La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
L'ordre du jour appelle la suite discussion du projet de loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (nos 846, 971, 881, 942 et 944).
Le temps de parole restant pour la discussion de ce texte est de onze heures cinquante-six minutes pour le groupe La République en marche, dont 641 amendements sont en discussion ; neuf heures cinquante-deux minutes pour le groupe Les Républicains, dont 965 amendements sont en discussion ; trois heures quarante et une minutes pour le groupe du Mouvement démocrate et apparentés, dont 176 amendements sont en discussion ; cinq heures vingt-neuf minutes pour le groupe UDI, Agir et indépendants, dont 154 amendements sont en discussion ; cinq heures seize minutes pour le groupe Nouvelle Gauche, dont 254 amendements sont en discussion ; quatre heures treize minutes pour le groupe La France insoumise, dont 109 amendements sont en discussion ; trois heures quatorze minutes pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine, dont 232 amendements sont en discussion, et dix-sept minutes et trente-quatre secondes pour les députés non inscrits, dont 169 amendements sont en discussion.
Cet après-midi, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s'arrêtant à l'amendement no 184 portant article additionnel après l'article 6.
De nombreux biens, notamment des logements, sont dans notre pays vacants et sans maître, c'est-à-dire sans propriétaire ou héritier.
Ainsi, des logements peuvent rester vides pendant plusieurs années avant que la commune concernée ou l'État ne les récupèrent. Si nous manquons actuellement de données au niveau national, plus de 11 000 logements sans maître ont été recensés dans l'agglomération lilloise.
Près de 2 millions de personnes étant en attente d'un logement social, la récupération de ces biens pourrait faire partie des solutions envisagées.
Le droit positif prévoit la possibilité pour une commune de récupérer un bien sans maître au bout de trente années. Nous proposons d'abaisser ce délai à dix ans, afin de faciliter la mobilisation du foncier vacant et sans propriétaire ni héritier.
La parole est à M. Richard Lioger, rapporteur de la commission des affaires économiques, pour donner l'avis de la commission.
Monsieur le président, chers collègues, la commission, même si elle comprend tout à fait le problème qu'il soulève, est défavorable à cet amendement dont l'éventuelle adoption nécessiterait de modifier également le code civil.
La parole est à M. le ministre de la cohésion des territoires, pour donner l'avis du Gouvernement.
L'amendement no 2195 n'est pas adopté.
Nous partageons tous, dans cet hémicycle, la volonté de faciliter la construction de logements sociaux.
L'amendement no 1947 vise à mettre en place une expérimentation en vue de maîtriser les prix de vente du foncier au bénéfice des bailleurs sociaux. Il prévoit un encadrement fondé sur les données de France domaine, à l'instar de ce qui est parfois pratiqué pour les collectivités territoriales.
L'amendement no 1949 concerne plus particulièrement les ventes en l'état futur d'achèvement – VEFA – afin qu'elles soient également encadrées et qu'elles se concluent au coût réel de construction.
Cela permettrait aux plus petits bailleurs sociaux de mener des opérations plus facilement, en particulier dans les territoires où elles sont plus compliquées à engager.
Lorsque j'étais maire, j'ai pu constater que, faute d'une telle maîtrise, le prix du foncier tend à augmenter d'année en année, et ce dans des proportions énormes.
Dans la mesure où les collectivités font beaucoup d'efforts, au travers de la suppression de taxes d'aménagement ou de l'octroi de différentes aides, pour faciliter la vente de foncier destinée à la construction de logements sociaux, il serait logique que la loi prévoie un encadrement des prix de vente au bénéfice des bailleurs.
Si nous partageons votre préoccupation de contenir l'inflation du prix du foncier, l'expérimentation que vous souhaitez voir mettre en place pourrait néanmoins se révéler contre-productive en engendrant des reports de vente ou en gonflant les ventes au secteur libre, avec un effet d'éviction des bailleurs sociaux, soit l'inverse de ce que vous recherchez.
Ces derniers sont d'ailleurs davantage favorables aux incitations fiscales du type de celles qui sont prévues par le projet de loi. La commission est donc défavorable à ces deux amendements.
La parole est à M. Jean-Luc Lagleize, pour soutenir l'amendement no 1611 .
La mission de la Foncière publique solidaire est de commercialiser les biens fonciers de l'État, ce qu'elle ne fait pas sans quelques difficultés. Or il se trouve que certaines universités ont des biens à vendre et souhaiteraient se faire aider dans ce domaine. Cet amendement vise donc à autoriser la FPS à traiter les biens fonciers que pourraient lui confier les universités ou d'autres établissements d'enseignement supérieur.
En tant qu'ancien président d'université, je suis particulièrement sensible à cette question mais, comme vous le savez, cher collègue, le projet de loi sur la dévolution du patrimoine aux universités n'est pas encore prêt. J'en avais d'ailleurs parlé à la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation dans le cadre de mon rapport pour avis sur les crédits pour 2018 de la recherche et de l'enseignement supérieur.
Malheureusement, la Foncière publique solidaire ne peut pas, en l'état actuel du droit, acquérir des biens faisant partie du domaine privé des établissements publics. Mais nous aurons l'occasion de retravailler sur le sujet et j'aurai alors, cher collègue, quelques propositions à faire dans le sens que vous souhaitez.
Avis défavorable.
L'amendement no 1611 n'est pas adopté.
L'article 7 est adopté.
Nous en venons aux amendements à l'article 8.
La parole est à M. Richard Lioger, rapporteur, pour soutenir l'amendement no 2475 .
L'amendement no 2475 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme Émilie Bonnivard, pour soutenir l'amendement no 776 .
Le présent amendement a pour objet de revenir sur le maintien du droit de préemption urbain des préfets dans les communes carencées en logement social – au titre de l'article 55 de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU – et dont le plan d'occupation des sols serait devenu caduc car non mis en forme dans un plan local d'urbanisme.
Il est défavorable : le droit de préemption doit pouvoir être exercé en vue de permettre aux communes carencées d'atteindre le taux de logements locatifs sociaux exigible.
L'amendement no 776 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 8, amendé, est adopté.
Nous en venons aux orateurs inscrits à l'article 9.
La parole est à Mme Séverine Gipson.
Dans les zones tendues, le parc de bureaux vacants constitue un gisement qui permettrait de répondre aux besoins de logements. Ainsi, rien qu'en Île-de-France, le stock de bureaux vacants est estimé à 3,5 millions de mètres carrés. Imaginez combien de personnes il permettrait de loger !
Dans la réalité, les opérations de transformation de bureaux en logement sont trop rares, car elles nécessitent de lourds investissements. En outre, les opérations de construction de bureaux sont bien plus rentables que celles de construction de logements, même lorsqu'à leur issue lesdits bureaux restent vacants.
C'est pourquoi l'article 9 vise à permettre aux maires ou aux présidents des établissements publics de coopération intercommunale – EPCI – compétents pour l'instruction des permis de construire d'accorder une majoration de 30 % du volume constructible pour la transformation de bureaux en logements.
Par ailleurs, et afin d'alléger les contraintes économiques pesant sur ces opérations de transformation, il prévoit une dérogation aux obligations relatives à la mixité sociale prévues par le plan local d'urbanisme.
Cela permettra ainsi de créer une réelle embellie sur le front du logement en transformant – espérons-le – des milliers de bureaux vacants en logements.
Je suis saisi de deux amendements identiques de suppression de l'article, nos 2496 et 2587.
La parole est à Mme Sylvia Pinel, pour soutenir l'amendement le premier d'entre eux, no 2496.
Cet amendement vise à supprimer l'article 9 car, comme je le disais ce matin, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État auprès du ministre de la cohésion des territoires, un certain nombre de garanties n'y sont pas précisées.
En effet, il remet en cause les avancées réalisées par la loi relative à l'égalité et à la citoyenneté qui avait fait de la mixité sociale un des objectifs principaux poursuivis tant dans la construction de logements que dans l'attribution de logements sociaux.
En effet, cet article place en quelque sorte la mixité sociale en position d'accusée, au prétexte qu'elle freinerait la transformation des bureaux en logements. C'est méconnaître l'état de la situation actuelle.
D'une part, les immeubles composés de bureaux permettent de rééquilibrer, dans certains territoires, la part de logements sociaux avec celle de logements libres. D'autre part, les évolutions récentes en matière de fiscalité ont conduit à renforcer l'incitation financière qui encourage les entreprises à céder leurs bureaux en vue de créer des logements.
La France devrait accroître la mixité sociale si elle prétend mener une politique d'aménagement du territoire ambitieuse et en accord avec les attentes de nos concitoyens. À cet égard, l'article 9 représente un recul important. C'est pourquoi il convient de le supprimer.
La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir le second amendement de suppression, no 2587.
C'est toujours le même problème : le projet de loi devrait favoriser autant la mixité sociale que la construction de logements.
S'agissant de la construction, transformer des bureaux en logements est un choix intelligent. Il faut donc faciliter, partout sur le territoire, la réalisation de telles opérations qui vont dans le bon sens. Mais alors que dans ce domaine, le droit en vigueur fonctionne plutôt bien, vous supprimez la mesure qui obligeait à inclure la construction de logements sociaux dans ces opérations de transformation, ce qui, comme l'a dit notre collègue Sylvia Pinel, va à l'encontre de l'objectif de mixité sociale.
Cet objectif, vous l'oubliez systématiquement lorsque vous évoquez les moyens de favoriser la construction de logements. L'article 9 est à cet égard révélateur.
Je pensais que le Président de la République serait écouté lorsqu'il affirmait qu'il fallait cesser d'envoyer les populations fragiles dans les quartiers déjà classés prioritaires au titre de la politique de la ville, les QPV. Or ce n'est pas dans ces quartiers que l'on trouve des bureaux vacants ! Si on ne produit pas de logement social lors de la conversion de ces bureaux en logements, on ne risque pas de régler le problème de la ghettoïsation.
La dérogation qui existe dans le droit actuel permet uniquement la reconstruction à l'identique du gabarit existant. Cette seule dérogation ne permet pas de rendre viables les opérations de transformation de bureaux en logement. C'est afin de faciliter ces opérations que le projet de loi prévoit d'écarter les servitudes de mixité sociale prévues par le plan local d'urbanisme – PLU – et d'accorder un bonus de constructibilité de 30 %. Avis défavorable.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de la cohésion des territoires, pour donner l'avis du Gouvernement.
Nous abordons là un article important. Sachant que la construction de nouveaux logements prend du temps, nous avons réfléchi aux moyens d'accroître la mobilité au sein du parc social – nous y reviendrons lors de l'examen des articles sur le sujet – , mais aussi aux moyens de lutter contre la vacance, un phénomène massif qui concerne aussi bien les bureaux que les logements.
Nous avons énormément travaillé avec les professionnels et les élus pour comprendre pourquoi des centaines de milliers de mètres carrés de bureaux – même s'il est très difficile de connaître exactement leur nombre – restent vacants dans les zones dites tendues.
Nous avons donc pris un certain de mesures très fortes. Et vous noterez sans doute avec intérêt que les principaux promoteurs et aménageurs se sont engagés, si les dispositions que nous envisageons sont adoptées, à transformer 500 000 mètres carrés de bureaux vacants en logements avant la fin de 2022.
S'agissant de la mixité sociale, j'appelle votre attention sur deux points : le premier est que, bien évidemment, toutes les autorisations nécessaires – qu'il s'agisse, en fonction des travaux envisagés, de déclarations préalables de travaux ou de permis de construire – restent dans la main des maires, et que de telles opérations ne pourront donc avoir lieu sans leur accord.
Second point : la servitude de mixité sociale ne pourra être écartée que dans les communes qui ne sont pas carencées.
C'est inscrit clairement dans le texte ; dès lors qu'une commune est carencée, la transformation de bureaux en logements par l'utilisation des dispositions incitatives, notamment la possibilité de déroger aux servitudes de mixité sociale et d'obtenir un bonus de constructibilité, est impossible. C'est écrit noir sur blanc dans le texte, à l'alinéa 4 : la majoration de 30 % s'applique « dès lors que la commune ne fait pas l'objet d'un arrêté au titre de l'article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitation », ce qui correspond aux communes qui sont carencées au sens de l'article 55 de la loi SRU.
Encore heureux que les communes carencées ne soient pas concernées, monsieur le secrétaire d'État. Il n'aurait plus manqué que cela !
La parole présidentielle dit qu'il faut mettre les populations les plus fragiles dans des logements sociaux hors quartiers prioritaires de la politique de la ville : nous sommes d'accord, n'est-ce pas ? Or si vous exemptez les communes qui ne sont pas carencées mais qui n'ont pas 25 % de logements sociaux de l'obligation de faire du logement social lorsqu'on transforme des bureaux en logements, vous allez diminuer le nombre de logements sociaux qui se construisent actuellement !
Le dispositif actuel fonctionne bien. Bien sûr, les promoteurs disent que s'il n'existait pas, ils en feraient plus – mais les promoteurs, c'est un peu comme les commerçants : je n'ai jamais rencontré un commerçant qui me dise que tout va bien, que la vie est belle et qu'il fait un chiffre d'affaires extraordinaire ! Le commerçant dit par principe que la vie est dure, que c'est compliqué, que la crise est là – et c'est normal. Le promoteur pleure toujours – et c'est normal. Tout cela est logique ; mais, en l'espèce, le dispositif actuel fonctionne plutôt bien.
Non !
Vous savez, monsieur le secrétaire d'État, nous aussi nous les rencontrons, les promoteurs. Je le répète : cela fonctionne plutôt bien.
De toute manière, comment voulez-vous lutter contre la ghettoïsation si vous supprimez toutes les mesures qui permettent la construction de logements sociaux hors quartiers prioritaires de la politique de la ville ? Cela ne peut pas fonctionner !
En l'espèce, de quoi s'agit-il ? Vous donnez aux promoteurs des droits à construire supplémentaires, c'est-à-dire un avantage, ils auront moins de parkings à faire, mais, en échange, il faudra qu'ils fassent un peu de logement social – on ne parle pas de 90 % : juste un peu. Or vous, vous leur dites qu'ils n'auront plus à en faire. Je pense pour ma part que cette mesure, certes, permettra la construction de logements, mais qu'elle va aussi réduire la capacité de notre pays à lutter contre la ghettoïsation. Vous oubliez toujours cette dimension ; cet article est de ce point de vue révélateur.
L'amendement no 2497 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
En 2011, j'étais avec le collectif Jeudi noir et je soutenais l'occupation d'un immeuble Axa situé non loin de l'Élysée et qui était vide depuis 2006. Nous rêvions alors, comme souvent lorsqu'on voit des bureaux vacants, que les personnes qui, dans notre pays, sont soit sans abri, soit mal logées puissent trouver refuge dans ces bureaux inutilisés depuis des années – on compte aujourd'hui 1,7 million de demandeurs de logements sociaux.
Nous pensions aussi que le fait d'utiliser ces bureaux et de les transformer en logements sociaux aurait permis, vu les lieux où souvent ils se situent, que certaines villes respectent mieux la loi SRU, car chacun sait que les villes carencées ne représentent pas l'entièreté des villes qui ne la respectent pas.
Or voilà que vous proposez de faciliter la transformation des bureaux en logements. On se dit que c'est super – sauf que, justement, vous vous exonérez, et qui plus est en vous en vantant, des objectifs en matière de logement social, y compris pour ce qui est du respect de la loi SRU. Je vous ai écouté attentivement, monsieur le secrétaire d'État, et je n'arrive pas à comprendre comment vous pouvez soutenir que, pour inciter les gens à construire des logements, il faut les exonérer de l'obligation d'affecter un certain pourcentage d'entre eux au logement social. À ce rythme-là, on ne construira plus du tout de logements sociaux en France !
Si au principe que, pour qu'on construise des logements, il faut faire en sorte que les promoteurs puissent déroger à toutes les règles de mixité sociale, l'on ajoute la vente des logements sociaux que vous préparez, soyez assurés qu'il n'y aura bientôt plus de logements sociaux ni de politique de logement social dans ce pays. Mais c'est bien ce que vous préparez, notamment par l'intermédiaire de ce projet de loi. Je pense que ces mesures sont davantage faites pour favoriser la spéculation que pour mettre des gens à l'abri ou leur permettre de vivre à peu près décemment – mais j'espère me tromper. C'est pourquoi, je vous propose, chers collègues, de supprimer les alinéas 2 et 3 de l'article, qui prévoient de déroger aux objectifs de mixité sociale.
La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l'amendement no 2588 .
Le principal argument invoqué par les villes qui sont en dessous du seuil de 25 % de logements sociaux et qui sont des villes constituées – je pense à Paris, mais pas seulement – , c'est que comme elles ne disposent pas de foncier disponible, il leur est difficile de satisfaire aux obligations de produire des logements sociaux et de créer de la mixité sociale, car cela ne peut se faire qu'en reconstruisant la ville sur elle-même, en changeant des logements privés en logements sociaux ou en transformant des bureaux en logements, avec une part de logements sociaux. Si l'on déroge aux servitudes en matière de logement social pour la transformation des bureaux en logements, on sert sur un plateau un argument à tous ceux qui opposent, pour ne pas satisfaire aux obligations de loi SRU, le fait qu'ils sont dans une ville constituée dans laquelle il y a peu de foncier disponible et que la reconstruction de la ville sur la ville, il n'y arrivent pas. C'est incompréhensible ! En outre, c'est contraire aux objectifs de la loi SRU ; c'est d'ailleurs représentatif, comme je le disais ce matin durant la discussion générale, de cette manière d'entamer par petites touches, à travers cette loi, les fondamentaux de la loi SRU.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
Je reprendrai ce qui a été dit tout à l'heure par le secrétaire d'État et qui avait fait réagir M. Pupponi par ces mots : « Encore heureux ! ». Les dérogations sont encadrées et elles ne s'appliqueront pas dans les communes carencées. Le maire chargé de délivrer les permis de construire pourra toujours choisir de les moduler.
J'ajoute que tout cela est fait pour faciliter les opérations : derrière, il y a un modèle économique qui doit permettre cette transformation.
Je voudrais que l'on soit précis dans ce qu'on dit. On peut nous faire des procès – c'est de bonne guerre – , mais, premièrement, il ne s'agit pas de la construction d'immeubles de logement, il s'agit de la transformation de bureaux en logements, deuxièmement, nous ne prévoyons pas de lever les servitudes introduites par la loi SRU dans le cas des communes qui sont non carencées.
La question que l'on peut se poser, c'est de savoir s'il doit s'agir des communes non carencées au sens où l'entend le code de la construction et de l'habitation ou de toutes les communes qui ne respectent pas l'obligation de 25 %.
C'est une vraie question, mais il ne s'agit pas de détricoter la loi SRU.
Troisièmement, d'où partons-nous ? Je veux bien entendre tous les arguments, mais vous savez très bien qu'aujourd'hui, très peu de bureaux sont transformés en logements. Pourquoi M. Coquerel a-t-il pu aller dans des bureaux vacants avec ses amis ? C'est parce que ces bureaux n'étaient pas en transformés en logements. De tels cas de figure, il y en a partout aujourd'hui ; dans Paris, il y a plein de bureaux qui sont vacants depuis de longues années, mais qui ne sont pas transformés en logements. La question fondamentale est : comment engager cette transformation ? Si l'exclusion du dispositif touchait les communes qui sont en dessous de 25 %, et non de celles qui font l'objet d'un arrêté de carence, la transformation des bureaux en logements serait moins facilitée, non seulement à Paris, mais aussi dans d'autres cas de figure.
La situation actuelle est figée. À Paris, si quelques milliers de mètres carrés sont transformés – je ne le nie pas, d'ailleurs j'ai eu l'occasion de travailler avec certaines des entreprises qui le font aujourd'hui – , cela représente très peu, vous le savez bien.
Enfin, que dit le projet de loi ? Il manie à la fois la carotte et le bâton. La carotte : on vous donne des incitations ; le bâton : si vous ne le faites pas, on réquisitionne les bureaux pour faire de l'hébergement d'urgence. Voilà ce que nous faisons ; on ne peut donc pas nous accuser de ne pas aller assez loin. Il ne s'agit pas d'un article qui dirait : « Allez-y, messieurs les promoteurs, faites-vous plaisir ! ». Au contraire, nous leur disons : « Nous essayons de trouver ensemble, avec pragmatisme et intelligence, des solutions pour aboutir à cette transformation, mais si vous ne le faites pas, alors nous réquisitionnerons les bureaux pour faire de l'hébergement d'urgence ». Il me semble donc que le texte est tout de même équilibré.
Tout d'abord, monsieur le ministre, nous avons compris que cet article visait à faciliter la transformation de bureaux en logements. Vous savez, nous écoutons, nous réfléchissons, nous lisons les articles ; et nous avons compris que le dispositif ne concernait pas les villes carencées. Je vous le dis, car comme vous avez répété ce que disait l'article, je voudrais vous éviter cet effort à l'avenir.
Ensuite, vous dites chercher une solution, mais je vais vous la donner, moi, la solution : donnez des incitations à transformer des bureaux en logements, mais dans le respect de la mixité sociale – sinon, vous réquisitionnez. Pourquoi permettre à des promoteurs de construire, donc de spéculer et de se faire de l'argent – car ils ne vont pas le faire pour nos beaux yeux – , en prévoyant de ne réquisitionner les bureaux que s'ils refusent de les transformer en logements ? Moi, je propose que l'on respecte les servitudes en matière de logement social. Ce n'est pas impossible, quand même ! Le logement social, ce n'est pas une grande plaie, et ce ne devrait pas être un problème que d'obliger les promoteurs à en faire.
Je propose donc de faire ce que vous aviez prévu, à savoir donner une incitation, mais, en échange, il faut que le promoteur respecte la part de logements sociaux dans le programme. Si ce n'est pas le cas, vous réquisitionnez – nous irons ensemble, si vous voulez.
Sourires.
Dans certains quartiers, le modèle économique est acquis : dans les beaux quartiers parisiens, le mètre carré coûte plusieurs milliers d'euros. Les promoteurs, qui ont construit des bureaux restés vacants, vont transformer ceux-ci en logements, en dérogeant à certaines règles sur le stationnement et en faisant des logements magnifiques, qu'ils vont vendre très cher, plus de 10 000 euros le mètre carré. Ne me dites pas qu'ils vont perdre de l'argent dans l'opération ; ils vont en gagner beaucoup.
On peut quand même dire à ces gens-là de construire 20 à 30 % de logements sociaux. Leur marge diminuera un peu, ils gagneront un peu moins d'argent que ce qu'ils auraient espéré, mais on ne leur demande quand même rien d'extraordinaire ! Nous voulons juste qu'il n'y ait pas d'incitation à un gain exceptionnel dans certains territoires, alors que l'on sait que les promoteurs vont bénéficier d'une manne financière que vous leur accordez.
Vous dites, monsieur le secrétaire d'État, que si la transformation n'est pas réalisée les locaux seront réquisitionnés. Banco ! Je vous prends au mot. Mais dans ce cas, il faut l'inscrire dans l'article 9.
C'est déjà inscrit dans le texte de loi.
Non, monsieur le secrétaire d'État. Dans un autre article, il est dit que le préfet « peut » réquisitionner des bureaux afin d'en faire des structures d'hébergement d'urgence, mais ce n'est pas automatique. Le préfet n'est pas obligé de le faire. En revanche, si l'on prévoyait que si l'on ne transforme pas les bureaux en logements, la réquisition est automatique, alors oui, cela pourrait fonctionner – mais il faut que ce soit automatique, et non laissé au bon vouloir du préfet.
Je vous prends donc au mot, et l'on verra bien dans combien de beaux quartiers parisiens ou de beaux centres historiques le préfet va aller réquisitionner des locaux vides pour faire de l'hébergement d'urgence. On sait très bien comment ça se passe, où ont lieu les réquisitions et où l'on installe l'hébergement d'urgence. On l'a vu ce week-end encore : les sans-abri qui sont sur les trottoirs parisiens, on les enlève de là et on les met en banlieue. C'est souvent comme ça que ça que ça se passe.
Si vous inscrivez donc dans le texte ce que vous avez dit au banc, monsieur le secrétaire d'État, à savoir que la réquisition sera automatique, et non laissée au bon vouloir du préfet, alors le bâton sera réel.
Mme Sylvia Pinel applaudit.
Cet article concerne les villes denses, les villes constituées, et c'est vrai que Paris en est l'exemple le plus emblématique. Profitez d'une pause dans notre discussion pour faire le tour du pâté de maisons : vous vous apercevrez qu'il y a plein d'immeubles qui, à l'origine, avaient été construits pour être des logements et qui, au fil des années, ont été transformés en bureaux. Résultat : il y a aujourd'hui à Paris des rues totalement noires passé vingt et une heures ; il n'y a plus de vie parce que ces immeubles, qui étaient auparavant des logements, sont devenus des bureaux. Seules les chambres de bonne restent éventuellement éclairées le soir. Mais, au regard des critères actuels, ces bureaux sont obsolètes. Aussi peut-il y avoir un intérêt économique à les transformer en logements.
Je souscris donc à cette idée, mais exonérer les opérateurs de construire un certain pourcentage de logements sociaux ne me paraît pas raisonnable. Nous ne parlons pas forcément des seules villes carencées, d'ailleurs, je suis d'accord avec M. le secrétaire d'État sur ce point. Selon moi, les villes hors des clous sont celles qui comptent moins de 25 % de logements sociaux. Des villes carencées sont manifestement de mauvaise foi, mais là où l'effort doit vraiment être poursuivi en matière de construction de logements sociaux, c'est dans les villes qui en comptent moins de 25 %.
Exonérer une ville comme Paris de l'obligation de transformer les bureaux en logements – ce qui est souvent, d'ailleurs, un retour à la fonction d'origine de l'immeuble – ne me semble ni juste ni productif.
Il ne s'agit nullement, monsieur le rapporteur, d'attenter à l'équilibre économique des opérations. L'opérateur qui dit avoir un bilan déficitaire parce que, transformant des bureaux en logements à Paris, il est obligé de respecter un taux de logements sociaux, celui-là, je veux bien que vous me le présentiez : je discuterai de son bilan point par point, car celui-ci serait forcément mensonger.
Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, nous partageons beaucoup de vos objectifs : M. Pupponi l'a dit, de même que l'ensemble de nos collègues. Mais le texte fait sauter des garde-fous sur la réalisation de plus-values immobilières. À 90 %, la situation des bureaux inoccupés, nous le savons bien, concerne Paris : à Montauban, je puis vous le dire, nous ne nous sentons pas concernés par le présent article… Bref, il s'agit vraiment d'un article parisien.
Protestations sur quelques bancs du groupe LaREM.
En effet. Et dans ces grandes métropoles, les prix de l'immobilier au mètre carré sont élevés. Dans certains quartiers de bureaux, les VIIIe et XVIIe arrondissements de Paris, pour ne pas les citer, le prix au mètre carré est élevé. Or vous entendez faire « sauter » la condition du taux de logements sociaux dans les opérations de transformation, …
… autrement dit les garde-fous, ce qui permettra à certains de réaliser des plus-values importantes : une fois la transformation opérée, un laps de temps s'écoulera pendant lequel la plus-value pourra être réalisée. C'est sur ce point que porte le débat : quels garde-fous comptez-vous maintenir pour empêcher des réalisations de plus-values quasiment gratuites ? Ces plus-values sont tout à fait légitimes lorsque l'investissement crée de la richesse, mais, en l'espèce, nous parlons de donner des clés pour des plus-values faciles. C'est bien cela que nous vous reprochons à travers cet article. Aussi plaidons-nous pour des garde-fous.
Pour témoigner de ce que cet article n'est pas exclusivement parisien, je viens des Hauts-de-Seine.
Sourires.
Ce département compte beaucoup de bureaux, et peu de villes y respectent la loi SRU. Combien de temps a-t-il fallu pour démontrer que Neuilly-sur-Seine est une ville carencée ! Ses maires successifs nous ont d'abord expliqué que la ville n'avait pas de foncier disponible ; or elle en avait à l'époque, mais il a disparu, forcément, au gré des constructions d'immeubles de standing et de bureaux. Combien de temps a-t-il fallu attendre, disais-je, pour qu'un préfet se décide à mettre à l'amende cette ville dont les maires, pour y échapper, se justifiaient de construire deux ou trois logements sociaux par an ! Aujourd'hui, la ville est enfin carencée.
Mais quoi de commun entre Neuilly-sur-Seine et ma commune de Gennevilliers ? Dans les Hauts-de-Seine, vingt-deux villes sur trente-six ne respectent pas la loi SRU. L'an dernier, neuf de ces villes ont été jugées carencées. Restent donc treize villes qui ne respectent toujours pas la loi SRU, et l'ont même décidé. C'est un chiffre élevé dans un département qui compte trente-six communes et où, depuis dix jours, des centaines de familles sont expulsées de l'hébergement d'urgence car elles ne rentrent plus dans les nouveaux critères : lorsqu'elles comptent des enfants de plus de trois ans, elles sont en effet expulsables, si bien qu'elles se retrouvent à la rue sous prétexte de « fluidité ». C'est dire l'importance de ces amendements.
Je ne puis laisser dire que le présent article détricote la loi SRU. Celle-ci fixe un taux de 25 % de logements sociaux, tout en précisant que les communes qui ne l'atteignent pas doivent respecter un certain nombre d'objectifs définis dans les contrats de mixité sociale ; à défaut de quoi, ou si les résultats ne sont pas à la hauteur escomptée, des amendes les sanctionnent.
Au-delà du taux de 25 %, il s'agit donc, à travers la loi SRU, de voir si les communes s'engagent dans une chronique de construction jugée satisfaisante pour atteindre les objectifs de mixité sociale.
Certaines des 1 800 communes visées par la loi SRU, on le sait bien, n'atteignent pas le taux de 25 % mais consentent un effort de construction…
… et engagent une dynamique en cette matière pour échapper aux arrêtés de carence. Rien n'empêche une commune qui veut échapper à ces arrêtés d'utiliser tel ou tel dispositif à cette fin.
D'autre part, monsieur Coquerel, la réquisition de bureaux, dans le parc privé, en vue de les transformer en logements existe déjà. Le droit le permet, mais l'on observe que cela ne marche pas, ou très mal. Si nous suggérons des réquisitions pour l'hébergement d'urgence, c'est parce que l'opération est bien plus aisée.
Le bâton qui avait été prévu il y a quelques années est donc inopérant. De même que très peu de bureaux sont transformés en logements, très peu de bureaux sont réquisitionnés à cette fin. Ceux qui s'intéressent au sujet savent à quel parcours du combattant s'apparente une telle réquisition, qui porte atteinte à l'acte de propriété. L'article 11 du texte vise à faciliter les réquisitions de bureaux pour l'hébergement d'urgence.
J'en viens au troisième point, monsieur Pupponi : la réquisition doit-elle ou non être automatique ? Je suis un peu embarrassé pour vous car, à l'article 11, vous avez déposé un amendement visant à ce que cette réquisition soit, non pas automatique, mais conditionnée à l'avis du maire.
Je m'apprête à donner un avis favorable à cet amendement, monsieur Pupponi ; mais nous en reparlerons en discutant de l'article 11. Cette automaticité, quoi qu'il en soit, n'a de sens que sur avis du maire : c'est précisément ce que vous proposez.
Quant à l'équation économique, je partage totalement ce qu'a expliqué Jean-Luc Mélenchon à la tribune hier : si un grand nombre de propriétaires de bureaux vides conservent ces biens, c'est parce que, dans leur bilan, ils ont plus de valeur que des logements occupés. Tel est le problème fondamental. La notion de constructibilité, dans le projet de loi, tend à ce que la comparaison qui peut être faite, au sein des bilans comptables, entre cent bureaux et cent logements ne soit plus de mise : je vois à votre expression, Mme Rabault, que vous comprenez ce que je veux dire.
À cet égard, M. Mélenchon, hier, avait raison à 100 % ; et c'est sur le fondement du problème qu'il a énoncé que nous avons prévu les dispositions dont je viens de parler.
L'amendement que je défendrai, si vous permettez, est un peu différent. Selon moi, seul le maire d'une commune en QPV devrait donner son accord. Ce n'est donc pas du tout la même chose ! Je ne propose absolument pas de solliciter l'avis du maire d'une commune carencée !
Je suis d'accord avec vous.
La raison en est, monsieur le secrétaire d'État, que les promoteurs iront acheter des bureaux dans les beaux quartiers, car ils savent qu'ils pourront les revendre. Ils n'iront assurément pas transformer des bureaux en logements dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, où ils savent bien qu'il n'y a pas de marché. Dans certains quartiers, les logements sont vendus à 2 000 euros le mètre carré ; si vous y transformez des bureaux en logements, vous ne vous y retrouvez donc pas financièrement, compte tenu du prix du marché.
Avec ce que vous proposez entre l'article 9 et l'article 11, les bureaux seront transformés en logements vendus très cher dans les beaux quartiers parisiens et dans les grandes métropoles, et les promoteurs gagneront beaucoup d'argent ; et dans les QPV, les bureaux vides seront réquisitionnés par le préfet pour l'hébergement d'urgence. Voilà comment les choses finiront ! Où les bureaux resteront-ils vides ? Là où il n'est pas rentable de les transformer en logements, bien entendu ! D'où mon amendement, qui tend à ne conditionner de telles opérations à l'accord du maire que dans les QPV. Ce n'est pas du tout pareil.
Vous avez l'air d'accord, monsieur le ministre, avec un tel garde-fou pour les QPV.
Je vous en remercie, mais un parallélisme des formes s'impose, dès lors, pour les villes dépourvues de logements sociaux. Je le répète, l'objectif de mixité sociale va de pair avec celui de construire des logements. Et si je puis me permettre, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, en l'absence de transformation de bureaux en logements, il faut prévoir une réquisition : je suis d'accord avec vous ; mais il faut alors le préciser expressément, car la réquisition doit être obligatoire. Dans les QPV, celle-ci ne doit pas être possible sans l'accord du maire, mais obligatoire, au titre de l'hébergement d'urgence, là où, dans les beaux quartiers, les bureaux vides ne sont pas transformés en logements. Si vous tenez les deux bouts de cette équation, nous serons d'accord.
Si je puis me permettre aussi, monsieur le ministre, vous savez très bien comment tout cela va finir. M. Peu l'a dit : les promoteurs peuvent bien construire 10, 15 ou 20 % de logements sociaux s'ils réalisent une belle opération financière. Il ne me paraît pas scandaleux de leur faire gagner un peu moins d'argent, d'autant qu'a été votée, en loi de finances, l'exonération fiscale des plus-values réalisées par les entreprises qui vendent leurs biens en vue de les transformer en logements. Dès lors que l'entreprise est ainsi exonérée de plus-value immobilière, elle peut bien baisser le prix ; c'est plus intéressant pour le promoteur, qui peut aussi faire un peu de logement social.
Chacun, dès lors, y trouvera son compte : les entreprises qui ont vendu les actifs, les promoteurs qui construisent des logements, le Gouvernement qui voit l'offre de logements augmenter, et le logement social qui gagne quelques logements. On peut faire plaisir à tout le monde : c'est ce que nous vous proposons.
Applaudissements sur les bancs du groupe NG et sur plusieurs bancs des groupes FI et GDR.
J'apporterai une petite précision. Tout à l'heure, monsieur le secrétaire d'État, vous avez dit qu'une commune qui ne respecte pas la loi SRU mais prend des engagements à son sujet échappe à l'arrêté de carence du préfet. Ce n'est pas tout à fait exact. Une commune qui ne respecte pas cette loi mais touche la dotation de solidarité urbaine, par exemple – pour reprendre un débat que nous avions eu – , se trouve de fait exonérée d'un tel arrêté. Cela peut donc continuer très longtemps. De mémoire, trente-deux communes sont dans cette situation ; pour certaines d'entre elles, il y a sans doute des choses à faire.
J'introduirai un petit grain de sable dans l'édifice. Beaucoup de questions se posent lorsque l'on transforme un immeuble de bureaux en immeuble de logements. Tout d'abord, les trames des bâtiments, souvent, ne correspondent pas du tout. Je ne suis pas sûr que de telles opérations donnent des logements de qualité.
S'agissant ensuite de la question des quartiers, les assouplissements sur les gabarits et les stationnements peuvent vraiment soulever des questions d'usage. Surtout, il peut sembler légitime d'imposer un taux de 20 à 30 % de logements sociaux au nom de la mixité, mais à une seule condition : que ce soit concrètement possible. Tout dépend, donc, de ce dont on parle. Parlons-nous de transformer plusieurs îlots de bureaux en logements ? En ce cas, il peut y avoir des équipements tels qu'un ascenseur ou une cage d'escalier, de sorte que le bien peut être récupéré par un bailleur. Mais dans un petit immeuble de bureaux, un taux de mixité de 20 à 30 % paraît difficile à atteindre.
Il faudrait, nous sommes tous d'accord, que ces immeubles de bureaux fassent l'objet de projets. Si seuls vingt logements sont créés dans une telle opération, je le répète, il paraît difficile d'imposer une mixité sociale. Au demeurant, les bailleurs ne seraient pas forcément intéressés de récupérer quatre ou cinq logements – et ils ne sont pas forcément demandeurs, lorsque l'on en discute avec eux.
Il conviendrait donc de préciser, peut-être dans le cadre de la navette, la rédaction du texte : en l'état actuel de cette rédaction, la transformation de bureaux en logements n'offre pas les garanties souhaitables en termes de qualité de vie, et ne répond pas aux attentes des bailleurs au regard de ce qu'ils sont disposés à faire.
Sur les amendements identiques nos 2199 et 2588 , je suis saisi par le groupe Nouvelle Gauche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Sur l'amendement no 2049 , je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. le ministre.
La question fondamentale est de savoir si l'article 9 constitue un progrès par rapport à la situation actuelle. Dans notre pays, certaines villes importantes, à commencer par Paris, présentent des centaines de milliers de mètres carrés de bureaux vacants. Une telle situation est regrettable et je remarque que, jusqu'ici, peu a été fait pour y remédier.
Ce que nous proposons – pouvoir transformer des bureaux qui ne sont pas occupés en logements – est donc bien un progrès. Certes, M. Bazin l'a souligné, certaines difficultés techniques peuvent se poser, que la réglementation peut contribuer à résoudre.
Si nous avons prévu un bonus de constructibilité – nous avions proposé un taux de 10 %, 30 % semblant élevé – , c'est que, jusqu'à présent, les propriétaires préféraient laisser ces bureaux vacants. En tout cas, nous améliorons la situation, sans toucher à la loi SRU.
Nous ne touchons pas aux dispositions de la loi SRU pour les villes importantes, dont les bureaux vacants seront simplement transformés en logements. La négociation que le secrétaire d'État a menée avec divers représentants de propriétaires est à cet égard positive : ce qui importait, c'était de débloquer la situation.
Je ne prétends pas que ce que nous faisons est toujours parfait mais, de grâce, dès lors que nous améliorons la situation, et que nous parvenons à mettre des locaux inoccupés sur le marché du logement, à rendre à nouveau utiles des bureaux aujourd'hui vides, reconnaissez qu'il y a un progrès.
Il est nécessaire d'aller dans ce sens. Peut-être trouvez-vous cela insuffisant, …
… mais, moi, je vous dis que c'est un progrès. Et c'est cela qui compte !
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
J'ai bien écouté vos arguments, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État mais, pour avoir siégé aux côtés du préfet de région d'Île-de-France dans la commission statuant sur les constats de carence, je connais bien l'argument principal au nom duquel les villes dont le taux de logements sociaux est inférieur à 25 % et ne font aucun effort pour en construire justifient leur inaction : à chaque fois, les préfets lisent les mêmes épais rapports dans lesquels les maires déplorent l'absence de foncier disponible, le fait que la ville est déjà constituée, que la seule façon de créer des logements sociaux est de reconstruire la ville sur elle-même en transformant en logements les bureaux ou les appartements vacants. À chaque fois, le préfet finit par ne pas constater la carence.
Je peux ainsi vous fournir une liste de villes de la région Île-de-France qui ne font aucun effort et se contentent d'invoquer l'argument de la ville constituée pour ne pas respecter leurs servitudes. Alors, stop ou encore ? Je ne dis pas qu'inciter à transformer des bureaux en logements ne constitue pas un progrès, mais au nom de quoi, si ce n'est pour affaiblir la loi SRU, exonérez-vous ces villes de leur obligations en matière de construction de logements sociaux – surtout si vous leur octroyez par ailleurs un droit de constructibilité supplémentaire ? C'est porter atteinte à la loi SRU et apporter de l'eau au moulin des villes qui ne consentent jamais aucun effort au nom d'arguments qui, de mon point de vue, sont fallacieux.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI.
Pouvez-vous au moins, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, prendre l'engagement que, à partir du moment où les 500 000 logements promis seront construits, vous donnerez aux préfets des ordres stricts afin que les villes ayant produit des logements grâce à ces nouvelles dispositions sans atteindre leur quota de logements sociaux soient placées en état de carence ? Dans cette hypothèse, en effet, elles auraient obtenu ces logements en violation de la loi SRU.
Il faut une contrepartie. Dès lors que vous n'imposez pas d'inclure une part de logements sociaux dans toute opération destinée à convertir des bureaux en logements, les communes qui construiront de nouveaux logements grâce aux dispositions de l'article 9 sans pour autant satisfaire à leurs obligations devront être sanctionnées. Elles doivent payer une amende : ce serait trop facile si elles peuvent violer la loi avant d'être absoutes par les préfets !
Applaudissements sur les bancs des groupes NG, FI et GDR. – Mme Sylvia Pinel applaudit également.
Il est procédé au scrutin.
Nombre de votants | 64 |
Nombre de suffrages exprimés | 59 |
Majorité absolue | 30 |
Pour l'adoption | 12 |
contre | 47 |
Il est procédé au scrutin.
Nombre de votants | 66 |
Nombre de suffrages exprimés | 61 |
Majorité absolue | 31 |
Pour l'adoption | 12 |
contre | 49 |
L'amendement no 2049 n'est pas adopté.
L'amendement no 2050 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Bénédicte Taurine, pour soutenir l'amendement no 2200 .
L'article 9 affiche l'objectif de rendre plus attractive la transformation de bureaux vacants en logements, mais sans apporter aucune garantie sur la qualité des logements et équipements qui en résulteront. Il nous paraît pourtant fondamental, pour prévenir de possibles abus, de prendre les dispositions nécessaires afin d'assurer à toutes et tous un logement digne et de qualité.
C'est pour cette raison que nous vous proposons de préciser certaines normes de nature à garantir la qualité des futurs logements.
Avis défavorable. Il n'est pas utile de rappeler les règles de droit existant, car il va de soi que les porteurs de projet ne peuvent y déroger.
Madame la députée, je vous demande de retirer votre amendement, car il est satisfait. La loi et les règlements devant être respectés, il n'y a pas de raison de les rappeler.
L'amendement no 2200 n'est pas adopté.
Cet amendement pragmatique et de bon sens nous renvoie à la discussion précédente, car je fais miens les arguments de François Pupponi. Les communes carencées au sens de la loi SRU ne doivent pouvoir bénéficier des dérogations prévues par l'article 9 que si elles s'engagent à construire des logements sociaux, voire très sociaux. Ainsi précisées, les dispositions que nous examinons permettraient ainsi de satisfaire les ambitions du Gouvernement en matière de construction – que nous partageons – tout en favorisant la mixité sociale, puisque, par définition, les communes carencées comprennent très peu de logements sociaux sur leur territoire.
La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l'amendement no 2590 .
Avis défavorable. Rien ne justifie que les communes carencées ne puissent pas déroger à certaines règles du PLU, en termes de gabarit, de densité, d'aires de stationnement, par exemple, si la nature du projet et son implantation l'exigent.
Avis défavorable.
Cet amendement vise à inciter les communes carencées à construire des logements bénéficiant d'un prêt locatif aidé d'intégration – PLAI. Ce n'est pas la révolution ! Que l'on écarte les communes qui n'ont pas 25 % de logements sociaux, passe encore, mais s'agissant des 200 communes carencées, on ne peut leur permettre de déroger au code de l'urbanisme ni leur donner de nouveaux droits à construire sans qu'elles s'engagent à construire du PLAI ! C'est l'application stricte de la loi SRU.
Rappelons que ces communes violent la loi et paient déjà une amende pour cette raison. Elles n'ont pas de logements sociaux et qui ne font aucun effort pour en construire. Si vous leur accordez une faveur aussi exceptionnelle pour se développer, la moindre des choses est de leur demander de construire un minimum de PLAI – à moins que vous ne vouliez pas promouvoir la mixité sociale, mais alors, il faut le dire !
Cet amendement n'a tout de même rien d'extraordinaire !
Nous parlons de 200 communes en France et de quelques centaines de logements, dont une partie en PLAI. Il ne s'agit pas d'imposer la construction de centaines de milliers de logements dans les communes carencées !
La parole est à M. Richard Lioger, pour soutenir l'amendement no 2477 .
L'amendement no 2477 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 9, amendé, est adopté.
Le prix du logement, chacun le sait, augmente de manière continue depuis une trentaine d'années, au point où, dans certains centres urbains, ce poste représente 35 % voire 40 % du revenu familial.
La France compte plus de quatre millions de mal-logés, dont plus de 140 000 personnes sans aucun logement. Pendant que des millions de personnes sont en situation de mal-logement, voire sans logement, le nombre de logements vacants ne cesse d'augmenter et atteint aujourd'hui plus de 3 millions. Calculez : il y aurait de quoi loger et reloger quasiment tous ceux qui en ont besoin.
Il faut donc forcer les propriétaires de logements vacants à les mettre sur le marché à des prix accessibles au plus grand nombre au lieu de les laisser spéculer sur la pierre. Nous proposons donc de quadrupler le montant de la taxe sur les logements vacants, conformément à un voeu formulé par le Conseil de Paris au début de juillet 2017 – sachant que la capitale, où la demande de logements est forte et la pénurie patente, compte environ 100 000 logements vacants. Quadrupler le montant de la taxe serait un moyen de remettre sur le marché locatif une partie de ces logements et ainsi de répondre à une demande sociale.
Avis défavorable. Nous préférons des dispositifs incitatifs plutôt que punitifs.
Je salue votre idée, monsieur Coquerel, mais si la taxe sur les logements vacants fonctionnait, cela se saurait. Vous en êtes d'ailleurs conscient puisque vous proposez d'en modifier le taux. Le problème est qu'avec une telle augmentation, le montant de la TLV en viendrait à dépasser largement celui de la taxe d'habitation sur les résidences secondaires, dont les maires sont libres de moduler le taux. Dans de nombreuses communes, les niveaux des deux taxes sont déjà très proches. Dès lors, votre proposition conduirait les propriétaires, du jour au lendemain, à déclarer le logement vacant comme résidence secondaire.
Le système que vous proposez est donc inopérant.
Si c'est le seul problème, monsieur le secrétaire d'État, il suffit de sous-amender notre amendement pour exclure les résidences secondaires. Mais, dans la plupart des cas, ce n'est pas ce problème-là que posent les logements vides dans les centres urbains, mais celui de la spéculation sur la pierre et de l'organisation de la rareté : c'est ce phénomène qui fait monter le prix des logements depuis des années.
Vous en appelez à des mesures incitatives, …
Je n'ai pas dit cela.
… mais il y en a déjà eu un sacré paquet, depuis des années.
Si elles ne suffisent pas, il faut bien trouver un moyen d'obliger ceux qui spéculent sur la pierre comme ils le feraient sur n'importe quoi d'autre à faire que leur logement serve à quelque chose. Pour ma part, je pense qu'ils y seront obligés si cela leur coûte trop cher.
L'amendement no 2201 n'est pas adopté.
Nous avons adopté en commission des affaires économiques un amendement introduisant ce nouvel article 9 bis, afin de pérenniser le dispositif créé en 2009 par la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion et qui permettait la signature de conventions temporaires avec des propriétaires de bureaux ou de logements vacants acceptant de les mettre à disposition pour servir de logements ou d'hébergements d'urgence.
Je propose ici une nouvelle rédaction de l'article incluant l'ensemble des acteurs, privés, publics et associatifs. Ainsi, à Toulouse, un bailleur social a mis des logements vacants à disposition dans l'attente d'une nouvelle opération. Cela se fait aussi beaucoup avec des bureaux destinés à être démolis ou transformés à terme en logements.
Ce dispositif qui n'est pas coercitif, mais incitatif, peut être utilisé sur l'ensemble du territoire.
L'enjeu est toujours la mixité sociale. Les contrats de résidence temporaire risquent de faire venir de nouvelles populations dans des zones déjà fragilisées : les quartiers prioritaires de la politique de la ville.
Nous proposons donc ici que, dans les QPV, la conclusion de ces contrats soit soumise à l'accord préalable du maire.
Avis défavorable à l'amendement no 2287 et avis favorable à l'amendement no 2986 sous réserve de l'adoption des sous-amendements nos 3177 à 3184 .
S'agissant du sous-amendement no 3192 , la procédure d'occupation des locaux vacants est conçue pour répondre à un besoin ponctuel de logements : cela ne paraît pas compatible avec la mise en oeuvre d'une procédure d'autorisation préalable, potentiellement lourde. Avis défavorable.
Même avis.
Je tiens à remercier M. Nogal : après avoir longuement débattu de ce sujet en commission, nous avons retravaillé et réécrit cet article, comme nous en étions convenus.
Je m'interroge d'abord sur la façon dont nous légiférons. On réécrit intégralement un article…
… par un amendement parlementaire lui-même intégralement sous-amendé par neuf sous-amendements. Convenez que la compréhension de ce que nous sommes en train de faire en est rendue un peu délicate.
Rassurez-vous, mon cher collègue : on a déjà vu pire, mais cela mérite d'être souligné pour que nous améliorions nos méthodes de travail, puisqu'il est prévu de les revoir.
Ensuite, cet article, si je le comprends bien, vise en réalité à faciliter l'organisation par les préfets – en Île-de-France, par le préfet de région – des hébergements temporaires, ainsi rendus plus réguliers. J'ai une adresse à faire au Gouvernement à ce sujet.
Bien sûr, nous avons besoin d'hébergements temporaires. Et, objectivement, il y a, dans les régions qui connaissent des difficultés, des maires réticents, quand d'autres maires accompagnent volontiers le processus. Mais quelle est aujourd'hui l'attitude des préfets, particulièrement du préfet de la région Île-de-France ? Elle consiste, sans doute sur instruction, à cacher aux maires les opérations en cours, avant de laisser les organismes et associations leur demander d'accompagner les populations qui viennent ainsi d'être logées. C'est une erreur de méthode ; c'est même insultant pour les élus.
Je vous demande de modifier ces instructions. Le préfet doit d'abord aller vers le maire, pour demander, pour expliquer ce qui est envisagé par les organisations en collaboration avec l'État. Le maire joue ou non le jeu ; s'il joue le jeu, il peut accompagner la démarche. Mais quand on la lui fait à l'envers – je connais des maires, et je les connais bien – , il décide de ne pas l'accompagner. Cela pose des problèmes de scolarisation d'enfants dont l'admission en maternelle peut être refusée par le maire, simplement parce qu'il hébergeait déjà et qu'on aurait pu commencer par venir le trouver.
Peut-être n'êtes-vous pas au courant, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, et je peux le comprendre. Mais il faut modifier les instructions aux préfets. Si le maire ne veut pas, alors on peut passer outre ; mais si on la lui fait à l'envers a priori, cela complique les possibilités d'hébergement d'urgence de ces populations qui en ont besoin, cela ne favorise pas leur intégration et cela ne résout pas le problème.
Je peux comprendre la logique de l'amendement : on a besoin de loger des gens en urgence, de faire de l'hébergement social ; il faut trouver des solutions, et celle que propose notre collègue va dans le bon sens.
Mais en faisant cela dans les QPV, on aggrave la ghettoïsation. C'est pourquoi, je le répète, il faut une contrepartie. Cet hébergement d'urgence, même temporaire, qui peut durer deux mois, trois mois, six mois, concerne dans certains cas des familles, comme vient de le dire notre collègue Lagarde ; leurs enfants vont être scolarisés dans les communes concernées et les services sociaux vont y être mis à contribution. C'est bien normal, et la quasi-totalité des maires accueille ces enfants.
Mais puisque vous refusez notre sous-amendement, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, vous considérez qu'en QPV, dans des communes où il y a déjà des familles nombreuses en difficulté, le maire n'a pas son mot à dire. On va donc concentrer une fois de plus les populations les plus fragiles au même endroit.
Ce n'est pourtant pas moi qui dis qu'il faut arrêter de ghettoïser ces quartiers : c'est le Président de la République – j'étais mardi dernier à l'Elysée.
Or vous refusez tous les amendements en ce sens.
Ici, il s'agit simplement de permettre au maire de la commune d'accueil de donner son avis, …
… pour éviter de ghettoïser le ghetto ! Même cela, vous le refusez ? Bravo ; continuez comme ça : la ghettoïsation est en marche !
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes GDR et LR. – Mme Sylvia Pinel applaudit également.
Je ne peux pas ne pas intervenir sur cette question. Reprenez-vous, chers collègues !
Oui, surréaliste ! En quelques secondes, quelle désinvolture, quel mépris – oui, quel mépris ! – envers les villes et les quartiers populaires ! En clair, ces quartiers sont des voies de garage, des poubelles ! Car c'est comme cela que nous le vivons désormais. Le simple sous-amendement de notre collègue Pupponi devrait recueillir sans coup férir votre unanimité !
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR. – Mme Sylvia Pinel applaudit également.
L'amendement no 2287 est retiré.
Le sous-amendement no 3192 n'est pas adopté.
Monsieur le président, je demande une suspension de séance de quinze minutes.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à vingt-deux heures quarante, est reprise à vingt-deux heures quarante-cinq.
La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l'amendement no 2593 portant article additionnel après l'article 9 bis.
L'amendement no 2593 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, le projet de loi renforce la sécurité incendie s'agissant des feux de façade pour les bâtiments de moins de cinquante mètres. Les produits combustibles sont déjà interdits sur les immeubles de grande hauteur. Cette interdiction sera-t-elle étendue aux immeubles de moyenne hauteur ? Pensez-vous que ce soit la bonne solution ? Voilà une question importante sur laquelle nous avons besoin d'éclaircissements.
Lors de l'examen en commission, vous nous avez assuré que les normes de sécurité ne seraient pas abaissées.
Je reviens un instant sur l'incendie de la tour Grenfell à Londres. En juillet 2017, monsieur Mézard, vous aviez affirmé que les pouvoirs publics réaliseraient un audit pour connaître, en France, le nombre de bâtiments présentant des fragilités face au risque d'incendie similaires à celles de la tour londonienne. Cela fait bientôt un an, et nous n'avons aucune trace de cet audit. La rédaction est-elle achevée ? Au vu de ses conclusions, êtes-vous en mesure de nous apporter des garanties sur l'utilisation de matériaux potentiellement dangereux dans les immeubles de moyenne hauteur ?
L'article 10 prévoit la création d'une nouvelle catégorie d'immeubles, les immeubles de moyenne hauteur, dont les règles de sécurité incendie sont adaptées pour faciliter la mutation de bureaux en logements.
Or, le Conseil d'État considère que « l'étude d'impact devrait être complétée pour présenter les différentes options possibles, expliciter les raisons qui ont conduit à choisir celle consistant à créer une nouvelle catégorie d'immeubles et préciser les impacts de cette option ».
L'amendement déposé par Mme Dalloz vise à réaffirmer l'obligation d'accessibilité dans le code de la construction et de l'habitation.
La parole est à M. Jean-Félix Acquaviva, pour soutenir l'amendement no 430 .
La parole est à Mme Valérie Beauvais, pour soutenir l'amendement no 1417 .
Cette mesure va à l'encontre de l'avis du Conseil d'État. En effet, ce dernier estime « que l'étude d'impact devrait être complétée pour présenter les différentes options possibles, expliciter les raisons qui ont conduit à choisir celle consistant à créer une nouvelle catégorie d'immeubles et préciser les impacts de cette option ».
Cet amendement vise à réaffirmer dans le code de la construction et de l'habitation l'obligation d'accessibilité pour les personnes handicapées.
Il est un peu exagéré d'affirmer que cet article va à l'encontre de l'avis du Conseil d'État. Ce dernier se borne à demander des précisions – le Gouvernement n'aurait pas présenté cet article s'il avait vraiment suscité une opposition de la part du Conseil d'État.
En outre, la demande est pleinement satisfaite puisque les immeubles de moyenne hauteur devront respecter les dispositions du code de la construction et de l'habitation relatives à l'accessibilité, applicables selon les cas aux bâtiments d'habitation collectifs, aux bâtiments existants ou aux établissements recevant du public.
Je demande donc le retrait des amendements.
Même avis que le rapporteur.
Pour répondre à M. Bazin, dès que le malheureux incendie de la tour Grenfell est survenu, nous avons demandé au CSTB – centre scientifique et technique du bâtiment – un audit dont les conclusions sont publiques et consultables. À la suite du rapport, nous avons requis un complément d'information. Nous avons également lancé une opération de recensement précis du nombre d'immeubles concernés pour laquelle nous avons sollicité les préfets. C'est un sujet important que nous n'avons pas oublié et qui appellera vraisemblablement des modifications réglementaires.
L'article 10 est adopté.
Je suis favorable à l'amendement sous réserve de l'adoption d'un sous-amendement rédactionnel.
Le sous-amendement no 3195 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement no 2594 , sous-amendé, accepté par le Gouvernement, est adopté.
Nous proposons de supprimer l'article 11. La réquisition ne peut être qu'une solution d' urgence, de court terme. Porter sa durée à quatre ans revient à la transformer en solution de moyen terme. Il ne faudrait pas que l'État se dérobe à sa responsabilité de production de logements au titre de l'hébergement d'urgence.
En 2012, le nombre de sans domicile fixe en France était estimé par l'INSEE à plus de 143 000. Compte tenu de l'aggravation de la crise du logement, on peut penser qu'ils sont plus nombreux aujourd'hui.
Nous proposons d'allonger d'un an à deux ans la durée de réquisition des logements vacants.
La procédure de réquisition sans attributaire à laquelle se réfère votre amendement n'a pas été mise en oeuvre. Il n'est donc pas opportun d'en allonger la durée. Il est préférable de privilégier la procédure de réquisition avec attributaire qui fait l'objet de l'article 11.
L'amendement no 2203 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Émilie Bonnivard, pour soutenir l'amendement no 1037 .
La procédure de réquisition, prévue dans le code de la construction et de l'habitation et renforcée par le présent projet de loi, doit associer les maires des communes concernées qui connaissent leur territoire, permettant ainsi d'éviter une concentration, au sein d'une même zone, des hébergements d'urgence.
L'article L. 642-9 du code de la construction et de l'habitation prévoit déjà l'association du maire. Ce n'est qu'après avoir sollicité l'avis du maire que le représentant de l'État dans le département notifie au titulaire du droit d'usage des locaux son intention de procéder à la réquisition. Votre amendement est donc satisfait.
L'amendement no 1037 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Le présent amendement a pour objectif de conserver, dans le cadre de la procédure de réquisition de logements et de bureaux vacants pour l'hébergement d'urgence des personnes sans abri, le droit pour l'attributaire de réaliser des travaux de mise aux normes minimales de confort et d'habitabilité, ainsi que de maintenir la même durée de réquisition. Il tend ainsi à maintenir les mots « pour une durée d'un an au moins et de six ans au plus » à l'article L. 642-1 du code de la construction et de l'habitation.
Par ailleurs, en raison des difficultés d'accès au logement, les personnes accueillies demeurent de long mois, voire des années, en hébergement d'urgence. Aussi, la préservation de la qualité des normes de confort et d'habitabilité et le maintien de la durée de réquisition des locaux seraient cohérents avec le plan quinquennal « logement d'abord », dont l'objectif est notamment de faciliter l'accès rapide au logement des personnes sans domicile, en rapprochant les conditions d'accueil en hébergement et dans le logement.
La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l'amendement no 2595 .
Quel est l'avis de la commission sur ces quatre amendements identiques ?
Les modalités applicables à la réquisition de locaux pour faire du logement doivent être adaptées à l'hébergement d'urgence pour que le dispositif fonctionne. Ainsi, la durée de réquisition prévue est plus courte, la réquisition en matière d'hébergement d'urgence ayant vocation à répondre à des besoins plus ponctuels. Avis défavorable.
Toujours dans un objectif de mixité sociale, le présent amendement vise à exclure les locaux situés dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville du champ d'application de la réquisition, ainsi que les communes comptant plus de 50 % de logements sociaux. Comme nous l'avons dit et répété, il convient de ne pas accroître la paupérisation de ces zones, où habitent déjà un grand nombre de personnes en difficulté. Tel est le sens de la discussion que nous avons eue précédemment à propos de l'article 9.
La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir pour soutenir l'amendement no 2596 .
L'objectif est qu'il ne soit pas procédé à des réquisitions dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, ni dans les quelques communes de France qui comptent plus de 50 % de logements sociaux, afin d'éviter la ghettoïsation.
L'amendement no 2599 est un amendement de repli, aux termes duquel il serait nécessaire de demander l'accord du maire concerné lorsque l'on procède à une réquisition dans un quartier prioritaire de la politique de la ville. C'est la moindre des choses. Je crains néanmoins le pire.
En revanche, je souscris à l'amendement no 2599 de M. Pupponi, qui nous a convaincus après une longue discussion en commission.
Même avis que le rapporteur.
Sur les amendements identiques nos 2499 et 2596 , je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
… …… …… …… …… …… …… …… …… …… …… …… …… …… …… …….
Je vais maintenant mettre aux voix les amendements identiques nos 2499 et 2596 .
Il est procédé au scrutin.
Nombre de votants | 63 |
Nombre de suffrages exprimés | 63 |
Majorité absolue | 32 |
Pour l'adoption | 24 |
contre | 39 |
L'amendement no 2599 est adopté.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, NG et GDR.
La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l'amendement no 2600 .
La parole est à M. Brahim Hammouche, pour soutenir l'amendement no 3160 .
La réduction de la qualité des normes « en fonction de l'usage prévu pour les locaux », c'est-à-dire pour l'hébergement d'urgence, apparaît contradictoire avec les principes d'un accueil dans des conditions dignes et décentes en hébergement d'urgence, prévus par l'article L. 345-2-2 du code de l'action sociale et des familles. Le rapprochement entre les normes minimales de décence en hébergement et celles qui sont applicables dans le logement est défendu depuis 2009, notamment dans le cadre du programme d'humanisation des centres d'hébergement. Il doit demeurer un objectif primordial, afin de sortir des logiques de simple mise à l'abri des personnes en situation de précarité.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR. – Mme Sylvia Pinel applaudit également.
L'amendement no 1697 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cinq millions de foyers sont concernés par la précarité énergétique. Celle-ci n'est pas uniquement liée à des éléments de revenus qui empêchent les individus d'améliorer la qualité environnementale de leur logement ; elle tient aussi à des conditions de logement dégradées qui empêchent leurs occupants de maîtriser leur consommation d'énergie et de vivre dans des conditions de logement dites « décentes ». Selon l'article 30 de la loi no 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, « un ménage est considéré en situation de précarité énergétique lorsque son revenu fiscal de référence est, compte tenu de la composition du ménage, inférieur à un plafond fixé par arrêté du ministre chargé de l'énergie ».
Il manque encore et toujours un critère de performance énergétique clair et mesurable autorisant la mise en location d'un logement. Toute personne en situation de précarité énergétique réelle doit être éligible à une procédure de réquisition de logement. Telle est l'orientation de notre amendement.
Les personnes en situation de précarité énergétique sont des personnes justifiant de faibles ressources et souffrant de mauvaises conditions de logement. Elles peuvent déjà bénéficier de la procédure de réquisition. Avis défavorable.
Même avis que le rapporteur. L'amendement est satisfait.
Il est procédé au scrutin.
Nombre de votants | 68 |
Nombre de suffrages exprimés | 64 |
Majorité absolue | 33 |
Pour l'adoption | 10 |
contre | 54 |
L'amendement no 2202 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Elsa Faucillon, pour soutenir l'amendement no 1696 .
La législation actuelle prévoit que les propriétaires personnes morales peuvent échapper pendant 24 à 26 mois à la procédure de réquisition en présentant un échéancier de travaux. Pendant ce temps, les services de l'État mobilisés pour la recherche de solutions d'hébergement d'urgence se tournent généralement vers d'autres priorités. Le présent amendement vise à simplifier l'article 11 sans pour autant remettre en cause le droit de propriété, dans la mesure où le titulaire du droit d'usage disposerait toujours d'un délai de trois mois pour mettre fin à la vacance de sa propriété dans l'éventualité d'une procédure de réquisition.
Devant l'ampleur des situations d'urgence, chacun d'entre nous se dit qu'un meilleur accompagnement social est nécessaire. Il faut surtout que les personnes concernées puissent sortir de l'hébergement d'urgence pour aller vers du logement pérenne et de qualité. Aucun d'entre nous ne souhaite que des familles ou des personnes passent plusieurs années dans des chambres d'hôtel dans des conditions parfois très éloignées de la dignité et de la décence. Or de nombreuses personnes en situation d'urgence ne bénéficient pas d'un accompagnement social suffisant et ne trouvent pas de logement abordable.
Dans mon département, les Hauts-de-Seine, l'hébergement d'urgence représente actuellement 4 000 nuitées. Le problème est que les crédits ont été coupés et que, partant, de nouveaux critères dits « de vulnérabilité » ont été imposés depuis une dizaine de jours. Cela concerne pour le moment les Hauts-de-Seine, mais tel sera bientôt le cas dans toute l'Île-de-France et dans d'autres zones tendues. Lorsqu'il modifie ces critères de vulnérabilité, l'État décide en fait que les gens qui étaient vulnérables hier ne le sont plus aujourd'hui.
La direction régionale et interdépartementale de l'hébergement et du logement d'Île-de-France nous a expliqué qu'il fallait « fluidifier » dans les Hauts-de-Seine. Mais, fluidifier, cela devrait être pour emmener ces familles vers du logement pérenne, pas pour les mettre à la rue. Pourtant, il y a dix jours, des dizaines de familles se sont retrouvées sur le trottoir, simplement parce que leurs enfants ont plus de trois ans. Elles ont été relogées dans des écoles, grâce à un réseau de solidarité formidable. Est-ce vraiment le pays que nous voulons ? Est-ce cela la sixième puissance économique mondiale ?
La loi peut permettre de réquisitionner rapidement des logements pour répondre à ces situations d'urgence. Décidons-en aujourd'hui ! Il est inconcevable que les choses se passent de cette manière dans la sixième puissance économique du monde ! Je ne citerai qu'un seul exemple : une femme qui se lève tous les jours pour aller bosser dans un EHPAD ne sait pas où elle pourra faire dormir ses deux mômes, des jumeaux de trois ans et demi, qui sont scolarisés, après le 6 juin prochain. Est-ce là le pays que nous voulons ? Des solutions existent et nous pouvons agir ici ! Alors, faisons-le !
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, FI et NG. – M. Brahim Hammouche et Mme Sylvia Pinel applaudissent également.
Le Gouvernement a montré, à travers un certain nombre d'articles de loi que nous venons d'adopter, sa réelle volonté de pallier les problèmes que vous soulevez, madame Faucillon. En tout cas, votre amendement constituerait, à notre sens, une atteinte au droit de propriété. Les dispositions légales existantes limitent considérablement les dérives auxquelles vous avez fait référence. Elles prévoient que le titulaire du droit d'usage qui s'est engagé à mettre fin à la vacance ou à réaliser des travaux justifie de l'exécution de son engagement sur la demande du représentant de l'État. Je sais que les représentants de l'État seront, compte tenu des consignes qui ont été données, impitoyables sur ces questions.
C'est absolument faux ! Les préfets font le contraire ! Ils n'ont aucune consigne !
En l'absence de justification utile, le représentant de l'État peut notifier l'arrêté de réquisition. Avis défavorable.
L'amendement no 1696 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 11, amendé, est adopté.
Je suis d'accord avec M. Peu : surveillez vos préfets !
Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2018, on s'en souvient, vous avez réformé l'impôt sur la fortune en faisant un cadeau de 3,6 milliards d'euros aux 1 % les plus riches qui percevaient des revenus mobiliers. À l'époque, vous avez expliqué que ceux qui touchaient des revenus immobiliers continueraient pour leur part à être assujettis à un impôt sur la fortune. Vous avez en effet considéré que l'immobilier était un « patrimoine improductif » et qu'il devait continuer à être taxé. Nous vous prenons au mot et vous proposons d'aller plus loin par cet amendement, qui vise à taxer beaucoup plus fortement les riches qui sont détenteurs d'un tel patrimoine improductif – nous ne nous satisfaisons pas pour autant du fait que vous ayez mis de côté les riches qui sont détenteurs de capitaux mobiliers.
Ces recettes supplémentaires pourraient être utilement investies dans la construction de logements sociaux, notamment dans les zones tendues et très tendues, à l'heure où notre pays compte plus de 4 millions de mal-logés et 140 000 personnes sans aucun logement. Cet effort de solidarité participerait à la résorption de la crise du logement en touchant ceux qui spéculent sur la pierre et qui, selon votre propre aveu, sont quelque part des improductifs.
La mesure relève de la loi de finances. Nous sommes défavorables à l'idée de réformer un impôt qui vient d'être créé, puisqu'il date de 2018. Avis défavorable.
L'amendement no 2206 n'est pas adopté.
L'amendement vise à insérer après l'article 11 : « Le Gouvernement remet au Parlement, dans les trois mois suivant la promulgation de la présente loi, un rapport sur la mise en oeuvre de la procédure de réquisition de locaux vacants prévue à l'article L. 642-1 du code la construction et de l'habitation. »
Il s'agit d'un amendement de repli. La loi no 2013-61 du 18 janvier 2013 crée un nouveau régime de réquisition qui permet à l'État, par l'intermédiaire de son représentant dans les départements, d'acquérir la jouissance de locaux vacants, depuis au moins douze mois.
Cette procédure complexe et très coûteuse pour l'État n'a, jusqu'à présent, donné lieu qu'à quelques dizaines de réquisitions. Avant d'étendre les délais de réquisition des locaux vacants, il semble approprié de comprendre pourquoi l'État n'a pas fait de la réquisition un outil plus probant de sa politique en matière d'hébergement d'urgence.
Avis défavorable. Nous sommes opposés à la multiplication des demandes de rapport. De plus, l'amendement obligerait le Gouvernement à faire rédiger un rapport sur la procédure de réquisition de locaux vacants à des fins d'hébergement d'urgence moins de trois mois après sa création, ce qui, vous me l'accorderez, confine à l'absurde.
J'émets également un avis défavorable, mais je tiens à apporter une précision. Vous avez raison, monsieur Peu, on parle beaucoup des représentants de l'État dans les départements, c'est-à-dire des préfets. Il n'entre ni dans les habitudes de M. Mézard ni dans les miennes de nous défausser de nos responsabilités sur ceux-ci.
M. le secrétaire d'État renverse un verre d'eau.
Je crois que j'ai arrosé M. Mézard. Pardon, cher Jacques. Je ne sais comment m'excuser. Cela se devine à peine…
Rires et applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Le Gouvernement passe des instructions aux préfets. On sait les difficultés que pose l'hébergement d'urgence. Pendant tout l'hiver, M. Mézard et moi-même avons tenu chaque semaine une visioconférence avec tous les préfets de région afin que les mesures contenues dans les circulaires soient effectivement mises en oeuvre.
Nous continuons à le faire, sur un rythme moins hebdomadaire, pour nous assurer que toute la politique du logement est mise en oeuvre avec de véritables indicateurs. Je le répète, les préfets, c'est nous qui en sommes responsables. Nous assumons cette responsabilité et nous insufflons une véritable dynamique dans tout le corps préfectoral pour atteindre nos objectifs.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Monsieur le rapporteur, vous n'aimez pas les rapports ? Soit ! Mais dans l'opposition, il se trouve qu'on les aime. C'est une différence entre nous.
J'ai néanmoins pu constater, lors de l'examen du texte en commission, que vous en acceptiez certains dont la rédaction n'était pas proposée par la minorité, ce qui prouve que la même demande peut quelquefois recevoir des traitements différents.
Traiter le sujet en répondant : « C'est absurde ! » est maladroit, voire méprisant.
« Oui ! » sur les bancs du groupe LR.
Le Gouvernement pourrait en convenir, les procédures de réquisition de logement à des fins d'hébergement d'urgence sont complexes, coûteuses et pas si faciles à mener.
Il serait intéressant pour la représentation nationale de savoir exactement comment elles se passent, pourquoi il y en a si peu et quel est leur coût global, d'autant que c'est apparemment une des solutions que vous préconisez et qu'a priori, compte tenu du contexte que nous connaissons, nous risquons d'avoir besoin d'encore plus d'hébergements d'urgence au cours des prochaines années.
Je souscris aux excellents propos de mon collègue. Pour abonder dans son sens, j'ajoute qu'il y a probablement eu une incompréhension ou une méprise sur la proposition de M. Ramadier. Celui-ci a dit qu'il était important de faire un bilan sur la manière dont les réquisitions ont – ou plutôt n'ont pas – été utilisées jusqu'ici.
Cette information nous aiderait à comprendre quels effets pourraient avoir les dispositions dont nous discutons. En matière d'hébergement d'urgence, la réquisition n'est pas une mesure anodine et ce n'est pas un rapport banal que nous vous demandons. Compte tenu de la gravité des décisions que nous prenons en ce moment, il serait légitime que nous soyons éclairés par les échecs du passé.
L'amendement no 190 n'est pas adopté.
Voilà qui ne plaira peut-être pas au rapporteur, mais nous demandons la rédaction d'un rapport sur la politique d'attribution des logements de fonction aux personnels de l'État dans les établissements publics locaux d'enseignement. Ce rapport prendra en compte les logements par nécessité absolue, les logements pour utilité de service, ainsi que l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise.
Alors que les Français dépensent près de 40 % de leur budget pour leur logement, les rémunérations des professeurs et enseignants restent en décalage avec la hausse du coût de la vie. La question du logement est donc essentielle pour eux.
Les difficultés se manifestent particulièrement lorsqu'ils sont mutés dans une autre ville. S'il existe des dispositifs d'accès aux logements publics ou privés dans chaque académie, force est de constater que, selon les organisations représentatives des enseignants, il n'y a pas de politique cohérente d'information en matière de logement.
Plusieurs collectivités mènent néanmoins des initiatives volontaristes. Ainsi, la région Île-de-France s'est engagée dans un dispositif permettant l'accès aux logements sociaux des enseignants nouvellement nommés qui intègrent des lycées en pénurie de professeurs, en contrepartie d'une présence d'au moins cinq ans dans l'établissement.
L'amendement tend donc à demander un rapport pour connaître l'action du Gouvernement en matière de logement des professeurs et enseignants.
Avis défavorable.
Je suis extrêmement favorable à cette demande de rapport. Alors que nous commencions l'examen du projet de loi, j'ai assisté avec des collègues à la remise d'un rapport d'information, dans le cadre d'une mission d'évaluation sur l'action de l'État, dans l'exercice de ses missions régaliennes en Seine-Saint-Denis : justice, police, éducation.
Il en ressort un point important : il n'y a pas que des fonctionnaires qui ne veulent pas aller dans ce département. Certains aimeraient s'y installer, y rester même. Seulement, ils ne peuvent pas s'y loger. Certaines villes, comme la mienne, se débrouillent pour réserver des logements aux policiers ou aux enseignants, mais elles le font avec les moyens du bord, dans une situation de pénurie.
Les fonctionnaires de l'éducation et de la police, ou les fonctionnaires hospitaliers, n'ont pas le droit au 1 % logement – ils sont donc démunis. Or les préfets sacrifient le pourcentage de logements réservés aux fonctionnaires pour satisfaire à leurs obligations en matière de relogement des personnes défavorisées, si bien que les fonctionnaires sont, notamment dans les zones tendues, les grands sacrifiés.
Soyons cohérents ! Essayons de tendre une main solidaire à ces personnels souvent mal payés, qui ne peuvent pas se loger dans les zones tendues et qui, alors même qu'ils voudraient bien y rester, sont abandonnés par tout le monde, sauf quand un maire se décide à mener en leur faveur une action volontariste.
Non seulement je suis très favorable à la rédaction d'un rapport, mais j'élargirais volontiers son objet aux enseignants, aux policiers et à d'autres personnels de la fonction publique.
Sur l'amendement no 2258 , je suis saisi par le groupe Les Républicains d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
En règle générale, je suis, moi aussi, hostile aux demandes de rapport, mais je voterai néanmoins l'amendement,
« Merci ! » sur les bancs du groupe LR
en regrettant qu'il ne concerne que les personnels de l'éducation nationale.
Une commission d'évaluation de l'Assemblée, voire une commission d'enquête, devrait s'intéresser à la façon dont l'État gère son parc immobilier de logements. Je pense d'ailleurs, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, que vous ne le savez pas vous-mêmes. Non seulement vous l'ignorez à cet instant, mais vous auriez bien du mal à obtenir cette information de votre administration. C'est sans doute un des sujets les plus opaques de la République. Or nous aurions besoin d'y voir plus clair. Il y a un véritable travail à faire sur le sujet.
Pour prolonger la réflexion de M. Peu, j'ajoute que la pression de la loi sur le droit au logement opposable – DALO – empêche l'État dans certains départements, dont le nôtre, la Seine-Saint-Denis, d'attribuer les 5 % de logements réservés aux fonctionnaires à ceux auxquels ils sont destinés !
M. Peu vient de l'expliquer, les présidents d'organismes HLM, les maires, bref les réservataires locaux en viennent à tricher – car enfin pardon, monsieur Peu, mais réserver des logements pour des enseignants, des policiers ou des magistrats, cela revient à tricher pour loger des fonctionnaires. On doit s'en rendre compte. Il m'est arrivé par le passé d'être obligé de loger en urgence une greffière du tribunal de Bobigny qui habitait dans une cité compliquée de ma circonscription. Certains de ceux qui l'avaient vue au tribunal s'étaient rendu compte qu'elle vivait près de chez eux… L'État n'était pas en mesure de réagir.
Il faut clarifier l'utilisation de ces biens. Après notre débat, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, on peut imaginer un travail commun entre le Gouvernement et le Parlement – car j'imagine que le Sénat formulera la même demande que l'Assemblée, constatant qu'il y a des dysfonctionnements et qu'on peut améliorer sur ces sujets le fonctionnement de l'État.
Il faut aussi ouvrir une réflexion sur le fait que les 5 % de logements sociaux réservés aux fonctionnaires de l'État doivent effectivement leur être attribués, ce qui n'est malheureusement plus le cas dans les zones les plus tendues.
Je répète que je soutiens l'amendement. Plus on y verra clair, plus on permettra au Gouvernement d'améliorer la politique de l'État sur son domaine – ses propriétés – ou sur son domaine réservataire.
Encore un mot pour défendre l'excellent amendement dont Mme Le Grip est la première signataire. Comme M. Peu et M. Lagarde, je considère qu'il traite d'une fonction régalienne. Je regrette que le ministre et le secrétaire d'État aient balayé cette demande comme, il y a quelques jours, ils ont balayé le rapport Borloo.
En l'espèce, je ne parle pas pour mon département. Dans le territoire de Belfort, la vacance du logement social permet de loger – sans tricher – les instituteurs, les militaires, les policiers, les greffiers et, peut-être un peu moins souvent, les juges. Mais il ressort des propos de mes collègues de Seine-Saint-Denis qu'un vrai problème se pose dans certains quartiers. Si l'on veut avoir des enseignants qui ont envie d'aller dans les quartiers défavorisés, dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, et d'y rester, il faut quand même faire un geste !
Je rappelle que le pouvoir d'achat de ces personnels n'augmente pas et que ceux-ci – je pense notamment aux enseignants – exercent dans des conditions que je qualifierai, pour rester poli, de très difficiles. L'État peut au moins rédiger un rapport pour savoir comment et dans quelles conditions on les loge, et si l'on peut mieux faire !
Considérez cet amendement comme un amendement d'appel afin que nous puissions faire le point tous ensemble – à votre initiative, monsieur le ministre, puisque vous allez commander ce rapport – et prendre rendez-vous dans un an, pour examiner la manière dont on peut améliorer le dispositif qui permet de loger les fonctionnaires dans certains quartiers. Je ne comprendrais pas que la majorité ne réponde pas à cette demande.
La proposition me semble de bon sens et raisonnée. Si l'on veut amorcer un cercle vertueux de reconquête de nos territoires, à laquelle tendent plusieurs plans, il faut que la mixité soit effective. Il faut aussi que nous protégions ces hussards de la République que sont aujourd'hui les policiers, les enseignants et les fonctionnaires d'État.
Un rapport pour avoir de la visibilité sur ce que se passe sur le terrain et permettre à l'État de protéger au mieux ses fonctionnaires et leur donner un toit me semble fort honorable. Nous voterons en faveur de cet amendement.
« Merci ! » sur les bancs du groupe LR.
Il est procédé au scrutin.
Nombre de votants | 75 |
Nombre de suffrages exprimés | 73 |
Majorité absolue | 37 |
Pour l'adoption | 29 |
contre | 44 |
L'amendement no 2258 n'est pas adopté.
Vous n'en avez rien à faire des fonctionnaires ! N'allez pas pleurer sur le sort des enseignants !
Le groupe MODEM se réjouit des simplifications apportées par le texte. Effectivement, il faut construire plus et mieux. Cela étant, des inquiétudes se manifestent à l'égard de nos paysages urbains et ruraux.
Aujourd'hui, que ce soit dans une mairie ou dans une intercommunalité, les services instructeurs n'ont aucun moyen de juger l'architecture. Dans le cadre de l'instruction d'un permis de construire ou d'un permis d'aménager, on juge d'après le code de l'urbanisme, mais absolument pas d'un point de vue architectural – je ne parle pas des zones ABF – architectes des Bâtiments de France. Notre groupe propose l'inclusion dans le plan locald'urbanisme d'une charte architecturale et paysagère, de façon à mieux prendre en compte l'architecture des territoires, qu'ils soient ruraux ou urbains.
Il importe que la Bretagne ne ressemble pas, demain, à l'Alsace, ou le Pays basque à l'Auvergne. L'identité de nos territoires est essentielle, et cet amendement permettrait de la respecter. Ce serait une aide précieuse apportée aux services de l'urbanisme, aux services instructeurs des permis, qui permettrait de mieux appréhender l'architecture. Cette dernière est certes une notion subjective, mais, aujourd'hui, nos services – c'est l'ancien maire qui vous parle – sont complètement démunis.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe MODEM.
On comprend la philosophie de votre amendement mais on peut lui opposer deux arguments. Premièrement, comme vous venez de le dire, la beauté architecturale présente un caractère subjectif. Ayant été adjoint à l'urbanisme pendant dix ans, j'ai constaté que des immeubles conçus par de grands architectes pouvaient être jugés horribles par une partie de la population et très beaux par une autre partie. La charte architecturale et paysagère que vous appelez de vos voeux me semble extrêmement difficile, voire quasiment impossible à mettre en place. Les élus disposent de l'aide des ABF…
Sourires.
Restez calme ! Nous aurons l'occasion d'en reparler. Les architectes-conseils et les services de l'urbanisme aident également les maires à prendre la décision de signer ou non un permis de construire. Deuxième argument, la charte serait annexée au PLU et alourdirait considérablement les procédures. Donc avis défavorable.
Je donnerai également un avis défavorable. Nous sommes nombreux ici à savoir la difficulté à réaliser un PLU. Le code de l'urbanisme et la réglementation actuelle permettent d'inclure dans le PLU certains des éléments que vous souhaitez introduire, que ce soit la définition des actions et des opérations nécessaires pour mettre en valeur l'environnement, les continuités écologiques, les paysages, les entrées de villes et le patrimoine. De grâce, un document d'urbanisme est déjà suffisamment compliqué à réaliser sans qu'on rajoute constamment des dispositions. Je comprends tout à fait l'objectif que vous poursuivez et je peux y souscrire, mais arrêtons d'empiler les documents et les cadres !
Monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, j'entends bien vos arguments, mais avez-vous vu la différence entre deux lotissements, l'un suivi par un architecte-conseil, l'autre pas ? L'architecture est évidemment une notion subjective, mais voulez-vous un urbanisme à l'espagnole ? Allez voir ces villes espagnoles, appréciez les différences de cachet architectural d'une région à une autre !
Murmures sur quelques bancs du groupe LaREM.
Je sais que ça ne plaît pas à tout le monde, mais souffrez que je vous dise cela. De vraies inquiétudes se manifestent. Cette charte serait définie par les élus, qui ne seraient pas dépossédés de leurs pouvoirs, avec des architectes-conseils dont, je le rappelle, c'est le métier. Compte tenu de tous les éléments que l'on demande dans un PLU ou un PLUI, je ne vois pas en quoi cette disposition alourdirait quoi que ce soit. Ce serait, au contraire, un guide pour les services instructeurs, qui sont constitués de personnels administratifs n'ayant pas suivi de formation architecturale, qui instruisent un permis au regard du code de l'urbanisme et des règlements d'urbanisme.
Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM.
Cher collègue, vous avez rappelé, dans votre introduction, que ce projet de loi avait pour but de simplifier et d'accélérer quelque peu la construction de logements. Vous proposez de prendre en compte un critère totalement subjectif, qui aurait juste vocation à ralentir la production de logements. Il est déjà suffisamment compliqué d'obtenir un permis de construire pour qu'on ne rajoute pas une condition totalement subjective.
Vous dites que la Bretagne ne doit pas ressembler à l'Alsace, mais le charme de nos territoires vient aussi du fait qu'il y a de très belles maisons à colombages en Bretagne – je parle sous le contrôle de M. le président. Puisque vous avez évoqué le PLUI, j'évoquerai ma communauté de communes, qui regroupe soixante-deux communes dont aucune ne ressemble à une autre. Les maisons de la commune de Bretagne ne ressemblent pas à celles de Croix, pas plus qu'à celles de Réchésy ou de Faverois : vous devrez donc définir une charte distincte pour chacune de ces quatre communes de ma circonscription – que je suis heureux d'avoir pu citer ici. Je ne vois vraiment pas comment on pourrait appliquer une telle disposition.
Tout le monde n'est pas obligé d'énoncer la liste des communes de sa circonscription !
Sourires.
Pour ma part, cela irait relativement vite, monsieur le président, il n'y en a que trois.
Rires.
Pas du tout, monsieur le député ex-maire de Sarcelles : Le Bourget, Drancy et Bobigny.
Je comprends l'idée de M. Lainé. Je ne sais pas si le dispositif est le bon mais je veux appeler l'attention du Gouvernement et de nos collègues sur le fait qu'évacuer cette proposition au motif qu'elle serait trop compliquée ou présenterait un caractère subjectif paraît un peu sommaire.
En réalité, quand un maire ne veut pas du type de construction présenté, que fait-il ? Il la refuse au motif d'une mauvaise insertion dans le site, ce qui conduit généralement à un contentieux devant le tribunal administratif. Or, sans me prononcer sur le fond, j'ai le sentiment que le juge administratif a un jugement encore plus subjectif que le maire, parce qu'il ne connaît pas le quartier ni les détails du dossier.
Peut-être le dispositif proposé n'est-il pas le bon, mais il conviendrait d'y réfléchir. Il faut quelques règles pour guider les décisions. On subjectivise tellement la décision du juge administratif lorsque le maire ne veut pas laisser construire n'importe quoi, qu'on n'est peut-être pas très opérationnel.
L'amendement no 1615 n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements, nos 2862 et 1970 rectifié , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Laurianne Rossi, pour soutenir l'amendement no 2862 .
Cet amendement vise à reconnaître officiellement et à conférer une véritable identité à un métier exercé depuis près de vingt-cinq ans dans notre pays, celui d'urbaniste. Les urbanistes sont des professionnels de l'aide à la décision, qui contribuent, auprès des élus locaux, à la définition des stratégies territoriales et à l'ingénierie des projets de territoires. En France, des formations distinctes coexistent pour les architectes, les paysagistes et les urbanistes, mais seules celles qui concernent les architectes et les paysagistes sont réglementées, confèrent un titre protégé. Or l'appellation d' « urbaniste » est convoitée, parfois usurpée, par des personnes physiques n'ayant pas la capacité ou la formation nécessaire pour justifier de ce titre.
Cet amendement vise à instituer un titre professionnel d'urbaniste au sein du répertoire national des certifications professionnelles, le RNCP, comme c'est déjà le cas pour les paysagistes et les architectes. Cette reconnaissance serait un levier important, aussi bien pour ces professionnels que pour la maîtrise d'ouvrage publique, son organisation, sa qualité et, bien entendu, les ouvrages urbanistiques. Cela permettrait de garantir une commande publique de qualité, mais aussi une plus grande fluidité dans les parcours professionnels de ces urbanistes.
La parole est à M. Sébastien Cazenove, pour soutenir l'amendement no 1970 rectifié .
Mon amendement est sensiblement le même que celui de Mme Rossi. J'ajouterai simplement que cette reconnaissance ne créerait en aucun cas un monopole et ne ferait pas obstacle à ce que d'autres professionnels interviennent dans le secteur.
On peut partager l'objectif de lisibilité que vous poursuivez. On constate d'ailleurs que la plupart des urbanistes qui travaillent pour nous dans les collectivités ont déjà un diplôme ; ce sont généralement des architectes. Faut-il réglementer encore plus cette profession ? Nous ne le pensons pas. La commission a émis un avis défavorable.
Vous ouvrez un sujet connu. Un travail – toujours en cours – a été engagé avec les urbanistes depuis un peu plus d'un an sous l'égide du précédent ministère du logement, puis du ministère de la cohésion des territoires. Les urbanistes n'étant pas totalement d'accord entre eux pour identifier la bonne solution, je vous propose que nous laissions ces travaux se dérouler et que nous en reparlions quand nous sentirons que le sujet est plus mûr.
Les amendements nos 2862 et 1970 rectifié sont retirés.
Nos concitoyens connaissent trop peu, à mon sens, l'importance des documents de planification de l'urbanisme pour le développement et la structuration de leur territoire. Ils sont trop peu nombreux à savoir que, depuis la loi Grenelle 2, les PLU comprennent des objectifs environnementaux dont la mise en place permet des avancées considérables en matière de sauvegarde de l'environnement et de limitation de l'étalement urbain. Oui, le PLU représente une avancée importante pour nos villes et nos villages, et l'abandon des POS – plans d'occupation des sols – doit se faire progressivement mais sûrement.
Toutefois, dans ce domaine comme dans trop de domaines, l'administration centrale fait parfois preuve d'entêtement. L'établissement d'un PLU, pour une commune de petite taille, représente deux ans de travail, des dizaines de milliers d'euros dépensés auprès des cabinets d'étude et une aventure administrative parfois incertaine. Autant dire que les irrégularités sont possibles et les annulations, courantes.
Ma circonscription est émaillée de ces communes frappées par l'illégalité de leur PLU et contraintes, à cause des délais extrêmement courts imposés par la loi, de revenir au règlement national d'urbanisme, véritable carcan urbanistique – vous en conviendrez – dans lequel le développement économique des communes ne peut s'exprimer. Je citerai la commune de Saint-Blimont, dans ma circonscription, qui compte 900 habitants et dont le maire m'a alerté sur la complexité de construire de simples logements.
Tout en partageant les objectifs du déploiement des PLU et, maintenant, des PLUI, j'appelle donc le Gouvernement à la plus grande écoute sur ces sujets, qui retiennent l'attention de tous les élus locaux concernés. J'ai d'ailleurs déposé des amendements sur cet article, qui sont de nature à faciliter cette période transitoire particulièrement sévère.
Près de dix-sept ans après la loi du 13 décembre 2000, l'article 12 vise à acter définitivement la disparition des POS. Alors qu'ils devaient théoriquement avoir disparu depuis le 26 mars 2017, ils ont bénéficié d'une succession de dispositions transitoires ou dérogatoires favorisant le prolongement de leur durée de vie. Au 25 septembre 2017, on dénombrait cinquante et une communes couvertes par un POS à la suite de l'annulation d'un PLU. Il existe aujourd'hui un risque juridique que ces POS remis en vigueur conduisent à autoriser certaines occupations du sol prohibées par la réglementation actuelle ou contraires aux objectifs des politiques publiques.
Le présent article modifie donc l'article L. 174-6 du code de l'urbanisme et dispose que « Le plan d'occupation des sols antérieur redevient applicable pour une durée d'un an à compter de la date de cette annulation ou de cette déclaration d'illégalité. [… ] À défaut de plan local d'urbanisme ou de carte communale exécutoire à l'issue de cette période, le règlement national d'urbanisme s'applique sur le territoire communal. »
L'application de la règle nationale d'urbanisme au bout d'un an constitue un élément particulièrement dissuasif pour les communes, en raison des importantes restrictions à la construction qu'elle institue, puisqu'elle interdit toute construction en dehors des parties actuellement urbanisées. Cependant, la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation s'est inquiétée de l'impact de cette mesure sur les finances des communes concernées. L'étude d'impact indique que les collectivités compétentes seront incitées à recourir aux services d'un bureau d'études pour faire à nouveau approuver leur PLU. Cela risque d'entraîner l'engagement d'études complémentaires coûteuses – sur l'actualisation des évaluations environnementales, par exemple – ou de nouvelles modalités de participation du public, comme la concertation préalable et l'enquête publique. C'est pourquoi je vous proposerai tout à l'heure un amendement fixant ce délai à deux ans.
Je suis saisi de six amendements, nos 881 , 1284 , 1972 , 2602 , 532 et 1285 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 881 , 1284 , 1972 et 2602 , d'une part, et les amendements 532 et 1285 sont identiques.
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement no 881 .
Il y a quelques mois, nous avons créé une délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation à l'Assemblée nationale, dont l'objectif est d'entendre la voix des communes et du terrain. Nous avons l'occasion de montrer que non seulement nous avons entendu cette voix, mais que nous sommes prêts à la mettre en musique et la concrétiser.
Le deuxième alinéa de l'article 12 dispose que le POS est remis en vigueur pour une durée d'un an à compter de la date d'annulation ou de déclaration d'illégalité du PLU. Cet amendement vous propose de retenir une durée de deux ans, plus raisonnable pour régulariser la situation du PLU.
La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour soutenir l'amendement no 1284 .
Il s'agit d'un amendement identique, et j'ai également déposé un amendement de repli, no 1285, qui fixe la durée à dix-huit mois.
En cas d'annulation, il est impossible de modifier un PLU en un an, les chances d'y parvenir sont très faibles. Le projet de loi propose intelligemment de remettre en place ce qui existait précédemment pendant un an, mais il faut le faire dans un délai compatible avec la remise en place des dispositions non annulables, celui d'un an n'étant pas suffisant.
Le projet de loi promeut une bonne idée, mais elle ne servirait à rien car elle n'est pas efficiente. Le délai serait insuffisant pour corriger le tir après une annulation. On devrait y parvenir en dix-huit mois, même si cela est un peu juste, et on est capable de le faire en deux ans.
La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l'amendement no 2602 .
La parole est à Mme Valérie Beauvais, pour soutenir l'amendement no 532 .
Comme vient de le dire notre collègue Lagarde, il s'agit d'un amendement de repli. La durée de deux ans est peut-être trop longue, mais celle d'un an est trop courte, donc nous proposons de retenir un délai de dix-huit mois, qui laisserait plus de temps aux élus locaux pour rédiger et adopter un nouveau PLU.
M. Jean-Christophe Lagarde a déjà défendu l'amendement no 1285 .
Quel est l'avis de la commission ?
Nous souhaitons conserver le délai d'un an, si bien que j'émets un avis défavorable à l'adoption de ces amendements.
En France, il y a une élection presque chaque année. Avec un délai d'un an pour réviser un PLU, il sera impossible de conduire l'enquête publique, parce qu'il y aura probablement une échéance électorale qui l'empêchera. Acceptez au moins le délai de dix-huit mois, c'est du simple bon sens.
Votre loi permettra au document d'urbanisme d'être applicable pendant un an, mais un petit malin pourrait attendre un an et un jour pour déposer son permis sous le régime du règlement national d'urbanisme, avant que le PLU ait pu être révisé.
Lorsque la commune basculera dans le régime de la règle nationale d'urbanisme, de nombreux documents ou autorisations d'urbanisme deviendront caducs. Cela concernera des lotissements ou des permis d'aménager. Nous ne voulons pas étendre le délai par caprice, mais bien parce qu'il n'est pas réaliste de penser que l'on pourra élaborer un nouveau PLU en une année.
Messieurs les ministres, vous avez l'objectif de construire davantage et de simplifier. Des communes se sont sincèrement engagées et ont quitté leur stade de POS. En réalité, certaines ont des difficultés : protocoles de constructibilité en zone d'affaissement, qui dépendent parfois des services de l'État, ce qui n'est pas toujours très simple ; instabilité des périmètres intercommunaux liée au fait que certains ont attendu et d'autres ont renégocié le projet d'aménagement et de développement durable – PADD – par souci de sécurité juridique.
Si vous voulez produire un choc d'offre, il ne faut pas briser d'élans – sans jeu de mots – sur des territoires qui se sont engagés. Si les POS tombaient sans que les communes aient eu le temps de réviser le PLU, il n'y aurait plus de possibilité de construire. Je vous demande vraiment une sagesse ministérielle.
La sagesse ministérielle est presque un pléonasme, monsieur le député.
Sourires.
Nous acceptons la durée de dix-huit mois.
La parole est à M. Emmanuel Maquet, pour soutenir l'amendement no 600 .
Cet amendement vise à prolonger la remise en application des POS pendant toute la période d'élaboration des PLUI. Il s'agit d'envoyer un message d'encouragement aux intercommunalités ayant pris cette initiative, eu égard au délai nécessaire pour mettre en place les PLUI. Dans le prolongement de la discussion que nous venons d'avoir, il semblerait raisonnable pour les communes concernées que l'on puisse faire la jonction entre ces deux échéances.
Avis défavorable. L'amendement que nous venons d'adopter permettra de remettre en place les PLU assez rapidement. Les POS ont pour conséquence la réactivation de règles devenues illégales voire inconventionnelles. En outre, les POS n'ont pas, contrairement aux PLU, l'obligation formelle de mettre en oeuvre les politiques, notamment en matière de continuité écologique, de prise en compte du changement climatique et de production d'énergies renouvelables.
L'amendement no 600 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Emmanuel Maquet, pour soutenir l'amendement no 601 .
Avec l'amendement que nous venons de voter, celui-ci a perdu son objet, donc je le retire.
L'amendement no 601 est retiré.
Cet amendement ainsi que le no 2603 à venir visent à faciliter la rédaction de documents d'urbanisme dans le cadre de la métropole du Grand Paris – MGP – , en prolongeant les délais d'élaboration.
L'article 113 de la loi du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté a prévu que les dispositions des PLH – plans locaux de l'habitat – préexistants à la métropole du Grand Paris demeuraient applicables dans l'attente de l'adoption du plan métropolitain d'habitat et d'hébergement – PMHH – et, au plus tard, dans un délai de deux ans à compter de la date du transfert de la compétence de la politique locale de l'habitat à la métropole, à savoir le 1er janvier 2019.
Il est très probable que le PMHH de la métropole du Grand Paris ne sera pas adopté à cette date, avec pour conséquence que la MGP, ses communes membres et leurs partenaires ne disposeront plus d'aucun document permettant d'assurer la continuité des politiques locales de l'habitat. C'est pourquoi le présent amendement a pour objet de porter la durée d'application des PLH préexistants à trois ans au lieu de deux ans, soit jusqu'au 1er janvier 2020.
M. François Pupponi a déjà soutenu l'amendement no 2603 .
Quel est l'avis de la commission ?
Je suis très sensible à ces amendements, mais il n'est pas possible de les adopter sans laisser plus de temps pour transférer la compétence de la politique du logement à la métropole. Je vous propose de retirer vos amendements au profit de mon amendement no 3011 , que nous examinerons après l'article 14. Il vise à modifier l'article 113 de la loi relative à l'égalité et à la citoyenneté pour considérer la MGP comme dotée d'un PLH exécutoire et reprenant les dispositions des PLH préexistants.
L'article 12, amendé, est adopté.
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement no 1012 .
L'amendement no 1012 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il s'agit d'amendements d'appel, déposés par M. Vercamer, que je soutiens, mais que je veux bien retirer. J'aimerais, en revanche, obtenir une réponse du Gouvernement.
Nous créons un certain nombre d'immeubles collectifs, notamment dans le logement social, mais nous n'avons pas le droit de faire en sorte que les aires de stationnement, y compris souterraines, soient occupées par les locataires. On construit donc des parkings souterrains qui restent vides, cependant que la voirie est encombrée.
Je comprends bien qu'un locataire de logement social peut ne pas avoir de voiture, et on ne peut donc pas l'obliger à louer une place de parking. Mais dès lors qu'il en a une, il doit l'occuper, puisque l'on a prévu que son logement devait être doté d'une place de stationnement, ce que l'État demande d'ailleurs à travers différentes règles. Sinon, cela signifierait que l'on oblige à construire des places vides à grands frais, avec un impact sur le budget des organismes et des bailleurs sociaux. Soit on dit qu'il n'y a plus de places de parking, soit il y en a, et elles doivent être occupées.
Tel est le sens de ces deux amendements, dont j'imagine bien qu'ils ne recueilleront pas un avis favorable. Je suggère néanmoins que l'on y réfléchisse et que l'on trouve un dispositif qui permette d'occuper les places de parking souterrain, qui coûtent, en tout cas chez nous, entre 15 000 et 20 000 euros l'unité. Ces frais sont acquittés par le bailleur, et c'est autant de travaux en moins consacrés aux locataires.
Nous avons évoqué ce sujet en commission. Nous avons d'ailleurs rappelé à cette occasion que les règles applicables aux PLU peuvent tout à fait fixer le nombre de places de parking exigibles, notamment des bailleurs sociaux.
Nous sommes défavorables à vos amendements, cher collègue, mais nous en comprenons la raison. Sans doute incombe-t-il au Gouvernement de répondre à vos observations !
Monsieur Lagarde, vous évoquez un sujet complexe. J'ai le sentiment – dont il faudra vérifier la véracité – que, s'agissant du flux, la question est à peu près résolue. De mémoire, la loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, dite « ALUR » a fait passer le ratio de places de parking par logement de 1 à 0,5.
Autrement dit, nous avons décorrélé, de façon générale, le nombre de places de parking et le nombre de logements. Néanmoins, on sait bien que le flux…
… représente 120 000 logements, tandis que le stock en compte 4,5 millions. Là réside donc la question. S'agissant du stock, je n'ai pas de réponse à vous fournir maintenant, monsieur Lagarde. Il faut que nous en discutions. Il est bien plus complexe de déterminer la meilleure façon d'utiliser les places vides, sachant que les baux de location, qu'ils comprennent une place de parking ou pas, sont déjà établis.
J'entends le raisonnement, parfaitement juste, de la distinction entre stock et flux. Je donnerai néanmoins un chiffre : dans la plupart des logements HLM de ma circonscription, on compte 50 % de places de parking vides. Or le taux de rotation des logements demeure hélas ! trop faible. Le flux en rotation est bien plus rapide que le flux en construction. C'est sans doute là qu'il faut chercher une solution au problème.
Il vise au respect de certaines dispositions de la loi littoral, dont nous débattrons ultérieurement. Celle-ci prévoyait – et c'est une très bonne chose – l'interdiction de circuler en véhicule à moteur dans les espaces naturels hors des chemins aménagés, comme le prévoit clairement l'article L. 321-9 du code de l'environnement. De tels chemins permettent de desservir, par exemple, des zones urbanisées ou de loisirs. Or, si nos prédécesseurs, jadis, en ces lieux, ont prévu et codifié cette possibilité de circuler en véhicule à moteur sur les chemins aménagés, à l'heure actuelle, en France, il n'existe aucun chemin aménagé !
Sur mon territoire, il en résulte de véritables problèmes. Bien entendu, nous ne demandons pas que l'on construise des autoroutes. Nous ne demandons pas davantage – car il ne faut plus en construire – des routes longeant le littoral, dont on sait les problèmes qu'elles ont causés. Nous demandons simplement l'application claire de la loi, afin de disposer de chemins aménagés permettant de desservir certaines zones, dans le cadre d'une urbanisation raisonnable. Localement, on nous répond systématiquement que telle n'est pas la philosophie du texte.
L'amendement permet de clarifier la situation en précisant ce que sont les chemins aménagés : des chemins qui permettent de desservir certaines communes, dans certaines conditions, sur autorisation préfectorale. Il s'agit uniquement de restaurer l'esprit de la loi littoral tel que, d'après mes recherches, nos prédécesseurs l'ont voulu.
Nous avons longuement débattu de l'amendement avec notre collègue Perea, dont il a lui-même rappelé qu'il est inspiré par les contraintes tout à fait spécifiques que présente son territoire. Je rappelle qu'il a été rejeté dans le cadre de l'examen du projet de loi pour un État au service d'une société de confiance. Il vise à régulariser les bandes de roulement sur les plages.
Le sujet est particulièrement sensible. Au demeurant, nous aurons l'occasion de l'évoquer lorsque nous aborderons les amendements modifiant la loi littoral. Avis défavorable.
L'avis du Gouvernement est également défavorable. Certes, on peut comprendre les particularités de tel ou tel territoire, de tel ou tel département. Pour autant – monsieur le député, ce que je vais dire n'est pas une critique mais une constatation – , les plages du littoral audois sont parmi les dernières en France à déroger illégalement à l'interdiction de la circulation des véhicules terrestres à moteur sur le domaine public maritime naturel prévu par la loi littoral.
On peut entendre vos arguments, mais faire droit à cet amendement ne serait vraiment pas un bon signal, même si nous comprenons les raisons pour lesquelles vous l'avez déposé. Le Gouvernement émet un avis vraiment défavorable.
Compte tenu de l'avis vraiment défavorable du Gouvernement, je retire l'amendement, …
« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe LR
… en attendant que nous en arrivions aux dispositions concernant la loi littoral.
L'amendement no 1602 est retiré.
La parole est à Mme Émilie Bonnivard, pour soutenir l'amendement no 4 .
La crise du logement que connaît actuellement la France se nourrit de causes multiples – structurelles ou conjoncturelles, réglementaires ou financières, législatives ou jurisprudentielles. En tout état de cause, elle semble largement entretenue par un déficit croissant de logements individuels.
La dégradation du rythme de construction de logements individuels est plus sensible en milieu rural qu'en milieu urbain. Tous types de logements confondus, les vingt-cinq départements où l'on construit le moins n'ont fourni que 15 000 logements en un an, dont seulement 9 700 logements individuels.
Ces données illustrent parfaitement la crise du logement que la France traverse. Pour y répondre, il est essentiel de relancer la construction de logements individuels en zone rurale.
Par-delà le lien entre crise du logement et crise de la construction en milieu rural, ces chiffres rendent compte de la crise démographique que connaissent les territoires les plus isolés. Avec dix-neuf départements en déclin démographique entre 2010 et 2015, sans compter Paris, le phénomène de néoruralité doit être considérablement relativisé.
Aussi, sans opposer la ville à la campagne en termes d'urbanisme, notre collègue Fabrice Brun, propose d'assouplir certaines dispositions du code de l'urbanisme qui ont été complexifiées de façon surprenante. Il propose notamment d'introduire parmi les principes fondamentaux du droit de l'urbanisme le droit au développement rural.
Les objectifs généraux en matière d'urbanisme doivent prendre en compte le développement de toutes les collectivités territoriales, qu'elles soient urbaines ou rurales. La commission est donc défavorable à l'inscription dans la loi du renouvellement rural comme objectif de l'action des collectivités territoriales en matière d'urbanisme.
J'ajoute que l'amendement est déjà satisfait. En effet, l'action des collectivités publiques doit d'ores et déjà viser à assurer l'équilibre entre les populations résidant dans les zones urbaines et celles résidant dans les zones rurales, la revitalisation des centres ruraux, et la diversité des fonctions urbaines et rurales. Je suggère donc le retrait de l'amendement, qui est objectivement satisfait.
J'ajoute également que, dans de nombreux départements dits ruraux – je me suis déjà exprimé sur la notion de ruralité – , on manque davantage d'habitants que de logements.
L'amendement no 4 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Bénédicte Taurine, pour soutenir l'amendement no 2208 .
Je présenterai simultanément les amendements nos 2208 et 2210 . Le projet de loi ne comporte pas de dispositions relatives à l'habitat des gens du voyage. Les deux amendements entendent remédier à cet oubli. Depuis le vote de la loi ALUR, le chemin de la reconnaissance pleine et entière de tous les modes d'habitat restant à parcourir est encore long.
Les deux amendements reprennent notamment les observations de la Fédération nationale des associations solidaires d'action avec les Tsiganes et les gens du voyage et de l'Association nationale des gens du voyage catholiques. Ils visent à améliorer la reconnaissance de l'habitat mobile en mettant fin aux restrictions et limitations dont font trop souvent l'objet les modes d'habitat dits « minoritaires ». Il s'agit d'améliorer la prise en compte de l'habitat mobile dans une logique d'égalité des modes d'habitat.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
L'avis de la commission est défavorable pour deux raisons. Tout d'abord, nous souhaitons assurer la stabilité de la teneur des documents d'urbanisme. En outre, s'agissant de l'habitat, le projet d'aménagement et de développement durable du PLU fixe les orientations générales. Si vos amendements étaient adoptés, chère collègue, ils ne fixeraient plus que les orientations relatives à la diversité de l'habitat, ce qui est plus restrictif.
J'ajoute aux arguments du rapporteur que la définition du terme « habitat », dans le code de l'urbanisme, englobe d'ores et déjà l'habitat des gens du voyage.
Je partage les observations formulées par M. le rapporteur et M. le secrétaire d'État, auxquelles j'ajoute que nous portons une responsabilité collective en la matière.
En effet, il conviendrait que les dispositions légales prévoyant la réalisation des aires d'accueil soient véritablement mises en oeuvre. Là est le véritable problème, autant pour les municipalités qui se mettent en conformité avec la loi – comme je l'ai constaté dans l'agglomération dont j'avais jadis la charge – sinon plus que pour tant d'autres qui ne le font pas. En général, ce sont les bons élèves qui ont le plus de difficultés.
J'évoque une responsabilité collective, car tous les gouvernements qui se sont succédé jusqu'à présent n'ont pas suffisamment agi pour faire respecter la loi. Et objectivement, depuis douze mois, je reconnais que nous non plus n'avons pas été tellement proactifs sur ce sujet.
C'est en effet dans ce sens que s'orientent mes observations.
L'amendement no 2208 n'est pas adopté.
Ils ont pour objectif de renforcer la sécurité juridique des schémas de cohérence territoriale – SCoT – quant à la réalisation de leur bilan de consommation d'espace à dix ans.
En appliquant strictement le droit en vigueur, les établissements porteurs de SCoT sont tenus de réaliser un bilan à dix ans courant jusqu'au jour de l'approbation du schéma de cohérence territoriale. En pratique, dans l'immense majorité des cas, les études permettant la définition du diagnostic territorial sont arrêtées lors de la phase d'arrêt du projet.
L'amendement no 6 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 2210 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement, dont notre collègue Annie Genevard est la première signataire, vise à permettre aux collectivités de montagne dotées d'un PLU de limiter la progression des résidences secondaires. Il vise un objectif de mixité sociale comportant la fixation d'un niveau d'équilibre entre logements de résidents permanents et résidences secondaires.
La parole est à M. Emmanuel Maquet, pour soutenir l'amendement no 658 .
Cet amendement important soulève une vraie difficulté, que nous rencontrons dans les zones de montagne – on pourrait, d'ailleurs, dire la même chose du littoral. La poussée des résidences secondaires est toujours plus forte. Elles représentent certes une richesse pour nos territoires, mais il est nécessaire d'en maîtriser la croissance.
La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l'amendement no 1960 .
La parole est à M. Xavier Roseren, pour soutenir l'amendement no 2182 .
La parole est à M. Jean-Félix Acquaviva, pour soutenir l'amendement no 2539 .
J'irai dans le même sens que mes collègues, en insistant sur le fait que ce phénomène de résidentialisation existe aussi sur le littoral. À la suite de la loi ALUR, il importe de fixer des ratios, afin d'éviter des déséquilibres forts. Ce débat continuera à propos du littoral, vous l'avez compris.
Je comprends l'intention, mais il paraît difficile que le PLU délimite des secteurs dans lesquels un pourcentage de logements est occupé par des résidents permanents : un même logement peut changer d'utilisation d'année en année, et passer de résidence secondaire à résidence principale. Avis défavorable.
Nous avons longuement débattu en commission de l'intégration de ce facteur de mixité dans les documents d'urbanisme. Aborder la question par l'opposition des résidences principales et secondaires me paraît complexe : le PLU, document prescripteur, serait dépendant de la volonté de nos concitoyens de déclarer leur résidence comme principale ou secondaire. Or l'État – les élus locaux en l'occurrence – n'a pas prise sur l'usage d'une résidence.
La question est extrêmement légitime, mais la distinction par le statut de résidence n'est pas le bon angle d'attaque. Je m'engage – je l'ai déjà dit en commission – à travailler sur ce point pour trouver une solution efficace.
Dans certaines opérations immobilières, cette distinction existe. Le débat peut donc avoir lieu.
L'amendement no 10 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
À la suite des réponses apportées par le Gouvernement en commission, je voudrais revenir sur un point. Vous voulez construire plus, et donc faciliter la construction. Or, lorsqu'on a mené un remembrement foncier et réduit de manière considérable les zones à urbaniser pour lutter contre l'étalement urbain, les zones qui ont été concentrées, mais qui ne sont pas encore urbanisées, sont par définition celles qui étaient plus difficiles – les promoteurs ne se sont pas jetés dessus.
Ce travail de maîtrise foncière passe aujourd'hui par des promesses de vente ; c'est comme ça que ça se passe. Les aménageurs signent des promesses de vente, et attendent de disposer de l'ensemble des terrains pour lancer des opérations.
C'est pourquoi je vous propose de remplacer les mots « d'acquisitions foncières » par les mots « d'une maîtrise foncière significative au moyen de la conclusion de promesses de vente ». Nous pourrons ainsi, très concrètement, renforcer l'urbanisation des zones 2AU classées comme telles depuis plus de neuf ans.
Nous avons déjà eu cette discussion en commission, et je redis que je suis défavorable à la limitation du recours à la procédure de révision pour l'ouverture à l'urbanisation des zones 2AU. Cette procédure est, selon moi, nécessaire pour s'assurer, après neuf ans, qu'il est toujours pertinent d'ouvrir la zone à l'urbanisation.
L'amendement no 882 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 619 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 12 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 28 rectifié et 34 rectifié .
La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l'amendement no 28 rectifié .
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement no 34 rectifié .
Les amendements identiques nos 28 rectifié et 34 rectifié , repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.
La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon, pour soutenir l'amendement no 2342 .
Cet amendement vise à compléter l'action des collectivités publiques en matière d'urbanisme. Nous souhaitons que celles-ci se fixent un objectif de lutte contre l'artificialisation des sols, complémentaire de la lutte contre l'étalement urbain.
Votre amendement est satisfait par l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme. Je vous suggère de le retirer.
L'amendement no 2342 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 12 bis est adopté.
L'amendement no 815 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 818 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement no 3162 .
L'amendement no 3162 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 12 ter est adopté.
L'article 12 quater est adopté.
Les articles que nous nous apprêtons à examiner, adoptés en commission des affaires économiques, ont fait couler beaucoup d'encre depuis deux semaines : j'ai pu lire que nous allions introduire des dérogations à la loi littoral, ou encore que nous allions la détricoter afin de pouvoir bétonner nos côtes. Le sujet est trop grave pour que nous ne dispersions pas ces fantasmes propagés vraisemblablement par certaines associations.
Que ce soit clair, la loi littoral est un marqueur de notre droit de l'urbanisme. En sanctuarisant nos rivages, elle a mis un terme aux abus des années soixante et préservé les splendeurs naturelles inestimables dont regorgent nos côtes. Je suis bien placé pour connaître les bienfaits de cette loi, ayant présidé le syndicat mixte Baie de Somme-Grand Littoral picard. La protection de cette baie, classée « grand site de France », n'aurait pas été possible sans la loi de 1986, qui l'a sauvée de l'urbanisation.
Il n'est donc pas question d'affaiblir la loi littoral.
Si nous y apportons quelques réglages ici, ce n'est que d'une main tremblante, au terme d'un travail fourni par notre groupe d'études sur le littoral – dont je salue les deux co-présidents, Gilles Lurton et Lionel Causse. Plusieurs réunions ont été tenues avec les cabinets ministériels afin de nous assurer que toutes les conséquences juridiques des mesures que nous proposons sont maîtrisées et anticipées.
Une intervention était indispensable. La loi littoral, qui laissait une grande place à l'interprétation, a conduit à des situations ubuesques que nous dénonçons depuis des années. Des permis de construire, délivrés en toute régularité, ont été invalidés par la justice ; des zones ont été déclarées inconstructibles à plusieurs kilomètres des côtes ; des exploitants ostréicoles ou conchylicoles se sont vu interdire la construction d'unités essentielles à leur activité.
Il est essentiel de tordre le cou à toutes ces fausses informations relayées parfois par la presse. Ces quatre articles viseront à harmoniser le droit, à renforcer la sécurité juridique et à remédier à des situations dramatiques, où des entrepreneurs ont vu leurs projets invalidés et ont perdu des centaines de milliers d'euros.
Rappelons également aux alarmistes de tous bords la belle unanimité qui se dégage sur ce sujet, d'abord sous la législature précédente, puis sous celle-ci. Il faut n'avoir jamais été confronté à ces blocages dont les conséquences peuvent être très néfastes pour accuser les députés de vouloir détricoter la loi littoral. Je pense que c'est dans cette optique de préservation de nos côtes que nous devons ouvrir nos débats sur cette question.
Je suis élu dans la circonscription de Narbonne ; le littoral audois est le moins urbanisé de tout l'arc méditerranéen. Né dans cette région, j'ai travaillé sur cette loi littoral ; je dois vous avouer avoir mal vécu que l'on nous accuse, ces dernières semaines, de vouloir bétonner le littoral. Personne ici ne veut saccager le littoral français !
En revanche, il faut faire un petit retour en arrière : projetons-nous en 1986, l'année où est votée la loi littoral. Huguette Bouchardeau est ministre de l'environnement. Nous sommes quelques années seulement après la décentralisation ; les maires ne disposent pas vraiment de services, les intercommunalités n'existent quasiment pas et les schémas de cohérence territoriale, pas du tout. La logique du tourisme est celle d'un tourisme de masse, celui – soit dit sans jugement de valeur – du « bronzer idiot ».
Il faut aussi se rappeler ce qu'était l'approche de l'environnement en 1986 : ce n'est plus du tout l'idée que nous en avons aujourd'hui ! Tous ceux qui parlent alors de réchauffement climatique sont pris pour des farfelus, totalement à côté de la plaque. Je pourrais vous citer de nombreux exemples de choses jugées vraies en 1986 et oubliées aujourd'hui.
Revenons en 2018 : tout ce que je viens de vous dire a changé, tout ! Notre vision est totalement différente.
Depuis le début de la législature, il y a un an, j'ai entendu dans tous les groupes parler de l'impérieuse nécessité d'évaluer les politiques publiques. Ce que nous demandons, modestement, c'est que l'on garde les belles choses inscrites dans la loi, mais aussi que l'on fasse des ajustements à la marge pour régler de petits problèmes et pour construire le littoral des années à venir. Notre responsabilité n'est pas forcément d'être les gardiens du passé ; c'est aussi de préparer l'avenir.
Aujourd'hui, il nous faut une évaluation claire, nette et précise : la loi littoral de 1986 est-elle la loi qu'il nous faut pour aujourd'hui et pour les années à venir ? Je ne crois pas que la loi ELAN apportera toutes les réponses, et nous y reviendrons peut-être au cours de la législature. Nous avons la possibilité aujourd'hui, dans l'esprit de la loi littoral, d'apporter quelques retouches à cette loi, comme l'on dit les ministres. Mais que l'on ne nous accuse pas d'être des bétonneurs ! Nous voulons seulement évaluer les politiques publiques et les mettre en oeuvre.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe MODEM. – M. Emmanuel Maquet applaudit également.
Mes chers collègues, nous sommes appelés à statuer sur plusieurs dispositions, dont l'objet est tout autant d'adapter que de préciser le régime d'urbanisation particulier des territoires littoraux. Le sujet est sensible. Je tenais à vous le dire avant que débutent les discussions amendement par amendement : il faut avoir ce débat aujourd'hui dans l'hémicycle. Ce soir, nous faisons un travail utile, nécessaire même, car il répond aux demandes légitimes exprimées tant par les élus que par les habitants qui veulent faire vivre les territoires littoraux. Mon souhait, c'est d'abord et avant tout que nous arrivions à densifier les hameaux, à la condition qu'ils ne soient ni dans la bande des cent mètres, ni proches du rivage. Cela était possible avant une décision de 2013 du juge administratif. Que l'on ne nous dise donc pas que nous détricotons la loi littoral ou que c'est une révolution !
Nous entendons également ceux de nos concitoyens qui sont inquiets pour le littoral – c'est une évidence. Parce que nous partageons leur attachement fort à l'environnement et aux paysages côtiers, nous proposerons une série d'amendements, rédigés pour certains en étroite collaboration avec nos collègues d'autres formations politiques, visant à entourer de garanties supplémentaires les possibilités nouvelles offertes par ce projet de loi. J'invite donc chacun, avant de s'exprimer sur ces questions, à se remémorer l'esprit de la loi littoral, ses principes et ses évolutions, voulus par Louis Le Pensec, et à dépassionner nos débats. Notre responsabilité est d'autant plus grande que notre tâche est difficile.
La loi relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, dite « loi littoral », vise à encadrer l'aménagement de nos côtes. Cette loi a été votée à l'unanimité par le Parlement français en 1986, avant d'entrer en vigueur le 5 janvier de la même année. Elle a trente-deux ans. Elle reste le texte de référence pour garantir la protection des territoires littoraux, particulièrement fragiles, soumis à une pression démographique sans retenue et à une situation nouvelle provoquée par les effets du changement climatique.
Aujourd'hui, 1 212 communes sont concernées par la loi littoral. De l'avis unanime, elle a rempli son double objectif : protéger des excès de l'urbanisation et permettre le libre accès du public aux sentiers littoraux. Elle bénéficie, encore aujourd'hui, d'un très large soutien de nos concitoyens. Cette loi ne doit pas être, directement ou indirectement, peu ou prou, ici ou là, remise en question. Seuls des dispositifs limités, strictement encadrés par l'État, sont acceptables pour répondre à des situations exceptionnelles.
Nous abîmerions irréversiblement nos territoires littoraux en acceptant des dérogations, même partielles, qui ne manqueraient pas de se généraliser. Il s'agit aussi de protéger les populations exposées à des phénomènes naturels, tels que la submersion marine ou l'érosion côtière sur les côtes rocheuses et les côtes sableuses de l'hexagone et des outre-mer. À l'heure où nous réfléchissons à des dispositifs d'adaptation des zones littorales au recul du trait de côte, il serait malvenu d'envisager une densification de l'urbanisation.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI et sur quelques bancs des groupes LaREM et MODEM.
Nous arrivons dans ce débat à des articles insérés par voie d'amendements, votés par la majorité, mais auxquels le groupe Les Républicains s'est opposé en commission des affaires économiques. D'emblée, avec mes collègues, nous voulons affirmer que la loi littoral est une très bonne loi et que, s'il faut y toucher, il ne faut le faire que d'une main tremblante.
Cette loi a permis de protéger notre littoral exceptionnel du bétonnage et de préserver dans notre pays un environnement de qualité qui, me semble-t-il, nous tient tous à coeur. Or les articles après l'article 12, dans la rédaction issue de la commission, ne nous conviennent pas et ne semblent pas assurer cette nécessaire protection. C'est la raison pour laquelle nous avons voté contre les amendements en commission des affaires économiques et nous maintenons aujourd'hui que nous n'acceptons pas ce texte en l'état.
Pour autant, nous ne sommes pas aveugles. Nous sommes proches du terrain, des élus locaux et de leurs difficultés, et nous avons aussi été élus pour les aider à les résoudre. En tant que coprésident du groupe d'études « Littoral » au sein de cette assemblée, avec Lionel Causse, dont j'apprécie l'ouverture d'esprit et les méthodes de travail, nous avons beaucoup travaillé sur ce sujet extrêmement sensible dans la population. Nous avons également travaillé avec nos collègues parlementaires, toutes tendances confondues. Cela ne date pas d'hier, puisque nous avons commencé nos travaux sous le quinquennat précédent. Nous sommes désormais en mesure, à mon sens, d'apporter des solutions.
Nous sommes d'accord pour reconnaître que, dans toutes les communes qui bordent le littoral, la loi littoral, aggravée par la loi ALUR, peut aussi créer quelques effets pervers qu'il nous faut corriger. Il s'agit principalement de ce que l'on appelle les « dents creuses » : ces espaces parfaitement identifiés dans des zones d'habitat diffus, définies comme des hameaux ou des villages, desservies par tous les réseaux, dans lesquelles il est aujourd'hui impossible de construire, même avec toutes les précautions possibles – préservation du bâti existant, avis de l'architecte des Bâtiments de France, avis de toutes les commissions compétentes et accord du préfet. Personne ne peut rien y construire, parce qu'une petite parcelle de terre sur le périmètre de la commune est frappée par la loi littoral, alors même que 99 % de son territoire ne l'est pas et que les constructions projetées n'auront aucune conséquence de covisibilité avec le littoral.
Ces situations sont vécues comme des injustices par les élus locaux et les habitants qui comprennent difficilement leur justification. Elles sont également sources de conflits juridiques, lorsque des personnes ayant acquis en toute bonne foi des terrains classés comme constructibles, en pensant réellement pouvoir construire dessus, ont obtenu de la part des élus locaux les permis de construire nécessaires, en toute bonne foi également, et ont construit leur maison avant de se voir condamnées, suite à un recours, quelques années plus tard, à détruire les bâtiments. Ces situations sont bien réelles. Je suis sûr que, dans l'hémicycle, certains entendront un écho familier dans mes paroles.
Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, si nous voulons résoudre ce problème, nous devons aussi prendre toutes les précautions nécessaires. Le texte, dans sa rédaction actuelle, ne répond pas à de telles exigences. C'est pourquoi nous vous demandons d'accepter nos amendements, qui ont été co-construits avec un très grand nombre de députés. C'est cet unique problème que nous voulons résoudre, d'autant plus que toutes les politiques publiques incitent à densifier l'existant.
Il est également normal que les populations, respectueuses de leur environnement – ce qui est une chance pour notre pays – , exigent de nous que nous agissions avec la plus grande prudence et que nous prenions toutes les précautions nécessaires. Ce texte ne répondant pas actuellement à une telle exigence, nous vous demandons, encore une fois, d'accepter nos amendements. C'est en fonction de l'issue de nos discussions, de la capacité du Gouvernement à entendre nos arguments, mais aussi ce cri qui monte de la France entière pour préserver ce qu'ont si bien réalisé nos prédécesseurs, que nous déciderons de la position à prendre sur ce texte.
C'est mon sentiment. Cette loi a été adoptée à une époque où le littoral était l'objet de nombreuses convoitises, entre une pression foncière importante et une urbanisation galopante. Ces pressions existent toujours. Ne nous leurrons pas. Ceux qui critiquaient cette loi à l'époque devaient déjà dire que les associations disaient n'importe quoi, comme je l'ai entendu tout à l'heure. La loi littoral est d'autant plus nécessaire aujourd'hui, à cause des risques météorologiques et de l'élévation globale du niveau des océans. Il faut gérer l'espace littoral avec la plus grande prudence. Or l'article 12 quinquies propose non pas des ajustements, comme je l'ai entendu, non pas des évaluations, mais bien des brèches dans la loi littoral.
Désormais, il sera possible de disposer, dans les dents creuses, d'un espace constructible.
« Mais non ! » sur divers bancs.
Mes chers collègues, je vous ai laissés parler tout à l'heure ! Il sera bel et bien possible d'avoir des espaces constructibles dans ces dents creuses, voire dans la bande des cent mètres. Vous nous proposez d'ouvrir une brèche qui pourrait remettre en question, à terme, l'esprit et la philosophie de la loi littoral. Je tiens à rappeler qu'elle a été votée à l'unanimité en 1986, mais que, dans un sondage en 2014, 91 % de l'opinion demandait sa pleine application. Ce n'est vraiment pas le moment de la remettre en question, d'autant moins en l'absence de toute étude d'impact. Au contraire, nous devons protéger la loi littoral. C'est pourquoi je vous invite à rejeter l'article 12 quinquies.
Comme vient de le dire Éric Coquerel, l'un des problèmes de l'article 12 quinquies, contrairement à ce qu'a dit notre collègue de La République en marche, c'est qu'il ne propose pas d'évaluation ou d'étude de moyens, mais qu'il permet des dérogations. C'est écrit noir sur blanc. Il est pourtant évident que le sujet invite au débat. Nous devrions nous donner du temps pour évaluer les ajustements à faire, alors qu'aucune étude d'impact n'a été menée et qu'on se félicite, paradoxalement, de l'adoption à l'unanimité de la loi littoral et de son efficacité. Cela est incompréhensible pour nos concitoyennes et nos concitoyens, et pour les associations.
Ce n'est pas la première fois que des associations interpellent la représentation nationale sur des sujets qu'elles connaissent bien pour travailler dessus depuis des années, pour lui faire part de leurs inquiétudes ou de critiques, et que ces interpellations sont considérées comme des fake news ou des mensonges. Cela pose un vrai problème. Nous pouvons échanger des arguments, sans pour autant faire de procès d'intention ou jeter le discrédit sur ce travail essentiel pour la démocratie, et qui devrait être un point d'appui pour nos travaux parlementaires, que mènent les associations. Souvent, ce sont elles qui ont été à l'avant-garde, particulièrement sur les questions d'écologie, bien avant que les députés ne s'en saisissent.
Pour que ce débat, qui intéresse un très grand nombre de nos concitoyens, soit bien compris par tous, il faut que vous fassiez preuve de respect à l'égard des associations et que vous considériez leurs arguments sur le fond, même pour vous y opposer ensuite.
Il n'y a pas ceux qui veulent bétonner le littoral et ceux qui veulent le sanctuariser. Pour faire partie d'un territoire littoral, probablement l'un des plus beaux coins de France – n'est-ce pas, monsieur le président – ,…
… je vais vous faire part de quelques cas de figure auxquels les élus ont été confrontés, dans le cadre de la loi littoral. S'il nous faut absolument préserver cette loi, qui nous permet de protéger l'environnement, elle n'est pas exempte d'absurdités, comme vous allez le voir. Par exemple, une base nautique pourvue d'un centre de secours ne peut pas être rénovée. Il n'est pas possible non plus de transformer d'anciens viviers en auberge de jeunesse. Une zone ostréicole ne peut pas être bâtie en bord de mer. Une zone ostréicole !
Les maires sont lassés. Ils se retrouvent parfois attaqués par les associations de celles et ceux qui partagent leur environnement un mois par an. Sans vouloir opposer les populations…
… entre celles et ceux qui y vivent et les autres qui cherchent à y vivre, entre celles et ceux qui cherchent à développer de l'activité économique ou de l'activité nautique. N'oubliez pas que l'activité d'une base nautique, ce sont des classes de mer. C'est là que l'on fait ses premiers pas sur l'estran, que l'on apprend comment retourner un caillou puis le remettre dans le bon sens.
Exclamations sur les bancs du groupe FI.
Je vous le dis de manière apaisée : comment voulez-vous pratiquer la mer et la voile, si vous n'avez pas les infrastructures d'hébergement ? Nous avons, dans l'article 12 quinquies, permis d'accomplir des progrès, sans porter atteinte à la loi littoral. Ces progrès sont de nature à faire vivre nos territoires. Certains d'entre vous opposent souvent la ruralité à la ville. Mais ma circonscription, dans les Côtes-d'Armor, ce sont des ruralités. Quand les ruralités se meurent, c'est souvent le fait d'une impossibilité à se développer. Je vous remercierai de bien écouter les propositions qui seront faites. Elles seront tout à fait respectueuses de l'environnement et de ceux qui le partagent, les enfants, les jeunes et les moins jeunes.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Je suis saisi de quatre amendements identiques, nos 883 , 2344 , 2529 et 2604 , tendant à la suppression de l'article 12 quinquies.
Sur ces amendements, je suis saisi par le groupe La France insoumise d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement no 883 .
Je vous avoue, messieurs les ministres, que j'éprouve un certain malaise face à cet article ajouté en commission. La concertation dans le cadre de la conférence de consensus n'a pas épluché tous les sujets et aborder un thème comme celui-ci en pleine commission, sans étude d'impact, crée forcément des inquiétudes. Va-t-on remettre en cause toute la loi littoral ? Je ne pense pas que ce soit l'idée. Pour autant, les éléments apportés manquent de garanties. On n'a pas la certitude de pouvoir régler les problèmes de la manière attendue sur le terrain et par les élus locaux ; en même temps – et cela doit vous parler – , on doit s'y atteler. La rédaction du texte ne me paraît pas ajustée, mais cela ne veut pas dire qu'il ne faut rien faire, car il existe des attentes légitimes.
Je vais retirer mon amendement de suppression afin de voir si les différents amendements sont de nature à nous rassurer. Il faut limiter l'adaptation de la loi littoral aux seules dents creuses ; c'est le coeur du problème. Il est légitime de souhaiter que des constructions ne viennent pas contrarier la visibilité du littoral, qui fait la France ; en même temps, on doit aussi comprendre l'injustice et l'anomalie d'une situation où l'on dit aux habitants d'un village qu'ils ne peuvent pas construire au-delà d'une dent creuse, ce qui les oblige à densifier les constructions à l'intérieur du village. Il nous faut rester cohérents avec les lois votées par le passé, et la rédaction actuelle, comme celles proposées par le Gouvernement dans les différents amendements, ne me semble pas ajustée. Il faudrait faire confiance aux élus qui défendent depuis longtemps la loi littoral et veiller à ne pas ouvrir trop de portes et à rester très précis. Les fenêtres que l'on ouvre doivent être bien cadrées et limitées, et nous devons obliger ceux qui auront la responsabilité sur le terrain de s'adapter à la loi littoral de le faire de manière extrêmement restreinte, afin que l'on conserve notre littoral.
L'amendement no 883 est retiré.
La parole est à M. Jean-Félix Acquaviva, pour soutenir l'amendement no 2529 .
On peut entendre que l'adaptation aux règles d'urbanisme engendre des difficultés dans la vie quotidienne. J'ai moi-même été maire de montagne, je connais des villages de montagne en Corse dont la commune possède un littoral, et il est ubuesque que la loi littoral s'y applique ; dont acte. Mais cet article rend constructibles les dents creuses, c'est-à-dire les espaces intermédiaires entre les agglomérations et les villages, et l'habitat diffus. C'est une entorse majeure au grand principe de la loi littoral.
Nous ne vivons pas dans le monde des Bisounours : les forces de l'argent et de la spéculation immobilière et foncière sont et ont toujours été là, malgré l'adoption de la loi littoral en 1986. Dans beaucoup de zones, les militants ont mené un combat permanent pour éviter que le littoral ne soit complètement pillé. On ne peut pas aujourd'hui, à la faveur d'un débat en commission, sans évaluation sérieuse, décider de la constructibilité des dents creuses. C'est impossible sans ouvrir la voie aux forces de l'argent qui assaillent quotidiennement nos territoires, au détriment des populations qui veulent un développement économique pérenne et la protection de l'environnement. Soyez, s'il vous plaît, les sentinelles, les grands messagers de la loi de 1986 !
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI.
La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l'amendement no 2604 .
Je suis étonné par la tournure du débat. L'amendement proposé par notre collègue en commission modifie la loi littoral ; c'est un fait juridique. Il avance que cette loi pose des difficultés et qu'il faut essayer d'y remédier. Je conteste et la forme et le fond.
Il n'y a pas de sujet tabou. La loi littoral peut évoluer comme toutes les lois, et elle doit sûrement le faire pour éviter les quelques écueils que nous connaissons tous, qui posent problème. Mais doit-on accepter qu'un amendement adopté en commission – sans étude d'impact, sans débat – ouvre la boîte de Pandore ? Car c'est ce qu'il fait : on pourra construire les dents creuses, on pourra installer des activités agricoles ou construire des champs photovoltaïques sur le littoral ; un article que vous avez adopté dit même que, dans les outre-mer et les îles métropolitaines, on pourra faire quelque chose de très spécifique. Personne ne dit de quoi il s'agit, mais les quelques recherches que nous avons faites semblent indiquer que certains – peut-être l'État – ont même des projets de décharges publiques dans l'espace protégé par la loi littoral. Si vous n'appelez pas cela déroger à la règle, si vous n'y voyez pas l'acceptation de l'inacceptable, que voulez-vous dire ?
Reprenons le débat, mettons-nous autour de la table de la commission et faisons une proposition de loi commune. On peut essayer d'améliorer ce qui doit l'être, mais ne le faisons pas au détour d'un amendement parlementaire qui n'a fait l'objet d'aucune étude d'impact. Car tout le monde, ensuite, dépose des amendements : les Bretons mettent en avant l'agriculture et l'ostréiculture ; d'autres se préoccupent de l'hôtellerie ou des activités nautiques. Chacun veut développer telle ou telle activité importante dans sa région ; alors où commence-t-on et où s'arrête-t-on ? Que devons-nous autoriser ? Faut-il le faire uniquement en Bretagne ou sur tout le littoral français ? Débattons ! Croyez-vous qu'il est raisonnable de détricoter la loi littoral – car c'est ce qui est fait ? Le Sénat s'y est essayé en 2016 ou en 2017 ; le ministre Mézard devait y siéger. Une pétition a alors été déposée pour dire qu'il ne fallait surtout pas toucher à la loi littoral ; parmi les signataires, il y avait Nicolas Hulot.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI. – Mme Sylvia Pinel applaudit également.
L'amendement adopté en commission me semble utile à plusieurs égards. Il renforce la portée des documents d'urbanisme dans la mise en oeuvre de la loi littoral ; quelque part, il renforce donc celle-ci. Il répond à la problématique du comblement des dents creuses dans des territoires marqués par une urbanisation dispersée. Il supprime la notion de hameau nouveau intégré à l'environnement, qui ne représente pas de réalité concrète sur le terrain et dont le sens juridique est imprécis. Avis défavorable.
Même avis. À ce stade du débat, je tiens à réaffirmer qu'il ne s'agit aucunement de porter atteinte à la loi littoral. Nous avons d'ailleurs déposé des amendements qui clarifient la position du Gouvernement. J'ai noté que M. Bazin a retiré son amendement dans l'attente de la suite du débat ; nous avons tous – ou pratiquement tous – la volonté de ne pas toucher à l'essence de la loi littoral à laquelle nos concitoyens sont à juste titre attachés. Le Gouvernement maintient cette position, et le débat va se poursuivre. Nous ne sommes pas dupes de la campagne qui a été menée : quand je vois des titres sur la bétonisation du littoral à propos des dents creuses, j'estime qu'il faut revenir à la réalité. D'ailleurs, monsieur Lurton, j'ai apprécié la teneur de vos propos ; je me sens proche de la ligne que vous avez définie dans vos explications.
Il ne faut pas non plus considérer que les textes sont intangibles : il ne s'agit pas de la Constitution et il faut regarder ce qui peut être amélioré, en tenant compte des demandes des territoires et des élus, et en respectant la volonté originelle de ceux qui ont unanimement voté la loi de 1986 : protéger le littoral contre la bétonisation. Le Gouvernement n'a aucunement l'intention de faciliter la bétonisation de nos côtes.
J'ai également entendu les difficultés, évoquées par M. Acquaviva, qui se posent quand la loi littoral et la loi montagne en viennent à coexister. Dans ces cas-là, ce sont les dispositions les plus restrictives de la loi littoral qui s'appliquent à la montagne, ce qui, dans certains territoires, pose un type de problèmes et dans d'autres, des problèmes inverses. Nous devons aussi tenir compte de ces réalités pour améliorer la situation sans remettre en cause les principes fondamentaux auxquels nous sommes tous attachés.
Monsieur le ministre, je vous remercie pour vos propos. Je sais que c'est la procédure parlementaire qui le veut, mais il est malheureux que les amendements de suppression soient toujours examinés au début de la discussion d'un article. C'est un véritable problème, car nous avons à proposer des amendements, que nous avons en partie évoqués en commission – mais sans y avoir mis toute la finesse juridique actuelle – , qui visent à protéger la bande des cent mètres le long du littoral et les espaces remarquables, et à prendre toutes les précautions nécessaires au respect du bâti existant dans les dents creuses, pour qu'on ne puisse pas y faire n'importe quoi. Si l'on vote la suppression de l'article, ces amendements ne seront pas examinés ; il n'y aura pas de discussion et une fois de plus, on aura évacué la question dont on parle depuis des années et dont on a vraiment besoin de discuter, car elle correspond à un problème réel pour les élus locaux. Nous sommes donc gênés vis-à-vis des amendements de suppression, car nous aurions vraiment souhaité discuter de nos autres amendements pour décider après, en fonction des réponses du Gouvernement, si nous proposons ou non de supprimer l'article.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.
Nous maintenons notre amendement de suppression précisément pour nous donner le temps de débattre sur le fond. On discute d'un article qui pose beaucoup de questions et suscite beaucoup de réactions, dans des conditions qui ne permettent pas d'aller au bout des interrogations.
M. le ministre disait ne pas être dupe ; je ne sais pas à quoi il fait allusion, mais les arguments soulevés dans la discussion méritent au moins qu'il y réponde. Je rappelle que la loi littoral, que tout le monde encense et dont les bienfaits sont unanimement reconnus – elle a notamment permis à des classes de profiter d'un littoral intact et à une série d'activités de se développer au sein des espaces protégés – ,…
… autorise de nouvelles constructions, mais uniquement si elles continuent l'agglomération ou le village existant. Cette loi n'empêche pas les constructions, mais érige un ensemble de garde-fous.
Je rappelle aussi que les fameuses dents creuses jouent un rôle dans la préservation de la biodiversité puisqu'elles absorbent une partie de la montée des océans. Leur préservation représente un enjeu écologique, car une partie des problèmes climatiques – inondations, ouragans – est aggravée par l'état du littoral et par le fait que ces espaces n'ont pas été assez protégés, l'artificialisation des sols précipitant les catastrophes naturelles.
Il y a aussi un enjeu social, car ces constructions participent à la hausse des loyers. Même si ce n'est pas du bétonnage, elles augmentent le prix des terres : c'est un fait avéré.
Pour toutes ces raisons, il serait beaucoup plus raisonnable de supprimer cet article. Cela ne veut pas dire que nous n'examinerons pas ces questions au fond, que nous n'y reviendrons plus jamais : nous avons plusieurs années encore à passer dans cet hémicycle, nous aurons l'occasion de poursuivre l'oeuvre entamée par nos collègues. Il vaut mieux faire les choses proprement, tranquillement, plutôt que de se précipiter, de travailler dans de telles conditions : ce ne serait, à mon sens, vraiment pas raisonnable.
Nous maintenons donc cet amendement de suppression. Compte tenu de l'ampleur de cet enjeu, nous pensons qu'il est nécessaire de réfléchir sérieusement.
Mes chers collègues, nous n'épuiserons pas le sujet de la loi littoral cette nuit ; nous le reprendrons demain matin. Je pense que nous pourrions voter ces amendements de suppression avant de nous séparer pour la nuit, car nous sommes tenus par la règle qui exige de lever la séance à une heure du matin pour pouvoir reprendre demain matin à l'heure habituelle. Si nous prolongeons nos débats, nous ne pourrons pas le faire.
Je vous propose d'écouter M. Dharréville, puisque j'ai annoncé que je lui donnerai la parole, et de passer au vote. Nous aurons tout loisir de poursuivre nos débats demain matin de manière plus précise, plus claire.
Monsieur le président, je demande la parole pour un rappel au règlement !
Rires et applaudissements sur divers bancs.
Rappel au règlement
Monsieur le président, je vais mettre un bonnet rouge pour montrer mon esprit de résistance !
Sourires.
Je demande la parole pour un rappel au règlement sur le fondement de l'article 58, alinéa 1, au sujet de la tenue de nos débats. Je dois avouer qu'en l'état, je ne sais pas comment prendre position sur ces amendements : cela dépendra de la position qu'adoptera le Gouvernement sur les amendements suivants.
Vous l'avez fait tout à l'heure, à propos d'un amendement de notre collègue François Pupponi, …
Je vous arrête tout de suite, monsieur Bazin : vous prendrez position sur l'article au terme des débats. Il n'y a là aucun problème.
Article 12 quinquies (suite)
Monsieur le ministre, vous avez parlé d'une campagne contre cet article. Je ne crois pas qu'il s'agisse d'une véritable campagne ; je sais, en revanche, que l'amendement qui l'a introduit a éveillé de nombreuses inquiétudes. La loi littoral est un texte marquant qui résulte d'une construction patiente. Nous ne pouvons la réviser de la sorte, par un amendement adopté en commission !
Avant toute chose, il y a beaucoup de travail à faire, de discussions à mener, d'échanges à avoir avec les élus locaux, les populations, les associations concernées.
Nous le savons, il y a eu du bétonnage sur nos côtes ; je l'ai vécu sur mon territoire. Cela a été dit il y a quelques instants, oui, des forces de l'argent veulent rentabiliser nos côtes pour leurs propres intérêts. Cela a nui, par le passé, à nos territoires, et il faut faire très attention à cela. Le bétonnage a été une réalité qui persiste par endroits. Les populations ont dû livrer bataille pour faire respecter leurs territoires. Je viens d'un lieu où l'on veut des territoires vivants, où l'occupation du littoral est très diverse : il y a un grand port industriel, des espaces préservés, des habitations. Un équilibre a été maintenu, au prix de grandes batailles.
Vous devriez renoncer à toute précipitation. Si vous avez envie de revenir sur ce sujet, alors prenez le temps de le faire dans un autre contexte, dans un autre cadre, de manière plus préparée, plus concertée. Vous ne devriez pas prendre cette responsabilité dans une telle précipitation.
Il est procédé au scrutin.
Nombre de votants | 67 |
Nombre de suffrages exprimés | 61 |
Majorité absolue | 31 |
Pour l'adoption | 17 |
contre | 44 |
Prochaine séance, ce matin, à neuf heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique.
La séance est levée.
La séance est levée, le vendredi 1er juin 2017, à une heure cinq.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Catherine Joly