La séance est ouverte.
La séance est ouverte à neuf heures trente.
La parole est à Mme Anne-Laurence Petel, pour exposer sa question, no 471, relative aux conseillers techniques sportifs.
Madame la ministre des sports, ma question porte sur la situation des conseillers techniques sportifs, CTS.
Mais, tout d'abord, je tiens à féliciter nos handballeuses, championnes d'Europe pour la première fois après avoir conquis le titre mondial il y a un an. Je sais que tous les Français sont fiers d'elles.
Mme Natalia Pouzyreff applaudit.
Madame la ministre, les CTS sont des agents de la fonction publique chargés de garantir l'accès au sport pour tous, de détecter les talents pour le sport de haut niveau, de perfectionner l'élite de nos athlètes et de former les cadres des fédérations sportives. Aussi, leur mission d'encadrement est essentielle pour la pratique sportive de tous les Français – reconnue aujourd'hui par l'ensemble des scientifiques comme étant bénéfique pour la santé et le bien-être. N'oublions pas non plus le rôle du sport dans la construction du lien social ou l'apprentissage des règles et de la discipline : bref, dans l'éducation à la citoyenneté.
La fonction des CTS dépassant le simple encadrement des athlètes de haut niveau, le tissu associatif et sportif français a besoin de les préserver des réductions d'effectifs. Alors que Paris accueillera en 2024 les Jeux olympiques et sera, l'espace d'une parenthèse, la capitale sportive mondiale, nous devons être au rendez-vous en réagissant aux inquiétudes des acteurs du sport français. C'est pourquoi, madame la ministre, je souhaiterais savoir comment le Gouvernement entend répondre aux craintes de suppression de postes, exprimées par les professionnels du secteur, et quelles solutions il compte apporter à ce problème.
Madame Petel, le modèle sportif français s'est organisé autour de la présence des cadres d'État, représentants des réalités et des métiers divers : managers d'équipe, sélectionneurs, entraîneurs et développeurs des pratiques et des projets sportifs des territoires, qui exercent aujourd'hui auprès des fédérations. La lettre plafond du Premier ministre à ma prédécesseur au ministère des sports, datée du 26 juillet 2018, annonce la trajectoire suivante : « dans le cadre du processus Action publique 2022, vous serez appelés à appliquer un schéma d'emploi de moins 1 600 ETP » – équivalents temps plein – « au cours de la période 2018-2022 afin de mettre en oeuvre l'engagement présidentiel de réduire de 50 000 le nombre d'agents publics sur le périmètre de l'État et de ses opérateurs. »
Cependant, pour être au rendez-vous des Jeux olympiques et paralympiques, le respect de la lettre plafond devra se concilier avec l'impératif de préserver et d'accentuer la qualité de l'action des fédérations. De même, le déploiement dans les territoires de l'action de l'Agence nationale du sport, qui verra le jour en mars 2019, nécessitera beaucoup d'ingénierie de projet au service des collectivités, pour laquelle je privilégierai une approche transfédérale.
J'ai eu l'occasion d'insister sur l'importance des compétences des CTS au service du sport français, tant en matière de développement des pratiques ou de formation que de haut niveau. Comme l'ensemble des agents du ministère des sports, ils jouent un rôle de catalyseurs pour les projets sportifs et accompagnent au quotidien les bénévoles – au nombre de 3 millions environ – qui font le sport en France. Ainsi, à l'issue d'un entretien avec le Premier ministre, le 10 septembre, j'ai affirmé qu'aucun des 1 600 CTS ne perdrait son emploi. Dans un courrier du 15 novembre adressé au mouvement sportif, le Président de la République a confirmé « qu'il n'[avait] jamais été question de supprimer 1 600 postes d'encadrement technique. » Il convient donc de définir une phase transitoire prévoyant une évolution du mode de gestion des CTS sans se priver de leur talent.
Ainsi, dès ma nomination, j'ai engagé une large consultation sur cette question. Dans ce cadre, j'ai reçu individuellement chacune des organisations syndicales du ministère des sports, ainsi que l'ensemble des acteurs concernés. Aujourd'hui, je termine la phase d'écoute ; j'engagerai ensuite une concertation qui me permettra de tracer des pistes d'évolution du mode de gestion des CTS, que je vous présenterai dès 2019.
La parole est à Mme Natalia Pouzyreff, pour exposer sa question, no 477, relative au centre GSMC.
Ma question s'adresse à Mme la ministre des armées et porte sur le développement attendu du centre de surveillance de la sécurité de Galileo, GSMC – Galileo Security Monitoring Centre –, situé à Saint-Germain-en-Laye.
Galileo, le système européen de radionavigation et de géolocalisation par satellite, offre à ses utilisateurs – 200 millions à la fin de 2018 – une précision sans comparaison avec ses concurrents américain, russe ou chinois. Le GSMC, opérationnel vingt-quatre heures sur vingt-quatre depuis deux ans, a pour mission de garantir la protection du système, d'assurer la gestion de crise et de mener les opérations de contrôle d'accès au service public régulé, PRS – Public Regulated Service.
Galileo centralise les canaux de transmission et les ordres hautement encryptés pour les applications gouvernementales et sensibles. Or le marché militaire du PRS pourrait être décuplé après la signature d'un accord entre l'Union européenne et les États-Unis. Les négociations sont en cours et devraient en toute logique se conclure sur un principe de réciprocité avec le GPS. Une telle perspective impose de dimensionner en cohérence les infrastructures du site.
En outre, il serait indéniablement intéressant pour la France d'héberger dans ce centre toute l'expertise et tous les moyens de test européens permettant la validation des modes d'usage des applications cryptographiques produites par les différents États membres.
Aussi, je souhaiterais savoir si les plans d'extension à l'étude sont adéquats par rapport aux perspectives nouvelles.
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des armées.
Madame Pouzyreff, vous nous interrogez sur un sujet à la fois technique et bâtimentaire. Pour ce qui est de la validation des modules cryptographiques fabriqués par nos partenaires européens, un mécanisme européen prescrit aujourd'hui que les fonctions de sécurité d'un module produit par un État membre doivent être évaluées par un autre État membre. La qualification et l'évaluation fonctionnelle des modules de sécurité et des équipements du segment utilisateur nécessiteront de disposer de moyens de test dont le développement incombe au programme Galileo et qui seront acquis par la France lorsqu'ils seront disponibles, afin de tester ses propres équipements. À l'avenir, il faudra sans doute compléter ce mécanisme pour qu'une évaluation fonctionnelle se fasse au niveau européen.
S'agissant des infrastructures, vous l'avez indiqué, on prévoit de construire un nouveau bâtiment sur le Camp des Loges à Saint-Germain-en-Laye. La procédure est en cours et des offres doivent être reçues au début de 2019. Ce nouveau bâtiment, qui sera livré au printemps 2021, est rendu nécessaire par l'évolution des exigences techniques du programme Galileo – celles du PRS et celles de la mission de surveillance de la sécurité. Ce programme d'infrastructure répond au besoin d'accueillir de nouveaux équipements et d'héberger un nombre croissant d'opérateurs – et non d'anticiper une croissance du nombre d'utilisateurs. En effet, la taille du GSMC ne dépend pas du nombre d'utilisateurs, mais de l'évolution des missions de Galileo. Les négociations en cours avec les États-Unis pour définir leurs modalités d'accès au PRS n'ont donc pas d'incidence particulière sur l'infrastructure.
La parole est à Mme Sereine Mauborgne, pour exposer sa question, no 478, relative au plan Famille pour les militaires.
Le 31 octobre 2017, la ministre des armées présentait le plan d'accompagnement des familles et d'amélioration des conditions de vie des militaires, dit plan Famille, destiné à mieux concilier engagement exigeant et vie familiale épanouie. Doté de 300 millions de crédits nouveaux sur cinq ans – ce qui porte à 530 millions le financement global sur la période 2018-2022 – , ce plan financera de nouvelles mesures qui répondent de manière concrète et visible aux contraintes inhérentes à la vie militaire.
Les quarante-six dispositions nouvelles du plan s'articulent autour de trois priorités : une meilleure prise en compte des absences opérationnelles, un meilleur accompagnement de la mobilité et l'ancrage de la garnison au coeur de la vie familiale et sociale. Concrètement, il s'agit par exemple d'élargir et de simplifier l'offre de prestations sociales, d'augmenter le nombre de places en crèche, de déployer dans toutes les enceintes militaires – en garnison et en opérations – un réseau internet wifi gratuit, d'augmenter les délais de préavis des ordres de mutation ou encore d'amplifier le soutien moral et psychologique aux familles avant, pendant et après les missions.
Mme la ministre s'est engagée à déployer 70 % des actions dès 2018. La mission « Défense » du projet de loi de finances pour 2019, qui constitue la première traduction financière des ambitions de la loi de programmation militaire, poursuit le financement du plan Famille en affectant 57 millions de crédits en faveur de mesures d'action sociale et de reconversion. Pourtant il semblerait que l'application de certaines d'entre elles rencontre quelques difficultés et suscite des interrogations au sein des unités. Des doutes ont également été émis quant au dimensionnement des mesures du plan Famille. Dans mon département du Var, par exemple, les difficultés d'accès au logement et l'importance, parmi le personnel des armées, du taux de célibataires géographiques constituent des sujets critiques vis-à-vis desquels le plan Famille concentre de fortes attentes.
Madame la secrétaire d'État, pourriez-vous m'indiquer quelles ont été les actions engagées par le ministère pour déployer les mesures du plan Famille et pour s'assurer, via la communication, que les nouveaux dispositifs sont bien portés à la connaissance du personnel dans l'ensemble des unités ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des armées.
Madame Mauborgne, vous l'avez dit : il y a un an, nous avons décidé d'agir pour les femmes et les hommes de la défense dans le cadre du plan Famille, affectant 530 millions d'euros sur la durée de la loi de programmation pour améliorer concrètement les conditions de vie de nos militaires, de nos civils et de leurs familles. Comme nous nous y étions engagés, 80 % des actions de ce plan ont eu des effets concrets dès 2018, notamment dans votre département du Var. Dans le domaine du logement, un effort particulier a été fait à Toulon, avec la commande de 223 logements, auxquels il convient d'ajouter quarante-six logements commandés par l'établissement public des fonds de prévoyance. Quatre hôtels sont par ailleurs conventionnés dans la base de défense de Draguignan et le wifi gratuit en garnison est totalement disponible depuis mars 2018.
Des mesures concrètes ont également été prises en faveur de la petite enfance afin d'élargir considérablement l'offre de garde, qui représente une vraie préoccupation pour nos militaires. De nouveaux berceaux ont été réservés à Toulon ainsi qu'à La Seyne-sur-Mer, et une centaine de conventions avec des assistantes maternelles ont été signées. La communication étant essentielle en la matière, ces mesures s'accompagnent d'une information du militaire et de sa famille, au niveau national – sur Intradef, via des articles dans les publications spécialisées et sur les réseaux sociaux – comme local. Parmi les exemples de communication directe, je peux vous citer notamment la newsletter de la base de défense de Toulon, le recrutement de quatre conjoints réservistes et l'organisation des « jeudis de Sainte-Anne » et de séances d'information orale pour les familles.
Ainsi, madame la députée, je peux vous assurer que, dans toute la France et particulièrement dans votre département, plus aucun membre du personnel du ministère ne devrait ignorer ce qu'est le plan Famille. Cependant nous devons poursuivre notre action, en toute humilité : la communication étant affaire de répétition, nous continuerons nos efforts, auxquels je vous remercie de participer.
Vous pouvez en effet compter, madame la secrétaire d'État, sur les députés de La République en marche, et en particulier sur les commissaires à la défense, pour se faire les relais de ce plan Famille.
J'ajoute encore une question. Il paraît nécessaire d'adapter certaines pratiques aux particularités locales : je pense notamment à la brigade franco-allemande du Tigre où, lorsqu'une mutation est prévue, les militaires ont droit à des cours d'allemand, mais pas leurs familles, qui ne peuvent y accéder pour des raisons d'assurance et d'adaptation des locaux. Plus la doctrine ministérielle en la matière sera forte, plus les adaptations locales seront efficaces.
La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour exposer sa question, no 491, relative aux conséquences de la sécheresse pour les éleveurs.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, et concerne les suites données aux états généraux de l'agriculture et de l'alimentation. Ils auront malheureusement donné le sentiment d'une grande illusion, et finalement d'une terrible déception.
Rappelons-nous l'engagement du Président de la République qui, le 12 octobre 2017, en clôture des états généraux, en fixait lui-même l'ambition en déclarant : « Le premier objectif est de permettre aux agriculteurs de vivre du juste prix payé. »
Nous sommes très nombreux à partager l'ambition de parvenir à un prix digne : celui qui assure la dignité de chaque travailleur, à chaque étape de la chaîne de production, le renouvellement des générations et l'épanouissement d'une profession qui a toujours su faire preuve de dignité, malgré les nombreuses difficultés qu'elle a rencontrées. Ce prix digne est celui qui reconnaît le travail et permet d'en partager justement la valeur.
L'engagement du Président avait légitimement suscité une grande espérance, mais aussi quelques doutes. Un an plus tard, après le vote de la loi EGALIM, nous constatons que l'engagement est resté lettre morte. Cette ambition supposait en effet de fixer des limites et des règles. Or aucun dispositif sérieux de régulation économique n'a été accepté par le Gouvernement. Aucune possibilité d'intervention réelle de la puissance publique n'a été tolérée, notamment en cas de désaccord dans les négociations entre producteurs et industriels.
Pour remédier au déséquilibre des forces dans ces négociations interprofessionnelles, il ne reste donc qu'une vague promesse de « responsabiliser les différents acteurs », et l'institution d'un médiateur, malheureusement dépourvu de tout pouvoir de contrainte.
La triste réalité, c'est que le Gouvernement a choisi de laisser les agriculteurs à leurs propres moyens face aux industriels.
Vous avez présenté la semaine dernière, en conseil des ministres, l'ordonnance sur le relèvement du seuil de revente à perte. Si vous semblez considérer qu'il s'agit d'une mesure phare des états généraux, nous sommes en réalité très loin du compte pour le revenu des agriculteurs.
Augmenter les marges des distributeurs et encadrer très timidement les promotions ne mettra pas fin à la guerre des prix. Cela ne permettra en rien de former les prix agricoles à partir de la réalité des coûts de production, et ne contribuera donc pas à relever le revenu des agriculteurs.
Afin de renouer avec l'engagement présidentiel, que nous partageons, vous pouvez encore agir utilement, notamment en interdisant l'achat des produits agricoles à un prix inférieur à leurs coûts de production. Serez-vous sensible à l'urgence d'agir concrètement en la matière ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des armées.
Je vous réponds, madame la députée, à la place du ministre de l'agriculture, qui ne peut être présent.
Je tiens à rappeler, en premier lieu, que la loi EGALIM a été votée au début d'octobre 2018, il y a donc moins d'un an, et que les négociations commerciales annuelles entre distributeurs et industriels ont commencé le 1er décembre et se termineront le 28 février. Ces premières négociations sous le régime de la loi EGALIM sont donc en cours.
Nous souhaitons évidemment qu'elles soient l'occasion historique d'établir un équilibre dans les relations entre l'amont et l'aval de la chaîne alimentaire, grâce à une meilleure répartition de la valeur ajoutée.
Cette meilleure répartition est, vous le disiez, particulièrement attendue par le monde agricole. Elle a fait l'objet, lors de la clôture des états généraux de l'alimentation, de l'accord de la plupart des parties prenantes, en présence du Premier ministre. Cet accord doit être respecté.
Elle vise, à travers une expérimentation de deux ans, à relever le seuil de revente à perte à 10 %, et à encadrer les promotions. Il s'agit de redonner leur juste valeur aux produits agricoles, et surtout de rémunérer décemment les agriculteurs. Ils constituent la seule profession dont on exige qu'elle vende au-dessous de son prix de revient, ce qui est bien sûr intolérable.
Nous veillerons à ce que les distributeurs et les industriels respectent tous les nouvelles dispositions. Les contrôles de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes et le dispositif technique de suivi seront fondamentaux.
Nous cherchons à modifier le comportement des acteurs, ce qui n'est pas rien. La détermination du Gouvernement est essentielle.
Le ministre a rencontré la semaine dernière les principales interprofessions et rappelé les attentes du Gouvernement, notamment le principe du « donnant donnant » posé par le Président de la République dans son discours d'octobre 2017 à Rungis.
Il est également primordial que les producteurs accélèrent la transformation de leur organisation : seul un regroupement de l'offre peut leur permettre de peser, à l'avenir, dans les négociations commerciales.
Le ministre souhaite tenir un langage de vérité à chaque maillon de la chaîne. EGALIM est un pari : le succès du titre I, c'est-à-dire la redistribution effective de la plus-value aux producteurs, est incertain, et repose pour beaucoup sur les stratégies de la grande distribution et des grands industriels.
Le Gouvernement a fait ce pari devant le désarroi d'une grande partie des agriculteurs, qui ne parviennent pas à vivre de leur métier. Le nouveau contrat social que le Président de la République appelle de ses voeux doit aussi être un contrat entre urbains et ruraux, entre consommateurs et producteurs.
Nous ferons en sorte que le pari d'EGALIM soit un pari gagnant pour toutes les parties. Ce sera une double bonne nouvelle : pour le portefeuille des agriculteurs et pour la santé et la qualité de vie de nos concitoyens.
Que Mme la secrétaire d'État soit remerciée d'avoir remplacé le ministre de l'agriculture.
J'ai bien noté que les négociations étaient en cours, et que l'expérimentation prendrait deux ans ; mais j'ai également noté que cet accord n'était pas contraignant. Mon inquiétude – qui n'est que l'écho de celles de la profession – tient à ce qu'aucun moyen contraignant n'existe actuellement pour sortir d'une situation de désaccord. Je suis d'autant plus inquiète que les effectifs du contrôle et de la répression des fraudes ont eux aussi été réduits. Vous comprenez donc que l'équation semble difficile à résoudre. Mais nous nous retrouverons probablement avant la fin de l'expérimentation pour en parler de nouveau.
La parole est à Mme Patricia Mirallès, pour exposer sa question, no 475, relative à la pêche à l'anguille.
Le règlement européen du 18 septembre 2007, dit règlement « anguille », institue des mesures de reconstitution du stock d'anguilles européennes, afin de favoriser le retour des géniteurs vers leur lieu de reproduction.
Le plan français de gestion de l'anguille, approuvé par la Commission européenne le 15 février 2010, fixe ainsi comme objectif une réduction de 60 % de la mortalité par pêche de l'anguille de moins de douze centimètres à partir de 2015.
Le 23 octobre dernier, la Commission générale des pêches pour la Méditerranée a fixé la période de pêche de l'anguille jaune, et décidé de sa fermeture, pour trois mois consécutifs, de décembre à février, période entérinée par le bureau du comité régional des pêches marines et des élevages marins – CRPMEM – Occitanie.
Si une interdiction supplémentaire de la pêche à l'anguille sur nos lagunes du Sud de la France devait être décidée, alors que les objectifs du plan de gestion sont d'ores et déjà atteints, cela engendrerait inéluctablement la disparition de nos artisans pêcheurs, et affecterait un secteur économique déjà en grande difficulté, d'autant que les pays du Sud de la Méditerranée n'appliquent aucun plan de gestion similaire.
Ma question est donc simple : qu'entendez-vous faire, et quelles garanties pouvez-vous donner aux pêcheurs d'anguilles de Méditerranée pour les années à venir ? Quels mécanismes pensez-vous promouvoir afin que les efforts consentis par nos pêcheurs puissent être équitablement partagés avec ceux situés de l'autre côté de la Méditerranée ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des armées.
Votre question, madame la députée, porte sur la gestion de la pêche à l'anguille en Méditerranée, qui est effectivement un sujet préoccupant du fait de la situation du stock d'anguilles. Les causes et facteurs de mortalité de l'anguille sont toutefois multiples, à cause de son cycle de vie particulier.
Pour ce qui concerne la mortalité par pêche, la Commission générale des pêches pour la Méditerranée a adopté, en octobre 2018, une recommandation qui prévoit notamment l'instauration, pour chaque État membre riverain de la Méditerranée, d'une période d'interdiction de la pêche de l'anguille pendant trois mois consécutifs.
En France, la pêche maritime de l'anguille argentée est déjà interdite en Méditerranée pendant cinq mois consécutifs. La pêche de l'anguille jaune est, elle, interdite pendant trois mois non consécutifs.
Afin de mettre en oeuvre la recommandation évoquée, des consultations ont été engagées auprès des professionnels. Elles ont permis d'identifier de manière concertée les périodes à retenir pour chacune des régions concernées. Un projet d'arrêté modifiant, dans ce sens, les dates de pêche de l'anguille jaune en Méditerranée est actuellement en cours de consultation et de réalisation.
Compte tenu des efforts déjà consentis en faveur de cette espèce par les pêcheurs méditerranéens, notamment depuis la mise en oeuvre du plan français de gestion de l'anguille approuvé en 2010 par la Commission européenne, l'application de cette recommandation ne nécessite aucune mesure supplémentaire à l'encadrement de la pêcherie d'anguille déjà existant en Méditerranée. Bref, je crois que chacun doit appliquer les règles correctement.
J'ai pu rencontrer beaucoup d'artisans pêcheurs. Leur intérêt commun est de respecter les règles de la pêche à l'anguille, mais ils me disent que, si, en France, la profession y est très attentive, il faudrait que les autres pays le soient tout autant.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à neuf heures cinquante-cinq, est reprise à neuf heures cinquante-huit.
La parole est à Mme Anne Blanc, pour exposer sa question, no 473, relative aux pré-enseignes publicitaires.
Ma question porte sur l'enjeu des pré-enseignes publicitaires en milieu rural. Suite à leur interdiction généralisée en 2015, dans une intention tout à fait louable de réduction de la pollution visuelle et de diminution des risques de pollution des sols, il a été décidé d'instaurer un cadre dérogatoire qui s'avère aujourd'hui trop strict, en particulier pour les pré-enseignes publicitaires hors agglomération.
En effet, nombre de commerçants, artisans d'art, lieux d'activité de loisirs ou exploitants agricoles écoulant leur production en vente directe ont vu leur activité se réduire de 25 %, voire de 50 %. L'effet pervers de cette interdiction se traduit donc en perte de dynamisme et d'attractivité touristique pour la majorité des territoires ruraux, qui, grâce aux pré-enseignes, pouvaient attirer des touristes de passage n'ayant pas forcément prévu un arrêt. Alors que nos territoires fourmillent de richesses à découvrir, plus rien n'est perceptible quand on les traverse. De plus, l'application de cette interdiction n'est pas la même partout et dépend du zèle du titulaire des prérogatives de police de la publicité, des services déconcentrés de l'État dans le département ou, si un règlement local de publicité a été voté, du maire ou du président de l'intercommunalité.
Il est indispensable, pour le dynamisme économique en milieu rural, d'étendre ces dérogations aux activités de fabrication ou de transformation respectant les méthodes traditionnelles et les savoir-faire locaux, aux activités culturelles liées au tourisme industriel et gastronomique, aux activités de loisirs en pleine nature, ainsi qu'aux sites culturels, hors ceux classés au patrimoine.
Aussi, madame la secrétaire d'État, quelles options le Gouvernement envisage-t-il pour élargir harmonieusement le régime dérogatoire des pré-enseignes publicitaires en milieu rural ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Vous avez interrogé M. François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Ne pouvant être présent, il m'a chargée de vous répondre.
Vous soulevez la question du régime dérogatoire à l'interdiction des pré-enseignes, en milieu rural particulièrement, signalant certaines activités utiles aux personnes en déplacement.
Tout d'abord, il convient de rappeler que le Conseil constitutionnel a invalidé l'article 161 de la loi ELAN portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, sur la réintroduction de ces pré-enseignes hors agglomération pour les restaurants, au motif qu'il s'agissait d'un cavalier législatif.
Nous avons entendu, dans les débats parlementaires, le besoin des professionnels de renforcer la visibilité de la signalisation des petits commerces situés en milieu rural. Ces acteurs économiques, essentiels au milieu rural, sont au service de la population. Ils doivent pouvoir se signaler, notamment aux touristes de passage, pour disposer d'un modèle économique performant.
L'attractivité des territoires supporte cependant mal la profusion de pré-enseignes aux entrées des villes. Aussi, leur suppression a-t-elle été décidée, par une disposition de la loi Grenelle du 3 août 2009. En contrepartie, le Gouvernement avait, à l'époque, proposé que la signalisation routière, dénommée signalisation d'information locale, puisse satisfaire le besoin des commerçants et des artisans, mais cette orientation n'a guère été suivie d'effet.
Il nous faut donc trouver une solution d'équilibre entre ces deux objectifs que vous défendez à juste titre. Avant de revenir vers vous sur ce sujet, le ministère de la transition écologique et solidaire va prendre contact avec le ministère de l'intérieur, afin que nos services étudient ensemble et, surtout, avec les représentants des professionnels les solutions susceptibles d'améliorer cette signalisation pour en augmenter la visibilité et tenir compte des besoins exprimés par les professionnels, tout en garantissant le respect des paysages, eux aussi important pour l'attractivité de nos territoires.
Je vous remercie pour votre réponse, madame la secrétaire d'État. Dans la période que nous traversons, il est beaucoup question de justice et d'équité de traitement des territoires ; il est donc particulièrement important de prendre en compte la demande que je viens de formuler, afin de redonner confiance aux espaces moins et peu denses dans leur capacité de développement économique et d'attractivité.
Je me tiens à votre disposition pour travailler avec votre ministère et celui de l'intérieur sur ce sujet.
La parole est à Mme Danièle Hérin, pour exposer sa question, no 479, relative à la gestion des cours d'eau et des abords.
Madame la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, je souhaite attirer votre attention sur l'adaptation de la gestion des cours d'eau et des abords.
Le 15 octobre dernier, l'Aude a été touchée par des inondations dévastatrices et d'une ampleur exceptionnelle. Alors que, le dimanche, certaines rivières pouvaient être traversées à pied, dans la nuit, l'eau a débordé par endroits jusqu'à près de 10 mètres pour se frayer un passage, arrachant des arbres, formant des embâcles et affaissant des abords, notamment le long du canal du Midi ou de l'Aude.
À l'heure de reconstruire, les enjeux de développement durable se posent dans un contexte de changement climatique. L'adaptation de la gestion des cours d'eau et des abords devient incontournable pour préserver des vies humaines, en même temps que la biodiversité. La cartographie des cours d'eau à risque et des zones inondables devra vraisemblablement être redéfinie avec les collectivités territoriales et les représentants des agriculteurs, et il conviendra notamment de développer des surfaces végétales pouvant accueillir le lit d'une rivière en crue.
L'entretien des cours d'eau ne semble plus adapté aux spécificités de l'arc méditerranéen. Les collectivités territoriales et les représentants des agriculteurs souhaiteraient la définition d'une charte environnementale propre à ce territoire, offrant la possibilité de déployer des stratégies différenciées, par exemple pour l'abattage des arbres et le curage des rivières, afin de prévenir les retenues d'eau et les destructions des abords en cas d'inondations. Des conventions infradépartementales pourraient être déclinées sur la base d'échanges de pratiques et d'expérimentations locales pour encadrer le nettoyage des cours d'eau et des abords, ainsi que leur gestion au long cours.
Dans le contexte de changement climatique, comment envisagez-vous l'adaptation de la gestion des cours d'eau et des abords dans les territoires ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Les inondations de l'Aude, d'une ampleur exceptionnelle, rappellent la vulnérabilité de votre territoire. Je m'y suis d'ailleurs rendue à deux reprises, le 22 octobre puis le 15 novembre : j'ai pu, à vos côtés, constater les dégâts et je sais combien il est urgent d'agir pour ce département. De nombreux outils existent pour accompagner les territoires dans le déploiement d'une démarche de prévention, qui ne peut être qu'une démarche de long terme, en lien direct avec l'aménagement du territoire.
La directive européenne sur les inondations de 2007 a permis une évaluation nationale du risque d'inondation et a conduit à l'élaboration de plans de gestion pour chaque grand bassin versant et à l'identification cartographique des territoires à risques. Localement, la mise en oeuvre de la prévention des inondations peut s'appuyer sur des programmes d'action spécifiques, les PAPI, portés par des collectivités territoriales et accompagnés par l'État, notamment à travers le fonds Barnier.
En matière de gouvernance, la compétence de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations est, depuis le 1er janvier 2018, dévolue aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre. Le bloc communal peut ainsi concilier urbanisme et prévention des inondations par une meilleure intégration du risque d'inondation dans l'aménagement du territoire, notamment dans les documents d'urbanisme, et par la gestion des ouvrages de protection. Il peut aussi concilier urbanisme et gestion des milieux aquatiques, en créant des zones d'expansion de crues naturelles, en améliorant l'infiltration des eaux et en ralentissant les vitesses d'écoulement des eaux vers les zones à enjeux.
Le curage des cours d'eau n'est pas la solution face à des événements pluvieux qui tendent à devenir de plus en plus extrêmes. En effet, il risque d'amplifier le phénomène en accélérant l'écoulement des eaux dans le lit mineur. Il en va de même du dévoiement des cours d'eau, puisque l'on observe que ceux-ci reprennent leur lit normal lors d'événements de grande ampleur.
La gestion de la végétation des rives, telle que la prévention des chutes d'arbres dans le lit ou leur enlèvement avant les périodes de crues, fait partie de l'entretien normal d'un cours d'eau pour ne pas aggraver les impacts des crues fréquentes ou moyennes. Toutefois, il faut aussi en reconnaître les limites et relativiser leur influence sur des événements de grande ampleur.
La meilleure prévention des inondations passe par l'association de mesures de gestion de l'occupation des sols et de ralentissement des crues, qui devraient s'appuyer le plus possible sur des solutions fondées sur la nature, telles que la lutte contre l'artificialisation des sols et le ruissellement, l'amélioration de l'infiltration, la restauration de zones naturelles d'expansion de crues, en particulier dans les zones agricoles, de zones humides et des fonctionnalités des cours d'eau, et la réalisation de techniques culturales agricoles n'aggravant ni les écoulements ni leur vitesse.
Toutes ces mesures, qui visent une meilleure résilience des milieux et de leurs territoires, peuvent et doivent être discutées et évaluées dans le cadre d'un programme d'action de prévention des inondations. La mission de retour d'expérience, lancée par le Gouvernement à la suite des crues de l'Aude, apportera des éléments sur l'entretien des cours d'eau et permettra d'engager des discussions locales entre syndicats de rivière et professions agricoles, en tenant compte de toutes les spécificités locales. L'État prendra toute sa part à ces discussions.
Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, d'être venue dans mon département immédiatement après l'événement, puis d'y être revenue peu de temps après.
Ne serait-il pas opportun de consacrer une étude à l'arc méditerranéen ? En effet, des travaux sont effectués, notamment dans le cadre des PAPI, mais cet arc ne concentre-t-il pas des phénomènes spécifiques méritant d'être examinés ?
La parole est à M. Guillaume Larrivé, pour exposer sa question, no 481, relative aux transports dans le territoire de l'Auxerrois.
Il y a deux gros dossiers d'infrastructures de transports pour Auxerre, capitale de l'Yonne, sur lesquels j'aimerais que le Gouvernement s'exprime ce matin par votre intermédiaire.
Le premier concerne la modernisation de la liaison ferroviaire entre Laroche-Migennes et Auxerre. C'est un très vieux dossier. La ligne n'étant toujours pas électrifiée, nous avions réussi à inscrire des crédits spécifiques dans le contrat de projet entre l'État et la région, mais votre Gouvernement et l'actuel conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté les ont été retirés par un avenant au contrat. Je le regrette, car j'aurais voulu que cette électrification puisse enfin se faire. Il existe, par ailleurs, un projet de train à hydrogène pour relier Laroche-Migennes et Auxerre, dont j'aimerais que vous précisiez le calendrier, les montants investis et la réalité.
Le second dossier, le contournement sud d'Auxerre, est également une Arlésienne de la vie du département de l'Yonne et de son chef-lieu. Il y a environ 120 millions d'euros à trouver : j'aimerais que les collectivités locales et le Gouvernement cessent le jeu de poker menteur et que l'on précise le calendrier et le plan de financement du contournement sud de la ville.
Il me semble nécessaire qu'une vraie réunion d'arbitrage, présidée par vous ou par la ministre chargée des transports, se tienne avec toutes les collectivités partenaires, pour dire la vérité sur ce qui est fait et ce qui ne l'est pas, pour préciser les montants financiers et le calendrier de réalisation de ces deux projets essentiels pour Auxerre et le département de l'Yonne.
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Vous avez interrogé Mme Borne sur la ligne ferroviaire reliant Laroche-Migennes à Auxerre et sur le contournement sud d'Auxerre. Ne pouvant être présente, elle m'a chargée de vous répondre.
Comme vous le savez, le Conseil d'orientation des infrastructures a examiné les projets d'électrification des lignes ferroviaires, notamment entre Paris et Troyes, Laroche-Migennes et Auxerre, Angoulême, Saintes et Royan, et Amiens et Rang-du-Fliers. Il a considéré que, s'il y a tout lieu de continuer à renouveler les caténaires des réseaux électrifiés existants, l'émergence de la technologie propre des trains à hydrogène, encore au stade de l'expérimentation mais qui approche de la maturité, conduit à s'interroger sur l'intérêt qu'il y aurait à poursuivre l'électrification des lignes.
Aussi, le Conseil a proposé d'étudier si la ligne reliant Laroche-Migennes à Auxerre se prêterait utilement à une expérimentation des motorisations à hydrogène et a estimé qu'un soutien de l'État à la démarche de la région Bourgogne-Franche-Comté en faveur du train à hydrogène mériterait d'être examiné. C'est dans ce contexte que le comité de pilotage du 13 juillet 2018 a validé la réorientation du projet, qui n'est pas un abandon, dans le sens d'une telle expérimentation. En parallèle du développement du matériel roulant adapté, les crédits inscrits dans le contrat de plan permettront d'étudier les conditions de déploiement de la solution hydrogène sur cette infrastructure et d'en démarrer la mise en oeuvre le moment venu. Évidemment, le projet de train à hydrogène ne sera réalisé que s'il répond aux besoins des territoires et qu'un consensus se crée sur ce sujet.
Concernant le contournement sud de l'agglomération auxerroise, je vous confirme une nouvelle fois la volonté de l'État de mener à bien sa réalisation. Comme vous l'avez mentionné, le coût du projet est estimé à 120 millions d'euros. Actuellement, 4 millions d'euros sont inscrits au contrat de plan entre l'État et la région, destinés à financer des acquisitions foncières et de mener des études complémentaires. En tout état de cause, le plan de financement du contournement sud d'Auxerre sera discuté lors de l'élaboration de la prochaine contractualisation, qui ne pourra manquer de retenir cette opération. La concrétisation de celle-ci nécessitera toutefois une mobilisation forte des collectivités aux côtés de l'État.
Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse. Toutefois, nous devons vraiment avancer – c'est le cas de le dire, s'agissant d'un sujet relatif aux transports. En matière d'électrification de lignes ferroviaires, je connais l'argumentaire que vous avez développé.
Je constate toutefois que certains projets ont avancé dans la région – par exemple entre Belfort et Delle – ou à côté – par exemple entre Troyes et Paris. Malheureusement, le projet auxerrois – pourtant retenu dans le contrat de projet État-région, grâce à François Patriat et plus généralement à la mobilisation des élus – a été abandonné.
Ce qui me rassure moyennement dans votre réponse, madame la secrétaire d'État – pardon de vous le dire si directement – , c'est que, en matière de trains à hydrogène, nous en sommes, si j'ai bien compris, à un stade hyper-expérimental. Il n'existe ni calendrier ni certitude au sujet de la réalisation du projet.
Cela me semble très préoccupant pour Auxerre. C'est pourquoi je me permets d'insister. Il est à tout le moins nécessaire d'organiser, au ministère des transports, une véritable réunion d'arbitrage et de cadrage avec des représentants des collectivités territoriales concernées, lesquelles sont potentiellement financeurs de tels projets, aux côtés du Gouvernement.
La parole est à M. Thomas Rudigoz, pour exposer sa question, no 468, relative au contournement ferroviaire de l'agglomération lyonnaise.
Ma question s'adresse à Mme la ministre chargée des transports. J'y associe nos collègues Yves Blein et Jean-Luc Fugit, dont les circonscriptions rhodaniennes sont également concernées. Nous aimerions connaître l'état d'avancement du tracé du tronçon sud du contournement ferroviaire de l'agglomération lyonnaise – CFAL – ainsi que les perspectives de son développement.
Ce projet ferroviaire, mené sous l'égide de SNCF Réseau, porte sur le trafic de marchandises ainsi que sur les trains de voyageurs. Il a vocation à relier la vallée du Rhône à la ligne Lyon-Grenoble, ce qui en fait une voie d'accès secondaire au tunnel transfrontalier de la ligne Lyon-Turin. Dans le cadre de la présentation du projet de loi d'orientation des mobilités, Mme la ministre a annoncé un investissement de 2,6 milliards d'euros sur dix ans consacré à la désaturation des grandes lignes ferroviaires en France.
Par ailleurs, elle a confirmé que la France s'engage – même si les négociations avec les autorités italiennes sont toujours en cours au sujet des modalités de réalisation du tunnel transfrontalier de la ligne Lyon-Turin – à réaliser les voies d'accès au tunnel, afin d'accueillir dans de bonnes conditions le trafic de fret international lors de sa mise en service.
Il me semble que la réalisation du tronçon sud du CFAL s'inscrit parfaitement dans la double volonté de résorber la saturation du noeud ferroviaire lyonnais et de renforcer la liaison Lyon-Turin.
Ma première question est donc la suivante : Mme la ministre privilégiera-t-elle – comme ses prédécesseurs – le fuseau ferroviaire plaine d'Heyrieux-Sibelin nord, lequel fait l'objet de vives critiques à l'échelle du territoire, ou envisagera-t-elle d'adopter un autre tracé le long de la ligne TGV ?
Par ailleurs, le précédent gouvernement a décidé de reporter le choix du tracé afin de mener des études complémentaires, ce qui a suspendu la procédure de déclaration d'utilité publique du CFAL. Compte tenu du retard pris dans la publication des études et du débat public sur le noeud ferroviaire lyonnais prévu en 2019, Mme la ministre compte-t-elle actualiser le calendrier du projet de contournement ferroviaire de Lyon, dont je rappelle que la mise en service était initialement annoncée à l'horizon 2030 ?
Madame la secrétaire d'État, je vous remercie d'avance de bien vouloir formuler des réponses précises s'agissant du tracé comme du calendrier de cet important projet ferroviaire, pour l'agglomération lyonnaise ainsi que pour la région.
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Monsieur Rudigoz, vous appelez l'attention de Mme Borne sur le projet de contournement ferroviaire de l'agglomération lyonnaise. Ne pouvant être présente ce matin, elle m'a chargé de vous répondre.
Le projet vise à constituer un itinéraire alternatif attractif pour le trafic de fret en transit, pour un montant estimé à 3,2 milliards d'euros. Le choix du fuseau destiné à accueillir le tronçon sud du contournement découle d'une concertation locale étendue, tenue en 2009 sur la base d'une analyse comparative et objective des diverses solutions de passage.
Le fuseau plaine d'Heyrieux-Sibelin nord a été identifié comme le plus adapté afin de satisfaire aux objectifs ferroviaires assignés au projet, en matière de circulation de transit et de desserte, tout en permettant la maîtrise les coûts et la limitation des conséquences sur le territoire traversé.
Sur ces bases, les études de tracé se sont poursuivies et le bilan de la concertation locale dressé en 2016 a amené à confirmer le choix de ce fuseau. Pour l'heure, aucune donnée nouvelle n'amène à le remettre en cause.
Toutefois, l'insertion du projet dans les territoires suscite des inquiétudes parmi les riverains. Le Gouvernement sera donc particulièrement vigilant afin que les études de définition de tracé permettent de limiter les conséquences sur les territoires concernés et de répondre aux préoccupations exprimées.
S'agissant du calendrier de réalisation, Mme Borne a demandé à SNCF Réseau de travailler en vue de l'engagement, au premier semestre 2019, d'un débat public sur les aménagements à envisager au coeur du noeud ferroviaire lyonnais, notamment la réalisation d'une gare souterraine à Lyon-Part-Dieu visant à améliorer la capacité et la régularité des transports du quotidien.
Un dossier de saisine a été remis à la commission nationale du débat public le 21 septembre dernier. La préparation du débat public se poursuit en vue de sa tenue au printemps 2019.
Ses conclusions, attendues au début de l'année 2020, fourniront un éclairage sur les besoins d'aménagement du noeud ferroviaire lyonnais et des principaux axes qui convergent vers lui. C'est alors que pourront être tracées des perspectives claires en matière d'aménagement des capacités du noeud ferroviaire lyonnais, ce qui permettra d'évaluer l'échéance à partir de laquelle une nouvelle infrastructure de contournement de l'agglomération trouvera sa pertinence. Une telle approche est indispensable afin de construire un programme d'ensemble cohérent, partagé avec les collectivités territoriales et financièrement soutenable.
Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse. Je me contenterai d'ajouter une précision au sujet des études : il importe que le ministère des transports procède à leur lancement le plus rapidement possible, car il n'a que trop traîné.
La parole est à M. Loïc Prud'homme, pour exposer sa question, no 465, relative aux mobilités en région bordelaise.
Tandis que les mobilités sont au coeur du débat public, j'aimerais évoquer la situation de la métropole bordelaise à ce sujet, qui symbolise l'impasse dans laquelle se trouve la politique menée par le Gouvernement en matière de transports. Les murs de camions s'accumulent sur la rocade bordelaise, les employeurs décalent les heures d'embauche afin que leurs salariés puissent enfin arrive à l'heure et l'air y est chaque année de moins en moins respirable.
Les gilets jaunes ne s'y sont pas trompés. C'est dans le département de la Gironde que la mobilisation populaire est la plus importante, à juste titre. À l'heure actuelle, pour entrer dans la métropole bordelaise ou en sortir, la seule solution, c'est le tout-voiture !
Pourtant, vous renforcez celui-ci, madame la secrétaire d'État. Vous condamnez la plupart de nos concitoyens des zones périphériques à l'immobilité sociale et spatiale. En même temps, vous maintenez l'exonération de taxe sur le kérosène. Pourtant, c'est rarement en avion que les gens vont travailler !
Comment oser réclamer à nos concitoyens qu'ils cessent d'utiliser leur voiture alors même que l'État et la métropole bordelaise investissent 270 millions d'euros en vue d'élargir la rocade routière, sans construire une route alternative ? Comment oser vanter les transports du quotidien et la transition écologique après avoir dépecé la SNCF, tandis que la région Nouvelle-Aquitaine prépare en ce moment même l'ouverture à la concurrence des TER et la fermeture de cinq lignes régionales ?
Les conséquences de cette vision libérale des transports, nous les connaissons : suppressions de postes, baisse de la qualité du service rendu aux usagers et remplacement des petites lignes quotidiennes par des bus Macron – une vision décidément très COP 21 ! Les gilets jaunes demandent l'adoption d'un plan d'urgence pour des mobilités au service d'une écologie populaire, vous leur répondez par des mesurettes anti-pauvres !
Leurs revendications de justice sociale et environnementale sont exprimées pacifiquement, mais avec la détermination du désespoir, lequel est le produit de la politique menée par le président des riches et du mépris qui vient d'en haut.
Madame la secrétaire d'État, j'aimerais savoir ce que Mme la ministre chargée des transports entend exactement par l'expression « favoriser les transports du quotidien ». Jusqu'à présent, sa politique entretenait le flou ; elle entre à présent dans le fluo, et c'est bien parti pour durer !
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Monsieur Prud'homme, Mme Borne ne peut être présente ce matin. Elle m'a chargée de vous répondre.
Elle a présenté le 26 novembre dernier le projet de loi d'orientation des mobilités, lequel est la traduction d'un engagement fort du Président de la République, qui souhaite que nous repensions en profondeur notre politique de mobilité afin de donner la priorité aux déplacements du quotidien. Afin d'y parvenir, nous avons lancé des Assises nationales de la mobilité dès le mois de septembre 2017, ce qui a permis de recueillir plus de 30 000 contributions sur tout le territoire.
Le projet de loi d'orientation des mobilités, qui en est directement issu, permettra le déploiement de nouvelles solutions de mobilité, notamment dans les zones peu denses où la voiture individuelle demeure l'unique moyen de se déplacer. Covoiturage, auto-partage, transport à la demande : de nombreux exemples démontrent que de nouvelles solutions de mobilité constituent des réponses aux impératifs des zones rurales ou périurbaines. Ces solutions sont plus respectueuses de l'environnement et surtout moins onéreuses que la voiture individuelle pour les Français qui y habitent.
Monsieur Prud'homme, vous évoquez la rocade de Bordeaux. Son élargissement est tout à fait compatible avec la politique menée par le Gouvernement en faveur des mobilités du quotidien plus propres. La voiture, que nous souhaitons rendre plus propre et plus partagée, demeurera une solution de déplacement incontournable pour de nombreux trajets. C'est pourquoi favoriser les transports du quotidien suppose également la mise à niveau de certains axes routiers.
S'agissant du transport ferroviaire, le nouveau pacte ferroviaire présenté par le Gouvernement vise à lui donner un nouveau souffle. Il s'agit d'investir massivement dans le réseau existant afin de le remettre en état, d'assainir la situation économique et de revoir l'organisation de la SNCF afin d'en améliorer le fonctionnement, d'ouvrir le secteur à la concurrence afin d'offrir aux voyageurs de nouveaux services au meilleur coût et de créer, pour les salariés, un cadre social adapté au nouveau contexte.
Par ailleurs, je rappelle que la priorité donnée à la programmation des infrastructures vise à résorber la saturation des noeuds ferroviaires. Bordeaux est l'une des villes prioritaires en la matière. L'objectif est de doubler le recours aux TER autour de Bordeaux.
Je rappelle également que la moitié des crédits prévus dans le projet de loi d'orientation des mobilités sera affectée au secteur ferroviaire, afin d'inverser, au profit des mobilités du quotidien, la logique de priorité au TGV qui prévaut depuis trente ans. Tel est le sens de ce projet de loi, que vous-même et vos collègues examinerez prochainement.
Le Gouvernement s'est engagé à demeurer aux côtés des collectivités territoriales, afin d'entretenir les lignes ferroviaires où la circulation est moindre, car elles sont indispensables au maillage de nos territoires et à leur vitalité.
Enfin, je rappelle que les régions sont seules compétentes pour définir l'offre de services TER. S'agissant de la région Nouvelle-Aquitaine, SNCF Mobilités a confirmé qu'aucune fermeture de ligne n'est envisagée.
Je retrouve dans cette réponse les éléments de langage habituels de Mme Borne, notamment en matière d'investissement dans les infrastructures. On voit bien à quelle logique obéit le nouveau pacte ferroviaire que l'on nous annonce. Ces investissements inédits, à quoi serviront-ils ? Réinvestir afin de rattraper un retard accumulé depuis des années et de rénover des lignes ferroviaires aura pour effet de livrer des rails neufs à la concurrence du privé, ce qui permettra à ces opérateurs d'agir sans investir.
Au reste, l'investissement bénéficie au tout-routier, comme à Strasbourg ou à Rouen où l'on construit de grands contournements. Vos solutions sont celles du tout-voiture, madame la secrétaire d'État. Le covoiturage et l'auto-partage que vous évoquez sont des solutions du passé. Quant à la voiture autonome et intelligente, qui permettra bientôt de faire circuler des voitures les unes derrière les autres, vous réinventez là ce qui existe depuis des décennies – cela s'appelle un train.
La parole est à M. Thomas Mesnier, pour exposer sa question, no 476, relative à la ligne Angoulême-Limoges.
« J'ai craqué, j'ai repris la voiture. » C'est ainsi qu'Isabelle, secrétaire administrative de cinquante-deux ans, qui prenait chaque jour le train à Chasseneuil-sur-Bonnieure, dans le département de la Charente, expliquait à un journaliste comment elle a été contrainte de renoncer au TER afin d'aller travailler à Angoulême.
La ligne Angoulême-Limoges, ce sont 118 kilomètres de voies, onze gares et 80 000 voyageurs à l'année. Le ballast date des années 1960, les traverses en bois de 1977 et les autres, en béton, de 1986 – mon année de naissance. Malgré les 23 000 traverses remplacées et les millions d'euros investis afin d'éviter que des tronçons entiers ne soient limités à 40 kmh, la ligne a été « suspendue » – comme on dit pudiquement – en mars dernier.
Comme les nombreux naufragés d'une gestion du réseau ferré caractérisée par des années d'inaction et de déficit d'investissement, cette concitoyenne est pourtant convaincue de l'intérêt du TER. Les lycéens, les apprentis, les professionnels et les entreprises implantées tout le long de la ligne – désireuses d'un accès au transport de fret – en sont eux aussi convaincus.
Ils attendent beaucoup de cette ligne, qui est décisive pour de nombreux enjeux : le renforcement du noeud ferroviaire d'Angoulême, soumis à des objectifs en matière de nombre de voyageurs pour le maintien de sa desserte LGV, assortis d'une « clause de revoyure » en 2027 ; le désenclavement de Limoges, favorisé par cette ligne transversale permettant un accès à la LGV desservant Angoulême et l'océan via Royan ; enfin, le développement et l'intégration de cette France périphérique, rurale, qui fait entendre sa colère comme sa volonté de développement.
L'annonce de la mise en deux fois deux voies du dernier tronçon de la RN 141, parallèle à la ligne Angoulême-Limoges, est accueillie favorablement, mais ne saurait constituer une réponse satisfaisante et cohérente avec les objectifs du projet de loi d'orientation des mobilités. Le 12 novembre dernier, à la demande de Mme Borne, le préfet de la région Nouvelle-Aquitaine a réuni les acteurs locaux, sans co-invitation avec celle-ci, ce que je regrette. Un premier chiffrage de la réouverture de la ligne, à 150 millions d'euros, a été évoqué. Trois des 10 millions d'euros de crédits du contrat de plan État-région encore disponibles pour cette ligne pourraient être fléchés afin de financer une étude établissant précisément les travaux nécessaires.
Aussi aimerais-je connaître les mesures que le Gouvernement ne manquera pas de prendre pour rouvrir cet axe, qui s'inscrit dans la logique de la politique suivie.
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Mme la ministre des transports ne pouvant être présente ce matin, elle m'a chargée de vous répondre.
Je partage votre constat relatif au manque d'entretien et au sous-investissement que les infrastructures ferroviaires existantes ont connu pendant de nombreuses années, ce qui explique l'état préoccupant de nombreuses lignes de desserte fine du territoire. La ligne Angoulême-Limoges est un exemple frappant de ce mauvais état général du réseau ferré secondaire, auquel les collectivités locales et, plus généralement, nos concitoyens sont si attachés.
Les investissements nécessaires pour remettre ces lignes à niveau s'élèvent à plusieurs centaines de millions d'euros par an durant les dix prochaines années. C'est pour cette raison que nous souhaitons adopter une nouvelle approche de la question des petites lignes : il s'agira de conduire, région par région, dans le cadre d'un partenariat entre l'État, les régions et SNCF Réseau, un travail qui permettra d'identifier les différentes solutions – techniques, d'organisation, financières, contractuelles – de manière à utiliser toutes les marges de manoeuvre disponibles pour assurer la sauvegarde de cette partie du réseau ferroviaire.
S'agissant plus précisément de la ligne Angoulême-Limoges, 19 millions d'euros sont inscrits dans le contrat de plan État-région signé par la Nouvelle-Aquitaine afin de réaliser les travaux de sauvegarde permettant d'assurer la continuité des circulations. L'État et ses partenaires ont ainsi dégagé en 2017 les crédits nécessaires à la réalisation des travaux les plus urgents entre Limoges et Saint-Victurnien, de façon à éviter l'instauration de ralentissements supplémentaires sur cette partie de la ligne, située en Haute-Vienne.
Vous le rappelez, malgré ces investissements, l'état très dégradé de la partie charentaise de la voie a nécessité l'interruption des circulations de trains entre Angoulême et Saillat-Chassenon, au mois de mars 2018. SNCF Réseau évalue les moyens nécessaires pour mener des travaux sur ce tronçon et pérenniser l'ensemble de la ligne à près de 150 millions d'euros ; une contre-expertise a été commandée par le conseil régional de Nouvelle-Aquitaine.
M. le préfet de région a, comme vous l'avez dit, réuni le 12 novembre dernier les parlementaires et les élus des collectivités territoriales concernées afin d'évoquer les différentes options et les perspectives envisageables pour la ligne. Une nouvelle réunion sera envisagée à la fin du mois de janvier 2019 afin d'établir un constat commun de la situation et de définir une stratégie d'action, en fonction des scénarios possibles. L'objectif est de garantir une liaison entre Angoulême et Limoges qui réponde aux besoins de nos concitoyens.
En tout état de cause, soyez assuré, monsieur le député, que Mme Borne et l'ensemble du Gouvernement seront particulièrement vigilants sur les suites données à ce dossier.
Je rappellerai ici le mot d'Alain : « Je ne sais ce que c'est que vouloir sans faire. » L'ambition du projet de loi d'orientation des mobilités est d'apporter à tous et partout des solutions alternatives à la voiture, afin d'en réduire l'usage individuel et donc l'empreinte environnementale des transports, et d'améliorer les déplacements du quotidien. C'est la feuille de route du Gouvernement et c'est le contrat moral passé avec les Français. Je m'attacherai à en faire respecter l'esprit et la lettre, au plus près des territoires, au plus près de la Charente.
La parole est à Mme Sophie Auconie, pour exposer sa question, no 494, relative à l'expérimentation des trains à hydrogène.
Le 22 novembre dernier, notre collègue Benoît Simian a remis à Mme la ministre chargée des transports un rapport consacré au verdissement du parc ferroviaire. Ce travail de grande qualité fait une place importante à l'hydrogène, ce dont je me réjouis. On nous parle même d'expérimentation – souvent un gros mot en français !
L'alliance avec les régions – que vous venez d'évoquer – sera essentielle à la réussite de ces expérimentations, et la bonne mise en oeuvre des contrats de plan État-région sera cruciale pour leur financement.
Le rapport Simian dresse, avec le concours des régions, une liste de lignes secondaires qui pourraient accueillir une ligne à hydrogène. Dans la région Centre-Val-de-Loire, dont je suis l'élue, il s'agit notamment de la ligne Tours-Loches. C'est une bonne nouvelle ; ces lignes dites secondaires ne le sont pas pour tout le monde ! Parallèle à un axe routier saturé, cette ligne constitue un vecteur essentiel pour la mobilité entre la métropole et la ruralité. Située à proximité de belles installations à hydrogène quasi-terminées, notamment dans la commune de Sorigny, la ligne Tours-Loches sera un exemple de la renaissance écologique du ferroviaire dans nos départements.
Dans la conjoncture économique, sociale et environnementale que nous connaissons, où la ruralité considère qu'il existe une vraie fracture entre elle-même et l'urbain, entre elle-même et le métropolitain, ces perspectives méritent toute notre attention.
C'est pourquoi, avec Pierre Louault, sénateur de mon département, je voudrais interroger Mme la ministre chargée des transports : alors que, de sa propre initiative, la région Occitanie vient d'annoncer la commande probable de trois rames à hydrogènes au constructeur Alstom, pouvez-vous nous éclairer sur les modalités formelles des candidatures à cette expérimentation du train à hydrogène ? Comment les collectivités territoriales pourront-elles être accompagnées ? Quels sont les objectifs précis du Gouvernement, et disposez-vous d'un calendrier d'ouverture de ces lignes « vertes » ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Mme la ministre des transports ne pouvant être présente ce matin, elle m'a chargée de vous répondre.
Le Gouvernement est pleinement engagé dans la transition écologique, en vue d'atteindre l'objectif fixé par le plan climat d'une neutralité carbone en 2050. Pour relever ce défi, il est nécessaire de faire évoluer tous les systèmes de transport ; le transport ferroviaire, bien qu'il ne soit responsable que de 1 % des émissions de gaz à effet de serre liées aux transports, doit contribuer à ce verdissement, grâce à l'évolution de son matériel.
Dans cette perspective, le rapport de M. Simian préconise l'utilisation de l'hydrogène. Tirant les conséquences de ce travail, le Gouvernement a demandé à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie – ADEME – de lancer un appel à projets. Appelé H2mobilité 2018, il vise à permettre le déploiement d'écosystèmes territoriaux de mobilité hydrogène, sur la base du déploiement de flottes de véhicules lourds. Cet engagement s'inscrit dans la mise en place du plan de déploiement de l'hydrogène.
Lors de la dernière réunion du Conseil national de l'industrie, le Gouvernement a rappelé l'objectif d'une décarbonation totale du transport ferroviaire à l'horizon 2040. Pour l'atteindre, il a été décidé de soutenir le projet d'Alstom de mise en circulation d'un premier train à hydrogène en France d'ici à 2022. Il s'agit de faire circuler à cette date une mini-flotte, afin de bénéficier d'un retour d'expérience.
Soyez assurée, madame la députée, que les services sont mobilisés pour veiller au lancement prochain d'une telle expérimentation, en lien avec les collectivités territoriales.
Je suis très sensible à ce message satisfaisant. Je prends acte du lancement de l'appel à projets par l'ADEME, dont je ferai part aux collectivités territoriales concernées.
Nous devons, les uns et les autres, mesurer combien il est important de saisir cette occasion dans la conjoncture économique, sociale et environnementale actuelle. Il faut éviter que les citoyens de la ruralité ne se sentent mis de côté, laissés pour compte – sentiment qu'ils ont souvent aujourd'hui ; et le Gouvernement doit montrer l'exemple d'une circulation vertueuse qui fera diminuer la saturation des axes routiers accidentogènes, et qui permettra aussi de diminuer nos émissions de gaz à effet de serre.
Je demeurerai vigilante.
La parole est à Mme Danièle Obono, pour exposer sa question, no 464, relative à la liaison « Charles-de-Gaulle Express ».
Ma question s'adresse à Mme la ministre des transports.
Depuis son lancement, le projet de liaison directe entre Paris et l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle nommé « Charles-de-Gaulle Express » rencontre, à raison, de fortes oppositions parmi lesquelles celles de nombreux citoyens et citoyennes, d'élus franciliens et franciliennes, dont la maire de Paris, et même du syndicat des transports Île-de-France mobilités. C'est en effet un projet absurde à plusieurs titres.
L'absurdité est d'abord écologique. Pour mettre en place le CDG Express, il va falloir construire de nouveaux rails entre Mitry-Mory et l'aéroport ; on rognera pour cela sur des terres agricoles. On nous dit que le CDG Express diminuera de 40 % l'utilisation de la voiture pour les trajets entre la capitale et l'aéroport, mais il assoit son financement sur une prévision du doublement du trafic aérien, qui est le plus polluant. C'est donc un non-sens qui va abîmer la biodiversité locale et contaminer d'autant plus l'air de la région parisienne.
C'est ensuite une absurdité sociale et territoriale. La liaison entre Paris et Roissy est aujourd'hui assurée par le RER B : 30 minutes de trajet pour un peu plus de 10 euros. Le CDG Express se destine exclusivement à la clientèle aéroportuaire, au coût de 24 euros pour 20 minutes de trajet. Le RER B dessert de nombreuses gares ; il est aujourd'hui bondé, tant les gens ont besoin de l'emprunter. Le CDG Express, lui, ne s'arrêtera pas dans ces gares, mais il empruntera des voies du RER B, saturant encore plus ce dernier. C'est donc un projet pour les riches, sans aucune plus-value économique pour les territoires qu'il traverse. Île-de-France Mobilités a d'ailleurs demandé l'arrêt du projet tant que toutes les garanties concernant les conséquences sur le RER B n'auront pas été données.
C'est évidemment une absurdité financière. Le coût du CDG Express a été relevé régulièrement, de 700 millions au début à plus de 2 milliards aujourd'hui. Il n'offre pourtant aucune garantie de rentabilité financière. L'État va prêter 1,7 milliard d'euros. Le financement de l'ensemble du projet repose en partie sur les recettes tirées du prix des billets. Mais qui peut assurer que les usagers et les usagères de l'aéroport préféreront prendre le CDG Express au RER B, bien moins cher ?
C'est enfin une absurdité démocratique. L'ensemble des informations concernant le montage financier n'ont pas été communiquées au public ; les règles de la concertation semblent ne pas avoir été respectées. Les avis recueillis dans les enquêtes publiques en 2016 étaient très majoritairement négatifs.
Ma question est simple, et relaie celle posée depuis des années par les citoyens réunis au sein du collectif « Non au CDG Express » : comptez-vous vous entêter dans ce grand projet inutile, ou bien mettre enfin un terme à cette absurdité que représente le projet du Charles-de-Gaulle Express ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Ne pouvant être présente, Mme la ministre des transports m'a chargée de vous répondre.
Le projet de CDG Express est essentiel pour l'attractivité économique et touristique de la région Île-de-France comme pour le développement de modes de transport plus propres, car il favorisera le report modal de la route vers le rail. L'utilité publique du projet a été confirmée par le Conseil d'État. Par ailleurs, l'enquête publique préalable à l'obtention des autorisations environnementales s'est achevée tout récemment, le 22 novembre dernier. Le ministre de la transition écologique et solidaire a désigné il y a quelques jours l'exploitant pressenti pour le CDG Express, à la suite d'un appel d'offres.
Concernant le calendrier des travaux, Mme Borne rencontrera dans les prochains jours la présidente de région pour en discuter. Le CDG Express ne se fera pas au détriment des lignes de transport du quotidien : c'est vrai tant pour le financement – aucune subvention n'est versée – que pour les travaux. Mme Borne sera très vigilante sur ce point : ces travaux ne devront pas avoir de conséquences pour les conditions de transports du quotidien, notamment sur le RER B.
Je souligne par ailleurs que le projet CDG Express s'est élaboré en coordination avec les autres projets de transport en Île-de-France. Ainsi, 180 millions d'euros sont prévus pour l'amélioration du RER B dans le cadre du dossier CDG Express. Plus généralement, le contrat de plan État-région d'Île-de-France prévoit des investissements de 7,6 milliards d'euros pour la période 2015-2020, dont 1,4 milliard d'euros pour l'État et 1,6 milliard d'euros pour la Société du Grand Paris. Concrètement, sans être exhaustif, il s'agit notamment des schémas directeurs des RER et des Transiliens, du prolongement d'EOLE, du prolongement de la ligne 11, de nouveaux tramways, de nouveaux trams-trains, de bus à haut niveau de service.
Enfin, le projet du Grand Paris Express viendra compléter le réseau existant – RER, Transilien et métro – grâce à des interconnexions, offrant ainsi aux Franciliens un moyen de transport supplémentaire, principalement en rocade. À terme, 200 kilomètres de lignes seront construits, c'est-à-dire autant que toutes les lignes du réseau actuel du métro parisien ; l'investissement sera de 35 milliards d'euros.
Les habitants de la Seine-Saint-Denis seront parmi les premiers à en bénéficier, notamment grâce à la mise en service de la ligne 16, qui ira jusqu'à Clichy-Montfermeil à l'horizon 2024.
Madame la secrétaire d'État, vous n'avez pas répondu à certains des points que j'ai soulevés. Alors que je m'interrogeais sur l'intérêt écologique du projet, vous évoquez son attractivité. Mais pour qui ?
J'entends que votre stratégie consiste à attirer les financiers de la City, et de faire de la place de Paris un nouveau grand centre économique et financier. Dans cette perspective, le Charles-de-Gaulle Express représente une vitrine, qui ne servira pas l'intérêt général puisque – vous ne l'avez pas contredit – son coût écologique, social et démocratique pèsera sur les usagers, qui ne seront pas les Franciliens et les Franciliennes.
Ce grand projet dans lequel vous vous enferrez et que l'ensemble des acteurs remettent en cause, je le répète, est inutile et n'a aucun intérêt. Sa réalisation, qui portera atteinte à la collectivité à plusieurs niveaux, connaîtra certainement de nombreuses difficultés. Je pense que nous serons conduits à en discuter à nouveau dans cette assemblée.
La parole est à Mme Agnès Firmin Le Bodo, pour exposer sa question, no 495, relative à la fusion des ports de l'axe Seine.
Ma question s'adresse à Mme la ministre chargée des transports.
Lors du comité interministériel de la mer – CIMER – , le Premier ministre a évoqué une mondialisation qui prend la forme d'une maritimisation. C'est dire à quel point la politique maritime de la France doit être dynamique et visionnaire. Pour faire face aux enjeux des nouvelles alliances maritimes, il s'agit bien d'avancer vers un nouveau modèle économique et une nouvelle stratégie nationale portuaire, tout en évoluant dans un cadre européen.
À cet égard, je serai particulièrement attentive à la participation de la France à la définition des orientations de la politique maritime européenne. La déclinaison de cette ambition ne devra pas oublier les questions de fiscalité. Il faudra peut-être, le moment venu, se demander s'il ne convient pas de créer des zones franches dans d'autres ports français.
Nous devrons également être attentifs à la desserte des marchandises vers l'hinterland et à la domanialité. Une juste et saine concurrence avec les ports du nord de l'Europe passe en effet par des conventions d'occupation, permettant de jouer à armes égales avec les ports belges ou hollandais, plus souples et mieux adaptés à la concurrence.
Le projet de loi d'orientation des mobilités, dite loi LOM, pourra inclure des dispositions en ce sens. Nous serons notamment attentifs à ce que le port du Havre dispose de moyens à la hauteur de ses ambitions européennes.
Les annonces issues de ce CIMER sont primordiales, notamment pour les ports du Havre, de Rouen et de Paris, qui coopéraient déjà au sein du groupement d'intérêt économique – GIE – HAROPA depuis 2012. Il était à présent devenu nécessaire de réfléchir à un mode de travail plus intégré. L'annonce du principe de la fusion des trois ports de l'axe Seine me réjouit donc, comme elle réjouit les acteurs portuaires havrais, qui y voient le moyen de mener à bien une grande ambition en termes de développement économique et commercial.
À l'issue de la concertation promise sans délai, l'établissement public unique, issu de cette fusion, sera le fer de lance de la politique maritime française. Le calendrier annoncé soulève cependant quelques interrogations car la fusion a été annoncée pour le 1er janvier 2021, sans que l'on comprenne les raisons d'un tel délai.
L'urgence économique et sociale nécessite des délais raccourcis. Pour une efficacité accrue, les concertations peuvent être menées dans un laps de temps plus court. Les acteurs portuaires, qui étaient dans l'attente, sont prêts à rencontrer au plus vite le préfigurateur, pour contribuer à la réussite de cette nouvelle structure. Membres du personnel, représentants des collectivités territoriales, acteurs économiques privés, tous ont la même ambition : faire avancer rapidement ce bel ensemble portuaire au service de la France.
Aussi, le Gouvernement pourrait-il nous confirmer le calendrier qui sera adopté ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Madame la députée, vous avez appelé l'attention de Mme Borne sur le calendrier de la fusion des trois ports de l'axe Seine. Ne pouvant être présente, celle-ci m'a chargée de vous répondre.
Le rapprochement des trois ports, décidé lors du comité interministériel de la mer de 2017, s'est traduit par la mission confiée au préfet François Philizot. À la suite de cette mission, le Premier ministre a annoncé, lors du CIMER de Dunkerque, en novembre dernier, la fusion des établissements portuaires à l'horizon du 1er janvier 2021.
Cet horizon de deux ans correspond au temps nécessaire pour mener à bien cette démarche de fond incluant différents travaux préalables à la constitution d'un nouvel établissement.
Il s'agira en particulier de faire aboutir les réflexions visant à fixer les modalités de fonctionnement du futur établissement, tant en interne, notamment dans son organisation, sa stratégie et ses accords d'entreprise, qu'en externe, dans ses relations avec l'État, les collectivités ou les partenaires économiques. Ces différents aspects doivent être traités par étapes successives.
Parallèlement, les deux années à venir seront pleinement utiles pour préparer et réaliser les modifications législatives et réglementaires nécessaires. Ainsi, des amendements pourront par exemple être déposés dans le cadre de la discussion du projet de loi d'orientation des mobilités, pour la création du futur établissement, afin que ce dernier soit pleinement opérationnel le 1er janvier 2021.
Madame la secrétaire d'État, vous avez confirmé que la fusion serait mise en oeuvre au 1er janvier 2021. Or le travail en amont a été réalisé pour partie, puisque François Philizot a déjà conduit sa mission durant près de un an. Dire que deux ans supplémentaires sont nécessaires suscite une certaine incompréhension, car tous les acteurs considèrent ce projet comme absolument nécessaire pour notre territoire et pour l'axe Seine.
Vous dites par ailleurs que, pour faire avancer ce projet, nous pourrons déposer des amendements au projet de loi d'orientation des mobilités, que nous espérons pouvoir discuter un jour dans cet hémicycle. Alors que la commission mixte paritaire travaillant sur le Brexit s'est réunie ce matin, afin d'autoriser le Gouvernement à légiférer par ordonnances, il y a urgence à ce que les trois ports du Havre, de Rouen et de Paris – l'Île-de-France est tout autant concernée par le Brexit – soient prêts à accéder au marché qui peut s'ouvrir pour l'économie française. Le délai de deux ans nous semble donc long.
Enfin, madame la secrétaire d'État, vous ne m'avez pas répondu s'agissant des zones franches, mais je ne doute pas de recevoir prochainement une réponse sur ce point.
La parole est à M. Joaquim Pueyo, pour exposer sa question, no 492, relative à la ligne Caen-Le Mans-Tours.
Je souhaite appeler l'attention de Mme la ministre chargée des transports sur le besoin crucial d'investissements ferroviaires dans le département de l'Orne, notamment sur la ligne Caen-Le Mans-Tours. Depuis plusieurs semaines, sur l'ensemble du territoire, de nombreux Français expriment leur inquiétude concernant non seulement le pouvoir d'achat mais également les services publics.
Dans nos territoires ruraux, de nombreux services à la population sont touchés par des restrictions de tous ordres. Concernant les transports, ces restrictions peuvent engendrer un sentiment d'abandon. Si nous voulons que nos concitoyens utilisent moins leur automobile, nous devons réaliser un effort substantiel, afin d'améliorer le fonctionnement et l'investissement des lignes de chemin de fer que l'on dit secondaires, mais qui sont très importantes pour nous.
Dans ma circonscription, la ligne Caen-Tours est prépondérante, notamment son tronçon Alençon-Le Mans, car elle permet aux habitants de prendre le TGV et de le relier aux métropoles françaises et aux aéroports. Elle doit représenter une solution de rechange crédible à l'utilisation de la voiture, mais, depuis plus de vingt ans, le manque d'investissements sur ce tronçon n'a pas permis de réduire le temps de trajet. Au contraire, celui-ci a augmenté, ce qui a parfois découragé les usagers de prendre le train.
Par ailleurs, nous pouvons constater qu'il n'y a pas suffisamment de navettes entre la ville d'Alençon et la gare TGV du Mans. C'est pourquoi je plaide depuis de nombreuses années pour que des investissements importants soient engagés sur cette ligne.
J'ai d'ailleurs longtemps demandé l'électrification du parcours Alençon-Le Mans, mais l'on m'a opposé le coût très important d'une telle mesure, dont j'ai pris acte. L'électrification de ce seul tronçon coûterait en effet près de 100 millions d'euros.
Avec les avancées technologiques actuelles, d'autres moyens peuvent être étudiés, notamment la mise en circulation de trains à hydrogène.
Relayant la question posée par de nombreux élus locaux et associations d'usagers, j'aimerais que soient précisés les investissements qui seront consacrés au tronçon Alençon-Le Mans dans les années à venir.
Je souhaite également qu'une expérimentation puisse être engagée pour mettre en place un projet de locomotives à hydrogène sur ce même parcours, afin de répondre aux besoins cruciaux de ce territoire.
M. Damien Pichereau applaudit.
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Monsieur le député, Mme Borne ne pouvant être présente, elle m'a chargée de vous répondre.
Le Gouvernement partage votre constat s'agissant du manque d'entretien et du sous-investissement que les infrastructures ferroviaires ont connus pendant de nombreuses années, lesquels expliquent l'état préoccupant de nombreuses lignes de desserte fine du territoire. Le tronçon Alençon-Le Mans illustre ce mauvais état général du réseau ferré secondaire, réseau auquel nos concitoyens sur les territoires sont attachés.
Pour cette raison, le Gouvernement a souhaité adopter une nouvelle approche pour traiter les petites lignes. Il s'agira de conduire, région par région, dans le cadre d'un partenariat entre l'État, les régions et SNCF Réseau, un travail d'identification des différentes solutions techniques, organisationnelles, financières et contractuelles, visant à mobiliser toutes les marges de manoeuvre possibles, pour assurer la sauvegarde de cette partie du réseau ferroviaire.
S'agissant de la ligne Caen-Le Mans-Tours, plus particulièrement de son tronçon Alençon-Le Mans où circulent des trains Intercités et, majoritairement, des trains de transport express régional – TER – , l'État travaille avec la région pour réaliser les travaux de régénération les plus urgents, dans le cadre d'un cofinancement reflétant la nature des trafics supportés par la ligne, qui témoignent de son intérêt à la fois national et local.
Les financements correspondants devront être inscrits au contrat d'avenir des Pays de la Loire, un nouveau pacte qui entérinera les engagements de l'État en faveur des territoires ligériens, à la suite du rapport de la mission d'appui sur les mobilités du Grand-Ouest.
M. Claude d'Harcourt, préfet de la région Pays de la Loire, est chargé de proposer une vision partagée entre l'État et les élus des territoires sur le projet à intégrer dans ce pacte, en l'articulant avec le volet mobilités du contrat de plan État-région dans les Pays de la Loire.
Au-delà de ces travaux d'urgence, qui constituent la première des priorités, il importe d'assurer la pérennité de la ligne, pour répondre aux préoccupations de nos concitoyens sur le long terme. C'est bien dans le cadre des réflexions partenariales autour de la mise en place de solutions techniques et de gouvernance novatrices et adaptées aux enjeux propres à chaque infrastructure, que des réponses seront apportées pour cette ligne.
S'agissant des équipements alimentés à l'hydrogène, comme je l'ai dit à Mme Sophie Auconie, le Gouvernement est favorable à la mobilisation de l'hydrogène pour le ferroviaire. Il accompagnera les territoires dans des expérimentations.
En tout état de cause, soyez assuré, monsieur le député, que le Gouvernement restera très vigilant sur le dossier de la ligne Caen-Alençon-Le Mans.
Madame la secrétaire d'État, je vous remercie pour les propos optimistes que vous avez tenus s'agissant de cette ligne, propos dont je prends naturellement acte.
Vous le savez, les élus des Pays de la Loire, dont mon collègue, Damien Pichereau, que je remercie pour ses applaudissements, comme ceux de Normandie sont tenaces.
Je regrette malgré tout que Mme la ministre chargée des transports n'ait pas répondu au courrier du collectif d'élus, qui, en juillet 2018, lui avait demandé un rendez-vous et une étude. Je souhaiterais qu'une réponse rapide lui soit apportée car, actuellement, les élus se sentent abandonnés, notamment parce que leurs courriers ne reçoivent pas de réponse.
Par ce geste, madame la secrétaire d'État, vous répondriez à la demande d'intérêt général des élus, pour l'ensemble du territoire.
Tout en restant vigilant sur ces points, j'attends avec impatience des décisions très précises concernant la rénovation de la ligne Caen-Tours.
La parole est à M. Damien Pichereau, pour exposer sa question, no 474, relative aux zones de revitalisation rurale.
Avant d'aborder la question des zones de revitalisation rurale – ZRR – , je m'associe à celle de mon collègue, Joaquim Pueyo, à propos de la ligne Caen-Le Mans-Tours, qui est vitale pour notre territoire.
Le dispositif des zones de revitalisation rurale a été créé dans l'objectif de compenser les difficultés particulières que rencontrent certains territoires ruraux en matière d'attractivité démographique et économique. Il ouvre un droit à un ensemble d'avantages, dont des exonérations fiscales et sociales, accordées aux entreprises qui s'y installent ou y développent leur activité.
Je me demande à présent s'il ne serait pas opportun d'élargir cet aménagement à un certain nombre de normes ou grilles de seuil et d'effectif, ce qui permettrait d'agir aux côtés de ces collectivités pour leur développement social et économique, à l'instar des dispositions prises en faveur des membres de professions médicales et paramédicales qui s'installent en ZRR.
Par exemple, dans ma circonscription, l'entreprise Cochet, employant une cinquantaine de salariés dans la commune de Sougé-le-Ganelon, qui souhaitait s'agrandir, a sollicité, en 2017, une subvention au titre de l'aide à la réindustrialisation. Cette aide lui a été refusée car l'investissement s'élevait seulement à 1,99 million d'euros au lieu des 2 millions requis pour y être éligible alors que cette commune est classée en zone de revitalisation rurale. Cette décision a été un coup dur pour notre territoire.
Plusieurs écoles de ma circonscription ont été confrontées à la fermeture d'une classe pour la rentrée 2018. Ainsi, la commune de Ruillé-en-Champagne a perdu son école, celle de Beaumont-sur-Sarthe une classe, et les trois communes de Sillé-le-Guillaume, Saint-Ouen-de-Mimbré et Gesnes-le-Gandelin ont, de justesse, réussi à maintenir leur effectif après avoir un temps figuré sur la liste des communes dans lesquelles un poste risquait d'être supprimé. Pourtant, ces cinq communes sont en ZRR, ce classement étant censé marquer la fragilité d'un territoire. Aussi, ne serait-il pas nécessaire de faire preuve d'un peu plus de souplesse ? Le Gouvernement envisage-t-il d'adapter aux ZRR les différents seuils que je viens d'évoquer afin d'améliorer l'attractivité des territoires ruraux et d'éviter que la fracture territoriale n'accentue la fracture sociale et économique dont souffrent leurs habitants ?
Le classement des communes en ZRR a fait l'objet d'une réforme en 2015, qui a permis de maintenir le nombre de communes classées à environ 14 000 sur l'ensemble du territoire. Les six communes que vous citez ont d'ailleurs bénéficié de cette réforme des critères de classement, puisqu'elles ont intégré le dispositif en 2017. Toutefois, comme tout dispositif de zonage et de classement, des effets de seuil sont de facto induits par les règles d'éligibilité. Néanmoins, et vous avez raison, il faut aussi de la souplesse et savoir adapter nos politiques publiques aux territoires.
C'est la raison pour laquelle Jacqueline Gourault et moi avons demandé au Commissariat général à l'égalité des territoires, qui gère le dispositif, d'examiner, en lien avec la direction générale des entreprises du ministère de l'économie et des finances, pour tous les dispositifs d'aides aux entreprises, la pertinence d'une modulation des seuils d'éligibilité ou des taux d'aides, afin de mieux prendre en compte la diversité des situations locales.
Comme vous le savez, le dispositif des ZRR s'achève en 2020. Nous avons donc une année de réflexion devant nous, réflexion qui pourra notamment être nourrie par les travaux de la délégation aux collectivités territoriales. En effet, un rapport récemment remis par vos collègues Anne Blanc et Véronique Louwagie sur l'efficacité des ZRR a mis en lumière d'importantes marges de progression.
Concernant votre inquiétude sur l'avenir des écoles en milieu rural, sachez qu'à la rentrée 2018, aucun poste dans le premier degré n'a été supprimé dans la Sarthe alors même que les effectifs étaient en baisse. Le ministre de l'éducation nationale est à votre disposition sur ce sujet qui excède la compétence de mon ministère.
Plus globalement, la politique menée par le Gouvernement vise à répondre aux besoins d'investissement en milieu rural. L'État va mobiliser près de 2 milliards d'euros, en 2019, pour l'investissement local, dont la moitié sera consacrée aux territoires ruraux, à travers la dotation d'équipement des territoires ruraux. C'est l'objet de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » du PLF pour 2019 que je vous ai présentée il y a quelques semaines et que vous aurez à coeur de voter en nouvelle lecture cette semaine.
Je vous remercie, monsieur le ministre, et je salue l'ensemble des mesures envisagées ainsi que la concertation. S'agissant des écoles, il est vrai qu'aucun poste n'a été supprimé mais, du fait de mouvements de population à l'intérieur du département, certaines zones se trouvent dépeuplées et perdent des classes. Certains problèmes en milieu rural – illettrisme, manque d'accompagnement des enfants – , similaires à ceux que connaissent les zones d'éducation prioritaire, justifieraient un accompagnement accru des ZRR. Mais nous aurons l'occasion d'en reparler.
La parole est à M. Pierre Dharréville, pour exposer sa question, no 466, relative à l'abandon des quartiers prioritaires de la politique de la ville.
Le 22 novembre dernier, deux jeunes sont morts assassinés dans le quartier de Canto-Perdrix à Martigues. J'ai une pensée pour les familles, ainsi que pour les habitants de ce quartier et de toute la ville. Tous ont été meurtris par cet événement dramatique. Ils veulent vivre bien, ils veulent vivre ensemble en paix. Voici un an, c'était le message porté par jeunes et moins jeunes dans un spectacle grandiose sur la place principale du quartier.
Mais, dans ce quartier prioritaire de la politique de la ville, 38 % de la population a moins de 25 ans ; plus du tiers des habitants vivent sous le seuil de pauvreté et près d'un quart des ménages bénéficient des minima sociaux. Ces chiffres indiquent clairement une concentration de difficultés économiques et sociales. C'est pourtant un quartier qui ne veut pas être caricaturé, où la solidarité n'est pas un vain mot, où les habitants de toutes les générations aiment à se rassembler pour échanger, participent aux instances de décision locales, où les locataires s'organisent, où l'on se retrouve pour le plaisir d'être ensemble dans le centre social – la maison de quartier Jeanne Pistoun – financé en grande partie par la municipalité et dont les animateurs et éducateurs sont très engagés.
Or, dans le cadre de la fusion présupposée du département et de la métropole, voici qu'il est déjà demandé à la mairie de dresser l'inventaire des centres sociaux dans le but, sans doute, de prendre la main et de revoir le déploiement de ces derniers.
L'État est défaillant dans ses missions régaliennes – l'éducation, la santé, la sécurité, la justice – et la loi ELAN n'encouragera pas les rénovations permettant d'offrir un meilleur cadre de vie. Dans ces quartiers dits sensibles ou populaires, les habitants n'ont pas tout à fait les mêmes droits. Il y a quelques jours, les habitants de Canto-Perdrix ont appris qu'ils n'avaient plus de facteurs titulaires. En d'autres termes, s'il manque des postiers, le courrier ne sera pas distribué. Comment pouvez-vous intervenir pour remédier à ce problème ?
Dans les quartiers populaires – à Port-de-Bouc, au Prépaou, à Canto-Perdrix – , c'est l'état d'urgence sociale et le service public s'effiloche. Certaines colères s'expriment dans la rue, d'autres restent contenues. Tous les quartiers identifiés dans le cadre de la politique de la ville doivent bénéficier de moyens, de services publics, et de présence humaine accrus. Donner un avenir aux jeunes doit être une priorité. Ces derniers ont des idées, des désirs, du talent ; ils ne doivent pas être empêchés, mais encouragés. À Canto-Perdrix, je rêve de quinze enfants par classe, d'une équipe médico-sociale pour les établissements scolaires, de permanences de la caisse d'allocations familiales et de la sécurité sociale, d'un bureau de poste, d'un poste de police nationale, qui est en sous-effectif, et d'un soutien supplémentaire aux centres sociaux.
Monsieur le ministre, quelles mesures comptez-vous prendre, et avec quels moyens, pour rétablir l'égalité républicaine et renforcer la présence humaine dans ce quartier meurtri de Canto-Perdrix qui ne veut pas être abandonné par la République ?
Le 14 novembre 2017, à Tourcoing, le Président de la République appelait à une mobilisation nationale pour les quartiers prioritaires. A suivi une longue période de concertation, à l'issue de laquelle a été adoptée une feuille de route comprenant quarante mesures gouvernementales qui seront déclinées par Julien Denormandie, dont je vous prie d'excuser l'absence ce matin.
Les habitants des quartiers prioritaires demandent d'abord à être traités à égalité, notamment en ce qui concerne les services publics. S'agissant de la présence de La Poste, je vais prendre l'attache du cabinet de Julien Denormandie et de Philippe Wahl, président-directeur général de La Poste, pour examiner le point que vous avez soulevé.
Sur les enjeux de sécurité, des réponses sont apportées : 1 300 postes de policiers et gendarmes seront déployés d'ici 2020 dans 60 quartiers de reconquête républicaine. Le cabinet du ministre de l'intérieur est à votre disposition pour examiner les besoins de renfort dont vous faites état.
Le droit de vivre dans un endroit digne et agréable est réaffirmé à travers la relance accélérée du renouvellement urbain dans 450 quartiers, doté de 10 milliards d'euros d'aides publiques, et une stratégie nationale pour le traitement des copropriétés dégradées qui était attendue depuis longtemps. Dans ces matières, il n'est évidemment pas question d'agir seul. Tel est le sens du pacte de Dijon, signé par le Premier ministre le 16 juillet dernier, qui marque la volonté d'associer pleinement les collectivités.
La fusion du département et de la métropole n'est pas encore actée. Le préfet de région a pour mission de remettre au Gouvernement un rapport permettant de l'éclairer sur les choix à venir. Le recensement que vous évoquez s'inscrit dans le cadre de ce rapport et ne préjuge en rien des décisions que le Gouvernement pourrait prendre.
Il faut désormais s'assurer de la traduction de la mobilisation nationale, quartier par quartier, et notamment à Canto-Perdrix à Martigues.
Je vous remercie de votre réponse et de ce que vous pourrez faire concrètement pour trouver une solution aux différents problèmes que j'ai soulevés.
La fusion du département et de la métropole est à l'étude, dites-vous. J'en conviens, une évolution institutionnelle est nécessaire afin de tirer les leçons de ce qui n'a pas fonctionné, mais les réformes à venir ne doivent pas être dictées par des objectifs d'économie et d'austérité, sinon leurs résultats seront désastreux.
J'insiste sur le soutien aux centres sociaux, dont la capacité à agir a été affectée par la suppression des emplois aidés – des manifestations répétées ont eu lieu dans le département en ce sens.
La parole est à M. Christophe Arend, pour exposer sa question, no 469, relative à la création de la collectivité européenne d'Alsace et à la coopération transfrontalière.
Le 29 octobre dernier, le Gouvernement et les élus d'Alsace ont annoncé leur volonté de créer la collectivité européenne d'Alsace en adoptant une déclaration commune. En Européens convaincus, nous ne pouvons que saluer la volonté de ce territoire frontalier.
Depuis leur résolution commune du 22 janvier dernier, l'Assemblée nationale et le Bundestag se sont dotés d'un groupe de travail franco-allemand, composé de neuf députés français et neuf députés allemands. L'une des missions de ce groupe de travail a été de faire des propositions pour le futur traité d'amitié franco-allemand, parfois appelé Élysée 2. 0.
Sur la question de la coopération transfrontalière, les nombreuses auditions d'élus des territoires concernés, d'acteurs de la société civile ou encore d'organisations de coopération franco-allemande l'ont convaincu de demander des compétences spécifiques et un droit d'expérimentation pour les collectivités transfrontalières existantes. Historiquement, Saar-Lor-Lux, créé en 1971, fut la première collectivité européenne transfrontalière intégrée. Cette entité a évolué avec l'ajout quelques années après de la Wallonie. Elle porte aujourd'hui le nom de Grande Région et constitue une véritable collectivité européenne transfrontalière intégrée réunissant quatre pays européens. Elle s'est d'ailleurs dotée depuis plusieurs années d'une structure juridique propre – Task force Frontaliers – et d'une université – UniGR. Dans sa dimension franco-allemande, les collectivités concernées sont essentiellement les trois eurodistricts : Strasbourg-Ortenau, PAMINA et SaarMoselle.
Nous avons compris que le chef de filat mentionné dans l'acte de naissance de la collectivité européenne d'Alsace vaut uniquement pour le périmètre de la nouvelle entité, mais nous tenons à rappeler, avec énergie, que la région Grand Est tout entière est terre de voisinage. C'est pourquoi nous vous demandons de nous rassurer sur l'octroi à l'ensemble des zones de voisinage, dont les eurodistricts, des mêmes prérogatives que celles dont jouira la future collectivité européenne d'Alsace en matière de coopération transfrontalière.
Dès le début, le cap fixé par le Gouvernement en matière institutionnelle a été le suivant : accompagner les initiatives locales, dès lors qu'elles répondent à l'intérêt général ; ne pas provoquer un big-bang des compétences et de l'organisation administrative des collectivités territoriales, qui ont connu suffisamment d'évolutions ces dernières années, lesquelles ont d'ailleurs traumatisé les élus et les territoires ruraux.
Accompagner les initiatives locales, c'était donc entendre et comprendre le désir d'Alsace exprimé par les Alsaciens et leurs élus. Pour comprendre les attentes et créer les conditions d'un dialogue apaisé, le Premier ministre a demandé fin janvier au préfet de la région Grand Est, Jean-Luc Marx, de mener une concertation sur la question institutionnelle alsacienne et de lui faire part de ses propositions, à deux conditions : d'une part, que la région Grand Est conserve son intégrité, et, d'autre part, que les grands équilibres de la loi NOTRe soient respectés. Jacqueline Gourault a ensuite été missionnée pour trouver les solutions d'un « cousu main » pour l'Alsace, ce qui a abouti à la signature d'une déclaration commune le 29 octobre dernier. Je sais d'ailleurs que vous avez été reçu par la ministre et son cabinet à plusieurs reprises sur ce sujet.
En matière de coopération transfrontalière, il est confié à la collectivité européenne d'Alsace un rôle de chef de file sur le seul territoire alsacien. Ainsi, la collectivité pourra organiser l'action collective, sans restreindre la capacité d'action des autres collectivités intéressées ; elle sera chargée d'établir un schéma alsacien de coopération transfrontalière, non prescriptif, en association avec l'ensemble des collectivités et des acteurs concernés ; elle pourra, en parfaite cohérence avec la stratégie régionale, décliner un volet opérationnel sur les projets structurants en matière de mobilité, par exemple.
Le conseil régional du Grand Est continuera à jouer un rôle majeur en la matière, à travers le volet transfrontalier du schéma régional de développement économique, d'innovation et d'internationalisation. À ce titre, une représentation transfrontalière de la région par le tandem constitué par le préfet de région et le président du conseil régional – M. Jean Rottner – sera expérimentée très prochainement.
Cette déclaration ne remet donc absolument pas en cause les points négociés dans le cadre du traité de l'Élysée – auquel vous êtes je le sais attaché, monsieur le député. Surtout, elle n'ampute les autres collectivités, notamment celles de Lorraine, d'aucune compétence ou modalité d'action, ni en matière transfrontalière, ni en aucune autre matière, car la loi que vous avez votée s'applique, cela va sans dire.
Les eurodistricts demeurent un outil de coopération transfrontalière très intéressant. Ils pourront continuer à fonctionner en vertu du droit commun, puisqu'ils agissent par délégation de compétences de leurs collectivités membres.
Il faut que nous continuions à appliquer cette méthode du « cousu main » dans d'autres territoires, y compris, d'ailleurs, dans l'ancienne région Lorraine. C'est ce que je ferai en janvier prochain avec la signature du pacte Ardennes : il s'agit là aussi de tenir compte d'une spécificité territoriale, en écoutant bien évidemment les attentes des élus locaux. Telles sont les précisions que je pouvais apporter en réponse à votre question, monsieur le député.
Je vous remercie, monsieur le ministre, de ces propos en tout point rassurants. En ma qualité de député qui s'intéresse au traité de l'Élysée et de président du groupe de travail franco-allemand, je ne puis, à ce stade, que vous assurer de mon soutien à l'accompagnement que le Gouvernement souhaite apporter sur le terrain en matière de droit à la différenciation. Nous serons amenés à en discuter de nouveau lorsque nous reprendrons l'examen du projet de loi constitutionnelle.
La parole est à M. Michel Vialay, pour exposer sa question, no 484, relative à une contractualisation réelle pour le développement des jeunes communautés urbaines.
Ma question entre complètement dans votre champ de compétence, monsieur le ministre chargé des collectivités territoriales.
La loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 a instauré une contractualisation entre l'État et les 322 collectivités territoriales et établissements publics de coopération intercommunale – EPCI – dont le budget primitif est supérieur à 60 millions d'euros. Après avoir rogné la dotation globale de fonctionnement, l'État limite, par ces contrats imposés, la progression des seules dépenses de fonctionnement à un maximum de 1,2 %, inflation comprise, chaque année pendant trois ans. Qui plus est, ce taux peut être abaissé lors de modulations très technocratiques.
Jusqu'à présent, le Gouvernement n'a pris aucune disposition réaliste pour inclure les jeunes EPCI dans le dispositif : ceux-ci sont traités de la même manière que des communautés urbaines dont le régime de croisière est déjà bien établi. Dans la mesure où l'on ne s'interroge que sur les dépenses, toute action autofinancée ou quasi autofinancée devient impossible, ce qui peut conduire les collectivités et EPCI à refuser, entre autres, le portage de financements européens ou de financements au titre de la politique de la ville.
Ce dispositif a une autre conséquence : le refus d'analyser certains types de dépenses en vue de les exclure, notamment les intérêts de la dette ou la participation à des syndicats mixtes, dont l'objet même est de réaliser des équipements. Dès lors, Grand Paris Seine et Oise, communauté urbaine en phase de création qui réunit soixante-treize communes très hétérogènes par leur taille et compte 408 000 habitants, ce qui en fait la première communauté urbaine de France, a vu le taux d'évolution de ses dépenses de fonctionnement réduit à 1,05 % par an. Pourtant, elle joue un rôle fondamental en matière d'aménagement du territoire, son objectif étant de développer l'emploi et d'assurer un cadre de vie de qualité à toutes les générations qui habitent ses communes membres. Elle ne devrait pas être stoppée ainsi dans son élan, ni privée de sa liberté d'action.
Il est clair que la contractualisation n'a de contractuel que le nom, puisque rien n'est négociable et que ce dispositif interdit l'exercice normal des compétences dévolues aux collectivités et EPCI concernés. Cette situation amène à s'interroger sur la possibilité de financer et d'accompagner des projets identifiés comme emblématiques et stratégiques. La communauté urbaine Grand Paris Seine et Oise se demande ainsi comment financer les travaux en matière de mobilité pour accompagner l'arrivée d'Eole, les acquisitions foncières pour accompagner les projets structurants, l'aménagement de la sortie de l'A13 à Mantes-la-Jolie, les projets liés à la sortie de l'A13 à Orgeval ou encore les équipements liés à la rénovation urbaine.
Il est donc nécessaire de prendre en considération la spécificité des jeunes communautés urbaines dans le cadre d'une contractualisation réellement négociée. Par ailleurs, Grand Paris Seine et Oise, qui est issue de la fusion de six communautés d'agglomération, détient des compétences plus larges que la somme des compétences de ces six EPCI. Il lui est donc indispensable d'achever sa structuration pour que son organisation soit efficiente. La limitation de sa capacité de recrutement lui interdira d'exercer certaines compétences, qui ne peuvent pourtant plus, légalement, être du ressort des communes.
Que prévoyez-vous, monsieur le ministre, afin de résoudre ce problème pernicieux ?
Vous avez abordé plusieurs points dans votre question, monsieur le député.
D'abord, je défends la méthode. Nous avions d'ailleurs combattu tous les deux la méthode précédente, qui consistait à réduire de manière autoritaire la dotation globale de fonctionnement – DGF – pour l'intégralité des collectivités territoriales françaises, les plus petites comme les plus grandes. Désormais, la DGF ne diminue plus pour les plus petites collectivités, notamment les plus petites communes de votre circonscription, que je connais bien. La DGF peut bien évidemment diminuer si la commune perd de la population, par exemple, mais le concours global de l'État reste stable.
Par ailleurs, le Gouvernement a fait le choix de se concentrer sur les 322 collectivités les plus importantes, en leur demandant de limiter leurs dépenses – il ne s'agit pas d'une baisse de la DGF. Autrement, dit, on leur demande un effort, par précaution, pour des raisons, que nous pouvons tous comprendre, liées notamment à la situation financière de notre pays et au respect que l'on doit au contribuable, notamment au contribuable local.
S'agissant toujours de la méthode, nous avons retenu uniquement les dépenses de fonctionnement, et non celles d'investissement, ce qui est logique. En outre, nous n'avons pas imposé de choix, puisque les collectivités avaient la possibilité de contractualiser ou non. D'ailleurs, la communauté urbaine Grand Paris Seine et Oise – GPS& O – , que vous avez évoquée, a choisi de ne pas signer de contrat, ce qui montre bien qu'il y avait une forme de liberté. Dès lors, c'est le préfet qui a fixé le taux, par arrêté. Si l'on s'était engagé dans une démarche de contractualisation, des négociations auraient pu avoir lieu, ce qui aurait pu permettre, le cas échéant, de moduler le taux.
Ensuite, vous avez posé une question précise sur la possibilité d'un retraitement, c'est-à-dire, au fond, sur la capacité à s'adapter aux différentes situations, par exemple à celle d'une jeune communauté urbaine telle que GPS& O, que je connais bien. Oui, le retraitement sera possible, je profite de cette occasion pour le dire. Nous avons d'ailleurs commencé à procéder à un tel retraitement, par exemple en faveur des conseils départementaux qui doivent prendre en charge un grand nombre de mineurs non accompagnés, comme je l'ai indiqué à M. Pierre Bédier, président du conseil départemental des Yvelines et ancien secrétaire d'État.
Cala vaut d'ailleurs pour toutes les collectivités et les EPCI, qu'elles aient signé un contrat ou que le taux ait été fixé par arrêté. Les préfets seront amenés à examiner, cas par cas, les situations spécifiques qui peuvent donner lieu à un retraitement. À cet égard, il sera particulièrement intéressant d'étudier les implications d'Eole, que vous avez évoquées dans votre argumentation, compte tenu des marges de manoeuvre financières que GPS& O doit dégager à ce titre.
Nous allons donc examiner les situations cas par cas, et je me tiens personnellement à la disposition des élus de GPS& O à cette fin. Si certains critères sont parfois technocratiques, le préfet des Yvelines n'a rien d'un technocrate ! À mon avis, il aura à coeur, à mes côtés, d'examiner ce qui peut être fait, avec l'ensemble des élus de GPS& O et avec vous, monsieur le député. Nous pourrions envisager, pourquoi pas, une négociation en vue d'une contractualisation, celle-ci n'étant pas encore intervenue jusqu'à présent. Tous les points que vous avez évoqués pourraient entrer dans le cadre de cette négociation.
Je prends note de ces évolutions. Comme vous pouvez l'imaginer, le taux de 1,05 % constitue une limitation considérable, compte tenu, d'une part, de l'effet du glissement vieillesse technicité et, d'autre part, des besoins en ingénierie, c'est-à-dire de la nécessité de recruter des collaborateurs à même de traiter les dossiers d'investissement. Il importe que la jeune communauté urbaine qu'est GPS& O puisse évoluer de façon normale.
La parole est à M. Jean-Luc Lagleize, pour exposer sa question, no 489, relative à la privatisation partielle de l'aéroport de Toulouse-Blagnac.
Ma question s'adressait à M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances, mais je suis ravi que ce soit vous qui formuliez la réponse, monsieur le secrétaire d'État chargé du numérique.
Permettez-moi tout d'abord de rappeler certains éléments de contexte. En avril 2015, l'État a cédé au consortium chinois Casil Europe 49,99 % du capital de l'aéroport de Toulouse-Blagnac. Il en a conservé 10,01 %, les 40 % restants étant détenus par les collectivités locales, à savoir la région Occitanie, le conseil départemental de la Haute-Garonne, Toulouse Métropole et la chambre de commerce et d'industrie de la Haute-Garonne.
Au moment de cette vente, l'État a conclu avec le nouvel acquéreur un pacte d'actionnaires, dont le contenu n'a jamais été rendu public. C'est ce pacte qui m'intéresse aujourd'hui. Bien que la puissance publique détienne 50,01 % des parts, ce pacte particulier permet à Casil Europe d'exercer le contrôle opérationnel de la société. Comme l'a souligné la Cour des comptes dans un rapport publié le mois dernier, la privatisation demeure donc inaboutie et l'aéroport de Toulouse-Blagnac reste dans une situation ambiguë et instable : il s'agit d'une entreprise dont le capital est majoritairement public mais dont le contrôle revient à l'actionnaire privé, par l'effet du pacte d'actionnaires qu'il a conclu avec l'État.
M. le ministre de l'économie et des finances avait lui-même indiqué qu'il ne souhaitait pas que l'État exerce l'option de vente à Casil Europe des 10,01 % du capital de l'aéroport de Toulouse-Blagnac qu'il détient encore, sachant qu'il peut exercer ladite option jusqu'au 17 avril 2019. Lors d'une audition récente, la Cour des comptes a opposé l'argument du secret des affaires à mes interrogations sur ce pacte d'actionnaires. Dont acte. Je m'en tiendrai donc aux seules questions suivantes. Premièrement, quelles sont les caractéristiques de ce pacte d'actionnaires du point de vue juridique et en matière de durée ? Deuxièmement, une fois la date du 17 avril 2019 passée, l'Etat pourra-t-il céder les dernières parts qu'il détient à un acquéreur public, semi-public ou privé qui souhaiterait les racheter ? Enfin, qu'adviendrait-il, dans ce cas, des obligations figurant dans le pacte d'actionnaires ?
Bruno Le Maire ne pouvait pas être présent ce matin et m'a demandé de vous répondre, monsieur le député. Vous aviez déjà pu échanger avec lui à ce sujet.
En 2015, vous l'avez rappelé, l'État a cédé 49,99 % du capital de l'aéroport de Toulouse-Blagnac au consortium chinois Casil Europe. Il en a conservé 10,01 % et a perçu une prime de contrôle grâce à la conclusion d'un pacte d'actionnaires avec Casil Europe. Ce pacte, sur lequel porte votre question, est effectivement couvert par le secret des affaires. Il prévoit notamment des règles de gouvernance et de fonctionnement – ce qui est assez habituel – , des obligations de concertation sur des sujets stratégiques et les modalités d'une possible cession des 10,01 % détenus par l'État. Comme Bruno Le Maire l'a déjà indiqué, l'État n'a pas exercé son option de vente à Casil Europe, ce qu'il pouvait faire à partir du 17 avril 2018. Cette option au profit de Casil Europe n'a pas été renouvelée et ne sera pas exercée.
Quant à l'opportunité et aux modalités d'une éventuelle évolution de la participation de l'État, elles n'ont pas été complètement évaluées ; rien n'est donc arrêté en la matière. Je ne réponds donc que partiellement à votre deuxième question, mais nous pourrons y revenir dans les prochains mois.
Je tiens à rappeler que les investissements réalisés par l'aéroport depuis sa privatisation sont conformes au projet industriel qui avait mené à la signature du pacte d'actionnaires ; ils s'élèveront à 160 millions d'euros sur la période de 2017 à 2020. Les résultats de l'évaluation du trafic et de l'évaluation financière sont aujourd'hui satisfaisants : ils indiquent une gestion de niveau « adaptée » à « bonne ». En 2017, le trafic s'est accru de 14 % pour s'établir à 9,2 millions de passagers, et le chiffre d'affaires a augmenté de 18,5 % pour atteindre 142 millions d'euros. Les premiers résultats de 2018 confirment cette dynamique, malgré l'ouverture à proximité, au cours de l'été 2017, de la ligne à grande vitesse Tours-Bordeaux. La situation économique est donc meilleure, et la relation équilibrée.
Nous pourrons revenir dans quelques mois sur la question de l'opportunité et des modalités d'une éventuelle évolution de la participation de l'État.
Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, de votre demi-réponse, à laquelle je réagirai par une demi-remarque supplémentaire : si l'aéroport de Toulouse-Blagnac se porte bien, c'est avant tout grâce à Toulouse et à son attractivité.
Par ailleurs, ma question portait essentiellement sur l'éventuelle transférabilité, à un futur actionnaire, des obligations qui figurent dans le pacte conclu entre l'État et Casil Europe. Pour qu'un investisseur puisse éventuellement venir à la rencontre des représentants de l'État et leur faire part d'un projet pour Toulouse-Blagnac, encore faut-il qu'il sache à quoi il s'engage. Nos prochaines conversations porteront donc sur la question de la transférabilité.
La parole est à M. François-Michel Lambert, pour exposer sa question, no 486, relative à la stratégie "France logistique 2025".
Monsieur le secrétaire d'État chargé du numérique, en mars 2016, la commission nationale logistique mise en place par le ministre de l'économie Emmanuel Macron et la ministre de l'environnement Ségolène Royal a rédigé une proposition de stratégie intitulée « France logistique 2025 », qui a été présentée au Conseil des ministres en mars 2016.
Ce texte fixe un cadre pour une économie moderne dont le fonctionnement repose sur l'échange des biens, des services et des données, au sein de notre territoire et au-delà de nos frontières, car nous avons besoin d'une logistique performante et agile.
À ce titre, la logistique est un maillon essentiel du circuit marchand et un organe vital pour le fonctionnement de notre société. C'est aussi un facteur déterminant de la compétitivité, qui représente 10 % du PIB national, 200 milliards d'euros de chiffres d'affaires et 1,8 million d'emplois.
La France est reconnue pour la qualité de sa main-d'oeuvre, son maillage d'infrastructures et d'équipements ou encore la disponibilité de ses terrains, mais elle est classée seulement au seizième rang mondial de la logistique, selon l'indice de performance logistique de la Banque mondiale, loin derrière ses voisins les plus proches. Notre sous-performance logistique coûterait chaque année 20 à 60 milliards d'euros à l'économie nationale.
Pour réussir la mise en oeuvre de l'accord de Paris sur le climat et réaliser les objectifs gouvernementaux en matière de transport, la modernisation de la chaîne logistique, du producteur au consommateur, constitue le levier important. Il s'agit de diminuer l'empreinte carbone des activités de transport de marchandises et leurs émissions polluantes, ainsi que de promouvoir de nouveaux modèles économiques comme l'économie circulaire et les circuits courts d'approvisionnement.
Dans un contexte de forte concurrence entre acteurs et entre pays voisins, la France, qui dispose encore d'importantes marges de progrès, doit être soutenue dans cette voie.
Tel est l'objectif de cette stratégie, qui vise à renforcer la logistique d'aujourd'hui et à préparer celle de demain, en l'adaptant aux mutations du modèle. La révolution numérique et les enjeux de développement durable impactent notamment l'écosystème complexe et globalisé de l'activité logistique, appelée à s'adapter et à faire preuve d'agilité. La logistique est par ailleurs une activité particulièrement territorialisée, au fort potentiel d'emploi et structurante pour le pays.
Avec la stratégie nationale « France Logistique 2025 », notre pays possède son document stratégique, sa vision pour la logistique.
Cette stratégie qui repose sur cinq axes fixe un cadre voué à mobiliser l'ensemble des acteurs dans la durée, à travers un processus ouvert. En septembre 2017, le Gouvernement a initié une démarche, dénommée « Fret + », pour structurer la mise en oeuvre de « France Logistique 2025 », mais cette démarche semble à l'arrêt depuis plus de six mois.
Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous préciser quelle sera la prochaine étape du Gouvernement, dans le cadre de la mise en oeuvre de la stratégie « France Logistique 2025 », afin que nous conservions l'objectif de placer la France dans le « top 5 » des pays en matière de performance logistique avant 2025, et de générer pour l'économie un gain estimé, selon les experts, entre 20 et 60 milliards d'euros.
Monsieur le député, le Gouvernement est résolu à maintenir le cap en matière d'amélioration de la performance des activités logistiques, dans le droit-fil de la stratégie nationale « France logistique 2025 », dont vous avez rappelé les piliers. Il s'agit en effet d'un enjeu majeur du développement de l'économie, de l'emploi et des territoires.
Où en sommes-nous à ce stade ? De nombreuses réflexions ont été menées, par exemple dans le cadre des assises nationales de la mobilité, sur les stratégies thématiques dans les transports ferroviaires, portuaires, fluviaux, et au sein du groupe de travail Fret +, qui a réuni des membres de l'administration des transports, des organisations professionnelles du transport de marchandises, des start-up et des élus de l'Assemblée nationale, pour aboutir notamment à la production d'un livre blanc avec l'Alliance industrie du futur.
Des adaptations nécessaires, de nature législative, ont été préparées au vu de tous ces travaux ayant vocation à faire encore l'objet d'échanges, en particulier dans le cadre du débat parlementaire sur la loi d'orientation des mobilités, qui sera examinée courant 2019.
Il faut rappeler l'importance de la logistique pour la compétitivité de notre industrie et de nos ports. La dynamique de réindustrialisation qui est engagée devra tirer parti de l'efficacité économique des échanges. Sur ce point, la France a encore des progrès à réaliser.
Cette ambition est portée par l'État. Elle suppose de renforcer la part de valeur créée ou captée sur les circuits des chaînes logistiques, depuis l'approvisionnement industriel jusqu'à la commercialisation et la distribution.
C'est pourquoi la prochaine étape consistera pour l'État à officialiser très prochainement les objectifs d'une mission qui débouchera sur un plan de mesures opérationnelles, lesquelles seront mises en oeuvre pendant le quinquennat, notamment à partir de la stratégie nationale « France logistique 2025 ».
L'État attend de cette étape deux bénéfices principaux. D'une part, il s'agit de permettre la montée en puissance des bonnes pratiques de gestion de la chaîne d'approvisionnement dans la sphère productive, notamment pour les petites et moyennes entreprises. D'autre part, le volet portuaire de ce plan constitue la stratégie nationale portuaire que le Premier ministre a souhaité voir mise en place sous six mois, comme il l'a annoncé lors du récent comité interministériel de la mer.
Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie. Nous apprenons qu'une mission sera initiée prochainement. Il est plus que temps, compte tenu des enjeux ! Je rappelle que notre sous-performance logistique crée dans l'économie globale privée ou publique des surcoûts évalués, selon les experts, entre 20 et 60 milliards d'euros. Ce sont autant de marges de manoeuvre pour notre économie et nos entreprises, ainsi que pour certains services publics en difficulté.
J'insiste pour que cette mission travaille au plus vite et pour qu'elle soit réellement soutenue par le ministre de l'économie, voire par le Premier ministre, et rattachée à leur administration. Notre développement économique est en jeu.
Ce serait un risque, à mes yeux, que de laisser ce dossier au seul ministère des transports, qui, s'il possède une expertise, n'embrasse pas la totalité du champ économique. Ainsi, le numérique, dont vous êtes responsable, doit renforcer nos performances logistiques.
La parole est à Mme Geneviève Levy, pour exposer la question no 485 de M. Arnaud Viala, relative aux conditions de vie des retraités.
M. Arnaud Viala, retenu dans le Sud de l'Aveyron par une réunion capitale pour l'avenir des hôpitaux de Millau et Sainte-Affrique, souhaite vous donner l'occasion de clarifier la position du Gouvernement sur un sujet qui préoccupe un très grand nombre de Français modestes, que la vie a éprouvés.
33 milliards d'euros par an : c'est à ce niveau que le Conseil d'orientation des retraites estime le versement annuel des pensions de réversion à des retraités ayant perdu leur conjoint.
Selon le COR, ces retraités sont au nombre de 3,8 millions, dont 89 % de femmes. En 2015, un veuf vivant seul a perçu en moyenne 2 205 euros bruts de retraite par mois, alors qu'une veuve vivant seule a touché 1 808 euros bruts, retraite de réversion comprise. Cette inégalité touche surtout les veuves d'ouvriers, de paysans, d'artisans et de commerçants.
Ces chiffres montrent l'importance de la pension de réversion pour les conjoints survivants. Sans celle-ci, pour beaucoup de retraités modestes, de l'Aveyron comme de tous les territoires de France où les tissus économiques ont concentré des professions à faible pension, c'est la pauvreté assurée.
Le ministre de l'action et des comptes publics a souvent été interrogé dans cet hémicycle, mais ses réponses, comme celles du Haut-commissaire en charge de la réforme des retraites, n'ont jamais été suffisamment claires pour rassurer nos concitoyens.
Le ministre a répondu tour à tour qu'il envisageait, dans sa réforme, de capitaliser, sous forme de partage des droits entre les deux conjoints, selon les modèles allemand ou britannique, que la pension de réversion pourrait être purement et simplement supprimée, comme dans le modèle suédois, ou que le cumul de la retraite du survivant et de la retraite de réversion pourrait être plafonné.
La question est simple et appelle une réponse claire du Gouvernement : quelle option celui-ci retiendra-t-il, dans le cadre de sa réforme, pour les pensions de réversion ?
Madame la députée, vous avez appelé l'attention de Gérald Darmanin – qui, ne pouvant être présent, m'a demandé de vous répondre à sa place – sur l'avenir des retraités.
Je vous confirme d'abord, ce qui sera une réponse d'actualité, que, conformément aux annonces faites par le Président de la République lors de son allocution du 10 décembre dernier, il est prévu de revenir en 2019 sur la hausse de la contribution sociale généralisée pour les retraités dont les revenus ne dépassent pas 2 000 euros par mois. Ce sont 3,7 millions de foyers de retraités qui verront ainsi leur taux de CSG repasser au taux antérieur de 6,6 % au lieu de 8,3 %. Cette mesure importante était très attendue par une grande partie de ceux dont vous avez parlé.
Vous savez par ailleurs que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 prévoit un nouveau dispositif de lissage qui permettra d'atténuer la hausse de la CSG pour les foyers qui pouvaient, pour quelques dizaines d'euros, basculer à un taux supérieur. Cette mesure bénéficiera à plus de 350 000 foyers, qui acquitteront dès 2019 une CSG moins importante.
S'agissant de la revalorisation des pensions de retraite, le Parlement a voté en loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 une augmentation de 0,3 % en 2019 et 2020. Cette évolution s'accompagne d'un choix fort du Gouvernement en faveur des retraités les plus modestes, avec une forte revalorisation du minimum vieillesse sur trois ans pour atteindre 903 euros en 2020, soit une hausse de 100 euros par rapport à 2017.
Cette mesure forte de solidarité bénéficiera aux 550 000 retraités percevant déjà le minimum vieillesse, et devrait contribuer à majorer la pension de 46 000 personnes âgées supplémentaires.
Au-delà du strict champ de la retraite et du minimum vieillesse, les retraités bénéficient d'un ensemble d'autres dispositions qui permettront de soutenir leur pouvoir d'achat : suppression progressive de la taxe d'habitation, crédit d'impôt pour les services à la personne, réforme du « 100% santé » concernant le remboursement des prothèses dentaires, l'optique et les appareils auditifs, et mise en place de la couverture maladie complémentaire contributive.
Le niveau de vie des retraités et la pérennité du modèle social seront bien entendu au coeur de la réflexion engagée par le Gouvernement en vue d'une refondation de l'architecture globale de notre système de retraites, pour le rendre plus juste et plus lisible pour les assurés.
Les autres travaux engagés et la concertation avec les partenaires sociaux permettront d'examiner les modalités les plus adaptées pour garantir le niveau de vie des retraités.
Le débat qui s'est ouvert récemment nous impose d'être encore plus engagés à l'avenir. Sur certaines questions, auxquelles je ne répondrai pas ce matin, vous recevrez une réponse dans les prochaines semaines ou les prochains jours. Je tenais cependant à dresser ce panorama complet sur la situation des retraités en France.
Monsieur le secrétaire d'État, vous m'avez rappelé les décisions du Président de la République sur la CSG. Je vous rappelle à mon tour que celles-ci reprennent une demande formulée depuis des mois par l'opposition. Nous ne pouvons que nous réjouir d'un revirement qui satisfera les retraités.
Vous avez également mentionné des mesures qui ne sont pas sans incidences sur le pouvoir d'achat des retraités. Cependant, vous l'avez reconnu vous-même : la question que je vous ai posée reste en suspens. Je ne vous cache pas que les retraités sont inquiets. Beaucoup d'entre eux sont des gens fragiles, toujours en attente.
J'ai noté que le sujet sera bientôt discuté. J'insiste sur la question des pensions de réversion, qui constitue une véritable préoccupation pour les retraités, notamment les plus âgés.
La parole est à Mme Geneviève Levy, pour exposer sa question, no 482, relative aux effectifs de la police nationale à Toulon.
Ma question s'adressait à M. le ministre de l'intérieur. À Toulon, les quartiers de Sainte-Musse et de La Beaucaire connaissent depuis quelque temps une explosion particulièrement inquiétante de violence et de trafics.
Les tirs nocturnes, et maintenant diurnes, causent des blessés et des morts. La ville de Toulon a consenti – et continue de consentir – un effort très important, tant pour les effectifs de la police municipale que pour le développement de la vidéosurveillance ; mais rien ne remplace les moyens et les missions de la police nationale.
Or, bien que celle-ci soit très impliquée dans des actions régulières, ses effectifs ne sont pas suffisants pour rassurer les habitants de l'agglomération toulonnaise, qui manifestent leur inquiétude et crient leur colère, ni pour rétablir durablement l'ordre républicain.
Et pour cause : le centre-ville, même s'il se transforme, notamment grâce à une opération de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, l'ANRU, connaît des trafics importants. De nouveaux quartiers sont gangrenés par la délinquance, ce qui crée un climat permanent d'insécurité et de violence. Rendez-vous compte : il y a eu huit morts depuis le début de l'année sur l'aire toulonnaise.
Nous constatons l'arrivée de bandes organisées venant de Marseille et de Nice, qui passent d'une métropole à l'autre sans difficulté pour asseoir leur commerce criminel. Les effectifs de police de ces deux villes ont été renforcés alors que les moyens toulonnais ne cessent de diminuer, lentement mais sûrement. Ne me répondez pas que les renforts ponctuels estivaux sont une réponse à l'activité des trafiquants, qui s'exerce tout au long de l'année. Les demandes incessantes du maire de Toulon aux ministres de l'intérieur successifs sont restées sans effet ; si des promesses ont été faites, elles n'ont pas été tenues. Quels moyens humains vont être déployés dans les prochains mois pour assurer la sécurité des habitants de l'aire toulonnaise et, surtout, lutter durablement contre les trafics, la délinquance et la violence, qui ne cessent de progresser ?
La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.
Madame la députée, la lutte contre le trafic de stupéfiants constitue un défi majeur dans le cadre du renforcement de la sécurité quotidienne de nos concitoyens, et le Gouvernement en est pleinement conscient. Dans l'agglomération toulonnaise, comme vous venez de le rappeler, on observe, depuis 2017, une recrudescence des violences, avec un usage d'armes à feu directement lié aux trafics de drogue, qui se développent et suscitent une inquiétude légitime de la population. Pour y faire face, le dispositif policier a été adapté et se renforce. La circonscription de sécurité publique de La Seyne-sur-Mer dispose de 136 agents, et celle de Toulon de 691 personnels, auxquels s'ajoutent 24 agents du renseignement territorial.
Il est aussi important que nous revoyions nos modes d'action. À cet égard, la police de sécurité du quotidien jouera un rôle majeur, par un renforcement de la présence policière sur la voie publique ; par ailleurs, les relations entre les polices municipales s'approfondissent dans l'agglomération toulonnaise. La police de sécurité du quotidien s'appuie aussi sur le travail mené par deux délégués à la cohésion entre la police et la population, qui ont été affectés à certains secteurs sensibles de Toulon et de La Seyne-sur-Mer. Enfin, la direction départementale de la sécurité publique – DDSP – dispose de policiers formateurs antidrogue, dont l'un est établi à La Seyne-sur-Mer, pour mener des actions de sensibilisation dans les établissements scolaires. Dans la circonscription de police de Toulon, 116 trafics ont été démantelés l'an dernier par les services de la DDSP. S'agissant de la police judiciaire, l'antenne de Toulon se concentre sur les dossiers criminels liés à la drogue. Le service régional d'identité judiciaire de Marseille est systématiquement dépêché sur les affaires d'homicide ou de tentative d'homicide confiées à l'antenne de police judiciaire, et un renfort est également apporté à l'antenne de police judiciaire de Toulon par les enquêteurs du siège de la direction centrale de la police judiciaire – DIPJ – de Marseille.
Cette mobilisation produit des résultats. L'antenne de police judiciaire de Toulon a saisi 1,5 million d'euros d'avoirs criminels depuis janvier 2018, contre 276 000 euros en 2017, et quatre faits d'homicide volontaire relevant de règlements de comptes ont été résolus. La lutte contre les stupéfiants est un combat de chaque instant, qui va s'intensifier. À la demande du Président de la République, un plan de mobilisation générale de la lutte contre les trafics de stupéfiants dans les quartiers sensibles est en cours d'élaboration, et les services du ministère de l'intérieur y travaillent activement.
Je connais bien le travail du délégué à la cohésion entre la police et la population à Toulon, qui est très utile, surtout en matière de renseignement ; il avait été suspendu et j'ai beaucoup oeuvré pour qu'il soit rétabli.
Cela étant, madame la ministre, vous me parlez de la police de sécurité du quotidien ; c'est certainement une bonne chose – on ne va pas faire la fine bouche – , mais si elle est de nature à rassurer les habitants, elle ne saurait inquiéter les bandes organisées, les trafiquants durs, qui posent actuellement problème dans les quartiers que j'ai cités. C'est la raison pour laquelle nous serons très attentifs au plan que vous annoncez. Néanmoins, j'y insiste, madame la ministre, il y a urgence : comme vous l'avez rappelé, on constate depuis 2017 une montée indiscutable de la violence et de la criminalité liée à la drogue.
La parole est à M. Jean-Jacques Gaultier, pour exposer sa question, no 483, relative à l'arrondissement de Neufchâteau.
Ma question s'adresse à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et concerne le projet de modification des limites de l'arrondissement de Neufchâteau. Tous les élus de l'arrondissement, les conseillers départementaux, les conseillers régionaux, les présidents des communautés de communes, le député et les sénateurs, sont hostiles à un tel projet, qui a pour objet de rattacher en bloc l'intégralité de la communauté de communes de Mirecourt Dompaire à l'arrondissement d'Épinal. Je me fais l'écho de cette opposition unanime qui repose tant sur des motifs de forme que de fond. Sur la forme, tout d'abord, l'absence d'information initiale, de concertation préalable, est toujours un mauvais signal envoyé aux élus. Plus grave, une telle décision irait à l'encontre de leur avis, puisque le conseil départemental des Vosges s'est prononcé contre un tel projet lors de deux votes, le 21 novembre 2016 et, beaucoup plus récemment, le 29 juin 2018. De la même façon, le pôle d'équilibre territorial et rural – PETR – de l'ouest des Vosges, qui regroupe toutes les communautés de communes de ce territoire, s'est également prononcé, par une délibération unanime, contre cette éventualité. Or, ce pôle d'équilibre est considéré comme un partenaire et un interlocuteur : il est le signataire des contrats de ruralité conclus avec l'État et du pacte « offensive croissance emploi » avec la région.
S'agissant du fond, après le big bang de la loi NOTRe, ce tsunami territorial qui a entraîné de nombreuses modifications pour les cantons, les communautés de communes, les régions – telle la région Grand Est, qui va des bords de la Seine aux bords du Rhin ! – , les élus aspirent à la stabilité territoriale – d'ailleurs promise par le Gouvernement. Par ailleurs, la plupart des modifications issues de la loi NOTRe auxquelles je fais référence ont eu pour effet d'augmenter la taille des territoires ruraux – cantons, communautés de communes et régions. Or, ce projet conduirait, en sens inverse, à réduire la taille et la population de l'arrondissement de Neufchâteau, qui présente déjà un fort caractère rural, en lui faisant perdre 12 000 habitants. À terme, cela l'affaiblirait et lui porterait préjudice.
Je demande donc à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales de prendre en considération l'avis de tous les élus, qu'ils soient de droite, de gauche ou du centre – pour une fois, ils sont tous d'accord, et cela ne coûterait pas un centime à l'État – et de garantir la stabilité territoriale, la « cohésion » de l'ouest vosgien – pour reprendre l'intitulé de votre ministère – , en évitant notamment la dislocation de l'arrondissement de Neufchâteau.
La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.
Monsieur le député, le 1er janvier 2017 est entrée en vigueur la nouvelle carte intercommunale des Vosges, qui a fait passer le nombre d'établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre dans le département de vingt-sept à onze. Dans ce cadre, une réflexion sur l'évolution de l'échelon infradépartemental de l'État avait été engagée pour adapter les limites des arrondissements aux nouveaux contours des EPCI, et non pas l'inverse. Le préfet des Vosges a donc consulté en 2016 les élus du département, afin de construire un projet cohérent avec les bassins de vie envisagés et les attentes des élus des territoires. Lors de la réunion du comité de pilotage du 12 décembre 2016, la majorité des élus du secteur de Mirecourt Dompaire ont voté en faveur d'un rattachement à l'arrondissement d'Épinal, par cinquante-trois votes contre quarante-neuf. C'est pour cette raison qu'à l'époque, le projet de redéfinition des limites de l'arrondissement territorial prévoyait le rattachement de la future intercommunalité à l'arrondissement d'Épinal.
Au demeurant, la communauté de communes de Mirecourt Dompaire a délibéré dès le 27 février 2017 pour adhérer au SCOT – schéma de cohérence territoriale – des Vosges centrales, ce qui constituait un argument supplémentaire en faveur de son rattachement à l'arrondissement d'Épinal. Néanmoins, lors de la séance du 29 juin 2018, le conseil départemental a voté – de nombreux élus s'étant abstenus – contre ce projet. Par conséquent, le préfet des Vosges a reçu le 6 décembre 2018 les élus de l'arrondissement afin de leur indiquer que la publication de l'arrêté du préfet de région portant redéfinition des limites des arrondissements de l'État dans le département des Vosges avait été suspendue. Un cycle de concertation avec les élus concernés sera relancé, dont il convient d'attendre le résultat.
Enfin, la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales me prie de vous signaler que quelle que soit la décision qui sera prise, l'avenir de la sous-préfecture de Neufchâteau n'est pas remis en cause.
Je connais bien tous ces arguments, notamment le vote de ce comité de pilotage. C'était d'ailleurs assez extraordinaire, puisque ce comité de pilotage concernait une institution qui n'existait pas encore, une future intercommunalité. Cela n'a donc pas beaucoup de valeur réglementaire. Je me félicite que le préfet ait reçu l'ensemble des élus le 6 décembre dernier, d'ailleurs à ma demande, et que la publication de l'arrêté ait été suspendue. Cela étant, je reste vigilant, car la langue française est précise et je connais la différence entre une suspension et une annulation. Nous serons attentifs à l'organisation de cette nécessaire concertation, au dialogue, à l'information des élus, qui manquait cruellement auparavant.
La parole est à M. Philippe Dunoyer, pour exposer sa question, no 493, relative à l'attribution des bourses aux étudiants de Nouvelle-Calédonie.
Madame la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, le droit général d'accès à l'enseignement supérieur, récemment réaffirmé par la loi du 8 mars 2018 relative à l'orientation et à la réussite des étudiants, implique que le système d'attribution des bourses permette à toute personne titulaire du baccalauréat de bénéficier d'une formation supérieure. Or, le nombre d'étudiants boursiers en licence à l'université de Nouvelle-Calédonie est encore très inférieur à la moyenne nationale : le taux s'élève à 27 %, contre un taux national de 38 %. Ce taux est également très inférieur à celui du reste des outre-mer : 63 % à La Réunion, 55 % en Martinique, 61 % en Guadeloupe, 58 % en Guyane et 65 % à Mayotte. Cette différence s'explique notamment par l'inadéquation du plafond de revenus à la réalité économique du pays. En effet, les plafonds de ressources relatifs aux bourses d'enseignement supérieur sont fixés par arrêté pour l'année universitaire, sur la base des revenus et du coût de la vie en métropole. Or, le coût de la vie outre-mer, en particulier en Nouvelle-Calédonie – ainsi qu'en Polynésie française – est nettement plus élevé. Selon un rapport de l'Institut d'émission d'outre-mer de 2017, l'écart de prix moyen entre la Nouvelle-Calédonie et la France métropolitaine est estimé à 33 % – et à 39 % pour la Polynésie française en 2015. Une autre étude conduite par l'INSEE – Institut national de la statistique et des études économiques – sur le même sujet indique que le coût de la vie est, en Nouvelle-Calédonie, 1,7 fois supérieur à celui de la métropole. En outre, le montant des bourses attribuées aux étudiants est également calculé sur la base du coût de la vie en métropole, ce qui en diminue fortement l'effet dans l'environnement de cherté de la vie auquel je viens de faire référence.
Madame la ministre, l'amélioration de la condition étudiante doit concerner tous les étudiants, qu'ils soient des outre-mer ou de l'Hexagone, afin d'offrir à chacun les mêmes chances de réussir. Compte tenu de ces éléments, entendez-vous prendre en compte le coût de la vie dans les collectivités régies par l'article 74 de la Constitution et en Nouvelle-Calédonie pour définir d'une part le seuil de revenus permettant de déterminer le droit aux bourses d'enseignement supérieur allouées aux étudiants dont les parents vivent dans ces territoires, et d'autre part le montant des bourses attribuées à ces étudiants ?
La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.
Monsieur le député, vous appelez mon attention sur la situation des étudiants néo-calédoniens sollicitant une bourse d'enseignement supérieur sur le fondement de critères sociaux, en particulier à la lumière des spécificités économiques et sociales de la Nouvelle-Calédonie. Vous l'avez rappelé, le dispositif d'attribution des bourses est national. Conformément aux dispositions en vigueur, les bourses sont accordées de manière uniforme en fonction d'un barème national, qui prend en considération les ressources et les charges de la famille de l'étudiant, la distance entre le domicile familial et le lieu de formation, ainsi que le nombre d'enfants à charge du foyer autres que le demandeur.
Pour l'année universitaire 2017-2018, ce sont 1 571 étudiants qui ont bénéficié d'une bourse d'enseignement supérieur sur critères sociaux en Nouvelle-Calédonie. Une particularité s'applique aux étudiants néo-calédoniens : ils peuvent bénéficier du maintien du paiement de la bourse pendant les vacances d'été, et percevoir ainsi douze mensualités au lieu de dix lorsqu'ils répondent aux critères d'attribution de ces bourses et effectuent leurs études en métropole tout en étant à la charge de leurs parents résidant dans un département d'outre-mer, une collectivité d'outre-mer ou en Nouvelle-Calédonie. 542 étudiants ont ainsi pu bénéficier de ce dispositif, chiffre en augmentation de près de 15 %.
La mise en place de la contribution vie étudiante et de campus en Nouvelle-Calédonie permettra aussi de renforcer le niveau d'accompagnement et la mise à la disposition de ces étudiants de facilités dans les domaines de la santé, du bien-être et de la culture.
Néanmoins, nous sommes tout à fait conscients que la situation sociale et le niveau de revenus d'un territoire ultramarin à l'autre n'est pas comparable à l'aune des seuls taux de boursiers, et que le coût de la vie peut se révéler très variable d'un territoire à l'autre, y compris au sein de l'Hexagone.
C'est pourquoi nous poursuivons notre nouvelle approche, qui permet de mieux prendre en compte la diversité des problématiques territoriales, dans le prolongement des échanges qui avaient commencé en séance publique à l'occasion de l'examen de la loi relative à l'orientation et à la réussite des étudiants. Comme vous le savez, mon ministère a commencé à analyser la situation des boursiers ultramarins, notamment en Nouvelle-Calédonie, travail que je suis, bien sûr, prête à poursuivre avec vous à la suite des échanges que vous avez déjà pu avoir avec mes services.
Merci, madame le ministre, pour votre connaissance du dossier. Cette sensibilité a son importance, du moins telle qu'elle est ressentie par les étudiants et par les parents. En effet, l'injustice flagrante dont témoignent les chiffres que j'ai rappelés tout à l'heure doit recevoir une réponse ou des éléments de réponse. Ceux-ci doivent être spécifiques à nos territoires, comme vous l'avez dit, mais il faut certainement revoir aussi le dispositif dans sa globalité, car son uniformité ne traduit pas les difficultés économiques parfois insurmontables que rencontrent certains parents – dont les revenus sont pris en compte – dans un environnement économique où le coût est 1,7 fois supérieur. En la matière, comparaison n'est pas raison.
Je suis donc tout à fait satisfait de savoir que cette question est ouverte auprès de vos services, et je les en remercie. Avec mon collègue Philippe Gomès, qui vous avait également saisie de cette question lors de l'examen de la loi, nous serons à votre disposition pour y travailler et trouver les solutions les plus adaptées à nos territoires.
La parole est à M. Gabriel Serville, pour exposer sa question, no 467, relative à la réforme constitutionnelle et au statut de la Guyane.
Ma question s'adresse à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice. En mars-avril 2017, la Guyane était précurseur d'un vaste mouvement qui a précédé les dynamiques sociales observées depuis quelques semaines sur le territoire de France hexagonale. Ce mouvement de protestation se cristallisait autour de revendications liées au non-développement de notre territoire. Il a par ailleurs abouti à la signature, le 21 avril 2017, d'un accord dit « accord de Guyane », dont l'un des points forts est la mise en oeuvre d'un processus d'évolution du statut de la Guyane.
Cette question est récurrente, car elle a été posée par tous les présidents de la Ve République, du général De Gaulle au dernier président, François Hollande. Le président Emmanuel Macron a du reste évoqué lui aussi cette éventualité lors de son passage en Guyane. Elle a également été reprise par toute la classe politique de Guyane, mais elle n'a toujours pas abouti à ce jour.
Nous sommes cependant à un tournant de notre histoire car, en vertu des compétences qui lui ont été attribuées par la loi du 27 juillet 2011, le congrès des élus de Guyane s'est récemment prononcé, dans une résolution, pour demander que le Premier ministre soit saisi afin que le processus de consultation populaire qui doit précéder l'évolution du statut soit mis en oeuvre le plus rapidement possible. Toutefois, comme cela s'est produit après l'affaire Benalla, les mouvements sociaux qui ont secoué la France hexagonale ont conduit à différer la reprise des travaux relatifs à la révision de la Constitution.
Madame la ministre, l'attente d'une réponse gouvernementale à la hauteur des enjeux est très forte en Guyane. Je voudrais donc savoir si, à ce stade, vous seriez en mesure de nous dire solennellement quelle réponse peut être apportée à cette demande émanant de la classe politique de la Guyane, sachant que, comme j'ai toujours dit, la question n'est pas d'ordre idéologique – il s'agit simplement d'une question de bon sens, d'une question pragmatique. Nous avons en effet relevé qu'à chaque fois que nous votons les lois dans cet hémicycle, l'exposé des motifs traite de questions, de caractéristiques et de vérités qui se rapprochent de la situation qui prévaut en France hexagonale, mais qui sont aux antipodes des vérités que nous connaissons sur le territoire de la Guyane. La population de ce territoire et la classe politique sont donc en droit d'attendre une réponse favorable de votre part.
La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.
Monsieur le député, vous interrogez le Gouvernement sur les évolutions institutionnelles envisagées pour la Guyane dans le cadre de la révision constitutionnelle. Pour ce qui est tout d'abord du calendrier de cette dernière, l'examen du projet de loi, comme vous le savez, ne reprendra pas au mois de janvier – ce point est en train d'être acté, en cet instant même, en conférence des présidents. Cette décision fait suite à la volonté exprimée par le Président de la République d'organiser un grand débat sur l'ensemble du territoire national, qui doit notamment porter sur la démocratie et la citoyenneté, car c'est ce que nos concitoyens nous demandent. Le Premier ministre l'a annoncé ici même jeudi dernier. Il est donc logique d'attendre le résultat de ce grand débat avant de reprendre l'examen de la révision constitutionnelle.
Pour ce qui concerne plus spécifiquement la Guyane, l'organisation, en 2018, des états généraux, clôturés par le congrès des élus du 27 novembre dernier, a démontré toute l'importance de la question institutionnelle pour les élus du territoire, comme vous venez de le rappeler. L'État n'a pas été associé à ces réflexions mais, comme la ministre des outre-mer, Annick Girardin, a déjà eu l'occasion de le dire, le Gouvernement ne s'opposera pas aux projets des territoires, pourvu qu'ils soient portés par l'ensemble – c'est-à-dire une très grande majorité – des parlementaires, qu'ils aient pu faire l'objet d'une large concertation et qu'ils soient pleinement partagés par tous les Guyanais. C'est à cela que le Gouvernement sera attentif.
Merci, madame la ministre. J'ai été très attentif à la réponse que vous nous avez apportée. Je reconnais avec vous les contraintes qui pèsent aujourd'hui sur le calendrier. Toutefois, comme vous l'avez dit et comme je tiens à le rappeler, nos territoires ont déjà fait l'objet à plusieurs reprises d'états généraux. Nous avons été, en quelque sorte, précurseurs de ce qui se passera prochainement sur le territoire de France hexagonale. Les assises des outre-mer nous ont permis de réfléchir à diverses modalités susceptibles de faire évoluer le cadre économique de nos territoires. Il est vrai que la question récurrente du cadre institutionnel n'a pas encore abouti. Dans tous les cas, je tiens à rappeler que, comme je l'ai dit précédemment, nous sommes déjà engagés dans ce processus.
Je souhaiterais qu'une fois que nous serons parvenus à l'étape ultime, le Gouvernement entende que nous sommes dans une démocratie et que, pour fonctionner correctement, la démocratie n'a pas besoin de s'appuyer sur une très large majorité, comme vous l'avez dit dans votre réponse, mais tout simplement sur une majorité. Dans le passé, en effet, les Guyanais s'étaient déjà prononcés et on nous avait fait entendre que la majorité qui s'était dégagée n'était pas suffisante pour que le résultat soit pris en considération. Je tiens donc à dire aujourd'hui, afin que cela soit noté pour la suite des travaux que nous allons entreprendre, qu'il suffit que la majorité des élus s'oriente dans une direction pour obliger – je dis bien : obliger – le Gouvernement à prendre en considération la décision majoritaire, même si cette majorité n'est pas écrasante ni très large. Il suffit en effet qu'il y ait la majorité pour que les choses avancent.
Nous sommes donc en attente de la réponse que nous fera le Premier ministre, tout en sachant que nous pouvons parfaitement décorréler les travaux qui seront menés sur le territoire de la Guyane de ceux qui seront menés sur celui de la France hexagonale.
La parole est à M. Philippe Latombe, pour exposer sa question, no 487, relative à la lutte contre le trafic international d'organes.
Je souhaite appeler l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la nécessité d'améliorer la traçabilité des transplantations d'organes réalisées par nos compatriotes à l'étranger. Avec sa loi de bioéthique, la France promeut le don libre et gratuit d'organes, ce qui interdit aussi bien la vente que le tourisme médical de transplantation. Il ne peut donc être accepté que la transplantation d'organes devienne un commerce international qui s'alimente d'organes prélevés de force, dont les Français seraient clients. Dans ce cas de figure, en effet, l'assurance maladie devient, par le suivi des patients transplantés, un payeur dans la chaîne du marché des prélèvements forcés d'organes.
Le Parlement européen a condamné, en 2013 et 2016, la pratique massive des prélèvements forcés d'organes en Chine. Une dizaine de pays ont modifié ou sont en train de modifier leurs lois de bioéthique et leurs lois pénales pour lutter contre ce trafic et dissuader leurs citoyens de recourir à ces transplantations. En mars 2015, le Conseil de l'Europe a proposé à tous les pays du monde la signature et la ratification de sa convention pour lutter contre ce trafic. Cette convention est entrée en vigueur le 1er mars 2018. A ce jour, dix-sept pays l'ont signée et cinq l'ont ratifiée. La France n'en fait pas partie.
Pouvez-vous nous dire, madame la ministre, si la signature et la ratification de la convention européenne sont programmées dans un avenir proche et ce qui est envisagé dans le cadre de la révision de la loi de bioéthique pour améliorer l'effectivité de la lutte contre le trafic d'organes.
La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.
Monsieur le député, vous avez raison : le trafic d'organes humains constitue une atteinte à la dignité humaine et au droit à la vie, et fait en outre peser une menace sur la santé publique. C'est la raison pour laquelle les États membres du Conseil de l'Europe ont élaboré cette convention du 25 mars 2015 relative à la lutte contre le trafic d'organes, dite convention de Saint-Jacques-de-Compostelle.
Cette convention invite les gouvernements à ériger en infraction pénale le prélèvement illicite d'organes humains de donneurs vivants ou décédés et prévoit aussi des mesures de protection et de dédommagement des victimes, ainsi que des mesures de prévention destinées à garantir la transparence et un accès équitable aux services de transplantation. Il s'agit donc d'un traité international en matière pénale, qui a été négocié par le ministère de la justice et auquel nous souscrivons totalement, puisque l'ensemble des principes de la convention du Conseil de l'Europe sont déjà inscrits tant dans la loi française que dans la convention d'Oviedo ratifiée par la France en 2011, ce qui traduit l'engagement de notre pays à combattre le trafic d'organes.
Pour ce qui concerne plus précisément le texte que vous évoquez, des consultations interministérielles sont en cours quant à sa signature possible par la France, compte tenu des autres textes régissant les trafics d'organes.
La parole est à M. Erwan Balanant, pour exposer sa question, no 488, relative aux conduites addictologiques.
Ma question s'adresse à Mme la ministre des solidarités et de la santé. J'ai été alerté par les élus locaux de mon territoire et par le centre de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie – CSAPA – de Quimperlé de la recrudescence des conduites addictologiques. Alcoolisation forte, binge drinking, prise de stupéfiants et banalisation de leur usage : le constat est terrible et inquiétant. J'ai reçu à ma permanence une équipe du CSAPA engagée et déterminée à travailler pour lutter contre ce fléau. Ces acteurs passionnés de terrain poussent aujourd'hui un cri d'alarme.
Depuis plusieurs années, en partenariat avec la communauté d'agglomération de mon territoire, la gendarmerie et les lycées, ils ont mis en place un programme de prévention et d'action intitulé « Conduites à risque avec les produits ». Ils ont ainsi pu rencontrer près de 1 400 lycéens et, avec eux, aborder leurs pratiques festives et identifier les risques et les comportements à adopter. Ils les ont également sensibilisés aux conséquences pénales de ces conduites.
Cette action nous permet quelques constats. Il y a, d'abord, des motifs de préoccupation : 60 % des jeunes ont déjà connu un trou noir dès la seconde, 35 % ont déjà fumé du cannabis en seconde et 55 % en terminale. Les consommations de drogues plus dures se développent et la cocaïne est parfois devenue ce qu'ils appellent la « base ».
Il existe aussi, à côté de ces constats terribles, des motifs de satisfaction et d'espoir. D'abord, la prévention fonctionne et il y a une prise de conscience et un impact mesurable chez les jeunes qui ont eu la chance de suivre ce programme. Le recours aux consultations jeunes consommateurs – CJC – , par exemple, a augmenté de 200 % en deux ans. En outre, un véritable maillage territorial s'est mis en place avec les acteurs de terrain.
Madame la ministre, cette action est aujourd'hui menacée, faute de financement. Je poserai donc deux questions : quelles actions et quelles mesures concrètes le Gouvernement envisage t-il pour renforcer le réseau des CSAPA ? Imagine-t-il un grand plan de lutte contre les consommations à risque, qui permettrait de lutter contre ce fléau qui a un coût humain et social énorme ?
La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.
Le dispositif médico-social dédié à la prévention et à la prise en charge des consommateurs de substances psychoactives comprend un réseau de 420 centres de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie et de 149 centres d'accueil et d'accompagnement à la réduction des risques pour les usagers de drogues ; 411 millions d'euros de crédits sont consacrés au fonctionnement de ces structures d'addictologie.
La prévention des consommations à risque dès le plus jeune âge, qu'il s'agisse de tabac, d'alcool ou encore de cannabis, est une priorité de notre politique de prévention car, vous l'avez rappelé, la prévention fonctionne et c'est essentiel. C'est pourquoi le plan Priorité prévention, lancé en mars 2018, contient plusieurs mesures visant à renforcer ces actions de prévention. Il repose tout d'abord sur une école davantage promotrice de santé et sur des dispositifs d'ores et déjà déployés, tels que les ambassadeurs élèves ou encore le service sanitaire des étudiants en santé, qui consacre une grande partie de son temps à ces questions de prévention. Nous le savons, lorsque des jeunes parlent aux jeunes, cela a souvent un impact plus important.
Le deuxième sujet porte sur la capacité à résister à la pression du groupe et l'acquisition de compétences relationnelles pour faire face au conflit. Ce sont autant de facteurs de protection qui permettent de prévenir les comportements à risque futurs, notamment à l'adolescence, lorsqu'il est parfois très difficile de résister à ces pressions de groupe.
L'ensemble de ce plan incite au partenariat entre collèges, lycées et centres de consultations jeunes majeurs. Il favorise les actions de prévention collective, mais aussi une meilleure orientation des jeunes en difficulté, ainsi que de leurs proches, vers les bonnes structures. Pour soutenir le renforcement de la prévention des addictions en général dès le plus jeune âge, le Gouvernement a décidé d'élargir l'objet du fonds de lutte contre le tabac à l'ensemble des addictions. Ce plan de lutte bénéficiera d'ailleurs du produit de l'amende forfaitaire pour usage de stupéfiants prévue dans le projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice. Ce nouveau fonds, qui interviendra en complémentarité des autres sources de financement, renforcera la prévention des addictions.
Les réseaux CSAPA bénéficieront-ils concrètement de ces aides et de ce fonds de 411 millions ? Aujourd'hui, ce réseau fonctionne et obtient des résultats : il serait dommage de s'en priver.
Par ailleurs, je vous relance sur la question d'une campagne nationale sur les consommations à risque. Cela fait très longtemps qu'il n'y a pas eu dans notre pays de campagne d'ampleur sur les consommations à risque, en particulier concernant les drogues – cela existe pour le tabac et l'alcool, mais très peu pour les drogues.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour exposer sa question, no 490, relative à l'accès aux soins visuels des Manceaux et Sarthois.
Je souhaite appeler l'attention de la ministre des solidarités et de la santé sur l'accès aux soins visuels des Manceaux et des Sarthois. En effet, en France, selon les dernières données disponibles, pas loin de 15 % des enfants de 4 à 10 ans souffriraient de troubles de la vue, notamment de myopie. Chez les personnes âgées dépendantes en établissement, environ un tiers seulement des personnes réaliseraient régulièrement un bilan. Il faut attendre environ trois mois en moyenne entre la demande de rendez-vous médical chez les ophtalmologistes et la visite.
Dans la Sarthe, la situation est encore moins bonne et même inquiétante : alors que la densité des ophtalmologistes et de 8 pour 100 000 habitants en France, elle est de 4,5 dans le département. Sauf urgence et situation médicale particulière, aucun nouveau rendez-vous n'est accordé aux patients dont les médecins sont partis. Il leur est proposé de se rendre hors département, à Angers, à Nantes ou à Paris, ce qui, au-delà de la distance, constitue un frein économique au suivi visuel des familles.
Dans ces conditions, des solutions concrètes devraient être trouvées. L'installation prioritaire de nouveaux médecins, la délégation de la réalisation d'actes de contrôle et de surveillance des ophtalmologistes vers les orthoptistes et les opticiens, la réalisation de consultations en télémédecine avec l'assistance d'un autre professionnel ou encore la possibilité d'autoriser les opticiens à réaliser des actes en établissement d'hébergement pour personnes âgées constituent autant de moyens d'améliorer l'accès aux soins en proximité.
Je souhaite donc connaître les intentions du Gouvernement et les réponses concrètes que l'État a la responsabilité d'organiser. La loi du 26 janvier 2016 énonce ainsi qu'il est en charge des parcours de soins qui, par la coordination des acteurs sanitaires, sociaux et médico-sociaux, en lien avec les usagers et les collectivités territoriales, assurent la continuité, l'accessibilité, la qualité, la sécurité et l'efficience de la prise en charge des usagers.
Madame la ministre, que puis-je tout simplement répondre aux patients qui viennent me voir en me disant : « Je n'ai plus de médecin spécialiste et on me conseille d'aller à 200 kilomètres » ?
La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.
Le soin visuel est une préoccupation majeure depuis plusieurs années. La Sarthe est un territoire sensible, qui a vu émerger de nombreuses initiatives de la part des professionnels de santé. Ceux-ci ont été accompagnés par l'agence régionale de santé ; leurs expérimentations ont ensuite été déployées et intégrées dans le droit commun. À titre d'exemple, les protocoles de correction optique autorisés en Pays de la Loire dès la fin 2013 sont aujourd'hui entrés dans le droit commun et permettent de prendre en charge chaque année plus de 4 000 patients sarthois avec des délais inférieurs à un mois.
Mais je vous rejoins sur un point : la démographie médicale, tout particulièrement dans la Sarthe, nécessite d'aller beaucoup plus loin. L'agence régionale de santé des Pays de la Loire a donc autorisé le protocole de correction optique à distance au début du mois d'octobre. Plusieurs sites de déploiement sont à l'étude et verront le jour en 2019. D'autres pistes exploitant la télémédecine sont à l'étude ; d'autres protocoles ont été proposés et sont en cours d'instruction, certains concernant les collaborations avec les opticiens. Par ailleurs, les contrats de coopération et les protocoles organisationnels permettront aux orthoptistes de suivre les pathologies stabilisées. La question de l'accompagnement, notamment financier, doit encore être précisée. Le département de la Sarthe a aussi été désigné pour expérimenter le dépistage des troubles visuels de l'enfant par les orthoptistes.
Enfin, l'agence régionale de santé ainsi que les unités de formation et de recherche poursuivent leurs efforts pour permettre l'augmentation du nombre d'ophtalmologistes formés en Pays de la Loire, et notamment à Angers. Ainsi, la capacité de l'école d'orthoptie a été augmentée de 25 % en deux ans. Ce sujet, vous le savez, est un sujet qui tient à coeur au Gouvernement : nous y travaillons avec la ministre des solidarités et de la santé, notamment en ce qui concerne les lieux de formation, puisque nous savons que le lieu de formation est essentiel si l'on veut stabiliser les jeunes dans leur territoire.
Madame la ministre, je vous remercie pour votre réponse, qui apporte des éléments opérationnels et concrets aux problèmes en attente sur le territoire. Je veux insister particulièrement sur l'urgence qui existe dans ce département – cela ne date pas d'aujourd'hui. Le départ en retraite de nombreux praticiens, dans différentes spécialités comme chez les généralistes, nous pose vraiment question. Nous avons tous la volonté, tant du côté du Gouvernement que des collectivités et des députés, d'accompagner ces dispositifs. J'entends votre réponse et j'espère que nous pourrons améliorer la situation en 2019 : nous ferons un bilan à la fin de l'année prochaine.
La parole est à Mme Cécile Rilhac, pour exposer sa question, no 472, relative à la prise en charge des capteurs en continu du taux de glycémie.
Ma question s'adresse à Mme la ministre des solidarités et de la santé. Les personnes diabétiques sous insuline peuvent désormais, grâce à des capteurs spécifiques, connaître très simplement leur taux de glycémie. Cette avancée leur permet d'anticiper les phases d'hypoglycémie ou d'hyperglycémie et d'adapter en conséquence leur traitement. Cette surveillance est indispensable pour le diabète de type 1. Ainsi, il est notamment possible de programmer des alarmes la nuit en cas de dépassement des seuils glycémiques, évitant à de nombreux parents de s'angoisser en permanence et de se réveiller pour contrôler le taux de glycémie de leur enfant.
Malheureusement, les tout derniers capteurs ne sont remboursés par l'assurance maladie que sous certaines conditions bien précises. De l'avis de nombreux patients et des parents concernés, ces critères peuvent paraître injustes, pour au moins deux raisons. Première raison : le diabète de type 1, au moment où il est diagnostiqué, est généralement très grave puisqu'il présente des risques de complications ou d'empoisonnement. Il est donc urgent de le traiter pour éviter à la personne des séquelles, sans attendre les six mois requis par la sécurité sociale.
Deuxième raison : l'assurance maladie a fixé une barre minimum de 8 % de l'HbA1c, c'est-à-dire des hypoglycémies sévères, pour la prise en charge de ces capteurs, le risque étant que certains malades cessent de se soigner pour atteindre ce seuil permettant le remboursement – je vous laisse imaginer les conséquences potentielles de cette dérive sur certains malades. Faut-il le rappeler, notre pays compte aujourd'hui plus de 4 millions diabétiques de type 1 et de type 2, un chiffre qui doit nous interpeller, mais surtout nous faire prendre conscience de l'urgence de continuer à faire de la prévention – c'est indispensable – mais aussi de l'accompagnement de ceux qui souffrent. C'est notre responsabilité et notre rôle que de chercher à améliorer la vie de centaines de milliers de nos concitoyens touchés par le diabète.
Aussi, madame la ministre, je souhaiterais connaître la position du Gouvernement et vous demander par là même si vous êtes favorable à un remboursement sans condition des capteurs en continu du taux de glycémie.
La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.
Madame la députée, la prise en charge du diabète est graduée et doit être adaptée à chaque stade de la pathologie. La première étape dans la prise en charge du patient, c'est souvent un changement des habitudes de vie – changement d'alimentation, promotion de l'activité physique. En fonction de la progression de la pathologie et du type de diabète, il existe de nombreux médicaments permettant de traiter les patients et d'assurer un suivi de prise en charge par une approche graduée : on commence avec certains médicaments puis, si nécessaire, et seulement si nécessaire, on en ajoute d'autres en fonction de la progression de la maladie.
Il en va de même avec les dispositifs médicaux que vous évoquez : ils doivent s'inscrire dans une stratégie graduée de prise en charge. S'ils ne permettent pas de remplacer la lecture de la glycémie par bandelette, ils la complètent pour les patients pour lesquels une autosurveillance par bandelette plus de quatre fois par jour n'est pas suffisante pour équilibrer le traitement. Il ne s'agit donc pas de ce que l'on appelle un dispositif de premier recours, car il faut d'abord tenter ce qui fonctionne pour la grande majorité des patients, à savoir le suivi de la glycémie par bandelette. En outre, ces dispositifs de suivi en continu de la glycémie ne sont pas si faciles à utiliser. Ils nécessitent une formation précise des patients, une adhésion au traitement qui doit être réévaluée et modifiée périodiquement. Ce dispositif ne peut donc pas être proposé d'emblée à tous les patients.
Par ailleurs, les conditions de prise en charge ont été définies, après avis de la Haute Autorité de santé, qui a revu l'ensemble des données disponibles pour faire une recommandation sur les bonnes modalités de prise en charge de ces dispositifs. Cet avis de la Haute Autorité de santé est la meilleure garantie que seules les considérations scientifiques liées à l'intérêt des patients seront prises en compte. Pour permettre d'avancer sur ce sujet, la Haute Autorité de santé a demandé qu'une étude en vie réelle soit conduite pour évaluer en pratique l'apport réel de ces dispositifs. La ministre des solidarités et de la santé sera particulièrement attentive à ce que les conclusions de cette étude se traduisent par toute évolution de la prise en charge qui apparaîtra nécessaire.
Merci, madame la ministre, pour cette réponse. Je ferai simplement une petite remarque concernant l'approche graduée. Dans le cas du diabète de type 1, et particulièrement lorsqu'il s'agit d'enfants, les capteurs sont une véritable nécessité pour leur assurer très rapidement un confort de vie ainsi qu'une scolarité normale, leur évitant de se sentir malades. Vous avancez l'argument selon lequel cela serait difficile car il faudrait une formation et une approche graduée ; or il faut savoir que les parents comme les enfants s'y font particulièrement vite. En revanche, je suis ravie d'apprendre que la Haute Autorité de santé a demandé cette évaluation : j'espère que les associations de malades y seront associées, de manière à ce que les conclusions aillent dans leur sens.
La parole est à M. Jean-François Parigi, pour exposer sa question, no 480, relative au certificat de décès à domicile.
La désertification médicale est un des fléaux qui frappent nos territoires ruraux, mais aussi urbains. Elle se traduit par un engorgement des services d'urgence et un manque de médecins. Au-delà des problématiques de santé auxquelles nos concitoyens sont confrontés, cette situation provoque des difficultés pour constater les décès à domicile. En effet, il n'est pas rare que les praticiens ne soient pas disponibles pour établir rapidement un certificat de décès, laissant des proches déjà choqués dans une situation d'extrême détresse.
Le certificat de décès est pourtant un document essentiel pour entamer les procédures administratives à la suite de la perte d'un proche. Vous le savez, madame la ministre : chaque année, un quart des décès en France ont lieu à domicile. Il ne s'agit donc pas d'un sujet anecdotique. Le traumatisme de familles confrontées à la perte d'un proche dont le corps reste parfois deux à quatre jours à domicile avant d'être pris en charge n'est pas acceptable. La raréfaction de la ressource libérale sur nos territoires ne doit pas prendre en otage les administrés.
Par ailleurs, cette situation affecte d'autres services publics, notamment nos policiers et gendarmes, mobilisés plusieurs heures, voire plusieurs jours, dans l'attente de l'intervention d'un médecin.
Afin de lutter contre la désertification médicale, le Gouvernement a annoncé plusieurs mesures : développement de la télémédecine, fin du numerus clausus, ou encore création du statut d'infirmier en pratique avancée, qui permettra aux infirmiers de gagner en autonomie et d'effectuer plus d'actes, à l'exception du certificat de décès à domicile. L'objectif est de réduire la fracture territoriale en matière d'accès aux soins. Même s'il faut saluer certaines de ces initiatives, elles ne porteront leurs fruits que dans quelques années et ne répondent pas à la problématique du certificat de décès à domicile.
Face à la pénurie de praticiens, il existe une solution pour constater un décès à domicile : déléguer cet acte à d'autres professionnels de santé, notamment les infirmiers, comme c'est le cas au Canada. Moyennant une formation adaptée, les infirmiers libéraux pourraient en effet établir cet acte. Bien souvent, ces professionnels de santé suivent le patient depuis plusieurs années. Dès lors, que compte faire le Gouvernement pour soulager la souffrance des familles endeuillées ? Allez-vous entamer des négociations avec les professionnels de santé ?
La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.
Monsieur le député, le certificat de décès est un document médical sur lequel le médecin doit indiquer les maladies ou affections morbides ayant directement provoqué le décès, ainsi que les autres états morbides, facteurs ou états physiologiques ayant contribué au décès ; mais il peut aussi demander des investigations en cas de mort suspecte. Ainsi, la certification du décès est aussi un processus légal par lequel le fait, la cause et les circonstances du décès sont attestés par écrit.
C'est pourquoi il n'est pas prévu de déléguer cet acte à d'autres professionnels de santé. Toutefois, face aux difficultés que vous évoquez, qui sont réelles, d'autres solutions ont été recherchées pour faire établir un certificat de décès à domicile en zone sous-dotée en médecins. Une première mesure relevant de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 permet de valoriser la prise en charge de l'examen médical nécessaire à l'établissement de ce certificat de décès : l'examen nécessaire à l'établissement du certificat de décès au domicile réalisé par le médecin est rémunéré par un forfait de 100 euros lorsqu'il est réalisé en période de faible disponibilité médicale, la nuit, le week-end ou les jours fériés, ou tous les jours et à toute heure dans les zones sous-dotées.
Plus largement, cette mesure financière s'inscrit dans le contexte d'amélioration de l'accès aux soins, notamment de l'accès à un médecin. Vous l'avez rappelé, l'objectif du Gouvernement est d'augmenter la ressource en médecine générale de ville pour améliorer la prise en charge des parcours et assurer la continuité et la permanence des soins. Ces plans permettront également de renforcer la capacité des médecins à répondre aux demandes d'établissement de certificats de décès formulées par les familles dans des contextes douloureux. Vous pouvez compter sur la détermination du Gouvernement pour trouver toutes les pistes d'amélioration nécessaires.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Fixation de l'ordre du jour ;
Suite de la discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi de finances pour 2019.
La séance est levée.
La séance est levée à douze heures trente-cinq.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Serge Ezdra