Commission des affaires économiques

Réunion du mercredi 14 février 2018 à 16h30

Résumé de la réunion

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La réunion

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La commission a auditionné M. Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, M. Sébastien Lecornu, secrétaire d'État, et Mme Brune Poirson, secrétaire d'État.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le ministre d'État, Madame et Monsieur les secrétaires d'État, Mesdames et Messieurs les députés, avec la COP21, le Climate Finance Day, le One Planet Summit et le Pacte mondial pour l'environnement, la France a beaucoup parlé d'environnement et fait parler d'elle sur le thème de l'environnement au cours des deux dernières années – c'est le moins qu'on puisse dire – et est devenu en quelque sorte le porte-drapeau de la transition écologique dans le monde. Cependant, force est de constater que c'est seulement depuis quelques mois que l'on observe une adéquation entre les paroles et les actes – que l'on vous doit, Monsieur le ministre d'État, Madame et Monsieur les secrétaires d'État. L'enjeu de cette mandature est bien de transformer ce que beaucoup voient encore comme une contrainte en une opportunité pour la France de prendre de l'avance et de devenir un modèle pour tous.

Ce changement doit se faire dans le monde, mais aussi chez nous, dans notre quotidien. Or, par la multiplicité des secteurs qu'elle couvre, la commission des affaires économiques est résolument la commission du quotidien, qu'il s'agisse de se nourrir, de se loger, de communiquer, de consommer ou encore de travailler – car l'entreprise est au coeur de nos travaux. Notre commission se doit d'incarner cette réalité du quotidien et de permettre une adéquation entre idéaux politiques, impératif environnemental et réalités économiques.

Il est de notre responsabilité à toutes et à tous, en tant que commissaires, de faire entrer la transition écologique et solidaire dans le quotidien des Français. Comment y parvient-on ? En gardant constamment à l'esprit que la transition énergétique et écologique est partout, tout le temps. Cette transversalité doit continuer à guider nos travaux pour nous aider à concevoir une législation concourant à une économie plus durable, mais aussi à changer les pratiques et les mentalités. La transition écologique doit devenir l'habitude qui nous incite à penser les politiques publiques avec une approche novatrice. Nous devons légiférer au futur plutôt qu'au passé !

Quand nous traitons d'agriculture, elle nous rappelle qu'une alimentation saine, sûre et durable est tout aussi importante que le partage de la valeur, car c'est justement cette transition qui va permettre de créer de la valeur. La montée en gamme vers une agriculture française plus durable est aussi une partie de la solution pour le revenu des agriculteurs.

Quand nous traitons du logement, elle nous rappelle qu'il faut bien sûr construire de nouveaux bâtiments, mais aussi qu'il faut passer par des rénovations énergétiques : on doit pouvoir construire un monde plus vert, mais aussi un monde dans lequel on se loge pour moins cher.

Quand nous traitons du secteur automobile – nous avons reçu hier le PDG de Toyota France –, la transition écologique nous rappelle qu'il s'agit du deuxième secteur le plus consommateur d'énergie, mais aussi une partie de la solution vers une économie plus collaborative et moins polluante.

Ce sont là autant d'exemples qui montrent que transition écologique et performance économique peuvent aller de pair. Cela dit, nous devons aussi savoir résoudre nos contradictions. On veut des aliments bio, sans pour autant payer plus cher – ce qui pose le défi de la restauration collective –, on veut des environnements moins pollués sans prendre la peine de recycler – moi qui viens de Montréal, je peux vous dire, Madame la secrétaire d'État, que la France a encore quelques progrès à faire en matière de recyclage –, enfin, on veut davantage d'énergie renouvelable, mais on ne supporte pas d'avoir une éolienne à côté de chez soi, comme le sait M. Sébastien Lecornu.

Dans ce domaine, nous avons tous une responsabilité et il y a tout un travail de pédagogie à faire, car cette transition doit avant tout être comprise comme la poursuite d'un futur meilleur pour nous et surtout pour nos enfants. N'oublions pas le proverbe amérindien qui dit que nous n'héritons pas la planète de nos ancêtres, mais que nous l'empruntons à nos enfants.

À l'instar du Paris Saint-Germain, qui a son trio magique – constitué de Mbappé, Cavani, Neymar, et plus connu sous le nom de MCN –, nous recevons aujourd'hui le trio magique de la transition écologique, HPL, à savoir M. le ministre d'État Nicolas Hulot et ses deux secrétaires d'État, Mme Brune Poirson et M. Sébastien Lecornu. Madame, Messieurs, je vous souhaite la bienvenue au nom de notre commission et vous donne la parole pour une vingtaine de minutes, avant que les membres de la commission ne vous posent des questions.

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Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Monsieur le président, cher Roland, Mesdames et Messieurs les députés, je suis heureux de me trouver aujourd'hui devant votre commission, pour un exercice inédit pour moi. Vous avez parlé de transition : par définition, l'exercice est délicat, car si on sait ce qu'on quitte, ce qu'on garde et ce qu'on voudrait transformer, on n'a pas encore une vision claire du point d'arrivée. Comme vous l'avez dit, la transition écologique dans sa globalité – et la transition énergétique en particulier – n'aura une chance d'aboutir que si nous nous efforçons, les uns et les autres, de la rendre socialement acceptable, culturellement désirable et économiquement pertinente. Durant la période de transition, il faudra jouer sur quelques accompagnements, afin de permettre aux secteurs concernés d'opérer les conversions nécessaires.

Je vous remercie pour votre invitation devant la commission des affaires économiques. Sans doute la nécessité d'avoir dû prendre en charge, dès notre prise de fonctions, une multitude de dossiers, a-t-elle retardé cette rencontre, mais peu importe, il n'est jamais trop tard, et le moment est d'ailleurs bien choisi. On le dit de toutes les années, mais l'année 2018 est véritablement une année charnière, puisqu'elle est celle de la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), qui va constituer, je l'espère, un moment d'intelligence collective, lors duquel nous allons devoir faire les bons choix. En effet, de la réussite, de l'ambition et de l'ajustement de cette transition écologique dépendent un certain nombre d'autres succès ou de handicaps, notamment sur le plan économique.

L'année 2018 va probablement être dense pour les députés – vous en avez l'habitude –, mais aussi pour Mme Brune Poirson, pour M. Sébastien Lecornu, pour moi-même et pour Mme Élisabeth Borne, ministre chargée des transports, avec qui nous travaillons dans une complicité et une harmonie absolues. Comme vous l'avez rappelé, en matière d'énergie, la mobilité est évidemment un domaine particulièrement concerné ; nous en avons parlé dans le cadre des Assises de la mobilité et nous préparons la loi sur les mobilités. Le grand chantier qui va nous occuper durant l'année qui vient est celui qui va consister à construire la transition énergétique et à poser les bases de la nouvelle programmation pluriannuelle de l'énergie, qui doit être adoptée avant la fin de l'année. Cela ne saurait se résumer à un débat d'ingénieurs ou de spécialistes – dont nous aurons besoin, bien entendu, car le sujet est pour le moins compliqué –, il faut que ce soit aussi un débat citoyen, impliquant les territoires, et qui nous permette de partager une ambition, une vision et le chemin pour y parvenir.

Je ne doute pas que nous soyons capables de le faire, et nous avons du temps pour cela, même si nous devons avancer assez rapidement. Depuis six mois, des discussions sur les différents aspects techniques de notre mix énergétique ont eu lieu, et ont déjà largement associé l'ensemble des parties prenantes. Dans quelques semaines, une consultation du public va avoir lieu sous l'égide de la Commission nationale du débat public (CNDP), ce qui est essentiel, car nous nous trouvons à un moment très particulier de notre histoire énergétique. En disant cela, je ne fais pas qu'employer une formule toute faite : nous nous apprêtons vraiment à passer – à un rythme qui reste encore à déterminer – d'un modèle qui était principalement basé sur les énergies fossiles, lequel pendant cent cinquante ans, a permis à une partie de l'humanité de « sortir de terre ». Heureusement ou malheureusement, selon le point de vue que l'on adopte, nous allons devoir apprendre – assez rapidement, ne serait-ce qu'en raison de la contrainte climatique – à nous affranchir des énergies fossiles. Soudainement, ce qui a été une solution pour l'humanité est devenu un problème, une contrainte qui nous tombe sur les épaules en ce début de XXIe siècle, nous prenant un peu de court.

Cette contrainte étant maintenant bien prise en compte, nous ne sommes pas complètement démunis pour y répondre. Je répète souvent comme un credo, non pas pour m'en convaincre mais pour en convaincre chacun, que la contrainte n'est pas l'ennemi de l'innovation, mais sa condition, et si j'ai une foi limitée dans le génie humain, je suis convaincu qu'en matière d'énergies renouvelables, de stockage des énergies intermittentes et de bien d'autres technologies, il existe une profusion d'avancées et d'innovations extrêmement prometteuses. En tout cas, il est essentiel que le débat se fasse d'une manière documentée, apaisée et partagée. C'est la première fois depuis plus de quarante ans que l'occasion nous est donnée de retrouver les clés de notre destin sur ce sujet. C'est donc avant tout un grand rendez-vous démocratique que nous devons organiser, afin de dessiner une transformation très profonde de notre rapport à l'énergie pour poser les bases, je l'espère, de notre indépendance énergétique. L'indépendance énergétique est en effet la clé de l'indépendance dans tous les domaines – et, à l'inverse, la dépendance énergétique entraîne souvent d'autres dépendances. Pour notre propre liberté d'action et de paroles, nous devons avoir pour objectif de parvenir à produire de manière autonome notre énergie à l'intérieur de nos frontières – cela n'a rien d'une chimère, et je pense que cet objectif doit au contraire nous enthousiasmer et nous réunir.

En effet, nous sommes face à un double tournant. Premièrement, l'accord de Paris nous oblige, je le répète, à tourner le dos rapidement aux énergies fossiles. Ce qui était l'objet initial de la loi mettant fin à l'exploration des hydrocarbures ne constitue pas l'alpha et l'oméga de la transition énergétique, ni même de l'affranchissement des hydrocarbures, mais cela donne un cap, un axe, et surtout une ligne de cohérence. Si l'on veut que les citoyens accueillent la transition énergétique, il faut que celle-ci leur paraisse comme une évidence : or, ils ne pourraient pas comprendre que nous continuions à chercher de nouveaux gisements d'énergie fossile sur notre territoire alors que les scientifiques affirment que, pour réussir la bataille climatique, il faut renoncer à exploiter 70 % des réserves qui se trouvent sous nos pieds. Les énergies fossiles doivent donc disparaître totalement de notre consommation d'énergie au cours des prochaines années – à l'exception, peut-être, de quelques petites gouttes, réservées à des usages pour lesquels nous n'aurons pas trouvé de substitut. Il faut le dire, c'est une véritable révolution dans notre manière de produire de l'électricité et de la chaleur, mais aussi pour la mobilité des marchandises et des personnes.

Le deuxième grand virage de notre politique énergétique, c'est le sujet de l'énergie nucléaire, qui écrase un peu dans notre pays la production d'électricité, et qui a également tendance à confisquer – je le dis sans esprit polémique – tout le débat sur l'électricité. J'espère que nous arriverons à sortir des postures dogmatiques – pour ou contre le nucléaire –, comme cela avait été le cas avec la loi relative à la transition énergétique, qui avait évité cet écueil. Quelles que soient les positions des uns et des autres, il me semble que nous pouvons tous être d'accord sur le fait que, lorsqu'il s'agit de produire de l'électricité, il n'est pas judicieux de mettre tous ses oeufs dans le même panier. Dès lors, il s'agit de trouver un point de rencontre sur la meilleure façon de rééquilibrer le mix : y parvenir constituera à mes yeux un gage de sécurité pour l'avenir.

En tout état de cause, il est loin le temps où l'on décidait sans consulter les citoyens, dans les grands bureaux de la République – c'était sans doute plus pratique –, de lancer un programme de cinquante réacteurs ! Aujourd'hui, quand on veut poser un mât d'éolienne, cela semble presque plus compliqué que de décider d'implanter cinquante réacteurs nucléaires à l'époque – mais je veux croire que ce n'est pas une fatalité. Quoi qu'il en soit, la réalité économique et écologique d'aujourd'hui est différente. Pendant des années, les commentateurs de la vie énergétique de notre pays ont affirmé que nous étions condamnés au nucléaire, censé constituer la seule source d'énergie décarbonée de masse. Pour ce qui est des énergies renouvelables, elles n'échappaient pas à la caricature, puisqu'on nous disait alors : « Vous n'allez pas remplacer le charbon, le pétrole et le nucléaire par des moulins à vent ! ». Les esprits ont évolué, d'abord parce que la démonstration a été faite que les énergies renouvelables peuvent tout à fait assurer la production d'énergie – ce qui paraissait inenvisageable, y compris sur un plan économique, il y a cinq ou dix ans. Désormais, les perspectives technologiques permettent d'envisager que les courbes puissent se croiser, et qu'un certain nombre d'énergies renouvelables puissent même présenter des avantages compétitifs sur le plan économique.

Je considère – et ce n'est pas une chimère entrevue dans une boule de cristal – qu'un futur 100 % renouvelable est désormais envisageable, pour plusieurs raisons. D'abord, en tant qu'envoyé spécial de François Hollande pour la préparation de la COP21, j'ai été amené à visiter les centres d'énergie et de recherche aux Émirats arabes unis, aux États-Unis, en Chine, etc., et j'ai pu constater que l'innovation est sacrément en marche de par le monde, y compris chez nous, dans nos petites, moyennes et grandes entreprises. Ce que nous devons faire maintenant, c'est créer les conditions propices et aligner les planètes, notamment en matière d'investissements, de financement et de règlements, et puis nous lancer à fond, en n'hésitant pas à changer d'échelle : c'est précisément ce à quoi nous nous attelons.

Rien ne nous empêche, aujourd'hui, d'imaginer un futur où nous produirons toute l'énergie nécessaire à nos besoins à partir de sources d'énergie disponibles en abondance, à savoir le vent, le soleil, la biomasse, le mouvement des vagues, le gradient thermique. Non seulement cette idée n'a rien d'un rêve inaccessible, mais elle ouvre des perspectives énormes en termes géopolitiques, dans la mesure où cela permettra à chaque État, peut-être même à chaque territoire, de disposer de son autonomie énergétique, qui est la base de l'autonomie tout court. Nous devons intégrer ces perspectives dans nos modes de pensée et, s'il ne s'agit pas d'avoir une foi aveugle dans cette vision du futur, il est certain que cela ne marchera pas économiquement si nous restons dans une forme de réticence, de réserve, qui nous incite à faire les choses en petit : nous devons changer d'échelle. Certes, il y a des difficultés, des verrous et des freins, mais il peut aussi y avoir de magnifiques leviers ; en tout état de cause, le signal du départ a été donné, et nous ne devons pas attendre le dernier wagon pour monter dans le train. D'autres que nous ont déjà progressé énormément en matière d'énergies renouvelables : les Chinois, par exemple, ont fait preuve d'une remarquable célérité dans le développement de ces nouvelles énergies, dépassant très rapidement tous les objectifs qu'ils s'étaient fixés.

Désormais, les choix que nous allons faire en matière de nucléaire dépendent étroitement du rythme de progression des énergies renouvelables – c'est pourquoi nous devons procéder à des ajustements très délicats –, de la baisse de leurs coûts et de la rapidité et de la réalité du développement du stockage.

À ce stade, j'ai quelques certitudes, fort heureusement, mais aussi des questions. J'ai des certitudes, par exemple, sur le fait que l'avenir de l'énergie et en particulier de l'électricité, sera profondément décentralisé et smart, comme on dit. Pour ce qui est des questions que je me pose, elles portent notamment sur le stockage de l'électricité et ses coûts, des points sur lesquels subsistent quelques inconnues. L'un des grands choix que nous allons devoir faire dans les années qui viennent, au fur et à mesure de la fermeture des réacteurs nucléaires en fin de vie, sera évidemment celui de la technologie ayant vocation à remplacer les centrales.

Nous aurons le choix entre reconstruire des réacteurs nucléaires, dont on sait qu'ils sont extrêmement coûteux – c'est un fait, il y a dans le domaine nucléaire ce qui apparaît comme une loi implacable de non-maîtrise des coûts, qu'il faut garder à l'esprit afin de ne pas s'emballer, ni dans un sens et ni dans l'autre – et qu'ils nous laissent un héritage de déchets qu'il nous revient collectivement d'assumer : nous ne pouvons pas les faire disparaître dans l'espace, ni sous les océans – ce que certains ne se sont malheureusement pas privés de faire pendant les années 1960 et 1970. Il va bien falloir trouver une solution à ce problème et résoudre pour cela le problème de l'acceptabilité, chez nous comme dans les autres pays. Depuis que je suis ministre, j'ai découvert en effet que les pays qui nous envoient des déchets à traiter et reconditionner n'ont pas plus envie que nous de les récupérer, n'ayant pas non plus trouvé de solution miracle pour le stockage. Je ne dis pas cela d'une manière dogmatique, mais c'est un sujet qu'il ne faut pas occulter et, si personne ne veut d'éolienne dans son jardin, personne ne veut non plus voir arriver des déchets ultimes sur son territoire, ce que je peux comprendre. Or, ces déchets existent, et la question de leur stockage doit être intégrée au débat, car elle est englobée dans celle de l'acceptabilité sociale.

Si la France veut rester un pays où l'électricité est relativement bon marché, elle devra évidemment sans doute se tourner vers le stockage des énergies renouvelables, dont le prix connaît des baisses spectaculaires. Cet enjeu est d'autant plus important qu'avec la décentralisation de notre modèle énergétique, chaque citoyen va voir surgir dans sa proche périphérie des énergies renouvelables, ce qui suscite des débats. J'en suis parfaitement conscient puisque, lors de chacun de mes déplacements, des associations viennent à ma rencontre pour m'expliquer à quel point la vue d'éoliennes, ou la présence de panneaux solaires dans un quartier contrôlé par les Bâtiments de France, est insupportable. Cela fera partie de notre travail que de faire comprendre à nos concitoyens qu'à un moment ou à un autre, il faudra faire des choix, car on ne peut pas être contre tout. Pour convaincre, nous devrons faire de la pédagogie, notamment pour montrer à nos concitoyens les bénéfices qu'ils peuvent tirer des énergies renouvelables : ainsi, les fermes d'éoliennes qui sont bien acceptées sont celles où des coopératives ont été créées afin de permettre aux habitants du territoire concerné d'en tirer bénéfice.

Ce débat est la clé d'une transition réussie pour Électricité de France (EDF) et l'ensemble des salariés de la filière. En effet, dans ce domaine-là, nous devons la vérité, la transparence et la sincérité. Le cabinet du ministère travaille à l'élaboration d'une méthode qui sera utilisée pour déterminer la trajectoire de diminution de la taille du parc de réacteurs nucléaires. En fonction de la trajectoire qui sera déterminée dans le cadre de la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), nous saurons dans les grandes lignes quand les réacteurs vont devoir être fermés. Il conviendra alors de déterminer comment, en nous inspirant de ce qui est en train d'être fait à Fessenheim – même si le modèle n'est pas encore abouti –, comme s'y emploie actuellement Sébastien Lecornu. L'objectif est bien d'arriver, en même temps que la PPE, à construire cette méthode avec des paramètres clairs, afin de déterminer quels seront les réacteurs fermés en priorité. Ainsi, les salariés, les territoires et les entreprises auront la visibilité dont ils ont besoin pour préparer les reconversions.

Comme je l'ai dit en introduction, il est bien beau de se fixer des objectifs, on peut toujours se faire plaisir, mais c'est une autre paire de manches que de les atteindre ! Il est inconcevable d'annoncer par voie de presse à des salariés, à partir d'un ministère parisien capitonné, que leur centrale à charbon ou leur réacteur va être fermé : dans ces conditions, la transition ne saurait être compréhensible et acceptable. Il vaut mieux prendre un peu de temps pour anticiper les conversions, les impacts éventuels et surtout les potentiels de développement. C'est en tout cas la méthode que nous avons choisie.

Certains des scénarios envisagés aujourd'hui se traduiront par des choix de société très différents, que personne autour de la table ne doit vouloir dissimuler pour des raisons de posture politique ou de croyance idéologique. C'est une révolution que nous devons écrire ensemble pour notre pays, pour les salariés du secteur, pour les consommateurs, et évidemment pour les citoyens.

La programmation pluriannuelle de l'énergie comporte deux autres piliers importants qu'il ne faut pas négliger, d'autant que les quatre piliers de la transition énergétique se conditionnent les uns les autres, ce qui fait qu'ils doivent tous être réunis. Si nous ne stabilisons pas notre consommation – voire si nous ne la diminuons pas –, nous allons être en difficulté ; de même, si nous ne développons pas les énergies renouvelables à grande échelle et si nous ne réduisons pas nos émissions de gaz à effet de serre, nous allons être en difficulté. Nous devons donc veiller à avoir une vision intégrale du problème.

Le premier des deux piliers est celui de l'efficacité énergétique, qui s'incarne notamment à travers le plan sur la rénovation thermique des logements. L'intérêt de ce plan est qu'il porte sur l'un des rares sujets qui suscite au sein de mon ministère une forme de consensus, car tout le monde n'y voit que des avantages. En effet, on comprend aisément que toute énergie qu'on peut se dispenser de consommer représente, pour les citoyens comme pour les entreprises, autant d'argent qui peut aller au pouvoir d'achat ou à l'investissement – en la matière, il y a du grain à moudre, on parle même d'un facteur 4 – voire plus élevé – dans certains secteurs, et nos entreprises sont très performantes en matière d'efficacité énergétique.

Là encore, l'objectif est de concevoir des logements qui produisent plus d'énergie qu'ils n'en consomment, et qui deviennent le coeur de notre modèle énergétique, parce qu'ils seront à la fois faiblement consommateurs d'énergie, souvent producteurs de leur propre énergie, et intelligents, c'est-à-dire capables de dialoguer avec les réseaux.

Cela passe par un changement profond de paradigme autour des questions relatives à la rénovation des bâtiments, qui constituent justement le coeur du sujet. Il faut que, dans tous les bâtiments publics et privés, la rénovation devienne un réflexe automatique quand on entreprend des travaux. Le débat central autour des incitations à faire des travaux d'isolation au moment de la vente des biens immobiliers n'est pas encore tranché, car il est soumis à la consultation. Quelles incitations mettre en place ? Faut-il rendre la rénovation obligatoire à la vente d'une maison ? Créer un bonus-malus ? Le débat est ouvert sur toutes ces questions.

Enfin, la PPE repose sur un second pilier, celui du développement massif des énergies renouvelables, sur lequel M. Sébastien Lecornu travaille actuellement. Sur tous ces sujets – efficacité énergétique, énergies renouvelables, réforme du marché de l'électricité, élaboration des stratégies nationales de transition énergétique à l'horizon de dix ans –, des objectifs et des principes de gouvernance pour chaque État européen sont en cours de négociation entre institutions européennes. Je sais que vos collègues de la commission des affaires européennes ont, eux aussi, émis des recommandations sur ces textes, notamment dans le cadre du rapport du député Thierry Michels. Mme Brune Poirson, qui a participé à la négociation de ce paquet de textes législatifs au Conseil des ministres européens de l'énergie, aura probablement l'occasion d'y revenir tout à l'heure.

La transition énergétique passe également par une transformation de la mobilité, dans le cadre qu'est en train de définir Mme Élisabeth Borne. C'est aussi – il est important de le garder à l'esprit – un enjeu de santé publique. Il y a quelques jours, je me suis rendu à Bruxelles, à l'invitation du commissaire Karmenu Vella, puisque j'ai hérité d'une situation où notre pays est en infraction régulière et répétée aux directives européennes de qualité de l'air. J'assume la situation, mais nous n'allons évidemment pas en rester là : nous allons agir au niveau européen pour obtenir des règles fermes sur les émissions des voitures et des camions, et un rehaussement des normes. Après les scandales des moteurs truqués, dont les dernières révélations au sujet de l'expérimentation sur les singes et sur les hommes, et les tricheries en matière de moteurs diesel, ne sont qu'un sordide soubresaut, nous portons maintenant au sein du Conseil, dans un dialogue rapproché avec nos partenaires, au premier rang desquels l'Allemagne, des propositions pour que le véhicule « zéro émission » devienne la norme d'ici à 2040.

J'ai dit tout à l'heure que la contrainte n'est pas l'ennemi de la créativité. Lorsque j'ai annoncé, dans le cadre du plan climat, l'objectif consistant à arrêter en 2040 de vendre des véhicules émettant des gaz à effet de serre ou des véhicules thermiques, j'ai entendu toutes sortes de réactions. Pour ce qui est des industriels automobiles français, ils m'ont dit « chiche, ne changez pas les règles ». Entre-temps, d'autres États ont repris les mêmes objectifs, mais avec un calendrier plus serré. Or, Peugeot vient d'annoncer qu'à partir de 2025, chaque véhicule mis sur le marché sera proposé à la fois dans une version thermique et dans une version électrique. Ce qui est important pour moi dans la transition écologique, c'est de se fixer des objectifs et de faire en sorte que la transition se fasse autour des trois principes fondamentaux que sont la prévisibilité, la progressivité et l'irréversibilité, qui se trouvent malheureusement souvent bafoués. Lorsqu'on cherche à passer en force, cela ne passe pas. Et si l'on change les règles du jeu en cours de route, cela crée les situations que nous avons connues.

L'Europe doit aussi travailler à relever son ambition, tout en préservant et en protégeant son modèle économique de chef de file de la transition écologique : c'est bien d'accomplir des efforts à l'intérieur de l'Europe, mais c'est quand même mieux si on le fait en se protégeant de l'extérieur, afin que nos acteurs économiques ne se trouvent pas en difficulté. C'est pourquoi, en 2018, nous allons continuer à travailler sur la mise en place d'un prix plancher du CO2 dans le secteur de l'électricité avec nos partenaires européens – dès que la situation sera stabilisée en Allemagne, nous allons à nouveau travailler sur ce point avec la chancelière Angela Merkel –, dans la suite des travaux que nous avons entamés dans le cadre du One Planet Summit.

Nous poursuivons aussi les réflexions sur ce que l'on appelle, non plus la taxe aux frontières européennes, mais le mécanisme d'ajustement aux frontières qui est juridiquement envisageable dès lors qu'il concernera les importations en provenance de pays qui n'auront pas fixé un prix du carbone ou un plancher carbone, afin d'éviter que les secteurs industriels auxquels on demande d'agir ne soient pénalisés par la non-action de certains pays en matière de lutte contre le changement climatique.

La transition, c'est aussi un projet de modernisation de l'économie qui ne fonctionnera que si l'on change d'échelle. C'est indispensable si l'on veut inscrire dans un projet d'ensemble nos actions en matière de réduction d'émissions de gaz à effet de serre. C'est pour cela que nous travaillons sur une approche intégrée avec l'ensemble des ministères – dans un premier temps, nous lui avions donné le nom un peu prétentieux de Green New Deal, puis nous sommes revenus sur terre et nous parlons désormais d' « accélérateur de la transition écologique ». Il s'agit de définir des actions concrètes, ambitieuses et concertées qui concilieront effectivité de la transition et développement économique durable. Cette réflexion est pilotée par M. Jean-Dominique Senard, le patron de Michelin, et Mme Laurence Parisot, qui nous aident à trouver les leviers et à lever les freins pour changer d'échelle. En gros, nous allons mettre le paquet pour que l'économie et l'emploi bénéficient à plein de la transition énergétique. C'est un effort sans précédent de modernisation de l'économie française, de formation aux nouveaux métiers – j'en ai encore parlé ce matin encore avec la ministre du travail, Mme Muriel Pénicaud – qui va être progressivement engagé.

Cet accélérateur sera constitué de plusieurs briques, certaines que je viens d'évoquer sur les énergies renouvelables, d'autres qui sont en cours d'élaboration ou de concertation, sur la mobilité durable, l'efficacité thermique des bâtiments, le développement de l'économie circulaire, l'innovation avec notamment un plan hydrogène car tous les acteurs existent déjà dans cette filière, sur le financement, la fiscalité de la transition écologique et les conséquences à en tirer en matière de formation et de compétences. Cet accélérateur englobera la mobilisation de tous, notamment sur l'économie circulaire, autour de la feuille de route que Mme Brune Poirson vous présentera dans quelques instants.

Je n'ai pas le temps ici de développer l'ensemble des sujets qui vont nous occuper au cours des douze prochains mois. Il est clair néanmoins que nous devrons progresser aussi sur les questions relatives à l'alimentation, à l'agriculture, mais aussi à la santé et à l'environnement, tant il est vrai que tout cela est lié.

Je conclurai sur une idée, un principe qui va guider notre action collective avec Mmes Élisabeth Borne et Brune Poirson et M. Sébastien Lecornu : mettre la protection et l'information des consommateurs au coeur de notre projet. La transition écologique et solidaire ne fonctionnera que si elle va à la rencontre des citoyens, si elle leur donne les outils pour faire les bons choix et si elle ne les met pas dans des impasses. C'est pour cela que grâce à l'extension de la garantie légale pour lutter contre l'obsolescence programmée, au recyclage des plastiques et au retour de la consigne, à l'information sur les contenus en pesticides et en perturbateurs endocriniens des produits alimentaires et de consommation courante, à l'affichage sur les véhicules des émissions de particules fines grâce à la vignette Crit'Air lorsque l'on vend un véhicule, grâce à une réflexion sur l'affichage du coût d'usage des véhicules, et grâce à l'amélioration du diagnostic de performance énergétique pour les logements, nous allons, en 2018, permettre aux Français de faire le bon choix, celui de l'écologie au sens noble du terme.

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Brune Poirson, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Mesdames, Messieurs les députés, le ministre d'État Nicolas Hulot vient de détailler les grands chantiers, et surtout la vision qui nous anime sous sa direction. J'évoquerai pour ma part l'un des piliers du plan climat qui a été présenté par M. Nicolas Hulot au mois de juillet dernier, celui de l'économie circulaire, l'objectif étant de tendre vers une économie qui soit, à terme, 100 % circulaire. Il s'agit en réalité de mettre en oeuvre le plus rapidement possible les objectifs qui ont été fixés par le Président de la République durant la campagne présidentielle et repris par le Premier ministre lors de son discours de politique générale au début de l'été.

Je rappelle quels sont les objectifs d'ici à 2025 : tendre vers 100 % de plastiques recyclés et réduire de 50 % des quantités de déchets mis en décharge. Ce chantier important s'inscrit pleinement dans la transformation sociale et sociétale, dans cette transition écologique et solidaire que vient de décrire M. Nicolas Hulot.

Le modèle économique linéaire, « fabriquer, consommer, jeter » sur lequel reposent encore beaucoup de nos activités économiques, ne doit et ne peut plus durer parce qu'il se heurte à l'épuisement des ressources de la planète. Au-delà de cette aberration environnementale, on peut parler de « double arnaque », pour reprendre une expression du ministre d'État, une arnaque à la fois pour la planète et pour le consommateur.

Il s'agit pour nous d'élaborer une approche systémique pour parvenir à établir les blocs de ce que pourrait être cette économie circulaire mais aussi de remplir le plus rapidement possible des objectifs très concrets, à savoir réduire de 30 % la consommation de ressources d'ici à 2030, réduire de 50 % les quantités de déchets mis en décharge d'ici à 2025 et créer 500 000 emplois nouveaux en mobilisant notamment l'économie sociale et solidaire, parce que la transition écologique ne se réalisera que si elle est aussi solidaire, c'est-à-dire si elle est créatrice d'emplois.

Ce basculement de modèle économique ne pourra malheureusement pas se faire spontanément. Il demande une action volontariste de l'État pour définir un cadre réglementaire et économique qui incite les acteurs à prendre des décisions dans le sens de l'économie circulaire. Il s'agit d'activer de nombreux leviers : la durée de vie de nos produits, l'écoconception, la collecte, le recyclage et la valorisation, la planification des ressources, l'information des consommateurs, la mobilisation des collectivités. L'enjeu, c'est de parvenir à la mobilisation générale des acteurs autour de cette économie. C'est précisément tout l'objet de la feuille de route de l'économie circulaire sur laquelle j'ai commencé à travailler avec le ministre d'État depuis le mois d'octobre dernier et qui a donné lieu à une première phase de consultation, qui s'est achevée récemment. Les travaux des différents ateliers ont été synthétisés puis mis en ligne sur le site www.consultation-economie-circulaire.gouv.fr pour une deuxième phase de consultation. Je vous invite d'ailleurs à y contribuer. Cette phase de consultation en ligne s'achèvera le 25 février mais nous poursuivrons la concertation – je reçois actuellement des représentants de la grande distribution, des collectivités, des associations de consommateurs, des organisations non gouvernementales. Nous publierons à terme la feuille de route qui permettra d'accélérer le développement de l'économie circulaire.

Un mot sur la finance verte. L'objectif général, c'est de rediriger de façon massive les investissements privés vers des projets plus durables. L'enjeu est de mettre le secteur financier au service du climat. Toutefois, nous ne pourrons pas le faire seuls à l'échelle de notre pays, même si nous pouvons être très moteurs sur cette question. Nous l'avons montré avec le One Planet Summit et en créant des coalitions d'États européens, notamment au travers du Green Grow Group et des négociations européennes. Vous le savez, nous venons d'achever tout un cycle de négociations fondamentales sur le paquet énergie propre pour tous les Européens qui vise à créer le socle de l'union de l'énergie. Nous voulons repolitiser la question environnementale parce que nous avons un vrai devoir d'exemplarité au niveau européen. Et, au-delà de l'Europe, nous sommes attendus dans le monde entier. Nous devons donc être moteurs sur la question climatique et environnementale. Notre ligne est très claire : elle a été fixée par le Président de la République le 21 septembre dernier lors de son discours fondateur de la Sorbonne. Le ministre d'État a évoqué les objectifs de développement du mécanisme d'inclusion carbone aux frontières ou encore le développement d'un prix plancher du carbone : nous avons d'ores et déjà lancé ces grands chantiers que nous déploierons plus activement lorsque le gouvernement allemand sera installé.

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Sébastien Lecornu, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Mesdames, Messieurs les députés, je tiens à vous remercier pour ce travail commun de sept mois entre la commission et le pôle ministériel, et plus particulièrement vous, Monsieur le président, qui avez accepté de monter à bord sur le sujet de la libération des énergies renouvelables. Nous avons en effet souhaité associer à nos travaux en amont l'Assemblée nationale et le Sénat, au travers des commissions du développement durable et des affaires économiques, pour que vous ne soyez pas simplement mis devant le fait accompli lors du processus législatif. Vous avez également accepté d'aller à plusieurs reprises sur le terrain, à nos côtés, et encore dernièrement à Flamanville et à La Hague, pour vous rendre compte par vous-mêmes de la difficulté de ces sujets.

Le ministre d'État a rappelé les grands principes de la PPE. Certes, ramener la part de l'atome dans le mix électrique à 50 % est un objectif important. D'autres le sont tout autant, comme la part des énergies renouvelables qui devra représenter 32 % de la consommation énergétique en 2030, 40 % de la production d'électricité, 38 % de la consommation finale de chaleur, 15 % de la consommation finale de carburant et 10 % de la consommation de gaz.

Le premier principe, c'est évidemment nos objectifs climatiques qui ont une conséquence très opérationnelle, à savoir la fermeture de quatre centrales à charbon sur le territoire français métropolitain : Le Havre, Cordemais, Gardanne et Saint-Avold.

Le deuxième principe, c'est la sûreté, sujet dont l'Assemblée nationale s'est emparée en créant une commission d'enquête, et que nous abordons au quotidien en dialoguant avec l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN).

Le troisième principe, c'est la sécurité, et notamment la sécurité de l'approvisionnement en électricité, qui relève de Réseau de transport d'électricité (RTE).

Le quatrième principe, c'est la prise en compte de l'impact social de la transition, qui nous préoccupe tous. Cela pose la question des contrats de transition écologique sur laquelle je serai certainement amené à vous répondre.

Bien sûr, l'énergie recouvre aussi des volets industriel et économique s'agissant de la construction des différentes filières, le nucléaire et les énergies renouvelables, et amène à s'interroger sur le modèle des grandes entreprises, y compris publiques – je pense notamment à EDF – et sur le coût de l'électricité.

Il convient d'abord de donner de la prévisibilité dans l'écriture de la PPE, tant pour les consommateurs que pour les professionnels, ce qui pose la question de la concertation. La PPE est un document réglementaire. Mais le Gouvernement souhaite associer – ce sera la première fois – très directement l'Assemblée nationale et le Sénat à la réflexion sur l'écriture de ce décret. Dans les semaines qui viennent, nous vous indiquerons quelle méthodologie sera retenue.

La place de l'innovation est importante. M. Nicolas Hulot a parlé de l'hydrogène, ce qui soulève le problème du stockage.

Il convient également que cette PPE fasse preuve de sincérité. S'il est facile de se fixer des objectifs, il est plus difficile de les remplir. C'est particulièrement vrai du nucléaire. Nous devons aussi être sincères dans notre capacité collective à nous donner les moyens d'atteindre nos objectifs en matière d'énergies renouvelables.

Quels sont les deux leviers d'action du Gouvernement pour avancer en matière d'énergies renouvelables ? Le premier, c'est le « boostage » par les appels d'offres. Cet outil, qui est désormais important pour l'ensemble des porteurs de projets, participe à trouver un modèle et une compétitivité autour des énergies renouvelables. Le ministre d'État a annoncé un doublement des appels d'offres en matière d'énergie solaire pour l'année 2018, puisque l'on passe de 1,5 gigawatt à 2,5 gigawatts, avec des prix moyens pondérés sur les derniers lauréats qui tendent à diminuer, ce qui est particulièrement encourageant.

Des résultats d'appels à projets sont attendus également en matière d'éolien terrestre. Quant à l'éolien offshore, nous aurons certainement l'occasion d'y revenir dans le cadre de nos différents échanges.

L'autre piste d'action importante, c'est la libération opérationnelle des contraintes parfois inutiles qui pèsent sur les énergies renouvelables. Un groupe de travail, qui a rendu ses conclusions il y a quelques jours, prévoit une dizaine de mesures de libération des énergies éoliennes. Des débats ont eu lieu et vous vous êtes prononcés, dans le cadre du projet de loi pour un État au service d'une société de confiance (ESSOC), sur des dispositions qui entreront rapidement en application.

Par ailleurs, la méthanisation occupe une place centrale, et pas seulement parce qu'elle permet de diversifier le revenu des agriculteurs. Le groupe de travail a commencé à se réunir et a proposé des pistes telles que la simplification de la réglementation, le financement bancaire, le soutien public et la mobilité.

Nous fondons également beaucoup d'espoirs sur l'énergie solaire pour laquelle des mesures de libération sont attendues. C'est un grand chantier qui sera lancé à la fin de ce mois, pendant le salon de l'agriculture, pour s'achever aux alentours de mai-juin. En la matière aussi, il sera question de simplification réglementaire, de procédures d'urbanisme, de repérage du foncier, y compris des friches, pour ne pas faire n'importe quoi sur les terrains agricoles, d'autoconsommation, sujet qui intéresse très directement nos concitoyens et sur lequel on doit pouvoir apporter des réponses dans les semaines et les mois à venir, du solaire thermique et dans une autre mesure de la géothermie.

Enfin, la performance énergétique des bâtiments ou l'intelligence énergétique est un point important puisque l'énergie que l'on ne consomme pas, c'est l'énergie propre que l'on produit.

L'enjeu pour nous, c'est de décliner tous ces objectifs par des réponses opérationnelles très concrètes qui parfois relèvent de la loi, et parfois du règlement. Il faut le faire avec beaucoup de pragmatisme et, surtout en écoutant ensemble des acteurs.

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Monsieur le ministre d'État, la semaine dernière se tenait le dix-neuvième colloque annuel du syndicat des énergies renouvelables (SER), dont le thème était : « Accélérons la croissance des énergies renouvelables, face à l'urgence climatique ». Ce thème en dit long et révèle bien l'importance d'aller plus vite, plus loin dans le développement et l'accompagnement des énergies renouvelables en France.

Malgré une accélération ces dernières années, les rythmes actuels sont en dessous des objectifs en matière d'énergies renouvelables fixés par la première PPE. Au regard de cette cadence, il apparaît difficile d'atteindre ces objectifs – nous serons au mieux au niveau des options basses. En résumé, nous sommes en retard sur nos objectifs tant nationaux qu'européens à l'horizon 2020.

Je rejoins M. Jean-Louis Bal, président du SER, sur notre capacité à atteindre l'objectif fixé par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte : porter la part des énergies renouvelables à 32 % dans le mix énergétique à l'horizon 2030.

Votre ministère travaille actuellement avec l'ensemble des parties prenantes sur la révision de la PPE pour 2019-2023, et sur la PPE 2024 -2028. Elle fixe le cap, la feuille de route de la transition énergétique. Parce que je sais que le pragmatisme n'est pas incompatible avec l'optimisme, Monsieur le ministre d'État, qu'allez-vous faire, qu'allons-nous faire ? Modifier nos objectifs à la baisse pour être sûrs de pouvoir les atteindre ou avoir les moyens de nos ambitions ? Le cas échéant, sur quels leviers allez-vous, allons-nous nous appuyer pour faire de ce défi une réussite ?

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S'il est une énergie verte qui existe depuis longtemps, c'est bien l'hydroélectricité. Elle est produite en effet dans notre pays depuis des décennies et la construction des barrages a participé à la reconstruction de la France après la seconde guerre mondiale. Or depuis quelques années déjà, la Commission européenne « harcèle » l'État français pour qu'il remette en concurrence ses concessions sur le marché.

Pouvez-vous faire un point d'étape sur cette question, sachant qu'il y a de la part des agents de l'électricien français EDF beaucoup d'inquiétudes ? Si ces concessions devaient être confiées à des entreprises privées, quelles garanties le Gouvernement pourrait-il apporter aux habitants qui vivent à l'aval de ces barrages en matière de sécurité, pour certifier que des économies ne seraient pas faites justement au détriment de celle-ci ?

Je ne peux pas ne pas saisir l'occasion de cette audition sans évoquer un dossier agricole extrêmement sensible, celui du loup. Je crois savoir que des députés de la majorité se sont désolidarisés en la matière de la position du Gouvernement. Tel qu'il est proposé, le plan loup est absolument inacceptable du point de vue agricole. Si le tir – sans faire un mauvais jeu de mot – n'est pas corrigé, nous aurons des étés extrêmement difficiles et douloureux en montagne pour notre pastoralisme, qui est clairement mis en danger.

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Vos trois portefeuilles ministériels sont réunis sous l'intitulé de la transition écologique et solidaire. Ma question porte sur cette dimension solidaire, adjectif qui traduit notamment l'existence de liens issus de responsabilités communes et d'intérêts partagés. Pourtant, les faits et les circonstances me conduisent à penser que, parfois, pour ne pas dire souvent, cette solidarité fait défaut, comme en attestent régulièrement les difficiles conditions d'émergence des projets en lien avec vos prérogatives respectives. Combien de projets de développement d'énergies renouvelables souffrent d'une absence de consensus, d'un manque de vision partagée, alors qu'ils sont porteurs d'intérêts et de bénéfices ? Les champs d'éoliennes, les centrales solaires photovoltaïques, les centrales hydroélectriques présentent comme dénominateur commun la cristallisation de refus. Paradoxalement sur des registres différents, la fermeture d'une centrale nucléaire se heurte à d'autres rejets. Le refus deviendrait presque la norme. Comment, dès lors, envisager la transition écologique et énergétique et une programmation pluriannuelle de l'énergie qui doit savoir mobiliser un mix énergétique renouvelé, laissant place à plus d'énergies renouvelables ? Comment provoquer le changement comportemental, nécessaire pour faciliter le développement de ces énergies renouvelables (ENR) sur tous les territoires ? De mon point de vue, ce sera en mobilisant la solidarité.

Ma question porte donc sur votre vision des leviers à actionner pour faciliter cette solidarité nationale. Faut-il imaginer de nouvelles formes de partage des bénéfices générés par les ENR, à l'échelle des territoires d'aménagement ? Faut-il revisiter le processus de concertation ? On voit déjà les effets bénéfiques en termes de consensus des groupes de travail que vous avez lancés sur le développement des éoliennes et tout récemment sur la méthanisation, mais pensez-vous qu'il faille aller au-delà et poursuivre plus en avant de nouvelles formes de dialogue ?

Enfin, la sensibilisation des plus jeunes peut être un autre levier. Quelles actions envisagez-vous, quelle est votre vision pour amplifier la conscience des jeunes générations à la nécessaire préservation de notre planète, en particulier via les sujets de l'énergie et du climat ?

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L'étendue du sujet et la pluralité des ministres auraient justifié trois réunions différentes. Pour ma part, je me concentrerai sur une problématique unique.

Comme vous le savez, les pêcheurs du Tréport, de Dieppe et des Hauts-de-France se mobilisent contre le projet éolien offshore au large du Tréport dont ils contestent, avec la Commission nationale du débat public et le Parc naturel marin, l'emplacement depuis dix ans. Ils seront d'ailleurs devant le port du Havre vendredi. Leurs messages sont simples et légitimes, me semble-t-il. Ils n'ont pas d'opposition de principe aus énergies renouvelables. Ils savent que cette filière est nécessaire à la lutte contre le réchauffement climatique, mais ils demandent que son développement ne se fasse pas au détriment de leur activité. Ils rappellent que la pêche française est une pêche artisanale durable et qu'ils ont fait beaucoup d'efforts pour la gestion des espèces. Ils sont d'ores et déjà affectés par le Brexit et par la pêche électrique, ce qui renforce leurs inquiétudes légitimes. Le projet qu'ils contestent constitue une menace vitale pour eux puisqu' il a vocation à s'implanter sur la zone la plus poissonneuse.

Monsieur le ministre d'État, et je vous crois sincère, vous avez dit vouloir rendre désirable la transition énergétique. Le Premier ministre a expliqué que le développement des énergies marines renouvelables devait, pour se concrétiser, régler préalablement les conflits d'usage.

À quelques jours d'une décision importante de l'Agence française de la biodiversité, quelles mesures concrètes envisagez-vous pour concilier l'avenir de notre pêche et les 1 000 emplois concernés du quartier maritime Dieppe-Le Tréport avec vos envies légitimes, qu'on souhaite accompagner, de développement du recours aux énergies renouvelables dans le cadre d'un mix énergétique public intelligent et équilibré ?

Vous avez dit qu'il était loin le temps où l'on décidait à Paris, dans un cabinet ministériel, et j'en suis heureux. À Dieppe, j'aime dire, comme le poète, « Homme libre toujours tu chériras la mer ! ». Les pêcheurs chérissent la mère nourricière, et ils méritent le respect. Si l'on veut réussir la transition énergétique, il convient de passer intelligemment, dans le respect des acteurs, le palier de l'addition et non de la soustraction des économies.

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Monsieur le ministre d'État, vous reconnaîtrez dans mes propos ceux d'une députée des Alpes, berceau de l'hydroélectricité, cette grande histoire, celle de la houille blanche et de l'industrialisation des vallées de montagne. Plusieurs décennies plus tard, c'est un des piliers majeurs de la transition énergétique de notre pays. Première source d'électricité renouvelable en France, elle est aussi la moins chère et représente 66 % de la capacité de pointe. À ce titre, elle constitue un outil indispensable au service de la transition énergétique, une part essentielle de notre souveraineté énergétique dont vous avez beaucoup parlé en introduction.

La semaine dernière, vous avez annoncé avoir fait des propositions d'ouverture à la concurrence des ouvrages hydroélectriques français, ce patrimoine historique national. Vous parlez beaucoup de cohérence. Mais où est-elle ? Je ne la vois pas. Comment peut-on décider de brader la production d'électricité hydraulique quand, dans le même temps, tout le monde s'accorde à dire que ce moyen de production pilotable est essentiel pour assurer l'équilibre entre production et consommation d'électricité, et pour atteindre les objectifs fixés par la loi relative à la transition énergétique et pour la croissance verte ?

Comment peut-on décider de démultiplier le nombre d'exploitants des concessions hydroélectriques, désorganisant et désoptimisant ainsi le système, en ne respectant pas forcément la cohérence des chaînes hydroélectriques ? Pourquoi ouvrir à la concurrence, lorsqu'il y a absence de réciprocité dans les autres États membres concernés ? Quid de la gestion de la ressource en eau dont les enjeux sont multiples, des différents usages de l'eau ? Qu'en sera-t-il de la sûreté des ouvrages, de la sécurité d'approvisionnement ?

Avez-vous mesuré les conséquences pour l'emploi ? Je ne le crois pas, d'autant que cette décision intervient alors que le débat public sur la PPE n'est pas achevé. Cette décision, si elle devait être confirmée, entraînerait mécaniquement et inévitablement une hausse du prix pour le consommateur. Je n'y reviens pas, car je l'ai largement développé dans un rapport que j'ai réalisé dans le cadre de la commission des affaires économiques sous la précédente législature. Vous faites d'ailleurs fi des outils instaurés dans la loi relative à la transition énergétique, notamment le renouvellement sous conditions de travaux qui conforterait très nettement l'activité de General Electric dont chacun connaît ici la situation et les enjeux.

Pouvez-vous préciser le calendrier et les vallées concernées ?

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Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Vous avez dit que le développement des énergies renouvelables n'allait pas assez vite, et vous avez raison ! Toutefois, le Président de la République a demandé au Gouvernement d'établir, en étroite association avec les entreprises, les salariés, les élus, les territoires et les citoyens – ce qui ne s'était jamais fait auparavant –, une nouvelle trajectoire ambitieuse pour atteindre le plus rapidement possible les objectifs fixés par la loi relative à la transition énergétique. C'est vrai, nous sommes en retard, mais l'objectif de 2030 reste fixé à 32 % d'énergies renouvelables dans le mix énergétique. Cette nouvelle trajectoire sera définie dans le cadre de la révision de la programmation pluriannuelle de l'énergie, qui devra être adoptée avant la fin de l'année.

Sans attendre cette échéance, le Président de la République nous a demandé de préparer, avant la fin du premier trimestre, un plan d'action pour simplifier le développement des projets de production d'énergies renouvelables et accroître ainsi notre ambition en la matière.

Pour ce faire, j'ai lancé une démarche de concertation inédite, qui vise à asseoir autour de la table toutes les parties prenantes des filières d'énergies renouvelables pour identifier les mesures permettant de lever les freins – ils sont nombreux – à leur développement. M. Sébastien Lecornu a réuni les premiers groupes de travail sur l'éolien et la méthanisation. Les travaux seront lancés prochainement sur le solaire.

Certains des projets qui m'échoient n'ont pas toujours été bien instruits, et selon des procédures très alambiquées. Il a pu arriver que l'on organise la consultation une fois l'emplacement décidé ! C'est une leçon que nous devons tirer collectivement si nous voulons que les projets d'aménagement, dans ce domaine comme dans d'autres, ne se heurtent pas systématiquement à des refus : les « réunions de consultation » doivent être des réunions de consultation, et non des réunions d'information !

Lorsque l'on en est aux dernières étapes de la procédure, il reste peu d'alternatives. Au Tréport, l'opérateur a apporté de nombreuses améliorations, mais je reconnais bien volontiers que si l'on avait placé ce projet quelques miles nautiques à l'ouest, cela m'aurait facilité la tâche ! Les choses ne sont pas si simples. Nous avons même cherché un véhicule législatif pour repartir à zéro, mais cela prendrait à nouveau de nombreuses années, sans parler des préjudices. Les anciennes procédures ont pu durer douze ans, durant lesquels les technologies ont changé. Pour changer de modèle, avec des technologies plus performantes, il faudrait repartir du début.

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Sébastien Lecornu, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Faut-il, devant un objectif difficile à atteindre, baisser les bras ? Assurément non : en début de quinquennat, nous faisons le pari d'accélérer. Nous ne pensons pas être plus idiots que certains de nos amis européens et il n'y a pas de raison que nous n'arrivions pas à prendre le virage de la transition énergétique.

On lit encore trop souvent dans la presse que les énergies renouvelables ne sont pas compétitives. C'est de moins en moins vrai : les appels d'offres qui sortiront tout au long de l'année vous montreront qu'un modèle compétitif commence à émerger. Cela a été dit sur tous les bancs lors de l'examen du projet de loi pour un État au service d'une société de confiance, la libération des procédures administratives et réglementaires constitue un enjeu. Parfois, ce sont les normes environnementales, pourtant nécessaires, qui empêchent la transition énergétique ! C'est aujourd'hui le cas pour la méthanisation, qui prendra le même virage que l'éolien.

Lorsqu'il existe, dans le domaine des énergies renouvelables, un marché de l'offre et de la demande, j'estime que c'est à nous de revoir l'environnement législatif et réglementaire afin qu'il fonctionne bien. C'est vrai pour l'éolien offshore et terrestre, c'est vrai aussi pour le solaire, qui exige une réflexion sur le foncier.

M. Philippe Bolo m'a interpellé sur l'environnement sociétal des énergies renouvelables, une évidence. Dans les groupes de travail, nous avons arrêté un principe, celui de systématiser le financement participatif et l'intéressement à l'énergie produite pour l'ensemble des riverains de parcs éoliens. Cette mesure très concrète rejoint l'action de Mme Brune Poirson sur l'économie circulaire et donne de la cohérence à notre action.

Il y aura un avant et un après 2018 ; nous avons de grandes chances de parvenir à faire mieux, dans la mesure où nous sommes très en retard.

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Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Les propos qu'a pu tenir Mme Marie-Noëlle Battistel sur l'hydroélectricité, sont un peu durs. Il n'y a pas d'ambiguïté : le Gouvernement soutient totalement l'hydroélectricité, une énergie renouvelable, flexible et compétitive. Bien que son potentiel de développement soit hélas limité, cette énergie est importante pour le système électrique, et aussi pour le développement économique des territoires.

Le droit français doit être en conformité avec le droit européen, qui prévoit que les concessions hydroélectriques échues doivent être renouvelées par mise en concurrence. La loi relative à la transition énergétique prévoit que les collectivités locales peuvent être associées à la concession dans le cadre d'une société d'économie mixte (SEM) hydroélectrique, ainsi que le regroupement des concessions hydrauliquement liées pour faciliter leur exploitation et favoriser la sûreté. Elle prévoit aussi la possibilité de prolonger les concessions, contre travaux, dans le respect de la directive « concessions ». Le statut des personnels sera, dans tous les cas, préservé et les cahiers des charges devront prévoir la reprise des personnels.

Comme le précédent gouvernement, nous essayons de rechercher avec la Commission européenne une mise en oeuvre équilibrée de ces dispositifs. À ce stade, l'accord n'a pas encore été trouvé, mais nous poursuivons, dans la fermeté, les discussions pour aboutir à une solution satisfaisante. Il s'agit de sortir le plus rapidement possible d'un statu quo qui nuit considérablement aux investissements dans le secteur et est source d'incertitudes pour les entreprises, les salariés et les collectivités.

Les dernières discussions avec la direction générale de la concurrence de la Commission européenne visent à permettre un avancement du dossier dans le respect des lignes rouges. La position de la France, que nous continuons de défendre, est la suivante : regroupement des concessions, indispensable à une cohérence des vallées ; projet de prolongation des concessions de la Truyère et du Lot, exploitées par EDF et de la concession du Rhône, exploitée par la Compagnie nationale du Rhône (CNR) ; refus de toute exclusion d'EDF du processus de mise en concurrence ; mise en concurrence limitée aux concessions échues, qui pourrait se faire par paquets successifs.

La remise en concurrence est une politique nationale qu'il faut mener si nous voulons optimiser la gestion des barrages, relancer l'investissement et mieux redistribuer les ressources financières vers les territoires. Il ne faut pas oublier que les barrages appartiennent à l'État, et que nous devons les valoriser.

Dans ce cadre, le Gouvernement négocie le meilleur moyen de procéder aux remises en concurrence, tout en respectant le droit de l'Union européenne, le droit national et en protégeant les intérêts français. Comme c'était le cas du précédent gouvernement, nous avons bien conscience des inquiétudes exprimées par les salariés et les riverains. Nous nous attacherons à informer régulièrement les acteurs, en évitant toute supputation. Ce processus ne doit pas mener à une dégradation sociale ou territoriale. Mes équipes et celles du Premier ministre ont rencontré, et continueront de le faire, les syndicats et les entreprises. Il n'y aura pas de privatisation et les exploitations seront renouvelées, avec un cahier des charges. L'État continuera d'exercer des contrôles de sécurité très stricts sur les barrages, quel que soit l'exploitant. Un arrêté ministériel viendra bientôt renforcer ces exigences.

Je l'ai dit tout à l'heure, nous avons des leçons à tirer d'événements récents sur les procédures de consultation. Nos marges de manoeuvre sont parfois limitées : annuler revient à repartir à zéro. Il convient aussi de distinguer, et je m'efforce de le faire, les inquiétudes avérées de celles qui ne le sont pas toujours. Je comprends la situation des pêcheurs, qui redoutent en prime les conséquences du Brexit et l'impact éventuel de la pêche électrique. Cela fait beaucoup pour un même secteur, dont j'ai reçu récemment les représentants.

Il est vrai que si nous ne mettons pas en place de nouvelles modalités de concertation, nous échouerons. Le Président de la République a demandé au Gouvernement d'établir, en relation étroite avec toutes les parties, une nouvelle trajectoire ambitieuse pour atteindre les objectifs fixés par la loi relative à la transition énergétique.

Le loup ! Voilà un sujet auquel j'espérais échapper aujourd'hui, et que je vous souhaite de ne pas avoir à traiter... J'ai bien conscience que nombre d'entre vous êtes confrontés à la détresse, à la souffrance et à la colère des éleveurs, et je ne sous-estime pas la difficulté. Il est vrai que cette activité, pendant un temps, s'est exercée en l'absence du loup, contrairement à ce qui s'est passé en Italie, ce qui rend la cohabitation plus difficile en France désormais.

En tant que ministre, je dois relever un enjeu aussi important que celui du changement climatique, celui de la biodiversité. Vous pourrez m'opposer que les éleveurs travaillent à sauvegarder cette biodiversité, l'argument est valable. Mais je ne peux pas faire de tri dans la biodiversité. Si nous échouons sur la cohabitation du loup avec nos pratiques économiques, nous perdrons toute crédibilité dans les instances internationales pour enjoindre les grandes nations à livrer le combat de la biodiversité, qui participe de l'avenir de l'humanité. Je dois porter simultanément ces causes territoriales et cette cause universelle.

Le compromis que nous avons trouvé, au terme d'une longue consultation, est le moins mauvais. Il s'agit notamment d'assouplir l'encadrement des tirs de défense, de donner davantage de latitude aux préfets, qui sont au plus proche des réalités territoriales. Mais entre ceux qui voudraient que l'on tue moins de loups, ceux qui souhaiteraient que l'on n'en tue pas du tout et ceux qui aimeraient qu'on les tue tous, personne n'est vraiment satisfait.

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Ma question s'adresse à M. Sébastien Lecornu. Les contrats de transition écologique – CTE –, destinés à accompagner les territoires vers une économie décarbonée, constituent une démarche nouvelle. Elle repose sur un contrat entre l'État et les territoires, avec des objectifs à atteindre à la fois sur le plan écologique et sur celui de l'emploi, en échange de moyens financiers. Cette méthode doit permette d'enclencher la conversion écologique d'un territoire vers une économie décarbonée ainsi que vers des emplois et activités durables. Les CTE sont principalement déployés à l'échelle des établissements publics de coopération intercommunale et ciblent autant les collectivités que les entreprises et les salariés. Qui plus est, tous les acteurs du territoire – ONG, universités, syndicats, etc. – peuvent s'associer à cette dynamique via des chartes d'engagement.

Vous avez annoncé que les financements potentiels représentaient plus de 15 milliards d'euros. Fin 2017, vous avez expliqué que le Gouvernement souhaitait expérimenter ces contrats dans une vingtaine de sites pilotes, notamment les sites concernés par la fermeture de centrales à charbon d'ici à 2022.

Le 11 janvier, à Arras, vous avez signé le premier contrat, avant d'annoncer la mise en place d'un comité de pilotage sur la fermeture de la centrale de Fessenheim, afin d'assurer la reconversion du site et de construire un projet pour le territoire qui soit exemplaire. Il s'agit du CTE le plus précis à ce stade, puisqu'il crée un comité qui s'organise autour de six grands groupes de travail – mutations économiques, aménagement du foncier, infrastructures, fiscalité locale, approvisionnement énergétique et études d'impact.

Députée d'Aix-en-Provence et Pays d'Aix, je suis concernée par le sort de la centrale biomasse de Gardanne. Un CTE est en cours d'élaboration, mais les syndicats sont inquiets du manque de transparence et de l'association trop faible des salariés dans son élaboration. Pouvez-vous expliciter votre méthode d'élaboration des CTE et notamment la concertation avec les syndicats ? Que pouvez-vous nous dire de la qualité des emplois proposés aux salariés en reconversion ?

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Monsieur le secrétaire d'État, vous l'avez dit dans votre propos introductif, la méthanisation est une filière prometteuse qui crée des emplois, verdit une partie du gaz et diversifie le revenu agricole. Dans un département agricole et rural comme l'Orne, ces avantages ne nous ont pas échappé. Nous avons ainsi plusieurs beaux projets de méthanisation agricole collectifs en cours de réflexion, voire de réalisation, notamment à Messei. Or, d'expérience, et au vu du parcours du combattant que doivent emprunter ces dossiers, il serait judicieux de revoir deux points.

Le premier porte sur l'instruction des dossiers ICPE – installations classées pour la protection de l'environnement – et des permis de construire. Le processus actuel est long, fastidieux, technocratique. Il constitue, en raison de sa complexité, un frein, accentué encore par l'attitude parfois tatillonne des DREAL – directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement – ou des MRAE – missions régionales d'autorité environnementale. Pourquoi ne pas remettre en application le système des autorisations uniques, qui étaient plus simples et qui pouvaient être modifiées au fur et à mesure que le dossier était retravaillé par de simples « porté à connaissance », sans passer par de nouvelles enquêtes publiques ?

Le second point concerne la qualification du digestat qui sort du méthaniseur. Le décret de 2017 ne va pas encore assez loin. L'idéal serait que le digestat soit totalement assimilé à un fertilisant et non à un déchet. Cela serait un plus pour les agriculteurs, qui allégeraient ainsi leur plan d'épandage et seraient plus motivés encore pour participer à des projets collectifs de méthanisation. Cela permettrait aussi de mieux valoriser le digestat, en évitant de rajouter de l'azote chimique.

Qu'il s'agisse du processus administratif ou de la qualification du digestat, peut-on être encore plus performant pour faire avancer la méthanisation agricole, en laquelle nous croyons profondément ?

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Dans le cadre de la PPE et du volet sur la rénovation thermique, quelle place comptez-vous réserver au tiers-financement ? Je pense en particulier au dispositif Oktave, expérimenté dans la région Grand-Est.

Vos prédécesseurs ont pris des engagements, notamment sur les territoires à énergie positive. Comment comptez-vous déboucler ce dossier ?

Monsieur Sébastien Lecornu, vous êtes venu récemment en « repérage » en Alsace, en vue du « tournage » de ce qui sera probablement le dernier épisode du « feuilleton » Fessenheim. Ce qui était une transition énergétique est d'abord vu sur le terrain comme une transition économique. Quelle tonalité comptez-vous donner au scénario ? La fermeture se résumera-t-elle à éteindre la lumière et à accrocher la clé au clou ? S'agira-t-il plutôt d'un laboratoire, pour essuyer les plâtres et trouver un dispositif reproductible dans d'autres sites en France, voire à l'étranger ? Ou bien avez-vous l'ambition d'en faire une vitrine ?

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Sans reprendre les propos de Mme Marie-Noëlle Battistel et la teneur de votre réponse, je tiens souligner que les concessions hydroélectriques arrivent à échéance en étant rentables, du fait de l'amortissement de l'investissement de départ – public – et de la faiblesse des coûts d'exploitation. Maintenant que les barrages sont rentables, ce sont les nouveaux concessionnaires, majoritairement privés, qui en recevraient les bénéfices, d'autant que la loi sur l'eau et les milieux aquatiques de 2006 supprime le droit de préférence alloué à EDF. Comment garantir à EDF la possibilité de poursuivre l'exploitation des barrages ?

Je tiens à évoquer aussi la dimension, importante, de la sûreté. Une entreprise qui exploite un barrage à court terme n'aura pas les mêmes intérêts qu'un concessionnaire à long terme. Il faudra donc être vigilant sur le renforcement des exigences en matière de sûreté.

Enfin, la privatisation – que vous ne voulez pas nommer ainsi – induira une hausse mécanique du prix de l'électricité pour les consommateurs. Cela s'est vu dans d'autres circonstances. Les coûts de production étant faibles, c'est une activité très rentable pour l'actionnaire d'EDF – l'État –, qui aura empoché 2 milliards en 2012.

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Ma question s'adresse à Madame la secrétaire d'État. La transition énergétique et la révolution numérique nous promettent un monde affranchi du pétrole, des pollutions ou des pénuries. Mais dans les faits, elles engendrent une nouvelle dépendance en ressources, et notamment aux métaux rares, indispensables pour mener cette transition : voitures électriques, éoliennes, panneaux solaires, smartphones, tous ces objets en contiennent.

Pourtant, l'extraction de ces métaux a des conséquences catastrophiques sur l'environnement. Un ouvrage, La Guerre des métaux rares, de Guillaume Pitron, en librairie depuis quelques jours, indique que soutenir le changement de notre modèle énergétique exige déjà un doublement de la production de métaux rares tous les quinze ans environ et nécessitera au cours des trente prochaines années d'extraire davantage de minerai que ce que l'humanité a prélevé depuis 70 000 ans.

Partant du principe que nous ne pouvons pas nous passer des métaux rares, en tout cas pour le moment, nous devons donc réfléchir à des manières de limiter au maximum leur utilisation. Cela passe par le recours à la réparation de produits et la lutte contre l'obsolescence programmée. Vous avez d'ailleurs rappelé qu'au-delà des aspects écologiques, la lutte contre l'obsolescence programmée présente également un intérêt économique pour les ménages. Sur ce sujet, vous avez récemment déclaré réfléchir à mettre en place un indice de durée de vie pour les produits électroniques et électroménagers. S'agit-il d'un dispositif d'information pour les consommateurs ou envisagez-vous également un volet fiscal ? Sur quelles bases seront définis les critères de calcul de cet indice ?

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Sébastien Lecornu, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Vous parlez particulièrement bien de la philosophie des contrats de transition écologique, Madame Anne-Laurence Petel. Nous sommes dans une démarche nouvelle, avec une dimension de laboratoire, puisqu'il s'agit d'associer le public et le privé à la transition territoriale. Autant la puissance publique, qu'il s'agisse de l'État ou des collectivités territoriales, a toujours bien répondu à ce genre d'initiative, autant la participation du monde économique, du monde consulaire, du monde agricole ou du monde social est un fait très nouveau. Cela suppose aussi que l'État modifie son mode de fonctionnement.

Vous avez été particulièrement généreuse en parlant des 15 milliards d'euros pour les CTE, mais je me dois d'être rigoureux devant la commission des affaires économiques. Dans la mesure où il s'agit de laboratoires et de démonstrateurs, ces vingt premiers contrats emprunteront différents crédits de droit commun et de l'argent du Grand plan d'investissement – d'où ce chiffre de 15 milliards d'euros.

Deux territoires démonstrateurs sont en cours de négociation : un territoire urbain et périurbain, autour d'Arras ; un territoire rural et plutôt agricole, la Corrèze. Une équipe spécifique a été placée auprès du cabinet. Quatre territoires auront, par définition, un CTE puisque s'y trouvent implantées des centrales à charbon. Il n'y a pas de CTE à Fessenheim car la problématique, de par son ampleur et l'histoire du projet, dépasse le CTE. En outre, la transition à Fessenheim ne fonctionnera que si elle est franco-allemande ; les CTE étant déjà suffisamment difficiles à élaborer, une négociation bilatérale ajouterait encore de la complexité.

À Gardanne, les travaux n'ont pas encore commencé. Il est normal que les salariés de la centrale aient exprimé leurs craintes. Une mission interministérielle « Charbon » vise à définir l'objet social et économique de la fermeture des quatre centrales à charbon. Ces fermetures posent aussi la question de la trajectoire du prix du carbone et des projets biomasse potentiels. MM. Nicolas Hulot et Bruno Le Maire ont choisi de confier ces questionnements à une mission indépendante, qui devrait faire un certain nombre de propositions en mai. Nous lancerons alors la négociation des contrats. Dans le même temps, Uniper et EDF devront engager le dialogue opérationnel et social, tel qu'il est prévu par la loi, avec l'ensemble des salariés. Sans doute serai-je amené à revenir devant votre commission sur ce sujet.

Monsieur Jérôme Nury, il est vrai que la méthanisation impose un parcours du combattant sur le volet réglementaire, où plusieurs questions se posent. Le régime actuel est déjà celui de l'autorisation unique, mais le groupe de travail comporte un atelier consacré à la question de la réglementation – ne serait-ce qu'en raison de la taille des méthaniseurs, certains étant considérés comme des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), d'autres non. On sait néanmoins qu'il faut plutôt accompagner les petites installations dans l'intérêt des éleveurs et de la profession agricole, comme le confirment l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture, les chambres elles-mêmes et la présidente de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA), que j'ai rencontrée encore hier. Il convient de calibrer les réglementations pour toujours garantir l'acceptabilité locale et sociale des projets – un défi dont je peux témoigner dans l'Eure. En France, 410 méthaniseurs sont en exploitation : pour l'essentiel de la cogénération, minoritairement en injection directe de gaz – ce qui montre qu'il faut accompagner un mouvement d'ensemble tout en garantissant, je le répète, l'acceptabilité locale et sociale de la réglementation sans pour autant amputer le modèle économique. Les méthaniseurs, en effet, présentent non seulement un enjeu réglementaire, mais aussi un enjeu capitalistique. L'investissement initial est très lourd et, souvent, les banques hésitent à accompagner les agriculteurs – entre autres – dans cette voie. C'est là que les outils de soutien public doivent se rencontrer.

S'agissant du digestat, tout dépend de sa qualité ; nous travaillons à sa qualification en lien avec Mme Brune Poirson, car cela relève également de logiques d'économie circulaire. Nous vous associerons volontiers à ces travaux, Monsieur le député.

Je laisserai, Monsieur Antoine Herth, le ministre d'État répondre sur un sujet qui lui est cher : la rénovation thermique. En revanche, les territoires à énergie positive pour la croissance verte sont un dispositif permettant de solliciter l'intelligence territoriale dans les appels à projets qui, incontestablement, a fait ses preuves et qu'il faut mener à son terme – ne serait-ce que parce qu'il faut respecter la parole de l'État. Néanmoins, nous nous sommes heurtés ces derniers mois au problème suivant : les conventions signées et les autorisations d'engagement étaient supérieures aux crédits de paiement effectifs, ce qui a conduit le Parlement à ajouter 75 millions d'euros sur la ligne budgétaire concernée, afin de passer l'année 2018 sans difficulté. Des choses ont été dites et écrites sur ce sujet, parfois avec malhonnêteté, reconnaissons-le ; si certains territoires rencontrent des difficultés, je me tiens naturellement à la disposition des parlementaires pour les lever.

Sur Fessenheim, je suis prêt à revenir m'exprimer devant la commission des affaires économiques et celle du développement durable. Fessenheim n'est, en aucun cas, un modèle à reproduire – six ans d'atermoiements, six ans pendant lesquels les salariés, les élus locaux et même l'entreprise, EDF, n'ont eu de nouvelles de l'évolution de la situation en Alsace et dans cette centrale que par les matinales de radio et les journaux.

Nous allons nous employer à ce que cette centrale devienne précisément un modèle en matière de transition territoriale, au moment même où nous nous emparons du sujet. De nombreux problèmes se présentent : la sous-traitance du générateur de vapeur n° 335, dont nous reparlerons, mais aussi le foncier et la sécurité de l'approvisionnement électrique en Alsace – un sujet récurrent et parfois passionné dont M. Nicolas Hulot, le président de RTE et moi-même nous saisissons. En somme, nous reprendrons toutes ces questions en avril, lorsque je me rendrai en Alsace pour réunir le comité de pilotage.

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Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

S'agissant de méthanisation, nous pouvons nous inspirer de l'Allemagne, où cette technique porte ses fruits. Nous devons aider les agriculteurs à s'associer entre eux car ils ont du mal à agir seuls, et nous devons leur apporter un appui en ingénierie. C'est un besoin que nous avons identifié dans l'accélérateur de la transition écologique d'abord parce que c'est bon pour la transition énergétique mais aussi pour sécuriser les revenus des agriculteurs. Dans ce domaine, il existe à l'évidence une marge de progression.

Je ne reviens pas plus longuement sur les territoires à énergie positive, sauf pour vous dire qu'ils me sont « revenus en pleine figure » pendant très longtemps parce qu'une panique légitime a saisi certains élus qui ont cru avoir engagé des projets qui ne seraient pas honorés. Nous y avons mis toute notre énergie : comme l'a dit M. Sébastien Lecornu sans faire de polémique, la ligne budgétaire n'était pas couverte. Nous avons donc pris un engagement rassurant que nous avons respecté, et nous nous sommes battus pour ajouter 75 millions d'euros aux 400 millions déjà disponibles.

Le tiers financement est évidemment une bonne approche : l'idée est qu'un tiers finance les travaux des ménages ou des propriétaires et se rembourse sur les économies réalisées. Nous devons porter cette pratique à une autre échelle ; c'est l'un des objectifs du plan de rénovation, qui s'inspire d'expérimentations locales réussies. Le tiers financement dans lequel les régions se substituent aux banques est également intéressant. Nous devrons explorer les soutiens possibles – j'aurai prochainement un rendez-vous à cette fin avec la Caisse des dépôts et consignations, qui n'apporte pour l'heure qu'un soutien au cas par cas, notamment en Île-de-France.

EDF peut présenter sa candidature à la mise en concurrence des concessions hydroélectriques ; les concessionnaires sont tous soumis à la réglementation de sécurité contrôlée par les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL). À mon sens, il ne devrait pas y avoir d'incidence significative sur le prix à la consommation, car c'est le prix des marchés qui constitue le véritable facteur d'évolution. Si incidence il y a, elle sera plutôt légèrement à la baisse en raison de la concurrence.

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Brune Poirson, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Il est vrai, Monsieur Benoit Potterie, que, paradoxalement, nos objets du quotidien sont de plus en plus gourmands en matières premières, notamment en ressources directement extraites de la planète. Ainsi, il faut 32 kilogrammes de matières premières pour fabriquer une puce électronique ; le développement de ces objets crée donc une véritable dichotomie à laquelle nous devons répondre. Vous avez vous-même cité des chiffres et un ouvrage qui sont éloquents.

Dans le cadre de la feuille de route sur l'économie circulaire – je remercie à cet égard les députés qui ont contribué à son élaboration et je les encourage à poursuivre leur participation –, nous avons adopté plusieurs approches pour lutter contre l'obsolescence programmée. En amont, tout d'abord, nous voulons encourager l'écoconception. Aujourd'hui, il est déjà possible de moduler l'écocontribution pour les téléphones portables, par exemple, selon des critères d'écoconception. Avec la feuille de route sur l'économie circulaire, nous voulons aller plus loin et renforcer cette modulation afin qu'elle incite les entreprises à écoconcevoir leurs produits. Nous envisageons plusieurs pistes – certaines sont en ligne sur le site internet du ministère – et nous les synthétiserons toutes dans les prochaines semaines.

Ensuite, il faut donner au consommateur les outils lui permettant d'identifier à l'achat la solution la plus durable. Les consommateurs demandent de la transparence et veulent, de plus en plus, savoir ce qu'ils achètent. Il est essentiel que nous les informions, en toute transparence, de la durée de vie des produits ; c'est aussi un enjeu de pouvoir d'achat. Voilà pourquoi nous élaborons un indice de 1 à 10 fondé sur une dizaine de critères précis dont la robustesse, la réparabilité et la durabilité des produits qui sont mis sur le marché. Cet indice sera aisément accessible et figurera, par exemple, à côté de l'étiquette indiquant la consommation énergétique des produits.

En aval, il est également essentiel de redonner au consommateur le réflexe de la réparation et du réemploi, d'abord parce que cela permettra d'augmenter la durée de vie des produits – car 60 % des produits en panne sont jetés ou ne sont pas réparés : si la réparation coûte plus de 30 % du prix final, le consommateur décide généralement de ne pas réparer et préfère jeter l'objet pour en racheter un neuf. Nous voulons donc créer une plateforme qui facilite la mise en relation des consommateurs avec les réparateurs. D'autre part, nous nous employons résolument, avec d'autres ministères, à mettre au point des dispositifs économiques et fiscaux susceptibles d'encourager la réparation et le réemploi. Il y a là un vaste vivier d'emplois. La création d'emplois dans le domaine de l'économie circulaire est potentiellement importante, étant précisé que ces emplois ne sont pas délocalisables. En aval toujours, il faut garantir la disponibilité des pièces détachées pour tous les biens technologiques, y compris les pièces détachées d'occasion. Toutes ces pistes sérieuses que nous explorons sont issues d'une consultation en amont, d'une concertation en cours et d'une consultation en ligne.

Enfin, n'oublions pas la phase de la fin de vie des objets, notamment électroniques, le but étant d'encourager les citoyens à les rapporter afin qu'ils soient valorisés et qu'ils ne soient pas laissés à l'abandon dans les tiroirs. On sait, par exemple, que 88 % des Français décident de changer de téléphone portable alors même que celui qu'ils possèdent est encore en bon état de fonctionnement. À terme, nous proposons par exemple d'expérimenter des dispositifs de reprise de tous les téléphones portables, des équipements informatiques et des téléviseurs.

Ces mesures poursuivent des objectifs de politique industrielle et de création d'emplois, mais elles visent aussi à redonner du pouvoir d'achat aux Français et, surtout, à mieux protéger les ressources de notre planète.

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Nous devons en finir avec les énergies fossiles en développant massivement les énergies renouvelables, mais aussi en privilégiant la mobilité sans émissions de gaz à effet de serre. L'hydrogène pourrait être la pierre angulaire de la révolution énergétique, du point de vue de la production et de la consommation. Chargés d'une mission sur la filière hydrogène, le Conseil général de l'économie et celui de l'environnement et du développement durable ont recommandé d'accorder un soutien politique et une aide à la structuration de la filière. Ils préconisent d'encourager des innovations, de mettre en place des démonstrateurs représentatifs des usages et d'établir des réglementations et des incitations fiscales de nature à favoriser le développement en zone urbaine. Les premiers objectifs viseront donc à lever les freins au développement de l'énergie à hydrogène et des piles à combustible tout en garantissant des niveaux de sécurité adaptés aux différents usages, à appuyer les territoires dans leur stratégie hydrogène – j'ai rendez-vous vendredi sur ce sujet avec le conseil régional de Nouvelle-Aquitaine –, à faciliter le partage des expériences et des bonnes pratiques, à mobiliser les financements associés aux objectifs nationaux et européens et, enfin, à concrétiser le déploiement de la mobilité hydrogène.

Envisagez-vous, Monsieur le ministre d'État, de placer l'hydrogène au même niveau que l'électricité afin d'obtenir un effacement des disparités dans les plans de déploiement ? Quels dispositifs financiers pourraient être mis en place pour soutenir les entreprises qui investissent dans les transports utilisant l'énergie à hydrogène ?

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L'Organisation mondiale du tourisme estime que le tourisme contribue au changement climatique à hauteur d'environ 5 % au niveau mondial. La croissance prévue du secteur du tourisme se traduirait d'ici à 2050 par une augmentation de 154 % de la consommation d'énergie et de 131 % des émissions de gaz à effet de serre – cela correspond à ce que l'on nomme trivialement le « carbone dans les valises ». En parallèle, le Premier ministre a relancé durant l'été le comité interministériel du tourisme en fixant l'objectif ambitieux – dont je me réjouis – de 100 millions de visiteurs en France en 2020, ce qui est un volume certes important, mais qui représente 50 milliards d'euros de recettes supplémentaires et se traduirait par la création de 300 000 emplois nouveaux.

En clair, il est absolument indispensable de trouver un point d'équilibre – c'est toute la difficulté – entre l'impact environnemental et le développement économique lié à l'attractivité touristique de la France. C'est ce que nous nous employons à faire dans la région Sud à plusieurs niveaux. La programmation pluriannuelle de l'énergie comporte-t-elle des projets et propositions, au niveau national, afin de tendre vers un tourisme plus sobre en carbone ?

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Ma première question porte sur le plan de rénovation énergétique des bâtiments. Je me félicite que la rénovation énergétique des bâtiments soit ainsi érigée en priorité nationale. Les passoires thermiques et la précarité énergétique sont de véritables fléaux pour nos concitoyens. Il est indispensable que ce plan contribue à l'évolution des pratiques du secteur du bâtiment et de la construction, en renforçant notamment les compétences et l'innovation. Comment comptez-vous vous assurer que les travaux de rénovation énergétique, dans les bâtiments publics comme dans les logements privés, seront confiés à des entreprises engagées en faveur d'un niveau élevé d'ambition et d'exemplarité en matière d'économies d'énergie ? Ce plan doit prévoir des garde-fous afin que la qualité des travaux soit parfaitement contrôlée. Que prévoyez-vous à ces fins ?

Ma deuxième question a trait à l'Accord économique et commercial global (CETA) entre l'Union européenne et le Canada, et à ses conséquences sur le secteur de l'énergie. Le rapport de la commission d'évaluation de l'impact du CETA, présidée par Mme Katheline Schubert, établit clairement que le climat est le grand absent de l'accord. Malgré l'entrée en vigueur de l'accord de Paris, rien n'est prévu pour limiter la hausse des émissions de dioxyde de carbone du transport international maritime et aérien qui sera induite par l'augmentation des flux de commerce, ni pour inciter à la mise au point et à l'adoption de technologies moins émettrices de carbone. Le plan d'action du Gouvernement relatif au CETA vise à mettre en oeuvre des actions complémentaires au traité avec le Canada, y compris au sein de l'Union européenne, pour renforcer la coopération internationale concernant les enjeux climatiques. Quelles sont ces actions et initiatives concrètes ? Que comptez-vous négocier pour faire converger nos instruments de lutte contre le changement climatique, et pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et l'empreinte carbone des carburants ?

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Je commencerai par évoquer la valorisation énergétique des déchets. Dans le cadre des études que l'État conduit actuellement, la filière des combustibles solides de récupération – les fameux CSR – sera-t-elle qualifiée d'énergie renouvelable ?

Ensuite, les plateformes locales de rénovation énergétique sont un dispositif d'impulsion d'un guichet unique en faveur de la transition énergétique des habitats, avec un accompagnement puissant de l'ADEME, qui arrive au terme d'un programme de trois ans. Quelle est la position du Gouvernement concernant ces plateformes ? L'État continuera-t-il de les accompagner via l'ADEME ?

Aux territoires à énergie positive succèdent désormais les contrats de transition écologique. Quelle est l'ambition réelle de ce programme ? Quel en sera l'interlocuteur local : la région, le département, le pays ou l'intercommunalité ?

Enfin, Monsieur le ministre d'État, vous connaissez le département d'Ille-et-Vilaine. Pleine-Fougères, Antrain, Louvigné-du-désert sont des localités qui se trouvent dans des territoires ruraux. Or, la question de la transition énergétique, comme celle des nouvelles technologies, devrait permettre de corriger les disparités qui existent entre les territoires. Il existe aujourd'hui un grand écart s'agissant de l'accès à l'énergie à des conditions techniques, économiques et financières acceptables, ce qui conditionne la répartition des entreprises dans les territoires. L'Ille-et-Vilaine est un département très industriel ; ma circonscription, autour de Fougères, compte presque 40 % d'emplois industriels. La question se pose de l'accès à l'énergie, notamment pour le gaz naturel ou le gaz provenant de la méthanisation, par exemple. Quelles sont les orientations et la volonté stratégique du Gouvernement en la matière ?

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Ma question, comme celle de M. Jean-Luc Lagleize, porte sur la rénovation énergétique des bâtiments. La France compte actuellement 7 millions de logements mal isolés ; 3,8 millions de ménages sont en situation de précarité énergétique et un Français sur cinq déclare avoir froid dans son logement. Vous avez, Monsieur le ministre d'État, présenté le 24 novembre un plan de rénovation énergétique des bâtiments aux côtés du ministre de la cohésion des territoires, M. Jacques Mézard. Ce plan se structure autour de quatre axes et, surtout, de la nécessité de faire de la rénovation énergétique une priorité nationale. Vous affichez notamment l'objectif de rénovation de 500 000 logements, dont 100 000 dans le parc social ; c'est une question qui touche particulièrement ma circonscription. En attendant la publication prochaine du rapport de notre collègue Marjolaine Meynier-Millefert et du président de Qualibat, Alain Maugard, cet objectif est-il toujours valable ? Qu'en est-il du calendrier ?

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Vous savez, Monsieur le ministre d'État, que l'éolien, qu'il soit terrestre ou flottant, suscite souvent une forte opposition des populations qui le subissent, qui ont des inquiétudes en termes de santé publique mais aussi de protection des paysages et, de facto, de préservation de leur patrimoine. Il y a quelques semaines, nous avons auditionné le président de RTE qui nous a expliqué ceci : la distance entre l'habitation et le mât n'est pas calculée en fonction des nuisances potentielles pour l'habitant, mais en fonction du potentiel d'installation – cinq cents mètres, parce qu'à un kilomètre de distance, aucun mât ne pourrait être installé en France en raison du mitage des habitations. De ce fait, les études avancées pour justifier l'éolien laissent parfois dubitatifs.

Vous parlez de transition énergétique socialement acceptable, Monsieur le ministre d'État. Avez-vous évolué concernant l'implication des associations implantées dans les zones où existent des parcs éoliens, afin de leur reconnaître, en droit ou en fait, le statut d'experts citoyens ? Ce sont en effet leurs membres qui vivent au quotidien dans ces zones éoliennes. Le 18 janvier, vous avez annoncé les conclusions du groupe de travail sur l'éolien. Hélas, elles ignorent le plus souvent la protection des paysages et de l'environnement, voire du patrimoine classé par l'État lui-même.

Un véritable équilibre doit être trouvé entre la politique de protection du patrimoine et celle de l'environnement. Je pense notamment aux parcs éoliens prévus dans certains villages comme Lespignan, près de Béziers, dont certains habitants luttent depuis plus de trente ans pour faire classer en site naturel la basse vallée de l'Aude, et dont les efforts risquent d'être réduits à néant si quelques mâts étaient installés en bordure de leur village.

Je pourrais aussi vous parler de l'éolien flottant. Le journal Der Spiegel estime que les 6 500 éoliennes prévues d'ici à 2020 rejetteront 13 000 tonnes de composés métalliques dans la mer, d'où les inquiétudes des pêcheurs et des consommateurs de produits de la mer.

Pourquoi ne pas privilégier d'autres solutions plus respectueuses des paysages, comme les panneaux photovoltaïques sur les routes ? Certes, cela aurait un coût mais, étant donné la faible productivité d'une éolienne, pourquoi ne pas lancer la France dans un chantier vraiment innovant qui aurait l'immense avantage de ne pas nuire à nos paysages et, du même coup, à notre tourisme, et qui serait socialement acceptable ?

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Nous sommes tous, ici, issus de territoires différents les uns des autres, ce qui fait la richesse et le charme de notre pays. Compte tenu de ces spécificités paysagères, sociales et économiques, la transition énergétique ne peut se développer de façon uniforme sur l'ensemble des territoires. C'est d'ailleurs le constat qu'a fait le groupe de travail « éolien » dans les conclusions qu'il a rendues le 18 janvier. Dans sa proposition n° 7, il met en avant la particularité paysagère – je réponds ainsi à Mme Emannuelle Ménard – et climatique de chaque territoire, et la nécessité de les prendre en compte dans le cadre d'un bilan du potentiel énergétique et afin de favoriser les retombées économiques locales.

Il me semble essentiel de souligner que ces diagnostics, qui doivent être largement partagés, sont des outils incontournables qui doivent dépasser le cadre d'un projet précis et de son phasage. Au contraire, ils devraient constituer un préalable à toute action sur le territoire afin de tenir compte de tous les paramètres locaux et, in fine, d'élaborer des solutions sur mesure et, surtout, en lien avec tous les acteurs concernés et les habitants des territoires.

Sur mon territoire, par exemple, se trouve une centrale nucléaire. La question de la transition énergétique s'y pose évidemment en termes d'énergies renouvelables, mais aussi en termes d'emploi local, de tissu social et économique, et de qualité paysagère. Tous ces enjeux doivent être pris en considération en même temps. Nous devons, certes, accélérer la transition énergétique, mais sans pour autant nous précipiter. Il est de notre responsabilité de faire les bons choix, c'est-à-dire de choisir des projets durables, mais aussi acceptables. C'est pour cela que nous avons besoin d'études territoriales qui soient aussi complètes et objectives que possible.

Comment le Gouvernement, en lien avec tous les acteurs de terrain et les collectivités locales, peut-il accompagner la mise en oeuvre de diagnostics territoriaux qui permettront le développement de projets efficients et surtout cohérents dans les territoires ?

Enfin, vous êtes tous les bienvenus en Haute-Gironde, à la centrale du Blayais, où nous pourrons échanger sur la nécessaire mixité et sur la transition énergétique !

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Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

J'ai évoqué l'acceptabilité, mais gardons-nous de retomber dans l'excès. Nous sommes pris entre deux feux : d'une part, celui de l'acceptabilité des éoliennes et autres panneaux solaires pour les citoyens et, d'autre part, celui – que l'on perd parfois de vue – de l'urgence. Il faut raccourcir les délais. J'espère, par exemple, que le « permis enveloppe » pour l'éolien en mer permettra de gagner du temps, notamment parce que la zone et le projet auront été définis dès la phase de l'appel d'offres.

Fidèles à notre caractère gaulois, néanmoins, nous sommes souvent prompts à refuser tout ce qui s'introduit dans notre champ visuel. Il faut donc faire de la pédagogie. Il a manqué à l'éolien, par exemple, une vision partagée à l'échelle nationale. Ce secteur s'est d'abord développé en dépit du bon sens, parce que personne n'y croyait vraiment et parce que la motivation était économique plus qu'énergétique. On proposait ainsi un revenu supplémentaire aux collectivités territoriales, ce qui a conduit à miter le paysage.

Nous ne ferons pas que de l'éolien, mais pas non plus que du solaire. Il faudra un mix – c'est le cas de le dire. En outre, les technologies ne sont pas toutes au même stade de développement, qu'il s'agisse de l'hydrogène, des hydroliennes ou de l'éolien flottant. Toutes ces technologies promettent de contribuer au mix énergétique mais ne sont pas toutes aussi développées. Dans le cas des éoliennes flottantes, par exemple, qui sont plus acceptables socialement parce qu'elles sont au large, il faut encore attendre pour vérifier que le cahier des charges est respecté ; il s'agit tout de même de mâts de cent-vingt mètres de hauteur qui ne sont pas posés sur un fond solide.

Quoi qu'il en soit, si nous voulons réussir la transition énergétique et respecter nos obligations climatiques, il faudra aussi y mettre de la bonne volonté et faire de la pédagogie. Pour les projets qui ne sont pas encore validés, il faudra revitaliser la démocratie participative et élaborative en amont. C'est un exercice difficile : nous sommes en retard par rapport à nos objectifs, et nous sommes face à une sacrée urgence climatique. Les partisans du nucléaire diront qu'il faut y répondre par le nucléaire ; nous conviendrons tous qu'il faut une combinaison d'énergies.

À ce stade, Monsieur Michel Delpon, nous ne sommes pas en mesure de consacrer aux bornes hydrogène des moyens équivalents à ceux des bornes électriques, même si ce sera peut-être le cas plus tard. Je place beaucoup d'espoir dans les flottes de camions et de véhicules municipaux. La ville de Pau, par exemple, vient d'acheter des bus à hydrogène. Comme les Allemands, je place également beaucoup d'espoir dans les trains à hydrogène, qui ont l'avantage de ne pas nécessiter l'électrification du réseau. Autre espoir : l'utilisation de l'hydrogène dans le domaine du stockage. J'y place tant d'espoir que j'ai confié une mission à la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) et au Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) afin de proposer une stratégie et des mesures d'accompagnement visant à déployer cette filière qui, à terme, jouera un rôle très important, y compris en termes de mobilité. Les centres de recherche et les acteurs industriels les plus importants – comme Air Liquide, mais pas seulement – ont de quoi structurer la filière ; nous nous y employons.

J'en viens à la rénovation énergétique des bâtiments. Je confirme les chiffres : 7 à 8 millions de logements peuvent être qualifiés de « passoires thermiques » – c'est dire si nous avons du travail ! C'est un secteur qui recèle un potentiel d'emplois et d'activité économique. Environ 3,8 millions de ménages très modestes vivent dans ces « passoires thermiques », dont 1,5 million sont propriétaires de leur logement et 500 000 résident dans le parc social.

Le plan de rénovation qui est en phase de consultation jusqu'à la mi-février s'inscrit dans le cadre d'une feuille de route pour le quinquennat, et même au-delà.

Publié le 24 novembre 2017, le projet de cette feuille de route a fait l'objet d'une concertation avec tous les acteurs : les collectivités territoriales, les professionnels de la rénovation, de l'immobilier, du secteur énergétique… La feuille de route sera finalisée courant mars. Les deux coordinateurs et animateurs de cette finalisation sont Mme Marjolaine Meynier-Millefert, députée de l'Isère, et M. Alain Maugard, président de Qualibat. Ils seront en charge de sa mise en oeuvre.

Quant à l'objectif climat, les bâtiments du secteur résidentiel et du secteur tertiaire, représentant 45 % de la consommation d'énergie et 25 % des émissions de gaz à effet de serre, constituent une priorité majeure de la transition écologique. À l'échelle du quinquennat, nous nous sommes fixés pour objectif de faire baisser de 15 %, par rapport à 2010, la consommation d'énergie dans le secteur. Il s'agit en effet d'être cohérent avec les objectifs que je m'étais fixé moi-même dans le plan climat.

Quant à la précarité énergétique, le plan assigne un objectif spécifique de lutte contre celle-ci, en prévoyant qu'au moins la moitié du demi-million de rénovations de logements attendues concernent les ménages modestes, soit 250 000 ménages par an. Auprès des propriétaires occupants, l'objectif de rénovation est fixé à 150 000 par an, pour qu'ils cessent d'être prisonniers ou victimes de la précarité énergétique. Ainsi, l'ensemble des passoires thermiques serait rénové en dix ans.

Pour atteindre nos objectifs annuels, nous proposons de massifier les gestes efficaces. Nous les avons bien identifiés, car des idées reçues circulent parfois sur ce qui est le plus efficace. J'en avais moi-même beaucoup, car je considérais que le double vitrage était la solution la plus efficace de toutes ; or ce n'est pas toujours vrai, tant du point de vue du rendement énergétique que du rendement économique. Essayons donc que chaque euro investi soit le mieux utilisé.

Pour faciliter cette massification, des actions d'ampleur sont prévues. Des aides de financement et des incitations plus mobilisatrices rendront plus simple le parcours de rénovation des ménages. Les ménages modestes doivent en être les premiers bénéficiaires. Ainsi, le crédit d'impôt pour la transition énergétique sera transformé en prime, ce qui ne supposera plus d'avoir la possibilité d'avancer les fonds. Cela permettra probablement de toucher beaucoup plus de personnes.

Une extraordinaire simplification de l'éco-prêt est aussi en cours, qui doit rendre plus aisé, pour les ménages modestes, le financement du reste à charge. Voilà un nouveau frein important qui disparaît ainsi. D'autres pistes sont également à l'étude, notamment celle d'inciter les propriétaires bailleurs vis-à-vis de leurs locataires, en accompagnant mieux le cas particulier, mainte fois évoqué, des copropriétés et en mettant mieux à profit les moments clés de la vie du logement, à commencer par le changement de locataire. Il faut, à cet égard, insister sur la valeur patrimoniale de la rénovation énergétique. Une fois effectuée, elle peut accroître, en effet, la valeur patrimoniale du logement.

Sur le contrôle de la qualité des travaux, permettez-moi de vous répondre plutôt par écrit, si vous en êtes d'accord.

Quant au tourisme, le sujet montre bien que nous ne mettons pas encore notre action en cohérence avec ce qu'implique la feuille de route induite par l'accord de Paris sur le climat. Dans la controverse relative au projet d'aéroport à Notre-Dame-des-Landes, la question de l'augmentation du trafic aérien n'a pas été posée. C'est un sujet presque tabou, tout comme celui de l'augmentation des flux des voyageurs du fait de la croissance exponentielle du tourisme. Il ne faut certes pas exonérer les transports maritime et aérien de leurs propres contributions – grâce aux avancées technologiques, des efforts ont déjà été faits dans ce sens, d'ailleurs sans doute davantage dans le domaine aérien que dans le domaine maritime. Mais la question se pose de manière plus large. La notion de tourisme durable ne saurait en effet rester une notion abstraite.

De même, il faut garder à l'esprit que le CETA, le Mercosur et les traités de libre-échange de nouvelle génération ne sont pas, en l'état, climato-compatibles. Mais je pourrais aussi évoquer les inquiétudes légitimes de nos agriculteurs sur ces deux premiers traités. Nous ne serions donc pas opposés à une transformation de ces traités de libre-échange en traités de juste échange. Au demeurant, « la messe n'est pas encore dite », ni dans un cas, ni dans l'autre.

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Brune Poirson, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Le CETA ne prenait, initialement, pas suffisamment en compte les aspects liés au développement durable et au changement climatique. Les négociations qui ont abouti à ce traité ont en effet commencé il y a quasiment une dizaine d'années, à une époque où le gouvernement canadien était notoirement climato-sceptique.

À l'issue des travaux de la mission d'experts diligentée par le Premier ministre, le Gouvernement a adopté, en octobre 2017, à la suite d'une large concertation menée par M. Jean-Baptiste Lemoyne et moi-même, un plan d'action visant à répondre aux besoins de transparence et d'exigence environnementales dans la mise en oeuvre du CETA et, à terme, des autres traités de libre-échange.

Dans le cadre de ce plan d'action relatif au CETA, un laboratoire de recherche a premièrement été chargé de mesurer l'empreinte carbone de ce traité ; sa méthodologie pourra être reprise pour d'autres futurs traités de libre-échange.

Deuxièmement, nous avons aussi agi en faveur de la reconnaissance d'un « veto climatique », qui protège un État souhaitant adopter une réglementation luttant contre le changement climatique, telle que l'interdiction française d'exploitation des hydrocarbures sur notre territoire d'ici à 2040 ; il faut éviter qu'une telle démarche puisse être contestée par des investisseurs.

Nous avons sollicité en ce sens la commissaire européenne au commerce, car le CETA est d'abord un accord entre le Canada et l'Union européenne. En décembre dernier, elle s'est déclarée d'accord pour travailler à la mise en place d'un tel veto. C'est une avancée importante. Mesure portée par la France et éventuellement reprise au niveau européen, ce veto climatique prendrait la forme d'une déclaration juridique interprétative adossée à cette partie du CETA qui est consacrée aux investissements.

Nos services travaillent à l'application concrète du mécanisme. Il ne suffit pas, en effet, de se fixer des objectifs ; nous nous interrogeons aussi, au Gouvernement, sur la manière de les mettre en oeuvre. Nous voulons ainsi proposer une interprétation conjointe et juridiquement contraignante qui garantisse la préservation du droit des États à réguler, notamment en matière climatique. Nous allons présenter ce projet à la Commission européenne. Il sera ensuite discuté, avec le Canada, dans le cadre du comité sectoriel des services à l'investissement, partie intégrante du CETA. Ce travail aura lieu à partir de la fin mars.

Troisièmement, ce plan d'action contient l'engagement d'adopter des mesures en faveur du changement climatique, en parallèle de nos travaux conduits dans le cadre du CETA, en coopération directe avec le Canada. Des négociations bilatérales s'achèvent ainsi sur un accord de partenariat entre la France et le Canada. Saluons l'action du ministre d'État Nicolas Hulot en ce domaine. Comme vous le savez peut-être, M. Justin Trudeau, le premier ministre canadien, sera en visite en Europe en avril. Sa visite devrait permettre de rendre plus concrets ces travaux bilatéraux franco-canadiens sur les questions climatiques.

Au total, le plan d'action s'articule autour de sept thèmes. Permettez-moi de vous présenter rapidement les quatre derniers.

Le quatrième prévoit la réduction des émissions du transport aérien et maritime. L'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) travaille déjà à l'étude d'une fiscalité carbone dans le transport aérien, qui pourrait avoir des prolongements opérationnels dès 2020.

Le cinquième couvre des mesures de tarification des émissions de dioxyde de carbone, leur réduction dans le secteur agricole et sylvicole, le développement de la finance verte et les efforts conjoints en matière de recherche et d'innovation.

Le sixième traite des subventions aux énergies fossiles. À l'occasion du One Planet Summit, les autorités canadiennes ont accepté notre proposition de travailler à une revue par les pairs des subventions aux énergies fossiles. Ses modalités devraient être adoptées à la réunion du groupe « énergie » du G20 prévue les 22 et 23 février prochains.

Le dernier thème, la révision de la directive sur la qualité des carburants, que nous appelons tous de nos voeux, sera un point à l'ordre du jour de la prochaine réunion entre le ministre d'État et le vice-président de la Commission européenne en charge des questions commerciales, le 19 février.

L'un des objectifs sera de mettre en place une méthodologie de calcul des émissions d'hydrocarbures qui soit rigoureuse, comme cela est prévu dans la loi visant à interdire l'exploitation des hydrocarbures d'ici à 2040.

Vous voyez donc que nous suivons de très près la mise en place de ce plan d'action. Fruit d'un travail interministériel, il a été mis à l'agenda européen, mais fait aussi l'objet d'échanges bilatéraux avec le Canada. Nous voulons en effet continuer à travailler en toute transparence sur la question.

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Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

À Madame Emmanuelle Ménard, j'aurais voulu dire que la consultation, pour importante qu'elle soit, ne doit pas non plus être un prétexte à refuser tout. Prenons l'exemple des tuiles solaires, qui commencent à bien s'intégrer dans le paysage. Certes, notre ministère est en charge de la protection de ce dernier, mais il y a aussi une part de subjectivité dans l'appréciation de chacun : l'un trouvera les éoliennes très laides, tandis que l'autre les trouvera très belles…

S'agissant de l'accès au réseau de gaz naturel, il est vrai qu'il n'est pas toujours disponible, car le gaz naturel n'est pas rentable partout. Mais la méthanisation peut alimenter, dans certains cas, des consommateurs locaux. Par exemple, elle sert déjà à chauffer des serres.

Enfin, le contrôle de la qualité des travaux est d'abord une question de formation ; il convient d'améliorer celle-ci et de renforcer le label « reconnu garant de l'environnement ». Il faut, en outre, renforcer la fiabilité du diagnostic de performance énergétique des bâtiments. Plus de contrôles sont aussi nécessaires, tant a priori qu'a posteriori.

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Sébastien Lecornu, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Je regrette quant à moi des inexactitudes importantes dans l'intervention de Mme Emmanuelle Ménard. Comme l'a rappelé le ministre d'État, la préservation des paysages fait partie des attributions du ministère chargé de l'environnement, tandis que la préservation du patrimoine fait partie des attributions du ministère de la culture. À aucun moment, dans les conclusions du groupe de travail en charge de l'éolien, nous n'avons fait sauter les verrous de protection que constituent les avis conformes de l'architecte des bâtiments de France (ABF) ou les restrictions sur les sites sensibles. Dans ces derniers, il n'y aura demain pas plus d'éoliennes qu'il n'y en a aujourd'hui.

Des courants politiques font circuler beaucoup de rumeurs sur les réseaux sociaux et sur internet, pour reprocher à la majorité parlementaire et au Gouvernement d'avoir agi n'importe comment sur le sujet. Mais ce n'est pas exact ! Permettez-moi de vous rappeler que pour de grandes procédures, telles que le classement d'un site au patrimoine de l'UNESCO, ce sont les deux ministres, de l'environnement et de la culture, qui exercent conjointement leurs compétences. Il n'est donc nullement question d'agir en dépit du bon sens au sujet des paysages.

Depuis longtemps, beaucoup d'associations réclament l'instauration d'un médiateur national pour l'éolien. Comme parlementaires, vous en savez certainement quelque chose, puisque, dans le cadre de l'exercice de vos fonctions, vous n'êtes pas les derniers à nous saisir de cas particuliers dans vos circonscriptions, soit pour soutenir un projet, soit pour vous y opposer – il arrive même que les élus locaux s'y affrontent sur la question. Il est donc sain que le travail de médiation ne soit conduit ni par le ministre, ni par le préfet.

Monsieur Thierry Benoit, s'agissant des contrats de transition écologique, je pense que le niveau de contractualisation doit être à la fois suffisamment proche du territoire pour être efficace et suffisamment élevé pour donner une réelle capacité d'action dans la maîtrise d'ouvrage. Le recours aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) est satisfaisant mais sans exclure ni la commune, ni le département, compétent pour les espaces naturels, ni la région, compétente pour l'éco-mobilité.

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Brune Poirson, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

J'en viens à la question de savoir si les combustibles solides de récupération peuvent être potentiellement considérés comme des énergies renouvelables. Il faut d'abord rappeler qu'il faut avant tout moins de déchets, en encourageant parallèlement le recyclage. Certes, la question des combustibles solides de récupération va être étudiée, mais gardons bien à l'esprit que ne sont qualifiés d'énergies renouvelables que les combustibles à base de biomasse, non ceux qui sont, par exemple, issus des plastiques.

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La question des bornes de recharge des voitures électriques se pose avec une acuité croissante, car ces voitures, ne représentant aujourd'hui qu'1 % du marché, vont connaître une forte expansion. J'ai récemment visité l'usine Renault de Cléon, près de Rouen. Elle a produit en 2017 non moins de 45 000 moteurs de véhicules électriques et prévoit de doubler sa production cette année, avant de la multiplier par cinq dans les années à venir.

Mais qu'en est-il des bornes de recharge dont ces véhicules auront besoin ? Dans cette usine, on craint que le réseau de ces bornes ne soit pas suffisamment développé. Il est prévu d'en déployer 100 000 en 2020, et sept millions en 2030 : cet objectif est-il accessible et réalisable ? Aujourd'hui, elles ne sont que 20 000…

Aujourd'hui, cependant, différents réseaux de bornes ne sont pas toujours compatibles entre eux. L'utilisateur du réseau de bornes de recharge de Rouen ne peut pas forcément utiliser le réseau de La Rochelle, car il lui faut pour cela une carte spéciale.

Enfin, le droit à la prise n'est pas suffisamment garanti, en particulier dans les copropriétés. Nous devons adopter des mesures législatives pour changer cette situation. En est-il qui soient déjà prévues ?

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Ma première question portera sur l'eau. Le Président de la République a lancé des Assises de l'eau qui seront, j'imagine, organisées par votre ministère, Monsieur le ministre d'État. Nous nous dirigeons cependant vers une impasse, sous l'angle des investissements économiques, si des dispositions prévues par la loi de finances pour 2018, qui affecteront les agences de l'eau également en 2019, sont maintenues.

Ma deuxième question portera sur la qualité de l'air. Vous en avez fait, dès votre prise de fonctions, une priorité. Demain, vous recevrez les représentants des treize zones concernées par le contentieux européen en cours. Sur ce front, votre combat doit, à mon sens, ne pas s'arrêter à la porte de votre ministère, mais revêtir une dimension interministérielle, pour éviter que des décisions soient prises, dans tel ou tel secteur, qui affectent négativement la qualité de l'air dans ces treize zones.

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À moins de deux semaines du salon de l'agriculture, voici les thèmes qui me préoccupent : la viande bovine, dont des importations massives sont prévues dans le cadre de notre accord avec le Mercosur, alors qu'on connaît l'empreinte carbone de la viande rouge, a fortiori si elle a de surcroît traversé l'Atlantique ; les oléagineux, les OGM et les sojas produits en Amérique du Sud, arrosés au glyphosate et qui arrivent massivement en France pour nourrir le bétail ; la réduction massive et souhaitée des phytosanitaires en France – sur ce dernier sujet, une mission d'information parlementaire est en cours. Il faut en effet trouver des alternatives : agriculture de précision, conservation des sols…

S'agissant de la viticulture bio, que pensez-vous de l'utilisation du soufre et du cuivre ? Quels sont les impacts sur le sol et sur l'eau ? Quant à l'abandon du glyphosate, il entraîne la multiplication des labours, ce qui n'est pas énergétiquement souhaitable. Enfin, que pensez-vous de l'importation massive des produits bio d'un continent à l'autre ?

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Votre action ministérielle me paraît marquée, à court terme, par la recherche du compromis et, à long terme, par celle d'une réelle cohérence.

Madame la secrétaire d'État, l'article 70 de la loi relative à la transition énergétique prévoyait explicitement l'expérimentation de la mention de la durée de vie des produits sur des segments de marché où la France était compétitive. Loin des grands projets, ne pourrait-on simplement passer ici à la mise en oeuvre ?

Monsieur le secrétaire d'État, les couloirs de défense aérienne constituent de légitimes obstacles à l'installation d'éoliennes. Il semble cependant que nous pourrions trouver avec nos armées des solutions innovantes pour ouvrir des champs qui ne tombent pas sous le coup de la protection des espaces naturels et des paysages. Est-ce que vous y travaillez ?

Monsieur le ministre d'État, à plus long terme, une loi relative à un plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises (PACTE) est en préparation : des syndicats, des ONG, des laboratoires d'idées (think-tanks) tels que Terra Nova ou la fondation Jean Jaurès, y réfléchissent, tout comme le groupe Nouvelle Gauche, qui a déposé une proposition de loi sur les entreprises. Vous vous êtes prononcé clairement en faveur d'une vraie révision du code civil pour consacrer la responsabilité sociale et environnementale de l'entreprise : allez-vous, au sein de la majorité, poursuivre ce combat ?

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En Haute-Saône, notre syndicat mixte à vocation unique pour le transfert, l'élimination, la valorisation des déchets ménagers (SYTEVOM), est très actif dans le domaine de l'économie circulaire – nous attendons d'ailleurs la visite de Madame la secrétaire d'État. Il nous tarde de vous le faire visiter, avec ses 120 emplois à la clé, et, par exemple, son projet « tomates ».

Monsieur Nicolas Hulot, vous connaissez déjà, je crois, la ville d'Ungersheim. Je vibre d'un ardent enthousiasme pour tout ce qu'y fait M. Jean-Claude Mensch depuis vingt ans, en matière de transition écologique. Comment peut-on aider des projets de ce type qui peuvent, à mon sens, apporter beaucoup d'éléments positifs à nos territoires ruraux ?

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Mon intervention portera sur le même sujet que celle de mon collègue Benoit Potterie, à savoir les technologies vertes, qui ne le sont peut-être pas tant que cela. Elles représentent sans doute la face cachée de la transition énergétique.

Leur impact écologique serait considérable, pour un bilan plutôt accablant. L'économie digitale fait usage d'une quantité considérable de métaux, de sorte que certains experts soutiennent que la prétendue marche heureuse vers l'ère de la dématérialisation ne serait qu'une vaste tromperie, puisqu'elle génère en réalité un impact nuisible toujours plus considérable.

Voici quelques exemples. Ainsi, en une heure, dix milliards de mails sont échangés dans le monde. Cela représente 50 gigawattsheure, soit l'équivalent de la production électrique de quinze centrales nucléaires pendant sept heures. Deuxième exemple : en matière de transition énergétique, la croissance du marché des éoliennes d'ici à 2050 nécessitera 3 200 millions de tonnes d'acier, 300 millions de tonnes d'aluminium, 40 millions de tonnes de cuivre… Nous aurons aussi de plus en plus besoin des terres rares pour le développement numérique.

Or l'exploitation de ces minerais est rien moins que propre ; elle nécessite des procédés très polluants. Ne croyez-vous pas, monsieur le ministre d'État, que la transition énergétique et numérique dévastera l'environnement dans des proportions inégalées ? Les impacts environnementaux ne seront-ils pas plus importants encore que ceux qui sont générés par l'extraction pétrolière ?

Pour nous affranchir de notre appétit de pétrole et de charbon, ne croyez-vous pas que nous sommes en train de leur substituer un monde nouveau de pénurie, de tensions et de crises inattendues ?

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Madame la ministre, vous avez récemment réaffirmé l'objectif du Gouvernement de recycler 100 % des plastiques en 2025. Selon un article des Échos publié le 11 janvier dernier, la France se classe cependant avant-dernière des 28 pays européens en matière de recyclage des emballages plastiques. C'est dans ce cadre que vous avez annoncé que le Gouvernement envisageait le rétablissement d'une consigne pour les bouteilles et les canettes, afin d'inciter les consommateurs à recycler leurs emballages. Il est vrai que cette mesure, mise en place dans d'autres pays européens, tels que l'Allemagne, la Belgique, le Danemark, a fait ses preuves.

Cependant, identifiez-vous certains freins, certains blocages qui pourraient survenir à la suite de la mise en place de cette mesure et, dans ce cas, quels moyens pourraient être mis en oeuvre afin de les surmonter ? Quelles sont vos pistes de réflexion sur le maillage territorial des machines ? Avec quels acteurs allez-vous engager le dialogue : grandes et moyennes surfaces, commerces de proximité, etc. ?

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Le Gouvernement est confronté depuis six mois aux contraintes du monde réel, qui mettent à mal certains idéaux doctrinaires.

Au sujet du glyphosate, chacun sait les efforts considérables fournis par nos agriculteurs, afin de mettre en oeuvre une gestion responsable et de réduire autant que possible les quantités utilisées, car ils sont soucieux de leur propre santé comme de la qualité de leurs produits. La France a fait le choix d'être largement moins-disante et plus contraignante que l'Union européenne en matière d'interdiction du glyphosate, ce qui m'inspire plusieurs questions.

Comment garantit-on que les substituts du glyphosate, qui vont en grande partie provenir de l'étranger, ne seront pas plus nocifs et plus polluants que le produit qu'ils vont remplacer ? Sur quelles études s'appuie-t-on aujourd'hui pour qualifier le glyphosate de produit nocif et quantifier ses effets néfastes, étant précisé que circulent à ce sujet des informations contradictoires ? Enfin, quelles garanties a-t-on que le remplacement du glyphosate ne va pas nuire à la compétitivité de notre agriculture ?

Le deuxième sujet que je souhaite aborder est celui de la méthanisation, qui donne lieu à un grand nombre de projets sur notre territoire. Sur le plan administratif, ces projets nécessitent l'élaboration de dossiers complexes et très longs à monter. S'ils créent des emplois et contribuent, dans le cadre de la transition énergétique, à permettre l'autonomie énergétique de nos territoires, ils suscitent également des craintes au sein de la population au sujet des odeurs et de la dangerosité des installations – le stockage de gaz faisant craindre des risques d'explosion. Votre ministère soutient et finance la plupart de ces projets : d'après vous, la législation actuelle offre-t-elle des garanties suffisantes en termes de sécurité et de salubrité pour les habitations environnantes ?

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Monsieur Sébastien Lecornu, depuis notre dernière rencontre, datant du 16 novembre dernier, au cours de laquelle nous avions parlé des contrats de transition écologique (CTE), les choses n'ont que très peu avancé.

Je crois beaucoup à ce dispositif, qui peut constituer une réelle solution pour éviter aux territoires comme le mien, celui de Cordemais, de subir négativement la fin de l'ère du charbon, et pour leur permettre de commencer à penser à l'avenir. J'y crois d'autant plus, Monsieur le secrétaire d'État, que sur le plan local, les élus, les agents, les chambres consulaires, ne me parlent que de cela. Vous conviendrez cependant que nous n'avons pas de vision claire de ces contrats. Beaucoup s'inquiètent déjà de savoir quels moyens seront alloués aux projets et comment ils le seront.

On ne créera pas de synergies dans l'écosystème économique local sans un cadre défini et sans l'assurance que vous serez là pour soutenir les initiatives. Alors, Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous préciser le contenu de ces CTE, les moyens qui leur seront alloués, et surtout comment vous comptez soutenir et valoriser les territoires les plus engagés sur ce terrain ?

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Sébastien Lecornu, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

M. Damien Adam m'a interrogé au sujet des bornes de recharge des véhicules électriques. Mon expérience d'élu local me permet de dire que jamais le déploiement des prises n'a été aussi rapide qu'il l'est actuellement – ce que l'on doit aux collectivités territoriales, mais aussi aux syndicats d'électricité, y compris en milieu rural. Pour ce qui est des objectifs que nous nous sommes fixés, je suis optimiste quant au fait que nous puissions les atteindre.

Monsieur Martial Saddier, je suis heureux de vous retrouver pour parler de l'eau. Nous allons d'ailleurs passer ensemble le semestre qui vient puisque, comme vous le savez, le chef de l'État a annoncé, lors du congrès de l'Association des maires de France (AMF), la tenue prochaine des Assises de l'eau. En termes de gouvernance, c'est complexe et très technique, c'est pourquoi il convient, en début de quinquennat, de se poser les bonnes questions sur l'investissement dans l'eau, en partant des attentes et des besoins du consommateur et en remontant ensuite la filière pour répondre à tous les problèmes qui se posent en matière de distribution, de traitement, de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations (GEMAPI), de petit et de grand cycle de l'eau. J'ai déjà eu l'occasion d'échanger avec vous à plusieurs reprises au sujet des agences de l'eau et de leur financement, notamment dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances et à l'occasion d'une question au Gouvernement.

Notre projet consiste à organiser des Assises de l'eau qui pourraient se tenir à l'horizon du mois de mai. En amont, nous réunirons des groupes de travail qui travailleront selon la même méthodologie que celle utilisée pour les énergies renouvelables et associeront l'ensemble des parties prenantes, à savoir le monde agricole, l'Agence française pour la biodiversité (AFB), les associations et les agences de l'eau. Ces groupes effectueront des déplacements sur le terrain, et je serai ravi de vous rencontrer dans ce cadre, puisque vous êtes désormais président du comité de bassin Rhône-Méditerranée. J'espère que nous aurons l'occasion de traiter des questions relatives à l'eau d'une manière technique et moins politique, car elles sont extrêmement complexes, même pour les spécialistes, et nécessitent d'être examinées avec objectivité afin de les rendre aussi transparentes et intelligibles que possible à nos concitoyens.

S'agissant des éoliennes, de la défense aérienne et de l'aviation civile en général, Monsieur Dominique Potier, les conclusions du groupe de travail sur l'éolien font apparaître un certain nombre d'avancées que l'on peut juger soit significatives, soit insuffisantes, selon le point de vue que l'on adopte. Aujourd'hui, le balisage lumineux des éoliennes est conditionné par les règles de l'aviation civile et les règles d'emploi de l'armée de l'air. De nombreuses zones de notre pays se trouvent « vitrifiées », c'est-à-dire que le développement de l'éolien y est impossible, que l'on se trouve dans le périmètre d'une base aérienne, dans celui d'un radar ou dans celui d'une zone d'entraînement de l'armée de terre. Un dialogue constructif avec le ministère des armées nous a permis d'obtenir une avancée majeure, partant du principe qu'il convient désormais d'examiner les situations au cas par cas, plutôt que de considérer qu'une zone est « vitrifiée » dans sa globalité. Cela va se faire à l'aide de logiciels permettant, lors de chaque dépôt de projet de construction d'un parc éolien, de procéder à une évaluation in concreto de l'impact que la réalisation du projet pourrait avoir en matière de défense aérienne, d'aviation civile et d'emploi des armées. Ce dossier va nécessiter un suivi, mais nous ne pouvons que nous féliciter de constater que la transition énergétique est en train de faire changer les choses dans un domaine, celui des incidences sur les armées, jusqu'alors très figé – nous aurons l'occasion d'en reparler en matière d'utilisation du foncier militaire, notamment pour ce qui est de la mise en oeuvre d'installations photovoltaïques ou de méthanisation, où les armées disposent de l'opportunité de générer des recettes pour elles-mêmes.

Vous m'avez interrogé, Monsieur Fabien Di Filippo, sur la sécurité des installations de méthanisation. Sans reprendre tout ce que j'ai déjà dit à ce propos, je note que le sujet suscite des questionnements très divers : alors que M. Jérôme Nury m'a interrogé, il y a quelques instants, sur la possibilité d'assouplir les normes ainsi que sur la nécessité d'aller plus vite et de revoir éventuellement la classification des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), de votre côté, vous vous posez des questions très légitimes sur la sécurité des méthaniseurs. Le caractère apparemment contradictoire de ces préoccupations montre à quel point il est justifié que le groupe de travail mis en place soit équilibré dans sa composition – je rappelle qu'il comprend des distributeurs, des porteurs de projet, ainsi que des représentants de GrDF, des services de l'État et du monde agricole –, afin d'être à même d'apporter des réponses aux attentes et aux questions de chacun. Cela dit, un méthaniseur reste une installation gazière…

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C'est bien pourquoi je souhaite savoir si vous estimez que la législation offre des garanties en termes de sécurité.

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Sébastien Lecornu, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Sur ce point, je vous renvoie à ce qui a été dit précédemment au cours de notre réunion, Monsieur le député. Le groupe de travail sera saisi de cette question, et je me tiens à votre disposition pour vous fournir les explications complémentaires que vous pourriez souhaiter.

Pour ce qui est des contrats de transition écologique, Madame Anne-France Brunet, j'ai également déjà exposé les raisons pour lesquelles les choses ont peu avancé. Je ne sais pas si vous êtes particulièrement pressée de fermer la centrale à charbon de votre territoire, mais le fait est qu'on ne peut le faire n'importe comment : c'est pourquoi la mission interministérielle de réflexion sur le devenir des centrales à charbon est chargée de nous indiquer les pistes à suivre sur la meilleure manière de procéder, notamment vis-à-vis de l'opérateur. S'agissant des négociations de contrats, j'insiste sur le fait que nous sommes en train d'inventer quelque chose de tout nouveau, et qu'il ne faut pas confondre vitesse et précipitation. Si nous avons choisi de négocier les premiers contrats de transition écologique dans la communauté urbaine d'Arras et en Corrèze, c'est justement parce qu'il n'y a pas de centrale à charbon sur ces territoires, et qu'il est donc plus facile d'y créer un modèle, sur la base duquel nous pourrons ensuite entamer des discussions à l'échelle du territoire.

Je comprends votre inquiétude mais je tiens à vous rassurer : j'aurai l'occasion de réunir l'ensemble des parlementaires et des élus des quatre territoires « à charbon », qui correspondent d'ailleurs à quatre situations différentes. Trois des centrales à charbon s'adossent à un port où l'on décharge du charbon – ce n'est pas le cas de celle de Saint-Avold, située en Moselle –, et deux centrales seulement sont exploitées par EDF : comme on le voit, les dossiers sont complexes, et bien distincts les uns des autres. M. le ministre d'État a tenu à intégrer de la prévisibilité et de la sincérité dans le plan climat en indiquant que les centrales à charbon fermeraient durant le quinquennat, mais ce n'est pas parce que nous avons voulu faire preuve de clarté et d'honnêteté que nous devons maintenant agir dans la précipitation et faire n'importe quoi.

Je vous le répète, je comprends les impatiences qui peuvent s'exprimer sur le territoire, mais il y aura un contrat de transition écologique et je serai à vos côtés pour vous aider à obtenir qu'il soit le plus performant possible. Pour cela, je suis preneur de toutes les propositions qui peuvent remonter des collectivités territoriales, car en la matière ce n'est pas l'État qui va imposer tel ou tel projet de manière autoritaire : les territoires ont, eux aussi, vocation à nourrir la réflexion. Pour ce qui est des territoires comportant une centrale à charbon, le projet est conçu en partant de la fermeture de la centrale et de ses implications : on pourrait faire un projet territorial ignorant complètement cette question, mais vous conviendrez que ce serait dommage.

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Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Ne m'en veuillez pas si j'oublie de répondre à quelques questions. Si tel est le cas, nous vous transmettrons une réponse par écrit.

Le glyphosate est presque un symbole. Ce que nous réussirons ou pas sur ce produit conditionne la rationalité et la détermination sur d'autres molécules.

On est passé d'une perspective qui ne semblait pas chagriner grand monde – une nouvelle autorisation par l'Europe du glyphosate pour dix ou quinze ans sans autre prescription – à une autorisation pour cinq ans assortie de conditions afin d'essayer de mettre en phase les moyens de recherche et de méthodologie pour confirmer la dangerosité et surtout étudier les alternatives. C'est de l'intelligence et de la stratégie. Si l'on s'en était tenu à la première option, la seule chose que l'on aurait obtenue pendant ces dix ou quinze ans, c'est une liste funeste de victimes.

Nous avons inscrit dans notre Constitution le principe de précaution dont on n'a pas abusé, contrairement à ce que certains prétendent. Auparavant, on en savait moins que maintenant pour réagir face à certains scandales. L'histoire et la justice ne seront pas amnésiques. Il est donc de notre responsabilité d'appliquer un minimum ce principe de précaution.

La position qu'un ministre ou un député doit adopter par rapport au glyphosate n'est pas facile à définir parce que trois agences font trois diagnostics qui ne sont pas tout à fait concordants. Toutefois, le diagnostic du Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), agence mondiale qui dépend de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), n'a jamais été pris en défaut. Il a confirmé la dangerosité probable du glyphosate – on est quasiment en haut de la graduation. Autrefois, pour vérifier la toxicité d'une molécule, on regardait ce que l'on appelle l'effet de dose et on voyait à quel moment elle devenait toxique. Aujourd'hui, la démonstration est difficile parce que deux phénomènes complémentaires se croisent, d'une part le phénomène de bioaccumulation qui fait qu'une relation de cause à effet peut s'étaler dans le temps, les méthodologies des agences n'étant pas toujours adaptées à cela, d'autre part le phénomène de l'effet cocktail, c'est-à-dire qu'une substance seule peut ne pas être dangereuse, mais le devenir lorsqu'elle est associée à un adjuvant.

Notre première responsabilité est de ne pas mettre le sujet sous le tapis : pendant longtemps, on a ajourné la question et renouveler l'autorisation pour quinze ans revenait carrément à enterrer le problème. Il ne s'agit pas non plus de céder à des peurs paniques. Je pense que nous allons entrer dans une forme de maturité. Le nouveau directeur général de l'OMS que j'ai rencontré à Genève est tout à fait d'accord avec nous : il faut d'abord fiabiliser l'expertise, ce qui n'est pas facile car, par définition, un expert a d'abord travaillé dans le domaine où il est censé exercer son expertise, ce qui le rend toujours un peu suspect. Il faut donc introduire de la rationalité pour valider les peurs, infirmer celles qui ne le sont pas et pour guider l'action publique. Cela étant, on commence à savoir un certain nombre de choses. Du reste, le vocabulaire et les postures ont changé. On est passé, y compris dans notre pays, de « ne nous enlevez pas le glyphosate, on ne sait pas faire autrement », à « laissez-nous un peu de temps ». Tous les jours, je reçois le témoignage de quelqu'un qui parvient à se passer de glyphosate grâce à la technique du semis direct ou de la culture sans labour. Je n'en fais pas une norme, je dis simplement que l'on entre dans une forme d'intelligence.

La France veut interdire le glyphosate dans trois ans – il faut bien se fixer des objectifs. On a mis en place des méthodes pour évaluer. L'Institut national de la recherche agronomique (INRA) ne découvre pas le problème, des travaux ont été effectués, des méthodes mécaniques et de biocontrôle ont été expérimentées. Nous allons maintenant entrer dans une phase opérationnelle, et c'est très important.

Est-ce que je trouve satisfaisant qu'on nourrisse notre bétail avec des tourteaux de soja en provenance d'Amérique du sud, fabriqués dans des conditions sociales et environnementales lamentables, et au détriment de la forêt amazonienne ? Bien évidemment, la réponse est dans la question : cela ne me va pas vraiment. Les États généraux de l'alimentation, et je parle là sous le contrôle de M. Dominique Potier, ont produit de l'intelligence collective, processus qu'il va falloir prolonger. Il faut qu'on aille plus loin sur le plan « protéines végétales » si l'on veut parvenir à une forme de souveraineté alimentaire en France ; sur le statut du foncier agricole, il faut aussi aller plus loin ; sur la formation des jeunes agriculteurs, et afin qu'ils puissent avoir des alternatives, il en va de même. Hier, j'ai reçu au ministère les représentants d'Interbev, la filière de la viande rouge, et je vais aller les voir au salon de l'agriculture parce qu'ils ont préparé, eux aussi, un plan d'action. Bref, tout le monde se met en marche. (Exclamation et sourires.) J'accompagne ce mouvement d'autant que la seule chose à laquelle je ne me résigne pas c'est l'immobilisme. Toutes ces démarches sont sincères – y compris à la FNSEA, les jeunes agriculteurs ont envie de changer, pour peu qu'on les y aide. C'est cette fameuse convergence que j'essaie de créer.

De surcroît, le contexte est favorable puisqu'il y a une demande des consommateurs. Le marché est là, et il n'est pas couvert. Cela étant, le bio ne doit pas nécessairement être l'alimentation et le mode de production exclusifs, les bonnes pratiques pouvant parfois produire, elles aussi, des effets sur les productions non certifiées « bio ». Cela fait une semaine que, chaque jour, on me parle du sulfate de cuivre utilisé en agriculture biologique. Je ne sais pas ce qui se passe et je ne suis pas capable de vous répondre. Nous allons examiner cela. L'un d'entre vous a demandé si le remède des technologies vertes n'était pas pire que le mal. Rien n'est parfait, il y a toujours un effet pervers, un effet induit. Effectivement, les éoliennes ne tombent pas du ciel, et nombre de technologies utilisent des métaux rares – les Chinois l'ont bien compris puisqu'ils ont fait en sorte d'en avoir la quasi-exclusivité.

Je ne peux pas néanmoins admettre ce qui a été dit sur les énergies fossiles : elles mettent en effet en péril l'humanité car elles sont principalement – pas exclusivement puisque les gaz à effet de serre sont multiples – la cause du changement climatique. Soit on est climato-sceptique, et on ne les met pas en cause, soit on se range derrière l'avis partagé de la science, et on ne peut pas les placer au même niveau de dangerosité – éventuelle – que d'autres technologies. Je vous indique au passage, même sans invoquer le changement climatique, ce que j'ai du mal à faire, que l'utilisation des énergies fossiles coûte chaque année à la collectivité mondiale 5 000 milliards de dollars en termes environnemental et sanitaire. Ce chiffre ne provient pas de mon ministère mais de l'OMS, de la Banque mondiale et des Nations Unies.

On a donc tout intérêt à sortir des énergies fossiles. Cela étant, vous avez raison, il faut examiner les choses au cas par cas car nous buterons, de toute façon, sur la raréfaction des ressources. C'est pour cela que l'économie circulaire devra venir en complément : à un moment ou un autre, il faudra que chaque substance utilisée puisse rentrer dans un cycle.

Je veux rassurer M. Damien Adam : le nombre de bornes électriques augmente. Nous mettons les moyens et conservons les objectifs que nous nous sommes fixés, car ils conditionnent le plan climat. Un décret impose la compatibilité des prises et le projet de loi sur la mobilité devrait prévoir le droit à la prise.

Les négociations liées au Mercosur ne sont pas terminées. Les conditions françaises, que le Président de la République a rappelées récemment, ne sont toujours pas remplies, notamment pour la viande.

Monsieur Martial Saddier m'a interrogé sur les Assises de l'eau, qui constitueront, avec la PPE, les deux grands sujets de l'année. Ces assises porteront sur l'état des réseaux, qui est, je dois dire, assez inquiétant. Des milliers de kilomètres de réseau ont été remplacés par du Polychlorure de vinyle (PVC) première génération, ce qui n'est pas rassurant sur le plan sanitaire. En outre, le réseau est émaillé d'importantes fuites.

Les assises seront aussi l'occasion de s'interroger sur la ressource en eau. Des préfets m'ont alerté : dans plusieurs départements, la courbe démographique, ascendante, croise celle de la ressource en eau, en chute. C'est un sujet qu'il convient de regarder de façon non dogmatique, en associant, à tous les niveaux territoriaux, l'ensemble des acteurs. Les agriculteurs, notamment, réclament à cor et à cri des retenues collinaires, mais cela suppose aussi de s'interroger sur le type de cultures envisageables aujourd'hui, compte tenu de la raréfaction de l'eau et des changements climatiques.

Je finirai en répondant à M. Dominique Potier. J'ai en charge l'économie sociale et solidaire, dont je découvre la diversité et l'importance dans le tissu économique, notamment en termes d'emplois – une donnée que j'avais jusque-là sous-estimée. Lire dans le code civil, en 2018, que l'objet de l'entreprise est le profit ne me satisfait pas, en effet. Il me semble que tout a été dit lorsque, après la première guerre mondiale, on a fondé l'Organisation internationale du travail et défini le rôle de l'économie et celui des entreprises. Sans doute a-t-on perdu de ce sens au fil du temps.

Si l'on veut confirmer la réconciliation des Français avec leurs entreprises, dont ils sont souvent fiers, la consultation publique dans le cadre de la concertation sur la future loi PACTE est une démarche intéressante. Elle est menée par des personnes de divers horizons. Lorsque nous avons lancé cette concertation, avec Mme Muriel Pénicaud et M. Bruno Le Maire, j'ai demandé qu'il n'y ait pas de tabous, que rien ne soit occulté. Il faut aussi écouter les responsables des entreprises pour ne pas, dans une bonne intention, ouvrir la boîte de Pandore.

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Brune Poirson, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Non, le Gouvernement ne s'apprête pas à déployer en France un système de consigne. Comme je l'ai expliqué, notre méthode de travail nous a conduits à élaborer collectivement la première version de la feuille de route de l'économie circulaire. Cela a débouché sur une consultation citoyenne, dont est ressortie l'idée de la consigne. Par ailleurs, des études montrent que les Français sont nombreux à y adhérer. Si cette politique publique devait être retenue, nous emploierions la voie de l'expérimentation, avec des adaptations en fonction des territoires et le développement de différents types de consigne.

Le travail de concertation que je mène avec l'ensemble des acteurs qui travaillent dans le domaine de l'économie circulaire a fait apparaître quelques freins. La consigne constituerait un geste de tri supplémentaire. En outre, il pourrait être difficile de déconsigner, notamment les bouteilles en plastique. Il existe un risque de fraude. Enfin, les collectivités pourraient subir une perte de revenus associés à la collecte des bouteilles en plastique.

En regard, les gains sont nombreux, aussi bien pour ce qui est des frais de collecte que du nettoyage de rue. L'efficacité de la collecte, qui est l'une de nos priorités, serait renforcée. En France, nous ne collectons pas suffisamment les déchets : à Paris, seule une bouteille sur dix est collectée et recyclée. Ces gains nous poussent à expérimenter, d'autant que des expériences menées dans d'autres pays européens, malgré les réticences, sont très concluantes. Plus de 80 % de la population allemande se déclare favorable au système de consigne, après quelques années de mise en oeuvre.

À terme, nous mènerons peut-être des expérimentations, principalement dans les zones urbaines. Nous nous concentrerons sur la mise en place d'un système qui soit lisible pour l'ensemble des acteurs et accompagnerons les collectivités dans cette démarche.

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Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Je trouve ces échanges très enrichissants. L'année 2018 s'annonce délicate, notamment pour ce qui concerne la conduite de la programmation pluriannuelle de l'énergie. Nous n'allons pas nous y employer en vase clos dans notre ministère. Rien n'est écrit. Nous avons reçu les scénarios de RTE pour la transition énergétique, qui constituent une base de travail et qui vous ont été présentés. Nous devons aussi écouter la société civile ; j'ai demandé au Président de la République de pouvoir également entendre les ONG. Nous devons ouvrir le processus. Dans les territoires, les citoyens doivent s'emparer de cette réflexion. Je forme ici le voeu que nous puissions partager une vision et que nous abordions cette programmation pluriannuelle de l'énergie avec une forme d'enthousiasme collectif, même si cela peut sembler naïf. Je ne vois pas cela comme une contrainte : les petites et moyennes entreprises (PME) et les grandes entreprises sont extrêmement efficientes sur ces sujets. En termes d'économie et d'emploi et à tous points de vue, nous avons tout à gagner à réussir cette programmation pluriannuelle et cette transition énergétique, au-delà même de l'objectif climatique dont je suis convaincu que vous ne doutez pas.

Membres présents ou excusés

Réunion du mercredi 14 février 2018 à 16 h 30

Présents. – M. Damien Adam, M. Patrice Anato, Mme Delphine Batho, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Thierry Benoit, Mme Barbara Bessot Ballot, M. Philippe Bolo, Mme Anne-France Brunet, M. Jacques Cattin, M. Sébastien Cazenove, M. Anthony Cellier, Mme Michèle Crouzet, M. Yves Daniel, M. Rémi Delatte, M. Michel Delpon, M. Nicolas Démoulin, M. Fabien Di Filippo, Mme Stéphanie Do, M. José Evrard, Mme Valéria Faure-Muntian, Mme Véronique Hammerer, M. Antoine Herth, M. Sébastien Jumel, M. Jean-Luc Lagleize, Mme Célia de Lavergne, Mme Marie Lebec, M. Roland Lescure, Mme Monique Limon, M. Richard Lioger, M. Didier Martin, Mme Emmanuelle Ménard, M. Jean-Baptiste Moreau, M. Mickaël Nogal, M. Jérôme Nury, Mme Claire O'Petit, Mme Valérie Oppelt, M. Éric Pauget, Mme Anne-Laurence Petel, M. Dominique Potier, M. Benoit Potterie, M. Vincent Rolland, M. Jean-Bernard Sempastous, M. Denis Sommer, Mme Bénédicte Taurine, Mme Huguette Tiegna, M. André Villiers

Excusés. – Grégory Besson-Moreau, Mme Christelle Dubos, M. Daniel Fasquelle, M. Joachim Son-Forget

Assistaient également à la réunion. – M. Éric Alauzet, Mme Émilie Bonnivard, M. Pierre Cordier, M. Loïc Prud'homme, M. Martial Saddier