La séance est ouverte.
La séance est ouverte à neuf heures.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement no 821 .
Il vise à revenir sur deux dispositions figurant à l'article 5 du projet de loi de finances – PLF – pour 2020 : la transformation en exonération du dégrèvement de la taxe d'habitation pour 80 % des contribuables et le gel des bases de la taxe d'habitation en 2020. Nous demandons la suppression de ce gel, qui contrevient aux modalités votées par notre assemblée lors de l'examen du PLF pour 2018 – modalités qui conduiraient probablement, cette année, à une revalorisation des bases comprise entre 1,1 % et 1,3 %. Aussi un gel n'est-il pas acceptable.
J'en viens aux tableaux de simulation des taxes foncière et d'habitation qui nous ont été communiqués hier soir. Monsieur le secrétaire d'État, avez-vous étudié les conséquences qu'aurait l'article 5 pour les communes qui ont augmenté leurs taux en 2018 ou 2019 ? Quelles pertes de recettes devront-elles supporter si les dispositions de l'article 5 étaient appliquées dès 2020 et 2021 ?
La parole est à M. le rapporteur général, pour donner l'avis de la commission.
Cet amendement est partiellement satisfait s'agissant des bases de la taxe d'habitation, puisque l'amendement no 2864 de la commission des finances prévoit de revaloriser ces bases au regard de l'indice des prix à la consommation – IPC. S'agissant des taux, un dégel conduirait à faire peser une augmentation exclusivement sur les 20 % de contribuables restants et sur la taxe d'habitation des résidences secondaires, ce qui ne serait pas raisonnable. Mon avis est donc défavorable.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics, pour donner l'avis du Gouvernement.
Je partage l'avis du rapporteur général concernant les bases, puisque, comme je l'ai expliqué hier, le Gouvernement soutiendra l'amendement présenté par la commission concernant la revalorisation de ces bases. De même, je rejoins l'avis du rapporteur général en ce qui concerne les taux. Il nous paraîtrait déraisonnable de faire peser l'augmentation sur les 20 % de contribuables restants durant la période transitoire. C'est la raison pour laquelle nous proposons un gel des bases avant l'entrée en vigueur du nouveau système en 2021 pour les résidences principales, et de manière transitoire pour les résidences secondaires.
Nous souhaitons que, à compter de 2021, les collectivités soient financées intégralement selon le nouveau modèle de financement : ainsi, la taxe d'habitation encore payée de manière résiduelle par 20 % – et qui s'éteindra progressivement – sera perçue directement par l'État sur le compte d'avances, et versée à titre de recettes générales dans le cadre du nouveau modèle de financement.
Madame Louwagie, je vous transmettrai des éléments relatifs aux conséquences de l'article 5 pour les communes qui ont augmenté leurs taux. Sachant que davantage de communes les ont augmentés plutôt que baissés, il apparaît d'ores et déjà que l'impact global net, en termes de recettes, s'élève à 53 millions d'euros. Je vous communiquerai le nombre de communes ayant abaissé ou relevé leurs taux, en précisant les conséquences économiques afférentes. J'émets un avis défavorable sur cet amendement.
De nombreuses questions restent sans réponse quant à la refonte de la taxe d'habitation. Votre dispositif pénalisera les départements qui ont adopté une attitude « modèle », à l'instar du Jura qui n'a pas augmenté sa taxe foncière sur les propriétés bâties depuis au moins sept ans. Au contraire, les départements qui ont augmenté régulièrement leurs taux bénéficieront en quelque sorte d'une prime, puisque, pour eux, la compensation de taxe sur la valeur ajoutée – TVA – sera beaucoup plus forte. Pour leur part, les départements vertueux, qui se sont abstenus d'augmenter leurs taux, n'auront droit qu'à une compensation, sans perspective d'évolution. Nous parlons donc ici de la perte de dynamique d'une recette.
Vous disiez hier soir, monsieur le secrétaire d'État, que le dispositif que vous proposez n'entamera pas l'autonomie des collectivités. Or, quand un département et une collectivité perdent la maîtrise de l'ensemble de ses taxes, ils perdent bel et bien en autonomie.
L'amendement no 821 n'est pas adopté.
Il vise à revenir sur le gel de la revalorisation des bases de la taxe d'habitation. Tous les ans, une bataille homérique se tient dans cet hémicycle, généralement en fin d'examen du PLF, pour déterminer le coefficient de revalorisation de ces bases. Dans le cadre de la discussion du PLF pour 2017, il a été jugé raisonnable d'inscrire une règle claire dans la loi. Aujourd'hui, cette règle est remise en cause pour la taxe d'habitation sur les résidences principales uniquement, tandis qu'elle est maintenue pour la taxe d'habitation sur les résidences secondaires et pour la taxe foncière sur les propriétés bâties. Ce fonctionnement à deux vitesses n'est pas pertinent, puisqu'une résidence principale peut devenir une résidence secondaire, et inversement. Monsieur le secrétaire d'État, devons-nous comprendre que vous continuerez à émettre les rôles pour tous les articles ?
Certes, une revalorisation des valeurs locatives des résidences principales au regard de l'indice des prix à la consommation, en l'occurrence de 0,9 %, est préférable à une absence de revalorisation. Toutefois, si la règle initiale était appliquée, la revalorisation pourrait atteindre 1,3 %. Monsieur le secrétaire d'État, quelle perte de produit représente la différence entre 1,9 % et 1,3 % pour la revalorisation des bases de la taxe d'habitation ?
Enfin, le tableau qui nous a été remis hier soir n'est absolument pas une simulation, comme il le prétend, mais une photographie des coefficients à un instant donné. Une véritable simulation aurait évalué les conséquences du PLF en 2020 pour les communes qui ont augmenté leurs taux en 2018 et 2019, pour celles qui ont abaissé leurs taux sur la période et pour celles qui ont des fiscalités additionnelles.
J'ai participé à la négociation sur la revalorisation des bases, dans laquelle la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation préconisait un taux de 1,1 %. Un taux de 0,9 % a finalement été retenu, alors qu'un gel des bases était initialement prévu. L'année dernière, nous avons fait de la taxe d'habitation un outil favorable pour les collectivités, grâce à une revalorisation portée à 2,2 %. Il est regrettable que le projet de loi revienne sur une mécanique qui avait été élaborée par le législateur, qui fonctionnait et qui contentait tous les acteurs. Le dispositif existant de revalorisation des bases devrait être reconduit, car il est clair et précis.
Enfin, il ne me paraît pas souhaitable de différencier les conditions de revalorisation des bases selon qu'elles concernent la taxe foncière, la taxe d'habitation sur les résidences principales et la taxe d'habitation sur les résidences secondaires.
Une fois encore, le dispositif de revalorisation des bases tel qu'il figurait dans la loi jusqu'à présent devrait être maintenu : ce serait une suite normale pour les collectivités. Le taux de 0,9 % proposé par la commission des finances constitue un élément de travail intéressant, mais au-delà, la réforme de la taxe d'habitation doit s'attacher à clarifier et à simplifier le dispositif. À cet égard, le mécanisme qui est appliqué depuis quelques années est adapté et donne satisfaction – la preuve en est qu'il n'a pas suscité de difficulté, même si le taux de revalorisation est passé à 2,2 %.
Je vous propose de vous rallier à l'amendement no 2864 de la commission des finances, qui prévoit une revalorisation selon l'indice des prix à la consommation, c'est-à-dire de 0,9 %. Je vous avoue que, l'an dernier, lorsque les dispositions pérennes de revalorisation ont été votées, je pensais que la référence était l'indice des prix à la consommation : aussi m'étais-je étonné qu'un autre taux soit retenu, de 2,2 %. En réalité, le texte de loi fait référence à l'indice des prix à la consommation harmonisé – IPCH – , qui n'est pas à proprement parler un indice des prix à la consommation, mais un agrégat uniquement destiné à la vérification de certains critères de convergence de Maastricht. La revalorisation de 0,9 % que nous proposons correspond au véritable indice des prix à la consommation.
J'entends, madame Pires Beaune, que le maintien de la règle actuelle conduirait à une revalorisation d'au moins 1,1 %, au lieu des 0,9 % préconisés par la commission. Cet argument me paraît toutefois problématique. Loin de moi l'intention de mettre le feu à l'hémicycle, surtout à cette heure matinale, mais l'IPC est l'indice le plus représentatif des prix ; c'est d'ailleurs celui qui est pris en compte dans toutes les revalorisations, au-delà même du champ des collectivités locales.
En toute franchise, il serait plus raisonnable, simple et pertinent d'appliquer l'indice des prix à la consommation à l'ensemble des revalorisations. À l'époque où le texte a été voté, la nuance entre l'IPC et l'IPCH m'avait échappé. Je vous propose donc de retirer votre amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Même avis, pour les mêmes raisons. J'apporterai toutefois quelques précisions chiffrées.
S'agissant du différentiel de recettes, madame Pires Beaune, il convient d'avoir en tête son ordre de grandeur, à savoir un dixième de point de revalorisation, soit environ 20 millions d'euros pour l'ensemble du bloc communal, à rapporter à l'ensemble des recettes de celui-ci, soit, pour les résidences principales, 16 milliards d'euros en 2019. Même si 20 millions d'euros, ce n'est pas rien, vous conviendrez que, rapportée à la masse globale des recettes, cette somme n'est guère significative.
Je partage d'autant plus la position du rapporteur général que le taux de 0,9 %, qui correspond à l'indice des prix à la consommation, repose sur un constat à date t, alors que celui de 1,3 % que vous évoquez n'est qu'une prévision.
Enfin, pour vous répondre de manière peut-être un peu plus précise, madame Louwagie, si l'on ne considère que le produit des hausses votées par les communes en 2018 ou en 2019, sans prendre en considération le solde net que j'ai indiqué tout à l'heure, il s'élevait à 109 millions d'euros pour l'ensemble du bloc communal, dont 63 millions d'euros pour les seules communes. Pour être encore plus précis, la hausse fut de 53 millions d'euros en 2018 pour les communes qui ont actionné le mécanisme et de 10 millions d'euros seulement en 2019, la différence s'expliquant par le fait que le nombre de communes qui ont procédé à une hausse fut singulièrement plus bas en 2019 qu'en 2018.
Je voudrais moi aussi apporter quelques précisions sur ce point.
Je suis d'accord avec ce que viennent de dire le rapporteur général et le secrétaire d'État. Si l'on considère les dix années précédant la réforme engagée en 2017, on enregistre presque trente-cinq points d'écart entre l'IPC et la revalorisation des bases. Cet écart est trop important pour qu'il ne soulève pas d'interrogations. Depuis la mise en place de la réforme, c'est-à-dire sur les deux dernières années, l'IPC et le taux de revalorisation étaient respectivement de 2,6 % et de 3,4 %.
Il faut que nous ayons en tête que, certes, il s'agit d'une ressource pour les collectivités territoriales – et nous sommes tous très contents que cette ressource soit incrémentée chaque année – , mais il s'agit aussi d'un impôt payé par nos concitoyens dans chaque territoire. Est-il logique que la revalorisation des bases soit systématiquement supérieure à l'inflation constatée ? La question se pose, et c'est pourquoi le compromis proposé par la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, soutenu par une majorité de députés, et qui consiste à retenir le taux de 0,9 %, me paraît une bonne solution.
Merci, monsieur le secrétaire d'État, pour vos réponses.
Si je comprends bien, la revalorisation sera cette année de 0,9 % ; mais quid des deux années qui restent – du moins pour les 20 % de ménages encore soumis à la taxe d'habitation ? Monsieur le rapporteur général, vous remettez en cause cette année l'indice qui avait été retenu dans la loi de finances pour 2018 – mais que se passera-t-il en 2021 et 2022 ? Avez-vous des pistes à nous soumettre ? Il serait important que les communes en soient informées !
Par l'amendement no 2864 de la commission, il sera proposé que les bases soient revalorisées en 2020. À partir de 2021, madame Louwagie, on entrera dans le nouveau modèle de financement des collectivités territoriales. La dynamique des recettes des collectivités, qu'il s'agisse de la taxe foncière qui sera désormais perçue par les communes ou de la fraction de TVA qui sera affectée en compensation aux départements et aux intercommunalités, aura comme dynamique minimale l'évolution des valeurs locatives retenues pour l'établissement de la taxe foncière sur les propriétés bâties. La taxe d'habitation aura quant à elle été purement supprimée dans le calcul des compensations pour les collectivités, même si elle doit subsister pour les résidences secondaires et même si 20 % des contribuables doivent continuer à la payer, sur la base d'un gel des taux.
Mes chers collègues, je vous rappelle qu'il convient de suivre scrupuleusement les dispositions de notre règlement s'agissant des interventions sur les amendements si nous voulons respecter le calendrier – qui est, comme vous le savez, contraint.
Par cet amendement, nous proposons de rétablir la revalorisation forfaitaire des valeurs locatives pour l'établissement de la taxe d'habitation pour les résidences principales. Il s'agit de garantir que le mécanisme de compensation de la suppression de la taxe d'habitation ne jouera pas au détriment des collectivités locales – ce dont nous venons de débattre en partie.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement no 1080 .
Cet amendement est issu des travaux de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation – M. le président Cazeneuve le confirmera. Il vise à fixer à 1,1 % la revalorisation des bases pour 2020.
Je n'ai pas bien compris votre réponse, monsieur le secrétaire d'État. Comment s'opérera à partir de 2021 la revalorisation des bases de la taxe d'habitation – qui sera, je le rappelle, maintenue pour les résidences secondaires – , de la taxe foncière sur les propriétés non bâties et de la taxe foncière sur les propriétés bâties ? Appliquera-t-on aux trois le même coefficient ou des coefficients différents ?
La mesure dont nous discutons – à savoir une revalorisation soit de 0,9 %, soit de 1,1 % – s'appliquera en effet cette année aux trois. Or, voilà vingt-cinq ans que je le répète – et je n'aurai été entendu qu'une fois… – , cela est absurde, car l'évolution des revenus du foncier n'a rien à voir avec celui de l'immobilier !
Et il faudrait en outre différencier logements et locaux d'entreprises.
D'où ma question : le Gouvernement envisage-t-il une augmentation différenciée tenant compte de l'évolution des prix du marché, ce qui serait logique, puisque la base est censée être la valeur locative de chaque bien ? Il me semble en effet que l'on revient aujourd'hui sur la réforme de 2017 qui prévoyait l'application automatique d'une règle. Pourriez-vous donc, monsieur le secrétaire d'État, nous éclairer sur les coefficients retenus pour la revalorisation des bases des trois taxes : taxe foncière sur les propriétés bâties, taxe foncière sur les propriétés non bâties et taxe d'habitation ?
La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l'amendement no 1551 .
Cet amendement vise à revenir à la règle qui avait été fixée – et je remercie notre collègue Jerretie d'avoir déposé un amendement allant dans le même sens.
Je crois que, devant le Conseil constitutionnel, ce que vous envisagez posera un problème d'équité. Je le répète : une résidence principale peut devenir une résidence secondaire et réciproquement ; or le coefficient de revalorisation ne sera pas le même.
D'autre part, l'utilisation de l'IPCH ne sortait pas de nulle part, monsieur le rapporteur général. C'est d'ailleurs ce qui est utilisé comme référence par les instances européennes.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 2864 .
Il s'agit de procéder à la revalorisation dont je viens de parler, à savoir l'application d'un coefficient de 1,009, soit une indexation sur l'indice des prix à la consommation.
La parole est à Mme Émilie Cariou, pour soutenir l'amendement no 1980 , identique au précédent.
Cet amendement exprime la même position que celle présentée par le rapporteur général et par Jean-René Cazeneuve : procéder à une revalorisation de 0,9 %.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
Je suis défavorable à tous les amendements, exceptés celui de la commission et l'amendement identique de Mme Cariou.
Même avis.
Je profite de cette prise de parole pour dire à M. de Courson que, pour la suite, l'objectif est que la revalorisation forfaitaire soit la même pour l'ensemble des valeurs locatives restant en application. L'intervention du rapporteur général vous aura fait comprendre qu'il y a actuellement un débat sur le référent à retenir, à savoir soit l'IPC, soit l'IPCH, et le Parlement aura très certainement à en discuter dans les années à venir.
Madame Pires Beaune, si une résidence secondaire devenait résidence principale, la valeur de base serait calculée comme si ladite résidence avait été principale dès 2020.
Monsieur le secrétaire d'État, la question de fond n'est pas celle-là ! Le problème, c'est que les valeurs locatives sont censées représenter les loyers réels. Or, pour prendre cet exemple, l'évolution des valeurs locatives du foncier non bâti n'a rien à voir avec l'indice des prix à la consommation, elle dépend des arrêtés préfectoraux qui fixent annuellement les taux plafonds. On devrait donc avoir un indice pour le foncier non bâti calé sur l'indice publié par le ministère de l'agriculture pour la fixation des loyers. Certaines années, comme il y a deux ou trois ans, les loyers ont baissé. Les valeurs de base retenues pour la taxe foncière sur les propriétés non bâties devraient être indexées dessus – et quand ils repartiraient à la hausse, on revaloriserait.
S'agissant maintenant de la taxe d'habitation, pourquoi l'indexer sur l'indice des prix à la consommation alors qu'il existe un indice de référence des loyers ? Quant à la CFE, la cotisation foncière des entreprises, elle devrait être indexée sur l'indice des loyers commerciaux !
Voilà ce que j'essaie de vous expliquer, monsieur le secrétaire d'État – car le résultat de ce que l'on fait depuis quarante ou cinquante ans, c'est qu'il y a une totale déconnexion entre les valeurs locatives et les valeurs du marché. On a déjà engagé pour les baux commerciaux une révision fondée sur la réalité du marché. On va faire de même – vous l'avez confirmé dans vos interventions – pour ce qui est du volet logement du foncier bâti. Quand le fera-t-on pour le foncier non bâti ? Voilà les questions que pose aussi cette réforme.
La parole est à M. le président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Je me pose une question un peu existentielle.
Jusqu'à présent, les maires comprenaient la taxe d'habitation : c'était quelque chose d'à peu près clair, il y avait des bases, que l'on revalorisait certes plus ou moins bien, mais enfin on comprenait à peu près comment cela fonctionnait, et l'on pouvait piloter les choses. Là, honnêtement, on n'y comprend plus rien. Sur les 30 000 maires qui nous regardent, pas un n'a compris quelque chose. Il y a des coefficients différents, on ne sait même plus ce qu'on revalorise. Moi, j'aimerais bien savoir ce qu'il en est !
On dit qu'en 2021, il n'y aura plus de taxe d'habitation – mais il y en aura quand même une. Comment va-t-on en revaloriser les bases ? On dit qu'on n'y touchera pas – ce qui semble signifier qu'il n'y aura plus du tout de revalorisation de la taxe d'habitation pour les 20 % de ménages les plus aisés, comme vous dites, et pour les résidences secondaires. Mais on dit aussi qu'après deux ou trois on touchera à nouveau, et directement cette fois, à la taxe d'habitation pour les résidences secondaires. Alors, qui revalorise quoi ? Les bases des taxes d'habitation vont-elles perdurer en étant revalorisées ou tout cela sera-t-il gelé, le coefficient correcteur s'appliquant sur le foncier bâti ? Honnêtement, tout cela n'est pas très intuitif !
Les choses se compliquent encore lorsqu'il s'agit de fixer le coefficient correcteur à appliquer – mais ça, c'est une autre affaire.
Monsieur le secrétaire d'État, pourriez-vous nous réexpliquer les choses ? Pour ceux qui seront les premiers concernés par la réforme, il semble que l'on a transformé un système qui était plutôt simple et qui fondait un lien direct entre le contribuable et l'échelon local en une sorte de monstre administratif !
Je vais essayer de répondre à la question existentielle du président Woerth, car je ne voudrais pas le laisser dans un tel état vu la journée qui s'annonce.
Sourires.
Quels coefficients de revalorisation proposons-nous d'appliquer après que l'amendement du rapporteur et celui de Mme Cariou auront été adoptés ? Toutes les valeurs locatives de base, à l'exception de celles s'appliquant à la taxe d'habitation sur les résidences principales, seront augmentées, dans le cadre du présent projet de loi de finances, sur la base de l'IPCH.
Les valeurs locatives de la taxe d'habitation sur les résidences principales sont revalorisées à hauteur de 0,9 %, soit l'IPC sur le constaté de novembre à novembre.
À partir de 2021, seule sera gelée la question des 20 % restants de contribuables qui paieront encore une partie résiduelle de la taxe sur les résidences principales – gelée en termes de montant des taxes payées ; mais parce que la compensation dépendra de l'évolution des bases des valeurs foncières, de la taxe foncière, l'État assumera pendant ces deux ans le différentiel et la compensation aux communes. Nous aurons en effet une recette résiduelle, payée par le contribuable, qui sera fixe, alors que la compensation aux communes suivra la dynamique des valeurs locatives de la taxe foncière.
À partir de 2021, à l'exception de la fraction restant à payer de la taxe sur les résidences principales, les élus auront un pouvoir de taux sur la taxe foncière, qui sera désormais la leur, ainsi que sur la taxe d'habitation sur les résidences secondaires.
Je le dis en aparté à M. de Courson : j'ai entendu vos réflexions sur la meilleure façon de calculer l'indice par rapport au coût de la construction ou au loyer. Vous-même dites avoir été entendu en vingt-cinq ans…
… une fois. Je suis au regret de vous dire que ce ne sera pas moi qui vous suivrai la vingt-sixième année. Notre travail de réforme de la fiscalité locale et de compensation des recettes de la taxe d'habitation pour les communes est suffisamment technique sans que le Gouvernement y ajoute cette année une réflexion sur la manière dont on calcule l'indice – à la seule exception de la différence entre IPC et IPCH pour les valeurs locatives de la taxe d'habitation sur les résidences principales.
Il faut distinguer, d'une part, l'année de transition, qui sera assez complexe puisque nous allons passer d'un système à l'autre – ce qui justifie des règles spécifiques en 2020 – , et, d'autre part, le régime permanent, à partir de 2021. Or celui-ci est extrêmement simple : les communes auront le revenu de la taxe foncière, équivalant à l'euro près à ce qu'elles avaient auparavant, avec un pouvoir de taux. On va donc se retrouver dans une situation qui sera probablement encore plus simple qu'aujourd'hui pour les communes et les maires.
Si j'ai bien compris, monsieur le secrétaire d'État, à partir de 2021 l'État percevra la taxe d'habitation sur ce qui restera des 20 % de contribuables. Seulement vous la percevrez au taux 2019, voire 2020, puisqu'on peut encore augmenter cette année les taux de la taxe d'habitation sur les résidences secondaires. C'est gelé ? Mais si la mesure est décidée avant la loi de finances, comme on en a parfaitement le droit ? Au conseil départemental, nous adoptions des taux en décembre, avant le vote du projet de loi de finances. Si j'augmente les taux, la loi me ramènerait donc aux taux de l'année précédente ?
D'ailleurs, êtes-vous sûrs que c'est constitutionnel ? Je vous souhaite bien du plaisir !
L'État toucherait donc ce qui restera de la taxe d'habitation au taux de 2019 et compenserait aux communes au taux de 2017. Ce n'est pas possible, puisque vous appliquez la compensation au taux de 2017 et avec les abattements existant en 2017 ; si ceux-ci ont été modifiés à la hausse ou à la baisse, vous ne voulez pas en tenir compte. Expliquez-moi la cohérence du dispositif ! Pensez-vous vraiment que ce système soit conforme à la Constitution, voire tout simplement normal ?
Mais oui, les deux !
Cet amendement de François Pupponi vise à supprimer l'alinéa du projet de loi de finances qui suspend les mécanismes de lissage, d'intégration fiscale progressive et d'harmonisation de taux d'imposition de la taxe d'habitation.
Ces dispositifs, liés à l'évolution des périmètres intercommunaux, permettent d'opérer une convergence progressive des taux et ont fait l'objet de délibérations des exécutifs locaux. Ils ne sont donc pas contraires à la mise en oeuvre de la réforme fiscale. En outre, leur gel reportera de plusieurs années l'harmonisation des taux intercommunaux de la taxe sur les résidences secondaires.
La parole est à Mme Patricia Lemoine, pour soutenir l'amendement no 1904 .
Cet amendement est en effet identique à celui déposé par François Pupponi, et nous souscrivons évidemment à tout ce qui vient d'être dit. J'ajouterai toutefois que nous nous interrogeons au sujet du délai de suspension. Le texte n'est pas très clair sur ce point : suspend-on de 2020 à 2023, ou de façon définitive ? Nous proposons donc également de supprimer les alinéas concernant la suspension des périodes de lissage, car ils auraient pour effet de maintenir d'importants déséquilibres entre les contribuables d'un même territoire.
Monsieur le secrétaire d'État, Charles de Courson a très judicieusement soulevé tout à l'heure la question de la constitutionnalité de cet article 5, de l'ensemble de ses alinéas. L'alinéa 164 dit en effet : « Les lissages, intégrations fiscales progressives et harmonisations de taux d'imposition de la taxe d'habitation en cours au 1er janvier 2020 sont suspendus ». Les mesures en cours au 1er janvier 2020 ont été adoptées en 2018 et 2019 ; les voilà suspendues, purement et simplement. Cela ne pose-t-il pas problème en termes de constitutionnalité ? Nous vous proposons donc de mettre en oeuvre cette suspension à compter de l'année 2023 ; ce report permettrait de clarifier les choses et de bien informer chacun au sujet de ces mesures.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement no 1624 .
Il s'agit d'un amendement similaire à ceux que présentent nos collègues ; mais je mets cette occasion à profit pour vous demander, monsieur le secrétaire d'État, de transmettre à la représentation nationale les tableaux des communes perdantes au regard de l'augmentation des taux – au regard des chiffres que vous nous avez donnés : 109 millions d'euros pour le bloc communal et 63 millions d'euros pour les communes. Pourrions-nous être destinataires, si possible dans la journée, d'un récapitulatif présentant l'ensemble des communes et des établissements publics de coopération intercommunale – EPCI – concernés ?
Cette discussion peut se ramener à la question posée par Mme Lemoine. La rédaction de l'article laisse entendre que cette mesure de suspension prend fin à partir de 2023. Si M. le secrétaire d'État nous confirme qu'il s'agit de la bonne lecture, je demanderai le retrait de ces amendements : à défaut, l'avis de la commission serait défavorable.
Je confirme qu'il s'agit d'une suspension jusqu'en 2022 inclus, et qu'il y aura reprise en 2023, tant du pouvoir de taux que du système de lissage. De plus, ces amendements sont satisfaits par l'alinéa 181 de l'article 5. Je souscris donc entièrement à l'analyse du rapporteur général : avis défavorable.
Monsieur le secrétaire d'État, êtes-vous certain de la constitutionnalité de votre alinéa au regard du principe de libre administration des collectivités territoriales ? Si j'ai bien compris, vous ne faites ni plus ni moins que d'annuler les systèmes de lissage pendant trois ans, de 2020 à 2022 inclus. Pourriez-vous éclairer sur ce point la représentation nationale ?
D'autre part, avez-vous mesuré les conséquences de l'alinéa 179 pour les intercommunalités qui avaient mis au point des dispositifs de lissage pouvant aller jusqu'à douze ans ? Avez-vous mesuré la déstabilisation des relations entre communes et EPCI qui en résultera ?
Ce sujet a été amplement abordé au sein de la délégation, puisque les pactes financiers, fiscaux, conclus lors des récentes reconfigurations territoriales ont souvent été longuement débattus à l'échelon local. Nous avions donc besoin de vous entendre, monsieur le secrétaire d'État, au sujet de cette suspension – qui reste une suspension, même si trois ans, ce n'est pas neutre pour les collectivités.
Je serais intéressée par un panorama des EPCI que concerne cette mesure, car certains ont choisi d'harmoniser les taux dès leur création au lieu de lisser ensuite. Pourrions-nous recevoir des éléments complémentaires permettant une vue d'ensemble ?
Enfin, je rappelle que cette mesure de suspension n'aura aucun impact financier ou budgétaire sur les EPCI, mais seulement sur la compensation, sur les montées et descentes entre communes.
Dans cette discussion très technique de spécialistes, vous voudrez bien excuser l'intrusion d'un peu de bon sens.
Sourires sur les bancs du groupe LR.
De fait, nous créons un impôt spécifique sur les résidences secondaires. Il y en a 3,3 millions en France ; toutes ne sont pas à Saint-Tropez ou à Ramatuelle. Beaucoup de gens gardent, après en avoir hérité, la résidence principale de leurs défunts parents. Des gens mutés en région parisienne, où ils sont locataires, conservent en province leur résidence d'antan : elle devient une résidence secondaire. Ces résidents secondaires vont constater qu'ils sont les seuls à payer un impôt que ne paie pas le propriétaire d'une résidence secondaire au Portugal, que ne paie pas le vacancier qui utilise Airbnb ; cela va poser des problèmes. De plus, la taxe d'habitation est conçue comme la contrepartie d'un certain nombre de services ; or, par définition, un résident secondaire ne bénéficie pas du service scolaire, puisque ses enfants ne sont pas scolarisés sur place.
Il convient que nous nous interrogions, non pour défendre des gens supposés disposer d'un patrimoine, mais parce qu'il existe dans certaines parties de notre territoire une économie de la résidence secondaire que ce dispositif risque de remettre en cause, surtout dans les secteurs où elle est déjà fragile. Je suis surpris que cette question n'ait pas été plus évoquée, car j'y vois une forme d'injustice. Sachons dire que la disparition de la taxe d'habitation sur les résidences principales crée un impôt sur les seules résidences secondaires, avec les difficultés que cela suscite.
Merci, monsieur Le Fur. Vous avez très légèrement dépassé le temps imparti : apparemment, le bon sens demande un peu plus de temps.
Sourires.
Monsieur de Courson, nous ne présenterions pas cet alinéa si nous ne le considérions pas comme conforme à la Constitution. Les avis que nous avons sollicités vont plutôt dans ce sens. La suspension du lissage est une mesure temporaire, qui prendra fin en 2023, et sera sans impact sur les ressources des collectivités – communes ou EPCI.
Par ailleurs, monsieur Le Fur, les résidences secondaires sont déjà taxées, et l'inégalité que vous dénoncez par rapport à ceux qui auraient choisi de ne pas avoir de résidence secondaire est déjà une réalité, avant même la suppression de la taxe d'habitation. Nous pourrions en faire un sujet de débat plus large, du reste.
Enfin, madame Louwagie, les données concernant l'évolution des taux dans les communes et les intercommunalités sont accessibles en open data depuis quelques années. Je ne vous fournirai pas les informations au banc, comme hier soir, mais je vous invite à consulter les sites de la direction générale des finances publiques et du ministère de l'économie et des finances.
L'amendement no 1624 n'est pas adopté.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 2791 rectifié .
La rédaction de l'article 5 présente deux difficultés. Tout d'abord, contrairement aux communes, les EPCI ne bénéficient pas de la redescente du taux départemental de la taxe foncière sur les propriétés bâties, la TFPB, et doivent donc être traités différemment. Par ailleurs, le taux départemental de TFPB représente en moyenne 40 % du taux cumulé de TFPB communal, intercommunal et départemental, et non 50 %, comme il est écrit à l'article 5.
Par conséquent, cet amendement tend à maintenir dans les EPCI la possibilité de supprimer l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties applicable aux constructions nouvelles. Il vise également à assouplir le taux de limitation de l'exonération pour les communes, en le portant à 40 % au minimum dans la mesure où, en moyenne, le taux départemental de TFPB représente 40 % du taux cumulé de TFPB communal, intercommunal et départemental.
Favorable.
Monsieur le rapporteur général, cet amendement a une portée considérable et ne saurait être considéré comme rédactionnel !
J'avais bien compris que vous ne le considériez pas ainsi. Avez-vous des simulations ? Les conséquences financières ne seront pas négligeables pour les communes qui pratiquent l'exonération, notamment pour les bailleurs sociaux. Quelles sont les sommes en jeu ? Dans quelle mesure votre amendement les modifiera-t-il ?
Je n'avais pas présenté cet amendement comme rédactionnel, fort heureusement ! Une erreur s'est glissée dans la rédaction de l'article 5 qui aurait eu pour effet de modifier le droit existant. Cet amendement tend simplement à maintenir la situation actuelle et le droit stricto sensu. Dès lors, les simulations ne sont pas nécessaires. Il s'agit, justement, de ne pas faire de différence entre les situations exemptées et celles qui découleront de l'application du projet de loi de finances pour 2020.
L'amendement no 2791 rectifié est adopté et les amendements nos 1082 et 2857 tombent.
Cet article tend à ne pas appliquer la revalorisation forfaitaire des valeurs locatives qui entrent dans le calcul de la taxe d'habitation. En effet, les ressources locales se trouveraient privées de 250 millions d'euros chaque année, ce qui va à l'encontre de l'engagement répété du Gouvernement qui veut compenser la suppression de la taxe d'habitation à l'euro près. La revalorisation forfaitaire est de droit depuis la loi de finances pour 2017 et correspond à l'inflation constatée. Cet amendement vise donc à maintenir cette revalorisation forfaitaire, conformément aux engagements du Gouvernement.
Votre amendement me semble hors sujet. La situation est claire, pour ce qui est du foncier bâti. Seules les exonérations et les abattements sont aujourd'hui gelés, pour ne pas soulever de difficulté, mais je ne pense pas que votre amendement se rapporte à ce sujet. Je vous invite par conséquent à le retirer. Sinon, j'y serai défavorable.
L'amendement no 704 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
En raison de la disparition de la taxe d'habitation sur les résidences principales en 2020 le projet de loi de finances pour 2020 prévoit d'adapter les règles de lien et de plafonnement des taux des impositions directes locales, dès 2020 pour la cotisation foncière des entreprises et de la taxe foncière sur les propriétés bâties, dès 2023 pour la taxe d'habitation sur la résidence secondaire.
Cet amendement tend à appeler votre attention quant à la nécessité d'instaurer de nouvelles règles de lien et de plafonnement des taux de taxes locales. Ne serait-il pas plus judicieux de laisser aux organes délibérants des collectivités locales et des EPCI le soin de déterminer la répartition des impôts locaux entre les ménages et les entreprises en fonction des caractéristiques et de la réalité de leur territoire ?
Petite remarque liminaire, destinée au rapporteur général : pourquoi ne pas légiférer également à droit constant pour les valorisations forfaitaires ?
Venons-en à la liaison de taux. Je considère, comme d'autres élus, qu'il n'est plus nécessaire de lier les taux entre eux, dès lors que l'on supprime la taxe d'habitation, pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, la taxe foncière sur les propriétés bâties devient l'impôt pivot. Or, il s'agit d'un impôt général et non spécifique, acquitté par les ménages et les entreprises. La logique n'est donc plus celle de la taxe d'habitation, payée seulement par les ménages.
Ensuite, cette règle lie les taxes foncières et la taxe d'habitation sur les résidences secondaires, qui relèvent d'une politique spécifique, que l'on souhaite fiscaliser ou non, sans lien avec une taxe d'habitation classique. Cette liaison ne repose sur aucun principe.
Enfin, la taxe professionnelle a été remplacée par la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises et la cotisation foncière des entreprises. La taxe professionnelle n'est plus prise en compte dans les règles de liaison mais de nouvelles taxes ont été conservées. En l'espèce, la taxe d'habitation est supprimée et la taxe foncière devient l'impôt pivot. La règle de liaison se retrouve fondée uniquement sur le foncier et l'immobilier. Je pense sincèrement qu'elle n'a plus d'utilité.
Certains prétendent que cette règle permet de limiter l'évolution de l'imposition qui pourrait pénaliser les entreprises. Je crois que ce n'est plus vrai, car la CFE et la taxe foncière sur le non-bâti sont payées par les entreprises.
Je suis convaincu, depuis la réforme de 2018, qu'il n'y a plus lieu d'intégrer cette liaison des taux. En revanche, je propose à M. le secrétaire d'État que l'on poursuive notre réflexion pour faire évoluer cette partie de l'article.
Avis extrêmement défavorable à cette proposition de déliaison, qui donnerait un sens tragique, pour les entreprises, à notre réforme. D'ailleurs, les représentants des associations d'entrepreneurs, quelle que soit la taille de leur société, leur fonction ou leur branche, ont été très clairs : une telle réforme ne doit prévoir aucune mesure qui laisserait penser que l'on peut augmenter librement les impôts à la charge des entreprises.
Avis défavorable.
La proposition du Gouvernement ne tient pas la route. Historiquement, les liaisons entre les taux, dissymétriques, étaient prévues pour protéger les entreprises, puisque toute hausse de la pression fiscale sur les entreprises s'accompagnait automatiquement de la même hausse sur les ménages.
Vous prétendez maintenir la liaison entre les taux pour protéger les entreprises alors que le système ne fonctionne plus ! Prenons l'exemple d'une ville industrielle où les deux tiers du foncier bâti sont occupés par des entreprises, des commerces, des industries. La CFE est la même. Dès lors, toute hausse du taux du foncier bâti pèsera massivement sur les entreprises.
Maintenez cette liaison ente les taux si vous le voulez, mais cela n'est pas efficace, à moins de retenir ma proposition de prévoir un second plafonnement. Aujourd'hui, le cumul de la CFE et de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises – CVAE – est plafonné à 3 % de la valeur ajoutée. Ne pourrions-nous pas intégrer la taxe sur le foncier bâti, calculé entreprise par entreprise, à ce plafonnement, quitte à le rehausser ? J'avais demandé des simulations en ce sens pour fixer le taux, autour de 4 %. Les entreprises seraient ainsi protégées.
Voilà pour les communes. Pour ce qui est des intercommunalités, tout autant concernées par la règle de liaison, que prévoyez-vous ? Souhaitez-vous approfondir cette piste, d'ici à la deuxième lecture, et faire des simulations pour un plafonnement à la valeur ajoutée ?
Monsieur le rapporteur général, faisons confiance aux élus qui ne sont pas schizophrènes au point de matraquer les entreprises de leur territoire avec des taux ahurissants. Nous soutiendrons cette proposition pertinente.
Je ne pense pas que nous soyons si éloignés que cela les uns des autres. Les taux sont liés, en effet, mais cette règle est très peu utilisée dans nos communes, car, vous en conviendrez tous, les élus n'ont pas intérêt à augmenter la pression fiscale sur les entreprises. Cela étant, cette garantie a le mérite d'exister.
Le nouveau système est sans doute perfectible, mais il ne fait que transposer le régime existant pour intégrer la taxe foncière et offrir ainsi la même garantie.
Monsieur de Courson, la taxe foncière est également payée par les ménages. Elle n'est peut-être pas assise sur la même base, mais elle peut éviter des abus. Je ne voterai pas ces amendements.
J'entends bien ce que vous dites, monsieur le secrétaire d'État : en transposant les dispositions existantes, vous souhaitez conserver le même mécanisme. Or, me semble-t-il, la situation a complètement changé. Ce plafonnement était justifié lorsque les collectivités disposaient de l'outil qu'est la taxe d'habitation, mais elles n'en disposeront plus. Cela soulève plusieurs questions pertinentes. À titre d'exemple, les communes qui avaient augmenté le taux de leur taxe d'habitation vont perdre des recettes importantes d'ici 2020, 2021 ou 2022. Il faut donc leur laisser une certaine latitude.
Par ailleurs, il faut faire confiance aux élus. Laissons-les gérer leur situation, qui peut varier grandement en fonction du poids que représentent les entreprises dans leur collectivité. Nous ne pouvons pas régler cette multitude de situations depuis Paris. Nous avons tendance à enserrer les élus dans une espèce d'étau, à ne pas les laisser administrer seuls ; cela représente, à mes yeux, une erreur fondamentale.
Sur l'amendement no 712 , je suis saisi par le groupe Socialistes et apparentés d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Jean-Louis Bricout, pour soutenir cet amendement.
Cet amendement, comme plusieurs de ceux qui ont été défendus précédemment, s'inscrit dans une logique de protection des entreprises. Il vise à supprimer le lien entre le taux de la taxe d'habitation sur les résidences secondaires – la THRS – et celui de la taxe foncière sur les propriétés bâties – la TFPB.
Le bien-fondé de la taxe d'habitation sur les résidences secondaires réside dans sa capacité à lutter contre le phénomène des « volets clos ». Or votre réforme propose un changement important : la taxe foncière remplace la taxe d'habitation comme impôt pivot. La grande différence entre ces deux impôts, c'est que la taxe d'habitation touche les ménages tandis que la taxe foncière touche à la fois les ménages et les entreprises ; de plus, la dynamique fiscale des collectivités repose désormais en grande partie sur la taxe d'habitation. Nous proposons donc que le taux de la THRS ne soit plus lié à celui de la TFPB afin d'éviter les effets de bord pour les entreprises.
Cet amendement pose, à mes yeux, un sérieux problème.
En réalité, l'absence de lien entre les taux de ces deux taxes risque, à moyen terme, de déséquilibrer la charge fiscale au détriment des contribuables non électeurs, c'est-à-dire des propriétaires de résidences secondaires. Soyons clairs : la THRS est tout sauf un impôt comportemental ; elle est un impôt de rendement. Sa logique est très différente de celle que vous présentez dans cet amendement, et autoriser une hausse sans contrainte de la THRS dans les zones détendues sur des contribuables généralement non électeurs me paraîtrait avoir des conséquences plus que désagréables.
Je vous le dis franchement : votre amendement permettrait à des régions comme la mienne, où certaines communes comptent 80 % de résidences secondaires et 20 % de résidences principales, de faire n'importe quoi. En outre, votre amendement pourrait laisser penser que la règle de compensation aux collectivités territoriales n'a pas été respectée et il permettrait de tondre la laine sur des gens installés. En effet, comme vient de le rappeler M. Le Fur, les résidents secondaires sont souvent des gens ayant un double domicile et qui, contraints de travailler à Paris, ont conservé leur résidence en province. Cela me semble une très mauvaise idée. Avis défavorable.
Avis défavorable également. Je précise que l'amendement, tel qu'il est rédigé, supprime les dispositions qui permettent aux communes et aux intercommunalités de voter elles-mêmes le taux de leur taxe d'habitation sur les résidences secondaires, ce qui entre en contradiction avec l'exposé des motifs.
Chers collègues, je vous rappelle que les interventions sur chacun des amendements seront limitées à deux prises de parole, que j'accorderai à Mme Pires Beaune et à M. de Courson. Par ailleurs, il serait plus agréable pour tout le monde, y compris pour le président de séance, que vos demandes de parole ne se fassent pas par des claquements de doigts. Je les vois assez bien sans qu'il soit besoin d'adopter cette attitude.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Nous retirons cet amendement ; il n'y aura donc pas de scrutin public. Je voudrais néanmoins que chacun ait conscience qu'entre une commune touristique – qui peut compter, comme vient de le dire M. le rapporteur général, 80 % de résidences secondaires, et dont la revalorisation des bases sera fixée à 1,3 si l'on suit l'indice des prix à la consommation harmonisé – , et une commune dépourvue de résidences secondaires, dont la revalorisation sera fixée à 0,9, les marges de manoeuvre ne seront pas du tout les mêmes.
Comme en témoignent les débats que nous avons depuis hier, ce projet de loi de finances postule que les élus sont des irresponsables.
Cela crée chez eux une défiance. J'avais pourtant cru comprendre que nous étions passés à l'ère de la confiance, ou tout du moins à une tentative de renouer la confiance avec les élus.
Je ne vois pas l'intérêt de cette liaison des taux. La vouloir, y compris pour les résidences secondaires, c'est faire le pari que les élus sont des irresponsables et que ceux des communes touristiques feraient exploser les taux de la THRS.
Je réitère la question que j'ai posée tout à l'heure, puisqu'elle reste sans réponse : les simulations annoncées auront-elles un sens ? En d'autres termes, seront-elles établies sur la base des valeurs locatives ? Nous venons d'adopter un amendement qui fixe la revalorisation des bases à 0,9 : les simulations devront la prendre en compte. Il faudrait également y ajouter les allocations compensatrices – y compris des allocations compensatrices de foncier bâti, qui ne figurent pas dans le tableau – et les rôles supplémentaires – qui sont parfois importants – , car ces données sont ignorées dans les simulations.
Enfin, et j'insiste sur ce point : quel sera le montant de la perte de produit pour les communes qui ont augmenté ou baissé leurs taux ? Cette mesure entraînera en effet une perte de produit dès 2020.
L'amendement no 712 est retiré.
Je suis saisi de huit amendements, nos 229 , 728 , 827 , 729 , 230 , 730 , 841 et 2354 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 229 , 728 et 827 sont identiques, ainsi que les amendements nos 230 , 730 et 841 .
La parole est à Mme Émilie Bonnivard, pour soutenir l'amendement no 229 .
Pour déterminer le montant de la perte de taxe d'habitation sur les résidences principales à compenser aux communes et aux EPCI, le projet de loi de finances pour 2020 propose de prendre en compte les bases de taxe d'habitation au titre de 2020 – sans revalorisation forfaitaire – et les taux de taxe d'habitation au titre de 2017.
Or, pour permettre une compensation intégrale des communes et des EPCI, le calcul de la perte aurait dû être fait sur les bases des derniers taux votés par les collectivités locales pour 2019 et 2020. À défaut de respecter la liberté des collectivités locales d'exercer pleinement leur pouvoir de taux sur la taxe d'habitation avant sa suppression définitive, le projet de loi de finances pour 2020 devrait donc fixer l'année de référence des taux en 2018 au lieu de 2017. Cette mesure permettrait de réduire les pertes de recettes occasionnées par la réforme de la taxe d'habitation qui a été imposée aux collectivités locales.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement no 728 .
La question a déjà été évoquée depuis que nous avons entamé la discussion de l'article 5 : du point de vue constitutionnel, avez-vous le droit, monsieur le secrétaire d'État, de fixer la compensation d'un impôt que vous supprimez sur les bases des taux de l'année 2017, alors que cette loi sera votée à la fin de l'année 2019 ? J'ajoute que certains de nos collègues ont d'ores et déjà voté une majoration, en novembre ou en décembre, avant l'adoption du projet de loi de finances.
Deuxième contradiction : vous dites que la compensation de la suppression de la taxe d'habitation pour 80 % des foyers sur les bases des taux de 2017 était une mesure annoncée. C'est exact. Mais ce taux ne concernait pas, alors, la THRS, et il ne prenait pas en compte les 20 % de foyers – pourcentage national, qui varie selon les communes – qui dépassaient le plafond de revenus fixé dans le texte voté il y a deux ans.
Autre contradiction : comment pouvez-vous, dans le même temps, accorder aux départements une compensation sur la base des taux de 2019 – voire de 2020 dans le cas où des assemblées voteraient une augmentation pour 2020 avant la promulgation de la loi de finances ? Il y a là un problème constitutionnel doublé d'un problème de sécurité financière. En effet, pour les communes qui auront fait le choix d'augmenter leurs taux en 2018, en 2019 ou en 2020, la compensation que vous instaurez entraînera une perte de recettes qui risque de mettre certaines municipalités en difficulté. De plus, pour certaines communes, cette augmentation avait été décidée dans le cadre d'accords de rétrocession de compétences avec les intercommunalités.
Nous avons nous aussi le sentiment qu'en calculant la compensation sur les bases des taux de 2017, vous culpabilisez les élus locaux et les maires qui ont été obligés d'augmenter les taux de la taxe d'habitation en 2018 et en 2019 – ce que nul ne fait de gaieté de coeur. Le discours que tenait alors le Gouvernement était très clair : « Vous serez compensés, à l'avenir, sur les bases des taux de 2017 pour les 80 % des foyers qui ne paieront plus la taxe d'habitation. » Les maires sont partis de cette donnée essentielle qui était que 20 % de leur population continuerait à payer la taxe d'habitation et que le reste serait compensé sur les bases de 2017.
Les règles ont changé entre-temps. La loi doit donc changer. Votre position doit tenir compte de l'évolution des taux entre 2017 et 2019 ; c'est une question de sincérité envers les élus et envers les contribuables locaux. Je le répète, si la taxe d'habitation a dû être augmentée entre 2017 et 2019, c'est pour répondre aux réalités auxquelles sont confrontées les collectivités territoriales depuis les baisses de dotations héritées de la période 2014-2017 mais aussi à la suite de décisions prises ces deux dernières années, qui ont eu un impact sur le budget des collectivités.
Je remarque que vous n'étiez pas signataire de cet amendement, monsieur Reda. Je vous ai laissé la parole car Mme Louwagie nous a fait signe qu'il était défendu, mais nous sommes ici en dehors des clous.
Nous demandons un scrutin public sur cet amendement car c'est la relation de confiance entre les élus et le Gouvernement qui est en jeu dans cet article. Il arrive aux élus d'une commune de mener des programmes d'investissement pour lesquels ils doivent anticiper les recettes nécessaires, notamment lorsqu'ils veulent avoir recours à un prêt. Certaines communes ont ainsi prévu une augmentation de leur fiscalité afin que les recettes correspondent aux investissements décidés et que leur budget soit à l'équilibre. Votre choix de vous arrêter aux bases de 2017, sans tenir compte de cette évolution parfois forcée de la fiscalité des collectivités, traduit un renoncement. C'est dommage, car il contribue à diluer cette relation de confiance.
La parole est à Mme Émilie Bonnivard, pour soutenir l'amendement no 230 .
Cet amendement de repli vise à prendre comme année de référence du taux non plus 2017 mais 2018.
Dans la continuité de mes deux amendements précédents, celui-ci vise à améliorer la réforme, qui est perfectible, nous le savons tous – nous sommes là pour en discuter avec le Gouvernement, afin de l'amender au maximum et de la rendre ainsi la plus juste possible. Son application doit reposer sur une base solide.
Le rapporteur général a qualifié mon amendement de sénatorial.
Sourires.
Il vise à calculer la perte sur la base moyenne des trois derniers taux votés par les collectivités locales, à savoir en 2017, 2018 et 2019. Sans contenter tout le monde, cette proposition permet de disposer d'une base plus solide que celle que propose le Gouvernement. En effet, elle traduirait ainsi le choix de l'exécutif de procéder à la réforme en deux étapes : en 2017, annonce de la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales pour 80 % de la population ; en 2019, annonce, par le Président de la République, de la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales pour les 20 % restants – 100 % des résidences principales étant dès lors exonérées.
De fait, en 2017, la loi annonçait bien la suppression de la taxe d'habitation pour seulement 80 % des résidences principales : les 20 % restants n'étaient donc pas prévus par les collectivités territoriales. Il serait donc plus cohérent et plus juste d'établir la moyenne générale des trois dernières années, ce qui permettrait de lisser les augmentations et les baisses intervenues tout au long de cette période de transition. Cette proposition pourrait être examinée au Sénat avant d'être adoptée en nouvelle lecture.
Je méditais sur la vocation sénatoriale de notre collègue Jerretie. Certaines reconversions sont presque annoncées.
Sourires.
On évoque la sincérité : or la loi de finances pour 2018 et la loi de programmation des finances publiques de 2018 ont annoncé que l'année de référence serait bien 2017.
Tout à fait. En matière de sincérité, telle est la réalité.
Vous avez tous évoqué les communes qui ont augmenté leur taux. Quid de celles qui les ont baissés, parce qu'elles ont fourni des efforts en matière de gestion et tenté de redresser les finances de leur collectivité en serrant les dépenses de gestion ? Ne changeons pas la règle qui a été établie dès le départ, y compris en tentant d'obtenir un consensus reposant sur un système qui ressemble à celui de la moyenne triennale applicable à l'imposition sur le revenu des agriculteurs. Avis défavorable à tous ces amendements.
Je partage l'intégralité des propos du rapporteur, en soulignant que, si ces amendements étaient adoptés, les communes qui ont réalisé des efforts de baisse de taux seraient pénalisées, ce qui ne me paraît pas juste. La règle avait été annoncée pour 80 % des résidences principales : la décision du Conseil constitutionnel aussitôt rendue, le Président de la République a déclaré que la totalité des contribuables serait exonérée. Notre politique est aussi sincère que transparente. Avis défavorable à tous ces amendements.
Je rejoins les propos de Christophe Jerretie, sans partager sa conclusion. L'exposé des motifs du projet de loi de finances pour 2018 stipule que « l'État prendra en charge les dégrèvements, dans la limite des taux et des abattements en vigueur pour les impositions de 2017, les éventuelles augmentations de taux ou d'abattements étant supportées par les contribuables ». Il évoquait également « un mécanisme de limitation des hausses de taux décidées ultérieurement par les collectivités et de prise en charge de leurs conséquences, de manière à garantir un dégrèvement complet, en 2020, pour les foyers concernés », afin de réduire la taxe d'habitation à 0 euro. C'est vrai que n'étaient alors visés que les 80 % des foyers.
Pourquoi une telle disposition avait-elle été prise ? Pour éviter des effets d'aubaine, voire des abus que des élus auraient pu être tentés de commettre. S'il avait été prévu de prendre pour référence le taux de la dernière année de la réforme, pour de mauvaises ou de bonnes raisons, d'aucuns auraient pu être tentés d'augmenter les taux, afin que leur collectivité soit compensée à hauteur de ces derniers taux. C'est le bon sens qui a prévalu à la rédaction de cette règle.
S'agissant des départements, il n'était absolument pas prévu, lorsque nous avons, à la fin de 2017, examiné le projet de loi de finances pour 2018, de baisser la taxe foncière. Il est donc logique d'appliquer un taux plus proche.
Les règles ont changé en cours de route : M. Cazeneuve l'a rappelé à l'instant. La base, lorsque nous avons voté le projet de loi de finances pour 2018, était 80 % des résidences principales. Il est donc légitime de demander le changement de l'année de référence.
Monsieur le secrétaire d'État, vous avez plaidé que ces amendements pénaliseraient les communes qui auraient diminué leur taux : vous oubliez que les prospectives financières sont faites pour toute la durée du mandat municipal, qui s'étend, en l'occurrence de 2014 à 2020. Des communes ont augmenté fortement leur taux en début de mandat : celles-ci en seront récompensées. D'autres, comme la mienne, ont au contraire immédiatement réalisé des efforts de gestion : elles ont réduit leur personnel et maîtrisé leurs charges de fonctionnement, avant d'augmenter faiblement leur taux en 2018. Elles seront pénalisées. Franchement, où est la morale ?
Monsieur le rapporteur général, des communes ont baissé ou augmenté leur taux pour des raisons de lissage, tout simplement. D'autres l'ont baissé en raison d'un transfert de nouvelles compétences en 2018 et 2019 vers l'intercommunalité. Il existe aussi quelques cas de rétrocession. La variation à la hausse ou à la baisse n'est donc pas nécessairement liée à un mode de gestion : elle peut l'être à une réorganisation entre les communes et les intercommunalités.
En prenant pour année de référence 2017 sans tenir compte, par exemple, des relations entre les communes et les intercommunalités, vous aboutissez à des absurdités.
Si un accord est trouvé au sein d'une intercommunalité en matière de fiscalité professionnelle unique – FPU – , la durée maximale d'unification des taux étant de douze ans, une commune dont le taux était très élevé le baissera chaque année pour rejoindre la moyenne pondérée de toutes les communes. Pourquoi prendre pour année de référence 2017 et non 2020, alors que le taux sera plus bas ?
Quid aussi des EPCI en fiscalité additionnelle, monsieur le secrétaire d'État ? Hier, vous avez déclaré que vous joueriez sur l'allocation compensatrice : non, pas dans le cas des EPCI en fiscalité additionnelle. Or je vous rappelle qu'un quart des EPCI en fiscalité propre sont encore en fiscalité additionnelle.
Pourriez-vous nous éclairer sur tous ces problèmes que vous ne résolvez pas ? Je le répète : votre démarche conduit à des aberrations et à des injustices.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 44
Nombre de suffrages exprimés 42
Majorité absolue 22
Pour l'adoption 14
Contre 28
L'amendement no 729 n'est pas adopté.
L'amendement no 2354 n'est pas adopté.
Il vise à accroître le nombre de communes pouvant conserver leur surcompensation, en relevant le seuil de 10 000 euros à 15 000 euros.
Dans la rédaction actuelle, 7 275 communes devraient être concernées selon les chiffres fournis par la direction générale des collectivités locales – DGCL – , lors du comité des finances locales du 23 juillet dernier. Il faut d'ailleurs noter que, si la DGCL évaluait alors le coût de cette disposition à 60 millions d'euros pour l'État, il ne devrait être en réalité que de 35 millions d'euros.
Avec cet amendement, le nombre de communes conservant leur surcompensation passerait à 9 917 – soit une augmentation de 36,3 % – , pour un coût supplémentaire d'environ 10 millions d'euros.
La parole est à Mme Caroline Fiat, pour soutenir l'amendement no 2118 .
Il vise à augmenter le plafond de la compensation des pertes pour les communes liées à la suppression de la taxe d'habitation à hauteur de 15 000 euros par commune. Les périmètres de la taxe d'habitation et de la taxe foncière sur les propriétés bâties ne se recouvrant pas parfaitement, certaines communes seront gagnantes et d'autres perdantes.
Nous avons appris cette nuit l'erreur manifeste de calcul de Mme Jacqueline Gourault et Gérald Darmanin : en effet, le Gouvernement semble avoir changé d'avis depuis l'entretien qu'ils avaient donné aux Échos en juin dernier. En regardant en détail les trente pages que comporte cet article 5, on découvre une mauvaise surprise pour les collectivités : il plafonne en fait le montant de la compensation à 10 000 euros par commune et non à 15 000 euros comme annoncé, le nombre des communes concernées passant ainsi de quelque 10 000 à 7 275.
Nous demandons que le Gouvernement respecte au moins ses engagements initiaux ! Il nous semble mesquin de venir économiser 5 000 euros sur le dos de petites communes rurales, qui comptaient parfois sur cette promesse. En outre, cette baisse n'a fait l'objet d'aucune annonce gouvernementale et se retrouve noyée à l'alinéa 395 de cet article de loi.
La surcompensation au bénéfice de certaines communes – tel est son principe – repose sur la sous-compensation au détriment d'autres communes. Ces amendements posent donc un problème de viabilité financière, de manière non maîtrisée, des communes sous-compensées qui contribueront au dispositif. Avis défavorable.
Même avis.
Voilà la preuve que, comme nous vous le disons depuis hier soir, l'article 5 est une véritable usine à gaz. Vous pouvez ensuite arguer que nos amendements posent des problèmes de viabilité financière. Il aurait mieux valu supprimer cet article.
L'amendement no 2748 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l'amendement no 735 .
Il vise à intégrer un peu de péréquation dans le coefficient correcteur. Aujourd'hui, en dépit des efforts réalisés depuis plusieurs années, la dimension péréquatrice n'est pas suffisante. Il conviendrait donc de profiter de la réforme pour améliorer cette dimension dans la fiscalité.
Je prends votre amendement pour un amendement d'appel. Si nous mêlons les exercices de péréquation aux exercices de compensation, nous risquons d'aboutir à des dispositifs très complexes. La péréquation ne doit pas être intégrée à un dispositif de compensation. Avis défavorable.
Même avis. Le coefficient correcteur est un mécanisme de compensation : nous ne souhaitons pas le complexifier avec l'introduction d'une part péréquée.
Monsieur le secrétaire d'État, l'amendement de François Pupponi a le mérite de poser une question importante. Si – et seulement si – j'ai bien compris l'article 5, le coefficient correcteur, le « coco », est gelé ! Il n'évolue pas d'année en année. Pouvez-vous nous confirmer que le coco est gelé ?
Rires.
Sourires.
C'est la question implicite posée par l'amendement de François Pupponi, dont je suis signataire : le coco est-il flexible et réajusté chaque année, ou bien gelé ?
Le coco est bel et bien figé, monsieur de Courson, vous avez bien compris l'article 5.
L'amendement no 735 n'est pas adopté.
Je savais que M. de Courson avait parfaitement compris l'article 5, je n'avais donc pas jugé utile de le lui confirmer de vive voix. Mais, comme il s'affole, je vais le faire : monsieur de Courson, vous avez tout à fait compris, le coefficient correcteur est gelé. Ainsi que je l'ai dit hier soir – cela ne vous aura sûrement pas échappé – , si un élu a recours au pouvoir de fixation du taux pour la taxe foncière perçue à partir de 2021, il percevra la totalité du produit, sans application du coefficient correcteur à la recette dégagée. Nous sommes dans une logique de compensation à l'euro près, et c'est pourquoi le coefficient est gelé.
Pour que ma réponse soit complète, je précise que l'article 5 prévoit une clause de revoyure à trois ans par le Parlement, afin de mener une première évaluation du dispositif.
Merci pour cette réponse, monsieur le secrétaire d'État, mais quid de la péréquation ? Si ce n'est pas maintenant, comme vous l'avez indiqué, c'est quand ?
Si vous le permettez, monsieur le président, je laisse Stella Dupont défendre cet amendement, dont elle est l'auteur.
Cet amendement propose d'anticiper la remise du rapport d'évaluation de la réforme au 1er février, afin que le Parlement dispose des informations et du temps nécessaires pour analyser convenablement cette évolution législative majeure, en vue du PLF pour 2021.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement no 1086 .
Je souscris totalement aux arguments de Stella Dupont. Pour avoir vécu la réforme de la taxe professionnelle et les multiples ajustements qui ont été nécessaires par la suite, j'ajouterais que, puisque nous travaillons actuellement à l'aveugle, sans savoir où nous allons, il ne serait pas inutile de disposer d'un peu de temps, et que des simulations lisibles nous soient transmises en temps et en heure – par exemple, ce qui nous a été communiqué cette nuit est totalement inexploitable. Peut-être faudrait-il que les commissions indiquent les informations dont elles souhaitent disposer.
La parole est à M. Jean-Louis Bricout, pour soutenir l'amendement no 1552 .
Nous avons effectivement besoin d'informations beaucoup plus complètes. Aussi la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation – car l'amendement présenté par Stella Dupont est issu de ses travaux – a-t-elle demandé la remise, au 1er février 2023, d'un rapport indiquant l'impact et les conséquences des mesures sur les ressources des communes, l'évolution de la fiscalité locale et, le cas échéant, les conséquences de la révision des valeurs locatives des locaux à usage d'habitation, notamment sur le budget de l'État.
Il partage l'objectif des trois amendements, qui tendent à ce que le Parlement dispose de l'évaluation la plus précise possible. J'appelle cependant l'attention sur le danger d'avancer la date de remise du rapport d'évaluation au 1er février : nous pourrons certes tenir ce délai, mais les informations fiscales sur les valeurs dont nous disposerons à cette date ne seront pas aussi complètes qu'au 1er avril. Je crains donc qu'une remise du rapport au 1er février n'en altère la qualité. C'est une difficulté technique.
Sur le fond, le Gouvernement était défavorable à cette proposition adoptée par la commission des finances, car il considérait que le rapport serait de meilleure qualité au 1er avril. Cependant, si les amendements qui viennent d'être présentés sont adoptés, nous rendrons donc notre rapport au 1er février – avec cette réserve sur la qualité, car nous serons certainement amenés à compléter les informations avec des données actualisées.
Je comprends tout à fait votre position, monsieur le secrétaire d'État, mais vous savez également que les arbitrages et la construction d'un PLF se font bien en amont du mois de septembre, date à laquelle le projet est déposé. La remise du rapport d'évaluation au 1er avril est relativement tardive : peut-être pourrions-nous convenir d'une date intermédiaire ? De plus, rien n'empêche que le rapport remis au 1er février soit complété au fil de l'eau, si nécessaire.
Je suis donc ouverte à toute proposition pour que nous trouvions la meilleure solution, c'est-à-dire pour que nous disposions des informations les plus fiables et les plus précoces possible.
Si les différents auteurs en sont d'accord, et après consultation des services du ministère de l'action et des comptes publics, nous pourrions nous engager à remettre le rapport au 1er mars, date à laquelle nous serons plus à même de donner des informations.
Si les auteurs des différents amendements ne s'y opposent pas, nous rectifions les amendements en inscrivant la date du 1er mars.
Je laisse à nouveau Stella Dupont présenter cet amendement, qui est le sien.
Comme Jean-Louis Bricout l'a mentionné tout à l'heure, cet amendement est également issu des travaux de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation. Il vise à demander un rapport d'évaluation sur la qualité des communes surcompensées et sous-compensées et sur leurs capacités d'investissement. Là encore, nous souhaiterions que le rapport soit remis le plus tôt possible dans l'année, afin que le comité des finances locales – CFL – et les différentes commissions et délégations parlementaires concernées puissent travailler sur cet aspect technique.
La parole est à M. Jean-Louis Bricout, pour soutenir l'amendement identique no 2013 .
Il vise en effet à demander un rapport d'évaluation du dispositif de compensation. Initialement, nous proposions la remise du rapport au 1er février ; au regard de nos échanges précédents, nous avons accepté la date du 1er mars.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement no 2976 .
Tout a été dit de ce petit amendement. Ce que nous voudrions, ce sont des réponses à toutes les questions que nous nous posons : quel est le montant des pertes pour ceux qui ont augmenté leur taux ? Quel est le montant de la surcompensation pour ceux qui l'ont diminué ? Aujourd'hui, nous n'avons aucune réponse précise à toutes ces questions.
Au sein de mon département, j'ai pu constater des situations extraordinaires : le plus bas coco est de 0,21. Or, dans les chiffres communiqués cette nuit par le ministère, il y a des cocos à 3 % – ce qui correspond donc à un taux final de 33 % !
On en arrive à des situations extravagantes. Parfois, c'est une gâterie, ça dépend des cas de figure…
Sourires.
Je remercie M. de Courson, qui évalue donc le coco à 3 % – sacrée fourchette !
Sourires
Je tiens à préciser que, initialement, les amendements nos 2865 et 2973 de la commission des finances ne faisaient qu'un. Pour des raisons légistiques, l'amendement initial a été coupé en deux : la date d'un côté, le contenu de l'autre. Cette précision faite – je crois qu'elle était nécessaire – , l'avis est évidemment favorable.
La parole est à Mme Stella Dupont, pour soutenir l'amendement no 2859 .
Il sollicite un rapport sur la construction de logements sociaux. Nous en avons beaucoup parlé hier, la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales et le dégrèvement prévu pour les revenus modestes auront potentiellement un impact sur les collectivités. Il conviendrait d'analyser ces conséquences au regard des premiers éléments de la réforme, dont nous pourrons disposer en début d'année prochaine.
Ce sujet a été soulevé par plusieurs personnes, dont François Pupponi. Je pense qu'il est important que nous puissions disposer d'un éclairage sur les conséquences qu'aura la réforme sur le parc de logements sociaux. Avis favorable.
L'amendement no 2859 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Également issu des travaux de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, cet amendement concerne un point important de la réforme. En effet, la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales a des conséquences sur les indicateurs financiers des collectivités, lesquels servent de base à l'évaluation de l'éligibilité aux dotations et, le cas échéant, à leur calcul. Nous devons donc travailler dès 2021 à l'adaptation de ces indicateurs, évoquée à plusieurs reprises par M. le secrétaire d'État.
L'amendement vise à demander un rapport pour anticiper les effets de la réforme et, comme va le préciser François Jolivet, rechercher la neutralité pour les collectivités.
La parole est à M. François Jolivet, pour soutenir le sous-amendement no 3023 .
Comme l'a fort bien dit Stella Dupont, au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, il est important que le Gouvernement puisse rassurer l'ensemble des collectivités territoriales sur les conséquences de sa réforme, en particulier s'agissant du calcul des dotations fondées sur le potentiel fiscal et le coefficient d'intégration fiscal.
Mon sous-amendement tend donc à préciser, en accord avec Stella Dupont, que la réforme des indicateurs financiers respecte le principe de neutralité financière pour les collectivités territoriales et leurs établissements.
Je ne suis pas d'accord : on est en train de tenter d'inscrire dans la loi ce qui figure à l'agenda de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation. Cela n'est pas très sain, car nous ne sommes pas ici pour légiférer sur des mesures sans valeur normative. C'est un peu comme si le Parlement adressait une injonction à l'une de ses commissions ou délégations. La délégation est maître de son agenda, elle doit vivre sa vie.
Quant au sous-amendement, il préjuge de la commande d'un rapport...
… pour indiquer ce qui, selon lui, devrait y figurer. J'y suis encore plus défavorable. Je demande donc le retrait, car la délégation doit gérer elle-même son agenda, d'autant qu'elle peut demander des rapports aux ministres et les auditionner de manière régulière.
Je partage l'avis défavorable de M. le rapporteur général concernant le sous-amendement de M. Jolivet qui préempte la conclusion du rapport.
S'agissant de l'amendement de Mme Dupont, je vais répéter la position du Gouvernement. La suppression de la taxe d'habitation va entraîner un changement du panier de recettes fiscales des collectivités, ce qui peut avoir des conséquences sur le calcul du potentiel fiscal des collectivités, notamment à l'échelle de chaque intercommunalité.
S'il y a une modification du potentiel fiscal, ce sera sur la base du panier de ressources de 2021 et cela peut avoir des répercussions sur le niveau des dotations et notamment sur l'éligibilité aux dotations de péréquation de 2022 – échéance qui nous laisse un peu de temps.
Comme je l'ai dit hier, le Gouvernement s'engage à ce que la réforme de la taxe d'habitation n'ait pas de conséquences directes sur le niveau des dotations et sur l'accès aux dotations de péréquation.
J'ai dit aussi que nous aurions toute l'année 2020 pour, soit modifier le mode de calcul du potentiel fiscal, soit neutraliser l'effet de la réforme de la taxe d'habitation sur le calcul du potentiel fiscal.
Pourquoi est-ce que je laisse ouverte cette alternative ? Parce que nombre d'élus et d'associations d'élus considèrent, certainement à juste titre, que les modalités de calcul du potentiel fiscal ne sont pas toujours satisfaisantes et qu'elles ne permettent pas d'avoir une représentation exacte de la situation économique et sociale ou des ressources de la commune.
Nous pouvons mettre à profit cette année pour, à partir des travaux de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation et de ceux de l'Assemblée et du Gouvernement, nous poser la question suivante : existe-t-il des modalités de calcul du potentiel fiscal qui seraient plus opportunes ? Si nous n'arrivons pas à résoudre cette question extrêmement complexe, nous pourrons faire en sorte que, dans le projet de loi de finances pour 2021, il y ait un dispositif de neutralisation de l'effet de la suppression de la taxe d'habitation sur le mode de calcul du potentiel fiscal. Il s'agira de s'assurer d'une neutralité parfaite.
En conséquence, je m'en remets à la sagesse de votre assemblée en ce qui concerne l'amendement de Mme Dupont, même si, comme le rapporteur général, je pense que la délégation est libre dans son travail et qu'elle peut auditionner les ministres autant qu'elle le souhaite. En revanche, je partage l'avis défavorable du rapporteur général en ce qui concerne le sous-amendement de M. Jolivet : il préempte la conclusion du rapport.
Tout le monde l'a dit, y compris vous-même à l'instant, monsieur le secrétaire d'État, la suppression de la taxe d'habitation a un effet réel et significatif sur les dotations aux départements, en particulier les dotations de péréquation.
À la lecture de la presse et d'après ce que j'entends autour de moi, je constate que certaines associations d'élus créent des peurs à ce sujet.
Étant donné qu'il existe une vraie crainte en la matière, il est important de rassurer ces élus. Ce que vous venez de dire au banc, monsieur le secrétaire d'État, me convient parfaitement. Nous aurons la possibilité de discuter et de nous assurer qu'il n'y aura pas d'impact sur les dotations et la péréquation. Nous avons un an pour travailler ensemble et voir s'il existe une meilleure solution.
J'étais signataire de l'amendement, mais je soutiens aussi l'objectif poursuivi par M. Jolivet à travers son sous-amendement. Il nous alerte sur les bouleversements que cette réforme provoque sur tous les indicateurs, y compris sur le potentiel fiscal.
Prenons un exemple. Le département de Paris affiche des taux de taxe d'habitation très bas et un potentiel fiscal très élevé. Si nous ne rectifions pas les choses, Paris va devenir le département le plus pauvre de France alors que le Gers sera le plus riche. Voilà ce que cela peut donner en termes de péréquation.
Il faut absolument que nous assurions la neutralité de la réforme dans ce domaine et c'est tout l'objet de l'amendement. Si la neutralité est au rendez-vous, très bien. Si elle n'y est pas, nous savons au moins que nous aurons à corriger le système en 2021. Je fais confiance à la direction générale des collectivités locales pour trouver la bonne solution, mais je pense qu'il vaut mieux l'écrire.
Le sous-amendement no 3023 n'est pas adopté.
L'amendement no 2858 est adopté.
En 2017, lors du vote du projet de loi de finances, nous avions eu une discussion assez longue sur la thématique de l'année blanche en ce qui concerne la compensation octroyée sous la forme d'affectation de fraction de TVA. En effet, si la compensation est calculée sur le produit budgétaire de l'année précédente, les collectivités peuvent subir une année blanche, car il n'y a pas de dynamique des ressources.
Par le biais de cet amendement, nous proposons donc que la compensation octroyée sous forme d'affectation de fraction de TVA, notamment en direction des départements, s'effectue bien à l'euro près. Elle ne doit pas s'effectuer en référence au produit budgétaire de l'année précédente pour ne pas entraîner une perte en ligne en matière de recettes.
Il s'agit d'un amendement personnel et non pas d'un amendement de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation.
En l'état, le texte prévoit un gel des recettes des EPCI en 2021. Cet amendement se situe dans la droite ligne de la position que j'ai défendue concernant les communes pour lesquelles une revalorisation de 0,9 % a finalement été décidée.
Défavorable.
Compte tenu du nombre de bénéficiaires concernés, les modalités de versement de la taxe sur la valeur ajoutée aux régions ne peuvent être étendues aux EPCI, aux départements ainsi qu'à la ville de Paris.
À cette première raison – technique – , s'en ajoute une autre. Le fait de fonder la compensation pour ces collectivités sur la TVA de l'année précédente, connue en début d'année courante, a pour avantage, d'une part, de verser aux collectivités concernées un produit de TVA définitif ne nécessitant pas d'actualisation en cours d'année, et, d'autre part, de donner une perspective claire aux élus dans l'élaboration de leur budget puisqu'ils connaissent, dès le début de l'année courante, le montant de TVA définitif.
Enfin, le millésime de TVA n'a pas d'incidence sur la fixation de la fraction servant au calcul de la compensation qui correspond au référentiel suivant : base de la taxe d'habitation de 2020 multipliée par le taux de 2017 pour les intercommunalités ou par le taux de 2019 pour les départements.
Cette année blanche pose problème : la dynamique économique de la TVA est en décalage par rapport à la dynamique fiscale. C'est fort regrettable.
Monsieur le secrétaire d'État, vous nous expliquez que l'on ne peut pas retenir le même mécanisme que pour les régions, parce qu'il y aurait plus de bénéficiaires. Votre argument ne tient pas, car nous ne débattons pas du nombre de bénéficiaires mais des modalités du calcul.
Vous nous laissez penser que vous allez, en cours d'année, réajuster les prévisions annoncées. Franchement, aucune personne raisonnable ici ne peut prendre cela pour argent comptant.
La parole est à M. le secrétaire d'État, pour soutenir l'amendement no 3057 .
Il n'a échappé à personne que, depuis plusieurs années, l'État et les départements ont des discussions parfois compliquées sur l'évaluation de la compensation de telle ou telle dépense, notamment dans le domaine social.
À l'occasion de la compensation de la taxe foncière sur les propriétés bâties des départements, qui descend vers les communes, nous avons donc prévu une compensation à l'euro près par une fraction de TVA, et nous avons ouvert des discussions avec les représentants des conseils départementaux.
Le Gouvernement vient de formaliser une proposition au président de l'Assemblée des départements – ADF. À la compensation de la taxe foncière, soit 15 milliards d'euros, il est proposé d'ajouter une fraction de TVA supplémentaire d'un montant de 250 millions d'euros.
Cette fraction de TVA supplémentaire servira à pérenniser le fonds d'intervention et le fonds de secours exceptionnel votés depuis plusieurs années au profit des départements et dont le montant moyen est de 115 millions d'euros. Au regard des différentes dynamiques, le Gouvernement a considéré qu'il était juste d'ajouter une fraction supplémentaire d'un peu plus de 130 millions d'euros.
Ces 250 millions d'euros de TVA supplémentaires ne seront pas répartis entre les départements selon la même méthode que les 15 milliards d'euros qui correspondent à la compensation de la taxe foncière. Ils seront répartis entre les départements sur la base de critères économiques et sociaux, fixés par la loi, afin de mieux aider les départements qui en ont le plus besoin. C'est une forme de péréquation.
Comme le reste de la TVA, ces 250 millions auront un caractère dynamique que l'on peut estimer à 6 ou 7 millions d'euros par an. Cette somme modique sera thésaurisée afin de constituer une sorte de fonds de réserve qui permettra de venir en aide, de manière ponctuelle, à des départements qui rencontreraient des difficultés particulières liées à telle ou telle catastrophe ou à telle ou telle situation économique et sociale.
Par le biais de cet amendement, l'État propose donc un accompagnement supplémentaire aux départements.
L'Association des départements de France a indiqué que, si le Gouvernement offrait un accompagnement supplémentaire en pratiquant une forme de péréquation, elle travaillerait elle-même à accentuer les mécanismes de péréquation horizontale qui sont régulièrement définis par ses membres et généralement retranscrits dans la loi par le Parlement.
La commission n'a pas examiné cet amendement arrivé tardivement.
Il m'inspire plusieurs questions. Je remarque notamment que le Fonds de soutien interdépartemental des départements, le FSID, n'est pas remplacé, puisque l'exposé sommaire précise qu'un amendement sera présenté en seconde partie. Quel sera le dispositif de péréquation horizontale ? Quels seront son montant et son mode de calcul ?
Les critères de ressources et de charges ne sont pas très précis.
J'aimerais avoir des précisions sur le choix et la définition de ces critères.
En ce qui concerne le fonctionnement du fonds de sauvegarde, je n'ai pas très bien compris qui le mettrait en oeuvre. Est-ce que ce seront les départements ? Il est déjà difficile de faire en sorte que la péréquation fonctionne entre eux. Est-ce que ce sera l'État ? J'aimerais avoir une réponse à ces questions avant de donner un avis définitif qui sera forcément personnel, puisque la commission n'a pas pu être saisie.
Tout d'abord, j'indique que nous avons pris cette initiative tardive à la suite de discussions avec les départements. Pour la transparence des débats, je rappelle que l'Association des départements de France revendique, d'assez longue date, la possibilité d'augmenter les droits de mutation de deux dixièmes de point. Nous n'avons pas retenu cette hypothèse, considérant que cela se traduirait par un alourdissement des prélèvements obligatoires inopportun. Nous avons fait la proposition contenue dans cet amendement.
J'indiquerai, en réponse à M. le rapporteur général, qu'il y aura bien, en 2020, un fonds de secours, désormais traditionnel, pour les départements. En effet, le dispositif prévu par notre amendement doit prendre effet à partir de 2021.
Pour ce qui concerne le fonds d'intervention auprès des départements, dont le montant moyen s'est élevé, au cours des sept ou huit dernières années, à 115 millions d'euros, nous retiendrons en 2020 les mêmes critères qu'au cours des années précédentes.
L'amendement que nous proposons ne prévoit pas aujourd'hui les critères de réparation, à partir de 2021, des 250 millions d'euros supplémentaires.
Madame Dalloz, nous sommes dans une démarche d'ouverture vis-à-vis des départements, avec lesquels nous discuterons justement de ces critères. Ces dispositions ne devant s'appliquer qu'à compter de 2021, nous disposerons de l'année 2020 et de la discussion du PLF pour 2021 pour y travailler et faire en sorte que les critères s'approchent le plus possible du souhait des départements.
Nous indiquons donc aujourd'hui qu'à compter de 2021, les départements recevront une compensation, à laquelle nous ajoutons 250 millions d'euros, et qu'à l'occasion du PLF pour 2021, nous discuterons ensemble des critères de répartition de cette somme.
Il était important que la représentation nationale ait connaissance de ces précisions. J'émets, à titre personnel, un avis favorable.
Mes chers collègues, vous savez que notre règlement prévoit un maximum de deux interventions par amendement, fût-il déposé par le Gouvernement. Je vous propose néanmoins d'y déroger pour cet amendement no 3057 , afin que chaque groupe puisse intervenir une fois, s'il le souhaite.
La parole est à Mme Véronique Louwagie.
Il est toujours difficile de se prononcer ainsi sur un amendement de dernière minute qui, de surcroît, n'est pas neutre. Vos réponses, monsieur le secrétaire d'État, n'apportent guère de précisions. Ainsi, les critères de ressources et de charges seront à définir ultérieurement.
Vous indiquez par ailleurs que cette disposition aura des conséquences sur le fonds de sauvegarde des départements. Certes, vous annoncez 250 millions d'euros supplémentaires, mais nous manquons d'informations : tous les départements pourront-ils en bénéficier, ou seulement certains d'entre eux ? Ces montants viendront-ils en sus d'une péréquation horizontale ? Il reste de nombreuses interrogations, au-delà de cette somme de 250 millions, que vous ajoutez sans doute pour apaiser des tensions.
Il me semble difficile de nous positionner sans disposer, non pas d'une simulation, mais à tout le moins des critères et des éléments de base qui permettront de répartir cette somme.
Il s'agit d'un étrange amendement, monsieur le secrétaire d'État, d'abord pour une raison de forme : il n'a en effet aucune incidence sur la première partie du PLF. En outre, il concerne l'exercice 2021. Il me semble donc qu'il devrait être renvoyé en deuxième partie, monsieur le rapporteur général.
Venons-en au fond : la dotation supplémentaire ne se monte pas à 250 millions d'euros, puisqu'il faut en soustraire les 115 millions déjà alloués. Il est donc en réalité question de 135 millions supplémentaires.
L'alinéa sur le fonds de sauvegarde est quant à lui un peu étrange : « une seconde part est affectée à un fonds de sauvegarde des départements. En 2022 » – je suppose qu'il est donc nul en 2021 – « son montant est égal à la différence entre la fraction prévue au I » – or, au I, la fraction n'est pas définie – « et le montant fixé à la première part ». Tout cela est bien nébuleux ! La sagesse, monsieur le secrétaire d'État, commanderait de retirer votre amendement afin d'y retravailler, puis de le redéposer en deuxième partie pour en étoffer le contenu. Tel qu'il est présenté aujourd'hui, il est tout à fait abscons.
Je commencerai par rappeler que l'an dernier, de la même façon, deux amendements avaient été ajoutés en cours de séance, en deuxième partie, au sujet des départements.
Des négociations sont en cours pour maintenir les dotations et les compensations aux départements. Le Premier ministre a envoyé un courrier, la semaine dernière, pour travailler avec les associations d'élus sur la répartition de ces 250 millions.
Sur le fond, il me semble préférable de disposer d'un dispositif pérenne plutôt que d'un fonds renouvelé chaque année dans cet hémicycle. Or cet amendement constitue justement une première étape vers cette pérennisation.
C'est pourquoi je crois nécessaire de soutenir cet amendement, même s'il nécessite probablement d'être complété. M. le secrétaire d'État confirmera sans doute que lors de la discussion de la deuxième partie, nous disposerons d'informations complémentaires sur ces 250 millions et sur la péréquation entre départements – comme cela avait été convenu et comme cela s'était déroulé l'an dernier.
J'aimerais cependant avoir une clarification quant à la clause dite « de sauvegarde » : concerne-t-elle l'enveloppe totale de 250 millions, ou uniquement les 115 millions ? C'est une question très pragmatique. J'aimerais également savoir si les départements ont donné un accord formel ou s'ils sont encore en négociation, sachant que se tient actuellement le congrès de l'Assemblée des départements de France, l'ADF. En particulier, le DMTO – fonds national de péréquation des droits de mutation à titre onéreux – demeurera-t-il notre base de travail ?
Quoi qu'il en soit, nous devons envoyer un signal positif aux départements, qui perdent la taxe foncière. Cet amendement constitue une première étape pour les accompagner, avec les réserves que j'évoque : nous devons aussi être informés des négociations entre les départements et l'État quant aux critères de péréquation – que, de toute évidence, le Gouvernement nous transmettra, peut-être même pour la nouvelle lecture.
Enfin, j'aimerais avoir confirmation qu'en deuxième partie, sur les articles non rattachés, il y aura bien un amendement de péréquation entre départements. Nous parlons en effet, me semble-t-il, d'un volume de 500 millions d'euros.
Il faudrait cesser de proposer la création de fonds de péréquation en séance. C'est en effet très déstabilisant, et les enjeux budgétaires et financiers sont majeurs. Or, lorsque des amendements de ce type arrivent en séance, nous ne disposons pas du temps nécessaire pour les étudier par avance. Je suis d'ailleurs de ceux qui militent pour l'interdiction du dépôt d'amendements du Gouvernement en séance, au dernier moment, sur le PLF comme sur tout autre projet de loi. De tels amendements, d'ailleurs, sont toujours lourds de conséquences. Ces pratiques ne datent au demeurant pas de cette législature : …
… je n'instruis ici aucun procès politique, loin de là.
Sur le fond, nous avons lu dans la presse spécialisée que les départements, actuellement réunis en congrès, sont montés au créneau contre la proposition du Gouvernement – et ils ont eu raison de le faire. En réponse, vous leur donnez un gage en créant, en séance, un fonds de péréquation. Or, comme l'a très justement observé notre collègue M. de Courson, une telle mesure relève de la deuxième partie. Il n'y a donc pas le feu au lac ! Nous aurions pu attendre l'examen de la deuxième partie, puisque ce dont nous parlons n'aura d'incidences qu'à partir de 2021.
Par ailleurs, vous nous demandez de voter un fonds dont nous ne connaissons pas les critères de répartition. Je reconnais, M. le secrétaire d'État, votre bonne volonté lorsque vous affirmez vouloir négocier ces critères avec les départements. Dans ce cas, vous devriez profiter du congrès de l'ADF pour mener cette négociation puis revenir vers la représentation nationale lors de la discussion sur la deuxième partie, dans trois semaines, en nous précisant les critères sur lesquels un accord a pu être trouvé avec les départements, et ceux sur lesquels il existe un désaccord. Nous pourrons alors avoir un débat plus éclairé que celui que nous avons sur cet amendement.
Je me pose une question plus existentielle au sujet de ce nouvel amendement : à force de tout compenser avec la TVA, le Gouvernement a-t-il l'intention de l'augmenter un jour ? J'aimerais une réponse précise à ce sujet, car nous ne pouvons pas prendre ce genre de décision en tirant des chèques sur l'avenir.
Je remercie M. Woerth, car il ne s'est jamais trouvé de question existentielle à laquelle la réponse soit aussi simple : non. Non, Gouvernement ne souhaite pas augmenter la TVA. Il est le gouvernement des baisses d'impôts, et non celui des hausses.
C'est la dette que vous allez augmenter ! Vous êtes le gouvernement de la dette !
Je vous propose de répondre aux différentes questions en remontant quelques années en arrière. Les départements, confrontés à des difficultés, ont un jour demandé la création d'un fonds d'aide exceptionnel, qui fut accepté une première année, puis une deuxième, puis une troisième. En 2018, il fut décidé que ce fonds d'urgence serait transformé en fonds de stabilisation et que son existence serait pérennisée pendant plusieurs années, jusqu'en 2021, à hauteur de 135 millions d'euros.
L'amendement que nous vous proposons aujourd'hui a pour objectif de pérenniser ce fonds au-delà de 2021. Nous proposons de faire un geste supplémentaire en faveur des départements en ajoutant 115 millions, pour atteindre un total de 250 million. Nous l'avons inscrit en première lecture, de façon tardive je le concède bien volontiers, car nous considérons que son application à partir de 2021, dans le cadre de la réforme de la taxe d'habitation et du financement des collectivités, nécessitait une vision globale.
Quant aux critères que nous souhaitons retenir, j'ai indiqué que nous aurions toute l'année 2020 pour en discuter. Je forme le voeu, rappelé par M. Jerretie, que les discussions soient suffisamment rapides pour que nous puissions présenter ces critères en deuxième partie. Ma position personnelle, qui est aussi le point de départ choisi par le Gouvernement, consisterait à choisir, pour la répartition de ces 250 millions d'euros, des critères très proches de ceux fixés par l'article 261 du PLF pour 2019 : le niveau et l'évolution des dépenses, ainsi que le niveau des ressources de compensation, en matière d'allocations individuelles de solidarité – AIS – ; et les critères financiers apparaissant dans cet article 261.
Si, d'ici à l'examen de la deuxième partie du PLF, ou au cours de l'année 2020, la discussion avec les départements conduisait à envisager d'autres critères, nous pourrions en débattre. Mais la position du Gouvernement au moment d'aborder cette discussion est celle que je viens de vous présenter. C'est une discussion essentielle que nous devons avoir avec les départements. C'est aussi un geste important auquel le Gouvernement consent sur ses recettes propres, vis-à-vis des départements, tout en restant ouvert sur la discussion des critères.
J'ajoute, monsieur Jerettie, que le fonds de sauvegarde, qui constituerait une sorte de troisième étage du dispositif et pourrait être utilisé ponctuellement pour répondre à des difficultés transitoires, serait adossé à l'enveloppe de 250 millions d'euros, et non à une fraction de celle-ci.
L'amendement no 3057 est adopté.
Une fraction des frais de gestion relatifs à la cotisation foncière des entreprises – CFE – , à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises – CVAE – et à la taxe d'habitation a été affectée en 2014 aux régions, en compensation de la dotation générale de décentralisation – DGD – dans le cadre de la refonte du financement de la formation professionnelle.
La suppression de la TH entraînera la disparition du produit correspondant à ces frais de gestion dont le montant à compenser pour les régions est estimé à 272 millions d'euros en valeur 2017. Aux termes de l'article 5 du PLF pour 2020, cette perte de recettes sera compensée aux régions par le versement d'une dotation budgétaire. Or nous savons ce qu'il advient des dotations budgétaires après quelques années : elles sont très souvent diminuées.
Le présent amendement vise donc à substituer le vecteur de la compensation par une fraction complémentaire de TVA, compte tenu de son caractère plus sécurisé et plus dynamique.
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l'amendement no 743 .
Il est clair que les régions vont souffrir d'un manque à gagner de 272 millions d'euros, ce qui est beaucoup. C'est augmenter encore un peu plus la part des ressources non dynamiques des régions. Cette proposition vise à leur permettre de préserver cette part dynamique.
Hier on a refusé aux régions la possibilité de moduler le taux de la taxe sur les cartes grises, alors que les régions ont besoin de ressources pour assumer leurs missions. L'acte II du quinquennat devait permettre de renouer des liens de confiance avec les collectivités territoriales, notamment les régions : ces amendements vont dans ce sens. Nous espérons donc qu'ils recueilleront l'avis favorable du rapporteur et du Gouvernement.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement no 1171 .
Il y a quelque chose que je ne comprends pas dans la position du Gouvernement. En compensation de la perte pour les régions des frais de gestion de la TH, qui naturellement disparaissent avec elle – il est vrai qu'il y avait quelque chose de bizarre à permettre aux régions de toucher des frais de gestion de la TH, mais vous n'en êtes pas responsable, monsieur le ministre, d'autant que je ne me souviens plus s'ils ont été instaurés par une majorité à laquelle vous apparteniez ou à laquelle j'appartenais – , vous proposez une dotation. Il serait beaucoup plus logique de la compenser par un prélèvement sur le produit de la TVA, comme vous l'avez fait pour tout le reste. C'est le sens de ces amendements.
C'est une problématique de transformation de la compensation de frais de gestion en une dotation budgétaire. Il s'agit clairement d'une baisse du dynamisme des ressources des régions, mais je rappelle qu'elles bénéficient déjà du dynamisme de la TVA, soit 300 millions d'euros supplémentaires depuis 2018. À cela s'ajoute le dynamisme des compensations résiduelles de TICPE, soit, là aussi, un plus de 300 millions d'euros. Au regard du sort des autres collectivités, dont la dotation est restée stable, ces amendements ne sauraient prospérer.
C'est le même avis que le rapporteur général, bien que notre évaluation du dynamisme de la fraction de TVA dévolue aux régions soit légèrement différente de la sienne, puisque nous en estimons la progression à 404 millions d'euros par rapport à 2017 ; mais l'essentiel n'est pas là. Les frais de gestions de la taxe d'habitation que perçoivent les régions – c'est peut-être une incongruité, en effet ! – représentent moins de 1 % de leur budget de fonctionnement. L'enjeu est quand même très peu significatif eu égard au dynamisme des recettes évoquées par le rapporteur général.
Je soutiens la position du rapporteur général. Les régions sont en effet les seules collectivités territoriales qui perçoivent l'équivalent de la DGF sous forme de ressources dynamiques, alors que celle des autres collectivités territoriales est stable. Le secrétaire d'État vient de le rappeler, elle devrait augmenter pour elles de 404 millions entre 2017 et 2020. C'est une bonne nouvelle pour les régions : elles ont aujourd'hui les moyens de leur développement.
J'avoue par ailleurs que je ne comprends pas mes collègues du groupe Les Républicains : quand nous proposons de compenser les pertes de ressources des EPCI ou des départements avec de la TVA, ils nous expliquent que ce n'est pas ce qu'il faut faire, et voilà que quand nous proposons une compensation sous forme de dotation, ils nous disent qu'il faut compenser par de la TVA ! Je suis un peu surpris par cette volte-face.
Je vous remercie de votre mansuétude à mon égard, monsieur le président.
Sourires.
Monsieur le rapporteur général, vos explications sont complètement embrouillées. Il s'agit certes de queues de cerise, monsieur le secrétaire d'État, mais ce serait tellement plus simple de les intégrer dans la compensation. Sinon, vous allez traîner une recette de 272 millions... De toute façon les régions n'ont pratiquement plus aucune autonomie fiscale et vivent des dotations que l'État veut bien leur octroyer.
L'amendement no 2757 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Jean-Félix Acquaviva, pour soutenir l'amendement no 1898 .
Cet article 5 est l'occasion d'opérer le toilettage nécessaire d'une des sources de financement de la collectivité de Corse. C'est en effet la seule collectivité qui perçoit l'intégralité du produit des droits de consommation sur les tabacs vendus en Corse, soit un montant estimé par l'inspection générale des finances – IGF – de 90 millions d'euros environ en 2017. Je rappelle que dans l'Hexagone, les droits sur les tabacs sont reversés aux organismes de sécurité sociale.
Comme l'indique le rapport attendu de la mission de l'IGF intitulé « Pour une économie corse du XXIe siècle », qui avait fait l'objet d'un traitement politique et médiatique très fort à l'occasion de la visite de Bruno Le Maire en corse, cette affectation du produit des droits de tabacs « ne répond à aucune logique économique » et « soumet l'équilibre du budget de la CdC à l'évolution de la politique gouvernementale en matière de santé publique ainsi qu'à l'évolution des comportements au sein de la population corse. »
C'est pourquoi le rapport recommande de transférer les droits de consommation sur les tabacs vendus en Corse aux organismes de sécurité sociale et, condition sine qua non, de remplacer cette recette par une fraction de produit de la TVA, de façon similaire à la dotation globale de décentralisation. C'est l'objet de cet amendement, qui va donc strictement dans le sens de la mission de l'inspection générale des finances, qui avait fait consensus au niveau local.
Il est important de relever que cet amendement va aussi dans le sens de la convergence des prix du tabac en Corse avec ceux du continent, dont la baisse espérée des volumes des ventes pourrait avoir une répercussion négative sur les finances de la collectivité de Corse. C'est pourquoi nous souhaitons une telle substitution. J'ajoute que cet amendement a été réécrit pour prendre en compte l'avis formulé par le rapporteur général en commission.
J'avais en effet émis le souhait que ce sujet soit abordé en séance. Je vous ferai observer, cependant, que c'est l'article 63 du PLF qui procède à un alignement progressif de la fiscalité du tabac applicable en Corse sur celle du continent à partir de 2022, sur une période de cinq ans, et le maintien de l'affectation de ces droits à la Corse. Je pense donc que ce débat devrait plutôt avoir lieu à l'article 63, de façon que nous puissions obtenir des garanties conformes à votre demande. Je ne suis pas certain, en effet, que le dynamisme des droits sur le tabac soit inférieur à celui des recettes de TVA. Avis défavorable, donc.
L'avis est défavorable pour les mêmes raisons que celles évoquées par le rapporteur. Je précise que, de 2011 à 2018, la taxe sur les tabacs a généré au profit de la collectivité de Corse une dynamique importante, avec un taux moyen annuel de 5,2 %. Il me semble donc plus opportun d'en rester à la situation actuelle. Je rappelle en outre que comme les autres régions, la collectivité de Corse perçoit déjà une fraction des recettes de TVA en substitution de la DGF, conformément à la loi de finances pour 2017.
Ce débat est quand même problématique alors que, je le répète, le rapport « Pour une économie corse du XXIe siècle » a été présenté en grande pompe à l'issue d'une mission de l'IGF adoubée par le ministre à Ajaccio devant les élus, communaux, intercommunaux, territoriaux et dont la conclusion est très claire. Vous parlez de recettes dynamiques, mais la convergence des prix du tabac va faire diminuer la consommation, ce que nous souhaitons tous, donc les recettes de la collectivité de Corse, quelle que soit leur importance : cela a été souligné par l'inspection générale des finances.
Je constate donc qu'il y a deux discours, et que celui qu'on tient à Ajaccio n'est pas celui qui est tenu au banc du Gouvernement. Vous nous donnez une nouvelle fois le sentiment que la parole du Gouvernement ne vaut pas grand-chose. Je vous remercie. Nous en tiendrons compte et le dirons en Corse dès notre retour.
Je vous donne la parole, monsieur Castellani, même si, en principe, je ne la donne qu'à deux orateurs ayant des vues opposées sur l'amendement – et, de surcroît, vous appartenez au même groupe.
Nous avons déjà débattu bien des fois de cette question en commission des finances et dans l'hémicycle. La Corse bénéficie de cet « avantage » en échange de contreparties très lourdes, et on nous demande aujourd'hui de rentrer dans le droit commun. Nous y souscrivons pour des raisons sanitaires, mais aussi par réalisme face à la pression très forte de Bercy et de l'Europe. Fort bien, mais cela doit être l'occasion de toiletter les relations fiscales entre l'État et la Corse.
Sortez de la logique de la dotation pour entrer dans celle d'une fiscalité dynamique : c'est ce que nous vous demandons, comme on vous l'a demandé il y a cinq minutes pour l'ensemble des régions. Comprenez la logique qui est la nôtre, ce n'est quand même pas compliqué !
L'amendement no 1898 n'est pas adopté.
L'amendement no 2758 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement no 830 .
Cet amendement vise à prendre en compte la situation des communes qui ont augmenté le taux de TH en 2018 et 2019 et qui, étant donné la transformation du dégrèvement en exonération, ne retrouveront pas les ressources afférentes à cette augmentation de taux. Or, si ces communes ont augmenté le taux de TH, c'est parce qu'elles avaient besoin de ressources supplémentaires. La généralisation de l'exonération de TH, initialement réservée à 80 % des ménages, risque de mettre nombre de petites communes en difficulté.
Le respect de la parole de l'État imposerait que vous compensiez la perte de recettes de ces communes – vous avez évoqué un montant de 109 millions d'euros pour le bloc communal.
Défavorable également.
L'amendement de notre collègue Louwagie est important, parce qu'il s'agit de faire respecter la parole donnée, la parole de l'État. Il s'agit aussi d'éviter un yo-yo fiscal fort dommageable pour nos collectivités.
À la veille du renouvellement des conseils municipaux, les citoyens et citoyennes susceptibles d'assumer ces responsabilités ont besoin d'avoir un cadre suffisamment cohérent pour ne pas décourager leur engagement. Quand on ne sait pas de quoi demain sera fait, quand on craint tous les ans de tels yo-yos budgdétaires, on a en effet du mal à s'engager.
L'État et la majorité ont évidemment toute légitimité pour changer les règles : cela s'appelle de la politique que de faire de tels choix en responsabilité, mais qu'au moins on évite de plonger les collectivités dans une telle insécurité budgétaire et fiscale.
Le groupe Socialistes et apparentés soutient ces amendements. Je répète, monsieur le secrétaire d'État, que nous devrions disposer d'une liste précise des communes qui perdront des recettes. Cette information ne sera toutefois pas suffisante : je souhaite que nous connaissions également le taux d'imposition voté par ces communes en fin d'année 2019, avec une comparaison par rapport aux taux moyens observés aux niveaux départemental et national.
Ces éléments monteraient tout simplement que ces communes n'ont pas toutes été de mauvaises gestionnaires. Nous aurions d'ailleurs probablement quelques surprises en étudiant ce qu'il s'est passé, non pas en 2018 et en 2019, mais pendant l'ensemble de la mandature municipale, entre 2014 et 2022. Le premier réflexe des élus, lorsqu'ils entament leur mandat, est en effet de faire une prospective financière afin de pouvoir anticiper sur l'ensemble de la période, notamment en matière d'investissements.
Je laisserai la parole à Mme Pires Beaune, qui fut à l'origine de cet amendement et dont l'amendement no 2008 est identique. Il porte sur un risque d'optimisation fiscale locale entre la taxe sur les logements vacants et la taxe d'habitation sur les résidences secondaires. Un autre amendement, rédigé par Mme Dominique David, qui a également beaucoup travaillé sur cette question, a d'ailleurs été déclaré irrecevable, pour des raisons qui m'échappent quelque peu.
La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l'amendement no 2008 .
Je vous remercie, monsieur le rapporteur général, de me laisser présenter cet amendement, qui a été adopté par la commission des finances. Il vise à répondre à l'optimisation fiscale pratiquée dans certaines villes, en appliquant une imposition identique aux logements vacants et aux résidences secondaires. Je ne connais malheureusement pas l'impact budgétaire estimé de ce phénomène pour les villes concernées, mais il est probablement significatif, notamment pour certaines communes urbaines.
Il est défavorable. La loi de finances pour 2013 a déjà renforcé la taxe sur les logements vacants, en en augmentant les taux. Il nous semble que son impact est devenu suffisant pour sensibiliser les propriétaires de logements vacants situés en zone tendue à l'impact socio-économique de la rétention de logements.
Les comportements d'optimisation évoqués ne nous paraissent en outre pas démontrés à ce stade. Nous considérons également que, la taxe sur les logements vacants étant destinée à financer la politique de logement par le biais de l'ANAH – Agence nationale de l'habitat – , il serait injustifié ou inopportun d'affecter une partie de son produit aux communes. J'ajoute que la mesure ne bénéficierait pas à toutes les communes, mais avant tout à celles qui appliquent déjà des taux élevés de taxe d'habitation et qui en auraient institué la majoration.
Enfin, le dispositif proposé présente des difficultés techniques majeures – cela relève de la forme, mais c'est important. Les raisons principales de notre opposition sont cependant les premières que j'ai évoquées.
Monsieur le secrétaire d'État, les communes font ce qu'elles peuvent pour tenter d'augmenter leurs recettes et de faire face à leurs obligations. Vous vous êtes efforcés de limiter le nombre de celles qui ont augmenté leurs impôts en 2018 et en 2019, mais en contraindrez un certain nombre à le faire.
La démonstration est pourtant simple : les communes perdront la TH et récupéreront, en contrepartie, la taxe foncière sur les propriétés bâties – TFPB. Cette dernière devrait porter principalement sur les logements sociaux, qui sont nombreux. Or les bailleurs sociaux en sont exonérés. Ainsi, si une ville décidait d'augmenter ses taux de TFPB – puisque vous affirmez depuis deux jours que les communes retrouveront le pouvoir de lever l'impôt par ce biais – , elle matraquerait les quelques propriétaires privés qui constituent les classes moyennes dans son territoire.
On va donc matraquer un nombre restreint de contribuables déjà surtaxés, les bailleurs sociaux étant exonérés. Vous pouvez le nier, mais la réalité sera bien celle-là ! Je vous invite à vous déplacer dans les communes : vous réaliserez que vous ne leur permettez pas de continuer à lever l'impôt normalement, car elles ont déjà atteint un taux de taxe foncière impensable. Si vous ne leur laissez pas un peu de liberté sur d'autres points, elles n'y arriveront jamais.
Si mon amendement, adopté par la commission des finances, présentait un problème de forme et que le Gouvernement souhaitait réellement y donner suite, il aurait pu le sous-amender.
Il ne me semble en outre pas anormal que les communes perçoivent une partie de la taxe locale sur les logements vacants, sans remettre en cause la fraction revenant à l'ANAH.
La parole est à Mme Patricia Lemoine, pour soutenir l'amendement no 1903 .
Nous arrivons à la fin de l'examen de l'article 5 et constatons combien des interrogations persistent, notamment sur ses modalités techniques d'application. L'amendement que je propose vise donc à y introduire une clause de revoyure, en partant du principe que les simulations quant à la mise en oeuvre de cet article se poursuivront pendant l'année 2020, pour vérifier l'absence d'effets pervers. Au vu des difficultés rencontrées tout au long de l'examen de l'article 5, je vous encourage vivement à soutenir cet amendement.
Il s'agit, là encore, d'un amendement sans effet normatif, même si j'en comprends l'objet. Il revient à la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation de se saisir de cette question, sans qu'il soit nécessaire de l'inscrire dans la loi. Le programme de travail du président de la délégation inclura probablement la simulation des effets de la réforme.
Je suggère le retrait, pour trois raisons. Tout d'abord, nous avons prévu une clause de revoyure en 2024, après l'entrée en vigueur du dispositif.
J'ai en outre eu l'occasion d'indiquer hier, lors de la discussion sur l'article, que si nous inscrivions au PLF pour 2020 des dispositions ayant vocation à s'appliquer en 2021, c'était bien pour pouvoir continuer à travailler en 2020 et à apporter si nécessaire des corrections dans le PLF pour 2021.
Enfin, je me suis engagé, notamment en réponse à Mme la présidente Rabault, à poursuivre la discussion, sur la base des chiffres qui vous ont été transmis hier, en nouvelle lecture du PLF, dans l'hypothèse où le Sénat modifierait l'article 5 – ce qui, chacun le sait, est une possibilité.
À la lumière des explications apportées par M. le secrétaire d'État, je le retire, et souhaite, bien entendu, pouvoir travailler sur cet article avec la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation.
L'amendement no 1903 est retiré.
Sur l'article 5, je suis saisi par les groupes Socialistes et apparentés et Libertés et territoires d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Robin Reda, pour soutenir l'amendement no 432 .
Il vise à demander au Gouvernement de remettre,
dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la présente loi de finances, un rapport sur les pertes subies par les départements du fait du transfert de la taxe foncière aux communes. Il ne vous engagerait pas trop fortement, puisque ce document serait remis au moment de l'élaboration du PLF pour 2022, la réforme commençant à s'appliquer en 2021.
La remise d'un tel rapport me semble très importante, à plusieurs titres. Il s'agit d'abord d'évaluer le fond de votre réforme et, le cas échéant, de justifier du fait qu'il ne s'agit pas d'un simple ajustement budgétaire mais réellement d'une manifestation de votre vision de la fiscalité locale – ce dont nous doutons.
D'autre part, nous nous situerons alors au début du prochain mandat départemental. Il paraît essentiel que les futurs présidents de conseil départemental disposent des informations financières qui leur permettront d'anticiper, pour toute la durée de leur mandat, les ressources dont ils disposeront et les choix de dépenses qu'ils devront faire.
Votre amendement, tel qu'il est rédigé, mentionne « la perte de recettes de la taxe d'habitation pour les départements », alors que ces derniers ne perçoivent pas cet impôt. Je vous invite donc à le retirer.
Même avis.
L'amendement no 432 est retiré.
Il vise à demander au Gouvernement de rédiger un rapport évaluant les pertes pour les communes qui construisent de nouveaux logements, notamment sociaux, après la suppression de la taxe d'habitation. Cette dernière croît en fonction de l'augmentation du nombre d'habitants. Or le versement d'une part de TVA proposé par le Gouvernement pour compenser la suppression de la taxe d'habitation ne tiendra pas compte de cette croissance de la population, notamment pour les logements qui, construits à partir de 2020, auraient mécaniquement dû entraîner une hausse des recettes de la TH et de la TFPB.
Cette modalité de compensation sera particulièrement problématique pour les logements sociaux : nous craignons qu'elle dissuade des villes d'en construire de nouveaux, puisqu'elles ne bénéficieront même plus de l'augmentation de la taxe d'habitation inhérente à la croissance de la population.
Pour toutes ces raisons, nous souhaiterions évaluer, à travers le rapport que nous demandons, les pertes induites pour les communes.
Vous soulevez là un véritable enjeu. Nous avons toutefois adopté tout à l'heure le principe d'un rapport intégrant cet élément à l'analyse des conséquences de la suppression de la TH. Votre amendement me semble donc globalement satisfait.
Même avis.
Nous parlons, depuis hier, de ces questions, qui sont majeures pour certaines communes. Vous affirmez que l'enjeu est réel : nous vous le confirmons. La demande formulée ici porte sur la rédaction d'un rapport.
Plus concrètement, une commune devant construire de nombreux logements sociaux n'aura plus intérêt à le faire, puisque si elle le fait, elle ne touchera pas la TFPB, dont les bailleurs sociaux sont exonérés, et ne percevra plus la taxe d'habitation. En quoi ces communes seront-elles incitées à construire des logements sociaux, y compris dans le cadre du programme national de rénovation urbaine ? Nous tentons d'interpeller le Gouvernement sur ce sujet depuis plusieurs semaines, sans recevoir de réponse. Comment ces communes feront-elles ? Quel intérêt auront-elles à construire des logements sociaux, puisqu'elles n'en tireront plus aucune recette fiscale ?
Je compléterai les propos de M. Pupponi en soulignant que la construction de logements sociaux a un impact très fort sur le budget de fonctionnement des communes : elle entraîne par exemple l'ouverture de classes supplémentaires, ainsi qu'une multitude de charges.
L'amendement no 2126 n'est pas adopté.
Il vise également à demander au Gouvernement de remettre un rapport, portant cette fois sur les mécanismes de compensation de la suppression de la taxe d'habitation pour les établissements publics de coopération intercommunale – EPCI – à fiscalité propre, les départements et la ville de Paris.
Cette compensation sera calculée en fonction des taux de la taxe d'habitation pour 2017 et de la taxe foncière pour 2019. Elle prendra donc en compte des taux passés, et non les taux tels qu'ils auraient vraisemblablement augmenté dans les années à venir, ce qui entraînera un manque à gagner pour ces villes – à tel point que les associations d'élus locaux demandent un dégrèvement total.
Les départements seraient aussi considérablement perdants du fait de la perte du foncier bâti. En y ajoutant l'effet de taux, un calcul rétrospectif montre que les départements auraient perdu en moyenne environ 370 millions d'euros par an s'ils avaient perçu la TVA au lieu du produit foncier, comme le propose le Gouvernement – soit près de 4 milliards d'euros entre 2005 et 2017.
Nous souhaitons, en demandant la rédaction d'un rapport d'évaluation, alerter sur cette situation : dans la durée, la compensation apportée par le versement d'une part de TVA ne tiendra pas compte de l'augmentation des taux qui serait intervenue dans les années à venir.
Une telle évaluation me semble relever de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation. Ce n'est pas forcément au Gouvernement de remettre le rapport, mais c'est à la délégation d'en faire la demande. Je demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, avis défavorable.
Même avis. Ce n'est pas à moi de dire ce que doit faire la délégation, mais je partage le sentiment du rapporteur général.
Non, monsieur le président, car je ne comprends pas la réponse. Il semblerait que, pour la deuxième fois, M. le rapporteur général me donne raison sur le fond, en disant qu'il peut y avoir un problème.
Les services du Gouvernement ont des moyens qui leur permettent de nous adresser des rapports détaillés. Nous attendons d'ailleurs encore celui qui traitera de la privatisation des autoroutes, demandé par un amendement voté voilà deux ans, et dont je suis ne doute pas qu'il nous sera remis et qu'il contiendra beaucoup d'informations intéressantes. Pourquoi nous dire que quelque chose d'autre est prévu ? Si ça ne fait de mal à personne et si vous considérez, monsieur le rapporteur général, qu'il y a un vrai problème, pourquoi ne pas demander ce rapport au Gouvernement ?
La délégation aux collectivités territoriales pourra en effet travailler ce sujet intéressant mais, monsieur le secrétaire d'État, recevrons-nous avant la discussion de la seconde partie du budget les deux rapports qui auraient dû nous être fournis avant le 30 septembre, consacrés respectivement aux compensations et exonérations et au FPIC, le fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales ?
L'amendement no 2132 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 56
Nombre de suffrages exprimés 54
Majorité absolue 28
Pour l'adoption 34
Contre 20
L'article 5, amendé, est adopté.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à onze heures quarante-cinq, est reprise à onze heures cinquante-cinq.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 2468 , portant article additionnel après l'article 5.
Cet amendement de M. Gilles Carrez, adopté en commission, tend à aménager la taxe sur les bureaux en Île-de-France en créant une zone tarifaire majorée, la zone premium, ou zone 1, pour laquelle interviendrait une augmentation de tarif de 20 %.
Favorable.
La parole est à Mme Olivia Gregoire, après quoi je donnerai la parole à Mme Constance Le Grip.
Tous les amendements sont importants. Comme je l'ai indiqué, quels que soient les amendements, il n'y aura que deux prises de parole sur chacun d'eux.
Protestations sur divers bancs.
En tant que députée de Paris, je tiens à exprimer, ce qui m'arrive assez rarement, ma relative incompréhension face à cet amendement.
L'an dernier déjà, le précédent projet de loi de finances instaurait une hausse de 10 % et le Gouvernement s'était engagé à ce qu'il n'y ait pas de nouvelle hausse de ce type. Les entreprises franciliennes et parisiennes ont été assez difficilement informées de ce qui se joue au sein de la Société du Grand Paris et des études qu'elle mène, ce qui suscite de leur part une certaine lassitude – pour ne pas dire plus – devant l'instabilité fiscale.
Enfin, en ma qualité de rapporteure spéciale sur le développement des entreprises, je regrette que, dans le cadre d'un débat sur les impôts de production courageusement lancé voilà quelques jours par le ministre de l'économie et des finances, nous soyons confrontés à cette hausse des taxes sur les bureaux, principalement à Paris, sans en avoir été informés. Je souhaiterais donc quelques explications pour savoir où en est la Société du Grand Paris et si on nous présentera tous les ans de tels amendements.
Je veux moi aussi, au nom du groupe Les Républicains, exprimer notre incompréhension et m'élever contre cet amendement qui crée une zone premium, selon un découpage ad hoc pour le moins surprenant.
Ce n'est vraiment pas, en effet, une zone de grands privilèges, à moins que c'en soit un que d'être surtaxé et de voir augmenter année après année, dans des proportions impressionnantes, les taxes sur les bureaux. N'y a-t-il d'ailleurs pas là une rupture d'égalité et un risque d'inconstitutionnalité ?
Mme Florennes a demandé la parole ! Je demande un rappel au règlement !
Mes chers collègues, vous pourriez, avant de demander la parole, être respectueux de ceux qui la prennent.
Ça irait mieux si vous respectiez ceux qui lèvent la main ! Madame Florennes avait demandé la parole avant !
Sourires.
Tous les débats sont importants, y compris ceux que nous avons eus ce matin avant votre arrivée.
Madame Le Grip, vous avez la parole.
Nous ressentons, pour le moins, de la gêne devant ce recours systématique à l'augmentation des impôts, que le Gouvernement et vous-même, monsieur le rapporteur général, semblez privilégier. La taxe sur les bureaux a en effet augmenté de 10 % l'année dernière et augmentera donc de 20 % pour cette zone premium, dont le ciblage est très préoccupant, sans parler du risque d'inconstitutionnalité. Devons-nous nous attendre à une augmentation de 40 % l'année prochaine ?
Il est tout à fait insupportable d'entraver, par ces boulets et ces freins, l'attractivité économique de l'Île-de-France que nous souhaitons maintenir et renforcer, surtout à l'heure du Brexit, alors que la région, les Hauts-de-Seine et l'établissement public Paris La Défense essaient d'avoir une stratégie convergente pour attirer de nouveaux sièges d'entreprises, notamment en provenance de Londres, à la suite de l'installation prochaine – je le rappelle – de l'autorité bancaire européenne à Courbevoie, et ce dans un contexte de compétition européenne et internationale, face par exemple à la concurrence de Francfort et d'Amsterdam. J'aimerais donc savoir où nous mènera ce recours systématique à l'impôt, encore et toujours, sur l'immobilier des entreprises ?
M. Bourlanges, vous n'avez pas la délégation pour le faire. Asseyez-vous et restez serein, je vous en prie.
Je note que les députés franciliens sont très présents pour débattre de cet amendement. J'aurais pu donner la parole à tous les députés corses il y a dix minutes…
M. Bourlanges, vous êtes trop respectueux des règles pour déroger à celle qui s'applique dans l'hémicycle. Puisque les demandes de prises de parole semblent plus nombreuses sur cet amendement que sur d'autres, je laisserai chacun des groupes s'exprimer, ce qui constitue une forme de dérogation. Nous passerons ensuite au vote sur cet amendement.
Merci, monsieur Goasguen, pour ces explications que vous me donnerez plus tard.
Rappels au règlement
Monsieur le président, il faut que nous nous mettions d'accord sur le déroulement des travaux. Je peux comprendre le problème de timing, la nécessité d'aller vite. Mais certains sujets très particuliers exigent un vrai débat. Lorsqu'on nous propose un amendement sur les départements, comme l'a fait tout à l'heure le Gouvernement, ou sur le Grand Paris, il faut que nous puissions en débattre. Surtaxer les entreprises, ce n'est pas neutre. Nous sommes tous confrontés à ce problème. J'accepte sans difficulté que nous soyons plus « coulants » sur d'autres amendements – et d'ailleurs nous le sommes depuis un certain temps – mais il nous faut nous laisser le temps de nous exprimer sur de tels sujets.
J'entends, à travers votre prise de parole, qu'aucune disposition de notre règlement n'a été enfreinte…
… et je me réjouis que nous soyons d'accord sur ce point.
La parole est à M. Jean-Louis Bourlanges, pour un autre rappel au règlement. Sur quel fondement, mon cher collègue ?…
Je veux simplement clarifier les choses, sans intention de perturber nos discussions. Avant que vous ne déclariez ce débat ouvert, j'avais levé la main pour demander s'il était possible d'avoir un scrutin public sur cet amendement. C'était indépendant de la question relative à l'ouverture du débat aux représentants des groupes, à laquelle vous avez répondu – ce dont je vous sais gré.
Je prends bonne note de votre demande, M. Bourlanges. Il se trouve qu'une demande de scrutin public ne se fait pas en levant la main, elle doit être déposée avant la présentation de l'amendement concerné.
Après l'article 5
J'avais voté la modification du règlement, mais je n'avais pas encore pu en expérimenter toutes les subtilités.
Sourires.
On apprend en faisant… et en marchant !
Ma collègue Laurianne Rossi s'associe à cette intervention. L'amendement de MM. Giraud et Carrez – absent ce matin – , qui n'est pas très explicite, est arrivé à la suite de la mission Carrez relative au refinancement de la Société du Grand Paris, donc du Grand Paris Express.
Sur la forme, une concertation a certes eu lieu, malheureusement non sans quelques trous et oublis. Ainsi l'établissement public Paris La Défense, auquel ont été confiés en 2018 la gestion et l'aménagement du quartier d'affaires du même nom, n'y a-t-il pas été associé. Sur le fond, c'est un mauvais signal adressé aux entreprises des Hauts-de-Seine, pour lesquels la taxe a déjà été augmentée de 10 % en 2019 dans le dernier projet de loi de finances, et ce alors que ces villes se battent, à l'heure du Brexit – comme l'a rappelé ma collègue Constance Le Grip – pour attirer les entreprises londoniennes face à une concurrente forte, comme vous le savez, de Francfort ou d'Amsterdam.
Je rappelle enfin que les entreprises des Hauts-de-Seine sont d'accord pour financer les services de transport, notamment le Grand Paris Express. Encore faut-il que ces lignes existent ou soient prévues. Ce n'est pas le cas de la ligne 15 ouest. Comme me l'a dit Jean-Louis Bourlanges : le paiement est cash mais la réalisation incertaine – celle-ci est prévue, au mieux, en 2030. Vous comprenez donc pourquoi plusieurs élus franciliens sont opposés à cette augmentation. Comme le dit le maire d'Issy-les-Moulineaux : à force de tuer le gros, le gros sera maigre et le maigre sera mort.
M. Jean-Louis Bourlanges et Mme Frédérique Dumas applaudissent.
Tout d'abord, on ne peut discuter de cet amendement sans avoir à l'esprit l'évolution de l'Ile-de-France. Depuis au moins vingt ans, on verse des larmes de crocodile pour s'inquiéter de la construction d'une métropole de plus en plus ségréguée, sur le plan social mais aussi sur celui des activités économiques. Jean-Pierre Chevènement, alors ministre de l'intérieur, fut le premier à tirer la sonnette d'alarme en parlant d'un risque d'apartheid urbain en Île-de-France.
Comme l'a confirmé la dernière enquête de l'IAURIF – institut d'aménagement et d'urbanisme de la région Ile-de-France – , tous les chiffres montrent qu'en dépit de tous les signaux d'alerte, la situation n'a cessé de se dégrader depuis vingt ans en Île-de-France, avec une concentration des richesses économiques d'un côté et des pauvretés sociales de l'autre.
À un moment donné, il faut donc prendre des dispositions pour y remédier. Le réseau de transport du Grand Paris est un moyen de relier des territoires et de sortir certains d'entre eux – je pense à des villes de Seine-Saint-Denis – de leur relégation. Mais franchement, faire en sorte qu'en matière de fiscalité des entreprises s'opère une distinction entre les territoires où il pleut toujours et ceux qui sont asséchés, ce n'est que justice.
Si on rapproche cette question de la discussion précédente – autour du fait que la disparition de la taxe d'habitation aura plus de conséquences sur les villes qui accueillent beaucoup de logements sociaux – , on s'aperçoit que cette loi de finances pénalise les territoires qui sont déjà en difficulté et exonère de l'effort de solidarité nationale ceux où se concentrent déjà toutes les richesses. Cette mesure de justice fiscale serait donc bienvenue.
M. Jean-Louis Bricout applaudit.
Je partage l'avis de M. Peu selon lequel il faut que ceux qui peuvent payer paient. Ce n'est pas forcément le fond de cet amendement qui me gêne, mais sa forme. Nous avons déjà souvent évoqué ce sujet pendant trois ans ou quatre ans – M. Carrez est en charge de ce marronnier. Chaque année, nous nous y attelons, et chaque année, ça bloque. Le problème, c'est que la SGP n'étant pas complètement financée, un amendement nous est proposé chaque année pour ajouter un peu de l'argent qui manque. Nous ne savons pas où nous allons. Le Gouvernement nous dit que, puisqu'il manquera toujours de l'argent, les gares ne seront pas construites.
Mais ceux qui pourront payer disposeront de belles gares, ce qui confirme les propos de M. Peu. Dans le département du Val d'Oise est prévue la construction d'une gare, desservie par la ligne 17. Reportée à 2030, elle risque même de ne pas voir le jour en cas d'abandon d'EuropaCity. Certains territoires du Grand Paris ne disposeront donc pas de gare. Il faut mettre fin à cette logique, consistant à procéder de manière fragmentaire. Lançons un grand débat sur le Grand Paris et sur les modalités de financement de ce réseau indispensable, afin de s'assurer que nous irons au bout du projet. Mais ajouter chaque année un peu d'argent sans que cela suffise à financer l'ensemble du programme, ce n'est pas la bonne méthode.
M. Charles de Courson, M. Jean-Louis Bricout, Mme Frédérique Dumas et Mme Olivia Grégoire applaudissent.
Je partage l'analyse de Stéphane Peu. Je suis étonné par les réactions qu'on peut observer, sur certains bancs de la majorité, chaque fois qu'on propose de taxer ceux qui ont déjà beaucoup et ne sont pas à plaindre, pour faire en sorte que les inégalités se résorbent. Et très franchement, les villes et arrondissements cités dans l'amendement ne sont pas à plaindre – de ce point de vue, le maire d'Issy-les-Moulineaux fait preuve, comme d'habitude, d'un humour un peu cynique.
Nous sommes très sceptiques sur le projet que masque celui du Grand Paris – je ne parle pas seulement de la question des transports, sur laquelle il y aurait des choses à dire, mais plus globalement d'un projet d'une métropolisation que nous jugeons libéral.
Nous appuierons cependant cet amendement, au moins pour l'exemple et parce qu'il est nécessaire d'opérer un rééquilibrage. Car, contrairement à ce qu'on dit, ces villes de Hauts-de-Seine et ces départements de l'Ouest parisien sont avantagés depuis plusieurs années, notamment grâce à la présence des bureaux.
Je défendrai l'amendement de MM. le rapporteur et Carrez en trois points. D'abord, nous voulons assurer le financement de la Société du Grand Paris, qui accomplit un travail difficile autour de projets importants. Ensuite, l'augmentation proposée représentera, selon les estimations, une augmentation d'un peu moins de 1 % du loyer hors charges, considérée comme tout à fait acceptable, et je dirai absorbable, par l'Observatoire régional de l'immobilier d'entreprise en Île-de-France. Enfin, la préfecture régionale d'Ile-de-France a mené, à notre demande, une concertation auprès des communes – et non pas, j'insiste, auprès des établissements publics – tout au long du mois de juin. C'est sur la base de cette concertation que l'amendement a été préparé.
Monsieur Goasguen, je vous en prie. Je donnerai la parole au président Woerth, à M. Bricout, à M. Saint-Martin et à vous-même.
Constatant qu'il y a, à l'évidence, des points de vue différents au sein de chaque groupe et pour être sûr qu'il n'y ait aucun doute à l'issue du scrutin public, je décide moi-même, conformément à ce qui est autorisé par le règlement, de la tenue d'un scrutin public sur l'amendement no 2468 .
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Jean-Louis Bricout.
J'ai hésité à intervenir parce qu'il s'agit en effet d'un débat de Parisiens. Mais il nous renvoie aux difficultés que nous rencontrons dans un contexte de métropolisation, notamment les écarts constatés entre la territoires ruraux et les métropoles. J'approuve les propos de M. Peu et soutiendrai les amendements qui visent à rétablir un équilibre entre ceux qui détiennent les richesses économiques et ceux qui sont confrontés à la pauvreté sociale.
M. Stéphane Peu applaudit.
Monsieur le président, je vous remercie pour votre compréhension de l'importance de ces enjeux. Il est très dommage que Gilles Carrez ne soit pas présent pour cette discussion.
Ce sont des choses qui arrivent, même si c'est regrettable. Sans vouloir être son porte-parole, on peut faire confiance à sa capacité à bien anticiper et analyser les besoins de financement de la SGP – car c'est bien de cela qu'il est question. Le mécanisme de cette taxe de 20 % sur une zone de bureaux « premium » – il faut rappeler que cette zone a été sélectionnée en fonction d'une assiette précise – …
… est-elle la meilleure méthode ? Une augmentation de taxe, quel que soit le contribuable, n'est jamais la meilleure méthode. Mais il me semble que c'est la plus intelligente par rapport à un besoin global de la SGP.
Je le dis d'autant plus facilement que, d'une part, mon territoire ne disposera pas de gare et que, d'autre part, ce débat ne se résume pas – et ne doit pas se résumer – à un duel francilien entre l'est et l'ouest, mais nécessite une vision d'ensemble.
Je suis d'accord avec M. Pupponi : si demain, nous voulons construire ensemble un vrai projet du Grand Paris, il faudra organiser un débat clair plutôt que d'en discuter à l'occasion de quelques amendements déposés ici ou là. En attendant, nous soutiendrons l'amendement de MM. Carrez et Giraud.
Monsieur Goasguen, je crois avoir compris que vous souhaitiez intervenir…
Monsieur le président, je reconnais en vous un député « premium » ! Pour ma part, je parle au nom du « premium doloris ».
Sourires.
Je vous remercie d'avoir accepté le scrutin public. Étant un des plus anciens de l'hémicycle, je pourrais donner des exemples de débats houleux où des scrutins publics ont été décidés dans des circonstances beaucoup plus délétères. Ce scrutin est important parce que le sujet est clivant – non seulement sur le plan géographique, mais à l'intérieur même des groupes politiques. Un scrutin public a l'immense mérite de poser les questions.
Sur le fond, je trouve que le système est pervers dans la mesure où il s'agit d'un colmatage financier…
… qui recouvre une question politique fondamentale. Merci, en tout cas, d'être revenu sur votre décision. Je suis ravi de reconnaître en vous, comme moi, un député « premium doloris ».
Merci pour vos mots aimables !
La parole est à M. le président de la commission des finances.
Je suis notre collègue : la France est un pays de fiscalité « premium ».
Sourires.
Je n'ai aucune réserve sur Gilles Carrez, qui est un ami, mais j'en ai beaucoup sur l'amendement. L'année dernière, nous avons déjà abordé cette question et avons fait le choix, à la majorité, d'augmenter la fiscalité sur les bureaux et les parkings pour financer la Société du Grand Paris. Pourquoi y revenir cette année ?
Pourquoi systématiquement revenir sur les mêmes sujets ? Les difficultés de financement de la Société du Grand Paris étaient connues l'année dernière et ne le sont pas davantage aujourd'hui.
L'année dernière nous aurions pu débattre, dans un climat plus apaisé, de la création d'une zone particulière ; mais y revenir me semble être une erreur. C'est un mal français, source d'instabilité fiscale : on ne sait jamais si, l'année suivante, on ne va pas revenir sur la question. Les marronniers fiscaux sont problématiques ; je pense donc qu'il faut être très réservé sur l'amendement proposé.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 51
Nombre de suffrages exprimés 44
Majorité absolue 23
Pour l'adoption 26
Contre 18
L'amendement no 2468 est adopté.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.
Après avoir adopté l'amendement précédent, j'espère que vous continuerez sur votre lancée et vous laisserez convaincre par le présent amendement, qui tend à renforcer significativement le taux de la taxe sur les logements vacants, la TLV.
Le 27 juillet 2017, Emmanuel Macron déclarait : « La première bataille, c'est de loger tout le monde dignement. Je ne veux plus, d'ici la fin de l'année, avoir des femmes et des hommes dans les rues, dans les bois ou perdus. » Malheureusement, les chiffres parlent d'eux-mêmes : 140 000 personnes sans domicile fixe, pour plus de 2,8 millions de logements vacants en 2016 – et à peu près autant aujourd'hui. À Paris, à proximité de notre hémicycle, 3 646 SDF ont été recensés en 2019, soit 689 de plus qu'en 2018.
Alors que nous étudions le troisième projet de loi de finances depuis la déclaration du président Macron, force est de constater que l'objectif n'a pas été atteint.
Par ailleurs, des millions de personnes rencontrent des difficultés à se loger à cause de loyers trop chers. Tous les députés parisiens et franciliens qui sont intervenus tout à l'heure dans le débat le savent puisqu'ils sont régulièrement interpellés dans leurs permanences, et je suis sûre qu'ils seront sensibles à l'amendement proposé.
Dans ce contexte, comment accepter que de si nombreux logements restent vacants ? Nous proposons de renforcer le taux de la taxe sur les logements vacants pour faciliter l'accès au logement. L'inefficacité de la taxe actuellement en vigueur devant être imputée à la faiblesse de son taux actuel, nous proposons de le porter de 12,5 à 50 % pour la première année de vacance, et de 25 à 100 % à partir de la deuxième année. Un tel taux devrait inciter les propriétaires de logements vacants à enfin les mettre en location, ce qui augmenterait l'offre et faciliterait l'accès au logement pour le grand nombre. Vous serez sûrement tous d'accord, j'imagine, pour dire qu'il est bien de notre rôle que de légiférer en ce sens.
La parole est à M. Stéphane Peu, pour soutenir l'amendement identique no 2164 .
Nous serons nombreux à reconnaître que le logement devient un immense sujet de préoccupation dans notre pays, pour au moins deux raisons : le nombre de gens mal logés ou pas logés du tout, et le poids de l'augmentation des prix du logement dans la dégradation du pouvoir d'achat des familles, locataires comme propriétaires.
À l'heure de cette crise du logement, il est insupportable de voir le nombre considérable de logements vacants, notamment dans les zones tendues. Dans la seule ville de Paris – on évoque souvent ses prix exorbitants et la difficulté à s'y loger – , il y a 100 000 logements vacants. C'est ahurissant !
La taxe majorée sur les logements vacants que nous proposons représente ni plus ni moins qu'une incitation à louer ou à vendre les logements immobilisés et inutiles afin de les remettre dans le circuit locatif ou dans celui de l'accession à la propriété. Ceux qui voudraient à tout prix les laisser vacants paieraient une taxe qui, je le rappelle, est fléchée vers l'Agence nationale de l'habitat, et apparaît donc comme doublement vertueuse.
Je partage votre constat. J'ai été l'un des premiers maires à appliquer la taxe d'habitation sur les logements vacants, la THLV, que les communes peuvent volontairement instaurer ; je comprends donc votre raisonnement.
Cela étant, les logements vacants ou sous-occupés représentent en France un problème global. Parmi les outils dont nous disposons pour y faire face, il y a la THLV, qui n'est pas visée par l'amendement puisqu'elle est volontaire et qu'elle concerne en général des communes de plus petite taille, souvent des communes rurales à forte présence touristique ; la TLV que vous citez ; et la surtaxe sur les résidences secondaires.
Il faudrait mener une réforme de toutes ces taxes sur le logement non occupé ou sous-occupé dans le cadre d'une politique publique plus large. C'est pourquoi je vous demande de retirer l'amendement – dont les taux, multipliés par quatre, ne représentent d'ailleurs pas forcément la bonne maille – pour nous permettre de légiférer rapidement sur ce problème. Si vous le maintenez, ce sera un avis défavorable.
Nous avons eu ce débat il y a quelques instants avec Mme Pires Beaune à propos d'un autre amendement. Pour les mêmes raisons que M. le rapporteur général, je suggère le retrait ; à défaut, avis défavorable.
Monsieur le rapporteur général, nous sommes là pour légiférer, et l'amendement permettrait de commencer ce travail. Certes, il ne réglera pas entièrement le problème des logements vacants – il faudrait pour cela revenir sur des décennies de politiques visant à rendre les villes et les métropoles plus « attractives », c'est-à-dire plus chères, et à les gentrifier. Mais nous vous proposons là une première solution, que vous pourriez d'ailleurs amender si vous trouvez la hausse que nous proposons excessive. Faites-le donc ; nous soutiendrons tout ce qui ira dans le sens de l'accès au droit fondamental au logement.
Je vous renvoie au rapport de la fondation Abbé Pierre sur le sujet, paru il y a quelques semaines, et aux dernières statistiques de l'INSEE sur l'augmentation du taux de pauvreté – 400 000 pauvres en plus – , celle-ci se traduisant notamment par la vulnérabilité en matière de logement. Le phénomène est particulièrement flagrant à Paris, mais d'autres villes sont également concernées, et il serait inconcevable que nous ne fassions rien, laissant prospérer les pratiques des propriétaires qui préfèrent laisser des logements vacants pour faire du bénéfice plutôt que de permettre à des gens de les louer ou de les acheter pour se loger. Nos concitoyens ne comprendraient pas que nous n'avancions pas, y compris à la faveur d'un amendement – que vous pourriez sous-amender – qui va dans le sens de l'intérêt général.
On taxe beaucoup les stocks et peu les flux, et je regrette l'absence de réflexion à ce sujet. Ainsi, la question n'a pas du tout été abordée dans le cadre de l'amendement précédent, relatif à la taxation des bureaux dans les zones « premium », que j'ai voté. La vacance est aussi liée à la rétention foncière : on attend pendant des années sans vouloir louer les biens inoccupés. L'axe de réflexion n'est pas le bon : il faut taxer moins les stocks et plus les flux.
Madame Obono, vous soulevez un vrai problème, celui de savoir pourquoi les zones tendues présentent des taux de vacance aussi élevés ; mais, pour le combattre, c'est à ses causes qu'il faut s'attaquer.
Pourquoi des propriétaires ne louent-ils pas leurs biens ? Cela paraît aberrant. Voilà le problème qu'il faut traiter. En augmentant le taux de taxation, vous ne changerez rien ; c'est au fond des choses qu'il faut s'attaquer. Mes chers collègues, même si cela ne doit pas me rendre populaire, j'estime qu'il faudrait se poser des questions sur l'équilibre entre les droits du propriétaire et ceux du locataire.
Nous n'avons en effet cessé, depuis quinze à vingt ans, de renforcer les droits du locataire. Aujourd'hui, une partie des propriétaires vendent ou ne veulent plus louer. J'ai vu des cas dramatiques : des gens modestes qui avaient mis de l'argent de côté et acheté un petit appartement pour compléter leur retraite ; or voilà que le locataire ne paie pas, et pour en obtenir l'expulsion, il faut deux ou trois ans. Ils étaient ruinés et n'arrivaient même plus à payer les annuités d'emprunt qu'ils n'avaient pas fini de rembourser !
C'est l'une des causes importantes du problème, et tant que vous n'aurez pas sécurisé les droits des propriétaires, vous aurez des logements vacants. En effet, madame Obono, quel intérêt les propriétaires ont-ils de laisser un logement vacant ?
Il faut poser les questions de fond. Je suis donc défavorable à votre amendement.
Par ailleurs, Gilles Carrez que je viens d'avoir au téléphone, m'a demandé de vous dire que s'il n'est pas là, c'est qu'il est en train d'intervenir à un colloque à la Cour des comptes.
Il concerne la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, la TEOM. Actuellement, les services fiscaux prélèvent 8 % de frais de gestion et de recouvrement de cette taxe – frais d'assiette et dégrèvements, par exemple. Au PLF 2019, on avait voté une part incitative permettant d'abaisser les frais de gestion pour les collectivités qui s'engageaient dans une démarche de réduction des déchets ; mais cette baisse est très limitée dans le temps puisqu'elle n'est prévue que sur trois ans.
Il s'agit de réduire tous les frais de gestion des services fiscaux de la TEOM.
Nous proposons également cet amendement, au-delà de l'incitation à la réduction du volume des déchets, parce que la TEOM est prélevée avec la taxe foncière, parce que cette dernière risque d'exploser dans les prochaines années si l'on en juge par toutes les dispositions que comporte l'article 5 sur la réforme de la fiscalité locale, et parce qu'il serait de bon ton de permettre aux collectivités de diminuer le taux de la TEOM là où c'est possible, afin de diminuer la facture des propriétaires qui sont les plus lourdement taxés en matière de fiscalité locale.
La parole est à Mme Frédérique Dumas, pour soutenir l'amendement no 480 .
Ce sont en effet plus de 550 millions d'euros qui sont prélevés au niveau national par la trésorerie au titre de la gestion pour les collectivités de la TEOM. La diminution que nous préconisons représenterait un allégement de la fiscalité totale de plus de 300 millions d'euros par an. La diminution des frais de gestion portant uniquement sur la TEOM avec une part incitative, telle que la propose le Gouvernement, ne concerne qu'une minorité des collectivités qui financent la gestion des déchets par le biais de la TEOM, et elle n'est que temporaire. Il s'agit donc bien d'un amendement de cohérence puisqu'il vise à aligner les frais prélevés par la trésorerie sur les frais pratiqués pour la gestion de la taxe foncière sur les propriétés bâties, ces deux taxes faisant l'objet d'un traitement commun par les impôts.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l'amendement no 642 .
Les frais de gestion de la TEOM représentent quelque 550 millions d'euros. Cette somme me semble prohibitive. C'est pourquoi nous en proposons une réduction de 5 %, soit environ 300 millions d'euros, car, encore une fois, ces frais alourdissent la facture du contribuable local.
Une réduction des frais de gestion est déjà prévue de la TEOM en cas de mise en place de la tarification incitative, et ce pendant les trois première années. Or on ne peut se permettre une politique court-termiste en la matière, car les infrastructures nécessaires sont très lourdes. Et si l'on veut vraiment inciter à de nouvelles méthodes de travail concernant les ordures ménagères, il faut décidément se projeter vers le moyen et le long terme. Aussi, nous vous proposons de réduire les frais de gestion de la TEOM de 8 % à 3 %, non pas pour les trois premières années mais indéfiniment, dès lors que des mesures ont été prises pour favoriser l'économie circulaire.
Nous avons longuement discuté de la question l'année dernière. Les frais de gestion sont une contrepartie des frais de dégrèvement, des frais de non-valeur, des frais d'assiette et de recouvrement ; ils correspondent donc bien à une réalité. Nous avons en effet voté, l'an dernier, un taux réduit de frais de gestion à 3 % afin de le rendre incitatif, non pas pour trois ans mais pour cinq ans après l'adoption de mon amendement de compromis à ce sujet. Je préfère que nous en restions à l'équilibre ainsi obtenu : nous n'allons pas changer les règles chaque année sur ce genre de trucs, ce n'est pas possible. Avis défavorable.
Même avis que le rapporteur sur les deux séries d'amendements identiques. J'ajoute que les frais de gestion ont été considérablement diminués en 2010 à l'occasion de la réforme de la taxe professionnelle et qu'au-delà de la rémunération d'un certain nombre de services, ces frais ont également été utiles pour faire face à des actions contentieuses relatives à la TEOM, engagées par des contribuables. Jouons donc cette fois-ci, si vous le voulez bien, le jeu de la stabilité.
Il n'y a plus aucune cohérence concernant les frais de perception. Certains sont à 3 %, d'autres à 8 %… Remettre un peu d'ordre dans tout cela pourrait être d'ailleurs un sujet d'étude pour la commission des finances, monsieur le rapporteur général.
Nous discutons de la TEOM à 8 %, mais quel est le taux des frais de gestion de la redevance d'enlèvement des ordures ménagères, la REOM ? Connaissez-vous la réponse ? Zéro pour cent, puisqu'il s'agit d'une recette non fiscale. Il serait utile, j'y insiste, monsieur le rapporteur général, qu'une étude soit réalisée sur la question afin que nous rationalisions un peu tout le dispositif.
En ce qui concerne les frais de gestion prélevés par la trésorerie, comment expliquez-vous, monsieur le rapporteur général, monsieur le secrétaire d'État, un tel différentiel de facturation du service entre la TEOM et la taxe foncière sur les propriétés bâties ?
Je rejoins Mme Louwagie : la réduction des frais de gestion de la TEOM relève, en l'état, d'une vision à court terme. De surcroît, à la fin, c'est toujours l'usager qui paie. L'application de la redevance incitative pousse les usagers à faire un effort pour trier leurs déchets. Puis ils ne comprennent plus : ils pensent faire un effort pour la planète en contrepartie d'une réduction de la TEOM et tout à coup leur facture, qui avait baissé comme l'intercommunalité le leur avait promis, augmente sans qu'ils sachent pourquoi – en fait, parce que le dispositif incitatif est parvenu à échéance – et ils finissent par ne plus vouloir fournir d'efforts.
Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 2506 , 172 , 381 , 832 , 2577 , 2648 , 774 , 1318 et 2398 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 172 , 381 , 832 , 2577 et 2648 sont identiques, de même que les amendements nos 1318 et 2398 .
La parole est à M. Benoit Potterie, pour soutenir l'amendement no 2506 .
Nous proposons une baisse de la taxe sur les surfaces commerciales – TASCOM – , taxe inéquitable puisqu'elle ne touche que les commerces physiques et non le commerce en ligne – e-commerce. Nous souhaitons la baisser de 25 %, avec une compensation de l'État pour les communes qui en bénéficient aujourd'hui. La perte de recettes représenterait environ 240 millions d'euros que nous proposons de compenser par la mise en place d'une taxe sur les entrepôts servant au stockage des biens vendus à distance.
C'est une manière de rééquilibrer notre modèle fiscal qui pèse trop fortement sur les commerces physiques. Je trouve en effet anormal qu'une surface commerciale paie cette taxe alors qu'elle est en concurrence avec des « pure players », les distributeurs en ligne qui, eux, ne la paient pas.
Nous formulons plusieurs propositions pour établir l'équité fiscale et territoriale entre les différents acteurs du commerce. Le présent dispositif prévoit d'intégrer les entrepôts de stockage des distributeurs en ligne dans l'assiette de la TASCOM. Il s'agit en effet de vraie plateformes de ventes commerciales et elles constituent le dernier maillon avant l'achat du bien par le consommateur ; c'est pourquoi elles méritent d'être assujetties à la TASCOM.
On pourrait considérer que ces amendements identiques sont des amendements d'appel. Reste qu'ils soulèvent une vraie question. Nous avons travaillé sur la taxation des GAFA – Google, Amazon, Facebook et Apple – au cours de l'année et il reste du chemin à faire pour aligner la fiscalité des commerçants physiques avec celle des distributeurs en ligne, qui se contentent d'avoir des entrepôts alors même que le commerce est leur activité principale.
Nous proposons d'étendre la TASCOM aux entrepôts servant au stockage de biens vendus à distance. L'objectif est de faire en sorte que le commerce en ligne paie sa juste part d'impôt. Je suis conscient que de plus en plus d'entreprises françaises relevant du commerce électronique et, surtout, que de plus en plus d'entreprises de la grande distribution mettent en place des offres omnicanales.
Afin de ne pas les pénaliser, le présent amendement prévoit une déduction de la nouvelle TASCOM pour les acteurs possédant à la fois des magasins physiques, par le biais de leur emprise foncière, et des entrepôts logistiques. Je ne veux pas pénaliser les petites et moyennes entreprises – PME – qui se lancent dans le commerce en ligne et c'est pourquoi je propose l'instauration de seuils qui permettent de les exclure du dispositif.
Concrètement, cela signifie que les distributeurs en ligne qui ont un certain volume de vente seraient désormais assujettis à la TASCOM, que les PME qui se lancent dans le commerce en ligne en seront exclues et que les commerces omnicanaux qui ont une surface de vente supérieure à celle de leur entrepôt ne s'acquitteraient que de la TASCOM de leur magasin physique.
La parole est à M. Jean-Paul Mattei, pour soutenir l'amendement no 2648 .
Nous souhaitons instaurer, à travers cet amendement de Jean-Noël Barrot, un dispositif de compensation pour une entreprise qui aurait à la fois des magasins physiques et des entrepôts, cela par le biais d'une déduction possible de la TASCOM. Nous souhaitons en particulier ralentir la construction de ces gigantesques entrepôts que l'on voit fleurir dans nos campagnes. Il s'agit de limiter cette pratique qui vraiment nous inquiète quant à la gestion du foncier.
La parole est à Mme Frédérique Dumas, pour soutenir l'amendement no 774 .
S'il faut en effet inciter à moins d'artificialisation des sols et à plus d'utilité, il est essentiel de taxer les entrepôts et les centres logistiques des commerces en ligne.
La parole est à M. Jean-Louis Bricout, pour soutenir l'amendement no 1318 .
Il existe en effet un problème d'équité fiscale entre le commerce physique et les grandes surfaces destinées au commerce en ligne. Un autre problème est celui, qui vient d'être évoqué, de l'artificialisation des sols et de l'étalement urbain.
La parole est à Mme Émilie Cariou, pour soutenir l'amendement no 2398 .
Le présent amendement vise à soumettre à la TASCOM les entrepôts et les centres logistiques afin de renforcer l'équité entre le commerce en ligne et le commerce physique.
Qu'il s'agisse de l'environnement ou de l'équité fiscale entre différents systèmes, la question est d'importance. Je rappelle que ces amendements ont des conséquences sur les recettes des collectivités territoriales, conséquences qui, à ce stade, n'ont été mesurées par aucun des signataires des amendements. Je vous mets vraiment en garde car certains EPCI, si l'on adoptait l'un des dispositifs que vous proposez, gagneraient beaucoup quand d'autres perdraient beaucoup. On ne peut donc pas voter pour ce type d'amendement sans qu'une étude d'impact complète soit réalisée. Je fais des reproches au Gouvernement concernant l'insuffisance d'études d'impact liées au présent PLF ; il ne faudrait pas que nous encourions les mêmes reproches.
J'ajoute que, suite à notre demande insistante, une mission de l'inspection générale des finances est en ce moment même en train de faire le point sur la fiscalité locale pesant sur le commerce. Selon sa lettre de mission, elle doit « étudier les effets d'une fiscalité spécifique des entrepôts, sans nuire à la compétitivité des secteurs de la logistique et de la distribution en France ». Le rapport de l'IGF sera manifestement remis au Gouvernement d'ici à la fin de l'année.
J'estime qu'il est préférable que nous demandions aux ministres concernés d'être transparents et de diffuser ce rapport, de façon que la commission des finances puisse se saisir pleinement du sujet. Ainsi, elle sera en mesure, lors de l'examen du prochain projet de loi de finances, de proposer des dispositions fondées sur des éléments étayés, et de disposer d'études complémentaires sur leur impact sur les collectivités locales.
Si M. le secrétaire d'État est d'accord avec cette procédure, j'invite les auteurs des amendements à les retirer dans l'attente de la publication du rapport que je viens d'évoquer, et du travail qu'effectuera la commission des finances.
Je demande le retrait de l'ensemble des amendements ; à défaut, mon avis serait défavorable. Je partage l'argument de M. le rapporteur général selon lequel les amendements, en l'état, ne peuvent anticiper les mouvements de transferts financiers entre collectivités, ce qui crée un risque que nous ne pouvons pas courir s'agissant du niveau de recettes des collectivités concernées.
Je partage aussi ses arguments selon lesquels les amendements, tels qu'ils sont rédigés, semblent assez faciles à contourner en termes de localisation des zones de stockage – ce problème de rédaction s'explique certainement par la complexité du sujet.
Au-delà de ce qu'a dit M. le rapporteur général, je partage l'objectif poursuivi par les auteurs des amendements concernant la nécessité de réfléchir à cette question des entreprises de stockage et au poids de la TASCOM.
M. le rapporteur général l'a dit, une mission est actuellement en cours, à la demande du Gouvernement. Elle nous remettra son rapport dans les prochains mois – d'ici à la fin de l'année, comme l'a dit Joël Giraud. Je m'engage bien évidemment à ce que ce rapport soit transmis au Parlement de manière que nous puissions travailler ensemble sur les bases de ce document, et mieux évaluer les effets de transfert ou les effets de bord des dispositions aujourd'hui présentées comme les réponses potentiellement les plus efficaces. Nous pourrons ainsi trouver un système dont nous aurons parfaitement anticipé les effets.
Monsieur le président, si vous le permettez, j'ajoute un mot sur un autre sujet. Il y a quelques heures, Mme Christine Pires Beaune m'a demandé le rapport du Gouvernement relatif aux exonérations et aux compensations. Je vous indique qu'il sera en ligne, c'est-à-dire à la disposition du Parlement, dès le début de la semaine prochain.
Je les maintiens, monsieur le président. Le commerce en ligne progresse depuis des années alors que le commerce physique régresse. Les plans sociaux se sont multipliés ces dernières semaines dans ce secteur. Si nous ne faisons rien, les recettes des collectivités baisseront puisque les magasins fermeront les uns après les autres.
En le présentant, j'ai indiqué qu'il s'agissait d'un amendement d'appel. Pour ma part, j'entends les difficultés que posent les dispositifs que nous proposons.
Je pense qu'il est indispensable que nous travaillions sur cette question. Depuis 2017, nous l'abordons lors de l'examen de tous les projets de loi de finances et nous constatons bien que les choses n'avancent pas suffisamment rapidement pour nos commerces physiques. Il est urgent que la commission des finances se saisisse de ce sujet comme l'a proposé le rapporteur général. Je retire mon amendement.
L'amendement no 381 est retiré.
Nous le retirons, monsieur le président, mais j'insiste : il y a urgence à se positionner sur ce sujet.
L'amendement no 2648 est retiré.
Monsieur Brun, madame Louwagie, maintenez-vous vos amendements respectifs ?
Il a été adopté par la commission du développement durable. Compte tenu des arguments présentés par M. le rapporteur général, nous le retirons à ce stade. Nous regrettons à notre tour que nous n'ayons pas davantage avancé sur ce sujet en une année.
Je précise que notre amendement ne comportait que des mesures positives, et qu'il ne provoquait aucun effet de bord pénalisant pour certaines communes. Nous nous rangeons cependant à la position du rapporteur général et nous acceptons d'attendre que l'on avance globalement sur cette question.
L'amendement no 2398 est retiré.
Il est maintenu. Nous parlons depuis très longtemps de réduire les iniquités, et nous ne faisons rien. Les positions prises sur la « taxe GAFA » en témoignent, puisque cette taxe sera inefficace. Nous avons l'occasion d'agir efficacement : profitons-en !
Il est maintenu, d'autant que je ne suis pas son premier signataire : c'est M. Dominique Potier. De plus, comme l'amendement de la commission du développement durable que Mme Cariou vient de retirer, il n'a pas d'effet négatif sur les collectivités. Il ne peut apporter que des revenus supplémentaires. Il y a vraiment urgence – à certains moments, je me demande même s'il n'est pas trop tard.
Il faut regarder ces amendements avec bienveillance, car ils posent de très bonnes questions. À un moment, il faut aussi trancher. On ne peut pas se contenter d'attendre la prochaine loi, énorme, qui révolutionnera tout.
L'iniquité fiscale, que chacun constate bien pour les petits commerces de centre-ville, concerne maintenant aussi les grandes surfaces. On en vient à penser qu'ils feront bientôt combat commun contre le commerce en ligne – même si les grandes surfaces ont désormais souvent elles-mêmes, comme les petits commerces, une activité de commerce en ligne. Il est clair qu'il faut regarder ce sujet de façon globale.
Par ce que les amendements que nous examinons comportent certainement des faiblesses juridiques qui pourraient rendre leur application compliquée, nous devrions créer un groupe de travail.
Il ne s'agirait pas d'enterrer les choses – le moins que l'on puisse dire c'est que lorsque nous avons créé un groupe de travail, cela n'a pas servi à enterrer un sujet. Composé des députés de la commission des finances qui souhaiteraient vraiment s'y associer, ce groupe de travail permettrait d'aboutir à des propositions solides sur le plan juridique afin de parvenir à l'équité. En effet, les entrepôts de commerce en ligne, qui sont, au fond, le dernier maillon avant le consommateur, ne sont que la face émergée d'un l'iceberg commercial. En tout état de cause, cette face émergée de l'iceberg doit être taxée comme le sont les magasins physiques.
Nous devons regarder cela de plus près et trouver une solution solide sur le plan juridique – ce qui ne doit pas être tout à fait le cas des amendements qui restent en discussion.
L'amendement no 2506 n'est pas adopté.
Il vise à moduler progressivement le taux de la TASCOM, selon le lieu d'implantation des grandes surfaces, pour l'augmenter de 50 % à l'horizon 2023 pour les installations situées hors des villes et des centres-bourgs, et le réduire de 50 % à l'horizon 2023 pour celles situées en centralité urbaine, dans une logique de bonus-malus.
La création d'une majoration supplémentaire progressive pour les nouvelles constructions hors villes et hors centres-bourgs à partir du 1er juin 2020 s'inscrit dans l'objectif « zéro artificialisation nette » du Gouvernement, visant à éviter au maximum de nouvelles consommations de terres agricoles et naturelles, et à les réduire dans les nouveaux projets.
Je rappelle que la notion de centralité urbaine et déjà présente dans le code de l'urbanisme à l'article L. 141-17, lequel dispose que « le document d'aménagement artisanal et commercial localise les secteurs d'implantation périphérique ainsi que les centralités urbaines, qui peuvent inclure tout secteur, notamment centre-ville ou centre de quartier, caractérisé par un bâti dense présentant une diversité des fonctions urbaines, dans lesquels se posent des enjeux spécifiques du point de vue des objectifs mentionnés au deuxième alinéa de l'article L. 141-16 ».
Dans le même esprit, il vise à moduler la taxe sur les surfaces commerciales selon leur localisation, ce qui présenterait un double avantage.
Cela freinerait l'artificialisation des sols en zone périubaine. De mémoire, en France, toutes les vingt minutes, on artificialise l'équivalent de quatre terrains de football de terres agricoles ! Nous sommes donc confrontés à un immense sujet environnemental et climatique.
Cette modulation permettrait aussi d'inciter les commerces à revenir dans les centres-villes, ce qui correspond à une politique engagée par le Gouvernement avec le plan « Action coeur de ville ».
Il vise, de la même façon, à moduler le taux de la TASCOM selon le lieu d'implantation des grandes surfaces en utilisant la notion de centralité urbaine qu'évoquait Mme Frédérique Dumas.
Je suis favorable à ce que ces questions soient étudiées au sein du groupe de travail dont le président de la commission des finances vient d'annoncer la création. Ces amendements auraient des conséquences considérables pour les collectivités locales – songez que certains EPCI pourraient perdre 50 % de leur TASCOM ! Compte tenu de nos débats pour nous assurer que les collectivités seront compensées à l'euro près, cela pose vraiment un problème.
La vision globale que nous aurons grâce au rapport de l'IGF et au groupe de travail de la commission des finances permettra d'étudier dans de bonnes conditions l'ensemble de ce sujet. Avis défavorable.
Même avis. J'ajoute que l'article 48 du projet de loi de finances, qui prévoit des possibilités d'exonération, en particulier dans les centres-bourgs et les centres-villes, à la main des communes, me paraît apporter une première réponse aux auteurs des amendements.
Mes chers collègues, je propose que nous finissions l'examen des amendements portant article additionnel après l'article 5 avant de lever la séance, puisqu'il n'en reste que fort peu.
La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l'amendement no 909 .
Il vise à affecter la majoration de la TASCOM de l'État à la collectivité de Corse, avec des seuils d'application de la majoration adaptée à l'échelle de ce territoire insulaire qui est la région où le nombre de mètres carrés de grandes surfaces rapporté au nombre d'habitants est le plus élevé de l'Hexagone. Une partie du produit de la majoration pourrait être affectée à l'Office foncier de la Corse.
Même avis
Je me permets de revenir sur l'amendement no 1064 de M. Matthieu Orphelin, qui aurait dû être soutenu avant celui-là, mais qui n'a pas été défendu. Je souhaite que l'on revienne sur le sujet en nouvelle lecture.
Dans mon département, une grande enseigne nationale ouvre ses commerces le dimanche après-midi en centre-ville, ce qui déstabilise le petit commerce. L'amendement visait à taxer les premiers au profit des seconds. Je crois que nous serons nombreux à être concernés par ce type de pratiques.
Peut-on me dire ce qui motive les avis défavorables émis sur mon amendement ? Je ne vois pas en quoi il pose un problème. Il y a une TASCOM, on peut la transférer et la majorer en raison de la très forte présence des grandes surfaces en Corse. Cela permettrait d'abonder les recettes de la collectivité de Corse.
Mon avis est par exemple motivé par le fait que vous instaurez un seuil de 230 000 euros de chiffre d'affaires annuel, ce qui fait entrer dans le champ de votre amendement des commerces qui ne sont pas des grandes surfaces. À ce seul titre, il faudrait donc revoir le dispositif que vous proposez.
L'amendement no 909 n'est pas adopté.
Cet amendement identique a pour objet d'affecter le produit de la TASCOM aux régions car elles ont, du fait de leurs compétences de développement économique, une vision globale de l'aménagement du territoire, en particulier à travers le schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires – SRADDET – ou le schéma directeur de la région Île-de-France – SDRIF. Il est donc cohérent que le produit de la TASCOM leur soit affecté.
Certaines communes ou EPCI sont, en outre, tentés d'autoriser l'implantation des grandes surfaces, qui contribuent à ce que d'aucuns appellent « la France moche ». Les régions ont probablement plus de recul dans ce domaine et pourraient organiser leur implantation de manière plus équilibrée, notamment grâce à l'outil fiscal de la TASCOM.
Avis défavorable. La mesure ici proposée entraînerait une perte de 774 millions d'euros pour le bloc communal.
Avis défavorable, pour la même raison.
La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l'amendement no 889 .
Il s'agit du fameux abattement de 30 % de la TFPB pour les bailleurs sociaux. Par ce biais, le Gouvernement et le Parlement ont décidé de les exonérer, mais ce sont en réalité les communes qui paient, puisque l'État ne compense l'abattement qu'à hauteur de 40 %.
On demande donc aux communes les plus pauvres, qui concentrent le plus grand nombre de logements sociaux, de se priver de recettes fiscales pour favoriser la politique de logement des bailleurs et du Gouvernement.
Si l'État veut payer, très bien, mais ce n'est pas aux collectivités locales de le faire. Avec cet amendement, je propose donc une compensation intégrale par l'État de l'abattement de 30 % de la TFPB pour les bailleurs sociaux.
La suggestion de M. Pupponi mérite d'être examinée dans le cadre du rapport visé dans un amendement que nous avons précédemment adopté : toutes les questions relatives au logement social y seront abordées.
La question soulevée par cet amendement n'est pas nouvelle. Les exonérations de TFPB existent depuis longtemps, et les compensations ont déjà largement décliné.
J'ai indiqué tout à l'heure que le rapport sur les compensations d'exonération, demandé l'année dernière, sera rendu public en début de semaine prochaine. Il constituera certainement un outil utile pour poursuivre la discussion.
De façon plus prosaïque, j'ajoute que si l'amendement était adopté, nous serions bien en peine de faire face, sur le plan budgétaire, aux conséquences immédiates de cette compensation intégrale par l'État, y compris au vu de l'ancienneté du sujet.
Dans l'attente d'un examen plus approfondi et du rapport prévu, je suggère donc le retrait ; à défaut, l'avis serait défavorable.
L'amendement no 889 n'est pas adopté.
L'amendement no 2442 , non soutenu, est repris par M. le rapporteur général.
Monsieur le rapporteur général, vous avez la parole pour le défendre.
L'amendement, qui a été examiné au titre de l'article 88, vise à exonérer de la taxe d'habitation et à dégrever de la contribution à l'audiovisuel public les contribuables qui bénéficient du dispositif dit « de sortie en sifflet » – pour les habitués, la fameuse « clause de grand-père », qui doit être ici respectée.
L'amendement no 2442 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Suite de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2020.
La séance est levée.
La séance est levée à treize heures cinq.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Serge Ezdra