La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures.
Cet après-midi, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s'arrêtant à l'article 36 A.
L'amendement no 286 de Mme Delphine Batho est défendu.
La parole est à M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur de la commission spéciale pour le titre III, pour donner l'avis de la commission.
La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, pour donner l'avis du Gouvernement.
Défavorable également.
L'amendement no 286 n'est pas adopté.
L'amendement no 5316 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 36 A, amendé, est adopté.
Je veux d'abord rappeler que, comme chacun dans cet hémicycle, je suis tout à fait conscient de l'urgence qu'il y a à agir pour protéger l'environnement face aux dommages engendrés par notre société et notre mode de vie. Je sais également qu'il revient à nos industries de prendre leur part dans la transition écologique, même s'il convient également de tenir compte des coûts, notamment humains, qu'elle implique. En l'espèce, le secteur aéronautique, objet de cet article, doit évidemment se moderniser et se verdir.
Cela étant, il ne faut pas que cette mutation se fasse au détriment des millions de salariés que cette industrie fait vivre, à plus forte raison parce que le contexte actuel de crise sanitaire n'est pas habituel. Nous ne pouvons l'ignorer ou faire comme si la crise n'avait pas déjà entraîné des milliers de licenciements. Nous appuyant sur les chiffres de l'INSEE, nous avons avancé le chiffre de 8 000 personnes licenciées en Occitanie dans le secteur aéronautique, dont près de la moitié pour le seul département de la Haute-Garonne. Cet aspect est bien réel et on ne peut l'occulter.
L'idéal écologique ne saurait être uniquement négatif, ni punitif. Il est légitime que le législateur assortisse chaque changement profond qu'il impose de propositions, d'idées positives ou de solutions de remplacement. En l'occurrence, interdire certains vols internationaux ou intérieurs ne pose pas de problème en soi, bien que leur impact – cela a été dit à plusieurs reprises – soit très faible au regard de la pollution globale produite par notre pays. Mais cette mesure risque d'emporter un coût humain disproportionné et, par surcroît, de ne pas favoriser le désenclavement de certaines régions.
Ne faudrait-il pas d'abord proposer des solutions de remplacement, à l'instar, entre autres, des lignes TGV et des intermodalités entre le train et l'avion ? S'agissant par exemple de la Haute-Garonne, je ne crois pas que la LGV – ligne à grande vitesse – à destination de Toulouse fasse partie de votre feuille de route, monsieur le ministre délégué. Elle pourrait néanmoins avoir des effets positifs certains sur le plan environnemental. Outre le fait de remplacer l'avion, la création d'une LGV permettrait de libérer le réseau ferré existant et donc de multiplier les trains régionaux du quotidien. Voilà une mesure qui, associée à une transformation de notre industrie, initierait certainement un processus plus large pour la population, en ce qu'elle produirait moins de désagréments et de bouleversements indésirables et permettrait de protéger les emplois salariés du secteur de l'aéronautique.
Ce matin, j'ai pris l'avion. Je suis parti de l'aéroport de Pau, devant lequel se trouve une plaque commémorant la première école de pilotage créée en Europe par Wilbur Wright, en 1908. Je me souviens de ce qui a été raconté à plusieurs reprises par certains élus sur l'histoire magnifique de l'aviation dans le Sud-Ouest. Au début du XXe siècle, Pau comptait seize aérodromes. Savez-vous pourquoi l'aéronautique s'est construite à la fois à Toulouse et dans le Béarn, dans le grand Sud-Ouest ? Parce que cette région se situait loin des champs de bataille et de la frontière allemande et parce que les conditions atmosphériques étaient optimales à l'époque.
Nous avons eu des ingénieurs extraordinaires, à l'instar de Joseph Szydlowski, un ouvrier juif polonais venu s'installer près de Pau, qui créa l'entreprise Turbomeca, ancêtre de Safran. De merveilleuses expériences ont été réalisées au gré des années. Et si, plus tard, Toulouse a bénéficié de l'arrivée d'Airbus, c'est parce que Pau était entre-temps devenue la capitale de la chimie, avec notamment l'implantation de Total. Les élus palois de l'époque ne se sont donc pas battus, mais il n'en demeure pas moins que la tradition en matière de mécanique, de soudure et de procédés est restée vivace tant chez les ouvriers que chez les ingénieurs. Les 1 500 entreprises auxquelles j'ai fait référence cet après-midi demeurent ainsi réparties entre les deux régions Occitanie et Nouvelle-Aquitaine.
J'en viens à ce qui nous est proposé dans cet article. Certains, y compris au sein de mon propre groupe, disent que, au fond, le seuil des deux heures trente ne concerne que les vols Paris-Lyon et Paris-Bordeaux. Il convient néanmoins de réfléchir aux conséquences sociales de l'arrêt de ce type de desserte sur l'industrie aéronautique, ce que ne fait pas l'étude d'impact qui accompagne le texte. Par conséquent, toutes sortes de chiffres sont véhiculés. Certains industriels parlent de la destruction de milliers d'emplois et estiment que le nombre de postes supprimés serait deux fois supérieur si le seuil des quatre heures devait être retenu.
Monsieur le ministre délégué, dans l'une de mes interventions, cet après-midi, je me suis permis de vous dire qu'à l'heure où vous nous soumettez cette disposition relative au transport aérien, nous ne voyons rien venir s'agissant des LGV – Joël Aviragnet en a parlé à l'instant – ou encore de l'intermodalité. Alors que la navette Paris-Bordeaux va être supprimée, rien n'est prévu pour que les passagers au départ de Bordeaux et à destination des Antilles continuent de voyager dans de bonnes conditions. Du retard a été pris en la matière.
De la même manière, alors qu'il est prévu que cette disposition soit applicable à compter du premier dimanche de mars 2022, l'Union européenne n'a pas encore décidé de la reprendre à son compte. Dans les régions frontalières, un report de trafic au bénéfice d'aéroports situés hors du territoire national apparaît donc inévitable. Ce sera le cas dans ma région, qui est moins éloignée de l'aéroport de Bilbao que de celui de Bordeaux.
Monsieur le ministre délégué, je peux entendre l'argument selon lequel la mesure sera compensée par l'existence de LGV, comme dans le cas du trajet Paris-Lyon. L'économie est ainsi faite que, par le jeu du marché, la SNCF l'emporte sur Air France sur ce type de liaison. En revanche, ce que je ne peux admettre, c'est que nous mettions un doigt dans un engrenage que nous ne maîtrisons pas : c'est ce que j'appelle la théorie du toboggan. Dès lors que le seuil des deux heures trente aura été entériné – je vous dis cela en sachant que nos propos sont enregistrés et retranscrits – , un jour viendra où un candidat à l'élection présidentielle promettra d'élever ce seuil à quatre heures. Certains feront campagne en faisant du fly bashing – nous en parlions cet après-midi. L'industrie aéronautique sera remise en cause, alors qu'elle est la fierté de notre pays et de nos ingénieurs.
Nous subissons aujourd'hui les conséquences d'avoir abandonné le secteur de la santé et les laboratoires pharmaceutiques, de ne pas leur avoir imposé certaines choses. Cela a été dit précédemment, nous sommes le seul membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU à ne pas avoir inventé de vaccin contre le covid-19. Je suis très inquiet de notre capacité, chaque fois que nous sommes en position de leader, à renoncer à nos industries, qui font à la fois la richesse et la fierté de notre pays.
Oui, je serai de ceux qui ne voteront pas cette disposition. Je m'exprime en nom propre, mais aussi, puisqu'elle m'a autorisé à le faire, au nom de la présidente de mon groupe, Valérie Rabault, qui connaît les mêmes difficultés d'éloignement géographique que Joël Aviragnet, Sylvia Pinel et d'autres députés. Je tenais à vous exposer, monsieur le ministre délégué, ce qui nous amène à considérer que cette mesure est contraire à l'intérêt du pays.
Enfin, à celles et ceux qui appartient au même camp que moi, je dis que la gauche ne gagnera jamais en prônant la décroissance. Cette idée est fausse. La décroissance, ce n'est pas la gauche. La décroissance, nous la connaissons depuis quinze ans : c'est du chômage, des générations sacrifiées, des difficultés sociales multiples.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Ce pays a besoin d'une énergie supplémentaire, de croire en le progrès technique et en sa capacité à dominer les difficultés. La fin de certaines lignes aériennes va à l'encontre de ce discours, que nous sommes une majorité à tenir dans cet hémicycle.
La filière aéronautique traverse une crise sans précédent qui fragilise l'ensemble des entreprises et de nombreux sous-traitants, comme c'est le cas dans mon département du Tarn-et-Garonne. Ces PME – petites et moyennes entreprises – , ETI – entreprises de taille intermédiaire – , ainsi que leurs salariés s'inquiètent légitimement pour la pérennité de leur activité et le maintien des compétences et des savoir-faire d'excellence. Leur situation est difficile étant donné que ces sociétés se sont endettées au cours des dernières années, non pas uniquement en raison de la crise du covid-19, mais pour moderniser leur équipement. Et malgré le déploiement de dispositifs de soutien – que je salue – , tant au niveau national que régional, la menace de plans sociaux en cascade demeure au coeur des préoccupations. Les chiffres ont été rappelés : avec près de 6 000 emplois supprimés entre mars et décembre 2020, l'Occitanie est la région la plus touchée par la crise du secteur aéronautique.
Si nous adhérons à l'objectif de neutralité carbone pour le transport aérien que prévoit le projet de loi, nous pensons qu'il faut donner à la filière des moyens adaptés pour opérer cette mutation et développer les innovations requises. Un virage trop rapide conduirait à une destruction accrue et à une perte de compétences alors que ces dernières sont indispensables à la relance du secteur et à sa transition écologique.
En effet, le développement d'un avion décarboné à l'horizon 2035 et, à court terme, le recours massif aux carburants non fossiles – qui coûtent plus cher – ainsi qu'à des innovations technologiques visant la sobriété énergétique, telles que la propulsion électrique ou l'hydrogène vert, demandent de lourds investissements à l'ensemble des acteurs de la filière.
L'objectif, monsieur le ministre délégué, est de travailler à l'amélioration de la performance environnementale des avions, en consacrant un effort inédit de recherche et d'innovation à la fois sur les appareils et les sources d'énergie. Nous devons adopter une logique de rupture technologique pour le développement de procédures destinées à réduire la consommation de carburants – vous en avez parlé tout à l'heure – , à optimiser les infrastructures et à réaliser des investissements dans le domaine de l'efficacité énergétique. À cet égard, l'avion hybride électrique, les progrès de la motorisation combinée à la réduction de la masse des appareils, la configuration zéro émission, ou encore le développement d'un avion ultrasobre sont autant d'exemples de ces technologies de rupture sur lesquelles nous travaillons.
Il est à craindre que le rebond du secteur aérien soit freiné et lointain. Lors de la reprise, l'activité sera différente de ce que nous avons connu par le passé, notamment en ce qui concerne la clientèle d'affaire. Dans un environnement aussi concurrentiel, il faut faire le choix de l'innovation et de l'avion vert, y compris dans les infrastructures aéroportuaires. Il convient aussi de faire attention aux décisions que nous prenons ce soir, parce que d'autres pays autour de nous ne font pas les mêmes choix.
Quant à l'option ferroviaire qui est régulièrement évoquée, il nous faut pouvoir absorber les flux de passagers et anticiper les besoins de mobilité, ce que nous ne faisons pas suffisamment dans le texte, monsieur le ministre délégué, surtout s'agissant des territoires qui sont mal desservis, comme Toulouse ou le Tarn-et-Garonne. À cet égard, je vous rappelle nos demandes concernant la LGV Bordeaux-Toulouse.
À mon tour, j'exprime l'inquiétude des députés Les Républicains au sujet de la filière aéronautique et, plus largement, au sujet de toute la filière industrielle française. J'ai déjà eu l'occasion de le dire, tout comme mon collègue Jean-Marie Sermier : l'industrie est une chance inestimable pour un pays. Au siècle dernier, les grands pas technologiques ont souvent été franchis grâce aux révolutions industrielles, qui ont accompagné l'évolution de notre société. La France a souvent été leader, leader dans l'industrie lourde et les industries électro-intensives, leader dans l'automobile, leader dans le nucléaire, leader enfin, avec d'autres, dans l'aéronautique.
Il n'y a pas à faire le procès du Gouvernement ou de la majorité, car lorsque les grands principes de ce projet de loi ont été posés, la covid n'avait pas encore fait son apparition.
Il est clair, depuis un mois, que nous nous accordons tous sur l'objectif final du texte consistant à décarboner notre société, mais entre l'écriture et l'examen du texte est intervenue la covid. Aujourd'hui, les aéroports les plus performants d'Europe sont à 90 % à l'arrêt. Ainsi, Genève, l'aéroport le plus performant d'Europe, n'a-t-il récupéré qu'à peine 10 % de son activité.
N'oublions pas que tout signal envoyé par le Parlement est immédiatement interprété par les dirigeants, les donneurs d'ordre, les bureaux d'études, les ingénieurs et les investisseurs, pour les effets qu'il aura sur le processus industriel, ce qui a une incidence directe sur les investissements sur le sol national.
Comme vient de le rappeler Mme Pinel, on ne peut pas se permettre, au moment où l'aéronautique est à l'arrêt, au moment où nos aéroports sont exsangues et où des milliers d'emplois sont en jeu, d'envoyer ce soir un signal supplémentaire indiquant que la France ne sera pas au rendez-vous du rebond. Je souhaite donc que tous, nous ayons à l'esprit l'impact en milliers d'emplois qu'auront sur les filières automobile, nucléaire et aéronautique, et partout dans nos territoires, toutes les décisions que nous prenons.
À mes yeux, cet article correspond à une prise de position équilibrée, qui répond à un engagement pris par la Convention citoyenne pour le climat (CCC) non seulement vis-à-vis des territoires et notamment de ceux qui ont investi pour leur désenclavement, mais également vis-à-vis de la filière aéronautique. Il répond dans le même temps à l'attente de nos concitoyens, désireux de voir évoluer nos habitudes de consommation.
Cela étant posé, il ne faut pas sous-estimer le potentiel de la filière aéronautique. Je suis persuadée de sa capacité à innover, à investir, à s'approprier le changement technologique, bref, à s'adapter pour demeurer une filière de pointe dans notre pays ; plus d'une fois en effet, elle a démontré qu'elle était capable de relever ce type de défis.
Je vous rejoins en revanche, monsieur Habib, et ne crois pas plus que vous à un système fondé sur la décroissance. Ce n'est pas le modèle défendu par notre majorité pas plus que celui choisi par un gouvernement qui investit 1,5 milliard d'euros sur trois ans pour soutenir la recherche et le développement au travers du plan de relance. Ce n'est pas davantage le choix des industriels, quand ils investissent près de 2 milliards par an dans l'avion décarboné, pour des avions plus performants permettant de répondre aux nouveaux défis technologiques.
L'aéronautique fait notre fierté et nous ne souhaitons pas l'abandonner ; les engagements que nous avons pris tendent à le prouver.
Les choix faits en matière environnementale ne sont pas sans incidence sur le secteur industriel. Nous sommes une poignée de députés du Val d'Oise, ce soir, dans l'hémicycle, et je voudrais évoquer l'aéroport de Roissy, dont le Gouvernement a décidé qu'il ne devait plus se développer.
En prenant cette décision, qui se justifie sur un plan environnemental, il fait une croix sur des dizaines de milliers d'emplois dans un territoire déjà en grande difficulté. On aurait pu imaginer que lorsqu'on fait ainsi une croix sur des dizaines de milliers d'emplois, on propose à la population la première touchée une solution de remplacement. On ne dit pas aux gens : « Nous allons sauver la planète, et tant pis pour vous ! »
On doit trouver une façon de lutter contre les dérèglements climatiques avec des solutions qui préservent l'avenir économique de la population, sans opposer l'un et l'autre. La méthode consistant à renoncer au terminal T4 de Roissy sans aucune compensation en matière d'emplois n'est sincèrement pas la bonne. Certes le choix environnemental doit primer, mais pas au détriment des choix socio-économiques et industriels. La force d'un pays est de jouer la complémentarité et d'opérer des choix stratégiques vitaux pour l'avenir de la planète sans abandonner les populations qui sont pénalisées par ces choix.
Je suis saisie d'une série d'amendements identiques, nos 1228 , 2783 , 2869 , 3122 , 3928 , 4895 , 4961 et 5174 , tendant à supprimer l'article 30.
Les amendements identiques nos 1228 de Mme Nathalie Serre, 2783 de M. David Lorion, 2869 de Mme Sylvia Pinel, 3122 de M. Marc Le Fur, et 3928 de M. Julien Ravier sont défendus.
La parole est à M. Benoit Simian, pour soutenir l'amendement no 4895 .
Comme ma collègue Sylvia Pinel, et en accord avec les propos de David Habib, je souhaite supprimer cet article qui prône la décroissance et procède d'un catéchisme écologique doctrinaire. Les mesures d'écologie punitive qu'il contient inquiètent la Nouvelle-Aquitaine et l'ensemble du Sud-Ouest, où les emplois doivent beaucoup à une filière aéronautique puissante.
Bordeaux, par exemple, n'est pas qu'une capitale régionale, c'est une ville à dimension européenne, voire internationale. En supprimant de manière dogmatique les lignes intérieures qui rendent de grands services, …
… que ce soit aux voyageurs d'affaires ou à ceux qui transitent vers les Antilles et le reste des outre-mer, vous ne résolvez pas l'équation, monsieur le ministre. Le président de la métropole de Bordeaux vous a écrit ; avec habileté, vous lui avez répondu qu'en effet, il faudrait des décrets d'application et un accord de la Commission européenne, mais qu'il fallait améliorer l'offre TGV. C'est dire si vous êtes embêté.
Avec l'examen de cet article, l'hémicycle se trouve ce soir dans une zone de turbulences, ce qui devrait parler au pilote d'avion que vous êtes – c'est un cheminot qui vous le dit ! La maire de Poitiers a eu beau déclarer que l'avion ne devait plus être un rêve d'enfant, nous nous inscrivons en faux contre cette idée. C'est d'autant plus faux que l'on parle des lignes intérieures qui peuvent, les premières, parvenir à se décarboner. C'est précisément sur ce type de lignes que nous devons investir et que les compagnies aériennes le feront.
Il est donc très hasardeux de condamner ces navettes, que j'utilise moi-même souvent, car il est parfois plus simple de rejoindre l'aéroport que la gare de Bordeaux. Tout le monde a mis de côté la question du grand contournement autoroutier de Bordeaux, qui est la ville la plus asphyxiée de France. En l'occurrence, la suppression des navettes va à l'encontre d'une bonne logique d'aménagement du territoire.
Nous sommes, ce soir, à la croisée des chemins, face à un article qui relève d'une vision dogmatique de l'écologie.
La parole est à M. Nicolas Turquois, pour soutenir l'amendement no 4961 .
Je voudrais vous faire part de mon malaise. Il ne doit pas y avoir de quiproquo quant au sens des propos qui ont été tenus. L'avion a évidemment une incidence sur l'environnement, mais quels moyens doit-on mobiliser pour changer la donne ?
Comme l'a dit David Habib, ce projet de loi a été pensé avant la crise de la covid. Or aujourd'hui, nous avons une filière qui va très mal. Certes, les grands donneurs d'ordre bénéficient du soutien de l'État, mais les sous-traitants, eux, sont en grande difficulté. À Châtellerault, par exemple, la crise de 2008 a tué l'automobile, et seules subsistent quelques entreprises, notamment les fonderies du Poitou, mais qui peuvent fermer boutique sous huitaine ou quinzaine. Aujourd'hui, c'est l'aéronautique : nous avons Thales, bien sûr, mais pour le reste, ce ne sont que des sous-traitants, auxquels il faut faire attention. Donnons-nous du temps !
En matière d'aménagement du territoire ensuite, si vu de Paris, un trajet de deux heures et demie en train est une évidence, l'aéroport permet aussi de se rendre à Lyon ou à Nice depuis Poitiers. Supprimer la ligne en provenance de Paris va nécessairement rompre l'équilibre de ces liaisons, et il me semble qu'on ne mesure pas toutes les conséquences économiques de nos décisions. À tout le moins, il serait souhaitable d'en retarder l'application.
MM. David Habib et Joël Aviragnet applaudissent.
La parole est à M. Jean-Marie Sermier, pour soutenir l'amendement no 5174 .
L'objectif de ce projet de loi est de parvenir à une baisse significative des émissions de gaz à effet de serre afin de préserver le climat. Or je vous rappelle que la France est responsable de 0,8 à 0,9 % des émissions au niveau mondial et que, dans ce volume, l'aéronautique ne représente que 2 à 3 %.
On est donc en train de casser plusieurs centaines de milliers d'emplois pour un bénéfice quasi nul sur le climat. On remet en cause une filière d'exception, source de plusieurs centaines de milliers d'emplois, alors qu'il faudrait que nous progressions beaucoup plus vite sur les automobiles décarbonées et sur le logement.
Ce n'est pas l'avion qui pose problème mais le CO2 qu'il émet. Or, vous l'avez vous-même dit, monsieur le ministre, nous progressons vite vers l'avion décarboné. Il sera sans doute là dans dix ans, c'est-à-dire demain, et il ne faudrait pas avoir tout cassé et se retrouver à devoir relancer des filières et des entreprises sacrifiées, alors que leur bilan carbone ne pèse aucun poids à l'échelle de la planète.
Il faut arrêter de faire de l'avion un tabou et de se livrer systématiquement au lynchage de l'industrie aéronautique. Si nous sommes tous d'accord sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre, cet article ne sert strictement à rien, car on parle de 2 % de nos émissions. Est-ce que vous vous rendez compte que, pour un progrès de l'ordre du pouième, ce sont des centaines de milliers d'emplois qui vont passer à la trappe ?
Nous souhaitons tous soutenir notre industrie aéronautique, dont nous pouvons être fiers, et l'accompagner dans sa décarbonation, en s'appuyant sur l'ingénierie et l'ensemble des salariés.
En revanche, et je tiens à l'assumer devant vous, je pense qu'il faut absolument garder l'article 36 en raison de la nécessité de réguler le trafic aérien. Il faut le faire en conscience et accompagner l'ensemble des salariés qui seront touchés par cette décision, mais j'assume que nous interdisions les liaisons aériennes lorsqu'il existe un trajet ferroviaire en deux heures et demie. Je l'assume car je suis certain que nous pouvons, en parallèle, trouver des voies permettant de relancer le train et de trouver des complémentarités entre le train et l'avion. Je l'assume car, dans la conception même de l'article, nous prévoyons de faire confiance à l'innovation. En effet, l'article ne s'appliquera pas au transport décarboné, en particulier à l'avion décarboné, ce qui renvoie au travail que nous engageons pour décarboner l'industrie aéronautique.
Enfin, je tiens à dire que nous nous engageons, grâce à un amendement à l'article 36 de Jean-Luc Fugit, à étudier la question du fret aérien. La représentation nationale sera éclairée sur la possibilité d'un report du fret aérien vers le fret ferroviaire, qu'il faudrait relancer – nous connaissons le combat que vous menez dans ce domaine, madame Essayan.
L'article me semble proposer une position équilibrée et pertinente. Je serai donc défavorable aux amendements de suppression. J'ai confiance dans cet article et en votre capacité de l'adopter.
Je souscris à beaucoup de ce qui a été dit sur l'industrie en général et sur l'industrie aéronautique en particulier, mais je tiens à dédramatiser le sujet : tout d'abord, il y a des lignes à grande vitesse en France et, chaque fois qu'une ligne à grande vitesse est venue concurrencer une ligne aérienne, les TGV ont asséché le trafic aérien.
La ligne Paris-Strasbourg a absorbé en quelques mois 90 % du trafic des lignes aériennes et, six mois après l'inauguration de la ligne Paris-Bordeaux, en juillet 2017, 60 % des clients se sont reportés sur le train. Il existe donc une complémentarité, et parfois une concurrence, entre ces modes de transport ; lorsqu'il existe une offre ferroviaire robuste, c'est-à-dire une ligne à grande vitesse, les clients se reportent en général sur le train. Or nous avons à l'étude un grand projet de régénération du réseau ferroviaire et cinq projets de lignes à grande vitesse, y compris le GPSO – le grand projet ferroviaire du Sud-Ouest. Nous avons l'ambition d'avancer résolument sur le sujet.
La mesure proposée dans l'article est raisonnable dans sa formulation. Elle ne va pas jusqu'aux trajets de moins de quatre heures, une option qui aurait asséché des territoires qui ont besoin de l'avion pour préserver leur attractivité. De plus, la mesure sera appliquée de façon incrémentale et coordonnée avec les territoires et avec le groupe Air France-KLM qui opère sur beaucoup de ces lignes. Elle nous conduit à arrêter les lignes Orly-Bordeaux, Orly-Nantes et Orly-Lyon en préservant les correspondances, y compris vers l'outre-mer et vers l'aéroport Paris-Charles-de-Gaulle, qui est un hub parisien, français et européen.
S'agissant des emplois, la capacité de la filière industrielle à se décarboner et à se créer de nouveaux avantages comparatifs – car la filière aéronautique sait tout faire de A à Z – représente aussi des emplois de demain. Elle n'est pas décorrélée de la filière hydrogène, et nous sommes également en train de lancer une filière biocarburants territorialisée, à haute valeur ajoutée et créatrice d'emplois.
Bien sûr, la crise joue un rôle et dramatise le débat actuel, mais nous arriverons un jour à la mettre derrière nous. Je rappelle que l'Asie est repartie intégralement et que l'Amérique du Nord a retrouvé 80 % de son trafic habituel. Nous sommes à 40 %, et nous avons encore une vision d'Européens enkystés dans la crise, mais je vous invite à dédramatiser, à vous projeter dans l'avenir et à avoir foi en nos capacités et en celles de la filière aéronautique.
Monsieur le ministre, je suis prêt à dédramatiser. Toutefois, si nous ne sommes pas directement concernés par l'industrie aéronautique, nous le sommes indirectement par la fermeture, ou la non-construction, d'un nouvel aéroport. Ce ne sont pas des emplois industriels, mais des emplois liés à la maintenance ou à l'hôtellerie-restauration. Et là, que proposez-vous ?
Concernant le TGV, j'ai une petite anecdote à vous raconter. Pour aller travailler de Sarcelles à Roissy, il n'y a pas de transports en commun : il faut aller à Paris et repartir. En revanche, on est en train de faire un TGV Picardie-Roissy pour que les Picards viennent y travailler ! Au bout d'un moment, il faut penser aux territoires systématiquement discriminés et oubliés, et faire des propositions concrètes.
Monsieur le ministre, vous avez dit que l'article concernerait trois liaisons : Paris-Nantes, Paris-Bordeaux et Paris-Lyon, et qu'il ne s'appliquerait pas aux trajets en correspondance vers l'outre-mer. J'aimerais savoir si vous avez calculé combien de tonnes de carbone seront potentiellement économisées par la suppression de ces trois destinations, sachant que, si les gens ne prennent pas l'avion, ils prennent le TGV ou le TER, voire la voiture s'ils doivent se rendre rapidement à un rendez-vous. J'aimerais donc savoir si vous avez calculé l'économie que l'on pourrait faire sur ces trois villes depuis Paris, compte tenu du décalage entre l'avion et le train. Avez-vous une réponse précise à cette question ?
On raisonne à l'échelle de la plaque parisienne, or Roissy n'est pas saturé ; pendant la crise, on a même fermé Orly et reporté des vols vers Roissy. Roissy, c'est le hub parisien, et il a d'ailleurs vocation à être davantage connecté au centre-ville parisien dans quelque temps avec le CDG Express. Il n'y a pas de problème de connectivité des territoires dès lors que Roissy fonctionne et qu'il est la porte d'ouverture vers l'international – et peut-être demain vers l'outre-mer, qui est davantage basé à Orly à l'heure actuelle. Le sujet est un peu théorique ; en pratique, il est résolu par Roissy et par sa capacité à accueillir du trafic en bonne connexion avec la capitale parisienne.
Je suis saisie de deux amendements, nos 4425 de M. Matthieu Orphelin et 100 de Mme Delphine Batho, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les deux amendements sont défendus.
Quel est l'avis de la commission ?
Défavorable.
Rappel au règlement
Il se fonde sur l'article 100, alinéa 7 du règlement. On ne peut pas, sous prétexte que s'appliquent les dispositions de l'article 49 du règlement, n'obtenir aucune réponse de M. le rapporteur ni de M. le ministre sur nos amendements.
Article 36
Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 4427 , 6811 , 4628 et 6809 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 4628 et 6809 sont identiques. Sur ces amendements ainsi que sur l'amendement no 6811 , je suis saisie par le groupe La France insoumise d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
L'amendement no 4427 de M. Matthieu Orphelin est défendu.
La parole est à Mme Danièle Obono, pour soutenir l'amendement no 6811 .
Rappelons tout d'abord le sujet de l'article. Les vols intérieurs représentent 4 % des émissions de gaz à effet de serre en France. Ces vols sont très souvent remplaçables par des trajets ferroviaires, qui ont une empreinte carbone bien plus faible. En outre, la pollution aérienne se double d'une injustice sociale : ce sont les plus riches qui polluent l'air de la majorité.
En France, la moitié des déplacements par avion est le fait des 20 % de personnes dont les revenus par unité de consommation sont les plus élevés. Ainsi, la proposition de la Convention citoyenne pour le climat d'organiser progressivement la fin du trafic aérien – je dis bien progressivement – sur les vols intérieurs d'ici à 2025, et uniquement sur les lignes où il existe une offre bas carbone satisfaisante en prix et en temps, avec un trajet de moins de quatre heures, apparaît comme étant de bon sens. Elle ne s'oppose pas, malgré ce qu'ont pu dire, penser ou craindre certains de nos collègues, à l'enjeu économique.
D'après Greenpeace, le passage de quatre heures à deux heures trente épargnerait les trois connexions les plus émettrices : Paris-Nice, Paris-Toulouse et Paris-Marseille. Avec plus de 3 millions de passagers en 2019, la navette entre Paris et Nice produit l'équivalent de 225 000 tonnes de CO2. Voilà pourquoi nous demandons de revenir à la proposition initiale de la CCC : supprimer les exceptions prévues pour les correspondances et garantir la non-réattribution des créneaux.
Il s'agit de prendre la mesure de l'enjeu. Beaucoup de collègues ont argué que, finalement, la France n'émettait pas tant de gaz à effet de serre que cela et que le phénomène était résiduel. C'est faux ! De notre point de vue, il s'agit d'avoir une ambition non seulement écologique, mais aussi économique, en s'appuyant sur les compétences du secteur pour entamer la bifurcation.
Nous parlons bien ici de vols intérieurs, qui correspondent à une très petite minorité de vols et qui représentent un enjeu à la fois climatique et démocratique. Nous avons travaillé cet amendement avec Greenpeace et avec d'autres associations. Nous pensons qu'il faut être à la hauteur de l'ambition de la CCC, or l'article, tel qu'il est, passe à côté de ce qu'il faudrait planifier.
Mme Mathilde Panot applaudit.
La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l'amendement no 4628 .
Il est défendu.
Monsieur le ministre délégué, je voudrais rebondir sur vos derniers propos. Je ne veux pas vous faire un procès d'intention, mais vous avez tout de même laissé entendre que cela ne vous posait pas de problème qu'il n'y ait plus, à terme, qu'un seul aéroport en France : Roissy. Vous avouerez que pour un certain nombre de territoires, c'est plus qu'inquiétant.
L'amendement no 6809 de Mme Mathilde Panot est défendu.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements ?
Cette série d'amendements traite de deux sujets.
Le premier est le relèvement du seuil d'interdiction de deux heures et demie à quatre heures. Nous avons étudié la question avec beaucoup d'attention, et le critère de quatre heures aurait des conséquences importantes pour le désenclavement des territoires ; pour le coup, les remarques de notre collègue Pupponi seraient justifiées. Il ne me semble pas pertinent de porter l'interdiction à quatre heures, d'autant plus qu'elle risquerait de toucher des lignes transversales dont la disparition emporte un risque d'enclavement élevé.
Pour le deuxième sujet, celui des correspondances, il faut faire très attention, notamment en raison des effets de bord que la mesure pourrait créer. M. Saddier connaît bien le sujet : nous risquons d'assister à un report du trafic aérien, par exemple de l'aéroport de Lyon sur celui de Genève, ce qui ne réglera en aucun cas la question de la lutte contre les gaz à effet de serre.
Notre combat commun devrait être d'améliorer la multimodalité, c'est-à-dire le fait de passer du train à l'avion de manière plus simple. Je sais que le trajet Marseille-Lyon se fait très bien en train ; il faudrait pouvoir, ensuite, partir rapidement de Lyon vers une autre destination en avion. Cela doit se faire main dans la main avec la SNCF et Air France, car à côté de l'amélioration des connexions, il faut aussi traiter des enjeux purement logistiques, notamment pour le transfert des bagages.
Avis défavorable à l'ensemble des amendements.
Je reviendrai sur les deux arguments qui ont été développés.
Pourquoi avons-nous fixé la toise à deux heures trente ? Parce que la limite de quatre heures aurait asséché des territoires qui sont déjà enclavés sur le plan physique et numérique.
C'est notamment le cas du grand Massif central, que je connais particulièrement bien, avec des villes comme Brive, Limoges, Rodez et Clermont-Ferrand. Retenir la limite que vous proposez contreviendrait à l'équité entre les territoires.
Par ailleurs, madame Obono, vous prétendez, de manière rhétorique, que l'avion est un moyen de transport réservé aux riches, mais cette affirmation est démentie par les faits.
MM. David Habib et Joël Aviragnet acquiescent.
Je vous opposerai des éléments objectifs. Ceux qui prennent l'avion sont, pour un quart des Français modestes, pour un quart des retraités et pour 50 % des actifs dits CSP+, c'est-à-dire appartenant aux catégories socioprofessionnelles les plus favorisées. Votre affirmation est donc inexacte, et elle l'est plus encore si l'on considère les charters et les vols à bas coûts, qui offrent à des familles l'opportunité de se déplacer si ce n'est une fois par an, du moins une fois tous les deux ans. L'avion est donc un moyen de transport et de liberté même pour les Français les moins aisés.
Pour toutes ces raisons, j'émets un avis très défavorable sur ces amendements.
Je conteste vos arguments.
En l'espèce, nous ne parlons pas de l'enclavement des territoires. Si l'on interdisait l'exploitation de services aériens sur des liaisons intérieures dès lors qu'existe une offre ferroviaire de moins de quatre heures, les trajets concernés seraient Paris-Marseille – qui dure trois heures deux, ce qui ne me paraît pas extraordinairement long – , Paris-Montpellier, qui prend trois heures quatre, ou Paris-Brest, qui se fait en trois heures vingt-cinq. Je rappelle qu'en 2019, Paris-Marseille a été la troisième ligne de vols intérieurs la plus utilisée et qu'elle a produit 127 000 tonnes de CO2 par an. J'ajoute que la durée du trajet en avion fait l'objet d'une publicité mensongère, qui méconnaît le temps nécessaire pour arriver jusqu'à l'aéroport, la demi-heure d'attente qui précède l'embarquement, puis, à l'arrivée, la jonction de l'aéroport au centre-ville. Ces délais, ajoutés au temps de transport, ne justifient pas qu'on continue à privilégier l'avion, alors que la mesure que nous proposons – j'y insiste – n'enclaverait en rien les territoires.
Quant à savoir si l'avion est réservé aux plus aisés, je vais à mon tour citer un chiffre qui doit nous interpeller, monsieur le ministre délégué : en France, 50 % des vols sont effectués par 2 % de la population.
Je suis heureuse de vous entendre parler d'emploi. En France, les géants du e-commerce ont détruit en solde net – avant l'épidémie de covid – 81 000 emplois, sans que personne s'en soit ému. Nul ne s'est demandé s'il fallait arrêter Amazon jusqu'à ce qu'on s'en inquiète tout à coup. Une tribune signée par 700 étudiants en aéronautique, un collectif du nom d'Icare et autre collectif réunissant des personnels de l'aéronautique plaident tous pour une bifurcation, en disant qu'ils pourraient investir leurs compétences dans d'autres domaines.
Enfin, il est absurde de prétendre que, parce qu'il y aurait une crise, il faudrait attendre que les émissions de gaz à effet de serre réaugmentent, avant d'entreprendre de les réduire. C'est maintenant qu'il faut intervenir. Dans sa rédaction actuelle, l'article est vide, purement symbolique : en s'attaquant aux trois lignes dont vous parlez, on réduira les émissions de CO2 des vols métropolitains de 2,2 %. Si l'on retenait en revanche la limite de quatre heures au lieu de deux et demie, on ferait baisser ces émissions de 33 %, ce qui aiderait la France à réaliser son ambition climatique et à respecter ses engagements internationaux, sans empêcher les gens de se déplacer.
Mme Danièle Obono applaudit.
L'amendement no 4427 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 80
Nombre de suffrages exprimés 78
Majorité absolue 40
Pour l'adoption 5
Contre 73
L'amendement no 6811 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 73
Nombre de suffrages exprimés 72
Majorité absolue 37
Pour l'adoption 5
Contre 67
Pour absorber le report de passagers de l'aérien vers le ferroviaire, il faut des trains suffisamment nombreux. Reste à définir les conditions optimales qui permettraient au ferroviaire de relayer l'aéronautique. L'amendement no 2289 précise que l'offre doit être d'au moins dix liaisons quotidiennes, dont quatre aux heures de pointe. L'amendement no 2266 , qui sera appelé dans un instant, tend à renvoyer la fixation du nombre de ces liaisons quotidiennes à un décret. On ne peut en effet prendre une telle interdiction sans en prévoir les conséquences.
Je suggère le retrait des amendements ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Je comprends le problème, madame Pinel, mais soyons francs : ces mesures n'appartiennent pas tout à fait au domaine de la loi. J'ai évoqué ce qui s'était passé pour les liaisons Paris-Strasbourg et Paris-Bordeaux afin de montrer quel était le sens de l'histoire. Dès lors qu'une offre robuste capte des clients, la fréquence des trajets augmente. C'est pourquoi nous investissons tant dans le ferroviaire, auquel sont consacrés 50 % des investissements du plan de relance.
Monsieur le ministre délégué, si vous étiez, je ne dirai pas sincère mais cohérent, vous devriez, en dépit des difficultés normatives, juridiques, formelles que vous avez alléguées, soutenir la proposition de Mme Pinel. On ne peut pas laisser les choses se faire sans intervenir. Si l'on confie certaines liaisons à la SNCF, qui n'est pas plus vertueuse qu'Air France ou que beaucoup d'entreprises privées, on lui laissera la possibilité de fixer les règles qui l'arrangent.
Vous connaissez parfaitement la réalité du réseau ferroviaire français. Les liaisons entre les provinces, tout comme la desserte des extrémités du pays, sont catastrophiques. Le trajet Paris-Pau prend cinq heures sur le papier, mais, dans les faits, il m'est arrivé de le faire en huit heures. Au reste, le jour où ça m'est arrivé, je n'étais pas mécontent, car M. Guillaume Pepy était dans le train. Je ne l'ai jamais vu aussi énervé et je n'ai jamais vu quelqu'un passer autant de temps au téléphone. Sans doute cherchait-il à joindre la direction de son entreprise !
En fixant la toise à deux heures trente, nous lâchons complètement la bride à la SNCF. Or je ne pense que ce soit votre intention, pas plus que celle de notre assemblée. Il faut exercer une autorité sur cette société. Nous soutenons les amendements de Mme Pinel parce qu'ils présentent l'intérêt de fixer un cadre, en prévoyant un certain nombre de rotations. Je répète, ils tendent à préserver l'aménagement du territoire, auquel nous croyons tous, en conservant la main sur la compagnie ferroviaire.
J'entends que ces dispositions ne relèvent peut-être pas de la loi, mais on ne peut méconnaître les inquiétudes de la filière aéronautique, de ses salariés, des habitants des territoires concernés et des usagers des lignes aériennes qui risquent d'être supprimées. En outre, il faut anticiper l'absorption des passagers de l'aérien par le ferroviaire. Des discussions sont en cours entre Air France et la SNCF sur la complémentarité et sur l'intermodalité fer-air. Vous ne pouvez pas nous demander de voter l'article sans nous apporter aucune précision sur l'offre ferroviaire de remplacement ni sur le cadencement des trains. Rassurez-nous – même si nous sortons du domaine strictement législatif – sur le fait que le transfert est anticipé et informez-nous de l'avancée des discussions !
M. David Habib applaudit.
Votre inquiétude est légitime, mais nous avons construit l'offre de transport en privilégiant la complémentarité des modes. Depuis 2017, le réinvestissement dans le mode ferroviaire a été majeur, que ce soit dans le réseau primaire ou secondaire, à travers les cinq projets de LGV en cours sur le territoire, notamment entre Paris et la Normandie, en Provence-Alpes-Côte d'Azur, entre Montpellier et Béziers…
On pense également au GPSO entre Bordeaux et Toulouse. Autant de dossiers qui vont avancer, ce qui achèvera le maillage grande vitesse du réseau ferroviaire.
Le meilleur argument que je puis vous apporter est le lien entre la concurrence et la complémentarité des modes. En juillet 2017, nous avons inauguré un train Paris-Bordeaux en deux heures quatre. Quand le chemin de fer a proposé une liaison à grande vitesse robuste, bien cadencée et de qualité, il a capté 60 % des clients en six mois. Je n'ai aucun doute sur le fait que la SNCF assurera la fréquence qui lui permettra d'attirer des clients quand elle en aura l'occasion.
Au demeurant, nous assumons la tutelle et nous avons rouvert beaucoup de dossiers. J'ai parlé des politiques tarifaires, de la lisibilité et de la transparence. Mais je répète que notre crédibilité repose avant tout sur les investissements considérables consentis dans le mode ferroviaire depuis 2017, qui me semblent de nature à lever toutes vos inquiétudes.
Enfin, nous disposons d'un cadre de dialogue avec les régions, au sein du conseil ministériel, pour parler de la desserte du territoire avec les exploitants et les industriels. Ces échanges transparents se feront au service de l'équité et, au sens large, de l'aménagement du territoire. En la matière, vous pouvez avoir confiance en nous.
Je suis saisie de six amendements, nos 123 , 6808 , 3663 , 5988 , 3997 et 4964 , pouvant faire l'objet d'une discussion commune.
Les amendements nos 3663 et 5988 étant identiques, de même que les amendements nos 3997 et 4964 .
Sur l'amendement no 6808 , je suis saisie par le groupe La France insoumise d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Les amendements nos 123 de Mme Delphine Batho, 6808 de François Ruffin et 3663 de Mme Anne-France Brunet sont défendus.
La parole est à M. Gérard Leseul, pour soutenir l'amendement no 5988 .
Nous proposons d'allonger de deux heures trente à trois heures la limite qui déclenchera l'interdiction des trajets aériens pour lesquels il existe une offre ferroviaire de remplacement.
Les amendements nos 3997 de M. Robin Reda et 4964 de M. Jean-Luc Lagleize sont défendus.
Quel est l'avis de la commission ?
Avis défavorable. Le trajet Paris-Limoges dure trois heures treize, Paris-Brive est à peine plus long et Paris-Clermont-Ferrand prend trois heures vingt. Nous sommes dans cette épure. Pour maintenir son attractivité, le grand Massif central a besoin d'une desserte aérienne quotidienne, qui reçoit un soutien budgétaire au titre de la politique d'aménagement du territoire – comme nombre de liaisons interprovinciales.
L'amendement no 123 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 79
Nombre de suffrages exprimés 76
Majorité absolue 39
Pour l'adoption 7
Contre 69
L'amendement no 6808 n'est pas adopté.
L'amendement no 5317 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Les amendements identiques nos 4000 de M. Robin Reda et 4966 de M. Jean-Luc Lagleize sont défendus.
Je suis saisie de trois amendements, nos 4757 , 3996 et 5869 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Sur l'amendement no 5869 , je suis saisie par le groupe Les Républicains d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Jean-Marie Sermier, pour soutenir l'amendement no 4757 .
L'amendement vise à faire précéder tout arrêt d'une liaison aérienne d'une concertation avec l'ensemble des partenaires.
La concertation que nous appelons de nos voeux concerne cette fois-ci les collectivités locales. Il est inimaginable de supprimer la ligne Paris-Rennes ou Paris-Bordeaux sans que les collectivités, qui participent parfois au financement de ces lignes, notamment les communautés d'agglomération et les métropoles, ne soient consultées.
Sur l'article 36, je suis saisie par le groupe La République en marche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements en discussion commune ?
Il est en effet nécessaire de procéder à une concertation lorsqu'une telle décision touche les territoires. Rassurez-vous, les préfets ont le devoir d'en organiser. À Bordeaux, une concertation a été menée par le corps préfectoral avec les acteurs de l'aéronautique et les collectivités locales. Vos amendements étant satisfaits, j'émets un avis défavorable à leur adoption.
Monsieur Sermier, il y a deux types de concertation : une menée à l'échelle nationale au sein d'un comité interministériel qui réunit l'industrie, les exploitants aéronautiques et la SNCF pour évoquer les dessertes et les principaux élus concernés, et une autre, conduite localement.
À Bordeaux, j'ai demandé à la préfète de Nouvelle-Aquitaine d'organiser une concertation et je participerai aux discussions dès lors que le projet de loi aura avancé.
Il existe à la fois une enceinte de concertation nationale et des déclinaisons territoriales pour assurer la parfaite information de tous.
Vous ne pouvez pas ignorer que tous les maires de l'agglomération bordelaise, sauf un, vous ont écrit pour demander le maintien de la navette.
Je ne l'ignore pas.
Celui qui n'a pas signé la lettre dit en privé qu'il a hésité avant de renoncer. Le président de la métropole, socialiste, Alain Anziani, vous a écrit ce courrier avec l'ensemble de ses collègues ; le président de la région Nouvelle-Aquitaine, socialiste, Alain Rousset, a également participé à la rédaction de cette lettre. J'insiste sur leur appartenance au Parti socialiste pour que les choses soient claires.
Il est bien normal qu'il revienne au Parlement de décider, mais il y a un vif désir d'échanger avec vous pour que vous mesuriez les conséquences de cette décision voire pour vous faire changer d'avis – j'ai néanmoins dit aux élus bordelais que ce serait très difficile. Les amendements qui viennent d'être présentés sont tout à fait pertinents.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 74
Nombre de suffrages exprimés 73
Majorité absolue 37
Pour l'adoption 14
Contre 59
L'amendement no 5869 n'est pas adopté.
L'amendement no 130 de Mme Delphine Batho est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
… je comprends l'objectif poursuivi par notre collègue Delphine Batho, mais je souhaite rappeler à la représentation nationale que l'attribution des créneaux est régie par la réglementation européenne, en particulier le règlement 9593 du 18 janvier 1993 qui fixe des règles très strictes en la matière. Avis défavorable.
L'amendement no 130 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 3955 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 3964 de Mme Delphine Batho est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Cet avis répondra aussi à la préoccupation exprimée tout à l'heure par notre collègue Benoit Simian : nous avons souhaité suspendre l'interdiction des vols lorsque le transport aérien sera décarboné. L'amendement vise à supprimer cette dérogation alors qu'il importe de la maintenir dans la loi. Voilà pourquoi j'émets un avis défavorable.
M. le rapporteur a tout à fait raison, d'autant que les premiers vols décarbonés seront certainement régionaux et possiblement transversaux. La disposition du projet de loi est importante, d'où un avis défavorable.
L'amendement no 3964 n'est pas adopté.
L'amendement no 4968 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Les amendements nos 2125 de Mme Delphine Batho et 4971 de M. Jean-Luc Lagleize sont défendus.
Les amendements identiques nos 2073 de M. Jean-Yves Bony et 4949 de M. Jean Lassalle sont défendus.
Mon amendement concerne l'ensemble du fret aérien national quand celui de M. le rapporteur ne couvre que celui transitant par l'aéroport Paris-Charles-de-Gaulle. Pourquoi donnez-vous la préférence au second, monsieur le ministre délégué ?
Je sais que vous avez interpellé M. le ministre délégué et je ne doute pas qu'il vous donnera des éléments de réponse. Nous avons travaillé l'amendement avec notre collègue Jean-Luc Fugit : comme 90 % du fret aérien transite par l'aéroport Paris-Charles-de-Gaulle, nous avons décidé de cibler le rapport que le Gouvernement devra remettre au Parlement sur cet aéroport. Peut-être étendrons-nous plus tard son champ à l'ensemble du territoire. Voilà pourquoi votre amendement recueille un avis défavorable.
C'est la double peine ! Vous supprimez les vols intérieurs qui partent souvent d'Orly et vous chargez le fret à Roissy. Les habitants de nos territoires ne bénéficieront pas des emplois du nouveau terminal mais subiront les nuisances nocturnes.
Je voulais déposer un amendement visant à obliger le ministre délégué, ses conseillers et les rapporteurs du texte à vivre pendant deux ans dans un HLM de Sarcelles – …
… disons plutôt une belle demeure de Montmorency – , pour se rendre compte des nuisances aéroportuaires la nuit autour de Roissy. Le seul aéroport ouvert la nuit est celui de Roissy, celui d'Orly est fermé. Et vous nous proposez d'accroître le fret !
En outre, je le répète, vous ne faites aucune proposition de création d'emplois alors que l'abandon des projets de terminal T4 de l'aéroport Paris-Charles-de-Gaulle et d'EuropaCity entraîne la perte de 80 000 emplois. Ces projets étaient certes mauvais, mais ils devaient créer 80 000 emplois ! Votre seule proposition est d'augmenter le fret à Paris-Charles-de-Gaulle, donc d'accroître les nuisances.
Il faut apporter autre chose que des décisions négatives à ce territoire !
Il se trouve que j'ai vécu pendant deux ans à 10 kilomètres de Roissy, donc je vois ce qu'implique d'habiter près d'un aéroport. En outre, j'ai appartenu à la commission consultative de l'environnement de Paris-Charles-de-Gaulle, donc je connais le sujet des nuisances aéroportuaires.
Je comprends parfaitement votre préoccupation, mais le sujet ne se limite pas à Roissy. Un projet de développement du fret aérien existe ainsi à l'aéroport de Châlons-Vatry : il a d'ailleurs montré son utilité au moment de la crise sanitaire car beaucoup de matériel médical, notamment des masques, a transité par cet aéroport – de nombreux autres aéroports avaient également répondu présent.
Les modèles économiques des aéroports de demain seront davantage tournés vers la transition énergétique, les nouvelles énergies, la logistique urbaine et interurbaine : il y a un modèle économique pour les aéroports orientés vers le fret – mais pas uniquement – et intégrant pleinement la transition écologique, notamment la décarbonation par les énergies nouvelles.
Nous pourrons en reparler, monsieur Pupponi, à l'article 37 ou au-delà de ce projet de loi, notamment pour évoquer le remplacement du projet EuropaCity, mais vous nous faites un mauvais procès sur la concentration des nuisances à Roissy car le sujet du fret aérien est bien plus large que la seule plaque parisienne.
Derrière ces articles se cache le sujet des nuisances sonores aériennes que M. Pupponi vient de soulever mais que nous ne pouvons pas aborder ce soir. Je salue l'amendement et le travail de mon collègue Jean-Luc Fugit.
Le rapport a pour objectif de se pencher sur le fret aérien, notamment à Roissy, pour étudier son éventuel transfert vers le fret ferroviaire. C'est un sujet important, car ce transfert permettrait de diminuer les nuisances sonores que subissent nos concitoyens.
Monsieur le ministre délégué, je saisis l'occasion pour vous demander à nouveau de remettre le projet Euro Carex à l'ordre du jour. Il permettra justement de transformer du fret aérien en fret ferroviaire et donc de relancer la stratégie de promotion de ce dernier.
Je profite que le débat concerne Roissy pour abonder les propos de M. Pupponi sur les vols de nuit et sur le risque d'aggraver encore une situation déjà insupportable avec cette proposition relative au fret.
Ensuite, puisqu'on parle beaucoup d'aviation depuis le début de la séance, je remercie tous les parlementaires qui se sont opposés au projet de privatisation du groupe Aéroports de Paris. Nous examinons le projet de loi climat et discutons des enjeux environnementaux, or je ne vois pas très bien comment la transition énergétique qu'on prône pour le secteur aéronautique serait envisageable avec une société privatisée.
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et FI. – M. François-Michel Lambert applaudit également.
Si j'ai bien compris, M. le ministre délégué soutient mon amendement, puisqu'il a expliqué que l'un des enjeux était l'extension du fret aérien à d'autres aéroports. C'est justement ce que je propose dans mon amendement, alors que celui de M. le rapporteur, qui est très bon aussi, ne concerne que Roissy – vous l'avez dit vous-même, monsieur le rapporteur. Travaillons donc sur l'ensemble du fret aérien, qu'il soit à Roissy, à Marseille ou à Vatry, afin de trouver comment réduire ses volumes.
L'amendement no 4327 n'est pas adopté.
Nous avons longuement évoqué le contexte que connaît la filière aéronautique ; pour préserver les emplois et les savoir-faire, il me semble utile de décaler la date d'entrée en vigueur du présent article. Le premier amendement vise à la fixer au 1er juillet 2025, le second au 1er juillet 2024.
La parole est à M. Nicolas Turquois, pour soutenir l'amendement no 5004 .
Il participe de la même philosophie que ceux que nous avons précédemment défendus : nous nous inscrivons dans la démarche de l'article, mais nous proposons d'attendre que l'état économique de la filière autorise de semblables mesures. Il faut que le trafic aérien ait atteint un niveau équivalent à celui qu'il avait en 2019. Nous avons prévu d'attendre ensuite dix-huit mois, on peut peut-être discuter de ce délai.
Il est normal de demander un effort à une filière qui va bien, parce que c'est indispensable pour la planète, mais nous le demandons à une filière qui a les deux genoux à terre. Je vous assure, mes collègues, que ce soir nous faisons une bêtise.
M. David Habib applaudit.
Je dois avouer qu'en déposant cet amendement, je ne pensais pas avoir à le défendre, persuadé que j'étais qu'en raison de la crise du covid, nos débats auraient une autre tonalité, et que nous prendrions d'autres décisions ce soir. C'était un amendement de repli, qui se transforme en amendement de dépit.
Je rappelle à la représentation nationale que nous sommes la première destination touristique au monde. Puisque vous décidez, semble-t-il, de ne pas revenir sur le calendrier – c'est le fait majoritaire – , faites au moins en sorte que l'entrée en vigueur de ces mesures n'intervienne pas au milieu d'une des deux grandes saisons touristiques, à savoir l'été et l'hiver. Nous sommes la première station de ski au monde, le minimum serait d'éviter une application en pleine saison de ski, même si cela ne suffira pas à résoudre le problème de fond.
L'amendement no 126 de Mme Delphine Batho est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
S'agissant des délais, après concertation avec l'ensemble des acteurs, je crois qu'on a trouvé une position d'équilibre entre l'amendement de Mme Batho, qui vise une application en octobre 2021, et ceux qui tendent à attendre bien davantage. Je vous propose donc de retirer vos amendements ; à défaut, l'avis sera défavorable.
Avis défavorable.
Je partage les propos du rapporteur. En outre, je rappelle que l'État a soutenu l'ensemble du secteur à hauteur de 15 milliards d'euros, ce qui n'est pas rien.
M. Jacques Marilossian applaudit.
Cela a permis d'éviter des faillites, des suppressions d'emplois, des prédations et des acquisitions hostiles. L'État soutient aussi l'aviation de demain : c'est l'objectif de décarbonation, dont nous avons discuté ; ne serait-ce que pour les trois prochaines années, il sera financé à hauteur de 1,5 milliard d'euros. L'État est au rendez-vous pour soutenir la filière.
Monsieur le rapporteur, avec qui la concertation a-t-elle eu lieu ? J'ai rencontré les industriels chez moi, ils n'y ont pas participé ; j'ai rencontré la CGT de Safran, non plus ; j'ai rencontré des jeunes, car Safran et le conseil régional d'Aquitaine ont créé une école d'aéronautique, non plus ; les présidents de communautés de communes où se situent les installations, non plus. Avec qui vous êtes-vous concertés ? J'ai aussi interrogé Air France, ils nous disent : pas de concertation, ou, plus exactement, échange d'informations, mais pas de concertation.
M. Benoit Simian applaudit.
Vous prenez une décision, c'est votre droit, vous êtes majoritaires, mais évitez de laisser supposer qu'elle est le fruit d'une négociation avec qui que ce soit.
Quant à la Convention citoyenne, je me permets de vous adresser de nouveau une demande que j'ai déjà faite à Mme Pompili, ministre de la transition écologique : que la liste des membres de la CCC soit rendue publique,
Mme Cendra Motin et M. Jean-Marie Sermier applaudissent
comme leur déclaration d'intérêts, afin de prouver définitivement qu'il n'y a pas eu d'intervention de l'État, que l'État ne leur a pas tenu la main, selon les termes que certains ont employés.
M. Jean-Marie Sermier applaudit.
J'ai déjà cité l'exemple des Pyrénées-Atlantiques : 700 000 habitants, quatre représentants à la Convention citoyenne, et tous – c'est respectable – avaient un engagement en matière d'environnement. Comme je l'ai dit dans la discussion générale, la probabilité qu'ils aient été tirés au sort relève de la magie.
Je vais faire entendre une autre voix du groupe Socialistes et apparentés, bien qu'évidemment je respecte tout à fait la position de mon collègue – nous avons bien sûr débattu de la mutation du secteur aérien. Nous sommes extrêmement sensibles à la question des pertes d'emplois, c'est pourquoi nous avions déposé des amendements à l'article 35, qui visaient notamment à accélérer les feuilles de route et à préciser les transitions nécessaires. Certes, leur adoption n'aurait pas résolu toutes les difficultés inhérentes à un sujet aussi sensible.
Concernant le plafond de deux heures trente, certains d'entre nous pensaient qu'il fallait le hausser, mais nous avons été sensibles à l'argument de l'emploi, et nous sommes revenus à une position plus modérée. Cependant, nous gardons le cap d'un changement de modèle, ce qui ne signifie pas que l'industrie aéronautique n'a pas d'avenir, mais celui-ci est déplacé, comme Dominique Potier l'a expliqué dans son intervention. Selon moi, dans certains secteurs professionnels, il faudra effectivement penser et agir autrement.
Monsieur le ministre délégué, vous avez dit qu'un quart des voyages en avion était le fait des personnes retraitées, sans doute parce qu'elles disposent de temps et de moyens. Mais les jeunes générations, elles, nous disent qu'elles souhaitent habiter demain dans un monde vivable. Il faut bien nous mettre en tête que ce projet de loi répond à une nécessité, celle de l'urgence climatique, qui impose de partager les efforts.
Je ne peux pas laisser M. David Habib attaquer ainsi les citoyens de la Convention citoyenne pour le climat. La CCC a été voulue par le Président de la République, elle a constitué un exercice démocratique inédit et son travail a été salué sur tous les bancs de l'Assemblée nationale. Je remarque d'ailleurs que beaucoup des groupes d'opposition critiquent le Gouvernement quand il ne reprend pas les mesures proposées par la Convention citoyenne…
En l'occurrence, il ne les reprend pas ! La CCC proposait le seuil de quatre heures.
… mais, de temps en temps, attaquent les membres de la Convention, lorsque certaines mesures ne leur plaisent pas. Nous sommes la représentation nationale, assumons nos responsabilités et ne critiquons pas un exercice qui a réuni pendant six mois des citoyens tirés au sort, dans un cadre précis, organisé par le CESE (Conseil économique, social et environnemental), avec des garants. On peut avoir un regard critique, mais ne jetons pas la suspicion et l'opprobre sur des citoyens qui ont bien travaillé.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et SOC. – Mme Delphine Batho et M. Cédric Villani applaudissent également.
Le débat sur la Convention citoyenne s'invite donc maintenant, un samedi soir très tard. Loin de nous l'idée d'attaquer la CCC et le travail accompli, ou de reprocher aux uns et aux autres le temps passé et l'énergie déployée. Nous ne critiquons pas les résultats, le groupe Les Républicains a d'ailleurs repris dans ses amendements certaines propositions, que nous pensons utiles pour la planète.
Mais tout de même, la question que pose M. David Habib est importante. Si nous n'avons rien à nous reprocher, si nous n'avons rien à cacher, le mieux reste de publier les noms. J'ai relu ce document fort intéressant qu'est le projet de loi ; on y trouve en page 2 la liste des membres de la Convention, mais environ 85 % d'entre eux n'ont donné que leur prénom. Ce n'est ni grave, ni gênant, ils en ont peut-être moins l'habitude que nous, puisque vous savez qu'en tant que parlementaires, nous déclarons tout : nom, prénom, âge, adresse, et toutes les informations nécessaires.
Toutefois, pour calmer cette discussion, peut-être faut-il demander leurs noms. Je ne sais pas à qui il faut nous adresser ; en tant que ministre délégué chargé des transports, vous n'êtes pas directement impliqué dans ce dossier. Monsieur le rapporteur général, nous vous le demandons à vous, afin que vous puissiez transmettre notre souhait à la ministre de la transition écologique. Nous voudrions que tout soit net, clair et sans bavure, et donc disposer des noms, des prénoms et des adresses des 150 citoyens de la Convention, et savoir s'ils ont rempli une déclaration d'intérêts pour, le cas échéant, en prendre connaissance, ou du moins savoir sur quel site elle est publiée.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 85
Nombre de suffrages exprimés 70
Majorité absolue 36
Pour l'adoption 56
Contre 14
L'article article 36, amendé, est adopté.
L'amendement no 5817 de Mme Michèle Tabarot, portant article additionnel après l'article 36, est défendu.
L'amendement no 5817 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 120 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je suis saisie de cinq amendements, nos 1580 , 576 , 6803 , 5125 et 5989 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 576 et 6803 sont identiques.
L'amendement no 1580 de Mme Émilie Cariou est défendu.
Les amendement identiques nos 576 de M. Loïc Dombreval et no 6803 de M. Loïc Prud'homme sont défendus.
La parole est à M. Stéphane Peu, pour soutenir l'amendement no 5125 .
Il s'appuie sur une proposition de la Convention citoyenne pour le climat, dont nous n'avons pas critiqué la composition. Au contraire, si nous nous félicitons du travail effectué, nous regrettons surtout le décalage entre l'espoir né de cette convention, le Président Emmanuel Macron s'engageant à reprendre ses propositions « sans filtre », et ce qu'il en résulte dans le projet de loi.
Parmi ses propositions, l'éco-contribution représente aujourd'hui un pourcentage par billet d'avion insuffisant, en comparaison de nombreux autres pays européens, qui font le choix d'augmenter la fiscalité des billets d'avion de manière importante depuis quelques années. Nous proposons une taxe progressive, qui porte principalement sur l'aviation d'affaires, c'est-à-dire sur les jets privés, dans une moindre proportion, mais de manière plus importante qu'aujourd'hui, sur les classes affaires des vols commerciaux et, bien sûr, de manière beaucoup plus marginale sur l'ensemble des billets d'avion.
Ces trois niveaux de progressivité de la taxe permettront d'allier l'efficacité économique à la justice sociale et aux objectifs de la transition énergétique. Un tel mode de taxation et une telle progressivité pourraient rapporter 4,2 milliards d'euros au budget de l'État, ce qui permettrait de financer le secteur ferroviaire, le plan vélo et bien d'autres choses utiles encore
Presque identique à l'amendement précédent, il vise à doubler l'écotaxe actuelle sur les billets en première, en classe affaires et sur les jets privés.
Il faut délivrer un message cohérent sur l'aérien. Vous proposez d'augmenter la taxe de solidarité, autrement dit la taxe Chirac, alors même que les activités aéronautiques sont très touchées par la crise. Je tiens à rappeler que c'est notre majorité qui a augmenté la taxe Chirac dans la loi de finances pour 2020. Malheureusement, en raison de la crise, nous n'avons toujours pas récolté les bénéfices de cette décision. Attendons d'en voir les effets, avant d'envisager toute nouvelle augmentation. J'émets donc un avis défavorable sur l'ensemble de ces amendements.
Il existe de nombreuses taxes spécifiques au transport aérien, comme la taxe incitative relative à l'incorporation de biocarburants, les systèmes de quotas à l'échelle de l'Union européenne ou encore les systèmes de compensation à l'échelle de l'OACI – Organisation de l'aviation civile internationale – , l'éco-contribution.
S'y ajoute une taxation générale qui figure parmi les plus élevées en Europe, notamment par rapport à certains pays dont on fait parfois l'éloge. La Suède, par exemple, a un niveau de taxation de vingt points inférieur à celui de la France. Le Royaume-Uni, qui a un niveau de taxation à peu près équivalent, vient d'annoncer une baisse de la taxe sur les billets d'avion, pour accompagner la reprise. Ne nous trompons donc pas sur notre environnement géopolitique proche, européen. Le but n'est pas d'affaiblir le transport aérien français.
Monsieur le ministre délégué, vous avez indiqué qu'il faut des prix plancher pour les billets d'avion, que l'on ne peut pas voyager pour 10 euros. Une taxe doit être acquittée. Même si vous avez la possibilité de différer dans le temps l'augmentation de l'éco-contribution, il est important de donner un signe en matière de justice sociale, comme l'a souligné M. Peu.
Je reconnais que vous avez augmenté la taxe Chirac. La question que posent nos amendements, qui sont proches, c'est celle de la progressivité, donc de la justice, laquelle consiste à différencier nettement la taxe selon que l'on voyage en jet privé, en classe affaires ou en classe économique. La notion de la progressivité de la taxe ou de l'impôt devrait tous nous réunir.
Je ne dispose pas des chiffres de l'éco-contribution sur les billets d'avion, mais il me semble que la France se situe en deçà de la moyenne européenne, non pas au-dessus. C'est la raison pour laquelle nous vous proposons de l'augmenter et de la rendre progressive.
L'amendement no 1580 n'est pas adopté.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l'amendement no 6959 .
Cela relève du hasard, j'avais pris l'initiative, après la crise des gilets jaunes, de réunir 150 citoyens sur la colline de Sion, pour réfléchir à « plus de justice, moins de carbone ». De ces deux jours, avec E4C – Energy4Climate – , Alternatives économiques et de nombreux témoins économiques et sociaux du territoire, ont résulté des propositions assez extraordinaires. Pour ma part, j'ai salué l'initiative du Président de la République et je la salue de nouveau publiquement ce soir : je rends hommage à l'honneur de chacun des 150 citoyens qui se sont engagés dans cette aventure.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
En revanche, notre pays souffre d'un défaut d'articulation entre démocratie participative et démocratie représentative. Comme l'a souligné Laurent Berger, lorsqu'un citoyen s'engage au nom de la démocratie participative et qu'il devient un responsable syndical, puis un élu, il bascule alors dans la démocratie représentative.
Ni Nicolas Sarkozy, ni François Hollande n'ont eu une telle démarche, ni même Emmanuel Macron, malgré ses tentatives, qui se sont soldées par des échecs, à l'instar de celui des états généraux de l'alimentation, suivis de l'immense déception engendrée par la loi dite ÉGALIM, et de celle suscitée par le présent projet de loi, à l'issue de la Convention citoyenne pour le climat. Je le redis, au nom du groupe Socialistes et apparentés : nous avons un problème de continuum démocratique, de passage de la démocratie participative à la démocratie représentative.
J'en viens à l'amendement : j'ai lu avec passion les dossiers scientifiques sur la décarbonation, les scénarios « Maverick » et « Iceman ». J'ai découvert toutes les perspectives qu'ouvre le génie humain. J'ai une autre conviction profonde, qui repose sur le fait qu'avec le train, le taux d'émission s'élève 14 grammes de CO2 par passager au kilomètre, contre 285 grammes avec l'avion.
L'amendement que je propose est ancien, puisque je l'ai déjà déposé il y a trois ans, avant que le sujet ne soit à la mode. Pour une distance parcourue identique, il vise à ce qu'une taxe, correspondant à l'écart entre le prix moyen du billet de train et celui du billet d'avion, s'ajoute au prix du billet acquitté par le voyageur aérien. Cette taxe permettrait d'annuler les effets pervers des subventions publiques, telle que l'exonération de taxation du kérosène, dont très peu de Français bénéficient. Au contraire, l'ensemble des Français bénéficieraient de cette taxe différentielle entre le billet de train et le billet d'avion, en alimentant l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF), pour renforcer les réseaux ferrés de transport des voyageurs, notamment sur les petites lignes. Elle permettrait ainsi de restituer une équité fiscale et tarifaire, au nom de l'intérêt général, et favoriserait la décarbonation, grâce au changement des pratiques – je n'aime pas parler de décroissance – , et à un juste repositionnement de l'aérien, là où il est utile.
Cet amendement permettrait donc d'accroître la justice sociale tout en augmentant la décarbonation. Les citoyens de la colline de Sion voulaient plus de justice et moins de carbone : il en résulte des amendements de bon sens, comme celui que je défends.
Nous partageons tous la volonté de mettre en avant le travail réalisé par la Convention citoyenne pour le climat. Nous sommes en effet confrontés à une véritable défiance du système politique, et il faut allier la démocratie participative à la démocratie représentative. Il est de notre devoir d'animer une telle réflexion et de rendre hommage aux citoyens qui s'engagent. Je salue également le travail que vous avez mené après la crise des gilets jaunes, pour favoriser l'apaisement et formuler des propositions.
En revanche, votre amendement vise une nouvelle fois l'augmentation de la taxe Chirac. Nous avons déjà eu cette discussion : une telle hausse n'est pas souhaitable alors que nous l'avons déjà augmentée pour 2020, sans pouvoir encore mesurer les conséquences de cette décision à ce jour, du fait de la crise. Il me semble donc préférable de voir les effets de cette augmentation dans le temps, ainsi que la situation du secteur de l'aérien au sortir de la crise, avant d'envisager toute nouvelle augmentation de la fiscalité. C'est la raison pour laquelle j'émets un avis défavorable sur votre amendement.
Je salue également l'engagement des citoyens, avec lesquels j'ai eu plusieurs échanges francs, exigeants et ouverts, notamment avec le groupe de travail « Se déplacer » : il ne faut pas changer les règles du jeu en cours d'examen.
Votre point de vue est intéressant, monsieur Potier, car il existe de nombreuses façons de comparer les choses. La voiture émet environ 88 grammes de CO2 par passager au kilomètre, avec un taux de remplissage de l'ordre de 2,2 passagers. Ce chiffre est de 1,7 gramme pour le TGV, mais il peut monter, selon le mix énergétique du pays, à 114 grammes. Ce 1,7 gramme tient donc au fait que l'énergie française est décarbonnée, étant essentiellement nucléaire. Pour l'avion, ce chiffre s'élève en moyenne à 141 grammes sur le moyen courrier.
Mais une telle approche ne vaut que si l'on prend en compte uniquement les moyens de transport, les véhicules. Or il faut aussi regarder le système de transport, le coût des infrastructures, leur entretien, la régénération, les effets de remplissage, de distance : bref, les chiffres évoluent beaucoup. Votre proposition est intéressante, mais pour la rendre pertinente, il faudrait raisonner sur le système de transport, un travail actuellement effectué par les services du ministère : il n'est pas encore complètement abouti. Je vous invite donc à en discuter de nouveau.
L'amendement no 6959 n'est pas adopté.
L'amendement no 5819 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il tend à supprimer l'article 37, qui vise à interdire la construction de nouveaux aéroports et l'extension des aéroports existants.
Je profite de cet instant pour remercier le rapporteur d'avoir évoqué à de nombreuses reprises Jacques Chirac, pour son rôle dans la création de la première taxe aérienne solidaire sur cette planète.
Je rappelle qu'il a été le premier président de la République à dire les choses, en matière d'environnement. C'était à Johannesbourg, en septembre 2002 : « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs. » Cela a permis d'engager des politiques importantes en matière environnementale, reprises par les présidents et les majorités successifs, notamment en 2007 par le président Sarkozy et le ministre de l'écologie d'alors, Jean-Louis Borloo, lors du Grenelle de l'environnement.
Je vous remercie donc, monsieur le rapporteur, de reconnaître à Jacques Chirac le mérite d'avoir le premier ouvert cette nouvelle ère pour l'environnement, qui nous tient tant à coeur aujourd'hui.
La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l'amendement no 4974 .
Vous prévoyez dans cet article d'empêcher l'extension des aéroports existants et la construction de nouveaux – très bien. Or le trafic aérien, à terme, se développera. Les aéroports existants rencontreront donc des difficultés pour l'accueillir et leurs riverains subiront des nuisances accrues. Où en est d'ailleurs le fameux fonds d'indemnisation des riverains ? Nous voyons bien que l'indemnisation pour les nuisances causées par les aéroports n'est pas suffisante.
Par cet amendement, j'appelle en tout cas votre attention sur les conséquences de l'article sur les aéroports existants et leurs riverains.
Il importe de maintenir cet article, car il s'inscrit dans notre volonté, assumée, de réguler l'activité aéronautique. Il en est de même de l'interdiction des vols intérieurs quand des alternatives ferroviaires de moins de deux heures trente existent.
En ce qui concerne l'extension des aéroports, il faut avancer. Un certain nombre d'entre eux est entouré de zones humides, qui participent de la biodiversité et qu'il faut protéger. Maintenons donc l'article 37, qui est équilibré. Avis défavorable.
J'émets un avis défavorable, pour les mêmes raisons que M. le rapporteur.
Monsieur Pupponi, faisiez-vous référence à la TNSA – la taxe sur les nuisances sonores aériennes – ou à des fonds d'indemnisation spéciaux pour les riverains ? Des mesures dérogatoires existent parfois, comme c'est le cas, par exemple, à Nantes. L'affaire, en cours, est gérée à l'échelon local. Quant à la TNSA, comme les années 2020 et 2021 ont été particulières, un amendement la concernant est prévu dans le prochain projet de loi de finances.
Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 138 , 5250 , 6580 , 577 , 3666 et 6821 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 138 , 5250 et 6580 d'une part, nos 577, 3666 et 6821, d'autre part, sont identiques.
Je suis saisie par le groupe la France insoumise d'une demande de scrutin public sur chacune de ces deux séries d'amendements identiques.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
L'amendement no 138 de Mme Delphine Batho est défendu.
La parole est à Mme Annie Chapelier, pour soutenir l'amendement no 5250 .
Le présent amendement vise à interdire les projets de construction de nouveaux aérodromes et d'extension de ceux déjà existants, à l'exception des projets motivés par la sécurité ou la défense nationale.
Contrairement à l'orateur précédent, notre objectif est d'anticiper une potentielle augmentation du trafic aérien pour la contrer. En effet, le développement aéroportuaire n'est pas souhaitable : il faudrait écouter davantage ceux des jeunes qui le savent et ont d'autres aspirations. L'économie engendrée par le renoncement aux développements aéroportuaires permettrait de financer d'autres projets.
Je rappelle que, dans la nuit de mercredi à jeudi, 80 % de la production agricole française a été touchée par la gelée noire. Pour l'agriculture, cette année s'annonce blanche. J'espère que le soutien de l'État à l'agriculture sera au niveau de celui qui a été accordé au secteur aéroportuaire, auquel il a versé 15 milliards d'euros. L'agriculture fait travailler 1 million de personnes. Nous parlons de secteurs d'activité et d'emplois : la diminution de la production agricole en fera disparaître des centaines de milliers !
Dressons un parallèle. Alors que nous pouvons très bien imaginer un monde dans lequel nous voyagerions beaucoup moins en avion, tout simplement parce que d'autres possibilités existent, pour l'agriculture, en revanche il n'y en a pas. Si, demain, il n'y avait plus d'avion, nous continuerions de nous déplacer mais, sans agriculture, nous ne pourrions plus manger.
Les explications sont unanimes : cette gelée noire a été causée par le changement climatique. Le printemps ayant été trop précoce, la végétation n'a pas supporté la gelée. Si nous examinons un tel texte, c'est parce que l'urgence de la situation exige de prendre des mesures et de les inscrire dans des lois. S'il vous plaît, ne soyez pas timides. Soyez concrets. Pensez à demain, et, mieux encore, à aujourd'hui !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe FI. – Mme Delphine Batho et M. Cédric Villani applaudissent également.
La parole est à M. Jean-Charles Colas-Roy, pour soutenir l'amendement no 6580 .
Si nous décidons de restreindre les constructions et les extensions d'aéroports, il faut l'affirmer clairement dans la loi, en rendant l'article plus explicite – actuellement, le texte mentionne seulement l'impossibilité d'une déclaration « d'utilité publique en vue d'une expropriation ». L'amendement no 6580 vise, grâce à une rédaction plus claire, à interdire explicitement les extensions et les créations de nouveaux aéroports..
De nombreux collègues ont souligné les grandes difficultés que traverse actuellement le secteur aéronautique, demandant que l'on soutienne les industriels et les territoires concernés. Pourtant, s'il importe de mener la transition écologique dans le secteur des transports en France, c'est justement parce que notre pays compte des constructeurs automobiles de premier plan, une compagnie aérienne nationale et des constructeurs aéronautiques leaders dans le monde ! Si la France y arrive, elle montrera l'exemple aux autres pays et elle accroîtra son leadership international, en particulier au plan européen, dans l'optique de la présidence du Conseil de l'Union européenne au premier semestre 2022.
Ne soyons pas moins-disants et restons à l'avant-garde des pays qui se réforment. Le respect de l'accord de Paris et la croissance économique par la transition écologique exigent des mesures fortes. Ce texte en contient : nous pouvons en accroître encore le nombre.
Honnêtement, monsieur le ministre délégué, proposer cet article ou ne rien faire, cela revient à peu près au même. Il est pour le moins éloigné d'une reprise « sans filtre » de la proposition de la Convention citoyenne pour le climat consistant à « interdire la construction de nouveaux aéroports et l'extension des aéroports existants ». En effet, vous prévoyez un nombre absolument incroyable d'exemptions ou d'exceptions.
Le texte de l'article vise à modifier le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique en rendant impossibles les déclarations d'utilité publiques pour les constructions et extensions d'aéroports. Or, selon le Réseau action climat, sur la dizaine de projets aéroportuaires étudiés actuellement, aucun ne nécessite une telle déclaration. La mesure ne sert donc à rien, à part pour l'aérodrome de Nantes-Atlantique, mais pour lequel une exception est prévue – j'y reviendrai.
L'article prévoit en outre que seules seront concernées les constructions et extensions « qui ont pour effet d'entraîner une augmentation nette, après compensation, des émissions de gaz à effet de serre. » Or plusieurs rapports démontrent que les compensations sont parfaitement illusoires dans le secteur aérien et qu'il faut les abandonner. Par exemple, les arbres qui sont plantés en compensation d'un trajet en avion ne capteront du carbone que dans bien des années !
C'est aux alinéas suivant que l'article devient magnifique, avec l'énumération d'un nombre fou d'exceptions. Feront ainsi exception à la mesure les aérodromes de Nantes-Atlantique et de Bâle-Mulhouse, ceux des collectivités d'outre-mer, ainsi que les constructions rendues nécessaires « par des raisons de sécurité, sanitaires, de défense nationale ou de mise aux normes réglementaires » – disposition qui permettra tout et n'importe quoi. Monsieur Djebbari, je vous rappelle que le Gouvernement, qui avait pourtant annoncé l'abandon du terminal 4 de Roissy-Charles-de-Gaulle, refuse de l'inscrire dans ce texte.
La France possède un tiers des 460 aéroports européens : nous n'avons pas besoin d'en construire de nouveaux ou d'agrandir encore ceux qui existent. Je donnerai simplement un exemple, celui de l'aéroport de Marseille, le cinquième de France. Un projet vise à augmenter ses capacités d'accueil de 4 millions de passagers annuels, avec 22 000 mètres carrés d'espace supplémentaires, dont 6 000 de commerces, avant la construction éventuelle d'une nouvelle jetée d'embarquement de 13 000 mètres carrés, le tout pour 160 millions d'euros. Ne faudrait-il pas en finir avec cette folie et investir ces sommes dans le transport ferroviaire et plus généralement les transports en commun ?
Je le répète, le Réseau action climat a montré que cet article, c'est du vide, car il ne concernera aucun des dix plus grands projets aéroportuaires. Il ne sert absolument à rien, à part à gesticuler pour feindre d'agir.
Madame la députée, il n'y a pas de gesticulations dans cet hémicycle : il y a des députés qui veulent surtout oeuvrer à la transition écologique de manière très pragmatique, en faisant confiance à l'innovation et à notre capacité d'accueillir l'avion décarboné de demain.
Pour cela, oui, je l'assume, il faut prévoir des dérogations et laisser des marges de manoeuvre, pour des extensions contrôlées de ces aéoports. Au nom de l'innovation, conservons l'équilibre du texte. Avis défavorable à l'ensemble des amendements.
Concernant l'investissement dans les autres modes de transport, nous n'avons pas à rougir.
Je le répète – mais après tout, puisque c'est nous qui l'avons fait, profitons-en : nous avons repris 35 milliards de dette de la SNCF. Alors que le système ferroviaire était dans un état catastrophique, 36 milliards d'euros seront investis en dix ans, ce qui est inédit, dont 6 milliards dans les petites lignes, qui devaient toutes fermer d'après certains rapports. Nous n'avons, en la matière, aucune leçon à recevoir de personne sur ces bancs.
Mme Cendra Motin applaudit.
Partons des faits. Nous avons arrêté des projets aéroportuaires, comme celui de Notre-Dame-des-Landes et celui du terminal 4 de Roissy-Charles-de-Gaulle, dont le coût était estimé à 9 milliards d'euros. C'est nous, et non pas vous, qui avons arrêté ces projets. Le présent article aura des implications concrètes : il conduira à arrêter des projets, par exemple, celui, à Lyon, de construire un deuxième double piste, ou celui, à Bordeaux, d'aménager une piste parallèle.
Cela, vous le savez très bien, si vous faites preuve d'honnêteté intellectuelle. Vous avez parlé du nombre d'aéroports en France. Depuis des années, ils sont trop nombreux, d'autant qu'ils partagent la même vocation généraliste – c'est même la raison pour laquelle les compagnies ultra low cost les ont mis en concurrence les uns avec les autres. La Nouvelle-Aquitaine compte ainsi onze aéroports, tous, supposément, généralistes, la Bretagne, cinq. Nous avons engagé il y a quelques mois une concertation avec les régions pour soit trouver des synergies, soit accompagner des fermetures d'aéroport. Vous savez donc très bien que, malheureusement – ou heureusement pour vous – , des aéroports régionaux fermeront dans les années qui viennent.
Cet article est utile : il met fin à des projets qui n'ont plus de sens dans le contexte actuel. S'y ajouteront donc des fermetures d'aéroports existants, parfois au grand dam des territoires concernés, qui les contesteront.
Enfin, nous avons eu l'occasion de le souligner, ainsi d'ailleurs que M. Pupponi : l'aéroport de demain ne sera plus celui d'aujourd'hui. Il se tournera vers la transition écologique, vers la logistique urbaine et interurbaine, éventuellement vers le fret aérien. Je voudrais tout de même partager avec vous la réalité de ce que je vis : tous les maires écologistes qui avaient fait campagne contre leur aéroport viennent à présent me voir pour que je le sauve ! Ne tombons pas dans la démagogie qui consisterait à s'acharner systématiquement sur les outils d'aménagement du territoire…
… et à les conforter en coulisse. Avis défavorable.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 71
Nombre de suffrages exprimés 68
Majorité absolue 35
Pour l'adoption 12
Contre 56
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 72
Nombre de suffrages exprimés 70
Majorité absolue 36
Pour l'adoption 14
Contre 56
Il vise à préciser la rédaction de l'article 37, en ajoutant que l'interdiction de déclaration d'utilité publique s'applique à la création d'un aérodrome ouvert à la circulation aérienne publique, d'une piste ou d'une aérogare. Son objectif est d'exclure du champ de cette interdiction les travaux qui peuvent avoir lieu autour d'un aéroport, notamment pour en faciliter l'accès, comme à Roissy-Charles-de-Gaulle.
Il s'inscrit, en quelque sorte, dans la suite des propos du ministre délégué et du rapporteur sur les différents projets de décarbonation du secteur aérien : nous appelons d'ailleurs de nos voeux ces progrès techniques. Pour le moment, toutefois, encadrer le développement des capacités aéroportuaires réclamerait plutôt d'interdire la délivrance d'un permis d'aménager – et non celle de déclarations d'utilité publique en vue d'une expropriation – , pour tout projet de création ou d'augmentation de ces capacités susceptible d'entraîner une augmentation des émissions de gaz à effet de serre. Cela reviendrait à subordonner les extensions aéroportuaires au fait que nous pourrions demain disposer d'une aéronautique plus vertueuse.
L'amendement no 5983 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Les amendements identiques nos 2805 de M. David Lorion et 4759 de Mme Zivka Park sont défendus.
L'amendement no 136 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 4762 de Mme Zivka Park est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
L'amendement étant satisfait, je demande son retrait ; à défaut, avis défavorable.
L'amendement no 4762 est retiré.
L'amendement no 2126 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Si vous le permettez, madame la présidente, je défendrai par la même occasion les amendements nos 5479 et 6814 à 6820 , qui prévoient également d'interdire des projets d'extension aéroportuaires.
Ils portent sur Nantes-Atlantique, Bâle-Mulhouse-Fribourg, Bordeaux-Mérignac, Paris-Charles-de-Gaulle, Nice-Côte-d'Azur, Marseille-Provence, Lille-Lesquin, Rennes-Saint-Jacques, Montpellier-Méditerranée et Caen-Carpiquet. Leur objectif est d'obliger le Gouvernement à planifier une véritable bifurcation du secteur. En effet, comme l'a fort bien expliqué Mathilde Panot, l'article 37 ne permettra pas de penser autrement l'aménagement du territoire et la mobilité, ni d'investir dans d'autres solutions les fonds prévus pour ces extensions. En vérité, à vous entendre, monsieur le ministre délégué, on se demande si votre stratégie ne vise pas plutôt à renforcer et à diffuser le trafic aérien – ce qui irait à l'encontre de tous nos engagements internationaux en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, mais surtout, encore une fois, vous empêcherait de préparer la bifurcation écologique.
C'est pourquoi nous voulons inscrire explicitement dans cet article que ces projets d'agrandissement seront définitivement abandonnés. Sans cela, monsieur le rapporteur, je serais au regret de constater que toutes vos dispositions ne sont que du vent, car elles ne donneront même pas aux salariés du secteur et à l'écosystème aérien les moyens de se projeter dans un avenir consistant en autre chose qu'à créer des conglomérats et des aéroports toujours plus étendus, qui aspirent, de plus, pour leurs infrastructures, les ressources dont disposent les territoires.
Je serai clair : à partir du moment où des études ou des travaux ont été engagés sur le terrain, l'adoption de ces amendements ne permettrait pas de revenir sur les extensions en cause. Concernant Bâle-Mulhouse-Fribourg, j'ajouterai que l'article 2 de la convention franco-suisse du 4 juillet 1949 interdit d'apporter des modifications à l'aéroport sur le seul fondement du droit français. En conséquence, avis malheureusement défavorable à ces amendements.
Je me suis efforcé d'être le plus clair et le plus honnête possible s'agissant des projets aéroportuaires arrêtés – le terminal 4 de Roissy, Notre-Dame-des-Landes, les aménagements de Lyon et de Bordeaux, pour ne retenir que les plus emblématiques – et des perspectives de fermeture de certains aéroports régionaux. Les principes qui guident notre action en la matière sont le respect du droit, la concertation et l'autorité de la chose jugée. Je n'entrerai pas dans le détail, mais c'est pour cette raison que les amendements défendus ou évoqués par Mme Obono recevront tous un avis défavorable du Gouvernement.
L'amendement no 5340 de M. le rapporteur est un amendement de précision.
L'amendement no 5340 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement no 5054 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 3981 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Les amendements nos 5005 de M. Jean-Luc Lagleize et 2096 de Mme Delphine Batho, pouvant être soumis à une discussion commune, sont défendus.
La parole est à Mme Danièle Obono, pour soutenir l'amendement no 5479 .
J'en profiterai pour répondre à certains arguments du ministre délégué. Tout d'abord, les fermetures de petits aéroports ou d'aéroports régionaux ne compenseront pas l'existence – encore moins l'extension – de très grands sites qui, je le répète, monopoliseront moyens et infrastructures. Ensuite, certains des projets que nous souhaitions interdire, par exemple ceux de Nantes et de Lille, n'ont pas fait l'objet d'actes administratifs, ni même d'une concertation : en l'occurrence, il s'agit donc non pas de respecter l'autorité de la chose jugée, mais d'avoir une ambition, une vision générale portant aussi bien sur l'écologie que sur l'économie et les salariés de ce secteur. Tel est le sens de cet amendement, qui vise à mettre fin au projet d'agrandissement de Bordeaux-Mérignac, et des amendements suivants, que j'ai déjà défendus, mais que nous maintenons.
Mme Mathilde Panot applaudit.
L'amendement no 5479 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 68
Nombre de suffrages exprimés 60
Majorité absolue 31
Pour l'adoption 49
Contre 11
L'article 37, amendé, est adopté.
Les entreprises qui exploitent des services sur les pistes, en particulier, doivent modifier et renouveler leur flotte, afin de participer également à la réduction des émissions polluantes.
La parole est à M. Jean-Luc Fugit, pour soutenir l'amendement no 6218 .
Dans le même esprit, cet amendement vise à réduire les quantités de gaz à effet de serre et de polluants de proximité émises dans les zones aéroportuaires par les moteurs des groupes auxiliaires de puissance et par les engins de piste nécessaires à l'exploitation de l'aéroport.
C'est une nouvelle version d'un amendement soumis à la commission spéciale, que j'ai retravaillé pour tenir compte des avis émis dans ce cadre. Son objectif est double : d'une part, que les exploitants aéroportuaires et les sociétés d'assistance en escale réalisent d'ici à 2027 les investissements nécessaires pour mettre en place des moyens de substitution aux moteurs des groupes auxiliaires de puissance, qui provoquent une pollution atmosphérique importante ; d'autre part, qu'ils fassent l'acquisition d'engins de piste plus propres lors du renouvellement de leur parc motorisé, roulant ou non, dans la proportion minimale de 50 % de ce renouvellement à partir du 1er janvier 2024 puis en totalité à partir du 1er janvier 2027.
Cette mesure est importante également car elle permettra d'améliorer significativement la qualité de l'air que respirent les personnels travaillant sur les pistes des aéroports. Je me suis efforcé d'être très bref, mais il était important que je mentionne ce point pour eux.
Je partage la volonté d'améliorer la qualité de l'air que respire le personnel travaillant à proximité de ces engins. Je vous remercie, monsieur Fugit, pour votre engagement : vous avez beaucoup travaillé sur les zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m) et continuez d'oeuvrer pour améliorer la qualité de l'air. Vous avez contribué à éclairer aussi la représentation nationale sur les difficultés que rencontre la filière. Les entreprises du secteur aérien sont en effet touchées de plein fouet par la crise. En lien avec d'autres députés, notamment François Pupponi, nous avons pu avoir des contacts avec elles. Or l'ajout de contraintes à ce stade ne me semble pas cohérent avec leur situation.
C'est la raison pour laquelle je crois nécessaire que nous travaillions, dans le cadre notamment du prochain projet de loi de finances, à des suramortissements permettant d'accompagner ces entreprises dans la décarbonation de leur outil de travail. Je sais que nous pourrons compter sur vous pour avancer. Quoi qu'il en soit, je serai à vos côtés pour mener ce combat.
Nous avions eu l'occasion d'en parler en commission : les aéroports sont engagés dans des processus de décarbonation. Ils obtiennent déjà des résultats tangibles : l'aéroport de Nice a ainsi diminué de 80 % ses émissions par rapport à une période de référence. L'électrification des véhicules de piste – appartenant généralement à des flottes captives – , qui permet d'enregistrer des résultats rapides, est accélérée par les dispositifs de surarmotissement. Je partage donc évidemment l'objectif visé par votre amendement, monsieur le député, mais considère qu'il est satisfait : je vous en demande donc le retrait.
J'ai du mal à comprendre les avis du rapporteur et du ministre délégué. L'amendement n'est en effet pas très contraignant. Il indique simplement que les entreprises faisant rouler des véhicules autour des pistes doivent choisir du matériel moins polluant lors du renouvellement de leur flotte, en précisant qu'elles ont jusqu'à 2027 pour le faire. Cela n'exclut pas que nous votions aussi, à l'occasion du projet de loi de finances, des mesures fiscales incitatives. Mais encore faut-il que les entreprises soient soumises à une obligation !
Il n'est pas possible de consacrer un article entier à l'exemplarité dont doivent faire preuve les aéroports et ne rien exiger des entreprises qui sont présentes sur les pistes. Imaginez le nombre de véhicules concernés et la pollution ainsi émise – au détriment non seulement des personnels et des passagers mais aussi des riverains ! Les gens qui habitent à proximité des aéroports subissent en effet ces pollutions. Avec le présent amendement, nous demandons simplement aux entreprises de faire un effort qui n'est pas insurmontable ! Je ne comprends pas pourquoi ces amendements devraient être refusés.
Je peux comprendre les arguments avancés, au regard de la crise actuelle. Nous serons en effet au rendez-vous du PLF pour prendre des mesures. J'espère que notre débat de ce soir, même s'il est très rapide, incitera les entreprises concernées à se lancer. Je comprends que ce ne soit pas facile financièrement compte tenu de la situation, mais l'amélioration de la qualité de l'air doit être un combat partout, tout le temps et pour tout le monde. Ces entreprises devront être, elles aussi, au rendez-vous.
Quant à nous, nous y travaillerons à l'occasion du PLF, en répondant à l'invitation du rapporteur, pour donner aux entreprises les moyens de se lancer. C'est un point que le Conseil national de l'air (CNA) surveillera à l'avenir. Je retire donc mon amendement, en espérant que nous pourrons avancer et enregistrer des victoires dans la lutte pour l'amélioration de la qualité de l'air.
L'amendement no 6218 est retiré.
Tout en étant opposé à ces amendements, je souhaite alerter M. le ministre délégué et M. le rapporteur sur le fait que, dans le cadre du volet aéronautique du plan de relance, les avitailleurs n'ont pas été directement visés par des aides. Le budget du dispositif Territoires d'industrie a été très récemment abondé à hauteur de 300 millions d'euros supplémentaires pour permettre aux entreprises de bénéficier de nouveaux investissements et de subventions de l'État. Il serait important que, dans ce cadre, au-delà des discussions que nous pourrions avoir à l'occasion du PLF, les entreprises intervenant au sol sur les plateformes aérorportuaires soient également accompagnées.
L'amendement no 5083 n'est pas adopté.
Je suis saisie de huit amendements identiques tendant à supprimer l'article 38.
Les amendements nos 107 de Mme Delphine Batho, 3121 de M. Marc Le Fur, 3174 de M. Jean-Marie Sermier, 4002 de M. Robin Reda, 5066 de M. Jean-Luc Lagleize et 5128 de M. Hubert Wulfranc sont défendus.
La parole est à Mme Mathilde Panot, pour soutenir l'amendement no 6822 .
Nous nous opposons à la généralisation de la compensation carbone, qui revient à de multiples reprises dans ce projet de loi et qui constitue une tentative de diversion. Je rappelle que les émissions de CO2 du secteur aérien ont augmenté de 71 % entre 1990 et 2018. La priorité est évidemment de les réduire et non pas de croire en l'illusion d'une compensation qui, de fait, n'existe pas : elle est inefficace et ses détails d'application sont délirants.
L'article 38 prévoit en effet l'application de la mise en ? uvre de la compensation en 2022 mais ne la rend obligatoire que pour 50 % des émissions de gaz à effet de serre ; il faut attendre 2024 pour que 100 % des émissions soient concernées. En outre, la sanction prévue est ridicule, puisqu'elle n'est que de 100 euros pour une tonne de CO2 non compensée – soit seulement 1 600 euros pour un trajet Paris-Marseille. Nous nous opposons donc à ce qu'on pourrait résumer sommairement ainsi : « J'ai pris l'avion mais j'ai planté trois arbres. » Malheureusement, cela ne fonctionne pas ainsi. Il faut engager des changements systémiques et non pas se réfugier dans l'illusion technologiste d'une compensation qui, je le répète, n'existe pas.
L'amendement no 7143 de M. Julien Aubert est défendu.
Quel est l'avis de la commission sur ces huit amendements de suppression ?
Je voudrais remettre en perspective l'article 38. Nous avons entamé notre débat sur le secteur aérien en abordant le premier pilier de notre stratégie, la décarbonation. Le second pilier est la réduction des émissions, que nous obtiendrons grâce à l'interdiction des vols lorsqu'il existe une autre solution en deux heures trente. Viennent ensuite le sujet des aéroports puis celui de la compensation.
Il me semble nécessaire de prend acte de notre désaccord sur ce dernier point. Vous pensez que la compensation n'est pas le bon outil, alors que je pense le contraire : elle offre, en effet, l'opportunité de financer des projets de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de séquestration de carbone, qui manquent aujourd'hui de financements. Il convient de le souligner.
En commission spéciale, nous avons décidé la réalisation d'un bilan des projets de compensation, notamment de leur mise en oeuvre, pour pouvoir mesurer les effets du mécanisme. Je vous propose de nous donner rendez-vous lorsque les bilans de ces projets auront été publiés, afin que nous puissions voir qui, de vous ou de moi, chers collègues, avait raison. J'émets donc un avis défavorable sur ces amendements de suppression.
La compensation est un outil complémentaire à toutes les initiatives de décarbonation en dur, que j'ai eu l'occasion de citer : les biocarburants, l'électrification des opérations au sol, l'optimisation des trajectoires aériennes et le travail d'innovation réalisé en matière de structures aérodynamiques, de composants et de modes de propulsion. La compensation s'ajoute à ces mesures, afin d'accélérer le pouvoir de décarbonation, mais elle ne s'y substitue pas. Il y a bien des actions de fond qui sont entreprises. Pour ces raisons, j'émets un avis défavorable.
Je suis, pour ma part, favorable à la suppression de l'article 38, qui est un peu de « la poudre de perlimpinpin », pour reprendre une expression de notre président. Il inscrit dans le marbre un mécanisme de compensation : or vous venez très bien d'expliquer, monsieur le ministre délégué, que celle-ci ne se substitue pas à la décarbonation mais la complète.
Je rappelle que le mécanisme de compensation, au travers des unités de réduction certifiée des émissions (URCE), que l'on appelle crédits carbone dans le présent texte mais qui peuvent aussi être qualifiées de REC – réductions d'émissions certifiées – , a été conçu en 1997, à l'occasion du protocole de Kyoto, ratifié par la France en 2005. Or il a été démontré depuis que le mécanisme de compensation est totalement inopérant. Il s'est avéré sans aucun effet sur la réduction, recherchée, de la hausse régulière, constante et annuelle des émissions de gaz à effet de serre. Il s'agit donc d'un dispositif qui ne fonctionne pas. Je veux bien que l'on fasse une loi bavarde, qui ne soit que de la littérature, en prévoyant des mécanismes de compensation mais soyons plutôt honnêtes et sincères. Mettons en place des dispositifs qui permettront une réelle décarbonation. Je le répète : les mécanismes de compensation sont de la poudre de perlimpinpin.
Mme Danièle Obono applaudit.
Il y a déjà des leçons à tirer de ce mécanisme, comme cela vient d'être dit. L'exemple d'Air France l'illustre : le projet de compensation que la compagnie a engagé à Madagascar s'est non seulement révélé être un échec patent en matière de réduction des émissions, mais il a, en outre, exacerbé les tensions entre les communautés. C'est un échec absolu. Il faut donc tirer les leçons du passé.
Ensuite, je persiste à dire – tout comme le démontrent des expériences et des rapports et comme le soulignent des associations – que la compensation est une illusion qui nous détourne de l'essentiel. Lorsque l'on compense, la priorité n'est plus de réduire les émissions de gaz à effet de serre, notamment celles de l'aviation.
Monsieur le rapporteur, je n'ai pas entendu l'échéance à laquelle vous souhaitiez me donner rendez-vous : un an, cinq ans, dix ans ? Vous savez aussi bien que mois que nous sommes face à un problème urgent. Supprimons donc l'article 38 qui ne sert à rien, sinon à aggraver la situation en créant un mécanisme qui n'a jamais été un moyen de réduire les émissions. Je le répéterai autant qu'il le faudra : des arbres plantés ne sont pas des forêts. L'enjeu est maintenant de les laisser vieillir et non pas de faire de la fausse compensation, comme vous le proposez.
La parole est à M. Guillaume Kasbarian, pour soutenir l'amendement no 6260 .
Je défendrai en même temps les amendements nos 6259 et 6258 . L'amendement no 6260 vise à réécrire l'alinéa 5 de l'article 38, qui instaure un système de compensation des émissions de gaz à effet de serre par les compagnies opérant des vols à l'intérieur du territoire français, dont les émissions sont déjà soumises aux obligations du système ETS – système d'échange de quotas d'émission. Il y aura donc une double compensation. Les modifications que je propose dans le texte visent donc à éviter que les émissions de GES déjà compensées ne le soient une seconde fois.
Je vous remercie pour vos amendements, monsieur Kasbarian, qui me permettent de clarifier les choses. L'article 38 porte sur deux mécanismes bien différents. Tout d'abord, le marché du carbone européen vise à limiter les émissions de gaz à effet de serre en plafonnant le montant maximal d'émissions du secteur au sein de l'Union européenne. Or l'objectif de l'article 38 consiste à mettre en place des mécanismes de compensation.
Ensuite, le dispositif européen SCEQE – système communautaire d'échange de quotas d'émission de l'Union européenne – ne constitue en aucun cas un mécanisme de compensation : il est un système d'échange de droits d'émission. Il n'y a donc pas de double taxation car les deux logiques sont totalement différentes : dans un cas, une compensation, dans l'autre, un système d'échange. C'est la raison pour laquelle j'émettrai un avis défavorable sur vos amendements.
Comme l'a souligné le rapporteur, il n'y a pas de double compensation. Il y a, d'une part, un système de quotas mis en ? uvre au plan européen depuis de nombreuses années et, d'autre part, un mécanisme de compensations inter-étatiques dont l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) a la charge. Demande de retrait.
Merci, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre délégué, d'avoir pris le temps de de me répondre. Nous avons déjà eu cette discussion en commission mais nous n'avons pas réussi à atterrir sur un terrain d'accord. J'entends vos arguments mais je persiste à penser que la rédaction est source de doutes, comme le soulignent les syndicats – le syndicat national des pilotes de ligne (SNPL), la CFDT – et le Conseil d'État. À la page 24 de son avis, il écrit clairement qu'« obliger les compagnies aériennes à compenser les quotas devant également être restitués à titre onéreux dans ce système » revient « à payer deux fois pour la même tonne de carbone », chose qui pourrait être difficile à justifier.
C'est pourquoi je vais maintenir mon amendement. J'espère de tout c? ur que nous parviendrons au cours de la navette à clarifier la rédaction de l'article sur ce point et à dissiper les craintes grandissantes de double taxation.
L'amendement no 6260 n'est pas adopté.
La parole est à M. Nicolas Turquois, pour soutenir l'amendement no 5006 .
Dans la continuité d'amendements précédemment défendus, il vise à préciser que cette obligation n'entrera en vigueur que dix-huit mois, après que le trafic aérien aura retrouvé son niveau de l'année 2019.
L'amendement no 5006 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Alors que nous achevons cette semaine de débats, il n'est pas interdit, madame la présidente, de vous remercier pour votre présidence ainsi que vos collègues qui vous ont précédée, ni de vous souhaiter, à tous, chers collègues, un excellent week-end, ou du moins ce qu'il en reste.
Sourires sur divers bancs.
Je voulais aussi profiter de cette dernière invervention pour avoir, avec mes collègues du groupe Les Républicains, une pensée pour l'agriculture française, plus particulièrement l'arboriculture et la viticulture qui ont subi un gel historique, comme on en voit en moyenne tous les trente ans – Jean-Marie Sermier et moi pouvons en témoigner, nous qui sommes tous les deux des anciens de la profession agricole, plus particulièrement de la viticulture et de l'arboriculture. Nous savons dans quelle galère vont devoir s'embarquer tous ceux qui, en une nuit, ont perdu une année complète de travail sur leurs cultures pérennes.
Applaudissements sur les bancs des groupes LR, LaREM, Dem et Agir ens. – M. Cédric Villani applaudit également.
Merci pour les agriculteurs, mes chers collègues.
Quant à mon amendement, il vise tout simplement à adapter le calendrier d'entrée en application des dispositions de l'article 38 en prenant en compte les conséquences de la covid-19. Comme nous l'avons tous souligné, ce texte a un point faible, …
… particulièrement dans sa partie consacrée à l'aéronautique, qui est de ne pas prendre en considération la crise sanitaire. C'est comme si la covid-19 n'avait pas existé ! Or la situation du secteur aéronautique est comparable à celle des secteurs de la restauration, de l'hôtellerie et des bars : toutes ces activités sont quasiment à l'arrêt. Citons l'avis du Conseil d'État : « [… ] dans le chapitre relatif au transport aérien, aucune analyse du caractère soutenable des mesures projetées dans le contexte de la crise sanitaire n'apparaît. »
Ces amendements ont aussi pour objet de reporter la date d'entrée en application des mesures proposées, compte tenu de la crise sanitaire qui affecte la planète.
Tout au long de cette semaine, les membres du groupe LR ont essayé et, je crois aussi, réussi à faire passer des proposisions – je vois M. le ministre délégué opiner du chef, ce qui conforte mon jugement. Nous souhaitons que la décarbonation s'applique à toutes les activités de la vie courante : se déplacer, se loger – nous aborderons les chapitres consacrés au logement la semaine prochaine. Or, en ce qui concerne l'aéronautique, le Gouvernement n'a pas fait montre d'une volonté forte d'aller très vite et très massivement vers l'avion décarbonné. Si nous ne le faisons pas, alors même que la France dispose d'une avance technologique grâce à sa filière aéronautique d'exception, je crains que, demain, d'autre pays ne nous devancent et que nous ne soyons obligés de travailler avec eux. Tel est le message que nous voulons vous faire passer.
Enfin, si nous sommes tous concernés par le réchauffement climatique, nous ne pouvons pas affirmer qu'avec ce texte, nous arriverons à régler les problèmes de gel tardif. Ce serait un raccourci un peu rapide.
Pour contribuer à réduire les émissions de gaz à effet de serre, je le répète, il faut nous en donner les moyens : nous misons sur la technologie pour décarboner nos gestes de la vie quotidienne.
Nous avons beaucoup parlé de fiertés françaises, qu'il s'agisse de l'automobile, du vélo, de l'aviation. Notre collègue Zivka Park, qui est très engagée sur ces questions technologiques, y est revenue. Il y a une autre fierté française, c'est l'agriculture de qualité. Sur l'ensemble de nos bancs, nous pouvons avoir une pensée pour nos agriculteurs, pour nos viticulteurs et pour nos arboriculteurs touchés de plein fouet par ces chutes de température. Qu'ils sachent que la représentation nationale et le Gouvernement seront à leurs côtés pour les aider.
Je souhaiterais aussi rendre hommage, je le dis avec beaucoup de sincérité, au groupe Les Républicains, avec lequel nous avons très bien travaillé en commission comme dans l'hémicycle. Nous avons des points de désaccord, mais les débats ont toujours été de qualité. Je sais que nous pourrons avancer ensemble, notamment sur la décarbonation de l'aérien.
Vos amendements, chers collègues, conduisent à dénaturer notre ambition en matière de compensation carbone, laquelle constitue pour moi une occasion historique, en particulier pour les projets de territoire. Anne-Laure Cattelot a déposé un amendement relatif à la forêt, qui montre comment nous pouvons très rapidement tirer tous les bénéfices de ces mécanismes de compensation carbone pour financer dans les territoires des projets susceptibles d'améliorer notre environnement et de lutter contre le réchauffement climatique.
Soucieux de garder à l'article 38 toute son ambition, je vous demanderai de retirer vos amendements ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable .
Je commence par prendre acte du désaccord sur les amendements, avant de souscrire aux propos de M. le rapporteur sur le bon travail collectif que nous avons effectué, pour finir par exprimer, moi aussi, mon soutien aux agriculteurs victimes de ce gel inédit, aux côtés desquels l'ensemble du Gouvernement, le Premier ministre à sa tête, se tient, pleinement à la tâche.
Les amendements nos 5071 de M. Jean-Luc Lagleize et 6428 de Mme Sandrine Le Feur sont défendus.
La parole est à Mme Béatrice Piron, pour soutenir l'amendement no 2528 .
Cet amendement d'appel propose d'inclure dans le système de compensation, en complément des projets d'absorption du carbone, des investissements visant à développer les aéronefs ainsi que les équipements aéronautiques et aéroportuaires bas-carbone ou décarbonés. Cela permettrait, entre autres, de mieux accompagner la transition écologique de l'aviation légère et sportive, en soutenant davantage le financement des avions électriques, bien moins polluants et moins bruyants.
C'est un enjeu dont s'emparent déjà les fédérations sur nos territoires, soit avec leurs moyens propres, soit avec des subventions locales. Il me paraît toutefois nécessaire que l'État insuffle une réelle dynamique à l'échelle nationale. Si mon amendement n'est pas adopté ce soir, j'espère que nous aurons l'occasion de reparler de ces sujets lors des prochaines discussions budgétaires.
Madame Piron, je souhaite saluer votre engagement et souligner la constance avec laquelle vous défendez ce sujet, de projet de loi de finances en projet de loi de finances. C'est la raison pour laquelle je veux prendre le temps de vous répondre.
À l'article 38, nous ne souhaitons pas financer des projets susceptibles d'émettre du carbone. Notre volonté est avant tout de cibler des activités qui permettent de compenser les émissions de gaz à effet de serre, notamment des projets de territoire en lien avec la forêt ou l'agriculture – Anne-Laure Cattelot a déposé des amendements à ce sujet. Je vous demande de bien vouloir retirer vos amendements, ce qui ne nous empêchera pas de travailler sur vos propositions, qui s'inscrivent pleinement dans notre pilier numéro 1, la décarbonation du secteur aérien. Je serai à vos côtés pour les soutenir, mais il ne me semble pas pertinent de les prendre en compte dans le cadre des compensations carbone.
J'approuve tous les propos du rapporteur. Je remercie Mme Piron pour son engagement et lui demanderai de retirer son amendement, lui donnant peut-être rendez-vous en projet de loi de finances pour avancer sur ces sujets importants.
J'attends avec impatience de travailler avec vous. Je retire mon amendement.
L'amendement no 2528 est retiré.
Les amendements nos 2838 de M. Vincent Ledoux et 5073 de M. Jean-Luc Lagleize sont défendus.
Cet amendement de ma collègue Anne-Laure Cattelot vise à assurer qu'une part significative des mécanismes de la compensation iront à la forêt et l'agroforesterie en France et en Europe.
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir le sous-amendement no 7409 et donner l'avis de la commission sur l'amendement.
Le sous-amendement est rédactionnel, madame la présidente. Quant à l'amendement d'Anne-Laure Cattelot, dont nous pouvons tous saluer l'engagement sur ces sujets, j'y suis très favorable.
M. Jean-Charles Colas-Roy applaudit.
Il illustre parfaitement ce que nous voulons faire avec les compensations carbone.
Avis favorable à l'amendement, sous réserve de l'adoption du sous-amendement de M. le rapporteur.
Le sous-amendement no 7409 est adopté.
L'amendement no 5958 , sous-amendé, est adopté.
L'amendement no 5336 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Nicolas Turquois, pour soutenir l'amendement no 5007 .
Nous proposons l'entrée en vigueur des dispositions du présent article après réhabilitation du fonctionnement de la filière. Je connais déjà l'issue du vote sur cet amendement, mais je voudrais toutefois souligner la nécessité d'accompagner la filière aéronautique ; des plans massifs de soutien, que je salue, ont été instaurés mais il sera nécessaire de l'aider dans la durée car elle est gravement affectée.
J'en profite, puisqu'il s'agit de notre dernière prise de parole, pour saluer le travail de la présidente.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem. – M. Cédric Villani applaudit également
En réponse à Mme Panot, je voudrais dire que la compensation n'est, certes, sûrement pas à la hauteur de ses attentes, mais qu'elle correspond au cycle naturel : la nature, ce sont des émissions d'un côté et des absorptions de l'autre. C'est tout de même plus positif, dans l'esprit, que ce qui a été instauré jusqu'à présent. Cet engagement fort doit être souligné, même si je préférerais qu'il soit un peu plus étalé dans le temps.
Défavorable.
Je sais que tout le monde est pressé de conclure la discussion sur ce secteur, mais j'aurais mauvaise conscience si je ne vous posais pas une question qui me taraude à l'occasion de l'amendement de notre collègue Nicolas Turquois : celle des règles éthiques et d'économétrie s'appliquant à ces compensations.
Pouvez-vous nous garantir que des précautions sont prises pour qu'il n'y ait en aucun cas accaparement des terres dans des pays en voie de développement, dépourvus de droit relatif aux sols ? Ne peut-il pas y avoir des phénomènes de distraction des sols destinés aux biens alimentaires au profit des plans de reforestation ? Est-ce que la compensation carbone ne s'oppose pas, dans certains cas, à la biodiversité et à des cultures vivrières ou à des systèmes paysans ? Les compensations alimentent à l'échelle de la spéculation financière mondiale ces phénomènes d'accaparement dont l'ONU et l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) nous disent qu'ils sont actuellement une cause de violences et de misère supérieure aux guerres dans le monde.
Pouvez-vous nous garantir que toutes les règles seront respectées, conformément à ce que prévoit la loi d'orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale (LOP-DSI), sur l'aide publique au développement (APD), pour que le droit relatif aux sols des paysanneries du Sud ne soit pas entravé par ces mécanismes de compensation carbone ?
Autrement dit, pour faire court, les modes de loisirs de 1 % de l'humanité ne sont-ils pas en train d'entraver la capacité à nourrir 10 milliards d'habitants en 2050 ? Pouvez-vous nous apporter des réponses claires sur ce sujet ?
Vous soulevez une question très importante relative à l'éthique. Le décret y veillera : c'est un engagement que je prends devant vous.
Je veux répondre rapidement à notre collègue. Les Amish ne sont pas les seuls à mettre en doute le mécanisme de compensation. La Commission européenne elle-même l'a fait. Pour ce qui concerne la compensation dans le domaine aérien notamment, il s'agit d'une illusion incroyable, et l'on ne peut que regretter l'absence de mesures fortes en faveur de la réduction indispensable des émissions.
L'amendement no 5007 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 53
Nombre de suffrages exprimés 51
Majorité absolue 26
Pour l'adoption 38
Contre 13
L'article 38, amendé, est adopté.
Je suis saisie de quatre amendements identiques, nos 110 , 4630 , 6581 et 6825 , portant articles additionnels après l'article 38.
Les amendements identiques nos 110 de Mme Delphine Batho et 4630 de Mme Nathalie Bassire sont défendus.
La parole est à M. Jean-Charles Colas-Roy, pour soutenir l'amendement no 6581 .
Il vise à intégrer dans le budget carbone de la France les émissions de gaz à effet de serre issues du transport aérien international. À l'heure actuelle, seules les émissions dues au transport intérieur sont comptabilisées : il convient de tenir compte de celles liées au transport international.
L'amendement no 5252 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Avant d'en venir à l'article 39, je donne la parole à M. le rapporteur qui souhaite ajouter quelques mots.
Très rapidement puisque nous passons à l'examen de l'article 39, je voudrais vous remercier pour ce samedi passé ensemble sur des sujets essentiels, saluer la qualité de nos débats et mettre en avant le travail accompli pour faire avancer la mobilité décarbonée. Je vous exprime un très grand merci.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Un merci qui est évidemment partagé. Bon week-end pour le peu qu'il en reste.
Rappels au règlement
Je souhaite faire un rappel au règlement sur le fondement de l'article 50 concernant les horaires de nos séances.
Vous souhaiter appeler l'article 39 qui correspond à un changement de titre et de ministre au banc. Je constate qu'il est vingt-trois heures cinquante. Attaquer ce titre maintenant me paraît saugrenu étant donné le nombre d'heures que nous avons déjà passées cette semaine dans l'hémicycle.
Pour la clarté des débats et pour une question de cohérence, je pense qu'il serait préférable de lever la séance, puisqu'il n'y a pas eu de consultation préalable des groupes. À défaut, je demanderais une suspension de séance.
Protestations sur divers bancs.
Ma chère collègue, il est prévu de lever la séance à minuit conformément au règlement. En outre, vous ne disposez pas de la dérogation pour solliciter une suspension de séance. Nous poursuivrons donc nos travaux jusqu'à minuit.
La parole est à M. Stéphane Peu, pour un rappel au règlement également.
Il s'agit d'un rappel au règlement sur le même fondement. Le rapporteur général a eu la gentillesse de venir voir l'ensemble des groupes, en tout cas le mien, pour nous demander d'être raisonnables dans la défense de nos amendements, de manière à pouvoir finir l'examen du titre III ce soir avant minuit.
Pour cette raison, nous sommes plusieurs, moi le premier, à ne pas avoir présenté nos amendements et à nous être contentés d'annoncer « défendu » pour respecter ce qui relève d'un consensus et d'une pratique dans l'organisation de nos débats.
Je crois, comme ma collègue Sylvia Pinel, qu'il n'est ni correct ni raisonnable de commencer l'examen d'un nouveau titre, portant sur un tout autre sujet, cinq minutes avant minuit, alors qu'on nous a demandé de réaliser un effort et que nous l'avons fait.
Mme Mathilde Panot applaudit.
Je me tiens à votre disposition. Je consulte donc l'avis de M. le rapporteur de la commission spéciale pour les chapitres Ier et II du titre IV, et de Mme la ministre déléguée chargée du logement. Toutes les solutions qui vous conviennent me conviennent.
La parole est à M. Mickaël Nogal, rapporteur de la commission spéciale pour les chapitres Ier et II du titre IV
Je me tourne vers Mme la ministre déléguée chargée du logement, qui a été appelée à venir siéger en fonction du temps qui avait été réparti et alors que nous ne maîtrisions pas totalement l'avancement de l'examen du titre III. Je me rangerai à l'avis des groupes. J'ai sondé quelques collègues précédemment.
J'ai dit que je me rangerai à l'avis des collègues. Je suis allé voir M. Pupponi, M. Peu et Mme Obono. J'ai fait cette démarche en tant que rapporteur : ne me le reprochez pas !
N'ayant pas été consultée et étant donné que les débats se sont parfaitement déroulés ces derniers jours, je lève la séance.
Prochaine séance, lundi 12 avril, à seize heures :
Suite de la discussion du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt-trois heures cinquante-cinq.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra