La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
J'ai reçu de M. Jean-Luc Mélenchon et des membres du groupe La France insoumise une motion de renvoi en commission, déposée en application de l'article 91, alinéa 6, du règlement.
La parole est à Mme Sabine Rubin.
Avec le projet de loi de règlement du budget 2018 s'achève le premier exercice budgétaire complet du Gouvernement.
Depuis son chiffrage initial et durant son exécution, nous n'avons eu de cesse de vous alerter, monsieur le ministre de l'action et des comptes publics, sur l'absence de pertinence de vos choix budgétaires opaques, « austéritaires » et court-termistes. À présent, les résultats sont sous nos yeux ; ils nous donnent raison.
À force de rabotages, les dépenses publiques ont chuté de 1,8 % en termes réels, et de 3 % hors masse salariale, tandis que le déficit budgétaire de l'État s'accroissait de 12 %, en conséquence des cadeaux fiscaux que vous avez distribués. Nous enregistrons cette année la baisse des prélèvements obligatoires la plus sévère depuis 2009, à hauteur de 16,5 milliards d'euros.
Et, comme le père Noël, vous ne passez jamais chez les plus démunis. Suppression de l'ISF – impôt de solidarité sur la fortune – , baisse de l'impôt sur les sociétés, augmentation du CICE – crédit d'impôt compétitivité emploi – : autant de ristournes ne bénéficiant qu'aux plus fortunés de nos concitoyens !
Quant aux baisses de la taxe d'habitation et de l'impôt sur le revenu, dont vous vous gargarisez à longueur de plateaux télévisés, en invoquant les classes moyennes, elles contournent précisément les plus pauvres, qui déjà ne s'en acquittaient pas. Sur tous ces sujets, le rapport de la Cour des comptes sur le budget de l'État en 2018 est accablant.
Et encore : il ne s'agit là que de ce qui peut être évalué par le Parlement, devenu la dernière roue du carrosse républicain. Si, en 2017, le président Macron a prétendu recentrer la mission de cette assemblée sur le contrôle du Gouvernement, notamment par le biais du printemps de l'évaluation, on a omis de nous donner les outils nécessaires.
Entre une foule d'indicateurs tronqués et l'absence des moyens humains et financiers qui nous permettraient de produire des évaluations indépendantes, c'est le flou artistique qui règne, et non la nécessaire transparence.
Par le biais de la présente motion de renvoi en commission, ce sont précisément ces deux hypocrisies que nous dénonçons et tâchons de corriger : celle d'un exercice budgétaire très coûteux pour les pauvres, et celle d'un printemps de l'évaluation qui, au lieu de nous donner les moyens du contrôle, fait de nous l'observatoire impuissant des faits et gestes du Prince.
Confrontés au caractère lacunaire des chiffres et à l'insuffisance des débats en commission, nous effectuons notre propre printemps de l'évaluation de votre exercice budgétaire et de vos calculs.
Comme je l'ai rappelé à l'instant, la Cour des comptes – qui ne saurait être soupçonnée de complaisance à notre égard – vous accable dans son rapport sur le budget de l'État en 2018. Au cours des derniers mois, vous n'avez eu à la bouche que le terme pompeux de « transformation », remplaçant celui de « réforme ».
À la lecture du rapport, on se demande bien ce que vous entendez transformer, dès lors que vous ne consacrez que 3,5 % du budget général à l'investissement ! Ce chiffre, à lui seul, signe votre imposture. Il ne s'agit pas tant de transformation que de destruction, avant tout celle de l'État, donc de notre pouvoir collectif d'action et de décision, seul à même d'opposer au chaos des intérêts particuliers un choix de société effectué démocratiquement.
La Cour des comptes est formelle : en 2018, vous avez taillé dans les recettes comme dans les dépenses, tout en portant le déficit à 76 milliards d'euros. Une telle augmentation n'avait pas été mesurée depuis 2014. Résultat : un État appauvri, affaibli dans ses missions les plus cruciales, à la merci des mangeurs de dividendes, qui n'attendent rien d'autre que de planter leurs crocs dans ces juteux monopoles !
L'année dernière, avec la suppression de l'ISF, la diminution de l'impôt sur les sociétés, la hausse du CICE et la mise en place de la flat tax, vous avez privé les Français de 9,5 milliards d'euros. Autrement dit, vos cadeaux aux nantis correspondent très exactement à la hausse du déficit budgétaire, que vous faites supporter par tous les Français. Comme au temps des fournisseurs militaires, l'effort de tous finance le confort de quelques-uns !
En effet, dans le même temps, les impôts les plus injustes, non progressifs, augmentent sans discontinuer, des milliards supplémentaires en TVA aux 4 milliards de la fiscalité énergétique. On voit à qui le Gouvernement prend et à qui il donne sans compter. On voit où vont sa confiance et ses allégeances.
La Cour des comptes relève également qu'il n'existe aucun contrôle de la niche fiscale en faveur du mécénat des entreprises, dont le coût a décuplé depuis sa création en 2003, sans que la moindre évaluation de son efficacité ne soit menée. Tandis que l'on scrute le moindre faux-pas des bénéficiaires d'aides sociales, toujours suspects de fainéantise ou de roublardise, l'oligarchie bénéficie d'une confiance aveugle pour la dépense des deniers publics qui lui sont alloués !
Il en est ainsi des 200 dépenses fiscales – les fameuses niches – dont la Cour des comptes déplore l'absence de pilotage, ainsi que l'ignorance dans laquelle nous sommes du nombre de leurs bénéficiaires. Cette opacité, cette complexité nébuleuse, comment ne pas croire qu'elles servent un objectif de dissimulation et d'esbrouffe, alors même que le Gouvernement les entretient soigneusement dans les dispositifs fiscaux qu'il échafaude ?
Des 10 milliards du fonds pour l'innovation dans l'industrie, la Cour des comptes estime qu'il ne sortira chaque année que 250 millions, le reste se perdant dans les méandres d'une mécanique budgétaire complexe et injustifiée, et pouvant être retiré à tout moment pour servir d'autres fins.
Difficile, dès lors, de penser qu'il s'agit d'autre chose que d'un paravent destiné à justifier les privatisations calamiteuses d'entreprises publiques pourtant bénéficiaires, telles que La Française des Jeux et Aéroports de Paris – ADP !
S'il fallait encore une preuve que tout cela relève d'une certaine forme d'aveuglement doctrinaire, la Cour des comptes démontre que ce fonds, dont les plus optimistes évaluent le rendement à 2,5 %, est cinq fois moins rentable que la moyenne des participations publiques.
Autrement dit, en s'abstenant de privatiser les entreprises concernées et en se contentant d'introduire dans le budget annuel une ligne de 250 millions, destinés à l'investissement public en faveur de l'innovation, le Gouvernement dépenserait moins, et épargnerait à l'État un démembrement dont souffriront les prochaines générations – générations qu'il prétend pourtant protéger en pratiquant une austérité tout à fait sélective.
Car, en un mot comme en cent, c'est bien à cela que nous assistons. De même que l'on démembrait ceux qui attentaient à la personne du souverain, on démembre l'État, ici et maintenant, pour avoir attenté à la souveraineté de l'oligarchie. Le Parlement assiste, en spectateur impuissant, à ce lamentable spectacle, qui l'est d'autant plus que le printemps de l'évaluation n'est qu'une vaste imposture, tant sur le fond que sur la forme.
Tout d'abord, j'aimerais faire observer que la procédure a été taillée pour les rapporteurs spéciaux des commissions d'évaluation. Ceux-ci – permettez-moi de le rappeler – sont peu nombreux parmi les groupes comptant peu de députés, tels que celui dont je suis membre.
On me permettra de rappeler également que ces rapporteurs, pour être si spéciaux, disposent de deux heures de discussion avec les ministres. Les orateurs des groupes, eux, n'ont que deux minutes de temps de parole. En fin de compte, il résulte de cette formidable prime à la majorité que le Gouvernement n'est contrôlé que par ses ouailles.
Par ailleurs, les évaluations portent souvent sur des missions dépourvues de véritable proximité thématique. Que l'on m'explique, par exemple, ce que l'immigration et le stationnement routier ont à voir ensemble pour être traités dans une même commission d'évaluation !
La plaisanterie ne s'arrête pas là : les contours des indicateurs dont dispose le Parlement, ainsi que leurs résultats, ont été préalablement définis. À nos yeux, ils sont contestables.
Quelle idée, par exemple, de faire évaluer la performance de la Cour nationale du droit d'asile à l'aune de la vitesse à laquelle elle traite ses dossiers ! La même remarque vaut pour le Haut Conseil des finances publiques, dont personne ne se soucie de savoir, après qu'il a rendu ses avis, s'ils sont conformes aux réalités macroéconomiques qu'ils étaient censés prédire. On pourrait également mentionner les indicateurs nommant « performance » la revente, au bénéfice des rentiers de la dette publique, de biens publics essentiels.
On voit là le parti pris de ces indicateurs, que vous vous refusez à réformer malgré nos propositions en ce sens, monsieur le ministre. Voilà donc comment s'exerce le pouvoir en Macronie : au bénéfice des riches, au détriment du peuple, dans une opacité qui maintient les citoyens, l'opposition que nous représentons et jusqu'à votre propre majorité dans l'ignorance et l'impuissance !
Toutefois, nous refusons de nous résoudre à cette situation. Nous refusons que les conditions d'examen du projet de loi de règlement du budget 2018 ne soient pas à la hauteur des exigences démocratiques, notamment pour les petits groupes comme le nôtre.
Nous affirmons que le nécessaire contrôle de l'action du Gouvernement par le Parlement nécessite d'en assurer la transparence, qui ne peut être escamotée derrière les concepts creux d'efficacité, d'efficience et de simplification, qui sont votre marque de fabrique.
Cette motion de renvoi en commission est donc pour nous l'occasion de sortir ce débat du huis clos feutré des commissions élargies, et de le soumettre à l'éclairage, fût-il artificiel, de l'hémicycle. C'est l'occasion de jeter la lumière sur vos paravents, afin qu'une autre vérité sur votre politique s'y dessine.
Bien entendu, il me sera impossible de revenir sur le détail de chaque mission budgétaire. C'est pourquoi je mettrai l'accent sur vos choix politiques qui nous semblent être les plus graves.
En premier lieu, considérant que les services publics constituent le patrimoine de ceux qui n'en ont pas, nous affirmons que les participations financières de l'État dans les secteurs stratégiques doivent rester majoritaires.
Or, à la lecture du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État », nous découvrons que celui-ci a vendu, depuis 2017, des milliards d'euros de titres, de parts et de droits de sociétés qu'il détenait dans des entreprises de première importance pour nos concitoyens, telles que Safran, Engie et GIAT Industries.
Nous pourrons bientôt y ajouter les milliards de La Française des Jeux et d'Aéroports de Paris, qui sont autant de cadeaux offerts à vos amis, au détriment du pragmatisme économique le plus élémentaire dont vous vous revendiquez pourtant. C'est à croire que l'entourloupe que vous ont réservée les investisseurs chinois lors de la cession de l'aéroport de Toulouse ne vous a pas servi de leçon – ou plutôt que l'intérêt supérieur de la France vous importe peu !
Brader ces fleurons permet certes de faire rentrer à court terme de l'argent frais dans les caisses de l'État, pour éponger notamment le coût de vos cadeaux aux riches, tout en restant dans le cadre des fameux 3 % de déficit public. Mais l'intérêt des Français sur le long terme, il semble que vous n'en ayez cure.
En privatisant ADP, vous faites perdre à nos concitoyens une part de souveraineté, vous accroissez les risques environnementaux par l'augmentation du nombre de vols et vous ouvrez la porte à des réductions d'effectifs, donc à une dégradation de la qualité du service. Je profite de l'occasion pour rappeler à celles et ceux qui nous écoutent l'importance de leur soutien à la procédure en cours de référendum d'initiative partagée.
Autre attaque, contre les plus pauvres cette fois : votre politique en matière de logement, qui constitue une offense à la mémoire et à l'action de l'Abbé Pierre. D'après le rapport publié par la fondation éponyme au début de l'année, les coupes budgétaires décidées par le Gouvernement dans la politique du logement lui permettront d'économiser 4 milliards d'euros par an à partir de 2020, par rapport à la situation qui prévalait en 2017.
Le programme 109 « Aide à l'action au logement » en fait les frais, avec une diminution de la dotation initiale de ce programme de 1,2 milliard d'euros entre 2017 et 2018. D'ici à 2020 et par rapport à la situation en 2017, le Gouvernement aura fait perdre 2,5 milliards d'euros par an aux allocataires de l'aide personnalisée au logement – APL. Ainsi, en 2019, un allocataire aura perdu en moyenne 12 euros par mois par rapport à ce qu'il percevait avant l'arrivée d'Emmanuel Macron au pouvoir. Et la dégringolade va continuer en 2020 ! Je vous rappelle que la moitié de ceux qui touchent des APL vivent en dessous du seuil de pauvreté.
Toutes les semaines, je reçois dans ma permanence des demandeurs de logement. En Seine-Saint-Denis, les logements sont saturés. Que dois-je répondre à ces personnes, sinon que vos choix politiques en matière de logement social débouchent sur une baisse de 12 % de construction de logements sociaux depuis le début de la législature ?
Dois-je leur dire d'attendre et de prendre leur mal en patience ? Ce serait leur mentir, puisqu'une étude de la Caisse des dépôts qui prend en compte les nouvelles perspectives financières des HLM est particulièrement pessimiste : elle conclut que la production de logements sociaux passera en dessous de 100 000 en 2020 et déclinera jusqu'à 60 000 par an jusqu'en 2027.
Comme si cela ne suffisait pas, vous ajoutez de l'indignité à l'injustice que vivent nos concitoyens en situation de handicap. Certes, vous augmentez le montant de l'allocation adulte handicapé – AAH – tout en assumant, il est vrai, de maintenir ses bénéficiaires en dessous du seuil de pauvreté. Mais en changeant les modes de calcul d'accès à l'AAH pour les couples, vous empêchez nombre d'entre eux d'en bénéficier. Vous faites finalement reposer la solidarité nationale sur la solidarité conjugale. Pourtant, vous avez eu l'occasion à maintes reprises de voter une proposition de loi de ma collègue Marie-George Buffet. Soutenue par toutes les oppositions et par l'ensemble des associations oeuvrant dans le domaine du handicap, cette proposition estimait que cesser de tenir compte des revenus du conjoint pour calculer le montant de l'AAH coûterait 360 millions d'euros, soit l'équivalent de l'augmentation des dépenses en 2018 pour le programme 157 « Handicap et dépendance ». C'est donc là une mesure tout à fait réalisable.
Prenons maintenant la mission « Travail et emploi ». Les dépenses d'intervention pour l'ensemble de la mission ont baissé de 16 %, en raison de la restriction du dispositif des contrats aidés, rebaptisés « parcours emploi compétences ». Alors que l'on en comptait 380 000 en 2016 et 280 000 en 2017, les voilà réduits à 128 000 en 2018.
Certes, vous avancez que seul un tiers de ces contrats aboutit à un CDI. Ce n'est pas satisfaisant, en effet. Mais si vous daigniez mettre fin aux baisses de dotations des collectivités, celles-ci pourraient plus souvent embaucher durablement les bénéficiaires de ces contrats. En outre, il est bon de rappeler que 90 % des bénéficiaires étaient des personnes précaires ou éloignées de l'emploi à qui ce contrat permettait d'accomplir des travaux bien souvent socialement utiles dans les associations et certains services publics.
Voilà une partie seulement des réalités que nous aurions aimé pouvoir aborder lors d'un véritable débat. Les administrations de la fonction publique subissent saignée sur saignée ; l'accueil des demandeurs d'asile est sous-budgété ; une portion des crédits pour l'équipement de nos forces dans la mission « Défense » est tout bonnement annulée. Et nous ne bénéficions que de deux minutes par commission élargie pour aborder ces sujets de premier ordre pour nos concitoyens !
Nous voulant toujours force de propositions, nous avons néanmoins proposé des pistes d'amélioration du contrôle parlementaire de l'exécution du budget par le Gouvernement, dans le sens d'une plus grande transparence.
Une fois n'est pas coutume, après avoir fait nôtres les critiques de la Cour des comptes, nous avons relayé certaines de ses préconisations.
Ainsi, selon la Cour, les dépenses fiscales – ou niches fiscales – ont augmenté de 6,7 milliards d'euros entre 2017 et 2018, dépassant ainsi les 100 milliards d'euros. Au total, entre 2013 et 2018, le coût des niches fiscales a progressé de 39 %. Cependant, ces dépenses fiscales ne sont « ni pilotées, ni évaluées ». La Cour des comptes note ainsi que « leur évaluation demeure en outre très lacunaire, alors qu'elles présentent souvent des liens distendus avec les missions et leurs objectifs. » Pour plus de 200 niches fiscales, nous ne connaissons même pas le nombre de bénéficiaires !
Dans le même esprit, nous sommes censés pouvoir apprécier l'évolution des recettes fiscales lors de l'examen du projet de loi de règlement. Or nous ne disposons pas d'instruments nous permettant d'apprécier l'effet d'aubaine de vos cadeaux fiscaux, et donc les pertes de recettes qu'ils ont entraînées. Je pense ici par exemple à la flat tax.
Expliquez-nous, chers collègues, comment vous pouvez faire votre travail de contrôle sans ces informations. C'est pourquoi nous proposons qu'elles soient annexées au prochain projet de loi de règlement, pour être lisibles et exploitables.
François de Rugy a annoncé le 23 mai 2019 que serait réalisée, pour le projet de loi de finances pour 2020, une évaluation de toutes les décisions budgétaires du Gouvernement à l'aune du respect d'une trajectoire de 2 degrés. Dans ce même esprit, nous avons déposé un amendement tendant à ajouter un document budgétaire de politique transversale en matière de préservation de la biodiversité. Pourquoi avoir refusé ? Le Gouvernement n'a-t-il pas intérêt à rendre ces données exploitables par notre assemblée, voire par les militants écologistes qui s'y intéresseraient ?
Nous proposons d'ailleurs que chaque politique interministérielle fasse, de la même façon, l'objet d'une évaluation lors de l'examen du projet de loi de règlement, en publiant les documents de politiques transversales à cette occasion.
Enfin, pour davantage de transparence concernant les partenariats public-privé et leur coût pour les Français, nous exigeons d'avoir accès au chiffrage complet de ces contrats, notamment lorsqu'ils sont pluriannuels, dans les comptabilités générale et budgétaire de l'État. Il s'agit, pour les contribuables, de connaître le vrai coût de cette association contre nature.
Cette loi de règlement a finalement le mérite de mettre en évidence la politique menée par votre Gouvernement ; elle n'a pour effet que de faire supporter aux pauvres le poids des riches, ce que nous avons maintes fois condamné. Au-delà, nous dénonçons cette parodie d'évaluation que constitue le printemps de l'évaluation. Non que nous ne contestions les instruments existants ou les chiffres qu'ils contiennent, mais ceux-ci sont insuffisants voire inexistants dans certains cas. En outre, nous manquons de temps pour bien les analyser.
C'est pourquoi, dans le souci d'être constructifs, et afin de proposer des pistes d'améliorations du contrôle de l'exécution budgétaire, le groupe de la France insoumise et moi-même demandons le renvoi de ce projet de loi en commission.
La motion de renvoi en commission, mise aux voix, n'est pas adoptée.
Ce projet de loi de règlement présente un certain nombre de points positifs.
L'année passée a été marquée par une gestion des dépenses de l'État conforme à la prévision initiale – ce qui n'est pas très habituel. La preuve en est qu'aucun décret d'avance n'a été nécessaire, alors que les gestions précédentes en avaient connu deux, parfois trois. Ainsi, les sous-budgétisations se sont limitées à 1,5 milliard d'euros en 2018. Ce sont toujours les mêmes : les OPEX, pour 600 millions encore…
Ça s'améliore !
C'est vrai, monsieur le ministre, mais peut mieux faire, comme on disait sur votre bulletin de notes quand vous étiez jeune.
Sourires.
C'était il n'y a pas si longtemps !
Peut mieux faire ! On progresse de 200 millions en 200 millions, donc peut-être qu'à la fin de la législature, nous en arriverons à fixer d'emblée le bon chiffre. Tout le monde sait que le budget initial n'est pas suffisant, mais on continue !
Les sous-budgétisations, disais-je, se sont donc limitées à 1,5 milliard, contre 4,4 milliards d'euros en 2017. Le groupe Libertés et territoires salue donc le fait que le Gouvernement a su tenir l'enveloppe des dépenses dans le cadre des autorisations budgétaires, grâce à l'amélioration de la qualité de la budgétisation initiale. Les annulations et ouvertures de crédits comptent également parmi les plus basses depuis l'entrée en vigueur de la loi organique relative aux lois de finances. La Cour des comptes salue d'ailleurs notamment le faible niveau de la réserve dite « de précaution », dont le taux de mise en réserve est passé de 8 % en 2017 à 3 % en 2018.
Quant aux recettes de l'État, elles sont supérieures de 8,8 milliards d'euros à ce que vous aviez prévu en loi de finances initiale – en fait, un petit peu moins si l'on retire le 1,4 milliard correspondant au report des droits de mutation – et ce malgré les grèves de la SNCF et le mouvement dit des « gilets jaunes ». Cependant, on ne peut pas dire que ce soit le résultat de votre action ; c'est tout simplement le fruit d'une conjoncture internationale favorable, mais cela reste une bonne nouvelle.
Malgré ces deux points positifs, des points faibles persistent.
Tout d'abord, et c'est le plus préoccupant, le déficit continue de s'accroître. La loi de finances pour 2018 avait certes prévu une très forte hausse du déficit de l'État, qui devait atteindre 85,7 milliards d'euros, en progression de 23,6 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2017. Sur le papier, le résultat obtenu semble positif, puisqu'en définitive, le déficit atteint 76 milliards en 2018, soit 3 % du PIB. Mais n'oublions pas l'essentiel : le déficit de l'État continue de s'accroître ! Il est supérieur de 8,3 milliards d'euros à ce qu'il était en 2017 – voire de 11,1 milliards si l'on tient compte du 1,4 milliard lié au rattachement erroné des droits de mutation entre 2017 et 2018 que je citais à l'instant. Le déficit est supérieur de 12 % à ce qu'il était l'année précédente, et c'est bien là où le bât blesse. Certes, objectivement, c'est mieux que ce que vous aviez prévu, mais c'est quand même moins bien que l'exécution précédente. Ces chiffres sont d'ailleurs assez conformes à la trajectoire présentée dans le programme de stabilité, qui ne prévoit pas d'effort particulier concernant l'État : il faut remarquer que l'effort porte sur les comptes des administrations de sécurité sociale et des collectivités locales, dont l'amélioration compense la dégradation du déficit de l'État.
Nous observons une petite réduction du déficit public – 0,2 point – mais le déficit structurel demeure quasiment stable. Le déficit public – État, sécurité sociale et collectivités territoriales – s'établit à 59,6 milliards en 2018, soit 2,5 % du PIB, après 2,8 % en 2017. C'est un chiffre inférieur de 0,2 point – compte tenu des problèmes d'arrondi – à celui prévu par la loi de programmation de janvier 2018. Cette réduction est en apparence une bonne nouvelle.
Mais le diable se cache dans les détails, et les règles européennes nous demandent un effort structurel de réduction de nos déficits publics de 0,5 point de PIB, c'est-à-dire d'environ 12 milliards d'euros par an. Faisons le compte : cet effort est de seulement de 0,1 point puisque le déficit structurel passe de 2,4 % du PIB en 2017 à 2,3 % en 2018 ; ce niveau de déficit est supérieur de 0,1 point à celui prévu dans la loi de programmation des finances publiques de janvier 2018. D'ailleurs, dans vos prévisions pour 2019, le solde structurel devrait passer à 2 % en 2019, c'est-à-dire une réduction de 0,3 point de PIB. Mais c'est sans compter le ralentissement de l'économie internationale.
La dette continue d'augmenter, malgré les règles européennes. Vous ne respectez pas engagements européens de la France.
Quant à la baisse des recettes fiscales, ou plus exactement aux mesures de réductions fiscales, elles n'ont pas été compensées par une réduction de la dépense à due concurrence.
Les recettes fiscales ont connu une baisse de 13,5 milliards, décidée en loi de finances pour 2018 : je pense à la transformation de l'impôt de solidarité sur la fortune en impôt sur la fortune immobilière – IFI – pour 3,2 milliards, au prélèvement forfaitaire unique pour 1,2 milliard environ ou encore à la prise en charge par l'État du dégrèvement de taxe d'habitation, pour un bon 3 milliards. Les années antérieures, il y avait eu le CICE, la baisse du taux normal de l'impôt sur les sociétés, le crédit d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile. Cependant, il faut aussi noter des hausses : les recettes fiscales ont été augmentées de 5 milliards notamment grâce à la fiscalité énergétique et à la TVA, ce qui fixe le solde à 8,5 milliards. Notons qu'en l'absence de mesures fiscales, nous aurions tout juste maintenu le déficit du budget de l'État entre 2017 et 2018, puisque son augmentation est de 8,3 milliards.
À ce propos, la Cour des comptes – dont le groupe Libertés et territoires partage l'analyse – rappelle que « l'État n'est pas à même de réduire ses propres dépenses à due concurrence des baisses de prélèvements opérés sur l'ensemble des administrations publiques. » Le problème est en effet que vous n'avez pas eu le courage politique suffisant pour réduire la dépense publique, seul moyen de diminuer durablement les prélèvements fiscaux. Cette loi de règlement le montre.
Quant aux dépenses fiscales, nous en avons parlé tout à l'heure lorsque nous avons débattu d'une proposition de résolution sur ce sujet. Elles ont continué d'augmenter. Vous savez ce que dit l'épître de saint Paul, monsieur le ministre…
« Ce que je veux faire, je ne le fais pas, et ce que je ne veux pas faire, je le fais. » Une telle phrase peut parfaitement s'appliquer aux dépenses fiscales, et c'est d'ailleurs bien là le drame. Comme vos différents prédécesseurs, vous avez dit : « On ne pouvait continuer ainsi, il faut les réduire. » Or, à chaque fois, on constate le mouvement inverse. Pourquoi ?
Vous vous y opposiez !
C'est probablement l'oeuvre du diable, diront nos collègues communistes,...
… le diable étant en l'occurrence le grand capital. Mais non ! C'est l'absence de courage politique. La Cour des comptes, dont notre groupe, là encore, partage le diagnostic, estime que « les dispositifs de plafonnement des dépenses fiscales sont aujourd'hui inopérants ». Une revue de l'ensemble des niches fiscales qui viennent « miter » l'impôt sur le revenu, entre autres impôts, et obérer sa progressivité est donc aujourd'hui nécessaire.
À titre d'exemple, comme le rappelle la Cour des comptes, sur les soixante-dix-sept dépenses fiscales de la mission « Économie » – mission qui dépend de vous, monsieur le ministre, et de M. Le Maire – , vingt-sept, soit un tiers, n'ont pas été évaluées. Or ces dépenses représentent plus de 28 milliards d'euros en 2018 ! Il faudrait donc appliquer la règle fixée par notre éminent rapporteur général selon laquelle tout dispositif non évalué doit être supprimé : dans une telle hypothèse, vos services ne manqueraient pas de procéder aux évaluations nécessaires...
Dans le contexte actuel d'exaspération fiscale, nous devons plus de transparence et d'efficacité à nos concitoyens. Notre groupe a fait des propositions pour réduire le poids de l'ensemble des niches ou mieux les plafonner. Une méthode efficace consisterait à dire à tous vos collègues du Gouvernement : « Commencez par réduire de 10 %, dès l'année prochaine, le coût de l'ensemble des niches fiscales existantes. Ensuite, on pourra discuter. »
Au passage, nous avons découvert que certains ministères n'organisaient plus les conférences sur les dépenses fiscales – nous l'avons vu dans les notes d'exécution budgétaire de la Cour des comptes, auxquelles je vous renvoie.
C'est moi qui organise ces conférences !
Enfin, au-delà des constats propres à l'exécution de la dépense en 2018, nous pouvons relever que, chaque année, la complexité du cadre budgétaire de l'État et son manque de lisibilité deviennent critiques. La conséquence, c'est que notre capacité à appréhender dans leur globalité les enjeux financiers associés à l'action de l'État est désormais limitée et, avec elle, la possibilité de prendre des décisions en étant pleinement informés. C'est pourtant dans ce but qu'ont été institués des principes aussi sains que l'unité et l'universalité budgétaires, sans parler de la non-affectation des recettes aux dépenses.
J'en veux pour preuve le contournement croissant du cadre budgétaire applicable aux dépenses de l'État. En effet, une part importante de l'action de l'État est logée dans des fonds sans personnalité juridique, qui ne figurent pas au budget de l'État : hormis l'abondement initial, les dépenses effectuées sur ces fonds demeurent hors budget.
De fait, les moyens des fonds sans personnalité juridique échappent aux règles de gestion.
Ma question est donc simple : monsieur le ministre, êtes-vous favorable à la solution que la Cour des comptes préconise, à savoir la rebudgétisation, notamment celle du Fonds pour l'innovation dans l'industrie ? Et, plus largement, comptez-vous effectuer une revue de l'ensemble des fonds sans personnalité juridique contrôlés par l'État ?
Ainsi soldons-nous, ce jour, et de manière définitive, le budget 2018, et achevons la séquence budgétaire qui aura animé nos travaux ces dernières semaines. Beaucoup a d'ores et déjà été dit, tant en commission qu'en séance publique, notamment que le budget de l'État est déficitaire, et de manière plus importante qu'en 2017 – 8,3 milliards d'euros de plus.
Vous nous avez présenté vos différents arguments. Sans surprise, nous n'y souscrivons aucunement. La lecture du rapport de la Cour des comptes, mis en débat ici même lundi dernier, fait à nos yeux tomber bien des mythes, que vous alimentez et qui ont la vie dure en matière budgétaire.
Je n'ai pas pour habitude d'employer l'analogie à laquelle beaucoup ont recours en comparant l'État à un ménage ou à une entreprise lambda. Cette comparaison est largement biaisée, tronquée, la durée de vie d'un État n'étant pas celle d'un ménage ou d'une entreprise. Surtout, avec le niveau des impôts, l'État fixe lui-même son propre salaire, ce qui n'est pas le cas de la quasi-intégralité de nos concitoyens.
Une fois ces précautions légitimes prises, que s'est-il passé en 2018 ? Une nouvelle fois, nous entendons dire que l'État vit au-dessus de ses moyens, qu'il reste trop dépensier. Mais si, en 2018, l'État a dépensé plus qu'il n'en avait dans le portefeuille, ce n'est pas parce que ses dépenses ont flambé. Loin de là ! Car avec les coups portés à la politique du logement et à la cohésion des territoires du fait notamment des suppressions massives des contrats aidés et des baisses aveugles touchant l'APL, les dépenses publiques ont été littéralement cadenassées.
D'ailleurs, nos concitoyens l'ont très bien constaté : les moyens des politiques publiques sont mis sous tension extrême, ce qui est le signe d'un puissant recul de la puissance publique. L'état de santé de nos hôpitaux en est l'illustration la plus criante, la plus nette. Seul le courage des personnels hospitaliers permet d'éviter, pour le moment, la rupture.
Au fond, l'État n'a donc pas dépensé plus qu'en 2017. L'explication de la hausse du déficit budgétaire en 2018 n'est pas à aller chercher de ce côté-là.
À cet égard, la lecture du rapport de la Cour des comptes offre un éclairage tout à fait utile : le déficit budgétaire s'est dégradé de 8,3 milliards d'euros en 2018 en raison des baisses d'impôt massives, de l'ordre de 13,5 milliards d'euros, dont l'essentiel, – 11,3 milliards – , a été capté par les plus aisés et le secteur marchand. Voilà pourquoi, à la fin de 2017, nous avions qualifié ce projet de loi de finances pour 2018 de « budget des riches ». Les faits nous ont donné raison.
Voici le détail de ces 11,3 milliards d'euros de baisses d'impôts qui auront profité, je le répète, à un tout petit cercle.
Le CICE, qui coûtait déjà un « pognon de dingue », a vu sa facture augmenter de 3,5 milliards d'euros en 2018 pour atteindre 20 milliards d'euros. On cherche encore les effets positifs de ce crédit d'impôt sur l'emploi, l'industrie, les territoires et l'investissement. Quand bien même le CICE n'aura montré aucun signe d'efficacité, comme le rappelait d'ailleurs le dernier rapport de la Cour des comptes, vous avez décidé de le pérenniser. Pour 2019, année dite de transition, c'est même fromage et dessert, puisque l'ancienne et la nouvelle version du CIC se cumuleront, pour un coût total de 40 milliards d'euros.
Vous avez ensuite supprimé l'SF, creusant ainsi un trou de 3,2 milliards d'euros dans nos finances publiques. Mais, de même que pour le CICE, on se demande quels effets ont été obtenus. Où est passé le ruissellement ? Où en sont les fameuses évaluations tant promises ? Monsieur le ministre, je tiens cordialement à vous le rappeler : en commission des finances, vous vous êtes engagé à me transmettre des informations sur le profil des bénéficiaires de la suppression de l'ISF et sur les gains fiscaux qu'ils ont ainsi obtenus. Quand le ferez-vous ?
La même sollicitation s'appliquait au prélèvement forfaitaire unique, autre mesure fiscale phare de ce budget des riches, à l'origine d'une perte budgétaire de 1,6 milliard d'euros, soit 300 millions de plus que ce que la flat tax devait initialement coûter. Par quoi s'explique une telle dérive budgétaire ? Et qu'en sera-t-il pour 2019 ?
La baisse de l'impôt sur les sociétés a ensuite conduit à une diminution du produit de l'IS de l'ordre de 1,2 milliard d'euros, à laquelle s'ajoutent les effets de la suppression de la taxe à 3 % sur les dividendes, laquelle rapportait 1,8 milliard d'euros, mais n'a pas été remplacée.
Voilà donc le détail de ces 11,3 milliards d'euros de mesures fiscales, de cadeaux, octroyées sans contrepartie, sans engagements préalables, sans conditions : une véritable privatisation de nos finances publiques.
Je pourrais également parler des 2 milliards d'euros supplémentaires qu'aurait dû rapporter l'extension de la taxe sur les transactions financières aux opérations intraday, ces opérations hyperspéculatives effectuées au cours d'une même journée, et qui sont source de déstabilisation financière. Mais, tout dévoués à mener la bataille du Brexit en vue d'attirer les traders de la City de Londres, vous avez renoncé à cette mesure pourtant juste et attendue par nos concitoyens.
Avouons-le, mes chers collègues : 11,3 milliards, c'est un montant colossal. C'est l'équivalent des moyens cumulés que l'on alloue annuellement à la justice, aux prisons, à l'outremer, à l'asile et l'immigration, ainsi qu'à l'Institut national de la statistique et des études économiques.
Ce chiffre nous montre bien que notre pays n'est pas à l'os, qu'il dispose de moyens financiers, des moyens pour mener une autre politique, moderne, plus juste, plus ambitieuse, de progrès. Ces 11,3 milliards d'euros auraient pu – auraient dû – être alloués aux vrais besoins de notre pays. Ils l'ont été à ceux qui avaient déjà tant.
Voilà pourquoi nos concitoyens ont scandé « Justice fiscale ! » sur nos ronds-points, dans les réunions publiques et dans les cahiers de doléance. Vous leur avez répondu : « grand débat ».
Les annonces formulées par le Président de la République, puis par le Premier ministre la semaine dernière, nous permettent toutefois d'y voir plus clair. Ainsi fermez-vous la porte à la grande réforme fiscale tant attendue par nos concitoyens. Vous restez au milieu du gué et tout porte à croire que les changements promis s'apparenteront, une nouvelle fois, à un tour de passe-passe.
Vous annoncez par exemple vouloir baisser de 5 milliards le montant de l'impôt sur le revenu en concentrant sur les deux premières tranches les effets de cette mesure. Bien noté… Mais cela signifie que 50 % de nos concitoyens ne seront pas concernés, ceux qui ne paient pas l'impôt sur le revenu, notamment les plus fragiles. Vous vous obstinez, en effet, à ne toucher ni à la TVA ni à la CSG, qui pèsent pourtant lourd sur les ménages les plus modestes. Ces derniers resteront une nouvelle fois sur le bord de la route.
L'autre question posée est celle du financement de cette baisse d'impôt. Le point est fondamental : qui paiera la note ? En avril dernier, la majorité nous indiquait que ces 5 milliards seraient majoritairement compensés par la suppression de niches fiscales dont bénéficient les entreprises. Ce n'est plus le cas, puisque la réforme des niches fiscales ne devrait rapporter qu'un milliard. Les 4 milliards restant pourraient donc venir de nouvelles diminutions de crédits, appelées de leurs voeux par certains des orateurs qui viennent de s'exprimer, et qui viendront pénaliser celles et ceux qui ont besoin des services publics, en conformité avec votre leitmotiv : « moins d'impôt, moins de dépenses publiques ».
Pour financer les baisses d'impôts dont doivent bénéficier les classes moyennes, ces mêmes classes, outre les classes populaires, seraient donc mises à contribution. Question justice fiscale, il faudra repasser ! Voilà pourquoi nous craignons que tout cela ne s'apparente, une nouvelle fois, à un tour de passe-passe, à un énième jeu de bonneteau fiscal.
Car faire contribuer les plus riches et les grands groupes semble d'ores et déjà exclu. Monsieur le ministre, pourquoi ne pas instaurer de nouvelles tranches sur les hauts revenus ? Pourquoi ne pas revenir sur la suppression de l'ISF et la baisse d'impôt sur les dividendes et autres titres financiers ? Pourquoi ne pas agir efficacement contre l'évasion fiscale, comme nous vous le proposons ? Le Premier ministre est resté silencieux sur ce point, ce qui est peu compréhensible.
La question du financement se pose également depuis qu'a été confirmée la suppression totale de la taxe d'habitation. Sur ce sujet, vous n'avez pas encore rendu votre copie. Nous ne désespérons donc pas, même si nous sommes assez peu confiants, compte tenu des orientations budgétaires que vous avez prises depuis le début du quinquennat, et dont le présent projet de loi de règlement est l'illustration.
Au regard de ces différents éléments, vous comprendrez aisément pourquoi les députés communistes et le groupe GDR voteront contre ce projet de loi.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SOC.
La politique poursuivie au cours de l'année 2018, première année de plein exercice budgétaire pour le Gouvernement et la majorité parlementaire, visait à stimuler l'investissement et à augmenter le pouvoir d'achat, conformément au cap fixé par le Président de la République. Et les actions entreprises dans ce but ont eu des effets concrets sur le quotidien des Français. Dans ma circonscription, croyez-moi, de nombreux habitants nous remercient de gagner 50 euros de plus par mois grâce à la suppression des cotisations salariales maladie et chômage.
De même, la promesse a été tenue de supprimer la taxe d'habitation pour 80 % des ménages – une mesure appréciée par les contribuables et les élus – en compensant à l'euro près la perte de ressources pour les collectivités locales.
Le filet social a été renforcé – en témoigne la revalorisation de la prime d'activité, de l'allocation adulte handicapée et de l'allocation de solidarité aux personnes âgées. Alors que ces allocations n'ont pas été augmentées depuis des années, une fois encore, la promesse a été tenue et cela mérite d'être salué.
La maîtrise de l'objectif de dépenses totales de l'État – 425,4 milliards d'euros – illustre l'engagement de sérieux budgétaire pris auprès des Françaises et des Français. Mais l'orthodoxie budgétaire ne doit pas être notre unique horizon politique. C'est la raison pour laquelle certaines missions prioritaires ont bénéficié, dans le même temps, de hausses significatives de leurs crédits. Ainsi, en exécution et par rapport à 2017, la mission « Enseignement scolaire » a vu ses crédits augmenter de 1,27 milliard d'euros – pour avoir rencontré les enseignants des CP et CE1 dédoublés dans des établissements en réseau d'éducation prioritaire, je peux vous assurer que ces moyens supplémentaires sont salués et unanimement appréciés. La mission « Défense » a bénéficié de 997 millions d'euros de crédits supplémentaires, la mission « Recherche et enseignement supérieur » de 675 millions d'euros, et la mission « Écologie et développement durable » de 667 millions d'euros – nous avons plus que des mots à proposer pour réussir la transition écologique primordiale et attendue, nous passons aux actes et nous engageons les moyens nécessaires. Les missions « Sécurités » et « Justice » voient leurs crédits croître respectivement de 327 et de 354 millions d'euros. N'en déplaise à nos collègues de l'opposition ici présents qui préfèrent évidemment voir le verre à moitié vide plutôt que plein !
Mais, soyons clairs, cette politique assumée de stimulation de l'activité économique a inévitablement une incidence sur le déficit budgétaire de l'État.
Le déficit de l'État atteint ainsi 3 % du PIB contre 2,9 % l'année précédente. Pour la première fois depuis 2014, le déficit budgétaire de l'État croît. Là encore, promesse tenue ! Cependant, cette augmentation est à contrebalancer par les bons résultats de la croissance française. En dépit d'une conjoncture européenne dégradée, l'économie française a réalisé une performance plus qu'honorable, la croissance s'établissant à 1,6 %, soit légèrement plus élevée qu'outre-Rhin.
Dopé par les réformes du Gouvernement – assouplissement du marché du travail, fiscalité plus favorable à l'investissement, etc. – qui ont restauré la confiance des acteurs économiques, le secteur marchand présente, en 2018, un solde net de 241 000 créations de poste.
Pour 2019, les entreprises s'engagent encore à augmenter leurs investissements de 11 %. Grâce à la robustesse de l'activité économique, stimulée par l'action du Gouvernement, les recettes fiscales sont plus importantes que prévu dans la loi de finances initiale, LFI. Conséquence de recettes plus importantes qu'espéré et de dépenses maîtrisées, le solde des comptes publics est bien meilleur qu'attendu. Nous n'avons pas à en rougir. Bien au contraire.
Le déficit budgétaire de l'État atteint 76 milliards d'euros, contre 85,7 milliards prévus en LFI, tandis que le déficit public s'élève à 2,5 % du PIB, en baisse par rapport à 2017.
S'il faut retenir une chose de ce projet de loi de règlement du budget, c'est que la France suit une trajectoire de diminution de son déficit public, respectant ainsi les engagements pris.
En résumé, l'exécution budgétaire 2018 est globalement conforme aux prévisions en matière de dépenses, ce qui démontre la sincérité du budget présenté en LFI, et meilleure qu'escompté en matière de recettes, ce qui témoigne d'un budget initial réaliste et prudent.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
La loi de règlement est l'occasion pour le Gouvernement de rendre des comptes à la représentation nationale, émanation du peuple, sur le respect des objectifs fixés dans le budget initial et sur le bon emploi des ressources publiques.
Or, deux ans après l'accession d'Emmanuel Macron à la fonction présidentielle, force est de constater que les voyants sont au rouge : la dépense publique augmente ; le déficit de l'État se creuse ; la dette s'envole.
Cette loi de règlement n'est rien d'autre que le constat d'échec, hélas, de la politique budgétaire de la majorité. Je tire à nouveau la sonnette d'alarme, en premier lieu, sur les dépenses publiques.
En effet, contrairement à ce que veut faire croire le Gouvernement, la dépense publique augmente de 0,9 % en volume, soit 24,5 milliards d'euros de plus qu'en 2017, et de 1,9 % en valeur. Le Gouvernement a bien tenté de faire croire à une baisse des dépenses en volume en utilisant les indicateurs qui l'arrangent, c'est-à-dire en excluant les crédits d'impôt et en retenant un déflateur qui lui est favorable. Mais, monsieur le ministre, vous avez été rappelé à l'ordre par la Cour des comptes selon laquelle « l'État n'est pas à même de réduire ses propres dépenses à due concurrence des baisses de prélèvements opérés sur l'ensemble des administrations publiques » – ce n'est pas moi qui le dis.
Vous n'avez aucunement profité d'une croissance favorable de 1,7 % pour réduire la dépense, ce qui rend impossible toute baisse durable des impôts.
Constat très inquiétant pour la France : la hausse de la dépense porte essentiellement sur les dépenses de personnel – celles-ci augmentent de 2 milliards d'euros. Ainsi, la masse salariale, qui représente 39 % du budget de l'État, a crû de 2 % et les effectifs n'ont pas baissé. Les promesses du Gouvernement de diminution du nombre d'emplois publics ne sont pas tenues. En fait, monsieur le ministre, vous avez renoncé à réduire le train de vie de l'État, et ce sont les Français qui, à terme, paieront vos erreurs.
En deuxième lieu, le déficit public, qui s'élève à 59,6 milliards d'euros, nous classe parmi les mauvais élèves de la zone euro. De 2017 à 2018, le déficit moyen de la zone euro est passé de 1 % à 0,5 % du PIB tandis que le déficit de l'État en France était porté de 2,9 % à 3 %. Les autres pays de la zone euro présentent un déficit autour de 0,8 %, donc trois fois moins élevé que le nôtre.
Ce déficit public s'explique par l'ampleur extrêmement inquiétante du déficit de l'État, qui se creuse pour la première fois depuis trois ans. Ainsi, en 2018, ce dernier augmente de 8,3 milliards d'euros pour atteindre plus de 76 milliards d'euros, soit une hausse que nous rappelait le président de la commission des finances de 12 %.
Ces chiffres sont alarmants à plusieurs titres. D'abord, parce que comme le souligne le Haut Conseil des finances publiques, « si la diminution du déficit structurel est proche en 2018 de la trajectoire inscrite dans la loi de programmation des finances publiques, le solde structurel de - 2,3 points de PIB reste très éloigné de l'objectif à moyen terme de - 0,4 point de PIB défini dans ce texte ». Ensuite, parce que notre pays, du fait de votre politique, n'a pas tiré profit du contexte favorable de forte croissance pour accomplir les efforts nécessaires. Alors que toutes les administrations sont vertueuses, l'État à lui seul représente 120 % du déficit public en 2018. L'effort de réduction du déficit public repose donc uniquement sur les collectivités et la sécurité sociale à qui l'État prescrit des restrictions budgétaires qu'il ne s'impose pas lui-même.
En troisième lieu, la dette continue d'augmenter. Dans son dernier rapport annuel paru le 3 juin, le Fonds monétaire international s'inquiétait du niveau de la dette publique française.
Tant que le spectre de l'endettement public planera au-dessus du destin économique de la France, aucun avenir serein ne sera envisageable pour nos concitoyens. La dette s'élève au 31 décembre 2018 à 2 026 milliards d'euros auxquels il faut ajouter les 4 208 milliards d'engagements hors bilans.
Celte situation est catastrophique : on sait qu'une augmentation de 1 point des taux d'intérêt entraîne, selon les chiffres du Trésor, un surcoût de la charge de la dette de 2 milliards d'euros la première année, de 4,7 milliards la deuxième, puis de près de 19 milliards après cinq ans.
En dépit du bon sens, le Gouvernement renonce à maîtriser la dépense, laissant le déficit structurel inchangé et la dette s'alourdir. C'est la raison pour laquelle le groupe Les Républicains ne votera pas le projet de loi de règlement de budget 2018.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Ce projet de loi de règlement, le deuxième que nous examinons sous cette législature, est une nouvelle fois porteur de nouvelles encourageantes. Pour la seconde année consécutive, notre déficit public est inférieur à 3 % – il s'établit à 2,5 % pour être exacte – , ce qui représente une amélioration de 0,3 % par rapport à 2017.
Cette baisse a été obtenue grâce à une diminution en volume de la dépense publique de 0,3 %, et ce, pour la première fois depuis de nombreuses années. Nous nous réjouissons particulièrement de ce résultat, puisque la LFI prévoyait une progression de 0,6 %. Cet effort de maîtrise de la dépense publique a permis d'adopter des mesures ayant pour effet de diminuer de 0,2 point le niveau de prélèvement obligatoire et de le porter à 45 % du PIB.
Le déficit budgétaire de l'État s'élève à 76 milliards d'euros, ce qui constitue une amélioration substantielle de près de 10 milliards par rapport à LFI et de 4 milliards par rapport à la loi de finances rectificative présentée en novembre 2018.
Enfin, dans la continuité du budget de 2017, le taux de mise en réserve a été abaissé de 8 à 3 %, ce qui montre ici encore la volonté du Gouvernement de promouvoir la sincérité budgétaire.
Nous saluons ces résultats, qui tiennent à la fois à des recettes de l'État plus élevées que prévu, mais aussi à la maîtrise des dépenses. Les recettes fiscales se sont ainsi améliorées grâce à un rendement de la TVA supérieur à la prévision, et grâce au dynamisme de l'impôt sur les sociétés. La maîtrise des dépenses est due à un strict respect de l'objectif de dépenses totales de l'État fixé en LFI et à une construction sincère et fondée sur des prévisions solides. Les sous-budgétisations sont ainsi passées de 4,4 milliards à 1,5 milliard d'euros – ce progrès mérite d'être souligné. Par conséquent, l'exécution du budget en 2018 est marquée par l'absence d'ouverture et d'annulation de crédits par décret d'avance, ce qui constitue une première depuis trente ans.
Nous saluons ces résultats, et en particulier la baisse des prélèvements obligatoires, qui est le premier jalon d'une évolution qui devrait particulièrement profiter aux contribuables des premières tranches d'imposition.
Nous ne pouvons enfin que nous féliciter de l'effort de sincérité budgétaire, qui répond aux objectifs que nous nous sommes fixés dans cette législature, mais aussi, de manière plus pragmatique, aux exigences de la loi organique relative aux lois de finances.
Nous avons entendu ces derniers mois s'exprimer un sentiment d'injustice, voire d'exaspération fiscale, et nous nous devons d'y apporter une réponse. Celle-ci doit passer par une nouvelle baisse des impôts, mais également par un recalibrage des tranches de l'impôt sur le revenu, afin que celui-ci soit plus juste et plus en phase avec la réalité vécue par les contribuables. Il est, en effet, loisible de penser qu'une imposition plus progressive serait mieux perçue et renforcerait le consentement de nos concitoyens à l'impôt. La baisse des taux d'imposition pour les premières tranches doit ainsi être l'occasion d'une réflexion plus globale sur notre système d'imposition sur le revenu.
La dette publique s'est stabilisée, pour la première fois depuis une décennie, à 98,4 % du PIB, comme en 2017. Si nous nous réjouissons de cette stabilisation, il convient de ne pas cesser nos efforts. La dette publique française représente aujourd'hui 2 300 milliards d'euros, soit 80 000 euros par ménage français. La charge de la dette s'élève, quant à elle, à 45 milliards d'euros, soit 1 500 euros par ménage.
Ces chiffres justifient la recherche de l'équilibre budgétaire. Nous ne prônons pas cet équilibre par principe, mais parce que la charge de la dette représente un montant insupportable, qui grève le budget de l'État alors qu'il pourrait être utilisé à bien meilleur escient, que ce soit pour le financement de la dépendance, ou de l'éducation, pour des investissements écologiques, ou encore pour soutenir le milieu associatif. L'équilibre budgétaire n'est pas une politique en soi, c'est avant tout une exigence de bonne gestion des deniers publics. Nous devons y parvenir. Une gestion déraisonnable pèserait sur les générations futures. Nous sommes responsables devant elles, et nous leur devons de leur laisser des finances publiques assainies et non la charge de nos excès.
Si nous pouvons donc nous réjouir des résultats de l'année 2018, nous ne devons pas nous reposer sur eux, nous devons continuer à oeuvrer au rétablissement des finances publiques. Le déficit public provient aujourd'hui essentiellement du déficit structurel, c'est-à-dire qu'il n'est pas lié à la conjoncture. Pour résorber un tel déficit et atteindre les objectifs définis dans la loi de programmation des finances publiques, il reste encore beaucoup à faire. Nous devons poursuivre nos efforts.
Pour parvenir au désendettement de la France, il n'existe que deux solutions : l'augmentation des recettes de l'État ou une diminution des dépenses. Nous nous sommes engagés à ne pas recourir aux augmentations d'impôts. Nous avons d'ailleurs pris le chemin inverse, avec la suppression de la taxe d'habitation et l'engagement de baisser l'impôt sur le revenu.
Nous nous sommes donc engagés sur la voie de la diminution des dépenses publiques, qui passe par une gestion plus rigoureuse de nos deniers. Je pense notamment aux niches fiscales, monsieur le ministre, dont la Cour des comptes souligne régulièrement le coût croissant. Difficilement maîtrisées, chiffrées et évaluées, elles entraînent nécessairement une hausse incontrôlée des dépenses publiques, particulièrement fiscales. Cela n'est pas acceptable aujourd'hui où les deniers publics sont si rares et si chers.
Sincérité, sérieux et évaluation doivent continuer à être notre boussole pour la préparation et l'exécution des prochaines lois de finances. Pour toutes ces raisons, le groupe MODEM votera le texte.
Applaudissements sur les bancs des groupes MODEM et LaREM.
Nous venons de l'entendre : le Gouvernement et la majorité se félicitent d'un déficit public maintenu sous le seuil des 3 % du PIB, d'une évolution favorable du solde budgétaire par rapport à la loi de finances initiale de 2018, d'une stabilité des recettes et d'une évolution maîtrisée des dépenses.
Avec une telle présentation, on pourrait se dire que ce texte va se voter les yeux fermés – à ceci près que ceux des députés du groupe Socialistes et apparentés sont grands ouverts.
Nous avons lu les différents documents et annexes budgétaires, et nous nous rappelons aussi l'examen et les dispositions du projet de loi de finances de 2018.
Le déficit public est certes maintenu sous la barre des 3 % du PIB en 2018, dans la continuité de l'effort de redressement budgétaire opéré depuis 2012. Mais on ne peut oublier qu'il repassera ce seuil en 2019, cas unique au sein de l'Union européenne, en raison des choix budgétaires et fiscaux du Gouvernement.
Le solde budgétaire est effectivement meilleur que celui prévu par la loi de finances initiale pour 2018 : 76 milliards d'euros de déficit contre 85,7 milliards. Mais nous y voyons surtout une dégradation par rapport au solde budgétaire de 2017, caractérisé par un déficit de 67,7 milliards d'euros. Concrètement, le déficit budgétaire de l'État s'est creusé de 8,3 milliards d'euros entre 2017 et 2018 ; il devrait dépasser la barre des 100 milliards d'euros en 2019 !
Quant aux recettes, elles se sont stabilisées. C'est presque une anomalie. Vu la reprise économique que nous avons connue en 2017 et dont les effets se sont prolongés en 2018, elles auraient dû être en forte hausse, permettant ainsi de réduire le déficit budgétaire.
Cette stagnation s'explique en réalité par les baisses d'impôts opérées en 2018. Le groupe Socialistes et apparentés n'est pas opposé aux baisses d'impôts – encore faut-il qu'elles soient dirigées vers ceux qui en ont le plus besoin.
Or ces baisses, c'est le fameux « plan richesse » de la LFI de 2018, prévoyant la suppression de l'ISF et la mise en place de la flat tax. Ce plan représente 5 milliards de cadeaux fiscaux par an, pendant cinq ans, pour les Français les plus riches.
S'agissant d'une évolution maîtrisée des dépenses, on retrouve là encore les choix budgétaires du Gouvernement, que nous avions vivement combattus à l'automne 2017. Ce sont par exemple les coupes sur les APL ou la baisse drastique des contrats aidés.
Ces contrats aidés me permettent de faire la transition avec le détail de l'exécution budgétaire. Non seulement leur nombre a été fortement revu à la baisse, mais la complexité du dispositif n'a pas permis aux collectivités et aux associations de se saisir correctement des parcours emploi compétences : sur 200 000 PEC budgétés en LFI, seuls 128 000 ont été créés.
L'analyse de l'exécution budgétaire montre également une sous-consommation des crédits de paiement de l'ordre de 177 millions d'euros au sein de la mission « Outre-mer ». Dans sa note d'analyse de l'exécution budgétaire, la Cour des comptes qualifie d'« inédite » l'ampleur de cette sous-consommation des crédits et rappelle que l'année 2017 avait connu une sous-exécution des crédits de paiement de la mission de seulement 20 millions d'euros.
Ces sous-consommations résultent principalement des choix contestables du Gouvernement, qui ont par exemple conduit à casser la politique du logement en outre-mer. À elle seule, cette politique représente 65 des 177 millions de crédits de paiement non consommés en 2018 sur la mission « Outre-mer ».
La suppression de l'APL accession a participé au « brutal coup d'arrêt », pour citer le Gouvernement, de la production de logements en outre-mer, qui est passée de 476 logements en 2017 à 94 en 2018. La suppression de cette aide a également conduit à un effondrement des aides à l'amélioration de l'habitat privé en Guadeloupe et à la Réunion. Par ailleurs, le nombre de logements locatifs sociaux et très sociaux financés par l'État a diminué de 9,9 %, soit 478 logements de moins.
Je terminerai en revenant sur le travail d'évaluation mené par ma collègue Christine Pires Beaune sur la mission « Remboursements et dégrèvements ». Il est apparu que l'année 2018 se caractérise par une explosion des contentieux perdus par l'État en matière d'impôt sur les sociétés.
La loi de finances pour 2018 avait anticipé un niveau de décaissements résultant de contentieux unitaires à l'impôt sur les sociétés de 0,84 milliard d'euros. En réalité, ces décaissements se sont élevés à 3,23 milliards d'euros, soit une différence de 2,4 milliards d'euros.
Dans sa note d'analyse de l'exécution budgétaire de 2018, la Cour des comptes note que ces décharges exceptionnelles d'impôt sur les sociétés « n'ont pas été anticipées par l'administration » et reconnaît qu'elle n'a « pas identifié de causes spécifiques communes à cette évolution des contentieux unitaires à l'IS ». Ce qui est certain, c'est que l'État n'a plus l'expertise juridique suffisante pour défendre ses intérêts en cas de contestation sur le montant d'impôt sur les sociétés à payer, au point de devoir rembourser en 2018 plus de 3 milliards d'euros aux entreprises.
Vous l'aurez compris, le groupe Socialistes et apparentés ne votera pas le projet de loi de règlement de 2018.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.
Nous nous retrouvons ce soir pour clôturer le premier exercice budgétaire plein de ce quinquennat. Il me paraît donc important de garder en tête que, de ce fait, les résultats de l'exécution du budget de 2018 engagent la responsabilité du Gouvernement et de la majorité. Gardons également en tête que l'exécution du budget de l'État en 2018 a été marquée par la décélération de l'activité, avec une croissance estimée à 1,6 %, après 2,3 % pour l'année 2017.
Le contexte économique international est incertain, et marque un ralentissement de la croissance partout dans le monde. Cette incertitude, les tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine ou encore la situation dans le golfe Persique peuvent légitimement nous inquiéter pour l'avenir.
Nous avons déjà eu l'occasion de le dire : l'exercice 2018 a été marqué par une nette amélioration de la sincérité du budget, notamment en ce qui concerne les dépenses. La « sincérisation » de l'élaboration du budget se traduit dans l'exécution budgétaire, puisque l'exécution des dépenses a été largement conforme au budget voté.
Ainsi, la clôture de l'exercice budgétaire de 2018 est caractérisée par une diminution des sous-budgétisations, une exécution des dépenses publiques mieux maîtrisée et l'absence de décret d'avance en cours d'année. Ce budget est certainement le plus sincère depuis une décennie. Il faut s'en féliciter même si l'effort de sincérité n'est pas totalement achevé – je pense notamment au financement des OPEX.
L'exercice 2018 est également marqué par un déficit public qui s'établit sous la barre des 3 % de PIB, à 2,5 % du produit intérieur brut. Cette deuxième année consécutive de respect de notre engagement européen acte de fait notre sortie de la procédure de déficit excessif qui nous était appliquée depuis 2009.
Bien qu'il faille s'en réjouir, il convient néanmoins de rester vigilants, car le niveau de déficit reste élevé et nous sommes encore loin d'un rétablissement durable de l'équilibre des finances publiques de notre pays.
Je prendrai l'exemple de l'évolution du déficit structurel, celui sur lequel l'action publique peut et doit réellement agir. Ce dernier est quasi nul, avec à peine 0,1 point de PIB. La faible amélioration du solde structurel résulte d'un effort sur les dépenses publiques, hors crédits d'impôt, qui est presque intégralement absorbé par des mesures de baisse des prélèvements obligatoires.
Le déficit structurel reste ainsi très éloigné de l'objectif de moyen terme défini dans la loi de programmation des finances publiques pour 2018-2022 que nous avons votée en début de quinquennat. En réalité, l'amélioration du déficit public s'explique principalement par l'excédent dégagé pour la deuxième année consécutive par les administrations de sécurité sociale, qui atteint 10,7 milliards d'euros et, dans une moindre mesure, par l'excédent des collectivités locales. Le déficit budgétaire de l'État a connu, lui, une hausse atteignant 76 milliards d'euros en 2018.
Il faut bien avoir conscience que, pour l'exercice 2018, les recettes de l'État n'ont couvert que neuf mois de dépenses. Donc, à compter du 1er octobre, celui-ci a vécu à crédit jusqu'au 31 décembre. Cela doit réellement nous alerter, tout autant que le fameux jour du dépassement, ce jour où l'humain a consommé l'intégralité des ressources annuelles de notre planète.
Sous l'effet de la hausse du déficit, le poids de la dette de l'État s'alourdit de 70 milliards d'euros. Ainsi, la dette de l'ensemble des administrations publiques est stabilisée à 98,4 % du PIB, mais son montant continue d'augmenter pour atteindre 2 315 milliards d'euros, alors que nos voisins européens réduisent la leur depuis déjà plusieurs années.
Finalement, même si ce budget exécuté reste relativement maîtrisé, en comptabilité, la situation financière de l'État ne s'est pas améliorée en 2018. Une illustration en est peut-être l'émission par l'État de titres à moyen et long terme en 2018, pour plus de 225,4 milliards d'euros, ce qui fait de nous le second émetteur de la zone euro, à un niveau très proche de celui de l'Italie. Et, bien que la charge d'intérêts soit stabilisée à 40 milliards grâce à des taux d'intérêt faibles, deux choses doivent nous interpeller : d'abord, le montant élevé de 10,8 milliards de primes à l'émission encaissé en 2018 pour la quatrième année consécutive est très supérieur au montant, 3 milliards, inscrit dans le tableau de financement du budget initial ; ensuite, la grande difficulté à résorber le déficit et la dette de l'État en cette période de faible taux d'intérêt semble nous faire courir un véritable risque en cas de remontée des taux.
Peut-être un autre point mérite-t-il également des éclaircissements : les recettes de l'État ont été amputées de 2,4 milliards d'euros à la suite des contentieux fiscaux perdus au profit d'entreprises et relatifs à l'impôt sur les sociétés. Les sommes en jeu, qui grèvent le budget de l'État, étant non négligeables, une attention particulière doit être apportée à la limitation de ces contentieux.
Mes chers collègues, vous le savez, le groupe UDI et indépendants refuse d'abandonner l'objectif d'un retour à l'équilibre du solde des comptes publics. Il s'agit d'un engagement que l'on doit tenir pour ne pas laisser aux générations suivantes un budget trop dégradé.
L'ensemble des travaux que nous avons menés au cours du printemps de l'évaluation, notamment les résolutions soutenues par la commission des finances, ont montré combien nous devions améliorer les outils et méthodes d'évaluation budgétaire mais surtout d'évaluation de l'utilité de nos politiques publiques pour nous permettre de redéfinir les dépenses publiques et de les rendre plus efficientes.
Qu'il s'agisse de mieux piloter les effectifs et la masse salariale de l'État, de prévenir et de corriger les sur-exécutions et les sous-exécutions des lois de finances, de renforcer le pilotage et l'évaluation des dépenses fiscales par les administrations publiques ou encore d'améliorer les modalités de contrôle budgétaire par le Parlement, nous partageons tous la volonté d'assurer une plus grande efficience de nos dépenses publiques.
La Cour des comptes souhaite également contribuer à la refonte de la performance de la gestion des finances publiques, pointant la complexité sans cesse croissante du cadre budgétaire de l'État, l'information qui a été enrichie, au risque de devenir surabondante, et les procédures et outils incomplets pour mesurer l'efficience des politiques publiques.
Cette volonté commune doit nous permettre de nous engager sur la voie d'une réduction nette du déficit public et d'un redressement des comptes publics.
L'exécution budgétaire de 2018 est maîtrisée. C'est pourquoi les députés de notre groupe voteront majoritairement la loi de règlement.
Applaudissements sur les bancs des groupes UDI-I et LaREM.
Cette année, l'examen de la loi de règlement revêt une certaine importance. C'est en effet la première fois que nous allons examiner une exécution budgétaire complète de la majorité. Et nous jugeons que le bilan est lourd.
Deux mille dix-huit n'a pas été une bonne année pour notre pays. Elle a été marquée par une immense tromperie : celle de votre prétendu « fonds pour l'innovation et l'industrie ». Vous auriez dû l'appeler par son vrai nom : « fonds pour justifier les privatisations » ! Ce n'est pas moi qui le dis : c'est la Cour des comptes, qui dénonce dans son rapport une « mécanique budgétaire [… ] complexe et injustifiée » et nous explique que « Ce montage a conduit à des opérations inutilement compliquées, en partie pour afficher une dotation de 10 milliards finançant l'innovation de rupture, alors qu'en pratique 250 millions lui seront effectivement consacrés annuellement. »
Il vous suffirait de remplacer ce fonds par une simple ligne budgétaire de 250 millions d'euros annuels destinés à l'innovation. Ce serait bien plus lisible pour l'ensemble des Français, ainsi que pour la représentation nationale et pour la comptabilité nationale – mais je sais bien pourquoi vous procédez ainsi : c'est que vous voulez justifier l'injustifiable, à savoir la privatisation de nos fleurons nationaux, que vous avez décidé de livrer aux appétits des actionnaires.
L'injustifiable, c'est d'avoir privatisé une de nos frontières, Aéroports de Paris.
L'injustifiable, c'est de catapulter la Française des jeux dans l'estomac des intérêts privés, alors qu'il y a des enjeux de santé publique, notamment en relation avec la dépendance aux jeux.
L'injustifiable, c'est de placer Engie entre les mains cupides du marché, alors que l'on nous avait assuré, au moment de l'ouverture de son capital, qu'il n'était pas question de privatiser l'entreprise – et pourtant, nous y sommes. Et l'on feindra de s'étonner que les prix de l'énergie ne cessent d'augmenter, au plus grand désespoir des Français !
L'injustifiable, c'est que votre fonds pour l'innovation ne soit que des mots. La Cour des comptes souligne que ce fonds n'est pas réellement sanctuarisé, ce qui, en clair, signifie que les 10 milliards d'euros issus des privatisations pourraient à tout moment être récupérés par l'État et cesser d'être investis dans l'innovation.
L'injustifiable, c'est que les recettes tirées des participations publiques soient plus importantes que les intérêts de ce fonds – nous l'avons dit à maintes reprises. On espère que ces derniers représenteront 250 millions d'euros par an, alors que les premières sont trois fois plus élevées.
La brutalité et l'inconséquence de ces décisions vont, je l'espère, sauter aux yeux des Français. Comme vous le savez, nous nous battons pour obtenir 4,7 millions de signatures pour pouvoir organiser un référendum contre la privatisation d'Aéroports de Paris. J'ai une bonne nouvelle pour vous, monsieur le ministre : nous avons tenu ce soir un premier meeting, entre parlementaires issus de différents bancs de l'Assemblée ; ce meeting a rencontré un succès qui en dit long et nous donne l'espoir d'obtenir le nombre de signatures requis.
L'année 2018, c'est une année de plus où l'État marche en arrière. En 2018, les dépenses nettes du budget général de l'État, qui s'élèvent à 325,2 milliards d'euros, ont été exécutées à un niveau inférieur de 1,1 milliard d'euros à ce que prévoyait la loi de finances initiale. Le Gouvernement a donc reculé : il a dépensé encore moins que promis lors de son premier projet de loi de finances.
Pour l'année 2018, on nous ressert encore la vieille soupe de l'austérité, de la nécessité d'un déficit contenu. L'augmentation des dépenses est, dans l'absolu, bien maigrelette – 0,3 % – , mais, comparativement à celle de la population française, qui, et c'est une bonne nouvelle, continue d'augmenter, les dépenses ont en réalité diminué de 1,8 %. Tel est le prix de la soumission au dogme de l'austérité.
Vous sacrifiez l'État à une idéologie qui relève presque du mysticisme, tant elle brille par l'absence de résultats concrets qu'elle procurerait au pays, comme aux autres pays qui la subissent en Europe. En effet, malgré la mise en quarantaine des dépenses publiques, le déficit budgétaire de l'État s'est encore accru, passant de 67,7 milliards d'euros en 2017 à 76 milliards d'euros en 2018. La faute à quoi ? La faute à des recettes de l'État en constante diminution.
Oh, les diminutions n'ont pas profité à tout le monde : les cadeaux fiscaux qu'Emmanuel Macron a infligés – si je puis dire – aux Français n'ont bénéficié qu'aux plus riches. C'est une autre des causes du recul de l'État. Le seul record du Gouvernement en 2018, c'est une baisse des prélèvements obligatoires de 16,5 milliards d'euros, un niveau qui n'avait jamais été atteint depuis 2009.
Ces baisses d'impôts sont injustement ciblées. Elles sont pour une minorité de Français l'occasion de bénéficier de toujours plus d'avantages : 3,2 milliards d'euros de gagnés avec la suppression de l'impôt de solidarité sur la fortune et la création de l'impôt sur la fortune immobilière ; 1,6 milliard d'euros avec l'instauration du prélèvement forfaitaire unique, qui, soit dit en passant, a coûté 300 millions de plus que prévu, et ce alors que nous vous avions avertis de l'effet d'aubaine que cela provoquerait, avec une augmentation des paiements en dividendes ; 3,5 milliards d'euros avec l'augmentation du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi ; 1,2 milliard d'euros avec la diminution du taux de l'impôt sur les sociétés. Il y eut aussi la suppression de la taxe à 3 % sur les dividendes, qui a certes été invalidée par le Conseil constitutionnel, mais qui n'était pas moins injuste et profitable aux plus riches.
En revanche, vous n'avez pas la même mansuétude envers les pauvres, car les impôts non progressifs, donc les plus injustes, ont augmenté de 4,1 milliards d'euros au titre de la fiscalité énergétique et de 0,9 milliard du fait de diverses mesures d'augmentation de la TVA, notamment dans les secteurs du logement et de la construction. Ces chiffres contrastent avec l'augmentation de la contribution française à l'Union européenne, qui, elle, curieusement, progresse de plus de 4 milliards d'euros, avec plus de 733 millions d'euros de plus que la prévision initiale – c'est bien l'un des seuls secteurs où celle-ci est autant dépassée !
L'année 2018 marque visiblement l'ouverture d'un festival, celui des annulations de crédits. En effet, un certain nombre de crédits qui avaient pourtant été adoptés dans le cadre du projet de loi de finances pour 2018 n'ont été ni consommés en 2018, ni reportés sur 2019. Voici un petit florilège d'annulations non reportées d'autorisations d'engagement et de crédits de paiement : 530,3 millions d'euros en autorisations d'engagement et 19,6 millions d'euros en crédits de paiement pour la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » ; 454,7 millions d'euros en autorisations d'engagement et 13,3 millions d'euros en crédits de paiement pour la mission « Cohésion des territoires » ; 1,2 milliard d'euros en autorisations d'engagement et 102 millions d'euros en crédits de paiement pour la mission « Défense » ; 72,5 millions d'euros en autorisations d'engagement et 73,8 millions d'euros en crédits de paiement pour la mission « Outre-mer » ; 2,4 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 14,2 millions d'euros en crédits de paiement pour la mission « Travail et emploi ». Il s'agit pourtant de ministères essentiels tant sur le plan social que sur le plan de la défense et de l'écologie ! Ces crédits ne seront pas utilisés, bien qu'ils aient été votés et que les besoins ne manquent pas.
Je voudrais dire quelques mots du budget dont je suis le rapporteur spécial, à savoir celui de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». La baisse des effectifs se poursuit au sein d'un ministère pourtant essentiel si l'on veut prendre au sérieux la question de la transition écologique et solidaire. Alors qu'il y a urgence, du fait du changement climatique, à périmètre constant, en 2018, les dépenses de la mission ont diminué de 3 %.
Chers collègues, il est inconcevable de continuer à diminuer les effectifs d'un ministère qui a déjà perdu 27 000 équivalents temps plein en dix ans. C'est considérable, et cela touche aussi les opérateurs du ministère. Et tout ça pour quoi ? Vous promettez sans cesse la prospérité dans la start-up nation que vous nous vantez, mais le moins que l'on puisse dire, c'est que vos résultats économiques, mesurés à l'aune même du critère de la croissance, sont mauvais !
La croissance ralentit : elle est passée de 2,3 % en 2017 à 1,6 % en 2018, alors qu'elle est de 1,8 % dans la zone euro et de 3,7 % dans le monde. Vous n'avez donc pas solidifié l'économie française. D'ailleurs, lorsque vous avez dû accorder, début 2019, 10 milliards d'euros pour la consommation populaire sous la pression du mouvement des gilets jaunes, les chiffres de l'économie française se sont un peu améliorés, notamment par rapport à ceux du reste de l'Europe, ce qui montre que ce qu'il faudrait, ce n'est pas une politique de l'offre, mais bien une politique de la demande.
Vous vous gargarisez de la hausse de 1 % du pouvoir d'achat des ménages en 2018, mais ce que vous ne dites pas, c'est que si l'on mesure les effets cumulés des mesures prises en 2018 et en 2019, les 1 % les plus riches du pays ont connu un gain annuel moyen de 3 016 euros, et que les 0,1 % les plus riches ont connu une augmentation de 17,5 % de leur revenu disponible.
Vous comprendrez donc que nous considérons que votre budget est ce que nous dénonçons depuis longtemps, à savoir un budget pour les riches – et cela ne ruisselle pas du tout sur le reste de l'économie française.
Ce projet de loi de règlement est important à deux titres.
D'abord, il s'agit du premier examen d'un exercice budgétaire complet depuis que le Gouvernement et la majorité sont au pouvoir. Ce premier bilan est positif à double titre, et c'est pourquoi la majorité votera en faveur du texte.
Ce dernier témoigne de la crédibilité du Gouvernement à mener à bien sa politique visant à redonner du pouvoir d'achat et libérer l'économie tout en maîtrisant les dépenses publiques. Il témoigne aussi du sérieux budgétaire du Gouvernement dans ses prévisions, en vue de « sincériser » les finances publiques. Le taux de mise en réserve de crédits a été réduit de 8 % à 3 % et aucun décret d'avance n'a été pris.
Ce projet de loi est important aussi parce qu'il conclut le deuxième printemps de l'évaluation organisé par l'Assemblée nationale. Grâce aux efforts consentis par le Gouvernement et la Cour des comptes pour avancer le calendrier de présentation du projet de loi de règlement, des rapports annuels de performances et des notes d'exécution budgétaire, le Parlement a pu disposer de tous les outils pour mener l'évaluation.
Le Parlement prend très au sérieux son rôle de contrôle et d'évaluation, comme le montre sa décision de présenter des propositions de résolution qui, quoique techniques, doivent permettre une réelle amélioration de la gestion des finances publiques, dans l'intérêt du contribuable. Les propositions de résolution qui ont été examinées ces deux derniers jours ont permis de faire le point sur des sujets qui ressortent de ce projet de loi de règlement. La majorité a présenté quatre résolutions, qui ont été adoptées très largement – j'en remercie mes collègues – et avaient pour thème, pour la première, la gestion de la masse salariale de l'État, à travers la demande d'un document rassemblant toutes les données pour un suivi détaillé de l'évolution de celle-ci, pour la deuxième, le contrôle des sous-exécutions et des sur-exécutions budgétaires, pour la troisième, le pilotage des dépenses fiscales, problème que la majorité a décidé de prendre à bras-le-corps grâce à une « mise sous radar », pour reprendre l'expression de mon collègue François Jolivet, et un meilleur suivi par les ministères métiers, pour la dernière, enfin, l'amélioration des modalités de contrôle budgétaire. Si l'on avait imaginé l'année dernière la création d'un office parlementaire d'évaluation, dont on peut regretter l'abandon, de nombreuses autres pistes existent donc pour améliorer l'évaluation.
Après ce rapide retour sur le printemps de l'évaluation, j'aimerais souligner les points saillants de l'exercice budgétaire 2018.
Étant rapporteure spéciale pour les engagements financiers de l'État, je ne peux pas ne pas commencer par parler de l'évolution de la dette, qui est l'un des enjeux principaux pour la majorité et le Gouvernement. Nos efforts en la matière ne doivent pas s'arrêter à la loi de finances pour 2018. Si la dette a connu, pour la deuxième année consécutive, une réévaluation à la hausse, la charge de la dette, elle, est contenue, ce qui est le signe du caractère exceptionnel des conditions de financement actuelles.
Les articles consacrés à la dette et à la charge de la dette se multiplient. Des économistes orthodoxes passent le gué. Certains, comme Olivier Blanchard, ancien chef économiste du Fonds monétaire international, ébranle un peu les idées reçues en relativisant, lors d'une présentation au Peterson Institute intitulée « Dette publique et taux d'intérêt faibles », les risques d'un endettement trop important des États dans un contexte où le taux de croissance économique est plus élevé que les taux d'intérêt. Jean Pisani-Ferry propose, quant à lui, d'utiliser les économies faites sur la charge de la dette pour réaliser des investissements utiles, comme ceux nécessaires à la transition écologique. D'autres, comme Vítor Constâncio, ancien vice-président de la Banque centrale européenne, propose de revoir la règle européenne de 3 % de déficit.
Je ne dis pas que je suis d'accord avec ces économistes ou qu'ils ont raison. En revanche, il me semble que la petite musique qu'ils jouent doit être entendue par l'Assemblée nationale. Il serait important que la commission des finances débatte de ces questions – dommage que le président Woerth ne soit plus là.
Il convient de souligner aussi que les résultats budgétaires de l'année 2018 ont été marqués par un contexte économique et social particulièrement agité, à savoir les mouvements sociaux provoqués par la réforme ferroviaire et le mouvement des gilets jaunes, apparu en réaction à l'augmentation massive du prix du baril de pétrole. Le ralentissement économique mondial provoqué par l'accentuation des tensions commerciales n'a pas épargné la France, même si notre pays a su trouver, sinon une certaine constance, du moins une stabilité. Tous ces événements témoignent du caractère imprévisible du contexte dans lequel évoluent, d'une année sur l'autre, nos finances publiques.
Nous ne vivons pas dans un univers stable, mais dans un monde assailli de bouleversements, bousculé par l'urgence, l'immédiateté et la nécessité de réagir en permanence. Ces changements rapides nous affectent, font chavirer nos repères et ceux de nos concitoyens, qui, n'ayant plus de boussole, s'en remettent aux populistes et aux démagogues. Face à cette montée des incertitudes, le rôle de l'État est d'apporter une forme de constance et de résilience à travers ses décisions. Tel est l'objet de l'acte II du quinquennat amorcé par le discours de politique générale du Premier ministre.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Projet de loi de règlement du budget, moment de vérité pour le Gouvernement et pour votre majorité, monsieur le ministre ! C'est en effet le premier exercice budgétaire relevant de la seule responsabilité de la nouvelle majorité.
La Cour des comptes déplore un déficit structurel très éloigné de l'objectif initial. Celui-ci, dans la loi de programmation, avait été fixé à 0,4 point de PIB, contre 2,1 points aujourd'hui. Cette comparaison n'est pas flatteuse pour vous. Je note que le résultat de l'exécution budgétaire de 2018 confirme le renoncement de ce gouvernement, votre renoncement, monsieur le ministre, sur l'équilibre des comptes publics.
Souffrez que je vous fasse entendre une autre vérité…
Le déficit s'établit, en 2018, à 76 milliards d'euros. Vous parlez d'une amélioration. Certes. Amélioration il y a par comparaison avec les inscriptions en loi de finances initiale. Mais, en 2017, le déficit se montait, en exécution, à 67,7 milliards. À 76 milliards pour 2018, loin de s'être amélioré, le solde s'est donc dégradé de 9 milliards. Vous pouvez compter comme vous voulez, la réalité est bien celle-ci : le déficit s'est creusé en volume.
Vous avez, en effet, revu à la baisse les principaux indicateurs financiers : abandon du retour à l'équilibre des finances publiques en 2022 – votre nouvel objectif, en termes de déficit, est fixé à 1,2 point du PIB – ; abandon de la réduction de 5 points de la dette publique, pour un nouvel objectif fixé à 1,6 point, et une augmentation de 1,2 point en 2018. C'est une réalité : la dette publique augmente. On ne peut donc pas parler d'amélioration.
Concernant enfin la réduction de la dépense publique, votre objectif est désormais de 2,1 points, contre 3,3 points initialement. Si cette majorité considère que ces chiffres sont bons, nous n'en avons pas la même lecture ; nous n'avons même pas fréquenté les bancs de la même école. Tout cela, monsieur le ministre, ne témoigne pas d'une bonne gestion, bien au contraire. Les chiffres l'attestent, vous n'avez pas réussi à baisser la dépense publique en 2018, puisque celle-ci augmente de 24,5 milliards d'euros par rapport à 2017. Je dis bien 24,5 milliards !
Vous avez tenté de nous convaincre que vous aviez baissé les dépenses en volume, par un subterfuge qui excluait les crédits d'impôt. Mais, fort heureusement, cela n'a pas trompé la vigilance de la Cour des comptes, qui vous a rappelé la règle. Concrètement, il n'y a pas eu d'économies structurelles.
Les dernières annonces du Premier ministre n'ont d'ailleurs pas été assorties du moindre euro de financement. C'est inquiétant. Quant à votre engagement de diminuer le nombre d'emplois publics, là encore, on a assisté à l'effet inverse. Au final, c'est un autre renoncement à un objectif qui, pourtant, n'était pas ambitieux.
Vos fautes se répercutent directement sur la fiscalité des entreprises et des ménages. Comment nos entreprises peuvent-elles retrouver de la compétitivité pour investir et recruter si la pression fiscale reste pour elles à ce niveau, dans une concurrence internationale farouche ? Comment soutenir durablement le pouvoir d'achat des ménages par une baisse de l'impôt sur le revenu des classes moyennes avec un niveau aussi élevé de prélèvements obligatoires et de dette publique ?
Comme vous l'avez dit dans votre propos liminaire, monsieur le ministre, vous avez pourtant bénéficié de recettes supplémentaires de TVA, pour 4,3 milliards d'euros, et de TICPE, pour 2,6 milliards. Le déficit baisse, n'ont de cesse de répéter le Gouvernement et la majorité. La réalité est tout autre : il augmente de 12,3 % en 2018, soit plus que le total des recettes de l'impôt sur le revenu.
Le gouvernement auquel vous appartenez est le mauvais élève de l'Europe, avec un déficit public de 2,5 % du PIB en 2018. D'autres indicateurs sont, par comparaison avec nos partenaires de la zone euro, tout aussi alarmants. Notre déficit commercial a ainsi augmenté de 3 % ; l'investissement – entreprises, ménages et administrations publiques réunis – a chuté de 38 % ; la croissance, enfin, devrait atteindre 1,4 % en 2019, contre 2,3 % en 2017.
Ces données, incontestables, sont la preuve qu'il y a un problème, tout comme le nombre de propositions de résolution déposées par votre majorité et récemment examinées, que ce soit sur l'évaluation des effectifs de l'État, sur les sur et sous-exécutions, sur le pilotage et l'évaluation des dépenses publiques ou sur le contrôle budgétaire par le Parlement. Toutes ces propositions ont été votées à l'unanimité. Il est donc urgent de rassurer vos rangs ou de changer de méthode.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.
La loi de règlement est un exercice important, qui a d'ailleurs pu retrouver un peu plus de place dans notre hémicycle avec le printemps de l'évaluation. Mais, pour les parlementaires que nous sommes, monsieur le ministre, elle est un exercice un peu fictif, dans la mesure où nous ne pouvons pas annuler les annulations de crédits que vous proposez.
Quand des crédits n'ont pas été consommés, il y a deux options : soit ils sont reportés, soit ils sont annulés. Or il nous est interdit de choisir entre ces deux options – vous seul pouvez le faire, monsieur le ministre – , si bien que nous en sommes réduits à constater les choix faits par le Gouvernement, ce qui, vous en conviendrez, est quelque peu frustrant.
Comme l'an dernier, nous aurions aimé pouvoir annuler certaines annulations de crédits, qui ont encore augmenté par rapport à l'an dernier. À l'article 4, vous annulez ainsi 7 milliards d'euros d'autorisations d'engagement et 1 milliard d'euros de crédits de paiement. Concrètement, vous annulez 36 millions d'euros d'autorisations d'engagement sur le programme « Patrimoines » – principalement – alors que l'incendie de Notre-Dame a remis en lumière les immenses besoins qui existent en matière d'entretien du patrimoine.
Vous annulez aussi 454 millions d'euros d'autorisations d'engagement, qui portent essentiellement sur le programme « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » – comme si, en ce domaine aussi, il n'y avait pas de vrais besoins. Vous annulez encore 1,2 milliard d'euros d'autorisations d'engagement sur la mission « Défense », dont 855 millions sur le programme « Préparation et emplois des forces ». Sur ces 855 millions d'euros, 213 millions n'ont pas été consommés en raison du report en 2019 du marché relatif à la contractualisation de l'arrêt technique du sous-marin Le Terrible. Pourquoi ce marché a-t-il été reporté et pas les autorisations d'engagement ? Il y a un petit biais sur ce point aussi.
En ce moment se tient le Salon du Bourget, où ceux qui aiment les avions ont pu admirer le bel A400M. Alors que les marchés de soutien à cet avion sont poursuivis et reportés, les autorisations d'engagement, elles, ne le sont pas : elles sont annulées à hauteur de 491 millions d'euros.
Parmi les autres constats qui découlent de ce projet de loi de règlement, il y a la question des effectifs, dont nous avons déjà débattu hier soir. Comme le montre clairement la fiche 6 du rapport du rapporteur général, on constate que les effectifs, en 2018, sont inférieurs de 26 287 équivalents temps plein – soit moins que le plafond – , dont la moitié dans la seule éducation nationale et 4 923 au sein du ministère de l'intérieur.
Autre question que le jeu de la loi de règlement nous conduit à poser : les ministères ont-ils pu bénéficier des crédits de paiement que la majorité avait votés ? Nous avons également eu l'occasion d'aborder cette question hier soir, pour remarquer, monsieur le ministre, que ce sont presque toujours les mêmes missions qui sont en sous-exécution. Deux conclusions sont donc possibles : soit notre assemblée vote, pour se faire plaisir, un budget finalement non consommé…
C'est possible !
Sourires.
Je n'en sais rien : pour ma part, je ne l'ai pas voté. Posez donc la question à votre majorité.
Ce que vous décrivez existait avant elle !
Sans doute mais, en tout cas, cela existe toujours aujourd'hui.
Seconde hypothèse, disais-je, puisque vous avez refusé les décrets d'avance et autres loi de finances rectificative, vous préférez garder la main sur la répartition des crédits, ce qui vous laisse beaucoup de pouvoir mais s'avère un peu frustrant pour le Parlement.
En 2018, la mission « Justice » a ainsi sous-consommé 116 millions par rapport à ce qui avait été voté ; la mission « Relations avec les collectivités territoriales », 89 millions d'euros ; la mission « Santé », 17 millions d'euros. Les montants étaient déjà presque aussi élevés l'an dernier. La mission « Action extérieure de l'État », elle, a sous-consommé 37 millions d'euros, et la mission « Aide publique au développement », 67 millions d'euros. Les anciens combattants n'échappent pas non plus à ce régime sec de la sous-consommation, avec moins 34 millions d'euros, non plus que la mission « Culture », qui, comme chaque année, sous-consomme ses crédits, à hauteur de 24 millions d'euros cette année, contre 62 millions l'an dernier.
Pour conclure, je ne reviendrai pas sur le cap que vous avez donné à votre politique économique. Nous ne le partageons pas, car nous considérons qu'il ne répond pas aux impératifs que sont la réduction des inégalités et le soutien à la création d'activité économique dans notre pays. Pour exprimer notre opposition à votre politique économique, nous avons déposé un amendement quelque peu technique sur le fameux déficit structurel. De fait, celui-ci reflète à nos yeux l'aggravation de la situation des finances publiques, tout simplement parce que vous avez décidé d'amputer, dans des proportions significatives, certaines recettes.
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et FI.
À entendre le Gouvernement, il faudrait se congratuler pour les résultats obtenus sur le budget de 2018. Qu'en est-il réellement ? L'année 2018 a été marquée par une gestion des dépenses de l'État conforme à la prévision initiale, c'est vrai. Les dépenses continuent néanmoins à progresser, même si, je le reconnais bien volontiers, elles le font à un rythme moins soutenu.
Globalement, la hausse du déficit a été contenue à un niveau significativement inférieur à celui qui était prévu par la loi de finances initiale. Pourtant, pour la première fois depuis 2014, et après trois ans de quasi-stabilité, le déficit budgétaire de l'État s'est accru en 2018, passant de 67,7 milliards d'euros en 2017 à 76 milliards en 2018, soit 23,4 % des dépenses nettes du budget général, contre 21 % en 2017. En clair, cela signifie que les recettes de la France ne couvrent que neuf mois de dépenses de l'État et que, en 2018, déficit et dette ont continué à augmenter.
Rappelons, si vous le permettez, quelques chiffres-clés. La situation nette des comptes de l'État est fortement négative, à hauteur de 1 296 milliards d'euros au 31 décembre 2018. Ce chiffre ne dit pas grand-chose aux néophytes comme moi, mais il représente quatre années de recettes fiscales ! Et il ne cesse de croître si l'on en croit la Cour des comptes, selon laquelle « en 2006, lors du premier exercice de certification conduit par la Cour, la situation nette des comptes de l'État représentait "seulement" deux années » de produits fiscaux. Cela traduit une très nette détérioration de la situation financière de l'État.
Toujours selon la Cour des comptes, « le passif de l'État représente plus du double de son actif ». Et pour parler plus clairement encore, ce que l'État doit représente plus de deux fois ce qu'il possède. Restons dans le concret : avec 76 milliards d'euros, comme je l'ai dit, le déficit de l'État représente 23,4 % des dépenses nettes de son budget, c'est-à-dire 4 milliards d'euros de plus que les dépenses de la mission « Enseignement scolaire » ou 3 milliards de plus que les recettes de l'impôt sur le revenu.
Alors comment faire ? De fait, la France se signale également par l'un des taux de prélèvements obligatoires les plus élevés du monde, avec 48,4 % du PIB en 2017, selon Eurostat. Je proposerai quelques pistes. La première est la lutte contre la fraude fiscale. Je vous avoue ne pas vraiment adhérer au discours idéologique de certaines ONG, selon lequel l'évasion fiscale des entreprises en France priverait chaque année l'État de 60 à 80 milliards d'euros. Ce chiffrage est largement biaisé, selon le très instructif ouvrage du Cercle des fiscalistes, Les Intox fiscales. Cette surestimation de la fraude fiscale donne malheureusement au Gouvernement l'impression que ce n'est pas à l'État de faire des économies, mais au contraire que ce sont les contribuables qui doivent être davantage contrôlés et réprimés. Cette approche ne me convainc pas : je lui préfère la solution de « détente des taux », proposée par le même Cercle des fiscalistes.
Des solutions, il en existe d'autres. Et puisqu'il faut aborder les sujets qui fâchent, je me livre volontiers à l'exercice. Prenons l'exemple de l'exécution de la mission « Immigration, asile et intégration ». Elle est, une nouvelle fois, marquée par la hausse des demandes d'asile en 2018, avec pour conséquence directe, évidemment, la hausse de l'allocation pour demandeur d'asile. Les crédits de cette mission ont été significativement renforcés dans la loi de finances initiale pour 2018, à hauteur de 10,3 % en autorisations d'engagement et de 25,8 % en crédits de paiement. Mais cela ne suffit toujours pas !
Et ce n'est pas étonnant puisque, selon la Cour des comptes, la programmation des dépenses correspondant à l'allocation pour demandeur d'asile repose sur des hypothèses de délai de traitement des demandes d'asile – soixante jours – et de croissance de leur nombre – 10 % de la demande d'asile globale – qui apparaissent « optimistes », selon le terme de la Cour des comptes – pour ma part, je dirais « très sous-évaluées », au regard des données de l'année 2017 : 185 jours de délai moyen de traitement et une croissance des demandes de 17,3 %.
Selon la Cour des comptes, cette augmentation crée un « risque d'insoutenabilité budgétaire de la mission ». La programmation pour 2019 ne va pas améliorer la situation budgétaire, puisqu'elle prévoit un dépassement du plafond 2019 de 201,7 millions d'euros à périmètre constant. L'estimation est particulièrement insincère au vu des hypothèses avancées : une croissance nulle de la demande d'asile et des délais de traitement de la demande par l'OFPRA de soixante jours, alors que l'on constate déjà une hausse de 6,2 % des demandes d'asile pour les quatre premiers mois de l'année en cours. Les hypothèses sont donc totalement irréalistes, et même à la limite de la mauvaise foi, j'en ai peur !
L'an dernier à la même période, à la droite de nos bancs, on nous prédisait un dérapage des finances publiques tandis qu'à gauche, on nous accusait de sacrifier le pouvoir d'achat des classes moyennes en menant une politique d'austérité. Mauvaise pioche, mes chers collègues : il n'en est rien ; les indicateurs actuels sont globalement bons.
En effet, pour la première année de plein exercice budgétaire depuis notre arrivée aux responsabilités, les dépenses publiques sont maîtrisées, passant de 55 % à 54,4 % du produit intérieur brut ; le déficit public s'élève à 2,5 % du PIB, contre 2,8 % en 2017 ; les prélèvements obligatoires ont été ramenés de 45,2 % à 45 % du PIB, et le poids de la dette se stabilise enfin. N'oublions pas, en outre, que nous sommes enfin sortis de la procédure pour déficit excessif que 1a Commission européenne avait ouverte contre nous en 2009.
Sur le front du pouvoir d'achat, notre politique porte également déjà ses fruits : après avoir atteint 1,2 % en 2018, la hausse devrait être proche de 2 % en 2019. De plus, comme le souligne l'Observatoire français des conjonctures économiques, elle profite principalement aux classes moyennes et populaires.
Nous prouvons ainsi que le fait de réduire les prélèvements obligatoires pesant sur les Français et les entreprises afin de relancer l'activité économique de notre pays ne contredit pas le sérieux budgétaire.
Les bons résultats que j'ai cités en matière de dépenses ont notamment été permis par les efforts de sincérisation du budget, après une loi de finances pour 2017 que la Cour des comptes avait qualifiée d'« insincère » à l'été 2017. Ainsi le Gouvernement a-t-il décidé, dès l'année 2018, de ramener la réserve de précaution de 8 % à 3 %, de ne pas présenter de décret d'avance, pour la première fois depuis la mise en oeuvre de la LOLF, et de ne pas recourir à une loi de finances rectificative en cours d'année.
Comme président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, je me réjouis, par ailleurs, particulièrement que notre majorité ait tenu ses engagements vis-à-vis des collectivités territoriales en maintenant leurs dotations et que les collectivités elles-mêmes aient honoré le contrat en maîtrisant la hausse de leurs dépenses en deçà de 1,2 % : tout le monde, je crois, y est gagnant. Nous sommes en voie de retrouver la confiance, à un moment où la contractualisation financière s'intègre à un ensemble plus vaste de pactes territoriaux entre les collectivités et l'État.
Le printemps de l'évaluation s'est, quant à lui, imposé comme un moment fort du calendrier budgétaire, et l'examen du projet de loi de règlement s'en trouve considérablement amélioré – ce constat fait, je crois, l'unanimité. Grâce à la création des commissions d'évaluation des politiques publiques, il est désormais possible de demander à chaque ministre – c'est la moindre des choses, me direz-vous – des comptes sur l'exécution et les résultats de l'exercice précédent, donc de contrôler plus efficacement l'action du Gouvernement.
Il en ressort notamment que la mesure de l'efficacité des politiques publiques pourrait être améliorée, un constat que partage la Cour des comptes dans son rapport annuel. Dans le cadre de la modernisation de l'action publique, il nous faut veiller à assurer une meilleure articulation avec la démarche de performance.
L'amélioration pourrait également passer par la création d'un projet de loi de financement des collectivités territoriales, ou, pour le moins, par une modification de la LOLF – probablement plus aisée à mettre en oeuvre – , afin de consolider et d'unifier les documents budgétaires relatifs aux finances locales. Ce volet ferait l'objet d'un débat spécifique, voire d'un vote sur un article de récapitulation des transferts de l'État aux collectivités territoriales, lors de l'examen des lois de finances. Cette avancée contribuerait à rendre plus sereines et prévisibles les relations financières entre l'État et les collectivités. Il s'agit aussi, on le sait, d'une demande récurrente de nos amies les associations d'élus locaux.
En respectant nos engagements de campagne en matière budgétaire, en maîtrisant les dépenses publiques tout en contribuant à en améliorer l'évaluation, nous faisons le nécessaire pour faire renaître la confiance chez nos concitoyens et nos partenaires économiques, condition indispensable de la relance de l'activité et de la transformation de notre pays.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Je serai bref, puisque nous en avons longuement discuté en commission. Je l'ai dit dans mon exposé liminaire, le projet de loi de règlement a été adopté en conseil des ministres avant que l'INSEE ne publie ses comptes définitifs. L'amendement tend à mettre en conformité le texte avec les chiffres que l'INSEE a désormais rendus disponibles et qui sont d'ailleurs meilleurs que prévu, la croissance atteignant 2,3 % en 2017, au lieu de 2,2 %, et 1,7 % en 2018, au lieu de 1,6 %. Il vise tout simplement à mettre à jour l'article liminaire, sachant que l'avis rectificatif émis – pour la première fois – par le Haut Conseil des finances publiques ne présente pas de modification fondamentale par rapport au précédent.
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l'amendement no 24 .
L'objet en est quelque peu technique. La croissance potentielle, c'est-à-dire celle que nous aurions si l'économie du pays fonctionnait à plein, est par définition un indicateur invisible, puisque cette condition n'est jamais entièrement satisfaite. Elle est néanmoins utilisée dans le calcul européen du déficit structurel.
Nous l'avons recalculée par rapport à l'estimation qu'en propose le projet de loi de règlement, pour intégrer dans la gestion les événements de la fin 2018, qui ont dégradé le solde structurel, ce qui correspond à un effet non de la conjoncture mais de la structuration même de nos finances publiques. Nous réévaluons ainsi le déficit structurel à 2,5 % du PIB, ce qui représente un écart par rapport aux chiffres du Gouvernement.
Le même que chaque année sur ce type d'amendement : il n'appartient pas au projet de loi de règlement de revenir sur des hypothèses qui ont été fixées par la loi de programmation des finances publiques.
Je suis toutefois surpris, car nous avions l'habitude d'amendements qui procèdent à l'inverse.
L'amendement accroît le déficit conjoncturel au détriment du structurel ;...
La parole est à M. le ministre de l'action et des comptes publics, pour donner l'avis du Gouvernement.
L'article liminaire, amendé, est adopté.
La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l'amendement no 3 .
Nous en devons l'initiative à Charles de Courson.
Actuellement, le Haut Conseil des finances publiques se prononce uniquement sur les recettes du projet de loi de finances. À la lumière de l'audit sur les finances publiques rendu par la Cour des Comptes le 29 juin 2017 et qui avait relevé de graves sous-budgétisations dans le projet de loi de finances pour 2017, il semble opportun que le Haut Conseil puisse se prononcer sur les dépenses du projet de loi de finances à venir.
Charles de Courson a bien voulu retirer en commission cet amendement qui, à mes yeux, relève de la loi organique. Il avait l'intention de le redéposer en vue de la séance pour obtenir du Gouvernement et de moi-même la promesse d'un avis favorable dans l'hypothèse où il en ferait un amendement à la réforme de la LOLF. J'ai bien entendu sa demande ; je n'y ai pas répondu, et je n'y répondrai pas davantage aujourd'hui.
Je le répète, l'amendement n'a pas sa place dans le présent texte. Je vous demande donc de bien vouloir le retirer ; à défaut, mon avis sera défavorable.
Défavorable.
Cela m'est difficile puisque je n'en suis pas le premier signataire. Je le maintiens.
L'amendement no 3 n'est pas adopté.
Les articles 1er, 2, 3 et 4 sont successivement adoptés.
La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l'amendement no 9 .
Il est le premier d'une dizaine d'amendements tendant à demander un rapport – c'est l'artifice que nous avons trouvé pour ouvrir une discussion et obtenir des explications au sujet de certaines annulations.
Il s'agit ici de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales », qui subit une annulation, en autorisations d'engagement, de 530 millions d'euros, soit 20 % des AE consommées en 2018 : ce n'est pas rien !
Or je n'ai absolument rien compris à l'explication fournie par le rapport annuel de performance, monsieur le ministre. Je vais vous la lire ; vous me l'expliquerez. Les sous-consommations en AE correspondraient à « des désengagements juridiques anciens et inactifs réalisés principalement en fin de gestion 2018 au titre de plusieurs mesures gérées par l'Agence de services et de paiement, dans le cadre du suivi de l'audit MMAI n°11042-02 sur la fiabilité de la comptabilité et du suivi des engagements dont la gestion est confiée à l'ASP réalisé en 2012 . »
Sourires.
Il s'agit, en effet, d'une série d'amendements dont certains ont été déposés puis retirés à ma demande en commission, en vue d'obtenir des explications du ministre au banc au sujet des sous-consommations constatées.
Je l'ai dit dans mon propos liminaire, si nous avons instauré le printemps de l'évaluation, c'est précisément pour que de telles questions soient posées au ministre pendant cette phase d'évaluation de l'ensemble des missions. Ces demandes de rapport me semblent donc parfaitement superfétatoires. En outre, certaines des questions soulevées – mais pas nécessairement celle dont nous parlons – ont obtenu des réponses des ministres lors des réunions des commissions d'évaluation des politiques publiques.
Demande de retrait, et, à défaut, avis défavorable sur l'ensemble de ces amendements. Je ne reprendrai pas la parole à propos des suivants.
Madame la députée, je soulignerai d'abord – après Mme Rabault, ainsi que M. le rapporteur général et M. le président de la commission des finances, que je remercie de l'avoir fait – que le Gouvernement, grâce au travail de mes équipes, a su avancer l'envoi de divers documents budgétaires, notamment les rapports annuels de performance. J'en sais également gré au premier président de la Cour des comptes ; nous y avons beaucoup travaillé, nous y travaillerons peut-être encore davantage l'année prochaine. Si, à cause de cet avancement, quelques points-virgules ou virgules ont sauté et que cela fait obstacle à la discussion, je l'entends.
Quelques points-virgules, tout de même. Je vais donc répondre à vos questions.
D'abord, en ce qui concerne le ministère de l'agriculture et de l'alimentation, il n'y a pas de discussion à avoir puisque, que ce soit avec M. Travert hier ou avec M. Guillaume aujourd'hui, les crédits ont fait l'objet d'échanges techniques consensuels. Les annulations en question ne résultent pas de mauvaises évaluations. Il n'y avait, en effet, aucune raison de reporter ces crédits puisque le ministre de l'action et des comptes publics et le ministre de l'agriculture ne le demandaient pas. Et, comme l'a très bien dit le rapporteur général, de mauvais calculs auraient été décelés lors des printemps de l'évaluation.
Pour ce qui est, plus précisément, de l'annulation de 530,3 millions d'euros d'autorisations d'engagement et de 19,6 millions d'euros de crédits de paiements non consommés en 2018 et non reportés, elle s'explique par la consommation des autorisations d'engagement minorée de 503 millions d'euros, compte tenu des désengagements opérés en fin de gestion et hors du titre 2 du programme 149 « Compétitivité et durabilité de l'agriculture, de l'agroalimentaire, de la forêt, de la pêche et de l'aquaculture », conformément aux recommandations de l'audit réalisé par le conseil général de l'alimentation, notamment en mai 2012 – Mme Rabault s'en souvient peut-être – , relatif à la fiabilité de la comptabilisation et du suivi des engagements des opérations de l'ASP, audit renouvelé en juillet 2017.
Ces opérations correspondent à des désengagements d'engagements juridiques anciens et inactifs – nous aurions pu, en effet, en discuter lors du printemps de l'évaluation, monsieur le rapporteur général, mais je réponds bien volontiers à Mme la députée – , des désengagements, disais-je, gérés par l'ASP. Il s'agit de prêts bonifiés utilisés, pour beaucoup d'entre eux, pour l'installation et la modernisation d'exploitations, il y a une vingtaine d'années, et qui sont aujourd'hui moins performants du fait de la baisse durable des taux d'intérêt – 220 millions d'euros ont ainsi été désengagés – , d'anciens programmes d'investissements agricoles et forestiers terminés depuis plusieurs années, parfois depuis plus de dix ans – 150 millions d'euros ont été ainsi désengagés – , ainsi que d'anciens dispositifs d'intervention de l'État comme ceux à destination des ouvrages hydrauliques qui, depuis, ont été transférés aux collectivités locales – 30 millions d'euros ont été désengagés à ce titre.
Ensuite, la consommation des crédits de paiement a été minorée d'environ 16,5 millions d'euros en raison de moindres besoins des programmes 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation », et 215 « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture ». Par ailleurs, 81,2 millions d'euros de crédits de paiement ont été reportés sur l'année 2019 et seront donc largement suffisants pour faire face aux besoins, notamment, du grand plan d'investissements et à ceux liés au remplacement du dispositif « Travailleurs occasionnels demandeurs d'emploi » – TODE – , qui a occupé une partie de nos soirées l'année dernière.
Je comprends donc, monsieur le ministre, que votre avis est défavorable.
La parole est à M. Ugo Bernalicis.
Je sais bien que la gestion des autorisations d'engagement est une vraie galère pour tout un tas de ministères : il y a toujours des AE qui se baladent, correspondant à des engagements juridiques passés un an ou deux ans auparavant et qui partent dans la nature parce qu'on ne procède pas aux bonnes restitutions. Il est vrai que le progiciel Chorus s'est amélioré, l'année dernière, avec des restitutions en masse d'AE qui traînaient ici ou là. La voiture-balai est sans doute passée du fait des évolutions techniques. Une partie de la réponse est donc à trouver ici, même si je comprends bien que certaines analyses ont évolué. L'engagement juridique est une prévision budgétaire, d'une certaine manière, les crédits de paiement constituant, eux, l'exécution au sens strict.
Tout cela revient à rappeler, de mon point de vue, et pour ne pas me faire plus abscons encore que le ministre, que nous avons eu tout un débat sur l'exécution budgétaire au fil de l'eau. Hier, une proposition de résolution a été votée pour qu'on puisse disposer de l'état des crédits au bout de huit mois, c'est-à-dire au moment où l'on prépare le projet de loi de finances. Il s'agit d'avoir les données de l'année n-1, celles de l'année en cours telle qu'exécutée au bout de huit mois, cela afin qu'on puisse se projeter vers l'avenir.
J'ai une proposition technique à faire, même si je m'y prends sans doute trop tard – le sommeil fait parfois surgir de bonnes idées. Ne serait-il pas intéressant de donner à tous les commissaires aux finances, peut-être même aux collaborateurs des groupes rattachés à la commission des finances, un accès en consultation au progiciel Chorus pour l'intégralité des programmes budgétaires ?
C'est fait ! Vous y avez accès, monsieur le député !
Vous y avez accès !
Vous avez reçu un courrier à ce sujet !
L'engagement que j'ai pris l'année dernière a été tenu : comme le rapporteur général et le président de la commission des finances le savent, j'ai écrit au président de l'Assemblée qui lui-même a informé tous les députés qu'ils ont accès, ainsi que leurs collaborateurs, à l'intégralité des données du progiciel Chorus. Vous n'êtes donc victime d'aucune ségrégation, si j'ose dire. On peut toujours améliorer l'information des parlementaires mais il s'agit ici d'une avancée importante, et M. Coquerel, je crois, était en commission quand nous l'avons évoquée.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
La parole est à M. le président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Un système dénommé Lex impact, à destination des députés, permet de mesurer l'impact d'un amendement, par exemple. Cet outil pourrait être amélioré mais permet déjà un début de chiffrage. Je ne suis pas sûr que tous les députés y aient accès, ce dispositif étant encore en rodage.
Si, ils y ont accès.
Les services, en effet, y ont accès. Et ce système est rattaché au progiciel Chorus.
En commission, le rapporteur général m'avait demandé de retirer mes amendements avant même que je ne les défende. C'est ce que j'ai fait afin que nous puissions en débattre en séance. Il est en effet difficile, en ayant seulement trois membres de notre groupe à la commission des finances, d'être disponibles pour discuter des budgets de toutes les missions.
Pour ce qui est du présent amendement, j'ai trouvé les réponses qu'on m'a faites intéressantes, en particulier s'agissant de la non-consommation des prêts bonifiés – c'est une information utile. Je retire mon amendement.
L'amendement no 9 est retiré.
Vous gardez la parole, madame Pires Beaune, pour soutenir l'amendement no 8 .
Le présent amendement concerne, lui, la mission « Aide publique au développement » – APD. Quelque 172 millions d'euros d'autorisations d'engagement non consommés et non reportés sont annulés. Ce montant représente 6 % de celui des autorisations d'engagement consommées en 2018. Je n'ai peut-être pas très bien cherché, mais je n'ai pas trouvé les projets qui ont fait l'objet d'une annulation. Je suppose que si l'on annule des AE, c'est parce que certains projets humanitaires ont peut-être été supprimés. Sans doute pourrez-vous nous confirmer, monsieur le ministre, que l'engagement du Président de la République de porter l'aide publique au développement à hauteur de 0,55 % du revenu national brut – RNB – en 2022 sera bien tenu.
La commission a déjà donné un avis défavorable.
Quel est celui du Gouvernement ?
Le niveau d'annulation des crédits que vous évoquez pour l'aide publique au développement correspond, bien sûr, à des crédits non reportés. De même que je l'ai précisé pour le ministère de l'agriculture et de l'alimentation, il a fait l'objet d'échanges techniques consensuels entre administrations et correspond bien aux crédits réellement nécessaires en gestion 2019.
D'autre part, pour 160 millions d'euros sur 172 millions d'euros, le montant de l'annulation résulte de retraits d'autorisations liés à des engagements pluriannuels antérieurs, devenus sans objet du fait de l'évolution des sous-jacents de la dépense évoqués dans la mission APD. Il s'agit, en particulier, de la bascule de l'International finance facility for immunisation – comme dirait le président de la commission qui parle le patois picard – sur le fonds de solidarité pour le développement, bascule qui est sans impact – 85 millions d'euros – , de la révision à la baisse, dans un contexte de taux bas, des bonifications de prêts au fonds vert pour le climat dont le montant demeure inchangé – 53 millions d'euros – et de la refonte du dispositif d'aide budgétaire engagée en 2011 – 20 millions d'euros.
Ensuite, le décret de transfert de 4 millions d'euros d'AE évoqué dans l'exposé sommaire de votre amendement correspond au soutien du ministère de l'Europe et des affaires étrangères à l'accueil du prochain congrès mondial de la nature de l'Union internationale pour la conservation de la nature – manifestement une priorité française d'aide publique au développement.
Enfin, en ce qui concerne l'engagement de porter l'ADP au taux de 0,55 % du RNB, nous allons bientôt pouvoir en débattre à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2020, le débat d'orientation des finances publiques devant même nous permettre d'envisager les trois années suivantes. Le Gouvernement, en tout cas, y réfléchit avec Jean-Yves Le Drian – j'en profite pour saluer le travail du député Berville qui a proposé, dans son rapport de 2018, que soit discuté un texte d'orientation sur l'aide au développement. Sachez, madame la députée, que, sur ce sujet comme sur les autres, la promesse du Président de la République sera tenue.
L'amendement no 8 est retiré.
La parole est à Mme Michèle Victory, pour soutenir l'amendement no 10 .
Nous souhaitons, ici aussi, des éclaircissements sur l'annulation d'autorisations d'engagement et de crédits de paiement non consommés en 2018 et non reportés de la mission « Cohésion des territoires », pour un total de 454,7 millions d'euros qui portent principalement sur le programme « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat ».
Nous voulons, par ailleurs, en savoir davantage sur l'annulation de crédits de paiement non consommés et non reportés pour cette mission, à hauteur de 13,3 millions d'euros. Nous avons cherché, sans trouver vraiment d'explications à ces annulations. Nous avons émis l'hypothèse que le ralentissement de l'activité dans le secteur du logement social pouvait les expliquer, à moins que les annulations ne résultent de mauvais choix de la part du Gouvernement en matière de logement social.
Quel est l'avis du Gouvernement, étant entendu que la commission a déjà donné un avis défavorable ?
Cette dernière explication vous aurait sans doute arrangée, madame la députée, mais elle est infondée. Si 454,7 millions d'euros d'autorisations d'engagement n'ont pas été consommés en 2018 et n'ont pas été reportés, c'est pour une raison technique liée aux fonds de concours versés au Fonds national des aides à la pierre, le fameux FNAP, dans le cadre du programme « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat ». Les crédits de paiement une fois consommés, quand ils couvrent des engagements antérieurs, on doit annuler les autorisations d'engagement. Le projet de loi de règlement ne procède donc pas, ici, à l'annulation de crédits de paiement mais bien à celle d'autorisations d'engagement. Cette annulation n'a donc pas de conséquence particulière sur la politique du logement.
L'amendement no 10 est retiré.
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l'amendement no 17 .
Le présent amendement porte sur le programme « Patrimoines », que nous avons malheureusement longuement évoqué à l'occasion de l'incendie de la cathédrale Notre-Dame. Je ne comprends vraiment pas pourquoi 35,7 millions d'euros d'autorisations d'engagement non consommées et non reportées sont annulés alors que les besoins du patrimoine sont importants.
Quel est l'avis du Gouvernement, celui de la commission étant, ici aussi, défavorable ?
Vous connaissez bien le budget de l'État, madame la présidente Rabault, et en particulier les habitudes – peut-être mauvaises – du ministère de la culture, comme d'autres ministères d'ailleurs, mais singulièrement de celui-ci. Je m'en étais ouvert à Mme Nyssen peu après ma prise de fonctions, puis à nouveau à M. Riester, son successeur.
Le ministère de la culture, avec des moyens préservés – son budget augmente même légèrement – , ne consomme pas l'intégralité de ses crédits. Il a même la fâcheuse habitude de demander très tôt des dégels de crédits alors, je le répète, qu'il n'en consomme pas l'intégralité. Jusqu'à présent, hormis ceux de la Cour des comptes que, pour des raisons d'indépendance, j'ai bien voulu dégeler à la demande du premier président Migaud, je n'ai dégelé aucun autre crédit, d'autant que nous atteignions le plafond de 3 % de crédits reportables.
Il y a donc, au ministère de la culture, cette tradition de ne pas consommer ses crédits, ce qui est un peu dommage, vous l'avouerez. Je l'ai rappelé au ministre, je viens de le dire, et je vais avoir bientôt l'occasion de le lui rappeler encore. En outre, le ministère de la culture n'a pas demandé le report d'une année sur l'autre des crédits en question.
Je ne sais pas si on vote des budgets pour se faire plaisir, madame Rabault, mais ce qui est certain, et je l'ai dit à plusieurs reprises aux parlementaires, c'est qu'il ne sert à rien d'inscrire des crédits pour ne pas les consommer, et cela de façon répétitive ; cela ne sert à rien non plus, pour peu qu'on soit soucieux de sincérité budgétaire – et je m'adresse à la majorité comme à l'opposition – , de faire ajouter des crédits par voie d'amendement, au mois de décembre, alors que nous avons tous travaillé sur le budget depuis très longtemps, et cela pour se rendre compte, in fine, qu'ils n'ont pas été consommés. Ce fut le cas du ministère de la culture, donc, mais aussi de celui des sports et de celui des outre-mer.
Quand on s'aperçoit que les annulations de crédits ou les sous-exécutions sont supérieures aux montants de crédits votés par voie d'amendements, les parlementaires de la majorité comme de l'opposition font valoir au ministre des comptes publics mais aussi à chaque ministre, en commission lors de la préparation du budget ou au moment de l'examen du projet de loi de règlement, qu'une telle pratique n'est pas de bonne politique budgétaire. Donc le Gouvernement n'a pas eu la volonté d'annuler des crédits du programme « Patrimoines » pour faire des économies de bouts de chandelles.
Comment corriger cette sous-exécution chronique de certaines lignes budgétaires ? Quand le ministre de l'action et des comptes publics dit : « Manifestement, vous ne consommerez pas vos crédits. Vous retirer des crédits ne revient pas à annuler votre politique puisque vous ne les consommez pas », vous imaginez le sourire de ceux auxquels s'adresse ce discours ; ils vous répondent : « Si, si, cette année nous consommerons nos crédits. » Nous verrons bien ce qu'il en sera.
L'amendement no 17 est retiré.
La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l'amendement no 11 .
Il relève de la même logique que le précédent amendement concernant, cette fois, la mission « Défense ». Une remarque particulière, cependant, concernant l'annulation de crédits en raison de l'arrêt technique du sous-marin Le Terrible : le marché a été reporté mais pas l'autorisation d'engagement. De la même façon, l'engagement des marchés de soutien à l'avion de transport militaire A400M a été reporté, mais pas l'autorisation d'engagement. J'avoue que je ne comprends pas : si vous reportez un programme, vous diminuez l'enveloppe par rapport à l'année précédente.
L'avis de la commission est défavorable. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Madame la députée, j'ai du mal à comprendre votre argumentation. Il y a une loi de programmation militaire et ces crédits ont été ouverts dans les budgets prévisionnels. Je veux bien vous faire une réponse écrite avec Mme la ministre des armées s'agissant de gros dossiers d'investissement, mais, en tout état de cause, il n'y a pas d'entourloupe. Il y a une loi de programmation militaire : ces AE sont ouvertes, et elles le seront aussi dans le budget que nous vous présenterons en 2019.
Ils sont annulés parce qu'ils n'ont pas été consommés en 2018.
Le décret relatif à la gestion budgétaire et comptable publique empêche leur report. Ils sont techniquement annulés avant d'être rouverts parce que le contrôleur applique le décret GBCP qui ne permet pas le report.
Sourires.
Cela dit, la France aura toujours des sous-marins !
L'amendement no 11 est retiré.
La parole est à Mme Michèle Victory, pour soutenir l'amendement no 12 .
S'agissant de la mission « Justice », le projet de loi de règlement procède à l'annulation d'autorisations d'engagement non consommées pour plus de 81 millions d'euros sur le programme « Administration pénitentiaire », principalement sur l'action « Accueil et accompagnement des personnes placées sous main de justice », pour 40,2 millions d'euros sur le programme « Justice judiciaire » et 33 millions d'euros sur le programme « Conduite et pilotage de la politique de la justice ».
Pour les crédits de paiement non consommés et non reportés, les annulations s'élèvent à 53,6 millions d'euros.
Étant donné les besoins considérables de cette administration en financements et en investissements – rappelons que le taux d'occupation des établissements pénitentiaires était en moyenne de 118 % en 2018 sur l'ensemble du parc, ce qui n'est franchement pas raisonnable – , nous estimons qu'il y aurait des choses à faire, et ces annulations ne nous paraissent pas satisfaisantes.
La commission est défavorable à l'amendement. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Je rappelle que, depuis la loi de programmation de la justice et le premier budget que je vous ai présenté, le ministère de la justice connaît la plus grande hausse de budget jamais enregistrée sous la Ve République, soit 5 % d'augmentation de crédits par an. Il est vrai que la justice en a bien besoin, tant pour son personnel que pour la construction de places de prison ou pour renforcer les moyens à la disposition des magistrats.
Cela étant posé, vient le moment de constater l'exécution des crédits. Pour respecter l'autorisation parlementaire, nous avons fait le choix d'annuler 167,3 millions d'euros en autorisations d'engagement, et 53,6 millions de crédits de paiement non consommés en 2018 et non reportés.
En effet, hors titre 2, donc hors dépenses de personnels, 116,8 millions d'euros sont essentiellement des autorisations d'engagement devenues sans objet, liées en particulier à des baux et à des loyers de partenariats public-privé que Mme la ministre n'a pas souhaité poursuivre, ou à des marchés informatiques abandonnés. Par respect pour l'autorisation parlementaire, ces crédits n'ont pas été reportés pour financer des opérations différentes de celles pour lesquelles le Parlement avait émis un vote. Je crois que chacun peut être satisfait que cette autorisation parlementaire ne soit pas violée.
Le solde est constitué de 50,6 millions d'euros relevant du titre 2, dont plus de 90 % correspondent à un excédent de contribution au compte d'affectation spéciale « Pensions ». Il ne s'agit donc pas de dépenses de personnels au sens des salaires, mais au sens au sens du CAS devenu sans objet.
Pour les crédits de paiement, 90 %, soit 46,3 millions d'euros, sont des crédits de titre 2 qui correspondent à un excédent de contribution au CAS « Pensions » – en parallèle des autorisations d'engagement devenues également sans objet.
En conséquence, rien de ce qui a été annoncé par la ministre, en titre 2 ou hors titre 2, n'a donc été mis de côté en raison d'économies de fin de gestion. Les annulations sont intervenues parce que d'autres dépenses n'auraient pas correspondu aux autorisations d'AE et de CP votées par les parlementaires.
L'amendement no 12 est retiré.
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l'amendement no 13 .
Vous procédez à l'annulation de 72 millions d'euros d'autorisations d'engagement sur la mission « Outre-mer », alors que la Cour des comptes, qui a plutôt l'habitude de recommander la diminution des dépenses, évoque, dans sa note d'analyse de l'exécution budgétaire s'agissant de l'outre-mer, une sous-consommation « inédite » des crédits alloués à la mission. Nous sommes donc étonnés de constater que les autorisations d'engagement sont annulées alors même que la Cour des comptes vous incite à faire en sorte que les crédits soient consommés.
La Cour des comptes et le Parlement souhaitent une bonne gestion. Vous parlez essentiellement d'autorisations d'engagement pour l'outre-mer prises avant 2018. Précisément, il s'agit ici de « faire le ménage » en la matière pour ne pas traîner indéfiniment avec des AE qui ne correspondraient plus à la réalité. Le taux d'exécution des AE, hors reports et annulations des années antérieures, est de 99,86 %, mais un certain nombre d'AE s'étaient accumulées, ce que vous pourrez constater en consultant Chorus.
S'agissant des crédits de paiement, les 177 millions d'euros non consommés correspondent à des fonds de concours reportés de droit : un peu plus de 52 millions au titre du programme 123 « Conditions de vie outre-mer », dont près de 49 millions au seul titre du Fonds de solidarité de l'Union européenne ; 28 millions sur le programme 138 « Emploi outre-mer », essentiellement au profit du service militaire adapté, et 19,3 millions d'euros produits de sessions des SIDOM, les sociétés immobilières d'outre-mer, ouverts dans la loi de finances rectificative de fin d'année. Ces crédits ainsi que 3,5 millions supplémentaires ont été reportés au titre d'une disposition générale prévue par la LOLF. Le total des crédits reportés sur la mission « Outre-Mer » s'élève à 103,5 millions d'euros.
La sous-consommation réelle des crédits de paiement pour le programme 103 se monte donc à 70,46 millions d'euros, principalement en raison d'une moindre dynamique en matière de logement et d'aménagement du territoire. Ces crédits n'ont pas été reportés, dans le respect du plafond des 3 % de crédits reportables, prévu à l'article 10 de la loi organique de 2001.
Ces sous-consommations n'ont cependant eu aucune conséquence préjudiciable sur les territoires ultramarins. Les besoins exprimés ont tous été couverts, comme en témoigne le niveau très bas des charges à payer à la fin 2018 par ce ministère, soit à peine 21 millions d'euros, en baisse continue depuis 2016. Madame Rabault, je rappelle qu'en 2016, ces charges approchaient les 50 millions d'euros : nous les avons donc divisées par plus de deux.
Enfin, je peux vous assurer que l'exécution 2019 fait l'objet d'échanges soutenus avec Mme la ministre des outre-mer afin d'éviter qu'un tel scénario se reproduise. Cela fait écho à la discussion budgétaire qui a eu lieu dans cet hémicycle au mois de décembre dernier : à la demande des parlementaires de l'opposition comme de la majorité, nous avions voté des crédits qui n'ont finalement pas été consommés.
L'amendement no 13 est retiré.
La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l'amendement no 14 .
Il est relatif aux crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », consacrés à l'investissement des collectivités. Monsieur le ministre, lorsque je vous ai interrogé, il y a quelques semaines, vous m'aviez répondu que toutes les demandes de versements avaient été honorées. Il se trouve que j'ai sollicité certaines communes qui avaient déposé un dossier avant le 15 octobre dernier. On aurait pu penser que le versement était aujourd'hui effectif ; ce n'est pas le cas.
C'est le passé. Pour cette année, monsieur le ministre, prenez-vous l'engagement que toutes les demandes de versements de DETR – dotation d'équipement des territoires ruraux – , et de DSIL – dotation de soutien à l'investissement local – , transmises avant le 15 octobre, pour prendre une date raisonnable, seront honorées ?
La commission est défavorable à l'amendement. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Si les dossiers sont complets, je ne vous réponds pas de façon absolue sur la date du 15 octobre, mais…
Pas nécessairement, mais je veux bien intervenir commune par commune, sachant que la DETR et la DSIL ne relèvent pas de mon ministère, mais qu'elles sont « à la main des préfets », si je puis dire, et normalement soumises au contrôle des parlementaires, avec le ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Madame Rabault, je suis certain que vous vous faites respecter par votre préfet.
J'ai d'ailleurs donné un avis favorable à un amendement prévoyant que les parlementaires soient, quelle que soit leur couleur politique, associés. Je suis sûr, madame la députée, que vous avez la personnalité pour vous imposer au représentant de l'État. Sinon, M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales, vous aidera à le faire.
Je ne sais pas si nous pouvons fixer une date et choisir le 15 octobre. On peut imaginer qu'au début du mois d'octobre, si les dossiers ont été déposés et qu'ils sont complets, ce ne sera pas une question d'argent : il y en aura. Cela dit, je vais avoir à évoquer très prochainement avec M. Lecornu le nombre important des autorisations d'engagement : il va falloir mettre des crédits de paiement en face. Il y aura donc un ressaut budgétaire pour les dotations d'investissement, dont je voudrais rappeler qu'elles sont très élevées depuis le quinquennat précédent, parce qu'il y avait des baisses de dotation globale de fonctionnement – DGF. Nous avons souhaité conserver un niveau très élevé de DETR et de DSIL alors que nous n'avions plus abaissé la DGF. Nous avons même procédé à une légère augmentation. Cela prouve bien que nous sommes les amis des collectivités locales.
Je suis sûr que vous préférez cette politique budgétaire à la précédente. Encore faut-il effectivement honorer les paiements lorsque les dossiers complets sont déposés par les collectivités locales, singulièrement les plus petites d'entre elles, s'agissant de la DETR.
Nous aurons l'occasion de parler, lors de l'examen du projet de loi de finances de cette année, de la bonification par des dotations d'investissement de ceux qui ont respecté le « contrat de Cahors ». À ma connaissance, une quinzaine de collectivités sur 322 n'ont pas respecté ce contrat. Pour toutes les autres, la question se posera de l'intéressement, notamment en investissements. Nous évoquerons ce sujet avec les dotations d'investissement dans le cadre du projet de loi de finances et dans le projet de loi de règlement 2019. Je pense que ce sera encore plus lisible.
L'amendement no 14 est retiré.
La parole est à Mme Michèle Victory, pour soutenir l'amendement no 15 .
Pour la mission « Sécurités », vous annulez des autorisations d'engagement à hauteur de 79,6 millions d'euros, essentiellement sur le programme « Gendarmerie nationale », à hauteur de 61,1 millions d'euros. Monsieur le ministre, je suppose que vous comptez m'expliquer qu'il n'y a rien dans tout cela qui soit de nature à inquiéter la gendarmerie nationale, et que nous ne devons pas nous inquiéter des raisons de ces annulations et de ces reports.
La commission est défavorable à l'amendement. Quel est l'avis du Gouvernement ?
En l'espèce, la situation témoigne d'une bonne gestion de la part du ministère de l'intérieur qui a vu ses crédits augmenter, en particulier pour le titre 2. Il y a eu une auto-assurance, conformément à ce que nous demandons au ministère ; ils ont annulé leur réserve de précaution diminuée à 3 %. Ce montant a été utilisé, non pas pour financer le budget général et d'autres dépenses, mais pour couvrir les dépassements du ministère de l'intérieur sur d'autres sujets.
Nous avons donc accepté – c'est en tout cas ce que je fais depuis que je suis ministre de l'action et des comptes publics – un minimum de gestion personnelle du ministre de l'intérieur qui fait le choix de compenser un dépassement sur ceci par le gel de cela. Il lui appartient désormais de justifier, s'il le souhaite et si vous l'interrogez, sa politique budgétaire devant vous, telle qu'elle répond aux priorités qui ont été fixées.
Je crois que l'autorisation parlementaire est respectée, d'autant que cela est bien visible et parfaitement critiquable par la Cour des comptes si elle le souhaite. On évite ainsi les décrets d'avance qui sont toujours à mon avis malvenus. Nous préférons l'auto-assurance de la réserve de précaution à une forme d'irresponsabilité qui conduirait les ministres à demander, quoi qu'il arrive, la compensation de dépassements de leurs crédits.
Il n'y a donc pas eu, pour le ministère de l'intérieur, de difficultés particulières, si ce n'est, peut-être, un léger changement de la politique menée par le ministre qui a dû provoquer des dépassements dans certains domaines.
L'amendement no 15 est retiré.
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l'amendement no 16 .
Il s'agit de la plus grosse annulation d'autorisations d'engagement, soit 2,4 milliards d'euros sur la mission « Travail et emploi ». J'imagine que cette annulation est liée à la baisse du nombre de créations d'emplois aidés. Peut-être existe-t-il une autre raison ?
Mme Rabault a fait la question et la réponse !
L'amendement no 16 est retiré.
Les articles 5, 6 et 7 sont successivement adoptés.
Comme je l'indiquais en défendant la motion de renvoi en commission, cet amendement fait écho aux propos tenus par M. François de Rugy, qui a annoncé la mise en oeuvre de l'évaluation de l'impact des décisions budgétaires du Gouvernement à l'aune d'une trajectoire de 2o C pour le projet de loi de finances 2020, ainsi que des mesures de protection de la biodiversité.
Les scientifiques nous disent l'urgence de mettre en place une politique publique de préservation de la biodiversité, au même titre qu'une politique publique de lutte contre le changement climatique.
Or une telle politique publique doit s'appuyer sur des informations précises. C'est la raison pour laquelle notre groupe demande qu'une annexe supplémentaire au projet de loi de finances soit consacrée à la politique interministérielle sur la préservation de la biodiversité.
La commission a émis un avis défavorable à cet amendement. Vous sollicitez, madame Rubin, la création d'un document de politique transversale – DPT – sur la politique interministérielle de préservation de la biodiversité. En commission, j'avais indiqué sous forme de boutade que la seule espèce qui ne soit pas en voie de disparition, c'était justement les DPT, puisqu'il y en a déjà vingt et un – et je ne suis pas vraiment sûr que leur lecture soit aussi effective que vous semblez le penser.
Je rappelle aussi qu'il existe un programme 113 qui porte sur la biodiversité et dont le rapporteur spécial est M. Coquerel, ici présent. Je souhaiterais que votre amendement soit redéposé dans le cadre du PLF en indiquant les informations qui vous manqueraient. En l'état, je ne crois pas que la publication d'un document supplémentaire soit vraiment nécessaire.
Mon avis est également défavorable, mais pas pour les mêmes raisons, et je m'en veux de contredire le rapporteur général. Il me semble que Mme la députée Peyrol a déposé, l'année dernière, un amendement en loi de finances, qui a été adopté, créant un nouveau document budgétaire consacré à la biodiversité, …
… que nous pourrions faire imprimer en vert si vous le souhaitez.
Sourires.
Votre amendement est donc satisfait. Peut-être que Mme la députée Peyrol pourrait confirmer sa création, monsieur le président.
Très bonne suggestion, monsieur le ministre.
La parole est à Mme Bénédicte Peyrol.
Il y a, en effet, l'amendement qui a été voté l'année dernière en loi de finances et qui propose la création d'un jaune budgétaire…
… pour lister les dépenses vertes, incluant donc les dépenses en faveur de la transition écologique et donc du changement climatique, mais aussi celles relatives à la biodiversité.
Et puis, dans le cadre du projet de loi relatif à l'énergie et au climat, j'ai déposé un amendement, qui a été adopté en commission du développement durable ainsi qu'en commission des affaires économiques. Il s'agit d'avoir un rapport qui soit une sorte de budget vert en passant au scanner toutes les dépenses de l'État pour voir leur compatibilité avec l'accord de Paris et aussi avec les problématiques de biodiversité, à savoir les dépenses favorables à la biodiversité et celles qui y sont défavorables.
De surcroît, nous avons déjà à notre disposition différents documents : le jaune sur le financement de la transition énergétique et le jaune qui liste les politiques finançant la stratégie en faveur du climat, soit une partie des questions que vous évoquez, madame Rubin.
Mme Cendra Motin et Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas applaudissent.
Sourires.
Un jaune-vert !
Sourires.
Cela veut-il dire que cet ensemble de documents fait écho à l'annonce de M. de Rugy que je viens de rappeler ?
L'amendement no 18 est retiré.
Cet amendement demande que soit dressée la liste des opérateurs qui ne sont pas considérés comme des organismes divers d'administration centrale et la liste des opérateurs qui sont considérés comme des organismes divers d'administration centrale.
La réflexion de la commission des finances à ce sujet rejoint celle du Gouvernement puisqu'une circulaire du Premier ministre vise à clarifier la question. Maintenant que nous disposons d'un jaune budgétaire sur les opérateurs de l'État, il conviendrait d'y distinguer les opérateurs ODAC – Organismes Divers d'Administration Centrale – et ceux qui ne le sont pas pour avoir un panorama plus complet permettant d'arriver à une simplification du dispositif, du moins à une mutualisation autant que possible.
Je suis d'accord sur le principe avec ce que vous exposez, mon cher collègue : il serait utile que le jaune budgétaire précise pour chaque opérateur s'il a la qualification d'ODAC au sens de la comptabilité nationale. Mais, à mon avis, cette modification d'annexe peut se faire à droit constant, sans donc qu'il soit besoin de modifier la loi. Toutefois, pour vous être agréable et compte tenu de l'intérêt de la demande, j'émettrai un avis de sagesse.
L'amendement no 25 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
J'en reviens ici aux décrets d'avance. L'article 13 de la loi organique relative aux lois de finances prévoit qu'« en cas d'urgence, des décrets d'avance pris sur avis du Conseil d'État et après avis des commissions de l'Assemblée Nationale et Sénat chargées des finances peuvent ouvrir des crédits supplémentaires sans affecter l'équilibre budgétaire défini par la dernière loi de finances », ces dernières devant rendre le leur dans un délai d'une semaine pour que le conseil d'État puisse être lui-même saisi dans les temps. Ce n'est qu'ensuite que le Gouvernement peut prendre un décret d'avance.
Les avis des commissions sont, bien sûr, communiqués au Conseil d'État, mais l'avis de celui-ci reste confidentiel ; les commissions n'en ont pas connaissance. Nous avions déjà relevé cette dissymétrie de la procédure en commission des finances, le 6 juin dernier. Vous nous aviez répondu, monsieur le rapporteur général, que cela était normal en raison du principe de séparation des pouvoirs et que, de surcroît, cette question relevait de la loi organique. Vous aviez d'ailleurs promis une réponse plus argumentée lors du débat sur la LOLF, mais je préférerais que vous me la donniez tout de suite, d'où cet amendement. Vous avez compris qu'il vise à améliorer l'information de la représentation nationale en lui donnant ainsi la possibilité de mieux remplir sa fonction de contrôle.
L'amendement no 7 de Mme Christine Pires Beaune est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Cet amendement a déjà été examiné à de multiples reprises et autant de fois rejeté. Comme vous le savez, les avis du Conseil d'État sont destinés au Gouvernement et lui seul peut décider de les rendre publics.
J'entends bien qu'en janvier 2015, le Président de la République a annoncé la publicité des avis du Conseil d'État, à l'exception des textes à caractère financier et des textes autorisant la ratification ou l'approbation des traités internationaux. Pour autant, au nom du principe de séparation des pouvoirs, le législateur ne peut imposer dans la loi la transmission au Parlement de certains avis du Conseil d'État. De plus, je confirme qu'une telle disposition me semblerait relever de la loi organique. Avis défavorable.
Cet amendement porte sur les partenariats public-privé, qu'il s'agit de rendre plus visibles et lisibles de façon à pouvoir en faire les bilans.
Les partenariats public-privé, c'est souvent l'investissement pour le public et les bénéfices pour le privé. La Cour des comptes a, par exemple, relevé, pour le seul domaine pénitentiaire : « Au cours des vingt-neuf prochaines années, l'État versera donc 5,605 milliards d'euros au titre de l'investissement, dont 2,595 milliards d'euros correspondant à la quote-part de frais financiers, et 10,902 milliards d'euros au titre du fonctionnement, soit un total de 16,507 milliards d'euros », au titre de l'immobilier issu des partenariats public-privé. C'est donc souvent une gabegie budgétaire pour l'État qui, en outre, donne de cette manière sa garantie à ce type de partenariat.
Notre groupe demande donc, compte tenu des différents rapports qui en ont pointé les dysfonctionnements et du fait que c'est une mauvaise affaire pour l'État, que le Parlement dispose des documents lui permettant d'avoir plus de visibilité et plus de lisibilité en la matière.
Mon avis est aussi défavorable qu'en commission et pour les mêmes motifs. Premièrement, votre amendement me semble partiellement satisfait parce que les dettes liées aux partenariats public-privé figurent dans la comptabilité générale de l'État – en page 52 du rapport de présentation se trouve un tableau qui récapitule les paiements minimaux futurs actualisés au titre des principaux contrats immobiliers dans le cadre du partenariat. Deuxièmement, votre amendement relèverait plutôt du niveau d'une loi organique.
L'amendement no 23 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Maintenant qu'a été adopté mon précédent amendement, nous pouvons aller un peu plus loin. Dans le but de mieux informer le Parlement et de renforcer ainsi le contrôle sur les organismes publics, cet amendement tend à créer un jaune budgétaire sur les organismes divers d'administration centrale non-opérateurs de l'État, sur le même modèle que le jaune budgétaire relatif aux opérateurs de l'État. Nous aurons, comme cela, un panorama complet.
Je crains de devoir exprimer un avis moins sage qu'il y a quelques minutes. Je crois vraiment que l'enrichissement de l'annexe sur les opérateurs de l'État est une meilleure solution que la création d'une annexe consacrée aux ODAC. Je rappelle, au passage, que cette notion d'ODAC relève de la comptabilité nationale alors que celle d'opérateurs relève de la LOLF. Ce sera donc une demande de retrait. À défaut, l'avis sera défavorable.
Si j'ai bien entendu, le jaune sur les opérateurs de l'État serait complété par une partie « non-opérateurs ». Si c'est bien cela, je retire l'amendement.
L'amendement no 5 est retiré.
La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l'amendement no 6 .
Après l'article 7, il est proposé d'insérer l'article suivant : « Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport faisant un état des lieux de la compensation financière par l'État des transferts de compétences aux collectivités territoriales, en évaluant notamment si ces compensations financières ont été effectuées pour des montants financiers suffisants et l'impact de ces compensations sur les finances publiques. »
L'article 72-2 de la Constitution précise que « tout transfert de compétences entre l'État et les collectivités territoriales s'accompagne de l'attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice ». Or la réforme de la taxe d'habitation ainsi que la loi sur l'avenir professionnel et l'aménagement numérique du territoire, dite loi ELAN, grèvent les ressources des communes et des établissements publics de coopération intercommunale. Cela nous incite à demander des précisions sur les chiffres réels et sur l'impact de ces transferts sur les finances des collectivités.
En commission, vous m'aviez répondu, monsieur le rapporteur général, que le code général des collectivités territoriales satisfaisait déjà à cette demande, mais il ne le fait que partiellement, car nous demandons également l'évaluation de l'impact de ces mesures, par exemple celui de la taxe d'habitation. C'est pourquoi nous avons à nouveau déposé cet amendement en séance.
Cet amendement avait déjà été déposé l'an dernier et j'ai toujours le même avis. Outre l'argument relatif au code général des collectivités territoriales, je rappelle qu'au sein du Comité des finances locales, une commission consultative sur l'évaluation des charges établit à l'intention du Parlement, à l'occasion du projet de loi de finances, un bilan sur l'évolution des charges transférées. Un jaune budgétaire est également consacré aux transferts financiers de l'État aux collectivités, qui distingue les transferts de compétences et les compensations liées à des réformes de la fiscalité locale. L'amendement me semble donc parfaitement satisfait.
Êtes-vous parfaitement satisfait, monsieur Castellani, ou bien passons-nous au vote ?
L'amendement no 6 n'est pas adopté.
On nous parle souvent de déficit, de dépenses publiques à réduire, mais on laisse de côté des dépenses qui ne cessent d'augmenter année après année, ces niches fiscales qui sont autant de recettes qui manquent à l'État.
Les niches fiscales ont comme particularité d'exploser chaque année le plafond prévu. Ainsi, de 2017 à 2018, elles ont augmenté de 6,7 milliards d'euros, ce qui fait que maintenant on dépasse allègrement les 100 milliards d'euros. Au total, de 2013 à 2018, le coût des niches fiscales a progressé de 39 %. Je suis encore enclin à citer la Cour des comptes, qui explique qu'elles ne sont « ni pilotées, ni évaluées », notant que « leur évaluation demeure en outre très lacunaire, alors qu'elles présentent souvent des liens distendus avec les missions et leurs objectifs ». Il y a 200 niches fiscales pour lesquelles on ne connaît même pas le nombre de bénéficiaires !
La Cour des comptes recommande donc, et nous avec, depuis plusieurs années, de réaliser un chiffrage exhaustif du nombre de bénéficiaires et du coût de chacune des dépenses fiscales, et de compléter les documents budgétaires en précisant les objectifs auxquels concourent les dépenses rattachées à chaque programme, en les assortissant, pour les plus significatives d'entre elles, d'indicateurs de performance.
Nous recommandons ainsi, au travers de cet amendement, de suivre les conclusions de la Cour des comptes et de nous permettre de disposer effectivement d'un chiffrage exhaustif du nombre de bénéficiaires et du coût de chacune de ces dépenses fiscales pour le moins dispendieuses.
Ce que vous proposez de créer, c'est exactement le tome II, « Évaluation des voies et moyens », qui existe dans le cadre du projet de loi de finances, et qui serait transposé dans la loi de règlement. Très honnêtement, je ne crois pas que ce soit la bonne méthode. Le problème n'est franchement pas le véhicule législatif, mais bien l'accessibilité d'informations dont nous ne disposons pas dans l'actuel tome II, y compris lors de l'examen du projet de loi de finances.
Créer une nouvelle annexe qui aurait les mêmes défauts que celle qui existe déjà dans le cadre du PLF ne serait pas forcément très efficace. Améliorons d'abord le tome II « Évaluation des voies et moyens » avant de commencer à nous poser des questions sur la loi de règlement.
Même si je partage avec vous, sur le fond, le souhait de disposer d'informations accessibles, car tel est bien le sujet, je demande donc le retrait de l'amendement. À défaut, l'avis de la commission sera défavorable,
Dans le prochain rapport d'application de loi fiscale, je fournirai une étude précise sur les dépenses fiscales qu'il est prioritaire d'évaluer, afin que nous ayons un moyen de pression en vue d'obtenir ces informations.
Ce qui a été voté dans les plans de prévention des risques – PPR – à la suite des certificats d'économie de produits phytopharmaceutiques – CEPP – relève également de cette logique.
Je maintiens l'amendement et prends note de ce que vous nous indiquez, monsieur le rapporteur général. Nous ferons donc pression ensemble.
L'amendement no 19 n'est pas adopté.
Sur l'ensemble du projet de loi de règlement du budget 2018 et d'approbation des comptes de l'année 2018, je suis saisi par le groupe La République en marche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à Mme Sabine Rubin, pour soutenir l'amendement no 20 .
Il a également trait aux niches fiscales. Ce serait une manière de s'assurer que nous ferons bien pression ensemble que de s'engager sur celui-ci.
Il s'agit de faire en sorte que le Gouvernement remette au Parlement « dans un délai de trois mois [… ], un document présentant une méthode et un calendrier concernant la mise en oeuvre d'un programme d'évaluation de l'efficacité et de l'efficience des dépenses fiscales les plus significatives [… ]. »
Puisque nous nous engageons à le faire, nous pouvons déjà prévoir un calendrier, un programme, une méthode. Tel est le sens de cet amendement.
Chère collègue, cet amendement correspond au souhait que j'avais formulé lors de l'examen de la précédente loi de finances, qu'un tel travail d'évaluation soit réalisé. L'amendement que j'avais déposé à cet effet a été adopté, et le ministre de l'économie et des finances, et le ministre de l'action et des comptes publics ont, de ce fait, confié à l'Inspection générale des finances une mission d'évaluation des niches.
Un rapport consacré à l'état des lieux des travaux d'évaluation et d'encadrement des dépenses fiscales devrait être remis ces jours-ci, puisqu'il était prévu pour la fin du mois de mai ou le début du mois de juin. Nous avons d'ailleurs rencontré les services de l'IGF en charge de ce dossier. Il s'agit d'identifier les priorités dans le cadre d'un travail pluriannuel et de disposer d'un tableau de bord qui synthétise notamment les dépenses, l'appréciation portée, les évolutions possibles et tout autre élément utile.
Je considère qu'aujourd'hui votre amendement, comme d'ailleurs le précédent, vient en appui de la demande que j'ai effectuée et dont la satisfaction est en cours à l'heure actuelle.
J'aborderai également ce sujet, et pour les mêmes raisons, dans le rapport d'application de la loi fiscale. Je pense donc très honnêtement que demander un rapport complémentaire ne ferait que retarder un peu plus la publication du rapport de l'IGF.
Il conviendrait mieux que nous oeuvrions ensemble à l'analyse de ce même rapport. Je demande donc le retrait de cet amendement.
Franchement, j'aimerais obtenir des précisions sur ces histoires de niches fiscales, à propos desquelles mon collègue Éric Coquerel a rappelé les chiffres.
En réponse à un précédent amendement, vous indiquiez qu'il était impossible d'obtenir les chiffres en question et qu'il fallait s'en référer au tome II « Évaluation des voies et moyens », dans lequel on ne trouve pas les éléments.
Maintenant, vous me dites qu'un rapport ayant trait aux niches fiscales est en cours de finalisation. Les chiffres en question existent et n'existent pas ; vous avez fait voter un amendement : quand donc pourrons-nous disposer d'informations concernant ces fiches ? Je voudrais des précisions, car ce débat devient, à cette heure, très confus.
À partir du travail d'évaluation mené par l'Inspection générale des finances, nous disposerons du calendrier d'évaluation de ces niches.
L'amendement no 20 est retiré.
Nous proposons, au travers de celui-ci, que « Le Gouvernement présente, sous forme d'annexe générale au projet de loi de règlement de l'année, un document présentant la décomposition entre évolution spontanée des recettes fiscales et impact des mesures prises sur les comportements. »
L'exemple pris dans l'exposé sommaire est celui de la flat tax, sur lequel nous avions déjà échangé. Je vous avais, monsieur le ministre, un peu harcelé au sujet de son évaluation, de son montant et de l'effet d'aubaine qu'elle pouvait susciter sur le chiffrage annoncé, c'est-à-dire un coût de 1,5 milliard d'euros. Maintenant qu'une année a passé, qu'en a-t-il été ? Quelle est la part relevant d'un effet normal, structurel et prévisible de cette flat tax et quelle est la part relevant d'un effet d'aubaine ?
Nous souhaitons cette décomposition afin de disposer d'une meilleure évaluation et d'une meilleure visibilité des mesures que vous prenez contre la volonté du groupe La France insoumise. Il faut vraiment que nous puissions disposer, à la fin, de chiffrages qui soient plus précis.
Votre demande constitue le pendant de celle que vous avez formulée tout à l'heure, qui correspondait au tome II « Évaluation des voies et moyens », puisqu'elle renvoie, cette fois, au tome I. En fait, vous demandez que ce dont nous disposons dans le cadre du projet de loi de finances soit également disponible pour le projet de loi de règlement.
Je vous signale qu'en pratique, mon rapport sur le projet de loi de règlement comporte une analyse et une synthèse de l'ensemble des notes d'exécution budgétaires de la Cour des comptes. Cette synthèse comporte précisément les données dont vous venez de solliciter la communication. Votre amendement est donc satisfait par mon rapport, dont la simple lecture vous fournira l'analyse dans la loi de règlement des conséquences du tome I « Évaluation des voies et moyens ». J'en demande le retrait.
J'en conclus donc que, là, maintenant, vous sauriez m'expliquer quelle part de la flat tax relève de son effet prévu et prévisible et quelle part relève de l'effet d'aubaine.
L'amendement no 21 n'est pas adopté.
Vous ne pourrez pas lui opposer le même argument que celui dont vous avez usé à propos des précédents. J'ai bien farfouillé dans Budgetek, et à moins qu'un coin ou un recoin de cette application m'ait échappé, je n'ai pas trouvé les documents de politique transversale qui m'intéressent – nous en avons parlé tout à l'heure à propos de la création d'un de ces DPT.
Il se trouve que je me suis intéressé, ces derniers temps, à des histoires de délinquance financière. Il existe un DPT portant sur une partie de cette dernière, qui est la fraude fiscale. Il s'agit du DPT le plus rigolo, car il est transversal à un seul ministère, c'est-à-dire qu'il n'implique que deux directions de Bercy – cela, c'est pour la petite histoire, pour faire sourire ceux qui en ont encore envie sur ce type de sujets et à cette heure.
Je me suis dit que la loi de règlement était peut-être le moment opportun pour faire le point, pour l'année 2018, en matière de politique transversale, sur un sujet qui intéresse beaucoup de personnes dans l'hémicycle, à tout le moins les membres des groupes de la Gauche démocrate et républicaine et de La France insoumise. Nous avons, en effet, mené des travaux sur ce sujet à part entière. Et là, patatras ! Je n'ai rien trouvé, puisque, par principe, les jaunes budgétaires ne sont pas suivis dans le cadre des lois de règlement. Ils ne sont présentés qu'au moment de l'examen des lois de finances initiales, en vue de bâtir des prévisions. Et c'est à ce moment-là que nous pouvons nous voir communiquer des éléments sur l'exécution budgétaire de l'exercice n-1.
Par conséquent les DPT échappent au découpage classique entre les projets annuels de performance et les rapports annuels de performance que nous prenons en ce moment-même pour cadre de nos discussions. C'est dommage, car, du coup, il n'existe pas de commission élargie portant sur ces mêmes DPT, ni de discussion préalable en commission, puisqu'ils ne sont pas examinés.
Toute cette réflexion est née d'une frustration personnelle en matière de fraude fiscale, mais elle pourrait concerner la sécurité routière ou la politique de la ville, c'est-à-dire tous les DPT que nous connaissons. Je pense qu'il serait utile que l'on puisse respecter, concernant ces documents, ces deux étapes que sont la loi de règlement et la loi de finances.
En ce moment, dans tout l'hémicycle, on se prend d'amour pour les DPT. Je ne sais pas ce qui s'est passé à leur sujet au moment du printemps !
Sourires.
Votre demande ne porte pas seulement sur le DPT relatif à la fraude fiscale mais sur tous : vous voulez que leur publication soit anticipée au stade du projet de loi de règlement.
Très honnêtement, je pense que ce n'est pas le sujet. Ce qu'il faut d'abord, c'est améliorer la qualité des informations qui nous sont fournies, et pas forcément en augmenter la quantité – la quantité peut nuire à la qualité.
Je comprends que vous ayez ressenti une frustration, car le projet de loi de règlement ne relève pas d'une logique privilégiant une politique d'évaluation – c'est notamment le cas des CEPP – , et c'est encore plus vrai aujourd'hui. Mais il s'agit précisément du travail des rapporteurs spéciaux, qui doit être mis en avant. Il me semble préférable que les DPT soient fournis au stade du projet de loi de finances, c'est-à-dire au moment où l'on décide. Qui plus est, cela présente l'avantage de laisser plus de temps à l'administration pour les rédiger et pour disposer d'informations cohérentes.
Je demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, l'avis de la commission sera défavorable.
Nous avons dû mal nous comprendre, ou alors l'amendement n'est pas suffisamment bien rédigé, ce qui est une possibilité – chacun peut progresser.
Son esprit est le suivant : un DPT ressemble tout de même vachement à un projet annuel de performance, sauf qu'il compile des données issues de différents PAP dans un seul document traitant d'une seule politique publique, qui peut être portée par plusieurs ministères. Or le réalisé de l'année n-1, c'est-à-dire ce que l'on voit lors de l'examen de la loi de règlement, nous n'y avons accès qu'au moment de l'examen du projet de loi de finances où le DPT suivant est porté à notre connaissance.
Ce que je souhaite, c'est qu'au moment de l'examen de la loi de règlement, on puisse connaître le réalisé – juste ce qui a été fait, pas ce qui va être fait l'année suivante, qui relève de la loi de finances – de l'année n-1, qui porte sur le DPT que l'on a voté en loi de finances.
En d'autres termes, qu'il y ait le même parallélisme entre PAP et RAP sur les documents de politique transversale – ça ressemble sûrement à du javanais, mais peut-être pas pour ceux qui suivent un peu les débats budgétaires. Il n'y a pas d'information sur les DPT dans les notes d'évaluation budgétaire, pas de rapporteur spécial pour les DPT nommé au moment de la loi de règlement puisque, dans le cadre du printemps de l'évaluation, c'est une équivalence avec les rapporteurs spéciaux qui a été institué pour la loi de règlement.
Peut-être que je suis trop gourmand et que je demande trop d'informations. Néanmoins, celles-là pourraient nous être utiles pour avoir le même suivi en deux temps que sur d'autres sujets que nous suivons lors de l'examen du projet de loi de finances.
L'amendement no 22 n'est pas adopté.
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2018.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 46
Nombre de suffrages exprimés 45
Majorité absolue 23
Pour l'adoption 32
Contre 13
Le projet de loi est adopté.
Prochaine séance, ce matin, à neuf heures trente :
Suite de la discussion de la proposition de loi visant à rétablir le pouvoir d'achat des Français ;
Discussion de la proposition de loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité intérieure ;
Discussion de la proposition de loi relative à la programmation du rattrapage et au développement durable de Mayotte ;
Discussion de la proposition de loi visant à développer l'accueil familial des personnes âgées et handicapées ;
Discussion de la proposition de loi relative à plusieurs articles de la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique.
La séance est levée.
La séance est levée, le jeudi 20 juin 2019, à minuit et demie.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Serge Ezdra