Présidence de
M. Éric Woerth,
Président
La commission poursuit l'examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2020 (n° 2272) (M. Joël Giraud, rapporteur général).
Après l'article 2 (suite)
La commission est saisie de l'amendement I-CF1430 de M. Éric Coquerel.
L'amendement I-CF1430 a pour objet de supprimer l'abattement de 40 % sur les dividendes. La France est le pays d'Europe où les entreprises cotées en bourse reversent la plus grande part de leurs bénéfices sous cette forme. La manne versée aux actionnaires s'y élève à 51 milliards de dollars, très loin devant l'Allemagne et le Royaume-Uni. Cette appropriation par le capital de la richesse créée par le travail contribue à accroître considérablement les inégalités, en France comme dans le monde.
Rien ne saurait justifier l'accroissement supplémentaire des inégalités par un abattement de 40 % sur les dividendes. C'est la raison pour laquelle nous proposons de supprimer celui-ci.
Avis défavorable, comme l'année dernière et la précédente, puisqu'il s'agit d'un marronnier que nous avons déjà étudié plusieurs fois. L'abattement de 40 % sur les dividendes se justifie par le fait que les bénéfices distribués ont déjà subi un impôt et qu'il a succédé à l'avoir fiscal de 50 %.
La commission rejette l'amendement I-CF430.
Elle examine ensuite l'amendement I-CF62 de Mme Véronique Louwagie.
L'amendement I-CF62 s'inscrit dans le cadre du financement de la dépendance. Il a pour objet de sortir de l'assiette de l'impôt sur le revenu les rentes viagères des personnes bénéficiaires de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), qui ont besoin de l'aide constante d'une tierce personne pour rester à domicile ou qui sont hébergées dans un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) du fait de leur perte d'autonomie.
En envisageant une exonération uniquement au moment où survient la dépendance, le dispositif encourage les personnes à souscrire des rentes viagères. À l'heure actuelle, certaines personnes disposant de rentes viagères doivent payer l'impôt sur le revenu alors qu'elles ont des difficultés à financer les coûts mensuels de l'EHPAD. Le dispositif pourrait leur apporter des solutions pour surmonter les périodes où elles sont en difficulté.
Cet amendement est louable mais pose plusieurs problèmes.
D'abord, l'APA n'est pas attribuée sous condition de ressources. L'amendement ne posant pas de condition de ressources non plus, il en résulterait une exonération totale d'une rente qui peut bénéficier à des contribuables déjà assez aisés.
Ensuite, l'amendement n'est pas chiffré.
Enfin, si l'on ne peut qu'être sensible à votre intention, on peut se demander s'il revient vraiment à la fiscalité de traiter ce problème. Les solutions ne doivent-elles pas plutôt relever d'un débat global sur le financement de la dépendance ? Nous avons en France le travers de créer des dépenses fiscales supplémentaires pour traiter les problèmes.
Avis défavorable.
Monsieur le rapporteur général, vous pouvez sous-amender cet amendement pour le conditionner à des niveaux de ressources. Vous avez raison, il faut une vision globale du dispositif, mais elle n'existe pas aujourd'hui. C'est pourquoi j'ai déposé cet amendement.
La commission rejette l'amendement I-CF62.
Elle se penche sur l'amendement I-CF465 de M. Philippe Vigier.
Nous souhaitons revenir sur la suppression définitive de la demi-part fiscale accordée aux veufs et veuves, qui avait rendu imposables 2 millions de personnes sur les 3,6 millions de retraités bénéficiant de cette demi-part. Alors que des efforts ont été consentis pour certaines couches de notre société – je pense notamment aux mesures visant à satisfaire les gilets jaunes –, il importe de répondre aux retraités qui ont vu leurs revenus diminuer sensiblement.
Monsieur le président connaît bien cet amendement puisque nous l'avions déjà déposé lorsqu'il était en fonction, avec un système qui permettait une dégressivité.
La forêt de marronniers a prospéré, puisqu'elle a été plantée dès 2009. Les arbres sont maintenant très hauts !
Nous avons suffisamment débattu de ce sujet. Mon avis est défavorable. Je rappelle que nous accordons une importante réduction d'impôts cette année, qui bénéficiera aussi aux contribuables visés par l'amendement.
Je partage votre avis sur l'ancienneté des marronniers. Pour ce qui est de la baisse d'impôts, nous ouvrirons à nouveau le débat en séance.
La commission rejette l'amendement I-CF465.
Elle en vient à l'amendement I-CF1116 du président Éric Woerth.
Cet amendement vise à relever le plafond du quotient familial à 1 800 euros dès le premier enfant à charge.
Comme tout à l'heure, pour des amendements de même nature, j'estime que cet amendement profite surtout aux familles les plus aisées. Nous avons choisi de mettre en place une baisse qui profitera à toutes les familles, aisées ou plus modestes. À mon grand regret, l'avis sera défavorable.
L'amendement ne touche pas uniquement les catégories aisées, qui paient déjà beaucoup d'impôts.
La commission rejette l'amendement I-CF1116.
Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements I-CF253 et I-CF387 de M. Nicolas Forissier.
Ces amendements poursuivent le même objectif, mais diffèrent techniquement par la hauteur des plafonds.
Je précise à monsieur le rapporteur général qu'il ne s'agit pas de marronniers mais de châtaigniers, d'Ardèche ou du Berry, ce qui me paraît bien plus noble. Ces châtaigniers apportent une réponse à la suppression de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), que j'ai votée, comme d'autres ici. Cette mesure a supprimé un dispositif qui permettait de drainer énormément d'argent vers les petites et moyennes entreprises (PME) et les très petites entreprises (TPE). L'ISF-PME, je le rappelle, représentait 1,2 milliard de recettes pour les entreprises.
Je ne suis pas persuadé que la recette asséchée par la suppression de l'ISF-PME ait été réellement compensée, d'autant que la création d'un impôt sur la fortune immobilière pour les PME (IFI-PME), qui aurait pu y pourvoir, a été refusée. Je propose donc à nouveau de renforcer le dispositif IR-PME, qui porte sur l'impôt sur le revenu, en augmentant les plafonds et en essayant d'être dans l'esprit de ce qui existe dans plusieurs autres pays, notamment l'Angleterre, avec les organismes de placement, les investment schemes, qui sont extrêmement efficaces.
Les entreprises en amorçage, les petites entreprises de territoire, les PME ont souvent un cap à franchir, lorsqu'elles se développent. Or elles rencontrent fréquemment des difficultés pour obtenir des financements auprès des banques. Le fait d'encourager les investisseurs providentiels, ou business angels, pourrait fournir une part de la réponse. Tel est l'objectif de ces deux amendements.
Dans le cadre des travaux de préparation du projet de loi de finances (PLF), j'ai demandé au Gouvernement où en était l'IR-PME. En effet, la réponse de Bruxelles semblait se faire attendre. Le Gouvernement m'a autorisé à rendre public qu'il déposera un amendement en seconde partie du PLF pour présenter un dispositif sur ce sujet. Je n'en connais pas la nature à l'instant où je vous parle.
Actuellement, pour renforcer le dispositif, il faudrait à nouveau le notifier à la Commission européenne. Le dispositif initial ne l'avait pas été, et Bruxelles s'en était aperçu lorsqu'il avait été modifié. Par pitié, ne le modifions pas pour ne pas repartir pour un round de négociations avec la Commission européenne !
D'ici à la seconde partie du PLF, le Gouvernement doit proposer un dispositif sur l'IR-PME. Je propose à toutes celles et ceux qui souhaitent que nous légiférions dès à présent de retirer ces amendements, en attendant cette proposition, quitte à l'amender par la suite.
Si je comprends bien, le Gouvernement propose un amendement, donc apporte une réponse à la demande de Bruxelles. On peut espérer que l'amendement gouvernemental renforce un peu le dispositif.
Je ne peux pas vous répondre. Nous étudierons ensemble la proposition, et serons alors à même de la juger. Nous pourrons éventuellement sous-amender.
On attend donc la récolte des châtaignes, en espérant qu'elle soit bonne.
Faisant toute confiance à M. le rapporteur général, je retire ces amendements.
Les amendements I-CF253 et I-CF387 sont retirés.
L'amendement I-CF1023 de M. Jean-Noël Barrot est retiré.
La commission examine l'amendement I-CF267 de M. Nicolas Forissier.
L'article 199 du code général des impôts permettait aux contribuables de bénéficier d'une réduction de leur impôt sur le revenu égale à 25 % du montant des intérêts des emprunts contractés pour acquérir, dans le cadre d'une opération de reprise, une fraction du capital d'une PME. Il est proposé que ces dispositions s'appliquent jusqu'au 31 décembre 2022 au lieu du 31 décembre 2011. La mesure existante étant très efficace, elle doit être prolongée.
On exhume là un dispositif ancien, abandonné au profit d'autres dispositifs qui aident les souscripteurs à entrer au capital de PME, notamment le dispositif Madelin, dont il a été question à l'instant.
Votre proposition, en première partie du PLF, conduirait à un effet d'aubaine pour tous les emprunts contractés depuis 2012. J'y suis donc défavorable et je demande le retrait de l'amendement. De tels effets d'aubaine sur autant d'années, ce n'est pas raisonnable.
Cet amendement résulte d'un travail commun avec le Sénat. Je dirai aux sénateurs, de votre part, qu'ils proposent des effets d'aubaine.
On ne peut pas soutenir cet amendement, qui est accessoire au regard des taux d'intérêt actuels. Il existe d'autres moyens, notamment la création de sociétés holding. Cette voie ne semble donc pas opérante.
L'amendement I-CF267 est retiré.
L'amendement I-CF1028 de Mme Sarah El Haïry est retiré.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission rejette l'amendement I-CF131 de M. Damien Abad.
Elle en vient à l'amendement I-CF1035 de M. Jimmy Pahun.
Cet amendement de mon collègue Jimmy Pahun vise à valoriser les modes de propulsion entièrement décarbonés. L'avantage fiscal qu'il propose enverrait un signal aux chantiers qui construisent des navires utilisant ce mode de propulsion.
Afin d'éviter un effet d'aubaine, je vous suggère de déposer cet amendement en seconde partie du texte. Il est difficile d'avoir un débat sur un amendement créant un tel effet d'aubaine.
L'amendement I-CF1035 est retiré.
La commission examine l'amendement I-CF1301 de M. Olivier Serva.
L'amendement vise à rétablir le dispositif d'incitation fiscale à l'investissement que prévoit l'article 199 du code général des impôts dans les collectivités relevant de l'article 73 de la Constitution, c'est-à-dire dans les départements d'outre-mer, en le centrant uniquement sur les opérations de réhabilitation et de rénovation de logements, et en le réservant aux organismes de logement social (OLS) non bailleurs sociaux.
Pour éviter tout abus, la direction régionale des finances publiques et la direction de l'environnement, de l'aménagement et du logement encadreraient le dispositif, afin de s'assurer de la bonne utilisation des fonds et d'en réserver le bénéfice aux entreprises ayant obtenu l'agrément entreprise solidaire d'utilité sociale (ESUS), à partir de 2020.
Même punition : on ne peut pas changer les règles du jeu en cours d'année. C'est un débat que nous pourrons mener lors de la discussion sur la seconde partie du PLF, mais en aucun cas en première partie. Si monsieur Serva le souhaite, il pourra déposer à nouveau son amendement en seconde partie.
L'amendement I-CF1301 est retiré.
La commission en vient à la discussion de l'amendement I-CF1209 de Mme Christine Pires Beaune.
L'amendement ne crée pas de nouvelle déduction fiscale ou de nouveau crédit d'impôt, mais vise à rétablir un peu de justice. Aujourd'hui, le reste à charge moyen d'un hébergement en EHPAD est bien supérieur à celui d'un hébergement à domicile – plus de 1 800 euros contre 60 euros, selon le rapport Libault. Dans le second cas, les personnes bénéficient d'un crédit d'impôt, alors qu'il s'agit d'une réduction d'impôt dans le premier. Cela signifie qu'en EHPAD, les personnes les plus modestes ne reçoivent aucune aide fiscale.
L'idée est donc de transformer la réduction d'impôt en EHPAD en crédit d'impôt pour tous. La mesure a un coût : 675 millions d'euros. En revanche, 603 000 personnes étant hébergées en EHPAD contre 1,8 million de personnes à domicile, il est possible de financer entièrement cette transformation en excluant du crédit d'impôt à domicile les personnes dont le revenu fiscal de référence est supérieur à 42 000 euros.
Madame Pires Beaune, je vous prie, tout d'abord, de m'excuser de n'avoir pas trouvé le temps de vous rappeler pour discuter de ce sujet très intéressant.
Le tome II de l'annexe Évaluations des voies et moyens indique que la réduction d'impôt, qui a bénéficié à près de 466 000 ménages, devrait coûter 315 millions d'euros en 2020. Vous chiffrez la transformation en crédit d'impôt à 700 millions d'euros. Je vous remercie, d'ailleurs, d'avoir pris la peine de chercher à gager votre proposition. Je suis cependant opposé, non pas à l'amendement sur le fond, mais à ce gage, car le crédit d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile a une vocation plus large, celle de lutter contre le travail au noir.
Ce sujet a été récemment débattu, mais les propositions ont été retirées aussi vite qu'elles avaient été avancées. C'est la raison pour laquelle personne ne s'est jusqu'à présent aventuré à placer ce crédit d'impôt sous conditions de ressources.
L'avis n'est donc pas défavorable à l'amendement mais au gage, qui me semble particulièrement inapproprié.
Je comprends l'argument sur le travail au noir, et, précisément, je ne touche pas à l'exonération de cotisations sociales pour l'emploi à domicile, qui permet en effet de lutter contre celui-ci. Il me semble donc que le gage reste acceptable, car le reste à charge est estimé à 60 euros par mois pour l'emploi à domicile. Lorsque l'on perçoit plus de 42 000 euros de revenus pour une part, on peut s'acquitter d'une telle somme.
A contrario, si l'on vit en maison de retraite et que l'on n'est pas imposable, un reste à charge moyen de 1 800 euros est difficilement supportable.
Avec cet amendement, nous abordons pour la seconde fois le financement de la dépendance. Je pense qu'il y aura bien d'autres amendements sur ce sujet. Nous tentons là de trouver des solutions à un vrai problème, que le Gouvernement ne s'est pas approprié jusqu'à présent.
Si je suis tout à fait favorable à la transformation de cette réduction d'impôt en crédit d'impôt, je serai plus mesurée sur la proposition de financement. Il faut que nous puissions travailler sur ce sujet, parce que nous avons un problème de financement de la dépendance. La voie fiscale peut être une réponse.
Avant de commencer à financer quoi que soit, il faut savoir ce que l'on finance et définir une politique. La ministre Agnès Buzyn présentera un texte devant le Parlement au premier semestre, voire au premier trimestre 2020. De plus, pour répondre à vos attentes, le projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui sera présenté demain en conseil des ministres, contient certaines dispositions concernant l'aide aux aidants ou les EHPAD. Ne commençons donc pas à financer des mesures sans connaître la photo d'ensemble de la politique de la dépendance.
Cette photo d'ensemble, nous la connaissons ! Nous avons tous des exemples, autour de nous ou dans nos circonscriptions, de citoyens vivant dans les EHPAD, qui ont des difficultés terribles pour financer leur hébergement : soit leur conjoint ne vit plus, car il doit consacrer les deux retraites du couple à ce financement, soit ce sont les enfants qui ne vivent plus. Soyons sérieux, n'allons pas relancer une convention, un grand débat, un groupe de travail. Cela suffit !
Aujourd'hui, nous savons que la dépendance pose un problème, et le Gouvernement n'en a pas pris la mesure. Ce ne sont pas les mesures du PLFSS qui apporteront une quelconque solution. Il faut être sérieux lorsque l'on parle d'un sujet qui touche autant de familles et crée autant de difficultés.
Je comprends les remarques de Cendra Motin. J'ai pu me procurer les chiffres des crédits et réductions d'impôt dans le cadre des rapports budgétaires. J'espère qu'ils sont exacts, car ils m'ont été communiqués par la direction générale des finances publiques.
Je le répète, une toute petite somme serait retirée à ceux qui touchent plus de 42 000 euros. Le financement serait possible, car 1,8 million de personnes sont hébergées à domicile, contre 600 000 en EHPAD.
Je veux soutenir cet amendement. Il suffit de peu de chose : par un impôt un tout petit peu plus juste, on peut financer une mesure qui constitue une avancée pour les personnes âgées et leurs familles.
J'en conclus, sans doute sous les huées, que tout ce qui ne vient pas de La République en marche n'est pas acceptable, même les bonnes propositions. La réalité, c'est qu'on ne peut pas bouger une virgule du texte. Prenez donc vos responsabilités, coupez le cordon ombilical avec le Château !
Monsieur Dufrègne, avec tout le respect que je vous dois, il n'y a jamais eu de cordon ombilical entre nous et le Château !
J'ai écouté avec attention les propos, toujours instructifs, de madame Pires Beaune. Sa proposition, bien que je ne la soutienne pas, est intéressante. Je soutiens, en revanche, ce qu'a dit madame Cendra Motin. Madame Dalloz, je vous ai aussi entendue. Ceux qui ont la chance d'avoir encore des parents ont et auront, comme nous tous, des préoccupations en matière de dépendance. C'est un problème lourd que, sur le plan politique, les majorités d'aujourd'hui comme celles de demain devront gérer.
Agnès Buzyn l'a dit – jusqu'à présent, elle a fait ce qu'elle a dit –, elle présentera un projet de loi de financement de la dépendance. Ce type de mesures, qui m'interpelle, a vocation à financer un tel projet de loi. Peut-être pouvons-nous nous rencontrer pour réfléchir à un autre véhicule, car celui-ci n'est pas le bon. Néanmoins, et je le dis sincèrement, au nom du groupe La République en marche, ce n'est pas parce que l'idée ne vient pas de nous que je ne la trouve pas intéressante.
Le projet de loi relatif à la dépendance trouvera toute sa justification. Il y aura, de toute façon, beaucoup plus à faire sur le reste à charge en EHPAD que ce que je propose. La transformation d'une réduction d'impôt en crédit d'impôt serait un premier pas, qui s'appliquerait dès l'année prochaine.
Je vous transmettrai les chiffres de la DGFIP ; ils vous permettront de réfléchir d'ici à la discussion en séance. Cet amendement ne remet pas en cause la nécessité d'une vraie loi sur la dépendance. J'aurais aimé avoir eu le temps d'interroger la ministre de la santé elle-même sur ce point, car la proposition ne peut qu'aller dans son sens.
Je maintiens cet amendement, que je compte déposer à nouveau en séance, s'il n'est pas adopté.
Combien représente cette « toute petite somme » qui permet de financer la transformation de la réduction d'impôt en crédit d'impôt ?
La moyenne du reste à charge pour une personne hébergée à domicile s'élève à 60 euros par mois, selon le rapport Libault qui présente les chiffres les plus récents. Elle concerne 1,8 million de foyers, un nombre élevé qui permettrait de financer les 300 000 personnes en EHPAD qui, aujourd'hui, n'ont rien, sachant que près de la moitié des 603 000 personnes hébergées en EHPAD est déjà concernée par une réduction d'impôt.
Vous prenez donc de l'argent à d'autres familles…
J'attends avec impatience un projet de loi sur la dépendance. Tous les Gouvernements en ont annoncé un, sans le présenter tant le sujet est complexe. On peut toujours faire des mesures d'aménagement et d'amélioration, mais est-on capable d'élaborer un vrai projet de loi ? Nous verrons.
La commission rejette l'amendement I-CF1209.
Elle examine l'amendement I-CF296 de M. Charles de Courson.
Dans la ligne des questions soulevées par madame Pires Beaune, je rappelle qu'une large part des personnes âgées hébergées en EHPAD subit l'effet négatif de l'augmentation de la contribution sociale généralisée (CSG) sans bénéficier de la compensation au titre du dégrèvement de la taxe d'habitation. En effet, dans certains EHPAD intégrés à un hôpital, on ne paie pas de taxe d'habitation, contrairement aux EHPAD privés. Nous avons parlé de ce sujet bien des fois.
Pour les personnes hébergées en EHPAD dont le revenu fiscal de référence est supérieur à 27 000 euros, l'augmentation de la réduction fiscale existante, promise par le Gouvernement dans le cadre du PLF 2018, permettra de compenser tout ou partie de la hausse de la CSG. Or une part significative de la population hébergée en EHPAD est constituée de personnes dont le revenu fiscal de référence est compris entre 14 750 euros et 27 000 euros. Pour celles-ci, l'augmentation de la réduction fiscale ne compense pas la hausse de la CSG, puisque cette partie de la population soit n'est pas assujettie à l'impôt sur le revenu, soit est redevable de l'IR pour un montant inférieur au montant de la réduction fiscale.
L'amendement I-CF296 a donc pour objet, dans un premier temps, d'augmenter le plafond de dépenses ouvrant droit à l'avantage fiscal, en le portant de 10 000 à 12 000 euros, ce qui porterait le montant de l'avantage fiscal de 2 500 à 3 000 euros, soit 500 euros supplémentaires.
Dans un second temps, il s'agirait de transformer la réduction d'impôt en crédit d'impôt pour les personnes qui ne sont pas imposables. Nous l'avons fait, il y a bien longtemps, en adoptant un de mes amendements visant les aides aux familles.
Avis défavorable pour des raisons de coût. Toujours selon le tome II de l'annexe Évaluations des voies et moyens, la réduction d'impôt a bénéficié à 466 000 ménages et devrait coûter 315 millions d'euros en 2020. La transformation en crédit d'impôt et l'augmentation de l'assiette ne sont pas chiffrées dans votre amendement, mais leur ordre de grandeur est tout de même de quelques centaines de millions d'euros.
L'amendement de madame Pires Beaune chiffrait uniquement la transformation en crédit d'impôt. Vous allez plus loin en augmentant, en plus, le plafond.
Reconnaissez, monsieur le rapporteur général, qu'un problème se pose pour les personnes dont le revenu fiscal de référence est compris entre 14 750 euros et 27 000 euros, soit 1 200 à 2 300 euros mensuels. La mesure gouvernementale pénalise ces personnes qui, dans un EHPAD dépendant d'un hôpital, ne paient pas la taxe d'habitation, puisque la compensation ne joue pas. Que fait-on pour elles ?
La commission rejette l'amendement I-CF296.
Elle examine, en discussion commune, les amendements I-CF894 de Mme Marie-Christine Dalloz et I-CF1434 de M. Éric Coquerel.
J'essaierai d'être pragmatique, concrète et simple. Monsieur de Courson proposait d'augmenter un plafond de 10 000 à 12 000 euros ; je fais exactement l'inverse, en passant un autre plafond de 12 000 à 10 000 euros. Avec cette économie, je gage le coût induit par ma proposition.
Pendant longtemps, on a réservé le crédit d'impôt en faveur de l'emploi d'un salarié à domicile aux contribuables qui travaillaient, excluant les retraités du dispositif. Or ce sont bien ces derniers qui ont le plus besoin de salariés à domicile, pour assurer les soins de toilette ou la télésurveillance. Il s'agit de rétablir un équilibre entre l'avoir fiscal et le crédit d'impôt. Cet amendement constituerait donc une véritable avancée pour les personnes qui ne travaillent pas. Il serait financé par la baisse du plafond, de 12 000 à 10 000 euros, pour les personnes qui travaillent. C'est simple, ça roule !
L'amendement I-CF1434 vise à concentrer l'utilité du crédit d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile, en évitant les effets d'aubaine pour les plus favorisés.
En 2015, la réduction moyenne d'impôt résultant de ce crédit d'impôt était de 625 euros. Nous suggérons d'abaisser à cette somme le plafond du montant pouvant être touché au titre de ce crédit d'impôt. Ainsi, les ménages pourront continuer de déclarer les revenus des personnes qu'elles emploient à leur domicile jusqu'à 1 250 euros, et de bénéficier d'un crédit d'impôt de 50 % de cette somme. Au-delà de cette limite, nous estimons qu'il revient aux ménages de supporter le coût des personnes qu'ils emploient à leur domicile.
Est toutefois conservé le plafond de 12 000 euros pour les services d'assistance aux personnes âgées, aux personnes en situation de handicap ou aux autres personnes ayant besoin d'une aide personnelle à domicile ou d'une aide à la mobilité, qui favorisent leur maintien à domicile.
Madame Dalloz, votre amendement est satisfait depuis près de trois ans, puisque la loi de finances de 2017 a universalisé le crédit d'impôt en faveur des services à la personne. L'extension à tous les contribuables du crédit d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile est une réalité depuis cette date. Votre satisfaction étant absolue, nous proposons un retrait !
Quant à l'amendement I-CF1434, il peut déstabiliser tout un secteur pour lequel le crédit d'impôt joue un rôle majeur de régularisation du travail non déclaré. Parce qu'il favoriserait le travail au noir, j'y suis défavorable.
À combien est fixé actuellement le plafond ? Le projet de loi de finances pour 2020 le modifiera-t-il ?
Le plafond s'élève à 12 000 euros, auquel s'ajoutent 1 500 euros par enfant à charge. Le projet de loi de finances ne le modifie pas.
L'amendement I-CF894 est retiré.
La commission rejette l'amendement I-CF1434.
Puis, suivant l'avis défavorable du rapporteur, elle rejette successivement les amendements I-CF1338 de M. Fabien Gouttefarde et I-CF1431 de M. Éric Coquerel.
Elle en vient à l'amendement I-CF1070 de M. Matthieu Orphelin.
Il s'agit de tirer les leçons de la crise des gilets jaunes de l'année dernière, dirigée contre l'augmentation de la taxe carbone. Ce rejet d'une fiscalité écologique avait pour principale motivation le manque de redistribution des montants collectés grâce à cette augmentation de la taxe carbone. Il est donc proposé d'aménager un cadre fiscal pour les années à venir afin de redistribuer d'éventuelles augmentations de la fiscalité écologique, en créant un crédit d'impôt « Revenu climat », dont les montants seront définis plus tard.
L'amendement I-CF1070 résulte d'échanges avec le réseau Action climat, qui regroupe des organisations compétentes sur ces sujets, et fait écho à certains travaux de think tanks et d'associations qui ont essayé de penser une fiscalité écologique juste socialement. Cette fiscalité comprendrait une redistribution, afin que les quatre ou cinq premiers déciles, en dessous du revenu médian, voient leur pouvoir d'achat augmenter si la fiscalité écologique était appliquée.
Ce sera la même punition que pour tous ceux qui proposent des crédits d'impôt en première partie : étant donné que ces amendements créent un effet d'aubaine, je vous invite à les déposer en seconde partie.
Comme vous le savez, une convention citoyenne pour le climat se tient actuellement, qui devrait déboucher sur des propositions concrètes pour l'environnement et la transition écologique. Le processus ayant été clairement annoncé, il doit être respecté. Il faut donc attendre les conclusions de cette convention pour en tirer les conclusions.
Je suis avec intérêt et de façon rapprochée cette convention citoyenne, qui a commencé ses travaux et à laquelle je souhaite un plein succès, notamment sur la question de la fiscalité. Cela ne nous empêche pas de continuer à réfléchir, à lire, à écouter ce que les acteurs de la société civile proposent.
J'ai planté cette petite graine aujourd'hui notamment pour nous orienter vers les divers travaux en cours des think tanks, des associations et des organisations, qui ont continué à réfléchir pour tirer les leçons de la crise des gilets jaunes. Je retire mon amendement, pour le redéposer plus tard.
Nous discuterons d'autres solutions possibles pour cette intéressante question du financement de la transition écologique.
L'amendement I-CF1070 est retiré.
La commission est saisie de l'amendement I-CF127 de M. Damien Abad.
L'objet de cet amendement est de permettre aux personnes handicapées moteur ou aux personnes domiciliant une personne handicapée moteur de bénéficier d'un prêt à taux zéro pour le financement de travaux d'aménagement de leur résidence principale.
Il existe déjà un crédit d'impôt au titre des dépenses d'installation ou de remplacement d'équipements d'accessibilité ou d'adaptation des logements aux personnes en situation de handicap. Il a été prorogé jusqu'à la fin de 2020 par la loi de finances pour 2018.
Par ailleurs, d'autres dispositifs permettent de mettre en oeuvre la solidarité nationale. Citons les allocations spécifiques comme l'allocation aux adultes handicapés (AAH), les aides de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) ou encore la taxe sur la valeur ajoutée au taux réduit de 5,5 % pour les équipements médicaux et paramédicaux
J'ajoute que, placé en première partie, ce prêt à taux à zéro créerait un effet d'aubaine. Il aurait davantage sa place en deuxième partie.
On ne peut que partager l'objectif que vous poursuivez, mais la réponse proposée ne me paraît pas idéale.
Le dispositif très concret proposé par mon collègue Damien Abad me paraissait intéressant. Vous dites qu'il créerait un effet d'aubaine, mais si la commission des finances créait des effets d'aubaine en faveur des personnes en situation de handicap, cela ne me poserait pas de problème. La clef de leur autonomie, c'est de pouvoir vivre chez elles.
Quand je parle d'effet d'aubaine, j'évoque l'effet d'aubaine fiscal. En aucun cas, je ne me permettrai d'employer ce terme à propos des personnes en situation de handicap. Ce qui me gêne, c'est que le dispositif proposé s'appliquerait à des équipements déjà acquis. C'est la raison pour laquelle je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement pour le déposer en deuxième partie.
La commission rejette l'amendement I-CF127.
Elle examine ensuite l'amendement I-CF247 de M. Nicolas Forissier.
Je reviens sur la transmission des entreprises dont je veux souligner, encore une fois, qu'il est important de s'en préoccuper.
L'impôt sur les plus-values de cession en cas de crédit-vendeur est un frein à la bonne transmission des entreprises, car il constitue une charge considérable. L'objet du présent amendement est, dans la continuité des travaux sénatoriaux, de réduire les effets de seuil pour les petites et moyennes entreprises (PME) et les entreprises de taille intermédiaire (ETI) en échelonnant l'impôt sur les plus-values de cession. Ce dispositif s'inscrit dans la suite logique de la loi pour la croissance et la transformation des entreprises.
Tel qu'il est rédigé, l'amendement est satisfait sur deux points : le seuil de chiffre d'affaires et de bilan ainsi que l'extension à la vente de droits sociaux. Je pense que vous n'avez pas tenu compte du dispositif adopté l'année dernière.
Par ailleurs, votre amendement se heurte à un autre problème de rédaction : il supprime des seuils qui n'existent pas. Je vous invite à le réécrire pour la séance.
J'ai pris soin de rappeler au ministre qu'il avait pris l'engagement en séance d'évaluer dans un an ce dispositif de paiement échelonné en cas de crédit-vendeur. Cela vous permettra d'avoir une réponse de sa part si vous redéposez cet amendement après l'avoir retravaillé.
L'objet de cet amendement était précisément d'avoir un débat sur ce point. Je vais le retirer puis le redéposerai sous une autre rédaction.
L'amendement I-CF247 est retiré.
La commission examine les amendements identiques I-CF807 de M. Fabien Roussel, I-CF1184 de M. Jean-Louis Bricout et I-CF1393 de M. Éric Coquerel.
L'amendement I-CF807 propose la suppression du prélèvement forfaitaire unique (PFU) à 30 %, dispositif profondément inégalitaire qui a mis fin à la progressivité de notre système fiscal sur les revenus du capital et engendré un coût non soutenable pour les finances publiques. Il convient donc d'y mettre un terme. Comptez sur nous pour vous soumettre des idées pour utiliser les gains fiscaux issus de cette suppression !
Le rapporteur général a, dans un mouvement d'euphorie, souligné que le PFU avait été une réussite. Il a simplement oublié de préciser qu'on avait observé un glissement entre revenus qui relevaient auparavant de l'impôt sur le revenu et dividendes auxquels s'applique le taux de 30 %.
Jean-Paul Dufrègne a parfaitement défendu l'amendement identique I-CF1184. Matthieu Orphelin a souligné à juste titre le déséquilibre fiscal et social engendré par la suppression de l'ISF et la mise en place du PFU. Ces deux mesures prises en début de mandat ont provoqué des pertes de recettes qui ont dû être compensées par une augmentation de la fiscalité écologique. Cela pose en toile de fond le problème de l'acceptabilité sociale de cette fiscalité.
J'ajoute à la défense de l'amendement I-CF1393 que nous avions alerté sur ce risque de hausse de la part des dividendes, citant l'économiste Gabriel Zucman. Il y avait tout lieu de penser, en effet, qu'avec le PFU, les chefs d'entreprise préféreraient se rémunérer sous forme de dividendes, moins taxés, plutôt que de revenus salariaux et que cela n'allait en rien favoriser l'investissement.
Plutôt que d'euphorie, monsieur Dufrègne, je parlerai de satisfaction, d'ailleurs partagée par le Comité d'évaluation des réformes de la fiscalité du capital.
Avis défavorable à l'ensemble de ces amendements.
Monsieur Bricout, la création du PFU ne s'est nullement traduite par un effritement des recettes fiscales. S'il y avait eu un déport des salaires vers les dividendes aussi important que vous le dites, nous ne constaterions pas cette hausse massive du volume de l'impôt sur le revenu. Il y a eu non seulement une hausse des revenus, mais aussi des distributions et du réinvestissement, point sur lequel nous pourrions revenir.
Au moment de l'instauration du PFU, plusieurs collègues ont affirmé qu'il rapporterait au lieu de coûter puisque de nombreuses entreprises se refusaient à distribuer des dividendes à cause de l'extrême progressivité de l'imposition. Et c'est ce que nous avons constaté.
Monsieur le président, je m'étonne donc que vous ayez déclaré recevables ces amendements qui, contrairement à ce que prétendent leurs auteurs, entraîneraient des pertes de recettes.
La commission rejette les amendements identiques I-CF807, I-CF1184 et I-CF1393.
Elle est saisie de l'amendement I-CF46 de M. Fabrice Brun.
Cet amendement vise à conforter la prime volontaire de 1 000 euros, exonérée d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales, dont l'idée est venue du président de la région Hauts-de France. On peut toujours regretter que tout le monde ne la perçoive pas mais c'est apparemment un dispositif apprécié par les entreprises qui peuvent la verser et par les salariés qui en bénéficient. Nous proposons qu'elle soit reconduite d'une année sur l'autre et qu'elle soit exclue du calcul du revenu fiscal de référence.
Votre amendement est en grande partie satisfait par le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) qui prévoit de reconduire le dispositif de prime exceptionnelle pour 2020.
Par ailleurs, la rédaction de l'amendement pose problème puisqu'il ne précise pas qui décide de la reconduction et comment.
Je vous propose donc de le retirer et de le retravailler pour le déposer sur le PLFSS.
Sur vos conseils avisés, monsieur le rapporteur général, je vais le retirer pour me reporter vers le PLFSS.
La prime sera reconduite cette année et sera exonérée de cotisations sociales mais aussi d'impôts, sous réserve d'un accord d'intéressement.
Oui, mais elle entrera toujours dans le calcul du revenu fiscal de référence, si mes informations sont bonnes.
L'amendement I-CF46 est retiré.
La commission en vient à l'amendement I-CF740 de M. Joachim Son-Forget.
L'amendement vise à abroger les dispositions de l'article 13 de la loi de finances de 2019 et à maintenir par conséquent la retenue à la source pour les revenus de source française de nos compatriotes expatriés. Les nouvelles règles censées s'appliquer le 1er janvier prochain créent des effets de bord qui n'avaient visiblement pas été prévus lors de la réforme de l'article 197 A du code général des impôts, faute d'étude d'impact.
Dans toute réforme, il y a des gagnants et des perdants, et il faut veiller à maintenir un équilibre global. L'an dernier, nous avons adopté plusieurs mesures favorables aux non-résidents et il convient d'en faire à présent le bilan.
Même si la réforme est juste dans son principe, le changement de règles du jeu peut avoir quelque chose de brutal. Je comprends le sens de votre amendement, même si je considère que l'abrogation que vous proposez serait une solution plus brutale encore. Je vous suggère donc de le retirer au profit d'une réflexion plus large sur ce sujet à laquelle vous seriez associés.
Je ferai part de vos remarques à notre collègue Son-Forget. Pour l'heure, je retire l'amendement.
L'amendement I-CF740 est retiré.
La commission examine, en discussion commune, les amendements I-CF65 et I-CF66 de Mme Véronique Louwagie.
Environ 3 millions de nos concitoyens peinent à trouver un médecin traitant, et c'est pour eux une préoccupation majeure.
Mon amendement I-CF65 propose d'encourager l'installation des médecins généralistes dans les zones de désertification médicale en leur permettant de bénéficier d'une exonération totale sur le bénéfice imposable pendant les cinq premières années, et partielle les trois années qui suivent – 75 % la sixième année, 50 % la septième et 25 % la huitième – comme c'est le cas dans les zones de revitalisation rurale (ZRR). L'amendement I-CF66, de repli, propose une exonération à 100 % pendant trois ans.
Comme je l'ai précisé tout à l'heure, madame Louwagie, le PLFSS comportera une exonération de cotisations sociales pendant deux ans pour les jeunes médecins qui s'installent en zone sous-dense. L'an dernier, nous avons adopté, à l'initiative de Julien Dive, une extension de l'exonération de cotisation foncière des entreprises (CFE) aux médecins implantés dans une zone sous-dense et le Gouvernement a réaffirmé son ambition de garantir à chacun un accès aux soins partout sur le territoire dans le cadre de la stratégie « Ma Santé 2022 ».
En outre, les zones de désertification médicale que vous mentionnez dans votre amendement n'ont pas d'existence juridique, ce qui fait courir un risque d'incompétence négative.
Le dispositif en vigueur dans les ZRR ne fonctionne pas. Une mission a montré très clairement que l'incitation n'était pas suffisante et qu'elle n'avait pas su enrayer la désertification dans ces zones.
Par ailleurs, il ne faut pas faire jouer les territoires les uns contre les autres. Le déficit de médecins est un phénomène généralisé en France. Si vous incitez les médecins à venir s'installer à un endroit, il y en aura moins ailleurs.
Revenons aux objectifs du plan « Ma Santé 2022 », notamment ceux qui visent à redonner du temps médical aux médecins. On ne peut pas inventer des médecins supplémentaires, quel que soit le dispositif fiscal.
Les zones de désertification n'ont peut-être pas d'existence juridique mais elles sont définies dans les classements établis par les agences régionales de santé (ARS). Certains départements comportent des zones d'intervention prioritaire (ZIP). Il est donc possible de sectoriser géographiquement ce dispositif d'exonération.
L'idée n'est bien sûr pas de monter les territoires les uns contre les autres. Force est toutefois de constater qu'il y a un déséquilibre dans la répartition des médecins. Comparons Saint-Laurent-du-Var avec ses sept médecins pour 3 500 habitants et certaines vallées de l'Ardèche.
Je trouve les amendements de madame Louwagie intéressants. Ils préfigurent les zones franches médicales, sur lesquelles nous pourrions réfléchir, et mettent en évidence le fait que l'égalité dans l'accès aux soins n'est plus assurée dans notre pays.
Monsieur Cazeneuve, il existe bel et bien des zones carencées. Ce n'est pas seulement le nombre de médecins qui pose problème mais aussi leur répartition. Ils sont surtout présents dans les grandes villes et le long du littoral. Une petite ville de ma circonscription a créé une maison de santé pluridisciplinaire (MSP). Elle est concurrencée par une ville dotée d'une zone franche et elle a beaucoup de mal à attirer les médecins. Il faudrait réfléchir aux moyens de parvenir à une meilleure répartition.
Certes, l'attractivité des territoires ne se réduit pas aux seuls avantages fiscaux pour les médecins, mais je ne peux pas laisser dire que les dispositifs des ZRR ne fonctionnent pas. Ils fonctionnent à condition qu'il y ait des médecins leaders qui lancent des projets, des maisons de santé soutenues par les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), des programmes destinés à encourager le travail collectif et la télémédecine.
Monsieur Cazeneuve, il ne faut pas généraliser : les ZRR ne fonctionnent pas toujours mais elles fonctionnent quand même. Je peux vous citer de nombreux exemples d'installations de professionnels de santé favorisées par ces dispositifs. Si on affirme aujourd'hui qu'ils ne fonctionnent pas, demain on dira qu'ils ne servent à rien et ils seront supprimés.
Je viens appuyer les propos de M. Cazeneuve. Les ZRR ne suffisent pas à attirer des praticiens. Une simple mesure fiscale ne peut créer du jour au lendemain une génération spontanée de médecins. Dans les zones actuelles, ce sont des professionnels venus de tous les pays du monde qui exercent, car la France n'a pas assez de médecins. Le plan « Ma Santé 2022 » vise à renforcer les effectifs. Instaurer un nouveau zonage et une nouvelle niche fiscale ne règlera pas notre problème.
Madame Cariou, nous sommes tous d'accord pour dire qu'il nous faut plus de médecins. Il n'en demeure pas moins qu'il est nécessaire de trouver des solutions dans cette période transitoire et qu'il y a des territoires qui ont plus de difficultés que d'autres.
Monsieur le rapporteur général, les zones de désertification médicale ne sont peut-être pas définies dans le code général des impôts mais elles sont prises en compte par les ARS. C'est sur ces territoires qu'elles soutiennent la création de maisons de santé.
Je vais retirer mes amendements pour travailler à une meilleure définition juridique pour les redéposer en séance.
Les amendements I-CF65 et I-CF66 sont retirés.
Article 3 : Domiciliation fiscale en France des dirigeants des grandes entreprises françaises
La commission est saisie de l'amendement I-CF706 de M. Jean-Paul Mattei.
Les critères de domiciliation fiscale pour les dirigeants de grandes entreprises françaises définis à l'article 3 sont particulièrement attractifs. Cet amendement est le premier d'une série que nous avons déposée avec Éric Coquerel, co-rapporteur de la mission d'information sur l'impôt universel, afin de traduire concrètement, dès ce PLF, les mesures préconisées dans notre rapport.
Nous proposons par l'amendement I-CF706 d'insérer le critère des 183 jours de résidence fiscale sur le territoire national à l'article 4 B du code général des impôts. Cette définition du domicile fiscal est inspirée de la jurisprudence du Conseil d'État et des critères retenus par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Il nous paraît opportun d'élargir les critères de résidence fiscale en ajoutant au niveau législatif un critère pris en compte par des textes de rang inférieur, à savoir la notion de présence effective sur le territoire national.
Cela permettrait de clarifier la doctrine fiscale et d'éviter des conflits d'interprétation nés de l'absence de l'inscription dans la législation de ce critère de nombre de jours de résidence.
Tout d'abord, monsieur Mattei, monsieur Coquerel, il me faut saluer le travail que vous avez effectué dans le cadre de votre mission d'information. Vous avez déposé plusieurs amendements mettant en oeuvre les préconisations que vous aviez formulées. Je dois avouer que je suis moins sensible à l'architecture de cet amendement I-CF706 qu'à celle des suivants.
La domiciliation en France malgré une présence inférieure à six mois est établie à partir de la jurisprudence et dépend d'une approche au cas par cas : les décisions rendues en la matière prennent en compte la durée de séjour en France et les durées de séjour dans les autres pays, mais aussi la présence éventuelle en France de la famille et l'exercice en France d'une activité. Elle est appréciée selon un faisceau d'indices et votre rédaction risque de rigidifier les choses.
En outre, la durée en France doit être nettement supérieure à celle du séjour dans les autres pays. Or, avec votre amendement, une personne serait automatiquement considérée comme résidente française dès lors qu'elle résiderait en France un jour de plus que dans un autre pays, même si elle a toute sa famille et le siège de son travail dans l'autre pays et n'est en France qu'au titre de déplacements professionnels, comme c'est le cas de beaucoup de gens, notamment des frontaliers, qui font la navette entre deux pays.
En outre, en cas de départ précoce ou d'arrivée tardive, une personne pourrait ne pas être considérée comme résidente fiscale française, ce qui serait un manque à gagner pour l'État.
Je vous invite donc à retirer cet amendement. Nous aurons ce débat en séance avec le ministre. Votre rédaction risque de desservir des personnes qui ne poursuivent aucun objectif d'optimisation fiscale et qui ont simplement à faire la navette entre deux pays.
Mes chers collègues, souvenez-vous de Johnny Hallyday. Il était censé résider en Suisse. Or un astucieux inspecteur des impôts français, en relevant les dates de tous les concerts qu'il donnait dans le monde, a établi qu'il passait plus de 183 jours à l'extérieur de la Suisse, et le fisc a considéré qu'il était résident français et a procédé à un redressement correspondant à une année de revenus.
Votre amendement n'introduit pas seulement le critère des 183 jours, qui est de nature jurisprudentielle. Il fixe aussi la condition d'une durée de résidence sur le territoire national supérieure à la durée de résidence dans chaque autre pays, ce qui pose un vrai problème. Prenez les artistes qui se produisent partout dans le monde : ils peuvent résider à l'étranger plus longtemps qu'en France et risquent de ne plus être considérés comme résidents français.
Éric Coquerel n'est pas là, mais je vais retirer cet amendement, car je pense qu'il est important que nous ayons un débat dans l'hémicycle sur la notion de résidence fiscale. Cela fixera la doctrine et dissipera les problèmes d'interprétation.
L'amendement I-CF706 est retiré.
La commission examine l'amendement I-CF467 de M. Charles de Courson.
J'ai déposé cet amendement pour poser une question double au rapporteur : l'article 3 est-il compatible avec le droit communautaire ? Par ailleurs, est-il compatible avec les 130 à 140 conventions fiscales bilatérales que nous avons signées ?
Cet amendement est totalement satisfait par l'article 55 de la Constitution qui dispose, comme vous le savez, que les conventions priment sur la loi, sous réserve de leur ratification régulière et d'une application réciproque. Il n'est donc pas nécessaire d'inscrire dans la loi un principe qui est consacré directement dans la Constitution. Nous n'allons pas rappeler la hiérarchie des normes à chaque article du PLF, d'autant que cela pourrait créer une confusion et inciter certaines personnes à penser qu'en l'absence d'une telle précision dans la loi, cette dernière prime.
L'article 3 ajoute simplement une précision sur le lieu d'exercice de l'activité professionnelle. Cela ne pose pas de problème de compatibilité avec le droit communautaire.
Monsieur le rapporteur général, avez-vous passé en revue les 130 conventions fiscales bilatérales pour savoir comment y est traitée la domiciliation fiscale ?
Comme vous l'avez rappelé, les conventions priment sur la loi. Est-ce à dire que cet article ne s'applique qu'aux pays n'ayant pas conclu de telles conventions, soit une quantité négligeable ? Est-ce un espace vide ? Combien est-il susceptible de rapporter ?
Je ne pense pas que ce soit un espace vide, mais je dois vous rappeler qu'il s'agit d'un domaine qui relève du secret fiscal. Je ne suis pas en mesure d'apporter des précisions chiffrées.
Je vais retirer cet amendement, mais j'aimerais avoir des explications du ministre au sujet de la portée de cet article.
L'amendement I-CF467 est retiré.
La commission examine, en discussion commune, l'amendement I-CF1428 de Mme Sabine Rubin, les amendements identiques I-CF713 de M. Jean-Pierre Mattei et I-CF806 de M. Fabien Roussel ainsi que l'amendement I-CF1154 de Mme Valérie Rabault.
L'amendement I-CF1428 tend à supprimer le plancher de chiffre d'affaires de un milliard d'euros instauré par le présent article, afin d'obliger les dirigeants d'entreprises françaises à payer leur impôt en France quelle que soit la taille de leur entreprise.
Dans une allocution, Emmanuel Macron a déclaré, en réponse aux gilets jaunes : « le dirigeant d'une entreprise française doit payer ses impôts en France et les grandes entreprises qui y font des profits doivent y payer l'impôt. C'est la simple justice ». Pourquoi se limiter aux patrons des très grandes entreprises, celles dont le chiffre d'affaires excède un milliard d'euros ?
Dans la continuité de notre rapport, l'amendement I-CF713 propose d'étendre le champ de la taxation de certains hauts revenus des dirigeants français en fixant le seuil, non plus à un milliard, mais à 500 millions d'euros. Nous considérons que ce serait une mesure de compromis.
Monsieur de Courson, vous vous interrogiez sur l'eurocompatibilité de l'article 3. Celui-ci redéfinit la notion de domiciliation fiscale et il me semble assez bien rédigé. Il n'y a donc pas de risques par rapport aux conventions internationales.
L'article porte sur le lien entre l'exercice de fonctions de dirigeant de grande entreprise française et la domiciliation fiscale en France. Comme monsieur Mattei, nous proposons, par l'amendement I-CF806, d'abaisser le seuil d'un milliard d'euros à 500 millions d'euros. Le but est de rattacher fiscalement à la France un plus grand nombre de dirigeants de grandes entreprises françaises et ainsi de donner plus de vigueur à cet article.
Nous nous posons des questions sur le nombre de personnes concernées par le seuil fixé à un milliard. Serait-il possible d'avoir des précisions à ce sujet ?
L'amendement I-CF1154 fixe, pour sa part, un seuil de 750 millions d'euros, à mi-chemin entre les 500 millions qui viennent d'être proposés et le seuil de un milliard inscrit dans le texte.
Rappelons qu'en janvier 2019, Bruno Lemaire avait déclaré : « Nous prévoyons d'alourdir les sanctions au cas où un chef d'entreprise ne respecterait pas ces règles de domiciliation fiscale ». Or je ne vois rien de nouveau en matière de sanctions, le droit commun semble continuer de s'appliquer. Par ailleurs, j'ai eu beau lire et relire, je ne trouve dans l'évaluation préalable ni le nombre de chefs d'entreprise potentiellement concernés ni même le montant du rendement attendu.
Je suis sensible au fait, monsieur Mattei, que les préconisations de votre rapport d'information puissent trouver une traduction législative. Simplement, le seuil de 500 millions que vous proposez ne correspond à rien en droit fiscal. Le seuil de 750 millions proposé dans l'amendement I-CF1154 est, quant à lui, prévu pour la déclaration pays par pays, mais il s'agit d'un chiffre d'affaires mondial, non d'un chiffre d'affaires national.
Je vous propose de retirer tous les amendements pour les redéposer avec un seuil fixé à 250 millions, seuil plus objectif qui correspond à celui utilisé pour le cinquième acompte et la trajectoire de l'impôt sur les sociétés. À titre personnel, je leur donnerai un avis favorable. Pour être clair, entre 700 et 1 500 entreprises environ seraient concernées.
Les amendements I-CF1428, I-CF713, I-CF806 et I-CF1154 sont retirés.
La commission est saisie de l'amendement I-CF707 de M. Jean-Paul Mattei.
Cet amendement, parfaitement eurocompatible, a pour objectif de développer en France un mécanisme de fiscalité que l'on peut qualifier d'« impôt universel ciblé » – ciblé sur les paradis fiscaux, ce qui réjouira certains –, tel qu'il existe d'ores et déjà dans plusieurs pays européens comme l'Allemagne, la Finlande ou la Suède.
Le droit à taxer de la France ne s'éteindrait pas immédiatement après le changement de résidence fiscale mais continuerait de s'appliquer un certain temps aux contribuables partant à destination d'un pays dont le taux d'imposition est de 50 % inférieur à celui de la France, que ce soit en matière d'impôts sur le revenu, du travail, du capital ou du patrimoine.
Votre amendement revient à appliquer une sorte de droit du sang fiscal, qui va à l'inverse de la logique territoriale qui repose sur la notion de domiciliation et non de nationalité. Pour cette raison de principe, bien que la discussion soit intellectuellement passionnante, j'y suis défavorable.
Je m'interroge, par ailleurs, sur plusieurs autres points.
Aucun cadre temporel n'est fixé pour la nationalité française. Est-ce à dire qu'une personne ayant résidé en France sans en avoir la nationalité, puis qui l'obtient et part immédiatement à l'étranger, relèverait de votre dispositif ?
En outre, faute de précision sur son entrée en vigueur, votre dispositif pourrait s'appliquer à des personnes qui remplissent déjà les critères que vous prévoyez, ce qui conférerait à l'amendement une portée rétroactive.
Vous faites référence à des dispositifs similaires, notamment en Allemagne. Toutefois, ce pays a un régime plus encadré qui suppose un maintien du lien avec le pays d'origine et un seuil minimal de revenus de source allemande. Il prévoit, en outre, que les principaux centres d'intérêt économique du contribuable restent en Allemagne, conditions qui apparaissent logiques si l'on veut lutter contre l'évasion fiscale et pas simplement contre un déménagement.
Je vous demanderai donc de bien vouloir retirer votre amendement.
Je ne suis pas tout à fait d'accord avec vous, monsieur le rapporteur, car cet amendement ne remet pas en cause la notion de résidence fiscale inscrite dans notre droit. Il me semble que le mécanisme allemand n'est pas si éloigné de ce que nous proposons.
Comme je ne suis pas seul signataire de cet amendement, je me vois dans l'obligation de le maintenir.
La commission rejette l'amendement I-CF707.
Elle est saisie de l'amendement I-CF704 de M. Jean-Paul Mattei.
Nous revenons à un sujet qui avait déjà animé nos débats l'an passé : la fameuse exit tax. Je m'étais étonné alors qu'on modifie son régime. Sur le principe, je trouve choquant qu'une personne qui crée une entreprise sur le territoire français se voie exonérée d'imposition sur les plus-values si elle quitte la France alors que les entrepreneurs qui restent sont soumis à cette taxation. C'est un enjeu d'équité fiscale et d'attractivité du territoire, malgré ce que l'on peut entendre.
Précisons que toutes les mesures que nous avons proposées ne coûtent rien au budget de l'État, bien au contraire.
Je serai bref, car c'est un débat que nous avons déjà eu l'an dernier. Quand nous avons modifié le régime de l'exit tax, je rappelle que j'ai légèrement aggravé les choses par rapport à ce qui était proposé et qu'il a fallu se battre pour cela. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement I-CF704.
Puis elle adopte l'article 3 sans modification.
Après l'article 3
La commission est saisie de l'amendement I-CF767 de M. Jean-Pierre Mattei.
En matière de succession, au delà du quatrième degré, il est plus difficile d'identifier les héritiers et les droits de mutation s'élèvent à 60 %. Nous proposons de supprimer la qualité d'héritier au delà du troisième degré, sauf s'il y a un testament authentique ou olographe. Cela permettrait à l'État de récupérer 100 % des biens, ce qui constituerait une recette fiscale intéressante.
J'ai un peu de mal à me figurer dans quels cas votre amendement s'appliquerait. Il ne serait plus possible d'hériter de ses arrière-arrière-grands-parents – pour ma part, c'est de cette manière que je suis devenu propriétaire d'un lopin de terre en Yougoslavie – mais, pour que le cas se produise, il faudrait que toutes les générations intermédiaires soient décédées ou aient refusé la succession.
En outre, je considère que les règles successorales ne relèvent pas des lois de finances. Demande de retrait ou avis défavorable.
L'article 777 du code général des impôts détermine les droits de mutation en fonction du degré de parenté. Si vous préférez, nous pourrions prévoir un taux de 100 % au delà du quatrième degré, en prévoyant une exception si un testament existe.
La commission rejette l'amendement I-CF767.
Elle en vient à l'examen de l'amendement I-CF1055 de M. Jean-Noël Barrot.
Cet amendement reprend une vieille idée, qui consiste à différencier la fiscalité s'appliquant aux unités de compte et aux fonds euros dans l'assurance-vie.
L'assurance-vie est le placement préféré des Français, en raison de l'avantage fiscal considérable qu'elle présente, sur les plus-values et sur les successions. Les contrats d'assurance-vie peuvent se faire soit en unités de compte, soit en fonds euros. Les fonds euros, qui sont des fonds garantis, sont essentiellement placés dans des obligations souveraines. Les unités de compte, elles, financent les entreprises.
L'objectif général de la loi PACTE était d'orienter une partie de l'épargne vers les entreprises, mais en raison de la baisse des taux d'intérêt, qui deviennent même négatifs, il devient de plus en plus difficile et coûteux pour les assureurs de servir une rémunération sur les fonds euros. Actuellement, les plus grands assureurs de la place – Allianz, Axa, Generali ou Crédit agricole – envisagent, soit de fermer l'accès aux fonds euros, soit de relever les frais d'accès à ces fonds pour décourager les épargnants d'y placer leur épargne et les diriger vers les unités de compte.
Avec cet amendement, je propose que, dans les contrats d'assurance-vie qui seront souscrits à partir de l'année prochaine, les abattements sur le calcul des plus-values soient réservés aux unités de compte. Plutôt que de laisser les assureurs relever les frais pour décourager les épargnants et capter ainsi une partie de l'avantage fiscal, supprimons l'avantage fiscal, faisons une économie sur nos dépenses fiscales et aidons ainsi les assureurs à décourager les épargnants d'investir dans les fonds euros.
Nous allons examiner plusieurs amendements portant sur l'assurance-vie. Très honnêtement, je ne pense pas que la disparition des abattements changera quoi que ce soit dans les choix d'épargne. Pour moi, il s'agit juste d'une augmentation d'impôt. Si l'on supprimait cet abattement, il n'y aurait plus aucun avantage à détenir une assurance-vie de plus de huit ans pour la fraction qui excède 150 000 euros. Elle serait soumise au même PFU que les contrats dénoués avant huit ans, ce qui semble étrange.
Par ailleurs, il existe des dispositifs fiscaux incitatifs, s'agissant de la taxation de la transmission des capitaux de l'assurance-vie aux bénéficiaires lors du décès de l'assuré. Le prélèvement spécial s'applique après un abattement de 20 % pour les contrats dit « vie-génération » qui sont investis en unités de compte. Pour toutes ces raisons, j'émettrai un avis défavorable sur votre amendement.
Pardonnez-moi, monsieur le rapporteur général, mais aucun de vos deux arguments n'est convaincant. Il ne s'agit pas d'une augmentation d'impôt, puisque cela ne concernerait que les contrats à venir. Par ailleurs, la fiscalité ne deviendrait pas neutre pour l'assurance-vie, puisqu'au sein d'un contrat d'assurance-vie, les unités de compte conservent tous les avantages fiscaux, tandis que les fonds euros conservent tous les avantages successoraux et perdent les abattements. L'assurance vie resterait donc très privilégiée sur le plan de la fiscalité.
Quand l'État français emprunte sur les marchés financiers, il a besoin de ces fonds euros pour garantir ses emprunts. Vous voulez réduire la souscription à des fonds dont l'État aura besoin pour emprunter. Quelque chose n'est pas clair !
Les assureurs augmenteront les frais, ce qui annulera l'avantage fiscal : c'est ce qui est déjà en train de se passer.
L'amendement de Jean-Noël Barrot met le doigt sur un vrai problème, qui résulte de la politique menée par la Banque centrale européenne. Celle-ci a essayé de relancer l'inflation, sans y réussir, avec des taux de plus en plus bas, et même négatifs, que l'on fait encore plonger. Cela met les banques européennes dans une situation extrêmement difficile : comme elles ne gagnent plus rien sur les prêts, elles essaient de se rattraper sur les services. Intellectuellement, on pourrait effectivement se dire que, pour l'intérêt national, mieux vaudrait que les gens qui souscrivent des contrats d'assurance-vie investissent dans des actions plutôt que dans des fonds en euros. Le problème, c'est que les contrats d'assurance-vie détiennent environ le tiers de la dette publique française. Le risque, c'est que votre amendement entraîne un désamorçage.
Certes, mais certains risquent de demander le remboursement de leur ancien contrat, et les choses peuvent tourner assez vite. Le danger, c'est de déstabiliser le secteur. Vous l'avez expliqué vous-même, cher collègue : certaines sociétés d'assurances relèvent déjà les frais sur les fonds euros. Elles essaient de maintenir une rémunération un peu supérieure à l'inflation sur les contrats en unités de compte. Sur les contrats en fonds euros, la rentabilité est négative.
La commission rejette l'amendement I-CF1055.
Elle est saisie de l'amendement I-CF48 de M. Fabrice Brun.
Comme mon collègue Jean-Paul Mattei, je souhaite, à mon tour, défendre le retour de l'exit tax. Je rappelle qu'elle représentait une recette de 150 millions d'euros, au bas mot, qui reposait sur quelques centaines de contribuables. Nous avons été quelques-uns à être effarés du choix qui a été fait, dans la loi de finances de 2019, de ramener de quinze ans à deux le délai de détention des actions après l'installation de l'actionnaire hors de France qui exonère de l'exit tax. Cette décision a tout simplement consisté, monsieur le rapporteur général, à supprimer l'exit tax. Et, dans un souci de justice fiscale, nous proposons de rétablir cette imposition sur la plus-value résultant de la cession des actions, telle qu'elle existait depuis 2011, avant que vous ne la modifiiez.
Même avis que sur ce précédent amendement. Je note d'ailleurs qu'en toute cohérence, vous avez voté l'amendement de M. Jean-Paul Mattei.
Il est tout de même dommage de s'asseoir sur 150 ou 200 millions d'euros. J'ajoute que cette mesure témoignait d'une certaine idée de la justice fiscale.
La commission rejette l'amendement I-CF48.
Elle examine ensuite l'amendement I-CF1426 de Mme Sabine Rubin.
Une taxe avait été introduite dans le projet de loi de finances pour 2018, qui visait à taxer les propriétaires de grands navires de plaisance ou de sport. Par cet amendement, nous proposons de la réévaluer à la hausse compte tenu de son rendement tout à fait dérisoire par rapport à ce qui avait été évoqué. Si le chiffrage initial n'était pas bon, alors il convient de le réévaluer. Si vous ne voulez pas le faire, cela signifie que cette mesure n'a été qu'un « coup de com' » pour faire oublier l'image de président des riches qui collait à la peau d'Emmanuel Macron.
C'est une question que je connais particulièrement bien, puisque j'ai effectué un contrôle sur pièces et sur place à la direction générales des douanes pour voir comment ou si cette disposition était appliquée. Il s'agissait, d'ailleurs, non pas de la création d'une taxe, mais du changement de barème d'une taxe existante. Même si j'ai déjà fait fuiter quelques informations dans la presse, je n'ai pas encore publié les conclusions de ce contrôle, parce que j'attends encore des éléments complémentaires de la direction générale des douanes. En tout état de cause, prétendre que seuls dix Français sont aujourd'hui utilisateurs d'un yacht, c'est se moquer du monde.
Ces éléments complémentaires devraient me permettre de comprendre pourquoi il existe des trous noirs dans le dispositif de contrôle. Le département où l'on rencontre le plus de yachts dans ce pays n'a, par exemple, fait l'objet d'aucun contrôle, du fait, m'a-t-on dit, de l'incompétence de jure de la section de recherche qui est censée s'en occuper. Croyez bien que j'irai au bout de cette affaire, d'autant que ces fonds étaient destinés, pour partie, à la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM), dont, heureusement, plusieurs amendements d'origine parlementaire visent dans le cadre de nos travaux à sauvegarder le financement.
Je suis défavorable à votre amendement, parce qu'il ne servira à rien de multiplier par dix le montant de la taxe. Le problème, ce n'est pas le montant de la taxe, mais son assiette. Je répète que prétendre qu'il n'y a pas plus de dix utilisateurs de yacht dans ce pays, c'est se moquer du monde. J'émettrai donc un avis défavorable sur cet amendement, mais croyez bien que je ne les lâcherai pas.
C'est une petite affaire, mais elle est assez amusante. Pourquoi l'actuelle majorité a-t-elle créé cette taxe sur les yachts ? Pour faire croire, au moment de la suppression de l'ISF, qu'on allait faire payer les riches sur les valeurs mobilières – tout le monde sait que les grandes fortunes, ce sont des valeurs mobilières. Mais pour les petits riches, on a maintenu l'IFI. À l'époque, nous vous avions fait remarquer qu'on peut très facilement délocaliser un yacht pour l'immatriculer en Italie ou à Malte, par exemple. Mes chers collègues, voilà une bonne démonstration que trop d'impôt tue l'impôt : maintenant, il n'y a plus que dix yachts ! Il serait intéressant que notre rapporteur général, qui peut avoir accès à cette liste, nous dise qui sont les dix imbéciles qui immatriculent encore leur yacht en France !
Je pense que nous devrions tous voter l'amendement de Mme Sabine Rubin, car en multipliant le montant de la taxe par dix, nous ferons partir les dix derniers, et nous aurons ainsi un rendement nul.
Je précise que l'amendement ne porte que sur le droit de francisation et de navigation (DAFN), qui s'applique aux pavillons français, alors que le dispositif que j'avais introduit concernait le droit de passeport, c'est-à-dire l'utilisation d'un navire par un Français, quel que soit son pavillon. C'est bien ce qui est problématique : une personne seulement a déclaré le DAFN en France. Il n'y a qu'un bateau à pavillon français en France ! L'assiette est encore plus réduite que ce qu'on imaginait ! L'important n'est pas le DAFN, mais le droit de passeport : c'est différent.
La commission rejette l'amendement I-CF1426.
Elle examine ensuite l'amendement I-CF1053 de M. Jean-Noël Barrot.
Je reviens à l'assurance-vie, avec un amendement qui vise à faire circuler le capital et à encourager les donations du vivant. Lorsqu'on a un contrat d'assurance-vie, tous les versements que l'on y fait jusqu'à 70 ans peuvent être transmis en franchise de droits de succession jusqu'à 150 000 euros, sans que cela consomme les autres abattements disponibles pour la succession. Cet avantage successoral incite à continuer à verser sur le contrat d'assurance-vie jusqu'à 70 ans, plutôt que de transmettre du vivant. Après 70 ans, l'abattement se réduit à 30 000 euros.
Avec cet amendement, je propose, pour les futurs contrats d'assurance-vie, de ramener à 60 ans l'âge au delà duquel l'abattement passe de 150 000 à 30 000 euros. Cela favorisera une transmission plus rapide du capital.
Il ne me semble pas très cohérent de faire passer le seuil de 70 ans à 60, alors que l'espérance de vie augmente. Sur le fond, vous voulez remettre en cause le régime de l'assurance-vie pour inciter à faire des donations et réorienter l'épargne vers des compartiments plus productifs. On est déjà allé dans ce sens avec le PFU et la loi PACTE, qui a créé des incitations en faveur des contrats en unités de compte. Le débat a eu lieu et un équilibre a été trouvé dans ce texte. Je ne voudrais pas que l'on déstabilise complètement l'assurance-vie. Avis défavorable.
Vous vous souvenez certainement de l'emprunt Pinay. Il a coûté très cher à la France, puisqu'on disait toujours : « On a mis la grand-mère en Pinay juste avant de la mettre en bière. » C'était une façon de bénéficier de l'exonération de la transmission. Cela ne rapportait pas beaucoup, mais ça a ruiné le Trésor public. Il ne faudrait pas accélérer le mouvement ! Je rappelle, par ailleurs, qu'il n'y a pas transmission, car le bénéficiaire n'est pas détenteur de l'assurance-vie. Il faut tout de même attendre la mort du de cujus.
La commission rejette l'amendement I-CF1053.
Puis elle examine, en discussion commune, les amendements I-CF1119 du président Éric Woerth, I-CF1029 et I-CF1031 de Mme Sarah El Haïry, I-CF1129 de M. Éric Pauget, I-CF129 de M. Damien Abad et les amendements identiques I-CF130 de M. Damien Abad et I-CF990 de M. Gilles Carrez.
L'amendement I-CF119 vise à favoriser les donations anticipées, en portant à 150 000 euros le montant de l'abattement personnel en ligne directe en cas de succession ou de donation, et en faisant passer le délai de rappel fiscal de quinze ans à dix ans. Cet amendement revient constamment et, si je l'ai redéposé, c'est parce que le ministre de l'action et des comptes publics a fait une proposition assez comparable. Comme je ne vois pas cette disposition dans le PLF, j'aide le ministre à préciser les choses. Cet amendement vise à faire davantage circuler l'argent.
Nous croyons, nous aussi, à la famille et à la nécessité de favoriser les donations et la solidarité intergénérationnelle. Comme le ministre de l'action et des comptes publics, qui appelle à faire vivre la solidarité à l'intérieur de la famille, nous pensons que les gens doivent avoir de l'argent au moment où ils en ont besoin. Nous voulons que les parents et les grands-parents puissent donner de l'argent à leurs enfants ou à leurs petits-enfants au moment où ça leur est utile : il faut donc favoriser les flux. Notre amendement I-CF1031, qui est très optimiste, vise à réduire de quinze à six ans le délai de reprise des droits de donation. Notre amendement I-CF1029, moins optimiste, propose de réduire ce délai de quinze à dix ans. Nous proposons, par ailleurs, de faire passer le montant de l'abattement de 100 000 à 153 000 euros, afin de favoriser la solidarité intrafamiliale.
Dans le même esprit, l'amendement I-CF1129 vise à revenir à la loi TEPA de 2007. Nous proposons à notre ministre de l'action et des comptes publics de s'inspirer de ce qu'avait fait Nicolas Sarkozy. Il s'agissait d'un dispositif équilibré, qu'il soutenait totalement à l'époque.
L'amendement I-CF990 est un peu différent. Je propose de ne pas revenir sur l'abaissement, qui a été décidé dans la loi de finances rectificative pour 2012, de l'abattement, de 150 000 à 100 000 euros, mais de revenir, en revanche, sur le délai de reprise, pour le ramener de quinze ans à dix ans.
L'abattement à 150 000 euros a été introduit dans la loi TEPA en 2007 ; il n'était que de 50 000 euros auparavant. Le délai de reprise n'était alors que de six ans, mais il a vite été porté à dix ans. En août 2012, on est revenu à 100 000 euros, avec un délai porté à quinze ans. J'ai consulté des notaires : ils sont favorables à un retour à dix ans. Je rappelle que, pour une famille avec deux enfants, avec un abattement de 150 000 euros, on pouvait donner en franchise d'impôt 600 000 euros en un peu plus de 10 ans. Si on le faisait en démembrement de propriété, on passait à plus d'un million d'euros, ce qui, à mes yeux, était excessivement généreux. Cet amendement, je le répète, ne porte que sur la réduction du délai de quinze à dix ans.
Ces amendements sont très coûteux et ils ne sont pas chiffrés : pour être très clair, ils représentent plusieurs milliards d'euros. Je vous rappelle que la fiscalité du patrimoine a été allégée au début de la législature, notamment avec la suppression de l'ISF, et que nous faisons cette année une importante baisse d'impôt sur le revenu. Ajouter quelques milliards par le biais de ces amendements me semble superfétatoire. Avis défavorable.
Je voterai l'amendement de Gilles Carrez, car il me semble équilibré. Je ne suis pas d'accord avec vous, monsieur le rapporteur général, quant au coût élevé de cette proposition. Cela va, au contraire, réinjecter de l'argent dans l'économie, créer de la consommation et des recettes de TVA. Il ne faut pas avoir un raisonnement à l'instant T : les recettes fiscales perdues, nous les retrouverons dans la consommation. Ces amendements vont tout à fait dans le sens des annonces du ministre de l'action et des comptes publics : il s'agit d'organiser la solidarité transgénérationnelle en permettant aux parents de mettre à leurs enfants le pied à l'étrier. Ramener le délai de quinze ans à dix fluidifiera le système. Cette mesure me paraît équilibrée et tout à fait pertinente.
Je suis tout à fait d'accord avec vous. D'une manière générale, et je m'adresse ici à la majorité, on ne peut pas considérer par principe que toutes les dépenses du Gouvernement – 5 milliards d'impôt sur le revenu, 20 milliards de taxe d'habitation – sont une bonne chose et que toutes les dépenses proposées par l'opposition sont mauvaises. Cessons de faire comme s'il y avait des dépensiers et des économes : pour notre part, nous n'aurions pas orchestré les choses de la même façon, nous n'aurions pas dépensé 20 milliards d'euros de taxe d'habitation. La mesure qui est proposée favorisera la circulation de l'argent, ce qui est une bonne chose.
Je veux soutenir le rapporteur général. Monsieur le président, l'impôt sur le revenu et la taxe d'habitation concernent des millions de personnes, ce qui n'est pas le cas des donations. Une succession moyenne, aujourd'hui, s'élève à 63 000 euros et la fiscalité sur les successions touche moins de 15 % des ménages. On ne peut pas comparer l'impôt sur le revenu et la taxe d'habitation, d'une part, et la fiscalité successorale, d'autre part.
La commission rejette successivement les amendements I-CF1119, I-CF1029, I-CF1031, I-CF1129, I-CF129, I-CF130 et I-CF990.
Elle examine ensuite l'amendement I-CF1404 de M. Éric Coquerel.
Cet amendement ne va pas priver l'État de recettes, bien au contraire. Il vise à refonder totalement le barème de notre impôt sur l'héritage, en le rendant plus progressif et en ajoutant des tranches – c'est notre marque de fabrique –, afin d'assurer une progression plus douce jusqu'au taux de 100 % pour la part des héritages au delà de 33 millions d'euros. Rassurez-vous, cela ne toucherait que 0,01 % seulement des plus riches. Il ne s'agit pas de les éliminer, mais bien de les faire contribuer. D'un point de vue plus philosophique, la part des patrimoines hérités dans le patrimoine total est passée de 45 % en 1970 à près de 70 % aujourd'hui. Il nous semble important de rompre avec cette dynamique inégalitaire, qui n'a rien à voir avec le mérite.
Personne ne s'étonnera que je donne un avis défavorable à cet amendement. Il pose un léger problème de constitutionnalité : le taux marginal de 100 % me paraît un peu confiscatoire…
La commission rejette l'amendement I-CF1404.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur général, elle rejette ensuite l'amendement I-CF1052 de M. Jean-Noël Barrot.
Puis elle examine l'amendement I-CF252 de Mme Lise Magnier.
Afin de favoriser la croissance des entreprises familiales, cet amendement tend à exonérer de droits de mutation à titre gratuit la transmission d'entreprise au sein du cadre familial en cas de conservation des titres sur une durée de quinze ans.
Je rappelle que la transmission d'une entreprise peut bénéficier du pacte Dutreil, avec exonération partielle de 75 %, de l'abattement en ligne directe de 100 000 euros par enfant et d'une réduction d'impôt spécifique et supplémentaire de 50 % pour les transmissions d'entreprise. Tous ces dispositifs étant cumulables, je propose que nous en restions là.
La commission rejette l'amendement I-CF252.
Elle examine ensuite l'amendement I-CF1030 de Mme Sarah El Haïry.
L'amendement I-CF1030 propose d'introduire une exonération des droits de mutation à titre gratuit sur la donation des parts de capital avec donation temporaire d'usufruit pendant au moins dix ans à une fondation ou à une association reconnue d'utilité publique. Il s'agit de créer un nouveau flux, au service de l'intérêt général, et de diffuser une culture philanthropique au sein même de la famille.
Tout cela me paraît un peu compliqué. Qui, par exemple, exercera le droit de vote sur les parts qui sont données temporairement ? Ce n'est pas précisé. Par défaut, ce serait l'association, et elle sera bien désemparée si elle doit se mêler de la gestion d'une société, alors que l'idée est plutôt de lui donner les dividendes. Par ailleurs, votre amendement ne prévoit pas d'exonération partielle, ni même d'abattement, et son assiette me paraît trop large. Je vous invite donc à le retirer.
L'amendement I-CF1030 est retiré.
La commission en vient à l'amendement I-CF1032 de Mme Sarah El Haïry.
Afin de faciliter les donations des grands-parents aux petits-enfants, je propose de faire passer l'abattement de 31 865 à 100 000 euros, comme pour les parents.
Je rappelle que lorsque deux grands-parents consentent à un de leurs petits-enfants une donation de biens communs, ce dernier bénéficie déjà du double abattement. Avec votre amendement, on pourrait donc atteindre des abattements de 200 000 euros pour chacun des petits-enfants. En outre, cet abattement peut se cumuler une fois avec l'abattement sur les dons de sommes d'argent consentis au profit des enfants, des petits-enfants ou des arrière-petits-enfants. Pour toutes ces raisons, je préfère qu'on en reste au droit actuel. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement I-CF1032.
Puis, suivant l'avis défavorable du rapporteur, elle rejette l'amendement I-CF905 de M. Jean-Noël Barrot.
Elle examine ensuite l'amendement I-CF266 de M. Nicolas Forissier.
Cet amendement vise à corriger l'article 790 du code général des impôts, relatif aux abattements fiscaux en cas de donation d'une entreprise. Il prévoit actuellement une réduction de 50 % sur les droits liquidés lorsque le donateur est âgé de moins de 70 ans et je propose, avec cet amendement, de porter l'abattement à 60 %, de façon à encourager la transmission d'entreprise par anticipation.
J'ai déjà rappelé que la transmission d'entreprise peut bénéficier du pacte Dutreil, avec exonération partielle de 75 %, de l'abattement en ligne directe de 100 000 euros par enfant et d'une réduction d'impôt supplémentaire de 50 % spécifique à la transmission d'entreprise, que vous voulez augmenter. Encore une fois, ces dispositifs sont cumulables ; restons-en là. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement I-CF266.
Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements identiques I-CF47 de M. Fabrice Brun, I-CF96 de M. Pascal Lavergne, I-CF133 de M. Damien Abad, I-CF162 de Mme Josiane Corneloup, I-CF195 de M. Charles de Courson, I-CF523 de Mme Émilie Bonnivard, I-CF837 de Mme Valérie Beauvais et I-CF973 de Mme Marie-Christine Dalloz ainsi que les amendements I-CF102 de Mme Lise Magnier et I-CF310 de M. Charles de Courson.
L'amendement I-CF47 m'a été inspiré par la Confédération nationale des appellations d'origine contrôlée (CNAOC). Pour éviter que, demain, nos plus beaux terroirs agricoles et viticoles appartiennent aux Chinois ou à d'autres puissances étrangères, je propose, avec cet amendement, de favoriser les transmissions familiales en exonérant de l'IFI les propriétaires qui affectent durablement leurs terres à des exploitations agricoles par un bail à long terme d'au moins dix-huit ans.
Mon collègue député de la Gironde, Pascal Lavergne, et moi-même souhaitons, avec l'amendement I-CF96, appeler l'attention de la commission sur les transmissions d'exploitations familiales. Nous proposons de porter à dix-huit ans la durée d'impossibilité de transfert du bien, qui n'est que de quatre ans dans le régime actuel. Il s'agit ainsi de s'aligner sur ce qui existe dans d'autres pays européens, en Allemagne ou en Italie, par exemple. Il s'agit de protéger nos exploitations viticoles, qui sont convoitées par les Chinois et par les grands groupes qui investissent dans nos territoires.
L'amendement I-CF162 vise à protéger les exploitations agricoles et viticoles familiales en allégeant la fiscalité des donations et des successions lorsque les héritiers s'engagent à ne pas vendre les biens reçus et à les laisser affectés à l'exploitation familiale pendant une durée de dix-huit ans.
Nous faisons face à un vrai problème de transmission des exploitations agricoles, en particulier viticoles. C'est vrai dans le Bordelais, en Champagne, comme dans la région de Cognac. Ce que nous proposons, c'est que, lorsque la transmission a lieu au sein de la famille, on porte à dix-huit ans la durée de conservation, pour essayer de maintenir le caractère familial de ces exploitations. Sinon, que va-t-il se passer ? Si un exploitant qui a trois enfants partage sa terre entre ses enfants, ceux qui n'exploitent pas vont revendre leur terrain, et c'est la fin des exploitations familiales.
Nous vous faisons cette proposition, élaborée avec la CNAOC, mais ne croyez pas, monsieur le rapporteur général, que c'est un cadeau que nous faisons aux exploitants. Il n'est pas évident de recevoir, à 40 ou 45 ans, la responsabilité d'une terre pour dix-huit ans. Tel est l'objet de mon amendement I-CF195 : il me paraît équilibré et je crois que c'est un bon moyen de préserver le capitalisme familial.
Dans de nombreux vignobles, dont celui de Champagne, le prix du foncier pèse fortement sur la pérennité du modèle de l'exploitation familiale. On assiste ainsi, dans certains vignobles, à la disparition des exploitations de taille moyenne, au profit d'exploitations de très petite ou, au contraire, de très grande taille. On constate également le morcellement du vignoble et la diminution du nombre de vignerons. En 2018, les acquisitions de terres par les viticulteurs représentaient 43 % de surfaces, contre 63 % en 1993. Aujourd'hui, la fiscalité incite les propriétaires à repousser à plus tard la transmission. Et, lorsque la succession s'ouvre, les droits à payer par les héritiers sont tels, que ces derniers sont incités à vendre une partie ou la totalité des biens, ce qui menace la pérennité de l'exploitation familiale.
Afin de protéger le modèle de l'exploitation viticole familiale, l'amendement I-CF837 vise à alléger la fiscalité des donations et successions, lorsque l'héritier s'engage à ne pas vendre les biens reçus et à les laisser affectés à l'exploitation familiale pendant une durée d'au moins dix-huit ans. Il prévoit donc un engagement de conservation du bien pendant cette durée minimale, ce qui garantit la pérennité du modèle familial, en contrepartie d'une exonération de 80 % des droits de mutation à titre gratuit, et ce dans la limite de 20 millions d'euros, comme cela se pratique en Allemagne, en Italie et en Suisse.
La bonne nouvelle, monsieur le président, c'est que l'amendement I-CF973 est rigoureusement identique à ceux de mes collègues. Mais il n'y a pas que la Bourgogne, le Bordelais et la Champagne : il y a aussi le Jura et son vin jaune !
Plus sérieusement, la transmission des exploitations viticoles est un vrai problème, que notre collègue Charles de Courson a bien exposé : lorsqu'un exploitant a trois enfants, celui qui reprend l'exploitation est dans l'incapacité totale de payer les parts du reste de la fratrie. Et cela entraîne le morcellement de nos vignobles.
Cet amendement apporte de solides garanties : une durée de détention de dix-huit ans, une exonération de 80 % dans une limite de 20 millions d'euros. Les choses sont très claires !
L'amendement I-CF102 va dans le même sens. Les feux de détresse allumés par la profession agricole au cours des dernières semaines sur tous nos territoires et la manifestation nationale organisée aujourd'hui posent une seule question : quelle agriculture, quel modèle agricole voulons-nous pour demain ? Le modèle de l'exploitation familiale est celui que nous devons préserver. C'est pourquoi nous devons accompagner la transmission des exploitations agricoles et viticoles en France.
Nous avons déjà eu ce débat l'année dernière et nous avons considérablement amélioré les choses dans la loi de finances initiale pour 2019. Nous avons renforcé les dispositifs incitatifs, puisque nous avons introduit une exonération de 75 % jusqu'à 300 000 euros transmis et de 50 % à partir de 300 000 euros transmis. Le pacte Dutreil peut également intervenir, et je rappelle les mesures sur la fiscalité agricole de l'an dernier. Je propose, une fois encore, que nous en restions là.
Nous parlons de biens d'une très grande valeur, et nous avons déjà fait énormément pour la filière viticole. Du point de vue d'autres personnes dans la même situation de patrimoine, ce que vous proposez va loin. Avis défavorable.
Je m'exprime en tant que coprésidente du groupe d'études Vigne, vin et oenologie de l'Assemblée nationale. Nous sommes tous sensibles à la situation des vignobles et à la question de la transmission des exploitations viticoles, mais je trouve dommage que vous ayez repris tels quels les amendements que vous a envoyés la CNAOC.
On ne peut pas présenter de tels amendements sans les chiffrer, quand on sait ce que peut coûter un vignoble en Bourgogne, en Champagne ou en Aquitaine. De surcroît, je vous rappelle qu'une mission d'information relative au foncier agricole a été conduite par nos collègues Jean-Bernard Sempastous et Dominique Potier, et un projet de loi sur le foncier, la transmission et la reprise nous sera présenté, qui nous permettra de faire ensuite des propositions de financement de ces transmissions dans un projet de loi de finances. Autrement dit, prenons les choses dans l'ordre. Ne vous y trompez pas : je suis, tout autant que vous, attachée au vignoble français.
Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2018, nous avions abordé le thème de la fiscalité agricole. D'un commun accord, nous avions retiré plusieurs amendements à la suite d'une proposition du Gouvernement de créer un groupe de travail sur la fiscalité agricole. Dans ce groupe de travail, dont font également partie Marie-Christine Verdier-Jouclas, Lise Magnier et Charles de Courson, il nous avait été dit que tout ce qui concernait la transmission ferait l'objet de propositions l'année suivante. L'année suivante, c'est maintenant !
Ces amendements m'étonnent. Aujourd'hui, en matière de transmission d'entreprises, il existe un abattement de 75 % dans le cadre du pacte Dutreil, avec l'obligation de conserver l'entreprise soit six ans, soit quatre ans lorsqu'il s'agit d'un pacte réputé acquis.
Les terres agricoles posent un vrai problème parce qu'elles sont souvent gérées dans des groupements fonciers agricoles, qui ne bénéficient pas d'exonérations. Certes, nous avons adopté l'année dernière un relèvement de l'abattement à 300 000 euros mais, compte tenu des intérêts en jeu, une vraie réflexion doit être menée.
Que se passe-t-il, en pratique ? Les gens apportent leurs terres à la société commerciale pour bénéficier du pacte Dutreil. Au bout de quatre, cinq ou six ans, les héritiers pourront vendre et il n'y aura plus de possibilité de contrôle. Il y a des problèmes avec les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural. C'est un vrai sujet de fond, qu'il ne faut pas balayer d'un revers de la main.
Les groupements fonciers agricoles sont souvent des prisons dorées, dans lesquelles les donataires ou les héritiers sont obligés de rester pendant dix-huit ans : loin de favoriser la spéculation, ils apportent de la stabilité en sécurisant le patrimoine foncier. Il faudrait appliquer un traitement équivalent aux entreprises et aux domaines agricoles, en leur imposant des obligations de conservation. Il serait intéressant de retravailler ces amendements, qui soulèvent le véritable enjeu du maintien de notre patrimoine agricole dans les mains des Français.
Je rejoins mon collègue Mattei : la question est de savoir comment l'on considère le foncier agricole. Soit cela ne concerne que la propriété de terres, soit il s'agit d'un outil d'exploitation. Dans ce dernier cas, le pacte Dutreil s'applique au foncier agricole, ouvrant droit à l'exonération de 75 %. Aujourd'hui, le foncier agricole n'est pas considéré comme un outil de travail. La transmission d'une exploitation agricole ou viticole n'incluant pas le foncier, les héritiers ne bénéficient pas de l'exonération. C'est là tout le problème.
Nous avons tous dans nos gènes un attachement très fort aux terres agricoles. Aujourd'hui, nos agriculteurs sont des chefs d'entreprise, ils ont parfaitement conscience de cet enjeu. Il est nécessaire d'entamer une réflexion sur la manière d'intégrer le foncier agricole dans la transmission. Il s'agit d'un bien d'entreprise, d'un outil d'exploitation qui doit pouvoir bénéficier du pacte Dutreil.
Deux éléments complémentaires. Tout d'abord, en Allemagne, le Parlement exonère les biens fonciers dans la limite de 20 millions d'euros en cas de maintien du caractère familial. C'est assez proche de l'amendement que nous avons déposé.
Ensuite, je prends l'exemple, certes particulier, de la Champagne. Qui achète aujourd'hui ? Ce sont, à 20 %, les maisons de champagne, c'est-à-dire de grandes sociétés, qui font monter les prix. Contourner la réglementation sur les structures est très simple : les terres sont mises en société, et elles rachètent les actions, comme notre collègue Mattei vient de l'expliquer. Si l'on veut détruire le caractère familial de l'agriculture et de la viticulture, continuons comme cela !
Je vous appelle à la raison. Les amendements présentés ne sont absolument pas chiffrés ; on ne sait pas du tout combien cette mesure peut coûter au budget. Nous réglons les problèmes les uns après les autres. Une réforme du foncier agricole va être proposée et, en matière d'agriculture, je vous signale que, l'année dernière, nous avons créé une épargne de précaution, à la demande des agriculteurs, parce que la DPI – déduction pour investissement – et la DPA – déduction pour aléas – étaient de véritables usines à gaz qui ne fonctionnaient pas.
Le foncier agricole ne doit pas être traité du seul point de vue des exploitations viticoles, même s'il recèle bien des problèmes. Nous avons déjà proposé, l'année dernière, une mesure fiscale concernant la transmission ; d'autres sujets doivent encore être abordés, comme les transmissions extra-familiales. Les exploitations agricoles, et pas seulement viticoles, atteignent en effet de tels niveaux d'actifs qu'il sera très difficile de les transmettre. Laissons aussi la mission d'information aboutir, et abordons les thèmes dans le bon sens, comme vous l'a proposé madame Verdier-Jouclas.
Les dispositifs existants ne sont pas suffisants, et le phénomène s'est accéléré ces dernières années ; il ne faut donc pas le sous-estimer. Notre proposition vise à conserver leur caractère familial à l'agriculture et à la viticulture françaises. Si nous voulons que tout le vignoble champenois appartienne demain à LVMH, il suffit de continuer comme cela !
On touche au patrimoine agricole et viticole de la France : notre histoire, notre ADN, notre culture ! Nous avons le devoir de dire que pèse une vraie menace sur ces grands terroirs de France, qui risquent demain d'appartenir en quasi-totalité à des fonds chinois, américains ou canadiens. Nous avions coutume de nous rassurer avec l'idée que l'agriculture et la viticulture étaient parmi les dernières activités non délocalisables : ce n'est plus le cas ! Le terroir français est en vente à la découpe !
Je n'en suis pas sûr. Mais c'est bien parce que ces terres sont probablement les terres agricoles les plus chères que la question se pose. L'objectif de les conserver dans une exploitation familiale doit pouvoir être partagé.
La commission rejette successivement les amendements identiques I-CF47, I-CF96, I-CF133, I-CF162, I-CF195, I-CF523, I-CF837, I-CF973 et les amendements I-CF102 et I-CF310.
Elle examine ensuite, en discussion commune, l'amendement I-CF1535 de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire ainsi que les amendements I-CF1216 et I-CF1217 de Mme Frédérique Tuffnell.
Ces trois amendements visent à valoriser un dispositif foncier de protection de l'environnement en proposant l'exonération des droits de mutation à titre gratuit pour tous les biens immobiliers gérés au moyen d'une obligation réelle environnementale (ORE). Celle-ci a été créée par la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages du 8 août 2016. Seules cinq ont été signées à ce jour, mais plus de 200 ORE de compensation ont été signées.
L'article L. 132-3 du code de l'environnement définit ainsi l'obligation réelle environnementale : « Les propriétaires d'un bien immobilier peuvent conclure un contrat avec une collectivité publique, un établissement public ou une personne morale de droit privé agissant pour la protection de l'environnement en vue de faire naître à leur charge, ainsi qu'à la charge des propriétaires ultérieurs, des obligations réelles que bon leur semble, dès lors que de telles obligations ont pour finalité le maintien, la conservation, la gestion ou la restauration d'éléments de la biodiversité ou de fonctions écologiques. » Elle contribue ainsi à protéger certaines espèces de faune ou de flore sauvages, à conserver des haies, des arbres, des bosquets ou encore des zones tampon entre des zones urbanisées et des zones naturelles.
Pour garantir la valeur d'engagement en contrepartie de l'avantage fiscal, l'ORE contractée devra être d'une durée supérieure à trente ans, comme en matière forestière, être certifiée par une entité agréée au titre de la protection de l'environnement et signée en dehors de toute démarche de compensation des atteintes écologiques pour encourager la participation spontanée et volontaire des propriétaires dans la préservation de la biodiversité et des fonctions écologiques.
De tels amendements ne peuvent pas figurer dans la première partie du projet de loi de finances dans la mesure où ils créeraient un effet d'aubaine sur les dispositifs existants. Je vous demande de bien vouloir les redéposer en deuxième partie, même si je suis réservé sur les chances qu'ils auraient d'y prospérer. Je comprends bien leur finalité écologique, mais j'ai toujours un problème quand une proposition n'est pas chiffrée. De plus, je ne suis pas totalement convaincu par le lien entre droits de mutation à titre gratuit et acceptation d'une ORE.
Je préfère maintenir ces amendements en première partie. Certes, ils ne sont pas chiffrés – cela est impossible puisque seuls cinq contrats d'ORE ont été signés aujourd'hui. L'exonération des droits de mutation est difficile à estimer dans ces conditions. C'est justement pourquoi nous voulons inciter à la signature d'un plus grand nombre d'ORE. Compte tenu de l'enjeu écologique, je maintiens ces amendements.
La commission rejette successivement les amendements I-CF1535, I-CF1216 et I-CF1217.
Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements I-CF808 de M. Jean-Paul Dufrègne et I-CF1185 de M. Jean-Louis Bricout.
L'amendement I-CF808 propose de rétablir l'impôt de solidarité sur la fortune ! Comment faire autrement après que, des mois durant, cette année, nombre de nos concitoyens ont demandé le rétablissement de l'impôt de solidarité sur la fortune, que vous avez supprimé en 2017 ?
D'ailleurs, dans un rapport commandé par le Gouvernement à l'issue du grand débat national, qui a fait ressortir ce sujet en tête des revendications de nos concitoyens au nom de la justice fiscale, France Stratégie indique qu'il est impossible de dire si cette mesure a effectivement bénéficié à l'économie. En revanche, elle a bénéficié aux 5 % des ménages les plus riches, avec un gain de 6 500 euros par an et par ménage.
Ce cadeau, qui coûte cher au budget de l'État – 2,9 milliards d'euros –, a profité à 600 000 familles possédant un patrimoine total taxable de 1 028 milliards d'euros. Nous vous proposons de leur reprendre 2,9 milliards : il leur en restera bien assez !
L'amendement identique I-CF1185 a été parfaitement défendu par mon collègue. Quand je vois les propositions que vous faites pour exonérer encore et toujours les plus aisés, je doute fort que vous les acceptiez !
Je note que vous ne citez pas le comité d'évaluation des réformes de la fiscalité du capital lorsqu'il dit beaucoup de bien du prélèvement forfaitaire unique (PFU) ! Le rapport de ce comité dit qu'il est extrêmement difficile de faire une évaluation à court terme. Ce choix a été fait en début de quinquennat et vos amendements sont totalement opposés à la position du Gouvernement : je ne vous surprendrai donc pas en émettant un avis défavorable.
La commission rejette les amendements I-CF808 et I-CF1185.
Elle en vient aux amendements identiques I-CF264 de M. Nicolas Forissier, I-CF420 de Mme Véronique Louwagie et I-CF1094 de M. Éric Pauget.
Nous proposons, pour notre part, la suppression de l'impôt sur la fortune immobilière (IFI).
La majorité a pris une bonne décision en supprimant l'impôt de solidarité sur la fortune et en remettant cet argent dans le circuit économique. On peut discuter des modalités, mais c'était très important en termes d'attractivité et d'image de la France. Le problème, c'est que vous vous êtes arrêtés à mi-chemin en conservant un impôt sur la fortune immobilière, atténuant considérablement l'attractivité recherchée. De ce fait, la base de cet impôt peut à nouveau être élargie : l'incertitude demeure, ce qui est extrêmement préjudiciable au retour ou à l'investissement de ceux qui avaient quitté notre pays. Il est donc très important d'aller jusqu'au bout de la démarche. Ce serait une façon aussi de baisser la fiscalité et de recycler cet argent dans l'économie de tous les jours.
J'ajoute que l'impôt sur la fortune immobilière est injuste, car il pèse sur les petits patrimoines, les petites fortunes. Les très riches, ceux qui possèdent beaucoup de valeurs mobilières, sont avantagés ; mais ceux qui n'ont pour patrimoine que ce qu'ils ont accumulé au fil d'une vie de travail dans le but de le léguer à leurs enfants continuent de payer un impôt sur la fortune immobilière. Chers collègues de la majorité, soyez cohérents, supprimez cet impôt !
Je veux juste rappeler que l'IFI a contribué à stigmatiser la notion de propriété dans notre pays, notamment la propriété immobilière, qui fait partie de notre ADN. À ce titre, il faut le supprimer, et c'est l'objet de l'amendement identique I-CF1094.
Je ne vous surprendrai pas en donnant un avis défavorable à ces amendements de suppression d'un dispositif qui, en plus, a eu le bon goût de rapporter plus que prévu !
L'argument final du rapporteur souligne que les estimations de recettes du Gouvernement étaient inférieures de moitié à ce que l'on percevra en 2020 ! Nous en sommes à près de 2 milliards anticipés : c'est bien la preuve qu'il y a anguille sous roche ! Cela reste un très mauvais impôt.
Il y a quelque chose de choquant à devoir payer l'IFI quand on investit dans l'immobilier pour le louer à des personnes qui ont besoin d'un logement, et de n'avoir rien à payer si l'on investit dans un patrimoine de valeurs mobilières ou de valeurs étrangères. Ce n'est pas d'un côté blanc et de l'autre noir, avec fiscalité ou sans fiscalité ; cela devrait former un ensemble. Mais je pense que nous ne serons jamais d'accord sur ce point !
La commission rejette les amendements I-CF264, I-CF420 et I-CF1094.
Elle est saisie de l'amendement I-CF888 de M. Éric Pauget.
Sortons au moins la résidence principale de l'immobilier assujetti à l'IFI ! Tel est l'objet de cet amendement.
En effet, un abattement de 30 %. Ce débat a déjà eu lieu lors de la création de l'IFI. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement I-CF888.
Article additionnel après l'article 3 : exonération partielle d'impôt sur la fortune immobilière des monuments historiques situés en zone de revitalisation rurale
Elle examine ensuite l'amendement I-CF770 de M. Gilles Carrez, qui fait l'objet du sous-amendement I-CF1574 du rapporteur général.
L'amendement I-CF770 résulte du travail que je mène comme rapporteur spécial du patrimoine depuis deux ans. Il vise à étendre l'exonération de 75 % de l'IFI, qui existe d'ores et déjà pour les bois, les forêts ou les terres agricoles données à bail, aux immeubles classés ou inscrits au titre des monuments historiques, à la condition qu'ils soient ouverts au public et situés en zone de revitalisation rurale. Ces conditions sont donc très restrictives.
Pour lutter contre la fracture territoriale, il faut davantage utiliser notre patrimoine historique, qui présente beaucoup d'atouts, tant du point de vue économique – cela est créateur d'emplois – que du point de vue touristique. Pour redonner la vie à des secteurs en grande difficulté, l'on pourrait miser sur les monuments historiques. Or il est extrêmement difficile aujourd'hui pour le propriétaire d'un tel lieu d'acquitter l'IFI en totalité, alors qu'il serait tout à fait disposé à ouvrir au public et à faire en sorte que le territoire local tire parti de ce monument.
Je présente un sous-amendement pour encadrer l'exonération proposée, avec des obligations déclaratives annuelles du propriétaire au service en charge des monuments historiques. Ce sujet a été évoqué par plusieurs parlementaires de manière beaucoup plus large. Je souhaite donner un avis favorable à l'amendement à la condition expresse que soit voté le sous-amendement.
Je suis tout à fait d'accord, d'autant qu'une mission conjointe de l'inspection des finances et du ministère de la culture travaille actuellement sur une meilleure définition des critères d'ouverture au public. Le coût de cette mesure est évalué entre un et 3 millions d'euros, car cela ne concerne que quelques centaines de sites. Il est donc très réduit.
Avec tout le respect que je dois à monsieur Carrez et à notre rapporteur général, nous ne souhaitons pas ouvrir une nouvelle niche sur l'IFI. Son champ est relativement large et remettrait en cause l'équilibre auquel nous sommes parvenus sur l'impôt sur la fortune immobilière.
Cet abattement existe ; il figure dans le code des impôts pour les bois, forêts et terres agricoles.
Cela répond à une vraie raison. La question n'est pas de créer une niche fiscale ou pas, mais de savoir si elle a un sens.
Toutes les activités économiques que vous préconisez peuvent tout à fait être réalisées sans bénéficier d'une exonération d'IFI. Je ne comprends pas du tout le lien que vous faites entre une telle exonération et la valorisation du patrimoine, son ouverture au public ou l'activité économique.
Si l'on prend l'exemple de Chenonceau ou de Vaux-le-Vicomte, vous avez raison. Mais il s'agit, en l'occurrence, de petits sites dont les recettes commerciales sont tout à fait insuffisantes pour faire vivre leur propriétaire. Celui-ci, obligé d'avoir une activité professionnelle par ailleurs, est donc assujetti à l'IFI. On en arrive à ce paradoxe que les propriétaires de très grands sites comme Chenonceau ou Vaux-le-Vicomte ne sont pas soumis à l'IFI alors que les propriétaires de sites moins remarquables sont entravées par l'IFI.
Nous ne pouvons que soutenir cet amendement, rendu encore plus opérationnel par le sous-amendement. Cela ne peut que rendre les territoires plus attractifs, créer des gains économiques et de l'activité, et donc générer des rentrées fiscales. Il ne peut pas y avoir de pertes, cela me semble évident.
La commission adopte le sous-amendement I-CF1574 puis l'amendement I-CF770 ainsi sous-amendé.
Enfin, elle en vient à l'amendement I-CF1126 de M. Éric Pauget.
Il s'agit d'exclure de la base de l'IFI un bien immobilier ou un logement qui serait mis en location pour une résidence principale avec un loyer encadré. Cela permettrait de mettre des logements sur le marché.
Un bien loué avec un loyer encadré présente une valeur vénale inférieure à celle d'un bien libre. Il y a donc déjà un avantage à l'IFI à louer un bien avec un loyer encadré. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement I-CF1126.
Membres présents ou excusés
Réunion du mardi 8 octobre 2019 à 21 heures
Présents. - M. Saïd Ahamada, M. Jean-Noël Barrot, Mme Émilie Bonnivard, M. Jean-Louis Bricout, M. Fabrice Brun, Mme Émilie Cariou, M. Gilles Carrez, M. Michel Castellani, Mme Anne-Laure Cattelot, M. Jean-René Cazeneuve, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Jean-Paul Dufrègne, Mme Stella Dupont, M. Bruno Duvergé, Mme Sarah El Haïry, M. Nicolas Forissier, M. Olivier Gaillard, M. Joël Giraud, Mme Perrine Goulet, Mme Olivia Gregoire, Mme Nadia Hai, M. Alexandre Holroyd, M. Christophe Jerretie, M. François Jolivet, M. Daniel Labaronne, M. Mohamed Laqhila, M. Michel Lauzzana, M. Vincent Ledoux, Mme Patricia Lemoine, Mme Véronique Louwagie, Mme Marie-Ange Magne, Mme Lise Magnier, M. Jean-Paul Mattei, Mme Cendra Motin, Mme Catherine Osson, M. Xavier Paluszkiewicz, M. Hervé Pellois, Mme Valérie Petit, Mme Bénédicte Peyrol, Mme Christine Pires Beaune, M. François Pupponi, M. Xavier Roseren, M. Fabien Roussel, Mme Sabine Rubin, M. Benoit Simian, Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas, M. Éric Woerth
Excusés. - M. David Habib, M. Marc Le Fur, Mme Valérie Rabault, M. Olivier Serva
Assistaient également à la réunion. - Mme Valérie Beauvais, Mme Josiane Corneloup, M. Fabien Di Filippo, M. Matthieu Orphelin, M. Éric Pauget, Mme Frédérique Tuffnell, M. Arnaud Viala, M. Philippe Vigier, M. Jean-Marc Zulesi
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