La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
Cet après-midi, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles non rattachés à des missions.
Je vous rappelle qu'à la demande du Gouvernement, nous examinons ce soir par priorité les articles 51 et 65, ainsi que l'amendement portant article additionnel après l'article 65.
J'ai déposé plusieurs amendements sur cet article important, monsieur le président, et je vais prendre un peu de temps pour présenter celui-là, ce qui vaudra défense des autres.
Madame la ministre du travail, vous prévoyez, dans l'article 51, d'instaurer une taxe forfaitaire d'un montant de 10 euros sur les contrats à durée déterminée dits d'usage – CDDU – , augmentant ainsi le coût du travail.
Vous fixez à cette mesure l'objectif de lutter contre la précarité des travailleurs, mais laissez-moi dresser la liste, issue d'un rapport de 2015 de l'inspection générale des affaires sociales – IGAS – , le plus récent que j'ai trouvé sur le sujet, des métiers utilisant le CDDU : aide déménageur, qui effectue des missions ponctuelles, le déménagement étant bref et non récurrent ; ouvrier docker occasionnel ; personnel de chambre pour l'hôtellerie ; jeune auxiliaire pendant les vacances ; enquêteur vacataire, dont la mission est, par définition, très courte ; intervenant à domicile ; artiste ou technicien du spectacle ; sportif professionnel et entraîneur ; personnel extra de restauration.
Les CDDU sont conçus pour des activités de courte durée, qui dépassent rarement un ou deux jours. Si les entreprises ont recours à ces contrats, ce n'est pas par plaisir, c'est parce qu'ils leur permettent de fournir des prestations et de remplir des missions qui s'imposent à elles pour assurer leur activité.
Le rapport de l'IGAS de 2015 montre que les CDDU sont surtout utilisés par les petites entreprises : près de 60 % des embauches en CDDU ont été effectuées par des entreprises de moins de cinquante salariés, et presque 40 % par des entreprises de moins de vingt salariés. Les petites entreprises, qui savent rebondir et réagir à l'activité de leur secteur, notamment parce que leurs procédures sont plus légères que celles des grandes entreprises, peuvent obtenir certains marchés grâce à ces contrats. Vous allez donc mettre des entreprises en difficulté et probablement réduire l'emploi dans certains secteurs.
En outre, les CDDU s'inscrivent, dans certaines situations, dans des dispositifs d'insertion sociale, qui favorisent le retour de certaines personnes dans le monde du travail, en leur remettant le pied à l'étrier. Le nombre de contrats risque de diminuer, ce qui privera ces personnes de ce moyen d'obtenir un emploi.
Les CDDU d'insertion sont exclus du champ d'application du dispositif !
Je ne voudrais pas répéter ce qu'a dit Véronique Louwagie, mais cette taxe est une erreur – même si vous nous expliquerez sûrement qu'elle n'en est pas une. Elle pénalisera certains secteurs. Si le CDDU est si mauvais pour le marché du travail, interdisons-le, mais créer une pénalité de 10 euros est une drôle d'idée. Comme souvent, l'enfer est pavé de bonnes intentions, et la volonté d'avoir des contrats plus longs, plus stables et moins précaires s'oppose à la réalité, à savoir qu'aujourd'hui, le travail est par nature quelque chose de précaire. Votre Gouvernement se dit très attaché au travail, ce dont je n'ai pas de raison de douter ; dans ce cas, il faut privilégier le travail sous toutes ses formes, même celle du contrat d'usage, dont on peut espérer qu'il débouche sur la conclusion d'un autre type de contrat. De surcroît, comme l'a très bien montré Véronique Louwagie, le CDDU est utile à certaines entreprises.
J'ai l'impression que cette taxe est plus une mesure de rendement qu'une disposition de droit social.
Monsieur le président, je vous propose de m'accorder le temps nécessaire à la défense de cet amendement dans le cadre de ce qui est une petite discussion générale. J'ai déposé plus de quinze amendements que je pourrai ainsi défendre d'un mot. Je vous échange cinq minutes maintenant contre trente minutes de présentation de mes amendements. Je suis sûr que vous serez d'accord.
Pas cinq minutes, mais un peu plus de deux minutes si vous le souhaitez.
Sinon, je défendrai tous mes amendements pendant deux minutes, et cela durera plus longtemps.
Sourires.
Madame la ministre, le système de bonus-malus que vous instaurez pour les contrats courts inquiète les professionnels du tourisme, de l'hôtellerie et de la restauration. Ces secteurs connaissent des pics d'activité saisonniers incontournables et inhérents à leur activité – le comprendre relève du bon sens paysan. Plutôt que des taxes et des contraintes supplémentaires, les professionnels attendent du Gouvernement des dispositifs pour les aider à embaucher. Dans l'hôtellerie et la restauration, plus de 100 000 postes sont à pourvoir : trouver des employés constitue un casse-tête pour les très petites entreprises et les petites et moyennes entreprises – TPE et PME – du secteur. Résoudre ce problème, dans ce secteur et dans bien d'autres, devrait être la priorité du Gouvernement.
J'ai entendu beaucoup de bêtises tout à l'heure concernant le taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée – TVA – dans la restauration. Oubli ou volonté de nuire, personne n'a souligné que cette mesure avait permis de revisiter les grilles salariales et d'investir pour remettre aux normes de nombreux établissements, notamment familiaux. À cause du nouveau règlement de notre assemblée, je n'ai pas pu obtenir la parole lorsque je l'ai demandée, monsieur le président, mais je tenais à faire cette mise au point.
Pour en revenir au présent article, il faut savoir distinguer la bonne utilisation des CDDU du recours excessif à ces contrats. En outre, madame la ministre, reconnaissez que l'instauration d'une taxe forfaitaire de 10 euros n'aura aucun effet sur la précarité de l'emploi : si les choses étaient aussi simples, voire simplistes, cela se saurait !
Enfin, pour aller droit au but, sur le terrain, on n'en peut plus des taxes ! Voilà pourquoi j'ai déposé des amendements visant à exempter de cette nouvelle taxe divers secteurs d'activité, notamment celui de l'enseignement supérieur, dans lequel les contrats courts permettent aux professionnels d'apporter, dans des séquences très ciblées, leur expérience aux étudiants. Vu de Paris, on pourrait penser que la mesure ne touchera que les traiteurs et les professionnels du spectacle, mais de nombreuses autres activités seront concernées.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l'amendement no 2743 .
Madame la ministre, je ne comprends pas pourquoi vous faites, dans le cadre de ces articles non rattachés, une fixation sur le CDDU ! La seule explication que je verrais tiendrait à une volonté de toucher le secteur culturel, dans lequel vous considérez peut-être que le recours au CDDU est abusif. J'ignore si cela est vrai, mais j'aimerais connaître les secteurs dans lesquels les CDDU sont très répandus.
La taxe forfaitaire de 10 euros aura un impact non seulement sur tous les corps de métier qui ont été cités par mes collègues Louwagie et Brun, mais également dans certains territoires. Dans le Jura, il y a beaucoup de tourisme, hiver comme été : si un salarié ne se présente pas au travail, parce qu'il s'est blessé ou est tombé malade, il n'y a pas d'autre solution que d'avoir recours à un contrat très court pour faire face à la fréquentation touristique. Les traiteurs connaissent également des périodes plus difficiles à gérer que d'autres : tout ne se programme pas comme dans un ministère, madame la ministre !
Je ne comprends donc pas l'instauration de cette taxe, d'autant que celle-ci n'aura aucun effet sur la précarité, si telle était votre intention. Il me semble qu'il s'agit, en réalité, d'une mesure de rendement. Vous prévoyez, dans le projet de loi de finances – PLF – , une recette de 50 millions d'euros : c'est peu pour une disposition qui suscitera beaucoup de tracasseries et de complexité pour les entreprises, et qui aura des effets négatifs sur l'emploi dans l'ensemble du territoire.
La parole est à M. Joël Giraud, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l'avis de la commission.
Étant donné que nos collègues ont engagé une sorte de discussion générale, je donnerai mon avis – si vous me le permettez, monsieur le président – sur l'article 51 et sur l'intégralité des amendements qui ont été déposés. Nous gagnerons ainsi du temps, car je me contenterai d'émettre un avis défavorable sur les amendements suivants.
Vous pouvez me faire confiance, monsieur le président : je ne fais pas de promesses électorales – et le président Woerth comme moi-même sommes plutôt rapides.
Sourires.
La taxe proposée s'inscrit dans le cadre général de la réforme de l'assurance chômage ; elle vise à inciter financièrement les employeurs à réduire le recours aux CDDU, surtout les CDDU très courts, d'une ou deux journées, parfois moins. L'objectif n'est pas de pénaliser des secteurs économiques ni de remettre en cause le principe du CDDU, il est de lutter contre la précarité salariale et la dégradation financière de l'assurance chômage, puisque les successions de contrats courts coûtent cher à l'Unédic. Je n'invente pas ces éléments, qui ont été mis en évidence par un rapport de l'IGAS en 2015, l'inspection ayant porté un constat très sévère sur l'utilisation des CDDU.
Qu'est-ce qu'un CDDU ? Le rappel me semble nécessaire, car j'ai entendu tout à l'heure certaines confusions, par ailleurs compréhensibles. Il s'agit d'un contrat à durée déterminée – CDD – très dérogatoire, d'une durée pouvant être très courte, qui peut être conclu sans motif, à la différence des autres CDD. Le CDDU peut être reconduit sans limite et sans délai de carence entre le terme d'un contrat et sa reconduction. Des salariés peuvent ainsi travailler pour le même employeur pendant plusieurs années, à travers des contrats de quelques jours, voire d'une journée, reconduits sans cesse. Je suis un peu étonné que certains exposés sommaires d'amendement omettent totalement ces faits, pourtant soulignés par l'IGAS, qui a relevé de nombreux abus. Je précise aussi – car j'habite moi aussi une région touristique – que le CDDU ne doit pas être confondu avec le contrat saisonnier ni avec le CDD pour les vendanges.
J'ai posé la question dans ma circonscription : la majorité des professionnels des remontées mécaniques, de l'hôtellerie et de la restauration n'ont pas recours au CDDU, car ils disent avoir du mal à attirer des personnels formés, au recrutement desquels les contrats saisonniers conviennent parfaitement. Dans une région connaissant un tourisme saisonnier, l'utilité des CDDU n'est pas du tout démontrée pour les entreprises qui souhaitent avoir des personnels formés. Or, dans le secteur du tourisme, nos concurrents emploient des personnels encore mieux formés que les nôtres.
De nombreuses formes contractuelles existent pour tenir compte de la diversité des besoins, comme le CDD de date à date, qui permet d'éviter le CDDU.
Pourquoi une taxe de 10 euros par contrat ?
Nous n'en pouvons plus des taxes ! Dans ce pays, dès qu'il y a un problème, on instaure une taxe !
Parce que la majoration de 0,5 % de la contribution d'assurance chômage due par les employeurs, mise en place en 2013, s'est révélée inefficace, comme le souligne l'IGAS dans son rapport. Pour être efficace, il faut cibler les contrats les plus courts : c'est ce que fait la taxe forfaitaire, puisque ses effets se concentrent sur les CDDU très courts, d'une ou deux journées ; l'impact est résiduel, voire presque nul, à partir d'une semaine.
Pourquoi est-il urgent d'agir ? Les CDDU sont très dérogatoires et placent les travailleurs dans une situation de totale insécurité et de précarité, les privant de visibilité, de progression, de capacité à se projeter dans l'avenir et de formation. La part des CDDU dans les embauches a explosé : un contrat sur cinq conclus en 2017 était un CDDU, soit 8 millions au total. Les CDDU d'une journée ou moins représentent 42 % des CDDU conclus.
Les secteurs d'activité concernés demandent d'attendre, afin d'engager une concertation, et s'opposent à toute action brutale. Je rappelle tout de même que le Gouvernement lutte activement contre la précarité salariale depuis 2013 ; il a demandé aux secteurs d'agir, mais rien n'a été fait. L'inaction pendant des années impose un changement de méthode, et nous choisissons celle de la taxe incitative.
Je l'ai dit, il y a des abus dans le recours aux CDDU. Je ne suis pas favorable à ce que des secteurs soient exemptés de la taxe simplement parce que des dysfonctionnements font que leur activité repose parfois sur les CDDU : on ne peut se prévaloir de sa propre turpitude ! J'ajoute que les secteurs concernés par le CDDU ont intérêt à recruter sur de plus longues durées pour avoir des personnels qualifiés, comme je l'ai constaté dans le tourisme.
Le fait que certains secteurs prévoient, dans leur convention collective, des indemnités de précarité ou des requalifications en contrat à durée indéterminée – CDI – après une certaine durée ne me convainc pas de les exclure du champ de la taxe : l'indemnité prévue par les conventions collectives revient simplement à rétablir l'indemnité de précarité que les titulaires d'autres CDD que le CDDU perçoivent ; quant aux modalités de requalification en CDI, elles ne me paraissent pas non plus spécialement généreuses, surtout si le recours au CDDU est abusif.
Pourquoi certains secteurs sont-ils exonérés de la taxe prévue par l'article 51 ? Les employeurs des ouvriers dockers occasionnels et ceux des intermittents du spectacle sont les seuls à toujours supporter une surcontribution spécifique de 0,5 %. Au demeurant, les ouvriers dockers constituent une main d'oeuvre d'appui que la loi oblige à recruter en CDDU. Les employeurs des intermittents du spectacle sont soumis en outre à une surcontribution spécifique de 5 %. Quant aux associations intermédiaires d'insertion professionnelle, elles oeuvrent pour l'intérêt général et s'inscrivent dans le champ du règlement général d'exemption par catégorie – RGEC – adopté à l'échelon européen. Tout cela est donc parfaitement normal.
Exempter d'autres secteurs ferait courir le risque d'une rupture d'égalité complètement injustifiée ; on entrerait ainsi dans le champ des aides d'État, ce qui n'est pas acceptable. Toutefois, la commission a adopté un amendement, déposé par Mme Verdier-Jouclas, visant à inciter les partenaires sociaux à faire preuve de vertu en prenant des dispositions en vue d'améliorer la situation des salariés, mais sans que cela constitue une aide d'État.
Bref, vous voyez bien, chers collègues, que la taxe ne cible pas tel ou tel secteur pour le punir. Elle vise un objectif de justice sociale, en l'espèce l'amélioration des conditions de travail. Elle aura pour effet d'inciter les employeurs à recourir à des contrats de travail plus longs que ceux auxquels ils recourent à l'heure actuelle.
Je sais que les représentants de certains secteurs ont milité pour sa suppression, comme en témoigne le nombre élevé d'amendements identiques déposés sur l'article – et comportant les mêmes fautes d'orthographe ! Il n'en reste pas moins que maintenir le statu quo ne rendrait pas service aux secteurs d'activité concernés et ne constituerait certainement pas une faveur pour les travailleurs précaires, que la taxe vise à aider.
De surcroît, celle-ci participe de l'équilibre de la réforme de l'assurance chômage. Elle concerne des secteurs qui bénéficieront par ailleurs d'avantages visant à mettre un terme aux tensions de recrutement qu'ils connaissent.
Avis défavorable sur les amendements de suppression.
La parole est à Mme la ministre du travail, pour donner l'avis du Gouvernement.
J'aimerais revenir sur la logique d'ensemble de la taxe sur les CDDU, ce qui permettra d'abréger le débat par la suite.
Cette taxe n'arrive pas seule : elle s'inscrit dans le cadre de la réforme de l'assurance chômage, et participe à son équilibre. Cette réforme vise à développer l'emploi et à réduire la précarité. Elle tend pour cela à responsabiliser les employeurs, inciter les demandeurs d'emploi au retour à l'emploi et mieux les accompagner, ainsi que les entreprises.
À l'heure actuelle, l'un des principaux problèmes, en matière d'assurance chômage, est l'explosion du nombre de contrats courts. En vingt ans, le monde du travail a totalement changé.
À l'heure actuelle, le nombre de contrats courts d'une durée inférieure ou égale à un jour est très élevé. L'une des raisons de ce phénomène est le recours croissant aux CDD d'usage. En 2017, on dénombrait 8 millions d'embauches par an en CDDU, sur un total de 37 millions ; 42 % d'entre eux étaient conclus pour une durée inférieure ou égale à un jour.
L'explosion du nombre de ces contrats, conclus souvent pour une durée très courte, explique en grande partie le fait que les CDDU soient, si j'ose dire, dans notre collimateur. De fait, on a ressuscité les journaliers précaires – je sais que le mot choque, mais c'est ainsi – dans notre pays, et cela à très grande échelle.
Que certains secteurs de l'économie doivent recourir aux contrats très courts, personne ne le nie. Si cela devient un système à très grande échelle – au demeurant absent des pays voisins, qui ne fonctionnent pas si mal que cela – ,…
Je rappelle que les CDDU peuvent être renouvelés sans limitation de durée, et qu'ils ne donnent pas lieu au versement de la prime de précarité, contrairement aux CDD classiques, dont ils se distinguent essentiellement sous ces deux aspects : aucune prime de précarité n'est prévue, et on peut les renouveler indéfiniment avec la même personne, pour des durées très courtes.
En 2015, l'IGAS a publié un rapport critiquant vivement le développement anarchique de ces contrats, et cela d'autant plus qu'y recourent bien d'autres secteurs d'activité que ceux qui y sont autorisés – Mme Louwagie les a rappelés.
En 2017, les trois quarts des CDDU ont été conclus dans des secteurs autorisés à le faire ; les 2 millions de contrats restants l'ont été dans des secteurs qui ne le sont pas. Comme ces contrats sont conclus pour une durée de quelques heures, il est assez difficile de les placer individuellement sous surveillance.
Au cours des dernières années, des négociations ont été menées dans les secteurs habilités à recourir aux CDDU en vue de limiter leur usage ou d'établir des protections ou des garde-fous en faveur des travailleurs. Les précédents gouvernements ont essayé d'agir par la voie conventionnelle, afin de réguler le phénomène. Dans la quasi-totalité des cas – hormis quelques exceptions heureuses – , ces démarches n'ont pas abouti. Dans l'ensemble, la voie conventionnelle n'a pas permis de résoudre le problème.
Nous avons donc opté pour un système de régulation, qui a le mérite d'être simple. Il repose sur l'instauration d'une taxe forfaitaire de 10 euros par CDDU, qui ne pénalise en rien les CDDU de trois ou six mois, mais cible le recours excessif à des contrats très courts.
D'un point de vue global, cette taxe ne constitue pas une nouvelle contribution perçue sur les entreprises – ce point est très important. En effet, jusqu'au mois d'avril 2019, celles-ci s'acquittaient d'une taxe de 0,5 % sur chaque CDDU décidée par les partenaires sociaux, dont le produit était d'environ 50 millions d'euros. Lors de la réforme de l'assurance chômage, nous avons décidé de ne pas appliquer uniformément cette taxe, qui frappait aussi les CDDU de trois ou six mois, mais de la cibler sur les contrats de très courte durée, pour une recette fiscale similaire. Globalement, le niveau de taxation des entreprises n'augmentera donc pas ; nous nous contentons de cibler la taxe sur le recours excessif aux contrats courts.
D'autre part, je rappelle qu'il existe de nombreux outils – ils sont bien plus nombreux à présent – permettant de ne pas recourir aux contrats très courts, notamment l'annualisation du temps de travail, les groupements d'employeurs et le CDI intérimaire, que nous avons sécurisé juridiquement dans le cadre de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel.
En somme, la flexibilité est nécessaire pour certaines entreprises, mais elle peut s'accompagner d'une meilleure sécurisation pour les salariés. C'est ce que nous visons. Nous recherchons un système relevant de la flexisécurité.
Dans ce cadre, l'article 51 prévoit des exemptions, dont les justifications me semblent incontestables.
La première concerne les contrats d'intermittents du spectacle, qui seront exemptés de cette taxe, non parce qu'il s'agit du monde du spectacle, mais parce que les employeurs de ce secteur d'activité versent d'ores et déjà une surcontribution spécifique de 5 %, à laquelle s'ajoute une majoration des contributions spécifique sur les CDDU à hauteur de 0,5 %, majoration instaurée en 2013 et supprimée pour les employeurs des autres secteurs, mais maintenue pour ceux de ce secteur particulier par le décret du 26 juillet 2019, ce qui représente au total une contribution de 9,55 % à l'assurance chômage pour ces derniers. Chacun ici conviendra qu'on ne peut pas taxer un employeur deux fois pour le même objet.
Deuxièmement, nous excluons également du champ de la taxe les associations intermédiaires d'insertion professionnelle – vous avez eu raison de signaler leur cas, madame Louwagie – , car leur objet même est de limiter la durée des contrats d'insertion, qui servent de tremplin pour retourner vers l'emploi classique. Il serait donc illogique de les pénaliser, elles à qui on demande de conclure des contrats provisoires jouant ce rôle.
Troisièmement, M. le rapporteur général l'a évoqué, les employeurs des dockers occasionnels sont également exemptés, car la loi les oblige à utiliser des CDDU – ce pour quoi ils paient, au demeurant.
En outre, un amendement visant à exempter de taxe les branches professionnelles ayant consenti des efforts significatifs pour réguler par accord l'usage des CDDU a été adopté en commission. Mon cabinet et moi-même avons consacré beaucoup de temps à rencontrer et écouter les professionnels des secteurs concernés – comme vous l'avez fait aussi, mesdames et messieurs les députés, si j'en juge par le nombre d'amendements déposés – , notamment le déménagement, l'hôtellerie et la restauration. Cet amendement de Mme Verdier-Jouclas vise, de même que d'autres identiques, à répondre à leurs préoccupations, tout en s'inscrivant dans une logique de responsabilisation des branches professionnelles et des employeurs. Il y est prévu que, si des branches signent des accords étendus fixant des seuils en matière de durée minimale des CDDU et de nombre de jours par an au-delà desquels l'employeur est tenu de proposer un CDI au salarié, alors elles seront exemptées de la taxe de 10 euros par CDDU.
Ce point me semble très important. Dès lors que des gens travaillent 200 jours par an uniquement en CDDU, vous m'accorderez qu'il y a quelque chose de vicié dans le monde du travail !
Nous faisons ici le pari de la responsabilité et du dialogue social afin d'améliorer la situation des salariés, lutter contre la précarité et promouvoir l'emploi stable.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est défavorable aux amendements de suppression, et sera favorable aux amendements que je viens d'évoquer.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Madame la ministre, j'aimerais vous poser une question au troisième degré. Cet après-midi a été de nouveau autorisée l'utilisation d'huile de palme dans le carburant, par l'adoption d'un amendement de notre collègue Laqhila, avec l'accord du Gouvernement. Les entreprises utilisant de l'huile de palme seront-elles concernées par la nouvelle taxe ?
Tout à l'heure, madame Louwagie a indiqué qu'elle s'engageait – et engageait par là-même tous les orateurs – à faire preuve d'esprit de synthèse et de concision.
Cet après-midi, nous avons examiné un peu plus de 300 amendements, ce qui est honorable. Il en reste tout de même 600 à examiner, soit dit pour celles et ceux qui, demain, auront à coeur de siéger et de présider les séances – je n'en serai pas.
Nous allons donc tâcher d'avancer le plus rapidement possible. Je demande à chacun – je n'ai pas le droit de demander quoi que ce soit à Mme la ministre, mais je sais qu'elle entend mes propos – d'être concis. Vous le premier, monsieur Brun !
Sourires.
Je tâcherai d'être aussi concise que possible.
Madame la ministre, monsieur le rapporteur général, dans le cadre de l'argumentaire que vous venez de développer, vous annoncez que vous émettrez un avis favorable sur l'amendement no 2539 , qui vise à responsabiliser les branches professionnelles, afin qu'elles puissent mieux s'organiser pour lutter contre la précarité, en limitant le recours aux CDDU, ce qui est une bonne chose. Au demeurant, l'amendement no 2539 a d'ores et déjà été adopté par la commission des finances. Pour notre part, nous avons voté en sa faveur.
Le présent amendement, qui vise à décaler la mise en application de la taxe sur les CDDU à 2021, va dans le même sens. Laissons le temps aux branches professionnelles de s'organiser !
Monsieur le président, parce que vous savez utiliser toutes les subtilités du nouveau règlement, parce que vous avez fait preuve d'une grande compréhension, et parce que j'ai l'habitude de tenir mes engagements, je me contenterai d'indiquer que l'amendement est défendu.
« Bravo ! » sur divers bancs.
Madame la ministre, j'aimerais obtenir une précision. Vous avez indiqué que la taxe sur les CDDU ne coûtera rien de plus aux entreprises que les taxes en vigueur, et que nous en restons à une recette fiscale de 50 millions d'euros. Or l'évaluation préalable de l'article 51 indique une recette nette supplémentaire de 50 millions d'euros.
La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne, pour soutenir l'amendement no 2303 .
Il contraste avec ce que nous venons d'entendre. Pour notre part, nous considérons que le montant de la taxe n'est pas assez élevé pour être dissuasif. Nous proposons de le porter à 50 euros.
Je remercie M. Dufrègne pour son soutien, mais 50 euros, c'est un peu too much. Nous en resterons à 10 euros. Avis défavorable.
L'amendement no 2303 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je suis saisi de six amendements, nos 2539 , 1863 , 2653 , 2979 , 2611 et 2690 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 2539 , 1863 , 2653 et 2979 sont identiques et font l'objet d'un sous-amendement no 3038 .
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 2539 .
Je ne reprendrai pas la bonne argumentation développée par M. le rapporteur général et par Mme la ministre au sujet des CDDU.
Je me contenterai de rappeler qu'il existe d'autres façons de proposer des contrats aux salariés, d'autres outils, …
Il existe aussi d'autres façons de résoudre le problème que la taxation !
… notamment le CDI de chantier, le CDD conclu de date à date, l'annualisation du temps de travail, le CDI intérimaire et le CDD de remplacement. Il s'agit donc, monsieur Woerth, d'une mesure incitative visant à amener les employeurs à recourir à d'autres outils. La suppression et l'interdiction n'ont pas toujours été de bons modes d'action.
Madame Louwagie, les associations intermédiaires d'insertion professionnelle sont exemptées de la taxe : le nouveau dispositif ne posera donc aucun problème à ce secteur. Toutefois – et je tiens à saluer ici le travail de nos collègues Christophe Blanchet et Pascale Fontenel-Personne – , nous avons été alertés sur l'existence d'angles morts. Certains professionnels, tels que les traiteurs, pourraient être déficitaires si la taxe de 10 euros sur les CDDU leur était appliquée.
Nous y avons donc réfléchi, et nous proposons d'exonérer de la taxe forfaitaire les entreprises relevant de filières qui auraient signé un accord de branche prévoyant l'encadrement de l'utilisation de ces contrats par l'instauration d'une durée minimale et, surtout, par l'obligation de transformer les CDDU un CDI au terme d'une durée cumulée de travail effectif. Cela permettrait de rationaliser et de limiter l'usage des CDDU précaires, qui donnent lieu à des abus, et de faire en sorte que soient privilégiés les CDD ou les CDI.
La parole est à M. Christophe Blanchet, pour soutenir l'amendement no 1863 .
Je félicite Mme Verdier-Jouclas pour la rédaction de son amendement, qui va dans le bon sens, celui d'un accord gagnant-gagnant. Il est exact que, dans tout le secteur de l'événementiel, les professionnels – traiteurs, sociétés de sécurité, aménageurs d'espaces, hôtesses ou autres – doivent parfois répondre à des demandes urgentes.
Dernier exemple en date, le sommet du G7 à Biarritz a nécessité d'organiser, en moins de vingt-quatre heures, tout un événement, et de recruter cent personnes au dernier moment. Dans un cas comme celui-là, il faut évidemment faire appel aux personnes qui sont disponibles. Or, dans ces secteurs d'activité, ce sont souvent les salariés qui indiquent leurs disponibilités aux employeurs, lesquels doivent s'adapter.
Nous en avons un exemple ici même, chers collègues : quand nous allons nous restaurer, nous voyons des salariés embauchés à l'année, qui sont habillés en bleu ; mais, si nous avons fait durer nos travaux un peu plus longtemps, ceux qui viennent nous servir sont habillés en blanc. Nous sommes heureux de les trouver, et pourtant nous ne pouvions pas prévoir que nous aurions besoin de les embaucher.
Il convenait donc d'aménager le dispositif par un accord gagnant-gagnant. Je crois que ces amendements nous en fournissent l'occasion. Peut-être allons-nous pouvoir trouver une sortie par le haut, qui tiendrait compte des spécificités de certains secteurs. Vous disiez, monsieur le rapporteur général, qu'il faut recruter à long terme, mais, dans certains métiers, ce n'est pas possible parce que les salariés ne le veulent pas ou ne le peuvent pas – je pense aux mères isolées qui ne peuvent travailler que dans quelques créneaux horaires, ou encore aux étudiants qui se rendent disponibles pour un ou trois mois, mais pas pour une année.
L'adoption de ces amendements nous permettrait donc de parvenir à un équilibre. Sans doute faudrait-il…
Merci, cher collègue.
La parole est à Mme Sarah El Haïry, pour soutenir l'amendement no 2653 .
Je dirai d'une phrase que nous croyons pour notre part au dialogue social, et que nous voyons ici une première étape vers la possibilité d'une exonération dès lors que le dialogue social a lieu.
Je voudrais, en le présentant, répondre à vos arguments, madame la ministre.
Je rappelle la définition des contrats à durée déterminée dits d'usage : ce sont des contrats conclus pour des emplois pour lesquels « il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois ». Il s'agit donc bien d'une option autorisée lorsque d'autres solutions ne sont pas possibles.
Or l'amendement no 2539 impose le cumul de plusieurs conditions pour que la taxe ne soit pas exigible : il faut avoir conclu une convention ou un accord collectif prévoyant une durée minimale des contrats « et » la transformation des CDDU en CDI au terme d'une durée cumulée de travail effectif.
Je vous propose, par ce sous-amendement, de rendre suffisante l'une ou l'autre de ces deux conditions. La loi ne peut pas demander aux partenaires sociaux de conclure un accord prévoyant la transformation des CDDU en CDI, alors même qu'elle reconnaît par ailleurs que le recours au CDDU est autorisé dans la mesure où, justement, un CDI ne peut être conclu. Vous ne pouvez pas exiger cette transformation, sous peine que la mesure reste inopérante dans les faits.
Par cet amendement, je propose de reporter d'un an l'application de la taxe forfaitaire dans les secteurs où des négociations de branches sont déjà en cours. Je pense qu'il convient de laisser un peu de temps pour que ces négociations puissent aboutir.
L'amendement no 2690 de M. Fabrice Brun est défendu.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
La commission est favorable à l'amendement no 2539 et à ceux qui lui sont identiques, et défavorable au sous-amendement no 3038 de Mme Louwagie. L'amendement défendu par Mme Verdier-Jouclas pose effectivement une condition cumulative, que vous voulez, madame Louwagie, remplacer par une alternative. Je pense que dans ce dernier cas, le dispositif ne serait pas assez verrouillé.
J'émets en outre un avis défavorable sur les amendements nos 2611 et 2690 .
Le sous-amendement no 3038 n'est pas adopté.
Il s'agit non plus de supprimer l'article 51, mais d'envisager une solution intermédiaire. Nous proposons de soustraire du champ d'application de la taxe les CDDU conclus par les entreprises de moins de onze salariés exerçant dans des secteurs d'activité couverts par une convention ou un accord collectif de travail étendu prévoyant le recours à ce type de contrat.
Cela permettrait de ne pas soumettre les très petites entreprises à la taxe sur les CDDU – je pense en particulier aux entreprises du bâtiment. Par exemple, dans le Jura, anticipant la neige qui allait tomber aujourd'hui, certaines d'entre elles ont sans doute eu recours hier à une ou deux personnes supplémentaires pour une journée, afin de faire face à leur obligation de terminer les toitures avant la chute de neige. Ce n'est là qu'un exemple des particularités dont il faudrait tenir compte.
Les amendements identiques no 2326 de M. Fabrice Brun et no 2407 de Mme Louwagie sont défendus.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement no 2308 .
Cet amendement de Maxime Minot vise à exempter de la taxe forfaitaire les contrats conclus dans des branches professionnelles ayant négocié par voie conventionnelle un contrat à durée déterminée d'usage qui prévoit, quelle que soit sa durée – c'est très important – , le versement d'une indemnité de compensation de la précarité supérieure ou égale au montant défini à l'article L. 1243-8 du code du travail.
L'amendement no 2308 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je propose que la taxe forfaitaire de 10 euros sur les CDDU ne soit pas appliquée aux contrats conclus avec les salariés relevant des professions de l'hôtellerie et la restauration, les centres de loisirs et de vacances.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement no 2408 .
Je me contenterai d'indiquer, pour mes autres amendements à venir, qu'ils sont défendus. De même que celui-ci, ils ont pour objet de faire apparaître toutes les situations qui peuvent se proposer à nous, dans divers secteurs d'activité, où l'on peut trouver de bonnes raisons d'exonérer de taxe les contrats à durée déterminée dits d'usage.
Il a pour objet d'exonérer de la taxe forfaitaire de 10 euros les contrats à durée déterminée d'usage conclus avec les personnels des traiteurs organisateurs de réceptions. Le cas des traiteurs pose effectivement un problème car, par définition, leurs personnels travaillent de façon très ponctuelle. Cet amendement vise donc à leur ouvrir cette exonération, d'autant qu'il est loin d'être certain que l'instauration d'une telle taxe favorise la conclusion de CDI.
J'ai entendu dire tout à l'heure que l'amendement de M. Blanchet et ceux qui lui sont identiques visaient à régler ce problème. J'aimerais que Mme la ministre le confirme, afin que je sois assurée que les traiteurs bénéficieront bien de la disposition que nous avons adoptée tout à l'heure.
L'amendement no 151 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
J'aurais apprécié de recevoir une réponse sur la question des traiteurs – j'espère qu'elle viendra ultérieurement.
Le présent amendement tend à exempter de la taxe forfaitaire de 10 euros les contrats conclus avec les guides, conférenciers, interprètes et accompagnateurs, qu'ils soient salariés des opérateurs du secteur des agences de voyage et de tourisme ou salariés des organismes de tourisme chargés de l'accueil touristique à l'échelle locale, départementale, régionale ou nationale.
Si cette taxe s'appliquait à ces contrats, elle ne favoriserait pas, de toute façon, des contrats plus longs dans le secteur du tourisme, puisque, par nature, les missions de ces professionnels ne s'y prêtent pas.
Cet amendement comporte une petite subtilité. Il prévoit, en effet, de dispenser de la taxe les contrats conclus par les salariés des agences de voyage et de tourisme.
Même avis.
Pour répondre à Mme Dubié, qu'il s'agisse des traiteurs, des agences de voyages ou d'autres professions, la même règle s'appliquera à tous en vertu des amendements que vous venez d'adopter : si un accord de branche satisfaisant aux conditions que nous avons évoquées est signé, les CDDU seront exonérés de la taxe. Tous les contrats pourront être exonérés dès lors qu'ils seront conclus dans un tel cadre.
L'amendement no 2207 n'est pas adopté.
Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 3027 , 1370 , 2410 , 2692 et 2409 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 2410 et 2692 sont identiques.
Les amendements no 3027 de M. Francis Vercamer et no 1370 de M. Nicolas Forissier sont défendus.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement no 2410 .
Madame la ministre, vous prétendez que l'amendement de la commission des finances et les amendements identiques que nous avons adoptés apporteront une réponse aux questions que nous soulevons. Je suis désolée, mais dans les faits, cette disposition sera inopérante car, par définition, la conclusion de contrats à durée déterminée dits d'usage est motivée par la nature de l'activité et par son caractère temporaire.
La parole est à M. Fabrice Brun, pour soutenir l'amendement identique no 2692 .
Un CDDU peut être conclus à la demande du salarié parce que celui-ci est soumis à des contraintes personnelles ou parce qu'il doit cumuler plusieurs emplois. Le présent amendement vise à donner de la souplesse au dispositif en exonérant de taxe les contrats conclus dans ces conditions.
L'amendement no 2409 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 1536 rectifié , 2712 et 3004 .
La parole est à Mme Lise Magnier, pour soutenir l'amendement no 1536 rectifié .
Cet amendement vise à exclure du champ de la taxe les contrats conclus par les associations répondant à un appel à projet public à durée déterminée. Le projet public étant par nature à durée déterminée, les associations auront nécessairement recours à des contrats à durée déterminée dits d'usage.
J'ajoute à l'excellente argumentation de Mme Magnier qu'il serait malvenu d'imposer une taxe sur des contrats qui permettent de répondre au besoin d'une collectivité ou de l'État.
Les amendements identiques nos 1536 rectifié , 2712 et 3004 , repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.
La parole est à Mme Sarah El Haïry, pour soutenir l'amendement no 3003 .
Cet amendement concerne les services de secours, dont chacun connaît la mobilisation et l'importance dans nos territoires. Je propose donc un traitement particulier pour les contrats conclus par les associations agréées de sécurité civile.
L'amendement no 3003 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 1583 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement vise à exonérer de la taxe les contrats conclus avec les salariés relevant des professions du déménagement. Madame la ministre, nous n'avons pas dû rencontrer les mêmes entreprises, car il émane de ce secteur d'activité une forte demande en ce sens.
L'amendement no 2711 de Mme Véronique Louwagie est défendu.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements ?
Défavorable aussi, mais le secteur du déménagement est un très bon exemple. En effet, un accord ayant été signé, il sera exempté de la taxe. Il montre ainsi la voie aux autres : c'est très bien.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Je souhaite revenir sur vos propos, madame la ministre. À moins que je vous aie mal comprise, vous affirmez qu'un secteur d'activité sera exonéré s'il a signé une convention. Pourtant, ce n'est pas ce que prévoit l'amendement de la commission que nous avons adopté. Si je l'ai bien lu, il faut en effet non seulement qu'un accord ait été signé, mais aussi que l'entreprise s'engage à convertir tous ses CDDU en CDI dans un délai à déterminer. Il ne suffit donc pas qu'un accord de branche ait été signé. Je tenais à corriger vos propos – à moins que j'aie mal saisi.
Avis défavorable.
J'ai fait un raccourci, madame Louwagie. Il faut qu'un accord de branche ait été signé, et que celui-ci respecte les deux conditions posées dans l'amendement. C'est le cas pour le secteur du déménagement – qui est en avance sur ce que, je l'espère, l'Assemblée adoptera.
L'amendement no 2222 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je suis saisi de quatre amendements, nos 2221 , 2708 , 2678 et 2930 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 2678 et 2930 sont identiques.
Tous ces amendements – les amendements no 2221 de M. Fabrice Brun et no 2708 de Mme Véronique Louwagie, ainsi que les amendements identiques no 2678 de Mme Lise Magnier et no 2930 de M. Fabrice Brun – sont défendus.
Cet amendement vise à exclure du champ de la taxe les contrats conclus avec les salariés relevant des professions de l'action culturelle.
Il me semble, madame la ministre, que, dans votre propos liminaire, vous avez dit que les professions culturelles et du spectacle seraient exonérées de taxe. Je souhaiterais avoir confirmation.
Les professions du spectacle sont bien exemptées de taxe car les employeurs de salariés intermittents du spectacle continuent de s'acquitter de la surcontribution de 0,5 % au titre des CDDU : ils ne vont pas payer deux fois la taxe.
Je vous propose donc de retirer vos amendements, puisqu'ils sont satisfaits ; à défaut, l'avis du Gouvernement serait défavorable.
L'amendement no 2218 n'est pas adopté.
Cet amendement concerne les contrats conclus avec les salariés des professions d'entreposage et de stockage de la viande. Plus généralement, tous les professionnels travaillant dans le domaine des denrées alimentaires périssables ont un important besoin de flexibilité.
Cet amendement vise à obtenir le report d'un an de l'application de la taxe – mais Mme la ministre a déjà expliqué que ce ne serait pas possible. Il s'agit donc plutôt d'un amendement d'appel.
Nous sommes le 14 novembre, et la taxe entrera en vigueur dans un mois et demi. Or les amendements identiques que nous avons adoptés tout à l'heure permettront, en cas de convention ou d'accord collectif, d'exonérer une branche de cette taxe. Certaines branches, comme celle des traiteurs, n'auront malheureusement pas le temps d'aboutir à un tel accord d'ici au 1er janvier prochain – même si vous avez souligné, madame la ministre, que cela fait longtemps que de tels accords auraient dû être conclus. Aussi seront-elles pénalisées en devant payer cette taxe à partir de cette date.
Je souhaiterais donc, madame la ministre, que vous vous engagiez sur le fait que dès qu'un accord aura été conclu, celui-ci ne restera pas au bas de la pile et qu'il obtiendra rapidement votre signature. Nous garantirions de cette manière une efficacité maximale à cette mesure et éviterions que certains secteurs d'activités ne pâtissent trop de l'instauration de cette taxe.
Défavorable sur les deux amendements.
Je précise néanmoins qu'en contrepartie du dialogue auquel nous incitons les partenaires sociaux, nous ferons diligence pour entériner au plus vite les accords qui auront été conclus afin que les secteurs d'activité concernés soient aussi peu taxés que possible – même s'il existe des délais incompressibles, une commission devant statuer. Je vous invite donc à retirer votre amendement, monsieur Blanchet.
L'amendement no 1861 est retiré.
L'amendement no 2698 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement no 2700 .
Tous les exemples que nous avons mis en avant au travers des différents amendements que nous avons soutenus montrent qu'il existe des secteurs et des activités pour lesquels il est très difficile de ne pas recourir à des contrats à durée déterminée dits d'usage, qu'il s'agisse de l'hôtellerie et restauration, des guides conférenciers, des enquêteurs, des déménageurs ou des activités foraines. Vous savez fort bien que, dans la vraie vie, il est impossible pour ces secteurs de ne pas avoir recours à des CDDU.
L'amendement no 2700 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 2540 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 2541 .
Cet amendement vise à ce que le Gouvernement remette au Parlement, d'ici à la mi-2022, un rapport sur l'application de la mesure, afin que nous puissions agir en connaissance de cause au terme des nouvelles règles de l'assurance chômage, prévu au 1er novembre 2022.
L'amendement no 2541 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 51, amendé, est adopté.
Rappel au règlement
Je souhaiterais revenir, monsieur le président, sur ce qui s'est passé cet après-midi, au moment de l'examen des amendements portant article additionnel après l'article 72.
L'amendement no 2901 de notre collègue Mohamed Laqhila a simplement été déclaré défendu, puis il a reçu un avis défavorable de la part de M. le rapporteur général et un avis favorable de la part du Gouvernement. Nous sommes ensuite passés au vote dans le brouhaha, sans y prêter réellement attention, et l'amendement a été adopté grâce aux voix des députés de la majorité – pas aux nôtres. Ce faisant, ceux-ci ont – je ne sais pas s'ils en sont conscients – décidé de réintroduire l'huile de palme sur la liste des biocarburants jusqu'en 2026. Elle avait pourtant été exclue de cette liste l'an dernier à la suite d'un combat homérique mené par le MODEM lui-même ! Il faut dire que sur le plan environnemental, il est possible de mieux faire que d'importer de l'huile de palme de Malaisie, au prix de la déforestation et afin d'alimenter des carburants en France.
J'ai néanmoins le droit de dire, cher collègue, que la manière avec laquelle s'est déroulée ce vote n'est ni convenable ni élégante et que, sur le plan environnemental, cette décision n'est ni correcte ni intelligente. Le président du groupe Libertés et territoires, Philippe Vigier, va certainement demander qu'une conférence des présidents soit convoquée demain afin d'examiner la manière dont tout cela s'est passé et obtenir une seconde délibération – je crois que M. le rapporteur général ou M. le président de la commission des finances ont le pouvoir d'en demander une.
Monsieur Pupponi, vous aurez constaté que j'ai procédé au vote de manière tout à fait correcte – je tiens à le signaler pour des raisons qui ne sont pas nationales.
Je vous remercie, monsieur Pupponi, de m'en donner crédit car, en raison de mon département d'élection, je souhaite qu'il n'y ait pas le moindre malentendu sur le sujet. Il est en effet fréquent que des personnes partageant vos opinions sur l'huile de palme s'opposent à moi.
Il sera donc porté au compte rendu que j'ai été un président exemplaire : j'en suis très heureux !
Exclamations et rires.
Toujours pour qu'il n'y ait pas de malentendu, ne croyez pas que je fais ici allusion au MODEM, car ce n'est pas le cas – si j'apporte cette précision, c'est que ce mouvement est très présent dans le département dont je suis l'élu.
La conférence des présidents et le président Ferrand seront donc saisis par M. le président Vigier et examineront la question.
Enfin, je vous demanderai, monsieur Pupponi, de faire référence à un article du règlement la prochaine fois que vous souhaiterez faire un rappel au règlement.
Je vais le retirer au profit de l'amendement no 2597 de la commission des finances.
La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l'amendement no 2193 .
J'avais déjà présenté cet amendement de M. Boris Vallaud en commission. Je suis, moi aussi, prête à le retirer au profit de l'amendement no 2597 sous réserve toutefois que l'on me confirme que la contribution pour 2019 de l'Association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées – AGEFIPH – est annulée et qu'à partir de 2020, elle donnera lieu à une convention et à des négociations entre l'AGEFIPH et l'État. Est-ce bien cela ?
L'article 65 institue une contribution pluriannuelle de l'AGEFIPH au financement des entreprises adaptées à hauteur de 50 millions à 55 millions d'euros par an entre 2020 et 2022, par le truchement de l'Agence de services et de paiement, qui est un opérateur de l'État.
L'adoption de l'amendement no 2597 reviendrait à supprimer l'article 65, ainsi que la contribution exceptionnelle de l'AGEFIPH pour 2019, qui deviendrait de ce fait caduque. L'amendement vise à modifier le circuit de financement afin de le rendre davantage conforme aux canons du droit budgétaire. Au lieu de passer par une contribution de l'AGEFIPH à l'Agence de services et de paiement, qui elle-même verserait des aides aux entreprises adaptées, le financement serait assuré par une convention pluriannuelle entre l'État et l'AGEFIPH, avec un versement de cette dernière retracé dans le budget général au travers d'un fonds de concours – ce qui répond à la question posée par Mme Pires Beaune. Le Parlement serait par conséquent informé, en programmation et en exécution, de l'utilisation des fonds. Le montant du versement de l'AGEFIPH, d'environ 50 millions d'euros, serait quant à lui calibré précisément en fonction des besoins des entreprises adaptées et des ressources de l'association.
Pour l'intérêt de la discussion, je souhaiterais rappeler le contexte dans lequel s'inscrivent cet amendement et ce sous-amendement, à savoir une démarche globale visant à faciliter l'accès à l'emploi des personnes en situation de handicap. À quelques jours de la vingt-troisième édition de la semaine européenne pour l'emploi des personnes handicapées, je souhaite rappeler l'engagement très fort du Gouvernement en la matière. D'ailleurs, lundi prochain, mes collègues Sophie Cluzel et Olivier Dussopt et moi-même installerons le comité national de suivi et d'évaluation de la politique d'emploi des personnes handicapées.
À l'invitation du président de l'Union nationale des entreprises adaptées – UNEA – , Cyril Gayssot, j'ai pu constater sur le terrain, aussi bien en visitant l'entreprise FMS à Saint-Geours-de-Maremne il y a quelques semaines, que lors du lancement à Pau, le 10 octobre dernier, de l'Inclusive Tour, les attentes du secteur et la nécessité de procéder à des transformations. Tel est l'objet de l'engagement national « Cap vers l'entreprise inclusive 2018-2022 » que nous avons, Sophie Cluzel et moi, signé le 12 juillet 2018 avec l'UNEA, APF France handicap et l'Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis, l'UNAPEI. La grande ambition que nous portons collectivement avec le secteur est de passer de 40 000 à 80 000 emplois dans les entreprises adaptées. Un grand nombre de personnes demeurent en effet aujourd'hui à leur domicile ou dans un ESAT, un établissement et service d'aide par le travail, alors qu'elles pourraient être en mesure, par l'intermédiaire d'un emploi dans une entreprise adaptée, d'être progressivement amenées vers un emploi ordinaire. C'est pourquoi la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel a établi des passerelles reliant les entreprises adaptées aux autres employeurs publics et privés, comme le CDD « tremplin ».
L'année 2019 apparaît comme une année charnière pour la transformation des entreprises adaptées, et c'est pourquoi la question des financements se pose avec tant d'acuité. L'État accompagne cette transformation par l'inscription de 395 millions d'euros de crédits dans la loi de finances pour 2019 au titre de la mission « Travail et emploi », ce qui représente une augmentation de 25 millions d'euros par rapport à l'année précédente. Cet appui financier se poursuivra en 2020 grâce à un budget de 403 millions d'euros, en progression de 8 millions par rapport à 2019.
Cet effort budgétaire s'accompagne d'une contribution de l'AGEFIPH, dont la vocation est le retour à l'emploi des personnes en situation de handicap. L'article 273 de la loi de finances pour 2019 et l'article 65 du PLF pour 2020 prévoient une telle contribution, à hauteur de 50 millions d'euros pour 2019, puis pour un montant compris entre 50 millions et 55 millions d'euros par an entre 2020 et 2022.
Les récents échanges entre l'AGEFIPH, qui est un organisme paritaire, et l'État ont toutefois abouti à opter pour une autre solution que l'article 65. L'AGEFIPH fournira une contribution à titre volontaire par l'intermédiaire d'un accord, et non d'un prélèvement décidé par le Parlement. Cet accord prendra la forme d'une convention pluriannuelle pour la période 2019-2022, laquelle sera conclue prochainement et prévoit une contribution de l'AGEFIPH au financement des entreprises adaptées d'un montant annuel d'environ 50 millions d'euros.
Le montant exact sera défini chaque année par accord entre l'AGEFIPH et l'État, en fonction des besoins, c'est-à-dire de la montée en puissance des entreprises adaptées. Cette approche conventionnelle, fondée sur la concertation, sera plus souple et conforme à l'esprit que nous avons voulu encourager, notamment grâce aux ordonnances. Elle permettra un dialogue régulier entre l'État, l'AGEFIPH et le secteur adapté.
Comme vous l'avez souhaité, le passage à ce financement par convention s'accompagnera de la création d'un fonds de concours, qui permettra au Parlement de suivre précisément l'affectation des crédits versés par l'AGEFIPH.
Sous réserve de l'adoption du sous-amendement no 3106 du Gouvernement, qui vise à préciser que la suppression du prélèvement prévu en 2019 entrera en vigueur avant l'échéance du 31 décembre 2019, …
… le Gouvernement émet un avis très favorable, autrement dit plus que favorable, …
Sourires.
… à l'amendement no 2597 de la commission des finances. Nous confirmons qu'il convient d'abroger la disposition législative relative à l'exercice 2019 et qu'aucune disposition législative n'est prévue concernant les années 2020 à 2022.
Le sous-amendement no 3107 est adopté.
L'amendement no 2597 , sous-amendé, est adopté, et l'article 65 est ainsi rédigé.
Il porte sur le système de financement de l'apprentissage dans le secteur du bâtiment et des travaux publics. Je fais un bref rappel historique pour que vous en compreniez bien l'objet.
Depuis 1951, les entreprises du BTP versent une contribution établie par convention entre les partenaires sociaux du secteur et inscrite dans le code du travail. Son produit est affecté au CCCA-BTP, le comité de concertation et de coordination de l'apprentissage du bâtiment et des travaux publics, qui regroupe l'ensemble des centres de formation d'apprentis du secteur.
À ce stade, les partenaires sociaux du BTP ne sont pas parvenus à un accord relatif au financement de l'apprentissage. Compte tenu de la date, la conclusion d'un tel accord avant le 1er janvier 2020 leur semble et nous semble inaccessible. Dans ces conditions, le financement de l'alternance et de l'apprentissage dans le secteur du BTP n'est pas garanti.
Par le présent amendement, établi après concertation avec le secteur, le législateur fixerait lui-même le taux de cotisation en cas de carence des partenaires sociaux. Il s'agirait d'une forme de subsidiarité, si jamais les partenaires sociaux n'arrivaient pas à conclure. Cela permettrait de sécuriser le niveau de financement de l'alternance et de l'apprentissage dans le secteur du BTP – lesquels sont d'ailleurs en plein développement depuis l'entrée en vigueur de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel – , de répartir le produit de la contribution entre l'opérateur de compétences du bâtiment et le CCCA-BTP, et de garantir le financement du lycée d'Égletons, référence nationale et internationale en matière de travaux publics.
Il convient de reconnaître que le secteur du BTP a du mal à conclure l'accord attendu. Néanmoins, les acteurs concernés étant tous attachés à l'apprentissage et à l'alternance, ils demandent au Gouvernement et au Parlement de les aider à sécuriser le système au cas où ils n'y parviendraient pas eux-mêmes.
La parole est à M. le rapporteur général, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement et pour soutenir le sous-amendement no 3106 .
J'émets un avis favorable sur l'amendement. Mon sous-amendement est rédactionnel.
Le sous-amendement no 3106 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement no 3081 , sous-amendé, est adopté.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à vingt-deux heures cinquante, est reprise à vingt-deux heures cinquante-cinq.
Il s'agit d'un amendement de notre collègue Arnaud Viala.
Nous constatons que l'exonération de taxe foncière sur les priorités bâties appliquée aux bâtiments ruraux affectés de manière permanente et exclusive à un usage agricole est un élément très intéressant pour les exploitants agricoles. Or elle n'est pas applicable lorsque de tels bâtiments utilisés de manière permanente et exclusive à un usage agricole sont détenus par des regroupements d'exploitants, c'est-à-dire des sociétés elles-mêmes constituées d'exploitants agricoles.
Vous le savez très bien, de nombreux exploitants agricoles se regroupent actuellement pour organiser les évolutions techniques et technologiques qui s'imposent à eux. Ces regroupements sont nécessaires, voire indispensables, dans un certain nombre de cas. Il n'est pas équitable qu'ils ne bénéficient pas de l'exonération mentionnée. Je propose, par cet amendement, de la leur étendre.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l'amendement no 1089 .
Cet amendement de M. Le Fur vise à ce que les regroupements d'exploitants agricoles, quelle que soit leur forme juridique, bénéficient de l'exonération permanente de taxe foncière sur les propriétés bâties applicable à tous les bâtiments ruraux affectés de manière permanente et exclusive – le terme est important, car il délimite précisément le champ de l'amendement – à un usage agricole.
Il s'agirait d'une mesure importante en faveur du monde agricole, qui contribuerait à la lutte contre l'artificialisation des terres, dont nous parlons sans cesse.
Il est défavorable. L'exonération doit être limitée à des organismes qui ne sont pas des sociétés civiles ou commerciales, donc aux seules sociétés coopératives agricoles et groupements d'intérêt économique, qui sont précisément constitués entre exploitations agricoles.
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du numérique, pour donner l'avis du Gouvernement.
Je passe du coq à l'âne ; c'est le jeu lors de l'examen des articles non rattachés.
L'amendement vise à clarifier le statut fiscal des bassins naturels de baignade au regard de la taxe d'habitation et de la taxe foncière sur les propriétés bâties. En commission des finances, j'ai reçu une réponse partielle.
Je souhaiterais obtenir une réponse plus complète de la part du Gouvernement, dans l'intérêt de contribuables de bonne foi qui n'ont pas les moyens de construire une piscine ou optent pour un bassin de baignade plus conforme à leur vision de l'environnement.
Apparemment, M. Brun a été relativement satisfait de ma réponse, mais attend que le Gouvernement la confirme. Je ne répéterai donc pas ladite réponse et laisse le soin au Gouvernement de donner la sienne. J'émets néanmoins un avis défavorable.
Contrairement à ce qui est indiqué dans l'exposé sommaire de l'amendement, les bassins naturels de baignade ne bénéficient d'aucune exemption fiscale. Leur caractère naturel et écologique est sans incidence sur leur traitement fiscal.
L'instauration d'une exonération en faveur des bassins naturels de baignade créerait une différence de traitement fiscale injustifiée entre les propriétaires de tels bassins et ceux de piscines traditionnelles. Au surplus, cela ne manquerait pas d'encourager des demandes similaires pour d'autres biens analogues. La mesure que vous proposez induirait par ailleurs une perte de ressources pour les collectivités territoriales.
Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement.
L'amendement no 1912 n'est pas adopté.
La loi de finances pour 2010 avait supprimé la taxe professionnelle, notamment parce que son assiette incluait tous les biens d'équipements. Les cotisations qui l'ont remplacée portent l'une sur le foncier, l'autre sur la valeur ajoutée, qui est un sujet distinct.
On s'aperçoit qu'il existe aujourd'hui des interprétations différentes quant à l'assujettissement des équipements productifs à la taxe foncière sur les propriétés bâties – TFPB. À l'origine, on avait bien indiqué qu'ils étaient tous exclus de son assiette. C'était le cas de gros équipements tels que les fours, les réseaux frigorifiques ou les tours de craquage.
En 2013, le Conseil d'État a ajouté un autre critère : l'équipement devait désormais être dissociable de l'immeuble. Le fisc a alors considéré qu'un certain nombre d'équipements n'étaient pas dissociables de l'immeuble, notamment ceux que je viens de citer. Il s'agit pourtant d'équipements destinés à produire, qui ne sont en aucun cas assimilables à un immeuble, et au bénéfice desquels le législateur avait entendu supprimer la taxe professionnelle.
Il est nécessaire de clarifier cette question d'ordre fiscal en mettant fin à cette interprétation, d'ailleurs appliquée de manière par trop variable. Je souhaiterais donc que vous fassiez adopter le présent amendement. Au cas où vous ne voudriez pas le faire, pour des raisons que je ne m'expliquerais pas, j'appelle le Gouvernement à confirmer que les équipements productifs ne sont pas assujettis à la taxe foncière sur les propriétés bâties, qu'ils soient ou non dissociables de l'immeuble.
Le bulletin officiel des finances publiques – BOFiP-impôts – est très clair à ce sujet. Néanmoins, les directions départementales des finances publiques, les DDFiP, peuvent éventuellement avoir des interprétations différentes. Si tel est le cas, je suggère que le secrétaire d'État s'engage à ce qu'une clarification soit apportée pour remédier au problème.
En revanche, si votre objectif est d'exonérer des biens actuellement soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties car non dissociables du bâti, votre amendement aura des conséquences financières non maîtrisées pour les collectivités territoriales. Je vous invite donc à le retirer. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Monsieur le président Woerth, je confirme que nous pourrions travailler sur une harmonisation des pratiques des DDFiP. Il me semble que la jurisprudence récente du Conseil d'État confirme l'intention du législateur, tant dans le domaine du champ de l'exonération des installations dissociables des locaux industriels qu'au regard des principes d'évaluation de la taxe foncière sur les propriétés bâties.
Comme l'a souligné M. le rapporteur général, étendre le principe d'exonération en soustrayant ces installations de l'assiette de la CFE – cotisation foncière des entreprises – aurait pour conséquence une perte de recettes non négligeable pour les collectivités territoriales.
Je note par ailleurs que sur le fond du sujet, à savoir les possibles évolutions des modalités d'évaluation de la valeur locative des établissements industriels, un rapport doit être remis au Parlement le 1er avril 2020, afin de déterminer les effets éventuels. Une modification au fond serait donc plus pertinente après cette échéance, ce qui la reporte à un prochain projet de loi de finances.
Les entreprises rencontrent de vraies difficultés dans ce domaine, qui donne lieu à de nombreux redressements. Le plus souvent les entreprises sont de bonne foi, mais il leur est très difficile de dissocier les éléments soumis à la TFPB et à la CFE de ceux qui ne le sont pas. Les interprétations varient notablement selon les centres des impôts.
Il arrive parfois que les redressements portent sur les réfrigérateurs des cantines, que l'administration fiscale considère comme des éléments indissociables des bâtiments. C'est dire si l'on assiste à des situations ubuesques ; je me souviens que nous avions eu ce débat l'an dernier à propos de certains exemples comparables. Nous attendons en effet le rapport du Gouvernement, mais il est très urgent de résoudre ce problème.
Le sujet est important pour les entreprises. Nous parlons de fiscalité : un élément appartient ou non à l'assiette, et la question de savoir si les recettes perçues au titre de la taxe viennent financer les collectivités locales est hors sujet. Il ne faut pas tout mélanger, sans quoi on ne fait plus de fiscalité. Or je pense que le législateur n'a jamais souhaité que les équipements concourant à la production soient considérés comme des biens immeubles.
Il s'agit de regarder les outillages, les installations et les moyens matériels d'exploitation nécessaires à l'activité exercée comme extérieurs à l'assiette de la CFE ou de la taxe foncière, qu'ils soient ou non déplaçables. Une énorme machine n'est pas déplaçable. C'est de l'ordre du bon sens, lequel doit guider la fiscalité. La question n'est pas de savoir qui la recette financera, mais si c'est fiscalement juste ou injuste.
D'après ce que je comprends, vous ne contestez pas qu'il existe des différences de traitement d'une DDFiP à l'autre, avec des appréciations subjectives, entraînant de possibles incertitudes.
Il existe déjà une jurisprudence ; le Gouvernement souhaite que le rapport permette d'approfondir la question des cas d'usages. Apparemment, la situation dépend des contrôleurs fiscaux, susceptibles de décider ou non qu'un bien peut être exonéré. Il s'agit d'établir des instructions claires sur les usages à adopter, à la fois pour les personnels des administrations fiscales et pour les entreprises.
Il faut aussi que nous puissions faire remonter les cas particuliers quand c'est nécessaire.
Je soutiens l'amendement de M. Woerth. Nous sommes parfois malheureusement obligés de donner des précisions : la réglementation de l'administration, notamment par l'intermédiaire du BOFiP, va parfois plus loin que l'esprit de la loi. Or l'administration regarde plutôt le bulletin officiel que la loi. Je ne la critique pas, j'en fais partie, mais cela se passe malheureusement parfois ainsi. Il faut donc que le législateur apporte les précisions nécessaires, pour que tout soit bien clair. Cela se pratique régulièrement, j'estime que cela va dans le bon sens, y compris pour faciliter le travail de l'administration fiscale.
Cette situation me rappelle une problématique de même nature, celle des modalités de qualification des établissements industriels, pour laquelle, je pense, nous avions adopté la bonne démarche. Pendant un an environ, des réunions de travail ont associé l'ensemble des professionnels et des parlementaires. Elles ont permis de bien définir les enjeux et d'établir en définitive une doctrine fiscale, inscrite à l'article 56 de la loi de finances pour 2019. Depuis qu'il a été adopté, je n'ai pas été informé de problèmes liés à la requalification d'établissements commerciaux en établissements industriels.
Peut-être devrions-nous emprunter la même démarche dans ce cas d'espèce, afin de clarifier la doctrine fiscale et de mettre fin aux problèmes évoqués, qui mettent les entreprises en difficulté.
L'amendement no 2934 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement no 452 .
C'est un amendement déposé par notre collègue Jérôme Nury, qui tend à placer les activités de compostage agricole dans la même situation que les activités de méthanisation agricole. En effet, elles répondent à la même logique et aux mêmes objectifs. Il s'agit donc de faire en sorte que ces activités puissent également bénéficier d'exonérations de CFE et de taxe foncière sur les propriétés bâties, à condition qu'elles dépendent d'exploitants agricoles.
Cet amendement est un marronnier datant de 2015 ; de plus, il tend à instaurer un effet rétroactif aux exonérations proposées. Pour ces raisons, l'avis est défavorable.
L'amendement no 452 n'est pas adopté.
Cet amendement a pour objet d'exonérer du versement de la taxe foncière sur les propriétés bâties les surfaces de circuits de karting appartenant uniquement à des associations et gérées par elles – à l'image des exonérations existantes pour les haras ou encore les terrains occupés par des serres affectées à une exploitation agricole.
Le montant de la TFPB est calculé en fonction de la surface des bâtiments implantés sur la parcelle mais aussi de la totalité des mètres carrés du circuit, ce qui l'augmente de façon importante. Avec la récente révision des valeurs locatives des locaux professionnels, la TFPB due par les propriétaires des circuits de karting a explosé, mettant les associations qui les exploitent en difficulté.
Bien entendu, les bâtiments eux-mêmes seraient maintenus dans l'assiette de la taxe sur le foncier bâti.
Pour que la mesure soit cohérente avec les autres cas d'exonération de la TFPB, il faudrait au minimum que celle-ci soit facultative, de sorte que les collectivités territoriales décident de l'appliquer ou non. De plus, prendre en considération le mode de gestion du karting introduit une rupture d'égalité typique. L'avis est donc très défavorable.
L'amendement no 1738 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 1163 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Mon collègue Marc Le Fur a voulu évoquer par cet amendement le sujet de la méthanisation. La méthanisation agricole bénéficie de certaines exonérations de la CFE et de la taxe foncière sur les propriétés bâties. Cependant ces exonérations ne concernent pas la méthanisation industrielle.
Si la France veut atteindre son objectif ambitieux de 10 % de gaz renouvelable en 2030, tous les types de méthanisation doivent y concourir. Cet amendement ne vise pas à imposer aux collectivités d'exonérer de CFE ni de TFPB la méthanisation industrielle, mais il tend à donner à celles qui souhaiteront jouer le jeu la possibilité d'offrir cette exonération aux entreprises qui pratiquent la méthanisation en recyclant des déchets ménagers, afin qu'elles bénéficient des mêmes avantages que ceux dévolus à la méthanisation agricole, qui utilise les effluents des élevages.
Il s'agit d'un amendement de bon sens, de coordination, cohérent avec nos engagements en faveur du développement des énergies renouvelables.
Les amendements identiques nos 1945 de M. Pancher et 2784 de Mme Louwagie sont défendus.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Le Fur et ses collègues font preuve de constance depuis 2016, puisque cette mesure est proposée chaque année depuis. Il faut distinguer la méthanisation industrielle, dont le bilan carbone n'est pas toujours très bon, de la méthanisation agricole de proximité, déjà bénéficiaire d'exonérations. Comme toujours depuis 2016, l'avis est défavorable.
Sourires.
L'avis est également défavorable, même si c'est la première fois que je l'exprime.
Peut-être parviendrons-nous à vous convaincre un jour, monsieur le rapporteur ; quelle différence faites-vous entre les deux formes de méthanisation ? Il n'y en a pas !
L'adoption de l'amendement laisserait aux collectivités locales qui perçoivent cet impôt la décision de pratiquer les exonérations et de perdre les recettes afférentes, pour des raisons de développement économique ou environnemental.
Le Parlement et le Gouvernement s'affranchissent à leur gré des compensations, pénalisant les communes, mais les communes ne pourraient pas décider de ne pas percevoir les recettes d'un impôt ?
Revenons à des règles simples : il s'agit de fiscalité locale, c'est aux collectivités de décider ; si elles veulent exonérer les entreprises de ces taxes sur leur territoire, elles doivent avoir le droit de le faire.
L'amendement no 1095 n'est pas adopté.
Parmi l'ensemble des dispositifs existant pour soutenir financièrement les propriétaires qui réalisent des travaux éligibles au crédit d'impôt pour la transition énergétique, le code général des impôts permet aux collectivités territoriales d'exonérer de la taxe foncière sur les propriétés bâties les constructions de logements achevés avant le 1er janvier 1989 faisant l'objet de dépenses éligibles au CITE.
À l'heure actuelle, la part de l'exonération doit être fixée par la collectivité à 50 % ou à 100 % du montant de la taxe foncière. De surcroît, lorsque la collectivité décide de l'appliquer, elle est contrainte de le faire pour cinq ans.
Cet amendement vise à assouplir ces règles, pour que les collectivités puissent se saisir plus largement de cet outil, et donc accompagner elles aussi la rénovation énergétique des logements. Pour ce faire, nous proposons de remplacer « de 50 % ou de 100 % » par « de 50 % à 100 % », et surtout de ramener la durée de l'exonération de cinq à trois ans.
Sur le fond, je suis plutôt favorable à cet amendement ; il permettrait de donner plus de flexibilité aux collectivités pour user de cette exonération facultative, afin d'inciter les propriétaires bailleurs à rénover les logements qu'ils mettent en location. Pour ces raisons, j'émets un avis de sagesse.
La durée actuelle de cinq ans, qui s'applique à d'autres exonérations de courte durée, semble équilibrée et adaptée à l'objectif poursuivi. La raccourcir enverrait un signal négatif au contribuable, ce qui serait vraisemblablement contreproductif. Permettre aux collectivités de moduler davantage le taux d'exonération – entre 50 % et 100 % – leur laisserait plus de latitude, mais il faudrait alors prévoir des paliers par dizaine pour simplifier la gestion et offrir au contribuable une meilleure visibilité. Dans ces conditions, le Gouvernement émet un avis défavorable.
Les amendements nos 2426 et 1948 , dont Mme Battistel est la première signataire et qui seront appelés dans un instant portent sur le même sujet. Je m'étonne donc que les trois amendements ne fassent pas l'objet d'une discussion commune.
Mme Battistel avait présenté l'un d'eux en commission, après quoi elle a procédé, à la demande de M. le rapporteur général, à un changement de date.
Je ne peux pas vous répondre précisément sur ce point, madame Pires Beaune. Peut-être M. le rapporteur général, qui a émis un avis de sagesse sur l'amendement de Mme Magnier, souhaite-t-il émettre un avis favorable sur les vôtres ? Cela me semble la seule explication.
Sourires.
Monsieur le secrétaire d'État, l'amendement est conforme à la volonté du Gouvernement de mieux accompagner les collectivités territoriales et de redonner confiance aux élus. En France, nous nous heurtons à une difficulté en ce qui concerne la rénovation énergétique des logements. Nous en avons longuement débattu tout au long de l'examen du projet de loi de finances et, comme nous le faisons à chaque PLF, nous avons reparlé du crédit d'impôt pour la transition énergétique.
L'amendement vise à laisser aux collectivités la possibilité de prendre une décision. Elles bénéficieraient ainsi d'une plus grande souplesse.
Pour certaines collectivités, accorder une exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties aux logements achevés avant le 1er janvier 1989 qui ont fait l'objet de dépenses éligibles au CITE peut être très lourd. Le faire pour trois ans serait plus facile. En outre, pourquoi ne pas leur laisser le choix de moduler le taux d'exonération entre 50 % et 100 % ?
Je n'ai pas compris votre argument sur la nécessité de fixer des paliers par dizaine. Si une collectivité préfère retenir un taux d'exonération de 62 %, par exemple, pourquoi ne pas lui en laisser la liberté ? Laissons-les se saisir correctement des outils existant, et rendons leur usage plus souple !
Pourquoi ne pas faire confiance aux collectivités territoriales ? Pour l'heure, celles-ci doivent choisir entre un taux d'exonération de 50 % ou de 100 %, mais certaines en préféreraient peut-être un autre, par exemple 75 %. Tout dépend des territoires. Laissons aux collectivités la possibilité de fixer elles-mêmes le taux d'exonération. Elles disposent déjà d'une marge de liberté, puisqu'elles peuvent déjà choisir entre 50 % et 100 %. Par conséquent, où est la difficulté ?
L'amendement présente l'avantage d'accompagner les collectivités, qui pourront prendre leur décision en fonction du territoire. Je rappelle que, sur l'amendement, M. le rapporteur général a émis un avis de sagesse.
Je suis très surprise que le Gouvernement ait émis un avis défavorable, alors qu'il s'apprête à présenter le projet de loi « engagement et proximité », visant à redonner confiance aux élus. Ce matin, on nous a parlé de discernement et de différenciation. Ce soir, nous en sommes apparemment très loin !
Mme Magnier propose une modulation du taux, qui pourrait certes nous convenir, mais non de la durée, qui serait raccourcie partout de cinq à trois ans. Elle ne laisse donc pas le choix aux collectivités, ce qui justifie l'avis défavorable du Gouvernement.
L'amendement no 2041 est adopté.
Applaudissements sur les bancs des groupes UDI-Agir et LR.
Ces amendements, je l'ai dit, portent sur le même sujet que le précédent, puisqu'ils visent à eux aussi à assouplir le dispositif d'exonération de TFPB pouvant être mis en place par les collectivités au bénéfice des ménages après réalisation de certains travaux d'économie d'énergie.
Aujourd'hui, lesdits travaux concernent les logements achevés avant le 1er janvier 1989. L'amendement no 2426 vise à y associer les logements achevés avant le 31 décembre 2011. L'amendement no 1948 , qui est de repli, vise à y associer les logements achevés avant le 31 décembre 2004.
J'avais cru moi aussi que les trois amendements feraient l'objet d'une discussion commune. Si tel avait été le cas, j'aurais suggéré à Mme Pires Beaune, qui propose peut-être un élargissement excessif du dispositif, de retirer ses amendements au profit de celui de Mme Magnier, que l'assemblée vient d'adopter.
Cela dit, je continue à demander le retrait des amendements. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Dans un souci de cohérence avec ma réponse précédente, avis défavorable.
Je ne partage pas l'analyse de M. le rapporteur général. À mon sens, je ne propose pas d'élargir le dispositif. L'amendement no 2041 de Mme Magnier, qui vient d'être adopté, ne modifie pas le fait que le dispositif d'exonération concerne uniquement des travaux relatifs à des logements construits au 1er janvier 1989. Nous proposons de traiter, dans l'amendement no 2426 , le cas des logements construits entre le 1er janvier 1989 et le 1er janvier 2012 et, dans l'amendement no 1948 , celui des logements construits entre 1989 et le 1er janvier 2005.
Les amendements de Mme Magnier et ceux de Mme Pires Beaune sont complémentaires !
Mes amendements ne portent ni sur le taux d'exonération ni sur la durée de l'exonération.
Grâce à l'amendement no 2041 , les collectivités pourront modifier à leur guise le taux d'exonération. Les amendements en discussion tendent à élargir le nombre de logements éligibles au dispositif. Ils permettront donc que l'on procède à davantage de rénovations thermiques, notamment à ce que l'on supprime – ce qui est notre objectif à tous – les « passoires thermiques », appellation qui, malheureusement, peut s'appliquer à beaucoup de logements construits après 1989.
Attendons de voir si l'amendement no 2041 aura un effet incitatif sur les collectivités locales. Si l'on élargit trop l'assiette de l'exonération, on court le risque de retirer aux collectivités toute incitation à agir. Mieux vaut attendre avant de prendre une telle décision. Je maintiens donc ma demande de retrait.
Il s'agit de proroger jusqu'à la fin de 2022 le dispositif de soutien aux jeunes entreprises innovantes – JEI. Nous proposons également que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur les effets et les évolutions possibles de ce dispositif.
Celui-ci vise à aménager le critère de qualification exigeant que les dépenses de ces entreprises en recherche et développement représentent au moins 15 % du total de leurs charges déductibles.
Je suis très favorable à l'amendement et au sous-amendement. Le dispositif a prouvé de son efficacité. C'est donc une excellente idée que de le proroger. Lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, un débat s'est élevé sur ces bancs sur le plafonnement de la compensation de la sécurité sociale. Le PLFSS ayant été rejeté ce soir par le Sénat, nous aurons l'occasion de revenir sur ces éléments.
Le sous-amendement no 3032 est adopté.
L'amendement no 2517 , sous-amendé, est adopté.
Certainement, monsieur le président. Il s'agit d'un sujet dont nous parlons souvent, mais cette fois, le Gouvernement nous a communiqué des chiffres, ce dont je le remercie.
À la demande du Gouvernement, le Parlement a voté le principe d'exonération d'impôts directs locaux ou d'abattements, qui ne sont pas compensés aux collectivités locales. Nous proposons que les collectivités possèdent un droit de veto à l'égard de décisions prises ailleurs, qui les pénalisent.
Avec une mention spéciale pour notre collègue Jean-René Cazeneuve, je me permettrai de citer quelques chiffres. Alors que le montant des exonérations accordées par les collectivités aux personnes modestes atteint 326 millions d'euros par an, ces collectivités en reçoivent 16 millions en échange ! Autant dire qu'on leur prend chaque année 310 millions, qu'on ne leur rend jamais.
Le montant des abattements de 30 % de la base d'imposition de la TFPB, liés aux contrats de ville, se monte à 157 millions par an. Or, après abattement, les collectivités ne touchent que 62 millions par an. Par ce biais, on leur prend donc un peu moins de 100 millions par an, sans qu'elles aient leur mot à dire.
Inutile de multiplier les exemples. Au total, ce sont des centaines de millions, voire des milliards d'euros qu'on emprunte aux collectivités locales. Cela ne peut plus continuer. Elles doivent pouvoir s'opposer à des décisions qui les concernent et qui sont prises ailleurs.
En cas de démolition-reconstruction de logements locatifs sociaux dans le cadre des conventions ANRU – Agence nationale pour la rénovation urbaine – , la nouvelle construction ne peut pas bénéficier des régimes d'exonération de taxe foncière prévus pour ces opérations si la construction démolie en avait déjà bénéficié et si la commune compte plus de 50 % de logements sociaux. Cette règle a été adoptée dans le cadre de la loi de finances pour 2017, sur proposition de certains élus locaux qui s'inquiétaient des pertes de recettes fiscales liées à ces exonérations et souhaitaient limiter la concentration des logements sociaux sur leur territoire, dès lors que ces logements étaient déjà nombreux.
Si ces préoccupations sont tout à fait compréhensibles, il y a des situations où la reconstruction sur place s'impose, en raison de spécificités particulières. Nous proposons donc de permettre aux élus locaux de déroger à la règle, s'ils le souhaitent.
M. Pupponi a raison de souligner que les collectivités locales sont pénalisées par des exonérations d'impôts directs locaux, qui ne sont que partiellement compensées par l'État. Toutefois, ces amendements me gênent en ce qu'ils permettent aux collectivités locales de remettre en cause des exonérations de manière unilatérale, alors que celles-ci permettent à l'État de soutenir la construction de logements neufs, en exonérant de TFPB le futur propriétaire bailleur pendant une période assez longue, pouvant s'étendre selon les dispositifs sur dix à trente ans.
Aux termes des amendements nos 1946 , 1957 et 1961 , les collectivités pourraient remettre en cause des engagements de l'État en termes de fiscalité, ainsi que l'équilibre financier des projets de construction de logements neufs passés et nouveaux. J'émets donc un avis défavorable.
Les amendements nos 1955 et 2089 posent un autre problème : la mesure qu'ils préconisent s'appliquerait de manière rétroactive aux opérations de démolition et de reconstruction déjà effectuées, ce qui susciterait par ailleurs un effet d'aubaine très important. Avis également défavorable.
Vous avez parfaitement résumé la situation, monsieur le rapporteur général. Le Gouvernement souhaite favoriser le financement et la construction de logements sociaux : cela ne me poserait évidemment aucun problème, s'il en assumait le coût. Or ce n'est pas le cas, puisqu'il demande aux collectivités locales de payer à sa place. C'est cet aspect qui est choquant.
Si le Gouvernement veut favoriser le logement social par des dispositifs, qu'il en assure lui-même le financement, et ne demande pas aux communes les plus pauvres de le faire à sa place.
Ces communes se voient privées d'une partie de leurs recettes alors que leur population est de plus en plus fragile. Il y a quelques années, un ancien premier ministre avait parlé d'« apartheid » pour décrire la situation de notre pays. Il avait raison de dénoncer une ghettoïsation organisée : ces dispositifs touchant aux finances locales se font sur le dos des communes.
Je rejoins la position de M. Pupponi. Certaines exonérations des impôts directs locaux s'inscrivent dans le temps long et concernent toutes les communes – laissons-les de côté. Toutes les autres, instaurées en faveur des personnes modestes – qu'il s'agisse d'abattements inscrits dans les contrats de ville, ou de ceux prévus pour les zones franches urbaines et les quartiers prioritaires de la politique de la ville – , s'appliquent spécifiquement aux communes qui connaissent les plus grandes difficultés, et où se concentrent les logements sociaux.
Ce constat vaut aussi pour les EPCI – établissements publics de coopération intercommunale – , puisque les exonérations affectent les finances de ces derniers.
Les sommes non compensées dont nous parlons ici se comptent en centaines de millions d'euros.
L'amendement no 1946 n'est pas adopté.
Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 2880 , 2980 , 1949 , 2125 et 2872 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 2880 et 2980 sont identiques, de même que les amendements nos 1949 , 2125 et 2872
La parole est à M. Daniel Labaronne, pour soutenir l'amendement no 2880 .
La loi de finances pour 2019 étend aux logements anciens réhabilités, pour une durée de quinze ans, le bénéfice de l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties applicable aux constructions de logements neufs faisant l'objet d'un contrat de location-accession.
Le présent amendement a pour objet de préciser les modalités d'application de cette disposition. Premièrement, l'achèvement des travaux de réhabilitation constituerait le point de départ de l'exonération. Deuxièmement, les conditions d'octroi de cette exonération seraient alignées sur celles qui s'appliquent pour l'exonération des constructions neuves en location-accession. Enfin, l'amendement vise à faciliter le cumul du prêt social accession location – PSLA – et du prêt à taux zéro pour les logements anciens, dans les cas où un contrat de location-accession a été signé.
L'amendement vise à étendre le dispositif de PSLA aux logements anciens faisant l'objet de travaux. Le PSLA est un prêt conventionné ouvert aux opérateurs souhaitant avoir recours à la location-accession. L'obtention du prêt est subordonnée à l'agrément de l'État et à l'obligation de signer une convention avec celui-ci. Destiné aux ménages aux revenus modestes, inférieurs à un plafond de ressources, le PSLA propose un dispositif original d'accession à la propriété, assorti de fortes garanties. Nous souhaitons étendre ce dispositif aux logements anciens où des travaux sont menés.
Le dispositif de PSLA a fait ses preuves dans le neuf, pour les ménages aux revenus modestes, inférieurs à un plafond de ressource. Il serait utile de l'étendre aux logements anciens faisant l'objet de travaux. En effet, dans les zones tendues, il permettrait aux acquéreurs d'acheter un logement à des prix plus abordables, et dans les zones détendues, d'améliorer l'habitat existant. Dans toutes les zones, cela permettrait de réaliser des travaux de rénovation énergétique.
Je rappelle que le Premier ministre s'est engagé, dans son discours de politique générale, à oeuvrer pour améliorer la performance énergétique des logements.
La parole est à M. Daniel Labaronne, pour soutenir l'amendement no 2872 .
L'amendement tend à permettre la signature de PSLA pour les logements anciens. Il modifierait, d'une part, une disposition de la loi de finances pour 2019, qui introduisait une exonération de taxe foncière sur la propriété bâtie de quinze ans pour les opérations de location-accession, sous réserve que les collectivités territoriales ou EPCI aient pris une délibération en ce sens. Cette disposition serait étendue au PSLA. Par ailleurs, les bénéficiaires d'un PSLA ancien pourraient bénéficier du prêt à taux zéro – PTZ – ancien.
Le rapporteur nous dit que la rédaction des amendements no 2880 et 2980 est meilleure. Certes, mais enfin, peut-il nous préciser sur quels points ? Dans de telles matières, les questions techniques sont importantes – je le sais d'expérience. Je veux bien retirer l'amendement no 1949 , à la condition que le rapporteur ou le secrétaire d'État précisent leur position.
L'amendement no 2872 est retiré.
Je retire également mon amendement ; et regarderai de plus près la manière dont les autres amendements ont été rédigés. Je fais confiance au rapporteur général.
L'amendement no 1847 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement no 2783 .
L'amendement aurait pu faire l'objet d'une discussion commune avec ceux de M. Pupponi, dont nous avons débattu tout à l'heure. Il concerne les abattements sur la taxe foncière sur les propriétés bâties, plus particulièrement dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.
J'ai été, dans le passé, maire de L'Aigle. J'étais au début ravie que la ville compte un quartier prioritaire de la politique de la ville, croyant que ce dispositif s'accompagnerait de ressources, d'aide, de soutiens. Quelle n'a pas été ma surprise de constater que l'abattement sur la taxe foncière sur les propriétés bâties attaché au dispositif n'était compensé qu'en partie par l'État, à hauteur de 40 % ! Les villes concernées par ce dispositif perdent donc des recettes. C'est une double peine : un quartier et une commune qui subissent déjà une situation difficile voient leurs ressources diminuées.
Nous ne pouvons pas abandonner ces territoires. Nous revenons sur cette question tous les ans dans cet hémicycle, sans jamais recevoir de réponse. L'amendement vise à corriger cette situation, qui crée de vraies difficultés.
Plusieurs éléments de votre amendement me conduisent à la prudence. Tout d'abord, la question du maintien de la compensation par l'État se posera pour les collectivités qui choisiraient, à partir de 2020 ou 2021, de maintenir l'abattement dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. En effet, l'abattement sera devenu facultatif. Les sommes en jeu sont importantes : le montant de la compensation s'est élevé en 2018 à 70 millions d'euros.
Par ailleurs, alors que le droit actuel ne prévoit qu'un abattement de 30 %, votre amendement ouvre la voie à une exonération intégrale sur la part de la taxe foncière sur les propriétés bâties revenant aux collectivités. Les sommes en jeu sont potentiellement très importantes. Pour ces raisons, j'émets un avis défavorable.
Nous sommes d'accord : les montants sont importants. Il s'agit de 100 millions d'euros de perte pour les collectivités les plus pauvres de France.
L'amendement permettrait qu'une discussion ait lieu tous les ans avec les bailleurs. Les collectivités pourraient choisir de maintenir l'abattement en leur faveur ou non ; dans ce dernier cas, elles garderaient leur argent.
Les bailleurs, disons-le, ne font pas bon usage de ces quelque 100 millions d'euros d'abattements. Je vous invite à venir le constater dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville : ils utilisent cet argent, la plupart du temps, pour rémunérer les gardiens, régler les frais de gestion. Ils ne respectent pas la loi parce que personne ne contrôle ce qu'ils font vraiment. Laissez les collectivités décider par elles-mêmes si elles veulent perdre 100 millions d'euros de recettes.
L'amendement no 2783 n'est pas adopté.
Les signataires d'un bail réel solidaire peuvent bénéficier d'un abattement de 30 % sur la taxe foncière, si une délibération a été prise en ce sens par la collectivité territoriale. L'amendement tend à permettre aux collectivités de majorer l'abattement, si elles le souhaitent, dans le but de favoriser l'accession sociale à la propriété.
L'amendement no 2091 de M. Peu est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
L'abattement auquel vous faites référence n'a été instauré qu'il y a à peine deux ans. Il est un peu tôt pour le modifier, et proposer d'en augmenter le montant. Avis défavorable.
La parole est à Mme Constance Le Grip, pour soutenir l'amendement no 2456 .
Il concerne un tout autre sujet et tend à redonner, dans nos débats, une place au patrimoine et aux immeubles classés ou inscrits au titre des monuments historiques.
L'amendement vise ainsi à exonérer les immeubles classés ou inscrits au titre des monuments historiques des taxes foncières sur les propriétés bâties et non bâties.
Je suis parfaitement consciente du caractère délicat de cette proposition. Coprésidente du groupe d'étude sur le patrimoine, je souhaite toutefois appeler l'attention de la représentation nationale sur les difficultés de financement de notre patrimoine.
Stéphane Bern s'est vu confier au début du quinquennat du président Macron pour mission de proposer des sources de financement innovantes afin de sauvegarder notre patrimoine – je pense au loto du patrimoine et aux taxes affectées dont nous avons déjà débattu à plusieurs reprises, notamment l'an dernier. Nous remportons à chaque fois de petites victoires, mais cela n'empêche pas que, dans le cadre de la loi de finances rectificative adoptée il y a quelques jours, 25 millions de crédits en faveur du patrimoine ont été annulés.
Une telle situation impose de lancer un coup de projecteur sur la nécessité absolue d'aider les propriétaires d'immeubles classés ou inscrits au titre des monuments historiques à faire face aux coûts de restauration et d'entretien de leur propriété.
Par le présent amendement, nous proposons donc d'exonérer de taxe foncière sur les propriétés bâties et non bâties les immeubles inscrits ou classés qui sont ouverts au public. Cela aurait toute une série d'avantages…
Madame Le Grip, vous avez déjà largement dépassé les deux minutes de temps qui vous étaient allouées.
Quel est l'avis de la commission ?
Les propriétaires privés de monuments classés ou inscrits peuvent d'ores et déjà déduire de leurs revenus imposables les impositions autres que celles qui incombent à l'occupant et qui sont perçues au profit des collectivités locales, notamment les taxes foncières ; quant aux monuments nationaux, ils sont exonérés de taxes foncières. Le régime est donc déjà très favorable. Avis défavorable.
L'amendement no 2456 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Daniel Labaronne, pour soutenir l'amendement no 2857 .
Cet amendement vise à étendre aux tourbières l'exonération – déjà applicable aux prairies naturelles et aux marais – de taxes foncières sur les propriétés non bâties à hauteur de 50 % et, sur délibération de la collectivité territoriale ou de l'EPCI, de porter cette exonération à 100 %.
Je suis très favorable à cet amendement. En creusant la question de la tourbière, si j'ose dire, j'ai constaté qu'en droit français, une tourbière n'est pas une zone humide, comme je l'imaginais, mais une carrière car – j'en ai été très surpris – elle était initialement considérée comme une zone d'extraction. L'amendement que vous proposez ramène en quelque sorte les tourbières dans le giron des zones humides moyennant un système d'exonération qui ne présente aucun coût. En effet, l'exonération est très mal compensée et, de surcroît, elle est englobée dans les variables d'ajustement. Autrement dit, la compensation versée par l'État sera compensée par d'autres transferts financiers peu élevés. Nous mettrons ainsi le droit en cohérence avec la pratique ancienne selon laquelle une tourbière n'est plus une carrière depuis longtemps. Autrement, il arrive qu'il faille extraire les tourbières de la déclaration de zones humides au motif qu'elles sont des carrières ! Le droit français, lorsqu'il est fondé sur des codes vieux de plus de 150 ans, est parfois surprenant.
Je ne possède pas la capacité du rapporteur général à creuser dans les tourbières mais, une fois n'est pas coutume, je suis en désaccord avec lui et j'émets un avis défavorable. S'agissant de l'extension de l'exonération temporaire des zones humides de tourbières, j'appelle votre attention sur le fait que même avec un engagement de préservation de leur caractère humide, les tourbières seront exploitées. En outre, je rappelle que les tourbières font déjà l'objet d'une évaluation favorable de la taxe foncière sur les propriétés non bâties.
Quant à la proposition visant à permettre aux communes et aux EPCI de délibérer sur la hausse à 100 % de l'exonération temporaire relative aux zones humides, elle se traduirait en l'absence de compensation par des pertes de recettes pour les collectivités. Avis défavorable.
Néanmoins, monsieur le rapporteur général, il me semble un peu fort de permettre aux collectivités locales de porter cette exonération de 50 % à 100 % alors qu'en banlieue, ce type de hausse n'est pas autorisé ! Et il le serait pour les tourbières ? Il faudra que vous m'expliquiez votre logique.
L'amendement no 2857 n'est pas adopté.
La parole est à M. Daniel Labaronne, pour soutenir l'amendement no 2858 .
L'amendement no 2858 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Christophe Lejeune, pour soutenir l'amendement no 250 .
Je vais vous parler de la forêt. L'objectif de mobilisation de la ressource forestière par une gestion durable constitue une priorité de la politique forestière nationale. Afin de contribuer à sensibiliser les propriétaires de petites parcelles forestières à la nécessité de gérer leurs forêts, la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt du 13 octobre 2014 prévoit la possibilité de mettre en place un recouvrement triennal de la taxe foncière sur les propriétés non bâties lorsque le montant annuel de celle-ci est inférieur au seuil de perception – qui, pour mémoire, s'élève à 12 euros par an.
Une grande partie de la forêt privée du territoire national n'est pas exploitée, d'où un manque croissant d'approvisionnement des entreprises de transformation du bois qui doivent parfois recourir à l'importation de bois, ce qui aggrave leur empreinte carbone. De nombreuses scieries sont ainsi contraintes de cesser une partie de leur activité alors que leurs carnets de commandes sont pleins. De plus, les nombreux incendies qui touchent chaque été l'Europe, y compris l'Europe du Nord, prouvent qu'il est nécessaire d'entretenir correctement les forêts, faute de quoi l'on risque de provoquer une catastrophe écologique.
C'est pourquoi cet amendement vise à favoriser l'exploitation et l'entretien des parcelles de forêts qui ne sont pas soumises à recouvrement.
L'amendement no 250 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement de M. Bournazel vise à déplafonner la surtaxe d'habitation sur les résidences secondaires afin de donner la liberté aux communes concernées d'en fixer le taux de majoration qui leur revient, ce taux étant actuellement encadré entre 5 % et 60 %.
La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne, pour soutenir l'amendement no 1451 .
Dans le sillage de la proposition de hausse de la taxe sur les logements vacants que nous avons défendue en première partie du PLF, cet amendement vise à autoriser les collectivités qui le souhaitent à majorer la taxe d'habitation sur les résidences secondaires d'une proportion allant de 5 % à 300 % – et non de 60 % comme la loi le leur permet actuellement. On offrira ainsi aux collectivités situées en zones tendues la possibilité de fixer un taux d'imposition dissuasif de nature à contraindre les propriétaires de résidences secondaires à remettre leur logement sur le marché de la vente ou en location. Le taux en vigueur de la taxe additionnelle à la taxe d'habitation sur les résidences secondaires ne représente qu'une contribution moyenne de l'ordre de 600 euros par an et par propriétaire, soit un niveau bien trop faible pour inciter les propriétaires en question à louer ou à vendre leurs logements.
Quant au nombre de résidences secondaires en zone tendue, il ne cesse d'augmenter et d'accroître les tensions déjà vives sur le marché du logement. La situation est particulièrement caricaturale à Paris, qui compte près de 120 000 résidences secondaires dont la plupart ne sont occupées qu'une à deux semaines par an. Il est important de rendre à nouveau ces logements disponibles.
La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l'amendement no 2846 .
Dans le même esprit que les précédents, cet amendement vise à étendre à toutes les communes de France qui le souhaitent la possibilité de majorer la taxe d'habitation sur les résidences secondaires et à leur permettre de relever à 150 % le plafonnement de la surtaxe.
La parole est à M. Christophe Blanchet, pour soutenir l'amendement no 2610 .
Cet amendement a été déposé par Mme Frédérique Lardet – le Calvados défend la Haute-Savoie. Il existe en effet une réelle tension dans des territoires comme la Haute-Savoie, très attractive pour les touristes mais aussi pour les travailleurs transfrontaliers : de nombreux Suisses achètent des terrains dans ce département, d'où la situation assez tendue du logement et l'augmentation constante du prix au mètre carré. Si l'article 1407 ter du code général des impôts permet aux communes de majorer de 5 % à 60 % la part leur revenant de la cotisation de taxe d'habitation, nombreux sont les territoires qui se trouvent pourtant en situation de tension. Il est urgent de leur donner les moyens d'adapter leur fiscalité en fonction de leur situation. C'est pourquoi cet amendement vise à renforcer le dispositif existant en augmentant de 60 % à 100 % le plafond de majoration.
La parole est à M. Cédric Villani, pour soutenir l'amendement no 3001 .
Comme les précédents, cet amendement concerne la fiscalité applicable aux résidences secondaires dans les communes de plus de 50 000 habitants en zone tendue, où l'offre de logement est très insuffisante par rapport à la demande. Depuis 2017, ces communes peuvent majorer la part de taxe d'habitation qui leur revient sur les logements meublés non affectés à la résidence principale. Le taux peut être compris entre 5 % et 60 % ; c'est notamment le cas à Paris, Nice et Nantes. Rappelons que Paris est très touchée par le problème du logement tendu : 200 000 à 250 000 logements y seraient sous-occupés, soit 15 % du parc locatif. Cette situation exceptionnelle appelle action.
Le présent amendement vise à porter le plafond de 60 % à 100 % – pour qui trouverait ce taux de 100 % considérable, précisons qu'il s'agit simplement de porter le coefficient de 1,6 à 2, pour une fiscalité incitative motivée par des circonstances exceptionnelles.
La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l'amendement no 1959 .
Cet amendement porte sur le même sujet – d'où sa présence dans la discussion commune – même s'il ne propose pas une mesure tout à fait équivalente. Puisque nous avons adopté l'amendement qu'a présenté Mme Magnier tout à l'heure, nous devrions adopter celui-ci parce qu'il vise à relever de 60 % à 100 % le taux de la part de taxe d'habitation revenant aux communes, mais il vise aussi à distinguer entre les zones A, B et C en fonction du niveau de tension. Autrement dit, il s'agit de prévoir une modulation entre 5 % et 100 %, et non 60 % dans le droit actuel, avec un taux variable selon le zonage. Je confirme que le pourcentage peut à première vue paraître élevé mais M. Villani a très bien expliqué que l'augmentation reste modeste en volume.
La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l'amendement no 2763 .
Dans la même logique, cet amendement vise à offrir aux maires des instruments fiscaux dans les cas où plus de la moitié des logements de leurs communes sont des résidences secondaires, d'où des répercussions sur l'économie de la commune et un effet d'éviction des populations les plus modestes. Nous proposons d'étendre ce dégrèvement aux personnes ayant acquis leurs biens de longue date – au moins dix ans – ou les ayant reçus par héritage, afin de ne pas les pénaliser.
Plusieurs arguments ont été présentés. Tout d'abord, la hausse de 20 % à 60 % de la surtaxe de taxe d'habitation pour les résidences secondaires, entrée en vigueur en 2017, a été très mal vécue par bon nombre de contribuables : outre les résidents secondaires, il y a également de nombreux doubles résidents, c'est-à-dire des personnes qui possèdent une résidence familiale mais qui travaillent ailleurs ou qui, pour une raison ou pour une autre, sont en situation de double résidence. J'ai reçu de nombreuses personnes venant de Saint-Nazaire – je vous prie de croire qu'il ne s'agissait pas de contribuables riches – et j'ai même tenté de baisser le taux en question de 60 % à 40 % car il provoque des situations dramatiques pour certaines des personnes en question.
Ensuite, je ne voudrais pas laisser croire que la suppression de la taxe d'habitation sur la résidence principale est l'occasion d'augmenter la fiscalité locale pour d'autres impositions ; c'est un point important. Au demeurant, je suis convaincu qu'il faudra très vite réfléchir – et nous le ferons – à une taxation unique sur tous les logements qui, d'une manière ou d'une autre, ne sont pas affectés à la résidence principale – ce qui rejoint le discours concernant la taxe sur les logements vacants tenu tout à l'heure : il pourrait finalement être plus favorable, sur le plan fiscal, de déclarer son logement vacant.
Permettez-moi d'insister à nouveau sur le fait que la fiscalité ne résout pas tout. J'entends que les tarifs des locations proposées à Paris par le biais des plateformes numériques sont abusifs, mais on trouve également sur ce marché des maisons de famille de contribuables pas nécessairement aisés. Il convient donc de faire attention. Avis défavorable.
Suite à la réponse de M. le rapporteur, je souhaite préciser que les amendements n'ont d'autre but que d'ouvrir aux collectivités locales qui le souhaitent la possibilité de mener une politique en faveur du logement. Une commune en difficulté, par exemple, resterait libre de ne pas augmenter la taxe d'habitation dans les proportions proposées.
Par ailleurs, nous avons longuement discuté ce matin de l'importance du zonage, en particulier dans les zones tendues, qui peuvent faire l'objet d'une spéculation immobilière importante en raison du tourisme, par exemple. Pour lutter contre l'inflation qui en résulte, la pertinence du zonage est fondamentale, et c'est pourquoi je réitère ma demande que le Gouvernement opère une révision des zonages.
Certains amendements, comme l'amendement no 1959 de Mme Pires Beaune, me semblent à cet égard plus pertinents d'autres. Si nous voulons mener une politique du logement complète et efficace, nous devons nous doter des instruments adéquats : la possibilité de moduler la majoration de taxe d'habitation en fait partie.
L'amendement no 1834 vise à permettre, dans les communes de Corse, une majoration de 60 % à 150 % de la part leur revenant de la cotisation de taxe d'habitation sur les résidences secondaires. La moitié du produit de cette majoration serait versée à la commune et l'autre moitié à la collectivité de Corse, le but étant de lutter contre la prolifération des résidences secondaires. C'est donc un dispositif particulièrement adapté à la Corse.
L'amendement no 1835 vise à prévoir que la collectivité de Corse peut instaurer une taxe annuelle sur les logements non affectés à l'habitation principale, prenant la forme d'un pourcentage sur la valeur vénale du bien.
Les arguments que j'ai développés tout à l'heure restent valables. Les situations exposées ne sont pas spécifiques à la Corse, elles touchent également les départements touristiques de montagne, par exemple. Avis défavorable.
Je crains que le rapporteur général ne sous-estime vraiment la gravité de la situation en Corse : discrimination sociale, constitution de ghettos, basculement d'une société traditionnelle vers une société résidentielle. Alors qu'ailleurs en France, on compte moins de 10 % de résidences secondaires, ce taux est de près de 40 % en Corse. Dans bien des communes, il y a plus de résidences secondaires que de résidences principales : cela entraîne un bouleversement profond. Derrière tout cela, il y a des gens pas très regardants sur le respect de la loi et le vivre ensemble.
La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à la prochaine séance.
Nous avons examiné 170 amendements, il en reste 472.
Prochaine séance, ce matin, à neuf heures :
Suite de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2020 : suite de l'examen des articles non rattachés.
La séance est levée.
La séance est levée, le vendredi 15 novembre, à zéro heure cinq.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Serge Ezdra