La séance est ouverte.
La séance est ouverte à neuf heures trente.
La parole est à M. Éric Woerth, président et rapporteur de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Après avoir débattu, il y a deux jours, de la fiscalité et de la dépense publique, nous revenons sur le sujet à l'occasion de l'examen de la présente proposition de loi, déposée par les députés du groupe Les Républicains. Le fait – je tiens à le souligner d'emblée – que la majorité ait déposé une motion de renvoi en commission nous donne une petite idée de son positionnement. Si ce dernier ne m'étonne guère, ce qui me surprend le plus, c'est que vous puissiez décider par un vote – mais peut-être la motion sera-t-elle rejetée – d'interrompre cette discussion, en contradiction avec l'esprit du grand débat que vous avez suscité…
… comme avec l'esprit des évolutions du règlement intérieur que le président de l'Assemblée nationale envisage. Si vous adoptiez la motion de renvoi en commission, vous montreriez que vous n'aimez les débats que lorsque vous les organisez vous-mêmes et que vous entendez clore immédiatement tout débat ouvert par l'opposition – drôle de conception des choses…
Je tiens à présent dire un mot sur l'état de nos finances publiques, monsieur le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics, puisque Bruno Le Maire et Gérald Darmanin ont souhaité présenter le programme de stabilité du Gouvernement aux Échos plutôt qu'à l'Assemblée nationale. Vous abandonnez l'objectif d'équilibre en 2022, puisque le déficit public dépassera la barre des 3 % du PIB en 2019 et atteindra encore 1,2 % en 2022. Vous remettez à plus tard la réduction de la dette. Vous repoussez la suppression totale de la taxe d'habitation. Vous repoussez la diminution de l'impôt sur les sociétés pour les grandes entreprises – j'entendais encore hier le secrétaire d'État annoncer que cette promesse serait tenue pour 2022. Bref, on ne tient jamais ses engagements sur le moment mais on les remet à plus tard. Que dire, d'ailleurs, de l'ahurissant pataquès autour des retraites, avec, désormais, deux réformes à l'affiche : l'une qui ne touche pas à l'âge du départ à la retraite et l'autre qui au contraire le modifie ? C'est tout à fait incompréhensible, alors que l'enjeu est de 320 milliards d'euros et surtout que l'enjeu de vie est essentiel pour les Français.
Le poids des prélèvements obligatoires est plus important que sous François Hollande et la dépense publique, en 2018, a augmenté plus vite que sous le mandat de ce dernier. Lorsque vous affirmez qu'ils n'augmentent pas en volume, ce n'est pas tout à fait exact car le taux d'inflation, très important, masque une hausse des dépenses de l'État. Et quand le Gouvernement affirme qu'il est le premier, en trente ans, à avoir fait baisser la dépense publique, c'est évidemment faux.
Venons-en au fond de notre proposition. La politique que vous menez depuis bientôt deux ans a exacerbé des inquiétudes résultant de la longue stagnation du pouvoir d'achat qui a suivi la grande crise de 2007-2008. Le manque de dimension humaine dans vos réformes a surtout réveillé, chez nos concitoyens, un sentiment d'injustice jamais vraiment endormi : injustice sociale, injustice territoriale, injustice intergénérationnelle. En matière de fiscalité, votre politique a envoyé des signaux contradictoires dès la loi de finances pour 2018, en procédant, selon une vision assez technocratique, à des modifications d'ampleur des prélèvements obligatoires qui se sont traduites par une hausse de 4,5 milliards d'euros pour les ménages.
La ligne directrice alors affichée clairement par le Gouvernement et non démentie depuis lors est de faire payer aux retraités ce qui était présenté comme des mesures favorables au pouvoir d'achat des actifs. Nous l'avons dit et nous le répétons : les actifs n'ont jamais demandé à prendre l'argent de leurs parents et les retraités ont mérité leur pension après une vie de travail.
En commission, nos collègues de la majorité nous ont répété en boucle les chiffres publiés la semaine passée par l'INSEE, selon lesquels le pouvoir d'achat aurait augmenté de 1 % en 2018. Ils ont moins insisté sur deux faits : ce taux était en baisse par rapport à 2017 ; en outre, par unité de consommation, l'augmentation n'était plus que de 0,4 %. Surtout, les chiffres de l'INSEE, au niveau global, ne permettent pas d'appréhender le creusement des inégalités. L'OFCE – l'Observatoire français des conjonctures économiques – avait pour sa part montré, l'an dernier, que les mesures prévues par la loi de finances pour 2018 étaient largement favorables aux ménages aisés, dont le niveau de vie avait progressé de 1,6 %, tandis que celui des 5 % des ménages les plus modestes avait été amputé de 0,6 %.
Avec les textes financiers pour 2019 et la loi portant mesures d'urgence économiques et sociales, le Gouvernement a apporté quelques corrections partielles aux erreurs que nous dénoncions depuis des mois ; je pense notamment à l'augmentation de la CSG – la contribution sociale généralisée – pour les retraités, au refus de l'exonération fiscale de la CSG et de la CRDS – la contribution pour le remboursement de la dette sociale – des heures supplémentaires et à l'augmentation de la fiscalité énergétique. Mais le Gouvernement a créé de nouvelles injustices qui mettent à mal notre pacte social, par exemple en décidant un quasi-gel des pensions, exposant les retraités à une lourde perte de pouvoir d'achat.
Compte tenu des mesures de rééquilibrage votées très rapidement à la fin de l'année 2018 et de l'augmentation naturelle des revenus en période de croissance, le pouvoir d'achat des ménages devrait globalement augmenter en 2019. Or les Français n'ont absolument pas ce sentiment, comme vous pourrez le remarquer. Surtout, il y a beaucoup de perdants, dont, je le répète, un grand nombre de retraités.
Aussi le présent texte a-t-il pour objectif de remédier au sentiment d'injustice exacerbé dont vous portez la responsabilité. La réponse que nous proposons consiste avant tout à redonner du pouvoir d'achat aux Français et à corriger les mesures que vous avez prises.
Il faut d'abord annuler les mesures de rabot prises par le Gouvernement à l'automne dernier. En effet, on ne fait pas baisser durablement la dépense publique en procédant à des coupes à l'aveugle. Le pays a besoin de réformes d'ampleur. Pourtant, votre gouvernement joue les Hibernatus depuis cinq mois, en attendant le dégel avec la fin du grand débat.
Les deux premiers articles de la proposition de loi rétablissent les règles de droit commun de revalorisation des pensions de retraite, des allocations familiales et des aides au logement.
Ce matin, Gérald Darmanin avançait à la radio que c'est votre majorité qui allait rétablir l'indexation des pensions ; or je note que c'est cette même majorité qui les a désindexées.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Cette attitude a donc quelque chose d'assez schizophrénique. Ces deux articles permettent de rendre plus de 3 milliards d'euros aux Français, un pouvoir d'achat qu'ils n'auraient jamais dû perdre.
J'estime qu'il faudrait aller plus loin en posant la question de l'évolution des critères de revalorisation des pensions. Aussi proposons-nous, par le biais d'un amendement, que les 1 000 premiers euros de pension soient indexés non pas uniquement sur les prix mais aussi sur les salaires, le niveau de vie, la croissance. Les retraités sont en effet utiles à notre économie et il faut leur rendre une partie des fruits de la croissance à laquelle ils contribuent ; si vous pensez le contraire, il faut absolument que vous le disiez.
Le second axe de la proposition de loi consiste à diminuer la pression fiscale qui pèse sur les classes moyennes et les familles, grâce à trois mesures.
L'article 3 supprime le taux de CSG à 8,3 % sur les pensions de retraite. Il s'agit donc de revenir totalement sur l'augmentation de la CSG et non, comme vous l'avez fait, partiellement. Cette disposition aurait un impact financier de 2,9 milliards d'euros. Elle conduirait en revanche à majorer les recettes de l'impôt sur le revenu, une partie de la CSG étant déductible de cet impôt : net de cet effet, le coût de la mesure serait de 2,3 milliards d'euros. J'estime d'ailleurs que la CSG devrait être totalement déductible de l'impôt sur le revenu, tout comme la CRDS et les prélèvements de solidarité sur les revenus du capital – on n'a pas à prélever d'impôt sur l'impôt.
Nous proposerons un autre amendement sur la CSG applicable aux pensions de retraite, afin d'effectuer un lissage. De façon surprenante, le Gouvernement n'avait pas proposé un tel dispositif pour le passage du taux de 0 à 3,8 %. J'espère donc que la majorité votera cet amendement.
Je proposerai également, par voie d'amendement, que les heures supplémentaires soient exonérées de CSG et de CRDS. Quand l'opposition vous a demandé d'exonérer les heures supplémentaires d'impôt sur le revenu, vous nous avez répondu : « non, non ! » ; puis : « oui, oui ! ». Eh bien, faites-le pour la CSG et la CRDS : allez jusqu'au bout de vos convictions !
L'article 4 vise quant à lui à ce que le plafond de ce que l'on appelle « l'avantage » du quotient familial revienne au niveau d'avant 2012. Le quotient familial n'est pas une niche fiscale ; il établit une solidarité horizontale entre les Français qui ont des enfants et ceux qui n'en ont pas, afin d'égaliser les niveaux de vie.
L'article 5 touche également à l'impôt sur le revenu. Je note que vous êtes en train d'aborder la question – vous avez évidemment besoin de l'opposition pour cela. Nous devons baisser de 10 % le taux des deux premières tranches du barème.
Au total, le coût de nos propositions peut être évalué, sur plusieurs années, à 25 milliards d'euros. Dans notre esprit, il s'agit d'un ensemble de mesures d'urgence, auxquelles il convient d'en ajouter d'autres. Je souhaite que le Gouvernement engage réellement, sérieusement, une réforme complexe mais indispensable : celle de la baisse des impôts de production, à hauteur d'1 point de PIB sur cinq ans.
Au-delà de ce premier paquet de propositions, augmenter le pouvoir d'achat de manière durable ne saurait consister qu'en une baisse d'impôts ; il faut aussi et surtout augmenter le taux d'activité, c'est évident. Je constate que le Gouvernement entame également ce débat que nous avons pour notre part lancé il y a désormais plusieurs mois. Tant mieux : discutons du nombre d'heures d'activité dans notre pays.
Vous nous avez répondu, en commission, que les mesures que nous proposions coûtaient très cher. C'est très curieux : quand la majorité dépense sans compter, cela ne coûte jamais cher, c'est toujours raisonnable.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Quand vous annoncez la suppression de la taxe d'habitation sans prévoir le financement de cette mesure, quand le ministre de l'action et des comptes publics prône la suppression de la redevance audiovisuelle sans se poser la question de savoir en contrepartie de quoi, quand vous dépensez 11 milliards d'euros, d'un claquement de doigts, au mois de décembre, alors vous vous targuez de faire preuve d'une grande responsabilité ; …
… en revanche, quand c'est l'opposition qui propose ce genre de mesures, elle est irresponsable.
Sortez de cette caricature ! Nous avons en effet des propositions pour financer les mesures que nous préconisons, ce qui n'a jamais été votre cas. Donc, projet contre projet, proposition contre proposition, acceptez de revoir votre copie, changez vos méthodes, affrontez la réalité des réformes à mener. C'est à tout cela que la présente proposition de loi du groupe Les Républicains vous appelle.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics.
Aux yeux du Gouvernement et, je crois, de la majorité, le principal mérite de la proposition de loi du groupe LR est de rendre publique la manière dont le principal groupe d'opposition souhaite répondre à la question du pouvoir d'achat des Français. Il faut bien le dire, monsieur le président Woerth, la générosité, parfois surprenante, de vos propositions…
… cache quelques difficultés, des interrogations, et appelle deux séries de critiques : l'une tient au financement de vos mesures ; …
Dites-nous plutôt comment vous allez financer la suppression de la redevance audiovisuelle !
… l'autre à la nature elle-même de vos revendications.
Pour ce qui est de leur financement, je ne vous ferai pas l'affront – car vous connaissez tout cela par coeur – de critiquer la manière dont vous gagez votre proposition de loi, ne connaissant que trop bien l'usage qui est fait de l'article 40 de la Constitution. J'observe cependant que le coût de votre proposition de loi, estimé par vos soins à 10 milliards d'euros – près de 17 milliards en réalité, j'y reviendrai – , conduirait à quadrupler le prix du paquet de cigarettes.
Sourires. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Mais j'ai dit que je ne vous ferai pas l'affront de vous rappeler quel est le principe du gage.
Nouvelles exclamations sur les bancs du groupe LR.
On va retrouver vos amendements gagés sur l'augmentation du prix du tabac !
Je vais continuer, mesdames et messieurs de l'opposition, en partant de votre hypothèse – discutable, vous le verrez – d'économies de dépenses de 20 milliards d'euros.
Premièrement, les économies que vous préconisez sont en quelque un recyclage de vos propositions de l'automne dernier. À l'époque, en effet, vous formuliez la même proposition mais en réduisant d'autres prélèvements obligatoires, comme les impôts de production, à hauteur de 3 milliards d'euros. Faut-il en conclure que vous avez renoncé à cette proposition, puisque vous voulez faire des économies en réduisant d'autres prélèvements ? À l'époque, vous prévoyiez également de financer, par ces mêmes économies, des baisses d'impôts que le Gouvernement a appliquées depuis lors, comme la défiscalisation des heures supplémentaires…
… ou la suppression de la hausse de la taxe carbone. Cela signifie-t-il que vous refusez désormais d'envisager le financement de ces mêmes mesures, contrairement à ce que nous faisons ? Vous me permettrez de souligner l'incohérence entre la proposition du mois de novembre et celle-ci.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Au-delà de ces contradictions, …
Vous vous trouvez le mieux placé pour nous reprocher nos contradictions ?
… j'ai le regret de vous dire que la fragilité de votre texte tient également dans la qualité et la soutenabilité des économies que vous proposez. En effet, à supposer que les 20 milliards d'euros d'économies soient documentés – ce qui n'est pas le cas – , ils ne représenteraient qu'une seule année sur la cible de 90 milliards d'euros d'économies en quatre ans, nécessaires pour financer vos mesures.
Vous nous appeliez à dire toute la vérité, à tout dire ici, l'interrogation qui se justifie est de vous demander comment vous financez les 70 milliards d'euros restants. Quelles dépenses publiques supprimez-vous ? À quelles politiques renoncez-vous pour achever le financement sur quatre ans des mesures que vous proposez ? Nous le savons tous, il est toujours plus facile de mettre en avant de nouvelles baisses d'impôt, forcément consensuelles, que de documenter les économies restant à trouver pour les financer.
Sur le fond, à présent, comment se caractérise ce texte ? À y regarder de près, il s'apparente davantage à une critique qu'à une véritable proposition puisque, sur les cinq articles qu'il comporte, quatre ont pour seul objectif de revenir sur ce que cette majorité ou la précédente ont fait. Pardonnez-moi de vous le dire aussi crûment, mais défaire n'est pas et ne sera jamais une politique, …
… surtout quand les mesures que vous faites le choix de présenter conjointement sont aussi incohérentes entre elles. Plusieurs exemples nous permettent de nous en convaincre.
Premièrement, vous proposez de revenir intégralement sur la hausse de la CSG pour les retraités.
Mais j'observe que vous approuvez ainsi, tacitement, la suppression des cotisations sociales salariées des actifs, dont cette hausse permet, au nom de la solidarité entre les générations, d'assurer le financement. J'en profite pour rappeler que vous vous étiez pourtant opposé à cette mesure, le 25 octobre 2017.
Deuxièmement, vous proposez deux mesures relatives à l'impôt sur le revenu dont vous prétendez qu'elles bénéficieront en premier lieu aux classes moyennes. En réalité, c'est tout l'inverse.
L'exemple du quotient familial est éloquent à cet égard puisque la mesure que vous proposez cible les 10 % de contribuables les plus aisés.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
De même, vous proposez de diminuer le taux de l'impôt sur les revenus pour ses deux premières tranches, mais vous semblez oublier que, telle que vous la proposez, cette baisse bénéficiera à l'ensemble des contribuables, même les plus aisés. C'est d'ailleurs ce qui explique que vous sous-estimiez le coût de la mesure à 2 milliards d'euros, alors que son coût réel, …
… du fait de son application à tous, excède 8 milliards d'euros. Cela vient souligner l'absence de documentation des mesures que vous proposez et des économies nécessaires pour les financer.
Troisièmement, vous proposez de revenir sur les mesures consistant à limiter la progression des prestations sociales adoptées par le Parlement l'an passé et auxquelles vous aviez, dans un passé encore récent, vous-mêmes souscrit, puisqu'en 2012, le gouvernement de François Fillon avait gelé les prestations familiales…
… et revalorisé les APL – les aides personnalisées au logement – de seulement 1 %, soit un niveau bien inférieur à l'inflation.
Surtout, vous n'avez, me semble-t-il, porté qu'un regard partiel sur l'ensemble de l'action gouvernementale puisque vous omettez, peut-être délibérément, toutes les mesures prises par le Gouvernement et adoptées par la majorité – et cette majorité seule – pour protéger les plus modestes et renforcer leur pouvoir d'achat. Pas un mot à propos de la suppression de la taxe d'habitation, et pour cause, …
Exclamations sur les bancs du groupe LR
… vous l'avez rejetée le 21 octobre 2017.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Pas un mot à propos du plan pauvreté, qui privilégie des mesures ciblées sur les plus fragiles plutôt qu'une augmentation généralisée de quelques euros sans discernement. Pas un mot à propos de l'augmentation du minimum vieillesse ou de l'allocation aux adultes handicapés. Pas un mot à propos de l'augmentation de la prime d'activité. Pas un mot à propos de l'indexation du RSA – le revenu de solidarité active – sur l'inflation – là encore, votre groupe s'est abstenu, le 8 novembre dernier, sur les crédits de la mission « Solidarités ».
Exclamations continues sur les bancs du groupe LR.
Vous-même aviez voté contre le budget deux semaines avant de devenir secrétaire d'État !
Trois jours avant, monsieur Di Filippo !
Plus encore, mesdames et messieurs les députés du groupe LR, à la lecture de votre proposition de loi, j'ai le sentiment qu'une partie de l'opposition n'a pas encore suffisamment entendu le message délivré par cette majorité à l'endroit des Français et de leur pouvoir d'achat – peut-être parce que cette même opposition n'a pas voté les mesures en question.
Je pense notamment à celles de la loi portant mesures d'urgence économiques et sociales, sur laquelle vous vous êtes massivement et courageusement abstenus. Ce texte répondait pourtant à des objectifs qu'il me semble vous avoir entendu défendre par le passé, s'agissant des heures supplémentaires, du développement de l'intéressement ou du retour sur la hausse de CSG pour 70 % de retraités.
Je veux, puisque cela n'a pas été entendu, vous rappeler les mesures concrètes que ce gouvernement et cette majorité ont prises pour que le travail paie davantage. C'est la suppression des cotisations sociales, chômage et maladie pour les salariés, qui permet un gain de pouvoir d'achat en faveur des actifs de 266 euros par an pour un salaire au niveau du SMIC. C'est la revalorisation de la prime d'activité, afin de renforcer le pouvoir d'achat des travailleurs modestes et inciter à la reprise d'emploi. C'est l'exonération des cotisations salariales et d'impôt sur le revenu sur les heures supplémentaires, qui bénéficiera d'abord aux ouvriers et employés, très nombreux à faire des heures supplémentaires. C'est l'association des salariés aux résultats de l'entreprise, avec la suppression du forfait social sur les sommes versées au titre de l'intéressement pour les entreprises de moins de 250 salariés, ainsi que sur l'ensemble des versements d'épargne salariale pour les entreprises de moins de 50 salariés.
Je veux également rappeler que les aides ont été revalorisées de manière exceptionnelle pour les plus modestes et les familles.
Le minimum vieillesse a déjà été revalorisé de 65 euros par mois et l'engagement présidentiel de plus de 100 euros par mois sera tenu sur le quinquennat. L'allocation aux adultes handicapés sera revalorisée, à terme, de 90 euros par mois, pour atteindre 900 euros. Les dépenses engagées au titre des services à la personne donnent désormais lieu systématiquement à un crédit d'impôt, à la place d'une simple réduction d'impôt, qui ne bénéficiait pas aux ménages non ou peu assujettis à l'impôt sur le revenu. Les parents isolés ont bénéficié d'un soutien exceptionnel avec la revalorisation de l'allocation de soutien familial, tout comme les familles nombreuses les plus modestes ont bénéficié d'une revalorisation du complément familial, ou encore les familles monoparentales de la revalorisation de 30 % du montant du complément de libre choix du mode de garde.
Je veux enfin répéter que les impôts des Françaises et des Français baissent
« Ah ! » sur les bancs du groupe LR
et que tout est mis en oeuvre pour que les dépenses liées à leurs besoins fondamentaux ne grèvent pas leur budget.
Je pense ici à la suppression de la taxe d'habitation,
Exclamations sur les bancs du groupe LR
contre laquelle vous avez voté – je le répète puisque cela vous semble vous plaire – , et qui concernera tous les Français d'ici à la fin du quinquennat.
Je pense également à la mise en oeuvre progressive du 100 % santé…
… qui garantira une prise en charge intégrale des lunettes, prothèses dentaires et aides auditives.
Je me permets de rappeler à nouveau que votre groupe n'a pas su se mobiliser pleinement pour soutenir ces mesures. Toujours en matière de santé, je pense à l'extension de la couverture maladie universelle complémentaire aux bénéficiaires de l'aide au paiement d'une complémentaire santé, qui permet notamment aux personnes âgées de bénéficier d'une mutuelle à moins d'1 euro par jour, soit un gain de pouvoir d'achat de 50 euros par mois.
Mesdames et messieurs les députés de l'opposition, votre proposition de loi n'est pas financée.
Défaire ne constitue jamais un projet politique. Votre proposition feint d'ignorer tous les efforts mis en oeuvre par le Gouvernement pour améliorer le pouvoir d'achat. Vous nous avez appelés à un débat, propositions contre propositions. Pourtant, à ce stade, nous en sommes à des propositions contre des incantations.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Protestations sur les bancs du groupe LR.
Nous restons donc fidèles à nos propositions, fidèles à nos mesures, fidèles à nos engagements.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Quoi de plus paradoxal, incongru et sidérant que de refuser de débattre d'une proposition de loi du groupe Les Républicains sur le pouvoir d'achat, alors que nous sommes en plein coeur du grand débat national, que l'Assemblée nationale est censée être le lieu de débat par excellence et que le pouvoir d'achat est la priorité absolue des Français !
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Il est vrai que ce gouvernement et cette majorité n'en sont pas à un paradoxe près.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.
Mais admettez tout de même que refuser, à l'heure du grand débat national, de débattre du sujet qui intéresse le plus les Français, c'est fort de café.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Balayer d'un revers de main cette proposition de loi, comme vous vous apprêtez à le faire par une motion de renvoi en commission, c'est tout simplement rester sourd aux attentes des Français.
D'après un sondage publié hier, 79 % d'entre eux estiment que le grand débat va accoucher d'une souris, avec des conclusions très éloignées de leurs préoccupations.
Plus le grand débat s'allonge, plus il tourne à la grande confusion. Grâce à cette proposition de loi, nous vous proposons d'en sortir pour que le Gouvernement passe enfin des paroles aux actes. Si vous avez échoué au bout de deux ans, c'est parce qu'Emmanuel Macron a commis la même erreur que François Hollande : il a augmenté les impôts et les charges sur les Français, faute d'avoir réalisé des économies sur la dépense publique.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.
Cette proposition de loi a donc pour objectif de corriger cette erreur fondatrice et de s'attaquer au problème fondamental de notre pays : son double record européen, en matière de dépenses publiques et de prélèvements obligatoires.
En effet, monsieur le secrétaire d'État, vous qui étiez un proche de François Hollande…
Pas tant que ça ; il faut mieux vous renseigner…
… vous savez que la dépense publique augmente plus que sous sa présidence : pour la première fois, la France connaîtra cette année le déficit public le plus élevé de toute la zone euro ! Dans le même temps, notre pays a atteint un record historique de prélèvements obligatoires en franchissant la barre des 1 000 milliards d'euros.
Pourtant, le Gouvernement ne semble pas avoir tiré les leçons du ras-le-bol fiscal inédit qui traverse notre pays. La seule réponse que l'on entend dans les médias, c'est toujours plus d'impôts. Sont évoqués l'alourdissement des droits de succession, la taxation de la revente des résidences principales, la réduction des crédits d'impôt pour les familles, la création d'une nouvelle tranche d'impôt sur le revenu, la hausse de l'impôt sur la fortune immobilière ou encore le retour des hausses de la taxe carbone sur les carburants et le chauffage, promu par quatre membres du gouvernement et quatre-vingts députés de sa majorité.
Nous, nous sommes clairs et nous tenons un langage de vérité : moins de gaspillage de l'argent public pour moins d'impôts. Voilà ce que nous proposons, monsieur le secrétaire d'État, grâce à un plan détaillé de 20 milliards d'euros d'économies. Et vous ne pouvez pas jouer avec nous au jeu des incohérences, vous qui avez voté contre un budget en première lecture en tant que parlementaire, puis pour quand vous êtes arrivé sur le banc des ministres,
Applaudissements sur les bancs du groupe LR
vous encore qui avez voté contre la défiscalisation des heures supplémentaires – je ne suis pas sûr qu'en matière de cohérence, vous soyez le mieux placé pour donner des leçons.
Exclamations sur les bancs des groupes LaREM et LR.
Au-delà, cette proposition de loi a deux visées principales.
Il s'agit d'abord de mettre fin au matraquage fiscal que subissent injustement les retraités. Les retraités – c'est l'INSEE qui le dit, pas seulement nous – ont été les plus grands sacrifiés de la politique d'Emmanuel Macron. En dix mois, les ménages de retraités ont perdu en moyenne 390 euros de niveau de vie. Selon l'Institut des politiques publiques, deux retraités sur trois perdent du revenu à cause des décisions du Président de la République. Mesdames et messieurs les membres du Gouvernement et de la majorité, les retraités ne sont pas des nantis. Ce sont au contraire des personnes ayant travaillé toute leur vie pour avoir droit à une retraite décente, et l'on n'appartient pas à une génération dorée quand on gagne 800, 1 000 ou 1 200 euros de retraite par mois.
Applaudissements sur les bancs des groupes LR et LT.
Voilà pourquoi nous vous demandons de supprimer la hausse de 25 % de la CSG que 60 % des retraités, soit 8 millions d'entre eux, ont subi en 2018. Ne trompez pas les Français : en 2018, les retraités ont effectivement subi cette hausse, vous le savez pertinemment. Nous vous demandons aussi de revaloriser l'ensemble des pensions de retraite – et chaque mot compte, « l'ensemble » ne signifie pas seulement ceux qui perçoivent de petites retraites.
Nous proposons également d'augmenter le pouvoir d'achat des classes moyennes et de réduire de 10 % l'impôt sur le revenu des deux premières tranches.
En outre, nous proposons de réindexer au niveau de l'inflation les pensions d'invalidité ainsi que les aides au logement, qui ont subi une politique du rabot injuste, ajoutée à la baisse de 5 euros des APL décidée durant l'été 2017.
Approbations sur plusieurs bancs du groupe LR.
Enfin, nous proposons de réindexer au niveau de l'inflation les allocations familiales. Pourquoi avoir voulu toucher à la seule politique qui marche en France, à savoir la politique familiale, alors que le nombre de naissances en France s'est effondré de 9 % en seulement huit ans ? Nous proposons donc de rétablir les plafonds du quotient familial au niveau qui était le leur avant qu'ils soient abaissés par la majorité socialiste, en 2012.
Ces propositions concrètes sont des réponses à l'urgence de la situation. Depuis le début de la législature, nous n'avons eu de cesse de vous alerter sur l'injustice fiscale de votre politique, notamment à l'égard des classes moyennes et des retraités. Nous attendons du Président de la République, président des fractures et des factures, qu'il change de politique et en finisse avec une fiscalité excessive, injuste et punitive. Il est temps non plus temps de palabrer mais d'agir : agir pour répondre aux attentes de la France des milieux de cordée et des classes moyennes, agir pour la France des retraités, agir en adoptant cette proposition de loi des députés Les Républicains, qui serait un signal fort en faveur du pouvoir d'achat des Français.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Nous entamons cette journée d'initiative parlementaire du groupe Les Républicains par une proposition de loi qui prétend rétablir le pouvoir d'achat des Français.
Pour commencer, je rappellerai que, d'après la dernière note de conjoncture de l'INSEE, confirmée par la Banque de France, le pouvoir d'achat devrait avoir augmenté de 1,8 % sur les seuls six premiers mois de cette année : du jamais vu en quinze ans, mes chers collègues, vous oubliez de le dire !
Cela ne signifie certes pas que nous ne devions pas agir davantage, mais entendons-nous bien sur les notions et sur la méthode.
Exclamations sur les bancs des groupes LR et LT.
Car qu'est-ce que le pouvoir d'achat ? C'est la quantité de biens et de services que l'on peut acheter avec une unité de salaire. Le coût du logement, par exemple, n'entre donc pas dans la définition.
Cela explique que, malgré une hausse continue du pouvoir d'achat depuis 2014, ce n'est pas le sentiment de nos concitoyens. C'est là que le bât blesse. Continuer de raisonner uniquement autour du pouvoir d'achat, comme vous le faites depuis des jours et des jours, et ce matin encore, c'est passer à côté de ce que nos concitoyens expriment depuis maintenant des mois !
Que nous disent les Français ? Pour eux, le véritable vrai pouvoir d'achat, c'est l'argent qu'il leur reste à la fin du mois, après avoir payé leur loyer, leurs transports quotidiens, leurs abonnements, etc. ; ce sont les ressources disponibles après avoir payé toutes ces dépenses contraintes.
Voyons maintenant ce que vous proposez dans ce texte imprécis pour résoudre l'équation.
Les deux premiers articles de la proposition de loi visent à revenir sur la moindre indexation des pensions de retraite et de certaines prestations sociales. En décembre dernier, je vous le rappelle, le Conseil constitutionnel a censuré cette mesure pour l'année 2020. Ainsi, en l'absence d'une nouvelle mesure votée par notre assemblée, les retraites et prestations sociales seront automatiquement indexées sur l'inflation dès le mois de janvier prochain.
L'article 3, quant à lui, prévoit le retour de la CSG à son taux de 2017 pour les retraités qui font partie des 30 % les moins modestes, c'est-à-dire pour ceux qui ont une retraite excédant de plus de 15 % le salaire médian d'une personne occupant en emploi. Rappelons qu'il n'existe pas une catégorie homogène de retraités.
Dans un système social où le financement des retraites n'est pas assuré pour l'avenir, l'urgence est double : assurer la pérennité de ce financement, tout en garantissant un revenu décent aux retraités les plus modestes. C'est ce qui a été fait avec la revalorisation du minimum vieillesse, engagée par notre majorité.
Plus largement, s'agissant de ces mesures, on notera qu'en politique, hélas, les mauvaises habitudes ont la vie dure ! Une majorité fait ; la suivante défait ! La première revient au pouvoir et elle refait ce qui avait été défait.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Tout comme le Parti socialiste propose un retour en arrière sur la réforme de la fiscalité du capital, …
… le groupe Les Républicains propose de défaire ce qui vient d'être fait. On retrouve là les méthodes des deux partis qui ont gouverné notre pays ces trente dernières années, …
Comme si François Bayrou n'avait jamais été au Gouvernement depuis trente ans !
… préférant les querelles politiciennes à l'intérêt de nos concitoyens,
Applaudissements sur les bancs des groupes MODEM et LaREM. – Exclamations sur les bancs du groupe LR
préférant flatter les masses par des mesures court-termistes que d'avoir une vision globale et à long terme !
Mêmes mouvements.
Pendant ce temps, notre majorité travaille, elle avance, au service des Français et des Françaises !
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Venons-en maintenant à l'article 5. Monsieur le rapporteur, vous avez expliqué dans la presse que vous vouliez baisser l'impôt sur le revenu de 10 %. Vous mentez aux Françaises et aux Français, monsieur Woerth !
Premier mensonge, donc. Certes, vous proposez de réduire de 10 % le taux des deux premières tranches, en faisant baisser le taux marginal d'imposition de la première tranche de 14 à 12,6 %, soit une baisse de 1,4 point, et celui de la deuxième tranche de 30 à 27 %, soit une baisse de 3 points. Mais réduire deux des cinq tranches de 10 %, ce n'est en aucun cas réduire l'impôt de 10 % ! Vous mentez !
Pire encore, vous annoncez, dans l'exposé des motifs de la proposition de loi, que cette mesure a pour objet de « réduire la pression fiscale supportée par les classes moyennes ». Or, l'impôt sur le revenu étant progressif, les plus grands gagnants d'une baisse des taux des deux premières tranches sont logiquement ceux qui se situent au début de la troisième tranche, c'est-à-dire les ménages disposant d'un revenu de l'ordre de 8 000 euros par mois : un revenu de ministre !
Encore plus parlant : un célibataire gagnant près de 2 000 euros par mois verrait son impôt sur le revenu baisser d'environ 150 euros par an alors qu'une personne gagnant 8 000 euros bénéficierait de plus de 1 600 euros de baisse d'impôt ; pour un salaire quatre fois supérieur, le gain d'impôt serait plus de dix fois supérieur.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes MODEM et LaREM.
Dans un pays dans lequel la moitié de la population gagne moins de 1 800 euros par mois, soit vous manquez totalement votre cible, soit les classes moyennes que vous côtoyez ne sont pas les mêmes que celles que nous connaissons.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LR.
S'agissant du quotient familial, dont il est question à l'article 4, nous vous rejoignons sur l'importance de ce dispositif dans la politique familiale française.
La politique familiale a toujours été au coeur des préoccupations de ma famille politique.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et MODEM. – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LR.
En commission, monsieur le rapporteur, vous avez annoncé vouloir revenir sur les abaissements des plafonds de 2013 et 2014. Si, à la fin de l'année 2012, François Hollande a bien abaissé le plafond de 2 000 à 1 500 euros, vous semblez oublier que les deux coups parmi les plus violents de l'histoire du quotient familial ont été portés par votre famille politique :
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM. – Exclamations sur les bancs du groupe LR
en 2010 puis en 2011, avec, dans un premier temps, un gel de la revalorisation de ce plafond, puis une baisse à 2 000 euros décidée par le gouvernement Fillon.
Exclamations continues sur les bancs du groupe LR.
Sur le fond, nous sommes favorables au principe d'une telle mesure, mais nous ne soutenons pas le relèvement du plafond tel que vous le proposez.
Pour éviter la concentration des effets d'une hausse trop brusque, mais aussi pour obtenir un relèvement du plafond cohérent avec notre objectif d'assainissement de nos finances publiques, nous proposons un relèvement progressif, par exemple de 100 euros par an pour atteindre 1 800 euros en 2022. Cette trajectoire progressive aurait l'avantage de permettre la montée en puissance des économies engagées, lesquelles, je vous le rappelle, serviront, avec la baisse du déficit, à diminuer l'impôt acquitté par nos concitoyens.
Néanmoins, mes chers collègues, cela ne doit pas nous empêcher de réfléchir à l'impact du quotient familial sur les Français les plus modestes. Parce qu'ils ne sont pas assujettis à l'impôt sur le revenu, ces derniers n'en bénéficient pas, alors même que leurs revenus sont soumis à la CSG. Selon nous, le principe de l'universalité de cette disposition est primordial et doit faire l'objet d'approfondissements.
Chers collègues, le pouvoir d'achat des Français est évidemment un sujet important. C'est pourquoi il nécessite une vision globale, il mérite un travail rigoureux, contrairement au vôtre, et il appelle des mesures sérieuses, qui ne sont pas celles que vous proposez.
Protestations sur les bancs du groupe LR.
Si je voulais faire du mauvais esprit, je considérerais que cette proposition est au mieux opportune, au pire démagogique ! Avouez, chers collègues, qu'elle tombe à pic !
Applaudissements sur les bancs des groupes MODEM et LaREM. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Rires. – Applaudissements sur les bancs du groupe LR
Sourires.
… réunis dans l'hémicycle pour examiner la proposition de loi de nos collègues Les Républicains visant à rétablir le pouvoir d'achat des Français, nous espérons que le débat aura bien lieu.
Évidemment, si nous pouvons partager l'objectif affiché par le texte, nous ne partageons pas complètement la méthode retenue, je dois l'avouer.
Je crois qu'il faut d'abord rappeler pourquoi on en est arrivé là. Dès son arrivée au pouvoir, il faut avouer que ce gouvernement a fait fort en matière de déséquilibre fiscal et d'injustice sociale et territoriale.
Vous avez d'abord transformé l'ISF – impôt de solidarité sur la fortune – en IFI – impôt sur la fortune immobilière – , avec toutes les incertitudes que cette modification peut comporter en ce qui concerne l'efficacité économique ; nous attendons toujours votre rapport sur ce sujet.
Ensuite, vous avez créé la flat tax. Quoi de plus injuste que ce prélèvement forfaitaire sur les revenus du capital, avec un taux linéaire à 12,8 %, alors que le taux de la première tranche sur les revenus du travail est à 14 % ?
Vous avez aussi exonéré 80 % de nos concitoyens de la taxe d'habitation. On s'interroge sur l'exonération de cette taxe locale pour les 20 % des Français restant, c'est-à-dire les plus aisés.
C'est dommage ! Au sujet de cette mesure, vous oubliez de nous dire qu'en réalité, il ne s'agit pas d'exonérer d'une taxe locale mais simplement de transformer un impôt local en impôt national, puisque vous compensez la perte de recettes pour les communes : le coût pour le budget de l'État s'élève donc à 10 milliards d'euros, auxquels il faudra ajouter 8 milliards pour exonérer la totalité des contribuables.
Enfin, en 2019, vous doublez les aides aux entreprises en transformant le CICE – le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi – en réduction de charges. Le coût total de ce dispositif pour 2019 sera de deux fois 22 milliards d'euros.
Après ces mesures particulièrement favorables aux plus aisés et au monde de la finance, il vous faut, bien sûr, compenser, afin de converger vers les équilibres budgétaires, par des mesures d'économie ou des nouvelles recettes. C'est alors que vos choix n'épargnent en rien les hommes et les territoires les plus fragiles. Il y a eu la baisse des APL, puis sa désindexation, ainsi que la suppression progressive des emplois aidés pendant deux années consécutives. Comme il en manquait encore, vous êtes allés chercher de nouvelles recettes : ce fut la hausse de la CSG de nos retraités, qui ne sont pas près de l'oublier, et la hausse vertigineuse de la fiscalité écologique, soit 55 milliards en cinq ans – même si vous avez un peu rétabli la trajectoire depuis, c'est la goutte d'eau qui fait déborder le vase.
Si le mouvement des gilets jaunes a obligé le Gouvernement à mettre la main à la poche, les mesures qu'il a annoncées divisent et sont bien insuffisantes. Il n'est donc pas étonnant que nous nous retrouvions ce matin dans l'hémicycle pour examiner cette proposition de loi du groupe Les Républicains, pour essayer de répondre à une demande aussi forte d'une partie de nos concitoyens.
Bien entendu, nous partageons bon nombre des mesures proposées dans le texte. La réindexation sur l'inflation des pensions de retraite ou des aides au logement, ou l'annulation de la hausse de la CSG pour les retraités percevant un montant de pension compris entre 2 000 et 3 000 euros sont des mesures que nous défendons depuis bientôt deux ans.
En revanche, nous nous opposons au relèvement de certains plafonds en matière de quotient familial. Pour mémoire, ces plafonds ont connu des baisses successives lors de la précédente législature afin de favoriser la progressivité de l'impôt sur le revenu.
L'application des dispositions de cette proposition de loi provoquerait une aggravation du déficit public de près de 16 milliards d'euros : 3,3 milliards au titre de l'augmentation des dépenses publiques, en conséquence des articles 1er et 2, et 12,75 milliards d'euros au titre de la perte de recettes publiques due aux articles 3, 4 et 5.
Il faut donc souligner l'hypocrisie de nos collègues du groupe Les Républicains lorsqu'ils présentent un tel texte. La dégradation du solde public qui résulterait immanquablement de l'adoption de la proposition de loi est en contradiction flagrante avec les propos régulièrement formulés par les élus Les Républicains, qui se font les chantres de la chasse aux dépenses publiques et de l'équilibre budgétaire. Cette forme d'hypocrisie se retrouve dans l'exposé des motifs de la proposition de loi, qui se conclut ainsi : « Nous ne pouvons malheureusement pas, juridiquement, gager une proposition de loi par une baisse des dépenses, ce qui nous oblige à gager cette proposition de loi sur le tabac. Mais Les Républicains ne souhaitent évidemment pas d'augmentation des taxes sur le tabac et proposent de compenser le coût de ces mesures de pouvoir d'achat [… ] par une baisse des dépenses publiques de 20 milliards d'euros par an. »
Ce paragraphe appelle deux réflexions. D'une part, les rédacteurs de la proposition de loi n'étaient pas contraints de gager sur le prix du tabac les pertes de recettes. D'autre part, rien ne les empêchait de proposer des économies dans le texte lui-même. Ils ont donc choisi de ne pas dire un mot à ce sujet. Où les économies attendues seront-elles faites ? Nous n'en savons rien. Quels services publics feront les frais des économies considérables à prévoir ? Y aura-t-il moins de policiers, d'infirmiers, de dotations aux collectivités ? C'est le flou artistique.
Dans nos rangs, au moins, les choses sont claires : nous voulons rétablir l'ISF et corriger la flat tax.
L'ensemble des articles de la proposition de loi ayant été rejeté par la commission des finances, le texte est considéré comme rejeté par cette dernière. Nous sommes partis pour qu'il connaisse le même sort en cette séance ; c'est bien dommage. En tout cas, au regard de l'hypocrisie qu'il représente, il paraît difficile au groupe Socialistes et apparentés de choisir une autre position que l'abstention.
« Ah ! » sur les bancs du groupe LR.
Nous examinons ce matin une proposition de loi visant à rétablir le pouvoir d'achat des Français, en réponse, sans nul doute, au sentiment de colère et de désarroi qui s'est exprimé au travers du mouvement des gilets jaunes. Cette crise inédite pour notre pays, tant par sa durée que par les acteurs qui se sont mobilisés, a pris naissance dans le sentiment profondément nourri et ressenti par de nombreux Français d'une injustice sociale devenue inacceptable.
Les faits sont là, les chiffres ne mentent pas : nombre de nos concitoyens ont effectivement constaté une érosion de leur pouvoir d'achat. Il n'est d'ailleurs pas surprenant de constater que, dans le cadre du grand débat national provoqué par ce mouvement, les Français ont placé le pouvoir d'achat au premier rang de leurs revendications.
Un sondage publié hier par le cabinet Elabe précise que 60 % des Français attendent que l'exécutif agisse sur le pouvoir d'achat, et que 28 % d'entre eux classent même cette demande comme leur priorité numéro un, démontrant ainsi, s'il le fallait encore, combien ce sujet prégnant est d'actualité.
Notre responsabilité est nécessairement d'écouter les justes revendications et de les porter dans l'hémicycle afin de répondre aux attentes concrètes de nos concitoyens.
La proposition de loi déposée par le groupe Les Républicains vise à répondre au désir d'augmentation du pouvoir d'achat à travers différentes mesures, dont la réindexation sur l'inflation des pensions de retraite, des aides personnalisées au logement et des allocations familiales, ou encore la suppression de la hausse récente de la contribution sociale généralisée pour tous les retraités.
Sur le principe, nous ne pouvons qu'être favorables à ce type de mesures, qui nous semblent justes et équitables. Nous adhérons bien sûr à l'idée de voir nos retraités, lourdement mis à contribution ces dernières années, payer moins de CSG et gagner en pouvoir d'achat en réindexant leurs retraites sur l'inflation, ce qui n'est plus le cas depuis plusieurs années. De même, nous sommes favorables à une plus grande progressivité de l'impôt : il faut arrêter de matraquer les classes moyennes, comme ce fut le cas sous le précédent quinquennat. Nous ne pouvons également qu'être sensibles aux mesures qui visent à agir favorablement sur le quotient familial, donc sur la politique familiale, elle aussi mise à mal ces dernières années. En ce sens, je n'ai aucune difficulté à affirmer que je rejoins mes collègues du groupe Les Républicains dans leurs propositions.
D'ailleurs, durant l'examen des précédents projets de loi de finances, le groupe UDI, Agir et indépendants a défendu des positions similaires, appelant notamment à diminuer la pression fiscale exercée sur les Français. À ce titre, il s'était opposé à l'augmentation de la CSG, privilégiant plutôt une hausse de la TVA.
Cependant, si nous rejoignons nos collègues dans leur souhait d'améliorer le pouvoir d'achat des Français, le calendrier choisi ne nous paraît pas opportun, tant il fragilise l'exercice budgétaire.
Le grand débat, qui a réuni tant de Français, est en phase de conclusion ; notre assemblée s'est d'ailleurs exprimée cette semaine sur quatre thèmes majeurs et elle aura encore l'occasion, dans les prochaines semaines, de s'exprimer sur le rendu des consultations.
Les députés de mon groupe ont ainsi défendu les mesures suivantes : l'adoption d'une règle de stabilité et de clarté fiscales car les Français ont en marre de voir des règles du jeu balayées d'un revers de main en permanence, sachant qu'il faut de la stabilité, pour les particuliers mais aussi pour nos entreprises, si l'on veut relancer la croissance par la consommation ; une réflexion sur la progressivité et l'universalité de l'impôt, car introduire de nouvelles tranches d'imposition nous semble indispensable afin de réduire les inégalités et de permettre à chacun de vivre décemment ; un élargissement des dispositifs de TVA à taux réduit ; la suppression de la hausse de la CSG pour nos retraités. Autant de mesures qui pourraient être de nature à redonner du pouvoir d'achat.
Dès lors, nous interprétons plutôt la proposition de loi de nos collègues comme une contribution au débat.
Toutefois, tel que rédigé, ce texte correspond plus à une addition de mesures qu'à une véritable vision globale sur le pouvoir d'achat des Français. En effet, des sujets aussi importants que ceux liés à la fiscalité environnementale, qui affectent pourtant au quotidien les citoyens, sont occultés. Surtout, les mesures ici proposées auraient plus leur place dans un projet de loi de finances que dans une proposition de loi examinée en milieu d'année. En effet, leur coût, que vous avez d'abord estimé, monsieur le rapporteur, à 10 milliards d'euros, puis réévalué en commission des finances à 17 milliards d'euros au moins, devrait être nécessairement intégré au cadre global offert par un projet de loi de finances pour que nous ayons une visibilité sur leur soutenabilité pour le budget de l'État.
Enfin, n'oublions pas que l'urgence sociale consécutive à la crise des gilets jaunes nous a déjà amenés à devoir voter à la fin de l'année dernière, en toute responsabilité, une série de mesures destinées à aider les plus fragiles de nos concitoyens, en leur redonnant du pouvoir d'achat, …
… même si une partie d'entre elles n'étaient pas clairement financées. Il nous apparaît économiquement dangereux de reproduire ce type de geste sans prévoir précisément des moyens pour le financer, au risque de générer de lourdes conséquences sur les finances de notre pays.
Vous affirmez, monsieur le rapporteur, avoir déjà, par le passé, déterminé les économies réalisables pour compenser ces 20 milliards d'euros de manque à gagner, mais tout en indiquant être contraint juridiquement de gager vos propositions sur le tabac plutôt que par la création d'économies. Je m'interroge sur l'absence d'une liste précise de ces économies dans l'exposé des motifs de la proposition de loi, car rien ne vous l'interdisait. Elles nous auraient pourtant permis d'accorder plus de crédibilité à la faisabilité de votre proposition de loi.
Il m'apparaît donc difficilement concevable de voter en l'état une telle proposition de loi, son exposé des motifs ne détaillant pas clairement les économies sur les dépenses publiques permettant d'en financer les mesures.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Pourtant, je n'oublie pas que vous parliez en décembre dernier, lors du vote des mesures d'urgence, d'« un choc de dépenses non financées » ou encore de « 10 à 15 milliards d'euros de dépenses nouvelles qui ne sont pas financées ».
Nouvelles exclamations sur les bancs du groupe LR.
Je vous prie, chers collègues, de faire preuve de respect envers Mme Lemoine et de la laisser terminer son intervention.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Je vous remercie, madame la présidente.
Vous tentez certes, monsieur le rapporteur, de répondre au mouvement de contestation des gilets jaunes en cherchant à atténuer le sentiment d'injustice qu'ils éprouvent, et cette démarche reste bien sûr louable, il faut vous en rendre justice. Néanmoins, les Français attendent de nous que nous soyons cohérents et responsables. C'est pourquoi, au vu du risque que ce texte fait porter sur l'équilibre des finances publiques, le groupe UDI, Agir et indépendants ne pourra le voter en l'état.
Il souhaite cependant débattre avec vous de chaque mesure, prise individuellement.
« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe LR.
Il y a de l'ambiance, ce matin…
La proposition de loi déposée par nos collègues du groupe Les Républicains contient une partie avec laquelle nous ne pouvons évidemment qu'être d'accord : celle qui vise à redonner du pouvoir d'achat aux Français en supprimant des mesures malheureusement prises par la majorité actuelle, c'est-à-dire en réindexant les pensions de retraites et les APL sur l'inflation. C'est certes le minimum syndical, mais elles sont bienvenues tout de même, car ces mesures frappent les couches populaires et moyennes.
En 2019, les bénéficiaires auront perdu en moyenne, en valeur réelle, 12 euros d'APL depuis l'arrivée d'Emmanuel Macron, et cette dégringolade va encore empirer en 2020. Notons que celle-ci concerne aussi le logement social puisque la loi ELAN – portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique – prévoit que les bailleurs sociaux contribuent à son financement, y compris en vendant une partie du parc immobilier HLM, même dans les villes qui ne respectent pas la loi SRU – solidarité et renouvellement urbains – , ce qui contribue évidemment à expliquer la baisse de 10 % de construction de logements sociaux constatée en 2018.
Dans la proposition de loi, l'autre mesure bienvenue, réclamée par les gilets jaunes et manifestement par une très grande majorité de Français, est l'annulation de la hausse de la CSG sur les retraites. Nous l'avions également défendue lors de l'examen du dernier PLFSS. Il n'est pas normal que les retraités paient une hausse de la CSG pour financer la suppression de cotisations des actifs. Ce gouvernement met ainsi à contribution des gens qui ont travaillé toute leur vie, souvent dans des conditions difficiles, pour financer un risque qu'ils ne courent pas : celui du chômage. Cette hausse de CSG a touché 60 % des retraités, qui, avec en plus la désindexation, ont perdu, pour une bonne part d'entre eux, au moins un mois de pension.
Vous vous doutez bien que nous aurions ajouté d'autres mesures pour le pouvoir d'achat, par exemple l'augmentation des salaires, dont le poids par rapport à celui des revenus du capital est un problème constant, depuis des années, en France, ou encore le faut qu'aucun retraité ne perçoive une pension inférieure au SMIC, considérant qu'une fois à la retraite, l'espoir de promotion sociale s'éteint, et que personne, dans ce pays, ne devrait vivre sous le seuil de pauvreté.
En revanche, ce qui nous ennuie, dans cette PPL, c'est qu'elle finance ses mesures par des coupes massives – entre 10 milliards et 20 milliards d'euros – dans les dépenses publiques, donc dans les services publics. Autrement dit, les mesures favorables au pouvoir d'achat seraient annulées par la diminution des services rendus par l'État aux citoyens, sachant que l'État est le seul soutien, par le biais de mécanismes de solidarité et de redistribution, pour une bonne partie des classes populaires voire moyennes. Par exemple, si vous réindexez les APL sur l'inflation mais que la politique publique nuit à la construction de logements sociaux, on voit bien que beaucoup de Français demeurent pénalisés.
Je suis d'ailleurs sans cesse étonné d'entendre comparer les dépenses publiques au fait de jeter de l'argent par la fenêtre, d'entendre qu'elles ne servent pas les Français. Ce n'est pas vrai. C'est ainsi que l'État redistribue, injecte de l'argent, ne serait-ce qu'à travers le traitement des fonctionnaires, et fait évidemment bénéficier beaucoup de secteurs de l'économie – le bâtiment, entre autres – de la manne publique par ses commandes. Je vous ai d'ailleurs souvent fait remarquer que la seule raison pour laquelle la France n'est pas entrée en récession après la crise économique, alors que le marché privé était atone, c'est le maintien des dépenses publiques.
Il faut se souvenir que les dépenses publiques sont aussi des recettes. À l'inverse, si vous voulez réduire des dépenses qui ne servent pas à grand-chose, voici des pistes : le CICE et ses 20 milliards d'euros de recettes annuelles en moins, et même 40 milliards en 2019, ou encore beaucoup d'autres exonérations qui favorisent toujours les entreprises, le capital, sans qu'on en voie les conséquences favorables pour l'intérêt général et l'économie nationale.
Je conclurai en disant que la dette publique, qu'on nous présente comme insupportable, faisant appel à un apparent bon sens qui incite à comparer la situation de notre pays à celle d'un chef de famille dépensant l'argent qu'il n'a pas, revient à comparer les stocks et les flux. Souvenez-vous que la France n'est pas endettée à 100 % de son PIB annuel, mais sur sept ans, et que comparer stocks et flux aboutit évidemment à un constat alarmant, mais dénué de réalité, car l'endettement de notre pays ne se traduit financièrement que par les intérêts qu'il paie chaque année, ce qu'il peut largement supporter. Je ferai du reste remarquer que la garantie demandée dans les partenariats public-privé – je pense à la liaison Lyon-Turin – , c'est toujours celle des États. Or, vu le patrimoine du nôtre, nous sommes très loin de connaître en situation de faillite. Si j'avais eu plus de temps, j'aurais étoffé mon explication. En tout cas, la référence à la dette justifie malheureusement souvent une politique d'austérité au service d'une monnaie forte, au service d'une politique économique bénéficiant à l'Allemagne et aux rentiers allemands, mais pas à un pays comme le nôtre. La France a besoin, au contraire, d'une redistribution du pouvoir d'achat et d'investissements sur le long terme.
Applaudissements sur les bancs des groupes FI et GDR.
Voilà une proposition de loi focalisée sur le rétablissement du pouvoir d'achat des Français, mais bien éloignée, disons-le d'emblée, des revendications d'une augmentation du pouvoir d'achat portées par une majorité de Français. Voilà une proposition de loi financée par une baisse des dépenses utiles dans les services publics, qui s'inscrit dans une course à l'échalote avec le Gouvernement, sourds que vous êtes, les uns et les autres, aux sources de financement à prélever sur le capital, à commencer par la suppression du prélèvement forfaitaire unique et par le rétablissement de l'impôt de solidarité sur la fortune. C'est donc une proposition de loi en trompe-l'oeil, jusque dans les détails.
Oui, bien sûr, il convient de réindexer avec effet rétroactif les pensions de retraite sur l'inflation et d'annuler toute augmentation de la CSG prélevée sur les revenus des retraités, c'est bien la moindre des choses. Mais nous proposons d'aller plus avant en faveur des retraités les plus modestes, en portant les pensions les plus faibles – dont il faut bien dire qu'elles sont scandaleusement basses – au-dessus du seuil de pauvreté, plus précisément en les alignant sur le salaire minimum.
Nous estimons que la question du pouvoir d'achat des retraités doit s'envisager avec, en toile de fond, la question de la suppression du prélèvement forfaitaire unique, qui devrait permettre de restaurer une meilleure progressivité de notre système fiscal en mettant davantage les plus riches à contribution. Mais, de cela, il n'en est assurément pas question dans votre proposition de loi.
D'ailleurs, vous n'arrivez pas à masquer vos choix politiques, puisqu'au détour de l'article 4, vous proposez ni plus ni moins de relever significativement le plafonnement du quotient familial. Une telle disposition serait favorable aux foyers aisés, les ménages disposant de revenus imposables importants, à partir d'environ 65 000 euros pour un couple avec un enfant. C'est donc un dispositif d'équité que vous voudriez peu ou prou abolir, ce qui, là encore, est bien loin des attentes des actifs ouvriers, employés et des catégories intermédiaires.
Votre conception de la progressivité de l'impôt sur le revenu va de pair. En effet, s'il est évident que diminuer les taux des deux premières tranches de l'impôt sur le revenu intéresse le pouvoir d'achat des classes moyennes et modestes, cette mesure profiterait de manière significative aux plus aisés, puisque les 72 617 premiers euros de revenus seraient alors imposés à taux réduit. Excusez du peu ! Le rapport l'indique : pour un célibataire, la diminution de l'impôt serait de 210 euros pour un revenu de 25 000 euros, et de 1 633 euros dès 80 000 euros de revenu net ; il en irait de même pour les couples, qu'ils aient ou non des enfants. Non, le dispositif proposé, volontairement lacunaire, est loin de renforcer la progressivité de l'impôt sur le revenu !
Somme toute, votre proposition de loi ne parvient pas à cacher vos véritables priorités : redonner davantage de pouvoir d'achat aux catégories sociales les plus avantagées en échange d'une maigre bonification pour toutes les autres.
Dans cet hémicycle, il y a quelques semaines, nous défendions le principe d'un barème d'imposition à neuf tranches, avec un taux marginal à 48 % s'appliquant sur les hauts revenus. Il s'agit là d'un barème véritablement progressif, qui diminue le taux des tranches les plus basses, multiplie les tranches intermédiaires pour garantir une vraie progressivité et rehausse le taux marginal supérieur, que nous proposons de porter de 45 à 48 %.
Nous souhaiterions aller plus loin mais la jurisprudence constitutionnelle, en l'état, ne nous le permet pas. C'est pourquoi nous proposons de réviser la Constitution afin d'y intégrer l'impératif de justice fiscale.
Pour être à la hauteur de cet impératif, il nous faut dépasser la seule question de l'impôt sur le revenu : c'est l'ensemble de notre système fiscal qu'il convient de rééquilibrer si nous voulons qu'il soit juste et lisible, donc accepté par tous.
L'impôt sur le revenu représente environ 70 milliards d'euros. C'est 160 milliards d'euros de moins que la CSG et la TVA – la taxe sur la valeur ajoutée – cumulées, ces deux prélèvements injustes car à taux quasi uniques, qui frappent donc plus durement les familles modestes que les familles plus riches. Un rééquilibrage s'impose donc. J'en profite pour rappeler que la CSG et la TVA ont littéralement flambé ces dernières années, parce que notre pays s'obstine à mettre en oeuvre ces fameuses politiques dites « de compétitivité » consistant à alléger toujours plus la fiscalité des grandes entreprises. Mais dès que l'on baisse leur impôt, au nom de gains d'attractivité et d'emploi hypothétiques, à en croire la doxa libérale, c'est vous, c'est moi, c'est nous tous, ce sont tous les citoyens qui sont sollicités pour remettre au pot !
L'actuel produit de l'impôt sur les sociétés s'élève à 35 milliards d'euros. Il a été divisé par deux en quelques années, et il rapporte désormais deux fois moins que l'impôt sur le revenu. Le funeste CICE et la flambée coûteuse d'un crédit d'impôt recherche dont l'efficacité s'avère pour le moins douteuse, en sont les causes. Ces deux symboles des politiques de compétitivité sont sans effets économiques ni sociaux mais ils conduisent à un lourd transfert de fiscalité des entreprises vers les ménages, transfert qui est à l'origine de la colère sur nos territoires.
Cette proposition de loi n'en tire malheureusement aucune leçon. Pire, ses initiateurs se livrent, comme d'habitude, à une surenchère avec La République en marche : ils proposent de diminuer de 20 milliards le budget des services publics. Ce sont donc les Français, qui réclament partout plus de postes dans les hôpitaux, les établissements pour personnes âgées dépendantes, les écoles, les collèges et les administrations, qui devraient payer la note de mesures portant un coup de sabre dévastateur à l'égalité sociale et territoriale !
Je m'adresse maintenant à la vaste partie droite de l'hémicycle.
D'un mouvement de bras, l'orateur désigne les six travées du centre et de la droite.
Sourires.
Le masque est tombé. Les logiques politiques et économiques des groupes Les Républicains et La République en marche…
… sont les mêmes : moins d'impôts pour moins de dépenses publiques, moins de mises en commun et de projets collectifs, moins de solidarité et moins d'égalité !
Ces logiques de comptable, qui vous conduisent à jouer à qui sera le plus libéral, n'offrent aucune perspective politique à notre pays, sinon l'enrichissement d'une infime minorité, le décrochage des classes moyennes et la paupérisation de classes populaires déjà à l'os. Selon vous, l'État devrait être réduit à la portion congrue et la puissance publique cantonnée dans un petit pré carré, ce qui ne manquerait d'ailleurs pas de durement toucher les collectivités locales. En somme, il ne s'agirait plus que d'un État minimal, avec la société sans impôt dont rêve M. Darmanin, laissant le champ libre à la marchandisation de tous les services.
Cette politique, les Français n'en veulent pas ; ils l'ont déclaré partout, dans les débats, sur les ronds-points. Et pourtant, alors que ce qu'il est convenu d'appeler « le grand débat » touche à sa fin, tout porte à croire qu'il a été organisé non pour répondre aux attentes de nos concitoyens mais pour conforter ces funestes orientations. Les Français demandent-ils de la justice fiscale et sociale ? Vous leur répondez, pas plus tard que mardi dernier dans l'hémicycle, que vous allez continuer de suivre le sillon emprunté depuis mai 2017.
Concernant le barème de l'impôt sur le revenu que j'ai évoqué il y a un instant, la majorité a fini par laisser fuiter ce que pourraient être ses propositions. Alors, chers collègues, comment allez-vous vous y prendre ? Allez-vous réduire les taux des premières tranches ? Allez-vous instaurer des tranches intermédiaires ? Allez-vous renforcer le mécanisme de la décote, au risque de rendre l'impôt encore plus illisible, donc moins accepté ? Allez-vous rester silencieux à l'égard des hauts revenus et refuser d'instaurer la nouvelle tranche supérieure plébiscitée par les Français ? Enfin, confirmez-vous que cette baisse d'impôt sera financée par une diminution des services publics ?
Au regard de la politique conduite depuis 2017 et de la tournure prise par le grand débat, nos espérances en la matière sont très limitées – c'est un euphémisme. Néanmoins, tout ce qui peut être gratté doit l'être, et nous irons chercher les avancées pour le pouvoir d'achat avec les dents, s'il le faut, et en mettant les mains dans le cambouis. Aussi n'est-il pas question pour nous de fuir le débat, pas question de voter pour la motion de renvoi en commission.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, LR et FI. – Approbations sur les bancs du groupe LR.
Le pouvoir d'achat est devenu, ces derniers mois, la première préoccupation de nos compatriotes ; c'est là un vaste problème. Le définir en quelques mots est relativement aisé : le pouvoir d'achat étant la différence entre le revenu et le coût des biens et services. En termes plus triviaux, c'est l'argent subsistant à la fin du mois – quand il en reste…
En revanche, évaluer le pouvoir d'achat est un exercice périlleux, comme vient de le confirmer la polémique suscitée par les propos du gouverneur de la Banque de France. On parle désormais de baisse ressentie du pouvoir d'achat et l'on prend en compte l'augmentation des dépenses contraintes.
Bref, sans m'appesantir sur ces sujets, je ferai remarquer que la légère amélioration enregistrée par l'INSEE depuis juin 2017 cache d'importantes disparités. Ainsi, les retraités et les ménages les plus modestes apparaissent comme les grands perdants, alors que les ménages les plus aisés – les 1 % les plus riches, pour être clair – ont connu, entre juin 2017 et octobre 2018, une augmentation de leur pouvoir d'achat estimée à 6 %. Cette politique inégalitaire a contribué à l'éclatement de la crise des gilets jaunes.
Depuis lors, comme on le sait, le Gouvernement a tenté, dans l'urgence, de rééquilibrer quelque peu les choses. C'est ainsi que nous avons adopté, dans les tout derniers jours de 2018, une série de mesures en faveur du pouvoir d'achat, lesquelles, nous l'avons dit, vont dans le bon sens. Si ces mesures ont sensiblement corrigé la trajectoire précédente, elles restent néanmoins insuffisantes. Ainsi, accroître de 100 euros le revenu de nos concitoyens gagnant entre 0,5 et 1,5 SMIC en augmentant la prime d'activité est une mesure partielle, puisque 55 % de nos concitoyens gagnant le SMIC n'en bénéficient pas.
Preuve que les mesures annoncées ne sont pas suffisantes, le mouvement des gilets jaunes s'est poursuivi après l'adoption de ces mesures, qui, de toute évidence, n'ont donc convaincu que peu de Français. L'exécutif ne sait quelle réponse politique et sociale apporter à cette question, il est vrai difficile, et sa paralysie met toujours plus en péril la cohésion sociale. On peut d'ailleurs s'inquiéter des possibles regains de tensions qui pourraient avoir lieu à la sortie du grand débat, car ce dernier a suscité de grandes attentes.
Reconnaissons toutefois une vertu à cette proposition de loi : celle de rappeler que la position de l'actuelle majorité à l'égard des retraités est intenable. Je veux parler du plafonnement de la revalorisation des pensions de retraite à 0,3 % en 2019 mais aussi en 2020, mesure qui a été annulée par le Conseil constitutionnel mais que, je pense, vous présenterez de nouveau dans le prochain projet de loi de finances. L'inflation étant d'environ 1,5 %, la baisse du niveau de vie des retraités devrait se poursuivre, à moins que le Gouvernement n'en décide autrement, comme le suggèrent les propos tenus par le Président de la République, la semaine dernière, devant des élus des Hauts-de-France. Monsieur le secrétaire d'État, peut-être pourrez-vous d'ailleurs nous faire connaître les pistes que le Gouvernement envisage de suivre.
Nous regardons également avec intérêt la proposition, inscrite à l'article 2, visant à réindexer, en 2019, les aides au logement sur l'inflation. En 2017, chacun le sait, nous nous étions opposés à la diminution de 5 euros des APL.
Au-delà de la revalorisation du pouvoir d'achat des retraités, à laquelle nous sommes favorables, certaines dispositions de cette proposition de loi ne nous paraissent pas assez ciblées, pas à même d'améliorer la vie de nos concitoyens les plus modestes.
Deux dispositifs que vous proposez sont présentés comme des mesures favorables au pouvoir d'achat des classes moyennes et modestes : le relèvement du plafond du quotient familial, d'une part, et la baisse de 10 % des taux des deux premières tranches de l'impôt sur le revenu, d'autre part. Examinons ce qu'il en est, par exemple, pour la seconde mesure. Si ne sont augmentés ni le nombre de tranches ni le taux d'imposition des tranches les plus élevées, on aboutit à un allégement général de l'impôt qui, bien sûr, ne touche que les redevables de l'impôt sur le revenu ; la mesure ne renforce donc en rien la progressivité de cet impôt – je rappelle que moins d'un Français sur deux le paie, les ménages les plus modestes en étant exonérés et n'étant donc pas concernés par l'allégement proposé. En outre, cette mesure ne serait pas destinée aux seules classes moyennes, comme vous le prétendez dans l'exposé des motifs ; elle concernerait aussi les classes aisées, voire très aisées.
Il en va de même s'agissant de la proposition relative à l'allégement de CSG pour les retraités, qui ne bénéficie qu'à ceux dont les revenus sont supérieurs à 2 000 euros par mois. Nous regrettons qu'a contrario, aucune disposition de ce texte ne vise à améliorer le quotidien des allocataires de petites retraites.
Un autre grief que nous pouvons faire à ce texte concerne évidemment son coût : il s'agit là d'un problème majeur. Si l'on considère le coût de l'ensemble des mesures proposées – la réindexation des APL et des allocations familiales, l'annulation de la hausse de la CSG pour tous les retraités, y compris ceux, je le répète, dont les revenus excèdent 2 000 euros, le rétablissement des plafonds du quotient familial, l'abaissement des taux des deux premières tranches de barème de l'impôt sur le revenu – , l'addition est lourde. Vous évaluez les dépenses supplémentaires à 10 milliards d'euros, ce qui, vous le comprendrez, n'est guère compatible avec nos engagements européens.
D'après l'exposé des motifs, vous entendez financer ces mesures par une baisse des dépenses publiques. Dès lors, un problème se pose : où comptez-vous faire ces économies ? Sur les moyens de l'hôpital ? Ce serait difficile. Alors, sur ceux des collectivités ? Des infrastructures ? Dans le champ de la protection sociale ? Dans celui de l'environnement ? Ce n'est pas simple.
Soit dit en passant, nous avons pu constater, quand vous étiez aux responsabilités, que vos économies se faisaient pour l'essentiel sur le dos des territoires, notamment des zones rurales, par la réduction des moyens alloués aux services publics.
En d'autres termes, telle qu'elle se présente, cette proposition de loi n'est donc pas la seule solution que l'on puisse opposer à la politique actuelle du Gouvernement et elle ne répond que partiellement aux demandes formulées par les Français.
Des mesures plus adaptées sont à étudier. Parler de pouvoir d'achat, c'est aussi aborder le sujet de la fiscalité. À cette fin, nous avons versé au grand débat national des propositions visant à réformer notre système fiscal de manière plus efficace. Dans une démarche constructive, notre groupe estime que plusieurs pistes de réformes existent.
Je veux d'abord évoquer la revue de l'ensemble des niches fiscales, qui mitent l'impôt sur le revenu et obèrent sa progressivité. Comme vous le savez, notre collègue Charles de Courson a formulé des propositions visant à réduire le poids de l'ensemble des niches et à mieux les plafonner en réduisant de 10 % par an leur coût tout en abaissant le barème de l'impôt sur le revenu à due concurrence, donc sans augmenter la pression fiscale sur les classes moyennes.
Précisons que des modulations pourraient être apportées en fonction des contraintes géographiques ou sociales de certains territoires, conformément au principe de différenciation.
Enfin, nous considérons qu'il est nécessaire de revaloriser les petites retraites – je pense notamment aux retraites agricoles, en incluant le cas des conjoints non salariés, ainsi qu'aux artisans et commerçants. Cette revalorisation pourrait par exemple être partiellement financée par une hausse des taxes sur les sodas, sur les parachutes dorés ou sur les retraites chapeau, dont nous avons encore eu récemment des exemples. Il est en effet urgent de mettre fin aux dispositions injustes touchant nos retraités, qui ont été lourdement mis à contribution ces derniers temps.
Les députés du groupe Libertés et territoires estiment que les demandes des Français pour plus de pouvoir d'achat appellent des réponses inédites, à la hauteur des fractures qui traversent le pays. Nous proposons donc d'introduire une règle de confiance, afin qu'aucune retraite ne soit inférieure à 85 % du SMIC. Cette règle se traduira par la définition d'un taux de cotisation plafond, d'un taux de remplacement plancher et d'une pension de retraite minimale.
Voilà les propositions que notre groupe vous soumet : ce sont des mesures crédibles et susceptibles d'améliorer véritablement le quotidien des Français, qui en ont plus que besoin.
Applaudissements sur les bancs du groupe LT.
La proposition de loi que nous examinons ce matin a le mérite d'ouvrir un débat entre deux visions de la politique économique.
Votre proposition de loi a pour objectif d'augmenter le pouvoir d'achat des Français en privilégiant deux instruments de l'action publique : d'un côté l'instrument fiscal, à travers la baisse des tranches d'imposition et le rétablissement du plafond du quotient familial ; de l'autre, les prélèvements sociaux, avec l'indexation des retraites sur l'inflation et la suppression de l'annulation de la hausse de la CSG.
Cette orientation de politique économique s'inscrit dans un schéma classique de la pensée économique, d'inspiration keynésienne. Dans ce schéma, c'est l'intervention de l'État qui permet l'amélioration du pouvoir d'achat : on est typiquement dans le cadre d'une politique de redistribution des richesses au moyen d'une augmentation du revenu disponible des ménages.
Plutôt que cette vision de l'action publique, nous privilégions une autre approche et l'utilisation d'autres instruments de politique économique. Nous pensons que ce n'est pas l'État, seul et omnipotent, qui doit être à la manoeuvre dans la relance du pouvoir d'achat, même s'il y contribue, évidemment, comme le secrétaire d'État en a fait la démonstration tout à l'heure. Nous pensons qu'avant que l'État n'intervienne pour redistribuer des richesses, il faut d'abord les créer.
Pour favoriser la création de richesses, nous devons nous appuyer sur les entreprises, coeur battant de notre économie et de notre système redistributif.
Créer un environnement favorable au développement de l'activité productive de nos entreprises pour leur permettre de créer de la valeur et dégager de la croissance, nécessite, de notre point de vue, d'autres instruments de politique économique que ceux auxquels vous nous proposez de recourir ce matin.
Libérer le marché du travail, favoriser l'orientation de l'épargne vers l'investissement productif, investir dans les compétences, encourager l'innovation, permettre à nos entreprises d'être aussi compétitives que leurs concurrentes sont autant d'instruments qui permettent de créer de la croissance, grâce une politique de soutien de l'activité productive.
Cette orientation de politique économique donne des résultats, comme en atteste le taux de croissance de l'économie française en 2018 – sur ce point, vous avez été assez silencieux.
C'est la balance des transactions courantes qui compte, pas la balance commerciale.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Ne vous énervez pas, c'est inutile ; laissez-moi poursuivre mon propos. Je vous ai écouté, faites de même.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Nouvelles exclamations sur les bancs du groupe LR.
C'est l'augmentation de la valeur ajoutée et de la croissance qui est fondamentalement le moteur de l'augmentation du pouvoir d'achat.
D'abord, elle permet de réduire le chômage. Or la première des inégalités en matière de pouvoir d'achat est celle qui tient à l'emploi. Or, en 2018 comme en 2017, les entreprises françaises ont créé beaucoup d'emplois : c'est autant de personnes qui ont vu leur pouvoir d'achat s'améliorer.
Ensuite, la croissance permet d'augmenter le pouvoir d'achat de ceux qui travaillent, à travers une augmentation de leur rémunération salariale, de leur intéressement ou de leur participation aux résultats de l'entreprise.
Le secrétaire d'État a rappelé les mesures qui ont favorisé ces dispositifs.
Enfin, la croissance permet de rétablir les équilibres budgétaires – baisse du déficit et stabilisation voire diminution de la dette – et offre ainsi des marges de manoeuvre budgétaires pour financer des mesures permettant l'augmentation du pouvoir d'achat des plus démunis de nos concitoyens.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
En définitive, cette politique de soutien à l'activité productive entraîne une amélioration du pouvoir d'achat qui alimente la demande.
C'est toute la cohérence de notre politique économique, qui consiste à…
… mener à la fois, en même temps, une politique d'offre et une politique de demande. Cette approche équilibrée a en outre le mérite de limiter les risques inflationnistes. Or on sait que, pour protéger le pouvoir d'achat, il faut contenir l'inflation.
Si nous partageons l'objectif de votre proposition de loi s'agissant de l'augmentation pouvoir d'achat, …
… nous divergeons sur les moyens d'atteindre cet objectif.
De manière assez contre-intuitive, vous semblez privilégier l'intervention de l'État en matière d'amélioration du pouvoir d'achat, alors que nous favorisons un État qui libère et protège en favorisant la création puis la redistribution des richesses par les acteurs économiques, sous la forme d'une augmentation du revenu disponible.
Vous faites le choix d'une politique budgétaire ancienne, dont on ne connaît pas précisément le financement, là où nous faisons confiance aux acteurs économiques et où nous inscrivons notre action publique dans le cadre d'une politique économique cohérente.
Applaudissements et « Bravo ! » sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.
Je suis très honoré de conclure la discussion générale pour le groupe Les Républicains ; j'ai en effet entendu tellement d'approximations et de contrevérités que je vais me faire un plaisir de remettre le clocher au centre du village.
Applaudissements et « Bravo ! » sur les bancs du groupe LR.
S'il est un challenge que le Gouvernement et sa majorité peuvent gagner haut la main, c'est bien, comme l'a habilement rappelé mon collègue Damien Abad, celui du concours Lépine de la taxe. Voilà qui n'est pas de nature à rassurer les propriétaires privés, qui semblent désormais être dans votre viseur.
Faute de réelle baisse de la dépense publique, votre politique injuste s'est révélée particulièrement préjudiciable au pouvoir d'achat des Français.
Depuis 1945, personne n'avait osé s'attaquer au consensus de la Libération.
Vous l'avez fait, en désindexant du coût de la vie les retraites, les prestations familiales, l'allocation logement, et même les prestations d'invalidité : vous êtes allés jusque-là !
Je passe sur la réduction brutale et drastique des contrats aidés, qui, elle aussi, a pénalisé les plus fragiles.
Et passons sur le budget du CNDS, et sur la fin de la réserve parlementaire !
À l'injustice, vous avez ajouté le mépris et la division, et vous continuez à le faire,
Protestations sur les bancs du groupe LaREM
en essayant de monter les Français les uns contre les autres : les actifs contre les retraités, les ruraux contre les urbains.
Oui, vous avez aggravé les fractures sociales et territoriales. Oui, vous avez pénalisé le pouvoir d'achat, particulièrement celui des plus modestes et des classes moyennes.
Voilà pourquoi il nous faut réparer ce que vous avez abîmé.
À rebours de votre matraquage fiscal, les députés du groupe Les Républicains…
Avec une constance que personne ne peut nous contester, nous proposons des mesures simples et concrètes.
D'abord, la réindexation sur le coût de la vie des pensions de retraite, des allocations familiales et des aides au logement, avec effet rétroactif, est un préalable indispensable, chers collègues de la majorité, pour réparer vos erreurs et gagner l'apaisement.
Nous proposons également l'annulation de la hausse de la CSG pour l'ensemble des retraités, car ceux-ci ne sont pas des nantis ; ils ont en effet travaillé toute leur vie pour mériter leur retraite. Vous brisez ainsi le pacte de confiance entre les générations. Concrètement, vous privez chaque retraité d'un mois de pension chaque année.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Nous proposons aussi le rétablissement des plafonds du quotient familial tels qu'ils existaient avant qu'ils ne soient fortement abaissés en 2012. C'est en effet le bon outil pour prendre en compte les charges des familles, de toutes les familles.
Nous proposons enfin, en priorité sur les deux premières tranches, une baisse de 10 % de l'impôt sur le revenu, pour favoriser le pouvoir d'achat des classes moyennes.
Nous formulerons en outre plusieurs propositions par voie d'amendements pour redonner toute son efficacité à l'exonération pleine et entière des heures supplémentaires.
Avant sa suppression en 2012, par pure idéologie, ce dispositif avait pourtant fait ses preuves en matière de valorisation du travail et du pouvoir d'achat des plus de 9 millions de salariés du public comme du privé qui en avaient bénéficié.
Les mesures d'urgence prises sous la pression populaire, dans la panique de la fin décembre 2018, s'avèrent, vous le savez, insuffisantes et, bien pire, non financées, alors que les nôtres le sont.
Exclamations et rires sur les sur les bancs du groupe LaREM.
Nous sommes la seule formation politique à les accompagner d'un programme de réduction des dépenses publiques de 20 milliards d'euros, qui a été détaillé par notre rapporteur Éric Woerth.
Nous pouvons en débattre, elles existent : elles sont sur la table et ont été rendues publiques.
« Rien ! » et « Zéro ! » sur les bancs du groupe LaREM.
Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le timing est le bon : le grand débat national est terminé, et les Français attendent désormais des décisions concrètes, mais certainement pas celles annoncées par la presse économique et le Premier ministre ces derniers jours, concernant les pièces détachées automobiles, les syndics de copropriété et le permis de conduire. Quelle vision stratégique s'en dégage-t-il ? Il vous reste au moins encore, il est vrai, l'augmentation du prix de l'électricité…
Soyons sérieux : ne laissons pas un Président isolé décider seul dans son bureau. Débattons, ici, aujourd'hui, projet contre projet. Comment accepter que vous vous défiliez sur le fond, que vous vous débiniez au moyen de quelque artifice législatif ou de quelque motion de procédure, comme vous nous en avez si souvent gratifiés ?
Les esprits libres le savent, tout comme les amateurs de bonne chère : il faut de l'impertinence dans l'analyse, comme un peu de poivre dans le ragoût !
Il le faut dans le but de surprendre les papilles – c'est le président du groupe d'études sur la gastronomie qui vous le dit – ou les neurones. Alors, pour une fois, surprenez-nous : emparez-vous de ce texte. Débattons devant les Français, devant les perdants de votre politique, au premier rang desquels les retraités.
Débattons devant ces trop nombreuses femmes et ces trop nombreux hommes, qui, même en travaillant, ont du mal à boucler leurs fins de mois.
Débattons pour répondre, enfin, à ceux qui paient toujours plus et n'ont jamais droit à rien.
Vifs applaudissements sur les bancs du groupe LR. – Exclamations sur les bancs du groupe LaREM. – Invectives de part et d'autre.
Quarante-cinq secondes de plus que son temps de parole, et pas une idée !
S'il vous plaît, je vous rappelle qu'il y reste des orateurs inscrits.
La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon.
Nos collègues du groupe Les Républicains ont déposé une proposition de loi fondée sur un constat que nous ne pouvons que partager : le Gouvernement d'Emmanuel Macron et sa majorité ont attaqué les plus pauvres et les classes moyennes pour faire d'insupportables cadeaux aux plus riches. Il est donc nécessaire de revenir sur certaines des mesures les plus antisociales, qui ont été le catalyseur de la mobilisation des gilets jaunes. Ainsi, nous allons débattre, je l'espère, de la réindexation sur l'inflation des pensions de retraite, des allocations familiales et des APL.
Après avoir augmenté la CSG due par les retraités modestes, La République en marche a décidé de reculer devant la grogne. Mes chers collègues de la majorité, n'affichez pas ce recul comme un progrès social que l'on devrait à votre humanisme car c'est grâce à la mobilisation de la population, aux gilets jaunes, qu'une partie des retraités ne seront finalement pas frappés par la hausse de la CSG ; ce n'est pas un cadeau que vous avez fait, c'est le résultat de l'action du peuple.
Au-delà, entre la hausse de la CSG et la désindexation des pensions de retraite sur l'inflation, vous faites les poches à nos retraités. Et pas qu'un peu : en deux ans, vous allez récupérer 8 milliards d'euros ; 8 milliards d'euros sur le dos des personnes âgées, fragiles, qui ont passé leur vie à travailler pour avoir droit, un jour, au repos.
À La France insoumise, nous défendons la vision inverse : nous souhaitons que nos personnes âgées puissent vivre dignement, sans se poser la question des fins de mois. Nous pensons qu'aucune pension de retraite ne doit être en dessous du niveau du SMIC et que le minimum vieillesse ne peut être en dessous du seuil de pauvreté.
J'ai une pensée aujourd'hui pour ces nombreux retraités qui, notamment dans les outre-mer, vivent dans la pauvreté, avec parfois seulement 300 euros par mois, après une vie de dur labeur. Comment peut-on laisser faire ça ? Comment peut-on penser que 300 euros sont suffisants pour vivre ?
Autre attaque des macronistes contre l'ensemble des classes moyennes et pauvres : la diminution des APL. En 2017, vous avez décidé de réduire de 5 euros les APL. En 2018, vous avez décidé de geler ces aides. En 2019, ces mesures antisociales représentent 12 euros de moins dans le budget mensuel des ménages concernés. Alors que les loyers ne cessent d'augmenter, souvent plus vite que les revenus, comment pouvez-vous penser que c'est une bonne idée que de réduire les aides aux logements ? Je ne sais pas comment une personne saine d'esprit peut suivre ce raisonnement !
Mes chers collègues, votre politique est faite d'attaques permanentes contre toutes les catégories de population – hormis les riches : …
… les travailleurs, par la destruction du code du travail avec vos ordonnances ; les retraités, par l'augmentation de la CSG et la désindexation des pensions de retraite ; les malades, par les coupes de plusieurs milliards d'euros dans le budget de la sécurité sociale et la destruction de notre système de santé ; les familles, par la vente des HLM, la baisse des APL – et j'en passe ; les personnes handicapées, par notamment la réduction de l'obligation d'accessibilité de 100 % à 10 % seulement des logements ; les étudiants, par la création d'un système injuste de sélection à l'entrée des études supérieures et la diminution du budget de l'université.
Aux plus riches, en revanche, on ne demande aucun sacrifice. De la suppression de l'ISF au doublement du montant du CICE, vous ne leur avez fait que des cadeaux – des cadeaux qui se comptent en milliards !
Vous espérez que le grand débat portera un coup final à la mobilisation, mais tant que vous n'aurez pas restauré la justice sociale, vous n'aurez pas la paix.
Pour en revenir à la proposition de loi, nous ne pouvons que souscrire aux trois premiers articles, qui reviennent sur les mesures antisociales du Gouvernement. Il s'agit là de justice sociale. Malheureusement, l'ADN du groupe Les Républicains revient aux articles 4 et 5, qui tendent à relancer le pouvoir d'achat par le rétablissement des plafonds du quotient familial au niveau de 2010 et par la baisse de l'impôt sur le revenu pour les deux premières tranches. Cela ne profiterait qu'aux familles les plus aisées. La plus juste manière d'augmenter le pouvoir d'achat consiste, selon nous, à valoriser le travail, non en recourant à des heures supplémentaires, mais par une augmentation du SMIC. Comme il est difficile pour vous de l'entendre, nous nous abstiendrons sur le vote de ce texte.
Je note qu'apparemment, M. le président de la commission et rapporteur du texte n'est plus là. C'est dommage. J'espère qu'il va revenir pour écouter les orateurs inscrits dans la discussion générale. Ce serait le minimum !
Mouvements d'indignation sur les bancs du groupe LR.
Sourires.
Chers collègues, nous voici rassemblés pour examiner ce que j'appellerai un texte de circonstance, un texte qui prétend apporter une réponse aux revendications, légitimes, de nos concitoyens, mais qui se contente de faire le bruit de la réponse sans en composer la musique.
Il s'agit d'un texte de circonstance, parce qu'il annonce sans construire. Il égrène des mesures alléchantes, sans s'assurer de leur faisabilité. Bref, il traduit une politique de l'immédiateté, sans vision ni stratégie.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Je rejoins la volonté de nos collègues du groupe Les Républicains de se saisir du contexte actuel tendu pour présenter une loi sur le pouvoir d'achat. Il y a des demandes, légitimes, auxquelles il faut répondre.
Nous sommes tous en phase avec cette volonté d'apporter une réponse à nos concitoyens pour un meilleur contexte économique et social. D'ailleurs, nous y répondons chaque jour, et ce depuis presque deux ans.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Mais, contrairement à nos collègues Les Républicains, la majorité ne se contente pas d'un intitulé, ni d'un effet d'annonce. Elle oeuvre en profondeur pour le pouvoir d'achat des Français.
Elle construit des solutions pérennes, qui s'inscrivent dans le temps et, surtout, qui servent le fonctionnement de notre économie.
Je regrette de devoir vous le redire, chers collègues : les mesures que vous proposez ne reposent sur aucun socle budgétaire.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.
Vous annoncez la nécessité de faire 20 milliards d'économies budgétaires, mais vous ne mentionnez aucunement où ces économies seront faites.
Vous n'expliquez pas non plus quels services publics seraient supprimés ou réduits pour assurer le financement de vos mesures.
Pensez-vous que les Français soient dupes ? Pensez-vous qu'ils ne voient pas, comme nous, qu'on ne peut pas promettre des mesures alors qu'elles ne sont pas financées ?
Et vous ? Macron a dit qu'il allait réduire de trois points le déficit. Comment allez-vous faire ?
Le choix fait par la majorité est une augmentation du pouvoir d'achat ciblée…
… à la fois sur le soutien à l'activité et sur la protection des plus fragiles.
C'est un choix assumé et responsable, car il est mûri, construit et financé dans un équilibre intelligent, pertinent et sincère.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Que la vocation du présent texte soit de rouvrir le débat sur le pouvoir d'achat des Français, je m'en réjouis. Nous avons la même préoccupation. Mais que ce soit l'occasion de postures politiciennes, qui visent à occuper l'espace législatif alors que notre pays se trouve dans une situation délicate, je le regrette – et je le dénonce.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.
En dépit du bien-fondé incontestable de notre intérêt collectif pour le pouvoir d'achat des Français, …
Nous devons présenter des textes qui ont une réelle chance d'être construits et discutés, et qui reposent sur le sérieux budgétaire, non sur des approximations.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Nous continuons le travail. Pour supprimer les cotisations salariales pour l'assurance maladie et l'assurance chômage, afin de rapprocher le salaire brut du salaire net. Pour supprimer la taxe d'habitation. Pour augmenter la prime d'activité en soutien au revenu des travailleurs modestes. Pour augmenter le minimum vieillesse. Pour augmenter l'allocation aux adultes handicapés.
Les exclamations perdurent.
Chers collègues, vous allez dire que nous n'allons pas assez vite, ni assez loin, …
… mais vous conviendrez avec moi – et particulièrement M. le rapporteur – que de loin, la critique est aisée. L'art de répondre aux besoins immédiats et urgents des Français suppose un travail exigeant et sincère.
Exclamations continues sur les bancs du groupe LR.
Je vous prie de bien vouloir m'excuser une fois encore, mais nous avons des invités dans les tribunes, et l'on n'y entend rien.
Vous n'avez pas adopté la même attitude tout à l'heure, quand M. Brun avait la parole, madame la présidente !
Vous ne pouvez pas dire cela, monsieur Di Filippo. Il est normal que l'on réagisse dans l'hémicycle, et je vous laisse faire, mais là, on n'entend vraiment plus rien. Laissez au moins l'oratrice terminer son intervention ; vous aurez la possibilité d'y répondre, vous le savez très bien.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.
Je reprends – et je répète. Chers collègues, vous allez dire que nous n'allons pas assez vite, ni assez loin, mais vous conviendrez avec moi – et particulièrement vous, monsieur le rapporteur – que la critique est aisée.
L'art de répondre aux besoins immédiats et urgents des Français suppose un travail exigeant et sincère, …
Alors, ne nous demandez pas de faire le grand écart et de procéder à une augmentation flagrante des dépenses tout en veillant à ne pas creuser le déficit. Ce grand écart budgétaire, vous n'avez pas été capables de le faire lorsque vous étiez aux responsabilités !
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Notre majorité fait quant à elle le choix du sérieux budgétaire et d'une réponse pertinente aux attentes des Français.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.
Je vous remercie pour votre attention, tout particulièrement vous, mesdames et messieurs les membres du groupe Les Républicains.
Vives protestations sur les bancs du groupe LR.
Nouvelles invectives entre les membres du groupe LaREM et ceux du groupe LR.
Chers collègues, pourrions-nous reprendre le cours de nos travaux, s'il vous plaît ? Un peu de respect pour l'oratrice qui vient de gagner la tribune ! Si vous voulez vous parler, allez ailleurs !
Vous avez la parole, madame Ménard.
« On ne vit plus, on survit. » Voici l'une des phrases portées à bout de bras par les gilets jaunes sur des pancartes de fortune. Et tandis que la rue bat le pavé, la presse relaie l'autosatisfaction du Gouvernement,
« Ah ça, oui ! » sur les bancs du groupe LR
qui pense qu'avec ses quelques mesures d'urgence déployées en décembre dernier, la grogne des Français va s'estomper. Pari perdu.
D'en haut, on ne comprend plus rien à ce qui se passe en bas. Pourquoi les gilets jaunes continuent-ils à se mobiliser alors que les prévisions sont encourageantes : 2 % de pouvoir d'achat en plus annoncé en 2019. Mais que demande le peuple ? En réalité, c'est assez simple : cela s'appelle la justice sociale. Or certaines des mesures prises par la majorité ressemblent plus à une aumône qu'à une réelle revalorisation des salaires. Ce sont des mesures de court terme pour calmer les manifestants, alors qu'il faudrait s'inscrire dans le long terme pour redynamiser durablement l'économie. Tout ce que fait le Gouvernement, c'est enjoindre les entreprises à verser des primes.
Or, malgré le milliard d'euros de primes annoncées, la réalité est moins réjouissante : selon les derniers chiffres, 61 % des 2 millions de salariés qui ont pu bénéficier de primes ont touché une enveloppe inférieure à 500 euros, et 6 % ont même perçu moins de 100 euros. Certes, comme toujours, il y a les gâtés – si j'ose dire : ils sont 16 % à avoir touché 1 000 euros, soit le montant maximal de la prime. Tant mieux pour eux – mais les autres ?
Alors, que faire ? Il faut commencer par adopter cette proposition de loi, qui corrige un certain nombre de mesures injustes prises par le Gouvernement.
Ainsi l'article 1er, qui propose de réindexer en 2019 les pensions de retraite et les allocations familiales sur l'inflation. Lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, j'avais déjà alerté à plusieurs reprises le Gouvernement sur l'injuste désindexation des pensions de retraite sur l'inflation, alors qu'en même temps les allocations pour les demandeurs d'asile étaient revalorisées. Un véritable scandale pleinement assumé par le Gouvernement et sa majorité, parfaitement conscients que les prestations allaient augmenter cinq fois moins vite que le coût de la vie et que le pouvoir d'achat des retraités serait ainsi écorné de 3 milliards d'euros en 2019.
L'article 3, quant à lui, nous rappelle que le Gouvernement n'aime décidément pas les retraités, puisqu'il avait commencé de longue date son travail de sape avec l'augmentation de la CSG des retraités dont la pension était supérieure à 1 200 euros – retraités qu'Emmanuel Macron avait à l'époque qualifiés d'« aisés ».
Avec 1 200 euros, on est un retraité aisé ?
Après avoir longuement ferraillé, nous avions réussi à faire entendre raison au Gouvernement, qui pense que, pour renflouer les caisses de l'État, il suffit de se servir dans le porte-monnaie des retraités. Grand seigneur, le Gouvernement a donc fini par épargner ceux qui touchent une retraite de moins de 2 000 euros. Pour ma part, je pense que c'est un grand pas pour le Gouvernement, mais un bien trop petit pas pour les retraités. Raison pour laquelle, à l'instar de mes collègues Les Républicains, je pense que c'est toute la hausse de la CSG qu'il faut annuler.
Si cette nouvelle interpellation n'était pas entendue, je propose par l'intermédiaire d'un amendement que le plafond d'exonération de CSG soit relevé à 3 000 euros – et même, pourquoi pas, à 6 000 euros, …
… puisque c'est le seuil en dessous duquel un journaliste bénéficie d'un abattement fiscal. Ce qui est valable pour un journaliste ne devrait-il pas l'être pour les retraités ?
Je regrette cependant que la question de la TVA ne soit pas abordée dans le texte. C'est l'impôt que paient tous les Français et qui freine considérablement la consommation, notamment pour les produits de première nécessité. Un certain nombre de pays courageux ont d'ailleurs opté pour une TVA à taux zéro pour ces produits – je pense à l'Irlande, au Royaume-Uni et à Malte qui, avant d'entrer dans l'Union européenne, avaient adopté cette mesure.
Alors c'est vrai, le Gouvernement va s'empresser de brandir la directive européenne de 2006, qui interdit aux États membres d'avoir un taux de TVA inférieur à 5 %. Pourtant, cette mesure est plébiscitée par les gilets jaunes depuis des mois. Aussi, sans aller jusqu'au taux zéro, nous pourrions déjà donner un coup de pouce aux Français en taxant les produits de première nécessité à 2,1 %, comme je l'ai proposé à travers l'un de mes amendements – qui, hélas, ne sera pas plus examiné que les autres.
Ce taux ayant été accordé, par exemple, aux secteurs de la presse et des spectacles, ce serait, me semble-t-il, la moindre des choses de l'appliquer à certains produits alimentaires de première nécessité, …
… quitte à aller négocier avec Bruxelles – il me semble que c'est votre rôle.
Pour toutes ces raisons, je soutiendrai cette proposition de loi de bon sens – si, bien sûr, La République en marche daigne nous laisser l'examiner !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.
Pour une primo-députée comme moi, et pour beaucoup de mes collègues, il y a un certain intérêt à observer les subtilités du jeu parlementaire qui animent le théâtre politique.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Et je dois dire, mes chers collègues, que les manoeuvres politiciennes des députés, lorsqu'ils sont dans l'opposition, me fascineraient grandement si elles ne contribuaient pas à éloigner nos concitoyens de la politique et à alimenter la crise de la représentation que nous traversons.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM. – Nouvelles exclamations sur les bancs du groupe LR.
Je dois dire qu'avec cette proposition de loi, vous faites très fort dans le registre de la démagogie.
Mêmes mouvements.
Et je suppose que vous avez dû bien vous amuser à enfiler les perles des six articles qui la composent.
Rires sur les bancs du groupe LaREM. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Car, pour tout vous avouer, ce texte, je l'ai rebaptisé « DORG ». Entendez : « Demain, on rase gratis » !
Rires et applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.
Un vrai cas d'école !
Souffrez donc, mes chers collègues, que j'en tire quelques enseignements qui seront, je l'espère, utiles à nos concitoyens – et en particulier aux jeunes gens qui assistent à nos débats ce matin – – pour décrypter vos intentions réelles.
Rires et applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Protestations sur les bancs du groupe GDR
pour produire son plein effet, la manoeuvre doit s'inscrire dans un contexte de crise susceptible de mettre en difficulté l'adversaire.
Exclamations sur quelques bancs du groupe LR.
Quelle chance ! Voici qu'une colère qui couvait depuis plus de dix ans et dont l'explosion a été soigneusement évitée par l'immobilisme et les reculades des gouvernements précédents, …
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Nouvelles exclamations sur les bancs du groupe LR
… voici, disais-je, que cette colère de citoyens délaissés depuis longtemps par les politiques publiques…
… explose sur les ronds-points à l'automne 2018 ! Un peu d'huile sur le feu, quelques « On vous l'avait bien dit ! » et un gilet jaune enfilé ici ou là pour montrer de quel côté l'on se range… Le contexte est idéal !
Exclamations continues sur les bancs du groupe LR.
Règle numéro deux : on ne fait pas grand-chose. L'équation est complexe, d'ailleurs, on le sait bien. Comment trouver des marges de manoeuvre supplémentaires dans un contexte de déficit public, …
… qui, même s'il baisse depuis deux exercices budgétaires, doit être l'objet de tous les efforts de maîtrise ?
Mêmes mouvements.
Ce n'est pas votre problème. On regarde l'adversaire se dépatouiller avec ces contraintes, si possible avec un certain dédain, et l'on ne montre surtout pas sa surprise face à la pertinence des solutions qu'il met en oeuvre. Il rend 14 milliards d'euros de pouvoir d'achat aux Français : pas mal, pour des débutants !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Mais, si possible, on explique que c'est, soit irresponsable face à l'état des finances publiques, soit insuffisant au regard des revendications… ou les deux, car on n'est pas à une contradiction près !
Rires et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
… lorsque les choses commencent à se calmer un peu et que tous les observateurs, dont l'INSEE et la Banque de France, confirment une hausse du pouvoir d'achat, une stabilisation de l'inflation et une croissance au meilleur niveau en Europe, on s'applique à casser l'ambiance.
Nouveaux applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
On sort des tiroirs toutes les mesures qu'on y avait remisées lorsque l'on était au pouvoir, et l'on en fait une proposition de loi !
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.
Ce texte coûterait 17 milliards d'euros aux finances publiques… Ah, quand même… Bon, ce n'est pas grave : proposons, dit-on, 20 milliards d'économies. On ne sait pas très bien comment, mais, au pire, on verra plus tard ! Il s'agit aussi, si possible, de trouver un titre un peu aguicheur : le « rétablissement du pouvoir d'achat », voilà qui est parfait !
Eh bien chapeau, chers collègues, et merci pour cette belle leçon de politique politicienne !
Mais non merci, en fait, vraiment non : je préfère une politique qui profite vraiment aux Français, comme celle que nous menons.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LR.
On verra bien si, un jour – que j'espère le plus tardif possible – , je me retrouve dans l'opposition. Ce jour là, j'espère que je ne serai pas politique au point d'en perdre mon âme et mon ambition pour les Français !
Vifs applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Merci pour ce grand moment, madame David. Pour une primo-députée, vous usez beaucoup des vieilles ficelles, et en y mettant une ardeur peu commune.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Rappelons une règle de base : l'hôpital ne doit pas se moquer de la charité.
Applaudissements sur les bancs des groupes LR et GDR.
Exclamations sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.
Vous voyez, vous n'écoutez pas… Je ne parlais pas du bruit dans l'hémicycle, en tout état de cause, mais de l'oreille que nous devons prêter à nos idées respectives. Ce n'est pas parce que nous sommes politiquement minoritaires que nous avons tort. D'ailleurs, vous passez un temps fou à détricoter des mesures que vous avez mis la même ardeur à défendre quelques mois plus tôt.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
C'est faire preuve d'une conscience professionnelle singulièrement aiguë !
Ne caricaturez pas ce que nous proposons : cela empêche le débat, et ce serait un peu étonnant, en l'occurrence. Contrairement à ce que vous répétez en boucle, nous avons proposé des mesures de réduction des dépenses publiques.
M. Laqhila, qui n'a jamais lu le programme des Républicains à ce sujet, nous reproche de ne rien proposer. Pour le coup, je ne suis pas sûr que le MODEM, lui, ait jamais rien proposé en ce domaine !
Mêmes mouvements.
Débattons, par exemple, de l'âge de départ à la retraite ! L'injustice, d'ailleurs, consisterait à ne pas le reculer. Contrairement à vous – et nous verrons bien ce que vous déciderez sur ce point – , nous l'avons fait. Nous sommes donc légitimes pour en parler.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Autre moyen de réduction des dépenses : les 20 milliards d'euros d'économies prévues dans le programme des Républicains, que vous rejetez d'un revers de main sans avoir jamais daigné le lire.
« Si ! » sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Pourriez-vous vous prononcer, par exemple, sur le plafonnement de l'allocation unique à 75 % du SMIC ? Vous ne l'avez jamais fait.
Le programme des Républicains, ce sont 500 000 fonctionnaires en moins !
Avez-vous dit un mot sur l'idée d'un nouveau mouvement de décentralisation ? Et que faites-vous pour réduire les effectifs des fonctionnaires ? Notre projet est de les réduire à hauteur de 300 000 postes.
Non, 300 000. Vous ne dites pas les choses. Tout cela, en réalité, vous met très mal à l'aise. Vous êtes totalement incapables d'assumer une politique de réduction de la dépense publique.
Ni La République en marche, ni l'ensemble des partis représentés dans cet hémicycle, hormis Les Républicains, n'ont le courage d'afficher un programme de réduction de la dépense publique.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Vous nous avez fait, monsieur Labaronne, un cours d'économie sur le bien-fondé du keynésianisme. C'est proprement ahurissant ! Selon nous, c'est bien la relance de l'activité et de l'emploi qui fera redémarrer l'ensemble de l'économie française. Les mesures pour y parvenir ne sont pas seulement d'ordre financier, bien entendu : elles concernent aussi le code et le marché du travail, les qualifications, la formation, sujets cruciaux s'il en est. C'est ainsi que l'on pourra décider de mesures de réduction d'impôt et d'augmentation du pouvoir d'achat. Nous ne croyons pas du tout que celui-ci soit seulement une affaire d'impôts : le pouvoir d'achat, c'est évidemment et avant tout une affaire d'activité, mais vous vous refusez à le voir.
Surtout, vous ne faites rien en ce sens.
Faites des réformes, plutôt que d'organiser des débats sans fin ! Le débat, d'ailleurs, vous ne l'acceptez pas : pétris de certitudes, vous n'écoutez pas ceux qui veulent débattre avec vous.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Plutôt que de détricoter vos mesures les unes après les autres, écoutez ce que vous dit l'opposition !
Vous reprochez à cette proposition de loi, monsieur Labaronne, de ne pas couvrir tout le champ de l'action publique. Évidemment ! Une seule proposition de loi n'a pas vocation à remettre en cause deux ans d'errance fiscale et économique du Gouvernement ! Pour cela, il faudra bien d'autres textes. Mais écoutez un peu l'opposition : vous ne vous en porterez que mieux, vous verrez !
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Enfin, vous êtes revenu à plusieurs reprises, monsieur Laqhila, sur l'impôt sur le revenu. Ne faudrait-il rien faire en ce domaine ?
Faudrait-il se contenter d'une vague modification des critères d'entrée dans cet impôt, comme le suggère le ministre de l'économie ? On peut toujours prendre un tas de mesures d'adaptation : tous les gouvernements l'ont fait et celui-ci n'échappera pas à la règle, mais, en général, ces gouvernements-là réforment peu, ou en tout cas jamais en profondeur, sur des éléments structurels.
L'impôt sur le revenu, il faut bien entendu le baisser ; et nous proposons de le faire à hauteur de 10 % sur les deux premières tranches. Les plus hauts revenus profiteraient donc de cette baisse jusqu'à l'extrémité de la deuxième tranche, les taux restant ensuite inchangés sur les tranches supérieures. D'ailleurs, je vous le rappelle, le taux marginal le plus élevé de l'IR n'est pas de 45 %, contrairement à une idée répandue, mais de 48 ou 49 %, à quoi il faut ajouter la CSG.
L'impôt sur le revenu étant donc très concentré, la mesure que nous proposons aurait l'avantage de bénéficier à plein aux catégories moyennes et de le déconcentrer un peu. On peut ne pas être d'accord, mais discutons-en !
Chaque fois que nous proposons quelque chose, vous nous répondez : démagogie. Mais la majorité elle-même n'est rien moins que démagogique ! Vous avez passé cinq mois à débattre, occupant toutes les chaînes de télévision pour dire que vous comprenez les Français.
Et, comme toujours, vous calez lorsqu'il s'agit de décider. Les décisions, nous nous efforçons pour notre part de les accélérer. C'est pourquoi, j'en suis convaincu, vous voterez notre proposition de loi.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
On n'a pas forcément tort lorsque l'on est politiquement minoritaire, avez-vous dit, monsieur le rapporteur. Je ne vous ferai jamais de procès en cette matière, et d'autant moins que je vous laisse bien volontiers le monopole, sinon de la citation, du moins des références à son auteur.
Cela ne nous empêche pas de dire, en revanche, que vous avez tort, à nos yeux, car nous ne partageons pas votre point de vue, ni d'ailleurs les hypothèses qui le sous-tendent, et ce pour quatre raisons dont j'ai déjà parlé. En premier lieu, le coût des mesures que vous proposez n'est pas, selon nous, de 10 milliards d'euros, mais de 17 milliards – 16,85 milliards, pour être précis.
Sur l'ensemble de la durée prévue, soit quatre ans, cela représenterait 90 milliards de dépenses non documentées.
Deuxième raison : vos mesures, en particulier sur l'impôt sur le revenu, auraient un caractère injuste puisqu'elles en amoindriraient la progressivité. De plus, elles seraient bien plus coûteuses que ce que vous dites : vous les estimez à 2 milliards d'euros alors que, appliquées à l'ensemble des foyers fiscaux, elles représentent 8 milliards.
La troisième raison tient à une documentation insuffisante des 20 milliards d'euros d'économies proposés. En outre, cette proposition se télescope avec d'autres, formulées en novembre dernier par votre famille politique. En somme, vous proposez d'appliquer dès aujourd'hui des mesures dont le financement, si l'on se fie à ces propositions du mois de novembre, est déjà capté par des mesures que nous avons mises en oeuvre, parmi lesquelles la défiscalisation des heures supplémentaires.
Quatrièmement, vous fermez les yeux sur les mesures instaurées par le Gouvernement en matière de pouvoir d'achat et de soutien aux ménages les plus modestes, mais aussi sur les réformes que nous avons mises en oeuvre, sur celles que nous mettons en oeuvre, sur celles que nous allons mettre en oeuvre au cours des prochaines semaines – je pense bien évidemment à la transformation de l'action publique et tout particulièrement à la modernisation de la fonction publique.
Je crois comprendre que la majorité a déposé une motion de renvoi en commission.
Je pense que les failles de votre proposition de loi justifient effectivement que celle-ci soit retravaillée. Dans l'intervalle, le Gouvernement continuera à réformer !
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.
... et des membres du groupe La République en marche une motion de renvoi en commission déposée en application de l'article 91, alinéa 10, du règlement.
La parole est à M. Jean-René Cazeneuve.
Mes chers collègues, par la proposition de loi que vous nous présentez, vous souhaitez améliorer le pouvoir d'achat des Français : c'est une cause que nous approuvons, évidemment. Mais notre majorité n'a pas attendu votre proposition de loi pour renforcer le pouvoir d'achat.
Protestations sur les bancs du groupe LR.
Sourires sur les bancs du groupe LaREM.
Nous menons en effet, depuis le premier jour du quinquennat, une véritable politique en faveur du pouvoir d'achat, en rémunérant mieux le travail, en allégeant la fiscalité locale et en soutenant significativement les personnes les plus fragiles.
Souffrez que je revienne...
... sur les principales mesures que nous avons prises.
Pour mieux rémunérer le travail, nous avons supprimé les cotisations salariales d'assurance maladie et chômage :...
... cela représente 1,45 % d'augmentation du salaire net pour tous les salariés – soit 44 euros par mois pour un couple de personnes au SMIC.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – M. Mohamed Laqhila applaudit également.
Nous avons aussi adopté une trajectoire d'augmentation de la prime d'activité sur la durée du quinquennat : c'est une incitation claire au retour à l'emploi et, pour la société, à se retrouver autour de la valeur travail.
Nous avons également, grâce à la loi PACTE, amélioré les dispositifs d'intéressement et de participation des salariés, car nous voulons associer toutes les forces vives productives à la réussite de nos entreprises.
Nous allégeons fortement la fiscalité locale et nous rétablissons plus de justice entre les territoires en supprimant progressivement la taxe d'habitation pour 80 % des ménages – et bientôt pour 100 % d'entre eux. Vous qui souhaitez réduire la pression fiscale, pourquoi n'avez-vous pas voté cette mesure ? Ce sont 14 milliards d'euros de pouvoir d'achat qu'elle rend aux Français, le gain moyen étant de 550 euros par foyer et par an.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Cette suppression, je le rappelle, n'entame en rien les ressources des collectivités territoriales, compensées à l'euro près, inflation incluse et compte tenu de l'augmentation de la population. À cet égard, les élus ont déjà pu vérifier que nous honorions nos engagements.
Nous soutenons aussi les plus fragiles, grâce à l'augmentation de l'allocation de solidarité aux personnes âgées, qui toucheront 100 euros de plus en 2020 qu'en 2017.
Protestations sur les bancs des groupes LR et GDR.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Protestations sur les bancs du groupe LR.
Quant à l'augmentation de l'allocation adulte handicapé, une personne seule percevra 900 euros en 2019 quand elle n'en touchait que 800 en 2017 : c'est beaucoup plus que si nous avions indexé ces prestations sur l'inflation !
Protestations sur les bancs du groupe LR.
Enfin, lorsque les Français nous ont dit avec insistance, avec fracas qu'ils ne ressentaient pas suffisamment l'effet de ces mesures, nous sommes allés encore plus loin. C'était en décembre 2018.
La prime d'activité a alors été revalorisée. Pour une personne seule au SMIC, cela représente un gain mensuel de 100 euros, cumulé à la hausse légale du SMIC.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Plus de 1,2 million de bénéficiaires supplémentaires touchent cette prime.
Mêmes mouvements.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM. – Protestations sur les bancs du groupe LR.
Les heures supplémentaires et complémentaires ont été défiscalisées et exonérées de cotisations sociales salariales –
Exclamations sur les bancs du groupe LR
Protestations sur les bancs des groupes LR et GDR
à l'exception de la CSG-CRDS, pour les heures supplémentaires et complémentaires. Cela représente 455 euros par an en moyenne pour un salarié qui touche 1 500 euros par mois.
Les protestations se poursuivent sur les bancs du groupe LR.
Monsieur Cazeneuve, un instant, s'il vous plaît.
Pouvons-nous faire à nouveau preuve d'un peu de calme et de respect...
Protestations sur les bancs du groupe LR.
Mes chers collègues, je m'adresse non seulement à vous mais à l'ensemble de l'hémicycle, y compris l'orateur. Pouvons-nous reprendre le débat dans le calme et nous écouter les uns les autres ?
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Voyons, cela ne sert à rien : personne ne s'écoute, personne ne s'entend.
Je vous en prie, monsieur Cazeneuve.
Il ne s'agit pas du tout de provocations, mais de faits, de mesures votées et de chiffres validés.
La prime exceptionnelle versée avant le 31 mars a été exonérée de cotisations sociales, salariales et patronales, ainsi que d'impôt sur le revenu. C'est plus de 1 milliard d'euros de pouvoir d'achat distribué à plus de 2 millions de Français.
Mme Cendra Motin applaudit.
Enfin, la hausse de la CSG a été annulée pour une partie des retraités : 70 % d'entre eux en sont désormais exonérés.
Toutes ces mesures prises pour accroître le pouvoir d'achat des Français ont un sens économique et social, au service d'une nation forte. Et, comme l'ont dit mes collègues, elles portent leurs fruits : selon l'INSEE, le pouvoir d'achat des Français a augmenté de 1,1 % au cours du dernier trimestre 2018 et progressera de 1,8 % en 2019.
Selon l'OFCE, ce sont les classes moyennes qui seront les principales bénéficiaires de notre politique : pour elles, le gain moyen s'élèvera à 440 euros par an.
En outre, nous avons fait tout cela en préservant les comptes publics de la nation. Ce que vous rêviez de faire, nous l'avons fait :
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM. – Exclamations sur les bancs du groupe LR
pour la première fois depuis dix ans, nous avons réussi à baisser les dépenses publiques, les prélèvements obligatoires, le déficit public, et à stabiliser la dette.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Précisons que c'est la première fois depuis vingt ans que la dépense publique baisse en volume.
Mêmes mouvements.
Voilà tout ce que nous avons fait ; bien évidemment, il n'est pas question de nous arrêter là : nous continuerons dans cette direction.
Parlons maintenant de votre proposition de loi, qui nous paraît à la fois injuste, démagogique et irresponsable.
Injuste, tout d'abord, car les mesures qui y sont inscrites, contrairement à ce vous répétez en boucle, ne ciblent pas les classes moyennes : les grands gagnants sont bel et bien les classes et les foyers les plus aisés.
Protestations sur les bancs du groupe LR.
La première tranche concernerait les foyers les plus aisés ? Il faut arrêter de dire n'importe quoi !
Trois exemples, tirés de votre texte. Premièrement, le rétablissement du plafond du quotient familial à son niveau d'avant 2012 ne s'adresse qu'aux 20 % des foyers les plus aisés : on est très loin des classes moyennes !
Approbation sur les bancs du groupe LaREM. – Protestations sur les bancs du groupe LR.
Deuxièmement, la baisse du taux de l'impôt sur le revenu que vous proposez – une diminution de 10 % du barème des deux premières tranches – ne bénéficie pleinement qu'aux foyers dont les revenus dépassent 73 000 euros par an : là aussi, on est très loin des classes moyennes !
Mêmes mouvements.
Enfin, votre proposition d'annuler la hausse de la CSG pour les 30 % des retraités les plus aisés s'adresse, par définition, aux retraités les plus aisés…
Mêmes mouvements.
Finalement, sur les 17 milliards d'euros d'augmentation de la dépense publique prévus dans votre projet, ce sont près de 11 milliards qui concernent exclusivement les foyers français les plus aisés : tout l'inverse de ce que veut faire notre groupe, qui, à l'issue du grand débat, plaide pour poursuivre, voire pour amplifier, la baisse des prélèvements obligatoires pesant sur les classes moyennes.
Votre proposition est non seulement injuste, mais démagogique. Vous proposez ainsi d'indexer sur l'inflation les pensions de retraite, les aides au logement, les allocations familiales... Rappelons en passant qu'en 2012 l'UMP – une famille politique que vous connaissez bien – ne s'était pas gênée pour geler les prestations familiales...
... ni pour désindexer les aides au logement. Est-il acceptable d'adopter des postures différentes selon que l'on est aux responsabilités ou dans le confort de l'opposition ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Indexer toutes les dépenses de l'État sur l'inflation, c'est le meilleur moyen d'aggraver les déficits – vous le savez – , car il y a toujours des investissements et des dépenses supplémentaires qui n'étaient pas prévus ; c'est renoncer à faire des choix, renoncer à être juste – renoncer, en somme, à faire de la politique.
Mêmes mouvements.
Nous assumons la politique qui vise à mettre fin à la tendance générale d'augmentation indifférenciée de l'ensemble des prestations. Nous privilégions les augmentations ciblées sur le soutien à l'activité et sur la protection des plus fragiles.
La réindexation des pensions, par exemple, doit en priorité se concentrer sur les petites pensions.
Je souhaite également revenir un instant sur la situation des retraités en France. Leur revenu moyen est le plus élevé au sein des pays occidentaux : les Français de plus de 65 ans touchent en moyenne 104 % du revenu moyen de l'ensemble de leurs concitoyens. Ils bénéficient aussi du meilleur taux de remplacement du salaire en Europe.
En outre, je vous rappelle que, dans notre système universaliste, ce sont les cotisations des actifs qui financent les retraites, de sorte qu'augmenter celles-ci, c'est faire peser une charge supplémentaire sur les épaules de ceux qui travaillent.
Bien sûr, les retraités ne sont pas des nantis – jamais nous n'avons dit cela. Oui, les retraités ont cotisé toute leur vie et méritent donc de bénéficier de la solidarité nationale. Mais ils ne forment pas une population homogène :...
... on ne peut pas mettre sur le même plan une personne au minimum vieillesse et une autre qui touche une retraite de 5 000 euros !
Il n'est donc pas anormal qu'une partie des retraités les plus aisés contribuent à l'effort de la nation pour aller vers une société plus juste, une société qui assure notamment un financement pérenne des pensions de retraite – les leurs, celles de leurs enfants, celles de leurs petits-enfants.
Injuste, démagogique, votre proposition de loi est également irresponsable. Voyons le coût de vos mesures.
Vous connaissez certainement, mes chers collègues – je vois qu'il y a des jeunes dans la salle – , le livre pour enfants Où est Charlie ? – vous savez, ce jeune homme sympathique qui a disparu.
Sourires.
À la lecture de votre proposition de loi, avec tout le respect que je dois aux Républicains, je me suis dit : « Où est Éric ? »
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM. – Vives protestations sur les bancs du groupe LR.
Où est l'ancien ministre du budget qui déclarait « la maîtrise de la dépense publique est notre priorité absolue » ? Il propose maintenant d'augmenter de 17 milliards d'euros les dépenses publiques !
Protestations sur les bancs du groupe LR.
N'étant plus à une contradiction près, vous allez jusqu'à donner à vos mesures un caractère rétroactif ! Il fallait y penser !
Mêmes mouvements.
Sourires et exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
J'ai l'impression qu'après un long errement ils sont arrivés au pôle Nord : vous savez, ce lieu où l'aiguille de la boussole s'agite sans plus indiquer aucune direction.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Protestations sur les bancs du groupe LR.
Qu'il est étonnant de voir les pères la rigueur d'hier devenir aujourd'hui les pères la dépense !
Protestations sur les bancs du groupe LR.
Du point de vue comptable, la proposition de loi aurait pu être signée par le parti communiste :...
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – M. Mohamed Laqhila applaudit également. – Protestations sur les bancs du groupe LR.
Pour financer vos mesures, vous prétendez vouloir réduire la dépense publique de 20 milliards d'euros. Vous auriez pu déposer une proposition de loi tendant à réduire la dépense publique – on l'attend !
Protestations sur les bancs du groupe LR.
Chers amis, ça va bien se passer...
Mais, dans l'exposé des motifs, nous n'avons pas lu le début du commencement d'une mesure ni d'une proposition en ce sens !
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Protestations sur les bancs du groupe LR.
C'est un peu : « dépensons maintenant ce que nous gagnerons peut-être un jour »,...
Protestations sur les bancs du groupe LR.
... à l'image des quelques pistes d'économies que vous avez présentées lors de l'examen en commission et sur lesquelles je souhaite revenir.
Mêmes mouvements.
Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Renforcer la lutte contre la fraude fiscale ? On ne vous a pas attendus ! Je vous rappelle que nous avons adopté à l'automne dernier un projet de loi entièrement consacré à cet objectif et que votre groupe a voté à une large majorité.
En créant la police fiscale et en levant le verrou de Bercy, nous avons pris le problème de la fraude fiscale à bras-le-corps, et nous continuerons de le faire.
Améliorer l'efficacité du système de santé ? On ne vous a pas attendus ! Regardez les chiffres de l'INSEE du mois de mars, et vous constaterez que le déficit des organismes de sécurité sociale a été divisé par quatre et ramené à 1,2 milliard d'euros. Vous auriez pu voter le projet de loi relatif à l'organisation et à la transformation du système de santé,
« Eh oui ! » sur les bancs du groupe LaREM
qui va permettre aux Français le même accès aux soins, où qu'ils demeurent.
Inciter le retour à l'emploi ? On ne vous a pas attendus ! C'est tout le sens de notre action, car c'est par l'emploi, vous le savez, que nous améliorerons durablement le pouvoir d'achat – cela a été dit par mes collègues. Au-delà des mesures fiscales et incitatives que j'ai énumérées, je vous renvoie également aux projets de loi de Mme Pénicaud, qui portent leurs fruits : le taux d'emploi a atteint son niveau le plus haut depuis 1981, …
… et nous nous félicitons que la moitié des contrats conclus en 2018 soient des CDI.
Vous proposez d'aligner le mode de calcul des pensions de retraite du public sur celui du privé. On ne vous a pas attendus !
Nous allons proposer une réforme dont l'objectif est d'arriver à un système de retraite plus juste…
Exclamations sur les bancs du groupe LR
Vous allez la voter ? C'est une bonne nouvelle !
Dans ce système, 1 euro cotisé donnera les mêmes droits à tous, et les règles seront les mêmes pour tous.
Moderniser la fonction publique ? On ne vous a pas attendus ! Je vous invite à vous pencher sur le projet de loi défendu par Olivier Dussopt.
Vous souhaitez également la mise en place d'une allocation sociale unique.
J'espère que vous serez au rendez-vous quand nous proposerons la création du revenu universel d'activité dans le cadre de la mise en oeuvre du plan de lutte contre la pauvreté.
Enfin, vous proposez de supprimer l'aide médicale d'État pour la réserver aux soins d'urgence. Sur ce point, vous faites preuve, une nouvelle fois, de démagogie. Une telle mesure ne peut aboutir qu'à l'engorgement des urgences et à une augmentation du coût des soins.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Comment comptez-vous financer toutes ces dépenses ? Peut-être des mesures inavouables se cachent-elles derrière votre proposition de loi ? Peut-être allez-vous ressortir le programme du candidat Fillon ?
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Peut-être allez-vous baisser de 15 milliards les dotations aux collectivités ? Peut-être allez-vous augmenter la TVA de deux points ?
Vives exclamations sur les bancs du groupe LR.
Mes chers collègues, parce que nous ne croyons pas aux effets d'annonce, parce que nous nous attelons à remettre la France sur les bons rails, …
Exclamations prolongées sur les bancs du groupe LR
… parce que nous agissons concrètement pour le pouvoir d'achat des Français tout en respectant les grands équilibres, parce que nous continuons à transformer notre pays pour réduire les inégalités, parce que notre politique consiste à soutenir les classes moyennes alors que votre proposition de loi est ciblée sur les plus aisés, parce que de telles mesures doivent être proposées et examinées dans un cadre budgétaire précis, parce que votre proposition de loi s'intègre parfaitement dans le grand débat dont nous connaîtrons les conclusions d'ici à quelques jours, le groupe La République en marche propose son renvoi en commission.
Vifs applaudissements et « Bravo ! » sur les bancs des groupes LaREM et MODEM, dont plusieurs membres se lèvent et continuent à applaudir.
Sur la motion de renvoi en commission, je suis saisie par le groupe Les Républicains d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Monsieur Cazeneuve, vous n'avez pas fait ce que nous rêvions de faire : nous ne rêvions pas de déclencher une révolte sociale en France !
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Or c'est exactement ce que vous avez fait, c'est exactement ce à quoi votre politique a conduit.
Comme toutes les majorités qui se sont succédé dans cet hémicycle – Dieu sait que les majorités changent, vous le verrez – ,
Sourires sur les bancs du groupe LR
vous êtes heureux et fiers de ce que vous avez fait. Heureusement ! Mais une autre question se pose : êtes-vous heureux et fiers de détricoter systématiquement et consciencieusement ce que vous avez fait ?
Au fond, votre sentiment de fierté est indexé sur ce que pense l'opinion publique : lorsque celle-ci pense du mal de vos mesures, vous revenez dessus deux mois après les avoir prises et les avoir défendues pendant longtemps avec une extrême vigueur. C'est ce que vous avez fait en matière d'indexation…
… et de CSG.
Vous nous dites que nous sommes irresponsables. Soit. Mais vous naviguez par petit temps, non pas du point de vue social, certes, mais du point de vue économique : vous bénéficiez d'une croissance que vous n'avez pas créée, qui dure depuis trois ans.
Si la France croît plus rapidement que les autres États de la zone euro en 2019, c'est essentiellement en raison d'une grande faiblesse : elle n'est pas un pays exportateur. Si elle l'était, elle prendrait de plein fouet le ralentissement du commerce mondial. Nos faiblesses peuvent de temps en temps nous servir, mais c'est très ponctuel, ce n'est évidemment jamais durable.
Il est très facile de nous dire que nous sommes irresponsables. Mais est-ce très responsable de baisser la taxe d'habitation de 20 milliards d'euros sur l'ensemble du quinquennat, comme vous indiquez que vous allez le faire, …
… sans jamais préciser comment vous financerez cette baisse ? Le ferez-vous par de la dette ?
« Oui ! » sur les bancs du groupe LR.
Et sans mettre non plus sur la table une proposition de réforme des finances publiques locales ? Il n'y a pas aujourd'hui une seule idée forte à ce sujet ! Est-ce responsable de travailler de la sorte ?
Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
Est-ce responsable, pour un ministre du budget, d'annoncer qu'il va supprimer la redevance audiovisuelle sans jamais en parler avec les groupes de médias, à commencer par France Télévisions, …
… ni indiquer comment on pourra financer l'audiovisuel public ? Est-ce bien responsable de procéder ainsi ?
Est-ce responsable de dépenser 11 milliards d'euros en un claquement de doigts, au mois de décembre, sans savoir comment vous allez financer ces mesures, sinon par de la dette ? Car elles sont financées à 60 % par de la dette !
Au jeu de l'irresponsabilité, je crois, en toute honnêteté, que nous ne sommes pas les gagnants !
C'est bien la conduite peu responsable et peu sérieuse des affaires de la France qui vous a amenés au point où vous êtes arrivés aujourd'hui. Nous verrons ce qui sortira du grand débat, mais je note que, jusqu'à présent, la majorité n'en a rien appris. Elle n'a rien appris en écoutant les Français !
« En effet ! » sur les bancs du groupe LR.
D'ailleurs, vous nous le dites vous-mêmes, puisque vous affirmez que vous allez maintenir votre cap. Je croyais que, si vous écoutiez les Français, c'était peut-être pour modifier un tout petit peu le cap…
Vous ne le faites pas et, visiblement, vous ne le ferez pas.
Je terminerai par le sujet essentiel des retraites. Vous nous dites que nous sommes également irresponsables en la matière. Ce n'est pas du tout le cas ! Pour votre part, vous êtes en train d'en débattre en faisant émerger, depuis quelques jours, deux réformes des retraites.
Il y a d'abord la réforme Delevoye – d'ailleurs, on humilie tous les jours M. Delevoye, profondément, ainsi que les partenaires sociaux.
La réforme consisterait à remplacer les trimestres par des points et à poursuivre les réformes précédentes, qui ont toujours été menées, courageusement, par des élus et des gouvernements de droite. Vous achèveriez, je l'espère, la convergence entre régimes publics et privés – je dis bien « achever », non pas « engager » – et vous régleriez, ici ou là, un certain nombre d'injustices, car il y en a toujours en la matière.
M. Darmanin a déclaré ce matin sur les ondes d'une grande radio que ce serait un système par points, mais que ce ne serait plus un système par répartition.
Il faudra que vous vérifiiez si c'est exactement ce qu'il a voulu dire, car, s'il n'y a plus de système par répartition, ce sera très intéressant…
En tout cas, c'est là une petite réforme des retraites. À côté, il y a une grande réforme, qui porterait sur l'âge de départ à la retraite.
Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
Nous verrons bien ce que vous ferez sur l'âge du départ à la retraite. Une politique responsable consisterait, bien évidemment, à le relever.
Exclamations persistantes sur les bancs du groupe LaREM.
Mes chers collègues, laissez le rapporteur s'exprimer, s'il vous plaît !
Nous proposons beaucoup de mesures d'économie, et ce sont des économies nécessaires.
Quant au nombre de fonctionnaires, …
… vous ne le faites pas baisser, ou alors de façon tout à fait erratique, sans vision globale de la réforme de l'État.
Tous ces éléments sont constitutifs du projet des Républicains, un projet de réduction de la dépense publique et de réforme de notre société. C'est comme cela que nous entendons financer les mesures que nous proposons.
Puisque vous nous appelez à renvoyer le texte en commission, nous reviendrons bien évidemment sur le sujet en commission.
Si jamais vous votez la motion de renvoi, nous pourrons discuter à nouveau des mesures que nous proposons, mais aussi, plus largement, des mesures que vous proposez. En tout cas, je constate que le réservoir d'idées de La République en marche est totalement à sec !
Vifs applaudissements sur les bancs du groupe LR. – Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
Nous en venons aux explications de vote sur la motion de renvoi en commission. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.
« Ah ! » sur les bancs du groupe LaREM
mais, surtout, de sortir des mensonges. Oui, des mensonges !
Depuis le début de la matinée, nous avons entendu M. le ministre et les membres de la majorité, élargie au MODEM, voire à l'UDI, nous dire que, pour la première fois, les impôts des ménages avaient baissé en France.
Or je vais vous donner les chiffres de deux organismes. D'une part, l'INSEE indique que 4,5 milliards d'euros supplémentaires ont été prélevés sur les ménages en 2018. Voilà la réalité !
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Le taux des prélèvements obligatoires, qui sont supportés par l'ensemble des entreprises et des ménages, atteint un niveau record : 45 % du PIB.
D'autre part, l'OFCE – Observatoire français des conjonctures économiques – vient de publier une étude très intéressante, qui montre que les prélèvements obligatoires sur les ménages n'ont jamais atteint le niveau actuel, à savoir plus de 25 % du PIB.
« Eh oui ! » sur les bancs du groupe LR.
Ce sont des faits, des réalités, que vous ne pouvez pas nier et qui contredisent vos effets d'annonce !
Compte tenu de ces chiffres, du contexte et du mouvement que connaît la France, ne nous dites pas que notre proposition de loi est démagogique ! Cela fait désormais deux ans que nous présentons des amendements qui vont dans le même sens.
Nous restons très cohérents.
En tout cas, vous devez comprendre la nécessité et l'urgence de mettre en oeuvre cette proposition de loi, pour améliorer le pouvoir d'achat des Français. Si vous ne le faites pas, si vous n'avez pas le courage d'en débattre, c'est, en réalité, parce que vous refusez le dialogue.
Vous affichez votre volonté de dialogue dans la rue et dans les médias, mais, dans l'hémicycle, vous ne voulez pas débattre.
Qui plus est, le renvoi du texte en commission serait pathétique, car vous allez y vider chaque article de son contenu. C'est un déni du travail parlementaire.
Vous pouvez être fiers ! Vous êtes en train de renier les raisons qui vous ont amenés à siéger à l'Assemblée nationale, dans cet hémicycle. C'est, je le répète, un déni du travail parlementaire !
Vifs applaudissements et « Bravo ! » sur les bancs du groupe LR.
Le groupe du Mouvement démocrate et apparentés considère que cette proposition de loi intervient bien prématurément dans notre débat parlementaire.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Le temps des échanges d'idées est venu. Nous avons eu un débat à ce sujet dans l'hémicycle avant-hier, et toutes les propositions peuvent être mises sur la table. Nous constatons néanmoins que, à la suite de l'intervention du rapporteur et président de la commission des finances, le débat tourne et tourne encore, et que l'on ne parle pas uniquement de la proposition de loi.
Le temps du débat parlementaire est certes venu, mais il faut également prendre en considération la dette, qui dépasse, au moment où je vous parle, les 2 367 milliards d'euros. Ne gageons pas l'avenir de nos enfants !
Monsieur le président de la commission des finances, pour avoir été un ministre du budget très à cheval sur l'orthodoxie budgétaire, vous savez fort bien que l'on n'improvise pas des dépenses de plusieurs milliards lorsqu'on ne dispose pas des recettes pour les financer.
La baisse de 10 % de l'impôt sur le revenu que votre parti propose, l'annulation de l'augmentation de la CSG pour l'ensemble des retraités et la réindexation des pensions de retraite doivent être confrontées au principe du réalisme budgétaire. Pas plus qu'hier, lorsque vous étiez aux affaires, vos préconisations ne sont financées, aussi séduisantes puissent-elles paraître à nos concitoyens.
Or comment les cadeaux fiscaux sont-ils financés ? Précisément par les prélèvements obligatoires, qui portent sur les entreprises ou les particuliers. L'équilibre est difficile à trouver pour améliorer la justice fiscale sans sacrifier les classes moyennes ni les entrepreneurs, que vous prétendez défendre.
Vous conviendrez donc avec nous que les propositions que vous formulez sont suffisamment complexes pour mériter une analyse plus approfondie, que nous pourrons mener ensemble lors de l'examen du projet de loi de finances, sans idéologie mais en nous appuyant sur une étude d'impact qui fait aujourd'hui défaut. Bien évidemment, nous sommes toujours déterminés à soutenir le Gouvernement.
Pour ces raisons, à la fois techniques et de réalisme, nous voterons la motion de rejet préalable.
Applaudissements sur les bancs des groupes MODEM et LaREM.
Je trouve ce débat à certains égards consternant, voire pathétique. Je l'ai rappelé au cours de la discussion générale : en deux ans, votre gouvernement a pris des mesures plus injustes les unes que les autres, qui ont complètement déséquilibré notre système fiscal et notre système social.
En deux ans, vous avez accablé les territoires les plus fragiles – je ne rappellerai pas les mesures que vous avez prises en matière de contrats aidés. En deux ans, vous avez fait passer des gens modestes dans la précarité, et vous ne vous en rendez même pas compte.
Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
J'ai d'ailleurs l'impression que vous n'avez aucune conscience de la situation dans laquelle vous avez mis bon nombre de nos concitoyens dans les territoires.
Honnêtement, je ne sais plus si vous êtes déconnectés ou insensibles. Avez-vous vu ces retraités qui ont du mal à faire le plein de fioul ?
Comment pouvez-vous accepter cela ?
Et quand vous passez à la pompe, ne voyez-vous pas que, parfois, le client précédent ne peut pas dépenser plus de 20 euros, et qu'il met juste le carburant nécessaire pour aller travailler ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Avez-vous conscience que certains Français ont bien du mal à trouver 25 euros pour envoyer leur enfant chez le médecin ?
Je ne nie pas que certaines mesures de la proposition de loi soient difficiles à financer, ce qui, en un sens, n'est pas très sérieux.
Mais au lieu de comprendre qu'il y a une urgence sociale, vous refusez le débat…
… et vous vous montrez, au cours de vos interventions, d'une suffisance consternante. Franchement, vous n'avez rien vu et rien compris de la crise des gilets jaunes.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Vous vous êtes contentés de distribuer quelques miettes pour diviser et de provoquer un grand débat interminable qui débouche sur un vaste point d'interrogation.
Monsieur Bricout, il faut conclure. Revenez à votre explication de vote.
Vous avez l'occasion d'un débat démocratique. Acceptez-le au moins pour réfléchir à quelques mesures d'urgence. Vous en sortirez grandis !
Sans surprise, le groupe UDI, Agir et indépendants restera fidèle à sa doctrine qui consiste à refuser le renvoi en commission des textes examinés dans le cadre d'une niche parlementaire. C'est en effet un des rares moments où les groupes d'opposition peuvent susciter un débat démocratique dans l'hémicycle. Pour ce seul motif, nous ne voterons pas la motion de renvoi.
Applaudissements et « Merci ! » sur les bancs du groupe LR.
Malheureusement, cette motion de renvoi ne nous surprend pas. Chaque fois qu'une proposition de loi est déposée par les oppositions, vous ne la lisez pas et vous déposez sur-le-champ, selon le groupe signataire, une motion de rejet préalable ou de renvoi en commission. C'est votre marque de fabrique : vous refusez le débat démocratique parlementaire.
« Eh oui ! » sur les bancs du groupe LR.
Vous préférez le grand blabla du grand débat, lequel n'est qu'un grand coup de communication.
Si ce sont Les Républicains qui proposent des mesures pour relever le pouvoir d'achat, si ce sont Les Républicains qui proposent la réindexation des pensions de retraite, des allocations familiales et des APL, si ce sont Les Républicains qui veulent revenir sur la hausse de la CSG, et enfin si ce sont Les Républicains, à commencer par M. Woerth, que vous associez à Georges Marchais, c'est que votre politique est vraiment très inquiétante !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.
Son caractère antiredistributif va même à l'encontre du libéralisme économique dont vous vous réclamez. À ce propos, je vous invite à réviser vos fondamentaux. Adam Smith lui-même insiste sur la nécessité d'une redistribution face à la gloutonnerie des intérêts particuliers.
Mais revenons à la motion de renvoi. Ce qui est tragicomique, c'est qu'en refusant de débattre de la proposition de loi, vous refusez de discuter des mesures que vous avez proposées depuis dix-huit mois, mesures qui ont fait descendre certains Français dans la rue et qui sont refusées par 82 % d'entre eux. Nos concitoyens, voyez-vous, ont le sens de la justice. Ils sont moins fanatiques et moins extrêmes que vous s'agissant de la dictature de la finance.
Pour toutes ces raisons, nous refusons qu'on nous interdise de débattre. Le groupe La France insoumise ne votera donc pas la motion.
Laissons Georges Marchais tranquille ! Il aimait le débat, contrairement à d'autres !
Je remercie nos collègues Les Républicains de mettre en avant un problème que le mouvement des gilets jaunes a révélé et que plus personne ne conteste dans notre pays. De trop nombreux Français, même s'ils travaillent, ont du mal à finir le mois. Le pouvoir d'achat est le premier sujet d'actualité.
Comme l'a excellemment rappelé M. Wulfranc, cela pose deux problèmes : celui du montant des salaires et des petites retraites, trop bas pour permettre de vivre dignement ; celui de la répartition des richesses et des corrections que pourrait apporter la fiscalité.
Hélas ! Nous avons une fois encore assisté à un exercice de démagogie. Car ces deux problèmes sont en effet mis sous le tapis par la majorité, largement soutenue par Les Républicains, qui n'ont de cesse de vouloir baisser les dépenses publiques pour diminuer l'impôt des riches. Si nos groupes se rejoignent pour constater la faiblesse du pouvoir d'achat, ils sont diamétralement opposés sur la manière d'y remédier.
Le sujet mérite discussion, mais paradoxalement, au moment où le Président de la République appelle au grand débat, son gouvernement et sa majorité le refusent dans cette enceinte qui a pourtant vocation à l'accueillir.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
C'est, une fois encore, une contradiction, mais vous n'en êtes pas à une près. En tout cas, nous ne serons pas complices de cette mascarade. Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine ne votera pas la motion. Le débat, c'est maintenant !
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Le groupe Libertés et territoires regrette que la majorité ait déposé une motion de renvoi en commission. Une fois n'est pas coutume, il ne s'agit pas d'une motion de rejet, mais le résultat est le même : l'absence de débat dans l'hémicycle.
Pourtant, il faut le remarquer, nos échanges en commission des finances ont été longs et instructifs. Chacun a pu exprimer sa position, demander des éclaircissements, formuler des propositions. Dès lors, serait-il pertinent de renvoyer le texte en commission afin de le réexaminer ? La majorité ne cherche-t-elle pas plutôt à éluder le débat, par crainte de devoir défendre une fois de plus des positions qui ne satisfont pas nos concitoyens ?
Nous l'avons dit : la proposition de loi n'est pas la seule réponse possible à la politique gouvernementale. Elle ne constitue pas la seule alternative à la politique actuelle. Mais il nous semble du moins nécessaire d'en débattre, de tenter de l'améliorer, dans l'intérêt du plus grand nombre, qui doit demeurer notre ligne directrice.
Vous l'aurez compris : les députés du groupe Libertés et territoires sont favorables à la discussion comme à l'expression de la diversité. C'est pourquoi ils ne voteront pas cette motion, dont l'adoption enverrait aux oubliettes une proposition qui a le mérite de pointer les difficultés quotidiennes de nos concitoyens.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
La groupe La République en marche votera la motion de renvoi en commission, non que le pouvoir d'achat ne soit pas au coeur de ses préoccupations…
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Puisque Mme Dalloz a cité les chiffres de l'INSEE, je regrette qu'elle n'ait pas mentionné ceux de 2019, qui attestent, pour l'ensemble des Français, un gain de pouvoir d'achat de près de 2 %, ce qui est inédit, et de plus de 4 % pour les actifs.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Toutefois, ce n'est pas pour cette raison que nous renverrons votre proposition de loi en commission, mais parce que, pour ces questions, il y a un véhicule très pratique : il s'appelle le projet de loi de finances.
Madame Dalloz, je vous mets au défi, puisque vous vous en êtes vantée, de trouver un seul amendement des Républicains déposé dans ce cadre depuis deux ans, qui propose une économie, une baisse de la dépense publique.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
C'est bien simple : il n'y en a pas ! Dès lors, la proposition de loi relève de la pure démagogie.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Chers collègues, je vous appelle à un peu plus de respect les uns envers les autres. Nous écoutons la dernière explication de vote.
Exclamations persistantes sur les bancs du groupe LR.
Monsieur Di Filippo, au lieu de m'insulter, trouvez-moi un seul amendement déposé par Les Républicains sur le projet de loi de finances et tendant à faire baisser la dépense publique !
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM. – Vives exclamations sur les bancs du groupe LR.
Le texte en discussion tend à supprimer l'aide médicale d'État. Outre son caractère abject sur le plan éthique, la mesure ne rapporterait que 800 millions d'euros sur un total de 17 milliards. Le compte n'y est donc pas !
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.
Par ailleurs, quand vous recourez à la vieille technique du gage sur le tabac, de qui vous moquez-vous ? Envisagez-vous sérieusement de compenser par ce procédé une hausse des dépenses de 17 milliards ?
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.
C'est pourquoi nous vous proposons une solution très simple : revoyez votre copie, proposez-nous une baisse réelle de la dépense publique. À ce moment-là, nous pourrons débattre.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 145
Nombre de suffrages exprimés 144
Majorité absolue 73
Pour l'adoption 90
Contre 54
La motion de renvoi en commission est adoptée.
S'agissant d'un texte inscrit à l'ordre du jour fixé par l'Assemblée, il appartiendra à la conférence des présidents de proposer les conditions de la suite de la discussion.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à douze heures dix, est reprise à douze heures quinze.
La discussion générale étant close, j'appelle les articles de la proposition de loi, dans le texte dont l'Assemblée a été saisie initialement, puisque la commission n'a pas adopté de texte.
Je suis saisie de deux amendements, nos 7 et 6 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Sur l'amendement no 7 , je suis par le groupe Les Républicains d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Pierre Vatin, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour soutenir cet amendement.
La séance, suspendue quelques instants, est immédiatement reprise.
Il s'agit, par cet amendement, d'aller au-delà de la réécriture de l'article 1er proposée par l'amendement no 6 , qui va être présenté par le Gouvernement. La situation sociale des victimes de maladies rares et orphelines ne serait malheureusement pas modifiée par l'adoption de l'amendement du Gouvernement. Une définition plus précise des maladies rares et orphelines restreindrait le champ d'application de la mesure proposée au regard des évolutions scientifiques et ôterait sa souplesse à cette définition. Je forme le voeu que vous repreniez la proposition d'expérimentation détaillée contenue dans mon amendement. L'expérimentation quinquennale permettrait d'évaluer le soulagement apporté à la vie quotidienne de nombreux malades, en son volet social et non, bien entendu, médical.
En effet, je préconise qu'une commission nationale d'adaptation étudie la demande d'une personne handicapée ou atteinte d'une maladie rare ou orpheline, au cas où l'application d'une norme nationale ou d'une formalité administrative aboutirait pour elle à des conséquences disproportionnées. Ainsi, la commission saisie étudierait la possibilité d'une dérogation à ladite réglementation, en tenant compte des conséquences fonctionnelles du handicap ou de la pathologie.
En reprenant à votre compte ma proposition d'expérimentation, vous concilieriez mon idée première, consistant à venir en aide, dans leur vie quotidienne, aux victimes d'un handicap ou d'une maladie rare ou orpheline, et votre volonté de définir les maladies rares ou orphelines sans risque de restrictions scientifiques. Les malades ne pourraient qu'apprécier votre geste, et l'État ne pourrait que constater, au terme de l'expérimentation, que le soulagement apporté à des personnes se trouvant dans des cas très particuliers aura servi l'ensemble des personnes handicapées ou victimes des maladies rares ou orphelines.
J'ajoute que cette expérimentation démontrerait également que le travail de la commission complète l'action des maisons départementales des personnes handicapées – MDPH – , qui statuent, elles, à dates fixes, sur la situation de chaque personne, mais qui ne sont pas en mesure d'octroyer des dérogations aux normes d'application générale. Les cas visés sont peut-être exceptionnels, mais les victimes de ces maladies subissent des difficultés très douloureuses dans leur vie quotidienne.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, pour soutenir l'amendement no 6 .
Je suis ravi de vous retrouver pour la poursuite de l'examen de cette proposition de loi, que nous avions entamé en octobre dernier – je siégeais alors sur les bancs de cette assemblée, à vos côtés. Je voudrais rappeler que le Gouvernement accorde une importance toute particulière à la prise en charge des maladies rares et à l'amélioration des modalités d'accompagnement des personnes qui en sont atteintes. La ministre des solidarités et de la santé a lancé le troisième plan national des maladies rares, le 4 juillet 2018, conjointement avec la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation. Ce plan porte de grandes ambitions, notamment en matière d'inclusion, et répond à cinq enjeux contemporains concernant les maladies rares : permettre un diagnostic rapide de chacun, afin de réduire l'errance et l'impasse en matière de diagnostic ; innover pour traiter, afin que la recherche permette d'élargir les moyens thérapeutiques ; améliorer la qualité de vie et l'autonomie des personnes malades ; communiquer et former, en favorisant le partage de la connaissance et des savoir-faire concernant les maladies rares ; enfin, moderniser les organisations, tout en optimisant les financements nationaux.
Dans ce contexte, l'amendement que je vous soumets vise à donner une définition de la notion de « maladie rare », en retenant le critère de la prévalence au sein de la population générale. En cela, il reprend la définition prévue dans plusieurs textes européens, à commencer par le règlement pour les médicaments orphelins de 1999. Plus récemment, la directive relative aux soins de santé transfrontaliers précise que les maladies rares sont « celles dont le seuil de prévalence ne dépasse pas 5 personnes affectées sur 10 000 », soit moins de 1 personne sur 2 000 en population générale. Cet amendement reprend ce critère ainsi que la définition établie pour la création de la base Orphanet sur les maladies rares, en 1997, qui est essentielle à l'amélioration de la visibilité de ces maladies dans les systèmes d'information de santé et de recherche. Un grand nombre de personnes atteintes de maladies rares sont en situation de handicap. C'est pourquoi le troisième plan national sur les maladies rares a prévu, dans son axe no 8, d'améliorer l'inclusion et de faciliter l'accès aux dispositifs de compensation du handicap. Il s'agit notamment de renforcer la coordination avec la MDPH, comme vous l'indiquiez précédemment, monsieur le rapporteur. Cependant, certaines personnes atteintes de maladies rares peuvent n'avoir que peu ou pas de difficultés fonctionnelles et donc de handicaps associés. Ainsi, nous souhaitons donner une assise juridique à la définition des maladies rares, sans toutefois la restreindre aux possibles conséquences fonctionnelles de ces maladies.
La commission n'a pas examiné l'amendement du Gouvernement mais j'émets un avis favorable, en ce qu'il reprend une partie du texte de mon amendement.
J'émettrai un avis défavorable. En effet, le dispositif que vous nous proposez, monsieur le rapporteur, ne nous paraît pas efficient.
Le fait qu'il s'agisse d'une expérimentation, selon nous, ne change pas cet état de fait.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Il est en effet préférable d'envisager les exclusions éventuelles de la norme…
Mêmes mouvements.
Je ne suis pas perturbé, mais les gens qui assistent au débat ont peut-être envie d'entendre les arguments des différentes parties en présence.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Il en faut un peu plus pour me perturber. Toutefois, si le débat précédent a, semble-t-il, échauffé quelques esprits, je pense que, sur ces matières, nous pourrions avoir des échanges un peu plus apaisés.
Monsieur le rapporteur, il nous paraît en effet préférable d'envisager les exclusions éventuelles de la norme en même temps que l'on prépare cette dernière, plutôt que de les corriger a posteriori, comme l'implique votre amendement. Cela pourrait donner aux personnes en situation de handicap, à celles atteintes de maladies rares – et à celles se trouvant dans l'un et l'autre cas – le sentiment qu'elles ont été oubliées lors de l'élaboration de la législation.
Au demeurant, le mécanisme envisagé est relativement lourd, et la création et le bon fonctionnement d'une telle commission nationale d'adaptation requerrait des moyens importants, sur lesquels l'amendement n'apporte aucune précision. La création d'une commission de plus, alors que l'on vise un objectif de simplification des démarches, ne nous semble pas souhaitable.
De plus, le champ d'application de la dérogation en place ou à venir serait limité par le fait qu'elle doit être compatible, aux termes de votre amendement, « avec les engagements européens et internationaux de la France ». Pour reprendre votre exemple, monsieur Vatin, concernant la dérogation existante à la réglementation interdisant les vitrages surteintés pour les personnes souffrant – permettez-moi de lire…
… souffrant, disais-je, de protoporphyrie érythropoïétique, il est à noter que la réglementation objet de la dérogation est issue d'une directive communautaire concernant les vitrages de sécurité pour les véhicules à moteur. Ainsi, ajouter à la proposition de loi une obligation de compatibilité aux engagements communautaires, alors même que certains textes européens nécessitent une transposition et une interprétation, restreindrait considérablement le champ d'application de telles dérogations. Celles-ci sont pourtant nécessaires pour améliorer les conditions de vie des personnes.
Enfin, la mise en place d'une telle commission serait certainement redondante avec les dispositifs mis en oeuvre par le Gouvernement, tels que, notamment, « Une réponse accompagnée pour tous », les « Territoires 100 % inclusifs », ou encore la nomination de hauts fonctionnaires chargés du handicap et de l'inclusion, que nous avons nommés dans chacun des ministères pour animer cette politique. Nous demandons à ces différents acteurs de signaler les situations législatives et réglementaires qui feraient obstacle à l'accès au droit et au parcours de personnes en situation de handicap.
Cela nous semble suffisant, ce qui justifie un avis défavorable.
Monsieur le rapporteur, vous proposez de définir des pathologies, qui pourraient ouvrir droit à une dérogation spécifique. Or, ce n'est pas du tout l'esprit de la loi de 2005, qui vise à traiter les conséquences du handicap, et non à définir des pathologies. Il faut examiner ce type de situations en fonction des cas particuliers et non d'un point de vue général. Il faut veiller à ne pas créer d'usine à gaz. Nous partageons tous l'objectif de la simplification et de l'accès au droit – je rappelle que M. le secrétaire d'État, alors député, a élaboré un rapport, en mai 2018, sur la simplification du parcours administratif des personnes en situation de handicap. Si l'on adoptait votre amendement, on créerait encore des dérogations fondées sur des pathologies, et non sur la personne et le handicap. Nous devons voter l'amendement du Gouvernement…
… parce qu'il permet de combler un vide juridique : la maladie rare n'était en effet pas définie par le code de la santé publique. En revanche, il me semblerait contraire à la loi de 2005 « pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées », de conduire l'expérimentation que vous voulez mettre en place, monsieur le rapporteur.
J'ai un problème sémantique avec M. le rapporteur, puisqu'il emploie, à propos des maladies dont nous parlons, deux adjectifs – j'aimerais qu'il m'écoute, parce que c'est important. Monsieur le rapporteur, s'il vous plaît !
Vives exclamations sur les bancs du groupe LR.
Monsieur le rapporteur, vous avez ajouté deux adjectifs pour qualifier les pathologies dont nous parlons ce matin. Vous avez utilisé les termes de « maladies rares ». Nous parlons bien des quelque 8 000 pathologies existantes, sachant qu'on en découvre une vingtaine chaque année, qui touchent, dans les conditions qu'a rappelées M. le secrétaire d'État, une faible proportion de la population mais qui, globalement, représente plus de 3 millions de patients. Vous avez également ajouté le qualificatif « et orphelines », ce qui désigne les pathologies orphelines de traitement.
Ce qualificatif me pose problème, car il ferait de la maladie d'Alzheimer une maladie orpheline ; dans ce cas, on ne parle plus des 80 % de maladies génétiques, mais d'une pathologie qui risque de toucher le plus grand nombre d'entre nous.
Le groupe de travail sur les maladies rares que nous avons installé s'appelait au départ « groupe de travail sur les maladies orphelines », mais ce qualificatif ne convient pas aux maladies rares. D'ailleurs, fort heureusement, des thérapeutiques ont été récemment trouvées pour certaines d'entre elles.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 64
Nombre de suffrages exprimés 64
Majorité absolue 33
Pour l'adoption 30
Contre 34
L'amendement no 7 n'est pas adopté.
Sur l'ensemble de la proposition de loi, je suis saisie par le groupe Les Républicains d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no 5 qui tend à supprimer l'article.
Le dispositif de la présente proposition de loi n'ayant pas vocation à entraîner de pertes de recettes pour l'État, le gage prévu par l'article 2 est inutile.
L'amendement no 5 , accepté par le Gouvernement, est adopté et l'article 2 est supprimé.
J'ai entendu les objections formulées par M. Berta au mois d'octobre et je propose de rédiger ainsi le titre de mon texte : « Proposition de loi visant à la création d'un répertoire des dérogations et adaptations normatives applicables aux personnes handicapées ou atteintes de maladies rares ». Ce nouveau titre fait disparaître le mot « orphelines ».
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR. – M. Philippe Berta applaudit.
Avis de sagesse. Au regard de l'article que nous venons d'adopter, le titre initial de la proposition de loi ne convient plus, mais nous ne sommes pas totalement convaincus par la proposition du rapporteur. Nous comptons sur la navette parlementaire pour renforcer la cohérence entre le titre du texte et son contenu. Nous nous en remettons, à ce stade, à la sagesse de l'Assemblée nationale.
L'amendement no 1 est adopté et le titre est ainsi rédigé.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Nous avons achevé l'examen des articles de la proposition de loi.
La parole est à M. le rapporteur.
Je suis partagé : je remercie le Gouvernement de son attitude un peu plus bienveillante qu'au mois d'octobre, mais mon importante expérience de terrain, même si je ne suis ni médecin ni professionnel de la santé, m'a montré les lacunes sociales du dispositif Orphanet. Rien ne justifiait la motion de rejet préalable si le fond du texte n'était pas conservé. J'espère que la discussion au Sénat enrichira cette proposition de loi.
Vous m'avez proposé de reprendre à votre compte un amendement complémentaire et secondaire, que j'avais déposé pour améliorer le texte. Malheureusement, l'adoption de ce seul amendement n'a aucune portée effective pour ceux dont je défends les intérêts ici.
Se pose alors la question : pourquoi ce revirement ? Le contexte dans lequel se trouve aujourd'hui votre majorité est difficile. Votre entêtement à refuser de nombreuses initiatives, fussent-elles logiques, rationnelles et nécessaires, reflète votre incapacité à fédérer, y compris sur des sujets qui, comme celui-ci, ne clivent pas. Cette attitude vous vaut des critiques et vous incite à adopter une posture de communicant sans rien changer au fond : vous voulez montrer votre ouverture au dialogue en faisant semblant d'accepter un élément sorti de son contexte, pour pouvoir dire ensuite que la main tendue n'a pas été saisie. Ces trompe-l'oeil vous permettent de vous dédouaner de la responsabilité du rejet du texte, mais les administrés n'ont pas forcément la même vision des choses.
Je suis très étonné du rejet partiel de ma proposition de loi, alors qu'à la question au Gouvernement de notre collègue Berta sur l'autisme, posée mardi dernier, la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées a répondu par la nécessité de renforcer le caractère social et inclusif de l'Union européenne, démarche qui me semble comparable à celle de ce texte. En effet, je n'ai cessé de répéter que ma proposition possédait un caractère social : elle est débattue en votre présence, monsieur le secrétaire d'État, mais non en celle de Mme la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées, montrant un hiatus dans l'appréciation du texte.
Le handicap n'est pas qu'une maladie : il provoque aussi une chute sociale et un isolement lorsqu'il survient. Tôt ou tard, la majorité reprendra ma proposition, car elle comble d'importantes lacunes du dispositif d'accompagnement des personnes en situation de handicap.
Au mois d'octobre, on me parlait, en commission et en séance publique, de nouveau monde, que j'entendais comme une ouverture sur le monde et une culture de dialogue sans complexe. On me parlait de stigmatisation, mais vous vous cachez derrière cette notion, qui est en décalage avec la réalité. De nombreuses familles comptant des personnes atteintes d'une maladie rare et orpheline attendent impatiemment des solutions améliorant leur qualité de vie et facilitant leurs démarches administratives.
Un constat s'impose : ces personnes sont dans le besoin. J'ai lu attentivement votre projet de loi relatif à l'organisation et à la transformation du système de santé, dans lequel je n'ai trouvé aucune disposition allant dans le sens de la présente proposition de loi. Parfois, l'habit fait le moine, et il n'est pas nécessaire de fouiller profondément pour comprendre les causes qui vous poussent à rejeter sans motivation nos textes. C'est que vous ne semblez pas toujours vous préoccuper du quotidien des Français, qui ont besoin d'aide et de soutien. Vous avez revalorisé l'allocation aux adultes handicapés, mais cela ne suffit pas. Vous dites qu'il n'y a pas de citoyens de seconde zone, mais vos actes contredisent parfois vos propos. Craignez-vous une sur-réglementation, comme vous l'avez affirmé tout à l'heure, alors que votre programme de renaissance européenne est une usine à gaz ? Dès lors, je ne peux que vivement vous inviter à adopter la proposition de loi de notre collègue Pierre Cordier visant à lutter contre la sur-réglementation, dont nous débattrons cet après-midi.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Nous sommes réunis pour examiner la proposition de loi de notre collègue Pierre Vatin, et c'est heureux. C'est heureux, car, sur tous les bancs de cette assemblée, nous partageons l'idée selon laquelle il ne faut pas laisser près de 3 millions de nos concitoyens sur le bord du chemin, au prétexte que le taux de personnes affectées par une maladie rare peut paraître faible.
C'est heureux aussi, car nous partageons tous la volonté d'aider les malades et leurs familles. Si le Gouvernement nous avait apporté des éléments de réponse il y a six mois, en nous présentant notamment le dispositif Orphanet ou les mesures prises par le ministère des solidarités et de la santé, force est de constater que le terrain les juge encourageants, mais insatisfaisants.
C'est heureux enfin, car ce texte propose des solutions opérationnelles et concrètes, susceptibles de donner des résultats rapides. Il envoie surtout un signal fort et encourageant aux malades et à leurs familles.
Monsieur le secrétaire d'État, chers collègues de la majorité, ce texte représente une pierre, parmi tant d'autres, à l'édifice, qui ne vous coûte rien politiquement. Cette proposition de loi doit faire consensus, au-delà des considérations technocratiques ou des accusations de légèreté, infondées et insultantes. Ne cherchez pas de prétexte pour ne pas voter ce texte, il n'y en a aucun. Vous comprendrez que le groupe Les Républicains soutiendra cette proposition de loi.
En guise de conclusion, permettez-moi de saluer l'initiative et le travail de notre collègue, qui, quelle que soit l'issue du vote, marquent la volonté de notre groupe Les Républicains de porter la voix de nos compatriotes.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Initialement, monsieur le rapporteur, vous nous aviez invités à travailler sur la création d'un répertoire des maladies rares et orphelines, dont l'objet était de recenser celles qui permettraient de déroger aux règles communes. Le travail mené en commission nous a conduits à repousser la proposition de loi, car elle nous apparaissait en contradiction avec la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. En effet, les pathologies, et les handicaps éventuels en résultant, peuvent varier fortement selon les patients, que ce soit pour l'accès à l'école, à la vie professionnelle, au logement, à la mobilité, que l'on vive en ville ou à la campagne, que l'on soit aidé ou non dans sa vie quotidienne, ou selon son âge et son milieu. Les conséquences d'un handicap sont très diverses.
Depuis treize ans, le législateur et les exécutifs se battent pour ouvrir la société au handicap, afin que la loi, par nature impersonnelle, soit la garante d'une société inclusive, dans laquelle les personnes en situation de handicap ne pâtiraient pas d'une rupture d'égalité. La proposition de loi initiale entrait en contradiction avec ce principe, car elle confondait pathologie et handicap, cas particulier et général.
Nous sommes cependant d'accord sur la nécessité de simplifier les démarches administratives et l'accès au droit des personnes qui, atteintes de maladies rares ou porteuses d'un handicap, se sentent souvent démunies.
Dans nos discussions, il est apparu que notre législation ne disposait pas d'une définition de la maladie rare, d'où l'adoption de l'amendement no 6 du Gouvernement. Le groupe La République en marche votera cette proposition de loi ainsi amendée, à laquelle il faudra trouver un autre titre.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
La proposition de loi est certes pavée de très bonnes intentions, mais la France est exemplaire, ce qui n'est pas toujours le cas, dans la gestion des maladies rares ; nos collègues étrangers me le rappellent presque chaque semaine et n'ont d'autre but que de copier le modèle que nous avons mis en place, notamment Orphanet et d'autres répertoires.
J'ai la chance de suivre le déploiement pas à pas du troisième plan national sur les maladies rares, lancé en juillet dernier, qui me fait dire que nous allons conserver notre avance, car les choses se présentent plutôt bien.
Les maladies rares, dont la liste n'est sûrement pas définitive, présentent une difficulté liée à leur origine génétique. Pour une pathologie établie et diagnostiquée – même si le problème de l'errance diagnostique reste aigu – , les patients ne présenteront pas le même résultat phénotypique, c'est-à-dire qu'ils n'auront pas les mêmes traits, la même pénétrance, pour reprendre le terme employé en génétique. Établir une carte générale pour une maladie rare est donc très difficile ; or l'élaborer pour chaque individu est impossible.
Votre idée de départ est bonne, mais sa faisabilité me semble poser problème. Son application mettrait les acteurs de terrain en grande difficulté ; elle ne correspond d'ailleurs à aucune demande des professionnels ni des 220 associations dont l'objet est les maladies rares, qui n'attendent pas du tout cette carte pour leurs patients.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Sur le fond, le dispositif initial de la présente proposition de loi visait à recenser les dérogations administratives bénéficiant aux personnes atteintes de maladies rares ou orphelines dans un fichier destiné aux administrations publiques.
Nous étions plutôt bienveillants, s'agissant de cette mesure de simplification rappelant qu'il importe que la puissance publique reconnaisse mieux les difficultés rencontrées par ces personnes, lesquelles sont déjà très éprouvées par des situations d'errance diagnostique ou de fort isolement.
Nous étions favorables à la mise en place d'une expérimentation, qui aurait permis d'évaluer en temps réel sa pertinence ainsi que son efficacité, et de faire évoluer la réglementation si nécessaire. Le groupe UDI, Agir et indépendants votera le texte, même si nous regrettons qu'il ait été vidé en partie de sa substance et que sa portée s'en trouve réduite.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.
La présente proposition de loi, dont nous achevons enfin l'examen, a le mérite de faire ressurgir dans le débat les problèmes – auxquels nous ne pouvons rester sourds – rencontrés par de nombreux Français souffrant de maladies rares ou orphelines.
J'ai pris note des arguments avancés par Mme la ministre des solidarités et de la santé au mois d'octobre dernier et de ceux avancés tout à l'heure par M. le secrétaire d'État Adrien Taquet.
En dépit du lancement du plan national sur les maladies rares 2018-2022, et même si le répertoire Orphanet est déjà performant, il demeure complexe, pour les malades et leurs familles, d'accomplir certains actes administratifs pour leur vie quotidienne.
Il ne s'agit pas de discriminer – positivement ou non – mais bien de rendre ces cheminements administratifs moins complexes, et de soulager les familles des difficultés administratives qui s'ajoutent aux difficultés causées par la maladie.
La création d'un répertoire des maladies rares ou orphelines, tel qu'il est prévu par la proposition de loi, favorise une meilleure connaissance de ces maladies, une plus large diffusion des savoirs et une reconnaissance accrue des difficultés quotidiennes qui en découlent.
Le Gouvernement, soutenu par le groupe La République en marche, ne cesse d'appeler à davantage de simplification, affichant une volonté d'aller plus vite et plus loin. Ce texte, me semble-t-il, offre l'occasion de le faire.
Pour notre part, nous sommes très favorables à l'existence d'un tel répertoire. Vous l'aurez donc compris, chers collègues, le groupe Libertés et territoires votera la proposition de loi.
Applaudissements sur les bancs du groupe LT.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 67
Nombre de suffrages exprimés 67
Majorité absolue 34
Pour l'adoption 64
Contre 3
La proposition de loi est adoptée.
Applaudissements.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Discussion de la proposition de loi visant à soutenir le fonctionnement des services départementaux d'incendie et de secours et à valoriser la profession de sapeur-pompier professionnel et volontaire ;
Discussion de la proposition de loi constitutionnelle visant à lutter contre la sur-réglementation.
La séance est levée.
La séance est levée à douze heures cinquante.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Serge Ezdra