Présidence
La commission auditionne M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics, sur le projet de loi de finances rectificative pour 2018 (n° 1371).
Nous recevons M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès de Gérald Darmanin, venu nous présenter le projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour 2018, adopté en Conseil de ministres ce matin même.
Traditionnellement, le collectif d'automne ne nous est soumis que vers la fin du mois de novembre. Cette année cependant, il n'y a pas de décret d'avance, et les crédits doivent donc pouvoir être rapidement mis à disposition des gestionnaires, ce qui explique l'arrivée précoce de ce texte devant notre commission. Je note également qu'il est moins volumineux que les années précédentes.
Nous examinons néanmoins ce PLFR dans des conditions un peu particulières, dans la mesure où l'agenda parlementaire est extrêmement tendu : notre commission l'examinera ainsi vendredi à 9 heures, sachant que le délai de dépôt des amendements sera clos demain, jeudi 8 novembre, à 15 heures. Le texte est inscrit à l'ordre du jour de la séance publique lundi prochain, 12 novembre, à 16 heures, le délai de dépôt des amendements pour la séance étant fixé au samedi 10 novembre – ce qui incitera, j'imagine, beaucoup d'entre vous, à déposer leurs amendements directement pour la séance.
J'indique enfin que le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) a adopté le 31 octobre son avis relatif à ce PLFR.
Je voudrais réagir au sujet de l'organisation de nos travaux. Ce PLFR nous est présenté dans l'après-midi, et il faudrait que nous ayons déposé nos amendements avant demain, 15 heures, ce qui veut dire que nous sommes quasiment dans l'impossibilité d'en présenter. De telles conditions ne sont pas admissibles. Elles le sont d'autant moins que nous sommes parallèlement requis, en commission et en séance, par l'examen de la seconde partie du projet de loi de finances (PLF) pour 2019.
Sachant par ailleurs que, selon certains bruits de couloir, ce PLFR n'aurait pas vocation à être amendé, nous pouvons nous dispenser de réunir la commission vendredi matin, monsieur le président. J'invite plutôt nos collègues de la majorité à se saisir des conditions inadmissibles dans lesquelles nous sommes obligés de travailler.
Veut-on humilier le Parlement ? Aboutir à sa disparition ? L'examen des articles du PLF non rattachés à une mission budgétaire montre pourtant que nous ne sommes pas inutiles, car nous soulevons certains problèmes qui n'avaient pas été vus.
En vingt-cinq ans, je n'ai jamais connu de délais aussi fous. Et pour quelle urgence ? On nous explique que c'est pour que la loi soit promulguée fin novembre, de manière à éviter les mesures d'ajustement traditionnelles, par le biais de décrets d'avance. Mais c'est là de la cuisine budgétaire, dont tout le monde se fiche ! Ce qui intéresse le Parlement, c'est de pouvoir discuter sérieusement sur le fond.
Que cherche donc le Gouvernement ? Veut-il se passer du Parlement ?
J'ajoute – et ne le prenez pas pour vous, monsieur le secrétaire d'État – que je n'ai jamais vu qu'un ministre dont l'unique portefeuille est celui du budget envoie à sa place son secrétaire d'État pour discuter d'un texte budgétaire. C'est une question de respect du Parlement. Il est inadmissible de travailler dans ces conditions !
Si vous voulez que la réforme constitutionnelle, dont nous devons recommencer à débattre en janvier, échoue, continuez comme ça ! Si vous continuez à mépriser le Parlement comme vous le faites, ne vous étonnez pas de ce qui se passera alors.
Nous éprouvons la même incompréhension et la même colère que les deux orateurs précédents face aux méthodes qu'on nous impose et qui nous obligent, en quelques heures seulement, à avoir lu le PLFR, à l'avoir analysé et à avoir déposé nos amendements, sachant qu'on nous demande en plus d'avoir le don d'ubiquité, puisque l'examen du PLF se poursuit actuellement à la fois en séance et en commission.
C'est la première fois en six ans, depuis que je suis élue, que nous sommes contraints par de tels délais. Je rejoins donc Véronique Louwagie sur l'idée qu'il est inutile de réunir la commission vendredi pour discuter d'un texte que nous n'aurons pas pu amender, puisque vous ne semblez plus avoir besoin du Parlement. Ensuite, je pense, en effet, que nous aurons du mal à trouver un accord en janvier sur le projet de révision constitutionnelle car il n'est manifestement pas dans les projets du Gouvernement de renforcer les pouvoirs du Parlement, comme nous le réclamons.
Le droit d'amendement est garanti par notre Constitution. Or, disposer de moins de vingt-quatre heures pour déposer des amendements devant la commission, puis pour l'examen en séance publique, ne nous permet évidemment pas d'exercer de manière effective ce droit d'amendement, qui est un droit constitutionnel. Vous êtes donc en train de bafouer la Constitution et l'État de droit, et ne suis pas sûr que nos collègues de la majorité aient conscience de la gravité de ce qui se passe.
Enfin, les projets de loi de finances rectificative sont d'ordinaire présentés par leurs signataires, en l'espèce M. Bruno Le Maire et M. Gérald Darmanin, Je ne vous en fais pas le reproche à vous personnellement, monsieur Dussopt, mais vous n'êtes pas signataire de ce PLFR, et le fait qu'on vous envoie, vous, devant notre commission, est un signe de mépris pour le Parlement. C'est extrêmement grave et véritablement scandaleux – je pèse mes mots.
J'aimerais que certains modèrent leurs propos en ce qui concerne les droits du Parlement et le droit d'amendement. D'abord parce que, même s'il ne s'agissait pas du même texte, nous avons eu dans l'hémicycle des débats extrêmement riches sur la première partie du PLF, et que le droit d'amendement ne me semble pas avoir été particulièrement bridé.
Ce PLFR présente ensuite une particularité, c'est qu'il comporte peu d'articles et aucun article fiscal. Par ailleurs, le fait qu'il n'y ait pas de décret d'avance est une marque de respect pour le Parlement, qui n'avait pas de réel pouvoir sur ces décrets et à qui l'on présente au contraire un texte qui prouve la sincérité du budget.
Je ne conteste pas le fait que travailler à ce rythme soit extrêmement difficile, mais il est excessif de dire que le droit d'amendement est bafoué.
Selon la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), le Parlement dispose d'une semaine pour examiner les décrets d'avance...
Comment voulez-vous que, alors que nous devons défendre nos amendements en séance et en commission aujourd'hui et demain, nous puissions préparer sérieusement des amendements sur le PLFR ? C'est matériellement impossible ! Ne peut-on pas demander au Gouvernement de décaler d'une semaine l'étude du texte ?
Cette façon de faire est tout à fait irrespectueuse du Parlement. Tout à l'heure, tout le monde a applaudi la mémoire de Jaurès et de Clemenceau et leur engagement parlementaire, et on nous somme à présent de travailler dans une urgence impossible. Si vous voulez faire des économies, fermez le Parlement, cela ira plus vite.
Aussi expéditive que la manière dont on nous demande d'examiner ce PLFR, dans lequel j'ai cru voir qu'il était quand même question d'annuler 2 milliards d'euros de crédits. Ce n'est pas rien !
Permettez-moi de donner à nos collègues de la majorité l'exemple d'un fonctionnement tout à fait différent. Je suis conseillère départementale dans le Jura, où nous allons examiner lundi la décision modificative n° 2, soit l'équivalent du PLFR pour le département. Certes, les enjeux financiers ne sont que de 3,8 millions d'euros, ce qui est une goutte d'eau pour le budget de l'État, mais nous avons respecté les délais de convocation et le travail de toutes les commissions. Nous ferons les choses dans les règles, car le Gouvernement impose aux collectivités de respecter ces règles, en choisissant, pour sa part, de s'en exonérer.
Comme l'ont dit mes collègues, nous sommes au beau milieu de l'examen du PLF 2019, en commission comme en séance. Et voici qu'on nous soumet le PLFR. Pour Mme Peyrol, c'est « Circulez, il n'y a rien à voir » ! Il est d'ailleurs si mince que nous ne serions pas concernés. Mais s'il est si insignifiant, il ne fallait pas en faire !
Il est inadmissible de penser que nous n'avons même pas vingt-quatre heures pour examiner ce PLFR, alors que nous disposons d'une semaine pour les décrets d'avance. Je considère que nous sommes en pleine dérive totalitaire, entraînés par une majorité irresponsable et caporalisée.
J'entends parfaitement que les délais soient un vrai problème – nous en avions d'ailleurs parlé cet été lors de nos débats sur la révision constitutionnelle.
Cela étant, j'aimerais insister sur la manière dont, jusqu'à présent, on faisait des PLFR un usage dévoyé – il faut avoir le courage collectif de le reconnaître. Pendant des années en effet, ils ont servi à accueillir des dispositifs fiscaux qui n'avaient rien à y faire. Cela ne veut pas dire qu'il ne faille pas amender ce PLFR, mais ayez au moins l'honnêteté d'admettre que, jusqu'à présent, ce véhicule législatif était utilisé à mauvais escient.
Enfin, monsieur Hetzel, ce qui est méprisant, c'est de pointer du doigt le fait que M. Dussopt soit présent pour défendre ce projet de loi alors qu'il n'en est pas signataire.
Olivier Dussopt est secrétaire d'État auprès de Gérald Darmanin et il est tout à fait cohérent qu'il soit ici pour présenter ce PLFR, de même qu'il est cohérent que Mme Pannier-Runacher soit en train de défendre en séance publique les crédits de la mission Économie. J'aimerais donc que vous manifestiez davantage de respect pour les quatre ministres de Bercy, qui sont pareillement habilités à venir nous présenter ces projets de loi.
J'entends l'émotion légitime de nos collègues, mais permettez-moi de relativiser les choses. Il faut d'abord reconnaître que ce PLFR prouve que les prévisions macroéconomiques du Gouvernement ont été tenues.
Mais nous ne contestons pas ce texte sur le fond, nous contestons son examen sur la forme !
Par ailleurs, non seulement il n'y aura pas de décret d'avance mais, de surcroît, le PLFR aura des incidences budgétaires relativement mesurées puisque les ouvertures de crédits se limitent à 1,7 milliard d'euros et les annulations à 2,7 milliards.
L'abaissement, dans la loi de finances initiale, du taux de mise en réserve de 8 % à 3 % sur les crédits hors masse salariale contribue, entre autres, à donner à ce PLFR un aspect différent de ceux des années précédentes : Laurent Saint-Martin l'a dit, à la différence des précédents, ce PLFR n'est pas dévoyé.
Je m'exprime au nom des députés communistes pour faire part de notre mécontentement. Il nous est impossible de pouvoir travailler correctement, et notre droit d'amendement, pourtant garanti par la Constitution, est bafoué. Même s'il ne nous est pas formellement interdit de déposer des amendements, dans la mesure où nous sommes retenus en commission et en séance, il ne nous sera pas possible d'en discuter correctement. Ce droit inaliénable est d'autant plus important que nous parlons ici de sujets qui soulèvent beaucoup d'inquiétude dans le pays.
Nous ne pouvons nous satisfaire de cette situation, et je propose donc à nos collègues d'en donner acte en quittant cette audition.
Monsieur le président, nous allons en effet quitter cette audition, compte tenu du mépris qui nous est témoigné par le Gouvernement et de la remise en cause de notre droit d'amendement.
L'ensemble des commissaires de l'opposition se lèvent et quittent la salle.
Permettez-moi en préambule d'adresser mes remerciements à Laurent Saint-Martin, qui s'est élevé contre la forme d'inélégance dont ont fait preuve à mon endroit certains de ceux qui viennent de quitter la salle. Il se trouve que je n'y suis pas habitué, sans doute, précisément, parce que je ne suis pas assez souvent devant votre commission.
Il se trouve également – et je le mentionne au moins pour le compte rendu – que l'organisation du Gouvernement fait que je suis secrétaire d'État auprès de Gérald Darmanin et que j'ai à connaître, sous son autorité, de l'ensemble des sujets sur lesquels il a compétence, ce qui inclut le budget.
J'aurais enfin voulu rappeler, non sans sourire, à M. de Courson, qui regrette peut-être de n'avoir jamais été secrétaire d'État, que de Gaulle, en 1940, était, quant à lui, sous-secrétaire d'État. Comme quoi, une position au Gouvernement, ne fait pas la grandeur d'un destin, même si je ne saurais ébaucher la moindre comparaison entre ce personnage illustre et votre serviteur.
J'ai le plaisir de vous présenter un collectif budgétaire inédit, dans son format comme dans son contenu. C'est d'abord un texte court, qui ne comporte que quatre articles techniques : l'ajustement des recettes du compte d'affectation spéciale Transition énergétique ; l'ajustement des recettes du compte d'affectation spéciale Contrôle de la circulation et du stationnement routiers ; la ratification de décrets relatifs à la rémunération de services rendus ; un article enfin, prévoyant, conformément à l'article 11 de la loi de programmation des finances publique adoptée l'an dernier à l'initiative de la commission des finances du Sénat, de modifier les plafonds d'emplois des ministères et des budgets annexes, afin de ramener, dès 2018, l'écart entre les plafonds votés par le Parlement et la consommation effective des emplois, à un niveau proche de 1 %.
Nous rompons ainsi avec une mauvaise pratique consistant à ce que les lois de finances rectificatives de fin de gestion contiennent majoritairement des dispositions fiscales sans incidence sur l'équilibre de l'année en cours.
Au-delà d'un choix technique, nous faisons donc aussi un choix politique, puisque, comme nous nous y étions engagés, nous n'aurons pas recours à un décret d'avance de crédits. Puisque nous n'avons pas soumis au vote du Parlement des enveloppes dont nous savions qu'elles deviendraient caduques dès les premiers mois, voire – comme ce fut parfois le cas par le passé – dès les premières semaines de l'année à venir, nous n'avons pas besoin de recourir à un décret d'avance en cours d'année, qui revient à fausser la portée de l'autorisation parlementaire. Nous revenons là à une gestion budgétaire plus saine et plus respectueuse du vote du Parlement, comme en témoigne la baisse du taux de mise en réserve des crédits de 8 à 3 %, par ailleurs reconduite au titre de 2019.
En eux-mêmes, ces outils, prévus par la LOLF, sont des instruments utiles pour faire face à des urgences imprévisibles. En revanche, ils ne doivent pas être utilisés pour masquer l'insincérité initiale des budgets. À ce titre, et pour l'avenir, le Gouvernement entend donc les réserver à des situations réellement imprévisibles, et je me félicite que nous ayons collectivement mis en oeuvre pour 2018 un budget mettant fin aux sous-budgétisations récurrentes, et qui, pour la première fois depuis plus de trente ans, ne nécessiterait pas de recourir à un décret d'avance en cours de gestion.
Je tiens d'ailleurs à rappeler ici que, le 20 décembre 2016, M. de Courson avait introduit un recours devant le Conseil d'État contre un décret d'avance, considérant que les décrets d'avance relevaient de la manipulation budgétaire ; que le 22 décembre 2016, peut-être en appui à ce même recours, Mme Dalloz déclarait ici même qu'il s'agissait d'une pratique totalement dérogatoire au principe de l'autorisation parlementaire des dépenses. Peut-être cet outil connaît-il aujourd'hui, à leurs yeux, un retour en grâce, mais nous avons pris l'engagement de ne pas prendre de décret d'avance et de procéder dans le respect des autorisations parlementaires, telle que définies à l'occasion du débat budgétaire.
Sur le fond, ce PLFR s'inscrit dans la stricte continuité des hypothèses et des prévisions affirmées à l'occasion du vote de la loi de finances pour 2018. Je prendrai ici, pour vous en convaincre, quatre grands agrégats.
S'agissant, tout d'abord, du scénario macroéconomique attaché à ce PLFR, il est identique à celui prévu par le PLF 2019, qui retient une croissance du PIB de 1,7 % pour l'année 2018. En effet, les informations conjoncturelles publiées depuis la finalisation du PLF 2019 confortent les prévisions – celles publiées notamment par des organismes extérieurs depuis la finalisation du PLF, qui sont proches de celles du Gouvernement : la prévision de l'Observatoire français des conjonctures économiques la plus récente pour 2018 s'établit ainsi à + 1,7 %.
S'agissant de la prévision de solde public pour 2018 ensuite, elle est maintenue à – 2,6 % du PIB, soit le niveau du déficit de 2018 retenu dans le projet de loi de finances pour 2019. Le solde structurel resterait lui aussi inchangé, à – 2,2 % du PIB en 2018, tout comme l'ajustement structurel qui s'établirait à 0,1 point.
Plus encore, le redressement de nos comptes se poursuit, puisque, par rapport au solde budgétaire révisé dans le PLF 2019, soit un déficit de 81,3 milliards d'euros, le solde présenté dans le projet de loi de finances rectificative 2018 est de – 79,9 milliards d'euros, soit une amélioration de 1,4 milliard d'euros, qui s'explique principalement par les éléments suivants.
En premier lieu, le schéma retenu par le Gouvernement pour la fin de gestion permet de confirmer que la norme de dépenses pilotables sera sous-exécutée d'environ 600 millions d'euros par rapport à l'objectif fixé en loi de finances initiale.
En deuxième lieu, la cession de participations augmente à due concurrence les recettes du compte retraçant les participations financières de l'État.
En troisième lieu, les recettes non fiscales sont révisées à la hausse, à hauteur de 200 millions d'euros.
En quatrième lieu, la contribution au budget européen augmente de 100 millions d'euros suite au dernier budget rectificatif présenté par la Commission européenne.
En ce qui concerne à présent l'évolution des recettes, dans le détail, elle a un effet globalement neutre, si bien que le taux de prélèvements obligatoires s'établirait à 45 % en 2018, en ligne avec la prévision sous-jacente au PLF pour 2019.
En revanche, les recettes non fiscales sont, quant à elles, revues à la hausse de 200 millions d'euros en raison de la hausse du dividende versé par la Caisse des dépôts et consignations, pour 100 millions d'euros, et de la révision à la hausse des remboursements d'avances au secteur aéronautique pour, là encore, 100 millions d'euros.
Concernant ensuite l'évolution des dépenses, de la même manière, le ratio de dépense publique resterait inchangé à 54,6 % du PIB. Cette stabilité résulterait de prévisions conformes sur les trois sphères de la dépense publique : premièrement, comme anticipé dans le PLF pour 2019, la norme de dépense pilotable « État » devrait être sous-exécutée de 600 millions d'euros par rapport à l'objectif fixé en loi de finances initiale ; deuxièmement, concernant les administrations de sécurité sociale, l'objectif national d'évolution des dépenses d'assurance maladie, devrait, selon l'avis du comité d'alerte du 15 octobre 2019, être respecté ; enfin, les informations disponibles sur les dépenses des administrations publiques locales – chiffres encore fragiles à ce stade de l'année – confortent les prévisions retenues dans le PLF.
J'en viens pour finir au schéma de fin de gestion, qui permettra précisément la sous-exécution de 600 millions d'euros sur la norme de dépenses pilotables 2018, annoncée lors de la présentation du PLF pour 2019 et ce, tout en finançant les ouvertures de crédits indispensables pour assurer le règlement des dépenses obligatoires.
Parmi les ouvertures de crédits rendues indispensables par leur caractère d'urgence et qui seront intégralement gagées par des annulations à due concurrence, on notera la couverture des opérations extérieures (OPEX) et intérieures (OPINT) du ministère des armées pour 400 millions d'euros, les dépassements prévus pour les dépenses de personnel de certains ministères – à hauteur de 300 millions d'euros –, pour la prime d'activité – à hauteur de 200 millions d'euros –, pour l'allocation pour demandeur d'asile – à hauteur de 100 millions d'euros –, pour les aides personnelles au logement – à hauteur de 100 millions d'euros –, ainsi que pour les exonérations sur le périmètre de l'outre-mer – à hauteur de 100 millions d'euros.
Ces ouvertures seront intégralement gagées par des annulations à due concurrence, dans le respect du principe de responsabilité des gestionnaires que nous avons affirmé dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2018. Celles-ci concernent pour l'essentiel des crédits préalablement mis en réserve ou sont rendues possibles par la réalisation d'économies au-delà de ce qui était initialement prévu.
Mesdames et messieurs les députés, face au constat de débats devenus inintelligibles à l'occasion des collectifs de fin d'année, le Gouvernement a décidé de restreindre le champ de ce texte aux seules mesures ayant une incidence sur l'équilibre budgétaire de l'exercice en cours.
Si une telle évolution permet de revenir à l'essence des collectifs de fin d'année, elle est également faite pour renforcer la portée de l'autorisation parlementaire, et donc le contrôle des membres du Parlement sur les choix budgétaires réalisés.
Le PLFR comporte des mesures visant à financer les OPEX pour plusieurs centaines de millions d'euros. J'ai cru comprendre que la solidarité interministérielle, qui préside en général à ce financement, n'était pas requise, et que ce serait donc le seul budget de la défense qui financerait ce surcoût, sans ouverture de crédits supplémentaires. Ai-je bien compris ? Dans ce cas, dois-je en conclure que la loi de programmation militaire (LPM), qui prévoit un financement interministériel, n'est pas respectée ?
J'avais prévu un discours un peu pédagogique, à l'attention notamment de l'opposition ; je vais donc faire de la pédagogie sans auditoire, mais avec l'espoir que quelqu'un regardera la retransmission de cette séance.
Je voulais d'abord saluer le dépôt de ce PLFR 2018, qui illustre les méthodes novatrices du Gouvernement en matière de gestion du budget général de l'État.
Ainsi, je rappelle que le taux de mise en réserve des crédits a été abaissé en 2018 de 8 % à 3 %, hors dépenses de personnel. Cela visait à respecter l'autorisation parlementaire et à renforcer la responsabilité des gestionnaires de programme. Nous ne pouvons que saluer cette démarche.
À l'automne 2017, lorsque le Gouvernement avait pris cet engagement, beaucoup de ceux qui ont quitté cette salle avaient fait part de leur perplexité et de leurs doutes quant à la capacité du Gouvernement à gérer sans dérapage les crédits du budget général de l'État. Force est de constater que l'engagement a été tenu. En l'espèce, nous nous étions accoutumés à certaines pratiques, qui étaient pourtant en contradiction avec l'esprit de la LOLF, ce qui devait probablement traumatiser notre collègue Charles de Courson.
L'exercice 2018 est donc l'exemple d'une gestion saine et rigoureuse avec une budgétisation sincère en loi de finances initiale, un niveau raisonnable de mise en réserve et un ajustement en fin de gestion via une loi de finances rectificative de fin d'année, autant de pratiques inédites.
En outre, aucun décret d'avance n'aura été présenté devant le Parlement en 2018, ce qui n'était pas arrivé depuis 1985, d'après mes recherches archéologiques. On comprend dans ces conditions que les possibilités d'amender ce texte soient plus rares qu'à l'accoutumée.
À cet égard, je voudrais souligner la spécificité de ce PLFR.
En premier lieu, il se substitue au traditionnel décret d'avance de fin d'année, ce qui constitue une véritable avancée pour le Parlement, dont le pouvoir d'autorisation des crédits est pleinement respecté. Je comprends donc d'autant moins les remarques qui ont pu être faites.
Pour rappel, la procédure des décrets d'avance ne prévoit qu'un avis consultatif des commissions des finances, dans un délai de sept jours, avec une ratification dudit décret au sein du projet de loi de finances le plus proche. Le Gouvernement transmettait habituellement le projet de décret, sans présentation en commission et accompagné d'un rapport de motivation d'une quinzaine de pages. La loi de finances rectificative, quant à elle, donne lieu à une présentation par le Gouvernement en commission, à la communication d'un document de près de cent quarante pages et à l'examen du texte en commission et en séance. On ne peut donc que se féliciter de cette nouvelle procédure de fin de gestion.
En second lieu, le PLFR se concentre sur les ajustements de crédits de la fin de gestion. Il ne porte pas de dispositions fiscales, comme cela était le cas traditionnellement, ce qui fait que nous examinions en quelque sorte, avec le PLFR de fin d'année, un nouveau projet de loi de finances. Rien ne justifiait cette pratique, les mesures fiscales ne concernant bien souvent pas l'exercice en cours. Cela suscitait une véritable confusion entre les différents textes et rendait illisibles nos travaux et la politique budgétaire et fiscale poursuivie.
Il est plus que souhaitable que le PLF et le PLFR de fin d'année retrouvent leur nature première et un objet distinct : le PLF doit porter sur la politique fiscale et les mesures budgétaires de l'année à venir ; le PLFR de fin d'année doit se concentrer sur l'ajustement budgétaire de fin de gestion.
Cette clarification, dont je me réjouis, intervient après la mise en place du printemps de l'évaluation en mai dernier, à l'occasion de l'examen du projet de loi de règlement. Cela montre qu'il est possible d'améliorer de façon significative nos procédures, à droit constant, sans pour autant qu'il soit besoin d'inventer des chimères.
Ce PLFR doit nous permettre d'améliorer les conditions d'examen des textes financiers. Il me paraît donc indispensable d'appeler tous nos collègues – et je regrette donc que l'opposition soit partie – à respecter cette nouvelle pratique. C'est à ce prix que nous transformerons l'essai. Il faut qu'aux exigences auxquelles s'est astreint le Gouvernement répondent, par parallélisme, des exigences identiques au niveau du Parlement. En d'autres termes, le Parlement doit se garder d'introduire dans le texte aucune disposition fiscale nouvelle. On nous a annoncé tout à l'heure des milliers d'amendements : nous verrons bien de quoi il retourne.
Pour ce qui me concerne, j'adopterai, lors de l'examen en commission, une position de principe encore renforcée par ce qui vient de se passer et consistant à être défavorable à tout amendement fiscal déposé sur le PLFR de fin d'année.
Les amendements fiscaux doivent en effet être examinés lors de l'examen du PLF : nous en avons d'ailleurs examiné 1 108 en commission et 2 101 en séance sur la première partie, et nous sommes en train d'examiner en commission 568 amendements sur la seconde partie au titre des articles non rattachés, sans compter ceux qui vont être ajoutés d'ici à lundi prochain à 17 heures, pour être examinés en séance.
Si nous respectons collectivement ce partage entre les deux textes, ce qu'a respecté le Gouvernement, alors nous pourrons examiner plus rapidement ce PLFR, permettant ainsi d'ouvrir, notamment, les crédits nécessaires au financement des traitements dans certains ministères.
Ces précisions méthodologiques étant faites, et en espérant que chacun s'y conformera, en particulier ceux qui ne sont plus là pour m'entendre et font ainsi preuve d'un grand sens des responsabilités, j'aurai deux questions.
La première concerne le surcoût des OPEX, que vient d'évoquer le président : doit-on en effet comprendre que la clause de sauvegarde de la précédente LPM, qui prévoyait un financement interministériel de ces surcoûts, n'est plus applicable ?
J'aimerais ensuite savoir si les prévisions de recettes fiscales pour 2018, qui sont presque identiques à celles qui étaient associées au PLF 2019, sont susceptibles d'évoluer, compte tenu de la légère accélération de l'inflation qui a été mesurée par l'Institut national de la statistique et des études économiques au mois d'octobre et qui peut entraîner un léger surcroît de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) par rapport à ce qui est actuellement prévu ?
Merci en tout cas d'avoir respecté, comme vous l'avez fait, le Parlement, tant en matière de procédure que, par rapport aux engagements que vous aviez pris l'an dernier.
Sans vouloir m'appesantir sur ce qu'a dit l'opposition, ce n'est pas le fait que le PLFR soit moins dense que d'habitude ni son contenu qui sont en cause, ce sont les délais dont nous disposons pour déposer des amendements et nos conditions de travail.
Vous avez souligné que Mme Dalloz avait critiqué les décrets d'avance ; au moins avions-nous le temps de les regarder. On peut certes considérer que ce PLFR contient en quelque sorte les décrets d'avance, mais le temps qui nous est laissé pour l'examiner est si bref que cela pose un problème.
Or, vous savez bien que l'opposition, quelle qu'elle soit, est toujours très attentive à avoir le temps d'examiner les textes pour poser ses propres diagnostics.
Sur les OPEX, question posée à la fois par vous-même, monsieur le président, et par le rapporteur général, la clause de sauvegarde prévue par la LPM reste applicable si elle est nécessaire. Les 404 millions d'euros ouverts pour la mission budgétaire Défense sont financés par des annulations sur ladite mission.
Ces annulations portent toutes sur des crédits mis en réserve, ce qui permet de ne pas modifier les moyens effectifs dont disposaient les autres missions de la défense. La mission Défense ne contribue aucunement au financement des autres ouvertures de crédits – il n'y a pas de contribution de la mission à la solidarité interministérielle. Par ailleurs, il faut souligner que cette procédure permettra de dégeler des crédits beaucoup plus précocement que d'habitude, ce qui sera une nouveauté par rapport aux exercices précédents mais aussi une facilité pour le ministère des armées, comme pour l'ensemble des ministères, d'ailleurs, dès lors que nous sommes dans une logique de dégel.
Aujourd'hui, l'exécution de la mission Défense sera donc au niveau prévu en 2018, conforme à la LPM. Les économies réalisées sur un certain nombre d'aspects du budget de la défense permettent de financer les OPEX de la manière que j'ai indiquée.
La seconde question de Joël Giraud concerne l'inflation et la TVA. L'avis du HCFP confirme nos prévisions de recettes fiscales, notamment sur la TVA. À ce stade de l'année, nos prévisions sont surtout établies à partir des encaissements et non des hypothèses macroéconomiques, donc de l'inflation. Celle-ci devrait très peu faire varier les recettes de l'exercice et ne nécessite donc pas de modifier ce que nous proposons.
Une observation, tout d'abord. Je m'interroge en effet quand on dit vouloir défendre les institutions et que l'on fait preuve en même temps d'irrespect vis-à-vis du secrétaire d'État. En outre, quand on a la chance de vivre dans une démocratie forte, alors que le monde est instable, il est dangereux d'utiliser certains mots. Cette dérive lexicale m'inquiète.
Sur le fond, je salue ce texte, qui est la démonstration de la façon dont fonctionne le Gouvernement : il tient ses engagements. Gérald Darmanin avait annoncé qu'il n'y aurait pas de « PLF bis » cette année ; cette ténacité doit être saluée. Cet engagement répond également à une volonté du Parlement de rendre au collectif budgétaire sa vocation originelle de correction et non d'ajustement massif comme on a pu le connaître dans le passé.
À cet égard, notre majorité ne peut que souscrire à la volonté du rapporteur général de ne pas ajouter de dispositions fiscales à ce texte. Nous espérons que l'opposition nous suivra.
J'en viens à ma question. Les prévisions du Gouvernement sont inchangées par rapport à celles présentées dans le PLF 2019, à savoir une hypothèse de croissance à 1,7 %, tandis que le HCFP a estimé dans son avis qu'une hypothèse de 1,6 % était plus vraisemblable. Quelle réponse le Gouvernement y apporte-t-il ?
Je souligne enfin, à l'heure où nous parlons de fiscalité des carburants et d'affectation de la fiscalité écologique à la transition écologique, que 0,6 milliard de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques ont été affectés au compte d'affectation spéciale (CAS) Transition énergétique.
Bien sûr, disposer de plus de temps permet de prendre du recul et de conduire un travail plus approfondi. Cependant, je salue ce PLFR au nom de mon groupe, un PLFR restreint au strict minimum, avec seulement neuf articles et pas de décret d'avance, ce qui nous apporte une nouvelle lisibilité. C'est l'illustration de l'effort de « sincérisation » budgétaire mené depuis le début de la législature, et de réduction structurelle de la dépense publique, avec la baisse des plafonds d'emplois – 10 805 équivalents temps plein. Tels sont les éléments qu'il nous paraissait important de souligner.
Le Haut Conseil estime qu'une croissance de 1,6 % en 2018 est plus vraisemblable que nos prévisions, qui, pour le moment, restent inchangées à 1,7 %. Ces estimations extrêmement proches soulignent que nous sommes cohérents, tant sur le diagnostic d'un rebond de l'activité au second semestre 2018 – qui est déjà apparu dans les chiffres du troisième trimestre publiés la semaine dernière – que par rapport à l'ensemble des éléments dont nous disposons. À ce stade de l'année, si la prévision de croissance était, non pas exactement de 1,7 %, mais de 1,6 %, cela n'aurait que très peu d'effet sur la prévision de déficit public, qui, elle, est jugée plausible par le Haut Conseil dans son avis.
Madame El Haïry, vous avez évoqué les plafonds d'emplois. Au risque de vous décevoir, il ne s'agit pas d'une économie. C'est la conséquence de l'application de l'article 11 de la loi de programmation des finances publiques, introduit par le Sénat, qui a constaté que l'État, comme d'autres employeurs publics, d'ailleurs, disposait d'un plafond d'emplois voté par le Parlement ne correspondant pas à la réalité des emplois pourvus. Nous avons un plafond d'emplois autorisé par le Parlement et, en gestion, des schémas d'emplois, que nous imposons parfois aux ministères, lorsqu'il s'agit de réduire les effectifs. Le Sénat a voulu participer à la sincérisation des documents budgétaires et rapprocher le plafond des emplois ouverts de la réalité des emplois pourvus. L'article 11 prévoit donc que l'écart entre les emplois effectivement pourvus dans le cadre des schémas d'emplois du ministère et le plafond des emplois autorisé par le Parlement ne devrait pas dépasser 1 %. Or 33 000 emplois n'étaient pas pourvus dans le tableau, sur 2,3 millions. En supprimant 10 805 emplois – des emplois vacants, je le répète –, nous nous rapprochons de 23 000 et donc du pourcentage de 1 %. C'est une logique de sincérisation. Par ailleurs, les suppressions d'emplois qui ont été annoncées sont respectées.
Enfin, le Gouvernement partage vos observations sur la nature du PLFR. Nous sommes convaincus que le PLFR doit devenir un exercice d'ajustement : ajustement des prévisions, quand c'est nécessaire, ce qui n'est pas le cas cette fois-ci, ajustement des chiffres, ouverture de crédits dans des montants qui, eu égard à la masse globale du budget de l'État, restent modestes. Il ne doit plus être un exercice budgétaire bis ou une redite des débats fiscaux. Dès lors, le Gouvernement donnera lui aussi un avis défavorable à l'ensemble des amendements qui porteraient des articles additionnels en matière de fiscalité.
Dans le rapport du Haut Conseil, on trouve la formule « plausible au regard des informations portées à sa connaissance ». Une telle expression laisse planer le doute. Ce sont, si je me souviens bien, les termes qu'avait employés Bernard Tricot quand il affirmait que le Rainbow Warrior n'avait pas été saboté par les services français « au regard des informations portées à sa connaissance », informations qui s'étaient révélées quelque peu fausses...
Plus sérieusement, j'ai cru comprendre que les Allemands avaient révisé massivement leur prévision de croissance à la baisse. Je suis donc étonné que tant le Haut Conseil que le Gouvernement maintiennent une prévision de baisse extrêmement limitée. Cela ne me paraît pas très cohérent avec les signes envoyés ici et là depuis quelques semaines.
S'agissant du CAS Transition énergétique, que vous abondez de 600 millions d'euros, pourriez-vous détailler le contenu de cet abondement ?
Je commencerai par ce qui peut paraître le plus technique mais qui ne l'est pas : le CAS Transition énergétique. Ce qui apparaît comme un abondement, en tout cas de manière comptable, est avant tout une sous-exécution par rapport aux prévisions. Cela relève notamment des discussions entre le Gouvernement et la Commission de régulation de l'énergie (CRE) sur des questions de périmètre de ce compte, et des estimations que l'on doit faire en termes de soutien à la filière énergétique. Nous ne sommes donc pas dans une logique qui permettrait de détailler.
Monsieur Bourlanges, la cible de 1,7 % reste atteignable malgré le chiffre légèrement en retrait par rapport aux attentes de l'ensemble des prévisionnistes concernant le troisième trimestre, avec un pourcentage de 0,4 % plutôt que 0,5 %. Le diagnostic global que nous portons sur l'économie reste néanmoins inchangé puisque l'activité cesse de pâtir des éléments temporaires du début d'année. Nous voyons notamment repartir la consommation et l'investissement reste dynamique. Par ailleurs, les informations conjoncturelles dont nous disposons pour la fin de l'année sont plutôt encourageantes. Les premières enquêtes conjoncturelles portant sur le quatrième trimestre sont certes moins bien orientées qu'en milieu d'année dans l'industrie mais elles s'améliorent assez considérablement dans les services. Les signaux sont favorables pour l'investissement des entreprises et les exportations devraient être dynamiques en lien avec d'importantes livraisons de matériel de transport. Au regard de ces informations, le rythme de croissance de 0,4 % en fin d'année ne semble pas hors de portée et conduirait à une croissance annuelle proche de la cible annuelle de 1,7 %.
On a le sentiment que vous abondez le CAS Transition énergétique de 6 milliards d'euros mais c'est en réalité, si je comprends bien, le montant total du CAS, après le retrait de la sous-exécution de l'ordre de 600 millions.
Je vous le confirme. Les dépenses de ce CAS correspondent à des engagements de compensation pour le soutien aux énergies renouvelables. Elles compensent notamment les charges de service public aux opérateurs du service public de l'électricité, les mécanismes de soutien aux énergies renouvelables électriques, les appels d'offres pour le développement des effacements de consommation ou encore les coûts de gestion, et celles des fournisseurs de gaz naturel. Une délibération de la CRE de juillet 2018 a réévalué les charges de ces opérateurs au regard de trois facteurs : les prix de marché de l'électricité, plus élevés en 2018 qu'au moment de la prévision initiale réalisée en juillet 2007, des volumes prévisionnels de production d'électricité d'origine renouvelable, et les hypothèses de nouvelles capacités de production installées. Par cette délibération, la CRE nous permet d'annuler 595 millions d'euros pour ne pas surcompenser ces charges aux opérateurs concernés.
Les Allemands, monsieur Bourlanges, anticipent un ralentissement du commerce international compte tenu des grandes incertitudes commerciales, monétaires et politiques qui existent aujourd'hui. Leur économie étant très exposée aux échanges extérieurs, puisque près de 45 % du PIB allemand est exposé à la concurrence internationale, ils craignent que leur activité économique ne pâtisse de cette situation.
Cela montre que les prévisions macroéconomiques françaises pour 2018 sont d'une justesse remarquable car nous avons eu affaire à une très forte volatilité. Au deuxième trimestre, la consommation des ménages a chuté de 1 %. Sachant que cette consommation est de l'ordre de 1 600 milliards, cela représente 16 milliards de chute. Au troisième trimestre, elle a connu un rebond de 0,5 %, soit 8 milliards. Or, malgré la très forte volatilité des agrégats macroéconomiques, la prévision pour 2018 se révèle juste. Nous n'avons pas été mauvais en cette matière difficile !
J'ajoute que, s'agissant de l'Allemagne, il y a également des raisons de penser que la moindre croissance de fin d'année serait temporaire. Elle est en effet causée par les difficultés conjoncturelles auxquelles le secteur automobile allemand est confronté au troisième trimestre, liées notamment aux problèmes rencontrés par les constructeurs allemands pour atteindre leurs objectifs d'émission de CO2.
La commission poursuit l'examen des articles 48 à 71, non rattachés du projet de loi de finances pour 2019 (n° 1255) (M. Joël Giraud, rapporteur général).
Avant de reprendre cet examen, monsieur le président, je souhaite formuler une rapide proposition concernant le PLFR. Puisque j'ai indiqué qu'il serait cohérent de disposer d'un délai de dépôt d'amendements un peu plus long, serait-il possible de pouvoir déposer nos amendements jusqu'à vendredi matin, juste avant l'examen du texte en commission, c'est-à-dire le plus longtemps possible ?
Je pense que c'est possible en commission mais cela dépend tout de même du rapporteur général.
Si 15 000 amendements sont déposés, c'est ingérable. Le seul fait de traiter les amendements demande du temps.
La proposition vise à laisser un peu plus de temps aux parlementaires pour déposer des amendements, mais pourquoi ne tenons-nous pas cette séance de commission lundi ?
Le Gouvernement a inscrit le texte à l'ordre du jour de la séance publique lundi après-midi. C'est lui qui a la maîtrise de l'ordre du jour de Parlement. Toutes ces observations ont été faites en Conférence des présidents. J'ai moi-même reçu le ministre chargé des relations avec le Parlement dans mon bureau hier après-midi pour en parler. Je prépare une lettre au Premier ministre pour indiquer que nos conditions de travail doivent être respectées au mieux. Mais, dans notre République, c'est le Gouvernement qui fixe le calendrier du Parlement et non le contraire.
Je ne veux pas relancer le débat sur le fond – il a été très bien exposé par Bénédicte Peyrol – mais un délai jeudi à 20 heures me semble raisonnable si ce texte n'appelle que des amendements précis sur les articles. Nous pouvons repousser le délai entre nous sans repasser par la Conférence des présidents.
Il ne faut pas nous prendre pour de grands naïfs. Si ce PLFR reste un texte technique, si le Gouvernement ne dépose aucun amendement fiscal, il n'y a aucun problème. Il faut bien cependant que les mesures fiscales – chèque énergie ou autres – annoncées par le Président de la République se rattachent à un texte budgétaire : la première partie du PLF étant votée, cela ne peut se faire qu'au Sénat ou en nouvelle lecture. Comme par hasard, ce PLFR tombe très bien ! Nous voyons très bien ce qui peut arriver.
Tout ce que je peux vous dire à mon niveau, c'est que, si le Gouvernement dépose des amendements à caractère fiscal, j'y donnerai un avis défavorable par principe. J'ai dit tout à l'heure que je donnerais un avis défavorable à tout amendement à caractère fiscal pour la commission : cela concerne les parlementaires mais aussi le Gouvernement.
Si cela arrive, chacun en tirera les conséquences politiques, et Dieu sait qu'il y a de la créativité dans ce domaine... Ne faisons pas de procès d'intention.
J'ai commencé à regarder ce PLFR. Contrairement à ce que dit notre collègue, on y trouve, comme dans tous les textes de ce type, des problèmes sérieux. Par exemple, il annule 300 ou 330 millions sur les crédits d'équipement pour financer les 400 millions sur les OPEX. On reprend des pratiques auxquelles on avait promis de ne plus jamais avoir recours. De même, s'agissant de la transition énergétique, la recette supplémentaire est affectée à tout autre chose. Comme toujours, il se présente divers problèmes et on ne peut pas dire qu'il s'agisse d'un texte purement technique.
Les parlementaires ont la liberté de juger si un texte est technique ou non, et de décider du nombre d'amendements qu'ils entendent déposer. Mais on ne peut pas changer l'ordre du jour de lundi – le Gouvernement ne le modifiera pas, la question lui a déjà été posée. Nous pouvons, quant à nous, décaler la limite du dépôt d'amendements de quelques heures, jusqu'à 20 heures demain.
Je suis d'accord mais je souhaite que tout le monde soit bien conscient que le personnel administratif de la commission des finances devra de ce fait travailler toute la nuit.
Après l'article 55
La commission est saisie de l'amendement II-CF1089 de Mme Maina Sage.
Cet amendement avait été déposé en première partie et adopté en commission des finances. Lors de son examen en séance publique, le secrétaire d'État Olivier Dussopt avait déclaré être favorable au fond et à l'orientation tracée. À sa demande, cet amendement a été retiré afin d'être retravaillé avec le Gouvernement et redéposé en seconde partie dans une rédaction plus précise. Après consultation des différents acteurs locaux et en cohérence avec les recommandations du Gouvernement, cette proposition co-construite apporte le cadrage nécessaire à la protection des équilibres fiscaux de nos territoires. L'amendement précise que ce dispositif s'applique aux seuls navires de croisière d'une capacité de moins de 300 cabines effectuant 90 % des têtes de lignes et 60 % des escales dans les ports ultramarins, naviguant sous le pavillon d'un État membre européen et dont la société détient une filiale dans un de nos territoires outre-mer.
Le travail continue avec le Gouvernement pour un « atterrissage » consensuel sur le sujet en séance publique. Je vous invite donc à retirer vos amendements pour le moment.
Les bateaux de croisière ont été rendus éligibles à la défiscalisation il y a très longtemps. Cela a donné lieu à des excès, pour ne pas dire plus, et le dispositif a été supprimé. Nos collègues proposent, et c'est plus sérieux, d'exclure du champ les énormes paquebots de croisière, pour retenir des bateaux qui restent dans l'archipel l'essentiel de l'année et dont une partie de l'équipage est recrutée localement, afin que la mesure ait de véritables retombées dans le territoire. Ne vaudrait-il pas mieux, monsieur le rapporteur général, voter ces amendements ? Nous pourrions ainsi les comparer avec celui, éventuel, du Gouvernement.
J'en reste à ce que j'ai proposé dans la mesure où je sais que le travail se poursuit. En l'absence de proposition du Gouvernement en séance publique, je donnerai un avis de sagesse à ces amendements.
L'amendement est retiré.
Elle examine ensuite l'amendement II-CF1321 de M. Philippe Dunoyer.
Cet amendement concerne un dossier que nous avons déjà présenté, notamment avec mon collègue Philippe Dunoyer. Il s'agit de rendre admissible au bénéfice de la défiscalisation tout ce qui relève du stockage d'énergie solaire. Nos territoires sont en effet engagés, aussi bien en Nouvelle-Calédonie qu'en Polynésie française et dans le reste de l'outre-mer, dans des schémas de transition énergétique extrêmement volontaristes. Il nous semble donc opportun que les investissements réalisés dans ce secteur puissent être soutenus par l'État.
Ce dispositif a été en vigueur jusqu'en 2011, date à laquelle il a été supprimé à cause d'abus notamment. J'en resterai à cette position. Avis défavorable.
La commission rejette cet amendement.
Puis elle examine l'amendement II-CF1211 de M. Philippe Gomès.
La loi prévoit un délai de deux ans pour achever les fondations d'une construction financée par une opération de défiscalisation. Or des dossiers complexes par leur importance ou leur ampleur, ou par la nature du terrain, nécessitent des délais de réalisation plus longs. Cet amendement vise à prendre en compte cette réalité en précisant que le délai de deux ans peut être prorogé une fois sur demande motivée pour une durée maximale équivalente lorsque les caractéristiques d'un programme de construction le nécessitent.
Différents types de territoire connaissent des contraintes pour la construction : j'en connais un, le mien, où six mois par an le sol est gelé.
Dans la mesure où votre amendement comporte des imprécisions qui sont susceptibles de constituer une incompétence négative et de poser, en pratique, des difficultés d'application, la proposition ne tourne pas. Avis défavorable.
La commission rejette cet amendement.
Article additionnel après l'article 55 : Extension des dispositifs d'aide fiscale à l'investissement en faveur du logement social outre-mer à certaines dépenses de rénovation et de réhabilitation
La commission examine ensuite, en discussion commune, les amendements II-CF1398 du rapporteur général et II-CF1212 de M. Philippe Gomès.
La problématique de l'extension du champ de la réduction d'impôt pour l'investissement dans le logement social aux dépenses de rénovation et de réhabilitation avait été portée en première partie par nos collègues Philippe Gomès et Philippe Dunoyer. Lors de l'examen de leur amendement, j'avais indiqué que j'étais favorable aux arguments avancés à titre personnel mais que le dispositif qu'ils proposaient n'était pas parfaitement satisfaisant. Nous sommes parvenus à une meilleure rédaction précisant le mode de calcul de l'avantage fiscal, dans un parallélisme avec ce qui existe dans les départements et régions d'outre-mer (DROM). Cette rédaction a également été portée par notre collègue Olivier Serva en séance.
Il s'agit d'admettre au bénéfice de la défiscalisation les travaux de rénovation et de réhabilitation pour les logements sociaux achevés depuis plus de vingt ans. C'est un dispositif qui existe de longue date dans les DROM et qui, probablement par une inattention du législateur, n'a pas été étendu aux collectivités de l'article 74 de la Constitution et à la Nouvelle-Calédonie. Or, nous avons dans nos collectivités des parcs de logements sociaux qui, pour certains, sont très anciens et nécessitent des opérations de réhabilitation particulièrement lourdes, et il est donc indispensable qu'ils puissent être admis, comme dans les DROM, au bénéfice de la défiscalisation dès lors qu'ils sont âgés de plus de vingt ans.
Ce sont les mêmes objectifs que l'amendement que je viens de présenter et qui reprend votre préoccupation. Je vous propose de retirer votre amendement au profit du mien et d'en être ainsi cosignataire.
L'amendement II-CF1212 est retiré.
La commission adopte l'amendement II-CF1398.
Après l'article 55
La commission examine ensuite, en présentation commune, les amendements II-CF1022 et II-CF1023 de Mme Nicole Sanquer.
Le gouvernement de Polynésie française a fait de la politique du logement et plus particulièrement du logement social l'une de ses priorités. Le plan 3 000 logements est un parfait exemple du volontarisme et de la détermination du gouvernement polynésien sur cette problématique, mais cela ne suffit pas car pas moins de 5 300 demandes pour l'accès à un logement social sont en attente, et l'Institut de la statistique en Polynésie française estime à 35 000 le nombre de logements sociaux nécessaires d'ici à 2035. Pour dynamiser l'offre de financement, le gouvernement polynésien a ouvert des dispositifs sous forme de subventions à des organismes privés de logement social. Cependant, un problème persiste : la durée d'instruction des dossiers pour l'obtention de l'agrément central à l'aide fiscale. En 2017, le rapport Mazars a estimé que la durée d'instruction pour l'obtention de cet agrément s'élevait à deux ou trois ans en moyenne sur l'échantillon étudié.
Pour réduire cette durée d'instruction, l'amendement II-CF1022 propose d'ouvrir la procédure d'agrément simplifié aux organismes privés de logement social. Ainsi, après avis favorable du représentant de l'État dans la collectivité, les conditions d'obtention de l'agrément porteraient exclusivement sur la détermination de la base fiscale éligible et sur les conditions permettant de garantir la protection des investisseurs et des tiers.
L'amendement II-CF-1023 est un amendement de repli.
L'administration n'est pas fermée à l'idée mais elle n'a pas de personnel pour assurer cela dans les collectivités dotées de l'autonomie fiscale. Je souhaite que vous présentiez l'amendement devant le ministre. J'insisterai auprès de lui sur cette problématique qui me semble on ne peut plus légitime.
Les amendements sont retirés.
Article additionnel après l'article 55 : Mesures de coordination pour assurer l'application uniforme des obligations d'information et des sanctions associées à tous les dispositifs d'aide fiscale à l'investissement outre-mer
La commission est saisie de l'amendement II-CF958 du rapporteur général.
Le présent amendement vise à corriger des scories rédactionnelles résultant des lois de finances antérieures pour l'application des dispositifs d'aide fiscale à l'investissement outre-mer qui n'ont fait l'objet d'aucune coordination.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle est saisie, en présentation commune, des amendements II-CF993, II-CF987 et II-CF996 de M. Philippe Dunoyer.
Ces trois amendements visent à dynamiser la production de logements intermédiaires en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis-et-Futuna, qui sont dans une situation de grave déficit.
L'amendement II-CF993 vise à améliorer le dispositif dit « Pinel » en faveur du logement dans le secteur du logement intermédiaire dans les collectivités du Pacifique. Il n'est à l'heure actuelle pas suffisamment attractif, même si une majoration est prévue pour l'outre-mer. Le nombre de dossiers agréés chaque année est de vingt en Polynésie et entre cinquante et quatre-vingts en Nouvelle-Calédonie. Force est de constater que plus on est loin de l'Hexagone, plus il est difficile d'attirer des investisseurs.
Nous proposons de porter le plafond annuel d'investissement applicable par contribuable et par année d'imposition de 300 000 euros à 400 000 euros pour les investissements réalisés dans le secteur du logement intermédiaire dans ces collectivités.
L'amendement II-CF987 prévoit de majorer de 11 points les taux de réduction d'impôt qui s'appliquent aux investissements dans le secteur du logement intermédiaire, pour le porter à 34 % et 40 % selon que l'engagement relatif à la location du logement porte sur six ou neuf ans.
L'amendement II-CF996 porte le plafond des avantages fiscaux à 26 000 euros pour les investissements réalisés dans le secteur des biens productifs et les logements sociaux et intermédiaires contre 18 000 euros actuellement
Avis défavorable sur les trois amendements.
Je rappelle que le dispositif Pinel bénéficie actuellement aux contribuables dont les revenus sont les plus élevés : rehausser le plafond des dépenses prises en compte dans le calcul de l'avantage fiscal, comme vous le proposez dans le premier amendement, accentuerait ce phénomène, sans avoir véritablement d'autres effets bénéfiques.
S'agissant de l'amendement II-CF987, je soulignerai que les investissements réalisés outre-mer bénéficient déjà de conditions particulières, tenant compte des spécificités locales des outre-mer : les taux sont majorés – 23 % et 29 % au lieu de 12 % et 18 % – et les conditions de ressources et de loyers sont adaptées.
Enfin, pour le II-CF996, il me semble qu'instaurer un quasi-triplement du plafond des avantages fiscaux pour les investissements réalisés outre-mer serait se tromper d'objectif. Il est déjà prévu un presque doublement du plafond. Le soutien direct à l'outre-mer exercé grâce au fonds exceptionnel d'investissement (FEI) me semble plus efficace.
La commission rejette successivement les amendements.
Elle en vient à l'amendement II-CF1007 de M. Thibault Bazin.
Nous partageons l'objectif de produire plus de logements et sommes favorables aux dispositifs incitatifs destinés à libérer du foncier. Afin d'inciter les entreprises à vendre des biens immobiliers, la loi de finances pour 2018 a instauré un taux réduit d'impôt sur les sociétés de 19 % sur les plus-values réalisées jusqu'au 31 décembre 2022, sous condition d'un engagement de construction ou de transformation des biens vendus en logements dans un délai de quatre ans.
Le présent amendement propose de compléter ce dispositif en prévoyant l'application de ce même taux aux organismes d'HLM à l'occasion de ventes de locaux commerciaux, sous condition de réinvestissement, dans un délai de quatre ans, dans la construction, l'acquisition, la réhabilitation ou la rénovation de logements locatifs sociaux.
Un tel régime a existé entre 2006 et 2010. Il paraît opportun de le remettre en place sachant que la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN) comprend plusieurs mesures incitant les organismes d'HLM à céder leur parc.
Le taux réduit applicable aux plus-values de cession d'immeubles par les offices HLM a certes pris fin à compter de 2011, mais je vous rappelle que cette même année, a été introduit dans le code général des impôts l'article 210 F, qui prévoit l'application du taux réduit de 19 % aux plus-values de cession de locaux, si la société cessionnaire s'engage à transformer le bien acquis en local d'habitation.
Dans certaines conditions, les offices d'HLM peuvent bénéficier de ce taux réduit au titre des plus-values de cession de leurs locaux non affectés au logement social, si le cessionnaire s'engage à transformer ces locaux en locaux d'habitation.
S'agissant des fusions, il est expressément prévu à l'article 210 F que l'engagement pris par la société cessionnaire n'est pas rompu si la société qui l'absorbe s'engage à le respecter dans le délai restant à courir.
Compte tenu de ces éléments, je vous invite, monsieur Bazin, à retirer votre amendement.
L'amendement est retiré.
La commission est saisie des amendements identiques II-CF539 de M. Pascal Bois et II-CF847 de Mme Céline Calvez.
L'amendement II-CF539 porte sur le crédit d'impôt pour dépenses de production d'enregistrements phonographiques. Créé en 2006, ce dispositif a pour objectif de soutenir la création et la production musicales.
L'an dernier, le Parlement n'a souhaité le proroger que d'une année dans l'attente du rapport de la direction générale des médias et des industries culturelles du ministère de la culture. Elle a conclu à l'efficience de ce crédit d'impôt : pour 1 euro investi, 2,40 euros vont au budget de l'État par le biais des cotisations sociales et de la taxe sur la valeur ajoutée.
Nous proposons de le proroger de trois ans, jusqu'au 31 décembre 2022, ce qui permettra de donner à nouveau de la visibilité à l'industrie musicale.
Je rappellerai simplement que ce qui avait justifié la création de ce crédit d'impôt était le basculement numérique des modes de consommation. Comme il s'agit d'un phénomène qui s'approfondit, je pense nécessaire de soutenir encore la production phonographique.
Je devais déposer un amendement instaurant un cadrage général des crédits d'impôt s'appliquant aux sociétés du secteur du cinéma, de l'audiovisuel, des jeux vidéo, de la musique et du spectacle vivant. Leur durée aurait été calée sur celle de la loi de programmation des finances publiques 2018-2022 et ils auraient fait l'objet d'une évaluation avant d'être éventuellement renouvelés. Cela a tellement plu aux entreprises concernées, qui jouissent d'un crédit d'impôt ad vitam aeternam, qu'elles se sont retournées vers le ministère de la culture. J'ai donc préféré retirer mon amendement afin que nous trouvions en séance un dispositif permettant d'établir une équité entre crédits d'impôt pris dans leur ensemble et de maîtriser les dépenses fiscales. Je constate en effet que ces crédits continuent de progresser, ce qui ne me paraît pas normal au vu des conclusions du rapport d'information sur l'application des mesures fiscales.
Je vous demande donc de bien vouloir retirer vos amendements de façon que nous cherchions ensemble en séance un dispositif plus complet qui comprendra des dispositions de régulation.
Je comprends parfaitement les arguments du rapporteur général. Ces crédits d'impôt nécessitent d'être évalués pour qu'on passe du prêt-à-porter au sur-mesure, selon qu'ils s'appliquent à l'art vivant, à l'industrie phonographique, au cinéma. Émilie Cariou et moi-même venons de remettre au Premier ministre notre rapport sur la création du Centre national de la musique (CNM) Une des missions premières de cette institution sera de dresser un état des lieux des crédits d'impôt concernant spécifiquement la musique. Comme le CNM ne pourra pas entrer dans ce rôle du jour au lendemain, il me paraissait judicieux de proroger ce crédit d'impôt. Cela dit, je suis prêt à retirer mon amendement.
Les amendements identiques sont retirés.
Article additionnel après l'article 55 : Extension de la réduction d'impôt pour l'achat de flottes de vélos mises à disposition des salariés aux locations de longue durée de telles flottes
La commission examine ensuite les amendements identiques II-CF960 du rapporteur général et II-CF1299 de Mme Bénédicte Peyrol.
Mon amendement est défendu, et je vais laisser le soin à Mme Peyrol de défendre son amendement identique.
Conformément à l'engagement du Gouvernement annoncé le 14 septembre 2018 dans le cadre du plan « Vélo et mobilités actives », mon amendement vise à étendre l'assiette de réduction d'impôt prévue à l'article 220 undecies A du code général des impôts aux dépenses de location de longue durée de flottes de vélos.
Tout ça, c'est bien sympathique mais y a-t-il vraiment besoin d'une réduction d'impôt de 25 % alors qu'il n'y a plus un sou dans les caisses ? Cette disposition va surtout bénéficier aux habitants des zones concentrées : qui prend son vélo pour aller travailler quand il faut parcourir 30 kilomètres depuis son domicile ? Les bouseux, dont je fais partie, vont encore dire qu'il n'y en a que pour les bobos. Pour garantir un équilibre entre zones urbanisées et zones peu denses, il faudrait penser les avantages fiscaux dans leur globalité.
La commission adopte les amendements identiques.
Après l'article 55
La commission en vient à l'amendement II-CF966 de Mme Émilie Bonnivard.
Je constate avec plaisir qu'il est encore possible de créer de nouveaux avantages fiscaux. Je vais donc tenter ma chance avec le tourisme de montagne.
Cet amendement vise à répondre à la problématique suivante : comment trouver des fonds propres dans les stations de montagne pour construire des résidences de tourisme avec des « lits chauds », durablement marchands, alors que les droits à construire sont réduits ? Il s'agit de mobiliser les acteurs économiques du territoire, ceux du domaine skiable et des magasins de ski notamment, afin de les amener à investir dans ces outils immobiliers.
L'amendement prévoit d'ouvrir un droit à crédit d'impôt pour des sociétés ayant un intérêt direct à la fréquentation touristique d'une station classée de tourisme. Il correspondrait à l'amortissement sur plusieurs années du montant de la souscription dans les sociétés civiles de placement immobilier (SCPI) qui contribuent vertueusement à l'extension du parc immobilier marchand des stations de montagne.
Tout à l'heure, Mme Bonnivard voulait ressusciter le dispositif Robien SCPI. Elle tente à nouveau de le faire, sous une forme différente, pour les stations de montagne. Par parallélisme des formes, malgré mon amour absolu pour le tourisme de montagne, j'émettrai un avis défavorable.
Cet amendement a pour but d'appeler l'attention de nos collègues sur une problématique qui est suffisamment importante pour qu'elle soit transpartisane. J'aimerais que nous nous en saisissions ensemble afin que l'année prochaine, nous proposions de nouveaux outils ensemble.
Il y a beaucoup d'élus de montagne et il serait bon en effet qu'ils mènent une réflexion commune sur ces sujets récurrents.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement II-CF1165 de Mme Sabine Rubin.
Cet amendement a pour objectif de redéfinir des critères pertinents en vue d'établir une liste des États et territoires non coopératifs correspondant à leurs pratiques fiscales réelles.
Ces critères reposeraient sur la transparence fiscale, les normes « base erosion and profit shifting » (BEPS) – érosion de la base d'imposition et transfert de bénéfices – et l'absence de mise en place d'un régime fiscal dommageable, conformément aux préconisations du Conseil de l'Union européenne et de l'Organisation de coopération et de développement économiques. Cela permettra d'intégrer à la liste française des États que l'on devrait considérer comme des paradis fiscaux, mais qui actuellement n'y figurent pas, comme les Bermudes, les îles Caïmans et Hong Kong, mais aussi des pays européens comme l'Irlande et le Luxembourg.
Selon l'organisation non gouvernementale Oxfam, les entreprises du CAC 40 possèdent actuellement 1 450 filiales dans des paradis fiscaux mais seulement dix d'entre elles sont implantées dans l'un des paradis fiscaux identifiés comme tels dans les listes française et européenne. Ces entreprises du CAC 40 peuvent donc continuer de pratiquer une évasion fiscale massive en toute impunité. Avec un élargissement de la liste des paradis fiscaux, ces 1 450 filiales pourraient être sanctionnées : les entreprises du CAC 40 cesseraient alors ces pratiques fiscales dommageables pour nos finances publiques.
La « liste noire » européenne doit être lue à l'aune de la « liste grise », sorte de purgatoire fiscal. En 2019, les pays qui y figurent auront à donner des preuves de leurs engagements, sinon ils basculeront dans la liste noire.
En outre, bien que je partage votre souhait de mieux associer le Parlement à l'élaboration de la liste, je vous ferai remarquer que la loi relative à la lutte contre la fraude renforce cette association, grâce notamment à une clause de revoyure.
La commission rejette l'amendement.
Article additionnel après l'article 55 : Obligations déclaratives des structures bénéficiaires de la réduction d'impôt sur les sociétés au titre du mécénat
La commission en vient à l'amendement II-CF1393 du rapporteur général.
Le présent amendement revient sur le sujet de la niche « mécénat » sur laquelle nous avons beaucoup débattu en première partie. Devant les engagements pris par le Gouvernement, nous avions retiré l'amendement de la commission, qui était un amendement d'appel.
J'ai rencontré avec Gilles Carrez des magistrats de la Cour des comptes, chargés d'une enquête au titre du 2° de l'article 58 de la loi organique relative aux lois de finances. Ils posent la question de la fiscalité du mécénat de manière beaucoup plus large que la simple fixation d'un plafond et d'un plancher. Nous sommes donc convenus avec eux qu'il valait mieux attendre la publication de leur rapport puis former un groupe de travail afin de proposer des solutions pour le PLF 2020.
Ils ont souligné que l'absence de certaines données les empêchait de procéder à une juste évaluation du coût de cette niche. Ils nous ont donc proposé d'inscrire dans le PLF 2019 une obligation de déclaration des dons pour les structures bénéficiaires au-delà du seuil de 153 000 euros, seuil calqué sur celui qui prévaut pour les dons déductibles de l'impôt sur le revenu.
Cela nous permettrait, en outre, de disposer d'informations précises sur certains dons qui, à l'heure actuelle, semblent disparaître dans un trou noir.
Vous savez l'intérêt que je porte au mécénat. Pour ne rien vous cacher, j'ai été alertée par France Générosités de certains problèmes que soulève la mise en oeuvre de l'obligation visée par l'amendement. Quelles seraient ses modalités ? Comment valoriser les dons en nature ?
Je ne suis pas sûr que tel qu'il est rédigé, l'amendement prenne en compte les dons en nature.
J'ai mis mon nez là-dedans car je trouve que ce qui se passe n'est pas normal. L'association qui reçoit en don de la part d'une grande surface des denrées alimentaires invendues doit remplir une attestation Cerfa en détaillant les produits qu'elle accepte, ce qui représente un travail de Romain presque impossible à accomplir dans certains cas. Je me demande donc si l'obligation que le rapporteur général propose d'instaurer est réaliste. Cela constituera une obligation de plus qui viendra peser sur des associations qui fonctionnent souvent avec l'aide de seuls bénévoles. Plusieurs m'ont déjà dit être incapables de répondre aux exigences de l'administration fiscale.
J'irai dans le même sens car j'ai été moi aussi alertée par des associations qui m'ont indiqué que la mise en oeuvre du dispositif proposé par le rapporteur général se heurterait à des difficultés techniques. Il me semble important de faire un point avec le milieu associatif sur ces modalités et de l'évaluer.
Je précise tout d'abord que les modalités techniques de mise en oeuvre du dispositif sont renvoyées à un décret.
Notre but, conformément à ce que demande la Cour des comptes, est de faire la transparence sur ce que reçoivent les associations, qu'il s'agisse des dons en espèces ou des dons en nature.
La Cour des comptes n'a pu remettre son rapport au titre du 2° de l'article 58 à la date prévue car certaines associations ont refusé dans un premier temps de recevoir les magistrats.
La transparence ne peut qu'aider les associations. Celles pour qui le plafonnement à 10 millions d'euros de l'exonération pour les dons en nature posait problème ont, me semble-t-il, des moyens humains pour remplir ces formulaires de l'administration. Le seuil de 153 000 euros ne concerne pas les associations de quartier qui fournissent une aide de proximité dans des zones pauvres.
Le donateur doit indiquer le nom de l'association à laquelle il verse un don en espèces. Cela ne permet-il pas à l'administration fiscale de faire des recoupements ?
Des obligations sont en effet faites aux donateurs mais il faut pouvoir vérifier si les mêmes montants sont déclarés par les associations.
Je vérifierai d'ici à la séance si l'amendement tel qu'il est rédigé comprend aussi les dons en nature. Je pense que oui mais s'il y a une ambiguïté, nous déposerons un amendement pour le préciser.
Les Restos du Coeur m'ont montré les formulaires Cerfa : les informations dont ils disposent portent sur les quantités et non pas sur les valeurs. Ils ne peuvent pas dire combien valent les produits qu'ils reçoivent. Seule l'entreprise qui donne pourrait leur fournir une estimation.
Les modalités pratiques seront prises en compte dans le décret. Nous examinerons le rapport de la Cour des comptes lorsqu'il nous sera transmis. Pour l'heure, il me semble utile d'aller vers plus de transparence.
Je ne comprends pas pourquoi on n'inverserait pas la logique : on pourrait imaginer que l'obligation de déclaration pèse sur l'entreprise plutôt que sur l'association.
Le problème que veut résoudre la Cour des comptes concerne le rapprochement des données. Pour l'instant, il existe un « trou noir », selon l'expression des magistrats. Il faut que les informations sur les dons soient fournies et par les entreprises qui donnent et par les associations qui les reçoivent.
Le problème se pose pour les dons en nature. Tout stock sorti d'un commerce, qu'il s'agisse d'un petit magasin de proximité ou d'une moyenne ou grande surface, a une valeur comptable. C'est cette information-là qui devrait être utilisée par les associations pour remplir le formulaire Cerfa.
Nous pourrons apporter des précisions en séance sur ce qui relève des entreprises et des associations. Il faudra aussi veiller à ce que cette obligation ne vienne pas limiter les dons.
La commission adopte l'amendement.
Après l'article 55
La commission en vient à l'amendement II-CF1150 de M. Dominique Potier.
Cet amendement vise à accélérer le développement de solutions de biocontrôle, qui représentent aujourd'hui 5 % des alternatives aux produits phytosanitaires. Leurs perspectives de développement laissent penser que leur part pourrait atteindre 15 à 20 %. Nous proposons donc de porter le taux de crédit d'impôt pour dépenses de recherche (CIR) à 60 % au lieu de 30 %, taux considéré comme insuffisant par tous les opérateurs de la filière.
Jean-Baptise Moreau, rapporteur de la loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire (EGALIM), a déposé le même amendement, en cohérence avec les positions de la commission des affaires économiques. Des propositions allant en ce sens figuraient déjà dans le rapport d'Antoine Herth ou dans le rapport que j'avais remis au Premier ministre : le biocontrôle est la solution la plus efficace pour remédier aux carences de la phytopharmacie.
En accélérant les recherches en ce domaine, quelle que soit la taille des entreprises, nous irions vers des solutions environnementales à même de soutenir la compétitivité de l'agriculture française, dans un cadre compatible avec les conclusions des États généraux de l'alimentation et de la loi EGALIM.
Un amendement similaire, mais ne prévoyant qu'un taux majoré de 50 %, a été retiré en première partie en séance publique à mon invitation et à celle du Gouvernement. L'avis sera le même ici puisque le taux proposé est encore supérieur.
Avec votre amendement, vous créez une différence d'intensité du CIR en fonction non de la localisation des activités, mais de la nature des dépenses. Cela pourrait conduire à des revendications en chaîne, chaque secteur pouvant estimer qu'il mérite lui aussi un taux de CIR doublé. Le taux actuel de 30 % paraît tout de même assez généreux.
J'ajoute que le plan « Ecophyto II+ » prévoit plusieurs mesures pour encourager le développement des produits de biocontrôle et limiter les pesticides.
Je note, pour finir, que vous prévoyez une durée d'application de six ans, qui excède les limites de la loi de programmation des finances publiques.
Les solutions de biocontrôle constituent un enjeu majeur. Plutôt que d'en rester à des guerres picrocholines sur le glyphosate, il faut accélérer les recherches sur les alternatives. Si nous ne pouvons cibler le CIR sur certains secteurs, cela conduira à le remettre en cause dans sa globalité.
La commission rejette l'amendement.
Article additionnel après l'article 55 : Extension de la documentation complémentaire relative au crédit d'impôt recherche aux entreprises réalisant 1 million d'euros de dépenses de recherche
La commission examine, en discussion commune, les amendements II-CF1044 et II-CF1047 de Mme Amélie de Montchalin.
Les entreprises bénéficiant du CIR qui engagent plus de 100 millions d'euros de dépenses de recherche doivent remplir une déclaration formelle sur la nature de leurs travaux de recherche, l'état d'avancement de leurs programmes et les moyens matériels et humains qui y sont consacrés. Nous proposons de faire passer ce seuil de dépenses à 2 millions d'euros – amendement II-CF1044 –, ce qui concernerait 1 000 entreprises, ou à 1 million d'euros – amendement II-CF1047 –, ce qui concernerait 12 % des plus grandes entreprises.
Cela permettrait de mieux cerner le profil des chercheurs travaillant dans les entreprises privées et de vérifier que l'inscription des docteurs au répertoire national des certifications professionnelles (RNCP) se traduit par un meilleur emploi dans le secteur privé.
C'est un point que j'avais abordé dans le rapport d'information sur l'application des mesures fiscales, dans lequel j'avais formulé une proposition similaire. Mon avis sera donc favorable, avec une préférence pour l'amendement II-CF1047.
Le seuil passerait donc de 100 millions à 1 ou 2 millions d'euros, ce qui va alourdir la charge administrative de nombreuses entreprises. J'ai l'impression que cela va à l'inverse de la simplification que beaucoup ici appellent de leurs voeux.
Je dois dire que j'ai du mal à saisir le but recherché. On a l'impression d'une complexification de nature à accroître la masse de papiers, ce qui ne va pas dans le sens voulu par le Gouvernement.
Le but recherché est assez simple, cher collègue. Il s'agit de demander à davantage d'entreprises de préciser qui sont les personnes qui font de la recherche en leur sein, en indiquant leur âge, les conditions de leur recrutement, leur stratégie de ressources humaines au service de la politique de recherche. Cela permettra de mieux comprendre le parcours des jeunes chercheurs, en particulier des titulaires de doctorat, diplôme qui a été inscrit l'année dernière dans le RNCP en vue de faciliter les recrutements dans le secteur privé.
Le ministère de la recherche, qui mène chaque année des enquêtes sur les personnes qui se dédient à la recherche en France, pourra ainsi voir si des politiques supplémentaires doivent être mises en oeuvre et si le transfert entre recherche publique et recherche privée se passe au mieux. L'objectif est d'approfondir la connaissance du capital humain déployé dans les entreprises qui bénéficient du CIR, dont le coût pour l'État est de 6 milliards d'euros, rappelons-le.
Je suis prête, monsieur le rapporteur général, à retirer l'amendement II-CF1044 au profit de l'amendement II-CF1047.
Je précise que 2 800 entreprises environ seraient concernées par l'abaissement du seuil à 1 million d'euros proposé dans l'amendement II-CF1047.
Cela reste très raisonnable. Rappelons que notre pays compte 14 000 petites et moyennes entreprises et 5 000 entreprises de taille intermédiaires.
L'amendement II-CF1044 est retiré.
La commission adopte l'amendement II-CF1047.
Après l'article 55
La commission en vient à l'amendement II-CF1295 de M. Paul-André Colombani.
Le crédit d'impôt pour les investissements réalisés en Corse (CIIC) a été créé pour favoriser le développement des petites et moyennes entreprises (PME) ayant une activité commerciale ou libérale. Nous pouvions penser que les cliniques seraient éligibles. Or la doctrine fiscale en Corse ne leur a pas octroyé cet avantage, ce qui nous paraît profondément injuste à double titre : ces PME non seulement créent des emplois mais remplissent des missions de service public à travers des conventions avec l'agence régionale de santé de Corse.
Cet amendement vise donc à intégrer ces établissements de santé au sein du CIIC. Cela aura un impact financier très faible car cela ne concerne qu'une dizaine de cliniques. Une petite partie du gain fiscal généré par l'exclusion des meublés de tourisme du périmètre du CIIC pourrait être utilement redéployée vers cette mesure qui comporterait beaucoup moins de risques de dérives que lesdits meublés et qui contribuerait à améliorer l'offre de soins.
À mon sens, il s'agit plus d'un amendement d'appel, qui vise à obtenir une réponse claire du ministre sur l'application que les services fiscaux locaux font du crédit d'impôt. Je vous suggère de le retirer et de le redéposer en séance, de façon à avoir la réponse du ministre.
Le problème existe depuis longtemps. Si vous nous assurez que le ministre nous fera une réponse bien claire, je retire l'amendement.
Pour cet amendement, seule une dizaine d'entreprises sont concernées. J'entends bien la demande de retrait. Mais si la commission pouvait donner un avis de sagesse, sur un point assez évident, et recueillir des votes évidents, ce serait bien pour tout le monde.
Si je demande le retrait pour la séance, c'est que le Bulletin officiel des finances publiques précise bien que « les installations à caractère médico-social » et les activités libérales sont éligibles au crédit d'impôt.
C'est un problème d'interprétation de l'instruction, pour lequel il faut une réponse du ministre au banc.
L'amendement est retiré.
La commission examine ensuite l'amendement II-CF1296 de M. Paul-André Colombani.
Cet amendement vise à intégrer les micro-centrales d'une puissance inférieure à 500 kilowattheures dans le CIIC. Cela nous permettrait d'être conformes au droit de l'Union européenne, et surtout de développer la construction de ces micro-centrales, qui présentent de nombreux avantages. L'énergie hydroélectrique est très bon marché, car les coûts de production en sont réduits en Corse, qui est une zone non interconnectée. Cela réduirait énormément la contribution au service public de l'électricité. Qui plus est, la Corse est une montagne dans la mer, un château d'eau en Méditerranée, dotée d'un très fort potentiel hydroélectrique. Ces micro-centrales seraient couplées à des retenues collinaires, afin d'augmenter le stockage d'eau. Cette mesure importante permettrait de favoriser la transition énergétique.
Monsieur Colombani, quand vous aviez déposé un amendement portant sur un sujet voisin en première partie, je vous avais rappelé que les régies étaient exonérées, notamment lorsqu'elles satisfont aux besoins de la population, mais imposables quand elles poursuivent une activité lucrative susceptible d'être exercée par des entreprises privées. Je m'étais engagé à écrire au ministre, ce que j'ai fait. Votre amendement s'inscrit dans la continuité du précédent, en ce qu'il nécessite une clarification du ministre en séance. Si les zones non interconnectées possèdent un caractère spécifique, qui peut parfois nécessiter une législation particulière, dans sa rédaction actuelle, votre amendement pose un problème. C'est pourquoi il me semble préférable de poser directement la question au ministre pour trouver une solution destinée aux zones non interconnectées. Demande de retrait ou avis défavorable.
Nous entendons la réponse du rapporteur général. Mais il n'est pas possible de parler sans arrêt de développement durable sans avancer sur le sujet quand on a l'occasion de le faire. En ce qui concerne la Corse, nous avons besoin d'augmenter notre part de production d'énergie verte et nos possibilités de stockage d'eau. L'amendement de mon collègue va exactement dans ce sens. Qui plus est, le prélèvement sur le budget de l'État serait mineur, avec la garantie d'un retour sur investissement.
La commission rejette l'amendement.
Article additionnel après l'article 55 : Hausse des quotas de logements sociaux financés par des prêts locatifs sociaux (PLS) et ouverture encadrée du crédit d'impôt en faveur du logement social outre-mer aux acteurs privés
La commission en vient aux amendements identiques II-CF1359 de Mme Ramlati Ali et II-CF1387 de M. Jean-Noël Barrot.
Afin de faciliter le recours au crédit d'impôt qui permet d'accompagner le financement du logement social dans les départements d'outre-mer, l'amendement propose d'ouvrir le crédit d'impôt en faveur du logement social aux bailleurs privés et de relever de 15 % à 25 % le quota maximal de logements financés à l'aide d'un prêt locatif social (PLS) éligibles à ce crédit d'impôt. Cette condition pose toutefois une difficulté particulière au regard des spécificités de Mayotte. Ce territoire étant le département d'outre-mer qui dispose à la fois du parc locatif le moins dense et de la plus faible programmation de logements sociaux, la référence au nombre de logements sociaux livrés l'année précédente ne permet pas de mobiliser utilement le crédit d'impôt pour la construction de logements sociaux en nombre suffisant. Pour y remédier, le présent amendement précise que le nombre de logements PLS agréés par le préfet peut être porté jusqu'à cent par an jusqu'au 31 décembre 2021.
L'amendement vise à ouvrir les crédits d'impôt en faveur des logements sociaux aux bailleurs privés et à augmenter de 15 à 25 % le quota maximal des logements financés par le PLS.
Ces amendements participent d'un renforcement des moyens mis au service du développement du logement social en outre-mer et du soutien de la démarche engagée pour soutenir les crédits d'impôt en faveur des outre-mer. Avis favorable.
La commission adopte les amendements identiques.
Article additionnel après l'article 55 : Hausse de la quote-part de l'avantage fiscal octroyée au moment de l'achèvement des fondations des biens immobiliers dans le cadre du crédit d'impôt en faveur de l'investissement outre-mer
La commission examine les amendements identiques II-CF959 du rapporteur général, II-CF1248 de Mme Justine Benin et II-CF1363 de Mme Ramlati Ali.
Mon amendement vise à modifier le fait générateur des crédits d'impôt en faveur des investissements immobiliers dans les départements d'outre-mer, afin de mobiliser plus précocement les financements nécessaires à leur réalisation. Il concerne deux crédits d'impôt mis en place par la loi de finances pour 2014, pour remplacer à terme les aides fiscales historiques dans les départements d'outre-mer : l'un en faveur des investissements productifs, qui couvre notamment les biens immobiliers affectés aux besoins des exploitations éligibles, ainsi que la construction de logements neufs dans le secteur locatif intermédiaire ; l'autre en faveur du logement social. Les exploitants et organismes de logements sociaux bénéficient ainsi directement de l'aide fiscale nécessaire au financement de la production immobilière ultramarine. Afin de renforcer l'attractivité des crédits d'impôts et d'améliorer les conditions de financement des investissements immobiliers et la trésorerie des opérateurs des DOM, en cohérence avec les conclusions des Assises de l'outre-mer, il est proposé d'augmenter la quote-part du crédit d'impôt accordée lors de l'achèvement des fondations à 70 %.
La commission adopte les amendements identiques.
Après l'article 55
La commission examine, en discussion commune, les amendements identiques II-CF914 de Mme Véronique Louwagie et II-CF941 de Mme Lise Magnier ainsi que l'amendement II-CF31 de M. Vincent Descoeur.
L'amendement vise à proposer un crédit d'impôt aux petites et moyennes entreprises, pour prendre en compte la charge supplémentaire de travail imposée par le prélèvement à la source.
Il faut tenir compte des frais inhérents à l'établissement, à la perception et au reversement de l'impôt sur le revenu, liés en particulier à l'adaptation de logiciels, et rappeler que, contrairement aux arguments soutenus par l'État, le prélèvement aura un coût pour les très petites entreprises (TPE), mais aussi pour les PME, qui n'ont pas toutes recours au titre emploi service entreprise.
Ces amendements ne sont pas les mêmes, puisqu'ils prévoient la création d'un crédit d'impôt au titre des frais engagés par la collecte et retenue à la source : en 2019, pour les deux premiers ; chaque année pour le dernier. Par ailleurs, les deux premiers visent à fixer un montant forfaitaire proposé par PME selon leur taille. Sur la base du nombre d'entreprises concernées, en retenant des estimations basses, le coût de la mesure dépasse le milliard d'euros. Quant à l'amendement II-CF31, qui retient 1 % des sommes collectées, le coût est de 0,5 milliard d'euros. Cela fait beaucoup. Enfin, les deux amendements identiques ne visent que les PME, alors que toutes les entreprises seront concernées : cette différence de traitement ne se justifie pas. Qui plus est, le montant proposé est forfaitaire, sans tenir compte de la réalité des coûts supportés. Enfin, je rappelle que les retenues à la source faites dans le cadre du prélèvement à la source PAS vont offrir un avantage de trésorerie aux entreprises, en particulier aux TPE. Avis défavorable.
Monsieur le rapporteur général, l'État ne fera-t-il pas une économie ? Si oui, quelle en est l'estimation ?
La commission rejette successivement ces amendements.
Membres présents ou excusés
Réunion du mercredi 7 novembre 2018 à 17 heures 15
Présents. - M. Saïd Ahamada, M. Éric Alauzet, M. Jean-Noël Barrot, Mme Émilie Bonnivard, M. Jean-Louis Bourlanges, M. Michel Castellani, M. François Cornut-Gentille, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Olivier Damaisin, M. Benjamin Dirx, Mme Stella Dupont, M. M'jid El Guerrab, M. Joël Giraud, M. Romain Grau, M. Stanislas Guerini, Mme Nadia Hai, M. Patrick Hetzel, M. Daniel Labaronne, M. Mohamed Laqhila, M. Vincent Ledoux, M. Fabrice Le Vigoureux, Mme Véronique Louwagie, Mme Marie-Ange Magne, M. Jean-Paul Mattei, Mme Amélie de Montchalin, Mme Cendra Motin, Mme Catherine Osson, M. Hervé Pellois, Mme Valérie Petit, Mme Bénédicte Peyrol, Mme Christine Pires Beaune, M. François Pupponi, Mme Valérie Rabault, M. Fabien Roussel, Mme Sabine Rubin, M. Laurent Saint-Martin, M. Benoit Simian, Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas, M. Philippe Vigier, M. Éric Woerth
Excusés. - M. Marc Le Fur, M. Olivier Serva
Assistaient également à la réunion. - M. Jean-Félix Acquaviva, Mme Ramlati Ali, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Thibault Bazin, M. Pascal Bois, Mme Céline Calvez, M. Paul-André Colombani, M. Vincent Descoeur, Mme Sarah El Haïry, M. Philippe Gomès, Mme Stéphanie Kerbarh, M. Dominique Potier, Mme Nicole Sanquer
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