La réunion débute à 9 heures 30.
Présidence de M. Stéphane Mazars, vice-président.
La Commission examine la proposition de loi instaurant des mesures de sûreté à l'encontre des auteurs d'infractions terroristes à l'issue de leur peine (Mme Yaël Braun-Pivet, rapporteure) (n° 2754).
Nous examinons ce matin la proposition de loi instaurant des mesures de sûreté à l'encontre des auteurs d'infractions terroristes à l'issue de leur peine. Je laisse la parole à sa rapporteure, Mme la présidente Yaël Braun-Pivet.
La proposition de loi que je présente vise les auteurs d'infractions terroristes. Depuis plusieurs années, notre pays est durement touché par des attentats, qui nous ont profondément endeuillés : à Paris, Trèbes ou Nice, mais également en prison, notamment à Condé-sur-Sarthe. Pour faire face à cette menace, la législation s'est considérablement renforcée. En 2017, notre majorité a adopté la loi du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, dite loi SILT, qui a créé les mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance (MICAS). La loi prévoit un contrôle parlementaire renforcé, que j'exerce avec Raphaël Gauvain, rapporteur de ladite loi, pour le groupe La République en Marche, et Éric Ciotti, représentant le principal groupe d'opposition. Nous avons mené des auditions, nous sommes destinataires de tous les actes pris en vertu de la loi – notamment les MICAS anonymisées, dont nous pouvons contrôler la motivation – et nous avons réalisé des déplacements. Ainsi, nous avons pu observer les dispositifs de prise en charge des détenus radicalisés à Fleury-Mérogis.
En outre, en tant que présidente de la commission des Lois, je suis membre de droit de la délégation parlementaire au renseignement, qui auditionne les acteurs de la lutte contre le terrorisme, notamment le coordonnateur national du renseignement et de la lutte contre le terrorisme (CNRLT) et le directeur général de la sécurité intérieure (DGSI). Dans le cadre de ces fonctions, j'ai effectué des travaux sur la radicalisation, l'antiterrorisme et le renseignement pénitentiaire.
Enfin, vous le savez, je porte une attention particulière aux sujets liés à la détention. J'ai effectué de nombreuses visites en prison depuis trois ans – tout comme vous. Notre attention est attirée par tous les acteurs sur le risque important que nous font courir les sortants de prison condamnés pour terrorisme. En février 2020, lors d'une audition, M. Jean-François Ricard, procureur de la République antiterroriste, a déclaré : « C'est plus qu'une inquiétude pour nous, c'est une vraie peur. Vont être remis en liberté des individus extrêmement dangereux, aux convictions intactes ». Lors d'une audition liée à l'examen de la présente proposition de loi, il indiquait : « Nous affirmons que ce suivi des détenus, et le suivi des sortants, est devenu la première de nos priorités ». M. François Molins, procureur général auprès de la Cour de cassation, estimait que nous courrions un risque majeur à laisser sortir des gens non repentis, voire encore plus endurcis compte tenu de leur séjour en prison.
Face à ce risque, qu'avons-nous fait ? Nous avons renforcé les moyens des services de renseignement et avons instauré un chef de filât à la DGSI dans la lutte antiterroriste. Mais nous manquons d'instruments judiciaires. Certes, il en existe, mais leur accumulation crée un trompe-l'œil car les dispositions durcissant la législation antiterroriste ont rendu inapplicables certaines mesures de suivi judiciaire. Nous avons donc besoin d'un dispositif ad hoc de sûreté, objet de la proposition de loi.
Tous les parlementaires chargés de ces contrôles ont abouti à la même conclusion que Raphaël Gauvain et moi-même : Éric Ciotti a également déposé une proposition de loi, différente de la nôtre, mais qui poursuit le même objectif – renforcer le suivi judiciaire des personnes concernées. Au Sénat, mon homologue, Philippe Bas, et les sénateurs chargés du contrôle de la loi SILT, ont également déposé une proposition de loi proche de celle que je vous présente.
Les dispositions dont nous allons débattre émanent donc du Parlement, sont assez largement partagées par les deux assemblées et dépassent les clivages politiques. Avec Raphaël Gauvain, nous avons construit un dispositif qui remet le juge et le contradictoire au centre de la procédure. Nous avons sollicité l'avis du Conseil d'État car nous savons que la frontière entre les mesures de sûreté et les peines est ténue. L'enjeu est important puisqu'il conditionne l'applicabilité immédiate du dispositif.
Le Conseil d'État a confirmé que l'architecture de la proposition de loi autorise une application dès sa promulgation. C'est essentiel afin de protéger nos concitoyens du risque que certains de ces détenus feront courir à notre société lorsqu'ils seront libérés. Les amendements que je vous présenterai reprennent la quasi-totalité des préconisations du Conseil d'État, afin d'assurer la sécurité juridique du dispositif.
Nous entendons répondre à une problématique dont la presse s'est fait l'écho : la libération au cours des trois prochaines années de cent cinquante à deux cents détenus condamnés pour terrorisme, qui présentent donc un degré de dangerosité important.
La situation est paradoxale : appréhendés par la justice au début des années 2010, par exemple parce qu'ils souhaitaient partir sur des théâtres d'opérations terroristes, puis condamnés à des peines assez faibles – l'aggravation des sanctions est intervenue en 2016 –, ces condamnés terminent leur peine sans être éligibles à aucune remise, ni aucun aménagement du fait de la législation adoptée en juillet 2016. Contrairement aux détenus de droit commun, et alors qu'ils sont encore extrêmement dangereux, ils vont sortir de façon « sèche », sans bénéficier d'aucun accompagnement de réinsertion ni de suivi.
La proposition de loi tend à combler ce vide pour les détenus qui vont sortir dans les trois prochaines années. Le dispositif, confié au juge judiciaire, sera respectueux du contradictoire et permettra à ces condamnés de se réinsérer, mais visera également à les surveiller. Les mesures iront de la simple déclaration de domicile jusqu'à l'obligation de pointage au commissariat.
Nous sommes sur une ligne de crête, l'avis du Conseil d'État le souligne, entre le nécessaire respect des libertés individuelles et la mise en place de mesures pour faire face aux dangers de la situation. Nous allons en débattre, en gardant cependant à l'esprit l'importance du caractère opérationnel de ces mesures. En effet, certaines propositions déposées par d'autres parlementaires nécessitaient de modifier la Constitution, ou n'auraient été applicables que dans trente ans – même leurs auteurs le reconnaissent. À l'inverse, les dispositions de la proposition de loi que nous vous présentons pourront être utilisées par les services de lutte contre le terrorisme dès leur adoption.
Au 30 mars 2020, 534 personnes étaient condamnées et détenues pour actes terroristes en lien avec la mouvance islamiste, dont 42 doivent être libérées en 2020, 64 en 2021 et 47 en 2022, soit 153 libérations au cours des trois prochaines années. Nous savions tous qu'elles allaient, tôt ou tard, être libérées, mais tout le monde a fait comme si elles n'allaient jamais sortir, comme si la menace qu'elles représentent allait disparaître.
Pourtant, loin d'apaiser la violence et la radicalité des détenus, la prison les enferme souvent dans leur extrémisme. La radicalisation en prison est un fait documenté – le Conseil d'État le souligne à la page 5 de son avis. À titre d'exemple, Michaël Chiolo à la prison de Condé-sur-Sarthe, Mohamed Merah, Amedy Coulibaly, Chérif Chekatt, Mehdi Nemmouche – auteur de l'attentat au Musée juif de Bruxelles –, tous ces individus se sont radicalisés en prison. Dans une interview, François Molins confirmait que le milieu carcéral est un incubateur des radicalisations et du terrorisme.
Les magistrats prennent en compte la menace particulière que représente la sortie des détenus pour faits de terrorisme. Ainsi, Marc Trévidic, ancien juge antiterroriste et président de la cour d'appel de Versailles, estime qu'après leur libération, le risque de récidive de ces détenus terroristes est très élevé, d'autant que l'idéologie en question est toujours vivace. Il les compare à des criminels ou des violeurs en série.
Adel Kermiche, auteur de l'attentat du 26 juillet 2016 à Saint-Étienne-du-Rouvray, avait aidé des mineurs à partir en Syrie. Il avait été placé sous contrôle judiciaire et puis fiché « S » avant d'être arrêté, incarcéré puis relâché. De même, l'auteur du récent attentat au couteau à Londres, qui a fait deux morts, avait été condamné en 2012 à seize ans de prison pour préparation d'actes terroristes, libéré en 2018 et placé sous contrôle judiciaire. Ces deux exemples illustrent à quel point les mesures de contrôle judiciaire peuvent être insuffisantes face à la dangerosité de détenus radicalisés ou terroristes.
La proposition de loi, comme tous les dispositifs permettant d'accentuer la lutte contre le terrorisme qui menace notre société, va dans le bon sens. Mais nous regrettons qu'elle n'aille pas assez loin. Nous serons donc attentifs à son évolution lors de l'examen en commission et en séance. Nous ne devons pas perdre de temps en adoptant une proposition de loi inefficace. Ainsi, certaines dispositions semblent incongrues, comme celle prévue à l'alinéa 14 de l'article unique, qui consiste à placer les détenus pour terrorisme sous bracelet électronique lors de leur libération « sous réserve de leur accord », pour faire suite à la recommandation du Conseil d'État.
En outre, vous occultez le cas des détenus de droit commun radicalisés. Ils seraient environ mille selon l'administration pénitentiaire, mille sept cents selon les syndicats. Le milieu carcéral est un incubateur de radicalisation et de développement du terrorisme. La menace est grave. Notre groupe souhaite que les dispositifs proposés soient étendus aux détenus de droit commun dont la radicalisation entraîne des risques importants de récidive ou de passage à l'acte lors de leur sortie de prison. Il souhaite également instaurer une mesure de rétention de sûreté pour les auteurs d'infractions terroristes visés par la présente proposition de loi, afin de prendre la pleine mesure de leur dangerosité.
Certes, la mesure ne pourra être rétroactive et ne sera donc applicable qu'aux personnes ayant commis des actes en lien avec le terrorisme après la promulgation de la loi. Mais ce n'est pas une raison pour se priver, à l'avenir, d'un dispositif efficace et respectueux du droit.
Cette proposition de loi vise à créer un régime de sûreté applicable aux personnes condamnées pour des faits de terrorisme, afin de protéger notre territoire et les Français face au terrorisme. Elle s'inscrit dans un contexte où des terroristes islamistes, extrêmement dangereux, vont bientôt avoir purgé leur peine et devraient être libérés. Dès 2017, la loi SILT nous a permis de sortir de l'état d'urgence, tout en disposant d'outils nécessaires pour faire face à la menace – périmètres de protection, fermetures des lieux de culte, MICAS, visites domiciliaires et saisies.
Mais les dispositifs actuels, administratifs ou judiciaires, de suivi en sortie de détention sont insuffisants, compte tenu de la dangerosité potentielle de ces individus. La proposition de loi est issue de constats de terrain et des professionnels de la lutte antiterroriste. Comme l'a rappelé la rapporteure, elle est le fruit de travaux conduits au sein de la Délégation parlementaire au renseignement, du contrôle de la loi SILT et de la commission des Lois.
Elle crée un régime de sûreté ad hoc et prévoit des obligations pour les personnes sortant de détention : obligation de répondre aux convocations du juge, établissement de la résidence, autorisation avant tout changement d'emploi ou de résidence, mais également possibilité de placement sous surveillance électronique mobile.
Ces mesures ne pourraient être prononcées qu'après avis de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté, qui devra évaluer la dangerosité de la personne. Les mesures seraient ensuite décidées par le tribunal de l'application des peines, en formation collégiale, dans le respect du principe du contradictoire. Elles seraient ordonnées pour une durée d'un an, renouvelables dans une limite de dix ans en matière correctionnelle et de vingt ans en matière criminelle. Il s'agit de mesures préventives – et non de peines, conformément au principe de non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère.
Toutefois, afin de s'assurer de la constitutionnalité des mesures prévues, vous avez décidé de saisir le Conseil d'État et de suivre ses conclusions par voie d'amendements. Ils vont dans le bon sens et sécurisent juridiquement le dispositif. Mes collègues du groupe Modem et moi-même avions quelques réserves sur la rédaction initiale de la proposition de loi, compte tenu des risques constitutionnels. Dans le même objectif, le groupe MODEM proposera par amendement de supprimer la possibilité de prononcer un placement sous surveillance électronique mobile de la liste des mesures de sûretés applicables.
La proposition de loi vise à combler les insuffisances des mesures actuellement applicables à ces détenus lors de leur sortie de prison, afin de prévenir le risque de récidive. Pour que les dispositions soient efficaces, elles doivent être considérées comme des mesures préventives, afin d'être immédiatement applicables aux personnes condamnées pour des faits commis antérieurement à la promulgation de la loi.
Enfin, nous plaidons pour une évaluation de l'ensemble des dispositifs applicables – le Conseil d'État le mentionne d'ailleurs à la page 16 de son avis.
Cette proposition de loi est nécessaire. Mais elle pose aussi des questions car nous disposons déjà d'un arsenal juridique. Nous comprenons parfaitement l'objectif : combler le vide juridique lié à certains cas – les condamnés avant 2016 et ceux pour lesquels un suivi sociojudiciaire n'a pas été prononcé. En outre, en complément des mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance, il est intéressant de proposer un dispositif judiciaire, avec les garanties qui l'accompagnent.
Mais nous serons vigilants sur certains points : la surcharge potentielle de travail pour les policiers et les gendarmes liée aux pointages et aux différents contrôles prévus par la proposition de loi ; l'écueil constitutionnel lié au dispositif de placement sous surveillance électronique mobile – en audition, un intervenant a pointé le risque que cette mesure s'apparente à une peine. Qu'en pensez-vous ? Il y a aussi le risque de superposition avec des dispositifs existants – comment cela s'articulera-t-il ?
Il faut également clarifier les conditions de mise en œuvre et de renouvellement de ces mesures : le tribunal d'application des peines ne semble pas le plus compétent pour prononcer de telles mesures de sûreté.
Bien entendu, nous souscrivons à votre volonté de protéger nos concitoyens du danger que représentent ces individus lorsqu'ils sortent de prison. Mais le problème devrait être traité beaucoup plus en amont : dans les prisons, avec une prise en charge spécifique, mais également en traitant le mal « à la racine », dès l'école. Il nous faut rappeler la devise de notre pays – liberté, égalité, fraternité – et insister sur le fait que la radicalisation religieuse n'a pas de place dans un pays laïc.
Enfin, ces mesures ne pourront être pleinement effectives sans moyens supplémentaires pour tous les services concernés. Qu'est-il prévu ? Nous attendrons vos réponses et suivrons les débats avec attention.
L'avis du Conseil d'État est intéressant : il pointe les dispositifs existants permettant d'arriver au même but que le vôtre et souligne que l'intérêt de la proposition de loi se limite au cas des personnes condamnées avant 2016 – ainsi qu'à la simplification de quelques petites mesures.
Vous allez un peu vite en besogne en parlant de consensus transpartisan ! Année après année, le concept de dangerosité a dérivé et il a fini par nous échapper – où est désormais la frontière entre une peine et une mesure de sûreté ? Ce n'est pas moi qui le dis, mais le Conseil d'État dans son avis, et la jurisprudence. Régulièrement, devant la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), des mesures de sûreté sont requalifiées en peines.
Nous appliquons des mesures restrictives – voire privatives – de liberté à des gens qui n'ont encore commis aucune infraction, alors qu'avec l'association de malfaiteurs, nous disposons d'outils pénaux pour faire de la prévention. Le Conseil d'État le souligne, les services de renseignement disposent d'importants pouvoirs en la matière.
En réalité, votre proposition de loi vise à satisfaire aux exigences de la communication de la droite et de l'extrême droite : vous ne savez pas comment gérer les personnes radicalisées ou détenues pour des infractions en lien avec des actes terroristes !
Pourquoi en est-on arrivé là ? Nous avons créé une justice d'exception pour les actes terroristes, puis une incarcération d'exception : ces détenus sont pour la plupart quasiment à l'isolement et soumis à des mesures particulières. Ce faisant, vous leur rendez service car ils ne souhaitent qu'une chose : qu'on reconnaisse la spécificité et l'envergure de leurs crimes. Notre arsenal juridique et judiciaire valide leur schéma ! Contrairement aux autres détenus, ils ne bénéficient pas d'aménagements ou de réductions automatiques de peines, ni de mesures d'accompagnement.
Pourtant, le pire affront que nous pourrions leur faire serait de les considérer comme les autres. Et pour les détenus de droit commun, nous disposons déjà de toutes les mesures privatives de liberté, de rétention et de sûreté. Dans les autres secteurs de la criminalité, nous pouvons parfaitement retenir les détenus en prison pendant des années alors que leur peine est terminée…
C'est pourquoi nous sommes vigoureusement opposés à votre proposition de loi. L'avis du Conseil d'État le souligne à plusieurs reprises : vous introduisez une confusion supplémentaire dans notre droit entre la peine – qui devrait garder toute sa force – et la prévention.
Je partage le constat de M. Naegelen sur la prévention en prison : l'administration pénitentiaire a fait au mieux, avec les moyens dont elle disposait. Quel bilan tirer des quartiers d'évaluation ou de prise en charge de la radicalisation ? Nous n'en savons rien, pas plus que nous ne disposons d'analyse criminologique. Comment alors se prononcer sur le fond ? Non, il n'y a pas d'accord transpartisan sur ce texte.
Notre groupe est très réservé sur la proposition de loi. Bien entendu, nous sommes favorables à la mise en œuvre de mesures visant à prévenir la récidive d'actes terroristes, en particulier lorsqu'il s'agit du terrorisme islamiste, visé par ce texte. Malheureusement, les dispositifs prévus s'appliqueront plus largement.
Empêcher la récidive chez les détenus radicalisés à leur sortie de détention est un véritable défi. Au cours des trois prochaines années, plus de cent cinquante d'entre eux sortiront de prison. Leur éventuelle dangerosité et le risque potentiel de récidive terroriste sont une source légitime d'inquiétude pour les Français, et un enjeu de sécurité et de responsabilité pour les autorités.
Les mesures de prévention de la récidive doivent être strictement proportionnées. Le Conseil d'État note que le dispositif créé par la proposition de loi prend place dans un arsenal où les instruments préventifs et de répression sont déjà nombreux. Ainsi, l'infraction d'association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste est largement utilisée par les juridictions terroristes pour prévenir la commission d'actes terroristes.
En préalable, il faudrait mener une vaste étude sur les risques réels de récidive des personnes condamnées pour des actes terroristes en France. La Belgique l'a réalisée, et publiée cette année : elle révèle que le taux de récidive de ces détenus est très faible comparé à celui des détenus dits « classiques ». Ce résultat, totalement contre-intuitif pour l'opinion publique, le monde judiciaire et les services de sécurité, doit peut-être nous inviter à la prudence et à une analyse plus poussée du phénomène. L'étude belge révèle que les individus qui récidivent en matière de terrorisme le font généralement très rapidement – moins d'un an, voire moins de neuf mois, après leur sortie. Ce constat pose la question de la pertinence des délais extrêmement longs des mesures de sûreté prévus dans la proposition de loi – le renouvellement de ces mesures peut intervenir dans un délai de dix ou vingt ans. C'est d'ailleurs une des critiques majeures émise dans l'avis du Conseil d'État.
Nous nous interrogeons également sur le caractère préventif de certaines mesures, punitives et portant atteinte à la liberté d'aller et venir – comme le placement sous bracelet électronique. Nous partageons l'analyse du collègue de l'UDI et du Conseil d'État et considérons qu'il s'agit d'une mesure d'aménagement de peine, permettant d'exécuter une peine de prison sans être incarcéré, alors que les mesures de sûreté sont des mesures préventives, non fondées sur la commission d'une infraction, mais uniquement sur la constatation de la dangerosité supposée d'un individu.
Enfin, la proposition de loi présente un autre risque, très grave : celui que ces mesures de sûreté s'appliquent à d'autres publics que ceux auxquels elles sont destinées – écologistes, altermondialistes, animalistes, militants corses et basques. Nous vous avions déjà alerté sur le fait que le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions terroristes (FIJAIT), créé pour lutter contre le terrorisme islamiste, était anachronique. Vous allez encore plus loin !
Les causes des tensions doivent être résolues par le débat public. La situation s'est souvent apaisée, des condamnations ont été prononcées et, demain, ces militants se verraient appliquer des mesures de sûreté anachroniques ! Considérez-vous que ces derniers sont aussi dangereux que les islamistes ? Le terrorisme islamiste se manifeste par une idéologie barbare qui aboutit à l'atteinte – barbare – à la vie humaine.
Dans le contexte actuel, très troublé, fait de clivages, de crises sociales et politiques, il n'est peut-être pas nécessaire de mettre de l'huile sur le feu… Ne faudrait-il pas mieux caractériser le phénomène islamiste, mieux l'évaluer et préciser le caractère temporaire de l'urgence ? À défaut, vous contribuerez au clivage de la société et aux résurgences de tensions.
Bien sûr, nous savons qu'il s'agit d'individus particulièrement dangereux et fautifs, mais le groupe Écologie démocratie solidarité (EDS) s'interroge : s'agit-il d'une double peine ? Les dispositifs sont-ils proportionnés ? Quels sont les risques d'inconstitutionnalité ?
Ces questions expliquent nos amendements. Tout d'abord, les délais proposés nous semblent déraisonnables : nous proposerons de passer à cinq et dix ans – contre dix et vingt ans. Nous souhaitons supprimer les dispositifs liés à la surveillance électronique mobile, particulièrement intrusifs et privatifs de liberté, qui se révèlent inefficaces. Enfin, nous proposerons de conditionner les mesures de contrôle à un suivi sociojudiciaire afin d'améliorer l'inclusion de ces individus dans la société et de contribuer à leur déradicalisation, seule façon de lutter structurellement contre la récidive.
Nous nous positionnerons sur le texte à l'issue des débats.
Je ne compte plus le nombre de fois où nous nous sommes réunis pour examiner des dispositions destinées à nous protéger des actes terroristes. Pourquoi ? Le groupe Agir ensemble l'explique par plusieurs raisons. Tout d'abord, le terrorisme démontre sa capacité à s'adapter aux législations nationales et aux accords internationaux. Il les contourne et s'insère dans leurs angles morts et leurs vides juridiques. Cette stratégie nous pousse à devoir, sans cesse, repenser notre arsenal juridique.
En outre – c'est le cœur de la proposition de loi –, nous devons préserver l'équilibre entre respect de l'État de droit et impératif de sécurité. Si nous avons déjà légiféré sur les moyens d'intercepter et d'incarcérer les personnes pour des faits de terrorisme, reste à opérer le même travail pour l'étape suivante – lorsque le condamné a purgé sa peine.
Dans son avis, le Conseil d'État nous alerte : les dispositifs de lutte contre le terrorisme et sa récidive sont complexes, nombreux, issus de différentes sources et s'appliquent sous la responsabilité d'autorités différentes. Il estime que l'efficacité de l'action publique est menacée et préconise une évaluation des dispositifs préventifs applicables au terrorisme afin « d'améliorer la cohérence de l'ensemble des dispositifs, leur bonne articulation les uns aux autres et, par conséquent, leur efficacité, tout en facilitant les évolutions nécessaires et en consolidant l'équilibre entre la prévention des atteintes à l'ordre public et le respect des droits et libertés reconnus par la Constitution ».
Le Conseil d'État ne l'a pas relevé, mais nos débats nous permettront de vérifier qu'aucun dispositif existant ne permet de garantir que les terroristes islamistes (TIS) sont suivis à leur sortie de prison afin d'éviter qu'ils passent à l'acte ou réitèrent. Si des mesures complémentaires sont nécessaires, nous plaidons pour une évaluation de l'ensemble des dispositifs. Nous proposerons des amendements destinés à contribuer à l'efficacité des mesures proposées, dans l'esprit des préconisations du Conseil d'État. Confiant dans le bien-fondé des travaux réalisés par la rapporteure, le groupe Agir ensemble votera en faveur de la proposition de loi.
Notre groupe n'a pas encore arrêté son vote. Nous allons continuer de travailler et mener d'autres auditions avant la séance. Nous ne devons pas nous habituer, comme la majorité depuis trois ans, à aborder la question des libertés avec autant de légèreté. Il y a 3 mois, Philippe Bas a proposé au Sénat un texte sur le même sujet : c'est une course « à l'échalote » entre la majorité de l'Assemblée et celle du Sénat, alors qu'il faudrait avoir la main qui tremble avant de modifier des fondamentaux de l'État de droit. En outre, ce texte, présenté dans une semaine d'initiative parlementaire, est dépourvu d'étude d'impact et rien ne nous permet d'en mesurer les risques.
Il fait également totalement l'impasse sur la radicalisation en prison de détenus de droit commun. Quelle est notre politique de déradicalisation ? Après les grands discours, où en sommes‑nous ? Par ailleurs, il n'y a pas de justice préventive dans notre État de droit ! Depuis la réforme du service de renseignement pénitentiaire, des dispositifs permettent de suivre certains détenus. Mais prendre des mesures de restriction de liberté, une fois la peine purgée, pose un problème. Si vous doutez de la justice républicaine, interrogeons‑nous sur le quantum de la peine, pour complicité de terrorisme et acte de terrorisme. On ne peut pas, sous prétexte qu'on n'est pas satisfait de la réponse pénale ou de la politique pénitentiaire à l'égard des personnes radicalisées, essayer d'inventer un dispositif qui contredit notre État de droit.
À force de telles lois, vous vous êtes coupés de ceux qui sont attachés à une République équilibrée, notamment des gens du premier cercle d'Emmanuel Macron, comme François Sureau. La moitié des juristes vous reproche d'hystériser le pays, de saper les fondements de la République et de jouer aux apprentis sorciers avec la légèreté des novices.
Nous comprenons bien le problème que le texte aborde, et savons qu'il est grave. Mais, dans une société démocratique, on essaie d'aborder tous les sujets, quelques graves qu'ils soient, en respectant les principes fondamentaux. Or il nous semble qu'instaurer une peine après la peine va à leur encontre. J'entends également la nuance entre peine et mesure de sûreté, mais, en l'état actuel, nous risquons d'attenter très significativement à un principe important de notre droit pénal : la non‑rétroactivité. Notre groupe examinera de nouveau en détail votre proposition. Mais votre orientation semble dangereuse. Si l'on suivait la jurisprudence du Conseil constitutionnel, votre mesure de sûreté ne s'appliquerait qu'aux gens condamnés maintenant, soit dans dix ans, et n'atteindrait donc pas votre but. Parce que votre proposition ne nous semble pas aboutie, nous ne vous suivrons pas. La question essentielle est bien de réussir à prévenir la radicalisation en prison. Or votre texte ne peut y répondre.
Nous sommes tous d'accord : nous voulons nous prémunir contre le danger que représentent ces personnes, qui ont été condamnées pour terrorisme et sortent de manière sèche. Les dix-huit pages de l'avis du Conseil d'État témoignent de sa difficulté à distinguer les mesures de sûreté des peines, ainsi qu'à évaluer le caractère nécessaire et adapté de la proposition de loi. Il a précisé que de nombreux dispositifs existaient, de nature judiciaire ou administrative. Mais il a également relevé que, pour une catégorie de personnes, certes limitée, aucun dispositif ne pouvait s'appliquer. S'agissant des mesures de surveillance administrative, qui paraissent avoir sa préférence, il nous rappelle qu'elles ne sont applicables que jusqu'en décembre 2020. Il a proposé des mesures, dont vous avez tenu compte, madame la rapporteure, pour rééquilibrer la proposition de loi. Une réserve cependant : certaines s'apparentent à mon sens plus à une peine qu'à une mesure de sûreté et ne sont donc pas applicables immédiatement, selon le principe de la non‑rétroactivité.
Je souscris aux remarques d'Éric Diard : il est dommage que le texte n'embrasse pas la question de la radicalisation des détenus de droit commun, un sujet concernant beaucoup plus de personnes. Par ailleurs, je suis choqué que l'on puisse s'interroger sur la préservation de la liberté de gens qui ont porté atteinte à notre nation et à nos concitoyens, en commettant des actes terroristes. Il est évident que vos mesures auraient dû figurer dans la loi initiale et qu'il faut les mettre en œuvre de toute urgence. Combien de détenus seraient concernés ?
Je voterai ce texte, qui est utile, et m'étonne que l'on puisse douter de sa pertinence, alors que la menace est évidente et que des détenus présentant un risque de dangerosité majeur sortiront bientôt de prison. Le principe de précaution et la sécurité collective doivent prévaloir sur la préservation des libertés d'individus condamnés pour terrorisme et qui représentent une menace très grave. Nous ne sommes pas à la hauteur. Certes, la marge juridique est très étroite, puisque nos principes constitutionnels nous empêchent de sortir d'une forme de naïveté pour mieux nous protéger. Nous devrons avoir le courage de dire qu'une société a le droit de se protéger contre les menaces. Anticipons, avant qu'un individu sorti de prison commette un attentat et qu'on nous demande, en réaction, et sous le coup de l'émotion, de légiférer ! La rétention de sûreté instaurée par le Président Nicolas Sarkozy pour les criminels sexuels devrait pouvoir s'appliquer plus largement, au‑delà des quelque 500 personnes qui sortiront de prison, après avoir été condamnées pour terrorisme, aux 800 à 2 000 condamnés de droit commun susceptibles de radicalisation (DCSR). Enfin, les terroristes condamnés de nationalité étrangère devraient être systématiquement expulsés de notre pays, à leur sortie de prison, ce qui éviterait de les surveiller.
Il est nécessaire que, sur un texte de cette nature, des questions de droit fondamental se posent. Néanmoins, il me semble qu'il atteint un juste équilibre entre droits fondamentaux et absolue nécessité de protéger nos concitoyens. Nous avons des dispositifs de suivi socio‑judiciaire, que mentionne le Conseil d'État et qui peuvent s'appliquer sans limite de temps. Ce texte fixe une durée de dix ou vingt ans ; il permet également de revoir la position de l'individu concerné tous les ans. La position de la juridiction évoluera progressivement, au fur et à mesure de l'analyse de la personnalité, et de nombreuses personnes ne seront sans doute pas suivies dix ou vingt ans. La mesure doit être rétroactive, sans quoi le texte n'a aucune valeur. Enfin, le Conseil d'État a été très clair : c'est une mesure restrictive de liberté, qui n'empêche pas la personne de se déplacer. Elle est soumise à un contrôle élémentaire, qui paraît nécessaire, au regard de la gravité des actes commis.
Nous soutiendrons votre texte et vous proposerons des amendements pour préciser certains points. Malheureusement, il ne changera pas la stratégie pénale du Gouvernement. Pendant le confinement, 13 500 détenus ont été libérés de façon anticipée et autant ont échappé aux poursuites judiciaires, si bien que, çà et là, des tensions montent. Tous ces gens, qui devraient être en prison et auraient dû faire l'objet d'un suivi particulier, participent à l'embrasement de certains de nos territoires. J'ai la faiblesse de penser que ce qui se passe à Dijon est lié aux libérations anticipées et à la mise à l'arrêt du système judiciaire. La politique pénale doit suivre, sans quoi la proposition de loi ne servira à rien.
Nous sommes tous conscients du danger que représente le terrorisme et souhaitons tous protéger les Français. La proposition de loi me semble nécessaire, même si elle n'est évidemment pas l'alpha et l'oméga de la lutte contre le terrorisme.
Ce texte circonscrit vise à combler « un trou dans la raquette ». Il ne concerne pas des apprentis terroristes, mais des personnes condamnées pour terrorisme. C'est dommage que Stéphane Peu, qui m'a accusée d'opportunisme, soit parti, après avoir manqué ma présentation du texte. En lisant le compte rendu, il verra que cette proposition de loi est issue de trois ans de travail au sein de la Délégation parlementaire au renseignement et du contrôle parlementaire de la loi SILT. Les sénateurs, qui ont mené les mêmes travaux, ont abouti à la même conclusion, sans la moindre course « à l'échalote » pour reprendre son expression. S'il est possible de contester les dispositions en elles‑mêmes, il me semble malvenu de contester le processus.
Nous nous sommes bien évidemment interrogés sur l'équilibre du texte. Notre commission a toujours veillé à préserver les droits fondamentaux et les libertés publiques. C'est pourquoi nous avons souhaité saisir le Conseil d'État. Je garderai le souvenir de l'Assemblée générale qui a duré plus de trois heures, où nous avons pu échanger sur les concepts de peine et de sûreté. Nous proposons clairement une mesure de sûreté, qui vise à prévenir la récidive et non pas à punir. Il y aura une procédure contradictoire et une évaluation pluridisciplinaire régulière. Il ne s'agit pas de considérer que tout est perdu, mais qu'il faut absolument instaurer un suivi. Je fais confiance à l'autorité judiciaire pour apprécier qui doit bénéficier de cette mesure de sûreté – les 150 détenus identifiés n'y seront pas tous soumis. Cela ne signifie pas pour autant que nous renonçons à travailler sur la radicalisation en détention. Nous devons être réalistes : nous ne pourrons pas toujours déradicaliser les détenus.
Mes amendements reprennent les recommandations du Conseil d'État. Je regarderai avec beaucoup d'attention les vôtres, qui se rejoignent parfois.
Concernant le champ d'application, nous avons retenu l'incrimination terroriste, parce que les détenus de droit commun peuvent d'ores et déjà bénéficier des dispositifs de libération conditionnelle et de suivi judiciaire, et ne font pas l'objet d'une sortie sèche, contrairement aux détenus pour terrorisme, qui sont exclus explicitement des dispositifs d'aménagement de peine depuis 2016.
Article unique (art. 706‑25‑15 à 706‑25‑19 du code de procédure pénale) : Mesures de sûreté à l'encontre des auteurs d'infractions terroristes à l'issue de leur peine
La Commission examine l'amendement CL32 de M. Ugo Bernalicis.
L'enjeu de notre discussion est de savoir comment prévenir la récidive. On sait que le meilleur moyen est de préparer la sortie. Notre collègue remarquait que nous n'étions pas là pour défendre les droits des personnes condamnées. Mais si ! Parce que c'est un facteur de désistance. Or je crois que tout n'est pas fait en détention pour prévenir la récidive. Les mesures de sûreté que vous proposez doivent être prises seulement après que toutes les autres auront été essayées en vain. C'est vrai que ces détenus ne doivent pas sortir de manière sèche, c'est‑à‑dire, pour moi, non pas sans surveillance, mais sans avoir fait un travail pendant leur détention. Or c'est le cas, malgré quelques expérimentations.
Madame la rapporteure, vous disiez que votre dispositif s'appliquait déjà aux détenus de droit commun dits radicalisés. Votre texte met le pied dans la porte et incite à instaurer ces mesures de rétention pour des gens dont la caractérisation de TIS laisse à désirer, en ce qu'elle ne repose que sur la religiosité, qui est souvent loin de faire le lit des passages à l'acte violents.
Avis défavorable. La proposition de loi ne remplace pas les dispositifs de prise en charge de la radicalisation en détention, pour laquelle beaucoup est fait. Tout n'est pas parfait, bien sûr, mais, dans la mesure où c'est un enjeu majeur pour nos démocraties, il ne faut jamais renoncer à rechercher la meilleure façon de prendre en charge les personnes radicalisées. C'est pourquoi nous avons créé de nombreux quartiers de prise en charge de la radicalisation en détention et avons développé des programmes de sortie qui ont montré une certaine efficacité. La proposition de loi vise à assurer une meilleure prise en charge à la sortie de la détention.
Ces mesures ne sont pas nécessaires. Le Conseil d'État a d'ailleurs fait remarquer que nous n'étions pas dépourvus d'outils. Faire des quartiers spécifiques n'est pas résoudre le problème. J'aimerais être aussi péremptoire que vous ! En vérité, je ne sais rien sur l'efficacité des dispositifs. Je n'ai pas de rapport sur le sujet. À chaque fois que j'ai interrogé des personnels, dans les quartiers d'évaluation ou de prévention de la radicalisation, ils m'ont répondu qu'ils n'avaient aucun retour ni aucune évaluation. Et vous, parce que vous participez depuis trois ans à des réunions auxquelles nous n'assistons pas et que vous disposez d'informations auxquelles nous n'avons pas accès, vous nous dites que c'est bien ce qu'il faut faire. Permettez‑moi de douter ! Quand il s'agit de prendre des mesures restrictives de liberté, je m'interroge. La Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) examine in concreto si un dispositif est une peine ou une mesure de sûreté, et ne se fie pas à l'exposé des motifs. Et concrètement, c'est un peu flou.
Monsieur Bernalicis, je ne peux pas vous laisser dire que vous ne savez pas qu'il n'y a pas une catégorie de condamnés qui sort de façon sèche. Vous le savez, puisque le suivi socio‑judiciaire n'a été étendu aux infractions de terrorisme qu'en 2016. Certains condamnés pour terrorisme avant 2016 sortiront bientôt, sans être éligibles à un quelconque dispositif, à l'exception des mesures de surveillance administrative.
Le procureur national antiterroriste nous a donné les chiffres des prononcés de suivi socio‑judiciaire en matière criminelle. Depuis septembre 2019, alors que le nombre de terroristes islamistes jugés par la cour d'assises de Paris était déjà largement supérieur à celui jugé devant cette juridiction en vingt‑cinq ans, sur dix‑neuf dossiers en premier ressort et trois en appel, aucun suivi socio‑judiciaire n'a été prononcé – il n'a été requis qu'une seule fois pour une peine de huit ans. Deux catégories seront visées par la proposition de loi : les condamnés avant 2016 et les condamnés pour des faits criminels pour lesquels il semblerait que la jurisprudence de la cour d'assises de Paris soit de ne pas prononcer de suivi socio‑judiciaire, les peines étant trop longues pour évaluer sa nécessité au moment de la condamnation.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CL4 de M. Éric Diard.
L'amendement vise à reprendre l'article 6 de la proposition de loi du Sénat renforçant la lutte contre le terrorisme et le suivi des condamnés terroristes à leur sortie de détention. Le renforcement des dispositifs de suivi judiciaire apparaît comme la voie la plus adaptée. Même si l'objet de votre proposition est de prendre diverses mesures de sûreté, sans vous offenser, madame la présidente, celles présentées dans cet amendement sont plus efficaces, en introduisant dans le code de procédure pénale une nouvelle mesure destinée à permettre un suivi renforcé et prolongé des personnes condamnées pour des infractions terroristes, qui présentent à leur sortie de détention une dangerosité élevée et un risque avéré de récidive. Cette surveillance n'est pas une sanction pénale, mais une mesure d'accompagnement à la réinsertion, pour protéger la société contre des individus ayant purgé une peine, mais dont la dangerosité a été reconnue par le tribunal d'application des peines. Dans la proposition de loi du Sénat, il y a la possibilité de recevoir la visite du travailleur social et de se soumettre à un examen médical et à des injonctions thérapeutiques. C'est pourquoi je souhaite ajouter à votre article l'article 6 du Sénat.
Vous n'ajoutez pas seulement un dispositif ; vous supprimez le mien ! Mon homologue du Sénat a abouti aux mêmes conclusions et souhaite créer le même dispositif. Les points de convergence entre nos propositions sont nombreux. C'est pourquoi je ne doute pas que nous parviendrons à un accord en commission mixte paritaire. J'ai même commencé à discuter avec Philippe Bas. Notre dispositif comporte un point supplémentaire important : il prévoit la possibilité d'un pointage trois fois par semaine au commissariat, ce que ne prévoit pas le suivi socio‑judiciaire présenté par le Sénat. Or les acteurs de terrain, notamment le directeur général de la sécurité intérieure, nous ont dit à quel point ce pointage était important pour mesurer l'évolution d'un individu et assurer son suivi. Avis défavorable à l'amendement.
Un amendement vise à rendre possible le recours au dispositif PAIRS. Nous pourrons voir, pour la séance, si nous ajoutons le suivi médical.
L'amendement est retiré.
La Commission examine l'amendement CL46 de la rapporteure.
Premier d'une longue série, l'amendement vise à tenir compte tant des recommandations du Conseil d'État que des auditions que nous avons tenues qui prônaient toutes deux la saisine de la juridiction régionale de la rétention de la sûreté de Paris dans la mesure où il s'agit de mesures de sûreté et non de peines.
Le parquet national antiterroriste de Paris centralise en outre toutes ces affaires en raison de la compétence de ses services et de leur connaissance très fine de tous ces enjeux. Il convient donc de préciser qu'il sera en charge des réquisitions.
L'amendement propose donc de substituer au tribunal d'application des peines la juridiction régionale de rétention de sûreté de Paris, et de rendre le tribunal pour enfants de Paris compétent concernant les mineurs, même s'il ne s'agira que de situations exceptionnelles qu'il ne faut pour autant pas écarter.
La Commission adopte l'amendement.
Elle est ensuite saisie de l'amendement CL5 de Mme Marie-France Lorho.
L'amendement vise à préciser les modalités de la définition de la particulière dangerosité sur la base de laquelle le procureur de la République pourra ordonner les mesures de sûreté envisagées. Comment déterminera-t-il le risque que la personne visée commette les infractions au code de procédure pénale mentionnées à l'alinéa 6 sans que cela ne porte atteinte à la présomption d'innocence ?
Si le renforcement des dispositifs pénaux me semble essentiel, une personne ne doit pas pouvoir être condamnée parce qu'elle serait susceptible de commettre une infraction : cela ébranlerait en effet un pilier de notre édifice juridique.
L'amendement tend donc à supprimer l'alinéa 6, dans l'attente d'une meilleure rédaction.
Cet alinéa détermine précisément le champ d'application de la proposition de loi, à savoir les détenus ayant été condamnés pour des faits de terrorisme, à l'exclusion d'un certain nombre d'autres condamnations. Je ne peux donc qu'être défavorable à l'amendement, tout l'enjeu du dispositif tenant à l'appréciation de la particulière dangerosité.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement CL15 de M. Éric Ciotti.
Le champ de la proposition de loi n'inclut pas les délits d'apologie du terrorisme et de diffusion de messages en faisant l'apologie. Or il serait opportun qu'ils le soient. Certaines personnes condamnées pour de tels délits peuvent en effet présenter une dangerosité majeure qui doit être prise en compte au-delà de la condamnation pour terrorisme. Pourquoi, donc, les exclure, au détriment du principe de précaution ?
Il s'agit, non pas d'une peine, mais d'une volonté collective de la société de se protéger contre une menace.
Nous nous sommes effectivement beaucoup interrogés sur le champ à retenir pour cette proposition de loi. Nous avons exclu les deux infractions que vous mentionnez car nous avons considéré qu'en dépit de leur extrême gravité, elles visaient des délits d'expression.
En outre, elles sont aujourd'hui punies de peines de cinq ans d'emprisonnement. Or les mesures de surveillance judiciaire – réservées aux délits passibles de peines supérieures à sept ans d'emprisonnement – et de sûreté sont traditionnellement réservées à des incriminations beaucoup plus importantes, la rétention et la surveillance de sûreté étant quant à elles réservées à des crimes passibles de quinze ou plus d'emprisonnement.
Enfin, de telles dérogations existent déjà pour de tels délits dans la procédure pénale : je pense par exemple au régime de la garde à vue ou de la perquisition.
La logique de M. Ciotti, à laquelle je suis rigoureusement opposé et à laquelle votre texte ouvre la porte, se tient : à partir du moment où l'on admet l'existence du concept de dangerosité, qu'on le définit et qu'on prévoit des mesures de sûreté spécifiques, on peut, le risque zéro n'existant pas, les appliquer à tout le monde. Or elles emportent des conséquences concrètes sur la vie des gens puisqu'elles sont au minimum restrictives de liberté.
Dans le droit fil des lois successives depuis 2015, vous avez ouvert une boîte de Pandore, préparant ainsi la prolongation des dispositifs de la loi SILT. L'ambiance sécuritaire dans laquelle nous vivons autorise en effet, au prétexte d'une limitation des risques et d'une protection collective, ce type de discours au détriment des libertés fondamentales, notamment individuelles, dont on finit par oublier qu'elles constituent la norme, et les mesures restrictives et privatives de liberté l'exception.
Au mois de mai, un individu fiché « S », emprisonné à Vannes pour infraction à la législation sur les stupéfiants, a été libéré avec deux mois d'avance car il a bénéficié des mesures de l'ordonnance du 25 mars 2020. Or il a été arrêté pour avoir refusé un contrôle de police – il n'avait pas de permis de conduire, et était armé. Il avait pourtant été condamné en 2019 pour apologie du terrorisme !
Où s'arrête la naïveté et où commence la suspicion généralisée ? Ni la proposition de loi, ni l'amendement de M. Ciotti ne créent un nouveau délit. Une chose est sûre : tous nos concitoyens ne se livrent pas, lorsqu'ils font usage de leur liberté d'expression, à l'apologie du terrorisme, qui est clairement réprimée par la loi. En revanche, dans de très nombreux cas de passage à l'acte, les intéressés ont au préalable, sur les réseaux sociaux ou dans des correspondances privées, fait l'apologie du terrorisme. Il faut donc tenter d'empêcher tout nouveau passage à l'acte ainsi que toute réitération. L'amendement y contribuerait.
Cher collègue Bernalicis, la commission des Lois n'est pas en train d'inventer les peines de sûreté ou la notion même de sûreté : elles font en effet partie depuis très longtemps de notre droit et ne sont pas, contrairement à ce que vous avez dit, réservées à la matière terroriste.
Il en va de même de la notion de dangerosité en fonction de laquelle un magistrat, – ou en matière administrative un préfet ou le ministre de l'intérieur – peut prendre des mesures de sûreté : nous n'ouvrons aucune brèche.
Comme vous l'avez dit, la proposition de loi se situe dans le droit fil des textes visant à lutter contre le terrorisme, et notamment celui du 21 juillet 2016 qu'elle corrige puisqu'un amendement de M. Ciotti prévoyant que tous les condamnés pour des faits de terrorisme n'auraient droit à aucune réduction de peine avait alors été adopté. La majorité socialiste de l'époque l'avait d'ailleurs allègrement voté.
Or, ce faisant, on n'a fait que repousser le problème : quatre ans après, les intéressés se retrouvent en sortie sèche, ce qui justifie les mesures de sûreté. Elles permettront de les surveiller à leur sortie de prison.
Chers collègues, nos activités de contrôle nous ont amenés à faire état devant vous de nos auditions et de nos travaux. Celles s'exerçant sur la mise en application de la loi SILT nous rendent notamment destinataires d'une copie de tous les actes pris sur son fondement, notamment des MICAS – par ailleurs placées sous le contrôle du juge administratif – prises au moment des sorties de détention et qui établissent la dangerosité des intéressés. Or ils présentent des profils extrêmement dangereux : il nous faut donc intervenir.
L'amendement en question, monsieur Gauvain, qui privait de réductions de peine automatiques les condamnés pour terrorisme, était porté avec Jean-Jacques Urvoas, alors président de la commission des Lois – avec lequel nous avons également donné naissance au renseignement pénitentiaire –, contre l'avis de Mme Taubira, Garde des Sceaux à l'époque.
Or si nous sommes aujourd'hui capables d'évaluer la dangerosité en prison et de dresser un état des lieux de la menace, c'est précisément grâce au renseignement pénitentiaire. Je regrette que la logique poursuivie par M. Urvoas lorsqu'il avait excellemment exercé les fonctions de Garde des Sceaux ait été totalement mise à mal par Mme Belloubet qui a fait totalement sienne la philosophie de Mme Taubira.
Madame la rapporteure, comme le savent les services de renseignement, la dangerosité n'est pas liée à la condamnation : un individu qui n'a été condamné que pour un acte d'apologie du terrorisme, celui-ci pouvant précéder un très grave attentat, peut être extrêmement dangereux. Alors que la société doit s'en protéger, rien n'est prévu à sa sortie de prison. Je ne peux pas m'y résoudre.
Je comprends vos arguments, mais nous n'avons fait entrer dans le champ d'application de la proposition de loi que les infractions les plus graves.
N'y voyez pas malice, monsieur Ciotti, mais l'amendement CL4 d'Éric Diard, que vous avez cosigné et qui reprend la proposition de loi de l'excellent Philippe Bas, prévoit exactement la même exclusion que celle que je propose, à savoir celles « […] définies aux articles 421‑2‑5 et 421‑2‑5‑1 […] » du code pénal.
Il s'agissait d'un amendement de repli au cas où vous ne répondiez pas à ma légitime attente.
(Sourires.)
La Commission rejette l'amendement.
Elle est ensuite saisie de l'amendement CL11 de M. Jean-Félix Acquaviva.
Cette proposition de loi visant à créer un régime ad hoc pour les individus condamnés pour des faits de terrorisme en passe d'être libérés est présentée comme s'inscrivant dans le cadre de la lutte contre le terrorisme islamiste.
Notre forte réserve, que j'ai déjà exprimée au nom du groupe Libertés et territoires, vient du fait que l'on passe d'un exposé des motifs comportant une identification très précise et très factuelle de la dangerosité de ce terrorisme à une proposition de loi générale.
Or selon l'article 421-1 du code pénal, et plus précisément selon son troisième alinéa, de nombreuses infractions peuvent être, comme cela s'est déjà vu, qualifiées de terroristes : je pense aux dégradations de sous-préfectures commises par les bonnets rouges ou par les gilets jaunes, et à d'autres faits imputables à certains militants écologistes ou altermondialistes ou aux situations corse et basque.
La proposition de loi semble donc dangereuse et disproportionnée dans la mesure où elle trouverait à s'appliquer après la peine consécutive à une condamnation par ailleurs normale s'agissant d'actes de violence.
Or les actions relevant du terrorisme islamiste me semblent être caractérisées quasi-exclusivement par l'atteinte à la vie humaine, ce qui les lie évidemment à la notion de dangerosité sur l'évaluation de laquelle nous rejoignons le Conseil d'État. Sur le sol français, je n'en connais aucune en effet qui ait pris la forme de dégradations.
Il nous semble donc plus juste et nécessaire de distinguer les atteintes matérielles aux biens des atteintes délibérées à la vie humaine pour ne pas, en étant trop général, créer de situations clivantes n'ayant rien à voir avec l'objet même de la proposition de loi.
L'article 421-1 du code pénal définit comme terroriste « […] une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur […] ». Or je n'imagine pas que des militants écologistes ou des gilets jaunes puissent commettre des actes répondant à cette définition : la confusion est impossible.
Par ailleurs, l'exclusion du champ d'application de la proposition de loi des destructions matérielle ne me paraît pas opportune. Certains actes terroristes peuvent en effet ne viser que la destruction de biens et troubler ainsi gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur. Je suis donc défavorable à l'amendement.
Il s'agit évidemment d'un amendement d'appel : j'ai en tête au moins une cinquantaine de cas dans lesquels on a par le passé, au cours des années 1980 et 1990, qualifié de terroristes certains actes, dont on pourrait dresser la liste, issus de tels mouvements.
Oui, une telle généralisation a eu lieu et par conséquent oui, le risque existe. Non, la proposition de loi n'offre pas de ce point de vue de sécurité tant juridique que démocratique. Elle met en outre de l'huile sur le feu, tout comme le FIJAIT, qui visait le terrorisme islamiste mais qui a été clairement étendu à des détenus ne présentant pas de dangerosité, générant ainsi des tensions parmi les Corses et les Basques.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement CL47 de la rapporteure.
L'amendement tend à répondre à l'une des préoccupations du Conseil d'État en définissant la particulière dangerosité des individus entrant dans le champ d'application de ce texte. François Molins, procureur général près la Cour de cassation, nous a en effet indiqué qu'il serait préférable de la préciser, afin de consolider le dispositif.
Il vise donc à insérer, à l'alinéa 6, après le mot : « par », les mots : « une adhésion persistante à une entreprise tendant à troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur […] ». Il reprend la définition de l'acte terroriste figurant dans le code pénal.
Si je comprends bien, les mesures de sûreté ne devraient s'appliquer qu'à des personnes manifestant une telle adhésion, cette définition servant par ailleurs à caractériser certains faits dans le cadre de poursuites judiciaires.
Si cette définition est identique dans les deux cas, je préfère alors le traitement judiciaire, quitte, si la personne en question a continué à communiquer en détention avec l'extérieur en manifestant son intention de commettre dès sa sortie un acte terroriste, à rouvrir une enquête et à la condamner.
Cela illustre bien votre difficulté à mettre une frontière et le risque de jugements subjectifs fondés par exemple, comme l'amendement suivant CL48, sur « une probabilité très élevée ».
On entre ainsi dans un monde qui n'est ni celui des faits ni celui de la justice classique. Quoi qu'en dise notre collègue Raphaël Gauvain, non, il n'en a pas été ainsi de tout temps ni en toute matière. Le code pénal a connu un effet cliquet, conduisant, d'année en année, à une vision de plus en plus sécuritaire et répressive, sans pour autant, bien au contraire, que les résultats aient suivi.
Vous avez raison : si les personnes concernées ont commis une infraction qu'il est possible de caractériser, le procureur national antiterroriste les poursuivra pour ce motif. Il s'agit en l'espèce de définir le champ des personnes qui continuent d'adhérer aux thèses terroristes et radicales. Les MICAS sont éclairantes à cet égard. Cela se déduit de la persistance d'un comportement en détention caractérisé par une accumulation d'agressivité envers les surveillants et parfois d'incidents de détention impliquant par exemple la fabrication d'armes.
Il ne s'agit pas de poursuivre des personnes en raison de faits, mais d'identifier celles qui manifestent une radicalité et qui, de ce fait, présentent un danger pour la société. L'amendement CL47 vise à le caractériser en prévoyant une adhésion persistante à une entreprise tendant à troubler gravement l'ordre public.
Soyez rassuré, les acteurs du monde judiciaire savent très bien faire la distinction.
La distinction entre l'infraction et la peine de sûreté est, en pratique, extrêmement claire. Acheter un billet d'avion en vue de rejoindre un théâtre d'opérations relève, depuis 1986, de la première. La personne concernée sera donc, même si elle n'a pas commis d'acte terroriste, appréhendée, placée en garde à vue puis condamnée à une peine de prison.
Si au cours de sa détention elle profère certains propos, voire des menaces, on surveillera son entourage, ses appels. C'est sur la base de son dossier, de manière objective et à l'issue d'une procédure judiciaire conduite par des magistrats en fonction d'une jurisprudence et d'un débat contradictoire qu'on pourra en conclure que la personne présente une certaine dangerosité et doit donc faire l'objet de mesures de sûreté.
La Commission adopte l'amendement.
Elle est ensuite saisie de l'amendement CL48 de la rapporteure.
Il vise, dans la même ligne que le précédent, à caractériser le champ d'application du texte. S'ils souhaitent soumettre une personne aux mesures de sûreté, les magistrats devront, au-delà de la persistance d'une adhésion à une entreprise tendant à troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur, prouver qu'il existe « une probabilité très élevée » de commettre l'une des infractions en question.
Également inspiré par l'audition de François Molins, l'amendement vise à harmoniser plusieurs rédactions, puisque cette qualification juridique figure déjà à l'article 706-53-13 du code de procédure pénale relatif à la rétention et à la surveillance de sûreté.
Plusieurs d'entre vous ont employé les mots : peines de sûreté. Or de facto, la confusion est totale, car il s'agit, non pas de peines, mais de mesures de sûreté, distinction qu'il est nécessaire d'opérer pour éviter notamment une inconstitutionnalité. Si nous-mêmes employons spontanément le mot peines à leur propos, c'est peut-être qu'elles soulèvent une difficulté.
Si une personne est trouvée en possession d'armes au cours de sa détention, il s'agit d'un délit qui peut être poursuivi. Si une autre tient des propos incitant à la violence ou à la haine et fait l'apologie du terrorisme, cela peut également donner lieu à des poursuites. Tous les faits que vous avez cités peuvent en faire l'objet : je vous mets au défi d'en trouver pour lesquel cela serait impossible.
Nous évoluons vers une justice prédictive alors que l'on devrait examiner des faits et condamner. Je le dirai autant de fois que cela sera nécessaire.
J'entends que la mention « une probabilité très élevée » figure déjà dans notre droit. Pour autant, un risque élevé et une probabilité très élevée sont des notions différentes. Je crains que la seconde conduise à une analyse du risque. En outre, définir une probabilité en matière de comportements humains sera plus compliqué que de définir un risque, a fortiori si l'on requiert que son niveau soit très élevé.
Cette rédaction, qui vise à sécuriser juridiquement la démarche, peut avoir pour conséquence de vider de sa substance votre proposition de loi.
Il faudrait à tout le moins supprimer l'adverbe « très », sauf à ne cibler qu'un nombre de cas extraordinairement limité. Un tel critère sera en effet compliqué à appliquer. Cela risque de détruire l'architecture du texte.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle est saisie de l'amendement CL18 de M. Éric Ciotti.
L'amendement vise à étendre la possibilité de prendre des mesures de sûreté à l'égard de détenus de droit commun susceptibles de radicalisation (DCSR). Il s'agit, non pas d'une peine après la peine, ce qui n'aurait bien entendu aucun fondement juridique, mais de protéger notre société contre la dangerosité de certains individus.
Le profil des terroristes qui ont tragiquement marqué l'histoire contemporaine de notre pays nous enseigne que nombre d'entre eux avaient fait l'objet d'une condamnation pour apologie du terrorisme.
En l'espèce, le schéma est similaire : les détenus identifiés par le renseignement pénitentiaire comme présentant une dangerosité en raison de leur radicalisation persistante ou opérée au cours de leur séjour derrière les barreaux constitueront, à la fin de leur détention, une menace et un risque – ou une probabilité – élevés ou très élevés de passage à l'acte.
Incluons-les dans le champ d'application du texte sous peine de perdre une grande partie du bénéfice du dispositif ! Auditionnés dans le cadre du contrôle de la loi SILT, le président du tribunal judiciaire de Paris, comme le procureur de la République antiterroriste, avaient considéré que 800 à 1 200 prévenus et condamnés correspondraient à ce profil radicalisé. Pour les syndicats pénitentiaires ils étaient de l'ordre de 1 500 à 2 000. Nous ne pouvons pas ne rien faire face à cette menace.
Je suis d'accord avec vous : il n'est pas possible de ne rien faire face à cette menace mais, précisément, nous disposons des outils judiciaires nécessaires avec la surveillance judiciaire et les aménagements de peine.
Par ailleurs, nous avons défini le champ d'application de la loi à partir d'un certain nombre d'infractions et ce que vous proposez me semble trop flou.
Avis défavorable.
Comme notre collègue Éric Poulliat et moi-même l'avions signalé dans notre rapport, l'administration pénitentiaire a eu le tort d'évaluer la radicalisation des cinq cents terroristes islamistes avant celle des détenus de droit commun susceptibles de radicalisation, actuellement en cours. Nous avons ainsi perdu beaucoup de temps.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine, en discussion commune, les amendements CL49 de la rapporteure et CL27 de M. Dimitri Houbron.
Afin de tenir compte de la recommandation du Conseil d'État, il s'agit de substituer au « tribunal de l'application des peines » la « juridiction régionale de la rétention de sûreté ».
La Commission adopte l'amendement CL49.
En conséquence, l'amendement CL27 tombe.
La Commission examine l'amendement CL6 de Mme Marie-France Lorho.
Si le procureur de la République est prêt à faire part auprès du tribunal d'application des peines d'une requête visant à exercer sur une personne des mesures de sûreté contraignantes, c'est qu'il considère que la personne condamnée a fait preuve d'une dangerosité avérée.
Dans cette éventualité, il serait particulièrement délicat pour les personnels des services judiciaires de ne pas faire appliquer toutes les mesures nécessaires à la surveillance de cette personne ou tout dispositif permettant de prévenir tout acte malveillant de sa part.
L'emploi de l'optatif, dans la formulation actuelle de l'alinéa 6, soulève le problème de la responsabilité des détenteurs de l'autorité judiciaire. Il me semble donc nécessaire que le procureur « ordonne » que des mesures strictes soient prises à l'encontre de cette personne.
Avis défavorable. Il faut faire confiance aux magistrats, qui ont une appréciation très fine des dossiers. De plus, l'individualisation de chaque situation est au cœur de notre système judiciaire.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CL7 de Mme Marie-France Lorho.
Nous évoquons le cas de personnes condamnées et reconnues dangereuses à l'issue de leur peine. Dès lors que le procureur de la République ordonne que des mesures de sûreté soient prises, le système judiciaire français reconnaît que des dispositifs spéciaux doivent être appliqués pour garantir la sécurité des Français. Il ne semble donc pas illégitime que ces personnes fassent l'objet d'une attention soutenue des services de surveillance compétents. Il n'est pas illégitime non plus d'exiger d'elles qu'elles indiquent aux autorités tout changement de situation.
C'est déjà le cas, l'alinéa 8 disposant que la personne doit déclarer sa résidence et l'alinéa 9 qu'elle doit « obtenir l'autorisation préalable du juge de l'application des peines pour tout changement d'emploi ou de résidence… ». Je vous renvoie également à l'article 132-44 du code pénal.
L'amendement est retiré.
La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL8 de Mme Marie-France Lorho et CL16 de M. Éric Ciotti.
Il n'y a aucune raison valable pour limiter la fréquence de présentation de l'ancien détenu reconnu dangereux à l'issue de sa peine auprès des autorités compétentes. Si, dans le cadre de tel ou tel dossier, celles-ci jugent nécessaire que la personne se présente à eux tous les jours, un tel pointage doit être possible. Mon amendement vise donc à supprimer la limite de trois pointages hebdomadaires.
Le pointage peut être étendu à sept jours hebdomadaires contre trois actuellement. Pourquoi se priver de cette possibilité ?
Nous avons beaucoup hésité s'agissant de la périodicité du pointage, dont nous savons à quel point il est utile. Nous avons opté pour un pointage maximal de trois jours par semaine pour sécuriser juridiquement et constitutionnellement le dispositif.
En 2008, lorsqu'il s'est prononcé sur la rétention de sûreté et plus récemment à l'occasion de l'examen de deux QPC sur les MICAS – où le pointage quotidien est possible –, le Conseil constitutionnel a jugé que ce dernier restreint les libertés. S'il jugeait que notre proposition de loi n'était pas conforme à la Constitution, elle ne pourrait s'appliquer. Il me semble donc nécessaire de maintenir une périodicité de trois jours hebdomadaire.
Avis défavorable à ces amendements.
Je le regrette. Compte tenu de la conviction que vous avez manifestée, j'espérais que vous émettriez enfin un avis favorable à l'un de mes amendements.
Vous préjugez d'une décision du Conseil constitutionnel, or, comme vous l'avez rappelé, celui-ci n'a pas remis en cause le principe du pointage quotidien dans le cadre des MICAS. Je ne pense donc pas que le risque d'inconstitutionnalité soit très grand.
Pour les législateurs que nous sommes, il est insupportable de faire valoir un risque d'inconstitutionnalité en raison de votre impréparation. Cela fait des mois que nous vous alertons sur le sujet. Si l'on veut qu'un texte soit efficace, il doit être travaillé suffisamment en amont pour éviter ce genre de risque et, le cas échéant, revoir la copie si elle n'est pas entièrement conforme à la Constitution.
J'ajoute que le pointage quotidien que nous proposons n'est pas une obligation mais une possibilité laissée au juge.
Je ne savais pas qu'il était constitutionnellement possible de saisir le Conseil constitutionnel sur une proposition de loi avant qu'elle ait été déposée ! Il est en revanche possible de saisir le Conseil d'État pour qu'il joue son rôle de conseil juridique du Parlement – ce que nous avons fait.
Nous avons évoqué un « chemin de crête », or, face au risque d'inconstitutionnalité, nous souhaitons en rester à des mesures de sûreté. Le Conseil constitutionnel peut en effet fort bien opérer une requalification et juger que le pointage quotidien relève plutôt de la sanction. Dans ce cas, le texte ne serait pas immédiatement applicable alors que notre objectif est qu'il le soit.
De plus, le dispositif proposé s'ajoute à la loi SILT et le ministère de l'intérieur, pendant la première année, pourra instaurer un pointage quotidien.
La Commission rejette successivement les amendements.
Elle examine les amendements identiques CL25 de Mme Paula Forteza et CL40 de Mme Laurence Vichnievsky.
Nous proposons la suppression du dispositif de surveillance électronique mobile, très intrusif et privatif de liberté. Nous sommes également préoccupés par le recours de plus en plus fréquent à ce type d'outils, qui nous entraîne vers un modèle de société dont nous ne voulons pas.
De plus, le droit en vigueur permet déjà l'utilisation de ces bracelets dans le cadre du suivi socio-judiciaire pour une durée de deux ans, renouvelable une fois en matière délictuelle et deux fois en matière criminelle.
Enfin, le pointage en présentiel est plus efficace.
Je précise également que le placement sous surveillance électronique mobile peut être prononcé dans le cadre d'un suivi socio-judiciaire, peine complémentaire prononcée par la juridiction de jugement, ou dans le cadre de la surveillance judiciaire, laquelle ne s'applique que pour la durée de la peine.
Je ne crois pas me tromper en reprenant le terme de « confusion » qui figure dans l'avis du Conseil d'État s'agissant de la distinction entre mesures de sûreté et peines. Selon moi, une telle mesure s'apparenterait à une peine. Supprimer cette possibilité éviterait donc un risque d'inconstitutionnalité.
Je comprends les préoccupations de nos deux collègues.
Le parquet national antiterroriste et le directeur général de la sécurité intérieure nous ont convaincus de l'utilité primordiale du pointage, le placement sous bracelet présentant en revanche moins d'intérêt opérationnel. Par ailleurs, un tel usage est possible dans le cadre des MICAS mais il est très peu utilisé.
Avis favorable à ces amendements qui, de surcroît, contribuent à sécuriser constitutionnellement le texte.
Je suis très défavorable à ces amendements car la surveillance électronique mobile est un dispositif parmi les plus efficaces du texte et les services de renseignement en ont besoin.
Le texte ne prévoyant pas d'assignation à résidence ou de rétention administrative pour ces individus dangereux, ce que je regrette, comment ne pas utiliser ce dispositif de géolocalisation, d'autant plus qu'il évitera une surveillance physique où plusieurs dizaines d'agents de renseignement peuvent être mobilisés ?
Je suis très surpris par cette suppression. Peu à peu, vous videz ce texte de toute sa substance.
Je comprends que des questions de liberté individuelle se posent mais ce fut manifestement moins le cas lorsqu'il s'est agi d'adopter en commission des dispositifs de surveillance numérique à l'endroit de toute la population pour lutter contre le covid-19 que cela ne l'est lorsqu'il s'agit de lutter contre des individus radicalisés !
Les conséquences d'une censure constitutionnelle seraient quant à elles bien moins importantes que précédemment et nous pouvons en prendre le risque. Si la disposition n'est pas censurée, la protection des Français sera satisfaite.
Il faut placer ce nouveau régime juridique dans un ensemble de mesures visant les personnes sortant de prison, notamment le suivi administratif et la loi SILT.
Lors de la première année qui suit la sortie de prison, il est possible de cumuler une limitation de sortie à l'échelle de la commune et le port du bracelet électronique.
Par ailleurs, M. Ciotti sait bien qu'aucun bracelet électronique n'a été proposé dans le cadre des MICAS et suite à des sorties de prison. Il est faux de prétendre qu'une telle mesure, supposément très efficace, serait demandée par les services de renseignement.
Le groupe Les Républicains était plutôt favorable à cette proposition de loi mais elle vire de plus en plus au Canada Dry : elle a le goût de la mesure de sûreté sans l'être vraiment.
Sans être dans un état d'esprit sécuritaire, je trouve également qu'il y a un manque de logique. Vous faites de nombreuses propositions pour encadrer le suivi de la personne qui sort de prison mais pourquoi semblez-vous faire peu de cas du bracelet électronique ?
Nous avions en effet un a priori favorable sur ce texte mais vous êtes en train de le vider de sa substance. Il n'en reste rien ! Un pointage maximal trois jours par semaine… avec café et chocolat ?
Le placement sous surveillance électronique géolocalisée est rarement utilisé en raison de problèmes techniques et d'un coût très élevé alors que, comme tous les services de renseignement le disent, il est beaucoup plus utile qu'un placement sous surveillance électronique fixe.
Compte tenu de la philosophie de ce texte et de l'avis du Conseil d'État, soit ces amendements sont rejetés et la proposition de loi a une raison d'être juridique, soit ils sont votés et autant y renoncer.
Je voterai quant à moi ces amendements de suppression, qui plus est parce que je suis opposé à ce texte .
(Sourires)
Le placement sous surveillance électronique mobile n'est pas anodin. Nous avons besoin d'une sécurité juridique et nous ne sommes pas là pour faire n'importe quoi. Pourquoi les services de renseignement ne sont-ils pas demandeurs ? Parce qu'un individu surveillé vingt-quatre heures sur vingt-quatre ne présente plus aucun intérêt alors que celui qui ne l'est pas peut être physiquement suivi.
La Commission adopte ces amendements.
Elle examine, en discussion commune, les amendements CL3 de M. Éric Diard et CL21 de M. Éric Ciotti.
Cet amendement ultra-répressif vise à ajouter une mesure de sûreté à l'encontre des auteurs d'infractions terroristes puisqu'il s'agit de leur interdire certains emplois publics ou privés visés à l'article L. 114-1 du code de la sécurité intérieure.
Mon amendement s'inscrit dans la lignée de celui de M. Diard et des remarquables propositions qu'il a formulées au terme de la mission qu'il a menée avec Éric Poulliat, de même que des conclusions de la commission d'enquête sur les dysfonctionnements ayant conduit aux attaques commises à la préfecture de police de Paris le 3 octobre 2019, approuvées à l'unanimité.
Ce sont 806 personnes qui sont inscrites sur le fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT) et qui travaillent dans une profession sensible. Dans le public ou le privé, elles ne doivent pas pouvoir exercer. Finissez-en avec le « en même temps » au lieu de prendre des mesures gadgets !
Les choses sont très claires : les personnes condamnées pour des faits de terrorisme ne peuvent pas accéder à ce type d'emplois. Les articles 422-3 et 131-26-2 du code pénal prévoient déjà une peine complémentaire emportant interdiction ou incapacité d'exercer une fonction publique. Je ne reviens pas sur l'enquête administrative. Enfin, l'article 5 du statut général de la fonction publique indique que nul ne peut avoir la qualité de fonctionnaire si les mentions portées au bulletin n° 2 de son casier judiciaire sont incompatibles avec l'exercice des fonctions. Vos amendements sont satisfaits. Avis défavorable.
Ces deux amendements n'ont pas exactement la même portée.
Nous considérons que des personnes condamnées pour de tels faits ne doivent pouvoir accéder à aucun emploi public.
Par ailleurs, un certain nombre de missions sensibles de surveillance ou de sécurité, par exemple sur des sites classés SEVESO, relèvent d'emplois privés et de telles personnes ne doivent pas pouvoir y prétendre non plus.
L'article L.114-1 du code de la sécurité intérieure vise déjà les emplois publics ou privés. Une plus grande vigilance n'implique pas d'empiler les dispositifs.
La Commission rejette successivement les amendements.
Elle examine l'amendement CL50 de la rapporteure.
Cet amendement très utile, auquel mon homologue du Sénat est avec raison attaché, vise à intégrer dans le dispositif une nouvelle obligation. Il s'agit du dispositif PAIRS, programme d'accompagnement individualisé et de réaffiliation sociale qui peut s'étendre de trois à vingt heures par semaine. Cette prise en charge sanitaire, sociale, éducative ou psychologique me semble indispensable pour poursuivre le travail de déradicalisation après la peine. Le magistrat pourra prononcer cet accompagnement s'il le juge utile. Vous le voyez, cette proposition de loi n'est pas vidée de sa substance, bien au contraire !
Je ne suis pas sûr que vous nourrissiez ce texte avec cet amendement. Il faut évidemment user de tous les moyens pour réinsérer les détenus radicalisés qui le peuvent mais tous ne sont pas dans cet état d'esprit et ce sont eux qui soulèvent des problèmes, qui s'opposent de toute façon à la République, à la France, à l'État de droit, à nos valeurs.
La Commission adopte l'amendement.
Elle examine, en discussion commune, l'amendement CL9 de Mme Marie-France Lorho et les amendements identiques CL17 de M. Éric Ciotti et CL30 de M. Dimitri Houbron.
Il me semble plus raisonnable de laisser aux mains de l'autorité judiciaire compétente la possibilité de déterminer le temps d'application des mesures de sûreté à la personne dangereuse. Si j'entends la nécessité pour les auteurs de cette proposition de loi de donner un cadre temporel normatif à ces mesures, il apparaît plus légitime de laisser les autorités ayant évalué la dangerosité particulière de la personne déterminer combien de temps celle-ci doit être contrainte aux mesures de sûreté la concernant. Tel est l'objectif de l'amendement CL9.
L'amendement CL17 vise à porter à deux ans la durée maximale durant laquelle des mesures de sûreté peuvent être ordonnées, ce qui nous paraît relever d'une volonté de protection plus forte, plus ambitieuse et, disons-le, plus courageuse.
En vertu de l'article R. 53-8-44 du code de procédure pénale, une surveillance de sûreté d'une durée de deux ans peut être prononcée et, le cas échéant, renouvelée par la juridiction régionale de la rétention de sûreté à la suite d'une surveillance judiciaire, d'un suivi socio-judiciaire ou d'une rétention de sûreté.
Du fait que la présente proposition de loi dessine un régime, certes plus restrictif, mais pour des individus présentant un degré de dangerosité particulièrement élevé, le présent texte doit se calquer sur la même variable temporelle que celle du régime appliqué pour les personnes condamnées pour meurtre, torture, viol ou enlèvement. Tel est l'objectif de l'amendement CL30.
Je précise que nous avons déposé un autre amendement proposant que la personne concernée puisse, au bout d'un an, demander une réévaluation de sa situation, et que ces deux propositions complémentaires l'une de l'autre aboutissent à une situation que le Conseil constitutionnel devrait juger équilibrée.
J'ai hésité sur la durée des mesures prononcées par la juridiction, qui constitue un équilibre fragile. L'essentiel pour qu'une mesure de sûreté soit considérée comme équilibrée, c'est le caractère réexaminable de la situation et son caractère non définitif – il faut qu'il y ait des réévaluations périodiques. J'ai opté pour une durée d'un an, étant précisé qu'il est procédé durant la détention de la personne à une première évaluation, beaucoup plus approfondie que les autres. L'équilibre constitutionnel me semble atteint avec ce dispositif. Nous pourrons en débattre en séance publique mais, pour le moment, je préfère que nous en restions à une surveillance de sûreté d'un an.
L'amendement CL30 est retiré.
La Commission rejette successivement l'amendement CL9 et l'amendement CL17.
Elle est saisie, en discussion commune, des amendements CL52 de la rapporteure et CL28 de M. Dimitri Houbron.
Cet amendement de cohérence établit la compétence de la juridiction régionale de la rétention de sûreté de préférence à celle du tribunal de l'application des peines et précise que l'avis de la commission doit être sollicité pour chaque renouvellement.
La Commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'amendement CL28 tombe.
La Commission examine les amendements identiques CL22 de Mme Paula Forteza et CL38 de M. Raphaël Gauvain.
Le texte prévoit que les mesures de sûreté s'appliquent dans le cas d'une infraction répondant à la qualification d'un délit puni par une peine inférieure à dix ans d'emprisonnement, un niveau qui nous semble trop élevé et que nous proposons de ramener à cinq ans.
L'amendement identique CL38 vise à adapter la durée maximale totale des mesures de sûreté prévues. Il est proposé de la ramener à cinq ans, au lieu de dix dans la proposition initiale, et à dix ans lorsque les faits commis par le condamné constituent un crime ou un délit puni de dix ans d'emprisonnement, au lieu de vingt ans dans la proposition. Nous conserverions une claire distinction entre ce qui est de nature délictuelle et ce qui est de nature criminelle.
Je suis favorable à ces amendements qui reprennent l'esprit des préconisations du Conseil d'État en proposant une réduction sensible de la durée des mesures de sûreté – cette durée restant toutefois suffisamment importante.
La Commission adopte ces amendements.
Elle est saisie de l'amendement CL51 de la rapporteure.
Reprenant une préconisation du Conseil d'État, l'amendement CL51 vise à diminuer la durée maximale de prononcé des mesures de sûreté lorsque le condamné est mineur. Il est proposé que cette durée passe à trois ans en cas de délit terroriste et à cinq ans en cas de crime.
La Commission adopte l'amendement.
Elle examine, en discussion commune, les amendements identiques CL23 de Mme Paula Forteza et CL45 de M. Raphaël Gauvain, ainsi que l'amendement CL24 de Mme Paula Forteza.
L'amendement CL23 propose de faire passer la durée maximale de la mesure de sûreté en matière criminelle de vingt ans à dix ans maximum.
L'amendement de repli CL24 propose de faire passer la durée maximale de la mesure de sûreté en matière criminelle de vingt ans à quinze ans maximum.
La Commission adopte ces amendements
En conséquence, l'amendement CL24 tombe.
La Commission est saisie de l'amendement CL31 de M. Dimitri Houbron.
L'amendement est retiré.
La Commission examine l'amendement CL53 de la rapporteure.
Cet amendement répond à une recommandation du Conseil d'État, qui a souhaité prévenir le risque de superposition de dispositifs judiciaires sur un même condamné. Pour cela, il vise à insérer à l'alinéa 18, après le mot « moyen », le mot « judiciaire ».
La Commission adopte l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CL10 de Mme Marie-France Lorho.
Cet amendement de précision vise à conditionner l'application strictement nécessaire des mesures de sûreté à la commission des infractions mentionnées à l'alinéa 18, mais également à leur réitération. Si la personne condamnée est en situation de récidive, il paraît évident que la répétition de son acte doit constituer un motif inconditionnel d'application de telles mesures de sûreté. S'il se peut qu'une telle affirmation soit comprise tacitement dans la locution « commission de l'infraction », il semble plus sage de faire apparaître directement la réitération des infractions comme une condition à la nécessaire application de telles mesures.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CL26 de Mme Paula Forteza.
L'amendement CL26 visait à conditionner la mise en place des mesures de sûreté à un suivi socio-judiciaire, mais il a été satisfait par un amendement de la rapporteure que nous avons examiné précédemment. Par conséquent, je le retire.
L'amendement est retiré.
La Commission est saisie de l'amendement CL33 de Mme Danièle Obono.
Cet amendement d'appel vise à contester le recours à la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté. Vous vous êtes efforcée de nous convaincre, lors de votre propos liminaire, que le texte ne prévoyait pas des peines, mais des mesures de sûreté, faisant par ailleurs l'objet d'un examen par une commission pluridisciplinaire, censé garantir le respect du principe du contradictoire. Or, dans les faits, il est très rare que cette commission reçoive la personne détenue : peut-être permet-elle que différents professionnels aient un droit de regard sur la décision prise, mais elle n'assure en rien le respect du principe du contradictoire, qui suppose que la personne concernée puisse elle-même faire valoir son point de vue – ce qui n'est pas le cas.
Comme vous le savez très bien, c'est la procédure qui doit être contradictoire, et elle l'est. J'émets donc un avis défavorable à cet amendement.
J'ai parfaitement compris que les commissions pluridisciplinaires n'ont pas vocation à garantir le respect du contradictoire, et c'est bien ce que je dénonce ! Par ailleurs, ces commissions se prononcent essentiellement sur la notion de dangerosité, qui n'est que très vaguement définie. La contrôleure générale des lieux de privation de liberté s'est elle-même interrogée au sujet de leur capacité à démontrer une dangerosité, alors que la décision prise à ce sujet est lourde de conséquences pour les personnes sortant de détention, qui se voient imposer des mesures restrictives de liberté.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CL54 de la rapporteure.
Lors des auditions que nous avons effectuées, la présidente d'une juridiction de sûreté nous a indiqué que le délai de trois mois était trop bref pour procéder à l'examen des situations, c'est pourquoi je vous propose de le porter à six mois.
A-t-on vraiment mesuré quel serait l'impact d'un doublement du délai ? Une telle mesure est-elle compatible avec le contexte d'urgence, qui impose d'examiner rapidement un grand nombre de dossiers ?
Techniquement, il faut du temps pour examiner un dossier, mais votre argument est pertinent, et j'admets que nous devons également faire en sorte de nous doter le plus rapidement possible d'un dispositif opérationnel. Je retire mon amendement pour réexaminer cette question en vue de la séance publique.
Il faut faire effectuer un examen, réunir la commission pluridisciplinaire et procéder à une évaluation globale durant six semaines, ce à quoi un délai de trois mois ne suffit pas toujours. Peut-être la solution consistera-t-elle à retenir un délai de six mois pour l'avenir, mais un délai plus court durant une période transitoire – par exemple, jusqu'à la fin de l'année 2020 –, afin de rendre le dispositif opérationnel le plus rapidement possible. Je vous propose de travailler en ce sens.
L'amendement est retiré.
La Commission est saisie de l'amendement CL55 de la rapporteure.
Conformément à une suggestion du Conseil d'État – et aux préoccupations exprimées par M. Bernalicis –, le présent amendement précise que la commission pluridisciplinaire adresse à la juridiction régionale de la rétention de sûreté et au condamné un avis motivé sur la particulière dangerosité de celui-ci.
La Commission adopte l'amendement.
Elle adopte l'amendement de cohérence CL56 de la rapporteure.
En conséquence, l'amendement CL29 tombe.
La Commission est saisie de l'amendement CL57 de la rapporteure.
Le présent amendement poursuit deux objectifs. En premier lieu, conformément à une suggestion du Conseil d'État, il mentionne explicitement la possibilité pour la juridiction de mettre fin aux mesures de sûreté dès lors qu'elle l'estime nécessaire, même en dehors de l'échéance annuelle de renouvellement. En second lieu, il précise les règles selon lesquelles le condamné peut solliciter la modification ou la mainlevée des mesures de sûreté, ce qui est essentiel pour la philosophie du dispositif et sa sécurité juridique.
Si nous ne sommes pas opposés au principe du dispositif proposé, la durée d'un an nous paraît un peu courte. Il faut espérer que la rédaction actuelle, qui ne prévoit pas de délai de carence entre deux demandes, ne va pas conduire à un engorgement de l'administration chargée du suivi.
La Commission adopte l'amendement.
Elle examine l'amendement CL58 de la rapporteure.
Cet amendement vise à préciser les voies de recours de la décision de la juridiction régionale de la rétention de sûreté de Paris, et à permettre que les mesures de sûreté ordonnées soient suspendues dans le cas d'une détention de plus de six mois pour des faits de droit commun.
La Commission adopte l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CL59 de la rapporteure.
L'amendement CL59 autorise le Gouvernement à déterminer par décret en Conseil d'État les détails de la procédure créée par la proposition de loi, notamment en ce qui concerne la composition de la commission pluridisciplinaire.
La Commission adopte l'amendement.
Elle adopte l'article unique modifié.
Après l'article unique
La Commission examine l'amendement CL19 de M. Éric Ciotti.
Cet amendement vise à inverser le principe s'appliquant au suivi socio-judiciaire des condamnés en matière de terrorisme, en rendant ce suivi systématique et en permettant au juge de le lever s'il l'estime inutile. Un tel dispositif nous semble beaucoup plus adapté à la nature des infractions visées et au caractère particulièrement dangereux des détenus concernés.
Je comprends la préoccupation consistant à renforcer le suivi des personnes condamnées pour terrorisme, mais je suis très défavorable à la systématisation des peines, car j'estime qu'il faut laisser les magistrats apprécier souverainement chaque situation. Les spécialistes du terrorisme nous ont expliqué qu'il existait une difficulté dans les affaires criminelles où sont prononcées des peines très longues, car personne ne parvient à se représenter le condamné à une échéance de quinze ou vingt ans.
Cet amendement laisse au juge la latitude de ne pas prononcer le suivi socio-judiciaire. Par ailleurs, s'agissant d'une peine dont la nature particulière nécessite la mise en place d'un accompagnement, notre amendement vise à rendre plus efficace le dispositif ayant vocation à s'appliquer aux futures condamnations pour actes de terrorisme, alors que votre proposition de loi concerne les peines déjà prononcées – cela pour tenter de rattraper le retard pris dans un domaine où notre groupe alerte la représentation nationale depuis des mois.
La Commission rejette l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CL12 de M. Éric Ciotti.
Cet amendement vise à rendre applicable aux personnes condamnées pour un crime terroriste le dispositif de la rétention de sûreté, qui permettra de les maintenir en détention à l'issue de leur peine si elles continuent de présenter une forte dangerosité. Puisque la rétention de sûreté peut déjà s'appliquer à certains crimes, notamment les viols, il est logique qu'elle concerne aussi les actes de terrorisme, qui sont sans doute les plus dangereux pour l'ensemble de la société.
Le dispositif que nous proposons est immédiatement opérationnel et me semble beaucoup plus satisfaisant que celui qui résulterait de votre amendement. La rétention de sûreté pour les actes de terrorisme se heurte à une difficulté majeure, à savoir son absence de rétroactivité, qui fait qu'elle ne pourrait s'appliquer à tous les détenus qui vont faire l'objet d'une libération dans les prochains mois. J'émets donc un avis défavorable à votre amendement.
L'amendement de notre collègue Ciotti ne procède pas à la réécriture de votre texte, mais porte un article additionnel après l'article unique qui vient d'être adopté. Complémentaire de votre dispositif, il vise à son extinction pour les peines futures, auxquelles s'appliquerait la rétention de sûreté.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine, en présentation commune, les amendements CL1 et CL2 de M. Éric Diard.
Il faut faire preuve d'un peu de courage politique : la rétention de sûreté n'est pas inconstitutionnelle et, si elle avait été étendue dès la loi du 25 février 2008 aux actes de terrorisme, cela nous aurait facilité la vie ! Il y a des attentats en France depuis de nombreuses années et je crains malheureusement qu'il y en ait encore, c'est pourquoi nous devons absolument introduire dans cette proposition de loi la rétention de sûreté pour les crimes terroristes. Tel est l'objet de ces amendements.
Avis défavorable. J'en profite pour dire à M. Schellenberger, qui affirme que les députés du groupe Les Républicains nous alertent depuis des mois, que lui et ses collègues auraient pu utiliser les journées qui leur sont réservées pour inscrire l'une de leurs propositions à l'ordre du jour, ce qu'ils n'ont pas fait. Nous sommes tous d'accord sur la nécessité de renforcer notre arsenal juridique et je ne pense donc pas opportun de nous chamailler pour savoir qui a été le premier a faire une proposition sur ce point : l'important est d'avancer et de faire collectivement les choses du mieux que nous pouvons.
Lorsque des textes contribuant à la sécurité des Français ont été présentés par d'autres groupes que le nôtre, nous les avons soutenus – beaucoup plus souvent que la majorité n'a voté les textes présentés dans le cadre des niches qui nous étaient réservées ! Ce que je voulais dire tout à l'heure, c'est que nous avons du mal à aller aussi loin que nous le voudrions parce que nous sommes contraints par le temps et par le risque d'une censure du Conseil constitutionnel. Je rappelle que notre excellent collègue Éric Diard a mené sur les sujets qui nous occupent aujourd'hui des travaux reconnus pour leur qualité, obtenu la constitution de missions d'information et fait des propositions intéressantes. Vous pouvez donc difficilement nous reprocher de ne pas avoir travaillé sur ces sujets. Aujourd'hui, en tant que groupe majoritaire, vous disposez de fait de l'essentiel de l'initiative législative, et vous avez la fâcheuse tendance à rejeter tout ce que nous proposons.
Je ne suis pas d'accord avec vous, monsieur Diard, quand vous dites que la rétention de sûreté ne pose pas de problème en termes de constitutionnalité – d'ailleurs, si j'ai bonne mémoire, le texte que vous aviez présenté à ce sujet était une proposition de loi constitutionnelle.
Pour ce qui est de l'efficacité, il se trouve que la rétention de sûreté n'existe dans aucun autre État européen comparable à la France. La dernière fois qu'elle a été mise en œuvre, c'était en Irlande au début des années 1970, afin de faire face aux attentats de l'IRA – et ce dispositif a été abandonné au bout de quelques mois, ayant démontré qu'il était totalement inopérant.
J'invite M. Gauvain à comparer ce qui est comparable, en l'occurrence à se pencher sur les attentats terroristes commis dans les différents pays d'Europe, il trouvera sans doute cela très instructif.
La Commission rejette successivement les amendements.
Elle est saisie de l'amendement CL34 de M. Ugo Bernalicis.
Cet amendement vise à ce que la décision de classement d'une personne en TIS ou en DCSR fasse l'objet d'une audience spéciale en commission pluridisciplinaire unique en présence de l'intéressé, afin de garantir le respect du principe du contradictoire. En effet, les classements TIS et DCSR ne relèvent pas uniquement du renseignement, mais ont des conséquences en matière de détention : par exemple, les détenus concernés font l'objet de ce qu'on appelle une « gestion menottée » impliquant un port de menottes beaucoup plus fréquent que pour les autres détenus.
Je rappelle que le champ de la proposition de loi est celui des détenus condamnés pour acte de terrorisme et qu'il ne concerne donc pas les détenus DCSR.
Quant au classement en TIS, il résulte directement de la nature de l'infraction commise. Les détenus placés en quartiers de prise en charge de la radicalisation (QPR) et en quartiers d'évaluation de la radicalisation (QER) le sont dans le cadre d'une procédure définie réglementairement et respectant le principe du contradictoire. Votre amendement étant en grande partie satisfait, j'y suis défavorable.
Il est heureux que cet amendement soit satisfait pour les QPR et les QER, qui impliquent que les détenus soient transférés dans un quartier à part ! Je vous confirme qu'il vise les détenus n'entrant pas dans ces catégories mais qui, du fait de leur classement TIS ou DCSR, se voient opposer un refus d'aménagement de peine ou d'accès à certaines activités en détention – ce qui me semble porter atteinte à notre objectif commun de prévention de la récidive, car le respect du principe du contradictoire contribue à ce que la peine soit mieux comprise et mieux acceptée par le détenu.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CL35 de Mme Danièle Obono.
Cet amendement vise à permettre à la représentation nationale de bénéficier d'un rapport exhaustif sur les différents programmes de prévention de la radicalisation violente mis en place par l'administration pénitentiaire, ainsi que sur leurs conclusions. Cela nous permettra de disposer d'éléments tangibles et objectifs sur l'efficacité des différents dispositifs existants, et d'éviter d'avoir à débattre à l'aveuglette sur des sujets particulièrement délicats, car touchant aux libertés.
L'évaluation est l'une des trois missions constitutionnelles du Parlement. Vous pouvez saisir la commission des lois d'une demande d'évaluation, son bureau l'examinera avec la plus grande attention. Avis défavorable.
La possibilité de présenter une demande d'évaluation n'exclut pas celle que l'exécutif rende lui-même un rapport, j'en veux pour preuve que vous aviez prévu dans le cadre de la loi SILT que le ministre de l'intérieur nous rende un rapport tous les ans – ce qui a d'ailleurs été l'occasion d'un beau cafouillage, avec l'envoi d'une première version qui n'était pas la bonne... Le fait que vous repoussiez l'idée d'un rapport rendu par l'exécutif me semble aussi incompréhensible qu'inquiétant, car il va se trouver lui-même dans l'incapacité de disposer d'éléments d'information objectifs : que vont pouvoir dire les ministres interrogés à ce sujet s'ils n'ont pas ces éléments ?
La Commission rejette l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CL36 de M. Ugo Bernalicis.
L'amendement CL36 vise à ce que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur l'accès aux activités de réinsertion des personnes détenues mises en cause dans des affaires classées TIS ou DCSR.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CL37 de Mme Danièle Obono.
Si je peux admettre que vous me suggériez de faire une demande d'évaluation, madame la rapporteure, je m'inquiète un peu à l'idée que vous fassiez voter la mise en place de mesures de sûreté sans disposer vous-même d'éléments d'information objectifs à ce sujet.
L'amendement CL37 vise à ce que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur les conséquences – notamment en matière de prévention de la récidive – de l'isolement sur les personnes détenues mises en cause dans des affaires classées TIS ou DCSR. L'isolement augmentant l'agressivité du détenu et sa dangerosité, il serait bon de connaître ses effets avec précision afin d'être en mesure d'adapter éventuellement les dispositions appliquées aux détenus concernés.
La Commission rejette l'amendement.
J'ai dit lors de la discussion générale que le groupe Les Républicains était a priori favorable à cette proposition de loi. Celle-ci ayant été vidée de sa substance, elle est devenue purement cosmétique, c'est pourquoi nous avons finalement décidé de nous abstenir.
La Commission adopte l'ensemble de la proposition de loi modifiée.
La réunion se termine à 12 heures 50.
Information relative à la Commission
La Commission a désigné M. Guillaume Vuilletet rapporteur sur le projet de loi organique portant report des élections sénatoriales et des élections législatives partielles (n° 3121).
Membres présents ou excusés
Présents. - Mme Bérangère Abba, M. Jean-Félix Acquaviva, M. Ugo Bernalicis, Mme Yaël Braun-Pivet, M. Vincent Bru, M. Éric Ciotti, M. Éric Diard, Mme Coralie Dubost, Mme Nicole Dubré-Chirat, M. Raphaël Gauvain, M. Guillaume Gouffier-Cha, M. Dimitri Houbron, Mme Élodie Jacquier-Laforge, Mme Marie-France Lorho, M. Stéphane Mazars, M. Ludovic Mendes, M. Jean-Michel Mis, M. Didier Paris, Mme George Pau-Langevin, M. Pierre Person, M. Stéphane Peu, M. Bruno Questel, M. Rémy Rebeyrotte, M. Pacôme Rupin, M. Raphaël Schellenberger, M. Jean Terlier, M. Arnaud Viala, Mme Laurence Vichnievsky, M. Guillaume Vuilletet, Mme Hélène Zannier
Excusés. - Mme Émilie Guerel, Mme Marietta Karamanli, Mme Emmanuelle Ménard, Mme Valérie Oppelt, M. Jean-Pierre Pont
Assistaient également à la réunion. - M. Xavier Breton, M. Pierre Cordier, M. Fabien Di Filippo, Mme Paula Forteza, M. Christophe Naegelen, M. Jean-Pierre Vigier, M. Jean-Marc Zulesi