La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures.
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification (nos 3470, 3598 rectifié).
Cet après-midi, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles de la proposition de loi, s'arrêtant à l'amendement no 1 à l'article 7.
Sur les amendements no 1 et identiques, je suis saisie par les groupes Les Républicains, Agir ensemble, UDI et indépendants, et Gauche démocrate et républicaine d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Nous en venons donc aux amendements identiques, nos 1 , 45 , 71 , 86 , 91 , 98 , 121 , 130 , 162 , 241 , 246 , 319 , 343 , 376 , 444 et 498 , tendant à supprimer l'article 7.
La parole est à M. Sébastien Jumel, pour soutenir l'amendement no 1 .
Le débat fort intéressant que nous avons eu en fin d'après-midi a démontré la quasi unanimité des groupes de l'opposition et d'une partie de la majorité – le ministre a même exprimé un avis de sagesse – sur l'article 7 : il constitue une ligne rouge à ne pas franchir.
Je veux prendre l'exemple de mon beau département de la Seine-Maritime.
Souvenez-vous que lors de la création des groupements hospitaliers de territoire – les GHT qui, à mon sens, n'étaient pas une bonne idée car ils ont servi à rationaliser, voire à rationner la dépense sanitaire – , le débat a d'abord porté sur le dimensionnement des territoires de santé puisque chaque GHT, comme vous le savez, est adossé à un territoire de santé.
Heureusement, le maire du Havre, avant d'embrasser un destin national, a plaidé pour que le territoire havrais ait un GHT à dimension humaine, ce qui a permis au maire de Dieppe que j'étais de plaider à son tour pour un GHT à dimension humaine dans le nord du département. Même si nous étions contre les GHT, nous avons ainsi fait en sorte qu'ils soient des outils susceptibles d'apporter une réponse sanitaire équilibrée à l'échelle des territoires.
Mon groupement se compose de trois hôpitaux : l'hôpital pivot de Dieppe et les hôpitaux de proximité de Saint-Valéry-en-Caux et d'Eu. Le risque était grand que ces deux derniers se trouvent dévitalisés, par exemple par la suppression des urgences et des consultations avancées à Eu, ou par la perte d'autres services à Saint-Valéry ; les EHPAD – établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes – du département risquaient eux aussi d'être vidés de leur substance.
Qu'est-ce qui a permis de les préserver ? C'est d'abord l'existence de conseils de surveillance ou de conseils d'administration dans l'ensemble de ces établissements – hôpitaux ou EHPAD de proximité – , et ensuite le fait que s'y trouvaient des directeurs de plein exercice. Si on laisse l'établissement pivot se substituer aux directeurs des établissements de proximité, on permet l'Anschluss. Nous avions pourtant patiemment fait en sorte, de manière équilibrée et transpartisane, que l'outil du GHT puisse répondre aux besoins de proximité à l'échelle des territoires – ce qui ne nous empêchait pas de le critiquer par ailleurs.
Je termine ma phrase : l'avis de sagesse du Gouvernement, ainsi que l'opposition d'une partie de la majorité et de la totalité de l'opposition, doivent conduire au retrait de l'article 7.
Sur le terrain, nous avons entendu – et continuerons peut-être d'entendre demain si la représentation nationale adopte l'article – dire que si nous n'avions rien fait, cela aurait été mieux.
Cet article 7 n'a fait l'objet d'aucune concertation. En commission, madame la rapporteure, vous avez avoué vouloir « brusquer les élus » en automatisant les directions communes.
Pourtant, le choix de centraliser la direction de tous les établissements d'un GHT ne doit pas relever du seul directeur de l'établissement support.
Monsieur le secrétaire d'État, tout le monde se plaint de la vision centripète des GHT à direction unique mais personne ne fait rien. Mieux vaudrait muscler le rôle du comité stratégique des élus du GHT et y associer les parlementaires et les représentants intercommunaux concernés ; la décentralisation serait ainsi mieux respectée. Parce qu'elle force les coopérations, l'automatisation de la direction commune prévue à l'article 7 est absolument inacceptable.
Au reste, les GHT ne produisent pas que des effets positifs. Prenons un exemple concret : le groupement qui se trouve sur mon territoire a mis en commun la stérilisation et la blanchisserie. Résultat : ces deux activités sont finalement plus chères et plus longues pour les établissements parties. La mise en commun n'est souhaitable que si elle est pertinente. Si les établissements de ce GHT avaient été placés sous une direction commune au printemps dernier, la maternité locale aurait été fermée au prétexte de la crise sanitaire, selon le souhait du directeur général de la maternité régionale. Heureusement, nous avons résisté !
Mes chers collègues, laissez une liberté de forme et de fond aux acteurs locaux. Laissez-les décider si une direction commune est un atout pour leur territoire.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.
Dans sa version initiale, l'article 7 prévoyait de confier systématiquement à l'établissement support du GHT la direction commune de tout établissement partie dont le poste de direction était vacant. La commission a modifié l'article en remplaçant cette direction commune systématique par un intérim confié au directeur de l'établissement support.
Cette disposition est inacceptable. Nous sommes nombreux ici – le ministre Olivier Véran l'a lui-même évoqué tout à l'heure – à connaître un établissement associé ou « partie », selon le terme employé dans le texte, dont le directeur, une fois parti, n'est remplacé que par un directeur adjoint voire un attaché d'administration hospitalière, au nom de la direction commune. Or il arrive que la situation s'éternise et que l'établissement en question finisse par ne plus avoir de direction.
Le personnel a besoin que la personne chargée de la direction soit présente tous les jours, et pas seulement à temps partiel. Les établissements associés ont leur propre conseil de surveillance et leur CME – commission médicale d'établissement. Ils doivent disposer d'un directeur à part entière. C'est pourquoi nous demandons la suppression de l'article 7.
Tout à l'heure, le ministre Olivier Véran nous a fait part d'une expérience personnelle dans sa circonscription et a rappelé la nécessité de maintenir une santé de proximité. J'ai pour ma part été membre du conseil de surveillance d'une maison de retraite pendant une quinzaine d'années et président de celui d'un hôpital psychiatrique de 800 salariés durant trois ans.
Il est un mot à la mode qui s'emploie ici depuis plusieurs années, quelle que soit la majorité : « mutualiser ». La mutualisation, croit-on, générerait nécessairement des économies et permettrait, dans chaque territoire, de faire mieux avec beaucoup moins de dépense publique ; je reste relativement dubitatif.
Dans le domaine si particulier qu'est celui de la santé de nos compatriotes, nous devons être très prudents. Je souscris aux propos des précédents intervenants et à l'avis de sagesse, en quelque sorte, que le ministre a exprimé tout à l'heure sur la question. J'insiste à mon tour pour que soit supprimé l'article 7, afin que nos territoires disposent d'un « maillage de santé » à la hauteur des attentes de nos compatriotes.
La parole est à Mme Agnès Firmin Le Bodo, pour soutenir l'amendement no 91 .
Quand des amendements de suppression sont déposés par un si grand nombre de députés appartenant à tant de groupes différents, c'est sans doute qu'il y a un problème. Et en effet, problème il y a.
Le ministre Olivier Véran explique que dans l'esprit du Ségur, « on ne force personne ». En déposant cet amendement de suppression, nous disons ceci : dans l'esprit des GHT, laissez les territoires agir.
Applaudissements sur les bancs des groupes Agir ens et UDI-I. – M. Sébastien Jumel applaudit également.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 98 .
Je serai brève car l'essentiel a été dit. M. le ministre Véran expliquait tout à l'heure qu'il existe des situations dans lesquelles l'intérim confié au directeur de l'établissement support se déroule très bien ; cela peut en effet arriver et nous ne le nions pas, mais nous demandons simplement que la décision soit laissée au plus près du terrain.
Je rappelais lors de la discussion sur l'article que les ARS – agences régionales de santé – étaient censées permettre une organisation territoriale efficace, cohérente et rationnelle. En éloignant la prise de décision du pouvoir local, on fait exactement le contraire et on se retrouve aux antipodes de l'objectif souhaité d'efficacité et de rationalité. Il est essentiel de laisser la décision au plus près du terrain, et non de la confier au directeur de l'établissement support ; cette demande émane de l'ensemble des établissements dans les territoires.
Nous martèlerons les arguments qui viennent d'être développés aussi longtemps qu'il le faudra pour vous faire comprendre qu'il n'est pas du tout envisageable de regrouper ainsi les directions d'établissement à la faveur d'une vacance de poste. En outre, dans le contexte de la crise que nous continuons de traverser, cette orientation me semble plus que malvenue.
Il suffit d'avoir vécu la première vague du covid-19 dans les territoires pour constater la bonne volonté dont ont fait preuve les hôpitaux territoriaux – je ne parle même pas des hôpitaux de proximité – en déployant les services qu'ils pouvaient apporter à l'équilibre général du système de santé…
Oui, pour sauver des vies. Si ces avions-là avaient volé sans pilotes capables de présenter en temps réel l'état des capacités et des disponibilités des établissements, et le volume de travail que les soignants étaient en mesure d'absorber, comment aurait-on pu répartir la charge ?
Alors que ces hôpitaux affrontent la deuxième vague, forts des ajustements et corrections qu'ils ont su apporter depuis la première, je ne crois pas opportun de leur envoyer le signal de leur déclassement – car c'est bien de cela qu'il s'agit ! En retirant sa direction à un établissement au profit de l'échelon supérieur, fût-ce pour une période temporaire – qui finit souvent par être définitive – , on le déclasse et, in fine, on le prive non seulement de son mode ordinaire d'organisation mais aussi de l'autonomie qu'il est en droit de réclamer.
En clair, l'article 7 est une erreur et nous vous demandons de le retirer pour éviter qu'une profonde amertume ne s'ajoute parmi les soignants à tous les problèmes que rencontrent la France et son système de santé.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.
La parole est à Mme Gisèle Biémouret, pour soutenir l'amendement no 130 .
Permettez-moi d'ajouter plusieurs arguments. Tout d'abord, la centralisation du pouvoir aux mains de l'établissement support ne correspond pas du tout à l'esprit qui a présidé à la création des GHT.
Ensuite, ces groupements ne comptent pas que des CHU – centres hospitaliers universitaires. On y trouve aussi des centres hospitaliers de petite taille et des hôpitaux de proximité. Pour leurs directeurs, le combat est quotidien : à chaque fois qu'ils ont besoin de quelque chose – un équipement supplémentaire, un médecin, un nouveau poste – , ils mènent un combat sans relâche pour que leur établissement continue de fonctionner dans les meilleures conditions.
Ils sont à la fois directeurs des ressources humaines et gestionnaires financiers, assurant les trois quarts des fonctions dans certains petits hôpitaux où, faute de moyens, ces postes ne sont pas pourvus. Si l'on veut conserver un maillage d'établissements autonomes et répondant aux besoins de santé des territoires, il faut conserver les directeurs d'hôpitaux.
Avons-nous vraiment tiré les conclusions de la crise sanitaire ? Je me pose la question. À l'issue de plusieurs mois de commissions d'enquête, d'auditions et de débats, qu'avons-nous constaté ?
Pourquoi notre système sanitaire ne fonctionne-t-il pas ? Les deux premiers problèmes se résument en peu de mots : mutualisation et centralisation – et la bureaucratie afférente. Le troisième problème tient au fait que l'on impose les choses d'en haut aux décideurs qui sont sur le terrain, en totale méconnaissance des réalités locales.
Voilà trois problèmes qui sont au coeur de toute la crise que nous avons traversée. Alors que nous n'en sommes pas encore sortis, que proposez-vous ? De conserver la même tradition, la même philosophie, comme si de rien n'était, et de continuer à appliquer la même stratégie : confier la direction du GHT à l'établissement support, recentraliser, remutualiser, diriger à distance, supprimer toute flexibilité et imposer.
Avons-nous traversé la même période et en avons-nous tiré les mêmes enseignements ?
Murmures sur les bancs du groupe LaREM.
C'est l'inverse qu'il faut faire : se rapprocher du terrain et faire confiance aux acteurs locaux !
Voilà les raisons pour lesquelles je défends cet amendement déposé par mon collègue Bazin, que j'ai eu le plaisir de cosigner. Je vous appelle à retirer cette disposition ou à voter pour nos amendements de suppression.
La suppression de cet article conditionnera le vote du groupe UDI et indépendants sur l'ensemble de cette proposition de loi.
Si le développement des GHT représente un enjeu central de la coopération entre les établissements, la vacance de poste pose problème pour la gouvernance de ces établissements. Or la mesure proposée, qui ne figurait pas dans les conclusions du Ségur de la santé, va à contre-courant de la logique de coopération qui a été rappelée lors de la présentation du plan « Ma santé 2022 ».
Les 136 GHT actuels ont des tailles, des histoires et des organisations différentes. Des mesures d'intégration et de mise en commun des directions existent déjà, signes de la volonté d'acteurs qui désirent aller plus loin qu'un projet médical partagé quand cela a du sens. Au contraire, le caractère automatique de ce transfert paraît autoritaire et risque d'éloigner le pouvoir décisionnel dans certains établissements de taille importante. Il fait également évoluer le dispositif à l'inverse de la médicalisation souhaitée de la gouvernance, en éloignant d'autant plus les professionnels de terrain de leur direction. C'est pourquoi nous demandons la suppression de cet article.
Madame Tiegna, vous souhaitez défendre l'amendement no 246 de Mme Bénédicte Peyrol ? Le vôtre est le suivant, le no 319.
Je vais défendre les deux, madame la présidente.
L'amendement de ma collègue Bénédicte Peyrol a également pour but de supprimer cet article qui pose des difficultés quant au fonctionnement et à l'organisation future des GHT. Même si l'intérim peut être circonscrit sur la durée et faire l'objet d'un avis des instances de l'établissement partie, il n'en reste pas moins qu'il éloigne le pouvoir décisionnel du territoire pour le centraliser tout à fait.
D'autre part, faire le choix d'un intérim par le directeur de l'établissement support sera perçu par le personnel de l'établissement partie – même si tel n'est pas l'objectif du présent article – comme une mise sous tutelle, alors que nous essayons de faire en sorte que les services publics soient proches des lieux de décision des territoires.
En outre, on peut regretter que la disposition présentée dans cet article ne puisse faire l'objet d'un débat plus étayé, à la lumière d'un rapport sur le fonctionnement des GHT. Si les rapports de l'Inspection générale des affaires sociales – IGAS – et de la Cour des comptes en la matière se concentrent sur l'aspect financier de la mise en oeuvre des GHT, force est de constater qu'à ce jour, aucun rapport ne fait le bilan de l'aspect organisationnel et humain.
Mon amendement no 319 vise également à supprimer cet article car l'organisation qu'il préconise est mal perçue dans nos territoires ruraux qui y voient un risque d'éloignement du processus décisionnaire pour les petits hôpitaux.
Puisque vous présentez deux amendements identiques, madame la députée, pourriez-vous abréger l'argumentation du second ?
Dans le Lot, par exemple, l'hôpital de référence se trouve à l'extrémité du département, ce qui veut dire qu'il faut, …
… en plus de la centralité, tenir compte des distances qui existent entre les différents…
Madame la députée, vous ne pouvez pas présenter deux fois le même amendement, de suppression en l'occurrence. J'ai essayé de vous le dire de manière diplomatique.
Mme Huguette Tiegna proteste.
La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l'amendement no 343 .
Il va revenir, ne vous en faites pas !
… je regrette de ne pouvoir lui dire que son intervention précédente était pleine de sagesse alors qu'il nous prenait un peu pour des Bisounours.
Nos débats, depuis une heure et demie, font clairement apparaître l'opposition qui existe entre deux visions de la politique de santé. L'une, très technocratique, se fonde sur des organisations pensées en vase clos, en particulier celle des ARS et des GHT très intégrés avec une direction commune. L'autre, la nôtre, privilégie l'approche territoriale, considérant que le mode d'organisation doit avant tout s'adapter aux besoins et à la réalité du terrain.
Le GHT auquel j'appartiens avec madame la rapporteure fonctionne correctement car les engagements des uns et des autres ont été respectés. Avec une direction commune, on change de braquet. Si cet article était malheureusement adopté, on ouvrirait la voie à la fusion des hôpitaux de proximité et au développement d'un hôpital départemental entouré, pour le reste, de petites maisons de santé.
Faites attention à ce danger ! Pour ma part, je ne serai plus là très longtemps.
Ancien praticien hospitalier, je tiens à défendre l'hôpital et je supprime cet article.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.
Sourires.
Nous sommes tous convaincus qu'aller plus loin dans l'intégration et la concentration des fonctions support au sein de ces GHT n'est pas la bonne réponse. Au moment où les Français nous demandent plus de proximité, particulièrement en matière d'offre de soins, vous ne pouvez pas répondre par plus de centralisation.
Nous sommes d'autant plus inquiets que, d'un GHT à l'autre, les situations sont très différentes. Dans son rapport de décembre 2019, l'IGAS avait reconnu que de nombreux GHT étaient « pénalisés par des compositions et des périmètres inadéquats ». Ajouter de l'intégration dans ces GHT malades d'une mauvaise définition territoriale au départ, ne fera qu'aggraver l'inégalité d'accès aux soins, en privilégiant un établissement par rapport à un autre.
Comme vous le savez très bien, monsieur le secrétaire d'État, ce qui marche bien sur un tableur dans un bureau se révèle souvent plus difficile sur le terrain.
J'en veux pour preuve les gains escomptés sur les achats qui, malgré les regroupements, ne progressent pas, comme l'écrit l'IGAS noir sur blanc dans son rapport de décembre 2019. Pire : cette logique comptable de concentration rend le recours aux fournisseurs locaux beaucoup plus difficile, voire impossible. C'est un comble que nous vivons au quotidien dans nos territoires où l'hôpital est bien souvent le premier employeur public et l'un des donneurs d'ordre les plus importants pour les entreprises locales.
Voilà les aberrations technocratiques que nous subissons sur le terrain. Voilà pourquoi nous souhaitons supprimer cet article 7 !
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.
La parole est à M. Jean-Félix Acquaviva, pour soutenir l'amendement no 444 .
Faisant écho à mes collègues, je dirai ceci : laissons faire les territoires. Les établissements parties du GHT et spécialement les hôpitaux de proximité doivent garder une direction dédiée et autonome, pleine et entière, pour appréhender au mieux les besoins en proximité, pour pouvoir gérer leurs achats, leurs ressources humaines, leurs investissements. Les relations des établissements de proximité avec les GHT doivent être révisées par le biais d'un avenant à la convention constitutive, leur permettant d'être partenaires et non plus établissements parties des GHT.
Cet amendement vise donc à la suppression de cet article. Je me joins à toutes les voix précédentes pour demander plus de décentralisation dans ce domaine, et non pas plus de centralisation.
L'article 7 propose une centralisation de gestion uniforme au niveau national alors que nos territoires sont très différents dans leur configuration.
La crise sanitaire nous démontrant la nécessité de privilégier la proximité, la chefferie d'établissement doit être préservée en priorité. Lorsque l'hôpital se situe à plus de 100 kilomètres du coeur de la décision pour sa gestion, l'organisation proposée – soit une direction commune – ne peut pas aider à la bonne gestion quotidienne des établissements hospitaliers.
Avant la suspension de nos travaux, le ministre Véran a donné un avis de sagesse, ce dont je le remercie. Une gestion de proximité est le seul gage de bon fonctionnement des établissements hospitaliers dans tous les domaines, comme attendu par la population. Je propose donc le retrait de cet article.
La parole est à Mme Stéphanie Rist, rapporteure de la commission des affaires sociales, pour donner l'avis de la commission sur ces amendements de suppression.
Que sont les groupements hospitaliers de territoire ? Ce sont des groupements d'hôpitaux publics dont l'objectif – décrit dans les projets médicaux partagés – est de permettre une prise en charge graduée des patients sur un territoire.
Le directeur de l'établissement support a un rôle de coordonnateur chargé de faire appliquer ce projet médical partagé. Plusieurs rapports mettent un fait en évidence : quand les GHT fonctionnent bien, la prise en charge des patients s'en trouve améliorée et l'offre de soins accrue.
Comme vous l'avez dit, monsieur Door, notre GHT fonctionne bien : nous avons réussi à sauver des services de chirurgie et, par ricochet, un service de maternité.
Les 136 GHT de France sont très hétérogènes, ainsi que l'ont souligné les rapports.
Il est des cas – à vous entendre, ils sont nombreux– où chacun, les élus comme les directeurs eux-mêmes, défend son territoire, ce qui entraîne une compétition entre des établissements de santé publique qui devraient coopérer.
Cet article, adopté en commission, vise à favoriser ces coopérations en proposant une direction commune lors d'une vacance de poste de directeur. Cette avancée, différente d'une fusion, permettrait de renforcer, voire de sauver, les plus petits établissements.
J'entends les craintes exprimées depuis quelques semaines, lors des débats en commission. J'ai une conviction profonde sur ce sujet qui est, je le sais, partagée par de nombreux acteurs de terrain. La réécriture prudente de cet article, proposant l'intérim et le passage devant les commissions d'élus, n'a pas suffi.
Il est en forme, M. Brun !
Je ne peux pas être favorable à ces amendements de suppression ni à ceux, ultérieurs, qui auraient pour effet de bloquer les groupements qui avancent sur les territoires, car cela irait à l'encontre de l'objectif de simplification de cette proposition de loi. Par cohérence, je m'en remets à vos votes. Cette proposition de loi apporte de nombreux autres points positifs. Restons positifs.
La commission ayant adopté cet article, je suis donc défavorable aux amendements de suppression.
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles, pour donner l'avis du Gouvernement sur ces amendements de suppression.
Je serai bref car le ministre Olivier Véran a été clair lors de la discussion générale, même si ses propos ont parfois pu être caricaturés dans l'intervalle.
Nous croyons à la pertinence des GHT, qui a été démontrée lors de la crise que nous venons de traverser, contrairement à ce que certains d'entre vous ont pu dire.
Nous étions également convaincus qu'il serait pertinent d'aller un cran plus loin, non pas dans la centralisation, mais bien dans l'intégration de l'organisation de l'offre de soins dans les territoires. Vous avez raison, monsieur Brun : les GHT fonctionnent bien à certains endroits et moins bien à d'autres.
L'objectif du Gouvernement n'est évidemment pas que des inquiétudes ou des peurs s'emparent des acteurs locaux : c'est à eux qu'il revient de s'approprier localement ces dynamiques territoriales de coopération. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement s'en remettra à la sagesse de l'Assemblée sur cet article.
Je ne veux pas prolonger indûment le débat mais simplement redire que l'article 7 constitue selon nous un accélérateur brutal de l'intégration dans les GHT, avec tous les problèmes que cela posera dans les différents territoires – un accélérateur brutal et puissant qui entraînerait une transformation majeure du paysage actuel et du fonctionnement du système hospitalier.
Je ne suis pas sûr d'avoir compris toutes les subtilités du positionnement des uns et des autres. Ce que je comprends, c'est qu'il y a un problème et que la meilleure façon de le régler n'est pas d'adopter cet article comme s'il ne portait pas à conséquence, d'autant qu'il n'a pas été évoqué en ces termes au cours des discussions qui ont eu lieu dans le cadre du Ségur de la santé, dont vous nous avez vanté les mérites – même si j'ai exprimé nos doutes à cet égard. Il serait tout de même surprenant qu'une modification d'une telle ampleur s'impose ainsi à tous, avec toutes les incidences qu'elle pourrait avoir.
Nous maintenons donc notre amendement de suppression de l'article 7.
Je précise d'abord – car il nous arrive, madame la présidente, d'avoir quelques incompatibilités d'humeur alors même que nous nous apprécions beaucoup – que si je ne pouvais pas m'exprimer jusqu'au bout, je ne resterai pas pour autant inactif durant les semaines et les mois à venir, car le débat qui nous occupe ce soir présente la même gravité que celui qui a conduit le Gouvernement à retirer l'article 24 de la proposition de loi relative à la sécurité globale.
J'ai entendu vos propos, madame la rapporteure et monsieur le secrétaire d'État, et nous en tenons bien évidemment compte, mais ils sont si ambigus qu'ils ne veulent rien dire ! Je croyais qu'avec cette proposition de loi, nous donnerions un souffle nouveau à la santé, après la terrible période du covid-19. Je me rends compte, à mesure que l'examen du texte progresse, qu'il n'apporte rien. Pouvons-nous au moins nous accorder sur le fait qu'un des éléments ayant aggravé la crise liée au covid-19 fut la difficulté à trouver des centres hospitaliers qui pratiquent la réanimation et les soins intensifs ? C'est ce qui a imposé le transfert de malades du nord au sud et vice-versa.
Si nous nous accordons sur ce point – je cherche des yeux le chronomètre, car je ne veux pas vous agacer, madame la présidente – , je vous invite à méditer ce qu'écrivent, dans un communiqué de presse publié aujourd'hui même à La Rochelle, les présidents des commissions médicales d'établissement de centres hospitaliers : « À l'annonce d'une nouvelle loi de santé débattue à l'Assemblée nationale, les communautés médicales prennent la mesure du fossé qui se creuse entre les promesses et la mise en oeuvre concrète de l'action publique. Le projet de loi visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification porte bien mal son nom. Car, aborder des sujets structurels majeurs, sans aucune concertation préalable, pose avant tout la question d'une défiance voire d'un profond mépris des praticiens hospitaliers en pleine crise sanitaire ».
La suite viendra un peu plus tard, si vous m'y autorisez, madame la présidente. Si j'en avais eu le temps, j'aurais aimé rappeler à M. le ministre des solidarités et de la santé quelques chiffres concernant son département de l'Isère et tous les hôpitaux qu'il a réunis !
Le groupe Mouvement démocrate et Démocrates apparentés ne s'est pas prononcé sur la suppression de l'article 7. Deux visions peuvent prévaloir : soit on veut des GHT plus intégrés et un hôpital mieux structuré, soit, comme c'est le cas au Modem, on adopte une vision par territoire. Nous sommes plutôt favorables aux groupements de coopération sanitaire, qui exercent sur un bassin de vie et construisent des ponts et des passerelles entre hôpitaux publics, ESPIC – établissements de santé privés d'intérêt collectif – , cliniques privées et CPTS – communautés professionnelles territoriales de santé. La crise a bien montré que ce qui fonctionne, c'est la création de ces ponts et passerelles entre établissements, dans un même bassin de vie.
Avec l'article 7, on s'oriente plutôt vers un hôpital intégré. Nous n'avons toutefois pas déposé d'amendements de suppression, car il nous semble intéressant de débattre de cette question. Nous avons en revanche déposé deux amendements.
Le premier vise à exiger un avis conforme du donneur et du receveur, en quelque sorte, c'est-à-dire du comité stratégique du GHT et du conseil de surveillance de l'hôpital partie au groupement. Il me semble important que les acteurs concernés puissent échanger : s'ils jugent que le GHT présente un intérêt pour eux et que l'hôpital partie veut s'y intégrer davantage, tant mieux. S'il ne le souhaite pas, qu'il reste indépendant : l'important est que la discussion s'engage.
C'est la raison pour laquelle nous ne sommes pas favorables à la suppression de l'article 7, même si nous aviserons en fonction de vos réponses : nous voulons que les parties prenantes discutent et que toute décision d'intégration soit soumise à un double avis conforme.
Le deuxième amendement concerne la vacance de la chefferie : il s'agit d'éviter que le poste ne soit déclaré vacant qu'après plusieurs mois et qu'il soit, entre-temps, automatiquement confié à l'établissement support du groupement.
J'attends donc votre réponse sur ces deux amendements : si vous donniez un avis défavorable à l'amendement par le biais duquel nous demandons un double avis conforme du GHT et de l'hôpital partie au groupement, nous pourrions voter pour la suppression de l'article. Si vous y donniez un avis favorable, la discussion resterait ouverte.
Il me semble en tout cas intéressant de débattre des GHT, sans nécessairement supprimer l'article.
Parce que je suis très favorable à la décentralisation, je suis très favorable aux GHT. De nombreuses oppositions à ces groupements se sont exprimées ici, mais pour des raisons différentes, voire opposées. Certains considèrent que les GHT conduiraient, localement, à une forme de centralisation et regrettent que les problèmes se règlent à 100 kilomètres du petit hôpital où ils travaillent. Mais quelle est la solution alternative, en vérité ? Elle consisterait à revenir à la situation qui prévalait avant la création des GHT il y a quatre ans et demi : les directeurs d'établissement parcouraient alors 800 kilomètres pour faire régler à Paris les conflits qu'ils rencontraient dans leur région.
Ce fonctionnement est malencontreux. Il me semble que nous devons devenir adultes : cessons de demander à un ministère ou à une autre administration de régler les problèmes qui se posent entre deux petits hôpitaux locaux, voire entre deux services. Ces conflits doivent pouvoir se résoudre par un dialogue local entre adultes responsables, qui organisent les choses.
En outre, les contempteurs des GHT se trompent : il ne s'agit pas de remettre ces derniers en question. Ils existent depuis quatre ans et demi et continueront d'exister – ceux qui n'y sont pas favorables devront malheureusement s'y adapter !
Murmures sur les bancs du groupe LR.
Il est vrai qu'il existe beaucoup de GHT, comme celui auquel M. Door faisait référence, qui fonctionnent très bien – nous en connaissons tous – , tandis que quelques-uns rencontrent des difficultés. C'est la raison pour laquelle il nous faut continuer à construire les GHT pour que tous améliorent leurs conditions de fonctionnement. Je ne suis donc pas du tout favorable à la suppression de l'article 7.
M. Jean-René Cazeneuve applaudit.
Le rapport de l'IGAS précise clairement que les GHT comptent entre deux et vingt établissements : ils peuvent être constitués de quelques gros établissements comme d'une multitude de petits établissements ; certains couvrent un périmètre départemental, d'autres un périmètre infradépartemental – peu importe. Tous les cas de figure existent. Supposons que tous les établissements d'un GHT connaissent une vacance de poste – situation très hypothétique mais possible. Le directeur de l'établissement pivot prendrait-il la direction de tous les établissements ?
« Eh oui ! » sur les bancs du groupe LR.
C'est une super-centralisation – une méga-centralisation, même – que vous inventez là !
M. Jean Lassalle applaudit.
L'esprit des GHT, à leur création, consistait à organiser des coopérations, à raisonner à l'échelle d'un territoire et à permettre à chacun d'avoir son mot à dire. Si vous désignez un grand chef pour régir tout cela, vous abandonnez complètement l'objectif que vient d'évoquer notre collègue Touraine : il s'agissait d'éviter une centralisation excessive qui imposait d'aller chercher tous les arbitrages à Paris ou auprès d'un grand chef, en créant au contraire un espace de concertation – ce qui, effectivement, prend du temps.
En poussant le raisonnement à l'extrême, l'article 7 conduirait à permettre au directeur de l'hôpital support de prendre la direction de tous les établissements du GHT. C'est inacceptable.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SOC. – M. Jean Lassalle applaudit également.
J'ajoute ma touche en rappelant que la pire des lois, c'est celle dont on n'a pas besoin. C'est précisément ce que vous essayez d'instaurer avec l'article 7 : une règle uniforme et technocratique, là où il n'y a que des situations particulières et dépendantes des spécificités des GHT dans les territoires. Quand un poste de directeur d'établissement devient vacant, pourquoi systématiquement confier l'intérim, de manière discrétionnaire, au directeur de l'établissement support ? Pourquoi ne pas laisser l'adjoint au directeur, qui est certainement le mieux placé, l'exercer – éventuellement sous le pilotage du directeur de l'établissement pivot, bien entendu ?
Imposer de façon discrétionnaire une règle uniforme à des situations particulières est une erreur. Nous partageons tous ce constat. L'avis de sagesse du Gouvernement nous permettra d'éviter que les territoires pâtissent de cette situation.
Madame la rapporteure, je connais votre volonté d'assurer une meilleure intégration pour une meilleure politique de soins. Nous ne pouvons pas vous faire le reproche de vouloir vous investir sur cette question. Mais si l'on se focalise beaucoup sur le fait de confier la direction d'un établissement au directeur de l'établissement support, je rappelle tout de même que la suite de l'article 7 prévoit que le directeur général de l'ARS propose une fusion d'établissements dans un délai d'un an, après simple avis des parties concernées. C'est écrit clairement dans le texte.
M. Jean Lassalle applaudit.
Il ne s'agit pas non plus de revenir sur la création des GHT. Nous nous privons d'ailleurs d'une réflexion sur la répartition géographique au sein de ces groupements : ce n'est pas pour rien que, comme ma collègue Agnès Firmin Le Bodo me le rappelait tout à l'heure, la MECSS – la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale – s'apprête à mener une étude sur les GHT, quatre ans après leur création. Nous ne saurions nous dispenser de cette analyse avant d'aller plus loin.
Je rappelle à nouveau que la loi du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé offre des avancées en matière de coopérations, voire de fusions, à condition toutefois que les établissements en soient d'accord. C'est là la grande différence avec le texte que nous examinons aujourd'hui.
Enfin, le rapport de l'IGAS cité par la rapporteure – et que nous avons largement évoqué – comporte un passage très intéressant : « les élus doivent donc être davantage associés pour partager les enjeux sensibles du GHT, notamment la recomposition de l'offre de soins, qui nécessite une pédagogie active et impose de les consulter ». En proposant d'imposer une fusion qui ne dit pas son nom, on fait exactement l'inverse. Voilà pourquoi les membres du groupe Agir ensemble voteront en faveur des amendements de suppression.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Agir ens. – M. Jean Lassalle applaudit également.
Monsieur le secrétaire d'État, je trouve particulièrement regrettable que vous balayiez nos arguments en les qualifiant de caricatures…
… au motif que nous défendons une vision inspirée des réalités des territoires.
Je veux à cet égard apporter deux éclairages.
Tout d'abord, votre explication, madame la rapporteure, fait frontalement offense à tous les directeurs d'établissement : vous leur signifiez en clair qu'ils ne servent à rien…
Mme la rapporteure nie de la tête.
Si, madame la rapporteure ! Ce sont pourtant les directeurs qui animent la vie de leur établissement et assurent sa complémentarité avec les autres au sein du GHT. Il faut bien pour que ce dernier fonctionne – je le dis aussi à M. Touraine – que les établissements qui le composent aient des pilotes et des stratégies qui convergent.
M. Jean Lassalle applaudit.
Deuxième point : les périmètres de GHT voisins produisent forcément des effets de bord locaux. Je suis élu d'un département, l'Aveyron, plutôt moins peuplé que d'autres et pourtant partagé entre deux groupements hospitaliers de territoire. Si les directeurs d'établissement n'étaient pas là pour assurer la complémentarité entre l'un et l'autre, le bassin sanitaire, qui correspond fort logiquement à celui du département, aurait été écartelé entre deux logiques, y compris durant la crise que nous venons de traverser, ce qui aurait conduit à ne pas satisfaire les besoins sanitaires de la population.
M. Jean Lassalle applaudit.
Je ne comprends donc vraiment pas pourquoi chercher à modifier par la loi un dispositif qui fonctionne très bien.
Je précise à notre collègue Cyrille Isaac-Sibille que les amendements à venir de son groupe tomberont si l'article 7 est supprimé. En toute franchise, je préférerais encore la suppression de l'article à l'adoption des amendements en question puisqu'ils auraient pour effet de bloquer le fonctionnement actuel. En effet, si l'on demande l'avis conforme de plus d'une commission, ce qui est possible aujourd'hui ne le sera plus demain.
D'autre part, madame Rabault, le texte donne la faculté au directeur général de l'ARS de ne pas proposer au directeur de l'établissement support d'assurer l'intérim s'il considère, par exemple, que les gens ne s'entendent pas suffisamment bien ou que le GHT est trop grand pour ce faire. L'hypothèse que vous évoquez d'un directeur de GHT assurant l'intérim dans vingt établissements où tous les postes de direction seraient vacants est donc impossible.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 197
Nombre de suffrages exprimés 197
Majorité absolue 99
Pour l'adoption 176
Contre 21
Les amendements identiques nos 1 , 45 , 71 , 86 , 91 , 98 , 121 , 130 , 162 , 241 , 246 , 319 , 343 , 376 , 444 et 498 sont adoptés ; en conséquence, l'article 7 est supprimé et les amendements nos 108 , 48 , 122 , 112 , 24 , 22 , 413 , 87 , 66 , 216 , 390 , 391 , 205 , 155 , 111 , 282 , 242 , 371 , 221 , 168 , 167 , 30 , 92 , 131 , 153 , 243 , 191 , 504 , 505 , 406 , 160 , 248 et 134 tombent.
Applaudissements sur divers bancs.
Nous en venons à plusieurs amendements portant article additionnel après l'article 7.
La parole est à M. Jean-Louis Touraine, pour soutenir l'amendement no 305 .
Cet amendement vise un double objectif de simplification des démarches et de meilleure intégration des GHT. Il est proposé de permettre aux groupements d'établissements de santé d'assurer l'exploitation d'une autorisation unique d'activité de soins sur un territoire déterminé, et que l'établissement support du GHT puisse également l'assurer pour le compte des établissements qui en sont membres. Ce serait un élément essentiel pour les établissements de santé puisque les autorisations d'activités de soins sont une problématique centrale dans l'organisation de l'offre de soins sur le territoire et que celle-ci est assurée beaucoup plus facilement quand elle est prise en charge par le GHT dans son ensemble.
L'amendement pose la question des autorisations qui pourrait être délivrées au sein des groupements hospitaliers de territoire. Même si, sur le fond, je suis favorable à davantage d'intégration et que cette proposition va dans ce sens, je crois qu'au vu de la discussion précédente, l'Assemblée n'est pas du tout prête à l'accepter. Demande de retrait.
Même avis.
Mes chers collègues, on ne peut absolument pas adopter cet amendement dangereux de M. Touraine car il donnerait tout pouvoir aux GHT sur les autorisations. Ce serait même pire que ce que nous avons évité en supprimant l'article 7 !
L'amendement no 305 n'est pas adopté.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à vingt et une heures cinquante, est reprise à vingt et une heures cinquante-cinq.
La séance est reprise.
La parole est à Mme Martine Wonner, pour soutenir l'amendement no 14 .
Vous savez que les établissements de santé mentale ont le droit dérogatoire de ne pas intégrer un GHT. Cet amendement propose de supprimer cette dérogation, non pas pour les forcer à l'intégration mais pour rappeler qu'il serait judicieux d'envisager une véritable organisation territoriale des soins en santé mentale entre les établissements publics de santé mentale et les autres établissements du même territoire. C'était la conclusion du rapport que Caroline Fiat et moi-même avions rendu l'année dernière dans le cadre de la mission d'information présidée par Brahim Hammouche sur l'organisation de la santé mentale. Il faudrait notamment que les patients en souffrance psychique bénéficient enfin d'une approche assez solide des problématiques somatiques, car on sait que leur espérance de vie est réduite d'environ dix ans en raison de comorbidités somatiques.
Avis défavorable puisque les dérogations pour les hôpitaux psychiatriques sont de plus en plus rares, qu'il reste peu d'établissements concernés et qu'elles devraient totalement disparaître d'ici à 2022. Cet amendement ne me semble donc pas nécessaire.
Même avis pour les mêmes raisons.
Je voudrais remercier Mme la rapporteure et M. le secrétaire d'État pour leur courage. Ce n'est pas parce que nous nous combattons que nous n'avons pas envie de réussir ensemble. Je m'étais permis, la semaine dernière, d'appeler solennellement, à deux reprises, l'attention de Gérald Darmanin sur les dangers de l'article 24 du projet de loi de sécurité globale, lui disant qu'il se plaçait lui-même dans une impasse. Or c'est ce que vous étiez à votre tour en train de faire avec l'article 7.
Je voudrais dire un mot des centres psychiatriques, auxquels j'ai recommencé de m'intéresser depuis que Mme Wonner en a parlé récemment. Il se trouve qu'un de mes stagiaires en dirige un et que nous avons la chance d'avoir ici même, distants de quelques mètres, deux psychiatres qui comptent parmi les plus renommés de notre pays, et je les ai vus à l'oeuvre l'autre soir. Or ce que nous faisons maintenant pour ces centres est à peu près de la même veine que ce que nous étions en train de faire pour les directeurs d'établissement hospitalier, c'est-à-dire rien, si ce n'est aggraver peut-être un peu plus encore la situation en la figeant. Je demande donc que cette proposition de loi soit purement et simplement retirée. De toute façon, elle est décapitée puisque son navire amiral, l'article 7, ayant été supprimé, tout ce qui reste n'a plus de sens.
Madame la rapporteure, je constate que, depuis nos échanges en commission, nous sommes restées l'une et l'autre sur nos positions, mais je souhaite vraiment que ce débat se poursuive. Puis-je espérer que M. le secrétaire d'État s'engage à être particulièrement attentif, dans les prochains mois et les prochaines années, aux questions relatives à la santé mentale, afin que l'on cesse de raisonner systématiquement en séparant médecine et chirurgie obstétrique, d'une part, et santé mentale, d'autre part. Nous devons privilégier une approche coordonnée dans les territoires, une approche transversale.
M. Jean Lassalle applaudit.
Dans mon département, en Seine-Maritime, la question de la psychiatrie s'est posée de façon aiguë. Les « perchés » de l'hôpital psychiatrique du Havre, et les grévistes de la faim de celui de Saint-Étienne-du-Rouvray ont sonné l'alarme pour dénoncer les problèmes rencontrés par l'hôpital psychiatrique. À l'échelle de territoires à dimension humaine, les PTSM, les projets territoriaux de santé mentale, permettent d'avancer sur ces questions.
J'appelle votre attention sur les inégalités territoriales très fortes qui sont liées au système de dotation forfaitaire pour l'hôpital psychiatrique. Lorsqu'à Dieppe, nous disposons de 78 euros par habitant en psychiatrie – alors que les diagnostics territoriaux de santé font apparaître des besoins colossaux – , on dispose de 220 à 230 euros à l'est du département. Il faut donc envisager des rééquilibrages et l'engagement de moyens supplémentaires afin que la psychiatrie constitue une véritable priorité à l'échelle nationale.
L'amendement no 14 n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Louis Touraine, pour soutenir l'amendement no 307 .
La crise sanitaire a montré l'importance d'une gestion territorialisée qui passe par l'existence de GHT respectueux de chaque établissement, qui soient aussi davantage intégrés. Je propose en conséquence que ces groupements puissent être dotés d'une personnalité morale, sous une forme ou une autre. Tous les hospitaliers membres de la Fédération hospitalière de France savent à quel point c'est important.
La Cour des comptes nous invite elle-même à franchir le pas dans son dernier rapport annuel sur l'évaluation des lois de financement de la sécurité sociale, indiquant que l'absence de personnalité juridique avait « des conséquences dommageables en termes d'adaptabilité opérationnelle ».
Monsieur Touraine, nous aurons tous les deux beaucoup de travail afin de parvenir à convaincre nos collègues de l'intérêt des GHT pour la création d'offres de soins.
Nous sommes nous-mêmes convaincus mais, parce que nous sommes loin d'avoir convaincu tout le monde, mon avis est défavorable.
À défaut d'un retrait, l'avis du Gouvernement sera défavorable, en cohérence avec nos arguments précédents et avec la suppression de l'article 7.
Je me réjouis de ces avis négatifs : donner la personnalité morale aux GHT sonnerait la fin des hôpitaux de proximité.
Ils n'auraient plus de conseil de surveillance ni de commission médicale d'établissement. Ils seraient vidés d'une partie de leur substance au profit du GHT. À l'inverse, nous sommes nombreux à souhaiter que des hôpitaux demeurent au plus près de chaque territoire, ce qui n'empêche pas une organisation et une mutualisation autour du GHT.
J'espérais que l'idée de l'attribution de la personnalité morale aux GHT ne reviendrait pas sur la table. Nous en avions débattu, en 2015, lors de l'examen de la loi Touraine sur la modernisation de notre système de santé… Marisol Touraine, évidemment, pas Jean-Louis.
Notre collègue Touraine a un mérite : celui de la cohérence et de la transparence. Lorsqu'on lit l'ensemble de ses amendements, on voit bien, madame la rapporteure, dans quel monde vous voulez nous emmener. Vous venez d'ailleurs de l'avouer en expliquant que vous aviez encore beaucoup de travail à faire pour nous convaincre. Moi, très sincèrement, j'espère que nous n'irons jamais vers ce monde.
J'ai l'impression que vous n'avez rien compris aux fractures territoriales à l'oeuvre dans notre pays où les territoires demandent à être pris en considération – la crise des gilets jaunes en était une manifestation. Ils demandent une présence des services publics et souhaitent que l'on s'engage, enfin, dans un aménagement équitable du territoire.
Différents amendements, à l'instar de celui que nous examinons qui tend à donner la personnalité morale aux GHT, visent à l'inverse à concentrer les moyens au détriment des territoires. Si le directeur du GHT peut être aussi directeur de l'établissement support, cela pose un réel problème de gouvernance, car il sera mal placé pour juger de la pertinence d'une action globale cohérente.
Qu'est-ce qui a fait la richesse de notre pays ? C'est un aménagement équilibré du territoire, avec une présence des hôpitaux. C'est cela que les Français attendent aujourd'hui ; ils ne veulent pas emprunter le chemin dans lequel vous voulez nous emmener.
Monsieur Bazin, vous me dites que je ne comprends rien à la fracture territoriale.
Je suis députée d'un territoire qui connaît la démographie médicale la plus faible. Avant d'être élue, j'étais médecin – je le reste – , et je m'occupais du groupement hospitalier de territoire. J'ai pu constater que des malades qui habitent à une heure de l'établissement support sont moins bien soignés que d'autres. Mon seul objectif avec ce texte et dans mon engagement en tant que députée est d'améliorer l'offre de soins. Prétendre que je ne connais rien à la fracture territoriale, c'est donc, me semble-t-il, aller un peu loin.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.
Très bien !
L'amendement no 307 n'est pas adopté.
En décembre 2019, dans son bilan d'étape des groupements hospitaliers de territoire, l'IGAS écrivait noir sur blanc que certains GHT sont « pénalisés par des périmètres ou compositions inadéquats » et préconisait de revoir certains périmètres. Dans cette perspective, l'amendement vise à inscrire dans la proposition de loi que chaque département français doit compter au moins un hôpital support.
Pourquoi la Lozère, un département de 76 000 habitants pour lequel j'ai beaucoup d'affection, a-t-il un hôpital support à Mende ; pourquoi la Haute-Loire, envers laquelle mon amitié n'est pas moindre, dispose-t-elle d'un hôpital support au Puy-en-Velay, et pourquoi l'Ardèche, département de 330 000 habitants, n'en compte-t-elle aucun – mes prédécesseurs n'ayant eu d'autre idée que de le situer dans le département voisin de la Drôme ?
Mes chers collègues, j'en appelle à votre soutien pour que tous les départements français puissent accueillir un établissement support – ils sont quelques-uns à n'en compter aucun. C'est un minimum sanitaire vital ; c'est un enjeu majeur d'égalité d'accès aux soins, tout le monde le comprend, et parce que c'est une injustice de la loi Touraine de 2016, nous devons la réparer ensemble ce soir.
Avis défavorable. Pour votre information, on ne compte que cinq départements sans établissement support.
Vous posez la question du périmètre des GHT, mais votre amendement n'y répond pas.
Voilà un amendement qui m'étonne, monsieur Brun ! Avez-vous fait la leçon à Mme la rapporteure sur sa méconnaissance des territoires et sur une volonté centralisatrice pour présenter ensuite un amendement par lequel vous imposez d'en haut, à chaque département, depuis votre siège, l'obligation d'avoir un établissement support ?
Que répondez-vous aux cinq départements qui souffrent de fait d'une inégalité d'accès aux soins ?
Par ailleurs, vous n'êtes pas sans savoir que certains territoires comptent plusieurs GHT et doivent donc accueillir plusieurs établissements supports, ce que votre amendement proscrit. Faudra-t-il supprimer l'un de ces établissements ? Je crois vraiment qu'il y a une incompréhension ; la rédaction de votre amendement en atteste. Avis défavorable.
Pour ma part, je comprends l'amendement de M. Brun, qui vise à résoudre le problème des départements sans hôpital support. Lorsque M. Véran était rapporteur général de la commission des affaires sociales, en 2017, et même en 2016, …
… j'avais proposé un amendement visant à évaluer les 136 GHT de France en fonction de leur périmètre – certains périmètres peuvent être immenses, réduits ou inaccessibles, comme en Lozère. Au sein de l'Assemblée, Mme Bourguignon a par la suite proposé à la MECSS d'évaluer le périmètre des GHT. Il faut que ce travail s'engage très vite car nous débattons depuis deux heures de groupements qui n'en sont encore qu'au stade de l'enfance. On veut faire croire qu'ils sont adultes, mais ce sont des gosses.
Ils évolueront progressivement, mais il faut que ce soit de la meilleure manière, ni aux forceps, ni à la va-vite. C'est désormais à la MECSS, madame Vidal, de faire son travail ; nous pourrons débattre ultérieurement des GHT nouveaux.
Nous en revenons toujours au fameux débat sur les GHT. Je me souviens que nous en avions largement discuté à la fin de l'année 2015. Les agences régionales de santé ont eu les bras cassés au début de l'année 2016 lors de la constitution des GHT car on leur faisait déjà un procès en centralisation et un autre, tout à fait fondé, sur l'absence d'appropriation par les territoires. Nous retrouvons les mêmes éléments aujourd'hui.
Fabrice Brun ne cherche pas à détruire tous les GHT…
Il veut que le groupement hospitalier de territoire soit adapté à un bassin de vie avec des proximités et des complémentarités. Ce n'est absolument pas contradictoire avec le propos ou la pensée de Mme la rapporteure. Nous cherchons seulement à mettre en avant le besoin de proximité en matière de santé. La rédaction de l'amendement n'est peut-être pas la bonne, mais je me rends aussi compte, au fur et à mesure que nous avançons, que la rédaction de la proposition de loi elle-même ne semble pas davantage achevée puisque le texte est contesté de toute part et sur tous les bancs. Peut-être serait-il urgent de créer une commission à même de dessaisir le Parlement ?
Rires sur les bancs du groupe LR.
La préoccupation de M. Brun est légitime : il souhaite que les départements oubliés ne le soient plus. Il est vrai cependant que la rédaction de l'amendement est inappropriée – je m'excuse de le dire aussi directement : elle pourrait conduire à remettre en cause le nombre d'établissements supports des départements qui en comptent plusieurs.
Elle a toutefois le mérite d'appeler l'attention sur un point qui constitue sans doute l'un des aspects positifs des lois précédentes : l'introduction d'un élément de démocratie sanitaire avec les conseils territoriaux de santé. Peut-être devrions-nous confirmer que la définition du périmètre des établissements supports des GHT fait l'objet d'une véritable consultation des élus, ceux qui sont membres des conseils territoriaux de santé.
Dans les faits, on se souvient comment tout cela a été dessiné : au moment de l'élaboration des schémas régionaux d'organisation sanitaire, les directeurs généraux d'ARS ont pris une carte et ils ont décidé de ce qui leur semblait pertinent.
Des départements ont ainsi été en quelque sorte dépecés. On en est resté à la verticalité et au « déménagement du territoire » que nous subissons dans bien d'autres domaines que celui de l'hôpital.
Pour conclure, permettez-moi de dire que la régionalisation a éloigné les ARS. En Normandie, l'ARS est partie à Caen : comment peut-elle prendre en considération la réalité des besoins de santé lorsqu'elle doit réfléchir à l'avenir de l'hôpital d'Eu qui se situe à 200 kilomètres ? Le déménagement des ARS, leur éloignement, a renforcé leur vision technocratique.
Je veux rassurer l'Assemblée quant aux travaux de la MECSS, évoqués à plusieurs reprises. L'évaluation des GHT figure bien à son agenda. Pour des raisons évidentes, nous n'avons pas pu la mener à bien en début d'année, comme cela était prévu. Nous attendions la fin de l'examen du PLFSS pour commencer, et nous envisageons de remettre notre rapport au plus tard en septembre.
Merci infiniment, madame la présidente, de me laisser parler. Je veux dire à mes collègues qui regrettent de ne pas avoir de GHT dans leur département, …
… en particulier pour les petits départements, que je me demande s'il s'agit vraiment d'un inconvénient. Peut-être avez-vous eu beaucoup de chance d'échapper à ce cancer. On ne change pas la nature humaine : un directeur d'établissement support n'a qu'une idée en tête, c'est mettre le grappin sur tous les autres hôpitaux du territoire, surtout quand la haute administration l'y encourage vivement – elle le notera là-dessus ! On se plaint qu'il n'y a plus de directeurs – forcément, on les fait disparaître ! Il s'agit d'une des fonctions de la très haute administration publique les plus dévalorisées au cours de ces dernières années. Pourquoi ? On voulait leur faire jeter l'éponge, de sorte qu'il ne reste que des directeurs de centres hospitaliers territoriaux.
Je demande le retour des conseils d'administration, parce que tout le monde y est représenté et qu'ils sont présidés par l'élu principal de la région – souvent le maire de la ville – aux côtés du directeur, et cela fonctionne.
Je prends encore quelques secondes, mais je m'arrêterai si vous me faites signe, madame la présidente : je ne veux surtout pas vous vexer, vous ne le méritez pas. Quant à moi, j'ai trop de choses à dire.
Il est inutile que nous poursuivions l'examen du texte : nous venons de lui couper la tête. Vous savez qu'un canard auquel on coupe la tête continue à marcher quelques mètres avant de s'effondrer. En supprimant l'article 7, nous avons décapité la proposition de loi. Mes chers collègues, que reste-t-il à étudier d'un canard qui n'a plus de tête ?
Rires sur les bancs du groupe GDR.
Sourires.
Je constate beaucoup de résistances au développement des GHT, auxquelles s'ajoutent des remarques, comme celle de M. Door, qui expriment le souhait d'une très lente progression, sur quelques décennies. En vérité, l'objectif ainsi visé, sauver les hôpitaux de proximité, ne pourra être atteint en se contentant du statu quo. Vous observez tous dans les petites villes de vos circonscriptions ou des circonscriptions voisines des fermetures de maternités et d'hôpitaux. Leur intégration dans un GHT constitue justement le moyen d'éviter leur disparition.
L'avenir dira si vous avez sauvé ces petits hôpitaux de proximité en freinant le développement des GHT, ou s'ils ont au contraire résisté là où les GHT s'étaient bien déployés. Je connais dans ma région un GHT qui existe depuis au moins dix ans, sans répondre à cette appellation, car il en avait anticipé le développement : tous les petits hôpitaux de proximité ont été préservés. À l'inverse, ceux qui refusent ce travail coopératif au niveau local voient les hôpitaux de proximité fermer.
L'avenir nous dira qui a tort et qui a raison, mais je crois dommage de nourrir des préjugés contre ce système. Certes, des améliorations sont possibles, mais ce n'est pas en refusant ce dispositif a priori qu'on sauvera le maillage hospitalier du territoire, auquel nous sommes tous très attachés.
L'amendement no 147 n'est pas adopté.
Il tend à rendre au médecin hospitalier son rôle, en définissant mieux la place des commissions médicales d'établissement dans l'élaboration du projet médical partagé, qui doit incomber à la CME et aux médecins. Cet amendement a été rédigé en lien avec le Conseil national de l'ordre des médecins.
L'amendement no 279 de M. Julien Borowczyk est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Je demande le retrait, sinon l'avis sera défavorable. En effet, votre amendement est satisfait : l'article L6144-2-1 du code de la santé publique, issu de l'article 37 de la loi relative à l'organisation et à la transformation du système de santé, prévoit que la « commission médicale de groupement contribue à l'élaboration et à la mise en oeuvre de la stratégie médicale du groupement et du projet médical partagé du groupement. »
La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé, pour donner l'avis du Gouvernement.
Les mots ont leur sens. Vous dites que les CME et les médecins contribuent à l'élaboration de la stratégie du GHT, c'est-à-dire qu'ils ne l'élaborent pas. Mon amendement vise à préciser que ce sont les médecins qui élaborent ce projet. Ils ne se contentent pas d'y contribuer, et ils disposent des moyens nécessaires.
Qu'il n'y ait aucune ambiguïté : je ne suis pas opposé à la coopération interhospitalière et je ne milite pas contre la gradation des soins, mais quand on vient de l'un des cinq départements qui ne disposent pas d'un hôpital support et qu'on constate que depuis 2016, les moyens convergent précisément vers ces hôpitaux, comprenez qu'il faille crier fort. Je représente un département qui compte 340 000 habitants, lesquels ne doivent pas être considérés comme des sous-citoyens dans le domaine de l'accès aux soins.
Pour expliquer mon amendement, je prendrai l'exemple de la première et la plus stratégique des fonctions support, à savoir le recrutement des médecins. Dans le contexte particulièrement difficile que notre pays connaît en matière de démographie médicale, quand l'hôpital support est situé à 50 ou 100 kilomètres, voire dans le département voisin, comme c'est le cas de l'Ardèche, croyez-vous vraiment que le recrutement de médecins généralistes ou spécialistes servira à renforcer les établissements secondaires ? Pas du tout ! C'est bien humain ; on comble d'abord ses propres besoins et, en fin de compte, les inégalités de soins s'aggravent. On ne parle pas suffisamment de ce phénomène très répandu, qui affecte nombre de territoires. Voilà pourquoi nous demandons qu'une évaluation plus précise et plus régulière du fonctionnement des groupements hospitaliers de territoire soit menée, par les ARS, en relation avec le ministère, ainsi que par les parlementaires – je rejoins ici le débat que nous venons d'avoir concernant la MECSS. Il s'agit de savoir si chaque GHT remplit bien sa mission première, la lutte contre les inégalités d'accès aux soins.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.
Avis défavorable. Je sais que vous êtes, comme moi, un député ancré dans votre territoire ; vous pouvez observer le fonctionnement du groupement hospitalier de votre circonscription bien plus souvent que tous les trois ans, soit la fréquence que vous demandez pour la remise du rapport. En outre, selon la loi, les GHT doivent évaluer annuellement l'évolution de leur projet médical partagé.
En essayant de comprendre pourquoi vous étiez si en colère contre le système des GHT – je ne formule ici aucune critique – , je me suis souvenu que vous êtes député de l'Ardèche, dont je connais bien la situation. Si je comprends bien, votre problème vient de ce qu'un GHT ne peut être qu'infradépartemental sans déborder sur les départements voisins, ce qui place l'Ardèche dans une situation complexe. Vous ne disposez pas d'un gros hôpital support…
… et vous n'entretenez pas de liens avec le voisin drômois dans le cadre d'un GHT.
J'aime bien dialoguer, mais je ne veux pas que la présidente me fasse les gros yeux – certes, elle ne fait jamais rien de tel !
En clair, vous n'avez donc pas suffisamment de lien avec votre voisin drômois. Je suis plutôt d'accord avec vous concernant l'excessive rigidité de certains périmètres. Alors député, je m'en étais entretenu avec le directeur général de l'ARS Auvergne-Rhône-Alpes, Jean-Yves Grall, qui a toute ma confiance. Nous avions discuté des conditions permettant d'affranchir les GHT de la règle départementale. Je vous propose de retirer votre amendement, sinon l'avis sera défavorable. Je n'ai pas besoin que les ARS me remettent un rapport tous les trois ans car je les ai au téléphone tous les matins. En revanche, je vous propose qu'avec quelques-uns des élus d'autres parties de l'Ardèche qui m'ont sollicité sur ce sujet, nous prenions un peu de temps pour élaborer ensemble une solution durable. Cela vous conviendrait-il ?
Oui. Ça a mis du temps : je suis député depuis trois ans et, pour la première fois dans cet hémicycle, je rencontre un ministre des solidarités et de la santé à l'écoute.
Exclamations sur les bancs des groupes LaREM et Dem.
Il est également en relation avec les ARS, comme nous le sommes. J'accepte de retirer mon amendement à condition bien entendu que le travail que vous proposez soit effectivement mené, avec l'ensemble des élus du département, dans le seul objectif de conforter l'offre de soins des Ardéchois.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.
L'amendement no 149 est retiré.
L'amendement no 144 de M. Fabrice Brun est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Défavorable. Il est satisfait.
L'amendement no 144 n'est pas adopté.
L'amendement no 100 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Vincent Thiébaut, pour soutenir l'amendement no 362 .
Monsieur le ministre, vous avez souligné qu'un des principaux problèmes rencontrés par les GHT concerne leur périmètre, sa cohérence avec le bassin de vie et avec l'ensemble des acteurs locaux, qu'ils appartiennent au domaine de la santé, au conseil de surveillance, ou qu'ils soient élus. Les différents rapports établis sur ce sujet, notamment ceux de la Cour des comptes, le confirment. J'avais déjà présenté un amendement similaire lors de l'examen du projet de loi « Ma santé 2022 » et je l'avais retiré, dans l'attente de réponses que je n'ai pas obtenues ; je le défends donc à nouveau car il garde tout son sens. Il vise à préciser les modalités de révision des périmètres des GHT. Un contrat local sur lequel tous les acteurs auront travaillé sera nécessaire pour définir une offre de soins locale, soutenue par l'ensemble des électeurs du territoire. Le directeur de l'ARS rendra ensuite un avis motivé. Il ne s'agit pas d'une opposition aux GHT, mais d'une autorisation à redéfinir leur cadre, pour qu'ils soient cohérents avec les offres de soins et les territoires. Un tel dispositif manque.
Ma circonscription en offre une illustration : un très gros GHT couvre le bassin de l'Alsace du nord et Strasbourg. En quatre ans, une seule réunion a été organisée, pour visiter la cave à vin des hospices de Strasbourg. C'est sympa, mais je doute que cela ait amélioré l'offre de soins. Pendant la crise sanitaire liée au covid-19, les cinq établissements hospitaliers de ma circonscription se sont organisés de manière autonome. Ils n'ont reçu qu'un unique appel téléphonique du GHT.
Une étude de l'ARS affirme que le nouveau périmètre proposé est cohérent, tout comme l'offre de soins et la gouvernance – bref, l'ensemble du projet est cohérent et pourtant, le projet ne peut aboutir car il nous est répondu que des analyses seraient encore nécessaires.
Cela fait deux ans que nous travaillons sur ce sujet, et la situation ne peut plus durer ! Je suis sûr que beaucoup de territoires se battent, eux aussi, pour obtenir un périmètre plus cohérent avec les réalités des citoyennes, des citoyens, des acteurs locaux.
C'est presque un avis de sagesse, puisque je me suis rendue sur votre territoire et que j'ai compris les difficultés que vous évoquez – les problèmes de périmètres, les nombreux audits… Mais il ne me semble pas que l'on puisse généraliser à l'ensemble des GHT ; mon avis est donc plutôt défavorable.
Comme à propos de l'Ardèche, que j'évoquais avec M. Brun tout à l'heure, certains cas locaux méritent réflexion.
Les ARS sont fondées à agir. Avec le pragmatisme total de l'ancien député que je suis, je suis prêt à regarder les dossiers individuels qui pourraient poser problème. Je ne connais pas la situation de votre territoire, monsieur Thiébaut, mais nous pouvons l'examiner.
En revanche, si l'on ouvre la possibilité de modifier tous azimuts les périmètres des GHT, voilà ce qui va se passer : dans 90 % des territoires, des gens qui n'approuvaient pas un périmètre – celui-ci fût-il parfaitement justifié – feront valoir leur droit à les modifier. Cela obligera les hôpitaux à engager un travail d'ingénierie, qui n'aboutira jamais à une solution qui recueille l'unanimité : il y a toujours des discussions. Et, dans la plupart des cas, ce chantier n'aura pas grand sens, surtout au regard de la crise sanitaire.
La mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale – MECSS – travaille sur le sujet, et doit rendre ses conclusions dans quelques semaines. L'Inspection générale des affaires sociales – IGAS – a également émis des recommandations. Je vous propose d'examiner les situations problématiques, mais nous n'avons pas besoin de modifier la loi : tous les outils nécessaires existent. Ne rebattons pas les cartes, car c'est là un énorme chantier.
Je vous crois de bonne foi, monsieur le ministre, et je vous entends, mais c'est exactement la réponse qui m'a été faite il y a un an et demi ; or depuis, rien n'a changé. Cet amendement ne fait que préciser les modalités de la modification de périmètre des GHT : les acteurs qui le souhaitent doivent pouvoir travailler sur un contrat territorial, sur l'offre de soins, en concertation avec les élus locaux et les acteurs médicaux. Les hôpitaux qui ne souhaitent pas de modification n'ont pas besoin d'en demander !
J'aimerais le retirer, mais encore une fois, monsieur le ministre, un an et demi après ma première interpellation, la situation n'a pas changé.
Je maintiens donc cet amendement dont je redis qu'il me paraît intéressant.
Je soutiens cet amendement de notre collègue alsacien. Les régions taille XXL n'ont, on le voit bien, pas amené que du bon ; et les GHT étant parfois XXL, eux aussi, cela ne facilite pas toujours les coopérations. Si l'on veut renforcer celles-ci, il faut plus de proximité : pour travailler ensemble, il faut se rencontrer, se connaître, dialoguer. Ce n'est pas le cas de tous les GHT, mais certains périmètres posent problème – pour des raisons parfois de distance, parfois de taille, parfois d'absence de complémentarité.
Ne vous inquiétez pas, monsieur le ministre : le dispositif proposé par l'amendement laisse la main aux ARS. Cela mériterait d'ailleurs une discussion, mais la proposition de loi fait malheureusement l'impasse sur le sujet… En l'occurrence, les ARS pourront refuser les propositions, à la seule condition de motiver ce refus. Cet amendement représente à mes yeux un premier pas, l'engagement d'un dialogue avec les ARS. Il va dans le bon sens, celui d'une meilleure couture territoriale, celui d'un aménagement plus pertinent et plus efficient de notre système de santé.
L'amendement no 362 n'est pas adopté.
Nous ne pensons pas, contrairement à ce qui a été dit tout à l'heure, que les GHT pourraient sauver les hôpitaux de proximité ou les maternités dont l'existence est menacée ; nous estimons que c'est la logique de l'hôpital-entreprise, vieille d'une vingtaine d'années, qui a entraîné la fermeture de lits, la suppression de postes, puis de services entiers, et finalement des hôpitaux eux-mêmes.
M. Jean Lassalle applaudit.
Cet amendement vise donc à abroger l'article L. 6132-7 du code de la santé publique, qui est contraire à l'autonomie de gestion des hôpitaux publics. Si quelques rares groupements hospitaliers de territoire ont su mettre en place une gestion cohérente, c'est loin d'être le cas partout, et il convient à tout prix de laisser aux structures hospitalières le choix de mutualiser, ou non, certaines de leurs fonctions au sein des groupements hospitaliers de territoire et de ne pas imposer des regroupements ou des mutualisations totalement déconnectés des réalités.
Avis défavorable. Sur la forme, ce n'est pas cet article du code de la santé publique que vous souhaitez supprimer ; sur le fond, vous connaissez mon engagement en faveur des GHT.
L'amendement no 398 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Philippe Vigier, pour soutenir l'amendement no 163 .
En 2018, vous vous en souvenez probablement, il y a eu une commission d'enquête sur l'égal accès aux soins des Français sur l'ensemble du territoire ; j'avais déjà essayé d'expliquer les limites des GHT, et les débats que nous venons d'avoir montrent, je crois, que si certains fonctionnent bien, d'autres méritent d'être réexaminés.
Mais le problème, surtout, c'est que le privé a été complètement oublié ! Je ne comprends pas. Les patients se fichent de savoir s'ils sont pris en charge par le public ou le privé ; ce qu'ils veulent, c'est la meilleure efficience, la meilleure chance de sortir de l'impasse !
Monsieur le ministre, vous encouragez des praticiens des centres hospitaliers universitaires, ou du centre hospitalier régional d'Orléans par exemple, c'est-à-dire du public, à aller travailler dans le privé comme spécialistes ; nous commençons plus généralement à adopter une approche moins hospitalo-centrée. C'est le moment, avec l'émergence des CPTS, de décloisonner et de mieux faire travailler ensemble le public et le privé, avec une véritable efficience à la clé. Nous ne pouvons plus nous permettre de laisser de côté tous ces professionnels que nous avons été très heureux de pouvoir réquisitionner pendant la crise de la covid-19, et dont nous avons apprécié la générosité, la compétence, le professionnalisme.
Cet amendement propose donc, sur la base du volontariat, la création de groupements de santé de territoire. Le parcours de soins doit pouvoir allier public et privé.
Et n'ayons pas peur du contrôle parlementaire : c'est notre boulot ! Quand nous avons voté une mesure, nous vérifions ensuite qu'elle est bien appliquée.
Mme Justine Benin applaudit.
Nous sommes bien d'accord : des coopérations doivent se forger au sein d'un bassin de vie entre le public et le privé. Le décloisonnement, vous le savez, est important à nos yeux. Toutefois la rédaction de votre amendement est floue et ne reflète pas vos intentions. Avis défavorable.
L'amendement de M. Vigier est très intéressant. Monsieur le ministre, les groupements de coopération sanitaire – GCS – ont été votés il y a quelques années, et si la création des GHT les a fait passer dans l'ombre, il en existait 350 ou 400. Ils représentaient à la fois le privé et le public. Que sont-ils devenus ?
Monsieur le ministre, vous vous êtes félicité, pendant la crise sanitaire, de la coopération entre public et privé ; vous l'avez revendiquée, même ! Or l'amendement de Philippe Vigier vise à la faire vivre concrètement en créant des passerelles entre le public, les ESPIC, les cliniques et les CPTS. Cette coopération a fonctionné pendant la crise, même si elle a peut-être été insuffisante – ce que l'on peut regretter.
Nous soutiendrons cet amendement.
M. Maxime Minot applaudit.
J'ai, je l'avoue, trouvé la réponse du ministre un peu courte ! Dans mon département, qui les hôpitaux publics vont-ils chercher quand il s'agit de faire le diagnostic des tests PCR ? Je vous pose simplement la question. Eh bien, ils vont chercher les établissements privés ! De la même façon, le privé va chercher le public lorsque des pathologies très spécifiques nécessitent des plateaux techniques très performants. Franchement, après la crise de la covid-19, nous ne pouvons plus nous payer le luxe de laisser notre système de santé fonctionner en tuyaux d'orgue ! Et si la rédaction ne convient pas, réécrivez l'amendement – j'ai beaucoup d'humilité, madame la rapporteure ! On vit de bonne soupe et non de beau langage : l'essentiel, c'est d'avancer.
Je ne vous ai pas répondu longuement tout à l'heure, monsieur Vigier, car vous étiez debout pour reprendre la parole dès la fin de l'intervention de Mme la rapporteure… Je me suis dit que j'interviendrai après vous, après avoir un peu mieux appréhendé votre proposition.
Je comprends parfaitement votre logique, et j'entends tous ceux qui appellent à davantage de coopération entre public et privé. La crise sanitaire a été l'occasion de mettre en place des coordinations. Les CPTS sont un très bel outil ; elles marchent très bien là où elles existent.
Mais les GHT, c'est une stratégie de groupements publics ; le secteur privé a sa propre stratégie de concentration, avec de grands groupes de cliniques privées. Ce que vous proposez, c'est donc une strate supplémentaire, territoriale.
Une artiste décédée aujourd'hui a chanté : « j'aime les gens qui doutent, les gens qui trop écoutent leur coeur se balancer »… Nous pouvons peut-être douter et nous écouter, chacun à notre tour. C'est ce que l'on appelle un dialogue !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
De mémoire, il existe dix-sept ou dix-huit strates d'organisations territoriales de santé. Autrement dit, il y a dix-sept ou dix-huit façons de déterminer ce qu'est un territoire de santé, selon ce que l'on prend en considération : la médecine de ville, la médecine hospitalière, les coopérations, etc.
On pourrait évidemment en créer d'autres, mais les outils existent : les GCS permettent des mutualisations au sein du secteur public, au sein du secteur privé ou entre établissements publics et privés ; les CPTS, cellules de coordination territoriale entre l'hôpital public, le secteur privé et la médecine de ville, sont en plein développement ; les GHT, dont nous discutons depuis un bon moment, permettent les stratégies de regroupement au sein du secteur public.
Nous n'avons pas besoin de créer un nouvel outil. Ce qu'il faut faire, c'est pousser, dans les territoires, les acteurs à se coordonner et à travailler davantage ensemble.
Je comprends la philosophie de notre collègue Philippe Vigier. Il est très clair que la coordination et la coopération entre les secteurs public et privé ont été essentielles lors de la crise. Néanmoins, la présente proposition de loi étant un texte de simplification, évitons de créer un outil supplémentaire. Peut-être conviendrait-il tout simplement d'intégrer les établissements privés dans les GHT.
L'amendement no 163 n'est pas adopté.
L'article 7 bis prévoit la création d'un numéro national unique dédié à la santé, le 113, ce qui est une fausse bonne idée. Les membres du groupe Les Républicains pensent profondément qu'il faut laisser aux différents territoires la possibilité de choisir l'organisation qui leur convient.
Je ne suis pas un spécialiste des questions de santé, mais je m'appuie sur une expérience de terrain de plusieurs années dans l'Yonne. Dans ce département, tous les acteurs de terrain, tant les professionnels de santé – les médecins, les infirmiers, les ambulanciers – que les professionnels des secours – les sapeurs-pompiers – , avec le soutien unanime des élus nationaux et territoriaux, plaident pour la création d'un centre départemental de réception et de régulation des appels d'urgence et des appels de secours, autrement dit d'une plateforme départementale du 15 et du 18, qui assurerait en outre la régulation des services assurant la permanence des soins.
Or ce serait impossible si nous adoptions l'article 7 bis tel qu'il est rédigé, car nous devrions alors tous converger vers un modèle national unique, celui du 113. Laissons aux territoires la possibilité de s'organiser et respectons la voix de la démocratie sanitaire, monsieur le ministre ! Dans l'Yonne, le conseil territorial de santé a validé à l'unanimité la création d'une plateforme commune 15-18. Or, depuis trois ans, le directeur général de l'ARS fait preuve d'obstination bureaucratique : il n'écoute jamais les acteurs de terrain ni les élus, malgré leurs démarches communes. Il y a là un problème. Faisons confiance aux acteurs de terrain, écoutons les professionnels du soin et des secours, tenons compte de leur expérience !
Dans certains départements, notamment l'Yonne, il convient de créer une plateforme commune 15-18 ; dans d'autres, il ne faut sans doute pas retenir ce modèle. Acceptons une diversité dans notre organisation et refusons, dès lors, d'adopter l'article 7 bis en l'état. Par son caractère uniforme, le dispositif prévu empêcherait les territoires de trouver des solutions adaptées à leurs besoins et à ceux de la population.
M. Maxime Minot applaudit.
Je vous remercie, madame la présidente, de m'écouter toujours avec la même patience.
Dans votre département de l'Isère, monsieur le ministre, vous êtes assis sur un véritable baril de poudre, qui va vous exploser à la figure – je vous le dis franchement et en toute décontraction. Depuis qu'on s'est organisé autour de Grenoble, avez-vous affirmé tout à l'heure, tout va mieux, malgré quelques petits problèmes. Or je me suis un peu renseigné, figurez-vous !
Pour ma part, je n'en dirai pas plus, l'article 7 ayant été supprimé. En revanche, d'autres parlent beaucoup, notamment certains de vos proches : « On voit que le coronavirus revient à la hausse, alors que les lits sont toujours fermés » ; « Des patients testés positifs au covid côtoient même des patients négatifs » ; « Le mal est très profond » ; « La crise du covid est un accélérateur des problèmes qui existaient déjà dans les hôpitaux publics » ; « On a toujours été en sous-effectif »…
Dès lors que nous avons décapité votre canard en supprimant l'article 7, monsieur le ministre, je propose que nous écrivions une vraie loi relative à la santé en France. Le secteur est en train de mourir, car nous avons mis nos pas dans ceux des auteurs de la réforme territoriale qui a consisté à créer des intercommunalités XXL et des régions plus vastes encore. Nous en voyons désormais les résultats : pas un euro n'a été économisé et le territoire est dévasté !
Cela fait plus de dix ans qu'il est question de créer une plateforme téléphonique unique pour les appels relatifs aux soins non programmés – je le sais pour avoir présidé pendant cinq ans un service départemental d'incendie et de secours, SDIS, le sujet ayant été évoqué également par les sapeurs-pompiers, comme l'a rappelé Guillaume Larrivé.
Vous proposez, monsieur le ministre, de créer un numéro unique, le 113, qui remplacerait tous les numéros existants. L'idée est intéressante, mais vous procédez un peu à la va-vite, par le biais d'un amendement adopté en commission. Nous avons du mal à comprendre comment l'on pourrait traiter à la fois, avec ce dispositif, la demande d'un citoyen atteint d'une forte grippe et celle d'un citoyen victime d'un problème cardiaque – tel est bien le problème posé.
Mes chers collègues, comme à nombre d'entre vous, je suppose, les sapeurs-pompiers m'ont fait part de leur crainte d'un amalgame avec le 112, ce qui serait source de confusion au sein de la population.
Qui plus est, aucune étude d'impact n'a été réalisée. C'est pourquoi je demande la suppression pure et simple de l'article 7 bis. Gardons-nous d'aller trop loin et donnons-nous le temps de trouver, dans les prochains mois, une solution pertinente et efficace, que toutes et tous attendent.
Il n'est pas envisageable que nous en restions à cet article 7 bis, introduit par un amendement adopté en commission. Plusieurs de mes collègues l'ont dit, la logique de proximité plaide pour que les territoires qui le souhaitent et sont déjà prêts puissent créer une plateforme départementale de réception, de traitement et de régulation de ces appels.
Or, même s'il devait y avoir in fine une convergence vers un dispositif de numéro unique, ces démarches en sont à l'origine déconnectées, car elles exigent que les équipes concernées se synchronisent et manifestent le souhait de travailler ensemble, de façon à répondre aux attentes des patients dans les territoires.
Généraliser un tel dispositif sur le territoire national sans tenir compte des spécificités territoriales serait une erreur, qui plus est par un amendement à une proposition de loi adopté en commission.
La quasi-totalité des territoires expriment le souhait que la gestion des appels soit assurée au niveau départemental. Il faut déverrouiller les blocages administratifs pour que ceux qui sont prêts puissent agir rapidement en ce sens.
Nous examinons un texte relatif à la santé, mais sachez que les forces de sécurité, en particulier les services de police et de gendarmerie, sont en train de prendre des directions différentes en matière de gestion des appels qui leur sont adressés. Or je crains fort que le processus qu'elles ont engagé ne soit irréversible si on le laisse se poursuivre.
L'article 7 bis prévoit que l'instauration du service d'accès aux soins s'accompagnera de la création d'un numéro unique dédié à la santé, le 113. Or, avant d'être inscrite dans un texte de loi, celle-ci devrait être débattue dans un cadre beaucoup plus large ; elle devrait faire l'objet d'une concertation avec toutes les parties intéressées. En effet, elle ne fait pas l'unanimité au sein des services de secours et d'urgence.
La création du 113 irait à l'encontre de la volonté de faire du 112, numéro d'urgence européen, le numéro unique pour tous les appels de cette nature, qu'ils relèvent du SAMU – service d'aide médicale urgente – , de la police, de la gendarmerie ou des sapeurs-pompiers.
En laissant subsister deux numéros, l'un dédié aux secours et à la sécurité – le 112 – , l'autre dédié à la santé – le 113 – , vous maintiendriez l'organisation inefficace et insuffisamment coordonnée qui résulte de la coexistence du 18 et du 15 ; vous renonceriez à une importante mesure de simplification et de modernisation de l'action publique.
Au vu de ces nombreuses interrogations, nous demandons à notre tour la suppression de l'article 7 bis, ajouté en commission.
M. Jean Lassalle applaudit.
La parole est à M. Pierre Dharréville, pour soutenir l'amendement no 67 .
Il y a un imbroglio autour de l'article 7 bis. Il convient effectivement de progresser en matière d'organisation des secours et de l'accès aux soins, mais on ne peut pas le faire de la sorte, au détour d'un amendement adopté en commission. Cela mérite un véritable travail avec les nombreux acteurs concernés, …
… qui tienne compte des différentes expérimentations menées et permette d'aboutir à une solution réellement partagée.
La proposition que vous mettez sur la table a suscité de nombreuses objections, eu égard notamment au numéro d'urgence européen, mais aussi à l'activité de secours déployée par les pompiers. Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine a lui aussi déposé un amendement de suppression, car nous pensons que la solution n'est pas la bonne et que la méthode employée ne convient pas.
La parole est à M. Guillaume Larrivé, pour soutenir l'amendement no 132 .
Je souhaite ajouter quelques arguments à ceux que j'ai avancés lors de mon intervention liminaire sur l'article.
Vous le savez, monsieur le ministre, l'Assemblée des départements de France a saisi l'ensemble des députés et leur a fait part de ses vives interrogations et de sa désapprobation quant à l'article 7 bis tel qu'il est rédigé. Les diverses organisations de sapeurs-pompiers nous ont également exposé leurs doutes.
Il y a un véritable micmac dans le débat public : tout se passe comme si la maison santé plaidait pour le 113, et la maison pompiers, pour le 112. Or, s'il y a plusieurs numéros uniques, il n'y a plus du tout de numéro unique. La confusion règne.
N'étant pas familier du code de la santé publique, à la différence de plusieurs d'entre vous, je me suis référé à son article L. 6311-2, que l'article 7 bis tend à modifier. Selon moi, il n'est pas si mal, et il serait imprudent de le modifier, car sa rédaction autorise diverses modalités d'organisation.
Dans certains départements, notamment l'Yonne, on se dirigerait vers une coopération entre le 15 et le 18 – à condition que l'ARS l'accepte. Dans d'autres, on expérimenterait plutôt un rapprochement des numéros dédiés aux urgences et à la permanence des soins. Or il est possible de faire l'un ou l'autre à droit constant.
À ce stade, nous n'avons pas intérêt à figer un modèle d'organisation dans la loi. Faisons plutôt vivre les expérimentations territoriales et retrouvons-nous dans quelques mois pour en dresser le bilan. Peut-être serons-nous alors en mesure d'ajuster le cadre législatif, au vu des expériences de terrain et après une vraie concertation. Cela me semblerait plus raisonnable que d'adopter dans la précipitation un article écrit avec les pieds !
La crise sanitaire que connaît notre pays du fait de l'épidémie de covid-19 renforce le besoin de simplification et de mise en cohérence de l'organisation des appels d'urgence. C'est ce que demande le Président de la République depuis le 6 octobre 2017. Or l'article 7 bis introduit en commission revient à juxtaposer un nouveau numéro aux numéros européens et français déjà existants, ce qui ne va ni dans le sens d'une simplification ni dans celui d'un gain de lisibilité pour nos compatriotes. La question est sérieuse : il s'agit de donner les bons outils à l'ensemble des services de secours pour leur permettre de répondre le plus rapidement possible aux urgences, sans délaisser les services d'accès aux soins non urgents. Le groupe d'études sur les sapeurs-pompiers volontaires de l'Assemblée nationale traite de ce sujet difficile depuis un an et des propositions ont été faites dans la proposition de loi relative à la sécurité civile qui sera bientôt examinée en séance. La question mérite un débat plus large et plus concerté que la simple adoption d'un amendement au sein d'une proposition de loi qui, à l'origine, n'avait pas l'ambition d'y répondre. C'est pourquoi il est proposé de revenir sur l'amendement adopté en commission en supprimant l'article 7 bis.
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l'amendement no 185 .
Pour compléter l'argumentaire de mes collègues, j'ajouterai que la proposition de créer un numéro dédié à la santé, qui suscite l'incompréhension de nombreux professionnels de secours, va à l'encontre de l'objectif attendu d'une simplification et d'une meilleure lisibilité pour nos concitoyens. À bien y réfléchir, c'est un non-sens. Il convient de retirer l'article et de poursuivre la réflexion dans un cadre élargi.
La parole est à Mme Isabelle Valentin, pour soutenir l'amendement no 217 .
Le numéro d'appel unique du 113 n'a pas fait l'objet d'une étude d'impact et n'a pas été discuté avec les professionnels concernés. Il inquiète les professionnels de secours, et notamment les sapeurs-pompiers : s'il était mis en place, le dispositif fermerait la porte à toute expérimentation de coopération territoriale entre le SDIS et le SAMU.
La parole est à Mme Annie Chapelier, pour soutenir l'amendement no 274 .
Pour ne pas être redondante, je dirai simplement que le service d'accès aux soins – SAS – est une excellente initiative, mais que corréler celle-ci à un numéro unique imposé au détour d'un article additionnel adopté en commission freinerait la dynamique d'installation du SAS dans les territoires. Nous devrions plutôt travailler avec les SDIS et proposer un numéro recevable par toute la population. Ajouter un numéro supplémentaire, c'est prendre le problème à l'envers : nous le percevons comme un numéro unique, mais pour le reste de la population, ce ne sera jamais qu'un numéro supplémentaire ; le moment venu, on aura toujours en mémoire le 15 ou le 18 avant de penser au 113.
L'article 7 bis a été inséré en commission à l'initiative de Thomas Mesnier, rapporteur général de la commission des affaires sociales, …
… mais il semble qu'il n'y ait pas eu de concertation avec les acteurs concernés – ou du moins pas devant nous, car elle a été menée rapidement la semaine dernière. Une telle méthode crée la confusion dans la construction du service d'accès aux soins, le fameux SAS. Les professionnels ont-il été consultés ?
Il me semble qu'ils sont tout aussi concernés que les services d'urgences. Instaurons plutôt des conditions propices à l'élaboration d'un nouveau système de coordination, avec tous les acteurs concernés.
Il me semble que nous examinerons dans quelques minutes un amendement du Gouvernement ; il serait souhaitable de l'étudier, même s'il arrive lui aussi de manière soudaine, en pleine séance, car nous devons sortir de cette situation conflictuelle. Le SAMU et les urgentistes sont tout à fait favorables à la proposition de M. Mesnier, mais il faut aussi penser aux pompiers et à la médecine de ville, qui ont dû vous faire part de leurs observations, monsieur le ministre. C'est tout un ensemble d'acteurs que nous devons réunir dans les meilleures conditions possibles.
La parole est à Mme Josiane Corneloup, pour soutenir l'amendement no 383 .
J'abonde dans le sens de mes collègues concernant le numéro unique qui remplacerait les différents numéros existants.
Il serait dommage de chambouler les débats et les expérimentations actuellement en cours pour faire du 112, géré par les sapeurs-pompiers, le numéro unique d'appel d'urgence. Je crois que cet article 7 bis entraînerait de la confusion et de l'illisibilité, et je pense qu'il faut le supprimer.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Nous avions également déposé un amendement de suppression, pour deux raisons. Tout d'abord, je tiens à dire que nous sommes favorables au SAS lancé par le Gouvernement et que notre seule question concernait la création d'un numéro unique, le 113 – car il nous semble que le débat n'est pas encore tranché et que l'Assemblée a encore besoin de se réunir, d'échanger et de mener des auditions.
Plusieurs options sont sur la table : le 113, défendu par un certain nombre d'entre vous, et le 112, défendu par d'autres députés. Elles méritent que l'Assemblée prenne le temps d'en discuter.
La deuxième raison pour laquelle nous avions déposé l'amendement tenait au flou de l'article concernant la place des sapeurs-pompiers, qui sont pourtant l'un des acteurs principaux des urgences – avec le SAMU, bien sûr, il ne s'agit pas ici d'un jugement de valeur. L'amendement du Gouvernement qui sera présenté juste après cette série semble néanmoins répondre à nos interrogations. Pour cette raison, nous retirons le nôtre.
L'amendement no 441 est retiré.
L'amendement no 445 de M. Paul-André Colombani est défendu.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements ?
Je suis défavorable à ces amendements de suppression. Nous allons discuter de l'amendement déposé par le Gouvernement ; d'après les débats que nous venons d'avoir, celui-ci me semble en mesure d'emporter l'adhésion de l'ensemble de l'Assemblée. Quoi qu'il en soit, la commission a adopté l'article ; elle est donc défavorable à sa suppression.
Sur l'amendement no 521 du Gouvernement, je suis saisie par le groupe La République en marche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Si vous m'y autorisez, madame la présidente, je vais, dans le même mouvement, répondre sur les amendements de suppression et défendre l'amendement no 521 du Gouvernement.
Tout d'abord, je remercie Thomas Mesnier, qui est tenace – à raison – sur la question du service d'accès aux soins depuis la mission qu'il a effectuée avec le professeur Carli, patron reconnu des SAMU de France. Cette initiative préfigurait ce qui commence à apparaître dans le reste du territoire. En effet, vous avez été nombreux ici, quelle que soit votre couleur politique, à soutenir des expérimentations de SAS dans vos territoires respectifs. Vingt-deux ont été retenues, qui couvrent déjà 40 % de la population française, et d'autres viendront. Entre le rapport de Thomas Mesnier et la pratique, il s'est donc écoulé peu de temps, pour un sujet qui n'est pourtant pas neuf : l'organisation territoriale des services d'urgence.
L'amendement adopté en commission proposait deux dispositions. La première – à laquelle je crois comprendre que nombre d'entre vous, y compris parmi ceux ayant déposé un amendement de suppression, sont favorables – est la consécration législative du SAS, qui existe déjà sous forme expérimentale dans les territoires, afin que l'expérimentation puisse se poursuivre – il s'agit de permettre la coopération entre la ville et l'hôpital dans l'accès aux soins non programmés. Cette coordination est souhaitée, souhaitable et désormais opérationnelle dans nombre de territoires. Merci aux professionnels de santé qui se sont organisés entre eux afin d'assurer la coordination et la régulation dans de nombreux domaines. L'année dernière, j'avais ainsi fait adopter un amendement permettant aux dentistes de faire de la régulation le week-end afin d'éviter que les personnes qui ont une rage de dents ne se retrouvent aux urgences. Le dispositif a été enrichi, et c'est formidable, car c'est une très bonne solution. Cette partie de l'amendement est consensuelle – je me permets de parler en votre nom – et il serait dommage de la retirer de la proposition de loi.
La deuxième partie concerne le fameux numéro unique. On peut être pour le numéro unique santé et contre le numéro unique pompiers, pour le numéro unique santé et pour le numéro unique pompiers, contre le numéro unique santé et pour le numéro unique pompiers, etc. En conséquence, le dossier patine depuis un moment, indépendamment du bord politique de chacun ; d'ailleurs, certains ont pu être favorables à une version puis changer d'avis plusieurs années après, ce qui est tout à fait correct, mais ne fait pas avancer le dossier. L'amendement adopté en commission consacre dans le droit un numéro unique santé, provoquant les réactions attendues ; ce n'est pas la première fois et, à mon sens, pas la dernière fois, que l'Assemblée a ce débat.
L'amendement que le Gouvernement présente propose donc de retenir toute la première partie, c'est-à-dire l'important travail mené par le député Mesnier sur le SAS, et de retirer toute allusion au numéro unique, afin que le dialogue puisse se poursuivre dans les territoires et au niveau national.
Cela permettra, passez-moi l'expression, de ne pas jeter le bébé avec l'eau du bain. Je vous propose donc de nous retrouver autour de l'objet politique SAS, que vous êtes nombreux à réclamer pour vos territoires respectifs, et de retirer les amendements de suppression au profit de l'amendement gouvernemental no 521.
Vous aurez compris, chers collègues, que nous discutons à la fois des amendements de suppression et de l'amendement no 521 du Gouvernement. Je ne redonnerai donc pas la parole à la suite de la présentation de l'amendement du Gouvernement.
La parole est à M. Julien Dive.
Monsieur le ministre, je souhaite vous interroger sur un sujet plus particulier. En cas de carence d'ambulances privées, quand une personne appelle le 15, la carence est couverte par les sapeurs-pompiers. Le phénomène, qui progresse de manière exponentielle, représente un surcoût exorbitant pour les SDIS puisque le tarif fixé au niveau national rembourse la carence à hauteur de 120 euros alors qu'elle coûte six, sept ou huit fois plus au département du SDIS en question.
Dans mon département de l'Aisne, il a représenté un surcoût, ou plutôt une perte, de 3 millions d'euros. Avez-vous évalué l'importance des carences potentielles à supporter par les sapeurs-pompiers dans le cadre du SAS et du numéro unique, et surtout le coût qu'elles pourraient représenter pour les départements de France ?
Je ne crois pas que l'article remette en question l'intérêt du SAS, mais il y a un problème de méthode dans la proposition de loi, madame la rapporteure. L'article 7 bis est arrivé en commission sans concertation, et voilà que le Gouvernement propose une réécriture totale par voie d'amendement. Vous connaissez l'adage : chat échaudé craint l'eau froide, et l'on a vu ce qui s'est passé la semaine dernière avec une réécriture proposée au dernier moment. Il me semble que nous devrions prendre du recul et faire preuve de sagesse. Nous n'aimons pas la méthode qui consiste à déposer un amendement à la hussarde au dernier moment, sans aucune concertation et sans que l'on ait pu en parler aux professionnels concernés.
En outre, l'amendement renvoie tout au pouvoir réglementaire.
Il me semble problématique de dessaisir le Parlement sans nous donner une idée claire de ce que vous allez faire.
Il faut appliquer la méthode du « en même temps ».
Pour éviter de déstructurer les offres de soins déjà organisées sur le territoire, il est souhaitable que tout en créant un numéro commun dédié à la santé, nous maintenions les numéros déjà existants pour répondre aux demandes de soins non programmées.
Pour ne pas dessaisir le Parlement de ces questions importantes, je vous propose d'élargir la réflexion à un amendement de repli, le no 388, qui permet de conserver le SAS mais supprime les alinéas 4 et 5, relatifs au numéro national unique. Je vous invite d'ores et déjà à le voter.
L'article 7 bis a été introduit en commission des affaires sociales la semaine dernière suite à l'adoption de mon amendement no 248 .
Celui-ci n'a pas été écrit à la va-vite, monsieur Larrivé, mais a fait l'objet d'un travail de longue haleine. Il reprend la mesure 1 du pacte de refondation des urgences et la mesure 26 du Ségur de la santé.
Il fallait l'insérer dans la version initiale de la proposition de loi, alors !
Il a fait l'objet de plusieurs mois de concertations avec la médecine de ville, la médecine hospitalière, les pompiers et les ambulanciers, soit tous les acteurs du secours, de l'urgence et du soin non programmé, dans le cadre de la mission que j'ai menée l'année dernière avec le professeur Pierre Carli et toute une équipe dédiée.
Le service d'accès aux soins, c'est la promesse d'un meilleur accès aux soins, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept, où que l'on soit sur le territoire ; c'est une réponse là où souvent, malheureusement, en France, en 2020, il n'y en a pas.
Ce service permettra de réguler les flux, en assurant aux patients un lien vingt-quatre heures sur vingt-quatre avec des médecins généralistes, mais aussi, peut-être, avec d'autres professionnels de santé, en plus des dispositifs existants – l'aide médicale d'urgence, comme les autres numéros et services de secours.
Il est très important d'inscrire cet article dans la loi. Outre la création du SAS, il permettra une avancée majeure dans la cogestion entre médecine hospitalière et médecine de ville, favorisant les passerelles et le travail en commun entre ces deux mondes de la santé. On entend tout le temps qu'il faut renforcer leurs liens ; avec cet article, nous le faisons.
J'entends bien que le numéro national unique n'est pas consensuel, comme l'a rappelé M. le ministre – j'espère que nous arriverons un jour à un consensus en la matière.
Après avoir écouté de nouveau tous les acteurs – pompiers, représentants de la médecine de ville et de la médecine hospitalière – , je crois sage de renoncer à inscrire la création d'un numéro dans la loi, mais de maintenir les dispositions relatives au SAS.
La phase pilote, déjà lancée, permettra d'avancer en laissant dddqdqdqfdqaux territoires et aux professionnels de santé la liberté de s'organiser pour améliorer la réponse qu'ils apportent aux patients – c'est là tout l'intérêt du SAS.
Je vous invite donc à ne pas voter ces amendements, qui supprimeraient la belle promesse du SAS, et à adopter celui du Gouvernement.
Monsieur le ministre, cet article a été introduit par voie d'amendement en commission ; le Gouvernement propose maintenant de le réécrire dans l'hémicycle.
Or, lors des auditions conduites en commission par Mme la rapporteure, nous n'avons pas pu discuter du SAS avec les représentants des pompiers, des SAMU, des SMUR – services mobiles d'urgence et de réanimation – et les syndicats de médecins libéraux.
J'entends bien que M. Mesnier a mené un travail important et les a auditionnés sur cette question ; mais ce n'est pas notre cas. Il faut donc vous faire confiance.
Monsieur le ministre, puisque vous proposez de réécrire l'article, pouvez-vous au moins nous indiquer si les services des pompiers sont d'accord sur le principe ?
Avez-vous aussi consulté les SMUR et les SAMU pour savoir s'ils étaient favorables aux dispositions concernant le SAS ?
L'amendement du Gouvernement vise à remplacer les mots « peut être » par le mot « est » au troisième alinéa de l'article L. 6311-2 du code de la santé publique, ce qui aurait pour conséquence d'impliquer systématiquement les médecins libéraux dans le SAS. Mais sont-ils d'accord ?
En somme, comme l'amendement nous est soumis sans que nous ayons pu les auditionner, nous aimerions savoir s'il a été rédigé en concertation avec les pompiers, les SMUR, les SAMU et les syndicats de médecins libéraux.
Mme Michèle de Vaucouleurs applaudit.
Personne ici ne remet en question la pertinence des SAS. Il n'y a qu'à voir l'engouement qu'a suscité dans les territoires l'annonce du lancement de vingt-deux sites pilotes en la matière.
Dans mon département, le Gard, la candidature du CHU de Nîmes et de ses partenaires médicaux n'a pas été retenue ; je peux vous dire qu'ils sont extrêmement déçus. Tout le monde perçoit l'importance et la pertinence de ce dispositif, et nous espérons que tous les territoires seront soutenus.
Puisque tout le monde est d'accord, pourquoi le Gouvernement ne permet-il pas davantage d'expérimentations que les vingt-deux prévues ?
Par ailleurs, puisque l'expérimentation des SAS commence en janvier 2021, avant une généralisation prévue pour la fin de l'année prochaine, pourquoi ne pas attendre pour déposer un amendement visant à réintroduire de la souplesse et à améliorer l'organisation et le statut juridique des SAS ?
Il faut voir l'engouement que l'expérimentation suscite ; tous les acteurs réfléchissent aux manières de créer un dispositif pertinent pour leur territoire. Je m'interroge donc sur l'utilité de l'amendement du Gouvernement.
Monsieur Mesnier, si je salue la création du SAS, que vous avez bien présenté, le dispositif concernant le numéro 113 ne convient pas.
J'apporte mon soutien à l'article créé grâce à l'amendement de Thomas Mesnier. Au-delà du choix du numéro, se pose la question de l'interlocuteur de nos concitoyens. On sait que plus de 70 % de leurs appels concernent la santé, et que si les pompiers décrochent, ils risquent fort de les orienter vers les urgences. Or nous nous plaignons tous d'une saturation de ces services.
Créer un numéro et mettre au bout du fil des médecins, qui savent quand orienter les patients vers la médecine de ville et quand les orienter vers les urgences, c'est quand même du bon sens !
Je soutiens donc la création du numéro prévu à cet article et regrette que nous n'avancions pas sur ces questions.
Évitons les dogmes.
Notre objectif ne doit pas être de défendre la corporation des pompiers, aussi noble soit-elle, mais de répondre à une problématique de santé. Il faut donc un numéro d'urgence santé.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 180
Nombre de suffrages exprimés 177
Majorité absolue 89
Pour l'adoption 78
Contre 99
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 180
Nombre de suffrages exprimés 158
Majorité absolue 80
Pour l'adoption 114
Contre 44
Monsieur le ministre, mettez à profit le temps qui vous est donné pour réécrire un véritable projet pour la santé dans notre pays, maintenant que l'article 7, qui était le principal de ce texte, a été rejeté et que nous ne savons plus très bien qui est pour et qui est contre le reste de la proposition de loi.
Beaucoup de praticiens le disent : nous sommes épuisés. Nous n'avons tiré aucun enseignement de la première vague de covid-19, si bien que nous sommes toujours aussi gênés par la seconde.
C'est l'éternel problème : où accueillir les patients ? Où installer les centres de réanimation ? Disons-le, ce sont ces questions qui amplifient le problème du covid-19 sur l'ensemble du territoire.
Que se passera-il en cas de troisième vague, puisque nous ne sommes pas en mesure de tirer le moindre enseignement des deux premières ?
Reprenons notre calme. Le secteur de la santé a été très gravement mis à mal depuis une trentaine d'années. Tout le monde y a sa part, et il n'y a lieu d'en être fier pour personne.
Il faut faire savoir au président Macron que s'il a été choisi par les Français, c'est pour apporter un changement en profondeur. Or la santé est notre bien le plus précieux. Recommençons donc le travail.
La parole est à M. Sébastien Jumel, pour soutenir l'amendement no 31 visant à supprimer l'article 8.
Comme vous le savez, les membres du groupe de la Gauche démocrate et républicaine sont très attachés à un principe : quel que soit leur territoire de résidence, nos concitoyens doivent avoir accès à la même qualité de services publics. C'est vital en matière de soins.
Cet article permet aux directeurs d'établissements supports, en lien avec le président de la commission médicale d'établissement, de déroger aux principes ordinaires en matière d'organisation des soins. Mais sa rédaction est trop floue, trop ouverte, alors que la question est très sensible, ce qui entraîne le risque de renforcer les inégalités territoriales.
Cet article permet aux établissements, après avis des différentes commissions qui y siègent, de s'organiser en pôles ou en services. En somme, il donne de la souplesse grâce à des dérogations – il ne s'agit pas d'obligations.
Pourquoi ne pas donner aux acteurs la possibilité d'organiser leurs établissements comme ils le veulent ? Vraiment, je ne comprends pas votre opposition. Avis défavorable.
L'article 8 de cette proposition de loi est emblématique du Ségur de la santé : s'il y a des articles qui ont fait consensus lors de ces négociations, ce sont bien ceux qui prônent la liberté d'organisation.
Pour ma part, j'étais même enclin à mettre fin au caractère opposable de toute une partie du code de la santé publique relative à l'organisation des hôpitaux. Si la modalité finalement choisie dans ce texte est différente, le résultat est à peu près identique.
Cela n'affectera pas la qualité des soins. Il s'agit d'arrêter d'imposer un unique modèle d'organisation aux hôpitaux, quelles que soient par ailleurs leur taille et leur structuration.
Les schémas rigides ont dominé avant la loi portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite loi HPST, mais aussi après celle-ci, alors qu'ils ne correspondent pas nécessairement aux attentes. Un hôpital de 500 lits n'a pas vocation à être organisé de la même manière qu'un hôpital de 9 000 lits, par exemple.
Avec cet article, nous proposons donc aux acteurs, si les règles actuelles de fonctionnement ne leur conviennent pas, et qu'ils s'accordent sur d'autres, d'organiser eux-mêmes leur gouvernance interne, pour la rendre plus démocratique et ouverte – il pourra ainsi être possible d'élire les chefs de service – et accorder davantage de place aux soignants. Libre à eux !
Comme la rapporteure, je ne comprends donc pas votre amendement de suppression. À moins que l'organisation actuelle de l'hôpital, selon un modèle unique, rigide, fermé, insuffisamment démocratique ne vous convienne mieux ? Mais je doute que ce soit la position du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
L'amendement no 31 n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l'amendement no 345 .
Cela ne nous paraît pas pertinent, dans la mesure où ce conseil, composé d'élus et d'usagers, a un rôle à jouer dans la réorganisation de l'établissement.
En outre, cet amendement supprime l'alinéa 6, qui alourdit la procédure de manière superfétatoire.
Avis très défavorable. Cher Jean-Pierre Door, vous êtes le premier à dire qu'il faut remédicaliser la gouvernance de l'hôpital. On vous propose un article grâce auquel ce sont les soignants et les médecins qui pourront, avec le directeur, décider des modalités d'organisation interne, et vous déposez un amendement qui confie cette tâche au maire !
Je ne vois pas du tout en quoi le président du conseil de surveillance ou le président du directoire sont habilités à dire comment doit s'organiser un établissement en interne : c'est exactement l'inverse de l'esprit du Ségur et de la proposition de loi actuelle.
Honnêtement, pour avoir discuté avec vous depuis des années des schémas d'organisation, je pense que nous aurions rêvé de pouvoir adopter un article comme celui que nous propose Stéphanie Rist. Après tous les débats que nous avons eus autour de la loi HPST, cette idée s'est concrétisée pendant la crise de la covid, et cela a très bien fonctionné.
Ne demandez donc pas au directoire de décider de l'organisation, pièce par pièce.
Monsieur le ministre, vous présentez l'amendement de Jean-Pierre Door de manière un peu biaisée. Je le dis d'autant mieux qu'il y a ici, non loin de moi, un maire qui est médecin et a assuré la présidence du conseil de surveillance en ayant une parfaite connaissance de l'hôpital.
Ce que demande cet amendement, au-delà d'une remédicalisation de la gouvernance, c'est qu'on y associe davantage les élus locaux. Les parlementaires sont absents des comités stratégiques des GHT. Or ils ont été largement associés à la gestion de la crise sanitaire et peuvent à ce titre faire remonter les difficultés rencontrées.
Il faut également associer davantage les élus des établissements publics de coopération intercommunale, les EPCI, qui ne sont pas forcément membres du conseil de surveillance. Bref, il faut réarmer la gouvernance en la remédicalisant, mais aussi en s'appuyant sur les élus locaux.
L'amendement no 345 n'est pas adopté.
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement no 513 rectifié du Gouvernement.
Cet amendement vise à donner plus de souplesse encore aux établissements qui le souhaitent pour leur permettre d'organiser librement en interne la gestion des structures médicales et médico-techniques, de la CME, de la commission des soins ou du directoire.
On a vu que l'autonomie avait fonctionné, et les conclusions de la mission confiée au professeur Claris ont confirmé le besoin d'une plus grande souplesse dans l'organisation. Il faut donc faire confiance aux territoires et au monde hospitalier pour trouver l'organisation qui leur convient et procéder, s'il le faut, à des ajustements en cours de route.
La commission n'a pas examiné cet amendement ; à titre personnel, j'y suis plutôt favorable.
L'amendement no 513 rectifié est adopté.
L'article 8, amendé, est adopté.
Si vous le permettez, madame la présidente, je défendrai en même temps l'amendement no 129 , qui est un amendement de repli. L'amendement no 127 fait suite à un courrier cosigné par de nombreux députés que je vous ai adressé cet été, monsieur le ministre, ainsi qu'à une question écrite formulée au printemps.
Il s'agit de permettre aux parlementaires de siéger comme membres de droit – ou à titre consultatif, comme le propose l'amendement no 129 – dans les conseils de surveillance des établissements publics de santé.
En effet, chaque année, nous sommes amenés à travailler, à amender et à enrichir le PLFSS, qui détermine le financement des établissements. Il nous paraît donc légitime de pouvoir participer à sa traduction et à sa déclinaison dans nos territoires, et le conseil de surveillance nous paraît l'instance la mieux adaptée pour le faire.
Le Ségur comme la crise sanitaire ont montré que les parlementaires pouvaient faire preuve de pédagogie et qu'ils avaient la volonté de s'impliquer sur le terrain dans la mise en oeuvre des politiques de santé.
À cet égard, la loi relative à l'organisation et à la transformation du système de santé de juillet 2019 a constitué une avancée – qui attend encore néanmoins sa traduction réglementaire – , en permettant aux parlementaires de siéger dans les CTS – conseils territoriaux de santé. Cet amendement souhaite approfondir encore la proximité des parlementaires avec les instances de santé locales.
Je conviens avec vous que la question de la répartition reste ouverte, plusieurs députés élus dans une grande agglomération pouvant être référents d'un même établissement : on pourrait, dans ces cas-là, faire appel au directeur de l'ARS ou au préfet pour organiser avec bon sens la répartition.
Il y a une forme d'iniquité dans le fait que certains parlementaires peuvent aujourd'hui participer au conseil de surveillance au titre de personnalités qualifiées, quand d'autres, qui aimeraient faire de même, restent sur le bord de la route.
La parole est à Mme Chantal Jourdan, pour soutenir l'amendement no 143 .
Cet amendement vise également à permettre aux parlementaires de siéger au sein du conseil de surveillance d'un établissement public de santé situé sur leur territoire. Il nous semble en effet utile qu'ils puissent, tout comme le maire de la commune ou le président du département dans lequel est implanté l'établissement, participer à cette instance qui joue un rôle important dans la définition de la stratégie de l'établissement, d'autant qu'ils sont régulièrement sollicités dans leurs circonscriptions sur les questions de santé.
Nous proposons ainsi que deux parlementaires – un député de la circonscription et un sénateur du département – puissent siéger au conseil de surveillance d'un établissement de santé.
Comme les amendements précédents, cet amendement propose d'intégrer dans les conseils de surveillance un député et un sénateur élus sur le territoire.
En effet, avant la loi sur le non-cumul des mandats, beaucoup de parlementaires détenteurs de mandats locaux pouvaient, à ce titre, siéger dans ces instances qui leur permettaient d'être informés de la vie du centre hospitalier de leur circonscription.
Avec la loi sur le non-cumul, les parlementaires ne sont plus représentés dans les conseils de surveillance, alors qu'ils sont saisis en permanence de sujets de santé par les usagers, les soignants ou l'ensemble du personnel médical.
Peu importe la formule qui sera retenue, mais il est nécessaire que les parlementaires puissent siéger dans les conseils de surveillance des établissements situés sur leur territoire.
M. Jean Lassalle applaudit.
Le présent amendement a pour but d'intégrer les députés dont la circonscription est le siège d'un établissement public de santé principal au sein du conseil de surveillance de celui-ci. En effet, afin d'améliorer la connaissance et le contrôle par les parlementaires du fonctionnement de ces établissements, et plus globalement du système de santé et de la politique sanitaire, il est essentiel que les députés puissent assister aux séances des conseils de surveillance.
La crise sanitaire de la covid-19 a mis en lumière le défaut d'information des parlementaires dans ce domaine, et ce serait donc une avancée essentielle pour l'information de la représentation nationale.
Ces amendements – dont l'un oublie nos amis sénateurs – posent la question de la place des élus dans la gouvernance des hôpitaux, au-delà de leur présence dans le conseil de surveillance. Il me semble que c'est un sujet dont il conviendrait plutôt de débattre dans le cadre de la loi 3D – décentralisation, différenciation et déconcentration. Avis défavorable.
La présence des parlementaires dans les conseils de surveillance est un vieux débat.
Dans mon ancienne circonscription, il y a, outre le CHU, un établissement de rééducation et au moins sept ou huit EHPAD. Si l'on compte deux ou trois heures de réunions par mois pour chaque établissement…
C'est une réalité, je le sais pour avoir été membre du conseil de surveillance d'un hôpital…
Vous parlerez après, monsieur le député ; demandez la parole à la présidente !
J'ai été membre du conseil de surveillance d'un hôpital qui n'était pas le CHU de ma circonscription, mais un gros hôpital psychiatrique public. J'y siégeais en tant que personnalité qualifiée ; l'on peut donc tout à fait être coopté quand on est parlementaire pour siéger dans un conseil de surveillance – c'est d'ailleurs assez fréquent, et je suis sûr que c'est le cas de nombre d'entre vous.
Cela étant, faut-il qu'il y ait systématiquement des parlementaires dans tous les conseils de surveillance de tous les établissements publics, et donc de tous les EHPAD ? Je ne le crois pas. C'est pourtant ce que proposent ces amendements – si vous les votez, vous serez attendus, mercredi à dix heures, au conseil de surveillance de tel EHPAD de votre circonscription.
En revanche, siéger au conseil de surveillance en tant que personnalité qualifiée pour avoir son mot à dire ou, à tout le moins, écouter et partager des idées ou des informations me choque si peu que j'avais moi-même demandé à l'être mais, en l'occurrence, pas dans ma circonscription.
Certains de vos amendements prévoient en outre que tous les établissements publics de santé doivent avoir des parlementaires dans leur conseil de surveillance, ce que je trouve assez directif. Lorsque vous avez un conseil de surveillance déjà composé de quinze membres, il n'y a pas grand sens à y rajouter des sénateurs et des députés. J'y étais déjà défavorable en tant que député, j'y suis toujours défavorable en tant que ministre.
Il y a de multiples manières de participer aux politiques sanitaires : on peut s'impliquer dans les commissions régionales de santé et d'autonomie, auprès des délégués départementaux et des directeurs généraux des ARS, ou auprès des présidents des CME.
J'ai toujours pu m'entretenir avec un directeur d'établissement, un président de CME ou un chef de service, surtout dans la circonscription où j'étais élu. Les parlementaires ont accès à toutes ces personnes.
En revanche, siéger dans toutes les réunions des conseils de surveillance de tous les établissements publics d'une circonscription ne correspond pas à l'idée que je me faisais de la fonction de parlementaire. Je ne suis pas sûr que l'on rendrait un grand service aux établissements et aux commissions concernés.
Il ne s'agit pas d'assister aux conseils d'administration de tous les EHPAD – dans ces établissements, il n'y a pas de conseils de surveillance, mais des conseils d'administration, comme vous le savez parfaitement.
La présence d'un député au conseil de surveillance d'un petit hôpital, au côté du représentant de l'intercommunalité – depuis la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite loi NOTRe, les intercommunalités désignent en effet un représentant dans les conseils de surveillance des hôpitaux de leur ressort – , peut être utile. En effet, l'expertise d'un député qui s'intéresse aux questions de santé peut être intéressante.
En outre, monsieur le ministre, vous serez sensible au fait que la présence au conseil de surveillance permet de suivre directement la mise en oeuvre des décisions. La présence du député ne serait pas obligatoire et dépendrait de son implication, mais il devrait avoir le droit d'y participer. Je regrette qu'il ne puisse pas le faire actuellement.
Il n'est pas de bon aloi de rejeter ces amendements au motif que les intenables agendas des parlementaires les empêcheraient de participer aux réunions ; en effet, les parlementaires ont l'habitude de ces situations et font en permanence des choix en fonction des priorités qu'ils assignent au mandat qu'ils exercent au nom de leurs concitoyens.
Nous voulons corriger l'effet pervers du non-cumul des mandats, qui a expulsé des conseils de surveillance de très nombreux parlementaires qui y siégeaient en qualité d'élu local.
Ces députés et sénateurs, instruits par leur présence dans ces instances, pouvaient légiférer avec pertinence. Les parlementaires sont dorénavant déconnectés de la réalité des établissements.
Nous souhaitons tous que l'organisation de l'offre de soins dans les territoires soit étudiée de manière fine et en fonction de leurs spécificités. Dans cette optique, il me paraît invraisemblable que les parlementaires, qui votent la loi, n'aient pas accès à ces instances.
Je suis proche du directeur et du personnel du seul hôpital de ma circonscription rurale. Lorsque nous nous impliquons dans un territoire et que nous débattons du Ségur de la santé, nous avons une utilité dans les conseils de surveillance, car leurs membres nous posent des questions. Nous leur expliquons notre démarche, notre stratégie et le fléchage de l'argent dans les hôpitaux. Nous jouons un rôle de relais entre le ministère, l'hôpital, son personnel et les élus locaux, qui ne sont pas forcément au courant des décisions.
La présence des parlementaires dans les conseils de surveillance ne doit pas être obligatoire, mais elle ne serait pas non plus cosmétique. Mon problème n'est pas de siéger là ou là, mais d'être proche, d'expliquer, d'écouter…
… et d'être le maillon entre le ministère des solidarités et de la santé et les établissements sur Ma santé 2022, le Ségur de la santé, l'après Ségur de la Santé, le post-Covid-19 et ce que vivent au quotidien les membres du conseil de surveillance.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et LR. – M. Philippe Vigier applaudit aussi.
Monsieur le ministre, vous avez pointé à juste titre le nombre de conseils de surveillance auxquels il faudrait assister. Ne pourrait-on pas imaginer que l'on siège dans un établissement avec une voix consultative ? Le parlementaire choisirait l'établissement en accord avec le directeur général de l'ARS ou le préfet.
Je n'ai pas eu de réponse au problème de l'iniquité que j'ai soulevé. Vous avez raison, un député peut siéger au conseil de surveillance en tant que personnalité qualifiée, mais si un parlementaire occupe la place de personnalité qualifiée, les autres parlementaires du territoire restent les bras croisés. J'ai participé à un conseil de surveillance en tant que conseiller départemental et je mesure la pertinence d'y intégrer les parlementaires pour faire de la pédagogie sur le PLFSS, mais également sur le Ségur de la santé, afin de rappeler tout l'intérêt de le connaître, de le maîtriser et de l'adopter.
M. Yves Daniel applaudit.
M. le ministre a raison de pointer le caractère récurrent de ce débat dans l'hémicycle, puisque nous avons discuté de cette question à l'occasion de l'examen d'un PLFSS.
Je ne pense pas qu'il faille siéger dans les conseils de surveillance des établissements pour expliquer et faire de la pédagogie. Je n'ai pas besoin d'être dans ces instances pour savoir ce qui se passe dans les hôpitaux. Pour cela, je rencontre les soignants et les directeurs d'établissement.
Nous sommes deux députés dans le Douaisis, l'un de la majorité et l'autre de l'opposition : nous allons prolonger nos débats dans les conseils de surveillance et pourrir leurs réunions ? C'est complètement ridicule ! Ce n'est pas le rôle du député de participer à de telles instances. Si vous voulez porter la bonne parole, prenez des rendez-vous !
M. Jean Lassalle applaudit.
Si un député de la majorité doit expliquer la politique du Gouvernement au conseil de surveillance de l'hôpital, je ne vois pas l'intérêt de sa présence.
J'ai présidé pendant dix ans un conseil de surveillance, dont j'ai été membre dix-huit ans. C'est un engagement très fort, car les hôpitaux, sans revenir sur le débat sur la direction d'hôpital, ont besoin de soutien. Je ne vais pas reparler de l'IRM de l'hôpital de Condom, mais le parlementaire doit relayer de telles demandes. Je le vois davantage dans un rôle de soutien que de pédagogue de l'action gouvernementale. Un parlementaire est utile quand ses concitoyens ont besoin de lui pour les soutenir dans leurs démarches et leurs combats.
Jamais deux sans trois, je vais encore être d'accord avec M. le ministre – mais je m'arrêterai là ! J'ai beau relire les amendements, je n'arrive pas à les comprendre. Lorsqu'il y a des problèmes sur le terrain, on organise des réunions nommées « pré-conseils de surveillance », auxquelles j'ai participé à l'invitation de syndicats ou de directeurs, qui me faisaient part de leurs difficultés avant le conseil de surveillance. J'avais ainsi interpellé Mme Agnès Buzyn avec les questions que mes interlocuteurs avaient soulevées et nous avions pu résoudre des problèmes avant le conseil de surveillance. Cela m'est arrivé deux fois depuis mon élection.
En outre, je ne vois pas l'intérêt de participer à un conseil de surveillance sans avoir de droit de vote. Lorsqu'il y a des difficultés dans les conseils de surveillance, la direction, les syndicats et les personnels savent nous trouver.
Comme le disait M. le ministre, entre les MAS – maisons d'accueil spécialisées – , les IME – instituts médico-éducatifs – , les EHPAD et les hôpitaux de proximité, nous passerions notre temps dans des conseils de surveillance. Vous seriez tranquilles, vous ne me verriez plus à l'Assemblée, mais je vous manquerais au bout d'un moment !
Sourires
Je préfère être ici pour examiner des textes de loi et défendre des amendements plutôt que de siéger en permanence dans des conseils de surveillance.
Prochaine séance, demain, à quinze heures :
Suite de la discussion de la proposition de loi visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification ;
Discussion de la proposition de loi visant à réformer l'adoption.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt-trois heures cinquante-cinq.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Serge Ezdra