La séance est ouverte.
La séance est ouverte à neuf heures trente.
La parole est à M. Jean-Luc Fugit, pour exposer sa question, no 637, relative à la sortie du classement en zone défavorisée simple de communes du Rhône.
Monsieur le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, ma question concerne l'aide qui peut être apportée aux exploitations agricoles du sud du département du Rhône perdant dès 2019 une partie des indemnités compensatoires de handicaps naturels.
En 2018, la France a dû revoir le classement des territoires pour définir les zones défavorisées simples, ou ZDS. Cette nouvelle définition se traduit, pour le territoire agricole situé au sud du département du Rhône, par une perte d'aides européennes pour toutes les exploitations agricoles de nombreuses communes.
Je vous alerte sur l'incompréhension et la colère que le nouveau classement suscite parmi les agriculteurs et les élus locaux de ce territoire. Je vous le dis très sincèrement : je comprends cette colère. En effet, dans le cas des communes des Haies, d'Échalas, de Trêves, de Longes ou encore de Loire-sur-Rhône, la situation est d'autant plus incompréhensible que ces territoires font partie du parc naturel régional du Pilat, dont toutes les autres communes ont conservé – tant mieux – leur classement en ZDS, tout en présentant les mêmes caractéristiques : agriculture d'élevage et contexte pédoclimatique identique et difficile, renforcé par les effets notables du dérèglement climatique.
Lors de l'annonce du nouveau classement, un accompagnement des exploitations agricoles sortant de ce dispositif de soutien avait été évoqué. Les services de la DDT – la direction départementale des territoires – du Rhône ont commencé à proposer des diagnostics. J'ai conscience aussi qu'il faut sûrement accompagner ces exploitations vers une transition leur permettant de produire des revenus complémentaires.
Monsieur le ministre, vous connaissez bien nos agriculteurs et notre agriculture, vous êtes le premier défenseur de la ferme France, mais croyez-moi, sur ce plateau du sud du Rhône qui souffre, nous avons besoin de perspectives concrètes et crédibles, d'une vision partagée pour que nos agriculteurs puissent continuer à vivre de leur travail, et que nous, citoyens, puissions profiter à la fois de leurs produits de qualité et des paysages qu'ils entretiennent et sculptent tout au long de l'année.
Quelle aide effective comptez-vous apporter dès 2019 à ces agriculteurs lourdement touchés par la perte de ces aides, qui doivent également faire face à l'impact des évolutions climatiques ?
Monsieur Fugit, comme vous le savez, la révision de la délimitation des ZDS est une obligation européenne. Cette révision a fait l'objet d'un travail long, parfois douloureux, car le zonage de 1976 était bien ancré et accepté par tous. Il a fallu déterminer des critères nouveaux pour prendre en compte le mieux possible les différentes situations françaises, tout en assurant leur robustesse et leur équité d'application sur l'ensemble du territoire. Ce travail est désormais terminé. La Commission européenne a approuvé formellement, le 27 février dernier, le cadre national modifié par le nouveau zonage. Les textes nationaux d'application sont en cours de signature, pour une entrée en vigueur le 31 mars 2019, c'est-à-dire dans quelques jours.
Le zonage a été conçu dans sa globalité, sur la base de critères s'appliquant de façon uniforme sur l'ensemble du territoire, afin de cibler les zones les plus en difficulté. Il a été conçu également pour répondre à la contrainte réglementaire de ne pas classer plus de 10 % du territoire en zones sous contraintes spécifiques.
Il s'agit désormais de se consacrer à la phase suivante, l'accompagnement des sortants, en recherchant localement, au plus près du terrain, à mettre en place les outils les plus appropriés pour les exploitants concernés. Les dernières discussions menées par la France avec l'Union européenne ont permis d'aboutir à une revalorisation significative du dispositif d'accompagnement des sortants. Cette aide sera calculée sur la base du montant de l'ICHN – l'indemnité compensatoire de handicaps naturels – de la programmation 2014-2020, et non sur celle de la précédente programmation, comme cela était initialement prévu. Je m'y étais engagé ; nous l'avons obtenu.
La France mettra en oeuvre les nouvelles possibilités offertes par ce texte et retiendra pour les agriculteurs sortants le montant d'indemnité le plus élevé possible, soit 80 % de la nouvelle référence en 2019, puis 40 % de cette référence en 2020 – j'ai obtenu ces 40 % pour 2020 au lieu des 20 % prévus.
Au-delà du zonage, les critères d'octroi de l'ICHN ont été confirmés par la Commission européenne. Ainsi, nous n'aurons pas à mettre en place d'ICHN végétale dans les ZDS, comme certains semblaient le craindre. Par ailleurs, les modulations spécifiques aux producteurs d'ovins et de caprins ne sont pas modifiées. Quant au sous-zonage existant pour les régions dites de piémont, il ne sera pas non plus modifié. Par ailleurs, j'ai demandé à toutes les DDT, dont celle du Rhône, de faire remonter les projets de territoire travaillés avec les chambres d'agriculture afin d'apporter un maximum de soutien aux pistes de reconversion possibles.
La réforme des ZDS a provoqué un émoi considérable sur le territoire, je le sais très bien. Il se trouve que 6 000 communes entrent dans le dispositif ; bien sûr, celles-ci ne font aucun bruit – ce n'est effectivement pas le sujet. On entend au contraire beaucoup les critiques de celles qui en sortent ; elles ont raison, vous l'avez dit à juste titre, mais il faut introduire davantage d'équité. Je crois que les mesures que je viens d'annoncer vont dans ce sens.
Monsieur le ministre, je vous remercie d'avoir pris conscience du problème et de nous avoir fait ces annonces. Je vous invite à rencontrer les agriculteurs du plateau du sud du Rhône.
Ce serait d'autant plus intéressant que cela vous permettrait de discuter aussi avec des arboriculteurs, des viticulteurs et des maraîchers du département qui travaillent à réduire l'usage des produits phytosanitaires. Cela nous donnerait donc l'occasion de faire le point sur l'utilisation du glyphosate, et également de constater combien, sur de tels territoires, les conséquences du changement climatique sont importantes et nécessitent des accompagnements.
La parole est à M. Maxime Minot, pour exposer sa question, no 647, relative aux vétérinaires ruraux.
Alors qu'ils doivent déjà faire face pour eux-mêmes aux déserts médicaux, de nombreux éleveurs de l'Oise, comme ceux d'autres territoires ruraux, sont dorénavant confrontés aux déserts vétérinaires pour leurs cheptels. Cette pénurie de praticiens atteint des niveaux record – moins 25 % en un an dans mon département – et pose de grandes difficultés aux agriculteurs, voire occasionne des drames dans certaines exploitations.
La loi oblige le recours aux vétérinaires, qui se déplacent pourtant de moins en moins, faute de temps, évidemment, puisqu'ils sont moins nombreux, mais aussi faute d'une rémunération suffisante des actes, alors que les soins des animaux domestiques sont beaucoup plus rentables. Les vétérinaires sont indispensables, d'autant qu'ils contribuent à une attente forte de nos compatriotes, qui demandent que l'on produise autrement et localement.
Dans ce contexte, de nombreux éleveurs se sentent démunis et doivent s'en remettre à leur expérience pour pratiquer l'autodiagnostic. Ils n'appellent le praticien qu'en dernier recours, d'autant que le coût, non seulement du déplacement mais aussi de la consultation téléphonique, est très élevé. Ce n'est pas acceptable ; cela ne peut pas durer.
Pour résoudre ce problème, de nombreuses initiatives locales sont recensées, mais il convient aussi et surtout que l'État prenne ses responsabilités afin d'assurer la continuité de soins et un maillage efficace du territoire.
Si, en janvier 2017, une feuille de route pour la période 2017-2020, comportant une trentaine d'actions réunies en huit axes stratégiques, a été mise en oeuvre, force est de constater que, deux ans plus tard, elle n'a pas produit les effets escomptés, loin de là. Quant au rapport attendu pour le dernier trimestre 2019 à la suite de la mission que s'est vu confier le conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux, il reportera aux calendes grecques les mesures opérationnelles qui devaient être prises immédiatement.
Monsieur le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, il est urgent d'agir, avant que le tissu agricole français ne se déchire complètement et irrémédiablement. Les éleveurs français font vivre nos territoires ruraux et participent à leur attractivité, donc à leur avenir, autant qu'ils incarnent un héritage qu'il nous appartient de préserver. Ne les oublions pas ; ils comptent sur vous.
Monsieur Minot, je vous remercie pour cette question très grave. Je me suis entretenu hier avec l'ensemble des représentants de la profession vétérinaire, car je sais combien le sujet que vous abordez est sensible dans tous les départements, en particulier dans le vôtre, l'Oise, ainsi que dans la Creuse.
Il existe un problème de recrutement, nous en sommes parfaitement conscients. Pendant le salon de l'agriculture, j'ai lancé un grand plan de recrutement pour que 20 000 nouveaux élèves entrent en apprentissage ou rejoignent nos lycées agricoles. Il faut que davantage de personnes s'orientent vers ces professions, en particulier vers celle de vétérinaire.
Par ailleurs, nous nous apercevons de plus en plus que les nouveaux vétérinaires s'orientent non plus vers la campagne mais plutôt vers la ville. Je ne veux pas opposer les uns aux autres, mais le phénomène mérite d'être signalé.
Comme vous l'avez indiqué, une feuille de route a été publiée, comprenant huit axes stratégiques et de nombreuses orientations. Je veux la revoir pour la rendre plus efficace. J'ai pris l'engagement, devant l'ensemble de la profession, de le faire dans les jours qui viennent, afin de la rendre plus efficace, plus efficiente, parce qu'il faut aller de l'avant.
Comme vous l'avez également signalé, le CGAAER – conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux – remettra son rapport prochainement ; ce ne sera pas aux calendes grecques, mais à la fin de l'année 2019. Je crois que c'est important.
Je prends ce dossier à bras-le-corps, car j'ai la conviction que, dans nos zones rurales, nous ne devons pas laisser se développer des déserts vétérinaires comparables aux déserts médicaux. Elles méritent mieux que cela.
Je veux saluer les éleveurs, qui accomplissent un travail considérable. De nombreuses conventions sont signées avec les vétérinaires, qui peuvent ainsi être appelés, en cas de besoin, lorsque l'éleveur ne peut plus gérer un problème seul. Demain, des vétérinaires se déplaceront-ils encore à deux heures du matin parce qu'un vêlage se passe mal, pour retourner une matrice ou pratiquer une césarienne ? Tel est l'enjeu soulevé par votre question. Sachez que je me consacre totalement à y répondre.
Un état des lieux de la démographie vétérinaire est en cours d'élaboration. Dans le même ordre d'idée, une mission a été confiée à l'APCA – Assemblée permanente des chambres d'agricultures – afin de dresser un tableau de la situation par filière. Je pense que nous allons avancer.
Je souhaite que nous travaillions également avec les collectivités territoriales, qui ont un rôle très important à jouer.
Nous avons en outre traité cet hiver le dossier des GDS, les groupements de défense sanitaire.
Bref, nous savons qu'il s'agit d'un véritable sujet. Le respect du bien-être animal est devenu absolument indispensable. Les éleveurs travaillent en ce sens de façon remarquable : je ne connais pas un éleveur qui n'aime pas son troupeau, son bétail, et qui n'oeuvre pas pour le bien-être animal. Je veux saluer les éleveurs, qui ont fait baisser de 40 % l'utilisation des antibiotiques l'année dernière. Tout cela va dans le bon sens.
Je le répète, monsieur Minot, le sujet de la démographie médicale est un vrai sujet. J'espère vous apporter des réponses très précises dans les semaines qui viennent : nous ne pouvons pas accepter des déserts vétérinaires dans nos zones rurales.
Monsieur le ministre, je prends bonne note de votre volontarisme. Toutefois, dans cette matière comme dans les autres, seuls compteront les résultats.
Bien sûr !
J'attends donc que vous m'apportiez des informations supplémentaires dans les prochaines semaines. Sachez que le monde agricole compte sur vous, car il y a vraiment urgence.
La parole est à M. Gérard Menuel, pour exposer sa question, no 649, relative aux défis environnementaux pour les agriculteurs.
Monsieur le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, je veux vous interroger sur la politique nationale à mener dans le secteur agricole au regard des défis et des enjeux environnementaux qui sont devant nous.
La qualité de l'eau, la préservation des sols, le maintien de la biodiversité sont autant d'éléments incontournables qui doivent guider les politiques culturales dans les exploitations agricoles. Je ne veux pas, par ailleurs, ignorer le réchauffement climatique qui va perturber les façons de faire dans l'agriculture, secteur qui devra lui aussi répondre aux exigences en matière de CO2 mais également mieux maîtriser ses besoins en eau.
De nombreuses pratiques agricoles devront donc évoluer. Ce mouvement est déjà engagé, avec le bio, le développement de l'agriculture de conservation ou encore la réduction voire, à terme, l'arrêt de l'emploi de la phytopharmacie en agriculture et l'arrivée de nouvelles méthodes de protection comme le biocontrôle.
Cette nécessaire adaptation de l'agriculture passe, qu'on le veuille ou non, par des investissements lourds dans des technologies avancées faisant appel aux robots, aux drones et à du matériel spécifique pouvant par exemple remplacer le désherbage chimique. Cela passe aussi par la recherche, qui devra être en mesure de proposer aux agriculteurs des variétés de végétaux résistantes aux bioagresseurs, en faisant appel, par exemple, à la mutagenèse, limitant ainsi l'apport de produits chimiques.
Monsieur le ministre, face à ces défis, êtes-vous prêt à accompagner par des engagements appropriés la nécessaire mutation agricole et à soutenir la recherche afin de proposer des alternatives durables à l'emploi de la phytopharmacie en agriculture ?
Monsieur Menuel, votre question, sur laquelle l'ensemble des parlementaires et l'exécutif travaillent, est à la fois une question agricole et une question de société : quelle agriculture voulons-nous pour demain ?
L'exigence de nos concitoyens est toujours la même : nous voulons manger à notre faim, bénéficier de la meilleure indépendance alimentaire possible et de la sûreté sanitaire la plus efficace, et, en même temps, sortir de la dépendance totale aux produits phytosanitaires – vous avez raison de dire que c'est indispensable. Il faut faire tout cela à la fois.
Pour y parvenir, il faut se fonder sur deux grandes orientations.
Il faut d'abord investir dans la recherche. Que sera l'agriculture demain ? Quel est son avenir ? Comment cultiverons-nous ? Le Gouvernement et l'immense majorité des parlementaires apportent une réponse : la transition agroécologique, que nous devons fonder sur l'agronomie, à partir d'une autre façon de cultiver les terres, d'une meilleure rotation des sols, etc. – vous connaissez tout cela aussi bien que moi. Il faut ensuite s'appuyer sur la recherche privée. Lorsque j'ai inauguré le salon international du machinisme agricole, je me suis rendu compte que la filière française des agroéquipements est en tout point remarquable : elle développe des systèmes mécaniques qui permettront d'économiser jusqu'à 80 % de produits, ce qui est absolument remarquable ! Il faut maintenant faire en sorte que ces agroéquipements puissent être mis en fonctionnement sur les surfaces agricoles françaises.
Évidemment, il faut aussi se fonder sur d'autres évolutions. Vous évoquez les nouvelles pratiques de sélection, les NBT – New Breeding Techniques, ou nouvelles techniques de sélection végétale – , qui doivent se conformer à la réglementation relative aux OGM. Un arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne de juillet 2018 considère que ces nouvelles pratiques doivent répondre à la réglementation des OGM issus de la transgénèse. L'interprétation de cet avis soulève des interrogations, la réglementation européenne sur les OGM n'étant pas adaptée à ces nouvelles techniques ; la détection des NBT, en particulier, pose des difficultés. Des discussions sont donc en cours avec la Commission européenne et un rapport du laboratoire de référence de l'Union européenne est attendu sur cette question.
Dans son avis de mars 2018 sur les nouvelles techniques d'amélioration des plantes, le comité d'éthique de l'INRA – Institut national de la recherche agronomique – , du CIRAD – Centre de coopération internationale en recherche agronomique – et de l'IFREMER – Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer – recommande à la fois d'être vigilant quant aux formes d'agriculture d'économie et de société que prépare l'édition des génomes végétaux, et de réserver une ouverture dans les approches et les thématiques de recherche, de manière à explorer aussi les ressources offertes par des techniques alternatives. À cet égard, je peux aller dans votre sens, monsieur le député.
Plus globalement, se pose la question de notre agriculture de demain : sommes-nous prêts collectivement à accepter certaines de ces techniques pour contribuer à la réduction des produits phytosanitaires et ainsi promouvoir une agriculture plus durable ? Ce débat devra avoir lieu prochainement, en intégrant les enjeux scientifiques, techniques, environnementaux, sociétaux et éthiques. Votre question est vraiment une question d'actualité ; je vous en remercie.
Monsieur le ministre, je partage plusieurs observations que vous venez de formuler, notamment concernant la recherche privée à travers la mécanisation, qui doit être soutenue. Je me permets toutefois d'insister sur la recherche variétale, qui permettra de limiter fortement l'usage de la phytopharmacie en agriculture. Cette recherche a besoin de soutien. Or l'actualité nous a montré que des faucheurs allaient briser la recherche nationale de grands groupes coopératifs ou privés ; il faudra mettre fin à ces comportements.
Quant au débat sur les OGM, nous l'avons eu par le passé, et je crois qu'il est maintenant totalement dépassé. Il est derrière nous, mais devant nous se lève la problématique de la mutagénèse. La recherche doit également s'engager sur ce secteur.
Tout à fait !
Je rappelle que la mutagénèse n'a rien à voir avec les OGM, car aucun apport en matériel génétique extérieur ne vient modifier les nouvelles plantes.
La parole est à Mme Marguerite Deprez-Audebert, pour exposer sa question, no 654, relative aux difficultés de la filière betteravière.
Monsieur le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, je souhaite appeler votre attention sur les difficultés d'une filière pourtant bien réputée et profitable : la filière betteravière.
Mes collègues des Hauts-de-France sont tout aussi préoccupés que moi car, au-delà des récentes conditions climatiques, qui, vous le savez, ont nui à son rendement, la filière betteravière de notre pays connaît une période difficile, pour deux raisons : la fin des quotas sucriers entraîne une baisse plus importante que prévue du cours du sucre ; la consommation de sucre est appelée à diminuer puisque nous faisons tout pour la restreindre dans l'alimentation – ce qui est une bonne chose. La fermeture programmée des usines Südzucker est une manifestation tangible de ces événements.
Rappelons qu'en avril 2018, l'Union européenne a interdit trois substances néonicotinoïdes, très nocives pour les abeilles : l'imidaclopride, le thiaméthoxame et la clothianidine. Or 99 % des semences de betterave utilisées en France sont traitées avec des substances néonicotinoïdes. C'est la raison pour laquelle douze États européens ont d'ores et déjà demandé des dérogations. La betterave sucrière étant récoltée avant floraison, elle ne présente pas de risque pour les insectes pollinisateurs. Par ailleurs, nos concurrents extra-européens – Russie, États-Unis ou Turquie – ne s'embarrassent pas de telles questions sanitaires. De plus, nous sommes persuadés qu'avec le développement des biocarburants, cet or vert que constitue le bioéthanol, la filière voit s'ouvrir de nouvelles perspectives. Il est donc essentiel pour l'agriculture et l'économie françaises que celle-ci soit préservée et pérennisée dans les prochaines années.
Monsieur le ministre, ma question est double. Quel est l'état de vos échanges avec vos homologues européens pour parvenir à une position commune sur les néonicotinoïdes ? Quelle stratégie mettre en place pour soutenir la filière betteravière française, afin qu'elle traverse cette période difficile dans les meilleures conditions possibles, tout en tenant le cap de la diminution des produits phytosanitaires ?
Madame Deprez-Audebert, répondre à toutes vos questions en deux minutes va être compliqué ! Je vais donc essayer d'aller au plus court.
Tout d'abord, la situation de la filière sucrière dans le monde est inquiétante, les difficultés actuelles s'expliquant par la surproduction de sucre et la baisse durable des coûts. Je rencontrerai les représentants de la filière betteravière dans les heures ou les jours à venir pour continuer à travailler.
S'agissant de Südzucker, j'ai déjà eu l'occasion de m'exprimer. Cette entreprise allemande a choisi de conserver ses sites en Allemagne et de fermer des sites en Pologne et en France. Cela peut se comprendre, pour des motifs de restructuration, du point de vue allemand, mais pas du point de vue français. Je trouve inacceptable, avec l'ensemble de l'exécutif, le choix qui a été fait de fermer les sites français en laissant des personnels à l'intérieur pour échapper aux PSE – plans de sauvegarde de l'emploi – et empêcher une reprise. Nous travaillons à faire évoluer la position de Südzucker afin de rendre possibles des reprises, parce que nous croyons, pour notre part, que la courbe des cours du sucre peut se modifier au cours des prochaines années et qu'il existe une possibilité industrielle pour avancer. La filière betteravière et sucrière en France n'est pas finie ; elle a encore de l'avenir, je tiens à le réaffirmer dans l'hémicycle ce matin.
Quant à la question particulière que vous posez sur les produits phytopharmaceutiques, la décision a été prise par la France d'interdire les trois substances néonicotinoïdes que vous avez évoquées. Cela me semble aller dans le bon sens – je parle devant Brune Poirson, qui ne me démentira pas. La lutte pour se défaire de la dépendance aux produits phytopharmaceutiques est absolument indispensable, en Europe et en France.
La France est leader en la matière : elle veut être le premier pays en Europe à arrêter cette dépendance aux produits néonicotinoïdes, au glyphosate et à tous les produits phytopharmaceutiques, c'est absolument indispensable. Nous travaillons à faire en sorte que le standard européen soit non pas à la baisse, dans une logique de dumping, mais à la hausse, pour que l'ensemble des pays européens utilisant des substances que nous allons interdire en France ne contribuent pas à pratiquer une concurrence déloyale. Tel est le travail que le Président de la République m'a demandé de mener auprès de mes collègues européens, ministres de l'agriculture, afin que tous les pays fassent monter les standards.
Nous serons tous d'accord, je pense, dans cet hémicycle, pour dire que nous devons aller vers la fin de la dépendance aux produits phytopharmaceutiques, appliquer le principe de précaution, afin de placer la santé au centre de nos préoccupations sans que cela ne mette à mal les filières économiques agricoles, dont la filière sucrière.
C'est pourquoi, précisément, nous travaillons à des alternatives. J'évoquais précédemment l'agroécologie, secteur avec lequel nous avançons bien, et nous aurons sans doute des nouvelles à annoncer dans les prochaines semaines.
En tout cas, soyez assurée, madame la députée, que nous veillons : je surveille moi-même, comme le lait sur le feu, la situation de la filière sucrière en France ; je ne laisserai pas une entreprise allemande mettre à mal l'emploi de centaines de salariés et la filière sucrière française.
Démonstration est faite, une fois encore, de la nécessité d'obtenir de la convergence et de l'harmonisation au niveau européen. C'est vraiment un combat indispensable, de tous les instants.
J'aurais souhaité que vous me répondiez aussi sur le bioéthanol, cet or vert, notamment, du territoire des Hauts-de-France. C'est un carburant de proximité, distribué en circuit court, moins cher que celui qui vient de loin.
C'est un carburant d'avenir, et nous allons y arriver !
La parole est à M. Laurent Furst, pour exposer sa question, no 651, relative aux déchets plastiques et à la pollution des océans.
Le changement climatique et le recul de la biodiversité sont des questions majeures pour l'avenir de l'humanité. Un autre sujet me semble plus qu'essentiel : la pollution des océans.
Les océans sont à l'origine de la vie sur terre, ils constituent une pompe à carbone et produisent de l'oxygène. Les océans nourrissent notre monde, qui compte 7 milliards de personnes et en comptera bientôt 9 milliards. Pourtant, les océans souffrent et se dégradent, notamment à cause des pollutions liées au plastique.
Selon les publications, les chiffres varient, mais nous savons que l'on produit annuellement 55 kilos de plastiques par être humain, que seulement 20 % du plastique est recyclé et que 90 % du plastique non recyclé ou valorisé énergétiquement termine à la mer, principalement par la voie des fleuves. Nous savons aussi que la production de plastique pourrait augmenter de 40 % d'ici à 2030, qu'un sac plastique mettra 450 ans à se désagréger et une bouteille d'eau ou de soda 1 000 ans, et que, d'ici à 50 ans, si rien ne change, la masse de plastique à la mer sera supérieure à celle de poissons. Nous savons en outre que le septième continent, le vortex de plastique, découvert dans le Pacifique nord voilà vingt-deux ans, est désormais suivi d'autres amas qui se forment à la convergence des courants marins. Nous savons quatre autres choses essentielles : le plastique entre dans la chaîne alimentaire, ce qui ne sera pas sans conséquence pour l'homme, qui aura par ailleurs de plus en plus besoin des ressources halieutiques de la planète ; de nombreuses espèces emblématiques de la biodiversité marine, comme les tortues ou les cétacés, sont affectées par l'ingestion de plastique, sans oublier les effets mortifères sur les oiseaux de mer ; le plastique en mer est difficilement récupérable, et les actions engagées en la matière auront plus une dimension de communication – utile au demeurant – qu'un réel effet ; surtout, il faut arrêter cette folie qui met la nature et, à terme, l'homme en danger.
Madame la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, ma question ne porte pas vraiment sur ce que la France fait en France, car nous ne sommes pas excellents, pas très bons. Mais des objectifs ont été fixés, qu'il faut atteindre rapidement. Cela nous permettra de parler à hauteur de ce que nous sommes, c'est-à-dire le deuxième potentiel maritime mondial, la surface maritime mondiale française étant équivalente à celle de la Chine et de la Mongolie réunies.
Voici donc mes questions. Quelle est l'action de la France au niveau international pour changer la donne et faire évoluer la situation ? Ne faudrait-il pas provoquer une conférence de type des COP sur le climat et proposer l'adoption d'un nouveau traité international sur la pollution des océans ? L'Europe existe-t-elle sur un tel sujet ? Très concrètement, est-il possible d'aider les pays pauvres durement frappés par la prolifération du plastique à récupérer celui-ci afin de le recycler ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Avant toute chose, monsieur Furst, je vous remercie infiniment pour votre question, qui revêt une importance fondamentale. Malheureusement, peu à peu, nos océans mutent ; ils ne sont déjà plus ce qu'ils étaient, et le phénomène risque de s'accélérer.
Vous parliez, à raison, des déchets, notamment des déchets plastiques que l'on trouve bien trop souvent dans l'océan. La Fondation Ellen MacArthur affirme même que, d'ici à 2050, il pourrait y avoir autant de déchets plastiques que de poissons dans nos océans. C'est criminel, vis-à-vis de l'humanité comme à l'égard de la biodiversité et des êtres vivants qui les peuplent.
L'objectif de la France se situe à plusieurs niveaux.
Il convient de souligner un premier aspect essentiel : une fois que les déchets plastiques sont dans la mer, il est trop tard ! C'est donc sur terre qu'il nous faut changer le système économique, changer nos façons de produire et de consommer, afin d'éviter la surconsommation d'objets plastiques qui envahissent notre quotidien, auxquels nous sommes trop habitués et qui, pour nombre d'entre eux, finissent dans les océans. La France mène donc chez elle, au niveau national, une politique ambitieuse de lutte contre les déchets plastiques au moyen, par exemple, d'un pacte national sur les emballages plastiques, de la transformation de l'économie avec le développement de l'économie circulaire ou encore de toute une série de mesures sur lesquelles j'espère avoir le temps de revenir dans ma réponse.
Mais je tiens à vous parler de l'objectif de la France à l'échelle internationale puisque, vous avez raison, une grande part de la pollution plastique émane de pays situés essentiellement en Asie. À cet égard aussi, la France est extrêmement active.
D'abord, en la matière, la question de la haute mer est essentielle. Nous devons donner un statut à cette haute mer. L'humanité doit se donner les moyens de la protéger. Des négociations sont en cours et la France est très mobilisée sur cette question.
Par ailleurs, la présidence française du G7 vient de commencer, et notre pays a fait de la lutte contre la pollution plastique dans les océans et la préservation de la biodiversité marine une des priorités de sa présidence. Nous voulons fixer des objectifs très concrets. C'est pourquoi nous avons changé de méthode : au lieu d'avoir un communiqué signé par un ensemble de pays, nous voulons de l'action ; nous voulons créer une coalition d'au moins 25 % d'États acteurs se mobilisant en faveur de la lutte contre la pollution plastique dans les océans.
De même, au niveau européen, nous rassemblons des pays – nous l'annoncerons dans les prochains mois – pour qu'ils s'engagent aussi dans une démarche de pacte contre le plastique pour changer les pratiques à terre.
Enfin, la France est extrêmement mobilisée aux côtés de la Chine qui va accueillir la COP15 de la biodiversité, qui sera aussi importante que la COP21 le fut pour le climat.
La parole est à M. Laurent Furst, pour un mot, parce que le temps est écoulé.
Il me paraît essentiel de rappeler les faits suivants : l'Europe ne représente que 18 % du plastique produit dans le monde ; les pays du tiers-monde n'ont pas vraiment le choix parce qu'il n'y existe pas de circuit froid pour l'alimentation et que le plastique alimentaire y est donc très important ; or c'est avant tout celui-ci que l'on retrouve dans les océans ; par conséquent, la collecte est importante.
Mais permettez-moi d'ajouter pour conclure, madame la secrétaire d'État, que bien que n'appartenant pas à la même famille politique, sur des sujets aussi essentiels, nous tenons le même discours. C'est beau !
La parole est à M. Adrien Quatennens, pour exposer sa question, no 632, relative à la règle verte.
« Est-ce que nous avons commencé à réduire nos émissions de gaz à effet de serre ? La réponse est non. Est-ce que nous avons commencé à enrayer l'érosion de la biodiversité ? La réponse est non. Est-ce que nous avons commencé à se mettre en situation d'arrêter l'artificialisation des sols ? La réponse est non ». Ces mots, madame la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, vous les connaissez, bien sûr : ce furent ceux du ministre Nicolas Hulot alors qu'il démissionnait.
Alors que la jeunesse du pays se lève et vous somme d'agir pour le climat, vous poursuivez les politiques de libre-échange, en rupture avec les engagements, pourtant peu ambitieux, de la COP21. Alors que la jeunesse du pays se lève et vous somme d'agir pour le climat, vous refusez d'inscrire dans la loi l'interdiction du glyphosate. Alors que la jeunesse du pays se lève et vous somme d'agir pour le climat, vous reportez à plus tard la transition énergétique.
Selon les experts climatiques, il nous reste à peine douze ans, non pas pour verdir un peu votre programme, mais pour changer de modèle économique. L'urgence climatique ne peut s'accommoder de vos petits pas et de vos reculades – j'en ai la conviction, c'est peut-être une différence entre nous. L'écologie n'est pas soluble dans le libéralisme ; je crois qu'elle ne l'est pas davantage dans le macronisme – même si j'observe que des écologistes de salon rejoignent les rangs de La République en marche à l'occasion des échéances électorales. Vous devez savoir que, dans le cadre des traités qui interdisent de dépasser 3 % de déficit, notre pays ne peut pas investir de manière conséquente, comme il le faudrait, pour relever le défi climatique.
À Lille, les pics de pollution sont parmi les plus fréquents de France : nous en sommes à soixante jours par an, alors que l'OMS – l'Organisation mondiale de la santé – estime la situation alarmante au-delà de trois jours par an. L'absence de planification écologique permet de poursuivre et de faciliter des projets d'urbanisation toujours plus fous. Par exemple, le projet controversé d'aménagement de la friche Saint-Sauveur illustre parfaitement la course au béton : Martine Aubry, maire de Lille, et Damien Castelain, président de la métropole, soutiennent la création d'une piscine olympique en lieu et place d'un des derniers lieux non urbanisés de la ville, qui pourrait constituer le véritable poumon vert réclamé par beaucoup d'habitants, pendant que se joue sur place une opposition stérile entre le besoin de logements et le besoin de respirer.
La loi pour un État au service d'une société de confiance de juillet 2018 remplace la procédure d'enquête publique par une simple consultation numérique pour certains projets : sous prétexte de simplifier, vous complexifiez en fait l'accès des citoyens au débat.
Madame la secrétaire d'État, le défi climatique est un péril assuré pour l'humanité si nous y entrons par la loi du marché. Pourquoi ne pas mettre à l'ordre du jour la règle verte, selon laquelle on ne prélèverait pas davantage à la nature que ce qu'elle peut reconstituer ? Il s'agit d'un véritable défi technique lancé à toute l'humanité, au service duquel, je le crois, la France peut déployer toutes ses capacités technologiques, son savoir-faire et ses compétences techniques.
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Cela vous étonnera peut-être, monsieur Quatennens, mais je partage certaines de vos conclusions : oui, l'érosion de la biodiversité a lieu toujours plus vite ; oui, il faut faire bien plus, aller plus vite et plus loin en matière de lutte contre le réchauffement climatique, et c'est aussi ce qu'a affirmé le Président de la République ; j'étais aux côtés de la jeunesse et je continuerai à l'être parce qu'ils ont raison de se lever pour demander une société qui fasse plus sens et aussi une transformation profonde du système économique.
C'est justement ce que notre gouvernement engage. Alors que « la jeunesse du pays se lève », comme vous dites, vous en restez dans les belles paroles. Vous critiquez les « écologistes de salon » mais je vois ici de l'écologie d'estrade. Oui, il faut changer en profondeur le système économique, ce capitalisme parfois totalement absurde et cette finance qui ne fonctionne que pour elle-même, et nous avons commencé à le faire, notamment à travers la présidence du G7 et notre engagement au niveau international. Le monde financier doit se mettre au service de l'environnement. À ce propos, j'étais la semaine dernière à nouveau à Bruxelles pour défendre l'idée qu'il faut prendre en compte les risques climatiques autant que les risques financiers. De même, nous voulons transformer le système économique, j'ai eu l'occasion d'en parler dans ma réponse à Laurent Furst, en changeant nos modes de production et de consommation ; à cette fin, il s'agit de réduire les quantités d'objets consommés, notamment en plastique, en encourageant fortement le recyclage et en favorisant le plus rapidement possible le réemploi, et le Gouvernement mène une politique en ce sens, à travers notamment le pacte national sur les emballages plastiques.
Voyez-vous, ce dont notre pays a besoin, c'est d'actions, monsieur le député. Les propos d'estrade, c'est bien, mais ils ne nous expliquent pas comment faire. Il faut entrer dans le débat sur la méthode, commencer à se salir les mains. Oui, c'est cela la réalité si l'on veut lutter activement contre le réchauffement climatique et en faveur de la biodiversité. Là est l'essentiel. Quand on en reste aux grands principes, on est bien sûr tous d'accord, mais il faut maintenant sortir de l'idéologie. Or quelles solutions proposez-vous ? Quelle voie pour marcher de l'avant ? J'entends dans vos propos beaucoup de constats, mais je peux en faire autant ! C'est en effet très confortable, mais quand apporterez-vous des solutions vraiment concrètes ? Ce que vous proposez s'apparente parfois à une dictature verte ! Voilà aussi ce que j'entends à travers vos propos sur la règle verte !
Je vous invite à parler avec les personnes qui se retrouvent face aux réalités du changement climatique : il faut à la fois concilier certains impératifs – je pense à l'emploi pour les familles qui risqueraient de le perdre – et l'accélération de la lutte contre le changement climatique. Car il s'agit de penser « à la fois » quand on veut faire basculer des systèmes.
Voilà la réalité qu'il faut prendre en compte quand on est en position de décider, et c'est bien plus difficile que quand on reste tranquillement assis sur son banc.
J'appelle chacun à veiller à respecter le temps de parole total, qui, réplique comprise, ne peut dépasser six minutes, car il y a trente-trois questions ce matin.
La parole à M. Adrien Quatennens.
Je serai le plus bref possible, monsieur le président.
Madame la secrétaire d'État, je regrette que, sur la fin de votre réponse, vous ayez employé à mon égard un ton politicien alors que je pense vraiment que nous sommes tous, vous et moi compris, au pied du mur. Vous me reprochez de faire des effets de tribune, mais les solutions que mon groupe propose vous permettraient de sortir du régime de l'incantation dans lequel, pour votre part, vous vous situez. En réponse à la question précédente, vous avez dit qu'il fallait…
Le temps de parole est écoulé !
… changer de modèles de production et de consommation : je vous propose ici une méthode réellement applicable, consistant à se fixer une règle politique qui obligerait à se mettre en mouvement.
Je vais conclure.
Par ailleurs, vous devez savoir, madame la secrétaire d'État, qu'il n'est pas possible de faire ce que vous appelez de vos voeux sans investir massivement, mais que le cadre actuel nous en empêche.
Stop !
Je termine, monsieur le président.
La différence entre vous et moi sur ce sujet, c'est que, contrairement à vous, je ne crois pas que, face à l'urgence temporelle, les petits ruisseaux puissent faire les grandes rivières : notre pays a besoin de grandes décisions politiques.
Je veux répondre !
Il ne suffit pas de dire qu'il faut investir massivement ; il faut s'en donner les moyens. Or c'est exactement ce que nous sommes en train de faire, …
… notamment au niveau européen.
Je suis entièrement d'accord avec vous pour dénoncer le fait que des banques et d'autres institutions financières investissent massivement dans des projets néfastes pour la planète. Non, ce n'est pas normal, il faut lutter contre, et c'est exactement ce que nous sommes en train de faire !
On pourrait continuer le débat !
Nous allons clore cet échange riche et vif, dont je vous remercie tout en appelant à la maîtrise du temps de parole.
La parole est à Mme Jacqueline Dubois, pour exposer sa question, no 639, relative à la prime à la conversion pour l'achat d'un véhicule propre.
Madame la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, pour favoriser le passage aux véhicules propres, le Gouvernement a mis en place un dispositif de prime à la conversion, dont le montant peut être doublé pour les ménages les plus modestes. Les témoignages que j'ai recueillis révèlent toutefois que cette aide est conditionnée par les capacités financières initiales des intéressés, la prime n'étant versée que plusieurs mois après la demande.
Ainsi, une personne de ma circonscription, éligible selon elle à une prime de 4 000 euros, ayant un besoin urgent de changer de véhicule, est confrontée à de tels obstacles qu'elle a fini par renoncer au projet de le remplacer ; sa crainte de ne plus pouvoir circuler pour travailler si sa voiture rend l'âme entretient chez elle le sentiment désespérant d'être prise dans une spirale de la pauvreté. Pour cette personne survivant avec le RSA – le revenu de solidarité active – et en recherche de travail, débourser une somme de 4 500 à 5 000 euros n'est pas possible. Un véhicule est pourtant indispensable pour travailler et pour se déplacer dans les zones rurales. Les concessionnaires agréés qu'elle a contactés lui ont refusé de verser l'avance pour l'achat d'un véhicule de ce prix. Quant aux services chargés du RSA, ils ne délivrent pas de prêts aux personnes qui ont alterné des périodes d'intérim et de RSA, ce qui est son cas. L'obtention d'un prêt bancaire avec 430 euros de revenu par mois est difficile, d'autant que l'obligation de remboursement immédiat est pour elle rédhibitoire.
Le directeur de la caisse d'allocations familiales de Dordogne, que j'ai rencontré, m'a indiqué que la CAF aurait la capacité financière d'avancer la somme équivalente à la prime pour les bénéficiaires qui ne disposent pas de ressources financières suffisantes ; cette souplesse permettrait de lever les blocages et de faciliter la mise en oeuvre opérationnelle du dispositif de prime à la conversion, mais il faudrait que la CAF ait l'autorisation.
Madame la secrétaire d'État, nous avons le devoir de rendre accessibles les mesures sociales de transition écologique que nous avons votées. Comment le Gouvernement compte-t-il faciliter et sécuriser, pour les plus démunis, l'accession à la prime à la conversion ? Est-ce que la proposition faite par la CAF de Dordogne pourrait être mise en place assez rapidement ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Madame Dubois, je réponds en lieu et place de M. François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, qui ne peut être présent. Je vous remercie pour votre question, qui est essentielle, et aussi pour le travail que vous menez avec des acteurs locaux proposant, au plus près du terrain, des solutions concrètes pour améliorer la diffusion des politiques sociales, afin qu'elles bénéficient le plus rapidement possible au plus grand nombre.
Vous savez que la solidarité, particulièrement quand elle touche à la transition écologique, est la priorité de notre gouvernement. Notre objectif est d'atteindre la neutralité carbone d'ici à 2050. Pour aller plus vite, il est nécessaire d'accompagner les Français. C'est pourquoi le Gouvernement a mis en place la prime à la conversion, qui est un vrai succès : plus de 300 000 primes ont été versées depuis un an ; chaque semaine, plus de 10 000 changements de véhicules sont réalisés grâce à ce dispositif de soutien. Celui-ci bénéficie en particulier aux ménages modestes puisque les trois quarts des primes sont versées à des ménages non imposables. Les concessionnaires automobiles jouent un rôle clé dans le dispositif puisqu'ils avancent plus des trois quarts des primes.
Toutefois, vous avez raison de souligner qu'il est nécessaire d'accompagner davantage encore les ménages les plus modestes. Des solutions de financement doivent être conçues à cet effet, en lien avec les constructeurs automobiles. C'est pourquoi le Premier ministre a demandé au ministère de l'économie et des finances de mettre en place de telles mesures, comme des prêts à taux zéro. Je ne doute pas que le ministre de l'économie et des finances pourra vous informer régulièrement de l'avancement de ces travaux. Je suis sûre aussi qu'il sera ravi d'en discuter plus avant avec vous, en particulier s'agissant de la solution que vous proposez. Je vous invite enfin à en parler avec mon équipe et celle de la ministre chargée des transports.
Je crois qu'il est important de continuer à avancer dans l'accompagnement social de la transition écologique, et je tiens à vous remercier encore de proposer des solutions concrètes.
Je vous remercie pour cette réponse, madame la secrétaire d'État. Ma question s'adressait en priorité à Mme Buzyn puisqu'elle portait notamment sur la solution proposée par une CAF, mais j'ai eu le plaisir de vous la poser à vous. Quoi qu'il en soit, j'espère qu'une solution sera trouvée pour débloquer cette situation.
La parole est à M. Philippe Chalumeau, pour exposer sa question, no 641, relative à l'aéroport de Tours Val de Loire.
Ma question s'adressait initialement à Mme la ministre chargée des transports. Madame la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, depuis plusieurs mois, l'État et les collectivités locales examinent avec les acteurs économiques publics et privés les perspectives des aéroports de la région Centre-Val de Loire, dans le souci que les différentes initiatives ne se concurrencent pas et participent à l'attractivité de nos territoires.
L'aéroport de Tours Val de Loire possède de véritables atouts, expliquant son rayonnement et témoignant de son haut potentiel. À ce titre, le plan d'affaires du syndicat mixte exploitant l'aéroport devrait permettre à ce dernier de diversifier les activités et les sources de revenus de sa plateforme, qui représente près de 84 millions d'euros de chiffre d'affaires et un potentiel de plus de 820 emplois en 2035.
Cet avenir se veut donc prometteur, à l'heure où le concours du ministère des transports a pérennisé notre service de contrôle aérien, jusqu'alors remis en cause par le départ prévu de l'école d'aviation de chasse à l'été 2021. En l'absence de ce contrôle, indispensable à la desserte de toutes les lignes régulières, le Val de Loire aurait été privé de sa principale porte d'entrée aérienne, facteur nécessaire à son développement économique et touristique ainsi qu'aux retombées qu'il peut légitimement en attendre.
Au nom des Tourangelles et des Tourangeaux, je tiens par votre entremise à en remercier Mme Élisabeth Borne, ministre chargée des transports. Grâce à elle et à M. le Premier ministre, l'aéroport de Tours Val de Loire peut désormais regarder vers l'avenir ; il a d'ailleurs connu une recrudescence de l'ordre de 40 % de son trafic passagers sur les deux premiers mois de l'année 2019, couplée à un net essor de l'aviation d'affaires.
Si l'aéroport de Tours Val de Loire poursuit sa montée en puissance et compte bien user pleinement de son potentiel pour répondre aux besoins du territoire qu'il dessert et des politiques publiques qui y sont menées, à l'heure où une réflexion européenne s'ouvre pour définir les orientations qui seront données pour tous les aéroports régionaux français et où les progrès technologiques permettent d'espérer plus vite qu'imaginé des avions davantage respectueux de notre chère planète, grâce aux avancées en matière de propulsion à l'hydrogène ou grâce à l'électricité verte, quelle politique nationale pouvons-nous collectivement coconstruire afin de faire de nos aéroports régionaux de vrais pôles d'attractivité, moteurs du développement économique et touristique, et en même temps durable, de notre pays sur le long terme ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Vous avez souhaité interroger Mme Élisabeth Borne, ministre chargée des transports. Celle-ci ne pouvant être présente, je vous répondrai à sa place.
Les assises du transport aérien, clôturées le 8 mars dernier par Élisabeth Borne, ont permis de dégager pour les années à venir une stratégie dont la priorité est d'assurer une connectivité efficace des territoires par le transport aérien. Le Gouvernement va donc accompagner les collectivités dans la mise en oeuvre de stratégies aéroportuaires locales, dans plusieurs buts.
Le premier est de parvenir à une desserte terrestre efficace des aéroports français. L'accessibilité des grands aéroports est en effet un prérequis pour leur développement et leur insertion au coeur du territoire. Elle doit être pensée de façon intermodale et en rapport avec les nouvelles mobilités, car nous devons anticiper l'avenir – nous enferrer dans un modèle passé serait une grave erreur – tout en tenant compte des situations locales.
Le deuxième but est d'aider les régions développant des stratégies aéroportuaires, en veillant notamment à clarifier la répartition des compétences entre l'État et les collectivités, afin que les projets puissent rapidement être réalisés.
Troisième but : désenclaver les territoires par les lignes d'aménagement du territoire.
Quatrième but : simplifier les interventions financières des collectivités auprès des exploitants d'aéroports, grâce à des règles nationales mettant en oeuvre le cadre européen relatif au fonctionnement pour les aéroports de moins de 200 000 passagers par an, et aux aides à l'investissement pour les aéroports de moins de 3 millions de passagers par an.
Cinquième but : nous souhaitons assurer une solidarité entre aéroports en réaffirmant le soutien plein et entier du Gouvernement au système de péréquation entre aéroports pour le financement des missions de sécurité et de sûreté aéroportuaires.
Par ailleurs, il importe de mettre en oeuvre des actions ciblées et adaptées à la diversité des aéroports, notamment afin d'améliorer leur connectivité. Pour les plus petits aéroports, l'enjeu est de pouvoir accueillir des vols internationaux chaque fois que nécessaire, par exemple pour l'aviation d'affaire, les services réguliers ou la maintenance aéronautique. Il faudra évidemment tenir compte des contraintes touchant la sûreté et le contrôle des frontières.
Le développement de la connectivité aérienne spécifique des régions ultramarines reste également l'une de nos priorités.
Monsieur Chalumeau, je vous remercie pour votre implication sur ces questions, sur lesquelles, je le sais, vous travaillez beaucoup. Soyez assuré que nous continuerons à oeuvrer à vos côtés afin d'assurer le développement d'aéroports régionaux comme celui de Tours Val de Loire et de renforcer l'attractivité des territoires.
Je vous remercie, ainsi que Mme la ministre des transports, pour votre soutien à notre aéroport, capital pour le développement de notre territoire.
La parole est à M. Xavier Breton, pour exposer sa question, no 652, relative à l'état de catastrophe naturelle à la suite de la sécheresse de 2018.
J'appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur et de l'ensemble du Gouvernement sur l'ampleur des dommages que la canicule de l'été 2018 a causés à de nombreuses constructions dans la plupart des départements de l'Est de notre pays. En effet, la forte déshydratation des sols a altéré la stabilité des fondations et produit des fissures dans les murs et les dalles des maisons individuelles, certaines étant menacées d'effondrement.
Rien que dans le département de l'Ain, une centaine de communes sont touchées par le phénomène et plus de mille dossiers de déclaration de sinistre ont été déposés auprès des services de la préfecture de l'Ain au titre de la procédure de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. Dans le département du Jura, d'après les chiffres que m'a communiqués notre collègue Marie-Christine Dalloz avec qui nous travaillons sur ce dossier, 200 communes sont concernées et près de 1 500 dossiers ont été déposés.
Or, selon les dispositions en vigueur relatives à ce type d'aléas, l'instruction des demandes ne pourra débuter qu'au second trimestre 2019, après que le rapport annuel de Météo France sur la sécheresse aura été réalisé et transmis à la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises.
En avril 2018, le Gouvernement avait pourtant indiqué qu'il voulait simplifier ce type de procédure et réduire sensiblement les délais d'instruction des demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle.
Madame la secrétaire d'État, quelles mesures concrètes le Gouvernement envisage-t-il de prendre pour répondre aux inquiétudes des propriétaires, qui attendent d'être indemnisés depuis de nombreux mois ? Les travaux de réparation des désordres structurels subis par leurs maisons revêtent désormais un caractère d'urgence si nous voulons éviter que la situation ne s'aggrave.
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Monsieur Breton, je répondrai pour le ministre de l'intérieur, qui n'a pu être présent à cette séance.
Au cours du second semestre 2018, un épisode de sécheresse et de réhydratation des sols a touché le territoire métropolitain, particulièrement le nord-est du pays, ainsi que vous l'avez souligné. D'après les premiers éléments recueillis, cet épisode serait comparable par son ampleur à celui de l'année 2017.
Pour reconnaître qu'une commune est en état de catastrophe naturelle, je rappelle que l'autorité administrative se prononce toutefois sur l'intensité anormale de l'agent naturel à l'origine des dégâts, non sur leur ampleur. Or – pardonnez-moi pour ces détails un peu techniques – , compte tenu de la cinétique lente spécifique à l'aléa sécheresse et des connaissances scientifiques disponibles à ce jour, deux critères sont utilisés pour l'identifier et le caractériser, l'un tenant aux conditions géotechniques et l'autre aux conditions météorologiques. Le délai de traitement du dossier sur lequel vous nous alertez est donc incompressible, je le regrette. En effet, l'analyse du critère météorologique d'une sécheresse géotechnique étant réalisée sur la base d'un rapport annuel de Météo France, les demandes communales ne peuvent être instruites qu'un an après la catastrophe, une fois réalisée la consolidation des données météorologiques de l'année écoulée.
Météo France et les services de l'État concernés ont cependant été sensibilisés à la nécessité de traiter ces demandes dans les meilleurs délais, et nous relaierons votre question auprès d'eux.
Du reste, les travaux que nous réalisons actuellement consistent en une simplification de la procédure de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. Nous disposerons ainsi dans les prochaines semaines de nouveaux critères qui seront utilisés dès cette année pour analyser les demandes au titre de l'épisode de sécheresse-réhydratation des sols de l'année 2018. Ces travaux poursuivent deux objectifs : prendre en compte le progrès des connaissances scientifiques relatives aux phénomènes, notamment les modalités techniques de traitement des données météorologiques servant à établir le degré d'humidité des sols supplémentaire ; rendre plus lisibles, pour les responsables communaux et les sinistrés, les critères mis en oeuvre – un effort pour simplifier leur présentation sera réalisé en ce sens. Avec cette réforme, nous voulons donc améliorer la qualité des critères tout en les rendant plus simples, mais aussi rendre plus compréhensible leur application.
Je note que vous souhaitez une accélération de la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle et une simplification de la procédure : l'une et l'autre sont en effet bienvenues.
J'ajoute que les élus se mettent à la disposition des services des préfectures pour travailler à leurs côtés. Des associations comme Les Oubliés de la canicule, qui possèdent des délégations dans les différents départements frappés, peuvent également aider à trouver les moyens d'un traitement le plus rapide des conséquences dramatiques que cet épisode de sécheresse a eues pour de nombreux propriétaires et locataires de maisons.
La parole est à M. Lionel Causse, pour exposer sa question, no 638, relative au statut de l'élu local.
Les conditions dans lesquelles les élus locaux exercent leurs fonctions ont profondément évolué depuis la loi NOTRe, portant nouvelle organisation territoriale de la République.
La réalisation des missions de l'élu local est passionnante mais chronophage, allant jusqu'à nécessiter un temps plein. En effet, la multiplication des réunions, dues notamment à l'intercommunalité, mobilise de plus en plus les élus. Dans les communes les plus petites, ceux-ci réalisent de surcroît quotidiennement des missions normalement dévolues à des agents municipaux. Cette charge est à mettre en regard des indemnités très faibles des élus : de l'ordre de quelques centaines d'euros pour les plus petites communes. Ramenée à l'heure, l'indemnité d'un élu local est de quelques euros et, très souvent, elle ne suffit pas à compenser les dépenses liées à leurs fonctions.
Les revalorisations des indemnités des élus par des augmentations de la valeur du point d'indice de la fonction publique, en 2016 et 2017, ont été grevées, ces dernières années, par plusieurs mesures, dont la hausse des charges sociales – la CSG, la contribution sociale généralisée, et la cotisation au DIF, le droit individuel à la formation – , qui ont réduit leur montant net. Depuis le 1er janvier 2017, les indemnités de fonction sont en outre fiscalisées au même titre que les autres revenus ; ce nouveau régime a notamment des conséquences pour les élus dont les indemnités de fonction sont supérieures à celles des maires des communes de moins de 500 habitants et pour ceux qui poursuivent une activité professionnelle.
Par ailleurs, il est particulièrement difficile de concilier un mandat d'élu avec l'exercice d'une activité professionnelle. Si des autorisations d'absence sont prévues, elles sont limitées aux séances du conseil municipal et à certaines autres réunions. Le crédit d'heures attribué à un conseiller communal d'une commune de moins de 3 500 habitants est de sept heures par trimestre, et ces heures libérées par l'employeur ne sont pas rémunérées. La loi prévoit que ce temps soit pris en compte pour la détermination de la durée des congés payés et du droit aux prestations sociales. Si la loi du 31 mars 2015 visant à faciliter l'exercice, par les élus locaux, de leurs mandats introduit un statut de salarié protégé pour certains d'entre eux, son effectivité, d'après plusieurs jurisprudences récentes, ne semble pas pleinement garantie.
Enfin, la fonction intrinsèquement précaire de ces élus nécessite d'améliorer leur réinsertion professionnelle, leur formation et leurs droits sociaux acquis, particulièrement si le nombre de mandats cumulés dans le temps venait à être limité.
Aussi souhaiterais-je connaître les mesures que le Gouvernement compte prendre afin de créer un véritable statut de l'élu et éviter que ne se produise une crise de l'engagement à la veille du renouvellement municipal de 2020.
Monsieur Causse, je vous remercie pour votre question qui me permet, à mon tour, de saluer l'engagement des 600 000 élus locaux de notre pays, dont la grande majorité – près des trois quarts – sont des bénévoles, qui incarnent la démocratie locale de proximité et exercent de surcroît un service public au profit de leurs concitoyens.
Le statut de l'élu local est un vieux dossier, bien connu sur les bancs de cet hémicycle. Il est devenu urgent que nous le fassions avancer dans la mesure où notre société connaît une crise globale de l'engagement qui touche l'engagement associatif mais aussi les élections municipales, notamment dans les villages ruraux les plus reculés. Dans la perspective des élections municipales de l'an prochain, il s'agit donc là d'un enjeu majeur.
Des travaux sur ce sujet ont été commis par le Parlement, à l'Assemblée nationale mais aussi au Sénat. Un rapport remis à Jacqueline Gourault il y a quelques semaines a permis de dessiner des perspectives et d'envisager des avancées.
La première de ces améliorations concerne le volet du régime social des élus locaux. La création d'un site dédié sur ameli. fr améliore l'information des élus locaux sur ce sujet et permet un meilleur traitement des questions de protection sociale.
La deuxième avancée, réalisée dans le cadre du PLF pour 2019, est l'augmentation, pour les communes de moins de 3 500 habitants, de la fraction représentative des frais d'emplois, qui ne sont pas soumis à l'impôt sur le revenu. Pour ces communes, il s'agit tout de même d'un début de solution.
Il est également crucial d'améliorer tous les à-côtés de l'engagement. À cet effet, des travaux et des réflexions sont en cours, notamment avec la présidente de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes de l'Assemblée nationale. Il nous faut ainsi faire progresser nettement le droit individuel qu'est le droit à la formation.
Le sujet du statut des élus locaux est d'autant plus complexe qu'il touche aussi à la question des finances communales. Il n'est pas rare que les élus dirigeant des collectivités locales souhaitent prendre des mesures afin de mieux accompagner leurs collègues, mais ils ne veulent pas pour autant augmenter les sommes qui y sont consacrées. La question des indemnités est particulièrement délicate dans l'actuel climat d'« élus-bashing ».
Nous sommes ouverts à toutes les solutions proposées. Il est à craindre que, pour la première fois, il soit difficile, dans certains villages ruraux, de constituer des listes complètes de candidats aux élections municipales de 2020. Nous avons donc collectivement le devoir impérieux de trouver, au cours de cette année, des solutions aussi réalistes que possible.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. Un point est essentiel : si l'on veut voir des ouvriers et d'autres salariés s'engager dans des mandats d'élus, il faut pouvoir leur garantir un revenu ainsi qu'une réinsertion professionnelle. Certains pays garantissent le maintien du salaire. Peut-être faut-il réfléchir dans cette direction. Quoi qu'il en soit, je remercie beaucoup le Gouvernement de sa volonté d'avancer sur tous ces sujets.
La parole est à M. Jean-Félix Acquaviva, pour exposer sa question, no 653, relative à la TVA sur la construction de logements sociaux en Corse.
Monsieur le ministre chargé des collectivités territoriales, ces derniers mois, le rythme de construction de logements neufs, notamment de logements sociaux, a ralenti, alors que la demande est importante. Il y a un mois, dans le cadre d'une alliance assez inédite, les professionnels du bâtiment, les collectivités locales et les associations humanitaires, comme la Fondation Abbé-Pierre, ont poussé un cri d'alarme. En 2018, une baisse de 7,6 % des permis de construire a d'ailleurs été enregistrée par rapport à 2017.
Si des facteurs conjoncturels sont à prendre en compte, les dernières décisions de ce gouvernement en matière de fiscalité relative à l'aide au logement – rabotage des APL, les aides personnalisées au logement, dont celle en faveur de l'accession, fin du prêt à taux zéro dans les zones rurales et périurbaines – ont malheureusement eu des effets négatifs que nous redoutions et que nous avions dénoncés dans cette assemblée.
En Corse, plus particulièrement, outre les rabotages que je viens d'évoquer, votre décision de relever de 5,5 à 10 % le taux réduit de TVA sur la construction de logements sociaux – dont elle bénéficiait de par la loi, à l'instar de l'outre-mer, en tant que zone insulaire île-montagne reconnue – y mine gravement les perspectives de construction, alors que le parc de logements sociaux de ce territoire accuse déjà un retard très important.
Monsieur le ministre, la situation est grave : l'île connaît un taux de pauvreté de 20 %, contre 14 % en moyenne dans l'Hexagone, et un taux de logement social qui s'élève seulement à 10 %, contre 17 % au niveau hexagonal. Le ratio constaté entre la demande de logements sociaux et le nombre d'attributions est très fort, puisqu'il culmine à 6, contre seulement 3,8 en France continentale. Les bailleurs sociaux, comme l'Office public de l'habitat de la collectivité de Corse, y sont étranglés. Malgré sa bonne volonté et ses efforts de redressement, il lui faudra puiser pas moins d'1 million d'euros dans ses réserves pour mener à bien ses programmes de rénovation.
La libéralisation du logement social et la baisse des aides publiques qui ont été prônées sont catastrophiques pour la Corse et les autres territoires à fortes contraintes où l'économie est fortement touchée par la pression de l'attractivité touristique. Cela apporte son lot trop important de spéculation foncière et immobilière, engendrant une rente foncière insupportable. Nous ne nous résoudrons jamais à cette réalité que nous vivons : il s'avère plus intéressant pour un promoteur de construire une villa luxueuse en bord de mer pour un riche vacancier qui n'y séjournera que deux mois dans l'année plutôt qu'un logement pour une famille insulaire dans le besoin.
Le rééquilibrage doit s'opérer de manière urgente. Nous sommes prêts à y travailler. Nous estimons que vous devez prendre la mesure de la situation et revenir à une TVA à 5,5 % pour la construction de logements sociaux en Corse.
Monsieur Acquaviva, je vous prie d'excuser M. Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement, qui, ne pouvant être présent, m'a chargé de vous lire la réponse qu'il avait préparée à votre attention.
Tout d'abord, j'aimerais revenir sur les chiffres que vous avez évoqués. La baisse de 7,6 % des permis de construire en 2018 doit être relativisée car elle succède à une période de croissance continue, depuis mai 2015, du nombre de ces permis et de la construction de logements ; on se trouve donc actuellement à un niveau très supérieur à celui des années 2013 à 2015. En outre, cette baisse ne vaut pas pour la Corse, où le nombre de logements autorisés a augmenté de 9,3 %.
Le Gouvernement reste néanmoins attentif à la conjoncture de la construction de logements. La loi ELAN, portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, adoptée fin 2018, comporte ainsi un volet destiné à soutenir la construction de logements, avec des mesures visant notamment à libérer le foncier – vous l'avez dit – , à simplifier l'acte de construire et les règles d'urbanisme, à accélérer les procédures administratives ou encore à encadrer les recours abusifs.
Quant au volume de logements sociaux financés en 2018 en France métropolitaine continentale, quoiqu'en léger retrait par rapport à 2017 – moins 4 % – , il demeure à un niveau très élevé.
En Corse plus spécifiquement, la croissance du nombre de logements sociaux financés en 2018 est spectaculaire : elle s'établit à 20 % tous logements sociaux confondus, et 134 % pour les logements les plus sociaux, financés grâce à des PLAI, des prêts locatifs aidés d'intégration.
Le Gouvernement ne méconnaît pas pour autant les efforts du secteur du logement social, dont plusieurs mesures témoignent. Je pense notamment à deux d'entre elles : la mise en oeuvre, dès 2018, de la réduction de loyer de solidarité destinée à contenir les dépenses d'allocation logement sans affecter le pouvoir d'achat des locataires ; la hausse du taux de TVA de 5,5 à 10 %. Le Gouvernement a donc accompagné les bailleurs sociaux par des mesures de soutien, comprenant notamment un plan de la Caisse des dépôts et consignations de 10 milliards d'euros de financements ainsi que le gel à 0,75 % du taux du livret A.
Ont été parallèlement adoptées des mesures favorables à une augmentation progressive des ventes de logements HLM, en priorité aux locataires du parc social.
Pour venir en aide aux bailleurs fragilisés, le Gouvernement a également prévu la création d'un dispositif de péréquation via la Caisse de garantie du logement locatif social.
Est enfin engagée, sous la conduite du Premier ministre, une concertation avec les représentants des bailleurs sociaux sur la clause dite « de revoyure », afin d'évaluer l'impact des mesures de la loi de finances pour 2018 et du dispositif d'accompagnement, et d'envisager d'éventuels ajustements.
Je serai très rapide.
Je vous remercie, monsieur le ministre, pour les éléments de réponse globaux que vous m'avez apportés s'agissant de la France continentale.
Je note simplement qu'il existe encore un décalage entre ceux-ci et la réalité territoriale spécifique à la Corse, évident à la lumière des chiffres annoncés. Vous avez évoqué le taux de croissance, certes ; mais comme nous partions de très loin, comme nous sommes victimes d'un effet ciseau dû à la rareté foncière, plus forte qu'ailleurs – je rappelle qu'en Corse, le taux de résidences secondaires est de 39 %, contre 9 % en moyenne à l'échelle métropolitaine – , et que ce phénomène s'aggrave, et comme les fonds propres de l'Office public de l'habitat diminuent, je vous donne malheureusement rendez-vous l'année prochaine pour constater que ce taux de croissance accusera une baisse et même que des opérations auront dû être stoppées. Je vous lance donc un appel urgent !
La parole est à Mme Elsa Faucillon, pour exposer sa question, no 633, relative au logement social.
La loi ELAN – portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique – ainsi que la réduction du loyer de solidarité, la RLS, constituent à mes yeux une remise en cause de la politique du logement social et menacent directement l'avenir financier des OPH, les offices publics de l'habitat.
La RLS, inscrite à l'article 126 de la foi de finances pour 2018, constitue en effet une menace catastrophique pour l'avenir de tous les bailleurs sociaux. Elle accompagne en outre la baisse de l'aide personnalisée au logement – l'APL – perçue par les locataires du parc social et a pour objet d'en effacer l'impact en diminuant d'autant leur loyer.
La RLS permet à l'État d'économiser 800 millions d'euros en 2018, 1,2 milliard d'euros en 2019 et 1,5 milliard d'euros à partir de 2020. Pour les OPH, la conséquence directe de cette décision est une baisse de 8 à 10 % de leur budget annuel. Par exemple, dans ma circonscription, cette mesure représente 5 millions d'euros en moins pour les opérations de réhabilitation et de construction de logements de l'OPH de Gennevilliers, alors que la ville compte 3 000 demandeurs de logements.
Cette mesure est fondée sur le mythe de la supposée richesse des organismes et sur le coût, jugé excessif par certains, du logement social pour le budget de l'État. Les bailleurs vont subir de plein fouet l'impact de la RLS.
Le dispositif s'ajoute à un ensemble de mesures conduisant à limiter les ressources des bailleurs, comme la fin de la contribution de l'État aux aides à la pierre, la hausse de la contribution des bailleurs à la Caisse de garantie du logement locatif social, le gel des loyers dans le parc social en 2018 et le relèvement, dont vous venez de parler, de 5,5 à 10 %, du taux de TVA applicable aux opérations immobilières dans le secteur du logement social.
Ces réformes sont inacceptables car elles organisent l'affaiblissement des organismes HLM et accélèrent la privatisation du logement social. Elles entraîneront une précarisation des plus démunis parmi les locataires et les demandeurs de logement, et signent la fin du modèle HLM français. Cela revient à renoncer à conserver un haut niveau de production de logements sociaux. Cette mesure va conduire à la mise en faillite des OPH.
Monsieur le ministre, dans la loi de finances pour 2020, comment allez-vous tirer les conclusions de son impact financier désastreux ?
Madame Faucillon, je vous prie d'excuser à nouveau mon collègue Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement, qui a préparé les éléments de réponse que je vais vous communiquer. Cette réponse me permettra en outre de compléter les propos que j'ai tenus en réponse à M. Acquaviva.
Il est crucial, dans ce débat, de rappeler un chiffre : la France consacre près de 40 milliards d'euros au financement de la politique du logement, soit environ 2 % de sa richesse intérieure. C'est un niveau très important par rapport à nos voisins européens.
Nous avons mis en oeuvre une mesure importante de rétablissement des comptes publics, en réduisant les aides au logement dans le parc social, à hauteur de 800 millions d'euros pour 2018 et 2019, tout en préservant le pouvoir d'achat de tous les locataires concernés, puisque cette baisse d'APL prévue, vous le savez, est compensée par une diminution de loyer. Le Gouvernement ne méconnaît néanmoins pas l'effort qu'il a ainsi demandé aux bailleurs sociaux. C'est pourquoi nous avons mis en place plusieurs mesures.
D'abord, comme je le rappelais tout à l'heure, un plan de 10 milliards d'euros apportés par la Caisse des Dépôts et consignations et une réforme du taux du livret A doivent les soutenir dans leurs investissements comme dans leurs réformes de productivité.
Ensuite, pour les bailleurs qui se trouveraient fragilisés malgré ces mesures d'accompagnement, nous avons prévu un dispositif de péréquation via la Caisse de garantie du logement locatif social.
Nous avons en outre impulsé un mouvement de consolidation du secteur, favorisant ainsi l'adossement des bailleurs aux acteurs les plus dynamiques et les plus solides. Il n'y aura donc pas d'organismes en faillite, madame la députée.
Enfin, comme je vous l'ai déjà indiqué, une concertation est actuellement menée sous l'autorité du Premier ministre avec les représentants des bailleurs sociaux. Les échanges entre le Gouvernement et le secteur HLM n'ont donc jamais cessé. La prochaine étape, l'objectif, d'ici à quinze jours – nous y arriverons – est d'aboutir à un pacte avec l'ensemble des fédérations de bailleurs sociaux. Celui-ci devra préserver les objectifs de réduction de dépenses publiques tout en fixant un haut niveau d'ambition en matière de rénovation et de production de logements sociaux.
Je remercie M. Denormandie de vous avoir transmis cette réponse. Ceci dit, sans vous faire offense, j'éprouve, un petit regret : celui qu'il n'ait pas pu être présent, parce qu'il est vrai que des discussions sont en cours, notamment avec des bailleurs et des élus locaux, et ma question participe de cet échange.
Je souhaite répondre sur un seul point : encore heureux que vous viendrez au secours des bailleurs, comme d'ailleurs certains d'entre eux sont parfois venus au secours des banques après les grandes crises !
La question n'est pas simplement de savoir si les organismes HLM seront ou non en faillite demain, mais de savoir quelles seront les possibilités qui s'offriront à eux. Je pense notamment à celui de Gennevilliers, qui, grâce à l'efficacité de sa gestion, se montre capable, même si c'est au prix de nouvelles difficultés, de rénover des logements et d'offrir un habitat digne, tout en continuant à produire du logement social et du logement en accession sociale à la propriété. Dans les projections qu'il fait compte tenu des mesures annoncées, il disposera de moins de moyens pour remplir ses missions, alors même que Gennevilliers compte 3 000 demandes de logement et que la faiblesse au niveau national de la lutte contre la spéculation conduit à ce que le logement privé devienne inabordable.
Ce qui manque, ce sont des logements de qualité abordables. Or force est de constater que c'est le secteur HLM qui apporte une réponse en la matière. Il ne demandait justement que de pouvoir encore mieux répondre. Or les mesures prises depuis deux ans rendent plus improbable cette éventualité, alors que l'urgence reste de pouvoir construire des logements sociaux.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour exposer sa question, no 663, relative aux prérogatives des polices municipales.
Bien que les incivilités continuent de polluer la vie quotidienne de nos concitoyens – fin 2018, 22 % des Français se sentaient en danger dans leur quartier ou dans leur village : du jamais vu depuis dix ans – , la police de sécurité et du quotidien n'a pas pu être implantée sur tout notre territoire. Aussi, faute de ce soutien, certaines communes ont multiplié les effectifs de leur police municipale et les moyens qu'elles leur ont consacrés.
Meilleur équipement, armement, formation, caméras de vidéoprotection : autant d'aspects qui, s'ils sont pris en charge par les municipalités, ne suffisent pas.
Pourquoi ? Parce que, la délinquance évoluant, les prérogatives de nos polices municipales devraient également évoluer. Il serait ainsi nécessaire de généraliser leur accès direct au fichier des permis de conduire, au système d'immatriculation des véhicules et aux fichiers des objets et des véhicules signalés – autant dire volés – ainsi qu'au fichier des personnes recherchées. Il faudrait également leur permettre de procéder à des contrôles d'identités et à des fouilles de véhicules, tant dans le cadre d'une procédure judiciaire que dans celui d'une réquisition écrite du procureur de la République.
Les polices municipales peuvent participer à la reconquête des quartiers de non-droit en France ; elles sont d'ailleurs peut-être même les mieux placées, grâce à leur connaissance précise du terrain. Elles savent en outre prendre des risques pour cela.
Le week-end dernier, à La Devèze, quartier difficile de Béziers classé quartier prioritaire de la politique de ville, alors que notre police municipale tentait d'arrêter le pilote d'une moto volée qui faisait de la roue arrière sans casque, elle a été copieusement caillassée. Son commandant a manqué de recevoir une pierre, vraisemblablement tirée à l'aide d'un lance-pierre, en plein visage. Ces situations exaspèrent les Français. Une loi contre les rodéos urbains a bien été adoptée l'an dernier mais, sur le terrain, rien ne change.
Ma question est donc simple : quand allez-vous, monsieur le ministre de l'intérieur, donner à ces 22 000 hommes et femmes les moyens d'assurer efficacement la tranquillité de nos concitoyens ?
Madame Ménard, je vous prie d'excuser mon collègue Christophe Castaner, ministre de l'intérieur, qui m'a confié le soin de vous lire la réponse qu'il a préparée avec l'aide de ses services.
Pour mener à bien leurs missions, outre des compétences en matière de police administrative, les policiers municipaux disposent, vous le savez, du statut d'agent de police judiciaire adjoint, ce qui leur confère de nombreuses autres compétences, comme la constatation des contraventions aux arrêtés de police du maire ou la lutte contre les nuisances sonores.
En outre, depuis trois ans, leurs moyens ont été considérablement renforcés afin de leur permettre d'exercer plus efficacement leurs missions. La loi du 22 mars 2016 relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs a élargi leurs compétences géographiques en prévoyant qu'ils puissent constater, sur affectation du maire, les infractions à la police du transport ferroviaire. Lorsqu'ils sont affectés à la sécurité d'une manifestation sportive, récréative ou culturelle, ils peuvent procéder à l'inspection visuelle des bagages et, avec le consentement de leur propriétaire, à leur fouille ainsi qu'à des palpations. Grâce à la loi du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, ils peuvent aussi participer à la protection des périmètres édictés par le préfet en cas de risque d'actes terroristes.
S'agissant de leur équipement, depuis l'entrée en vigueur du décret du 28 novembre 2016, les policiers municipaux ont notamment la possibilité de porter un pistolet semi-automatique de calibre 9 mm, qui assure de meilleures conditions de riposte. Afin de prévenir les incidents au cours des interventions, les agents de police municipale peuvent être équipés de caméras individuelles ; cette mesure, à l'origine expérimentale, a été pérennisée par la loi du 3 août 2018 relative à l'harmonisation de l'utilisation des caméras mobiles par les autorités de sécurité publique.
Enfin, un décret du 24 mai 2018 a ouvert aux agents de police municipale un accès direct aux informations enregistrées dans les traitements de données à caractère personnel relatifs au permis de conduire et à la circulation des véhicules.
Les agents de police municipale disposent donc de moyens conséquents, largement renforcés depuis trois ans, ce qui leur permet d'assurer toujours plus efficacement leurs missions. Nous sommes bien évidemment en concertation permanente avec les associations d'élus sur ces questions.
Comme vous venez de le souligner, monsieur le ministre, les prérogatives des policiers municipaux ont été accrues depuis quelques années, mais cela ne suffit malheureusement pas car la délinquance est en constante évolution.
Vous savez bien évidemment que les policiers municipaux, du fait de leur présence sur le terrain, sont souvent les premiers à se présenter et à apporter une réponse, non seulement en cas de délinquance et d'incivilité au quotidien, mais aussi en cas d'acte de terrorisme, comme on l'a vu à Nice dernièrement. Ce que réclame la police municipale, de même que la police nationale, c'est qu'une meilleure coopération puisse être mise en place entre elles, ainsi qu'avec la gendarmerie. Le plus souvent, cela se passe très bien, car tous ces corps oeuvrent à un même but : assurer la sécurité de leurs concitoyens.
Ce qui manque, sur le terrain, ce sont des consignes claires de la part des préfets et parfois une volonté affirmée de la part des procureurs de la République. C'est ce que les policiers municipaux souhaitent, ainsi que voir leurs prérogatives accrues. Je déposerai prochainement une proposition de loi en ce sens.
La parole est à M. Guillaume Vuilletet, pour exposer sa question, no 644, relative aux hôpitaux de Carnelle et de Beaumont-sur-Oise.
Madame la secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, c'est pour moi une très grande joie de vous poser cette question.
La semaine dernière, le sénateur Arnaud Bazin a interrogé votre collègue Adrien Taquet à propos du groupement hospitalier de territoire Nord-Ouest Vexin Val-d'Oise. J'aimerais que vous nous précisiez certains éléments de la réponse qui lui a été apportée.
J'ai noté la nécessité de prendre en considération la situation financière dégradée du GHT NOVO. Toutefois, j'aimerais que nos concitoyens puissent obtenir des éclaircissements sur celle-ci, ainsi que sur le devenir des deux hôpitaux de Saint-Martin-du-Tertre et de Beaumont-sur-Oise.
Je comprends la nécessité de concentrer les pratiques médicales les plus exigeantes en matériel sur un site unique ; de ce point de vue, le choix de l'établissement René-Dubos à Pontoise n'est pas absurde. Cependant, les vingt-huit kilomètres qui séparent les sites de Beaumont-sur-Oise et de Pontoise correspondent souvent à une heure de déplacement. Il n'est pas possible, quand on parle de ce secteur du Val-d'Oise, d'envisager le site de Pontoise comme un site de proximité. Je me réjouis donc d'entendre évoquer, concernant l'hôpital de Beaumont-sur-Oise, le maintien d'une offre de proximité en maternité et en accueil pédiatrique, ainsi que d'un service de chirurgie en ambulatoire et d'un service d'urgence. Pourrez-vous revenir plus en détail sur ces informations ?
J'ai cru comprendre que ce seront les mêmes médecins qui officieront à Beaumont-sur-Oise et à Pontoise. Si tel est le cas, comment leur travail sera-t-il articulé entre les deux sites ? Comment faire en sorte de répondre aux besoins en accueil de médecine générale et en accueil d'urgence ? La maternité de Beaumont-sur-Oise restera-t-elle une maternité de niveau 2 ? Des pétitions d'usagers réclament le maintien des urgences pédiatriques. Est-ce bien ce type de service qui est assuré à Beaumont-sur-Oise et, si oui, comment va-t-il évoluer ?
Je veux aborder aussi la situation du site de Carnelle, qui a été victime d'une réhabilitation aussi coûteuse que mal engagée et qui connaît par ailleurs des difficultés de recrutement pour ce qui concerne le corps médical. Une mort lente du site n'est pas acceptable pour la commune. Pouvez-vous vous engager à ce que le site connaisse une évolution qui se traduise par le maintien ou la création de nouvelles activités, en particulier dans le domaine médico-social ? Enfin, à cet effet, ne croyez-vous pas qu'il serait utile de créer, sous l'égide de l'ARS – l'agence régionale de santé – , un comité de pilotage, associant les collectivités locales, les usagers et les personnels médicaux ?
Sur ces différents points, je souhaiterais avoir quelques éclaircissements, madame la secrétaire d'État. Je vous en remercie par avance.
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Le groupement hospitalier de territoire Nord-Ouest Vexin Val-d'Oise, dit « GHT NOVO », est composé de trois établissements : le centre hospitalier René-Dubos, CHRD, à Pontoise ; le groupe hospitalier Carnelle Portes-de-l'Oise – GHCPO – , dont font partie les sites de Beaumont-sur-Oise et de Saint-Martin-du-Tertre ; le groupement hospitalier intercommunal du Vexin.
Ces établissements se caractérisent par une situation fragile. En effet, l'inscription en comité interministériel de performance et de modernisation de l'offre de soins – COPERMO – a été motivée en raison d'une très forte dégradation de la situation d'exploitation des établissements du GHT NOVO, cumulée à une grande vétusté des installations. Le projet de restructuration du GHT NOVO, validé par le passage devant le COPERMO en janvier 2019, repose sur une reconfiguration de l'offre de soins sur le territoire, structurée autour d'un ambitieux projet médical de territoire, qui vise à garantir à la population la meilleure qualité de prise en charge.
Cette reconfiguration se justifie tant sur le plan de la prise en charge – amélioration de l'attractivité médicale en concentrant les ressources médicales rares et mise en place de filières de soins graduées sur le territoire – que sur le plan médico-économique, du fait de la nécessité d'optimiser les plateaux techniques lourds en raison de l'impossibilité de faire vivre des micro-unités, et de jouer sur les effets de seuil en vue d'améliorer les organisations.
L'ARS d'Île-de-France, en liaison étroite avec les élus locaux, suit de près cette reconfiguration afin de s'assurer que l'offre de soins sur le territoire reste de qualité.
La restructuration du GHT NOVO ne prévoit pas la fermeture du site de Beaumont-sur-Oise. Le GHCPO sera consolidé en offrant aux habitants une prise en charge de proximité et de qualité, grâce aux mesures suivantes : maintien d'un service d'accueil des urgences et d'une activité de médecine pour adultes et enfants ; renforcement d'une maternité publique de territoire, l'objectif étant que chaque future maman, quel que soit son lieu de résidence, puisse accéder à la même qualité de soins et de prise en charge, dans une sécurité totale ; création d'un service pédiatrique et de néonatologie au sein du GHT NOVO, dans le cadre du pôle femme-enfant de territoire déjà constitué ; mutualisation des lits de soins critiques et de réanimation adulte au sein d'un seul site, afin de garantir une prise en charge de qualité par des équipes hyperspécialisées ; poursuite de la structuration d'un pôle de chirurgie territoriale, avec une équipe médicale de territoire en anesthésie et en chirurgie intervenant dans deux établissements.
Par conséquent, le site de Beaumont-sur-Oise continuera d'offrir aux habitants une prise en charge de proximité, tout en étant attractif auprès des patients et des professionnels de santé, en collaboration étroite avec le CHRD, établissement support du GHT NOVO.
Enfin, concernant le site de Saint-Martin-du-Tertre, des projets de reconversion sont en cours d'analyse entre l'établissement, l'ARS et les élus locaux.
Je suis très satisfait d'avoir obtenu une réponse aussi détaillée, madame la secrétaire d'État !
Il importe de comprendre que, dans cette période où la désertification médicale touche tous les territoires, y compris l'Île-de-France, l'inquiétude est forte. Une information rationnelle et fiable est donc nécessaire. Vous nous l'avez apportée, et je vous en remercie ; il faudra la compléter au fur et à mesure.
Les questions liées à l'attractivité médicale et aux enjeux de carrière pour les médecins doivent elles aussi être prises en considération si l'on veut faire vivre les sites hospitaliers et les hôpitaux multisites.
Naturellement, nous resterons vigilants quant à la suite des événements.
La parole est à Mme Élodie Jacquier-Laforge, pour exposer sa question, no 655, relative aux groupements hospitaliers de territoire.
Madame la secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, le devenir des groupements hospitaliers de territoire est une question qui nous préoccupe beaucoup en ce moment.
En application de la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, chaque hôpital public a dû intégrer un GHT, ce dernier devant reposer sur un projet médical partagé, qui s'appuie sur une stratégie de groupe, au service des besoins des patients. Ce projet, qui devait être élaboré avant le 1er juillet 2017, se décline sur un territoire dont la taille doit correspondre à une distance acceptable pour les patients et les professionnels.
Il s'agit là d'un nouveau mode de coopération entre les établissements publics de santé à l'échelle d'un territoire, à travers l'instauration d'un dispositif conventionnel entre établissements publics de santé, par lequel ils s'engagent à se coordonner autour d'une stratégie de prise en charge commune et graduée du patient, formalisée dans un projet médical partagé défini par une convention constitutive. Le principe est d'inciter les établissements de santé à mutualiser leurs équipes médicales et à répartir les activités afin que chaque structure trouve son positionnement dans la région. L'objectif est de garantir à tous les patients un meilleur accès aux soins en renforçant la coopération entre hôpitaux publics autour d'un projet médical et de permettre aux établissements de santé de soigner mieux et à moindre coût.
Plusieurs leviers sont censés exister pour la mise en oeuvre des GHT. Un groupement hospitalier de territoire doit disposer : d'outils de travail convergents permettant la mise en place d'équipes de territoire grâce à un système d'information, un département d'information médicale et une fonction achats gérés à l'échelle du groupement ; d'une stratégie de formation coordonnée pour garantir la mise en place de protocoles de prise en charge harmonisés et la diffusion des bonnes pratiques ; de modalités de gouvernance reposant sur un établissement de santé support, ainsi que la mise en place d'instances communes adaptées à ses besoins ; de pôles interétablissements permettant une organisation médicale et soignante de territoire ; de processus de certification conjoints pour valoriser la convergence en matière de qualité de prise en charge.
Or, dans de nombreux cas, le projet médical n'existe pas ou il existe sous une forme inappropriée car elle ne prend pas en compte les réalités de terrain. De nombreux GHT ne fonctionnent donc pas correctement, ce qui crée de nombreuses difficultés locales, notamment pour les services d'urgence. Les logiques sont floues ou inexistantes et trop souvent dictées par des visions purement comptables. La situation des groupements de coopération sanitaire est encore moins compréhensible.
C'est pourquoi je vous demande, madame la secrétaire d'État, de bien vouloir me communiquer des données chiffrées par région, notamment, bien sûr, pour ce qui concerne la région Auvergne-Rhône-Alpes, et par département, pour ce qui concerne l'Isère, et de m'indiquer quelles actions vous comptez engager pour accélérer la mise en place des GHT.
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Madame Jacquier-Laforge, comme vous le soulignez, l'impulsion préalable à la mise en place d'un groupement hospitalier de territoire est une coordination d'établissements publics autour d'une stratégie de prise en charge commune et graduée du patient. Près de trois ans après leur création et un an et demi après la finalisation de la première version de projet médical et soignant partagé, nous pouvons à présent réaliser un bilan des GHT.
À ce jour, l'ensemble des GHT ont répondu présents : tous les projets médicaux partagés ont été rédigés et approuvés par les ARS, exception faite de ceux de deux GHT en cours de construction – ceux de la Guyane et de la Guadeloupe. Ces stratégies médicales se fondent à plus de 90 % sur un diagnostic territorial des besoins en santé, qui dépasse le champ du seul GHT pour tenir compte de leur ancrage territorial, notamment au regard des autres offres et des coopérations qui les précédaient.
Plusieurs GHT ont engagé des réorganisations médicales et soignantes au profit des patients. Je pense par exemple au GHT de la Vienne, qui a mis en place une équipe commune pour les quatre sites d'accueil des urgences du territoire, équipe composée d'une cinquantaine de médecins urgentistes qui se partagent la permanence des soins ; depuis novembre dernier, grâce à cette organisation, l'hôpital de Châtellerault ne fait plus appel aux médecins intérimaires pour combler ses plannings. Il s'agit là d'un exemple parmi d'autres, une centaine de GHT ayant traité de la filière urgence dans leur projet médical et soignant partagé.
On ne peut dire que les GHT évoluent tous selon des visions purement comptables. Néanmoins, vous avez raison : si tous les GHT ont franchi les jalons légaux, leur degré de maturité n'est pas homogène ; les territoires ne sont pas uniformes, les réponses ne sont pas univoques. Les situations des 136 GHT varient très fortement, que ce soit pour ce qui est du nombre de leurs membres – de deux à vingt établissements – , de la population concernée – de 100 000 à plus de 2,5 millions d'habitants – ou de la taille des équipes professionnelles – de 1 200 à plus de 25 000 équivalents temps plein. Toutes ces données sont accessibles à tous, sur le site du ministère des solidarités et de la santé.
Consciente des difficultés et des obstacles auxquels peuvent faire face certains GHT, comme vous le soulignez, la ministre des solidarités et de la santé a décidé d'un accompagnement financier à hauteur de 36 millions d'euros pour les deux prochaines années.
Enfin, le projet de loi discuté la semaine dernière en séance publique prévoit de poursuivre l'intégration des GHT en renforçant la stratégie et la gouvernance médicales en leur sein, en créant des commissions médicales de groupement, en confiant à l'établissement support la gestion des ressources médicales à l'échelle du GHT et enfin en accompagnant les établissements volontaires pour davantage d'intégration, ce qui facilitera l'application de cette stratégie collective au service des populations des territoires.
La parole est à Mme Élodie Jacquier-Laforge, à qui il reste quelques secondes de temps de parole.
Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, pour la qualité de votre réponse et pour les précisions que vous m'avez apportées.
La parole est à M. Pascal Brindeau, pour exposer sa question, no 662, relative au groupement hospitalier de territoire du Loir-et-Cher.
J'illustrerai les interrogations de Mme Jacquier-Laforge par un cas concret. Je souhaite en effet vous interroger, madame la secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, sur le fonctionnement du groupement hospitalier de territoire du Loir-et-Cher, en particulier sur les difficultés rencontrées par le centre hospitalier de Vendôme. Je tiens à préciser, en préambule, que ni les élus du conseil de surveillance, ni les praticiens, ni l'ensemble des personnels de ce centre hospitalier ne sont opposés par principe aux groupements hospitaliers de territoire : nous en comprenons les objectifs en matière de mutualisation, de coopération renforcée et de complémentarité, en vue d'assurer un maillage hospitalier du territoire intelligent.
Pour autant, l'hypercentralisation et l'hyper-personnalisation de la gestion et des décisions actuellement prises au sein du GHT nous posent problème.
Le bon fonctionnement d'un groupement hospitalier de territoire ne peut reposer, je crois, que sur l'équilibre et la confiance, qui font tous deux défaut aujourd'hui. Dans une question écrite, j'ai cité un certain nombre d'exemples illustrant ces difficultés et ces dysfonctionnements. J'en prendrai ici quelques autres, notamment la pression insupportable exercée par la direction du GHT sur les praticiens hospitaliers du centre de Vendôme pour tenter de pallier le manque d'effectifs du centre hospitalier de Blois.
Dans votre réponse précédente, madame la secrétaire d'État, vous évoquiez le problème des urgences. Je veux l'évoquer à mon tour, car les urgences de Vendôme voient passer 22 000 patients par an, alors qu'elles ont été formatées pour en accueillir 16 000. Aucun praticien n'y est toutefois intérimaire : tous sont titulaires, alors que, dans le même temps, le déficit de praticiens au centre hospitalier de Blois soulève des difficultés pour assurer les gardes du SMUR – structure mobile d'urgence et de réanimation. Je pourrais prendre aussi les exemples de la gériatrie ou de la psychiatrie, spécialités dans lesquelles les effectifs du centre hospitalier de Vendôme sont au complet, quand ceux du centre hospitalier de Blois pâtissent malheureusement de départs et de déficits en leur sein.
L'objet de ma question, c'est que le bon fonctionnement d'un groupement hospitalier de territoire ne peut consister à récupérer, si j'ose dire, des effectifs dans un centre hospitalier pour combler les déficits dans un autre. Des solutions doivent donc être trouvées pour assurer l'ensemble des services d'urgence, par exemple du département de Loir-et-Cher, nous en sommes pleinement conscients. Cela implique, de mon point de vue, de revoir les bases des objectifs stratégiques du groupement hospitalier de territoire du Loir-et-Cher et surtout d'y instaurer une gouvernance plus partagée, au bénéfice des principes de confiance et d'équilibre que je souhaite voir se développer.
Je sollicite donc votre intervention, via l'agence régionale de santé du Centre-Val de Loire, pour apporter des réponses concrètes à ces questions.
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Vous m'avez interrogée, monsieur Brindeau, sur la situation du centre hospitalier de Vendôme et les difficultés organisationnelles qu'il rencontre dans le cadre du groupement hospitalier de territoire du Loir-et-Cher.
Comme vous l'avez précisé, il a été demandé aux GHT de regrouper les fonctions achats. Dans ce cadre, le centre hospitalier Simone-Veil de Blois, établissement support du GHT, a mis en place une direction commune pour les achats. À ce titre, le directeur du GHT du Loir-et-Cher a souhaité ne pas procéder, dans un premier temps, à une délégation de signature, le temps de consolider les processus en question.
Il s'agit là, je veux le rappeler, de sujets majeurs car les directeurs de GHT engagent leur responsabilité juridique personnelle. Le directeur de l'établissement support va se rapprocher des directeurs des autres établissements pour objectiver avec eux les difficultés éventuelles ou les points à améliorer.
Pour ce qui concerne les systèmes d'information, les GHT doivent élaborer une convergence. Le GHT du Loir-et-Cher est à ce titre bien organisé puisqu'une direction commune des systèmes d'information est mise en place et une convergence proposée, ce qui répond tout à fait à la politique nationale de l'appel d'offres. Ces engagements, pris dans le cadre du GHT par les directions des établissements concernés, se poursuivront dans les prochains mois.
Nous sommes donc bien dans le cas d'établissements publics qui s'organisent au sein d'un GHT, dans le sens voulu par le législateur. Ce GHT dispose d'une gouvernance au sein de laquelle chacun des membres doit pouvoir s'exprimer, et, grâce à lui, un important travail de convergence a déjà été effectué au cours des deux dernières années.
Le centre hospitalier de Vendôme assure un rôle essentiel sur votre territoire, et je ne doute pas de l'implication de ses responsables pour participer de façon active à la gouvernance du GHT du Loir-et-Cher. Si des évolutions sont attendues, elles doivent se construire de façon constructive entre tous les acteurs, dans l'intérêt du territoire et de ses habitants.
Je m'attendais à votre réponse sur la délégation de signature et l'engagement de la responsabilité juridique du directeur de GHT, madame la secrétaire d'État. Je vous le dis simplement et tranquillement, cet argument ne tient pas du tout, puisque toute délégation de signature engage la responsabilité non seulement du délégataire mais aussi du délégant.
C'est bien l'absence de confiance du directeur du GHT dans le fonctionnement même de ce dernier et le travail collectif ainsi rendu impossible qui posent problème. Et c'est ce problème qu'il faudra régler à l'avenir. Je vous remercie néanmoins de votre réponse.
La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour exposer sa question, no 631, relative à la vente du protoxyde d'azote.
Je veux vous alerter, madame la secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, sur le développement, dans notre pays, de la consommation de protoxyde d'azote – ce fameux gaz injecté dans les siphons pour faire de la crème chantilly. Le phénomène, parti de Lille, se diffuse partout en France. Le « proto », comme on l'appelle communément, est devenu une substance psychoactive parmi les plus utilisées. Les risques liés à sa consommation sont nombreux et réels. Il y a déjà eu des morts, dont un mineur, à cause d'une hyperconsommation de cartouches dédiées à l'usage domestique. De nombreux élus locaux et nationaux, dont je suis, toutes obédiences confondues – y compris de la majorité, donc – , soutiennent, sur le fond, la proposition de loi que j'ai déposée pour interdire la vente de ces cartouches aux mineurs et faire apposer, sur elles, un pictogramme pour les désigner comme des produits dangereux.
« Les ballons, c'est pas comme le tabac, l'alcool, le cannabis : c'est pas dangereux, c'est légal », disait un consommateur régulier, à Roubaix. Ces propos montrent que les risques liés à l'hyperconsommation sont méconnus, du fait du statut du produit. Protéger les mineurs des produits nuisibles en interdisant qu'ils leur soient vendus constitue un premier niveau de réponse, et non le seul : c'est une limite posée, significative, pour un produit qui n'est pas anodin. Ce n'est pas totalement efficace, à cause de la faiblesse des contrôles, mais, au moins, cela limitera la banalisation du produit, chez les mineurs comme chez les majeurs. Est-ce parce que les lois d'interdiction de vente aux mineurs sont mal appliquées qu'il ne faut plus y avoir recours ? C'est la position actuelle du Gouvernement.
Pour vous, une interdiction de vente aux mineurs ne se justifierait pas car, je cite, « cette consommation ne concerne pas seulement les mineurs ». Une législation semblable existe pourtant pour le tabac et l'alcool, eux aussi consommés par tous les publics. Si demain, reprenant votre propre argument, je vous propose la fin de l'interdiction de la vente d'alcool aux mineurs, me suivrez-vous ? Je ne le crois pas, et vous aurez raison.
Par ailleurs, le ministère affirme : « Le problème c'est l'inhalation, pas les cartouches. » On croit rêver ! De toute évidence, l'accès libre aux cartouches, mode de consommation ultra-majoritaire, précède l'inhalation. Ce sont bien les cartouches destinées à la consommation domestique qui posent problème, et le vide juridique total en la matière est une aberration.
Enfin, le ministère récuse l'approche produit par produit. Pourtant, c'est précisément parce que le produit dont je parle fait l'objet d'un usage détourné et qu'il n'est pas seulement une drogue, qu'il doit être abordé de manière spécifique.
Aucun de vos arguments n'est sérieux. Et, sur la question du pictogramme à apposer sur la cartouche, le ministère ne dit absolument rien. Au-delà de vos discours lénifiants sur de potentielles actions de prévention, mettrez-vous à l'ordre du jour du Parlement, précisément au nom de la prévention pour nos enfants, l'interdiction de la vente de ces cartouches aux mineurs et l'apposition, sur elles, d'un pictogramme ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Nous avons bien connaissance des problèmes sanitaires qui se posent sur votre territoire à cause de ces produits depuis plusieurs mois, et je comprends votre sentiment, monsieur Bernalicis. Le protoxyde d'azote est un gaz à usage médical, utilisé par exemple pour les anesthésies, mais aussi à usage commercial, pour la pressurisation d'aérosols.
Pour sa finalité médicale, ce produit est déjà soumis à la réglementation des produits stupéfiants. Pour son usage commercial, dans les aérosols, la réglementation est celle des produits de consommation courante. Compte tenu de l'usage détourné de ces produits, une approche produit par produit, en vue de mettre fin aux pratiques dont vous avez parlé, paraît vaine. Seules des approches de prévention globales auprès des jeunes pourront porter leurs fruits, même si, il faut le reconnaître, nous ne pourrons prétendre à éradiquer complètement certaines pratiques.
Nous comprenons le souhait partagé par plusieurs parlementaires d'interdire la vente aux mineurs du protoxyde d'azote, mais cela serait malheureusement peu efficace. C'est l'inhalation d'un produit dont la finalité n'est pas l'usage qui en est fait qui pose problème, non le produit lui-même. L'usage détourné, dans un but récréatif, s'observe dans les Hauts-de-France, en milieu urbain, essentiellement dans la métropole lilloise et à Valenciennes.
Nous oeuvrons conjointement à l'élaboration d'un plan d'action de prévention avec la ville, la préfecture et l'ARS, l'agence régionale de santé. À Lille, nous travaillons dans le cadre du CLSPD, le conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance. Plusieurs actions sont en cours d'élaboration ou déjà mises en oeuvre : des mesures de prévention menées par les opérateurs habituels – centres de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie – , par les consultations jeunes consommateurs et par le centre d'accueil et d'accompagnement à la réduction des risques des usagers de drogues ; des actions de formation des encadrants sur le sujet des addictions en général ; des mesures de sensibilisation, enfin, qui devraient être adressées aux commerçants pour les inciter à mieux contrôler la vente des cartouches de protoxyde d'azote. À Valenciennes, l'agence régionale de santé a mandaté l'un de ses opérateurs, le groupe « écoute information dépendance », pour alerter et sensibiliser les acteurs du territoire.
Nous privilégions donc la sensibilisation des professionnels qui, dans les domaines de la santé, du social ou de l'éducatif, encadrent les jeunes. À ce jour, il n'a pas été retenu d'actions directes auprès de l'ensemble des jeunes sur ce produit ciblé, afin d'éviter un effet zoom. Le lien sera également établi avec le service sanitaire des étudiants, avec mise à disposition du document élaboré par le centre d'addictovigilance.
La prévention est bien entendu nécessaire, madame la secrétaire d'État, mais, là encore, vous vous reposez sur les moyens existants, qui d'ailleurs vont diminuant – le département du Nord a ainsi revu à la baisse, à hauteur de 5 %, ses dotations à la prévention spécialisée et aux clubs de prévention. Que faites-vous pour compenser ces baisses ? Allez-vous au-devant des problèmes ? Non !
J'ai rencontré les acteurs de terrain, que ce soit la ville ou les clubs de prévention : tous réclament un texte de loi pour interdire la vente aux mineurs du produit dont nous parlons. Cela permettrait au moins un premier effet. Ce seront les commerçants qui sont pénalisés, non les mineurs : sur de tels publics, seule la prévention est efficace, bien sûr. Mais on n'y met pas les moyens.
Vous parlez d'effet zoom. Soit, continuons à ne pas zoomer, jetons une couverture sur la situation, qui, d'ailleurs, n'est pas seulement lilloise : elle s'observe aussi en Picardie, à Strasbourg ou, comme le montrent certains articles de presse, à Montpellier. Bref, le problème se généralise, vous le savez ; il serait temps d'y répondre et d'agir.
La parole est à M. Hervé Saulignac, pour exposer sa question, no 658, relative à la maternité de Privas.
L'ARS – l'agence régionale de santé – Auvergne-Rhône-Alpes a placé sous administration provisoire l'hôpital de Privas, ville préfecture de l'Ardèche, pour une période de six mois qui vient d'être renouvelée. Cette décision fait suite à des difficultés financières majeures de l'établissement et à un climat social particulièrement dégradé, malgré l'immense qualité des personnels qui font l'honneur de la fonction publique hospitalière.
Depuis plus de dix-huit mois, j'alerte l'ARS sur la situation de cet établissement. Dans le cadre des préconisations qui pourraient être faites par l'administrateur, dont je salue ici le travail et les qualités humaines, de nombreux Privadois redoutent la suppression de services, notamment – mais pas seulement – celui de la maternité. Partout en France, le regroupement des accouchements au sein de grands centres hospitaliers se traduit par la fermeture de petites unités et éloigne les populations d'un service chargé de symboles, celui dans lequel, en l'occurrence, de jeunes Ardéchois viennent au monde. La maternité de Die, dans un département voisin de l'Ardèche, est devenue, à cet égard, le triste symbole de la lutte contre la désertification médicale.
C'est pourquoi, avant qu'une décision ne soit prise, j'ai demandé à l'ARS, conjointement avec le maire de Privas, que soit menée une étude d'impact en matière sanitaire et sociale. Cette précaution me semble la moindre des choses. Connaître les conséquences d'une fermeture éventuelle de la maternité de Privas, les alternatives crédibles pour les femmes enceintes et les temps de trajet, variables selon les saisons, c'est tout simplement s'assurer d'agir en connaissance de cause. Il serait en effet incompréhensible de prendre une décision sans en mesurer les conséquences pour les populations vivant dans le bassin privadois.
Je connais le discours rassurant qui consiste à rappeler que la maternité détient une autorisation jusqu'en 2021, mais ce n'est pas ce qui m'intéresse. Ce qui m'intéresse, c'est, premièrement, de connaître les engagements que vous prenez pour stabiliser une équipe de professionnels dans cette maternité afin d'y ramener la sérénité et, deuxièmement, que soit enfin réalisée l'étude d'impact que j'ai demandée avec le maire de Privas et sans laquelle aucune bonne décision ne saurait être prise.
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Monsieur le député, l'hôpital de Privas a été placé sous administration provisoire par l'agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes en octobre 2018 en raison de difficultés financières majeures et d'un climat social difficile. Les premiers constats de l'administrateur provisoire font apparaître une situation plus dégradée qu'initialement, ce qui amène l'agence régionale de santé à envisager la prolongation de l'administration provisoire pour six mois supplémentaires.
Il n'est pas envisagé, vous l'avez bien dit, de remettre en cause l'autorisation de l'activité de gynécologie-obstétrique dont dispose actuellement l'établissement et qui est valable jusqu'en août 2021. Il appartient en revanche au centre hospitalier de Privas d'assurer les conditions techniques et humaines de fonctionnement garantissant qualité et sécurité des soins.
Il convient en outre de rappeler que le centre périnatal de proximité de Die a ouvert le 1er janvier 2018, ce qui a permis 1 125 consultations pédiatriques et de gynécologie et le suivi effectif de 93 parturientes ayant accouché en 2018.
Enfin, vous questionnez de manière générale la pertinence sanitaire de la fermeture des structures de faible activité, affirmant qu'elle est discutable, et n'apporte ni un gage de progrès, ni l'assurance d'un meilleur service à la population. Il me semble important de rappeler à cet égard que la politique menée depuis plus de trente ans a conduit à réduire le nombre de structures effectuant moins de 300 accouchements et que cela a entraîné une baisse significative des taux de mortalité infantile et maternelle. En ce qui concerne les décès encore constatés aujourd'hui en France, l'enquête périnatale de 2016 conclut que plus de la moitié d'entre eux sont considérés comme évitables, dès lors qu'il existe un bon suivi des grossesses à risque et une bonne prise en charge post partum.
Qualité et sécurité des soins doivent être l'unique préoccupation dans la prise en charge adaptée et graduée des parturientes, ce que de nombreux professionnels ont rappelé le mois dernier.
Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, de bien vouloir transmettre mon courrier à la ministre des solidarités et de la santé, qui pourra peut-être m'apporter une réponse plus précise. Car c'est une question très précise que j'ai posée : il est nécessaire de disposer d'une étude d'impact dans l'hypothèse de la fermeture de la maternité de Privas ; voilà la seule question que j'ai soulevée. Vous avez invoqué vous-même la nécessité de la qualité et de la sécurité des soins : je vous demande d'étudier ce que seront la qualité des soins et la sécurité des parturientes lorsque la maternité sera située à plus de trois quarts d'heure de chez elles. C'est, je le répète, la seule question que je vous pose et c'est à cette question que j'attends une réponse de la ministre de la santé.
La parole est à Mme Brigitte Liso, pour exposer sa question, no 642, relative aux violences sexuelles dans le département du Nord.
Ma question s'adresse à Mme la secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations.
En tant que femme et élue du Nord, je ne peux que m'inquiéter de la hausse des violences sexuelles en 2018 : en augmentation sur tout le territoire national, elles ont littéralement explosé dans mon département. Après n'avoir cessé d'augmenter depuis une dizaine d'années, elles y ont en effet crû de 20,8 % en 2018, soit deux points de plus que le niveau national. On constate plus généralement une progression des violences faites aux femmes. Ces chiffres, déplorés par Michel Lalande, préfet du Nord, classent notre département au quatrième rang de ceux qui sont touchés.
Heureusement, en même temps que la parole des femmes se libère, les forces de l'ordre se forment pour recevoir les victimes et traiter leurs plaintes de manière plus efficace. Ce travail de prévention conduit avec des partenaires ciblés, comme les intervenants sociaux ou les gendarmeries, est très bénéfique.
Au mois de juin 2019, la gendarmerie de Lille lancera ainsi un nouvel outil à destination des adolescents, baptisé Car'ado : un véhicule « customisé » interviendra dans le sud du département – en particulier à Avesnes et à Maubeuge, deux villes très touchées – ? lors d'événements sportifs ou festifs, pour sensibiliser les filles et les garçons à la question.
L'initiative vise à prévenir les violences intrafamiliales, plus particulièrement les violences faites aux femmes, à l'aube des relations sexuelles entre garçons et filles. L'objectif est de donner des clés aux filles, pour les faire sortir d'une position de victimes, et de sensibiliser les garçons sur les rapports machistes qu'ils pourraient entretenir avec elles. Le projet permettra également de participer à l'éveil de la citoyenneté chez les adolescents. Car'ado s'appuiera sur plusieurs partenaires : la région, le département, la préfecture, plusieurs directions déconcentrées et des associations.
Cette opération particulièrement intéressante s'insère parfaitement dans la politique gouvernementale de lutte contre les violences faites aux femmes. En fonction de la réussite de l'édition 2019, on pourrait ainsi envisager de l'étendre à l'ensemble du département du Nord, puis à tout le territoire national.
Je souhaiterais connaître l'état de la réflexion de Mme la secrétaire d'État à ce sujet et les éventuelles mesures d'urgence qu'elle envisage dans les départements les plus touchés.
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Permettez-moi, madame la députée, de vous apporter la réponse transmise par ma collègue Marlène Schiappa, qui ne pouvait être présente ce matin.
Le nombre de plaintes pour violences sexistes et sexuelles sont en forte hausse à l'échelle nationale en 2018, de 17 % s'agissant des plaintes pour viol et d'environ 20 % concernant les plaintes pour agression sexuelle. Dans le Nord, la hausse est de 20,8 %, ce qui fera l'objet d'une attention particulière des forces de l'ordre en 2019.
Si ces chiffres sont le signe d'une libération de la parole dont on ne peut que se réjouir, ces violences sont inacceptables, et l'ensemble du Gouvernement s'est engagé à les combattre dans le cadre de la grande cause du quinquennat. Un seul mot d'ordre : ne rien laisser passer.
Plusieurs mesures ont ainsi été mises en oeuvre, concrétisant l'engagement pris par le Président de la République le 25 novembre 2017.
Pour renforcer la condamnation des violences, la loi du 3 août 2018 a créé la verbalisation pour harcèlement de rue – 356 amendes avaient été prononcées au 1er mars – et porté à trente ans le délai de prescription des crimes sexuels commis sur les mineurs.
Pour améliorer la prise en charge des victimes, nous avons lancé, le 27 novembre dernier, la plateforme de signalement en ligne des violences sexistes et sexuelles – en trois mois, 2 000 signalements ont déjà été recueillis – et ouvert dix centres de prise en charge du psychotraumatisme, dont un qui est piloté par le centre hospitalier universitaire de Lille.
Le Gouvernement s'attache à répondre aux besoins exprimés par les acteurs de terrain. Ainsi, près de 9 % du budget que le secrétariat d'État à l'égalité entre les femmes et les hommes dédie à la lutte contre les violences est consacré à la région Hauts-de-France. À Douai, nos services travaillent à la création d'un réseau sur un territoire qui en est démuni depuis un an ; 18 000 euros seront mobilisés pour créer un réseau spécifique d'acteurs et une partie de la levée de la réserve de précaution, à hauteur de 31 000 euros, permettra de financer un accueil de jour spécifique dans le Douaisis. De même, la réforme des établissements d'information, de consultation ou de conseil familial vise à la sensibilisation et à l'accompagnement des jeunes s'agissant de ces questions ; quatre de ces établissements ont été agréés dans le Nord depuis le 3 janvier 2019.
Dès lors, le Gouvernement ne peut que se réjouir de l'investissement d'autres acteurs dans ce domaine, en particulier de l'action de sensibilisation à destination des adolescents que vous venez de nous présenter, déjà expérimentée en Guadeloupe. Il sera attentif aux résultats de l'initiative, dont le lancement est annoncé en juin prochain, avant de proposer, éventuellement, son extension à d'autres territoires.
La parole est à M. Brahim Hammouche, pour exposer sa question, no 656, relative aux frais d'inscription universitaires pour les étudiants étrangers.
Madame la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, le Gouvernement a décidé, en novembre dernier, qu'à compter de la rentrée 2019, les étudiants étrangers non européens devront débourser 2 770 euros en licence et 3 770 euros en master, contre, respectivement, 170 et 243 euros aujourd'hui – pour une dépense moyenne par étudiant de 11 510 euros. Si le Gouvernement entend conforter notre tradition d'accueil des étudiants du monde entier, cette décision ne laisse pas d'inquiéter, en contradiction apparente avec l'objectif gouvernemental d'attirer au moins 500 000 étudiants à l'horizon 2027 dans le cadre du plan « Bienvenue en France ». Elle semble d'ores et déjà affecter l'attractivité des universités aux yeux de bon nombre d'étudiants non européens ; le doyen de la faculté des sciences et technologies de Vandoeuvre-lès-Nancy, qui m'a saisi à ce sujet, a ainsi sonné l'alerte dans un courrier de janvier 2019, où il fait déjà état d'une baisse de 63 % du nombre de candidatures d'étudiants étrangers par rapport à 2018.
Par ailleurs, vous n'êtes pas sans savoir, madame la ministre, l'apport économique des étudiants étrangers au pays, en particulier en Lorraine, bien au-delà des sommes investies par l'État : selon une étude Campus France de 2014, le solde positif annuel du coût et de l'apport de leur formation dépasse 1,5 milliard d'euros ; en 2016, leur apport économique s'élevait à 15 772 euros par étudiant.
Le Gouvernement a certes rappelé la validité du décret de 2013 permettant l'exonération de frais d'inscription de ces étudiants dans la limite de 10 % du total des élèves inscrits à l'université ; toutefois, les inquiétudes demeurent. Vous avez également annoncé la parution d'un décret garantissant que les frais d'inscription pour les étudiants français et étrangers n'augmenteraient pas plus que l'inflation ; je souhaiterais en connaître les modalités d'application, notamment savoir s'il s'agit d'une indexation des frais d'inscription sur l'inflation.
Le Gouvernement veut enfin multiplier par trois le nombre de bourses et d'exonérations destinées aux étudiants internationaux, prioritairement extracommunautaires. Je souhaiterais obtenir des éclaircissements sur les conditions d'attribution de ces bourses et de ces exonérations.
En attendant, je crois plus sage de surseoir à la mesure d'augmentation des frais d'inscription pour les étudiants étrangers.
La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.
Vous l'avez rappelé, monsieur le député, l'objectif de la stratégie « Bienvenue en France » est bien d'attirer davantage d'étudiants internationaux dans notre pays et, à cette fin, non seulement d'améliorer très nettement leurs conditions d'accueil, mais aussi de tripler le nombre de bourses et d'exonérations accordées, pour que tous les étudiants qui veulent choisir la France puissent le faire, quelles que soient leurs conditions de ressources. Pour la première fois, en effet, l'attractivité internationale des universités est devenue une priorité gouvernementale.
S'agissant des chiffres qui circulent et des inquiétudes qui se sont exprimées concernant la baisse du nombre de pré-inscriptions, le processus est en cours s'agissant du master ; pour la licence, nous avons les résultats définitifs, et ils sont stables ; j'insiste cependant sur le fait que le nombre de pré-inscriptions ne correspond pas à celui des inscriptions définitives, seul un dossier sur quatre en moyenne étant finalement retenu par les établissements.
J'insiste également sur le fait que les bourses et exonérations supplémentaires ont déjà été notifiées aux postes et viseront plus particulièrement à permettre de continuer d'accueillir dans d'excellentes conditions financières – mais toujours pas matérielles – les étudiants, notamment originaires d'Afrique francophone.
Quant à la question du report, la possibilité donnée aux établissements d'exonérer de frais d'inscription jusqu'à 10 % des étudiants leur offre une marge de manoeuvre qui leur permet de construire leur stratégie d'attractivité internationale et d'instaurer le système redistributif que nous souhaitons.
Aujourd'hui, beaucoup d'étudiants viennent s'inscrire en France, sans nécessairement estimer le coût total de leurs futures études, notamment celui de la vie et du logement. Voilà pourquoi les universités se sont engagées dans un processus qui leur permettra de définir la manière, à partir des frais d'inscription différenciés acquittés par les étudiants qui le pourront – et ils sont nombreux, dans le monde, à choisir une formation payante, y compris en France – , de créer de vraies bourses d'excellence, grâce auxquelles les étudiants aux revenus les plus faibles, mais tout aussi méritants, bénéficieront de meilleures conditions pour réussir.
Il s'agit en somme d'une stratégie de transformation de la façon dont nous souhaitons accueillir les étudiants internationaux. Nous parlons bien de frais d'inscription différenciés : je l'ai dit, un décret qui sera publié dans les prochains jours confirmera que rien ne change pour les étudiants communautaires.
Je vous remercie, madame la ministre, pour vos propos rassurants. Je m'en ferai le relais auprès des doyens des facultés de ma circonscription qui m'ont saisi et auprès des représentants de l'Assemblée parlementaire de la francophonie, dont je suis moi-même membre. La qualité de notre enseignement supérieur et la qualité de notre recherche contribuent en effet au rayonnement de la francophonie et à l'attractivité du pays. Je pourrai donc rassurer la grande communauté francophone, ici et là-bas.
La parole est à M. Christophe Blanchet, pour exposer sa question, no 645, relative aux PME de la filière spatiale.
Madame la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, la Revue stratégique de défense et sécurité nationale de 2017 a rappelé l'importance cruciale que revêt l'espace pour l'ensemble de nos missions. Si la France reste une puissance spatiale de premier ordre, c'est naturellement grâce à ses grands groupes aérospatiaux. Je souhaite toutefois évoquer les petites et moyennes entreprises – PME – d'excellence qui y contribuent autant, et qui essaiment sur nos territoires. Je tiens à témoigner ici des difficultés qu'elles rencontrent dans l'accès à certains appels d'offres – notamment aux marchés de l'Agence spatiale européenne – ASE.
L'ASE applique un principe de « retour géographique » selon lequel elle passe ses commandes auprès des industries des États au prorata de leur contribution financière. Or les grands groupes français consomment, à eux seuls, la totalité de leur quote-part, privant les PME de cette aide, ce qui les met en situation de concurrence déloyale en Europe, au risque qu'elles délocalisent leurs activités.
Même le ministère des affaires étrangères reconnaît un manque d'efficacité et des distorsions de concurrences. Plus grave encore, nos propres grands groupes préfèrent acheter plus cher, moins bien, un produit qu'une PME française peut créer, précisément parce qu'acheter français reviendrait à réduire l'enveloppe de retour géographique dans laquelle ils puisent. Ainsi, l'entreprise ACMH – Ateliers de construction mécanique de Honfleur – Aerospace & Defence, dans ma circonscription, a encore vu un contrat lui passer sous le nez au bénéfice des Britanniques, alors même que nous sommes en plein Brexit.
Peut-être me rappellerez-vous, madame la ministre, l'existence du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi – CICE. Mais il ne peut représenter qu'une part très modeste du financement, et il comporte des risques quand le retour géographique peut atteindre 70 % des investissements. Madame la ministre, c'est la France qui décide, en dernier recours, quels types de produits et de services entrent dans le calcul du retour géographique. Nous savons que la France a d'ores et déjà entamé des discussions avec l'Agence spatiale européenne sur le sujet des distorsions de concurrences. Au-delà de ces questions qui relèvent de la compétence du ministère des affaires étrangères, pouvez-vous me dire ce que le Gouvernement entend faire pour soutenir les PME de ce secteur ô combien stratégique ?
La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.
Monsieur le député Blanchet, l'industrie spatiale française, secteur stratégique et d'excellence nationale, représente une filière clé de notre économie. Elle a réalisé en 2017 un chiffre d'affaires de 4,6 milliards d'euros, en croissance de près de 5 % par rapport à 2016, et représente plus de 16 000 emplois directs hautement qualifiés. Cette industrie a également un fort effet d'entraînement sur d'autres secteurs d'activité, fournisseurs ou bénéficiaires de services satellitaires.
Vous l'avez rappelé, il est en effet capital que les entreprises françaises, en particuliers les PME, puissent bénéficier pleinement des contrats industriels issus des programmes de l'ASE. Le principe de retour géographique, s'il ne présente pas que des inconvénients, conduit parfois, comme vous le soulignez justement, à des inefficiences dans les grands programmes spatiaux européens, à l'heure où la concurrence s'intensifie sur les marchés internationaux. Néanmoins, un certain nombre de PME maîtrisent des technologies et des compétences clés dans le cadre de la stratégie spatiale de la France et parviennent à obtenir un nombre significatif de contrats de l'ASE.
Des discussions sont en cours afin de faire évoluer la politique industrielle de l'Agence. Les solutions à l'étude sont de deux types. La première voie envisagée serait de réserver une part entre 3 et 5 % du retour géographique national aux PME. L'Allemagne a déjà mis en pratique cette mesure dans deux programmes ASE. Une autre solution envisagée tendrait à intensifier et à inciter plus fortement les coopérations entre les maîtres d'oeuvre et les PME dans les programmes technologiques amont. La France consacre déjà une part significative de la dotation de son programme optionnel de technologie à des actions menées par des PME innovantes. Ces discussions ne sont pas encore achevées mais nous y reviendrons une fois qu'un accord sera défini.
Pour ce qui est de la société ACMH, elle est, vous le savez, en grande partie dépendante de marchés spécifiques passés sous la responsabilité de l'ASE dans le cadre, notamment du programme Ariane. Je rappelle seulement que les grands groupes français du secteur spatial ne proposent pas les produits commercialisés par cette société, et ne peuvent donc capter des contrats à son détriment. Reste néanmoins, vous l'avez souligné, la question de la répartition potentielle du retour géographique. Le projet de délocalisation de cette société comme ses difficultés actuelles pourraient donc s'expliquer par d'autres causes que celles attachées aux limites du principe du retour géographique. Les services de l'État resteront bien sûr vigilants et examineront avec une grande attention tout projet de transformation de cette entreprise afin de garantir à la fois l'activité et l'emploi dans ce territoire.
Je vous remercie pour votre réponse, madame la ministre. En effet cette entreprise mérite d'être suivie et vous en avez bien saisi tous les problèmes. À la veille des élections européennes, c'est aussi un enjeu que de défendre ce secteur afin de rétablir une égalité de traitement entre les PME et les grands groupes.
La parole est à M. Jean-Michel Jacques, pour exposer sa question, no 643, relative au recrutement et à la formation des cybercombattants.
Dans son discours du 18 février dernier, Florence Parly, ministre des armées, a évoqué diverses menaces auxquelles la France doit faire face. Elle a clairement annoncé la nouvelle doctrine offensive de l'État face à la menace cyber : « En cas d'attaque cyber contre nos forces, nous nous réservons le droit de riposter, dans le respect du droit, par les moyens et au moment de notre choix. »
Nos armées souhaitent notamment recruter 1 000 cybercombattants. C'est un véritable défi et, pour y arriver, il va falloir monter en compétence et recruter les meilleurs profils. Vous le savez, le Pôle d'excellence cyber, basé en Bretagne, réunit des représentants des armées, des entreprises et des universités. L'université de Bretagne Sud, d'ailleurs, que j'ai la chance d'avoir dans mon territoire propose deux diplômes d'ingénieurs, un master et proposera, dès le mois de septembre, une licence professionnelle. Elle travaille aujourd'hui avec les opérateurs d'importance vitale, les PME, les services de l'État et les armées, avec pour objectif de former le plus de jeunes possible à la cybersécurité.
Comment le Gouvernement compte-t-il rendre possible le recrutement de 1 000 nouveaux cybercombattants, alors qu'il faut compter avec les énormes besoins de recrutement de toutes nos entreprises et administrations ?
La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
Monsieur le député, l'objectif du ministère des armées de disposer de 1 000 cybercombattants supplémentaires d'ici à 2025, pour répondre aux enjeux de la cyberdéfense, est, en effet, un véritable défi car la ressource humaine disponible à la sortie des écoles et sur le marché du travail n'est pas suffisante pour répondre aux besoins croissants des secteurs publics et privés.
Le ministère des armées a donc entrepris de développer une politique de ressources humaines spécifique pour disposer des effectifs compétents nécessaires. Cette politique se fonde sur l'optimisation de plusieurs leviers : le recrutement, la fidélisation, la formation.
Pour le recrutement, le ministère dispose de véritables atouts : le service de la nation, les opérations, les hautes technologies – tout cela attire. Ces points forts sont valorisés grâce à des campagnes de communication avec une forte participation du commandement de la cyberdéfense – COMCYBER – , et en faisant évoluer les missions des réservistes opérationnels et citoyens, qui sont un rouage essentiel de notre rayonnement. Afin d'augmenter son attractivité dans un contexte concurrentiel avec le secteur privé, le ministère des armées a également fourni un effort substantiel en matière de grilles salariales du personnel civil et commencé à augmenter le nombre de militaires commissionnés, ce qui leur permet de commencer avec un grade et donc une rémunération supérieurs.
En ce qui concerne ensuite la fidélisation, plusieurs mesures sont déjà prises ou en cours d'étude, pour renforcer le sentiment d'appartenance à la communauté cyber du ministère : la création d'un commandement de la cyberdéfense et d'unités regroupant les différents volets cyber, la définition d'un marquant RH cyber et la construction de véritables parcours de carrière.
En troisième lieu, la formation – qui devient de plus en plus continue, modulaire, en alternance, en partenariat avec le monde académique, civil ou industriel, individualisé – est un élément clé car c'est elle qui permet d'améliorer la compétence de chacun en fonction des besoins. Ce processus permet de compenser la difficulté de recruter des experts cyber ab initio. Une formation en continu est également le moyen de motiver un individu à rester dans un domaine très évolutif.
Comme vous pouvez le constater, monsieur le député, le ministère des armées a bien conscience que le recrutement de 1 000 cybercombattants est autant une chance qu'un défi, que nous sommes prêts à relever.
Vous remercierez Mme Parly de sa réponse, monsieur le ministre. Je prends bien en compte tous les efforts fournis par le ministère des armées. Il est important de travailler en amont – je m'adresse ici au ministre de l'éducation nationale que vous êtes – , afin de conduire des jeunes vers cette voie. J'ai récemment participé, dans ma circonscription, à un événement intitulé « Osons au féminin », portant sur le secteur numérique où l'on trouve très peu de femmes. Nous devons amener nos jeunes à s'investir dans la cyberdéfense et dans la cybersécurité, de façon à disposer des forces nécessaires pour assurer la sécurité du pays.
La parole est à Mme Josiane Corneloup, pour exposer sa question, no 648, relative aux moyens du fonds pour le développement de la vie associative.
Ma question, qui s'adresse au ministre de l'action et des comptes publics, porte sur la suppression de la dotation d'action parlementaire – DAP – prévue à l'article 14 de la loi organique no 2017-1338 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique – dotation communément appelée « réserve parlementaire ».
L'effet immédiat de cette suppression pénalise les petites communes, essentiellement rurales, ainsi que les associations qui assurent la vitalité et le dynamisme de nos territoires. Pour pallier la suppression de la réserve parlementaire, qui représentait 50 millions d'euros, le fonds pour le développement de la vie associative, initialement prévu pour financer la formation des dirigeants et bénévoles associatifs, a été abondé par la loi de finances pour 2018 de 25 millions d'euros supplémentaires.
Je tiens à rappeler que le montant des subventions et leur fléchage étaient rendus publics chaque année sur les sites de l'Assemblée et du Sénat. Je vous rappelle également que la réserve parlementaire était un outil indéniable pour créer de la proximité entre les parlementaires, les élus locaux et le monde associatif. Les associations sont le parfait exemple d'un vivre-ensemble harmonieux et solidaire, les bénévoles effectuant un travail remarquable au bénéfice de l'intérêt général. Au vu de la crise du bénévolat en France, il est indispensable de continuer à les accompagner au mieux, afin de les encourager à poursuivre leur action. Ces associations ont désormais beaucoup de difficulté à équilibrer leur budget et certaines sont contraintes d'abandonner leur projet car, dans les faits, le fonds ne permet pas de satisfaire les besoins de toutes les associations. Ce fonds s'adresse prioritairement aux associations ne bénéficiant pas du crédit d'impôt sur la taxe sur les salaires – CITS – , l'équivalent du CICE pour les associations. Toutefois même pour celles concernées, le montant dédié à ce fond est nettement insuffisant.
Concrètement, il apparaît que cette somme de 25 millions d'euros ne permet pas d'aider toutes les associations qui nous sollicitent. Les petites structures associatives sont les victimes de ces nouvelles modalités, faute de moyens suffisants pour répondre à leurs demandes de subventions.
Je vous prie par conséquent de bien vouloir m'indiquer quelles sont les mesures que vous comptez prendre pour soutenir à la fois les projets des petites communes et les associations qui, j'y insiste, ont un rôle crucial en France.
La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
Madame Corneloup, vous avez indiqué que votre question s'adresse à M. le ministre de l'action et des comptes publics. En réalité, c'est bien à moi qu'elle s'adresse, la vie associative figurant dans mon champ de compétences – ainsi, les choses vont bien !
La loi de finances pour 2018 a confié la gestion de 25 millions d'euros au fonds pour le développement de la vie associative – FDVA – chargé d'assurer les missions de l'ancienne réserve parlementaire, selon de nouvelles modalités de gouvernance. Des crédits identiques ont été reconduits par la loi de finances pour 2019.
Le décret du 8 juin 2018 relatif au fonds pour le développement de la vie associative introduit des principes révisés s'agissant de la répartition des crédits par département, d'une part, et, d'autre part, de la gouvernance du fonds au plus près du terrain, afin de tenir compte des attentes précises exprimées par les parlementaires.
Les petites associations sont les premières bénéficiaires de ce dispositif, qui est complémentaire d'autres dispositifs bénéficiant davantage aux grandes – vous les avez mentionnés. Le tout permet d'assurer une certaine équité.
L'instruction du 15 mai 2018 relative au fonds pour le développement de la vie associative et à l'utilisation de ses crédits déconcentrés prévoit que les petites associations bénéficient en priorité de ces crédits, s'agissant notamment des priorités de financement et du plafond de subvention, fixé à 15 000 euros.
Dans le cadre de sa mission interministérielle et intersectorielle, le FDVA, auprès duquel plus de 22 800 associations ont déposé une demande en 2018, a versé l'intégralité des 25 millions d'euros dont il disposait à 9 500 associations, soit 41,5 % de celles ayant présenté une demande. Il s'agit donc d'un fort taux de satisfaction.
Tous les secteurs ont été soutenus, le secteur sportif compris. À titre d'exemple, en Nouvelle-Aquitaine, 32 % des associations ayant déposé une demande appartiennent au secteur sportif : 45 % d'entre elles ont bénéficié d'une subvention.
Le dispositif étant désormais en place, je compte mobiliser les services compétents afin que la campagne 2019 se déroule selon un calendrier amélioré, et que les notifications de subventions soient connues avant l'été. Par ailleurs, les associations auront la possibilité – de façon plus systématique que l'an passé – de déposer leur demande sur le portail officiel de gestion intitulé « Le Compte Asso », afin d'assurer une efficacité accrue.
Après une année d'application de la nouvelle organisation du FDVA, il nous semble important que les parlementaires siègent au collège départemental, au sein duquel ils seront consultés sur les priorités et les propositions de financement territorial.
À la lumière de débats que j'ai suivis dans le cadre du grand débat national, je suis même très ouvert à l'idée de budgets participatifs, permettant de procéder de façon plus équitable et plus transparente – ce qui est d'ores et déjà une vertu du FDVA par comparaison avec le système précédent – , en vue d'une amélioration constante de l'irrigation du territoire et des petites associations.
La proposition de loi visant à améliorer la trésorerie des associations, dont l'examen sera poursuivi ce jour par votre assemblée, pourrait fournir le cadre d'une évolution législative permettant d'associer les parlementaires à leur gouvernance.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. Il est exact que le problème ne réside pas dans la constitution des dossiers, laquelle se déroule relativement bien.
Toutefois, il serait peut-être important de préciser les critères de sélection. En effet, de nombreuses associations ont été déçues, car leur demande n'a pas abouti sans qu'elles comprennent pourquoi, ce qui crée une importante frustration. Comme vous l'avez vous-même indiqué, 41 % des demandes ont été satisfaites, ce qui signifie que plus d'une sur deux ne l'a pas été. Il y a là un vrai problème d'adéquation entre les moyens et la demande.
Vous avez raison !
La parole est à Mme Zivka Park, pour exposer sa question, no 640, relative à la réforme du baccalauréat sur les territoires.
Monsieur le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, je souhaite vous interroger sur la mise en oeuvre de la réforme du baccalauréat.
Un constat s'est imposé : le baccalauréat est trop peu adapté aux ambitions de réussite que nourrit notre jeunesse. L'enseignement supérieur est marqué par un taux d'échec trop important, notamment à l'université – 60 % des étudiants échouent à obtenir leur licence en trois ans et 25 % des jeunes actifs sont au chômage. En outre, l'organisation du baccalauréat est très complexe.
Les Français sont très attachés au baccalauréat, véritable symbole républicain. Toutefois, la forme actuelle du diplôme n'est pas satisfaisante. Dans le cadre de la réforme, dans des territoires bouleversés par la crise, les acteurs du monde de l'éducation se posent des questions sur la place qu'il convient de lui donner, en tant que passerelle vers l'enseignement supérieur.
Le système en vigueur demeure faussement égalitaire. Il ne résout pas la question des inégalités entre les établissements. L'enjeu de la réforme du baccalauréat est de préparer la réussite des étudiants dès le lycée. Il n'en reste pas moins que plusieurs interrogations demeurent s'agissant de la mise en oeuvre de la réforme.
Il faut conserver à l'esprit que la génération qui connaîtra la réforme du baccalauréat a déjà vécu celle du collège. Dans les territoires, le corps enseignant et les parents des lycéens redoutent un accroissement des inégalités, en raison du risque de concurrence entre les lycées d'un même bassin, entre les disciplines et entre les personnels.
Monsieur le ministre, comment comptez-vous intégrer la notion de territoire dans les politiques éducatives ? Comment penser en réseaux d'établissements, afin d'organiser au mieux la carte des spécialités et la progression des programmes en vue d'anticiper le frein à la mobilité dans les territoires ?
La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
Madame Park, votre question est très importante. Dans le débat public en cours, on entend beaucoup d'affirmations partiellement fausses à ce sujet.
Comme vous le savez, la réforme du baccalauréat – qui comporte une réforme des lycées général et technologique comme de la voie professionnelle – a pour objectif non seulement l'élévation du niveau général, mais aussi la justice sociale, laquelle est aussi un enjeu de justice territoriale.
Il s'agit d'un enjeu de justice sociale, car l'objectif est justement de lever les prédéterminations. Par exemple, j'entends parfois dire que le nouveau système rendra l'orientation plus précoce qu'elle n'était précédemment. C'est totalement faux, c'est même le contraire.
Dans le système ayant prévalu jusqu'à présent, l'orientation était assez précoce. On devait choisir, en fin de seconde, entre l'une des trois voies d'enseignement général. Le plus souvent, si on ne choisissait pas la voie S, on se fermait plusieurs portes, notamment celles des études scientifiques.
Nous instaurons un système permettant au contraire de se déterminer en fonction d'un choix de spécialités bien plus vaste. N'oublions pas que le premier gain pour l'élève – de seconde, en l'occurrence – , si on le compare aux générations antérieures, est d'avoir un plus grand nombre de choix, ce qui est un vecteur d'équité.
Il s'agira en général d'une trentaine de combinaisons, parfois d'une vingtaine, en tout état de cause bien plus nombreuses que les trois combinaisons toutes faites d'aujourd'hui. Cette liberté est un vecteur d'égalité – c'est un fait.
L'implantation territoriale des spécialités a également fait l'objet de nombreux fantasmes. Il suffit, pour s'en rendre compte, de comparer les discours que certains tenaient aux mois de novembre et décembre et, juste avant les vacances de Noël, l'implantation territoriale des spécialités.
Chacun a constaté que la promesse était tenue. Nous avons fait preuve d'une volonté de justice territoriale, reposant sur une implantation, que je qualifierai de surcompensatoire, des spécialités attractives dans les établissements qui doivent gagner en attractivité.
Les statistiques le confirment. À l'heure actuelle, seuls 84 % des lycées publics offrent les enseignements des trois séries L, ES et S. Je n'entendais personne, soit dit en passant, s'émouvoir au sujet des 16 % de lycées publics qui ne les offraient pas.
Désormais, 92 % des lycées publics proposent au moins sept enseignements de spécialité. C'est donc un progrès au regard des trois voies préexistantes. Les 8 % d'établissements restants sont des lycées très petits, et non des lycées très défavorisés – ce n'est pas la même chose.
Par ailleurs, le nouveau lycée enrichit l'offre d'enseignement des établissements où sont scolarisés les élèves socialement les plus défavorisés. À l'heure actuelle, 82 % des lycées publics les plus défavorisés offrent les enseignements des trois séries L, ES et S. Désormais, 88 % des établissements de cette catégorie dispensent au moins sept enseignements de spécialité.
À l'évidence, l'existence d'une diversité de parcours est un enrichissement. À l'heure actuelle, certains élèves n'ont pas accès aux enseignements proposés dans la série qu'ils choisissent. Les défauts que l'on prête au futur système sont en réalité ceux du passé, que nous avons réussi à atténuer.
Ainsi, dans la voie générale, les enseignements artistiques approfondis ne sont accessibles qu'aux seuls élèves de la série L, soit 10,7 % des élèves de la voie générale en 2017. À la rentrée 2019, tous les élèves pourront choisir parmi les enseignements proposés dans leur établissement. Les enseignements de spécialité artistique, par exemple, sont proposés dans 43,8 % des lycées publics.
Les rectorats ont adopté une vision territoriale doublée d'une exigence d'équité, afin que, grâce à la mise en place de réseaux d'établissements, les élèves puissent bénéficier de cours dispensés dans un autre établissement que le leur si nécessaire.
Quoi qu'il en soit, l'offre est plus riche établissement par établissement. On peut en prendre plusieurs exemples. À l'heure actuelle, l'enseignement du latin ou du grec est proposé dans 12 % des lycées publics ; l'enseignement de spécialité « Littérature et langues et cultures de l'Antiquité » sera proposé dans 24 % des lycées publics, soit un doublement de cette proportion.
En outre, dans 74 % des établissements publics, les élèves pourront choisir de suivre l'enseignement optionnel de langues et cultures de l'Antiquité. Il s'agit d'un progrès considérable, salué comme tel par les spécialistes du sujet.
S'agissant de l'enseignement de l'informatique, seuls 3,5 % des élèves l'étudient au lycée. Dans la nouvelle configuration, 53 % des établissements publics proposeront l'enseignement de spécialité « Numérique et sciences informatiques ». Le progrès sera donc indéniable. Voilà, me semble-t-il, ce qu'il faut d'abord noter s'agissant de la réforme du lycée.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. J'ai rapidement contacté le directeur académique des services de l'éducation nationale – DASEN – du Val-d'Oise, qui m'a pleinement rassurée à ce sujet. Hormis trois lycées du département, celui-ci sera couvert par tous les enseignements de spécialité.
S'agissant de la neuvième circonscription du Val-d'Oise, si toutes les options ne sont pas enseignées dans chaque lycée, elles ont été réparties en fonction de la distance entre lycées, afin d'éviter que ceux-ci ne soient mis en concurrence. Il faudra demeurer vigilant.
La parole est à M. Julien Aubert, pour exposer sa question, no 650, relative au remplacement des filières par des spécialités dans la réforme du lycée.
Monsieur le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, la réforme du lycée promue par le Gouvernement doit bientôt entrer en vigueur. Elle prévoit notamment la suppression des filières littéraire, économique et sociale ainsi que scientifique et leur remplacement par ces fameuses spécialités.
Lycée à la carte, simplification, davantage de liberté aux élèves : j'ai bien pris note de votre argumentaire, même si je tiens à relativiser quelque peu l'enthousiasme généralisé qu'il suscite, s'agissant de jeunes de 15 ans devant faire un choix qui les engage. En effet, il existe des effets de cliquet : si vous choisissez les mathématiques, il n'est pas possible de modifier complètement vos enseignements par la suite si vous vous êtes trompé.
Cette simplification donne du fil à retordre à la grande majorité des parents d'élèves. Soucieux de faire les bons choix et d'accompagner leurs enfants scolarisés en seconde, ceux-ci sont confrontés à des choix cornéliens, notamment faute de visibilité sur la correspondance entre ce qui sera exigé dans l'enseignement supérieur et les spécialités requises pour y entrer.
Pour renforcer cette simplification, toutes les options et spécialités ne sont pas enseignées dans tous les établissements. Des regroupements par secteur – donc des mutualisations – sont à prévoir.
Je prendrai l'exemple de Carpentras, ville située dans ma circonscription, où les élèves du lycée Victor-Hugo souhaitant continuer l'option de provençal devront traverser la ville en marchant, ce qui leur prendra une bonne vingtaine de minutes, pour se rendre dans un lycée voisin, soit en tout quarante minutes de temps perdu. Une autre difficulté sera de trouver le bon horaire pour les deux lycées, avec le risque que les cours n'aient lieu très tôt le matin ou tard le soir. Il y a de quoi décourager les plus volontaires, même s'il existe des adeptes du provençal qui sont sportifs ! Cette perspective a suscité un vif mécontentement parmi les défenseurs de la langue et des cultures provençales, dont je suis. Ils y voient la fin de l'enseignement des langues régionales.
Je prendrai un second exemple. À Apt, autre ville de ma circonscription, un élève souhaitant étudier les sciences de l'ingénieur devra se rendre dans un lycée situé à l'Isle-sur-la-Sorgue, à une quarantaine de kilomètres. Or plusieurs études ont démontré que l'accroissement du temps de trajet entre le domicile et l'établissement scolaire est un facteur important de décrochage et d'échec.
Monsieur le ministre, je souhaite appeler votre attention sur ces points. Le risque n'est pas de tendre vers un baccalauréat d'excellence, il est de tendre vers un baccalauréat déséquilibré entre les territoires. Vous avez évoqué la justice sociale : je tenais à appeler votre attention sur la justice territoriale.
La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
Monsieur Aubert, votre question est complémentaire de la précédente. Je ne répéterai pas ce que j'ai dit au sujet de la répartition des enseignements de spécialité. Par ailleurs, je reconnais qu'il existe entre justice sociale et justice territoriale une relation très forte.
Vous avez soulevé plusieurs points. S'agissant du risque de confusion découlant d'un choix accru, il s'agit d'un argument que l'on peut toujours avancer dès lors que le champ de la liberté s'étend. Nous offrons plus de choix – on peut appeler cela plus de confusion.
Je profite de ma réponse à votre question pour signaler qu'il existe des points de repère, notamment le site internet horizons2021. fr, que nous avons créé. Il est emblématique de la logique à l'oeuvre, car il permet aux élèves de seconde de se poser de bonnes questions au sujet de leur avenir.
Ils ne s'agit pas de le faire de façon définitive, ce qui induirait une orientation précoce plaçant les élèves dès la classe de seconde dans un couloir choisi à seize ans, alors que nous serons tous d'accord pour considérer que la plupart des élèves, à seize ans, ne savent pas ce qu'ils veulent faire plus tard, ce qui est bien normal.
La réforme permet précisément de tenir compte de cette réalité. Elle permet – notamment grâce au site internet horizons2021. fr – de réfléchir aux spectres des possibilités offerts par l'enseignement supérieur et aux correspondances entre ces spectres et les différents parcours conduisant à ces possibilités.
La réforme permet donc à un élève de seconde de se poser des questions qui, jusqu'à présent, ne se posaient pas si tôt. Elles se posaient à lui plus tard, voire trop tard, au risque de le confronter à un échec dans l'enseignement supérieur.
Les réponses qu'apporte l'élève sont des premières réponses. Elles ne sont pas définitives. En clair, il devra, une fois en classe de première, procéder à des arbitrages entre enseignements de spécialité.
Par ailleurs, les débats sur les enseignements de spécialité ne doivent pas nous faire oublier qu'il existe un bloc commun d'heures – occupant la majorité des heures d'enseignement – destiné à tous les lycéens. Ne l'oublions jamais lorsque nous débattons de la réforme.
Ainsi, la prédétermination est moindre qu'elle n'était précédemment, les choix plus nombreux et l'implémentation plus juste. Bien entendu, vous pourrez toujours citer tel ou tel exemple, monsieur Aubert – je connais, par définition, moins bien que vous ceux que vous avez cités. En tout état de cause, il faut toujours comparer la situation obtenue avec la précédente.
Dans le cas des langues régionales, il était très fréquent de demander aux élèves de changer d'établissement pour étudier une langue régionale, ou une langue étrangère rare. La réforme du lycée n'accentue pas ce phénomène ; elle ouvre au contraire de nouvelles opportunités aux langues régionales – point à noter pour tous les partisans de celles-ci : les élèves peuvent choisir un enseignement de spécialité non seulement en langue étrangère, mais aussi en langue régionale, en corse par exemple. Je rappelle que l'horaire hebdomadaire est de quatre heures en classe de première, puis de six heures en classe de terminale.
La réforme du lycée a permis de mener une réflexion sur l'égalité territoriale. Vous pouvez, certes, constater telle ou telle insuffisance du système, mais nous sommes incontestablement en progrès par rapport à la situation antérieure, tant sous l'angle de l'égalité territoriale – offre dans chaque lycée mais aussi mise en réseau des lycées – que de celui des nouvelles libertés proposées aux lycéens.
Il demeure un problème : vous allez revoir le poids et la notation des options au baccalauréat. Vous dites qu'il est inconcevable que des élèves aient plus de vingt sur vingt à l'examen. Mais si l'option est enseignée à l'autre bout de la ville, et que de surcroît vous savez qu'elle ne comptera pas véritablement, les élèves risquent de se décourager : pourquoi, dans ces conditions, suivre trois heures d'enseignement de provençal ?
Il faut donc à mon sens revoir le poids des options. De plus, des lycées verront disparaître telle ou telle option.
S'agissant du bloc commun, je note que l'horaire alloué à l'enseignement moral et civique est de trente minutes : je sais que c'était déjà le cas mais, au vu de la crise démocratique que nous traversons, il faudrait peut-être songer à en augmenter substantiellement la durée !
La parole est à M. Pierre-Yves Bournazel, pour exposer sa question, no 660, relative à l'avenir du théâtre Le Lavoir moderne parisien.
Ma question s'adresse à M. le ministre de la culture, mais je remercie Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances de répondre au nom du Gouvernement.
Elle porte sur la situation du Lavoir moderne parisien, théâtre de la Goutte d'Or, qui joue un rôle majeur d'offre culturelle de proximité, pour l'accès de tous à la culture et pour l'égalité des chances. Les difficultés rencontrées par le Lavoir moderne parisien sont très représentatives de celles auxquelles sont confrontés de petits théâtres dynamiques dans les quartiers populaires – c'est d'ailleurs le seul théâtre de la Goutte d'Or. Il est aujourd'hui menacé de fermeture par un nouveau projet immobilier plus rentable. Or, le Lavoir moderne parisien propose une offre culturelle essentielle : il est primordial de le sauver, dans l'intérêt général, car il effectue un formidable travail de transmission de la culture et des pratiques artistiques, grâce à une grande variété de représentations théâtrales, philosophiques et artistiques.
L'offre culturelle de proximité est essentielle dans tous les quartiers quels qu'ils soient, car d'une part la demande y est forte, et d'autre part l'éveil culturel dans les quartiers dits « populaires » participe de l'égalité des chances en faisant découvrir de nouveaux horizons aux enfants et aux familles qui au départ ont un moindre capital social et culturel.
Il faut porter et soutenir une solution alternative qui préserve ce théâtre.
En tant qu'élu du dix-huitième arrondissement, et député de la dix-huitième circonscription de Paris, je soutiens la mobilisation légitime de l'équipe du Lavoir moderne parisien et je ne suis d'ailleurs pas le seul : de nombreux élus, des personnes du monde associatif, des habitants et des acteurs de renom du monde culturel se mobilisent également, dans l'intérêt général.
Comme disait André Malraux : « La culture ne s'hérite pas, elle se conquiert ». Nous continuerons ainsi de nous battre pour préserver et soutenir l'offre de création culturelle parisienne. Madame la secrétaire d'État, nous avons besoin du soutien du Gouvernement pour nous aider à sauver le Lavoir moderne parisien ; nous souhaitons qu'il demeure dans le quartier de la Goutte d'Or.
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances.
La direction régionale des affaires culturelles d'Île-de-France a été saisie par les deux associations théâtrales Procréart et Graines de soleil d'une demande de protection du Lavoir moderne parisien au titre des monuments historiques. Après plusieurs visites sur place, la DRAC a toutefois considéré que l'édifice ne remplissait pas les conditions pour une protection au titre des monuments historiques – ce qui aurait apporté une réponse à vos inquiétudes.
Saisie en parallèle par la DRAC, la mairie de Paris a indiqué qu'une protection au titre du plan local d'urbanisme – PLU – n'était pas non plus justifiée, compte tenu des nombreuses transformations subies par les lieux : ne subsiste en effet de l'ancien lavoir que la structure en charpente de la salle inférieure, visible dans l'actuelle salle de théâtre. Le signalement existant de la parcelle au PLU « pour son intérêt patrimonial, culturel ou paysager » apparaît donc suffisant au vu de l'état et des caractéristiques des bâtiments. Ceux-ci sont par ailleurs situés dans le périmètre de protection des abords de l'église Saint-Bernard, mais hors champ de visibilité.
En vertu de l'ordonnance de 1945 sur les salles de spectacles, tout changement d'affectation ou tout projet de démolition d'un lieu abritant une salle de spectacle est en revanche soumis à autorisation du ministre chargé de la culture. La direction générale de la création artistique du ministère de la culture avait rappelé cette réglementation au précédent propriétaire des lieux par un courrier en date du 23 octobre 2012. Toutefois, si la protection conférée par l'ordonnance précitée vise à préserver la destination des lieux de théâtre, elle ne permet pas de s'opposer au droit du propriétaire de mettre fin au bail. De plus, elle ne trouvera à s'appliquer que lorsque le propriétaire aura manifesté son intention de démolir ou de changer l'affectation de la salle de spectacle.
Or, à ce jour, il ressort de plusieurs rencontres des services de la ville de Paris avec le propriétaire du Lavoir moderne parisien qu'il n'a pas été question de faire disparaître la salle, ni d'en modifier l'affectation – ce qui, je l'espère, va dans le sens que vous souhaitez.
Le ministère de la culture a demandé à ses services de suivre avec la plus grande attention la situation du Lavoir moderne parisien, ainsi que l'activité théâtrale de l'association Graines de soleil, qui effectue un travail remarquable.
Nous partageons votre objectif : préserver l'affectation culturelle de ce lieu.
Merci, madame la secrétaire d'État, de ces propos clairs et de votre soutien. Il faut à mon sens passer à l'offensive de façon encore plus nette : le ministère de la culture, la ville de Paris, les associations concernées et les habitants doivent se mobiliser pour créer un rapport de forces. Ce lieu, ouvert à tous les citoyens de Paris, comme à tous ceux qui viennent dans la capitale découvrir ses créations, doit garder son âme.
Il faut une coordination des services, un pilotage, une volonté politique ; et un véritable soutien doit être apporté aux associations qui font vivre le Lavoir moderne parisien. Nous nous battrons jusqu'au bout pour le sauver.
La parole est à Mme George Pau-Langevin, pour exposer sa question, no 657, relative à l'avenir de la Maison du peuple de Clichy.
Ma question s'adresse à M. le ministre de la culture, mais je fais confiance à Mme la secrétaire d'État pour répondre au nom du Gouvernement.
La Maison du peuple, située à Clichy-la-Garenne, est classée monument historique depuis 1983. À l'avant-garde architecturale dans la France d'entre-deux-guerres, le bâtiment est construit dans ce quartier de la banlieue parisienne entre 1936 et 1938, résultat des politiques municipales menées par le Front populaire. Exemple marquant de l'histoire de la construction en acier, la Maison du peuple de Clichy illustre l'union indissoluble de la culture et des techniques, de la forme et de la construction. Premier bâtiment préfabriqué à mur-rideau et à structure métallique, il est doté de cloisons coulissantes, de sols amovibles et d'un toit ouvrant. L'équipe d'architectes, dirigée par Jean Prouvé, a créé un dispositif fonctionnel complexe, sous la forme de deux volumes simples juxtaposés, suivant les conseils de l'ingénieur aéronautique Bodiansky et dans les ateliers mécaniques de Schwartz-Haumont.
Or un projet lauréat de l'appel à projets Inventons la Métropole du Grand Paris, imaginé par Rudy Ricciotti, LBA et Holzweg, propose d'ajouter une tour de 96 mètres à cet édifice pourtant pourvu du plus haut degré de protection patrimoniale. Les porteurs du projet annoncent une opération mixte, mêlant hôtel, logements de standing, centre culturel et espaces commerciaux. Ce projet, qui semble servir principalement des intérêts purement privés, risque de priver les amoureux de la culture d'un lieu patrimonial remarquable. En octobre 2018, alors ministre de la culture, Mme Françoise Nyssen avait annoncé par courrier au maire de Clichy qu'elle venait de confier à l'inspection des patrimoines « une mission d'analyse du projet » de la Maison du peuple.
Quelles mesures le ministère de la culture entend-il prendre pour éviter la défiguration de ce monument ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances.
Construite de 1937 à 1939 par les architectes Marcel Lods et Eugène Beaudoin, et marquée par les interventions innovantes de Jean Prouvé et Vladimir Bodiansky sur les aménagements intérieurs, la Maison du peuple a, comme vous l'avez rappelé, été classée en totalité au titre des monuments historiques en 1983. Cette protection, qui avait fait débat à l'époque, constituait un acte fondateur : la qualité de monument historique était reconnue à une oeuvre de l'architecture du XXe siècle – aujourd'hui considérée comme faisant partie de notre patrimoine à part entière.
La ville de Clichy a proposé pour cet édifice – dont l'état de conservation est malheureusement très préoccupant en dépit de travaux de restauration menés à la fin des années 1990 – un projet architectural reposant, d'une part, sur la restauration de la Maison du peuple et, d'autre part, sur l'adjonction à cet édifice d'une tour dont la construction serait confiée à l'architecte Rudy Ricciotti. Ce projet, qui témoigne de la volonté légitime des élus de développer le logement à Clichy et de valoriser la ville par un geste architectural fort accompagnant la rénovation de la Maison du peuple, pose la question de sa compatibilité avec la protection de ce dernier bâtiment au titre des monuments historiques. Si les adjonctions contemporaines sur des monuments protégés sont possibles, et se produisent d'ailleurs régulièrement, elles doivent aussi prendre cette protection en considération.
Le ministre de la culture a reçu les élus qui défendent ce projet. Les services du ministère de la culture ne sont pas encore saisis au titre des autorisations de travaux sur monuments historiques, mais le ministre leur a demandé de porter la plus grande attention à ce projet, afin que les objectifs de celui-ci s'inscrivent dans un cadre compatible avec la nécessaire protection au titre des monuments historiques dont bénéficie la Maison du peuple.
Merci, madame la secrétaire d'État. Je me félicite de ces précisions, ainsi que de l'assurance que le ministère de la culture considère ce projet avec une grande attention. Je souligne néanmoins que la ville de Clichy dispose d'espaces importants – où poussent d'ailleurs de plus en plus de bâtiments, à usage de commerce ou d'habitation. Elle est donc tout à fait à même de réaliser un geste architectural innovant sans avoir besoin de toucher à la Maison du peuple, précieux témoignage de l'architecture de l'entre-deux-guerres.
La parole est à Mme Manuéla Kéclard-Mondésir, pour exposer sa question, no 634, relative aux congés bonifiés des fonctionnaires originaires des outre-mer.
Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics. Le 11 janvier dernier, une réunion interministérielle sur la réforme des congés bonifiés s'est tenue à Matignon. Il n'est pas de notre volonté de nous opposer au principe d'une réforme en la matière ; mais le Gouvernement touche là à une mesure qui a été instituée par Michel Debré et Raymond Barre, deux Premiers ministres issus des outre-Mer, qui entendaient ainsi ramener un peu d'égalité dans la situation des fonctionnaires, qu'ils soient d'origine ultramarine ou métropolitaine.
En effet, un fonctionnaire métropolitain, même éloigné de sa région et de sa famille, peut y retourner chaque week-end ou chaque mois ; c'est impensable pour un fonctionnaire originaire d'outre-mer muté en métropole, comme pour un fonctionnaire métropolitain muté outre-mer. Le dispositif concerné vise donc bien à réduire une inégalité de situation. Et on comprend l'émotion des familles, ici comme outre-mer.
Pouvez-vous confirmer que la réforme que vous envisagez maintiendra le principe de la surrémunération pour tenir compte du coût de la vie chère outre-mer ? Pouvez-vous également nous confirmer que les fonctionnaires – qui partent évidemment en famille – n'auront pas à faire l'avance des billets d'avion, quelle que soit la fréquence retenue ?
Il serait peut-être plus judicieux de conforter le droit au recours des congés bonifiés, trop souvent remis en cause, selon l'appréciation aléatoire des critères des intérêts matériels et moraux par les administrations. Une définition claire s'impose. Ces congés ne doivent pas non plus être remis en cause en cas de prise de congés maternité ou parentaux, qui font repartir de zéro la période de trois ans, ce qui empêche parfois tout retour.
Nos populations veulent être rassurées sur ces questions. Aussi, madame la secrétaire d'État, pouvez-vous clarifier les principes de la réforme en cours ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances.
Madame la députée, lors de son discours en Guyane pour le lancement des Assises de l'outre-mer, le 28 octobre 2017, le Président de la République a lancé une réforme des congés bonifiés. Lors de la restitution de ces assises, le 28 juin 2018, il a confirmé cette attention, annonçant une réforme du dispositif, qui sera effective à compter de 2020 pour les fonctionnaires, avec un objectif et un principe simples : les congés, moins longs, seront désormais autorisés tous les deux ans.
Afin de poursuivre cet objectif, le Gouvernement a souhaité qu'une concertation associant les organisations syndicales représentatives et les employeurs des trois versants de la fonction publique soit organisée à compter du mois de mai 2019. Cette concertation doit notamment permettre d'évaluer le dispositif, dont les caractéristiques actuelles ont été déterminées en 1978 et, le cas échéant, d'identifier les évolutions pertinentes.
En toute hypothèse, et conformément aux annonces du Président de la République, les travaux seront conduits, non pas pour remettre en cause le droit à congés bonifiés, mais pour en moderniser les modalités d'application, de façon à permettre aux personnes concernées de bénéficier de congés plus fréquents, tout en répondant aux enjeux d'efficacité et de continuité des services publics.
Le régime actuel des congés bonifiés n'est plus adapté à notre temps, ni à nos modes de transport et de congés. Le système doit être réformé, non pas pour satisfaire des objectifs budgétaires, mais pour répondre à une meilleure organisation des services et permettre aux agents des retours plus fréquents.
Le Gouvernement souhaite une politique qui incite à revenir en outre-mer plus rapidement, plus facilement, plus souvent, et moins longtemps. L'objectif poursuivi est qu'au lieu de partir tous les trois ans, les agents publics de l'Hexagone, qui ont leurs intérêts matériels et moraux dans les territoires d'outre-mer, pourront partir tous les deux ans avec leur famille, dès l'année 2020, pour ceux qui sont partis en 2018.
Par ailleurs, le congé supplémentaire de trente-cinq jours, qui perdurait pour des raisons historiques, ne se justifie plus aujourd'hui. Seuls les temps de trajet devront être accordés aux bénéficiaires.
Vous avez également raison de souligner, madame la députée, que la question du maintien ou non de la surrémunération ne doit pas être un sujet de la discussion.
Enfin, je me permets de vous indiquer que le Gouvernement ne souhaite pas que les agents aient à faire l'avance des billets d'avion, car cela représenterait une charge trop importante pour un foyer. Il nous faudra trouver un moyen souple et adapté aux propositions, souvent changeantes, des liaisons aériennes.
L'ensemble de ces sujets seront discutés dans le cadre d'une concertation, qui débutera dans les prochaines semaines, pour aboutir à l'été 2019.
J'entends qu'une concertation sera menée avec les représentants des fonctionnaires concernés. Revenir plus souvent, par exemple au bout de deux ans, est une mesure positive, permettant aux fonctionnaires de maintenir le lien avec les familles.
Vous avez apaisé notre inquiétude en répondant à notre principale interrogation, qui portait sur l'avance des billets d'avion. Vous m'avez répondu sur la surrémunération. Compte tenu de l'évolution des conditions de transport depuis 1978, il faudra notamment revoir les modalités de prise en compte des périodes de congés.
Je vous fais donc confiance pour mener à bien la concertation avec les acteurs concernés.
La parole est à Mme Béatrice Descamps, pour exposer sa question, no 661, relative à la déduction des frais de double résidence à titre professionnel.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'action et des comptes publics. Je vous remercie, madame la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, de le représenter ici.
Les conditions de déduction des frais de double résidence à titre professionnel étant très strictes, afin d'exclure les cas de double résidence pour convenance personnelle, elles privent malheureusement certains Français de cette possibilité, pour des justifications et critères aussi divers que fluctuants.
L'actualité témoigne qu'il est temps de favoriser la double résidence à titre professionnel, pour plusieurs raisons.
Sur le plan de la sécurité, d'abord : à l'heure où nous luttons contre les décès sur les routes, comment peut-on favoriser les déplacements longs et quotidiens en voiture, augmentant la fatigue, donc la fréquence des accidents, au lieu de permettre aux travailleurs qui le souhaitent de rester sur place ?
Sur le plan écologique, ensuite : comment peut-on prôner une transition écologique et énergétique, en continuant à déduire des frais de déplacement en voiture au détriment des frais de double résidence, déduction pourtant bien plus écologique et durable, puisqu'elle occasionne moins de déplacements en voiture ?
Madame la secrétaire d'État, au-delà des complexités du dispositif de double résidence, qui peuvent exclure des situations pourtant légitimes et mettre en difficulté des Français simplement parce qu'ils travaillent, pouvez-vous m'indiquer quelles actions prévoit votre ministère pour revoir ou modifier ce dispositif, afin de l'assouplir ou de l'aménager, et d'être enfin en cohérence avec les divers objectifs que le Gouvernement s'est fixés ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances.
Madame la députée, en application du 3o de l'article 83 du code général des impôts, les salariés qui optent pour la déduction de leurs frais professionnels pour leur montant réel et justifié peuvent déduire les frais de double résidence de leur revenu imposable à l'impôt sur le revenu.
Ainsi que le précise la doctrine administrative publiée au Bulletin officiel des finances publiques-Impôts BOI-RSA-BASE-30-50-30-20, ces frais de double résidence s'entendent des dépenses supplémentaires « effectivement supportées par un salarié qui résultent de la nécessité pour ce dernier de résider pour des raisons professionnelles dans un lieu distinct de celui de son domicile habituel ».
Si la double résidence est justifiée par l'impossibilité de maintenir une seule résidence compte tenu du lieu de travail de chacun des conjoints, et qu'elle ne résulte pas d'un choix de simple convenance personnelle, les dépenses de double résidence ont alors le caractère de frais professionnels, y compris en l'absence de diligences en vue d'obtenir un rapprochement des lieux de travail.
Cette règle s'applique sans restriction, qu'il s'agisse de salariés du secteur privé ou du secteur public, et que le changement du lieu de travail de l'un des conjoints résulte d'un avancement professionnel ou de tout autre motif indépendant de sa volonté.
Le point de savoir si ces conditions sont réunies s'apprécie au regard des circonstances de faits propres à chaque situation, et, en toute hypothèse, sous le contrôle du juge de l'impôt. L'ensemble de ces dispositions témoigne de la volonté du législateur de fixer un cadre juridique adapté, permettant de prendre en compte la situation des personnes se trouvant en mobilité professionnelle.
Je comprends votre souhait d'assigner à ce dispositif de déduction des frais de double résidence un objectif environnemental. Cependant, vous l'avez dit, il s'agit aussi d'un mécanisme visant à lever des freins à la mobilité professionnelle, et à tenir compte des dépenses professionnelles réellement supportées.
Étendre la possibilité de déduction des frais de double résidence à des situations résultant de choix de convenance personnelle ne permettrait pas d'atteindre l'objectif que vous poursuivez, et conduirait surtout à des effets d'aubaine.
En revanche, je tiens à vous rappeler qu'à l'initiative du Gouvernement, plusieurs mesures encourageant les pratiques vertueuses sur le plan environnemental ont été adoptées à la fin de l'année 2018. La prise en charge des frais de covoiturage en tant que passager par l'employeur, pour les trajets entre le domicile et le lieu de travail, est ainsi exonérée de charges sociales et d'impôt sur le revenu, dans la limite de 200 euros par an.
L'aide allouée par certaines collectivités territoriales pour ces mêmes déplacements, en tant que conducteur en covoiturage, est également exonérée, dans la limite de 240 euros par an. Avec la prime à la conversion, des mesures ont en outre été prévues pour faciliter la conversion des véhicules les plus polluants. Enfin, le projet de loi d'orientation sur les mobilités comporte également des propositions, opérant une refonte plus complète des dispositifs de soutien au trajet entre le domicile et le travail.
Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, de votre réponse. Comme vous l'avez compris, même si vous évoquez un jugement au cas par cas, je suggérais un assouplissement des conditions très strictes du dispositif. Cette question m'a d'ailleurs été posée par un habitant de ma circonscription, confronté à la difficulté de déduire ces frais.
Je reconnais également que le Gouvernement a récemment pris des mesures. Toutefois, j'espère que ma question permettra de pousser la réflexion sur ce sujet plus loin encore, ce qui me semble nécessaire.
La parole est à Mme Danièle Cazarian, pour exposer sa question, no 635, relative à la taxe spéciale sur les grandes installations sportives.
Madame la secrétaire d'État, les grands équipements permettant d'accueillir des manifestations sportives et culturelles sont essentiels pour l'attractivité de notre pays, le dynamisme de l'industrie et du sport et le rayonnement international de la France.
Nul ne remettrait en cause les bienfaits de ces équipements. Toutefois, force est de constater qu'ils constituent aussi des nuisances très importantes pour les communes où ils sont situés, par la surmobilisation des infrastructures de transport, les atteintes régulières à la voirie et la mise sous tension des services locaux qu'ils entraînent.
Le législateur a donc prévu des mécanismes de compensation pérennes, initialement par le biais d'une taxe affectée, la taxe sur les spectacles, puis, par un prélèvement sur recettes permis par la réforme de la TVA.
Or, dans le cadre de l'Euro 2016 de football, certaines communes ont accepté de construire de grandes enceintes sportives sur leur territoire, comptant sur les revenus tirés de la taxe spectacle pour gérer les désagréments issus des manifestations sportives.
Cette taxe a cependant été supprimée entre le début des travaux et la livraison du stade, laissant les communes démunies, car inéligibles à la compensation. Il paraît donc justifié que la compensation sur recettes instituée lors de la suppression de la taxe sur les spectacles pour les manifestations sportives soit établie au bénéfice non seulement des communes, qui la percevaient effectivement au jour de sa suppression, mais également de celles qui ont autorisé, de façon irrémédiable, la construction d'un équipement soumis à la taxe sur les spectacles pour les manifestations sportives avant cette suppression.
Alors que la France se prépare à recevoir de grands événements sportifs, il est nécessaire de soutenir les communes qui accueillent sur leur territoire ce type d'équipements indispensables à l'attractivité de la France comme pays hôte de grands événements à portée mondiale.
C'est le cas du grand stade de la commune de Décines-Charpieu, le Groupama Stadium, près de Lyon, qui, cet été encore, accueillera les demi-finales de la Coupe du monde féminine. Pourtant, cette commune de taille moyenne, qui participe au rayonnement du sport français, ne touche pas un centime de compensation.
Madame la secrétaire d'État, ma question est simple : comment comptez-vous réparer cette injustice, qui pèse lourdement sur les finances de la commune de Décines ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances.
Madame la députée, je sais que vous suivez ce dossier de longue date. Vous avez d'ailleurs été reçue, en début d'année, au ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, avec la maire de Décines-Charpieu, Laurence Fautra, qui compte un stade dans sa commune.
Vous le savez, la loi de finances pour 2015 a supprimé la composante « réunions sportives » de l'assiette de l'impôt sur les spectacles, tout en introduisant un mécanisme de compensation pour les collectivités territoriales concernées, qui prend la forme d'un prélèvement sur recettes. Cette suppression était nécessaire pour se conformer au droit européen, afin d'éviter que les réunions sportives ne soient imposées à la fois à la TVA et à l'impôt sur les spectacles.
Madame la députée, vous m'interrogez sur la possibilité d'élargir le mécanisme de compensation au manque à gagner de recettes potentielles. C'est en effet le cas de Décines, puisque le stade a été livré après la suppression de la taxe même si, vous l'avez souligné, les travaux ont commencé un peu avant.
Les mécanismes de compensation de perte d'impôts locaux sont toujours fondés sur un principe de perte effective de recettes, qui peuvent donner lieu à compensation.
Pour répondre à votre question en allant dans votre sens, il faudrait revenir sur ce principe, pour en retenir un autre, fondé sur l'appréciation de recettes futures perdues. Un tel principe ouvrirait malheureusement de lourds débats sur de nombreux cas pratiques, au-delà de la situation spécifique que vous pointez.
Par ailleurs, n'oublions pas que tout élargissement de l'assiette de la compensation devrait nécessairement être financé dans les concours de l'État aux collectivités territoriales.
Je sais que si vous portez cette conviction, c'est aussi parce que vous êtes sensible à la situation financière de la commune de Décines, qui connaît des difficultés. Celles-ci ne sont pas liées à cette absence de compensation. D'autres voies existent pour accompagner les communes en difficulté, au premier chef desquelles, celle de Décines.
Nous restons donc naturellement à votre disposition ainsi qu'à celle de Mme la maire, pour échanger et déterminer comment nous pouvons accompagner la ville de Décines-Charpieu.
Comme vous l'avez souligné à l'instant, je suis très attachée à la solution de ce problème à une échéance raisonnable. La commune de Décines souffre fortement de l'absence de compensation et ne peut plus attendre. Quel que soit le dispositif choisi – je pense notamment à une éventuelle contractualisation avec l'État – , je resterai très attentive, comme je le suis depuis le début de mon mandat, au soutien que l'État doit apporter.
La parole est à Mme Sandrine Le Feur, pour exposer sa question, no 636, relative à la plateforme aéroportuaire de Morlaix.
J'appelle votre attention sur la plateforme aéroportuaire de Morlaix dans le Finistère. Vous le savez, car je vous ai déjà alerté à ce sujet, en novembre 2016, la direction régionale des douanes et droits indirects de Bretagne a mis fin aux dérogations au franchissement des frontières extérieures, qui étaient jusque-là accordées à la plateforme de Morlaix.
Décision a donc été prise par les pouvoirs publics de supprimer ce point de passage aux frontières. Depuis cette date, Morlaix n'est plus accessible par transport aérien à partir de pays situés hors de l'espace Schengen et il n'est plus possible non plus d'accéder à ces pays depuis Morlaix. Dans un monde ouvert et une économie globalisée, c'est une porte d'entrée qui se ferme, ce sont des complications qui s'ajoutent.
Avant la fin des dérogations au franchissement des frontières extérieures, le point de passage frontalier – PFF – de Morlaix était utilisé. Il ne demande qu'à l'être de nouveau. En effet, la plateforme accueille les avions d'entreprises locales, Hop ! – devenue Air France Hop – et Brittany Ferries ou encore la société Sermeta, leader mondial pour la fabrication d'échangeurs thermique pour chaudières à gaz. C'est un non-sens, vous en conviendrez avec moi, de les obliger à s'arrêter à Brest ou à Saint-Brieuc avant de pouvoir se poser à Morlaix.
Nos entreprises, et à travers elles nos entrepreneurs, ont besoin de facilités pour assurer leur mobilité et pour développer leurs relations avec les clients à l'international.
La disparition du PPF affecte la capacité du territoire à fixer des entreprises sur son sol. Elle hypothèque également les projets à même de dynamiser une plateforme à l'avenir incertain depuis la suppression de vingt-trois postes chez Air France Hop Morlaix cette année. Pour assurer la pérennité du site, il faudrait que cette compagnie puisse ouvrir ses ateliers à des clients tiers.
Par ailleurs, les acteurs locaux ambitionnent de développer une clientèle d'aviation d'affaires. Le PPF serait une réelle plus-value pour promouvoir notre plateforme aéroportuaire auprès d'une clientèle nationale et étrangère.
Je ne fais pas l'amalgame et je ne vous impute pas la décision de suppression du PPF qui est antérieure. On déduit aisément que celle-ci était motivée par des considérations budgétaires, mais, en réalité, il s'agit d'économies de bouts de chandelle !
Des aménagements peuvent être trouvés sans réel surcoût pour la collectivité. En effet, il est possible de s'appuyer sur le service des douanes du port de Roscoff-Bloscon, distant de 25 kilomètres seulement, qui offre un contingent d'opérateurs déjà agréés et contrôlés par la Direction générale de l'aviation civile et l'AESA – Agence européenne de la sécurité aérienne.
Dans le cadre de vols programmés, ces effectifs pourraient être mutualisés entre les deux sites de Roscoff et de Morlaix – effectifs qui ont récemment été augmentés d'une dizaine, ce qui porte à environ trente-cinq le nombre des agents.
Seriez-vous disposée à favoriser de tels aménagements – la réouverture d'un point de passage frontalier pour la plateforme aéroportuaire de Morlaix en mutualisant les effectifs des douanes de Roscoff ? Ce serait un levier d'attractivité pour le territoire, nous permettant de maintenir l'implantation d'entreprises et de développer commercialement la plateforme de Morlaix.
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances.
L'aéroport de Morlaix a perdu son statut de point de passage frontalier en 2011. Une dérogation avait bien été accordée par la direction régionale des douanes de Bretagne aux sociétés Brittany ferries et Brit Air, devenue Hop ! , mais elle a pris fin en 2016 avec le rétablissement des contrôles aux frontières dans le cadre de la lutte antiterroriste.
La requalification de l'aérodrome en tant que PPF exige la saisine du ministère de l'intérieur, qui procède à une consultation interministérielle et statue sur la demande à la lumière de plusieurs critères : le besoin d'accueil de liaisons extra Schengen dans l'aérodrome au regard du contexte économique local ; l'aménagement du site – signalétique, séparation des flux de voyageurs, mise en place d'aubettes, réseau permettant l'interrogation de fichiers – ; la capacité à affecter de manière ponctuelle ou pérenne un service de contrôle aux frontières ; les raisons pour lesquelles le trafic extra Schengen ne pourrait pas être pris en charge par un site aéroportuaire qualifié PPF à proximité.
Au regard de l'ensemble de ces critères, il a été observé un flux résiduel de vols privés extra Schengen dans cet aéroport et l'absence d'infrastructures adaptées, ce qui ne permet pas d'envisager aujourd'hui la réouverture d'un PPF.
En outre, le PPF de Brest est situé à une cinquantaine de kilomètres. Il est donc possible, comme cela se fait déjà, d'effectuer les formalités de contrôle à Brest avant de repartir vers l'aéroport de Morlaix. Cette solution permet de préserver l'attractivité du département, la ville de Morlaix n'étant pas pour autant privée de toute capacité à recevoir ce type de vols extra Schengen.
La brigade des douanes de Roscoff, que vous envisagez de mobiliser, est déjà très occupée au PPF de Roscoff et sera fortement affectée par le Brexit, qui se traduira par l'instauration de formalités douanières additionnelles. Des renforts d'effectifs sont, en effet, prévus mais ils seront pleinement absorbés par ces missions nouvelles. La brigade de Roscoff sera d'autant moins disponible pour procéder à des contrôles migratoires à Morlaix.
Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, pour votre réponse et pour ces précisions. Je continue néanmoins de travailler à la réouverture de ce PPF afin de développer l'aéroport de Morlaix.
La parole est à Mme Fiona Lazaar, pour exposer sa question, no 646, relative à l'usine Dassault à Argenteuil.
Madame la secrétaire d'État, je veux aujourd'hui vous alerter et vous sensibiliser aux enjeux industriels et économiques du territoire d'Argenteuil, alors que le groupe d'aviation Dassault a annoncé le 18 janvier dernier la délocalisation de son usine vers la ville voisine de Cergy-Pontoise.
Cette usine est implantée à Argenteuil depuis 1951. Sa délocalisation soulève d'immenses inquiétudes : non seulement chez les habitants – elle est le premier employeur privé du territoire – mais aussi chez les chefs d'entreprise et dans le tissu économique local qui reçoivent là un coup rude.
Je partage ces inquiétudes et j'ai eu l'occasion d'alerter le Premier ministre ainsi que plusieurs membres du Gouvernement ces derniers mois sur la situation. J'ai également rencontré à différentes reprises les dirigeants de l'usine et, encore ce matin, le P-DG de Dassault aviation, pour défendre les alternatives à cette délocalisation. Il m'a garanti qu'il n'était aucunement question de licenciements.
Cela étant, je déplore l'annonce brutale de cette délocalisation. Je suis consciente toutefois que cette annonce doit nous interroger quant à la capacité de notre territoire à maintenir son attractivité. Après soixante-huit ans à Argenteuil, la présence de Dassault était, pour beaucoup, devenue acquise ; notre territoire paie aujourd'hui certainement un manque criant d'initiative et d'ambition.
Nous ne pouvons pas rester passifs, ni être les victimes d'une concurrence exacerbée entre territoires voisins et amis, qui ajouterait aux problèmes des Argenteuillais un recul de l'emploi local. L'industrie se transforme, elle doit se transformer à Argenteuil aussi. Il faut aujourd'hui tout faire pour qu'Argenteuil, fleuron industriel hier, ne devienne pas désert postindustriel demain.
Notre territoire dispose aujourd'hui pour cela d'énormes atouts : 112 000 habitants, au sein du Grand Paris, sur la Seine, à dix minutes de Paris-Saint-Lazare. Argenteuil peut compter sur de nombreux entrepreneurs engagés et mobilisés au sein de réseaux d'entreprises particulièrement dynamiques, qu'il faut aider à se développer.
Dans ce contexte, il me paraît indispensable que l'État, qui est un client important de Dassault, fasse tout ce qu'il est possible pour trouver une alternative à cette délocalisation. Mais il me paraît également nécessaire, plus largement, d'aller de l'avant et de créer les conditions de la réussite industrielle et économique d'Argenteuil pour demain. La mobilisation du Gouvernement à nos côtés est indispensable pour trouver les moyens qui nous permettront de faire briller notre patrimoine et notre potentiel industriels.
L'État a reconnu la dimension industrielle historique d'Argenteuil en en faisant un des 124 territoires d'industrie. C'est une occasion importante de poser les bases d'un avenir industriel à la hauteur du potentiel d'Argenteuil : ce dispositif doit permettre d'attirer les entreprises et de les faire grandir, en particulier dans les secteurs d'avenir. L'industrie, allons-y !
Quels moyens le Gouvernement peut-il mobiliser, à nos côtés, à court, moyen et plus long termes pour assurer l'avenir économique de notre territoire de 112 000 habitants, un territoire d'industrie et d'innovation hier, mais aussi demain ?
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances.
Vous appelez mon attention sur la situation de l'usine Dassault d'Argenteuil et, plus particulièrement, sur la décision rendue publique le 5 février dernier par Dassault Aviation d'engager la construction d'une nouvelle usine dans le même département, dans l'agglomération de Cergy-Pontoise, située à une vingtaine de kilomètres.
Dassault Aviation indique n'avoir pas trouvé à Argenteuil de terrains disponibles compatibles avec ses programmes industriels et avoir, en conséquence, décidé la construction d'une usine neuve dans l'agglomération de Cergy-Pontoise. Cette réorganisation s'inscrit dans le cadre du plan de transformation engagé en 2016, qui vise à spécialiser davantage chacun des neuf sites de l'avionneur et à les moderniser, afin de mieux répondre aux défis liés au lancement de nouveaux programmes civils et militaires.
Le transfert à Cergy, en concertation avec les organisations syndicales, répond à des contraintes opérationnelles de l'avionneur, qu'une modernisation du site d'Argenteuil ne permettait pas de satisfaire, notamment au regard des nécessités de mise en production d'un nouvel appareil à l'horizon de 2021.
J'en suis bien consciente, c'est aujourd'hui une page qui se tourne pour les élus et les salariés de l'usine d'Argenteuil, propriété de Dassault depuis 1951 et partie intégrante du patrimoine de cette ville industrielle, qui a accueilli de nombreuses activités dans les domaines de l'automobile et de l'aéronautique notamment.
Avec ce projet, Dassault Aviation conforte toutefois son implantation industrielle en Île-de-France. Il a prévu des mesures d'accompagnement social pour aider les salariés qui souhaiteraient se rapprocher du futur site de Cergy. Il sera enfin pleinement engagé dans le démantèlement du site et sa dépollution pour permettre de nouveaux usages. Il sera attentif à tout l'écosystème et au tissu de sous-traitance que vous avez mentionné.
Une nouvelle étape débute désormais afin d'élaborer un schéma de réaménagement des douze hectares du site et d'y implanter de nouvelles activités, voire des logements si la commune le décide. Il faut donc mettre à profit la période qui s'ouvre, avant le transfert définitif de l'activité, pour assurer la réussite de la reconversion du site.
Vous évoquez, à juste raison, le programme Territoires d'industrie et la labellisation d'Argenteuil parmi les 136 territoires retenus par le Gouvernement. Il me paraît essentiel d'engager la contractualisation et de définir le projet de développement de Boucle Nord de Seine, afin que tous les enjeux de reconversion du site de Dassault soient pleinement pris en compte et bénéficient de l'accompagnement du programme, doté de 1,3 milliard d'euros pour l'ensemble de la France.
La parole est à M. David Habib, pour exposer sa question, no 659, relative à la filière hydrogène sur le bassin de Lacq.
Je souhaite, une fois de plus, vous sensibiliser à la question de la filière hydrogène sur le bassin de Lacq dans les Pyrénées-Atlantiques.
Nous avons obtenu, contre le Gouvernement qui se montrait assez obtus sur ce point, la poursuite de l'extraction de gaz sur le bassin de Lacq au-delà de 2040, tout comme pour le gisement voisin du Vic-Bilh.
Le gaz extrait du bassin de Lacq est naturellement chargé en soufre et en hydrogène sulfuré. Il est donc possible de développer aisément une stratégie industrielle autour de l'hydrogène. C'est tout le sens d'une démarche qui a été soutenue par l'union locale de la CGT et relayée par l'ensemble des organisations syndicales, ainsi que par le patronat, qui voit dans le développement de cette filière une heureuse initiative permettant, parallèlement aux efforts de reconversion et de mutation engagés depuis plusieurs années, d'assurer définitivement l'avenir du bassin de Lacq. Selon les prédictions, le bassin de Lacq devait durer cinquante ans. Je suis convaincu qu'il durera bien plus longtemps, bien plus que votre majorité et que notre opposition.
Quelles initiatives compte prendre le Gouvernement pour saisir cette opportunité qui fait consensus parmi les acteurs politiques et sociaux ?
L'étude de faisabilité qui a été réalisée va être rendue publique. Il n'a pas été simple de trouver les financements pour la mener à bien, madame la secrétaire d'État. Vous n'y êtes pour rien, car vous ne faisiez pas partie du Gouvernement à ce moment-là. En revanche, tel était bien le cas de M. Le Maire. Il avait été plus facile d'agir sous la majorité précédente : Christophe Sirugue, que je salue, avait été très attentif à nos interpellations.
Je souhaite vous entendre à ce sujet, sachant que rien ne se fera au-delà de la volonté des pouvoirs publics, que vous allez exprimer aujourd'hui, ni sans associer, bien évidemment, les groupes Total et Air liquide, qui sont installés sur notre territoire.
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances.
Monsieur Habib, le Gouvernement s'est fixé un objectif de neutralité carbone en 2050, qui sera décliné dans notre industrie. À cette fin, il a inscrit la décarbonation de l'industrie comme l'un des chantiers stratégiques dans sa feuille de route industrielle.
Notre stratégie de reconquête industrielle repose, d'une part, sur la mobilisation de filières professionnelles, dans le cadre des contrats stratégiques de filière, et, d'autre part, sur la dynamique de territoires. Les territoires et leur initiative sont les catalyseurs de cette stratégie.
Je me réjouis d'ores et déjà du succès de l'initiative territoires d'industrie, qui permet de contractualiser les relations au sein de chaque territoire concerné. L'animation est confiée aux conseils régionaux, et le pilotage, aux présidents d'intercommunalité et aux industriels locaux.
Cet effort réalisé au niveau local est complété par un engagement spécifique de l'État et des opérateurs publics – La Banque des territoires, Bpifrance, Business France, Pôle emploi, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie – , qui mobilisent un large éventail de politiques publiques pour appuyer et accompagner les projets des territoires d'industrie. Plus de 1,3 milliard d'euros sont orientés prioritairement vers ces territoires.
Le cas du site de Lacq est emblématique de la transition que nous vivons et des enjeux de transformation auxquels nous sommes confrontés. Historiquement productrice d'hydrocarbures, la plateforme s'est transformée et regarde désormais vers l'avenir, avec le projet de production d'hydrogène que vous avez mentionné. L'hydrogène est une technologie clef pour atteindre notre objectif de décarbonation et a fait l'objet d'un plan spécifique, annoncé par le ministère de la transition écologique et solidaire en juin dernier. Nous sommes d'ailleurs frappés par le nombre de projets liés à l'hydrogène qui émergent sur le territoire national. Je me félicite que l'étude portant sur la possibilité de construire une filière hydrogène à Lacq puisse servir de support à l'initiative soutenue dans le territoire d'industrie Lacq-Pau-Tarbes.
Comme vous le savez, un protocole d'accord relatif à ce territoire d'industrie a été signé hier entre les élus des collectivités locales et les industriels. Il symbolise le renouveau industriel que nous voulons promouvoir au travers de l'initiative Territoires d'industrie. Sachez que nous serons très attentifs à la réalisation de ce contrat. Le cadre qu'il fixe n'est d'ailleurs pas fermé : chacun a le droit d'avoir de bonnes idées complémentaires, qui pourront être mises en pratique. L'important, c'est que la dynamique est désormais engagée.
En tout état de cause, il est clair que l'hydrogène est une des technologies qui nous permettront d'assurer la transition écologique et énergétique. Il importe désormais de lancer des projets viables et de les soutenir.
Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d'État. Vous ne pouviez pas en dire plus, car nous sommes aujourd'hui au début d'un processus. Vous avez relevé à juste titre que de nombreux projets liés à l'hydrogène émergent sur le territoire national et que le site de Lacq a pleinement vocation à accueillir une filière hydrogène, compte tenu de son passé, de l'acceptabilité des populations et de la formation des salariés.
Je vous invite, madame la secrétaire d'État, à venir en Béarn. Vous pourrez constater que le complexe industriel de Lacq, fondé initialement sur l'extraction du gaz, a engagé sa mutation depuis des décennies. Il est passé à une autre chimie, celle des molécules, celle de l'intelligence. Il a maintenu son savoir-faire en matière énergétique, notamment dans le domaine des biocarburants et des matériaux composites. Aujourd'hui, tous les Boeing – Airbus se fournit auprès d'un autre producteur – contiennent de la fibre de carbone fabriquée chez nous.
Venez en Béarn, madame la secrétaire d'État. Je suis persuadé que l'ensemble du corps social, en dépit des différences politiques qui peuvent exister entre nous, saura faire bloc autour du développement de la filière hydrogène, que vous avez exprimé aujourd'hui la volonté de soutenir sur le territoire hexagonal.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Explications de vote et vote par scrutin public sur le projet de loi relatif à l'organisation et à la transformation du système de santé ;
Discussion de la proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête sur la situation et les pratiques de la grande distribution et de leurs groupements dans leurs relations commerciales avec les fournisseurs ;
Discussion de la proposition de loi, adoptée par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, relative à la représentation des personnels administratifs, techniques et spécialisés au sein des conseils d'administration des services départementaux d'incendie et de secours ;
Suite de la discussion de la proposition de loi visant à améliorer la trésorerie des associations.
La séance est levée.
La séance est levée à douze heures cinquante.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Serge Ezdra