La commission a poursuivi l'examen du projet de loi relatif à l'énergie et au climat (nos 1908 et 2032) (M. Anthony Cellier, rapporteur).
Madame la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, je vous souhaite la bienvenue.
Après l'article 3
La commission est saisie des amendements identiques CE615 de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, CE266 de M. François-Michel Lambert et CE533 de M. Matthieu Orphelin, qui font l'objet du sous-amendement CE719 du Gouvernement,
La rénovation énergétique des bâtiments est un levier majeur de lutte contre le réchauffement climatique : les bâtiments représentent 45 % de notre consommation d'énergie et 25 % de nos émissions de gaz à effet de serre.
Mme la secrétaire d'État parlera tout à l'heure de toutes les mesures qui existent déjà pour rénover les bâtiments. Pour notre part, nous avons souhaité vous présenter des amendements qui permettent de lutter contre la précarité énergétique tant sur le plan environnemental que sur le plan social.
L'amendement CE615 vise à intégrer un critère de performance énergétique dans les critères de définition d'un logement décent, de façon que des logements très précaires et très consommateurs d'énergie qui mettent leurs occupants en difficulté financière soient considérés comme indécents. Le décret « décence » permet de mieux protéger le locataire dans sa relation avec le propriétaire lorsque le logement n'offre pas toutes les qualités de confort, de saisir in fine un juge, et de revendiquer des loyers amoindris et des dommages et intérêts.
À tout seigneur tout honneur, je précise que l'amendement CE266 nous a été suggéré par la grande organisation de collectivités intervenant dans le secteur environnemental, AMORCE, qui dispose de vrais professionnels dans le domaine de la précarité énergétique et qui a réalisé un bon travail en la matière.
À l'origine, nous souhaitions déposer des amendements visant à interdire purement et simplement les passoires thermiques, car malgré les aides importantes attribuées aux propriétaires, rien ne bouge et certains biens mis en location sont dans un état scandaleux. Mais à la réflexion, interdire les passoires thermiques entraînerait ipso facto la question du relogement de centaines de milliers, voire de millions de personnes très mal logées dans notre pays.
La loi du 17 août 2015 relative à la transition écologique pour la croissance verte (LTECV) a introduit dans les critères de définition d'un logement décent ouvert à la location un critère de performance énergétique – nous étions quelques-uns à soutenir ce dispositif. Toutefois, le décret d'application de cette loi apparaît peu opérationnel : plutôt que de fixer un seuil de performance énergétique indiquant une consommation maximale par kilowattheure par mètre carré et par an, il fixe plusieurs critères flous et partiels.
L'objectif de notre amendement est de rendre systématique la rénovation des logements les plus énergivores destinés à la location en introduisant un seuil maximum de consommation énergétique par mètre carré et par an. Ces obligations et contraintes permettraient vraiment d'avancer en matière de rénovation thermique des passoires.
La question de la rénovation énergétique est sûrement au coeur du présent projet de loi. Plus de 6 millions de Français ne parviennent plus à se chauffer correctement, parce que les factures sont trop élevées du fait de la mauvaise isolation des logements. Mon amendement CE533 vise à préciser les critères de définition d'un logement décent en intégrant un critère de performance énergétique, tout comme il existe déjà des critères tels qu'une surface minimale de neuf mètres carrés, la qualité sanitaire, l'eau potable, etc.
Je ne suis pas du tout fan du sous-amendement du Gouvernement qui propose de se baser sur les consommations finales et non primaires, mais cette mesure est peut-être secondaire par rapport à celle de l'adoption d'une nouvelle définition des logements décents.
Le Gouvernement soutient le principe d'intégrer un critère chiffré de performance énergétique dans les critères de définition d'un logement décent afin de fixer de manière précise le niveau de performance à atteindre pour louer un logement.
Cette mesure n'a pas vocation à considérer l'intégralité des passoires thermiques, donc les étiquettes F ou G, comme des logements indécents, eu égard aux conséquences fortes qu'emporte cette qualification de logement indécent, mais il s'agit de viser, au travers des critères de décence, les logements les plus énergivores au sein de la classe G, par exemple ceux qui consomment au-dessus de 600 à 700 kilowattheures d'énergie finale par mètre carré et par an – j'y reviendrai puisque c'est l'objet du sous-amendement CE719. Ces niveaux correspondent à des factures énergétiques qui représentent 1,8 parfois 2 fois la facture énergétique moyenne des ménages. Cette mesure toucherait de l'ordre de 200 000 à 400 000 logements, selon les données issues de la base PHEBUS dont nous disposons.
Le sous-amendement CE719 proposé par le Gouvernement, qui est bien évidemment favorable à l'amendement CE615, vise à se baser sur les consommations d'énergie finale disponibles dans le diagnostic de performance énergétique (DPE) du logement, parce que ce sont les données qui importent concrètement le plus aux locataires, contrairement aux données d'énergie primaire.
Le premier alinéa de l'article 6 de la loi du 6 juillet 1989 prévoit déjà qu'un décret en Conseil d'État définit le critère de performance énergétique minimale à respecter et un calendrier de mise en oeuvre échelonnée. L'amendement CE615 sous-amendé permettrait de le préciser et de faire entrer la consommation énergétique dans les critères de décence. Le Gouvernement envisage une entrée en vigueur de ce dispositif au 1er janvier 2022 afin de laisser un délai raisonnable aux propriétaires pour anticiper l'obligation et réaliser les travaux, et aux professionnels du secteur du bâtiment de s'approprier le nouveau cadre de diagnostic de performance énergétique. Un tel dispositif pourrait être progressif, avec un seuil qui diminuera au cours du temps, au fur et à mesure que la dynamique des travaux aura été enclenchée dans la France entière.
Je rappelle tout d'abord que le coeur du projet de loi est l'urgence climatique et écologique. La rénovation contribue à apporter des solutions à cet enjeu.
Ces amendements sont très utiles pour améliorer les logements les plus dégradés. Je suis donc favorable à l'ensemble de ces amendements ainsi qu'au sous-amendement du Gouvernement qui cible les logements indécents les plus dégradés.
Le sujet est plus qu'important puisqu'il s'agit des passoires thermiques. Ce sont souvent des logements qui sont loués par des marchands de sommeil – des bailleurs indélicats, pour utiliser une expression plus sympathique.
Le décret « décence » fait appel à une notion d'insalubrité ou d'insécurité physique d'un logement. Fixer un critère de performance énergétique renvoie à l'insécurité économique dans laquelle les propriétaires plongent les locataires. En cas de contrôle ou dans le cadre du règlement sanitaire départemental et ce fameux décret « décence », ce dispositif peut permettre aux maires d'ordonner des travaux aux propriétaires. C'est donc une avancée.
Y a-t-il des logements sociaux qui seraient concernés par la mesure parmi les 200 000 à 400 000 logements dont fait état l'enquête PHEBUS ? Par ailleurs, les dispositions prévues dans ces amendements concerneront-elles aussi le logement social ?
Je suis ravie que l'on puisse s'accorder sur le fait que la consommation d'énergie d'un logement soit un critère de définition d'un logement décent. Cela permettra de lutter contre la précarité énergétique, certains ayant des difficultés pour se chauffer, et pour l'avenir de la planète, donc du climat.
Le sous-amendement vise à se baser sur les consommations d'énergie finale mentionnées dans le DPE, ce qui fait que dans le même temps on aura pour une même étiquette énergétique des logements qui seront considérés pour certains indécents et pour d'autres décents. Cela pose un problème de lisibilité pour les gens.
L'exposé sommaire du sous-amendement fait état de 600 à 700 kilowattheures d'énergie finale, ce qui emmène au-delà de l'étiquette G. Si je comprends qu'il faille commencer par le bas et remonter progressivement, je crains que cette mesure ait une portée trop faible par rapport aux attentes de nos concitoyens.
Je suis contre le sous-amendement du Gouvernement. S'agit-il de considérer comme décents des logements équipés de « grille-pain » particulièrement énergivores ?
Je suis plutôt favorable à ce que le DPE soit basé sur la consommation d'énergie finale qui concerne la réalité de la consommation. Par contre, l'exposé sommaire fait état de logements au-delà de 600 à 700 kilowattheures, ce qui correspond à des habitations sans portes ni fenêtres ! On ne peut pas parler de chiffres de cet ordre-là. C'est proprement catastrophique.
Lorsque l'on est sur des niveaux de 300 à 400 kilowattheures, on atteint déjà des factures d'électricité énormes. Au-delà de 600 à 700 kilowattheures, on a affaire à un taudis, il n'y a pas d'autre mot.
Madame de La Raudière, la mesure sera bien applicable aux logements sociaux : le décret s'appliquera à tout type de logement, quel que soit le bailleur, y compris les bailleurs sociaux. Il existe probablement assez peu de logements qui atteignent ce niveau-là chez les bailleurs sociaux car ils se sont lancés depuis longtemps dans de grosses opérations de rénovation, avec des volumes importants. Si l'on fixe cette obligation à compter de 2022, il est probable qu'à cette date il n'y en aura plus ou quasiment plus chez les bailleurs sociaux.
Le sous-amendement ne propose pas d'inscrire dans la loi le niveau de 600 à 700 kilowattheures. Il s'agit de montants indicatifs de seuils. On fixera un seuil en énergie finale – j'y reviendrai. L'idée est de partir des situations les plus scandaleuses. Selon l'enquête PHEBUS, de 200 000 à 400 000 logements seraient concernés. J'ai rencontré récemment une famille dont le logement était mal chauffé malgré une facture d'électricité de 400 euros par mois et une facture de fioul de 400 euros par mois. De tels cas existent, mais ce n'est heureusement pas la majorité. Les bons niveaux seront fixés par voie réglementaire.
Quant à la différence entre l'énergie finale et l'énergie primaire, je rappelle que l'énergie finale est la facture, c'est-à-dire ce qui pèse sur les individus, donc ce qui leur parle. Je présenterai ultérieurement un amendement qui propose que le nouveau DPE figure à la fois en énergie primaire et en énergie finale pour que les deux critères soient connus. Cela permettrait, à partir du même DPE, de tirer des conséquences, y compris pour le décret « décence » sans avoir l'impression d'avoir deux types de DPE, et d'avoir la totalité des informations dans le DPE lui-même.
Je voudrais revenir sur le caractère juridique de la mesure : on m'a toujours dit que le DPE n'était pas opposable juridiquement.
Il le sera à partir du 1er janvier 2021.
Je suis dubitatif sur le fait de mentionner dans le DPE à la fois l'énergie primaire et l'énergie finale. Je ne suis pas certain que cela évoque quelque chose au grand public. Si l'objectif est de développer une forme de sensibilité à la question de la précarité énergétique, ne faudrait-il pas réfléchir à un élément plus parlant pour nos concitoyens ?
Je veux tout d'abord remercier le Gouvernement pour ce dispositif qui constitue une belle avancée. Intégrer un critère de performance énergétique très précis afin de cibler les logements qui doivent être rénovés pour être loués et le niveau de performance atteint n'est pas anodin. Toutefois, j'appelle votre attention sur le fait qu'il n'est pas non plus anodin de remplacer le critère d'énergie primaire par le critère d'énergie finale, car cela va donner un coup de fouet au chauffage électrique et bouleverser ipso facto les catégories de logement, notamment les plus énergivores. C'est un premier pas intéressant. J'aurais souhaité que l'on en reste à l'énergie primaire, car cela va accélérer les équipements électriques dans les logements.
Madame la secrétaire d'État, il est indiqué dans l'exposé sommaire du sous-amendement que le dispositif entrera en vigueur le 1er janvier 2022, laissant un délai raisonnable au propriétaire pour réaliser les travaux. Or, 2022, c'est dans trois ans. Si le propriétaire a besoin de recourir à un prêt pour financer ses travaux et qu'il veut être ambitieux, cette ambition ne sera pas au rendez-vous. Si le remboursement du prêt est de 100 à 200 euros par mois pendant trois ans, il pourra faire de 3 000 à 4 000 euros de travaux, ce qui permettra seulement de changer la chaudière.
La date de 2022 est un signal pour pouvoir enclencher les travaux, sachant qu'ils s'amortissent en plus de trois ans.
La commission adopte le sous-amendement.
Puis elle adopte les amendements identiques, ainsi sous-amendés.
La commission examine, en discussion commune, les amendements CE536 et CE538 de M. Sacha Houlié, et l'amendement CE582 du Gouvernement.
Les amendements CE536 et CE538, préparés avec M. Colas-Roy, concernent l'opposabilité du diagnostic de performance énergétique. Nous allons d'ores et déjà retirer notre premier amendement qui est, je l'ai compris, trop ambitieux à ce stade, et qui vise à opposer le diagnostic de performance énergétique lors de la révision du loyer qui a lieu sur le fondement de l'indice de référence des loyers (IRL). Nous proposions qu'il ne soit pas possible d'augmenter le loyer si le logement n'était pas performant au plan écologique.
L'amendement CE538 propose, quant à lui, de ne pas réévaluer à la hausse le loyer lors du renouvellement du bail – qui a lieu tous les trois ans pour un bail d'habitation non meublée – si c'est une passoire thermique. Il s'agit d'un dispositif complémentaire et non orthogonal de tous ceux qui ont été développés. Le locataire qui habite dans une passoire énergétique ne peut pas subir une double sanction : une consommation énergétique importante et une augmentation du loyer.
L'amendement du Gouvernement tire en partie les conséquences de ce que nous défendons.
L'amendement CE582 vise à conditionner la révision du loyer, en cas de travaux, à l'atteinte d'au moins la classe E.
À compter de 2021, la loi du 6 juillet 1986 prévoit qu'il faut effectuer un minimum de travaux pour pouvoir réviser le loyer. Toutefois, ces travaux ne mentionnent pas les travaux de performance énergétique. Les modifications apportées conditionnent la révision du loyer, en cas de travaux, à l'atteinte d'un certain niveau de performance énergétique, afin que les locataires de logements ayant une consommation énergétique primaire supérieure à 331 kilowattheures par mètre carré et par an ne subissent pas à la fois des dépenses énergétiques très élevées, en tout cas plus élevées que la moyenne, et une révision significative de leur loyer.
Je veux tout d'abord remercier M. Houlié pour les échanges forts intéressants et enrichissants que nous avons eus sur ce sujet. Le travail qu'il a fourni dans un laps de temps très bref est considérable. Cela étant, le dispositif qu'il propose comporte encore des failles. Je lui demande donc de retirer l'amendement CE536 et de le retravailler d'ici à la séance publique.
Je suis favorable à l'amendement du Gouvernement.
Je demande le retrait des amendements CE536 et CE538 au profit de l'amendement du Gouvernement.
Avant de retirer mes amendements, je souhaite apporter trois précisions.
Premièrement, il s'agit d'une démarche citoyenne puisque ces propositions sont issues du Grand débat national et qu'elles figurent dans la contribution de La République en Marche. J'y suis particulièrement attaché, en tant que membre du bureau exécutif de ce mouvement.
Deuxièmement, ces solutions ont reçu un avis très favorable de la quasi-totalité des acteurs qui travaillent dans le cadre du plan Bâtiment durable. À ce titre, elles méritent donc une attention particulière.
Troisièmement, je présenterai une nouvelle rédaction de ces amendements en séance publique. Si on ne parvient pas à convaincre la majorité de nos collègues, je vous indique d'ores et déjà que je continuerai à travailler sur ce dossier, y compris par la voie d'une proposition de loi que je souhaite ensuite voir soutenue par mon groupe.
Les amendements CE536 et CE538 sont retirés.
On comprend bien l'objectif de l'amendement du Gouvernement ; je tiens à remercier nos collègues Sacha Houlié et Jean-Charles Colas-Roy pour leur amendement qui est clair, net et compréhensible. J'espère que nous pourrons y revenir en séance publique et l'adopter.
L'amendement de M. Houlié avait l'avantage de prévoir une clause de révision du loyer chaque année, une révision automatique du loyer. On aurait pu introduire un dispositif empêchant le bailleur d'augmenter automatiquement le loyer lorsqu'il n'a pas réalisé des dépenses énergétiques.
L'amendement du Gouvernement fait état d'une consommation énergétique primaire, alors que l'on vient d'adopter un amendement qui évoque la consommation énergétique finale. Pour la bonne compréhension des agents du secteur, il conviendrait que le législateur harmonise les termes employés dans la loi, sinon les indicateurs et les critères seront mesurés avec des unités différentes. Cela fait le bonheur des juristes, des avocats et des « sachants », mais le malheur des citoyens.
L'amendement de M. Houlié cosigné par M. Colas-Roy montre à quel point les sujets sont complexes en la matière. Nous sommes tous en train de rechercher la bonne méthodologie pour lutter contre les passoires thermiques. Je comprends que les auteurs de l'amendement le retirent tout en souhaitant pouvoir continuer à en discuter avec le Gouvernement.
La commission adopte l'amendement CE582.
Elle en vient à l'amendement CE444 de Mme Delphine Batho.
L'article 5 de la LTECV est déjà très ambitieux ; votre amendement cherche à le rendre encore plus ambitieux, ce qui est très louable et que je mets à votre crédit. Mais, comme vous le savez, nous avons pris du retard en matière de rénovation énergétique, ce que je ne peux que déplorer. Ces objectifs apparaissent donc difficilement atteignables.
Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement. À défaut, j'y suis défavorable.
Le Gouvernement partage bien évidemment l'objectif de la fin des passoires énergétiques et les outils permettant de rénover les passoires à l'occasion des mutations sont à développer. Le dispositif de consignation prévu à l'amendement CE527, qui sera examiné ultérieurement, semble mieux à même d'atteindre l'objectif recherché en fixant des règles opérationnelles et précises.
Je vous propose donc de retirer cet amendement au profit de l'amendement CE527. À défaut, j'y serai défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle est saisie, en discussion commune, des amendements CE378 de M. François Ruffin, CE212 de M. Jean-Louis Bricout, des amendements identiques CE623 de la commission du développement durable et CE524 de M. Matthieu Orphelin, et de l'amendement CE522 de M. Matthieu Orphelin.
L'amendement CE623 fait l'objet du sous-amendement CE709 de M. Loïc Prud'homme.
L'amendement CE378 prévoit que la location de tout bien immobilier dont la consommation en énergie primaire est supérieure à 330 kilowattheures par mètre carré et par an est interdite. L'objectif est bien de lutter efficacement contre les passoires énergétiques.
Afin de lutter rapidement contre la précarité énergétique, l'amendement CE212 vise à interdire la mise en location ou le renouvellement de baux locatifs dont le DPE fait apparaître une consommation énergétique supérieure à 330 kilowattheures d'énergie primaire par mètre carré. Il s'ensuivrait une obligation de mise en conformité sous trois mois, sous peine d'une amende de 100 euros par jour de retard au bénéfice de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH).
Le dispositif paraît plutôt coercitif, mais il n'exclut pas les propriétaires de bonne foi du bénéfice des dispositifs d'aide à la rénovation de droit commun en vigueur.
Cet amendement, adopté en commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, vise à rappeler les engagements que nous avons pris par le passé. En 2015, nous avions annoncé la fin des passoires thermiques d'ici à dix ans, objectif réaffirmé lors de la campagne présidentielle.
Le dispositif que nous proposons vise à montrer à quel point cet objectif est ambitieux mais néanmoins important parmi nos objectifs climatiques finaux. Il introduit dans le même temps une distinction qui nous semble importante entre zones tendues et zones détendues, qui doivent être traitées selon nous de manière différente. Les dates que nous proposons, même si elles doivent nous mettre en face de nos responsabilités vis-à-vis des ambitions de rénovation énergétique et des moyens que nous mettons en oeuvre pour atteindre ces résultats dans des temps très courts, ne pourront probablement pas être respectées en l'état. Mais, elles font référence à des propos qui ont été tenus et sur lesquels nous nous sommes tous engagés. Aujourd'hui, force est de constater que nous n'avons pas encore le niveau nécessaire d'engagement sur la rénovation énergétique qui permette de les atteindre. En fait, nous lançons une alerte collective pour que nous puissions relever le défi ensemble.
Pour de nombreux foyers, les factures énergétiques représentent de 10 à 20 % des dépenses mensuelles. Il faut donc lutter contre la précarité énergétique.
Le programme d'Emmanuel Macron comprenait effectivement des engagements très forts : il visait la rénovation de la moitié des logements passoires dès 2022 ; il est écrit en toutes lettres que les passoires énergétiques seront interdites de location à compter de 2025, et que cette mesure sera couplée à une aide pour les propriétaires non occupants qui ne pourraient pas faire les travaux. Enfin, il était prévu de mettre en place à cette fin un fonds public pour prendre intégralement en charge les travaux des propriétaires les plus précaires, avec un remboursement au moment de la vente du bien.
Cet amendement, adopté en commission du développement durable, avait fait l'objet d'un sous-amendement que j'avais défendu qui prévoyait que ces dispositifs financiers soient très clairement inscrits pour aider les propriétaires non occupants qui n'ont pas les moyens de réaliser des travaux. Plutôt qu'une interdiction sèche, comme certains aimaient à le caricaturer, nous avons prévu que soit créé un fonds afin d'aider les propriétaires non occupants à faire les travaux.
Je suis favorable à ce que ce dispositif s'applique dans un premier temps aux zones tendues, puis en 2028 aux autres zones.
L'amendement CE522 vise à commencer par rénover les logements classés G, de manière à étaler un peu plus l'effort dans le temps.
L'amendement présenté par M. Ratenon ne comporte pas de date, ce qui veut dire que l'obligation serait effective dès lors la promulgation de la loi. Je vous laisse imaginer l'effet que cela aurait sur le marché et sur la mise à disposition des biens de location… Cela me paraît du reste poser un problème de constitutionnalité.
Quant à l'échéance de temps prévue dans l'amendement CE212, elle est extrêmement courte.
Cela fait deux ans que Mme Meynier-Millefert est particulièrement investie sur le sujet de la rénovation et ses conseils, je le répète sans ambages, ont été précieux. Toutefois, je suis défavorable à son amendement CE623 car les notions d'interdiction sont à manipuler avec beaucoup de précaution.
M. Orphelin est tout aussi engagé que Mme Meynier-Millefert sur la question de la rénovation énergétique qui est au coeur de ce projet de loi. J'émettrai un avis défavorable sur ses amendements tout en le remerciant pour les discussions que nous avons pu avoir en privé.
Nous abordons un point très important dans cette discussion. Je vais donc prendre quelques instants pour présenter la vision du Gouvernement sur ce sujet.
Je commencerai par remercier tous les parlementaires qui ont proposé des amendements sur ce point. Nous partageons tous le même objectif : renforcer l'action sur la lutte contre les passoires énergétiques et atteindre les objectifs ambitieux que nous nous étions fixés dans la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte et que nous nous fixons à nouveau avec cette loi, puisque nous réaffirmons nos objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de consommation. Or les bâtiments représentent 45 % de notre consommation d'énergie et 25 % des émissions de gaz à effet de serre. Nous savons donc que le secteur du bâtiment est l'un des secteurs clés, peut-être le secteur le plus massif sur lequel agir pour pouvoir atteindre les objectifs que nous nous sommes tous fixé.
Environ 7,5 millions de logements sont des passoires thermiques, dont la moitié sont occupés par des ménages modestes. Nous sommes donc face à une urgence climatique et sociale. Toutefois, le Gouvernement souhaite agir de façon proportionnée en mettant en oeuvre des aides plus efficaces et mieux distribuées, de la transparence sur le marché, mais aussi, c'est inévitable, quelques contraintes pour permettre d'accélérer cette transition.
Un mot sur les aides même si elles ne sont pas mentionnées dans le texte – elles figureront dans la loi de finances qui sera présentée d'ici à quelques semaines. Il existe aujourd'hui deux aides principales : le crédit d'impôt – 30 % de la dépense en crédit d'impôt est versée postérieurement aux travaux avec un assez long décalage – et les aides de l'ANAH, au travers du programme « Habiter mieux » réservé aux ménages modestes, qui peuvent couvrir jusqu'à 50 % des travaux mais qui ne permettent de réaliser que 75 000 rénovations par an.
Nous allons transformer ces aides en une prime unique, bonifiée pour les ménages modestes, qui sera versée par l'ANAH au commencement des travaux. Cette aide, si on y ajoute les aides rénovation globale de l'ANAH, représente déjà 1,2 milliard d'euros chaque année, mais il faut que les ménages modestes y aient mieux accès. Pour ce faire, nous allons continuer à utiliser les certificats d'économie d'énergie. Nous nous sommes battus, avec M. François de Rugy, pour simplifier l'accès aux certificats d'économie d'énergie. On peut déléguer presque toutes les démarches aux opérateurs. Nous avons mis en place, avec le ministre d'État, des bonifications, notamment pour les combles et les chaudières, ce qui permet d'avoir accès à des travaux à 1 euro pour les ménages les plus modestes. Nous travaillons aussi sur l'éco-PTZ.
Le sujet de la distribution des aides, et donc de l'animation de la politique de la rénovation, est aussi extrêmement important. Comme vous le savez, nous travaillons actuellement à définir, notamment avec Mme Marjolaine Meynier-Millefert, le service public de l'efficacité énergétique de l'habitat. Ce service public avait été prévu par la loi de 2015 qui en avait fixé des contours relativement peu définis. Nous travaillons actuellement avec tous les acteurs pour avancer, trouver le plan de financement avec les régions et toutes les collectivités impliquées. En attendant, nous avons souhaité que l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) continue à soutenir les plateformes territoriales cette année, afin de ne pas créer de trous d'air.
Autre sujet qui revient trop souvent en matière de rénovation des logements et qu'il faut débloquer, celui des copropriétés. Nous montons actuellement un plan de rénovation des copropriétés, bien sûr, en coordination avec M. Julien Denormandie, qui maximisera, simplifiera les certificats d'économie d'énergie ainsi que le droit applicable à la rénovation dans les copropriétés. Une ordonnance sur les copropriétés est en cours d'élaboration avec la Chancellerie.
Dans le projet de loi, nous avons travaillé sur des mesures de transparence et d'obligations : rendre l'audit énergétique obligatoire lors des mutations à compter du 1er janvier 2022, améliorer l'information à la location en affichant clairement et en euros les frais de chauffage dans les annonces, enfin modifier la capacité de réviser les loyers entre deux locataires, avec l'obligation de faire des travaux pour atteindre au moins la classe E.
Nous avons également évoqué le sujet de la décence qui nous permettra de poser une obligation nouvelle au titre de la décence.
L'interdiction est évidemment tentante. D'ailleurs, elle figurait dans la loi relative à la transition écologique pour la croissance verte et dans le programme présidentiel à l'horizon 2025. Mais il me semble qu'il faut faire les choses dans l'ordre et que cette interdiction ne pourra être effective que lorsque les mesures précédentes auront été pleinement mises en oeuvre et produit leurs effets pour permettre de déverrouiller avec plus d'aides – des aides mieux distribuées, des aides plus efficaces – et la transparence du marché. Nous n'atteindrons pas un volume de croisière à la bonne vitesse d'ici à l'horizon 2025 ce qui supposerait de rénover plus d'un million et demi de passoires thermiques par an sur la période. Nous ne souhaitons pas non plus mettre en place un mécanisme qui deviendrait trop anxiogène pour les propriétaires, en particulier pour les propriétaires modestes. Il en existe, puisque parmi les propriétaires de passoires thermiques, certains sont des propriétaires occupants avec des revenus limités. D'autres sont des propriétaires bailleurs. On estime à environ 500 000 le nombre de ces propriétaires bailleurs eux-mêmes à revenus modestes qui mettent en location des passoires thermiques.
Nous allons donc avancer plutôt vers des mesures concrètes, rapides, qui produisent des effets au cours de ce quinquennat. C'est la raison pour laquelle, le Gouvernement est plutôt favorable à étudier la piste de la consignation qui sera discutée un peu tard. Cette consignation repose sur des mécanismes connus : une somme est retenue par les notaires, représentative soit du coût des travaux, soit d'un montant forfaitaire qui permet d'enclencher des travaux lorsqu'une passoire thermique est vendue ; le notaire ne la restitue au nouveau propriétaire que si les travaux sont effectués et permettent au logement de sortir de son statut de passoire. Ce système est finalement très similaire à ce qui s'est fait pour la mise aux normes de l'assainissement non collectif, qui fonctionne relativement bien dans ce secteur. Ce dispositif serait un énorme accélérateur des politiques de rénovation et il serait probablement plus proportionné, à ce stade, que l'outil d'interdiction. Il nous permettrait de faire probablement jusqu'à 100 000 rénovations de plus par an.
La position du Gouvernement est donc plutôt de privilégier la refonte des aides, l'amélioration du système, un plan pour les copropriétés, la focalisation des certificats d'économie d'énergie, les quelques mesures techniques d'amélioration du fonctionnement du marché, le décret « décence » et la consignation, et de n'en venir à l'interdiction seulement une fois qu'on se sera donné une chance de faire réussir toutes ces mesures.
Dans ces conditions, je suis défavorable aux amendements qui ont été présentés dans cette discussion commune.
Interdire les passoires thermiques est effectivement une solution séduisante ; depuis des années, on parle beaucoup mais on agit peu. Toutefois, en écoutant la réponse de Mme la secrétaire d'État, j'ai eu le sentiment qu'on ne voulait pas véritablement accélérer le mouvement et que l'on cherchait d'abord à tester tout l'arsenal existant avant d'en arriver à des mesures beaucoup plus contraignantes et coercitives. En fait, je crains que ce soit un moyen d'enterrer le dossier, tout en étant très sensible aux éléments que vous avez développés ; je crains aussi qu'un certain nombre de logements sortent du marché et basculent dans un marché gris ou un marché noir qui échappe à tout contrôle de ce secteur, sans compter évidemment l'impact pour les propriétaires modestes.
Vous avez esquissé une porte d'entrée sur une autre solution, ce qui me conduit à m'interroger sur le droit de propriété qui est bien malmené dans ce pays. Je ne sais pas dans quelle mesure ce que vous commencez à proposer n'est pas assez intrusif dans une relation qui reste contractuelle. Il serait donc intéressant d'en vérifier la constitutionnalité, même si le droit de propriété est assez mal protégé dans notre pays – j'en sais quelque chose pour avoir défendu une proposition de loi dans ce domaine.
Enfin, il nous manque une étude d'impact sur les mesures que vous proposez : le pire serait d'aboutir à l'inverse du résultat souhaité avec la sortie de milliers de logements du parc.
Madame la secrétaire d'État, nous sommes en contact depuis plusieurs semaines sur ce texte de loi ; vous avez également confié une mission à ma collègue Marjolaine Meynier-Millefert. Je connais aussi votre engagement auprès de M. Julien Denormandie pour trouver des solutions. Effectivement, nous sommes davantage attachés aux moyens qu'à l'interdiction. Il faut continuer à travailler car il est indispensable que ces mesures soient suivies d'effets. Je me propose donc de retirer l'amendement CE623.
L'amendement CE623 est retiré.
Monsieur le rapporteur, vous dites que le délai d'entrée en application de la mesure – il s'agit du 1er janvier 2021 – prévue dans l'amendement est beaucoup trop court. Mais celle-ci ne s'appliquera que lors de la mise en location ou du renouvellement du bail. Si le bail a été signé à la fin de 2020, on repart pour trois ans et le propriétaire peut mettre le logement en location et attendre avant de faire des travaux.
Madame la secrétaire d'État, vous souhaitez mettre en application toutes les mesures incitatives. Effectivement, quelques bonnes mesures permettent d'avancer sur le sujet. Ce que nous proposons, c'est une coercition douce puisque les gens bénéficieront des dispositifs d'accompagnement financiers.
Nous sommes face à un malentendu total. Relisez ce qui est indiqué dans le programme du Président Macron, et qui répond exactement aux arguments que vous avez mis en avant, Madame la secrétaire d'État. Nous avions pris l'engagement d'interdire la location des passoires énergétiques à compter de 2025. Mais ce n'est pas une interdiction pure et simple, puisqu'il est prévu qu'un fonds public prenne intégralement en charge les travaux des propriétaires les plus précaires, ceux qui n'ont pas les moyens de les réaliser, ce montant étant récupéré lors de la transaction du bien. Tels qu'ils sont rédigés, ces amendements me semblent répondre parfaitement à ce que vous avez dit. Le but n'est pas du tout d'embêter les propriétaires : s'ils n'ont pas les moyens de réaliser les travaux, nous avancerons intégralement leur montant grâce à ce fonds public qui est une innovation du projet que nous avons défendu. On avait identifié les blocages liés à une interdiction pure et simple – j'ai été rapporteur du Grenelle de l'environnement pour le volet de la rénovation énergétique. On s'était cassé la tête, avec tous les acteurs de la société civile et politique – je salue notamment M. Bertrand Pancher, qui y a participé ; on avait enfin une solution qui répond parfaitement aux critiques. Il ne s'agit pas de pénaliser les propriétaires, mais de les aider.
N'ayez pas peur des contraintes, Madame la secrétaire d'État, et ne vous en servez pas comme excuse. Le monde de demain sera fait de règles puissantes, s'appuyant sur nos valeurs, sans quoi ce sera la victoire des bandits et des truands, des riches contre les pauvres : ce n'est pas le monde que nous voulons. Le libéral que je continue à être n'a aucun problème pour dire que le monde est fait de règles. N'ayons pas peur des règles, notamment quand elles sont accompagnées de puissantes mesures d'incitation. Si des moyens sont prévus, pourquoi avoir peur des règles ? On ne peut pas penser que tout trouvera une solution tout seul, comme par enchantement.
Une partie de vos annonces me satisfait. S'il y a des moyens puissants, tant mieux. J'attire toutefois votre attention sur le fait que le problème, au cours de ces dernières années, n'est pas tant le manque de moyens que le yo-yo permanent – cela change tout le temps – et le refus constant de décentraliser, de faire confiance aux acteurs. Si on ne lâche pas du lest sur ce plan, cela ne marchera jamais.
Se pose enfin la question des contrôles. On en fait beaucoup, mais on contrôle quand même moyennement. Il faut regarder ce qui est livré partout. Si l'on se contentait d'appliquer les règles, pourtant peu contraignantes, qui ont été adoptées, on réaliserait déjà un grand pas en avant dans le domaine de la rénovation thermique.
J'ai bien entendu les explications de la secrétaire d'État. Je trouve que la question du tiers financement de la rénovation, soulevée par M. Matthieu Orphelin, est très importante. Je crois savoir que certaines régions ont imaginé des dispositifs en la matière. Ce ne sont pas des fonds, mais je crois que la Caisse des dépôts et consignations y est associée. Je pense qu'il serait utile que vous nous fassiez un point, au moins d'ici à la séance, sur le caractère opérationnel ou non de ces mesures : cela permettrait de juger s'il faut passer à une autre étape, telle que la création d'un nouveau fonds. C'est un vrai sujet.
Autre point, que j'ai déjà évoqué avec M. François de Rugy : nous avons un gros problème de communication. Le téléphone sonne dix fois par jour pour vous vendre une rénovation des combles ou vous demander si vous n'avez pas un problème avec votre facture d'électricité… Nous ne sommes pas audibles. Il faut traiter ce sujet, sinon tous les dispositifs que nous pourrons imaginer ne toucheront jamais leurs destinataires. C'est le problème du « dernier kilomètre », selon l'expression chère à la majorité.
Il y a un débat sur les limites du droit de propriété et l'incitation à réaliser des travaux. Je trouve vos propos, Madame la secrétaire d'État, plutôt empreints de bon sens. Vous avez fait référence à des dispositions qui fonctionnent, notamment en matière d'assainissement non collectif. Les arguments que j'ai entendus devraient nous rassurer en ce qui concerne l'amélioration des logements. Nous allons examiner d'autres amendements qui vont bien définir les choses. L'interdiction de louer ou de vendre est une mesure relativement violente. Certes, le Président de la République a pris des engagements dans le cadre de son programme, mais nous sommes le législateur : nous pouvons avoir notre propre opinion et notre propre conception des choses. Compte tenu du contexte, la bonne méthode est d'agir d'une manière beaucoup moins contraignante et violente pour les propriétaires, qu'ils soient occupants ou bailleurs.
En ce qui concerne la question du droit de la propriété et de la constitutionnalité, si l'on pense que la contrainte est possible sous la forme d'une interdiction, il me semble a fortiori que la consignation, dispositif beaucoup plus proportionnel dont l'objet, d'une certaine manière, est de mettre sous séquestre une partie du montant de la vente, ne posera pas de problème de constitutionnalité : le montant sera ensuite retransféré à l'acheteur, une fois les travaux réalisés. Mais il est tout à fait possible de s'en assurer. D'autres aspects plus techniques nécessiteront un peu de travail, mais je ne pense pas qu'il y ait un problème dans ce domaine.
Je ne crois pas que l'on puisse affirmer que l'interdiction est une coercition douce. Le débat, tel qu'il a été posé, porte sur la place de la contrainte et sur ses modalités. Je l'ai dit : il faut trouver un mélange d'incitation et de contrainte. Le Gouvernement n'est pas opposé par principe à la contrainte : lorsque l'on introduit un critère de performance énergétique dans le décret relatif au logement décent, c'est bien une contrainte : des logements qui pouvaient être loués auparavant ne pourront plus l'être, pour des raisons liées à la décence. Si on met en place la consignation, ce sera aussi une forme de contrainte : on imposera au vendeur de réserver une partie du prix de vente pour des travaux qui devront être réalisés par l'acheteur. La question n'est donc pas d'avoir peur ou non de la contrainte, mais de faire en sorte que celle-ci soit la plus proportionnée et la plus efficace possible.
Pour l'instant, tous les mécanismes de tiers financement et de fonds ne sont pas encore opérationnels. Le tiers financement existe. J'ai rencontré un certain nombre de sociétés qui y participent – je pense notamment à Île-de-France Énergies et à Oktave, dans le Grand-Est. Il en existe quelques autres, mais les mécanismes sont plutôt de faible ampleur pour l'instant. Les tours de table ne fonctionnent pas toujours, notamment du côté du secteur bancaire privé. Les institutions bancaires ne sont pas toutes au rendez-vous quand il est question de financement de long terme. La Caisse des dépôts et consignations ne prête pas aux particuliers, pas plus que la Banque des territoires. Les quelques grandes banques qui le faisaient, comme le Crédit foncier, y ont renoncé, pour des raisons diverses et variées. Le mécanisme existe, il est prometteur, mais il faut le retravailler, en particulier pour le plan de rénovation des copropriétés, qui s'y prête particulièrement si on veut avoir un financement applicable à la totalité d'une copropriété.
Nous en viendrons peut-être un jour à une interdiction, mais ce sera une contrainte forte, et il ne faudra l'instaurer que si l'on est capable de proposer une solution. Il me semble que nous avons aussi compris, depuis la campagne présidentielle, que les interdictions sans solution alternative sont plutôt une impasse. Nous souhaitons, en cet acte II du quinquennat, tirer les leçons de la période précédente.
Je voudrais vraiment souligner la grande différence d'analyse qui existe entre nous. Même s'il y a des clivages idéologiques, ce qui est proposé – et figurait dans le programme que nous avons défendu – est tout sauf une interdiction sans solution. La solution est une avance, jusqu'à 100 % du montant des travaux, pour les propriétaires qui n'ont pas les moyens d'avancer les frais.
Je voudrais réagir aux propos de M. Mattei et de Mme la secrétaire d'État en ce qui concerne la coercition et l'atteinte au droit de propriété. Il faut quand même bien voir à qui on a affaire. J'ai été maire d'une ville infestée de marchands de sommeil. Leur technique est simple : ils achètent des biens pas très cher, en général, et le principe est de profiter de la fragilité des gens et du système en se faisant payer par la Caisse d'allocations familiales. Ils se moquent complètement des travaux à réaliser. Je ne suis donc pas sûr que des mesures incitatives – il en existe déjà – amèneront ces gens à entrer dans le jeu.
Ce débat est vraiment important, et je pense qu'il est bien d'y passer un peu de temps. À ce stade, les amendements proposés reviennent à instaurer une interdiction, Monsieur Orphelin : la partie relative au fonds n'est pas montée, et il y a encore beaucoup de travail pour arriver à mettre en place les financements mutualisés qui permettront de réaliser massivement des opérations de rénovation.
Le décret « décence », Monsieur Bricout, devrait régler le problème des marchands de sommeil à mesure que l'on augmentera le seuil prévu. Les 200 000 ou 400 000 logements dont il est question – ce sont vraiment les pires passoires thermiques – sont typiquement ceux loués par des marchands de sommeil. Le décret va permettre de les « attraper », et nous allons augmenter progressivement le seuil.
L'idée était que l'interdiction ne doit jamais être mise en oeuvre, c'est-à-dire que l'on doit faire tout ce qu'il faut, d'ici à la date de son entrée en vigueur, pour qu'elle n'ait jamais besoin d'être utilisée. L'interdiction ne doit constituer qu'une voiture-balai pour des gens résolument récalcitrants, pour de mauvaises raisons. Je comprends bien qu'une interdiction puisse être anxiogène, qu'il peut y avoir un problème, et nous pouvons réfléchir à une obligation de travaux plutôt qu'à une interdiction de location. Nous pouvons y travailler encore d'ici à la séance.
Je voudrais juste dire à nos collègues que la majorité connaît bien le contenu du programme présidentiel, puisque nous l'avons défendu pendant la campagne pour les élections législatives. Nous sommes dans une situation où nous cherchons des solutions justes pour nos concitoyens. Il ne s'agit pas d'un renoncement. Comme la secrétaire d'État l'a expliqué, nous avons un rendez-vous en septembre dans le cadre du PLF ; à nous de prévoir les moyens nécessaires, de les définir clairement et de les expliquer aux Français. C'est ainsi que nous arriverons à lutter contre les passoires thermiques. Souvenez-vous de ce qui s'est passé quand on a voulu créer des aides pour que nos concitoyens puissent acheter des voitures de plus en plus propres. Il faut savoir tirer les leçons du passé.
La commission rejette successivement les amendements CE378 et CE212.
Elle rejette le sous-amendement CE709, puis l'amendement CE524.
Elle rejette enfin l'amendement CE522.
Ensuite de quoi, elle examine, en discussion commune, l'amendement CE160 de M. Matthieu Orphelin et les amendements identiques CE41 de la commission du développement durable et CE520 de M. Matthieu Orphelin.
L'amendement CE160 est défendu.
Je voudrais revenir sur une annonce faite par la secrétaire d'État – je ne voulais pas que l'on mélange les débats – de la transformation du crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE) en prime : cette mesure va dans le bon sens, et il est très bien que cet engagement se concrétise. Je voudrais seulement être sûr que le montant prévu pour le CITE sera maintenu à cette occasion, voire augmenté.
L'amendement CE41 concerne la méthodologie de calcul et d'évolution du coefficient d'énergie primaire, dont on a déjà parlé indirectement puisqu'il est utilisé dans le calcul du diagnostic de performance énergétique (DPE). Ce coefficient est aujourd'hui égal à 2,58.
Notre amendement garantira qu'il correspond au mix énergétique réel, avec une révision éventuelle tous les quatre ans, comme le propose la méthodologie européenne. Ce sera le mix actuel qui sera pris en compte lors de la révision, et non les anticipations. La fréquence de quatre ans reste faible par rapport à l'évolution du mix, prévu sur une période de vingt ans.
La question est un peu compliquée car il y a un effet sur les bâtiments neufs et un autre sur ceux existants, dans le cadre de la rénovation.
S'agissant des bâtiments neufs, un coefficient élevé favorise ou rend compétitif le gaz, alors que pour ces bâtiments très peu consommateurs en énergie, compte tenu des nouvelles réglementations thermiques, l'électricité semble plus adaptée, notamment dans la perspective de la neutralité carbone. Au vu de la durée de vie des bâtiments, de plusieurs dizaines d'années, on pourrait vouloir prendre en compte un mix énergétique futur pour permettre à ces bâtiments d'être le moins émetteurs possibles de gaz à effet de serre dès maintenant. C'est une vision de long terme, qui s'oppose à celle de la rénovation énergétique.
La modification du coefficient aurait pour effet de sortir mécaniquement des logements du champ actuel des passoires thermiques. Or la rénovation énergétique reste le sujet central, 1 % de logements étant construits chaque année. J'entends que le passage du coefficient à 2,1 serait surtout lié aux bâtiments neufs. Notre volonté de rester au plus près du mix actuel, avec un coefficient de 2,58, est au contraire liée à la question de la rénovation. Ce qui nous gêne, c'est que le changement de coefficient reviendrait à prendre la responsabilité de sortir 2 millions de passoires thermiques du spectre de la rénovation sans rien changer aux conditions de vie dans ces logements. Nos concitoyens ne le comprendraient pas. Si vous aviez une méthodologie permettant de dissocier ces deux sujets, nous serions preneurs.
La question du coefficient de conversion est éminemment complexe. Je me demande s'il est pertinent de le calculer à partir du mix énergétique actuel, sachant que les bâtiments que l'on construit aujourd'hui, dans le cadre de la réglementation thermique en vigueur, ont vocation à nous survivre. Le risque serait de favoriser une erreur d'interprétation. Je retiens en revanche l'idée qu'il faut être vigilant, si on touche au coefficient, à ce qu'il n'y ait pas d'effets de bord, c'est-à-dire une sortie artificielle des passoires thermiques relevant des classes F et G. Nous en avons déjà parlé avec le Gouvernement, et je serai vraiment attentif sur ce point.
Ces amendements s'opposeraient à la PPE en obligeant à utiliser, pour le calcul du facteur de conversion, le mix électrique existant et à réaliser une mise à jour tous les quatre ans. La PPE prévoit un calcul à partir du mix électrique projeté pour 2035. Le facteur de conversion d'énergie primaire sert avant tout à définir les normes pour la construction de bâtiments neufs et à tenir compte du fait qu'il faut utiliser une autre forme d'énergie pour produire l'électricité. Compte tenu de la durée de vie des bâtiments, il semble non seulement logique mais également souhaitable de prendre en compte un mix électrique qui est davantage représentatif du mix moyen pendant leur durée de vie. Les logements que l'on construira pendant la décennie 2020 seront bien évidemment encore là en 2035, et pour longtemps, les durées de vie moyennes s'approchant maintenant du siècle. Imposer de construire des bâtiments avec un coefficient correspondant à la situation actuelle, au lieu de se projeter vers l'avenir, ne reviendrait pas à faire preuve d'esprit stratégique et cela empêcherait de se projeter vers la neutralité carbone dans ce domaine.
Néanmoins, les questions que vous avez posées sont tout à fait importantes, et je souhaite vous rassurer sur deux points.
S'agissant des bâtiments neufs, nous abaisserons proportionnellement les seuils de consommation dans la nouvelle réglementation, afin que le changement de coefficient, quel que soit le niveau que nous allons retenir, ne permette pas de consommer plus d'électricité ou de réintroduire les « grille-pain ». C'est un engagement fort : nous compenserons l'effet du changement de coefficient par un abaissement des seuils de consommation.
En ce qui concerne les bâtiments existants, l'évolution prévue n'est en aucun cas un moyen de supprimer des passoires – cela n'aurait aucun sens. Nous nous engageons à corriger la définition de ces passoires pour tenir compte, notamment, de l'énergie finale. Cela nous ramène au débat précédent : l'énergie finale, par définition, ne dépend pas de la manière dont elle a été produite. Cela n'aura pas d'effet mécanique sur le nombre de passoires thermiques et sur les ambitions en matière de rénovation – je m'y engage également.
Enfin, il ne semble pas opportun de réviser le coefficient tous les quatre ans, car cela créerait une trop forte insécurité pour les acteurs du bâtiment. Il faut que les normes soient fixées pour des durées plus longues. Par ailleurs, ce ne serait pas une disposition de caractère législatif.
Autant de raisons pour lesquelles le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
Je trouve les arguments de Mme Meynier-Millefert très pertinents. On n'arrête pas d'introduire de nouveaux paramètres et de changer les modes de calcul, alors que l'objectif reste tout de même de lutter contre la précarité énergétique. Les « patchs » proposés risquent de ne pas traiter tous les effets de bord résultant de la modification qui est envisagée. Je trouve donc que ces amendements mériteraient d'être adoptés.
Je comprends que le ministère du budget ou d'autres acteurs aimeraient bien profiter de la transformation du crédit d'impôt en avance, au moment des travaux, pour reprendre 200, 300 ou 400 millions d'euros. J'aimerais que vous nous assuriez que cela n'arrivera pas, même si vous ne répondez pas nécessairement dès aujourd'hui à cette question.
La commission rejette successivement l'amendement CE160 et les amendements CE41 et CE520.
Puis elle examine, en discussion commune, les amendements identiques CE655 du rapporteur CE576 de Mme Huguette Tiegna et CE614 de la commission du développement durable, qui font l'objet des sous-amendements CE726, CE732, CE730, CE733, CE727 et CE728 de M. Guillaume Kasbarian, CE717 de M. Matthieu Orphelin et CE725 de M. Guillaume Kasbarian, ainsi que l'amendement CE528 de M. Matthieu Orphelin et les amendements identiques CE11 de M. Vincent Descoeur et CE268 de M. François-Michel Lambert.
La secrétaire d'État a déjà un peu évoqué mon amendement CE655. Le dispositif de mise sous séquestre que je vous propose me paraît opérationnel et de nature à contribuer fortement à atteindre nos objectifs. Dans leur rapport sur les aides à la rénovation énergétique des logements privés, l'Inspection générale des finances (IGF) et le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) ont mis en avant le fait que les mutations immobilières constituent un moment propice pour la réalisation de rénovations énergétiques, notamment dans le cadre d'opérations plus larges d'amélioration du logement, dès lors que plusieurs facteurs sont réunis : l'intervention d'un notaire, la recherche de financements, la vacance du logement, bien sûr, et le fait que l'on se projette dans son futur cadre de vie. On peut estimer que la consignation d'une partie du produit de la vente, qui n'est pas la seule mesure d'incitation à la rénovation, permettrait de provoquer des travaux dans une centaine de milliers de passoires thermiques chaque année, au moment le plus propice, c'est-à-dire lors d'une mutation immobilière. Nous pourrons compter sur des chiffres plus précis lorsque le DPE sera fiabilisé, en 2021. Je pense que nous devons travailler, en vue de la séance, sur une date et sur les moyens d'une mise en oeuvre effective de la mesure que je vous propose.
L'amendement CE576 a été initialement proposé par Mme Meynier-Millefert est identique à un amendement adopté par la commission du développement durable. Il prévoit que l'acquéreur paiera le prix affiché, dont 5 % au maximum seront réservés à la réalisation de travaux de rénovation énergétique. Cette mesure incitera à réaliser ces travaux, car ce sera le seul moyen de récupérer le montant placé sous séquestre.
L'amendement CE614 est identique : je me félicite de voir que nous nous accordons sur ce point.
Je vais défendre en même temps mes différents sous-amendements.
Je suis d'accord avec ce qu'a dit la secrétaire d'État : oui, il faut rénover les logements ; oui, il faut lutter contre les passoires ; oui, il faut encourager les propriétaires à réaliser des travaux. Je suis également d'accord avec l'idée qu'il existe plusieurs leviers et que ce n'est pas l'utilisation d'un seul d'entre eux qui permettra de tout résoudre, d'un coup de baguette magique. J'ose d'ailleurs espérer que s'il suffisait d'adopter trois lignes de loi pour résoudre le problème, nos prédécesseurs auraient eu l'idée de le faire. C'est tout un ensemble de mesures qui permettront d'agir, et non une seule, aussi emblématique soit-elle.
J'ai des réticences en ce qui concerne ces amendements identiques, dont je vais d'abord rappeler l'objet. En cas de vente d'un bien immobilier dont le niveau de performance énergétique n'atteindrait pas le niveau souhaité, deux choix seront possibles : le vendeur pourra réaliser lui-même des travaux, fixer un prix et recevoir le produit de la vente ; si le vendeur ne peut pas ou ne veut pas les faire – mille raisons peuvent l'expliquer –, 5 % du produit total de la vente seront mis sous séquestre par le notaire et éventuellement reversés à l'acquéreur si lui-même les réalise.
Cette mesure me pose un problème un peu philosophique : je suis moi aussi attaché au droit de propriété et à la liberté des personnes. Par ailleurs, je ne suis pas encore totalement certain du résultat que ces amendements produiront : j'ai du mal à voir en quoi ils permettront vraiment d'atteindre l'objectif. J'ai peur aussi que ce soit une source d'inégalité territoriale et sociale : on n'imagine pas investir 10 000, 15 000, 20 000 ou 30 000 euros dans certaines communes rurales, quand on achète une maison qui ne vaut pas grand-chose, par rapport aux appartements en ville, pour rénover un toit de chaume, les murs et faire des travaux d'isolation ; à défaut de pouvoir valoriser l'opération dans le prix de vente, on peut y renoncer et se résoudre à payer la pénalité, au risque de n'y voir qu'une taxe déguisée : on vous retire 5 % que vous ne récupérez jamais. J'ai peur de l'effet qui se pourrait se produire dans les zones rurales et pour certaines couches sociales. J'ai aussi une question opérationnelle : concrètement, si plusieurs personnes refusent successivement de faire des travaux dans une maison, le notaire prélèvera-t-il 5 % du prix à chaque fois ? Que deviendront les sommes que cela représente ? Qui les gardera ? Qu'en fera-t-on ? Autant de questions, que je reprends dans mes sous-amendements.
Le sous-amendement CE726 propose de mettre en place cette mesure à titre expérimental et dans les seules zones tendues. Le sous-amendement CE732 prévoit plus généralement qu'il s'agira d'une expérimentation. Le sous-amendement CE730 limitera le dispositif aux locaux professionnels, que l'on pourra ainsi tester avant de l'étendre à ceux des particuliers. Le sous-amendement CE733 tend à appliquer le dispositif seulement dans les zones tendues, afin d'en préserver dans un premier temps les zones rurales. Le sous-amendement CE727 la limiterait aux seules résidences secondaires dans un premier temps – on peut se dire a priori que leurs propriétaires ont peut-être davantage les moyens de réaliser ces travaux. On peut aussi se demander si cela ne pourrait pas concerner uniquement les biens immobiliers appartenant à l'État, si ce n'est pas à lui de montrer l'exemple avec ses propres transactions immobilières, avant de demander aux particuliers et aux entreprises de suivre : c'est l'objet du sous-amendement CE728. Enfin, le sous-amendement CE725 a trait au calendrier : par cohérence avec d'autres mesures, le dispositif ne s'appliquerait qu'à partir du 1er janvier 2021.
Les amendements que nous sommes en train d'examiner poseront un certain nombre de questions dans nos territoires. Je veux être sûr que nous sommes tous conscients des conséquences.
Le sous-amendement CE717 m'est venu à l'esprit en lisant le rapport du CGEDD cité par le rapporteur. Il montre que le coût des travaux pour la rénovation énergétique d'une passoire est compris entre 12 000 et 18 000 euros pour passer à la classe D et entre 20 000 et 30 000 euros pour atteindre la classe C. Mon sous-amendement tend à porter le taux de consignation à 7,5 % ; je le redéposerai en séance en prévoyant une variation selon que l'on est en zone dense ou non. Ce n'est pas la même histoire quand une maison coûte 100 000 ou 200 000 euros, alors que le montant des travaux est à peu près identique.
L'amendement CE528 est par ailleurs défendu.
Je remercie M. Kasbarian d'avoir mis en avant un certain nombre de questions. Je l'invite néanmoins à lire le rapport que j'ai évoqué et à faire confiance à ses collègues qui ont travaillé sur ce sujet, notamment au sein de la commission du développement durable et de la nôtre. Quand on veut avancer sur un sujet aussi important que la rénovation, dont nous débattons depuis tout à l'heure et dont il faut s'emparer, il ne faut pas passer son temps à trembler, à réfléchir et à reculer : il y a un moment où on doit avancer. Je vous propose d'améliorer ensemble mon amendement, si nécessaire, mais de l'adopter pour le moment : j'ai le sentiment que nous sommes sur la bonne voie.
Je comprends l'idée qui anime M. Orphelin, mais passer à un taux de 7,5 % ne serait peut-être pas sans conséquence : mieux vaut y réfléchir d'ici à la séance. Je lui suggère donc de retirer son sous-amendement. J'émets également un avis défavorable à son amendement CE528. J'essaie de répondre rapidement, mais je ne voudrais pas que vous ayez l'impression que je ne veux pas débattre.
En ce qui concerne les amendements CE11 et CE268, je pense qu'une mise sous séquestre plus importante ne se justifierait pas et constituerait une atteinte au principe d'égalité. Un logement classé E ne serait pas soumis au dispositif alors qu'un logement classé F ou G devrait être rénové pour se retrouver finalement mieux classé… J'émets donc un avis défavorable.
Je ne reviendrai pas sur la question de la rénovation énergétique en tant que telle, dont vous avez largement débattu. Ces amendements dits de consignation sont un outil intéressant, parmi d'autres, pour enclencher progressivement un certain nombre de travaux de rénovation dans le cadre des transactions qui ont lieu sur le marché immobilier. Il n'y aura pas d'obligation assortie d'une date butoir : la rénovation se fera au fur et à mesure des transactions. Ce dispositif a donc l'avantage d'être souple et de s'adapter au marché.
Bon an mal an, 800 000 ventes de logements privés ont lieu chaque année, hors logements neufs et logements sociaux. On considère qu'environ 100 000 relèvent des classes F et G et sont considérés comme des passoires thermiques. Ces mesures ne concerneront ainsi qu'une transaction sur huit, mais elles pourront avoir un effet réel, au fil du temps, en matière de rénovation.
Par ailleurs, les amendements s'inspirent d'un dispositif existant, qui n'a pas cassé le marché immobilier : celui relatif à l'assainissement non collectif. On voit bien, au passage, que les situations sont différentes selon que l'on habite dans un endroit raccordé ou non.
Je voudrais saluer le fait que l'évolution proposée est partagée par de nombreux groupes. Comme l'a dit le rapporteur, il faudrait encore affiner les conditions de mise en oeuvre. Un certain nombre de préoccupations ou de questions ont été évoquées, qui sont effectivement légitimes.
Je pense que la rédaction proposée par le rapporteur, Mme Tiegna et Mme Sarles, est celle qui doit être privilégiée. Le Gouvernement s'en remet en tout cas à la sagesse de la commission en ce qui concerne ces deux amendements. Je demande plutôt le retrait des autres, à défaut de quoi j'émettrais avis défavorable. J'émets également un avis défavorable aux sous-amendements : nous allons nous donner le temps, d'ici à la séance, de préciser un certain nombre de points qui pourraient être intégrés dans le dispositif.
Je suis ennuyé par la philosophie de ces amendements.
Je vais retirer mon amendement CE11, qui était une sorte d'amendement d'appel, notamment en ce qui concerne les copropriétés. L'idée était d'avoir une visibilité, quand on achète, sur les charges qu'il faudra acquitter à l'occasion d'une rénovation globale.
On achète parfois des biens pour des montants ridicules – 20 000 euros, par exemple – dans les zones détendues, et l'investissement pour lutter contre la précarité énergétique est supérieur au prix de vente. Il y a là un réel problème, notamment pour des ménages qui ont une très faible capacité d'achat et qui se reportent sur ces biens. Il est manifeste que dégager un montant égal à 5 % du prix ne suffira pas : il faudrait plutôt prévoir des mécanismes d'accompagnement dans les zones détendues. Les opérations programmées d'amélioration de l'habitat ne concernent pas un certain nombre de communes rurales. Il serait important que l'État puisse mettre en place un accompagnement équitable, en n'oubliant aucun territoire.
Les amendements qui nous sont proposés sont à mon avis incomplets. On pourrait faire confiance au décret d'application, mais vous savez que je suis généralement plutôt méfiant à cet égard. Je crains que ce dispositif ne provoque une rétention des ventes ; je ne suis pas certain qu'il accompagnera vraiment les acheteurs dans la réalisation d'un investissement, d'une manière sereine. Je préférerais donc que tous ces amendements soient retirés : ils ne sont pas encore mûrs.
Je voudrais soutenir les sous-amendements de M. Kasbarian, car ils me semblent empreints d'un certain pragmatisme. Notre collègue l'a dit : votre amendement, Monsieur le rapporteur, revient à créer un impôt de 5 % pour des propriétaires de biens immobiliers vétustes. Prenons le cas d'un bien valant 100 000 euros – je ne suis pas agent immobilier, mais j'ai été maire, et j'imagine donc un peu la situation : on mettrait sous séquestre un impôt de 5 000 euros. Mais allons jusqu'au bout de l'exemple : imaginons que le propriétaire soit un ménage en grande difficulté, des gens modestes qui n'ont pas pu finir de rembourser leur prêt et qui doivent vendre ou, pire, qu'une décision de justice les y oblige. Vous alourdirez encore leurs difficultés en leur imposant de mettre de côté 5 000 euros. Ce sont encore eux qui pâtiront les premiers de ce dispositif, quand bien même j'en comprends la logique et la trajectoire projetée. Et si ces amendements ont fait l'objet d'un travail en amont, acceptez que tous les députés puissent y participer et déposer des sous-amendements.
Vous proposez de mettre sous séquestre 5 % du produit de la vente d'un bien immobilier lorsque celui-ci ne remplit pas certains objectifs de consommation d'énergie. La mise sous séquestre existe déjà en droit, mais elle relève d'un tribunal quand on touche au droit de propriété. C'est possible aussi devant un notaire ou un agent immobilier dans le cadre d'une promesse d'achat – en matière de vente future, il s'agit en fait d'un acompte ou une indemnité pour le vendeur dans le cas où l'achat ne se ferait pas. La situation à laquelle vous pensez est profondément différente : la mise sous séquestre ne concernerait pas l'acheteur mais le vendeur, et ce ne serait pas une sorte d'acompte, mais une forme de punition, ou en tout cas de prélèvement. Prenons garde : si l'on touche au droit de propriété, cela relève de la justice, me semble-t-il.
Par ailleurs, on prélèverait une somme auprès du vendeur pour la verser ensuite à l'acheteur, sans passer par le budget de l'État. C'est ce que j'appelle une taxe affectée, et ce n'est pas très compatible avec nos règles budgétaires.
Vous prévoyez ensuite que « cette somme est débloquée au profit de l'acquéreur ou d'une entreprise choisie par lui pour mener lesdits travaux ». Je peux le comprendre dans le cas d'une entreprise qui réalise les travaux, mais la formulation retenue laisse à l'acquéreur la possibilité de les faire lui-même. Il y a donc un autre foyer infectieux sur le plan juridique : à supposer que le coût total soit de 30 000 euros, par exemple, mais comme je suis un peu bricoleur, que je m'en charge et que cela me revienne au final à 15 000 euros, que se passera-t-il ? Que fait-on de la marge ? Pourrai-je la garder pour moi ?
Je crains aussi que ces amendements provoquent une augmentation de 5 % des prix de vente afin de couvrir les futures mises sous séquestre ou qu'ils bloquent certaines transactions parce que la vente n'est plus rentable.
Se pose enfin la question de l'imposition de la plus-value. Si le vendeur réalise une belle plus-value, mais qu'elle est amputée de 5 % en raison d'une mise sous séquestre, il ne faudrait pas, de surcroît, l'imposer sur une plus-value latente non réalisée… Quelle modification du régime envisagez-vous en cas de mise sous séquestre ?
Comme M. Dive, je pense que les interrogations formulées par M. Kasbarian sont très pertinentes, et je suis donc favorable à ses sous-amendements.
C'est un bon débat ; nous partons d'un constat juste, à savoir cette étude du conseil général de l'économie (CGEDD) qui rappelle que c'est au moment de la transaction immobilière que l'opportunité se présente de faire des travaux de rénovation énergétique. C'est tout à fait naturel : quand vous achetez un bien en mauvais état, vous prévoyez, en général, dans le budget d'acquisition, les travaux que vous aurez à faire. Sur ce point, je crois que nous sommes tous d'accord.
Mais vous n'avez pas répondu, Monsieur le rapporteur, aux autres questions soulevées par M. Guillaume Kasbarian, pourtant très justes. Pour moi, l'impact de votre amendement variera considérablement selon qu'on se trouvera en zone non tendue ou en zone tendue. Le séquestre, qu'on le veuille ou non, sera vécu comme un impôt nouveau. Vous faites de la politique : vous aurez beau écrire dans le texte de la loi que ce n'est pas un impôt, les gens vont le percevoir comme tel. Vous allez prendre un risque politique énorme dans les zones tendues, en voulant faire adopter cet amendement.
En zone non tendue en milieu rural, les prix de vente des maisons peuvent déjà subir une décote liée au fait que la maison est en mauvais état, que le DPE fait apparaître une performance énergétique médiocre. Et là, non seulement vous aurez mal vendu, mais on vous prendra encore 5 % de plus… Voilà comment la chose sera perçue.
Le premier sous-amendement de M. Guillaume Kasbarian est plein de bon sens : il propose une expérimentation. Dans l'absolu, je ne serais pas favorable à votre amendement, Monsieur le rapporteur, mais, pour être députée depuis longtemps, je suis consciente du fait majoritaire : c'est pourquoi je défends une situation intermédiaire. Commençons par une expérimentation dans les zones tendues pour voir si ce dispositif peut fonctionner ou pas. Faute de quoi, vous risquez sinon de commettre une véritable erreur. Et proposer une telle mesure sans étude d'impact préalable, je trouve que ce n'est vraiment pas une bonne façon de légiférer.
Ces amendements manifestement ne « tournent » pas, on le voit bien à travers les sous-amendements.
Rappelons comment se déroule le processus d'une vente. Cela commence par des pourparlers entre un vendeur et un acquéreur. Ensuite, un compromis ou une promesse de vente sont signés, avec en annexe un DPE. Certes, on pourrait parler de la qualité du DPE, c'est vrai sujet ; reste que l'acquéreur achète le bien en connaissance de cause. Il le prend dans l'état où il se trouve, sans contestation possible contre le vendeur ; le prix convenu va tenir compte de l'état du bien.
Sur l'idée d'un séquestre, je reprendrai ce que dit notre collègue Aubert : cela pose un problème au regard de l'impôt sur les plus-values, mais également des droits d'enregistrement, dans la mesure où la taxation s'appliquera à un prix qui sera peut-être défalqué de 5 %.
Je crois que le Gouvernement a déposé un amendement concernant un « super-DPE » ou un nouveau certificat, ce qui va plutôt dans le bon sens : l'acquéreur doit être parfaitement informé des risques qu'il prend et du coût de la rénovation de ce bâtiment. Mais là, on s'immisce dans la négociation. Vous essayez de trouver des solutions pour rattraper cela, mais on voit bien que ces amendements ne tournent pas, parce qu'ils ignorent la réalité du processus de vente : pourparlers, compromis et vente proprement dite. On ne découvre pas après la vente que le logement est en catégorie E ou F… C'est ainsi que cela se passe dans la vraie vie.
Ma question portera seulement sur l'incidence d'une telle disposition sur les frais de notaire. Comment seront-ils calculés ? Faudra-t-il ou non prendre en compte la consignation ? La somme consignée entre-t-elle dans le cadre de l'article R. 444-66 du code de commerce ou dans celui de son article A. 444-164 ? Bref, après la réforme Macron des frais de notaire, quel est le droit applicable ?
Après avoir entendu la proposition du rapporteur sur la possibilité de retravailler de manière collective sur cette question d'ici à la séance publique, je retire mon sous-amendement CE717.
Je voudrais seulement rebondir sur la question de la confiance. Pour ma part, j'ai toujours eu confiance dans mon groupe politique et dans la majorité. Le nombre d'amendements que je dépose et la fréquence de mes interventions sont suffisamment modérés pour ne pas être perçus comme le signe d'un manque de confiance, mais comme la manifestation d'interrogations légitimes. Je ne doute pas que des gens ont travaillé sur le sujet ; si je pose ces questions, c'est qu'elles me taraudent, et j'ai l'impression que je ne suis pas le seul. C'est pourquoi je vais maintenir mes sous-amendements, quoique je pense très honnêtement que nous gagnerions collectivement à tout retirer et à travailler sur le sujet d'ici à la séance publique. On voit bien qu'il y a des choses qui ne « volent » pas, que des questions restent en suspens. Prenons le temps d'une pause, donnons-nous une semaine pour revenir en séance publique avec quelque chose de plus fort, qui aura été retravaillé, de façon totalement transpartisane, c'est-à-dire avec tous les collègues, quels qu'ils soient, qui eux aussi peuvent se prévaloir de leur expertise, pour avoir travaillé depuis des années sur tous ces sujets : droit de la propriété, transactions immobilières, notaires.
Prenons le temps d'une semaine de réflexion pour mettre au point quelque chose qui « vole » plutôt que de prendre le risque de valider dans la loi un dispositif qui, en l'état, nous pose vraiment des questions et dont nous avons tout lieu de douter des effets. Retirons tous les amendements sur ce sujet et donnons-nous une semaine, plutôt que risquer de faire une erreur.
Il est tout à fait naturel qu'un tel amendement pose un certain nombre de questions et soulève des inquiétudes. Lorsqu'une décision politique courageuse doit être prise, chacun de nous se pose la question de sa mise en oeuvre. C'est donc tout à votre honneur, cher Guillaume Kasbarian : nous avons régulièrement des discussions sur la manière dont chaque mesure que nous votons va concrètement s'appliquer sur le terrain. Il est donc tout à fait légitime que ces six sous-amendements soient apparus dans l'après-midi. Car ils posent des questions fortes, dont certaines ont aussi été relayées par d'autres groupes.
Mais je voudrais tout de même insister sur deux points.
D'abord, cette mesure proposée par le rapporteur, soutenue par le Gouvernement et précisée dans un rapport du CGEDD rencontre un écho dans la société civile : elle fait suite à des demandes de syndicats, de corps intermédiaires et d'associations d'élus qui se sont tournés vers nous. C'est dire qu'il y a une attente forte, qu'il nous faut relayer. Il faut donc que nous soyons ambitieux sur ces questions de rénovation énergétique. Les citoyens nous demandent souvent ce que nous faisons : nous envisageons des décisions courageuses, et c'est le cas de cet amendement dans la loi, et nous les inscrivons sans la loi. Nous pourrons encore procéder à des ajustements, pour faire plus encore, et de manière encore plus juste. Il faut montrer aux citoyens que nous allons voter ce dispositif, mais aussi travailler de manière très rapide aux amendements pour la séance publique, avec le Gouvernement, avec l'ensemble du groupe, afin de prendre toutes les garanties nécessaires et répondre aux questions qui se posent sur les effets possibles sur le coût du logement ou dans les zones détendues.
Ensuite, nous de partons pas de rien. Pour ma part, j'ai travaillé dans le domaine de l'eau et de l'assainissement. L'assainissement non collectif et sa mise aux normes avaient posé un certain nombre de problèmes. Pour les résoudre, on a utilisé le même dispositif de consignation, et cela a fonctionné ; et les agences de l'eau y ont aidé en apportant un cofinancement des travaux. Depuis le début de la soirée, le Gouvernement nous répète qu'il ne s'agira pas d'une mesure purement coercitive : on l'accompagnera par des aides aux ménages modestes pour la réalisation des travaux.
Je crois que cette mesure est juste ; mais il faut impérativement que nous travaillions ensemble pour la rendre parfaitement efficace, opérationnelle et juste pour la séance publique.
Il est tout à fait compréhensible que cette mesure fasse naître un certain nombre de questions, comme tout système un peu nouveau – même si celui-ci est inspiré directement d'un dispositif existant.
Certaines questions sont très concrètes et permettent de cerner des zones d'ombre ou d'exprimer des doutes. Mais d'autres interventions relèvent du procès d'intention ou visent seulement à faire peur aux gens : dire que c'est un impôt, c'est faux. Les mots ont un sens. Un impôt, c'est quelque chose que l'on doit payer au Trésor public, qui va ensuite le verser à l'État ou à une collectivité locale. Et un impôt, on ne le récupère pas, à moins d'avoir été prélevé indûment.
Le séquestre chez le notaire, c'est quelque chose qui existe déjà, Monsieur Aubert : il n'y a pas besoin d'une décision de justice pour le mettre en oeuvre. Cela se pratique souvent d'un commun accord entre acquéreur et vendeur. C'est une garantie que se donnent des parties à une transaction privée. Nous nous situons dans une logique de marché, de transactions privées dans lequel nous voulons seulement instaurer plus de transparences pour l'acquéreur, à l'instar de ce qui s'est fait avec le diagnostic de performance énergétique, les diagnostics d'assainissement, le diagnostic amiante, etc. Évidemment, lorsque le diagnostic amiante montre la nécessité de réaliser des travaux de désamiantage, le prix du logement va subir une décote… Ce n'est pas une raison pour ne pas faire de diagnostic amiante ! En revanche, si le diagnostic montre que la présence d'amiante ne présente aucun danger et que vous n'avez pas de travaux à faire, cela ne pèse pas sur le coût de la transaction : vous n'allez pas mettre une somme sous séquestre pour désamianter un bout de cheminée qui n'a pas besoin d'être désamianté. De même, si l'assainissement individuel n'est pas aux normes, il est de l'intérêt de l'acquéreur comme du vendeur de sécuriser la transaction en évaluant à temps les travaux de mise aux normes, pour éviter que les uns et les autres n'entrent dans des logiques de contentieux et ne se poursuivent mutuellement. Autant de dispositifs qui existent déjà et qui fonctionnent : loin de perturber le marché, ils permettent de le faire plutôt mieux fonctionner.
Se posent évidemment des questions telles que celle de la taxation des plus-values. Sur ces sujets, des solutions elles existent, puisque le modèle existe déjà. Cela supposera simplement des régularisations : le fisc, vous le savez bien, sait parfaitement gérer ces choses-là.
J'ai donc exprimé un avis de sagesse du Gouvernement sur la proposition du rapporteur : adopter d'ores et déjà le principe et travailler d'ici à la séance publique, à le préciser et à lever un certain nombre de questions. La lecture au Sénat permettra également de parfaire encore les choses ; ensuite viendra la lecture définitive. C'est ainsi que fonctionne le processus législatif : en tout cas, on ne part pas de rien en fonçant tête baissée, sur une idée qui serait soudainement sortie du chapeau. Je rappelle que l'argent dont il s'agit n'est pas pris à l'acquéreur ni au vendeur : c'est de l'argent orienté vers un objectif, en l'occurrence les travaux de rénovation. Comme Mme de La Raudière l'a très bien dit, quand on achète un bien immobilier qui paraît un peu dégradé – il peut simplement s'agir de peintures écaillées –, on se pose naturellement la question de savoir si l'on fera des travaux. Mais cela ne signifie pas nécessairement qu'on va les faire. Dans le cas de l'énergie, nous pensons que ce dispositif montrera son utilité au fur et à mesure du renouvellement du marché, comme ce fut le cas des normes sur le neuf, afin que les nouveaux logements consomment moins d'énergie. Le but est de faire en sorte que, progressivement, au fur et à mesure des ventes et des acquisitions, un certain nombre de rénovations s'effectuent ; car on sait qu'elles ne se font pas toutes seules : quand les gens ont des travaux à faire, ce ne sont pas forcément ceux-là qu'ils vont faire prioritairement.
Voilà la logique, assez fluide, qui sous-tend le dispositif proposé. Le marché des transactions immobilières enregistre environ 800 000 ventes par an. On considère qu'une petite centaine de milliers d'entre elles seraient concernées. En travaillant par étapes à répondre aux interrogations, comme l'a proposé le rapporteur, nous pourrons donc répondre aux interrogations.
Le dispositif proposé est effectivement un peu atypique par le fait qu'il se situe à mi-chemin entre le vendeur et l'acquéreur. Mais il ne fait qu'encadrer une pratique qui s'observe déjà dans les territoires : dans toutes les situations décrites, il y a une négociation autour du prix du logement vendu. Une passoire énergétique peut ainsi perdre 10 % de sa valeur. La disposition proposée permettra au contraire de sécuriser le vendeur, comme l'acheteur, en garantissant que seulement 5 % du bien sera consigné pour faire les travaux. Alors qu'en l'état actuel des choses, l'acquéreur, s'il négocie habilement, peut obtenir une décote de 10 % à 15 % au motif qu'il aura des travaux à faire. Il fait baisser le prix du logement, mais il ne fait pas nécessairement les travaux : c'est finalement un jeu de dupes.
Je ne comprends pas pourquoi on y verrait une forme de taxe ou d'impôt. Il s'agit plutôt de suspendre l'emploi de cette somme, pour faire en sorte qu'elle ne soit débloquée qu'en vue de réaliser l'objectif évoqué pendant la négociation : réaliser des travaux de rénovation énergétique.
Ce dispositif, on l'a dit, a tout de même fait l'objet d'un rapport du CGEDD et de l'IGF : cela ne représente pas moins de 496 pages d'analyse. Ce n'est donc décidément pas une mesure sortie du chapeau… Ce dispositif a aussi été longuement étudié par nos collègues de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, également favorables au dispositif.
Je crois que la vraie sagesse, puisque c'est la position du Gouvernement, serait de retirer cet amendement pour y travailler à nouveau et reprendre la réflexion sur ce sujet. Car je vois un malaise qui s'installe.
Vous n'acceptez pas que l'on parle d'impôt, Monsieur le ministre d'État, au motif qu'un impôt ne se récupère pas. Mais, si je regarde les faits, voilà 5 % du prix du bien qui ne seront pas récupérés par le vendeur, puisque c'est l'acheteur qui en bénéficiera afin de mener les travaux.
Tout à l'heure, j'ai pris l'exemple de gens modestes ayant un bien à 100 000 euros qu'ils sont contraints de vendre, situé dans un quartier peu prisé ou dans un village rural. Qui sera l'acheteur ? Soit un marchand de biens, soit un investisseur qui a plusieurs biens, une SCI par exemple. Ils achèteront parce qu'ils auront la possibilité de mener ces travaux avec les 5 % en cause. Si ce n'est pas un impôt, puisque vous n'aimez pas ce mot, ma conclusion est que c'est tout de même une mesure antisociale !
Sur la notion de séquestre, Monsieur le ministre d'État, vous avez été imprécis : cela existe, dites-vous, et cela peut faire l'objet d'un accord dans le cadre d'une vente. Certes, il y a beaucoup de séquestres qui ne sont pas rendus obligatoires par la loi. Mais, dans le cas qui nous occupe, nous parlons bel et bien d'une obligation légale.
Ce type de séquestre ne recouvre que deux possibilités en l'état actuel du droit : l'acompte versé par l'acheteur et inclus dans l'achat, puisque la vente libère l'acompte ; l'indemnité d'immobilisation due au vendeur : si le bien n'est pas acheté, l'acheteur s'acquitte d'une pénalité. Dans les deux cas, la vente libère la somme.
Dans le dispositif que nous examinons, en revanche, il n'y a pas de versement différé, mais la soustraction d'une somme donnée au moment de la vente. Autrement dit, vous bloquez, puis vous enlevez de l'argent, en employant ainsi le mot de séquestre pour des situations qui n'ont strictement rien à voir avec celles que prévoit le droit actuel, puisque le vendeur ne récupère pas la somme.
Ensuite, vous nous dites que ce n'est pas une taxe affectée, puisque cela sert à des travaux de rénovation énergétique. Mais ces sommes pourront être demain comptabilisées comme faisant partie des dépenses de politique publique de rénovation énergétique, que vous pourriez aussi bien financer différemment, par des crédits d'impôt par exemple. Au fond, il s'agit d'une somme soustraite de manière obligatoire et décidée par l'État, orientée vers un bénéficiaire… Bref, cela ressemble à une taxe et cela a le goût d'une taxe. Et si ce n'est peut-être pas une taxe, pour le vendeur, l'effet sera le même !
Nous souffrons d'un manque de logements en France. Une part des logements sont dans un état lamentable. Soit le propriétaire les rénove pour les mettre en location, soit il les vend.
S'il les rénove, il faut qu'il puisse être aidé. Il est souvent difficile d'atteindre une rentabilité suffisante une fois qu'on a réalisé des travaux trop coûteux par rapport aux loyers attendus. Du coup, dans un certain nombre de territoires, le propriétaire ne rénove pas.
S'il vend, il doit avoir une vision très claire : ou bien il réalise les travaux, ou bien il lui faudra vendre à un prix moindre en déduisant le coût des travaux, qui doit être connu. Les aléas relatifs aux travaux à réaliser seront forcément anticipés dans l'estimation de la valeur du bien : cela relève seulement du comportement rationnel d'un acteur économique. Votre consignation de 5 % n'y changera pas grand-chose ; pire, elle risque de produire des effets contraires à ce qu'on voulait. Tel que vous le proposez, Monsieur le rapporteur, votre amendement n'est pas complet ; sur le plan économique, il n'est pas opérant dans les territoires très tendus, ni dans les territoires non tendus où le coût des travaux à réaliser dépasse largement le prix de vente des passoires énergétiques. Sur le plan juridique également, de nombreuses questions restent sans réponse.
Pour toutes ces raisons, il serait prudent de retirer votre amendement, Monsieur le rapporteur. Pour ma part, je ne suis pas favorable à voter les sous-amendements, dans la mesure où cela signifierait que je cautionne un dispositif dont je maintiens qu'il est inopérant et même dangereux. J'insiste, Monsieur le rapporteur : retirez votre amendement !
Je passe la parole à une nouvelle série d'orateurs, mais il faudra ensuite voter, car c'est aussi notre métier !
Je comprends le sens de cet amendement mais, franchement, il ne tourne pas. Se pose également le problème des ventes en état futur de rénovation, de la définition des travaux à réaliser, tout un tas de problèmes juridiques non résolus à ce stade. Cet amendement mériterait vraiment d'être retravaillé. Si vous voulez qu'il soit efficace, je pense qu'il faut le retirer. Nous sommes prêts à y retravailler à plusieurs, de manière transpartisane. Mais, en l'état, ce dispositif est beaucoup trop compliqué et susceptible d'effets domino dont on ne mesure pas la portée à ce stade.
Je pense que nous sommes ici tous d'accord sur le fait que la rénovation énergétique est une priorité nationale, mais pas à n'importe quel prix. Nous ne pouvons notamment accepter l'absence d'étude d'impact sur un sujet aussi important.
La loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, dite « ELAN », sur laquelle nous avons travaillé pendant plus d'un an et demi, compte déjà énormément de dispositions sur cette thématique. La question ne relève d'ailleurs pas que de l'écologie ; peut-être faudrait-il consulter aussi le ministère de la cohésion des territoires ou celui du logement. Je vous engage donc, Monsieur le rapporteur, à retirer votre amendement.
J'imagine que cela a été fait… Ici, nous sommes au Parlement : laissons le Gouvernement faire ses affaires, et s'organiser comme il l'entend.
J'essaie… J'ai l'impression d'avoir tout essayé, mais ce n'est pas grave. Puisque vous ne souhaitez pas retirer votre amendement, Monsieur le rapporteur, je vais maintenir mes sous-amendements. S'ils ne sont pas adoptés, à mon profond regret, en tant que membre d'une majorité en laquelle j'ai pleine confiance, je serai amené à voter contre l'amendement.
Je ne sais pas si c'est le sens du vent, ces temps-ci… Peut-être le sens de l'histoire, mais pas le sens du vent !
Je voudrais simplement dire que cet amendement protège principalement le vendeur du bien. Vous qui connaissez le sujet de la volatilité des prix dans les territoires, vous savez aussi qu'une décote de minimum 10 % s'applique de fait aux passoires thermiques lorsqu'on essaie de les vendre.
Avec cet amendement, le vendeur pourra arguer que l'on ne peut décoter plus que nécessaire le bien dans la mesure où l'acquéreur aura ensuite les moyens de faire les travaux. Cet argument protège le vendeur du bien. Et si certains de nos collègues auraient encore des doutes, je m'engage à leur apporter les éléments complémentaires présents dans ce rapport, de façon qu'ils puissent, d'ici à la séance publique, éventuellement sous-amender sur les points qui les inquiéteraient encore.
Je maintiens mon amendement, en maintenant ma proposition d'y retravailler de manière collective.
Je maintiens moi aussi mon amendement. Je ferai observer que ces amendements ont été travaillés depuis des semaines. Je comprends tout à fait qu'on puisse déposer des sous-amendements, mais je ne veux pas qu'on nous fasse la leçon en laissant entendre que n'aurions pas travaillé. Déposer un sous-amendement à une heure seulement du débat prête aussi à interrogation.
Je ne dis pas qu'il n'y a pas eu de travail : l'intention est tout à fait intéressante. Cela étant, je m'associe totalement aux propos de mon collègue Mattei.
Permettez-moi de prendre l'exemple d'une petite maison de campagne dans un territoire très détendu, comme le mien. Disons qu'elle se vend entre 70 000 et 80 000 euros. Une consignation de 5 % du prix représentera entre 3 500 et 4 000 euros. Avec ces sommes-là, jamais l'acquéreur ne pourra faire les travaux : il préférera peut-être ne pas toucher la somme. Voilà le genre de situation qui va nous arriver : dans ce cas précis, il est certain que le montant n'est pas assez élevé. Comme le dit mon collègue Mattei, il y a quelque chose qui ne fonctionne pas. Il faut y retravailler, car c'est un sujet fondamental. C'est sûrement la bonne piste, celle par laquelle il faut aborder le sujet, mais il me semble que nous manquons d'éléments juridiques.
L'amendement CE11 a été retiré, ainsi que le sous-amendement CE717.
La commission adopte le sous-amendement CE726.
En conséquence, les sous-amendements CE732, CE730, CE733, CE727 et CE728 tombent.
Puis elle adopte le sous-amendement CE725.
Elle adopte ensuite les amendements identiques CE655, CE576 et CE614 ainsi sous-amendés.
En conséquence, les amendements CE528 et CE268 tombent.
La commission examine ensuite, en discussion commune, les amendements CE445 de Mme Delphine Batho et CE209 de M. Matthieu Orphelin.
Plutôt que de vous proposer une usine à gaz compliquée et qui ne fonctionne pas, mon amendement CE445 propose tout simplement d'instituer une obligation de rénovation lors des mutations de logements.
Sur ces questions de rénovation et d'économies d'énergie dans le bâtiment, tous les gouvernements successifs sont finalement confrontés au même processus administratif et budgétaire, se lançant à la recherche du mistigri qui n'existe pas, faute d'avoir le courage de prendre une décision simple, assortie d'un calendrier de mise en oeuvre qui peut être progressif et adapté à chaque catégorie, en commençant par les types de logements les plus énergivores. En tout état de cause, il faut éradiquer les passoires énergétiques, reconnaître le droit d'habiter dans un logement décent sur le plan énergétique et mettre en place des financements à cet effet.
Je regrette que nous n'ayons pas eu de réponse à la question posée tout à l'heure par M. Matthieu Orphelin, qui renvoyait à la proposition de faire sortir les investissements écologiques du calcul des déficits : on n'arrivera pas à changer d'échelle dans la rénovation énergétique sans un effort financier conséquent, ce qui suppose de faire jouer un certain nombre de leviers nouveaux.
Mon amendement est dans le même d'esprit que celui présenté à l'instant par ma collègue Delphine Batho. Il est vrai que je mesure l'écart entre l'ambition de ces amendements et le vote qui vient d'avoir lieu sur la consignation énergétique, qui me paraissait pourtant, en faisant la part de toutes ses imperfections, une bonne idée. Or on l'a complètement vidée de son sens !
Je vois donc bien quel sort va être réservé à cet amendement. Je n'interviendrai donc plus sur les sujets de rénovation énergétique. Pour l'instant, on loupe complètement le changement d'échelle !
Avis défavorable. Cette disposition n'est pas constitutionnelle : l'article 6 du projet de loi de transition pour la croissance verte, qui prévoyait une disposition similaire, a déjà été censuré par le Conseil constitutionnel pour atteinte au droit de disposer de son bien.
Je formulerai une demande de retrait ou, à défaut, un avis défavorable. Vous vous inscrivez dans une logique d'obligation extrêmement forte : « À compter de 2020 – autrement dès l'année prochaine –, les bâtiments privés résidentiels font l'objet d'une rénovation énergétique à l'occasion d'une mutation », sans qu'on sache d'ailleurs si cette obligation repose sur le vendeur ou sur l'acquéreur… Je vois bien l'intention poursuivie et je la comprends, mais ce dispositif n'est pas du tout opérationnel, contrairement à la mesure proposée et adoptée tout à l'heure, à savoir la consignation, qui permet d'orienter les investissements vers la rénovation énergétique au moment des ventes et des acquisitions de logements.
Je n'ai jamais compris comment, dans ce pays, on pouvait être capable de compliquer les choses de pareille manière ! On sait qu'il y a des bâtiments énergivores qui polluent et réchauffent l'atmosphère, mais on est incapable d'obliger à les mettre aux normes.
Je comprends la logique de cet amendement, mais pourquoi ne demander cette mise aux normes qu'au moment de la vente ? Mieux vaudrait laisser trois ans pour se mettre aux normes quand on pollue et quand on réchauffe l'atmosphère ? Quant à ceux qui n'ont pas les moyens de cette mise aux normes, on la leur finance.
Avec quel argent ? Mais avec ce qui avait été prévu dans notre programme électoral. On avait prévu un fonds d'avance aux propriétaires. Sachant que la durée moyenne de détention d'un bien immobilier en France est de sept ans, ces avances auraient au pire été récupérées au bout de sept ans. Cela avait été chiffré dans notre programme, où nous avions réfléchi à la possibilité de mettre sur la table 1 milliard d'euros pour amorcer ce fonds public. Si on veut, on peut. Là, on ne veut pas, tant pis !
C'est un peu émouvant : j'ai l'impression d'assister à une réunion d'anciens combattants de la campagne de 2017…
Vous avez raison de rire. Vos prédécesseurs avaient la même arrogance. J'ai vécu cinq ans avec ceux qui avaient vaincu grâce à Hollande.
D'abord, comment est-ce qu'on finance ? J'aurais quelques propositions à formuler. Quand vous voyez qu'on prévoit d'engager entre 70 et 90 milliards d'euros pour le développement de l'éolien, je trouve que votre petit milliard d'euros pour ce fonds, ce n'est rien. C'est petit bras ! Vous pouvez faire bien plus de rénovation énergétique en prenant seulement 10 % des sommes prévues pour l'éolien.
Ensuite, j'entends le rapporteur exprimer son opposition à l'amendement en disant que cela pose problème par rapport au Conseil constitutionnel. Mais on pourrait en revanche instituer un séquestre obligatoire, ce qui revient en fait au même résultat ? Si le résultat est le même, les mêmes arguments juridiques devraient être employés dans les deux cas, à savoir ceux qui découlent de la protection constitutionnelle du droit de propriété.
Je reprendrai les arguments de M. Matthieu Orphelin, pour soutenir son amendement. Car cet amendement est à peu près le seul amendement qui soit à l'échelle de l'objectif. Ensuite, le financement pourra être trouvé grâce à la solution de l'avance sur le reste à charge, solution opérationnelle et à la hauteur des enjeux. Enfin, cet argent-là ne saurait être mieux investi, puisqu'il contribue tout à la fois à la réduction de la fracture sociale, à la création d'emplois et à l'efficacité énergétique.
J'ai soutenu le projet présidentiel, et particulièrement les volets qui visaient à une certaine simplification et témoignaient d'une volonté d'agir en s'appuyant sur des éléments clairs. Or, deux ans plus tard, nous constatons une complexification et, finalement, un quasi-renoncement devant les engagements prévus. Essayons plutôt de retrouver ce qui avait rassuré les Français, notamment sur ces éléments.
La commission rejette, successivement, les deux amendements.
Elle examine ensuite les amendements identiques CE577 de Mme Huguette Tiegna et CE616 de la commission du développement durable.
L'amendement CE577 vise à préciser que l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), dans le cadre de ses missions de rénovation énergétique des logements des personnes en situation de précarité énergétique, s'appuie sur les données de consommation des logements et sur les informations dont dispose la caisse d'allocations familiales (CAF). Elle pourra ainsi mieux cibler les publics qu'elle doit aider.
L'objectif de l'amendement CE616 est bien de faire en sorte que toutes les données disponibles sur le logement puissent être utilisées par l'ANAH pour exercer ses missions et, donc, qu'elle puisse avoir accès aux données de la CAF. Car celle-ci dispose des données relatives aux DPE.
Avis favorable à ces amendements. Je pense qu'on peut l'adopter aujourd'hui ; mais il faudra limiter le transfert d'informations au seul DPE, en raison du droit applicable aux données personnelles.
Même avis : favorable, mais en prenant en compte la nécessité de l'amender en séance publique.
La commission adopte les deux amendements.
Puis, suivant l'avis défavorable du rapporteur et du ministre, elle rejette l'amendement CE208 de M. Matthieu Orphelin.
Elle examine ensuite l'amendement CE469 de M. Philippe Bolo.
Sagesse. J'en profite d'ailleurs pour dire que lorsque le Gouvernement s'en remet à la sagesse des membres de l'Assemblée, ce n'est pas pour leur suggérer de s'abstenir, mais pour les laisser se décider en toute conscience.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle examine l'amendement CE428 de Mme Stéphanie Do.
Alors que la réduction de la précarité énergétique et la détection des passoires thermiques constituent des enjeux majeurs de la politique énergétique, il convient d'associer au diagnostic de performance énergétique une étude thermographique infrarouge sur les bâtiments. Ce dispositif technique revêt un caractère incitatif, en permettant aux propriétaires ou locataires de prendre conscience de la nécessité des travaux de rénovation énergétique à réaliser.
Je comprends l'intérêt de prévoir une étude thermographique infrarouge du bâtiment ; néanmoins, avant d'en faire une obligation et de complexifier davantage le DPE, il est essentiel de le finaliser. Ce sera chose faite en 2021.
Vous allez compliquer sérieusement les transactions immobilières en exigeant, en plus d'un DPE, une étude thermographique de son logement, dont la réalisation n'est pas des plus faciles. Non seulement un diagnostiqueur n'y suffira pas, mais il faudra bien viser la saison à laquelle on met en vente son logement, car il est pratiquement impossible de réaliser des études thermographiques entre le printemps et l'automne… J'invite donc au retrait. À défaut, mon avis sera défavorable.
L'amendement est retiré.
La commission examine l'amendement CE468 de M. Philippe Bolo.
Pour accroître le niveau d'information des habitants, il faut intégrer dans le DPE le coût de la facture énergétique.
Le DPE est un outil déjà extrêmement complexe, pas encore totalement fiabilisé : ne le complexifions pas davantage. Avis défavorable.
Je demande le retrait : un autre amendement permet de traiter de la question.
L'amendement est retiré.
La commission est alors saisie de l'amendement CE523 du Gouvernement.
L'amendement CE523 vise à permettre à l'acquéreur ou au locataire potentiel d'un logement de connaître les dépenses conventionnelles de chauffage, d'eau chaude sanitaire et, le cas échéant – s'il y a une climatisation –, de froid. Le but est de mieux informer, et de manière évidemment normée, dans le cadre d'une transaction ou de la signature d'un bail, sur le coût réel de fonctionnement d'un logement.
Je vois d'un oeil favorable tout ce qui contribue à l'information des consommateurs, notamment en matière de chauffage.
La commission adopte l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement CE599 du Gouvernement et le sous-amendement CE731 de M. Jean-Paul Mattei.
Il s'agit ici des logements classés dans les catégories F et G par le diagnostic de performance énergétique. Lorsqu'ils seront mis à la vente, le DPE devra comprendre un audit énergétique, de façon à fournir à l'acquéreur potentiel des éléments concrets sur ce que pourront coûter les travaux d'amélioration du logement. L'outil est déjà expérimenté – il est d'ailleurs éligible au crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE). Cette disposition permettrait, là encore, d'avoir une meilleure information sur la réalité de ce qu'il y a à faire dans un logement dont on se porte acquéreur.
Mon sous-amendement CE731 vise à compléter l'alinéa 3 en prévoyant également une évaluation financière des travaux. Cela permettrait précisément aux locataires, et surtout aux acquéreurs, de prendre conscience des travaux qui doivent être réalisés. Sans rouvrir pas le débat assez long que nous avons eu précédemment au sujet de l'amendement de M. Cellier, je pense que ce que je propose serait une piste qui permettrait véritablement de régler le problème et d'affecter les travaux à faire. L'expérience du service public d'assainissement non collectif (SPANC), avec les obligations imposées en la matière, marche très bien : on aurait pu s'inspirer de cette méthode pour compléter l'amendement, en prévoyant un chiffrage précis.
Votre sous-amendement empêcherait les ménages d'avoir accès aux aides à la rénovation pour des travaux qui ne seraient pas explicitement prévus dans l'audit. Je suis extrêmement favorable, en revanche, à l'amendement du Gouvernement, et ce d'autant plus que l'audit énergétique est éligible au CITE depuis 2018. À cet égard, Monsieur le ministre d'État, connaissons-nous le nombre d'audits qui ont été financés grâce au CITE ?
Je suis moi aussi défavorable au sous-amendement : en l'état, il conditionnerait et donc freinerait l'accès aux aides, alors qu'actuellement il n'y a pas d'obligation de réaliser un audit préalable pour en bénéficier. Si l'on voulait vraiment aller dans ce sens à l'avenir et combiner tous les dispositifs, il faudrait réécrire la disposition. Je demande donc le retrait du sous-amendement ; à défaut, avis défavorable.
Je veux bien le retirer, et nous le retravaillerons pour la séance, mais l'enjeu n'est pas seulement celui des aides.
Le sous-amendement est retiré.
J'ai deux questions concernant l'amendement CE599. Premièrement, puisqu'il y a eu une expérimentation, quel est le coût moyen de l'audit ? Deuxièmement, ce type d'audit sera-t-il toujours éligible au CITE après la réforme de ce crédit d'impôt ? Autrement dit, s'agit-il d'un engagement du Gouvernement dans la durée ?
Le coût constaté est de 500 euros environ, mais cela dépend notamment de la taille du logement : le coût peut varier entre 500 et 700 euros.
La réponse à votre seconde question est oui : il est évident que l'audit sera toujours éligible au CITE. Comme je l'ai déjà dit, le principe du passage du crédit d'impôt à la prime est justement de faire en sorte que les contribuables n'aient pas à attendre d'avoir fait leur déclaration d'impôts pour se voir attribuer le crédit : la prime, quant à elle, est versée dès que les travaux sont effectués. En l'espèce, la prime sera versée dès que l'audit aura été enclenché et payé.
La commission adopte l'amendement.
Elle en arrive alors à l'amendement CE470 de M. Philippe Bolo.
L'amendement CE470 vise à imposer une réactualisation du diagnostic de performance énergétique douze mois après les travaux. Nous disposerions ainsi, de surcroît, d'une base de données permettant d'évaluer l'efficience de la politique publique en matière de rénovation des bâtiments.
Je comprends l'idée, mais je vous demande de retirer votre amendement, pour deux raisons. D'une part, tel qu'il est rédigé, de petits travaux éligibles au CITE devraient déboucher sur une révision du DPE, ce qui est relativement coûteux. D'autre part, il ne me paraît pas opportun d'obliger à la réalisation d'un nouveau DPE après les travaux : soit la personne qui les a effectués occupe son bien, auquel cas elle n'en a pas besoin, soit elle le loue, auquel cas elle a de toute façon tout intérêt à le faire réaliser.
L'amendement est retiré.
La commission examine ensuite l'amendement CE700 du rapporteur.
Il est essentiel que le Parlement dispose de données chiffrées pour mieux évaluer l'atteinte de nos objectifs en termes de rénovation des bâtiments. Cet amendement prévoit donc que le Gouvernement remette un rapport au Parlement sur le sujet, même si cela contredit un peu les propos que j'ai tenus depuis le début de l'examen du texte au sujet du nombre trop important de demandes de rapport – je le dis avant que certains ne le fassent à ma place. Celui-ci précisera notamment le nombre de passoires thermiques qui ont fait l'objet d'une rénovation et le nombre de celles devant encore être rénovées.
J'ai déjà dit ce que je pensais de la multiplication des demandes de rapport. Toutefois, je suis tout à fait favorable, évidemment, à ce que l'on fasse un état des lieux annuel de la progression du nombre de rénovations : sagesse.
La commission adopte l'amendement.
Ensuite de quoi elle est saisie de l'amendement CE214 de M. Jean-Louis Bricout.
… et qui va faire plaisir au président, au ministre d'État et au rapporteur.
Je propose une expérimentation visant à faire sortir de la précarité énergétique les occupants des logements énergivores, sujets dont nous parlons depuis tout à l'heure. Je ne vous rappellerai pas en détail les enjeux, qui sont, bien sûr, d'ordre écologique, puisque les logements représentent 43 % de la consommation énergétique française : à travers cet amendement, nous entendons satisfaire aux objectifs pour 2050 définis par la loi relative à la transition énergétique. Mais les enjeux sont également sociaux et économiques.
Le dispositif sort un peu des codes budgétaires habituels. Il permettra en outre de simplifier le recours aux aides accordées par l'État et les collectivités. Les propriétaires de logements énergivores, c'est-à-dire consommant plus de 330 kilowattheures par mètre carré et par an, pourront prétendre à ce dispositif.
La méthodologie serait la suivante. Le propriétaire éligible s'adresserait à un guichet unique, par exemple à un établissement départemental ad hoc – je pense notamment à Picardie Pass rénovation –, tiers de confiance et financeur. Cet établissement établirait un audit du logement, comme le voulait M. le monsieur d'État, et définirait une assiette de travaux permettant d'atteindre une consommation de 90 kilowattheures. L'assiette de travaux énergétiques serait alors validée par l'ANAH et ouvrirait droit à une subvention forfaitaire correspondant à 30 % du montant. Autrement dit, nous proposons de simplifier la procédure : il n'y aurait plus qu'un seul dispositif. Une avance équivalente au montant des travaux éligibles serait confiée à un guichet unique ; elle serait récupérée au moment de la mutation du bien, déduction faite de la subvention accordée. L'acompte initial et le montant récupéré seraient inscrits dans un acte notarial – M. Mattei n'est plus parmi nous, mais il pourrait vous dire que c'est tout à fait possible.
Eh bien, je n'en suis pas sûr, en fait… (Sourires.) Dans cette commission, la règle est de s'en tenir à deux minutes par amendement.
On peut rester cinq minutes de plus au chaud quand il y a des gens qui passent leurs hivers dans le froid.
Tout le monde ici est logé à la même enseigne – c'est le cas de le dire. Je vous demande donc de conclure.
L'acompte, disais-je, serait récupéré au moment de la mutation du bien, qu'il s'agisse d'une succession ou d'une vente. Le dossier serait suivi par l'établissement ad hoc du début du chantier jusqu'au paiement des entreprises.
Ce dispositif présenterait plusieurs avantages. D'abord, il s'agirait d'une avance – autrement dit, l'État récupérerait une partie des moyens engagés. Ensuite, il représenterait, pour l'occupant, un gain net de pouvoir d'achat, en lui évitant de recourir à un prêt.
Mais enfin, Monsieur le président, ce n'est pas sérieux ! Je voudrais avoir un peu plus de temps.
Le dispositif représenterait, pour l'occupant, un gain net de pouvoir d'achat, car il n'aurait plus de prêt à rembourser – les prêts, on le sait bien, viennent souvent minimiser les gains découlant des économies d'énergie. Le dispositif lèverait également le frein que constitue le reste à charge. En outre, le paiement des entreprises serait garanti, puisque l'agence s'occuperait de tout. Enfin, on lèverait les freins liés à l'engagement des travaux pour les propriétaires bailleurs qui ne bénéficient pas du retour sur investissement.
La problématique est ainsi envisagée globalement. L'avance serait remboursée, déduction faite de la subvention. Ce serait une réelle incitation pour les primo-accédants, lesquels auraient à financer seulement l'acquisition, et non plus les travaux dans un logement énergivore. C'est un dispositif global. Il est dommage que nous n'ayons pas eu le temps de le présenter.
Tout en respectant le travail que vous avez fait pour rendre ce dispositif explicite et digeste pour l'ensemble de la commission, je vous demande de retirer votre amendement, Monsieur Bricout. Le Gouvernement fait déjà un travail important pour accroître la visibilité et la lisibilité des aides : le CITE va être transformé en prime pour les plus modestes et les certificats d'économie d'énergie (CEE) précarité énergétique ont été créés. De plus, il existe un fonds de garantie pour la rénovation énergétique, qui facilite la délivrance par les banques des écoprêts aux ménages les plus modestes.
Je comprends bien la logique du dispositif. On pourrait dire, même si ce n'est pas là le langage habituel de M. Bricout, qu'il s'agit d'une sorte d'apport en capital, et que l'investisseur – en l'occurrence l'État – récupérerait sa mise lors de la revente.
En effet. C'est quelque chose qui peut s'entendre, même si cela suppose quand même la mobilisation de sommes importantes, puisqu'il n'y a pas de retour sur investissement pour le financeur, l'État récupérant le capital seulement lors de la vente – dont il ne maîtriserait d'ailleurs pas la date.
Le dispositif pose un autre problème, assez délicat et bien connu de tous ceux qui travaillent sur les questions de logement : tout ce qui s'apparente à un retour sur succession est, en définitive, assez dissuasif. Les gens ont relativement peu recours à de tels systèmes.
Enfin, dans les zones où les logements se vendent à des prix assez bas – nous en parlions précédemment –, avec ce système, contrairement au dispositif de consignation examiné tout à l'heure, limité à 5 % du prix –, les montants engagés peuvent être élevés au regard du prix de vente. Pour reprendre l'exemple de M. Turquois – et je ne pense pas que quiconque puisse contester ce qu'il disait –, dans certains territoires, il arrive qu'une maison se vende 70 000 ou 80 000 euros. Or, pour rénover des passoires énergétiques datant des années 1970, les travaux peuvent monter facilement jusqu'à 30 000 ou 40 000 euros. Si vous récupérez ce montant au moment de la vente, cela veut dire que le produit de celle-ci est assez faible. Le dispositif mériterait d'être sérieusement réexaminé s'il devait un jour être adopté. Je vous proposerai plutôt de retirer votre amendement ; à défaut, avis défavorable.
C'est dommage car, à l'heure actuelle, nous avons des dispositifs de rénovation « à la découpe », en quelque sorte : on change la chaudière et la fois d'après on refait les fenêtres. Avec le dispositif que je propose, il s'agirait de financer la totalité des travaux par une avance, avec une vision globale de la rénovation du logement, ce qui me paraît important – y compris du point de vue social, pour faire sortir vraiment les gens de la précarité énergétique. Il y aurait également un gain net de pouvoir d'achat : le reste à charge serait complètement financé et on éviterait le système bancaire, avec tous les frais qui vont avec. Cela simplifierait considérablement tous les systèmes existants. Comme vous le savez, les acteurs du logement, quand ils montent un dossier pour sortir les gens de cette grande précarité, doivent parfois trouver jusqu'à dix ou onze sources de financement. Le dispositif reposerait sur une subvention forfaitaire, qui serait la seule partie de la somme globale à ne pas être récupérée, mais qui se substituerait aux aides actuelles.
Je pense donc que le dispositif présenterait beaucoup d'avantages, à commencer par celui de simplifier le système des aides. En plus, l'argent ne coûte pas cher : les intérêts de l'avance ne représenteraient pas grand-chose, il y aurait seulement des frais de gestion. En fin de compte, la perte pour l'État se limiterait au montant de la subvention forfaitaire, laquelle – je le répète – remplacerait tous les dispositifs existants. Nous pourrions donc avancer vite.
Le problème, pour les gens modestes, vous le savez, c'est le reste à charge : même quand ils ont droit à des subventions, ils sont souvent obligés d'avancer l'argent pour payer les entreprises, ce qui bloque complètement les dossiers. Les bailleurs ont exactement le même problème, lié au retour sur investissement, et eux non plus ne font pas les travaux. Avec le dispositif que je propose, nous débloquerions complètement la situation.
Il répond à toutes les questions soulevées dans le débat sur le séquestre. Rien de tel ici : on accorde une avance et on la récupère sur le bien. C'est donc un dispositif qui est assis sur la valeur du bien. Peut-être faut-il effectivement, pour certains logements dont le coût d'acquisition est très bas, limiter le montant des travaux. Quoi qu'il en soit, je pense que le dispositif répond à tous les enjeux qui ont été évoqués.
Monsieur le rapporteur, vous avez cité un certain nombre de dispositifs. Pour connaître un peu la manière dont ils sont appliqués sur le terrain, je crois pouvoir dire que la proposition de notre collègue Jean-Louis Bricout n'a pas d'équivalent – du reste, ces dispositifs ne fonctionnent pas, et nous le savons. Le mérite de cette proposition est d'essayer autre chose. Il y a une forme de radicalité, de fluidité et de simplicité dans ce qui est proposé ; cela mérite d'être étudié. C'est une véritable innovation. Le dispositif n'a pas été conçu sur un coin de table : c'est le fruit d'un travail réalisé avec des départements, avec l'ANAH, des partenaires de l'immobilier et des intervenants du secteur social.
Ensuite, Monsieur le ministre d'État, vous évoquez le retour tardif pour l'État. Il me semble qu'avec le système de séquestre, il n'était pas très rapide non plus. Quoi qu'il en soit, c'est de l'argent qu'on récupérera un jour : il y a donc, pour l'État, une sorte de garantie. Le faible coût de l'argent permet de faire ce genre d'opération.
Enfin, pourquoi êtes-vous si réticent ? Nous proposons seulement une expérimentation. Mettons en oeuvre le dispositif dans un département, voire dans une ville, et observons ce qui se passe. Dans trois ans, nous en tirerons les conclusions. Cela n'aura pas ruiné l'État et nous aurons peut-être trouvé un levier efficace. Je vous le dis franchement : je trouve que vous faites preuve de peu d'ouverture d'esprit à l'égard d'une proposition aussi bien construite et précise.
Je suis conscient de la difficulté qu'ont nos concitoyens à comprendre le système actuel des aides. Moi-même, pendant le travail sur ce texte, j'ai joué au « client mystère », essayant de compiler l'ensemble des offres. Oui, c'est difficile ; oui, c'est complexe. Mais je sais aussi, pour en avoir discuté avec le ministère de la transition écologique et solidaire, qu'un travail considérable est en cours pour simplifier le système. Les aides existent déjà et l'enjeu est bien identifié : il faut simplifier les choses, faciliter l'accès aux dispositifs et mieux informer les Françaises et les Français.
Il y a certes la règle des deux minutes, et il est normal qu'elle s'applique à tout le monde mais, lorsque nous examinons des amendements traduisant la volonté de faire un véritable travail de fond, il faudrait tout de même, ne serait-ce que par respect pour le travail accompli par l'auteur de l'amendement, que nous ayons un véritable débat.
J'ai donc, pour ce qui me concerne, examiné le dispositif proposé. Il présente deux avantages. Premièrement, il existe actuellement de nombreux mécanismes, parfois même des doublons, des crédits d'impôt, des subventions et plusieurs niveaux ; face à cela, l'amendement offre l'avantage de la simplicité. Deuxièmement, il permet d'avoir une vision globale et un outil unique. Ce serait là, à mon avis, une véritable avancée. De ce point de vue, la démarche de notre collègue doit être saluée.
Cela dit, je me pose plusieurs questions. Effectivement, on évite le secteur bancaire. Il serait donc intéressant de savoir ce que cela représente pour celui-ci. S'agit-il d'un marché qui n'intéresse pas les banques ? En cas de massification du dispositif, cela ne risque-t-il pas de leur poser un réel problème ? Se pose aussi la question du suivi, évidemment, parce qu'il faudra bien, à un moment donné, récupérer les sommes engagées. Est-ce l'administration fiscale qui le ferait ? Cela suppose de mettre en place une organisation adéquate. Enfin, quel niveau de collectivité piloterait le dispositif ? On a beaucoup parlé de l'État, mais je pense qu'il faut se demander s'il ne vaudrait pas mieux appliquer le principe de subsidiarité, c'est-à-dire laisser la gestion du dispositif aux collectivités locales.
Si je ne crois pas que le dispositif soit immédiatement applicable, j'aurais souhaité que l'on essaie soit d'étudier, avec l'aide du Gouvernement, les moyens de l'affiner, soit de lancer une expérimentation – dans une commune ou dans un département, par exemple –, ne serait-ce que pour voir si cela fonctionne.
En ce qui concerne le suivi des travaux, Monsieur Aubert, le dossier serait confié à une sorte de guichet unique, un établissement ad hoc établissant au préalable l'audit complet du logement. On pourrait même étendre le dispositif à des travaux d'adaptation du logement au vieillissement ou au handicap – ainsi, nous aurions vraiment une approche complète et globale du logement. Le suivi serait effectif d'un bout à l'autre de la procédure : le périmètre des travaux serait validé par l'ANAH, mais celle-ci confierait à un organisme les fonds correspondant au montant des travaux, de façon à payer immédiatement les entreprises, ce qui éviterait un certain nombre de déboires que l'on connaît à l'heure actuelle. Le dispositif permettrait de résoudre les problèmes qui freinent le déclenchement des travaux.
S'agissant de la démagogie de M. Aubert, no comment ! Tout à l'heure, il nous expliquait qu'une consignation à 5 % était extrêmement dangereuse, qu'elle posait de nombreux problèmes, notamment de fiscalité, que nous n'avions pas envisagé tous les aspects de la question. Maintenant, alors qu'il s'agit de verser 100 % du prix des travaux et de n'en récupérer que 70 % à la revente, il nous dit qu'il n'y a pas de problème, qu'il faut y aller,…
… qu'il faut même confier le dispositif aux collectivités locales – même si, j'imagine, c'est quand même l'État qui paiera : je ne vous vois pas aller expliquer aux maires que c'est à eux de le faire. Je sais bien que cela va être comme ça d'un bout à l'autre de l'examen du texte : ce n'est pas grave, je suppose qu'il faut s'y habituer… En ce qui me concerne, je crois que je n'y arriverai pas. Je pensais que nous pouvions partager un peu d'esprit de responsabilité, malgré les divergences politiques.
Pour en revenir à M. Bricout, je lui reconnais le mérite d'avoir de la suite dans les idées : il a déjà fait cette proposition dans le cadre d'un autre débat. D'ailleurs, son dispositif s'affine et se précise au fur et à mesure du temps.
On ne peut pas l'accepter comme cela, Monsieur Potier, sans aller au fond du sujet. J'ai pris l'exemple des zones détendues – comme on dit dans le jargon –, où les prix des logements sont bas, mais on pourrait aussi parler des zones où les prix sont assez élevés, ou en tout cas dynamiques. Là, le résultat serait inverse, et cela créerait de fait des injustices : à revenu égal, un ménage investissant dans une zone détendue perdrait de l'argent quand un ménage investissant dans une zone tendue réaliserait une plus-value. À partir du moment où le dispositif est financé avec de l'argent public, cela mérite qu'on y réfléchisse quelques instants.
Au demeurant, nos objectifs se rejoignent, et je propose à M. Bricout de continuer à travailler avec lui – ainsi qu'avec ceux qui ont construit le dispositif à ses côtés. Ce qu'il propose existe déjà pour partie : un opérateur, en l'occurrence l'ANAH, sous-traitant à des organismes comme SOLIHA – Solidaires pour le logement –, peut d'ores et déjà aller voir les ménages modestes habitant dans des passoires énergétiques – ou, disons, dans des logements très peu performants – et regarder ce qu'il est possible de faire. Toutefois, il faut en effet améliorer le système, faire en sorte que l'aide soit plus importante pour certains logements, et combiner les différentes sources de financement. Faut-il, pour cela, mobiliser de l'argent public ou bien avoir recours à un prêt de longue durée ? Le dispositif mérite d'être affiné. C'est la raison pour laquelle je vous propose, Monsieur Bricout, de retirer l'amendement et que nous continuions à y travailler. À défaut, je maintiendrais mon avis défavorable.
Monsieur le président, vous animez toujours cette commission avec talent et avec le souci de faire en sorte que tout se passe bien – je vous le dis très sincèrement. Je ne comprends pas, en revanche, Monsieur le ministre d'État, votre obsession à l'endroit de mon collègue Julien Aubert. Pourtant, il ne vous rappelle pas à chacune de ses interventions que vous souhaitiez, à une certaine époque, 100 % d'énergies renouvelables… Il ne fait pas d'obsession, lui. Si nous voulons préserver le climat de nos débats, marqué par le souci de trouver des solutions, il ne faut pas que nous versions dans la caricature. Nous cherchons vraiment des dispositifs : il ne faut pas caricaturer. Mon collègue a manifesté son intérêt pour le dispositif proposé, tout en disant qu'il fallait peut-être le compléter. À cet égard, on pourrait effectivement s'interroger sur sa validité si, dans certaines zones détendues, la valeur de la mutation devait être inférieure au montant versé pour les travaux.
On peut donc tout à fait souligner l'intérêt du dispositif tout en invitant à continuer à y travailler – c'est d'ailleurs l'objet de l'examen en commission. Je souhaite vraiment que le climat soit apaisé, que nous évitions une surchauffe climatique alors que nous discutons de ce projet de loi relatif à l'énergie et au climat. (Sourires.) Nous devons appréhender ces enjeux d'une manière aussi apaisée que possible.
Monsieur le ministre d'État, prenez l'exemple d'une ville ou d'un département et faites-nous une simulation financière – nous vous avons demandé la même chose à propos du tableau concernant les aides aux énergies fossiles. Cela éclairerait le débat – je ne parle pas, quant à moi, de l'apaiser, car nous ne sommes pas du tout énervés. Ainsi, nous serions en mesure de nous prononcer, en responsabilité. Vous nous dites que cela coûte cher. Nous vous proposons d'essayer pendant trois ans dans une ville. Combien cela coûterait-il ? Je suis sûr que vos services pourraient nous fournir une estimation d'ici à demain.
Bien entendu, ils vont faire cela pendant la nuit !
Pourrions-nous avancer, Monsieur Potier ? Je suis sûr que nous parlerons de nouveau du dispositif en séance. Ne me dites pas non plus que cet amendement n'a pas été accueilli avec toute la considération qu'il méritait : cela fait quand même un quart d'heure que nous en discutons – même si, je le reconnais, il est important. S'il vous plaît, pourriez-vous conclure ? Je considère que la commission est suffisamment éclairée. Je vous prie de terminer votre intervention, après quoi je mettrai l'amendement aux voix.
Vous pourriez respecter ma prise de parole au lieu de m'interrompre.
Il ne vous est pas impossible, me semble-t-il, Monsieur le ministre d'État, de nous éclairer sur le montant d'une expérimentation portant sur un espace géographique donné. Une telle demande ne me paraît pas déplacée de la part d'un parlementaire. Par ailleurs, il pourrait être intéressant de ménager, dans l'amendement, une place pour un décret ayant pour objet de préciser les choses, de manière à éviter tous les pièges que vous nous signalez. Cela nous permettrait de trouver une solution en séance – car nous reviendrons évidemment sur la question, avec la même volonté de mener cette expérimentation.
Nous proposons en effet une simple expérimentation. J'ai réalisé un chiffrage du dispositif, mais je n'ai pas eu le temps d'aller jusqu'au bout de ma présentation. De plus, il vous reviendrait de définir le périmètre de manière à ce que l'expérimentation ne coûte pas trop cher et que l'on puisse régler tous les détails. Je vous propose de vous envoyer une description complète du dispositif en vue de l'examen du texte en séance.
En ce qui concerne les zones non tendues, ou encore les acquisitions, il est possible de trouver des solutions. S'agissant de la récupération de l'argent, le système serait bien cadré. Dans le cadre de l'aide sociale à l'hébergement (ASH), on place quelqu'un dans une maison de retraite et le département récupère la somme sur l'aide sociale perçue. Là, nous demandons que l'avance soit inscrite dans un acte notarial, pour permettre ensuite de récupérer l'argent sur le bien – l'État aurait même la priorité. En fin de compte, je le répète, le dispositif est assis sur le bien.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement CE343 de Mme Delphine Batho.
Faut-il chauffer des bureaux vides la nuit ? La réponse est non. Cet amendement s'inscrit dans le cadre d'un ensemble de propositions très simples pour mettre fin à ce qui constitue du gâchis énergétique. Je voudrais souligner aussi qu'il y a urgence à provoquer un changement culturel dans le rapport à l'énergie, faute de quoi tous les efforts qui pourront être faits en termes d'isolation des bâtiments – qu'il s'agisse de bâtiments d'habitation ou de locaux professionnels – provoqueront un effet rebond sur la consommation d'énergie. Si on veut avoir une réelle efficacité, tout ce qui concerne les travaux d'amélioration de l'efficacité énergétique des bâtiments doit s'accompagner de mesures visant à changer les comportements de consommation.
Comme vous l'expliquez très bien dans l'exposé sommaire de cet amendement, Madame Batho, réduire le chauffage de 1 degré permet de diminuer la consommation énergétique de 7 %. Il faut y insister, car c'est très important. Cela dit, la partie réglementaire du code de l'énergie prévoit déjà que, pendant les périodes d'inoccupation des locaux d'une durée égale ou supérieure à vingt-quatre heures consécutives, la température moyenne du chauffage est limitée à 16 degrés – 8 degrés au-delà de quarante-huit heures. Peut-être devrions-nous aller encore plus loin – c'est en tout cas mon avis –, par exemple en envisageant une modulation à la semaine pour les bâtiments inoccupés, ou encore pendant la nuit. En tout état de cause, il faut être un peu plus ambitieux. Toutefois, la mesure que vous proposez est de niveau réglementaire et non législatif. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement.
Faut-il chauffer les bâtiments inoccupés pendant la nuit ? La réponse est non. Faut-il inscrire cela dans la loi de façon aussi précise ? La réponse est également non. Je vous propose donc de retirer cet amendement ; à défaut, avis défavorable.
Je le maintiens. Comme les dispositions réglementaires de cette nature – j'en évoquerai d'autres par la suite – ne sont pas appliquées, il me semble utile de légiférer.
La commission rejette l'amendement.
Elle est alors saisie de l'amendement CE580 de M. Damien Adam.
Cet amendement vise à rendre obligatoire la présence d'un thermostat d'ambiance programmable ou connecté dans l'ensemble des logements d'ici à la fin 2021. Cette installation permet de réduire considérablement la consommation de chauffage – jusqu'à 40 % –, et par conséquent la facture énergétique des ménages. Ces thermostats connectés sont désormais proposés à des prix modérés si l'on considère les économies possibles et les aides financières éligibles. En parallèle, pour rendre l'obligation acceptable, l'installation de ces dispositifs pourrait être rendue éligible au CITE.
L'idée a deux vertus : premièrement, faire baisser la consommation, deuxièmement, diminuer en même temps le montant de la facture. Je suis donc sensible à votre idée d'une maîtrise active de la consommation d'énergie, qui est effectivement essentielle. Néanmoins, l'amendement suppose que les équipements de chauffage soient pilotables, ce qui n'est a priori pas le cas tout le temps, sauf erreur de ma part – je pense par exemple au chauffage au gaz collectif. Toutefois, l'idée mériterait d'être approfondie. Je demande donc le retrait de l'amendement, mais il faut continuer à creuser, car l'idée est vraiment bonne.
Même argumentation et même position.
La disposition est peut-être de niveau réglementaire. Il faut aussi examiner les technologies disponibles : nous pouvons réfléchir notamment à cet aspect.
Je suis prêt à ce que l'amendement soit sous-amendé, par exemple en le limitant aux systèmes programmables. Ce serait déjà une avancée intéressante pour toutes les personnes ayant un équipement de ce type.
Je n'ai pas dit cela, Monsieur le président. Peut-être, en vue de la séance, pourrions-nous travailler sur l'amendement de manière à ce qu'il recueille un avis favorable. Dans cette hypothèse, je le retire.
L'amendement est retiré.
La commission examine l'amendement CE610 de M. François Pupponi.
On a beaucoup parlé des acteurs privés, notamment de ceux qui ne respectaient pas les normes. Je vous propose de parler de l'État, en particulier d'EDF. En effet, il existe encore aujourd'hui en France une centrale électrique fonctionnant au fioul lourd. Cela pollue, c'est dangereux pour la santé, cela réchauffe le climat – et cela continue. La question est de savoir jusqu'à quand. Je propose pour ma part que cela s'arrête en 2021 – et je suis gentil, parce que cela fait longtemps qu'on aurait dû arrêter d'utiliser du fioul lourd. Voilà trente ans qu'on nous le promet, que les préfets nous disent de ne pas nous inquiéter, que cela va s'arranger. Je propose donc de dire stop en 2021, qu'on arrête à cette date de produire de l'électricité avec du fioul lourd. Je ne suis même pas sûr que la pratique ait encore cours dans les pays sous-développés !
Je ne suis même pas sûr que les pays sous-développés eux-mêmes existent encore… (Sourires.)
Je partage votre analyse, Monsieur Pupponi : il faut utiliser de moins en moins le fioul lourd et fortement carboné. J'ai moi-même, dans mon territoire, vu fermer un site de production de ce type. Néanmoins, Réseau de transport d'électricité (RTE) a démontré que la suppression en 2021 des turbines à combustion (TAC) au fioul serait de nature à créer de sérieux problèmes de sécurité d'approvisionnement.
Monsieur Pupponi, nous souhaitons évidemment – vous le savez, et nous le disons depuis le début de l'examen du projet de loi – sortir de la production d'électricité par le charbon et le fioul, et même, à terme, par le gaz. Je ne suis pas sûr de savoir exactement de quelle centrale vous voulez parler, mais j'ai ma petite idée…
Nous pensions bien à la même ; cela va mieux en le disant.
En l'occurrence, la situation des îles, qu'elles soient en métropole ou outre-mer, est particulière : il s'agit de ce que l'on appelle des « zones non interconnectées ». Je vous rappelle d'ailleurs qu'il y a une programmation pluriannuelle de l'énergie pour chacun de ces territoires. Nous menons des discussions approfondies avec les élus de la collectivité de Corse. En ce qui me concerne, ma position sur la question est très claire : la priorité est de sortir du fioul lourd. Pour cela, il faut basculer, dans un premier temps, vers le gaz naturel, parce que la production renouvelable n'est pas en mesure de faire face rapidement aux besoins d'électricité de la Corse. Or cela suppose de garantir l'approvisionnement en gaz de l'île, ce qui n'est pas chose aisée puisque, s'il y a la possibilité de créer un appontement à Bastia, ce n'est pas le cas à Ajaccio. On pourrait construire un gazoduc entre Bastia et Ajaccio. Cela ne me paraît pas extrêmement réaliste, mais si c'était la seule solution, nous tenterions de le faire – je dis bien que nous le « tenterions », car ce ne serait pas une mince affaire. Un autre système d'approvisionnement par la mer, tout en préservant le golfe d'Ajaccio, qui est un site particulier, pourrait être envisagé. Quoi qu'il en soit, cela ne se fait pas en claquant des doigts, ni par le biais d'un amendement.
C'est Mme Ségolène Royal qui avait proposé une solution censée être opérationnelle. Après 2023, je le rappelle, on ne pourra plus utiliser le fioul lourd.
Je soutiens cet amendement et je pense qu'il serait utile pour tout le monde de comprendre ce qui se passe. Plusieurs gouvernements et ministres successifs ont annoncé l'arrêt du fioul lourd en Corse – même si cela suppose, ensuite, la question du passage au fioul léger puis au gaz, ce qui ne va pas sans poser problème, comme vous l'avez dit. Comment se fait-il que cela ne soit pas encore fait au bout de tant d'années ? Que se passe-t-il ? Cela m'intéresserait de le savoir.
Je n'entrerai pas trop dans les détails, car ce serait long. Certains territoires d'outre-mer sont confrontés au même problème : on ne remplace pas des centrales aussi facilement que cela. Il y a un débat en Corse, mais aussi entre les élus de Corse, l'État et EDF, sur le dimensionnement de la centrale qui doit remplacer la centrale au fioul lourd – laquelle, en plus de fonctionner au fioul lourd, est en fin de vie, ce qui veut dire que, de toute façon, il faut en construire une nouvelle.
Pour ma part, je ne souhaite pas qu'on construise une centrale au fioul. Il s'agira donc d'une centrale au gaz naturel. En outre, je ne souhaite pas, aussi bien pour le climat que pour des raisons financières, que le nouvel équipement soit surdimensionné. Je laisse de côté la question du gazoduc – même si elle se pose bel et bien, car une centrale à gaz qui n'est pas alimentée en gaz ne sert à rien.
Ceux qui disent – c'est le cas aujourd'hui encore dans Corse-Matin – qu'il suffit de faire un gazoduc se paient de mots. J'entends dire aussi que les technocrates ont pris le pouvoir au ministère. Comme d'habitude, ce sont des mots, pas des solutions. En l'occurrence, nous cherchons des solutions techniques concrètes.
Par ailleurs, Madame Batho, je pense que vous savez, pour avoir été confrontée au problème, que, dans toutes les zones non interconnectées, le système n'est pas le même que dans le reste du pays : l'opérateur – en l'occurrence EDF, qui jouit d'un monopole – est rémunéré sur la base de la capacité installée, non de la production réelle. Ce mécanisme est inflationniste : il pousse à faire des centrales de grande taille, en totale contradiction avec notre politique climatique car, par la suite, cela pousse à émettre davantage de gaz à effet de serre. Je souhaite réformer ce mode de fonctionnement. J'ai entrepris de le faire en discutant avec les élus de Corse – même si ces derniers n'exercent pas la compétence : ils ont simplement la capacité d'élaborer la programmation pluriannuelle de l'énergie. Si vous le souhaitez, je pourrais vous donner d'autres détails, notamment quant au fait que la révision de la PPE n'a pas encore été enclenchée, alors qu'elle avait été parmi les premières à être adoptées en 2015.
J'entends ce que vous dites, Monsieur le ministre d'État, mais le problème est qu'un choix a été fait il y a quelques années, en l'occurrence celui de remplacer la centrale du Vazzio d'abord par une centrale au fioul léger, puis par une centrale au gaz. Peut-être est-elle surdimensionnée, mais si on remet en cause ce projet, on repart pour cinq ou six ans, voire dix.
Mais non !
La procédure est en cours, les appels d'offres avaient été lancés, la centrale avait été choisie, de même que les entreprises : si on repart à zéro, je vous le dis – je connais un peu le dossier et j'ai moi aussi rencontré les élus de l'île –, tout le monde s'accorde pour dire qu'on ne tiendra pas les délais, et on laissera donc fonctionner encore longtemps une centrale au fioul vétuste, dangereuse, qui pollue et abîme la santé. Je suis personnellement intéressé – mes enfants ont été scolarisés à Ajaccio pendant des années : qui accepte de vivre dans un endroit où on brûle du fioul lourd ? On ne peut pas dire aux habitants qu'on continue à réfléchir – et à les polluer. Le choix a été fait : tant pis, assumons-le !
Je remercie M. le ministre d'État pour sa réponse. J'ai compris ce qu'il a voulu dire, y compris entre les lignes.
Je souhaite vous poser encore une question : concernant la nécessité de changer les règles du jeu pour les zones non interconnectées (ZNI), prévoyez-vous une ordonnance dans ce projet de loi, comme le Gouvernement le propose pour d'autres sujets, ou bien s'agira-t-il d'un travail à plus long terme – car, au-delà de la Corse, cela concerne toutes les îles ?
Il faut modifier l'ensemble du système, effectivement, et cela ne figure pas dans le présent texte. En revanche, nous encourageons la modification de chaque PPE – car il y en a une par territoire : c'est vrai pour la Corse et les îles outre-mer, mais pas pour les îles bretonnes, dont le fonctionnement est différent. L'objectif est bien de développer les énergies renouvelables. Par ailleurs, en général – et cela vaut pour les élus corses ; je ne sais pas si M. Pupponi se considère comme l'un d'entre eux (Sourires) –, les élus des îles concernées revendiquent l'autonomie énergétique de leur territoire. Or celle-ci ne saurait passer par l'importation de fioul ou de gaz : l'autonomie suppose le développement des énergies renouvelables, mais aussi de réaliser des économies d'énergie. C'est précisément à cela que nous travaillons avec les élus de la collectivité de Corse.
Avant de mettre aux voix cet amendement, je dois vous informer que, ce soir, nous avons examiné 52 amendements en trois heures, soit un peu moins de 18 par heure, contre 25 hier. Autrement dit, nous ralentissons. Il nous en restera 229 à examiner une fois que nous en aurons fini avec celui-ci, c'est-à-dire une petite moitié de l'ensemble des amendements sur ce texte. Cela peut nous occuper jusqu'à vendredi, voire samedi – en tout cas, à ce rythme, nous en avons pour une bonne dizaine d'heures. Je souhaite que tout le monde soit conscient de ce défi, et ce d'autant plus que certains d'entre vous, je le sais, ont d'autres défis particuliers à relever ce samedi… (Sourires). J'espère que les responsables de groupe seront présents au début de la réunion demain pour que nous évoquions le déroulement des débats, car je pense que nous pourrions accélérer légèrement.
La commission rejette l'amendement.
Membres présents ou excusés
Réunion du mercredi 19 juin 2019 à 21 h 50
Présents. – M. Damien Adam, M. Patrice Anato, M. Julien Aubert, Mme Delphine Batho, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Thibault Bazin, Mme Sophie Beaudouin-Hubiere, M. Yves Blein, M. Philippe Bolo, M. Éric Bothorel, M. Sébastien Cazenove, M. Anthony Cellier, M. Yves Daniel, Mme Typhanie Degois, M. Michel Delpon, M. Nicolas Démoulin, Mme Marguerite Deprez-Audebert, M. Julien Dive, Mme Stéphanie Do, Mme Véronique Hammerer, Mme Christine Hennion, M. Antoine Herth, M. Guillaume Kasbarian, Mme Laure de La Raudière, Mme Célia de Lavergne, Mme Marie Lebec, Mme Annaïg Le Meur, M. Roland Lescure, Mme Graziella Melchior, M. Jean-Baptiste Moreau, M. Mickaël Nogal, Mme Valérie Oppelt, Mme Anne-Laurence Petel, M. Dominique Potier, Mme Huguette Tiegna, M. Nicolas Turquois
Excusés. – Mme Anne Blanc, M. José Evrard, M. Sébastien Jumel, Mme Frédérique Lardet, Mme Bénédicte Taurine
Assistaient également à la réunion. – M. Guy Bricout, M. Jean-Charles Colas-Roy, M. Sacha Houlié, M. Jérôme Lambert, M. Jean-Paul Mattei, Mme Marjolaine Meynier-Millefert, M. Matthieu Orphelin, M. Jimmy Pahun, M. Bertrand Pancher, Mme Mathilde Panot, M. François Pupponi, M. Jean-Hugues Ratenon, Mme Nathalie Sarles, M. Benoit Simian, M. Jean-Marc Zulesi