La commission spéciale poursuit l'examen du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (n° 3875 rect.) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général, M. Damien Adam, M. Erwan Balanant, Mme Aurore Bergé, M. Lionel Causse, Mme Célia de Lavergne, Mme Cendra Motin, M. Mickaël Nogal et M. Jean-Marc Zulesi, rapporteurs).
Mes chers collègues, nous entamons ce soir l'examen des articles du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (n° 3875).
TITRE IER CONSOMMER
Chapitre Ier Informer, former et sensibiliser
Avant l'article 1er :
Amendement CS4677 de Mme Sylvie Bouchet Bellecourt.
Il s'agit de compléter l'intitulé du titre Ier par les mots « et éclairer », afin de cadrer les débats du Parlement. Tel quel, cet intitulé est incomplet, car il réduit les dispositions relatives à l'apprentissage des enjeux du développement durable à la seule consommation.
Les dispositions du titre Ier du projet de loi ont pour objet d'éclairer les choix du consommateur, notamment par le biais des enjeux d'éducation au développement durable. L'amendement est satisfait. Demande de retrait ou avis défavorable.
Les intitulés des titres du projet de loi reprennent ceux des groupes de travail de la Convention citoyenne pour le climat (CCC), à l'exception de celui du titre VI, qui a été ajouté pour des questions de lisibilité. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Article 1er (article 15 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire) : Affichage informant le consommateur sur les caractéristiques environnementales, ou environnementales et sociales, de biens ou de services
Amendement CS2544 de Mme Véronique Riotton.
L'affichage environnemental est plébiscité pour inciter au changement des comportements. Ce sujet complexe est travaillé depuis le Grenelle de l'environnement. Certains secteurs d'activité sont prêts. L'amendement vise à clarifier une trajectoire permettant de les distinguer des autres, en favorisant le déploiement rapide de ce dispositif. Telle est la volonté des acteurs. Il n'y a pas de raison, pour eux, de s'en tenir à l'expérimentation, que l'on peut conserver pour le secteur agricole, qui doit faire fruit des essais en cours.
L'amendement vise également à rappeler la nécessité de confier à un opérateur public un outil de calcul identique pour tous les acteurs, afin que le dispositif soit clair pour le consommateur.
Je comprends l'objectif que vous visez. Toutefois, la nouvelle rédaction de l'article 1er que vous proposez soulève plusieurs difficultés.
Tout d'abord, elle supprime une précision relative au marquage et à l'étiquetage des produits, qui nous semble très importante. Ensuite, elle supprime les expérimentations préalables. Or tout l'enjeu est d'obtenir un affichage environnemental assis sur des expérimentations évaluées scientifiquement. Au demeurant, elles n'empêchent pas les secteurs qui sont prêts d'aller plus vite que les autres. Il faut impérativement les maintenir. Enfin, elle supprime l'avis de l'Autorité de la concurrence sur le décret prévu à l'alinéa 6, dont le maintien me semble indispensable. Demande de retrait ou avis défavorable.
Madame Riotton, vous souhaitez introduire une souplesse par le biais de délais différenciés, selon les secteurs d'activité, pour la mise en œuvre de l'affichage environnemental. Je partage votre objectif : il faut effectivement que les secteurs d'activité qui sont prêts puissent se lancer.
Le projet de loi prévoit précisément une durée maximale de cinq ans, à compter de la publication de la loi, pour l'établissement d'un cadre harmonisé en matière d'affichage environnemental. Ainsi, rien n'empêche les secteurs qui sont prêts de se lancer. Au demeurant, certains d'entre eux, tels que le secteur agroalimentaire et le secteur textile, ont d'ores et déjà commencé à mener des expérimentations. L'amendement est donc satisfait. J'en suggère le retrait et émets à défaut un avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS1896 de M. Gérard Leseul.
. Bien souvent, lorsqu'un consommateur effectue une commande en ligne, il voit s'afficher « 0,00 euro » à la ligne relative aux frais de port. Les entreprises de commerce en ligne s'arrangent en effet pour intégrer ce coût ailleurs, ce qui le rend indolore pour la personne qui commande, mais pas pour l'environnement.
Cet état de fait est fort regrettable. Les informations relatives aux modalités et au coût du transport des biens et services achetés en ligne sont devenues quasi invisibles. Il est temps de les dispenser aux consommateurs. Un tel indicateur pourrait s'avérer décisif dans la lutte contre le réchauffement climatique et la diminution des émissions de gaz à effet de serre que nous appelons tous de nos vœux. Nous proposons de compléter l'alinéa 2 par une information sur le mode et le coût de transport d'un bien, d'un service ou d'une catégorie de biens ou de services.
Vous avez raison : le transport n'est pas neutre en matière environnementale, s'agissant notamment des émissions de gaz à effet de serre. L'affichage environnemental prévu à l'article 1er porte précisément sur le cycle de vie des biens et des services, qui inclut bien leur transport. L'amendement est satisfait par cette rédaction. Peut-être pourrons-nous aller plus loin lors de l'examen du texte en séance publique, en prévoyant, notamment pour les achats réalisés en ligne, la mention de l'impact environnemental dû au transport des biens et des services. Demande de retrait ou avis défavorable.
Même avis. Les méthodes de calcul et d'affichage retenues tiennent compte des impacts environnementaux liés au transport des biens et des services.
Le sujet soulevé par l'amendement mérite d'être creusé. Si j'en crois Mme le rapporteur, un produit acheté en ligne sera associé au même visuel qu'un autre acheté dans le commerce, à moins que l'on ne définisse plusieurs visuels selon le moyen de transport utilisé. Si le visuel reflète la totalité de l'information, coût du transport compris, alors il faut en définir deux selon le mode de vente. Si, pour des raisons de simplification, le visuel est identique, l'amendement apporte une information supplémentaire. Par ailleurs, s'il faut modifier le visuel en fonction du choix de l'entreprise de distribution de prendre à son compte ou non les frais de port, la gestion du dispositif risque de devenir très compliquée. Les dispositions prévues par l'amendement me semblent pertinentes.
. Il est clair que l'impact environnemental d'un produit donné varie en fonction de son mode de livraison. Cette information est donc nécessaire. Dans un même immeuble, deux produits peuvent être livrés l'un par avion et l'autre – je caricature un peu – en vélo. Comment faire la différence lors du choix du mode de livraison ? Nous devons trouver les moyens d'accompagner le décideur qu'est l'acheteur et d'éclairer son choix de mode de livraison, afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre, conformément à l'objectif que nous visons.
De toute évidence, le choix de tel ou tel moyen de transport pour livrer un bien ou un service a un impact environnemental. Or l'amendement porte sur le coût de transport, qui ne se confond pas avec celui-ci. Mettons-nous d'accord, d'ici à l'examen du texte en séance publique, sur une formulation permettant de bien viser l'impact environnemental des divers modes de transport utilisés et de distinguer l'acte d'achat immédiat dans un commerce et l'acte d'achat en ligne, afin d'éviter qu'une information trompeuse ne soit fournie au consommateur, ce qui pourrait l'amener à considérer que l'impact du transport est neutre.
Par ailleurs, les expérimentations prévues à l'article 1er en matière d'affichage environnemental offrent la souplesse recherchée en permettant de tester plusieurs formules. Il importe que cet affichage demeure lisible. Si nous aboutissons à trois, quatre, cinq ou six visuels différents, je ne suis pas certaine que le consommateur pourra faire un choix éclairé.
Il faut sans doute améliorer la visibilité de l'information relative à l'impact environnemental des transports, notamment sur les plateformes de e-commerce. Il me semble intéressant d'y travailler en vue de l'examen du texte en séance publique.
Avant de donner la parole à Mme la ministre, je rappelle que les membres de la commission spéciale sont prioritaires dans l'attribution des places. J'invite nos collègues qui ne le sont pas à céder leur place à Mme Cendra Motin, rapporteure, et à MM. Guillaume Garot et Stéphane Travert, anciens ministres.
L'affichage environnemental tient compte, de façon générale, du transport du produit ou de ses composantes, notamment s'ils proviennent de pays étrangers. Il ne tient pas compte du dernier kilomètre, le produit pouvant être retiré en magasin ou livré à domicile, ce qui pourrait faire l'objet d'un affichage distinct, notamment sur les plateformes de vente en ligne. Nous en débattrons en séance publique. Les dispositions du présent article portent uniquement sur le transport utilisé pour apporter le produit en France. Ces précisions vous amèneront peut-être à retirer l'amendement, monsieur Leseul.
. Hélas, madame la ministre, je soumettrai l'amendement au vote. Contrairement à ce qu'a dit Mme la rapporteure, il ne porte pas uniquement sur le coût de transport : il concerne aussi le mode de transport. Il est donc pertinent, même si une autre rédaction aurait peut-être été préférable. En tout cas, l'information qu'il prévoit de communiquer au consommateur permettrait de distinguer les modes de transport vertueux des autres.
Il s'agit d'un véritable débat de société. Nous avons pris l'habitude en effet de passer des commandes avec une livraison en vingt-quatre heures. Or c'est cela qui coûte cher du point de vue environnemental. Il faut rappeler sans relâche aux gens que si cette facilité est prise en charge financièrement par les commerçants, son coût en matière d'émission de CO2 est très lourd. Le dernier kilomètre coûte très cher, la livraison en vingt-quatre heures aussi. Il faut le dire haut et fort. Tous les produits ne doivent pas nécessairement être livrés en vingt-quatre ou en quarante-huit heures. La précision que notre collègue Leseul propose d'introduire dans le texte permettrait d'avoir une vision un peu plus claire du coût des produits en matière d'émissions d'émissions de CO2.
S'agissant de la livraison des produits en vingt-quatre heures, il y a plus efficace qu'un affichage environnemental : ne pas autoriser l'ouverture de trente-cinq nouvelles plateformes Amazon en France, ni les extensions d'aéroports, et taxer le kérosène des avions.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS2182 de M. Gérard Leseul.
. Je prends au mot Mme la rapporteure : cet amendement vise, à la première phrase de l'alinéa 2, à substituer aux mots « aux caractéristiques environnementales » les mots « à l'impact environnemental ». Il importe de ne pas limiter aux caractéristiques environnementales prises globalement l'information fournie au consommateur. Il faut préciser l'impact environnemental d'un bien ou d'un service donnés, même si l'article 1er se fonde sur la notion de cycle de vie des biens et des services.
Cher collègue, vous avez raison de me prendre au mot : je suis favorable à votre amendement. La formulation proposée me semble plus juste.
La commission adopte l'amendement.
Plusieurs de nos collègues, membres de la commission spéciale, ne peuvent participer au débat et voter faute de place. Nous devrons veiller à faire en sorte que tel ne soit pas le cas lors des prochaines réunions.
Monsieur le rapporteur général, je prends bonne note de vos observations. La commission spéciale compte soixante et onze membres et nous disposons de cinquante et une places. Les groupes ont la responsabilité d'assurer leur représentation en proportion de leur effectif, conformément aux instructions du bureau.
Amendement CS208 de M. Richard Ramos.
Cet amendement s'inspire des recommandations de la Fédération française des diabétiques relatives à la notion de santé environnementale. Les produits que nous consommons, buvons et mangeons ont un fort impact sur notre métabolisme et sur le fonctionnement de nos organes. Le lien entre l'exposition aux perturbateurs endocriniens et l'apparition de modifications épigénétiques telles que le diabète est de plus en plus évoqué. L'amendement vise à inclure les critères de santé environnementale dans les obligations d'affichage prévues à l'article 1er.
L'affichage environnemental prévu à l'article 1er permet de prendre en compte les impacts environnementaux et sociaux. De nombreux amendements visent à introduire des critères supplémentaires. J'en proposerai moi-même deux, afin que le texte soit le plus exhaustif possible sans toutefois dresser une liste. Nous devons en rester à des caractéristiques suffisamment générales pour pouvoir tout prendre en compte. Je considère ainsi que les enjeux de santé font partie des enjeux environnementaux et sociaux. Avis défavorable.
L'amendement vise à introduire dans le texte des critères sanitaires, ce qui permettrait de communiquer des informations sur la présence, dans certains produits, de perturbateurs endocriniens. La loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC) impose la mise à disposition du public de ces informations à partir du 1er janvier 2022. L'amendement est donc satisfait. Par ailleurs, l'article 1er prévoit un affichage environnemental dépourvu d'objectifs sanitaires. J'émets donc un avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS1535 de M. Dominique Potier.
Il s'agit d'ajouter à l'affichage environnemental un affichage tenant compte du respect de critères sociaux. Dans le cadre de l'examen du projet de loi AGEC, nous avons adopté une expérimentation pour l'industrie du textile, la deuxième plus polluante au monde, et dans laquelle subsistent les atteintes les plus graves au travail humain, – travail des enfants, esclavage moderne.
Nous l'avons dit lors de la discussion générale et vous en êtes convenue, madame la ministre : on ne peut plus dissocier les questions sociales des questions environnementales, tant elles sont imbriquées. Dès lors qu'il s'agit d'une expérimentation et que nous avons le temps d'établir une taxonomie des critères sociaux, nous proposons d'embarquer les droits sociaux. N'ayons pas une loi de retard ! Inscrivons-nous dans cette logique qui consiste, pour la France et l'Europe, à promouvoir, dans la mondialisation, des chaînes de production tenant compte du respect des droits humains et de la protection de notre maison commune !
Les critères environnementaux et sociaux sont en effet intimement liés. L'article 1er prévoit précisément la possibilité de retenir des critères sociaux. Demande de retrait ou avis défavorable.
L'article 1er dispose : « Un affichage destiné à apporter au consommateur une information relative aux caractéristiques environnementales d'un bien, d'un service ou d'une catégorie de biens ou de services, ainsi le cas échéant qu'au respect de critères sociaux, est rendu obligatoire ». Les critères sociaux figurent donc bien dans le corps de l'article. Je me souviens très bien des débats que nous avons eus lors de l'examen du projet de loi AGEC. Nous sommes parvenus à un affichage environnemental ou environnemental et social, ce qui rendait celui-ci facultatif. Le présent projet de loi prévoit le respect de critères sociaux, dans le même esprit que celui qui a inspiré les dispositions de la loi AGEC. Avis défavorable.
Madame la ministre, pour le groupe Socialistes et apparentés, il s'agit d'un point dur du débat qui s'ouvre aujourd'hui. Au demeurant, nous avions eu gain de cause lors de l'examen du projet de loi AGEC. Vous étiez alors présidente de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, et le résultat du vote vous avait surprise. Les membres du groupe Les Républicains nous avaient rejoints, ainsi que de nombreux membres de la majorité, et nous avions adopté cette disposition pour l'industrie du textile. Je me souviens très bien des réunions au ministère avec des entreprises du commerce équitable et des membres de l'Organisation internationale du travail (OIT) destinées à étudier, sous l'égide de Brune Poirson, la mise en œuvre de cette expérimentation, qui devait jouer un rôle pilote. Il s'agissait véritablement d'une novation en matière de responsabilité sociale et environnementale (RSE), et non de responsabilité sociale ou environnementale.
Nous sommes donc en pleine régression par rapport aux dispositions de la loi AGEC. Madame la rapporteure, il ne faut pas chercher à nous tromper : la formulation « le cas échéant » n'équivaut pas à « et ». En fonction de quoi et de qui introduira-t-on le respect de critères sociaux ? De la pression des lobbies ? De l'avis de l'exécutif ? Nous voulons que la loi pose clairement la question d'un affichage environnemental et social, et ne se contente pas de la formulation « ainsi le cas échéant qu'au respect de critères sociaux », qui n'a absolument pas le même sens, ce que chacun ici sait parfaitement.
Ce débat anticipe celui qu'ouvriront les amendements visant à supprimer les mots « le cas échéant ». Cette formulation crée une discrimination de fait entre exigence environnementale et exigence sociale. Or nous savons très bien qu'il s'agit d'introduire un élément d'information décisif, notamment au sujet de certaines filières d'importation de biens et de services frappés du sceau non seulement de la dérive environnementale, mais aussi de la dérive sociale. Comme notre camarade Potier, je pense – même si je le dis avec une moindre expertise – qu'il faut entreprendre un travail socle en la matière, afin de faire apparaître sur le même plan de réciprocité et d'égalité les critères environnementaux et les critères sociaux. Ce champ d'application ne peut être négligé ; il ne peut être traité – le mot est peut-être fort – de façon discriminatoire. Que signifie la formulation « le cas échéant » ? Il s'agit d'une imprécision majeure, qui pourrait vous être reprochée, madame la ministre.
Monsieur Potier, je suis heureuse de constater que ma mémoire ne me fait pas défaut. L'article 15 de la loi AGEC dispose : « Un dispositif d'affichage environnemental ou environnemental et social volontaire est institué. Il est destiné à apporter au consommateur une information relative aux caractéristiques environnementales ou aux caractéristiques environnementales et au respect de critères sociaux d'un bien, d'un service ou d'une catégorie de biens ou de services, basée principalement sur une analyse de cycle de vie ». Nous avons donc laissé le choix entre deux possibilités, aux termes de la loi telle qu'elle a été publiée au Journal officiel.
Le présent projet de loi n'a pas vocation à revenir sur les arbitrages de la loi AGEC. Nous souhaitons les prolonger et les préciser, notamment en donnant plus de poids à l'affichage environnemental, grâce à l'ajout de critères relatifs à l'empreinte carbone des biens et des services. Nous sommes dans la droite ligne de la loi AGEC.
Madame la ministre, je ne doute pas de votre bonne foi et vous avez les textes sous les yeux. Celui que vous venez de citer est issu de la commission mixte paritaire (CMP). Je me souviens très bien du vote de mon amendement dans l'hémicycle, qui aboutissait à un texte bien plus radical incluant des critères environnementaux et sociaux. Lors de la CMP, la majorité a fait son travail et a lissé notre proposition.
Nous sommes totalement libres d'écrire la loi telle que nous l'entendons et de décider qu'on ne peut plus, au XXIe siècle, fixer des critères environnementaux sans prendre en compte la dimension sociale. Célia de Lavergne a rappelé cet après-midi qu'on ne pouvait pas demander à nos agriculteurs, s'ils n'ont pas de bons revenus, de donner de la bonne terre et de bons produits ; cela vaut aussi pour les gamins du bout du monde, qui font nos jeans, nos iPhone et à l'occasion nos pizzas. Il y a un lien intrinsèque entre la condition sociale et les questions d'environnement. Il s'agit de les traiter ensemble, sans violence. L'expérimentation offre le temps d'établir un juste équilibre entre ce qui est souhaitable et ce qui est possible.
Ce débat me rappelle la question que j'ai posée au Premier ministre au mois de novembre 2018 à propos de la trajectoire écologique, d'une part, sociale et humaine, d'autre part, de nos travaux. De nombreux Français, notamment les plus fragiles, connaîtront de grandes difficultés lors de la mise en œuvre des mesures que nous prévoyons de prendre. Tout est beaucoup plus facile lorsqu'on a de l'argent. Il importe donc de tenir compte de la dimension sociale et humaine.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS3996 de Mme Michèle Crouzet.
Cet amendement vise à modifier l'alinéa 2 en insérant, après le mot « environnementales », les mots « et de santé environnementale ». L'article 1er vise à améliorer l'information du consommateur en matière d'empreinte environnementale. Les aliments que nous mangeons et buvons, ainsi que l'air que nous respirons, influent sur l'expression de nos gènes à court terme et peuvent induire, à long terme, des modifications de notre métabolisme susceptible d'avoir des conséquences sur le fonctionnement de certains de nos organes.
Comme je l'ai indiqué lors de l'examen de l'amendement CS208, l'impact environnemental inclut la question de la santé environnementale. Je connais votre engagement sur ce sujet, mais la précision proposée ne me semble pas nécessaire. Demande de retrait ou avis défavorable.
Il ne me semble pas particulièrement intéressant de faire figurer à l'article 1er la santé environnementale, sur laquelle nous reviendrons au cours de nos débats. Ce sujet fait actuellement l'objet d'une stratégie nationale santé-environnement, issue d'un important travail, et dans laquelle plusieurs députés sont très investis. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS3668 de Mme Florence Provendier.
Cet amendement vise à créer un indicateur global, prenant en compte l'impact non seulement environnemental, mais aussi éthique et social. Les consommateurs pourront ainsi devenir les acteurs de la transition écologique et solidaire en choisissant de façon éclairée des produits fabriqués, emballés et transportés par des acteurs participant à un projet de société plus juste et inclusif. Les enjeux écologiques ne sauraient être détachés des enjeux éthiques et sociaux.
Je vous ferai la même réponse qu'à Dominique Potier, car vous proposez d'ajouter des critères similaires. Il s'agit bien d'un affichage environnemental : on ne peut pas y inclure l'ensemble des dimensions que l'on aimerait voir présider à un acte d'achat. Par ailleurs, un certain nombre d'avancées ont déjà été réalisées grâce à la loi AGEC. Il s'agit ici de les poursuivre en ce qui concerne l'affichage environnemental, et non pas de revenir sur d'autres arbitrages. Je demande donc le retrait de l'amendement.
L'idée est de prendre en compte la dimension sociale quand c'est pertinent – d'où la formulation « le cas échéant », qui suscite tant de réactions. Autant il peut être pertinent d'associer la dimension environnementale à la dimension sociale dans le domaine du textile, par exemple, car les conditions dans lesquelles certains produits sont fabriqués à l'étranger posent problème, autant ce n'est pas le cas s'agissant d'autres secteurs, notamment dans l'alimentaire. Si je suis défavorable à cet amendement, il n'en demeure pas moins qu'il est absolument essentiel, parfois, de prendre en compte des critères sociaux pour que le choix du consommateur soit éclairé.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS3049 de Mme Catherine Osson.
Cet amendement découle des recommandations formulées par notre collègue Catherine Osson dans son rapport d'information « Pour une alimentation sûre et saine », présenté au nom de la commission des affaires européennes. Il vise à ce que l'étiquetage des produits mentionne de façon explicite leur origine et leur lieu de production. L'objectif de protection de l'environnement va de pair avec celui du « manger mieux » – et même, en l'occurrence, celui du « manger local ».
C'est en effet l'une des propositions du rapport d'information de nos collègues Catherine Osson et André Chassaigne. Toutefois, il est impossible d'inclure dans l'affichage environnemental l'ensemble des critères qu'il serait pertinent de prendre en considération. Cela nuirait d'ailleurs à sa lisibilité, et donc à son effectivité. En outre, la provenance des produits est incluse dans la notion de cycle de vie : l'amendement est donc en partie satisfait. Avis défavorable.
Je rejoins l'avis de Mme la rapporteure : l'impact environnemental de l'acheminement des produits est pris en compte dans l'analyse du cycle de vie. Par ailleurs, il existe déjà des systèmes d'affichage indiquant l'origine française des produits, notamment les appellations d'origine protégée (AOP). Je considère donc que l'amendement est satisfait, et vous propose de le retirer ; à défaut, avis défavorable.
Je soutiens cet amendement. Peut-être vos réponses sont-elles exactes sur le plan technique, madame la ministre, madame la rapporteure, mais il faut aussi tenir compte de l'attente très forte de nos concitoyens dans ce domaine. Très souvent, les consommateurs sont perdus : le savon de Marseille est fabriqué en Hongrie, la moutarde de Dijon n'est pas produite dans cette ville, et lorsque l'on cherche le lieu de production, il arrive qu'on ne le trouve pas, ou alors qu'il soit indiqué sous la forme de codes abscons que seuls les experts peuvent décrypter. Ce projet de loi, qui reflète les travaux de la Convention citoyenne et traduit la volonté présidentielle, est censé être ambitieux ; c'est aussi, disons-le clairement, la dernière occasion, sous cette législature, d'avancer sur des questions de cet ordre. J'invite donc les uns et les autres à réviser leur approche et à voter cet amendement.
Je comprends l'objectif de tous ces amendements : il s'agit d'enrichir l'affichage environnemental. Toutefois, en multipliant les critères, on risque de le rendre absolument illisible. Le projet de loi est relatif au climat : il faut se concentrer sur l'impact environnemental. Cet affichage représente déjà une avancée formidable. Or, à trop vouloir ajouter des éléments, on va le rendre inopérant.
En l'espèce, il est évident que le lieu de production est inclus dans le cycle de vie. Par ailleurs, le fait de tricher s'agissant du lieu de production peut être sanctionné. Enfin, et de toute façon, les lieux de production sont très souvent multiples : il n'est pas si facile que cela de les tracer.
Ce débat est lié au fait que nous n'avons pas eu de discussion générale sur l'affichage environnemental. Celui-ci a d'ailleurs fait l'objet de lois successives depuis maintenant douze ans, sans jamais entrer réellement en vigueur.
Je considère que la question du lieu de production – et, à travers elle, celle de la relocalisation de l'économie – fait partie intégrante de la dimension écologique. De la même façon, toutes les demandes exprimées précédemment concernant le transport, la santé environnementale et les droits humains sont légitimes. Nous devons avoir une approche globale. Il faut que le consommateur dispose d'informations lui donnant une vue d'ensemble de l'impact d'un produit. Grâce à l'open data, il devrait être possible d'avoir une sorte de Yuka donnant toutes ces informations au consommateur.
S'il est tout à fait légitime d'essayer d'élargir le périmètre de l'affichage, la question est surtout de savoir comment faire en sorte que cet indicateur voie le jour rapidement. En effet, on ne peut plus se contenter de lancer des expérimentations dont on ne dresse jamais le bilan. Quand l'affichage environnemental entrera-t-il donc vraiment en vigueur, madame la rapporteure ?
J'entends votre argument, Monsieur le rapporteur général, mais la question du lieu de production n'est pas innocente. Le bilan carbone doit être pondéré par la prise en compte d'autres critères, faute de quoi certains produits agricoles, notamment, fabriqués de l'autre côté de l'Atlantique par nos concurrents et acheminés par paquebots, risquent de sembler plus performants que d'autres produits pourtant fabriqués à quelques centaines de kilomètres du lieu de consommation. Nous avons été alertés sur ce point.
Je rejoins Delphine Batho : l'approche écologique doit tenir compte des effets des modes de production en termes de développement et de respect des droits humains. Certes, il faut tenir compte du bilan carbone, mais si l'on ne prend en considération qu'un seul critère, on risque de déformer la perspective, car ce paramètre peut être utilisé à des fins totalement opposées aux objectifs visés. C'était le sens de mes propos liminaires, cet après-midi, lorsque j'ai évoqué la biodiversité et la question de la vie humaine en général.
Alors que l'article 1er ne propose qu'une expérimentation, ce qui est en soi très timide, et qu'il ne nous reste que dix ans environ pour sauver le climat, la cohésion sociale de notre pays et l'équilibre planétaire, nous écarterions des questions aussi importantes que celle des droits humains, mise en parallèle avec la préservation de l'environnement ? Ce serait une folie.
Comment faire pour aller vite tout en trouvant les bons critères et en évitant les effets de bord ? Il est vrai, monsieur Potier, qu'être trop restrictif pourrait se révéler contre-productif. Par ailleurs, chacun des critères qu'il est proposé d'ajouter, pris isolément, peut sembler pertinent, et je comprends que vous vouliez les inclure dans le dispositif, mais la question est de savoir s'ils ont leur place dans l'affichage environnemental. Permettront-ils également d'avancer vite, alors même que l'on attend depuis longtemps un tel affichage susceptible d'éclairer le consommateur dans ses choix ?
Toutes les auditions que nous avons réalisées sur le titre Ier m'ont amenée à penser que le carbone ne pouvait être le seul critère pertinent pour définir l'affichage environnemental. C'est la raison pour laquelle je vous proposerai d'étendre celui-ci à la préservation de la biodiversité et des ressources naturelles. Au demeurant, nous nous sommes beaucoup interrogés sur cette dernière notion : il aurait été possible de détailler en évoquant, par exemple, la qualité de l'eau ou la consommation qui en était faite, ou encore la qualité de l'air. Nous avons préféré retenir une formulation plus large, qui nous paraissait permettre d'engager les expérimentations et donc de mettre en œuvre le dispositif plus rapidement.
En effet, l'article 1er n'a pas pour objet de retarder la mise en œuvre de l'affichage. Il s'agit simplement de disposer d'une évaluation scientifique des expérimentations, notamment s'agissant des produits issus de l'agriculture, de la sylviculture ou de l'agroalimentaire, avant de rendre l'affichage obligatoire. Par ailleurs, rien n'empêchera certains secteurs de s'engager plus vite dans cette démarche. Les représentants du textile, par exemple, nous ont dit qu'ils y étaient prêts.
L'enjeu est de définir à l'article 1er des critères donnant une information fiable et lisible aux consommateurs, tout en permettant à l'ensemble des entreprises – les grands groupes aussi bien que les très petites entreprises (TPE) – de les mettre en œuvre. Si le dispositif est trop complexe, le consommateur sera perdu. Cela renvoie entre autres à la question des visuels : si on les multiplie, on perdra en lisibilité.
Nous essayons donc de trouver un équilibre : il faut élargir le dispositif lorsqu'il est pertinent et possible de le faire, tout en ayant conscience que multiplier les critères, c'est prendre le risque que les expérimentations n'aboutissent pas. Non seulement ce serait une déception, mais tout le monde y perdrait – le consommateur aussi bien que la lutte contre le dérèglement climatique.
La commission rejette l'amendement.
Suivant l'avis de la rapporteure, elle rejette l'amendement CS4789 de Mme Sira Sylla.
Amendement CS4125 de Mme Béatrice Piron.
L'affichage des informations relatives à l'empreinte carbone des produits améliorera l'information des consommateurs et permettra à ces derniers de faire des choix éclairés sur leur façon de consommer. Par cet amendement, il est proposé d'afficher également les informations relatives à la traçabilité des biens, c'est-à-dire d'indiquer le pays de provenance ou, s'il y a lieu, de reconditionnement.
Même réponse que précédemment : la notion de cycle de vie englobe la traçabilité des produits. Je demande donc le retrait de l'amendement.
Un produit comme l'iPhone comprend des centaines de composants fabriqués dans des pays différents. Faudra-t-il indiquer en petits caractères toutes les étapes du circuit ? Cela risquerait d'être contre-productif. Par ailleurs, en ce qui concerne le visuel montrant l'empreinte carbone, vous avez expliqué qu'il avait pour objectif de refléter l'impact de l'importation. Encore faut-il déterminer si l'empreinte carbone est calculée pour chaque composant ou au moment de l'assemblage. Si la première option est retenue, plus les produits sont complexes, plus il sera difficile de proposer un visuel : bonne chance aux graphistes !
L'amendement est retiré.
Amendements identiques CS1536 de M. Dominique Potier et CS1597 de M. Hubert Wulfranc.
Une réunion interministérielle s'est récemment prononcée en faveur de l'adhésion à l'Alliance 8.7, visant notamment à lutter contre le travail des enfants, dans le cadre des objectifs de développement durable. Par ailleurs, la présidence française de l'Union devrait voir aboutir une directive européenne relative au devoir de vigilance incluant à la fois l'environnement et les droits humains, sans que la mise en œuvre de ce texte ne pose le moindre problème, en France ou ailleurs. L'Allemagne a adopté le principe il y a exactement huit jours. Le Parlement européen, quant à lui, a adopté à une large majorité, il y a quelques heures, le projet de directive. Or nous sommes en train de créer un affichage qui ne prendrait pas en compte ces deux séries de critères. Autrement dit, les tribunaux pourront sanctionner une multinationale en se fondant sur eux, mais on s'interdira d'aider le consommateur à accomplir son devoir civique, au bout de la rue comme au bout du monde, à travers l'affichage.
Vous avez dit vous-même, madame la ministre, que les mots « le cas échéant », s'agissant des critères sociaux, étaient de méchants mots : je vous propose d'en finir avec la méchanceté en les supprimant. Ainsi, nous serons fidèles à l'idéal qui doit nous rassembler. Des critères sociaux et environnementaux seront pris en compte, ce qui permettra notamment de contrer la concurrence déloyale envers les produits français. On peut en effet y voir un instrument destiné à protéger notre économie, mais aussi la volonté de manifester une fraternité humaine allant d'un bout à l'autre de la chaîne de production. Nous ne pouvons pas reculer sur ce point.
Comme précédemment, je vous demande de retirer ces amendements, étant entendu que rien n'empêchera de prendre en compte les critères sociaux, puisqu'ils sont nommément cités à l'article 1er. Nous considérons simplement que cela doit dépendre de la catégorie de biens et services considérée : il faut que cette référence soit appropriée. Par ailleurs, une mission a été confiée à France Stratégie pour définir très précisément ce que sont ces critères sociaux. Ces précisions devraient vous rassurer au sujet de l'engagement de la majorité et du Gouvernement en faveur d'une prise en compte des critères sociaux.
Avec Élisabeth Borne et Olivia Grégoire, j'ai confié une mission à la plateforme RSE pour conduire une expérimentation. Autrement dit, nous n'en sommes plus seulement à la théorie : il s'agit de voir concrètement ce que doit être un affichage social sur les produits, notamment dans le secteur du textile. Les premières conclusions devraient être connues fin juin ou début juillet. Nous prenons donc la question au sérieux. Vous avez raison : c'est un enjeu absolument essentiel, et je ne voudrais pas que nous donnions l'impression que ne voulons pas nous en occuper. Avis défavorable.
Je me réjouis évidemment de cette annonce d'une expérimentation conduite au bon niveau. Les discussions que nous avions eues avec votre prédécesseur avaient été interrompues ; je suis heureux qu'elles reprennent sous votre autorité. Le succès n'est pas tout à fait assuré, car cela dépend de la volonté du Gouvernement. Qui plus est, en la matière, la pression des milieux économiques peut être très forte.
Vous avez cité tout à l'heure le secteur de l'alimentaire, madame la ministre. Or c'est dans la filière du cacao que le travail des enfants est le plus répandu, notamment en Afrique subsaharienne, du fait d'une explosion de la demande dans les classes moyennes des pays émergents. Vous disiez que la dimension sociale existait dans le secteur du textile mais pas dans celui de l'alimentaire. L'exemple que je viens de donner montre que, justement, cela mérite que l'on en discute. Qui va décider in fine que des critères d'ordre social doivent être pris en compte ?
Je propose que, d'ici à la séance, nous mettions en commun notre intelligence pour avancer sur ce point. Une ouverture de votre part serait la bienvenue. Nous pourrions ainsi établir une liste des secteurs concernés. Par respect pour le Parlement, il faut se doter d'un outil de décision transparent, indiquant que telle ou telle filière doit absolument s'engager dans le domaine social, mais que ce n'est pas nécessaire pour telle ou telle autre. Nous pourrions nous retrouver autour de cette démarche. Cette manière de décider ensemble, c'est de la démocratie qui fonctionne ; c'est aussi le contraire du jeu des influences économiques, qui contrarie le dessein écologique et social que nous partageons.
Ne conservez pas les mots « le cas échéant » dans le texte. Rendez-vous compte, en effet, du signal qu'ils adresseraient à l'opinion publique, auprès de laquelle nous allons mener un travail d'explicitation du projet de loi, comme c'est bien légitime. Nous allons évidemment insister sur cet élément, d'autant que, dans la période actuelle, la question sociale, mise en miroir avec la question écologique, est particulièrement sensible. Comment expliquerez-vous à l'opinion que vous mettez en œuvre une expérimentation concernant un affichage environnemental et « le cas échéant » social ?
Quand une personne travaillant pour une plateforme en ligne vous apporte un sandwich, même si les rillettes ont été confectionnées à 20 kilomètres, la personne en question relève du régime de la charte de responsabilité sociale, et non du régime s'appliquant aux travailleurs reconnus. Il y a donc là des enjeux politiques, sur lesquels nous insisterons et pour lesquels nous sommes prêts à aller à l'affrontement, car il ne saurait y avoir deux poids, deux mesures entre l'environnemental et le social.
Il n'est pas question de faire deux poids, deux mesures et encore moins d'aller à l'affrontement : nous souhaitons dialoguer – ce qui n'empêche pas d'avoir des désaccords.
Il s'agit bien ici d'un affichage environnemental ; je ne crois pas, d'ailleurs, que vous ayez demandé qu'il soit renommé. Nous souhaitons élargir le dispositif de façon à ce qu'il intègre le respect de la biodiversité et des ressources naturelles ainsi que, le cas échéant, des critères sociaux. Vous dites, monsieur Potier, qu'il faudrait lister les filières concernées. Or le texte renvoie à un décret la définition des catégories de biens et services et la manière dont cet affichage doit être caractérisé, tout simplement parce que les critères environnementaux retenus ne sauraient être les mêmes pour les produits électroniques et les produits agroalimentaires, par exemple, ce que chacun peut comprendre.
De la manière, s'agissant des critères sociaux, quels éléments retiendrez-vous ? Faudra-t-il prendre en compte l'échelle des salaires, notamment pour les travailleurs qu'évoquait M. Wulfranc, ou bien encore le respect de l'égalité entre les femmes et les hommes, à propos duquel un index très précis a été élaboré par le Gouvernement et rendu public aujourd'hui même par Mme la ministre de l'emploi ? En ce qui concerne les importations, faudra-t-il tenir compte de la question du travail des enfants, sur laquelle, là encore, le Gouvernement a pris des engagements ? Faut-il lister tous les éléments entrant dans la catégorie des critères sociaux, ou encore renvoyer à un décret la manière dont ils seraient fixés ? Voulez-vous les déterminer pour chaque catégorie de biens et de services ?
Surtout, et on en revient à la question posée par Delphine Batho, voulez-vous que l'expérimentation aboutisse, de façon à ce que le consommateur ait à sa disposition un véritable affichage environnemental ? Or, plus on complexifiera le dispositif, plus l'objectif que nous poursuivons tous – à savoir faire en sorte que le consommateur soit éclairé dans ses choix – s'éloignera. Nous ne disons pas qu'il faut le simplifier à l'excès ; tout au contraire, nous considérons nous aussi qu'il faut l'élargir à certains critères pertinents. Mais nous voulons maintenir un équilibre. Ce n'est en aucun cas une manière de considérer que les critères que vous proposez sont moins importants que d'autres.
L'article ne crée pas un affichage environnemental : il met en place des expérimentations qui auront pour objet de voir comment faire marcher ensemble les différents dispositifs, pour déboucher sur une méthodologie unique et claire pour les consommateurs. Plusieurs expérimentations sont déjà en cours, mais sur la base de critères différents, ce qui ne permet pas aux consommateurs de savoir ce qu'il en est. L'objectif est de compiler ces éléments pour obtenir, en définitive, un affichage que tout le monde puisse comprendre et se fondant sur des critères communs.
Par ailleurs, l'alinéa 4 de l'article 1er dispose que le bilan des expérimentations sera transmis par le Gouvernement au Parlement. Un amendement de votre rapporteure précisera également que ce bilan est public et transparent. Tout ce qui pourra améliorer les expérimentations sera le bienvenu, fera l'objet d'un débat et, à la fin, débouchera sur un affichage. Nous n'en sommes pour l'instant qu'au point de départ.
La commission rejette les amendements.
Amendement CS840 de M. Antoine Herth.
L'ONU a défini dix-sept objectifs de développement durable (ODD) : pourquoi ne pas y faire référence dans le texte ? Ce seront les briques servant de base à l'expérimentation, qui permettront ensuite d'écrire la formule pour chaque secteur de production, tout en proposant un affichage environnemental aussi clair et compréhensible que possible pour le consommateur.
La prise en compte des critères « sociaux » tient à cœur à chacun d'entre nous, mais que mettons-nous derrière ce mot ? M. Wulfranc nous parle du droit du travail pour les livreurs des plateformes, mais en me reportant aux dix-sept objectifs de développement durable, j'y trouve d'autres éléments : l'égalité entre les hommes et les femmes, l'accès à la scolarité ou encore l'accès à la santé. Je propose donc tout simplement d'inscrire dans la loi une référence aux objectifs de développement durable.
En outre, le commerce doit être envisagé dans un cadre plus large que le marché national, à commencer par celui du marché intérieur européen. Je regrette donc que l'on ne prenne pas la précaution, dans cet article, de faire référence aux traités européens : cela pourrait nous valoir quelques retours négatifs du côté de la Commission européenne, une fois que nous passerons de l'expérimentation à la mise en place de l'affichage.
Enfin, dans la mesure où la France souhaite régulièrement être à l'avant-garde, le dispositif adopté doit être reproductible. À cette fin, autant afficher une ambition mondiale en se référant aux dix-sept objectifs de développement durable.
La réécriture que je proposerai plus tard, visant à ajouter la question des ressources environnementales et de la biodiversité, permettra de clarifier les choses. Comme vous poursuivez le même objectif, je vous propose de retirer votre amendement.
L'affichage environnemental a pour objectif de permettre au consommateur de faire un choix éclairé. Pour cela, l'indicateur doit être aussi lisible et compréhensible que possible. Les ODD sont de mieux en mieux connus – tant mieux – et doivent nous guider dans toutes les politiques publiques que nous mettons en place. Toutefois, l'affichage environnemental doit-il tenir compte, par exemple, du lien du produit avec des villes ou communautés durables, avec le travail en faveur de la paix, ou encore avec des institutions efficaces ? En intégrant autant de critères, on risque de complexifier les choses, sans pour autant rendre l'indicateur plus efficace. Je suis donc défavorable à cet amendement.
Je suis conscient du fait que cela complexifierait le dispositif. J'ai bien entendu également le rapporteur général, qui nous disait que le dispositif devait être simple et efficace pour pouvoir être rapidement mis en œuvre. Mais alors, madame la ministre, ne faudrait-il pas plutôt parler d'« affichage climatique » ? Ainsi, on comprendrait d'emblée qu'il s'agit non pas du développement durable dans son ensemble, mais de la dimension climatique, qui est d'ailleurs l'objet principal du texte. Cela aurait pour avantage de ne pas risquer de donner l'impression au consommateur qu'on lui ment. En 2005 – j'ai quelques cheveux gris –, dans le cadre d'une mission parlementaire consacrée au commerce équitable, j'avais été confronté à un problème similaire, à savoir la manière de garantir au consommateur que les produits portant ce label respectaient un certain nombre de critères. C'est très compliqué.
Je retire mon amendement, mais je crois qu'il a permis d'éclairer nos discussions.
L'amendement est retiré.
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement CS2584 de Mme Laurianne Rossi.
Amendement CS4146 de M. Pacôme Rupin.
Cet amendement vise à rendre obligatoire la mise en œuvre du processus d'affichage des caractéristiques environnementales pour l'ensemble des biens et services à destination des consommateurs, notamment en ce qui concerne leur impact en termes d'émissions de gaz à effet de serre. Cet affichage est essentiel pour une meilleure prise de conscience par le consommateur de l'impact environnemental de chaque bien ou service consommé. Il doit permettre de réorienter la consommation de nos concitoyens vers les produits et services ayant les effets les plus favorables. Sa mise en œuvre doit être généralisée et rendue obligatoire. Elle ne saurait concerner uniquement certaines catégories de biens et services ni être décidée par décret, à la seule appréciation du Gouvernement – quel qu'il soit – et de l'administration.
Cet amendement supprimerait de fait la phase d'expérimentation, qui peut aller jusqu'à cinq ans en fonction des catégories de biens et services concernées. Or cette phase est nécessaire pour affiner les critères dont nous venons de parler, préciser les catégories de biens et services concernées et prendre les décrets qui permettront ensuite de mettre en œuvre le dispositif. Certains secteurs sont prêts et veulent aller vite ; d'autres, en revanche, ne seraient pas en mesure de le déployer immédiatement, soit parce que la réflexion est en cours au niveau européen, soit parce que d'autres mesures ont déjà été prises – je pense en particulier à Agribalyse pour les produits agricoles et agroalimentaires.
Rendre le dispositif obligatoire presque immédiatement, sans phase expérimentale, ce serait prendre le risque de ne pas retenir les bons critères. Nous entendons que la phase d'expérimentation soit efficace pour que l'affichage ait du sens, qu'il soit bien appliqué et permette d'éclairer le consommateur. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS2512 rectifié de M. Pierre Venteau.
Cet amendement vise à s'assurer que s'il existait une disposition d'affichage environnemental à l'échelle européenne, la disposition française serait harmonisée, pour éviter tout risque de distorsion de concurrence.
Pour que l'affichage environnemental ait toute sa portée, il faut effectivement, et le ministre de l'économie l'a confirmé lors de son audition, qu'il y ait des dispositions au niveau européen. Des travaux sont en cours à cet effet. Cela ne nous empêche en rien de prévoir des expérimentations, car il est nécessaire d'avancer. Allons-y dès maintenant si c'est possible, et permettons à la France de prendre de l'avance. Demande de retrait.
Le Gouvernement prend résolument en compte les travaux européens, et notamment le programme lié à l'empreinte environnementale des produits, dit PEF, auquel participent l'ADEME (l'Agence de la transition écologique) ainsi que les services de mon ministère et des entreprises françaises. Il milite aussi au niveau de l'Union pour faire progresser l'information environnementale sur les produits et valoriser les travaux que nous conduisons ensemble. Néanmoins, la France doit se laisser la possibilité de prendre une initiative au niveau national si le contexte européen n'avance pas assez vite – et c'est aussi, on l'a vu par le passé, une manière d'influencer l'agenda communautaire, surtout en cette période. C'est pourquoi je demande le retrait de cet amendement. À défaut, avis défavorable.
L'amendement est retiré.
Amendement CS4141 de M. Pacôme Rupin.
Je crois vraiment que les expérimentations prévues sont nécessaires. Demande de retrait ou avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS3633 de la rapporteure.
Cet amendement permet de renforcer et d'élargir les critères pris en considération dans l'affichage environnemental. Je le lis : « L'information apportée tient compte de l'ensemble des impacts environnementaux significatifs des biens et services considérés, en particulier en termes d'émissions de gaz à effet de serre, d'atteintes à la biodiversité et de consommation de ressources naturelles. » Cela donne un éclairage précis sur les critères qui méritent d'être pris en compte et répond à un certain nombre d'autres amendements qui ont été déposés.
Avis favorable. Il est effectivement nécessaire d'indiquer plus clairement que l'impact environnemental d'un produit ou d'un service est loin de se résumer à ses émissions de gaz à effet de serre. Il ne s'agit évidemment pas d'établir une liste exhaustive de critères, cela se fera par voie réglementaire, mais d'élargir le spectre de l'affichage environnemental au-delà de la seule question qui avait été évoquée par les membres de la Convention citoyenne pour le climat, celle du score carbone. Les « atteintes à la biodiversité » comprennent en particulier la déforestation et la mise en danger d'espèces, et la « consommation de ressources naturelles » recouvre les consommations d'eau et de ressources du sous-sol, entre autres.
J'ai un problème avec le mot « significatifs », qui nous éloigne des caractéristiques environnementales pures du produit considéré. Qu'est-ce qui est significatif, qu'est-ce qui sera considéré comme une information négligeable alors qu'en réalité elle est importante ? Je suggère de retirer ce terme.
Cet amendement va dans le sens de ce que souhaite le groupe Agir ensemble. C'est une avancée, mais encore une fois, attention au reporting ! Comment mesurera-t-on ce qui est significatif ou non ? Qui, de l'administration française ou d'une autorité ad hoc, le fera ? Un impact environnemental est difficilement quantifiable, mais il est important que le critère soit suffisamment robuste pour résister le cas échéant à des contestations devant les tribunaux. Il faut renforcer encore le dispositif.
Comment intégrera-t-on les impacts dus au transport ? Par exemple, un produit fabriqué à partir de poisson pêché en Bretagne peut être vendu à Nice. Or l'impact du Brest-Nice n'apparaîtra pas sur l'étiquette, ce qui est normal puisque l'usine de production ne peut pas savoir où le produit sera vendu. Un produit identique, vendu à Nice et pêché en Méditerranée, peut même afficher un impact supérieur ! Comment ne pas induire les Niçois en erreur à cause de notre affichage, alors que nous sommes dans l'incapacité d'intégrer le transport ? Sans parler des tomates de Provence qui peuvent représenter un poids carbone bien supérieur à des tomates venues de l'autre côté de la Méditerranée par container et délivrées immédiatement au port de Marseille, qui se trouve en ville même.
La difficulté de cet amendement, c'est que, contrairement au score carbone qui est quantifié, l'impact sur la biodiversité est un élément qualitatif. Pour rendre compte de ce phénomène qualitatif, soit on établit une grille quantifiée, une espèce de note, ce qui est en soi assez complexe, soit on donne une description, en disant par exemple que tel produit a fait disparaître telle espèce. De quelle façon abordez-vous le sujet ?
Ensuite, il ne faudrait pas confondre les émissions de gaz à effet de serre avec de la pollution, due par exemple à une forte émission de particules qui porte atteinte à la biodiversité. Le CO2 est naturel et ne doit pas être assimilé à une pollution.
Enfin, les impacts environnementaux doivent-ils être recensés de manière exhaustive ? Cela soulève de nombreuses questions, comme la prise en compte du transport, ou les cas où il y a plusieurs composants. Rien que pour le carbone, ce processus est déjà complexe. Doit-on au contraire tenir compte des principaux impacts environnementaux ? Je ne veux pas parler là des impacts significatifs sur la biodiversité, mais des grandes catégories d'impacts, qui pourraient être simplifiées, par exemple dans le cycle de vie. Ces points mériteraient d'être analysés et débattus. Si l'on décide d'un recensement exhaustif, qui mêle à la fois du qualitatif et du quantitatif, cela suppose d'établir des seuils, et cela aboutit à une usine à gaz qui rend difficile toute information synthétique.
Je salue la philosophie de cet amendement, mais en pointant quelques limites. Il y est question d'atteintes à la biodiversité, comme si la production était forcément une atteinte. Or je pense qu'elle peut avoir des externalités positives.
Prenons l'exemple de la viande bovine : un élevage intensif en Amérique du Sud peut avoir un meilleur bilan carbone qu'un élevage dans le Cantal, parce que les bovins y poussent plus vite, sur un espace limité, avec une atteinte à la biodiversité et une consommation de ressources naturelles réduites. Mais l'élevage du Cantal aura des externalités positives en termes de biodiversité, de paysages, de richesse du territoire – qui sont certes difficiles à quantifier. C'est la biodiversité dans son ensemble qu'il faut considérer, sans se focaliser sur les atteintes et en tenant compte des externalités positives.
Cet amendement est une forme d'ovni, un rêve absolument impossible à concrétiser. De plus en plus de produits sont importés, les délocalisations sont énormes en termes de production de biens quels qu'ils soient. Or, nous en avons discuté à propos de la loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (loi ÉGALIM), nous n'avons pas les moyens ni le droit d'aller voir comment se passe la production dans un pays tiers à l'Union européenne. Comment voulez-vous contrôler la réalité de l'information donnée sur les émissions de gaz à effet de serre et les atteintes à la biodiversité ou aux ressources naturelles, s'agissant de biens de consommation importés de Chine ou de produits d'alimentation provenant d'Amérique du Sud ? Selon la loi ÉGALIM, nous ne pouvons pas admettre dans notre pays des biens alimentaires qui ne respectent pas nos conditions sanitaires… mais aucun contrôle n'est possible. Et les normes environnementales imposées aux pneus Michelin ne le sont pas aux pneus qui viennent de Chine, parce qu'on ne peut pas contrôler ce qui s'y passe ! C'est cela, la réalité. Cet amendement est très séduisant, très écolo, très progressiste, mais aura autant d'effets concrets qu'une bulle dans la stratosphère.
Pourtant notre objectif est bien d'y arriver. On voit bien les limites de l'exercice : plus on ajoute des critères, plus on complexifie le dispositif, moins on le rend applicable et efficace. Je ne peux opposer d'arguments à un certain nombre des éléments que vous avez évoqués. En revanche, dès lors qu'on prend en considération le cycle de vie du produit, on peut intégrer la question des transports : il aura un score dégradé en fonction de son trajet. C'est une donnée objective. On ne peut pas contrôler sur pièce et sur place, c'est vrai, mais on peut au moins évaluer les impacts dus au transport grâce au critère carbone. Quant aux questions agricoles, je pense qu'elles doivent être traitées dans un alinéa spécifique. Je proposerai donc plus tard un amendement CS4704 qui viendra spécifier les choses, notamment s'agissant des externalités environnementales. Il ne faut pas prendre le risque que les produits provenant d'Amérique du Sud, puisque vous les avez évoqués, puissent être mieux notés, parce qu'ils auraient un cycle de vie plus court, que des produits élevés dans le Cantal.
Bref, s'agissant des importations, l'empreinte carbone permet d'être réaliste, et s'agissant des questions agricoles, l'affichage intégrera les externalités, qu'il conviendra d'évaluer scientifiquement. Tout cela concourt à démontrer la nécessité des expérimentations, parce qu'on voit bien la complexité du déploiement de l'affichage environnemental. Si l'on n'expérimente pas, comment concrétiser tout ce que vous avez décrit ?
Enfin Mme Batho a raison : le terme « significatifs » est trop subjectif, il faut le retirer. Ce sera plus clair et plus juste.
L'amendement CS3633 rectifié se lit donc ainsi :
« L'information apportée tient compte de l'ensemble des impacts environnementaux des biens et services considérés, en particulier en termes d'émissions de gaz à effet de serre, d'atteintes à la biodiversité et de consommation de ressources naturelles. »
Effectivement, ce terme risquerait de donner lieu à une jurisprudence sans fin. Dire qu'on tient compte de l'ensemble des impacts environnementaux des biens ou services suffit – positifs aussi d'ailleurs, il n'est pas question de se restreindre aux impacts négatifs. Cette rédaction me paraît en outre bien plus propre d'un point de vue légistique. Avis favorable.
Pour le reste, tout un travail de base de données est en cours au niveau international pour établir une pondération, donner une note moyenne à chaque pays dont on importe des produits. Ce travail demande du temps et n'est pas terminé. Enfin, les entreprises aussi ont un devoir de responsabilité sociétale quant à ce que font leurs fournisseurs.
La commission adopte l'amendement CS3633 rectifié.
Suspension de la réunion de vingt-deux heures quarante-cinq à vingt-deux heures cinquante-cinq
Amendement CS3994 de Mme Aude Luquet.
Il s'agit d'améliorer la lisibilité du nouvel indicateur en précisant que l'affichage est uniforme, ce qui permettra de faciliter les comparaisons. On s'appuierait ainsi sur l'exemple du Nutri-score, qui a été plébiscité par les consommateurs.
Sur le fond, je partage votre ambition d'un affichage le plus clair et le plus lisible possible. Mais à ce stade, alors que les expérimentations n'ont pas démarré, il est prématuré d'imposer cette uniformité à toutes les catégories de biens et services, tous les critères, toutes les filières. Peut-être les expérimentations concluront-elles à cela, peut-être au contraire apparaîtra-t-il qu'il faut ici une notation, là d'autres éléments. Il ne faut pas préjuger de leurs résultats. Avis défavorable.
La limite de cet indicateur, c'est que les affichages vont se multiplier, certains résultant d'initiatives privées. Il faut rester vigilants, sans quoi cela risque de brouiller l'information.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS2687 de M. Guillaume Garot.
Cet amendement propose que l'affichage environnemental soit effectué dans le lieu de vente à proximité du produit, et qu'il soit réservé à des supports matériels. En effet, dans la rédaction actuelle de l'article, il est envisagé que l'affichage environnemental se fasse par marquage, par étiquetage ou par tout autre procédé approprié. Connaissant la politique des distributeurs, il est clair qu'on finira par scanner un QR code sur son smartphone ! Sauf que cela exclut une grande partie des consommateurs. L'idée, toute simple, très concrète, est donc de se limiter à des modalités d'affichage très pratiques, pour ne pas créer de nouvelles exclusions.
Je partage l'objectif de cet amendement, mais je préférerais que vous le retiriez au profit des deux identiques suivants de Mme Sarles et de M. Colas-Roy, qui reprennent la terminologie de la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (loi AGEC). En précisant que l'affichage est visible au moment de l'acte d'achat, ils garantissent bien l'information du consommateur.
L'objectif, c'est que chaque consommateur puisse obtenir l'information, et facilement. Il me semble que les amendements suivants permettent de l'atteindre sans figer une méthode particulière, et c'est pourquoi je suggère le retrait du vôtre.
Je ne comprends pas bien pourquoi les deux amendements suivants seraient plus efficaces que le mien, qui, s'il ne provient pas de la majorité, est tout de même parfaitement clair !
Mais il impose que l'affichage se fasse sur le lieu de vente. Pourquoi ne serait-il pas directement apposé sur le produit, par exemple ? Les amendements suivants, en précisant que l'affichage doit être visible ou accessible au moment de l'acte d'achat, satisfont votre préoccupation, mais en donnant plus de leviers pour y arriver.
Selon mon amendement, l'affichage doit être non seulement sur le lieu de vente, mais à proximité du produit. Cela satisfait nos préoccupations à tous.
Malgré l'intention des auteurs des amendements suivants, prévoir un affichage accessible, cela ne veut pas dire qu'il sera affiché. Sur ce sujet des modalités à retenir, il serait utile d'une part de connaître le bilan qu'on tire des douze ans d'expérimentation de l'affichage environnemental, et d'autre part de savoir vers quelle option on s'oriente : affichage physique, données accessibles numériquement… Le Gouvernement en a-t-il une idée ? Avec ce texte je ne comprends pas vers quoi nous allons d'un point de vue opérationnel.
Je n'ai toujours pas de réponse à ma question sur la prise en compte du transport. Des biscuits normands peuvent être vendus à Marseille avec un affichage légèrement meilleur que celui des navettes marseillaises, parce qu'on n'aura pas tenu compte du trajet qu'ils auront effectué. D'où l'intérêt de l'amendement de Guillaume Garot : procéder à l'affichage sur le lieu de vente permet d'intégrer jusqu'au dernier impact, y compris celui qu'on veut camoufler, celui d'un transport à travers toute la France, voire plus.
Un argument supplémentaire : puisque votre amendement parle de lieu de vente, s'étend-il aux plateformes en ligne ? L'article 1er doit s'appliquer partout, et votre amendement fait courir le risque que l'affichage environnemental ne soit pas valable dans l'e-commerce, alors que les deux amendements suivants précisent bien qu'il est visible ou accessible.
Non, je pense qu'une plateforme en ligne n'est pas un lieu de vente. En tout cas, cela peut donner lieu à des débats d'experts pendant des heures. C'est pourquoi nous préférons parler de l'acte d'achat : c'est plus clair.
La commission rejette l'amendement.
Amendements identiques CS2351 de Mme Nathalie Sarles et CS4607 de M. Jean-Charles Colas-Roy.
Effectivement, si l'on veut responsabiliser les citoyens, il convient de s'assurer que l'affichage environnemental est bien visible au moment de l'acte d'achat, car certaines mentions sont encore cachées, ou accessibles à un autre moment que celui de l'achat. Transformer les consommateurs en consom'acteurs est une priorité, comme la Convention citoyenne pour le climat l'avait mentionné. Une information claire, précise et visible, c'est l'objet de ces amendements.
Je pose une troisième fois ma question : à quel moment arrive-t-on à faire la différence entre deux produits identiques sortant de deux usines distantes de 1 000 kilomètres ? Une fois que l'affichage est imprimé, on n'y peut plus rien. Des produits ayant parcouru 1 000 kilomètres viendront donc tromper le consommateur, le consom'acteur, en lui laissant entendre qu'ils ont un impact environnemental identique ou même légèrement moindre que le produit qui sort de l'usine d'à côté. On ne lui donne pas l'information. Il croira acheter un produit avec un bon poids carbone alors que l'effet transport n'y est pas inclus.
La commission adopte les amendements.
Pour information, nous examinons dix amendements à l'heure. Il serait peut-être utile d'accélérer un peu quand c'est possible.
Amendement CS3662 de Mme Florence Provendier.
Avis défavorable. Je pense que cet amendement devrait être placé après l'article 5, et peut-être légèrement remanié, même si sur le fond j'y suis favorable.
Avis défavorable car il est déjà précisé dans l'article 1er que le consommateur aura accès à l'information par voie de marquage, d'étiquetage ou par voie dématérialisée dans des conditions qui seront précisées par décret.
La commission rejette l'amendement.
Amendements CS502 et CS503 de M. Jacques Marilossian (discussion commune).
Ces amendements visent à rendre plus lisible l'information environnementale pour les consommateurs. Le CS502 précise qu'elle doit être fiable, transparente et vérifiable ; le CS503, qui est un amendement de repli, se limite à ce qu'elle soit fiable. Cette proposition s'appuie sur le rapport du Conseil économique, social et environnemental sur l'affichage environnemental.
Avis défavorable à l'amendement CS502 car, comme je l'ai déjà dit, il n'est pas nécessaire d'allonger indéfiniment le texte. En revanche, avis favorable au CS503, qui ajoute le terme « fiable » : cela va mieux en le disant.
Je suis d'accord sur les principes défendus par l'amendement CS502, mais sa rédaction est très lourde : je demande son retrait, ou mon avis sera défavorable. S'agissant du CS503, je m'en remets à votre sagesse : c'est une précision rédactionnelle qui n'est pas indispensable mais qui peut être utile.
L'amendement CS502 est retiré.
La commission adopte l'amendement CS503.
Amendement CS148 de M. Michel Vialay.
Il me semble important autant de mesurer l'impact sur l'environnement d'un produit que de comprendre les effets qu'il peut avoir sur la dégradation de la santé et d'y sensibiliser les consommateurs. C'est pourquoi il serait opportun de mentionner dans cet alinéa 2 l'impact des substances chimiques dangereuses et notamment des perturbateurs endocriniens, dont on connaît les effets sur la santé et les maladies qui peuvent en découler.
Avis défavorable, toujours pour les mêmes raisons. La question des perturbateurs endocriniens fait évidemment partie de l'impact environnemental, et votre amendement est donc satisfait. Si nous prenons le risque de nous essayer à l'exhaustivité en multipliant les critères, les écueils que nous évoquions apparaîtront vite. Pour la clarté et les possibilités d'évolution de l'affichage environnemental, mieux vaut ne pas ajouter à la liste prévue.
L'Institut national de l'environnement industriel et des risques insiste sur la nécessité de renforcer les actions de communication vers le public, et c'est également préconisé dans le règlement européen REACH. Ce ne serait donc pas une disposition propre au présent projet de loi.
La commission rejette l'amendement.
Amendements identiques CS434 de M. Guy Bricout, CS644 de M. Vincent Descoeur, CS827 de M. Julien Dive et CS1076 de M. Jean-Yves Bony.
L'affichage environnemental ne sera efficace que s'il permet d'éclairer le consommateur sur les différentes externalités environnementales, qu'il s'agisse des émissions de gaz à effet de serre, du stockage du carbone, de la préservation de la biodiversité, de la qualité de l'eau etc. Se limiter au seul cycle de vie pourrait avoir pour conséquence d'encourager les productions intensives, par exemple celles des ruminants sud-américains, au détriment des élevages plus respectueux de l'environnement, à l'image de ceux des plateaux volcaniques du Cantal. Ce serait un comble ! Nous en avions déjà débattu avec Stéphane Travert lors de l'examen de la loi Égalim. L'idée court que les critères pourraient être fixés par décret mais il me semble important d'inscrire dans la loi celui de la capacité de stockage du carbone, notamment dans le cadre de l'élevage.
Je vous présenterai dans quelques instants un amendement qui vise à créer un alinéa spécifique consacré aux externalités environnementales des produits agricoles, sylvicoles et alimentaires, pour éviter les effets de bord que vous décrivez. Il sera également nécessaire d'évaluer scientifiquement l'expérimentation menée, en particulier en vue de rendre obligatoire cet affichage. Des garde-fous sont nécessaires dans ce domaine. Je vous invite par conséquent à retirer votre amendement qui sera satisfait par l'amendement CS4704.
Je vous fais confiance et je retire l'amendement mais je le déposerai à nouveau en séance si d'aventure, j'avais été abusé.
La rédaction que la rapporteure proposera me semble plus complète et je vous invite à retirer vos amendements. Par ailleurs, il ne me paraît pas souhaitable de retenir la valeur nutritionnelle des produits alimentaires. L'affichage doit se baser sur des critères complets tout en demeurant lisible. Nous pourrions par exemple imaginer une échelle de A à F. L'expérimentation nous permettra de déterminer les critères sur lesquels elle reposera mais prenons garde de ne pas en altérer la clarté à force d'en élargir le champ.
À écouter Mme la ministre, je me dis que mes collègues feraient bien de ne pas retirer leur amendement. Celui de Mme la rapporteure porte en effet sur les externalités environnementales mais le leur va plus loin. Le critère de la valeur nutritionnelle du produit mériterait d'être retenu. À force d'imposer des mesures très restrictives à notre propre production, nous finirons par devoir importer des produits beaucoup moins vertueux. L'amendement de mes collègues a le mérite d'exister et j'espère que la sagesse collective l'emportera d'ici la séance.
Les amendements CS434 et CS644 sont retirés.
La commission rejette les amendements CS827 et CS1076.
Amendements CS1596 de M. André Chassaigne, CS1327 de M. Thierry Michels, CS2523 de M. Jean-François Mbaye, CS3667 de Mme Yolaine de Courson, CS2353 de Mme Nathalie Sarles, CS3733 de Mme Yolaine de Courson, CS3751 de Mme Valérie Petit, CS3995 de Mme Yolaine de Courson (discussion commune).
Nous venons d'adopter l'amendement CS3633 rectifié de Mme la rapporteure qui tend à ce que l'information apportée tienne compte de l'ensemble des impacts environnementaux des biens et services considérés, en particulier en termes d'atteintes à la biodiversité et de consommation de ressources naturelles. Nous en avons déduit, avec le président Chassaigne, qu'il faudrait retirer cet amendement, en maintenant les réserves de ce même président et en souhaitant que cet OVNI ne soit pas condamné à l'inopérationnalité.
Mon amendement traduit l'ambition et la cohérence de la majorité. Nous voulons mobiliser les consommateurs et les acteurs économiques afin de mener, ensemble, la transition écologique. La loi anti-gaspillage pour une économie circulaire nous a permis de progresser dans le domaine du numérique et des biens électroniques. Nous voulons passer à la vitesse supérieure, en renforçant nos exigences en termes de consommation et de production. C'est en renforçant la transparence que nous favoriserons intelligemment la consommation de biens produits par une économie française et européenne plus décarbonée, source d'emplois de qualité dans le territoire, celle que nous voulons promouvoir par ce texte, en incitant consommateurs et producteurs à acquérir et produire les biens qui ont le moins d'impact possible sur l'environnement.
Cet amendement reprend une préconisation du Conseil économique, social et environnemental, de créer un indicateur qui dépasse le seul score carbone, en s'appuyant sur les six grands types d'impacts identifiés par l'ADEME, en particulier l'épuisement des ressources naturelles non renouvelables, la pollution ou la biodiversité. Ainsi, chaque acteur pourra se décider en pleine connaissance de cause.
Nous devrons accompagner ce mouvement qui vise à renforcer la transparence et à mobiliser les consommateurs et les entreprises, grâce aux aides allouées par l'État dans le cadre du plan de relance pour soutenir les entreprises dans leurs efforts d'innovation et de transition de leurs outils de production ou dans celui de notre budget, en particulier via le fonds Économie circulaire – les crédits dédiés au programme 181, qui vise à concrétiser la transition écologique, ont en effet plus que doublé dans la loi de finances.
L'amendement CS2523 tend à informer le consommateur des effets sur l'environnement du bien ou du service qu'il achète.
Mme la rapporteure entend par biodiversité la déforestation ou la mise en danger des espèces. Je pense au contraire que la définition s'étend au monde vivant sous toutes ses formes, de la diversité génétique à la biosphère. Nous faisons, nous aussi, partie de la biodiversité.
Je vous propose par conséquent de ne pas nous en tenir au seul impact carbone mais de prendre en compte les effets sur la biodiversité, à savoir les conséquences pour le monde vivant sous toutes ses formes. Dès lors, il ne serait plus utile de dresser des listes interminables d'effets.
Par l'amendement CS2353, il s'agit, là encore, de renforcer la place de la biodiversité dans le texte, conformément aux recommandations du Conseil économique, social et environnemental, d'autant plus que les derniers chiffres dont nous disposons sont alarmants, y compris en Europe.
Je vous invite à suivre les conseils du président Chassaigne et à retirer ces amendements car ils sont satisfaits par l'amendement que vous avez adopté à l'unanimité et qui tendait à tenir compte de l'ensemble des impacts environnementaux, en particulier les atteintes à la biodiversité. Puisse la sagesse communiste inspirer cette assemblée.
En effet, ces amendements sont satisfaits par celui de Mme la rapporteure, que vous avez adopté. On ne peut pas évaluer l'impact environnement si l'on ne prend pas en compte la biodiversité. La Convention citoyenne pour le climat souhaitait que l'on retienne le score carbone mais cet indicateur n'aurait permis de mesurer que les conséquences sur les émissions de gaz à effet de serre. Au contraire, l'affichage, tel qu'il résulte de l'amendement de Mme la rapporteure, permettra de mesurer les effets globaux sur l'environnement, en particulier sur la biodiversité. Une pastille spécifique sera dédiée au score carbone. Je vous invite à retirer les amendements.
Je maintiens mes amendements. Si nous devions manger aujourd'hui du sucre de betterave, il aurait un très mauvais score biodiversité.
Les amendements CS1596, CS1327, CS2523, CS2353 et CS3751 sont retirés.
La commission rejette successivement les amendements CS3667, CS3733 et CS3995.
Amendements CS2270 de M. Bertrand Pancher, CS2888 de M. Dominique Potier et CS3997 de Mme Nadia Essayan (discussion commune).
Informer les consommateurs sur l'empreinte carbone des produits est un progrès mais ce progrès restera incomplet si les consommateurs ne sont pas, dans le même temps, sensibilisés aux impacts climatiques générés par les transports et la livraison des produits. L'information sur le coût carbone du transport vise à responsabiliser l'ensemble des acteurs en incitant les consommateurs comme les vendeurs à privilégier le recours au transport décarboné dans les chaînes logistiques.
Je suis surpris que mon amendement CS2888 soit rattaché à cette discussion commune, il est peut-être mal rédigé. Par « chaînes d'approvisionnement », je n'entends pas les chaînes logistiques par lesquelles le produit est acheminé, mais les systèmes de production et les sous-traitants.
Fabriquer une tonne d'acier en Chine consomme 50 % de CO2 de plus qu'en France. Comment calculer le contenu en carbone de produits identiques selon leur origine, au-delà des effets du transport ?
Il ne suffit pas de connaître l'empreinte carbone des produits ; pour sensibiliser le consommateur, il est très important de tenir compte aussi de l'impact lié au transport et à la livraison. Cette information doit permettre de responsabiliser le consommateur et l'inciter à choisir des modes de transport décarbonés. Tel est l'objet de l'amendement CS3997.
L'affichage environnemental prendra en considération le cycle de vie, qui intègre le transport, comme je l'ai dit à M. Chassaigne à propos des importations. Les modalités précises de calcul seront déterminées à l'issue de l'expérimentation qui va être mise en place, et distinctes selon les catégories de biens et services.
Nous sommes convenus de travailler avant la séance à un dispositif spécifique pour mesurer l'impact environnemental de la livraison. En effet, une plateforme de commerce électronique ne devrait pas indiquer au moment de l'achat que la livraison ne coûte rien, laissant à penser que l'impact environnemental est également nul. L'information au bénéfice du consommateur doit être clarifiée.
Avis défavorable aux amendements CS2270 et CS2888, et je demande le retrait de l'amendement CS3997 pour y retravailler.
Avis défavorable. L'impact environnemental des transports est calculé à l'arrivée du produit en France : l'affichage intégrera donc les transports internationaux.
Une seconde étape commence quand le produit est en France, et dépend donc de la façon dont il arrive au consommateur : dans une grande surface, chez un petit commerçant ou sur une plateforme en ligne.
L'affichage environnemental sera identique pour un même produit. Il est trop compliqué de distinguer, pour un produit arrivé dans le port de Dunkerque, selon qu'il est livré à Lille, Paris ou Marseille. Nous pouvons faire l'analyse du cycle de vie général, avant que le produit n'arrive sur le marché français. Après, nous pourrons l'affiner, par exemple pour prendre en compte les plateformes en ligne. Je suis d'accord avec la proposition de la rapporteure d'y travailler en vue de la séance.
Faire apparaître l'impact du transport serait extrêmement important, d'autant que le développement des accords de libre-échange a multiplié le nombre de produits importés.
Le plus facile serait d'afficher le pays d'origine, mais la réglementation européenne a limité les articles qui pouvaient porter cette mention. Pour d'autres, notamment les produits alimentaires, dont la viande transformée et les produits laitiers, nous n'avons obtenu cette autorisation qu'à titre expérimental.
Pour prendre l'exemple des pneumatiques, le consommateur connaît la marque, mais pas le lieu de fabrication. Un pneu peut provenir de Pologne, d'Asie ou de Clermont-Ferrand. Peut-être serait-il possible de le savoir en démontant le pneu pour regarder à l'intérieur, mais je n'en suis pas certain. Il est donc très difficile, dans le système économique actuel qui promeut la libéralisation, le moins-disant et les délocalisations, d'indiquer l'impact environnemental d'un produit, et je suis pessimiste quant aux résultats de l'expérimentation.
J'en reviens toujours à la même question, qui n'a toujours pas reçu de réponse : comment éviter de créer une distorsion d'appréciation chez le consommateur ? Entre deux produits équivalents, celui qui a parcouru 1 000 kilomètres pour traverser toute la France pourrait afficher un meilleur impact environnemental au motif qu'il aurait eu recours à des énergies renouvelables. La question du transport est extrêmement importante.
Nous ne nous rendons pas compte de l'immense complexité du travail nécessaire, uniquement pour faire un Éco-score. Il va falloir intégrer l'ensemble du cycle de vie des produits, avec des sous-ensembles issus de pays différents.
Or depuis une heure et demie, nous proposons d'ajouter encore de la complexité. Certes, les idées sont bonnes, mais l'enfer est pavé de bonnes intentions. Nous ne pouvons pas intégrer le mode de distribution du produit une fois qu'il a été fabriqué. Faisons confiance à l'intelligence des Français : les Marseillais qui achètent des huîtres de Cancale savent d'où elles viennent, et ceux qui achètent des avocats savent qu'ils ne poussent pas en Auvergne…
Si, dans deux ans, cet indice permettait d'informer sur l'Éco-score des produits, ce serait déjà un résultat incroyable même s'il ne donne pas toutes les indications que nous aimerions ajouter. Toutes ces propositions sont intellectuellement satisfaisantes, mais elles ne peuvent pas entrer dans la construction de cet indice.
M. Chassaigne a raison, comme souvent, de regretter l'impossibilité de mentionner le pays d'origine dans tous les cas. Mais certains produits incorporent des composants de nombreux pays différents. C'est le cas des smartphones – extrêmement complexes –, mais aussi des vélos, qui peuvent être assemblés en France avec des pédales venant d'un pays, et des freins d'un autre, et ainsi de suite.
Là est tout l'intérêt de l'analyse du cycle de vie : elle permet de tenir compte de l'origine de chaque composant pour donner l'empreinte carbone du produit global. C'est l'information dont le consommateur a besoin. Je le rappelle, l'affichage environnemental a pour objet d'orienter le choix du consommateur.
L'amendement CS3997 est retiré.
La commission rejette successivement les amendements CS2270 et CS2888.
Amendements CS1528 de Mme Paula Forteza et CS2356 de Mme Nathalie Sarles (discussion commune).
Il s'agit de préciser la quantité de matières premières et d'eau nécessaires à la fabrication d'un produit. Ce sont des informations importantes, notamment pour les produits numériques, mais j'imagine que la rapporteure va nous répondre que cette information est intégrée dans l'analyse du cycle de vie.
Je propose également de prendre en considération la quantité d'eau consommée. Je trouve que la question de l'eau n'est pas suffisamment présente dans ce texte. Je suis étonnée, alors qu'il est question de climat et de résilience, que le texte n'aborde pas la raréfaction de cette ressource.
Ces deux amendements sont satisfaits suite à l'adoption du CS3633 rectifié, qui mentionne la consommation de ressources naturelles. Il n'est pas nécessaire de préciser à l'infini les différents éléments. Je demande le retrait.
Même avis. Les impacts liés aux atteintes à la biodiversité sont pris en compte dans l'amendement précédemment adopté.
Lors de l'audition de l'ADEME, nous avons compris que la construction de l'Éco-score est extrêmement compliquée. J'entends tous les amendements qui proposent d'ajouter des éléments pour rendre cette indication encore plus sécurisante pour le consommateur, mais je crains que nous n'aboutissions à un résultat irréalisable.
Laissons l'expérimentation se dérouler, et voyons quels critères les scientifiques nous proposerons pour obtenir l'Éco-score le plus représentatif du produit vendu. La quantité de matières premières et d'eau nécessaires peut varier d'une récolte à l'autre, ou d'un coin du champ à l'autre !
Je ne suis pas convaincue que l'intervention de M. Millienne nous fasse gagner du temps. Il serait utile que le Gouvernement nous explique pourquoi l'affichage environnemental n'a pas été mis en œuvre depuis douze ans. Est-ce en raison de la réticence des secteurs économiques, ou de difficultés techniques ? Les choses seraient beaucoup plus claires, y compris pour discuter les propositions de la Convention citoyenne sur le score carbone.
Je suis convaincue par la réponse de la rapporteure, mais je ne retire pas cet amendement car il a été déposé par ma collègue Paula Forteza.
C'est précisément parce que nous n'avons jamais réussi à nous mettre d'accord sur une méthodologie commune que cela n'a pas été mis en œuvre. Les méthodologies sont différentes, les critères ne sont pas les mêmes et il est impossible pour le consommateur d'établir des comparaisons. Tout l'intérêt de ce que nous avons fait dans le cadre de la loi AGEC et de ce que nous examinons ce soir, c'est de faire converger les méthodologies pour aboutir enfin à une méthodologie reconnue par tous. Il s'agit en effet d'un sujet complexe et l'expérimentation demandera un peu de temps mais je suis bien d'accord avec vous : nous devons aboutir vite !
Les amendements nous auront donné l'occasion d'aborder ces sujets et de mesurer la complexité des choses. Monsieur Millienne, l'eau est bien évidemment nécessaire pour la production agricole, mais son usage pour la production textile, qui s'accompagne souvent de l'adjonction de teintures polluantes, concourt à l'altération tant qualitative que quantitative de la ressource. Je comprends que l'on ne puisse pas tenir compte de ce critère, mais il est important de soulever ces questions pour améliorer les process industriels, donc le score des produits.
L'amendement CS2356 est retiré.
La commission rejette l'amendement CS1528.
L'amendement CS2357 de Mme Nathalie Sarles est retiré.
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement CS2583 de Mme Laurianne Rossi.
Amendements CS4233 de M. Denis Sommer et CS3033 de M. Sylvain Templier (discussion commune).
Pour soutenir les achats de produits locaux en circuits courts, lesquels peuvent avoir de mauvais scores matière d'émissions de gaz à effet de serre, M. Templier propose de tenir compte du nombre d'intermédiaires et de la provenance des matières premières. Cela éclairera les consommateurs dans leur choix et encouragera les producteurs à optimiser les conditions de production pour réduire au maximum l'impact carbone.
Encore une fois, plus on complexifie, moins l'affichage a de chances d'aboutir. L'analyse du cycle de vie d'un produit intègre son transport. Avis défavorable.
Non, l'analyse ne le prend en compte que partiellement, ainsi que je l'ai démontré. Parce que l'on n'intégrera pas toutes les composantes, et notamment le transport lié à la mise à disposition et à la vente des produits, des entreprises subiront la concurrence de marchandises produites à 1 000 kilomètres de là. Je crains que l'article ne soit déclaré inconstitutionnel en raison de cette distorsion de concurrence. Le système est complexe, c'est vrai, mais on ne doit pas ignorer les risques d'inconstitutionnalité sous prétexte que l'on recherche la simplicité ou l'opérationnalité.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement CS5001 de M. Jean-Marie Sermier.
Au fil du débat, il m'apparaît que l'affichage est loin de pouvoir s'appuyer sur des valeurs techniques indiscutables. L'analyse du cycle de vie dépend de divers critères mais si on les intègre tous, on finira par noyer les consommateurs. C'est sans fin ! L'affichage doit être explicite pour le commun des mortels. Ne sommes-nous pas en train de monter une usine à gaz ? Le mécanisme ne doit-il pas être retravaillé ? J'espère donner l'exemple en retirant cet amendement.
L'amendement est retiré.
Amendement CS2365 de Mme Nathalie Sarles.
Bien sûr, c'est compliqué ! Il faut procéder par filière, par type d'équipement. Nous avons réussi à aller dans la dentelle lorsque nous avons examiné le projet de loi AGEC. Mme Riotton avait alors défendu la notion de réparabilité, fondamentale si nous voulons lutter contre l'obsolescence programmée. Je propose ici que l'affichage fasse ressortir l'indice de durabilité pour les équipements électriques et électroniques.
La loi AGEC prévoit en effet que l'indice de durabilité pourra être déployé, mais seulement pour certains produits électriques et électroniques. Si l'on met en confrontation des labels issus des indices et l'affichage environnemental, on court le risque de l'illisibilité. Encore une fois, plus on complexifie, plus on s'éloigne de notre objectif, celui que les consommateurs s'y retrouvent. Comme l'a dit Mme Batho, cela fait douze ans que nous attendons cet affichage. Pour que nous aboutissions, les critères doivent être suffisamment précis. Je suggère le retrait.
Les consommateurs pourront disposer d'un indice de durabilité grâce à la loi AGEC. Il est inutile que l'affichage en fasse mention.
Tous les amendements que nous avons examinés vont dans le bon sens car leurs auteurs cherchent à prendre en compte les questions sociales et environnementales. Pourtant, j'ai le sentiment que l'on déplace les responsabilités sur le consommateur, que l'on appelle à juste raison « consomm'acteur », comme si c'était seulement au niveau de l'acte d'achat que l'on allait résoudre ces questions. On ignore ainsi l'importance des choix politiques, qui font que l'on développe le libre-échange, et les choix de rentabilité financière, qui font que l'on délocalise. Les règlements permettent d'imposer des évolutions aux process de fabrication ; c'est notamment en donnant un droit de regard aux salariés dans les entreprises que l'on peut faire évoluer les choses. On croit l'affaire réglée, mais la question des responsabilités n'est pas abordée.
Toute réglementation doit être compréhensible par le commun des mortels. Il faut prendre garde à ne pas leurrer les consommateurs, cela pourrait se retourner contre nous. Comme l'a dit André Chassaigne, nous essayons de bien faire avec ces amendements mais nous n'y parvenons pas car la liste des critères est sans fin, les bases juridique et technique manquent et il n'y a pas encore de socle commun européen. Ne faut-il pas attendre une réflexion au niveau européen avant d'avancer ?
Parce que c'est compliqué, on ne ferait rien ? Parce que c'est compliqué, il faudrait attendre que l'Europe propose quelque chose ? Nous parlons ici d'une expérimentation, qui nous permettra d'avancer et de trouver les solutions pour résoudre une question dont vous reconnaissez tous l'importance.
La commission rejette l'amendement.