Commission des affaires sociales

Réunion du mercredi 30 septembre 2020 à 9h30

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • IVG
  • allongement
  • avortement
  • clause
  • congé
  • congé de paternité
  • médecin
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La réunion

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COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Mercredi 30 septembre 2020

La séance est ouverte à 9 heures 30

La commission examine la proposition de loi de Mme Albane Gaillot visant à renforcer le droit à l'avortement (n° 3292) (Mme Albane Gaillot, rapporteure).

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Voilà quarante‑cinq ans que l'interruption volontaire de grossesse (IVG) est entrée dans notre droit comme un droit fondamental pour les femmes. Quarante‑cinq ans, et pourtant des difficultés existent encore. Depuis tout ce temps, le législateur se penche sur ce sujet ô combien délicat pour perpétuer, améliorer et approfondir l'esprit de la loi Veil, dans l'unique but de contribuer à la cause des femmes aussi longtemps que nécessaire. Les parlementaires ont toujours su dépasser leurs clivages pour être à la hauteur de l'enjeu : en 1975, avec la loi Veil, en 1982, avec la loi Roudy, en 2001, avec la loi Aubry-Guigou, et en 2016, dans la loi de modernisation de notre système de santé.

La proposition de loi que je vous présente se veut, elle aussi, résolument transpartisane. Elle n'est ni celle d'un parti, ni celle d'une faction politique, encore moins la mienne. Elle est celle de toutes et tous, dans l'intérêt de toutes les femmes. À cet égard, je salue la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes pour son travail approfondi, ainsi que ses deux rapporteures pour leur rapport sur le sujet, qui ne manquera pas d'enrichir nos débats. C'est dans cet esprit responsable et collectif que je vous invite à aborder l'examen du texte.

Celui-ci comporte deux dispositions principales : l'allongement du délai légal d'avortement de douze à quatorze semaines de grossesse, soit de quatorze à seize semaines d'aménorrhée ; la suppression de la clause de conscience spécifique à l'IVG, dans une rédaction qui conserve l'obligation de réorienter les femmes, sans supprimer la clause de conscience générale des professionnels de santé.

Depuis 2001, le délai légal de recours à l'avortement est de douze semaines de grossesse – délai qui ne vaut que pour l'IVG dite chirurgicale ou instrumentale, puisque, suivant les recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS), les IVG médicamenteuses ne peuvent être pratiquées que jusqu'à la septième semaine de grossesse.

Pourquoi l'article 1er prévoit-il d'allonger ce délai ? Si la majeure partie des IVG sont effectuées avant la huitième semaine de grossesse, 5 % d'entre elles ont lieu entre la dixième et la douzième semaine et, dans bien des cas, le délai est même dépassé. Les associations de terrain estiment qu'il y aurait chaque année entre 3 000 et 5 000 femmes contraintes de partir avorter à l'étranger. Combien d'autres, ne pouvant se rendre à l'étranger, se retrouvent sans solution ? Le choix qui leur reste, entre mener à son terme une grossesse non désirée, avec des conséquences potentiellement délétères pour elles comme pour l'enfant, ou recourir à un avortement clandestin, souvent au péril de leur santé, n'en est pas un. En tant que législateur, il est de notre responsabilité de veiller à ce que cela n'arrive plus dans notre pays, à ce que les femmes, quelle que soit leur situation et sur quelque territoire qu'elles se trouvent, puissent trouver une solution. Nous devons leur garantir le respect de leur droit à l'avortement et de leur droit à disposer librement de leur corps.

Ne nous leurrons pas, ce sont bien les femmes dans des situations de fragilité qui se retrouvent le plus souvent à dépasser le délai de douze semaines. Ce sont les plus jeunes, les moins informées, les plus éloignées de notre système de santé, celles qui subissent des conditions de vie précaires, des violences conjugales. Tout comme il faut en finir avec l'idée que l'IVG est un échec de la maîtrise de la contraception, il faut en finir avec celle que le dépassement du délai relève d'une mauvaise gestion de son avortement. De même qu'il n'y a pas d'avortement repoussé par plaisir, il n'y a pas de dépassement du délai de douze semaines sans une situation problématique. Il peut s'agir de problèmes personnels, mais aussi structurels, par exemple le défaut de prise en charge rapide d'une femme par notre système de santé à cause de la fermeture d'un centre d'IVG ou d'un déficit d'établissements sur son territoire. Les raisons sont multiples et je suis convaincue qu'une évolution pragmatique de notre législation permettra de mieux prendre en charge les femmes et de mieux respecter leur droit à l'avortement.

L'article 2 revient sur la clause de conscience. Le législateur a toujours su approfondir la loi Veil, et il nous incombe de continuer à adapter cet héritage à notre temps. En ce sens, la clause de conscience spécifique à l'IVG ne me semble plus adaptée à ce que devrait être l'IVG en France au XXIe siècle. Lorsque la loi Veil a été examinée en 1974 à l'Assemblée nationale, le texte prévoyait qu'un médecin n'était jamais tenu de donner suite à une demande d'interruption de grossesse ni de la pratiquer, mais qu'il devait informer, dès la première visite, l'intéressée de son refus. Cette disposition reflétait les équilibres sociaux et politiques de l'époque. Henry Berger, rapporteur de la loi et médecin, notait en effet dans son rapport que l'Ordre des médecins se montrait hostile au projet de loi, tout comme un certain nombre de parlementaires. La mesure s'était alors imposée comme une voie de pacification. Elle avait d'ailleurs permis que l'article soit adopté sans modification au cours de l'examen du projet de loi au sein de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'époque. Aussi nécessaire et consensuelle qu'elle fût en 1974, elle ne répond plus à la réalité actuelle.

Certains ont cru comprendre que la fin de la clause de conscience spécifique à l'IVG reviendrait à contraindre tout médecin et toute sage‑femme à la pratiquer. Il n'en est rien. Abroger la clause de conscience spécifique à l'IVG ne toucherait en rien à la clause de conscience générale qui permet au médecin ou à la sage‑femme de refuser de pratiquer tout acte médical, dont l'IVG. Une telle clause contribue à maintenir l'IVG dans un statut d'acte médical à part et à pratiquer une médecine à géométrie variable. Les associations auditionnées l'ont toutes rappelé : l'IVG est un soin apporté aux femmes. Il ne semble, dès lors, plus justifié que le droit lui fasse une place particulière, comme si le législateur tenait tantôt à culpabiliser la femme, tantôt à décourager les professionnels de santé. Ce statut n'a que trop perduré.

Par ailleurs, cette disposition est redondante avec la clause de conscience générale des professionnels de santé, codifiée par voie réglementaire. Aux termes de cette clause de conscience, un médecin a le droit de refuser des soins pour des raisons professionnelles ou personnelles, hors cas d'urgence et de manquement au devoir d'humanité. Cette disposition perdurera et tout médecin ou tout autre professionnel de santé sera en droit de refuser un soin, y compris l'IVG. Cette mesure est purement symbolique, me direz-vous. Eh bien, je crois à la force des symboles, et je crois aussi qu'une telle évolution emportera des conséquences pratiques : en participant à faire évoluer les mentalités, elle renforcera l'accès à l'IVG pour toutes les femmes qui le veulent, quels que soient leur âge, leur catégorie sociale ou leur territoire.

En cas de refus du praticien, le législateur de 1975 avait prévu une obligation d'information et de réorientation des femmes, absente de la clause de conscience générale que nous conservons. C'est pourquoi il importe de maintenir dans le code de la santé publique cette mesure protectrice, ce qui permettra en même temps de mentionner la possibilité du refus du médecin ou de la sage‑femme de pratiquer une IVG – voilà qui devrait rassurer les détracteurs de la suppression de la clause spécifique. En mettant fin à cette exception, nous n'enlevons rien à personne : ni aux femmes, qui seront toujours informées et réorientées, ni aux professionnels de santé qui pourront toujours se réclamer de la clause de conscience générale du code de la santé publique pour refuser de pratiquer n'importe quel acte médical, y compris l'IVG. En revanche, nous renforçons le droit de l'IVG et prenons acte de la place qu'elle a conquise en quarante‑cinq ans : celle d'un soin apporté aux femmes au même titre que les autres.

En conclusion, légiférer sur l'IVG appelle tant à l'humilité qu'au sens des responsabilités. C'est dans cet esprit que cette proposition de loi a été élaborée, portée et soutenue par des députés de tous les groupes. Je forme le vœu qu'elle saura dépasser nos clivages habituels dans l'intérêt des femmes, en particulier des plus jeunes, des plus précaires et des plus désemparées d'entre elles. Je souhaite qu'elle puisse renforcer le droit à l'avortement et son égal accès à toutes les femmes.

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Quarante‑cinq ans après la loi Veil, l'accès à l'IVG, qui devrait être un droit effectif, ne l'est toujours pas. À la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, nous avons mené des travaux pendant plus d'un an, multiplié les auditions pour écouter, comprendre, questionner et identifier tous les freins qui font du parcours médical vers l'IVG un parcours du combattant. Nous avons identifié plusieurs leviers à activer. Notre travail transpartisan a consisté à rappeler les fondamentaux du combat de Simone Veil – ce qui est inscrit dans la loi sans être effectif dans tous nos territoires –, mais aussi à modifier et à apporter des corrections à ce parcours médical. Gardons en tête qu'il ne s'agit pas d'ouvrir un grand débat de bioéthique mais bien de lever ensemble les freins existants pour faire de l'IVG un droit réel.

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Sur un sujet qui en appelle à nos consciences, expériences ou convictions personnelles, chaque membre de notre groupe votera de manière individuelle. C'est notre force que de permettre à chacun, sur des sujets aussi fondamentaux, de s'exprimer librement.

Le discours de Simone Veil pourrait, aujourd'hui encore, nous inspirer. Lorsque l'écart entre les infractions commises et celles qui sont poursuivies est tel qu'il n'y a plus, à proprement parler, de répression, c'est le respect des citoyens pour la loi et, partant, l'autorité de l'État qui sont remis en cause. À l'époque, 300 000 femmes étaient contraintes de subir des IVG clandestines. Aujourd'hui encore, selon vos propres chiffres, elles sont 3 000 à 5 000 à devoir partir à l'étranger. Comme Simone Veil le disait si bien, l'IVG n'est jamais une victoire. Aller à l'encontre de la loi, défier l'autorité de l'État n'est jamais une partie de plaisir. Mais c'est le délai légal actuel qui contraint encore trop de femmes à agir ainsi. Simone Veil parlait de solution réaliste, humaine et juste. Au vu des législations de nos voisins européens et en l'absence d'un consensus clair sur une définition scientifique permettant de déterminer réellement à quel moment le fœtus devient un enfant à naître, votre proposition de loi me semble équilibrée. Le fœtus serait considéré comme viable à partir de vingt‑quatre semaines : les quatorze semaines doivent demeurer notre limite.

Pour ce qui est de la clause de conscience spécifique à l'IVG, la question de son utilité juridique se pose. En France, il est prouvé que cette double clause complique l'accès à l'IVG dans certains territoires. Selon un article de francetvinfo.fr, aucune IVG n'a pu être effectuée pendant plusieurs mois à l'hôpital du Bailleul, dans la Sarthe, parce que trois des quatre gynécologues refusaient de la pratiquer, obligeant ainsi les femmes apeurées à parcourir plus de 45 kilomètres pour subir cette intervention. Soyons bien conscients que cet acte n'est jamais anodin, même pour les praticiens pro‑IVG. Mais si l'on peut comprendre la détresse du praticien, l'existence d'une double clause stigmatise injustement une femme qui prend déjà une décision très difficile.

Je voterai favorablement votre proposition de loi.

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Nous avons à examiner un texte sensible, parce qu'il touche à l'intime et aux convictions de chacun. Les membres du groupe MoDem et Démocrates apparentés voteront en leur âme et conscience. Le droit des femmes à disposer de leur corps est un combat ancien, dont il nous faut entretenir la flamme. Ce n'est pas un droit acquis. Un océan nous sépare d'un pays où, plus que jamais, de tels droits sont menacés.

Je suis, à titre personnel, résolument favorable à votre proposition de loi. Plusieurs fois, j'ai rencontré des femmes qui ne bénéficiaient pas d'un accès facilité à l'IVG, par manque de médecins ou parce que certains médecins, par convenance ou conviction, refusent de pratiquer cet acte chirurgical. Dans mon territoire, les deux se cumulent, rendant encore plus difficile cette épreuve. C'est intolérable à entendre dans notre pays ! Même si je pense que l'allongement du délai est souhaitable, ainsi que la suppression de la seconde clause de conscience, il me semble que d'autres réflexions sont nécessaires, notamment sur l'accès à la contraception.

Comme le rappelait Simone Veil, avorter est toujours un drame et le restera. La semaine dernière, nous découvrions l'étude de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES), particulièrement éclairante sur ce sujet. Notons que les plus pauvres avortent le plus, considérant l'avortement comme un contraceptif. Notre politique de santé publique doit en tirer les conclusions en matière d'accès à la contraception et de remboursement, d'accès à l'information et aux droits du corps.

Accueillir un enfant est un bouleversement dans la vie d'une femme. Elle doit être prête à l'accueillir, pour prévenir notamment les maltraitances, et donc choisir le bon moment. Si ce n'était pas le bon moment, elle doit pouvoir trouver l'accompagnement nécessaire.

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Le 26 novembre 1974, Simone Veil montait courageusement à la tribune pour défendre son projet de loi visant à dépénaliser l'avortement. Quarante‑six ans plus tard, l'IVG est tolérée plutôt qu'admise comme un véritable droit. Avec Cécile Muschotti, nous avons mené une mission d'information sur l'accès à l'IVG dans le cadre de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, qui a mis en évidence des disparités territoriales importantes et des inégalités d'accès. Après de nombreuses auditions et des déplacements à l'étranger, nous avons rendu un rapport, le 16 septembre dernier, et présenté une proposition de loi transpartisane, marquée du sceau de la délégation, qui rejoint certaines de vos propositions et en complète d'autres : allongement du délai et suppression de la double clause de conscience, mais aussi extension de la compétence des sages‑femmes pour les autoriser à pratiquer l'IVG.

Nous sommes conscients que ces dispositions ne règleront pas toute la question. Nous avons fait plusieurs préconisations relevant du domaine réglementaire ou de circulaires qui doivent être absolument prises. Quarante‑cinq ans après la loi Veil, peut‑on encore accepter que l'accès à l'IVG soit plus une tolérance qu'un droit ? Qu'entre 3 000 et 5 000 femmes doivent partir à l'étranger parce que nous n'avons pas su les prendre en charge ? Que cet acte reste à ce point stigmatisé, oubliant les mots de Simone Veil selon lesquels aucune femme ne recourt de gaieté de cœur à l'avortement ? Peut‑on se satisfaire de cette situation, de ce parcours de la combattante ? Nous ne le pensons pas. Nous devons agir pour que ce droit soit enfin effectif.

Nous amenderons le texte, de sorte qu'il puisse atteindre les objectifs recherchés par la délégation aux droits des femmes.

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Sur un sujet aussi sensible, qui interpelle les sentiments les plus personnels, le groupe Agir ensemble n'aura pas de position de vote et chacun se prononcera selon ses convictions.

À titre personnel, je ne peux qu'être sensible à cette proposition de loi sur un sujet important. Vous avez d'ailleurs raison de rappeler que le droit à l'IVG est aujourd'hui menacé dans le monde et qu'il convient de réaffirmer qu'il s'agit d'un droit intangible et d'une avancée pour le droit des femmes à disposer de leur corps.

Les débats liés à l'extension du délai d'accès à l'IVG ont évidemment trouvé une nouvelle résonance en raison de l'épidémie et des difficultés d'accès aux soins qu'elle a entraînées. De trop nombreuses femmes n'ont pu bénéficier d'un accès à l'IVG dans les délais légaux, ce qui n'est pas acceptable. Au‑delà de l'effet conjoncturel, de trop grandes inégalités territoriales subsistent dans l'accès à l'IVG. C'est parfois un véritable parcours du combattant, en raison de l'absence de praticiens ou de la fermeture de centres d'orthogénie. Néanmoins, l'extension du délai légal d'accès à l'IVG à quatorze semaines constitue‑t‑elle la réponse la plus adaptée à cette perte de chances pour les femmes ? Le choix de douze semaines, il y a quarante‑cinq ans, était mesuré et pesé. Il convient aujourd'hui de nous demander pourquoi certains parlent de vingt-quatre semaines. À titre personnel, je suis plutôt favorable à une extension temporaire, comme cela avait été envisagé pendant la crise du coronavirus, à une solution d'équilibre sur un sujet difficile. Prenons garde à ne pas fracturer la société sur de tels sujets.

Je suis plus réservée concernant la suppression de la double clause de conscience. Inscrite dans le marbre de la loi, elle est différente de la clause de conscience générale des médecins. On risquerait de mettre en danger la vie de certaines femmes si elles étaient mal accompagnées par des médecins que l'on aurait forcés à réaliser des IVG. L'IVG, pour reprendre les mots de Simone Veil, est toujours un drame, et il ne s'agit pas d'un acte médical comme les autres. Il nous faut aussi travailler sur la contraception chez les jeunes filles, un sujet trop largement abandonné.

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Nous devons faire preuve d'humilité. Le droit à l'avortement a été durement acquis. Nous devons rester vigilants quant à son exercice. Depuis 1975, l'encadrement de l'interruption volontaire de grossesse a considérablement évolué. Rappelons qu'en 2001, la loi Aubry a étendu le délai du recours à l'IVG jusqu'à la fin de la douzième semaine de grossesse. En 2013, l'IVG est devenue gratuite pour toutes les femmes. Enfin, en 2016, le délai minimal de réflexion d'une semaine a été supprimé. Je tiens à rappeler que l'IVG n'est pas une décision facile à prendre. Ce n'est ni une solution de facilité ni une solution de confort. C'est un libre choix, un choix difficile et toujours douloureux.

La proposition de loi prévoit, à l'article 1er, un allongement des délais légaux de douze à quatorze semaines, afin d'éviter que de nombreuses femmes ne se rendent à l'étranger pour avorter. Le groupe UDI et Indépendants proposera un amendement de suppression de cet article. Il nous semble que le problème n'est pas le délai de recours à l'IVG mais son accessibilité selon les territoires – manque de praticiens, manque de structures hospitalières – et les défaillances de la prévention.

L'article 2 vise à supprimer la double clause de conscience du médecin. Nous y sommes opposés. Notre groupe veut réaffirmer la liberté de conscience du médecin à pratiquer l'avortement. Il votera contre la proposition de loi.

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La semaine dernière, j'inaugurais la rue Simone‑Veil à Atton, dans ma circonscription, en hommage à cette femme politique qui s'est battue avec acharnement pour le droit des femmes et l'interruption volontaire de grossesse. Défendre aujourd'hui la position de mon groupe sur un texte relatif à l'IVG est fort de significations pour moi. Mais le sujet est également fort de significations en cette période de covid‑19, puisque ce droit est rendu encore plus difficile d'accès dans certains territoires, ce qui constitue une entrave au droit fondamental des femmes à disposer de leur corps. Au problème de la désertification médicale s'ajoute une clause de conscience stigmatisante spécifique à l'IVG, qui n'a pas lieu d'être et qui crée une rupture dans l'égalité des soins. Le délai pour avorter est trop court pour certaines femmes, conduites à avorter clandestinement, à se rendre à l'étranger ou à subir une grossesse non désirée.

Notre groupe soutient votre proposition de loi, dont j'ai été la cosignataire dès son premier dépôt. Elle prévoyait initialement une formation à destination des élèves de tous âges. Nous proposerons de réintégrer cette disposition, en ajoutant que la formation doit contenir des enseignements relatifs au consentement. Nous proposerons également de réintégrer l'expérimentation qui permettait à des centres de planification d'effectuer des IVG. Enfin, nous proposerons d'étendre les compétences des sages‑femmes. Nous espérons vivement que cette dernière mesure, que nous vous avions déjà soumise dans le cadre d'une autre proposition de loi, l'an dernier, sera soutenue à la lumière de l'excellent rapport de Marie‑Noëlle Battistel et Cécile Muschotti.

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Le 16 septembre 2020, la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes de l'Assemblée nationale a remis un excellent rapport d'information sur l'accès à l'IVG. Les deux rapporteures y ont formulé vingt‑cinq recommandations, dont deux qui se retrouvent dans cette proposition de loi. Il y est précisé que l'offre de soins en matière d'IVG est très contrastée selon les territoires, aussi bien en ce qui concerne le nombre de praticiens de santé que celui des établissements. Ces inégalités territoriales ont des conséquences sur les conditions d'accès à l'IVG et sur les délais d'obtention des rendez‑vous, ainsi que sur le libre choix de la méthode. Elles pénalisent surtout les femmes les plus vulnérables. Nous ne devons pas oublier que 3 000 à 5 000 femmes partent chaque année avorter à l'étranger pour avoir dépassé le délai légal.

Notre groupe soutiendra les deux mesures de la proposition de loi. La clause de conscience spécifique à l'IVG pouvait s'expliquer dans le contexte de 1975, mais ne se justifie plus aujourd'hui. Il ne faut pas non plus oublier tout le travail à mener sur la prévention. Le texte s'enrichira des amendements issus des travaux de la mission d'information de la délégation aux droits des femmes, afin de répondre, à l'issue de son examen, à beaucoup des problèmes auxquels sont confrontées les femmes dans une telle situation.

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Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine approuvera les deux articles de la proposition de loi, car nous sommes favorables à une évolution du droit à l'avortement, évolution dont la nécessité a été soulignée avec une acuité particulière pendant le confinement. De fait, ces deux articles répondent à une exigence absolue en matière de protection des droits des femmes. Les obstacles qui entravent l'accès à l'IVG sont, nous le disons de longue date, encore trop nombreux.

À cet égard, la clause de conscience spécifique est un archaïsme qui stigmatise l'avortement : nous devons faire tomber cette barrière symbolique.

Quant à l'allongement de deux semaines du délai d'accès à l'IVG, il est une avancée nécessaire, compte tenu de l'accroissement des difficultés liées à la faiblesse des moyens alloués aux centres IVG – la volonté politique de les développer doit être plus forte – et, de manière générale, à la fragilité de notre système de santé, qui souffre de pénuries, notamment d'un manque de médecins. Qui plus est, nombre de femmes sont confrontées à l'augmentation de la précarité et à la persistance des violences dont elles sont victimes. Cette mesure, les chiffres le montrent, est nécessaire pour mieux répondre à leur demande. Ces derniers mois, les demandes d'IVG hors délai ont crû considérablement ; le confinement et les difficultés économiques qui en résultent ont aggravé la situation.

Pour conclure, je veux saluer le travail accompli, dans le cadre de la délégation aux droits des femmes, par Marie-Noëlle Battistel et Cécile Muschotti – nous porterons un regard très positif sur les amendements qui en sont issus – ainsi que celui d'Albane Gaillot, qui a permis que nous examinions cette proposition de loi aujourd'hui.

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Je tiens, en premier lieu, à remercier notre rapporteure, Mme Gaillot, pour cette proposition de loi transpartisane. Il s'agit d'un texte important pour les droits des femmes. Alors que l'on pourrait croire que le droit à l'IVG va de soi, le recours à ce soin – j'emploie ce mot à dessein, car on estime qu'une femme sur trois y a recours au moins une fois dans sa vie – ressemble de plus en plus à un parcours de la combattante.

Dans leur rapport au nom de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, Marie-Noëlle Battistel et Cécile Muschotti dressent les constats suivants : 3 000 à 5 000 femmes seraient conduites à se rendre à l'étranger pour avoir recours à un avortement, l'IVG se trouve parfois entravée au nom de convictions religieuses ou idéologiques et les femmes disposent d'une offre de soins très inégale selon les territoires.

Outre qu'elle prévoit un allongement des délais, qui permettra à des centaines de femmes de ne plus être obligées de se rendre à l'étranger – et de subir la discrimination sociale qui en découle – ou de mener à terme une grossesse non désirée, délétère aussi bien pour la femme que pour l'enfant à naître, la proposition de loi nous conduit à prendre position sur la clause de conscience créée lors de l'adoption de la loi Veil. Il y a bientôt un demi-siècle que survit ce qu'il faut bien désigner aujourd'hui comme un archaïsme. Non seulement cette clause spécifique laisse à penser que l'IVG n'est, en définitive, pas un soin comme un autre, mais elle entretient la petite musique selon laquelle la femme serait un être frivole, irresponsable ou immature. Dans une société qui se dit moderne et progressiste, cette clause spécifique, surannée et anachronique doit être supprimée.

Le groupe Écologie Démocratie Solidarité est heureux de pouvoir travailler avec les autres groupes à l'aboutissement de ce texte et soutiendra sans réserve l'ensemble des amendements progressistes de nature à garantir un droit à l'IVG effectif pour toutes les femmes.

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La proposition de loi tend notamment à allonger les délais légaux d'accès à l'IVG, c'est-à-dire sans raison médicale. C'est techniquement possible, mais est-ce humainement souhaitable ? La question relève, me semble-t-il, de la réflexion menée dans le cadre des lois de bioéthique. En effet, c'est à compter de la douzième semaine que le fœtus prend du poids, que l'audition se développe, de même que les connexions neurologiques, et que le sexe peut être déterminé avec certitude.

En outre, la santé des femmes est en jeu. Les avortements pratiqués plus tardivement les exposent à un risque sanitaire supplémentaire : les douleurs sont plus intenses à des âges gestationnels plus avancés, les saignements plus abondants et les risques hémorragiques plus importants.

Le nombre élevé des IVG, en augmentation chaque année, tend à démontrer que l'accès à l'avortement ne semble pas entravé. Selon Alain Milon, le président de la commission des affaires sociales du Sénat, les avortements tardifs sont plutôt dus à un défaut de prévention. « Le véritable enjeu », estime-t-il, « réside donc moins dans le réexamen de ce délai que dans les efforts qui doivent être faits pour prévenir les situations d'urgence. À cet égard, la bonne information des patientes est fondamentale. » J'ajoute que nous devrions également nous interroger sur les écarts régionaux, le nombre des recours à l'IVG variant du simple au triple – il est notamment plus élevé dans les départements et régions d'outre-mer –, et sur les écarts entre générations, puisque le nombre d'IVG diminue pour les moins de 20 ans et augmente pour les trentenaires.

Le texte tend, par ailleurs, à supprimer la clause de conscience spécifique, au motif que le code de la santé publique comporterait déjà une clause de conscience. Mais ces deux clauses ont-elles la même portée ? La clause générale du médecin existait avant la loi de 1975 sur l'avortement ; sa portée est plus restreinte ; elle est de nature non pas législative mais réglementaire et ne peut pas être invoquée par tous les personnels soignants.

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Mes convictions sont sans ambiguïté : je ne souhaite pas que le droit à l'avortement soit remis en cause. En revanche, je crois que son cadre doit demeurer solide et ne pas être élastique.

Sur le fond, l'allongement du délai est un débat sans fin. La borne actuelle me paraît nécessaire, car il ne faudrait pas donner à penser, comme l'a dit Mme Goulet, que l'IVG est un moyen de contraception. En ce qui concerne la clause de conscience spécifique, je considère que l'IVG est un acte médical à part. C'est un droit, une liberté pour les femmes, mais ce n'est pas un soin, un acte médical banal. Or supprimer la clause de conscience est une manière de banaliser cet acte fort qui doit demeurer assez exceptionnel. Si toutes les convictions sont respectables, celles des militantes des droits des femmes le sont tout autant que celles des médecins qui, pour des raisons personnelles, se refusent à pratiquer cet acte.

Il est vrai que ce sont les femmes les plus pauvres qui avortent. Il faut donc développer l'information et l'accompagnement, améliorer l'accès à la contraception et réduire les inégalités territoriales. Sur ces points, nous serons, me semble-t-il, tous d'accord. Mais aborder le droit à l'avortement sous l'angle de l'allongement du délai et de la clause de conscience spécifique me paraît de mauvais aloi. Ce faisant, on réveille un débat forcément douloureux, sans apporter de remède ou de solution pérenne. C'est pourquoi, à titre personnel, je ne soutiendrai pas la proposition de loi.

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L'IVG résulte du choix d'une femme ou d'un couple. Il s'agit d'une question éminemment sensible, qui a des répercussions politiques sur le plan législatif.

Selon les éléments recueillis par nos collègues de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, il subsiste dans notre pays des inégalités dans l'accès à l'IVG, de sorte que le parcours de certaines femmes demeure compliqué, en raison notamment de démarches trop longues. Depuis 1975, la législation a évolué, et la question se pose aujourd'hui de savoir si cette évolution doit se poursuivre. Cette question a fait l'objet de débats parlementaires récurrents : elle a été abordée, en 2019, lors de l'examen de la loi relative à l'organisation et à la transformation du système de santé et, en 2020, lors de la discussion des textes sur l'urgence sanitaire et du projet de loi bioéthique.

La proposition de loi porte sur l'allongement des délais, lesquels varient d'un pays à l'autre, et sur la double clause de conscience. Cette dernière question est importante, et doit être traitée de manière précautionneuse, car l'IVG n'est pas un acte médical banal. J'espère que nous pourrons débattre de ces questions sereinement.

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Je constate qu'un certain consensus se dessine, même si les positions ne sont pas les mêmes sur tous les bancs.

Tout d'abord, si la proposition de loi ne comporte que deux articles, elle sera certainement complétée par un certain nombre d'amendements.

Il est vrai qu'en matière d'accès à l'IVG, on observe d'importantes disparités territoriales, en raison notamment de la fermeture de centres d'IVG. Perrine Goulet a évoqué la Nièvre, que je connais bien, où des mesures ont été prises par la HAS et le ministère de la santé, précisément pour remédier à ce problème. Ce texte ne peut pas traiter de tous les enjeux, mais nous discuterons probablement, lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), des moyens budgétaires alloués à ces structures.

La proposition de loi ne traite pas non plus de l'éducation à la sexualité et à la vie affective ni de l'accès à la contraception, qui sont également de véritables questions. Je vous propose que nous abordions l'examen des amendements, qui nous permettra d'étayer nos arguments.

La commission en vient à la discussion des articles de la proposition de loi.

Article 1er : Allongement du délai de recours à l'IVG de douze à quatorze semaines de grossesse

La commission est saisie des amendements de suppression AS1 de M. Thibault Bazin et AS8 de Mme Valérie Six.

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Il s'agit de supprimer l'article 1er, pour les raisons médicales et scientifiques que j'ai exposées dans mon intervention précédente.

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Pour justifier l'allongement de deux semaines du délai légal de recours à l'IVG prévu à l'article 1er, les auteurs de la proposition de loi expliquent vouloir éviter que, chaque année, 3 000 à 4 000 femmes ne se rendent à l'étranger pour se faire avorter – sachant que, dans ces pays, les autorisations ne sont accordées qu'à des conditions très restrictives. Nous estimons, quant à nous, que ce n'est pas la solution et que le problème doit être traité en amont, en faisant tout pour faciliter l'information sur la contraception pré et post-rapport sexuel.

Il est toujours difficile de fixer une limite. Ce n'est pas en repoussant les barrières légales que nous mettrons fin à la démarche des milliers de femmes qui, chaque année, partent à l'étranger. Il faut leur permettre de surmonter les difficultés d'accès à l'IVG, s'interroger sur les causes de dépassement du délai légal, qui tiennent avant tout à une prévention défaillante ou aux difficultés qu'ont les femmes à trouver un praticien près de leur domicile. En outre, compte tenu du développement du fœtus, une IVG tardive peut faire courir des risques plus importants à la femme enceinte.

C'est pourquoi nous souhaitons maintenir le terme de la durée légale d'accès à l'IVG à la fin de la douzième semaine de grossesse.

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Sans surprise, je suis défavorable à ces amendements.

Souvent, on nous dit qu'il s'agit d'une course sans fin. Il faut savoir que l'allongement du délai intervenu en 2001 n'a pas incité les femmes à changer de comportement : elles n'ont pas retardé leur arrivée dans le parcours d'IVG.

Ensuite, la technique utilisée, celle de l'aspiration, est la même, quel que soit le délai. Des difficultés techniques et médicales peuvent survenir aussi bien à cinq, huit ou douze semaines qu'à quatorze, comme nous l'ont confirmé lors des auditions les professionnels de santé, gynécologues-obstétriciens et sages-femmes, notamment.

Par ailleurs, les tests génétiques dont il a été question peuvent être réalisés dès dix semaines ; l'allongement du délai ne changera rien, à cet égard.

Certes, l'enjeu territorial est réel, mais l'allongement du délai répond à une véritable problématique, puisqu'on estime à 2 000 le nombre des femmes concernées. Si cette mesure peut être une solution pour ces femmes, nous aurons déjà fait un grand pas !

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Il est difficile de discuter de ce sujet dans le cadre d'une niche parlementaire. Compte tenu des nombreuses questions d'ordre éthique ou sanitaire qu'il soulève, il mériterait de faire l'objet d'une réflexion menée avec des professionnels. Vous dites, madame la rapporteure, que l'acte est le même et que le pratiquer à quatorze semaines ne pose pas davantage de problèmes techniques. Or, selon Cloé Guicheteau, une médecin généraliste qui exerce au planning familial et au centre IVG du centre hospitalier universitaire de Rennes, à sept, huit ou neuf semaines, la durée de l'aspiration est de 3 minutes, puis elle augmente un peu ; mais, entre douze et quatorze semaines, une difficulté technique se fait ressentir.

Toutes les détresses doivent être entendues, mais nous devons aussi pouvoir mesurer les risques d'un tel acte et ce qui se joue pour le fœtus entre douze et quatorze semaines. Je ne suis pas un expert, mais, à quatorze semaines, on peut, par exemple, déterminer le sexe du fœtus.

Nous devons avoir une réflexion de fond sur la barrière symbolique et éthique des douze semaines.

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Une collègue a fait observer que, plutôt qu'allonger les délais, il faut agir en amont du parcours, notamment dans le domaine de l'éducation à la sexualité. Nous avions déposé un amendement visant précisément à réserver, dans chaque établissement, un volume horaire pour l'organisation de trois séances annuelles ; hélas ! il a été déclaré irrecevable. Nous avons donc bien conscience que le seul allongement du délai ne suffit pas. Surtout, le parcours doit être suffisamment fluide pour que l'avortement soit pratiqué le plus possible dans le délai des douze semaines.

Si nous sommes favorables à l'allongement de celui-ci, c'est parce que nous souhaitons prendre en compte les cas où, parce qu'elle a eu une prise de conscience tardive, a fait un déni de grossesse ou a eu du mal à prendre sa décision, une femme a dépassé le délai légal actuel. Le parcours d'accès ayant été amélioré – et nous souhaitons qu'il le soit davantage encore –, les femmes qui se trouvent dans cette situation seront de moins en moins nombreuses. Mais quand bien même elles ne seraient que 200 ou 1 000, nous ne pouvons pas accepter de les laisser partir à l'étranger.

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Certes, plus on tarde, plus c'est délicat. Mais un avortement clandestin l'est davantage encore et met la santé des femmes en danger. La plupart des IVG tardives concernent les plus jeunes femmes ou les plus jeunes couples, qui ne peuvent pas se rendre à l'étranger. Quant à l'argument de la difficulté technique, il était déjà avancé par les praticiens lorsque le délai a été allongé de dix à douze semaines.

Non, l'IVG n'est pas considérée comme une contraception. Je vois dans mon cabinet qu'elle est parfois même la conséquence d'un échec de la contraception, qu'elle soit sous forme de préservatif, de pilule ou de pilule du lendemain. Encore une fois, il s'agit d'un soin à part entière : 30 % des femmes ont recours à l'IVG au cours de leur vie.

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Gardons à l'esprit, car c'est fondamental pour la suite de nos débats, qu'une femme qui ne le veut pas ne mènera pas sa grossesse à terme. Par ailleurs, contrairement à de fausses idées qui circulent, tous les pays qui ont allongé le délai de recours à l'IVG n'ont pas vu pour autant le nombre d'IVG augmenter. Enfin, j'invite ceux qui jugent le délai d'examen de cette proposition de loi trop court à lire le rapport de la délégation aux droits des femmes. Pendant plus d'un an, nous avons procédé à des auditions, rencontré des dizaines d'acteurs, dont des spécialistes et des médecins, pro ou anti-IVG. Ces travaux nous ont permis de parvenir à un point d'équilibre, en proposant un texte qui améliore l'accès aux soins sans mettre en cause les préoccupations bioéthiques.

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Le sujet est complexe, car il renvoie chacun à ses valeurs personnelles. Il est donc important que nous soyons bienveillants à l'égard des opinions des uns et des autres.

Je suis, pour ma part, gênée, en tant que médecin de santé publique et de prévention, par le fait que la question n'est pas suffisamment appréhendée dans sa globalité. Il me semble ainsi qu'une véritable réflexion d'amont doit être menée sur la prévention, laquelle ne doit pas être réduite à l'éducation à la sexualité dans les écoles. Par ailleurs, nous ne savons pas à quel stade de sa grossesse une femme s'aperçoit qu'elle n'a d'autre solution que de se rendre à l'étranger. Un délai de quatorze semaines pourrait ne pas toujours suffire. Dès lors, faudra-t-il encore le réviser ? Certes, ces questions ont été examinées par la délégation aux droits des femmes mais, en tant que membre de la commission des affaires sociales, j'aurais souhaité bénéficier d'un temps de réflexion et participer à des auditions. Tel n'a pas été le cas, et cela pose un véritable problème.

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Vous avez raison de rappeler la nécessité d'être bienveillant.

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La réflexion sur le sujet a bien eu lieu : au cours des trois dernières années, les mesures proposées ont été mises à la discussion à l'occasion de l'examen de divers textes et, à chaque fois, elles ont été repoussées. C'est la raison pour laquelle la délégation aux droits des femmes s'en est saisie. Pendant un an et demi, Cécile Muschotti et Marie‑Noëlle Battistel ont travaillé et se sont rendues sur le terrain pour étudier les corrections qu'il convenait d'apporter au dispositif actuel.

L'allongement du délai de douze à quatorze semaines ne changera rien : ce n'est pas à ce moment-là que l'on peut, par exemple, déterminer le sexe de l'enfant. Si la limite a été fixée à douze semaines et s'il existe une double clause de conscience, c'est parce que, bien que le droit à l'avortement soit reconnu dans notre pays, des freins ont été maintenus pour contraindre les femmes et les culpabiliser. Ces freins, nous devons les lever, pour que leur choix soit respecté et que l'accès à l'IVG soit enfin effectif dans l'ensemble du territoire. Tel est l'objet de la proposition de loi.

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La délégation aux droits des femmes a travaillé pendant plus d'un an et demi ; tous les effets d'un allongement de deux semaines du délai ont été étudiés et l'ensemble des parties entendues.

Sur cette question, comme sur celle du droit de mourir dans la dignité, chacun a des convictions intimes, et je les respecte toutes. Mais la République est laïque et les conceptions religieuses, qui ont toute leur place dans la sphère privée, doivent être écartées dès lors qu'on débat d'un texte qui, dans l'intérêt général, vise à apporter une solution aux quelque 5 000 femmes qui, parce qu'elles ont dépassé les délais légaux, se rendent à l'étranger et se mettent parfois en danger.

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Je veux, tout d'abord, saluer le travail de la délégation aux droits des femmes.

Pour ma part, je suis très mal à l'aise et partagée face à l'article 1er. On a évoqué les disparités territoriales, le fait que les avortements tardifs touchent principalement les femmes en situation de précarité et les 5 000 femmes qui se rendent à l'étranger – je ne parlerais pas, à ce sujet, d'avortements clandestins. Mais, entre douze et quatorze semaines, le fœtus grandit de 5 à 10 centimètres ; c'est un problème, selon moi. En 2001, le délai est passé de dix à douze semaines ; aujourd'hui, on propose de le porter à quatorze semaines : où ce glissement s'arrêtera-t-il ?

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L'allongement du délai de dix à douze semaines n'a pas provoqué d'augmentation du nombre d'avortements. Le faire passer à quatorze semaines ne vise qu'à apporter une réponse aux 5 000 départs à l'étranger, qui dénotent une inégalité d'accès à un droit fondamental. Cela me pose un problème, car énormément de femmes en France recourent à l'IVG durant leur vie. Il s'agit donc d'un vrai sujet de société à ne pas prendre à la légère.

Qui plus est, en allant jusqu'à quatorze semaines, nous nous alignerons sur un certain nombre de pays.

Pour ce qui est de l'aspect technique, les gynécologues et les internes sont d'ores et déjà formés aux gestes, qui sont identiques à ceux pratiqués en cas de fausse couche. Cela ne soulève donc pas de difficulté particulière. Les médecins qui ne se sentiraient pas prêts techniquement pourraient toujours faire jouer leur clause de conscience et orienter les patientes vers d'autres confrères. Ainsi ne seraient-ils pas mis en difficulté. Au cours des auditions, nous avons rencontré plusieurs praticiens qui se disent prêts techniquement et en nombre suffisant pour les 2 000 avortements dont il est question.

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J'entends parler d'un éventuel manque de travail et de la nécessité de disposer, en tant que commissaires aux affaires sociales, de nombreux éléments. Qui, ici, n'a jamais été rapporteur d'une mission ? Qui ignore le travail qui a précédé la remise du rapport, en réflexion et auditions ? À quoi bon présenter des rapports si, comme celui que nous avons remis en 2018, on ne leur fait pas confiance et qu'on en demande un nouveau ? Quel dommage de perdre autant de temps quand on voit la situation dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes aujourd'hui – mais c'est un autre sujet !

En l'occurrence, nous disposons du rapport de la délégation aux droits des femmes, qui clôt un an et demi de travail, et de celui de notre rapporteure Albane Gaillot. Chers collègues, soit vous ne leur faites pas confiance, et tous les députés doivent devenir rapporteurs et on ne s'en sortira pas, soit vous retroussez vos manches et vous lisez les travaux de vos collègues en leur faisant confiance ! Je ne peux pas entendre que nous n'aurions pas de quoi nous faire une opinion.

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Je peux comprendre l'esprit de l'amendement de suppression de mon ami Thibault Bazin. Ayons toujours en mémoire les propos majeurs et forts de Simone Veil, selon laquelle l'IVG est toujours un drame. Coûte que coûte, il faut effectivement faire avancer notre législation en la matière, mais n'oublions pas cependant ce qui est ressorti des auditions et des déplacements sur le terrain : notre culture de la relation sexuelle est défaillante, notamment dans la connaissance de ses conséquences, qui a régressé au sein de la jeunesse française. Se pose donc, au-delà de la médecine scolaire et bien qu'elle ne puisse être traitée dans cette proposition de loi, la question de la prévention, de l'information et de la sensibilisation.

Notre mission ne sera pas remplie par le seul vote de cette proposition de loi et de ses deux articles. Le sujet est culturel et sociologique autant qu'éthique. Les politiques publiques doivent impérativement, en matière de sexualité, de rapport à l'autre et de corps humain, refaire, et de façon massive, de la prévention.

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Nos échanges, analyses et points de vue, tout aussi respectables les uns que les autres, montrent le caractère sensible de la question qui est bien plus éthique que religieuse. Elle est donc d'une toute autre dimension qu'une simple proposition de loi.

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Personne ici n'entend remettre en question le droit à l'IVG dont chacun est bien conscient qu'elle est, pour reprendre les mots de Simone Veil, un drame.

L'allongement du délai légal de dix à douze semaines n'aurait pas entraîné d'augmentation du nombre d'avortements. A-t-on une étude d'impact qui le prouve ? Sans vouloir dire que le travail n'a pas été fait, madame Fiat, existe-t-il une étude d'impact qui mettrait en évidence le nombre de femmes qui n'iraient pas à l'étranger entre la douzième et quatorzième semaine de grossesse ? Ce sont là les chiffres dont nous avons besoin.

Notre principal sujet est de savoir comment lever les freins d'accès à l'avortement. Ce n'est sûrement pas seulement en allongeant les délais légaux, car cela ne mettra pas fin aux inégalités territoriales, ni en votant un texte qui ne comporte que deux articles.

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Quand une femme veut avorter, elle avorte, quelle que soit la situation. Si l'allongement du délai de douze à quatorze semaines peut résoudre les problèmes rencontrés par certaines femmes, ce sera déjà ça.

S'agissant de l'étude de l'impact, je vous renvoie à une étude de l'Institut national d'études démographiques qui a mesuré l'impact de l'allongement de dix à douze semaines. On peut penser qu'un certain nombre de femmes bénéficieront d'un allongement à quatorze semaines.

La proposition de loi ne lèvera que quelques freins à l'avortement. Les autres pourront être traités dans le cadre du PLFSS, et je sais que certains commissaires se sont penchés sur les questions d'éducation ainsi que de prévention médicale et sanitaire.

La commission rejette les amendements.

Puis elle adopte l'article 1er sans modification.

Après l'article 1er

La commission est saisie des amendements identiques AS11 de Mme Marie-Pierre Rixain et AS13 de Mme Marie-Noëlle Battistel.

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Issu des travaux de la délégation aux droits des femmes, l'amendement AS11 vise à améliorer l'information relative à la méthode d'IVG en systématisant la présentation des trois méthodes existantes par les professionnels de santé.

Une étude écossaise fait état d'un taux d'insatisfaction vis-à-vis de la méthode employée de 5 % chez les femmes ayant pu choisir leur méthode d'IVG contre 22 % chez celles n'ayant pu la choisir. De surcroît, un certain nombre de femmes ne sont pas informées de l'existence de ces trois possibilités.

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Les femmes ont le choix entre trois méthodes d'IVG – médicamenteuse, chirurgicale avec anesthésie locale et chirurgicale avec anesthésie générale – mais elles restent trop dépendantes de l'offre de soins disponible sur leur territoire. Le nombre de centres pratiquant l'IVG a diminué de 7,7 % en dix ans, ce qui creuse les inégalités territoriales. De plus, l'information ne leur est pas toujours donnée de manière transparente : on ne leur propose que la méthode disponible à l'endroit où elles habitent.

L'amendement tend donc à rétablir le droit d'information quant à ces différentes méthodes.

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Ces amendements identiques visent à renforcer le droit à l'information ainsi que celui – absolu et fondamental, puisqu'il constitue l'un des éléments du droit à l'IVG – des femmes à choisir leur méthode d'avortement. Je suis tout à fait d'accord avec l'objectif qu'ils poursuivent : l'information est une condition de l'efficacité de leur parcours d'IVG.

Or ces droits dépendent beaucoup des réalités du terrain. S'il est important d'avancer sur ce plan par la loi, il l'est également de rendre concrètement possibles de telles avancées en s'assurant que les moyens nécessaires sont disponibles.

Avis favorable.

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Nous allons passer au vote. Qui est contre ces amendements ?

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Peut-être faudrait-il rappeler, madame la présidente, que seuls les membres de la commission des affaires sociales peuvent prendre part au vote.

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C'est le cas : seules sont comptabilisées les voix des commissaires aux affaires sociales.

La commission r ejette les amendements.

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Je comprends que nous soyons contraints par le temps, madame la présidente, mais nous n'avons même pas pu discuter de ces amendements. J'avais d'ailleurs demandé la parole.

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Aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 2212-1 du code de la santé publique, « Toute personne a le droit d'être informée sur les méthodes abortives et d'en choisir une librement. » Je n'ai donc pas compris l'intérêt de ces amendements.

Article 1er bis (nouveau) : Extension de la compétence des sages-femmes à la méthode chirurgicale d'IVG jusqu'à la dixième semaine de grossesse

La commission examine les amendements identiques AS12 de Mme Marie-Pierre Rixain, qui fait l'objet du sous-amendement AS36 de la rapporteure, AS14 de Mme Marie‑Noëlle Battistel et AS31 de Mme Cécile Muschotti.

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L'amendement AS12 vise à étendre les compétences des sages-femmes en matière d'IVG en leur permettant de pratiquer également les IVG chirurgicales jusqu'à la dixième semaine de grossesse. C'est un sujet sur lequel la délégation aux droits des femmes a longuement travaillé avec les organisations professionnelles.

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Les sages-femmes peuvent pratiquer des IVG médicamenteuses. Compte tenu des multiples difficultés d'accès à l'IVG mises en évidence par notre rapport d'information, nous proposons qu'elles soient également autorisées à pratiquer des IVG chirurgicales. Cette extension de leurs compétences permettra d'augmenter l'offre et de rendre plus rare le dépassement des délais légaux, objectif que chacun d'entre nous poursuit.

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Il s'agit clairement de lever un frein d'accès à l'avortement. Le dispositif, tout à fait encadré, se fonde évidemment sur le volontariat des sages-femmes ainsi que sur leur formation. Il permettrait de démultiplier l'offre d'accès à l'IVG sur l'ensemble du territoire national.

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Il me semble tout à fait logique de permettre aux sages‑femmes de pratiquer des IVG instrumentales dès lors qu'elles peuvent justifier d'une expérience minimale en la matière et qu'elles ont suivi une formation complémentaire. J'ai pu constater au cours de mes auditions qu'un réel consensus émerge aujourd'hui parmi les acteurs de terrain en faveur d'une telle évolution.

Les sages-femmes disposent des compétences nécessaires et réalisent d'ores et déjà de nombreux actes intra-utérins. Leur ouvrir la pratique chirurgicale permettrait de faciliter l'accès des femmes à toutes les méthodes d'IVG, de renforcer la démographie médicale à l'heure où la France est confrontée à une pénurie de praticiens, de lutter contre les inégalités territoriales. La bientraitance et la qualité de la prise en charge des femmes s'en trouveraient renforcées, dans la mesure où les sages-femmes qui s'engageraient dans cette nouvelle compétence seraient impliquées et engagées dans l'accès à l'IVG, dans une démarche d'accompagnement.

Toutefois, je ne vois pas pourquoi il faudrait limiter à dix semaines l'exercice de cette nouvelle compétence – aucune demande de ce genre ne m'est remontée du terrain. Je serai donc favorable aux amendements si mon sous-amendement, qui tend à en supprimer la seconde phrase, est adopté.

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Je suis pour la montée en compétences de tous les professionnels de santé, pourvu qu'elle passe par une formation. Nous avons tous à y gagner dans la mesure où cela améliore l'offre de soin. Les sages-femmes y sont prêtes, elles le demandent. Au cours de leur audition, les représentants de l'Ordre des médecins n'avaient pas encore tranché la question mais ont semblé extrêmement ouverts à une telle montée en compétences des sages-femmes.

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Les sages-femmes ont en effet les capacités de pratiquer ce type d'acte, mais elles réclament aussi une revalorisation de leur statut et une augmentation de leurs effectifs. Il n'est pas question de charger leur barque sans leur accorder la reconnaissance à laquelle elles ont droit, ni les conditions de travail adéquates. Je suis favorable à ces amendements, encore faut-il que l'évolution du statut et les effectifs dans les hôpitaux suivent.

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Alors que les sages-femmes sont, de par le statut hospitalier, considérées comme personnel non médical, on envisage qu'elles puissent accomplir un acte chirurgical. Il faudrait également procéder à une mise en cohérence de leur statut.

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Sans étude d'impact, je m'interroge : ne faudrait-il pas donner les moyens et fixer un cadre avant de mettre en œuvre une telle mesure ? D'ailleurs, je m'interroge aussi sur la recevabilité financière des amendements. J'invite leurs auteurs à les retirer afin de les retravailler en vue de la séance publique.

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Au-delà de la cohérence, se pose effectivement un problème de statut des sages-femmes, qui n'a jamais été traité. Le code de la santé les range parmi les professions médicales, mais, sur le terrain, elles sont profession paramédicale. Elles n'ont jamais réussi à choisir entre les deux. Il est vrai que le statut paramédical en particulier leur procure des avantages qu'elles ne conserveraient pas forcément si elles adoptaient celui de praticien hospitalier. La profession elle-même est clairement divisée sur le sujet ; il faudra donc le traiter avec elle.

Les autoriser à pratiquer un tel acte technique en secteur hospitalier ou en clinique posera des problèmes. Je ne suis donc pas sûre que ces amendements puissent trouver une application opérationnelle.

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Le métier de sage-femme est réglementé depuis 1810 mais n'est toujours pas reconnu comme une profession médicale. Cette situation doit effectivement évoluer. En milieu hospitalier, les sages-femmes pratiquent déjà des interventions chirurgicales telles les épisiotomies, mais leur statut leur interdit de percevoir certaines primes. C'est absolument scandaleux !

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Les sages-femmes pratiquent seules, de jour comme de nuit, des accouchements au cours desquels elles peuvent accomplir certains actes chirurgicaux, et cela ne perturbe personne. Il est certes très important de s'interroger sur leur statut, car elles le réclament elles-mêmes, mais que les commissaires aux affaires sociales ne s'en préoccupent que pour l'IVG et pas pour l'accouchement m'interpelle.

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La proposition qui nous est faite correspond à une demande forte des représentants de sages-femmes, tant des syndicats que de l'Ordre. Non seulement la profession se dit apte, après avoir suivi une formation adéquate, à pratiquer des IVG chirurgicales, mais elle le demande afin de permettre au maximum de femmes qui en ont besoin d'accéder à l'IVG – c'est là notre sujet.

Dans certains territoires, la couverture médicale est par trop insuffisante. Outre‑mer, en raison du déficit médical, des décrets ont dû être pris pour autoriser les sages‑femmes à pratiquer des actes dépassant leur domaine de compétence. Il serait bon que nous légiférions pour leur permettre, après avoir suivi une formation, de pratiquer de tels actes. Il sera bien temps, à l'occasion de l'examen du PLFSS ou d'un autre texte, de revenir sur leur statut.

Successivement, la commission rejette le sous-amendement et adopte les amendements.

Après l'article 1er

La commission examine les amendements identiques AS15 de Mme Marie-Noëlle Battistel et AS22 de Mme Marie-Pierre Rixain.

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Il s'agit de garantir aux femmes le droit à l'anonymat et à la confidentialité de l'IVG au moyen de procédures spécifiques aux établissements de santé ou à la médecine de ville. Si ce droit existe, il n'est pas toujours respecté sur le terrain – on nous a parlé de nombreux cas de mineures en établissements scolaires ou de jeunes majeures recevant à domicile des résultats d'échographie ou des factures. De telles procédures spécifiques permettraient de lever cette difficulté.

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La confidentialité n'est, en effet, pas totalement assurée. Notre amendement AS22, issu des travaux de la délégation aux droits des femmes, tend donc à clarifier la législation en garantissant le droit à l'anonymat et à la confidentialité de l'IVG pour toutes les femmes par l'instauration de procédures spécifiques, en établissement de santé comme en ville.

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La confidentialité et l'anonymat sont des principes importants du droit à l'IVG. Je comprends donc parfaitement l'intention des auteurs des deux amendements. Toutefois, ces aspects me semblent plutôt relever du niveau réglementaire et, encore une fois, il serait plus efficace de vérifier les moyens sur le terrain et d'en assurer la bonne mise en œuvre que d'émettre des vœux pieux dans la loi. D'autant que les témoignages font état de bonnes pratiques dans ce domaine, qu'il serait sans doute plus utile de valoriser et de développer.

Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable, mais pour des raisons de forme, non de fond.

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Je propose que nous en rediscutions d'ici à l'examen en séance publique pour parvenir à une rédaction plus satisfaisante. Je retire l'amendement.

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À condition que nous en reparlions bien en vue de la séance, je retire aussi le mien.

Les amendements sont retirés.

La commission est saisie de l'amendement AS5 de Mme Caroline Fiat.

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Il reprend une disposition de la première proposition de loi : l'expérimentation de la possibilité pour des centres de planification familiale d'effectuer des interruptions volontaires de grossesse. Elle permettrait, d'une part, de lutter contre la pénurie de lieux où cette intervention est praticable et, d'autre part, de redynamiser le réseau des plannings familiaux, très délaissés par l'État alors qu'ils devraient être en première ligne à l'heure où l'on parle de prévention. L'accompagnement des femmes s'en trouvera ainsi nettement amélioré, quantitativement et qualitativement.

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Avis favorable. Nous devons trouver des solutions pour faire face au manque de praticiens ; à cette fin, il pourrait être efficace d'étendre aux centres de planification et d'éducation familiale la possibilité de pratiquer des IVG chirurgicales.

La commission rejette l'amendement.

Article 1er ter (nouveau) : Suppression du délai de réflexion de deux jours pour confirmer une demande d'IVG en cas d'entretien psychosocial préalable

La commission est saisie de l'amendement AS30 de Mme Cécile Muschotti.

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Il vise à supprimer le délai de quarante-huit heures entre l'entretien psychosocial préalable et le recueil du consentement. Il s'agit de l'une des recommandations que Marie-Noëlle Battistel et moi-même formulons dans notre rapport d'information afin de fluidifier le parcours d'IVG, particulièrement dans le cas où la grossesse est découverte tardivement.

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À mon sens, le délai de quarante-huit heures ne se justifie plus. En ce qui concerne les femmes majeures, son maintien les infantilise, alors même que tout délai de réflexion a été supprimé en 2016 ; il constitue, en outre, une forme de dissuasion pour celles qui voudraient accéder de droit à l'entretien. Pour les mineures, la question se pose peut-être de manière plus complexe ; il conviendra de bien vérifier ce point d'ici à l'examen en séance. Toutefois, à première vue, le maintien du délai ne se justifie pas non plus dans ce cas, notamment parce qu'il complique plus encore l'accès des mineures à l'intervention alors que, comme le montrent les derniers chiffres de la DREES, elles restent très concernées par l'avortement, notamment tardif.

La commission adopte l'amendement.

Article 2 : Suppression de la clause de conscience spécifique relative à l'IVG

La commission examine les amendements de suppression AS2 de M. Thibault Bazin et AS9 de Mme Valérie Six.

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Madame la rapporteure, vous voulez supprimer la clause de conscience spécifique à l'IVG au motif qu'elle aurait la même portée que la clause de conscience générale, concernant comme elle tout le personnel soignant : il y aurait donc une clause de trop. Votre argument me semble fallacieux, pour quatre raisons.

Premièrement, la clause générale existait avant la loi de 1975 sur l'avortement. Si le législateur a cru bon d'en introduire une spécifique à l'occasion du vote de cette loi, c'est parce qu'il a considéré que l'acte visé était de nature particulière compte tenu de sa portée.

Deuxièmement, la clause générale applicable au médecin est de portée plus restreinte que la clause spécifique : elle limite le pouvoir d'appréciation du médecin dans au moins deux circonstances, indiquées dans le texte. Dans ce cas, le cadre juridique est donc plus contraignant.

Troisièmement, la clause générale n'est pas de nature législative, mais réglementaire. Or la garantie de liberté est bien plus grande dans une loi que dans un décret, puisqu'une loi ne peut être modifiée que par une autre loi votée par le Parlement, alors qu'un décret peut l'être du jour au lendemain par le Gouvernement – on connaît quelques exemples.

Quatrièmement, la clause générale ne s'applique pas à l'ensemble des personnels soignants. Certes, une clause générale similaire à celle du médecin existe pour les sages‑femmes et pour les infirmiers, mais, elle aussi de nature réglementaire, elle est assortie des mêmes limites et conditions. Il existe, en outre, d'autres professions qui peuvent participer de près ou de loin à la réalisation d'une IVG, dont les aides-soignants. Or l'article relatif à la clause spécifique dispose clairement qu'« aucun auxiliaire médical, quel qu'il soit, n'est tenu de concourir à une interruption de grossesse ». La suppression de cette clause ne risque-t-elle pas de porter atteinte à la spécificité de ces professions et de l'acte lui-même ?

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La suppression de la clause spécifique a pour but de lever les obstacles empêchant l'accès à l'IVG. Le code de déontologie médicale prévoit une clause de conscience pour tous les médecins et pour l'ensemble des actes médicaux ; le médecin est soumis à ce code qui a force de loi. Aux termes de la déclaration de Genève, également appelée serment du médecin, le médecin exerce sa profession « avec conscience et dignité, dans le respect des bonnes pratiques médicales ». Dans un souci de cohérence, il semble opportun de conserver la rédaction actuelle de l'article L. 2212-8 du code de la santé publique.

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Ces amendements n'ont pas lieu d'être, puisque nous ne supprimons pas la possibilité pour les médecins de refuser de pratiquer les IVG. Je le répète, les médecins et les sages-femmes pourront continuer à refuser de pratiquer un acte d'IVG grâce à la clause de conscience générale prévue à l'article R. 4127-47 du code de la santé publique pour les médecins et à l'article R. 4127-328 du même code pour les sages-femmes. Il n'est pas question de supprimer cette possibilité, ce qui serait contre-productif et nuirait non seulement aux professionnels de santé, mais aussi aux femmes.

La clause spécifique n'apporte rien et stigmatise l'acte d'IVG, comme je l'ai dit dans mon propos liminaire. Il convient donc de la supprimer.

Avis défavorable.

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Vous ne répondez pas à mes arguments. Les articles que vous citez à juste titre, et auxquels s'ajoute l'article R. 4312-12 du même code pour la profession d'infirmier, sont de nature réglementaire. Ils n'ont pas la même portée qu'une loi et n'assurent pas le même niveau de protection aux professionnels de santé. C'est une question majeure !

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Si, comme vous essayez de nous en convaincre, cela ne change absolument rien pour les professionnels de santé, pourquoi vouloir à tout prix supprimer cette clause plus protectrice pour eux ?

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En supprimant la clause spécifique, nous affirmons que l'IVG n'est pas un acte de nature particulière, mais un soin comme un autre pour toutes les femmes. Cette suppression est symbolique, je l'admets, puisque la clause de conscience continue d'exister. Avons-nous inscrit dans la loi Claeys-Leonetti une clause de conscience spécifique permettant de refuser d'administrer la sédation profonde en fin de vie ? Non ! La clause de conscience est valable pour tous les praticiens. L'IVG est un phénomène sociétal, et, dans notre société moderne et progressiste, la double clause instaurée en 1975 n'a plus lieu d'être.

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De même qu'une femme qui ne désire pas mener sa grossesse à terme ne le fera pas, un médecin qui ne veut pas pratiquer un acte d'IVG n'y sera aucunement forcé, puisque la clause générale de conscience le protège en lui permettant de s'y refuser pour des raisons personnelles ou professionnelles. La question n'est donc pas là. Dès lors, la clause spécifique est uniquement symbolique, elle stigmatise l'IVG ; il est politiquement et philosophiquement important de la supprimer.

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Tous les médecins ont le droit de refuser de pratiquer un acte ; nous l'entendons et nous défendons ce droit. Est-il pour autant utile de disposer d'une clause spécifique à l'acte d'IVG, qui ne fait que stigmatiser encore davantage celui-ci ?

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Il y a une raison supplémentaire de supprimer la clause spécifique : la nécessité de faire respecter l'obligation de transfert de la patiente à un praticien susceptible de réaliser l'IVG. Actuellement, en effet, ceux qui ne veulent pas pratiquer l'IVG se croient parfois autorisés à ne pas procéder à ce transfert. Le message à faire passer est double : non, celui qui ne veut pas le faire ne le fera pas – ce qui est mieux pour la femme, car s'il ne veut pas le faire, c'est qu'il ne sait pas le faire, qu'il ne l'a jamais fait et ne le ferait donc pas bien ; oui, il a l'obligation de transférer la femme avec son dossier à quelqu'un qui le fera.

La commission rejette les amendements.

Puis elle est saisie de l'amendement AS32 de Mme Cécile Muschotti.

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Il s'agit de rédiger de façon plus cohérente les dispositions résultant de la suppression de la clause de conscience spécifique, en reprenant la rédaction des dispositions du projet de loi relatif à la bioéthique au sujet de l'interruption médicale de grossesse (IMG), adoptées conformes par le Sénat et l'Assemblée nationale. L'amendement permet, en outre, la création d'un répertoire des professionnels de santé et des structures qui pratiquent l'IVG.

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En ce qui concerne la suppression de la clause de conscience spécifique, quelles différences l'amendement comporte-t-il par rapport à la rédaction actuelle de l'article 2 ? Dans les deux cas, les deux premiers alinéas de l'article L. 2212-8 sont supprimés et remplacés par la seule mention de l'obligation de réorientation. Mais dans cette mention, outre que l'amendement modifie la place des mots « sans délai » et remplace les mots « dudit refus » par les mots « de son refus », il ne fait pas référence, contrairement à l'article 2, aux sages-femmes parmi les praticiens susceptibles de pratiquer l'IVG et vers lesquels la femme doit être réorientée. Sans doute s'agit-il d'un oubli ; en tout cas, ce point est important, de sorte que la rédaction de l'amendement n'améliore pas l'article 2. Nous pourrons évidemment la modifier lors de l'examen en séance, au nom de la cohérence que vous mettez en avant avec le projet de loi relatif à la bioéthique.

En ce qui concerne la publication par les agences régionales de santé (ARS) d'un répertoire des professionnels de santé pratiquant l'IVG, ce sujet, également important, est bien différent de celui de la suppression de la clause de conscience spécifique, car il engage des enjeux pratiques beaucoup plus vastes touchant l'accès à l'IVG. Le Réseau entre la ville et l'hôpital pour l'orthogénie (REVHO), a développé un tel répertoire pour l'Île-de-France ; cette initiative devrait être soutenue et généralisée, sans doute, en effet, sous le pilotage des ARS. Il me semble préférable d'adopter un amendement proposant cette seule évolution, comme les amendements identiques AS17 et AS24 auxquels je donnerai un avis favorable.

Pour ces différentes raisons, demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

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Je le répète, il s'agit de privilégier une présentation cohérente. En l'état, l'article aborde d'abord la faculté pour les établissements privés de refuser de pratiquer l'IVG ; cet ordre, outre qu'il donne un signal un peu particulier, n'est pas logique. Mieux vaudrait commencer par indiquer, comme dans le projet de loi relatif à la bioéthique à propos de l'IMG, qu'en cas de refus du praticien l'obligation d'information sans délai et de réorientation s'applique immédiatement, puis d'en venir à la création du répertoire.

La commission adopte l'amendement.

En conséquence, l'amendement AS35 de la rapporteure tombe.

La commission est ensuite saisie des amendements identiques AS16 de Mme Marie-Noëlle Battistel et AS23 de Mme Marie-Pierre Rixain.

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L'article L. 2212-8 du code de la santé publique dispose que les établissements privés habilités à assurer le service public hospitalier peuvent refuser que des interruptions volontaires de grossesse soient pratiquées en leur sein si d'autres établissements sont en mesure de répondre aux besoins locaux. Notre amendement, issu des travaux de notre mission d'information, vise à supprimer cette faculté.

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La situation permise par l'article précité du code de la santé publique ne se justifie plus, pour trois raisons. D'abord, l'évaluation par ces établissements de la possibilité que d'autres établissements répondent aux besoins locaux peut être défaillante : quelle acception de cette notion est-elle retenue, et comment savoir en temps réel si tel est bien le cas ? Ensuite, l'IVG doit absolument faire partie des soins offerts par tout établissement de santé contribuant au service public hospitalier : il n'est plus concevable qu'un établissement habilité comme tel puisse refuser de la pratiquer. Les établissements en question contribueront à enrichir l'offre de soins en matière d'IVG.

Avis favorable.

La commission rejette les amendements.

Puis elle examine les amendements identiques AS17 de Mme Marie-Noëlle Battistel et AS24 de Mme Marie-Pierre Rixain.

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Toujours issu des travaux de la délégation aux droits des femmes, notre amendement préconise la création d'un répertoire des professionnels pratiquant l'IVG sur le modèle du site ivglesadresses.org, géré et mis à jour par les ARS. Chaque ARS serait ainsi chargée de l'installation d'un tel réseau dans le territoire relevant de sa compétence. Il existe en la matière une franche inégalité territoriale : certains secteurs en ont un, d'autres non.

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Ces amendements sont rendus inutiles par l'adoption de l'amendement AS32 prévoyant la création d'un tel répertoire. Demande de retrait.

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Dans ce cas, pourquoi cette adoption n'a-t-elle pas fait tomber nos amendements ? Mais s'ils sont satisfaits, je retire le mien.

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Je vais faire de même, mais je souhaite, madame la rapporteure, que nous échangions à ce sujet d'ici à l'examen en séance, pour comprendre pourquoi mon amendement n'est pas tombé et m'assurer que le répertoire pourra bien être créé.

Les amendements sont retirés.

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J'appelle votre attention sur le fait que le répertoire visé à l'amendement AS32 recense, sous réserve de leur accord, les professionnels de santé pouvant pratiquer l'IVG, alors qu'aux termes des amendements qui viennent d'être défendus, la publication de la liste n'est pas subordonnée à un accord des intéressés.

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Merci de cette précision. Nous retravaillerons donc l'amendement en vue de la séance.

La commission est saisie de l'amendement AS29 de Mme Ramlati Ali.

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J'approuve évidemment l'objectif de cet amendement : renforcer et accélérer la réorientation et l'accompagnement des femmes à la fin du délai légal d'accès à l'IVG. On a bien vu, à propos de la suppression de la clause spécifique, que la réorientation des femmes est un véritable enjeu. C'était d'ailleurs le sens de mon amendement AS35, qui n'a pas été adopté.

L'amendement soulève toutefois plusieurs difficultés. D'abord, il fait référence au délai de douze semaines que nous sommes en train de modifier. Ensuite, il ne propose d'accompagnement spécifique que le dernier jour du délai légal, alors que le problème se pose bien en amont : il faudrait donc avancer cette date à deux semaines avant le terme du délai, comme tendait à le faire mon amendement AS35.

Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Enfin,elle adopte l'article 2 modifié.

Après l'article 2

La commission est saisie de l'amendement AS4 de Mme Caroline Fiat.

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Je ne comprends pas ce que cet amendement fait là : il porte sur la possibilité pour les sages-femmes de pratiquer l'IVG, que j'ai déjà défendue.

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C'est qu'il y a une incohérence entre le dispositif et l'exposé sommaire. Le dispositif prévoit la suppression de la clause de conscience spécifique tout en conservant la clause de réorientation des femmes. L'amendement est donc satisfait par l'article 2.

Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Puis elle examine les amendements identiques AS18 de Mme Marie-Noëlle Battistel et AS25 de Mme Marie-Pierre Rixain.

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Il s'agit d'interdire d'opposer un refus à des patientes en fin de délai légal, afin d'assurer une offre de soins équitable dans l'ensemble du territoire. Il n'est plus concevable, en effet, qu'en fonction des convictions du chef de service de tel ou tel hôpital, aucune offre d'orthogénie ne soit disponible ou que l'établissement public refuse d'assurer les IVG alors que le délai légal n'est pas encore dépassé. Cette protection est essentielle aux femmes les plus vulnérables qui ne peuvent s'adresser à une clinique privée ni se rendre à l'étranger pour des raisons d'information et de coût.

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Les amendements sont satisfaits par le vote précédent de l'obligation de réorientation. Attention, en les adoptant, de ne pas contredire la clause générale de conscience !

La commission rejette les amendements.

Elle examine ensuite les amendements identiques AS19 de Mme Marie-Noëlle Battistel et AS26 de Mme Marie-Pierre Rixain.

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Mon amendement vise à pérenniser l'allongement du délai de recours à l'IVG médicamenteuse en ville de cinq à sept semaines de grossesse, qui a été décidé pour faire face à la crise sanitaire et qui a prouvé son efficacité. Un parallèle avec l'allongement des IVG chirurgicales serait ainsi établi.

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J'ajoute que cet amendement AS26 est également issu des travaux de la délégation aux droits des femmes.

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Cette mesure fait l'objet d'un très large consensus au sein de la délégation aux droits des femmes, et parmi les professionnels de santé qui ont recours à l'IVG et les associations militantes. Il s'agit d'une évolution de nature à augmenter l'offre de soins en la matière et d'enrichir les possibilités de choix pour les femmes.

L'avis rendu au mois d'avril 2020 par la HAS au sujet de cet allongement était positif. De même, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé a souscrit aux deux protocoles proposés par la HAS durant la crise. Les auditions que j'ai menées ont été unanimes : cette mesure doit être pérennisée.

Avis favorable.

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La HAS a été saisie mais n'a pas encore rendu son avis. Je souhaiterais que l'on puisse entendre le ministre sur cette question lors de l'examen de ce texte en séance publique.

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Faire droit aux revendications d'associations peut être une bonne chose, mais en la matière il s'agit d'un processus très traumatisant physiquement et psychologiquement. Si le dispositif doit évoluer dans le sens qui est proposé ici, notre responsabilité est de veiller à renforcer l'accompagnement médico-social et médico-psychologique des patientes, car si elles ont recours à l'IVG c'est bien qu'il y a eu un problème au niveau de la contraception.

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L'IVG médicamenteuse est déjà autorisée jusqu'à sept semaines de grossesse à l'hôpital.

J'insiste sur l'importance de laisser le choix à la patiente de subir, si elle le souhaite, une IVG en ambulatoire, qui est possible jusqu'à sept semaines pourvu qu'elle bénéficie de l'accompagnement approprié.

La commission rejette les amendements.

Article 2 bis (nouveau) : Rapport du Gouvernement sur l'application de la législation relative au délit d'entrave à l'IVG

La commission en vient aux amendements identiques AS21 de Mme Marie-Noëlle Battistel, AS28 de Mme Marie-Pierre Rixain et AS33 de Mme Cécile Muschotti.

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Il s'agit de demander un rapport sur la dérogation qui a été accordée pendant la crise du covid-19, d'autant que la HAS n'a pas encore rendu son rapport.

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L'amendement AS28 de la délégation aux droits des femmes est identique. J'ajoute qu'en France, certaines organisations se livrent à des attaques répétées contre le droit à l'avortement, qui comptent parmi les plus organisées des pays de l'Union européenne. Le délit d'entrave à l'IVG n'est absolument pas à prendre à la légère, et il importe que nous puissions travailler sur la question.

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Le délit d'entrave à l'IVG a été reconnu par la loi en 1993, puis enrichi de la notion d'entrave à l'accès à l'information des femmes en 2004. Il a été complété par le délit d'entrave à l'IVG sur internet en 2017. Malgré la volonté du législateur et les différentes évolutions visant à garantir l'accessibilité à l'IVG, la montée en puissance des mouvements anti-IVG et anti-choix, en France comme à l'étranger, s'est traduite par une utilisation des outils numériques pour propager un contre-discours à son sujet, si bien que le délit d'entrave s'avère aujourd'hui mal appliqué. Toutes les associations de terrain le disent, c'est un outil intéressant mais il est insuffisamment utilisé et utilisable.

Afin d'évaluer l'ampleur et l'impact du phénomène sur les femmes, une évaluation du délit d'entrave serait salutaire pour, le cas échéant, agir en faveur d'une meilleure application de la loi, particulièrement sur internet, au service de toutes les femmes.

Avis favorable.

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Je signale que je viens de défendre par erreur un autre amendement et que je suis tout à fait en phase avec ce que mes deux collègues viennent de dire.

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Dans le cadre d'une niche parlementaire, nous sommes force de proposition. Plutôt que de demander au Gouvernement de nous remettre un rapport, ne devrions-nous pas lancer une mission « flash » ou une mission d'information au sein de notre commission ? J'ai des difficultés à cerner qui est visé là.

La commission adopte les amendements.

Article 3 : Compensation financière

La commission adopte l'article 3 sans modification.

Enfin, elle adopte l'ensemble de la proposition de loi modifiée.

Après quelques minutes de suspension, la commission procède ensuite à l'examen de la proposition de loi de M. Guillaume Chiche visant à créer un congé de parenté égalitaire et effectif (n° 3290) (M. Guillaume Chiche, rapporteur).

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C'est un réel plaisir de venir vous présenter une proposition de loi que j'ai déposée avec le groupe Écologie Démocratie Solidarité et qui vise à améliorer le congé de paternité.

L'article unique de cette proposition de loi propose de modifier à la fois la forme et le fond du dispositif instauré en 2002. Depuis cette date, en plus de trois jours d'absence autorisés dont bénéficient l'ensemble des salariés lors de la naissance d'un enfant, les pères se sont vu accorder un congé de paternité de onze jours, voire de dix-huit jours en cas de naissances multiples.

Contrairement à ce que sous-entend la sémantique actuelle, le congé de paternité ne concerne pas uniquement les hommes : depuis la loi de 2013, le parent qui ne porte pas l'enfant peut être une femme et donc en bénéficier. La dénomination « congé de paternité » est donc devenue impropre dans une société où l'égalité effective est constamment recherchée. D'autant plus qu'à la faveur de la première lecture du projet de loi relatif à la bioéthique, nous avons adopté l'ouverture à toutes les femmes de l'aide médicale à la procréation. Dès lors, il est délicat d'affirmer que la parentalité conserve une exclusive de genre, de sexe ou d'orientation sexuelle dans notre droit positif. C'est pourquoi le premier volet de cette proposition de loi vise à donner au congé de paternité la dénomination plus inclusive de « congé de parenté », de sorte que l'ensemble des parents soient reconnus comme tels.

Outre la terminologie, la proposition de loi s'attelle à repenser le fond du congé de paternité en l'allongeant de façon significative : à douze semaines en cas de naissance simple, à treize semaines en cas de naissances multiples. Une partie de ce congé serait obligatoire, pour une durée de huit semaines qui devraient nécessairement être prises dans les quatre mois suivant la naissance. Le caractère obligatoire nous paraît essentiel dès lors que plus de 30 % des pères ne recourent pas actuellement au congé de paternité auquel ils ont droit.

Le congé de paternité tel que nous le connaissons entraîne des disparités sur le marché du travail entre les femmes et les hommes ainsi qu'au sein de la sphère privée ; il apparaît fondamental de le réformer en instaurant une égalité réelle, tant sur le plan professionnel que sur le plan privé.

L'allongement du congé de parenté a pour finalité de créer une meilleure répartition au sein des couples de la charge mentale, physique et organisationnelle liée au mode de garde lors de l'arrivée d'un enfant, le plus souvent assumée exclusivement par la personne qui accouche. Aujourd'hui encore, une femme sur deux arrête de travailler ou passe à temps partiel dès l'arrivée du premier enfant ; selon l'Institut national de la statistique et des études économiques, les femmes gagnent toujours, en moyenne, 20 % de moins que les hommes, à compétences et à poste égaux. Le dispositif proposé permettrait de supprimer les fractures professionnelles dont souffrent de nombreuses femmes, et qui peuvent avoir des conséquences sur leur pouvoir d'achat au moment de la retraite, l'objectif étant d'aider l'ensemble des salariés et des fonctionnaires à concilier leur vie personnelle et leur vie professionnelle.

Cette proposition de loi aiderait à la fois à mettre un terme aux discriminations à l'embauche que les femmes subissent du fait de la capacité que leur sexe leur confère de porter un enfant, mais également à aplanir l'ensemble des inégalités qui existent entre les femmes et les hommes. Ainsi, selon le baromètre de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques publié en janvier 2019, la majorité des parents d'enfants de moins de 3 ans trouvent que le congé de paternité est trop court ; ils sont 63 % à souhaiter le voir allongé. De nombreuses entreprises ont pris les devants pour leurs salariés. Les employés d'Ubisoft et de L'Oréal ont ainsi droit à un mois de congé de paternité, et le groupe Aviva a porté à dix semaines ce congé. De leur côté, les organisations syndicales de salariés se sont unanimement prononcées en faveur d'un allongement de la durée du congé de paternité, dans une déclaration à l'occasion de la Journée internationale des droits des femmes en 2018.

Hormis les aspects d'égalité entre femmes et hommes, il importe de souligner que plus le congé de paternité est long, plus la sensibilité du père ou de la conjointe à l'enfant est grande. Dans le rapport que lui a commandé l'exécutif, qui aborde l'épanouissement et le développement de l'enfant, Boris Cyrulnik indique ainsi qu'il serait opportun d'allonger le congé de paternité à neuf semaines.

De fait, les comparaisons internationales mettent en évidence la brièveté relative du congé de paternité français. On peut même affirmer que la France connaît un important retard par rapport à ses voisins européens, nombreux à faire le choix d'étendre ce congé : en Espagne, il est passé à sept semaines ; les pères ont droit à cinquante-quatre jours de congés payés en Finlande et à dix semaines minimum en Norvège. Ces congés sont intégralement indemnisés, ce que préconise aussi cette proposition de loi. Il est en effet essentiel que les modalités d'indemnisation du congé de parenté continuent d'être alignées sur celles du congé maternité, à savoir une prise en charge intégrale par la sécurité sociale.

Le coût des dispositions contenues dans la proposition de loi est estimé à 2,4 milliards d'euros, sachant qu'en 2019, la branche famille était excédentaire de 1,5 milliard d'euros. Selon moi, nous aurions tout intérêt à utiliser ces excédents pour allonger le congé de parenté ici proposé plutôt que pour alimenter la Caisse d'amortissement de la dette sociale, qui vient d'être alourdie par le transfert de la « dette covid ».

Je termine mon propos en saluant l'engagement d'une grande partie des groupes. J'ai remarqué, à la faveur des amendements qui ont été déposés, qu'une grande partie d'entre vous est favorable à l'allongement du congé de paternité. Je m'en réjouis grandement pour l'égalité entre les femmes et les hommes et pour l'intérêt des enfants.

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Je me réjouis, au nom du groupe La République en Marche, de débattre aujourd'hui de la réforme du congé de paternité et de l'accueil des enfants. Cette question est primordiale, car elle touche aussi bien au développement de l'enfant dans ses tout premiers jours qu'à la définition de la place du père ou du second parent, à la répartition des tâches au sein du couple ou encore à l'évolution de carrière des parents.

La présente proposition de loi envisage une augmentation substantielle de l'actuel congé de paternité pour le faire passer de onze jours à douze semaines, dont huit semaines obligatoires, et de dix-huit jours à treize semaines en cas de naissances multiples. Si les députés de notre groupe accueillent favorablement le principe de l'allongement du congé de paternité, nous considérons cette proposition comme irréalisable à ce stade. Une telle durée ne recueille pas de consensus auprès de l'ensemble des parents ni des associations de familles. L'Union nationale des associations familiales (UNAF) a ainsi fait part, lors des auditions, de sa crainte que cette mesure, dont le coût est estimé à plus de 2 milliards d'euros, au moins, par an, ne pénalise d'autres actions de notre politique familiale. Notre groupe a donc déposé un amendement visant à récrire l'article unique et traduisant l'engagement du Président de la République du 23 septembre dernier d'allonger le congé de paternité de onze à vingt-cinq jours, dont sept jours obligatoires. Nous estimons, en effet, que la proposition présidentielle trouve un bon équilibre, en phase avec les attentes des scientifiques et de la société. C'est, en tout cas, une première étape importante : sans clore le débat, elle pose le premier jalon d'une réforme plus profonde des congés familiaux et du congé parental en particulier, comme le suggèrent les travaux de la commission sur les 1000 premiers jours, présidée par Boris Cyrulnik.

Si cette proposition de loi nous donne l'occasion d'un premier échange sur la réforme du congé de paternité, ce débat doit se poursuivre de manière plus approfondie dans le cadre de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), dans son volet dédié au financement des prestations familiales. Ce sera, pour nous, l'occasion de faire de nouvelles propositions.

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Le groupe Les Républicains est profondément attaché à toutes les questions familiales et à la cellule familiale en général. Particulièrement maltraitée sous le quinquennat de François Hollande, la famille demeure, sous le présent quinquennat, le parent pauvre de certaines politiques publiques, alors même qu'elle est essentielle au pays dans ces périodes compliquées et pour l'avenir.

La présente proposition de loi me semble un peu baroque en ce qu'elle tente de provoquer un débat sociologique avec un article unique, en le réduisant, qui plus est, à une question sémantique à travers la substitution du congé de parenté à celui de paternité.

Le congé de paternité a trouvé sa place dans la société. Une nouvelle formule devrait reposer sur le choix laissé aux familles, aux couples parentaux de décider librement lequel des deux parents va s'occuper davantage de leur enfant. Nous serions favorables à un dispositif beaucoup plus souple. Je crois d'ailleurs avoir observé que le Haut Conseil de la famille, de l'enfance et de l'âge préconise effectivement de ne pas imposer, de ne pas être dans un champ obligatoire. Avec votre dispositif, vous enfermez, vous encadrez.

J'ai noté que le Président de la République avait annoncé récemment le doublement du congé de paternité, cette proposition faisant suite au rapport sur les 1000 premiers jours. Nous sommes favorables à l'évolution du dispositif législatif, et nous arrêterons la position de vote de notre groupe en fonction des débats, que nous ne souhaitons pas limités à la sémantique. De ce point de vue, d'ailleurs, la dénomination « congé de paternité » nous semble plus lisible.

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Le groupe MoDem et Démocrates apparentés est d'accord avec l'impérieuse nécessité d'étendre le congé de paternité, pourvu que cette extension se fasse dans un cadre bien défini, par le véhicule législatif adapté et de manière raisonnée et concertée. Or l'étendue du dispositif ici proposé apparaît peu réaliste du point de vue de sa soutenabilité pour les finances publiques, et pour les entreprises qui devraient s'adapter.

Notre groupe partage l'idée de droits ouverts à toutes les familles sans discrimination, mais il souhaite conserver la notion de paternité afin de maintenir la lisibilité des dispositifs familiaux. Il s'agit d'avancer par étapes. Une évolution de la terminologie nous paraîtrait indispensable si celle-ci contrevenait à l'égalité des droits. Dans la mesure où elle est proposée pour mieux prendre en compte la diversité des modèles familiaux, elle mériterait une plus ample réflexion, une étude d'impact détaillée et une concertation avec l'ensemble des parties prenantes.

Le groupe MoDem et Démocrates apparentés ne votera donc pas ce texte dans sa rédaction actuelle mais proposera, avec l'ensemble des groupes de la majorité, un amendement retranscrivant les annonces du Gouvernement : extension du congé de paternité à vingt-huit jours, à raison de trois jours de congé de naissance financés par l'employeur et vingt-cinq jours pris en charge par la sécurité sociale, et instauration d'une fraction obligatoire de sept jours afin d'en assurer l'effectivité.

Même si le vecteur législatif que constitue une proposition de loi n'est, de toute évidence, pas adapté, il s'agit d'affirmer le soutien de la majorité à l'action menée par le Gouvernement, qui sera effective dans le prochain PLFSS.

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Nous sommes favorables à cette proposition de loi visant à prolonger le congé de parenté et à le rendre égalitaire et effectif. Cependant, nous avons quelques interrogations sur l'étude d'impact qui a pu être faite et dont nous n'avons pas connaissance.

Allonger la période de congé est une bonne chose, mais le plus important nous paraît être la période obligatoire, sachant que, sans cette obligation, ce congé n'est pas pris dans nombre d'entreprises. La dernière proposition de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) est de six semaines obligatoires. Nous sommes pour le renforcement de la période obligatoire.

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Le rapport de la commission d'experts, dirigée par le neuropsychiatre Boris Cyrulnik, sur les 1000 premiers jours de l'enfant souligne l'importance de la présence parentale dans les premiers temps de l'enfance, expliquant que l'enfant est en développement constant sous la pression de son milieu. Pour mieux protéger les enfants, il est donc primordial de mieux accompagner les parents en leur accordant du temps. Du temps pour être disponible pour leur famille, pour créer une relation harmonieuse avec leur enfant ; du temps pour tenter de lutter contre les inégalités de destin.

Outre qu'elle offrirait du temps, la proposition de loi contribuerait à diminuer les inégalités femmes-hommes. L'allongement du congé de paternité permettrait d'agir sur la discrimination indirecte qui affecte les mères qui travaillent. L'implication du second parent et sa responsabilité pourraient ainsi être plus conséquentes, contribuant à l'équilibre des rôles au sein de la famille. Cela va dans le bon sens, et je salue l'engagement du Gouvernement, en la personne d'Adrien Taquet, secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles, de traduire cette volonté dans le prochain PLFSS ainsi que dans les prochains textes en faveur de l'aide sociale à l'enfance.

Notre groupe Agir ensemble a décidé de soutenir et cosigner l'amendement de la majorité récrivant l'article unique de la proposition de loi afin d'y inscrire l'engagement présidentiel d'allonger le congé de paternité de onze à vingt-cinq jours en s'appuyant sur les conclusions de la commission Cyrulnik. Nous pensons, nous aussi, que l'allongement du congé est une évolution majeure pour notre société, mais nous émettons des réserves sur votre traitement sémantique de la notion de parentalité. À l'unisson de notre collègue Stéphane Viry, nous restons interrogatifs sur l'introduction de ce débat par le biais d'une proposition de loi.

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La proposition de loi du groupe Écologie Démocratie Solidarité vise à allonger le congé de paternité, qui serait renommé « congé de parenté ». Certes, le groupe UDI et Indépendants partage l'affirmation de Boris Cyrulnik dans son rapport sur les 1000 premiers jours de l'enfant qu'il faut « du temps, de la disponibilité et de la proximité physique et émotionnelle de la part des parents pour qu'ils construisent avec leur bébé [une] relation harmonieuse ». Pour autant, il ne peut soutenir l'extension à douze semaines du congé de paternité, car le coût pour les finances publiques en serait colossal : au moins 2,4 milliards d'euros, si l'on se réfère à un rapport de l'IGAS datant de juin 2018, estimant le coût d'un congé de paternité de six semaines à 1,2 milliard d'euros.

L'annonce faite mercredi dernier par le Président de la République que la durée du congé de paternité serait portée à vingt-huit jours, dont sept obligatoires, nous paraît une réforme bien plus raisonnable, sur laquelle nous aurons à nous prononcer dans le cadre du PLFSS. Plus qu'une obligation formelle, elle s'accompagnerait d'incitations renforcées.

Seuls 67 % des pères ont recours au congé de paternité tel qu'il existe aujourd'hui. Ce chiffre n'a que très peu évolué depuis que le dispositif a été créé, et il dissimule de fortes inégalités sociales : 88 % des salariés en contrat à durée indéterminée prennent ce congé, contre moins de 48 % de ceux en contrat à durée déterminée. Assortir le congé de paternité d'une période obligatoire paraît indispensable, tant les chiffres démontrent que la jouissance du congé dépend de la stabilité du contrat de travail.

Si nous sommes défavorables à la proposition de loi, trop coûteuse, nous soutiendrons, en revanche, l'amendement du groupe La République en Marche tendant à allonger le congé de paternité d'une manière bien plus raisonnable, et nous attendons les débats, imminents, du PLFSS 2021.

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Je me réjouis qu'une telle proposition de loi soit inscrite à l'ordre du jour, car l'allongement du congé d'accueil de l'enfant est une bonne chose pour les enfants, pour les familles et pour la société.

Les nourrissons ont besoin des soins de leurs deux parents au cours de leurs premiers jours. C'est indispensable pour leur développement et pour leur bien-être, comme pour le développement de liens affectifs précoces avec les deux parents. C'est un bienfait pour l'équilibre des familles, car ainsi les deux parents peuvent apprendre ensemble les gestes liés aux soins de l'enfant, sans que l'essentiel repose sur la mère. Le partage des tâches et de la charge mentale est bien plus équilibré quand les deux parents ont l'opportunité de s'occuper de l'enfant. Enfin, c'est un bienfait pour la société, car cela contribuera à réduire l'inégalité entre les hommes et les femmes vis-à-vis de la naissance d'un enfant.

Je salue également le changement de nom du congé, qui vise à s'adapter à la réalité des familles d'aujourd'hui.

Un amendement vient d'être déposé pour changer complètement – comme d'habitude – un texte présenté dans le cadre d'une « niche » d'un groupe d'opposition. S'agissant du nom du congé, « parentalité » veut dire quelque chose, et « paternité » autre chose. Le groupe La France insoumise défendra des amendements visant à revenir au texte initial du groupe EDS.

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Le choix des mots et leur sens sont très importants. Rien que la modification de la terminologie utilisée est un aspect fondamental : la diversité des familles va enfin être prise en compte, sans que cela entraîne le moindre flou, bien au contraire. Parler de congé de « parenté » est totalement légitime. Le groupe Libertés et Territoires a souligné à plusieurs reprises, notamment dans le cadre du projet de loi relatif à la bioéthique, que le législateur devait mieux prendre en compte la totalité des familles.

Par ailleurs, un congé de parenté plus long sera bénéfique pour les enfants et pour les parents. Le rapport sur les 1000 premiers jours de l'enfant recommande un allongement du congé de paternité pour construire une relation très harmonieuse avec les bébés. Dans les faits, l'actuel congé de paternité n'est utilisé que dans 67 % des cas – on y a donc recours d'une manière inégale.

Mon groupe est tout à fait favorable à cette proposition de loi, plus ambitieuse que ce que le Gouvernement envisage. Le texte qui nous est soumis permettra notamment de réduire les inégalités, ce qui est vraiment un objectif à atteindre.

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Pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine, cette proposition de loi va dans le bon sens. Nous avons demandé à plusieurs reprises que le congé de paternité soit allongé. La proposition de loi que nous avons déposée en juin 2020 tendait à porter sa durée à quatre semaines. Il nous paraît nécessaire de donner plus de temps au papa lors de la naissance d'un enfant, et plus généralement à l'ensemble des parties prenantes d'un couple. Nous partageons donc l'esprit de ce que vous avez proposé, monsieur Chiche. Un récent rapport, remis par Boris Cyrulnik, a montré la nécessité d'avancer en la matière.

Vous proposez d'allonger le congé de paternité à douze semaines, et je crois qu'il est effectivement nécessaire d'établir une forme d'obligation, sans quoi le dispositif n'aura pas la même efficacité. Il s'agit de lutter pour une transformation des mentalités, une meilleure égalité entre les femmes et les hommes. On sait que les premiers moments de l'accueil d'un enfant sont décisifs pour les habitudes, les pratiques, les liens qui s'instaurent ensuite au sein du couple. Il faudrait peut-être que l'on réfléchisse aussi à un allongement du congé de maternité, mais c'est un autre débat.

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Par cette proposition de loi, le rapporteur met au cœur de nos débats la question du bien-être de l'enfant et de ses parents. Il s'agit de corriger les nombreuses inégalités introduites par le congé de paternité tel qu'il a été créé en 2002 : en donnant du temps, nécessaire pour établir un lien entre un parent et son enfant, ce qui favorise le développement social, cognitif et affectif de ce dernier ; en proposant une nouvelle dénomination à ce congé pour prendre en compte la diversité des familles.

L'allongement du congé de parenté a aussi pour objectif d'instaurer une égalité réelle, aussi bien sur le plan professionnel que dans la sphère familiale. Il existe, en effet, de fortes inégalités socioprofessionnelles : le congé de paternité reste trop souvent un congé « CSP+ ». Sur le plan privé, la situation actuelle n'incite pas le second parent, lors de l'arrivée d'un enfant, à s'investir de la même façon dans la vie familiale, l'essentiel des charges domestiques de la vie commune reposant sur la femme qui a accouché.

L'intérêt supérieur de l'enfant est au centre de cette proposition de loi. S'appuyant sur les travaux dirigés par le neuropsychiatre Boris Cyrulnik, celle-ci constitue une invitation à légiférer sur la manière dont nous façonnons nos enfants. Ils ont une appétence sociale dès la naissance, et leur comportement s'organise en fonction de leur environnement, dont dépendent fortement les capacités d'apprentissage. Enfin, la création d'un lien, d'un attachement fort se fait dès les premiers jours.

Le groupe Écologie Démocratie Solidarité se réjouit de cette proposition de loi qui s'inscrit dans son engagement pour une société moderne, progressiste et égalitaire. Nous serons favorables aux amendements allant dans le sens de l'intérêt supérieur de l'enfant, considérant que « sage est le père qui connaît son enfant ».

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Nous sommes tous attachés à la famille et aux valeurs familiales. Tout ce qui peut permettre aux parents d'avoir du temps pour s'occuper de leurs enfants ne peut être que bénéfique. Il a été prouvé que l'engagement du père a des effets positifs sur le développement du bébé et que sa présence est importante pour soutenir la mère, dans une période où elle a besoin d'être entourée, notamment dans les tâches quotidiennes, et pour diminuer le risque d'épuisement psychique, de dépression, qui peut exister. Je tiens également à souligner le rôle de l'éducation parentale, dans laquelle le père et la mère ont tous deux une place essentielle.

Je m'interroge, comme beaucoup de collègues, sur la modification du nom du congé. La parenté, selon le dictionnaire, est la relation entre deux personnes appartenant à la même famille. Ce n'est pas tout à fait la même chose que la parentalité. Souhaitez-vous aller vers un nouveau modèle, tel celui de la Norvège ou de la Suède où la conception de l'égalité hommes-femmes est autre, ou bien avez-vous d'autres idées ? Dites-le nous très franchement.

Je m'interroge aussi sur le financement. Ce que vous proposez aurait un coût énorme pour la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) : il est question de plus de 2 milliards d'euros pour huit semaines de congé obligatoires et quatre semaines facultatives. Comment pourrions-nous faire face à cette charge ? Avez-vous une étude d'impact qui nous permettrait de connaître le coût de votre proposition et ses conséquences pour les entreprises ? Même si certaines d'entre elles ont montré l'exemple en adoptant des mesures particulières pour les familles, il y aurait un coût et des difficultés. Nous avons donc besoin, monsieur le rapporteur, de précisions supplémentaires. Nous ne doutons pas de votre bonne volonté, mais le sujet n'est pas aussi simple qu'on pourrait le penser.

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Merci, monsieur le rapporteur, pour cette proposition de loi. Je me réjouis que l'on augmente, enfin, la durée du congé de paternité. Je tiens aussi à rappeler que nous avons permis, au cours de ce mandat, aux indépendantes et aux agricultrices d'avoir un congé de maternité. Ce sont d'excellentes mesures pour aller vers davantage d'égalité entre les femmes et les hommes et pour assurer un meilleur développement des enfants et des familles.

Cela étant, je reste convaincue que nous devrions prendre le temps d'une réforme un peu plus structurelle des congés liés à la parentalité, en gardant en tête les mêmes objectifs : le développement de l'enfant et l'égalité entre les femmes et les hommes. Nous devions conduire une mission sur ce sujet avec Caroline Fiat, mais nous en avons été empêchées par les circonstances sanitaires. Je crois que nous devrions remettre la question sur la table d'ici à la fin de la législature.

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Je me demande si, dans le cadre de votre « niche » parlementaire, c'est de votre proposition de loi que nous allons discuter ou du projet du Gouvernement. Dans la mesure où l'amendement de la majorité la réécrit totalement, ce ne sera plus votre texte... La majorité veut utiliser votre véhicule législatif et, inspirée par son maître à penser, « ubériser » votre proposition de loi.

L'alinéa 1er tend à supprimer le terme « paternité », ce qui est révélateur de votre volonté de nier la place du père, comme le fait le projet de loi relatif à la bioéthique – vous êtes ainsi cohérent avec vous-même. Sous prétexte d'égalité, vous voulez supprimer cette belle expression qu'est le congé de paternité.

L'alinéa 4 obligerait les salariés à prendre au moins huit semaines de congé de parenté. Nous ne pouvons qu'être favorables à un allongement du congé, mais il nous paraît difficilement concevable d'imposer de le prendre. Dans certaines situations, un congé de huit semaines peut être difficilement compatible avec l'engagement professionnel du parent – songeons, par exemple, aux auto-entrepreneurs, aux petits commerçants et aux responsables de très petites entreprises (TPE). Le congé doit être proposé et non imposé. Il convient de laisser nos concitoyens choisir ce qui est le mieux pour eux, pour leur famille et pour leur enfant.

L'alinéa 6 fait référence au genre de la personne concernée et au mode de conception de l'enfant. Je ne sais pas de quoi vous voulez parler : j'espère qu'il ne s'agit pas de la gestation pour autrui (GPA). Les précisions que voulez apporter me paraissent inutiles ou malvenues.

La majorité veut tout à coup allonger le congé de paternité. Je suis étonné de ce revirement : après avoir raboté la prestation d'accueil du jeune enfant, confirmé le rabotage du quotient familial et sous-revalorisé les allocations familiales par rapport à l'inflation, vous proposez un allongement du congé de paternité. Quelle est la cohérence de votre politique familiale ? Vous voulez, par ailleurs, élargir l'assistance médicale à la procréation aux femmes seules. Mais en quoi allez-vous les aider, les premiers jours, s'il n'y a pas de deuxième parent ? Une fois encore, où est la cohérence ?

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Puisqu'il a beaucoup été question des travaux de la commission sur les 1000 premiers jours, j'informe notre commission que M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé, sera auditionné le 21 octobre. Nous aurons tout le loisir d'échanger avec lui sur ce sujet.

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Je me réjouis de l'unanimité – sauf erreur de ma part – que recueille l'allongement du congé de paternité comme moyen d'assurer un bon équilibre au sein des familles, grâce à un lissage de la charge liée à l'arrivée d'un enfant, et d'agir dans l'intérêt de ce dernier.

Cette proposition de loi s'appuie sur le rapport du Dr. Cyrulnik et sur celui de l'IGAS, mais aussi sur différentes missions d'information parlementaires et sur des travaux de l'UNAF. J'ai voulu, par ce texte, proposer des moyens permettant d'atteindre directement les objectifs que nous visons.

Je comprends que la situation est compliquée et que nous ne pouvons pas tout bousculer, mais cette législature avance à grands pas – il nous reste peu de mois pour légiférer. Je crois qu'il faut aller de l'avant.

Je partage l'idée que la cellule familiale est importante. Je ne cherche pas à provoquer un débat sémantique mais à faire en sorte que l'ensemble des familles, quelle que soit leur composition, puissent se reconnaître dans notre politique familiale, y compris dans les termes utilisés. Certains d'entre vous ont demandé, en appelant à une forme de liberté, qu'on ne fasse pas du recours au congé de paternité une obligation. Je crains, pour ma part, que certains pères ne subissent une forme de pression dans leur environnement professionnel ou une autocensure, et qu'ils se privent d'être présents auprès de leur enfant et de leur conjointe. Il faut s'aligner sur l'obligation faite aux femmes de prendre un congé de maternité de dix semaines après l'arrivée de l'enfant.

Je comprends l'interrogation sur le bon véhicule législatif. Dans l'intérêt des familles et des enfants, néanmoins, je crois que nous devons faire feu de tout bois. Nous ne voulons laisser passer aucune occasion d'améliorer les conditions de nos concitoyens et concitoyennes – notre journée de « niches » parlementaires en fait partie.

Plusieurs d'entre vous ont évoqué la question du coût, estimant que 2,4 milliards d'euros représenteraient une dépense considérable. Comme je l'ai indiqué dans mon propos liminaire, la branche famille est excédentaire de 1,5 milliard d'euros. Nous avons bien vu, lors de l'examen des derniers PLFSS, que les politiques familiales font l'objet d'une gestion que l'on pourrait qualifier de très précautionneuse. Par ailleurs, on ne peut nier l'existence de coûts induits. Le fait que des conjoints ou des conjointes ne soient pas présents auprès de l'enfant qui vient de naître, qu'ils ne puissent pas assumer de façon égalitaire la charge mentale, psychologique, organisationnelle conduit parfois à des drames – entre 10 % et 15 % des femmes font une dépression post-partum – et à une évolution malheureuse des enfants qui aurait pu être évitée par la présence du conjoint ou de la conjointe. Tous ces drames et toutes ces situations de détresse ont un coût pour la sécurité sociale, car ils entraînent souvent le recours à d'autres politiques publiques, familiales ou non, et à des actions en matière de santé dont le coût est loin d'être négligeable. La création d'un congé de parenté substantiel permettra d'optimiser la gestion budgétaire, ce que nous sommes nombreux à souhaiter.

La question des études d'impact est récurrente. Nous n'avons pas la capacité de lancer de telles études en tant que parlementaires, contrairement à l'exécutif. Néanmoins, les travaux que j'ai cités ont permis de nous éclairer. Ce sont les rapports du Dr. Cyrulnik, de l'IGAS et de l'UNAF ainsi que les deux missions d'information sur la politique familiale, la première – menée par moi-même et par Gilles Lurton, désormais maire de Saint-Malo – n'ayant pas abouti, et la seconde – dont la rapporteure était Nathalie Elimas, désormais membre du Gouvernement, et le président Stéphane Viry – ayant souligné la nécessité de renforcer l'accompagnement des jeunes enfants, notamment grâce au congé parental.

Je partage ce qu'a dit Paul Christophe à propos de l'intérêt de l'enfant et de la limitation des inégalités femmes-hommes. Je remercie Martine Wonner pour ses propos, que je fais totalement miens, et je partage, bien sûr, sans la moindre réserve ceux de Delphine Bagarry.

L'examen des amendements nous permettra de débattre de la proposition alternative du groupe la France insoumise en ce qui concerne la qualification du congé. Je n'ai pas de préférence, à partir du moment où le terme choisi permet d'inclure toutes les personnes et toutes les familles d'une manière indifférenciée.

Le groupe GDR a rappelé qu'il avait préparé une proposition de loi en la matière. D'autres aussi l'ont fait, ce qui montre que l'allongement du congé de paternité est un objectif partagé.

Il est important de rappeler que la présence du père limite les risques psychiques pour la mère. C'est particulièrement important pour elle et pour l'enfant.

L'élargissement, qui a été rappelé, du droit de recours au congé de maternité a également tout son intérêt. Quant à une réforme plus structurelle, la présente proposition de loi n'a pas la prétention de couvrir l'ensemble des défis concernant les congés pour l'accueil des jeunes enfants.

Merci, monsieur Bazin, d'avoir souligné que je fais preuve de cohérence dans mes engagements ! Il n'est pas question de supprimer l'existence du père mais de lui donner des droits supplémentaires, d'affirmer qu'il est un parent à part entière et de lui permettre d'être aux côtés de sa conjointe et de son enfant, bref d'occuper sa place dans la sphère familiale, pour le bien de tous. Par ailleurs, la gestation pour autrui est interdite sur le territoire national, et il n'est pas question de la légaliser dans le cadre de cette proposition de loi.

La commission en vient à l'examen de l'article unique.

Article unique : Transformation du congé de paternité et d'accueil de l'enfant en un congé de parenté de douze semaines, pour partie obligatoire

La commission examine l'amendement AS12 de Mme Michèle Peyron, qui fait l'objet des sous-amendements AS14 du rapporteur, AS15, AS16 et AS17 de M. Thibault Bazin, AS23 de Mme Caroline Fiat, AS21 de M. Thibault Bazin, AS22 de Mme Caroline Fiat ainsi qu'AS18, AS19 et AS20 de M. Thibault Bazin.

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L'amendement AS12 vise à récrire l'article unique de la proposition de loi, où nous souhaitons inscrire l'engagement formulé le 23 septembre par le Président de la République de porter le congé de paternité de onze à vingt-cinq jours. Cette décision s'appuie sur les conclusions de la commission Cyrulnik installée en septembre 2019 et consacrée aux 1 000 premiers jours du nouveau-né.

Le coût de la mesure – 500 millions d'euros en année pleine – serait supporté par la sécurité sociale à travers la CNAF. Les trois jours du congé de naissance seraient maintenus à la charge de l'employeur, et quatorze jours seraient ajoutés aux onze jours actuellement indemnisés par la sécurité sociale.

Ce congé de paternité comprendrait, en outre, une part obligatoire de sept jours afin d'assurer l'effectivité et l'équité de cette mesure, notamment pour les salariés dont le contrat est plus précaire et dont le taux de recours est plus faible.

Il s'agit là une réforme sociétale historique, qui correspond aux aspirations profondes de nos concitoyens, notamment des plus jeunes générations. Elle marque l'aboutissement d'un engagement fort du Président de la République afin de lutter à la racine contre les inégalités de destin. De fait, c'est le partage d'un temps suffisamment long avec leurs parents qui apportera aux enfants de meilleures bases pour leur développement.

Cette mesure favorisera également l'égalité entre les femmes et les hommes, grande cause du quinquennat, car elle témoigne d'une évolution culturelle importante en revalorisant la place du père ou du second parent auprès de l'enfant, et contribue au renforcement de la responsabilité de chacun des deux parents.

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Cet amendement récrit en effet complètement ma proposition de loi. Si les deux textes ont en partage l'objectif d'un allongement du congé de paternité, le mien permettrait à mon sens d'y répondre beaucoup plus rapidement.

Néanmoins, j'ai bien conscience que l'adoption de cet amendement conditionne celle de la proposition de loi. Le progrès étant effectif, je souhaite, au cas où cet amendement serait adopté, améliorer encore le texte sur le plan sémantique afin de promouvoir une démarche inclusive visant toutes les familles. C'est le sens du sous-amendement AS14, qui tend à substituer au « congé de paternité » le « congé de parenté ».

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Selon les termes de l'amendement proposé par la majorité, ce n'est pas la sécurité sociale qui financera ces 500 millions, ce sera une hausse des taxes sur le tabac. Le Gouvernement n'étant pas représenté ici pour lever ce gage, une telle hausse me paraît inacceptable pour les Français dans le contexte que nous connaissons, alors que votre majorité a déjà mis à mal leur pouvoir d'achat avec la hausse des taxes sur le tabac, sur les assurances, sur l'essence, mais aussi celle de la CSG, et j'en passe.

Le sous-amendement AS15 vise à supprimer, au premier alinéa de l'article, les deux occurrences du mot « consécutifs ». Je suis certes favorable à toutes les mesures susceptibles d'améliorer le sort des familles, à tout ce qui favorise l'investissement des parents auprès de leurs enfants, mais les parents doivent bénéficier d'une certaine latitude. Autant un congé de onze jours consécutifs est admissible, autant un congé de vingt-cinq jours devrait pouvoir être fractionné, y compris dans l'intérêt des femmes et des enfants. Chaque couple étant différent, il convient de laisser aux parents la possibilité d'apprécier ce qui leur convient le mieux.

Le sous-amendement AS16, quant à lui, dispose que le père peut céder tout ou partie de ces quatorze jours supplémentaires au bénéfice de sa femme. Ils peuvent être précieux pour la mère qui allaite et qui, aux termes de son congé de maternité, doit sevrer son enfant. En outre, selon sa profession, le père peut juger préférable d'accorder un tel bénéfice à sa femme pour l'équilibre de tous.

Le sous-amendement AS17, enfin, vise à supprimer les alinéas 4 et 5 de l'amendement, qui me semblent très directifs en interdisant d'employer les salariés dans les sept jours qui suivent la naissance de l'enfant. De plus, comment s'articulent ces sept jours avec les trois jours du congé de naissance ? Une rédaction trop stricte me semble préjudiciable aux familles.

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Le sous-amendement AS23 vise à rendre obligatoire le congé de parentalité pendant sept jours, faute que nous soyons parvenus à proposer un amendement le rendant obligatoire pendant toute la période.

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Le sous-amendement AS21 vise à substituer à l'alinéa 5 l'alinéa suivant : « Le congé de paternité est pris à des dates proches de l'événement, fixées en accord avec l'employeur ». Ce dispositif serait plus facilement applicable dans les TPE tout en évitant un certain dirigisme préjudiciable aux familles et aux entreprises.

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Le sous-amendement AS22 vise à remplacer le mot « paternité » par celui de « parentalité ». Si nous sommes favorables à la philosophie de la proposition de loi, nous considérons qu'il importe de rompre avec une vision purement biologique de l'accueil d'un enfant.

De plus, pendant ce temps de congé, il ne s'agit pas seulement d'accueillir sa descendance mais d'apprendre à devenir parent.

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Les sous-amendements AS18, AS19 et AS20 visent à supprimer respectivement aux neuvième, dixième et onzième alinéas les occurrences du mot « consécutifs ». Un congé de onze jours consécutifs est admissible mais un congé de vingt‑cinq jours devrait pouvoir être fractionné. Le Gouvernement a d'ailleurs évoqué cette possibilité et l'a confirmée à la presse. Je ne comprends pas que la majorité l'ait supprimée alors qu'il convient de s'adapter au projet des familles.

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Plusieurs groupes parlementaires ont proposé d'autoriser le fractionnement évoqué par M. Bazin, à l'instar de l'ensemble des organisations et associations que nous avons auditionnées. J'y suis, quant à moi, pleinement favorable pour diverses raisons, dont l'organisation des familles et la présence alternée des parents auprès des enfants. Avis favorable, donc, aux sous-amendements AS15, AS18, AS19 et AS20.

Avis défavorable, en revanche, au sous-amendement AS16, l'un des objectifs de cette proposition de loi étant de favoriser l'égalité entre les femmes et les hommes à travers le partage des tâches.

Avis également défavorable au sous-amendement AS17 : jouir d'une liberté, ce peut être aussi être obligé de recourir à un droit.

Avis favorable au sous-amendement AS23.

Avis défavorable au sous-amendement AS21. Dans l'état actuel de notre droit, la logique de conciliation entre l'employeur et les salariés est effective. L'obligation d'un recours au congé de parentalité dans les quatre mois après la naissance me semble très raisonnable.

Avis de sagesse s'agissant du sous-amendement AS22.

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La proposition n° 19 du rapport de Nathalie Elimas au nom de la mission d'information sur l'adaptation de la politique familiale française aux défis de la société du XXIe siècle, remis en juillet dernier, invite les pouvoirs publics à envisager l'allongement du congé de paternité pour permettre un meilleur partage des tâches familiales entre les parents et favoriser l'égalité entre les femmes et les hommes. Nous sommes donc dans l'air du temps, mais reste à savoir la traduction législative que l'on peut en donner.

Nous pouvons certes prendre aujourd'hui un certain nombre de décisions mais, compte tenu du coût que représentent ces mesures, le véritable débat aura lieu lors de la discussion du PLFSS. J'ai cru comprendre que les milieux patronaux se montrent plutôt favorables à un tel allongement, même si la période envisagée semble un peu « incongrue » avec la crise économique que nous traversons, l'importance prise par le télétravail et l'activité partielle. Peut-être une question de calendrier se pose-t-elle donc.

Quoi qu'il en soit, tout cela va plutôt dans la bonne direction.

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Nous sommes ouverts sur la question sémantique posée par votre sous-amendement, monsieur le rapporteur, mais compte tenu des sous-amendements qui ont été déposés aussi bien par la droite que par la gauche, nous constatons que nous n'avons pas atteint un consensus sur la nouvelle dénomination. Personnellement, je ne suis pas d'accord avec la proposition de M. Bazin visant à supprimer la mention de l'accueil de l'enfant alors qu'elle permet d'ouvrir ce dispositif au partenaire de la mère. Je ne suis pas non plus d'accord avec celle de Mme Fiat, le congé de « parentalité » me paraissant trop proche du congé parental, ce qui pourrait créer des confusions. Le groupe La République en Marche continue de penser que le PLFSS est le meilleur véhicule pour défendre cette réforme. S'engager aujourd'hui sur une dénomination qui ne fait pas l'unanimité et qui ne serait peut‑être pas effective dans la réforme définitive pourrait également engendrer des confusions. Avis défavorable, donc au sous-amendement du rapporteur.

Les sous-amendements AS15, AS18, AS19 et AS20 de M. Bazin concernent la question du fractionnement, qui fait l'objet de négociations en ce moment. Cette demande d'une partie de la population est un vrai enjeu mais la question n'est pas encore mûre. Il me semble donc plus opportun d'en débattre dans le cadre du PLFSS, lorsque les négociations seront achevées. Notre groupe votera contre ces sous-amendements.

Nous voterons également contre le sous-amendement AS16, qui porte atteinte à l'objectif de cette réforme : la présence des deux parents auprès de l'enfant et une égalité accrue entre femmes et hommes dans la vie professionnelle comme dans leur ménage.

Nous voterons aussi contre le sous-amendement AS17. L'obligation de prise du congé de paternité constitue un véritable levier pour permettre au second parent d'être présent lors des tout premiers jours de la vie de l'enfant. Elle garantira que les salariés les plus précaires, qui actuellement prennent le moins leur congé de paternité, puissent y recourir sans craindre la pression de leurs employeurs. Cette obligation est d'autant plus importante qu'elle se situe immédiatement après la naissance, qu'elle contribue ainsi à protéger la santé de la mère et de l'enfant, et qu'elle ne prive pas totalement le droit du salarié à exercer son emploi.

Enfin, s'agissant du sous-amendement AS21, nous souhaiterions, là encore, que les négociations avec les partenaires sociaux soient achevées avant d'accepter toute modification. De la même manière, un engagement sur une telle mesure sans pouvoir garantir qu'elle sera adoptée dans la réforme finale pourrait entraîner des confusions.

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Il est difficile d'entendre que nous souhaiterions supprimer la notion d'accueil alors que nous y avons toujours tenu, tout comme nous tenons à tout ce qui concerne la politique familiale.

Monsieur le rapporteur, vous prétendez créer un droit, mais pourquoi autant de contraintes ? Nous souhaitons, quant à nous, donner plus de souplesse aux familles. Un père de famille ne pourra jamais allaiter ! Chaque famille doit pouvoir s'organiser comme elle le souhaite, comme elle le peut.

Enfin, le coût de ce dispositif, évalué à 2,4 milliards, est exorbitant, surtout dans la situation que connaît le pays et alors que le Gouvernement nous prépare de mauvais coups pour les mois à venir. Comment comptez-vous donc le financer, qui plus est alors que les dépenses sociales sont responsables des principaux dérapages budgétaires ?

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Certains ricanent à notre endroit mais il me semble qu'il faut respecter les avis divergents qui s'expriment sur les moyens à utiliser. Nous aussi, nous représentons des familles ou des TPE, qui sont inquiètes !

Je n'ai jamais voulu supprimer la notion d'accueil de l'enfant. J'ai débattu de questions sémantiques avec M. Chiche : lui souhaite remplacer le mot « paternité » par le mot « parenté », moi pas ; voilà tout.

Nous sommes en désaccord sur la notion de droit, monsieur le rapporteur. À nos yeux, on doit être libre de l'exercer ou non quand vous souhaitez son exercice obligatoire. Nous faisons confiance aux familles. Le congé de trois jours est un droit, pris en accord avec l'employeur, et cela se passe plutôt bien à ma connaissance.

La majorité considère que la question du fractionnement n'est pas mûre et qu'elle devra être examinée dans le cadre du PLFSS. Or l'attente, en la matière, est forte. Si la plupart ne souhaitent pas un fractionnement, dont acte, mais laissez à d'autres la liberté d'en user, qui plus est, souvent, dans l'intérêt de la femme ! De deux choses l'une donc : soit tout est renvoyé au PLFSS – présentez, alors, un projet global sérieux ! –, soit nous allons au bout de la discussion de votre réécriture de l'article unique ! Ce texte est mûr ou il ne l'est pas.

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Les Français ne sont pas bêtes, madame Peyron, et ne confondrons pas congé parental et congé de parentalité ! Nous venons de voter la loi sur la bioéthique : le maintien du terme « paternité » reviendrait à laisser de côté nombre de familles. Faisons donc preuve de cohérence et avançons à la fois sur la procréation médicalement assistée, sur les congés et sur les termes !

S'agissant des employeurs, monsieur Bazin, nous sommes toujours confrontés au même problème. Donnons donc la possibilité à tous les parents de prendre ce congé ! Un entrepreneur doit pouvoir s'arrêter et être épaulé ! Donnons-lui les moyens de pouvoir s'occuper de son enfant en profitant du congé de parentalité !

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Le groupe Écologie Démocratie Solidarité regrette que l'amendement de Mme Peyron soit beaucoup moins audacieux que l'article unique originel, mais nous considérons également qu'il s'agit d'un premier pas. Nous nous réjouirions d'une inscription de cette mesure dans le PLFSS 2021 et nous voterons donc en faveur de la réécriture proposée.

Le caractère obligatoire est évidemment la clef si nous voulons une égalité réelle, un droit pour tous.

Des économies seront, par ailleurs, réalisées grâce à la meilleure santé des enfants. Selon le rapport de l'IGAS, la présence du conjoint longtemps après la naissance a des répercussions à l'adolescence, sur les apprentissages et à l'âge adulte. Cette mesure coûtera cher, oui, mais certains coûts seront évités, si difficile cela soit-il de les chiffrer.

S'agissant du fractionnement, le couple doit avoir le choix et nous voterons en faveur des sous-amendements qui l'autorisent, même si nous comprenons les difficultés techniques que peuvent rencontrer les employeurs.

Personnellement, je suis attachée au terme de « parentalité », la « parenté » renvoyant, me semble-t-il, plutôt à la filiation.

L'important, c'est de continuer à avancer ensemble pour le droit des hommes, des femmes, des couples et, surtout, le bien-être et la santé des enfants.

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La question de la parentalité relève non seulement de la sémantique, mais aussi de la physiologie, de la psychologie, de la psycho-physiologie et même du domaine de la santé mentale, avec la guidance parentale. Ce sont environ 20 % des femmes qui souffrent de dépression post-partum et certaines d'entre elles en pâtissent bien au‑delà de la période périnatale. Les conséquences peuvent être importantes pour elles, pour les couples mais, aussi, pour les enfants. Il me semble donc conforme au souci de prévention de parler plutôt de congé de parentalité.

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Madame Fiat, je ne prends pas nos concitoyens pour ce qu'ils ne sont pas. J'ai seulement évoqué une possible confusion. Je vous donne rendez-vous dans l'hémicycle, lors de la discussion du PLFSS, pour la dénomination du congé.

Monsieur Bazin, vous ne m'avez pas bien comprise : des négociations sont en cours et le débat devra de toute façon avoir lieu dans l'hémicycle, où je vous donne également rendez-vous. Le groupe La République en Marche, encore une fois, n'est pas opposé – bien au contraire – au fractionnement.

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Notre approche diffère un peu, monsieur Bazin, monsieur Di Filippo, s'agissant de l'exécution d'un droit. Ne pas rendre obligatoire une partie du congé nous conduirait mécaniquement au non-recours. Dans les entreprises comme dans toutes les collectivités, les pressions, les jugements de valeur existent. L'effectivité de ce droit suppose de le rendre obligatoire.

Je vous renvoie à ce propos au non-recours au congé parental qui, depuis sa réforme, lors du quinquennat précédent, ne fait l'objet que d'un très faible taux de recours. Il en est de même pour l'ensemble des prestations familiales. Les conclusions et orientations du rapport d'information parlementaire de Mme Elimas montrent que le taux de non-recours à des droits est très important. Comment détecter ces personnes afin de les en faire bénéficier automatiquement ? C'est la question qui se pose et c'est dans cette dynamique que je m'inscris.

La commission rejette successivement les sous-amendements.

Elle adopte ensuite l'amendement AS12, et l'article unique est ainsi rédigé.

En conséquence, les amendements AS1 de M. Thibault Bazin, AS10 de M. Bastien Lachaud, AS3, AS2 et AS4 de M. Thibault Bazin, AS8 de M. Jean-Louis Touraine, AS7 de M. Thibault Bazin et AS6 de M. Pierre Dharréville tombent.

Après l'article unique

La commission examine l'amendement AS9 de M. Jean-Louis Touraine.

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Chacun connaît la diversité des formes de familles. Cet amendement permet que le congé parental s'applique dans le respect des coparentalités.

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Je partage avec vous l'objectif de reconnaissance de l'ensemble des familles et d'absence de hiérarchisation entre elles. Avis favorable.

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Cet amendement soulève un vrai problème et nous interroge sur le public visé par le congé de paternité et d'accueil d'enfant, notamment, sur la situation du conjoint ou de la conjointe du père de l'enfant. Avant de me prononcer, je souhaiterais avoir des éclaircissements de la part du ministre en séance publique, la semaine prochaine. Le groupe La République en Marche vous propose donc de retirer votre amendement.

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M. Touraine, comme M. Chiche, fait preuve d'une grande cohérence et sait très bien où il veut nous emmener. L'exposé des motifs mentionne « la personne qui est liée au père de l'enfant » : pourrait-ce être un autre homme, avec lequel une GPA aurait été réalisée à l'étranger ? Est-ce une porte ouverte, un cheval de Troie ?

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La GPA est interdite en France et le restera, cela a été dit lors de la discussion du projet de loi sur la bioéthique. En revanche, il est bien question, dans un projet de loi à venir sur l'adoption, de pouvoir donner un statut aux enfants nés de GPA à l'étranger. Le congé d'adoption sera, quant à lui, prolongé, comme le congé parental.

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Je retire mon amendement et je le présenterai à nouveau en séance publique afin de bénéficier de l'éclairage de tous, y compris du ministre.

L'amendement AS9 est retiré.

La commission adopte la proposition de loi modifiée.

La séance est levée à treize heures dix.

Présences en réunion

Réunion du mercredi 30 septembre 2020 à 9 heures 30

Présents. - Mme Stéphanie Atger, M. Didier Baichère, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Thibault Bazin, M. Julien Borowczyk, Mme Marine Brenier, M. Sébastien Chenu, M. Gérard Cherpion, M. Guillaume Chiche, M. Paul Christophe, Mme Christine Cloarec-Le Nabour, Mme Josiane Corneloup, M. Dominique Da Silva, M. Nicolas Démoulin, Mme Jeanine Dubié, Mme Catherine Fabre, Mme Caroline Fiat, Mme Agnès Firmin Le Bodo, Mme Albane Gaillot, M. Guillaume Gouffier-Cha, Mme Perrine Goulet, Mme Véronique Hammerer, M. Brahim Hammouche, Mme Monique Iborra, Mme Caroline Janvier, Mme Fadila Khattabi, Mme Fiona Lazaar, Mme Charlotte Lecocq, Mme Geneviève Levy, Mme Monique Limon, Mme Cécile Muschotti, M. Bernard Perrut, Mme Bénédicte Pételle, Mme Michèle Peyron, Mme Stéphanie Rist, Mme Valérie Six, Mme Marie Tamarelle‑Verhaeghe, M. Jean-Louis Touraine, M. Nicolas Turquois, M. Boris Vallaud, Mme Laurence Vanceunebrock, Mme Michèle de Vaucouleurs, Mme Annie Vidal, M. Philippe Vigier, Mme Corinne Vignon, M. Stéphane Viry

Excusés. - M. Joël Aviragnet, Mme Justine Benin, Mme Claire Guion-Firmin, M. Thomas Mesnier, M. Patrick Mignola, M. Jean-Philippe Nilor, Mme Nadia Ramassamy, M. Jean-Hugues Ratenon, Mme Mireille Robert, Mme Nicole Sanquer, Mme Hélène Vainqueur-Christophe, Mme Isabelle Valentin

Assistaient également à la réunion. - Mme Delphine Bagarry, M. Xavier Breton, Mme Céline Calvez, Mme Annie Chapelier, M. Pierre Dharréville, M. Fabien Di Filippo, Mme Paula Forteza, M. Maxime Minot, M. Cédric Villani, Mme Martine Wonner