La commission spéciale poursuit l'examen du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (n° 3875 rect.) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général, M. Damien Adam, M. Erwan Balanant, Mme Aurore Bergé, M. Lionel Causse, Mme Célia de Lavergne, Mme Cendra Motin, M. Mickaël Nogal et M. Jean-Marc Zulesi, rapporteurs).
Chers collègues, nous avons examiné 3 285 amendements, au rythme moyen de quarante amendements à l'heure. Il en reste cent sur le titre IV. L'examen du titre V commencera demain matin.
Article 56 bis (nouveau) (chapitre III du titre IV du livre III du code de l'environnement) : Création d'un arrêté de limitation de l'accès aux aires protégées
Amendement CS5333 du rapporteur.
Nous sommes tous conscients du problème posé par l'hyperfréquentation de certains espaces.
Je propose de permettre aux maires et aux préfets de prendre des arrêtés pour réglementer ou interdire l'accès aux aires protégées lorsqu'une fréquentation excessive peut porter atteinte à leurs caractéristiques écologiques, forestières, paysagères ou esthétiques.
Avis très favorable. Je tiens à saluer le travail du sénateur M. Jérôme Bignon, du député M. Jimmy Pahun, et de nombreux autres qui connaissent dans leurs circonscriptions les problèmes d'hyperfréquentation des aires protégées. Je me suis rendu dans le parc national des Calanques avec Mme Claire Pitollat et M. Saïd Ahamada il y a quelques semaines, et j'ai pu y constater que l'hyperfréquentation met en danger la résilience de ces espaces sensibles.
Merci, madame la secrétaire d'État. Cet amendement répond à une forte demande des maires des îles du Ponant, très fréquentées. La loi d'orientation sur les mobilités a permis de réduire le nombre de véhicules faisant la traversée ; il sera maintenant possible de réguler le nombre de passagers.
Cet amendement renvoie à un décret en Conseil d'État. Conformément à l'usage, nous aimerions connaître les grandes lignes de ce décret avant la séance.
La commission adopte l'amendement.
Après l'article 56
Amendement CS3928 de Mme Valérie Petit.
Je vous propose un très bel amendement sur les forêts, en particulier celles qui ceinturent nos villes. Elles représentent de véritables poumons verts pour les habitants, ce sont des lieux où – quand nous ne sommes pas confinés – nous nous échappons pour nous reconnecter à la nature. Ces forêts rendent des services innombrables, elles nous protègent, et je suggère que nous les protégions à notre tour.
Je propose de classer les bois et forêts périurbains en forêts de protection. Ce serait un très bel objectif à nous fixer pour 2030, et j'espère susciter votre adhésion.
Vous proposez de classer tous les bois et forêts périurbains en forêt de protection. L'un des motifs de classement prévu par le code forestier concerne justement les forêts périurbaines. Il me semble que votre amendement est satisfait et je vous invite à le retirer.
Avis défavorable. Le classement en forêt de protection ne doit pas être généralisé, les situations doivent être étudiées au cas par cas. De plus, la notion de forêt périurbaine n'est pas définie dans la loi.
Je retiens la proposition du rapporteur et je retire l'amendement pour le retravailler en vue de la séance.
L'amendement est retiré.
Amendements identiques CS2658 de Mme Laurence Vichnievsky et CS3567 de M. Jimmy Pahun.
Il s'agit d'encourager la philanthropie foncière pour atteindre les objectifs fixés par la stratégie nationale des aires protégées : 30 % du territoire national sous protection, et 10 % sous protection forte.
Vous souhaitez exempter les gestionnaires d'espaces naturels protégés du droit de préférence bénéficiant aux propriétaires d'une parcelle boisée en cas de vente.
Je considère que l'équilibre actuellement prévu dans le code forestier en matière d'exemption au droit de préférence doit être préservé. Je vous invite donc à retirer ces amendements, sinon avis défavorable.
Créer une nouvelle exemption, quel qu'en soit le bénéficiaire, risque de fragiliser l'équilibre actuel du régime forestier. Je partage néanmoins votre diagnostic sur la nécessité d'un outil pour les gestionnaires d'espaces naturels – le Conservatoire du littoral, les conservatoires d'espaces naturels.
Je vous invite donc à retirer ces amendements pour y retravailler car il faut trouver des réponses à ce problème.
L'amendement est retiré.
Article 56 ter (nouveau) : Prorogation de certains décrets de classement de parcs naturels régionaux
Amendement CS5489 du Gouvernement.
Par dérogation à l'article L. 333‑1 du code de l'environnement, nous proposons que les décrets de classement des parcs naturels régionaux dont le terme vient à échéance avant le 31 décembre 2022 soient prorogés de six mois.
Pour chaque parc naturel régional concerné, tout décret de renouvellement de classement pris en application de l'article L. 333‑1 avant l'échéance des six mois emporte le terme anticipé de la prorogation.
Cette mesure facilitera le travail de ces parcs, contraints par des délais très resserrés, et dont le travail de concertation avec les parties prenantes a été perturbé par la crise sanitaire. Nous proposons de leur laisser six mois supplémentaires.
Je remercie Mme la secrétaire d'État de proposer une solution à ce problème qui avait été porté à notre connaissance lors des auditions. Vous apportez une réponse positive aux nombreux amendements de députés qui soulevaient cette difficulté, avis très favorable.
L'amendement part d'une bonne intention, mais il ne règle que la situation de deux parcs naturels régionaux. Pourquoi ne pas reprendre le délai de dix‑huit mois ? Beaucoup d'autres démarches administratives ont été reportées en raison de la pandémie, et nous sommes tous attachés à la Chartreuse, aux Grands Causses, au Massif des Bauges, au Verdon, au parc Normandie-Maine, au parc Loire-Anjou-Touraine, au Vercors, à la Forêt d'Orient, à la Montagne de Reims, au Queyras, au Luberon, aux Pyrénées Ariégeoises, au Pilat – la liste est longue ! Il n'y a pas de raison de ne pas proroger le délai de dix-huit mois, et j'espère que tous les collègues seront d'accord.
Les cinq parcs naturels régionaux concernés par cette disposition font état d'un retard entre cinq et six mois, il nous semble correct de retenir ce délai. Nous ne souhaitons pas créer un précédent trop important, car malgré le contexte difficile, nous ne pouvons pas laisser glisser le calendrier.
L'adoption de cet amendement ferait tomber le mien – CS274 – qui me paraît pourtant mieux correspondre à la réalité de l'ensemble des parcs concernés.
Notre amendement CS2978 propose également de porter le délai supplémentaire à dix-huit mois, et concerne vingt-cinq parcs. Je demande à la secrétaire d'État de retirer son amendement au profit du nôtre. (Sourires).
Excellente suggestion, Monsieur Bricout, mais les représentants des parcs concernés, qui ont été interrogés, estiment pouvoir régler le problème dans les six mois.
La commission adopte l'amendement.
En conséquence, les amendements CS2978 de Mme Cécile Untermaier, CS169 de M. Vincent Descoeur, CS170 de M. Vincent Rolland, CS231 de M. Patrick Hetzel, CS274 de M. Martial Saddier, CS330 de M. Dino Cinieri, CS640 de M. Guy Bricout, CS1048 de M. Emmanuel Maquet, CS1284 de M. Loïc Dombreval, CS2233 de Mme Laurence Trastour‑Isnart et CS426 de M. Jean-Michel Mis tombent.
Après l'article 56
Amendement CS4154 de M. Aurélien Taché.
C'est un sujet crucial. Il semble partir d'une situation particulière, mais il a une grande portée générale. Dans le cadre du projet de développement de l'Université Paris-Saclay, qui entraîne la construction de bâtiments et de routes, le souci de préservation de terres extraordinairement précieuses, d'une grande qualité agricole et abritant une importante biodiversité, a poussé l'État à adopter un dispositif inédit de protection : la zone de protection naturelle, agricole et forestière (ZPNAF). Elle protège cet espace de toute évolution réglementaire.
Dans le contexte de grande défiance des citoyens et des associations, je pense qu'une « zone à défendre » (ZAD) aurait déjà été installée sur ce territoire sans ce dispositif.
Il est temps de le renforcer, et de l'étendre partout où c'est nécessaire. Il peut être renforcé en garantissant par la loi l'existence d'une charte et d'un comité de pilotage. Ce dispositif doit être adopté partout où il s'impose, selon des diagnostics établis, ou chaque fois que des terres précieuses devront être protégées de grands projets de développement – je pense en particulier au célèbre Triangle de Gonesse, dont la richesse des terres n'est pas à démontrer.
Il existe déjà deux dispositifs qui peuvent être engagés à l'initiative des collectivités : les zones agricoles protégées (ZAP) et les périmètres de protection et de mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains. Avis défavorable.
La préservation de long terme est assurée par les deux dispositifs cités par le rapporteur. Ils assurent une forte protection réglementaire.
Une zone agricole protégée a déjà été constituée sur une superficie de quatre cents hectares dans le Triangle de Gonesse, et je suis favorable au classement de cent soixante-dix hectares dans sa partie sud. Mais cela doit se faire à l'initiative des collectivités locales.
Le niveau de protection apporté par une ZAP n'est pas comparable à la protection apportée par une ZPNAF. Si le périmètre d'une ZPNAF est décidé par décret, son existence est prévue par la loi, ce qui lui offre une protection supérieure.
L'inscription de la charte et du comité de pilotage dans la loi contribuera à rassurer. Il ne s'agit pas de mégoter : sur le plateau de Saclay, les associations mettent en doute la capacité d'une loi à protéger un site des puissances à l'œuvre en matière d'urbanisation. Il est urgent de protéger davantage.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS4062 de Mme Florence Lasserre.
Il s'agit de placer les terres agricoles sous la sauvegarde de la nation pour les faire bénéficier d'une protection similaire à celle reconnue aux forêts françaises. Le meilleur moyen de lutter contre l'artificialisation sera toujours de renforcer la protection des espaces naturels agricoles et forestiers.
Nous avons étudié un amendement identique, présenté par M. Potier, à l'article 48.
Limiter l'artificialisation répond déjà au problème des espaces naturels agricoles et forestiers. Il est important de trouver un équilibre entre sols naturels agricoles et forestiers. C'est l'objet de ce projet de loi.
Mettre les terres agricoles sous la sauvegarde de la nation pourrait conduire à les sanctuariser, interdisant tout projet innovant.
Les nouvelles dispositions pour lutter contre l'artificialisation prévoient la possibilité de compenser l'artificialisation dans certains lieux par des renaturations d'espaces agricoles. Le projet de loi est fondé sur une logique de flux ; avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette l'amendement CS3564 de M. Jimmy Pahun.
Amendement CS1776 de Mme Anne-Laurence Petel.
Il est proposé d'élargir le champ de compétence de la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF) en lui confiant la prérogative de formuler un avis conforme pour la réalisation de constructions et de projets d'aménagement nouveaux. Cet élargissement vise à renforcer la politique de lutte contre la réduction des surfaces situées en dehors des espaces urbanisés.
L'agriculture occupe plus de la moitié du territoire français, mais les pertes de surfaces agricoles utiles sont conséquentes. L'amendement propose donc de confier à la CDPENAF davantage de pouvoir pour la préservation des terres agricoles.
Nous avons déjà débattu d'un amendement identique, auquel j'avais rendu un avis défavorable. Élargir les compétences de la CDPENAF requiert au minimum une consultation des acteurs locaux. Demande de retrait, ou avis défavorable.
La modification proposée des compétences de la CDPENAF est vraiment importante. Même si nous souhaitons limiter les constructions conduisant à la consommation d'espaces ou au mitage, nous devons respecter l'équilibre entre les projets qui relèvent d'un avis conforme et ceux qui relèvent d'un avis simple. Les projets soumis à avis simple sont, pour la plupart, directement liés à l'exercice d'une activité agricole ou à la réutilisation du bâti existant. Il n'est pas souhaitable de séparer ces deux conditions, avis défavorable.
Je retire l'amendement, et je proposerai à son auteure d'améliorer la précision de sa rédaction.
L'amendement est retiré.
Amendement CS4655 de M. Jean-Charles Colas-Roy.
La trame verte, la trame brune et la trame bleue, dont il est question dans l'amendement, sont des concepts de travail. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendements identiques CS2662 de Mme Laurence Vichnievsky et CS3565 de M. Jimmy Pahun.
Nous préconisons de permettre la constitution d'obligations réelles environnementales (ORE) sur le domaine public. Cet instrument novateur existe pour le domaine privé, mais pas pour le domaine public. Il permettrait à l'État et aux collectivités de garantir la vocation environnementale de ses propriétés en cas de revente, afin de contribuer durablement à l'atteinte des objectifs fixés dans la stratégie nationale des aires protégées.
Permettre la signature d'obligations réelles environnementales sur le domaine public serait intéressant pour privilégier une gestion favorable à l'environnement des terrains concernés sur le long terme. Mais ces amendements doivent être retravaillés avant les débats en séances. Je vous invite donc à les retirer, à ce stade.
Je comprends tout l'intérêt de rendre possible la signature d'obligations réelles environnementales sur le domaine public, mais cette exception contrevient aux principes d'inaliénabilité et d'imprescriptibilité du domaine public. Cette mesure devant faire l'objet d'une réflexion approfondie avant la séance, je vous propose de retirer ces amendements.
Je soutiens le point de vue du Gouvernement : l'obligation réelle environnementale est censée s'imposer aux propriétaires privés. La gestion favorable à la biodiversité du domaine public est un vrai problème, mais je ne suis pas sûre que les obligations réelles environnementales soient l'outil approprié pour y répondre.
De plus, l'amendement comporte un biais : il permettrait d'utiliser les ORE sur le domaine public en contrepartie d'une réduction des ORE sur le domaine privé. Il faut être prudent, et chercher d'autres solutions aux questions soulevées par ces amendements.
Une bonne loi sur l'adaptation au changement climatique doit aussi savoir s'adapter, ce qui implique d'imaginer des solutions inédites. Je crains à nouveau de devoir pousser à être innovants, à ouvrir les opportunités plutôt que de les fermer. Cet amendement de grande qualité ouvre la discussion et mérite notre soutien.
Je suis disposée à retravailler cet amendement, qui est déjà issu d'un travail avec les conservatoires des espaces naturels. Il est vrai qu'il faut innover, et je suis tout à fait prête à le faire d'ici la séance.
Les amendements sont retirés.
Article 57 (article L. 215-4-1 [nouveau] du code de l'environnement) : Rétablissement de la possibilité pour le département d'exercer le droit de préemption au titre des espaces naturels sensibles sur les périmètres sensibles et validation des actes réglementaires intervenus dans ce sens depuis 2016
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CS5148 et CS5164 du rapporteur.
Elle adopte l'article 57 ainsi modifié.
Article 57 bis (nouveau) (article L. 215-14 du code de l'urbanisme) : Octroi d'un droit de visite au titulaire du droit de préemption des ENS
Amendement CS3563 de M. Jimmy Pahun, sous-amendements CS5474 et CS5475 de M. Paul Christophe.
Il est proposé que le titulaire du droit de préemption des espaces naturels sensibles bénéficie d'un droit de visite des biens. Cette mesure a été élaborée avec le Conservatoire national du littoral, dont la qualité du travail est reconnue.
Avis défavorable. Cette disposition prévoit également une suspension du délai d'instruction qui n'est pas souhaitable. De plus, s'agissant d'espaces naturels, une visite est moins déterminante que pour des espaces bâtis.
Je ne comprends pas bien le motif de ces avis défavorables. Nous octroyons un droit de visite des biens aux titulaires du droit de préemption, conformément à une demande de leur part. Pourquoi le refuser ?
Cet amendement me semble excellent. Un droit de visite est toujours adossé au droit de préemption, personne n'achète un bien sans le voir. Dans de grands espaces naturels sensibles, une visite permet de savoir s'il y a une décharge ou de vérifier l'état du sous-sol ; c'est utile.
Si un droit de visite est prévu pour tous les autres droits de préemption publique, je ne comprends pas pourquoi il ne serait pas accordé dans cette situation.
Je comprends l'intérêt d'un droit de visite du bien. C'est le II de l'amendement qui me pose problème, car il prévoit une suspension des délais d'instruction.
Je vous propose de rectifier l'amendement CS3563 pour supprimer cette suspension du délai et prévoir uniquement un droit de visite.
La commission rejette les sous-amendements CS5474 et CS5475
Elle adopte l'amendement CS3563 rectifié.
Après l'article 57
Amendement CS3740 de M. Jean-Bernard Sempastous.
Notre collègue M. Sempastous a déposé plusieurs amendements visant à encourager la remise en valeur des terres incultes et à favoriser les communes dans le cadre de la procédure de préemption. Quatre d'entre eux ont été « sauvés », dont celui-ci, relatif au fichier immobilier.
L'absence d'entretien des biens laissés à l'abandon favorise la fermeture des milieux qui nuisent aux écosystèmes. La procédure d'appréhension des biens sans maître ou présumés tels contribue à remettre en valeur ces sites. Toutefois, elle présente un écueil : les qualités de « successibles présentés » et de propriétaires connus sont incertaines, car difficiles à vérifier, voire invérifiables. L'inscription au fichier immobilier, tenu par les services de publicité foncière, constitue un critère objectif de vérification des actes publiés.
L'amendement vise à faire en sorte que les biens faisant partie d'une succession ouverte depuis plus de trente ans soient reconnus sans maître si aucun héritier ne figure dans le fichier immobilier. D'après le droit en vigueur, un bien sans maître est un bien faisant partie de la succession d'une personne décédée sans héritier, ou dont les héritiers n'ont pas accepté la succession dans les trente ans suivant le décès.
Pour qu'un bien immobilier soit considéré comme sans maître, il faut apporter la preuve que personne n'en est l'héritier. Or l'absence d'inscription au fichier immobilier n'en est pas une, car les héritiers d'un bien en deviennent propriétaires le jour du décès de la personne dont ils héritent. J'émets donc un avis défavorable à l'amendement, même s'il vise à accélérer et à simplifier la procédure d'appréhension.
Qu'un bien soit recensé au fichier immobilier comme dépourvu d'héritiers ne signifie pas qu'il l'est. Par exemple, des héritiers ayant omis de faire effectuer au notaire l'attestation permettant sa mise à jour n'en demeurent pas moins propriétaires du bien concerné. Avis défavorable.
Je retire l'amendement et inviterai notre collègue à le retravailler en vue de son examen en séance publique. Il faut trouver une solution au problème.
L'amendement est retiré.
Amendement CS1316 de Mme Delphine Batho.
Il s'agit de créer une zone de protection naturelle, agricole et forestière (ZPNAF) du Triangle de Gonesse, en Île-de-France, afin de protéger les 170 hectares de terres agricoles situés sur cette commune. En dépit de l'annonce de l'abandon du projet EuropaCity, la construction d'une gare en plein champ, à plus de deux kilomètres de toute habitation, se poursuit.
La présentation de cet amendement me permet d'insister sur la nécessité de concevoir autrement les ceintures maraîchères des grandes villes dans le cadre d'une stratégie de lutte contre le changement climatique, de relocalisation et de proximité. En ce qui concerne Paris et l'Île-de-France, l'autonomie alimentaire est probablement réduite à un jour. Les terres agricoles visées par l'amendement sont donc d'une valeur considérable pour aujourd'hui et pour demain et doivent être valorisées comme telles.
Le projet EuropaCity porte sur une superficie d'un peu moins de 700 hectares, dont 400 classés en zone agricole protégée (ZAP). Les 280 hectares restants font l'objet d'études. Avis défavorable.
La réflexion sur l'avenir de ce territoire se poursuit, en lien avec les acteurs locaux. La concertation avec les acteurs concernés et l'appropriation des enjeux qui en résulte sont indispensables. Il n'est pas nécessaire d'adopter une disposition législative. Avis défavorable.
Adopter une disposition législative est nécessaire, puisque, pendant que l'on débat du rapport Rol-Tanguy, les travaux de construction de la gare continuent, faisant fi du projet de coopérative pour une ambition agricole, rurale et métropolitaine d'avenir (CARMA) et de la mobilisation de la société civile pour valoriser ces terres et développer autour de nombreuses activités. Il y a donc un problème.
La commission rejette l'amendement.
Article 57 ter (nouveau) (articles L. 161-10 et L. 161-10-2 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime et article L. 3222-2 du code général de la propriété des personnes publiques) : Interdiction de la désaffection d'un chemin rural par décision administrative et précision des conditions de l'échange des parcelles sur lesquelles sont sis les chemins ruraux
Amendements identiques CS842 de M. Antoine Herth et CS5005 de M. Julien Aubert.
. Il s'agit d'empêcher la disparition de chemins ruraux qui, en étant considérés comme affectés à l'usage public, ne pourront pas être vendus. Il s'agit d'interdire la désaffectation par décision administrative d'un chemin utilisé, même de façon irrégulière, par le public.
Les amendements visent à protéger le patrimoine rural des communes, en faisant en sorte que le conseil municipal ne puisse désaffecter un chemin rural s'il est emprunté par le public. Cette démarche est légitime. Toutefois, la qualification de chemin rural englobe une grande diversité de situations, dont certaines se prêtent à des initiatives des communes visant à réorganiser l'espace rural. Sagesse.
Madame la secrétaire d'État, je vous remercie d'avoir émis un avis de sagesse. En quarante ans, les chemins ruraux ont perdu 50 % de leur linéaire. Outre leur fonction de desserte des parcelles, ils constituent un patrimoine qui appartient à tout le monde.
S'agissant des chemins ruraux appartenant aux collectivités locales, il n'y a pas de problème. S'agissant de ceux qui sont des propriétés privées, s'ils sont moins ou plus utilisés – ce qui ne signifie pas qu'ils ne le seront pas à nouveau un jour, pour la randonnée ou la pratique du vélo –, le risque existe qu'ils soient repris. Les amendements permettent de sanctuariser l'avenir des chemins ruraux, au bénéfice du monde rural mais aussi du monde urbain, dont les habitants s'y promènent.
Je partage l'avis de notre ami jurassien Jean-Marie Sermier. J'ajoute que certains chemins ruraux, notamment les plus anciens, qui sont des chemins creux, abritent une faune et une flore dont la protection est l'un des objectifs du présent texte. Monsieur le rapporteur, je vous pense sensible à la cause environnementale. Peut-être pourriez-vous reconsidérer votre avis sur les amendements, s'agissant d'un texte emblématique du quinquennat ? L'avis de sagesse du Gouvernement me convient à merveille. Les amendements permettent de conserver le patrimoine, tout en s'inscrivant dans une démarche de protection de la faune et de la flore.
Je remercie notre collègue Jean-Marie Sermier d'avoir abordé la question des chemins ruraux, qui recoupe en partie les enjeux de la biodiversité.
J'ajoute qu'il faut ouvrir une réflexion sur le financement des travaux connexes. Un problème d'équilibre financier se pose entre l'accès à l'alimentation et à l'énergie, la préservation de la biodiversité et la récréation écologique. Les communes rendent souvent des arbitrages malheureux, faute de moyens pour satisfaire la desserte de certains espaces.
La question de l'économie rurale et des chemins ruraux qui permettent de la faire prospérer doit être posée. J'avoue ne pas avoir de solution. Les financements traditionnels, par le biais des associations foncières de remembrement (AFR), semblent dépassés, corporatistes et inadaptés aux communes d'aujourd'hui. Notre collègue aborde un sujet méritant l'ouverture d'une mission d'information parlementaire. Le problème est tout sauf négligeable.
Je soutiens les amendements. La désaffectation d'un chemin n'est jamais durable, de nombreux exemples en attestent – j'habite un village de 500 habitants, dont j'ai longtemps été maire. Un chemin est désaffecté, faute d'usage agricole, jusqu'au jour où des habitants férus de randonnée décident qu'il mérite d'être rouvert, et souvent participent à son nettoyage. Un chemin désaffecté pendant dix, vingt ou trente ans peut, un beau jour, répondre à un besoin des populations.
Par ailleurs, dans le cadre de l'ouverture de corridors écologiques, il arrive – j'ai récemment eu l'occasion de le constater – que les pires difficultés se posent, car les chemins ont disparu, ce qui oblige à passer par des propriétés privées, avec toutes les contestations qui en résultent.
. Je remercie notre collègue M. Potier d'avoir escamoté mon amendement !
J'aimerais ajouter deux arguments. Comme l'a rappelé notre collègue M. Benoit, les chemins ruraux rendent service à la biodiversité, tout autant que les haies, qui font l'objet d'un plan de gestion durable (PGDH). Il serait dommage de s'en priver. Par ailleurs, pensons aux jeunes, qui font preuve d'un fort désir de reconnexion avec la nature. Ne les privons pas de la possibilité de redécouvrir les chemins ruraux et de les réinvestir !
Je soutiens les amendements. Dans cette période où on ne peut aller ni au restaurant, ni au spectacle, se balader le samedi et le dimanche dans nos campagnes est très apprécié par nos concitoyens, qui redécouvrent ces chemins. Ils sont très empruntés. Ma circonscription, qui est très rurale, compte 294 communes, dont 108 ont élu un nouveau maire aux dernières élections. La plupart d'entre eux s'intéressent aux chemins ruraux, pour en faire des voies dédiées aux mobilités douces, notamment le vélo.
Je soutiens les amendements. Les chemins ruraux sont très importants. Or leur préservation n'est pas toujours facile. Dans la zone légumière du Léon, où la terre est chère, certains agriculteurs les mettent en culture, ce qui a pour effet de les faire disparaître. Et les promeneurs qui empruntent le GR34 débouchent parfois sur un champ.
Compte tenu de ce débat, et même si j'ai toujours des doutes sur l'intérêt que présente, pour les communes, la possibilité de faire évoluer les chemins ruraux, j'émets un avis de sagesse.
La commission adopte les amendements.
Amendements CS2507 de M. Pierre Venteau et CS2992 de M. Yannick Kerlogot (discussion commune).
La commission adopte l'amendement CS2507. En conséquence, l'amendement CS2992 tombe.
Après l'article 57
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette les amendements identiques CS2506 de M. Pierre Venteau et CS3140 de M. Yannick Kerlogot.
Amendement CS3163 de M. Loïc Dombreval.
J'aimerais savoir pourquoi l'amendement fait l'objet d'avis défavorables. Il vise à faire en sorte que le Gouvernement remette annuellement au Parlement un rapport sur la mise en œuvre des dispositifs d'obligations réelles environnementales (ORE) et de paiements pour services environnementaux (PSE) réalisés sur le territoire national.
Il me semble important de montrer que nous voulons valoriser les terres agricoles, et qu'un service rendu à la nature doit être rémunéré, d'autant plus que les ORE peuvent être utilisées au titre de la compensation d'atteintes à l'environnement. En dresser le bilan permettrait d'étendre leur application à d'autres domaines. La bonne compréhension et l'évaluation de ces outils me semblent nécessaires.
Madame Tuffnell, je tiens à vous éclairer sur ce point très important. Ces deux outils innovants sont opérationnels, ce dont nous pouvons nous féliciter. La loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages prévoit un rapport sur la mise en œuvre des ORE. Il sera publié dans les jours à venir, après validation par le secrétariat général du Gouvernement (SGG). Je recommande cette saine lecture !
S'agissant des PSE, ils sont en cours de déploiement, grâce notamment à un budget de 150 millions d'euros sur trois ans. Le ministère de la transition écologique publiera un bilan de cette expérimentation, qui a vocation à inspirer la prochaine réforme de la politique agricole commune (PAC), ce à quoi nous serons très attentifs.
L'amendement est donc satisfait.
La commission rejette l'amendement.
Chapitre V Adapter les territoires aux effets du dérèglement climatique
Article 58 A (nouveau) (article L. 125-5 du code de l'environnement, articles L. 271-4 et L. 271-5 du code de la construction et de l'habitation et article 3-3 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986) : Adaptation du dispositif d'information acquéreur locataire pour les biens exposés au déplacement du trait de côte
Amendement CS5051 du rapporteur, sous-amendement CS5373 de Mme Sophie Panonacle.
Je voudrais, avant de vous présenter mes amendements, remercier ceux qui m'ont aidé à les rédiger, en particulier les députés Sophie Panonacle, Stéphane Buchou et Jimmy Pahun, mais aussi Mme la ministre.
Nous abordons le problème du trait de côte, provoqué par l'érosion et l'élévation du niveau de la mer. Pas moins de 20 % des côtes françaises sont concernées. Les territoires littoraux étant plus denses que la moyenne, de nombreux logements sont concernés par les variations territoriales : entre 5 000 et 50 000, d'ici à 2100, pour une valeur estimée entre 800 millions et 8 milliards d'euros, selon les estimations du centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA). Or, les outils actuels ne permettent pas de répondre aux besoins exceptionnels engendrés par la nécessité de se replier vers les zones littorales non exposées à l'érosion côtière. Il nous a donc semblé nécessaire de faire évoluer les outils dont disposent ces territoires.
Ainsi, l'amendement CS5048 tend à ce qu'un décret identifie les territoires les plus exposés au recul du trait de côte. Le CEREMA et les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) ont été chargés de cette mission, afin de mieux informer les habitants du recul du trait de côte. Les communes identifiées devront établir une cartographie à intégrer dans leur document d'urbanisme. Des zonages de l'exposition pourront être réalisés par les collectivités elles-mêmes sur la base des données des observatoires locaux du littoral, en s'appuyant sur le CEREMA et le bureau de recherches géologiques et minières (BRGM).
L'amendement CS5051 vise à améliorer le dispositif d'information des acquéreurs et locataires de biens immobiliers situés dans les zones exposées. L'information sera délivrée dès la visite des lieux et non plus lors de la signature de la promesse de vente ou du contrat de location. Elle intégrera l'information relative au recul du trait de côte ainsi que les conséquences pour le marché immobilier.
L'amendement CS5044 tend à ce que le zonage de l'exposition au recul du trait de côte, ainsi intégré au document d'urbanisme, distingue entre l'exposition à l'érosion de court et moyen terme à l'horizon de trente ans et celle à long terme, à l'horizon de cent ans.
Enfin, l'amendement CS5049 vise à accorder un droit de préemption spécifique afin de faciliter la maîtrise foncière dans le cadre des biens menacés d'érosion côtière. Ce droit, institué par la commune ou l'intercommunalité compétente, devra faciliter la réduction du nombre de constructions en zones très exposées et permettra d'installer des constructions non pérennes ailleurs.
Le sous-amendement vise à compléter ainsi l'amendement : « Les annonces publicitaires pour la vente et la location des biens doivent obligatoirement porter la mention : bien exposé au risque de l'érosion côtière. » Les personnes intéressées pourraient ainsi être informées avant même la première visite. Aujourd'hui, un tiers des transactions se font entre particuliers et il importe de ne pas les mettre en danger.
L'adoption de l'amendement permettra de délivrer, à temps, une information suffisamment complète. Votre sous-amendement n'est pas inintéressant. Nous pourrions peut-être réfléchir à en revoir la rédaction mais, en attendant, je vous invite à le retirer.
L'amendement CS5051 vise à améliorer l'information du dispositif d'information des acquéreurs et locataires de biens immobiliers car, aujourd'hui, il ne contient aucun élément relatif au recul du trait de côte. Qui plus est, vous proposez de transmettre l'information dès la première visite du bien, ce qui améliore l'efficacité du dispositif tout en aidant l'acquéreur ou le locataire à prendre sa décision. Enfin, vous prévoyez l'usage du numérique, ce qui s'inscrit dans le plan de transformation numérique de l'action publique. Pour toutes ces raisons, avis favorable.
Quant au sous-amendement, je partage l'avis du rapporteur. L'important est d'informer pour que chacun puisse prendre une décision en connaissance de cause mais insérer cette mention dans les annonces publicitaires pourrait représenter une contrainte excessive susceptible de freiner le marché immobilier. En rester au stade de la première visite me semble un bon compromis entre la nécessaire information des acquéreurs ou locataires et la fluidité du marché immobilier. Je vous invite à le retirer.
Je comprends vos arguments mais je pensais plus particulièrement à la visite entre particuliers. Comment prouver que le particulier a bien informé l'acquéreur ou le locataire, si un conflit survient par la suite ?
Le sous-amendement est retiré.
La commission adopte l'amendement.
Article 58 B ( nouveau ) (article L. 321-15 [nouveau] du code de l'environnement) : Identification par décret des communes exposées à l'érosion littorale
Amendement CS5048 du rapporteur, sous-amendements CS5428 de M. Jimmy Pahun, CS5370 de Mme Sophie Panonacle, CS5442 de M. Stéphane Buchou, CS5371 de Mme Sophie Panonacle, CS5443 et CS5444 de M. Stéphane Buchou.
L'amendement tend à ce que les territoires les plus exposés au recul du trait de côte soient identifiés par décret. Ce travail serait réalisé par le CEREMA et les DREAL.
Le sous-amendement tend à intégrer les décharges, sauvages ou non, à la cartographie de communes concernées par l'évolution du trait de côte.
Il s'agit d'associer le Conseil national de la mer et des littoraux (CNML) à l'élaboration de la liste des communes les plus menacées par le recul du trait de côte. Il serait légitime à remplir cette fonction en raison des missions qui lui sont déjà assignées. En effet, il assure l'élaboration, le suivi et l'évaluation de la stratégie nationale pour la mer et le littoral. Il contribue, par ses avis et ses propositions, à orienter et coordonner les actions publiques en mer et dans les territoires littoraux.
Depuis près de dix ans, suite à la tempête Xynthia, la stratégie nationale de gestion intégrée du trait de côte (SNGITC) est le socle des réflexions et projets menés autour de l'érosion côtière. Nous proposons d'inscrire dans le code de l'environnement cette stratégie afin de définir les orientations locales de gestion du trait de côte.
Il s'agit de permettre à toute commune dont le territoire est en contact avec le rivage maritime d'être inscrite sur cette liste sans en attendre la révision, prévue tous les neuf ans, afin de profiter des dispositifs qui en découlent.
Je vous propose de transformer le comité national de suivi et de gestion intégrée du trait de côte, que je préside, pour lui donner une existence juridique. Deux programmes d'action ont été adoptés, 2012-2015 et 2017-2019, mais depuis, il est difficile de le faire vivre.
Je vous propose par ailleurs de le renommer « comité national de l'aménagement littoral ».
Enfin, le dernier sous-amendement tend à créer des commissions régionales de gestion de la dynamique littorale, chargées du suivi, de l'élaboration et de la labellisation de l'application des stratégies locales.
Ces sous-amendements sont tous intéressants, mais certains pourraient être revus d'ici à la séance publique. C'est le cas de ceux de M. Buchou qui pourraient être retravaillés avec le CNML. J'émets donc un avis favorable au sous-amendement CS5370 qui vise justement à associer le CNML à l'élaboration de la liste, et un avis défavorable aux autres.
L'amendement du rapporteur, auquel je suis favorable, répond à la volonté du Gouvernement d'anticiper la prise en compte de l'érosion afin de permettre aux territoires d'adapter la recomposition spatiale, tout en concentrant leur action sur les zones prioritaires.
Monsieur Pahun, le Gouvernement, sensible au problème des décharges sauvages, a pris des décisions, cette année, dans le cadre du comité interministériel de la mer. Ainsi, sur la base de la cartographie des décharges historiques en cours de réalisation par le BRGM, à partir des données fournies par les collectivités territoriales, une expérimentation sera lancée afin de dépolluer les décharges prioritaires. Je vous invite à retirer le sous-amendement.
Madame Panonacle, le CNML joue un rôle particulier dans l'élaboration des politiques d'aménagement, de protection et de mise en valeur de la mer et des littoraux, notamment la gestion intégrée des activités liées à la mer et au littoral. Sa proposition est une bonne idée et je suis favorable au sous-amendement CS5370.
Monsieur Buchou, vous proposez d'accorder aux stratégies locales une valeur juridique en les inscrivant dans la loi. Aujourd'hui, la dynamique est plutôt bien engagée, comme en témoignent les stratégies qui se mettent en place dans tous les territoires, même si ce n'est pas toujours au même rythme. Ces stratégies locales ont d'autant plus de force et d'influence qu'elles sont élaborées avec les acteurs locaux. C'est beaucoup plus important que leur inscription dans la loi. Je fais confiance aux acteurs du territoire pour se mobiliser et construire ensemble ces stratégies. Je vous invite à retirer votre sous-amendement CS5442 qui est satisfait.
J'en viens au sous-amendement CS5371 de Mme Panonacle. Nous avons décidé de dresser par voie réglementaire la liste des communes exposées au recul du trait de côte et devant intégrer dans leur document d'urbanisme une cartographie. Nous voulons diriger l'action publique vers les zones prioritaires en incitant les collectivités à s'emparer de ce sujet. Toutefois, l'article L. 321-15 du code de l'environnement, que l'amendement du rapporteur vise à insérer, devrait prévoir de réviser cette liste au moins tous les neuf ans, ce qui signifie qu'elle pourra être actualisée chaque fois que nécessaire, afin de tenir compte des évolutions locales. Une commune qui souhaitera être intégrée à cette liste pourra l'être si les phénomènes en cause le justifient. Je vous invite à retirer le sous-amendement.
Enfin, j'invite M. Buchou à retirer ses sous-amendements. Je comprends qu'il souhaite renforcer l'efficacité de la gouvernance, mais la stratégie nationale de gestion intégrée du trait de côte s'est dotée, dès 2012, d'un comité national de suivi afin de sensibiliser les acteurs nationaux, locaux, aux problématiques de l'érosion côtière. Présidé par un parlementaire, il constitue une instance de concertation avec les représentants des parties prenantes et il n'a pas d'existence légale. Cependant, la création d'une nouvelle instance obligatoire dans le champ des problématiques littorales contredirait l'esprit de simplification, de souplesse et d'adaptabilité qui doit nous animer et qui est facteur de résilience. Enfin, la notion de gestion intégrée du trait de côte, issue du Grenelle de la mer, et employée par la sphère académique, est bien acceptée par tous les acteurs. Il serait dommage de modifier la terminologie.
Par ailleurs, ni la loi, ni le règlement, n'imposent aux territoires de se doter d'une instance dédiée au suivi des problématiques de gestion intégrée du trait de côte. Elles sont débattues au sein des instances locales existantes, comme les conseils maritimes de façade, le parlement de la mer en Occitanie ou encore la conférence régionale de la mer et du littoral en Bretagne ou dans les Pays de la Loire.
L'instauration de commissions dédiées aux problématiques du littoral aurait également pour conséquence de complexifier la gouvernance locale, ce qui n'irait pas dans le sens de la simplification.
Le sous-amendement de M. Pahun relève du bon sens. Les décharges sauvages, fréquentes en bord de mer, ont des conséquences très graves pour l'écologie en cas d'érosion, comme en témoigne le cas de la décharge du quartier de Dollemard, au Havre. Il serait dommage de s'en remettre à une simple expérimentation. Je suis choquée de voir des décharges se déverser dans la mer. L'érosion n'a pas pour seule conséquence de déloger des gens, elle peut également polluer la mer.
Les problématiques sont différentes. Nous avons besoin d'une cartographie des communes concernées par le recul du trait de côte pour mener des politiques de prévention. Le problème des décharges ne concerne pas ces seules communes. Nous ne pouvons pas nous occuper prioritairement, de ce point de vue, de certaines communes alors que les dangers que représentent ces décharges ne sont pas forcément liés au recul du trait de côte. Le BRGM travaille à la conception de la cartographie de ces lieux. Rassurez-vous : votre préoccupation, légitime, est entendue.
C'est vrai, de plus en plus de stratégies locales sont mises en place sur le littoral, mais le vrai sujet reste celui de l'opposabilité. Le rapporteur, qui connaît bien la région de la Nouvelle Aquitaine, ne me contredira pas. Si on n'inscrit pas les stratégies locales dans la loi, certains particuliers ou professionnels continueront à faire n'importe quoi dans les territoires littoraux. Je ne pense pas, malheureusement, que si l'on en reste là, nos territoires littoraux deviennent véritablement résilients.
Les sous-amendements CS5428, CS5371, CS5443 et CS5444 sont retirés.
La commission rejette le sous-amendement CS5442.
Elle adopte le sous-amendement CS5370 et l'amendement du rapporteur sous‑amendé.
Article 58 C ( nouveau ) (article L. 562-4-1 du code de l'environnement) : Articulation des documents d'urbanisme avec les dispositions des plans de prévention des risques littoraux (PPRL)
Amendement CS5050 du rapporteur.
L'amendement vise à prévoir dès à présent l'articulation avec les plans de prévention des risques. Ces dispositions ont pour objet de préciser les modalités de mise en cohérence des plans de prévention des risques littoraux intégrant des dispositions relatives à l'érosion, lorsque des documents d'urbanisme ont intégré la prise en compte du recul du trait de côte.
Nous sommes surpris de la manière dont se déroule la discussion autour de cet article qui n'existait pas, il y a encore quelques instants. Ce sont neuf amendements du rapporteur qui visent à reposer la problématique du trait de côte et non un amendement du Gouvernement. Ce n'est pas sérieux. Depuis longtemps, nous dénonçons les conditions de travail de cette commission spéciale, qui mettent à mal notre pouvoir d'amendement. Nous ne pouvons pas proposer quoi que ce soit de précis pour améliorer un texte rédigé par amendement et que l'on découvre au dernier moment ! Le problème du recul du trait de côte concerne plus de 1 000 communes et pose de graves difficultés aux propriétaires lorsqu'ils veulent vendre leurs biens mais aussi aux élus pour l'élaboration de schémas de protection. Nos collègues, qui ne siègent pas dans notre commission, mais sont plus sensibilisés que moi à ce problème, puisque je suis élu d'un des départements les plus éloignés de la moindre côte, le Jura, auraient pu travailler sur ce sujet. Ils n'ont pas pu le faire dans de bonnes conditions, ce que nous dénonçons.
Les parlementaires travaillent depuis très longtemps sur le problème du trait de côte, ceux de la majorité comme ceux qui siègent dans des groupes d'étude. Ce travail a donné lieu à de nombreux échanges, notamment avec les élus représentant les communes concernées, qui se sont réjouis de l'arrivée de ce texte. Le Gouvernement a proposé des mesures par ordonnance pour proposer plus rapidement aux territoires les mesures qu'ils attendent depuis longtemps. Le rapporteur en a repris différents aspects, à la suite d'un travail avec le Gouvernement et de nombreuses concertations, pour aboutir à la meilleure rédaction possible et en débattre avec vous. Nous y sommes. En tant que membre du Gouvernement, je suis ravie que le travail parlementaire mené depuis de nombreuses années aboutisse enfin. Bien sûr, le texte est perfectible, c'est pourquoi nous en discutons à présent.
Depuis 2017, je préside le groupe d'études Littoral et nous travaillons avec tous les députés qui en sont membres pour apporter des réponses aux différents enjeux. Depuis décembre, nous avons augmenté le nombre d'auditions car nous pensions que le projet de loi dit « 4D » s'emparerait du problème du recul du trait de côte. Beaucoup de députés ont pu y participer, quelle que soit leur appartenance politique. La dernière réunion s'est tenue jeudi dernier et nous avons pu valider le dépôt de ces amendements. Lorsque nous avons appris que des mesures seraient prises par voie d'ordonnance, nous avons négocié avec le Gouvernement pour enrichir cet article 48 par nos amendements.
Nous ne remettons pas en cause le travail qui a été fait par Mme la ministre, par M. le rapporteur et par l'ensemble des collègues concernés par la question. Le recul du trait de côte est effectivement un problème considérable, qui fait l'objet de réflexions depuis 2017.
Vous nous dites, Madame la ministre, que ce travail a déjà beaucoup avancé. S'il avait trouvé une traduction dans le projet de loi, cela nous aurait permis de travailler normalement : nous aurions pu déposer des amendements, et ceux de nos collègues qui ne sont pas membres de la commission spéciale auraient pu prendre connaissance du dispositif.
Nous sommes dans une situation où le rapporteur coconstruit avec la ministre, alors que celle-ci devrait coconstruire avec l'ensemble des parlementaires. Sur ce point comme sur d'autres, nos remarques ne sont pas entendues.
La commission adopte l'amendement.
Article 58 D ( nouveau ) (article L. 4433-7-2 du code général des collectivités territoriales) : Dispositions de coordination pour les communes exposées au recul du trait de côte dans les régions d'outre-mer
Amendement CS5045 du rapporteur.
La commission adopte l'amendement.
Article 58 E ( nouveau ) (articles L. 121-19 et L. 121-21, paragraphe 3 [nouveau] de la sous-section 3 de la section 1 du chapitre Ier du titre II du livre Ier et article L. 121-45 du code de l'urbanisme) : Adaptation des documents d'urbanisme et des règles d'utilisation des sols des communes les plus exposées à l'érosion littorale et dispositions relatives à la réalisation et au financement de travaux d'office
Amendement CS5238 du rapporteur, sous-amendements CS5431 du Gouvernement et CS5455 de Mme Sophie Panonacle.
L'amendement CS5238 concerne l'adaptation des documents d'urbanisme et des règles d'utilisation des sols des communes qui seront les plus exposées à l'érosion. Le premier zonage correspondra à la survenance du recul à un horizon proche, c'est-à-dire moins de trente ans ; le second prendra en compte l'exposition des enjeux humains au recul du trait de côte à plus long terme, entre trente et cent ans.
Le sous-amendement CS5431 vise à préciser les modalités de financement de l'obligation de démolition mise en place par le nouvel article L. 121-22-5 du code de l'urbanisme créé par l'amendement CS5238.
Le financement sera à la charge du propriétaire du bien qui souhaite construire dans une zone d'exposition au recul du trait de côte à long terme prévue dans les communes les plus exposées. Il passera par un mécanisme de consignation : au moment où la démolition du bâtiment sera ordonnée par le maire, la somme retenue sera déconsignée et assortie d'intérêts. Je suis favorable à l'amendement ainsi sous-amendé.
La culture du risque est très peu développée dans notre pays. Pour contribuer à y remédier, le sous-amendement CS5455 vise à ajouter à la cartographie réalisée par la commune un document destiné à porter à la connaissance de tous – élus, techniciens et habitants – le phénomène de l'érosion côtière et à mettre en évidence la vulnérabilité des biens et des personnes. L'information est en effet le moteur essentiel pour faire progresser la culture du risque. Développer cette culture, c'est améliorer l'efficacité de la prévention et de la protection. Le CEREMA a consacré d'excellents rapports à la question.
En évoquant la culture du risque, Mme Panonacle parle à mon cœur ; nous devons effectivement la faire progresser. Toutefois, la solution proposée ne me paraît pas la plus efficace : l'ajout d'un document consacré à cet enjeu risque de noyer l'information.
J'ai lancé il y a deux mois une mission, animée par M. Frédéric Courant – connu notamment pour l'émission « C'est pas sorcier » –, qui rassemble notamment des scientifiques et des sociologues. Elle est chargée de réfléchir à la manière de développer la culture du risque, qu'il s'agisse de risques naturels ou technologiques. Je vous donnerai bientôt des nouvelles de ses travaux. J'espère qu'elle permettra de nous doter d'outils efficaces.
Le sous-amendement CS5455 est retiré.
La commission adopte successivement le sous-amendement CS5431 et l'amendement sous-amendé.
Article 58 F ( nouveau ) (articles L. 133-1, L. 133-2, L. 133-4, L. 141-13, L. 151-5, L. 151-7, L. 151-41 et L. 153-27 du code de l'urbanisme) : Adaptation des schémas de cohérence territoriale et des plans locaux d'urbanisme des communes exposées à l'érosion littorale
Amendement CS5044 du rapporteur, sous-amendement CS5451 de M. Jimmy Pahun.
L'amendement CS5044 vise à décliner le dispositif dans les documents d'urbanisme. Il prévoit l'intégration dans le géoportail de l'urbanisme des cartes de préfiguration des zones exposées au recul du trait de côte à horizon de trente ans et de trente à cent ans.
Je demande le retrait du sous-amendement CS5451 ; à défaut, avis défavorable.
Je suis favorable à l'amendement. En ce qui concerne le sous-amendement, j'en demande le retrait : s'il était adopté, tous les schémas de cohérence territoriale (SCOT) littoraux devraient identifier de tels secteurs, y compris ceux qui ne sont pas concernés par le recul du trait de côte.
Le rapporteur nous présente neuf amendements, comptant environ 800 lignes de texte au total, à quoi s'ajoute un sous-amendement du Gouvernement. Ils réécrivent en totalité les règles d'urbanisme en zone littorale pour le siècle à venir. Il y est question d'un droit de préemption – sauf, notamment, en cas de donation entre ascendants et descendants ou entre collatéraux jusqu'au sixième degré –, ou encore de la mise en place d'une redevance. Il est tout bonnement impossible de digérer aussi rapidement toutes ces informations : les citoyens qui nous écoutent ne doivent nous en vouloir si nous ne nous prononçons pas sur ce dispositif. Nous n'avons pas des services comparables à ceux du Gouvernement. Nous nous exprimerons probablement en séance, une fois que nous aurons analysé de près la question.
La commission rejette le sous-amendement.
Puis elle adopte l'amendement.
Article 58 G ( nouveau ) (article L. 210-1 et chapitre IX [nouveau] du titre Ier du livre II du code de l'urbanisme) : Création d'un droit de préemption spécifique et prioritaire pour les biens exposés à l'érosion littorale
Amendement CS5049 du rapporteur, sous-amendements CS5369 de Mme Sophie Panonacle et CS5429 de M. Jimmy Pahun.
L'amendement CS5049 vise à instaurer, au profit des communes et intercommunalités compétentes, un droit de préemption spécifique afin de faciliter la maîtrise foncière dans les zones menacées par l'érosion côtière. Ce mécanisme permettra de réduire le nombre de constructions situées dans les zones très exposées et de mettre en œuvre des affectations et des usages non pérennes.
Le sous-amendement CS5359 a pour objet de garantir le rôle éminent des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER).
Le droit de préemption de ces organismes a été renforcé par la loi du 20 mai 2019 pour la protection foncière des activités agricoles et des cultures marines en zone littorale, ce qui leur permet de préserver des espaces et des activités agricoles et conchylicoles. Le sous-amendement vise à exclure les biens immobiliers à usage ou à vocation agricole, au sens de l'article L. 143-1 du code rural et de la pêche maritime, du champ d'application du nouveau droit de préemption prévu par l'amendement du rapporteur.
Je demande le retrait de ce sous-amendement, ainsi que celui du sous-amendement CS5429. Les SAFER devraient se retrouver en second rang, derrière les établissements publics fonciers (EPF), mais nous n'avons pas eu le temps de nous en assurer. Nous le ferons d'ici à la séance.
Je suis favorable à l'amendement et demande le retrait des sous-amendements. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Selon notre analyse, et sous réserve de vérifications plus approfondies, le droit de préemption créé par l'amendement du rapporteur prévaut sur celui des SAFER mais ne l'exclut pas : ces organismes devraient pouvoir appliquer ce droit en second rang pour tous les biens soumis au droit de préemption relatif au trait de côte, de la même façon que les autres droits de préemption prévus par le code de l'urbanisme.
Le sous-amendement CS5429 vise à limiter la mise à bail des terrains acquis au titre du droit de transmission spécifique au recul du trait de côte à une durée de quinze ans et pour un motif d'intérêt général avant qu'ils ne soient renaturés. L'objectif de l'amendement du rapporteur est évidemment la renaturation des biens ainsi acquis, mais celle-ci doit être progressive. Par ailleurs, la proposition ne permet pas de tenir compte de l'évolution de l'érosion côtière, du niveau d'exposition et de l'imminence de la disparition des biens.
Je retire mon sous-amendement, à condition que nous y retravaillions avec M. le rapporteur en vue de la séance.
Si la proposition de Mme Panonacle n'était pas retenue, c'est toute la loi « Pahun » qui tomberait : son objectif était justement de faire passer de cinq ans à vingt ans le délai dont dispose la SAFER pour exercer son droit de préemption.
Je retire mon sous-amendement.
Le Conseil d'État a-t-il émis un avis sur ces amendements qui, si je comprends bien, consistent à inscrire d'ores et déjà dans la loi une partie du contenu de la future ordonnance ?
Comme mes autres collègues, je ne suis pas en mesure de me prononcer sur ces dispositions sans les avoir étudiées de façon approfondie.
Comme il s'agit d'amendements, qui plus est d'origine parlementaire, le Conseil d'État n'a pas émis d'avis, Madame Batho.
Je vous laisse imaginer l'incidence financière de cette mesure pour les collectivités. La question, encore une fois, n'est pas de savoir s'il faut ou non créer ce droit de préemption : nous ne pouvons pas nous prononcer sur un dispositif que nous découvrons à l'instant.
Prévoir la préemption par les EPF peut sembler sympathique, mais cela ne fait que reporter la charge : au final, ce sont toujours les collectivités territoriales qui devront payer. Il serait bon que, d'ici à la séance, nous ayons un ordre d'idées des conséquences de la disposition.
Ces amendements ont été élaborés en étroite concertation avec l'Association nationale des élus du littoral (ANEL). Tout n'est pas réglé, évidemment, mais le travail de concertation a bien eu lieu, et le dispositif répond à une demande des collectivités : celles-ci ont besoin d'outils pour agir.
Je confirme que ces mesures sont très attendues par les élus locaux, surtout dans les territoires qui ont d'ores et déjà avancé sur cette question – Stéphane Buchou parlait de la Nouvelle-Aquitaine, où des stratégies locales ont été élaborées, notamment pour préserver les plages. Cela dit, vous avez raison : le financement est un enjeu important. Cela fait partie des points que nous devrons aborder avec le Gouvernement.
Pour éviter tout malentendu, je précise que le débat ne porte pas sur la nécessité d'agir : ce que nous mettons en cause, c'est la méthode employée, qui ne nous permet pas d'étudier la proposition et de nous prononcer en connaissance de cause.
Les sous-amendements sont retirés.
La commission adopte l'amendement.
Article 58 H ( nouveau ) (articles L. 321-1 et L. 324-1 du code de l'urbanisme) : Intégration aux compétences des établissements publics fonciers de la contribution à la politique de protection contre le recul du trait de côte
Amendement CS5052 du rapporteur.
Il vise à élargir le champ de compétence des établissements publics fonciers, afin qu'ils puissent intervenir dans le cadre de l'adaptation des territoires au recul du trait de côte.
Comprenons-nous bien : nous ne remettons pas en cause le dispositif en lui-même. Nous soulignons un problème de méthode.
Si le dispositif fonctionne, on dira, dans dix ans, que c'est grâce à une concertation entre M. le rapporteur, Mme la ministre et l'ANEL ; mais si ce n'est pas le cas, ou s'il manque de l'argent, on dira que c'est à cause des parlementaires – soit parce qu'ils n'étaient pas là le soir où le texte a été voté, soit parce qu'ils n'ont rien dit pour s'y opposer.
Nous sommes ravis d'entendre qu'une concertation a été organisée en amont avec les élus du littoral, mais c'est à nous qu'il revient de voter la loi de la République. Or, pour ce faire, nous devons disposer de toutes les informations.
La commission adopte l'amendement.
Article 58 I ( nouveau ) (articles L. 421-5-1 [nouveau], L. 421-6-1 [nouveau], L. 421‑8, L. 421-9, L. 424-1, L. 425-15-1 [nouveau], L. 462-1, L. 462-2 et L. 480-4 du code de l'urbanisme) : Régime dérogatoire applicable aux constructions et démolitions dans les zones exposées au recul du trait de côte
Amendement CS5046 du rapporteur.
Il s'agit de prévoir dès maintenant le régime applicable aux constructions dans les zones exposées au recul du trait de côte délimitées par le plan local d'urbanisme ou la carte communale en application de l'un des amendements précédents. Ces dispositions tirent donc les conséquences des règles de constructibilité ainsi créées sur le régime des autorisations d'urbanisme.
Avis favorable. Cet amendement, comme les autres, est le fruit d'un travail de concertation. Celle-ci n'est d'ailleurs pas finie, car les débats en séance permettront d'enrichir encore le texte. Il s'agit d'inscrire dans la loi, après en avoir débattu avec vous, des mesures initialement prévues dans l'ordonnance.
Les députés d'opposition n'ont pas pu déposer des amendements ni participer pleinement au débat sur un texte très attendu. Pendant la semaine qu'il nous reste avant l'examen en séance, nous allons l'étudier d'arrache-pied, notamment en recueillant l'avis de nos collègues des Républicains dont la circonscription est située en bordure de littoral – je pense à MM. Dumont, Therry, Maquet, Gosselin, Bourgeaux, Le Fur et Quentin. Même si le Gouvernement n'a pas souhaité nous associer au débat, nous nous efforcerons d'y prendre part.
Jusqu'en septembre 2020, je coprésidais avec M. Gilles Lurton le groupe d'études relatif au littoral. Nous avons beaucoup travaillé ensemble. Je regrette qu'il n'ait pas été remplacé après son départ de l'Assemblée nationale : cela aurait peut-être permis de faire le lien avec vous. Cela dit, ces propositions ont fait l'objet, depuis 2017, d'une concertation avec tous ceux qui voulaient y participer.
La commission adopte l'amendement.
Article 58 : Habilitation à prendre une ordonnance pour adapter les territoires littoraux aux effets du déplacement du trait de côte
Amendements de suppression CS107 de M. Dino Cinieri, CS309 de M. Martial Saddier, CS760 de M. Gérard Menuel, CS1494 de M. Thibault Bazin, CS2251 de Mme Laurence Trastour-Isnart, CS4077 de Mme Florence Lasserre et CS4260 de M. Arnaud Viala.
Le Parlement se sent dessaisi de la question. Ces amendements sont un appel à ce que, d'ici à la séance, le Gouvernement fasse montre de transparence quant à ses intentions.
Madame la ministre, votre collègue Mme Wargon nous a dit qu'elle essaierait de préciser les habilitations proposées, voire d'en supprimer certaines s'agissant des articles dont elle a la charge. J'espère que vous ferez de même pour l'article 58.
Nous parlons de certaines des questions abordées ici depuis la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ÉLAN). Dès cette époque, je pensais que nous aboutirions ; or, même dans ce texte, ce n'est pas encore le cas. Il faut s'adapter aux effets du dérèglement climatique, mais en concertation avec les collectivités locales, car ce sont elles qui sont en première ligne pour gérer les problèmes. Les parlementaires concernés doivent être associés eux aussi. Quant au Parlement dans son ensemble, il ne saurait être privé de la possibilité d'exprimer son avis sur ces questions. Pourriez-vous nous communiquer vos amendements avant la séance, madame la ministre, de façon à ce que nous puissions préparer nos sous-amendements ?
Le recul du trait de côte est un phénomène de grande ampleur : il concerne 197 communes, hors Guyane. Nous pensons que l'ordonnance n'est pas le véhicule idoine : cette question touchant à l'aménagement du territoire doit être abordée dans un projet de loi dédié.
Je suis moi aussi défavorable à ces amendements de suppression.
Notre objectif est tout simplement de préciser les dispositions relatives à l'adaptation des territoires littoraux, en nous appuyant sur les dix années de réflexion qui ont eu lieu sur la question – souvent avec le soutien des parlementaires. Cela dit, je vous garantis que nous vous transmettrons les éléments dont nous disposons, même si tout n'est pas encore finalisé. Les collectivités et les parlementaires seront étroitement associés. Comme vous le savez, je suis très attachée au travail parlementaire.
Je connais votre attachement à l'Assemblée nationale. Il n'en demeure pas moins que le texte comporte beaucoup de demandes d'habilitation. Si les ordonnances sont déjà écrites, pourriez-vous nous les communiquer ? Cela nous permettrait de mieux appréhender vos intentions.
Le recul du trait de côte n'est pas sans conséquence : il affecte les projets des habitants. Si nous voulons éviter de consommer des terres supplémentaires, nous devons ouvrir des perspectives aux communes concernées.
La commission rejette les amendements.
Amendement CS5015 du Gouvernement, sous-amendements CS5436, CS5438, CS5439 et CS5437 de Mme Sophie Panonacle, CS5450 du rapporteur.
Nous avons anticipé vos demandes et fait en sorte que le plus de mesures possible soient inscrites dans le texte issu de la commission. Dans la mesure où les amendements du rapporteur ont été adoptés, l'amendement CS5015 vise à réduire le champ de l'habilitation du Gouvernement à légiférer par voie d'ordonnance pour ce qui concerne les dispositions du chapitre V du titre IV.
Je précise que l'adoption de cet amendement ferait tomber l'ensemble des amendements à l'article 58.
Face à l'urgence climatique et aux effets du dérèglement sur le trait de côte, les communes concernées attendent avec une légitime impatience l'adoption de dispositions législatives. Je propose, avec le sous-amendement CS5436, de réduire de douze à six mois le délai durant lequel le Gouvernement est autorisé à prendre ces mesures par voie d'ordonnance.
L'absence de préconisations en matière de financement de l'adaptation des territoires littoraux au dérèglement climatique fragilise le dispositif. Déplafonner la taxe pour la gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (GEMAPI), affecter une partie des droits de mutation aux régions, créer un fonds assurantiel sur le modèle du fonds Barnier sont des pistes que le projet de loi de finances (PLF) pour 2022 devra ouvrir. Il est indispensable, pour l'heure, que le Gouvernement s'engage à prévoir des financements spécifiques, faisant appel à la solidarité locale, régionale et nationale. Tel est l'objet du sous-amendement CS5438.
Les projets d'adaptation des territoires littoraux qui passent par une stratégie de relocalisation prendront du temps. En attendant leur mise en œuvre, il est indispensable de poursuivre l'entretien des ouvrages de protection existants, voire de créer de nouveaux dispositifs de lutte contre l'élévation du niveau de la mer. L'identification de ces ouvrages est particulièrement importante. Tel est l'objet du sous-amendement CS5439.
Dans le cas où des projets de relocalisation d'habitations et d'activités économiques nécessiteraient la mise à disposition de nouveaux espaces fonciers, le sous-amendement CS5437 précise les conditions dans lesquelles il peut être accordé une dérogation à la loi « Littoral ».
Le sous-amendement CS5450 vise à réduire de douze à neuf mois le délai durant lequel le Gouvernement est autorisé à légiférer par voie d'ordonnance pour ce qui concerne les dispositions du chapitre V.
Je vous suggère, Madame Panonacle, de retirer le sous-amendement CS5436 au profit du présent sous-amendement.
L'adaptation des territoires littoraux pourrait se chiffrer en milliards d'euros – les enjeux financiers, vous avez raison de le rappeler, sont très lourds. Je vous invite à continuer de travailler sur les voies de financement possibles et à retirer l'amendement CS5438.
Je partage votre inquiétude : il convient de préciser qu'il est nécessaire de prendre en compte l'état des ouvrages de protection. J'émets donc un avis favorable au sous-amendement CS5439.
Je considère que le sous-amendement CS5437 est satisfait.
Enfin, j'émets un avis favorable à l'amendement du Gouvernement.
La concertation demande un peu de temps et le Gouvernement doit disposer d'un délai raisonnable pour prendre les mesures par voie d'ordonnance. Je vous demande, Madame Panonacle, de retirer le sous-amendement CS5436 au profit du sous-amendement du rapporteur, sur lequel j'émets un avis favorable.
L'accompagnement financier des projets d'adaptation constitue un sujet très important et il est vrai que les collectivités concernées ont besoin d'une réponse. Je suis bien consciente de leur impatience, mais nous travaillons actuellement à des propositions qui soient pérennes. Je vous suggère de retirer le sous-amendement CS5438 car il est inutile d'inscrire une telle précision dans ce projet de loi : le dispositif financier qui sera retenu devra de toute façon être transcrit dans une loi de finances – le PLF pour 2022, j'espère.
J'émets un avis favorable sur le sous-amendement CS5439.
Je demande le retrait du sous-amendement CS5437, qui est satisfait.
Je ferai la même remarque que sur l'amendement du rapporteur. Nous allons autoriser le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance des mesures permettant la relocalisation des biens exposés au recul du trait de côte, la définition de nouveaux outils financiers pour accompagner les projets d'adaptation ou encore la création d'une redevance foncière en lien avec le nouveau régime de contrat de bail réel immobilier de longue durée. Il sera nécessaire d'éclairer la représentation nationale en séance !
J'ai bien entendu que nous retravaillerons sur les dispositifs financiers d'accompagnement dans le cadre du PLF pour 2022. Il est important d'apporter, avant la fin de la législature, les financements que les collectivités attendent depuis de nombreuses années.
Les sous-amendements CS5436, CS5438 et CS5437 sont retirés.
La commission adopte successivement les sous-amendements CS5439 et CS5450.
Elle adopte l'amendement sous-amendé.
En conséquence, l'article 58 est ainsi rédigé et tous les autres amendements portant sur cet article tombent.
Du fait de l'adoption de l'amendement du Gouvernement, de nombreux autres amendements ne pourront être discutés ce soir. Permettez-moi d'exprimer ma surprise et ma déception car ils reflétaient le travail effectué depuis des années.
L'habilitation à légiférer par voie d'ordonnance concerne les mesures permettant de définir ou d'adapter les outils d'aménagement et de maîtrise foncière, des outils attendus depuis de nombreuses années par les territoires littoraux. Cela aurait mérité que nous entrions dans le détail. Il en va de même pour le financement des dispositifs, un sujet essentiel. Nous aurions aussi pu évoquer les questions relatives à la préemption et à la constructibilité. J'espère que nous aurons l'occasion d'en débattre en séance.
Après l'article 58
Amendement CS3422 de Mme Josette Manin.
Mme Manin propose par cet amendement de mieux encadrer les cessions de parcelles dans la zone des cinquante pas géométriques aux Antilles. L'État doit veiller à ce que la décote préconisée dans le rapport de janvier 2020 du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) ne donne pas lieu à des abus fonciers et à des enrichissements sans cause. Il convient de se prémunir du risque d'effet d'aubaine lié aux opérations de régularisation, d'autant que les communes et les agences des cinquante pas géométriques exercent rarement le droit de préemption dont elles disposent. Par ailleurs, l'État doit privilégier une cession au prix du marché réel, en fonction des ressources du foyer domicilié sur place, dans une limite impérative de 500 mètres carrés de parcelle, afin de lutter contre l'artificialisation effrénée de ces zones ultramarines.
Les occupants de la zone des cinquante pas géométriques peuvent bénéficier d'une décote car ils ne disposent souvent pas des revenus suffisants pour acquérir les terrains déclassés du domaine public. De plus, les agences des cinquante pas géométriques ont pour objet de trouver des solutions de logement pour les occupants, tout en préservant le domaine public. Le risque de voir céder des parcelles trop étendues est donc très faible, voire inexistant. En outre, le droit de préemption dont disposent les agences des cinquante pas géométriques – pour éviter tout phénomène de revente immédiate avec plus-value – sera rénové et aligné sur le droit de préemption urbain. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement CS4777 de Mme Liliana Tanguy.
Il est proposé que, dans un délai de six mois suivant la promulgation de la loi, le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur les mesures d'accompagnement et d'adaptation prévues pour les collectivités concernées par le recul du trait de côte.
Il faut trouver des solutions de financement le plus rapidement possible pour pouvoir les inscrire dans le prochain PLF. La rédaction d'un rapport nous ferait perdre trop de temps.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission rejette l'amendement.