La séance est ouverte.
La séance est ouverte à neuf heures trente.
Il vise effectivement à supprimer l'article 5, qui affaiblit et détériore considérablement les garanties et droits fondamentaux des demandeurs d'asile. Je pense à la réduction de 120 à 90 jours du délai courant à compter de l'entrée sur le territoire francais et au-delà duquel le dépôt d'une demande d'asile peut entraîner l'examen de celle-ci selon la procédure accélérée. Comme je l'ai dit hier, toutes les associations disent à quel point c'est mal connaître les spécificités des parcours des demandeurs d'asile. L'association ELENA considère que les difficultés ne sont nullement imputables aux demandeurs d'asile et ne peuvent être considérées par l'administration comme l'indice d'un défaut sérieux des motifs de demande. Il existe de nombreux obstacles sur le chemin d'un demandeur d'asile.
Plutôt que de chercher à améliorer le dispositif et à assurer un meilleur respect des droits, cet article empêche encore plus les demandeurs d'asile d'accéder à leurs droits, afin de les expulser au plus vite. Par cette réduction des délais, vous souhaitez augmenter le nombre de procédures accélérées, dans une simple logique arithmétique. Cette procédure accélérée prive le justiciable de la collégialité de la Cour nationale du droit d'asile – CNDA – et raccourcit le délai de préparation du dossier, au détriment de la qualité de l'instruction. C'est pourquoi nous demandons la suppression de cet article.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement no 321 .
C'est un point que nous avons évoqué en première lecture, et sur lequel les sénateurs ont insisté lors de leurs débats. Nous aurions pu, a priori, partager l'objectif de l'article 5, visant à réduire les délais d'instruction et à dissuader les demandes ne relevant pas de la protection humanitaire, mais à la condition d'avoir les moyens pour y parvenir.
Actuellement, le délai moyen d'attente des demandes à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides – OFPRA – est de trois mois. Comme l'a relevé le Commissaire aux droits de l'homme au Conseil de l'Europe, les obstacles linguistiques et matériels auxquels se heurtent les demandeurs d'asile à leur arrivée sur le territoire, la nécessité de bénéficier d'un accompagnement juridique et social pour rédiger leur demande et les difficultés rencontrées par un certain nombre d'entre eux pour accéder aux plateformes d'accueil des demandeurs d'asile et aux centres d'accueil et d'examen des situations – CAES – rendent ce délai difficilement tenable. Un délai supérieur est souhaitable.
Cet article ne permet pas de garantir un traitement normal du dossier et une procédure équitable. Faute de moyens en personnel et de crédits suffisants, la situation ne s'améliorera pas. Plus largement, le projet de loi ne traite même pas des demandes d'asile en préfecture. C'est pourquoi nous souhaitons supprimer cet article, qui se traduira par une dégradation de la situation.
La parole est à Mme Élise Fajgeles, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, pour donner l'avis de la commission.
Comme je l'ai dit en première lecture, les difficultés et la longueur du délai pour accéder au guichet unique ne sont pas imputables au demandeur d'asile, qui peut repasser en procédure normale à tout moment, surtout lorsque la longueur du délai est due à des difficultés d'accès au GUDA – guichet unique pour demandeur d'asile. En tout état de cause, les moyens que vous demandez, Mme Karamanli, sont là. Dans la région parisienne par exemple, où des engorgements assez importants étaient constatés, une nouvelle méthode est appliquée depuis deux mois : une plateforme téléphonique permet de prendre rendez-vous auprès du guichet unique, et l'on est passé de trois semaines d'attente environ il y a deux mois à seulement quatre ou cinq jours aujourd'hui. Bref, les moyens arrivent et l'accès à la demande d'asile se fait beaucoup plus vite.
Quant aux associations, j'en ai encore rencontré une la semaine dernière à Marseille : ils m'ont dit qu'ils étaient critiques sur de nombreux aspects du texte, mais que plus vite les demandeurs d'asile entraient dans la demande, mieux c'était pour eux. Avis défavorable sur ces amendements.
La parole est à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, pour donner l'avis du Gouvernement.
Avis défavorable.
Nous avions déposé un amendement, en première lecture, car nous craignions que la procédure accélérée n'exclue, de fait, les personnes les plus fragiles, les moins informées, celles qui ont le plus besoin de protection. Si cette mesure est prise, et nous pensons qu'elle le sera, nous souhaiterions que l'administration s'adapte pour que ces personnes soient informées de leurs droits.
Je soutiens les amendements de M. Peu et de Mme Karamanli. Mon expérience m'amène à penser qu'un délai de 90 jours est trop court pour de très nombreux demandeurs d'asile. Une durée de 120 jours est plus raisonnable. Je crains que la réduction des délais n'augmente le nombre de procédures accélérées, souvent dangereuses, qui risquent de porter atteinte au bon examen des dossiers.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 430 .
À l'heure de la transparence – ne riez pas ! – il faut souhaiter que les chiffres sur l'immigration soient les plus complets possibles, pour éviter que l'on crie au scandale en parlant de manipulation des chiffres ou de ce concept à la mode de « fausses informations », car cette menace entraîne une restriction de la liberté d'expression et muselle les débats. Demander des chiffres et des informations factuelles sur les demandeurs d'asile ou les apatrides, et plus précisément sur leur pays d'origine ainsi que sur les langues qu'ils utilisent, est primordial pour la liberté de parole et la qualité de l'information.
Pour cela, il faut que les rapports annuels de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides renseignent plus précisément les Français : c'est permettre à ces derniers d'être informés sur les vrais chiffres de l'immigration ; c'est accorder des sources d'informations réelles aux médias ; c'est donner aux hommes politiques l'opportunité de voter des politiques migratoires en connaissance de cause ; enfin, et ce n'est pas la moindre des raisons, c'est enrichir le débat public.
Cette mesure, qui nous vient du Sénat, est de bon sens et n'a rien de politiquement incorrect : au contraire, elle prône la transparence, et je sais que cela vous est cher. C'est la raison pour laquelle il faut voter cet amendement.
L'amendement no 430 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-France Lorho, pour soutenir l'amendement no 57 .
L'amendement no 57 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement no 307 .
Nous avons abordé ce sujet hier. Cet amendement vise à améliorer la rédaction de cet article en la complétant. Nous proposons d'exclure, par principe, de la liste des pays sûrs au sens du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile – CESEDA – des pays qui pratiquent des discriminations fondées sur l'orientation sexuelle ou l'identité de genre. La rédaction actuelle de l'article est insuffisante, puisqu'elle ne mentionne que l'orientation sexuelle.
Je partage votre préoccupation, mais nous avons déjà adopté un amendement en première lecture, et conservé un amendement du Sénat qui vise à inclure l'identité de genre. Votre amendement est donc satisfait par les articles 4 A et 5.
Je partage l'avis de Mme la rapporteure qui partage l'avis de Mme Karamanli, mais j'émets un avis défavorable.
Sourires.
L'amendement no 307 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement no 308 .
Je suis très heureuse de cet esprit de partage, sauf qu'il ne se traduit pas dans les votes !
C'est le coeur qui parle !
Je vais essayer de vous convaincre avec le coeur, alors. Nous proposons que les pays qui pénalisent l'interruption volontaire de grossesse ne soient pas considérés comme des pays sûrs. Vous ne pouvez qu'être d'accord avec nous, et donc accepter notre amendement.
Défavorable. Nous n'allons pas faire une liste à la Prévert : les personnes persécutées sont protégées.
L'amendement no 308 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement no 309 .
L'amendement no 309 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement vise à obliger l'OFPRA à remettre à jour les fiches pays tous les six mois, afin de tenir compte de l'évolution de leur situation. L'actuelle rédaction, qui prévoit la mise à jour « régulière » n'étant pas assez contraignante, certaines fiches ne sont pas actualisées comme il le faudrait.
L'amendement no 221 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement no 311 rectifié .
Les modalités de la communication de l'OFPRA avec les demandeurs d'asile méritent d'être entourées de garanties légales, destinées à assurer la bonne information de ces derniers. Il importe à cet égard de préciser que les demandeurs disposent de la faculté de choisir le ou les moyens de communication les mieux adaptés à leur situation personnelle. La possibilité de choisir le mode de communication est la meilleure garantie d'une bonne information des demandeurs et donc de l'effectivité de leur droit. C'est en ce sens que cet amendement cherche à améliorer la rédaction de l'alinéa 4 de l'article 5.
Nous avions déjà bien travaillé en première lecture en commission pour améliorer la garantie du mode de communication. Avis défavorable.
Nous avions même excellemment travaillé. Même avis.
La notion de « pays sûr » nous laisse dubitatifs compte tenu de l'évolution souvent très rapide de la situation géopolitique. Nous souhaiterions un suivi et une révision régulière de la définition et de la liste de ces pays.
L'amendement no 311 rectifié n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l'amendement no 313 .
Cet amendement concerne les alinéas 5 à 7. L'application des procédures accélérées apparaît manifestement incompatible avec la possibilité pour les demandeurs d'asile de préparer leur demande dans des conditions raisonnables. Pour rappel, les procédures accélérées conduisent à un traitement superficiel par l'OFPRA, et en cas de recours devant la CNDA l'audience doit se tenir dans les cinq semaines, contre cinq mois dans le cadre d'une procédure normale. De plus, le recours est examiné par un juge unique.
L'amendement no 313 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne, pour soutenir l'amendement no 243 .
L'article L. 723-2 du CESEDA prévoit les hypothèses dans lesquelles l'OFPRA ou le préfet peuvent décider de classer les demandes d'asile en procédure accélérée. Dix cas sont prévus, qui sont définis largement et d'appréciation subjective, ce qui en pratique permet le recours à la procédure accélérée dans de très nombreuses situations. Or la procédure accélérée offre de moindres garanties aux demandeurs d'asile. En procédure accélérée, l'OFPRA a quinze jours pour statuer après enregistrement du dossier, et la CNDA, cinq semaines après enregistrement du recours. Et dans ce cas, l'affaire est jugée par un juge unique et non par une formation collégiale, ce qui conduit à écarter l'assesseur nommé par le Haut-Commissaire des Nations unies pour les réfugiés, alors même que sa présence constitue un élément fondateur du dispositif français d'asile.
La multiplication des dossiers soumis à la procédure accélérée témoigne d'une logique comptable de l'asile, qui fait primer le raccourcissement des délais de jugement sur la qualité de l'instruction des demandes et des décisions rendues. Cette logique engendre des dérives dans le fonctionnement de la CNDA et pour le droit des demandeurs d'asile. Aussi, au regard des garanties réduites qu'offre la procédure accélérée, nous considérons qu'elle devrait rester exceptionnelle. C'est pourquoi nous proposons de limiter les recours à la procédure accélérée aux seuls cas de fraude sur l'identité, de demande manifestement infondée, telle que définie par le Comité exécutif du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, et de demande d'asile en rétention.
En plus des cas que vous avez cités, il y a aussi les demandes de réexamen ou liées à la liste des pays sûrs ! Il est important que ces dossiers puissent également faire l'objet d'une procédure accélérée. Avis défavorable.
L'amendement no 243 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement no 310 .
L'amendement no 310 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l'amendement no 317 .
L'amendement propose de transposer une disposition de l'article 14 de la directive « procédures », qui garantit qu'une absence d'entretien pour raison médicale n'influe pas dans un sens défavorable sur la décision de l' Office. Il nous semble important que les raisons médicales soient prises en compte.
C'est déjà le cas : lorsque la non-présentation à l'entretien est due à des raisons médicales, l'OFPRA en tient compte. Avis défavorable.
L'amendement no 317 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Par cet amendement, nous proposons de maintenir à 120 jours le délai de dépôt de demande d'asile permettant d'accéder à la procédure normale. Avec ce délai, le primo-arrivant en France rencontre déjà de nombreuses difficultés dans l'élaboration de sa demande d'asile. Il n'est pas toujours suffisamment informé des différentes démarches qu'il doit entreprendre pour bénéficier d'une protection internationale. L'obtention de ces informations peut prendre du temps, notamment lorsqu'il n'est pas francophone et qu'il est confronté à la barrière de la langue.
Il faut rappeler que les primo-arrivants font souvent état de nombreux traumatismes liés tant à leur histoire qu'aux moyens déployés pour arriver en France. Ainsi, ils peuvent mettre plusieurs semaines avant de se présenter dans une plateforme d'accueil. Réduire ce délai à 90 jours ne ferait qu'accentuer les difficultés rencontrées par les primo-arrivants, et ne permettrait pas aux demandeurs d'asile d'exercer correctement leurs droits. C'est pourquoi cet amendement propose la suppression de l'alinéa 6 de l'article 5.
Je vous rappelle qu'à partir du moment où on est demandeur d'asile, on bénéficie des conditions matérielles d'accueil et d'un suivi par des associations. Avis défavorable.
L'amendement no 402 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement no 315 .
L'amendement no 315 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il apparaît aujourd'hui très clairement, y compris au Gouvernement, que le droit d'asile est dévoyé et utilisé comme une filière d'immigration clandestine. Ainsi, tout doit être fait pour lui redonner sa place, je dirais même sa noblesse. Évidemment, nous préférons, comme des millions de Français, qu'un étranger entré illégalement en France soit immédiatement expulsé. En attendant, notre amendement propose de baisser davantage le délai à partir duquel l'administration peut recourir à la procédure accélérée d'examen de la demande d'asile.
Demander l'asile dans un pays n'est pas une démarche anodine et ne se fait pas sur un coup de tête. Si, 20 jours après son arrivée clandestine, un étranger n'a pas demandé l'asile, surtout avec les dispositifs incitatifs mis en place par les associations pro-immigration, c'est clairement un détournement de la procédure. La France s'est toujours fait un devoir d'accueillir ceux qui sont réellement persécutés dans leur pays d'origine, mais comme le disait Michel Rocard, elle ne peut accueillir toute la misère du monde.
La France est en voie de paupérisation. Charité bien ordonnée commence par soi-même : tâchons déjà d'apporter aux Français en difficulté, de plus en plus nombreux, l'aide dont ils ont besoin avant de vouloir jouer les bons samaritains dans le monde entier.
Cet amendement vise à réduire de 90 à 30 jours le délai au cours duquel une demande d'asile doit être déposée. On assiste aujourd'hui à des détournements de procédure de plus en plus fréquents, où des personnes en situation irrégulière sont autorisées à se prévaloir du fait qu'elles pourraient demander l'asile dans notre pays alors qu'elles s'y trouvent parfois depuis presque 90 jours – ce qui est la durée maximale prévue dans le texte. Nous proposons de limiter cette durée à 30 jours pour éviter le détournement des procédures.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 447 .
Comme en première lecture, nous revenons sur l'une des mesures phares de la réforme. On nous affirme, la main sur le coeur, qu'on veut maîtriser les délais d'instruction et dissuader les demandes pouvant apparaître comme étrangères à un besoin de protection. Pour cela, le Gouvernement veut réduire les délais d'instruction des dossiers des demandeurs d'asile, pour les faire passer de 120 à 90 jours.
Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire en première lecture, cette mesure est positive et va dans le bon sens, mais elle manque d'audace. Une personne qui ne demande pas rapidement à bénéficier du droit d'asile n'envoie pas un signal positif pour entrer dans une procédure légale. Certains, au Sénat comme à l'Assemblée, estiment que la réduction des délais d'instruction constitue une atteinte directe aux droits de l'homme et qu'elle ferait tomber l'examen de la demande d'asile sous le régime de la procédure accélérée. Je crois au contraire que la réduction du délai de traitement des dossiers protège les droits fondamentaux des demandeurs d'asile.
Cette mesure est non seulement respectueuse des personnes qui demandent l'asile, qui méritent d'avoir une réponse rapide, mais aussi de nature à envoyer un signal fort aux Français, dont 57 % ne veulent plus financer l'immigration massive. Il faut donc réduire ce délai encore davantage et passer à 60 jours.
Le signal fort aux Français, c'est d'avoir une position équilibrée, tenant compte de la difficulté de la situation des demandeurs d'asile comme de la nécessité d'accélérer les procédures. Pour cela, 90 jours représentent un bon compromis. Avis défavorable à l'ensemble des amendements.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement no 314 .
L'amendement no 314 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Hier soir, Mme la rapporteure et M. le ministre d'État nous ont expliqué qu'on avait affaire à un texte majeur qu'il fallait examiner au plus vite, si bien que la commission d'enquête pouvait attendre, voire prendre fin conformément à la volonté de l'Élysée et de la majorité. Je constate pourtant ce matin que l'examen de ce texte est très pauvre, tant en matière de mobilisation des députés que de débat puisque le ministre d'État et la rapporteure estiment visiblement qu'il suffit d'exprimer un avis défavorable sans avoir à le justifier.
L'amendement no 245 reprend une préconisation de l'association des avocats du droit d'asile et vise à interdire le recours à la procédure accélérée pour les mineurs non accompagnés. Alors qu'ils sont extrêmement vulnérables, qu'ils doivent être protégés au nom de l'intérêt supérieur de l'enfant, aucune garantie procédurale particulière n'est prévue dans le traitement de leurs demandes d'asile par l'OFPRA et la CNDA.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement no 316 .
Cet amendement pose l'interdiction des procédures accélérées pour le traitement des demandes de mineurs comme un principe auquel on ne peut déroger. En prévoyant que la procédure ne peut être mise en oeuvre à leur égard, la loi aurait le mérite d'être claire. C'est pourquoi nous souhaitons insérer un alinéa après l'alinéa 6.
Madame Faucillon, je ne sais pas si vous venez d'arriver, mais je me lève régulièrement depuis ce matin pour donner mon avis sur tous les amendements.
Néanmoins ce sera un avis défavorable puisque la vulnérabilité du demandeur d'asile est déjà prise en compte par l'OFPRA et la CNDA, qui peuvent décider de replacer le dossier en procédure normale. Or la minorité fait évidemment partie des critères de vulnérabilité.
Je suis toujours Mme la rapporteure, donc je vais moi aussi me lever pour donner un avis défavorable. J'ai fait hier un long exposé liminaire. Peut-être Mme Faucillon n'a-t-elle pas pu l'entendre dans son intégralité…
… mais j'y avais traité l'ensemble des arguments. Avis défavorable.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement no 318 .
Je rappelle que les règles de notre assemblée et la simple politesse exigent que les orateurs se lèvent. Mme la rapporteure le fait depuis hier, et c'est bien normal.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Eh oui, chers collègues : lisez donc le règlement !
Mais la remarque de nos collègues du groupe GDR allait bien au-delà : ce qu'ils demandent, c'est qu'on leur réponde sur le fond, de façon plus précise.
Cet amendement vise à modifier l'alinéa 7 de l'article 5, afin de prévoir la consultation, par l'OFPRA, des associations luttant contre les persécutions et les discriminations fondées sur l'orientation sexuelle ou les pratiques sexuelles. Ces associations disposent en effet d'informations pertinentes et régulièrement actualisées sur l'état des droits des personnes LGBT. Elles sont donc en mesure d'éclairer l'OFPRA et la CNDA le cas échéant.
Les discriminations fondées sur l'orientation sexuelle ou l'identité de genre font déjà partie des formations dispensées aux agents de l'OFPRA. Votre demande est donc déjà satisfaite. Avis défavorable.
Nous avons déjà longuement discuté de cette question lors de la première lecture. Avis défavorable.
L'amendement no 318 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l'amendement no 312 .
Cet amendement vise à modifier la rédaction de l'alinéa 9, afin que les demandeurs puissent choisir le ou les moyens de communication les mieux adaptés à leur situation personnelle. La possibilité de choisir le mode de communication est en effet la meilleure garantie d'une bonne information des demandeurs, et donc de l'effectivité de leurs droits.
Nous avons déjà travaillé en première lecture à garantir la qualité de la transmission de toutes les communications de l'OFPRA au demandeur d'asile. L'avis de la commission est donc défavorable.
L'amendement no 312 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement no 319 .
Nous insistons, par cet amendement, sur le libre choix de la langue dans laquelle le demandeur pourra être entendu : l'effectivité du droit d'asile en dépend. Dans bien des cas, lors de leur enregistrement en préfecture, les demandeurs d'asile déclarent comprendre une langue dans laquelle ils ne sont pourtant pas très à l'aise, simplement pour manifester leurs bonnes dispositions et leur volonté de s'intégrer. Ainsi ont-ils ensuite des difficultés de compréhension.
Les dispositions du projet loi permettront de former les agents de préfecture à mieux présenter le choix des langues. J'ai beaucoup discuté à ce sujet, et encore dans un CAES à Marseille récemment : il apparaît qu'il n'est pas toujours nécessaire que la procédure ait lieu dans le dialecte particulier du demandeur pour que celui-ci se fasse comprendre. Avis défavorable.
L'amendement no 319 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement porte lui aussi sur la question du choix de la langue. L'article 7 du projet de loi prévoit que le demandeur d'asile est entendu tout au long de la procédure dans la langue pour laquelle il a manifesté une préférence lors de l'enregistrement de sa demande ou, à défaut, dans une autre langue dont il a une connaissance suffisante, celle-ci pouvant être identifiée par l'OFPRA ou la CNDA.
Le choix de la langue employée pour toute la procédure est donc fixé lors de l'enregistrement de la demande d'asile, au guichet de la préfecture, lors d'un bref entretien au cours duquel est remis à l'étranger le dossier à envoyer à l'OFPRA. Ce choix ne peut être contesté que lors du recours devant la CNDA. Or, lors de cet entretien en préfecture, le demandeur d'asile n'est pas assisté : à défaut d'interprète, il peut ne pas saisir tous les termes de la question ni sa portée réelle.
Le projet de loi ne garantit ainsi pas l'accès effectif du demandeur à la procédure en cas de choix de la langue par l'administration, car le critère de « connaissance suffisante » de la langue, tel qu'il est défini par le projet de loi, ne permet pas de s'assurer que le demandeur comprend et s'exprime clairement dans cette langue.
L'amendement no 222 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-France Lorho, pour soutenir l'amendement no 14 .
Alors que selon l'OFPRA plus de 80 % des entretiens avec les demandeurs d'asile se déroulent en présence d'un interprète, il convient de s'assurer que leur présence est indispensable et que leur neutralité est acquise. C'est pourquoi je demande, par cet amendement, à l'administration de s'assurer des intentions de ces traducteurs. Pour cela, il convient de lui conférer un droit de regard sur leurs prestations dans les officines qui les emploient.
Cette mesure de contrôle est primordiale, à l'heure où nos voisins italiens ont eu à souffrir de traducteurs au service du gouvernement érythréen d'Asmara. Il est nécessaire que ces entretiens, qui déboucheront éventuellement sur la délivrance d'un titre de séjour, se déroulent de façon neutre et objective. Elle est importante également pour la sécurité des Français : il ne faut pas laisser séjourner sur notre territoire des individus sur la base de propos fallacieux. C'est enfin une mesure primordiale pour la souveraineté de nos institutions.
Je ne partage pas votre suspicion à l'égard des traducteurs et des agents de l'OFPRA. Avis défavorable.
L'amendement no 14 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 427 .
La parole est à Mme Marie-France Lorho, pour soutenir l'amendement no 56 .
Cet amendement s'inscrit dans la lignée de ceux que j'ai déposés pour lutter contre les associations dont les membres agissent impunément au mépris de la loi. Il est certes nécessaire que les personnes handicapées soient accompagnées, mais il est indispensable que l'OFPRA s'assure du sérieux des associations concernées. Compte tenu des exactions commises par certaines associations militantes, nous demandons que l'OFPRA s'assure de la neutralité politique des structures auxquelles elle fait appel.
Je vous encourage à aller à l'OFPRA, à rencontrer son directeur général, Pascal Brice, et à assister aux entretiens réalisés. Il faut leur faire une parfaite confiance. Avis défavorable.
L'amendement no 56 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement no 320 .
L'amendement no 320 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Raphaël Schellenberger, pour soutenir l'amendement no 262 .
L'amendement no 262 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-France Lorho, pour soutenir l'amendement no 58 .
Aux termes de cet amendement, si le demandeur ne souhaite pas être accueilli sur le territoire français, l'OFPRA est tenu, de manière impérative, de statuer sur son cas. Compte tenu des flux migratoires massifs qui assaillent la France, il faut prendre toutes les mesures nécessaires, lorsqu'un demandeur ne souhaite pas demeurer sur le territoire national, pour qu'en effet il n'y demeure pas. En laissant ouverte cette possibilité, vous encouragez l'administration à ne pas statuer sur ces cas. Rendre cette décision impérative permettrait de clarifier la mission de l'OFPRA comme la situation des personnes en situation irrégulière.
L'amendement no 58 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement no 322 .
L'amendement no 322 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 5 est adopté.
La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon, pour soutenir l'amendement no 133 .
Dans le climat européen actuel, nous craignons que cet article n'ouvre une brèche dans le droit français, qui permettrait, à terme, l'externalisation totale de l'asile. Nous demandons donc sa suppression.
Cet article a été ajouté au Sénat pour consacrer la procédure de réinstallation, qui permet au contraire à l'OFPRA de traiter les demandes d'asile directement dans les camps gérés par le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés – HCR – de manière à éviter que les demandeurs d'asile ne se lancent dans des traversées au péril de leur vie, en se livrant aux mains des passeurs. Cette disposition est vraiment très importante. La commission est donc défavorable à ces deux amendements.
Je précise que dans le cadre de la politique équilibrée que nous voulons mener, nous avons procédé, au cours des derniers mois, à un certain nombre de réinstallations, afin que ces personnes n'aient pas à affronter la dangereuse traversée de la mer Méditerranée ou d'autres parcours éprouvants. Avis défavorable.
L'article 5 bis est adopté.
Cet amendement vise à rétablir un article ajouté par le Sénat, qui tendait à préciser que les demandeurs d'asile à qui une protection est accordée doivent reconnaître la primauté des lois de la République.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 448 .
Effectivement, l'octroi du statut de réfugié ou de la protection subsidiaire doit être regardé comme faisant partie d'un contrat moral et philosophique avec la France. La Franc permet à des étrangers de régulariser leur venue. Ce faisant, l'État leur témoigne sa confiance. Cette confiance ne doit pas être à sens unique, elle doit aussi être honorée par la personne ayant demandé l'asile.
Les personnes qui reçoivent des papiers doivent manifester leur envie de s'intégrer et leur reconnaissance à la France qui les accueille, et donner l'assurance qu'ils respecteront nos us et coutumes. Cette forme de contrat entre la France et les réfugiés qu'elle accueille, qui paraît évidente, ne peut plus être tacite. Cela va sans dire, mais cela ira encore mieux en le disant. C'est pourquoi nous proposons d'inscrire dans notre droit que « Après l'octroi du statut de réfugié ou du bénéfice de la protection subsidiaire, l'intéressé doit signer une charte par laquelle il s'engage à reconnaître et à respecter la primauté des lois et des valeurs de la République parmi lesquelles la liberté, l'égalité, dont celle des hommes et des femmes, la fraternité et la laïcité. »
Cette disposition, adoptée par le Sénat, engage chaque réfugié à s'investir sincèrement, et ce dès sa régularisation. Il s'agit tout simplement de poser des règles, de définir un cadre, de demander aux réfugiés de s'impliquer dans leur intégration. Si 60 % des Français estiment que la France accueille trop de migrants, c'est bien parce qu'une grande partie des personnes que nous accueillons n'arrivent pas à s'intégrer, ou parfois ne le veulent pas.
Les étrangers qui arrivent sur notre territoire doivent déjà signer le contrat d'intégration républicaine, qui est bien plus complet et bien plus contraignant que votre charte, d'autant qu'il a été complété par un amendement du Gouvernement en première lecture. Par ailleurs, les mesures reprises du rapport d'Aurélien Taché permettront de parfaire l'intégration des réfugiés.
Pour finir, nous n'avons pas à demander aux réfugiés de s'intégrer, mais à les aider à le faire. L'avis de la commission est donc défavorable.
J'ajoute que la notion de « réfugiés » concerne 30 000 personnes par an, et le contrat d'intégration républicaine 120 000. Avis défavorable.
La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne, pour soutenir l'amendement no 247 , tendant à supprimer l'article.
Au préalable, je voudrais vous dire, madame la rapporteure, que vous n'aviez pas à apostropher Mme Faucillon comme vous l'avez fait tout à l'heure…
… simplement parce qu'elle demandait des arguments à l'appui des avis que vous donnez à nos amendements. Si certains sont fébriles, ce n'est pas de notre faute.
Nous proposons, par cet amendement, de supprimer l'article 6, pour trois raisons.
Premièrement, nous nous opposons à l'élargissement de la procédure accélérée. Ce projet de loi prévoit que les dossiers de cessation de protection pour un motif de menace grave pour l'ordre public, la securite publique, la surete de l'Etat ou pour un motif d'exclusion seront desormais places en procedure acceleree, avec un objectif de traitement en cinq semaines, et qu'ils seront examines par un juge unique a la CNDA. Or, comme le souligne l'intersyndicale de la CNDA, ces dossiers sont parmi les plus complexes que la cour ait a traiter, du fait de leur caractère sensible et technique. Ils necessitent une instruction particulierement rigoureuse et approfondie eu egard aux consequences qu'une decision de rejet ou d'annulation pourrait entrainer.
Dans la pratique, ces dossiers presentant une difficulte serieuse seront reorientes systematiquement en procedure normale par le juge unique, afin qu'ils soient juges par une formation collegiale, comme le permet le code de l'entree et du sejour des etrangers et du droit d'asile. Ainsi, au lieu de raccourcir les délais de jugement, cet élargissement inadapté de la procédure accélérée ne ferait que les rallonger en imposant à ces dossiers complexes un détour inutile devant un juge statuant seul.
Deuxièmement, nous nous opposons à la généralisation du recours à la vidéo-audience. L'article 6 supprime le caractère facultatif de la visioconférence et l'impose au justiciable. Comme le souligne l'intersyndicale de la CNDA, le recours a la vidéo-audience déshumanise le rapport entre le juge et les parties. Il est d'autant plus inadapté au contentieux de l'asile que l'oralité en est une composante essentielle. Or les difficultés du demandeur d'asile pour raconter son parcours, souvent dramatique, dans les moindres détails seront encore accrues devant une caméra.
Je termine, monsieur le président. Troisièmement, nous nous opposons à l'instauration d'un délai de quinze jours pour solliciter l'aide juridictionnelle. En nouvelle lecture, la commission des lois à certes conservé le délai de trente jours pour le recours contentieux devant la CNDA, mais a fixé le délai de demande d'aide juridictionnelle à quinze jours suivant la notification de la décision de l'OFPRA. Or l'article 6 modifié par la rapporteure supprime la possibilité, qui existait, de solliciter l'aide juridictionnelle au-delà d'un délai de quinze jours. Sous couvert de maintenir un délai de recours d'un mois, il s'agit en fait de limiter les délais de demande d'aide juridictionnelle.
Merci, monsieur Dufrègne, j'ai accepté à titre exceptionnel ce dépassement de votre temps de parole.
Quel est l'avis de la commission ?
S'agissant de la procédure accélérée pour les personnes présentant une menace grave pour l'ordre public, il me semble que la demande d'asile doit être instruite, évidemment, mais le plus rapidement possible eu égard à la gravité de cette menace pour la sécurité de nos concitoyens. Quant au délai de quinze jours pour demander l'aide juridictionnelle, il a semblé à la commission que c'était un bon compromis pour maintenir le droit au recours tout en gagnant du temps. Je rappelle en effet que c'est un des objectifs du projet de loi que de réduire les délais de traitement de la demande d'asile : c'est une question de dignité. Le recours à la vidéo-audience constitue lui aussi une manière plus rapide et plus efficace d'administrer la justice. Lors de nos auditions, des avocats nous ont dit qu'il était tout à fait possible de procéder par vidéo-audience tout en respectant la dignité des demandeurs et les droits de la défense. L'avis est donc défavorable.
L'article 6 est peut-être l'un de ceux où le travail entre le Gouvernement et la commission a été le plus intense. J'ai entendu ses arguments et, tout en réduisant le délai de demande de l'aide juridictionnelle, nous sommes restés dans les délais que nous nous sommes impartis. Je crois donc que cette rédaction est satisfaisante pour le Gouvernement comme pour la commission. C'est un exemple de coopération entre le Gouvernement et le Parlement.
L'amendement no 247 n'est pas adopté.
La parole est à M. Raphaël Schellenberger, pour soutenir l'amendement no 105 .
Cet amendement vise à revenir à la rédaction initiale en rétablissant le délai de quinze jours au lieu d'un mois pour le recours contre la décision de rejet de l'OFPRA.
Je vous propose, mon cher collègue, de conserver cet ajout du groupe Les Républicains au Sénat, qui me semble très bon. Avis défavorable.
L'amendement no 105 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement no 323 .
Cet amendement, comme le prochain défendu par notre groupe, vise à supprimer les dispositions imposant la visioconférence pour les audiences car elle est préjudiciable aux droits de la défense. En effet, dans tous les cas, l'avocat perdra soit le bénéfice d'une présence à l'audience, soit celui d'être aux côtés du requérant. Dans tous les cas également, ces moyens de communication audiovisuelle présentent des défauts techniques peu compatibles avec l'exigence d'un procès équitable.
Madame la rapporteure, vous avez dit en commission qu'il s'agissait simplement de s'adapter à la justice du XXIe siècle et d'accélérer les procédures, à condition évidemment que toutes les conditions techniques soient réunies. Mais que pèsent l'accélération des procédures et la réduction des coûts face à la nécessité de préserver les droits de l'homme ? Un de nos collègues de la commission des lois a insisté sur le fait qu'on ne voit pas de la même manière les gens quand on les regarde directement ou à travers un écran. Il s'agit tout de même de statuer sur le destin d'hommes et de femmes qui de surcroît, le plus souvent, ont eu un parcours très difficile et ont vécu une histoire tragique.
La vidéo-audience n'est pas motivée seulement par des économies d'argent et de temps, mais aussi par le respect de la dignité des demandeurs, notamment lorsqu'ils sont placés en rétention, parce que cela leur évite de longs déplacements sous escorte. Je vous rappelle, ma chère collègue, que le magistrat pourra à tout moment décider de ne pas faire appel à la vidéo-audience s'il considère que les conditions techniques ne sont pas réunies. J'ai moi-même assisté à une vidéo-audience à la CNDA et j'ai vu que lorsqu'elles le sont, il y a un vrai échange entre la cour et la personne entendue. Avis défavorable.
L'amendement no 323 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je sais que cela peut paraître répétitif, mais nous sommes tout de même en train de déterminer les conditions dans lesquelles les personnes vont pouvoir formuler leur demande d'asile pour les années à venir.
Je sais que la visioconférence existe déjà en procédure pénale pour éviter le transfert de personnes incarcérées, mais elle n'est appliquée qu'avec le consentement du justiciable, ce que le projet de loi supprime en l'espèce.
Par ailleurs, la visioconférence rompt l'unité de temps et de lieu qui caractérise tout procès, faisant écran entre le magistrat et le justiciable et limitant l'interaction entre eux. Elle déshumanise donc la relation judiciaire, réduisant l'épaisseur humaine du témoignage.
Je ne dis pas qu'il faut renoncer à la visioconférence, mais qu'elle doit être laissée au libre choix du justiciable. Et puis il y a aussi des problèmes pratiques qui, loin de réduire les coûts, contribuent à les augmenter.
C'est pourquoi, en l'absence d'abrogation de l'article, cet amendement propose de préciser la procédure : d'une part, il subordonne la visioconférence au consentement du justiciable, conformément à la jurisprudence du Conseil constitutionnel ; d'autre part, il vise à garantir les bonnes conditions matérielles de la procédure et à assurer le libre choix de la place de l'avocat et de l'interprète.
Avis défavorable, pour les mêmes raisons. Je rappelle que le Conseil constitutionnel a validé en 2011 le recours à la vidéo-audience.
L'amendement no 223 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-France Lorho, pour soutenir l'amendement no 60 .
L'alinéa 8 entend subordonner le droit ouvert aux intéressés de présenter leurs explications à la cour via un moyen de communication audiovisuelle au respect des conditions prévues par le même alinéa. Pourtant, il est également mentionné que c'est au président de la juridiction concernée qu'il incombe de décider s'ils le peuvent.
Intégrer cet alinéa dans le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile reviendrait à instaurer une double conditionnalité contradictoire. En effet, il suffirait que le président prenne une décision, positive ou négative, pour que les conditions prévues à l'alinéa soient respectées. En d'autres termes, les intéressés pourraient présenter leurs explications si les conditions sont réunies et alors même que le président s'y serait opposé. Au vu de cette contradiction, je demande que l'alinéa 8 soit supprimé.
L'amendement no 60 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Laurence Vichnievsky, pour soutenir l'amendement no 288 .
Dans sa rédaction issue du projet de loi, les dispositions du CESEDA privilégient théoriquement la présence de l'interprète aux côtés de l'étranger, mais ne la rendent pas obligatoire dans le cas d'une audition par visioconférence. Je rappelle que l'interprète traduit les éléments du dossier, les questions de la cour et les réponses que le requérant apporte ; enfin et surtout, l'interprète permet aussi au requérant de s'entretenir avec son avocat qui, le plus souvent, ne connaît pas la langue de son client. Or les échanges entre l'étranger et son conseil ne peuvent être confidentiels s'ils doivent s'exercer par l'intermédiaire d'un interprète qui se trouve loin d'eux, aux côtés du juge. C'est donc la confidentialité des rapports entre l'avocat et son client, l'une des bases du procès équitable, qui se trouve remise en cause. Le présent amendement a pour objet de garantir ce principe.
Madame Vichnievsky, nous en avons déjà parlé : il est impossible d'avoir recours à un interprète dans toutes les langues, y compris les plus rares. Le recours à l'interprète par téléphone existe déjà. L'avis est donc défavorable.
Madame Vichnievsky, l'administration a eu affaire dans plusieurs régions à des demandeurs d'asile parlant le konso – qui compte 195 000 locuteurs dans le monde ! Vous comprenez qu'il ne pourra s'en trouver forcément un auprès du requérant. En revanche, on peut peut-être trouver un interprète à la CNDA.
Monsieur le ministre, j'entends votre réponse, mais cela signifie qu'en pratique, on ne trouvera les interprètes qu'en Île-de-France, auprès de la CNDA. Le risque est que peu à peu, il n'y ait plus d'interprète aux côtés du requérant.
L'amendement no 288 n'est pas adopté.
L'alinéa 12 de l'article 6 constitue un recul intolérable des droits fondamentaux des requérants devant la Cour nationale du droit d'asile. En effet, vous souhaitez systématiser le recours à la télé-audience. Imaginez la scène : le demandeur d'asile , qui, au nom du droit international, requiert une protection contre des persécutions , va se retrouver seul, ou accompagné de son interprète et de son avocat, face à son écran, tandis que la cour en formation de jugement siégera dans la salle d'audience, très loin. Si l'avocat se trouve aux côtés de son client et qu'il souhaite transmettre un document à la cour, comment fera-t-il ? Dans une audience habituelle, où tous les intéressés sont présents physiquement, le document est transmis au greffe et examiné directement.
Par ailleurs, une audience n'est pas un entretien d'embauche : c'est une vie tout entière qui se joue. On ne peut pas juger quand une machine s'interpose entre le juge et le requérant. C'est une atteinte grave au droit constitutionnel à un procès juste et équitable. Mes chers collègues, je vous demande de faire preuve d'un peu d'humanité en votant cet amendement, à savoir la suppression de l'alinéa 12.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l'amendement no 324 .
Il s'agit d'offrir la possibilité au requérant de refuser la visioconférence, notamment lorsque les raisons qui motivent la demande d'asile sont délicates à exprimer – on peut penser aux violences ou aux sévices sexuels. En effet, la communication audiovisuelle peut évidemment avoir pour effet d'inhiber l'intéressé.
L'idée n'est pas d'interdire purement et simplement la vidéo-audience : si la personne le souhaite ou l'accepte, pourquoi ne pas y recourir ? Mais je pense qu'il faut lui donner la possibilité de la refuser, compte tenu de la différence entre une image vidéo et la présence humaine réelle.
Vous savez, lorsqu'on fait un film, on n'utilise pas qu'une seule caméra posée devant quelqu'un : il y a plusieurs prises de vues, et un montage. Cela permet de saisir des détails qui donnent l'impression de sentiments, même si cela reste des impressions. Alors imaginez une personne immobile devant son écran, une caméra fixe, et un juge qui ne dispose que de cette image, qui ne voit rien de la gestuelle par exemple : cela peut rendre la perception plus difficile.
Je ne suis pas favorable à l'interdiction de la vidéo-audience, mais à ce que le requérant puisse, à chaque fois, décider ou non de son utilisation. Je souhaite par conséquent la suppression de l'alinéa 12.
Cet amendement vise à maintenir la possibilité pour le demandeur du droit d'asile de refuser d'être entendu par la CNDA via un moyen de communication audiovisuelle.
Je ne sais pas, chers collègues, si vous avez déjà assisté à une audience devant la CNDA : le demandeur d'asile sait, surtout en deuxième appel, qu'il s'agit de son dernier recours. J'ai assisté pour ma part à plusieurs de ces audiences. Elles peuvent être extrêmement rapides, ou alors longues, ce qui ne signifie pas pour autant que l'issue en soit favorable. La tension y est généralement très forte. Les visages sont fermés, et il n'y a pas d'empathie.
Pour y avoir assisté plusieurs fois, je peux vous assurer que ces séances sont extrêmement dures.
Alors que je n'étais moi-même pas concernée, puisque j'accompagnais des personnes, je me suis sentie extrêmement fatiguée à la fin de la session. Dans ces conditions, dites-moi comment il serait possible d'entendre les requérants par vidéo-conférence !
Si la personne est d'accord, je veux bien. Mais donnez-lui la possibilité de ne pas l'être ! Ce n'est pas possible autrement !
Pour ma part, je ne pense pas que de telles audiences puissent se faire avec la vidéo-conférence : il faut absolument que la personne concernée soit physiquement présente. C'est déjà suffisamment dur comme ça. Et vous connaissez en outre le taux d'acceptation, au terme de ces séances ! Donnez au moins aux personnes la possibilité d'être présentes et de se défendre personnellement !
Applaudissements sur les bancs des groupes MODEM, UDI-Agir, NG et GDR.
Quel est l'avis de la commission sur cette série d'amendements identiques ?
Comme je l'ai déjà dit, j'ai moi-même assisté à des vidéo-audiences : il me semble que le contact peut également passer dans ce cas. Certains de nos collègues qui sont avocats disent même que parfois, la dignité est mieux respectée avec la vidéo qu'en direct, parce que c'est moins impressionnant.
Par conséquent, ce principe doit être appliqué à tout le monde. Avis défavorable.
Le dispositif que vous évoquez ne méconnaît tout d'abord aucune exigence constitutionnelle. Il est entouré de toutes les garanties légales et matérielles, que nous avons tenu à préciser. Il permettra un traitement délocalisé et plus rapide des recours, tout en pouvant constituer une facilité pour le requérant qui n'aura pas à se déplacer à la Cour. Avis défavorable.
Je comprends bien les arguments de la rapporteure et du ministre d'État. Il est certain que les nouvelles technologies peuvent favoriser l'efficacité, et même la rentabilité, d'un certain nombre de procédures. Néanmoins il me semble que nous avons fait le choix, dans cette République, d'une justice humaine. Cela implique que les procédures ne soient pas entièrement écrites, et appelle l'oralité des débats.
C'est la raison pour laquelle nous avons des audiences de justice, dans ce pays, même si elles sont formelles dans le cadre de la justice administrative : cela permet d'amener les arguments grâce à l'oralité, à travers le contact humain.
Il me semble, pour avoir siégé sur les bancs de la magistrature administrative, que la visioconférence n'apporte pas ce contact humain, c'est-à-dire la capacité à lire aussi sur le visage des autres une certaine expression qui peut parfois être l'expression de la vérité.
Or ce que nous recherchons, mes chers collègues, dans ce type d'audiences, c'est bien la manifestation de la vérité. À mon sens, celle-ci doit se faire, et continuer de se faire, à travers le contact humain.
Applaudissements sur les bancs des groupes MODEM et GDR.
La parole est à M. Fabien Di Filippo pour répondre à la commission et au Gouvernement.
À titre personnel, je ne suis pas du tout favorable à ces amendements. J'ose espérer que, pour nos magistrats, la manifestation de la vérité ne repose pas uniquement sur de la communication non verbale. Les technologies qui sont aujourd'hui à notre disposition, que j'ai pu voir à l'oeuvre, nous permettent d'échanger de fort belle manière.
Par ailleurs, dans un certain nombre de cas, l'on ne demande pas leur avis aux justiciables de notre pays : ils sont entendus, depuis les locaux de la gendarmerie par exemple, par téléconférence.
Aujourd'hui, la problématique est également celle du coût : il faut mobiliser des policiers pour le transport et le procès, ce qui a un coût considérable. Or, vu les flux migratoires, il y aura sans doute davantage de procédures de ce type dans les années à venir.
Il n'y a pas de raison que notre pays consacre davantage de moyens à la justice des étrangers en France qu'à la justice des Français. Ce doit être la même justice pour tout le monde et à ce titre, les vidéo-audiences me semblent parfaitement acceptables. N'oubliez pas, chers collègues, que dans certains cas, comme dans ma circonscription par exemple, l'on mobilise des policiers pendant plusieurs heures pour de très longs trajets, aller et retour. Cela fait perdre énormément de temps.
Monsieur le président, il n'a pas été inutile que M. Di Filippo rappelle que le respect des droits demande parfois, effectivement, des moyens.
MM. Jean-Paul Dufrègne, Erwan Balanant et Olivier Becht applaudissent.
C'est bien de cela qu'il est question ici : dans le but de réduire les coûts, on poursuit une logique qui ne respecte pas les droits et qui rabote le droit d'asile.
Tout ce qu'on nous oppose, comme arguments, vise à expliquer que le recours à la vidéo-audience peut constituer une facilité et que les choses peuvent bien se passer. Mais à aucun moment les auteurs des amendements n'ont dit le contraire !
Bien sûr qu'à certains moments, et à la demande d'ailleurs du requérant, il est possible que la vidéo-audience soit utile. Il y a parfois des situations qui l'exigent, par exemple lorsque la personne ne peut pas se déplacer. Mais cela doit rester exceptionnel, car les audiences devant la CNDA sont effectivement du domaine du récit. Et ce récit, qui peut parfois durer cinq heures ou plus, nécessite un contact humain. Oui, voir la personne concernée, voir sa manière de se comporter et de se mouvoir est essentiel.
Ces amendements demandent simplement que le requérant puisse s'opposer à cette décision de recourir à la vidéo-audience, ou en tout cas l'accepter. Si l'on veut respecter les droits, ils doivent être adoptés.
La parole est à Mme Laurence Vichnievsky, pour soutenir l'amendement no 292 .
Il s'agit d'un amendement proche de ceux que nous venons d'examiner, mais qui n'est pas identique.
Il a pour objet de rétablir le consentement préalable du requérant séjournant en France métropolitaine à être entendu à l'audience de la CNDA, tout en donnant la possibilité au président de la juridiction de ne pas tenir compte du refus du requérant et de recourir à l'audience par un moyen de communication audiovisuelle lorsque ce dernier est détenu, placé en rétention administrative ou assigné à résidence.
Cette position me paraît assez équilibrée et devrait recueillir l'assentiment de tous.
En ne subordonnant en aucune manière la tenue de l'audience par un moyen de communication audiovisuelle au consentement du demandeur d'asile – et sur ce point je ne suis pas d'accord, monsieur le ministre d'État, avec votre analyse de la jurisprudence du Conseil constitutionnel – le projet de loi encourt à mon sens la censure du Conseil constitutionnel.
Je rappelle que, devant se prononcer sur la constitutionnalité des audiences tenues par visioconférence, le même Conseil constitutionnel, après avoir relevé que leur déroulement était « subordonné au consentement de l'étranger », a décidé que « dans ces conditions », le dispositif mis en place garantissait « la tenue d'un procès juste et équitable ». Or je rappelle que le projet de loi ne prévoit en aucune manière de tenir compte de ce consentement.
Enfin, la généralité de l'expression de bonne administration de la justice, qui constitue le critère de choix entre audience présentielle et vidéo-audience, laisse augurer que cette seconde forme d'audience va rapidement devenir la norme de traitement de l'ensemble des demandes d'asile.
Il faut rappeler à cet égard que le président de la CNDA sera amené, sans pouvoir déléguer ce pouvoir, à prendre ce type de décisions dans au moins 50 000 dossiers par an. La décision sera donc à mon sens nécessairement prise à l'avance. Qui contrôlera ensuite, in concreto, si les conditions techniques de transmission sont bien réunies ?
Mes chers collègues, au-delà de mon expérience personnelle, qui n'a pas beaucoup de poids, …
… comment peut-on dénier l'épaisseur de chaque être humain ? Il ne s'agit pas d'une image !
Applaudissements sur les bancs des groupes MODEM, NG, GDR, FI et UDI-Agir.
Madame Vichnievsky, nous avons déjà eu cet échange en première lecture ainsi qu'en commission. Il me semble que la bonne administration de la justice est d'appliquer le recours à la vidéo-audience à tout le monde, quelles que soient les situations individuelles. En effet, cela ne doit pas être vu comme une sanction. Il n'y a donc pas de raison de l'appliquer plus à une personne en rétention administrative qu'aux autres : c'est simplement une mesure de bonne administration de la justice. Avis défavorable.
Je vais exactement dans le sens de Laurence Vichnievsky. Ma crainte est que nous ouvrions une brèche, que nous insérions par cette disposition un coin qui ouvrira la voie à la généralisation de la vidéo-audience en matière de justice.
C'est pour moi un vrai sujet de préoccupation. Nous ne devons pas aujourd'hui penser que la vidéo-audience pourra remplacer la présence humaine. Ce n'est pas possible. Si nous avions le temps, je vous ferais un petit cours de cinéma.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Pardon, mais chacun son métier ! Je suis à votre disposition pour en parler, car je ne veux pas que nous puissions penser qu'une image vidéo pourrait remplacer la présence humaine.
Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM.
Nous sommes, mes chers collègues, en présence d'une question qui dépasse le simple projet de loi que nous en sommes en train d'examiner. Permettre demain, dans une procédure qui reste une procédure de justice, que ce ne soit plus l'individu, humainement présent, qui soit jugé, mais son image, n'est pas anodin. Sans compter que demain, l'évolution des progrès technologiques fera peut-être que l'image elle-même sera plus virtuelle, de type hologramme.
Nous devons être conscients, parce que nous serons tous un jour peut-être amenés à rendre des comptes à la justice, qu'il ne nous sera peut-être plus possible, demain, de le faire humainement devant notre juge, mais que notre image ou notre hologramme sera jugé à notre place.
Si ce débat, qui me semble fondamental, n'est pas tranché dans cette assemblée, il devra l'être par le juge constitutionnel.
Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM.
L'amendement no 292 n'est pas adopté.
Madame la rapporteure, vous avez affirmé tout à l'heure que nous n'avions rien à demander aux réfugiés, et que nous devions les aider à s'intégrer sur notre territoire.
Ces propos sont très révélateurs de la philosophie de ceux qui défendent ce projet de loi, totalement vide et pas à la hauteur de la submersion migratoire que connaît notre pays.
Ce projet de loi est une véritable fumisterie. Il faut exiger du réfugié qu'il s'assimile dans notre pays.
Le Gouvernement fixe un délai de quinze jours pour exercer un recours à la suite d'une décision formulée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. Notre amendement vise à réduire à sept jours ce délai, qui nous semble en l'état bien trop long. Demander l'asile n'est pas une démarche anodine ; une telle décision ne peut avoir été prise à la légère. Un étranger qui se verrait opposer un refus, s'il est motivé et croit fermement qu'il a le droit de bénéficier à l'asile, n'a pas besoin de quinze jours pour faire appel. En outre, une telle réduction du délai permettrait d'assurer une meilleure gestion des dossiers à la CNDA, donc d'améliorer les procédures.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 436 .
Il convient de revenir sur le dispositif adopté par la commission, qui prévoit que le demandeur dispose d'un délai de quinze jours pour formuler sa demande d'aide juridictionnelle devant le bureau d'aide juridictionnelle de la Cour nationale du droit d'asile. Par l'intermédiaire de cet amendement, je propose que ce délai soit fixé à sept jours, au lieu de quinze. L'objectif reste le même : il s'agit d'accélérer la procédure pour que les dossiers soient traités dans les plus brefs délais.
La majorité dit souvent que la réduction des délais porterait atteinte à la protection des droits fondamentaux. Cette vieille rengaine bien huilée, que l'on entend dès que l'on tente d'améliorer les choses, m'étonnera toujours. Vous affirmez, madame la rapporteure, monsieur le ministre d'État, que vous défendez une position « équilibrée » ; or lorsque non seulement la France, mais l'Europe tout entière est confrontée à une immigration massive, il ne doit plus être question d'équilibre, il s'agit de prendre des mesures fermes. Notre droit prévoit des délais qui se comptent en jours et en mois, parfois même en années. On ne peut pas dire que, dans un tel cadre, les droits fondamentaux ne sont pas respectés ! La juste appréciation d'un délai doit se faire en fonction de la matière et des circonstances. En l'occurrence, réduire à sept jours le délai accordé à une personne pour demander l'aide juridictionnelle ne me semble pas porter atteinte aux droits des personnes qui veulent venir en France, puisque cela ne remet pas en question l'existence même de ce droit.
Avis défavorable : il faut accélérer les procédures tout en garantissant le droit au recours équitable.
Il est rédactionnel.
L'amendement no 487 , accepté par la commission, est adopté.
L'article 6, amendé, est adopté.
Cet article comprend plusieurs mesures, dont deux particulièrement importantes relatives à la question dite de « la réduction des délais ».
L'objectif de réduction des délais de procédure qui est attaché à cette réforme se traduit en réalité par un traitement expéditif des demandes, au détriment des garanties procédurales des demandeurs. L'amélioration des délais de traitement est un objectif porteur, mais il ne devrait en aucun cas passer par une réduction des délais de procédure. Nous considérons que l'amélioration des délais de traitement devrait plutôt concerner la phase dite de « premier accueil ». Or le projet de loi n'en parle pas. Cette phase liminaire, celle de l'accès à la procédure d'asile et au dispositif national d'accueil, constitue pourtant l'une des principales carences du système du droit d'asile en France. Le projet de loi ne propose à aucun moment de l'améliorer, donc de travailler pour celles et ceux qui arrivent en France et qui, pour certains, se verront protégés par notre pays : tous sont extrêmement mal accueillis. Parmi les pays européens, nous faisons partie de ceux qui respectent le moins les droits des demandeurs lors de cette phase de premier accueil.
C'est pourquoi le groupe GDR est favorable à la suppression de l'article 7.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l'amendement no 325 .
Le présent amendement tend à supprimer le I de l'article. En effet, la volonté de réduire les délais ne peut conduire à porter atteinte aux droits des personnes à être entendues dans la langue de leur choix. Il s'agit là d'une suggestion du Défenseur des droits.
Gagner du temps sur le choix de la langue permettra à l'OFPRA de lancer l'interprétariat et de gagner jusqu'à trois semaines. Comme je le disais tout à l'heure, des formations seront assurées auprès des agents de préfecture ; le choix de la langue se fera donc dans les meilleures conditions possibles. L'OFPRA aussi aura tout à y gagner. Tout cela se fera dans de bonnes conditions. Avis défavorable.
L'amendement no 325 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l'amendement no 326 .
L'amendement no 326 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l'amendement no 327 .
L'amendement no 327 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Pierre-Henri Dumont, pour soutenir l'amendement no 86 .
Il s'agit d'un amendement qui avait déjà été examiné en première lecture. Si nous l'avons déposé de nouveau, c'est que notre groupe y tient énormément.
Cet amendement vise à interdire l'accès à la demande et à la procédure d'asile à tout étranger qui figurerait dans le fichier des signalements pour la prévention et la radicalisation à caractère terroriste, le FSPRT. En effet, on ne peut pas profiter de la protection et de la générosité de la France si l'on constitue en même temps une menace pour les Françaises, les Français et tous ceux qui vivent sur le territoire de la République française.
Je vous rappelle, monsieur Dumont, que désormais on lie même l'OFPRA pour qu'il n'accorde pas l'asile ou que celui-ci soit retiré lorsqu'une personne présente une menace grave pour l'ordre public.
Nos procédures me semblent suffisamment contraignantes et protectrices. Avis défavorable.
J'ignore si M. Dumont était présent, mais j'ai eu hier l'occasion de répondre à M. Ciotti sur le nombre de personnes que nous avions éloignées parce qu'elles figuraient dans le FSPRT et qu'elles nous semblaient constituer un danger pour l'ordre public. Avis défavorable.
Cet amendement m'inspire la réflexion suivante.
Les personnes qui sont destinées à résider sur le territoire doivent s'intégrer.
Sourires.
C'est dans l'intérêt d'abord de la personne elle-même, ensuite de la collectivité : on ne peut pas vivre durablement en extraterritorialité ou en apnée. Mais encore faut-il avoir la volonté de s'intégrer : c'est l'acte premier. Or il est difficile de s'intégrer dans une société dont a priori on rejette les fondamentaux. C'est tout ce que je voulais dire.
Les propos que vient de tenir M. Castellani sont pleins de bon sens. On n'a vocation ni à s'intégrer ni à être protégé par une société dont on dénonce les valeurs et que l'on veut combattre. Je pense que sur ce principe, nous sommes d'accord, madame la rapporteure.
Ce que l'on souhaite, à travers cet amendement, c'est tout simplement ajouter une mesure qui serait plus protectrice sur le plan juridique. Quand M. le ministre d'État évoque les personnes qui sont inscrites dans le FSPRT et qui ont été expulsées, cela ne représente que quelques individus…
… sur plusieurs milliers qui sont encore présents sur notre sol. Nous demandons donc non seulement une clarification juridique sur les demandes d'asile en France de personnes radicalisées, mais aussi, bien évidemment, l'expulsion rapide des personnes très dangereuses qui continuent de vivre sur notre sol, parfois même en bénéficiant de la protection de notre pays.
L'amendement no 86 n'est pas adopté.
À travers cet amendement, nous proposons de garantir un droit procédural qui nous semble fondamental dans le cadre d'une procédure de demande d'asile. En effet, par les alinéas 5 et 6 de l'article 7, le Gouvernement prévoit que, dès l'enregistrement de sa demande d'asile en préfecture, l'étranger ou l'étrangère choisira une langue qui sera utilisée durant tout l'examen de sa demande par l'OFPRA.
D'abord, nous trouvons cela incroyable, alors que le Gouvernement vient de faire examiner par le Parlement un texte qui consacre le « droit à l'erreur ». Ce sont les publics vulnérables et peu familiers de notre langue qui devraient d'abord en bénéficier. Ils doivent être considérés comme les autres justiciables !
Ensuite, cette obligation fait fi de la complexité de la situation des demandeurs et des demandeuses d'asile, non seulement en France, mais aussi dans leur pays. Elle ignore le multilinguisme, le fait que l'on peut comprendre une langue de manière globale sans que celle-ci vous soit familière, ainsi que la possibilité que ce soit dans une autre langue ou dans un dialecte parlé dans son pays d'origine qu'une personne est le plus à l'aise, surtout pour parler d'un sujet aussi sensible que son parcours migratoire.
Enfin, il nous semble que l'intention du Gouvernement est uniquement d'ordre administratif. C'est d'ailleurs ce qui est indiqué dans l'étude d'impact : il s'agit de réduire les délais en vue de faciliter l'organisation des rendez-vous. Ce gouvernement qui prétend, comme on l'a beaucoup entendu en première lecture, rendre hommage au travail des agents de l'OFPRA et de la CNDA, se montre bien sourd aux demandes et aux revendications de ceux-ci, qui s'étaient mobilisés et mis en grève pour dire qu'une bonne partie des problèmes provenaient de leur surcharge de travail et qui demandaient un plus grand nombre d'embauches, sous un statut stable et non précaire afin de pouvoir faire un travail de qualité. Si vous voulez réduire les délais, il faut plus d'humains et, surtout, prêter une attention particulière à la complexité des situations – ce que vous ne semblez pas prêts à faire.
Réduire les délais de traitement des demandes, madame Obono, ce n'est pas seulement une question administrative, c'est aussi une question de dignité : cela permettra que les personnes soient fixées sur leur sort le plus rapidement possible.
S'agissant des agents de l'OFPRA, lorsque nous les avons entendus en audition, ils nous ont dit qu'ils étaient prêts à s'investir pour former les agents de préfecture pour ce qui est du choix de la langue.
Enfin, je vous rappelle que le budget de la mission « Immigration, asile et intégration » pour 2018 a été augmenté de 26 %, ce qui a permis d'augmenter les effectifs de l'OFPRA.
Avis défavorable, donc.
Mme Obono n'était pas là hier quand j'ai expliqué longuement que nous tenions à renforcer considérablement la formation de nos agents : c'est la condition pour mettre en oeuvre le texte dont nous discutons.
Monsieur le ministre d'État, étant donné la façon dont vous semblez maîtriser ce qui se passe dans votre ministère, je ne suis pas sûre que vos affirmations aient une quelconque importance !
Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
Madame la rapporteuse, vous parlez de dignité. C'est en effet une question de dignité que de respecter l'usage de la langue. Vous ne pouvez pas imposer une langue à une personne qui a subi autant de traumatismes, et cela alors que, dans sa vie quotidienne, y compris avant les traumatismes et l'exil, cette personne était polyglotte et utilisait divers moyens d'expression.
Vous dites que les personnels de l'OFPRA vous ont indiqué qu'ils étaient prêts à s'investir. Précisément : ces personnels s'investissent jusqu'à l'épuisement ; ils sont sensibles à ces questions.
Toutefois, il semblerait que vous soyez restée sourde à l'autre volet de leur expression. En effet, ces mêmes personnels sont prêts à s'investir dès lors qu'on leur en donnera les moyens. Or la maigre augmentation que vous avez évoquée ne suffira pas – nous l'avions déjà dit à l'époque. Ces agents le disent et le répètent : ils s'investiront, ils feront leur travail, mais sans moyens supplémentaires, ce sera aux dépens du bien-être des personnes qui seront face à eux et de leur propre bien-être, car être digne et respectueux des migrants, c'est aussi entendre leur parole dans des conditions acceptables. Votre prétendue efficacité se fait au détriment de cette dignité !
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Madame Obono, je vous rappelle que c'est la forme « Mme la rapporteure » qui a été retenue en 1998 – soit il y a vingt ans – ,…
… dans le cadre de la féminisation de nos titres, à laquelle je tiens beaucoup.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Bien au contraire, madame Obono.
D'ailleurs, il ne s'agissait pas d'une critique à votre endroit ; je mettais plutôt cela sur le compte de la fatigue des derniers jours.
Sourires.
L'amendement no 135 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Elsa Faucillon, pour soutenir l'amendement no 248 .
Il semblerait que l'examen de ce texte ne suffise pas à rendre heureux le ministre d'État, puisque, pour s'amuser, il a besoin de se lancer dans des provocations.
Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
Je l'invite à y renoncer, car cela ne me semble pas nécessaire. Quoi qu'il en soit, nous y répondrons à chaque fois.
Le présent amendement, de repli, reprend une proposition de l'association ELENA. Il vise a assurer aux demandeurs d'asile des garanties procedurales.
Les bases juridiques europeennes applicables au droit d'asile prevoient un droit a l'information du demandeur d'asile « dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu'il la comprenne », aux termes mêmes de la directive « Procedures ».
Or la nouvelle formulation retenue par le projet de loi – « dans une langue dont il a une connaissance suffisante » – laisse supposer que l'on pourra se contenter d'une simple connaissance d'une langue sans s'assurer que le demandeur d'asile la comprenne précisément, donc qu'il puisse bien se défendre dans celle-ci. Cette formulation est moins protectrice que la directive europeenne, que, une fois n'est pas coutume, nous préférons.
L'OFPRA peut toujours demander que l'entretien n'ait pas lieu si la personne n'est pas en mesure de le suivre. De plus, le fait que cet entretien n'ait pu se dérouler dans de bonnes conditions est toujours un motif d'annulation pour la CNDA. Avis défavorable.
L'amendement no 248 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l'amendement no 328 .
Cet amendement vise à permettre au demandeur d'« être entendu dans une autre langue à tout moment devant l'Office français des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile », afin de se faire comprendre au mieux. Même s'il a déclaré comprendre une langue au moment de son accueil, on peut en effet constater, in fine, qu'il en comprend mieux une autre.
L'amendement no 328 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Pierre-Henri Dumont, pour soutenir l'amendement no 189 .
Cet amendement d'appel, que je n'ai pu déposer sur un autre article à cause de la règle de l'entonnoir, concerne un sujet local : les dialectes utilisés pas des personnes interpellées, en particulier dans le Calaisis, après avoir commis des actes répréhensibles, comme des attaques de policiers ou de CRS, puis relâchées lorsqu'elles invoquent le fait de parler une langue qui n'est pas la langue officielle de leur pays d'origine – l'Éthiopie ou l'Érythrée, par exemple – , mais un dialecte local parlé par 150 ou 200 locuteurs dans le monde, si bien que la justice est contrainte de les relâcher et ne peut les condamner à la juste sanction qu'elles méritent.
Le cas s'est présenté, par exemple, avec le dialecte éthiopien du konso et le dialecte érythréen du kunama. Ce phénomène, hélas de plus en plus fréquent, crée une forme d'impunité pour les migrants qui, le long des côtes de la Manche et de la mer du Nord, continuent de défier les forces de l'ordre et l'État.
Il s'agit, je le répète, d'un amendement d'appel. S'il n'a pas forcément de lien direct avec ce dont nous parlons, l'objectif, à travers lui, est d'évoquer le sujet, très grave et d'une ampleur croissante.
La rédaction du texte répond à la préoccupation que vous exprimez, mon cher collègue, puisqu'elle précise que la langue utilisée avec le demandeur est celle dont il est raisonnable de penser qu'il la comprend. Avis défavorable.
Défavorable. Nous travaillons, monsieur le député, à la création d'une plateforme qui comprendra un volant d'interprétariat, et ce dans une large palette de langues.
L'amendement no 189 n'est pas adopté.
L'article 7 est adopté.
En doublant le délai d'instruction, vous délégitimez la voix de l'administration. L'autorité administrative a le devoir de motiver ses décisions de transfert par écrit. En une semaine, l'étranger concerné a parfaitement le loisir de découvrir la teneur de ce jugement.
En allongeant le délai, vous mettez en doute le bien-fondé de la décision administrative et octroyez davantage de prérogatives à une personne dont la situation est à régulariser. Cette constante inversion des rapports, qui postule une irrégularité nécessaire du droit français, et qui est réitérée au fil du texte, me semble plus qu'alarmante.
La parole est à M. Raphaël Schellenberger, pour soutenir l'amendement no 265 .
Cet amendement vise à supprimer la disposition relative au raccourcissement du délai de contestation des décisions de l'OFPRA. Il y a trois mois, nous avons légiféré pour mettre nos procédures applicables aux « dublinés » en conformité avec les décisions du Conseil constitutionnel. Puis, en première lecture du projet de loi asile et immigration, on y est revenu, pour contredire une décision solennellement votée par notre assemblée deux semaines plus tôt.
En matière d'efficacité du travail parlementaire, on a fait mieux ! En tout état de cause, il me semble essentiel d'en revenir à la décision que nous avions collectivement prise en mars dernier.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 451 .
Voici un nouvel exemple de la désinvolture, pour ne pas dire plus, du Gouvernement envers le Parlement. En première lecture, nous étions un certain nombre, ici, à expliquer que, lorsqu'un étranger fait l'objet d'une décision de transfert mentionnée à l'article L. 742-3 du CESEDA, un délai de sept jours à compter de la notification de cette décision lui suffit pour en demander l'annulation au président du tribunal administratif.
Précisons qu'il s'agit d'une décision de transfert vers un autre État membre de l'Union européenne pour un étranger faisant l'objet d'une procédure « Dublin ». Le Sénat a d'ailleurs la même position que nous puisqu'il a supprimé le présent article, ce que vous-mêmes refusiez. On voit donc, bien entendu, cet article réapparaître en nouvelle lecture.
Au moins peut-on vous concéder d'avoir de la suite dans les idées. Mais, pour un gouvernement qui n'a cessé de répéter, ces quinze derniers jours, vouloir renforcer les droits du Parlement, peut-être seriez-vous bien inspirés, de temps en temps, d'écouter un peu plus les députés et les sénateurs au lieu de rester campés sur vos positions pour le moins dogmatiques.
C'est pourquoi je demande une nouvelle fois la suppression de cet article.
L'article 7 bis est adopté.
Je veux intervenir sur un aspect du texte : la création d'une commission ad hoc émettant un avis sur les schémas régionaux d'accueil. Il s'agit là d'une avancée importante qui nous vient du Sénat.
Cette commission réunira autour d'une même table les différents acteurs qui oeuvrent en faveur de l'accueil, de l'hébergement et de l'intégration des personnes. Leur avis sur les schémas régionaux est essentiel : plus on inclut les territoires et les acteurs qui les composent, plus on a de chances de faire fonctionner le projet et, ainsi, de favoriser l'intégration.
L'amendement adopté au Sénat est assez semblable à celui que j'avais présenté en première lecture avec mon collègue Matthieu Orphelin. Notre amendement, toutefois, portait sur la création d'une commission au niveau départemental. Une commission régionale est certes une avancée, mais il faut être au plus près du territoire et des acteurs pour recueillir leur vécu de terrain. Pour ce faire, l'échelle départementale est pertinente.
Notre objectif était d'obtenir un diagnostic territorial d'accueil permettant de décliner, de manière cohérente et diffuse, au niveau départemental, le schéma régional d'accueil. J'espère que cette commission, même si elle demeure à l'échelle régionale aux termes de l'article 9, permettra de faire remonter les spécificités des territoires.
Le rôle des collectivités et des élus, moteurs pour l'intégration des personnes sur le territoire, est essentiel. C'est pourquoi je regrette la suppression de l'article 8 bis, qui prévoyait d'inclure au sein du conseil d'administration de l'OFII, des représentants des collectivités territoriales.
Que ce soit en milieu urbain, en milieu périurbain ou en milieu rural, mon expérience de maire de Chalonnes-sur-Loire m'a permis de voir les possibilités d'une intégration réelle. Installer un centre d'accueil des demandeurs d'asile en milieu rural est possible ; cela peut même très bien fonctionner. Les personnes sont alors réellement accueillies et intégrées au sein de la petite commune.
Une bonne intégration, mes chers collègues, nécessite un travail de dentelle.
L'article 9 concerne les conditions matérielles d'accueil des demandeurs d'asile. Il renforce le caractère directif du schéma national d'accueil de ces demandeurs, orientés vers une région où ils seront tenus de résider. Le contrôle des autorités sera également intensifié ; de nouvelles hypothèses de retrait ou de suspension des conditions matérielles d'accueil sont prévues.
Comme l'avait souligné le Défenseur des droits s'agissant de la réforme de l'asile de 2015 qui avait institué le schéma national d'accueil, cette orientation contraignante pour les demandeurs s'apparente à une forme d'assignation à résidence.
Il convient de rappeler que, si la directive « Accueil » autorise les États à prendre de telles mesures, il ne s'agit que d'une possibilité offerte à ces derniers. Aux termes de l'article 2 du protocole additionnel no 4 à la Convention européenne des droits de l'homme, de telles mesures, qui restreignent la liberté d'aller et venir, ne doivent être, dans une société démocratique, qu'exceptionnelles et être nécessaires à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au maintien de l'ordre, à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui.
Le cadre du projet de loi dépassant largement ces limites, nous demandons la suppression de l'article 9.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 449 .
Nous avons, en France, la passion des plans et des schémas : plan local d'urbanisme, schéma de cohérence territoriale, schéma d'aménagement et de gestion des eaux, directive territoriale d'aménagement, et j'en passe. Il est ici question d'un schéma d'accueil des demandeurs d'asile et d'intégration des réfugiés. Son titre nous induit cependant en erreur : où est-il question, dans l'article 9, de l'« intégration » des réfugiés ? Si le seul hébergement suffisait à l'intégration, cela ferait bien longtemps que nous n'aurions plus à parler des questions d'immigration.
Il n'est donc question, dans l'article 9, que de l'hébergement des personnes. Pourquoi, je le répète, ne pas traiter de l'intégration ? La refonte induite par le dispositif est loin de répondre à nos attentes. Le droit d'asile, essentiel à notre démocratie, doit être mis en oeuvre ; mais ce n'est pas en créant un énième schéma que nous résoudrons le problème.
De plus, comment définir notre politique d'immigration sans tenir compte de nos capacités d'accueil réelles ? Si le nombre de réfugiés accueillis est supérieur à notre capacité d'accueil, je ne vois pas comment il sera possible d'atteindre l'objectif d'intégration fixé par le projet de loi. Insertion et capacité d'accueil réelle doivent aller de concert ; c'est pourquoi je demande la suppression de l'article.
L'article 9 revêt une importance particulière, précisément pour répondre au problème de la concentration des flux migratoires dans certaines régions. Le schéma national envisagé, bien plus contraignant, est donc essentiel.
Lors de l'évacuation des derniers campements à Paris, on a vu qu'un grand nombre de personnes s'étaient vu proposer un hébergement ailleurs en France ; mais elles sont revenues à Paris, où aucun hébergement ne leur était proposé et où elles se trouvaient dans des campements tout à fait indignes. Il est important qu'elles demeurent dans les hébergements proposés sur l'ensemble du territoire.
L'article favorise l'intégration, madame Ménard, grâce à l'amendement qui, adopté en première lecture, tend à coordonner l'hébergement des réfugiés, une fois qu'ils ont obtenu ce statut, avec l'hébergement qu'ils avaient pendant toute la période où ils demandaient l'asile.
Avis défavorable, donc, sur ces amendements de suppression.
J'ai toujours eu, avec Mme Stella Dupont, des discussions approfondies sur le sujet. Elle plaidait d'ailleurs pour une répartition des demandeurs d'asile sur l'ensemble du territoire, précisant qu'un certain nombre de territoires étaient prêts à s'engager.
Le rôle des collectivités locales, dans ces conditions, est fondamental. Si le schéma est régional, c'est au niveau du département, avons-nous précisé, que nous organiserons, en concertation avec les maires, l'accueil des demandeurs d'asile. La version actuelle du projet de loi, madame Dupont, est donc de nature à vous satisfaire.
La parole est à Mme Élise Fajgeles, pour soutenir l'amendement no 383 .
L'amendement no 383 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
M. le ministre devrait accepter cet amendement, puisqu'il vient d'expliquer qu'il souhaitait associer très étroitement les collectivités territoriales à la démarche.
Il s'agit d'un amendement de repli : la majorité se refusant à reconnaître que la méthode utilisée pour instaurer le schéma d'accueil des demandeurs d'asile n'est pas efficace, je demande qu'au moins ce schéma soit mis en oeuvre en concertation avec les collectivités territoriales concernées. Ce sont elles qui sont au plus près du terrain et qui connaissent le mieux leurs capacités d'accueil réelles.
En 2017, les demandes d'asile ont atteint un niveau record : plus de 100 000 dossiers ont été déposés devant l'OFPRA, soit une hausse de 17,5 % par rapport à 2016. Dans ce contexte, une concertation étroite entre administration et collectivités est primordiale, comme l'a rappelé, je le répète, M. le ministre lui-même. Face à ce phénomène, en effet, il ne faut pas se tromper d'approche : plutôt que d'adapter notre capacité d'accueil au nombre de demandeurs d'asile ou aux quotas demandés par Bruxelles, mieux vaut nous fonder sur notre capacité d'accueil réelle, donc nous placer en la matière sous l'autorité directe des collectivités territoriales concernées et leur demander leur accord.
La parole est à Mme Marie-France Lorho, pour soutenir l'amendement no 16 .
Avis défavorable.
L'article 9 prévoit déjà que le schéma régional est établi après concertation avec une commission comprenant des représentants des collectivités territoriales. Concertation, oui ; leur demander leur accord, non : à chacun sa part de générosité et d'accueil, et cette répartition doit être respectée dans l'ensemble du territoire.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 431 .
Malheureusement, comme trop souvent, on a l'impression que la loi ne prend pas en considération les réalités du terrain – ici, que l'on ne se préoccupe pas des collectivités qui accueillent les personnes immigrées : on veut bien les consulter, mais certainement pas leur demander leur avis.
Voilà l'écueil qui menace la mise en oeuvre de l'article L. 744-2 du CESEDA. Il est aujourd'hui question de modifier cet article – qui permet d'établir un schéma national d'accueil des demandeurs d'asile – en fixant des quotas d'accueil de demandeurs d'asile et de réfugiés par région ou par département. Je m'étonne, alors que la pression migratoire est toujours plus forte et qu'elle ne va pas manquer d'évoluer – dans un sens ou dans un autre, d'ailleurs – , que ne soit pas prévue une révision régulière du schéma. Cela ne paraît guère logique : en 2014, 291 000 migrants étaient arrivés en Europe ; en 2017, ils étaient plus de 1,8 million. Cette forte pression migratoire ne doit pas être prise à la légère.
J'aimerais également rappeler que dans notre seul pays, alors qu'en 2010 l'administration enregistrait 52 000 demandes d'asile, en 2017 le cap des 100 000 personnes a été dépassé – et je dissocie bien ici les demandeurs d'asile des autres flux migratoires.
Voilà pourquoi, comme le Sénat, je pense qu'il serait pertinent de réviser le schéma tous les trois ans. Tel est l'objet de cet amendement.
La loi dispose déjà que le schéma national est révisé tous les trois ans.
Avis défavorable.
Avis défavorable.
J'aimerais revenir un instant sur l'amendement précédent.
De manière générale, nous souhaitons que les collectivités soient associées aux décisions relatives aux mouvements migratoires, comme à toutes les décisions, d'ailleurs, touchant des événements qui les concernent directement. En la matière, les situations sont souvent difficiles ; nous en avons encore eu un exemple récemment à propos de l'Aquarius.
L'amendement no 431 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-France Lorho, pour soutenir l'amendement no 47 .
Certains membres d'organisations non gouvernementales usent de leur statut d'humanitaires pour sciemment déroger à la loi. Le caractère partisan de certaines structures n'est plus à démontrer. Le tribunal de Grasse a ainsi statué le 18 décembre dernier sur le cas d'un bénévole ayant délibérément contribué à une violation de la loi en permettant à deux personnes en situation irrégulière d'échapper à un contrôle de police.
Intégrer des factions militantes à la commission est déraisonnable et contribue à légitimer des instances qui ne devraient pas jouir d'une telle reconnaissance. Octroyer de telles prérogatives à des officines militantes ne revient à rien de moins qu'à reconnaître les dérogations à la loi auxquelles elles s'adonnent.
Tel est le sens de cet amendement.
Je ne partage toujours pas votre suspicion à l'égard des associations qui aident les demandeurs d'asile.
Avis défavorable.
Avis défavorable.
C'est incroyable, cette histoire de commission ! Ici, vous souhaitez que des gens qui ont commis des infractions à la loi participent à la commission ; dans d'autres circonstances liées à l'actualité, vous souhaitez que des personnalités dont vous estimez qu'elles n'ont pas pris part à d'autres infractions ne soient pas associées à d'autres commissions, comme des commissions d'enquête… Elle est drôle, cette vision à géométrie variable !
L'amendement no 47 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 432 .
L'alinéa 12 de l'article 9 dispose que le schéma national « fixe les orientations en matière de répartition des lieux d'hébergement pour demandeurs d'asile et réfugiés sur le territoire de la région, présente le dispositif régional prévu pour l'enregistrement des demandes d'asile [… ] et définit les actions en faveur de l'intégration des réfugiés ».
On voit bien ici l'effort consenti pour que le schéma soit efficace. Mais je crois qu'il le serait encore plus s'il définissait aussi les actions mises en oeuvre pour assurer l'éloignement des déboutés du droit d'asile. En effet, s'il est important de pouvoir accueillir sur notre territoire une personne que nous protégeons, notamment lorsque l'asile lui a été accordé, n'oublions pas que les mesures d'éloignement des déboutés doivent elles aussi être effectives.
Je vous rappelle que la Cour des comptes nous avait appris en 2015 que c'était loin d'être le cas : elle affirmait alors que 96 % des déboutés du droit d'asile restaient sur notre territoire après que la décision leur avait été signifiée. Ce constat est d'autant plus regrettable qu'il met à mal notre État de droit et notre souveraineté. Parce que cela ne peut continuer, nous devons nous doter de tous les moyens possibles pour que les décisions rendues soient respectées, surtout quand elles n'octroient pas de droit au séjour dans notre pays. Parce que je suis attachée à ces deux principes, je demande que cette précision soit apportée à l'article L. 742-3 du CESEDA.
Il s'agit d'un point intéressant, qui aurait mérité une réponse plus argumentée.
Monsieur le ministre, madame la rapporteure, vous aimez bien l'équilibre et les projets qui marchent sur deux jambes ; vous parlez d'humanité et de fermeté ; or la fermeté comprend l'éloignement des personnes illégalement présentes sur notre sol.
De plus, la fermeté elle-même doit marcher sur deux jambes. On sait qu'il faut réduire l'immigration en France pour ne pas saturer nos capacités d'accueil. Or il existe deux manières de le faire : d'abord, mieux contrôler les entrées sur notre territoire, et ce volet se gère autant au niveau européen qu'au niveau français ; ensuite, éloigner plus efficacement les personnes qui sont venues en France, qui ont demandé l'asile, qui ont été déboutées et qui doivent très rapidement retourner dans leur pays puisqu'elles sont présentes illégalement sur notre sol et qu'elles n'ont plus aucune raison de bénéficier de la protection de la France.
Il faut donc donner suite à l'amendement ou, en tout cas, engager le débat si vous voulez redonner de la crédibilité à votre politique d'immigration.
L'amendement no 432 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l'amendement no 329 .
Cet amendement se conforme aux recommandations du Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes.
L'article 9 vise à assurer une répartition plus équilibrée des demandeurs et demandeuses d'asile sur le territoire. Conformément à l'objectif constitutionnel consistant à favoriser l'égalité entre les femmes et les hommes, et afin de permettre la mise en sécurité effective des demandeuses d'asile majeures et mineures, l'amendement propose la création de places d'hébergement spécifique pour les femmes dans les CADA.
Ces places d'hébergement devront être adaptées à la situation des femmes accueillies : mineures, victimes de violences sexuelles, femmes isolées, cheffes de familles monoparentales.
Je rappelle qu'aux termes de l'alinéa 16, que nous avons introduit en première lecture, la vulnérabilité des personnes est prise en considération lors de l'attribution du lieu d'hébergement. Il s'agit notamment des femmes qui ont été victimes de violences. De plus, les CADA ont déjà des places réservées à ces femmes. L'amendement est donc satisfait.
L'amendement no 329 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Le premier permet à l'étranger de choisir librement sa région de résidence lorsqu'il justifie ce choix par des raisons personnelles ou familiales ; le second l'autorise à s'opposer à son orientation lorsqu'il justifie de la possibilité d'être hébergé par un tiers. Tous deux complètent la rédaction de l'article 9 en favorisant une meilleure intégration des personnes – ce que Mme la rapporteure a dit souhaiter à plusieurs reprises.
Lorsque l'OFII propose un hébergement après l'enregistrement de la demande, il tient compte des liens pouvant déjà exister entre le demandeur d'asile et le territoire. Cela continuera d'être le cas avec le nouvel article 9. Les amendements sont donc satisfaits.
Avis défavorable.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement no 332 .
Il s'agit d'apporter à l'alinéa 22 un complément nécessaire en accordant aux demandeurs d'asile un droit inconditionnel à l'accueil et au maintien dans les lieux d'hébergement.
Par cet amendement, comme par l'amendement no 333 auquel nous en viendrons un peu plus loin, nous souhaitons consacrer un droit au répit ou à l'hébergement inconditionnel. Il se situe aux antipodes de votre circulaire, monsieur le ministre : le caractère inconditionnel du droit au répit se traduirait par l'impossibilité de procéder à des recensements des migrants accueillis dans les lieux d'hébergement au profit d'une administration soucieuse de procéder à un maximum d'expulsions dans le cadre d'une politique du chiffre aussi inepte qu'inefficace.
Plusieurs collègues l'ont rappelé en commission : toutes les associations gestionnaires de centres d'hébergement et d'accueil, y compris les plus proches des services de l'État, sont absolument opposées par principe à cette ingérence dans l'accueil et à cette remise en cause d'un droit imprescriptible.
Vous semblez continuer de préférer l'efficacité à l'humanité ; ce n'est pas acceptable.
Madame Karamanli, il n'y a pas de droit inconditionnel à être hébergé dans le dispositif national d'accueil destiné aux demandeurs d'asile, précisément parce qu'il doit être réservé à ces derniers. Voilà pourquoi une bonne coordination est nécessaire. Il reste toujours l'hébergement d'urgence de droit commun ; mais le dispositif national d'accueil ne doit pas être saturé par les personnes qui ne sont pas demandeurs d'asile.
Avis défavorable.
L'amendement no 332 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement vise à revenir sur un ajout du Sénat, lequel a pour but de permettre au gestionnaire d'un lieu d'hébergement pour demandeurs d'asile de saisir le juge administratif, afin de mettre en oeuvre la procédure d'expulsion, lorsqu'un débouté du droit d'asile refuse indûment de quitter les lieux. En droit positif, seule l'autorité compétente, à savoir le préfet, a la possibilité de saisir le juge administratif sur ce fondement. Or, l'amendement voté par le Sénat, lors de son examen du projet en première lecture, ouvre également cette saisine au gestionnaire d'un centre d'hébergement, ce qui n'est pas souhaitable. En effet, le préfet, représentant de l'État, décide ou non d'enclencher cette procédure, en faisant preuve de neutralité envers les demandeurs déboutés de l'asile. Le gestionnaire d'un lieu d'hébergement, en revanche, serait susceptible de ne pas agir avec la même neutralité, dans la mesure où il connaît et côtoie régulièrement les personnes concernées par ladite procédure d'expulsion.
Cet ajout a été demandé par les gestionnaires eux-mêmes. Lors de la visite d'un centre d'accueil, à Marseille, avec ma collègue Alexandra Louis, la semaine dernière, on nous a redit à quel point cette disposition était importante pour eux, afin d'apporter de la fluidité à leur capacité d'hébergement. Avis défavorable.
La fluidité dans les lieux d'hébergement est l'une des conditions permettant la mise à l'abri de tous les demandeurs d'asile, ce qui est évidemment l'une des priorités fixées par le Président de la République.
Pour une fois, je suis en accord avec la commission et M. le ministre d'État. J'ai un peu de mal à comprendre l'amendement de notre collègue Balanant, dans la mesure où nous avons un vrai besoin de places dans les centres dédiés, alors que moins de 60 % des demandeurs d'asile sont hébergés dans une structure leur offrant des conditions d'accueil dignes. Il vaut mieux que ces personnes soient dans des centres où ils peuvent bénéficier de tout l'accompagnement nécessaire, le temps de leur demande d'asile, plutôt que de les voir traîner dans les rues, faute de places, ou vivre dans des chambres d'hôtel payées par l'État.
Je suis entièrement d'accord avec ce que disent M. le ministre d'État, la rapporteuse…
Exclamations sur les bancs du groupe LaREM
… et M. Dumont. Mais vous me dites qu'il faut favoriser l'accueil en centre d'hébergement, alors que vous voulez y faciliter les expulsions. Je ne comprends pas que vous ne compreniez pas.
L'amendement no 414 n'est pas adopté.
Sur un sujet proche, cet amendement vise à garantir aux étrangers déboutés de l'asile et hébergés dans un lieu prévu à cet effet – souvent, des centres d'accueil pour demandeurs d'asile – le bénéfice de la trêve hivernale. En effet, la loi portant réforme de l'asile du 29 juillet 2015 a introduit une procédure dérogatoire au droit commun en matière d'expulsion des lieux d'hébergement pour demandeurs d'asile qui s'applique notamment aux personnes déboutées de l'asile. Ainsi, le juge administratif, saisi en référé sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, peut adopter une ordonnance immédiatement exécutoire. Il convient de remédier à cette situation, afin d'assurer pleinement les droits fondamentaux des étrangers bénéficiant d'un hébergement en centre pour demandeurs d'asile, notamment leur droit au logement. Cet amendement vise également à unifier les circonstances dans lesquelles l 'expulsion de ces étrangers n 'est plus appliquée, sans plus laisser ces circonstances à l'appréciation de chaque préfecture.
La trêve hivernale a été instituée pour éviter aux familles d'être expulsées de leur logement en hiver. Je ne comprends pas pourquoi le même système ne s'applique pas aux demandeurs d'asile. Dans ma circonscription, quelqu'un s'est retrouvé expulsé d'un CADA en plein milieu de l'hiver. Certes, ces personnes sont déboutées et doivent partir ; mais nous ne pouvons pas, dans notre République, mettre des gens dehors, sans abri, en plein milieu de l'hiver. Je ne veux pas que cela arrive dans mon pays.
Monsieur Balanant, c'est tout l'intérêt du système d'information par le biais des services intégrés d'accueil et d'orientation – SIAO – proposé dans ce texte. Le dispositif national d'accueil des demandeurs d'asile est fait pour héberger ces personnes. Ensuite, une articulation doit se faire avec l'hébergement d'urgence de droit commun, qui ne doit pas être saturé par des réfugiés, qui devraient être dans leur parcours d'intégration ou des gens qui doivent être pris en charge au titre de la demande d'asile et accompagnés. Il ne s'agit pas de mettre des gens à la rue, mais de les héberger là où ils pourront bénéficier de l'accompagnement approprié. Avis défavorable.
Je rappelle que cet hiver, pour l'hébergement d'urgence, nous sommes passés à 147 000 places.
Je soutiens l'amendement de mon collègue Erwan Balanant. L'hiver dernier, des familles ont été mises à la porte de CADA. On a beau me dire qu'il y aura des places d'hébergement d'urgence, je ne suis pas sûre qu'elles soient vraiment garanties, surtout pour l'hiver prochain. Je demande à voir. Ce que je vois, c'est que ce texte risque d'instaurer des inégalités de traitement devant la loi, selon le statut des personnes. C'est le cas pour la vidéoconférence, pour la trêve hivernale, pour Mayotte ou pour les délais de procédure. Il est nécessaire de faire très attention à cela. Notre République doit accueillir toutes les personnes dignement, quel que soit leur statut.
L'amendement no 413 n'est pas adopté.
Cet amendement vise à supprimer les dispositions tendant à légaliser la circulaire Collomb du 12 décembre 2017, qui remet en cause les principes et les valeurs auxquels notre République est historiquement attachée. De fait, elle rétablit la politique du chiffre en matière d'expulsions et organise la surveillance et le contrôle des migrants, avec des méthodes qui affaiblissent aussi bien le principe d'inconditionnalité de l'hébergement d'urgence que d'inviolabilité d'un domicile relevant d'un lieu privé. En définitive, elle conduit à un tri et à une mise en concurrence de la misère humaine dans les centres d'hébergement, entre les personnes sans domicile fixe et les migrants. Les associations ont unanimement protesté contre cette circulaire et continuent de le faire. J'ai pu constater dans mon département dans quelle situation se trouve l'hébergement d'urgence. Face à la misère grandissante, les critères de vulnérabilité se voient redéfinis, ce qui conduit à un tri et à une hiérarchisation dans la misère. Parce que cette circulaire met en concurrence les personnes vulnérables, nous y sommes toujours fermement opposés et proposons de la supprimer.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement no 333 .
Le directeur de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, M. Leschi, nous avait bien expliqué que le système d'information des centres d'hébergement, qui existe depuis plusieurs années et que la circulaire a permis de fixer, a conduit à prendre en charge, au titre de la demande d'asile, 17 000 personnes en 2017, qui se trouvaient dans des hébergements de droit commun sans être suivies au titre de la demande d'asile. Cette information a des effets très bénéfiques pour les personnes qui doivent bénéficier d'un accompagnement adapté à leur statut. Avis défavorable.
Cela nous a également permis de découvrir que des personnes étaient hébergées en hôtel depuis une quinzaine d'années, ce qui n'est évidemment pas une situation convenable. Avis défavorable.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement no 334 .
L'amendement no 334 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-France Lorho, pour soutenir l'amendement no 63 .
Alors que le projet de loi prévoit à l'alinéa 11 de l'article 9 de mettre en place un comité régional de l'habitat et de l'hébergement compétent, ce comité se voit délégitimer en subordonnant sa décision au bon vouloir des demandeurs d'hébergement. Soumettre à leur acceptation les solutions avancées par le comité revient à contredire l'alinéa 11, mais aussi à accorder au demandeur un poids dans le processus décisionnel. L'accueil français ne peut se soumettre aux exigences particulières et doit respecter un principe d'ordre et de cohérence que seuls les comités habilités sont en mesure de préserver. Au nom de la cohérence législative et de la légitimité accordée aux comités d'ordre public, je demande que soit supprimé l'alinéa 31.
L'amendement no 63 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement no 335 .
Cet amendement vise à maintenir les conditions matérielles d'accueil, dès lors que l'étranger justifie de la possibilité d'être hébergé par un membre de sa famille ou par un tiers en lieu et place de l'orientation de l'administration, selon une suggestion du Défenseur des droits. C'est pourquoi nous souhaitons modifier la rédaction de l'alinéa 31.
Pour les mêmes raisons que tout à l'heure, les capacités d'hébergement ailleurs sur le territoire sont déjà prises en compte. Avis défavorable.
L'amendement no 335 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. le ministre d'État, pour soutenir l'amendement no 488 .
C'est un amendement rédactionnel qui vise à corriger l'ambiguïté de la rédaction actuelle, qui pourrait exclure de l'application de l'article L. 744-7 du CESEDA les demandeurs dont l'instruction de la demande ne relève pas de la responsabilité de la France en application du règlement de Dublin.
Nous proposons d'empêcher que des personnes d'ores et déjà particulièrement vulnérables puissent être mises à la rue et privées de tout moyen de subsistance. Le Gouvernement semble en effet prêt à priver les demandeurs et demandeuses d'asile d'un montant nécessaire à leur survie, s'ils ou elles refusaient d'être envoyés dans une région qu'ils n'auraient pas choisie. Les conditions matérielles d'accueil normalement allouées aux demandeurs et demandeuses d'asile sont indispensables pour survivre dans des conditions dignes, le temps de l'examen de leur demande et d'un éventuel recours. Il n'est donc absolument pas envisageable que ces aides de survie soient supprimées, pour quelque raison que ce soit. Obliger un demandeur ou une demandeuse d'asile à se rendre dans une région qu'il ou elle n'a pas choisie peut, en outre, entraver l'examen de sa demande. C'est par exemple le cas s'il ou elle était jusqu'alors suivi par une association : s'en retrouver éloigné pourrait affecter sa capacité à présenter un dossier complet et étayé.
Nous rejoignons ainsi l'avis du Défenseur des droits qui considère que ce dispositif conduirait à mal traiter les demandeurs et demandeuses d'asile, en allant jusqu'à mettre leur vie en danger, au prétexte de basses considérations budgétaires. Comme le constatent chaque jour les associations et les citoyens qui apportent leur aide aux migrants à la rue, dans le XIXe arrondissement de Paris, par exemple, ces mesures sont totalement inefficaces, puisque les personnes reviennent vers les lieux où elles ont des attaches et des repères, notamment associatifs. En plus d'être injustes et indignes, ces dispositions sont inefficaces.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Précisément, ces dispositions n'étaient pas assez contraignantes. Ce n'est pas une sanction. Cela vise à permettre une meilleure répartition sur le territoire et à éviter un engorgement là où l'hébergement des demandeurs d'asile est absolument saturé.
Avis défavorable.
Que les choses soient claires : nous pensons qu'il faut une meilleure répartition des personnes sur le territoire, parce que les points de saturation que constituent la région parisienne, le Nord-Pas-de-Calais ou la vallée de la Roya posent des problèmes aux migrants comme aux territoires. Mais ajouter des contraintes pour les demandeuses et demandeurs d'asile ne permettra pas de résoudre la situation. De notre point de vue, il faudrait – comme nous l'avons exposé dans nos propositions alternatives – mettre en place des incitations positives. Faire peser de nouvelles contraintes sur les personnes demandant l'asile ne marche pas, à moins de leur imposer de telles obligations que l'on contreviendrait à nos engagements internationaux. C'est l'enseignement de la pratique. Ces personnes reviennent de toute façon dans les régions qu'elles ont quittées, parce qu'elles n'ont pas les moyens d'aller ailleurs. C'est notre travail de fournir les moyens nécessaires pour que tous les territoires puissent assurer un accueil digne. Mais comme ce n'est pas le cas, de toute façon, elles reviennent et se retrouvent à la rue. De plus, vous les rendez dépendantes de tous les circuits souterrains, de toutes les formes d'exploitation. Si on leur enlève le peu d'argent qu'elles ont, elles vont se retrouver entraînées dans des actions possiblement illégales pour survivre. En définitive, vous accroissez la vulnérabilité, vous accroissez la clandestinité, sans régler quoi que ce soit.
C'est pourquoi nous souhaitons compléter cet alinéa par les dispositions figurant dans l'amendement.
L'amendement no 136 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement no 337 .
Cet amendement vise à abroger le quatrième alinéa de l'article L. 744-8 du CESEDA. En effet, cette disposition soulève deux difficultés qui justifient sa suppression. Premièrement, le refus des conditions matérielles d'accueil en cas de demande de réexamen revient à sanctionner un demandeur du seul fait qu'il fasse usage de son droit à réexamen. Deuxièmement, le refus de ces mêmes conditions matérielles en cas de présentation de sa demande d'asile après quatre-vingt-dix jours constituerait une double peine pour le demandeur.
Le refus de l'octroi des conditions matérielles d'accueil en cas de demande de réexamen n'est pas obligatoire. C'est l'OFII qui en décide, après avoir déterminé si la demande présentait ou non un caractère dilatoire. Avis défavorable.
L'amendement no 337 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l'amendement no 338 .
En l'état, le projet de loi prévoit que la décision de suspension des conditions matérielles d'accueil est d'effet immédiat, même si le demandeur la conteste. Cet amendement vise à ce que la décision de suspension soit susceptible de recours et que celui-ci soit suspensif, afin de ne pas placer le demandeur dans une situation de précarité incompatible avec la possibilité d'intenter un recours.
Un bon nombre de recours – 746 exactement – ont été engagés en 2017 contre le retrait des conditions matérielles d'accueil, et ces derniers sont suspensifs. Ces informations nous ont été confirmées par les représentants syndicaux des magistrats, que nous avons reçus. Un contentieux en la matière existe bel et bien.
L'amendement no 338 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement no 339 .
Le projet de loi fait peser des contraintes lourdes – comme cela a été rappelé à plusieurs reprises – sur le demandeur d'asile, qui vont au-delà de la pleine et entière coopération qu'un pays est en droit d'attendre de l'intéressé. À cela s'ajoute le fait que l'État ne remplit pas toujours ses obligations, notamment en matière de premier accueil et d'hébergement. C'est pourquoi nous souhaitons, par cet amendement, améliorer la rédaction de l'article 9 en ajoutant deux alinéas.
En tout état de cause, madame Karamanli, on ne refuse pas les conditions matérielles d'accueil en raison du manquement de l'administration à l'une de ses obligations. Donc avis défavorable.
L'amendement no 339 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement no 340 .
L'amendement no 340 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement no 341 .
L'amendement no 341 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Deux décisions récentes de la Cour de justice de l'Union européenne, intervenues le 19 juin et le 5 juillet 2018, ont clarifié l'articulation entre la directive « Retour » et la directive « Accueil ». Le présent amendement vise à permettre aux préfets d'appliquer l'article 8 du projet de loi, s'agissant de la préparation de l'éloignement des demandeurs d'asile dont le droit au maintien prend fin, en pleine conformité avec le droit de l'Union, tel que la Cour de justice de l'Union européenne vient de l'interpréter. La Cour a notamment rappelé que ces étrangers, notamment ceux originaires de pays d'origine sûrs, pouvaient faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français – OQTF – dès la décision de l'OFPRA. Mais elle a précisé que tant qu'un juge ne s'était pas prononcé sur leur situation, la directive « Accueil » leur demeurait applicable.
Afin d'assurer la pleine applicabilité de cette directive, le présent amendement prévoit que les demandeurs d'asile déboutés peuvent être soit assignés à résidence, soit placés en rétention, mais dans les seuls cas où l'article 8 de la directive permet un tel placement en rétention. Il s'agit notamment des situations dans lesquelles il faut déterminer les éléments sur lesquels se fonde la demande d'asile, et lorsqu'il est probable que l'étranger tentera de fuir ou en cas de troubles à l'ordre public. L'amendement prévoit également que, conformément à la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, l'étranger pourra bénéficier des conditions matérielles d'accueil jusqu'à une décision du juge de l'OQTF ou de la CNDA.
L'ensemble de ces modifications sont ainsi de nature à sécuriser le cadre dans lequel, à la charnière des directives « Retour » et « Accueil », les préfets pourront prendre des OQTF à l'encontre des demandeurs d'asile, notamment originaires de pays sûrs, déboutés par l'OFPRA.
Avis favorable.
On se complique un peu la vie. Dans différents pays européens – soumis aux mêmes directives – , le fait de refuser définitivement l'asile à une personne qui en fait la demande vaut obligation de quitter le territoire. Dans le cas présent, on doit jongler avec plusieurs dispositions, examiner des amendements et des sous-amendements du Gouvernement et de la rapporteure pour essayer de dénouer ce noeud au cerveau que l'on crée nous-mêmes en refusant la rédaction du Sénat. Cela nous paraît regrettable. Par ailleurs, la directive « Retour » permet, dans certains cas précis, de renvoyer des mineurs vers les pays d'origine. Je regrette que vous n'appliquiez pas toutes les possibilités offertes par la directive et que vous refusiez d'ouvrir le débat.
Le sous-amendement no 513 est adopté.
L'amendement no 489 , sous-amendé, est adopté.
L'article 9, amendé, est adopté.
La parole est à M. le ministre d'État, pour soutenir l'amendement no 490 .
Il s'agit d'un amendement de précision. Les centres provisoires d'hébergement ne sont pas compétents pour assurer la coordination des actions d'intégration des étrangers protégés qu'ils hébergent. Leur mission est l'accueil, l'hébergement et l'accompagnement linguistique, social, professionnel et juridique en vue de l'intégration des réfugiés. En revanche, ils peuvent participer aux actions menées en ce sens.
L'amendement no 490 , accepté par la commission, est adopté.
L'article 9 bis, amendé, est adopté.
La parole est à Mme Aina Kuric, pour soutenir l'amendement no 400 , portant article additionnel avant l'article 9 ter.
Cet amendement vise à supprimer les dispositions introduites par le Sénat afin de déroger aux règles d'acquisition de la nationalité française pour les personnes résidant dans le département de Mayotte. Ces dispositions font en effet totalement abstraction de la situation mahoraise dans sa globalité et ne proposent aucune solution durable et efficace pour le département. La lutte contre l'immigration illégale ne doit pas se faire au détriment de l'étude des situations personnelles ou individuelles. Depuis 2011, le département de Mayotte connaît une phase d'intégration républicaine. Il s'agirait là d'un pas en arrière.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM, ainsi que sur les bancs des groupes NG, FI et GDR.
Madame Kuric, je vais me contenter de vous donner un avis défavorable sans argumenter davantage puisque Mme Ramlati Ali va intervenir sur l'article 9 ter et que nous allons aborder le sujet de Mayotte. Il me paraît important d'entendre notre collègue en priorité, puisqu'elle est la mieux placée pour nous apporter des explications. Je pourrai m'expliquer plus en détail sur Mayotte à d'autres moments du débat. Avis défavorable.
Même avis. Nous parlerons dans un instant de Mayotte.
L'amendement no 400 n'est pas adopté.
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 9.
La parole est à Mme Ramlati Ali.
Le 11 juillet dernier, la commission des lois a adopté des amendements adaptant les conditions d'accès à la nationalité française à Mayotte. Cela fait suite à l'adoption au Sénat des amendements de mon collègue Thani Mohamed Soilihi, extraits de sa proposition de loi qui a reçu un avis favorable du Conseil d'État le 5 juin dernier. Ces nouvelles dispositions répondent à une situation urgente, exceptionnelle et unique sur le territoire français. La pression migratoire à Mayotte est sans commune mesure avec ce que l'on connaît ailleurs et a de graves conséquences sur les plans économique, social et culturel.
Je rappelle que plus de 40 % des adultes présents à Mayotte sont de nationalité étrangère. Parmi eux, la moitié sont des migrants illégaux, ce taux d'irrégularité atteignant 74 % chez les personnes âgées de 18 à 24 ans. Un taux de natalité hors normes fait du centre hospitalier de Mayotte la première maternité de France, avec près de 10 000 naissances par an. On dénombre à Mayotte, au minimum, 3 000 mineurs isolés. Plus de 40 % des patients soignés au centre hospitalier de Mayotte viennent des Comores. Le grand nombre de décès qui surviennent durant la traversée entre Anjouan et Mayotte constitue une catastrophe humanitaire – dont on ne parle nulle part. Tous ces chiffres doivent être rapportés à un territoire de 374 kilomètres carrés, qui connaît la densité la plus forte hors Île-de-France. Mayotte, c'est une situation sanitaire inacceptable et indigne d'un territoire de la République française
Aussi, mes chers collègues, je me réjouis que la commission des lois ait pris la pleine mesure du problème et entériné ces dispositions, à l'instar du Président de la République, qui les a soutenues lors des assises des outre-mer, à l'Élysée, le 28 juin dernier, les considérant légitimes au regard de la situation « exceptionnelle de Mayotte ».
Je veux dire aux collègues qui ont déposé des amendements de suppression du titre Ier bis et engagé un recours devant le Conseil constitutionnel que j'entends leurs arguments. Néanmoins, je leur rappelle que ces dispositions constituent une exception justifiée par la situation mahoraise, et ne constituent point une atteinte au droit du sol. Je ne peux être plus explicite que le Conseil d'État, qui a rendu un avis clair et motivé.
Applaudissements sur de très nombreux bancs du groupe LaREM.
Cet article, ajouté par le Sénat, qui adapte l'application du droit du sol pour l'accès à la nationalité française à Mayotte, nous paraît inacceptable.
« Regardez la situation ! » parmi les députés non inscrits.
Parler d' « adaptation » est un doux euphémisme quand il s'agit en réalité de modifier le code civil dans le but de remettre en question le droit du sol dans le département de Mayotte. C'est une grave remise en cause de notre unité territoriale. C'est intolérable. Un enfant né à Mayotte doit disposer des mêmes droits que tout enfant né ailleurs sur le territoire de la République française. La condition cumulative consistant à imposer que l'un des parents soit, au jour de la naissance, présent de manière régulière sur le territoire national, depuis plus de trois mois, crée une inégalité de droit – dont vous devriez avoir conscience – contraire à nos valeurs et à l'esprit de la Constitution.
Avec cet article, accoucher à Mayotte ou en métropole n'octroierait plus les mêmes droits au sein de notre République. La situation mahoraise, complexe certes, ne doit pas servir de prétexte pour porter atteinte au droit du sol. Votre article va à l'encontre de l'histoire et de notre tradition d'accueil. C'est pourquoi nous voterons contre son adoption.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI. – Mme Sonia Krimi applaudit également.
Nous connaissons la réalité de Mayotte, et j'entends les propos de notre collègue Ali Ramlati. Nos concitoyens y rencontrent de grandes difficultés et y subissent des discriminations, dues au retard pris dans l'investissement social et éducatif, ainsi qu'au niveau élevé du chômage et de la pauvreté.
Nous avons toujours soutenu les revendications des élus locaux et nationaux demandant à la République d'assurer et d'assumer l'égalité de tous les citoyens, notamment dans les territoires d'outre-mer, qui sont malheureusement fort délaissés.
Cohérents avec cette position, nous maintenons notre opposition à cet article, fondée sur notre volonté de maintenir avant tout l'égalité. Vous dites que cet article est une exception, mais elle est insupportable car elle ouvre une brèche. L'application du droit du sol se révèle déjà défectueuse, le véritable droit du sol n'existant pas aujourd'hui dans notre pays. En effet, certains de nos concitoyens et concitoyennes, nés en métropole, doivent surmonter beaucoup d'obstacles pour faire respecter leurs droits.
Cet article n'arrêtera pas l'immigration à Mayotte. Des milliers, des milliers et des milliers de Comoriens et Comoriennes meurent dans les eaux de Mayotte – vous vous souvenez que votre Président parlait avec humour des kwassa-kwassa – …
Exclamations sur les bancs du groupe LaREM
… parce qu'ils quittent leur archipel pour des raisons qui vont perdurer.
Il faut garantir l'égalité républicaine en matière sociale, économique, juridique et citoyenne. Voilà pourquoi nous sommes contre l'adoption de cet article.
Applaudissements sur les bancs des groupes FI et GDR. – Mme Sonia Krimi applaudit également.
Nous pouvons nous réjouir que la situation de Mayotte, particulière du fait de la pression migratoire en provenance des Comores, soit enfin prise en compte. Néanmoins, la solution proposée ne nous semble pas complètement satisfaisanteAujourd'hui, face au flux migratoire grandissant et à la pression croissante qui va s'exercer sur la France, il faut interroger l'ensemble de notre stratégie du droit du sol, non pour y mettre fin, mais pour conditionner ce droit à la présence légale sur le territoire national. Il ne nous semble pas logique qu'une personne présente illégalement sur le territoire national, à Mayotte ou ailleurs, puisse bénéficier du droit du sol.
Enfin, j'aimerais corriger une manipulation de l'avis du Conseil d'État sur cette disposition. L'accord du Conseil d'État sur sa rédaction ne signifie pas que celui-ci soit favorable à ce que la discussion sur l'évolution du droit du sol en France soit limitée, mais qu'il valide l'application, sur une petite portion du territoire national, de règles différentes. Nous pouvons nous en réjouir, car Mayotte connaît des problèmes particuliers, mais il ne faut pas utiliser cet avis du Conseil d'État pour expliquer que son accord sur cette disposition montre son désaccord sur l'élargissement de la question. A priori, il n'y a aucune raison pour que le Conseil d'État empêche le législateur de débattre des conditions générales d'application ou d'octroi de la nationalité. L'avis du Conseil d'État ne pourra donc pas être mobilisé contre l'excellent amendement à venir, déposé par nos collègues Ciotti et Larrivé.
Nous sommes ici pour essayer de trouver des solutions à des problèmes patents. Cet article, cela est suffisamment rare dans ce projet de loi pour le souligner, offre une solution, pas forcément idoine, mais la seule applicable concrètement.
Lors de la première lecture de ce texte, notre collègue Mansour Kamardine nous a expliqué ce qu'il se passait réellement à Mayotte, où des clandestins font la loi et attaquent des Français, où les classes sont surchargées, où les cours ont lieu à moitié le matin et à moitié l'après-midi pour pouvoir scolariser tout le monde, où la maternité de Mamoudzou est la première d'Europe et où l'équivalent d'une classe naît chaque jour.
Si la proportion de clandestins était la même en métropole qu'à Mayotte, il y en aurait 20 millions. Est-ce tolérable ? Devons-nous rester les bras croisés ? Ne devons-nous pas aider ce département français et ses habitants, qui ont tous les yeux braqués sur le vote de l'Assemblée nationale ? Au cours des quatre derniers mois, 12 000 clandestins sont arrivés à Mayotte. Ne devons-nous pas essayer de mettre un terme à ces arrivées massives ? Je le pense, tandis que d'autres dans cet hémicycle pensent le contraire et préfèrent l'abandon à l'action. Ce ne sera pas la position que nous prendrons. Le groupe Les Républicains fera, comme l'a dit mon collègue Schellenberger, d'autres propositions, afin de pouvoir prendre les mêmes mesures dans d'autres endroits de la République.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Sur l'amendement no 106 que nous examinerons lui aussi tout à l'heure, je suis saisi par le groupe Les Républicains d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Pierre Dharréville.
Nous proposerons de supprimer cet article, qui exige que l'un des parents d'un enfant né à Mayotte soit, au jour de la naissance, présent de manière régulière sur le territoire national depuis plus de trois mois.
Nous récusons cette logique consistant à casser un peu plus l'unicité de la République dans le territoire mahorais et contribuant à renforcer l'idée qu'il existe des citoyens et des citoyennes de seconde zone, ayant des droits et des devoirs différents.
Cet article pourrait être jugé inconstitutionnel, puisque Mayotte, en tant que département français, doit bénéficier de conditions identiques à celles du reste du pays. La disposition ajoutée au Sénat met gravement en cause l'indivisibilité de la loi française en matière de nationalité. Certains juristes s'inquiètent qu'une telle mesure n'ouvre la voie à d'autres départements formulant des demandes de différenciation. Nous considérons que la République doit maintenir son unicité, hisser son niveau d'exigence et garantir l'État de droit, partout où elle se trouve.
Cette disposition ouvre une brèche à tous ceux qui veulent remettre en cause le droit du sol, et ce en totale contradiction avec nos principes fondamentaux et l'intérêt supérieur de l'enfant. Les problèmes posés par les caractéristiques démographiques du territoire mahorais ne se résoudront pas au moyen de mesures toujours plus répressives, mais principalement par la clarification de notre place aux Comores et par le fait d'y assumer et assurer, sans détour, nos responsabilités. La remise en cause du droit du sol dans le territoire français ne constituera jamais une réponse et n'apportera pas de solution aux problèmes soulevés.
Il convient d'assurer pleinement l'égalité des droits dans tout le territoire. Cela fait longtemps que la situation sociale à Mayotte, qui alimente des tensions et parfois de l'insécurité, appelle une solidarité nationale à la hauteur. C'est en ce sens qu'il faut chercher des solutions.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, NG et FI.
Chers collègues, j'entends vos arguments, mais permettez-moi de m'étonner de recevoir, en réponse à l'un de mes amendements sur Mayotte, l'invitation à laisser les élus mahorais s'exprimer.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI et sur quelques bancs du groupe LR.
Ces derniers prennent la parole sur les sujets concernant la France métropolitaine, et j'ai le souvenir d'une République indivisible, dans laquelle tous les citoyens sont concernés par les lois votées par le Parlement français.
Je me permets également de remettre en question la pertinence de l'article 9 ter, parce que je me demande si le droit du sol constitue véritablement le problème. Nous partageons tous le constat des grandes difficultés de Mayotte, mais ce vrai problème doit être traité dans son ensemble. Je souhaiterais me joindre à vous pour y travailler, mais ne dites pas que les flux migratoires en provenance des Comores sont motivés par la demande de nationalité. En effet, l'acquisition de la nationalité par déclaration n'est pas la plus répandue à Mayotte. Le rapport de 2016 sur les orientations pluriannuelles de la politique d'immigration du Gouvernement évoque les quinze pays dont les ressortissants acquièrent la nationalité française par déclaration, et les Comores n'y figurent pas ; les pays concernés sont l'Algérie, le Maroc, la Tunisie, la Fédération de Russie, le Cameroun, la Côte d'Ivoire, le Sénégal, la Turquie, le Mali, la République démocratique du Congo, Haïti, Madagascar, la Roumanie, le Portugal et le Liban. Je ne vois pas les Comores !
Applaudissements sur les bancs des groupes FI, GDR et NG. – Mme Sonia Krimi applaudit également.
Ce sujet nous renvoie à une question profonde et historique, relative à ce qu'est notre République et ce qu'est la France. La France est une nation politique. Est citoyen français celui qui participe à la vie collective, politique et publique : c'est le grand acquis de la Révolution de 1789 et c'est de ce terreau qu 'est né le droit du sol. On n'est pas Français parce que l'on a des ancêtres français, mais parce que l'on est citoyen de la République. Tel est le grand principe de la Révolution de 1789. Revenir sur ce principe, c'est revenir sur celui d'universalisme et d'universalité de la devise républicaine « liberté, égalité, fraternité ». C'est cela dont il est question avec le vote de cet article
Le droit du sol a déjà été remis en question, et sa version intégrale n'existe plus, ce qui crée des problèmes inutiles et nombreux au quotidien.
Alors, bien sûr, vous me direz que la situation à Mayotte est particulière ; elle est en effet spécifique, puisque ce territoire ultramarin est entré, à sa demande, dans un processus de départementalisation. Il s'agit d'un territoire abandonné par la République, parce que les investissements dans les services publics et ceux qui permettraient son développement endogène n'existent pas, les gouvernements successifs n'ayant pas fait les choix budgétaires nécessaires pour garantir la départementalisation dans de bonnes conditions. C'est cela que les Mahorais paient aujourd'hui, et non l'afflux migratoire.
Camoufler ces abandons successifs des gouvernements au nom d'une rupture d'égalité revient à en finir doublement avec la République une et indivisible.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Mes chers collègues, que de temps perdu pour prendre en compte la réalité de la situation catastrophique de l'île de Mayotte ! Nul dans cet hémicycle, excepté bien sûr les députés de Mayotte, ne peut donner de leçons aux Mahorais sur ce que devraient être la générosité ou le droit du sol, et ce pour ne pas avoir vécu le point auquel la situation est arrivée à Mayotte.
Cette situation est devenue proprement ingérable. Il faut avoir conscience de l'augmentation dans les années à venir des flux migratoires ; la saturation de nos capacités d'accueil nous conduira, à un moment donné et quoi qu'il arrive, à remettre en cause les règles du droit du sol, à Mayotte et dans tout le territoire national.
Dans certains cas – je ne dis pas que cela concerne tous les immigrés – , les procédures de demande d'asile sont dévoyées : de jeunes couples arrivent, par exemple des Balkans, contournent les procédures d'asile, déposent et redéposent des demandes jusqu'à la naissance d'un enfant. En vertu du droit du sol, l'enfant acquiert très facilement la nationalité française, puis les principes du regroupement familial permettent à toute la famille de rester sur le sol français. Il faut le dire, et je ne suis pas caricatural, …
… car, certes pas dans tous les cas, mais dans la majorité d'entre eux, il y a la volonté de bénéficier de notre système d'aides sociales.
Il faut prendre en compte la réalité de la situation, non seulement à Mayotte où elle est la plus terrible, mais aussi dans l'ensemble du territoire national. Il faut dire, en toute responsabilité, que l'acquisition de la nationalité française est un processus légal et long et qu'il nous faudra revenir sur ces règles du droit du sol.
Chers collègues du groupe La France insoumise, vous ne pouvez pas affirmer que la situation de Mayotte ne découle pas de l'immigration clandestine. Le département de Mayotte se trouve dans une situation très difficile et vit une crise sans précédent. Les clandestins envahissent les bancs des écoles ainsi que les hôpitaux.
L'immigration est hors de contrôle. Ce qui se produit à Mayotte illustre les incapacités et les échecs des gouvernements qui se sont succédé jusqu'à présent. Je me réjouis que les membres du groupe Les Républicains se disent aujourd'hui favorables à la suppression du droit du sol.
Je rappelle toutefois que nous avons déposé en première lecture un amendement en ce sens qu'ils se sont abstenus de soutenir.
Il faut mettre un terme à ce qui constitue un appel d'air encourageant l'immigration clandestine à Mayotte – et plus généralement dans notre pays – , laquelle découle bel et bien du droit du sol. Nous ne pouvons pas abandonner nos compatriotes dans une telle situation. Ce qui se passe dans ce département préfigure notre avenir si nous ne prenons pas les mesures nécessaires à la lutte contre l'immigration clandestine dans notre pays.
« Ah ! » et applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Nous voici à nouveau réunis afin de débattre de la situation de Mayotte. Je tiens à dire tout le plaisir que j'éprouve à constater que nous nous retrouvons après quelques semaines en vue de dégager une majorité – du moins je l'espère – à ce sujet, afin de tenir compte des spécificités de ce territoire. J'ai bien écouté nos collègues et souhaite rappeler ma conception de la République. Si celle-ci est une et indivisible, elle n'interdit pas la prise en considération des spécificités de certains territoires, telle que nous l'envisageons aujourd'hui.
Aux yeux des élus de Mayotte siégeant dans cette enceinte, le droit du sol n'est pas un sujet de débat. Sur un territoire de 374 kilomètres carrés, la proportion de population d'origine étrangère clandestine excède 52 %. Transposé au territoire métropolitain, ce chiffre correspondrait à la présence de 35 millions d'étrangers en situation irrégulière. Évoquerait-on alors encore le droit du sol et les principes de la République ?
La République autorise la prise en considération de situations particulières. Enfin, je demande à ceux qui nous opposent ces principes si certains d'entre eux, tels que l'égalité sociale ou le droit à la sécurité, ne sont pas méconnus à Mayotte ? S'agissant d'égalité et de grands principes, j'aurais aimé que nous nous mobilisions tous afin de faire en sorte qu'à Mayotte la sécurité aussi bien que l'égal accès à la sécurité sociale soient garantis à nos concitoyens de la même façon qu'ailleurs.
Ceux qui prônent l'arrivée de tout le monde à Mayotte ne rendent pas service aux populations qui y vivent ni à ceux qui veulent y venir.
À Mayotte, territoire de 374 kilomètres carrés, la République n'a pas les moyens d'accueillir tout le monde. C'est pourquoi je remercie ici ceux qui ont compris la situation de ce département dès la première lecture du texte et encourage ceux qui l'ont comprise à l'issue de plusieurs allers-retours.
Nous sommes confrontés à une situation spécifique, qui appelle une réponse spécifique. Je remercie ceux qui franchiront le pas afin d'apporter des réponses à la situation de Mayotte.
Applaudissements sur les bancs des groupes LR et UDI-Agir.
J'ouvrirai mon propos en m'adressant à nos collègues mahorais, auxquels mon soutien ne fera jamais défaut afin de faire en sorte que la République satisfasse les besoins de la population partout sur le territoire et que le traitement des Françaises et des Français obéisse à une véritable équité territoriale, où qu'ils se trouvent sur le territoire national.
J'estime que l'article 9 ter a été mal préparé. On affirme à raison que la maternité de Mayotte est l'une des plus importantes d'Europe, et que la majorité de celles qui y accouchent sont des étrangères. Mais à aucun moment on n'indique combien d'enfants nés à Mayotte deviennent Français. L'article 9 ter a précisément pour objet, si je comprends bien, de lutter contre ce phénomène. Par ailleurs, il laisse penser que l'on devient automatiquement français si l'on est né en France. C'est faux.
Sur la base de ces observations, j'estime qu'il est nécessaire de mieux préparer l'article. Rien ne justifie que l'on fasse entorse aux règles d'acquisition de la nationalité française, d'autant moins – s'agissant des territoires d'outre-mer, en particulier de celui de Mayotte – qu'on ne peut pas affirmer dans cet hémicycle qu'il faut assurer les mêmes droits et les mêmes devoirs sur le territoire mahorais qu'ailleurs et, en même temps, demander que celui-ci fasse exception sur ce point. La République à la carte n'existe pas.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM, ainsi que sur les bancs des groupes FI et GDR.
Enfin, je me suis replongé dans le compte rendu des débats ayant précédé l'instauration du « visa Balladur ». Il s'agissait à l'époque d'instaurer un visa afin de réduire le nombre d'arrivées en provenance des îles voisines. Résultat : 10 000 morts entre Anjouan et Mayotte depuis 1995.
Ainsi, l'adoption de l'article 9 ter n'aura pas pour conséquence de réduire le nombre de migrants en provenance des îles voisines, au contraire.
Monsieur le président, certaines interventions de deux minutes semblent plus longues que d'autres !
Je conclus, monsieur le président. Le trafic dépend de ce que l'on paie pour parcourir le trajet entre Anjouan et Mayotte et du souhait de voir son enfant acquérir la nationalité française. Je rappelle qu'il existe un délit de reconnaissance frauduleuse de paternité, consistant à se déclarer père d'un enfant alors qu'on ne l'est pas. Nous encourageons un trafic qui n'est pas sain pour la République.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM, ainsi que sur les bancs des groupes FI et GDR.
Je reprendrai les termes employés par notre collègue : pas d'exception sur le territoire français ! Pas de République à la carte ! Les mêmes droits pour tous !
Le problème est aigu et complexe. L'article 9 ter est mal préparé et mal formulé. La solution proposée est mauvaise. Comme l'a rappelé notre collègue Aina Kuric, les Comores ne figurent pas dans la liste des principaux pays dont les ressortissants demandent à acquérir la nationalité française. Le problème est donc ailleurs. Certes, il existe, mais ce n'est pas en cherchant à refouler les gens qu'on parvient à le résoudre.
Exiger, pour l'acquisition de la nationalité française, que l'un des parents de chaque enfant né à Mayotte y réside de façon régulière depuis plus de trois mois avant l'accouchement complique la situation mais ne résout rien. Ce n'est pas en cherchant à refouler que l'on y parvient, je le répète.
Monsieur le ministre d'État, vous évoquez l'augmentation du nombre d'OQTF et vous vous en félicitez. Mais les personnes visées ont-elles réellement quitté le territoire ? Tel n'est pas le cas de la plupart d'entre elles, je puis en témoigner. Elles en sont réduites à adopter un autre mode de vie, bien plus indigne.
À Mayotte, vous créez un problème. Je propose donc de supprimer l'article 9 ter et de travailler à une proposition de loi plus adaptée à la situation.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM, ainsi que sur les bancs des groupes FI et GDR.
Il n'y a pas les humanistes, les utopistes et les rêveurs d'un côté, et les pragmatiques et les réalistes de l'autre. Il importe d'en être conscient en abordant ce débat de cette façon, faute de quoi chacun est cornerisé et aucun débat n'est possible.
L'article 9 ter n'a pas été voté en première lecture mais introduit par le Sénat, contre l'avis du Gouvernement. Je ne détaillerai pas les précisions apportées par M. le ministre d'État sur ce sujet.
Rires sur les bancs du groupe LR.
Je ne comprends pas pourquoi on se refuse à évoquer la situation des enfants dans le cadre du texte, ce qui m'a amené à ne pas déposer à nouveau des amendements sur ce sujet, alors même que nous évoquons ici les conditions d'acquisition de la nationalité française, dont il me semblerait plus sérieux de débattre ailleurs. Plusieurs de nos collègues estiment que les étrangers, ces horribles étrangers dont je faisais jadis partie, viennent en France pour percevoir les aides sociales.
Exclamations sur les bancs du groupe LR et parmi les députés non inscrits.
Je rappelle que le budget consacré à la solidarité représente 3,64 % des sommes allouées à la protection sociale. Ainsi, pour ces horribles étrangers, ces pauvres gens qui ne viennent que pour profiter des aides sociales, on peut chercher l'argent ailleurs.
Nous ne disons pas qu'ils sont horribles, mais qu'ils ne peuvent acquérir automatiquement la nationalité française !
J'espère que le Mozambique, au large duquel se trouvent les Comores, ne votera pas dans cent ans, lorsque les Comoriens seront obligés de quitter leur île en raison de la catastrophe écologique qui nous attend, de telles dispositions de repli.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM ainsi que sur les bancs des groupes NG, GDR et FI.
Monsieur le ministre d'État, je comprends bien que le Gouvernement tente de trouver, avec cet article, des motifs de freiner le flux migratoire à Mayotte. Peut-être des dispositions de ce type peuvent-elles dissuader certaines personnes prévoyant d'émigrer à Mayotte afin que leur enfant acquière la nationalité française. Quoi qu'il en soit, le dispositif envisagé ouvre une brèche dangereuse dans un pan de notre droit, et pas n'importe lequel : celui de la nationalité. Nous craignons qu'il en résulte une contagion à d'autres territoires.
Quid alors d'un individu entré dans une partie du territoire français davantage exposée au risque migratoire, tel que le Sud ou l'Est du territoire métropolitain ? La proposition de notre collègue Essayan consistant à élaborer un texte de loi spécifique à Mayotte et à exclure ce sujet du présent texte me semble relever d'une grande sagesse.
Applaudissements sur les bancs des groupes UDI-Agir, FI et GDR.
Rires.
Le droit du sol et l'acquisition de la nationalité française font l'objet de débats récurrents depuis la Révolution française. Le XIXe siècle a vu l'affrontement de ceux ayant une conception horizontale de la nationalité, aux yeux desquels celle-ci repose avant tout sur l'appartenance à une communauté de destin – la République – , et ceux qui en avaient une conception verticale, tels Maurras, pour lesquels elle ne peut procéder que de l'héritage, donc du droit du sang.
Depuis des décennies, en dépit du fait qu'elle ait été ébréchée – ce que nous regrettons – , notamment par les mesures Pasqua de 1993, cette question est absolument centrale. En réalité, elle fonde ce qu'est une nation. Celle-ci repose-t-elle sur une citoyenneté ethnique, renvoyant à une définition rance, celle de l'extrême-droite, ou sur une citoyenneté politique ? Nous, nous défendons et défendrons toujours celle-ci.
J'entends bien que la situation à Mayotte pose problème, mais je doute que celui-ci puisse être résolu de la façon envisagée, car il est complexe. Mayotte ne peut pas constituer l'exception par laquelle nous ouvririons une brèche dans le droit du sol en prévoyant qu'un enfant né à Mayotte n'est Français que si ses parents y résidaient auparavant, ce qui introduit dans notre droit la notion d'héritage, donc le droit du sang.
C'est pourquoi nous nous opposons à l'article 9 ter – comprenez-le ! On ne peut pas résoudre le problème de Mayotte en remettant en cause ce qui fonde la définition de la nationalité en France, ainsi que dans d'autres pays – et c'est heureux. Il s'agit d'un combat absolument essentiel, qui anime toujours, en Europe et ailleurs, les débats sur la définition de la nation. Je vous demande, chers collègues, de ne pas mettre le doigt dans cet engrenage, si sensible la situation à Mayotte soit-elle.
Je voudrais répondre à notre collègue Sonia Krimi – amicalement, mais fermement.
Exclamations sur les bancs du groupe FI.
C'est vrai, il n'y a pas, chère Sonia, d'un côté les humanistes et de l'autre les pragmatiques. Mais il n'y a pas non plus d'un côté les bons et de l'autre les méchants. Il y a, dans le groupe majoritaire, des députés responsables qui cherchent toujours la voie de l'intérêt général et de l'efficacité.
Vifs applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Cette remarque s'adresse d'ailleurs tout autant aux groupes de l'opposition, et en particulier à M. Coquerel et à Mme Obono, qui ne cessent d'aller trop loin dans les arguments.
Tous, nous sommes les élus de la nation ; nous avons non seulement le droit, mais le devoir, de nous intéresser à chaque point du territoire national et d'adopter une perspective qui ne soit pas uniquement locale. Mais rien n'interdit d'écouter les acteurs locaux.
Rien n'interdit d'écouter les députés de ce territoire qui est, vous l'avez dit, l'un des départements d'une République indivisible. Rien n'interdit de ne pas se voiler la face.
Rien n'interdit de ne pas être aveugle quand la situation est si grave, si douloureuse, pour les populations locales. Vous dites que nous allons attaquer le droit du sol. Mais pas du tout !
D'ailleurs, le Conseil d'État, juge administratif suprême, le dit dans son avis du mois d'avril dernier, qui est très clair : il n'y a pas d'atteinte au droit du sol, mais l'ouverture d'une possibilité d'un ajustement des conditions d'accès à la nationalité. Pour une condition de résidence de trois mois, vous agitez la peur d'une atteinte au droit du sol !
Protestations sur les bancs du groupe FI.
Nous allons soutenir les acteurs locaux, et les représentants de la nation élus à Mayotte…
… parce que nous considérons que nous pouvons aujourd'hui apporter une solution, au sein d'un programme global.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Rires.
Mesdames et messieurs les députés, je comprends les réflexions de certains de vos collègues : en effet, lorsque l'on touche au droit du sol, même pour un territoire comme Mayotte, il faut le faire avec précaution, afin d'éviter toute généralisation, demain, de la remise en cause du droit du sol.
Mais qui peut ici nier que la situation de Mayotte est particulière ? Tout à l'heure, votre collègue Mansour Kamardine a rappelé les chiffres ; tous les jours, nous demandons quotidiennement aux Comores de reprendre un certain nombre de leurs ressortissants qui se trouvent à Mayotte en situation irrégulière, mais le pays refuse. Nous sommes dans une situation difficile, et d'autant plus difficile que les Comores traversent une crise grave : il y aura, dimanche prochain, un référendum constitutionnel. Les règles seront plus compliquées encore.
Exclamations sur les bancs du groupe FI. – « Chut ! » sur les bancs du groupe LaREM.
Il s'est renseigné, et il n'a pas ajouté « selon les informations à ma disposition » !
Nous avons donc repris les propositions qui nous ont été faites par le sénateur de Mayotte Thani Mohamed Soilihi, qui a pris la précaution de les faire valider par le Conseil d'État. Celui-ci, saisi par le Sénat, a conclu qu'elles ne posaient aucune difficulté constitutionnelle ni conventionnelle, dès lors que la proposition de loi se place dans le cadre de l'article 73 de la Constitution, et qu'elle fait partie des « lois de souveraineté » qui peuvent faire l'objet d'adaptations dans les départements d'outre-mer. En l'espèce, cette adaptation paraît au Conseil d'État justifiée, au regard des caractéristiques et contraintes particulières – établies et documentées – de ce territoire, et limitée. Il n'y a pas d'atteinte substantielle au droit du sol. Enfin, si personne ne prétend qu'elle réglera tous les problèmes, la modification proposée apportera une réponse adaptée et proportionnée.
Cette évolution nous paraît donc à la fois nécessaire et équilibrée ; c'est pourquoi nous vous demandons de la soutenir.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – M. Mansour Kamardine applaudit également.
Mes chers collègues, j'ai mal au coeur quand je pense à cet article et aux conséquences qu'il aura.
Je suis élu de La Réunion, je suis allé à Mayotte ; j'ai vu, j'ai écouté et j'ai entendu. J'ai le droit de m'exprimer sur ce qui s'y passe.
Oui, le droit du sol est l'un des principes essentiels de la République. Dès la Constitution de 1791, tout enfant né et résidant en France est citoyen français, même s'il est né de parents étrangers.
La situation à Mayotte n'est pas un problème de nationalité, mais de développement, de co-développement régional et de services publics ! J'invite mes collègues à ne pas céder un pouce sur nos principes : Mayotte n'est pas un caillou hors de France, Mayotte est un département français. Beaucoup de nos collègues l'ont assuré il y a quelques mois lorsque l'on a beaucoup parlé de la crise traversée par ce territoire.
Prouvez que vous pensiez ce que vous disiez : si Mayotte est française, elle doit avoir le même droit que les autres territoires, et les enfants nés à Mayotte doivent être aussi français que ceux nés à La Réunion, en Guadeloupe, en Bretagne ou à Paris ! Retrouvez la raison, mes chers collègues : on ne peut pas découper les principes fondateurs de la République et les appliquer à la carte. Le droit du sol doit s'appliquer partout : tout enfant né en France doit pouvoir, s'il le souhaite, obtenir la nationalité française. L'adaptation oui – mais oui aussi à une politique de co-développement au service des droits humains !
Je dis à mes collègues élus à Mayotte qu'ils font sûrement le bon diagnostic, mais que les solutions qu'ils proposent sont mauvaises.
J'en ai marre, comme député de La Réunion, d'entendre mes frères et soeurs réunionnais dire que s'il y a autant de problèmes à La Réunion, c'est à cause des Mahorais ! Et j'en ai marre d'entendre que s'il y a autant de problèmes à Mayotte, c'est à cause des Comoriens !
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
La parole est à Mme Elsa Faucillon, pour soutenir l'amendement no 251 .
Ce n'est pas seulement une brèche juridique que vous ouvrez en attaquant le droit du sol. Les débats que nous venons d'entendre depuis trente minutes, les mots prononcés à l'égard d'hommes et de femmes qui doivent fuir leur pays pour différentes raisons le montrent : c'est une brèche dans les consciences que vous ouvrez. Ce sera la condition de possibilité de l'ouverture, par la suite, d'une brèche juridique.
Cette logique de restriction du droit du sol repose sur le fameux argument de l'appel d'air, que nos collègues de droite vont régulièrement reprendre ; or il ne repose sur rien. Il ne sert qu'à faire croire aux Français que des mesures plus restrictives empêcheront des hommes et des femmes de venir en France. C'est faux ! Les seules conséquences de ces dispositions, ce seront le renforcement des passeurs et la multiplication des drames.
Je ne nie nullement les spécificités de Mayotte, et les extrêmes difficultés sociales comme environnementales qu'elle rencontre. Mais si vous pensez que c'est en restreignant les droits, en s'écartant de nos valeurs, que vous résoudrez des problèmes, vous vous trompez. Encore une fois, ces mesures ne provoqueront que de nouveaux drames, et elles ne serviront qu'à forcer plus de gens encore à vivre dans l'irrégularité.
Cessez de vous prétendre les seuls responsables face à des émotifs. Il n'y a pas les émotifs et les solides, les responsables et les irresponsables ! Si vous voulez vous montrer responsables, rejetez cette proposition.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement no 379 .
Créer un régime dérogatoire pour Mayotte ne résoudra rien ; mais limiter le droit du sol, même à Mayotte seulement, c'est ouvrir la boîte de Pandore.
Cette volonté d'adapter le droit du sol pour Mayotte est tout, sauf nouvelle. En 2006, une disposition comparable avait déjà été envisagée par le Gouvernement de l'époque – vous voyez à qui je fais allusion.
Cette disposition pose tout de même plusieurs problèmes. Tout d'abord, sa conformité à la norme suprême, et en particulier à son article 73, est incertaine. Par ailleurs, adapter un principe de droit pour traiter un problème qui se pose dans un autre domaine, mais pour lequel on n'a pas trouvé de solution directe, c'est contestable. Il convient enfin de rappeler qu'un enfant dont la mère accouche à Mayotte ne devient pas automatiquement français.
Vous choisissez ici un mauvais moyen d'agir, et cette solution sera inefficace. Il y a d'autres moyens de répondre à la crise de Mayotte.
J'ajoute qu'il existe un contexte historique régional de circulation,. En revanche, il n'y pas d'accords bilatéraux adaptés avec les États riverains, et l'organisation sanitaire régionale est insuffisante, alors qu'elle serait de nature à résoudre bien des problèmes.
Ces éléments justifieraient à eux seuls le rejet de cet article. J'invite tous nos collègues à réfléchir : nous pouvons trouver d'autres moyens pour répondre aux besoins de Mayotte.
Je n'opposerai pas ici l'émotion à la raison. Il est impossible de ne pas être ému par la situation insupportable que connaît la population mahoraise. Mais soyons aussi cartésiens : nous fabriquons la loi, et la décision que nous nous apprêtons à prendre est importante pour la République.
Lorsque Mayotte est devenue un département, en 2011, des engagements ont été pris, en particulier celui de travailler sur le développement des îles avoisinantes. C'est primordial, puisque l'île la plus proche n'est qu'à 70 kilomètres. La coopération paraissait déjà cruciale à l'époque.
La solution proposée aujourd'hui est une fausse solution. Je vous ai donné les chiffres tout à l'heure : la population comorienne n'acquiert pas la nationalité française par déclaration, ce n'est pas vrai ! Nous partageons, je le redis, le constat des difficultés de Mayotte. Mais les leçons que vous en tirez sont mauvaises. Ne nous trompons pas de débat !
Ne nous cachons pas derrière les peurs du peuple mahorais pour ne pas prendre nos responsabilités ! Ne creusons pas encore davantage les inégalités entre les populations de nos départements d'outre-mer et les métropolitains ! N'éloignons pas Mayotte de notre République !
Applaudissements sur lquelques bancs du groupe LaREM, ainsi que sur les bancs des groupes NG, FI et GDR.
Nous nous sommes engagés à intégrer Mayotte dans la République française. Ne revenons pas en arrière ! Assumons nos responsabilités, par un vrai choix !
Monsieur le ministre d'État, j'appelle à votre bienveillance afin de travailler sur le sujet de Mayotte dans sa globalité. Par cet article, nous ne réglons absolument rien. Nous faisons semblant de nous préoccuper d'une population qui vit dans de grandes difficultés, en ignorant le vrai problème.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM,ainsi que sur les bancs des groupes, NG, FI et GDR.
Pour répondre à ma collègue Aina Kuric, selon laquelle tous les députés sont à même de prendre position car ils sont bien conduits à statuer sur tous les textes, il faut rappeler qu'il est intéressant d'entendre tous les membres d'un territoire pour leur expérience, leurs connaissances et leur sensibilité particulières.
Dans les propos de nos collègues Mansour Kamardine ou Ramlati Ali, auxquels j'ajouterai notre collègue sénateur, Thani Mohamed Soilihi, je n'entends pas des peurs mais une détresse et un appel à trouver des solutions.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – M. Mansour Kamardine applaudit également.
Cette détresse transcende les clivages politiques puisque deux groupes parlementaires différents de cet hémicycle y sont sensibles.
Nous ne pouvons pas rester sans rien faire. M. le ministre d'État a rappelé l'avis du Conseil d'État : cette solution est « limitée, adaptée et proportionnée ». Mayotte connaît une situation exceptionnelle, qui met tout le monde en danger.
Il faut pouvoir dissuader l'immigration illégale. Or les signaux contraignants que nous envoyons sont également reçus par les passeurs. Cette possibilité d'une adaptation proportionnée et adaptée à la situation exceptionnelle de Mayotte est donc intéressante.
Par ailleurs, nous avons adopté des dispositions transitoires permettant aussi, pour les personnes résidant à Mayotte, de faire valoir leur droit du sol.
Je vous demanderai donc, chers collègues, de repousser ces amendements afin que, tous ensemble, nous puissions aider nos compatriotes de Mayotte en leur apportant cette solution, qui répond à une situation exceptionnelle.
Applaudissements sur de très nombreux bancs du groupe LaREM.
Comme je viens de le dire, je comprends que certaines interrogations puissent se poser. Cependant, cette solution n'est pas la seule que nous appliquons pour Mayotte. Le Gouvernement et les élus locaux ont travaillé pour mettre en place un plan d'ensemble, effectif dès cette année, qui portera à la fois sur l'emploi, par la création d'une direction régionale de l'emploi et d'une antenne supplémentaire de la mission locale ; sur la santé, par la création d'une agence de santé de plein exercice et par la modernisation de l'hôpital, avec un accès aux soins plus facile ; sur le sport, avec le rattrapage des équipements sportifs, financé à hauteur de 4 millions d'euros ; sur l'éducation, par l'installation d'un rectorat de plein exercice d'ici à deux ans et le recrutement de 500 personnels de l'éducation nationale sur cinq ans.
Nous travaillons donc sur l'ensemble des aspects. C'est pourquoi je vous demande de voter le texte que Mme la rapporteure vient de vous présenter.
Applaudissements sur de très nombreux bancs du groupe LaREM.
« Non ! » sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Eh bien, si, mesdames et messieurs les députés de la majorité !
Beaucoup a été dit, et personne ne remet en cause la légitimité des députés de Mayotte à intervenir. Nous assumons cependant respectueusement ce désaccord avec nos collègues, comme les députés de la majorité assument d'ignorer totalement et de passer outre les revendications des associations sur le terrain, qui connaissent les réalités. Nous avons pour cela des arguments à faire valoir.
Si je ne me suis pas rendue à Mayotte comme notre collègue Jean-Hugues Ratenon, j'ai visité la Guyane, un autre territoire français qui, sans être insulaire, présente des particularités. Situé sur un autre continent, ce département, très en retard en matière de développement économique et social, partage des frontières avec plusieurs pays et connaît également une très forte pression migratoire. D'ailleurs, lors de ce séjour en Guyane, j'ai entendu les mêmes arguments que ceux développés pour Mayotte.
Les élus guyanais seraient légitimement fondés à avancer les mêmes arguments pour obtenir aussi une dérogation. Mesdames, messieurs les députés de la majorité, vous ouvrez une brèche vers une solution qui pourrait être invoquée avec pareille légitimité pour la Guyane.
Par ailleurs, un de nos collègues a tenu des propos très pertinents, en notant qu'à La Réunion, on dit que les problèmes sont de la faute des Mahorais. Là, comme à Marseille, le problème, c'est toujours l'immigré !
C'est là où, fondamentalement, vous vous trompez. Avec cette politique migratoire, vous ne faites que désigner des coupables, sans apporter de solution. Par principe, s'agissant de l'immigration illégale, la difficulté n'empêche pas les passeurs, elle les crée. Ainsi, plus vous augmentez la difficulté, plus les tarifs seront élevés. Vous permettrez donc aux passeurs de gagner encore plus d'argent sur le dos des migrants.
La solution que vous vous apprêtez à voter aura pour seules conséquences davantage de vulnérabilité et de clandestinité, donc, de morts.
Applaudissements sur les bancs des groupes FI et GDR.
Je répondrai aux propos de mon collègue Florent Boudié avec beaucoup d'amitié mais aussi une grande fermeté. Cet article résoudra-t-il le problème à Mayotte ? La réponse est non.
Depuis quand des lois sont-elles votées pour remplacer des campagnes d'information et envoyer un message ? Le vote des lois a pour objectif de structurer notre société. Toutes les lois qui la déstructurent sans résoudre un problème sont dangereuses. Réfléchissez, chers collègues, à cette notion de justice. Allons-nous résoudre le problème ou non ?
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM et sur les bancs du groupe FI.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 114
Nombre de suffrages exprimés 108
Majorité absolue 55
Pour l'adoption 23
Contre 85
La parole est à M. Éric Ciotti, pour soutenir l'amendement no 106 .
J'indique que la demande de scrutin public sur cet amendement a été retirée.
Le présent amendement vise à généraliser le dispositif précédent sur l'ensemble du territoire, et je donnerai peut-être là des arguments à ses détracteurs.
Chers collègues, vous avez légitimement évoqué les problèmes graves, majeurs, que connaît Mayotte. Mansour Kamardine, qui en est le témoin, s'est battu avec beaucoup de conviction contre cette situation, qui a vu Mayotte devenir un lieu privilégié pour l'immigration clandestine. Mais ces problèmes se posent sur tout le territoire national. Aussi, monsieur le ministre d'État, nous vous demandons très clairement que la nationalité française ne soit pas l'objet ni l'objectif des filières d'immigration illégale.
Cet amendement vise ainsi à empêcher les personnes entrées en France de manière illégale de prétendre à ce que leurs enfants, nés sur le territoire national, deviennent automatiquement Français.
Nous voulons établir ce principe de politique publique et de société.
Le dispositif adopté par le Sénat, que nous approuvons et que nous soutiendrons – nous avons voté contre les amendements de suppression – , posera naturellement un problème juridique. J'ignore comment le Conseil constitutionnel tranchera la question qui sera portée devant lui. Comment poser un principe pour une partie du territoire national, et ne pas le généraliser à son ensemble ?
Mes chers collègues de la majorité, vous avez fait un pas. Je vous propose d'aller beaucoup plus loin que d'envoyer un message, madame Krimi, en prenant une disposition très claire pour combattre l'immigration illégale et affirmer que l'on ne peut pas devenir un Français par hasard, ni en étant l'objet des filières d'immigration clandestine, nouveaux négriers des temps modernes.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Monsieur Ciotti, je pourrais vous répondre avec les mêmes arguments que précédemment, lorsque M. Schellenberger affirmait que le Conseil d'État n'avait pas statué sur l'inconstitutionnalité d'une extension de la mesure à tout le territoire.
Le Conseil d'État a estimé que la mesure, appliquée à Mayotte, n'est pas inconstitutionnelle car elle est « limitée, adaptée et proportionnée à la situation particulière de Mayotte ». Le reste du territoire ne connaît pas une telle situation exceptionnelle.
C'est pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Je ne pense pas que l'on puisse résoudre les problèmes des territoires de manière uniforme. Mayotte présente une situation spécifique, à laquelle nous allons répondre.
Il en va de même pour la Guyane, dont la situation spécifique a été prise en compte par un décret récent. Depuis que nous avons pris ce décret, l'immigration irrégulière diminue sur ce territoire.
Pour ce qui concerne le territoire métropolitain, nous pouvons combattre l'immigration irrégulière d'une autre façon. Je l'ai dit, ce n'est pas contre les États que nous voulons combattre l'immigration irrégulière, mais avec eux. C'est vrai pour l'Afrique, comme pour le continent européen.
Tout à l'heure, M. Dumont a évoqué les Balkans.
Nous avons passé des accords avec certains pays de cette région qui avaient été dispensés de visas, et dont certains ressortissants venaient demander l'asile en France. Nous avons mené avec eux une politique efficace, conduisant à une diminution de 43 % des départs. Et ces pays reprennent désormais tous leurs ressortissants déboutés du droit d'asile. C'est par une coopération européenne et mondiale, que nous résoudrons ce problème difficile.
Sur l'article 9 ter, je suis saisi par le groupe La France insoumise d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Éric Ciotti.
Monsieur le ministre d'État, madame la rapporteure, j'entends vos réponses. Le Conseil d'État a donné un avis sur le caractère dérogatoire de la disposition pour Mayotte, non sur la volonté de systématiser ce dispositif à l'ensemble du territoire national. Si l'exception est possible à Mayotte, la généralisation par la loi est possible sur tout le territoire national.
En revanche, monsieur le ministre d'État, vous dites qu'il s'agit d'un problème de coopération internationale. Celle-ci est certes utile, mais ne concerne pas le sujet dont nous débattons.
Vous avez dit vous-même qu'entre 400 000 et 500 000 étrangers, peut-être davantage, sont en situation irrégulière sur notre territoire national – je vois que vous acquiescez. En plus des entrants qui arrivent chaque année, 60 000 personnes, déboutées du droit d'asile, se maintiennent presque systématiquement sur le territoire, en situation irrégulière. Cela signifie qu'il y a en France environ 100 000 nouveaux étrangers en situation irrégulière chaque année. Ce problème ira en s'accentuant.
Il faut aujourd'hui défendre le creuset républicain, ce qui fait la nationalité française – la volonté d'adhérer à la République, de s'y intégrer, de s'y assimiler, d'épouser ses valeurs, sa culture, son identité et son histoire. On ne peut pas devenir français simplement parce que ses parents sont entrés de façon irrégulière sur le territoire national. Nous demandons que le candidat à la nationalité française affirme sa volonté. Nous voulons limiter le droit du sol auquel nous restons attachés pour empêcher qu'il ne bénéficie à ceux qui ont violé les lois de la République, parfois en ayant été exploités par des filières d'immigration illégale.
Exclamations sur les bancs du groupe LR. – Approbations sur les bancs du groupe FI.
Il n'y a pas d'automatisme. Ce n'est pas parce qu'on est né sur le territoire français qu'on est français – rappelez-vous cela.
Il faut avoir un certain âge, avoir soi-même résidé un certain nombre d'années en France pour pouvoir l'obtenir. Ne faites pas croire à l'existence d'un automatisme – c'est malsain.
Quant aux filières, vous en parlez régulièrement. Oui, il faut combattre les filières, mais les demandeurs d'asile ne font pas partie de ces filières, ils en sont les victimes.
Arrêtez donc de faire croire que tous les demandeurs d'asile nous menacent ! Non, tous les demandeurs d'asile ne nous menacent pas. On gouverne paisiblement non pas en attisant la division mais en favorisant le rassemblement.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes MODEM et LaREM, ainsi que sur les bancs du groupe FI.
L'amendement no 106 n'est pas adopté.
En entendant mes collègues du groupe LR, je me souvenais de cette phrase du colonel MacArthur : « les batailles perdues se résument en deux mots : trop tard » – avoir su trop tard, avoir compris trop tard, avoir agi trop tard. J'espère que, pour Mayotte, il n'est pas trop tard. Les solutions proposées aujourd'hui sont mieux que rien, si je puis dire, mais elles ne seront pas assez efficaces compte tenu de l'aggravation de la situation depuis une bonne quinzaine d'années déjà.
Les conditions sanitaires sont effrayantes – allez à Mayotte voir de vous-même, chers collègues. Les Mahorais sont submergés – vous refusez d'en parler – par une violence terrifiante, à tel point qu'un couvre-feu est instauré : à partir d'une certaine heure, les femmes ne sortent plus – je n'ai pas entendu Mme Schiappa s'en émouvoir – et beaucoup d'hommes non plus d'ailleurs. Les pouvoirs publics sont noyés sous le nombre tout à fait spectaculaire de clandestins.
Nous proposons la suppression pure et simple du droit du sol.
La nationalité continuera de pouvoir être acquise soit par la filiation, soit par la naturalisation, c'est-à-dire par le mérite. Cette Assemblée compte en son sein plusieurs députés qui ont obtenu la nationalité par le mérite – ils sont la preuve que c'est possible.
Exclamations sur plusieurs bancs.
Je vous épargne les favelas qui se multiplient, les problèmes d'emprise foncière.
En refusant d'apporter une réponse, vous condamnez les Mahorais à la pauvreté et à la précarité. La politique dissuasive est un préalable nécessaire mais elle n'est pas suffisante. Il faut aussi faire preuve, monsieur Collomb, d'un peu de fermeté. Cela n'a pas été le cas à l'égard des Comores qui continuent à se moquer ouvertement de la France en refusant de respecter le droit international. Si vous organisiez un référendum à Mayott, évidemment les Mahorais voteraient en faveur de la suppression du droit du sol – soyez-en conscients. Si un référendum avait lieu au niveau national, une majorité de Français refuseraient également le droit du sol tant ils sont lucides sur l'incitation à l'immigration clandestine qu'il constitue.
Le droit du sol n'est pas un totem. Nous sommes la représentation nationale. Si, demain, les Français décidaient de supprimer le droit du sol, ils le supprimeraient, que cela vous plaise ou non, que cela plaise ou non au Conseil d'État ou à je ne sais quelle autre instance qui essaie aujourd'hui de s'arroger la souveraineté nationale que la Constitution a confiée au peuple et à lui seul.
Dans de nombreux pays du monde, le droit de la nationalité est très différent du nôtre, avec des droits attachés à la nationalité très différents de ceux attachés à la nationalité française. Arrêtez de laisser penser que hors du droit du sol, la situation serait terrifiante – elle est tout à fait normale dans des dizaines de pays.
Nous proposons la suppression totale du droit du sol parce que non seulement Mayotte le mérite, mais la France entière le mérite. Dans l'amendement de repli, nous demandons de porter de trois mois à un an le délai de présence régulière sur le territoire de l'un des parents afin d'éviter les prévisibles contournements de procédure.
Mon premier argument est d'ordre juridique : le Conseil d'État exige que l'exception soit limitée, adaptée et proportionnée. Or, la suppression totale du droit du sol que vous proposez paraît complètement disproportionnée.
Deuxième réponse, d'ordre politique – je réponds ainsi également à M. Ciotti – : votre argumentation sur Mayotte vous permet d'instiller votre haine de l'étranger et votre souhait de faire de la France une forteresse recroquevillée sur elle-même. Ce n'est pas notre vision de la France
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM
Monsieur Pajot, vous n'avez pas la parole.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Même avis que Mme la rapporteure.
Mon intervention vaudra explication de vote sur l'article.
Vous avez entendu Mme Le Pen, et à un degré moindre, M. Ciotti. Vous voyez bien de quelle manière certaines forces ici entendent utiliser la modification que vous proposez dans l'article 9 ter pour justifier une remise en question globale du droit du sol.
Mme Le Pen estime que le droit du sol n'est pas un totem – elle a raison. C'est une bataille politique qui, depuis plus de deux cents ans, oppose, dans ce pays, ceux dont elle est l'héritière et ceux qui défendent les principes de la République telle que nous la concevons en France.
Certains pays consacrent le droit du sang. Je ne crois pas que l'application du droit du sang intégral pendant des siècles en Allemagne ait été complètemnt étrangère au nazisme. Ce choix ouvre la voie à des théories racialistes.
La bataille politique doit être menée. Monsieur Ciotti – je pense à la chanson de Maxime Le Forestier – , vous dites qu'on ne doit pas être français par hasard. Pourtant, vous savez que lorsqu'on naît quelque part, c'est toujours par hasard. On ne choisit pas l'endroit où on naît, que l'on soit fils d'immigrés ou fils de Français.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM
La question n'est pas là. Il existe déjà une différence – cela a été rappelé – : lorsque l'on naît de parents immigrés, il faut, à un certain âge, manifester sa volonté d'être français – on a le droit d'être français mais il faut le réclamer.
Qu'est ce qui se joue ici ? En créant une brèche – Danièle Obono l'a très bien expliqué au travers de l'exemple de la Guyane – , vous prenez le risque d'une remise en cause généralisée du droit du sol, et vous ouvrez la voie à des forces qui pourraient prendre le pouvoir dans ce pays à l'avenir.
L'un des orateurs plaidait pour que soient prises en considération les conditions locales. Mais, rendez-vous compte, conditions locales après conditions locales, sera remis en question le principe d'unité et d'indivisibilité de la République auquel je tiens particulièrement, s'agissant de la manière d'être français.
Il faut résoudre les nombreux problèmes de Mayotte par l'argent, par des discussions géopolitiques avec les Comores. Vous ne pouvez pas le faire en prenant le risque que soit par la suite remis en question le droit du sol dans ce pays.
Je ne pensais pas encore aujourd'hui – comme dans les années quatre-vingt, à l'époque de SOS Racisme – entendre des personnes assimiler ceux qui souhaitent mettre un coup d'arrêt à l'immigration massive à ceux qui ont de la haine pour les étrangers. C'est le niveau zéro de la pensée politique.
Plus personne n'ose dire cela aujourd'hui. Quant à vos références au nazisme, monsieur Coquerel, cette outrance, coutumière de votre part, est d'autant plus ridicule que plusieurs pays dans le monde ont choisi un modèle différent du nôtre, la Thaïlande par exemple.
En Thaïlande, la situation est bien pire car on ne peut jamais devenir thaïlandais – même si on y est né, même si on s'y marie. Cela ne correspond pas à notre vision ; nous pensons qu'une personne peut devenir française par le mérite. Il ne semble pas que les Thaïlandais soient des nazis mais peut-être avez-vous des éléments à ce sujet ?
Vous prétendez incarner le nouveau monde et le pragmatisme. Mais lorsque vous taxez de xénophobie ceux qui veulent remettre en cause des dispositions qui manifestement ont, pendant des décennies, incité à l'immigration, vous êtes non pas l'ancien monde, mais l'ancien, ancien, ancien monde.
Vous auriez pu accuser de racisme.
Mais il n'est pas sans doute pas facile, je le conçois, de traiter de racistes les Mahorais qui, dans leur immense majorité, veulent supprimer le droit du sol alors qu'ils sont de couleur et musulmans.
Lorsque vous comprendrez qu'il s'agit d'un problème de nationalité et de patriotisme, d'un problème de bon sens et non pas d'un problème de sang ou de couleur de peau, comme vous essayez toujours de le faire croire, vous aurez avancé dans votre réflexion.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 69
Nombre de suffrages exprimés 66
Majorité absolue 34
Pour l'adoption 47
Contre 19
L'article 9 ter est adopté.
Prochaine séance, cet après-midi, à seize heures :
Suite de la discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie.
La séance est levée.
La séance est levée à treize heures quinze.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Serge Ezdra