La séance est ouverte.
La séance est ouverte à neuf heures.
La parole est à M. M'jid El Guerrab, pour exposer sa question, no 1327, relative au rapatriement des Français de l'étranger.
Avec cette question adressée à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, je souhaite appeler l'attention du Gouvernement sur les mesures de restriction de déplacements des Français de l'étranger et sur la possibilité de créer formellement un droit au rapatriement ou, plus exactement, un droit au retour sur le territoire national.
Depuis maintenant presque un an, le transport aérien est quasiment à l'arrêt. Les compagnies subissent de plein fouet la résurgence de l'épidémie de covid-19 et ses nombreux variants. Beaucoup de ces compagnies risquent de disparaître, les États ne pouvant plus continuer à toutes les aider. Or, pendant ce temps, de nombreuses contraintes se font de plus en plus lourdement sentir pour nos 3,5 millions de compatriotes qui vivent à l'étranger.
Le Conseil d'État, dans une décision du 12 mars dernier, a supprimé l'obligation de justifier de motifs impérieux pour revenir en France, et le Gouvernement est allé plus loin encore, puisque la mesure a depuis lors été élargie aux conjoints de Français qui n'auraient pas la nationalité française. Je ne peux donc que me réjouir de telles mesures et de telles avancées, pour lesquelles moi-même et d'autres collègues parlementaires nous sommes beaucoup mobilisés derrière vous.
En effet, nos compatriotes qui vivent à l'étranger ne doivent plus avoir l'impression d'être un peu les oubliés de la mère-patrie : c'est pourquoi la question du droit au retour sur le territoire national, avec un effet inaliénable, se pose très sérieusement. Je souhaite donc alerter le Gouvernement quant aux difficultés que rencontrent encore, dans leur vie personnelle et professionnelle, les Français qui résident dans des pays hors Union européenne, et vous demander comment nous pouvons accélérer la réflexion sur l'idée d'un droit au retour sur le territoire national, ainsi que, plus largement, sur le statut des Français de l'étranger et leur place au sein de la République.
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du tourisme, des Français de l'étranger et de la francophonie.
Merci pour cette question, monsieur le député, car vous avez été au coeur de l'action diplomatique visant à assurer un retour à nos compatriotes qui, voilà un an, se sont tout à coup trouvés bloqués par le rétablissement des frontières. Un chiffre vaut mieux que mille mots : ce sont 370 000 Français de passage à l'étranger que nous avons ramenés à la maison, si vous me permettez cette expression, avec une opération logistique des plus complexes. Aux Philippines, par exemple, il a fallu aller chercher de petits groupes de Français dans de petites îles pour les ramener dans de moyennes îles, puis dans la grande île, et enfin à Paris. Tout cela s'est fait en coopération active avec vous-même et au moyen de divers outils que nous avions mis en place avec les parlementaires représentant les Français établis hors de France et les conseils des Français de l'étranger. Je tiens à saluer également l'action du CDCS, le centre de crise et de soutien du ministère de l'Europe et des affaires étrangères, qui a été la cheville ouvrière de tous ces rapatriements.
L'action a donc été forte, et elle a d'ailleurs été reconnue par la Cour des comptes qui, dans son rapport annuel paru voilà quelques jours, a salué une opération menée à coûts maîtrisés. Nous pouvons donc nous réjouir de l'efficacité non seulement de cette action mais aussi en matière de coût pour les finances publiques, même si, naturellement, lorsqu'il s'agit de nos compatriotes établis hors de France, on ne compte pas.
Comme vous le savez, nous avons aussi mis en place un plan de 220 millions d'euros, car certains de nos compatriotes ont fait le choix de rester dans leur pays de résidence – ce qui est normal car, lorsqu'on y établit sa vie, il est important de pouvoir préserver tout ce qui a été fait sur place. Ce plan continue à s'appliquer et nous demandons naturellement de pouvoir reconduire tout au long de 2021 ce dispositif d'aide sociale, éducative et médicale. Après avoir acheminé des médicaments et la télémédecine, nous travaillons activement sur la vaccination, afin de trouver des solutions pour les 16 % de Français de l'étranger résidant dans des zones qui ne disposent pas de vaccins homologués par l'Union européenne. Là encore, vous êtes au coeur de cette démarche.
Pour ce qui est du droit au rapatriement, il est clair que le fait de pouvoir revenir dans son pays est une liberté fondamentale, comme vous l'avez dit. L'obligation de justifier de motifs impérieux était une mesure très temporaire, qui a d'ailleurs été assouplie, puis suspendue. Nous avons nous-mêmes élargi cette suspension non seulement aux conjoints des Français établis hors de France, mais également à leurs enfants.
Cependant, graver un tel droit dans quelque marbre que ce soit demande une réflexion juridique, car ce droit pourrait parfois être contrarié par des mesures prises par les autorités du pays de résidence. On a vu en effet dans certains pays que des résidents français qui reviendraient en France auraient beaucoup de difficulté à regagner leur pays de résidence – nous en avons plusieurs exemples dans les Amériques et en Asie. Un travail reste donc à conduire sur le plan juridique pour que ce droit soit non pas seulement formel, mais aussi réel. Toujours est-il que l'année qui vient de s'écouler a montré que, lorsque nous sommes confrontés à ces situations, les autorités françaises et le Gouvernement ne ménagent pas leur peine pour permettre le retour à la maison des enfants du pays.
Vaccination des personnels des entreprises exportatrices
La parole est à Mme Virginie Duby-Muller, pour exposer sa question, no 1350, relative à la vaccination des personnels des entreprises exportatrices.
Je souhaite appeler l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur les difficultés que rencontrent les entreprises exportatrices françaises face à la crise sanitaire. Alors que les échanges économiques reprennent peu à peu leur rythme d'avant la crise, notamment sur les marchés asiatiques, les entreprises françaises se trouvent confrontées à une situation de concurrence déloyale face à d'autres entreprises étrangères, du fait du retard de la vaccination en France.
Dans de nombreux pays, en effet, une vaccination effective est et sera exigée pour les commerciaux qui viennent pour des opérations de démarchage ou de négociation de contrats, la visioconférence ne se substituant pas toujours aux impératifs du marché des échanges économiques. De nombreux chefs d'entreprise français souhaiteraient ainsi pouvoir donner accès à une vaccination rapide à leurs commerciaux internationaux. À court terme, leur accès à des tests PCR rapides n'est pas toujours garanti, ce qui les empêche parfois de poursuivre des discussions commerciales à l'étranger. Les files d'attente pour les tests PCR, parfois impressionnantes, ont également généré un marché illégal, de faux tests étant parfois produits.
Nous avons tous conscience du calendrier de vaccination établi par la Haute Autorité de santé, qui privilégie les publics les plus fragiles. Je souhaite cependant alerter le Gouvernement quant à la situation de notre secteur exportateur français et sur l'attractivité de notre offre à l'international, d'autant que le déficit commercial s'est dangereusement aggravé en 2020. Il est donc nécessaire de garantir aux chefs d'entreprise qui exportent ou à leurs commerciaux internationaux un accès prioritaire à la vaccination contre la covid-19 et, à court terme, un accès rapide aux tests PCR. Comment comptez-vous répondre à cette situation ?
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du tourisme, des Français de l'étranger et de la francophonie.
Madame la députée, nous avons tous bien conscience que la vaccination est la lumière au bout du tunnel, et c'est la raison pour laquelle nous mettons les bouchées doubles, avec l'objectif d'atteindre fin avril le chiffre de 10 millions de personnes vaccinées en France. La montée en charge est engagée, avec un rythme de 200 000 vaccinations par jour. Ce dispositif répond à une stratégie vaccinale validée par la Haute Autorité de santé, qui a émis des recommandations en la matière afin de faire baisser la mortalité et de protéger les soignants, et a défini l'âge comme le facteur le plus important de cette stratégie.
De grandes puissances exportatrices, comme les États-Unis, le Royaume-Uni ou Israël, pays où la vaccination est également très avancée, n'ont pas choisi de procéder à un ciblage lié à la fonction ou à la mission des personnes vaccinées, notamment pour les commerciaux, que vous évoquez. La stratégie de vaccination reste donc ciblée sur l'âge, mais nous ne restons pas pour autant les bras ballants en matière d'export. Ainsi, M. Franck Riester, ministre délégué auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur et de l'attractivité, a multiplié, avec Business France, les événements à destination du marché asiatique.
Beaucoup de choses peuvent se faire au moyen de la dématérialisation, mais pas seulement. Nous avons ainsi instauré un chèque relance VIE – volontariat international en entreprise – , d'un montant de 5 000 euros, pour permettre aux PME et ETI – établissements de taille intermédiaire – de recourir à ce dispositif sensationnel, qui est une véritable école des cadres de l'export de demain. Business France organise également de nombreux événements et les témoignages que nous recueillons sont ceux d'entreprises qui s'adaptent et qui, lorsqu'il faut faire progresser des discussions commerciales importantes, n'hésitent pas à y consacrer des moyens importants – je pense notamment au recours à l'aviation d'affaires privée. En tout cas, ne doutez pas un instant de notre détermination à soutenir le tissu productif français dans sa capacité à exporter.
Pour ce qui est des tests PCR, l'accès à ce type de matériel, essentiel pour voyager et se déplacer, est actuellement très bon et nous devrions atteindre dans quelques jours ou quelques semaines le chiffre de 100 millions de tests pratiqués depuis le début.
Le contexte qui s'impose à nous depuis un an rend certes plus difficiles les relations entre entreprises, mais nous avons des acteurs nationaux, des acteurs tricolores très mobilisés, et je rends hommage aux équipes de Business France et à celles d'Atout France, qui travaillent au rayonnement touristique de la France.
La parole est à M. Guillaume Vuilletet, pour exposer sa question, no 1343, relative Soutien aux loueurs de véhicules en outre-mer.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance, mais également à M. le ministre des outre-mer, qui m'a fait l'honneur de me confier une mission sur la place des outre-mer dans l'environnement régional dans le contexte de la pandémie du covid-19, c'est-à-dire dans un contexte de crise et dans une perspective d'intégration régionale et de développement économique. Les contacts que j'ai pu nouer durant la préparation de ce rapport, que je dois rendre prochainement, ont fait apparaître le problème que je souhaite vous signaler aujourd'hui et qui est l'une des singularités expliquant que la crise prenne dans nos outre-mer un relief tout particulier. M. le ministre des outre-mer connaît du reste fort bien ce problème car, lorsqu'il m'a fait l'honneur de m'associer au voyage qu'il a fait à La Réunion en août 2020, cette situation particulière nous avait été signalée.
Le tourisme, qui a un poids déterminant dans le tissu économique des outre-mer – il représente environ 10 % de l'activité ultramarine – est lourdement touché par la crise sanitaire : j'invite à lire à ce propos le rapport de notre collègue sénateur. Se rendre dans les territoires insulaires suppose divers services connexes, dont la location de voitures de tourisme, qui fait l'objet de ma question et concerne plus de 150 entreprises fournissant ce service aux visiteurs. Au-delà même du tourisme, la location de véhicules fait partie des rouages indispensables aux économies ultramarines et les entreprises de ce secteur connaissent un problème structurel, que la crise rend plus sensible encore et sur lequel je souhaite appeler l'attention du Gouvernement.
Le problème posé est simple : pour les véhicules de location de tourisme, l'administration fiscale reconnaît, dans l'ensemble du pays, des durées d'amortissement de quarante-huit à soixante mois. Or une telle norme n'est pas adaptée aux outre-mer. De fait, les rapports d'experts convergent pour indiquer qu'on peut y constater un taux d'usure bien supérieur. Il y a sans doute à cela des raisons climatiques, mais aussi des raisons liées à un réseau et à des infrastructures qui ne correspondent pas toujours aux normes que nous connaissons dans l'hexagone.
Dans les faits, nous constatons donc une usure prématurée des véhicules, de l'ordre de 33 % par rapport à l'hexagone. S'il est bien entendu possible pour les loueurs de faire valoir que l'usure est constatée avec un temps d'usage plus court, afin de bénéficier d'un amortissement accéléré, nous pouvons convenir qu'il s'agit d'une lourdeur administrative dont ils se passeraient en cette période un peu troublée. En outre, dans la mesure où cette usure est systémique, la situation est amenée à durer et justifierait l'apport d'une correction pérenne par l'administration.
Le secteur demande que le taux d'amortissement soit adapté à la réalité ultramarine pour le cas particulier des véhicules de tourisme, et atteigne 33 % de la valeur du véhicule par an. Monsieur le secrétaire d'État, une telle adaptation de la réglementation fiscale pourrait-elle être réalisée ?
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la transition numérique et des communications électroniques.
D'une manière générale, les amortissements constatés par une entreprise à raison des biens donnés en location sont admis en déduction du résultat fiscal dans la limite de ceux généralement admis d'après les usages de chaque nature d'industrie, de commerce ou d'exploitation. S'agissant des matériels de transport automobile, la doctrine administrative et la jurisprudence précisent que la durée normale d'amortissement généralement admise est de quatre ou cinq ans.
Toutefois, les entreprises peuvent retenir des durées d'amortissement inférieures à la durée d'usage de référence, à la condition de justifier de circonstances particulières. La doctrine administrative, qui décrit ces circonstances, précise qu'elles peuvent résulter d'une utilisation intensive du bien – par exemple, lorsque le matériel est utilisé vingt-quatre heures sur vingt-quatre – ou être invoquées lorsque la rentabilité du bien loué n'est pas assurée – comme c'est le cas pour les biens se démodant rapidement. Ainsi, l'administration a précisé que, si ces circonstances étaient établies, elle ne remettrait pas en cause un taux qui ne s'écarterait pas de plus de 20 % des usages professionnels.
La situation géographique et climatique d'un département ou d'une région ne suffit pas à justifier une dérogation et l'institution d'un usage applicable à toutes les entreprises de ce seul département. Il appartient à chaque entreprise de démontrer que les véhicules qu'elle exploite sont effectivement utilisés sur une durée plus courte que les durées généralement admises, compte tenu notamment de l'utilisation qui en est faite et, le cas échéant, de conditions climatiques ou géographiques particulières aux lieux d'utilisation des véhicules.
Une dérogation générale n'est pas souhaitable, puisque le droit en vigueur permet de rendre compte de la réalité économique des différents usages en tenant compte des circonstances de fait propres à l'usage de chaque bien. À cet égard, les entreprises concernées peuvent se rapprocher du service des impôts des entreprises dont elles dépendent afin d'apporter, si elles le souhaitent, l'ensemble des justifications requises.
À toutes fins utiles, il est rappelé que la durée minimale, pendant laquelle les investissements ouvrant droit au bénéfice de l'aide fiscale à l'investissement en outre-mer doivent être conservés par l'entreprise et affectés à l'exploitation pour laquelle ils ont été acquis, résulte à la fois de l'objectif du dispositif, qui vise à assurer durablement le développement économique local, et de l'importance de l'avantage fiscal consenti par l'État.
La République est en effet une et indivisible et, à ce titre, il est normal que ces règles s'appliquent sur l'ensemble du territoire. Mais peut-être peut-on réfléchir à instaurer à l'avenir une forme simplifiée de ces démarches. Elles seront systématiques, puisqu'elles résultent de la réalité territoriale.
Dans la période singulière que nous traversons, nous devons soutenir la location de véhicules, rouage essentiel de l'économie locale : en outre-mer, il est très difficile de faire fonctionner le secteur touristique sans ces activités connexes à l'arrivée des touristes.
J'en appelle donc à la sagesse future du Gouvernement – je ne doute pas qu'il saura en faire preuve – , afin que nous trouvions des adaptations permettant de simplifier les démarches.
La parole est à M. Bastien Lachaud, pour exposer sa question, no 1332, relative à la situation de Lapeyre.
Lapeyre : un nom que tous nos concitoyens connaissent, celui d'une entreprise fondée en 1931, synonyme de quatre-vingt-dix ans de savoir-faire et d'excellence dans le domaine de la menuiserie et de l'aménagement.
Le siège de cette entreprise, qui emploie aujourd'hui près de 3 500 salariés dans dix usines et 126 magasins répartis sur tout le territoire national, se situe à Aubervilliers, dans ma circonscription.
Aujourd'hui, cette entreprise risque de disparaître. À la suite d'erreurs stratégiques qui l'ont mise en difficulté, Saint-Gobain, son propriétaire, a choisi de la vendre. À cette fin, il privilégie à ce jour l'offre de Mutares, un fonds d'investissement allemand coté à la bourse de Francfort. Cette vente se déroule dans des conditions d'opacité inacceptables – Saint-Gobain a d'ailleurs été condamné en justice pour défaut d'information. En effet, les représentants des salariés sont tenus dans le flou. Et quand c'est flou, c'est qu'il y a un loup !
Ce loup, c'est Mutares, connu pour ses opérations de rachat à finalité spéculative : Pixmania, Artmadis ou encore Grosbill en ont déjà fait les frais par le passé, victimes d'un repreneur sans aucun projet d'entreprise, qui ne cherche qu'à siphonner les comptes, licencier et vendre le patrimoine immobilier, pour engranger des fonds à court terme, engraisser ses dirigeants et gaver ses actionnaires, laissant ses victimes exsangues.
C'est le scénario qui risque de se reproduire pour Lapeyre. Les syndicats ont découvert l'existence d'un business plan prévoyant près de 1 000 licenciements, ainsi que la fermeture de quatre usines et de nombreux magasins dès 2023. Mutares va donc continuer de se nourrir sur la bête jusqu'à la liquidation : une honte !
Il faut arrêter la casse sociale avant qu'il ne soit trop tard. Des salariés se sont regroupés au sein du collectif Lapeyre et ont élaboré un projet crédible de sauvegarde de l'entreprise et de l'emploi. Depuis des mois, ils tirent la sonnette d'alarme, allant jusqu'à alerter le Président de la République. J'ai moi-même écrit au ministre de l'économie, des finances et de la relance : pas de réponse, pas de soutien, aucune action. Jusqu'à quand allez-vous laisser faire la vente à la découpe du patrimoine industriel français ? Que comptez-vous faire pour sauver Lapeyre ?
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la transition numérique et des communications électroniques.
Vous interpellez le Gouvernement sur le processus de vente de l'entreprise Lapeyre qui, comme vous le soulignez, est connue de bien des professionnels du bâtiment et des Français affectionnant le bricolage.
Lapeyre connaît effectivement des difficultés depuis plusieurs années, ce qui a conduit le groupe Saint-Gobain à décider de vendre l'entreprise. Afin de trouver un repreneur, Saint-Gobain a donc lancé un appel d'offres. Il s'agit d'un processus utilisé très fréquemment par les entreprises et, en dehors des cas particuliers liés à la protection de nos intérêts stratégiques – et vous avez pu constater encore récemment que nous n'hésitons pas à intervenir rapidement et vigoureusement en la matière – , l'État n'a pas à s'immiscer dans une telle décision.
En revanche, nous veillons évidemment à ce que l'opération de vente se déroule dans le respect de notre droit, particulièrement protecteur des salariés. Plusieurs accords de méthode ont été signés avec les représentants des salariés dans le cadre de ce processus de vente, et j'invite bien entendu chacune des parties à les respecter pour garantir le meilleur dialogue et la meilleure coopération possibles.
Je ne commenterai pas, monsieur le député, le scénario noir que vous venez de dresser et qui me semble ne reposer sur aucun élément tangible au regard du peu d'informations dont nous disposons. À ce stade, nous savons que Saint-Gobain garantit au repreneur le financement d'une dotation représentant plus de dix ans de pertes, évaluées sur celles connues l'année dernière. Pour fermer toute possibilité au repreneur de « siphonner », comme vous dites, l'entreprise Lapeyre, cette dotation sera affectée à une fiducie contrôlée par un tiers et l'actionnaire ne pourra récupérer aucun dividende tant que Lapeyre n'aura pas retrouvé l'équilibre.
Par ailleurs, une liquidation de l'entreprise entraînerait automatiquement la perte de l'intégralité de l'apport du fonds du repreneur, ce qui ne serait pas dans son intérêt. Enfin, Saint-Gobain a exigé le maintien du dispositif industriel jusqu'à fin 2022. Je ne sais pas s'il y a un loup, monsieur le député, mais je sais que des engagements ont été pris, sur le respect desquels nous serons particulièrement vigilants.
Vous n'apportez aucune réponse, monsieur le secrétaire d'État. Vous confirmez seulement que très peu d'informations sont disponibles – d'ailleurs, la justice a condamné Saint-Gobain sur ce point.
Il faut que les salariés aient accès à l'ensemble des données : le business plan dont je vous ai parlé, les salariés l'ont obtenu par des fuites depuis Saint-Gobain ! Il existe donc une réelle volonté de ne pas mettre en concurrence les différentes offres de reprise. S'il n'y a aucun problème avec le fonds Mutares, pourquoi ne pas rendre publics les éléments de son offre, afin de la comparer aux autres offres ?
Monsieur le secrétaire d'État, votre responsabilité et celle du Gouvernement n'est pas simplement de faire respecter le droit français : vous êtes également responsables de l'outil industriel et de ses salariés. La crise a démontré comme nous étions vulnérables lorsque nous délocalisions à outrance : notre pays a besoin d'industries productives, d'ouvriers et d'usines, mais vous ne faites rien pour les protéger.
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour exposer sa question, no 1358, relative aux crédits à la consommation.
Ma question s'adresse au ministre de l'économie, des finances et de la relance. Dans le contexte de crise économique et sociale que nous traversons, il est à craindre qu'un grand nombre de nos concitoyens, qui ont dû avoir recours à des crédits à la consommation, ne soient pas en mesure d'honorer leurs échéances aux dates prévues.
En 2020, les défauts de paiement ont représenté 9 milliards d'euros, soit 1 020 euros par famille. La cession de ces créances par les banques à des sociétés de recouvrement aggrave la situation des familles concernées, entraînant les nombreux dérapages que beaucoup d'entre nous connaissent : harcèlement en tous genres, impossibilité fréquente d'accéder aux documents justifiant la créance et, pire : j'ai été alerté à ma permanence sur des situations de mise en recouvrement de dettes qui n'étaient plus dues.
Je souhaiterais que le Gouvernement améliore les mesures de protection de nos concitoyens, en renforçant l'information des souscripteurs en amont de l'éventuelle cession de leur crédit, puis en encadrant beaucoup plus strictement l'activité des sociétés de recouvrement. Il me semble, monsieur le secrétaire d'État, que tout doit être fait pour empêcher nombre de nos concitoyens d'entrer dans l'engrenage des défauts de paiement, humainement et financièrement désastreux.
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la transition numérique et des communications électroniques.
Les données dont nous disposons ne semblent pas montrer, pour l'heure, d'augmentation des défauts de paiement des crédits à la consommation. L'encours de ces crédits s'est légèrement tassé entre janvier 2020 et janvier 2021, accusant une baisse de 0,9 %, signe à la fois d'une moindre demande au cours de l'année écoulée et d'une attention plus grande des banques quant à la situation des emprunteurs. Par ailleurs, le nombre de dossiers de surendettement déposés à la Banque de France depuis le début de l'année 2021 est également inférieur de 8,9 % à l'année dernière. Or, pour rappel, le nombre de dossiers de surendettement déposés en 2020 était déjà inférieur de près de 24 % à celui de 2019.
À nos yeux, cela signifie deux choses. Tout d'abord, les mesures prises par le Gouvernement jusqu'à présent pour soutenir le revenu des ménages – activité partielle, aide exceptionnelle de solidarité, aide financière d'urgence accordée par la CAF, la caisse d'allocations familiales, extension des indemnités journalières – ont bien fonctionné.
Ensuite, le cadre juridique applicable au crédit à la consommation est robuste : le dispositif prévoit notamment que les établissements vérifient la solvabilité des emprunteurs, afin d'éviter qu'un nouveau crédit ne vienne dégrader une situation financière déjà compromise. Il prévoit également des flexibilités en cas de dégradation de la situation économique des emprunteurs, comme la possibilité de reporter les échéances pour les crédits renouvelables ou un délai de grâce pouvant aller jusqu'à deux ans, en cas de licenciement notamment. En outre, dans le cadre de leur relation commerciale, les établissements de crédit peuvent consentir aux emprunteurs en difficulté des reports ou des facilités de paiement.
Toutefois, le Gouvernement, qui continue à suivre très attentivement l'évolution de la situation avec l'ensemble des acteurs concernés, a d'ores et déjà pris de nouvelles mesures de prévention du surendettement à destination des ménages. En effet, des dispositions budgétaires adoptées dans la loi de finances pour 2021 permettent de renforcer le dispositif de prévention du surendettement, en portant de 400 à 500 le nombre cible de points conseil budget subventionnés. Ceux-ci ont pour mission d'accompagner les ménages en difficulté, précisément pour leur éviter de tomber dans le surendettement.
Par ailleurs, en février 2021, le Premier ministre a confié au député Chassaing une mission visant à améliorer l'inclusion bancaire des ménages fragiles et à établir de nouvelles mesures de prévention du surendettement. Cette mission devra notamment étudier comment renforcer l'identification précoce des ménages fragiles et leur prise en charge par les acteurs locaux, mais aussi améliorer la connaissance des dispositifs existants de traitement des défauts de paiement.
L'ensemble de ces travaux sont de nature à améliorer, à moyen terme, la protection des publics les plus fragiles : cela demeure en effet l'une des priorités du Gouvernement pour la période actuelle.
La parole est à M. Régis Juanico, pour exposer sa question, no 1356, relative à la taxe d'habitation des locaux occupés par des associations.
Je souhaite vous interroger sur l'assujettissement à la taxe d'habitation – TH – , souvent récent, de certains locaux de collectivités locales mis à disposition d'associations.
À Saint-Étienne, que vous connaissez bien, plusieurs structures associatives ou d'éducation populaire – centres sociaux et amicales laïques, notamment – ont reçu pour la première fois un avis d'imposition, fin 2020 – à l'issue, donc, d'une année particulièrement difficile pour la vie associative, à l'arrêt presque total pendant de nombreux mois en raison de la crise sanitaire.
Dans un contexte de raréfaction de la ressource financière, faute d'activité, la crise a obligé – et oblige encore – des structures à ponctionner leur trésorerie pour faire face à l'urgence. Or les sommes appelées au titre de la TH, qui s'élèvent souvent à plusieurs milliers d'euros, mettent en péril l'équilibre financier, déjà fragile, des structures associatives et d'éducation populaire, qui n'ont pourtant pas manqué à leur mission et entendent continuer de jouer un rôle indispensable de préservation et de développement de la cohésion sociale dans nos quartiers.
Certes, en application de l'article 1407 du code général des impôts, les associations à but non lucratif, qu'elles soient ou non reconnues d'utilité publique, sont redevables de la TH pour les locaux meublés qu'elles occupent à titre privatif et qui ne sont pas retenus pour l'établissement de la cotisation foncière des entreprises. A contrario, les locaux auxquels le public a accès et dans lesquels il peut circuler librement ne sont pas imposables au titre de la TH. De nombreuses structures ont donc formé des recours auprès de la direction départementale des finances publiques de la Loire, mettant en avant l'ouverture au public de leurs locaux, au-delà des seuls adhérents : en effet, une grande partie de ces espaces peuvent accueillir des réunions publiques, des conseils de quartier, des réunions ou assemblées générales d'autres associations, comme les AMAP – associations pour le maintien d'une agriculture paysanne – , ou encore recevoir des élèves.
Ainsi, au cas par cas, en fonction de la situation exacte de chaque association ayant fourni un plan des locaux suffisamment détaillé pour permettre d'identifier précisément les surfaces privatives et celles ouvertes au public, de maigres dégrèvements ont pu être consentis par la direction départementale des finances publiques – DDFIP. Néanmoins, année après année, force est de constater un durcissement de l'application des textes : la DDFIP fait désormais valoir que l'usage des locaux cesse d'être privatif uniquement lorsque l'ouverture au public ne dépend pas de la volonté de l'organisme. Ils conservent également un caractère privatif lorsque les conditions d'accès restent fixées par l'organisme utilisateur.
Cette situation est particulièrement mal vécue par les acteurs associatifs qui bénéficient de locaux mis à disposition par les collectivités locales, d'autant plus que certaines structures ne sont pas assujetties à la TH, ce qui entraîne de profondes inégalités de traitement. À tous égards, la situation ligérienne, couplée à une lecture particulièrement restrictive des textes, pénalise fortement les structures associatives locales. Dans le contexte tout à fait exceptionnel de 2021, où la persistance de la crise sanitaire engendre à la fois baisse d'activité, perte de recettes, reflux du mécénat des entreprises et diminution du nombre de bénévoles, la survie même de plusieurs d'entre elles est en jeu.
Monsieur le secrétaire d'État, les associations concourent à l'intérêt général : le Gouvernement pourrait-il envisager une révision de leur fiscalité, afin d'exonérer en grande partie, voire totalement, de la TH ces structures vitales pour notre pacte social et républicain ?
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la transition numérique et des communications électroniques.
Vous avez raison : je connais bien Saint-Étienne – moins bien que Lyon, d'un point de vue sportif, mais ce n'est pas là le sujet qui nous occupe.
L'assujettissement des associations à la TH constitue une question importante. Comme vous l'avez rappelé, les associations à but non lucratif se trouvent dans ce cas pour les locaux meublés qu'elles occupent à titre privatif et qui ne sont pas retenus lors de l'établissement de la CFE, la cotisation foncière des entreprises. En revanche, ne sont pas soumis à la TH les locaux meublés des collectivités privées auxquels le public a accès.
Selon une jurisprudence bien établie par le Conseil d'État, cette exemption ne s'applique qu'aux locaux où l'accès et la circulation du public s'opèrent librement : autrement dit, l'usage des locaux par une collectivité privée cesse d'être privatif lorsque leur ouverture au public ne dépend pas de la volonté de cette collectivité, mais lui est imposée par des règles émanant d'un tiers. Inversement, lorsque les conditions d'accès – type de public admis, jours et heures d'ouverture – sont fixées par la collectivité utilisatrice, les locaux conservent un caractère privatif.
L'article 16 de la loi de finances pour 2020 prévoit la suppression totale et définitive, par étapes échelonnées entre 2020 et 2023, de la TH afférente à l'habitation principale. La TH afférente aux résidences secondaires et aux autres locaux meublés non affectés à l'habitation principale est donc maintenue. Sans méconnaître l'intérêt qui s'attache à l'action des organismes associatifs sans but lucratif, il ne peut être envisagé de les faire bénéficier de cette suppression, ce qui les exclurait de toute participation au financement des dépenses locales : les autres contribuables locaux devraient alors compenser la perte de ressources qui en résulterait pour les collectivités.
En outre, les associations qui éprouveraient de réelles difficultés à acquitter la TH peuvent solliciter auprès des services fiscaux la remise gracieuse de tout ou partie de leur imposition. Des consignes permanentes ont été données à ces services afin que les demandes de cet ordre, formulées par des contribuables en difficulté, soient examinées avec bienveillance.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement n'envisage pas de réviser les règles d'assujettissement des associations à la TH. Toutefois, dans le contexte actuel, il a été demandé à l'administration fiscale de veiller à l'harmonisation des pratiques locales : des consignes claires ont été transmises en ce sens à son réseau.
Si je puis me permettre, monsieur le secrétaire d'État, votre réponse fera une belle jambe à l'Olympique Terrenoire, au club du troisième âge, à la FNACA – la Fédération nationale des anciens combattants en Algérie, Maroc et Tunisie – ou à l'amicale laïque du quartier. Nous réclamons la suspension ou même l'annulation de la taxe qui, je le répète, les frappe pour la première fois, alors que le contexte ne s'y prête guère.
Responsabilité sociale des entreprises
La parole est à M. Frédéric Barbier, pour exposer sa question, no 1337, relative à la responsabilité sociale des entreprises.
Monsieur le secrétaire d'État, je souhaite appeler votre attention sur les opérations d'optimisation des coûts auxquelles se livrent actuellement de grands groupes industriels comme Aperam. Implantée notamment à Pont-de-Roide-Vermondans, dans ma circonscription, cette filiale d'ArcelorMittal figure parmi les principaux producteurs européens d'aciers inoxydables de précision. Le savoir-faire exceptionnel, spécifique, des salariés de cette usine est largement reconnu au sein de leur secteur industriel : pour avoir travaillé quelques années dans le pays de Montbéliard, vous le savez aussi bien que moi.
Pourtant, l'entreprise s'apprête, après avoir délocalisé en Belgique une partie des activités de son site de Gueugnon, à transférer à son tour sur celui-ci une bonne part de l'activité de Pont-de-Roide. Notre usine perdrait ainsi quatre-vingts emplois sur 240 : c'est d'autant plus incompréhensible qu'elle possède un carnet de commandes bien rempli. La direction justifie ces restructurations par la nécessité d'accroître la compétitivité d'Aperam sur les marchés européens face à ses concurrents asiatiques, en particulier indonésiens. L'entreprise est un cas d'école : à ce jour, elle privilégie l'optimisation et n'investit guère en vue de développer son site de Pont-de-Roide-Vermondans. Il pourrait cependant en être autrement, grâce au plan de relance et si l'on suscitait sa diversification : l'hydrogène, par exemple, lui offrirait de belles perspectives d'avenir.
Alors que l'État est au rendez-vous pour soutenir les entreprises face aux conséquences de la crise sanitaire, entre autres par un plan de relance colossal inédit, ainsi que par le renforcement de la prise en charge du chômage partiel, je vous le demande, monsieur le secrétaire d'État : comment dissuader ces grands groupes bien portants de continuer de détruire des emplois en suivant une logique d'optimisation des coûts ? Et comment les encourager à relever le défi de la relocalisation, de l'innovation, de l'investissement et du développement, répondant en cela aux ambitions de l'État français ?
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la transition numérique et des communications électroniques.
Vous interpellez le Gouvernement sur le projet de restructuration industrielle de l'entreprise Aperam, envisagé à partir de la fin de l'année. Je peux vous assurer que nous suivons avec la plus grande attention l'évolution de la situation sociale sur ses différents sites. Vous l'avez dit : Aperam est l'un des leaders européens en matière d'aciers inoxydables de précision, production stratégique, puisqu'elle alimente d'autres filières industrielles telles que l'automobile et l'électroménager. Cependant l'entreprise subit la concurrence d'acteurs asiatiques très compétitifs, en particulier des Indiens, des Indonésiens et des Taïwanais, sans compter la Turquie, qui achète en Indonésie des brames d'acier, les lamine à chaud et les revend au sein de l'Union européenne. Si les mesures de sauvegarde européennes ont permis de diminuer ces importations d'acier laminé à chaud, elles sont moins efficaces concernant l'acier laminé à froid. La direction générale des entreprises – DGE – travaille donc avec la direction générale du trésor – DGT – à des actions antidumping et antisubventions plus ciblées, qui viseraient notamment l'Indonésie et l'Inde.
Au sein d'Aperam, une réflexion touchant l'outil de production est en cours : le groupe envisage notamment de transférer en trois ans l'activité de Gueugnon, qui concerne des produits non brillants, vers le site belge de Genk, lequel dispose de lignes de finissage plus performantes. Il s'agit en effet de produits dont la valeur ajoutée est moindre. Durant la même période, ce transfert d'activité entraînerait une rediffusion des effectifs : 100 à 120 salariés sur les 700 que compte actuellement le site. Ces départs reposeront uniquement sur le volontariat et donneront lieu à des mesures liées à l'âge : il n'y aura donc pas de plan de sauvegarde de l'emploi – PSE.
Parallèlement, le groupe a manifesté l'intention d'investir dans le site de Gueugnon afin de le recentrer sur son coeur de métier, c'est-à-dire le recuit brillant, de se repositionner sur des produits rentables et de remettre à niveau les outils industriels. Ce plan stratégique de 30 millions d'euros, validé par Aperam, vise à faire de Gueugnon le site européen de référence en matière de recuit brillant. Une partie de l'activité de laminage du site d'Imphy sera récupérée par Gueugnon, plus performant : ce dernier pourrait également se voir transférer une partie des activités de Pont-de-Roide, ainsi que vous l'avez souligné.
Toutefois, je soulignerai l'engagement pris par Aperam de ne pas fermer son usine de Pont-de-Roide et d'en développer l'activité à long terme, notamment en y investissant 3 millions d'euros. Monsieur le député, je vous sais très mobilisé sur le sujet : le Gouvernement sera particulièrement vigilant concernant ce site et les projets d'investissements que proposera Aperam pour en assurer la pérennité.
Merci, monsieur le secrétaire d'État, de ces propos rassurants. Quelques collègues députés et moi-même avons alerté Thierry Breton, le commissaire européen au marché intérieur, sur les mesures à prendre aux frontières afin de protéger notre inox. Je mise également sur la filière hydrogène : le pays de Montbéliard, l'un des territoires les plus industrialisés de France, est à l'avant-garde dans ce domaine, et je crois beaucoup en son développement. Je souhaite que nous soyons en mesure d'associer Aperam au plan hydrogène de toutes les façons possible. Si la production d'aciers inoxydables très spécifiques peut faire contribuer cette entreprise au développement de l'hydrogène, il faut que sa place lui soit assurée.
La parole est à Mme Christine Cloarec-Le Nabour, pour exposer sa question, no 1338, relative à l'éligibilité au fonds de solidarité.
Le soutien massif apporté aux entreprises face à la crise sanitaire est largement salué au-delà même de nos frontières : avec un effort de 155,36 milliards d'euros en 2020, soit plus du quart des dépenses réalisées à ce titre par les pays de l'Union européenne, la France se situe en tête du classement établi par la Commission européenne.
Le fonds de solidarité constitue l'un des piliers de cette politique de soutien. Or des commerçants de ma circonscription m'ont alertée : ils se trouvent dans une situation financière préoccupante et ne sont pas éligibles à ce fonds. Deux restaurants qui n'ont pu ouvrir en 2020 n'en bénéficient pas, faute de chiffre d'affaires à déclarer, alors que ces restaurateurs ont engagé des frais et contracté des emprunts qu'il leur reste à rembourser. Un bar-épicerie, quant à lui, a perdu trop peu de son chiffre d'affaires, alors que la marge générée par l'épicerie est en fait très inférieure à celle du bar, qui tombe sous le coup des fermetures administratives : malgré l'évolution des critères d'éligibilité pour février 2021, son propriétaire s'est vu dans l'obligation de souscrire un prêt garanti par l'État. Une autre commerçante, qui possède six points de vente de prêt-à-porter, n'a bénéficié du fonds que pour sa société, soit 1 500 euros par mois lors du premier confinement et 10 000 euros en novembre dernier. La durée de la crise et la faiblesse des montants versés durant ces trois mois de fermeture ont grandement fragilisé sa structure.
Monsieur le secrétaire d'État, si je salue les mesures prises en quelque sorte au fil de l'eau pour aider les commerces à surmonter cette crise, toutefois, au vu des situations que je viens de vous exposer, est-il envisagé ou envisageable de poursuivre l'adaptation des critères d'éligibilité au fonds de solidarité, voire de les rendre rétroactifs sous conditions, afin d'éviter que ces entreprises ne mettent la clé sous la porte ?
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la transition numérique et des communications électroniques.
Vous appelez l'attention du Gouvernement sur l'accès au fonds de solidarité des entreprises créées après le 30 septembre 2020, entre autres. Ces critères d'éligibilité sont régulièrement adaptés et élargis afin de soutenir au mieux nos entreprises : vous avez évoqué le fait que la Commission européenne saluait l'action de la France en la matière. Ainsi, à compter des aides distribuées au titre du mois de janvier 2021, toutes les entreprises créées avant le 31 octobre 2020 – et non plus le 30 septembre – sont susceptibles de bénéficier du fonds de solidarité, quels que soient leur chiffre d'affaires et leur secteur d'activité, dès lors que cette activité fait l'objet d'une interdiction d'accueil du public en raison de mesures de confinement et qu'elles ont perdu au moins 50 % de leur chiffre d'affaires.
Vous nous signalez également la situation des commerces de proximité exerçant plusieurs activités. Pour ces entreprises, c'est l'activité principale qui détermine l'accès au fonds de solidarité. Prenons le cas que vous avez cité, celui d'un bar-épicerie. Si, en temps normal, la majeure partie de son activité repose sur le bar, il bénéficiera d'aides à ce titre, soit 10 000 euros ou 20 % de son chiffre d'affaires ; si son activité principale est l'épicerie, il recevra l'aide accordée aux entreprises hors secteurs S1 ou S1 bis, soit 1 500 euros dès 50 % de baisse du chiffre d'affaires par rapport à l'année passée.
Madame la députée, je ne veux pas que vous doutiez de l'engagement du Gouvernement au service des commerces de proximité. Le plan de relance a créé un fonds de soutien, doté de 60 millions d'euros, pour subventionner les opérations des 100 « foncières territoriales », afin de revitaliser nos territoires. Nous accompagnons les buralistes : nous leur avons donné la possibilité de vendre des timbres et d'assurer le règlement des impôts. Ils peuvent également développer une offre de services de proximité, grâce au fonds de transformation qui leur permet de financer ces projets d'activité complémentaire : épicerie, conciergerie, cave à vins. Je le répète, comptez sur la mobilisation totale du Gouvernement pour soutenir et accompagner ceux qui composent le tissu économique français.
Même si toutes mes questions n'ont pas reçu de réponse, je ne doute pas que le Gouvernement sera aux côtés des entreprises, des commerces en particulier. Il s'agit plutôt aujourd'hui d'une deuxième étape : faire dans la dentelle, cibler, suivre les entreprises en difficulté, afin de les accompagner au mieux et, encore une fois, de parvenir à ce qu'elles ne mettent pas la clé sous la porte.
La parole est à Mme Naïma Moutchou, pour exposer sa question, no 1344, relative au fléchage des dépenses publiques.
Au moins 500 milliards d'euros : c'est ce que l'État et les territoires injecteront dans l'économie française au cours des cinq années à venir pour indemniser les secteurs en difficulté, accompagner les populations les plus fragiles, soutenir la relance et, bien sûr, ouvrir la voie de la transition écologique. Ces mesures budgétaires d'une ampleur sans précédent posent naturellement la question de l'outil qui permettra à l'État et aux territoires de piloter et de sécuriser la dépense publique, ainsi que d'en optimiser la productivité.
La France dispose des technologies et des savoir-faire pour appuyer l'État dans cette démarche au moyen d'une plateforme numérique de fléchage qui déterminerait l'usage des sommes allouées, à l'image d'un chèque-restaurant, et apporterait l'assurance qu'elles sont bien utilisées au sein du seul périmètre auquel elles sont destinées. Grâce au fléchage, le bon montant parviendrait au bon destinataire, pour le bon usage. C'est indispensable, lorsqu'un pourcentage de 1 % d'évaporation ou de gaspillage revient à une perte de 5 milliards d'euros. Les sommes en jeu imposent que nous nous dotions d'un tel outil régalien. Actionnable par tous les services de l'État, déclinable selon les régions et les territoires, il permettrait d'évaluer facilement en temps réel et d'ajuster et de rendre compte en toute transparence de l'action publique. Pilier d'un pôle éco-numérique national, la plateforme de fléchage pourrait constituer un élément clé de notre souveraineté.
Nous en avons les moyens : dans ma circonscription du Val-d'Oise, par exemple, un projet est prêt. Baptisé France Fléchage, il est défendu par Alain Schott, ses associés et ses équipes d'Ekwee. Il ne tient qu'à nous de le faire entrer dans une phase pilote et opérationnelle. Comment pourrions-nous travailler et avancer ensemble, monsieur le secrétaire d'État, pour mettre au point cet outil de fléchage, et dans quel délai ? Vous l'avez compris, je suis prête à vous faire des propositions concrètes pour faciliter la reconstruction nationale.
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la transition numérique et des communications électroniques.
Madame la députée, vous appelez l'attention du Gouvernement, notamment celle de monsieur Bruno Lemaire, sur la bonne utilisation des moyens alloués par l'État et les territoires pour répondre à la crise sanitaire, économique et sociale et pour bâtir la France de 2030. Nous vous rejoignons parfaitement. Le souci de la bonne allocation des moyens anime la mise en oeuvre du budget de l'État, que l'on soit ou non en période de crise. L'effort sans précédent déployé par le Gouvernement appelle à renforcer la vigilance ainsi que la transparence vis-à-vis de nos concitoyens et de l'ensemble des acteurs économiques.
Dès l'adoption, en mars 2020, de la première loi de finances rectificative instaurant les principaux dispositifs d'urgence – l'activité partielle, le fonds de solidarité et les PGE, notamment – , un comité chargé du suivi de la mise en oeuvre des mesures de soutien et de leur évaluation a ainsi été créé. Associant des parlementaires et présidé par Benoît Coeuré, ce comité a déjà rendu publics des éléments quantitatifs et qualitatifs d'appréciation de la mise en oeuvre des mesures de soutien. Le rapport final, publié prochainement, permettra de déterminer globalement si l'argent public a bien été versé là où il était vraiment utile.
Parallèlement, la lutte contre la fraude à l'activité partielle et au fonds de solidarité a été renforcée, afin que nous nous assurions que les moyens octroyés par la solidarité nationale parviennent bien à ceux qui en ont besoin. Au-delà de la réponse à l'état d'urgence, 100 milliards d'euros sont actionnés par l'État afin de relancer notre économie en la rendant plus verte et plus inclusive. La capacité à suivre la dépense au plus près de sa matérialisation constitue l'un des principaux piliers du déploiement du plan de relance. En effet, nous ne pouvons être efficaces que si nous savons quels montants ont été dépensés et dans quel but. C'est une condition sine qua non pour piloter le plan, afin qu'il réponde à son objectif premier : redresser rapidement notre économie.
À ce titre, vous pouvez constater que les tableaux de bord retraçant la mise en oeuvre territorialisée des mesures du plan de relance, régulièrement actualisés, sont publiés sur le site internet de France relance. L'outil de fléchage que vous proposez contribue à la bonne allocation des moyens. C'est une initiative que je salue car, comme je viens de le souligner, elle rejoint l'un des principes clés de l'action de l'État. Le cabinet du ministre de l'économie, des finances et de la relance est disposé à discuter avec vous et avec le think tank de l'outil proposé.
Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d'État. Je saisis évidemment la perche ; nous continuerons de travailler avec le cabinet du ministre. Je suis convaincue qu'une plateforme de fléchage est une réponse inéluctable à la question des moyens budgétaires alloués et à la demande de transparence légitime de l'opinion publique à ce sujet.
La parole est à Mme Géraldine Bannier, pour exposer sa question, no 1328, relative au soutien au secteur de l'événementiel.
Si le début d'année est difficile pour tous, il est intolérable pour d'aucuns : les traiteurs et professionnels de l'événementiel. Pour ces habitués des célébrations familiales et autres festivités, l'année est en effet d'ores et déjà compromise. Certains ont, par exemple, annoncé l'annulation de nombreux mariages initialement prévus à l'été 2021, voire jusqu'en octobre, ce qui met fin à leurs espoirs de reprise. Certes, le Gouvernement a déployé un vaste éventail avec le chômage partiel, le fonds de solidarité, les PGE ou encore le renoncement des bailleurs à leurs loyers en soutien aux commerçants, grâce au crédit d'impôt prévu de 50 %. Aucun remboursement de PGE ne sera exigé la première année, la possibilité étant offerte de rembourser dans un délai de un à cinq ans.
Bien que ces modalités soient adaptées à la situation, les traiteurs et autres professionnels de l'événementiel continuent de s'inquiéter de ne pouvoir reprendre l'activité qui constitue le coeur de leur métier. La situation des traiteurs et professionnels de l'événementiel reste précaire et nombreux sont ceux qui auront du mal, ou ne parviendront pas, à se relever. En effet, ces aides demeurent insuffisantes pour des chefs d'entreprises qui tournaient jusqu'à présent à plein régime. Certains d'entre eux ont bien essayé de limiter la casse, en proposant par exemple des repas à emporter pour les fêtes de fin d'année, mais cela est peine perdue, en particulier dans les départements ruraux où la pratique consistant à acheter des plats à emporter en semaine est peu répandue.
Au-delà de ces seules considérations économiques, des milliers de familles sont rongées par l'angoisse suscitée par la situation que traduisent les chiffres. Les travailleurs extras sont également très éprouvés et parfois peu indemnisés. Monsieur le secrétaire d'État, que prévoit le Gouvernement pour soutenir, tout au long des mois à venir, ces professionnels dont le planning de réservation continue progressivement de se réduire comme peau de chagrin ?
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la transition numérique et des communications électroniques.
Le ministre délégué Alain Griset a beaucoup travaillé avec les organisations du secteur de l'événementiel, qu'elles représentent le domaine professionnel – celui des congrès, des foires et des salons – ou particulier – celui des mariages, notamment. Ces organisations ont été reçues plusieurs fois au ministère, et chacun a parfaitement conscience des enjeux très spécifiques qui pèsent sur le secteur, comme la nécessité d'anticiper ou comme le travail de préparation préalable à toute juste rétribution. Ces impératifs sont profondément perturbés par les contraintes qu'impose la pandémie, d'autant plus que le virus ne cesse de surprendre.
Pour le Gouvernement, l'enjeu a consisté à mettre en place les bons outils pour les bonnes personnes. Or l'événementiel ne recouvre pas une activité unique, comme la restauration ou la vente de vêtements : c'est un écosystème. Dans l'événementiel professionnel, on trouve non seulement les traiteurs, les gestionnaires de sites, les agences d'hôtes et d'hôtesses, mais aussi des menuisiers spécialisés dans la conception de stands, des concepteurs de signalétique, des fabricants de matériel de son et lumière, des agents de sécurité, des agences de communication et des chauffeurs – sans oublier les commerçants et les artisans qui réalisent l'essentiel, sinon la totalité de leur chiffre d'affaires, lors de foires et salons. Dans l'événementiel particulier, on trouve les traiteurs, ainsi que plusieurs professions dont certaines, comme les wedding planners – organisateurs de mariages – sont si récentes que leur nom n'a pas encore de traduction française.
L'identification des acteurs du secteur a donc été un défi. Elle était nécessaire pour permettre à tous de bénéficier des aides les plus importantes, qui n'ont pas d'équivalent en Europe – notamment le fonds de solidarité renforcé qui leur permet de bénéficier chaque mois d'un droit d'option entre l'indemnisation, allant jusqu'à 10 000 euros de perte de chiffre d'affaires, et la compensation de 20 % du chiffre d'affaires, plafonnée à 200 000 euros. Citons aussi l'activité partielle sans reste à charge, les exonérations de cotisations patronales et l'aide au paiement des cotisations salariales. Je rappelle qu'il existe aussi des solutions de financement, en particulier le prêt garanti par l'État, dont le remboursement du capital peut commencer deux ans après la conclusion, dont les taux sont sans équivalent sur les marchés et dont nous avons également acté le décalage des amortissements.
En somme, si le secteur n'enregistre pas de recettes, nous nous assurons qu'à la fin il n'ait plus de charges. Cette politique, nous la menons non seulement pour lui mais aussi pour tous ceux qui sont fortement affectés par les conséquences économiques de la crise sanitaire. Je rappelle, comme cela a été évoqué un peu plus tôt, que la Commission européenne a constaté que la France avait dépensé 50 % de plus que l'Allemagne pour soutenir ses entreprises. Cette politique est sans équivalent en Europe et dans le monde.
Je vous remercie pour votre réponse. Je voudrais partager un témoignage que j'ai reçu hier, celui d'une femme de 54 ans, employée depuis dix ans dans l'événementiel, n'ayant plus travaillé depuis le salon de l'agriculture de 2020. Elle souligne qu'il est très difficile pour les extras d'accéder aux aides, en raison des 138 jours de travail dont il faut justifier au minimum. Souvent, les extras font beaucoup d'heures en peu de jours : je tenais à appeler votre attention sur ce problème.
La parole est à Mme Nicole Dubré-Chirat, pour exposer sa question, no 1342, relative à la réhabilitation de locaux à Béhuard.
Ma question porte sur la situation particulière de la commune de Béhuard, dans le Maine-et-Loire, qui compte 150 habitants permanents. Cette petite cité de caractère, lieu de pèlerinage, est située sur une île en bordure de Loire et, de facto, en zone inondable. Les inondations, plus ou moins fréquentes, sont anticipables, prévisibles et progressives : elles diffèrent en cela de celles qui touchent d'autres sites. Les habitants connaissent le risque de circuler en bottes, sur des planches comme à Venise ou en bateau.
La commune a peu de possibilités d'extension pour réaliser des constructions et installer des entreprises ou des activités diverses – en dehors des activités touristiques – , ce qui lui offre peu de ressources financières. Le budget de la commune est alimenté par les impôts, qui augmentent légèrement chaque année, les aides de l'agglomération et la subvention Natura 2000, qui s'élève à environ 1 000 euros par an. L'équilibre budgétaire est donc difficile à atteindre.
De plus, l'aménagement du territoire est limité par le plan de prévention des risques d'inondation – PPRI – qui régule les risques sur tout le territoire de manière uniforme. Compte tenu de l'activité touristique existante, les élus souhaiteraient réhabiliter ou réaffecter d'anciennes dépendances de fermes en habitat adapté pour y faire des gîtes ou des chambres d'hôtes. Or cela n'est pas possible aujourd'hui. Serait-il possible, madame la ministre déléguée, d'envisager, en lien avec le projet de loi organique relatif à la simplification des expérimentations mises en oeuvre sur le fondement du quatrième alinéa de l'article 72 de la Constitution ou avec le projet de loi dit 4D – décentralisation, différenciation, déconcentration, décomplexification – , d'envisager des procédures différenciées concernant les inondations, afin de permettre ce type d'évolutions dans des secteurs spécifiques ? D'autres communes pourraient s'en inspirer et le maire y est favorable.
Dans cette même cité, une convention a été signée avec La Poste en 2016 pour qu'en période d'inondation, un membre de la municipalité récupère le courrier à l'agence postale de la commune voisine et le distribue en bateau à Béhuard. Or cette convention est sur le point d'être dénoncée par La Poste au titre de la responsabilité juridique et il n'existe pas d'autre solution à ce jour, ce qui mettra à mal un service public de proximité dont bénéficient les usagers au cours de ces périodes particulières à durée variable. Quelle action spécifique peut-on mettre en place pour répondre à ce besoin ?
Madame la députée, vous avez interrogé Mme Pompili, ministre de la transition écologique, qui m'a chargée de vous répondre. La ville de Béhuard est inondée de manière fréquente et les vitesses d'écoulement de l'eau peuvent y être élevées, comme l'a rappelé la dernière crue, survenue au mois de février. Les principaux objectifs de la prévention des risques d'inondation sont d'éviter les décès, souvent dus à des écoulements rapides, et de réduire les dommages matériels. Le Gouvernement tient à ce que la solidarité nationale puisse continuer à être mise en oeuvre pour les sinistrés, ce qui implique de ne pas augmenter notre vulnérabilité collective.
Le plan de prévention des risques d'inondation du Val de Louet, approuvé en février 2021, a fait l'objet d'une concertation étroite avec les collectivités concernées, en particulier Béhuart, pour évoquer le projet de règlement. Cette concertation a permis de répondre à certaines demandes des élus de Béhuard en créant un zonage spécifique, REPU – rouge écoulement préférentiel urbain – , pour tenir compte du caractère aggloméré du centre bourg et de la culture du risque qui y existe.
Lors de la concertation, la collectivité a également évoqué la possibilité de réhabiliter d'anciennes granges en gîtes en dehors de cette zone. L'État a répondu que le changement d'usage des granges ne pouvait pas être autorisé dans cette zone dite REPN – rouge écoulement préférentiel naturel – , en raison de l'évacuation plus difficile des habitants en cas de crise et de la moindre culture du risque chez les personnes hébergées. De plus, de nombreuses autres communes comportent également ce zonage, dans des secteurs où peuvent aussi se trouver d'anciennes granges. De fait, accorder certains droits à une commune sans les accorder à d'autres, dans la même configuration hydraulique et d'occupation du sol, constituerait une distorsion de traitement.
Cependant, le règlement du PPRI prévoit que, dans la zone REPN, le changement de destination des granges reste possible pour un usage sportif ou de loisirs. Une telle opportunité pourrait répondre aux projets de développement de l'activité touristique de la commune de Béhuard, en tenant mieux compte de la prévention des risques, dans la mesure où la fréquentation n'y serait pas liée à la présence de lieux de sommeil.
Merci beaucoup, madame la ministre déléguée, pour ces réponses précises. Nous étudierons la possibilité de faire évoluer la situation dans la zone REPN. Il s'agit de trouver une réponse spécifique pour les communes dans lesquelles les inondations ne sont pas comparables aux inondations torrentielles, mais se font par des montées en eau progressives.
La parole est à M. Jean-Marc Zulesi, pour exposer sa question, no 1339, relative à l'investissement de l'État dans la gare de triage de Miramas.
Comme vous le savez, madame la ministre déléguée chargée du logement, la pollution sonore et atmosphérique engendrée par le transport routier est un véritable problème dans certains de nos territoires. Dans ma circonscription des Bouches-du-Rhône, les citoyens attendent des mesures concrètes pour y faire face, je pense en particulier aux habitants de Rognac, qui souhaitent voir aboutir la construction de murs anti-bruit aux abords de l'autoroute, ou encore à ceux de Grans qui subissent de multiples nuisances liées au trafic routier.
Le développement du fret ferroviaire permet de réduire significativement les émissions de gaz à effet de serre et de particules fines. Il passe par un investissement dans nos infrastructures, notamment dans nos gares de triage, lesquelles souffrent depuis trop longtemps de sous-investissement. La gare de triage de Miramas, l'une des cinq gares de triage à gravité du réseau national, en a fait les frais : elle n'est plus à sa capacité maximale de fret. Or chaque jour passé sans investissement ajoute une ligne à l'ardoise de la rénovation. La régénération de l'outil existant est donc primordiale.
Mais soyons audacieux, soyons ambitieux, et développons d'autres infrastructures. À proximité de cette gare de triage se trouve la plateforme logistique de CLESUD, centre logistique de l'Europe du Sud, que j'ai visité avec le maire de Grans, Yves Vidal, le 30 octobre dernier. Son potentiel est non négligeable, il comporte même un terminal de fret ferroviaire qui ne demande qu'à se développer. Gare de triage et plateforme logistique de CLESUD constituent deux pôles complémentaires susceptibles de renforcer le fret ferroviaire dans une zone où le flux routier est dense.
Madame la ministre déléguée, quel regard porte le Gouvernement sur ces projets de territoire qui s'inscrivent dans la stratégie pour le développement du fret ferroviaire mentionnée dans la loi d'orientation des mobilités et dans notre ambition, que je sais commune, de doubler la part du fret ferroviaire d'ici à 2030 ?
Le fret ferroviaire est, vous le savez, un sujet prioritaire pour le Gouvernement et son développement constitue l'un des enjeux majeurs de la décennie à venir. Cette majorité a entrepris de consacrer au ferroviaire des investissements sans précédent. Cette priorité a été affirmée l'été dernier par le Président de la République et prend un relief particulier dans le contexte de crise sanitaire. Elle a été traduite dans les actes grâce à la loi de finances pour 2021 qui prévoit un soutien additionnel de 170 millions d'euros pour l'exploitation des services de fret ferroviaire dès 2021. Cet effort important contribuera à l'équilibre financier des opérateurs, qui se trouvent pour certains dans des situations financières difficiles.
Cette enveloppe permettra la prise en charge par l'État de près de 70 % du montant des péages payés par les trains de fret, la mise en place d'une nouvelle aide à l'exploitation des services de wagons isolés, le renforcement de l'aide à l'exploitation des services de transport combiné ainsi que le financement de l'aide au démarrage de nouveaux services d'autoroutes ferroviaires.
Par ailleurs, le plan de relance comporte un volet spécifique consacré au fret ferroviaire, qui prévoit un programme d'investissement d'ampleur pour tout le secteur. Je vous confirme que la rénovation de la gare de triage de Miramas est identifiée comme l'une des opérations auxquelles donner la priorité dans ce cadre. Elle fera l'objet d'un programme de régénération portant non seulement sur des installations permettant le tri des wagons mais aussi sur la remise en état des voies de service. Nous sommes conscients de la complémentarité avec les plateformes logistiques multimodales, comme celle du terminal CLESUD : des crédits du plan de relance seront fléchés vers ce type d'installations.
Tous ces investissements serviront la stratégie de long terme pour le développement du fret ferroviaire, que le Gouvernement remettra au Parlement dans les prochaines semaines, conformément à l'article 178 de la loi d'orientation des mobilités. L'objectif que nous partageons est le doublement de la part modale du fret ferroviaire d'ici à 2030. Le Gouvernement travaille en ce sens avec tous les partenaires, afin de réduire l'impact carbone des transports. Le Parlement sera bien évidemment largement associé à cet objectif.
Merci pour ces précisions, madame la ministre déléguée. Je salue les engagements du Gouvernement s'agissant de ces enjeux essentiels. Permettez-moi de vous inviter à vous rendre dans notre belle circonscription des Bouches-du-Rhône pour constater par vous-même quel potentiel elle recèle en matière de fret ferroviaire, dont la régénération est chère à notre territoire.
La parole est à Mme Brigitte Kuster, pour exposer sa question, no 1346, relative à la bretelle d'accès au boulevard périphérique à la porte de Clichy.
Ma question est adressée à M. le ministre délégué chargé des transports. Depuis 2014, la maire du XVIIe arrondissement que j'étais, puis les élus de la majorité municipale, le maire de Clichy ainsi que le président du conseil départemental des Hauts-de-Seine ont tenté d'intéresser l'État à la création d'une bretelle d'accès au périphérique extérieur au niveau de la porte de Clichy. Elle est en effet victime d'une thrombose en matière de circulation. Ce sont 4 600 véhicules qui y transitent chaque heure pendant les périodes de pointe et ce n'est pas la porte d'Asnières, déjà elle-même saturée, qui nous permettra de résoudre ce problème d'engorgement routier. Cette situation ne peut perdurer, compte tenu de l'installation du tribunal de Paris et de la direction régionale de la police judiciaire et de l'aménagement du nouveau quartier des Batignolles, qui a vu la construction de 140 000 mètres carrés de bureaux et de 3 500 logements.
Les ministères de la justice et de l'intérieur attendent eux aussi cette nouvelle infrastructure. Les agents du tribunal ainsi que ceux de la direction de la police judiciaire, au « 36 Bastion », sont confrontés chaque jour à l'aggravation des conditions de trafic. Rappelons que le préfet de police s'est lui-même déclaré favorable à la création de cette bretelle d'accès. L'immobilisation de cortèges pénitentiaires à haute sensibilité fait en effet peser une menace sur les forces de l'ordre ainsi que sur les automobilistes. Dans le contexte des procès liés aux attentats terroristes commis en France, il est impossible de continuer d'ignorer le danger existant.
Les études techniques ont démontré la faisabilité de cette infrastructure et sa pertinence pour désengorger la porte de Clichy. Le coût de ce chantier serait estimé à 6 millions d'euros. À quelle échéance le Gouvernement entend-il construire cette bretelle d'accès non seulement pour fluidifier le trafic mais, surtout, pour améliorer la sécurité des convois pénitentiaires et des habitants du quartier ?
Avant toute chose, il est important de souligner que le boulevard périphérique est une voie relevant de la Ville de Paris. En vertu du principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales auquel je sais le Parlement très attaché, le Gouvernement ne peut interférer dans un débat qui appartient aux acteurs locaux. Par ailleurs, ce projet de bretelle d'accès au périphérique fait l'objet d'un désaccord entre la mairie du XVIIe arrondissement et la mairie de Paris. La préfecture de police a pu rappeler que cette infrastructure faciliterait la circulation de véhicules de secours et les convois d'administration pénitentiaire et les services du ministère des transports ont agi en tant que facilitateur. Ils ont diligenté une étude d'impact sur le trafic dont les conclusions ont été communiquées en 2019.
Au-delà de ce projet, l'État suit avec attention la desserte de la porte de Clichy, qui a fait l'objet d'aménagements majeurs auxquels il a lui-même contribué. Je pense notamment au prolongement de la ligne 14 du métro parisien, de la gare Saint-Lazare à la mairie de Saint-Ouen, qui a pour objectif de désaturer la ligne 13 et de desservir un quartier en plein développement. Réalisé par la RATP dans le cadre des travaux du Grand Paris, ce nouveau tronçon a été mis en service en janvier dernier et constitue un vrai motif de satisfaction.
Je peux ainsi affirmer que l'État prend ses responsabilités quand il doit le faire, mais il me faut aussi vous rappeler qu'il ne peut intervenir en lieu et place des collectivités locales quand celles-ci sont pleinement compétentes.
Madame la ministre déléguée, merci d'avoir rappelé la situation de ce quartier que je connais particulièrement bien et d'avoir souligné les efforts consentis pour le développement de l'offre de transports en commun. Néanmoins, vous l'aurez compris, ma préoccupation porte sur la sécurité. Certes, le boulevard périphérique est une voie gérée par la Ville de Paris mais, pour m'être entretenue avec d'autres autorités – et je veux parler de représentants de l'État – , il me paraît important que l'État joue son rôle et engage une concertation avec la mairie de Paris, ce qui, à l'heure actuelle, est loin d'être le cas. J'estime qu'il doit y avoir une volonté politique des deux parties. Ce n'est pas parce que le boulevard périphérique appartient à la Ville de Paris que l'État doit baisser les bras face au danger que représente cet engorgement. Il se doit d'être au rendez-vous.
Il y a une autre raison pour laquelle je compte sur vous, madame la ministre déléguée, vous qui êtes rattachée à la ministre de la transition écologique : c'est la lutte contre la pollution induite par la thrombose de ce quartier. Ce n'est pas la desserte en transports en commun qui règlera le problème des personnes qui sont obligées de prendre leur véhicule.
Le danger est réel : le préfet de police, le ministère de l'intérieur et le ministère de la justice attendent une solution. Il appartient au Gouvernement de prendre ses responsabilités et d'engager les discussions nécessaires. Ce chantier, je le rappelle, représente un coût de 6 millions d'euros. La Ville de Paris et l'État peuvent se retrouver pour faire aboutir ce projet tant attendu par les habitants de ce quartier comme par les instances dont je viens de rappeler l'importance.
La parole est à Mme Valérie Beauvais, pour exposer sa question, no 1347, relative au fret ferroviaire et au réseau capillaire.
Ma question, qui s'adresse elle aussi au ministre délégué chargé des transports, porte sur l'exploitation des lignes de fret ferroviaire et plus particulièrement celles du département de la Marne qui relient les communes de Oiry et Esternay et de Coolus et Charmont. Le fret ferroviaire constitue un enjeu majeur non seulement pour l'activité économique de plusieurs secteurs, dont le secteur agricole, mais aussi pour la politique de décarbonation des transports et le respect des objectifs fixés par l'accord de Paris sur le climat.
Un train représentant l'équivalent de quarante-cinq camions, on peut estimer que les lignes capillaires évitent aux agriculteurs marnais de mettre sur nos routes départementales plus de 20 000 camions par an pour transporter leurs productions. Par ailleurs, il n'est pas inutile de rappeler que les lignes de fret contribuent aussi au maintien dans nos communes du maillage territorial des coopératives agricoles, lesquelles assurent des emplois directs et indirects aux habitants de nos territoires ruraux.
Or la pérennité de ce réseau capillaire est suspendue à la réalisation d'importants travaux rendus nécessaire par la carence dont son gestionnaire a fait preuve depuis de trop nombreuses années. C'est ainsi que pour les seules lignes de Oiry-Esternay et de Coolus-Charmont, le chiffrage des aménagements à réaliser, récemment présenté, s'élève respectivement à 38 millions et à 81 millions d'euros selon que la pérennité visée est de cinq ou dix ans. Aux termes des contrats qu'elles ont conclus, les coopératives agricoles doivent contribuer financièrement et elles s'inquiètent pour l'avenir de ces lignes, craignant notamment une utilisation dégradée des voies et, ou, une nouvelle charge financière qu'elles ne pourront assumer.
Madame la ministre déléguée, au regard de ces enjeux économiques et environnementaux, pouvez-vous m'indiquer quels moyens financiers le Gouvernement entend mobiliser pour assurer la pérennité du réseau capillaire de fret et plus particulièrement des lignes marnaises ? J'aimerais savoir, par ailleurs, si le plan de relance comprend des moyens spécifiques pour le fret ferroviaire. Si oui, comment seraient-ils répartis pour le département de la Marne ?
Vous interrogez le ministre délégué chargé des transports sur les lignes de fret ferroviaire de Oiry-Esternay et de Coolus-Charmont dans la Marne, et, plus généralement, sur l'importance du réseau capillaire de fret.
Depuis 2015, l'État consacre 10 millions d'euros par an au financement des investissements de régénération de ces infrastructures ferroviaires, aux côtés des collectivités territoriales et des chargeurs. La contribution de l'État, inscrite dans la durée, a permis ainsi d'impulser une véritable dynamique de remise en état de ces lignes, qui assurent notamment la desserte ferroviaire de sites industriels et agricoles dans les territoires. Elles sont d'ailleurs empruntées par 20 % des trains de marchandises en France et leur abandon entraînerait des conséquences désastreuses tant en matière de report modal que de compétitivité des entreprises, et donc d'emplois.
Dans le cadre du plan de relance, l'État triple son effort d'investissement pour contribuer au financement de nombreuses opérations à engager à court terme, afin d'assurer la pérennité des lignes concernées. La programmation des financements se fera dans le respect des règles appliquées jusqu'à présent, avec une contribution de l'État pouvant représenter jusqu'à 30 % des investissements à réaliser.
Les lignes que vous avez mentionnées, Oiry-Esternay et Coolus-Charmont, ont bien été identifiées au sein des besoins recensés et feront l'objet de discussions entre l'État, la région, les acteurs locaux et SNCF Réseau. Les échanges entre les parties prenantes ont d'ores et déjà permis de répartir les investissements nécessaires et d'engager une hiérarchisation des interventions sur le réseau. Divers critères sont pris en considération pour ce faire, dont la pérennité envisagée, le montant des travaux, le contexte territorial et économique des chargeurs, ainsi que le trafic fret sur les différentes lignes.
Dès lors que, dans le cadre de ces échanges, une décision sera prise concernant la programmation des travaux de remise en l'état de ces deux lignes, l'État assumera bien sûr sa part des investissements à réaliser, aux côtés des autres cofinanceurs. Vous pouvez être assurée, madame la députée, de notre total investissement dans le fret ferroviaire, avec un objectif que nous partageons : doubler sa part modale d'ici à 2030.
Je constate l'absence d'engagements financiers clairs quant aux investissements à cinq ou dix ans et regrette que vous ne soyez pas plus précise sur cette question, à laquelle les agriculteurs et les coopératives agricoles attendent des réponses. On ne peut pas nier leurs actions en faveur du développement durable et un geste du Gouvernement pour les accompagner permettrait de leur redonner de l'espoir. Il s'agit d'une terre de céréaliers et ce mode de transport est primordial aussi pour notre environnement.
La parole est à M. Jean Lassalle, pour exposer sa question, no 1352, relative à la sécurisation de la RN 134.
Ma question porte sur la route nationale 134, dénommée en son temps « voie européenne 7 ». Cette qualification est-elle toujours d'actualité ?
Dans les années 1990, l'État et l'Union européenne ont entrepris de moderniser la totalité de cet axe routier, comportant deux tronçons distincts : le premier, entre Pau et Oloron-Sainte-Marie, devait être réalisé sur un site nouveau, car l'implantation de la RN 134 engendrait des problèmes d'urbanisme, un trafic très dangereux et ne permettait pas d'arriver à un résultat. Le second correspond à la liaison entre Oloron-Sainte-Marie et l'entrée du tunnel de Somport. Le projet prévoyait de contourner les communes concernées et de mettre la route aux normes, avec une voie de dépassement sur les parties les plus montagneuses, l'ensemble devant être bordé de pistes cyclables.
Malheureusement, le nouveau site de l'axe reliant Pau à Oloron-Sainte-Marie, bien que financé des années durant, n'a jamais été réalisé : on s'est contenté de quelques aménagements ponctuels, n'améliorant en rien la sécurité. Il y a d'ailleurs sur ce tronçon de trente-sept kilomètres pas moins de quatre changements de vitesse ! Au sud d'Oloron-Sainte-Marie, quatre communes ont été contournées, mais il en reste autant qui attendent leur tour : les habitants, confrontés à l'augmentation du trafic de poids lourds, voient leur maison se dévaloriser et doivent supporter un bruit et une fureur insupportables.
C'était un grand et beau projet, lancé par le président de la République française François Mitterrand et le roi d'Espagne Juan Carlos 1er. Certes, le gouvernement actuel n'est pas responsable de cet état de faits, mais il n'a rien entrepris pour y remédier.
Aussi a-t-il l'intention de reprendre sérieusement ce projet dans son ensemble et de le mener à bien, notamment de réaliser la déviation d'Oloron-Sainte-Marie, qui devient vitale, et d'y consacrer un véritable financement, en donnant un caractère prioritaire à son engagement dans le prochain CPER, le contrat de plan État-région ? Et qu'en est-il du rendez-vous que j'ai sollicité auprès du ministre délégué chargé des transports ? Je viendrai accompagné d'une petite délégation, comme je l'ai fait avec tous les ministres qui l'ont précédé depuis le début de ce projet, il y a plus de quarante ans.
Vous interrogez le ministre délégué chargé des transports sur les travaux de sécurisation de la RN 134. Avant toute chose, soyez assuré que l'État est pleinement engagé dans la modernisation de cet axe routier. La stratégie actuellement suivie consiste à privilégier des aménagements progressifs et proportionnés au niveau de trafic présent sur cette voie.
Plus précisément, entre Oloron et la frontière espagnole, une enveloppe de 7 millions d'euros, financés intégralement par l'État, a été inscrite en 2020 à l'actuel CPER, afin de traiter plusieurs points délicats de cet axe. Ce montant a permis la mise en service d'un aménagement de sécurité à l'entrée nord d'Asasp-Arros en août 2020, ainsi que d'entamer des travaux d'aménagement de l'entrée sud, actuellement en cours, et d'engager le confortement du site du Larry, qui débutera le mois prochain.
Plus au nord, une opération de mise en sécurité de la route nationale entre Belair et Oloron bénéficiera en 2021 d'un financement de 10,5 millions d'euros, au titre du plan de relance, pour accélérer l'engagement d'une première section dont les travaux préparatoires débuteront en fin d'année. Je peux aussi vous confirmer que l'État renforcera les moyens prévus au CPER. L'inscription de l'opération devrait être augmentée de 12 millions d'euros, intégralement financés par l'État, et portée à 23 millions dans le cadre de l'avenant de prolongation du volet mobilité du CPER jusqu'à fin 2022.
Par ailleurs, plusieurs autres aménagements sont réalisés en dehors du CPER, comme la suppression du passage à niveau numéro 24 sur la commune d'Herrère. Cette opération, d'un montant de 8,3 millions, dont 6 millions financés par l'État, a été ouverte à la circulation en février dernier.
Enfin, s'agissant du budget d'entretien, la RN 134 bénéficie d'un programme d'amélioration d'itinéraire validé par décision du ministre délégué chargé des transports en 2017, pour un coût de 3,8 millions d'euros. À ce jour, il reste 1,4 million de travaux à réaliser, dont près d'1 million programmé en 2021. Enfin, je ferai part au ministre délégué chargé des transports de votre demande de rendez-vous.
La parole est à Mme Bénédicte Taurine, pour exposer sa question, no 1331, relative aux géotextiles.
La stabilisation des sols uniquement par les techniques du génie végétal est devenue obligatoire depuis la loi sur l'eau de 1992. Le recours à des géotextiles et des géofilets biodégradables est une composante essentielle lors des premiers mois de revégétalisation des sols, qu'il s'agisse des berges des cours d'eau, du confortement des digues ou pour limiter l'érosion de pistes de ski. Ces géotextiles sont très largement répandus et doivent être totalement biodégradables, puisque les particules sont ensuite assimilées par les végétaux ou peuvent se retrouver dans l'eau ou dans le sol.
À ce jour, les géofilets majoritairement utilisés seraient tissés en Asie, dans des conditions avantageuses sur le plan de la main-d'oeuvre, supposément des enfants. Or aucune norme n'existe et il n'y a pas de traçabilité s'agissant des traitements subis ni des conditions de fabrication, sans parler de l'impact carbone lié au transport de ces produits.
En 2018, les résultats d'analyses biochimiques de composition réalisées en laboratoire ont laissé apparaître dans leurs composants des hydrocarbures, des polluants organiques persistants, les POP, et du chlorure de sodium. Ces composés chimiques se retrouvent ensuite irrémédiablement dans les sols et les nappes phréatiques, alors que le sodium est nuisible à la faune et à la flore. Ces produits posent d'autant plus de problèmes lorsqu'ils sont utilisés dans des zones classées en espaces naturels sensibles ou Natura 2000.
Il est cependant possible de fabriquer des filets en fibres naturelles, sans additif et à grande échelle. Des chaînes de production existent en France et disposent d'une importante capacité de développement. De surcroît, cela permettrait de soutenir, voire de relancer, le secteur textile – je m'adresse particulièrement à vous par rapport au pays d'Olmes qui est une zone économiquement sinistrée – et d'améliorer la rétribution des éleveurs d'ovins.
J'ai déposé en ce sens un amendement au projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, qui a malheureusement été rejeté. Vous dites vouloir encourager les relocalisations et vous inscrire dans la transition écologique. Qu'attendez-vous pour prendre des mesures permettant de tarir ces filières d'importation aux contenus toxiques et orienter vertueusement la commande publique ? Pour conclure, j'espère que vous donnerez un avis favorable à l'amendement que je déposerai en séance.
Vous appelez l'attention du Gouvernement sur la présence de substances chimiques dangereuses, comme les polluants organiques persistants, dans les géotextiles qui visent à stabiliser les sols sur les pentes des berges de certains cours d'eau, des digues ou des talus à proximité des routes.
La lutte contre la présence de substances chimiques toxiques est un sujet de préoccupation majeure. C'est pourquoi les services de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes – DGCCRF – , ainsi que les services des douanes, effectuent régulièrement des contrôles sur la conformité des produits importés notamment, quant à la présence de matières toxiques.
La solution passe par la relocalisation d'une industrie textile en Europe, comme vous le soulignez. La Commission européenne a ainsi lancé récemment deux initiatives intéressantes que nous soutenons : d'abord, l'engagement d'une stratégie sur le textile durable, dans le cadre du plan de développement de l'économie circulaire, soumise à la consultation publique en janvier 2021 ; ensuite l'entrée en vigueur de la stratégie européenne sur les produits chimiques, qui vient consolider les démarches engagées par la loi relative à la lutte contre le gaspillage et l'économie circulaire du 10 février 2020, qui a rendu obligatoire l'affichage de la présence de substances dangereuses dans les produits de consommation.
Cette stratégie impliquera la modification de plusieurs directives européennes, notamment le règlement relatif à la classification, à l'étiquetage et à l'emballage des substances chimiques – CLP : Classification, labelling, packaging – , dont la nouvelle version sera présentée lorsque la France assurera la présidence du Conseil de l'Union européenne au premier semestre 2022.
Enfin, les services du ministère de la transition écologique se tiennent à la disposition des fabricants et des producteurs de textiles de lin ou de chanvre qui souhaiteraient se diversifier en proposant la fabrication de produits dépourvus de substances chimiques, à base de fibres naturelles, notamment s'ils souhaitent développer un écolabel, que ces matières soient destinées aux géotextiles ou à toute autre application.
Nous avons effectivement dans notre territoire des entreprises à même de fabriquer ce type de produits et il serait intéressant de les recevoir comme vous le proposez.
La parole est à Mme Marie-Pierre Rixain, pour exposer sa question, no 1340, relative aux inondations en Essonne.
Elle s'adresse à Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique. Chaque année, les vallées de l'Orge et de l'Yvette, en Essonne, connaissent d'importants épisodes d'inondation, qui fragilisent périodiquement le bâti et les habitations locales – conséquences non négligeables pour les communes de ma circonscription comme Longjumeau, Épinay-sur-Orge, Villebon-sur-Yvette ou encore Champlan, qui déposent régulièrement des demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle.
La fréquence et l'intensité de ce phénomène sont appelées à s'accélérer dans les prochaines années. De fait, les politiques publiques doivent avoir pour priorité de renforcer la résilience des territoires face aux risques naturels. Une condition s'impose pour cela : poursuivre une action cohérente entre l'État et les collectivités, pour s'adapter à un risque croissant. C'est la raison pour laquelle la compétence de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations – GEMAPI – a été attribuée, en 2018, aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre : désormais, les intercommunalités jouent un rôle central dans la définition des objectifs en matière de prévention des risques d'inondation.
Toutefois, cet ajustement de la compétence GEMAPI ne suffit pas. Huit ans après la définition d'une stratégie nationale de gestion des risques d'inondation, n'est-il pas temps de mettre à jour les moyens mobilisés par l'État en la matière ? Je pense notamment aux politiques d'aménagement, qui doivent intégrer des critères de résilience et de durabilité à la hauteur des risques d'inondation, et dont le coût ne peut reposer entièrement sur les seules municipalités. Rappelons aussi que l'urbanisation croissante des vallées de l'Orge et de l'Yvette accroît le risque d'inondation et la vulnérabilité des habitants et des activités. Quels moyens supplémentaires peuvent être déployés pour prévenir les risques d'inondation qui frappent durement nos concitoyens, particulièrement les Essonniens ?
Madame la députée, les événements marquants de juin 2016 et de l'année 2018 témoignent d'un risque d'inondation dans le bassin versant Orge-Yvette. L'artificialisation des cours d'eau et l'imperméabilisation des sols sont, évidemment, des facteurs aggravants.
Face à cette situation, les services de l'État et les collectivités travaillent, depuis de nombreuses années, à l'élaboration et à l'application d'une politique globale de prévention des innovations. En septembre 2006, le préfet de l'Essonne a approuvé le plan de prévention du risque d'inondation de la vallée de l'Yvette : il permet de freiner l'augmentation du risque, pour les personnes et pour les biens, d'y être exposés. En juin 2017, un nouveau PPRI a été approuvé pour l'Orge et ses principaux affluents. Depuis 2018, le syndicat intercommunal pour l'aménagement hydraulique de la vallée de l'Yvette, qui exerce la compétence de GEMAPI sur le périmètre de l'Yvette, développe un programme d'actions de prévention des inondations, ou PAPI d'intention. Cet outil contractuel et partenarial, soutenu financièrement par l'État, permet aux collectivités du bassin Orge-Yvette d'appliquer leur stratégie de prévention des inondations, à travers des actions combinant la réduction de la vulnérabilité des personnes et des biens, avec la culture du risque. Concrètement, un état des lieux de la vulnérabilité des réseaux stratégiques en zones inondables est en cours, et la réalisation de diagnostics de vulnérabilité des bâtiments communaux dans les villes de Savigny-sur-Orge, Viry-Châtillon et Longjumeau sera bientôt engagée.
Enfin, le Gouvernement a augmenté les moyens destinés à la prévention des risques naturels : l'enveloppe annuelle dédiée au fonds de prévention des risques naturels majeurs, ou fonds Barnier, est ainsi passée, cette année, de 135 à 205 millions d'euros. De même, le financement des mesures de réduction de la vulnérabilité a fortement crû, avec un taux se situant désormais à 80 %. Un plan d'accélération, de préparation et de mise en oeuvre des PAPI a également été élaboré. Toutes ces mesures renforcent notre action collective, avec le soutien accru de l'État.
La parole est à Mme Sophie Mette, pour exposer sa question, no 1330, relative à l'Europe de la culture.
Ma question s'adressait initialement à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Le mois dernier, j'ai interrogé Mme la ministre de la culture, Roselyne Bachelot, sur les conséquences du Brexit pour l'économie du secteur culturel. Nous avons plus précisément abordé la pétition signée par de nombreux artistes britanniques, demandant au gouvernement de M. Boris Johnson de créer un passeport culturel pour les musiciens. Quiconque connaît la force de la scène musicale live britannique ne peut qu'y être favorable. Constant que le Royaume-Uni faisait peu de cas des artistes dans l'accord du Brexit, Mme la ministre avait annoncé son soutien à une démarche de passeport culturel. Avant d'en discuter au niveau européen, c'est évidemment une affaire britannique.
La crise clarificatrice du Brexit me donne l'occasion de vous interroger de manière plus générale – et, si j'ose dire, plus européenne. Les députés du Mouvement démocrate (MODEM) et démocrates apparentés, tout comme leurs homologues au Parlement européen – je pense notamment à Laurence Farreng – , estiment essentiel, pour notre avenir, de voir émerger une Europe de la culture : elle est le liant dont nos peuples ont besoin, particulièrement à l'heure des crises et des populismes. Elle sera aussi très prolifique – nul ne peut en douter : nous sommes le continent qui a inventé le cinéma ; nous possédons un patrimoine unique de studios et de décors naturels ; nous organisons les festivals de cinéma les plus prestigieux ; nous disposons de grandes écoles de cinéma aux quatre coins de l'Europe, et par conséquent de professionnels éminemment reconnus.
Des efforts ont déjà été accomplis et des projets ont été soutenus. Ainsi, la directive européenne sur les services de médias audiovisuels prévoit que le catalogue des plateformes doit comporter au moins 30 % d'oeuvres européennes et que les États membres peuvent exiger des plateformes qui diffusent sur leur territoire qu'elles investissent dans des productions locales. C'est très bien, mais irons-nous plus loin ? Les axes de travail ne manquent pas : un programme massif de coproduction pouvant doper le catalogue d'oeuvres européennes et irriguer à nouveau les salles, l'investissement dans les compétences artistiques et techniques – notamment numériques – à l'échelle du continent, voire une harmonisation sociale. À l'approche de la conférence sur l'avenir de l'Europe et de la présidence française du Conseil de l'Union européenne, la France défendra-t-elle enfin l'idée d'une Europe de la culture ?
Mme la ministre de la culture ne peut assister à cette séance – vous le savez – , et m'a chargée de vous communiquer une réponse en son nom.
Partout en Europe, les secteurs culturels ont été touchés de plein fouet par la crise. S'ils ont su se réinventer pour continuer à créer et offrir au public un accès en ligne aux oeuvres culturelles, force est de constater qu'ils ont besoin d'être soutenus. C'est le sens de la politique de soutien aux secteurs culturels et créatifs que mène le Gouvernement depuis le début de la crise pandémique.
Au niveau communautaire, grâce aux efforts du Parlement européen – je salue notamment l'engagement de la députée Laurence Farreng – et à la mobilisation de la France, une hausse significative du budget consacré au programme Europe créative a été actée pour la période 2021-2027. D'autres programmes de financement, tels qu'Horizon Europe ou Erasmus+, pourront profiter aux acteurs culturels et aux jeunes. La Commission européenne a également annoncé plusieurs mesures d'accompagnement du secteur culturel, en particulier du cinéma, visant notamment à faciliter les coproductions européennes.
Au-delà de la crise sanitaire, l'émergence du numérique entraîne des mutations durables du secteur culturel, face auxquelles l'Europe doit faire preuve d'une ambition renouvelée et forte. Vous l'avez souligné, d'importantes avancées ont été réalisées ces dernières années grâce à la directive sur les services de médias audiovisuels et à la directive sur le droit d'auteur, qui est en cours de transposition en France. Ces avancées sont fondamentales mais, vous avez raison, l'Europe doit aller plus loin, et la France doit jouer un rôle moteur. C'est l'objet des discussions en cours sur la future législation relative aux services numériques, qui vise à mieux encadrer l'activité des plateformes. Enfin, avec la devise « relance, puissance, appartenance », la présidence française du Conseil de l'Union européenne sera l'occasion de renouveler nos engagements pour une Europe de la culture plus forte et plus ambitieuse, au service de la diversité culturelle et linguistique, plus responsable et plus égalitaire.
La parole est à Mme Anne Brugnera, pour exposer sa question, no 1341, relative à la propriété intellectuelle d'une oeuvre.
Elle s'adresse à Mme la ministre de la culture, à qui je souhaite un prompt rétablissement. Le 18 décembre 2020, le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique – CSPLA – lui remettait un rapport sur la preuve de l'originalité de l'oeuvre, commandé en 2018. Depuis quelque temps, en effet, les cours de justice françaises demandent de plus en plus fréquemment aux auteurs de prouver l'originalité de leur oeuvre, alors que cette disposition n'est pas pleinement inscrite dans notre droit : les juges se réfèrent, en la matière, à une jurisprudence.
De nombreux auteurs, réunis en associations et en collectifs, se sont mobilisés pour faire évoluer cette jurisprudence qui les inquiète. En effet, notre droit est clair : nul ne peut reproduire tout ou partie de l'oeuvre d'un autre sans son autorisation. Pourtant, certains auteurs se sont vu refuser ce principe qui protège leurs droits d'auteur, du fait d'une jurisprudence demandant à l'artiste plagié d'apporter lui-même la preuve de l'originalité de son oeuvre. Le rapport du CSPLA dénonce cette situation, et propose deux pistes de travail pour y remédier : l'une est législative, l'autre est jurisprudentielle. Je souhaite interroger le Gouvernement sur les suites que le ministère de la culture envisage de donner à ce rapport, qui énonce clairement les difficultés rencontrées par les auteurs.
Je profite de cette question pour alerter le Gouvernement : parmi ses préconisations – qui ont été rendues publiques – , le CSPLA suggère d'ajouter la mention de l'originalité de l'oeuvre dans le code de la propriété intellectuelle, en modifiant son article L. 112-1. Cette proposition inquiète fortement les auteurs : en effet, la notion d'originalité de l'oeuvre, qui reste floue, pourrait être source de difficultés face aux juges lors de futurs procès, notamment lorsqu'il s'agira de la motiver précisément. Pouvez-vous nous assurer que les suites données au rapport du CSPLA feront l'objet d'une concertation et d'un dialogue avec toutes les parties prenantes, plus spécialement avec les auteurs, dont l'inquiétude est forte ?
Votre question, madame la députée, traite des suites du rapport sur la preuve de l'originalité de l'oeuvre qui a été remis à Mme la ministre de la culture en décembre dernier. Cette dernière m'a chargée de vous répondre – et je me joins aux voeux de prompt rétablissement que vous lui avez adressés.
Le rapport du CSPLA témoigne des difficultés que rencontrent certains auteurs pour apporter la preuve de l'originalité de leurs oeuvres dans le cadre de procédures contentieuses. L'obligation faite aux auteurs d'apporter cette preuve, oeuvre par oeuvre, s'avère en effet redoutable s'agissant de contentieux de masse, portant sur plusieurs dizaines, voire plusieurs centaines d'oeuvres, notamment dans le secteur de la photographie. Leur grande difficulté à répondre aux exigences des magistrats sur la preuve de l'originalité se traduit, chez certains auteurs, par une renonciation à agir en justice et donc par un affaiblissement de leur protection. La situation est exploitée de manière opportuniste par les contrefacteurs, qui contestent systématiquement l'originalité des oeuvres afin d'empêcher les auteurs de faire valoir leurs droits.
Pour faire face à cette situation, le rapport du CSPLA évoque l'opportunité d'une évolution jurisprudentielle qui allègerait le fardeau de la preuve reposant sur les auteurs. Néanmoins, une telle évolution jurisprudentielle étant par essence incertaine, le rapport envisage également l'hypothèse d'une évolution législative. L'une des pistes évoquées, qui retient toute l'attention de Mme la ministre, consisterait à modifier le code de la propriété intellectuelle, afin que les auteurs ne soient tenus d'établir l'originalité de leurs oeuvres que dans les cas où la protection par le droit d'auteur apparaîtrait réellement contestable et serait sérieusement mise en doute par le défendeur. Une telle solution paraît répondre à un juste équilibre, en évitant les contestations d'originalité formées de manière systématique et dilatoire, mais sans éluder pour autant, lorsqu'il y a lieu, un vrai débat sur l'originalité des oeuvres. Aussi, Mme la ministre de la culture se rapprochera-t-elle prochainement du ministère de la justice, afin d'apprécier les conditions dans lesquelles cette préconisation pourrait être appliquée, dans le respect du pouvoir souverain d'appréciation des juges au fond. Elle ne manquera pas de vous tenir informés de ces avancées.
Au cas où une telle évolution législative était envisagée, je tiens à vous faire part, une fois encore, des inquiétudes des auteurs quant à la notion même d'originalité de l'oeuvre. J'espère que le travail sera mené en concertation avec eux, afin que leurs droits soient correctement défendus.
La parole est à M. Sébastien Nadot, pour exposer sa question, no 1354, relative à la culture en Occitanie.
Elle s'adresse à Mme la ministre Roselyne Bachelot, à qui je souhaite un prompt rétablissement. Qu'elle nous revienne au plus vite, et en forme, car il y a de quoi faire !
Depuis un an, la France a mis la culture à l'arrêt, ce qui se vit comme une souffrance à Toulouse et en Occitanie. Les quais de la Garonne, chantés par Claude Nougaro, sont fermés, et les voix des ténors enrhumés ne résonnent plus dans le théâtre du Capitole. Seule l'église Saint-Sernin continue d'illuminer le soir : le culte, oui – et c'est tant mieux – , la culture, non !
Tel est le triste quotidien à Toulouse : pour l'aéronautique, les avions sont au sol ; pour les 100 000 étudiants, les études sont au placard ; la culture du rugby doit se passer de la castagne des amateurs ; en matière de gastronomie, il ne nous reste guère plus que nos chocolatines. La culture populaire, qui faisait la fierté de la ville rose – petits festivals, théâtres, bars, restaurants, expositions et cinémas – n'est plus qu'un souvenir. Cité de l'espace, Quai des savoirs, Piste des géants, Muséum d'histoire naturelle, Aeroscopia, Halle de La Machine : la culture scientifique, spécificité de Toulouse, connaît le même sort.
Du carnaval à la fête de la musique, du musée des Abattoirs à celui des Augustins, la même misère… Pourquoi jeunes et moins jeunes sont-ils à ce point sacrifiés quand la grande soeur pyrénéenne, Barcelone, a su garder la flamme de la culture allumée ? L'Occitanie n'est pas l'Île-de-France, madame la ministre.
Les professionnels sont également en grande souffrance. La crise culturelle est grave. Voici venu le temps des précaires parmi les précaires : les vieilles fesses en ruine de Corinne Masiero comme un slogan.
Les mesures du Gouvernement ont permis à beaucoup de tenir financièrement jusqu'ici, mais cela ne suffit plus. Il faut pouvoir penser demain en nous indiquant clairement les scénarios mis en balance. « Le printemps est inexorable » écrivait Pablo Neruda. La pandémie aura eu le mérite de montrer qu'au pays de l'exception culturelle, la culture n'est pas inscrite comme un droit fondamental dans la Constitution. Il faudra bien se pencher sur cette étrangeté.
Dès votre rétablissement, madame la ministre, j'espère pouvoir échanger avec vous sur ce sujet essentiel, de préférence sur nos belles terres du Sud-Ouest. En attendant, madame la ministre, « Qu'il est loin mon pays, qu'il est loin. »
Monsieur le député, je vous réponds à la place de Mme la ministre de la culture, à qui je transmettrai également vos voeux de rétablissement et d'un retour rapide dans l'hémicycle et dans son ministère.
Le secteur culturel est en effet l'un des plus touchés par la crise sanitaire, en particulier à cause de la fermeture des établissements culturels depuis plusieurs mois. Cette situation n'est pas propre à la France : les cinémas, les salles de spectacles sont fermés dans la plupart des États de l'Union européenne et un peu plus de 80 % de la population de l'Union européenne n'y a pas accès aujourd'hui. Cette fermeture restreint bien sûr l'accès à certaines formes de culture, mais la culture n'est pas pour autant complètement à l'arrêt. Les captations, les résidences d'artistes, les tournages, les répétitions, si importants pour préparer les futurs spectacles ou productions sont maintenus. Ceci permet à nos artistes de continuer à créer et à montrer leurs créations même si, c'est vrai, cela se fait dans des conditions qui diffèrent du régime classique.
Au-delà, le Gouvernement accompagne financièrement les professionnels du secteur pour surmonter cette crise. Ce sont plus de 9 milliards d'euros qui ont été déployés pour le monde de la culture depuis mars 2020. Les dispositifs sont ajustés régulièrement pour s'adapter aux spécificités des différents pans du monde de la culture et aux évolutions de la crise sanitaire.
Bien sûr, le Gouvernement partage avec les professionnels de la culture, quel que soit leur statut, le même objectif : nous souhaitons que les lieux culturels puissent rouvrir rapidement, même si cela doit être très progressif.
La situation épidémique reste néanmoins toujours très préoccupante et le Gouvernement a été amené à prendre de nouvelles mesures de restriction la semaine dernière. Il n'est donc pas possible de donner aujourd'hui une date précise pour la réouverture des lieux culturels sur le territoire français ou plus spécifiquement, comme vous le demandez avec talent et avec les mots de Claude Nougaro, à Toulouse. Cela n'empêche pas de préparer cette reprise. C'est le sens du travail engagé par Roselyne Bachelot depuis le mois de décembre, avec l'ensemble des organisations professionnelles, pour construire avec elles le modèle de reprise progressive dès que la situation sanitaire le permettra.
La parole est à M. Philippe Latombe, pour exposer sa question, no 1329, relative à la copie privée, à Mme la ministre de la culture – à qui nous pensons tous ce matin.
Monsieur le président, je souhaitais poser effectivement une question à Mme la ministre de la culture, mais je sais que, comme elle ne peut pas être présente, Mme la ministre déléguée chargée du logement répondra à sa place.
Je poserai trois questions précises qui appellent des réponses précises.
Premièrement, pouvez-vous confirmer, à la lumière des arrêts du Conseil d'État et de la directive européenne afférente, que la redevance pour copie privée est une indemnisation des ayants droit en contrepartie du droit pour les particuliers d'effectuer pour des besoins personnels une copie des oeuvres, et que ce n'est pas une réelle rémunération, comme le laisse penser l'utilisation malencontreuse de ce terme dans le code de la propriété intellectuelle, qui impliquerait que ladite redevance soit socialisée et fiscalisée comme un salaire ?
Deuxièmement, les oeuvres obtenues par la méthode du stream ripping sont-elles bien des contrefaçons, considérées à ce titre comme illégalement détenues, ainsi que le considère la Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur internet – HADOPI ?
Troisièmement, pouvez-vous confirmer que le Gouvernement a accédé à la demande des sociétés d'ayants droit de soumettre à la redevance pour copie privée les supports reconditionnés, notamment les smartphones ? Une telle décision, qui verrait la marge des entreprises de reconditionnement réduite à néant, serait préjudiciable pour l'environnement car la filière, dont beaucoup d'entreprises jouent également un rôle d'insertion, à l'image des ateliers d'Emmaüs ou de recyclerie spécialisés sur les territoires, ne serait donc plus rentable.
Monsieur le député, je réponds à la place de Mme Roselyne Bachelot à qui je transmettrai vos voeux de prompt rétablissement. J'ai bien entendu votre souhait d'obtenir une réponse précise à vos trois questions précises, et je vais m'y efforcer.
Votre première question concerne la nature de la rémunération pour copie privée. Ce mécanisme est prévu aux articles L. 311-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle. Ce n'est ni un salaire au sens du droit social, ni une taxe au sens du droit fiscal : c'est un prélèvement à caractère privé qui revêt la même nature que le droit d'auteur et les droits voisins dont elle constitue une modalité particulière d'exploitation. Conformément au droit européen, cette rémunération constitue la compensation équitable destinée à indemniser les ayants droit à raison du préjudice causé par l'exception légale de copie privée qui permet aux possesseurs de supports d'enregistrement de reproduire licitement les oeuvres et prestations protégées à des fins privées sans solliciter l'autorisation des ayants droit concernés.
Votre deuxième question porte sur le stream ripping. Cette pratique est légale et la copie qui en résulte relève de l'exception pour copie privée, telle que prévue par la loi si plusieurs conditions sont réunies : elle doit être réalisée à partir d'une source licite à la demande de l'utilisateur sans être stockée par le convertisseur, et aucun contournement de mesures techniques de protection ne doit être effectué. C'est au regard de ces conditions que la commission pour la rémunération de la copie privée a pris en considération une partie des copies issues du stream ripping afin d'élaborer les barèmes qu'elle a adoptés. Cette prise en compte des sources issues du stream ripping par la commission a été validée par le Conseil d'État dans un arrêt rendu le 27 novembre 2019.
Enfin, votre dernière question porte sur les supports reconditionnés. Pour l'heure, l'exonération de ces supports a été écartée par le Gouvernement et l'examen de pistes alternatives est à l'étude, en particulier l'instauration par la commission pour la rémunération de la copie privée d'un barème spécifique applicable aux supports reconditionnés avec abattement. La commission a débuté l'examen de cette question par une phase d'auditions, notamment celle du syndicat qui représente les entreprises du reconditionnement, reçu le 2 mars dernier. Ce barème adapté permettra, je le crois, de répondre aux craintes exprimées par les acteurs du reconditionnement tout en préservant une source de revenus primordiale pour les acteurs culturels qui souffrent particulièrement en cette période de crise sanitaire.
Pour avoir auditionné les entreprises du reconditionnement, je peux vous dire très franchement qu'elles ont été très surprises de la façon dont elles ont été auditionnées. On les a écoutées poliment mais, sitôt leur audition terminée, la décision a été prise par la commission de proposer de soumettre les objets reconditionnés à cette taxe – à des montants ne permettant pas à ces entreprises, qui pour la plupart sont des entreprises de l'économie sociale et solidaire et qui jouent un rôle d'insertion, de dégager de marge.
On ne peut pas, d'un côté, dire aux Français qu'ils doivent recycler les smartphones dont leurs tiroirs sont pleins et, de l'autre, mettre à mal par cette taxe la filière de recyclerie, qui est aussi une filière d'insertion qui fait monter en compétence des personnes qui étaient loin de l'emploi et leur permet de trouver des emplois dans les métiers de l'électronique, qui sont des métiers d'avenir.
Je répète qu'à l'origine la redevance pour copie privée était faite pour l'ensemble de la durée de vie de l'appareil. Cela veut dire qu'à une redevance initiale pour copie privée, qui doit porter sur l'intégralité du cycle de vie de l'appareil, s'ajouterait une seconde redevance pour copie privée qui serait éventuellement soumise à abattement. Deux redevances pour copie privée pour le même appareil : ce n'est pas logique.
La parole est à Mme Nicole Trisse, pour exposer sa question, no 1336, relative au contrat d'apprentissage transfrontalier.
Monsieur le secrétaire d'État chargé des retraites et de la santé au travail, je souhaite appeler votre attention sur les difficultés rencontrées par les jeunes qui souhaitent faire un apprentissage transfrontalier. Dans le Grand Est et notamment en Moselle, l'apprentissage transfrontalier consiste à suivre la partie théorique de l'apprentissage au sein d'un centre de formation d'apprentis – CFA – de cette grande région, et la partie pratique dans une entreprise allemande, dans le Bade-Wurtemberg, la Sarre ou la Rhénanie-Palatinat.
La loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a profondément transformé la formation par apprentissage. Ainsi, ce ne sont plus les conseils régionaux qui pilotent, financent ou élaborent l'offre de formation, mais bien une institution publique, France compétences, qui gère et finance l'apprentissage depuis le 1er janvier 2019. Depuis l'entrée en vigueur de cette réforme et la fin des accords tripartites entre l'apprenti, l'entreprise et la région Grand Est, il est regrettable que les partenaires de l'apprentissage transfrontalier manquent toujours autant d'informations sur les modalités de financement pour ce type de contrat d'apprentissage.
Ainsi, s'il est toujours possible de signer un contrat transfrontalier avec une entreprise allemande, les coûts de formation doivent pour l'instant être pris en charge par l'entreprise ou par l'apprenti lui-même, faute de dispositifs clairs et précis. Les mesures sanitaires dues à la covid-19 n'ont, bien sûr, rien arrangé. Cette situation est très dommageable pour la centaine de jeunes qui profitent chaque année de ce dispositif. Il s'agit, certes, d'une particularité de la région, mais qui a été quelque peu oubliée par cette loi du 5 septembre 2018. Il me semble qu'il est vraiment urgent de remédier à ce manquement.
Par conséquent, pouvez-vous me préciser les modalités de financement qui ont été prévues pour ces contrats d'apprentissage transfrontalier et, le cas échéant, la date de leur mise en application ?
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des retraites et de la santé au travail.
Madame la députée, je connais votre engagement sur la question de la transformation de l'apprentissage et votre volonté que la réflexion que nous avons engagée sur ce point il y a deux ans aille à son terme, notamment afin d'améliorer la situation des jeunes qui suivent un apprentissage transfrontalier.
L'apprentissage transfrontalier représente effectivement un modèle intéressant en ce qu'il permet de favoriser l'insertion professionnelle des jeunes, notamment dans cette région Grand Est que vous connaissez bien. J'étais d'ailleurs, il y a quelques semaines, à la chambre de commerce et d'industrie de Strasbourg, où nous avons évoqué la situation que vous abordez dans votre question.
Pour mémoire, le financement du centre de formation d'apprentis en France était assuré jusqu'au 31 décembre 2019 en grande majorité par le conseil régional au titre de ses compétences en matière d'apprentissage et de coopération transfrontalière. Or le code du travail ne contient aujourd'hui aucune disposition relative à l'apprentissage transfrontalier ; le dispositif existe uniquement sous forme conventionnelle dans le cadre de la coopération transfrontalière entre régions européennes. Le contrat transfrontalier conclu par une entreprise étrangère ne peut donc être qualifié de contrat d'apprentissage dans le cadre du droit français. Pour qu'un apprenti soit considéré comme tel, Il doit être titulaire d'un contrat d'apprentissage de droit français, quelle que soit sa nationalité d'ailleurs. Le principal enjeu aujourd'hui concerne le financement des CFA qui accueillent des apprentis transfrontaliers.
Depuis la loi du 5 septembre 2018, qui a transformé l'apprentissage et modifié son financement, le système de subvention régionale a disparu au profit d'un financement à l'apprenti versé par les opérateurs de compétences – OPCO – en fonction du niveau de prise en charge déterminé par les branches professionnelles. Or il n'existe pas de base légale pour que les OPCO financent les contrats d'apprentissage transfrontalier, qui ne peuvent prétendre à la qualification de contrat d'apprentissage de droit français que j'ai évoquée tout à l'heure.
J'en viens maintenant aux quelques éléments permettant de faire avancer le sujet. Comme vous le savez, une solution a été trouvée pour les contrats signés en 2020. À titre dérogatoire et exceptionnel, Élisabeth Borne a autorisé les OPCO à prendre en charge ces contrats. Par ailleurs, l'Inspection générale des affaires sociales – IGAS – a lancé une mission dont les conclusions seront rendues dans quelques jours. Elles permettront de définir un nouveau schéma de gouvernance et de financement qui doit être pérenne. Des évolutions législatives sont donc à prévoir. La ministre du travail annoncera d'ici peu la décision prise, visant à assurer la prise en charge de ces contrats d'apprentissage transfrontalier si importants dans votre région.
Soyez certaine, madame la députée, de l'attention portée par le Gouvernement à ce sujet que vous avez raison de défendre. Je crois que Mme le ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion sera également sensible à toute proposition que vous souhaiteriez lui transmettre en la matière.
Je remercie M. le secrétaire d'État et à travers lui Mme la ministre du travail pour cette mission dont les résultats sont attendus très prochainement. Il faut effectivement définir un nouveau schéma pour l'apprentissage transfrontalier car nous sommes au coeur de l'Europe.
Des habitants du Grand Est franchissent la frontière tous les jours pour aller travailler ou pour d'autres raisons, c'est pourquoi il faut continuer d'avancer sur ce sujet, comme le prévoit le traité d'Aix-la-Chapelle de 2019. Je reste confiante : je sais que des discussions sont en cours et j'espère avoir très vite une réponse pérenne sur ce dossier.
La parole est à M. Pierre Dharréville, pour exposer sa question, no 1335, relative aux centres de formation AFPA.
Au regard du contexte économique et des besoins croissants, la mission de l'Agence pour la formation professionnelle des adultes – AFPA – est fondamentale : il s'agit d'assurer la formation de toutes celles et tous ceux qui souffrent de la crise économique et sociale, mais aussi d'accompagner la transition écologique et les mutations technologiques qui appellent de nouveaux efforts de qualification. On a besoin de développer une formation professionnelle exigeante afin de garantir le droit à l'éducation permanente. De ce point de vue, et d'autant plus à la lumière de la crise actuelle, l'AFPA doit être considérée comme l'un des pivots de la relance et aidée à ce titre, et non pas traitée comme un acteur lambda du grand marché de la formation : quelles commandes et quels moyens lui donnez-vous pour cela ?
Je veux vous parler tout particulièrement du centre d'Istres, dont en octobre 2018, la direction générale de l'AFPA avait annoncé la fermeture, parmi d'autres. Après de nombreuses mobilisations, des échanges approfondis avec les élus locaux et les acteurs de l'économie, de la formation ou de l'action sociale, en lien avec le Gouvernement, cette décision a été annulée. Les équipes s'emploient depuis lors à repartir de l'avant.
Le centre d'Istres a toute sa place dans la dynamique du plan de relance gouvernemental. C'est pourquoi il est urgent de lui attribuer les moyens de se reconfigurer et de lui laisser le temps de construire ses formations en lien avec l'ensemble des acteurs du territoire. Élément essentiel d'un maillage territorial, le centre d'Istres dispose de capacités d'hébergement, de plateaux de formation, d'une formidable ingénierie et de savoir-faire essentiels.
S'agissant d'un territoire aux enjeux particuliers, d'une terre marquée par une forte présence industrielle, qui engage sa transition, avec un niveau de qualification générale plus faible que la moyenne et un taux de chômage plus élevé, quelles dispositions comptez-vous mettre en oeuvre, en soutien de la direction de l'AFPA, pour que le centre d'Istres bénéficie des moyens nécessaires à cette mutation – pour qu'il puisse par exemple rénover son centre d'hébergement – et plus généralement pour soutenir son nouvel élan, si essentiel à ce territoire qui accueille le premier port de France ?
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des retraites et de la santé au travail.
Monsieur le député Dharréville, au-delà du centre AFPA d'Istres, votre question porte plus largement sur la formation professionnelle des adultes et de son rôle dans la transformation des métiers de notre industrie et de notre économie, ainsi que sur la capacité que l'on doit donner à chacun de réussir cette transformation pour progresser dans sa vie professionnelle et se maintenir dans l'emploi. Je crois d'ailleurs que sur ce sujet, nous nous rejoignons, même si nos avis diffèrent assez régulièrement sur les moyens.
Je veux redire combien l'AFPA et l'ensemble de ses collaborateurs sont importants aux yeux du Gouvernement : l'agence assure en effet la mise en oeuvre de politiques publiques majeures dans le champ de la formation professionnelle. Vous avez certainement en tête la « prépa compétence » qui permet à un demandeur d'emploi d'affiner son projet d'accès à la formation et de bénéficier d'un parcours d'entraînement de trente jours. Par ailleurs, dès le premier confinement, l'AFPA a été mobilisée pour fournir à tous les organismes de formation de France une plateforme numérique assurant la continuité pédagogique. Plus récemment, nous avons intégré dans le plan « 1 jeune, 1 solution » une nouvelle offre de parcours personnalisés destinée aux jeunes décrocheurs âgés de 16 à 18 ans : à ce titre, ce sont près de 35 000 jeunes qui seront accueillis dans les centres AFPA que vous venez de défendre brillamment.
J'arrête ici cette énumération, mais je pense que ces exemples illustrent l'importance de l'AFPA et la confiance du Gouvernement dans cette institution qui permet la formation et l'insertion. Pour parvenir à cette transformation, l'AFPA a un plan ambitieux qui vise à renforcer sa capacité commerciale et à développer son offre de services. En 2020, l'État a accompagné ce plan de transformation de l'AFPA à hauteur de plus de 200 millions d'euros supplémentaires. C'est là un autre exemple de l'importance de l'action de l'AFPA aux yeux du Gouvernement.
Je sais que le village AFPA d'Istres offre un appui de qualité à la reconversion des salariés, en particulier de ceux issus du milieu industriel que vous connaissez bien et que vous défendez. Il permet de répondre dans beaucoup de situations à la demande en techniciens de montage, soudeurs, techniciens de maintenance, et d'apporter des réponses concrètes aux besoins des entreprises en personnels qualifiés.
Soyez assuré, monsieur le député, que la situation des centres AFPA est suivie avec attention par l'ensemble du ministère du travail, de l'emploi et de l'insertion, notamment par la ministre Élisabeth Borne, et que le village AFPA d'Istres ne fait pas exception.
Merci de votre réponse, monsieur le secrétaire d'État. Je suivrai avec une attention particulière la situation du centre AFPA d'Istres mais, plus largement, je vous demande de veiller à ce que cette institution ait vraiment les moyens de poursuivre ses missions et que ce ne soit pas Bercy qui impose ses vues budgétaires.
La parole est à M. Fabrice Brun, pour exposer sa question, no 1351, relative aux formations supérieures en Ardèche.
Madame la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, nos jeunes ne veulent plus être les sacrifiés de la covid, les victimes des algorithmes de Parcoursup et encore moins la cible des inégalités territoriales dans la poursuite de leurs études.
Ainsi dans le bassin d'Aubenas, un bassin de l'Ardèche méridionale et de la montagne ardéchoise qui compte 100 000 habitants, sept lycées – de l'enseignement général, mais aussi des lycées agricoles, hôteliers, technologiques et privés – proposent sept BTS différents. Cette offre post-bac est complétée notamment par les formations du groupement d'établissements – GRETA – de l'Ardèche méridionale et de l'Institut de formation en soins infirmiers – IFSI.
Le Gouvernement est-il prêt à soutenir le développement de nouvelles formations bac +2, quitte à mutualiser les moyens entre ces différents établissements, par exemple entre un BTS de services à l'environnement et un BTS des métiers de l'esthétique, de la cosmétique et de la parfumerie, pour prendre des exemples concrets en lien avec le développement durable, thermal et touristique de notre territoire ?
J'en viens à ma deuxième question : quel sera l'engagement de l'État, sur le plan financier mais aussi pédagogique, aux côtés de la région Auvergne-Rhône-Alpes et des collectivités locales, dans le projet de campus des métiers de la gastronomie en cours de réalisation à Largentière, au cooeur de ma circonscription, mariant le magnifique château de la commune et le lycée hôtelier ? L'année 2021 a été déclarée année de la gastronomie par le Premier ministre, accompagner ce projet serait pour l'État une belle façon d'illustrer concrètement son engagement en la matière. Comme Suze-la-Rousse a son université du vin, je souhaite que demain Largentière ait son campus des métiers de la gastronomie,
Enfin, dans un registre complémentaire mais tout aussi indispensable, allez-vous étendre l'université hors les murs des grandes métropoles, comme cela a été fait il y a vingt ans avec l'installation à Mirabel, en Ardèche, d'une antenne de l'université Joseph-Fourier sur le domaine du Pradel cher à Olivier de Serres, le père de l'agronomie française qui était ardéchois, comme vous le savez, madame la ministre ? Nous avons besoin de vous pour créer un diplôme national des métiers d'art et du design, un bac +3 à développer en partenariat avec l'université dans le prolongement des baccalauréats professionnels AMA, « artisanat et métiers d'art » et du bac STD2A, « sciences et technologies du design et des arts appliqués », désormais disponibles sur le bassin. Allez-vous nous aider à mettre en valeur nos atouts remarquables en développant des formations post-bac en Ardèche, dans des métiers attractifs, source d'emplois et d'épanouissement pour nos jeunes ?
La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.
Bien sûr, monsieur le député Fabrice Brun, je soutiendrai résolument le développement de l'offre de formation en Ardèche, comme d'ailleurs sur l'ensemble des territoires.
Vous le savez, en 2019 l'Ardèche a fait partie des premiers territoires à expérimenter les campus connectés dans la commune de Privas. Pour redynamiser les territoires, l'État consacre 25 millions d'euros au déploiement d'une centaine de ces campus, des dispositifs plébiscités par les collectivités et les jeunes. À la rentrée 2021, trois campus connectés ouvriront grâce à la collaboration avec le conseil départemental, très actif dans ce domaine, à Privas, à Aubenas et à Annonay.
C'est donc près d'un million d'euros que l'État investit au profit des jeunes Ardéchois, là où, comme vous le rappelez, monsieur le député, il n'existait jusqu'en 2019 aucune offre d'enseignement supérieur autre que les BTS. Aujourd'hui, grâce à cette action, les étudiants ardéchois disposent d'un catalogue de plus de vingt licences, mais aussi de BTS, de BTS agricoles et de masters. Je tiens à saluer l'implication majeure, que vous avez rappelée, de l'Université Grenoble Alpes dans la mise en oeuvre de ces dispositifs campus connectés en Ardèche, notamment au travers de l'Agence de développement universitaire Drôme-Ardèche – ADUDA.
Les campus des métiers et des qualifications reflètent également la volonté de l'État de développer des projets inclusifs et structurants dans les territoires, notamment grâce à des financements du Programme d'investissements d'avenir – PIA. Le projet d'un campus des métiers et des qualifications de la gastronomie, que vous évoquez et dans lequel je vous sais pleinement impliqué, concerne un secteur malheureusement touché par la pandémie, ce qui explique qu'il n'ait pu avancer dans des conditions normales en 2020, mais le rectorat est très attentif au suivi de ce campus, qui travaille avec l'antenne de l'université de Grenoble Alpes située en Ardèche. Je serai évidemment très attentive au suivi de ce projet, qui doit pouvoir obtenir la labellisation à laquelle il candidate.
Enfin, conformément aux dispositions en vigueur, le développement de BTS est de la compétence, vous le savez, de la région, avec l'accord de l'autorité académique. C'est en effet la région qui arrête la carte régionale des formations professionnelles initiales hors apprentissage. Je vous invite donc à vous rapprocher de la région pour définir avec elle les modalités de réalisation de vos projets d'ouverture de BTS ou d'un diplôme national « métiers d'art et du design ». Le recteur de la région académique Auvergne-Rhône-Alpes y sera bien sûr très attentif. Un tel diplôme national conférant le grade de licence, le recteur sollicitera aussi l'université, de manière à ce que le partenariat avec cette université soit garant de la formation à la recherche et permette l'intervention d'enseignants-chercheurs dans le cadre de ce diplôme national.
Vous le voyez, monsieur le député, mon ministère est pleinement engagé dans le déploiement d'une offre de formation riche et diversifiée en Ardèche, conformément aux attentes du territoire et en accord avec les collectivités et le monde socio-économique, et cet effort sera poursuivi sans relâche.
Merci, madame la ministre, pour votre réponse et pour ces perspectives de travail en commun. Je me tiens à la disposition de vos services, du rectorat et de l'inspection académique pour que nous puissions travailler ensemble, avec la région, comme vous l'avez dit.
La parole est à Mme Marie-France Lorho, pour exposer sa question, no 1360, relative à la liberté d'instruction en France.
La propension de l'État à s'insinuer dans les sphères dont il doit rester détaché est inquiétante : l'immixtion permanente du législateur dans le refuge sacré que constitue la famille est un pas sans cesse franchi par le Gouvernement, et l'encadrement abusif de l'instruction en famille constitue l'un des points d'orgue de ce phénomène. À l'occasion de la loi sur le séparatisme, le Gouvernement s'est arrogé un droit inédit : le droit de soustraire à une instruction parentale des enfants qui bénéficient de l'enseignement qui leur est le plus adéquat ; le droit de revenir sur ce que le Conseil d'État qualifie de principe fondamental ; le droit de faire de l'école de l'éducation nationale un monopole qui n'aura plus à rendre de comptes, face à l'absence de mode d'instruction alternatif.
L'argument selon lequel il faudrait encadrer l'instruction en famille pour lutter contre le radicalisme islamiste est fallacieux. En effet, diverses études viennent souligner l'absence de convergence entre l'instruction familiale et ces cellules fondamentalistes. Le nombre infime de personnes visées – moins de 30 000 élèves – , est révélateur de l'ambition gouvernementale : l'éducation nationale cherche à enfermer les enfants dans son giron, en dépouillant les parents du droit le plus naturel, celui d'instruire leurs enfants comme ils l'entendent.
Les attaques multiples menées contre l'école hors contrat en sont également un témoignage manifeste. Face aux résultats particulièrement prometteurs produits par ces modes d'instruction alternatifs, l'éducation nationale redoute-t-elle de se confronter à l'excellence ?
Le Gouvernement ne peut s'octroyer des droits exclusifs sans mettre tout en oeuvre pour faciliter la vie des Français : vous ne pouvez pas priver les enfants d'une instruction en famille, alors même que les écoles rurales viennent à manquer. Vous ne pouvez empêcher des écoles hors contrat de s'installer dans des zones où l'école de la République ne tient plus ses promesses et où règne un chaos organisé par quelques élèves perturbateurs et auquel l'éducation nationale peine à mettre un terme.
Je profite de l'occasion pour vous alerter, par ailleurs, sur le traitement spécial réservé cette année aux candidats au baccalauréat scolarisés dans des établissements privés hors contrat : comme le rappelle Anne Coffinier, la présidente de l'association Créer son école, les lycéens inscrits dans ces établissements ne bénéficieront pas de la prise en compte du contrôle continu, à l'inverse de leurs contemporains du public et du privé sous contrat. Ce deux poids, deux mesures n'est pas acceptable.
Le droit français garantit la liberté d'instruction à travers l'article 2 du Protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il la préserve au titre de l'article 26 de la Déclaration universelle des droits de l'homme du 10 décembre 1948. L'Union européenne encourage quant à elle son respect aux termes de l'article 14 de sa Charte des droits fondamentaux. J'ai déposé, en janvier dernier, une proposition de résolution invitant le Gouvernement à préserver l'instruction en famille en créant un moratoire pour prévenir toute modification législative à son égard. Je maintiens mon invitation.
À l'heure où la crise sanitaire porte chaque jour atteinte aux libertés dont jouissent les Français, entendez-vous également priver les familles du droit fondamental d'instruire leur enfant au sein de leur foyer ?
Mon propos devrait être de nature à vous rassurer : si le Gouvernement souhaite soumettre la possibilité d'avoir recours à l'instruction en famille à un régime d'autorisation préalable, il ne s'agit pas d'interdire aveuglément tous les dispositifs d'instruction dans la famille, contrairement à ce que vous suggérez, ni de porter atteinte aux pratiques positives. Le projet de loi confortant le respect des principes de la République, qui a été adopté en première lecture par l'Assemblée nationale le 16 février dernier, a pour objectif de définir les exceptions à la scolarisation dans un établissement scolaire, afin de ne conserver que les cas relevant de demandes légitimes et de lutter contre toutes les tendances qui mettent en cause l'unité de la République.
Ainsi, il ne s'agit pas d'empêcher l'instruction dans la famille : le projet de loi est un texte d'équilibre, qui prévoit des dérogations à l'obligation de fréquenter un établissement d'enseignement public ou privé, sans que puissent être invoquées d'autres raisons que l'intérêt supérieur de l'enfant. Ces dérogations sont les suivantes : l'état de santé de l'enfant ou son handicap, la pratique intensive d'activités sportives ou artistiques, l'itinérance de la famille en France ou l'éloignement géographique de tout établissement scolaire public, et l'existence d'une situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif, sous réserve que les personnes qui en sont responsables justifient de la capacité de la ou des personnes chargées d'instruire l'enfant à le faire dans le respect de l'intérêt supérieur de l'enfant. Ce projet de loi permet surtout de passer d'un système de vérification a posteriori à un régime d'autorisation préalable. Cela nous permettra d'être certains que les enfants sont effectivement instruits à domicile, et non dans des structures clandestines, dangereuses non seulement pour la République, mais aussi et surtout pour l'enfant.
Le Gouvernement a été à l'écoute du Conseil d'État, des parlementaires et des associations concernées par l'instruction dans la famille. Nous n'ignorons pas l'émotion que le texte a suscitée chez certains. C'est pourquoi nous l'avons fait évoluer, afin que les exceptions envisagées permettent de maintenir l'instruction en famille dans tous les cas qui ne posent pas de problème particulier. Mais, en plus de garantir à l'enfant une pédagogie de qualité, nous devons aussi le protéger contre toute forme d'emprise qui obérerait certains de ses droits. Il ne s'agit pas de supprimer toute instruction en famille, mais de faire preuve de discernement : la notion d'intérêt supérieur de l'enfant et le respect des droits de l'enfant, en particulier le droit à une éducation complète, seront les critères principaux qui gouverneront l'ensemble du dispositif. Les dispositions prévues à l'article 21 du projet de loi confortant le respect des principes de la République nous permettront d'agir contre toutes les formes de scolarisation clandestine et, de façon plus générale, contre les abus de l'instruction dans la famille.
Préciser une liberté n'est pas l'affaiblir, mais la conforter en la définissant mieux. En l'espèce, cette définition manquait. Je considère donc que ce projet de loi conforte les droits de l'enfant autant que les principes de la République. Il n'y a là aucune atteinte à la liberté de l'enseignement, bien au contraire : comme toutes les libertés, y compris les plus précieuses, celle-ci nécessite un cadre.
Merci, madame la ministre déléguée. Je rappelle à chacun que la durée de chaque question est limitée à six minutes. La parole est à Mme Marie-France Lorho, pour quelques secondes.
Merci pour vos réponses, mais on ne fait pas la loi sur des régimes d'exception. Je rappelle que le régime d'autorisation que vous comptez instaurer et les dérogations associées apparaissent très lourds aux familles qui désirent éduquer leur enfant à domicile.
La parole est à M. Fabien Di Filippo, pour exposer sa question, no 1349, relative aux difficultés financières des associations face à la crise sanitaire.
Ma question s'adressait au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Je le répète souvent : le premier indicateur de vitalité d'un territoire est le dynamisme de son tissu associatif. Un tiers des Français adhèrent à une association, un cinquième d'entre eux y oeuvrent bénévolement et près de 2 millions y sont salariés. Ces associations jouent donc un rôle clef dans le fonctionnement de notre modèle de société et constituent des acteurs économiques majeurs.
Or de nombreuses associations sont très fortement fragilisées, au plan financier, par les confinements successifs. Elles affrontent de grandes difficultés en raison des restrictions sanitaires imposées par l'épidémie de covid-19, entre absence de manifestations, impossibilité de tenir des séances ou des compétitions, et baisse du nombre d'adhérents. Elles souffrent par ailleurs des contradictions entre l'autorisation de certaines pratiques par de grands groupes d'élèves en milieu scolaire et l'interdiction de ces mêmes activités de façon plus distanciée, en petits groupes, dans des gymnases. Les associations culturelles qui animaient des festivals au printemps et en été, les associations artistiques, celles qui donnent des cours de musique ou de danse, les cinémas associatifs, les associations sportives, ou encore les associations de solidarité : toutes ont besoin d'être soutenues. Elles ont surtout besoin de reprendre leurs activités immédiatement, en respectant les mesures barrières strictes qu'elles maîtrisent désormais parfaitement.
L'affaiblissement de ces structures peut avoir des conséquences qui excèdent largement le seul monde associatif, en nuisant tout particulièrement au lien social et au dynamisme local des territoires ruraux. Il aura un effet économique, parce que les associations représentent 4 % du PIB français – sans même valoriser l'intégralité du bénévolat – , mais aussi des conséquences fortes sur le lien social, en contribuant à la limitation des contacts humains et des échanges. L'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail – ANSES – souligne que les deux tiers des 11-17 ans présentent un risque sanitaire préoccupant du fait d'une trop forte sédentarité, et l'Observatoire national de l'activité physique et de la sédentarité – ONAPS – confirme que ce risque s'est accru depuis le premier confinement. Les difficultés des associations représentent également un risque important pour le développement culturel des jeunes, à des âges où les apprentissages sont capitaux, mais aussi pour l'accompagnement des plus fragiles, qui ne peut plus être assuré comme il l'est en temps normal.
Quelles sont les mesures prévues par le Gouvernement pour que les pratiques et les activités associatives puissent reprendre le plus normalement et le plus rapidement possible, notamment dans les territoires moins touchés par l'épidémie ? Quelles actions votre ministère compte-t-il mettre en oeuvre pour développer les pratiques en extérieur ? Quel accompagnement spécifique prévoyez-vous pour que les associations puissent faire face aux difficultés financières qui sont les leurs et entamer le plus rapidement possible la reconquête des licenciés et des inscrits ?
Merci de nous donner l'occasion de dire combien ces associations sont essentielles à nos yeux et combien elles représentent le véritable maillon du vivre ensemble dans notre société, raisons pour lesquelles l'État est à leurs côtés depuis le début de la crise. Notre soutien prend différentes formes et s'organise avec le concours de nombreux acteurs. Ma réponse portera à la fois sur le périmètre d'action de Sarah El Haïry, qui s'occupe de l'ensemble des associations, et sur le secteur sportif, dont j'ai la responsabilité.
L'aide de l'État se manifeste tout d'abord par le soutien aux trésoreries et aux fonds propres des associations. Par l'intermédiaire de France Active, des solutions financières sont apportées à hauteur de 45 millions d'euros pour la période 2020-2022, montant auquel s'ajouteront les 40 millions d'euros mobilisés par la Banque des territoires par le biais d'achats d'obligations.
Dans un deuxième temps, nous avons décidé de soutenir l'emploi associatif : le fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire – FONJEP – mobilisera 2 000 postes supplémentaires, l'Agence nationale du sport financera 2 500 postes, et un soutien à l'accession à l'emploi sera apporté dans le cadre du Sésame vers l'emploi pour le sport et l'animation dans les métiers de l'encadrement – SESAME – , qui aidera 3 000 personnes supplémentaires, étant entendu que les profils de ces jeunes, que nous proposerons aux structures associatives d'employer, couvrent aussi bien des personnes non encore qualifiées que des personnes déjà diplômées.
Dans un troisième temps, nous nous sommes assurés que les associations employeuses aient accès aux dispositifs de droit commun au même titre que n'importe quelle entreprise. Je songe au chômage partiel simplifié et renforcé, aux reports d'échéances sociales ou fiscales, ou encore à des remises d'impôts directs, qui pourront être décidées à l'issue d'un examen individualisé, association par association. Au-delà, afin que les nombreuses associations qui n'emploient pas de salariés puissent bénéficier d'une aide particulière, Sarah El Haïry a annoncé que le fonds de développement de la vie associative – FDVA – serait renforcé à hauteur de 5 millions d'euros, tandis que 15 millions d'euros seront spécifiquement alloués aux associations sportives au titre des exercices 2020 et 2021.
S'agissant de la nécessaire reprise de la pratique sportive, sachez que 80 millions d'euros sont mobilisés en faveur de projets sportifs fédéraux. Ces sommes seront reversées par les fédérations sportives aux associations, pour aider ces dernières à aborder la nouvelle saison avec confiance, en nouant notamment des partenariats territoriaux afin de permettre à leurs adhérents, qui n'ont pas accès aux équipements couverts, où les activités sont restreintes, d'utiliser des équipements extérieurs. En s'associant aux associations sportives qui proposent du sport outdoor, les associations concernées pourront ainsi faire bénéficier leurs adhérents du service qu'elles se sont engagées à leur fournir en septembre.
La campagne de formation du FDVA a été lancée en début d'année 2021. De nombreuses associations peuvent encore y postuler. Sachez que nous sommes présents aux côtés de toutes les associations et de tous les acteurs, parce que nous savons qu'ils sont essentiels à la République. C'est pourquoi nous déployons toute l'énergie nécessaire pour nous assurer de leur sauvegarde, de leur pérennité, et surtout du maintien de leur activité chaque fois que cela est possible.
La parole est à M. Fabien Di Filippo, que j'invite à rester très bref, le délai de six minutes qui s'impose à nous étant presque écoulé.
Je rappelle qu'un jeune sur deux passe plus de quatre heures trente par jour devant un écran. Je tiens également à vous alerter sur le fait que le montant additionnel alloué au FDVA ne représente qu'un sixième de celui dont nous disposions à travers la réserve parlementaire : 5 millions d'euros, cela correspond à 3 euros par association. Une telle somme n'est pas à la hauteur des enjeux.
La parole est à M. Hubert Julien-Laferrière, pour exposer sa question, no 1359, relative aux difficultés du sport amateur face à la crise sanitaire.
Vous le savez, du fait de la crise sanitaire, le sport amateur est à bout de souffle, avec des trésoreries en grande difficulté, un sport en salle à l'arrêt, des compétitions annulées, des dirigeants qui jettent l'éponge et des clubs qui mettent la clef sous la porte – sans compter que beaucoup d'entre eux étaient déjà en difficulté avant la crise. À cela s'ajoutent l'arrêt des manifestations extra-sportives, qui sont pourtant indispensables au fragile équilibre financier de nombreux clubs, et la quasi-impossibilité de faire appel au sponsoring, les partenaires potentiels rencontrant eux-mêmes de fortes difficultés – notamment les commerces locaux, qui sont les principaux sponsors de la plupart des petites structures.
Bien sûr – vous en êtes bien consciente – , avec l'arrêt des activités des associations, ce n'est pas seulement la pratique sportive qui se joue, mais aussi le lien social dans de nombreux territoires, dont les clubs sont un acteur majeur. Quand on a été membre d'une association sportive, élu local, comme c'est le cas pour beaucoup d'entre nous, maire d'un arrondissement, comme je le fus à Lyon, membre d'un conseil de quartier ou tout simplement acteur de son quartier, on sait à quel point les clubs sont un vecteur de cohésion sociale, de solidarité, d'entraide et de vivre ensemble, mais aussi à quel point ils remplissent une mission d'éducation. On sait aussi combien le sport est un impératif de santé publique. On pense également à ces milliers d'adhérents qui jouent pour le plaisir et qui ont, plus que jamais, besoin de cet exutoire. N'oubliez pas, enfin, que de nombreux sportifs professionnels ont débuté leur discipline dans un club amateur, comme Teddy Riner dans le 19e arrondissement de Paris, Nabil Fekir à Saint-Priest, Karim Benzema à Bron Terraillon, ou encore Éric Abidal à Lyon-Duchère AS, dans ma circonscription.
Je songe aussi aux salariés et aux nombreux bénévoles sans qui les clubs n'existeraient pas, qui transmettent leur savoir et les valeurs du sport, et qui sont bien souvent des relais éducatifs et sociaux. Je veux ici rendre hommage à ces bénévoles, moniteurs et coachs qui sont la richesse du sport français et qui font vivre les clubs. Leur attente est extrêmement forte. La troisième vague est bien là, mais la vaccination est en cours et le sport amateur a besoin, je le crois, de perspectives pour sortir de la crise et envisager la reprise.
Faisons confiance à nos associations sportives : elles sont capables d'organiser des rencontres et des événements tout en respectant les normes sanitaires. Sportifs, dirigeants, bénévoles : tous sauront faire preuve de responsabilité. Donnons-leur la possibilité de le prouver.
Madame la ministre déléguée, pouvez-vous nous donner des perspectives et un calendrier de reprise, y compris concernant les sports en salle et les manifestations extrasportives, pour soutenir ce sport d'en bas qui apporte tant à la collectivité ?
Depuis un an, je suis particulièrement attachée à ce que le sport fédéral et associatif puisse surmonter les difficultés auxquelles il est confronté. C'est pourquoi, dès le début de la crise, au début du mois de mars 2020, le choix que nous avons privilégié a consisté à autoriser certains sportifs à poursuivre leur pratique en permanence, à l'intérieur ou à l'extérieur, dans tous les équipements sportifs. Il s'agit des sportifs de haut niveau ou professionnels, des personnes qui font du sport sur ordonnance, des stagiaires en formation professionnelle ainsi que de toutes les personnes en situation de handicap qui pratiquent du sport parce que cela leur est indispensable.
Au-delà de ces situations, nous nous sommes efforcés de favoriser, à chaque nouvelle phase de la crise, le maintien d'une activité minimale pour les associations. À un moment donné, cela s'est traduit par l'autorisation accordée aux mineurs de pratiquer un sport. En outre, depuis le 28 novembre dernier, chacun, qu'il soit majeur ou mineur, est autorisé à faire du sport en extérieur, en pratique individuelle ou encadrée. Nous prenons ces décisions parce que nous faisons confiance aux éducateurs des associations sportives et à leurs dirigeants.
Malheureusement, depuis le 16 janvier, l'arrivée du variant anglais a rendu impossible l'autorisation d'une pratique en intérieur, aussi bien dans le cadre scolaire qu'associatif.
Néanmoins, vous le savez, nous avons annoncé il y a quelques jours la reprise de l'éducation physique et sportive – l'EPS – à l'école parce que l'activité sportive est indispensable au bien-être de nos enfants. M. le député Di Filippo l'a dit également tout à l'heure, le danger de la sédentarité guette les enfants comme les adultes. En raison du changement dans nos routines quotidiennes, nous risquons d'exclure le sport de notre vie de tous les jours. Nous ne voulons pas qu'une telle situation se produise. Nous devons maintenir le sport en vie quoi qu'il arrive.
Les collectivités et les fédérations ont imaginé des solutions permettant aux associations qui proposent une pratique en intérieur et à celles qui proposent une pratique en extérieur de collaborer. Des équipements sportifs et des cours de récréation sont mis à la disposition des associations pour que les adultes et les enfants passent du temps dehors. Nous devons nous adapter à cette situation de crise.
Il est indispensable de continuer à soutenir financièrement le monde associatif. Nous le faisons au quotidien à travers des aides significatives : 100 millions d'euros seront ainsi débloqués, sous la forme d'un dispositif nommé pass'sport, pour favoriser la reprise des licences et des adhésions à la rentrée prochaine.
Tous ensemble, nous arriverons à passer ce cap grâce à un monde du sport motivé et conscient de sa responsabilité en matière de santé des Français.
Je vous remercie pour votre réponse. Vous l'avez dit, au-delà des aides apportées par l'État, ces associations ont besoin de continuer à se sentir utiles à la collectivité.
La parole est à M. Michel Castellani, pour exposer sa question, no 1353, relative à l'hôpital de Bastia.
Je souhaite évoquer la situation de l'hôpital de Bastia et sa nécessaire refondation. L'épidémie de la covid-19 a mis en lumière la vulnérabilité des structures hospitalières de certains territoires, au premier rang desquels figure la Corse.
Grâce au dévouement exceptionnel des personnels hospitaliers et du système de santé – dont j'ai personnellement bénéficié et auquel je veux rendre hommage – , l'île a pu faire face à l'épidémie, non sans tensions ni inquiétudes.
Cette crise épidémique a renforcé nos craintes au sujet de l'hôpital de Bastia. La vétusté de ses infrastructures a éclaté au grand jour et la question d'une large restructuration voire, plus certainement, d'une reconstruction se pose plus que jamais.
L'enjeu est de doter l'ensemble de la Haute-Corse d'une infrastructure hospitalière moderne et accessible à tous. L'accès aux soins, droit fondamental qu'il convient absolument de garantir, fait l'objet de carences manifestes sur ce territoire, qui abrite pourtant 60 % de la population de l'île.
En outre, la reconstruction ou la modernisation de cet établissement hospitalier s'insérerait dans une stratégie de développement globale menée par la municipalité de Bastia sur le plan de l'urbanisme, des nouvelles mobilités et de l'énergie. Cette ville porte une ambition majeure pour l'avenir, la refondation de l'offre hospitalière constituant un élément central de son projet.
L'avènement de ce nouvel édifice nécessite des études de faisabilité techniques et financières approfondies. Le soutien du Gouvernement apparaît nécessaire pour soutenir la ville dans la mise sur pied de cette structure. Je souhaite donc savoir si le Gouvernement est disposé à soutenir ce projet essentiel pour Bastia et pour la Corse et lui demande par conséquent de garantir sa participation à la réussite de cette ambition.
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles.
Votre question est tout d'abord pour moi, ainsi que pour tout le ministère, auquel j'associe l'agence régionale de santé, l'occasion de saluer de nouveau l'engagement des personnels soignants, notamment en Corse, face à l'épidémie.
Vous avez parlé de « dévouement exceptionnel », des mots qui me semblent tout à fait adaptés, entre autres s'agissant du centre hospitalier de Bastia. Durant la crise, l'établissement a été en première ligne, tant dans l'accueil des patients covid que dans le déploiement des politiques de dépistage et de vaccination.
Je vous rappelle qu'un programme de modernisation du site principal a été lancé il y a quelque temps. Le centre hospitalier avait réalisé une première tranche de travaux de restructuration et exprimé son intention de poursuivre cette démarche sur l'ensemble du site. À l'occasion de sa venue sur l'île en février 2018, le Président de la République lui-même avait confirmé que l'État assurerait un accompagnement pour la réalisation d'une deuxième tranche de restructuration. « L'État fera pleinement ce qui est attendu de lui », avait-il précisé.
L'établissement a par la suite réalisé un diagnostic architectural, un travail de fond visant à formaliser un projet médico-soignant, notamment à travers l'expertise d'organisations en ressources humaines.
À cette occasion, vous le savez, d'importantes limites structurelles au développement du site ont été identifiées. Je pense par exemple à la configuration architecturale des ailes qui ne permettaient pas d'atteindre le standard de vingt-huit à trente lits par unité d'hospitalisation, au trop grand nombre de chambres à deux lits et mal équipées, au nombre insuffisant d'espaces médicaux, paramédicaux et de locaux logistiques dans les services ou encore au sous-dimensionnement des surfaces consacrées aux activités d'urgences et de SAMU.
Conscient des enjeux, l'établissement avait alors souhaité formaliser, dans le cadre d'un projet médico-soignant concerté, les priorités architecturales à prévoir. Au moment du déclenchement de la crise du covid-19, tout cela était en phase de finalisation en vue d'un passage en comité interministériel de la performance et de la modernisation de l'offre de soins hospitaliers à l'été 2020.
En fonction des besoins identifiés dans le cadre de la gestion de crise, l'établissement a été amené à mettre en oeuvre plusieurs réorganisations architecturales internes qui ont conduit, d'une part, à conforter les évolutions issues des précédents travaux et, d'autre part, à mettre en lumière des contraintes majeures, plus fortes que celles qui avaient été identifiées dans un premier temps.
La crise a notamment mis en évidence la nécessité de regrouper et de développer l'offre de soins critiques, ou encore l'insuffisance de l'équipement en ascenseurs qui ne permet pas de distinguer les flux au sein du centre hospitalier.
Ces éléments ont conduit l'établissement à actualiser son programme d'investissements et à solliciter une étude technique complémentaire, l'objectif étant bien d'approfondir les possibilités offertes par le site existant d'un point de vue architectural mais aussi de bénéficier d'un appui permettant de vérifier la faisabilité et le coût d'une restructuration in situ.
Tant l'ARS que le Gouvernement sont particulièrement attentifs au suivi de ce dossier. Des réunions de travail, vous le savez certainement, ont d'ailleurs encore eu lieu récemment. Nous espérons tous qu'elles permettront d'avancer sur les évolutions que je viens d'évoquer en partie et que nous considérons comme indispensables. Tels sont, monsieur le député, les éléments de réponse que je pouvais vous apporter à ce stade.
Monsieur le secrétaire d'État, vous avez évoqué le diagnostic architectural et le projet médico-soignant, c'est-à-dire toutes les carences qui se sont accumulées et dont souffrent Bastia et 60 % de la population de Corse. La situation est claire. En toute hypothèse, Bastia et la Haute-Corse ont besoin d'une nouvelle structure hospitalière refondée in situ ou sur un nouveau site. Le statu quo est tout simplement intenable.
J'insiste aussi sur le fait que la Corse est la seule région qui ne dispose pas de centre hospitalier universitaire. Le Gouvernement doit absolument envisager d'y remédier car la Corse en a besoin. J'ajoute que Bastia doit être pleinement partie prenante concernant ce projet.
La parole est à M. Jean-Yves Bony, pour exposer sa question, no 1345, relative à l'unité Parkinson à Ydes.
Je veux ici me faire l'écho du désarroi, de l'incompréhension et du mal-être de malades, de familles, de médecins et de soignants de l'unité de Parkinson d'Ydes, plus connue sous le nom de UPY, dans le Cantal.
En effet, en janvier dernier, l'ARS a annoncé, à la stupeur générale, la fin du financement de cette unité, donc sa fermeture, alors même que depuis 2018 elle ne respecte pas ses engagements et diminue chaque année ses financements, provoquant ainsi un déficit chronique du fonctionnement de l'UPY.
Cette unité pilote et novatrice de douze lits, créée en 2012, a été adoubée en 2016 par l'ARS qui lui a alors accordé une autorisation d'exercice en tant qu'unité de soins longue durée – USLD – , un statut obtenu par défaut eu égard aux spécificités des prises en charge qu'elle propose.
Elle offre aux patients parkinsoniens venus de tout le territoire français des séjours, temporaires ou permanents, de réajustement thérapeutique, de réhabilitation pluridisciplinaire et de répit. Elle propose en somme une prise en charge hyperspécialisée et individuelle, dans un cadre exceptionnel où l'humanité et l'expertise des soignants croisent le courage sans faille des malades sévèrement atteints tant sur le plan moteur que neuropsychiatrique et de leurs familles épuisées en recherche d'une aide adaptée.
Le corps médical et soignant de cette unité est unanime : repositionner l'activité Parkinson sur des lits de soins de suite et de réadaptation – SSR – classiques du centre hospitalier le plus proche, celui de Mauriac, revient, ni plus ni moins, à perdre toute la qualité, la spécificité, et l'attractivité de l'UPY, laissant de nombreux malades et familles sans aucune solution de recours.
L'ARS vient de suspendre cette fermeture ; je tiens ici à saluer cette décision. Il n'en demeure pas moins que l'avenir de l'unité Parkinson d'Ydes reste très compromis.
Monsieur le secrétaire d'État, ce centre fait figure d'exception nationale. Sa fermeture serait, aux yeux de tous, totalement incompréhensible et injuste. Aussi ma question est-elle simple : comment entendez-vous conserver l'UPY à Ydes et la rendre pérenne, et avec quels moyens ?
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles.
Tout d'abord, je vous rejoins lorsque vous soulignez le caractère unique de l'unité Parkinson d'Ydes, un dispositif expérimental qui existe depuis 2011 et qui est dédié, vous l'avez dit, à la prise en charge de patients atteints de la maladie de Parkinson, au sein de l'unité de soins de longue durée du centre hospitalier de Mauriac. Il s'agissait au départ d'une extension de douze lits de cette USLD. Cette unité Parkinson a bénéficié d'un financement significatif de l'agence régionale de santé, la dotation annuelle moyenne s'élevant à 500 000 euros.
En 2016, l'ARS a renouvelé l'autorisation de l'USLD, confirmant le besoin d'une offre de prise en charge des personnes dépendantes de plus de 65 ans qui nécessitent une surveillance médicale continue. À ce stade je tiens à indiquer, contrairement peut-être à ce que vous avez évoqué, qu'à l'époque cette extension ne représentait absolument pas pour l'ARS la validation d'un quelconque déficit structurel ou sanitaire.
Je veux tout d'abord souligner que l'activité de cette extension de lits de l'USLD ne correspond pas totalement au projet initial, lequel avait pour objectif de prendre en charge des patients en tout début de maladie ou pour des séjours de répit temporaire.
Ainsi, au 8 mars dernier, sur les douze places, cinq accueillaient des patients pris en charge en hébergement permanent, parmi lesquels trois, très dépendants car très âgés et étant à un stade avancé de la maladie, relèvent en partie d'un EHPAD. Par ailleurs, à cette date, aucun patient n'était accueilli en hébergement temporaire sur les quatre lits initialement dédiés à ces séjours permettant des réajustements thérapeutiques opérés en neurologie ou du répit destiné à soulager les familles.
Lors de la création de cette extension, il était pourtant spécifié, dans le projet initial, que la durée moyenne de séjour à Ydes ne devait excéder trois semaines car, dans la majorité des cas, les patients devaient rentrer à leur domicile. Cette unité devait assurer la prise en charge attendue de cette pathologie, consistant à retarder le plus possible la dépendance.
Il est enfin à noter que le fonctionnement de la structure expérimentale pose question en raison d'une difficulté à compléter, à certains moments, le planning des soignants.
Face à ce constat, et afin que soit permise une réflexion avec les acteurs sur le positionnement de cette offre par rapport aux besoins des habitants du Cantal, l'ARS Auvergne-Rhône-Alpes, après avoir suspendu la fermeture, comme vous l'avez dit, souhaite que soit menée une évaluation de cette expérimentation – ce qui, en réalité, n'a jamais été fait – , avec pour objectif de faire précisément le point sur ses modalités de fonctionnement ainsi que sur son financement.
À ce stade, évidemment, ni l'abandon de toute activité sur le site ni l'arrêt d'une prise en charge des patients souffrant de la maladie de Parkinson, n'ont été – en aucun cas – envisagés. Le souhait de l'ARS et du Gouvernement est bien plutôt de garantir la prise en charge optimale de ces patients – un objectif que vous partagez évidemment, monsieur le député – , mais une fois que cette étude aura été menée, afin que nous puissions évaluer la situation actuelle par rapport aux objectifs initiaux de cette unité.
Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, de votre réponse, même si vous n'avez pas clairement exprimé la volonté du ministère de conserver l'unité Parkinson d'Ydes. Je voudrais vous rappeler que cette unité rayonne bien au-delà du département, j'en veux pour preuve les interpellations dont fait l'objet mon collègue Mollac, du Morbihan, par des familles de sa circonscription qui soulignent l'importance de cette unité pour les familles et pour les patients. Certes, il y a, comme vous le dites, une baisse d'activité en mars, mais c'est fatal puisque les financements ont baissé. Je pense qu'il faut avant tout rassurer les patients et les familles. Il serait souhaitable qu'on puisse prolonger cet échange hors hémicycle.
La parole est à M. Arnaud Viala, pour exposer sa question, no 1348, relative à la rémunération des personnels luttant contre la covid-19.
Il y a plus d'un an que notre pays vit au rythme de cette pandémie qui frappe les Français dans leur santé, dans leur mode de vie et dans leurs habitudes, et qui met à rude épreuve notre système de santé et de soins, mais surtout nos soignants et nos aidants à l'hôpital public ou dans le privé, y compris ceux exerçant en libéral en ville ou à la campagne, et tout le secteur associatif et du service à la personne. Pour autant, partout dans notre pays des femmes et des hommes, indépendamment de leur statut et de leurs missions habituelles, ont donné le meilleur d'eux-mêmes, souvent au péril de leur propre sécurité, parfois de leur vie, pour aider les autres ; sans cet élan, nous n'en serions pas là et il y aurait eu infiniment plus de détresse, de solitude et de pertes humaines.
Afin de pallier le manque de reconnaissance des soignants et de tous les personnels que j'ai évoqués, le ministère de la santé a organisé une consultation avec les acteurs du système de soins français en 2020 et débloqué, au titre du Ségur de la santé, des sommes importantes pour améliorer la prise en charge des patients, mais aussi pour le quotidien des soignants, visant ainsi à revaloriser sous forme de primes les métiers exercés dans les établissements de santé et les EHPAD – établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes – en reconnaissant l'engagement de ces personnels au service de la santé des Français.
Cependant, une partie importante des professionnels médicaux et paramédicaux, mais aussi des services aux personnes, en particulier dans les milieux ruraux comme dans mon département de l'Aveyron, n'a pas reçu cette prime. Ces « oubliés du Ségur », comme ils s'appellent eux-mêmes, ressentent un manque de reconnaissance de leur travail. Je rappelle que la prime est à titre individuel de 180 euros dans le public et de 163 euros dans le privé, mais qu'il y a de très nombreuses disparités territoriales et fonctionnelles : les professionnels qui ne l'auraient pas reçue sont ceux des secteurs de l'aide à la personne, de l'aide à domicile et des EHPAD associatifs, mais il y a aussi d'infinies disparités entre les structures et entre les employeurs, à telle enseigne que plus personne n'y comprend rien ! Et les annonces répétées de la part du Gouvernement sur de nouvelles catégories qui pourraient émarger à cette prime ne les satisfont pas car il y a un manque de lisibilité. Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d'État, me dire ce matin où nous en sommes ?
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles.
Je vais essayer de clarifier les choses en rappelant les différents dispositifs qui, il est vrai, ont été parfois mis en oeuvre de façon successive. Je commencerai par souligner que vous avez raison de dire que les professionnels de santé ont fait preuve d'un engagement essentiel et salvateur par-delà même les seules structures hospitalières, et j'y inclus évidemment ceux du médico-social. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a tenu à ce qu'une prime leur soit octroyée, prime qui participerait à la nécessaire reconnaissance de leur secteur et de leur action, ayant bien conscience que cette reconnaissance ne peut être seulement d'ordre financière – même si cet aspect est évidemment important.
Lorsque la prime n'a pas été prise en charge par les collectivités locales référentes, par exemple les départements pour les aides à domicile, l'État a répondu présent en accompagnant le financement nécessaire à hauteur de 80 millions d'euros. Alors que seuls dix-neuf départements finançaient une prime au début de l'été, c'est aujourd'hui l'ensemble d'entre eux qui a fini par reconnaître ainsi l'engagement essentiel de ces professionnels.
L'État soutient évidemment tous les professionnels du secteur médico-social. Vous l'avez rappelé, c'est le sens du Ségur de la santé que de rendre plus attractifs les métiers sanitaires et médico-sociaux publics, notamment par une meilleure rémunération, et cela s'est donc traduit pour les salariés des EHPAD publics – et privés à but non lucratif – par une augmentation de 183 euros nets mensuels, mais aussi pour ceux des EHPAD commerciaux par une augmentation de 160 euros nets mensuels.
Une première extension du Ségur a permis de faire bénéficier de ces revalorisations certains professionnels de structures ou de services médico-sociaux qui relèvent de la fonction publique hospitalière : je pense notamment aux services de soins infirmiers à domicile – les SSIAD – concernés par la revalorisation de 183 euros nets mensuels à compter du mois de juin. L'extension se poursuit pour les autres établissements et services médico-sociaux sous l'égide, vous le savez, de M. Michel Lafourcade, missionné par le Premier ministre afin de mieux coordonner les différents métiers de l'autonomie.
Quant aux aides à domicile, votre assemblée a voté un amendement gouvernemental prévoyant un financement à hauteur de 200 millions d'euros par l'État pour compléter les négociations de l'avenant 43 de la convention de la branche en vue de refondre les grilles indiciaires de ces professionnels. Je le rappelle en précisant qu'ils relèvent, eux aussi, de la compétence des départements.
Le processus de reconnaissance et de revalorisation de tous ces métiers est donc bien en cours, comme le montrent les décisions que j'ai rappelées et celles qui seront prises dans les prochaines semaines et les prochains mois, et autant que nécessaire pour être à la hauteur de l'engagement des différents professionnels de santé que vous avez mentionnés.
Je vous remercie pour votre réponse, monsieur le secrétaire d'État, mais je me permets de zoomer sur le département de l'Aveyron que je connais très bien pour vous citer des structures telles que l'ADMR – Aide à domicile en milieu rural – , qui existe aussi dans d'autres départements, mais également l'UDSMA-Mutualité Française Aveyron, devant laquelle le personnel manifestait il y a quelques jours encore pour dénoncer les conditions de travail dans ses centres de soins infirmiers de proximité. On peut également mentionner toutes les résidences seniors. Vous m'indiquez que, suite à notre vote, des réflexions sont amorcées en vue d'une revalorisation salariale des personnels, mais ce type de travail au long cours ne répond pas à la question de la prime spécifique liée au contexte sanitaire de la crise de la covid, au cours de laquelle ils ont fait et consentent encore de très gros efforts pour accompagner des personnes en fragilité, essentiellement en milieu rural, souvent isolées, efforts sans lesquels ces personnes n'auraient pas pu traverser la période que nous connaissons.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour exposer sa question, no 1355, relative au Ségur de la santé pour les personnels médico-sociaux.
Ma question s'adresse à M. le ministre des solidarités et de la santé et porte sur la situation des personnels médico-sociaux des établissements non publics, qu'ils soient associatifs ou lucratifs, au regard des mesures dites du Ségur de la santé.
À la suite des accords signés en juillet 2020, une revalorisation salariale avait été accordée à tous les agents travaillant à l'hôpital ou en EHPAD, soit 183 euros dans le public et 160 euros dans le privé. Dans un premier temps, les aides-soignants, les éducateurs et les infirmières travaillant dans des structures médico-sociales comme les maisons d'accueil spécialisées, les services de soins infirmiers à domicile, les instituts médico-éducatifs et les foyers d'accueil médicalisés n'ont pas bénéficié de la revalorisation des salaires obtenue dans le secteur hospitalier. J'avais attiré l'attention du ministre sur ce point en décembre dernier, lors des questions au Gouvernement.
Depuis le mois passé, l'extension de cette revalorisation aux personnels du secteur social et médico-social a été accordée, mais à la condition qu'ils soient rattachés à un établissement public de santé ou à un EHPAD de la fonction publique hospitalière. Aujourd'hui, le sort de ceux travaillant dans le secteur privé – associatif ou lucratif – , soit les trois quarts des personnels du social et du médico-social, est toujours en suspens. Selon le périmètre retenu, ce sont de 40 000 à près de 200 000 personnes qui sont concernées. Dois-je rappeler qu'elles ont participé et continuent de le faire à la prise en charge des personnes fragiles et qu'elles ne comptent pas leurs heures ?
Je souhaite connaître les mesures envisagées et discutées, en lien avec les employeurs, de nature à assurer l'équité de traitement entre tous les personnels de soins médico-sociaux, mais aussi le calendrier de leur mise en oeuvre, ainsi que le nombre de personnes possiblement concernées par ces futures mesures de revalorisation dans les structures de soins de la Sarthe et en fonction de quel niveau moyen de rémunération.
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles.
Votre question, madame la députée, s'inscrit dans la continuité de celle du député Viala. Je vais donc apporter quelques éléments de réponse supplémentaires au risque d'être un peu redondant par rapport à celle que je viens de donner.
Vous avez justement rappelé l'historique des accords signés en juillet 2020, qui ont permis une revalorisation salariale des agents travaillant à l'hôpital ou en EHPAD à hauteur de 183 euros dans le public et de 160 euros dans le privé, revalorisation qui participait évidemment de l'indispensable reconnaissance des pouvoirs publics pour le dévouement de ces professionnels de première ligne dans la lutte contre la covid-19. Une fois encore, je souligne qu'il n'était pas question d'en rester là et le Gouvernement a exprimé à de nombreuses reprises son souhait de continuer à soutenir les professionnels du secteur médico-social et de prendre des mesures en conséquence.
C'est le sens du Ségur de la santé que de rendre plus attractifs les métiers sanitaires et médico-sociaux publics, d'où une première extension du Ségur qui a permis de faire bénéficier des revalorisations que j'ai rappelées certains professionnels de structures et de services médico-sociaux qui relevaient de la fonction publique hospitalière, notamment ceux des SSIAD qui seront concernés à compter du mois de juin par cette revalorisation de 180 euros nets mensuels. Le travail se poursuit pour les personnels des autres établissements et services médico-sociaux, en particulier pour ceux travaillant dans le secteur privé, associatif ou lucratif que vous évoquiez, sous l'égide, je le redis, de Michel Lafourcade, missionné en tant que coordonnateur des métiers de l'autonomie par le Premier ministre. Vous avez raison de souligner que les enjeux sont importants et qu'ils dépassent la seule question de la rémunération. Vous avez ainsi parlé d'équité, et c'est bien de cela aussi qu'il s'agit.
Pour ce qui est des aides à domicile, je rappelle que votre assemblée a voté cet amendement mobilisant 200 millions d'euros pour compléter la négociation de l'avenant 43 et refondre les grilles indiciaires de ces professionnels qui relèvent de la compétence des départements car, dans le contexte sanitaire de la crise pesant sur les finances des collectivités, il fallait que l'État soit au rendez-vous et ce fut le cas. J'ajoute que M. Lafourcade mène également une réflexion sur la question des formations.
Le processus de reconnaissance et de revalorisation de ces métiers est donc bien en cours et se poursuivra autant que nécessaire en prenant en compte, au-delà de la question de l'équité de traitement, celle de la juste reconnaissance de l'engagement de ces professionnels. Sachez, madame la députée, que le Gouvernement, à commencer évidemment par la ministre Brigitte Bourguignon, est pleinement engagé dans cette démarche.
Vos éléments de réponse, dont je vous remercie, correspondent à ce que m'avait dit le ministre Olivier Véran, lors de la séance des questions au Gouvernement, sur le travail et le rapport à venir de M. Lafourcade. Cela dit, j'attends des précisions sur le calendrier de la déclinaison des différentes mesures envisagées et selon les secteurs concernés. De même, je n'ai pas eu de réponse sur la situation dans la Sarthe et j'aimerais que les services du ministère me fassent parvenir des éléments précis. J'attends donc une réponse plus complète.
La parole est à M. François Ruffin, pour exposer sa question, no 1333, relative à la loi Grand âge.
« Hier matin j'arrive chez la dame, elle était tombée et s'était fracturée le crâne. J'appelle les bureaux, mais il n'y a personne pour me répondre, personne d'astreinte. Est-ce que vous trouvez ça normal ? J'ai appelé les pompiers, la famille, je me suis débrouillée, mais est-ce que vous trouvez ça normal ? » Samedi après-midi, c'est à Flixecourt, dans mon coin, qu'une auxiliaire de vie se plaignait de sa solitude, et le lendemain, à Villeurbanne, c'était encore une pluie de témoignages sur les horaires, les salaires, les congés. « Les cadres eux-mêmes s'épuisent, raconte Aline. Quand j'étais responsable de secteur, la plus grosse difficulté, c'était de trouver des gens pour faire le travail. À tel point que je suis allée quelquefois m'occuper de personnes âgées durant les week-ends sans avoir aucune compétence, sans en avoir le droit, mais je ne pouvais pas laisser les personnes dans leur lit, pas lavées, sans avoir mangé. »
C'est l'asphyxie dans l'aide à domicile. Quatre fédérations du secteur ont alerté le Gouvernement et les Français : elles nous disent que, bientôt, on ne pourra plus choisir de rester à domicile et qu'il leur est déjà impossible, faute de personnels, d'honorer toutes les demandes d'accompagnement des personnes âgées.
Cela fait trois ans que je sonne l'alarme et que je réclame un vrai statut et de vrais revenus pour les auxiliaires de vie. Depuis trois ans, sur les bancs du Gouvernement, on me renvoie à la loi sur le grand âge. Cet automne encore, lors de l'examen du budget, Olivier Véran déclarait que la future loi Grand âge et autonomie permettrait de revaloriser encore davantage ces métiers. Mais cela fait trois ans que nous ne voyons rien venir…
Je vais retracer l'historique de cette affaire, parce que la situation en deviendrait presque comique. En mai 2018, après une marée blanche, le Président de la République Emmanuel Macron promet en personne un plan Grand âge et une loi votée avant la fin de l'année 2019. Un an et demi plus tard, à la fin 2019, pas de loi, mais Agnès Buzyn se donne « d'ici à 2020 pour réussir ». Début 2020, nouveau report : le projet de loi sera présenté à l'été ; puis en juin, c'est à nouveau promis, juré, la loi sera prête d'ici à la fin de l'année… Fin 2020, Emmanuel Macron s'engage pour une loi dès le début 2021. Nous voici au printemps 2021 et j'ai regardé le calendrier parlementaire : aucune loi Grand âge à l'horizon. Cinq reports, c'est un record ! Comme vous l'ont dit les directeurs d'établissements, stop au blabla, on veut une loi ! Pour quand est-elle prévue ? Avez-vous une nouvelle promesse à nous faire ?
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles, pour répondre à une question partagée par beaucoup de députés.
Monsieur Ruffin, depuis les premières déclarations que vous mentionnez et qui remontent à 2018, il ne vous aura pas échappé qu'une crise sanitaire est intervenue, rendant délicate l'avancée d'un certain nombre de projets, et pas seulement celui concernant la question du grand âge et de l'autonomie. Par ailleurs, vous pouvez convenir qu'au-delà de la loi, plusieurs mesures ont été adoptées au profit de l'aide à domicile ; je vais prendre un peu de temps pour y revenir.
Votre question me permet de rappeler un chiffre important : plus de 80 % de nos concitoyens désirent mieux vieillir en pouvant rester à leur domicile. Cela suppose un travail d'ampleur pour mieux prévenir la perte d'autonomie, mais aussi et surtout pour susciter, chez les jeunes, des vocations en faveur de ces métiers du soutien à l'autonomie et au grand âge – les métiers du lien, comme vous les appelez. Il est impératif de garantir leur attractivité et c'est l'un des axes majeurs du travail entrepris par Brigitte Bourguignon au sein du Gouvernement. La ministre déléguée chargée de l'autonomie a eu l'occasion de faire le mois dernier, à Bordeaux, un point d'étape concernant le plan d'action sur les métiers du grand âge. Elle en a d'ailleurs rappelé les caractéristiques la semaine dernière, lors de son audition par la commission des affaires sociales de l'Assemblée. Elle a pu, à cette occasion, échanger avec les parlementaires sur plusieurs aspects.
En matière de revalorisation salariale, l'avenant 44 a d'ores et déjà été agréé pour revaloriser le point d'indice des aides à domicile. Ces 33 euros bruts supplémentaires sont une première étape qui, bien sûr, ne saurait suffire, c'est pourquoi des discussions se poursuivent au sujet de l'avenant 43, qui porte sur la refonte des grilles indiciaires. Dans le contexte de la crise sanitaire, la situation financière des collectivités territoriales aurait pu mettre en péril cette augmentation. La considérant comme fondamentale, le Gouvernement a donc proposé au Parlement de voter une mobilisation de 200 millions d'euros par an, prélevés sur la branche autonomie, pour en compléter le financement – sauf erreur de ma part, il me semble, monsieur le député, que vous avez voté cette mesure. Les travaux se poursuivent et cette question reste l'un des chantiers prioritaires de la ministre déléguée.
Vous le savez très bien, l'attractivité de ces métiers ne se cantonne pas à une revalorisation salariale, même si celle-ci est essentielle. En parallèle, nous adaptons les formations de ces professionnels pour anticiper les enjeux de demain, permettre une hausse des qualifications et prévenir les risques professionnels. Enfin, nous développons des réponses pour améliorer la qualité de vie au travail et rompre avec les difficultés que rencontrent ces professionnels au quotidien, étant entendu que ces métiers sont amenés à se démultiplier. Ainsi, grâce aux outils dont nous disposons, l'action du Gouvernement se poursuit indépendamment de la loi Grand âge. Comme cela a déjà pu être évoqué, un projet de loi sur ces questions vous sera présenté dès que le contexte sanitaire le permettra.
Ma question était simple : quand disposerons-nous d'un projet de loi ? Vous répondez pendant quatre minutes, mais vous ne faites mention d'aucune date. « Quand la crise sanitaire le permettra » : visiblement, la crise sanitaire permet de faire passer des projets de lois de toutes sortes mais pas celui-là, alors qu'il s'agit d'un point urgent puisque les auxiliaires de vie ont été en première ligne.
Je ne voudrais pas oublier un autre aspect : « La période est difficile pour les jeunes, pendant la crise sanitaire, on leur dit : "on fait tout ça pour les vieux" et, à la sortie, le grand texte qu'on voterait serait encore… pour les vieux ? » Voilà ce qu'a déclaré récemment un ministre de premier plan dans le journal Le Parisien.
Il faut éviter toute guerre des générations. Le projet de loi relatif au grand âge peut également être un projet pour les jeunes. France Stratégie indique que les métiers liés à l'accompagnement des personnes âgées sont des métiers d'avenir et que ce secteur permettra de créer beaucoup d'emplois. Mais dans quelles conditions ? Les jeunes auront-ils droit à des salaires de misère ou auront-ils accès à un statut et à des revenus décents ? La loi Grand âge doit être inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée, puisqu'elle s'adresse aussi à la jeunesse.
La parole est à M. Hubert Wulfranc, pour exposer sa question, no 1334, relative au centre hospitalier universitaire de Rouen.
Le CHU de Rouen s'est doté d'un nouveau bâtiment, le « Robec », regroupant l'ensemble des blocs opératoires de l'hôpital Charles-Nicolle. Selon l'intersyndicale, le bon fonctionnement des services transférés dans ce bâtiment en octobre 2020 serait compromis, alors que l'équipement affiche un taux d'activité de 60 %, hors effets du covid-19. Les dysfonctionnements sont dus à l'inadaptation de locaux construits sans que les personnels aient pu exprimer leurs besoins – notamment en matière de capacités de stockage – , à une insuffisance chronique de personnels et au manque de formation de certains agents hospitaliers, en particulier des infirmiers, dont les missions ont été élargies après leur transfert.
Prétextant d'une mutualisation des moyens, la direction du CHU a profité de l'opération pour redéployer quarante postes – notamment des postes d'aides-soignants – vers d'autres services de l'hôpital comme le service de brancardage ou de stérilisation d'équipements et d'ustensiles. Le travail qui était effectué par ces aides-soignants est maintenant réalisé, à effectif constant, par des IBODE – infirmiers de bloc opératoire – ou des IADE – infirmiers anesthésistes.
Les organisations syndicales font état d'une nette dégradation des conditions de travail, raison pour laquelle tous les personnels des blocs opératoires du Robec ont fait usage de leur droit de retrait, le 4 novembre dernier. Ils dénoncent des maquettes organisationnelles inexistantes ou aléatoires, une charge de travail importante, une mauvaise organisation dans la gestion des matériels ayant des conséquences sur les interventions chirurgicales, des heures supplémentaires qui explosent, ou encore l'absence de formation préalable pour des agents appelés à intervenir dans une spécialité chirurgicale qu'ils ne maîtrisent pas pleinement.
En présence de l'inspection du travail – qui a sommé la direction d'agir – , une motion a été adoptée le 2 février par le CHSCT – comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Elle demande le recrutement d'aides-soignants, de logisticiens d'étages et d'IBODE, une formation sérieuse pour les agents utilisant le nouveau matériel et l'emploi des agents de bloc opératoire uniquement pour des opérations pour lesquelles ils sont formés. Les représentants du personnel y rappellent que la direction est responsable des conditions de travail et des risques psychosociaux provoqués par la situation.
En l'absence de réponse crédible, l'intersyndicale a organisé une nouvelle journée de grève, le 18 mars. La direction continue de se réfugier dans le déni et refuse tout dialogue social. Ma question est donc simple : le ministre de la santé prendra-t-il toute disposition utile – en lien avec l'agence régionale de santé, la direction et les élus du personnel au CHSCT de l'hôpital – pour résoudre au plus vite ces dysfonctionnements constatés dans l'unité du Robec au CHU de Rouen ?
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles.
Même si vous connaissez les différents éléments de ce dossier, je commencerai par dresser l'historique des décisions qui ont été prises. Le regroupement des activités chirurgicales du CHU de Rouen au sein de ce bâtiment unique, le Robec, que vous estimez quelque peu précipité, est un projet ancien, initié il y a plus de dix ans. Il a été préparé avec l'ensemble des équipes soignantes et a fait l'objet de larges concertations avec les instances et les représentants du personnel. L'ouverture de ce bâtiment était très attendue : l'organisation antérieure, qui était éclatée en plusieurs blocs de spécialités, avait montré ses limites, notamment pour le travail et le fonctionnement des équipes au quotidien.
L'un des objectifs du projet « Robec » était précisément de répondre à cet impératif d'amélioration des conditions de travail. Il représente un investissement de 144 millions d'euros, avec un soutien financier de l'État de 29 millions d'euros. Au total, plus de 25 000 interventions y sont effectuées par an. L'emménagement dans le nouveau bâtiment était prévu au mois d'août 2020, mais la mobilisation de l'ensemble des équipes du CHU de Rouen dans la gestion de la crise du covid-19 n'a pas permis de dégager le temps nécessaire pour respecter cette échéance initiale. Je tiens d'ailleurs à saluer l'engagement constant de toute la communauté hospitalière du CHU qui, à nouveau, a fortement été mise à contribution, et qui l'est encore.
Pour assurer l'impératif de rattrapage des opérations chirurgicales reportées lors du premier confinement et limiter les pertes de chance pour les patients, l'emménagement dans le nouveau bâtiment a été organisé fin octobre 2020, après une large consultation. Cette nouvelle organisation, qui permet de regrouper toutes les équipes des blocs opératoires au sein du bâtiment le Robec, a été mise en oeuvre en maintenant le même nombre d'infirmiers et d'aides-soignants. Le dimensionnement par salle d'intervention demeure également inchangé et la direction a veillé à accompagner l'ensemble des professionnels pour que chacun s'approprie son nouvel environnement de travail – elle continuera à le faire, j'en suis convaincu.
Il est certain que le contexte de crise sanitaire dans lequel s'est déroulé l'emménagement a accentué les défis organisationnels posés aux équipes soignantes : quelques jours seulement après la mise en service du bâtiment, les besoins de la crise ont ainsi conduit à la transformation d'un étage en service de réanimation temporaire.
En dépit de la mobilisation de chacun dans ce contexte particulier, un droit de retrait a été déposé le 4 novembre 2020 par les professionnels de santé, sur la base d'une demande de sécurisation de leurs conditions de travail et des prises en charge des patients. Pour répondre à ces préoccupations légitimes du personnel et faciliter cette période de transition, la direction du CHU a immédiatement élaboré un plan d'action en collaboration avec les équipes concernées. Ses principaux axes et les mesures correctrices mises en oeuvre ont été présentés au CHSCT du 6 novembre 2020. Le plan s'accompagne de moyens supplémentaires, dont un renfort d'aides-soignants.
Dans cette période éprouvante, nous partageons évidemment tous l'objectif de garantir aux professionnels et aux patients les meilleures conditions de prise en charge. Ce nouveau plateau technique pour le CHU de Rouen constitue une amélioration évidente pour le territoire. Son ouverture atteste de la préoccupation constante de développer un savoir-faire face à l'épidémie du covid-19, tout en veillant au maintien de toutes les activités prioritaires sur le territoire.
La parole est à Mme Sylvie Tolmont, pour exposer sa question, no 1357, relative au titre de séjour des mineurs non accompagnés.
Je souhaite évoquer la situation de nombreux mineurs non accompagnés qui, inscrits en formation ou en apprentissage, rencontrent des difficultés pour obtenir un titre de séjour une fois leur majorité atteinte. La presse nationale s'est récemment fait l'écho du combat de M. Stéphane Ravacley, boulanger à Besançon, lequel avait entamé une grève de la faim pour s'opposer à la menace d'expulsion dont faisait l'objet son apprenti de 18 ans, M. Laye Fodé Traoré.
Contrairement à ce que Mme la ministre du travail avait pu indiquer, il ne s'agit malheureusement pas d'un cas particulier. J'ai plutôt le sentiment que ce type de situation se multiplie dangereusement. Dans mon territoire, la Sarthe, j'en veux pour preuve plusieurs exemples similaires de refus de délivrance d'un titre de séjour, notamment motivé par le caractère prétendument apocryphe des éléments d'identité présentés par le demandeur.
Nombre des jeunes concernés font pourtant montre d'un sérieux et d'une grande implication auprès de leurs maîtres d'apprentissage ou de stage, à tel point que ces derniers leur délivrent souvent une promesse d'embauche. Au-delà de leur investissement professionnel, certains font également preuve d'un engagement altruiste et interviennent sur le plan associatif, notamment sportif.
Malheureusement, malgré le soutien de leurs professeurs et des associations engagées auprès d'eux, ils essuient de nombreux refus, parfois peu argumentés. Cette situation, injuste compte tenu de l'engagement de ces jeunes, est également incompréhensible eu égard aux ressources publiques injectées pour assurer leur formation ou leur suivi ; enfin, elle est contreproductive car elle concerne des jeunes formés dans des filières en tension au sein desquelles les employeurs souhaitent recruter, qu'il s'agisse par exemple de la restauration, nonobstant la situation de crise actuelle, ou du bâtiment. C'est pourquoi j'aimerais que vous me fassiez part de vos intentions en vue de permettre à ces jeunes de s'intégrer professionnellement et socialement.
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles.
Je vais vous faire part de nos intentions et des mesures que nous avons déjà commencé à mettre en oeuvre. Certains jeunes, reconnus mineurs au moment de leur évaluation, sont pris en charge par l'aide sociale à l'enfance et se voient refuser le droit au séjour au moment de leur majorité parce qu'ils ne sont pas en mesure de justifier d'un état civil ou de leur nationalité. Cela suscite souvent de fortes interrogations et incompréhensions en créant des situations personnelles dramatiques. Vous avez cité le combat de Stéphane Ravacley, à Besançon, avec lequel j'avais échangé au téléphone au moment des faits, mais j'ai eu l'occasion lors de mes déplacements d'être confronté à d'autres situations similaires ailleurs sur le territoire.
Dans le cadre de l'examen des demandes, les préfectures s'appuient souvent sur les rapports de la police aux frontières et sur les autorités consulaires pour délivrer leur refus. Avant tout refus, une phase d'échanges est instaurée entre les services de la préfecture, les conseils départementaux et les ressortissants, qui donne la possibilité aux jeunes majeurs de compléter leur dossier avec de nouveaux documents qui permettraient de lever la suspicion qui aurait pu s'installer.
Considérant que ces situations ne peuvent pas être considérées comme satisfaisantes, le Gouvernement a souhaité prendre une série de mesures et apporter des réponses qui permettent de sécuriser ces procédures le plus en amont possible, car c'est souvent un défaut d'anticipation qui crée les ruptures. L'objectif est de donner des perspectives à ces jeunes dès que possible, afin qu'une épée de Damoclès ne reste pas suspendue au-dessus d'eux.
Afin d'institutionnaliser les phases d'échanges que j'évoquais et qu'elles se déroulent le plus en amont possible, le ministre de l'intérieur a publié une circulaire le 21 septembre 2020 – c'était un engagement de ma part – , invitant les préfectures à mettre en oeuvre « un examen anticipé des demandes de titres de séjour des mineurs étrangers confiés au service départemental de l'aide sociale à l'enfance », afin d'éviter toute rupture dans leur parcours d'intégration au moment où ils atteignent leur majorité. La question de la majorité, de l'intégration et de l'autonomie des jeunes de l'aide sociale en France ne doit pas se poser à « 18 ans moins le quart ».
On constate, dans les territoires, que les choses fonctionnent lorsque la préfecture et le département anticipent dès les 17 ans du mineur, et qu'ils prennent place autour d'une table pour évaluer dans quel parcours d'intégration il se situe – ou non – , et donc dans quelles perspectives, même si c'est sans engagement, on peut envisager l'évolution de ce jeune. Dans ces conditions, généralement, les choses se passent mieux et sans rupture une fois la majorité acquise. C'est le sens de la circulaire : il faut que l'ensemble des départements et des préfectures puissent adopter cette démarche d'anticipation.
Les jeunes ressortissants sont invités à solliciter plusieurs mois en amont, avec leur département, l'ensemble des documents pertinents, en particulier auprès des services consulaires, documents qui permettront à la préfecture de s'assurer que les conditions de l'admission au séjour seront réunies.
Brièvement, pour respecter les injonctions du président et le temps qui m'est accordé, sachez que la question de la sécurisation de la phase d'évaluation conditionnera également ce qui se passera au moment de l'accès à la majorité. L'utilisation du fichier d'appui à l'évaluation de la minorité, dont je sais qu'il a pu susciter certains débats, même s'il a aujourd'hui été adopté par une très grande majorité de départements – seulement une dizaine d'entre eux n'y ont pas recours – fait partie de la sécurisation de l'évaluation de la minorité qui rend plus facile, ensuite, l'acceptation de la reconnaissance de la majorité et la possibilité de délivrer un titre de séjour.
Je vous remercie pour votre réponse, monsieur le secrétaire d'État. Permettez-moi de vous citer un cas concret. Vous savez qu'à leur majorité, les jeunes suivis par l'aide sociale à l'enfance peuvent signer un « contrat jeune majeur » qui leur permet de bénéficier d'un soutien financier. On m'a expliqué que, pour que cette aide leur parvienne, ils devaient transmettre leur relevé d'identité bancaire. Seul problème : pour ouvrir un compte bancaire, il faut disposer de papiers d'identité ! On n'arrive décidément pas à sortir de situations qui sont pourtant totalement catastrophiques.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Présentation du rapport annuel de la Cour des comptes ;
Débat sur la politique du Gouvernement en faveur des associations.
La séance est levée.
La séance est levée à douze heures vingt.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra