Mardi 15 octobre 2019
La séance est ouverte à vingt-et-une heures trente.
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(Présidence de M. Brigitte Bourguignon, présidente)
La commission examine la suite des articles du projet de loi de financement de la sécurité sociale (n° 2296
TROISIÈME PARTIE DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L'ÉQUILIBRE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L'EXERCICE 2020
TITRE Ier DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES, AU RECOUVREMENT ET À LA TRÉSORERIE
Chapitre Ier Favoriser le soutien à l'activité économique et aux actifs
Article 7 : Reconduction du versement d'une prime exceptionnelle exonérée de contributions et cotisations sociales
La commission examine, en discussion commune, les amendements AS885 de M. Paul Christophe et AS145 de M. Pierre Dharréville.
L'amendement AS885 vise à réserver la condition d'un accord d'intéressement pour le versement d'une prime exceptionnelle aux entreprises de plus de onze salariés. En effet, la mise en place d'un accord d'intéressement dans les entreprises de moins de onze salariés se heurte à de nombreux freins, notamment d'ordre administratif, et risque fort de ne pas être effective dans les entreprises employant deux ou trois salariés, ce qui priverait ceux-ci de la prime exceptionnelle et serait contraire à la volonté du Gouvernement d'augmenter le pouvoir d'achat des salariés. Je précise que cet amendement est conforme à des dispositions relatives aux effets de seuil que nous avions défendues lors de l'examen du projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises (« PACTE »).
La prime exceptionnelle constitue en soi un outil de contournement du salaire socialisé, ce qui peut réduire chaque année la masse salariale, donc les rentrées de cotisations sociales pour la sécurité sociale.
Accorder cette prime aux grandes entreprises apparaît injuste, car elles ont la capacité d'augmenter les salaires sans passer par des dispositifs dérogatoires exonérés de cotisations sociales. En outre, ces grandes entreprises sont aujourd'hui les principales utilisatrices des dispositifs d'intéressement qui permettent de verser des primes à leurs salariés sans régler les cotisations sociales obligatoires. Ainsi, l'intéressement bénéficie à 75 % des salariés des entreprises de plus de 1 000 salariés.
À l'inverse, la prime peut se justifier pour les plus petites entreprises qui utilisent encore peu l'intéressement en dépit de l'exonération de forfait social décidée dans le cadre de la loi « PACTE ». C'est pourquoi l'amendement AS145 propose de limiter le champ d'application de la prime exceptionnelle aux entreprises de moins de 250 salariés.
Je suis très sensible à la volonté du Gouvernement d'accompagner la prime exceptionnelle de signature de contrats d'intéressement dans les entreprises : c'est l'un des objectifs de la loi « PACTE », que soutient la majorité.
Je suis également très sensible aux arguments des organisations qui représentent les toutes petites entreprises, selon lesquelles la prime exceptionnelle d'intéressement peut être difficile à appliquer dans les entreprises de deux ou trois salariés, ce qui risque malheureusement de priver les salariés concernés de cette prime. Nous avons vu au cours des auditions que la procédure à suivre par les entreprises pour signer les accords d'intéressement sera extrêmement simple, puisqu'un kit comprenant un contrat-type sera mis à leur disposition. Il est cependant permis de se demander si les toutes petites entreprises pourront conclure un tel accord dans les délais. Nous aurons certainement l'occasion d'échanger sur ce point en séance publique mais, dans l'immédiat, j'émets un avis favorable à l'amendement AS885.
Je suis en revanche défavorable à l'amendement AS145 car il est contraire à l'esprit du texte, qui est de permettre à tous les salariés de France de pouvoir bénéficier de la prime exceptionnelle, et d'encourager les entreprises à signer des accords d'intéressement.
La commission adopte l'amendement AS885.
En conséquence, l'amendement AS145 tombe.
La commission est saisie de l'amendement AS1017 de M. Sylvain Maillard.
Pour des raisons pratiques, la mise en place d'un accord d'intéressement dans les entreprises de moins de onze salariés risque d'être difficile. C'est pourquoi l'amendement AS1017 vise à ne pas conditionner, pour les employeurs de moins de onze salariés, le versement de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat à l'existence d'un accord d'intéressement – il serait en effet dommage que les salariés concernés soient les oubliés de ce dispositif.
Si la procédure de conclusion de l'accord d'intéressement a été extrêmement simplifiée, comme l'a dit M. le rapporteur général, il subsiste néanmoins des difficultés au sein des petites entreprises. L'amendement AS1017 a pour objet d'y remédier, afin de rendre plus facile la distribution des primes exceptionnelles.
Cet amendement étant satisfait par l'amendement AS885 que nous venons d'adopter, je vous invite à le retirer.
L'amendement est retiré.
La commission examine l'amendement AS735 de Mme Christine Cloarec-Le Nabour.
Mon amendement vise à simplifier l'information des entreprises de travail temporaire sur le versement de la prime par l'entreprise utilisatrice.
Il y a eu cette année beaucoup de contentieux résultant du fait que, si les agences de travail temporaire sont à même de verser la prime exceptionnelle, elles ne disposent pas toujours pour le faire d'informations suffisantes de la part de l'entreprise utilisatrice. Afin d'y remédier, mon amendement a pour objet de rendre obligatoire la désignation, par l'entreprise utilisatrice, des salariés intérimaires bénéficiaires de la prime ainsi que le montant devant être versé à chacun d'entre eux.
Cet amendement de précision me semble satisfait par l'état du droit, puisque le dispositif existant met déjà à la charge de l'entreprise utilisatrice une obligation d'information de l'entreprise de travail temporaire au sujet du versement de la prime, des salariés concernés et des modalités de versement de la prime.
L'ensemble de ce dispositif est précisément destiné à éviter les doublons, tout en permettant à l'entreprise de travail temporaire d'établir son propre plan de versement de la prime. Nous pouvons toujours interroger le ministre en séance publique à ce sujet, mais au vu des éléments dont je dispose, votre amendement me semble satisfait et je vous invite donc à le retirer.
L'amendement est retiré.
La commission est saisie de l'amendement AS378 de Mme Caroline Fiat.
Puisqu'il est ici question d'une prime exceptionnelle exonérée des contributions et des cotisations sociales, je commencerai par dire que nous préférerions voir les Français bénéficier de véritables augmentations de salaire.
En ce qui concerne le salaire lui-même, nous sommes en désaccord depuis le début de ce quinquennat avec votre politique, qui considère que le salaire se résumerait au salaire net. Pour notre part, nous livrons un combat qui nous tient à coeur pour faire valoir que les cotisations sont une part du salaire et que, lorsqu'on vous supprime des cotisations, chaque euro en moins cotisé représente un euro en moins pour les soins, pour les hôpitaux, pour la prise en charge en établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) ou pour l'accompagnement des femmes enceintes.
Dans un souci de clarté et afin qu'il ne puisse plus être dit qu'en baissant les cotisations, on augmente le salaire, nous proposons avec l'amendement AS378 que soient indiquées sur le bulletin de salaire les conséquences négatives des exonérations de cotisations sociales pour le budget de la sécurité sociale, ainsi que la diminution afférente des prestations sociales. Ainsi, chacun saura que, si les cotisations sociales disparaissent, demain ce sont potentiellement des soins et des prestations qui disparaîtront également. Nous y voyons un nécessaire exercice de clarification et d'honnêteté.
La question que vous posez avec cet amendement est celle de la substitution de la prime exceptionnelle à des éléments de rémunération qui seraient soumis à cotisations. C'est un débat en soi, mais nous ne disposons pas de l'ensemble des données fiscales et sociales qui permettraient de déterminer s'il y a ou non une substitution évidente.
Je pourrais me montrer taquin avec vous, monsieur Quatennens, et vous dire que si l'on devait indiquer aux salariés les prestations qu'une diminution des cotisations sociales est censée faire disparaître, il faudrait aussi leur signaler les bonnes nouvelles, à savoir la baisse du nombre de chômeurs ou l'augmentation du pouvoir d'achat.
Comme vous vous en doutez, j'émets un avis défavorable à votre amendement.
On peut jouer à ce petit jeu, monsieur le rapporteur général, mais je ne suis pas sûr que vous en sortiez gagnant... Si on doit évoquer une baisse du chômage, il faut être honnête jusqu'au bout et ne pas se contenter de dire aux Français que le chômage baisse : il faut leur préciser que les statistiques du chômage baissent, ce qui est différent. Quand vous partez en formation, vous disparaissez des statistiques ; quand vous signez un contrat extrêmement court, parfois de quelques jours seulement, vous disparaissez des statistiques également. Vous le voyez, s'il fallait jouer pleinement le jeu de l'honnêteté, je ne suis pas sûr que la majorité en sortirait gagnante.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine l'amendement AS619 de M. Philippe Vigier.
Nous ne sommes pas du tout opposés à la prime d'intéressement prévue par la loi de 2018 portant mesures d'urgence économiques et sociales (« MUES ») mais, comme l'a dit notre collègue Sylvain Maillard, cette prime est très compliquée à appliquer au sein des très petites entreprises. Je rappelle qu'un premier bilan de ce dispositif a été établi en mars dernier par un rapport de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), qui indiquait que moins de 30 % des établissements de plus de 2 000 salariés ont versé une prime, contre moins de 10 % pour les établissements de moins de dix salariés. Cela montre bien que nous devons trouver un dispositif complètement différent pour les petites entreprises : tel est l'objet de notre amendement AS619 – que je suis disposé à retirer s'il est satisfait.
Votre amendement n'est pas satisfait par l'adoption de l'amendement AS885, qui concerne uniquement les petites entreprises de moins de onze salariés. Pour ce qui est des entreprises employant entre 11 et 250 salariés, elles ont vocation à être très fortement incitées à conclure des accords d'intéressement, c'est pourquoi j'émets un avis défavorable à votre amendement.
La commission rejette l'amendement.
Elle est ensuite saisie de l'amendement AS664 de Mme Sarah El Haïry.
On constate dans le monde associatif, qui emploie 1 800 000 salariés, un blocage dans la mise en oeuvre des dispositions relatives à la prime d'intéressement, la conclusion d'accords portant sur ce point ne faisant pas partie de la culture des associations. Afin que les 920 000 salariés du secteur sanitaire et social, les 60 000 salariés de la culture ou encore les 80 000 salariés du sport puissent bénéficier du versement de la prime exceptionnelle, qui a vocation à augmenter le pouvoir d'achat, mon amendement vise à préciser que la condition d'instauration d'un accord d'intéressement pour le versement de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat ne s'applique pas aux associations.
Cet amendement est intéressant, car un certain nombre d'entreprises du secteur de l'économie sociale et solidaire n'ont effectivement pas vocation à passer des accords d'intéressement. Or, il faut éviter que les salariés de ces entreprises soient privés du versement de la prime exceptionnelle. J'émets donc un avis favorable à cet amendement, en attendant la discussion en séance publique.
La commission adopte l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement AS821 de M. Joël Aviragnet.
L'amendement AS821 vise à resocialiser la prime exceptionnelle, bien accueillie par les salariés même si elle ne bénéficie pas à tous, et à laquelle nous sommes donc favorables. En effet, au regard du déficit important, pour ne pas dire abyssal, de la sécurité sociale, il convient de rétablir les cotisations et contributions sociales, qui permettent aussi d'augmenter les droits des salariés. Par ailleurs, du fait de sa défiscalisation et de sa désocialisation, cette prime exceptionnelle s'est substituée progressivement au salaire, et est ainsi responsable d'une baisse de l'augmentation de la masse salariale au premier trimestre 2019.
L'année dernière, délivrée sur trois mois, la prime exceptionnelle a bénéficié à 5 millions de salariés, travaillant dans 408 000 établissements, pour un gain total de pouvoir d'achat supérieur à 2 milliards d'euros. Ce dispositif a donc connu un succès allant au-delà de toutes nos espérances, et nous souhaitons le reconduire l'année prochaine.
Il est évident que l'exonération de cotisations sociales a joué un rôle déterminant dans un versement de cette ampleur et que le rétablissement des cotisations lui ferait perdre une grande part de son intérêt. Je souhaite que nous profitions du prochain Printemps de l'évaluation pour déterminer, sur la base des chiffres que nous aura entre-temps fournis l'ACOSS, si la prime exceptionnelle a eu ou non une incidence sur la masse salariale, et quel sort doit être réservé à ce dispositif.
En l'état actuel des choses, j'émets un avis défavorable à votre amendement.
Monsieur le rapporteur général, j'appelle votre attention sur le fait que l'ACOSS a d'ores et déjà relevé un repli de la masse salariale de 0,3 % durant le premier trimestre 2019, après une augmentation de 0,8 % au cours du dernier trimestre 2018. L'explication en est simple : les entreprises ont versé une prime en 2018, et procédé juste après à une compression salariale afin de se rembourser !
L'amendement vise à prévenir ce comportement par la mise en oeuvre d'une solution équilibrée, consistant à continuer à défiscaliser mais à ne plus désocialiser, afin que les salariés ne soient pas doublement perdants – d'une part du fait de la désocialisation, d'autre part de l'effet d'aubaine dont ont profité les employeurs en diminuant la masse salariale.
Dans la mesure où vous disposez déjà des éléments d'évaluation que vous dites attendre, monsieur le rapporteur général, je vous engage à ne pas commettre une deuxième fois une erreur d'appréciation en repoussant la proposition consistant à resocialiser la prime exceptionnelle.
Monsieur le rapporteur général, vous venez de répondre à nos collègues socialistes que vous aviez pu quantifier le gain de pouvoir d'achat de la désocialisation et de la défiscalisation. Afin que nous soyons parfaitement informés, pourriez-vous également nous indiquer combien cette mesure va représenter en termes de lits d'hôpitaux en moins, de prestations sociales et de prises en charge en EHPAD supprimées ?
La commission rejette l'amendement.
Puis elle est saisie de l'amendement AS1 de M. Sylvain Maillard.
L'amendement est retiré.
La commission examine ensuite l'amendement AS335 de Mme Delphine Bagarry.
L'an dernier, afin de répondre à une situation d'urgence sociale, l'ensemble des groupes parlementaires ont voté une loi contenant des mesures en faveur du pouvoir d'achat. L'article 7 prolonge aujourd'hui une disposition de cette loi, à savoir le versement d'une prime exceptionnelle exonérée de cotisations sociales, en conditionnant cependant celui-ci à la conclusion d'un accord d'intéressement.
Au regard de l'incidence financière de cette mesure, il semble nécessaire d'informer le Parlement de son efficacité, en indiquant notamment dans quelle mesure elle a été profitable aux salariés plutôt qu'aux entreprises. Plus précisément, il importe de connaître son impact éventuel sur les négociations entre les partenaires sociaux portant sur l'augmentation des salaires, et de savoir s'il existe un effet d'aubaine qui la rendrait contre-productive pour l'augmentation des salaires. Si tel était le cas, et si la prime perdait son caractère exceptionnel, il faudrait faire en sorte d'apporter des correctifs au dispositif.
Madame Bagarry, ce que j'ai proposé tout à l'heure, à savoir profiter du Printemps de l'évaluation pour nous interroger sur les effets de la prime exceptionnelle, me semble satisfaire votre amendement. Je vous promets une évaluation rigoureuse, objective et à laquelle chacun pourra prendre part, comme cela avait été le cas l'année dernière au sujet d'un certain nombre de dispositifs.
Les chiffres de l'ACOSS cités par Boris Vallaud sont exacts, mais ils reposent sur une évaluation sur trois mois, et l'Agence elle-même reconnaît qu'il est difficile d'en tirer des conclusions définitives. Le dispositif législatif prévoit que les entreprises ne peuvent pas remplacer une augmentation de salaire par la prime, mais quant à savoir ce qu'il en est réellement, il semble que les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) ne disposent pas d'un recul suffisant pour le dire. En tout état de cause, nous serons extrêmement vigilants sur ce point dans le cadre du Printemps de l'évaluation.
Dans l'immédiat, je vous propose de retirer votre amendement et de participer à l'exercice d'évaluation collective auquel nous allons procéder au printemps prochain.
Je retire mon amendement, dont j'envisage de proposer le thème pour de prochains travaux de la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS), car il entre tout à fait dans son champ de compétence.
L'amendement AS335 est retiré.
La commission adopte l'article 7 modifié.
Article 8 : Ajustement du calcul des allégements généraux
La commission est saisie de l'amendement AS322 de Mme Jeanine Dubié.
L'amendement vise à retirer les conditions restrictives d'application de la déduction forfaitaire spécifique (DFS). L'article 8 prévoit le plafonnement du montant de la réduction générale de cotisations patronales pour les employeurs qui appliquent la déduction forfaitaire spécifique à 130 % des allégements auxquels a droit un employeur de droit commun.
Aujourd'hui, l'abattement de 10 % pour frais professionnels permet aux employeurs, notamment dans le secteur du bâtiment et des travaux publics, de prendre en charge les paniers-repas et les frais kilométriques de leurs salariés. Limiter la portée de ce dispositif représenterait une hausse de charges considérable pour les entreprises – environ 1 milliard d'euros rien que pour les entreprises du bâtiment et des travaux publics – et, par ricochet, une baisse de la paye nette des ouvriers, alors que nous essayons tous d'oeuvrer en faveur du pouvoir d'achat.
Les très petites entreprises (TPE) et petites et moyennes entreprises (PME) situées en zones rurales, déjà affectées par les fractures territoriales que chacun connaît, seraient encore plus violemment touchées que les autres par cette décision, puisque ce sont celles qui envoient le plus de salariés en déplacement sur des chantiers.
Nous souhaitons donc maintenir les conditions actuelles d'application de la DFS : tel est l'objet de notre amendement, qui vise à supprimer les conditions restrictives prévues par l'article 8.
Votre amendement conduit à supprimer des précisions rédactionnelles concernant ce qu'on appelle la « cotisation socle » patronale, à destination de la branche accidents du travail et maladies professionnelles – ce qui, je crois, n'était pas votre intention : vous voulez en fait parler de la DFS, qui va bien être modifiée, mais par voie réglementaire – par le Gouvernement, donc – et non par voie législative.
Je vous invite par conséquent au retrait de cet amendement.
Je retire l'amendement, que je redéposerai en vue de la séance publique s'il n'est pas satisfait entre-temps.
L'amendement AS322 est retiré.
La commission examine ensuite l'amendement AS981 de M. Joël Aviragnet.
Cet amendement du groupe Socialistes et apparentés propose d'éviter les effets de bords de la réforme du bonus-malus. On dénombre actuellement 400 entreprises en France dont tous les salariés sont au SMIC et qui, alors qu'elles ne payent pas de charges sociales, seraient tout de même bénéficiaires d'un bonus. Afin d'éviter que la sécurité sociale ne devienne leur débitrice, ce qui serait pour le moins curieux, nous proposons d'instituer un plafond.
Rien n'échappe à la sagacité de Boris Vallaud. En l'occurrence, il soulève une question que nous avons posée au cours de nos auditions, relative à la situation de certaines entreprises qui n'auraient que des salariés au SMIC et pourraient cumuler le dispositif de bonus avec les allégements de cotisations patronales.
Or, les cas allégués paraissaient tellement fictifs et virtuels que nous n'avons pas obtenu de réponse à cette question qui tendait à laisser croire à la nécessité de légiférer, au moins pour apporter une correction au dispositif actuel.
Par ailleurs, votre proposition consistant à instaurer une limite par décret ajouterait de la complexité à un système de bonus-malus et d'allégements déjà touffu. Elle aurait vocation à être évoquée dans le cadre du Printemps de l'évaluation s'il y a plus d'entreprises concernées que je ne le pense mais, dans l'immédiat, je vous invite à retirer cet amendement, et émettrai à défaut un avis défavorable.
Je n'ai pas été convaincu par le Printemps de l'évaluation, c'est pourquoi je vais maintenir mon amendement.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle est saisie de l'amendement AS381 de M. Jean-Hugues Ratenon.
Le respect de la dignité humaine n'est pas une valeur accessoire. Pourtant, par l'hyper-financiarisation de notre système économique, les salariés semblent n'être plus que des variables d'ajustement dans les comptes des actionnaires, des citrons que certains managers pourraient presser toujours un peu plus...
Ainsi, en raison de mauvaises conditions de travail, de la faiblesse de la rémunération ou de pratiques managériales agressives, de nombreuses entreprises connaissent un turn-over important. Aussi, prévoir un malus sur les cotisations patronales des entreprises au sein desquelles le renouvellement des salariés serait trop important va dans le bon sens. L'augmentation du niveau de cotisations patronales permettrait en effet de compenser financièrement les effets d'une prise en charge des salariés en souffrance.
Toutefois, un système de bonus semble quant à lui déplacé. En effet, si les entreprises fautives doivent être sanctionnées, les entreprises respectant les règles n'ont pas à être récompensées.
En matière de sécurité routière, par exemple, le Gouvernement prévoit-il de récompenser financièrement les conducteurs n'ayant pas reçu de contravention depuis plus d'un an ? Assurément non.
L'amendement AS381 prévoit donc de maintenir le malus pour les entreprises fautives, mais de supprimer le bonus pour celles qui ne font que respecter les règles et traitent humainement leurs salariés.
L'avantage d'avoir un bonus à côté d'un malus, outre son aspect incitatif qui pousse les entreprises à mieux agir, notamment en matière de respect de l'égalité salariale, c'est que cela permet de maintenir un certain écart entre les entreprises vertueuses et celles qui ne le sont pas – un écart que vous réduisez si vous supprimez le bonus. J'estime qu'il vaut mieux conserver le bonus, et je suis donc défavorable à votre amendement.
Je souscris tout à fait à l'objectif évoqué par M. le rapporteur général, consistant à maintenir un écart important entre les entreprises qui respectent la règle et celles qui ne la respectent pas. Cela étant, pour atteindre cet objectif, je suggère pour ma part d'augmenter le malus.
Il semble qu'il y ait là matière à déposer un amendement en séance publique, monsieur Dharréville...
Tout comme mon collègue Pierre Dharréville, j'estime que nous pourrions augmenter le malus. Je rappelle que nous sommes ici pour fixer des règles sous la forme de lois, que les entreprises sont tenues de respecter. Que penser d'un système où on en vient à féliciter les entreprises qui ne font que respecter la loi, en leur distribuant des sucettes comme on le ferait à des enfants sages ? Si nous en venions à un tel système, alors il faudrait le généraliser, notamment en l'appliquant aux bons conducteurs, comme je l'ai dit précédemment.
Les salariés travaillent dans de bonnes conditions parce que les députés ont décidé qu'il devait en être ainsi, et les entreprises n'ont pas à être récompensées pour cela.
Toutes les entreprises respectent les règles : je rappelle que nous devons partir de ce postulat.
L'idée du bonus-malus est très simple : elle consiste à encourager les entreprises vertueuses et à pénaliser celles qui ne le sont pas. Cependant, je ne peux laisser dire que certaines entreprises ne respectent pas la loi.
Monsieur Maillard, je ne suis pas certain que l'on puisse affirmer que toutes les entreprises respectent les règles. Ma collègue Fiat n'a pas dit qu'aucune entreprise ne respectait les règles, mais prétendre, comme vous le faites, qu'elles le font toutes, me semble faux. Non, toutes les entreprises ne respectent pas les règles, j'en veux pour preuve le fait qu'il est nécessaire d'instaurer un malus.
M. Maillard devrait lire plus attentivement les rapports de la Cour des comptes, qui font régulièrement état du fait que certaines entreprises s'adonnent à la fraude fiscale et sociale : il est clair que ces entreprises ne respectent pas la règle.
Quand une entreprise fait appel à des travailleurs détachés afin de pouvoir les payer moins que le salaire minimum légal, elle ne respecte pas la règle. Ce n'est pas nous qui le disons, c'est la Cour des comptes : vous pouvez donc difficilement affirmer le contraire.
Mme Fiat a évoqué l'éventualité de récompenser les bons conducteurs. Dans le même esprit, je suggère que l'on ne se contente pas de sanctionner les demandeurs d'emploi refusant trois offres d'emploi, mais que l'on octroie une prime à ceux qui se verraient refuser un emploi par trois entreprises auxquelles ils auraient proposé leurs services.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'article 8 sans modification.
Après l'article 8
La commission examine successivement les amendements AS142, AS141, AS140 et AS136 de M. Pierre Dharréville.
Je vais me dépêcher de présenter mes amendements, madame la présidente, avant qu'ils ne soient tous tombés !
L'amendement AS142 prévoit l'extinction progressive sur deux ans de l'allégement de cotisation patronale d'assurance maladie – l'allégement crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) –, qui représente un coût annuel de 22,1 milliards d'euros pour l'assurance maladie. Ce dispositif, qui est distribué aux entreprises sans contrepartie, a montré son inefficacité en termes de création d'emplois. Il me semble absolument inutile de devoir attendre un an de plus un hypothétique Printemps de l'évaluation pour prendre des mesures sur ce point – je devance votre réponse, monsieur le rapporteur général –, et j'estime que nous devons au contraire prendre la mesure de ce qu'il faut faire, et conserver ces recettes pour faire face aux besoins criants en matière de protection sociale.
Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas lorsque les revenus distribués au sens de l'article 109 du code général des impôts sont supérieurs à 10 % du bénéfice imposable du dernier exercice clos.
L'allégement de cotisation patronale au titre du CICE est accordé sans contreparties aux entreprises, ce qui représente une somme de 22 milliards d'euros en 2019. À défaut d'obtenir sa suppression, l'amendement AS141 propose de limiter l'effet de cette mesure aux seules entreprises qui ne distribuent pas en dividendes une partie substantielle des bénéfices enregistrés.
L'amendement AS140 supprime de manière progressive, entre 2020 et 2022, le dispositif Fillon d'allégements généraux de cotisations patronales sur les bas salaires qui, outre son coût annuel pour les finances sociales – 26 milliards d'euros pour la sécurité sociale en 2019, dont 11 milliards d'euros pour la seule branche maladie –, encourage la création d'emplois peu qualifiés et mal rémunérés.
L'amendement AS136 vise à limiter le bénéfice des allégements généraux de cotisations sociales patronales aux seules entreprises qui s'engagent à augmenter leurs rémunérations pour éviter le phénomène de trappe à bas salaires. Ainsi, seules les entreprises d'au moins 50 salariés dont plus de la moitié des salariés perçoivent des rémunérations au-dessus de 1,6 SMIC pourraient bénéficier des réductions de cotisations patronales sur les bas salaires.
L'adoption de ces quatre amendements alourdirait instantanément le coût du travail dans notre pays de 40 milliards d'euros environ. Vous ne serez donc pas étonnés que j'émette un avis défavorable.
Vous n'êtes pas obligé de prendre les quatre, monsieur le rapporteur général, je suis disposé à négocier !
Quand vous dites que les mesures proposées alourdiraient le coût du travail de 40 milliards d'euros, vous omettez de préciser qu'elles augmenteraient les recettes de la sécurité sociale du même montant, ce qui n'est pas négligeable.
Je suis tenté, monsieur Dharréville, mais je maintiens mon avis défavorable : à lui seul, le premier amendement pèse 22,6 milliards d'euros, ce qui n'en fait pas un petit amendement...
La commission rejette successivement ces amendements.
Elle est saisie, en discussion commune, des amendements AS144 de M. Pierre Dharréville et AS646 de M. Sacha Houlié.
L'amendement AS144 prévoit de limiter le champ d'application de l'allégement de cotisations patronales familiales, issu du Pacte de responsabilité, aux seuls bas salaires, c'est-à-dire aux seules rémunérations inférieures à 1,6 fois le SMIC.
Comme l'a démontré le Conseil d'analyse économique dans une note de janvier 2019 intitulée « Baisses de charges : stop ou encore ? », ce dispositif, qui s'applique aux rémunérations jusqu'à 3,5 fois le SMIC, est inefficace en termes de créations d'emplois et de compétitivité. Il est également coûteux pour les finances sociales, avec une perte de recettes de 8 milliards d'euros pour la branche famille.
Le nouveau ciblage proposé permet de rapporter 4 milliards d'euros de recettes nouvelles pour la sécurité sociale en 2020.
L'amendement AS646 se fonde également sur la note du Conseil d'analyse économique que vient de citer M. Dharréville, ainsi que sur le rapport « Soutenir les hommes et leurs entreprises » que j'ai rédigé conjointement avec mon collègue Pierre Person et qui porte sur cette note.
Nous avons mis en évidence dans notre rapport que les allégements de cotisations accordés ont eu une pertinence en tant que relais du CICE, c'est-à-dire jusqu'à 1,6 SMIC, avec des créations d'emplois massives et un renforcement de la compétitivité des entreprises.
En revanche, pour ce qui est des allégements de cotisations sur les rémunérations supérieures à 1,6 SMIC – et a fortiori sur celles comprises entre 2,5 et 3,5 SMIC, ce qui correspond à des salaires compris entre 3 000 euros et 4 200 euros –, aucune instance de contrôle, qu'il s'agisse de France Stratégie, de l'institut d'études économiques Rexecode ou encore de l'Institut des politiques publiques n'a été capable de nous en démontrer la pertinence, ni même d'établir qu'ils n'ont pas produit d'effets néfastes.
Nous estimons par conséquent que ces sommes doivent pouvoir être récupérées par l'État afin d'être réinvesties dans d'autres politiques publiques – efficaces, elles, pour l'emploi et la compétitivité des entreprises, qui étaient bien les objectifs poursuivis à l'époque par le législateur.
Notre amendement vient donc confirmer la pertinence de certaines exonérations de cotisations, tout en remettant en cause celles qui n'ont pu prouver la leur.
Ces deux amendements font suite au rapport du Conseil d'analyse économique portant sur les niches sociales et les effets d'aubaine pouvant résulter de certains allégements généraux de cotisations patronales. Plusieurs de nos collègues, parmi lesquels Sacha Houlié et Pierre Person, ont travaillé sur ces questions qui nous interpellent. Il en est effet intéressant de savoir si les nombreux allégements généraux de cotisations patronales sont tous indispensables, c'est-à-dire s'ils créent tous de la richesse et de l'emploi dans notre pays, ou si certains ne font que donner lieu à des effets d'aubaine, trop marqués pour qu'il soit intéressant de les conserver dans la durée. De ce point de vue, donc, le rapport du CAE avait été très intéressant.
Cela dit, la bascule du CICE s'est opérée récemment, avec la fameuse année double dont nous sortons, et le Gouvernement a exprimé la volonté de stabiliser la fiscalité des entreprises, afin de pouvoir constater dans la durée l'efficacité – ou l'absence d'efficacité – des différentes mesures d'allégement des cotisations patronales.
La vraie question est donc sans doute moins celle du « quoi » que celle du « quand ». Pour ce qui est des deux dispositions ici proposées, la première est un peu raide, en ce qu'elle supprime les allégements généraux dès 1,6 SMIC, ce qui représente un coût très important pour les entreprises – 4 milliards d'euros d'augmentation du coût du travail. J'y suis donc défavorable.
Quant à l'amendement de M. Houlié, il propose lui aussi une sortie assez abrupte du dispositif, à 2,5 SMIC. On aurait pu imaginer une sortie en biseau, entre 2,5 et 3,5 SMIC, avec une décroissance progressive – de l'ordre de 800 millions d'euros la première année et 800 millions d'euros la seconde, plutôt que de 1,6 milliard d'euros en une seule fois –, afin de permettre aux entreprises de faire face plus facilement aux augmentations de cotisations patronales que cela aurait pu entraîner. J'y suis donc également défavorable.
J'espère que les discussions en séance avec le Gouvernement nous permettront de progresser sur ces points sans perdre de vue l'objectif auquel nous sommes tous attachés, à savoir faire en sorte que les allégements de cotisations se traduisent bien par des créations d'emplois et de richesses dans notre pays. Il serait dommage que ce ne soit pas le cas.
Nous connaissons un peu le résultat, de même que l'ampleur des transferts de valeurs et de richesses qui ont été opérés dans notre pays depuis le travail vers le capital depuis une vingtaine d'années.
Les budgets précédents ont fait montre d'une grande générosité en la matière, une sorte d'assistance ayant vu le jour dont il convient aujourd'hui de se désintoxiquer. Voter cet amendement qui, de surcroît, semble faire quelques émules au sein de la majorité, me semblerait en l'occurrence un bon signal.
Nous devons avoir ce débat ici même et dans l'hémicycle. Un avis favorable de la commission pousserait peut-être le Gouvernement à réagir un peu et à évoluer, ce qui me paraîtrait intéressant.
Je remercie monsieur le rapporteur général pour son avis et les précisions apportées.
Je maintiens bien entendu mon amendement afin que la commission puisse se faire un avis sur cette question mais j'ajoute que si les baisses de cotisations ont pu avoir un effet conjoncturel lorsqu'il fallait relancer la machine, notamment afin de participer à la restauration des marges quand les entreprises en avaient besoin – je pense aux baisses visées dans notre amendement, avec M. Person – cet aspect conjoncturel même implique qu'elles n'ont pas vocation à être structurelles et ne doivent plus bénéficier aux rémunérations supérieures, comme l'a d'ailleurs dit le rapporteur général en évoquant une sortie en biseau – mais la commission jugera de ce qu'il doit en être à l'avenir, donc, dans les prochains projets de loi de financement de la sécurité sociale.
Sacha Houlié vient de lancer un débat intéressant sur ces exonérations qui, au départ, ont vocation à être limitées dans le temps. M. le rapporteur général chiffre nos mesures à 40 milliards mais une telle somme résulte d'une accumulation considérable des exonérations ! C'est aussi cela qui conduit à des chiffres effrayants !
Si nous décidons que des exonérations doivent être limitées dans le temps, alors, elles doivent l'être, sinon, il faut dire dès le départ qu'il en est autrement.
La commission rejette successivement les amendements
Puis elle examine l'amendement AS648 de M. Joël Aviragnet
L'amendement s'oppose à la désocialisation et la défiscalisation des heures supplémentaires pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, la non-compensation par l'État à la sécurité sociale des exonérations de cotisations sociales sur les heures supplémentaires, dont nous avons longuement parlé : cette somme non versée revenant de plein droit aux organismes sociaux creuse leur déficit et augmente l'endettement d'année en année. Avec ce type de mesures, la sécurité sociale devient une variable d'ajustement du budget de l'État, ce qui est tout de même difficilement acceptable.
Ensuite, la désocialisation des heures supplémentaires et complémentaires est un non-sens économique : le pays connaissant un taux de chômage de près de 10 %, il convient de ne pas inciter aux heures supplémentaires mais plutôt d'encourager un meilleur partage du travail.
Enfin, nous souhaitons rappeler que selon l'Observatoire français des conjonctures économiques – je renvoie à une note de juillet 2017 – cette mesure pourrait détruire 19 000 emplois et empêcher la création de 38 000 à 40 000 postes à l'horizon 2022 et coûterait 0,1 point de produit intérieur brut (PIB) aux finances publiques.
J'ajoute que le minuscule gain de pouvoir d'achat entraîné par cette mesure sera complètement anéanti par la sous-indexation des prestations sociales.
En fait, vous ne proposez pas le « travaillez plus pour gagner plus » de Nicolas Sarkozy, mais le « travaillez plus pour ne pas perdre plus » de M. le ministre Darmanin.
Si j'étais taquin, monsieur Aviragnet, je dirais que votre amendement est en partie satisfait. Vous craignez une perte de recettes pour la sécurité sociale mais comme vous avez voté le maintien de la compensation à l'article 3, la question ne se pose plus s'agissant des heures supplémentaires.
Plus sérieusement, vous prétendez que le gain de pouvoir d'achat est minuscule pour les Français, or, je ne sais si vous l'avez chiffré pour votre amendement mais, l'année dernière, il s'élevait à 1,8 milliard. Il est difficile d'expliquer aux salariés français qu'il s'agit là d'un gain minuscule.
Pour toutes ces raisons, avis défavorable.
J'entends bien : une telle somme est énorme, mais il faut regarder ce que cela représente Français par Français, et les salariés les plus modestes le savent.
La commission rejette l'amendement
Elle est ensuite saisie de l'amendement AS465 de M. Éric Woerth
Contrairement au groupe Socialistes et apparentés, nous voulons défiscaliser totalement les heures supplémentaires et proposons de ne pas soumettre aux cotisations patronales les salaires versés au titre des heures supplémentaires dès le 1er janvier 2020.
Je rappelle que la mesure prise par le Président Sarkozy visant à « travailler plus pour gagner plus » était concrète et avait rapporté régulièrement 500 euros environ à 9 millions de salariés, ce qui n'est pas rien.
Nous souhaitons donc aller plus loin que la simple désocialisation voulue par l'actuel Gouvernement en défiscalisant totalement les heures supplémentaires.
Avis défavorable pour les mêmes raisons que l'année dernière. Nous avons discuté de cette mesure – qui coûterait 2 milliards – dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2019 et de la loi « MUES ».
La commission rejette l'amendement
Elle examine ensuite l'amendement AS662 de M. Julien Dive
Cet amendement vise à favoriser l'employabilité des apprentis. Une TPE de moins de 11 salariés qui embauche et forme ces derniers doit être exonérée d'une partie des charges sociales et salariales afférentes dès lors qu'au terme du contrat d'apprentissage, elle leur propose un contrat à durée indéterminée (CDI). Outre que cela stabilise la situation de l'apprenti au sein de l'entreprise, celle-ci bénéficie d'un retour d'investissement pour le temps de formation qu'elle lui a consacré.
Vous proposez une exonération de cotisations sociales sur les rémunérations d'apprentis embauchés en CDI. L'idée est intéressante car il faut favoriser l'apprentissage mais je donnerai un avis défavorable, si vous ne retirez pas votre amendement, pour deux raisons. Tout d'abord, parce que les entreprises bénéficient déjà d'allégements considérables lorsqu'elles salarient un employé à moins de 1,6 SMIC, ce qui est le cas pour l'immense majorité des apprentis que vous visez. Ensuite, parce que votre amendement exclut les entreprises du bénéfice d'autres exonérations que celle que vous proposez, ce qui, pour un grand nombre d'entre elles, entraînerait un alourdissement de la charge qui pèse sur elles à raison de leurs autres salariés déjà embauchés.
La commission rejette l'amendement
Elle en vient à l'amendement AS898 de M. Jean-Félix Acquaviva
Cet amendement vise à étendre les exonérations de charges patronales prévues pour les entreprises implantées en zone de revitalisation rurale (ZRR) à celles situées dans une zone de développement prioritaire (ZDP), dispositif créé par l'article 135 de la loi de finances pour 2019 du 28 décembre 2018.
Cette nouvelle ZDP concerne la Corse, définie dans la loi comme île-montagne, territoire subissant un phénomène de contraintes cumulées où les surcoûts liés à ces spécificités pour les entreprises peuvent peser jusqu'à environ 9 % du chiffre d'affaires par an – étroitesse du marché, coûts du transport, difficulté de recrutement, surcoûts liés au surstockage...
Par cet amendement, il s'agit de favoriser le développement économique et l'emploi et de faire en sorte que nous disposions du bon avantage au bon niveau afin de faire disparaître ces contraintes cumulées et, surtout, d'améliorer le dispositif nouvellement créé, qui peine à démarrer faute d'avoir été fondé sur des mesures adéquates.
J'ai une carte de la magnifique Corse sous les yeux, monsieur Acquaviva. Hors Bastia et Ajaccio ainsi que leurs proches périphéries, toute la Corse est classée en ZRR. Créer un nouveau dispositif fiscal d'exonération uniquement pour deux grandes agglomérations très dynamiques serait à la fois complexe et pas forcément très adapté. Je vous propose, si vous en êtes d'accord, de retirer votre amendement.
Il est fort à propos puisque nous nous dirigeons vers la suppression des ZRR dans le projet de loi de finances (PLF) et que c'est bien cela qui nous inquiète ! Cet amendement vise précisément à faire en sorte que la ZDP, dispositif créé l'année dernière, prenne le relais – même si en tant qu'élu de montagne, je serais tout à fait d'accord pour que soit instaurée une zone fiscale prioritaire de montagne, nos amendements à ce sujet ayant été malheureusement repoussés l'année dernière. Faisons donc en sorte, au moins, que la ZDP soit efficace et qu'elle couvre toute la Corse !
Vous avez toujours le même avis sur cet amendement « préventif », monsieur le rapporteur général ?
La commission rejette l'amendement
Elle examine ensuite successivement les amendements AS309, AS308 et AS310 de M. Vincent Rolland
Nous avons déjà passé un peu de temps l'année dernière à discuter de l'amendement AS309. En séance, le Gouvernement s'était engagé à examiner comment il serait possible sinon d'exonérer, du moins, de diminuer fortement les cotisations vieillesse obligatoires pour certains professionnels libéraux – nous pensions notamment à de jeunes moniteurs stagiaires de ski, qui enseignent deux semaines l'hiver, ou à de jeunes retraités qui peuvent encore enseigner ce sport et renforcer les effectifs lorsqu'il y a beaucoup de monde. Les cotisations, aujourd'hui, sont tellement disproportionnées que nombreux sont ceux qui renoncent à quelques jours ou semaines d'activité.
L'amendement AS308 se situe dans la même veine mais est un peu moins généreux que le précédent.
L'amendement AS310, enfin, est défendu.
Nous débattons chaque année d'amendements concernant les moniteurs de ski. Winter is coming, comme on dit !
C'est une vraie question. L'année dernière, nous avions demandé un rapport au Gouvernement mais il ne l'a pas encore remis alors qu'il aurait dû l'être. Nous pourrons donc solliciter les ministres compétents pour savoir pourquoi et si l'on peut disposer d'un certain nombre d'éléments.
Depuis le dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), j'ai reçu des représentants des moniteurs de ski. Il est vrai que la cotisation de ceux d'entre eux qui sont saisonniers, dont l'activité est très réduite et qui gagnent quelques centaines ou milliers d'euros, peut paraître plus lourde dans le nouveau dispositif que dans le précédent. J'avais répondu, l'année dernière, qu'ils devaient s'inscrire au régime de micro-entrepreneur et que c'était très rapide sur internet, ce à quoi ils m'ont opposé que la déclaration des charges, des frais professionnels, n'était pas la même. Pour eux, le pourcentage de ces derniers peut en effet être élevé, ce qui peut soulever des difficultés.
Je vous propose de retirer vos amendements et que nous en discutions dans l'hémicycle – de toute façon, cela n'existe pas, un PLFSS où nous ne discuterions pas des problèmes rencontrés par les moniteurs de ski ! Si vous en êtes d'accord, nous pouvons approfondir cette question d'ici la semaine prochaine.
Sur le principe, je n'ai guère envie de retirer les amendements, ce qui n'empêche pas que nous en rediscutions. Dites-vous que c'est bien souvent d'étudiants dont il s'agit et que ces deux semaines de vacances leur permettent de disposer d'un revenu complémentaire pour financer leurs études ! Le niveau des pensions des moniteurs retraités, comme vous le savez sans doute, est quant à lui dérisoire – pour ne pas employer un autre terme – même s'ils ont une carrière complète.
Discutons-en donc encore, oui mais, en attendant, je maintiens ces amendements.
La commission rejette successivement les amendements
Elle étudie ensuite l'amendement AS288 de M. Sylvain Maillard
Cet amendement, que j'avais déjà présenté lors de l'examen du projet de loi d'orientation des mobilités, vise à permettre aux employeurs d'accorder, s'ils le peuvent et le souhaitent, un remboursement complet des frais de transports publics à leurs salariés.
Actuellement, la prise en charge obligatoire par l'employeur des titres d'abonnement est égale à 50 % de leur coût, conformément à l'article R. 3261-1 du code du travail, le montant devant être mentionné sur le bulletin de paie et exonéré de l'impôt sur le revenu. Les 50 autres pour cent sont quant à eux considérés comme des avantages en nature pour le salarié dès lors que l'employeur décide de les prendre en charge.
Le présent amendement permettra à l'employeur d'aller au-delà de cette obligation en le faisant bénéficier, pour le remboursement facultatif du coût restant des titres de transports de ses salariés, des mêmes avantages que lui octroie le remboursement obligatoire d'une partie dudit coût.
La mobilité est un facteur essentiel dans la vie active de tous les citoyens. En incitant l'employeur à participer encore davantage à la prise en charge des frais de transports de ses employés, cet amendement permet d'enraciner un comportement vertueux pour l'environnement et de valoriser le travail, ce qui est notre objectif. On ne doit plus payer pour aller travailler. En donnant aux salariés un droit à une mobilité facilitée, ce n'est pas seulement l'effort que l'on encourage, c'est aussi le travail qui est récompensé à sa juste valeur.
Quand on lit l'amendement de M. Maillard, on se dit qu'il est de bon sens puisque les employeurs sont encouragés à prendre en charge les frais kilométriques de leurs salariés. Ces derniers ne sont pas encouragés à la même hauteur à circuler en vélo électrique ou à prendre les transports en commun et, en tant que député de Paris, Sylvain Maillard connaît sans doute plus que d'autres l'importance de ce type de transports qui, de surcroît, est dans l'air du temps.
Néanmoins, je ne dispose pas d'un chiffrage, je ne sais pas combien cette mesure coûterait, je ne dispose ni d'évaluation, ni d'étude d'impact : les choses sont donc compliquées. Il n'en reste pas moins que j'ai envie de donner un avis de sagesse car cet amendement va dans le bon sens. Qu'il soit ou non adopté, nous pourrions ainsi débattre dans l'hémicycle et peut-être que, d'ici, une semaine, nous pourrions demander au Gouvernement d'évaluer le coût de cette mesure. Honnêtement, je n'ai aucune idée de ce qu'il peut être mais comme nous sommes en faveur du développement durable, que nous voulons prendre des mesures écologiques et que nous voulons développer les transports doux, on a forcément envie de vous encourager à poursuivre le dialogue avec le Gouvernement.
La question qui est posée, c'est celle de la gratuité des transports pour tous. Voilà ce qui résoudrait le problème pour les salariés ! Vous avez tout à fait raison de rappeler que les entreprises prennent en charge 50 % du coût des titres d'abonnement mais le versement transport diminuerait aussi pour les syndicats de transports, ce qui est également une question.
Je soutiens quant à moi cet amendement de bon sens, même s'il a un coût qui, cela dit, est compensé par une autre recette, comme le veut la règle du jeu en matière de recevabilité financière des amendements.
C'est une vraie question car il est d'autant mieux, pour un salarié qui se rend à son travail, de ne pas payer le transport. Vous avez tout à fait raison, monsieur Maillard.
Je soutiens également cet amendement.
J'ai entendu cinq sur cinq l'argument sur l'absence d'étude d'impact mais le prendre en compte constituerait une formidable jurisprudence dans cette maison ! Je ne compte pas le nombre de fois où l'on nous a servi des amendements et des textes sans que nous disposions d'une étude d'impact complète ! Si on s'attachait à ce qu'il en soit autrement, les conséquences seraient importantes !
En outre, vous avez raison de vous interroger sur le coût, monsieur le rapporteur général, mais il me semble que l'amendement est précis de ce point de vue-là en disposant dans son exposé des motifs qu'il en sera ainsi si les employeurs « le peuvent et le souhaitent ». L'entreprise saura donc parfaitement évaluer le coût réel que cela représente et ce serait pour elle un vrai moyen d'apporter du pouvoir d'achat à ses salariés.
Pour toutes ces raisons, je pense qu'une avancée est possible dès ce soir.
Pourquoi un tel amendement dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, monsieur Maillard, et non dans le PLF ? Je ne suis pas certain que ce soit sa place.
En effet : il est passé sous les mêmes fourches caudines que les autres et a donc été jugé recevable.
J'ai beaucoup travaillé sur cet amendement car il me semble fondamental : il faut augmenter le « bas de page » des fiches de paie de chaque salarié et envoyer ainsi un signal très clair : le travail paie plus.
Les transports font partie des charges induites pour se rendre au travail et, comme tel, cela me semble illogique. Plus encore, j'ai évoqué dans l'hémicycle les comités d'entreprise qui proposent des avantages – vacances, cadeaux de fin d'année – et c'est heureux, mais les grandes entreprises peuvent désocialiser et défiscaliser les versements. En revanche, un salarié paie 50 % de ses frais de transport pour aller travailler, ce qui me semble une injustice. D'où mon grand attachement à cet amendement.
Je trouve cet amendement plutôt pertinent et il me semble intéressant que, pour une fois, une bonne idée germe en plein coeur de Paris. Je souhaite simplement que M. Maillard travaille de la même façon et avec la même concentration sur le prix des carburants pour tous les salariés des secteurs ruraux, qui ne bénéficient pas des transports en commun et qui ne pourront jamais profiter d'une prise en charge, ne serait-ce qu'à 50 %, de leurs frais de transport.
Je rejoins tout à fait mon collègue Grelier : nous n'avons pas tous forcément toujours accès aux transports publics. J'ajoute que nous, députés, lorsque nous nous rendons à l'Assemblée nationale, bénéficions de la gratuité des transports publics. Le climat ne s'en porte pas plus mal. En outre, il ne serait pas possible de parler de gratuité puisqu'il s'agirait d'une prise en charge par les entreprises.
Aujourd'hui, lorsque des gens sont embauchés au SMIC, l'éloignement de leur domicile de leur lieu de travail renforce l'asymétrie du calcul entre le coût qu'il y a à accepter un travail et à le refuser. Tant que nous ne serons pas parvenus à répondre à la question de la rémunération du travail, il faudra travailler à lever les freins à la reprise d'activité pour des gens qui, sinon, s'enfermeront dans la spirale de l'inactivité.
Je précise simplement à l'attention des gens qui nous écoutent que le train n'est pas gratuit pour les députés mais que son coût est pris en charge par l'Assemblée nationale.
Je soutiens bien évidemment cet amendement que j'ai cosigné et je rappelle que s'il a un coût, il implique également un gain car il encouragera l'emploi alors que nous savons combien la mobilité est un problème pour un certain nombre de salariés. Il conviendra donc d'évaluer aussi ces recettes-là.
La commission adopte l'amendement AS288
Elle examine ensuite l'amendement AS952 de M. Francis Vercamer
Cet amendement d'appel vise à lutter contre les déserts médicaux et le manque de médecins généralistes ou spécialistes dans certaines régions.
Le paradoxe français fait que l'agence régionale de santé (ARS) oblige les personnels paramédicaux à s'installer – ils ne peuvent le faire, en effet, dans une zone sur-dotée et sont contraints d'exercer dans une zone sous-dotée – et que ce n'est pas le cas des médecins, qui sont les prescripteurs. Nous sommes donc confrontés à un problème important dans certains secteurs où les médecins manquent et où les paramédicaux sont présents puisqu'ils sont contraints de s'y installer.
Je propose donc de créer des zones franches médicales, au même titre qu'il en existe – même si elles sont un peu tombées en désuétude – pour les quartiers en difficulté afin de désocialiser les revenus des professionnels qui s'installeraient dans ces zones définies par l'ARS.
Il s'agit donc d'un amendement d'appel, l'idée étant de réfléchir à cette question des zones franches. Je précise d'ailleurs dans l'amendement que les modalités d'application seraient définies par décret – ce n'est pas moi qui les fixerai ! Je pense que c'est une vraie question car tout ce que nous avons essayé jusqu'à présent ne fonctionne pas. Sachant que la majorité ne veut pas rendre obligatoire l'installation des médecins, nous devons trouver des moyens de les attirer et c'est peut-être celui-ci qui coordonnera l'ensemble des aides dont bénéficient ces territoires.
Des zones existent déjà. Je vous rappelle que l'article L. 1434-4 du code de la santé publique prévoit que l'ARS définit de telles zones où les médecins peuvent bénéficier à la fois de l'aide de l'État, des collectivités, de l'assurance maladie, etc.
J'entends néanmoins votre question : quid, après la disparition à venir des zones franches, des mesures incitatives dont bénéficient les médecins ? Eh bien, les ARS prennent le relais avec leur propre zonage. Nous débattrons de cette question, de même que des adaptations à la marge dans les territoires ainsi que sur la façon dont il est possible d'inciter les ARS à adapter les zonages de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques lorsqu'ils sont un peu anciens.
J'ai entendu votre appel. Ce débat a eu lieu lors de la discussion du projet de loi sur la modernisation de notre système de santé et il me semble que ces zones ARS constituent déjà une réponse.
Ce sont des zones où les médecins peuvent en effet bénéficier d'un certain nombre d'aides à l'installation mais, en l'occurrence, il n'est pas question d'aides mais d'exonération de charges sociales pour les médecins qui viennent s'installer, selon des modalités à définir : différents régimes dans le temps, modulation en fonction des zones car peut-être faut-il des incitations plus importantes dans certaines que dans d'autres. Ce zonage peut être d'ailleurs identique à celui qui existe déjà. Il s'agit donc d'exonérer de charges sociales les revenus des médecins qui s'installent dans ces zones, en plus ou à la place des aides à l'installation.
Cette idée mérite d'être approfondie car, si elle n'est pas la panacée, elle peut constituer un complément aux dispositifs existants – je dis cela au rapporteur général, qui sait tout autant que moi que les aides fiscales et sociales en vigueur dans les zones labellisées par les ARS ne sont pas de même nature que celles qui pourraient être proposées dans le cadre des zones franches, qui seraient beaucoup plus intéressantes sur le plan financier pour les praticiens faisant cet effort-là.
En outre, monsieur le rapporteur général, vous savez aussi très bien que le tracé des zones sous-médicalisées établi par les ARS comporte des anomalies : à 3 kilomètres de distance, une ville peut être située en zone normalement dotée et une autre en zone sous-dotée, ce qui crée des distorsions de concurrences inacceptables.
Il me semblerait nettement plus performant de créer des zones sur le principe des zones franches économiques telles qu'elles ont été pensées sur des territoires plus vastes – le Gouvernement pouvant élaborer par décrets les labels idoines – ce qui éviterait les concurrences déloyales entre territoires contigus telles que nous les connaissons.
J'ajoute que lorsque l'on demande aux ARS de modifier les périmètres des zones sous-dotées, il faut au minimum deux ans, comme j'en fais l'amère expérience dans mon département, ce qui est tout de même long pour dresser un tel constat.
Je comprends tout à fait l'objectif de l'amendement du collègue Vercamer mais j'aurais tendance à le renvoyer à l'article 36 du texte, qui instaure un contrat unique pour l'installation des jeunes médecins et des prises en charge de cotisation sociales pour ceux qui, notamment, pratiquent en secteur 1 sans dépassement d'honoraires. Je pense donc, cher collègue, que l'article 36 répond à votre préoccupation.
Cet amendement d'appel de notre collègue Vercamer, qui me semble très pertinent. Les déserts médicaux sont un vrai problème. Il ne se passe pas une semaine sans qu'un député, a fortiori membre de cette commission, ne soit interpellé et invité à participer à des réflexions et à des travaux pour trouver des solutions. Notre palette comporte des dispositifs et des outils qui ne fonctionnent pas, sinon, la situation s'améliorerait. Cet amendement est plein de bon sens puisque la logique d'une différenciation positive par territoire est déjà effective dans d'autres politiques publiques. Comme cela n'engage pas de bouleversement, il me paraît de bon aloi de tenter l'expérimentation proposée par notre collègue Vercamer. J'invite donc nos collègues à voter cet amendement.
La commission rejette l'amendement AS952
Elle est ensuite saisie de l'amendement AS608 de Mme Jeanine Dubié
Par cet amendement, nous souhaitons une harmonisation des allégements de cotisations sociales entre les EHPAD des secteurs public et privé puisqu'en l'état il existe une distorsion de concurrence. En effet, les services médico-sociaux associatifs et commerciaux – je dis bien, commerciaux – bénéficient d'un abattement de charges pérenne de 6 % de la masse salariale alors qu'il n'en est pas de même dans le secteur public et que cette surcharge représente environ 400 millions d'euros par an. Il est donc important de mettre un terme à une telle distorsion en faisant en sorte que cet avantage concurrentiel conféré aux EHPAD disparaisse et que la situation soit équitable. Il n'est pas possible de continuer ainsi alors que les uns et les autres assurent me semble-t-il une mission de service public.
Il existe une différence de fiscalité entre les EHPAD selon leur statut. Les EHPAD publics, notamment, ne paient pas de taxe foncière non plus que d'autres charges qui reposent sur des structures privées. Votre amendement étend la suppression de 6 points de cotisation maladie aux EHPAD publics, créant un régime dérogatoire, mais je peux vous répondre à travers l'accélération de la convergence pour les EHPAD, avec un investissement important du Gouvernement. Plus globalement, une mission des inspections générales des affaires sociales et des finances, annoncée par la ministre le 3 juillet dernier, est en cours et vise précisément à déterminer les différences réelles de charges sociales et fiscales entre les établissements de santé privés d'intérêt collectif et les établissements publics de santé. Je vous propose d'attendre ses conclusions pour y voir plus clair.
Je vous prie de retirer votre amendement, sinon, avis défavorable.
J'entends votre argument, monsieur le rapporteur général. Je veux bien le retirer en attendant la séance publique mais l'exonération de la taxe foncière – j'ai un exemple en tête – représente bien moins que celle de 6 % de la masse salariale d'un établissement calibré. Il faudra que ce document nous apporte des éléments d'appréciation.
L'amendement AS608 est retiré
La commission examine les amendements identiques AS37 de Mme Marine Brenier, AS164 de M. Paul Christophe, AS312 de M. Gilles Lurton, AS470 de M. Brahim Hammouche, AS808 de Mme Agnès Firmin Le Bodo et AS958 de Mme Michèle de Vaucouleurs
Cet amendement vise à supprimer une discrimination entre professionnels de santé libéraux selon leur régime d'affiliation suite à l'adoption, en 2016, d'une taxe additionnelle de 3,25 %.
L'article 52 de la LFSS 2016 a harmonisé le taux des cotisations maladie, maternité et décès des professionnels indépendants, ramenant le taux de cotisations des professionnels de santé libéraux affiliés au régime des praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés (PAMC), alors de 9,81 %, à hauteur du taux appliqué au Régime social des indépendants (RSI), soit 6,5 %.
Ce même article 52 a également introduit une taxe additionnelle de 3,25 % applicable aux revenus tirés d'une activité non conventionnée ou des dépassements d'honoraires pour les seuls professionnels de santé affiliés au régime PAMC prévu l'article L. 646-3 du code de sécurité sociale. Cette taxe additionnelle constitue une véritable iniquité entre les professionnels de santé libéraux affiliés au régime PAMC et ceux qui le sont au RSI, qui en sont exonérés. Sa suppression vise à mettre un terme à cette discrimination entre professionnels de santé libéraux selon leur régime d'affiliation et répond à la politique gouvernementale d'harmonisation des cotisations sur les revenus d'activité.
Outre ce qui vient d'être dit, je précise pour être totalement transparent que cet amendement AS470 a été proposé par l'Union nationale des professionnels de santé pour corriger l'écart de 3,25 % entre les professionnels de santé libéraux, qui cotisent différemment selon leur régime d'affiliation. Il s'agit donc d'un amendement « sourcé ».
L'amendement identique AS958 vise à supprimer la taxe additionnelle de 3,25 % applicable aux revenus tirés d'une activité non conventionnée ou des dépassements d'honoraires pour les seuls professionnels de santé affiliés au régime PAMC. Cette taxe additionnelle constitue une véritable iniquité entre les professionnels de santé libéraux affiliés à ce régime et ceux qui le sont au RSI, qui en sont exonérés. Sa suppression vise à mettre un terme à cette discrimination entre professionnels de santé libéraux selon leur régime d'affiliation et répond à la politique gouvernementale d'harmonisation des cotisations sur les revenus d'activité.
Avis défavorable à l'ensemble de ces amendements relatifs à la taxe additionnelle votée en LFSS 2016 portant régulation des dépassements et compléments d'honoraires. Ce débat a déjà eu lieu, nous l'avons chaque année, et l'avis reste le même.
La commission rejette successivement les amendements
Elle en vient à l'amendement AS132 de M. Pierre Dharréville
L'amendement vise à ce que, dans un délai d'un an à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement remette au Parlement un rapport évaluant l'impact des dispositifs d'exonération de cotisations sociales sur les créations d'emplois, les salaires et l'investissement des entreprises.
L'annexe 5 du PLFSS, qui retrace les différentes mesures d'exonérations de cotisations sociales, reste très sommaire s'agissant de l'évaluation de ces dispositifs. Ce constat est appuyé par la Cour des comptes dans son dernier rapport annuel sur l'application des lois de financement de sécurité sociale qui indique que « les évaluations de l'efficacité des "niches sociales" n'ont pas d'effet perceptible sur les choix publics. Elles portent sur un champ partiel et leur méthodologie est inégalement robuste. Lorsque des évaluations constatent l'inefficacité de certaines "niches", celles-ci ne sont que rarement remises en cause. » C'est pourquoi elle préconise de mieux les évaluer et de supprimer les niches sociales peu efficientes.
Avec la transformation du CICE en réduction pérenne de cotisations sociales, le montant total des exonérations – allégements généraux, exonérations ciblées, exemptions d'assiette –, atteint 66 milliards d'euros en 2019 – 90 milliards d'euros selon le chiffrage de la Cour des comptes. Ce coût a doublé entre 2013 et 2019. Au regard des sommes en jeu, il est nécessaire que la représentation nationale ait une connaissance plus fine de l'usage de ces dispositifs par les entreprises. C'est pourquoi il est proposé de disposer d'une évaluation précise et détaillée de l'impact des mesures d'exonération en matière d'emploi, de salaires et d'investissements.
Même argumentaire que précédemment : le Printemps de l'évaluation nous permet de réaliser efficacement nos propres évaluations. Je propose le retrait ; à défaut, avis défavorable.
Il serait utile, notamment pour donner sa pleine efficacité au Printemps de l'évaluation, que nous disposions d'une analyse du Gouvernement permettant de confronter nos avis et de prendre les meilleures décisions.
Le nombre de rapports demandés au Gouvernement et dont nous attendons encore la remise, alors que le délai imparti est dépassé, atteint déjà quatre. Nous pouvons continuer à cumuler les demandes de rapport ou prendre le taureau par les cornes et nous donner les moyens de faire les évaluations nous-mêmes.
La portée de ces exonérations colossales est telle qu'elles constituent le sujet central du PLFSS. S'il ne faut demander qu'un seul rapport, que ce soit celui-là.
La commission rejette l'amendement.
Article 9 : Non-assujettissement aux cotisations et contributions sociales des indemnités spécifiques de rupture conventionnelle dans la fonction publique
La commission est saisie de l'amendement AS382 de Mme Caroline Fiat.
Cet article prévoit de ne plus assujettir aux cotisations et contributions sociales les indemnités de rupture conventionnelle dans la fonction publique, sans accorder de compensation budgétaire par l'État à la sécurité sociale.
Alors que les exonérations de cotisations en tout genre pèsent de plus en plus lourdement sur le budget de la sécurité sociale, cet article est indécent. Soit il creuse le déficit de la sécurité sociale, soit il induit une diminution des prestations versées en cas de retraite, maladie, accidents, maternité ou chômage.
Pour justifier cette exemption, le Gouvernement argue qu'elle existe déjà dans le secteur privé. C'est tout l'inverse qu'il faudrait faire : aligner les règles applicables au privé sur le public. En d'autres termes, plutôt que d'aligner vers le bas les règles d'assujettissement social sur les ruptures conventionnelles applicables aux salariés du secteur privé et du secteur public, cet amendement propose de mettre fin à toute exemption d'assiette.
Vous proposez de supprimer toute notion d'exonération pour toute rupture conventionnelle dans le public et le privé : j'y suis défavorable.
À cet article 9, plusieurs députés ont déposé des amendements afin d'assurer la compensation à la sécurité sociale de l'exonération de rupture conventionnelle pour les contrats de la fonction publique, ce qui est tout à fait légitime à la lecture du rapport Charpy-Dubertret. Ces amendements ont été rejetés en application de l'article 40 de la Constitution car ils représentaient une charge, le dispositif n'étant pas encore pleinement entré en vigueur. Nous en débattrons une prochaine fois, et je soutiendrai alors cette mesure.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 9 sans modification.
Après l'article 9
La commission est saisie des amendements AS143 et AS133 de M. Pierre Dharréville.
Ces deux amendements sont complémentaires. L'amendement AS143 propose d'augmenter la contribution sociale généralisée (CSG) sur les revenus du capital de 2,8 points, ce qui permettrait un rendement supplémentaire de 3 milliards d'euros au profit des caisses de sécurité sociale.
Quant à l'amendement AS133, il vise à exonérer toutes les pensions de retraite et d'invalidité, sans exception, de l'augmentation de 1,7 point du taux de la CSG applicable depuis le 1er janvier 2018. En effet, si les retraites inférieures à 2 000 euros brut ont bénéficié d'une baisse de CSG suite au mouvement des « gilets jaunes », les autres retraités continuent de subir la hausse injuste de CSG. Ces derniers subiront également un quasi-gel de leurs pensions en 2020.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements.
Elle en vient à l'amendement AS466 de M. Éric Woerth.
Cet amendement du groupe Les Républicains vise à alléger la fiscalité excessive qui pèse sur les entreprises en France. Le poids des impôts sur la production est une spécificité française : 3 % du PIB en 2016, contre 1,6 % en moyenne dans la zone euro. Ne nous étonnons pas, dès lors, de subir une désindustrialisation croissante et un déficit extérieur persistant.
Cet amendement propose en conséquence d'abroger la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés (C3S). Cet impôt continue de peser lourdement sur la compétitivité de l'économie nationale, alors même que le taux du CICE a été ramené à 6 % en 2018. Il convient de mener à son terme la réforme déjà entreprise en supprimant entièrement la C3S.
Il s'agit d'un amendement récurrent du groupe Les Républicains. J'en comprends la logique, mais son coût est très important. Avis défavorable.
Il est vrai que cet amendement revient tous les ans, mais un jour il ne reviendra plus, car il n'y aura plus d'industries en France !
Si je peux rassurer M. Vercamer, la part résiduelle de la C3S, qui n'a pas été supprimée, concerne essentiellement les secteurs de la banque, de l'assurance et de la grande distribution. Je ne pense pas qu'ils aient besoin de cette suppression.
La commission rejette l'amendement.
La commission est saisie de l'amendement AS139 de M. Pierre Dharréville.
Cet amendement a pour effet de soumettre les revenus financiers des sociétés aux taux actuels des cotisations sociales employeurs de chaque branche de la sécurité sociale. Il est logique que les revenus du capital contribuent à ce bien collectif. Cette contribution nouvelle permettrait de mener une politique sociale active répondant véritablement aux besoins de la population. Elle inciterait fortement les entreprises à privilégier le facteur travail.
Votre proposition consiste à taxer une partie des revenus des sociétés à hauteur de la somme des cotisations patronales assises sur les rémunérations, soit environ 12 %. Outre le doublement des charges qui pèserait mécaniquement sur les entreprises, elle aboutirait à déformer la stratégie des entreprises concernant l'utilisation de leurs bénéfices, et à supprimer l'assiette sur laquelle votre contribution est assise. L'effet risque donc d'aller à l'inverse de votre objectif. Avis défavorable.
Il me semble que l'instauration du prélèvement forfaitaire unique dans le dernier PLF a eu un impact direct sur les finances de la sécurité sociale, puisqu'un certain nombre de dirigeants d'entreprises aurait fait le choix de ne plus se rémunérer en salaire, mais par des dividendes. Avez-vous des informations à ce sujet, ou pourriez-vous les obtenir, car elles pourraient nous éclairer utilement ?
La commission rejette l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement AS134 de M. Pierre Dharréville.
Cet amendement entend revenir sur l'allégement de la fiscalité sur les actions gratuites, subrepticement entériné par la majorité à l'occasion du précédent PLFSS, sans aucune étude d'impact. Lors des débats en séance, la perte de recettes a été chiffrée à 120 millions d'euros par an : il serait intéressant de bénéficier d'une actualisation de ce chiffre. Ce dispositif, qui permet l'attribution gratuite d'actions, profite essentiellement à des salariés très bien rémunérés de grands groupes, et aux dirigeants. Outre un coût non négligeable pour les finances sociales, il s'agit d'un outil de contournement du salaire. Nous proposons de ramener la contribution patronale au taux de 30 %.
Lorsque cette disposition a été votée, elle visait plutôt les petites entreprises et les start-up que les rémunérations des grands dirigeants, mais nous pouvons demander une évaluation sur cette question. Dans l'attente, avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine l'amendement AS859 de M. Joël Aviragnet.
Nous sommes inquiets de la situation de l'hôpital et de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) envisagé dans ce PLFSS. Nous proposons d'affecter une part des recettes de l'impôt sur la fortune immobilière à la branche maladie de la sécurité sociale.
Nous avons débattu des compensations, votre proposition revient à enlever des ressources à l'État pour les affecter à la sécurité sociale, ce qui serait contradictoire avec tous nos échanges précédents sur le respect de la « loi Veil ». Le transfert de recettes serait énorme, sans que l'impact pour l'État n'ait été quantifié. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Je note que le rapporteur général s'est rangé à la décision prise tout à l'heure par la majorité des parlementaires de la commission. S'il m'indique qu'en séance, il votera conformément à l'avis de la commission, je suis disposé à retirer cet amendement...
En séance, je me ferai le porte-voix de l'avis de la commission, conformément à mon rôle. Nous en débattrons.
La commission rejette l'amendement.
Elle en vient à l'amendement AS138 de M. Pierre Dharréville.
Cet amendement prévoit d'exonérer les établissements publics de santé et les EHPAD publics de taxe sur les salaires, comme cela se fait déjà pour l'État et les collectivités territoriales. Alors que les personnels hospitaliers réclament de nouveaux moyens financiers et humains d'ampleur, cette mesure permettra de redéployer 4 milliards d'euros dans l'activité hospitalière dès 2020, notamment pour financer des réouvertures de lits, des embauches et des revalorisations salariales dans l'ensemble des services.
Je suis sensible à votre proposition afin de soulager les hôpitaux des charges qui pèsent sur eux, dans le contexte de comptes sociaux en difficulté, mais je ne suis pas sûr que ce soit la meilleure façon de procéder : la taxe sur les salaires dont vous exonérez les hôpitaux et les EHPAD publics abonde les comptes de la sécurité sociale. Nous risquons d'entrer dans un cercle sans fin ; je demande le retrait, sinon avis défavorable.
Les hôpitaux sont les seuls établissements dans la fonction publique à payer des taxes sur les salaires, qui représentent 12 % de la fiche de paie et 7 % des budgets de dépense des hôpitaux. L'hôpital de mon lieu de résidence est en déficit d'environ 6 millions d'euros, et la taxe sur les salaires représente une somme équivalente. Si cette dernière est supprimée, cet hôpital ne sera plus en déficit.
La commission rejette l'amendement.
Elle est saisie successivement des amendements AS944 et AS945 de Mme Anne Genetet.
L'amendement AS944 vise à replacer les Français établis hors de France dans une situation fiscalement cohérente à propos de la CSG et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) sur les revenus du capital.
Lors des discussions sur la loi de finances rectificative pour 2012, la majorité précédente a choisi d'étendre les prélèvements sociaux aux revenus immobiliers de source française perçus par les personnes physiques fiscalement domiciliées hors de France. Elle s'est ensuite fourvoyée durant de longues années dans un contentieux avec la Cour de justice de l'Union européenne, qui a jugé cette mesure illégale.
Pour bénéficier d'une protection sociale minimale, les Français qui résident à l'étranger ont souvent recours à des assurances privées coûteuses, ou sont assujettis à des régimes obligatoires de protection sociale liés à leur pays de résidence – lorsqu'ils vivent hors de l'Union européenne – ou à leur fonction. La CSGCRDS s'ajoute à ces prélèvements et dépenses souvent très importants.
Nous avons mis un terme, l'année dernière, à cette situation pénalisante et déloyale en supprimant ces cotisations pour les résidents de l'Union européenne (UE), de l'Espace économique européen ou de la Suisse, pourvu qu'ils soient affiliés à un régime de sécurité sociale européen. Il faut s'en féliciter, mais cette décision crée une distorsion du principe d'équité fiscale entre contribuables dont la situation fiscale et les enjeux de protection sociale sont pourtant identiques.
Un premier pas a été franchi, il convient de mener la logique à son terme en supprimant cette cotisation pour l'ensemble des Français établis hors de France, et ainsi mettre un terme à la discrimination entre ceux qui sont établis au sein de l'UE et ceux qui sont en dehors. C'est l'objet de ces amendements, que je vous présente avec l'ensemble de mes collègues députés représentants les Français établis hors de France.
Madame la députée, je vous propose d'en débattre en séance, en présence du ministre des comptes publics. Je suis incapable d'estimer précisément le coût de ces amendements pour les finances publiques, et ils soulèvent un certain nombre d'interrogations.
Je comprends la difficulté. Nous avions résolu l'année dernière la situation des Français résidents au sein de l'Union européenne car une convention existe dans le cadre européen. Ce n'est pas le cas, par exemple, pour ceux qui résident en Amérique du nord ou en Amérique du sud. Par ailleurs, cette disposition emporterait des conséquences pour les personnes de nationalité étrangère dont la résidence patrimoniale est en France, car ils ne seraient plus assujettis à la CSGCRDS sur leurs biens patrimoniaux situés en France, à la différence des Français résidents.
Je souhaite que nous trouvions une solution pérenne pour les Français de l'étranger, qui attendent beaucoup du PLFSS chaque année. Je n'ignore pas non plus les difficultés qu'a pu entraîner pour les Français de l'étranger le prélèvement à la source, dont l'impact exact n'est pas encore connu. Je souhaite que le ministre des comptes publics puisse mener ce dialogue avec vous ; je vous propose donc de retirer ces amendements.
La commission rejette successivement les amendements.
Puis elle examine l'amendement AS95 de M. Richard Ramos.
Il s'agit d'un amendement de bon sens cosigné par des parlementaires de l'ensemble des groupes : Gauche démocrate et républicaine, La France insoumise, M. Dominique Potier pour les Socialistes, M. Philippe Vigier pour Libertés et Territoires, M. Thierry Benoit pour UDI, Agir et Indépendants, Mme Barbara Bessot-Ballot pour La République en Marche ou encore Mme Michèle Crouzet.
L'Organisation mondiale de la santé indique que le sel nitrité est dangereux pour la santé ; pourtant des industriels en utilisent dans les jambons, faisant consciemment courir un risque aux Français.
Je suis très content de défendre cet amendement, proposé par des députés de chacun des groupes. Il prévoit d'instaurer une taxe de 10 centimes par kilogramme de sel nitrité, ce qui n'aura presque pas d'impact financier, mais constituera un outil qui permettra aux industriels de changer. Le combat de cet amendement, c'est la santé contre l'argent ; j'espère que la santé l'emportera.
Je ne vous dirai pas que « nous n'avons pas les mêmes valeurs », monsieur Ramos, vous m'avez suivi lors du combat sur le Nutri-Score, et je serais prêt à vous suivre les yeux fermés. Cela étant, « ne passons pas à côté des choses simples » : nous avons dit que nous ne mettrions pas en place de taxe comportementale.
Cette nouvelle taxe aurait un champ d'application extrêmement large, puisqu'elle concerne un très grand nombre de charcuteries. Vous prétendez qu'elle n'aurait pas un grand impact financier, mais j'ai besoin d'une évaluation précise de ses conséquences pour l'industrie, car 10 centimes par kilogramme, ce n'est pas complètement neutre non plus.
Vous connaissez mes engagements en matière de santé nutritionnelle, et si personne ne m'arrêtait, je pourrais décider d'une quinzaine de taxes comportementales chaque année. Mais nous savons qu'il faut systématiquement les accompagner d'une démarche d'explication à l'égard des industriels et des Français.
Je ne peux pas donner d'avis favorable à cet amendement : je propose d'en débattre en séance, avec les ministres concernés, qui seront nombreux s'agissant d'une taxe comportementale sur l'alimentaire...
Dès à présent, les industriels cherchent d'autres solutions : ils savent donc qu'il existe un danger. Et si nous décidons d'une taxe de 10 centimes par kilogramme, elle ne sera pas sensible sur le prix du produit fini.
Nous adopterions simplement un outil, et si les industriels n'allaient pas dans le sens de la santé et de la qualité nutritionnelle, le taux augmenterait. Ce n'est pas la commission des finances qui prendra position sur ce sujet ; je prends donc note de l'avis de sagesse du rapporteur général...
Ah non ? Excusez-moi, je ne comprends pas quand quelqu'un me dit : « je suis d'accord avec vous, mais je ne suis pas d'accord », dans ces cas je ne retiens toujours que la première partie de la phrase... Nous en débattrons dans l'hémicycle, et j'espère que le bon sens l'emportera.
Si vous ne savez pas que je peux être d'accord sans donner un avis favorable, c'est que vous n'étiez pas parmi nous au début de l'examen du texte !
Je ne peux pas vous donner un avis favorable ou un avis de sagesse : je ne connais pas l'impact sur les industriels, et nous n'avons aucun chiffre. Lorsque nous avions travaillé sur la taxe sur les sodas, nous avions mené de nombreuses concertations, nous savions où nous allions atterrir et quel serait l'impact. Dans le cas présent, nous avançons à l'aveuglette.
Nous partageons le combat pour la qualité nutritionnelle, nous aurons l'occasion de le mener ensemble, mais cette proposition est prématurée.
J'ai signé cet amendement car il est plein de sagesse. M. Ramos a bien expliqué l'intérêt de cette démarche, totalement innovante. Le rapporteur général nous assure que nous en débattrons en séance, mais il faut arrêter de nous opposer l'argument de l'étude d'impact, tout comme l'argument de l'anticonstitutionnalité d'une mesure est brandi avant même d'avoir l'avis des constitutionnalistes.
Si vous estimez que la direction est la bonne, il faut soutenir cet amendement, et je pense qu'il le mérite. Si vous estimez que ce n'est pas la bonne direction, réfutez-le avec des arguments fondés scientifiquement, pas en arguant de l'absence d'étude d'impact.
Nous soutiendrons cet amendement, et nous récusons l'idée qu'il faudrait une étude d'impact – nous en sommes dispensés pour les amendements – et que nous avançons à l'aveuglette. Sur beaucoup de propositions que vous faites, nous ne sommes pas plus éclairés, bien que vous évoquiez souvent la nécessité de voir pour croire. Pour ma part je soutiens l'amendement proposé.
Bien évidemment, nous soutiendrons cet amendement. Pour aller dans le sens de M. Vallaud, sur beaucoup d'éléments, la représentation nationale a dû décider sans connaître les conséquences. Ainsi quand il s'est agi de transformer l'impôt de solidarité (ISF) en impôt sur la fortune immobilière (IFI), on nous a annoncé que l'investissement dans les PME en bénéficierait. Les rapports montrent que c'est l'inverse qui s'est passé. Nous avons plus de raisons de faire confiance à notre collègue Ramos sur la question des sels nitrités que de faire confiance à la majorité sur sa politique fiscale.
Non seulement cet amendement est de bon sens, mais s'il n'est pas accompagné d'une étude d'impact, des études épidémiologiques existent depuis mes premières années d'école de médecine sur la dangerosité des sels nitrés, en particulier dans la charcuterie, et leur impact sur la survenance de néoplasies. À défaut d'étude d'impact, nous pouvons tenir compte des études épidémiologiques pour faire un grand pas pour la prévention. Nous connaissons le coût des traitements curatifs, et adopter cet amendement signalerait à la population ce que peut la puissance publique, notamment en faveur de la qualité nutritionnelle. D'ailleurs, les industriels nous suivent : un reportage télévisé montrait ce midi que les industriels ne s'y opposaient absolument pas mais qu'au contraire, cela les pousserait à innover et à améliorer leurs produits.
Monsieur Ramos, votre amendement s'applique uniquement à la charcuterie industrielle, et pas à la charcuterie artisanale ? Si c'est le cas, nous le voterons.
La charcuterie artisanale n'a pas besoin de recourir aux sels nitrités, car on y achète sa tranche de jambon au jour le jour. C'est pour cela que les charcutiers meilleurs ouvriers de France n'utilisent pas de sels nitrités. Si l'on met du sel nitrité dans un jambon, c'est parce qu'on a appris à trois générations d'enfants que le jambon devait être rose. Et si l'on met du sel nitrité dans du jambon de pays, c'est pour le faire sécher en trois mois au lieu de neuf, et gagner plus d'argent.
Soyez rassuré, monsieur Door, je sais que l'on fait de très bonnes charcuteries à Montargis – et aussi de bonnes pralines ! – et il n'est pas nécessaire d'utiliser de sel nitrité dans le jambon vendu à la coupe. Dans l'hémicycle, nous serons nombreux, et des députés Les Républicains seront à nos côtés, pour défendre la santé contre les intérêts financiers des mauvais industriels.
Nous sommes tous ici pour défendre la santé, monsieur Ramos, ne vous inquiétez pas, nous n'avons pas de leçon à recevoir sur ce point.
Après cet exposé sur le jambon et le pâté, l'avis du rapporteur général est-il toujours défavorable ?
Mon avis n'a pas changé. Avec l'application du Nutri-Score, une grande marque industrielle française a réduit de 25 % le taux de sel de ses produits. De plus en plus de jambons dans les linéaires ont un taux de sel réduit de 25 %, ce qui démontre que les industriels font un vrai effort.
Je crois que placer l'information à la base de la prévention fonctionne assez bien. Continuons de nous battre pour la signalétique, pour l'information du consommateur, pour promouvoir les bonnes pratiques industrielles en matière alimentaire et ringardiser les mauvaises.
La commission adopte l'amendement.
Elle est ensuite saisie des amendements AS367 et AS370 de M. Cyrille Isaac-Sibille.
Chers collègues, continuons : après les sels nitrés, il est question du sucre. Vous savez que les industriels en incorporent dans tous les plats cuisinés. Je propose d'instaurer une taxe comportementale frappant les sucres.
La question du sucre ajouté dans les produits transformés rejoint celles du Nutri-Score et de l'information nutritionnelle. Ce sont des combats que nous avons envie d'accompagner, mais qui se traduisent par des taxes nouvelles qui vont toucher les consommateurs. Je crois en la prévention par l'information, je crois à la visibilité de l'information, au développement de la prévention et de la santé nutritionnelle. Une taxe vient d'être adoptée sans que nous connaissions son impact sur le pouvoir d'achat ; je suis obligé de rendre un avis défavorable sur l'ensemble des taxes comportementales alimentaires, même si le combat peut parfois être légitime et que je pourrais moi-même en proposer par dizaines.
La commission rejette successivement les amendements.
Elle en vient à l'amendement AS373 de M. Cyrille Isaac-Sibille.
Il s'agit d'un sujet grave, concernant les bières. Le titre alcoolique des bières peut s'élever à 17 degrés, et la jeunesse en est la cible principale. Ces bières ne sont pas vendues dans les supermarchés, et sont pensées pour inciter les jeunes à consommer des boissons fortement alcoolisées. Il est anormal que les bières dont le titre alcoolique est supérieur à 11 degrés ne soient pas plus taxées. Ces bières ciblent les jeunes, et ne sont pas distribuées dans la grande distribution mais dans les lieux d'alcoolisation. Je ne comprendrais pas que la commission n'adopte pas cet amendement.
Je partage complètement votre objectif : les bières à plus de 11 degrés ne sont pas des bières artisanales, de microbrasseurs ou de consommation courante. Ce sont généralement des bières importées, produites en très grande quantité, et qui vont cibler des publics fragiles et précaires, qui n'ont pas beaucoup d'argent, et les jeunes qui cherchent une ivresse rapide.
Nous savons que la bière supérieure à 11 degrés est un problème, car les personnes non averties en boivent pensant que ce n'est pas très fort, et finissent monstrueusement ivres après trois canettes, car c'est équivalent à boire trois bouteilles de vin.
Mais cet amendement pose deux problèmes, l'un économique et l'autre juridique. Le périmètre retenu est très vaste : il ne retient pas celui de la taxe sur les bières que j'avais connue comme parlementaire il y a quelques années et qui avait fait couler beaucoup d'encre. Et juridiquement, la détermination de l'assiette va être compliquée, et risque d'être contestée en justice. Avis défavorable du fait de la construction de l'amendement.
L'amendement est très bien construit : au-dessus de 11 degrés d'alcool, le taux de la taxe double. Ce n'est absolument pas technique. Si la commission veut dissuader les jeunes de boire ce type d'alcool, l'amendement est très bien construit. Je ne comprends pas votre argumentaire.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine l'amendement AS340 de Mme Jeanine Dubié.
Cet amendement propose d'introduire une taxe spécifique sur les bières fortes, titrant plus de 5,5 degrés d'alcool. Ces bières sont très prisées par les jeunes et souvent consommées dans l'espace public. Elles contiennent une quantité importante d'alcool : à titre d'exemple, une cannette de 50 centilitres d'une bière titrant 8,5 degrés ou plus représente trois à quatre unités d'alcool.
Par ailleurs, ces bières titrant parfois au-delà de 12 degrés d'alcool – soit autant que du vin – s'achètent souvent en canettes métalliques, conditionnement qui incite à terminer chaque canette entamée avant de commencer une autre activité. La consommation de telles boissons accélère donc l'alcoolisation et augmente le risque d'effets dommageables, notamment pour les jeunes, ou les personnes en situation difficile dont le pouvoir d'achat est limité, ce qui les rend très sensibles à l'effet prix. Créer une taxe sur ces produits particuliers permettrait de limiter le caractère incitatif à l'achat, donc à l'alcoolisation excessive, dans un objectif de prévention des risques et de réduction des dommages.
Avis défavorable. Fixer une limite à 5,5 degrés d'alcool inclurait dans l'assiette de la taxe un très grand nombre de bières, et pas uniquement celles fortement alcoolisées que vous souhaitez atteindre. Par ailleurs, il existe déjà une fiscalité inhérente aux bières.
Le PLFSS nous amène à raisonner en termes de fiscalité, mais nous devons aller au-delà. J'invite nos collègues à se joindre aux travaux du groupe d'études sur les addictions, car tout ne tient pas à la fiscalité. Ces bières très fortes sont par exemple vendues dans des supérettes, où des distributions de bières à emporter réfrigérées sont organisées. Les supérettes se substituent aux débits de boisson alors qu'elles ne sont pas soumises aux mêmes règles.
Il faut revoir toute la distribution en fonction des usages nouveaux de ces bières fortement alcoolisées, ce qui pourra faire l'objet d'une proposition de loi dépassant le seul aspect fiscal. Le message de prévention portant sur les usages de l'alcool au sein de la population sera beaucoup plus fort.
La commission rejette l'amendement.
La commission est saisie, en discussion commune, des amendements identiques AS333 de Mme Jeanine Dubié et AS850 de M. Joël Aviragnet, ainsi que des amendements AS949 et AS950 de Mme Audrey Dufeu Schubert.
L'amendement AS333 vise à compléter la loi de 2004 en incluant les vins aromatisés dans l'assiette de la taxe « prémix ». Nous en avions discuté l'an passé à l'occasion du précédent PLFSS. Depuis quelques années, le marché des vins ou cidres aromatisés se développe, en ciblant clairement les jeunes par leur emballage ou leurs appellations. Proposés à bas prix – parfois moins de 3 euros en linéaire – ils sont très attractifs pour les jeunes. Par cet amendement, nous souhaitons décourager l'entrée précoce des jeunes dans la consommation d'alcool en étendant aux boissons aromatisées à base de vin ou de cidre l'encadrement de ces produits d'appel.
La première taxe « prémix » a été adoptée en 1997. Elle avait entraîné presque immédiatement l'effondrement du marché français de ces boissons : moins de 10 000 litres en avaient été vendus en 1997, contre 950 000 en 1996 lorsque le marché était en plein essor. Suite à l'entrée en vigueur de la nouvelle taxe, en 2004, les ventes de premix ont diminué de 40 %. Il s'agit donc bien d'un outil de dissuasion important.
Nos viticulteurs et nos vins de qualité ne seront pas concernés, parce que la plupart des vins aromatisés proviennent de l'étranger et sont de très mauvaise qualité, ce qui explique la nécessité de les aromatiser pour les rendre plus buvables.
Notre amendement AS850 proposons également d'étendre la taxe « prémix » aux vins aromatisés. Ces vins à faible teneur en alcool, très sucrés, sont souvent la porte d'entrée vers des alcools plus forts pour des populations fragiles, notamment les jeunes.
Sur le fond, je souscris à l'argumentaire de mes collègues. L'extension de la taxation des « prémix » aux boissons à base de vin me paraît en effet essentielle, du point de vue tant de la santé publique que de la justice fiscale. Cependant, mon amendement AS949 diffère légèrement des leurs, dans la mesure où il exclut de cette taxation les vins de terroir que sont les poirés et le cidre, lesquels ne peuvent pas être assimilés à des « prémix ». Quant au second amendement, AS950, il est de repli, mais j'ai bon espoir que le premier sera adopté.
Il était prévu de faire évoluer la taxe sur les « prémix » puisque le marché s'est adapté en exploitant les trous laissés dans la raquette. À cet égard, le dispositif proposé dans l'amendement AS950 me paraît pertinent, car son assiette permet d'éviter les effets de bord, c'est-à-dire une taxation trop forte de certains produits. Je suis donc favorable à l'amendement AS950 et défavorable aux amendements AS333, AS850 et AS949.
Je me félicite, monsieur le rapporteur général, que vous soyez favorable à l'amendement de Mme Dufeu Schubert, que je voterai. Je veux en effet insister sur l'épouvantable cynisme des industriels. Je pense en particulier au propriétaire de la marque « Rosé Sucette » – il fallait l'inventer ! –, pour qui « ces bouteilles, à moins de 3 euros sur linéaire, seront un tremplin permettant aux néophytes d'accéder aux vins plus classiques, notamment pour un public plutôt jeune et féminin ».
Nous menons, je le rappelle, une politique de prévention de l'obésité. Or, ces boissons à base de vins, qui proviennent à 95 % ou 98 % de l'étranger – il s'agit de véritables piquettes – sont très néfastes à la santé de nos jeunes. Je vous demande donc, mes chers collègues, d'adopter l'amendement AS950.
L'amendement AS333 est retiré, de même que l'amendement AS850.
Je retire l'amendement AS949, en comptant sur l'ensemble des membres de la commission pour adopter l'amendement AS950, qui marque une avancée en matière de santé publique puisqu'il contribuera à protéger nos jeunes, en particulier les jeunes femmes.
L'amendement AS949 est retiré.
La commission adopte l'amendement AS950.
Chapitre II Simplifier et moderniser les relations avec l'administration
Article 10 : Unification du recouvrement dans la sphère sociale
La commission est saisie des amendements de suppression AS385 de M. Adrien Quatennens et AS814 de M. Pierre Dharréville.
Les URSSAF sont une institution puissante, grâce notamment à leur travail centré sur des objectifs précis et à leur grande indépendance vis-à-vis de l'État. L'unification des régimes soulève donc plusieurs questions : combien de personnes pour réaliser ses missions ? Comment préserver les champs de qualification et de compétence des personnes en poste actuellement ? En outre, ce processus d'unification ne garantit pas une meilleure efficience finale. C'est pourquoi nous proposons, par l'amendement AS38, de supprimer l'article 10. Franchement, je ne comprendrais pas que cet amendement de bon sens puisse être rejeté...
L'article 10 tend à unifier le recouvrement des cotisations sociales sous l'égide des URSSAF. Cette mesure concerne la quasi-totalité des employeurs du secteur privé, qui acquitteront auprès de celles-ci les cotisations jusqu'ici payées à l'AGIRC-ARRCO, ainsi que les employeurs des régimes spéciaux – marins, industries électriques et gazières, clercs de notaire – et les employeurs publics. Les missions de recouvrement des caisses des régimes spéciaux seront ainsi progressivement transférées aux URSSAF entre 2020 et 2023.
Cet article vise à préparer le terrain pour la réforme des retraites, qui a pour objectif la création d'un système universel de retraite englobant l'ensemble des régimes complémentaires et des régimes spéciaux. De fait, l'étude d'impact précise que « ces différentes étapes permettront que l'unification du recouvrement des cotisations sociales constitue utilement un acquis pour la mise en oeuvre future de la réforme des retraites ».
Une telle disposition est grave, d'un point de vue démocratique, car elle crée toutes les conditions techniques de la mise en oeuvre de la réforme des retraites avant même que celle-ci ne soit débattue. On nous a suffisamment répété, au cours des deux dernières années, à propos de tel ou tel aspect de la question des retraites, qu'il serait examiné dans le cadre de la réforme, pour que je m'étonne qu'on nous propose d'adopter une telle disposition. Ce n'est pas sérieux ! Si nous devons débattre de ce sujet, attendons la discussion de la réforme globale.
Monsieur Dharréville, sur la forme, je vous rejoins : peut-être ne devrait-on pas anticiper ainsi sur la réforme à venir. Sur le fond, je ne partage pas les inquiétudes qui ont été exprimées. Les URSSAF sont des institutions qui ont fait la preuve de leur efficacité. Nous veillerons à ce que la transition se passe au mieux et à garantir le bon recouvrement des cotisations. En tout état de cause, il s'agit d'une mesure de simplification qui présente un certain nombre d'avantages en matière de recouvrement. Avis défavorable à ces deux amendements.
La commission rejette les amendements.
Puis elle adopte l'article 10 sans modification.
Article 11 : Simplification des démarches des travailleurs indépendants
La commission adopte l'article sans modification.
Article 12 : Simplifier et créer un cadre de prise en compte contemporaine des aides en faveur des particuliers employeurs dans le cadre des services à la personne
La commission examine, en discussion commune, les amendements identiques AS23 de M. Gilles Lurton et AS422 de Mme Agnès Firmin Le Bodo ainsi que l'amendement AS91 de Mme Annie Vidal.
Les publics fragiles visés à l'article 12 ont recours à différents types d'intervention, à savoir l'emploi direct, qu'il s'agisse d'un particulier employeur ou d'un service mandataire, et le mode prestataire. Or, le mode d'intervention mandataire ne figure pas dans cette disposition. L'amendement AS23 vise donc à intégrer dans le dispositif l'ensemble des modes d'intervention à domicile, afin de simplifier la vie de toutes les personnes en situation de perte d'autonomie ou de handicap.
L'amendement AS422 a le même objet : il s'agit de compléter l'article 12 en y ajoutant le mode d'intervention mandataire, qui semble avoir été oublié.
L'amendement AS91 vise également à intégrer le mode d'intervention mandataire à l'expérimentation de la « contemporanéisation » du crédit d'impôt à domicile. En intégrant expressément à cette expérimentation l'ensemble des modes d'intervention à domicile, cet amendement a pour objet de simplifier la vie de toutes les personnes en situation de perte d'autonomie ou de handicap.
Ces amendements visent en effet à étendre l'expérimentation proposée dans cet article à l'ensemble du champ des services d'aide à la personne, ce qui ne la rendra que plus pertinente. Avis favorable aux amendements AS23 et AS422, dont la rédaction me paraît préférable à celle de l'amendement de Mme Vidal.
L'amendement AS91 est retiré.
La commission adopte les amendements identiques AS23 et AS422.
Elle est ensuite saisie de l'amendement AS92 de Mme Annie Vidal.
Il est indiqué, dans le projet de loi, que la liste des départements retenus pour participer à l'expérimentation de la « contemporanéisation » du crédit d'impôt sera précisée par décret. Par cet amendement, nous proposons que celui-ci précise également les modalités de mise en oeuvre de cette expérimentation.
La commission adopte cet amendement.
Puis elle examine l'amendement AS58 de M. Gilles Lurton.
S'il est louable d'expérimenter des dispositifs permettant de supprimer tout délai entre le moment où la dépense est effectuée et celui où les aides sont perçues par les personnes recourant à des services à domicile, notamment les plus vulnérables d'entre elles, il est nécessaire de mesurer les éventuels effets négatifs de telles mesures. Ainsi, certains services d'aide et d'accompagnement à domicile (SAAD) facturent des prix supérieurs à la participation financière légale prévue pour l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) et la prestation compensatoire du handicap (PCH). Il convient donc de mesurer l'effet de cette expérimentation sur le prix des services et, en conséquence, sur le reste à charge.
Par ailleurs, l'expérimentation prévoit que la contemporanéité de l'APA et de la PCH soit organisée par les centres de chèques emploi services universels. Or, les conseils départementaux peuvent d'ores et déjà, grâce à un mécanisme de tiers payant, verser directement ces prises en charge aux SAAD, limitant ainsi l'avance de trésorerie par les bénéficiaires. Il convient donc de vérifier que l'expérimentation, en introduisant un nouvel acteur, n'engendre ni surcoût pour les personnes ou les services prestataires ni complexités supplémentaires. Tel est l'objet de cet amendement.
Votre demande de rapport porte sur l'application d'un article particulier du PLFSS, qui peut parfaitement être examinée dans le cadre du Printemps de l'évaluation. Je vous propose que, conformément à ce que nous avons décidé l'an dernier, nous évitions de demander au Gouvernement des rapports sur des questions qui peuvent faire l'objet d'une évaluation parlementaire.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte ensuite l'article 12 modifié.
Article 13 : Simplification des démarches pour les redevables et renforcement de la sécurité juridique
La commission est saisie de l'amendement AS387 de M. Jean-Hugues Ratenon.
La LFSS 2019 permet une suppression partielle des exonérations en fonction de la gravité de la fraude commise. Une telle mesure ne nous semble pertinente ni au regard de la morale, ni au regard de la santé des finances publiques. En outre, l'exposé sommaire de cet article nous semble beaucoup trop général.
Votre amendement tend à supprimer non seulement certaines dispositions de l'article, mais aussi le principe même de la modulation des annulations d'exonération dans les cas les moins graves. Cela revient à utiliser – tous les inspecteurs de l'URSSAF le savent – un canon contre des moineaux. Nous avons adopté, l'année dernière, un mécanisme simple, dissuasif et proportionné sur lequel il n'y a pas lieu de revenir. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine successivement les amendements AS825 et AS826 de M. Joël Aviragnet.
Il est proposé, à l'article 13, que les annulations de réductions de cotisations de sécurité sociale puissent être modulées en fonction de l'infraction commise. Actuellement, les sanctions applicables en matière de travail dissimulé sont les mêmes pour tous les employeurs, quelles que soient la taille de l'entreprise et la gravité des infractions constatées, et consistent en une annulation des exonérations de cotisations sociales dont elles bénéficient. Cet article, s'il permet une simplification, présente néanmoins un véritable risque de banalisation du travail dissimulé. C'est pourquoi nous vous proposons d'en supprimer certaines dispositions. Il convient en effet que, pour un même manquement à la loi, toutes les entreprises se voient appliquer la même sanction, qu'elles bénéficient ou non d'une exonération.
Avis défavorable, pour les mêmes raisons que celles exposées à l'amendement précédent – nous avons eu cette discussion l'an dernier.
La commission rejette successivement les amendements.
Elle est ensuite saisie de l'amendement AS919 de M. Dominique Da Silva.
La LFSS 2018 prévoit l'entrée en vigueur, à compter du 1er janvier 2019, du Bulletin officiel en ligne de la sécurité sociale (BOSS), inspiré du Bulletin officiel des finances publiques (BOFiP) relatif à la fiscalité. Toutefois, le chantier a pris du retard, à tel point que l'alinéa 11 de l'article 13 vise à supprimer purement et simplement toute date d'entrée en vigueur du BOSS. Or, il convient, me semble-t-il, que la loi impose tout de même un délai à l'administration en maintenant une date d'entrée en vigueur, que je propose de fixer au 1er juillet 2020.
Le BOSS mettra à disposition l'ensemble de la doctrine sur un site unique, et nous saluons cette avancée pour tous les cotisants. Toutefois, sa publication nécessite un travail de longue haleine. En outre, la date que vous avez retenue est un peu trop ambitieuse si l'on vise une publication complète du BOSS à cette échéance et elle ne l'est pas assez si l'on vise uniquement la publication des premières fiches de la direction de la sécurité sociale (DSS). Je vous suggère donc de retirer l'amendement.
Je vais retirer l'amendement, mais il serait bon de fixer une date, quand bien même elle serait postérieure au 1er juillet. J'espère que nous pourrons nous accorder sur ce point d'ici à la séance publique.
L'amendement est retiré.
La commission adopte l'article 13 sans modification.
Article 14 : Mesures de lutte contre la fraude
La commission adopte l'article sans modification.
Chapitre III Réguler le secteur des produits de santé
Article 15 : Clause de sauvegarde des dispositifs médicaux
La commission est saisie de l'amendement de suppression AS693 de M. Jean-Carles Grelier.
Cet amendement tend à supprimer l'article 15, dont on peut dire qu'il est un pistolet sur la tempe des industriels. Il est en effet indiqué dans son exposé des motifs que la clause de sauvegarde qu'il institue a vocation, non pas à s'appliquer, mais à faire pression sur les industriels pour favoriser la négociation. C'est la négation même, me semble-t-il, de l'esprit de la négociation conventionnelle conduite par le Comité économique des produits de santé (CEPS). J'ajoute qu'à la différence du secteur du médicament, le secteur des dispositifs médicaux est constitué de start-up et de petites sociétés qui peuvent être extrêmement gênées par une telle clause et pour lesquelles il faut laisser ouvert le champ de la négociation conventionnelle.
Cette clause de sauvegarde a vocation à s'appliquer si la croissance annuelle du marché des dispositifs médicaux inscrits sur la « liste en sus » intra-hospitalière et intra-groupe homogène de séjours – il s'agit, dans 90 % des cas, de dispositifs orthopédiques, notamment de prothèses, et d'implants utilisés pour le traitement d'infarctus ou d'accident vasculaire cérébral –, dépasse 3 %.
Je partage un certain nombre de vos interrogations. De fait, si la croissance de ce marché est dynamique, c'est parce en raison notamment d'une augmentation des volumes qui s'explique, par exemple, par l'avènement des thrombectomies, lesquelles permettent d'éviter des handicaps à nombre de victimes d'accidents vasculaires cérébraux. Quant aux prix, qui peuvent certes poser problème, la négociation conventionnelle avec le CEPS a pour objet, comme vous l'avez indiqué, de les déterminer et d'exercer, le cas échéant, une pression sur les industriels.
Néanmoins, l'an dernier, le taux de croissance du marché est demeuré inférieur à 3 %, de sorte que si la dynamique reste la même l'an prochain, cette clause ne s'appliquera pas. On peut l'interpréter comme un « pied dans la porte » : nous savons qu'il est plus simple de faire varier un taux que d'introduire un nouveau dispositif.
Quoi qu'il en soit, dans un avis de 2015, les inspections générales des affaires sociales et des finances s'étaient montrées très réservées quant à une telle disposition. Ce type de clause existe dans le secteur du médicament, où elle a davantage de sens. Je précise cependant qu'en l'espèce, elle concernerait des entreprises de taille intermédiaire plutôt que des PME.
J'avoue que je suis moi-même assez réservé quant à cette disposition. Je l'étais déjà par le passé, lorsque nous avons assisté à certaines tentatives législatives d'imposer ce type de mesures ; il m'est donc difficile de me déjuger. Nous en discuterons certainement avec la ministre en séance publique.
Cela dit, j'émets un avis défavorable à votre amendement, car je lui préfère l'amendement AS108 de M. Paul Christophe, qui a un objet similaire au vôtre mais qui présente l'avantage de préserver une des dispositions de l'article 15 qui me paraît devoir l'être.
Pour ma part, je soutiens l'amendement AS693 car, s'agissant des dispositifs médicaux innovants, une telle clause de sauvegarde me paraît inadaptée et inefficiente. Un mécanisme conventionnel serait certainement beaucoup plus efficace en la matière.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine l'amendement AS108 de M. Paul Christophe.
Je souscris aux propos de M. le rapporteur général. Cette clause de sauvegarde suscite une véritable inquiétude, car le marché est très hétérogène : elle concerne des dispositifs divers, souvent produits en petites séries par de très petites entreprises. Autant ce mécanisme peut être pertinent en ce qui concerne le médicament, autant il est difficilement applicable aux dispositifs médicaux. En outre, il fait peser une menace sur un écosystème d'entreprises innovantes, dont de nombreuses entreprises françaises, qui sont déjà limitées dans leur capacité de générer des gains de productivité et doivent relever le défi colossal que représente l'application d'un nouveau règlement européen. Tel est le sens de l'amendement.
Suivant l'avis favorable du rapporteur général, la commission adopte l'amendement.
En conséquence, les amendements AS398 de M. Adrien Quatennens et AS59 de M. Paul Christophe tombent.
La commission examine l'amendement AS266 de M. Paul Christophe.
Le PLFSS fait référence à la notion d'exploitant. Or, ce terme, s'il est commun à la réglementation du médicament et du dispositif médical, renvoie à des notions complètement différentes selon le secteur concerné. En matière de dispositifs médicaux, par exemple, l'article R. 5211-5 du code de la santé publique définit l'exploitant comme « toute personne physique ou morale assurant la responsabilité juridique de l'activité requérant l'utilisation de ce dispositif ». Or, cette acception est sans rapport avec celle proposée dans le PLFSS.
L'articulation des deux codes entraînera donc inéluctablement une confusion entre ces termes et soumettra de fait des opérateurs économiques à un régime qui ne leur sera pas destiné. Il est d'autant plus indispensable d'assurer une cohérence légistique en la matière que la réglementation de la sécurité sociale est complexe. C'est pourquoi il est proposé, par cet amendement, de renoncer à la notion d'exploitant.
Cet amendement me semble ajouter de la confusion à une terminologie complexe que cet article s'efforce de clarifier. Je vous suggère donc de le retirer.
L'amendement est retiré.
La commission adopte l'article 15 modifié.
Article 16 : Fixation du taux M. pour 2020
La commission examine, en discussion commune, les amendements identiques AS315 de M. Gilles Lurton et AS414 de M. Jean-Pierre Door, ainsi que l'amendement AS399 de Mme Caroline Fiat.
De PLFSS en PLFSS, les entreprises du médicament voient leur situation se dégrader. L'ONDAM 2020 a été fixé à 2,3 % ; pour le médicament, le taux de croissance autorisé est fixé à 0,5 %. Faire, chaque année, du médicament le principal vecteur des économies recherchées sur l'assurance maladie a des conséquences graves. La part de financement consacrée au médicament au sein des dépenses de santé décroît chaque année, entraînant un décrochage qui commence à se manifester. Concrètement, ce décrochage allonge le délai d'accès aux médicaments, incite au désinvestissement industriel et suscite des phénomènes nouveaux de pénurie – nous y reviendrons à l'article 34.
L'amendement AS315 est un amendement d'appel, qui vise à appeler l'attention de la commission sur l'absurdité qui caractérise chaque année la fixation du plafond du taux de croissance des entreprises du médicament.
Compte tenu de la contraction du budget de la sécurité sociale, du fait notamment de l'absence de compensation par l'État des exonérations de cotisations sociales qu'il a décidées, et de la fixation d'un ONDAM très faible, il est nécessaire que l'ensemble des entreprises actrices du secteur participent à l'effort collectif. C'est pourquoi nous proposons, par l'amendement AS399, de fixer à 0,1 % le taux d'évolution de leur chiffre d'affaires à partir duquel elles doivent contribuer.
Le taux M d'évolution du marché du médicament avant déclenchement de la clause de sauvegarde a été fixé en concertation avec les industriels dans le cadre du CSIS. Avis défavorable à ces trois amendements.
La commission rejette les amendements AS315 et AS414.
Puis elle rejette l'amendement AS399.
Elle adopte ensuite l'article 16 sans modification.
Après l'article 16
La commission examine, en discussion commune, deux séries d'amendements identiques : les amendements AS351 de M. Gilles Lurton, AS417 de M. Jean-Pierre Door et AS502 de Mme Agnès Firmin Le Bodo, d'une part, et les amendements AS97 de M. Paul Christophe, AS352 de M. Gilles Lurton, AS418 de M. Jean-Pierre Door et AS504 de Mme Agnès Firmin Le Bodo, d'autre part.
Les entreprises de la répartition pharmaceutique jouent un rôle crucial dans la chaîne du médicament en assurant l'approvisionnement de plus de 21 500 pharmacies françaises sur l'ensemble du territoire. Leurs missions sont assorties d'obligations de service public encadrées par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé. Elles doivent ainsi disposer des stocks de médicaments permettant de satisfaire durant au moins quinze jours la consommation habituelle, livrer l'ensemble des pharmacies d'officine dans un délai de 24 heures après chaque commande et disposer d'au moins neuf médicaments sur dix commercialisés en France.
Dès lors que ces missions sont confiées par l'État à des acteurs privés, la rémunération de ces derniers est encadrée par un arrêté de marge. Par ailleurs, l'activité de répartiteur est soumise à une taxe prélevée par l'ACOSS au titre de la vente en gros de médicaments. L'assiette de cette contribution est composée de trois parts, dont la première correspond à un taux de 1,75 % du chiffre d'affaires hors taxes réalisé par l'entreprise au cours de l'année civile. Or, depuis plusieurs années, le système de rémunération est inadapté à l'évolution du marché et n'est plus viable pour les répartiteurs pharmaceutiques, qui ne parviennent plus à dégager de bénéfices. L'amendement AS351 a pour objet de remédier à cette situation.
Même si des discussions sont en cours avec le ministère, le circuit de répartition des médicaments est actuellement fragile, au point qu'il conviendrait de prendre des mesures à court terme pour éviter son effondrement, car celui-ci créerait des difficultés considérables dans la distribution des médicaments aux pharmacies de France.
La chaîne du médicament, dont font partie l'industrie pharmaceutique et les entreprises de répartition pharmaceutique, va mal. L'an dernier, Mme la ministre s'est engagée à ce que des discussions aient lieu ; elles ont lieu, mais elles n'ont pas abouti à grand-chose pour l'instant. L'amendement AS502 vise donc à ramener de 1,75 % à 1 % le taux de la contribution dont s'acquittent les entreprises de répartition pharmaceutique.
L'an dernier, lors de l'examen du PLFSS, nous avons eu, sur ce sujet, un long débat au cours duquel Mme la ministre s'est engagée à trouver une solution pour le premier trimestre 2019. Or, si des travaux sont en cours, nous ne voyons, hélas ! rien venir, et la situation ne s'est pas améliorée. L'amendement AS97 vise donc à tirer le signal d'alarme, car ces entreprises sont dans une situation de grande précarité, et à souligner la nécessité de pérenniser le système de distribution du médicament, qui est indispensable.
La répartition pharmaceutique est une question dont nous débattons chaque année. L'an dernier, la ministre a indiqué qu'elle engagerait des discussions avec les industriels grossistes répartiteurs. Selon mes informations, ces travaux ont abouti à une proposition concrète visant à transformer en profondeur les modalités de rémunération des grossistes répartiteurs. Cette proposition leur a été transmise, mais n'a pas encore reçu de réponse.
À ce stade, toute modification de la fiscalité, dans des proportions qui ne sont pas négligeables – puisque l'impact financier de vos propositions s'élèverait à 90 millions ou à 60 millions d'euros chaque année, pour une taxe qui en rapporte 200 millions – perturberait ces négociations. Je vous propose donc que nous en discutions avec la ministre en séance publique, afin de savoir où nous en sommes. Je vous suggère de retirer vos amendements ; à défaut, avis défavorable.
La commission rejette les amendements AS351, AS417 et AS502.
Puis elle rejette les amendements AS97, AS352, AS418 et AS504.
Elle examine ensuite l'amendement AS281 de M. Paul Christophe.
Alors que les biosimilaires participent au même titre que les génériques à des économies potentielles pour le système de santé, les industriels qui mettent en oeuvre des stratégies de promotion pour leurs biosimilaires ne bénéficient, à ce jour, d'aucun abattement sur la taxe sur la promotion. En cohérence avec la stratégie nationale de santé, qui soutient le développement des biosimilaires, il conviendrait d'attribuer aux industriels commercialisant ces produits les mêmes avantages fiscaux que ceux accordés aux producteurs de génériques. Il vous est donc proposé d'insérer un alinéa prévoyant, pour les biosimilaires, le même abattement que celui existant pour les spécialités génériques.
Avis défavorable. L'idée est séduisante, mais elle suscite un certain nombre de difficultés liées aux différences intrinsèques entre ces deux catégories de produits.
La commission rejette l'amendement.
TITRE II CONDITIONS GÉNÉRALES DE L'ÉQUILIBRE FINANCIER DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Article 17 : Transfert de recettes entre la décurité sociale et l'État et entre régimes de sécurité sociale
La commission est saisie de l'amendement AS429 de Mme Caroline Fiat.
Cet amendement tend à supprimer l'article 17, qui prévoit la finalisation de différentes réformes auxquelles nous nous sommes opposés, à savoir le transfert de recettes entre les branches et organismes de la sécurité sociale et la répartition de la TVA et de la taxe sur les salaires entre les branches, en conséquence des allégements généraux des cotisations patronales d'assurance chômage auxquels nous nous opposons. Cet article prévoit également le transfert à la sécurité sociale du financement de l'Agence nationale de la sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et de l'Agence nationale de santé publique (ANSP). Or, ce transfert nous semble relever d'une mauvaise appréciation du domaine de la sécurité sociale : l'ANSM et l'ANSP étant des agences chargées de la santé publique et de la prévention, elles doivent, à ce titre, demeurer dans le giron du budget général de l'État.
Cet article prévoit enfin l'abrogation des transferts de dette de l'ACOSS vers la CADES, l'instauration d'une compensation entre le régime spécial de retraite du personnel de la SNCF et la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) et l'AGIRC-ARRCO, du fait de la fin du régime spécial de retraite de ce personnel votée dans le cadre du nouveau pacte ferroviaire, ainsi que la finalisation de la réforme du RSI.
En tant que fille de plombier, j'estime que, lorsqu'un tuyau est défaillant, il faut en changer, et donc le supprimer.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine l'amendement AS607 de M. Gilles Lurton.
Il s'agit d'un amendement de cohérence, compte tenu de l'adoption, à l'article 3, d'un amendement visant à supprimer la non-compensation à la sécurité sociale des pertes de recettes causées, en 2019, par les décisions de l'État de modifier les conditions de paiement de la contribution sociale généralisée et la tarification des heures supplémentaires.
Il s'agit de l'amendement miroir de celui adopté tout à l'heure à l'article 3, qui supprime la non-compensation des mesures d'urgence pour l'année 2019. L'article 17 a pour objet la non-compensation des mesures pour l'année 2020 à hauteur de 3,8 milliards d'euros ; vous êtes le seul député à avoir déposé un amendement de suppression. Je ne peux pas donner un avis différent de celui que j'ai donné tout à l'heure à l'article 3, à savoir un avis défavorable.
Je comprends bien que vous ne puissiez pas donner un avis différent. Néanmoins, à partir du moment où la commission des affaires sociales a adopté la suppression des alinéas considérés de l'article 3, il faut en tirer les conséquences à l'article 17 en adoptant l'amendement AS607.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement AS684 de M. Jean-Pierre Door.
Le Gouvernement envisage, dans l'article 17, alors même que s'engagent les discussions sur la réforme des retraites, de faire compenser par la CNAV et par l'AGIRC-ARRCO les déficits du régime spécial de retraite du personnel de la SNCF. Ainsi le régime général des salariés français devra-t-il supporter les déséquilibres du régime de la SNCF. C'est un véritable problème : que deviendront ces déficits ? Seront-ils assumés par tous les Français ?
Avis défavorable car le régime SNCF devrait subir une forte baisse de ses cotisants, et donc de ses recettes, dans les années à venir.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite les amendements identiques AS22 de M. Gilles Lurton, AS427 de Mme Agnès Firmin Le Bodo et AS453 de Mme Annie Vidal.
L'amendement AS22 vise à compléter l'alinéa 55 par la phrase suivante : « Les modalités d'attribution de l'enveloppe de 50 millions d'euros susvisée seront précisées par décret d'application. »
En effet, la tarification et le financement des SAAD ne répondent pas à l'enjeu démographique actuel et surtout au fait que les personnes souhaitent majoritairement rester à leur domicile – cette politique est encouragée par le ministère des solidarités et de la santé et je l'encourage aussi très fortement dans ma circonscription. Cette tarification est réglementée par des décrets, dont le principal fixe les critères de sélection pour l'attribution de l'enveloppe de 50 millions octroyée par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) pour l'année 2019. Il conserve également les principes de financement et de tarification existant et ne préfigure de ce fait aucune réforme d'ampleur.
En effet, ce décret impose aux SAAD de conclure un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens et opère une différence d'attribution des crédits entre les SAAD habilités et les SAAD non habilités, ce qui institue une inégalité de reste à charge entre les bénéficiaires. Pour cette raison, les fédérations du secteur médico-social ont engagé un recours contentieux contre ces textes réglementaires. Le présent amendement vise donc à préciser que la répartition de l'enveloppe de 50 millions d'euros sera définie par le décret d'application.
Il est un peu tard pour entamer ce débat ; je veux simplement indiquer qu'il existe un contentieux sur le décret d'application concernant l'aide de 2019. L'amendement AS427 a pour objet de préciser qu'un nouveau décret serait à l'origine de la répartition de cette nouvelle aide de 50 millions.
L'amendement AS453 a pour objet de proposer de nouvelles modalités pour l'utilisation de l'enveloppe de 50 millions pour l'aide à domicile. Force est de constater que l'enveloppe inscrite en LFSS 2019 manque à ce jour d'effectivité. Il s'agit donc de prévoir par décret ou par nouvelle rédaction de l'alinéa de cet article les modalités d'accès à cette enveloppe.
Avis favorable car ces amendements identiques posent une question importante : celle du financement des SAAD. Je vous propose donc de les adopter.
La commission adopte ces amendements.
Elle adopte ensuite l'article 17 modifié.
Article 18 : Approbation du montant de la compensation des exonérations mentionnées à l'annexe 5
La commission examine, en discussion commune, les amendements AS135 de M. Pierre Dharréville et AS366 de M. Jean-Hugues Ratenon.
L'amendement AS135 vise à supprimer la contribution de 0,3 % prélevée sur les pensions de retraite pour financer la CNSA, qui pèse sur le pouvoir d'achat des retraités. En lieu et place, le financement de la dépendance serait assuré par une contribution de solidarité des actionnaires pour financer l'adaptation de la société au vieillissement. En mettant à contribution les dividendes versés aux actionnaires à hauteur de 2 %, nous pourrions ainsi récupérer près de 1 milliard d'euros par an pour le financement de la CNSA.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur général, la commission rejette successivement ces amendements.
Puis elle se saisit de l'amendement AS137 de M. Pierre Dharréville.
J'imagine que le débat en séance permettra de savoir pourquoi il paraît inopportun de reporter la taxe pour l'autonomie sur les actionnaires qui, ces dernières années, ont augmenté leurs dividendes.
Les différents dispositifs d'allégements de cotisations sociales patronales ont doublé entre 2013 et 2019 et s'élèvent aujourd'hui à 66 milliards d'euros. Outre leur coût exorbitant pour les finances publiques, ces dispositifs ne sont pas toujours efficaces en termes de créations d'emplois et ne permettent pas une élévation du niveau de qualification et de rémunération des travailleurs de notre pays.
Afin de limiter l'inflation de ces dispositifs, l'amendement AS137 crée un principe de non-prolifération des dispositifs d'exonération de cotisations sociales en prévoyant que chaque nouveau dispositif fait l'objet de la suppression d'un dispositif existant pour un montant équivalent.
Même débat que sur l'efficacité des allégements tout à l'heure. Nous ne pourrons l'examiner que lorsque nous disposerons des données. Demande de retrait ou avis défavorable.
Je ne le retirerai pas car il n'y a rien à évaluer : il s'agit simplement de s'engager à arrêter d'accorder des exonérations supplémentaires. Toute exonération nouvelle doit faire l'objet d'une suppression d'exonération équivalente : je ne crois pas que cela nécessite une évaluation.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement AS369 de M. Adrien Quatennens.
Cet amendement a pour objet la remise d'un rapport au Parlement examinant les atteintes à la sécurité sociale et à ses grands principes. Cet exercice d'introspection permettra d'envisager des mesures de protection de ce dispositif, notamment par une constitutionnalisation plus claire des grands principes sociaux.
Depuis la loi n° 94637 du 25 juillet 1994, dite « loi Veil », toutes les exonérations de cotisations sociales ont été compensées à l'euro près par l'État. En effet, ces exonérations sont devenues au fil du temps un instrument de la politique de l'emploi utilisé par les gouvernements. Leur poids financier ne saurait reposer sur le budget de la sécurité sociale.
En abrogeant l'article L.131-7 du code de la sécurité sociale, le Gouvernement a rompu cet équilibre. Désormais les exonérations de cotisations sociales salariales qu'il décidera ne seront plus compensées. La multiplication de ces exonérations pèsera donc directement sur le financement de notre système de protection sociale.
La logique du Gouvernement est ancienne et son logiciel périmé. Il veut faire croire à une augmentation du salaire net et du pouvoir d'achat par la baisse des cotisations sociales salariales et omet sciemment que celles-ci font partie intégrante du salaire socialisé et différé. Ce faisant, il tarit les sources de financement de la sécurité sociale.
Pourtant, les exonérations de cotisations patronales sont quant à elles toujours compensées par le budget général de l'État. Par exemple, les 20 milliards d'euros de CICE transformés en baisse pérenne des cotisations patronales seront compensés par autant de milliards en moins pour le fonctionnement et le personnel des hôpitaux, de l'éducation nationale ou de la justice. Le Gouvernement fait donc payer aux contribuables les cadeaux qu'il fait aux entreprises et fait payer aux assurés sociaux la hausse de salaire qu'il leur fait miroiter. En fin de compte, les Français paient deux fois les décisions du Gouvernement.
Franchement, madame Fiat, étant donné le bazar créé par le dernier rapport sur la relation État-sécurité sociale et ses conséquences dans notre débat ce soir, je préfère qu'il n'y ait pas de nouveau rapport et que l'on en reste à une doctrine pouvant être débattue directement au Parlement. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'article 18 sans modification.
Article 19 : Approbation du tableau d'équilibre de l'ensemble des régimes obligatoires pour 2020
La commission adopte l'article 19 sans modification.
Article 20 : Approbation du tableau d'équilibre du régime général pour 2020
La commission adopte l'article 20 sans modification.
Article 21 : Approbation de l'annexe C, de l'objectif d'amortissement de la dette sociale et des prévisions de recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites et mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse
La commission adopte l'article 21 sans modification.
Article 22 : Habilitation des régimes de base et des organismes concourant à leur financement à recourir à l'emprunt
La commission adopte l'article 22 sans modification.
Article 23 : Approbation du rapport sur l'évolution pluriannuelle du financement de la sécurité sociale (annexe B
La commission adopte l'article 23 et l'annexe B sans modification.
Enfin, la commission adopte la troisième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale, modifiée.
La séance est levée à zéro heure vingt-cinq.
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Présences en réunion
Réunion du mardi 15 octobre 2019 à 21 heures 30
Présents. – M. Joël Aviragnet, Mme Delphine Bagarry, M. Belkhir Belhaddad, Mme Justine Benin, Mme Gisèle Biémouret, M. Julien Borowczyk, Mme Brigitte Bourguignon, Mme Marine Brenier, M. Gérard Cherpion, M. Paul Christophe, Mme Christine Cloarec-Le Nabour, Mme Josiane Corneloup, M. Dominique Da Silva, M. Marc Delatte, M. Pierre Dharréville, M. Jean-Pierre Door, Mme Jeanine Dubié, Mme Audrey Dufeu Schubert, Mme Nathalie Elimas, Mme Caroline Fiat, Mme Agnès Firmin Le Bodo, Mme Carole Grandjean, M. Jean-Carles Grelier, Mme Véronique Hammerer, M. Brahim Hammouche, M. Cyrille Isaac-Sibille, Mme Fadila Khattabi, Mme Charlotte Lecocq, Mme Monique Limon, M. Gilles Lurton, M. Sylvain Maillard, M. Thomas Mesnier, M. Thierry Michels, Mme Michèle Peyron, M. Laurent Pietraszewski, Mme Stéphanie Rist, Mme Laëtitia Romeiro Dias, Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe, M. Jean-Louis Touraine, Mme Isabelle Valentin, M. Boris Vallaud, Mme Michèle de Vaucouleurs, M. Olivier Véran, M. Francis Vercamer, Mme Annie Vidal, M. Philippe Vigier, Mme Corinne Vignon, M. Stéphane Viry, Mme Martine Wonner
Excusés. - Mme Claire Guion-Firmin, M. Jean-Philippe Nilor, M. Bernard Perrut, Mme Nadia Ramassamy, M. Jean-Hugues Ratenon, Mme Nicole Sanquer, Mme Hélène Vainqueur-Christophe
Assistaient également à la réunion. - M. Jean-Félix Acquaviva, M. Éric Alauzet, Mme Ericka Bareigts, M. Alain Bruneel, M. Fabien Di Filippo, Mme Sarah El Haïry, M. Sacha Houlié, Mme Amélia Lakrafi, M. Richard Ramos, M. Vincent Rolland