COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES
Mercredi 17 novembre 2021
La séance est ouverte à neuf heures trente.
La commission examine la proposition de loi visant à faire évoluer la formation de sage‑femme (n° 4556) (Mme Annie Chapelier, rapporteure).
« Compter les femmes pour que les femmes comptent », tel est bien l'état d'esprit de cette proposition de loi sur les sages‑femmes. Elles sont 23 400 en France. Spécialistes de la physiologie, elles prennent en charge chaque année plus de 750 000 femmes qui accouchent et autant de nouveau-nés et de partenaires. Elles assurent la surveillance, le suivi médical de la grossesse, préparent à la naissance, à la parentalité. Elles accompagnent les femmes tout au long de leur vie, en assurant leur suivi gynécologique de prévention ou en prescrivant leur contraception. Et la liste n'est pas exhaustive.
Derrière ces chiffres et ces compétences élargies, se cache un mal‑être profond et ancien de la profession. Depuis le manifeste commun de 2003, les sages‑femmes n'ont cessé d'exprimer leurs revendications sans réussir à se faire entendre totalement. Le moment est venu de les soutenir dans ce combat, par cette proposition de loi.
La venue au monde de cette proposition représente un aboutissement pour celles qui nous font naître et qu'il nous faut d'urgence reconnaître. Au cours de cette législature, de belles avancées ont été réalisées pour la santé mentale des jeunes mères, qu'il s'agisse de l'instauration d'un entretien prénatal et d'un entretien postnatal ou des mesures contenues dans les lois de financement de la sécurité sociale de 2020 et 2022. Ces dispositions ont contribué à réaffirmer le rôle essentiel des sages‑femmes dans la lutte contre la dépression du post-partum. Avec les apports de la loi de notre collègue Mme Rist et la revalorisation des rémunérations par le Ségur de la santé, un mouvement a été enclenché.
Nous partions de très loin. Deux femmes sur trois se disent très insatisfaites de leur prise en charge au moment de l'accouchement et sept étudiantes sages‑femmes sur dix souffrent de symptômes dépressifs. Ce mal-être commun aux professionnels et aux parturientes est notamment lié à une très forte médicalisation de la naissance. Au travers de leurs revendications, les sages‑femmes souhaitent revenir à leur cœur de métier : la physiologie. Les patientes, elles, souhaitent davantage de personnalisation et une réappropriation de ce moment si particulier et déterminant de la vie d'une mère et de celle de l'enfant qu'est la naissance.
Dès lors, pourquoi avoir centré cette proposition de loi sur la seule formation ? Le terme de « formation » est présent plus de cent quarante fois dans le rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS), paru en juillet 2021, alors que celui-ci portait sur l'évolution globale de la profession. La formation constitue à la fois un point de départ et la condition sine qua non de l'évolution en profondeur de cette profession.
Le texte soumis à votre examen avance plusieurs solutions en vue d'améliorer les conditions d'apprentissage et d'exercice des sages‑femmes, tout au long de leur carrière.
L'article 1er prévoit le parachèvement de l'intégration universitaire. Pour donner une suite aux auditions, je présenterai un amendement afin que cette universitarisation ait lieu prioritairement au sein des unités de formation et de recherche (UFR) de santé ou, le cas échéant, d'une des composantes de formation en médecine. Les modèles d'intégration universitaire sont, en effet, très hétérogènes et il s'agit de proposer une ligne directrice.
La formation des sages‑femmes, qui s'effectue en école, est en cours d'intégration à l'université. Sur les trente-cinq écoles de sages‑femmes de notre pays, onze indiquent avoir finalisé leur universitarisation et seulement six d'entre elles ont opté pour le transfert complet de leur financement au niveau universitaire. La circulaire de la direction générale de l'offre de soins de 2012 avait pourtant fixé l'achèvement du processus d'intégration universitaire pour 2017. Les causes de ce retard sont multiples mais nullement financières. Selon les présidents des centres hospitaliers universitaires, le frein est davantage psychologique. Pourtant, ce processus d'intégration universitaire est inéluctable pour réaffirmer le caractère médical de la profession. L'article 1er fixe la ligne directrice qui a manqué jusqu'à présent pour le rendre effectif.
La formation doit évoluer aussi dans son contenu. C'est l'objet de l'article additionnel après l'article 1er que je vous propose de créer par amendement : il créerait un statut de maître de stage universitaire en maïeutique, comme cela existe en médecine, pour mieux accompagner les étudiantes pendant leurs stages, en libéral et en ambulatoire. Alors que les stages sont un moment clé dans l'apprentissage des étudiantes, il s'agit de combler le manque d'encadrement révélé par une enquête réalisée en 2019 par l'Association nationale des étudiants sages‑femmes.
Avec l'extension des compétences et l'élargissement des missions, la formation s'est trouvée considérablement densifiée, et la profession appelle de ses vœux sa révision dans son ensemble. Un amendement tendra à modifier l'article 2 de façon à réorganiser les premier et deuxième cycles, et à instituer un troisième cycle d'études à l'issue duquel les étudiantes obtiendront le diplôme d'État de docteur en maïeutique.
Diagnostic anténatal, monitoring, échographie sont autant d'éléments qui ont technicisé le suivi de la grossesse et l'accouchement. Les sages‑femmes françaises sont celles qui, en Europe, sont dotées du plus grand nombre de compétences et de responsabilités, ce qui justifie une formation plus étayée mais surtout plus équilibrée. Il ressort des auditions une totale unanimité sur la nécessité d'une sixième année, considérée comme « très attendue » et représentant une véritable bouffée d'oxygène pour les étudiantes. Elle correspond à la recommandation 30 du rapport de l'IGAS, dont les auteurs, lors de leur audition, ont souligné l'impérieuse nécessité, concluant par les mots : « c'est le moment ».
Pour être pertinente, la formation doit aussi être reconnectée au terrain et réalisable. C'est le sens de l'article 3, qui vise à donner aux enseignantes-chercheuses de la filière maïeutique la possibilité d'exercer simultanément leur activité clinique, à l'instar des médecins, dentistes et pharmaciens. Cet article 3, pour l'instant, ne permet le cumul d'activité que pour les sages‑femmes souhaitant exercer dans les hôpitaux publics ; un amendement de réécriture tendra à ouvrir cette possibilité à l'ensemble des sages‑femmes enseignantes-chercheuses, qu'elles travaillent à l'hôpital public, dans des établissements privés ou en ambulatoire.
Notre commission a auditionné les deux seules maîtresses de conférences en maïeutique de France. Pour elles, l'évolution vers cette double expertise est d'une évidence absolue. Mme Chantry, qui n'a plus exercé depuis sept ans, a dit se sentir totalement déconnectée du terrain. Elle ne peut exercer en étant enseignante-chercheuse, car cela lui est refusé par son chef d'établissement. La double activité permet pourtant la combinaison optimale entre théorie et pratique, nécessaire à une meilleure actualisation de leurs connaissances et de l'enseignement prodigué.
Grâce à un modèle très incitatif et une volonté nationale, les pays du nord de l'Europe ont favorisé le développement de la recherche en maïeutique. En Suède, en particulier, plus de 176 sages‑femmes sont titulaires d'un doctorat, contre seulement 45 en France ; elles sont quatre fois plus nombreuses pour une population six fois inférieure – le ratio est de 1/24. De ce fait, les pays du Nord ont de bien meilleurs chiffres au regard de la qualité de l'accouchement, mesurable aux taux de césariennes. Ceux-ci sont les plus bas du monde occidental : 17 % en Suède, contre 21 % en France. La France reste quand même un assez bon élève au niveau européen puisque, dans certains pays du sud de l'Europe, ce taux peut atteindre 50 %.
Par ailleurs, alors que toutes les disciplines, de l'histoire à la sociologie, publient nombre de travaux de recherche sur l'accouchement en France et sur les perspectives d'évolution du métier de sage‑femme, celles-ci restent les grandes absentes, les exclues de la recherche. Les plus concernées par le sujet ne sont encore qu'étudiées par d'autres, notamment les médecins gynécologues-obstétriciens.
La reconnaissance de l'activité de sage‑femme passera par une évolution des nomenclatures, abordée à l'article 4. Celles-ci les placent dans une zone grise entre le paramédical et le médical. Depuis 1982, les nomenclatures d'activités françaises (NAF) et des professions et catégories socioprofessionnelles (PCS) de l'Institut national de la statistique et des études économiques classent les sages‑femmes avec les infirmières ou en catégorie de profession intermédiaire. Je proposerai des amendements visant à les reclasser avec les autres professions médicales, comme le prévoit le code de la santé publique.
À en juger par le faible nombre d'amendements déposés, nos débats ne devraient pas être longs. Je gage qu'il est révélateur d'un consensus sur l'évolution de la formation des sages‑femmes. Je me réjouis du riche travail transpartisan qui a prévalu durant l'élaboration de cette proposition de loi. J'y vois une volonté nationale, puisque, durant toutes les auditions, nous n'avons jamais entendu une note discordante.
Je remercie l'ensemble des personnes auditionnées, en particulier les étudiantes sages‑femmes, pour leur collaboration. Elles prennent leur destin en main, se battent pour leurs droits et nous donnent toutes les raisons d'être fiers de notre jeunesse. Je remercie aussi mon groupe Agir ensemble, ainsi que les cent trente‑six députés de tous les bancs de l'hémicycle, cosignataires de cette proposition de loi, pour leur confiance et leur soutien.
Les compétences des sages‑femmes, la qualité de leur travail et leur utilité pour notre société doivent être réaffirmées et défendues avec fierté. Ce métier construit notre société. C'est ce que je vous propose de faire avec notre groupe.
Vaste sujet que celui de la formation des sages‑femmes... Cette profession, essentielle à plus d'un titre, a connu de grandes évolutions ces dernières années. Le rôle et les missions des sages‑femmes ont été considérablement accrus par différents textes de loi – l'adoption de la proposition loi de ma collègue Stéphanie Rist, notamment, a apporté de nombreuses avancées en matière de prescription. Leur rémunération a été revalorisée par une augmentation mensuelle nette d'environ 365 euros, à l'issue du Ségur de la santé.
La formation restait un point en suspens. La proposition de loi reprend les principales propositions d'un rapport remis à ce sujet à Olivier Véran en juillet 2021.
Les auditions des acteurs concernés ont clairement fait ressortir la nécessité de faire évoluer la formation des sages‑femmes pour intégrer les nombreuses responsabilités qui leur ont été attribuées ces dernières années. Il s'agit d'offrir à l'ensemble des femmes un suivi de qualité sur l'ensemble du territoire et de permettre aux professionnelles d'assimiler au mieux leurs nouvelles compétences. À cet égard, nous saluons votre proposition d'achever le processus d'universitarisation de la formation de sage‑femme. C'est un enjeu primordial pour les élèves de la filière de se rapprocher du milieu universitaire afin de mieux se coordonner avec les autres professions de santé, mais aussi de bénéficier des mêmes avantages que les autres étudiants.
De même, nous soutenons la création d'une sixième année d'études qui, couplée à une refonte globale des premier et deuxième cycles, permettra aux étudiants d'avoir un parcours plus cohérent et plus apaisé, et d'approfondir leurs compétences, notamment grâce à des stages encadrés.
Sous réserve de l'adoption des amendements proposés, le groupe La République en Marche soutiendra cette proposition de loi.
Nous avons, avec cette proposition de loi, une réelle chance de faire évoluer le statut et la profession des sages‑femmes et de leur rendre ainsi ce qu'elles donnent chaque jour.
Être sage‑femme en France n'est pas chose aisée. Déconsidérées, peu reconnues, pas assez rémunérées et peu entendues, les sages‑femmes ont régulièrement été les grandes oubliées de toutes les avancées au sein de notre système de santé. À commencer par notre nomenclature des activités qui, en désaccord avec le code de la santé publique, ne reconnaît pas cette profession comme médicale. Étonnant, quand on pense à tout ce qu'elles font au quotidien : naissances, suivis gynécologiques, contraception, orthogénie, procréation médicalement assistée, rééducation périnéale, prévention sexuelle et reproductive.
La France se vante d'être le seul pays où la profession de sage‑femme est considérée comme médicale. En pratique, nous en sommes encore loin. Votre proposition régule enfin une situation qui aurait dû l'être depuis bien longtemps.
Puisque les compétences et les nouvelles technologies scientifiques et médicales évoluent, le groupe Les Républicains approuve la création d'un troisième cycle d'études et la volonté d'aligner la formation des sages‑femmes sur les autres formations universitaires médicales. Nous nous réjouissons également de la possibilité offerte d'accéder à des postes d'enseignantes-chercheuses – encore une discrimination entre les sages‑femmes et les autres professions à laquelle il est grand temps de remédier.
Ce texte tel que vous proposez de le modifier est très attendu par l'ordre des sages‑femmes et toutes les associations de la profession, y compris les étudiantes que vous avez saluées. Il porte la promesse d'une avancée majeure, tant au regard du statut que de la reconnaissance des compétences et du champ d'action.
Même si nous aurions aimé voir repris l'article sur les maisons de naissance que comportait votre première proposition de loi, le groupe Les Républicains se satisfait de ce premier pas et votera en faveur de votre texte.
La présente proposition de loi revêt une importance particulière en ce qu'elle répond aux demandes formulées par les sages‑femmes. Elle donne également une suite à la recommandation de l'IGAS de procéder à une revalorisation globale de la profession, impliquant une refonte de la formation. Elle va dans le sens de la nécessaire clarification des prérogatives des sages‑femmes et d'une plus grande reconnaissance de leur profession, exprimées lors des auditions. Fort de ces constats partagés, le groupe Mouvement Démocrate (MoDem) et Démocrates apparentés salue la majorité des dispositions proposées.
L'article 1er, à travers l'achèvement de l'universitarisation de la formation, entend remédier aux disparités territoriales en matière d'enseignement, qui rongent l'évolution pérenne de leur statut et perpétuent un entre‑deux que dénoncent les sages‑femmes.
L'article 2, en créant une sixième année et un troisième cycle universitaire, accordera plus de temps aux sages‑femmes pour se former. Cette année supplémentaire est devenue nécessaire pour accompagner l'extension des compétences et l'élargissement des missions qui leur sont confiées, notamment depuis la loi de modernisation de notre système de santé, promulguée en 2016. Nous restons vigilants sur le contenu pédagogique de la sixième année, comprenant l'adaptation du référentiel des compétences et la possibilité pour les sages‑femmes de bénéficier du statut de maître de stage.
L'article 3 instaure un statut ad hoc pour les sages‑femmes doctorantes, permettant de concilier exercice professionnel et enseignement et recherche. Bien que les contours de ce statut restent à préciser, nous ne pouvons que reconnaître la pertinence du compromis trouvé, qui permettra d'asseoir les compétences des sages‑femmes au même titre que les médecins ou les pharmaciens, qui peuvent cumuler ces deux activités.
Concernant l'article 4, modifiant les nomenclatures NAF et PCS des sages‑femmes, notre groupe exprime quelques réserves, non pas sur le bien‑fondé de cette démarche, mais sur ses conséquences, qui mériteraient une étude d'impact.
Ce texte, qui complète en partie et amplifie les dispositifs déjà annoncés, propose une avancée significative. Toutefois, l'évolution du métier de sage‑femme nécessitera qu'on s'y penche à nouveau pour leur permettre d'exercer leurs activités en toute sécurité et de bénéficier de la reconnaissance à laquelle elles ont droit.
Le métier de sage‑femme subit une déconsidération paradoxale : alors même que les sages‑femmes françaises sont, entre toutes les européennes, celles qui disposent des compétences les plus riches et des responsabilités les plus lourdes, et que leur activité s'étoffe au fil des années, leur statut médical n'est qu'en partie reconnu par le code de la santé publique.
Leur formation s'est insuffisamment adaptée à l'enrichissement de leurs compétences. Depuis 2002, la durée en est passée de quatre à cinq ans du fait de la généralisation de la première année de médecine commune à toutes les écoles de sages‑femmes, les quatre années suivantes se déroulant dans l'une des trente‑cinq écoles spécialisées. La plupart de ces dernières – vingt‑quatre sur trente‑cinq – font encore l'objet d'une régulation et d'un financement régional, et onze ont choisi un financement de niveau universitaire, ce qui crée une disparité de situations préjudiciable.
Trois changements bienvenus sont introduits dans ce texte : l'universitarisation de la formation, même si celle-ci pourrait être davantage prescrite par le législateur ; la création d'un troisième cycle universitaire, de nature à approfondir les connaissances des sages‑femmes en néonatalogie et dans les nouvelles technologies utilisées en maïeutique et en périnatalité ; la possibilité de cumuler pratique clinique et enseignement et recherche, à l'instar de nombreuses autres professions médicales. La consécration législative du statut médical des sages‑femmes leur permettra de s'adapter davantage aux évolutions des compétences qui leur sont demandées.
Toutefois, la réforme de la formation n'est qu'une partie de la réponse au choc d'attractivité dont cette profession a besoin et au mal-être des sages‑femmes, fortement mobilisées depuis des semaines contre la dégradation de leurs conditions de travail, commune à l'ensemble des professionnels de santé.
Parce que cette réforme de la formation est attendue par les sages‑femmes, le groupe Socialistes et apparentés votera en faveur de ce texte.
Notre groupe a choisi d'inscrire à l'ordre du jour de sa niche parlementaire cette proposition de loi sur la formation des sages‑femmes dans la ferme intention d'avancer vers une meilleure reconnaissance de leurs compétences et de leur rôle dans notre système de santé. Les récents mouvements de grève des sages‑femmes témoignent du profond mal‑être qui traverse cette profession, exercée à 98 % par des femmes.
Si la proposition de loi ne répond à toutes leurs aspirations, l'évolution de la formation constitue une première étape pour revaloriser et réaffirmer le statut médical de cette profession. À la différence de leurs homologues étrangères, les sages‑femmes françaises sont une profession médicale à part entière, une exception française qui doit se refléter dans l'organisation de leur formation. C'est bien l'objectif poursuivi par ce texte, très favorablement accueilli par la profession.
D'abord, il s'attache à parachever l'intégration universitaire de la formation des sages‑femmes, qui aurait dû être finalisée en 2017. On est loin du compte, puisque seules onze écoles sur trente‑cinq y sont parvenues.
Ensuite, il complète la formation des sages‑femmes par un troisième cycle d'études sous la forme d'une sixième année de formation pour permettre aux étudiantes d'acquérir l'ensemble des compétences qu'exige la profession.
Enfin, il ouvre la possibilité aux enseignantes-chercheuses en maïeutique d'exercer conjointement des activités de soins, de recherche et d'enseignement. Ce cumul d'activité, qui découle d'une recommandation de l'IGAS, est essentiel pour garantir la qualité de la recherche et la transmission des savoirs en étudiantes en maïeutique. Un amendement de la rapporteure, soutenu par la majorité, élargira utilement cette disposition à l'ensemble des sages‑femmes enseignantes-chercheuses, qu'elles exercent à l'hôpital public, dans les établissements privés ou en ambulatoire.
Nous présenterons également un amendement visant à créer un statut de maître de stage universitaire en maïeutique, comme cela existe en médecine, pour mieux accompagner les étudiantes pendant leur stage.
Le groupe Agir ensemble vous invite à soutenir sans réserve cette proposition de loi présentée en son nom par Annie Chapelier, dont je veux ici saluer l'engagement constant, depuis le début du mandat, en faveur d'une meilleure reconnaissance de ce beau métier de sage‑femme.
Les sages‑femmes accomplissent un travail formidable : elles accueillent la naissance de plusieurs centaines de milliers d'enfants chaque année, mais surtout, elles exercent une profession médicale au service des femmes, qu'elles accompagnent tout au long de leur vie. À la fin du mois d'octobre dernier, les sages‑femmes se sont mises en grève, se mobilisant pour la sixième fois cette année. Elles n'ont de cesse d'interpeller sur leurs conditions de travail et sur le manque d'attractivité de leur profession.
L'une de leurs revendications concerne le renforcement de leur formation initiale par l'ouverture d'une sixième année d'étude en maïeutique. C'est le cœur de cette proposition qui tend à instaurer un troisième cycle d'études, un premier pas que notre groupe soutient.
Il faut le prolonger en engageant une réflexion sur l'attractivité de ce métier, compromise par la précarité des contrats de travail. Il n'est pas acceptable qu'au bout de cinq années d'études, une sage‑femme ait une rémunération si faible qu'elle doive cumuler des contrats précaires. Cela, alors même que la Cour des comptes préconisait, dès 2011, un parcours de soins désignant davantage la sage‑femme comme professionnel de premier recours pour les grossesses et le suivi gynécologique de prévention.
Que cette proposition de loi soit soutenue par des collègues de toutes tendances politiques confirme son intérêt. Le groupe UDI et Indépendants en fait partie, considérant que cette initiative parlementaire permettra d'appuyer la nécessaire reconnaissance de la profession de sage‑femme. Nous appelons toutefois l'attention du Gouvernement sur la nécessité d'une réelle valorisation de la profession.
Madame Chapelier, merci pour la justesse de vos mots sur le mal‑être des sages‑femmes et la volonté exprimée de pratiquer des accouchements plus naturels. Je vous remercie aussi pour cette proposition de loi sur la formation que, sans nul doute, nous approuverons.
Le cursus est très chargé et le taux d'abandon en cours de formation, considérable. Passer de cinq à six années paraît une nécessité, mais qui, à l'issue de six années de formation, acceptera un salaire de 2 000 euros – et encore moins pour les sages‑femmes en libéral ? Qui, surtout, acceptera, et c'est ce qui mine le plus le métier, le sentiment de mal faire son travail, de vivre l'angoisse de la course contre la montre pour ce qui devrait être, sinon un instant magique – car il y a aussi de la douleur –, du moins le moment exceptionnel des premiers instants de la vie de l'enfant et de l'accouchement pour la maman ? C'est pourtant ce qu'elles vivent au quotidien, ce qui explique leurs manifestations dans la rue et la mobilisation d'un quart de la profession.
À l'instar de l'Ordre national des sages‑femmes, je regrette que l'objet de la proposition soit passé de l'évolution de la profession à l'évolution de la formation, ce qui marque un rétrécissement de l'ambition. Je regrette aussi qu'une phrase concernant le taux d'encadrement des accouchements ait disparu de l'exposé des motifs, car c'est le cœur du problème. Le Collège national des sages‑femmes, le Collège national des gynécologues et obstétriciens et la Société française de pédiatrie réclament un taux d'encadrement nettement supérieur pour pouvoir revenir à un accouchement plus naturel, avec la sage‑femme en première ligne.
Il faut bien davantage faire évoluer le statut et les revenus des sages‑femmes, et je regrette l'étroitesse du texte, même si je peux la comprendre s'agissant d'une proposition de loi. En revanche, je ne comprends pas pourquoi nous l'examinons en procédure simplifiée, alors que nous devons nous en faire le plus possible l'écho pour en faire ressortir des thèmes qui doivent être débattus dans l'hémicycle.
Cette proposition de loi est un bel aboutissement de votre travail sérieux et engagé sur ce sujet, que nous avons toujours abordé de façon plutôt anecdotique, alors que la profession traverse une grave crise d'attractivité. Il était temps de remédier à l'entre‑deux dans lequel elle est coincée. On ne peut continuellement étendre le champ d'intervention, les compétences et les responsabilités des sages‑femmes sans améliorer ni leur rémunération, ni leur formation, ni leur statut. Du reste, certaines extensions expérimentales, comme la consultation longue en santé sexuelle ou l'interruption volontaire de grossesse (IVG) instrumentale, n'ont jamais été engagées.
La proposition de loi fait évoluer la formation, d'abord, en achevant l'intégration universitaire, nécessaire pour mettre fin à l'hétérogénéité de l'enseignement sur le territoire et décloisonner les formations en santé. Cela supposera une réelle volonté politique de la part du ministère des solidarités et de la santé et de celui de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.
Ensuite, la création d'un troisième cycle en maïeutique nous paraît une piste légitime pour compléter la formation initiale des sages‑femmes, et la bi‑appartenance, centrale pour favoriser la recherche. Nous nous interrogeons sur le sens des amendements proposés par la majorité, réécrivant la disposition initiale.
En plus du cumul des activités professionnelles et de recherche, nous approuvons la préconisation de l'IGAS concernant l'attribution aux sages‑femmes de bourses doctorales ciblées sur la recherche en maïeutique.
Enfin, si la reconnaissance de la profession de sage‑femme comme activité médicale dans la nomenclature française est un premier pas, elle ne règle pas pour autant la question du statut de la sage‑femme, notamment à l'hôpital, ni celle de la distorsion entre libéral et hôpital.
Notre groupe soutiendra néanmoins cette proposition de loi.
Si le code de la santé publique considère la profession de sage‑femme comme une profession médicale à compétences définies et réglementées, la NAF la classe comme une profession paramédicale. Les conséquences de cette incohérence sont tangibles, notamment en matière salariale. Alors qu'elles sont titulaires d'un diplôme de niveau bac+5, incluant une première année de médecine, les sages‑femmes hospitalières commencent entre 1 600 et 1 800 euros nets par mois et sont exclues du bénéfice de diverses primes. Loin de régler le problème, le Ségur de la santé n'a fait qu'ajouter de l'huile sur le feu et est jugé par nombre d'entre elles comme une provocation en ce qu'il ne répond ni à leurs revendications, ni à leurs besoins, ni à la reconnaissance qu'elles attendent.
Les sages‑femmes apparaissent comme une profession de santé aux conditions de travail dégradées, à qui l'on demande toujours plus sur le plan médical, sans que la reconnaissance sur le plan statutaire et salarial suive. Quand cela arrange, les pouvoirs publics leur découvrent des compétences et leur attribuent des extensions. Elles se sont massivement mobilisées, y compris les sages‑femmes territoriales, pour réclamer une revalorisation immédiate, pour l'ouverture de négociations dans le secteur privé, pour un plan de stagiairisation dans la fonction publique et une amélioration des conditions de travail et de leur nombre dans les services.
La proposition de loi ne change rien en matière de rémunération et de conditions de travail des sages‑femmes en activité, mais elle permet de consacrer leur statut médical au travers de la formation initiale. C'est le sens des dispositions autorisant une activité d'enseignement et de recherche en parallèle de l'activité professionnelle, qui tendent à gommer les différences existant avec d'autres professions médicales.
Nous soutiendrons la proposition de loi, en souhaitant que le débat s'élargisse afin d'en compléter les dispositions par des revalorisations salariales immédiates pour les 23 000 sages‑femmes en activité. Cette décision restant à la main du Gouvernement, je l'invite à entendre la mobilisation massive des sages‑femmes dans le pays.
Cette proposition de loi répond aux attentes de la profession médicale autonome, à compétences définies et réglementées qu'est celle de sage‑femme. À mi‑chemin entre le médical et le paramédical, celle-ci fait face à une crise profonde. Le traitement inabouti de leurs préoccupations et leur malaise profond expliquent la résurgence de la mobilisation des sages‑femmes. Épuisées par de mauvaises conditions de travail, oubliées du Ségur de la santé, elles quittent les maternités et leur profession, et des femmes et des familles en subissent les conséquences. L'extension de leurs missions au cours des dernières années a certes répondu à certains besoins mais n'a pas contribué à clarifier les parcours.
Quelles pourraient être des réponses claires et réalistes ? Selon quelles modalités pourraient-elles être déterminées, évaluées et rapidement appliquées ? La création d'un troisième cycle d'études permettra-t-elle la reconnaissance et la fluidification des parcours ? Comment mettre en cohérence la formation des sages‑femmes avec les nouvelles compétences qui leur ont été reconnues au cours de cette législature – consultation de premier recours, IVG, contraception, vaccination, prescription d'arrêts de travail et de dispositifs médicaux, dépistage des maladies sexuellement transmissibles, rôle de sages‑femmes référentes, intervention dans les maisons de naissance ? Pensez-vous que l'universitarisation doive concerner l'ensemble des paramédicaux ?
Les sages‑femmes sont les grandes oubliées de notre système de santé. D'abord exclues du Ségur de la santé, le Gouvernement a fini par les prendre en compte en leur accordant une revalorisation salariale, mais celle-ci reste nettement insuffisante. Leur reconnaissance par cette proposition de loi relative à l'évolution de leur formation par son intégration universitaire est donc bienvenue.
Le métier de sage‑femme va bien au-delà de l'accouchement. Son champ d'action a grandement évolué. La profession a beaucoup changé. Cette reconnaissance nécessaire passe par la revalorisation des salaires et la définition claire de leur statut. Nous n'y échapperons pas. Les élus du Rassemblement national soutiennent depuis longtemps cette revendication, de même que celles de l'ensemble des métiers de santé et de soins. Il convient de suivre les recommandations de l'IGAS, favorable à une revalorisation de la rémunération et à la clarification du statut de la profession, en considérant les sages‑femmes comme des praticiens hospitaliers.
Cette proposition de loi ne va pas assez loin et n'est pas toujours suffisamment précise, en particulier sur la révision de la nomenclature, mais nous la soutiendrons, parce que c'est un pas dans le sens d'une meilleure reconnaissance de cette profession par la formation. Nous souhaitons qu'elle soit un point de départ et non pas un point d'arrivée.
En 2021, toutes les professions paramédicales font l'objet d'interrogations, s'agissant de leur statut, de leurs fonctions, de leur place, de leur formation. Par cette proposition de loi, vous apportez des réponses à celle des sages‑femmes, ces grandes oubliées, pour reprendre les termes de Marine Brenier.
Vous aviez proposé initialement une autre proposition de loi, plus ambitieuse – je l'avais cosignée. Quelles considérations vous ont conduite à la réduire à un texte, certes utile, mais traitant seulement de la formation et de la nomenclature ?
Des places restent vacantes dans les écoles de sages‑femmes, ce qui prouve qu'en dépit de la beauté de ce métier, les vocations ne vont pas de soi. Quel regard portez-vous sur l'attractivité de la profession de sage‑femme ?
Vous avez raison de mettre en avant les sages‑femmes, qui exercent une belle profession, mais une profession en souffrance, qui n'a pas toujours eu la considération qu'elle mérite, y compris sous l'angle de la formation. Le nombre des médecins allant diminuant, je suis persuadé que nous aurons de plus en plus besoin de sages‑femmes dans nos territoires. À défaut de gynécologie médicale accessible aux femmes, pour leur suivi au quotidien, les sages‑femmes auront un rôle majeur à jouer.
Je tiens à souligner l'importance de votre proposition de loi au regard de la formation ainsi que la nécessité de revaloriser et d'étendre ce métier pour améliorer la prise en charge des femmes partout dans le territoire.
Un grand merci à Annie Chapelier, non seulement pour les sages‑femmes, mais aussi pour les femmes et les hommes, tous concernés par la naissance. Même si cette proposition de loi nécessitera des développements, il était courageux de s'attaquer à un sujet difficile, en négociation depuis des années, pour clarifier le statut médical des sages‑femmes. Nous pouvons tous nous en réjouir, d'autant plus qu'en matière de recherche en maïeutique et périnatalité, nous ne sommes pas les meilleurs d'Europe, tant s'en faut. Ce texte n'est donc pas seulement catégoriel, il nous concerne tous et va nous faire avancer.
Grâce aux sages‑femmes et à cette proposition de loi, qui devrait être adoptée à l'unanimité, nous pouvons nous réjouir de voir, comme souvent, l'Assemblée nationale servir l'intérêt général.
Je ne peux que vous remercier toutes et tous pour vos propos élogieux.
Pour rebondir sur les propos de Mme Iborra, c'est notre rôle de parlementaires d'être à l'écoute des professionnels sur le terrain et de faire remonter une multiplicité de sujets, qui sont traités de manière très éclatée dans de multiples textes de loi. En l'espèce, la profession de sage‑femme a été abordée au travers de la proposition de loi de Stéphanie Rist, de la stratégie Ma santé 2022 ou dans le cadre des lois de financement de la sécurité sociale.
Ma proposition de loi comportait en effet initialement vingt‑six articles et embrassait l'ensemble de la profession, mais cette dimension était inappropriée au cadre de la niche parlementaire. Elle a été réduite à l'aspect de la formation, parce que c'est celui qui conditionne l'évolution de la profession, et par suite, je l'espère ardemment, celle du statut et de la reconnaissance salariale, notamment en milieu hospitalier, mais aussi la réaffirmation du cœur de métier des sages‑femmes, c'est-à-dire l'accompagnement physiologique.
La perte d'attractivité du métier commence dès la formation, dont l'exigence suscite beaucoup d'abandons en cours de route – d'où le nombre important de places vacantes –, et par la difficulté d'y accéder, encore complexifiée par la réforme du PASS‑L.AS. L'intégration universitaire facilitera la création de places.
La restauration de l'attractivité passe par plusieurs moyens. La clarification de la formation en la sanctuarisant en tant que profession médicale en est un. On ne peut pas demander à de jeunes étudiantes – j'utilise à dessein le féminin, puisque cette profession comprend 98 % de femmes – de faire cinq ans d'études, et bientôt six, contre la promesse d'un statut intermédiaire incertain. La réponse par la voie de la formation encouragera l'attractivité, mais j'ai conscience que ce sera de façon limitée.
S'agissant du contenu pédagogique, au fil des auditions, s'est exprimée une demande générale de la profession en faveur de l'ajout d'une sixième année, confirmée par les présidents et doyens d'université. Or celle-ci ne peut pas être créée sans que les cycles précédents soient révisés – c'est l'objet d'un amendement. La sixième année est nécessaire parce que ces études sont plus denses que celles des odontologistes et des pharmaciens, parce que de nouvelles compétences ont été introduites et parce que revenir au cœur de métier, c'est‑à‑dire la maïeutique, permettra à la fois de développer la recherche et aura une incidence directe sur la qualité de la naissance et le mieux vivre ensemble.
Le mal‑être de la profession est global. Je suis presque autant déçue que M. Ruffin de ne pouvoir apporter davantage par cette proposition de loi, mais je crois sincèrement que la clarification du statut au travers de la formation sera déjà un pas énorme. Travaillant sur l'ensemble des professions de santé depuis le début de mon mandat, je constate une immense hétérogénéité et la désorganisation des formations. Tout est à construire pour avoir une vision harmonisée de ces professions, sans compter qu'elles sont connectées avec celles des autres pays d'Europe. Il y a beaucoup d'échanges entre des professionnels de santé des différents pays européens de formations disparates, de niveaux et de statuts très différents. En France, on fait de longues études, très denses, faiblement reconnues, au niveau universitaire. Dans les autres pays, les études sont réduites à trois ans pour la licence, et son contenu est plus faible qu'en France. Les sages‑femmes n'y échappent pas. Ma proposition de loi, en introduisant la clarification nécessaire pour celles-ci, accomplit un premier pas qui profitera également, j'en suis convaincue, à l'ensemble des professions de santé. Elle donne une direction qui sera positive pour tous.
Monsieur Perrut, ce n'est pas à moi de dire si l'on pourra achever avant la fin du mandat l'élargissement des compétences. Je le souhaite et, en tout cas, cette proposition de loi, si elle aboutit et si elle est appliquée, donnera un cadre à toutes les compétences ajoutées précédemment et en permettra l'élargissement. En quelque sorte, elle remettra les choses dans l'ordre.
Le sujet concerne en effet toutes les professions paramédicales, dont les sages‑femmes ne font pas partie. Si une distinction doit être établie entre métiers médicaux et non médicaux, il faut surtout envisager de faire évoluer les professions non médicales et les professions dites intermédiaires, dans lesquelles certaines classifications rangent les sages‑femmes. C'est une des réponses à la désertification médicale que tout le monde préconise, y compris au niveau international – car ce problème n'est pas seulement français. Nos professionnels de santé sont de mieux en mieux formés et ont de plus en plus de compétences, nous devons les utiliser pour amener des solutions au plus près des populations. C'est le cas des sages‑femmes pour la prise en charge des femmes et des hommes en matière de santé génésique.
La commission en vient à l'examen des articles de la proposition de loi.
Article 1er : Intégration universitaire de la formation initiale des sages‑femmes
Amendement AS14 de Mme Annie Chapelier.
Il s'agit de permettre aux sages‑femmes qui auront débuté le deuxième cycle des études de maïeutique avant le 1er septembre 2023, c'est-à-dire avant l'entrée en vigueur du troisième cycle prévu par l'article 2 de la proposition de loi, d'exercer avec le diplôme de sage‑femme.
La commission adopte l'amendement.
Amendement AS30 de Mme Annie Chapelier.
Pour respecter l'indépendance des universités, qui construisent elles-mêmes leurs UFR, l'amendement tend à orienter l'intégration de la formation en maïeutique vers une UFR de santé plutôt que vers une UFR de médecine, afin de prévenir le risque qui a été évoqué de subordination aux médecins.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'amendement de coordination AS15 de Mme Annie Chapelier.
Amendements AS16 de Mme Annie Chapelier et AS1 de Mme Valérie Six (discussion commune).
Les propos contradictoires entendus au cours des travaux préparatoires n'ont pas permis de dresser un bilan clair de l'état d'avancement de l'intégration universitaire de la formation en maïeutique et des formes prises par celle-ci. Un rapport remis par le Gouvernement s'impose pour identifier les leviers permettant à cette intégration de se dérouler au mieux, tant pour les étudiantes sages‑femmes que pour les enseignantes.
Le délai de six mois prévu pour la remise de ce rapport me paraît un peu court : trois ans me semblent plus réalistes.
Pour le coup, trois ans semblent trop long ! L'intégration universitaire doit être achevée en 2027, mais le troisième cycle sera instauré dès la rentrée de 2022‑2023 pour les étudiantes entrant aujourd'hui en deuxième cycle, et la sixième année deviendra effective en 2025. Au moment où ce rapport paraîtrait, la plupart des éléments participant à l'accélération de l'intégration auraient été introduits.
Demande de retrait ou avis défavorable.
L'amendement AS1 est retiré.
La commission adopte l'amendement AS16.
Amendement AS29 deuxième rectifié de Mme Annie Chapelier.
Il s'agit de repousser au 1er septembre 2027 l'achèvement de l'intégration universitaire que, dans un excès d'optimisme, nous avions prévu pour la rentrée de 2022-2023. L'échéance a été choisie en tenant compte de la durée des contrats qui lient les établissements d'enseignement supérieur à leur ministère. Leur laisser cinq ans pour parachever l'intégration universitaire de de la formation de sages‑femmes paraît plus raisonnable et réalisable.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'article 1er modifié.
Article 1er bis (nouveau) : Création d'un statut de maître de stage universitaire en maïeutique
Amendements identiques AS17 de Mme Annie Chapelier, AS8 rectifié de M. Paul Christophe, AS10 rectifié de Mme Caroline Janvier et AS12 rectifié de Mme Perrine Goulet.
Les auditions ont fait ressortir la nécessité de pouvoir se former auprès de maîtres de stage de terrain, notamment en secteur libéral et en maison de naissance, emblématiques de l'activité des sages‑femmes. L'amendement, qui résulte d'un travail conjoint avec les groupes et les personnes auditionnées, tend donc à créer le statut de maître de stage universitaire.
Nous nous réjouissons que l'amendement réponde pleinement, non seulement à la demande des étudiants et de la profession, mais aussi à la préconisation de l'IGAS.
Cet amendement à la fois répond à une demande du terrain et donne une suite à la recommandation 26 de l'IGAS. Il permettra aux étudiants en maïeutique d'être mieux accompagnés pendant leurs stages.
On ne concevrait pas d'avoir obtenu une formation de sage‑femme en six ans sans qu'elle soit accompagnée par un maître de stage qui en aurait le statut.
La commission adopte les amendements.
Article 2 : Création d'un troisième cycle d'études pour les étudiants en maïeutique
Amendement AS19 rectifié de Mme Annie Chapelier.
L'amendement tend à renvoyer à un texte réglementaire la durée ainsi que la définition précise du contenu pédagogique du troisième cycle des études de maïeutique, car ce niveau de détail n'est pas du ressort législatif.
Il prévoit, en parallèle, une révision des référentiels de formation des premier et deuxième cycles des études de maïeutique pour la rentrée universitaire 2023. Typiquement, l'étude de l'échographie doit être mieux répartie dans ces référentiels, et ne pas être réservée à la sixième année.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'amendement rédactionnel AS18 de Mme Annie Chapelier.
Amendement AS20 de Mme Annie Chapelier.
Il s'agit de prévoir la date d'entrée en vigueur du troisième cycle d'études de maïeutique, afin de donner de la visibilité aux acteurs de terrain. Ce troisième cycle s'appliquera à la rentrée universitaire 2023.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'article 2 modifié.
Après l'article 2
Amendement AS5 de M. Jean-Louis Touraine.
À l'instar d'autres professions de santé, les effectifs de sages‑femmes sont inégalement répartis sur le territoire national. Ils sont davantage concentrés près des villes universitaires, si bien que près de 2 millions de Françaises âgées de 15 à 49 ans sont éloignées d'un accès commode à une sage‑femme.
Pour les médecins, des dispositifs et incitations existent, comme le contrat d'engagement de service public (CESP).
Cet amendement propose la remise d'un rapport au Parlement afin d'étudier les solutions à mettre en œuvre pour faciliter l'installation des étudiants en maïeutique et des sages‑femmes diplômées dans les territoires sous-dotés.
Je partage le souhait de faciliter l'installation des étudiants en maïeutique dans les territoires sous‑dotés. Cependant, tant que l'intégration universitaire n'aura pas été achevée, les CESP seront très difficiles à mettre en œuvre. Dans le cas des passerelles, par exemple, les coûts universitaires sont laissés à la libre appréciation du chef d'établissement, et par conséquent très disparates. Souvent, les étudiantes qui ont pu accéder directement à la deuxième ou troisième année d'étude de sage‑femme ne peuvent pas poursuivre leur formation, car ces coûts sont prohibitifs.
Je vous invite à redéposer votre amendement en séance, pour que le Gouvernement nous indique s'il envisage le CESP pour les sages‑femmes. Je pense qu'une telle mesure est indispensable, et je l'avais d'ailleurs prévue dans un article de ma proposition de loi initiale.
L'amendement est retiré.
Article 3 : Possibilité pour les enseignants-chercheurs en maïeutique d'exercer conjointement des activités de soins, de recherche et d'enseignement
Amendements identiques AS21 de Mme Annie Chapelier, AS9 de M. Paul Christophe, AS11 de Mme Caroline Janvier et AS13 de Mme Perrine Goulet.
En théorie, rien n'empêche les sages‑femmes d'évoluer vers un doctorat. Il y a actuellement quarante‑cinq doctorantes, une professeure d'université et deux maîtresses de conférences d'université. Or, en acceptant de devenir professeures d'université, elles gagnent beaucoup moins qu'en étant sages‑femmes hospitalières. Elles ne cumulent pas la pratique clinique et l'enseignement pour des raisons économiques, parce que le chef d'établissement ou le président d'université s'opposent à ce qu'elles le fassent.
L'article 3 initial permettait le cumul des activités dans le seul milieu hospitalier. La nouvelle rédaction proposée par l'amendement ouvre la possibilité aux sages‑femmes d'être enseignantes-chercheuses à l'université et d'exercer soit en hospitalier, soit en libéral, soit en ambulatoire.
Il s'agit à la fois d'étendre à l'ensemble des sages‑femmes la possibilité de transmettre les savoirs et de garantir la qualité de la recherche.
L'exercice d'une activité clinique en même temps que des travaux de recherche est possible en théorie mais compliqué en pratique, du fait de la nécessité d'obtenir une autorisation de la part du chef d'établissement et de l'insuffisante valorisation financière. L'amendement, en plus de faciliter ce cumul dans l'hôpital public, en ouvre également la possibilité dans les établissements privés et en ambulatoire.
Pour que les sages‑femmes soient vraiment assimilées comme exerçant une profession médicale, il fallait ajouter cette brique à la formation.
La commission adopte les amendements.
Puis elle adopte l'article 3 modifié.
Article 4 : Modification de la place de l'activité des sages‑femmes dans la nomenclature d'activités française de l'Institut national de la statistique et des études économiques
La commission adopte successivement l'amendement rédactionnel AS22 et les amendements de correction terminologique AS25 et AS23 de Mme Annie Chapelier.
Amendement AS24 de Mme Annie Chapelier.
Il s'agit de renommer le groupe 86.2 de la NAF « Activités des médecins, des dentistes et des sages‑femmes. »
La commission adopte l'amendement.
Amendement AS26 de Mme Annie Chapelier.
Par coordination, la mention des sages‑femmes est retirée de la sous-classe 86.90D, renommée « Activités des infirmiers ».
La commission adopte l'amendement.
Amendement AS27 de Mme Annie Chapelier.
Cet amendement vise à faire passer les sages‑femmes de la catégorie socioprofessionnelle détaillée 43 de la nomenclature des professions intermédiaires de la santé et du travail social aux catégories 31 – professions libérales et assimilées –, pour les sages‑femmes libérales, et 32 – cadres de la fonction publique, professions intellectuelles et artistiques – pour les sages‑femmes hospitalières.
Il est essentiel que, dans nos statistiques publiques, les sages‑femmes soient reconnues comme appartenant à une profession médicale à part entière.
La commission adopte l'amendement.
Amendement AS28 de Mme Annie Chapelier.
Cet amendement prévoit une entrée en vigueur de l'article au plus tard au 1er janvier 2025, ce qui laisse un an au Gouvernement pour prendre le texte réglementaire d'application.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'article 4 modifié.
Article 5 : Gage de recevabilité
La commission adopte l'article 5 non modifié.
Enfin, elle adopte l'ensemble de la proposition de loi modifiée.
La commission en vient à l'examen de la proposition de loi pour l'emploi des seniors jusqu'à la retraite (n° 4537) (Mme Valérie Six, rapporteure).
La présente proposition de loi pour l'emploi des seniors jusqu'à la retraite est l'aboutissement de mois de travaux engagés dans le cadre de la mission d'information sur l'emploi des travailleurs expérimentés, que j'ai eu l'honneur de présider et dont Didier Martin et Stéphane Viry étaient rapporteurs. Elle s'inscrit dans la même démarche transpartisane et constructive, et je remercie mes collègues du groupe Les Républicains qui l'ont signée.
Avant notre rapport, bien des travaux avaient été conduits sur l'emploi des seniors, dans la perspective de la réforme des retraites. J'ai la conviction que le sujet est trop vaste et trop grave pour être abordé seul. À la croisée de l'emploi et de la retraite, il brasse de nombreuses questions liées aux règles de notre formation professionnelle, de notre santé au travail, de notre droit du travail, de nos prélèvements sociaux, de notre système de retraite, de notre système d'assurance chômage.
Cette question est d'autant plus importante qu'elle est structurante pour notre société. La ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion, Élisabeth Borne, l'a rappelé, il y a quelques jours, devant notre commission : « Il est évident que l'on doit travailler sur l'emploi des jeunes, mais il est nécessaire de travailler également sur l'emploi des seniors. Le taux d'emploi des 45-65 ans en France se situe 6 points en dessous de la moyenne européenne, ce qui interroge sur le niveau de compétitivité et sur l'équilibre de la protection sociale. » Je souscris à ce constat. Opposer emploi des jeunes et emploi des seniors n'aurait aucun sens ; chacun de ces publics rencontre ses propres difficultés sur le marché du travail, et chacun mérite d'être aidé. Comme il existe un plan « 1 jeune, 1solution », il existe pour un senior des solutions, j'en suis convaincue – c'était d'ailleurs une des conclusions de notre mission d'information.
Je devrais plutôt parler de travailleur expérimenté, tant le terme de senior charrie de préjugés et de stéréotypes négatifs. Je vous proposerai donc, par amendement, de préférer ce terme à celui de seniors, dans le titre de la présente proposition de loi.
Cette dernière, volontairement concise, ne prétend pas traiter du déploiement d'un nouveau système de retraite, aussi légitime soit-il – le contexte économique, social et politique ne permet pas de l'envisager sereinement, et ce n'est pas mon objectif. Elle est davantage tournée vers l'employabilité des seniors, fil conducteur d'un texte que j'ai conçu comme une boîte à outils mise à la disposition de quiconque veut s'emparer de cette question.
Je ne prétends pas présenter un panel exhaustif de toutes les solutions en matière d'employabilité. Bien d'autres dispositifs existent déjà, notamment relatifs à la négociation de branche et d'entreprise sur le maintien en emploi des salariés âgés de plus de 50 ans, pour un accès facilité à la formation professionnelle ou encore à la retraite progressive, qui peuvent être utilement mobilisés pour améliorer le taux d'emploi des travailleurs âgés. Certains d'entre eux font d'ailleurs l'objet d'une autre proposition de loi que j'ai déposée parallèlement.
Plusieurs principes cardinaux sont au fondement de la présente proposition de loi.
Tout d'abord, l'incitation plutôt que la sanction. Je suis intimement persuadée que la valorisation des bonnes pratiques des entreprises est bien plus efficace que la contrainte, notamment envers les plus petites d'entre elles. C'est pourquoi je propose, à l'article 1er, un double dispositif composé d'un label « 50+ », qui repose sur une démarche volontaire des entreprises, et d'un index « Dynamique des âges », qui ne s'appliquera qu'aux entreprises d'au moins 500 salariés et n'est assorti d'aucune sanction.
Ce dispositif s'inspire largement des démarches de labellisation et d'index, qui ont fait leurs preuves en matière d'égalité professionnelle et de lutte contre les discriminations. Il s'inspire également, comme bien souvent en matière d'innovation sociale, d'initiatives de terrain. Le succès du label « 45+ », mis en place par le comité de bassin de l'emploi du Sud Val‑de‑Marne, est la preuve que la reconnaissance des pratiques vertueuses des entreprises a un effet incitatif. La portée des effets du nouvel index « Dynamique des âges » sera évaluée dans un rapport dont l'article 2 prévoit la remise au Parlement dans un délai de trois ans.
La prévention et l'anticipation des besoins forment le deuxième principe fondateur. C'est l'une des conclusions fortes des travaux de la mission d'information : le maintien en emploi doit être pensé très en amont des enjeux de formation professionnelle et de prévention. La mi‑carrière, aux alentours de 45 ans, est une étape décisive. On sait que, passé un certain âge, les salariés renoncent à se former, victimes de l'« effet horizon ». Malheureusement, la durée de vie d'une compétence est de plus en plus courte, c'est pourquoi il faut tout mettre en œuvre pour prévenir l'obsolescence des compétences.
Telle est l'ambition de l'article 3, qui introduit un entretien professionnel renforcé, couplé à la visite médicale de mi‑carrière, afin d'établir un diagnostic complet de la situation professionnelle du salarié. À l'issue des auditions conduites dans le cadre de l'élaboration de la proposition de loi, il m'a paru utile de réécrire cet article, afin de faire toute sa place au conseiller en évolution professionnelle (CEP) dans cette démarche. Cette réécriture fera l'objet d'un amendement.
La visite médicale de mi‑carrière, introduite par la loi d'août 2021visant à renforcer la prévention en santé au travail, doit être l'occasion pour le salarié de préparer la seconde partie de sa carrière. Le secret médical rend évidemment impossible d'effectuer au cours du même entretien un diagnostic à la fois sur la santé du salarié et sur les perspectives professionnelles. J'ai acquis la conviction que cet entretien serait d'autant plus fructueux qu'il s'effectuerait en dehors de l'entreprise. Aussi, je le distingue bien de l'entretien professionnel qui doit se tenir obligatoirement tous les deux ans avec l'employeur. Seul le CEP, encore trop méconnu, me semble à même de conduire cet entretien renforcé. Nous y reviendrons lors de la présentation de mon amendement.
Dernier principe fondateur, l'accompagnement. L'article 4 fait de l'accompagnement spécifique des demandeurs d'emploi de plus de 50 ans un objectif explicite des missions de Pôle emploi. Depuis une dizaine d'années, Pôle emploi a renoncé à une approche d'accompagnement par public au profit d'une approche individualisée. Je considère que c'est une grave erreur, convaincue que le taux de retour à l'emploi des travailleurs âgés est bien meilleur lorsqu'ils bénéficient d'un accompagnement spécifique. Les initiatives en ce sens – le dispositif plein-emploi pour les seniors (PEPS) développé à Tourcoing, les espaces emploi AGIRC-ARRCO ou encore l'opération Talent seniors menée par l'Association pour l'emploi des cadres – foisonnent partout en France. Il ne faut pas confondre la situation des travailleurs âgés et celle des demandeurs d'emploi de longue durée. C'est précisément pour éviter qu'ils sombrent dans le chômage de longue durée qu'il faut prendre en charge rapidement ces travailleurs expérimentés. Toutes les initiatives locales couronnées de succès attendent un signal fort de notre part. C'est l'objet de l'article 4, qui me tient particulièrement à cœur.
Enfin, l'article 5 prévoit de rétablir le cumul emploi-retraite. J'ai bien conscience que ce sujet est moins consensuel que les autres, mais il ressortait clairement des travaux de notre mission, tout comme des auditions que j'ai menées, que le rétablissement des cotisations génératrices de droits nouveaux à la retraite est une puissante incitation au maintien dans l'emploi. Comme il m'importe d'aborder ce sujet à travers le prisme de l'employabilité, je vous proposerai par amendement une discussion plus générale sur la transition entre l'emploi et la retraite, en allongeant le délai de préavis que doit respecter un salarié pour solliciter son départ à la retraite. Plus le salarié préviendra son employeur en amont, mieux celui-ci sera à même d'organiser son maintien en emploi dans de bonnes conditions.
Notre prise de conscience collective sur les difficultés que rencontrent les travailleurs expérimentés dans l'emploi doit se traduire en actes. Je suis persuadée que nous pouvons élaborer ces solutions ensemble, dans une démarche consensuelle et constructive.
Les chômeurs plus âgés rencontrent de plus grandes difficultés à retrouver un emploi et sont davantage frappés par le chômage de longue durée : 60 % des 55 ans ou plus qui se trouvent au chômage le sont depuis plus d'un an et le taux d'emploi pour cette tranche de travailleurs est bas.
Le Gouvernement et la majorité se mobilisent depuis bientôt cinq ans pour favoriser le maintien en emploi et lutter contre le chômage des salariés expérimentés. Au moyen du plan d'investissement dans les compétences et le plan de réduction des tensions de recrutement, le Gouvernement déploie des dispositifs spécifiques et personnalisés d'accompagnement de demandeurs d'emploi de longue durée, dont les travailleurs expérimentés constituent une part importante.
La majorité a également œuvré en faveur de l'emploi des seniors. La loi renforçant l'inclusion dans l'emploi par l'activité économique, défendue par Marie-Christine Verdier‑Jouclas, a créé le contrat à durée déterminée inclusion, qui permet aux salariés âgés de 57 ans et plus d'avoir un suivi personnalisé de leur insertion professionnelle jusqu'à la retraite. La loi visant à renforcer la prévention en santé au travail, votée à l'initiative de Charlotte Parmentier-Lecocq et Carole Grandjean, participe à lutter contre la désinsertion professionnelle, notamment en créant des cellules de prévention de la désinsertion au sein des services de santé au travail et en prévoyant une visite médicale de mi‑carrière pour évaluer notamment si le poste occupé par un salarié est adapté à son état de santé.
La présente proposition de loi reprend cinq des trente et une préconisations du rapport d'information de nos collègues Valérie Six, Didier Martin et Stéphane Viry. Tout en partageant la volonté d'avancer sur la question de l'emploi des seniors, nous rappelons qu'elle fait l'objet de discussions entre les partenaires sociaux en ce moment même. Court-circuiter le dialogue social sur ce sujet, qui fait partie intégrante de leur mandat, serait tout à fait malvenu. Le respect du dialogue social et le souhait de progresser sur ce sujet crucial constitueront donc la boussole qui nous guidera dans l'examen de ce texte, notamment en mettant la lumière sur les dispositifs existants qui mériteraient d'être plus mobilisés.
Sur un tel sujet, on ne peut ni procrastiner ni considérer qu'on a fait le job depuis quatre ans. Que la majorité ait pris des mesures pouvant s'inscrire dans un panorama d'emploi des seniors, dont acte, mais on ne peut procrastiner. Je remercie Mme la rapporteure de mettre au cœur de la décision politique la question importante et sensible de l'emploi des seniors dans notre pays. Les rapports sont là, les études ont été faites depuis fort longtemps et, manifestement, la situation ne s'améliore pas suffisamment. Des hommes et des femmes sont écartés de la société, ce qui est préjudiciable pour eux, pour l'économie et les comptes sociaux du pays.
Cette proposition de loi devrait faire consensus puisque le constat est largement établi et partagé – personne ne peut dire que ce n'est pas un sujet. D'ailleurs, un rapport d'information reprenant un certain nombre de recommandations a été approuvé à l'unanimité. Qui plus est, le texte n'a rien de complexe, il propose des solutions opérationnelles et pratiques sont. Je ne vois pas par quelles arguties on pourrait écarter une réponse bénéficiant à des hommes et des femmes de plus de 50 ans qui recherchent un emploi ou que leur âge expose à des tensions.
Mme la rapporteure plaide pour un accompagnement spécifique. Alors que Pôle emploi a pour pratique de mettre le paquet sur des publics spécifiques – parfois les jeunes –, je ne comprends pas le blocage culturel qui fait obstacle à la mise en œuvre de solutions spécifiques aux hommes et aux femmes âgés de plus de 50 ans pour leur permettre de retrouver un emploi.
La proposition de loi part d'un constat que nous partageons tous : les chiffres du chômage sont les meilleurs depuis plus de dix ans, mais le taux d'emploi des seniors reste bien trop faible – à peine plus de 50 % en 2019.
Ce faible taux d'emploi est un gâchis économique. Alors que de très nombreuses entreprises se plaignent d'avoir du mal à recruter, le système met chaque année à la retraite des centaines de milliers de personnes très compétentes, car formées depuis quarante ans et plus. C'est surtout un immense gâchis humain. L'accès à la retraite est un acquis social de grande valeur, mais un départ brutal, total, du jour au lendemain est vécu comme un traumatisme par nombre de nos concitoyens. Qui n'a pas, dans son entourage, des personnes qui ont traversé une grave dépression en se retrouvant à la retraite ? Vous aviez des collègues, un savoir-faire reconnu et, du jour au lendemain, vous avez le sentiment de ne plus être utile à la société.
Merci d'avoir mis le sujet sur la table !
Je suis un peu moins enthousiaste s'agissant des mesures de la proposition de loi. L'efficacité des solutions incitatives qu'elle propose pour que les entreprises se saisissent de la question n'est pas garantie. Le label « 50+ », visant à promouvoir les bonnes pratiques en la matière, est intéressant, mais des politiques de responsabilité sociale des entreprises (RSE) l'intègrent déjà. Quant à l'index « Dynamique des âges », il apparaît peu opportun. D'abord, il est calqué sur l'index de l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes. Est‑il cohérent de mettre ces deux thèmes sur le même plan ? Ensuite, il est redondant avec l'index « Diversité » créé en janvier 2021, dont l'une des composantes vise précisément les seniors. Enfin, les disparités d'âge structurelles entre les secteurs d'activité ne permettront pas une mise en œuvre opérante de ce dispositif.
Si la mesure d'ouverture des droits nouveaux pour les travailleurs en situation de cumul emploi-retraite est, quant à elle, absolument nécessaire, elle ne peut pas être décorrélée d'une réforme globale du système de retraite. Il faudrait travailler sur un ensemble de mesures pour un passage plus souple, plus progressif d'un statut d'employé à plein temps à celui de retraité.
En revanche, la disposition relative à l'entretien professionnel de mi‑carrière apparaît très pertinente. Bénéficier à 45 ans d'un temps pour évoquer son avenir professionnel et aborder d'ores et déjà ses droits à la retraite serait assurément positif. Il faut l'appuyer sur l'outil qu'est le conseil en évolution professionnelle.
Le marché de l'emploi est souvent, pour les seniors, source de difficultés plus fortes que pour le reste de la population active. Quand ils ne sont pas en emploi, ils restent inscrits au chômage en moyenne 2,3 fois plus longtemps et l'accès à la formation professionnelle leur est plus fermé.
La proposition de loi qui nous est proposée contient des avancées intéressantes. Il est cependant regrettable que les obligations créées aux articles 1er à 3 ne fassent pas l'objet d'un mécanisme de contrôle assorti de sanctions en cas de non-respect. Notamment, il n'y a pas d'incitation pour les employeurs à obtenir le label « 50+ ». De même, l'obligation de publier l'index pyramide des âges et les actions associées sur le maintien de l'emploi des seniors pourrait s'appliquer à un seuil plus faible.
L'article 3 crée une obligation pour l'employeur de proposer un entretien, mais pas d'obligation pour le salarié de l'accepter. Il n'associe pas non plus à cet entretien les acteurs de la formation professionnelle.
Quant à l'article 5, le principe de génération de droits nouveaux à retraite augmenterait certes les pensions des salariés cumulant emploi et retraite, mais il risquerait d'encourager l'emploi de ceux des seniors qui, ayant atteint l'âge légal de départ à la retraite, choisiraient de liquider leur retraite et de reprendre un emploi. Cette fraction comprend notamment des retraités percevant une faible pension, contraints de reprendre un emploi pour compléter leurs revenus. C'est pourquoi le groupe Socialistes et apparentés a plutôt défendu, au cours de la législature, des mesures de revalorisation des petites pensions que de tels dispositifs.
Même si nous regrettons que n'aient pas été reprises les propositions les plus ambitieuses du rapport d'information des sénateurs Monique Lubin et René‑Paul Savary, telles que l'obligation d'inscription de l'emploi des seniors dans les négociations de branche et l'abondement spécifique du compte personnel de formation pour les personnes perdant leur emploi après l'âge de 45 ans, notre groupe votera en faveur de ce texte.
La proposition de loi du groupe UDI et Indépendants reprend une partie des recommandations de la mission d'information sur l'emploi des travailleurs expérimentés qui nous ont été présentées ici-même il y a quelques semaines.
Le taux d'emploi des 55-64 ans en France est l'un des plus faibles d'Europe : 53 %, contre 60 % dans l'Union européenne et 71 % en Allemagne. En outre, les seniors sont plus exposés que les autres aux risques de sous‑emploi et de désinsertion professionnelle. Le groupe Agir ensemble partage donc l'ambition d'agir en faveur de l'emploi des travailleurs expérimentés, mais considère toutefois que ni le véhicule ni le moment ne sont appropriés pour mettre en œuvre la plupart des mesures proposées. D'une part, la question de l'emploi des seniors ne peut s'appréhender en dehors d'une véritable concertation avec les partenaires sociaux. D'autre part, les conséquences financières que pourraient avoir certaines dispositions, dont nous partageons pourtant l'objectif, nous empêchent de les voter.
Nous sommes favorables à ce que les cotisations issues du cumul emploi-retraite soient rendues créatrices de droit, mais le coût à long terme pour les régimes de base de cette mesure prévue à l'article 5, estimé à 2,4 milliards d'euros, n'est pas soutenable sans que soit conduite en parallèle une réforme plus globale de notre système de retraite.
En revanche, notre groupe votera en faveur de la disposition de l'article 1er visant à créer un label « 50+ » pour valoriser les entreprises vertueuses en matière d'emploi des seniors. Il soutiendra aussi l'article 3, sous réserve de sa réécriture pour que la préparation de la seconde partie de la carrière soit abordée dans le cadre de l'entretien professionnel suivant le quarante‑cinquième anniversaire du salarié plutôt que lors d'un entretien non obligatoire spécifique.
Je remercie et salue, au nom de mon groupe, le formidable travail réalisé par notre collègue Valérie Six sur le sujet de l'emploi des seniors. Elle a consacré beaucoup de temps à l'élaboration d'un rapport reconnu de très grande qualité puis à celle de cette proposition de loi, de la même qualité.
Les travailleurs de plus de 55 ans ne sont pas suffisamment valorisés dans notre pays. En 2016, près de 70 % des chômeurs de plus de 55 ans étaient des chômeurs de longue durée. C'est dire s'il est difficile pour ces travailleurs de se réinsérer dans le marché du travail. Nous sommes pourtant convaincus que, compte tenu de leur grande expérience, les travailleurs de plus de 55 ans constituent une richesse dans une entreprise. C'est la garantie d'une transmission de savoir-faire et de compétences d'une génération à une autre. Dans un contexte économique où nous subissons un chômage de masse structurel, alors que des centaines de milliers d'emplois restent vacants et que toutes les entreprises cherchent à recruter, cette transmission des compétences d'une génération à une autre vaut toutes les politiques de formation.
Comme moi, mes chers collègues, vous devez souvent recevoir des personnes de plus de 55 ans, voire de 50 ans, qui ne cherchent qu'à travailler et s'épanouir dans leur vie professionnelle, et que les entreprises, les jugeant trop âgés, invitent à simplement attendre la retraite. C'est pourquoi nous souhaitons favoriser l'emploi des travailleurs expérimentés, permettre une transmission des savoirs et des intelligences entre les générations et prouver que personne n'est inemployable. Cela passe évidemment par cette proposition de loi, que je vous invite à adopter.
L'emploi des seniors est un sujet crucial qui mérite une ambition publique renouvelée. La mission d'information de la commission des affaires sociales a montré qu'il s'agissait d'un angle mort des politiques publiques, alors que la situation des travailleurs dits expérimentés s'est progressivement fragilisée sur le marché du travail. Celle-ci est liée aux mesures prises ces dernières années pour retarder le départ à la retraite : suppression du dispositif de préretraite dans le public, recul progressif de l'âge légal, augmentation de la durée de cotisation pour disposer d'une pension à taux plein. Là réside aussi une partie de la solution.
Les salariés doivent travailler plus longtemps mais les employeurs se montrent toujours plus réticents à embaucher des seniors. Résultat, en 2017, le taux d'emploi des 55‑64 ans en France était nettement inférieur à la moyenne des pays de l'Union européenne, et les travailleurs expérimentés sont surreprésentés parmi les chômeurs de longue et très longue durée. Ajoutons que près d'un retraité sur deux n'est plus en activité au moment de son départ à la retraite.
Devant ces constats, les mesures contenues dans cette proposition de loi nous semblent manquer d'ambition, restant incitatives et peu contraignantes pour les employeurs. L'instauration d'un label pour les entreprises exemplaires en matière d'emploi des seniors et d'un index « Dynamique des âges », sans déboucher sur des mesures, tient plus de la distribution de bons points que de la lutte effective contre les discriminations à l'embauche dont sont victimes les travailleurs expérimentés.
Nous avons également du mal à percevoir l'utilité d'un entretien de mi‑carrière à 45 ans – âge d'ailleurs discutable pour situer la mi‑carrière et le début de la fin de carrière –, alors qu'existe déjà un entretien professionnel obligatoire tous les deux ans.
Enfin, nous sommes opposés à l'article 5 visant à développer le cumul emploi‑retraite. Ce dispositif va à l'encontre du partage du temps de travail et incite les travailleurs à travailler toujours plus longtemps au détriment de leur santé pour compléter parfois une faible pension. Il se retournerait contre les seniors privés d'emploi.
D'autres propositions inverses auraient mérité d'être débattues, que je formulerai ultérieurement.
Force est de le constater, les seniors, les salariés expérimentés n'ont pas les mêmes chances que les autres de se maintenir dans leur activité professionnelle. Il est heureux que nous nous penchions à nouveau sur ce sujet qui met en évidence la nécessité de changer le regard porté sur eux.
À partir de 45 ans, la formule « Aujourd'hui est le premier jour du reste de ma vie » caractérise toute carrière professionnelle. Et elle recèle un potentiel qui plaide pour qu'on s'intéresse au maintien dans l'emploi. Ce dernier doit être abordé à travers l'examen critique de pratiques telle la rupture conventionnelle et la prise en compte du risque de désinsertion professionnelle. Il passe aussi par l'inclusion du sujet des travailleurs expérimentés dans les négociations de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences.
Le retour à l'emploi de ceux qui risquent de plonger dans le chômage de longue durée constitue aussi un sujet – il est d'ailleurs abordé dans un chapitre de notre rapport d'information. Pour ce public, un accompagnement spécifique pourrait s'avérer intéressant.
La transition douce, voulue et volontaire, de l'emploi à la retraite est également traitée dans un autre chapitre de notre rapport d'information. Nous devrons revenir sur le dispositif de la retraite progressive, qui n'a pas trouvé d'écho dans le public.
Notre mission d'information a montré que l'employabilité des travailleurs expérimentés est considérée comme un sujet essentiel par tous les groupes politiques.
Je sais que des négociations avec les syndicats sont en cours, mais il me semble qu'en tant que parlementaires, nous avons toute légitimité pour présenter un texte en parallèle. Cela relève de notre mission. Du reste, cette proposition de loi se veut simplement une boîte à outils qui doit servir, car il est urgent d'agir. C'est pourquoi je souhaitais qu'elle soit examinée peu après la remise de notre rapport d'information.
Stéphane Viry et Didier Martin, qui étaient corapporteurs de la mission d'information, savent à quel point le sujet me tenait à cœur et comme nous devions très vite proposer des solutions pragmatiques.
Monsieur Turquois, la labellisation est plus engageante que les politiques RSE en ce qu'elle valorise les entreprises les plus vertueuses. Les labels de diversité et de qualité sont efficaces, c'est pourquoi je m'en suis inspirée.
Aucune sanction n'est prévue, madame Biémouret, parce que je crois plus à la reconnaissance d'une société et de son travail pour atteindre un objectif au fur et à mesure des années. Le changement d'image de l'entreprise qui s'opère ainsi me semble plus efficace pour en amener d'autres à adopter des comportements bienveillants et à comprendre l'intérêt d'employer un travailleur expérimenté. L'index s'adresse aux entreprises comptant de gros effectifs, car elles sont dotées de services de ressources humaines et peuvent plus facilement travailler au long cours sur la thématique de la dynamique des âges.
Cette proposition de loi ne serait pas le bon véhicule législatif, dites-vous, madame Firmin Le Bodo. Pour nous, c'est agir qui importe. Il y a eu suffisamment de rapports, il est temps qu'un texte de loi aborde le sujet. C'est pourquoi nous avons voulu inscrire cette proposition de loi à l'ordre du jour de la niche de notre groupe.
Je remercie Michel Zumkeller, qui a pris la mesure de l'importance de notre travail. Il a eu raison de dire que personne n'était inemployable.
Nous avons vu, en préparant le rapport, que l'emploi des seniors est effectivement un angle mort des politiques publiques, monsieur Dharréville. C'est pourquoi nous voulions commencer à travailler et agir rapidement.
Je reviendrai au cours de l'examen des articles sur les entretiens et l'articulation avec la retraite.
La commission en vient à l'examen des articles de la proposition de loi.
TITRE IER
MAINTENIR EN EMPLOI
Chapitre Ier
Encourager les bonnes pratiques
Article 1er : Création d'un label « 50+ » et d'un index « Dynamique des âges »
Amendement AS11 de M. Guillaume Chiche.
Les risques professionnels et la pénibilité au travail sont deux axes majeurs du maintien dans l'emploi des personnes âgées de 50 ans et plus. Les pathologies liées au travail que l'on rencontre dans les métiers difficiles sont nombreuses et constituent un réel frein au maintien dans l'emploi des salariés ou agents. La prévention et l'anticipation des risques, notions qui manquent dans cette proposition de loi, doivent impérativement figurer dans les « bonnes pratiques » des entreprises décrites dans cet article. C'est le sens de cet amendement.
Votre amendement me semble déjà satisfait par le droit en vigueur puisque, dans le cadre de son obligation de sécurité à l'égard de ses salariés, l'employeur doit élaborer et tenir à jour un document unique d'évaluation des risques. Celui‑ci recense l'ensemble des risques pour la santé et la sécurité du personnel dans l'entreprise et propose des actions de prévention.
Si le contenu du document est insuffisant ou s'il n'a pas été mis à jour, le code du travail dispose que l'employeur s'expose à une amende prévue pour les contraventions de cinquième classe.
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
L'amendement est retiré.
Amendement AS12 de Mme Catherine Fabre.
Cet amendement tend à supprimer la première partie de l'article. Si les discriminations à l'embauche envers les salariés expérimentés sont réelles, l'index tel qu'il est proposé ne saurait constituer une solution. D'abord, la méthodologie et les modalités de son déploiement ne sont pas définies dans la proposition de loi, mais renvoyées à un décret. Elles n'ont fait l'objet d'aucune préparation ni concertation.
Ensuite, rien ne dit que l'index reposerait sur des indicateurs clairs, objectivables, simples et opérationnels. Il s'inspire de celui de l'égalité femmes-hommes ; or celui-ci, en plus de prendre en considération des critères d'évaluation précis, comme l'écart des rémunérations, s'appuie aussi sur l'obligation légale pour l'employeur d'assurer un même salaire pour un même travail. Cette obligation n'existe pas en matière d'emploi des travailleurs expérimentés ; elle n'est donc pas transposable à l'index proposé. La validité de cet outil s'en trouve donc questionnée.
Enfin, cet index pourrait pénaliser certains secteurs dont la main-d'œuvre est structurellement plutôt jeune, tels que celui du bâtiment et des travaux publics ou les métiers du numérique.
Le groupe La République en Marche considère que la proposition d'un tel index, loin d'être mûre, n'est pas recevable. Il propose d'en supprimer la mention à l'article 1er.
En revanche, le label « 50+ » que créerait ce même article pourrait contribuer à valoriser les bonnes pratiques et à mettre en lumière les entreprises vertueuses. C'est pourquoi nous soutiendrons cette mesure incitative, en rappelant toutefois qu'un label « Diversité » existe depuis maintenant plus de quinze ans. Comportant des critères liés à l'âge, il pourrait également être un vecteur de valorisation des bonnes pratiques en matière d'emploi des seniors.
Je suis évidemment très défavorable à cet amendement puisqu'il vise à supprimer les dispositions relatives à la création d'un index « Dynamique des âges ».
J'entends vos préoccupations et vos réserves, mais l'index n'a d'autre objectif que de valoriser les bonnes pratiques au sein des entreprises. Aucune sanction n'est prévue dans ce dispositif, contrairement à l'index de l'égalité professionnelle.
L'index « Dynamique des âges » s'inscrit d'ailleurs dans la lignée de l'index « Diversité » en ce qu'il s'agirait d'un outil qui prendrait une photographie d'une entreprise à un instant t, de sorte que ses services de ressources humaines puissent identifier les axes d'amélioration et engager les mesures correctives en faveur des travailleurs expérimentés.
Si j'ai une petite pointe de regret s'agissant de la proposition de loi, c'est pour son caractère plus incitatif que contraignant. Je trouve étonnant, alors qu'elle suit une bonne orientation, qu'on veuille supprimer des dispositions sur la dynamique des âges, qui n'emportent aucune sanction pour l'entreprise. C'est même un peu fort !
Au cours des travaux de la mission d'information, il nous a souvent été dit qu'il fallait savoir recenser les bonnes pratiques des entreprises ayant un comportement vertueux pour les ériger en exemple afin de les généraliser. Il n'y a pas d'autre vecteur pour cela que l'index.
Manifestement, vous avancez des prétextes pour le refuser, alors même que vous avez su l'imposer en matière d'égalité professionnelle femmes-hommes. Pourquoi ne pas vouloir le faire pour l'emploi des seniors ?
Le label que nous avions envisagé dans le rapport d'information pouvait être soit propre aux travailleurs expérimentés sous l'appellation label « 50+ », soit intégré dans le label « Diversité ». En tout cas, il avait vocation à lutter contre une forme de discrimination. Le label « Diversité » a fait son chemin auprès des organismes et collectivités publiques, mais très peu dans les très petites entreprises et les petites et moyennes entreprises. Ces dernières employant un grand nombre de salariés, il s'agit d'y promouvoir un label utile à la lutte contre les discriminations.
La commission adopte l'amendement.
En conséquence, les amendements AS3, AS9 et AS10 de M. Guillaume Chiche tombent.
Amendement AS18 de Mme Valérie Six.
Il s'agit d'un amendement de précision juridique tendant à réparer un oubli de référence au maintien en emploi des salariés âgés de plus de 50 ans dans les négociations.
Il s'agit de bien plus qu'un amendement rédactionnel puisque cette précision contredit l'intention du législateur, dans la loi d'habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social, de laisser aux partenaires sociaux la maîtrise de leur agenda social, en déterminant dans l'accord collectif la périodicité et le contenu des négociations obligatoires. L'idée était de s'adapter à la situation de chaque entreprise, d'aborder des sujets pertinents selon leur contexte.
Par ailleurs, ce point n'a jamais été soulevé en audition. Nous sommes contre cette idée.
En entendant la date citée par Catherine Fabre, je me souviens : les ordonnances « travail », le monde dans la rue... Vous en appelez à la liberté des partenaires sociaux, à la vertu du dialogue social. Demander que la question de l'emploi des seniors soit évoquée de façon systématique ne me semble pas une atteinte grave au dialogue social, d'autant que cela permettrait que de bonnes décisions soient prises. J'ai beau être critique vis-à-vis de la proposition de loi, je ne peux pas souscrire aux arguments dont vous usez pour vous y opposer.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 1er modifié.
Article 2 : Remise d'un rapport au Parlement évaluant l'efficacité de l'index « Dynamique des âges »
Amendement de suppression AS13 de Mme Catherine Fabre.
L'article 2 concernant l'évaluation de l'index « Dynamique des âges », puisque nous venons de décider la suppression de celui-ci, il convient, par cohérence, de supprimer l'article.
Cette disposition fait partie d'un texte sérieusement travaillé par un groupe parlementaire. Elle n'a rien de dingue ou de radical : ce n'est qu'une demande de rapport que le Gouvernement remettrait au Parlement sur la dynamique des âges en entreprise. Que vous déposiez des amendements de suppression pour cela m'effraie quant au sort que vous entendez réserver à tout texte d'impulsion parlementaire. Pour la démocratie parlementaire, il ne faut pas adopter cet amendement !
La commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'article 2 est supprimé.
Après l'article 2
Amendement AS4 de M. Guillaume Chiche.
Il s'agit également de demander au Gouvernement un rapport évaluant l'opportunité de modifier la Constitution pour instaurer des quotas en matière d'emploi des personnes âgées de plus de 50 ans dans les entreprises de plus de dix salariés.
Je suis convaincue que les outils proposés dans la proposition de loi – le label et, j'espère un jour, l'index – seront plus efficaces pour l'emploi des travailleurs expérimentés qu'une modification constitutionnelle, avec tout ce qu'elle entraîne de complexité.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Chapitre II
La formation professionnelle en seconde partie de carrière
Article 3 : Création d'un entretien renforcé de mi-carrière 45+
Amendement AS17 de M. Didier Martin.
Le présent amendement vise à mieux s'appuyer sur l'entretien professionnel pour aborder la seconde partie de carrière des salariés. Il s'agit de préciser que l'entretien professionnel qui suit le quarante-cinquième anniversaire du salarié est l'occasion d'expliquer les modalités d'accès au conseil en évolution professionnelle. On constate, en effet, que ce public y accède moins que les tranches d'âges inférieures.
Cet amendement rejoint ma volonté de mobiliser le conseil en évolution professionnelle, dans une rédaction qui me paraît toutefois insuffisante.
Mon amendement AS19 tend à instaurer un entretien renforcé avec un CEP, qui est, par définition, mieux équipé pour accompagner et conseiller le salarié dans la gestion de sa seconde partie de carrière. Il s'agit d'un entretien distinct de l'entretien professionnel. À vocation essentiellement préventive, il est couplé avec la visite médicale de mi‑carrière introduite par la loi « santé au travail » de 2021, qui, à défaut d'accord de branche, s'effectue durant l'année civile du quarante-cinquième anniversaire du travailleur.
Cet entretien diffère de l'entretien professionnel bisannuel en ce qu'il donne lieu à un véritable diagnostic à mi‑carrière, effectué avec un CEP extérieur à l'entreprise. Afin de protéger le secret médical, il ne se déroule pas en même temps que la visite médicale, le médecin ayant un rôle bien distinct de celui du conseiller en évolution professionnelle, celui-ci se trouvant ici clarifié.
Si j'émets un avis logiquement défavorable à votre amendement, je relève tout de même que nous sommes sur la même longueur d'ondes sur ce point. Je vous propose donc de travailler ensemble sur la rédaction de l'article 3 en vue de la séance.
La commission adopte l'amendement et l'article 3 est ainsi rédigé.
En conséquence, les amendements AS19 de Mme Valérie Six ainsi qu'AS5 et AS8 de M. Guillaume Chiche tombent.
TITRE II
FAVORISER LE RETOUR À L'EMPLOI DES TRAVAILLEURS EXPÉRIMENTÉS
Article 4 : Intégration de la problématique de l'accompagnement spécifique des travailleurs expérimentés dans la convention pluriannuelle conclue entre l'État, l'Unedic et Pôle emploi
Amendement de suppression AS14 de Mme Catherine Fabre.
L'article 4 intègre l'accompagnement spécifique des salariés âgés de plus de 50 ans dans la convention pluriannuelle tripartite État-Unedic-Pôle emploi. Or la stratégie de Pôle emploi est de proposer un accompagnement individualisé, qui se fonde sur un entretien diagnostic conduit en fonction d'une multitude de critères. Le seul critère de l'âge ici retenu va à l'encontre de ce suivi personnalisé. D'ailleurs, comme M. Paul Bazin, directeur général adjoint de Pôle emploi, l'a indiqué lors de son audition, il ne suffit pas à déterminer l'intensité de l'accompagnement nécessaire.
Par ailleurs, Pôle emploi conduit déjà des initiatives locales au profit des salariés et demandeurs d'emploi seniors. La question se pose peut-être de savoir comment les encourager davantage, mais il y en a déjà de très intéressantes développées dans le Nord et en Gironde, notamment. En tout cas, ce n'est pas au sein de la convention tripartite que cet encouragement peut s'inscrire. D'où la proposition de suppression de l'article.
Je suis profondément défavorable à cet amendement, car je suis persuadée que le public senior a besoin d'un accompagnement spécifique dès la perte d'emploi.
Il n'est pas question ici de remettre en cause la position de principe adoptée par Pôle emploi. Au contraire, l'article 4 prend acte de cette position et s'appuie dessus pour valoriser les nombreuses initiatives locales prometteuses observées à travers le territoire en faveur des demandeurs d'emploi expérimentés.
Que cela soit clair : l'objet de l'article 4 n'est pas d'élaborer une stratégie nationale spécifique aux demandeurs d'emploi expérimentés. Il s'agit de formaliser, à travers la convention tripartite État-Unedic-Pôle emploi, les dynamiques locales déjà existantes. Cette valorisation a d'ailleurs été très favorablement accueillie par le directeur général adjoint de Pôle emploi lors de son audition menée dans le cadre des travaux préparatoires de la proposition de loi.
Je ne comprends donc pas cet amendement de suppression, qui aura tout simplement pour effet de casser les dynamiques locales en faveur des demandeurs d'emploi expérimentés, pour lesquels le risque de chômage de longue durée et d'inactivité est malheureusement très élevé. J'espère que nous aurons l'occasion de retravailler sur cet article, car il est essentiel que le travail local conduit avec Pôle emploi et avec l'ensemble des acteurs des territoires soit reconnu par Pôle emploi.
On ne peut pas sérieusement dire comme cela, à grands traits, que la situation est satisfaisante. À voir le nombre de demandeurs d'emploi de plus de 50 ans inscrits à Pôle emploi, elle est plus que perfectible ! Pôle emploi a effectivement adopté comme ligne – mais par manque de moyens – de ne pas réserver de traitement particulier à ces demandeurs d'emploi, alors que ceux-ci présentent des caractéristiques qui pourtant l'exigeraient. Prétendre qu'il suffirait que Pôle emploi inventorie les solutions locales pour régler le problème, c'est méconnaître l'ampleur du sujet. Non, la question ne sera pas réglée par l'organisation par Pôle emploi d'un concours national, qui permettra au mieux d'apporter une reconnaissance aux très belles solutions territoriales résultant de la mobilisation d'acteurs privés. Il faut un accompagnement spécifique et cet amendement est malvenu.
Sur les cinq articles que compte cette proposition de loi, chers collègues de La République en Marche, vous avez amputé l'article 1er de plusieurs alinéas, supprimé l'article 2, réécrit l'article 3, demandé la suppression de l'article 4 et bientôt celle de l'article 5. De deux choses l'une, soit vous n'avez pas le courage de voter contre un texte sur l'emploi des seniors et vous le videz complètement de sa substance pour pouvoir afficher finalement un vote favorable ; soit le contenu de cette proposition de loi ne vous convient pas, mais vous ne voulez pas prendre le temps d'en déposer une vous-mêmes.
Soyez cohérents ! Si aucune disposition ne vous convient, laissez la rapporteure présenter ses dispositifs, laissez-nous les amender et, en bout de course, votez contre le texte. Ce sera beaucoup plus clair pour la représentation nationale et pour les citoyens qui suivent nos débats.
Je n'approuve pas du tout ces propos. Le travail des seniors recouvre plusieurs aspects qui doivent être davantage approfondis. L'approche de la rapporteure n'est pas la nôtre, et exprimer nos réserves ne signifie pas que nous ne nous intéressons pas au problème. Nous le faisons autrement.
La stratégie de Pôle emploi est précisément celle d'un accompagnement sur-mesure, individualisé, donc plus ambitieux qu'un accompagnement uniforme pour toute une catégorie de personnes. La rédaction de l'article me semble remettre cette stratégie‑là en question.
Du reste, la suppression de l'article ne va absolument pas freiner les initiatives locales en cours au sein de Pôle emploi. L'agence reste libre d'organiser des expérimentations adaptées aux territoires, pour des publics choisis. Encourager le déploiement de dispositifs adaptés au contexte local est un objectif que nous pouvons partager, et nous pouvons envisager de travailler, d'ici à la séance, au moyen de l'atteindre car, en l'état, l'article ne le permet pas.
Quant aux moyens dévolus à Pôle emploi, nous avons quand même embauché 2 000 équivalents temps plein, précisément pour renforcer l'accompagnement. De ce point de vue, on ne peut pas nous faire de reproche.
Ce qui me gêne le plus dans la suppression de cet article, c'est qu'elle aboutit à ce que ce qui existe sur le terrain et qui a besoin d'être encouragé ne soit pas reconnu. Pôle emploi avait ménagé des synergies avec des missions locales, précisément sur le critère de l'âge. L'idée était de les faire reconnaître et prendre en considération dans tous les pôles emploi de France.
La commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'article 4 est supprimé et l'amendement AS7 de M. Guillaume Chiche tombe.
TITRE III
AMÉLIORER LE PASSAGE DE LA VIE PROFESSIONNELLE À LA RETRAITE
Article 5 : Ouverture de droits nouveaux à la retraite pour les travailleurs en situation de cumul emploi-retraite
Amendement de suppression AS15 de Mme Catherine Fabre.
L'article 5 prévoit de rendre les cotisations issues du cumul emploi-retraite créatrices de droit. Cette disposition figurait dans le projet de loi pour un système universel de retraite : nous y sommes donc favorables. Cependant, ni le moyen ni le calendrier proposés ne nous paraissent opportuns.
Cette mesure constitue une part importante de la réforme des retraites et il n'est pas judicieux de la détacher de l'ensemble, qui doit garder sa cohérence. On ne peut pas voter une telle réforme par petits bouts, sans vision globale.
Par ailleurs, et ce n'est pas un détail, une telle mesure coûterait 3,4 milliards d'euros pour le régime général et les régimes complémentaires. Cet article affecterait donc gravement l'équilibre financier de notre système de retraite, déjà fragile. Encore une raison pour que cette mesure soit étudiée, chiffrée et discutée dans le cadre d'une réforme globale visant à garantir l'équilibre financier et la pérennité du système des retraites. C'est la raison pour laquelle nous proposons la suppression de cet article.
En déposant cette proposition de loi, je n'ai pas pensé au calendrier présidentiel. Quant à la réforme des retraites qui m'aurait permis de soumettre cette idée, où en était-elle ?
Je suis évidemment défavorable à cet amendement de suppression.
En ouvrant la possibilité aux assurés en cumul emploi-retraite de se constituer de nouveaux droits à la retraite sur la base de leurs cotisations versées, l'objectif est de faciliter la transition entre emploi et retraite. Cette possibilité offrirait également une solution à certains métiers en tension du fait de difficultés démographiques, comme celui de médecin, notamment. En outre, le caractère créateur de droits des cotisations versées rendrait plus attractif le dispositif de cumul emploi-retraite, dont le recours est aujourd'hui relativement limité.
En définitive, l'abrogation pure et simple de l'article L. 161-22-1 A du code de la sécurité sociale présente plusieurs avantages plus justes pour les travailleurs. Je regrette que vous ne partagiez pas cet avis.
Là encore, il s'agit d'une divergence de vue avec La République en Marche. Le cumul emploi-retraite est reconnu par tous comme étant une des solutions les plus efficaces pour maintenir et les personnes et le pouvoir d'achat. Vous la videz ! Le cumul emploi-retraite figure pourtant dans le rapport d'information que vous avez voté à l'unanimité il y a quelques semaines à peine.
Je ne peux que rejoindre la supposition de Guillaume Chiche que cette proposition de loi vous embarrasse parce qu'elle ne vient pas de vos rangs et que vous cherchez des prétextes pour l'écarter, quand bien même elle permettrait des avancées en faveur d'hommes et de femmes dont nous cherchons à améliorer la situation.
Cette mesure est en effet extrêmement efficace, mais son impact financier est important. Il faut donc réfléchir à l'inclure dans un ensemble qui permette de l'accompagner, par exemple les dispositifs de départ progressif. L'idée même n'est pas à remettre en cause, puisqu'elle figurait dans la réforme du système de retraite ; ce sont les modalités de sa mise en application qui posent problème.
Je ne peux pas laisser dire qu'en supprimant l'article nous remettrions en cause le dispositif du cumul emploi-retraite. Nous aussi considérons qu'il peut encourager les retraités à reprendre une activité, mais surtout inciter les seniors à partir le plus tard possible.
Lors de l'examen de la réforme des retraites, plusieurs points avaient été soulevés concernant ce dispositif : son financement, sa compréhensibilité, sa lisibilité et son acceptabilité. Quand bien même nous sommes d'accord sur la nécessité d'aller dans cette direction, on ne peut pas le faire du jour au lendemain.
Nous aurons effectivement à approfondir la réflexion sur un cumul emploi-retraite générateur de nouveaux droits. L'idée est intéressante ; elle doit être chiffrée et évaluée, car son impact financier est incontestable.
Le Président de la République s'est exprimé très récemment sur une réforme globale à venir du système de retraite, pour « aller vers plus de liberté », c'est-à-dire « permettre de partir en retraite progressivement, [...] accumuler des droits plus rapidement pour celles et ceux qui le souhaitent » et « encourager le travail au-delà de l'âge légal, aussi, pour celles et ceux qui en ont envie ».
Puisque vous trouvez tous que cet article est à travailler, il est bien dommage que vous préfériez le supprimer plutôt que l'amender.
La commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'article 5 est supprimé.
Après l'article 5
Amendement AS21 de Mme Valérie Six.
Il s'agit d'un amendement d'appel qui tend à augmenter la durée du préavis que doit respecter un salarié pour solliciter son départ à la retraite. Actuellement fixé à deux mois pour une ancienneté de deux ans et plus, à un mois pour une ancienneté de six mois à deux ans et à un délai fixé par la convention collective pour une ancienneté inférieure à six mois, ce préavis serait respectivement porté à six mois, trois mois et un mois.
Il s'agit, non pas de pénaliser le salarié, bien au contraire, mais de lui permettre de bénéficier d'un aménagement de ses conditions de travail en prévenant suffisamment en amont son employeur de sa volonté de partir à la retraite. L'allongement de ces délais s'inscrit dans la démarche de la présente proposition de loi, qui vise à mieux anticiper les trajectoires des salariés pour améliorer leur employabilité tout au long de leur carrière. Cette disposition figure d'ailleurs dans la proposition de loi n° 4541, qui présente un panel de solutions plus large pour améliorer le taux d'emploi des travailleurs expérimentés.
Je comprends que l'anticipation du départ à la retraite permet d'aménager une transition souple et progressive. En revanche, je ne suis pas du tout convaincue que l'obligation faite au salarié de donner un préavis plus tôt, sans obligation en retour pour l'employeur d'aménager son poste de travail, soit une avancée dans le sens que vous souhaitez. Je ne suis pas favorable à cet amendement.
Dans un monde idéal, cette proposition serait sans doute très positive pour faire mûrir un projet de départ. Parfois cependant, le départ est rapide, pour cause de problèmes de santé ou familiaux, ou diverses autres raisons. Il ne faudrait pas que le délai de six mois soit bloquant dans ces situations.
La commission rejette l'amendement.
Article 5 bis (nouveau) : Renforcement de l'information des salariés sur l'accès à la retraite progressive
Amendement AS16 de M. Didier Martin.
Par manque d'information, la retraite progressive peine à trouver son public. En 2019, elle concernait 21 500 bénéficiaires seulement. Or ce mécanisme permet de conserver une activité professionnelle dans des conditions aménagées, sous réserve de remplir les conditions d'éligibilité et d'obtenir l'accord de l'employeur. L'amendement tend à inclure dans l'entretien professionnel de mi‑carrière une information complète sur ce dispositif, afin d'adapter les conditions et le rythme de travail aux besoins des salariés.
La méconnaissance du dispositif de retraite progressive est en effet regrettable, car il assure une transition plus souple de l'emploi vers la retraite. L'information des salariés est capitale pour mieux anticiper la fin de carrière.
Par cet amendement, vous reprenez une proposition de notre rapport d'information, qui s'inscrit tout à fait dans l'intention de cette proposition de loi.
Avis favorable.
La commission adopte l'amendement.
Après l'article 5
Amendement AS6 de M. Guillaume Chiche.
L'amendement propose que lorsque le salarié atteint l'âge de 35 ans puis l'âge de 50 ans, les organismes de retraite, institutions ou entreprises lui adressent, dans un délai de trois mois à compter de la date anniversaire, une note d'information sur ses droits mentionnant notamment les modalités et conditions selon lesquelles il obtiendra la liquidation de ses droits à la retraite.
Cet amendement est satisfait par le droit en vigueur. En vertu des articles D. 161-2-1-3 à D. 161-2-1-6 du code de la sécurité sociale, tous les salariés à partir de 35 ans et jusqu'à 50 ans doivent recevoir tous les cinq ans un relevé de situation individuelle informant sur la durée d'assurance retraite et les points accumulés dans chaque régime de retraite de base et complémentaire auprès desquels le salarié a acquis des droits.
Il faut toutefois reconnaitre qu'en dépit de ces dispositions, l'information sur les droits à la retraite est largement insuffisante. L'information des salariés doit être renforcée pour être rendue effective, et la sous-direction des retraites et des institutions de la protection sociale complémentaire en a d'ailleurs pleinement conscience. Cependant, l'amélioration de l'information devra passer par un autre levier d'envergure.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Article 5 ter (nouveau) : Rapport sur le profil des bénéficiaires du cumul emploi‑retraite
Amendement AS20 de Mme Valérie Six.
Lors de son audition, la représentante de la sous-direction des retraites et des institutions de la protection sociale complémentaire a regretté le manque de données actualisées concernant les bénéficiaires du cumul emploi-retraite. L'étude la plus à jour de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques portant sur le profil des personnes bénéficiant du cumul emploi-retraite date de septembre 2017.
Cet amendement prévoit, par conséquent, par un rapport du Gouvernement au Parlement, l'actualisation de ces données.
Qu'il s'agisse du cumul emploi-retraite ou de la retraite progressive, ces dispositifs souffrent en effet d'un manque de notoriété. Compte tenu du manque de connaissances permettant de comprendre les comportements des salariés à leur égard, ce rapport me semble tout à fait utile, notamment pour bien préparer la réforme globale du système de retraite que nous appelons de nos vœux. Nous y sommes donc favorables.
La commission adopte l'amendement.
Article 6 : Gages financiers
La commission adopte l'article 6 non modifié.
Titre
Amendement AS22 de Mme Valérie Six.
Dans la lignée de ce que nous avions fait pour le titre du rapport d'information, je propose de remplacer le mot « seniors » par les mots « travailleurs expérimentés » dans celui de cette proposition de loi.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'ensemble de la proposition de loi modifiée.
La séance s'achève à douze heures quinze.
Présences en réunion
Réunion du mercredi 17 novembre 2021 à 9 heures 30
Présents. – M. Joël Aviragnet, M. Thibault Bazin, M. Belkhir Belhaddad, Mme Justine Benin, Mme Gisèle Biémouret, M. Julien Borowczyk, Mme Marine Brenier, M. Philippe Chalumeau, Mme Annie Chapelier, M. Sébastien Chenu, M. Guillaume Chiche, M. Paul Christophe, Mme Christine Cloarec-Le Nabour, M. Marc Delatte, M. Pierre Dharréville, Mme Jeanine Dubié, Mme Catherine Fabre, Mme Caroline Fiat, Mme Agnès Firmin Le Bodo, Mme Perrine Goulet, Mme Carole Grandjean, M. Jean-Carles Grelier, Mme Claire Guion-Firmin, Mme Véronique Hammerer, Mme Myriane Houplain, Mme Monique Iborra, M. Cyrille Isaac-Sibille, Mme Caroline Janvier, Mme Fadila Khattabi, Mme Geneviève Levy, Mme Monique Limon, M. Sylvain Maillard, M. Didier Martin, M. Thomas Mesnier, M. Thierry Michels, Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, M. Bernard Perrut, Mme Bénédicte Pételle, Mme Michèle Peyron, Mme Claire Pitollat, M. Alain Ramadier, Mme Stéphanie Rist, Mme Marie-Pierre Rixain, Mme Mireille Robert, Mme Valérie Six, Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe, M. Jean-Louis Touraine, M. Nicolas Turquois, Mme Isabelle Valentin, M. Boris Vallaud, Mme Laurence Vanceunebrock, Mme Michèle de Vaucouleurs, Mme Annie Vidal, M. Stéphane Viry, Mme Hélène Zannier, M. Michel Zumkeller
Excusés. – Mme Pascale Fontenel-Personne, M. Jean-Philippe Nilor, Mme Nadia Ramassamy, M. Jean-Hugues Ratenon, Mme Hélène Vainqueur-Christophe
Assistait également à la réunion. – M. François Ruffin