La commission a poursuivi l'examen, en nouvelle lecture, du projet de loi, modifié par le Sénat, pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (n° 1135 rect.), sur le rapport de M. Jean-Baptiste Moreau.
Notre ordre du jour appelle la suite de l'examen, en nouvelle lecture, du projet de loi, modifié par le Sénat, pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (n° 1135 rect.).
Cette nuit, la commission a adopté l'article 11 undecies avant d'interrompre ses travaux.
Article 11 duodecies A (article L. 1 du code rural et de la pêche maritime) Gouvernance du Conseil national de l'alimentation
La commission examine les amendements identiques CE382 de M. Richard Ramos et CE395 de Mme Laurence Maillart-Méhaignerie.
La commission adopte les amendements.
Puis elle adopte l'article 11 duodecies A ainsi modifié.
Article 11 duodecies (supprimé) (article L. 611-6 du code rural et de la pêche maritime) Certification des démarches agroécologiques
La commission examine, en discussion commune, les amendements CE299 et CE300 de M. Dominique Potier, ainsi que les amendements identiques CE245 de Mme Monique Limon et CE301 de M. Dominique Potier.
En signe de bonne volonté, afin de terminer nos travaux tôt à la fois dans un débat de qualité et un temps raisonnable, je défendrai conjointement les amendements CE299, CE300 et CE301, qui tous trois ont trait à la haute valeur environnementale (HVE).
L'amendement CE299 représente pour nous l'idéal, puisqu'il affirme que la certification HVE est la mention valorisante de la démarche agroécologique. L'amendement CE300 dispose que la HVE en est une des mentions valorisantes – c'était votre proposition, Monsieur le ministre, bienveillante mais à mon avis insatisfaisante. Le troisième amendement, CE301, est un compromis, puisqu'il dispose que la certification la HVE concourt de façon majeure à la valorisation de la démarche agroécologique ; autrement dit, il ne s'agirait plus d'une mention parmi les autres, mais d'une mention importante.
Je ne vais pas reprendre l'ensemble de mon argumentaire. Nous allons probablement aboutir à un accord a minima. Mais j'espère aller un peu plus loin et convaincre mes collègues de la majorité.
La thématique HVE a été abordée par quatre des quatorze ateliers des États généraux de l'alimentation (EGA), celui que je co-présidais notamment, mais également celui animé par Mme Marion Guillou. La HVE est une invention du Grenelle de l'environnement. Elle pourrait utilement se décliner dans le cadre de l'agroécologie, définie dans la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt de 2014. Pourquoi une telle norme ? Au moment où la compétition fait rage entre normes privées et normes publiques, il nous paraît normal, en tant que démocrates et républicains, de défendre les normes publiques : loin d'être contraires à l'esprit d'entreprise, elles le garantissent, en donnant des repères communs à la société.
Sur les conventions tripartites, vous n'avez pas accepté l'idée d'un label public ; pour ma part, j'y crois beaucoup, car ces labels ont été la condition de l'essor du commerce équitable et de l'agriculture biologique. Si nous voulons créer demain un pacte de confiance dans l'agroécologie, nous devons commencer par créer un pacte de référence autour de la norme HVE. Sa définition pourrait évoluer, puisqu'elle relève d'un décret. Vous pourriez ouvrir ce chantier au sein du ministère si notre amendement était adopté.
Les EGA s'étaient fixé un objectif plutôt volontariste de 30 % d'agriculture biologique en 2030 et de 30 % d'agriculture conventionnelle pour alimenter les marchés de produits de mélanges et d'export banalisés. À côté d'une agriculture plus conventionnelle et de l'agriculture biologique (AB), il y a donc une place pour l'agroécologie en restauration hors du domicile (RHD), en ceinture des métropoles. Cela correspond d'ailleurs aux bonnes pratiques déjà en cours dans la polyculture élevage, l'élevage extensif ou les vergers du futur.
Ce marché territorial de produits de consommation, doit être soutenu par une norme claire pour le consommateur, soutenue par les collectivités et, pourquoi pas, par l'Europe. Cette norme remplacerait avantageusement les mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEc), imposées aux producteurs et complexes. Cette agriculture agroécologique, avec une variante AB, pourrait être soutenue par le deuxième pilier de la politique agricole commune (PAC). Cela constituerait une véritable révolution, autour de contrats d'objectifs et non plus normatifs.
Il faut conquérir les marchés intérieurs, poursuivre la mutation de l'agroécologie par la création d'une norme publique : c'est indispensable si nous voulons que la définition de la bonne agriculture soit l'affaire du Parlement et de la puissance publique, et non des opérateurs du lait ou de la distribution. Recycler l'esprit du Grenelle dans les États généraux de l'alimentation, ce serait une belle boucle historique d'une dizaine d'années !
Notre amendement CE245 vise à rétablir la rédaction de l'article 11 duodecies reconnaissant que la certification HVE concourt de façon majeure à la valorisation de la démarche agroécologique. Notre collègue M. Potier vient de nous expliquer dans le détail le bien-fondé de la HVE.
Je suis favorable aux amendements identiques CE245 et CE301. En conséquence, je suis défavorable aux autres et vous demanderai de bien vouloir les retirer.
Mon avis sera le même que celui du rapporteur. Les EGA ont souhaité cette amplification de la diffusion de la HVE. Au cours des dernières années, les initiatives se sont multipliées afin d'engager les exploitations dans les pratiques agroécologiques. Le soutien public permet de fédérer et de valoriser toutes les initiatives autour de ce référentiel commun, pour les rendre plus efficaces pour l'environnement, mais aussi plus lisibles pour la société.
L'engagement en HVE n'exclut pas que d'autres initiatives dans lesquels l'agriculteur s'implique puissent également concourir de façon importante à la valorisation de la démarche agroécologique. L'amendement de Mme Limon en tient compte, tout comme l'amendement CE301 de M. Potier. Nous souhaitons revenir à l'équilibre et au compromis trouvés lors de la première lecture à l'Assemblée.
L'amendement CE300 est retiré.
La commission rejette l'amendement CE299.
Enfin, elle adopte les amendements identiques CE245 et CE301 et l'article 11 duodecies est ainsi rétabli.
Article 11 terdecies A (supprimé) Exigences environnementales dans les signes d'identification de la qualité et de l'origine
La commission examine, en discussion commune, l'amendement CE302 de M. Dominique Potier, ainsi que les amendements identiques CE246 de Mme Monique Limon et CE303 de M. Dominique Potier.
L'amendement CE302 concerne les signes d'identification de la qualité et de l'origine (SIQO) et la haute valeur environnementale (HVE). Le Sénat a supprimé la disposition que nous avions adoptée en première lecture ; nous souhaitons la rétablir. Après avoir travaillé avec l'Institut national de l'origine et de la qualité (INAO) et toutes les parties prenantes, en fixant 2030 comme horizon nous étions parvenus à une rédaction qui satisfaisait le Gouvernement et la majorité et qui avait été votée à l'unanimité.
Cela étant, plusieurs opérateurs m'ont fait savoir qu'ils trouvaient cet horizon 2030 trop lointain, que l'on parle de champagne, de truffe ou de mirabelle de Lorraine. C'est la raison pour laquelle mon amendement CE302 propose de le ramener à 2025, ce qui nous laisserait encore sept ans pour atteindre ce premier étage de certification environnementale. C'est tout à fait à notre portée. Madame Limon, Madame Lavergne, il ne faut pas attendre douze ans pour que ces produits de qualité, déjà réputés pour leur lien avec le terroir et avec des paysages extraordinaires, ainsi que pour leurs qualités organoleptiques, répondent au nouveau cahier des charges intégrant les labels et mentions valorisantes, et le respect de l'environnement. Ce serait un petit progrès par rapport à ce que nous avons adopté en première lecture. L'amendement CE303, qui maintient l'horizon 2030, est donc de repli.
Notre amendement CE246 vise à rétablir l'article 11 terdecies A dont les dispositions constituent l'illustration du besoin pour notre agriculture de s'orienter d'ici à 2030 vers un nouveau modèle, plus respectueux de l'environnement.
La profession agricole l'a très bien compris, comme nous avons pu le constater lors de notre réunion avec la fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA) ce matin. Ces exigences environnementales seront inscrites dans les cahiers des charges des signes de qualité et d'origine, tout en laissant le temps à la profession de s'adapter à ces nouvelles exigences. Bien entendu, rien n'interdit à certains de faire mieux : 2030 doit être considérée comme la date limite.
Je suis favorable aux amendements identiques CE246 et CE303, et par conséquent défavorable à l'amendement CE302. Nous souhaitons rétablir la rédaction telle qu'elle est issue du vote de l'Assemblée nationale.
La protection de l'environnement est une préoccupation majeure de nos concitoyens. Les cahiers des charges des signes officiels de qualité doivent répondre à cette attente sociétale ; mais je souhaite que vous mainteniez un délai raisonnable dans la loi. C'est la raison pour laquelle je préfère votre amendement de repli CE303, Monsieur Potier, ainsi que l'amendement identique CE246 de Mme Limon.
L'amendement CE302 est retiré.
La commission adopte les amendements identiques CE246 et CE303 et l'article 11 terdecies A est ainsi rétabli.
Article 11 quaterdecies (supprimé) Rapport au Parlement sur la déforestation importée
La commission en vient à l'examen, en discussion commune, des amendements CE253 de Mme Monique Limon et CE305 de M. Dominique Potier.
La déforestation importée est un sujet particulièrement important. Le débat au sein du monde agricole et dans l'opinion publique concernant l'usine de La Mède le démontre : les agriculteurs sont conscients des effets néfastes pour leur activité de ces importations massives – notamment s'agisant de l'huile de palme.
Notre amendement CE253 propose de rétablir le rapport définissant la déforestation importée, mais également de fixer pour objectif à l'État de ne plus acheter de produits ayant contribué à la déforestation importée à compter de 2022, comme cela a été récemment proposé par M. le ministre d'État Nicolas Hulot dans le cadre du plan biodiversité.
L'amendement CE305 vise également à rétablir l'article 11 quaterdecies, afin que le Gouvernement remette au Parlement un rapport faisant un état des lieux de la déforestation importée, mais propose également des pistes pour infléchir certaines pratiques agricoles et valoriser celles qui permettent de lutter efficacement contre ce phénomène, en préalable à la publication de la stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée, annoncée par le ministre de la transition écologique.
Je suis favorable à l'amendement CE253. Je vous demande en conséquence de bien vouloir retirer l'amendement CE305.
Je souhaite que vous retiriez ces deux amendements. Dans le cas contraire, mon avis sera défavorable. L'amendement CE253 ne rétablit pas l'article tel qu'il avait été adopté par l'Assemblée nationale : vous ajoutez que l'État se donne pour objectif, à compter de 2022, de n'acheter que des produits n'ayant pas contribué à la déforestation importée, disposition à laquelle j'ai été constamment hostile. En effet, aucun instrument européen ne nous permet de certifier que les produits agricoles et alimentaires importés au sein de l'Union européenne n'ont pas contribué à la déforestation. Nous poussons la Commission à publier un plan d'action communautaire et à le mettre rapidement en oeuvre ; mais nous ne pouvons exiger des fournisseurs de l'État français de s'assurer de la traçabilité des produits qu'ils importeront en moins de quatre ans, alors que nous nous inscrivons dans le cadre du marché unique communautaire.
Effectivement, l'amendement CE253 est différent de la rédaction retenue en première lecture, mais l'amendement CE305, lui, n'impose aucune obligation pour 2022. Il est donc plutôt cohérent avec ce que nous avions adopté en première lecture.
Monsieur le ministre, le sujet est majeur – je crois que, sur le fond, vous en êtes convaincu. La maison brûle et vous nous répondez que l'on ne dispose pas d'instruments de mesure ! Pour notre part, nous ne demandons qu'un rapport et vous donnez un avis défavorable, alors qu'il pourrait alimenter les arguments que vous porteriez ainsi plus aisément à l'échelle européenne ! Nous devons au minimum conserver ce rapport.
La commission adopte l'amendement CE253 et l'article 11 quaterdecies est ainsi rétabli.
En conséquence, l'amendement CE305 tombe.
Article 11 quindecies (articles L. 201-7 et L. 237-2 du code rural et de la pêche maritime) Renforcement des contrôles sanitaires relatifs aux denrées alimentaires
La commission passe à l'examen de l'amendement CE468 du Gouvernement.
Il s'agit de supprimer l'obligation de contre-expertise en cas de résultat défavorable sur les autocontrôles. Tout comme le rapporteur de la commission d'enquête chargée de tirer les enseignements de l'affaire Lactalis, M. Grégory Besson-Moreau, vous savez que la réglementation européenne prévoit que les mesures de gestion sont prises sur la base d'un résultat d'autocontrôle défavorable, sans contre-analyse, dès lors que ce résultat peut indiquer l'existence d'un risque pour la santé publique.
Outre son coût pour les professionnels, une contre-analyse induit un délai supplémentaire pour la prise des mesures adaptées, lequel pourrait porter préjudice à la protection du consommateur.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'article 11 quindecies ainsi modifié.
Article 11 sexdecies AA (nouveau) (articles L. 423-3, L. 452-5 et L. 452-7 [nouveau] du code de la consommation, articles L. 237-2, L. 205-7-1 [nouveau] et L. 237-4 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime) Encadrement et sanctions des politiques de retraits et de rappels de denrées alimentaires
La commission en vient à l'amendement CE306 de M. Dominique Potier.
L'article 11 sexdecies AA, introduit au Sénat par le Gouvernement, a trait à l'information du consommateur en cas de crise sanitaire. Lors du débat en séance à l'Assemblée, nous avions convenu que l'accès à l'information n'était pas aussi fluide que nécessaire. Vous-même aviez reconnu, Monsieur le ministre, que si le site du ministère de l'agriculture propose certes beaucoup d'informations, le dispositif méritait d'être amélioré.
Nous proposons de compléter cet article par la création d'un site dédié, simple d'accès pour l'ensemble des consommateurs qui ont une inquiétude, un souci ou une difficulté. Ce site donnerait un maximum d'informations et permettrait aussi au consommateur de signaler des défaillances. Ce serait une mesure de simplification et d'information des consommateurs.
Comme vous le reconnaissez dans votre exposé des motifs, cette mesure est d'ordre réglementaire : c'est au ministère de lancer une telle initiative. Rappelons que le site existe déjà, même s'il devrait être mis en valeur et rendu plus accessible.
J'émets pour ma part un avis favorable : rendre publics les retraits-rappels sur un site internet unique constituent l'une des avancées proposées par le rapport de la commission d'enquête chargée de tirer les enseignements de l'affaire Lactalis.
En outre, M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances, l'a évoqué hier. Suite à cette crise, le Gouvernement a saisi le conseil national de la consommation afin d'optimiser la procédure de retrait-rappel et d'améliorer l'information des consommateurs. Bien évidemment, nous devons encore analyser les conclusions du rapport en réunion interministérielle, les ministères de l'agriculture et de l'alimentation et de l'économie et des finances étant conjointement chargés de ces questions.
Il est également important que l'État ne se substitue pas aux professionnels, seuls responsables des retraits-rappels. Un décret prévoira les conditions d'application du présent article ; nous allons y travailler dans les semaines à venir.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte l'article 11 sexdecies AA ainsi modifié.
Article 11 sexdecies Interdiction du dioxyde de titane à compter du 1er juin 2020
La commission adopte l'article 11 sexdecies sans modification.
Article 11 octodecies (supprimé) (article L. 255-102-1 du code de commerce) Renforcement des obligations de certaines entreprises en matière de responsabilité sociétale
La commission examine les amendements identiques CE307 de M. Dominique Potier et CE396 de Mme Laurence Maillart-Méhaignerie.
Notre amendement CE307 tend à rétablir l'article tel qu'adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, en complétant la rédaction du Sénat par la lutte contre la précarité, le respect du bien-être animal et une alimentation responsable, équitable et durable.
Ces dispositions adoptées à l'unanimité et dans le consensus, aussi bien au sein de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire (DDAT) qu'en commission des affaires économiques, ont été supprimées par le Sénat, alors qu'elles ont une grande importance en termes de responsabilité sociétale des entreprises (RSE). Nous proposons également, par notre amendement CD396, de les rétablir.
La commission adopte les amendements et l'article 11 octodecies est ainsi rétabli.
Article 11 vicies (supprimé) (article L. 642-9 du code rural et de la pêche maritime) Représentation environnementale au sein de l'Institut national de l'origine et de la qualité
La commission examine les amendements identiques CE308 de M. Dominique Potier et CE397 de Mme Laurence Maillart-Méhaignerie.
Notre amendement CE308 rétablit les dispositions votées à l'Assemblée nationale concernant l'association des parties prenantes – associations environnementales et de protection de l'environnement et associations consuméristes – à l'élaboration des plans alimentaire territoriaux.
Notre amendement CE397 est identique. Nous souhaitons ouvrir la gouvernance de l'INAO aux représentants des associations agréées.
J'y suis également favorable.
La commission adopte les amendements et l'article 11 vicies est ainsi rétabli.
Article 11 duovicies Rapport au Parlement sur les projets alimentaires territoriaux
La commission adopte l'article 11 duovicies sans modification.
Article 11 tervicies (nouveau) (article L. 310-2 du code de commerce) Ventes au déballage de fruits et légumes
La commission examine l'amendement de suppression CE486 du Gouvernement.
Le code de commerce encadre déjà strictement les ventes au déballage. Celles-ci ne peuvent excéder deux mois par an dans un même local, un même emplacement ou un même arrondissement. Elles font l'objet d'une déclaration préalable auprès du maire de la commune du lieu de vente, dont une copie est adressée à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF).
Dans ce contexte, le régime d'autorisation proposé par l'article 11 tervicies pour les seuls fruits et légumes ne paraît pas utile, au regard même des objectifs de cet article. Un régime d'autorisation ne serait d'aucune utilité pour les ciblages des contrôles de la DGCCRF. Par contre, la charge administrative induite par une telle mesure pour les communes – notamment les plus petites – serait significative et n'apparaît pas justifiée ; qui plus est, dans l'éventualité où ces petites communes ne pourraient pas instruire les demandes d'autorisation dans des conditions satisfaisantes, l'application du principe « silence vaut rejet » pourrait conduire à des refus injustifiés aboutissant à une approche trop restrictive et générant des recours contentieux.
Enfin, la coexistence de deux régimes différents, pour les fruits et légumes et pour les autres produits, est facteur de complexité.
Autant de raisons pour lesquelles nous souhaitons supprimer cet article.
Je m'étonne de cette suppression. Parfois, nos petites communes sont confrontées à des ventes au déballage qui leur posent bien des difficultés : des individus non identifiés arrivent, s'installent là où ils peuvent, ou plutôt là où ils veulent, dans des conditions d'hygiène des plus surprenantes. Je ne comprends pas ce refus de légiférer sur un tel sujet.
La commission adopte l'amendement et l'article 11 tervicies est supprimé.
Article 12 (article L. 230-6 du code rural et de la pêche maritime, article L. 266-1 [nouveau] du code de l'action sociale et des familles et article L. 541-15-5 du code de l'environnement) Lutte contre la précarité alimentaire
La commission adopte l'article 12 sans modification.
Article 12 bis AA (nouveau) (article L. 541-15-3 du code de l'environnement) Plan d'action des gestionnaires de restauration collective pour lutter contre le gaspillage alimentaire
La commission examine l'amendement de suppression CE228 du rapporteur.
Le dispositif prévu par cet article sera couvert par l'ordonnance relative au gaspillage alimentaire, prévue à l'article 15 du présent projet de loi. D'où cet amendement de suppression.
La commission adopte l'amendement et l'article 12 bis AA est supprimé.
En conséquence, l'amendement CE309 de M. Dominique Potier tombe.
Article 12 bis A (article L. 541-15-17 du code de l'environnement) Mise à disposition de « doggy bags »
La commission examine l'amendement CE220 de M. Vincent Descoeur.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur et du ministre, la commission rejette l'amendement.
La commission se saisit alors de l'amendement CE310 de M. Dominique Potier et de l'amendement CE458 du Gouvernement.
Nous souhaitons revenir sur le dispositif des doggy bags. Lors de l'examen en séance à l'Assemblée nationale, nous avions décidé de les mettre gratuitement à la disposition des consommateurs. Notre amendement CE310 propose une formule plus ouverte et plus souple, en confiant aux restaurateurs le soin de mettre à disposition ces doggy bags dans des conditions qu'ils détermineront librement.
Cette mesure se veut avant tout pédagogique. Bien sûr, chaque mesure de lutte contre le gaspillage alimentaire est un pas en avant et notre planète s'en trouvera mieux. Mais on sait bien qu'en France, les portions ne sont pas les mêmes qu'aux États-Unis…
Je vous invite à retirer votre amendement au profit de l'amendement CE458 du Gouvernement.
Notre amendement CE458 vise effectivement à supprimer, non pas le doggy bag, mais l'obligation de mise à disposition gratuite des doggy bags par les établissements de restauration commerciale.
Si la mise à disposition s'impose quand le client en fait la demande, la répercussion de son coût doit être laissée à l'appréciation de l'exploitant de l'établissement. La gratuité ne saurait être imposée par cette disposition législative.
Au risque d'être désagréable, je trouve que la rédaction de l'amendement CE310 est plus fine et plus intelligente que celle du Gouvernement. S'il s'agit d'une démarche pédagogique et que l'on souhaite laisser l'initiative aux restaurateurs, c'est implicitement une expérimentation. Voyons si les consommateurs et les restaurateurs se retrouvent sur cette proposition.
Souvenons-nous que le meilleur pourfendeur du doggy bag dans cette assemblée est un illustre député dont la circonscription englobe le Canada. Là-bas, le doggy bag, utilisé depuis vingt-cinq ou trente ans, est en voie d'extinction car il a contribué à augmenter les portions, entraînant une forme de gaspillage et, sans aller jusqu'à parler de désastre écologique, favorisé tout de même une mauvaise utilisation de ces sacs. D'ailleurs, nous ne devrions pas dire doggy bags, mais « emporte-restes ». L'amendement du groupe Nouvelle Gauche tel que vient de le défendre notre ami M. Guillaume Garot et pertinent et intelligent : c'est celui-ci qu'il faut adopter.
Pour commencer, cessons d'utiliser ce terme de doggy bag. Nous sommes en France : inspirons-nous des Canadiens et parlons d'emporte-restes. Nous avons une responsabilité vis-à-vis de la langue française.
Sur le fond, quelle société veut-on en France ? Sur le plan culturel, nous avons un art de la table et de la gastronomie qui nous est propre. Je ne suis pas sûr que nous ayons envie de tomber dans un modèle à l'américaine.
Enfin, nos restaurateurs subissent déjà bon nombre de contraintes et nous sommes en train d'en perdre certains. Ne leur créons pas de charges supplémentaires !
Cette question cruciale transcende les clivages politiques… Initialement, cet article devait systématiser l'emporte-restes. Avec la modification que vous proposez, la mesure devient purement cosmétique ! Mettons-nous un instant à la place de la personne qui a payé son repas : devra-t-elle à nouveau payer pour avoir le droit d'emporter ses restes ?
Je suis d'accord, il ne faut pas imposer davantage de charges à nos entrepreneurs. Mais, dans ce cas, tenons-nous en au volontariat qui se pratique déjà et posons-nous la question de la généralisation du compostage des déchets alimentaires en France. On en est actuellement très loin, même si l'on n'en reste qu'au tri…
Je reste sur ma faim quant au choix de l'Assemblée sur cette question… Après avoir consacré de longs débats sur la prohibition des emballages plastiques dans les cantines ou la vaisselle réutilisable, voilà que nous nous mettons à faire exactement l'inverse ! Nous allons créer des déchets et emballer des aliments dans du plastique… Je regrette que l'Assemblée aille dans cette direction.
Monsieur Potier, pourriez-vous me préciser si votre proposition, telle qu'elle est rédigée, obligera les restaurateurs à proposer ces doggy bags ? La version du Gouvernement me convient mieux dans la mesure où elle évite des charges supplémentaires pour les restaurateurs : ils pourront faire payer le client. Si le restaurateur qui ne le propose pas devait tomber sous le coup de la loi, cela me poserait problème : la situation économique des petits restaurateurs est déjà fragile et ils ont du mal à boucler leurs fins de mois.
Ne passons pas des heures sur ce sujet ; certains débats de fond sont autrement plus importants. La démarche proposée vise à diminuer le gaspillage alimentaire. Dans le même temps, nos restaurateurs et entrepreneurs y voient une charge supplémentaire.
Nous proposons de joindre l'utile à l'agréable, en permettant aux restaurateurs de proposer aux clients qui le souhaitent d'emporter leurs restes dans des emballages prévus à cet effet ! Mais si le client en fait la demande, ce n'est pas aux restaurateurs de supporter cette charge. Il pourra donc facturer le coût de l'emballage – quelques centimes d'euro, ne l'oublions pas – dans l'addition. Cela permettra au restaurateur, non pas de gagner de l'argent, mais d'équilibrer ses charges, tout en servant notre objectif de lutte contre le gaspillage alimentaire.
La commission rejette l'amendement CE310.
Puis elle adopte l'amendement CE458.
Enfin, elle adopte l'article 12 bis A ainsi modifié.
Chapitre II Respect du bien-être animal
Article 13 bis A (article L. 214-11 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime) Conditions d'élevage des poules en cage
La commission examine les amendements identiques CE114 de M. Jérôme Nury et CE142 de M. Dino Cinieri.
Il est important de traduire les évolutions pérennes d'une société dans le cadre législatif. C'est l'objet de l'article 13 bis A qui vise à lutter contre l'élevage en cage. Cependant, ces changements sont souvent lourds de conséquences pour ceux qui les subissent – en l'occurrence les agriculteurs. Il faut donc veiller à ne pas les accabler davantage. En interdisant seulement la construction de nouveaux bâtiments à compter de la promulgation de la loi, notre amendement CE114 épargne les agriculteurs qui ont déjà commencé à investir ou à construire.
Mon amendement CE142 vise lui aussi à éviter une interdiction a posteriori de la construction des bâtiments visés, afin de ne pas pénaliser les agriculteurs qui ont déjà engagé les investissements ou les opérations de construction.
Vos amendements vont à l'encontre de l'équilibre que nous avions trouvé après de longues discussions à l'Assemblée nationale. Je leur préfère l'amendement CE247 de Mme Limon, que nous allons examiner dans un instant.
C'est la mise en production du bâtiment – et non sa construction – qu'il convient d'interdire. La formulation de vos amendements restreint l'interdiction aux nouveaux bâtiments, mais n'interdirait pas la réorientation d'un bâtiment existant vers l'élevage de poules pondeuses en cage…
Les cas particuliers des éleveurs dont les bâtiments sont en cours de construction seront traités par voie réglementaire, dossier par dossier. Nous serons favorables à l'amendement CE247, qui précisera ces modalités d'application par voie réglementaire. Nous souhaitons retrouver l'équilibre issu de la première lecture à l'Assemblée nationale.
Renvoyer au pouvoir réglementaire, c'est renvoyer à l'appréciation de l'administration locale. Le risque de traitement différencié des demandes selon les territoires et selon les directions départementales des territoires (DDT) n'est pas négligeable. J'attends de voir comment ces dispositions vont se traduire dans les faits…
Tous les dossiers en instruction seront examinés individuellement. La loi sera la même pour chacun et les DDT ont reçu des instructions pour que les projets en cours puissent se poursuivre : effectivement, il est difficile de tout changer quand votre plan de financement est bouclé et votre modèle économique arrêté. L'administration disposera de marges d'appréciation, mais elle recevra des instructions qui lui permettront d'avancer dans le bon sens.
La commission rejette les amendements.
Elle en vient à l'amendement CE247 de Mme Monique Limon.
Cet amendement vise à rétablir l'article 13 bis A tel qu'adopté en première lecture à l'Assemblée nationale. Il interdit la mise en production de tout bâtiment nouveau ou réaménagé d'élevage de poules pondeuses élevées en cage à partir de la promulgation de la loi, afin de permettre une transition plus respectueuse du bien-être animal, au sol ou en plein air par exemple.
La commission adopte l'amendement.
Avant que vous ne mettiez aux voix cet article relatif au bien-être animal, je souhaite indiquer que je regrette profondément qu'il ne comporte aucune disposition sur l'abattage rituel, qui occasionne des souffrances terribles aux animaux abattus sans étourdissement préalable. J'avais déposé un amendement en ce sens ; il a été rejeté. C'est dommage.
De nombreux pays se sont saisis de cette question : le Danemark, la Finlande, la Grèce, le Luxembourg, la Suède, la Suisse, la Norvège, l'Islande et certains Länder autrichiens ont pris la question à bras-le-corps et interdisent cette pratique.
J'entends votre question, mais il n'est pas nécessaire de légiférer sur ce sujet car, à l'instar d'autres pays européens, nous discutons avec le Conseil français du culte musulman et le Consistoire pour trouver ensemble des solutions pour réduire la souffrance animale au moment de l'abattage. Le dialogue est permanent avec les différents représentants des cultes. Nous avançons rapidement et dans le bon sens.
La commission adopte l'article 13 bis A ainsi modifié.
Article 13 bis Rapport portant sur les conséquences des plans de filière en matière de bien-être animal
La commission examine l'amendement CE229 du rapporteur.
Cet amendement vise à rétablir l'article 13 bis dans sa rédaction issue du vote de l'Assemblée nationale en première lecture.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte l'article 13 bis ainsi modifié.
Article 13 quinquies Expérimentation autorisant des dérogations pour la mise en place d'abattoirs mobiles
La commission examine l'amendement CE343 de Mme Sandrine Le Feur.
Je m'en remets à votre sagesse.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte l'article 13 quinquies ainsi modifié.
Chapitre III Renforcement des exigences pour une alimentation durable accessible à tous
Article 14 (supprimé) (articles L. 253-5-1 et L. 253-5-2 [nouveaux] du code rural et de la pêche maritime) Pratiques commerciales prohibées en matière de vente de produits phytopharmaceutiques (PPP)
La commission examine, en discussion commune, les amendements CE230 du rapporteur et CE239 de M. Dino Cinieri.
L'amendement CE230 vise à rétablir l'article 14 dans sa rédaction issue du vote de l'Assemblée nationale en première lecture.
Mon amendement CE239 précise que l'interdiction ne vise les réductions de prix – remises, rabais ou ristournes – d'une part, et la différenciation des conditions générales et particulières de vente, d'autre part, que pour autant qu'elles sont fondées sur les volumes, les montants d'achat ou les parts de marché des produits phytopharmaceutiques.
Je privilégierai l'amendement CE230 du rapporteur. Il est essentiel de réduire l'utilisation des produits phytosanitaires, conformément aux engagements pris depuis le premier plan Ecophyto.
La commission adopte l'amendement CE230 et l'article 14 est ainsi rétabli.
En conséquence, l'amendement CE239 tombe.
Article 14 bis A (nouveau) (article L. 511-12 du code de la consommation) Habilitation des agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes en matière de produits phytopharmaceutiques
La commission adopte l'article 14 bis A sans modification.
Article 14 bis (supprimé) (articles L.522-5-2, L. 522-5-3, L. 522-18 et L. 533-19 [nouveaux] du code de l'environnement) Extension aux produits biocides d'une partie de la réglementation applicable aux produits phytopharmaceutiques
La commission examine, en discussion commune, l'amendement CE248 de Mme Monique Limon, les amendements identiques CE316 de M. Dominique Potier et CE398 de Mme Laurence Maillart-Méhaignerie et l'amendement CE340 de Mme Frédérique Lardet.
L'amendement CE248 vise à réintroduire les dispositions relatives aux biocides proposées par notre collègue Mme Frédérique Lardet en première lecture. Alors que nous souhaitons réduire l'utilisation des produits phytopharmaceutiques, il nous semble indispensable d'appliquer des règles similaires aux produits biocides, notamment l'interdiction des remises, rabais et ristournes, telle qu'elle est prévue à l'article 14 du projet de loi.
Les pesticides comportent deux grandes familles : les biocides et les produits phytosanitaires. Ces derniers ont fait l'objet de restrictions de commercialisation dans diverses lois – notamment celle relative à la biodiversité – et ne sont plus en libre-service. Nous souhaitons que des dispositions similaires s'appliquent aux biocides et qu'ils ne soient plus vendus en libre-service, afin que leur commercialisation ne soit plus banalisée par les consommateurs. Nous souhaitons également que la publicité pour les ristournes, rabais et remises soit interdite. Notre combat est le même que celui de Mme Limon. Rétablissons ce dont nous avions convenu avec intelligence en première lecture, dans la continuité des lois précédentes. Ce sera un réel progrès pour les consommateurs. Tel est le but de mon amendement CE316.
Mon amendement CE398 est identique : il apparaît nécessaire de faire converger les réglementations concernant la mise sur le marché des produits biocides et phytopharmaceutiques pour le grand public.
L'objectif de l'amendement CE340 est également de rétablir la rédaction de l'article 14 bis tel qu'elle a été adoptée par notre assemblée en première lecture. Il s'agit de soumettre les biocides aux mêmes dispositifs réglementaires que les produits phytosanitaires.
Ces amendements se ressemblent beaucoup. Ayant une préférence pour le CE340 de Mme Lardet, je demanderai aux auteurs des autres amendements de bien vouloir les retirer.
Même avis. L'amendement de Mme Lardet présente l'avantage de ne pas prévoir la consultation formelle d'une commission.
Je retire également mon amendement CE316. Je me range à l'avis de M. le ministre. Nous partageons les mêmes attendus.
Les amendements CE248, CE316 et CE398 sont retirés.
La commission adopte l'amendement CE340 et l'article 14 bis est ainsi rédigé.
Article 14 ter (article L. 253-1 du code rural et de la pêche maritime) Autorisation de plantes comestibles comme substances naturelles à usage biostimulant
La commission examine l'amendement CE399 de Mme Maillart-Méhaignerie.
Le Sénat tient à conserver une procédure d'évaluation adaptée pour les parties consommables des plantes utilisées en alimentation animale ou humaine. Notre amendement vise à rétablir la rédaction adoptée en première lecture par notre assemblée : nous considérons que ces parties peuvent être exonérées de procédures d'évaluation préalables et être automatiquement qualifiées de substances naturelles à usage biostimulant autorisée.
Je suis fermement opposé à l'amendement de notre collègue. Le goût, l'odeur, la sensation de satiété jouent un rôle de régulateur dans l'alimentation. Quand des parties consommables de plantes sont utilisées sous forme de traitement, ces informations ne sont pas disponibles : vous ne connaissez ni l'usage, ni la dose appropriée, ni les précautions d'utilisation, autant d'éléments qui déterminent l'autorisation de mise sur le marché. À défaut, on risque d'enfumer l'utilisateur… La rédaction du Sénat me paraît beaucoup plus raisonnable.
La réécriture effectuée par le Sénat n'apporte rien par rapport à la situation actuelle, elle n'a donc aucune utilité.
Je me réjouis de l'amendement de Mme Maillart-Méhaignerie, mais j'ai une réserve au sujet de la formulation « dans l'état dans lequel elles sont consommées ». Je m'interroge sur l'interprétation juridique qui pourrait en être faite. Personne ne mange de purin de consoude, par exemple, pas même les animaux ; mais la consoude va très bien en omelette, et c'est un excellent fortifiant.
J'ai un autre exemple : dans la rhubarbe, les feuilles sont toxiques, seules les tiges sont comestibles.
La version adoptée par le Sénat rendait la commercialisation de certains produits extrêmement compliquée alors que l'Assemblée, en simplifiant la procédure d'autorisation, a permis une réelle avancée qui s'inscrit dans la trajectoire vertueuse de diminution du recours aux produits phytosanitaires. Les préparations naturelles peu préoccupantes (PNPP) ouvrent des perspectives. Leur vente est déjà encadrée et je trouve votre inquiétude, Monsieur Herth, disproportionnée.
Cessons de penser que tout ce qui est naturel est forcément bon. Il me paraît important qu'un avis scientifique soit rendu sur ces préparations car même certains aliments, à certaines doses, peuvent devenir toxiques. À l'heure où nous voyons toutes sortes de recettes de grand-mère remises à l'honneur sur internet…
Il importe de s'assurer que ces préparations sont sans danger. La consoude et l'ortie, on connaît ; mais il y en a d'autres, que l'on a moins à l'esprit.
Dans le cadre du plan Ecophyto, des groupes de travail se penchent sur les PNPP. Deux réunions ont déjà eu lieu depuis le 25 avril.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'article 14 ter modifié.
Article 14 quater AB (nouveau) (article L. 661-8 du code rural et de la pêche maritime) Mélanges de semences
La commission est saisie de l'amendement CE460 du Gouvernement.
Le droit européen en matière de commercialisation des semences et plants est organisé en directives de commercialisation sectorielles – pour les céréales, pour les légumes, etc. Celles-ci ne prévoient la possibilité de commercialiser des variétés en mélanges que pour deux d'entre elles : les plantes fourragères et les semences de céréales.
En droit national, cette possibilité d'autoriser le commerce de variétés en mélange est devenue effective récemment grâce à deux arrêtés datés du 26 juin 2018 : le premier est relatif à la commercialisation des semences de céréales ; le deuxième concerne la commercialisation des mélanges de semences de plantes fourragères et vient remplacer un arrêté précédent de 2004 qui les autorisait déjà. La transposition des directives européennes est donc pleinement assurée. Il n'y a donc pas lieu de légiférer sur le sujet.
En outre, l'article introduit par le Sénat étend de facto la possibilité de commercialiser des mélanges pour d'autres espèces comme les oléagineux, ce qui est contraire au droit européen.
Pour toutes ces raisons, il convient de supprimer cet article qui va au-delà de ce qu'autorise le droit européen pour ces espèces.
Je veux vous remercier, Monsieur le ministre, d'avoir fait en sorte que ces arrêtés soient publiés rapidement. Vous aviez donné un avis défavorable à l'un de mes amendements en soulignant qu'il était d'ordre réglementaire, ce qui d'ordinaire est une façon d'enterrer une proposition. Vous l'avez au contraire prise en compte. Bravo !
L'intention des sénateurs n'était peut-être pas mauvaise. Il y a des sujets dont l'Europe devra s'emparer.
S'agissant des oléagineux, il est possible d'éviter le recours aux insecticides en utilisant simplement une variété précoce. Pour le colza, c'est une des pratiques encouragées par le dispositif des certificats d'économie de produits phytopharmaceutiques (CEPP) qui fonctionne le mieux mais elle reste contraignante : elle implique d'ajouter un petit sachet à un grand sachet de semences. Si jamais le mélange était déjà fait, cela simplifierait les choses. Des dérogations allant dans le bon sens pourraient être admises.
De manière générale, les méteils, les mélanges multi-variétés ou multi-espèces, constituent une voie d'avenir de l'agro-écologie, encore peu explorée. Ils supposent d'utiliser en amont des tables de tri densimétriques et des outils adaptés.
Il va falloir que la réglementation s'adapte à ces évolutions techniques qui permettent de densifier la production dans le respect de l'environnement.
La commission adopte l'amendement et l'article 14 quater AB est supprimé.
Article 14 quater A (article L. 253-7 du code rural et de la pêche maritime) Commercialisation des semences anciennes
La commission examine, en discussion commune, les amendements CE249 de Mme Monique Limon et CE459 du Gouvernement.
Notre amendement CE249 vise à rétablir la rédaction de l'article 14 quater A adopté en première lecture par notre assemblée.
Cet amendement opère une clarification : le premier alinéa précise que ce sont bien les variétés qui doivent avoir été préalablement déclarées, et non chaque cession à titre onéreux les concernant. Cela entraînerait sinon une charge administrative trop importante compte tenu des flux visés et constituerait une surtransposition du droit européen.
Afin de faciliter encore la mise à disposition de ces semences tout en assurant une information minimale des jardiniers amateurs et le respect des dispositions européennes, il importe que la déclaration gratuite et dématérialisée porte sur la description de la variété, les résultats d'essais non officiels s'il y en a, les connaissances acquises au cours de la culture et toute autre information utile au demandeur.
Il s'agit de renseignements faciles à recueillir, qui ne nécessitent pas la conduite d'essais officiels, chronophages et coûteux. Ils permettent d'offrir un suivi sanitaire et des garanties pour la protection des utilisateurs.
Je demanderai à Mme Limon de bien vouloir retirer son amendement.
Nous soutenons l'amendement de Mme Limon et nous réjouissons de la position du rapporteur. La transparence sur les variétés est déjà assurée. Nous pouvons redouter que le décret visé par le Gouvernement ne soit jamais publié et qu'il contribue à complexifier les choses alors que nous voulons les simplifier, notamment pour les jardiniers amateurs.
La commission adopte l'amendement CE249 et l'article 14 quater A est ainsi rétabli.
En conséquence, l'amendement CE459 tombe.
Article 14 quater (article L. 253-5 du code rural et de la pêche maritime) Encadrement de la publicité pour les produits phytopharmaceutiques
La commission adopte l'article sans modification.
Article 14 quinquies (article L. 253-6 du code rural et de la pêche maritime) Promotion des solutions de biocontrôle dans le plan Ecophyto
La commission est saisie de l'amendement CE383 de M. Philippe Berta.
Cet amendement prévoit d'étendre le plan d'action national de réduction de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques à l'ensemble des produits de substitution en fonction de l'état d'avancée de la recherche, avec a minima les produits de biocontrôle, les techniques d'agriculture de précision et la lutte intégrée contre les ennemis des cultures.
Votre amendement déséquilibre fortement cet article relatif au plan Ecophyto en en faisant un article portant essentiellement sur le biocontrôle et les autres produits de substitution. Avis défavorable.
Cet amendement pose des problèmes non pas de fond mais de forme. Il entraîne la suppression de deux alinéas importants concernant la mobilisation de la recherche et l'élaboration d'une stratégie nationale de biocontrôle cohérente. En outre, il contient deux définitions des produits de biocontrôle dont l'une serait incomplète. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine, en discussion commune, les amendements CE384 de M. Philippe Bolo, CE317 de M. Dominique Potier, CE385 de M. Philippe Bolo, CE318 et CE319 de M. Dominique Potier.
L'amendement CE384 vise à rétablir la rédaction issue de l'Assemblée nationale qui privilégie l'allégement des démarches administratives. Les conditions d'autorisation actuelles impliquent pour les entreprises de mener une batterie d'analyses coûteuses en amont de l'autorisation délivrée par l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES). L'amendement CE385 poursuit le même objectif de simplification.
Vous avez accepté d'adopter le principe de stratégie nationale de biocontrôle en première lecture. Par les trois amendements que nous défendons, nous voulons apporter des précisions sur ce qu'elle recouvre.
Dans l'amendement CE317, nous insistons sur le fait que le développement des produits de biocontrôle doit s'appuyer sur la dynamique de l'agriculture biologique et sur le dispositif de certification d'économie de produits phytopharmaceutiques. L'utilisation de produits de biocontrôle n'implique pas forcément pour l'instant d'être homologué « Agriculture biologique » ou d'être éligible au dispositif des CEPP. L'accélération du déploiement de la stratégie nationale serait une chance pour l'industrie du biocontrôle, qu'il s'agisse de start-up ou de filiales de multinationales. Les solutions de biocontrôle, qui représentent aujourd'hui un traitement sur sept, ont vocation à s'étendre jusqu'à un traitement sur cinq, voire un sur quatre.
L'amendement CE318 propose d'accompagner les petites et moyennes entreprises de biocontrôle dans la constitution de dossiers d'autorisation de mise sur le marché. Compte tenu des enjeux mis en avant lors des États généraux de l'alimentation, il est urgent de déployer de manière effective une stratégie nationale de biocontrôle clairement définie, qui renforce le déploiement des solutions existantes tout en accélérant les recherches en ce domaine.
L'amendement CE319 enfin vise à encourager l'innovation, ce que la direction générale de l'alimentation (DGAL) n'approuve pas pour des raisons de principe et de prudence que je ne partage pas.
L'Institut national de la recherche agronomique (INRA) a lancé pour la première fois un programme « Zéro pesticide chimique ». Dans quelques décennies, le recours à la chimie apparaîtra comme une phase transitoire dans l'histoire de l'agriculture. Ce n'est plus une utopie.
Si nous voulons remplacer les solutions chimiques, nous devons encourager les expérimentations visant à démontrer l'absence de toxicité et l'effectivité du produit sur le plan commercial. Je considère même que ces deux phases pourraient être dissociées : dès lors qu'il est réputé non toxique, le produit serait mis sur le marché et dans les douze mois ou vingt-quatre mois qui suivent, des preuves de sa puissance d'action seraient apportées. Le risque commercial est très faible par rapport à l'avantage que constitue le remplacement des solutions chimiques dont nous connaissons désormais la toxicité pour l'environnement et la santé humaine.
Sur les amendements CE384 et CE385 présentés par M. Turquois, l'avis de la commission est défavorable : l'équilibre trouvé par le Sénat avec un avis simplifié de l'ANSES répondra aux problèmes des exploitants concernés sans créer de risques inconsidérés.
La commission émet également un avis défavorable sur les amendements défendus par M. Potier et par Mme Battistel.
Monsieur Turquois, les produits de biocontrôle sont soumis à une procédure d'évaluation et d'autorisation fixée par des dispositions européennes et le plan Ecophyto ne saurait les en affranchir. Je privilégie la rédaction actuelle du projet de loi qui est compatible avec les marges de manoeuvre que laisse le règlement, notamment en termes de facilitation pour les entreprises.
Le Gouvernement est également défavorable aux amendements CE317, CE318 et CE319. Le plan d'action sur les produits phytopharmaceutiques a été présenté le 25 avril dernier. Les produits de biocontrôle servent autant l'agriculture biologique que l'agriculture conventionnelle et la plupart font l'objet de fiches-action dans le cadre du dispositif des CEPP. Leur reconnaissance passe par l'évaluation du potentiel de réduction correspondant à leur utilisation ; il faut laisser les acteurs concernés élaborer des recommandations pertinentes. L'alinéa 5 de l'article 14 quinquies mentionne déjà l'allégement des démarches des entreprises. Il est donc inutile d'apporter des précisions supplémentaires dans la loi.
J'aimerais réagir aux propos de mon collègue M. Potier sur le « Zéro pesticide ». Cessons d'alimenter le fantasme selon lequel les produits chimiques seraient forcément mauvais et les produits naturels, comme ces fongicides tirés de certains organismes, forcément bons. Tous reposent sur des principes actifs. Certes, il peut se produire des phénomènes de concentration ou d'effets secondaires liés aux produits de synthèse, mais cessons d'opposer systématiquement le naturel, par essence bon, et le chimique, par définition mauvais.
Je vais retirer l'amendement CE319, car j'ai été convaincu par les arguments du ministre.
Monsieur Turquois, je ne tiens pas à relancer le débat théologique sur les produits chimiques et les produits naturels. Le rapport Ecophyto 2 a été « adopté » à l'unanimité tout comme les propositions que nous avons formulées dans le cadre des États généraux de l'alimentation. Nous n'en sommes plus là. La société va beaucoup plus vite que nous et la recherche ose des hypothèses de recherche fondamentale assez radicales. Ne soyons pas conservateurs et envisageons tous les possibles, y compris une agriculture sans chimie où les produits de biocontrôle joueraient un rôle majeur. Il ne s'agit pas d'opposer produits chimiques et produits naturels, mais de se projeter dans l'avenir.
Je rejoins l'avis du ministre. Les produits de biocontrôle regroupent plusieurs solutions et des questions restent ouvertes sur l'utilisation des macro-organismes. Tout le monde connaît l'exemple des coccinelles asiatiques qui sont devenues une espèce invasive. Il me paraît difficile dans ces conditions d'exonérer ces techniques de procédures d'évaluation préalables.
La commission rejette successivement tous ces amendements.
Puis elle en vient à l'amendement CE461 du Gouvernement.
Il s'agit de mettre en cohérence la rédaction de cet article avec les modifications introduites dans un article ultérieur. Elles vont dans le sens d'une simplification de la gouvernance du plan Ecophyto.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'article 14 quinquies modifié.
Article 14 sexies A (nouveau) (article L. 253-8-2 et L. 253-19 à L. 253-27 [nouveaux] du code rural et de la pêche maritime) Fonds d'indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques
La commission est saisie de l'amendement CE489 du Gouvernement.
L'indemnisation des victimes atteintes de maladies liées à l'utilisation de produits phytopharmaceutiques est une préoccupation majeure du Gouvernement.
À la suite du dépôt d'une proposition de loi par Mme la sénatrice Nicole Bonnefoy visant à créer un fonds d'indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques, un rapport a été commandé le 25 avril 2017 par le précédent Gouvernement au Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD), à l'inspection générale des affaires sociales (IGAS) et au Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER). Cette mission avait pour objet de mener une réflexion sur l'indemnisation des victimes, les populations bénéficiaires et les produits phytopharmaceutiques visés.
Remis le 13 février 2018, le rapport préconise d'améliorer la réparation dans le cadre des régimes accidents du travail et maladies professionnelles (ATPM) en facilitant la reconnaissance des maladies professionnelles liées aux expositions aux produits phytopharmaceutiques et en améliorant leur prise en charge.
Afin de fournir un appui scientifique aux travaux des commissions, l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) a été saisi au printemps 2018 afin de fournir une étude actualisée des liens entre les pathologies et les expositions professionnelles aux pesticides, les dernières données datant de 2018. Les décisions doivent être fondées sur les données les plus récentes. Or, la précédente étude a compilé les données jusqu'en 2013, date depuis laquelle la connaissance a nettement progressé.
Enfin, pour les exploitants agricoles, une concertation sera menée pour améliorer, si besoin, leur niveau d'indemnisation qui est moins favorable que pour les salariés agricoles.
Un tel fonds pose un problème d'équité entre les personnes souffrant de maladies professionnelles, certaines étant moins bien indemnisées que d'autres. Il introduit également une rupture d'égalité entre les victimes de maladies liées aux produits phytopharmaceutiques en fonction de l'origine de l'exposition à ces produits. Les victimes professionnelles seraient indemnisées tant par la Branche « Accidents du travailMaladies professionnelles » que par le fonds, alors que les victimes d'une exposition non professionnelle comme les riverains et jardiniers amateurs n'auraient pas accès au fonds. Une telle distinction est contraire aux principes qui régissent les dispositifs d'indemnisation par la solidarité nationale.
Voilà pourquoi le Gouvernement n'est pas favorable à la création d'un fonds spécifique, mais il retient la proposition formulée par le rapporteur d'évaluer les modalités de création et de financement d'un fonds de ce type : il retire donc son amendement au profit de l'amendement CE509.
L'amendement CE489 est retiré.
La commission examine ensuite l'amendement CE509 du rapporteur.
Je propose que, dans un délai de neuf mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement présente un rapport sur le financement et les modalités de création d'un fonds d'indemnisation des victimes des produits phytosanitaires. Je reste convaincu qu'un tel fonds est nécessaire.
L'article 14 sexies A a été adopté à l'unanimité au Sénat, une unanimité pleine et entière alors que le vote de la proposition de loi de Mme Bonnefoy avait été marqué par des abstentions.
Quand, en première lecture, j'avais, avec certains collègues, déposé des amendements portant création d'un fonds d'indemnisation, beaucoup de collègues de différents groupes nous avaient suivis.
Je dois dire ma stupéfaction devant les arguments que vous venez d'employer, Monsieur le ministre. Dans un premier temps, vous aviez déclaré, notamment aux représentants de l'association Phyto-Victimes, que le périmètre du fonds devait être réduit aux agriculteurs victimes de maladies professionnelles. Aujourd'hui, vous nous dites qu'il faut supprimer l'article portant création du fonds car l'indemnisation ne serait pas étendue aux riverains… Autrement dit, vos arguments sont à géométrie variable !
Quant à l'amendement du rapporteur, il ne sert à rien. Un tel rapport existe déjà, c'est celui de l'IGAS, de l'IGF et du CGAAER. Et le Gouvernement a menti dans l'exposé sommaire de son amendement en prétendant que celui-ci préconisait une solution passant par la reconnaissance des maladies professionnelles liées aux expositions aux produits phytopharmaceutiques alors qu'il propose justement la création d'un fonds d'indemnisation en apportant des précisions sur ses modalités pratiques.
Je regrette profondément ces amendements qui reviennent sur le travail accompli par le Sénat.
Ce sujet, Monsieur le président, mérite qu'on lui consacre un peu de temps.
Mme Delphine Batho a parfaitement résumé le combat qui est le nôtre mais qui est d'abord celui des militants de l'association Phyto-Victimes. Je n'en parle jamais sans émotion car j'ai une immense admiration pour M. Paul François et les siens qui pendant des années ont défendu leur cause, parfois jusqu'à l'épuisement, sans être entendus. Ce n'est pas sans rappeler le mépris dont ont été l'objet les militants des premières associations de lutte contre l'amiante qui ont été ignorés par tout un système économique et institutionnel.
Ils ont enfin été étendus par nos collègues sénateurs. Après l'adoption de la proposition de loi au Sénat, nous les avons accueillis, Mme Delphine Batho et moi-même, dans le cadre d'un petit-déjeuner où tous les groupes politiques étaient représentés. À l'issue de cette réunion, tout le monde a fait une sorte de serment : le vote unanime du Sénat nous obligeait à faire des propositions – je ne veux mettre personne mal à l'aise car chacun est libre de changer d'avis.
Nous avons fait des propositions mais nous nous sommes heurtés à un mur avec le refus du Gouvernement dont on sait l'origine : la position du ministère de la santé dans un arbitrage interministériel.
Depuis, le Sénat a voté de manière unanime la création de ce fonds, en se repliant sur une position de compromis. La prise en compte des victimes périphériques – membres de la famille, riverains, jardiniers – avait un caractère extensif difficilement maîtrisable et la prudence l'a conduit à ne retenir que les professionnels. Depuis hier, j'ai reçu au moins une dizaine d'appels de sénateurs qui nous invitent à tenir bon.
Nous savons tous, Monsieur le ministre, que votre argument selon lequel les victimes périphériques ne sont pas prises en compte ne tient pas.
Décider de la création du fonds n'implique nullement de déterminer en même temps les règles de son utilisation. C'est un principe, un acte de courage politique qui est demandé : créons le fonds et voyons ensuite les modalités de son fonctionnement. Si notre collègue M. Christian Hutin était là, si nos collègues communistes étaient présents, ils pourraient nous dire que c'est ainsi qu'il a été procédé pour l'amiante.
Tout a été écrit dans le rapport commandé par le Gouvernement : trois inspections ministérielles ont conclu à la nécessité de la création d'un fonds, tout en appelant à la prudence sur ses modalités.
Je sais vos convictions profondes sur ce sujet, Monsieur le rapporteur. Ce qui nous est demandé aujourd'hui, ce n'est pas de commander un rapport alors qu'il y a des personnes qui souffrent et qui demandent justice, c'est de créer ce fonds, en faisant preuve de prudence s'il faut apporter cette concession au Gouvernement.
Je vais vous poser une question de procédure, Monsieur le président : si l'amendement du rapporteur était adopté, aurions-nous encore une fenêtre de tir pour nous exprimer sur ce sujet en séance, sans craindre un effet d'entonnoir ?
Ce serait tout à l'honneur de la commission d'adopter cet article de consensus et de modération élaboré par nos collègues du Sénat, tous horizons politiques confondus. Une belle leçon de démocratie !
Votre position, Monsieur le ministre, Monsieur le rapporteur, est délicate. Le vote du Sénat a eu un retentissement important ; il constitue une réponse forte sur le plan politique et médiatique à une question à laquelle nous nous sommes également frottés dans le cadre de la mission d'information commune sur l'utilisation des produits phytopharmaceutiques sans avoir pu trouver toutes les solutions.
Certes, il faut se donner le temps de la réflexion avant de prendre une décision. Mais là où votre position devient difficilement vendable, c'est que vous raisonnez uniquement selon une approche « top-down » en proposant un rapport. Et comment prenez-vous en compte les souffrances des victimes des produits phytosanitaires ? Vous passez à côté d'un des deux sujets à traiter. Avant la séance, il faudrait peut-être revoir votre copie.
Nous sommes sensibles à la souffrance des victimes et la question n'est pas de savoir s'il faut créer un fonds ou pas ou si les maladies liées aux produits phytopharmaceutiques existent ou pas.
Je m'interroge sur la proposition du Sénat car je suis très sensible à l'argument de l'équité. Si nous acceptons la création de ce fonds avec le périmètre envisagé, nous allons créer une différence d'indemnisation entre les agriculteurs selon que leur pathologie est liée à des produits phytosanitaires ou à d'autres types de substances comme le benzène. Dans certains cas, ils seront pris en charge à 100 % et dans d'autres, dans une moindre proportion.
Un travail a été engagé pour inscrire dans le tableau des maladies professionnelles les maladies liées aux produits phytopharmaceutiques de manière à assurer une cohérence dans l'indemnisation des victimes.
La question n'est pas de savoir – et je trouve à cet égard l'amendement du rapporteur remarquablement rédigé – s'il faut ou non créer un fonds mais selon quelles modalités le créer. C'est ce qui est important à retenir aujourd'hui. Nous allons vers la création de ce fonds, mais il faut le rendre plus juste, plus équitable et l'étendre aux différentes catégories d'utilisateurs que le ministre a citées.
Monsieur Potier, vous avez évoqué l'amiante mais le cas est tout à fait différent : il s'agissait de gens amenés, pour des raisons professionnelles, à travailler dans un milieu où ils étaient par le fait inévitablement exposés à cette substance.
Prenons le cas d'un agriculteur qui aurait épandu des produits phytosanitaires de façon rigoureuse : il serait normal qu'il soit pris en charge si jamais il était victime d'une pathologie liée à leur utilisation mais ne faudrait-il pas l'indemniser de manière différence d'une personne qui se serait exposée à ces produits en les utilisant de façon non professionnelle ?
L'objectif est bien de créer un fonds, mais il importe de prendre quelques mois pour réfléchir aux différentes modalités d'exposition et distinguer le cas de l'applicateur, de sa famille, éventuellement du voisinage ainsi que celui produits d'origine chimique à usage non exclusivement agricole. Un signal fort est donné par l'amendement de M. le rapporteur.
Je ne peux pas laisser dire que nous ferions preuve de mépris à l'égard des victimes et que nous ne les prenons pas en considération. Nous allons recevoir M. Paul François et les membres de l'association Phyto-Victimes le 1er août prochain au ministère – nous les avons déjà reçus à plusieurs reprises pas le cabinet. C'est bien évidemment avec eux que nous souhaitons travailler.
Nous traitons les choses de la même manière que pour l'amiante, sujet que je connais bien car mon département a été particulièrement touché. Dès lors que les risques ont été connus, les mesures qui s'imposaient ont été prises. Il y a toutefois une différence entre les produits phytopharmaceutiques et l'amiante : l'amiante est un produit désormais interdit alors que les produits phytosanitaires ne le sont pas.
Aujourd'hui, nous n'entendons pas battre en retraite et repousser d'un revers de la main la création d'un « fonds phyto » ; nous demandons du temps supplémentaire pour réfléchir aux modalités concrètes de son financement. Nous sommes engagés dans un travail avec le ministère de la santé ; l'IGAS et le CGAAER sont mobilisés et nous avons besoin de l'expertise de l'inspection générale des finances : il va bien falloir trouver l'argent.
Nous devons aborder ces questions posément pour être certains d'atteindre les objectifs que nous partageons tous ici. Nous voulons aussi éviter les dérives. Mme de Lavergne en a cité quelques-unes. Personne ne doit être laissé au bord du chemin. Assurer une équité de traitement est primordial.
Nous nous penchons également sur l'évolution du tableau des maladies professionnelles, car c'est aussi un moyen de contribuer à la réussite du futur fonds d'indemnisation des victimes.
Tout le monde est attaché à ce sujet et personne n'a parlé de mépris, Monsieur le ministre.
Je veux faire remarquer à Mme Lavergne, le whip du groupe majoritaire, que dire que les produits phytosanitaires ne sont pas la seule cause des maladies professionnelles ne règle pas le problème. On n'invoque pas la chute d'un échafaudage ou les risques d'insolation que courent les ouvriers du bâtiment pour éviter de s'attaquer au problème de l'amiante !
Aujourd'hui, on sait que les produits phytosanitaires sont nocifs. Le rapport le dit avec force : le problème existe, la population potentiellement concernée est de 100 000 personnes, parmi lesquelles 10 000 ont pu être exposées. Un nombre indéterminé d'entre elles seront victimes dans le temps.
M. Nicolas Turquois a évoqué la question de la responsabilité personnelle : c'est à la justice de dire si elle peut être engagée. Reste qu'un système phytosanitaire mal maîtrisé a fait des victimes, que la responsabilité est collective et que la responsabilité individuelle ne peut être invoquée pour nous en distraire. Cela me paraît évident.
Enfin, Monsieur le ministre, le rapport existe déjà : pourquoi faire un rapport sur un rapport ? Selon ce rapport, les fonds habituels de l'assurance maladie seront mobilisés. La mutualité sociale agricole (MSA), au niveau national, se dit prête à s'engager. Il est également écrit qu'il faudra faire appel au concours des industries phytopharmaceutiques. Certes, les géants du secteur y sont clairement opposés, mais il ne serait pas digne de cette assemblée de craindre un tel argument. Les scénarios financiers existent et nous devons les mettre en oeuvre, dans des modalités qui restent à préciser.
L'acte politique consiste à créer, dès maintenant, le fonds.
L'un des arguments du ministre consiste à dire que tous les produits phytosanitaires ne sont pas interdits. Je plaide pour ma part, et en toute cohérence, en faveur de l'interdiction de tous les produits dangereux, cancérigènes, mutagènes, reprotoxiques, perturbateurs endocriniens. Mais quand bien même ils seraient interdits demain, les victimes des pratiques passées doivent être reconnues et leur préjudice intégralement pris en charge. Par ailleurs, il existe des médicaments, comme la Dépakine, qui ne sont pas interdits, mais dont les victimes sont indemnisées.
L'IGF a fait un rapport et il n'y a pas lieu de demander un nouveau rapport.
Enfin, dans la disposition adoptée par le Sénat, le financement est prévu. En outre, une marge de manoeuvre budgétaire existe, puisque le plafond de la taxe sur les ventes de produits phytosanitaires n'est pas atteint.
La commission adopte l'amendement et l'article 14 sexies A est ainsi rédigé.
Article 14 sexies Expérimentation sur l'usage de drones d'épandage dans certaines conditions d'exploitation
La commission est saisie d'un amendement de suppression CE323 de M. Dominique Potier.
Cet article vise à autoriser l'utilisation de drones pour l'épandage de produits phytopharmaceutiques. Je rappelle que la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte a interdit, il y a trois ans, l'épandage aérien de ces produits. Elle a toutefois prévu la possibilité de dérogation : un arrêté de 2016 a établi une dérogation temporaire dans les départements du Bas-Rhin et du Haut-Rhin.
L'épandage de produits dangereux, que ce soit par la main humaine ou par les robots, a toujours des effets sur la biodiversité. On ne peut vouloir favoriser l'élimination des substances les plus dangereuses et autoriser leur utilisation par des voies détournées.
Je suis favorable au maintien de l'article dans sa rédaction votée à l'Assemblée nationale et donc défavorable à cet amendement.
Je souhaite que nous revenions au texte voté en première lecture à l'Assemblée. Je me souviens très bien avoir voté en 2015 l'interdiction de l'épandage aérien, mais l'épandage tel qu'on le connaît, par hélicoptère ou autre aéronef, avec bras de quatorze mètres et dispersion par le vent – avec les effets que l'on sait sur les populations et la biodiversité. Nous ne souhaitons pas revenir sur cette interdiction.
Toutefois, pour certaines cultures, notamment en forte pente, l'épandage aérien permet de réduire les risques courus par les opérateurs – cette année encore, des chenillards se sont retournés. Nous sommes arrivés à une agriculture connectée, une agriculture de précision : il est désormais possible de faire voler des drones pour déposer le produit où cela est nécessaire, à faible hauteur, sans dispersion. Le recours à des aéronefs télépilotés permet une réduction des risques pour l'applicateur, mais également de la dérive.
Nous souhaitons mener une expérimentation dans des conditions qui seront précisées par un arrêté interministériel. L'ANSES évaluera cette expérimentation et jugera si ce mode d'application peut apporter les bénéfices attendus pour la santé, l'environnement et les cultures. Cette expérimentation, très encadrée, est conforme aux dispositions communautaires.
Avis défavorable à cet amendement.
Les explications du ministre sont parfaites. J'ajoute que nous n'avons jamais obtenu de dérogation dans le Haut-Rhin.
Le préfet ne l'a jamais utilisé, considérant que le cadre juridique n'était pas suffisamment solide. Cet article tient compte de l'évolution technologique ; les drones, de plus en plus petits, permettent désormais de traiter de la meilleure façon possible ces vignes en forte pente, réduisant ainsi les risques pour les personnels. Je vous remercie, Monsieur le ministre.
Pour la transparence des débats, il aurait été souhaitable que les collègues ayant déposé en première lecture les 17 amendements identiques comportant la même faute d'orthographe nous disent d'où provenait cette proposition…
Non, ce n'est pas la CFTC qui l'a soutenue.
Les marchands de drones, dans leurs publicités sur internet, mettent en avant l'immense avantage que représente la capacité de propulsion du produit chimique par la rotation des hélices… je voudrais rappeler que si l'épandage aérien des pesticides a été interdit en Europe et en France, c'est précisément à cause des conséquences sanitaires catastrophiques liées à la dérive très large de ces produits.
Je rappelle que le cas très particulier de l'Alsace fait l'objet d'un arrêté interministériel, conforme à l'état actuel du code rural et de la pêche maritime et à la directive européenne. Le dispositif adopté par le Sénat est quant à lui absolument contraire au règlement européen, qui prévoit que l'on ne peut faire exception à l'interdiction que dans le cas où il n'existe aucun autre moyen de lutter contre un ravageur et une fois prises toutes les dispositions possibles pour protéger la santé publique.
On est vraiment dans le deux poids deux mesures… Sur le fonds d'indemnisation des victimes des produits phytosanitaires, on nous a expliqué qu'il fallait se donner du temps et publier un nouveau rapport. Mais quand il s'agit de l'épandage par drone, au nom de la modernité et de l'efficacité, on autorise avant de mesurer les effets. Votre démarche manque de cohérence !
Il est toujours difficile pour moi d'évoquer la douloureuse expérience que traversent les Antilles avec le chlordécone : trente ans après, nous nous battons toujours. Vous parlez de la possibilité d'utiliser des drones, mais pensez aux îles, où les parcelles sont très étroites, souvent fort inclinées, et proches des habitats. Quel que soit l'outil que vous utiliserez, il y aura inévitablement des effets de dispersion. Il faut donc être très prudent. Nous avons entendu toutes sortes d'arguments de même nature, y compris l'intérêt d'épandre au-dessus des feuilles de bananier. Pourtant, les conséquences seront les mêmes que celle de l'épandage par hélicoptère.
Sur le fonds d'indemnisation, je vous demande de ne pas oublier de prévoir une procédure rétroactive, qui permette de prendre en compte les victimes d'une exposition passée, mais dont les conséquences, en matière de santé publique et d'alimentation, perdurent, ce qui est le cas pour le chlordécone.
Je regrette que l'amendement de Mme Limon ne soit pas encore discuté, car il rétablit une rédaction qui était le résultat d'un compromis entre les commissions des affaires économiques et du développement durable de l'Assemblée nationale.
La disposition adoptée en commission nous avait en effet quelque peu contrariés et nous avions imaginé de n'autoriser cette expérimentation qu'avec les produits autorisés en agriculture biologique. Nous soutenons donc cette nouvelle technologie, conscients de la pénibilité et des risques du travail sur des pentes inclinées, tout en encourageant les pratiques plus vertueuses.
Les amendements de suppression sont toujours examinés en premier et à part, ma chère collègue.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine l'amendement CE251 de Mme Monique Limon.
Grâce à un travail de collaboration entre les commissions des affaires économiques et du développement durable et de l'aménagement du territoire nous avions réussi à trouver une solution satisfaisante, consistant à autoriser une dérogation à l'interdiction d'épandage aérien via l'utilisation de drones, mais seulement dans le cas de pentes égales ou supérieures à 30 %, et uniquement pour des produits autorisés en agriculture biologique.
Nous regrettons que le Sénat ait élargi cette dérogation et proposons, par cet amendement, de revenir à la rédaction initiale.
La commission adopte l'amendement et l'article 14 sexies est ainsi rédigé.
Article 14 septies A (nouveau) Rapport sur les normes du bio importé hors de l'Union européenne
La commission est saisie d'un amendement de suppression CE462 du Gouvernement
Le régime des échanges entre l'Union européenne et les pays tiers fera l'objet d'une évolution lors de l'entrée en application du nouveau règlement relatif à la production biologique.
Le Gouvernement considère que l'objectif du rapport prévu à cet article est déjà assuré par la révision du règlement européen.
Cette demande de rapport était fondée, dans la mesure où beaucoup de consommateurs s'interrogent sur la qualité des produits biologiques issus de pays étrangers. Réévaluer les règlements ne doit pas conduire à niveler la qualité. Êtes-vous en mesure de nous garantir que tous les produits biologiques importés obéiront à des normes équivalentes à celles en vigueur en Europe ?
Je pense que ce rapport est utile et qu'il faut le voir comme un appel à l'harmonisation de la réglementation dans certains bassins : les substances phytosanitaires utilisées à Saint-Domingue ou en Amérique centrale pour des productions identiques aux nôtres font l'objet de discussions et de négociations dans le cadre de la réglementation européenne, sans que les collectivités soient consultées et les conséquences bien évaluées : on découvre que des produits utilisés y compris en agriculture bio sont interdits au niveau européen. Il ne suffit pas de faire évoluer la réglementation européenne ; il faut aussi travailler sur les équivalences de normes entre les différents bassins maritimes frontaliers.
Nous avons voté hier l'article 11 obligeant les cantines scolaires, entre autres, à proposer au moins 20 % de produits biologiques ou issus de l'agriculture raisonnée. On se doute bien que les sociétés de restauration collective proposeront aux maires des menus élaborés à partir de produits bio importés. Or chacun sait que le bio russe ou le bio ukrainien, ce n'est pas le bio français. C'est la raison pour laquelle il est important de disposer d'une analyse comparative assez fine.
La commission adopte l'amendement et l'article 14 septies A est supprimé.
Article 14 septies (article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime) Champ d'interdiction des néonicotinoïdes
La commission est saisie de deux amendements de suppression CE148 de M. Dino Cinieri et CE353 de M. Thibault Bazin.
Cet article, ajouté par voie d'amendement lors des débats en commission des affaires économiques en première lecture à l'Assemblée nationale, pénalisera l'ensemble de la filière agricole française. L'interdiction élargie des néonicotinoïdes, alors que les agriculteurs sont sans alternative à ce jour, posera de graves problèmes pour la protection des cultures.
Le 22 février, le Président de la République a promis qu'en cas d'absence de solutions, les substances seraient maintenues dans le circuit agricole : « Personne ne sera laissé sans solution », « Jamais je ne demanderai à quelqu'un d'abandonner une pratique productive si elle lui fait perdre de l'argent ou qu'il n'y a pas une vraie substitution qui lui garantit qu'il peut tout à fait vivre du prix payé en arrêtant le glyphosate ».
Si cet article n'est pas supprimé, comme le propose mon amendement CE148, la France sur-transposera une directive européenne, ce qui accentuera encore plus les distorsions de concurrence avec nos voisins européens. En effet, alors que l'Union européenne a voté le 17 avril l'interdiction de trois nouveaux néonicotinoïdes, étendre en France l'interdiction des néonicotinoïdes aux substances présentant des modes d'action identiques pénaliserait nos agriculteurs.
Mon amendement CE353 tend également à supprimer l'article 14 septies. Certes, il faut lutter contre les substances dont le mode d'action est identique à celui des néonicotinoïdes. Mais, dans un marché commun, cela suppose une action à l'échelle européenne. Faute de quoi, nous ajouterons des contraintes aux agriculteurs français, sans pour autant assurer la présence sur le marché de produits plus sains. Nous partageons l'objectif d'une alimentation plus saine, mais pour que nos agriculteurs ne souffrent pas d'une distorsion de concurrence, il ne faut pas s'y prendre de cette manière.
C'est un amendement dont j'étais l'auteur qui a introduit cet article. Évidemment, les néonicotinoïdes ne sont pas la seule cause de mortalité des abeilles, mais la disparition des pollinisateurs est un problème général qui va se poser dans un futur assez proche pour l'agriculture : dans certains pays comme la Chine, on est déjà obligé de polliniser à la main. Il faut prendre ce problème à bras-le-corps et l'attaquer sur tous les fronts.
Dès 2012, la France a pris les premières mesures d'interdiction, visant notamment le Cruiser OSR. En 2013, des mesures au niveau européen ont restreint l'usage de trois substances néonicotinoïdes. En 2016, nous avons inscrit dans la loi biodiversité une interdiction des néonicotinoïdes à compter de septembre 2018 avec des dérogations jusqu'en 2020. Le 27 avril 2018, l'Europe a décidé d'interdire le traitement des cultures de plein champ utilisant trois substances néonicotinoïdes.
Il convient d'étendre aujourd'hui le champ de l'interdiction aux substances chimiques qui, si elles ne sont pas classées spécifiquement comme néonicotinoïdes, ont des modes d'action identiques. Car c'est bien le mode d'action qui est incriminé dans les effets sur les pollinisateurs, dont la situation devient préoccupante.
Bien qu'étant défavorable à ces amendements de suppression, je répète que nous ne pouvons pas mettre les agriculteurs au pied du mur en les laissant sans solution. Nous avons activé les instituts techniques et le milieu de la recherche pour rechercher des solutions de substitution.
Je me réjouis de la position du rapporteur et du ministre. Je saisis l'occasion de ce débat, Monsieur le ministre, pour vous demander quand est prévue la publication de l'arrêté interministériel relatif aux dérogations à l'interdiction des néonicotinoïdes, laquelle entrera en vigueur le 1er septembre. Je souhaite évidemment que le nombre de ces dérogations soit le plus faible possible.
Nous devons maintenir cet article, même s'il peut comporter des difficultés de mise en application. Il faut bien que certains États membres soient à la pointe de cette lutte et aient inscrit cette interdiction dans leur législation nationale pour que, dans le cadre de la future PAC, la suppression de ces pratiques soit rendue obligatoire dans les plans de gestion nationaux.
La commission rejette les amendements de suppression.
Puis elle examine l'amendement CE250 de Mme Monique Limon.
Alors que les néonicotinoïdes seront interdits à partir du 1er septembre, les choses sont en train d'évoluer au niveau européen : les États membres de l'UE ont adopté en avril dernier la proposition de règlement de la Commission visant à interdire trois substances actives néonicotinoïdes, excepté en culture sous serre.
Nous avons souhaité élargir la définition des « néonic » à l'ensemble des substances actives présentant des modes d'action identiques. L'amendement vise à rétablir la rédaction initiale de l'article.
Sagesse. Je suis favorable à l'extension de l'interdiction aux produits contenant une substance dont le mode d'action serait identique à celui des néonicotinoïdes. Cela étant, la rédaction adoptée par le Sénat ne me semble pas dénaturer l'article. Elle prévoit un avis préalable de l'ANSES, ce qui peut s'avérer utile, bien que le Gouvernement puisse à tout moment solliciter son avis. Les deux rédactions me semblent équivalentes.
Madame Batho, les dérogations seront très limitées. Il nous manque encore des informations pour certaines filières, mais les choses seront effectives fin juillet ou début août. Vous le voyez, cela approche !
Je vous remercie de cette réponse, Monsieur le ministre. Nous suivrons ce dossier avec beaucoup d'attention.
Je soutiens la rédaction proposée par Mme Limon, si tant est qu'elle soit modifiée comme le propose le Gouvernement dans son amendement CE463. En effet, contraindre la publication à un avis de l'ANSES, que le Gouvernement peut toujours demander, me paraît introduire une complexité supplémentaire.
Madame Limon, je vous propose de rectifier la rédaction de votre amendement en substituant, à l'alinéa 3, le mot « ceux » au mot « celles ».
La commission adopte l'amendement CE250 tel qu'il vient d'être rectifié.
En conséquence, l'amendement rédactionnel CE463 du Gouvernement, ainsi que l'amendement CE206 tombent.
Puis la commission examine l'amendement CE487 du Gouvernement.
Cet amendement répond à l'enjeu que constitue l'exposition des personnes habitant à proximité des zones où les produits phytopharmaceutiques sont utilisés.
Les États généraux de l'alimentation ont conclu à la nécessité de renforcer la protection des populations. Des mesures adaptées, de diverse nature – chartes validées par l'État, zones de protection, périodes de traitement – doivent être mises en place.
C'est ce que préconise le rapport établi conjointement par le Conseil général de l'environnement et du développement – CGEDD –, le Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux – CGAAER – et l'IGAS. Par ailleurs, cet objectif est repris dans la feuille de route pour une agriculture moins dépendante aux produits phytosanitaires, présentée par le Gouvernement le 25 avril.
Le Gouvernement appelle les utilisateurs à mettre en place des mesures pour réduire l'exposition aux produits phytopharmaceutiques et favoriser la coexistence des activités sur les territoires ruraux. Ces engagements seront formalisés dans des chartes d'engagement des usagers, adaptées au contexte local et aux leviers effectivement mobilisables par la ou les exploitations.
De nombreux territoires ont mis en place une concertation collective entre agriculteurs et riverains avec la formalisation, dans une charte, des modalités de traitement – heures de traitement, matériels, protection des habitations. Il s'agit de promouvoir un climat serein, de respect mutuel entre riverains et utilisateurs de produits phytosanitaires, notamment dans la viticulture.
Si la voie de la charte s'avère infructueuse, l'autorité administrative peut prendre des mesures de restrictions. Celles-ci peuvent aussi encadrer les mesures prises par les utilisateurs.
En vertu d'un nouveau document guide européen, des produits en cours d'évaluation pourront être assortis de conditions d'usage à proximité des zones d'habitation. Ainsi, les produits récemment évalués feront l'objet de restrictions plus importantes que d'autres qui peuvent présenter un profil toxicologique plus défavorable, mais qui n'ont pas été évalués avec ces nouvelles lignes directrices. Il serait incohérent que ces produits soient préférés à ceux nouvellement évalués et autorisés.
Cet amendement très important vient après le débat surréaliste que nous avons vécu en première lecture, lorsque, à la suite de l'intervention édifiante de nombreux groupes, le Gouvernement a retiré son dispositif.
Plutôt que de prendre des mesures de gestion de l'exposition sur le terrain, le plus simple serait de retirer du marché les produits cancérigènes, mutagènes, reprotoxiques et perturbateurs endocriniens dont la nocivité est connue.
À défaut, le Gouvernement doit affirmer, comme il l'est écrit dans le rapport conjoint de l'IGAS, du CGAAER et du CGEDD, que la responsabilité civile et pénale des pouvoirs publics est désormais engagée, un lien de causalité ayant été établi entre l'usage de ces substances et certaines maladies. Des études montrent, par exemple, que le taux de prévalence de la maladie de Parkinson augmente dans le périmètre des cultures viticoles.
La réalité, c'est que l'État n'a d'autres choix que de mettre en oeuvre ce dispositif. Cela étant, le mécanisme proposé par cet amendement me paraît très imparfait. Je ne crois pas trop à une charte volontaire. Il est prévu en cas d'échec que les pouvoirs publics puissent y substituer des mesures, mais il n'est pas précisé que celles-ci doivent être prises au niveau gouvernemental et ministériel.
Le précédent Gouvernement avait décidé de renvoyer aux préfets la responsabilité de prendre des arrêtés. Mais ceux-ci, calés sur une forme de moins-disant, garantissent très mal la protection des riverains. Le Gouvernement ne doit pas renvoyer cette question fondamentale au corps préfectoral et se débarrasser ainsi de sa responsabilité civile et pénale. Nous y reviendrons en séance.
Je soutiendrai cet amendement, même s'il est effectivement très insatisfaisant. Sur ce sujet, il convient d'être humble : une crise en Dordogne nous avait amenés à prévoir, dans le cadre de la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt des mesures de protection des riverains – hauteurs de haies, palissades, etc. – conçues de façon un peu précipitée et plutôt d'ordre réglementaire. La profession agricole a mis en avant le fait que des centaines de milliers d'hectares étaient concernés, ce qui pouvait mettre en danger l'équilibre économique des exploitations et poser des problèmes pratiques.
Mme Delphine Batho l'a dit : pour des raisons d'ordre public et de santé publique, le sujet ne doit pas être négligé. Il ne s'agit pas seulement d'interdire des substances cancérigènes, mais, plus globalement, de mettre en oeuvre la transition agro-écologique. On ne peut se satisfaire de la mise en place de différents périmètres : c'est l'ensemble de l'agriculture qui doit engager sa mutation. Nous plaidons pour la relance du plan Ecophyto 2. Nous savons que 25 à 30 % des pratiques peuvent être optimisées, voire la moitié, si l'agroécologie se massifie. Il faut agir immédiatement et globalement en faveur de la transition agroécologique, grâce à une orientation en ce sens de la PAC et de la politique agricole. La solution est plus globale que sectorielle.
Cela suppose également un effort de la société. L'urbanisme doit lui aussi évoluer. Par mesure de précaution, et quelle que soit l'évolution des pratiques agricoles, il convient de réinventer autour des villes des ceintures vertes, faites de vergers et de jardins, et toutes sortes de zones tampon. Le modèle du lotissement en bordure de champ céréalier appartient au passé. Ce serait une avancée importante que de voir figurer dans les PLUI ces zones intermédiaires, afin que le pulvérisateur ne soit plus directement au contact du gamin jouant dans son jardin.
Nous sommes tous d'accord avec les objectifs affichés dans cet amendement, mais je vous appelle à la vigilance quant à la perte de surface agricole que peuvent induire ces mesures, notamment dans les zones où l'habitat est relativement dense.
Il faut prendre en compte les attentes des populations et les besoins des usagers. Nous voyons combien il devient difficile de faire se côtoyer riverains et agriculteurs. Une charte basée sur le consensus, le dialogue et la concertation, s'appuyant sur le travail réalisé par la profession, à l'image de la « charte de bon voisinage en milieu rural », me semble aller dans le bon sens.
Monsieur le ministre, cette charte sera-t-elle opposable juridiquement ? Les riverains pourront-ils attaquer les agriculteurs qui ne la respecteraient pas tout à fait ? Nous devons prendre garde à ce que cette judiciarisation ne pénalise pas le monde agricole, qui pourrait se trouver en permanence devant les tribunaux, face à des riverains très tatillons.
Cette charte, qui introduit un dialogue entre les riverains et les agriculteurs, me semble une approche intéressante. Peut-être encouragera-t-elle les agriculteurs à étendre à l'ensemble de leur exploitation les pratiques imposées à proximité des habitations.
On sait par exemple que les produits phytosanitaires ne sont pleinement efficaces que tôt le matin, lorsque la plante est dite « en respiration » et que l'hygrométrie est la plus forte. Or un certain nombre agriculteurs persistent à les appliquer, en dépit des réglementations, de façon inadéquate, Si, par la sensibilisation et le dialogue introduits par cette charte, les pratiques plus vertueuses se généralisent, un pas aura été fait vers la mutation agro-écologique que M. Potier et bon nombre de nos concitoyens appellent de leurs voeux.
À la forme de défiance et de rigidité que peut revêtir le règlement, je préfère la confiance et la collaboration sur lesquelles pourrait reposer cette solution. Cet amendement a de surcroît l'avantage de permettre de s'adapter à une multitude de situations particulières, grâce au travail avec les professionnels, les instituts de recherche et les acteurs de terrain. Je suis favorable à cette évolution.
Cette idée d'une charte va dans le bon sens. J'ai eu l'occasion d'en mettre en place une dans ma commune. Elle s'élabore dans un esprit de respect mutuel et suscite chez les citadins un intérêt pour l'agriculture, loin de la suspicion qui s'exprime parfois dans nos textes.
Le retrait des cultures à proximité des zones d'habitat fait courir un risque important. L'idée que le paysan doive intervenir le plus loin possible des villes va à l'encontre de nos objectifs de préservation de l'espace agricole. Par ailleurs, des zones de friches risqueraient de se multiplier en bordure des zones habitées, ce qui n'est pas le plus souhaitable pour l'image de nos agriculteurs.
Certes, c'est une avancée que de procéder par la concertation, mais il faut tout de même un cadre. S'agit-il de la simple élaboration d'une charte, à l'initiative des préfets, qui pourra aboutir à un arrêté préfectoral, ou disposera-t-on d'un cadre, avec des définitions données par l'État, notamment concernant les zones tampon autour des lieux d'habitation ou accueillant des publics vulnérables ? Précisera-t-on les protections réglementaires à mettre en oeuvre en fonction des produits utilisés, des cultures, du matériel de pulvérisation ?
Je suis persuadé que l'on viendra, malheureusement, à des mesures plus coercitives. Une proposition de loi, déposée par certains membres de mon groupe, prévoyait des règles très strictes, avec une distance obligatoire de 200 mètres. Elle ne me semble pas réaliste, et c'est la raison pour laquelle je ne l'ai pas signée, mais il faut avoir à l'esprit que les exigences de nos concitoyens seront de plus en plus fortes si l'on n'apporte pas des réponses adaptées, durables et valant pour l'ensemble du territoire, l'État ne devant pas se contenter de renvoyer à chaque fois au terrain.
Je me souviens du débat que nous avions eu en première lecture à l'Assemblée nationale, mais je reste persuadé qu'il fallait faire quelque chose. Nous avons écouté les uns et les autres. Pour ma part, je ne suis pas dans la suspicion permanente vis-à-vis des producteurs, je leur fais confiance. C'est ainsi que je travaille : je suis dans le dialogue, dans la recherche de solutions, dans la volonté de faire fonctionner l'intelligence collective. Je pense que c'est ainsi que l'on arrive à avancer dans le bon sens. Plutôt que de se montrer coercitif, il s'agit de faire confiance aux territoires. On ne peut pas gérer tous les territoires de la même façon, que ce soit des plaines, des bocages, des vignobles, des zones de montagne ou, à l'inverse, des zones de vie très denses.
Cela étant, on peut encadrer les chartes. Le préfet a effectivement la main, mais il reste un représentant de l'État et donc du Gouvernement. Il est possible de donner des instructions aux préfets et de travailler avec eux, en fonction des territoires, pour avancer et permettre une concertation. La charte peut aussi être mise en place sous l'égide d'un maire avec les producteurs de sa commune et des représentants des riverains. Chaque maire peut choisir de faire une charte dans sa commune ou dans son intercommunalité avec les parties prenantes. L'essentiel est que les choses puissent fonctionner.
Pour abonder dans le sens de M. Jérôme Nury, prenons garde au danger d'une trop grande judiciarisation. On risquerait de se retrouver dans des situations où n'importe quelle association pourrait envoyer un producteur devant les tribunaux pour les raisons les plus diverses. Soyons vigilants dans ce domaine. Les chartes constituent un encadrement accepté par les producteurs et les organisations. Certains estiment que ce n'est pas suffisant, ce que je peux concevoir, mais il faut le voir comme un premier pas, accepté qui plus est par les producteurs et les organisations.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle examine l'amendement CE324 de M. Dominique Potier.
Cet amendement vise à interdire la production, le stockage et la vente de produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives non autorisées dans l'Union européenne. Quelles sont les règles données aux producteurs français ? On ne peut pas autoriser à des fins d'exportation, des produits interdits chez nous en raison de leur toxicité. Le principe est extrêmement simple : ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas que l'on fasse à toi-même. C'est le fondement de cet amendement.
Nous avons déjà eu ce débat en première lecture. Si votre amendement était adopté, il aurait deux conséquences : mettre des entreprises françaises exportatrices en difficulté économique et substituer à notre politique de gestion des produits phytosanitaires, celle des pays hors Union européenne. Avis défavorable.
Après l'adoption d'un tel amendement, l'industrie française ne pourrait produire que les seules substances actives autorisées en Europe. Or certaines substances n'ont pas été approuvées en Europe parce qu'elles ne font pas l'objet de demandes, notamment celles qui sont adaptées à des productions tropicales non cultivées en Europe. Ainsi, la lutte contre le criquet pèlerin – un véritable fléau en Afrique – fait désormais appel à des solutions de biocontrôle qui ne trouveront pas de marché en Europe. Une telle interdiction irait donc contre l'intérêt des industries françaises et aussi des productions des pays hors de l'Union européenne. Je suis donc défavorable à cet amendement, d'autant qu'il est contraire aux dispositions du règlement qui indique explicitement que la production, le stockage et la circulation de produits destinés à être utilisés dans un pays tiers ne requièrent pas d'autorisation et ne peuvent donc de facto être interdits.
Avant de donner la parole M. Letchimy, je voudrais signaler qu'il nous reste une heure de discussion puisque nous devrons lever impérativement la réunion à treize heures. Nous avons encore trente-six amendements en discussion. Si nous voulons terminer ce matin, nous devons accélérer un peu car notre rythme a baissé et que nous n'examinons plus que quinze à vingt amendements à l'heure.
Monsieur le ministre, j'ai très envie de ne pas avoir bien interprété vos propos. Vous voudrez bien m'excuser d'être un peu vif. L'amendement présenté par M. Guillaume Garot se réfère à des produits interdits. Nous avons l'exemple d'un produit interdit, c'est-à-dire le chlordécone. Trois ans après son interdiction, on a trouvé des produits stockés qui étaient utilisés, témoignant à coup sûr d'un trafic. Voulez-vous dire que nous accepterions d'exporter vers un pays tiers, tropical, un produit dont on connaît la dangerosité ? En tout cas, c'est ce que j'ai compris. Si tel était le cas, ce serait vraiment scandaleux. Un produit interdit en Europe doit l'être aussi à l'extérieur. L'amendement propose qu'il soit impossible d'exporter les produits considérés comme dangereux dans l'espace européen et en France.
Ces produits ne sont pas interdits ; s'ils ne sont pas autorisés, c'est parce qu'il n'y a pas la demande dans l'Union européenne. Ils peuvent être fabriqués dans l'Union européenne, mais ils sont destinés à traiter des insectes ravageurs ailleurs dans le monde, comme le criquet pèlerin en Afrique. Il s'agit de permettre de stocker dans l'Union européenne des produits qui ne lui sont pas destinés.
Nous présenterons un amendement en séance afin de prendre en compte le cas du criquet pèlerin. Ce n'est pas un bon argument, Monsieur le ministre : il s'agit bel et bien de produits réputés toxiques en Europe, et que l'on continue à produire et à exporter. Ce n'est pas parce que l'Europe le permet que la France doit le faire. Il faut que l'on change de régime. Nous exerçons une souveraineté solitaire, avec un certain cynisme, sans réciprocité ; nous devons inventer des modalités de souveraineté solidaire. Ce qui n'est pas bon pour nous n'est pas bon pour l'extérieur, quoi qu'il en coûte sur le plan économique. Il y va de la dignité humaine et, en partie, de la survie de notre humanité.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 14 septies modifié.
Article 14 nonies (articles L. 510-1 et L. 514-7 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime) Promotion de la réduction de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques par les chambres d'agriculture
La commission examine l'amendement CE231 du rapporteur.
Cet amendement vise à rétablir l'article dans sa rédaction issue du vote de l'Assemblée nationale en première lecture.
La commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'article 14 nonies est ainsi rétabli et l'amendement CE400 de Mme Laurence Maillart-Méhaignerie tombe.
Article 15 Habilitation à légiférer par ordonnances relatives à la séparation des activités de vente et de conseil en matière de produits phytopharmaceutiques, d'extension des pouvoirs confiés à certains agents publics et de lutte contre le gaspillage alimentaire
La commission examine l'amendement CE75 de Mme Lise Magnier.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission rejette l'amendement.
Puis elle examine, en discussion commune, l'amendement CE451 du Gouvernement, l'amendement CE19 de M. Arnaud Viala, l'amendement CE390 de M. Thibault Bazin, les amendements identiques CE115 de M. Jérôme Nury et CE143 de M. Dino Cinieri, les amendements CE9 et CE8 de M. Arnaud Viala, les amendements identiques CE325 de M. Dominique Potier et CE488 de M. Thibault Bazin et l'amendement CE315 de M. Dominique Potier.
Il s'agit de rétablir l'article 15 dans sa rédaction issue de la première lecture à l'Assemblée nationale. Le plan d'action gouvernemental sur les produits phytosanitaires associe toutes les parties prenantes. Celles-ci pourront faire des propositions qui seront reprises dans l'ordonnance prévue à l'article 15. Une première réunion a eu lieu la semaine dernière et le Gouvernement souhaite ne pas préjuger des conclusions de ses travaux. En cohérence avec l'amendement qui prévoit la suppression de l'article 12 bis AA, cet amendement propose de rétablir la rédaction de l'alinéa 15 de l'article 15, telle qu'elle avait été adoptée par l'Assemblée nationale. Le délai de douze mois, prévu pour la publication de l'ordonnance concernée, permettra d'organiser les consultations et la concertation nécessaires avec les représentants des collectivités locales, notamment pour définir les seuils à partir desquels les opérateurs seront soumis à l'obligation de diagnostic et les modalités de mise en oeuvre des dispositions.
L'amendement du Gouvernement, qui vise à restaurer l'article 15 dans sa rédaction issue de l'Assemblée nationale, justifie pleinement que nous redéposions le nôtre. Cet amendement CE19 vise, au contraire, à assouplir les conditions de la séparation totale que vous souhaitez entre la vente et le conseil. Cette séparation aurait des impacts économiques très lourds pour les exploitations. Surtout, elle mettrait à mal à la fois les certificats d'économie de produits phytopharmaceutiques (CEPP) et la logique dans laquelle les filières se sont engagées – avant et encore plus après la tenue des États généraux de l'alimentation – afin de faire baisser progressivement l'utilisation de ces produits. Nous souhaitons faire une distinction entre le conseil lié directement à la vente et le conseil pluriannuel lié à une pratique et une culture d'utilisation de ces produits. Tel est l'objet de notre amendement CE325.
Comme notre collègue M. Viala, nous voulons par notre amendement CE115 faire une distinction entre le conseil de vente et le conseil stratégique.
Notre amendement CE143, identique, vise à distinguer deux types de conseil : celui qui est destiné à informer sur l'utilisation – précautions, dosages – ; et celui qui tend à la vente du produit. Il ne faut séparer la vente du conseil que dans ce dernier cas afin de permettre la diminution des consommations.
Cette séparation de la vente et du conseil est un peu contradictoire avec l'effort des CEPP. Il fallait choisir une stratégie et s'y tenir. J'ai bien compris qu'il s'agit d'une promesse présidentielle dont vous ne savez pas trop quoi faire. Concrètement, la vente et le conseil ne seront pas vraiment séparés. Il sera, en effet, compliqué de faire une distinction entre le conseil de sécurité et le conseil commercial.
Des progrès ont été faits et on essaye d'en faire de nouveaux. Cela étant, le groupe Nouvelle Gauche continue à plaider pour une diminution globale de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques par le biais de deux processus : le plan Ecophyto déployé sur 30 000 fermes en France, soit un réseau de dix fermes pour chacune des 3 000 exploitations du living lab Dephy ; les CEPP qui allient des solutions chimiques, biovégétales, mécaniques ou numériques et qui ne doivent, en aucun cas, être fragilisés par cette séparation du conseil et de la vente. Au contraire, on doit faire du conseil sous toutes ses formes – indépendant, consulaire ou privé – une arme de transformation massive de notre agriculture.
L'amendement CE315 vise à réintroduire la rédaction de cet alinéa, telle que votée à l'Assemblée nationale et qui avait pour objet d'inclure l'approvisionnement durable dans le diagnostic préalable que devront réaliser les établissements de restauration collective, en plus de la lutte contre le gaspillage alimentaire.
Je suis bien évidemment favorable à l'amendement CE451 du Gouvernement, qui tend à rétablir l'article 15 tel qu'il avait été adopté à l'Assemblée nationale, et défavorable aux autres amendements.
Je vous rappelle que la concertation sur la séparation du conseil de la vente a commencé dans le cadre des groupes de travail Ecophyto 2 +. C'est l'occasion de lister les différents types de conseil. Je souhaite travailler avec les parlementaires sur l'ordonnance qui nous permettra d'avancer sur ce sujet.
Monsieur le ministre, inutile de rappeler que nous sommes en désaccord sur la rédaction de l'article 15. Nous avons déjà eu l'occasion d'en débattre en séance. En l'état, cet article va mettre en péril certaines activités bien structurées sur les territoires et les emplois afférents. Surtout, il va donner les clés aux multinationales qui seront les plus capables de traiter en direct avec les agriculteurs alors que certaines centrales d'achat pouvaient jouer un rôle d'intermédiaire et éviter ce rapprochement, cette pression des multinationales.
Au-delà du caractère discutable de l'ordonnance, je m'interroge sur la méthode. La semaine dernière, j'ai été informé par la profession qu'un groupe de travail s'était constitué le 12 juillet dernier, rue de Varenne, sur la rédaction de l'ordonnance prévue à l'article 15. Ces travaux préemptent la décision de l'Assemblée nationale. Un groupe de travail se réunit pour rédiger l'ordonnance avant que les débats aient lieu en commission et que le Parlement ait entériné la décision. Or on peut très bien changer d'avis – y compris la majorité et vous-même, Monsieur le ministre – d'ici au mois de septembre. Je m'étonne de la méthode employée.
Je n'ai rien à redire aux propos tenus par mon collègue M. Dive et je voudrais y ajouter une mise en garde : séparer le conseil de la vente peut paraître vertueux ; cependant, le conseil intervient au niveau global, de la dimension économique de l'exploitation. Chaque paysan a ses pratiques, ses habitudes, son histoire. Il est important que ce conseil vienne des organismes avec lesquels il est en confiance.
Les amendements CE9 et CE8 sont retirés.
La commission adopte l'amendement CE451.
En conséquence, les amendements CE390, CE325, CE488 et CE315 tombent.
La commission rejette les amendements CE19, CE115 et CE143.
Puis elle adopte l'article 15 modifié.
Article 15 bis A (nouveau) (article L. 131-15 du code de l'environnement et article L. 253-6 du code rural et de la pêche maritime) Gouvernance des instances de concertation en matière de produits phytopharmaceutiques
La commission examine l'amendement CE450 du Gouvernement.
Il s'agit de rendre compatible deux articles. Cet amendement est articulé avec un autre amendement qui réintègre l'actuel deuxième alinéa de l'article 15 bis A au sein de l'article 14 quinquies, afin de simplifier la gouvernance du plan Ecophyto.
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la commission adopte l'amendement.
En conséquence, les amendements CE149 de M. Dino Cinieri, CE158 de M. Antoine Herth et CE354 de M. Thibault Bazin tombent.
La commission adopte l'article 15 bis A modifié.
Article 15 ter A (nouveau) (article L. 511-16 du code de la consommation) Habilitation des agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes en matière de produits importés d'origine non animale
La commission adopte l'article 15 ter A sans modification.
Article 15 quater (article L. 331-21 du code forestier) Adaptation du droit de préférence dans les communes forestières
La commission examine l'amendement CE452 du Gouvernement.
L'amendement CE452 vise à supprimer cet article, adopté par le Sénat, prévoyant une modification du code forestier.
Lorsqu'une propriété forestière de moins de quatre hectares est vendue, les propriétaires forestiers voisins bénéficient d'ores et déjà d'un droit de préférence. L'objectif de cette disposition est de promouvoir le regroupement du parcellaire forestier qui est actuellement trop morcelé. Le code forestier dispose que ce droit de préférence ne s'applique pas lorsque la vente doit intervenir dans le cadre d'un aménagement foncier rural. Le cadre juridique actuel prend ainsi en compte de manière équilibrée l'ensemble des intérêts en jeu, y compris ceux de l'agriculture.
Ajoutons que cet article est de surcroît un cavalier législatif.
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'article 15 quater est supprimé.
Article 15 quinquies (nouveau) (article L. 3 du code rural et de la pêche maritime) Acclimatation des normes agricoles de l'Union européenne dans les zones ultrapériphériques
La commission examine l'amendement CE453 du Gouvernement.
La référence à l'article 349 du traité fondateur de l'Union européenne est erronée. Cet article du traité permet de prévoir des dispositions spécifiques pour les territoires ultrapériphériques mais selon une comitologie exclusivement européenne.
En outre, la rédaction actuelle laisse penser que des normes prévues dans le droit européen, y compris pour ces territoires, ne seraient pas pleinement mises en oeuvre, ce que ne permet pas le droit de l'Union européenne.
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'article 15 quinquies est supprimé.
Titre II bis Mesures de simplification dans le domaine agricole
Article 16 A (supprimé) (article L. 314-20 du code de l'énergie) Valorisation des projets collectifs de production d'électricité
La commission est saisie de l'amendement CE346 de Mme Sandrine Le Feur.
Étant donné que j'avais déposé le même amendement, je ne peux qu'être favorable à celui-ci.
La commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'article 16 A est ainsi rétabli.
Article 16 CA (nouveau) (article L. 311-1-1 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime) Valorisation des résidus de transformation agricole dans les usages non alimentaires
La commission examine l'amendement CE449 du Gouvernement.
C'est un amendement de suppression. Il n'est pas utile de préciser dans le code rural et de la pêche maritime que les résidus peuvent être valorisés dans les usages non alimentaires, car de telles valorisations ne sont pas interdites.
L'un des objectifs de cet ajout était de favoriser la valorisation de l'éthanol de mélasse en biocarburant. D'autres dispositifs, fiscaux notamment, sont plus à même de contribuer à cet objectif.
Enfin, cet article pourrait remettre en cause la hiérarchie des usages des résidus, en donnant la priorité aux débouchés énergétiques.
Cet article a le mérite de mettre l'accent sur les débouchés qui peuvent se présenter aux agriculteurs : les résidus de mélasse de betterave peuvent être utilisés pour les biocarburants, de même de l'amidon dans le cas du blé. Les dispositifs fiscaux, que vous évoquez, sont insuffisants. La part de 7 % des biocarburants dans la consommation d'énergie des transports intègre, qui plus est, l'huile de palme, au détriment de la filière sucre, de l'éthanol issu de la mélasse de betterave, et de l'huile de colza. Votre argument ne me satisfait pas, Monsieur le ministre, à moins que nous ayons un vrai débat sur les dispositifs fiscaux dont vous parlez, lors de l'élaboration du projet de loi de finances. Une mission d'information, visant à étudier les freins à la transition énergétique, doit s'installer cet après-midi et elle abordera la question des biocarburants.
La commission adopte l'amendement.
En conséquence l'article 16 CA est supprimé.
Article 16 C (articles L. 111-97, L. 431-6, L. 452-1, L. 452-1-1 et L. 453-9 [nouveau] du code de l'énergie, article L. 554-6 du code de l'environnement et article L. 255-12 du code rural et de la pêche maritime) Droit à l'injection pour le biogaz produit par les installations situées à proximité du réseau et couverture tarifaire des coûts de renforcement
La commission est saisie de l'amendement CE256 de Mme Monique Limon.
Cet amendement a trait à la méthanisation, tout comme le CE252 à l'article 16 D, que nous examinerons un peu plus loin. Au début de l'année, le secrétaire d'État, M. Sébastien Lecornu, avait initié un groupe de travail relatif à la méthanisation, afin de lever les freins à son développement et de permettre aux agriculteurs de s'engager dans cette démarche et de compléter ainsi leurs revenus. L'une des conclusions consensuelles de ce groupe de travail était la création d'un droit à l'injection dans les réseaux de gaz naturel. Mon amendement vise à modifier l'article 16 C tel qu'adopté au Sénat, afin d'éviter le détournement de ce droit pour réaliser des extensions de réseau de gaz naturel et ne pas remettre en cause le principe de propriété des réseaux publics de distribution de gaz par les collectivités territoriales ou leurs groupements.
Je suis favorable à ces mesures complémentaires, en lien avec les conclusions du groupe de travail sur la méthanisation.
C'est un excellent amendement auquel je souscris pleinement.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'article 16 C modifié.
Article 16 D (nouveau) (article L. 255-12 du code rural et de la pêche maritime) Sortie du statut de déchets des matières fertilisantes et supports de culture
La commission examine les amendements identiques CE150 de M. Dino Cinieri, CE159 de M. Antoine Herth et CE355 de M. Thibault Bazin.
L'article 16 D, introduit en commission des affaires économiques du Sénat, vise à faciliter la sortie du statut de déchets de matières fertilisantes et supports de culture (MFSC), les digestats fabriqués à partir de déchets, hors boues d'épuration. Il conduit à transformer les méthaniseurs en machines à laver des biodéchets.
Cette sortie du statut de déchets renvoie toute la responsabilité sur l'utilisateur du digestat, à savoir l'agriculteur. Ce n'est pas acceptable car l'agriculteur rend un service à la société en participant à la gestion des déchets.
Il importe, au contraire, de renforcer l'acceptabilité sociale des méthaniseurs, de préserver l'environnement et les sols au moment de l'épandage des digestats et de participer à la montée en gamme de l'agriculture française. Aussi, pour sécuriser la filière méthanisation, est-il essentiel de revenir sur cet ajout en supprimant l'article 16 D, comme le propose mon amendement CE150.
Mes arguments à l'appui de mon amendement CE159 sont les mêmes que ceux développés par M. Cinieri. Tout a été dit.
Mon avis est bien évidemment défavorable puisque l'article est conforme aux conclusions de l'atelier n° 3 des États généraux de l'alimentation, repris dans la feuille de route de l'économie circulaire.
Avis défavorable.
L'amendement CE355 est retiré.
La commission rejette les amendements CE150 et CE159.
Puis elle en vient à l'amendement CE252 de Mme Monique Limon.
Comme celui que j'ai défendu précédemment, cet amendement vise à favoriser le développement de la méthanisation. Le groupe de travail auquel j'ai participé durant plusieurs semaines avait prévu la mise en place des sorties de statut de déchets. Cette nouvelle rédaction permet de couvrir l'ensemble des matières issues de boues transformées, seules ou en mélange avec d'autres matières.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'article 16 D modifié.
Article 16 E (nouveau) (article L. 4 du code rural et de la pêche maritime) Définition législative des missions du comité de rénovation des normes en agriculture
La commission examine l'amendement CE455 du Gouvernement.
Il s'agit de supprimer cet article qui visait à inscrire le comité de rénovation des normes en agriculture (CORENA) dans la loi. Comme je m'y étais engagé auprès des organisations de producteurs et du Parlement, le CORENA s'est réuni le 13 juillet dernier, sous la présidence du préfet Bisch. Le Gouvernement a relancé les travaux du CORENA en ma présence. Il est superfétatoire d'inscrire ce comité dans la loi.
Comme je ne suis pas trop schizophrène, je vais émettre un avis défavorable à cet amendement de suppression : j'avais proposé cette inscription dans la loi au moins à trois reprises…
La commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 16 E sans modification.
Article 16 F (nouveau) Rapport sur la base des travaux comité de rénovation des normes en agriculture sur la surtransposition des normes européennes en matière agricole
La commission examine l'amendement CE456 du Gouvernement.
Il s'agit de supprimer l'article qui prévoit la remise d'un rapport sur la sur-transposition des normes européennes par le CORENA. Le Gouvernement s'est saisi de la question de la sur-transposition dans tous les secteurs. Un inventaire en cours d'achèvement permettra d'identifier les mesures de sur-transposition à supprimer. Ce travail fera l'objet d'un échange lors de la prochaine réunion du CORENA.
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'article 16 F est supprimé.
Titre III Dispositions transitoires et finales
Article 16 Entrée en vigueur et dispositions transitoires
La commission examine l'amendement CE454 du Gouvernement.
L'objet de cet amendement est de rétablir l'entrée en vigueur différée des dispositions prévues aux articles 14 et 14 bis relatifs aux pratiques commerciales prohibées en matière de produits phytopharmaceutiques et de produits biocides et supprimés par le Sénat.
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'article 16 modifié.
Article 17 (articles L. 950-1 et L. 441-8 du code de commerce) Coordination à Wallis-et-Futuna
La commission adopte l'article 17 sans modification.
Article 17 bis (nouveau) (articles L. 271-5-1, L. 272-9-1, L. 273-6-1 et L. 274-8-1 [nouveaux] du code rural et de la pêche maritime) Adaptation à l'outre-mer des seuils fixés à l'article 11 en matière d'approvisionnement de la restauration collective publique
La commission adopte l'article 17 bis sans modification.
Nous avons terminé l'examen des 387 amendements en discussion, et je vous informe que nous en avons adopté 122. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je vais donner la parole à ceux qui le souhaitent.
Monsieur le président, je n'ai pas fait le décompte mais tout porte à croire que les amendements adoptés sont majoritairement des amendements consistant à rétablir la version du texte issue de l'Assemblée nationale.
Monsieur le ministre, je voulais vous dire ma déception sur le fond et sur la forme de nos débats et de ce texte.
Sur le fond, nous avons tout fait pour répondre aux attentes de nos agriculteurs qui espéraient voir lever par ce texte une série de points durs et de verrous. Malheureusement, sur la question des indicateurs de prix dans le titre Ier, vous commettez une erreur et ouvrez la voie à une véritable loi de la jungle : les indicateurs seront fixés par des distributeurs bien trop puissants. En insistant sur cette trop grande puissance, nous avons d'ailleurs fait amende honorable s'agissant de la manière dont la distribution s'est construite dans notre pays. Les distributeurs vont continuer à exercer une pression folle sur des producteurs qui n'ont pas les moyens de lutter à armes égales avec eux. Quant à la séparation des activités de conseil et de vente des produits phytopharmaceutiques, elle révèle toute l'ambiguïté de la posture du Gouvernement qui affiche sa volonté d'améliorer les conditions d'exercice nos agriculteurs. Enfin, d'autres volets manquent cruellement dans ce texte, et notamment tout ce qui concerne le foncier et la transmission des exploitations. Ma déception sera surtout celle des exploitants agricoles de France et des gens qui vivent de l'agriculture et de l'agroalimentaire. Nous pourrons le vérifier dans quelques semaines, dès lors que le texte sera connu de tous.
Sur la forme, nous avons contribué positivement, à chaque étape des travaux, à enrichir le texte. Mais avec une certaine amertume, j'ai constaté qu'au fur et à mesure des débats, le Gouvernement s'est montré de plus en plus fermé face à nos propositions. Au début de la première lecture, les échanges nous laissaient espérer que nous serions en mesure de voter votre texte, même si nous ne nous attendions évidemment pas à ce que vous intégriez toutes nos propositions. Une fois arrivés quasiment en fin de parcours, nous constatons que vous avez rejeté de façon quasi systématique tout ce que nous avons cherché à défendre sans polémique et de manière argumentée.
Cette déception et cette amertume me conduisent à être très inquiet pour l'agriculture française après l'adoption de ce texte, probablement la seule loi du quinquennat pour ce secteur majeur de l'économie française. Ce texte, élaboré après la tenue des États généraux de l'alimentation, avait pourtant suscité d'énormes espoirs.
Je ne pourrai pas prendre part au vote puisque je ne suis pas membre de la commission des affaires économiques. De surcroît, comme nombre de collègues, je suis contraint depuis trois jours à faire du sport dans les couloirs de l'Assemblée pour être ici, en séance où l'on discute de la réforme constitutionnelle, en commission des lois où l'on examine le texte sur l'asile et l'immigration, en commission spéciale ou l'on débat du plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises (PACTE). Cette situation, dont vous n'êtes évidemment pas responsable, Monsieur le ministre, témoigne d'une forme de mépris pour les parlementaires mais aussi pour les citoyens qui attendent de nous que nous soyons présents. On les entend ensuite commenter les vues de l'hémicycle : Où sont les autres ? Ils sont à la buvette ? Eh bien non, les autres ne sont pas à la buvette, ils sont en train d'essayer d'aller au bout des travaux qu'ils ont entrepris à vos côtés.
À l'intention des personnes qui nous regarderaient, je signale que l'Assemblée nationale a toujours fonctionné de la même manière : plusieurs réunions peuvent se tenir en même temps. Effectivement, nos concitoyens se demandent légitimement ce que font leurs députés. Nous ne sommes pas toujours dans l'hémicycle, nous avons d'autres réunions, des rendez-vous et des interventions à l'extérieur : vous avez bien fait, Monsieur Viala, de le rappeler. En tout cas, merci à ceux qui ont été présents tout au long de nos travaux.
Monsieur le président, je voulais vous féliciter, mais également le rapporteur et le ministre, pour la bonne tenue de nos travaux. Sur la forme, je crois qu'il n'y a rien à dire. Nous avons pu nous exprimer sans refaire tous les débats, ce qui aurait été vain.
Pour ce qui est du calendrier, je ne peux qu'abonder dans le sens de M. Viala : je trouve assez insupportable d'avoir quatre textes en discussion ce matin. Ce sont des sujets de fond qui nous passionnent. Ne dites pas que l'Assemblée nationale a toujours fonctionné comme cela : la précipitation est devenue telle que nous ne pouvons pas revenir vers nos concitoyens et les responsables territoriaux, en amont de l'examen des textes. Physiquement, nous n'avons plus le temps de faire ce travail de concertation.
En ce qui concerne l'examen du présent texte, nous avons de grandes déceptions mais aussi la satisfaction d'avoir pu rétablir des dispositions de l'Assemblée nationale. La parole loyale a été donnée ; nous n'avons pas régressé et nous pouvons même relever quelques petits points d'amélioration et peut-être quelques rendez-vous pour la séance. J'espère que sur l'aide publique au développement, sur la certification environnementale des exploitations agricoles (HVE) de niveau 2, on va enfin prendre conscience du problème et progresser. Pour l'instant, on est sur l'épaisseur du trait, sur des marges.
Il nous reste des insatisfactions majeures. Premièrement, nous déplorons une régression concernant la médiation publique via des indicateurs publics. C'est vraiment un point de rupture important entre votre position et la nôtre. Nous maintenons que l'on peut avoir des indicateurs publics, fournis et couverts par la puissance publique pour éclairer et animer l'établissement d'un commerce juste entre les producteurs, les transformateurs et les distributeurs, sans tomber pour autant dans une économie administrée. Deuxièmement, le fait de traiter les coopératives en deux décrets nous pose un vrai problème. La coopération agricole, véritable passion française, passion rurale, aurait mérité que les parlementaires s'associent à leur meilleur niveau pour en débattre.
Enfin, il y a deux absences. Nous aurions dû prendre des mesures d'urgence en matière de foncier puisque nous ne sommes pas sûrs d'avoir un texte spécifique avant 2020, afin d'éviter les dérives et les démesures que nous constatons. Mais ma plus grande déception est due à l'absence de réaction de nos collègues – je le dis avec beaucoup d'amitié et de respect mais aussi de tristesse – concernant le fonds d'indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques.
Je regrette que nous en restions à une demande de rapport qui existe déjà. J'aurais aimé une prise de position politique, qu'il soit dit clairement que nous y renonçons ou que nous le faisons.
Je peux dire au rapporteur, aux animateurs du groupe et à Monique Limon qu'ils sont formidables puisque c'est ce qu'ils ont envie d'entendre… Si l'on ne peut plus exprimer un point de vue différent…
Madame Limon, je vous le dis avec beaucoup de respect : globalement, nos amendements ne passent pas. Rien ne passe.
On peut quand même dire, sans que cela soit pris pour un procès, que l'absence d'expression de votre part nous navre.
Même si ce ne sont pas les plus nombreux, rappelons que des amendements de l'opposition ont été adoptés : six amendements du groupe Les Républicains et dix amendements du groupe Nouvelle Gauche. Au-delà des amendements adoptés ou non, je pense que chacun a pu exprimer sa sensibilité.
Monsieur le président, je voudrais tout d'abord m'associer à mes collègues pour souligner la qualité de l'animation des débats. Je voudrais aussi remercier le ministre et le rapporteur pour le travail qui a été fait.
Je trouve que cette conclusion n'est pas à l'image de nos travaux. Nous avons réussi, de manière assez constructive et sans caricature, à rétablir l'équilibre des mesures que nous avions adoptées en première lecture, afin de permettre aux agriculteurs d'avoir les outils pour être mieux rémunérés, tout en gérant la transition agricole nécessaire.
Après cette nouvelle lecture effectuée en vingt-quatre heures, il me semble que le texte retrouve le sens de ce que nous voulions faire, en nous inspirant de la conclusion des États généraux de l'alimentation. Je trouve dommage de conclure cette séance en en restant aux seuls points d'achoppement. Rendez-vous est pris dans l'hémicycle à la rentrée ; nous ne sommes pas toujours d'accord, mais nous avons échangé de manière constructive et apaisée et je voulais en remercier tous les participants.
Je tiens également à remercier notre président pour la bonne tenue de nos débats, ainsi que le rapporteur et le ministre pour la qualité de leurs réponses.
Plusieurs collègues regrettent l'intensité de l'activité de l'Assemblée qui examine plusieurs textes simultanément. Philosophiquement, je ne crois pas au député omniscient capable d'intervenir sur tous les sujets : il faut savoir accepter de nous répartir les tâches. J'aimerais moi aussi pouvoir prendre la parole sur les sujets intéressants qui ont été évoqués, mais la diversité des problèmes auxquels le Gouvernement et la France doivent faire face nécessite une organisation qui permette de faire progresser en même temps plusieurs sujets. L'activité de député est exigeante, mais sortons-nous de l'esprit l'idée que nous pourrions intervenir sur tout !
Je reviens sur le sujet évoqué par M. Viala : la question des indicateurs publics a effectivement été posée. Pour ma part, je crois que le Gouvernement doit travailler au renforcement des filières. Lorsque nous aurons des produits agricoles français incontournables – comme le sont d'ores et déjà nos vins ou aux semences –, la construction des prix fonctionnera : c'est l'organisation des filières qu'il faut privilégier et non la question du caractère public des indicateurs.
Les coopératives constituent un enjeu fondamental pour l'agriculture de demain – le Gouvernement a pris des engagements en la matière.
Enfin, il ne faut pas oublier des sujets qui restent à traiter, comme celui de l'installation ou du foncier. Ils sont majeurs pour votre ministère, Monsieur Travert.
Je conclus en me félicitant de la qualité et du caractère apaisé de nos débats tels qu'ils ont été gérés par notre président de séance.
J'éprouve le même sentiment en me réjouissant également de la qualité de l'écoute du rapporteur et du ministre – qui a déjà pris des mesures très concrètes s'agissant de certaines dispositions.
En tant que groupe d'opposition, nous sommes dans notre rôle d'exposer toutes les options envisageables ; il revient ensuite à la majorité de choisir celle qui lui convient et d'en assumer les conséquences. Je nous donne rendez-vous à la rentrée, en septembre. Nos débats auront alors sans doute encore une tonalité un peu différente, car certains de nos collègues qui ne sont pas présents aujourd'hui défendront leurs amendements.
Grâce à la contribution de tous, ce texte commence à aller dans la bonne direction. Nous ne pouvons que nous en réjouir lorsque l'on est attaché au Parlement, comme je le suis.
Il est particulièrement important que nous ayons pu débattre de l'agriculture, dans le respect mutuel. Ce secteur fait aujourd'hui face à des situations souvent très compliquées qui ne laissent pas de place à la politique politicienne. Nous sommes vraiment là pour trouver les solutions les plus efficaces pour tout le monde.
Le travail n'est pas fini car ce projet de loi ne traduit qu'une partie des conclusions des États généraux de l'alimentation. D'autres conclusions, de nature non législative, ont déjà été mises en oeuvre par le ministre ou le seront prochainement.
Il reste la mission essentielle consistant à accompagner la profession et les interprofessions, chacun notre place. Nous avons tous un rôle à jouer en la matière, en particulier pour que les interprofessions puissent fournir des indicateurs incontestables et issus d'accords interprofessionnels unanimes. C'est seulement à cette condition qu'ils pourront avoir un réel effet de levier sur les prix payés aux producteurs.
À mon tour, je remercie le vice-président de la commission pour la tenue des débats, le rapporteur pour le travail accompli, et chacune et chacun d'entre vous pour le ton adopté durant ces heures d'échanges. Je salue l'esprit constructif dont vous avez tous fait preuve en préférant le pragmatisme aux postures. C'est bien de cela dont notre agriculture a besoin.
Il demeure évidemment entre nous des points de divergence, qui portent parfois plus sur le chemin à emprunter que sur le fond ou sur les solutions à retenir.
La question des indicateurs est l'un de ces points majeurs. Pour ma part, je crois à la responsabilisation des filières. Sur le terrain, parmi un certain nombre d'organisations de producteurs, je constate que des gens nous rejoignent dans notre volonté d'avoir des interprofessions capables de proposer des indicateurs – et qu'elles soient maîtresses de leurs choix.
Le Gouvernement et l'État sont là pour dresser un cadre. C'est ce que nous faisons avec ce projet de loi qui constitue une brique que nous ajoutons au mur de notre politique de l'alimentation pour la période 2018-2022.
Il reste évidemment beaucoup de sujets sur lesquels nous travaillons : le plan de sortie des produits phytosanitaires, la question du foncier avec la mission d'information en cours, la question de la fiscalité avec le groupe de travail réuni sous l'égide du ministère de l'agriculture et du ministre de l'économie et des finances. Ce groupe de travail présentera ses conclusions dans les jours à venir, ce qui se traduira par le dépôt d'amendements lors du prochain projet de loi de finances.
Tous ces éléments construisent par touches la politique agricole de notre pays en faveur d'une agriculture en transition, mais sur laquelle nous faisons le pari de l'avenir, un pari de confiance et d'échange avec l'ensemble des acteurs d'un monde important pour nous et que nous soutenons.
J'ajoute quelques éléments techniques relatifs aux amendements adoptés lors de nos débats : sur 122 amendements adoptés, 31 ont été déposés par des membres du groupe La République en Marche, 29 par le rapporteur, 6 par le groupe Les Républicains, 4 par le groupe du Mouvement Démocrate et apparentés, 1 par le groupe UDI, Agir et Indépendants, 10 par le groupe Nouvelle Gauche, 2 par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine, aucun par le groupe La France insoumise, et 39 par le Gouvernement.
Merci pour votre confiance !
À mon tour de me réjouir de la qualité des débats et des objectifs qui ont prévalu à l'élaboration de cette loi.
La commission a apporté des modifications bienvenues afin de garantir une rémunération plus juste des agriculteurs et une alimentation plus saine et plus durable. Je crois réellement que ce texte, qui doit encore être examiné en séance au début du mois de septembre, tend vers ces objectifs. Il me reste à le mettre aux voix.
La commission adopte le projet de loi modifié.
Membres présents ou excusés
Réunion du mercredi 18 juillet 2018 à 9 h 30
Présents. – M. Damien Adam, M. Patrice Anato, Mme Marie-Noëlle Battistel, Mme Sophie Beaudouin-Hubiere, M. Thierry Benoit, Mme Barbara Bessot Ballot, Mme Anne Blanc, M. Éric Bothorel, M. Sébastien Cazenove, M. Anthony Cellier, M. Dino Cinieri, M. Yves Daniel, M. Rémi Delatte, Mme Marguerite Deprez-Audebert, M. Fabien Di Filippo, M. Julien Dive, Mme Christelle Dubos, Mme Véronique Hammerer, M. Antoine Herth, M. Jean-Luc Lagleize, Mme Célia de Lavergne, M. Sébastien Leclerc, Mme Annaïg Le Meur, M. Serge Letchimy, Mme Monique Limon, M. Didier Martin, Mme Graziella Melchior, Mme Emmanuelle Ménard, M. Jean-Baptiste Moreau, M. Mickaël Nogal, M. Jérôme Nury, Mme Anne-Laurence Petel, M. Dominique Potier, M. Benoit Potterie, M. Jean-Bernard Sempastous, M. Éric Straumann, M. Nicolas Turquois
Excusés. – M. Jean-Claude Bouchet, M. José Evrard, Mme Valéria Faure-Muntian, M. Roland Lescure, Mme Claire O'Petit, Mme Bénédicte Taurine
Assistaient également à la réunion. – Mme Delphine Batho, M. Thibault Bazin, M. Jean-Yves Bony, M. André Chassaigne, M. Vincent Descoeur, M. Guillaume Garot, Mme Frédérique Lardet, Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, M. Gérard Menuel, M. Paul Molac, M. Matthieu Orphelin, M. Arnaud Viala, M. Jean-Pierre Vigier