La séance est ouverte.
La séance est ouverte à neuf heures trente.
Je vous présente tous mes voeux, monsieur le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics, ainsi qu'à vous tous, mes chers collègues.
Le Président de l'Assemblée nationale a reçu de M. Maurice Leroy, député de la troisième circonscription du Loir-et-Cher, une lettre l'informant qu'il se démettait de son mandat de député à compter du 9 janvier 2019. Acte a été pris de sa démission au Journal officiel du 11 janvier 2019.
Par communication du 8 janvier 2019, le ministre de l'intérieur a informé le Président que M. Maurice Leroy est remplacé, jusqu'au renouvellement de l'Assemblée nationale, par M. Pascal Brindeau, élu en même temps que lui à cet effet.
Situation de l'entreprise Konecranes à Vernouillet
La parole est à M. Olivier Marleix, pour exposer sa question, no 517, relative à la situation de l'entreprise Konecranes à Vernouillet.
Monsieur le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics, je souhaite appeler votre attention sur la situation de l'entreprise Konecranes à Vernouillet, près de Dreux.
Fabricant de palans électriques et d'outils de levage, l'entreprise Konecranes est un groupe finlandais prospère, qui fait des bénéfices et réalise un chiffre d'affaires de 4 milliards d'euros.
Elle a annoncé le 8 novembre 2018 que le site de Vernouillet n'était pas retenu pour la fabrication des palans électriques de nouvelle génération. Cette annonce intervient après une mise en concurrence du site – par le groupe – avec deux autres sites de production, en Allemagne et en Tchéquie. Les raisons qui ont poussé Konecranes à écarter Vernouillet sont difficilement compréhensibles, tout comme la sincérité de cette démarche, tant cette mise en concurrence avec la Tchéquie – dont les coûts salariaux sont bien plus faibles – et l'Allemagne voisine – où le groupe dispose d'un établissement majeur – semblait éliminer d'office la France.
Cette décision revient sans doute à condamner le site, alors que son carnet de commandes est plein pour 2019, et menace directement 120 emplois – jusqu'à 300 si l'on tient compte des sous-traitants. Konecranes vient d'ailleurs de mandater un cabinet pour trouver un repreneur du site, plutôt que de chercher à y relocaliser elle-même une autre activité.
L'incertitude de cet entre-deux et cette façon peu loyale de procéder sont difficiles à vivre pour les salariés et leurs familles.
Le délégué interministériel aux restructurations d'entreprises, Jean-Pierre Floris, dont je tiens à saluer la disponibilité et l'engagement, est venu sur place rencontrer les dirigeants du site. Je souhaiterais savoir quelles démarches le Gouvernement compte désormais mener pour obtenir des engagements fermes en faveur du maintien de l'emploi. Plus globalement, monsieur le secrétaire d'État, je tenais à vous dire combien je trouve choquant de voir une entreprise délocaliser sa production vers l'Europe de l'est sans toutefois oublier de localiser sa holding financière aux Pays-Bas… Ce que l'on reproche aux GAFA américaines en Irlande, des entreprises européennes le font désormais couramment : elles sont à la recherche du moins-disant fiscal d'un côté, du moins-disant social de l'autre. Quelles actions le Gouvernement mène-t-il sur le plan européen pour que les règles du jeu de l'Union ne favorisent plus de tels comportements opportunistes ?
M. Jean-Pierre Vigier applaudit.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics.
Avant de répondre à la question de M. Marleix, permettez-moi de vous présenter mes voeux pour cette nouvelle année.
Monsieur Marleix, un certain nombre de questions que vous avez posées touchant aux règles de l'Union méritent en effet un travail plus approfondi pour faire en sorte que les comportements opportunistes que vous avez décrits – dans le cas d'espèce ou dans un autre – puissent être mieux combattus. C'est le sens de l'engagement du ministre de l'économie et des finances, mais aussi du Président de la République sur la scène européenne.
Vous avez appelé plus particulièrement notre attention sur la situation de l'entreprise Konecranes de Vernouillet.
Vous l'avez rappelé, au mois de novembre 2018, le groupe finlandais Konecranes a annoncé sa décision de confier la réalisation de sa nouvelle gamme de palans électriques à son usine de Wetter en Allemagne, au détriment du site français de Vernouillet.
Le groupe, vous l'avez souligné, n'a pas justifié devant les représentants de l'État les motifs économiques l'ayant conduit à faire ce choix, qui fragilise évidemment l'avenir du site de Vernouillet.
Toutefois, à titre préventif au moins, suite à l'intervention des services de l'État et aux négociations qui se sont ouvertes après le blocage des expéditions début décembre, plusieurs avancées peuvent d'ores et déjà être relevées.
La direction s'est d'abord engagée, quelle que soit la production restante, à maintenir l'emploi de tous les salariés jusqu'au 31 décembre 2019. Elle s'est également engagée à rechercher activement toutes les solutions possibles pour maintenir dans l'emploi tous les salariés du site. Ceux d'entre eux dont l'emploi aurait disparu à la fin 2019 bénéficieront d'un congé de reclassement payé intégralement jusqu'au 31 décembre 2020 ; ce congé sera porté à 16 mois pour les salariés âgés de plus de 58 ans. Les salariés licenciés percevront une indemnité égale au double de l'indemnité légale ou conventionnelle, au plus avantageux pour le salarié, avec un plancher de 12 mois.
Par ailleurs, vous l'avez également souligné, le délégué interministériel aux restructurations d'entreprises s'est rendu sur le site le 18 décembre dernier. Il y a rencontré la direction ainsi que les salariés et a pu s'entretenir avec eux. Les services de l'État sont entièrement mobilisés afin de préserver l'activité et l'emploi sur le site de Vernouillet, et sont bien évidemment prêts à travailler avec l'ensemble des élus du territoire qui le souhaiteront.
À cette fin, le groupe Konecranes a choisi un cabinet de consultants pour la recherche d'un repreneur, qui a d'ores et déjà identifié une liste de 250 prospects. Le commissaire aux restructurations et à la prévention des difficultés des entreprises travaille avec ce cabinet et s'assure du sérieux de la démarche pour vérifier qu'elle ne relève pas du faire-valoir. Afin d'assurer la transparence de ce processus, il échange régulièrement avec les organisations syndicales ainsi qu'avec la direction de l'entreprise ; je suis convaincu qu'il en sera de même avec les élus locaux, pour que nous puissions trouver ensemble les moyens de maintenir une production sur le site de Vernouillet et faire en sorte de préserver le maximum d'emplois.
Je vous remercie pour votre réponse, monsieur le secrétaire d'État, ainsi que pour ce qu'a été et ce que continuera à être l'engagement de l'État sur ce dossier.
Il est assez difficile pour les salariés d'avoir le sentiment que l'actionnaire ne joue pas un jeu totalement transparent avec eux et les entraîne dans des procédures dilatoires alors que l'intention semble malheureusement bien être la recherche d'un repreneur, ce qui me laisse d'ailleurs un peu sceptique : en général, une entreprise est assez peu encline à trouver un concurrent et à lui laisser les clés d'un site.
Nous avons besoin de toute la pression et de toute la clairvoyance de l'État, lequel sera amené, même si je ne l'espère pas, ou alors le plus tard possible…
… à valider un plan de sauvegarde de l'emploi. Dans l'immédiat, nous avons besoin que l'État oblige Konecranes à tenir ses engagements.
La parole est à Mme Mathilde Panot, pour exposer sa question, no 497, relative aux indemnités kilométriques des travailleurs à domicile.
Monsieur le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics, je souhaite appeler votre attention sur la situation des travailleurs à domicile. Un grand nombre d'entre eux – je devrais dire d'entre elles, car il s'agit en majorité de femmes – n'ont pas d'autre choix que de circuler en voiture pour se rendre là où ils doivent rendre leurs services à la population et de faire des kilomètres, notamment en zone rurale. La précarité de leur situation est considérable et leurs revenus sont souvent très faibles. Nombre d'entre eux se trouvent aujourd'hui parmi les gilets jaunes – ils ne pouvaient pas supporter que leurs budgets, déjà contraints, le soient encore davantage du fait de l'augmentation du carburant.
J'ai rencontré des hommes et des femmes prêts à craquer sous le poids des mesures que vous ne cessez de prendre pour rendre la vie plus dure aux classes populaires et moyennes de notre pays, à cette France qui fait des efforts quotidiens pour ne pas sombrer et que M. Macron s'amuse à humilier régulièrement de manière répugnante.
Les travailleurs à domicile, monsieur le secrétaire d'État, doivent faire face à des horaires variables, fractionnés, incertains quand les personnes annulent ou déplacent un rendez-vous au dernier moment, à des temps partiels contraints, à des déplacements non prévus qu'une urgence oblige à faire.
Je tiens à rappeler le dévouement de tant de travailleurs à domicile qui, lorsque vous avez tout détruit – les services publics, les transports en commun – , sont parfois les seuls, en zone rurale, à incarner notre idéal commun de solidarité et de fraternité. Leurs conditions de vie et de travail ont été déconsidérées par les gouvernements successifs. Nombre de travailleurs à domicile ne parviennent pas à tirer un SMIC de leur travail pourtant épuisant.
Depuis dix ans, les indemnités kilométriques forfaitaires n'ont pas été réévaluées. Prendre la décision de le faire permettrait de soulager ces travailleurs à domicile qui n'en peuvent plus. Sachez qu'ils roulent presque toujours avec leur véhicule personnel pour travailler. Il n'est pas rare qu'ils doivent prendre des risques lorsque leurs agendas quotidiens sont trop chargés.
Êtes-vous d'accord, monsieur le secrétaire d'État, pour permettre à nos concitoyens, et particulièrement, à nos concitoyennes, qui travaillent à domicile, d'aller mieux et pour les aider à vivre décemment ? Allez-vous augmenter les indemnités kilométriques forfaitaires ?
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics.
Comme vous le savez, les frais supportés par les salariés sont déductibles de leur revenu imposable. Pour rappel, plusieurs modalités sont offertes au salarié afin qu'il choisisse la plus avantageuse, lorsqu'il opte pour le régime des frais réels.
L'évaluation des frais de déplacement peut s'effectuer en utilisant le barème forfaitaire fixé par arrêté en fonction de la puissance administrative du véhicule et de la distance annuelle parcourue. Lorsque le salarié ne fait pas application du barème, ces frais de déplacement sont déductibles pour leur montant réel.
Ce barème kilométrique peut également être utilisé comme référence par les employeurs pour l'allocation à leurs salariés d'indemnités pour leurs frais de déplacement professionnels exonérés d'impôt sur le revenu et de cotisations et contributions sociales.
L'article 10 de la loi de finances initiale pour 2019 permettra ce que vous demandez, c'est-à-dire la revalorisation du barème en 2019, en prenant notamment en compte le type de motorisation du véhicule afin que cette revalorisation soit plus importante pour les petites cylindrées, c'est-à-dire les véhicules les moins polluants, mais aussi les moins coûteux. C'est là une mesure qui répond directement aux inquiétudes que vous exprimez.
Il est également important de rappeler que face aux conséquences de l'augmentation des prix des carburants pour l'ensemble des salariés, en particulier les plus modestes, notamment les travailleurs que vous évoquez, des mesures spécifiques, applicables à compter des revenus de l'année 2018, ont été adoptées dans le cadre de la loi de finances pour 2019.
Ainsi, l'article 3 de la loi de finances prévoit que les aides à la mobilité versées par les collectivités territoriales ou Pôle emploi, destinées à couvrir les frais de carburant engagés par les salariés pour leurs déplacements entre le domicile et le lieu de travail, lorsqu'ils sont situés à une distance d'au moins trente kilomètres l'un de l'autre, sont exonérées d'impôt sur le revenu et de cotisations et contributions sociales jusqu'à 240 euros par an.
De plus, le covoiturage est désormais introduit dans les moyens de transport pour les trajets entre le domicile et le travail. Il peut faire l'objet d'un soutien de l'employeur exonéré de cotisations sociales et d'impôt sur le revenu dans la limite de 200 euros par an.
Enfin, d'autres mesures ont été adoptées, telles que le gel de la hausse de taxes sur les carburants, l'extension du dispositif du chèque énergie à de nouveaux bénéficiaires ou encore, même si cela ne concernera pas l'ensemble des salariés, le renforcement de la prime à la conversion, qui sera plus que doublée pour les ménages les plus modestes.
Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d'État, même si elle présente bien des insuffisances.
Il n'est pas possible de prétendre sérieusement que des travailleurs à domicile feront du covoiturage ! Ce n'est pas sérieux !
Quant au gel de la hausse des taxes, c'est certes une bonne chose pour ne pas rendre encore plus difficiles les conditions de vie de ces travailleurs, mais c'est maintenant qu'ils ont besoin d'aide ! La moitié des aides à domicile vivent avec moins de 900 euros mensuels. Ils font des journées de onze heures, mais qui ne comptent que pour six heures de temps travaillé. Ils vivent donc dans une grande précarité, et ce n'est pas la réponse que vous venez de donner qui changera leur situation.
Nous continuerons d'autant plus à nous battre que le consensus au sein de l'Assemblée nationale peut être large – un collègue de l'UDI, M. Favennec Becot, a posé une question écrite à ce propos. Il faut pouvoir vivre dignement de son travail !
Ces femmes qui travaillent à domicile – puisque ce sont surtout des femmes qui sont concernées – ont un engagement très fort, notamment auprès des populations les plus précaires ou des personnes âgées, mais celui-ci n'est pas reconnu, puisque nombre d'entre elles vivent sous le seuil de pauvreté.
La parole est à M. Fabien Roussel, pour exposer sa question, no 498, relative aux conséquences de l'alliance Alstom-Siemens.
Permettez-moi, monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, de vous présenter, ainsi qu'au personnel de l'Assemblée, mes meilleurs voeux de santé, de bonheur et de sérénité.
Monsieur le ministre de l'économie et des finances, rien ne va plus, en ce début 2019, concernant la fusion d'Alstom et de Siemens. Outre les salariés et leurs syndicats, c'est maintenant la Commission européenne qui doute du bien-fondé de l'opération. Elle a présenté une liste de griefs, recensant pas moins de 14 domaines dans lesquels il y aurait des risques de monopole ! Fin décembre, les autorités de la concurrence britannique, néerlandaise, belge et espagnole ont écrit à la commissaire européenne chargée du dossier pour l'alerter d'une « perte globale de concurrence très importante » si la fusion avait lieu. Pour les syndicats, la cause est entendue depuis le départ : cette fusion, ou plutôt cette absorption d'Alstom par Siemens, n'est pas une bonne affaire, car elle n'obéit pas à un projet industriel, mais vise tout simplement à satisfaire les actionnaires. Je rappelle qu'il était prévu « d'acheter » – pardon, de verser aux actionnaires – 1,8 milliard d'euros pour organiser cette fusion.
Ce projet de fusion se justifie de moins en moins. Il symbolise davantage un repli qu'un développement. La mise en place de synergies entre les deux groupes, pour un coût estimé à 380 millions d'euros, est censée rapporter annuellement 470 millions d'euros au terme des quatre ans durant lesquels l'emploi serait prétendument préservé – on a pourtant vu ce qu'il en était chez General Electric – , des économies qui se traduiraient par la suppression de 4000 à 7000 emplois selon les projections syndicales. La position de monopole d'un groupe privé risque de faire monter les prix et de coûter cher aux pays, aux collectivités qui ont besoin de trains, de métros, de tramways, car l'objectif unique est la rentabilité des actionnaires, et c'est avec de l'argent public que nous achetons ces matériels roulants.
Il est désormais urgent de réfléchir à un autre projet, à une coopération entre les États de l'Union européenne qui associerait les industriels du ferroviaire basés en Europe, y compris Bombardier, et des financements publics pour bâtir une stratégie industrielle à long terme, au service des pays, des collectivités, des besoins des habitants, mais aussi pour relever le défi climatique. Au lieu de crier au loup en ayant peur des Chinois et de l'entreprise CRRC, le Gouvernement ferait mieux de se battre pour un European Buy Act qui protégerait notre marché intérieur !
Soyons plus ambitieux : c'est aussi comme cela que nous pourrons bâtir un groupement industriel de taille suffisamment importante pour démarcher des contrats à l'international.
Pourquoi ne pas réfléchir dès à présent à une solution alternative à cette fusion néfaste ? C'est notre voeu pour 2019.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics.
Monsieur le député, votre question s'adresse au ministre de l'économie et des finances. Retenu ce matin, il m'a demandé de vous transmettre ces éléments de réponse.
Vous avez appelé son attention sur l'opération industrielle que constitue la fusion entre Alstom et la division mobilité de Siemens. Cette opération est d'une grande pertinence et peut être un modèle dans la constitution d'un leader industriel européen, capable de faire face à une concurrence intense et de se maintenir à la pointe de l'innovation.
Parce que cette opération est autant cruciale pour Siemens que pour Alstom, qui sont de tailles très comparables, Siemens a souhaité détenir 50 % du capital de la nouvelle société mais a accepté de prendre des engagements très importants, demandés par l'État pour préserver les intérêts français. Ainsi, pendant une durée de quatre années, il n'y aura ni fermeture de site, ni départ contraint ; les compétences et les investissements en recherche et développement en France seront maintenus ; le siège de la nouvelle société sera situé en France et elle sera cotée à la bourse de Paris.
La future entité pourra ainsi constituer un véritable champion industriel européen, disposant d'armes pour lutter face au leader chinois CRRC, qui dispose de capacités de production extrêmement importantes. Nous sommes très attentifs à ce que les mesures qui sont actuellement discutées avec les autorités européennes de la concurrence ne remettent pas en cause le bien-fondé économique de la fusion, mais également à ce qu'elles ne touchent que marginalement les sites et les employés français des deux groupes.
Vous avez soulevé un certain nombre d'interrogations et proposé une forme de solution alternative. Nous sommes convaincus que les discussions menées avec les autorités de la concurrence et les autorités communautaires permettront de les convaincre du bien-fondé de cette fusion et d'écarter de facto la recherche de solutions alternatives. Nous considérons en effet, je l'ai déjà dit, que la fusion proposée est un modèle pertinent pour constituer ce champion européen.
Je regrette que vous n'ouvriez pas le chantier d'un autre projet que celui qui associe les actionnaires de deux grands groupes dans un objectif de rentabilité à court terme. Vous ne répondez pas aux craintes des salariés concernant les suppressions d'emplois liées aux économies que cette fusion appelle. Vous dites qu'il n'y aura pas de fermeture de sites, mais vous ne vous engagez pas sur les suppressions d'emplois envisagées.
Vous parlez de la menace chinoise : la peur n'évite pas le danger. Il y a des mesures de protection à prendre pour les marchés européen et français. Quid des futurs appels d'offres, pour le Grand Paris notamment ? Quelles garanties avons-nous que les prix n'augmenteront pas ?
La parole est à M. Sylvain Brial, pour exposer sa question, no 518, relative à l'enseignement primaire à Wallis-et-Futuna.
L'enseignement primaire sur le territoire des îles de Wallis-et-Futuna est confié à la direction de l'enseignement catholique. Le Gouvernement affirme à juste titre une grande ambition pour le primaire. C'est particulièrement légitime sur notre territoire, qui connaît de nombreux problèmes. Le Président de la République l'a bien compris, qui a concentré d'importants moyens sur le primaire.
Aujourd'hui, les programmes sont plus exigeants, avec la maîtrise des technologies de l'information et de la communication dans l'enseignement – TICE – ou encore davantage de travaux sur les cultures locales. Cela passe notamment par une hausse du niveau de recrutement des enseignants à bac plus 5. Ce niveau de qualification doit permettre aux enseignants de nouvelles perspectives de carrière, avec l'accès au grade de professeur des écoles ou encore l'accès à de nouveaux concours internes de l'éducation nationale.
Monsieur le ministre de l'éducation nationale, les enseignants du primaire sur Wallis-et-Futuna ont deux caractéristiques : ils sont recrutés à bac plus 5 ; ils exercent une mission d'État. En outre, il n'existe pas de concurrence sur notre territoire entre le privé et le public. Nos enseignants ne peuvent donc avoir ces perspectives de carrière.
Je vous demande de prendre les dispositions permettant aux enseignants du primaire de Wallis-et-Futuna ayant les qualifications appropriées de se présenter aux concours réservés aux fonctionnaires.
Je vous demande également que la grille des rémunérations applicable soit comparable à celle de l'enseignement public, comme c'est le cas en Polynésie ou en Nouvelle-Calédonie.
Enfin, je souhaite que le territoire de Wallis-et-Futuna, du fait des problèmes locaux et de la faiblesse des résultats obtenus, puisse bénéficier du statut de réseau d'éducation prioritaire renforcé – REP+.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics.
Monsieur le député, je vous prie de bien vouloir excuser Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, qui est retenu ce matin. Il m'a demandé de vous apporter ces éléments de réponse.
Comme vous le rappelez, l'enseignement primaire public est concédé, à Wallis-et-Futuna, à la mission catholique. Pour assurer la direction et la gestion de l'enseignement catholique dans le premier degré, le conseil d'administration de la mission catholique mandate la direction de l'enseignement catholique qui a la responsabilité de mettre en oeuvre cette convention de concession.
Une convention régit cette concession depuis 1969. La convention pour la période 2012-2017 a fait l'objet d'une tacite reconduction en attendant sa réécriture. Celle-ci a débuté entre les services du ministère de l'éducation nationale, le vice-rectorat et la mission catholique ; beaucoup des sujets que vous avez abordés feront l'objet de discussions.
Un maintien du niveau de la subvention pour les années 2017 et 2018 a d'ores et déjà été acté.
Cette décision tient particulièrement compte des spécificités du territoire que vous rappelez et témoigne de l'engagement de l'État malgré la forte baisse démographique dans le premier degré.
Les personnels enseignants en fonction dans le premier degré à Wallis-et-Futuna sont très largement recrutés au niveau baccalauréat. Ils ne remplissent donc pas les conditions d'accès au corps des professeurs des écoles.
Néanmoins, le principe d'une revalorisation indiciaire de 20 points au profit des maîtres ayant atteint le dernier échelon de la hors classe depuis cinq ans a déjà été acté par avenant à la convention. Elle porte ainsi à 40 points d'indice la revalorisation des fins de carrière, ce qui est significatif et se compare favorablement à la grille indiciaire applicable au corps des instituteurs en métropole ou au corps des instituteurs néo-calédoniens.
Enfin, je vous informe qu'une mission lancée en octobre 2018 par le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse travaille actuellement à une meilleure adaptation des politiques éducatives et pédagogiques aux particularités des territoires. Votre proposition d'un classement en REP+ du territoire de Walllis-et-Futuna sera étudiée dans le cadre de cette mission, qui rendra ses conclusions en juin 2019.
Merci, monsieur le secrétaire d'État, pour votre réponse. Certes, nous parlons de l'avenir des enfants, mais à travers eux, c'est tout l'avenir du territoire qui est en jeu. C'est pourquoi je souhaite que nous puissions travailler avec les services de l'éducation nationale sur un ambitieux projet pédagogique pour Wallis-et-Futuna.
La parole est à M. Jean-Pierre Vigier, pour exposer sa question, no 512, relative à la fermeture de l'usine Copirel de Mazeyrat-d'Allier.
Le groupe Cofel, leader de la literie en France grâce à ces trois marques à forte notoriété que sont Bultex, Mérinos et Epéda, a annoncé en novembre 2018 la fermeture pour février 2019 de son site de Mazeyrat-d'Allier en Haute-Loire, l'usine Copirel. Cette décision brutale et inadmissible engendre le licenciement de 82 salariés et plonge autant de familles dans le désarroi le plus total. Les conséquences socio-économiques sont également catastrophiques pour les communes du Langeadois et du Brivadois, ainsi que pour l'ensemble des partenaires économiques qui bénéficiaient de l'activité de cette usine.
Au lendemain de l'annonce de cette fermeture, un comité de suivi a été constitué, regroupant les services de l'État, les élus et les représentants du personnel de l'usine, afin d'engager au plus vite des négociations avec le groupe Cofel, dans l'intérêt des salariés et avec pour objectif la recherche active d'un repreneur.
À ce jour, soit deux mois après le début des négociations, force est de constater l'absence de réponse du groupe Cofel aux demandes du comité de suivi, notamment la négociation du plan de sauvegarde de l'emploi, le maintien des achats de mousse auprès du fournisseur local, la recherche d'un repreneur, la transmission de l'étude d'impact suite à la fermeture de l'usine.
Aussi, monsieur le secrétaire d'État, je vous demande de m'indiquer les mesures que vous comptez urgemment prendre afin d'obtenir du groupe Cofel les nécessaires engagements permettant aux salariés, aux élus et aux pouvoirs publics d'obtenir des réponses précises et des engagements fermes.
Monsieur le secrétaire d'État, il y a urgence !
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics.
Monsieur le député, vous m'interrogez sur la situation de l'usine Copirel du groupe Cofel implantée à Mazeyrat-d'Allier. Le projet du groupe Cofel consiste en un transfert d'activité du site de Mazeyrat-d'Allier vers d'autres établissements suite à une décision d'économie des coûts fixes, selon les informations transmises par le groupe.
Alors que tous les autres sites de production du groupe lui appartiennent, les bâtiments utilisés à Mazeyrat sont loués à Recticel, lui-même sous-traitant de Copirel. Le groupe Cofel a été reçu par les services du ministère du travail les 21 novembre et 18 décembre 2018. Un premier comité de suivi s'est tenu le 30 novembre 2018, coprésidé par la sous-préfète, Mme Véronique Martin Saint-Léon, et vous-même, en tant que député de la circonscription. Le dernier comité, en date du 14 décembre 2018, s'est tenu dans un climat délétère, en présence de personnes qui n'étaient pas invitées ; les dirigeants ont dû être raccompagnés par les services de la gendarmerie. Cette attitude n'est pas responsable et peut considérablement nuire, par la mauvaise image du site qu'elle peut donner, à la recherche de repreneur en cours.
En tout état de cause, les services de l'État sont pleinement mobilisés pour sauver ce site industriel et les emplois qui lui sont liés. Nous continuons à travailler pour obtenir du groupe des engagements précis, mais aussi réfléchir à des projets de reconversion.
À cette fin, le commissaire aux restructurations et à la prévention des difficultés des entreprises concourt très activement à la recherche de repreneur aux côtés du cabinet qui a été mandaté pour ce faire. Je sais que vous y contribuez, vous aussi, de la manière la plus directe possible.
Les services de la DIRECCTE sont également mobilisés pour assurer le suivi de la procédure du plan de sauvegarde de l'emploi. Ils seront également très attentifs aux mesures d'accompagnement du PSE qui seront adoptées dans l'hypothèse où aucun projet de reprise ne pourrait prospérer.
De plus, les équipes de Pôle Emploi travailleront de concert avec le cabinet Arthur Hunt pour favoriser le reclassement des salariés licenciés.
Tous les efforts seront faits pour trouver une solution permettant de préserver l'activité et l'emploi. Les services du ministère de l'économie et des finances sont pleinement mobilisés, aux côtés des services de l'État, des élus et des acteurs économiques. Il appartient évidemment aux acteurs du territoire, comme vous avez su le démontrer et comme les élus locaux ont su le démontrer, de faire preuve d'esprit de responsabilité afin de mettre toutes les chances de notre côté, répondre à cette urgence et assurer un avenir à ce site.
Le groupe Cofel doit très rapidement répondre à nos demandes et apporter des solutions. Les salariés souffrent, tout comme la population locale, les élus et l'ensemble du territoire. Nous avons besoin de vous, monsieur le secrétaire d'État, car il est urgent d'agir pour apporter des solutions efficaces aux salariés de cette usine.
La parole est à Mme Aurore Bergé, pour exposer sa question, no 500, relative à l'indemnisation des commerçants victimes du mouvement « antispécisme ».
Monsieur le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, en septembre dernier, plusieurs commerçants de Saint-Arnoult-en-Yvelines ont subi de lourdes dégradations de leurs établissements à la suite d'actions menées par le mouvement « antispécisme ».
La lutte pour le bien-être animal est légitime. Je suis moi-même engagée contre la souffrance animale. Nous avons d'ailleurs franchi plusieurs étapes suite à l'adoption de la loi EGALIM. Désormais, les associations de protection animale peuvent se porter partie civile, le délit de maltraitance s'étend aux établissements d'abattage et de transport, les peines de maltraitance animale sont doublées, la mise en production de nouvelles batteries d'élevage de poules pondeuses en cages est interdite.
Ce sont de premières avancées et je reste persuadée que nous devons aller plus loin. Je pense en particulier à la vidéo ou au broyage des poussins. Pour autant, les méthodes employées par les groupes radicaux antispécistes sont inacceptables et l'agribashing est un fléau.
Les actions violentes et illégales ne cessent de se multiplier depuis quelques mois, à tel point que les bouchers-charcutiers ont demandé la protection de la police au ministre de l'intérieur, en juin dernier, et que le mois suivant, la confédération française de la boucherie-charcuterie et traiteurs les estimait, au cours de l'année 2018, au nombre de cinquante.
Ces dégâts ne sont pas sans conséquences pour les commerçants. Outre l'aspect psychologique indéniable, l'aspect économique est non négligeable, du fait des dommages et d'une perte de clientèle. Par ailleurs, les commerçants craignent une hausse significative de leurs assurances par la répétition de ce type d'agissements.
C'est pourquoi je souhaiterais savoir comment les commerçants ciblés seront accompagnés par les pouvoirs publics au niveau de leur protection quotidienne, mais aussi de leurs relations contractuelles avec leurs assurances. Qu'envisage concrètement le Gouvernement pour protéger nos commerçants des conséquences économiques injustes ?
Merci pour votre question, chère Aurore Bergé, qui me permettra de préciser plusieurs éléments. Tout d'abord, je voudrais m'associer à votre inquiétude et soutenir les bouchers et les charcutiers qui ont été lâchement agressés. Ces événements sont intolérables dans un État de droit. Vous évoquiez le cas de Saint-Arnoult-en-Yvelines, mais beaucoup d'autres villes sont concernées. Vous avez parlé de cinquante actions violentes, ce qui est inacceptable. Le Gouvernement partage votre préoccupation et s'associe à votre soutien.
Nous avons le droit, en France, de consommer ce que nous voulons. Chacun est libre de faire ce qu'il veut. Aucun groupe, quel qu'il soit, ne doit imposer à un autre, voire à la population entière, ce qu'il doit faire.
Des violences ont été commises dans des boucheries, ce qui est inacceptable. La loi EGALIM, que vous avez rappelée à juste titre, permet de progresser. Comme vous, madame la députée, je suis déterminé à aller plus loin. Nous devons encore franchir des paliers sur plusieurs sujets afin d'avancer.
J'ai rencontré, la semaine dernière, les associations « welfaristes » de notre pays. Elles condamnent ces actes délictueux, aussi bien les attaques menées contre les boucheries que les intrusions dans des élevages agricoles, dans les abattoirs, comme ce fut le cas dans l'Ain où un abattoir a été incendié. C'est inacceptable.
Quant à votre question précise, le Gouvernement n'a pas de réponse en monnaie sonnante et trébuchante, mais il faut que les bouchers et les charcutiers s'assurent contre les actes de vandalisme, qu'ils portent plainte. Le Gouvernement a été réactif, puisque le ministère de l'intérieur a immédiatement placé des policiers auprès de ces magasins pour les protéger. Cela étant, il n'est pas possible que dans notre pays, en 2020, des boucheries soient surveillées par des policiers !
Le Gouvernement est déterminé à prendre toutes les mesures pour préserver notre liberté d'alimentation, dans le cadre des états généraux de l'alimentation ou de la loi EGALIM. Il faudra aller encore plus loin, car personne ne doit imposer à quiconque, dans notre pays, une façon d'être ou de vivre. C'est notre liberté, notre démocratie.
La parole est à Mme Liliana Tanguy, pour exposer sa question, no 502, relative à l'obligation de débarquement des navires de pêche.
Monsieur le ministre, lors de la venue du Président de la République en juin 2018 au port du Guilvinec, un livre noir de l'obligation de débarquement lui a été remis par le comité départemental des pêches et des élevages marins du Finistère.
La réforme de 2013 de la politique commune de la pêche, la PCP, qui fixe les règles de répartition des droits de pêche pour chaque État membre, introduit l'obligation de débarquement, équivalant à l'interdiction de rejet en mer de certaines espèces, afin d'améliorer la gestion des stocks de poissons.
L'article 15 du règlement relatif à la PCP indique ainsi que « toutes les captures des espèces faisant l'objet de limite de capture, réalisées au cours d'activités de pêche dans les eaux de l'Union européenne, sont ramenées et conservées à bord des navires de pêche, puis enregistrées, débarquées et imputées sur les quotas ».
La mise en oeuvre de l'obligation de débarquement devait se faire progressivement avant d'entrer définitivement en vigueur au 1er janvier 2019.
Monsieur le ministre, la mise en place de cette politique de « zéro rejet » inquiète les professionnels de la pêche, notamment dans ma circonscription du Finistère.
En effet, l'obligation de débarquement repose sur la conservation à bord des captures non désirées, ce qui induit une augmentation conséquente des volumes de captures à ramener à terre. Pour faire face à cette obligation, les navires devront soit augmenter leur capacité de stockage, soit accepter que la valeur marchande des captures déchargées dans les ports soit inférieure, celles-ci étant partiellement composées d'espèces juvéniles ou bien non désirées.
L'éventualité d'un « choke effect » n'est pas à exclure. Ce terme est utilisé pour qualifier les situations résultant de l'obligation de débarquement dans les zones de pêche où cohabitent plusieurs espèces ayant des quotas différents et pour lesquelles la capture sélective est impossible avec les outils de pêche actuels.
À ce titre, les pêcheurs craignent que les navires soient contraints de rester à quai afin de ne pas risquer de capturer des espèces pour lesquelles il n'y a plus ou pas de quota, alors même qu'il leur reste des droits de pêche pour d'autres espèces.
Les professionnels devront donc faire face à une baisse de la rentabilité de leurs entreprises, conjuguée à une hausse du temps de tri et à une dégradation de la sécurité à bord. Les impacts socio-économiques pourraient s'avérer lourds pour l'ensemble de la filière.
Monsieur le ministre, quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour accompagner les professionnels de la pêche dans la mise en oeuvre de l'obligation de débarquement ?
Votre question est très importante, madame la députée. La France s'est opposée à cette obligation de débarquement, mais elle n'a pas été suivie par la majorité des autres États de l'Union européenne, qui l'ont acceptée. Le sujet est réel, car l'état des stocks de ces pêcheurs pourrait être remis en cause. Lors du dernier conseil des ministres de la pêche, qui fut particulièrement long, fin décembre, nous avons évoqué ce sujet. Le risque d'un « choke effect » est indéniable.
Je voudrais cependant me montrer rassurant, car nous prenons toutes les mesures transitoires nécessaires pour limiter les conséquences pour nos pêcheurs.
Ainsi, l'obligation de débarquement ou « politique du zéro rejet » ne s'appliquera pas à toutes les captures, mais uniquement aux espèces soumises à quota et, en Méditerranée, à celles soumises à des tailles minimales de capture.
L'objectif est bien d'inciter à une meilleure sélectivité pour éviter, justement, ces captures non désirées.
Sans renier cet objectif, j'ai oeuvré, notamment lors du dernier conseil des ministres en décembre à Bruxelles, afin que soient trouvées des solutions pour minimiser les conséquences négatives sur l'activité des navires. Nous y sommes, je crois, parvenus.
Ce travail de long cours permet d'assouplir la stricte obligation de débarquement de toutes les captures qui pèse sur les professionnels : amélioration des mécanismes d'échanges de quotas entre États membres, exemption de minimis et exemptions pour haut taux de survie autorisant le rejet de certaines espèces dans des pêcheries identifiées, flexibilités interzonales, flexibilités inter-espèces. Ces mesures vont dans le bon sens et répondent aux demandes des pêcheurs français.
Au-delà de ces solutions et ajustements, des demandes d'évolution de la réglementation européenne ne pourraient être portées par la France que si la démonstration d'une implication satisfaisante des armements français peut être apportée.
Aussi, il est indispensable de déclarer systématiquement les rejets à leur vraie hauteur, afin de pouvoir bénéficier du maintien des exemptions en vigueur et de leur prise en compte lors de la fixation des futurs niveaux de TAC – totaux admissibles de capture – , exprimés en captures totales.
Les services du ministère de l'agriculture et de l'alimentation sont pleinement mobilisés afin d'accompagner la mise en oeuvre de l'obligation de débarquement sur le littoral. J'ai, en ce sens, demandé qu'un guide pratique soit largement diffusé à nos professionnels afin de préciser, compte tenu des souplesses et ajustements d'ores et déjà prévus, les obligations induites par la généralisation de l'obligation de débarquement.
Cet accompagnement se fait évidemment en lien étroit avec les organisations professionnelles.
Votre question était très importante, madame la députée. Je veillerai personnellement à l'application de ces mesures, car l'obligation de débarquement pourrait poser des problèmes. Nous progressons.
La parole est à M. Stéphane Buchou, pour exposer sa question, no 507, relative au statut de la saliculture.
Monsieur le ministre, je vous interroge aujourd'hui au sujet du statut de l'activité de production de sel. J'associe à ma question ma collègue Sandrine Josso, députée de Loire-Atlantique, car dans nos deux circonscriptions, cette question est extrêmement prégnante.
Comme vous le savez, depuis la rédaction en 1988 de l'article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime, la saliculture est exclue du champ des activités réputées agricoles.
Pourtant, de nombreux domaines dans ce métier nous ramènent au statut agricole, qu'il s'agisse des questions liées au foncier, aux exploitations, à la production ou de celles liées au statut professionnel et social.
Par ailleurs, la production de sel issue des marais salants, comme c'est le cas dans ma circonscription, notamment sur l'île de Noirmoutier, est corrélée au cycle de la nature, en particulier celui du soleil et celui du vent.
Cette production, recueillie de manière artisanale, représente un poids économique important sur notre territoire national : 550 producteurs réalisent 40 millions d'euros de chiffre d'affaires.
Aujourd'hui, ce n'est qu'au travers de mesures dérogatoires que les saliculteurs peuvent bénéficier de dispositifs liés au statut agricole.
Cette situation est particulièrement inconfortable, et pour le moins incertaine, pour des professionnels qui sont les garants de notre patrimoine, de la préservation des espaces naturels et des magnifiques paysages que constituent les marais salants.
Elle pose des difficultés dans plusieurs domaines que vous connaissez bien : la sécurisation de l'activité salicole au sein des coopératives agricoles et la reconnaissance en organisation de producteurs.
Une modification de l'article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime sécuriserait la situation de fait des coopératives et des sociétés de forme agricole exerçant une activité salicole.
Elle permettrait de garantir la pérennité d'un savoir-faire ancestral, assurerait de meilleures conditions d'exploitation au sein de la filière et sécuriserait une profession dont la mission dépasse largement la récolte manuelle de sel.
En effet, les saliculteurs ou sauniers sont des acteurs incontournables d'un point de vue touristique, et ils participent très activement à l'attractivité des territoires concernés.
Leurs exploitations sous la forme d'oeillets sont particulièrement prisées et visitées dans nos départements touristiques, ce qui démontre à quel point la population y est attachée.
Monsieur le ministre, nous avions alerté votre prédécesseur Stéphane Travert sur le sujet et il nous avait donné son accord. Malheureusement, cela n'a pu voir le jour.
Aujourd'hui, il faut agir vite. Êtes-vous comme lui favorable à cette modification, pour que nous puissions rapidement corriger cette « anomalie » et ainsi permettre aux acteurs de cette filière, qui participent fortement à l'attractivité de notre ruralité, d'être sécurisés, soutenus et accompagnés dans un statut correspondant réellement au métier qu'ils exercent ?
Merci pour votre question, monsieur le député, qui recouvre plusieurs sujets.
L'attractivité de nos territoires et de la ruralité est essentielle, comme en témoigne le débat actuel. La ruralité souffre, et elle n'a nul besoin d'être handicapée par des mesures qui dégraderaient cette attractivité. Le statut agricole de cette filière et de ces organisations de producteurs est tout aussi important.
Je voudrais vous répondre très clairement et très précisément.
Vous déplorez que l'activité salicole ne soit pas assimilée à une activité agricole au titre de l'article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime. Le fait que les saliculteurs n'aient pas le statut d'agriculteurs peut poser des problèmes dans plusieurs domaines, comme la sécurisation de l'activité salicole au sein de coopératives ou la reconnaissance en organisation de producteurs. Du point de vue social, la pratique administrative assimile toutefois les saliculteurs à des agriculteurs, puisqu'ils sont affiliés à la Mutualité sociale agricole, la MSA, et sur le plan économique, la non-reconnaissance actuelle des saliculteurs comme agriculteurs n'a pas d'impact : le sel ne figurant pas à l'annexe I du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, ils n'ont pas accès aux aides européennes.
Lors de l'examen du projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et une alimentation saine et durable, dite loi EGALIM, certains amendements proposant des modifications de l'article L. 311-1 ont été déposés, mais ils ont été rejetés car ils ont été considérés comme des cavaliers ou comme contraires à l'article 40. Je crois cependant savoir que votre groupe ne serait pas opposé au dépôt d'une proposition de loi portant sur ce sujet, et je peux vous dire très officiellement que le Gouvernement vous soutiendra. Les services du ministère de l'agriculture et de l'alimentation seront prêts à travailler avec vous pour vous aider, dans ce cadre, à pérenniser un savoir-faire ancestral et assurer le développement économique de la saliculture.
Merci, monsieur le ministre. J'ai bien pris note du soutien du Gouvernement à la modification du statut des saliculteurs et de sa volonté de mettre fin à une anomalie qui perdure depuis 1988. Je crois que votre réponse va réchauffer bien des coeurs sur le littoral vendéen et ligérien, du côté de Noirmoutier comme de Guérande.
La parole est à M. Nicolas Dupont-Aignan, pour exposer sa question, no 527, relative aux méthodes d'abattage et à la transparence pour le consommateur.
Différentes associations, notamment l'association L214, ont exposé au grand jour les pratiques scandaleuses auxquelles se livrent certains abattoirs dans notre pays, pratiques qui déconsidèrent une profession qui consent beaucoup d'efforts par ailleurs. L'opinion s'est émue à juste titre de ce mépris pour la souffrance animale, au point que certains mouvements ont pris prétexte de ces actes barbares pour promouvoir une alimentation sans viande. Cette façon de répondre à un excès par un autre excès risque de déstabiliser toute notre filière agricole.
Depuis 1964, un décret rend obligatoire l'étourdissement des animaux de boucherie avant leur mise à mort. Ce texte a été repris par plusieurs directives européennes, et le règlement no 10992009 du Conseil européen a réaffirmé cette obligation d'étourdissement. Toutefois, il a été admis que des dérogations pourraient être accordées pour les méthodes d'abattage prescrites par des rites religieux. En France, ce régime s'applique en particulier aux rites juif et musulman. Or selon une enquête de l'Œuvre d'assistance aux bêtes d'abattoirs, l'OABA, plus de la moitié des établissements pratiqueraient l'abattage sans étourdissement. La chambre interdépartementale d'agriculture d'Île-de-France estime que le nombre d'animaux abattus selon un rituel religieux dépasserait très largement les besoins des minorités religieuses concernées. Cette situation s'explique par le fait que des parties non consommées par les croyants sont vendues dans le circuit commercial conventionnel pour des raisons économiques. Si l'on peut admettre, au nom du principe constitutionnel de liberté de conscience et de religion, que je ne remets pas en cause, qu'il faut garantir aux croyants la possibilité de consommer de la viande issue de méthodes d'abattage rituelles, on doit aussi, en vertu du même principe, garantir aux non-croyants, ou aux croyants d'autres confessions, qu'ils ne consomment pas ce type de viande à leur insu.
En attendant le dialogue que le Président de la République s'est engagé à nouer avec les représentants des cultes juif et musulman – que j'ai personnellement rencontrés – afin de mettre progressivement fin à l'abattage sans étourdissement comme le demandent les associations de défense du bien-être animal, il conviendrait de passer rapidement à une étape transitoire qui consisterait à rendre obligatoire l'étiquetage des modes d'abattage des animaux de boucherie.
Bien sûr.
La filière ovine et bovine risque sinon d'être en proie à la colère des consommateurs, ce qui remettrait en cause tout notre modèle agricole. Les consommateurs doivent être informés en toute transparence de la nature du produit qu'ils consomment et avoir la liberté de choisir selon leurs croyances et leurs convictions. Je souhaiterais savoir quelle est la position du Gouvernement à ce sujet.
Votre question renvoie d'abord à la liberté de choix des consommateurs. Je l'ai dit tout à l'heure, personne ne peut imposer à un citoyen français ce qu'il doit manger : ceux qui veulent manger de la viande doivent pouvoir manger de la viande et ceux qui ne veulent pas en manger doivent pouvoir ne pas en manger. Comme vous, j'ai rencontré récemment l'OABA. Le Gouvernement est favorable au caractère obligatoire de l'étiquetage du mode d'abattage des animaux de boucherie. Cela n'a pas été retenu à ce stade et le Gouvernement le regrette, car il lui paraît important d'assurer une plus grande traçabilité pour les consommateurs.
Les actes de cruauté constituent un autre problème. Ils doivent être poursuivis. Nous avons fait fermer l'abattoir de Boischaut dans l'Indre au mois de novembre, car il ne respectait pas les normes, et je déciderai sans trembler d'autres fermetures si elles s'imposent. Les intrusions dans les abattoirs doivent elles aussi être condamnées. Des mesures ont déjà été prises dans la loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et une alimentation saine et durable, dite loi EGALIM, et peut-être faudra-t-il aller plus loin.
L'abattage sans étourdissement relève de la liberté de culte. Vous avez rencontré, comme moi, les représentants des cultes juif et musulman. Nous devons regarder les choses de près et avancer. Appelons un chat un chat : nous savons très bien que pour des raisons économiques, certaines parties d'animaux de boucherie abattus de manière rituelle sont revendues dans le circuit conventionnel. Nous n'avons pas encore eu d'autorisation pour rendre obligatoire l'étiquetage du mode d'abattage. Nous continuons à oeuvrer en ce sens. Bref, il y a trois aspects dans votre question : les actes de vandalisme, qui doivent être combattus et dénoncés ; le choix des Françaises et des Français de manger ce qu'ils veulent comme ils veulent, y compris dans le cadre rituel ; et enfin l'étiquetage. Je vais poursuivre le travail sur ce sujet.
Votre réponse me réjouit, monsieur le ministre. J'ai toutefois une interrogation, car la Commission européenne est hostile aux dérogations – c'est la France qui les avait obtenues. Je ne remets pas en cause ces dérogations, mais je crois que l'étiquetage constituerait un bon moyen de réconcilier les consommateurs de viande avec la filière agricole.
La parole est à M. Benoit Potterie, pour exposer sa question, no 505, relative à l'agenda rural français.
Madame la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, je souhaiterais vous interroger sur un sujet qui suscite beaucoup d'attentes dans nos territoires ruraux. Ce n'est pas nouveau, ceux-ci se sentent abandonnés. Le dialogue entamé entre le bureau des maires ruraux et le Gouvernement est vu favorablement par l'ensemble des maires ruraux, qui saluent le fait que le Premier ministre ait réaffirmé la place et le rôle de la commune. Ils soulignent l'engagement du Gouvernement de ne pas fermer l'accès des communes rurales aux futurs services de l'Agence nationale de la cohésion des territoires. Cette nouvelle entité, composée de services d'ingénierie de l'État, était initialement calibrée pour ne servir que les établissements publics de coopération intercommunale, les EPCI. En étant ouverte aux communes, elle pourra les aider dans leur développement. Le président de l'association des maires ruraux du Pas-de-Calais m'a fait part de l'importance de faire de cette agence un outil opérationnel, sous la forme d'un guichet ouvert aux communes.
L'Association des maires ruraux de France demande au Gouvernement de soutenir l'agenda rural européen, autrement dit de s'appuyer sur la ruralité de notre pays pour le développer. Elle salue l'engagement pris par le Gouvernement de travailler à l'élaboration d'un agenda rural français, mission qui vous a été confiée, madame la ministre. Afin de maintenir le dialogue de proximité avec les maires ruraux de ma circonscription, j'aimerais savoir s'il est envisageable d'obtenir de votre part des éléments concrets sur la mise en oeuvre de cet agenda.
La parole est à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Monsieur le député, l'Agence nationale de la cohésion des territoires est destinée en priorité aux communes et aux territoires qui auront un projet. Je parle de « territoires » au sens large, car il n'y a pas de limitation dans les collectivités territoriales concernées. Vous savez peut-être que c'est le président de l'Association des maires de France qui a demandé qu'une telle agence soit créée. Dans chaque département, c'est le préfet qui servira de porte d'entrée aux services de cette agence, à la demande des élus locaux.
L'agenda rural européen prévoit qu'un agenda rural soit élaboré dans chacun des vingt-huit États membres, et le Gouvernement a bien l'intention de travailler à la mise en place d'un agenda rural national dans une démarche de co-construction. Nous nous nourrirons des propositions formulées par les territoires et par leurs habitants, notamment dans le cadre du grand débat national qui va s'ouvrir. Nous avons par ailleurs commencé les consultations avec les associations d'élus, en particulier l'Association des maires ruraux de France. Il nous faudra élaborer ensemble cet agenda rural.
La parole est à M. Charles de la Verpillière, pour exposer sa question, no 513, relative à la tarification du raccordement final sur les réseaux d'initiative publique.
Madame la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, ma question, assez technique, j'en conviens, concerne le tarif de raccordement des abonnés sur les réseaux publics de fibre optique dénommés réseaux d'initiative publique ou RIP. Ces réseaux sont construits soit par les délégataires, soit, cas plus rare, par la collectivité territoriale qui en a pris l'initiative. C'est notamment le cas du réseau de l'Ain, construit et exploité par le syndicat intercommunal d'énergie et de e-communication de l'Ain, le SIEA. Il dessert déjà 230 communes. Avec 115 240 logements et bâtiments éligibles et 37 820 abonnés, c'est l'un des plus développés de France.
Sur ces réseaux publics, le raccordement final des abonnés, du point de branchement dans la rue à la prise terminale dans le logement, est effectué par l'opérateur du réseau, qui le refacture au fournisseur d'accès à internet. Or les fournisseurs d'accès nationaux exigent des tarifs de raccordement très bas, alors que le coût réel avancé par l'opérateur public du réseau est double, voire triple, dans certaines zones rurales de montagne ou certaines zones frontalières comme le pays de Gex dans l'Ain. Pour attirer les fournisseurs d'accès et rentabiliser leurs réseaux, les RIP sont donc amenés à compenser la différence avec de l'argent public. À défaut, les négociations n'aboutissent pas et c'est l'avancement du plan France Très Haut Débit qui s'en trouve retardé.
Il est donc urgent d'aboutir à une tarification équitable et incontestable, reflétant les coûts réels de raccordement en zone peu dense, et c'est à l'État d'en prendre la responsabilité. L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes – ARCEP – avait prévu de lancer une consultation à ce sujet en 2018. Malheureusement, elle a été repoussée à 2019. D'où ma question, madame la ministre : que pouvez-vous faire pour apporter rapidement une solution définitive à ce problème ?
La parole est à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
L'aménagement numérique des territoires, nous le savons tous, est un enjeu fondamental d'équilibre entre tous les territoires. Les objectifs fixés par le Président de la République sont clairs : garantir un accès au bon débit dès 2020 et au très haut débit en 2022. Dans les zones rurales, ce sont, vous l'avez rappelé, les collectivités territoriales qui portent des projets de réseaux d'initiative publique – les fameux RIP – avec pour but d'apporter le très haut débit par le déploiement de la fibre optique jusqu'aux villages et jusqu'aux abonnés. Elles bénéficient dans leurs projets du soutien de l'État, qui subventionne ceux-ci à hauteur de 3,3 milliards d'euros.
Félicitations, d'ailleurs, pour ce que vous faites dans l'Ain, puisque, comme vous l'avez rappelé, vous êtes très en avance dans ce domaine.
Vous m'interrogez sur les conditions tarifaires dans lesquelles ces réseaux seront commercialisés auprès des fournisseurs d'accès à internet. C'est un sujet très technique. Le droit applicable résultant de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques prévoit que l'ARCEP adopte des lignes directrices portant sur les conditions tarifaires d'accès aux RIP.
Ces lignes directrices, adoptées fin 2015, doivent notamment garantir que les conditions tarifaires des RIP « prennent en compte l'apport d'aides publiques de manière à reproduire les conditions économiques d'accès à des infrastructures et à des réseaux de communications électroniques comparables établis dans d'autres zones du territoire en l'absence de telles aides. » Elles peuvent être mises à jour en tant que de besoin.
Dans ce cadre, l'ARCEP a examiné le tarif de gros du raccordement final. Il a été établi que ce dernier pouvait être fixé, de manière dérogatoire et transitoire, à 250 euros en lieu et place d'une tarification moyenne à 500 euros en vigueur dans les zones les plus denses du territoire. Cette dérogation a été instaurée afin de tenir compte des dispositions du cahier des charges du plan France Très haut débit, qui prévoient la possibilité de subventionner pour une durée de cinq ans les raccordements finaux dans les RIP afin de favoriser leur commercialisation.
L'ARCEP mène des travaux sur le raccordement final visant notamment
à en préciser les coûts. Conformément aux termes de la loi et si l'ARCEP l'estime opportun, ces travaux pourront mener à des mises à jour des lignes directrices et de la tarification des RIP. Le Gouvernement entend donc s'appuyer pleinement sur les futurs résultats des travaux du régulateur, pour répondre plus précisément à votre question. J'ai bien conscience du caractère encore insuffisant de cette réponse, puisque ces travaux sont en cours.
Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre, mais voyez bien qu'il y a urgence : les lignes directrices fixées par l'ARCEP en 2015 ne correspondent plus, ou ne correspondent pas, à la réalité des coûts de raccordement. Il faut très rapidement aboutir à une solution qui facilite la commercialisation sur les réseaux d'initiative publique.
La parole est à Mme Fannette Charvier, pour exposer sa question, no 501, relative à la sécheresse dans le Doubs.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur. Entre les mois de juillet et de décembre 2018, le département du Doubs a connu la plus grande sécheresse jamais enregistrée de son histoire.
Début septembre, la préfecture du Doubs a déclenché les procédures requises par le niveau « crise sécheresse » pour les bassins versants de l'Allan et de la Haute Chaîne du Doubs ; en octobre, cette alerte a été étendue au bassin des moyennes vallées du Doubs et de l'Ognon. Un mois plus tard, tout le département était concerné par ce phénomène d'une gravité et d'une durée inédites, résultant de la combinaison de l'année la plus sèche depuis 1949 et de la plus chaude depuis 2003.
Cette sécheresse a eu des répercussions très importantes sur les écosystèmes et le tissu économique et agricole local. Elle a également eu un impact direct sur l'accès à l'eau des habitants, puisque les trois quarts de la Franche-Comté ont été concernés par des limitations de la consommation d'eau potable.
Plusieurs dizaines de sinistres ont été recensés chez des particuliers, principalement des affaissements du sol et des fissures dans les murs. Ces particuliers attendent de pouvoir apporter des solutions à ces dégradations, mais font face à la procédure de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle au titre de la sécheresse, qui ne peut être engagée sans le rapport annuel de Météo France sur la sécheresse, réalisé à année échue, et qui devrait être diffusé en mai prochain. Les demandes de classement des communes en état de catastrophe naturelle pour une année n ne peuvent ainsi être traitées que l'année n+1, c'est-à-dire, dans ce cas, en mai 2019.
La procédure d'indemnisation, qui commence par la visite d'un expert, ne pourra être lancée qu'à partir de la date de classement, et les conséquences peuvent être lourdes, puisque cela signifie aussi que les travaux de sécurisation des habitations ne peuvent pas être réalisés à court terme.
Ma question porte donc, madame la ministre, sur les solutions qui pourraient être apportées afin d'accélérer ces procédures. Serait-il par exemple envisageable de se baser sur un rapport de situation locale précis de Météo France à la fin de l'événement de sécheresse ?
La parole est à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Je vous prie d'excuser le ministre de l'intérieur, qui m'a chargée de répondre à votre question. Un épisode de sécheresse-réhydratation des sols a touché le territoire métropolitain au cours du second semestre 2018, notamment dans le nord-est du pays.
Pour décider de la reconnaissance d'une commune en état de catastrophe naturelle, l'autorité administrative est tenue de se prononcer sur l'intensité anormale de l'agent naturel à l'origine des dégâts, et non sur l'importance des dégâts. Concernant l'aléa sécheresse, deux critères cumulatifs sont mis en oeuvre pour caractériser son intensité. Le premier est une condition géotechnique : un sol d'assise des constructions constitué d'argile sensible aux phénomènes de retrait ou de gonflement ; le second est une condition de nature météorologique : une sécheresse du sol d'intensité anormale.
Je comprends l'inquiétude des sinistrés face à un examen de leur demande qui peut leur paraître long. Mais ce délai est incompressible, puisque l'analyse de ce critère météorologique d'une sécheresse est réalisée, chaque année et pour tout le territoire, sur la base d'un rapport de Météo France, comme vous l'avez dit, pour l'ensemble de l'année écoulée.
Les demandes communales ne peuvent en conséquent être instruites qu'en année n+1, une fois toutes les données météorologiques de l'année effectivement recueillies. La réalisation de ce rapport nécessite un travail de plusieurs mois. Ainsi, le rapport relatif à l'année 2018 sera réalisé au cours du premier trimestre 2019.
Dans la mesure où des centaines de communes ont déjà déposé des demandes de reconnaissance, il convient d'expertiser l'ensemble des dossiers au regard des données techniques nationales consolidées, sans risquer une iniquité de traitement entre territoires.
Je souhaite cependant vous préciser que Météo France et les différents services de l'État concernés ont été sensibilisés sur la nécessité de traiter dans des délais raisonnables les demandes au titre de l'épisode de sécheresse-réhydratation des sols de l'année 2018. L'objectif est d'instruire l'ensemble des demandes reçues avant la fin du premier semestre 2019.
Je comprends tout à fait votre réponse, ainsi que les exigences afférentes au classement d'une commune. Il me semblait toutefois que dans le Doubs, la condition météorologique était évidemment remplie, puisque le fleuve Doubs a lui-même disparu, notamment dans le Haut-Doubs, et qu'il était par conséquent envisageable d'accélérer la procédure. Je comprends en tout cas l'effort fourni par Météo France pour tenter de procéder au classement avant la fin du premier semestre.
La parole est à M. Rémi Delatte, pour exposer sa question, no 514, relative à l'indemnisation des conséquences de la sécheresse.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur. Vous venez de le dire, madame la ministre : la sécheresse, que ce soit lors de son dernier épisode de 2018 ou lors des précédents, a eu des conséquences importantes sur les constructions, notamment sur des sols argileux qui connaissent un phénomène de retrait-gonflement important.
Ce phénomène fragilise la structure des bâtiments : on constate alors des fissures dans les dalles et les murs. Parfois, les dégâts sont beaucoup plus importants. Ainsi, plusieurs familles de ma circonscription, en Côte-d'Or, voient leur pavillon menacé d'effondrement. Ils doivent aujourd'hui envisager la démolition et la reconstruction pures et simples de l'édifice. Chacun devine bien sûr les conséquences financières que cela induit, et qui se cumulent avec les annuités des emprunts contractés pour l'acquisition du bien.
Je souhaite donc savoir quelles mesures le Gouvernement entend prendre dans ces cas précis, particulièrement graves. Indépendamment des délais que vous venez de rappeler, qui sont beaucoup trop longs, et des critères de déclaration de l'état de catastrophe naturelle, dont les procédures restent assurément à réviser, qu'envisagez-vous pour garantir l'indemnisation des propriétaires quand se cumulent la non-reconnaissance éventuelle de l'état de catastrophe naturelle et, bien sûr, l'extinction de la garantie décennale ?
La parole est à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Je ne répéterai pas ce que j'ai déjà dit à votre collègue, mais son intervention et la vôtre, que je pourrais compléter par la mienne, font apparaître – et cela me permet de lui répondre au sujet de la situation du Doubs…
… mais aussi de la Côte-d'Or et du Loir-et-Cher, où je connais aussi ce même phénomène – que beaucoup de départements ont été touchés. C'est l'une des conséquences des perturbations climatiques.
Des mesures ont été prises pour essayer d'accélérer les procédures, effectivement très longues pour les personnes concernées. Je rappelle que le déploiement de l'application informatique iCatNat, que vous connaissez sûrement, mise en place au début de 2018, permet le dépôt et la transmission dématérialisés de l'ensemble des demandes communales de l'année 2018 recensées aujourd'hui de façon plus systématique et plus rapide.
Météo France et les services de l'État ont évidemment été sensibilisés à la nécessité de traiter dans des délais raisonnables ces demandes. Cependant, l'exploitation des données météorologiques n'a pu débuter qu'une fois l'année 2018 écoulée. Le rapport 2018 sera ainsi terminé au premier semestre 2019.
Les critères mis en oeuvre par l'autorité administrative seront révisés en 2019. Cette révision poursuit plusieurs objectifs, dont la prise en compte de l'amélioration des connaissances scientifiques et le souci de rendre plus lisibles les critères mis en oeuvre pour les responsables communaux et les sinistrés. Ainsi, un effort de présentation de ces critères sera réalisé.
L'ensemble de ces mesures devrait permettre aux services de l'État d'instruire plus rapidement toutes les demandes communales reçues.
Enfin, le processus d'indemnisation relève des garanties prévues en cas de catastrophe naturelle, ainsi que des garanties décennales des constructeurs souscrites auprès des compagnies d'assurance. Le recours à un dispositif d'aide ne saurait être mis en oeuvre avant l'examen des procédures classiques d'examen et de recours gracieux ou contentieux, dans les délais prévus.
Je voulais préciser tout cela, mais pour être passée par le ministère de l'intérieur avant d'occuper mes fonctions actuelles, je sais tout l'effort consenti par ses services pour rendre plus rapide le traitement des dossiers.
Il importe en effet de tenir compte du besoin d'accélération et de simplification de la procédure de classement. En revanche, vous n'avez pas complètement répondu à la deuxième partie de la question : si par hasard la commune n'est pas classée en zone de catastrophe naturelle, et si la garantie décennale est éteinte, on se trouve devant une vraie inconnue. Vous avez certes fait allusion à une voie de recours, mais il faut pouvoir aider les personnes qui se trouvent dans cette situation. Pour certaines d'entre elles, elle est proprement catastrophique.
La parole est à M. Pierre-Yves Bournazel, pour exposer sa question, no 525, relative à la sécurité à Paris.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.
Le 9 novembre 2018, le Conseil d'État a condamné la ville de Paris et l'État pour « carence fautive » en matière de salubrité et de sécurité dans le quartier Château-Rouge. Le Conseil d'État a donné raison aux habitants qui se mobilisent depuis des années pour l'amélioration de leur qualité de vie. Le mérite en revient à l'association La Vie Dejean, qui a porté l'action en justice. Ces Parisiens ont légitimement le droit à la même tranquillité, à la même propreté des rues et à la même diversité commerciale que le reste de la capitale.
Le renforcement de l'action de la préfecture de police depuis 2017 a permis une amélioration de la situation, grâce à une augmentation des interpellations et des saisies de marchandises. Je me réjouis également de l'expérimentation de la police de sécurité du quotidien à partir de cette année. Toutefois, nous devons, pour apporter une réponse durable, tirer toutes les conclusions de cette décision inédite condamnant l'État et la ville et qui peut faire jurisprudence. Paris ne peut demeurer plus longtemps enfermée dans le carcan de l'arrêté du 12 messidor an VIII. Il est aujourd'hui indispensable de mener une réforme structurelle de l'organisation de la sécurité dans la capitale, ce qui passe notamment par la création d'une police municipale.
C'est l'intérêt de la ville de Paris que d'assumer pleinement ses responsabilités, en matière notamment d'occupation illégale du domaine public et de lutte contre les incivilités. C'est également l'intérêt de l'État, qui pourra se concentrer plus efficacement sur ses missions de police nationale, notamment la remontée des filières mafieuses. C'est surtout l'intérêt des Parisiens de bénéficier d'un service de tranquillité et de sécurité, comme dans toutes les autres grandes villes de France et d'Europe.
Je me réjouis que l'idée d'une police municipale, que je défends depuis 2013, fasse son chemin. Des élus de différentes sensibilités y sont désormais favorables, ce qui démontre que ce sujet d'intérêt général dépasse les étiquettes politiques. La maire de Paris elle-même, qui s'était toujours opposée à cette proposition, déclare ne plus en faire un tabou et semble se résoudre à la création d'une police municipale. Il est désormais temps d'avancer de manière constructive.
Plus que jamais, il est devenu indispensable de mettre nos concitoyens en situation de trancher démocratiquement cette question qui les concerne directement. C'est pourquoi j'ai proposé à la maire de Paris de leur soumettre ce débat, qui pourrait utilement être organisé au cours du premier semestre 2019.
Madame la ministre, cette avancée pour le quotidien des Parisiens ne pourra se faire sans une évolution législative et un travail en bonne intelligence avec le ministère de l'intérieur et la préfecture de police. Le Gouvernement est-il prêt à entamer un dialogue avec la ville de Paris sur la modernisation de la sécurité dans notre capitale ? Est-il prêt à créer les conditions d'une police municipale à Paris ?
La parole est à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Monsieur le député, je vous apporte la réponse du ministre de l'intérieur.
Vous savez que le préfet de police dispose, à Paris, de la compétence générale en matière de police. Il est responsable en matière de sécurité, d'ordre public et de sécurité civile. La maire de Paris dispose de pouvoirs de police d'attribution, qui se sont élargis au fil du temps, jusqu'à la loi du 28 février 2017 relative au statut de Paris. Ainsi, la police de la salubrité sur la voie publique et la police de la conservation du domaine public communal relèvent du champ de compétence de la maire de Paris, qui exerce également la compétence générale en matière de circulation et de stationnement.
Cette répartition garantit l'unité de décision juridique et la cohérence opérationnelle dans la gestion de la sécurité. Il ne paraît donc pas souhaitable de la remettre en cause.
Par ailleurs, la maire de Paris dispose aujourd'hui d'un nombre important d'agents de surveillance, qui jouissent d'un ensemble de prérogatives judiciaires. Ils peuvent, par exemple, appliquer les arrêtés de police pris par la maire de Paris, ainsi que certains arrêtés pris par le préfet de police, tels que ceux qui interdisent la consommation et la vente à emporter d'alcool sur la voie publique. Ils peuvent également intervenir pour verbaliser le stationnement gênant des vendeurs à la sauvette ou constater les atteintes à la salubrité publique, et mettre à la disposition des services de police en matière de lutte contre les stupéfiants les auteurs présumés de ces infractions.
Je tiens à vous assurer que le dialogue entre la préfecture de police et la ville de Paris sur les sujets de sécurité sont constants. Les modalités de coordination ont, par ailleurs, été revues lors de la loi précitée. Le principe d'opérations coordonnées est ainsi prévu. Cette coordination doit être approfondie, les pouvoirs du préfet de police n'empêchant nullement une étroite complémentarité entre l'action de l'État et celle de la ville de Paris.
Je vous ai répondu, monsieur le député, avec les mots du ministre de l'intérieur et les données qu'il m'a transmises. Je vous remercie de votre compréhension.
La séance, suspendue quelques instants, est immédiatement reprise.
La parole est à Mme Émilie Cariou, pour exposer sa question, no 510, relative à l'offre médico-sociale.
Madame la ministre, ma question, qui s'adresse à Mme Cluzel, secrétaire d'État chargée des personnes handicapées, porte sur les personnes en situation de handicap et le cas du territoire où je suis élue, la Meuse.
Nous savons notre majorité et le Gouvernement particulièrement engagés dans l'amélioration de la vie des personnes en situation de handicap. Mme Cluzel s'est rendue en novembre 2018, dans la Meuse, au congrès national de l'association Nous aussi, avec l'ADAPEI 55 – Association départementale de parents et d'amis des personnes handicapées mentales – , pour défendre et faire connaître toute notre action en faveur des personnes en situation de handicap, notamment en faveur de leur droit de vote.
Vous nous trouverez évidemment aux côtés du Gouvernement pour soutenir également, avec force et vigilance, l'accès largement amélioré aux complémentaires santé avec la fusion de l'ACS – aide au paiement d'une complémentaire santé – et de la CMU-C – couverture maladie universelle complémentaire – , ou encore la revalorisation en novembre 2019 de l'allocation adulte handicapé, qui sera portée à 900 euros par mois.
Je vous interroge sur une problématique plus spécifique, celle du déploiement efficace de nos mesures de solidarité en faveur des personnes en situation de handicap sur l'ensemble du territoire et, plus précisément, dans notre département frontalier lorrain. Le déficit de structures de prise en charge des personnes en situation de handicap est une réalité à laquelle se trouvent confrontées ces personnes et leurs familles. La proximité de la Belgique et l'offre importante de celle-ci en la matière rendent plus complexes encore le bon développement de notre offre dans la Meuse.
Je souhaite être informée des projections d'investissement en la matière, en France et en Meuse, sur les trois prochaines années, en vue d'apporter aux personnes concernées des conditions d'accueil et de prise en charge de qualité, au plus proche des familles, autorisant une intégration sociale optimale, sujet très important en zone rurale.
Je vous interroge également sur la coordination de nos efforts avec les pays frontaliers mieux dotés structurellement, comme la Belgique, et sur l'ensemble des mesures d'accompagnement permettant d'assurer que lors de la période de transition durant laquelle l'offre française rattrapera son retard, il ne soit jamais porté atteinte à la continuité de la prise en charge des personnes en situation de handicap.
Enfin, comment notre stratégie d'offre dans le domaine médico-social peut-elle s'accompagner de mesures cordonnées permettant de prévoir, dans le cadre de ces structures médico-sociales, des outils de maintien de la démographie des professionnels de santé dans les territoires ruraux ?
La parole est à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Madame la députée, je vous lis la réponse de Mme la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées : « L'accueil en Belgique de personnes en situation de handicap est un phénomène ancien, qui peut répondre à des motivations personnelles dans un parcours de vie librement choisi, liées à la proximité de ces établissements pour des transfrontaliers. C'est particulièrement le cas pour les personnes originaires du Grand Est, troisième région d'origine des quelque 7 500 enfants et adultes accompagnés par un établissement wallon.
Toutefois, l'accueil en Belgique traduit aussi trop souvent l'absence de solutions d'accompagnement adaptées aux besoins et attentes des personnes handicapées dans certains territoires. Il est donc essentiel d'assurer la meilleure prise en charge possible des personnes accueillies en Belgique et d'éviter les départs contraints.
Pour garantir un accompagnement de qualité en Belgique, un accord-cadre a été signé en décembre 2011 entre la France et la Wallonie. Entré en vigueur en mars 2014, il permet d'assurer une meilleure connaissance des situations et un contrôle des établissements d'accueil associant les autorités françaises selon des critères identiques à la réglementation française. J'ai tenu à présider personnellement en mars 2018, à Louvain-la-Neuve, la troisième réunion de la commission mixte qui supervise cet accord. Nous avons pu vérifier son bon fonctionnement, notamment dans la réalisation d'inspections communes, dont le nombre a progressé de 80 % entre 2015 et 2017.
Ma priorité est, par ailleurs, d'éviter les départs contraints et d'organiser le retour dans les meilleures conditions des personnes qui n'ont pas fait le choix de la Belgique. Depuis ma prise de fonctions, j'ai doublé, puis triplé, dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019, l'enveloppe des crédits mise en place pour prévenir ces départs : elle s'établit aujourd'hui à 45 millions d'euros.
Ces crédits, répartis entre les régions les plus concernées, doivent permettre de financer trois types de solutions de proximité sur le territoire national : des interventions directes de professionnels spécialisés au domicile, à l'instar des pôles de compétences et de prestations externalisées ; des renforts de personnels dans les établissements médico-sociaux en proximité des personnes accompagnées ou de leur famille ; des créations de nouvelles solutions dans des établissements et services médico-sociaux.
J'ai demandé aux ARS – agences régionales de santé – de prendre spécifiquement en considération les personnes concernées dans le cadre de leurs nouveaux projets régionaux de santé – PRS – , afin d'augmenter le nombre des solutions d'accompagnement, en poursuivant la réduction des files d'attente et des délais, en mettant fin aux accompagnements inadéquats, et en s'attachant à résoudre les cas complexes que les ARS identifient désormais avec plus de précision. Le PRS de la région Grand Est reprend cet objectif inclusif.
Afin d'aller plus vite et plus loin, j'ai enfin souhaité que la question des personnes handicapées accueillies en Belgique soit un des chantiers nationaux de la grande conférence nationale du handicap « Tous concernés, tous mobilisés », lancée le 3 décembre dernier. Nous rendrons compte, dans un événement de clôture en juin, placé sous l'égide du Président de la République, du travail dont le pilotage a été confié à l'ARS des Hauts-de-France. »
La parole est à Mme Michèle Victory, pour exposer sa question, no 522, relative à l'école départementale de musique et de danse de l'Ardèche.
Je souhaite appeler l'attention du Gouvernement sur la baisse de la participation de l'État au fonctionnement du conservatoire départemental de musique et de danse de l'Ardèche opérée à travers les aides de la direction régionale des affaires culturelles, la DRAC.
En 2001, ce projet ambitieux a permis de regrouper 134 communes, 16 antennes où ont lieu les cours, 1 488 élèves et 107 agents sur un territoire complexe que vous avez d'ailleurs visité récemment, madame la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Nous parlons de communes très rurales, en montagne ou dans la vallée du Rhône.
Malgré la belle réussite de ce projet, des difficultés de gouvernance liées à la structure et à son coût de fonctionnement élevé sont apparues. L'école départementale fait aujourd'hui face à une crise financière grave qui met en péril sa pérennité et, par là même, l'ambition d'une formation artistique à la hauteur des enjeux de développement de nos territoires ruraux et péri-urbains et d'une plus grande égalité dans l'accès aux pratiques artistiques.
La participation de l'État, qui s'élevait à 233 000 euros en 2011, n'a cessé de baisser pour atteindre 10 000 euros. Cette baisse de 96 % en sept ans, qui a été justifiée par un résultat d'exercice négatif, s'est accompagnée cette année d'une quasi-suppression des aides de la région Auvergne-Rhône-Alpes, passées de 100 000 euros en 2011 à 2 000 euros en 2018.
Dans le même temps, les élus ont veillé à baisser le montant des dépenses, imposant aux salariés des mesures sévères qui cristallisent le mécontentement des personnels.
Seul le conseil départemental de l'Ardèche témoigne de son engagement sans faille depuis 2001 en faisant passer sa subvention de 1,293 million d'euros à 1,4 million euros en 2018.
Nous le savons, nos concitoyens ne sont pas tous logés à la même enseigne en ce qui concerne l'accès à la culture. Encore bien trop souvent, le milieu social des jeunes a une forte incidence sur leur goût pour les pratiques artistiques, en particulier musicales. Le ministère de la culture doit pourtant jouer un rôle fondamental de garant de ce combat pour l'égalité.
Madame la ministre, quelle réponse pouvez-vous apporter aux élus locaux qui se mobilisent au quotidien pour faire vivre les activités culturelles en Ardèche ? Quels engagements pouvez-vous prendre devant nous pour préserver l'accès à la culture dans nos territoires ruraux ?
La parole est à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
La démarche de structuration et de développement de l'enseignement de la musique et de la danse en Ardèche, dont vous avez rappelé les grands objectifs et les principaux résultats, participe d'une politique d'aménagement culturel du territoire et de démocratisation de la culture pilotée par le département de l'Ardèche depuis le début des années 2000 et impliquant de très nombreuses communes du territoire, conformément à la répartition des compétences entre les collectivités locales en matière d'enseignements artistiques spécialisés.
Cette démarche volontariste et ambitieuse a été accompagnée de manière exceptionnelle par l'État à travers des subventions versées par la direction régionale des affaires culturelles Auvergne-Rhône-Alpes jusqu'en 2013. L'Ardèche était le seul département de la région à ne disposer d'aucun conservatoire à rayonnement régional ou départemental classé éligible à une aide au fonctionnement. Cette politique a permis le classement de l'école départementale dans la catégorie des conservatoires à rayonnement intercommunal pour une durée de sept ans arrivant à échéance en 2019.
À compter de 2012, comme tous les conservatoires de France, l'école départementale a subi le retrait progressif des financements de l'État, dont le réengagement s'effectue prioritairement, depuis 2016, au niveau des établissements régionaux ou départementaux et sous la forme d'aides aux projets annuelles. C'est dans ce cadre que le ministère de la culture attribue, depuis 2017, une aide de 10 000 euros au conservatoire Ardèche musique et danse issu de l'école départementale. Cette aide a vocation à être maintenue ou adaptée dans l'avenir, en fonction de l'évolution du projet du conservatoire, de l'effort nécessaire des communes et intercommunalités bénéficiaires du dispositif, ainsi que de la mise en cohérence des enseignements du conservatoire avec ceux des établissements d'enseignement artistique existant par ailleurs en Ardèche.
Le département de l'Ardèche est un territoire dans lequel le ministère de la culture entretient, depuis 2007, un engagement privilégié et constant, à travers la signature de quatre conventions de développement culturel successives – la dernière porte sur la période 2017-2019 – et de trois conventions de développement de l'éducation artistique successives – celle en cours porte sur la période 2018-2022 – associant le département, la DRAC, la région, la direction académique des services de l'éducation nationale – DASEN – et la caisse d'allocations familiales – CAF. L'engagement financier de l'État en Ardèche au titre du soutien au développement culturel s'est établi à 3,3 millions d'euros en 2018.
Madame la ministre, je vous remercie pour votre réponse. Effectivement, le montant global des aides de l'État au département de l'Ardèche est très important. Cependant, le conservatoire départemental de musique et de danse manque de subventions de fonctionnement et les difficultés auxquelles il se trouve actuellement confronté vont probablement obliger les élus à revoir l'intégralité de leur copie – beaucoup d'élus envisagent d'ailleurs de se retirer de cette école, qui est véritablement en crise. Il faudra que le ministre de la culture se penche une nouvelle fois sur cette question.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à onze heures cinq, est reprise à onze heures dix.
La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon, pour exposer sa question, no 496, relative à la situation des jeunes Réunionnais.
Bonne année 2019 à vous tous ici présents dans cet hémicycle !
Madame la ministre des outre-mer, nos jeunes Réunionnais connaissent une situation extrêmement difficile et sont touchés de plein fouet par les inégalités qui séparent La Réunion de l'Hexagone. Ainsi, en 2013, seuls 36 % des 16-29 ans étaient scolarisés à La Réunion, contre 42 % dans l'Hexagone. Un tiers de nos jeunes quittent le système scolaire sans avoir obtenu de diplôme. Aujourd'hui, la situation reste inchangée. Comment comptez-vous régler cela, madame la ministre ?
Autre préoccupation : chaque année, environ 2 200 étudiants quittent La Réunion avec le bac pour aller étudier dans l'Hexagone. Arrivés ici, ces étudiants sont souvent livrés à eux-mêmes : ils enchaînent les galères d'inscription, de logement et de vie à 9 500 kilomètres de toute attache familiale. Les parents sont totalement désemparés. Madame la ministre, êtes-vous prête à étudier l'instauration d'un guichet unique afin que chaque jeune et chaque parent soit accompagné de A à Z, quelle que soit la situation sociale de la famille ?
Qu'ils soient restés sur leur île natale ou qu'ils y reviennent, la recherche d'un travail est plus compliquée pour les jeunes Réunionnais que pour les jeunes vivant dans l'Hexagone. Ainsi, 30 % de nos jeunes diplômés trouvent un emploi dans l'année suivant la fin de leurs études, alors qu'ils sont 62 % – le double – à trouver un travail dans le même délai dans une région hexagonale. Cette situation n'a fait qu'empirer l'an dernier : en effet, le chômage des jeunes a augmenté de 4 points.
Madame la ministre, notre jeunesse se désespère. Elle ne croit plus en une classe politique qui n'a jamais réussi à régler les problèmes qui pourrissent notre société. Depuis que vous êtes ministre, rien n'a vraiment changé. L'an dernier, selon l'INSEE, notre territoire a vu disparaître 14 000 contrats aidés. Dites ce que vous voulez, pensez ce que vous voulez de ces emplois, mais sachez que chez nous, ils assurent une véritable mission de service public dans différents domaines et apportent à nos jeunes une première expérience professionnelle. L'instauration de la sélection à l'entrée de l'université, l'augmentation des frais d'inscription et la dérégulation de l'apprentissage vont continuer à amplifier les problèmes de notre île.
Madame la ministre, quand allez-vous mettre en place une réelle politique économique créatrice d'emplois et, plus globalement, une vraie politique d'insertion de nos jeunes ? S'il vous plaît, sur ces sujets, répondez-moi honnêtement et franchement, car les Réunionnaises et les Réunionnais ont le sentiment que vous leur avez menti lors de votre dernier passage dans notre île. Rien sur la transparence sur les emplois aidés !
Mon cher collègue, si vous voulez que Mme la ministre vous apporte une réponse, il faut qu'elle dispose d'un petit peu de temps de parole.
Je termine, monsieur le président.
Je disais donc, madame la ministre, que vous avez fait un certain nombre d'annonces mais que nous avons le sentiment que vous nous avez menti. J'aurai l'occasion de revenir sur ces mensonges, mais les Réunionnaises et les Réunionnais veulent maintenant vous entendre parler de la jeunesse. Merci de votre réponse.
La jeunesse est notre priorité. Vous le savez, la lutte contre le décrochage scolaire et contre toutes les inégalités de destin est au coeur du projet du Président de la République. Si le Gouvernement a décidé de dédoubler certaines classes et si le ministre de l'éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, a mis en oeuvre le dispositif « Devoirs faits », c'est justement pour apporter des réponses concrètes en la matière.
Mais l'école n'est pas tout. C'est pourquoi M. le secrétaire d'État Gabriel Attal a souhaité que le service civique soit accessible à tous les jeunes, notamment aux plus éloignés de la formation et de l'emploi. Cet accompagnement est une priorité. D'ailleurs, près de 2 750 places « garantie jeunes » seront offertes cette année à La Réunion.
En outre-mer, nous disposons aussi d'un outil puissant : le service militaire adapté, qui permet à près de 6 000 jeunes de suivre des formations professionnelles, avec un taux d'insertion exceptionnel, qui atteint 77 %.
Faisant de l'information un outil essentiel pour que chacun soit libre, nous avons aussi annoncé plusieurs mesures dans le cadre du Livre bleu. La ministre du travail, Muriel Pénicaud, s'est engagée à financer à hauteur de 253 millions d'euros, à La Réunion, le programme d'investissements dans les compétences.
Il faut certes former, mais il faut aussi que les entreprises embauchent – vous avez raison de le rappeler. Ma priorité est de mener et de gagner la bataille de l'emploi. La réforme que j'ai menée dans le but de parvenir à zéro charge pour une majorité de salariés devra porter ses fruits. À La Réunion, j'ai pris l'engagement d'instaurer un compteur d'emplois en face du soutien apporté aux entreprises. Nous allons investir dès cette année près de 1,9 milliard d'euros par an et il faut obtenir des résultats en termes d'emploi.
Je comprends et je connais les difficultés que rencontrent nos jeunes lorsqu'ils viennent s'installer en métropole. C'est la raison pour laquelle j'organise chaque année, dans la continuité de ce qui a été fait précédemment, le Forum des étudiants des outre-mer et c'est aussi pour cela que l'opérateur qu'est l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité – LADOM – accompagne 1 000 jeunes réunionnais dans le cadre du passeport mobilité pour la formation professionnelle. Il nous faut, là aussi, retravailler pour que LADOM puisse faire plus aux côtés des collectivités territoriales, qui ont aussi leurs programmes.
Comme vous le savez, nous avons également signé la semaine dernière une convention avec EDF en vue de créer un vivier de futurs techniciens spécialisés qui reviendront dans leurs territoires. Monsieur le député, le premier contrat signé l'a été avec un Réunionnais.
Pour ce qui est des contrats aidés, je serai très claire : vous savez très bien que La Réunion est un territoire dynamique en la matière, avec 11 000 contrats aidés qui seront disponibles cette année, comme l'an dernier. J'avais du reste annoncé, à La Réunion, 1 000 nouveaux contrats. C'est aujourd'hui chose faite : en l'espace de quatre semaines, ces 1 000 emplois ont bien été attribués par l'intermédiaire de Pôle emploi, comme je l'avais également annoncé.
Vous m'interpellez enfin à propos du désenclavement.
Madame la ministre, nous avons dépassé le temps alloué à cette question.
Monsieur le député, je serai chez vous dans trois mois et je rendrai des comptes sur toutes mes annonces. Comme vous le savez, je travaille dans la transparence et dans la confiance.
La parole est à Mme Isabelle Rauch, pour exposer sa question, no 504, relative au dispositif MEDINF 57.
Ma question, qui s'adresse à Mme la ministre des solidarités et de la santé, concerne le dossier MEDINF 57. Le plan « ma santé 2022 » entend promouvoir les communautés professionnelles territoriales de santé, afin de désencombrer les urgences grâce à des permanences de jour pour des soins non programmés et des urgences non vitales. Ce modèle existe depuis 2012 dans ma circonscription, sous la forme d'un cabinet libéral de soins immédiats et non programmés, installé dans une clinique privée et dénommé MEDINF 57. Le service rendu est important, notamment en proposant aux patients une alternative aux urgences du centre hospitalier régional. Cette offre est complémentaire de la médecine libérale, puisque c'est souvent vers elle que les généralistes orientent des patients pour des interventions immédiates ou rapides, qu'ils ne prennent pas en charge.
Ce modèle empirique n'a pas d'autre statut juridique que celui d'une société d'exercice libéral à responsabilité limitée. Or, le succès du fonctionnement d'une telle structure dépend étroitement de sa pharmacie, qui détermine le type de soins que le centre médical de soins immédiats peut proposer à ses patients. Pour se procurer les spécialités pharmaceutiques indispensables à sa mission de soins auprès de la patientèle, celui-ci doit faire appel au fournisseur le plus compétitif.
Pour une telle structure, le coût d'achat de ces médicaments est acceptable et viable auprès d'une centrale d'achat de type de la Centrale de référencement et conseil santé – CACIC. À défaut, non seulement le coût des médicaments est multiplié par six, mais certaines spécialités indispensables à son fonctionnement, comme le paracétamol injectable, ne sont pas accessibles et la fonction intermédiaire entre la médecine libérale et les urgences n'est plus assurée.
Or, à l'heure actuelle, la condition indispensable pour accéder à une telle centrale est d'être considéré comme « établissement de santé ». Plusieurs échanges ont déjà eu lieu avec l'Agence régionale de santé – ARS – Grand Est, laquelle semble partager la pertinence et l'intérêt du modèle.
Ma question est donc double. Tout d'abord, comment, dans la mise en oeuvre du programme « ma santé 2022 », prendre appui sur l'existant et lever les incertitudes juridiques pesant sur les expérimentations qui existent déjà dans certains territoires en leur accordant un statut dérogatoire qui leur permettrait d'avoir librement accès à une centrale d'achat ? Ensuite, l'expérimentation permise par l'article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 peut-elle en constituer le cadre pertinent et juridiquement stable pour favoriser l'émergence et la consolidation du modèle ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Madame la députée, je connais votre investissement sur ce sujet et l'enjeu spécifique qu'il peut représenter sur votre territoire. Comme vous le savez, l'Agence régionale de santé – ARS – Grand Est a lancé en 2018 une mission sur l'accès aux soins urgents et non programmés, dans un contexte sensible, marqué par des difficultés croissantes au sein des services des urgences et une démographie médicale en tension.
L'enjeu, dont, avec vous, nous reconnaissons l'importance, est donc bien de faciliter l'accès aux soins non programmés et aux urgences, en améliorant la pertinence des prises en charge et l'articulation des différentes structures de soins.
Le développement des centres de soins non programmés est identifié comme une priorité régionale, et c'est dans ce cadre que s'inscrit l'accompagnement de l'Agence régionale de santé auprès du cabinet MEDINF. Celui-ci est actuellement situé dans les locaux d'une clinique et il apporte un véritable service à la population en répondant aux besoins de son territoire en termes de soins non programmés. Le cabinet fonctionne en secteur 2 et les honoraires facturés par les praticiens permettent de couvrir les actes médicaux, les actes infirmiers, les médicaments et les frais de fonctionnement. À la demande de ce cabinet, l'accès à la pharmacie à usage intérieur – PUI – de la clinique est désormais possible et effectif depuis janvier 2019.
L'ARS Grand Est souhaite labelliser ce centre en centre de soins non programmés et aboutir à un modèle économique viable dans le cadre d'un passage en secteur 1. L'ARS a mis au point un modèle de financement des centres de soins non programmés qui a vocation à permettre le financement des surcoûts et, en contrepartie, à supprimer les dépassements d'honoraires.
Certains points restent cependant à conforter – je pense notamment aux liens avec les médecins traitants, qui doivent être développés. Une réflexion avec le service d'aide médicale urgente – SAMU – et les urgences de Thionville doit être engagée sur le circuit de transfert des patients, tout comme sur l'élargissement des horaires d'ouverture en soirée.
Merci, madame la secrétaire d'État, pour ces réponses. Je me réjouis que, depuis janvier 2019, ce centre puisse avoir accès aux médicaments de la pharmacie. Je vous remercie également pour votre engagement à lever toutes les entraves qui peuvent exister, afin de faire avancer ce dossier.
Je ne manquerai pas de rester vigilante et de vous accompagner, si nécessaire, pour ce qui concerne ces cabinets qui permettent un réel désengorgement des urgences et une meilleure prise en charge des patients sur l'ensemble du territoire.
La parole est à M. José Evrard, pour exposer sa question, no 528, relative à la mise en oeuvre d'un pouvoir judiciaire.
Madame la ministre de la justice, garde des sceaux, en demandant à son administration de la justice d'être sévère à l'égard des gilets jaunes, le Président de la République nous rappelle le peu de cas que la tête de l'État fait de l'indépendance de la justice, proclamée à tous les instants et dont lui-même se trouve être le garant.
La dépendance est aussi bien pratique que théorique, car, au pays de Montesquieu, l'administration de la justice n'est pas un pouvoir, mais une autorité dépendante de l'exécutif, un instrument du pouvoir. Le message est entendu et une répression judiciaire sans précédent est en action. La clémence n'est pas accordée aux gilets jaunes et l'État de droit, qui a pour objet de légitimer l'action publique, ne s'applique qu'aux individus dangereux que la lâcheté et le manque de place en prison laissent en liberté.
Oui, l'État de droit est considéré par nos compatriotes comme quelque chose d'incompréhensible, éloigné de leurs préoccupations et au service d'un petit nombre de privilégiés. Si un doute subsistait encore à cet égard, les récentes démonstrations judiciaires de la campagne de l'élection présidentielle ont montré qu'il y avait bien deux poids et deux mesures dans ce domaine et que celles-ci pouvaient exercer leurs ravages dans la zone théoriquement protégée du débat démocratique.
Les difficultés dans lesquelles se débat aujourd'hui votre gouvernement – votre pouvoir, au sens large – tiennent en grande part à l'usage qui fut fait, lors de la campagne présidentielle, de l'administration de la justice, en particulier du parquet national financier.
Mettre sous le même vocable de « justice » l'action de poursuivre et l'action de juger ressortit à l'ambiguïté française. C'est le règne de la confusion des genres. Ce n'est pas nouveau mais, dans le contexte de l'élection présidentielle, c'est le coeur du dispositif démocratique qui a été touché. On ne peut donc plus réformer, mais il faut refonder.
La réponse se trouve dans l'organisation de la sécurité des Français, mission régalienne essentielle, et de la justice, dont je brosse ici les grands traits.
La justice s'exerce dans les tribunaux, dont l'indépendance est fondamentale pour son exercice. Il faut donc s'engager vers l'élection des magistrats exerçant dans les tribunaux. Seule l'élection assurera l'indépendance effective de nos juges. C'est ce qu'on définit communément comme étant le pouvoir judiciaire.
À l'indépendance devra correspondre la proximité avec les justiciables. La sécurité met en oeuvre des policiers, des structures et des magistrats. C'est le regroupement de ces personnels dans un grand ministère de la sécurité qui donnera l'efficacité nécessaire que souhaitent les Français face à la montée inexorable de la criminalité.
La mise en oeuvre d'un pouvoir judiciaire est à l'ordre du jour. Dans les faits, n'est-il pas temps, madame le ministre, de le mettre en mouvement ?
Certes, ce changement est du domaine constitutionnel. Un référendum sur ce sujet a toute sa place dans la République française. Le référendum d'initiative populaire pourra sans aucun doute s'en saisir.
Ces dernières années, notre législation a évolué dans le sens d'une plus grande indépendance des magistrats, notamment de ceux du parquet, pour ce qui concerne tant l'exercice leurs fonctions que les conditions de leur nomination.
La loi du 25 juillet 2013 interdit les instructions individuelles. Seule subsiste, à l'article 30 du code de procédure pénale, la possibilité pour le garde des sceaux d'adresser aux magistrats du ministère public des instructions générales de politique pénale, disposition ayant pour unique but d'assurer l'égalité des citoyens devant la loi sur tout le territoire de la République. Vous voyez donc qu'au titre de cette loi, le Gouvernement ne peut transmettre aucune instruction individuelle à aucun parquet.
Pour ce qui est du statut des magistrats du parquet, la réforme constitutionnelle de 2008 a confié la présidence du Conseil supérieur de la magistrature – CSM – , initialement dévolue au Président de la République, au premier président de la Cour de cassation et au procureur général près cette même cour. Le projet de loi constitutionnelle adopté par les deux assemblées en 2016, mais qui n'a jamais été proposé au Congrès, proposait de modifier les modalités de nomination des magistrats du parquet, en prévoyant un avis conforme du CSM. Il proposait aussi de faire de ce dernier le conseil de discipline de ces magistrats.
Le projet de révision constitutionnelle qui a été présenté au Parlement au printemps dernier, et dont l'examen a débuté à l'Assemblée nationale, reprend ces dispositions, qui renforcent l'indépendance des membres du parquet.
Cependant, conformément à l'article 20 de la Constitution, « le Gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation ». À ce titre, il doit orienter la politique pénale par des instructions générales qui ne remettent nullement en cause l'indépendance des magistrats du parquet. Le Conseil constitutionnel a d'ailleurs confirmé, dans une décision récente du 8 décembre 2017, que ces dispositions assuraient une conciliation équilibrée entre le principe d'indépendance de l'autorité judiciaire et les prérogatives que le Gouvernement tient de l'article 20. Reflet de cette spécificité, l'article 5 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 relative au statut des magistrats place les magistrats du parquet sous l'autorité du garde des sceaux.
Cette autorité, qui s'exerce donc via des instructions de politique pénale générale, ne remet pas en cause leur indépendance. En effet, les magistrats du parquet disposent seuls du pouvoir de déclencher l'opportunité des poursuites, et leur parole à l'audience est libre.
Cette organisation ne remet donc pas en cause le principe de la séparation des pouvoirs à la française. Vous voyez, monsieur le député, que l'indépendance des magistrats, notamment de ceux du parquet, est assurée.
La parole est à M. Guillaume Chiche, pour exposer sa question, no 508, relative au service de psychiatrie de l'hôpital de Niort.
Madame la secrétaire d'État auprès de Mme la ministre des solidarités et de la santé, je souhaite vous interroger sur les conditions de travail du personnel soignant et les conditions d'hospitalisation des patients au sein du service de psychiatrie du centre hospitalier de Niort. Ce dernier entre aujourd'hui dans son cent vingt-septième jour de grève – cent vingt-sept jours qui sont le reflet de nombreux jours de fatigue, de désarroi, de détresse, de danger et d'abandon. Sachez, madame la secrétaire d'État, que le service de psychiatrie dans son ensemble est endeuillé par cette situation.
Le département des Deux-Sèvres est le plus sinistré en terme de nombre de médecins. Les psychiatres ne font pas exception à cette règle. Il y a urgence, compte tenu de l'insuffisance des moyens humains et matériels dont dispose la structure.
L'ouverture de nouveaux postes et de meilleures conditions de travail permettraient de remettre l'humain au centre des préoccupations et de rétablir la sécurité dans l'exercice de la profession. À l'heure où la santé mentale représente environ 20 % des dépenses nationales liées à la santé, la psychiatrie ne peut plus attendre.
Le 28 juin dernier, lors de la présentation de la feuille de route pour la santé mentale et la psychiatrie, la ministre des solidarités et de la santé, Agnès Buzyn, a annoncé des mesures visant à soutenir une offre en psychiatrie accessible, diversifiée et de qualité.
En termes de financement, il a été décidé, d'une part, d'allouer une enveloppe de 50 millions d'euros à la psychiatrie et, d'autre part, de dégeler 415 millions d'euros pour les hôpitaux dans leur globalité. Pourriez-vous nous préciser, concernant l'enveloppe de 50 millions d'euros réservés à la psychiatrie, le montant exact qui sera alloué au centre hospitalier de Niort ?
De plus, l'ARS Nouvelle-Aquitaine nous a fait savoir que l'hôpital de Niort bénéficierait de 759 000 euros au titre des 415 millions d'euros de crédits dégelés. Pouvez-vous nous confirmer qu'il s'agit bien d'argent supplémentaire, s'ajoutant aux crédits issus de l'enveloppe de 50 millions d'euros ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Vous avez souhaité appeler l'attention du Gouvernement sur deux questions. La première porte sur les conditions de travail des personnels et les conditions d'hospitalisation des patients au sein du service de psychiatrie du centre hospitalier de Niort ; la seconde concerne, plus largement, la situation générale de la psychiatrie en France.
Vous avez raison, la situation de la démographie médicale et soignante dans le secteur de la santé mentale dans les Deux-Sèvres est compliquée, mais le conflit social que vous évoquez est aujourd'hui en phase d'extinction, grâce à un dialogue social de qualité conduit par la direction de l'établissement depuis le mois de septembre 2018. Ce dialogue a permis d'aboutir à la signature d'un protocole de fin de conflit, partagé par trois organisations syndicales sur quatre. L'accord global permet de renforcer les équipes en accélérant les recrutements infirmiers, de convenir de modalités de remplacement favorisant la qualité de vie au travail et de faciliter les passages en CDI pour le personnel paramédical.
S'agissant des moyens alloués au centre hospitalier de Niort, je vous confirme que l'établissement bénéficiera de 750 000 euros supplémentaires par rapport aux dotations attribuées au cours de l'année 2018, au titre du dégel des crédits annoncé en décembre.
Concernant la situation générale de la psychiatrie, vous connaissez notre engagement en faveur de ce secteur, qui s'est traduit, dès la fin de l'année 2018, par l'octroi de moyens financiers pérennes supplémentaires : 50 millions d'euros, dont 91 000 pour le centre hospitalier de Niort. Notre feuille de route sur la santé mentale et la psychiatrie vise l'amélioration des conditions de vie, l'inclusion sociale ainsi que l'amélioration de l'accès aux soins et aux accompagnements. Nous favorisons une approche transversale de la politique de santé mentale, territorialisée, dans une dynamique d'« aller vers » et de renforcement du pouvoir d'agir des patients. Le centre hospitalier de Niort dispose d'atouts importants pour s'approprier pleinement ces orientations et y contribuer par ses actions.
Je vous remercie pour ces précisions ainsi que pour l'engagement de l'exécutif gouvernemental en faveur de la psychiatrie dans le centre hospitalier de Niort et, plus globalement, pour la situation des hôpitaux.
Je souhaite préciser que, dans le cadre du mouvement social existant dans ce centre hospitalier, un certain nombre d'accords ont été passés entre la direction et des organisations syndicales. Il serait de bon ton de réunir une nouvelle fois l'ensemble des acteurs sociaux autour de la table des négociations afin de trouver une issue collective entre les professionnels de santé et la direction du centre hospitalier de Niort, pour aller toujours plus avant dans l'amélioration des conditions de travail et d'accueil du patient.
La parole est à M. Christophe Naegelen, pour exposer sa question, no 524, relative aux infrastructures de santé dans les Vosges.
L'hôpital de Remiremont est l'hôpital public effectuant le plus d'actes chirurgicaux dans les Vosges. L'hôpital de Remiremont est la maternité publique effectuant le plus d'accouchements dans le département. L'hôpital de Remiremont est le poumon sanitaire de la montagne vosgienne, de ses vallées et d'une partie du territoire franc-comtois.
J'ai eu l'occasion d'interpeller la ministre Agnès Buzyn sur le sujet à de nombreuses reprises. C'est pourquoi je vous demande aujourd'hui de confirmer que l'hôpital de Remiremont maintiendra sa maternité en niveau 2A, conservant ainsi le service de néonatalité, son service des urgences vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept, et qu'il y aura une juste répartition des services de chirurgie et de médecine avec Épinal et ce, sans déshabiller l'hôpital romarimontain.
De plus, je vous remercie de me confirmer que, dans le cadre du plan « ma santé 2022 », cet hôpital sera bien classé dans la catégorie des établissements dits spécialisés.
Par ailleurs, je me permets de vous soumettre l'idée de développer l'hôpital romarimontain, par exemple avec la création d'un centre spécialisé dans la maladie de Lyme.
Un hôpital doit marcher sur deux jambes : le côté « activités », évoqué en propos liminaire, mais aussi, le côté « humain ». Plus que dans n'importe quelle autre activité, en secteur hospitalier, l'humain doit être au centre de l'organisation. Comment peut-on défendre un projet sans humanité, sans explication, sans y associer toutes les parties prenantes ? Ma dernière question porte donc sur le management en milieu hospitalier : quelles actions comptez-vous mener afin que les directeurs se montrent plus humanistes et plus respectueux envers leurs équipes ? Que comptez-vous mettre en place pour que les élus locaux soient davantage associés aux instances décisionnaires ? Je pense notamment à de vrais pouvoirs pour les présidents de conseils de surveillance.
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Monsieur le député, je vous remercie pour votre question. Je sais que le sujet de la qualité des services et des infrastructures de santé dans votre circonscription – la troisième circonscription des Vosges – vous tient à coeur et je ne peux que saluer votre investissement et votre travail.
Comme vous le savez, un contrat de performance 2018-2022 sera signé d'ici fin janvier entre l'agence régionale de santé Grand Est et les centres hospitaliers d'Épinal et de Remiremont afin de redresser leur situation financière particulièrement dégradée. La mise en oeuvre de ce contrat de performance sera fortement accompagnée par l'ARS Grand Est durant toute la période du contrat, pour un montant total de plus de 35 millions d'euros. Les travaux ont porté à la fois sur la performance interne et sur la performance de l'organisation territoriale de l'offre, afin de proposer une organisation cohérente, graduée et équilibrée de l'offre de soins, en adéquation avec les ressources disponibles.
Les communautés médicales des deux établissements doivent travailler à un projet médical permettant de répondre aux besoins de la population et garantissant à terme la pérennité de l'offre de soins hospitaliers dans ce territoire. L'offre qui sera ainsi organisée s'inscrira dans le cadre de la stratégie de transformation du système de santé : le plan « ma santé 2022 » prévoit ainsi que chaque hôpital devra à l'avenir adapter ses organisations en fonction du type de soins délivrés.
À ce stade des travaux, des engagements ont été pris par l'ARS pour maintenir les deux maternités et les deux sites opératoires d'Épinal et de Remiremont. S'agissant du projet d'un centre spécialisé dans la maladie de Lyme au centre hospitalier de Remiremont, celui-ci pourra être étudié dans le cadre du projet médical du groupement hospitalier de territoire et au regard des nouvelles orientations pour la prise en charge des maladies vectorielles.
Enfin, le ministère des solidarités et de la santé veille à prendre soin de ceux qui soignent. Aussi, nous veillons particulièrement à ce que les valeurs humanistes et de respect des équipes soient partagées par tous les professionnels hospitaliers.
Je vous remercie pour vos propos et particulièrement pour votre dernière phrase, car les valeurs humanistes sont essentielles.
Personne ne connaît mieux les territoires que les élus. Or signer un contrat de performance que le président du conseil de surveillance lui-même a refusé de signer, comme cela s'est produit à Remiremont, revient une fois de plus à passer par-dessus les élus, et c'est dommageable. Certes, il y a la fonction publique et les hauts fonctionnaires, mais ce sont les élus qui connaissent le mieux le territoire. C'est pourquoi, dans ma dernière question, je vous demandais si le Gouvernement avait une vision sur ce sujet : je vous demande vraiment d'y penser, car il faut remettre nos élus au centre du dispositif et donner de vrais pouvoirs au président de conseil de surveillance.
La parole est à M. Sébastien Jumel, pour exposer sa question, no 499, relative à la dotation en psychiatrie de l'hôpital de Dieppe.
Vous connaissez mon engagement à défendre l'hôpital de Dieppe dans sa capacité à répondre aux besoins de santé tels qu'ils sont mesurés dans les diagnostics territoriaux. Je veux remercier Agnès Buzyn – le compliment est suffisamment rare pour être souligné – d'avoir répondu à notre demande de rebasage de la dotation budgétaire en psychiatrie pour prendre en compte une situation de plus en plus intenable en Normandie. J'espère que la dotation de 400 000 euros sera pérennisée.
Mais je souhaite ce matin vous interpeller sur un autre sujet grave. L'hôpital de Dieppe, établissement support d'un groupement hospitalier de territoire à dimension humaine, s'est profondément modernisé. Parallèlement, la communauté médicale a élaboré un projet médico-soignant partagé ambitieux, pour offrir aux habitants de notre territoire une réponse de santé adaptée. Or, à Dieppe, la comparaison entre effectif réel et effectif théorique, établie en s'appuyant sur des indicateurs objectifs, fait apparaître un écart préoccupant, un déficit d'emplois médicaux qui s'accentue rapidement et même se généralise.
Les deux tiers des disciplines fonctionnent désormais en sous-effectifs – je tiens les tableaux précis à votre disposition. Retenez que l'anesthésie, la radiologie, les urgences, la pédiatrie, l'oncologie, les soins de suite et de réadaptation, la psychiatrie, la pédopsychiatrie et l'addictologie sont en très grande tension, tandis que les autres secteurs, tels que la gynéco, l'ORL, la biologie, la médecine interne ou la gériatrie, sont en fragilité, et cela, alors que notre hôpital connaît une croissance de son activité qui n'a pas d'équivalent en Normandie, voire en France. Cet établissement gagne en effet 1 000 séjours par an depuis de nombreuses années, ce qui témoigne de l'ampleur des besoins médico-sociaux de notre territoire, caractérisé par une population fragile et défavorisée.
Sans attendre les effets d'un numerus clausus desserré ni l'augmentation des formations que vous souhaitez déconcentrer, des moyens existent pour aider un hôpital tel que le nôtre à faire face à une telle crise de croissance, comme le fléchage des assistants spécialistes régionaux et l'affectation de médecins internes ; d'autres pistes pourraient être envisagées, comme une rémunération plus incitative pour les professionnels, qui ne choisissent jamais par hasard de travailler dans un hôpital public.
Madame la secrétaire d'État, pour veiller à un aménagement équilibré du territoire dans le domaine de la santé, quelles mesures concrètes, précises, entendez-vous prendre pour soigner un hôpital à dimension humaine comme le nôtre ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Monsieur le député, conformément aux engagements pris et en relation avec la feuille de route nationale sur la psychiatrie et la santé mentale, l'agence régionale de santé de Normandie a engagé des travaux sur la dotation annuelle de fonctionnement avec les établissements de santé exerçant des activités de psychiatrie. Un groupe de travail a débuté son activité il y a un an, avec pour objectif de formuler des propositions sur le périmètre et les règles de modulation des financements. À l'issue de ces réflexions, il a été décidé d'engager une modulation progressive et, au titre de l'année 2017, l'établissement s'est vu attribuer une dotation exceptionnelle non reconductible de 388 000 euros.
Une enveloppe nationale pérenne de 50 millions d'euros a été présentée à la fin de l'année 2018 afin de soutenir durablement les activités de psychiatrie. Cette enveloppe a été répartie entre les régions, la Normandie bénéficiant ainsi de 1,3 million d'euros, dont 415 000 euros pour le centre hospitalier de Dieppe. L'enveloppe régionale sera divisée de manière pérenne en 2019 et la répartition s'appuiera sur les critères issus des travaux régionaux de modulation au profit des établissements les moins dotés, dont l'hôpital de Dieppe.
Concernant la présence médicale à l'hôpital de Dieppe, nous avons bien conscience des difficultés dont vous nous faites part. Aussi, le projet de loi que nous vous présenterons dans quelques semaines sera la première pierre de la restructuration des soins de proximité et la constitution d'un collectif de soins. Des ponts et des outils de coopération seront facilités entre l'hôpital, la ville et le secteur médico-social. L'exercice coordonné a vocation à se développer, la gradation des soins à être clarifiée et assumée pour fluidifier le parcours des patients et améliorer la qualité, la sécurité et la pertinence des soins dispensés.
Enfin, le chantier du financement et de la tarification, que vous mentionnez en filigrane, se poursuit. Une première étape a déjà été franchie avec le vote dans la loi de financement de la sécurité sociale de la rémunération forfaitaire des pathologies chroniques – diabète et insuffisance rénale chronique notamment.
Madame la ministre, je veux tout d'abord vous remercier pour la précision de votre réponse. La pérennisation de la dotation en faveur de la psychiatrie est une bonne nouvelle. J'en prends acte avec satisfaction.
Je prendrai bien évidemment part au débat sur le projet de loi relatif à la santé, de manière à proposer une vision des choses qui sera peut-être quelque peu différente de la vôtre, et en tout cas complémentaire. Je souhaiterais toutefois que, sans attendre ce texte, vous examiniez, en liaison avec l'ARS, comment, grâce aux outils qui sont à votre disposition, on pourrait procéder à des rééquilibrages, notamment par le fléchage des assistants spécialistes régionaux et des médecins internes vers des hôpitaux comme le nôtre, voire par l'assouplissement des critères de rémunération : comme vous le savez, l'attractivité des postes en dépend.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour exposer sa question, no 523, relative à la reconnaissance des travailleurs de l'amiante.
À l'origine d'un scandale sanitaire dans les années 1990 en France, causant 3 000 décès par an dans notre pays, l'amiante est aujourd'hui encore au coeur du combat de nombreux anciens salariés exposés. Dans le territoire du sud de l'Isère dont je suis l'élue, plusieurs cas illustrent la difficulté que rencontrent les salariés et anciens salariés pour faire reconnaître leur exposition.
Je pense en particulier aux anciens salariés de la Compagnie des mines de La Mure, mines fermées définitivement en mars 1997. Ils se battent pour faire reconnaître l'exposition de l'ensemble des salariés, et pas uniquement de ceux qui descendaient au fond des mines. Une délégation a été reçue par la direction générale du travail, en ma présence, il y a plus de dix-huit mois. Depuis, nous n'avons aucune nouvelle.
Je pense aussi aux salariés du groupement d'intérêt économique Cevco situé à Pont-de-Claix. Ce GIE a été créé par les sociétés Rhône-Poulenc et Chloralp en 1997. Les salariés du site, initialement propriété de Rhône-Poulenc, puis du GIE Cevco en 1997 et de Chloralp en 2002, ont travaillé dans les mêmes conditions, au même endroit, tout au long de ces années. Les sociétés Rhône-Poulenc et Chloralp figurent au titre du site de Pont-de-Claix sur la liste des établissements ayant fabriqué des matériaux contenant de l'amiante, liste qui a été fixée par arrêté ministériel. De manière étonnante, le GIE Cevco, en revanche, n'y figure pas.
Dans ce cas particulier, il s'agirait simplement d'appliquer des arrêtés existants, comme celui du 23 août 2013 modifiant et complétant la liste des établissements de fabrication, flocage et calorifugeage à l'amiante susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, dont l'article 2 prévoit que « sont réputés figurer à [cette] liste ces mêmes établissements lorsqu'ils ont, sous une dénomination différente, exercé la même activité ». Les outils juridiques existent donc, mais ils ne semblent pas être appliqués.
Derrière ces situations qui paraissent découler de lenteurs administratives, il y a des femmes et des hommes : des salariés ou anciens salariés qui souffrent déjà des pathologies de l'amiante, d'autres qui vivent avec l'angoisse de développer un jour de graves maladies.
Madame la secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, pouvez-vous nous dire ce que vous comptez faire concrètement afin d'accélérer la reconnaissance de tels établissements et faciliter les démarches pour ces femmes et ces hommes envers lesquels l'État français a un devoir ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Madame la députée, j'ai bien entendu les inquiétudes et les difficultés que vous relayez et que connaissent les salariés qui ont été exposés à l'amiante au cours de leur carrière pour accéder au dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante. Depuis sa mise en place, ce dispositif a permis le départ en préretraite de près de 100 000 personnes. Toutefois, la loi a retenu les activités pour lesquelles le risque lié à l'amiante était le plus élevé et n'envisage pas la prise en compte de toutes les situations d'exposition.
La situation des établissements que vous citez est complexe. Chacun ici a bien conscience que les réponses apportées sont très sensibles pour les personnes concernées.
Le syndicat CGT des mineurs de La Mure a sollicité l'inscription de l'unité d'exploitation du Dauphiné sur les listes du dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante et une délégation de ce syndicat ainsi que vous-même avez été reçus à la direction générale du travail en juillet 2017. Il ressort de cet entretien que cet établissement n'entre pas dans le champ d'application du dispositif, les entreprises minières et assimilées étant soumises à une organisation spéciale de sécurité sociale pour les risques en matière de maladie, d'accidents du travail et de maladies professionnelles, ainsi que de vieillesse et d'invalidité.
Concernant la plateforme chimique du Pont-de-Claix, celle-ci était à l'origine détenue par la société Rhône-Poulenc, dont les activités ont été progressivement cédées à des établissements distincts. Certains d'entre eux ont été inscrits sur la liste des établissements de fabrication, flocage et calorifugeage à l'amiante susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation pour la période comprise entre 1916 et 2005. La situation des salariés du groupement d'intérêt économique Cevco du Pont-de-Claix n'a été soulevée que récemment. Une procédure contentieuse est pendante devant la cour d'appel de Grenoble. La question de l'application de l'article 2 de l'arrêté du 23 août 2013 que vous avez cité devrait être tranchée après l'audience prévue le 4 avril 2019. Toutes les conclusions de cette décision seront tirées.
Merci pour ces précisions, madame la secrétaire d'État.
Je prends bonne note de la tenue de l'audience du 4 avril, qui statuera sur la situation du site du Pont-de-Claix. Je serai évidemment très attentive à la décision qui sera rendue. J'espère qu'elle débouchera sur une inscription du GIE Cevco sur la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, au même titre que les autres sociétés présentes sur le site.
Concernant les Charbonnages de France, j'ai bien compris que le problème relevait d'un secteur particulier, soumis à des dispositifs spécifiques, mais il ne faudrait pas ne pas le prendre en considération pour autant. Depuis le rendez-vous que nous avons eu à la direction générale du travail, nous n'avons reçu aucune réponse écrite nous signifiant ce que vous venez de dire et nous indiquant quel processus il faudrait entamer pour obtenir une reconnaissance. Il serait bon que l'on nous transmette ces informations. Par avance, je vous en remercie.
La parole est à M. Jean-François Eliaou, pour exposer sa question, no 509, relative au plan loup 2018-2023.
Ma question s'adresse au ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Dans la quatrième circonscription de l'Hérault, le pastoralisme fait partie intégrante de l'économie, de la culture et des traditions. Il permet de créer et de maintenir des emplois dans plusieurs filières, notamment dans la filière laitière, ainsi que de préserver des milieux naturels tels que le plateau du Larzac, le domaine de Restinclières à Prades-le-Lez, le bois de Saint-Sauveur à Saint-Clément-de-Rivière ou encore le lac du Salagou. En ce sens, cette activité est garante de la biodiversité – j'y insiste.
Depuis plusieurs années, de nombreux éleveurs s'inquiètent du danger que le loup représente pour leurs troupeaux. Le bilan estival publié le 6 décembre 2018 par l'Office national de la chasse et de la faune sauvage relève l'existence de quatre-vingt-cinq zones de présence permanente, ce qui correspond à onze zones de plus qu'en juin 2018. Le bilan fait aussi état de la présence de soixante-douze meutes dans toute la France, alors qu'en juin dernier, il n'y en avait que cinquante-sept. Au total, 430 loups ont été recensés durant l'hiver 2018, soit 70 de plus qu'il y a un an.
La convention de Berne, qui assure depuis 1979 la protection de l'espèce canis lupus, a été ratifiée par la France en 1990. Lors de sa réunion fin novembre, le comité permanent de la convention de Berne n'a pas répondu aux demandes de déclassement du loup de son statut d'espèce strictement protégée. Or le nombre d'ovins victimes du loup depuis le début de 2018 s'élève à plus de 11 600 dans tout le territoire national.
Le plan national d'actions sur le loup pour 2018-2023 a fixé le seuil de viabilité à 500 individus. Ce seuil, qui garantit l'existence pérenne d'une espèce, est dépassé ou sur le point de l'être. Quelles mesures seront prises pour la suite de l'application du plan national, qui semble avoir atteint son objectif pour ce qui est de la viabilité de l'espèce ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Monsieur le député, je vous remercie pour votre question, à laquelle je répondrai à la place de M. François de Rugy, ministre d'État, qui n'a malheureusement pu être présent dans l'hémicycle ce matin. Je sais combien vous êtes, monsieur le député, impliqué dans cette matière – nous avons déjà eu l'occasion d'en discuter à de nombreuses reprises.
Le plan national pour le loup et les activités d'élevage pour 2018-2023 comprend un ensemble de mesures destinées à concilier la présence du loup, espèce strictement protégée en France, et les activités d'élevage. Il vise notamment l'objectif d'atteindre au plus tard en 2023 une population minimale de 500 loups en France, chiffre considéré comme un premier seuil de viabilité démographique de l'espèce, non par nous, mais par le Muséum national d'histoire naturelle et l'Office national de la chasse et de la faune sauvage.
Aujourd'hui, dix mois après le lancement de ce plan, l'Office national de la chasse et de la faune sauvage estime qu'il est probable que l'effectif de loups en 2019 atteigne les 500 individus. Cette croissance des effectifs intervient dans un contexte marqué par le maintien d'un niveau élevé de dommages aux troupeaux – vous nous avez alertés sur ce fait à plusieurs reprises, monsieur le député. En 2018, cela aurait concerné environ 12 000 animaux. Il paraît donc nécessaire de définir de nouvelles modalités de gestion à appliquer dans le cadre du plan national d'actions en vue d'abaisser le taux de prédation sur les troupeaux.
C'est pourquoi le Gouvernement a lancé, à la fin de 2018, des travaux visant à définir les modifications à apporter au plan national d'actions avant la prochaine montée aux estives. Ces travaux porteront sur la prévention et l'indemnisation et incluent un avis scientifique de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage et du Muséum national d'histoire naturelle. Ils seront soumis à l'avis du conseil scientifique du plan loup, dont la constitution sera arrêtée courant janvier, ainsi qu'à celui du Conseil national de la protection de la nature. Les différents acteurs de ce dossier, notamment les représentants professionnels agricoles, les élus locaux et les associations de protection de la nature seront étroitement associés à cette réflexion, qui sera engagée sous la présidence du préfet de la région Auvergne-Rhône-Alpes, préfet « coordonnateur loup ». La prochaine réunion du groupe national est prévue dès la mi-février. Soyez assuré que nous vous tiendrons informé, monsieur le député.
Merci, madame la secrétaire d'État, pour cette réponse très précise, qui nous satisfait. Toutefois, j'insiste sur le fait que l'objectif initial est atteint ; il faut maintenant passer à l'étape suivante. Je vous ferai pour ma part une suggestion – sur un mode un peu humoristique : rebaptiser le plan national pour le loup « plan national pour le pastoralisme ». Ce serait très important symboliquement.
La parole est à M. Nicolas Turquois, pour exposer sa question, no 519, relative à la sécurité des bouteilles de gaz.
Je voudrais appeler l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur la sécurité des bouteilles de gaz domestique, notamment en ce qui concerne l'intervention des sapeurs-pompiers en cas d'incendie.
Dans ce cas en effet, la température monte très vite autour de 600 degrés et la pression du gaz à l'intérieur de la bouteille atteint 50 bars, à la suite de quoi celle-ci explose. Cela concerne non seulement les habitations, mais aussi les véhicules, du fait de la présence régulière de bouteilles dans les camping-cars ou dans de simples voitures utilisées pour se réapprovisionner en gaz.
L'installation d'une soupape thermofusible, qui permettrait la libération du gaz dès une centaine de degrés, éliminerait le danger lié à l'explosion. Un dispositif analogue a été installé sur les véhicules roulant au gaz de pétrole liquéfié – GPL – et plusieurs pays voisins ont d'ores et déjà adopté de tels dispositifs sur les bouteilles de gaz.
Madame la secrétaire d'État, tous les pompiers attendent une telle évolution. Un de leurs collègues du Morbihan a perdu la vie à la suite de l'explosion d'une bouteille de gaz, il y a une dizaine d'années. Depuis, on déplore de nombreux blessés parmi pompiers et civils. En outre, les blessés sont parfois plus gravement atteints, car, dans certaines situations, par crainte de la présence de bouteilles de gaz, les pompiers se tiennent à distance, ce qui peut rendre leurs interventions moins efficaces. Il y a donc urgence. Je souhaiterais connaître les raisons qui empêchent une telle évolution réglementaire en France et les moyens d'y remédier. La vie de nos sapeurs-pompiers mérite que cette question très technique bénéficie d'un traitement prioritaire.
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Monsieur le député, vous avez interrogé M. François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Ne pouvant être présent, il m'a chargée de vous répondre.
Auparavant, je tiens à présenter mes condoléances aux familles, aux proches et aux collègues des deux pompiers décédés en intervention ce week-end. J'ai une pensée émue pour eux.
Vous posez, monsieur le député, une question fondamentale. Plus que jamais, la sécurité des pompiers doit être au coeur des préoccupations du Gouvernement. Vous appelez notre attention sur le fait que certains représentants des sapeurs-pompiers proposent que les bouteilles de gaz soient obligatoirement munies de soupapes, celles-ci pouvant limiter, en cas d'incendie, le risque d'explosion, donc l'exposition des sapeurs-pompiers.
Les bouteilles de gaz sont soumises à la directive d'harmonisation européenne 201035UE, qui n'impose pas la présence de soupapes. Les bouteilles conformes à ce texte peuvent circuler librement sur tout le territoire de l'Union européenne. En France, la majorité des bouteilles de gaz n'est pas équipée de soupapes, le dispositif français étant celui d'un limiteur de débit, incompatible avec cette technique. Par conséquent, à l'issue d'échanges entre mes services et ceux d'incendie et de secours, le ministère a décidé de confier à l'Institut national de l'environnement industriel et des risques, INERIS, une étude qui devra déterminer les avantages et les inconvénients respectifs des différents dispositifs de sécurité, dans l'objectif d'analyser tous les risques, sans se limiter à ceux de l'incendie. Les résultats seront disponibles fin 2019 et permettront à la France, si cela s'avère pertinent, d'argumenter en faveur d'une évolution de la réglementation européenne en matière de conception des bouteilles de gaz. En effet, comme celles-ci peuvent circuler librement dans toute l'Union, ce n'est qu'à cette échelle qu'on peut obtenir une réponse. L'INERIS planche sur ce problème.
Madame la secrétaire d'État, j'ai bien entendu votre réponse. Je voudrais saluer le colonel Delaunay du SDIS 44 – service départemental d'incendie et de secours de Loire-Atlantique – qui s'est beaucoup investi dans ce dossier lorsque son collègue du Morbihan a perdu la vie. Il avait notamment alerté M. François de Rugy, alors député de Loire-Atlantique, sur le sujet. En revanche, permettez-moi d'émettre des doutes quant à la possibilité d'une harmonisation européenne. En effet, les bouteilles françaises correspondent à une norme strictement nationale et ne sont pas utilisables dans les pays voisins, dont plusieurs ont adopté des dispositifs de soupape thermofusible. La mission confiée à l'INERIS permettra de reprendre les expérimentations réalisées par le colonel Delaunay, qui méritaient sans doute d'être menées avec plus de précision. J'insiste cependant sur le caractère urgent du problème : il est indispensable qu'une évolution de la réglementation intervienne cette année ou l'année suivante.
La parole est à Mme Marguerite Deprez-Audebert, pour exposer sa question, no 520, relative au passage au gaz H dans les Hauts-de-France.
Madame la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, ma question concerne également le gaz, mais cette fois du point de vue de l'approvisionnement.
Les réseaux de gaz des Hauts-de-France sont actuellement alimentés en gaz B – pour bas pouvoir calorifique – par un gisement aux Pays-Bas en fin d'exploitation. Aussi, pour assurer la continuité d'approvisionnement après 2029, il est nécessaire de convertir le réseau de gaz B en gaz à haut pouvoir calorifique, dit gaz H, qui alimente actuellement le reste du territoire français. Outre les modifications des réseaux de transport et de distribution, ce projet d'ampleur nécessite une intervention chez chaque client. Du côté des consommateurs, professionnels comme particuliers, il faudra également procéder à quelques modifications : une adaptation de la pression devra être effectuée, tout comme un réglage des appareils.
La phase pilote, appelée opération Tulipe, est en cours de démarrage : les premiers courriers sont parvenus aux clients concernés. Cette phase se terminera en 2020 et concernera 85 000 clients, de Doullens dans la Somme au Dunkerquois dans le département du Nord, en passant par le Ternois dans le Pas-de-Calais. Certains appareils devront d'ailleurs être changés : on estime de 2 à 5 % les appareils vieux de plus de quarante ans. C'est chez les personnes âgées ou dans les logements non rénovés où résident souvent les plus précaires que l'on trouvera ces matériels ne pouvant supporter le changement de composition du gaz.
Notre objectif étant de lutter contre la précarité énergétique et d'apporter une réponse solidaire et juste aux besoins de la transition écologique, qui paiera le réglage et le changement d'appareils ? Cela sera-t-il bien le concessionnaire, par le biais de la péréquation de solidarité nationale, et ce dès les phases de test qui débutent en 2019 ? Pouvez-vous nous rassurer sur ce point ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Madame Deprez-Audebert, je vous répondrai à la place de M. le ministre d'État qui n'a pu être présent ce matin. Je vous remercie pour votre question, particulièrement importante puisqu'elle va toucher de près la vie de nos concitoyens.
Vous l'avez dit, après plus de cinquante années d'exploitation, le champ gazier majeur de Groningue est aujourd'hui entré dans une phase de déclin. À la suite du constat d'une augmentation de la fréquence et de l'intensité de l'activité sismique autour du gisement, dans une zone jusqu'ici classée comme asismique, le gouvernement néerlandais – avec lequel j'en ai discuté personnellement – a annoncé une réduction du plafond de production du gisement et un arrêt des exportations de gaz B à compter de 2029. Pour assurer la continuité d'approvisionnement des 1,3 million de consommateurs de gaz B, une conversion progressive du réseau au gaz H a été lancée.
Cette conversion nécessite un contrôle préalable de l'ensemble des appareils à gaz, de façon à vérifier que chaque appareil est en mesure d'être alimenté en gaz H – une question de sécurité prioritaire. La vérification des appareils des consommateurs résidentiels sera effectuée par le gestionnaire du réseau de distribution de gaz naturel auquel ils sont raccordés. Une partie des appareils peut fonctionner aussi bien avec du gaz B que du gaz H et ne nécessite donc aucune opération supplémentaire.
D'autres ont toutefois besoin d'être réglés ou adaptés. Ces réglages ou adaptations seront également effectués par le gestionnaire de réseau de distribution. Cependant, comme vous le soulignez, une dernière catégorie d'appareils ne peut être ni réglée ni adaptée pour fonctionner avec du gaz H ; un remplacement est donc nécessaire. Pour aider les consommateurs résidentiels contraints de remplacer un appareil à gaz, la loi de finances pour 2019 prévoit l'attribution d'un chèque conversion, un titre spécial de paiement qui leur permettra de régler l'acquisition et l'installation de l'appareil de remplacement. Durant une phase transitoire nécessaire au déploiement de ce dispositif, des aides équivalentes seront apportées par les gestionnaires des réseaux de distribution de gaz naturel.
Par souci de justice sociale, pour éviter de faire peser sur certains consommateurs une charge insupportable, je vous confirme que les coûts de ces opérations de conversion du réseau de gaz B seront mutualisés entre les consommateurs de gaz naturel par le biais du tarif d'utilisation du réseau de distribution. Cette opération sera également l'occasion d'intensifier les actions de promotion de la rénovation énergétique à l'échelle des territoires concernés. Mes services se tiennent à votre disposition pour toute information complémentaire.
Merci pour votre réponse complète et détaillée. Nous serons vigilants : le sujet est important dans les Hauts-de-France, qui sont loin d'être la région la plus chaude de France et où les indicateurs de revenus sont les plus bas du pays.
La parole est à M. Stéphane Demilly, pour exposer sa question, no 526, relative à la détention d'animaux d'espèces non domestiques.
Madame la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, l'arrêté du 8 octobre 2018 fixant les règles générales de détention d'animaux d'espèces non domestiques établit les nouvelles règles de détention des animaux faisant partie de la faune sauvage détenue en captivité. Un collectif d'associations expertes de la protection de la biodiversité, dont le travail est largement respecté – One Voice, Sea Shepherd France, Le Biome, Centre Athénas – , s'est impliqué dans la lutte contre le trafic de la faune sauvage et tire régulièrement la sonnette d'alarme, depuis de longs mois, sur les conséquences de cette nouvelle réglementation, tentant en vain d'y sensibiliser le Gouvernement. Il a d'ailleurs contesté cet arrêté devant le Conseil d'État.
Désormais, de nombreuses espèces très rares, représentées dans la nature parfois par quelques dizaines d'individus, pourraient être détenues sur simple télédéclaration au prétexte de simplification administrative. Pour certaines d'entre elles, il n'existe aucun cheptel captif. Ces nouvelles règles risquent ainsi de créer un appel d'air et de relancer le marché de l'animal exotique à l'origine du trafic, qui représente la deuxième cause d'érosion de la biodiversité.
De plus, les nouvelles modifications réglementaires suppriment également plusieurs mesures obligatoires que doivent respecter les établissements détenant des animaux de la faune sauvage en captivité. D'après les associations, cette modification rendrait les contrôles impossibles et favoriserait le blanchiment d'animaux illégalement détenus – qui représente, depuis une dizaine d'années, le nouveau visage du trafic de la faune sauvage en Europe.
Enfin, cette nouvelle réglementation ne respecte pas le principe de non-régression édicté à l'article 2 de la récente loi pour la reconquête de la biodiversité, et est incompatible avec les accords internationaux ratifiés par la France.
De nombreuses affaires ont dernièrement montré que la France était l'un des principaux pays « consommateurs » d'espèces issues du trafic. Il me semble donc impératif que vous receviez rapidement et en personne ces associations qui regroupent experts et passionnés, afin d'écouter leurs arguments. Elles ne cessent, depuis de nombreuses années, de solliciter un entretien avec le ministère, sans succès. Pouvez-vous nous préciser si vous êtes prête à accéder à cette requête et à détailler les corrections que vous envisagez d'apporter à cet arrêté, afin de le mettre en cohérence avec l'impérieuse exigence de protection de la biodiversité ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Monsieur Demilly, l'arrêté du 8 octobre 2018 fixant les règles générales de détention d'animaux d'espèces non domestiques découle, vous l'avez souligné, de la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, et de ses décrets d'application du 23 février et du 17 novembre 2017.
Il introduit un nouveau régime de déclaration de détention, qui remplace celui de l'autorisation de détention, qui par ailleurs pouvait être tacite. La procédure de déclaration concerne uniquement les cas d'élevage d'agrément, où la détention des animaux n'a pas de but lucratif ou de négoce.
Au regard de la réglementation qui préexistait depuis août 2004, le régime de détention n'a été assoupli que pour huit espèces ni menacées, ni dangereuses, ni difficiles d'élevage – sept oiseaux et un reptile. La détention d'animaux de la majorité des espèces protégées et des espèces les plus menacées visées par la convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction, CITES, reste réservée à des établissements disposant d'une autorisation préfectorale d'ouverture, dont le responsable est titulaire d'un certificat de capacité. L'exposition d'animaux de telles espèces à des fins de vente reste interdite, notamment dans les animaleries.
L'arrêté du 8 octobre 2018 s'inscrit dans le mouvement général de simplification des procédures administratives pour les usagers, qui ne retire rien aux possibilités de contrôle des services de l'État. Ainsi, lorsque les prescriptions fixées ne sont pas respectées, l'administration conserve ses possibilités d'intervention et de sanction résultant des dispositions du code de l'environnement.
L'arrêté précise aussi les conditions d'identification des animaux, en étendant l'obligation de marquage individuel à de nouvelles espèces et en instaurant un enregistrement dans un fichier national d'identification. S'il apporte des simplifications pour les détenteurs d'espèces non menacées ou dangereuses, l'objectif de cet arrêté est donc bien d'améliorer l'encadrement de la détention et de lutter contre le trafic d'espèces sauvages en renforçant la traçabilité des spécimens et leur régime de détention, et surtout en facilitant les contrôles.
La France est très engagée à l'échelle nationale comme internationale en faveur de la préservation de la biodiversité, qui représente une de nos priorités. Ainsi, nous accueillerons en 2020 le congrès mondial de la nature. Nous tenons à la cohérence entre notre action intérieure et nos initiatives au niveau international et européen. Croyez-moi, nous sommes très impliqués et faisons très attention à la préservation des espèces. Je serais ravie d'en discuter plus en détail avec vous pour comprendre les besoins et les demandes des associations.
Merci pour cette réponse qui montre votre volonté de réaction. Je vous donnerai le numéro de téléphone du collectif d'associations, et je compte sur vous pour entrer en contact avec lui. Même si vous ne l'avez pas dit, j'ai lu sur votre visage que vous étiez prête à le recevoir, et j'en suis ravi.
La parole est à Mme Fabienne Colboc, pour exposer sa question, no 503, relative à la protection de l'environnement sonore.
Madame la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, je voudrais vous interroger sur la politique de protection de l'environnement sonore – un sujet particulièrement sensible dans mon département d'Indre-et-Loire, traversé par deux grandes infrastructures de transport : une ligne à grande vitesse, LGV, et l'autoroute A10. Les riverains se plaignent du bruit généré par ces voies de circulation, qui les affecte beaucoup. Plusieurs associations ont d'ailleurs été créées pour s'opposer aux nuisances et demander réparation des préjudices subis par les citoyens.
C'est dans ce contexte que vous avez missionné le Conseil général de l'environnement et du développement durable, le CGEDD, pour réaliser une expertise sur les raisons de l'importante mobilisation que suscite le bruit produit par la LGV et sur les réponses à lui apporter.
Dans ma circonscription, un recours a été déposé par une association qui estime que la loi sur le bruit n'est pas correctement appliquée et demande des transformations significatives afin de pallier les nuisances sonores nées du trafic sur l'A10.
La nécessité de protéger notre environnement sonore est un enjeu qui dépasse largement l'échelon local. L'Organisation mondiale de la santé a ainsi publié, le 10 octobre dernier, un rapport très alarmant concernant les effets sanitaires du bruit dans l'environnement. Somme de dix ans de travaux scientifiques, ce rapport montre que le bruit lié aux modes de transport est en Europe l'une des sources de pollution les plus dommageables pour la santé. De fait, les manifestations sanitaires qu'il relève sont inquiétantes : hypertension, effets sur le sommeil, déficience cognitive, perte de qualité de vie et de bien-être, conséquences sur la santé mentale. La situation est si grave que l'OMS recommande aux États de réduire rapidement de près de dix décibels les seuils maximaux d'exposition au bruit.
À quels moyens le Gouvernement entend-il donc recourir pour atteindre de tels objectifs de manière à protéger la santé des Français ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Madame la députée, vous avez souhaité appeler l'attention d'Élisabeth Borne, ministre chargée des transports, qui, ne pouvant malheureusement être présente, m'a demandé de répondre à sa place.
Je veux d'emblée vous rassurer, concernant un sujet qui vous tient, je le sais, très à coeur et à propos duquel vous avez alerté plusieurs fois déjà le Gouvernement et les services du ministère : nous avons parfaitement conscience du problème.
Dans le domaine des transports, les effets sonores des nouvelles infrastructures sont strictement encadrés par la réglementation. Le maître d'ouvrage doit prendre en considération les nuisances sonores diurnes et nocturnes dès la conception du projet d'aménagement, et s'engager à ne pas dépasser certains seuils de niveau sonore. Ces dispositions sont scrupuleusement respectées par les services de l'État quand ils assurent la maîtrise d'ouvrage, de même que par les concessionnaires qui exercent ce rôle dans le cadre d'une délégation de service public – comme c'est le cas pour l'autoroute A10 au niveau de la traversée de l'Indre-et-Loire.
Sachez que le Gouvernement n'inscrit cependant pas la réglementation dans un cadre figé et que nous sommes ouverts à des évolutions des textes en vigueur afin de mieux protéger la population contre ces nuisances très pénibles. Il est ainsi prévu d'amender une partie de la directive européenne du 25 juin 2002 relative à l'évaluation et à la gestion du bruit dans l'environnement. Les nouveaux travaux de l'Organisation mondiale de la santé que vous avez cités permettront d'éclairer ce travail d'actualisation. Les échanges sont en cours au niveau de la Commission européenne et des États membres, et les réflexions se poursuivent en vue de questionner la réglementation actuelle à partir desdits travaux.
Au-delà de ces évolutions réglementaires qui demandent du temps, le Gouvernement souhaite engager dès maintenant une action déterminée contre les nuisances sonores. Je sais que vous nous aiderez en vous associant à notre réflexion.
Il s'agit d'abord de remédier à la situation des habitations correspondant aux points noirs du bruit – les plus nocifs pour la santé humaine, à propos desquels la réglementation actuelle est déjà très dépassée. La ministre a demandé à ses services d'accorder une attention toute particulière à ces cas de figure précis.
Par ailleurs, une mission de médiation commune aux LGV Bretagne-Pays de la Loire et Sud Europe Atlantique a été confiée au CGEDD en mai 2018 afin d'apporter des solutions concrètes. Ses auteurs ont rencontré la majorité des parties prenantes et doivent remettre leur rapport au mois de janvier. Sur ce fondement, la mission pourra émettre toutes les recommandations qu'elle jugera utiles concernant l'évolution de la réglementation. Je sais que la ministre veillera à ce que ces recommandations soient suivies d'effets concrets. Je sais également que nous pourrons compter sur votre vigilance à cet égard, madame la députée.
Merci de ces précisions, madame la secrétaire d'État. Je me réjouis d'apprendre qu'un travail va rapidement être engagé sur ce sujet très important.
En étudiant le dossier, je me suis aperçue qu'il n'existe pas de gendarme du bruit s'agissant des infrastructures de transport. Cette situation m'étonne : le bruit aéroportuaire, lui, est encadré par l'ACNUSA, l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires, et fait l'objet de réglementations et d'une surveillance indépendante. Je me permets donc, madame la secrétaire d'État, de vous suggérer la création d'une autorité chargée de veiller à la bonne application, s'agissant des autres infrastructures de transport, des lois encadrant l'émission du bruit dans l'environnement. Cela pourrait faire partie des sujets abordés lors des réunions de travail à venir.
La parole est à Mme Mireille Clapot, pour exposer sa question, no 506, relative à la pollution de l'air à proximité de Valence.
Je souhaite alerter Mme la ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports, sur la pollution de l'air produite par l'autoroute à proximité de Valence.
Dans l'agglomération valentinoise, les seuils réglementaires pour le polluant NO2 – dioxyde d'azote – et sanitaires pour les particules et l'ozone sont dépassés de manière récurrente. Les zones de proximité routière font partie des secteurs singulièrement touchés par la pollution. Depuis son installation, la station de mesures de qualité de l'air Valence Trafic, située en bordure de l'autoroute A7, sur le territoire de l'agglomération de Valence, signale chaque année des dépassements de la valeur limite annuelle de dioxyde d'azote fixée dans le cadre européen. Depuis juin 2015, la France fait d'ailleurs l'objet d'une mise en demeure de la Commission européenne en raison de ces dépassements.
Dans ce contexte, une limitation de vitesse sur l'A7 aux abords de Valence a été instaurée à titre expérimental à partir de juin 2016. Les éléments d'analyse montrent que la baisse de la vitesse est certes bénéfique, en ce qu'elle permet de réduire les émissions polluantes liées au trafic de l'axe autoroutier, mais encore insuffisante. En ce qui concerne les émissions à l'échappement, c'est pour le dioxyde d'azote que le gain est le plus important ; pour les autres polluants, en revanche – PM10, ozone, dioxyde de soufre – , la diminution est beaucoup plus modeste. L'action permet donc de réduire l'exposition des populations riveraines, mais ne suffit pas au respect de la valeur réglementaire de manière pérenne dans l'ensemble du territoire.
Dès lors, que faire ? Le maire de Valence, président de Valence Agglo, suggère un contournement autoroutier de Valence, mais cette solution très onéreuse et consommatrice de terres agricoles ne ferait que déplacer le problème. L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie – ADEME – montre dans son rapport de mai 2016 intitulé « Impact des aménagements routiers sur la pollution atmosphérique » que certains aménagements installés aux abords des routes ou autoroutes peuvent contribuer à limiter la pollution liée au trafic routier, notamment en particules et oxydes d'azote.
Quelles mesures l'État compte-t-il donc prendre pour faire face à cet enjeu de santé publique ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Madame la députée, la ministre chargée des transports, ne pouvant malheureusement être présente, m'a demandé de vous répondre en son nom. Je vous remercie de votre question, qui est essentielle : il s'agit d'une priorité du Gouvernement, en particulier du ministère de la transition écologique et solidaire. C'est dans cette optique que la feuille de route « qualité de l'air » relative à l'agglomération de Valence a été signée en avril 2018 par le ministre de la transition écologique et solidaire.
Cette feuille de route ambitieuse prévoit dix-huit actions concrètes. Certaines sont relatives au développement de l'autopartage et des transports en commun au sein de l'agglomération, mais près de la moitié sont en lien direct avec l'autoroute A7. Elles incluent le recours à des mesures d'exploitation afin d'éviter la formation de secteurs de congestion, ainsi qu'une étude sur l'amélioration de l'insertion environnementale de l'autoroute. Plusieurs réunions de suivi et de pilotage de ces actions ont déjà eu lieu, associant les collectivités locales, les services déconcentrés de l'État et la société ASF – Autoroutes du Sud de la France – , concessionnaire de l'A7.
Je crois par ailleurs que le déploiement de zones à faibles émissions dans nos villes polluées est un bon outil, adaptable aux enjeux locaux, pour réduire les émissions du transport routier. Il a fait ses preuves à l'étranger et nous souhaitons donc y recourir en France. Le projet de loi d'orientation des mobilités le facilitera et contraindra les établissements publics de coopération intercommunale couverts par un plan de protection de l'atmosphère – PPA – à étudier sa mise en oeuvre. Du reste, nous pourrons bénéficier de votre connaissance du terrain, madame la députée, et de votre implication concernant ces sujets, lorsque nous travaillerons à l'élaboration de ce projet de loi, mais aussi à son application concrète.
S'agissant de Valence, il conviendra de prendre en considération l'ensemble des flux de trafic et leurs effets, en ayant à l'esprit le rôle majeur de l'axe rhodanien pour la circulation des véhicules – c'est une réalité.
Vous pouvez ainsi constater qu'en matière de lutte contre la pollution de l'air le Gouvernement met en oeuvre une politique volontariste, ambitieuse et qui se veut concrète, grâce à des objectifs précis à court terme, mais aussi par des changements potentiels de modèle de déplacement, voire de modèle économique dans certaines de nos villes. Nous devons continuer de travailler ensemble sur ces questions pour identifier des pistes concrètes en vue d'un changement rapide dans les territoires.
Merci, madame la secrétaire d'État. Il est bon d'entendre qu'il s'agit là d'une priorité du Gouvernement. Vous signalez que plusieurs travaux mettant en jeu les différents acteurs sont en cours. Vous faites bien de mentionner ASF. Je me demande si l'on ne pourrait pas aller un peu plus loin que de simples mesures de réduction de la congestion en transformant carrément l'autoroute actuelle : un projet auquel j'avais contribué voici quelques années visait ainsi son enfouissement – un important chantier, certes, mais qui permettrait d'absorber les particules par des plafonds végétalisés et, du point de vue sociétal, de relier les habitants du centre-ville au Rhône, dont ils sont aujourd'hui séparés par un ruban de béton qui pollue.
La parole est à Mme Constance Le Grip, pour exposer sa question, no 516, relative à l'enfouissement de la RN13 à Neuilly-sur-Seine.
Il s'agit très précisément du projet d'enfouissement de la RN13 au niveau de son segment situé en plein coeur de ma circonscription des Hauts-de-Seine, l'avenue Charles-de-Gaulle, à Neuilly-sur-Seine.
Cette avenue peut sans conteste être qualifiée de véritable autoroute urbaine du fait de l'importance de son trafic : 160 000 véhicules de tout tonnage l'empruntent quotidiennement ; c'est comparable aux autoroutes Al et A3, à ceci près qu'ici l'« autoroute » a malheureusement pour spécificité remarquable son insertion dans un tissu urbain très dense – le centre-ville de Neuilly-sur-Seine, commune qu'elle coupe véritablement en deux.
Cette surfréquentation en fait l'autoroute urbaine la plus empruntée et la plus polluée de France. Une étude d'Airparif publiée en juin 2018 a révélé un nombre de particules fines particulièrement élevé, notamment aux heures de pointe.
La décision de fermeture à la circulation automobile des contre-allées, prise le 28 juin dernier en conseil municipal, va devenir prochainement effective. Ce réaménagement de la voirie en surface, aux abords de l'avenue, entraînera incontestablement selon nous un report du trafic sur l'axe principal. En effet, à l'heure actuelle, les contre-allées absorbent 10 à 15 % du trafic journalier sur l'axe. Leur fermeture et le rétrécissement des quatre fois deux voies de circulation accroîtront donc inévitablement la congestion sur l'axe principal et, par conséquent, dégraderont la qualité de l'air à ses abords immédiats, sans parler des effets sur la qualité de l'air du maintien d'un nombre très élevé de feux de signalisation. Quant aux questions de sécurité, pour les piétons – ils sont 20 000 à traverser chaque jour l'avenue ! – comme pour les motards, elles restent évidemment pendantes.
Entre 1988 et 1992, des travaux très importants ont été réalisés dans le but de réduire ces nuisances, d'améliorer la sécurité et de garantir une meilleure tranquillité ; un quart de l'axe a ainsi été enfoui sous une dalle urbaine, à la très grande satisfaction des riverains. La commission particulière du débat public portant sur le projet de dénivellation et de couverture de la RN13 à Neuilly-sur-Seine a mis en avant les avantages d'un tel enfouissement : réduction des nuisances sonores pour les riverains, fluidité du trafic et baisse du nombre d'accidents corporels. L'enfouissement total contribuerait évidemment à améliorer grandement la qualité de vie des habitants.
Aussi, à l'heure où les politiques publiques tendent de plus en plus à limiter le recours à la voiture pour les déplacements quotidiens, et alors même que la tentative de fermeture des voies sur berges, à Paris, a montré ses limites, je souhaite savoir où en sont les réflexions et les études menées par l'État – pour peu qu'elles aient été entamées – sur la poursuite des travaux d'enfouissement de ce tronçon de la RN13, un chantier certes considérable mais qui contribuerait notablement à résoudre une grande partie des problèmes sanitaires causés à la population. La puissance publique envisage-t-elle la reprise de ce chantier lancé il y a plus de trente ans et selon quelles modalités ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Vous avez appelé l'attention de la ministre chargée des transports sur la situation de l'avenue Charles-de-Gaulle, ou RN13, à Neuilly-sur-Seine. Mme Borne ne pouvant être présente, elle m'a chargée de vous répondre.
L'axe en question supporte en effet un trafic très important et connaît des conditions de circulation difficiles aux heures de pointe. Pour limiter les nuisances liées au trafic, un projet de dénivellation et de couverture de la RN13 à Neuilly-sur-Seine a été envisagé en 2006 et a fait l'objet d'un débat public. À l'issue de ce débat, des études plus fines ont mis en lumière des difficultés techniques rendant très complexe la réalisation du projet.
Sur le plan financier, son coût a été estimé à 900 millions d'euros. En raison des contraintes budgétaires de l'État et des collectivités, ce coût élevé avait conduit à envisager une mise à péage du tunnel projeté afin de financer sa réalisation, une mesure qui comportait toutefois un risque important de report du trafic sur le réseau routier en surface et qui a donc été abandonnée.
Sur le plan technique, les études de génie civil du projet ont montré que la présence de la ligne 1 du métro rendait nécessaire la réduction de la hauteur du tunnel du métro, soit plus de sept années de travaux et d'importantes perturbations dans Neuilly-sur-Seine.
Enfin, un tel projet ne peut aboutir sans une adhésion et une participation active des collectivités intéressées. En l'absence d'un tel portage, les difficultés financières et techniques du projet ont conduit à ne pas le retenir et il n'est donc pas prévu de donner de suite à l'opération.
Reste que, comme vous le mentionnez, la commune de Neuilly-sur-Seine défend un projet de requalification des contre-allées de la RN13. Cette opération prévoit notamment la création d'espaces piétons, de surfaces végétalisées et de terrasses sur les contre-allées, ce qui permettrait d'améliorer le cadre de vie et donc de répondre aux aspirations des habitants de Neuilly-sur-Seine tout en réduisant les nuisances sonores et la pollution de l'air.
Ce projet a fait l'objet d'une instruction par les services de l'État qui ont émis un certain nombre de prescriptions afin qu'il satisfasse toutes les parties prenantes : riverains, usagers de la RN13, commerçants, collectivités locales et autres. Une décision d'opportunité favorable a été rendue par les services du ministère de la transition écologique et solidaire le 6 mars 2018. Soyez assurée, madame la députée, que les services de la ministre chargée des transports restent très impliqués dans la réalisation de ce projet et qu'ils ne manqueront pas de demeurer en contact étroit avec vous, comme c'est le cas depuis le début.
Je vous remercie pour ces précisions, madame la secrétaire d'État. Connaissant quelque peu le dossier, j'entends bien les raisons que vous invoquez concernant la complexité de l'enfouissement total de l'avenue Charles-de-Gaulle. Néanmoins, en France, de grands chantiers d'infrastructures ont été lancés malgré leurs difficultés techniques et malgré leur coût. Il s'agit en effet de savoir quelles sont les priorités du Gouvernement et s'il souhaite apporter une amélioration significative, réelle et durable aux nuisances que subissent les riverains.
Je regrette que le Gouvernement abandonne, semble-t-il de façon quasi définitive, le projet d'enfouissement de la RN13, mais nous aurons certainement l'occasion d'y revenir.
La parole est à Mme Justine Benin, pour exposer sa question, no 521, relative à Parcoursup et à l'avenir des jeunes en Guadeloupe.
La plateforme « Parcoursup » a été ouverte le 20 décembre dernier. Le coup d'envoi est lancé pour plusieurs centaines de milliers d'étudiants qui n'auront que quelques mois pour décider de leur avenir dans l'enseignement supérieur. Il semble que Parcoursup ait mis fin aux inégalités créées par l'ancien système qui soumettait certaines filières à la pratique du tirage au sort, ce qui était en effet inacceptable. En tout, ce sont 27 000 jeunes supplémentaires qui ont pu accéder à l'enseignement supérieur par rapport à l'année 2017. Et on ne peut que se réjouir des 21 % d'élèves boursiers en plus, signe que notre pays accorde encore de l'importance à l'égalité des chances.
Néanmoins, au même moment, en outre-mer et en Guadeloupe en particulier, de nombreux jeunes se sont mobilisés pour crier leur détresse. Nous devons donc les écouter. C'est notre devoir parce qu'ils n'ont plus d'espoir en leur avenir et parce que beaucoup se sont sentis délaissés, dans le cadre de Parcoursup, mais encore parce que la confiance qu'ils avaient dans l'école de la République s'est effondrée. Or nous, élus ultramarins, nous n'avons pas les moyens de nous fâcher avec notre jeunesse. Nous ne pouvons pas faire abstraction de leur inquiétude.
De nombreux jeunes Guadeloupéens se sentent délaissés et sentent qu'ils ont moins de chances d'accéder à une formation diplômante que les jeunes Franciliens. Et que penser du cas de telle jeune fille de Mayotte, qui doit se résigner à renoncer à une formation faute de ressources ? Or ces jeunes sont les forces vives du pays. L'avenir de la Guadeloupe, l'avenir de l'outre-mer, l'avenir de la France tout entière exige que nous leur apportions des réponses précises. Ne laissons donc pas cette jeunesse inquiète et donnons-lui les moyens de s'émanciper par la formation, les études et le travail. Donnons-lui les clés de son avenir, pour qu'elle incarne la France de demain.
Aussi, au nom de la devise républicaine, quels moyens entendez-vous mettre en oeuvre pour que les élèves ultramarins bénéficient des mêmes chances que les élèves de l'Hexagone. Quelle évaluation de Parcoursup pouvez-vous nous proposer et quelles propositions pouvez-vous avancer pour réconcilier nos jeunes d'outre-mer avec l'avenir du pays ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Je réponds à la place de la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, qui n'a pu être présente et m'a demandé de la remplacer.
Dans l'Hexagone comme dans les territoires ultramarins, l'ambition du Gouvernement en matière d'enseignement supérieur est la même : démocratiser son accès en luttant contre l'injustice du tirage au sort et de la sélection par l'échec. C'est l'objet tant de la loi relative à l'orientation et à la réussite des étudiants que de la plateforme Parcoursup.
Je tiens à vous assurer, madame la députée, que l'accès effectif des lycéens ultramarins à l'enseignement supérieur est une priorité du Gouvernement : des mesures ont été prises en ce sens dans la loi susmentionnée. En Guadeloupe, sur les 5 605 candidats inscrits en phase principale, 5 158 candidats, c'est-à-dire 92 %, ont reçu au moins une proposition, dont 1 880 lycéens boursiers. Le dispositif Parcoursup a donc parfaitement rempli ses missions. Il a révélé un certain nombre de défis auxquels la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation s'attelle.
En effet, si les lycéens de Guadeloupe ou de Mayotte reçoivent autant de propositions que la moyenne nationale, ils sont moins nombreux à faire le choix de l'enseignement supérieur et beaucoup changent de projet en cours de route. Nous devons comprendre ce phénomène et le combattre. C'est pourquoi la loi relative à l'orientation et à la réussite des étudiants comporte un important volet d'accompagnement social, notamment à destination des lycéens ultramarins. Ces mesures – baisse des droits d'inscription, suppression de la cotisation de 217 euros au régime de santé – ont permis de réduire de 100 millions d'euros le coût de la rentrée universitaire.
Une attention particulière a également été apportée aux boursiers. Conformément aux annonces faites par Frédérique Vidal, les boursiers bénéficient désormais du paiement anticipé de la bourse fin août et d'une mise en paiement des échéances suivantes de la bourse le 5 du mois au plus tard. Le Gouvernement entend aller plus loin dès la rentrée prochaine en renforçant la part des étudiants boursiers dans l'enseignement supérieur, notamment au profit des lycéens ultramarins. Ces derniers pourront également bénéficier de l'aide à la mobilité.
Tout est ainsi mis en oeuvre, madame la députée, afin de mieux accueillir les lycéens ultramarins dans l'enseignement supérieur, de les rassurer et de les accompagner sur le chemin de la réussite.
J'ai bien entendu vos explications, madame la secrétaire d'État. Je reste vigilante sur l'accompagnement social de nos étudiants, accompagnement que vous avez dit considérer comme aussi ambitieux pour les étudiants de l'outre-mer que pour ceux de l'Hexagone. Je vous ai aussi entendu dire que nous irions plus loin quant aux aides à la mobilité, à l'occasion de l'examen du prochain texte en la matière.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Élection d'un vice-président ;
Fixation de l'ordre du jour ;
Nouvelle lecture du projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice ;
Nouvelle lecture du projet de loi organique relatif au renforcement de l'organisation des juridictions.
La séance est levée.
La séance est levée à douze heures quarante.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Serge Ezdra