La commission examine le projet de loi de finances rectificative pour 2017 (n°384) (M. Joël Giraud, rapporteur général)
Aujourd'hui, nous sommes saisis sur ce projet de loi de finances rectificative (PLFR) de 256 amendements, que nous examinerons sous forme dématérialisée. C'est une première pour notre commission, mais d'autres commissions sont passées à la dématérialisation auparavant, et cela s'est très bien déroulé. Si des difficultés devaient se faire jour, une assistance technique y remédiera. Les amendements seront affichés sur les écrans de notre salle de commission, mais également, en temps réel, sur vos tablettes, grâce à l'application Eliasse.
Article liminaire : Prévision de solde structurel et de solde effectif de l'ensemble des administrations publiques pour l'année 2017
Suivant l'avis défavorable du rapporteur général, la commission rejette l'amendement CF287 de Mme Valérie Rabault.
Puis elle adopte l'article liminaire sans modification.
PREMIÈRE PARTIE
CONDITIONS GÉNÉRALES DE L'ÉQUILIBRE FINANCIER
TITRE Ier
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES
Article 1er : Compensation des transferts de compétences aux régions et aux départements par attribution d'une part du produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE)
La commission adopte l'amendement rédactionnel CF129 du rapporteur général.
Puis elle adopte l'article 1er modifié.
Article 2 : Ajustement des ressources du compte d'affectation spéciale Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs et de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France
La commission adopte l'amendement de précision rédactionnelle CF130 du rapporteur général.
Puis, suivant l'avis défavorable du rapporteur général, elle rejette l'amendement CF288 de Mme Valérie Rabault.
Elle adopte ensuite l'article 2 modifié.
Article 3 : Ajustement des recettes du compte d'affectation spéciale Transition énergétique
La commission adopte successivement les amendements de précision rédactionnelle CF131 et CF132 du rapporteur général.
Puis elle adopte l'article 3 modifié.
Article additionnel après l'article 3 : Augmentation du plafond d'affectation d'un prélèvement au Centre national pour le développement du sport
La commission examine CF94 de Mme Perrine Goulet.
Lors de l'examen du projet de loi de finances initiale pour 2018, le Gouvernement s'est engagé à proposer par voie d'amendement au présent PLFR 27 millions de crédits supplémentaires au Centre national du développement du sport (CNDS). N'ayant pas vu l'amendement annoncé, je le dépose moi-même.
La commission adopte l'amendement.
TITRE II
DISPOSITIONS RELATIVES À L'ÉQUILIBRE DES RESSOURCES ET DES CHARGES
Article 4 et état A : Équilibre général du budget, trésorerie et plafond d'autorisation des emplois
La commission adopte l'amendement de précision rédactionnelle CF133 du rapporteur général.
Elle adopte ensuite l'article 4 modifié.
Puis elle adopte la première partie du projet de loi de finances rectificative, modifiée.
SECONDE PARTIE
MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES
TITRE Ier
AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2017. - CRÉDITS DES MISSIONS
Article 5 et état B : Budget général : ouvertures et annulations de crédits
La commission adopte l'article 5 sans modification.
Article 6 et état C : Budgets annexes : annulations de crédits
La commission adopte l'article 6 sans modification.
Article 7 et état D : Comptes spéciaux : ouvertures et annulations de crédits
La commission adopte l'article 7 sans modification.
TITRE II
AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2017.
PLAFONDS DES AUTORISATIONS DES EMPLOIS
Article 8 : Plafonds des autorisations d'emplois de l'État
La commission se saisit de l'amendement CF289 de Mme Valérie Rabault.
Cet amendement a pour objet de demander au Gouvernement un rapport à propos du paiement des aides versées au titre de la politique agricole commune (PAC), qui pose beaucoup de problèmes depuis des années, notamment en ce qui concerne les aides à l'agriculture biologique. Le solde 2015 vient seulement d'être versé !
Le sujet est important. Une certaine opacité règne sur ces retards. Il faut en trouver les explications pour remédier aux difficultés et trouver des solutions pour l'avenir. Je suis donc favorable à l'amendement – au moins pour que le sujet soit débattu en séance publique.
Avec Hervé Pellois, nous avons donné le détail des aides PAC et le calendrier de leur versement dans notre rapport spécial consacré à l'agriculture. C'est un sujet que nous allons suivre de près toute l'année dans le cadre de nos fonctions de rapporteurs spéciaux. Je pense donc que ce rapport suffira. Nous avons prévu d'aller voir des agences de paiement, d'aller voir comment les régions ont restructuré les aides prises en charge, comment celles-ci sont payées et, surtout, calculées. Cela fait vraiment partie des attributions des rapporteurs spéciaux.
Je comprends la position de Mme Cariou, mais, sur un sujet aussi compliqué que la politique agricole, ne serait-il pas intéressant de disposer à la fois du diagnostic du Parlement et de la vision du Gouvernement, puisque c'est tout de même lui qui aura la main ? Ce double diagnostic pourra permettre un dialogue équilibré.
En tant que rapporteurs spéciaux, vous pourrez, c'est vrai, enquêter, mais toutes les administrations ne sont pas toujours coopératives quand il s'agit de donner toutes les informations au Parlement, ce que nous déplorons.
Je maintiens ma position. Je respecte infiniment le travail des rapporteurs spéciaux, mais la situation reste difficile, de nombreux agriculteurs n'ont toujours pas reçu les aides. L'adoption de cet amendement permettrait un dialogue en séance avec le ministre. Il faut être très clair : un budget de cavalerie se traduit aujourd'hui par des difficultés énormes. Nous sommes presque au mois de décembre et certaines aides de 2015, notamment les indemnités compensatoires de handicaps naturels – je connais bien le sujet – n'ont pas été versées.
J'entends bien les précisions de Mme Cariou, dont je la remercie, mais le rapport demandé serait complémentaire – il pourrait même aider les rapporteurs spéciaux. Toutes les informations peuvent nous aider à y voir clair.
Nous sommes tous d'accord. Il y a des difficultés complètement anormales, insupportables pour les agriculteurs. Certains n'ont pas encore perçu les aides de la PAC 2015 ! À diverses reprises, les uns et les autres, nous avons alerté le Gouvernement. Chaque fois, on nous a indiqué de prochaines dates de versement. La dernière communiquée était « fin novembre », mais tous les agriculteurs n'ont pas encore perçu les montants qu'ils devaient percevoir. Il importe de savoir ce qui s'est passé pour que cela ne se reproduise pas. Dans le cadre du contrôle de l'action du Gouvernement par le Parlement, notre rôle est de comprendre et de trouver une solution.
Le plus utile n'est pas de constater ce que tout le monde sait – que l'on n'a toujours pas payé les mesures agroenvironnementales (MAE) 2015 – mais de trouver des solutions. On sait qu'il y a des problèmes informatiques, mais il y a peut-être d'autres pistes à explorer, par exemple la mobilisation des créances pour éviter les crises de trésorerie, les banques refusant de consentir des avances de trésorerie quand elles ne sont pas sûres que les aides seront versées. Il ne s'agit pas simplement de nous dire qu'il faut que le système informatique fonctionne mieux. Tous les ministres nous le répètent depuis deux ans !
Nous évoquons la question dans le cadre de notre rapport spécial sur l'agriculture. Il y a des déjà des éléments. Nous avons entendu les représentants de l'Agence de services et de paiement (ASP), nous avons entendu ceux des régions, nous avons essayé de tracer avec eux quelques perspectives. On peut toujours demander à tout le monde de revenir autour de la table pour un nouveau rapport sur des dysfonctionnements dont nous sommes déjà parfaitement au courant, mais ce n'est pas très intéressant. Je ne suis pas sûr que le rapport demandé puisse vraiment être utile. Il faut un travail parlementaire. Avec Émilie Cariou, nous avons déjà envisagé la question, nous avons même commencé à prendre des rendez-vous. Un doublon est toujours possible, mais cela ne me paraît pas très opportun.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 8 sans modification.
TITRE III DISPOSITIONS PERMANENTES
I. MESURES FISCALES NON RATTACHÉES
Article 9 : Aménagement du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu
La commission se saisit de l'amendement de suppression CF165 de Mme Marie-Christine Dalloz.
J'ai assisté hier à la présentation faite, ici même, par les services de Bercy de l'interface informatique du prélèvement à la source. On voit bien que tout n'est pas encore calé et que subsistent des difficultés. On peut toujours rêver à un monde idéal, chers collègues du groupe majoritaire, mais la réalité est que les entreprises craignent aujourd'hui un coût bien supérieur aux 400 à 560 millions d'euros annoncés. Au moment où le ministre Darmanin présente son grand plan de simplification et de réforme, on ajoute de la complexité et des coûts supplémentaires pour les entreprises. Où est la cohérence dans l'action du Gouvernement ? Essayons aujourd'hui le prélèvement mensuel, mais supprimons le prélèvement à la source.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur général, la commission rejette l'amendement.
Puis elle examine, en discussion commune, les amendements identiques CF126 de Mme Valérie Lacroute et CF207 de Mme Véronique Louwagie, ainsi que l'amendement CF156 du président Éric Woerth.
Par cet amendement, je propose de supprimer le prélèvement à la source, qui revient finalement à reporter une charge administrative sur les entreprises. C'est donc une source de complexité pour elles, en même temps qu'un coût – certaines études donnent d'ailleurs d'autres montants que celui, annoncé, de 400 millions d'euros.
Et qu'en sera-t-il de la confidentialité ? Les entreprises auront connaissance de la situation fiscale et de la vie privée des salariés ; c'est profondément choquant. Certes, d'autres pays ont instauré un dispositif de prélèvement à la source mais, aujourd'hui, les modalités retenues en matière d'impôt sur le revenu ne le permettent pas sans que des éléments de la vie privée du salarié soient connus.
Pour toutes ces raisons, je vous propose de supprimer le prélèvement à la source.
J'ai déjà présenté l'amendement CF156 à plusieurs reprises. Il s'agit de permettre un prélèvement de l'impôt qui soit contemporain des revenus, mais sans passer par les entreprises. On peut le faire, l'administration fiscale l'admet. Certes, il y aurait deux mois de décalage, mais cela me paraît peu au regard du maintien du lien direct entre le contribuable et l'administration fiscale, indépendamment d'autres faits, notamment l'impression d'une moindre valeur du travail que donne le prélèvement à la source – en raison d'un moindre montant net versé au salarié.
Mme Louwagie craint pour la confidentialité des informations, mais la démonstration, hier, de la nouvelle interface du site impots.gouv.fr était tout à fait éloquente. Tous les Français qui ne souhaitent pas que leur employeur sache qu'ils ont d'autres revenus pourront opter pour un prélèvement par leur employeur à un taux proportionnel, leur imposition étant, le cas échéant, complétée par un prélèvement séparé. Voilà qui devrait dissiper toute crainte. Au demeurant, beaucoup de Français déclarent déjà leur revenu en ligne.
Je reste simplement vigilante sur la question de l'accessibilité de ces services aux personnes non connectées à internet, qui n'utilisent pas elles-mêmes un ordinateur. Que les bureaux des impôts, partout en France, puissent être des points d'accès et offrir un soutien pour que chacun comprenne bien est important. Je pense que le ministre pourra y revenir en séance. Tout un dispositif d'accompagnement est prévu, à mon avis aussi important que les mesures elles-mêmes.
Malheureusement, c'est dans les zones où l'accès internet est le plus déficient qu'aujourd'hui l'administration fiscale supprime des perceptions et des points de contact. En cinq ans, j'ai vu disparaître environ un tiers des points de contact avec l'administration fiscale.
Si ce prélèvement à la source me laisse sceptique, c'est aussi parce que nous n'avons fait aucune étude préalable de l'impact de cette réforme sur les recettes budgétaires. La taxe sur la valeur ajoutée est corrélée à l'activité économique. Lorsqu'il y a un retournement de cycle, l'effet peut se compter en milliards, sinon en dizaines de milliards d'euros. Regardez ce qui est arrivé après la crise des subprimes, ou ce qui était arrivé en 1992-1993. Depuis dix ans, l'impôt sur les sociétés (IS) est également corrélé à l'activité de l'année, alors qu'auparavant une partie de l'impôt était payée en début d'année suivante. Or, voici que vous faites de la troisième grande recette de l'État un troisième impôt dynamique corrélé à l'activité de l'année. En cas de retournement de cycle, ce sont les trois impôts qui joueront dans le même sens et, du point de vue des rentrées fiscales, ce sera une très mauvaise année. Cela s'anticipe, cela s'étudie. Ne faudrait-il pas créer des mécanismes de stabilisation automatique ? Il est inutile de faire des économies de bouts de chandelle pour maîtriser les dépenses si, la même année, les recettes baissent de 10 % ou 15 %.
Je veux signaler le paradoxe absolu de cette usine à gaz que l'on construit au moment même où le ministre de l'action et des comptes publics explique qu'il s'engage dans un processus de simplification. Vraiment, si quelque chose n'est pas simple, c'est cela ! M. de Villèle, ministre des finances de Louis XVIII, ultra mais très bon financier – un esprit réactionnaire, j'en conviens, mais nous lui devons la Caisse des dépôts et consignations... – l'observait : la meilleure évaluation que l'on puisse avoir de ce qui se passe dans une année donnée, c'est ce qui s'est passé l'année précédente. Ce n'est pas une évaluation exacte, mais c'est la meilleure possible. Ce que nous dit Mme de Montchalin à l'instant est vrai, et cela m'inquiète. Avec l'application d'un taux proportionnel, nous allons nous éloigner bien plus qu'en nous fondant sur l'année antérieure.
Le plus simple aurait été de généraliser le prélèvement mensuel sur l'année complète, donc sur douze mois, au lieu de dix aujourd'hui. Chacun aurait été fixé et les ajustements nécessaires, en raison, par exemple, d'un changement de situation ou d'un départ à la retraite, auraient été négociés avec l'administration fiscale. Celle-ci a donné de très grands exemples, ces dernières années, de l'amélioration de ses rapports avec le contribuable. La première mesure de simplification, c'est de ne pas tenter de résoudre des problèmes qui ne se posent pas !
J'entends bien ce qu'indique Mme de Montchalin, mais si l'on donne au salarié la possibilité de ne se voir appliquer qu'un certain taux, pourquoi faire une usine à gaz qui n'apporte rien ? Autant organiser un prélèvement sous forme d'acompte, en généralisant les dispositifs déjà en place.
Le prélèvement à la source n'apporte rien, il peut même mettre en difficulté des salariés qui choisiraient un taux qui ne leur correspond pas, avec un solde très important à régler à une échéance inappropriée.
Second point : certaines personnes, notamment des publics fragiles, même dans des zones correctement équipées, n'ont pas reçu la formation adéquate et nécessaire pour utiliser facilement toutes les technologies à disposition.
Il est vrai que des trésoreries ferment en milieu rural, mais beaucoup de maisons de service au public (MSAP) ouvrent, notamment dans la plupart des communautés de communes. Interrogez, chers collègues, les élus de vos communautés de communes ! Il y a des permanences du Trésor public dans les MSAP.
Second point, un certain nombre de chefs d'entreprise, de petites et moyennes entreprises (PME) ou de très petites entreprises (TPE), me disaient hier employer des salariés belges. Depuis très longtemps, la Belgique pratique un système de prélèvement à la source. Et cela ne leur pose strictement aucun problème ! Ils ne comprennent pas que cette disposition ne soit pas déjà en vigueur en France.
Un certain nombre de pays pratiquent ce prélèvement à la source. Quant à l'impact du ralentissement de l'activité économique sur les rentrées fiscales, il y a des mécanismes de stabilisation automatique, d'un point de vue macroéconomique, qui fonctionnent très bien.
Soyons vigilants, effectivement. Il faut accompagner les publics éloignés de l'outil numérique, ainsi qu'un certain nombre de dispositifs aujourd'hui, notamment en MSAP, qui continuent à se déployer.
Cependant, nous étions assez peu nombreux, hier, chers collègues, lors de la présentation de l'outil mis en place par la direction générale des finances publiques (DGFiP). Vous ne seriez pas inquiets si vous y aviez assisté ! C'est un outil simple, très clair dans sa présentation.
Sincèrement, je crois que le travail a été fait : des expérimentations ont été menées du côté des chefs d'entreprise, comme cela a été dit par M. Labaronne, et les conditions sont réunies pour que tout se passe bien. Calmons-nous donc un peu et avançons.
Auteure de l'amendement CF126, j'ajouterai quelques éléments. Même en Île-de-France, en Seine-et-Marne, vaste département, de nombreuses trésoreries ont fermé. Vous imposez au monde rural, où les connexions internet sont parfois très compliquées et où les trésoreries ferment, une triple peine. Malheureusement, les trésoreries ne pourront accueillir nos administrés dans de bonnes conditions : les agents sont submergés de travail et sont déjà aux côtés des collectivités.
Je ne vois pas comment ils pourront répondre aux administrés ni comment une population fragile, dans des zones très éloignées, pourra faire face à cette complexification. Et je ne parle pas des craintes des entreprises – certains d'entre nous ont reçu une lettre du Mouvement des entreprises de France (MEDEF), que le prélèvement à la source inquiète.
Non seulement ces services sont disponibles dans les MSAP, mais il y a plus de points de contact et de maisons de service au public que de trésoreries ! La présence de proximité va donc probablement croître au fil du temps. Et arrêtons d'instrumentaliser la ruralité et d'imaginer que les habitants des zones rurales sont complètement retardés ! Cela sous-entend qu'ils sont incapables de se connecter à internet.
Quant aux usines à gaz, notre impôt sur le revenu en est déjà une. En revanche, l'interface proposée aux utilisateurs est extrêmement claire. En trois écrans, c'est réglé ! Ce n'est absolument pas une usine à gaz pour ceux qui l'utiliseront.
Par ailleurs, il est vertueux que ce que le contribuable paie soit cohérent avec ce qu'il gagne. C'est également vertueux pour l'État. Faudrait-il qu'il se cache la tête sous le sable et ne voie pas la réalité si la situation économique change ?
Je veux simplement souligner deux avantages du dispositif. Pour les entreprises, tout va passer par la déclaration sociale nominative (DSN), par des flux dématérialisés. En réalité, elle n'aura rien à faire, puisque c'est le salarié qui choisira lui-même quel taux s'appliquera, que ce soit un taux neutre ou son taux réel d'imposition.
En revanche, un certain nombre d'entreprises et d'experts-comptables seront obligés de passer en phase 3 de la DSN. Ainsi, ils bénéficieront de la simplification, puisque une trentaine de déclarations, faites notamment par les services du personnel des entreprises, seront dématérialisées. Je retrouve complètement dans cette simplification des procédures la cohérence de l'action gouvernementale, sur laquelle certains s'interrogeaient.
Pour les salariés, c'est aussi une avancée. Hier, M. Parent, directeur général des finances publiques, nous expliquait qu'environ 40 % des personnes changeaient de situation au cours d'une année. Elles pourront donc adapter en ligne le montant de leur impôt grâce à un système effectivement relativement simple. Ce sera un impôt contemporain, et même un impôt qui correspond à leur situation à un moment donné.
Il serait dommage de se priver de ce dispositif.
Comme vous le savez, j'adopte toujours des points de vue quelque peu particuliers : je ne suis pas hostile au prélèvement à la source ; j'avais mis toutefois une condition, que le Gouvernement a levée, qui consistait à préciser que ce mode de prélèvement ne préfigure pas la fusion de l'impôt sur le revenu (IR) et de la contribution sociale généralisée (CSG).
En revanche, l'évaluation préalable de l'article 9 évoque un problème que nous avions souligné, celui de la territorialité du prélèvement à la source. Comment procède-t-on pour les revenus d'activité et de remplacement de source étrangère ? Je cite l'évaluation préalable : « Ces adaptations complexes ne peuvent pas être réalisées dans les délais impartis qui ne permettent pas d'envisager avec une raisonnable assurance la mise en place en 2019 d'un prélèvement à la source des prélèvements sociaux sur les revenus d'activité de remplacement de source étrangère. »
Je n'ai pas trouvé dans le texte de l'article 9 de disposition relative à ces prélèvements, c'est-à-dire le décalage d'au moins un an : M. le rapporteur général pourrait-il nous éclairer sur ce problème qui intéresse des dizaines de milliers de personnes, comme les travailleurs frontaliers, les personnes percevant des revenus de source étrangère, des retraites, etc. ?
J'entends dire que la mise en place du prélèvement à la source constitue un outil simple.
J'ai assisté hier à la présentation : l'intervenant ne parvenait même pas à faire sa présentation tant les questions du groupe majoritaire étaient nombreuses, à telle enseigne que la collègue qui conduisait la réunion a dû intervenir ! Ne nous faites pas croire que l'outil est simple !
Il est peut-être simple pour vous, qui maîtrisez les sujets fiscaux, qui êtes membres de la commission des finances ; mais mettez-vous à la place de quelqu'un qui ne maîtrise pas la technique fiscale. Il n'est pas recevable d'entendre dire qu'en l'état, il s'agit d'un outil simple ! Il est vrai, en revanche, que notre système fiscal actuel est complexe ; attachons-nous d'abord à le simplifier plutôt que de passer par le prélèvement à la source.
On nous dit que les MSAP constitueraient la solution miracle. Je rappelle qu'il en existe 500 en France, et si le président-directeur général de La Poste m'a indiqué récemment que d'autres étaient à venir, toutes n'ont pas passé contrat avec les services fiscaux : cela dépend de la volonté des collectivités territoriales. Vous allez changer les choses, mais ne dites pas qu'aujourd'hui les trésoreries sont présentes partout !
Enfin, si vous avez prévu la précaution de décaler le prélèvement à la source en 2019, c'est parce que vous avez conscience que l'impact du relèvement de la CSG au 1er janvier 2018 et du prélèvement à la source, s'il avait été prévu à la même date, aurait eu un effet dévastateur sur le pouvoir d'achat et l'opinion publique. Vous avez astucieusement botté en touche et reculé d'un an, mais vous ne réglez pas le problème de fond.
On ne peut pas balayer d'un revers de main la fermeture des perceptions et prétendre que l'ingénierie sera mise à disposition dans les territoires pour aider ceux qui auront des difficultés. J'aimerais que l'on précise si les MSAP vont effectivement passer contrat avec les services fiscaux, ou si l'on va transférer la tâche de ces derniers aux agents des collectivités, avec tous les problèmes que cela pose, notamment celui de la confidentialité.
Je suis quelque peu surpris d'entendre certains termes : on nous explique que nous devons « nous calmer », que nous « instrumentalisons la ruralité ». Si nous ne pouvons pas avoir un débat serein dans cette commission, je me demande dans quel cénacle nous pourrons l'avoir !
Je rappelle par ailleurs que les problèmes d'accès à internet ne se rencontrent pas que dans les zones rurales, ils sont aussi présents dans certaines banlieues. Le secrétaire d'État Mounir Mahjoubi a récemment souligné, fort opportunément, que plus de sept millions de Français de plus de 12 ans n'ont aucun accès au numérique. Il me semble que nous devrions avertir beaucoup plus clairement le Gouvernement et l'administration de ce problème.
Madame Dalloz, monsieur Forissier, il est essentiel que nous considérions nos concitoyens et électeurs comme des gens responsables. Lorsque nous assistons à une présentation et que nous avons des questions, légitimes car certains termes du débat doivent être explicités, comme ceux qui sont liés à la conjugalisation ou à l'individualisation de l'impôt, nous ne faisons que notre travail.
Ce n'est donc pas parce que nous posons des questions lors d'une présentation que le système est compliqué : il est inutile de porter la polémique là où elle n'a pas lieu d'être !
Vous savez tous que ce que nous faisons, s'agissant notamment de l'impôt sur les sociétés ou de la taxe d'habitation, contribue à la simplification du système fiscal. Les Français acquittent beaucoup d'impôts différents ; nous nous efforçons qu'ils en paient moins et que ces impôts soient moins nombreux. Soyez donc assurés que, dans notre travail d'évaluation – et les députés de la majorité seront ravis de le conduire avec vous –, nous étudierons si les MSAP ont bien les agréments et les partenariats nécessaires pour faire office de points d'accès, notamment dans le domaine de la fiscalité. Soyez certains aussi que nous serons, comme vous, à l'écoute des électeurs qui nous feront part des difficultés rencontrées – ou de leur satisfaction.
Sur les plans macroéconomique et individuel, nous constatons que beaucoup de Français voient leur situation changer, connaissant par là une baisse de revenu. Il faut donc moderniser l'impôt afin de ne pas les mettre en difficulté et leur éviter que, le moment venu ils n'aient plus les moyens de payer.
Le groupe du Mouvement Démocrate et apparentés est favorable au prélèvement à la source ; il restera toutefois très vigilant sur la question de la fracture territoriale, car des perceptions ferment, et les personnes âgées ou éloignées de l'emploi doivent être aidées de la meilleure façon. À cet égard, l'audit représente un apport utile, et la réduction de moitié du montant des amendes infligées en cas de défaillance constitue une avancée positive.
Nous considérons que le prélèvement à la source, en ce qu'il permet la contemporanéité du paiement de l'impôt, est une bonne chose pour la France et les Français, en particulier pour ceux dont les revenus varient d'une année sur l'autre. On peut en débattre longuement, mais c'est le choix que nous avons fait et nous l'assumons.
Je ne confonds pas cette question avec celle de l'accès à internet et de la facilité plus ou moins grande avec laquelle nos compatriotes se connectent au réseau pour faire leur déclaration de revenus. Ce sujet-là dépasse largement celui du mode d'acquittement de l'impôt, et je n'ai guère entendu quiconque s'insurger contre le fait que, pour s'inscrire à Pôle emploi ou bénéficier de certaines aides sociales, il fallait passer par internet.
Puisque M. Mahjoubi a été cité, je souhaite aller jusqu'au bout de son propos : environ 20 % de Français souffrent d'un accès difficile à internet, et 5 % ne sauront jamais l'utiliser, ou avec les plus grandes difficultés. Nous travaillons avec lui à un plan visant à diversifier les moyens d'accès au numérique, singulièrement à l'intention de ceux qui n'y ont pas accès aujourd'hui. À cette fin, des partenariats adaptés seront établis avec les collectivités territoriales et les entreprises, qui ont intérêt à ce que toujours plus de Français aient accès à internet ; je vous incite donc à rencontrer le secrétaire d'État et à le soutenir dans cette action.
Je suis agacé par le ton moralisateur que d'aucuns prennent pour dire : « Ici, nous sommes tous responsables. » Nous sommes tous responsables, en effet, et lorsque nous évoquons les problèmes d'une France qui est peut-être un peu moins en avance que l'autre, nous sommes assez responsables. Pour reprendre une formule célèbre : vous n'êtes pas notre maître et nous ne sommes pas vos élèves.
En l'occurrence, le problème est profond : il tient au fait que l'on veut soumettre à un prélèvement à la source, qui serait parfaitement adapté à un impôt proportionnel, universel et individuel, des revenus résultant d'une double agrégation : entre différentes sources de revenus, appréhendés qui plus est de façon fractionnée, d'une part ; au sein du foyer fiscal, d'autre part. Dès lors, l'entreprise ne peut être qu'extrêmement compliquée, et notre commission est dans son rôle lorsqu'elle rappelle cette complexité et signale le paradoxe consistant à appliquer un outil inadéquat aux mécanismes de formation des revenus et des prélèvements.
En Angleterre, chacun paie au premier penny en acquittant 20 % ; un an plus tard, le Trésor rembourse l'éventuel trop-perçu. Commencez par prendre 20 % à tout le monde alors que l'impôt n'est acquitté que par 42 % des Français : vous verrez le résultat ! Ne comparez pas des systèmes qui sont totalement différents, et admettez surtout que le problème de fond n'est pas un problème d'irresponsabilité, mais constitue une interrogation légitime.
Mme de Montchalin a parlé de « polémique ». J'entends que ce débat vous gêne, mais nous avons le droit d'avoir une opinion différente de la vôtre et de l'exprimer, et il est profondément choquant de s'entendre demander de se « calmer ». Il est par ailleurs humiliant pour le monde rural de prétendre qu'il soit incapable de se connecter : il ne s'agit pas d'incapacité, mais du manque de moyens techniques déployés dans les territoires ruraux, qui sont beaucoup moins bien servis que les territoires urbains. Il est important de le dire, car cette situation ne manquera pas de créer des difficultés.
Je vais m'attacher à dépassionner le débat.
À Mme Dalloz qui doute de la capacité du ministère à pratiquer tout de suite le prélèvement à la source, je répondrai que la décision de décaler l'opération d'un an n'est pas liée aux arguments qu'elle a avancés. Le but est plutôt de garantir une meilleure préparation des services techniques de Bercy, mais aussi de bien préparer le plan d'accompagnement que le ministre détaillera très prochainement. Il sera à la fois humain et technique et nous permettra d'aider chaque Français dans cette démarche, qu'il vive dans le monde rural ou dans une métropole.
Par ailleurs, les entreprises rencontrent des difficultés, puisque la DSN « phase 3 » est loin d'être en place partout. Or, c'est une condition importante à la réussite du dispositif ; il fallait donc leur accorder du temps.
Le groupe Nouvelle Gauche soutient cette réforme, dont nous avions voté le principe et la mise en oeuvre. Pour des raisons que l'on peut comprendre, la majorité propose d'en décaler l'application d'un an ; cela ne nous pose aucun problème.
Le nouveau système ne manquera pas de constituer un changement pour les Français, mais ils sont intelligents et capables de s'adapter – bien plus que certains ne semblent l'imaginer.
En 2007, déjà, le ministre du budget d'alors, Jean-François Copé, avait demandé à l'administration fiscale d'étudier la mise en oeuvre du prélèvement à la source. Le rapport avait conclu que la chose était tout à fait possible ; l'affaire est donc dans les tiroirs de la DGFiP depuis dix ans. Aujourd'hui sa mise en application est préparée, la chose se passera très bien, et les Français seront à terme très satisfaits.
Nous rejetterons tous les amendements tendant à revenir sur cette réforme.
Je rappelle par ailleurs que mensualisation et prélèvement à la source sont deux choses bien distinctes ; la seconde répond de façon judicieuse à des cas bien particuliers, plus nombreux qu'on ne le croit – décès, mariages, départs à la retraite, etc. – et qui posent problème l'année où ces événements se produisent.
J'ai moi-même été quelque peu agacé par la réponse de M. Bourlanges à Mme de Montchalin, dont la remarque faisait suite au propos de Mme Dalloz sur la réunion d'hier – à laquelle la plupart des membres de cette commission étaient absents. Que l'on ne nous reproche pas un ton prétendument moralisateur, alors que nous demandons simplement que soient respectées les personnes qui sont venues nous présenter une solution répondant précisément à certaines questions de l'opposition ! Si vous souhaitez un réel débat sur les 250 amendements restant à examiner, au lieu d'un rejet systématique, respectez l'expression de vos collègues !
La démonstration à laquelle nous avons assisté hier a achevé de me convaincre que des mesures d'accompagnement seront nécessaires. Pour avoir travaillé à la mise en place de MSAP dans des bureaux de poste, je me suis rendu à l'étranger afin de voir comment on y procédait. J'ai ainsi pu constater qu'au Danemark, après sept années de préparation de la population, environ 12 % des habitants n'étaient pas aptes à utiliser les processus dématérialisés. J'ai évoqué le sujet avec le Défenseur des droits, qui a travaillé sur cette question et qui considère qu'en France, compte tenu de la dispersion géographique de la population, de la pyramide des âges et de la relative complexité de notre organisation administrative, 20 % des gens éprouveront de façon durable des difficultés à s'adapter à cette modernisation de l'action publique.
Il me semble donc que cette réorganisation des services de l'État et des opérateurs publics doit être accompagnée de mesures d'aide à la population.
Je recommande à nos jeunes collègues d'observer la plus grande prudence. Il y a un an, ici même, l'administration a affirmé qu'elle serait prête pour le 1er janvier 2018 – la même administration que nous avons entendue hier ! Ne vous faites pas d'illusions, dans un premier temps, nous rencontrerons des difficultés. Le problème que j'ai relevé en lisant l'étude d'impact le montre. Il ne faut pas dire que tout va très bien !
L'instauration du prélèvement à la source n'est pas une réforme simplement technique ; elle peut induire des tensions salariales, elle pose le problème de la familialisation avec l'outil informatique, mais aussi celui de l'éloignement des Français vis-à-vis de l'impôt. Jean-Louis Bourlanges l'a dit : ce n'est pas la même chose de prélever à la source l'impôt sur le revenu lorsque celui-ci est payé par tous et lorsqu'il est payé par moins de la moitié de la population.
Il s'agit en vérité de la réforme voulue par Christian Eckert et par Bercy à une certaine époque, et Charles de Courson a raison : les mêmes représentants de l'administration qui nous expliquaient alors que tout était bouclé sur le plan technique, nous disent aujourd'hui que ce n'était en fait pas le cas. C'est une réforme héritée, que l'administration a défendue avec ardeur – ce qui est son rôle, mais cette opiniâtreté a sans doute empêché la recherche d'autres solutions.
Or, comme le montre le rapport de l'Inspection générale des finances (IGF), il existe d'autres solutions techniques permettant d'assurer la contemporanéité du paiement, de gommer le décalage d'un an entre la perception du revenu et le prélèvement de l'impôt, tout en respectant d'autres critères tels que celui de la confidentialité, en maintenant la familialisation et en évitant de mettre à contribution les employeurs.
Nous pouvons regretter que cette voie n'ait pas été choisie, et c'est pourquoi j'ai déposé un amendement permettant de mettre fin au décalage d'un an, mais par une autre méthode, assez largement ignorée par l'étude d'impact, qui s'en est tenue à une analyse assez technique du dispositif proposé par le Gouvernement.
Le problème soulevé par Charles de Courson ne nous a pas échappé ; cet angle mort de la réforme – toutes les réformes, tous les dispositifs en ont – sera réglé dans un délai d'un an. D'ici l'examen du texte en séance publique, nous disposerons, grâce aux services du ministère qui y travaillent d'arrache-pied, d'éléments complémentaires que nous n'avons pu obtenir du ministre lors de sa présentation du projet – pour la bonne raison nous n'avons reçu l'évaluation préalable qu'après...
Par ailleurs, la complexité du dispositif ne réside pas dans l'interface utilisée, mais dans son accessibilité, à laquelle les services de la DGFiP ont beaucoup travaillé. Or, la saisie numérique des données par le contribuable ne comporte pas de difficulté supérieure à celle que présente un formulaire papier classique de déclaration des revenus. Si complexité il y a eu, elle a surtout été celle liée à l'élaboration d'une interface de bon aloi – qui est précisément à mettre au crédit des agents de la DGFiP.
La commission rejette les amendements identiques CF126 de Mme Valérie Lacroute et CF207 de Mme Véronique Louwagie.
Puis elle rejette l'amendement CF156 du président Éric Woerth.
Elle en vient à l'examen des amendements CF3 à CF9 de M. Marc Le Fur.
Les amendements CF3 et CF4 tendent à exclure les jeunes du dispositif, car ils seront fortement pénalisés par le taux forfaitaire neutre que le projet prévoit de leur appliquer automatiquement.
L'amendement CF5 tend à instituer une assiette triennale pour l'imposition des bénéfices agricoles, que l'extrême volatilité des cours des produits agricoles et la multiplication des aléas climatiques et sanitaires ces dernières années font varier fortement d'une année sur l'autre.
L'amendement CF6 vise à prendre en compte l'ensemble des réductions et crédits d'impôt pour déterminer le taux de prélèvement applicable dans le cadre du prélèvement à la source.
L'amendement CF7 a pour objet la prise en compte des frais réels engagés par les salariés.
L'amendement CF8 tend à instaurer un abattement de 20 % sur les revenus du jeune contribuable entrant dans la vie active.
L'amendement CF9 vise à permettre l'application d'un taux modulé dans le mois qui suit un changement de situation familiale – mariage, conclusion d'un pacte civil de solidarité (PACS), divorce, veuvage, etc.
Nous avons déjà débattu de ces amendements en de précédentes occasions ; certains, d'ailleurs, ont été redéposés tels quels, puisqu'ils font encore référence à la date du 1er janvier 2018 et ne tiennent pas compte du report d'un an de la réforme.
J'émets, sur tous, un avis défavorable. Il ne faut pas effrayer nos concitoyens, en particulier les jeunes : une étude d'évaluation montre qu'en 2015, sur 500 000 primo-déclarants, la plupart étaient non imposables compte tenu de leurs revenus.
Ces amendements ont le grand mérite de souligner le caractère très particulier des transferts imposés par le nouveau système, qui favorise les héritiers – lesquels n'acquitteront plus l'arriéré d'impôt du défunt – et pénalise gravement les jeunes entrant dans la vie active – lesquels ne bénéficieront plus du décalage d'un an avant le paiement de leurs premiers impôts. Autre inconvénient : il y aura une augmentation nette de l'impôt, puisque celui-ci ne sera plus érodé par la croissance et l'inflation constatées sur l'année de référence ; selon les périodes, cette augmentation représentera 2 %, 3 % ou 4 %.
Cette réforme n'est donc pas neutre : elle fera des gagnants et des victimes.
Sur l'ensemble de ces amendements, au moins un est satisfait, puisque l'outil mis au point permet de tenir compte des changements de situation intervenus au cours des mois précédents. En cas de revenus fluctuant de façon notable, les intéressés peuvent se rendre sur le site internet de l'administration fiscale afin d'obtenir un taux d'imposition correspondant à la réalité, voire, comme l'a montré la présentation à laquelle nous avons assisté hier, un décalage des échéances.
La commission rejette successivement les amendements CF3 à CF9.
Elle étudie ensuite en discussion commune les amendements CF10 à CF16 et CF18 de M. Marc Le Fur.
Les amendements CF10 à CF13 visent à corriger la mécanique du taux forfaitaire en prenant en compte différentes situations : célibataire sans enfant, célibataire avec enfants, couple marié sans enfant, couple marié avec enfants.
Il s'agit, par les amendements CF14 à CF16, de corriger la mécanique du taux forfaitaire, qui peut, dans certaines situations, être défavorable aux contribuables, conduits à verser des acomptes trop importants. Le premier propose ainsi un taux calculé pour un couple marié avec deux enfants à charge, le deuxième pour un couple marié avec un enfant à charge, le troisième pour un couple marié sans enfant à charge.
L'amendement CF18, quant à lui, consiste à préciser les règles d'arrondi du taux de prélèvement.
S'agissant de la longue série des amendements que M. Le Fur dépose régulièrement depuis le projet de loi de finances de l'an dernier, j'ai indiqué clairement que nous tâcherions de trouver, à l'occasion de ce PLFR, une solution au problème des contrats de travail temporaires et à celui des cotisations aux plans d'épargne retraite et aux régimes de type Préfon. Sur ces sujets, je vous propose de cosigner mes amendements, qui ont été rédigés avec le concours du Gouvernement.
Pour l'ensemble des autres amendements, mon avis est défavorable.
La commission rejette successivement les amendements CF10 à CF16 et CF18.
Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CF303 du rapporteur général et CF17 de M. Marc Le Fur.
Mon amendement précise que les dispositions prévues pour les contrats à durée déterminée (CDD) s'appliquent aux contrats de travail temporaire, afin qu'il n'y ait pas de trou dans le dispositif.
La loi prévoit que les contrats à durée déterminée dont la durée n'excède pas deux mois ne feront pas l'objet d'un prélèvement à la source, mais elle ne dit rien des contrats intérimaires, dont la durée peut être supérieure à deux mois.
Notre amendement précise donc que les contrats intérimaires sont assujettis au même régime que les CDD.
Un contrat d'intérim est un contrat de travail temporaire. Le préciser était l'objet de mon amendement, que j'ai suggéré à M. Le Fur et à Mme Louwagie de cosigner, puisque ce sont eux qui avaient soulevé le problème.
La commission adopte l'amendement CF303.
En conséquence, l'amendement CF17 tombe.
La commission examine ensuite les amendements CF19, CF20, CF22 à CF27 et CF29 de M. Marc Le Fur.
Les amendements CF19 et CF20 proposent que les reports fonciers déficitaires ne puissent venir s'imputer sur les revenus fonciers éventuels de l'année 2017 et 2018, pour permettre aux bailleurs de conserver le bénéfice de dix années de report effectives.
Les amendements CF22, CF23 et CF24 tendent à supprimer l'augmentation des pénalités – qui peuvent aller jusqu'à 50 % – et fixent le taux de la majoration pour retard de paiement à 10 %.
L'amendement CF25 concerne la pénalité spécifique qui sanctionne le défaut de paiement de l'acompte ou l'erreur dans la modulation de la baisse de taux. Il s'agit de plafonner le taux de la majoration, qui peut être très pénalisante pour le contribuable.
L'amendement CF26 prévoit que les majorations ne sont pas applicables au rehaussement des bases d'imposition opéré par l'administration qui conduit à une révision rétrospective à la hausse du taux de prélèvement à la source ou de l'acompte.
L'amendement CF27 a pour objet de prendre en compte la situation particulière des agriculteurs dont les revenus connaissent d'importantes fluctuations, au gré de la conjoncture économique, sanitaire ou climatique. Il leur est dès lors difficile d'estimer leurs revenus, dont ils ne découvrent parfois le montant qu'au moment de l'établissement du bilan. L'amendement vise donc à supprimer la majoration applicable en cas de modulation qui ne correspondrait pas à la situation réelle.
L'amendement CF29 vise à éviter que les contribuables ayant des déficits reportables au 31 décembre 2017 soient privés d'une année pour les reporter.
Tous ces amendements ont déjà été déposés à maintes reprises sur les textes budgétaires que nous avons eu l'occasion d'examiner depuis l'an dernier, et ont déjà reçu un avis défavorable motivé. Je maintiens cet avis.
La commission rejette successivement les amendements CF19, CF20, CF22 à CF27 et CF29.
Puis elle en vient à l'examen, en discussion commune, des amendements CF28 de M. Marc Le Fur et CF273 de M. Éric Coquerel.
Notre amendement CF28 vise à garantir au contribuable salarié que son taux de prélèvement demeure confidentiel au sein de l'entreprise ou de la collectivité qui l'emploie, afin qu'il ne puisse être utilisé contre lui pour nuire au déroulement de sa carrière, à son avancement ou à une éventuelle réorientation professionnelle.
Mon amendement va dans le même sens. Nous avons déjà dit notre opposition au prélèvement à la source, que nous jugeons inutile, peu transparent et coûteux pour les finances publiques comme pour les entreprises. S'ajoute à cela le problème de la confidentialité des données fiscales. Nous proposons que soit considérée comme un délit toute discrimination salariale découlant de l'utilisation des informations personnelles rendues disponibles par le prélèvement à la source.
La disposition proposée par l'amendement CF28 figurait dans l'avant-projet de loi, mais il semble que le Conseil d'État l'ait fait retirer du texte. Sachant par ailleurs que cette disposition avait suscité l'inquiétude des employeurs, je vous invite à retirer cet amendement, sans quoi j'émettrai un avis défavorable.
Quant à l'amendement CF273, qui aggrave les sanctions, j'y suis également défavorable, car des sanctions existent déjà. Il convient simplement de les adapter sans excès – ce que je propose par une série d'amendements à venir – afin de s'inscrire dans le droit commun. Avis défavorable.
Nous rencontrons ici le type même d'effet pervers que peut provoquer le système, dans la mesure où il rend possibles les manipulations de carrière. À quoi s'ajoute qu'il risque également d'entraîner le développement de multiples contentieux de la part de salariés s'étant vu refuser une augmentation ou un avancement et ayant, de mauvaise foi, la tentation de l'imputer au fait que leur situation fiscale a été jugée exagérément favorable.
Le prélèvement à la source ne simplifie donc rien, et les entreprises ne vont pas tarder à s'en apercevoir : je ne comprends pas que le MEDEF ait à ce point négligé de dénoncer cette mesure dont les conséquences seront beaucoup plus lourdes qu'il ne l'imagine.
Je voudrais essayer de vous rassurer. Le salarié pourra choisir d'être imposé à un taux moyen, calculé par l'administration et pouvant recouvrir des situations extrêmement différentes d'un foyer fiscal à l'autre Il pourra également choisir d'individualiser ou non son taux au sein du couple, ou d'opter pour un taux neutre, en acquittant le complément directement auprès de l'administration, sans que l'employeur ait à en connaître Tout a donc été fait pour que la confidentialité des données fiscales soit préservée, et l'employeur ne pourra donc prendre prétexte de ce taux pour refuser une augmentation ou bloquer la carrière d'un salarié.
Ce que vient de nous expliquer Cendra Motin ne fait que confirmer la complexité du dispositif. Il va coûter cher à tout le monde, sans aucune utilité.
La commission rejette successivement les amendements CF28 et CF273.
Puis elle examine les amendements CF306, CF307, CF308 et CF305 du rapporteur général.
Ces amendements sont ceux qui redéfinissent les sanctions.
L'amendement CF306 concerne les sanctions pénales applicables en cas de violation du secret professionnel. Dans sa rédaction actuelle, le texte calque ces sanctions sur les sanctions appliquées notamment aux agents de la DGFiP, aux membres de la commission des infractions fiscales (CIF) ou à ceux des commissions des impôts mais en aucun cas aux particuliers.
Appliquer ce type de peine – particulièrement lourde, puisque les délits peuvent être punis de cinq ans d'emprisonnement et 300 000 euros d'amende – alors que les collecteurs ne sont nullement assimilables à des agents de l'État me semble excessif. Je propose donc que l'on en revienne à un régime de droit commun, c'est-à-dire à l'application des sanctions prévues en cas de divulgation d'un secret protégé par la loi, sanctions déjà lourdes puisqu'elles peuvent aller jusqu'à un an d'emprisonnement et 15 000 euros d'amende.
L'amendement CF307 propose l'allégement des sanctions en cas de retard du versement des retenues à la source excédant un mois. Le texte prévoit que, si une retenue à la source est versée à l'administration fiscale avec un retard supérieur à un mois, s'appliquent de lourdes sanctions : cinq ans d'emprisonnement et 9 000 euros d'amende. Ce sont les sanctions prévues pour défaut de versement des retenues à la source sur les revenus dont le titulaire est à l'étranger et qui, de ce fait, présentent un réel enjeu en matière de recouvrement. Appliquer automatiquement les mêmes sanctions à toutes les entreprises, y compris les TPE, alors que leurs salariés sont en France, ne paraît pas souhaitable. Nous proposons donc d'aligner les sanctions prévues sur celles qui s'appliquent en matière de rétention de contributions aux assurances sociales précomptées sur les salaires.
L'obligation de secret professionnel à laquelle le collecteur sera soumis est expressément étendue à toute la phase de préfiguration, dès septembre 2018. En revanche, les sanctions associées ne sont censées entrer en vigueur qu'au 1er octobre 2018. Nous proposons donc, par l'amendement CF308, de préciser expressément que ces sanctions s'appliquent, même avant octobre. Il est possible que le Gouvernement indique que cet objectif est satisfait mais, en attendant une telle précision en séance, il semble utile de prendre toutes les précautions pour garantir le respect de la vie privée.
L'amendement CF305, enfin, vise, dans le cadre de la phase de préfiguration du prélèvement à la source, à rendre possible pour les contribuables qui le souhaiteraient l'exercice de l'option pour le taux individualisé.
Non. Il s'agit de la phase de préfiguration qui, du fait d'un oubli de la DGFiP, n'a pas fait l'objet des mêmes garanties que la période de mise en oeuvre définitive.
D'une manière générale, les amendements relatifs aux sanctions rétablissent, là où cela était nécessaire, le principe constitutionnel de proportionnalité des peines, qui n'était pas toujours respecté dans le texte – le Gouvernement en a convenu.
Les amendements présentés par le rapporteur général, notamment ceux qui portent sur la responsabilité pénale des entrepreneurs, répondent à la revendication de ces derniers. C'est une bonne chose.
En effet, l'idée d'aligner le cas des chefs d'entreprise sur celui des comptables publics était proprement extravagante. On aurait pu aller plus loin et inventer une procédure de mise en débet des entreprises, cela aurait innové...
La commission adopte successivement les amendements CF306, CF307, CF308 et CF305.
Puis elle en vient à l'examen des amendements CF30 à CF48 de M. Marc Le Fur.
Cette série d'amendements déposés par notre collègue Marc Le Fur concerne les revenus exceptionnels. Ils traduisent bien les difficultés que vont soulever ces revenus en 2018, puisqu'ils devront être pris en compte alors que les revenus non exceptionnels pour la même période ne le seront pas. Je veux pour preuve de ces difficultés l'article 60 de la loi de finances pour 2017, qui répartit les revenus en deux catégories, les revenus non exceptionnels et les revenus exceptionnels, pour produire in fine une classification assez peu lisible.
L'amendement CF30 propose donc de modifier cet article 60, dans la mesure où il existe déjà une définition des revenus exceptionnels dans le code général des impôts.
L'amendement CF31 propose de corriger l'injustice selon laquelle sont considérées comme un revenu exceptionnel les indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail. Le licenciement n'est déjà pas facile à vivre, mais le salarié concerné sera doublement pénalisé s'il doit de surcroît être imposé sur ses indemnités.
Les amendements CF32 à CF36 sont des amendements de repli. Ils proposent respectivement de ne considérer comme des revenus exceptionnels que les seules indemnités versées à l'occasion d'une rupture du contrat de travail résultant de la volonté du salarié, et de considérer en revanche comme des revenus non exceptionnels les indemnités versées à l'occasion d'un licenciement pour motif économique ou à l'occasion d'une rupture conventionnelle, ainsi que les indemnités de départ à la retraite et les indemnités de changement de résidence ou de lieu de travail.
Le problème des revenus exceptionnels est dû au phénomène de « l'année blanche », sans lequel nous n'aurions pas besoin de préciser cette notion.
L'amendement CF37 vise à considérer comme des revenus non exceptionnels les prestations de retraite versées sous forme de capital, notamment dans le cadre de contrats Préfon.
L'amendement CF38 prévoit de considérer comme des revenus non exceptionnels les allocations et aides versées en cas de conversion ou de réinsertion, pour ceux qui auront la malchance de subir en 2018 une réorientation professionnelle.
Les amendements CF39 et CF40 concernent l'épargne et proposent, pour le premier de considérer comme des revenus non exceptionnels la participation, l'intéressement et les abondements de plan d'épargne salariale perçus en 2018, pour le second de considérer comme des revenus non exceptionnels les sommes issues de la monétisation des droits inscrits sur un compte épargne-temps.
L'amendement CF41 propose de ne pas considérer comme des revenus exceptionnels les gratifications surérogatoires, qui correspondent à certaines primes versées aux salariés par l'employeur. Quant à l'amendement CF42, il s'agit d'un amendement de repli.
L'amendement CF43 est également de repli. Il vise toujours à modifier l'article 60 de la loi de finances pour 2017 qui, dans la liste des revenus devant être considérés comme exceptionnels, mentionne « tout autre revenu qui par sa nature n'est pas susceptible d'être recueilli annuellement ». On a connu, vous en conviendrez, définition plus précise ! C'est la raison pour laquelle nous proposons de ne considérer comme des revenus exceptionnels que les gratifications dont le montant versé au titre de l'année 2018 serait supérieur de 20 % au montant des mêmes gratifications versées au titre de l'année 2017.
Dans le même ordre d'idées, l'amendement CF44 propose de ne pas considérer comme des revenus exceptionnels les éléments correspondant à la part variable du salaire et liés à la réalisation d'objectifs fixés par le contrat de travail, ce qui serait discriminatoire pour les salariés.
L'amendement CF45 précise également la notion de revenu exceptionnel.
L'amendement CF46 tend à éviter aux jeunes agriculteurs qui bénéficient d'abattements particuliers durant leurs cinq premières années d'exercice d'être privés d'une année d'abattement par l'entrée en vigueur du prélèvement à la source.
L'amendement CF47 concerne les déficits agricoles qui ne pourront être imputables sur l'année 2018.
Enfin, l'amendement CF48 a trait à la déductibilité des charges des revenus fonciers.
Certains de ces amendements, comme le CF46 et le CF47, avaient déjà été présentés l'an passé ; ils n'ont pas été mis à jour à la suite du report d'un an de la réforme et visent l'année 2017 au lieu de l'année 2018. D'autres me semblent déjà satisfaits. J'émets donc un avis défavorable sur l'ensemble de ces amendements, dont certains ont besoin d'être toilettés et qui ont déjà tous fait l'objet d'un débat.
Y aura-t-il un report des déficits qui ne pourront être imputés sur les revenus de 2018 ? La réponse du ministre à cette question n'a pas été très claire.
Il n'y aura pas de perte d'avantages. L'objectif de l'abattement et de l'imputation des déficits est de réduire l'impôt sur le revenu. Avec le prélèvement à la source, cet objectif sera atteint grâce au crédit d'impôt modernisation du recouvrement (CIMR), voire dépassé.
Le fait que l'abattement soit appliqué en 2018, malgré le CIMR, permettra de réduire le montant des acomptes payés en 2019 et en 2020. Sans l'imputation de l'abattement, comme le propose M. Le Fur, l'assiette et le taux des acomptes 2019 et 2020 seraient plus élevés, pénalisant les jeunes agriculteurs.
D'autres redevables à l'IR bénéficient d'avantages fiscaux du même type, comme, entre autres, les exonérations zonées ou les jeunes entreprises innovantes. En limitant la suspension et la prorogation d'un avantage fiscal à une catégorie de redevables, l'amendement s'expose à une rupture d'égalité inconstitutionnelle.
Le problème, c'est le délai de report, puisque certains reports sont limités dans le temps. Peut-être faudrait-il aménager temporairement ce délai.
Ôtons-nous de la bouche le terme d'« année blanche », car il ne s'agit pas de cela mais bien d'un crédit d'impôt. Le mode de calcul de l'impôt et la façon dont les crédits d'impôts vont s'appliquer restent les mêmes.
En ce qui concerne la liste des revenus exceptionnels, il s'agit d'éviter les effets d'aubaine, sans quoi l'on sait très bien que certains comptables ou certains chefs d'entreprise essaieront de favoriser des salariés. Néanmoins, nous ne devons pas priver ces derniers du bénéfice d'événements spécifiques qui surviendraient dans leur carrière.
Quant aux retraités, je rappelle qu'ils ont la possibilité de fiscaliser sur deux ans leur indemnité de départ en retraite.
Si malgré cela, des problèmes demeurent, le rescrit fiscal est un outil opposable à l'administration.
L'année 2018 n'est peut-être pas une « année blanche », mais certains ne paieront pas d'impôt du tout. Ce sera le cas des étrangers venant travailler sur le territoire français, s'ils arrivent par exemple en janvier et repartent en décembre.
Cette distinction entre crédit d'impôt et « année blanche » m'échappe totalement. Il me semble très clair, en revanche, que, dans le dispositif, les revenus de l'année 2018 ne seront pas imposés, sauf s'ils sont exceptionnels. Il y a donc bien une « année blanche », ce qui va se traduire par un appauvrissement de l'État, qui perdra une année de recettes fiscales. Les morts ne paieront pas au-delà de leur mort, ce qui est très bien d'un certain point de vue mais, comme ils étaient les seuls à pouvoir payer sans en souffrir, cela ne constituera pas nécessairement pour eux un avantage...
Ce qu'il va advenir des crédits d'impôt et autres déficits reportables n'est pas si clair, et va soulever d'innombrables questions chez les contribuables.
La commission rejette successivement les amendements CF30 à CF48.
Puis elle est saisie, en discussion commune, des amendements identiques CF106 de Mme Marie-Christine Dalloz et CF225 de M. Charles de Courson, ainsi que de l'amendement CF251 de M. François Pupponi.
Le droit commun comporte aujourd'hui une déduction fiscale à hauteur de 100 % des dépenses engagées chaque année pour l'entretien des monuments historiques. Dans la mesure où 2018 sera une « année blanche » – quand bien même certains voudraient la nommer autrement –, je crains qu'elle ne se caractérise par une chute des investissements en faveur des monuments historiques : les propriétaires qui ne pourront pas bénéficier d'avantages fiscaux sur leurs travaux risquent en effet de les différer.
Pour éviter cela, nous proposons d'instaurer un droit à déduction à hauteur de 100 % des dépenses engagées en 2018, et à hauteur de 50 % en 2019. Ne faisons pas souffrir davantage le secteur du bâtiment, qui se remet à peine d'années difficiles.
Voici encore un bon exemple des difficultés posées par « l'année blanche » ! Les travaux réalisés dans les monuments historiques privés risquent de diminuer beaucoup en 2018. Afin d'éviter cette chute, nous vous proposons d'autoriser l'imputation des dépenses de 2018 en 2019.
Il y a là, en effet, un problème. De plus, les déficits fonciers seront traités différemment selon que les bâtiments concernés sont, ou non, des monuments historiques. Nous avions réglé ce problème l'an dernier en loi de finances, mais ce projet de loi modifie à nouveau la situation.
Vous soulevez une question bien réelle. Toutefois le dispositif précédent, qui concentrait tout sur 2019, n'était pas satisfaisant non plus. L'administration fiscale cherche une solution. Je vous propose d'adopter ce matin l'amendement CF251, qui propose un lissage sur trois ans, ce qui me semble la solution la plus judicieuse. Ainsi, le débat aura lieu en séance et nous pourrons régler le problème.
J'émets donc pour l'amendement CF251 un avis de sagesse, et j'invite les auteurs des deux autres amendements à les retirer.
Je retire également le mien : ce que nous voulons, c'est une solution. Je me rallie avec plaisir à l'amendement de M. Pupponi, moins exigeant que le nôtre. Je souligne néanmoins que le risque économique en 2018 demeure, même avec un lissage sur trois ans.
Nous suivrons également l'avis de notre rapporteur général, afin que la discussion ait lieu en séance avec le Gouvernement.
Les amendements CF106 et CF225 sont retirés.
La commission adopte l'amendement CF251.
Elle se saisit ensuite des amendements CF49 à CF56 de M. Marc Le Fur.
Les amendements CF49 à CF52 portent sur les revenus fonciers. Cette difficulté avait déjà été soulevée par M. Le Fur l'an dernier : aucune disposition particulière n'était initialement prévue pour les dépenses de travaux imputables sur les revenus fonciers réalisées pendant l'année que l'on peut qualifier de blanche, n'en déplaise à certains. Ces travaux représentent 400 millions d'euros par an.
Le Gouvernement a vu le danger et prévu un étalement : les dépenses réalisées en 2018, mais aussi en 2019, seront imputables pour moitié en 2019. Mais c'est une solution pire que la précédente ! Le secteur du bâtiment, au lieu d'être en difficulté en 2018 seulement, le sera à la fois en 2018 et en 2019, puisque les personnes qui perçoivent des revenus fonciers ont intérêt à attendre 2020 pour réaliser des travaux. Les gestionnaires de patrimoine ou les promoteurs ont commencé à les en avertir, et à conseiller de ne pas réaliser de travaux en 2018 et 2019.
Encore une fois, sur deux ans, le secteur du bâtiment risque de perdre 800 millions d'euros si les travaux ne peuvent pas être déduits à 100 %.
C'est la situation que l'amendement CF49 vous propose de corriger en permettant au contribuable de choisir d'imputer dépenses engagées en 2018 sur l'année 2018, sur l'année 2019 ou sur l'une et l'autre. L'amendement CF50 est un amendement de repli.
L'amendement CF51 porte sur la déductibilité des provisions pour dépenses de copropriété.
L'amendement CF52 prévoit que les travaux réalisés en 2019 seront intégralement pris en compte pour la détermination des revenus fonciers de 2019. Il est en effet choquant que l'année 2019 soit également touchée.
Les amendements CF53 à CF56 portent sur les procédures fiscales de contrôle et de redressement, dans l'esprit de la lutte contre l'optimisation fiscale engagée par le Gouvernement.
L'amendement CF53 vise à abroger le L du II de l'article 60 de la loi de finances pour 2017.
L'amendement CF54 précise que la procédure anti-optimisation ne s'applique que lorsqu'il n'est pas fait usage de la procédure prévue à l'article L. 16 du livre des procédures fiscales.
L'amendement CF55 vise à garantir les droits et garanties du contribuable, qui doit pouvoir bénéficier des dispositions de la « charte des droits et obligations du contribuable vérifié » et de l'assistance d'un conseil. L'amendement CF56 est un amendement de repli.
Vous inventez ici, sans le dire, une nouvelle procédure fiscale. Ces amendements proposent une clarification.
Avis défavorable.
S'agissant des travaux, nous en avons déjà débattu. C'est, je suis le premier à le reconnaître, un angle mort de la réforme. La disposition du Gouvernement, qui soumet aux mêmes règles les travaux réalisés en 2018 et en 2019, est à mon sens la moins mauvaise possible, et le risque de report massif des travaux à 2020 me paraît limité.
S'agissant des amendements qui proposent de supprimer la clause générale « anti-optimisation », il me semble utile, compte tenu de la spécificité de la période de transition et des possibilités d'optimisation qu'elle pourrait offrir de prévoir cette clause spécifique. Celle-ci, au demeurant, est temporaire, puisqu'elle ne s'applique que pour la mise en oeuvre du CIMR et du CIMR complémentaire. J'ajoute qu'elle ne déroge pas aux règles prévues par les articles L. 16 et L. 16 A du livre des procédures fiscales.
Monsieur le rapporteur général, vous avez reconnu que l'amendement de M. Pupponi sur les monuments historiques était la moins mauvaise des solutions. Le problème soulevé ici est le même : pourquoi adoptez-vous une position différente ?
Dans le cas des bâtiments non classés, il est possible d'imputer 10 700 euros sur le revenu global, ce qui vous place souvent en déficit. Mais le report de ces déficits n'est possible que sur dix ans. Ne faudrait-il pas allonger temporairement ce délai, afin d'éviter que des déficits reportés ne tombent ?
Vous pointez, je l'ai reconnu tout à l'heure, une faiblesse du dispositif. Mais l'ouverture est moins facile que s'agissant des monuments historiques, car la masse financière en jeu est, ici, colossale. Je souhaite que le débat ait lieu en séance publique et que le Gouvernement s'exprime clairement.
Si cette réforme est vraiment un progrès fiscal, elle ne doit pas léser de contribuables... C'est effectivement un débat que nous devrons avoir en séance publique avec le Gouvernement.
Monsieur le rapporteur général, si nous déposons un amendement similaire à celui de M. Pupponi mais portant sur les bâtiments non classés, et allongeant d'un an la période de report des déficits, quelle sera votre position ?
Si vous me trouvez un gage à la hauteur, j'accepterai bien volontiers votre amendement. Recherche 3 milliards désespérément... !
Si les propriétaires font des travaux, l'État percevra de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), d'autres recettes... Il ne faut pas avoir une vision trop étroitement comptable. N'oublions pas l'effet sur l'économie !
Encore une fois, cette nouvelle version est pire que la version initiale, qui figurait dans le projet de loi de finances pour 2017. Certains travaux ne pourront être reportés, certes, mais beaucoup – le ravalement d'une façade, par exemple – le peuvent. Si vous ne pouvez déduire que la moitié des dépenses en 2018 et en 2019, mais tout en 2020, vous attendrez 2020 !
Je sonne l'alarme : sur deux ans, le secteur du bâtiment va perdre 800 millions d'euros.
Sur le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), le Gouvernement n'a pas hésité : pourquoi l'argument du coût vaudrait-il pour certaines situations et pas pour d'autres ?
Monsieur le rapporteur général, vous devez faire un geste. Votre position est intenable, tant pour les raisons économiques qui viennent d'être exposées que pour des raisons politiques : vous ne pouvez pas admettre la logique de l'amendement Pupponi et récuser les propositions de Mme Louwagie !
Si nous ne votons pas ces amendements, que faisons-nous ?
Le cas des monuments historiques est vraiment à part. Pour le reste, il y a différents amendements. M. de Courson a proposé d'en déposer un similaire à celui que nous avons voté pour les monuments historiques, mais qui s'applique à l'ensemble des revenus fonciers : nous en discuterons le moment venu. Reste qu'il y a un problème de recettes ! Je dois être vigilant. Un amendement doit être gagé pour de vrai, c'est-à-dire pas sur le tabac...
Le débat aura lieu en séance. Mais je maintiens mon avis défavorable sur les amendements déposés, et qui ont d'ailleurs déjà été discutés.
Vous parlez de gage, monsieur le rapporteur général, mais il n'y a pas besoin de gage, puisque c'est le projet lui-même qui a pour effet une augmentation de l'impôt, que nous sommes tout à fait fondés à refuser ! Ce que nous proposons est peut-être un peu hétérodoxe, mais tout à fait cohérent.
Votre vertu budgétaire est grande, monsieur le rapporteur général, mais vous l'employez à défendre une situation qui n'est pas vertueuse du tout !
Prenons un peu de hauteur. Le nouveau dispositif va augmenter l'impôt sur le revenu du fait de l'augmentation de sa base : les revenus taxés en 2019, qui ne seront plus ceux de 2018 mais ceux de 2019, seront plus importants. C'est un sujet dont on parle peu, mais une croissance de 2 % à 2,5 % des quelque 60 milliards de recettes de l'impôt sur le revenu, cela fait tout de même 1,2 à 1,5 milliard ! Ça fait des sous, comme on dit chez moi...
On ne peut pas avoir le beurre et l'argent du beurre. La réforme doit être neutre : elle ne vise pas à augmenter le produit net de l'impôt sur le revenu. Le Gouvernement doit trouver des solutions.
Je vous invite à déposer en séance un amendement « Pupponi généralisé », afin que le sujet ne soit pas éludé.
La commission rejette successivement les amendements CF49 à CF56.
Elle examine ensuite les amendements CF57 à CF62 de M. Marc Le Fur.
L'amendement CF57 vise à faire bénéficier le contribuable des garanties résultant de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, qui exige que le vérificateur recherche un dialogue avec le contribuable. Des difficultés importantes vont surgir : il faut protéger le contribuable.
Les amendements CF58 et CF59 portent sur la notion de réponse insuffisante, qui n'est pas définie clairement par la législation.
En matière de ressources, ou de dépenses, exceptionnelles, les erreurs risquent d'être nombreuses. Il y aura forcément des différences d'interprétation entre le contribuable et l'administration. L'amendement CF60 vise à éviter que les erreurs commises par les contribuables ne les conduisent à payer un impôt qui n'est pas dû.
L'amendement CF61 tend à abroger l'extension du droit de reprise à quatre ans. Cette extension n'est justifiée par le Gouvernement que par la nécessité de pouvoir contrôler les indépendants qui bénéficieraient d'un complément de CIMR en 2019.
L'amendement CF62 est un amendement de repli : le délai de reprise est porté à quatre années uniquement pour les indépendants qui bénéficieraient d'un complément de CIMR en 2020.
Avis défavorable. Ce sont des amendements que nous avons vus l'an dernier : le débat a eu lieu.
Les choses ont évolué depuis l'année dernière : nous y avons travaillé tout l'été, et le ministre a commencé à annoncer les modalités d'instauration d'un droit à l'erreur. L'administration se placera désormais dans un rôle de conseil, et lorsque la bonne foi des contribuables sera reconnue, il n'y aura pas de sanction.
La commission rejette successivement les amendements CF57 à CF62.
Elle aborde ensuite, en discussion commune, les amendements identiques CF304 du rapporteur général et CF243 de Mme Amélie de Montchalin, ainsi que les amendements CF2 et CF21 de M. Marc Le Fur.
Ces amendements font suite au débat que nous avons eu en séance, dans le cadre des articles non rattachés du projet de loi de finances, à propos des cotisations, notamment aux régimes de type Préfon, qui sont déductibles du revenu global. L'amendement de Mme de Montchalin est identique au mien.
Plus largement, ces amendements portent sur les cotisations d'épargne retraite individuelle qui permettent de bénéficier d'un avantage fiscal au moment du versement. Il est nécessaire d'instaurer un mécanisme afin d'éviter les pertes de cotisations en 2018. L'épargne retraite est un bon système pour encourager les Français à mettre chaque année une partie de leurs revenus de côté pour leur retraite. Notre proposition a été déposée après de longues discussions avec les professionnels du secteur.
Je retire néanmoins notre amendement, l'idée d'un avantage fiscal en 2019 fondé sur la moyenne des versements entre 2018 et 2019 ne faisant pas l'unanimité au sein de la profession et parmi les épargnants. Nous aurons cette discussion en séance, ce qui nous laisse quelques jours pour mettre au point une solution consensuelle.
Il faut inciter les Français à continuer d'épargner annuellement. Mais le coût budgétaire ne doit être trop important : il n'est donc pas possible de calculer l'avantage fiscal en 2019 sur les cotisations des deux années 2018 et 2019.
C'est vrai, mais le choix de passer au prélèvement à la source est le vôtre. Il faut l'assumer, comme vous le faites sur le CICE. Si vous augmentez l'impôt sous couvert de prélèvement à la source, le contribuable sera perdant, ou alors le marché rectifiera, comme cela risque d'être le cas pour les travaux ou pour les versements d'épargne retraite.
Nos débats montrent qu'un grand nombre de questions demeurent sans réponse. En l'occurrence, les contribuables n'auront aucun intérêt à épargner, et nous risquons une forte diminution des versements – alors même que nous souhaitons tous promouvoir ces dispositifs.
L'amendement CF2 porte sur la situation du régime Préfon. L'amendement CF21 est plus vaste et porte sur l'ensemble des régimes d'épargne retraite individuelle.
Je retire également mon amendement.
La difficulté est réelle, et il faut vraiment trouver une solution efficace d'ici à la séance publique – fût-elle proposée par le Gouvernement. Afin que cette solution soit aussi consensuelle que possible, je souhaite que Mme Louwagie et M. Le Fur soient associés à la discussion.
Je vous invite donc, chers collègues, à retirer les amendements CF2 et CF21.
Nous en revenons toujours au même problème : l'impôt sur le revenu est miné par les dépenses fiscales, qui dépassent 40 milliards d'euros. Dans le cas présent, soit en 2019 seulement le plafond passe de 10 % à 20 %, et les versements 2018 et 2019 pourront être déduits, soit il faut introduire un mécanisme de lissage, sur trois ans, comme nous l'avons fait pour les monuments historiques et comme nous le ferons peut-être pour les autres bâtiments.
Merci de votre proposition de travail commun, monsieur le rapporteur général. Je ne retire pas les amendements, que j'ai déjà retirés lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2018.
Je souhaite que l'on veille à ce que tous les secteurs d'activité soient traités de la même manière. L'immobilier ne doit pas être stigmatisé.
Les amendements CF304 et CF243 sont retirés.
La commission rejette successivement les amendements CF2 et CF21.
Puis elle adopte l'article 9 modifié.
Article 10 : Adaptation du droit fiscal au prêt de main-d'oeuvre à but non lucratif.
La commission adopte l'article 10 sans modification.
Article 11 : Interdiction de la déduction en charge des impôts prélevés conformément aux dispositions d'une convention fiscale
La commission adopte l'article 11 sans modification.
Après l'article 11
La commission se penche sur l'amendement CF211 de Mme Bénédicte Peyrol.
Les entreprises qui payent un impôt dans un État couvert par une convention ne sont pas toutes dans la même situation ; certaines entreprises ne peuvent pas imputer le crédit d'impôt conventionnel et subissent des doubles impositions.
Afin de mettre fin à ces situations et de compléter le dispositif instauré par l'article 11, qui transpose la jurisprudence « Céline », cet amendement tend à instaurer un report du crédit d'impôt conventionnel, pour une durée maximale de deux ans – durée, je le reconnais, un peu arbitraire. Au-delà de cette période, l'amendement précise que le reliquat de crédit d'impôt ne sera pas une charge déductible des résultats des exercices suivants. En effet, d'après la jurisprudence « Faurecia » de 2016, un crédit d'impôt étranger n'est pas une créance sur le Trésor, contrairement par exemple au CICE.
Je comprends votre volonté de ne pas pénaliser les entreprises déficitaires dont le crédit d'impôt tomberait en non-valeur, mais le coût ne serait pas anecdotique. Je vous invite à retirer l'amendement, afin que cette bonne question soit soulevée en séance et que nous interrogions le ministre.
Je suis entièrement d'accord avec ce que vient de dire le rapporteur général. J'ajoute qu'il faudrait, symétriquement, s'intéresser au traitement des dividendes étrangers qui bénéficient du régime mère-fille. C'était l'objet d'un amendement que j'avais défendu lors de la discussion du projet de loi de finances.
La liste des paradis fiscaux publiée hier par Oxfam inclut enfin Singapour et Hong Kong, pays dans lesquels l'IS est très faible. Nous appliquons pourtant à 100 % le régime mère-fille sur les dividendes qui reviennent de ces États.
Les enjeux fiscaux sont considérables. Sur le traitement des dividendes extra-européens, la réflexion doit être globale : il faut tout remettre à plat. L'optimisation au détriment de la France est certainement plus importante que le phénomène symétrique.
Je me suis interrogé, à la lecture du texte, sur la compatibilité du dispositif existant avec le droit communautaire. À cet égard, l'étude d'impact, dont nous venons de prendre connaissance, ne nous est guère utile, puisqu'il y est indiqué que « cet article ne vise pas à transposer en droit français des normes juridiques européennes ». Or, de fait, il crée une discrimination à l'intérieur de l'Union. N'est-ce pas une source de contentieux supplémentaire, monsieur le rapporteur général ?
Les régimes sont déjà différents suivant le type de convention fiscale. La question mériterait d'être creusée mais, a priori, la réponse est non, à l'heure actuelle.
Je souscris évidemment aux propos de Mme Cariou. Du reste, je vais suivre la recommandation du rapporteur général et retirer mon amendement, car il est vrai que l'on ignore le coût du dispositif proposé. Cependant, je précise, pour répondre à M. de Courson, qu'une procédure d'infraction a été ouverte contre la France en juillet dernier au sujet des personnes physiques qui sont en situation « déficitaire » et ne pourraient pas imputer leur crédit d'impôt sur leur revenu.
L'amendement est retiré.
Article 12 : Aménagement du sursis d'imposition applicable aux opérations intercalaires réalisées par les entreprises
La commission adopte l'article 12 sans modification.
Article 13 : Création d'un dispositif d'exonération fiscale pour les entreprises qui se créent dans les bassins urbains à dynamiser
La commission examine les amendements CF294 de M. Charles de Courson et CF179 de Mme Marie-Christine Dalloz.
Nous savons tous que cet article a été conçu pour le seul bassin minier du Nord et du Pas-de-Calais. Certes, il comporte, comme il se doit, des critères objectifs, mais je crains que l'un d'entre eux, celui de la densité de population, ne crée une rupture d'égalité entre les territoires. C'est pourquoi je propose de le supprimer. Nous avons déjà voté, je le rappelle, un dispositif de ce type – en partie, du reste, sur mon initiative, afin d'aider notre collègue Warsmann –, mais il concernait deux territoires : les Ardennes, qui étaient dans une situation épouvantable, et une partie de l'Ariège. En l'espèce, l'article 13 n'en concerne qu'un. Pourriez-vous nous apporter votre éclairage, monsieur le rapporteur général ?
Je partage l'avis de notre collègue de Courson. Je ne veux pas polémiquer mais, après avoir examiné l'amendement « Collomb » la semaine dernière, voilà que nous discutons aujourd'hui de l'article « Darmanin », pour ainsi dire. Je peux comprendre que l'on nous propose un tel dispositif, mais n'oublions pas que d'autres territoires que ceux visés par l'article 13 rencontrent les mêmes difficultés. Faisons donc en sorte que le champ d'application de l'article soit suffisamment large pour que personne ne se sente lésé.
L'amendement CF294, qui, au demeurant, ne procède pas à toutes les coordinations requises, conduirait à étendre considérablement le champ du nouveau dispositif, lequel serait applicable à toutes les communes dans lesquelles le taux de chômage est supérieur au taux national et le revenu médian inférieur à la moyenne nationale. Or, l'objectif de l'article 13 est ciblé.
Vous avez cité, monsieur de Courson, les bassins d'emploi à redynamiser (BER), qui concernent deux départements. Sans vouloir faire offense à ceux d'entre vous qui ont défendu leur prorogation, le dispositif de l'article 13 concerne tout de même une population plus importante, même si un seul secteur géographique est visé. En outre, votre amendement coûterait extrêmement cher.
Au reste, d'autres dispositifs ciblés prennent en compte des zones moins densément peuplées, je pense aux zones de revitalisation rurale (ZRR), aux BER ou aux zones de restructuration de la défense (ZRD), chacun de ces trois dispositifs ayant fait l'objet d'assouplissements en loi de finances l'année dernière et cette année. Il convient donc, me semble-t-il, d'en rester là, sans quoi nous risquons d'aller un peu trop loin.
Enfin, le dispositif tel qu'il est prévu s'inscrit dans le prolongement d'engagements qui avaient été pris sous la précédente législature.
Élu du bassin minier, je défends, au nom de ma formation politique, l'idée que ce type de mesures puisse être étendu à toute zone géographique dont le taux de chômage est supérieur à la moyenne nationale, car toute mesure concourant à l'inversion de la courbe du chômage est positive. Mais je ne voudrais pas que cette disposition destinée à redresser la situation de l'emploi dans le bassin minier soit supprimée au motif qu'une telle extension ne serait pas possible. Le bassin minier, je le rappelle, compte 1,1 million d'habitants ; le taux de chômage y est de 19,7 %, soit 10 points au-dessus de la moyenne nationale, et 19 % de la population, soit 5 points au-dessus de la moyenne nationale, y vivent sous le seuil de pauvreté. Ce bassin de vie est le plus sinistré de France. Je suis favorable à ce que l'on prenne de telles mesures pour l'ensemble de la France, mais qu'elles bénéficient au moins au bassin minier, car la situation est urgente. Par ailleurs, je confirme que cette disposition fait partie d'un ensemble de propositions qui avaient été présentées par le Premier ministre Bernard Cazeneuve à Oignies, en mars dernier, et qu'elle est donc très attendue par les élus de tous bords.
Lorsque j'ai pris connaissance du projet de loi de finances rectificative, je me suis demandé comment l'article 13 pouvait ne concerner qu'un seul territoire. De fait, les critères sont définis de façon que seul le bassin houiller du Nord et du Pas-de-Calais soit pris en compte. On en comprend les raisons. La semaine dernière, déjà, nous avons examiné un amendement consacré spécifiquement à la métropole de Lyon...
Mon amendement CF179 vise, non pas à remettre en cause ce dispositif, mais à l'étendre à d'autres territoires, de manière cependant plus restrictive que ne le demande M. de Courson, dont la proposition serait trop onéreuse. Je suggère en effet de retenir la notion de bassin houiller, qui est définie précisément dans la loi et qui permettrait d'étendre le dispositif à la Lorraine, second bassin industriel historique de France, ainsi qu'au Massif central, où se trouvent de petits bassins miniers. Cette solution présente l'avantage d'être cohérente et elle évite de laisser penser que M. Darmanin a travaillé pour son seul territoire.
Je voudrais signaler une légère incohérence dans l'argumentation de notre rapporteur général. On ne peut à la fois s'opposer à l'amendement de M. de Courson au motif qu'il s'appliquerait à beaucoup de monde et coûterait donc très cher, et estimer qu'un tel dispositif est nécessaire au Nord et au Pas-de-Calais parce que de nombreuses personnes sont concernées. Comme le dirait le Président de la République, il faut choisir l'histoire que l'on raconte. Mme Dalloz nous propose de retenir le critère du bassin minier. Nous pouvons en discuter, mais il faut être cohérent. C'est une verrue, tout de même, ce Nord-Pas-de-Calais unique.
Je rejoins Mme Dalloz. Bien entendu, je ne voterai pas contre cette mesure, justifiée pour cette région. Mais elle serait justifiée pour d'autres régions qui se trouvent dans une situation identique. Il me semble donc que nous pourrions retenir la notion de bassin minier et dresser la liste exhaustive des territoires concernés, en l'assortissant de critères objectifs tels que le taux de chômage. Ainsi, nous pourrions légiférer en toute connaissance de cause, sans commettre d'impair.
Je comprends la nécessité de flécher un dispositif vers des territoires qui se trouvent dans une situation économique et sociale dramatique. Mais cela crée des effets de zonage au détriment des territoires voisins. Je pense au département de l'Aisne qui, alors qu'il est également en grande difficulté, se trouverait pénalisé par un tel dispositif. Celui-ci devrait donc être appliqué à titre expérimental et, surtout, pouvoir être étendu aux territoires qui se trouvent en périphérie.
Je souscris à la proposition de Mme Dalloz d'étendre le dispositif à l'ensemble des bassins miniers. Je suis élu d'un territoire qui rencontre quasiment les mêmes difficultés que celui du Nord et du Pas-de-Calais, puisque le revenu médian y est inférieur à la moyenne nationale et que le taux de chômage y est très important. La proximité de la frontière luxembourgeoise n'arrange rien, dans la mesure où les disparités, notamment en matière d'urbanisme, sont telles d'un côté et de l'autre de cette frontière que les créateurs d'entreprises préfèrent s'installer au Luxembourg. Je m'entretiendrai donc avec Mme Dalloz afin que nous définissions des critères précis qui permettent d'inclure le territoire lorrain dans le dispositif.
Il n'est précisé nulle part, à l'article 13, que celui-ci est limité au bassin minier : il y est question de bassins urbains. En effet, d'autres zones, telles que celles évoquées par M. Paluszkiewicz, doivent également être redynamisées, mais elles ne répondent pas à l'ensemble des critères, qui sont : 1 million d'habitants, une densité de population supérieure à la moyenne nationale, un revenu disponible médian faible et un important taux de chômage. Ces critères peuvent être remplis par d'autres territoires, mais il se trouve qu'ils ne s'appliquent qu'au Nord et au Pas-de-Calais.
C'est une coïncidence qui correspond à un engagement du Président de la République, lequel a estimé, lorsqu'il s'est rendu sur place, que ces territoires urbains méritaient que l'on y consacre des moyens. Cela dit, nous pourrions mener une réflexion sur les territoires qui ne remplissent ni les critères des zones de revitalisation rurale ni ceux des zones urbaines denses.
En tout cas, l'exposé des motifs est clair, puisqu'il est indiqué : « Ce zonage trouverait en pratique à s'appliquer dans les seules communes du bassin minier du Nord et du Pas-de-Calais ». C'est un choix, mais la réalité est celle-là.
L'article 13 vise quasiment à créer une zone franche. Or, nous ne pensons pas que ce type de dispositif, qui prive l'État de recettes, soit la solution pour redynamiser des territoires qui pâtissent notamment de la politique de désindustrialisation menée depuis des années. En tout état de cause, les entreprises qui bénéficieront de ce dispositif doivent remplir un certain nombre de critères concernant l'emploi ou le type d'emplois créés et prendre des engagements, car la liste est longue des entreprises qui ont fermé après avoir bénéficié d'aides pendant plusieurs années.
M. Roussel défendra un amendement qui vise à améliorer cet aspect du dispositif, mais l'absence de critères pose problème. Du reste, nous préférerions que soit créé, en lieu et place du CICE, qui n'est pas « critérisé », un fonds de solidarité interentreprises dont les critères d'éligibilité prendraient en compte la situation des territoires – je pense notamment à ceux qui souffrent de la désindustrialisation – ainsi que l'engagement des entreprises de créer, par exemple, des emplois en contrat à durée indéterminée. Toujours est-il que si l'on additionne les dispositifs spécifiques en faveur des territoires défavorisés, on aboutira à un mitage de zones franches, et je ne crois pas que ce soit la solution au problème de notre pays.
Je partage les observations de notre collègue Paluszkiewicz. Dans notre territoire de la Meuse, en particulier dans les anciennes villes minières, le taux de chômage est élevé, l'urbanisme quasiment à l'abandon et les infrastructures défaillantes. Il est vrai que la densité de population n'est pas suffisante pour que ces territoires bénéficient du dispositif de l'article 13. Du reste, certains d'entre eux relèvent déjà de ZRR, et il faut éviter qu'ils cumulent les avantages. Mais nous allons réfléchir à la question d'ici à la séance publique.
Je suis content de notre débat, car l'objectif de mon amendement était de provoquer une discussion. Si nous reprenons les différents critères, nous nous apercevons que le premier – un taux de chômage supérieur au taux national – est, par définition, rempli par plus de la moitié des communes, que le deuxième – un revenu disponible médian par unité de consommation inférieur à la moyenne nationale – correspond également à une bonne moitié des territoires et que le troisième – une densité de population supérieure à la moyenne nationale – est difficilement compréhensible. Enfin, 70 % de la population de chaque établissement public de coopération intercommunale doivent résider dans des communes répondant aux trois critères précédents – vous voyez un peu le truc ! À quoi s'ajoute le critère du million d'habitants.
Je vous mets en garde : je pense que cet article sera censuré pour rupture d'égalité entre les territoires. Je ne suis pas du tout opposé à un dispositif de ce type : j'en ai conçu un similaire avec M. Warsmann pour les Ardennes et l'Ariège, qui a d'ailleurs été prolongé de trois ans par un amendement voté à l'unanimité lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2018. Mais si nous maintenons ces critères, nous risquons d'aller dans le mur. Dès lors, comment faire ? Il est vrai qu'à force de créer de petits dispositifs secteur par secteur, on se demande où est l'égalité entre les uns et les autres. J'ajoute que la dépense est tout de même estimée à 278 millions d'euros.
Tout d'abord, contrairement à ce que prétend Mme de Montchalin, l'exposé des motifs de l'article 13 précise bien – c'est d'ailleurs surréaliste – que le dispositif ne concerne en pratique que le bassin minier du Nord et du Pas-de-Calais. Ensuite, on crée, de fait, une nouvelle zone franche. Or, je rappelle que celles-ci font l'objet d'une négociation européenne ; je ne suis donc pas certain que la disposition soit acceptée au niveau européen. Enfin, lorsqu'on exonère des entreprises d'impôts locaux, ce sont toutes les autres collectivités locales qui paient.
Au-delà de la constitutionnalité du dispositif, la superposition de différents dispositifs de zonage – si bien ciblés qu'ils s'apparentent parfois à du localisme, comme c'est le cas ici – produit des effets d'aubaine. Ainsi, une petite commune de ma circonscription qui a créé une maison de santé pluriprofessionnelle ne parvient pas à attirer de médecins car elle se trouve à côté d'une zone franche. En définitive, ce sont donc des territoires en difficulté qui paient pour les autres.
Le débat est intéressant. Je rappelle tout de même que le bassin minier, qui est à cheval sur le Nord et le Pas-de-Calais, compte 1,1 million d'habitants, soit l'équivalent d'un gros département, et que tous les indicateurs socio-économiques y sont dans le rouge. On peut déplorer qu'il soit le seul territoire concerné par l'article 13 mais, depuis la fermeture des mines et d'Usinor-Denain, il a accueilli une mono-industrie, celle de l'automobile, qui tient à un fil, et il n'a pas bénéficié, ou alors seulement à la marge, d'une véritable politique de solidarité nationale. Ce bassin que l'on dit urbain comprend également des zones rurales et il se caractérise surtout par un taux de chômage supérieur de 10 points à la moyenne nationale et par un taux de pauvreté supérieur de 5 points à la moyenne nationale.
Dans cette affaire, la détermination du périmètre semble avoir précédé l'établissement des critères. C'est en cela qu'il y a coïncidence. Mais c'est ainsi. Néanmoins, outre le problème de constitutionnalité, qui ne doit pas être ignoré, la question du coût est importante. Je souhaiterais donc savoir, monsieur le rapporteur général, s'il vous paraît possible de revoir le dispositif avec le Gouvernement. Il faudrait en effet éliminer le critère de la densité, qui vise à discriminer arbitrairement et rompt ainsi le principe d'égalité, et rendre, par exemple, celui du taux de chômage plus exigeant. Ou bien on adopte le critère historique, c'est-à-dire la production houillère, proposé par Mme Dalloz. En tout état de cause, le Gouvernement ne peut maintenir ce dispositif arbitraire et sélectif. Il conviendrait donc de le redéfinir afin de le rendre rigoureux et plus juste.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, il s'agit évidemment d'une bonne mesure mais, pour cette raison précisément, elle doit être étendue à d'autres territoires qui se trouvent dans la même situation. Je vais prendre un exemple pour illustrer mon propos. Saint-Éloy-les-Mines compte 3 700 habitants, le taux de chômage y est de 20,4 %, donc supérieur à la moyenne nationale, le taux de pauvreté y est de 18,3 % et le revenu médian y est inférieur à la moyenne nationale. Cette commune répond donc aux critères définis à l'article 13, sauf à celui de la densité démographique. Certes, elle se trouve en ZRR, mais tel n'est pas le cas d'autres communes qui sont dans une situation analogue et qui ne bénéficieront pas non plus du dispositif de l'article 13. Je souhaite donc que nous adoptions une mesure équitable : à situation égale, dispositif égal.
Nous pourrions en effet revenir sur le critère de la densité. Mais j'insiste sur la nécessité de trouver un accord avec le Sénat pour qu'il examine la proposition de loi réformant le code minier, qui a été discutée en mars dernier à l'Assemblée. Par ailleurs, puisque M. Roussel a indiqué que ce dispositif correspondait à un engagement pris par le Premier ministre l'an dernier, j'ajoute que M. Bernard Cazeneuve s'est également rendu, en compagnie de M. Christian Eckert, à Longwy, où il s'est aussi engagé à ce que ces territoires soient concernés. Je le répète, le seul problème qui se pose est celui du critère de densité ; je souhaite donc que l'on puisse le revoir.
J'ai parfois le sentiment que l'on réinvente l'eau chaude. En effet, on ne parle pas des huit autres dispositifs ciblés. Or, le critère fondamental des ZRR est la densité démographique. Quant aux critères des BER, dont on a voté la prolongation dans l'enthousiasme général, ils sont les suivants : un taux de chômage au 30 juin 2006 supérieur de 3 points au taux national, une variation annuelle moyenne négative de population supérieure à 0,15 %, une variation annuelle moyenne négative d'emploi supérieure à 0,75 %. Et j'ajoute qu'il était précisé, dans l'exposé sommaire de l'amendement qui a prorogé ce dispositif, que ce denier ne concernait que les Ardennes et l'Ariège. Ces dispositifs n'ont pas été pour autant jugés inconstitutionnels. Que ceux qui les contestent de manière générale fassent attention à ne pas être concernés par l'un d'eux – je pense aux ZRD et à la Marne, par exemple.
En tout état de cause, leur caractère inconstitutionnel ne me paraît pas fondé, sans quoi ils auraient été censurés. Nous nous sommes battus pour que la définition des ZRR permette une sortie en sifflet, en établissant des critères assez proches de ceux dont nous discutons. Prenez donc garde à ce que vous dites sur les dispositifs ciblés car, à trop les critiquer, on risque de les faire tomber l'un après l'autre. Or, ce n'est pas notre but.
Quoi qu'il en soit, je suis défavorable aux amendements CF294 et CF179, dont nous discuterons, de toute façon, avec le ministre en séance publique. Je conclurai par un trait d'humour, en faisant remarquer à Mme Dalloz que, son amendement concernant également les anciennes mines, je pourrais peut-être en bénéficier en tant que détenteur d'une charte de 1143 de l'Empire allemand qui m'autorise à exploiter des mines...
La commission rejette successivement les amendements CF294 et CF179.
Elle en vient ensuite à l'examen de l'amendement CF172 de M. Fabien Roussel.
Afin que les mesures d'incitation fiscale dont bénéficieront les entreprises qui s'implanteront dans cette zone puissent véritablement servir l'emploi local, nous proposons d'ajouter que 50 % au moins des emplois créés doivent être occupés par des personnes issues des communes du bassin minier.
Je rappelle que, lors de la présentation du texte devant notre commission, M. Darmanin a indiqué qu'il accueillerait favorablement une telle initiative. Au demeurant, de telles clauses d'embauche locale ne sont pas inédites puisqu'elles existent déjà pour les entreprises qui se sont implantées en zone franche urbaine à compter de 2015. Avis favorable, donc.
La commission adopte l'amendement.
Elle examine ensuite les amendements identiques CF180 de M. Michel Castellani et CF253 de M. François Pupponi.
Cet amendement reprend une délibération votée par l'Assemblée de Corse, qui vise à favoriser l'installation d'entreprises en zone de montagne, notamment dans les petites communes isolées, grâce à une politique fiscale aménagée. Mais les critères définis peuvent être étendus à de nombreuses régions.
Le dispositif bénéficierait aux entreprises existantes ainsi qu'à celles qui seront créées jusqu'en 2027. Or, non seulement cela va très au-delà des prescriptions de la loi de programmation des finances publiques, mais cette date est largement postérieure à celle retenue pour les autres dispositifs zonés, qui est fixée à décembre 2020, ces dispositifs étant prorogés de trois ans en trois ans. Par ailleurs, toute la Corse est classée en zone d'aide à finalité régionale (ZAFR) et la quasi-totalité de l'île est en ZRR. Or, les avantages des ZRR sont plus intéressants, puisque l'exonération d'impôt sur le revenu ou d'IS dure huit ans, dont cinq ans à 100 %, et que des exonérations de cotisations sociales sont prévues.
Sans nier la spécificité de la Corse, je ne vois pas très bien l'opportunité du dispositif. Il existe déjà plusieurs dispositifs spécifiques à l'île : le crédit d'impôt pour investissement en Corse, dont le taux a d'ailleurs été majoré à 30 % l'an dernier pour les TPE ; l'exonération de taxe foncière sur les propriétés agricoles ; l'abattement de 25 % sur les bases communales de cotisation foncière des entreprises (CFE) ; des dispositions spéciales en matière de TVA. Avis défavorable.
L'amendement a été déposé aussi parce que le Gouvernement s'était engagé à mettre en place, dans le cadre de ce PLFR, des dispositifs particuliers pour la Corse, notamment pour le financement de la collectivité unique, et que l'engagement n'a pas été tenu. Ensuite, depuis la création des fonds d'investissement de proximité (FIP), la tradition est qu'il existe un différentiel entre FIP continentaux et FIP corses. Les premiers ont vu leur taux de réduction augmenté en loi de finances la semaine dernière, les seconds n'ont pas été modifiés, si bien que l'avantage comparatif de la Corse diminue.
Le rapporteur général a fait le tour des exonérations dont bénéficie la Corse, mais il s'agit d'une zone insulaire très marquée au plan économique et social, où le niveau de chômage est très élevé, la précarité considérable, le nombre de personnes vivant au-dessous du seuil de pauvreté largement supérieur à la moyenne. Les réalités sociales de l'île plaident pour conforter la création d'entreprises.
La commission rejette les amendements.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur général, elle rejette ensuite l'amendement CF181 de M. Fabien Roussel.
Elle est saisie de l'amendement CF204 de Mme Valérie Rabault.
L'amendement vise à demander au Gouvernement un rapport sur les conséquences de l'article 13 pour les collectivités locales en matière de compensations d'exonérations.
Je demande son retrait. Le rapport ne me semble pas complètement inutile mais le délai prévu ne serait pas suffisant, et mieux vaudrait, par ailleurs, produire un rapport sur l'ensemble des dispositifs plutôt que sur les seuls bassins urbains à dynamiser.
Je le retire mais j'aimerais que vous insistiez pour que l'on ait une ligne spécifique sur le rapport relatif aux remboursements et dégrèvements.
L'amendement est retiré.
La commission examine ensuite l'amendement CF295 de M. Charles de Courson.
Il paraît qu'une de nos fonctions est d'évaluer les politiques publiques, mais on oublie toujours de prévoir un rapport de suivi de l'impact d'une mesure. Tel est l'objet de notre amendement.
Il est trop tôt, après un an d'application seulement, pour évaluer ce dispositif. Mieux vaut adopter la démarche proposée par Mme Pires Beaune.
L'amendement est retiré.
La commission adopte l'article 13 modifié.
Après l'article 13
Suivant l'avis défavorable du rapporteur général, la commission rejette l'amendement CF254 de M. François Pupponi.
Article additionnel après l'article 13 : Extension de l'exonération d'impôts commerciaux applicable dans les zones de revitalisation rurale (ZRR) à la première transmission familiale d'une entreprise non individuelle
La commission examine ensuite l'amendement CF309 du rapporteur général.
Cet amendement s'inscrit dans la ligne de l'article 10 bis du projet de loi de finances (PLF) pour 2018, adopté par notre assemblée et voté conforme par le Sénat, qui prévoit le maintien des exonérations d'IR ou d'IS applicables dans les ZRR à la première transmission familiale d'une entreprise individuelle. Le dispositif avait été proposé par Valérie Rabault et nous l'avions retravaillé pour la séance. L'amendement vise à étendre cet assouplissement bienvenu aux transmissions familiales portant sur les autres entreprises. Il s'agit d'une mesure de cohérence avec notre vote en PLF, et éliminant le risque de rupture d'égalité évoqué par le ministre lors des débats.
La commission adopte l'amendement.
Après l'article 13
Puis la commission étudie l'amendement CF79 de M. Patrick Hetzel.
Cet amendement prend en compte la situation des sociétés de capitaux transparentes, créées par la loi de modernisation de l'économie (LME) du 4 août 2008, permettant aux investisseurs de déduire les pertes éventuelles de revenus pour le calcul de l'impôt, l'État prenant en charge la moitié du risque en cas de cessation de paiement. Mais cette incitation échoue en grande partie à cause d'une disposition du code général des impôts, l'article 156, qui « tunnélise » les revenus et élimine la plupart des investisseurs. Nous proposons donc de résoudre ce problème juridique en donnant une impulsion à un système dont chacun fait la promotion.
L'amendement professionnalise l'investissement mais crée du même coup une inégalité entre les associés des sociétés de l'article 239 bis AB et les associés de toutes les autres sociétés de personnes, qui resteraient soumis au droit commun. Paradoxalement, cela revient à traiter moins bien les associés des sociétés de personnes que les associés de sociétés de capitaux qui, sur option, choisissent le régime de l'IR. Une telle rupture de l'égalité rend la mesure inconstitutionnelle.
Si l'on veut dynamiser le dispositif, il est important de le porter auprès des non-professionnels.
La commission rejette l'amendement.
La commission est saisie de l'amendement CF191 de M. Christophe Bouillon.
Cet amendement réaffirme l'impératif de la sécurité d'approvisionnement, qui passe par l'existence de stocks stratégiques. Il appelle également notre attention sur l'ambition industrielle de notre pays, où il existe encore des raffineries qui procurent des emplois et des ressources aux territoires.
La valorisation comptable des stocks obligatoires est liée à la fluctuation des marchés. Concrètement, quand il existe des gains latents pour ces stocks, ils sont intégrés à 100 % dans l'assiette fiscale, alors que les pertes ne sont imputées qu'à hauteur de 50 % des profits éventuels les années suivantes. Cela pénalise ceux qui ont choisi d'investir en France car les règles sont différentes dans d'autres pays européens. Il vous est donc proposé d'introduire un mécanisme qui permette d'imputer sans plafonnement les pertes liées aux fluctuations des courants internationaux de référence.
Je me demande si certains marronniers n'ont pas des racines dans les nappes pétrolifères... Car c'est un amendement qui a déjà été déposé et rejeté en 2015, en 2016, et peut-être même avant.
Le report en avant est sans limite dans le temps : même si un plafond en valeur est prévu, ce dernier n'a qu'un effet de trésorerie car l'intégralité du déficit pourra in fine être imputée sur les exercices ultérieurs. Il ne paraît guère opportun d'introduire une exception sectorielle à une règle générale qui s'applique de la même manière à tout le monde. La gestion de la fluctuation des cours pétroliers est censée être prise en compte par les entreprises de ce secteur, pour leur fonctionnement. Les années où les cours remontent, cet amendement, étrangement, n'est pas proposé. Avis défavorable.
Ce n'est pas parce que c'est un marronnier que c'est un mauvais amendement. Comment justifier, du point de vue de l'intérêt général, la dissymétrie de traitement entre la hausse et la baisse ? La règle est discriminatoire, et la discrimination pèse particulièrement sur les pétroliers, astreints à trois mois de stocks au minimum.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement CF80 de M. Patrick Hetzel.
Il s'agit de clarifier les conditions d'application du taux réduit d'IS. L'amendement précise que la prise en compte de la somme des chiffres d'affaires de chacune des sociétés membres d'un groupe intégré ne vaut que pour l'application du taux réduit à la société mère de ce groupe. Pour l'application du taux réduit à une société détenue pour 75 % au moins par une société mère d'un groupe fiscalement intégré sans pour autant être membre du groupe intégré elle-même, seul le chiffre d'affaires propre de la société mère est pris en compte, à l'exclusion des chiffres d'affaires réalisés par les autres sociétés membres de ce groupe.
Cet amendement avait été retiré par son auteur l'an dernier, car il est satisfait. Seule la société mère d'un groupe fiscalement intégré bénéficie du taux réduit de 15 % pour la simple et bonne raison que, dans un groupe fiscalement intégré, seule la société mère est redevable de l'IS. Les autres sociétés membres du groupe n'en sont pas redevables. La précision que vous entendez apporter n'est donc pas utile.
L'amendement est retiré.
La commission examine, en discussion commune, les amendements CF184 et CF185 de Mme Valérie Rabault.
Les deux amendements ne diffèrent que par la date d'application : 1er janvier prochain pour le premier, douze mois plus tard pour le second. En 2004 a été créé un crédit d'impôt cinéma, dont l'objectif était de défendre la langue et la culture françaises. Le champ en a été étendu en 2015. Il s'agit de revenir sur cette extension, considérant que les effets spéciaux n'ont rien à voir avec la langue française. En outre, cela rapportera de l'argent à l'État.
Tout comme Mme Karine Berger, Mme Rabault était plutôt opposée à la logique générale de cet élargissement. Par cet amendement, vous tendez à revenir sur la seule dérogation à l'usage de la langue française. Ce point n'est peut-être pas le plus important, ni le plus onéreux, des élargissements du crédit d'impôt cinéma voté à l'époque. Plutôt que d'ajuster ce seul point, je propose une évaluation d'ensemble de ces dépenses fiscales au printemps, afin d'examiner si les élargissements votés par votre majorité entre 2012 et 2017, qui ont conduit à faire passer l'enveloppe des dépenses fiscales en faveur du cinéma de 143 à 321 millions d'euros, étaient justifiés. Je donne donc un avis défavorable à l'amendement au profit de cette évaluation.
Mme Pires Beaune a raison, et pour une fois qu'un amendement réduit la dépense fiscale, cela mérite d'être salué. Le précédent président de la commission des affaires culturelles ne cessait de déposer des amendements pour élargir les dépenses fiscales, et il a tellement exagéré qu'une partie du groupe socialiste s'est même révoltée. Les gens qui bénéficient des sociétés pour le financement de l'industrie cinématographique et audiovisuelle (SOFICA) et du dispositif cinéma sont extrêmement « rentés », pour parler comme l'extrême-gauche d'autrefois...
Je vais retirer les amendements et les redéposer en séance car je considère que le débat doit avoir lieu. Au vu de leurs montants, les crédits d'impôt culturels méritent une révision globale.
Les amendements sont retirés.
Article additionnel après l'article 13 : Prorogation du crédit d'impôt phonographique
La commission aborde les amendements identiques CF148 du rapporteur général et CF240 de Mme Amélie de Montchalin.
Il s'agit de proroger le crédit d'impôt pour production phonographique créé en 2006. Nous souhaitons continuer d'apporter notre soutien à un secteur qui a chuté de plus de 60 % depuis 2002 en raison de l'évolution des technologies et des pratiques culturelles. Le coût de l'amendement est estimé à 8 millions d'euros en 2020, 2021 et 2022. Il faut éviter un choc fiscal dans ce secteur essentiel au rayonnement de la France.
Avec 8 millions d'euros, ce ne sont pas du tout les mêmes échelles que précédemment, et le secteur concerné est très différent de celui du cinéma qui, comme l'a fort justement rappelé Charles de Courson, bénéficie d'autres mesures. J'y suis favorable.
La commission adopte ces amendements.
Après l'article 13
La commission examine ensuite l'amendement CF81 de M. Patrick Hetzel.
Cet amendement vise à définir les dépenses entrant dans la détermination de la base du crédit d'impôt recherche (CIR). Il existe un dispositif contraignant le sous-traitant à inclure dans son CIR les dépenses de recherche réalisées pour ses clients français, et à en déduire le chiffre d'affaires réalisé avec ces mêmes clients. Le 2 mars 2016, l'administration fiscale a apporté une précision bienvenue, en limitant la déduction des revenus aux dépenses effectivement engagées par le prestataire. Toutefois, cette précision a été annulée quelques jours plus tard, au motif d'une erreur matérielle. L'amendement vise à réintroduire dans la loi cette précision de bon sens.
Je serai plus prudent que vous, car si vous limitez la déduction aux seules dépenses et non aux sommes facturées, l'amendement peut conduire à ce qu'une partie de ces sommes soit prise en compte deux fois, en totalité pour le CIR du donneur d'ordre et en partie pour celui du sous-traitant. Je demande donc le retrait de l'amendement, pour éviter un risque d'optimisation que vous ne souhaitez pas non plus.
C'est un vrai problème, et ce depuis plusieurs années. La solution ne serait-elle pas que Mme Louwagie redépose son amendement en séance pour obtenir une réponse du Gouvernement, car la question peut parfaitement être résolue par simple instruction administrative ?
La commission rejette l'amendement.
Puis elle étudie, en discussion commune, les amendements CF157 et CF158 du président Éric Woerth.
Il s'agit de poursuivre la discussion que nous avons eue sur la transformation du CICE en baisses de cotisations salariales. Nous avions déposé un amendement précisant que les salaires concernés allaient jusqu'à trois fois et demie le SMIC. Le ministre présent avait répondu que cela coûtait trop cher et qu'il n'y était pas favorable, puis le Premier ministre a considéré que c'était une bonne idée, mais jusqu'à trois SMIC seulement. C'est l'application stricte du rapport Gallois, un des bons rapports de ces dernières années, et qui est à l'origine du CICE. Nous approuvons l'idée de transformer le CICE, mais si nous voulons réellement améliorer notre compétitivité, il faut intégrer les salaires de l'industrie, c'est-à-dire les emplois exposés à la compétition internationale.
Le premier amendement prévoit des allégements jusqu'à trois fois et demie le SMIC ; le second, de repli, jusqu'à trois fois seulement.
Si débat il doit y avoir, il devrait plutôt porter sur les allégements de charges, qui remplaceront le CICE en 2019. Le ministre vous a dit n'être pas fermé à toute discussion sur ce point. Il vous a même proposé une méthode : travailler la question à fond, en étudiant tous les effets et en dressant un bilan coûts-avantages. Je vous invite à retirer les amendements au profit d'une telle discussion. Leur coût, en outre, est très élevé : au moins 4,6 milliards d'euros par an, et sans doute plus.
C'est un débat que nous avons depuis des années en commission des finances : faut-il réduire les cotisations sociales seulement en bas de l'échelle des salaires, ou faut-il aller plus loin ? Quand on les baisse au bas de l'échelle, on ne protège pas l'industrie mais les services peu ou pas délocalisables. Le rapport Gallois préconisait un champ d'application compris entre 1,5 et 3,5 SMIC, plutôt que commençant à un SMIC. C'était une position courageuse conforme aux intérêts à long terme du pays. Mais cela n'a pas été fait.
La transformation du CICE en exonérations de charges aura pour effet de substituer une charge non déductible à une charge déductible. Vous récupérerez donc en IR et en IS environ 3,5 milliards d'euros. Le Gouvernement ayant dit que l'opération devait être neutre, je pense que vous devriez utiliser ces 3,5 milliards pour relever le plafond le plus haut possible, dans cette limite.
Vous avez bien écouté le Premier ministre, monsieur le président, mais il a aussi ajouté que c'était un très bon objectif à condition que la situation des comptes publics soit rétablie. Nous partageons l'idée, nous en voyons tous les avantages, mais nous faisons déjà beaucoup de choses en 2018 et nous n'avons pas les moyens budgétaires d'élargir la baisse de charges telle que vous le proposez.
Vous pouvez renoncer à supprimer la taxe d'habitation et la remplacer par des mesures de compétitivité. Nous vous faisons des propositions et nous les assumons.
Incontestablement, c'est là qu'il faut agir. Si notre commerce extérieur va si mal, si la part de l'industrie dans le PIB s'est contractée, c'est parce que l'offre n'est pas à la hauteur, et nous savons que c'est par les salaires les plus élevés qu'on pourra y répondre. Le précédent gouvernement, comme celui d'avant, pour des raisons d'efficacité immédiate et de réponse au chômage, se sont concentrés sur les bas salaires, mais il n'y a pas de doute sur l'objectif. Simplement, on ne peut pas tout faire en même temps. Vous-même, monsieur le président, vous devriez hiérarchiser vos propositions, entre le maintien du CICE à 7 %, l'allégement de charges à 3,5 fois le SMIC, la baisse de l'IS pour toutes les entreprises, l'exonération des heures supplémentaires, la réduction de l'IR... Vous ne pourriez pas tout faire en même temps. Il faut étaler les mesures dans le temps et c'est qu'a prévu le Gouvernement.
Cet échange entre libéraux et extrêmes libéraux est très intéressant. La pente est prise : ce que propose M. Woerth, la majorité s'apprête à le faire dans les mois à venir. Les charges sociales sont des cotisations sociales, c'est-à-dire du salaire socialisé, et c'est ce qui finance la solidarité nationale. La majorité En Marche est en train de casser tout le système de solidarité, et Les Républicains proposent même de recourir à l'impôt le plus injuste, la TVA, qui touche tous les Français de manière non progressive.
Cela fait des années que l'on discute du sujet à l'aveuglette. J'ai demandé il y a quelques années une analyse précise de la distribution des exonérations de charges sociales patronales, qu'il s'agisse du dispositif « Fillon » ou du CICE. Les seules statistiques dont nous disposions sont très générales, par grands secteurs d'activités, par grandes branches selon les données de l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), et c'est en vain que j'ai demandé à ce que nous puissions travailler par échantillons d'entreprises. La transformation du CICE qui vient d'être votée, ramenant celui-ci à 6 % de baisse directe des charges, est une bonne chose, mais le dispositif comporte maintenant une progressivité au bénéfice des salaires proches du SMIC. Or, nous ne savons pas qui bénéficie exactement de ces exonérations. On nous répète depuis des années que ce sont les sociétés de la grande distribution, du nettoyage et d'autres, mais en vérité nous n'avons pas d'éléments. Les entreprises exportatrices sont-elles vraiment pénalisées ? On ne le sait pas. On tourne en rond depuis des années, sans diagnostic précis.
Le CICE fait partie des politiques de l'offre. Il aurait pu être mieux fléché vers des entreprises qui ont vocation à exporter, mais, quoi qu'il en soit, il me semble qu'une économie doit marcher sur ses deux jambes et qu'il est temps à présent de mener des politiques de redistribution et de soutien au pouvoir d'achat, des politiques de la demande, qui bénéficient à nos entreprises de proximité. C'est pourquoi je ne voterai pas ces amendements.
La commission rejette les amendements.
Article 14 : Suppression de la procédure d'agrément préalable pour l'application du régime spécial des fusions aux opérations de restructuration réalisées au profit d'une personne morale étrangère
La commission examine l'amendement CF276 de M. Éric Coquerel.
Cet article supprime l'agrément du ministère pour bénéficier d'un régime dérogatoire, ce qui affaiblira la lutte contre la fraude fiscale. Nous demandons sa suppression.
Avis défavorable. La suppression de l'agrément est inévitable du fait de la jurisprudence de Cour de justice de l'Union européenne du 8 mars dernier, à savoir l'arrêt « Euro Park Service ».
La commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement CF213 de Mme Bénédicte Peyrol.
Il s'agit de mettre notre droit en conformité avec la directive « Fusions » et de transformer en une règle d'assiette l'engagement que doit prendre la société apporteuse de calculer les futures plus-values de cession afférentes aux titres à partir du prix de revient fiscal des éléments apportés. La jurisprudence européenne « 3DISrl » dit que toute condition non prévue par la directive est interdite.
Dans la mesure où il s'agit de tirer les conséquences de dispositions européennes, j'y suis favorable.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle étudie l'amendement CF277 de M. Éric Coquerel.
Cet amendement vise à alourdir l'amende en cas de non-déclaration par les entreprises souhaitant bénéficier du régime dérogatoire. Je ne pense pas que cela contrevienne au droit européen, comme on nous en menace régulièrement. Nous proposons de multiplier cette amende par cinq, en la portant à 50 000 euros, de façon que ce soit un peu dissuasif.
La remise en cause automatique du régime spécial en cas de défaut de déclaration pourrait présenter des difficultés au regard du droit européen : cela reviendrait à réintroduire une condition d'application du régime uniquement pour les fusions transfrontalières et non les fusions internes. Or c'est précisément cela qui a été jugé incompatible avec la directive. Ce n'est pas un problème de montant.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte ensuite l'article 14 modifié.
Je conclus en vous livrant une bonne nouvelle : la dématérialisation des amendements, au titre de cette seule matinée, a permis d'économiser environ 15 000 feuilles de papier.
Membres présents ou excusés
Réunion du mercredi 29 novembre 2017 à 9 heures 30
Présents. M. Saïd Ahamada, M. Éric Alauzet, M. Julien Aubert, Mme Émilie Bonnivard, M. Jean-Louis Bourlanges, M. Jean-Louis Bricout, Mme Émilie Cariou, M. Gilles Carrez, M. Michel Castellani, Mme Anne-Laure Cattelot, M. Jean-René Cazeneuve, M. Philippe Chassaing, M. Éric Coquerel, M. François Cornut-Gentille, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Olivier Damaisin, Mme Dominique David, M. Jean-Paul Dufrègne, Mme Stella Dupont, Mme Sarah El Haïry, M. Nicolas Forissier, M. Olivier Gaillard, M. Joël Giraud, Mme Perrine Goulet, M. Romain Grau, M. Stanislas Guerini, Mme Nadia Hai, M. Patrick Hetzel, M. Alexandre Holroyd, M. Christophe Jerretie, Mme Aina Kuric, M. Daniel Labaronne, Mme Valérie Lacroute, M. Mohamed Laqhila, M. Michel Lauzzana, M. Gilles Le Gendre, M. Fabrice Le Vigoureux, Mme Véronique Louwagie, Mme Marie-Ange Magne, Mme Lise Magnier, M. Jean-Paul Mattei, Mme Amélie de Montchalin, Mme Cendra Motin, Mme Cécile Muschotti, Mme Catherine Osson, M. Xavier Paluszkiewicz, M. Jean-François Parigi, M. Hervé Pellois, M. Pierre Person, Mme Bénédicte Peyrol, Mme Sylvia Pinel, Mme Christine Pires Beaune, M. François Pupponi, Mme Valérie Rabault, M. Xavier Roseren, M. Fabien Roussel, M. Laurent Saint-Martin, M. Jacques Savatier, M. Benoit Simian, Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas, M. Jean-Pierre Vigier, M. Éric Woerth
Excusés. - M. Jean-Noël Barrot, Mme Muriel Ressiguier
Assistaient également à la réunion. - M. Christophe Bouillon, M. Pierre Cordier