Présidence de
M. Éric Woerth,
Président
La commission poursuit l'examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2020 (n° 2272
Nous poursuivons, ce soir, l'examen de la seconde partie du projet de loi de finances, avec les missions Recherche et enseignement supérieur, Enseignement scolaire et Travail et emploi.
Sur les rapports de M. Fabrice Le Vigoureux et de MM. Francis Chouat et Benjamin Dirx, la commission examine d'abord les crédits de la mission Recherche et enseignement supérieur.
Avec 28,6 milliards d'euros, le budget 2020 pour la mission Recherche et enseignement supérieur s'inscrit dans la continuité des deux exercices précédents, avec une hausse des crédits de 534 millions d'euros pour la recherche et l'enseignement supérieur : au total, l'augmentation des crédits de la mission entre 2017 et 2020 représente 1,7 milliard d'euros, soit plus de la moitié du budget annuel de la culture.
Cette hausse continue traduit la double volonté qui sous-tend ce quinquennat : d'une part, faire de la recherche et de l'innovation la pierre angulaire de la compétitivité des entreprises françaises et du rayonnement de notre pays ; d'autre part, ériger la formation en levier essentiel de la lutte contre les inégalités de destin.
Les programmes dont je rapporte les crédits bénéficient de la hausse du budget de la mission en 2020. Les 242 millions d'euros supplémentaires attribués cette année aux programmes Vie étudiante et Formations supérieures et recherche universitaire répondent à un triple objectif : accompagner l'augmentation du nombre d'étudiants en licence et en master, soutenir les universités dans l'élargissement de leurs responsabilités et de leurs compétences, augmenter enfin les aides à destination des étudiants.
Pour ce faire, 176 millions d'euros supplémentaires par rapport à 2019 seront attribués au programme 150. Au-delà des moyens mobilisés pour accompagner la hausse dynamique des inscriptions en licence et master, ces crédits vont permettre de financer le plan Étudiants en augmentant les capacités des filières en tension et en accélérant la montée en puissance des dispositifs et parcours d'accompagnement. Ils vont également servir à financer la transformation des études de santé, mais également à généraliser le dialogue stratégique et de gestion qui rassemble ministères, universités, collectivités territoriales et autres partenaires des établissements pour attribuer une partie de leurs moyens financiers aux universités. Ce dialogue stratégique et de gestion, expérimenté avec dix établissements en 2018, a rencontré un franc succès et sera donc généralisé à quatre-vingts établissements pour cette année 2019-2020.
Enfin, 3 millions d'euros supplémentaires seront attribués aux établissements privés qui contribuent aux missions du service public de l'enseignement supérieur, ou établissements d'enseignement supérieur privé d'intérêt général (EESPIG). Ces établissements ont, en effet, connu une augmentation de 20 % de leurs effectifs étudiants au cours des trois dernières années et totalisent désormais 4 % des effectifs de l'enseignement supérieur. En revanche, il serait appréciable qu'une discussion entre le ministère et Bercy aboutisse à une revue des modalités de mise en réserve des crédits pour ces EESPIG, qui a atteint 7 % l'an dernier, sachant que ces crédits sont rarement dégelés.
J'en viens à présent aux crédits du programme 231 Vie étudiante. Les 67 millions d'euros supplémentaires par rapport à 2019 permettront d'augmenter les aides directes ou indirectes à destination des étudiants : les bourses sur critères sociaux, qui augmentent de 46 millions par rapport à 2019, soit un gain de 11 à 61 euros par étudiant selon l'échelon ; l'aide à la mobilité Parcoursup, mise en place dans le cadre du plan Étudiants et qui monte également en puissance – 9 000 demandes ont été enregistrées pour cette rentrée universitaire – grâce au travail d'information fait par le Centre national des oeuvres universitaires et scolaires (Cnous) et par les services de l'État.
Il convient néanmoins d'être vigilant sur quelques points. Le premier concerne la hausse à venir de la masse salariale du réseau des oeuvres universitaires. Les montants à abonder au compte d'affectation spéciale Pensions (CAS Pensions) vont mécaniquement augmenter, et la subvention pour charges de service public versé au réseau devra donc couvrir ses coûts.
Le second point concerne la garantie des prêts étudiants par la BPI. L'enveloppe de 2 millions d'euros de ce fonds de garantie n'a pas bougé depuis des années, alors que les besoins sont de plus en plus importants. Cette année, les enveloppes mises à la disposition de la Société générale et de la BPCE, par exemple, ont été épuisées en deux semaines. Je l'avais déjà souligné l'an dernier, je le redis cette année, conforté dans mon idée par la recommandation que la Cour des comptes a faite dans son rapport sur les droits d'inscription dans l'enseignement supérieur : c'est un dispositif qui fonctionne et il faut absolument en augmenter la dotation ; c'est pourquoi je défendrai un amendement en ce sens.
Enfin, à l'échelle de la mission, il y a un sujet majeur sur lequel je souhaite que le ministère, la direction immobilière de l'État et la direction du budget mènent une réflexion d'ampleur, dans le prolongement, notamment, des travaux de Jean-Paul Mattei, à savoir la rénovation énergétique du bâti universitaire. Le parc immobilier des universités représente près de vingt millions de mètres carrés de bâtiments, dont la moitié est considérée comme passoire thermique. Alors que l'opération Campus arrive à son terme, il est impératif de penser aujourd'hui un dispositif pérenne permettant aux universités de financer ces travaux colossaux. Plusieurs pistes sont envisageables : l'affectation de fonds existants, la sortie des universités des organismes divers d'administration centrale (ODAC), qui ne peuvent emprunter auprès d'un établissement de crédit, ou encore la mise en oeuvre de mesures permettant aux universités de mieux valoriser leur patrimoine.
À ces remarques et points de vigilance près, et pour toutes les raisons que j'ai évoquées, je vous propose de voter les crédits des programmes 150 et 231.
Le budget de la recherche s'inscrit dans une dynamique constante depuis le début de la législature. Hors universités, il a connu depuis 2017 une forte hausse : 1,2 milliard d'euros en autorisations d'engagement et 723 millions en crédits de paiement. Le PLF 2020 confirme cette progression et augure de l'effort significatif que portera la prochaine loi de programmation pour la recherche et l'innovation.
Nous sommes, en effet, à un moment charnière de notre politique de recherche. Face aux nouveaux défis climatiques, énergétiques, agricoles et sociétaux, mais aussi face à l'accroissement de la compétition mondiale, illustrée notamment par l'émergence spectaculaire de la Chine, il nous faut tenir notre rang, et la future loi de programmation de la recherche devra être, dans cette perspective, guidée par une très grande ambition. La France ne peut se permettre d'être distancée, en particulier sur certains secteurs de rupture, qui s'accompagnent de changements sociétaux profonds ; il y va de notre souveraineté scientifique et technologique, et de notre place en Europe et dans le monde. Cela implique de profondes transformations dans l'orientation et l'organisation de la recherche, et dans l'effort public et privé consenti par la nation.
Pour nous en tenir au budget pour 2020, plusieurs priorités se dégagent, au premier rang desquelles, en volume financier, notre politique spatiale. Les moyens alloués augmentent de 214 millions d'euros, afin d'abord d'apurer la dette française à l'égard de l'Agence spatiale européenne, ce qui contribuera à crédibiliser l'engagement français dans les programmes spatiaux européens. Il s'agit ensuite de renforcer notre engagement européen, puisque les discussions sur le prochain cadre financier pluriannuel devraient porter le budget spatial de l'Union de 11 à 16 milliards d'euros sur la période.
En second lieu, la recherche sur projet, portée par l'Agence nationale de la recherche, est confortée. Après un point bas en 2015, la hausse des moyens d'engagement a été continue et se poursuit en 2020, pour atteindre 740 millions d'euros, qui permettront à l'agence d'augmenter son taux de sélection. La recherche sur projet devra faire l'objet d'engagements ambitieux dans le cadre de la loi de programmation pour la recherche et, si nous voulons tenir notre rang au niveau européen, il faudra probablement porter ses moyens aux alentours d'un milliard d'euros.
Pour autant, le financement dit « récurrent » des laboratoires n'est pas oublié : le CNRS bénéficiera ainsi de 25 millions d'euros supplémentaires.
Je voudrais également évoquer les choix stratégiques faits en matière de recherche sur l'énergie et sur la sûreté nucléaire, qui va de pair avec la recherche sur les énergies renouvelables, l'une et l'autre étant les deux composantes de la décarbonation de notre économie.
Le Gouvernement a choisi de mener à terme le projet de réacteur Jules Horowitz, qui permettra de renforcer la sécurité de nos centrales et la compétitivité de notre industrie nucléaire. Il permettra également de produire des composants utilisés en imagerie médicale. Pour cela des redéploiements sont opérés au sein des programmes du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), du fait notamment du report du projet ASTRID de réacteur de quatrième génération, dans son volet démonstrateur. De nouveaux crédits budgétaires sont également demandés, en plus de la mobilisation des fonds issus du programme d'investissements d'avenir (PIA). Le CEA, enfin, qui est aussi un organisme de recherche en matière d'énergies renouvelables, voit à ce titre sa dotation consolidée à hauteur de 51 millions d'euros.
La politique de soutien à l'innovation connaît également une impulsion déterminante et, pour mieux la comprendre, il nous faut dépasser le cadre strict du budget de l'État. En effet, le Fonds pour l'innovation dans l'industrie est désormais opérationnel. Il permet de mobiliser 250 millions d'euros chaque année en faveur des domaines d'innovation stratégiques, afin de faire émerger l'industrie de demain. Soixante-dix millions d'euros supplémentaires doivent financer chaque année les start-up à forte intensité technologique – les deep tech –, et 120 millions d'euros sont alloués à des innovations de rupture, qui sont autant de grands défis.
Le financement de nos start-up est, en effet, un sujet prioritaire, ainsi que l'a encore rappelé récemment le Président de la République. Alors que le marché français du capital-risque se développe, beaucoup éprouvent des difficultés à passer le stade des plus grosses levées de fonds. Notre objectif est de constituer vingt-cinq licornes françaises d'ici à 2025, contre seulement neuf à l'heure actuelle.
Je dirai un mot à ce propos sur la baisse, de l'ordre de 16 millions d'euros, de la dotation à Bpifrance au titre de son soutien aux entreprises innovantes, ce qui porte les crédits à 100 millions d'euros. Deux amendements ont été déposés pour corriger cette baisse, mais, malgré le signal négatif qu'elle représente, il faut replacer l'évolution de cette dotation dans le total des aides à l'innovation opérées par Bpifrance, qui atteignent 1,4 milliard d'euros en 2018. Par ailleurs, les fonds nouveaux issus du fonds pour l'innovation et l'industrie (F2I) viennent plus que compenser cette baisse : 70 millions d'euros sont ainsi confiés à Bpifrance au titre du financement des innovations de rupture.
La recherche médicale, enfin, est confortée. Je confirme notamment que 25 millions d'euros seront consacrés, entre 2019 et 2023, à la recherche sur les cancers pédiatriques : après les 5 millions inscrits dans le budget 2019, ce sont également, cette année, 5 millions supplémentaires qui sont fléchés vers ce domaine de recherche. Un groupe de travail a été constitué, qui a lancé un premier appel à candidatures pour faire venir des chercheurs étrangers en France ; deux autres appels à projets sont prévus afin de faire travailler des chercheurs d'horizons variés sur le sujet ; la constitution d'une base de données sur les projets actuels de recherche est en cours afin de mieux coordonner les actions. Les crédits sont donc consolidés en 2020 et serviront à prolonger le financement de ces actions.
Je conclurai en indiquant qu'aujourd'hui, le budget de la recherche ne peut plus s'envisager au seul niveau national, mais doit intégrer une dimension territoriale et européenne.
Je m'associe totalement à la présentation faite par le rapporteur spécial sur le budget de la recherche. J'ajouterai qu'il ne faut pas perdre de vue que la recherche est un enjeu fondamental au regard de la souveraineté de la France. Les budgets sont certes en augmentation constante depuis 2017, mais les attentes sont très fortes en ce qui concerne la future loi de programmation pluriannuelle de la recherche.
J'insisterai, en outre, après le rapporteur spécial, sur la dimension territoriale et européenne de la recherche. Il est fondamental – et c'est d'ailleurs prévu – d'accompagner les montages de projets européens, sachant que c'est là où se trouvent les gros financements. Un milliard d'euros sont apportés par les régions, et l'on peut saluer le fait que, pour la première fois, l'État et les régions ont décidé de travailler ensemble et de se concerter avec les organismes de recherche pour permettre de diffuser les financements sur l'ensemble du territoire.
La commission en vient à l'examen des amendements à la mission Recherche et enseignement supérieur.
Article 38 et état B
La commission est saisie de l'amendement II-CF532 de M. Laurent Saint-Martin.
Cet amendement tend à diminuer symboliquement les autorisations d'engagement et les crédits de paiement du programme 150, l'idée étant, en réalité, plutôt de lancer une réflexion sur le périmètre actuel de la mission Recherche et enseignement supérieur et de pouvoir interroger la ministre en séance publique.
Cet amendement, qui a donc vocation à être retiré en séance après les explications du Gouvernement, fait suite au rapport de la mission d'information de la commission des finances sur la révision de la LOLF, duquel il ressort que le Parlement se saisit encore trop peu des questions de maquettes, notamment dans le cas des missions très larges, comme la mission interministérielle Recherche et enseignement supérieur, alors qu'il y va de la lisibilité de nos politiques publiques.
Dans le cas de cette mission, nous considérons que, avec neuf programmes rattachés à six ministères, c'est une fausse mission interministérielle, dans la mesure où les quatre programmes rattachés au ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation – c'est-à-dire les programmes 150, 231, 172 et 193 – concentrent 90 % des crédits. Nous proposons donc de recentrer le périmètre de la mission sur les quatre programmes que je viens de citer, et de ventiler les autres programmes dans le champ de compétence ministériel auquel ils appartiennent : les programmes 190, 192, 191, 186 et 142 seraient ainsi réaffectés au ministère de la transition écologique et solidaire, au ministère des finances, au ministère des armées, au ministère de la culture et au ministère de l'agriculture.
Il s'agit de rationaliser et de rendre plus lisibles un certain nombre de missions qui sont trop vastes.
Nous avons bien compris le caractère d'appel de cet amendement, qui décline une des propositions du rapport dont Laurent Saint-Martin a fait état.
S'il me semble que la réorganisation de la structure et du pilotage budgétaires sont étroitement liées à la façon dont, à l'issue de la loi de programmation de la recherche, nous organiserons l'action de l'État, je donnerai néanmoins un avis favorable à cet amendement, qui a vocation à susciter la discussion avec le ministre.
La commission adopte l'amendement II-CF532 (II-257
Puis elle examine l'amendement II-CF396 de M. Philippe Dunoyer.
Le présent amendement vise à transférer 2,6 millions d'euros de crédits de l'action Immobilier du programme 150 vers l'action Aides directes du programme 231. Cette somme correspond au montant que coûterait l'octroi de bourses aux étudiants calédoniens qui en font la demande mais qui se la voient refuser en raison de l'inadaptation des plafonds d'éligibilité des bourses « métropolitaines » à la vie chère en Nouvelle-Calédonie. Si le niveau de revenu en Nouvelle-Calédonie est parfois plus élevé, le coût de la vie y est également très supérieur à celui de la métropole. Le pouvoir d'achat des étudiants est donc très faible, ce qui les met en grande difficulté.
Cet amendement propose d'indexer les bourses sur le coût de la vie en Nouvelle-Calédonie. J'y suis défavorable pour deux raisons. D'abord, il existe déjà des dispositifs territoriaux qui sont exécutés par les provinces en Nouvelle-Calédonie pour soutenir les étudiants boursiers. Ensuite, si une réflexion sur la différenciation des bourses sur critères sociaux selon les territoires devait être engagée, elle ne pourrait se limiter au seul cas des étudiants néo-calédoniens, dans la mesure où il existe d'autres territoires où les étudiants sont confrontés à des problèmes de coût de la vie – je pense notamment au coût du logement en Île-de-France.
La commission rejette l'amendement II-CF396.
Elle en vient à l'amendement II-CF154 du rapporteur spécial Fabrice Le Vigoureux.
Il s'agit, comme je l'ai évoqué dans mon propos liminaire, de transférer 2 millions d'euros à Bpifrance, afin de mieux financer son fonds de garantie « Prêts Étudiants », qui est mobilisé pour permettre à des étudiants qui ne bénéficient pas d'une caution parentale ou d'un soutien particulier de pouvoir emprunter jusqu'à 15 000 euros à cinq banques partenaires de Bpifrance. Trois mille crédits sont ainsi octroyés chaque année, pour un montant moyen de 8 700 euros sur six ans. Ces crédits ne sont pas fléchés et permettent aux étudiants de financer leurs frais de scolarité, leur logement, leur moyen de transport ou encore des fournitures.
Selon une enquête de Bpifrance, 60 % des bénéficiaires n'auraient pas poursuivi leurs études sans l'obtention de ce crédit, tandis qu'environ 80 % d'entre eux jugent qu'ils n'auraient pas pu accéder à un financement bancaire sans la garantie accordée par l'État.
La Cour des comptes a souligné, il y a moins d'un an, la nécessité de rehausser ce fonds pour permettre à davantage d'étudiants de bénéficier de cette garantie d'État. Pour ma part, je rappelle qu'en quinze jours, cette année, ce fonds a été utilisé, et qu'au 15 juillet, beaucoup d'étudiants n'avaient plus accès à ce type de crédit, qui a pourtant fait la preuve de son efficacité. Nous proposons donc de doubler les montants de ce fonds, conformément à la recommandation de la Cour des comptes, qui préconise de le porter à 4 millions d'euros, tandis que Bpifrance souhaiterait qu'il atteigne 5,5 millions d'euros.
Je constate que cet amendement est gagé sur la recherche spatiale, ce qui est assez classique quand on met ainsi des crédits en orbite…
Je ne peux être que défavorable sur le gage, mais suis évidemment de l'avis du rapporteur sur le fond de l'amendement.
La commission adopte l'amendement II-CF154 (II-259
Elle discute ensuite de l'amendement II-CF129 de Mme Jeanine Dubié.
Cet amendement vise à doter de 20 millions d'euros supplémentaires l'action Recherche scientifique et technologique en sciences de la vie et de la santé du programme 172, en fléchant cette somme vers l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) pour qu'elle puisse ensuite être attribuée aux projets de recherches menées par les spécialistes des formes sévères et persistantes de la maladie de Lyme. En contrepartie, nous proposons de réduire de 20 millions d'euros les crédits de l'action Maîtrise de l'accès à l'espace du programme 193.
Je suis doublement embêté : d'abord, parce que le programme spatial contribue décidément beaucoup au financement d'autres actions de recherche, mais surtout, et plus sérieusement, parce que, bien qu'on ne puisse que saluer cette initiative consistant à attirer l'attention sur les recherches concernant la maladie de Lyme, nous ne disposons, à l'heure où je vous parle, d'aucune donnée sur le sujet dans les documents budgétaires ou dans les réponses des ministères.
Nous avons tout récemment interrogé les opérateurs de notre programme, afin qu'ils nous donnent des détails sur les projets de recherche qu'ils financent en la matière. Il s'agit de données parfois difficiles à agréger et qui nécessitent une comptabilité analytique fine que tous ne possèdent pas. Aussi, en l'attente des éléments que pourra notamment nous envoyer l'INSERM, je vous propose de retirer votre amendement et de le redéposer en séance.
L'état de la recherche sur cette maladie aux conséquences assez terribles pour ceux qu'elle affecte pose de vraies questions. Nous disposons en France de centres de référence, mais, pour autant, il ne me semble pas que la recherche soit structurée de manière optimale. L'idée de rationaliser les efforts de recherche en augmentant les crédits me paraît donc intéressante.
La maladie de Lyme est une maladie particulière très mal appréhendée, ce qui a motivé la tenue d'une conférence de consensus pour examiner dans quel sens orienter les recherches. En effet, les spécialistes ne sont pas d'accord entre eux et, avant de pousser les recherches plus avant, il conviendrait de s'accorder sur une direction.
L'amendement II-CF129 est retiré.
La commission est saisie de l'amendement II-CF525 de M. Matthieu Orphelin.
Il s'agit d'un amendement d'appel pour dialoguer avec le Gouvernement afin de s'assurer que le plan de déploiement de l'hydrogène pour la transition énergétique, annoncé par le Gouvernement en juin 2018 et doté d'un financement annuel d'au moins 100 millions d'euros, est bien financé. Je rassure donc le rapporteur spécial : si, à notre tour, nous prélevons 20 millions d'euros sur le budget de la recherche spatiale, c'est parce que la LOLF nous impose de compenser l'augmentation d'un programme par la diminution d'un autre.
Dans le domaine de l'hydrogène, il existe principalement deux voies de financement de la recherche et du développement : les crédits de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) et les crédits du Grand plan d'investissement. Or, aujourd'hui, ce qui est prévu de part et d'autre pour 2020 reste très flou. Nous devons avoir davantage de visibilité sur ses soutiens publics, sachant qu'en 2019, les crédits se situaient dans une fourchette comprise entre 50 et 70 millions d'euros, au lieu des 100 millions envisagés. Il faudrait qu'en 2020, nous nous en rapprochions au maximum.
L'ADEME est le principal opérateur du plan hydrogène, mais elle ne dépend pas de la ministre en charge de la recherche.
Cela n'empêche pas les grands opérateurs de la recherche publique de mener des projets de recherche avancée sur le sujet. Le Commissariat à l'énergie atomique participe au déploiement du plan hydrogène sur deux axes en particulier : la préparation de la nouvelle génération des technologies d'électrolyse pour la production d'hydrogène industriel et le développement de projets de démonstrateurs pour les zones non interconnectées, qui est un enjeu central du plan.
Néanmoins, le plan étant placé sous la responsabilité de la ministre de la transition écologique et solidaire, je vous invite à retirer votre amendement et à le redéposer en séance sur la mission Écologie. À défaut, l'avis sera défavorable.
L'ADEME étant placée sous la double tutelle des ministères de la transition écologique et de l'enseignement supérieur, j'avais souhaité défendre mon amendement, qui porte sur la recherche et le développement, au sein de cette mission et au sein de la mission Écologie.
Je le retire, mais les parlementaires devront s'assurer en séance que les engagements pris sont bien tenus, comme le commande notre rôle de contrôle de l'action du Gouvernement.
L'amendement II-CF525 est retiré.
La commission examine, en discussion commune, les amendements II-CF366 de M. Sébastien Jumel et II-CF81 de M. Éric Bothorel.
Par l'amendement II-CF81, je vous propose de transférer 20 millions d'euros vers l'action 02 du programme 192, en faveur du financement des projets d'innovation technologique et industrielle piloté par Bpifrance, au travers du programme « Aides à l'innovation ».
De 250 millions d'euros en 2011, les moyens mis à disposition de Bpifrance par l'État sont passés à 120 millions d'euros en 2019, réduits à 85 millions en exécution. Or, compte tenu de l'effet de levier de ces financements, toute diminution des crédits du programme 192 confiés à Bpifrance conduit à une baisse au moins triple des moyens apportés aux entreprises innovantes. En l'état actuel, nous avons atteint un niveau critique pour l'accompagnement de ces entreprises innovantes.
Il est vrai que la ligne de subvention à Bpifrance est en diminution depuis plusieurs années. Cela s'explique par la multiplication des dispositifs de soutien à l'innovation hors du cadre budgétaire, tels le PIA et, plus récemment, le Fonds pour l'innovation et l'industrie, qui doit apporter 250 millions d'euros supplémentaires à l'innovation. Il s'agit là, d'ailleurs, d'une source de financement beaucoup plus fiable pour l'innovation, qui demande du temps, alors que le PIA a, par nature, un caractère temporaire et que les dotations budgétaires ont tendance à varier selon les priorités du moment.
Bpifrance recevra d'ailleurs, dès l'année prochaine, 70 millions d'euros supplémentaires au titre du plan Deep tech. Il s'agit de crédits sanctuarisés, qui ne seront ni gelés, ni redéployés pour financer autre chose, et qui viendront financer de l'innovation à très forte valeur ajoutée, celle qui implique le plus d'efforts de recherche et développement. J'insiste également sur le fait que la dotation de l'État est relativement minime par rapport au total de 1,4 milliard d'euros d'aides à l'innovation que verse Bpifrance annuellement au titre des différents programmes qui lui sont confiés.
Il me semble qu'une autre solution que la hausse des crédits de la ligne est possible. Depuis plusieurs années, on voit un écart grandissant entre la dotation que nous votons à Bpifrance pour ses aides à l'innovation et les montants effectivement reçus. Cela tient à la construction du programme et à la présence de la compensation à la sécurité sociale des exonérations de cotisations au titre du dispositif « Jeunes entreprises innovantes » (JEI). Ces dernières années, le montant évalué en loi de finances a été largement dépassé, ce qui a obligé les gestionnaires à piocher sur la ligne de crédits à Bpifrance à hauteur de 35 millions d'euros en 2018. Il se trouve que le plafonnement de cette compensation est proposé dans le PLFSS pour 2020, ce qui permettra de préserver la dotation à Bpifrance. Je souhaite donc que le montant voté – 100 millions d'euros – se rapproche du montant qui sera effectivement versé.
C'est la raison pour laquelle j'émets, à ce stade, un avis défavorable sur ces amendements, qui peuvent être doublement satisfaits par le mouvement général vers Bpifrance et par la disposition particulière sur le plafonnement des exonérations de sécurité sociale proposé, l'ensemble devant permettre de retrouver les 100 millions effectifs, au lieu des 85 millions exécutés en 2019.
La commission rejette successivement les amendements II-CF366 et II-CF81.
Avant de faire voter l'ensemble des crédits, je souhaite revenir d'un mot sur les crédits consacrés à la recherche sur les cancers pédiatriques. C'est un sujet qui exclut la polémique, d'autant que nous avions demandé l'an dernier l'affectation de 5 millions d'euros supplémentaires chaque année à ce budget, et que le Gouvernement tient parole. On ne peut que s'en féliciter.
Reste la question de l'utilisation de cet argent supplémentaire, qui demande une meilleure lisibilité. C'est évidemment compliqué, dans la mesure où cela implique la recherche fondamentale et que l'on a, par ailleurs, affaire à des travaux pluridisciplinaires, complexes à évaluer ; cela étant, l'État sait gérer ce type de difficulté et devrait faire en sorte de mieux éclairer les familles sur les efforts consentis en faveur de la recherche contre les cancers de l'enfance.
Il se trouve que je ne suis pas très satisfait, car nous avions pour cela demandé à la ministre la création d'un groupe de travail et réuni de notre côté au printemps dernier une commission de suivi à laquelle participaient notamment Amélie de Montchalin, Bernard Perrut, Thierry Breton, le directeur général de l'Institut national du cancer (INCa), Christine Chomienne, la directrice du pôle recherche et innovation, Isabelle Richard, la conseillère santé de la ministre de la recherche, ainsi que les collaborateurs de Michel Lauzzana et de Nathalie Elimas. Il était entendu que nous obtiendrions les premiers documents avant le printemps de l'évaluation, de manière à pouvoir interroger le Gouvernement. Or, malgré des relances successives, nous n'avons eu aucune nouvelle, alors que nous ne demandions nullement des éléments définitifs mais une esquisse de la gestion des coûts et une première ébauche du fléchage des crédits. Lors du printemps de l'évaluation, Francis Chouat a interrogé en ce sens la ministre, qui a répondu que toutes ces réponses figureraient dans le jaune budgétaire. Il se trouve que nous n'avons toujours pas le jaune budgétaire et que nous l'attendons avec impatience.
J'ai, par ailleurs, été très surpris d'apprendre qu'un rendu d'expérience avait été présenté par le ministère lors d'un séminaire qui s'est tenu un samedi et auquel nous n'avons été conviés que quelques jours à l'avance, ce qui, compte tenu de nos agendas et de nos obligations de fin de semaine dans nos circonscriptions, ne nous a pas permis d'y assister. Nous avons, là encore, demandé que nous soient communiqués les documents diffusés lors de ce séminaire, qui accueillait des chercheurs et des associations de parents mais aucun parlementaire. J'ai donc écrit à la ministre pour solliciter des explications sur ces procédés, mais j'attends toujours une réponse.
J'entends donc l'avertir qu'on ne peut pas continuer comme ça et qu'un minimum de respect est dû aux parlementaires, en l'occurrence sur ce travail collectif qui souffre d'un manque de transparence. S'il est besoin de quelqu'un au ministère pour assurer les relations avec le Parlement et garantir un suivi normal de ce dossier, je les incite à prendre sur leurs ressources pour créer le poste.
Je tiens à abonder dans votre sens, monsieur le président, et à soutenir vos exigences de transparence. On sait quelle émotion avaient suscitée l'an dernier nos débats sur ce sujet et les efforts qu'ont fournis certains, dont vous-même ou Amélie de Montchalin, pour obtenir le vote des crédits.
En ce qui concerne le séminaire, je n'ai, comme vous, pas pu m'y rendre et y ai donc envoyé mon attaché parlementaire. Il était surtout destiné à l'information des familles, sachant que la ministre aurait par ailleurs déclaré qu'elle viendrait à l'Assemblée nationale en novembre pour informer les députés. Sans attendre novembre, nous devons l'interroger lors de la discussion du texte dans l'hémicycle.
J'ai moi-même alerté, il y a quarante-huit heures, le cabinet de la ministre, et nous avons par ailleurs auditionné l'INCa. Je vous rejoins d'autant plus sur le caractère désagréable de cette situation que, tandis que les crédits sont là et que les recherches sont en cours, cette absence de transparence pourrait susciter de la suspicion.
Je compte donc que vous puissiez obtenir des réponses de la ministre dans l'hémicycle. D'ici là, je ne désespère pas d'obtenir, à défaut du jaune budgétaire, quelques éléments d'information complémentaires.
Je souhaite revenir sur l'enseignement supérieur, dont les crédits sont en deçà des attentes. La hausse de 175 millions du budget de l'enseignement supérieur et de 67 millions pour la vie étudiante ne couvre pas les nouveaux besoins engendrés par l'accroissement du nombre d'étudiants.
Si l'on considère le budget par étudiant, il a drastiquement baissé depuis dix ans, étant passé de 11 006 euros par étudiant en 2011 à 10 300 euros en 2018, soit une baisse de 700 euros, sachant qu'il y a eu 56 000 étudiants de plus à la rentrée 2018 que l'année précédente et que, sur la période 2017-2022, la population étudiante devrait croître de 6,7 %, pour atteindre 2,8 millions d'étudiants.
Selon les syndicats, il faudrait augmenter les crédits d'un milliard d'euros par an pendant cinq ans pour couvrir cette hausse démographique, et c'est jusqu'à la conférence des présidents d'université qui juge décevant le budget de cette année.
En ce qui me concerne, élu d'un territoire rural, je voudrais redire les difficultés, notamment financières, qu'éprouvent les populations éloignées des centres d'enseignement supérieur pour accéder à ces derniers.
Nous prenons acte des efforts qui sont faits et saluons la hausse des crédits du ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation. Nous croyons profondément à l'idée de progrès, surtout dans ce contexte de concurrence internationale très vive, et nous savons que les pays les plus performants sont ceux qui investissent massivement dans la formation et dans l'éducation.
Cela dit, nous redoutons les conséquences sur l'attractivité de nos universités de la hausse des frais d'inscription pour les étudiants étrangers, dont nous notons d'ailleurs l'inconstitutionnalité. Par ailleurs, nous serons attentifs à l'usage des crédits alloués au plan Étudiants, en particulier à la correction des défauts constatés sur la plateforme Parcoursup.
Nous aurions aussi aimé que l'investissement public privilégie davantage certains domaines comme l'intelligence artificielle, tout comme nous souhaiterions que soient mieux mis en exergue les impératifs d'une recherche centrée sur la transition énergétique : nous avons la conviction qu'il est essentiel de progresser dans tous les domaines ayant trait aux énergies renouvelables.
Je n'ai pas la même lecture que vous des programmes 150 et 231. Le budget du programme 150 Formations supérieures et recherche universitaire a baissé de 0,46 % l'année dernière et de 0,31 % cette année. Plus généralement, on constate une diminution de 10 % en cinq ans par étudiant. Quant au programme 231 Vie étudiante, certes il est en hausse de 67 millions, mais si on prend en compte l'inflation, il est plutôt en baisse. Or la pauvreté étudiante est vraiment préoccupante : 28 % des étudiants bénéficient de bourses qui n'ont pas été revalorisées en fonction de l'inflation depuis 2016 ; 20 % des étudiants vivent en dessous du seuil de pauvreté et 46 % sont contraints de travailler, ce qui a bien évidemment des conséquences sur la réussite de leurs études universitaires.
En 2017, Emmanuel Macron avait lancé un appel aux chercheurs, souhaitant que la France soit la patrie qui porte la recherche. Je ne sais comment elle la porte, à voir des doctorants et des postdoctorants compenser jusqu'à 1,2 million d'heures de cours pour des salaires de misère : 17 centimes en dessous du SMIC payés après plusieurs mois – un véritable phénomène d'uberisation, de clochardisation ! Cela représente 13 000 travailleurs pauvres. Quand on veut appuyer la recherche stratégique, on ne traite pas ainsi les doctorants et les postdoctorants.
Enfin, je tiens à alerter sur le retard de la France en matière de taux d'accès au doctorat qui est inférieur à la moyenne des pays de l'OCDE, et de 38 % inférieur à celui de l'Allemagne.
Le budget de la mission Recherche et enseignement supérieur est en hausse de 500 millions d'euros, soit une augmentation de 1,90 % par rapport à 2019. Même si la vie étudiante reste, dans certains territoires, très précaire et parsemée d'inégalités, et alors que la dépense publique par étudiant n'a cessé de baisser ces dernières années, nous nous réjouissons de l'augmentation des crédits relatifs à la vie étudiante et à l'enseignement supérieur. La stagnation du nombre d'étudiants à venir avec, pour autant, un maintien des crédits alloués à l'enseignement supérieur, permettra d'offrir de bien meilleures conditions de vie aux étudiants. Ces moyens en augmentation favoriseront sans nul doute leur réussite, leur orientation, leur insertion professionnelle et leur mobilité, tout en accompagnant mieux l'ouverture européenne et internationale de nos établissements.
Nous saluons également la revalorisation des bourses étudiantes, même si le barème national fixant l'éligibilité à la bourse sur critères sociaux ne prend pas en compte les spécificités de certains territoires, comme je l'ai déjà dit tout à l'heure en défendant l'amendement de notre collègue Dunoyer.
La poursuite du plan « 60 000 logements étudiants » nous semble plus que nécessaire, compte tenu du manque actuel d'offres de logements étudiants.
L'augmentation des crédits de cette mission ne nous permettra toujours pas d'atteindre l'objectif de 3 % du produit intérieur brut (PIB) investi dans la recherche en 2020 dans le cadre de la stratégie Europe 2020. Je regrette de devoir rappeler que cet objectif avait déjà été fixé en 2000 lors du sommet de Lisbonne, pour être atteint dès 2010. C'est un vrai bémol dans les crédits de cette mission.
Pour autant, si l'investissement privé en recherche et en développement de notre pays reste inférieur à la moyenne de l'OCDE, il importe de souligner que l'investissement public reste supérieur à cette même moyenne.
Enfin, nous saluons l'initiative du Gouvernement de présenter, au cours du premier semestre prochain, un projet de loi de programmation pluriannuelle pour la recherche qui nous permettra d'avoir une meilleure visibilité à moyen terme de cette politique publique majeure.
C'est pourquoi nous voterons les crédits de la mission Recherche et enseignement supérieur.
J'entends bien les remarques formulées en ce qui concerne le montant de la dépense par étudiant, mais n'oublions pas que d'autres dispositifs existent à côté des crédits budgétaires : le PIA, qui représente, pour la seule année 2018, 1,7 milliard d'euros pour la sphère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, dont un tiers a bénéficié directement aux opérateurs ; les actions des collectivités territoriales ; la taxe affectée contribution vie étudiante et de campus (CVEC) à hauteur de 140 millions d'euros ; les nouveaux leviers permettant aux universités de valoriser leur immobilier. Avec tous ces éléments, l'effort public en faveur de l'enseignement supérieur et de la recherche est très significatif, et aussi singulier par rapport aux autres pays du monde.
Quant à la précarité étudiante, je rejoins ce qui a été dit. C'est la raison pour laquelle les droits d'inscription sont à nouveau gelés et que la cotisation à la sécurité sociale étudiante, qui représentait une dépense de 217 euros, est définitivement supprimée à compter de cette rentrée. Là encore, ce sont des mesures de soutien à prendre en compte pour bien jauger les crédits.
Bien évidemment, la rémunération, l'attractivité des métiers de la recherche, l'accueil des chercheurs étrangers, la mobilité des chercheurs français à l'étranger, au moins dans l'Union européenne, seront les véritables enjeux de la future loi de programmation pluriannuelle de la recherche. À cet égard, je vous renvoie au deuxième tome des trois rapports qui ont été remis au Premier ministre, qui donne des pistes de travail sur ces questions.
La commission adopte les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » ainsi modifiés.
Article additionnel après l'article 76 : Indicateur de gestion du patrimoine immobilier des universités
La commission examine l'amendement II-CF354 de M. Jean-Paul Mattei.
Cet amendement d'appel, que j'ai déposé avec le rapporteur spécial Fabrice Le Vigoureux, est issu des travaux que j'ai menés dans le cadre du printemps de l'évaluation budgétaire sur le patrimoine immobilier des universités. Il vise à demander au Gouvernement un rapport afin de proposer, dans le cadre du prochain projet de loi de finances, un indicateur de performance de gestion conditionnant les subventions publiques à la bonne gestion du parc immobilier des universités. Cet indicateur pourrait reposer sur le ratio entre la gestion du patrimoine immobilier et le niveau de subvention alloué par le budget du ministère.
J'ai pu constater que certains biens de prestige, sous-utilisés et mal exploités, causaient des pertes à certaines universités, les privant de moyens propres que le budget de l'État venait abonder pour assurer l'exercice de leurs missions. Je pense, en particulier, au patrimoine immobilier de la chancellerie des universités de Paris, et notamment aux biens d'apparat sous-exploités qui ne bénéficient que marginalement au public universitaire, que sont le domaine de Richelieu, dont l'équilibre n'est assuré que par la perception de subventions de la direction régionale des affaires culturelles (DRAC), et la villa Finaly à Florence, cette dernière accusant un déficit de près de 200 000 euros par an.
Ces biens avaient déjà suscité, en 2014, les critiques sévères de la Cour des comptes quant aux frais d'entretien qu'ils généraient et qui grevaient le budget de la chancellerie des universités, alors que celle-ci bénéficie de subventions publiques pour entretenir son patrimoine. De plus, la chancellerie n'a pas été capable de présenter un schéma directeur de stratégie immobilière.
Même si ce sujet recouvre aussi celui de l'acceptation des legs conditionnés, que je suggère d'interdire purement et simplement car ils limitent la valorisation qui peut en être faite, des marges de manoeuvre existent néanmoins, sachant qu'une mauvaise gestion, par effet de vases communicants, implique une mauvaise consommation des deniers publics. Cet indicateur permettrait donc de responsabiliser les acteurs sur la gestion de leurs biens de prestige, d'avoir connaissance du taux de bonne gestion et d'inciter les universités à améliorer la gestion de ces biens de prestige.
Cet amendement va dans le sens d'une diversification des sources de financement en mobilisant au mieux l'actif de nos établissements. Avis favorable.
La commission adopte l'amendement II-CF354 portant article additionnel après l'article 76 (II-253
La commission en vient à l'examen des crédits de la mission Enseignement scolaire.
Notre majorité a souhaité faire de l'éducation la première de ses priorités. Cette année encore, le budget de l'État reflète ce choix. Premier budget de la nation avec 74 milliards d'euros, l'enseignement scolaire voit ses crédits augmenter de 1,8 % par rapport à la loi de finances initiale de 2019, soit 1,2 milliard d'euros supplémentaires. Ces chiffres suffisent, s'il le fallait, à faire taire la critique souvent répétée que la priorité donnée à l'école ne serait qu'un affichage politique.
Notre objectif, depuis le début de la législature, est de remettre notre système scolaire sur les rails pour qu'il cesse d'être un facteur de creusement des inégalités. Ce budget est le reflet de notre ambition. Tout d'abord, la priorité donnée au premier degré se traduit par un effort supplémentaire de 500 millions d'euros et la création de plus de 500 équivalents temps plein (ETP) dans l'enseignement public et privé. Cet accroissement des moyens permettra de financer l'accueil de 25 000 élèves supplémentaires résultant de l'abaissement de l'âge de la scolarité obligatoire à 3 ans et d'étendre aux grandes sections le dédoublement des classes en éducation prioritaire – 300 000 élèves de CP et de CE1 en bénéficient déjà aujourd'hui et, d'ici à 2022, ils seront 450 000. Parce qu'une politique publique correctement évaluée et qui fonctionne doit être amplifiée, les effectifs seront progressivement limités, hors éducation prioritaire, à vingt-quatre élèves dans les classes de grande section, CP et CE1.
La priorité donnée au premier degré ne se pratique pas que dans les métropoles et les villes, comme certains voudraient le faire croire. Alors que le nombre d'élèves dans les territoires ruraux diminue, aucune école rurale ne sera fermée, sauf accord du maire.
Le second degré fait aussi l'objet d'efforts budgétaires continus. L'accompagnement des élèves est accentué au collège, avec la montée en puissance du dispositif « Devoirs faits », pour un coût de 167 millions d'euros en 2020. Au lycée, grâce à la réforme du baccalauréat, la rentrée des premières a été un succès avec plus de la moitié des élèves ayant innové dans la combinaison des matières choisies. L'orientation des élèves fait l'objet d'une attention redoublée puisque cinquante-quatre heures obligatoires lui sont désormais consacrées.
Par ailleurs, le budget 2020 de la mission prévoit un renforcement très significatif des moyens en faveur d'une école inclusive, car chaque élève, quelles que soient ses différences, a toute sa place dans l'école de la République. Dans tous les départements, des services départementaux de l'inclusion scolaire ont été créés. Ils permettront le déploiement de 3 000 pôles inclusifs d'accompagnement localisés (PIAL) d'ici à 2020 : un véritable service public de l'école inclusive va ainsi émerger.
Le plan de transformation des contrats aidés en accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) sera finalisé avant l'heure et 4 000 personnes seront recrutées pour la rentrée 2020.
Le budget pour 2020 poursuivra également la revalorisation du métier d'enseignant. L'augmentation des rémunérations au titre du protocole « parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR) s'élève à 300 millions d'euros. Après deux revalorisations de 1 000 euros nets à la rentrée 2018, les personnels exerçant en réseau REP+ bénéficieront d'une nouvelle mesure de revalorisation de 1 000 euros en 2019 et d'une autre en 2020.
Enfin, la rigidité qui a souvent été associée au ministère de l'éducation nationale n'est plus de mise. C'est ce que j'ai pu observer lors de mes déplacements auprès de tous les opérateurs de la mission. Leur gestion est rigoureuse et les processus de contractualisation avec le ministère sont avancés. Ils ont tous lancé une démarche de transformation et de modernisation exemplaire. Ainsi le Centre national d'enseignement à distance (CNED) développe-t-il des outils pédagogiques innovants et de très grande qualité. Il contribue à l'effort de rationalisation des dépenses du ministère. Le réseau Canopé, par exemple, effectuera une restructuration d'ampleur.
Ce dynamisme se retrouve enfin dans l'enseignement technique agricole où les taux de réussite aux examens et les taux d'insertion professionnelle sont excellents. Je réitère donc le voeu, formé ici l'été dernier, qu'une politique plus volontaire de valorisation et de promotion de l'enseignement technique agricole soit conduite dans les zones urbanisées, notamment auprès des jeunes des quartiers qui n'en connaissent parfois même pas l'existence. L'enseignement dispensé y est de qualité et une véritable attention est apportée aux élèves.
Toutefois, dans le cadre de la préparation de mon rapport, j'ai été frappée par la précarité d'une partie des enseignants de cette filière. Un plan de revalorisation de leur métier avait été négocié avec le ministère, mais il n'a pas obtenu de financement dans le projet de loi de finances pour 2020. Je défendrai donc un amendement visant à y remédier.
À cette correction près et pour toutes les raisons que j'ai évoquées, je donne, bien évidemment, un avis favorable au vote de ces crédits.
La commission en vient à l'examen des amendements à la mission Enseignement scolaire.
Article 38 et état B
La commission examine l'amendement II-CF246 de Mme Michèle Victory.
Le Président de la République avait annoncé la création de 10 000 postes d'enseignants supplémentaires. Or le projet de loi de finances ne propose que 440 postes d'enseignants dans le premier degré de l'enseignement public, ce qui est insuffisant. Aussi proposons-nous la création de 3 000 postes d'enseignants supplémentaires dans le premier degré.
Vous proposez d'allouer 240 millions d'euros pour créer 3 000 postes supplémentaires dans le premier degré, de façon à atteindre l'objectif de limitation des effectifs à vingt-quatre élèves par classe en grande section, CP et CE1, hors éducation prioritaire.
Je vous rappelle que l'objectif de dédoublement de l'ensemble des classes de CP et CE1 en REP et REP+ a été atteint cette année – cela concerne 300 000 élèves. Vous n'avez donc pas à craindre que nos promesses ne soient pas tenues.
J'ajoute que les effectifs dans le primaire diminuant depuis 2017, ce qui devrait nous inquiéter, 50 000 élèves en moins devraient être scolarisés en 2020, à la fois dans l'enseignement public et dans l'enseignement privé.
Pour toutes ces raisons, j'émets un avis défavorable.
La commission rejette l'amendement II-CF246.
Puis elle est saisie de l'amendement II-CF247 de Mme Michèle Victory.
Afin de maintenir un niveau de formation des enseignants de qualité, il ne paraît pas judicieux de diminuer les crédits de près de 30 millions d'euros par rapport à 2019. La formation des enseignants ne peut se limiter à l'accompagnement des réformes ; elle doit vraiment permettre un approfondissement sérieux des contenus didactiques et répondre à des besoins de formation à la demande.
Nous peinons à distinguer, dans ce budget, ce qui va à la formation initiale de ce qui va à la formation continue.
Nous souhaitons donc que des moyens supplémentaires soient alloués à la formation des enseignants.
Vous proposez le même amendement que l'année dernière. Une formation de qualité n'est pas synonyme de formation onéreuse. La diminution des dépenses de formation s'explique par le développement d'outils numériques, comme la plateforme M@gistère, et par celui de la formation à distance.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement II-CF247.
Elle étudie ensuite l'amendement II-CF232 de Mme Michèle Victory.
Les unités localisées pour l'inclusion scolaire (ULIS) fonctionnent plutôt bien et représentent une alternative importante pour les élèves qui ont des difficultés particulières.
En 2018, le taux de couverture des notifications d'affectation en ULIS écoles a baissé de 86,6 % à 85,6 %, du fait d'une augmentation constante des demandes. Il est indispensable de permettre à tous ces élèves de trouver des solutions qui correspondent à leur handicap. C'est pourquoi nous proposons une augmentation du nombre de postes en ULIS écoles.
Je ne suis pas tout à fait d'accord avec vos chiffres. Le projet de loi de finances prévoit la création de 66 ULIS dans l'enseignement public du premier degré et de 166 dans le second degré. Je rappelle qu'à la rentrée 2018, 71 ULIS avaient été créées en écoles et 202 en collèges et lycées. Les prévisions du taux de couverture s'améliorent donc pour 2019, s'établissant à 92 % en écoles et 88 % en lycée. Cette amélioration sera également permise par la réorganisation des services du ministère avec la création d'un véritable service d'inclusion scolaire dans chaque département en France – 3 000 PIAL. Enfin, le nombre d'AESH augmente, avec la création de 4 000 postes en 2020.
Je vous propose de refaire le point sur le taux de couverture l'année prochaine. Je doute que la situation ne soit pas meilleure d'ici là. Avis défavorable.
On voit bien que la politique d'inclusion dans le milieu ordinaire scolaire fonctionne et se déploie extrêmement bien dans le réseau de l'éducation publique. En revanche, quelques interrogations nous viennent du terrain s'agissant du réseau scolaire privé. J'aurais souhaité qu'on puisse faire le point, soit d'ici à l'examen de cette mission en séance publique, soit dans les mois qui viennent, sur l'usage des postes d'AESH dans les ULIS privées.
Il n'y a pas de classes ULIS dans l'enseignement agricole, ce qui est déplorable, car il s'agit d'un enseignement d'excellence où des élèves en difficulté pourraient trouver leur voie.
La commission rejette l'amendement II-CF232.
Elle en vient à l'amendement II-CF245 de Mme Michèle Victory.
Cet amendement vise à financer la titularisation d'une partie des contractuels de l'enseignement secondaire. Le volume des contractuels ne cesse d'augmenter, atteignant 40 % dans certaines zones tendues. On ne peut pas parler de stabilité des postes, des enseignements et des équipes avec autant de personnels contractuels. Ce sont des postes précaires, préoccupants tant pour les enseignants, au regard de leur rémunération, de leur retraite et de leur formation puisqu'ils n'ont pas les mêmes droits à la formation que les titulaires, que pour l'apprentissage des élèves.
Si l'on est dans une démarche d'apprentissage égalitaire et de qualité pour tous nos jeunes, et alors que l'on manque actuellement d'enseignants, il est indispensable de travailler à la titularisation de tous ces enseignants dont certains sont en poste depuis plus de dix ans, voire quinze, et sont reconnus par les inspecteurs pour l'excellence de leur travail. On pourrait ainsi titulariser 10 % des agents contractuels chaque année.
Une réforme d'une telle ampleur ne peut pas être discutée au détour d'un amendement, aussi peu précis qui plus est. Il s'agirait de titulariser une partie des contractuels, puis 10 % chaque année. Le chiffrage de la mesure n'est pas justifié et les modalités de sa mise en oeuvre sont inconnues : faudra-t-il ouvrir plus de places au concours ou bien la titularisation se fera-t-elle automatiquement ?
De surcroît, d'un point de vue budgétaire, l'adoption de cet amendement pourrait coûter à l'éducation nationale son système informatique, par exemple. Avis défavorable.
Vous aurez compris qu'il s'agit d'un amendement d'appel. J'ai déjà interrogé le ministre de la fonction publique et le ministre de l'éducation nationale sur ce sujet, mais on me répond toujours que ce n'est pas le bon moment. Il faudra pourtant bien, un jour, se pencher sur cette question de la titularisation de ces enseignants ! J'ai conscience que ce que nous proposons est assez grossier, mais il s'agit de susciter la réflexion puisque la loi Sauvadet n'a pas porté les fruits que nous attendions.
Qu'il y ait des contractuels n'est pas choquant en soi dès lors qu'ils ont droit à des formations et que le recrutement est de bonne qualité. Un bon professeur n'est pas nécessairement titulaire !
On peut avoir une vision plus diversifiée, avec des contractuels, des personnes en contrat à durée indéterminée, sans qu'il s'agisse forcément de précarité. Tout cela peut construire une éducation nationale cohérente.
La commission rejette l'amendement II-CF245.
Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements II-CF234 et II-CF233, tous deux de Mme Michèle Victory.
Si l'on veut accompagner la hausse programmée des effectifs et limiter le nombre d'élèves par classe pour favoriser un travail satisfaisant, il ne nous semble pas très judicieux de supprimer 440 postes d'enseignants. C'est pourquoi nous faisons deux propositions tendant à revenir sur ces suppressions.
Je suis défavorable à l'amendement II-CF234, qui n'est pas financé.
Quant à la hausse des effectifs d'élèves qui justifierait l'augmentation des crédits proposée par l'amendement II-CF233, elle est en réalité minime puisqu'elle sera de 0,2 % par rapport à l'an dernier. La diminution d'emplois qui, pour l'essentiel, n'étaient pas pourvus par des titulaires, est compensée par un recours accru aux heures supplémentaires, qui est parfois demandé par le corps enseignant puisqu'il améliore leur pouvoir d'achat.
En outre, les crédits du second degré ne diminuent pas puisque près de 450 millions d'euros supplémentaires sont prévus dans le programme 141. Le Gouvernement a fait le choix assumé d'opérer un rééquilibrage en faveur de l'enseignement primaire. Une meilleure maîtrise des fondamentaux entraînera un apprentissage facilité au collège. Cela explique la concentration des moyens humains sur le premier degré ainsi que le dédoublement des classes de CP et CE1 en réseau d'éducation prioritaire. Je suis donc défavorable à l'adoption de cet amendement.
Le recours aux heures supplémentaires constitue une réponse tout à fait partielle, qui peut convenir à un enseignant en début de carrière rencontrant des difficultés financières, mais ce n'est pas ce que les enseignants demandent majoritairement. Ils souhaitent plutôt qu'on les aide à trouver des conditions d'exercice de leur métier supportables. Ce qu'il s'est passé récemment montre que beaucoup d'enseignants sont proches du burn out dans une société qui leur en demande toujours davantage. L'heure supplémentaire n'est pas synonyme de valorisation de leur salaire et de leur travail.
La commission rejette successivement les amendements II-CF234 et II-CF233.
Elle en vient à l'amendement II-CF235 de Mme Michèle Victory.
Il s'agit d'un amendement d'appel.
D'une part, comme je l'ai déjà dit, on ne voit pas bien ce qui va à la formation initiale et ce qui va à la formation continue.
D'autre part, un décret prévoit, pour les enseignants, une formation sur le temps des vacances, qui serait rémunérée par demi-journée ou journée. On sait que cette formation répond plutôt à la demande de nouvelles matières consécutive à la réforme du baccalauréat. Or, quand on parle de formation des enseignants, il s'agit de la manière dont les enseignants vont avoir un peu plus d'horizon, un peu plus d'air pour pouvoir se nourrir et avancer dans leur métier.
Je souhaiterais donc avoir des chiffres un peu plus précis et que l'on réfléchisse à une formation des enseignants qui ne soit pas que l'accompagnement des réformes.
Une réforme globale de la formation des enseignants a été inscrite dans la loi du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance. La formation initiale des enseignants a ainsi été revue en profondeur avec la transformation des écoles supérieures du professorat et de l'éducation (ESPE) en instituts nationaux supérieurs du professorat et de l'éducation (INSPE) à la rentrée 2019. Le projet de loi de finances pour 2020 intègre 39 millions d'euros pour la préprofessionnalisation de 3 000 assistants d'éducation dès la rentrée prochaine.
S'agissant de la formation continue, un schéma directeur de la formation est mis en oeuvre pour 2019-2022, avec pour ambition de former l'ensemble des personnels des premier et second degrés. Vous le voyez, des efforts conséquents sont consentis pour la formation des enseignants. Avis défavorable.
Concernant la formation des enseignants, on délire complètement.
Pour être boucher, c'est-à-dire s'occuper de viande morte, il faut être titulaire au minimum d'un CAP, autrement dit avoir fait un ou deux ans d'études. Pour enseigner – je ne dis pas connaître une matière, mais savoir la transmettre –, les enseignants ont un ersatz de formation. C'est très insuffisant, en particulier pour les jeunes enseignants qui débarquent dans des lycées sans repère. Être enseignant, c'est un métier. On a pu voir malheureusement souvent, dans des émissions, comment on recrutait n'importe quel contractuel qui ne bénéficiait d'aucune formation. Et après, on nous parle de l'éducation des enfants : ce n'est pas du tout sérieux !
La commission rejette l'amendement II-CF235.
Puis elle passe à l'amendement II-CF239 de Mme Michèle Victory.
Le Gouvernement a prévu de diminuer les crédits alloués aux fonds sociaux versés aux établissements pour apporter une aide exceptionnelle aux familles qui en ont le plus besoin. Or on sait que la pauvreté augmente dans le pays, notamment la pauvreté des enfants. Quand on voit la difficulté qu'ont les familles à oser parler de leurs problèmes puis à les résoudre, ces fonds sociaux revêtent une importance toute particulière. C'est pourquoi nous proposons d'augmenter de 29 millions d'euros les crédits alloués aux fonds sociaux, pour les ramener au niveau de la loi de finances initiale de 2019.
J'entends bien vos inquiétudes sur la question des fonds sociaux qui a fait l'objet d'une rencontre au ministère avec Cécile Rilhac, rapporteure pour avis.
La programmation des fonds sociaux en 2019 s'établissait à 59 millions d'euros. Le projet de loi de finances pour 2020 prévoit d'y allouer 31 millions d'euros, après une réalisation de 53 millions d'euros en 2018. Je souligne que les bourses augmentent de 31 millions d'euros pour 2020, et, sur l'ensemble de l'action, l'augmentation est de 3 millions d'euros. Le montant alloué aux fonds sociaux est indicatif et le projet annuel de performance (PAP) précise bien que les aides sociales seront maintenues au niveau de la consommation 2018. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement II-CF239.
Puis elle discute de l'amendement II-CF236 de Mme Michèle Victory.
Si nous reconnaissons que des efforts importants ont été faits en matière de nomination d'AESH, le point faible demeure leur formation. Selon les handicaps auxquels ces personnes sont confrontées, les réponses à apporter sont bien évidemment différentes. Le directeur général de l'enseignement scolaire nous a indiqué que certaines académies, comme celle de Créteil, disposaient de trop faibles budgets pour la formation des AESH. Sachant que les notifications des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) augmentent très fortement, il conviendrait d'abonder les crédits dédiés à la formation de 10 millions d'euros. Il est important pour les familles que les AESH qui accompagnent leurs enfants soient réellement formés.
Je partage votre souci d'assurer un financement à la hauteur d'une formation de qualité des AESH. Nous avions eu un long débat l'année dernière dans l'hémicycle à ce sujet. Le décret du 27 juillet 2018 prévoit une durée minimale de formation de soixante heures. La transformation de l'ensemble des contrats aidés en contrats de trois ans, qui sera finalisée grâce à ce projet de loi de finances, devrait améliorer la situation. L'enveloppe consacrée à la formation des AESH est d'ailleurs en hausse de près de un million d'euros par rapport à 2019, pour s'établir à 8,2 millions d'euros. Avis défavorable.
Dans la plupart des régions, le plan d'investissement dans les compétences (PIC) permet à des personnes éloignées de l'emploi qui ont la vocation et l'envie de travailler en tant qu'AESH d'intégrer ces formations et d'être recrutées demain. Toutefois, dans les identifications de profil, les conseillers Pôle emploi ne font pas toujours bien la corrélation entre les besoins en AESH et les personnes qui souhaiteraient exercer ce métier.
Le statut des AESH n'est pas tout à fait le même dans l'enseignement agricole. Outre que leur nombre est insuffisant, ce sont encore souvent des contrats d'un an qui sont signés. Nous vous demandons donc d'être particulièrement vigilants sur cette question, d'autant que nous n'avons pas pu auditionner monsieur Guillaume sur cette mission.
La commission rejette l'amendement II-CF236.
Puis elle examine, en discussion commune, les amendements II-CF181 et II-CF186 de M. Cyrille Isaac-Sibille, et l'amendement II-CF379 de Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale consacre 200 milliards à la médecine de soins, mais bien peu à la médecine de prévention – cela remonte aux ordonnances de 1945.
La médecine de protection maternelle et infantile (PMI), la médecine scolaire et la médecine du travail, toutes trois médecines préventives, sont les parents pauvres de la médecine. On sait pourtant que la prévention est la solution. Aussi mes amendements ont-ils pour objet de renforcer les médecines de prévention.
La médecine scolaire est malade du manque de médecins scolaires, la moitié seulement des postes étant pourvus en raison de la faible attractivité de ces carrières. L'amendement II-CF181 propose d'abonder de un million d'euros les crédits alloués à la médecine scolaire, et le II-CF186 de 500 000 euros. L'adoption de l'un de ces amendements, symboliques, enverrait un message fort en faveur de la médecine de prévention.
Dans le même esprit, mon amendement II-CF379 vise à améliorer la situation de la médecine scolaire qui est en crise – telle l'Arlésienne, on en parle depuis bien longtemps.
La prévention est une priorité de la stratégie nationale de santé. Les deux récents rapports de madame Rist et de madame Peyron témoignent de l'importance de renforcer la prévention pour la santé des enfants, en particulier les bilans de santé. Si les besoins des services de PMI sont bien mis en évidence et entendus, la profession de médecin scolaire est laissée à l'abandon. Il y a une véritable souffrance au travail due à une maltraitance institutionnelle. L'Académie de médecine, le Haut Conseil de santé publique, la Cour des comptes, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) se sont tous alarmés face à l'état de ce service public à qui l'on demande de plus en plus de missions mais qui est incapable de les remplir.
Les conditions matérielles sont insuffisantes, et, comme l'a dit Cyrille Isaac-Sibille, il s'agit, par ces amendements, d'envoyer un signal, car les sommes que nous demandons sont modiques par rapport aux besoins de la profession. Une vraie politique de la prévention est nécessaire.
Ces professionnels ont une expertise dans le développement de l'enfant, ils sont formés spécialement aux troubles neuro-cognitifs, aux troubles des apprentissages, et ils sont capables de remédiation. Leur donner des moyens éviterait d'avoir recours à tout-va aux AESH. Bref, une vraie politique de prévention ne peut pas se faire sans ces interlocuteurs privilégiés des enfants à l'école.
J'entends bien l'appel que vous lancez.
Des mesures de revalorisation salariale ont déjà été adoptées dans le cadre du protocole PPCR depuis la rentrée 2017, pour les médecins et les infirmiers, notamment en REP+. Nous consacrons actuellement 511 millions d'euros en faveur de la santé à l'école.
Nous avons tous conscience que l'augmentation des crédits de 0,2 % que vous proposez ne permettra pas de résoudre le problème : il faudrait une réforme d'ampleur qui repenserait le recrutement puis la formation, revaloriserait les carrières et augmenterait les effectifs.
Une enquête de la Cour des comptes sur ce sujet est en cours à la demande du Parlement. Je vous propose donc que nous en rediscutions lors du printemps de l'évaluation.
Au-delà de la médecine scolaire, l'éducation nationale a longtemps cultivé un partenariat avec des associations qui ont été vidées de leurs subventions. L'Association de prévention et d'éducation sanitaire actions locales (APESAL), par exemple, faisait un travail de prévention formidable dans les écoles. Peut-être faut-il engager un travail dans le cadre du programme de réussite éducative de la politique de la ville pour redonner des forces financières à ces associations qui ont vu leurs moyens d'action réduits comme peau de chagrin dans les établissements scolaires. Pour l'heure, avis défavorable.
J'aime poser les questions qui fâchent. Depuis des années, la crise est patente dans tous les établissements du primaire et du secondaire. Mais à quoi sert la médecine scolaire ? Voilà la question dérangeante ! Le rôle qui lui a été assigné n'est-il pas rempli ? Ne devrions-nous pas l'organiser différemment, comme cela a été fait pour la médecine du travail, qui fait davantage appel à des infirmières ?
Monsieur le président, le rapport demandé à la Cour des comptes va-t-il aborder les questions de fond : quelles missions sont assignées à la médecine scolaire, sont-elles remplies, une autre organisation est-elle souhaitable ?
On ne trouve plus de volontaires pour devenir médecins scolaires, et une revalorisation, symbolique ou plus substantielle, ne réglera pas le problème : ce n'est pas qu'une question d'argent.
Le rapport sur la médecine scolaire que nous avons demandé à la Cour des comptes au titre du 2° de l'article 58 de la loi organique relative aux lois de finances nous sera remis au printemps prochain.
J'abonde dans le sens de monsieur de Courson : la médecine scolaire n'a plus le rôle qui lui a été attribué à sa création ; il faut l'envisager de manière complètement différente. Quel sens aurait une revalorisation du médecin scolaire alors que toute la médecine de ville est en crise ? Même si les salaires des médecins étaient doublés, le but ne serait pas atteint. Ce qu'il faut, c'est redéfinir leur rôle, car les besoins de la population en termes de prévention ne sont plus les mêmes qu'au sortir de la guerre.
La médecine scolaire a tout de même évolué depuis 1945 ! Mais je suis d'accord, il faut penser une véritable réorganisation et une priorisation des missions.
Cette profession de santé publique est malheureusement mal connue. On pense parfois que presque tout le monde peut faire un travail de prévention avec un peu de bonne volonté, mais ce n'est pas le cas. L'expertise de ces professionnels dans les domaines de l'intégration des enfants et de la réussite scolaire est méconnue et mal utilisée, car trop de missions leur sont confiées sans les prioriser.
Une vraie politique de prévention commence par les enfants. Il faut s'appuyer sur les ressources à notre disposition et leur donner la reconnaissance dont ils ont besoin. Les internes qui font des stages en médecine scolaire apprécient ce travail, ce sont les conditions de travail qui les découragent d'y faire carrière.
La médecine scolaire, c'est d'abord le dépistage de toutes les pathologies. Un fossé se creuse entre les enfants de familles qui reçoivent les messages de prévention, et qui bénéficient d'un bon environnement médical, et ceux qui n'ont pas cela. Pour ces derniers, la prévention passe uniquement par la médecine scolaire, qui joue un rôle très important de dépistage.
Je félicite la commission d'avoir commandé un rapport sur la médecine scolaire. Reste que les sommes ici proposées sont modiques, et les accepter à travers l'adoption d'un de ces amendements permettrait d'adresser un signal fort.
Je suis assez d'accord. La médecine du travail n'est pas exactement comparable, mais son objet est aussi la prévention, et nous voyons bien qu'elle permet de suivre toute une population qui ne va pas voir de médecin, et de la maintenir dans un bon état sanitaire. Il est essentiel que ces personnes aillent régulièrement voir un médecin.
Or ces disciplines sont dans un état de délabrement extraordinaire. Il faut engager des réformes profondes pour attirer de nouveaux médecins vers ce type de médecine, non pas soignante mais de dépistage, aujourd'hui moins attractive et moins rémunératrice. La médecine scolaire joue un rôle social tandis que la médecine du travail a un rôle en matière de pénibilité, par exemple au regard de la retraite. Elle pourrait se voir conférer beaucoup de pouvoir à l'avenir, par les liens qu'elle pourrait établir entre des affections et des milieux professionnels.
La commission rejette successivement les amendements II-CF181, II-CF186 et II-CF379.
Elle est ensuite saisie de l'amendement II-CF238 de Mme Michèle Victory.
Nous souhaitons appeler l'attention sur le fonds de vie lycéenne, dont les crédits sont en baisse dans ce budget. Le fonds de vie lycéenne permet de soutenir différentes initiatives d'élèves au sein de leur établissement, qui sont autant de leviers importants pour travailler sur la citoyenneté et le climat scolaire tout en permettant de transmettre les valeurs essentielles de la République.
Il est essentiel de maintenir les moyens prévus pour encourager et valoriser la participation des jeunes aux différentes instances de vie démocratique dans leurs établissements, en portant une attention spécifique aux lycées professionnels, dont les publics, issus de milieux plus fragiles, doivent être plus particulièrement accompagnés dans ces démarches.
Nous nous opposons donc à la baisse de 25 % des crédits alloués par ce budget au fonds de vie lycéenne.
Le PLF 2020 prévoit 2,5 millions d'euros pour le fonds de la vie lycéenne. Or, en 2018, 690 467 euros seulement ont été consommés. Je partage votre intérêt pour les initiatives des lycéens, mais abonder des crédits de ce fonds ne servirait à rien. Avis défavorable.
Madame la rapporteure spéciale, méfiez-vous des taux de consommation lorsque les crédits ne sont pas délégués ! Il faut approfondir l'analyse et déterminer si ce taux est faible faute de besoins ou parce que les crédits n'ont pas été délégués et que l'on feint de s'en étonner en fin d'année. C'est une vieille technique, bien pratiquée par la direction du budget.
Je pense plutôt que les lycéens n'ont pas envie de contribuer au déficit public et à l'endettement général. C'est un réflexe qui les honore.
La commission rejette l'amendement II-CF238.
Puis elle passe à l'amendement II-CF237 de Mme Michèle Victory.
Je partage le point de vue des intervenants précédents sur la médecine scolaire. En plus du soin apporté aux adultes et aux personnes qui travaillent, les infirmières scolaires ont un rôle majeur en offrant un point de rencontre entre les difficultés des jeunes et celles du monde scolaire. Pour aider les lycéens à surmonter les difficultés scolaires et à continuer leur formation, il faut des personnes à l'écoute.
Suivant l'avis défavorable de la rapporteure spéciale, la commission rejette l'amendement II-CF237.
Elle poursuit avec l'amendement II-CF240 de Mme Michèle Victory.
La plupart des actions internationales dans les collèges et lycées sont certes prises en charge par Erasmus +, mais nous nous inquiétons de voir les crédits alloués à l'action internationale en baisse dans ce projet de budget.
À l'heure où l'on parle beaucoup de la citoyenneté européenne et de la place de l'Europe et du monde dans l'imaginaire et la réalité de nos jeunes, il est important de maintenir un personnel formé pour accompagner ces projets. Le programme Erasmus aide aux déplacements et aux échanges, mais il faut aussi des personnes-ressources dans les établissements. Pour remplir ce rôle, le personnel a besoin d'heures de décharge ou d'heures supplémentaires, ce qui exige des moyens importants. Cet amendement a pour objet de les garantir.
J'ai eu l'explication de la baisse de 5,96 millions d'euros de ces crédits lors de l'audition de France Éducation international, anciennement CIEP, que j'ai effectuée en préparation de mon rapport : aucune subvention pour charges de service public ne lui sera reversée cette année en raison du niveau élevé de sa trésorerie.
La subvention de 5,96 millions d'euros versée l'an dernier ne sera pas versée cette année, à périmètre constant. Il n'y a donc pas de baisse de crédits. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement II-CF240.
Elle examine l'amendement II-CF242 de Mme Michèle Victory.
Nous demandons de revenir sur les suppressions de postes prévues dans l'enseignement agricole. Il est essentiel de donner la possibilité à des jeunes de s'engager vers une autre forme d'apprentissage, dans un domaine important à l'heure où l'on parle de développement durable et d'agriculture. Il faut y consacrer des moyens, et nous demandons la création d'unités localisées pour l'inclusion scolaire et de postes pour l'enseignement agricole.
Les suppressions de postes sont dues à la baisse des effectifs d'élèves dans l'enseignement agricole. Nous avons néanmoins augmenté le nombre d'emplois dans cette branche depuis la fin de la précédente législature : en 2016, le plafond d'emplois était de 15 232 ETPT, il est prévu à 15 334 en 2020, soit 102 de plus. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement II-CF242.
Puis elle examine l'amendement II-CF402 de la rapporteure spéciale.
Cet amendement tend à revaloriser les rémunérations des agents de catégorie 3 de l'enseignement technique agricole privé sous contrat.
Un plan de revalorisation des conditions d'emploi de ces agents a été défini en concertation entre les organisations syndicales et le ministère de l'agriculture et de l'alimentation. Il porte notamment sur les taux de promotion par liste d'aptitude, la proportion des recrutements au concours interne par rapport au concours externe, et la mise en place d'un parcours de formation.
Toutefois la partie du plan de requalification et d'amélioration du traitement indiciaire de ces agents n'a pas encore été mise en oeuvre, faute de crédits.
Cet amendement prévoit donc de financer la mise en oeuvre de ces deux parties du plan : un million d'euros pour le plan de revalorisation des conditions d'emploi, et également un million pour le rebasage des grilles indiciaires. En complément, 130 000 euros sont prévus pour les heures de remplacement nécessaires pour permettre le parcours de formation des agents concernés.
Au regard des conditions et mode de rémunération actuels de ces agents, et compte tenu du travail qu'ils accomplissent, essentiel à l'excellent taux d'insertion des jeunes issus de l'enseignement technique agricole dans la vie active, il est juste que ces mesures soient mises en oeuvre dès cette année.
Le financement de cette mesure serait assuré par le fléchage de 2,13 millions d'euros depuis le programme 230, en particulier depuis le fonds de soutien au développement des activités périscolaires. La baisse du nombre de communes et d'OGEC (organismes de gestion de l'enseignement catholique) ayant opté pour une organisation du temps scolaire sur quatre jours réduit fortement le besoin d'accompagnement financier que l'État leur verse en 2018 : près d'un quart des crédits n'ont jamais été exécutés.
La commission adopte l'amendement II-CF402 (II-269
Elle est ensuite saisie de l'amendement II-CF241 de Mme Michèle Victory.
Je reviens sur les ULIS dans l'enseignement agricole, que j'ai déjà évoqués. L'enseignement agricole permet d'intégrer des élèves confrontés à des difficultés dans l'enseignement général. Il est vrai que ses effectifs sont en baisse, et il faut comprendre pourquoi les jeunes ne sont pas plus nombreux à souhaiter y entrer, alors que cet enseignement correspond à un besoin de la société et offre d'intéressantes possibilités de trouver un emploi.
Pour ces élèves en situation fragile, il faudrait que l'enseignement agricole puisse offrir l'équivalent des ULIS, selon un système parallèle à celui de l'éducation nationale. Or ce n'est pas le cas, comme nous l'ont rapporté les organisations que nous avons rencontrées. Nous souhaitons donc la création de classes ULIS.
L'inclusion, en milieu agricole, est aussi liée à la nature de l'enseignement pratiqué. Qu'il n'y ait pas d'ULIS pour l'enseignement agricole dans chaque académie ne signifie pas que l'État n'y consacre pas les mêmes efforts qu'à l'enseignement général.
L'enseignement agricole est exemplaire en matière d'inclusion scolaire. Le nombre de jeunes en situation de handicap dans l'enseignement agricole augmente de 15 % par an. La dotation pour les élèves en situation de handicap ne cesse de croître : plus 26 % en 2020, soit 14,4 millions d'euros, après une hausse de 44 % en 2019 et de 14,4 % en 2018. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement II-CF241.
Elle examine ensuite l'amendement II-CF219 de M. Vincent Descoeur.
Cet amendement tend à réaffecter les dépenses de fonctionnement supplémentaires de l'enseignement agricole public vers un nouveau programme.
La hausse des dépenses de fonctionnement de l'enseignement public agricole est justifiée. La campagne de communication lancée cette année est nécessaire pour accroître la visibilité de cette filière de qualité. Elle porte ses fruits : le nombre d'élèves inscrits avait baissé de 1 300 l'année dernière ; ils étaient 900 de plus à la rentrée 2019.
Les frais de rénovation du système d'information se justifient par la nécessité de le rapprocher de celui de l'éducation nationale, pour fluidifier le parcours. Un élève qui passe de l'un à l'autre pourra ainsi faire l'objet d'un meilleur suivi.
Enfin, l'auteur de l'amendement s'émeut qu'une partie de ces dépenses profite à l'enseignement privé. En vertu d'un principe de parité, l'État est obligé de financer l'enseignement privé. Pour revenir sur ce principe, il conviendrait de changer la loi et non de couper les crédits. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement II-CF219.
S'agissant des crédits de cette mission, il ne faudra surtout pas oublier de compenser aux communes les coûts supplémentaires induits par l'abaissement à 3 ans de l'obligation de scolarité. Bien que tout se passe bien, il faut assurer la présence d'enseignants et de leurs remplaçants éventuels dans chaque classe, ce qui n'est pas toujours le cas.
Élu rural, je suis sensible aux critères appliqués pour l'ouverture ou la fermeture de classes. Il faut renforcer l'attractivité du métier d'enseignant et lutter contre la précarité des contractuels. Beaucoup d'entre eux doutent et manquent de reconnaissance – une expression qu'ils emploient couramment.
Il faut tenir les engagements de création de postes et également se pencher au chevet de la médecine scolaire.
Je suis toujours surprise du satisfecit que s'accorde le Gouvernement au regard des réalités du terrain, particulièrement dans mon département de Seine-Saint-Denis. Vous pouvez, bien sûr, arguer que les crédits de cette mission sont globalement en augmentation – c'est d'ailleurs vrai, en tenant compte de l'inflation –, mais le compte n'y est pas, sur aucun plan.
Tout d'abord, les dépenses en personnel du second degré sont en baisse alors que le nombre d'élèves augmente, sans revenir sur la souffrance au travail et les burn out.
Nous avons évoqué la médecine scolaire et la réduction de moitié des crédits alloués aux fonds sociaux des établissements. Alors que des enfants ne mangent pas, diminuer ces fonds qui permettent justement de payer parfois la cantine scolaire n'est pas en phase avec la réalité dans certains départements.
Le programme 214 Soutien de la politique de l'éducation nationale, qui permet notamment les renforts de professeurs, connaît aussi une baisse drastique de ses crédits. Je connais des collèges à Saint-Denis qui ont déposé un recours, car ils n'ont toujours pas d'enseignants. Dans ma circonscription aussi, des professeurs ne sont pas remplacés et je n'ai pas de réponse du rectorat.
Évoquons enfin la situation des directeurs d'école : sans revenir sur le suicide qui a tant fait parler, le manque d'assistance administrative impose aux directeurs une surcharge de travail bureaucratique. La profession est à bout, et ce budget ne prévoit absolument rien pour y remédier. En dépit des augmentations, ces crédits sont insuffisants.
C'est à leur entrée à l'école que nos enfants acquièrent les savoirs de base fondamentaux. Dès lors, l'effort porté sur l'enseignement du premier degré ne peut que nous réjouir, bien qu'il porte principalement sur l'école maternelle.
Nous saluons ce geste, en dépit des limites que nous pouvons identifier. Si nous approuvons la scolarisation obligatoire dès 3 ans, nous attendons des réponses précises sur l'engagement de l'État envers les communes. Celles-ci subissent déjà l'amputation d'une partie des finances locales avec la suppression de la taxe d'habitation, et ne pourront donc pas prendre en charge l'application de cette réforme, en tout cas pas sans de fortes garanties financières de l'État.
De la même façon, nous relevons avec déception la fermeture de 400 écoles en milieu rural, à contre-courant des promesses du Président. Ces fermetures vont accentuer la désertification : une école qui ferme, par effet cumulatif, entraîne la déstructuration du milieu humain d'une commune ou d'une région. Nous attendons une clarification des perspectives du Gouvernement à ce sujet.
L'ambiance au sein de l'éducation nationale est lourde, le suicide d'une directrice d'école est encore venu nous rappeler la dégradation des conditions de travail. Il convient de revaloriser le statut de l'ensemble des fonctionnaires de l'éducation, en premier lieu des enseignants, c'est une question de continuité du service public.
Enfin, compte tenu des ravages causés par les diverses formes d'addiction chez les jeunes, un effort prioritaire de sensibilisation et de prévention doit être mené tout au long de la scolarité.
Les classifications REP et REP+ sont de vrais succès là où elles sont mises en place. Mais comment ces zones sont-elles déterminées ? Ma circonscription recouvre un immense territoire rural, de 294 communes, dont certaines sont plus pauvres que d'autres. Le directeur académique des services de l'éducation nationale (DASEN) a clairement reconnu que certaines de ces zones connaissaient une situation très proche de celles classées REP sans pourtant entrer dans cette catégorie. Si ces zones avaient été dans d'autres départements de France, je pense qu'elles auraient bénéficié de ce classement. Comment garantir un traitement équitable pour classer tous ces territoires ?
S'agissant des fermetures de classes, il est dit que le maire a la décision finale, mais c'est en réalité très difficile. La population en milieu rural augmente, mais le nombre d'enfants diminue. Les effectifs par classe sont parfois très réduits, et il est difficile de garder certaines classes ouvertes. Certains maires y arrivent, d'autres pas. Il est difficile de tenir la parole du Président de la République sur cette question.
Le groupe MODEM et apparentés votera néanmoins les crédits de cette mission.
La commission adopte les crédits de la mission Enseignement scolaire ainsi modifiés.
Après l'article 76.
La commission est saisie de l'amendement II-CF243 de Mme Michèle Victory.
Il s'agit d'une demande de rapport sur la situation des enseignants contractuels. Cette question ne vous semble pas importante, mais elle l'est à nos yeux.
Nous souhaitons connaître la situation des contractuels au sein de l'éducation nationale. Nous savons qu'il reste des maîtres auxiliaires, sans que le ministre n'en connaisse le nombre, qui sont en poste depuis vingt, vingt-cinq ou trente ans. Il faut accorder une reconnaissance réelle aux personnes qui travaillent ; un rapport sur cette question serait bienvenu.
Je n'ai pas voulu dire que je me désintéressais de leur situation, simplement l'on peut exercer un métier de façon contractuelle. Il suffit de hausser le niveau des contractuels. Il n'y a pas d'obligation absolue de travailler sous statut, heureusement.
Tous les contractuels ne sont pas dans une situation précaire, mais il est vrai que certaines situations peuvent être très difficiles. Je vous conseille la lecture du rapport de la Cour des comptes, publié en 2017, sur la gestion des enseignants, et notamment des contractuels. Par ailleurs, certains titulaires craignent que la titularisation des contractuels ne dévalorise le concours. Avis défavorable.
On oublie souvent que l'exercice en tant que contractuel permet souvent de découvrir un métier. Beaucoup de jeunes qui n'ont pas prévu de passer les concours de l'éducation nationale découvrent plus tard une vocation. La période contractuelle peut être une phase de test du métier. Ainsi, il manque de nombreux enseignants en langues étrangères, et, heureusement, des passionnés de langues étrangères décident de prendre un poste de contractuel.
S'agissant de la revalorisation des contractuels, il m'a été dit qu'un chef d'entreprise dans le bâtiment qui souhaiterait mettre ses compétences et son expérience professionnelle de dix ou quinze ans au service de l'éducation nationale est recruté au bas de l'échelle ; l'expérience privée n'est pas du tout valorisée. Il serait intéressant de valoriser ces partages d'expérience, notamment pour les métiers qui ont pu abîmer le corps du fait des contraintes et de la pénibilité particulière du travail.
Nous avons commandé à la Cour des comptes un rapport sur les heures supplémentaires dans la fonction publique. Nous étudierons l'emploi de ces heures supplémentaires dans l'éducation nationale, les professeurs qui y recourent, ce qui apportera des éléments importants en plus de ceux que nous aurons sur la médecine scolaire.
J'interviens en réponse à madame Cattelot : si nous souhaitons en finir avec la fracture dans les esprits entre le public et le privé, il serait utile de valoriser toute l'histoire et les compétences de ceux que l'on accueille au sein de l'éducation nationale. On impose à ceux qui arrivent les mêmes contraintes que s'ils venaient de passer le CAPES. Or, s'agissant souvent de jeunes parents, les contraintes de mobilité géographique peuvent devenir un vrai frein. De la sorte, dans certaines filières – je pense en particulier aux professeurs de technologie – les manques sont criants.
La commission rejette l'amendement II-CF243.
Puis elle passe à l'amendement II-CF244 de Mme Michèle Victory.
L'accélération de la création des ULIS fait suite à de nombreux rapports documentant les mesures en faveur de l'inclusion scolaire. Je vous conseille, par exemple, la lecture du rapport de notre collègue Sébastien Jumel, rendu en conclusion des travaux de la commission d'enquête sur l'inclusion des élèves handicapés dans l'école et l'université de la République, quatorze ans après la loi du 11 février 2005. Il consacre des développements aux ULIS. Avis défavorable.
Je connais bien ce rapport et il précise que quatre ou cinq fois plus d'ULIS seraient nécessaires pour les élèves en situation de handicap. Un rapport serait donc utile.
La commission rejette l'amendement II-CF244.
Enfin, elle examine l'amendement II-CF380 de Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe.
Cet amendement vient en réponse aux propos de la rapporteure spéciale sur la revalorisation du statut des médecins scolaires et aux questions de nos collègues Michel Lauzzana et Charles de Courson. Il s'agit d'une demande de rapport au Gouvernement sur les missions qu'il convient de confier aux médecins scolaires, et l'opportunité d'apporter des changements à leur statut et leur ministère de tutelle, afin d'optimiser l'évolution de cette profession.
Le Parlement a demandé à la Cour des comptes un rapport sur la médecine scolaire, qui sera rendu au mois d'avril. Je vous propose donc de retirer votre amendement, quitte, si vous n'êtes pas satisfaite à la suite de ce rapport, à le déposer à nouveau l'année prochaine.
Je vous invite à assister à la remise de ce rapport par la Cour des comptes, au printemps prochain.
Le cahier des charges a déjà été transmis à la Cour des comptes. Je vous en ferai parvenir la lettre de commande.
L'amendement II-CF380 est retiré.
La commission en vient à l'examen des crédits de la mission Travail et emploi, et des articles 79 et 80, rattachés (Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas, rapporteure spéciale).
Depuis deux ans, le dynamisme de l'emploi est fort et le taux de chômage poursuit sa baisse. Il atteint aujourd'hui son plus bas niveau depuis dix ans – 8,5 % – et, selon la DARES, pourrait même descendre à 8,3 % à la fin de l'année 2019. Cette amélioration de la situation n'est pas que quantitative, elle est aussi qualitative, comme en témoigne la progression, au cours des deux dernières années, des emplois en contrat à durée indéterminée, parallèlement au recul de l'intérim.
J'y vois le succès de réformes structurantes, telles les ordonnances travail, qui ont donné aux entreprises et aux salariés la liberté et les moyens de définir eux-mêmes les règles d'organisation du travail, la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, qui a doté notre pays des moyens nécessaires pour gagner la bataille mondiale des compétences et bientôt, la transformation effective de l'assurance chômage et de l'accompagnement des chômeurs, qui parachèvera la construction de notre modèle social et d'un nouveau marché du travail adapté aux enjeux de notre temps. J'y vois également le succès de choix judicieux, tels la revalorisation de la prime d'activité, la transformation du CICE en baisses de charges pérennes ou le lancement, dès cette rentrée, des concertations autour des services publics de l'insertion.
Bien sûr, tout n'est pas gagné et la mission a connu certains bouleversements. Ainsi, la fin des emplois aidés ne s'est pas traduite immédiatement par un report sur les PEC, les parcours emploi compétences. Il faut donc poursuivre les efforts.
Après deux années de baisse marquée, je salue néanmoins le maintien des crédits de la mission à leur niveau de l'an dernier, soit 12,3 milliards d'euros de crédits de paiement à périmètre constant.
La principale mesure de transfert est la substitution de l'aide unique aux employeurs d'apprentis aux aides régionales à l'apprentissage. J'indique que je verrais d'un oeil favorable l'extension de cette aide, pour les entreprises de moins de 11 salariés, à certaines formations de niveau 3, sanctionnées par des diplômes bac + 2 ou BTS. Ce serait un signal politique fort et cohérent avec la réalité, notamment vécue par les artisans.
Certes, la subvention pour charge de service public de Pôle emploi diminue de 138 millions d'euros, pour s'établir à 1,24 milliard d'euros. Cependant, cette baisse est plus que compensée par l'augmentation d'un point de la contribution de l'UNEDIC, ce qui, conjugué à la dynamique propre de la masse salariale, permet à l'opérateur de disposer en 2020 de 487 millions d'euros de ressources supplémentaires, pour un montant total de 5,9 milliards d'euros.
Après plusieurs années de baisse, le plafond d'emplois de l'opérateur a été revu à la hausse, pour atteindre 46 995 ETPT. La nouvelle convention tripartite de Pôle emploi, en cours de finalisation, permettra de revoir en profondeur l'offre de service pour les demandeurs d'emploi et les entreprises, de développer un accompagnement plus rapide, plus efficace, davantage personnalisé. Dans cette perspective, 950 ETPT supplémentaires ont été octroyés, avec l'objectif, entre autres, de mieux anticiper les difficultés de recrutement des entreprises.
Conformément au déploiement de la stratégie de lutte contre la pauvreté, l'investissement dans les dispositifs d'insertion dans l'activité économique se poursuit. Ainsi, 120 millions d'euros supplémentaires – pour un total de plus de un milliard d'euros – sont accordés à une politique dont l'efficacité est attestée par l'amélioration des taux d'insertion dans l'emploi durable.
Sur le même volet de l'investissement, l'année 2020 devrait être celle du plein déploiement du plan d'investissement dans les compétences (PIC). Cet effort sans précédent en faveur des personnes les plus éloignées de l'emploi – 14 milliards d'euros sur le quinquennat – se traduira en 2020 par des engagements de 3,1 milliards d'euros. Environ 52 % de ce montant sont pilotés par les régions dans le cadre d'une contractualisation. Le reste est consacré à des appels à projets nationaux ou à l'amplification d'actions nationales, en premier lieu la Garantie jeunes et le parcours contractualisé d'accompagnement vers l'emploi et l'autonomie (PACEA).
Au-delà des recommandations, mes propositions portent essentiellement sur les maisons de l'emploi et sur les deux articles rattachés. Certaines maisons de l'emploi jouent le jeu et demeurent un acteur essentiel des politiques territoriales de l'emploi, en partenariat avec d'autres structures. Elles voient leur avenir compromis par le désengagement financier continu de l'État – justifié dans certains territoires. Même si elles peuvent toujours répondre à des appels à projets, elles doivent faire face à des coûts de structure. Je propose donc d'abonder leur financement de 5 millions d'euros, comme l'an passé. En contrepartie, le réseau existant doit se structurer différemment et se transformer pour assurer la pérennité de cet accompagnement financier et viser à une plus grande complémentarité avec Pôle emploi.
J'en viens aux articles rattachés. Il a été envisagé de revoir les dispositifs d'exonération totale de charges sociales pour les aides à domicile, ouverts sur la seule condition d'âge, pour les réserver aux personnes en perte d'autonomie. Je remercie le Premier ministre d'avoir su tenir compte de nos réserves et d'avoir annoncé le retrait de cette mesure.
L'article 80 vise à recentrer l'aide aux créateurs et aux repreneurs d'entreprises sur son public cible. Compte tenu de certains effets d'aubaine et du risque d'atteinte à l'équité entre travailleurs indépendants, j'approuve le principe d'une rationalisation du dispositif, mais je souhaite que les modalités en soient examinées avec une attention particulière. Il en va de même pour l'article 79 : la ministre du travail précisera les aménagements qu'il convient d'apporter pour préserver le dispositif tout en maîtrisant la dépense.
La commission en vient à l'examen des amendements à la mission Travail et emploi.
Article 38 et État B
La commission examine, en discussion commune, les amendements II-CF344 de Mme Sarah El Haïry, II-CF357 de M. Jean-Louis Masson et II-CF69 de la rapporteure spéciale.
Madame la rapporteure spéciale, je pense prêcher une convaincue puisque vous connaissez les spécificités des maisons de l'emploi, mais aussi leurs différentes situations. Nous avons déjà eu ce débat l'année dernière et je continue de défendre leur particularité et l'intérêt qu'elles représentent pour nos territoires. Plus que connectées à la réalité économique, elles offrent une ingénierie. Par ailleurs, elles sont en mutation et travaillent pour évoluer. Il convient de les soutenir dans cette démarche, et avec Bruno Fuchs, en déplacement dans le cadre de l'assemblée parlementaire de la francophonie, nous comptons sur votre bienveillance vis-à-vis de l'amendement II-CF344.
Depuis plusieurs années, nous constatons le désengagement financier continu de l'État. Je vous ai bien écoutée, madame la rapporteure spéciale, et j'ai retenu que vous entendiez abonder cette ligne. Je persiste à penser, cependant, que ce serait une erreur de diminuer les crédits. Du reste, je ne suis pas le seul à le penser : des personnes qualifiées, de nombreux élus locaux de tous bords, l'Alliance Villes Emploi, les acteurs issus de la société civile ont pris position sur ce sujet.
Les maisons de l'emploi ne sont pas assimilables aux autres acteurs publics de l'emploi, comme Pôle emploi, les missions locales ou Cap emploi pour les personnes à mobilité réduite. Elles sont des outils d'ingénierie territoriale, leur coeur de métier n'est pas forcément celui des autres structures. Elles font de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, c'est-à-dire adaptent les aptitudes des demandeurs d'emploi aux besoins des entreprises ; elles pilotent les clauses d'insertion dans les marchés publics en agissant comme un guichet unique en direction des donneurs d'ordres publics, des entreprises et des structures d'accompagnement des demandeurs d'emploi ; enfin, elles organisent les actions liées à la création ou à la reprise d'entreprise, notamment le parrainage des jeunes créateurs. Leur force réside dans des diagnostics territoriaux précis, dans leur parfaite connaissance du territoire et dans leur capacité à animer une plateforme collaborative qui regroupe tous les acteurs publics économiques et associatifs.
Avec l'ambition du Président de la République d'investir pour l'emploi et la formation, nous avons plus que jamais besoin des maisons de l'emploi, des acteurs de proximité incontournables et parfaitement efficients. C'est la raison pour laquelle, à travers l'amendement II-CF357, je propose de maintenir le soutien de l'État à hauteur de 10 millions d'euros – une baisse cependant significative puisqu'en 2017, 23 millions d'euros figuraient à la même ligne.
Les maisons de l'emploi ont été créées à un moment où Pôle emploi, tel que nous le connaissons, n'existait pas. Si l'État s'est désengagé progressivement, c'est qu'aujourd'hui, Pôle emploi a une occupation bien définie sur le terrain et effectue, dans certains territoires, le travail que pouvaient faire les maisons de l'emploi. C'est le cas dans le Tarn, par exemple, ou à Bordeaux, où l'Alliance Villes Emploi est très active.
C'est en tenant compte de cette complémentarité que nous avions voté l'an dernier un budget de 5 millions d'euros, alors qu'il était prévu qu'il passe de 10 millions à zéro euro. Après avoir échangé avec les responsables des maisons de l'emploi, et considérant qu'un budget inférieur à 5 millions d'euros ne leur permettrait pas de poursuivre, je propose de maintenir la dotation allouée l'an passé. Elle leur permettrait d'entamer une restructuration, quitte à changer de nom, pour travailler en complémentarité avec les autres structures. Pôle Emploi signera avec l'Alliance Villes Emploi un partenariat et une convention dans les semaines qui viennent. Je vous demande de bien vouloir retirer vos amendements au bénéfice de mon amendement II-CF69.
En passant de 10 à 5 millions, l'État a fait porter le poids du fonctionnement des maisons de l'emploi par les métropoles et les collectivités, c'est un simple transfert de subventions. Il n'y a pas eu d'économies particulières réalisées puisque tout se fait par appel à projets, notamment avec des financements européens.
Par ailleurs, Pôle emploi est l'un des partenaires des maisons de l'emploi, et siège la plupart du temps au sein du comité de pilotage, avec les collectivités locales. Les objectifs sont établis en commun ; il n'y a pas de rivalité, mais bien une complémentarité dans l'organisation même du fonctionnement des maisons de l'emploi. Je ne souscris donc pas du tout à vos arguments et maintiens mon amendement : il serait naturel de revenir à un budget de 10 millions d'euros, qui me semble être le minimum pour que l'État prenne vraiment sa part dans le fonctionnement des maisons de l'emploi.
Mon amendement était plus généreux puisqu'il proposait d'inscrire 11,5 millions d'euros. Mais je préfère, pour être honnête, « cranter », sécuriser le dispositif. Je retire donc mon amendement au profit de celui de la rapporteure spéciale, en espérant que le débat dans l'hémicycle nous éclairera. Même s'il n'y a pas de concurrence avec Pôle emploi, les maisons de l'emploi sont en mutation : l'important est de les accompagner et de faire en sorte que ce mouvement se poursuive sur des territoires comme celui de Nantes, où les élus sont très mobilisés. Les maisons de l'emploi sont performantes, et c'est bien dans l'intérêt de leur territoire qu'elles continuent d'exister.
Je me suis engagée à travailler avec les maisons de l'emploi dès la fin du budget. Je vous invite, madame la députée, à vous joindre à nous.
L'amendement II-CF344 est retiré.
Successivement, la commission rejette l'amendement II-CF357 et adopte l'amendement II-CF69 (II-877
Puis elle adopte les crédits de la mission Travail et emploi ainsi modifiés.
Article 79 : Recentrage des dispositifs d'exonération spécifique en faveur des aides à domicile intervenant auprès de publics fragiles
La commission est saisie des amendements de suppression II-CF5 de M. Vincent Descoeur, II-CF53 de la rapporteure spéciale, II-CF312 de M. Mohamed Laqhila et II-CF426 de Mme Lise Magnier.
Après la hausse de la contribution sociale généralisée sur les retraites et la désindexation des pensions de retraite, l'article 79 prévoit de supprimer l'exonération des cotisations sociales dont bénéficient les personnes âgées de plus de 70 ans pour l'emploi d'une personne à domicile. Cette mesure représente une nouvelle atteinte aux revenus et au pouvoir d'achat des retraités. Elle nous paraît contre-productive, puisqu'elle risque de provoquer le licenciement d'aides à domicile et qu'elle entre en contradiction avec la volonté politique de maintenir les personnes âgées à domicile.
Le 24 septembre, en réponse à Gilles Lurton qui l'alertait sur les conséquences de cette mesure, le Premier ministre s'est engagé à la retirer du projet de loi. L'amendement II-CF5 vise à faire respecter cet engagement.
L'amendement II-CF53, comme les amendements identiques déposés par tous les groupes, vise à concrétiser l'engagement pris par le Premier ministre lors des questions au Gouvernement. Lors de la séance, nous laisserons à la ministre du travail le soin de proposer une contrepartie. Aujourd'hui, nous prenons date en supprimant cet article.
La commission adopte les amendements de suppression II-CF5, II-CF53, II-CF312 et II-CF426 (II-876
En conséquence, l'article 79 est supprimé.
Article 80 : Recentrage de l'aide aux créateurs et repreneurs d'entreprises sur son public cible
La commission adopte l'article 80, sans modification.
Membres présents ou excusés
Réunion du mardi 22 octobre 2019 à 21 heures
Présents. - M. Saïd Ahamada, M. Michel Castellani, Mme Anne-Laure Cattelot, M. Francis Chouat, M. Charles de Courson, M. Jean-Paul Dufrègne, M. Bruno Duvergé, Mme Sarah El Haïry, M. Olivier Gaillard, M. Alexandre Holroyd, M. Daniel Labaronne, M. Mohamed Laqhila, M. Michel Lauzzana, Mme Patricia Lemoine, Mme Lise Magnier, M. Jean-Paul Mattei, Mme Cendra Motin, Mme Catherine Osson, Mme Sabine Rubin, M. Laurent Saint-Martin, Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas, M. Éric Woerth
Excusés. - M. François André, M. Joël Giraud, M. David Habib, M. Marc Le Fur, Mme Valérie Rabault, M. Olivier Serva
Assistaient également à la réunion. - M. Éric Bothorel, Mme Danièle Hérin, M. Cyrille Isaac-Sibille, M. Jean-Louis Masson, M. Matthieu Orphelin, Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe, Mme Michèle Victory
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