La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
Cet après-midi, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles de la seconde partie du projet de loi, s'arrêtant à l'amendement no 593 portant article additionnel après l'article 16.
Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 593 , 346 , 286 , 98 et 231 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 346 et 286 sont identiques, de même que les amendements nos 98 et 231 .
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, pour soutenir l'amendement no 593 .
Mme la présidente, monsieur le rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, mesdames et messieurs les députés, conformément à la stratégie pour le logement présentée le 20 septembre dernier, cet amendement traduit la volonté du Gouvernement de créer un choc d'offre dans les zones les plus tendues du territoire – les zones A et A bis– afin d'encourager la libération du foncier disponible et, in fine, d'accroître l'offre de logements.
Pour ce faire, un abattement exceptionnel, applicable, sous conditions, pour la détermination de la plus-value nette imposable tant à l'impôt sur le revenu qu'aux prélèvements sociaux, est mis en place pour les cessions engagées du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2020 de terrains à bâtir ou de biens immobiliers bâtis destinés à la démolition en vue de la réalisation de logements.
Cet abattement exceptionnel est conditionné à l'engagement du cessionnaire de construire des locaux destinés à l'habitation, sous condition de densité de l'offre de logements, dans un délai de quatre années suivant la date d'acquisition.
Le taux de l'abattement, fixé à 70 %, pourra être porté à 85 % lorsque le cessionnaire s'engage également à réaliser et à achever majoritairement des logements sociaux ou intermédiaires.
Par ailleurs, pour encourager la construction de logements sociaux sur l'ensemble du territoire national, les exonérations existantes en faveur des cessions directes ou indirectes réalisées au profit d'organismes en charge du logement social sont également prorogées jusqu'au 31 décembre 2020.
Enfin, puisque les cessions de droit de surélévation contribuent à l'objectif de densification poursuivi par le Gouvernement, leur exonération au titre des plus-values immobilières est elle aussi prorogée pour une durée de trois ans, soit jusqu'au 31 décembre 2020.
Le coût de ce gros effort du Gouvernement en faveur du choc d'offre est évalué à 170 millions d'euros en 2018, dont 60 millions au titre de l'impôt sur le revenu et 110 millions au titre des prélèvements sociaux. Il serait porté à 180 millions d'euros en 2019 et 2020.
Pour la clarté du débat, je vais aller au-delà de la présentation de l'amendement no 346 et donner quelques explications sur les amendements en discussion commune.
L'amendement du Gouvernement vise à mettre en oeuvre le premier engagement de sa stratégie pour le logement visant à provoquer un choc d'offre en faveur de la construction dans les zones tendues. D'une certaine manière, il apporte une réponse à tous ceux qui, au cours du débat, nous ont accusés de maltraiter l'immobilier et ont exprimé leurs craintes pour le secteur du bâtiment.
Je précise que l'amendement gouvernemental reprend entièrement les dispositions de l'amendement no 346 de la commission proposant une exonération pour les cessions en faveur du logement social. Son adoption ferait donc tomber ce dernier ainsi que l'amendement identique no 286 , déposé par M. Pupponi. De même, elle rendrait sans objet les amendements identiques nos 98 et 231 sur l'exonération des plus-values immobilières pour les droits de surélévation – dont l'amendement du Gouvernement reprend une partie, à savoir l'exonération pour les projets privés – ainsi que l'amendement no 287 de M. Pupponi, qui proposait aussi un abattement exceptionnel.
Sur le fond, cet amendement prévoit un abattement de plus-values immobilières sur les seuls terrains à bâtir et dans certaines zones. Des abattements exceptionnels de ce type ont été appliqués en 2013 et 2014 sur le foncier bâti ainsi qu'en 2015 sur le foncier à bâtir, mais ils étaient à chaque fois de portée générale. Pour la première fois, l'abattement est ciblé – cela mérite d'être souligné.
L'abattement sera de 100 % pour les cessions en faveur du logement social, ce qui constitue, là encore, la prorogation d'un dispositif existant sur lequel veille jalousement M. Pupponi. Il sera de 70 % en zone tendue – et de 85 % lorsque le cessionnaire s'engage à réaliser des logements sociaux. Vous l'aurez compris, c'est le cédant qui bénéficie de l'exonération de plus-values immobilières mais c'est l'acheteur du terrain qui s'engage à construire. À défaut de construction dans un délai de quatre ans suivant la cession, une amende, correspondant à 10 % du prix de cession, est infligée.
Les taux sont extrêmement puissants, en comparaison des abattements de 20 % ou 30 % votés entre 2013 et 2015. L'effet sera certainement très sensible dans ces zones.
Autre élément important, l'abattement n'est pas limité à six mois ou un an ; il est applicable aux promesses signées jusqu'en 2020, suivies d'une vente définitive qui peut être effectuée jusqu'à 2022, et de travaux qui peuvent au maximum être réalisés jusqu'en 2026 – après Jésus Christ ! Son effet devrait être conséquent et structurant en matière de construction de logements dans les zones tendues, et notamment de logement social.
La question du coût du dispositif est néanmoins posée. L'abattement exceptionnel, prévu dans la loi de finances pour 2015, coûtait 100 millions d'euros par an mais il était de portée générale et son taux était de 30 %. Ici, le taux est beaucoup plus important, et le dispositif durable. Quel sera donc son coût annuel ?
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l'amendement no 286 .
Je dirai également un mot de l'amendement no 287 . L'amendement no 286 est le même que celui qui a été adopté par la commission des finances et que le rapporteur général a excellemment présenté. L'amendement no 287 , examiné lors de la réunion tenue en application de l'article 88, a été rejeté par la commission.
Mme la ministre a affirmé que le Gouvernement engageait un effort exceptionnel. Mais, cet effort a déjà été accompli par le passé puisque les dispositions qu'il propose consistent, pour une part, à proroger des abattements déjà existants – le rapporteur général l'a parfaitement dit. En outre, le taux de 100 % d'abattement applicable à la vente d'un terrain situé en zone tendue pour la construction de logement social, prévu dans l'amendement du Gouvernement, est précisément celui proposé par l'amendement no 247 qui n'a pas été retenu par la commission des finances.
Nous soutiendrons donc l'amendement du Gouvernement qui est un copier-coller de ceux que nous avions déposés.
J'ai repris cet amendement qui a déjà été défendu dans l'hémicycle par notre collègue Jean-Paul Mattei après avoir été interpellée à plusieurs reprises sur la question. Afin d'accompagner l'effort de production de logements en zone tendue souhaité par le Président de la République, il vous est proposé de proroger jusqu'au 31 décembre 2019 l'exonération prévue en cas de cession d'un droit de surélévation.
J'ai cru comprendre que l'adoption de l'amendement du Gouvernement ferait tomber cet amendement. En revanche, je n'ai pas bien saisi si son objet était partiellement ou totalement repris dans l'amendement gouvernemental.
Pourriez-vous me préciser ce qui est retenu dans l'amendement du Gouvernement et ce qui ne l'est pas ?
La parole est à M. Jean-Paul Mattei, pour soutenir l'amendement no 231 .
L'amendement du Gouvernement, que nous découvrons, n'a rien d'anodin – les choix qu'il opère sont même assez décoiffants. Je regrette qu'il nous soit présenté au dernier moment car nous aurions eu besoin d'un peu de recul pour en évaluer la portée.
Je veux notamment m'assurer que ses dispositions s'appliquent aussi à la cession de droits de surélévation. L'exposé sommaire mentionne les terrains à bâtir et les biens immobiliers bâtis susceptibles d'être démolis, mais je voudrais être certain que les droits de surélévation sont également concernés.
L'amendement du Gouvernement va dans le bon sens, et je le soutiendrai, mais je regrette d'en prendre connaissance si tard, d'autant qu'il est lourd de conséquences. Je ne suis pas sûr que nous les ayons bien mesurées, notamment sur le plan financier. Par ailleurs, j'aimerais m'assurer qu'il prend en compte les dispositions contenues dans nos amendements.
J'ai dû prendre connaissance de l'amendement no 593 dans le même délai que vous, monsieur Mattei, ce qui est un peu léger. C'est donc sous le contrôle du Gouvernement que je répondrai à vos interrogations et à celles de Mme Louwagie. Il me semble que l'amendement satisfait votre demande s'agissant des particuliers, mais je n'y vois pas les éléments qui concernent les entreprises. C'est la raison pour laquelle je qualifiais de partielle la reprise des dispositions prévues par vos amendements. Il serait bienvenu que le Gouvernement le confirme.
J'émets un avis favorable sur l'amendement no 593 , dont l'adoption fera tomber les autres amendements.
Je confirme l'interprétation de M. le rapporteur général : la disposition relative à la surélévation s'applique aux particuliers uniquement.
Sur la forme, je remarque que l'amendement du Gouvernement – ce n'est pas un petit amendement, le rapporteur général l'a dit, puisque son coût est estimé entre 170 et 180 millions d'euros – n'a fait l'objet d'aucun examen en commission, d'aucune évaluation ni d'étude d'impact. Il appelle donc de ma part plusieurs questions.
La première concerne le caractère incitatif d'une telle mesure. Le rapporteur l'a rappelé, il existait déjà un abattement de ce type, avec un taux de l'ordre de 30 %. A-t-on vérifié que cette mesure, qui coûtait 200 millions d'euros, avait produit un quelconque effet ? En d'autres termes, les cessions de terrain ont-elles beaucoup augmenté ? Si ce n'est pas le cas, cela signifie que le précédent dispositif n'a pas servi à grand-chose. Le « choc de l'offre » qu'il devait favoriser a-t-il vraiment eu lieu ?
Ensuite, je m'étonne que votre amendement, qui prévoit pourtant des taux d'abattement bien plus élevés, ait un coût à peu près équivalent à celui de l'ancien dispositif.
Enfin, l'amendement prévoit deux taux distincts – 70 et 85 %. Pour passer du premier au second, il faut que le cessionnaire s'engage, au moment de la vente, à réaliser majoritairement des logements sociaux ou intermédiaires. C'est très bizarre : si le cessionnaire ne tient pas son engagement, allez-vous demander au cédant, qui n'y est pour rien, le remboursement du différentiel ? Dans cette hypothèse, le deuxième ne serait pourtant que la victime de la malhonnêteté du premier. Dès lors, je ne comprends pas pourquoi il devrait être redevable d'une amende.
Merci, monsieur de Courson. Cinq députés ont demandé la parole ; je pense que les explications arriveront ensuite.
La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne.
Oui, madame la présidente, beaucoup de députés ont demandé la parole, mais puisque l'amendement n'a pas été discuté en commission, il faut bien que nous fassions en séance le travail qui aurait dû être effectué en amont.
Moi aussi, madame la secrétaire d'État, je considère que la méthode du Gouvernement est inacceptable. À ce stade du débat, tout va bien. On trouve des sous : 150 à 200 millions d'euros, ce qui est loin d'être une bagatelle. Et l'on continue la concentration des crédits sans prendre en compte la question de l'aménagement du territoire, alors que nous avons besoin d'une véritable politique du logement.
Je suis favorable à des mesures qui concerneraient tout le territoire. On parle toujours des zones tendues ou très tendues. Qu'en est-il des autres ? Ne comptent-elles pas dans votre politique ? La ruralité doit accueillir de nouvelles populations. Il existe beaucoup de logements, voire des centres bourgs entiers à réhabiliter.
Pourquoi ne pas s'en occuper ? C'est une question que nous aurions posée en commission.
Je note enfin que vous n'y allez pas avec le dos de la cuillère, en proposant des abattements de 70 %, voire de 85 %. Une fois encore, certains s'en mettront plein les poches. On aurait pu envisager des seuils, afin de limiter le gain fiscal, notamment pour les investisseurs qui perçoivent déjà des revenus élevés. Un tel amendement justifierait le renvoi du texte en commission.
Qu'est-ce donc que cette façon de procéder, qui consiste à nous mettre toujours devant le fait accompli ? Je ne voterai pas l'amendement, car nous avons déjà vu quelle est votre méthode. Passe encore quand les sommes en jeu sont modérées, mais, en l'espèce, il s'agit de 150 à 200 millions d'euros, c'est-à-dire de montants considérables.
En termes de logement, c'est l'ensemble du territoire qu'il faut considérer. C'est d'ailleurs pourquoi j'appelle de mes voeux une loi d'orientation pour les territoires ruraux. La question de l'habitat et du logement est essentielle si l'on veut qu'ils se développent. Une dernière fois : votre manière de procéder n'est pas recevable dans cette enceinte.
Madame la secrétaire d'État, j'irai dans le même sens que mon collègue. Sur la forme, il est regrettable que nous n'ayons pas pu discuter votre proposition en commission. En outre, comme l'a signalé M. de Courson, nous ne disposons d'aucune évaluation des dispositifs existant auparavant.
Votre amendement rejoint ceux que nous avions déposés. On peut admettre qu'il faille créer un choc d'offre sur les territoires les plus tendus. Mais, si l'on considère le budget de manière plus globale, il apparaît que l'argent public va vers les territoires et vers les gens qui vont plutôt bien, auxquels on consent des cadeaux fiscaux d'un montant non négligeable, tandis qu'on demande aux territoires en difficulté de faire des économies.
La baisse des contrats aidés affecte les territoires qui souffrent le plus, notamment les territoires ruraux, tandis que vous proposez d'engager des dépenses sur les territoires prospères. Encore une fois, il s'agit d'une rupture d'égalité. La fracture territoriale continue malheureusement de s'aggraver.
Quand il s'est agi d'abonder le Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce – FISAC – de 3 millions supplémentaires, c'était une affaire d'État…
… alors que les petits territoires ont besoin de son intervention pour relancer le commerce de centre bourg. Et voilà que vous dépensez à tout-va. Je le regrette, même si je considère que les mesures envisagées vont dans le bon sens en favorisant un choc de l'offre.
La parole est à M. le président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Je m'associe à ce qui vient d'être dit sur la méthode, qui me semble difficilement admissible. Le Parlement peut évidemment continuer à travailler comme il l'a toujours fait, mais vous nous aviez promis une rupture. Je constate que celle-ci n'a pas eu lieu. Au contraire !
Il faut que vous le sachiez et, à un moment donné, il faudra que vous l'admettiez.
Votre méthode court-circuite la commission, qui est pourtant un lieu de débat naturel, comme elle court-circuite le Conseil d'État. Chaque fois que l'opposition formule une proposition – qui n'est pas nécessairement idiote – , vous nous répondez qu'il faut attendre une loi générale, adopter une vision panoramique, sinon planétaire, et vous rejetez nos petits amendements, qui auraient du moins l'avantage d'apporter certaines améliorations.
L'an prochain, promettez-vous, vous disposerez d'une vision globale. Dans ce cas, pourquoi ne pas prévoir une grande loi sur le logement au lieu de rassembler dans un collectif – sachant qu'aucun texte ne ressemble davantage à un fourre-tout – des mesures dont nous avons envie a priori de contester la cohérence ?
Certes, l'amendement tend à élargir ceux de certains députés, mais faute de disposer d'une étude d'impact, nous ne savons pas exactement de quoi il retourne. Dans un moment où il faudrait faire preuve de cohérence, vous semblez avoir oublié les choses. Je le regrette. Vous ne pouvez pas continuer à travailler ainsi et à passer sans arrêt par-dessus la commission. Nous l'avons dit : certains souhaitaient que nous la réunissions pour examiner les amendements et les articles additionnels. Nous y avons renoncé pour avoir ce débat en séance et éviter de perdre encore un ou deux jours, mais l'exercice atteint vraiment sa limite.
L'amendement, qui n'a pas été examiné par la commission des finances, suscite nombre de questions. Nous devrions pouvoir nous référer à l'étude d'impact. Je suis désolée de le dire, mais à un moment, il faut tout de même faire attention à ce qu'on fait.
Je rejoins le point de vue de mes collègues sur les zones tendues : certaines parties du territoire méritent d'être aménagées de manière stratégique, au nom d'une certaine vision.
A-t-on besoin d'exonérations fiscales dans les zones tendues ou faut-il d'autres dispositifs pour favoriser le bâti ou trouver des terrains à bâtir ? Ce n'est pas nécessairement le fiscal qui bloque dans ces zones. Peut-on nous donner davantage d'explications sur ce qui motive l'amendement et sur l'étude d'impact ?
Encore une fois, nous demandons une réflexion sur l'aménagement du territoire dans les zones rurales et sur le moyen de redynamiser ces territoires. Il n'y a pas lieu de se concentrer uniquement sur les zones tendues.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes REM, UAI et NG.
Un mot sur la forme. Comme l'ont dit plusieurs collègues, nous ne pouvons pas accepter de travailler dans ces conditions. Nous avons déjà eu l'occasion de le faire remarquer à propos d'un autre amendement. Les mesures que vous proposez, madame la secrétaire d'État, ont un impact important. Elles nécessitent qu'on prenne en compte certains éléments, qu'on évalue certaines conséquences, qu'on échange. Or nous n'avons pas eu l'occasion de participer au débat, ce qui n'est pas acceptable. Le Parlement doit travailler dans de bonnes conditions.
Mme Cariou souhaite que l'on se réfère à une étude d'impact, mais il n'y a pas eu d'étude de ce type, ce qui n'est pas acceptable pour des dispositions de cette nature.
Sur le fond, monsieur le rapporteur général, vous avez présenté l'amendement du Gouvernement comme une réponse à ceux qui se sont plaints de la situation de l'immobilier, notamment de celle des propriétaires. Je ne partage pas votre vision. Vous l'avez dit : ces dispositions sont favorables aux cédants, mais non à ceux qui exploitent l'immobilier, ce qui pose une vraie question sur les effets d'aubaine.
Deuxièmement, le dispositif privilégie certaines zones – A et A bis–, mais ce sont toujours les mêmes territoires, notamment ruraux, qui sont oubliés.
Et l'on retombe toujours dans les mêmes impasses, n'en déplaise à nos certains collègues.
Madame la secrétaire d'État, nous ne pouvons pas voter dans ces conditions une décision aussi importante, même si elle peut avoir certains effets. Je rejoins l'analyse du président de la commission. Quand nous avons déposé des amendements sur l'agriculture, on nous a objecté que le moment était malvenu et qu'il fallait attendre une loi sur la fiscalité agricole. Quand nous avons soutenu des amendements tendant à simplifier certaines choses, on nous a rétorqué que nous devions attendre la loi de simplification. Quand nos amendements tendaient à instaurer un droit à l'erreur, on nous a expliqué qu'il fallait attendre le projet de loi dédié. Quand nous avons soutenu des amendements sur le logement, on nous a encore une fois opposé le même argument. Nous aimerions trouver davantage de cohérence entre les demandes du Gouvernement et son action.
Sur l'amendement no 593 , je suis saisie par le groupe La République en marche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Distinguons la forme et le fond. Sur la forme, nous discutons d'un énième amendement du Gouvernement, dont l'incidence financière est importante et le chiffrage incertain, puisqu'il tend à augmenter considérablement le taux d'exonération actuel de 30 % qui s'appliquait jusqu'au 31 décembre.
Je suis gênée, car nous avions déposé deux amendements, dont celui du Gouvernement reprend les dispositions. Mais après le débat sur le prêt à taux zéro et sur le dispositif Pinel, je constate qu'on en revient toujours à exclure certaines zones de notre territoire, notamment les zones B et C.
Je conçois que, si l'on élargit le dispositif, la mesure coûtera bien plus que 180 ou 170 millions, mais je pense qu'il faut se demander, comme nous y a invité Émilie Cariou, si l'incitation fiscale est un bon système pour construire du logement sur l'ensemble des territoires.
Avant la seconde lecture, même si le temps est court, nous devrions nous chercher un meilleur dispositif, qui engloberait tous les territoires de notre pays.
Chers collègues, je comprends l'émotion de ceux qui pensent que l'amendement est arrivé trop vite et qui regrettent de n'avoir pas eu le temps de l'étudier. Il se trouve que ces mesures ont été longuement présentées par Jacques Mézard et Julien Denormandie, quand la commission élargie a examiné le budget de la mission « Cohésion des territoires ».
Depuis des semaines, on répète en commission et dans cet hémicycle que l'article 52 du projet de loi de finances apporte des modifications sur lesquelles nous manquons de visibilité et que le logement social en fera les frais. J'entends même dire que nous serions en train d'attaquer le secteur du logement.
Avec cet amendement, le Gouvernement clarifie ses orientations et celles de la majorité afin de créer le fameux choc d'offre, qui permettra de construire, donc d'offrir des logements dans les zones les plus tendues, où nous cherchons à faire baisser structurellement les loyers, non par des moyens artificiels, dont on constate qu'ils ont beaucoup de mal à franchir le contrôle de constitutionnalité, mais par des mesures structurelles relatives à la construction.
Dans notre pays, où 4 millions de personnes sont mal logées et 1,5 million de familles attendent un logement social, quand un dispositif prévoit des abattements qui permettront de construire du foncier moins cher, du logement social, du logement intermédiaire et mixte, et tout simplement des logements, il me semble essentiel de le soutenir.
Nous aurions tous aimé disposer de plus de temps pour examiner l'amendement. Pour avoir suivi les négociations de très près, je puis vous assurer que les décisions ont été prises pendant ces dernières heures. Il nous semblait important, compte tenu de la durée sur laquelle nous nous engageons – l'ensemble du quinquennat – , de clarifier les choses au plus vite.
Le logement demande du temps. On ne se lance pas dans un projet du jour au lendemain. Nous fixons le cap. Notre engagement excède même la durée de notre mandat. Notre méthode consiste à réfléchir sur un temps long. Je comprends votre émotion, mais le groupe REM soutient pleinement le Gouvernement et sa dynamique, le choc d'offre et la réforme du logement, piliers essentiels de sa politique.
En politique, certaines décisions doivent être prises dans l'urgence et d'autres demandent un peu plus de temps et de visibilité.
L'urgence aujourd'hui est certes de provoquer un choc d'offre dans les zones extrêmement tendues mais si les gens quittent nos territoires ruraux ou en difficulté pour aller s'agglutiner dans les métropoles et les grandes villes, c'est parce qu'il n'y a plus d'activité chez nous : les gens vont là où il y a de l'activité.
Ce dont nos territoires ont besoin à plus long terme, c'est d'un choc économique, de façon à ce que les gens y restent au lieu d'aller s'agglutiner là où l'offre de logements est déjà insuffisante.
Donc s'il faut certes répondre à l'urgence, il faut aussi donner à nos territoires les moyens de se développer. C'est ainsi qu'on fera baisser la pression dans les zones tendues.
Je me féliciterais que la majorité et le Gouvernement entendent nos objections si seulement cela vous empêchait d'agir dans l'urgence et la précipitation, sans la réflexion nécessaire. Je ne vois pas l'intérêt de proposer un tel amendement dans la précipitation si c'est pour constater ensuite que cela ne fonctionne pas. Ce serait faire preuve de bon sens que de le retirer pour que nous puissions le réexaminer en commission.
Le groupe MODEM est tout à fait d'accord avec le fond de l'amendement mais la méthode ne nous convient pas. Nous aurions dû l'étudier en commission, d'autant que le sujet est beaucoup trop important pour que nous le découvrions en séance publique. la méthode doit s'améliorer si nous voulons un travail législatif de qualité. Nous allons cependant le voter puisque le fond est bon.
Pour les raisons de forme et de fond que je vous ai exposées, le groupe de Les Républicains s'abstiendra sur cet amendement.
Le fond est peut-être bon mais la méthode n'est pas acceptable, d'autant que nous n'avons pas reçu de réponse à nos questions quant aux raisons qui justifient des taux d'abattement aussi élevés.
Cette mesure a été clairement exposée dès le 20 septembre. Elle fait partie en effet d'une stratégie d'ensemble qui va au-delà de ces sujets fiscaux.
Alors pourquoi ne pas nous l'avoir proposée plus tôt ? C'est encore plus grave !
Le choix du Gouvernement de traiter les sujets fiscaux en loi de finances me semble de bonne politique.
Par ailleurs ces sujets ont déjà été discutés et ont fait l'objet d'amendements.
La proposition du Gouvernement synthétise ces propositions dans un objectif de clarté par rapport à ce qui avait été affiché. Je pense donc que la voix du Parlement a été pleinement entendue.
Exclamations sur les bancs des groupes LR et UAI.
Il est procédé au scrutin.
Nombre de votants | 66 |
Nombre de suffrages exprimés | 54 |
Majorité absolue | 28 |
Pour l'adoption | 40 |
contre | 14 |
Ces trois amendements gigognes ont un objectif de simplification et de cohérence.
S'agissant des plus-values immobilières, comme vous le savez, les taux d'abattement varient en fonction de la durée de détention du bien. La taxation forfaitaire de la plus-value est à 19 % s'agissant de l'impôt et à 15,5 % s'agissant du prélèvement social. Sur les deux « silos », fiscal et social, le rythme de dégressivité n'est pas le même. Cela aboutit à une exonération totale de l'impôt au bout de vingt-deux ans de détention du bien et des cotisations sociales au bout de trente ans.
Il n'y a aucune raison de ne pas harmoniser ces deux régimes, fiscal et social. Je propose dans un premier amendement – le no 407 – que l'on aligne le régime d'exonération des cotisations sociales sur celui qui prévaut pour l'impôt, ce qui revient à exonérer ces plus-values au bout de vingt-deux ans de détention. Le deuxième amendement, no 408 , porte cette durée à dix-huit ans et le troisième, no 409, à quinze ans, ce qui était le rythme d'exonération qui prévalait avant l'augmentation de l'imposition de ces plus-values, augmentation qui fut à mon sens une erreur bien qu'elle ait été décidée par un gouvernement auquel j'appartenais.
Une même durée assurerait la cohérence du régime fiscal et du régime social.
Même avis.
Les jeunes générations doivent se demander d'où vient cette différence de durée entre la CSG et les cotisations sociales d'une part et l'impôt sur les revenus d'autre part. C'est tout simplement qu'uniformiser ces régimes aurait coûté trop cher : ce n'est pas plus compliqué que cela.
C'est pourquoi si nous devions voter un de ces amendements, ce serait le no 407, qui aligne la durée de détention nécessaire pour l'exonération de la CSG à celle exigée pour l'exonération d'impôt sur le revenu, soit vingt-deux ans pour tout le monde.
Cela ne coûterait pas très cher, madame la secrétaire d'État parce que les effets en seraient différés. En clair, ce serait à la charge de vos successeurs – je ne plaisante qu'à moitié. Il serait intéressant que vous nous disiez quel serait le coût de chacun de ces trois amendements.
Je ne comprends pas la logique qui est la vôtre, madame la secrétaire d'État quand vous rejetez une mesure de simplification – via l'harmonisation du régime fiscal et du régime social – alors qu'en principe, quelles que soient nos orientations politiques, nous sommes tous favorables à la simplification.
Il serait effectivement intéressant d'en connaître le coût, comme l'a dit mon collègue de Courson. Par ailleurs, avez-vous une proposition à nous faire pour aller vers la simplification et trouver une solution au problème que ces trois amendements tendent à résoudre ?
C'est en effet une mesure qui a été prise par un gouvernement dont M. Woerth a été membre.
Il est vrai qu'aligner ces durées serait une simplification bénéfique pour le marché de l'immobilier et, via les droits de mutation, pour les caisses publiques, même s'il s'agit de celles des départements et des communes.
Il est vrai que cette différence entre le régime des cotisations sociales, dont le taux va d'ailleurs passer à 17,20 %, et celui de l'impôt, dont le taux ne varie pas, constitue une forme d'anomalie. C'est pourquoi à titre personnel je soutiendrai ces amendements.
Il est vrai qu'en plus le taux va passer à 17,20 % – je vous remercie de votre vigilance, monsieur Mattei.
Maintenir cette différence n'a aucun sens, d'autant qu'elle ne favorise pas vraiment la mise sur le marché des biens immobiliers. Il n'y a aucune raison de s'opposer à une telle mesure, à moins de considérer que la seule simplification qui vaille est celle qu'on propose soi-même.
D'un côté vous nous proposez, en séance de nuit dans des conditions extrêmement contestables, un amendement qui vise à accélérer le rythme des mutations immobilières et à favoriser la construction, et de l'autre vous refusez des amendements qui visent précisément à favoriser les ventes immobilières et donc, au fond, à faire circuler l'argent. Il faudrait quand même, madame la ministre, que vous argumentiez un peu votre refus, que vous nous disiez quelle en est la raison philosophico-économique. Ce ne peut pas être uniquement une question de coût quand on voit tout ce que vous dépensez par ailleurs.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l'amendement no 209 .
C'est un excellent amendement de mon collègue Patrick Hetzel. Aujourd'hui, en effet, seules les actions sont éligibles au dispositif PEA-PME, à l'exclusion des actions dites « de préférence », des certificats d'investissement, des certificats coopératifs d'investissement ainsi que des obligations convertibles négociables sur les marchés réglementés.
Nous pensons que c'est une carence. il faut ouvrir ce dispositif si on veut orienter les flux financiers vers nos PME et lever une objection fréquemment invoquée aux ouvertures de capital.
Pour éviter tout effet d'aubaine qui rendrait une telle mesure onéreuse – je devance votre objection, monsieur le rapporteur général et madame la secrétaire d'État – , cette possibilité serait réservée aux titres émis par des sociétés non cotées sur des marchés organisés et réglementés et les gains ne seraient exonérés qu'à hauteur d'un montant équivalent au prix de revient du titre cédé.
Je pense que c'est une bonne option pour vous qui êtes très sensibles à tout ce qui peut orienter les flux financiers vers les PME.
Non, madame la députée, je ne vous reprocherai pas le coût de l'amendement. Simplement, celui-ci reprend une préconisation du rapport sur l'investissement productif de MM. Carré et Caresche, …
… une proposition faite dans l'ancien cadre fiscal, à savoir l'imposition au barème de l'impôt sur le revenu. Or, il nous semble qu'avec la mise en place du prélèvement forfaitaire unique et celle de l'impôt sur la fortune immobilière, la donne a totalement changé.
La majorité actuelle a pris des mesures qui, en matière d'investissement productif, me semblent beaucoup plus favorables que celles que vous défendez et qui relèvent d'un ancien système qui n'a plus cours.
L'amendement no 209 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement no 544 .
Cet amendement revient sur le problème de l'exonération progressive de la taxe d'habitation pour 80 % puis 100 % de la population si l'on en croit les déclarations de M. Le Maire et, maintenant, du Premier ministre, afin d'imputer cette diminution sur l'impôt sur le revenu.
Avis défavorable à cette transformation du dégrèvement de taxe d'habitation en réduction d'impôt.
L'amendement no 544 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l'amendement no 468 .
Nous revenons sur un débat que nous avons eu à plusieurs reprises : la mise en place d'une discrimination positive en faveur de certains territoires – au même titre qu'il en existe pour les contribuables – est-elle juste ou non ?
Par cet amendement, nous proposons une discrimination positive concernant le Fonds d'investissement de proximité – FIP – Corse mais nous ne demandons pas un cadeau. Les conditions sont en l'occurrence particulières : son champ d'action concerne la seule île de Corse et non quatre régions limitrophes, comme c'est le cas pour d'autres FIP ; le tissu corse est ce qu'il est avec, vous le savez, une présence entrepreneuriale très faible, à quoi s'ajoute un risque supérieur inhérent à l'insularité.
Je rappelle que le FIP ne fonctionnait pas du tout lorsqu'il n'était pas « boosté » par des taux de déduction supérieurs et que, depuis, il a tout de même réuni plus de 70 millions et fait vivre des centaines d'entreprises – dont le taux de survie est largement supérieur à ce qu'il peut être ailleurs. Il est donc logique que si, sur le continent, le taux de déduction fiscale passe de 18 % à 25 %, il passe en Corse de 38 % à 45 %.
Si vous prenez la décision de normaliser le FIP Corse, vous lui enlèverez totalement son attractivité et je ne suis pas quant à moi certain que ce soit in fine une bonne chose pour les finances publiques.
La commission a donné un avis défavorable à votre amendement. Je rappelle que le FIP Corse demeure une dépense dynamique : le coût était de 9 millions en 2012 et il sera de 35 millions en 2018. J'ajoute qu'il existe en Corse d'autres crédits d'impôt importants.
L'amendement no 468 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Ces quatre amendements concernent en effet le même sujet, celui de l'exonération ou du dégrèvement de la taxe d'habitation. Il s'agit d'une question extrêmement importante, emblématique, d'une mesure phare de la campagne électorale que notre majorité soutient fièrement en cette période.
Il se trouve que la suppression de la taxe d'habitation améliorera le pouvoir d'achat de nombre de Français en complément de la baisse de cotisations salariales et malgré l'augmentation de la CSG. Or, une population ne bénéficie pas de cet avantage : celle des retraités qui vivent en établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, les EHPAD. En effet, hors quelques-uns, la plupart des EHPAD ne sont pas soumis à la taxe d'habitation.
Par définition, ces personnes ne bénéficient pas de la baisse de cotisations salariales puisqu'elles sont retraitées et paient la CSG, entre 240 et 400 euros par an lorsqu'elles gagnent entre 1 400 et 2 500 euros par mois – en dessous, elles en sont exonérées et au-delà, nous assumons qu'il n'y ait pas de compensation, ni pour elles, ni pour d'autres. Entre 1 400 et 2 500 euros, ces personnes sont donc assujetties à la CSG sans pouvoir espérer quelque compensation financière que ce soit. Leur pouvoir d'achat sera amputé.
Puisqu'il n'est pas possible d'agir via la taxe d'habitation, inexistante, l'amendement no 80 propose une compensation à travers une réduction d'impôt en complément d'un crédit d'impôt existant au titre de l'hébergement et de la dépendance. Il apporterait 500 euros annuels à toutes ces personnes qui se situent dans la fourchette que j'ai indiquée, soit l'équivalent de la CSG qu'ils devront acquitter sur la même période.
Si cet amendement coûte 125 millions, l'amendement no 79 en coûte moitié moins – 62 millions.
Nous avons déjà examiné plusieurs fois ces amendements.
Je le dis et le répète : il n'est pas opportun de compenser un dégrèvement de taxe d'habitation – TH – par le biais de l'impôt sur le revenu, ces deux impositions étant complètement différentes, les foyers IR et TH ne se recoupant absolument pas.
Avis défavorable à tous ces amendements.
Avis également défavorable.
Il est dommage que Dali ne soit pas député : nous sommes là dans le surréalisme fiscal. On créerait un crédit d'impôt sur un impôt fictif, qui n'existe pas. On progresse, conceptuellement !
C'est une vraie innovation intéressante mais un renvoi en commission en vue de son approfondissement me semblerait de bon aloi.
Sourires.
Je partage totalement ce que vient de dire M. de Courson. Peut-être aurait-on dû travailler sur ces questions avant d'augmenter la CSG ! Depuis le début, on n'a pas arrêté de dire que ce problème se posait ! Depuis le début, on n'a pas réussi à le résoudre et maintenant, voilà où nous en sommes !
Je comprends le souci de M. Alauzet mais je pense que la solution proposée n'est pas la bonne. Si l'on veut « protéger » ces personnes âgées qui, effectivement, perçoivent parfois de très petites retraites, il aurait fallu soit accepter l'amendement que nous avons proposé visant à augmenter le seuil à partir duquel l'augmentation de la CSG est appliquée – c'est-à-dire 3 000 euros – , soit diminuer le reste à charge des personnes en EHPAD. Créer une réduction d'impôt sur un impôt qui n'existe pas, cela me paraît en effet très… hasardeux.
Un problème de pouvoir d'achat se pose et j'aurai quant à moi tout essayé depuis deux mois, y compris les solutions que vous avez proposées – j'ai également suggéré que la CSG ne s'applique pas à cette population. Pour l'instant, rien n'y a fait. Je cherche donc des solutions, de l'aide, afin de trouver un équilibre pour ces personnes.
La prime d'activité – ou naguère la prime pour l'emploi – ne correspond pas non plus à un impôt et elle existe. Pour tous les autres retraités, l'augmentation de la CSG est compensée par la baisse de la taxe d'habitation et cela n'a aucun rapport, monsieur le rapporteur général !
Les personnes dont je parle bénéficient déjà d'un crédit d'impôt sur leurs frais d'hébergement et de dépendance qui peut aller jusqu'à 2 500 euros. Je propose de le compléter par une réduction d'impôt ! Je ne vois pas où est le problème !
En tout cas, chers collègues – certains ici s'en souviennent très bien – , lors du mandat précédent – je regarde Valérie Rabault – , nous avions adopté une mesure de justice fiscale visant, pour fixer le taux de CSG auquel les personnes retraitées sont assujetties, à prendre le revenu fiscal de référence plutôt que le crédit d'impôt. Nous sommes très fiers de nous : nous avons amélioré la situation de 700 000 personnes. Puis, nous avons dégradé la situation de 450 000 personnes et nous avons ramé pendant deux ans pour qu'elles puissent récupérer leur pouvoir d'achat… C'est pourquoi je fais attention aux « angles morts » de cette loi et que j'aimerais bien que cette dérive soit prévenue, sinon, ce seront 250 000 personnes qui seront concernées par cette situation. Après, on assumera…
En fait, monsieur Alauzet, votre démonstration est parfaite car elle corrobore ce que nous disons depuis des semaines : la hausse de la CSG ne sera pas compensée pour tous les Français et pour toutes les catégories socioprofessionnelles. Finalement, vous le démontrez excellemment ce soir. Les Français s'en rendront compte dans quelque temps, quand ils verront leur pension ou leur bulletin de salaire. Ce sont eux qui supporteront les 22 milliards d'euros de CSG que vous mettez à leur charge.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Cet amendement de notre collègue Valérie Beauvais concerne les services à la personne.
Le mécanisme du crédit d'impôt conduit les 3,5 millions de ménages recourant chaque année en France aux services à la personne à réaliser une avance de trésorerie significative sur une période pouvant atteindre plus de dix-huit mois. Autoriser une mobilisation immédiate du crédit d'impôt auprès d'un établissement financier du secteur privé favoriserait le recours à la consommation de services à la personne pour les Français, notamment les plus modestes, qui pourraient alors concilier plus facilement vie familiale et vie professionnelle.
Il convient de souligner que ce dispositif est à coût constant pour l'État puisqu'il permettra une mobilisation immédiate des crédits d'impôt par les établissements financiers avec une restitution des crédits d'impôt par l'État dans les délais habituels de la liquidation de l'impôt sur le revenu.
J'appelle votre attention sur les conclusions d'une étude récente du cabinet Wyman considérant que ce dispositif pourrait engendrer dès le premier semestre suivant sa mise en place la création de plus de 80 000 emplois et permettrait par ailleurs de lutter contre le travail dissimulé.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement identique no 513 .
… de façon à ce que la co-temporalité soit établie en matière d'IR. Eh bien, je vous propose de faire la même chose en matière de crédit d'impôt s'agissant des services à la personne ! L'avance des fonds par les familles sera ainsi évitée. Il s'agit d'un dispositif très moderne, madame la ministre, qui ne coûte rien. La vie des familles en sera simplifiée.
Même avis.
La parole est à M. Christophe Jerretie, pour soutenir l'amendement no 126 .
L'amendement no 126 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement de la commission, no 347.
Puisqu'il s'agit d'un amendement de M. Jean-Paul Mattei, je propose donc son auteur le défende.
Cet amendement concerne le service « Patrim », qui facilite l'aide à l'évaluation d'un bien immobilier. Tout potentiel acheteur ou vendeur d'un bien immobilier peut désormais utiliser ce service, et les restitutions des ventes récentes comparables se font jusqu'au numéro de rue, ce qui est assez précis.
Par cohérence, nous proposons, avec cet amendement, que les mêmes données foncières et immobilières, très largement consultables par les particuliers au travers de « Patrim », soient rendues librement accessibles en ligne sous forme de fichier au profit de tous, notamment les acteurs de l'urbanisme, de l'aménagement et de l'immobilier.
La proposition qui est présentée s'inscrit pleinement dans la politique numérique du Gouvernement. Elle permettra également de mettre en cohérence les données accessibles au public, que ce soit via le service « Rechercher des transactions immobilières », ou via l'application « Demande de valeurs foncières ».
Cette mesure va effectivement dans le bon sens, puisqu'elle est un gage de simplification et d'accès aux informations. Mais je veux vous faire part de mon expérience. Lorsque j'ai fait ma déclaration d'intérêt et de patrimoine en tant que députée, je me suis servie de cet outil pour avoir une estimation de mon bien immobilier et je peux vous dire qu'il ne fonctionne pas du tout. L'idée est bonne, mais il faudrait que le système fonctionne réellement pour qu'il soit vraiment utile.
L'amendement no 347 est adopté.
L'article 17 est très original, puisqu'il fait six pages et compte 159 alinéas, et que tous les cas de figure sont traités. Il prévoit un nouveau report – puisque le dispositif devait entrer en vigueur, de mémoire, le 1er janvier 2017 – de la révision des dispositions sur les valeurs locatives des locaux professionnels, une mesure relativement ancienne, qui a été difficile à mettre en oeuvre.
Compte tenu des modifications qui ont régulièrement été apportées à cette mesure, on s'est très vite rendu compte, au sein des commissions départementales des valeurs locatives et des locaux professionnels, qu'elle produisait l'effet inverse de celui qui était escompté et qu'elle introduisait d'énormes disparités. En effet, les commerces de centre-ville ont parfois vu leur base de valeur locative multipliée par dix, tandis que, à l'inverse, celle des grandes surfaces a parfois été divisée par deux.
Tout le monde a compris qu'il y avait un problème – je me suis entretenue à ce sujet avec mon collègue Charles de Courson. Au sein des commissions départementales des valeurs locatives et des locaux professionnels, nous avons tous levé les bras au ciel et les élus sont eux aussi montés au créneau. Or, avec cet article 17, vous proposez de laisser les choses en l'état, en repoussant seulement d'un an, c'est-à-dire au 1er janvier 2019, la revalorisation annuelle qui, dans le droit commun, s'applique à tous les locaux. Vous proposez qu'il n'y ait aucune modification, ni en 2017, ni en 2018, et que la revalorisation classique des bases ait lieu en 2019.
J'aimerais donc savoir, madame la secrétaire d'État, si vous avez calculé l'impact de cette réforme. Quel est le montant réel de la revalorisation qui aurait dû être appliquée aux valeurs locatives des locaux professionnels au 1er janvier 2018 ?
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement no 537 .
L'amendement no 537 soulève un problème grave, celui de l'incidence de la révision des valeurs locatives sur l'enseignement privé. Les effets de cette réévaluation des bases seront incroyablement variés, comme vous le montreront quelques exemples. À Nanterre, l'augmentation sera de 77 % et elle atteindra 266 % à Boulogne, soit presque un quadruplement. À côté de cela, un département comme le Puy-de-Dôme – cela intéressera Mme Christine Pires Beaune – connaîtra une baisse de 30 %. Pourquoi ? On l'ignore.
Lorsque j'ai déposé cet amendement, le rapporteur général nous a dit qu'il n'y avait pas de problème, que l'augmentation de la cotisation de taxe foncière serait lissée et que, grâce notamment au « planchonnement », elle ne représenterait que 11 %. Ce pourcentage n'est pas faux, mais il s'agit d'une moyenne nationale. Or ce qui intéresse les gens, ce n'est pas l'augmentation moyenne, mais la situation commune par commune, département par département. Or on relève des écarts énormes.
Pourquoi ? Parce que l'administration fiscale – et j'en avais averti l'ancien secrétaire d'État chargé du budget, M. Christian Eckert – n'a pas voulu prendre en considération la spécificité des commodats signés entre les organismes de gestion de l'enseignement catholique – OGEC – et les propriétaires des bâtiments, par lesquels ces derniers consentent des loyers extrêmement faibles. Elle a estimé que les commodats ne reflétaient pas le marché et a appliqué les valeurs de marché, lesquelles varient selon les endroits. Et c'est ce qui conduit à cette situation folle.
Mon amendement est très simple. Il consiste à dire que les bâtiments des établissements d'enseignement privé sous contrat simple ou d'association, qui contribuent au service public de l'éducation, doivent être traités comme ceux de l'enseignement public, lesquels bénéficient d'une exonération de taxe foncière.
Ce que dit Charles de Courson est exact. Il m'a transmis la liste des taux d'augmentation et il est vrai que l'écart-type est spectaculaire – même si je confirme que la moyenne est la bonne.
À partir des éléments qu'il a bien voulu me transmettre, et qui avaient d'ailleurs fait l'objet d'un échange entre le ministère de l'éducation nationale et le ministère des finances sous le gouvernement précédent, nous avons constaté que ces problèmes, qui sont avérés, sont d'ordre réglementaire et n'ont rien à voir avec la loi. Je pense par exemple au classement des cours de récréation dans une catégorie ou une autre, avec des effets possibles sur le calcul de la surface imposable, ou encore au fait de considérer les établissements privés sous contrat comme des établissements à but lucratif.
Le problème est donc réel, mais il ne peut être résolu que de manière réglementaire. Je propose que le Gouvernement fasse une opération de « nettoyage », entre guillemets, afin d'assurer une égalité de traitement entre les différents établissements privés sous contrat. En revanche, je ne suis pas favorable à la proposition que vous faites de ranger les bâtiments d'un établissement privé sous contrat dans la même catégorie que ceux d'un établissement public.
Je vous invite donc à retirer votre amendement, faute de quoi je lui donnerai un avis défavorable. Mais je souhaiterais que le Gouvernement s'engage à éliminer ces écarts et à faire en sorte que des objets identiques relèvent de la même catégorie.
Avis défavorable.
Madame la ministre, on ne peut pas traiter une question aussi grave de cette manière.
Exclamations sur les bancs du groupe FI.
Ce n'est pas possible ! Je vous rappelle que, le 5 janvier 2017 – M. le rapporteur général l'a évoqué – , le directeur de cabinet du ministre de l'éducation nationale a écrit à son homologue, le directeur général du secrétaire d'État chargé du budget des comptes publics. Son courrier se terminait par les mots suivants : « Ces difficultés me conduisent à vous saisir pour vous demander d'étudier la possibilité d'introduire, dans le cadre d'une prochaine loi de finances, une exonération totale ou partielle pour les locaux utilisés pour des activités d'enseignement d'intérêt général. »
C'était du temps de nos collègues socialistes, qui ne sont pas réputés pour être des fanatiques de l'enseignement privé. N'est-ce pas, chers collègues ?
Vous avez certes beaucoup évolué, dans le bon sens, celui d'un équilibre. Ces établissements participent au service public. Il est dommage que l'époux de Mme Najat Vallaud-Belkacem ne soit pas là, car il aurait pu s'assurer auprès d'elle de la véracité de mes propos. Vous ne pouvez pas procéder ainsi, madame la secrétaire d'État. Vous verrez que cela vous retombera dessus !
Il faut trouver une solution et nous ne pouvons pas en rester là, car, lorsque les feuilles d'impôt vont tomber, tous les députés vont avoir les représentants de l'enseignement privé sur le dos.
Ils vont nous demander ce que nous avons voté. Il faut au moins que nous puissions leur répondre que nous en avons parlé et que nous avons proposé une solution.
Je vous ai bien entendu, monsieur le député. Comme vous pouvez l'imaginer, cela fait peu de temps que j'ai été informée de ce problème, mais je comprends que certains établissements aient porté ce sujet à l'attention du ministre des comptes publics, qui va s'en saisir…
… et envisager des mesures de nature réglementaire, si elles sont justifiées.
Rappel au règlement
Madame la présidente, je souhaite faire un rappel au règlement sur le fondement de l'article 58, alinéa 1 de notre règlement.
J'aimerais rappeler les conditions dans lesquelles nous devons examiner les textes de loi : si le Gouvernement y participe, c'est pour répondre à nos questions. Or, aujourd'hui, nous n'avons pas eu de réponse satisfaisante de votre part, madame la secrétaire d'État. Vous indiquez, à juste titre, que vous n'avez pris connaissance de ces questions que récemment, et mes propos ne vous visent pas personnellement. Mais la manière dont nous travaillons n'est pas admissible et je voudrais, madame la présidente, que vous en informiez M. le président de l'Assemblée nationale.
Nous ne pouvons pas travailler sur un texte aussi important que le projet de loi de finances rectificative dans de telles conditions. Certains amendements, dont l'impact budgétaire est important, n'ont été déposés que lundi dernier. L'un d'eux portait sur une somme de 339 millions d'euros ; un autre, relatif à la taxation des plus-values immobilières, prévoyait des abattements relativement importants – 70 et même 85 %. Dans les deux cas, nous n'avons pas eu de réponse satisfaisante à nos questions.
Les conditions dans lesquelles nous travaillons ne sont pas acceptables, je le répète. Je vous demande, madame la présidente, une suspension de séance de cinq minutes.
Elle est de droit.
J'indique au préalable que sur l'amendement no 537 , je suis saisie par le groupe UDI, Agir et indépendants d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à vingt-deux heures quarante-cinq, est reprise à vingt-deux heures cinquante.
Article 17
Je reviens sur l'amendement no 537 . Je suis assez surpris, une fois de plus, par votre remarque, monsieur de Courson : en nous disant que des écarts importants résultent de la révision des valeurs locatives, vous critiquez, de fait, le principe même de cette révision. Car ces écarts en sont la conséquence logique : dans la mesure où aucune révision n'a eu lieu depuis quarante ans, nous nous retrouvons bien évidemment avec des écarts. Vous nous dites que, au bout de quarante ans, la valeur locative est différente en Auvergne et à Boulogne-Billancourt. Or nul besoin d'avoir fait Saint-Cyr pour comprendre qu'en quarante ans, l'évolution n'a pas été la même dans ces deux endroits !
D'autre part, que n'avons-nous pas entendu lorsque nous avons parlé de la suppression de la taxe d'habitation ces dernières semaines ! En particulier – c'est assez jouissif, si vous me passez l'expression – qu'il serait beaucoup plus simple de réviser les valeurs locatives des locaux d'habitation ! Or regardez où nous en sommes : les services ont travaillé pendant dix ans à la révision des valeurs locatives des locaux professionnels – au demeurant, ce travail a été conduit non pas par notre majorité, mais par celles qui nous ont précédés – , le législateur a prévu un lissage et fixé des plafonds et des planchers, et vous en contestez maintenant le résultat ! Heureusement que nous n'avons pas choisi cette méthode pour la taxe d'habitation !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe REM.
Nous sommes nous aussi, dans nos circonscriptions, alertés sur le fait que la revalorisation…
Il s'agit non pas de SMS, mais de notes que j'ai prises sur mon téléphone. Je viendrai vous les montrer après, monsieur Pradié : vous verrez que je les ai écrites moi-même !
S'agissant de l'enseignement catholique, deux problèmes assez spécifiques se posent : le premier concerne la valorisation des surfaces ; le second porte sur les loyers, sachant que les loyers payés par les établissements de l'enseignement catholique ne sont pas de même nature que ceux que paient les autres acteurs économiques. C'est pourquoi de longues négociations ont eu lieu ces dernières semaines sur le sujet.
Toutefois, si nous suivions votre logique, monsieur de Courson – nous pourrions éventuellement la comprendre – , c'est tout le processus de revalorisation des bases qui serait remis en cause. En ouvrant cette brèche, nous nous exposerions au risque de recevoir des demandes analogues de la part de responsables d'activités périscolaires, sociales ou culturelles, et j'en passe, …
… qui insisteront sur le fait qu'ils travaillent eux aussi dans l'intérêt général.
Une chose est certaine : ces établissements paient désormais, en moyenne, 400 euros d'impôt en plus par an. Il y a bien sûr des gagnants et des perdants, et l'écart-type est important. Nous reconnaissons qu'il y a un sujet à traiter. Une piste de travail consiste à réexaminer la pondération des surfaces, en appliquant des coefficients différents aux bâtiments dévolus à l'enseignement et aux autres espaces – cours de récréation, terrains de sport, gymnases – , autrement dit en distinguant ce qui relève de la valeur principale et ce qui relève de la valeur secondaire.
Je comprends que les services fiscaux sont en train de travailler dans ce sens. Au nom du groupe La République en marche, je vous demande, madame la secrétaire d'État, de bien vouloir nous indiquer comment nous, parlementaires, pourrons être informés, dans les mois qui viennent, de la progression de cette instruction fiscale, qui vise à procéder de manière plus fine afin que les revalorisations n'aboutissent pas à des hausses indues et massives de taxe foncière pour ces établissements scolaires.
J'ai fait partie d'une commission départementale des valeurs locatives des locaux professionnels. Or cela s'est très mal passé. Pourquoi ? Parce que les services étaient incapables de nous donner…
Mme de Montchalin se dirige vers M. Pradié et lui montre son téléphone. – Exclamations sur plusieurs bancs.
Il faut dire que votre collègue avait mis en cause la nature des notes qu'elle lisait, monsieur Bazin.
Brouhaha.
Exclamations renouvelées.
Le problème qui s'est posé pour la révision des valeurs locatives des locaux professionnels est que nous ne disposions d'aucune étude d'impact. Nous avons consulté les commissions communales des impôts directs locaux, qui n'en disposaient pas non plus. Donc, nous ne savions pas ce que la révision allait donner. Et, aujourd'hui, un certain nombre d'entreprises découvrent qu'elles doivent payer des sommes astronomiques, d'ailleurs dépourvues de sens puisque les zonages sont contestés.
Il faut prendre en compte ces réalités de terrain. Si nous ne faisons pas remonter les problèmes de terrain afin qu'ils soient corrigés, à quoi sert l'Assemblée nationale ? Or, lorsque nous examinons un amendement du Gouvernement, on ne nous l'explique pas et on nous répond chaque fois, en substance : « Écoutez, faites-nous confiance ! » Au contraire, lorsqu'il s'agit d'un amendement émanant d'un groupe politique, même du groupe Les Constructifs, …
… on nous dit : « Attendez, c'est problématique, vous ne comprenez rien ! »
En l'espèce, nous soulevons une vraie question et je vous demande – autrement, nous ne servons à rien et nous pouvons aller nous coucher sans même examiner ce PLFR – …
… de discuter cet amendement jusqu'au bout : expliquez-nous quels sont les effets de la révision et nous apprécierons si elle est pertinente ou non pour l'intérêt de la France.
Si vous n'arrivez pas à vous exprimer, ce n'est pas de notre faute ! Nous, nous vous écoutons !
Mes chers collègues, madame de Montchalin, mes trente-deux ans de vie publique…
… me donnent un avantage : celui d'avoir participé aux deux révisions des valeurs locatives, celle de 1992, qui n'a jamais été mise en oeuvre, et celle qui est menée actuellement. J'ai présidé dans les deux cas la commission compétente dans mon département. Donc, je connais intimement le problème.
Or le problème n'est pas du tout celui que vous décrivez, ni les uns ni les autres. Il tient fondamentalement au fait que l'administration a refusé de considérer que le loyer, souvent symbolique, fixé dans le cadre des commodats constituait une valeur de marché, sachant que la révision consistait à se caler sur les valeurs réelles de location.
Telle est la première raison des écarts énormes que nous constatons, puisqu'il y avait même des commodats à titre gratuit. Refusant de considérer ces loyers comme des valeurs de marché, l'administration a pris en compte la valeur de marché dans le secteur considéré.
Deuxièmement, les établissements n'ont pas tous été classés dans la même catégorie : certains l'ont été dans des catégories de type « enseignement » ; d'autres, dans d'autres catégories. Ce n'est pas moi qui le dis, mais la note adressée par le directeur de cabinet de la ministre de l'éducation nationale à celui du secrétaire d'État chargé du budget que j'ai mentionnée précédemment.
Troisièmement, il y a eu des problèmes qui sont à la limite du gag : certains ont ainsi considéré les cours de récréations comme des terrains bâtis. Cela a contribué à produire ces énormes écarts.
Il s'agit donc d'un problème grave, susceptible de mettre en péril une partie de l'enseignement privé, ce qui ne me semble pas être l'objectif poursuivi par l'actuelle majorité. Je propose la solution extrême de l'exonération, sur le modèle du régime applicable à l'enseignement public, car c'est la plus facile. Mais, chers collègues de gauche, c'était l'une des propositions du cabinet de Mme Vallaud-Belkacem, comme en témoigne la lettre dont je vous ai lu un extrait.
Madame la secrétaire d'État, on ne peut traiter ce problème difficile à la façon de Mme de Montchalin, qui se contente de dire qu'il va être réglé. Il faut trouver une réponse.
Monsieur de Courson, je n'ai pas votre expérience sur le sujet de la révision des valeurs locatives… ,
… mais j'ai présidé la commission de mon département compétente en ce domaine. Nous y avons tout de même examiné 700 amendements ! Les règles de référence fixées par le législateur – les catégories « MAG » – ont conduit à des énormités en termes de valeurs locatives, parce que les termes en étaient un peu vieillots et ne correspondaient plus au marché actuel.
Ainsi, sur le plan géographique, on s'est appuyé sur la section cadastrale, une division qui remonte, dans certains cas, au cadastre napoléonien et n'a donc rien à avoir avec nos plans d'urbanisme. Il a donc fallu corriger de nombreuses incohérences en appliquant, selon les zones, des coefficients allant de moins quinze à plus quinze. Les fonctionnaires ne sont pas nécessairement en cause : c'est tout le dispositif qui a été très mal ficelé par le législateur de l'époque. Peut-être, à sa place, n'aurions-nous pas été plus vigilants, mais en tout état de cause, il en résulte de grosses anomalies.
Il me semble toutefois que l'amendement en discussion est hors sujet, car l'article que nous examinons prévoit simplement la codification de dispositions contenues dans la LFR pour 2010. Le problème de fond que vous posez doit être envisagé de manière beaucoup plus large – vous avez évoqué des prêts à usage ou des commodats, qui sont des cas particuliers. Votre amendement n'a, selon moi, pas sa place dans l'article 17.
J'appelle également de mes voeux la conclusion de ce travail de codification, qui fait suite à de nombreuses années d'analyse et de discussion technique. Nous devons le mener à son terme. Le cas des établissements d'enseignement a été mentionné tout à l'heure, et nous avons déjà eu l'occasion d'en discuter.
Sur les modes de calcul, les pondérations et plus généralement les modalités d'application de la réforme des valeurs locatives, il est possible de continuer à progresser dans la mesure où, comme vous le savez, cette application sera extrêmement progressive. Plusieurs mécanismes de lissage sont prévus pour atténuer les écarts. Les services de Bercy vont travailler dans les mois qui viennent sur les cas particuliers que vous avez soulevés et rendront compte de leurs travaux, comme cela a été demandé par Mme de Montchalin.
Il est procédé au scrutin.
Nombre de votants | 83 |
Nombre de suffrages exprimés | 73 |
Majorité absolue | 37 |
Pour l'adoption | 15 |
contre | 58 |
L'amendement no 537 n'est pas adopté.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 165 .
L'amendement no 165 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Comme l'amendement no 403 , que nous examinerons dans un instant, cet amendement vise à améliorer le dispositif prévu à l'article 17. Puisque le PLFR revient sur la révision des valeurs locatives des locaux professionnels, essayons d'en profiter pour parfaire cette réforme. Vous le savez, celle-ci prévoit un lissage des cotisations sur dix ans et un « planchonnement », pour éviter des variations trop brutales de la taxe foncière applicable aux locaux professionnels. Toutefois, en l'état actuel du dispositif, en cas de travaux entraînant une nouvelle déclaration de valeur locative en raison du changement de consistance d'un local, le planchonnement et le lissage ne s'appliquent plus : la nouvelle valeur est immédiatement appliquée.
Cela entraîne deux conséquences directes. Premièrement, dans la mesure où la majorité des locaux de centre-ville vont connaître une hausse de taxe foncière, un commerçant situé en centre-ville qui réaliserait des travaux ne bénéficiera pas du lissage de cette hausse sur dix ans. À l'inverse, une grande surface, en réalisant des travaux, pourra se voir immédiatement appliquer la baisse de taxe foncière que vont observer la plus grande partie des commerces situés en périphérie.
La deuxième conséquence concerne les recettes des collectivités, que la réforme devait maintenir le niveau. Dans ma ville, Châlons-en-Champagne, il existe deux grandes surfaces. Si, en 2018, elles réalisent des travaux impliquant un changement d'affectation ou de consistance, les recettes de l'intercommunalité diminueront de 300 000 euros, car le lissage et le planchonnement ne seront pas appliqués.
Les amendements nos 456 et 403 visent donc à boucher les trous dans la raquette – si je puis m'exprimer ainsi. Le premier prévoit l'application du lissage et du planchonnement même lorsque des travaux sont réalisés. Le deuxième maintient cette application lorsque les travaux concernent moins de 10 % de la surface du local.
Je remercie Mme Magnier d'avoir soulevé ce problème. Toutefois, la portée de l'amendement no 456 nous paraît beaucoup trop large. Il me semble préférable d'adopter les deux amendements identiques nos 267 et 403 , qui prévoient de maintenir le planchonnement et le lissage des cotisations lorsque le changement de consistance porte sur moins de 10 % de la surface du local. Le dispositif sera ainsi bien encadré. Je vous invite donc à retirer l'amendement no 456 au profit des deux amendements identiques suivants.
Même avis.
Je remercie M. le rapporteur et Mme la secrétaire d'État et je retire l'amendement.
L'amendement no 456 est retiré.
Les débats de ce soir ont permis de montrer que, si certains parmi nous ont été membres d'une commission départementale des valeurs locatives des locaux professionnels – CDVLLP – , ce n'est pas le cas de tous, à défaut d'un mandat le permettant. Pour autant, c'est à l'Assemblée nationale et au Sénat que nous votons les dispositions mises en oeuvre dans ces commissions. Cet amendement prévoit la présence, avec voix délibérative, des parlementaires dans la commission départementale compétente dans leur circonscription. Cette disposition permettra d'observer les différences d'approche entre les départements – M. de Courson a cité l'exemple des cours de récréation – et, le cas échéant, d'ajuster le dispositif à l'Assemblée nationale.
Nos débats ont montré que la présence des parlementaires dans ces commissions est utile. La commission est donc favorable à l'amendement, sous réserve d'adopter le sous-amendement no 576 , qui reprend les règles applicables aux commissions chargées de la répartition de la dotation d'équipement des territoires ruraux – DETR : deux députés et deux sénateurs, au maximum, seront désignés, et leur nombre ne devra pas être pris en compte pour le calcul d'un quorum. En effet, si nous voulons préserver l'intérêt porté à leurs travaux, il convient d'éviter d'aggraver les problèmes de quorum que connaissent parfois ces commissions en raison du nombre de personnes admises à y siéger.
Même avis.
Le sous-amendement no 576 est adopté.
L'amendement no 417 , sous-amendé, est adopté.
Il s'inscrit dans la même logique d'élargissement des CDVLLP. Les commissions communales et intercommunales des impôts directs – CCID et CIID – ont été bien sûr consultées sur l'évaluation des valeurs locatives des locaux professionnels ; elles ont même conduit un travail important en faveur de la détermination des coefficients de localisation dans chaque parcelle cadastrale. Cependant, le système marche désormais tout seul, et ni les communes ni les intercommunalités n'ont une vision de l'impact de la revalorisation des bases des valeurs locatives.
Le présent amendement vise à prendre à nouveau en considération l'avis, sinon des commissions communales, du moins des commissions intercommunales des impôts directs lors de l'évaluation des bases des locaux professionnels. Pour l'heure, en effet, les communes et intercommunalités ne reçoivent absolument plus d'informations sur les locaux soumis à l'imposition foncière, notamment la contribution foncière des entreprises – CFE – , alors qu'elles sont les premières concernées.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement no 244 .
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l'amendement no 432 .
Il est identique. La loi de finances rectificative de 2010 dispose que la valeur locative de chaque propriété bâtie ou fraction de propriété bâtie est déterminée en fonction de l'état du marché locatif et en tenant compte de nombreux critères, ce qui entraîne l'automaticité évoquée par Mme Dalloz.
Actuellement, les commissions communales et intercommunales des impôts directs n'ont plus pour mission d'évaluer avec l'administration les locaux professionnels, ce qui engendre, sur le terrain, des difficultés et conduit souvent à des évaluations qui ne sont pas très fidèles à la réalité.
Cet amendement vise à permettre aux commissions communales et départementales de procéder, avec le représentant de l'administration fiscale, à l'évaluation des propriétés bâties et des locaux professionnels, parce que ces commissions sont les plus à même d'apporter des éléments concrets.
Ces amendements visent à revenir au « système 70 », que la DGFiP – Direction générale des finances publiques – n'utilise plus. Je tiens à vous rassurer : il n'est pas question de se passer de la concertation locale, qui est essentielle à la fiabilisation des bases. Les commissions communales et intercommunales pourront donner un avis sur les avant-projets de délimitation des secteurs d'évaluation, des tarifs et des commissions de localisation. C'est précisément pour améliorer cette concertation que le Gouvernement propose le report d'un an de la première mise à jour des tarifs.
La DGFiP, vous le savez, a déjà entamé ses négociations, puisqu'elle a organisé, lundi, sa première réunion avec les représentants des associations d'élus.
Il y a, de plus, un problème de codification dans la rédaction des amendements, qui ne tient pas compte de la codification de la loi de finances rectificative de 2010. Je demande leur retrait. Sinon, avis défavorable.
Défavorable.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement no 538 .
Défendant un autre amendement, j'ai dit tout à l'heure qu'un des problèmes de fond touchant l'enseignement catholique est sa spécificité. La plupart des 8 300 établissements scolaires catholiques sont gérés par des OGEC – organismes de gestion des établissements d'enseignement catholique – , tandis qu'une autre structure est propriétaire de l'immobilier, le contrat entre les deux structures prenant très souvent la forme du commodat, ou prêt à usage, comme dirait notre éminent collègue notaire.
Or le texte, tel qu'il est rédigé, n'évoque que les baux, et comme l'administration considère que les commodats ne sont pas des baux, elle prend pour seules références celles du secteur dans lequel est implanté l'établissement. Une des solutions pour sortir de la situation que nous avons décrite précédemment est d'ajouter, dans le texte, les mots : « et dans les prêts à usage unique », de façon à permettre à l'administration d'évaluer les locaux en fonction des contrats existants. Tel est l'objet du présent amendement, qui permettrait de résoudre une grande partie des problèmes.
Dans la Marne, lorsque je présidais la commission, j'ai demandé qu'on prenne en compte les commodats : il m'a été répondu que c'est interdit, du fait que le texte n'évoque que les baux.
Avis défavorable à cet amendement pour les mêmes raisons qu'à l'amendement no 296 , puisque nous sommes toujours dans la logique d'alléger l'impact de la réforme des valeurs locatives sur les établissements privés d'enseignement, en particulier catholiques. Le recours à la voie réglementaire, dont Mme la secrétaire d'État a évoqué tout à l'heure la possibilité, me semble être la bonne solution en la matière.
Je confirme ma réponse précédente : donc, avis défavorable.
Mais il ne sera pas possible à l'administration d'appliquer la solution que vous avez suggérée tout à l'heure puisqu'elle est tenue par le texte même de la loi, qui n'évoque que les baux. Elle ne pourra donc procéder à aucun aménagement si les commodats ou prêts à usage ne sont pas ajoutés dans le texte – c'est la seule solution à ce problème.
Je ne suis pas le seul à avoir fait cette expérience. Notre collègue, qui a présidé la commission des Pyrénées-Atlantiques, peut le confirmer : nous n'avons pas le droit de nous référer aux commodats. Il le confirme. Madame Dalloz, vous qui avez également présidé une telle commission, avez-vous pu vous référer aux commodats ?
Il s'agit bien d'un problème législatif. Si vous ne procédez pas à cet ajout, vous ne pourrez pas en sortir.
L'amendement no 538 n'est pas adopté.
L'article 34 de la loi de finances rectificative de 2010, qui a instauré la fameuse révision des valeurs locatives des locaux professionnels, prévoit leur remise à plat tous les six ans, afin que les conseils municipaux puissent revoir les secteurs créés. Je rappelle que le nouveau système d'évaluation prévoit un découpage en six secteurs locatifs homogènes auxquels se rattache une grille tarifaire fixant un tarif au mètre carré déterminant la valeur locative.
Le principe est celui d'une révision tous les six ans, ce qui correspond à la durée d'un conseil municipal. Cet amendement de bon sens vise à assouplir le dispositif, alors même que la révision des valeurs locatives cadastrales des locaux professionnels est effective depuis le 1er janvier 2017 et que vous différez la première évaluation au 1er janvier 2019. Une rotation plus rapide de révision des secteurs – tous les quatre ans plutôt que tous les six ans – serait intéressante. Je ne comprendrais pas, monsieur le rapporteur général, que vous émettiez un avis défavorable sur une mesure de bon sens, qui ne coûtera rien et qui permettra d'associer les blocs communal et intercommunal à la révision des bases.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement no 246 .
Je rejoins les arguments de Mme Dalloz : afin de mieux coller à l'évolution du terrain, ces amendements visent à réduire de six à quatre ans le délai de révision des valeurs locatives des locaux professionnels.
Madame la secrétaire d'État, je regrette que le Gouvernement ne prenne pas la mesure des questions qui concernent l'évaluation des valeurs locatives des locaux professionnels, laquelle pose de vrais problèmes. Nous vous avons soumis plusieurs problématiques, qu'il s'agisse du rôle des commissions communales et intercommunales des impôts directs, de l'évaluation des locaux professionnels, de la question du commodat ou, avec cet amendement, de la question du délai. Il est important que le Gouvernement puisse apporter des réponses à toutes ces questions.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l'amendement no 431 .
En six ans, des modifications souvent importantes sont constatées. Elles justifieraient une actualisation des délimitations des secteurs la quatrième année qui suit le renouvellement général des conseils municipaux, ce qui permettrait de mieux coller à la réalité du terrain.
On peut voter des amendements pour se faire plaisir : c'est satisfaisant, c'est vrai.
Regardez la réalité. Vous participez sans doute comme moi à des commissions communales des impôts directs : vous savez très bien que la dernière révision date de plus de six ans, car elle suppose des travaux très longs à mener. Si vos amendements sont évidemment recevables sur le fond, le problème est que nous n'arriverons jamais à réunir ces commissions tous les trois ou quatre ans.
Il ne faut jamais dire jamais ! Nous sommes là pour changer les choses !
Le Gouvernement propose de les réunir après les élections municipales tous les six ans, sachant que les tarifs, eux, sont bien révisés tous les ans. Nous parlons là de la révision des secteurs d'évaluation : donnons sa chance à cette réforme qui prévoit un délai de six ans. Par pitié, regardez ce qui s'est passé jusqu'à présent : si un délai de six ans avait été tenu, cela se saurait.
Je rejoins le rapporteur général : le délai de six ans a été choisi parce qu'il est raisonnable. Un délai plus court mettrait en danger la profondeur des travaux préparatoires et de la concertation qui est nécessaire. La complexité de l'organisation de cette concertation risque d'être démultipliée si le délai est raccourci.
Je ne suis pas étonnée par vos réponses, madame la secrétaire d'État et monsieur le rapporteur général, puisque vous avez décidé de n'accepter aucun amendement de l'opposition. Tel est le nouveau monde, telle est la nouvelle façon de faire de la politique. On existe seul et les autres n'existent pas !
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe REM.
Votre réponse oublie un élément : les communes peuvent connaître des évolutions des bases en six ans. Des zones peuvent être redynamisées si, par exemple, le maire ou la communauté de communes a décidé d'aménager une zone commerciale, ce qui conduit à revoir les secteurs. Sans la prévoir systématiquement, ouvrons la possibilité d'une revalorisation ou d'une modification des secteurs au bout de quatre ans. Encore une fois, c'est une question de bon sens.
Ces amendements sont intéressants sur le fond mais il reste des trous dans la raquette. Vous parlez des secteurs géographiques. J'insiste, le secteur de référence, c'est la section cadastrale – telle est la loi.
Il faut pouvoir les modifier. C'est pourquoi il faut revoir le texte. À mon avis, il convient de remettre tout à plat. Vous avez évoqué les prêts à usage ou commodats : il faut faire attention parce que des mises à disposition peuvent être des formes déguisées de loyers ou d'aides. Tous vos amendements nécessitent une réflexion beaucoup plus approfondie.
Encore une fois, vous posez un vrai problème de fond. J'ai moi-même été mal à l'aise en présidant ces commissions, parce que je manquais d'éléments de référence sur le calcul des nouvelles valeurs locatives. Mais ce n'est pas par le biais d'amendements qui, de plus, sont incomplets, qu'il sera possible de résoudre tous ces problèmes, compte tenu du cadre particulier dans lequel s'inscrit le texte. Il faudra beaucoup plus que quelques amendements pour réformer le calcul des valeurs locatives.
Loin de se réduire à une posture politique, notre réponse est au contraire très raisonnable et très raisonnée.
Il a fallu quarante ans pour réaliser cette réforme des valeurs locatives et dix ans pour la mettre en place, et vous nous demandez de modifier la fréquence à laquelle on les modifiera, alors que la première itération n'a pas encore eu lieu !
Ne nous demandez pas, avant même d'avoir testé ces commissions, de les avancer ! Soyons raisonnables ! Évaluons d'abord l'impact de la réforme et nous ferons ensuite les modifications nécessaires.
Je trouve intéressante la proposition de Mme Dalloz du fait de la naissance, ces dernières années, de nombreuses communes nouvelles : s'il y a un lissage des taux d'imposition, les bases historiques demeurent. Pouvoir rééquilibrer l'impôt par une révision des valeurs locatives dans un délai non pas de six ans mais de quatre ans encouragerait la création de communes nouvelles. Les communes rurales qui se sont associées avec une commune urbaine voient l'impôt sans cesse augmenter : sa révision me paraît donc aller dans la bonne direction. C'est pourquoi je soutiens cet amendement de bon sens.
Défendu. Il est inutile d'en dire plus puisque la majorité ne veut pas nous entendre.
Exclamations sur quelques bancs du groupe REM.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement no 249 .
Cet amendement vise à prendre en compte et à corriger des anomalies intégrées dans le calcul des coefficients de neutralisation. En effet, nous avons constaté un certain nombre d'erreurs : parties de locaux non évaluées en système non révisé conduisant à prendre en compte des valeurs locatives anormalement faibles alors qu'elles correspondent à un équipement dans sa totalité en système révisé ; surfaces réelles erronées, parfois dans des proportions assez impressionnantes ; locaux sous-déclarés en système révisé, avec des surfaces moins importantes. Il vous est donc proposé, à travers cet amendement, de prendre en compte ces anomalies ou erreurs et de les corriger en mettant en place un nouveau mode de calcul des coefficients de neutralisation. Il ne suffit pas de déceler de telles erreurs : il faut aussi les prendre en compte et y remédier !
L'avis de la commission est défavorable, et ce n'est pas parce que je rejette les amendements de l'opposition – au cours des trente dernières minutes, j'ai accepté un amendement de Mme Rabault et un autre de Mme Magnier. Par ailleurs, Mme Louwagie, qui a l'honnêteté de dire les choses, peut témoigner qu'en commission, j'ai souvent accepté et défendu des amendements du groupe Les Républicains.
Cela étant, l'adoption de ces amendements supposerait, pour la DGFiP, de remettre en marche le « système 70 » d'évaluation des locaux que j'évoquais tout à l'heure ; or ce système n'est plus mis à jour. Là encore, ces amendements ne peuvent donc pas avoir de traduction opérationnelle.
L'article 17, amendé, est adopté.
Je suis saisie de deux amendements portant article additionnel après l'article 17.
La parole est à Mme la secrétaire d'État, pour soutenir l'amendement no 546 .
L'article 1388 bis du code général des impôts porte sur les logements attribués sous conditions de ressources par des bailleurs sociaux et ayant bénéficié d'une exonération de longue durée de taxe foncière sur les propriétés bâties ; il prévoit un abattement de 30 % sur la base d'imposition à cette taxe lorsque les logements concernés sont situés dans un quartier prioritaire de la politique de la ville et si l'office public de l'habitat ou la société d'économie mixte auxquels ils appartiennent est signataire d'un contrat de ville. L'abattement s'applique aux impositions établies au titre des années 2016 à 2020, à compter de l'année qui suit celle de la signature du contrat de ville.
En outre, à compter des impositions au titre de l'année 2017, l'article 47 de la loi de finances rectificative de 2016 subordonne le bénéfice de l'abattement à la signature, au plus tard le 31 mars 2017, d'une convention relative à l'entretien et à la gestion du parc immobilier ayant pour but d'améliorer la qualité du service rendu aux locataires. Cette disposition vise à favoriser la contractualisation des engagements d'entretien et de gestion du parc immobilier des bailleurs sociaux, mais son calendrier de mise en oeuvre s'est révélé complexe. En effet, plusieurs bailleurs sociaux n'ont pas été en mesure de signer ces conventions avant le 31 mars dernier, ce qui les prive d'abattement, non seulement pour 2017, mais aussi pour les années suivantes.
Dès lors, le présent amendement prévoit la possibilité de bénéficier à nouveau de l'abattement pour les impositions établies à compter de 2018 en cas de signature de la convention après le 31 mars 2017. La date limite pour signer cette convention sera désormais fixée au 1er octobre de l'année qui précède celle de l'application de l'abattement. Pour les impositions établies au titre de l'année 2018, il est admis que la signature puisse intervenir au plus tard le 28 février 2018.
La commission a examiné cet amendement dans le cadre de l'article 88 du règlement et lui a donné un avis favorable.
Madame la secrétaire d'État, je souhaite vous demander un éclairage complémentaire. D'une part, quel est le coût budgétaire de cette mesure ? D'autre part, cette modification du calendrier est-elle pérenne ou limitée dans le temps ?
S'agissant de la méthode, je regrette une nouvelle fois qu'un amendement de cette nature, dont l'impact n'est pas négligeable, ait été déposé à la dernière minute et examiné par la commission dans le cadre de l'article 88 du règlement sans que nous ne disposions d'étude d'impact.
Aussi, madame la secrétaire d'État, je souhaite vous poser plusieurs questions.
Tout d'abord, je rejoins la question posée par Mme El Haïry : quel est le coût de ce dispositif dans le temps ? Il serait intéressant que vous puissiez nous donner l'impact de cette mesure sur les années à venir.
Ensuite, pourquoi avoir retenu les dates qui nous sont proposées, en particulier celle du 31 mars 2017 ?
Enfin, avez-vous déjà eu des contacts avec les acteurs locaux sur un dispositif de cette nature ? Quels sont les partenaires que vous avez rencontrés ? Comment avez-vous échangé avec eux sur le dispositif qui nous est proposé ?
La durée de cet abattement est de trois ans : ainsi, les bailleurs sociaux ayant signé une convention avant le 28 février 2018 en bénéficieront au titre des années 2018, 2019 et 2020.
S'agissant du coût de cette mesure, je n'ai pas la réponse ce soir.
Madame la secrétaire d'État, je vous demande uniquement une petite précision : qui supporte le coût de cet abattement ? À ma connaissance, en l'absence de disposition spécifique, ce coût est à la charge de la collectivité locale, puisque c'est elle qui signe le contrat. La dépense est-elle remboursée par l'État ?
Le Gouvernement ne connaît pas le coût parce que ce sont les collectivités qui paient !
Cet abattement de taxe foncière est supporté par les collectivités locales et pris en charge partiellement par l'État.
Nous avons bien entendu, madame la secrétaire d'État, que vous n'étiez pas en mesure de nous indiquer ce soir le coût de votre amendement. Vous avez ajouté que cette situation était à la charge des collectivités. De surcroît, vous n'avez pas répondu à la question que je vous ai posée sur les éventuels contacts ou échanges que vous avez pu avoir avec les acteurs directement concernés par cette situation, c'est-à-dire avec l'Association des maires de France et les entités qui représentent les collectivités territoriales.
Très sincèrement, nous ne pouvons pas travailler dans ces conditions : cet amendement a été déposé à la dernière minute, et le Gouvernement n'est pas en mesure de nous préciser son coût ni de nous indiquer si les acteurs concernés ont été consultés sur le terrain. Ce n'est pas admissible !
Depuis quelques heures, nous travaillons dans des conditions qui ne sont pas acceptables. Chers collègues de la majorité, nous devons être exigeants : il faut que nous demandions, tous ensemble, à travailler dans de bonnes conditions.
Nous votons des dispositions importantes et nous sommes amenés à évaluer un certain nombre de points. Il est inadmissible de travailler dans ces conditions et de ne pas avoir les éléments de réponse !
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
D'une part, l'amendement no 546 a été déposé dans des délais que l'on peut qualifier de normaux.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LR.
D'autre part, cet amendement vise à permettre aux bailleurs sociaux ayant signé avec retard une convention avec des collectivités qui étaient, bien évidemment, pleinement consentantes, de bénéficier malgré tout de l'abattement de taxe foncière sur les propriétés bâties. Il s'agit donc d'une mesure de rattrapage qui se limitera, dans quelques départements ayant connu des retards de signature, à un petit nombre de conventions. Ces dernières devaient déjà être couvertes par l'abattement général prévu en 2017 ; elles n'ont pas pu l'être à cause du retard, mais l'intention de les couvrir existait bel et bien au moment où l'abattement a été mis en place.
Nous ne connaissons pas l'impact budgétaire de cet amendement. Il nous est demandé d'accompagner une politique du logement dont nous ne savons encore rien aujourd'hui. Et puis, on nous explique, depuis quelques semaines ou quelques mois, que les dotations aux collectivités ne baisseront plus – ça y est, on arrête enfin de baisser la dotation globale de fonctionnement ! Cependant, si vous retirez aux collectivités des recettes fiscales, elles continueront à vivre des moments assez difficiles.
Je suis un peu désolée de ce que j'entends ici ce soir : on ne retire rien aux collectivités locales ! Cette disposition, votée il y a plusieurs années, laisse aux communes la liberté de choisir si elles veulent accorder ou non des exonérations ou des abattements aux bailleurs sociaux qui s'installent et construisent sur leur territoire. Il ne s'agit que d'une possibilité donnée à la commune, qui peut décider de mettre ou non en place un tel dispositif. Si elle décide de le mettre en place, elle perd des recettes fiscales.
Nous soutenons l'amendement no 546 , qui vise à accorder un délai supplémentaire à certains bailleurs sociaux qui n'ont pas eu le temps de signer l'ensemble des conventions prévues dans le cadre d'un contrat de ville. Il n'y a rien de nouveau par rapport à ce qui existait auparavant. Je le répète, cet amendement ne fait qu'allonger de quelques mois le délai prévu pour la signature d'une convention entre les bailleurs sociaux et les collectivités qui souhaitent, dans le cadre d'un contrat de ville, faire bénéficier ceux-ci d'abattements et d'exonérations.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM.
L'amendement no 546 est adopté.
La parole est à Mme la secrétaire d'État, pour soutenir l'amendement no 404 .
Cet amendement vise à supprimer le mécanisme de participation des collectivités territoriales au coût du plafonnement de la contribution économique territoriale en fonction de la valeur ajoutée, dit « PVA ».
Lorsque le montant de leur contribution économique territoriale – CET – , composée de la cotisation foncière des entreprises – CFE – et de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises – CVAE – , est supérieur à 3 % de la valeur ajoutée produite, les contribuables peuvent demander le dégrèvement de leur CET à hauteur de la différence. Le montant du dégrèvement, à la charge de l'État, qui a atteint 1,17 milliard d'euros en 2016, varie en fonction de la valeur ajoutée, des bases foncières mais aussi des taux de CFE votés par les collectivités territoriales.
C'est pourquoi le législateur a mis en place un mécanisme permettant de faire participer les collectivités d'implantation des entreprises bénéficiaires du PVA au coût du dégrèvement pour la part résultant de hausses de taux décidées après 2010, année de la réforme de la taxe professionnelle et de l'institution de la CET.
Un premier mécanisme issu de la réforme de la taxe professionnelle devait s'appliquer en 2013. Il n'a jamais été mis en oeuvre, car il avait pour défaut dirimant de mettre à la charge de certaines collectivités un montant de participation excessif, c'est-à-dire supérieur à celui du dégrèvement de CFE résultant strictement de l'augmentation de leur taux.
L'article 52 de la loi de finances rectificative pour 2015, codifié à l'article 1647-0 B septies du code général des impôts, a refondu ce mécanisme afin de tenter d'en corriger les défauts.
La participation, ainsi calculée pour la première fois au titre de 2016, devait être mise à la charge des collectivités en 2017, pour un montant envisagé d'environ 80 millions d'euros. Cependant, le précédent gouvernement a décidé, dans l'attente d'un diagnostic plus précis, de suspendre l'application de la participation au plafonnement en fonction de la valeur ajoutée – PPVA – en 2017, car ses effets pouvaient en réalité être significatifs pour certaines collectivités, notamment en cas de regroupement.
Il s'avère in fine que le mécanisme de PPVA présente intrinsèquement des défauts qui tiennent à son manque de lisibilité pour les collectivités en raison de ses incidences sur plusieurs exercices budgétaires, à la complexité de sa mise en oeuvre compte tenu du nombre de communes concernées ainsi qu'à ses impacts significatifs sur quelques territoires industriels.
Le Gouvernement souhaite donc ne pas mettre en oeuvre la PPVA instituée en 2015 et privilégie un mécanisme plus simple et lisible, qui ne soit pas nécessairement de nature fiscale. Ce nouveau mécanisme serait présenté l'année prochaine. L'amendement tend ainsi de supprimer la PPVA instituée en 2015 à compter du 1er janvier 2017.
Cet amendement est très favorable aux collectivités territoriales. Ce mécanisme a été mis en place, puis suspendu précisément parce qu'il avait produit des effets qui, comme l'a rappelé Mme la secrétaire d'État, pouvaient être désastreux pour certaines collectivités territoriales, notamment en cas de regroupement.
Le Gouvernement prend aujourd'hui acte de la suspension prononcée par le précédent gouvernement en supprimant ce dispositif et en s'engageant à travailler à en instaurer un nouveau. Cette mesure est très favorable aux collectivités territoriales et votre rapporteur y est donc très favorable.
Monsieur le rapporteur général, ce dispositif est certes favorable, en termes de recettes, aux collectivités territoriales, mais il est défavorable aux entreprises. Ce plafonnement a en effet été créé parce qu'un mécanisme de plafonnement existait déjà du temps de l'ancienne taxe professionnelle.
L'exposé sommaire qui accompagne cet amendement ne permet pas de comprendre clairement ce qu'on reproche exactement au mécanisme précédemment mis en place. On y déclare en effet qu'« il s'avère in fine que le mécanisme de PPVA présente intrinsèquement des défauts », mais de quels défauts s'agit-il ?
On nous dit que ce dispositif est rétroactif au 1er janvier 2017. La loi de finances rectificative devant être publiée autour du 30 ou 31 décembre, comment s'appliquera l'abrogation du plafonnement ? Certaines entreprises qui bénéficiaient d'un plafonnement ne subiront-elles pas une très forte augmentation ? De fait, comme le prévoit le deuxième alinéa de l'amendement, ce plafonnement s'applique dès 2017. Pourrions-nous avoir des explications ?
Je souscris aux propos du rapporteur général, qui a également fait observer que ce dispositif avait déjà été reporté.
Je voudrais aussi, madame la secrétaire d'État, saisir l'occasion de cet amendement pour vous interroger à propos de la CVAE. Le groupe de travail créé par l'Assemblée nationale et regroupant toutes les sensibilités politiques de notre assemblée rencontre beaucoup de difficultés pour obtenir des données de votre ministère. Or travailler sur la fiscalité sans données est suicidaire. Nos décisions ont un impact sur les entreprises et il faut faire attention à ce que nous faisons. Je profite donc de cet amendement pour vous demander de pouvoir disposer, par département, de toutes les données qui vous ont été fournies sur la CVAE – je vois que le rapporteur général acquiesce – …
Sourires.
Je comprends l'intérêt de cet amendement, mais pourriez-vous nous donner quelques précisions ? Tout d'abord, qui, des collectivités locales et des entreprises, seront les perdantes et les gagnantes ?
Il serait également intéressant de savoir combien de communes seront concernées et d'avoir quelques exemples de ces communes, afin de nourrir notre réflexion sur cet amendement.
L'amendement no 404 est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics.
Je commencerai par vous prier d'excuser ma collègue Delphine Gény-Stephann, qui doit présenter devant le Sénat la mission « Engagements et dégrèvements ».
Je n'ai pas assisté à l'intégralité de l'échange sur l'amendement précédent, mais je tiens en revanche à faire écho à l'intervention que vient de faire Mme Valérie Rabault évoquant les conditions dans lesquelles le groupe de travail de l'Assemblée nationale s'acquitte de sa mission. Consigne sera donnée aux services du ministère de l'économie et des finances, madame Rabault, pour que l'intégralité des données par département que vous demandez, notamment pour ce qui concerne la mesure exacte des effets d'une territorialisation de la CVAE – mesure qui a fait l'objet d'un report – , soit transmise au groupe de travail, afin que la décision la plus opportune puisse être prise d'ici au PLF pour 2019.
Vous savez que je partage avec vous l'idée que la territorialisation peut être intéressante, mais des doutes existent quant à ses effets, qui sont partagés par de nombreuses associations d'élus, qu'il s'agisse des associations d'intercommunalités ou des associations de communes. La meilleure façon de répondre aux questions et de lever les doutes est de disposer des données. L'engagement en est pris.
Applaudissements sur les bancs du groupe REM.
L'amendement no 141 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
L'amendement no 142 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
L'amendement no 143 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
Mes chers collègues, je vais vous parler des casinos – et, bien sûr, quand on parle de casinos, on pense tout de suite aux dix qui, dans toute la France, nous tapent dans l'oeil. Je voudrais cependant que vous pensiez aux 190 autres, à ces petits casinos dont vous ne connaissez sans doute pas les noms et qui, à travers la France, emploient 15 000 personnes en emplois directs et 30 000 en emplois indirects. Ils participent à l'économie économique et touristique de communes modestes, qui ne sont pas les dix premières auxquelles vous avez pensé.
Ces casinos vont subir l'augmentation de la CSG, qui est certes tout à fait normale, mais qu'ils sont les seules personnes morales à subir sur le chiffre d'affaires brut : un moment viendra donc où ils connaîtront des problèmes d'équilibre.
Je prendrai l'exemple d'un de ces 190 casinos, dont le chiffre d'affaires est de 3 millions d'euros : on peut certes dire que c'est énorme, mais, avec trente-neuf salariés, le résultat net dégagé n'est que de 40 000 euros. Pour ce casino, l'augmentation de la CSG se traduira par une baisse de 100 000 euros : alors qu'il donnait 45 000 euros d'allocations aux associations de la commune et investissait annuellement dans la structure 10 % de son chiffre d'affaires, soit 300 000 euros, il ne sera plus en mesure de le faire.
Je vous demande donc de bien vouloir adopter cet amendement, qui ne propose pas de supprimer la CSG, mais simplement de la compenser. Il tend à proposer de compenser en partie cette augmentation en modifiant les limites minimale et maximale du barème du prélèvement progressif applicable aux jeux concernés par cette hausse du taux de CSG.
J'approuve pleinement l'argumentation que vient de nous présenter M. Blanchet. Cet amendement vise à trouver une solution à une situation injuste que nous avons créée dans le PLFSS – nous l'avions, pour notre part, contestée, mais elle a été adoptée – en augmentant de 1,7 point le taux de la CSG et en appliquant ce taux aux casinos, seules personnes de droit privé assujetties à la CSG, et en portant à 11,2 % le taux de 9,5 % actuellement applicable aux produits des jeux automatiques supérieurs à 1 500 euros.
Élu d'une circonscription qui compte deux casinos, je peux vous assurer que les dirigeants de ces établissements ne sont pas opposés à l'effort solidaire demandé et matérialisé dans le PLFSS par une hausse de la CSG. Je peux néanmoins vous assurer aussi qu'en appliquant un tel taux, vous prenez le risque de les entraîner dans une spirale économique dont ils auront du mal à se remettre.
La Cour des comptes et des rapports parlementaires ont souligné le fait que les casinos sortaient difficilement d'une longue période de crise qui les a fortement ébranlés. Les conséquences de cette taxation supplémentaire seront évidemment, comme cela vient d'être rappelé, une diminution du nombre de personnes qu'emploient ces établissements et la fermeture de nombreux casinos, qui pourtant contribuent largement à l'activité économique de nos collectivités territoriales, déjà lourdement affectées par les fortes baisses de dotation que nous leur infligeons. Ils contribuent aussi aux finances de l'État par tous les prélèvements qu'ils lui versent.
L'amendement tend donc à compenser en partie cette augmentation en modifiant les limites minimale et maximale du barème du prélèvement progressif applicable aux jeux concernés par cette hausse du taux de CSG. En d'autres termes, il s'agit de compenser la hausse de la contribution par une adaptation de son assiette de prélèvements sur le produit brut des jeux.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement no 502 .
Dans la discussion sur le fameux article 7 du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, j'avais appelé l'attention de mes collègues sur cette hausse de 1,7 point. Vous savez en effet qu'il existe deux prélèvements : l'un sur les casinos et l'autre sur les gains supérieurs à 1 500 euros. Ces trois amendements identiques ne portent que sur le premier de ces prélèvements – celui qui concerne les casinos – , sans toucher à l'augmentation de la CSG sur les gains des joueurs. Si on ne le fait pas en jouant sur l'assiette, et donc sans toucher au taux, ce sont, sur les 201 casinos français, les petits qui fermeront. Or nous avons déjà pris, voilà deux ans, des mesures tendant à conforter les petits casinos : nous avons ainsi modifié le système de prélèvements sur les jeux et augmenté le prélèvement sur les gros casinos tout en allégeant ceux qui touchaient les petits, afin de tenter de maintenir en vie ces derniers.
Les petits casinos sont souvent situés dans des zones liées au thermalisme ou dans des zones rurales profondes. La mesure proposée par ces trois amendements identiques ne consiste pas à jouer sur les taux, qui ont été votés dans le cadre de la loi de financement de la Sécurité sociale, mais à moduler l'assiette. J'appelle votre attention sur le fait que, si nous ne l'adoptons pas, ce sont dix, vingt ou trente casinos qui fermeront.
Au moment où l'on demande, avec la hausse de la CSG, des efforts à un grand nombre de catégories et de personnes, justifier l'exonération du secteur des jeux d'argent ne me semble pas être un message particulièrement intéressant à porter en public. Je vous le dis très honnêtement. C'est un truc qui me choque, je peux me permettre de le dire.
Tout secteur d'activité et toute personne peuvent avoir un jour des difficultés, mais quand il est question de ce secteur-là, j'avoue – même si c'est peut-être du moralisme à deux balles – que j'ai du mal à justifier un tel amendement.
En outre, le secteur des casinos connaît une légère augmentation – certes pas énorme – de son chiffre d'affaires : c'est donc un secteur en croissance. Peut-être certains casinos sont-ils en décroissance et d'autres ont-ils subi des enquêtes antiblanchiment qui n'ont pas arrangé les choses, mais j'émets un avis défavorable, car nous ne pouvons pas, en ce moment, diffuser de tels messages.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM.
Ma prise de parole va totalement dans le sens de M. Giraud. Le groupe La République en marche a à coeur de garder un bon équilibre entre libérer et protéger, de permettre à tous ceux qui travaillent d'avoir un travail qui paye plus tout en compensant pour les plus fragiles de nos concitoyens les effets potentiellement négatifs que cette mesure pourrait avoir.
Nous y avons beaucoup travaillé, nous avons essayé de construire un équilibre qui nous semble aujourd'hui satisfaisant. Il ne nous semble pas de bon aloi d'aller sur ce terrain ce soir, d'envoyer un message qui serait totalement en rupture avec notre ligne de favoriser ceux qui travaillent. Il ne s'agit donc pas de donner des avantages qui iront plus sûrement dans la poche des propriétaires des casinos que dans celle des salariés.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe REM.
L'avis du Gouvernement est le même que celui de la commission des finances, pour les raisons suivantes. Le relèvement des taux des contributions sociales s'appliquant à l'ensemble des acteurs économiques pour financer des baisses de charges sociales ne fait pas l'objet de mesures de compensation spécifiques et sectorielles. Son application aux casinos, prévue dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, n'a pas vocation à être compensée par une baisse d'un autre prélèvement sur les jeux de casino, dont le produit revient à l'État et à d'autres affectataires, notamment les communes. Cela induirait une inégalité de traitement entre les secteurs économiques.
En outre, pour compenser totalement la hausse des taux des contributions sociales, la mesure devra être complétée au plan réglementaire par un abaissement de 1,5 point des taux de tranches intermédiaires du barème de prélèvement progressif de l'État.
Il faut aussi souligner que le coût réel et global de la mesure est estimé, à ce stade, à 18,4 millions d'euros, dont 17 millions pour l'État et 1,4 million pour les communes. Cette mesure reviendrait, par ailleurs, à créer un deuxième barème de prélèvement progressif s'appliquant aux seules machines à sous, ce qui serait source de complexité et donc contraire à l'objectif de simplification de la fiscalité des casinos poursuivi depuis la dernière réforme de 2015.
Il faut aussi rappeler que les casinos ont bénéficié, à plusieurs reprises, de diverses mesures d'allégement fiscal : revalorisation des tranches du barème de prélèvement en 2009, découplage de l'assiette pour le calcul du prélèvement progressif en 2010 et refonte du barème de prélèvement progressif visant à soutenir les établissements de petite taille en 2015 – c'est donc récent.
J'ajoute un dernier argument : une fois votée, cette mesure, qui ne serait pas d'applicabilité immédiate, imposerait, outre l'adaptation des formalités administratives de déclaration et de prélèvement des paiements, de modifier un article du code général des collectivités territoriales, d'engager une procédure de saisine du Conseil national d'évaluation des normes et du Comité des finances locales en raison de son impact financier sur les communes sièges des casinos, à hauteur de 1,4 million d'euros. Elle serait ainsi source de complexité en termes de gestion et de suivi de ce prélèvement, tant pour les casinos que pour la direction générale des finances publiques, dont les outils informatiques respectifs devraient aussi être adaptés.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement, comme la commission des finances, prononce un avis défavorable.
Oui, car la réponse est expliquée et tranchée.
Monsieur le rapporteur général, chers collègues, indiquez-moi simplement où il est écrit « exonération » dans le texte de l'amendement : il n'y a aucunement écrit « exonération » dans mon amendement !
Par ailleurs, il ne faut pas avoir de préjugés ni grossir le trait – comme si, d'une manière générale, les casinos s'en mettaient plein les poches. Je vous parle des petits casinos. Mon amendement alerte sur les conséquences pour le tourisme et pour les jeux clandestins. Attention à ne pas fragiliser un peu plus les casinos et les petites structures, qui auraient moins de possibilités de développer le tourisme d'une manière générale. Quand on affiche un objectif de 100 millions de touristes dans quelques années, il faut penser à toutes les conséquences économiques. Nous nous sommes engagés au maintien des dotations aux communes mais, si les communes perdent les dotations au tourisme, comme feront-elles pour les récupérer ?
L'objet de cet amendement est donc de vous alerter. Les petits casinos se trouvent dans des communes rurales, pas dans de grandes agglomérations. Voilà le point sur lequel j'avais l'intention de vous alerter.
Pardonnez-moi, monsieur le secrétaire d'État, mais il règne une grande confusion intellectuelle dans ce débat. La CSG sur les casinos est un cas unique d'une CSG sur des entreprises : la CSG pèse sur les particuliers, pas sur les entreprises. C'est d'ailleurs une aberration du système de la CSG, mais passons.
Le débat aujourd'hui n'est pas là. Si vous maintenez le système en l'état, dix, vingt, trente petits casinos fermeront. Ce ne sont pas les grands casinos, je vous rassure ; ceux-là s'en tireront. Eh bien, on fermera les casinos ! Et vous mettrez au chômage trente à quarante emplois par petit casino. Et les collectivités perdront la totalité du prélèvement sur les jeux, qui alimente souvent des communes de petites dimensions. Cela sera une perte.
Et où iront les joueurs ? Dans les grands casinos ! Si vous n'adoptez pas ces amendements, vous poussez à la concentration des casinos. C'est un problème économique et non moral. Cela n'a rien à voir ! Vous répondez comme si les casinos étaient une personne physique, mais un casino n'est pas une personne physique, c'est une entreprise !
Je vous demande d'ailleurs, monsieur le secrétaire d'État, de répondre à la question : oui ou non, ce que nous avons voté dans la loi de financement de Sécurité sociale mettra-t-il en difficulté des petits casinos et entraînera-t-il leur fermeture ? Si vous me répondez non, alors vous méconnaissez totalement le sujet !
D'après mon deuxième bureau, les responsables français des 200 casinos sont venus voir le ministre de l'intérieur, qui s'est déclaré, m'a-t-il été indiqué, ouvert à une adaptation pour sauver les petits casinos, comme nous l'avons déjà fait une première fois, il y a deux ou trois ans, en allégeant le prélèvement sur les petits casinos – sinon, ils fermeront. Voilà le débat ! C'est un débat touchant aux entreprises, pas un débat éthique !
Je souhaite répondre à Mme de Montchalin. Je trouve ses propos un peu indécents : vous avez supprimé l'ISF, mis en place la flat tax, mis à genoux nos territoires ruraux avec la suppression des emplois d'avenir, …
… fragilisé les territoires, et, tout à coup, vous nous faites de l'action sociale, vous protégez la valeur travail en refusant un petit amendement qui était pourtant plutôt favorable aux petits casinos. Je trouve votre discours quelque peu indécent, permettez-moi de le dire !
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Je reviendrai simplement sur un mot prononcé par mes collègues à l'instant : à quel endroit de l'amendement parlons-nous d'exonération ? Ce mot ne figure aucunement dans l'amendement. Il s'agit de compenser la hausse de la contribution par une adaptation de son assiette de prélèvement sur le produit des jeux. C'est tout ! L'erreur commise dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale condamnera de nombreux petits casinos et de nombreux emplois ! Nous verrons bien à l'avenir, mais je suis persuadé que l'on arrivera à ce résultat du fait de cette erreur.
Une exonération peut aussi signifier la volonté, manifestée dans votre amendement, de diminuer un prélèvement sur les casinos, sans même parler d'une exonération totale. Je ne crois pas que M. le rapporteur général ait évoqué la possibilité d'une exonération totale ; en tout cas, personne ne vous a prêté cette intention. Vous dites simplement vouloir diminuer un prélèvement pour opérer une compensation.
En réponse à M. de Courson, j'ai bien compris que si je répondais non à sa question, j'étais dans la méconnaissance, et que si je répondais oui, j'étais un monstre froid et cynique ! Vous me permettrez d'éviter l'un et l'autre. Au cours des dernières années – j'ai cité 2009, 2015 et 2016 – , les casinos, les sociétés de jeux ont fait l'objet d'adaptations législatives, d'accompagnement, d'exonérations et de mesures visant à soutenir leur activité.
Par ailleurs, le chiffre d'affaires de ce secteur, toutes tailles confondues, est en augmentation. Dans un contexte où tous les acteurs économiques du pays – particuliers, ménages, entreprises – sont appelés à contribuer au redressement des comptes publics, nous considérons que l'amendement que vous défendez est contradictoire avec la nécessité de mettre chacun et chacune à contribution pour le redressement du pays. D'où l'avis défavorable.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe REM.
L'article 18, amendé, est adopté.
L'article 19 est adopté.
La parole est à M. Olivier Becht, pour soutenir l'amendement no 75 , portant article additionnel après l'article 19.
Cet amendement a pour objet de faire revenir l'Assemblée sur la question du financement des chambres de commerce et d'industrie, dites CCI. Nous reconnaissons, avec beaucoup de lucidité, la nécessité pour les chambres consulaires de participer à l'effort de redressement des comptes publics ; c'est la raison pour laquelle le Gouvernement a proposé ce prélèvement de 150 millions d'euros sur les ressources des CCI. Néanmoins, les CCI sont un acteur majeur en matière d'aide à l'exportation et d'innovation, qui sont les moteurs de la croissance, cette croissance que nous souhaitons tous dans cette assemblée.
L'amendement a pour objet de concilier les deux : d'un côté, il permet ce prélèvement de 150 millions dont le Gouvernement a besoin pour participer au redressement des comptes publics et, d'un autre côté, il déplafonne la TACFE – taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises – , générant 46 millions d'euros. Ce montant permettrait de conserver au moins un tiers des ressources annuelles dont les CCI ont besoin par rapport à l'année précédente.
Nous avons toutes et tous des chambres de commerce et d'industrie dans nos territoires. Certaines se portent mieux que d'autres, certaines ont encore des fonds propres en réserve. Néanmoins, elles ont toutes subi une baisse de recettes de près de 35 % au cours des cinq dernières années. Il est donc impératif que nous puissions garder dans nos territoires des chambres de commerce et d'industrie disposant des moyens d'accompagner les entreprises en matière d'aide à l'exportation et d'innovation. Je souhaite que le Gouvernement et la commission donnent un avis favorable à cet amendement.
Ce débat a déjà largement eu lieu. À l'issue de ce débat, nous avons proposé et fait voter un certain nombre d'amendements, notamment celui de l'augmentation du fonds de péréquation au bénéfice des chambres de commerce situées dans les territoires les plus fragiles. Les critères mêmes d'éligibilité ont été élargis par un amendement de notre collègue Cazeneuve. Nous en resterons là pour maintenir un réseau efficace dans les petits territoires. Les amendements votés correspondent parfaitement à cela. Avis défavorable.
Même avis. Ce débat, comme l'a rappelé M. le rapporteur général, a déjà eu lieu à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour l'année 2018.
Le coût de la mesure proposée dégraderait le solde budgétaire de l'État de 46 millions d'euros. Après plusieurs années de prélèvements sous des formes diverses et variées sur les CCI, l'objectif poursuivi par le Gouvernement est que l'année 2018 soit la dernière au cours de laquelle les chambres de commerce comme les chambres des métiers seront amenées à contribuer au redressement des comptes publics.
À l'initiative du rapporteur général, un certain nombre d'amendements ont été adoptés, qui permettront d'accompagner, partout où cela sera possible, dans le respect de la proximité, les rapprochements et, quand cela ne sera pas suffisant, et seulement alors, les mutualisations de chambres consulaires pour garantir l'efficacité de ce réseau. Avis défavorable pour toutes les raisons évoquées par le rapporteur général.
Je précise que lorsque l'on relève le plafond de TACFE, on ne fait pas perdre des recettes au Gouvernement, donc on ne touche pas au déficit public. En outre, les objectifs de péréquation ne répondent pas à la nécessité globale d'accompagner les entreprises sur le plan de l'export et de l'innovation.
J'en veux pour preuve la lettre qu'a adressée le président des chambres de commerce et d'industrie allemandes au Président de la République, au Premier ministre et à vous-même, madame de Montchalin. Il s'inquiète de la baisse de ressources des chambres de commerce françaises, qui se retrouveront dans une situation ne leur permettant plus d'assurer les objectifs que nous souhaitons, c'est-à-dire la croissance économique.
L'amendement no 75 n'est pas adopté.
L'article 20 concerne la taxe sur les services de télévision – TST-E – due par les éditeurs et les distributeurs de ces services, qui fait partie des taxes qui contribuent au financement du Centre national du cinéma – CNC. Ces taxes affectées permettent d'accorder des aides au cinéma français, à la production, aux exploitants ; c'est ce qui nous permet d'avoir un cinéma particulièrement dynamique et d'arborer fièrement notre exception culturelle partout dans le monde. Ce système vertueux de financement permet à notre cinéma de rivaliser avec d'autres productions étrangères. Or il a été mis en péril par des contentieux exercés par des chaînes de télévision contre le recouvrement des taxes sur les revenus issus de la publicité, notamment lorsqu'elles étaient encaissées par des régies publicitaires. Par une décision rendue le 27 octobre dernier sur la TST-E, à la suite d'une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel a accordé au Parlement et au Gouvernement un délai, courant jusqu'au 1er juillet 2018, pour sécuriser la taxe, pour l'avenir comme pour le passé. Tel est l'objet de l'article 20.
Le système proposé permettra de recouvrer la TST-E auprès des chaînes de télévision mais aussi des régies, de manière à respecter les principes posés par le Conseil constitutionnel. Ses effets seront neutres en termes de rendement, puisque cette taxe était déjà recouvrée auprès des régies publicitaires. Par ailleurs, cet article supprime l'abattement de 4 %, relatif aux frais de perception par les régies publicitaires. La disposition proposée a ainsi pour objet de sécuriser les recettes du Centre national du cinéma pour l'avenir, mais aussi pour le passé.
L'article 20 fait suite à une décision du Conseil constitutionnel du 27 octobre dernier, qui a censuré un certain nombre de dispositions relatives à la taxe sur les services de télévision due par les éditeurs. Cet article prévoit que les chaînes de télévision ne soient taxées que sur le chiffre d'affaires publicitaire qui leur revient, et non sur la part qui est conservée par les régies, également appelée « commission de régie ». Ce mécanisme soulève plusieurs problèmes.
En premier lieu, s'agissant des réclamations liées à l'inconstitutionnalité de la taxe dans le passé, l'article 20 dispose que les chaînes peuvent être remboursées de la fraction perçue indûment par le CNC au titre des années pour lesquelles elles ont formulé des contestations, conformément à la décision du Conseil constitutionnel. Toutefois, aux termes de cet article, ces mêmes sommes sont « concomitamment » versées par les régies au titre de ces mêmes années. Ce choix peut paraître contestable d'un point de vue constitutionnel, puisque le Conseil constitutionnel avait demandé que sa décision ait un effet utile. Or le versement par les régies de ce qui sera remboursé aux chaînes conduit économiquement à neutraliser cet effet utile dont les chaînes doivent bénéficier, en faisant peser la nouvelle contribution sur une autre entité du groupe auquel elles appartiennent.
En deuxième lieu, d'un point de vue économique, le remboursement qui est dû par le CNC à la suite de la décision du Conseil constitutionnel n'a rien d'exagéré, puisqu'il porte sur la fraction de la taxe frappant les commissions des régies, et non sur la totalité des recettes publicitaires. Pour ce qui concerne la taxe, qui doit entrer en vigueur à partir du 1er janvier 2018, l'exposé des motifs de l'article 20 indique que cette réforme sera neutre, puisqu'elle supprime l'abattement de 4 % tout en abaissant légèrement le barème de la taxe. Toutefois, monsieur le secrétaire d'État, d'après certains éléments qui nous ont été communiqués, la neutralité ne serait pas assurée. Pouvez-vous nous confirmer que le taux de 5,65 % garantit cette neutralité ?
Par ailleurs, la réécriture de la taxe sur les services de télévision conduit à une hausse du rendement, et donc à une augmentation des recettes du CNC, contrairement à l'objet affiché de l'article.
Je vais m'efforcer de rassurer Mme Louwagie, notamment sur la constitutionnalité et la neutralité de l'article proposé par le Gouvernement. Je précise que la réponse que je vous apporte sera complétée par les amendements du Gouvernement pour améliorer la rédaction, avec le même objectif.
En premier lieu, s'agissant de la constitutionnalité, dans sa décision du 27 octobre 2017, le Conseil constitutionnel a autorisé le Parlement et le Gouvernement à légiférer pour sécuriser la TST-E, tant pour le passé que pour l'avenir. À la suite de cette décision, et compte tenu d'un certain nombre d'interrogations, l'assemblée générale du Conseil d'État a également émis un avis favorable et confirmé la constitutionnalité des dispositions proposées par le Gouvernement à l'article 20 du PLFR.
En deuxième lieu, s'agissant de la neutralité, la mesure de sécurisation pour l'avenir est neutre en termes de rendement puisqu'aujourd'hui, toutes les chaînes redevables de la taxe sont diffusées en haute définition et sont, à ce titre, soumises au taux de 5,7 %. Plus aucune chaîne redevable de la taxe ne se voit donc appliquer le taux de 5,5 %. La mesure supprime l'abattement de 4 % et abaisse le taux pour parvenir au même rendement, qui passe de 5,7 à 5,65 %. La taxe sur les services de télévision n'est pas seulement assise sur les recettes publicitaires mais également sur d'autres recettes, comme la contribution à l'audiovisuel public, les SMS et les appels surtaxés, qui ne font pas l'objet d'un abattement de 4 % et sont soumis au même taux. Par conséquent, la neutralité de la réforme doit s'apprécier sur l'ensemble de l'assiette de la taxe ; elle est destinée à assurer la stabilité des ressources du CNC. Le taux de 5,65 % a précisément été retenu car il permet de maintenir le niveau global des ressources consacrées à la politique de soutien au cinéma et à l'audiovisuel.
Tant sur la constitutionnalité que sur la neutralité, j'espère ainsi avoir apporté des éléments de réponse à vos interrogations.
La parole est à M. le secrétaire d'État, pour soutenir l'amendement no 367 .
Il s'agit d'un amendement rédactionnel sur l'article 20 du PLFR qui concerne la sécurisation de l'assiette de la taxe sur les services de télévision due par les éditeurs. L'amendement vise à introduire, pour les procédures contentieuses – réclamations ou recours – , introduites dans les délais de recours contentieux et relatives à la taxe due au titre des années antérieures à 2018, un mécanisme concomitant de remboursement des chaînes de télévision et de taxation des régies sur la part des recettes publicitaires qui leur est respectivement revenue. Il s'agit d'adopter une rédaction plus simple, en accord avec la décision du Conseil constitutionnel du 27 octobre 2017, en supprimant la mention d'une date qui ne figurait pas dans cette décision. En cela, il s'agit d'un amendement rédactionnel.
L'amendement no 367 , accepté par la commission, est adopté.
L'article 20, amendé, est adopté.
Je suis saisie de deux amendements portant articles additionnels après l'article 20.
La parole est à M. le secrétaire d'État, pour soutenir l'amendement no 320 rectifié .
Cet amendement a pour objet de mettre en cohérence la rédaction des articles L. 115-6 et L. 115-7 du code du cinéma et de l'image animée avec la rédaction retenue par l'article 4 du projet de loi de finances pour 2018 aménageant l'assiette de taux réduits de TVA applicables aux services de presse en ligne. C'est donc un amendement de coordination.
L'amendement no 320 , accepté par la commission, est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d'État, pour soutenir l'amendement no 374 .
Le présent amendement a pour objet de lever des gages. Les articles 79 et 80 de la loi de finances de 2017 ont modifié le dispositif de crédit d'impôt en faveur des entreprises de jeux vidéo, tel que prévu à l'article 220 terdecies du code général des impôts. Le taux du crédit d'impôt est désormais de 30 %, au lieu de 20 %, et son plafond est fixé à 6 millions d'euros par entreprise et par exercice, au lieu de 3 millions. Par ailleurs, les dépenses engagées pour la création d'un jeu vidéo confiées à une autre entreprise ou un autre organisme – autrement dit, les dépenses de sous-traitance – sont dorénavant prises en compte dans la base de calcul du crédit d'impôt dans la limite de 2 millions d'euros par exercice, au lieu de 1 million.
En outre, l'article 81 de la loi de finances de 2017 a modifié le seuil des dépenses éligibles au crédit d'impôt pour dépenses de production de films et oeuvres audiovisuelles étrangers, tel que prévu à l'article 220 quaterdecies du code général des impôts. Ainsi, le montant minimum exigé de dépenses éligibles effectuées en France a été abaissé à 250 000 euros, contre 1 million d'euros auparavant, ou, lorsque le budget de production de l'oeuvre est inférieur à 500 000 euros, contre 2 millions auparavant, à un montant correspondant à au moins 50 % de ce budget.
Cependant, les gages des articles 79, 80 et 81 de la loi de finances de 2017 n'ont pas été supprimés. La formule précisant que ces dispositions « ne sont applicables qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû » a donc été maintenue dans la loi de finances de 2017. L'amendement a pour objet de supprimer ces gages afin de lever toute ambiguïté sur la nature des dispositifs fiscaux.
L'amendement no 374 , accepté par la commission, est adopté.
La transition vers une économie verte et la lutte contre le changement climatique sont des enjeux de première importance. Il sera donc mis fin à l'exploitation et à la recherche d'hydrocarbures d'ici à 2040. Cependant, l'impérieuse nécessité d'emprunter la voie de la transition énergétique ne doit pas nous faire oublier la réalité économique de certains de nos territoires dont les ressources financières peuvent dépendre de l'exploitation des ressources naturelles, et notamment des hydrocarbures. Pour ne pas les déstabiliser, les départements doivent être accompagnés dans la définition d'un nouveau modèle de développement économique. De fait, les transformations induites ne pourront être menées à bien que si les acteurs locaux disposent des ressources adéquates.
L'article 21 crée ainsi une taxe sur l'exploration des hydrocarbures, dont le produit sera reversé aux départements qui seront affectés par l'interdiction de la recherche et de l'exploitation des hydrocarbures en France. La taxe proposée permettra à ces départements de saisir les opportunités offertes par le passage à une économie plus respectueuse du climat et de l'environnement. C'est pour ces raisons que le groupe MODEM et apparentés, dans sa très grande majorité, votera en faveur de l'instauration de cette taxe sur l'exploration des hydrocarbures.
L'article 21 a pour objet d'instaurer une taxe sur l'exploration des hydrocarbures qui serait affectée aux départements comportant des sites d'exploration d'hydrocarbures. La création de cette taxe constituera en réalité une double peine pour les industriels du secteur, à qui l'on vient d'apprendre que leur activité se terminera en 2040. Nous devrions davantage les accompagner vers la reconversion de leur activité et des sites industriels, plutôt que de les taxer au profit de départements, prétendument pour accompagner la collectivité départementale, qui n'est pas propriétaire du site industriel à reconvertir.
La création de cette taxe est, pour nous, un non-sens. Accompagnons ces entreprises vers une reconversion de leur activité et de leurs sites industriels, plutôt que de les taxer. C'est pourquoi nous proposons la suppression de l'article 21.
Vous aurez compris que je n'engage pas mon groupe par cet amendement, qui vise à supprimer l'article. Ce dernier risque, à mon sens, de déséquilibrer, par un alourdissement trop brutal de la fiscalité, les équilibres économiques en jeu ainsi que les acteurs industriels, qui ont en grande partie fondé leurs investissements, dans nos territoires ruraux, sur la stabilité des paramètres fiscaux. Ces dispositions font également courir, à mes yeux, un risque constitutionnel ainsi que celui d'une censure des juridictions européennes, qui sanctionnent la perte de chance économique, résultat d'un climat d'insécurité fiscale compromettant des investissements. Étant donné les sommes en jeu – on sera confronté à une situation similaire lorsqu'on examinera l'article 22, sur la géothermie – , il me semble prudent de renoncer à cette taxation nouvelle et d'attendre la réforme du code minier pour envisager avec plus d'anticipation une éventuelle modification de la fiscalité pesant sur ces activités industrielles.
Même avis.
Monsieur le secrétaire d'État, vous avouerez qu'on monte au ciel, là ! Connaissez-vous le produit de cette taxe ? Il est de 810 000 euros. Et vous pensez assurer la reconversion d'un site avec ça ? Il y a quelque chose de risible. Je ne sais pas qui a donné au Gouvernement cette idée folle de créer une petite taxe de 810 000 euros. Et pour résoudre quel problème ? On nous explique qu'il n'existe actuellement en France aucun dispositif de fiscalité concernant l'activité d'exploration d'hydrocarbures. On marche sur la tête ! Faisons sauter cette taxe, et n'en parlons plus ! La reconversion obéit à d'autres règles que celle-là.
L'heure tardive m'avait fait espérer qu'un argument lapidaire suffirait, mais, comme cela n'est pas le cas, je vais répondre plus précisément à M. de Courson, en précisant que ces éléments vaudront jusqu'à l'article 23, puisqu'il s'agit de la même logique.
Dans le cadre de la fin de la recherche et de l'exploitation des hydrocarbures à l'horizon de 2040, le Gouvernement a souhaité revoir l'ensemble de la fiscalité relative à l'extraction des hydrocarbures, fiscalité qui n'avait pas été modifiée depuis des décennies. Il n'existe pas en France, contrairement à presque tous les pays voisins, de taxe sur l'exploration des hydrocarbures, et il serait surprenant que nous soyons le seul pays à ne pas instaurer ce type de taxe, …
… à même de prendre en compte les impacts environnementaux et locaux liés aux projets d'exploration menés par les opérateurs.
Il est prévu, par ailleurs, vous l'avez dit, monsieur de Courson, que cette taxe soit reversée aux départements, avec un recouvrement simple, puisqu'il concerne un nombre limité d'opérateurs – moins de dix – , qui se fera via le recouvrement de la TVA. Le barème a été calqué sur celui des pays voisins, notamment l'Italie, et cette taxe représentera entre 1 000 et 15 000 euros par permis à terre. Les recettes générées par cette taxe seront certes modestes – 810 000 euros – , mais elles permettront aux départements d'anticiper et de préparer la reconversion des territoires concernés par la disparition d'activités de recherche et d'exploitation des hydrocarbures.
Par ailleurs, je souhaite souligner que cette disposition, que vous qualifiez de modeste, est cohérente avec d'autres défendues par le Gouvernement : la hausse de la fiscalité pesant sur les activités d'exploitation des hydrocarbures, avec l'article 23 pour l'aménagement de la redevance départementale et communale des mines, le soutien accordé à l'amendement parlementaire visant à aménager la redevance progressive des mines, et l'instauration d'une fiscalité sur les activités de recherche d'hydrocarbures.
D'autre part, nous instaurons une fiscalité sur les activités de recherche de gîtes géothermiques à haute température pour favoriser l'acceptabilité locale de cette activité auprès des collectivités. Je sais que, là aussi, le produit financier est modeste, mais il convient de tenir compte de l'impact des travaux de recherche dans le territoire.
Les mesures proposées par le Gouvernement dans les articles 21 à 23 de ce PLFR peuvent paraître modestes, prises individuellement, mais elles sont cohérentes entre elles et visent à accompagner la transition énergétique que chacun appelle de ses voeux.
Monsieur le secrétaire d'État, vous versez cette somme aux départements alors que ceux-ci n'ont plus aucune compétence en matière économique, donc pas la compétence de réaliser ces conversions. Versez cet argent aux conseils régionaux au moins, cela serait un peu plus cohérent. Tout cela n'est ni fait ni à faire, monsieur le secrétaire d'État. Faisons sauter cet article, et ne nous encombrons pas de ce genre de petite taxe !
J'ai l'impression que le membre du Gouvernement présent ce soir n'est pas celui qui a eu l'idée de cette taxe. Là encore, ce n'est pas une méthode d'agir ainsi ! On dit souvent que l'on cherche ensemble à lutter contre la création de taxes supplémentaires. Et voilà que vous dites, monsieur le secrétaire d'État, que cette taxe n'existe pas en France et qu'elle existe dans tous les pays : cela doit être une des rares dans ce cas ! En revanche, il y a énormément de taxes qui existent en France, mais que l'on ne retrouve pas dans les autres pays ! Votre argument ne tient pas.
Tentons déjà de faire le ménage ! On a essayé de le faire sur la taxe farine et sur quelques autres, mais cette majorité a systématiquement refusé de nous suivre. Ce n'est pas la première taxe que le Gouvernement crée, et celle-ci aura un produit dérisoire : 810 000 euros ! Et si vous me dites que petite taxe deviendra grande, cela n'est pas rassurant !
En outre, Charles de Courson a raison de dire que le produit de cette taxe est assez mal affecté. Cette taxe est mort-née : admettez-le et soutenez sa suppression !
Monsieur le secrétaire d'État, les obligations de remise en état pèseront sur les entreprises. Ce sont les permis qui leur sont accordés qui prévoient ces obligations, et il faut leur laisser les moyens financiers de le faire. J'ai l'impression que c'est la double peine pour les entreprises. La loi sur la fin des hydrocarbures à l'horizon de 2040 va dans le bon sens, mais il ne faut pas en rajouter. Surtout, il faut leur permettre de s'inscrire économiquement dans la transition énergétique. J'insiste sur le fait que cette taxe est un très mauvais signe envoyé à ces entreprises, qui investissent beaucoup dans nos territoires, notamment ruraux.
Il est procédé au scrutin.
Nombre de votants | 57 |
Nombre de suffrages exprimés | 55 |
Majorité absolue | 28 |
Pour l'adoption | 9 |
contre | 46 |
L'amendement no 144 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme Muriel Ressiguier, pour soutenir l'amendement no 119 .
À l'article 21 du projet de loi de finances rectificative pour 2017, vous comptez introduire une taxe sur l'exploration des hydrocarbures. Nous sommes, comme vous le savez, défavorables à l'exploration et à l'exploitation des hydrocarbures, qui doivent cesser au 1er janvier 2040. La première démarche aurait dû être, selon nous, de ne plus permettre d'investir dans de tels projets, car les techniques utilisées pour ces explorations détruisent l'environnement. Nous devons sortir des énergies carbonées, en commençant par arrêter de subventionner les énergies fossiles, et toute exploration de gaz et de pétrole.
Il conviendrait donc d'appliquer ici le principe du pollueur-payeur, et le fait de payer ne devrait pas autoriser à polluer impunément dans la durée. À l'occasion de l'étude d'impact du projet de loi sur les hydrocarbures et des travaux en commission, l'exécutif avait annoncé l'actualisation du taux de la redevance progressive des mines, versée à l'État et calculée sur la production annuelle. Cette actualisation aurait dû se traduire par un quadruplement du produit de la taxe, mais cette disposition ne figure étrangement pas dans le PLFR.
Nous proposons par cet amendement de renforcer la présente taxe en la doublant, afin de la rendre plus dissuasive.
L'amendement no 119 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 146 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Selon la liste rouge de l'Union internationale pour la conservation de la nature – UICN – , 14 % des mammifères, 24 % des reptiles, 23 % des amphibiens et 32 % des oiseaux nicheurs sont menacés de disparition en France métropolitaine, tout comme 22 % des poissons d'eau douce et 28 % des crustacés d'eau douce. Pour la flore, ce sont 17 % des espèces d'orchidées qui sont menacées. Outre-mer, plus d'un tiers des espèces d'oiseaux de La Réunion sont également menacées ou ont déjà disparu de l'île, comme un tiers des oiseaux nicheurs en Guadeloupe.
La poursuite de l'exploitation des hydrocarbures joue un rôle majeur dans cette destruction du rôle de la nature, et nous nous y opposons fortement, comme nous l'avons déjà dit dans divers débats.
Nous vous proposons d'aller dans un sens qui permette de réparer les dégâts causés par ces explorations. En plus de taxer, comme vous le proposez, ces hydrocarbures, il nous semble fondamental de développer un autre rapport à la nature, fondé sur la responsabilisation des acteurs économiques et des particuliers, et sur la nécessité de la réparation.
En janvier 2017 a été créée l'Agence française pour la biodiversité par fusion de divers organismes. Elle a pour mission de gérer les parcs marins, d'assurer la police de l'environnement, de fournir l'appui technique aux politiques publiques, de former les personnels des collectivités ou les acteurs économiques, de dresser l'inventaire de la biodiversité ou encore de lutter contre les espèces envahissantes.
Vous avez choisi, dans ce PLFR, de prélever 27 millions d'euros sur le budget de cette agence, ce contre quoi nous nous sommes élevés. Vous avez l'occasion aujourd'hui de revenir sur ce manque à gagner pour l'Agence, puisqu'en vertu du principe de pollueur-payeur, il nous semble normal que le produit de la taxe que vous mettez en place sur l'exploration des hydrocarbures, cette même exploration qui détruit la nature, soit affecté à une agence qui oeuvre pour le maintien de la biodiversité et qui aurait grand besoin d'un renflouement de ses finances.
J'émets également un avis défavorable. L'Agence française pour la biodiversité dispose d'un budget de 211 millions d'euros, qui s'avère suffisant pour mener à bien ses missions, comme le prouve son fonds de roulement qui affiche 97 millions d'euros à la fin de l'année 2017. Vous avez souligné avec raison, madame Obono, qu'un prélèvement de 27 millions d'euros avait été effectué sur cette réserve de trésorerie, mais vous conviendrez avec moi que l'affectation d'une taxe correspondant à 810 000 euros de recettes ne serait, même si cela était nécessaire, pas en rapport avec les 27 millions d'euros évoqués.
Monsieur le président de la commission des finances, je croyais qu'un amendement n'avait pas le droit d'affecter le produit d'une taxe, une telle décision étant la prérogative du Gouvernement. Pourquoi cet amendement a-t-il donc été déclaré recevable ? Je pose là une simple question technique.
Monsieur le secrétaire d'État, vous avez remarqué que nous proposions dans un amendement précédent d'augmenter le prélèvement de la taxe, …
Oui, de 1,6 million d'euros !
… mais vous avez refusé cette idée, sans justifier votre refus d'ailleurs. Il nous semble qu'en matière de transition écologique et de préservation de l'environnement, il n'y a pas de petite taxe. Il faudrait se donner des moyens véritables pour participer à cette préservation, voilà pourquoi nous pensons que le vote de cet amendement serait un signal fort. En effet, on flécherait ainsi le produit de la taxe et on indiquerait que les pollutions doivent être taxées et réparées.
L'amendement no 120 n'est pas adopté.
L'article 21, amendé, est adopté.
La parole est à M. Joël Giraud, pour soutenir l'amendement no 319 rectifié .
Cet amendement procède à une mise à jour des barèmes de la redevance à taux progressif, qui est appliquée à la production d'hydrocarbures liquides et gazeux sur terre.
Cette mesure vise à actualiser et à simplifier la redevance à taux progressif, calculée sur la production d'hydrocarbures, en homogénéisant et en adoptant une seule règle de réévaluation des taux. Elle permettrait d'adapter la fiscalité des hydrocarbures aux réalités économiques, énergétiques et climatiques actuelles.
Favorable.
Est-on conscient des conséquences de ce que l'on veut nous faire voter ? Cette disposition entraînerait une explosion de ce type de fiscalité.
La France ne produit qu'environ 1 million de tonnes de pétrole par an, nos puits de pétrole étant peu nombreux. Si cet amendement était adopté, une partie des puits s'arrêterait.
Le taux passerait de 8 à 30 % ; c'est énorme, comme augmentation ! M. le secrétaire d'État ou M. le rapporteur général pourrait-il nous préciser les incidences économiques de cet amendement ? On m'a averti que des collègues avaient déposé des amendements sur le sujet, probablement pour constituer des recettes de poche aux conseils départementaux et aux conseils municipaux, puisque, de mémoire, un partage est réalisé entre ces instances. C'est une véritable explosion que cette hausse. Quelle est l'augmentation de la pression fiscale pour les rares puits de pétrole situés en France ?
Pour répondre à M. de Courson, cet amendement a été évalué à environ 16 millions d'euros à partir de 2018, pour huit entreprises de la filière.
L'amendement no 319 rectifié est adopté.
L'article 22 a pour objet la création d'une taxe sur l'exploration des gîtes géothermiques. Il diffère quelque peu de l'article précédent, car il concerne l'exploration pour des énergies nouvelles.
On pourrait penser qu'il vaut mieux ne pas taxer ces énergies afin d'en promouvoir le développement. Le problème est toutefois un peu plus compliqué. Prenons l'exemple de la méthanisation : les méthaniseurs agricoles ne sont pas taxés et, pour cette raison, les collectivités territoriales ne sont pas incitées à les accepter. Les investisseurs eux-mêmes souhaiteraient qu'une petite taxation soit introduite de façon à inciter les territoires à recevoir ces installations.
Il en va de même pour la géothermie : il faudrait un peu de taxation pour inciter les territoires à recevoir les outils d'une telle exploration. Je proposerai même, pour enfoncer le clou, un amendement qui vise à augmenter la taxe.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 348 .
Je laisserai le soin de cette présentation à l'auteure de l'amendement adopté en commission, Mme Magnier.
Il y a des biais intellectuels dont la logique m'échappe. Alors que nous avons tous la volonté de développer une politique écologique incitative de transition énergétique, il est question ici de taxer une ressource énergétique propre, saine, qu'on devrait plutôt accompagner. Je ne comprends pas par quel raisonnement on aboutit à une telle mesure.
Au moins tout autant que vous, monsieur !
Un élément de réponse avait été avancé en commission : cette taxe permettrait d'éviter que les exploitants de gîtes géothermiques ne creusent trop de trous, de limiter les surfaces exploitées. Il me semble toutefois que lorsqu'on est responsable d'une entreprise, on sait ce qu'on fait, et on évite les dépenses inopportunes.
C'est la raison pour laquelle nous proposons de supprimer cet article qui, disons-le clairement, instaure une taxe qui rapporterait 40 000 euros par an. On est ici très loin de la simplification fiscale, pourtant plus que nécessaire dans notre pays.
La parole est à M. Jean-Louis Bricout, pour soutenir l'amendement no 433 .
L'amendement a été parfaitement défendu par notre collègue à l'instant. Je ne sais si cet article permettra d'éviter les trous, mais ce qui est sûr c'est qu'il ne bouchera pas ceux du budget
Sourires
avec son rendement qui semble tout à fait dérisoire. Très franchement, je ne comprends pas très bien le raisonnement qui a été suivi, ni en quoi cette mesure contribue à simplifier la fiscalité.
Je suis donc pour la suppression de cet article, et j'espère que nous serons suivis.
Étant donné que l'un des deux amendements identiques est celui de la commission, il est évident que l'avis est favorable.
N'ayez pas peur de dire que vous êtes favorable à la suppression de l'article !
Dans la mesure où l'un des amendements a été adopté par la commission des finances, j'ai le sentiment que le défi n'est pas facile à relever.
Je rappellerai simplement pourquoi le Gouvernement avait inscrit cette mesure dans le projet de loi de finances rectificative. Tout d'abord, en France, la filière de valorisation du sous-sol s'oriente vers des filières renouvelables telles que la géothermie et le stockage d'énergie. Ensuite, la mise en place d'une taxe sur les permis exclusifs de recherche de gîtes géothermiques à haute température permet de tenir compte de l'impact des travaux de recherche sur un territoire et facilite leur acceptation par les acteurs locaux.
Par ailleurs, la taxe, indexée sur la surface des permis, a aussi pour but d'inciter les opérateurs du sous-sol et titulaires de ces titres à optimiser l'usage des sous-sols et leur activité de recherche en ciblant au plus précis leurs zones d'intérêt géographique.
La réforme proposée prévoit de verser le produit de la taxe aux départements de métropole ou aux collectivités d'outre-mer. Si le montant collecté sera faible – environ 40 000 euros les premières années – , il sera collecté auprès d'un nombre réduit d'opérateurs – moins de dix – et sera donc facile à recouvrer, et augmentera normalement les années suivantes compte tenu du développement prévisionnel de la filière géothermique.
Tels sont les arguments qui ont amené le Gouvernement à inscrire cet article dans le projet de loi de finances rectificative. Vous comprendrez aisément que, dans ces conditions, je ne peux donner un avis favorable à sa suppression.
Je m'en remets donc à la sagesse de l'Assemblée nationale.
On atteint au sublime ! Pourquoi le Gouvernement a-t-il proposé cet important article 22 ? De façon assez primaire, je m'en remets aux études d'évaluation : la fiscalité sur les gîtes géothermiques devrait permettre d'aider le développement de la filière en apportant une contrepartie financière aux territoires qui accueillent les projets d'exploration. C'est formidable ! Les recettes attendues sont de 40 000 euros par an, et seront prélevées sur dix à dix-sept opérateurs, on ne sait pas exactement combien. Si vous divisez 40 000 par dix, monsieur le secrétaire d'État, vous obtenez 4 000 euros. Comme dirait l'autre : « T'as pas cent balles ? » Et on en fait un article de loi de finances rectificative ?
La commission des finances, pleine de sagesse, a voté sa suppression. Nous avons d'ailleurs beaucoup ri à l'occasion de cette discussion. Faisons donc sauter cet article ! Pour une fois, on simplifiera un peu une loi de finances rectificative au lieu de la complexifier.
Il faut en effet mettre fin à cette plaisanterie. Vos propres tableaux, qui s'expriment non pas en milliers mais en millions d'euros, en font les frais puisqu'un certain nombre de zéros apparaissent entre la virgule et le chiffre final.
La taxe dont nous avons discuté auparavant représentait 800 000 euros, le montant ici est de 40 000 euros ; j'ai très peur pour la taxe suivante.
Je me suis un peu renseignée sur ce sujet et, à l'appui de ma formation d'économiste, j'ai découvert que les raisonnements économiques sont parfois contre-intuitifs. L'ADEME – l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie – et plusieurs autres organismes publics expliquent que, dans un certain nombre de domaines, une fiscalité réduite peut inciter les collectivités locales à s'intéresser au développement de telle ou telle filière.
… mais le fait de créer pour les collectivités un petit intérêt à s'ouvrir à de nouvelles pratiques. L'idée est donc d'introduire une petite incitation. Personne ne sera lésé sur le plan économique.
Ce raisonnement, donc, s'il n'est pas intuitif a priori, fait néanmoins l'objet de nombreux rapports, ces fameux rapports que nous demandons tous à longueur de débat…
Pas toujours.
… et dont le contenu, parfois, est intéressant. Nous vous invitons donc à voter contre ces amendements.
J'aimerais que, pour une fois, on n'évalue pas le dispositif, monsieur le secrétaire d'État, car cela coûterait plus que la taxe ne rapporterait.
Sourires.
Il est procédé au scrutin.
Nombre de votants | 62 |
Nombre de suffrages exprimés | 59 |
Majorité absolue | 30 |
Pour l'adoption | 20 |
contre | 39 |
L'amendement no 147 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Pour que la taxe soit un peu plus incitative pour les collectivités territoriales, je propose de l'augmenter.
Défavorable.
Il faudrait augmenter davantage, mon cher collègue ! Ce n'est pas assez ! Triplons ! Quadruplons !
Pensez donc que deux tiers des collègues ici présents ont voté pour le maintien de cette taxe ; c'est terrible ! Mais allons donc plus loin encore, sous-amendons ce qui est proposé ! Tout cela est vraiment ridicule. Hélas ! le ridicule ne tue plus en politique.
L'amendement no 363 n'est pas adopté.
L'amendement no 149 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 22, amendé, est adopté.
Sur l'article 23, je suis saisie de deux amendements identiques de suppression, nos 108 et 232.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement no 108 .
Il s'agit à nouveau d'augmenter une taxe. L'article 23 a en effet pour objet de modifier les taux des redevances départementale et communale applicables aux productions d'hydrocarbures en faisant disparaître une référence de 1992 et en modifiant des taux.
L'impact est important, puisque le taux applicable aux gisements anciens est augmenté de plus de 20 %, et celui applicable aux gisements nouveaux est augmenté de 300 % pour la redevance communale et de 400 % pour la redevance départementale.
Ces dispositions sont prises au détriment d'entreprises de petite taille dont l'activité contribue à la valorisation des gisements récents.
Plus généralement, il me semble regrettable d'organiser la création de microtaxes telles que celle que nous venons de voter. Elles induisent des frais de collecte importants qui diminuent leur rendement. De nombreux rapports se sont interrogés sur leur simplification et ont proposé leur suppression.
Je regrette que nous en votions une, ce qui équivaut à augmenter le montant des taxes. Le Gouvernement affirme qu'il ne procédera pas à des augmentations d'impôt ; il s'y livre pourtant dans tous les domaines.
La parole est à M. Jean-Paul Mattei, pour soutenir l'amendement no 232 .
L'article 23 procède à une forte augmentation du taux de la redevance communale et départementale des mines. Il prévoit en effet son augmentation de 25 % dès le 1er janvier 2018, ce qui ne bénéficierait pas nécessairement aux collectivités territoriales.
En outre, il fait peser sur le texte un risque de censure constitutionnelle. D'ores et déjà indexée sur l'inflation et sur l'évolution du PIB, cette taxe voit son montant augmenter en moyenne de 2,5 % par an. Il ne semble pas pertinent de remettre en cause cet équilibre. Il serait opportun de maintenir la législation en vigueur en matière de taxe sur les gisements d'hydrocarbures et d'engager une réflexion globale dans le cadre de l'examen du texte portant réforme du code minier prévu l'année prochaine.
Contrairement à certains propos qui viennent d'être tenus, cette taxe ne pèse pas essentiellement sur des petites sociétés. À l'heure actuelle, huit opérateurs l'acquittent, dont la société canadienne Vermilion qui représente 83 % de son produit total. La deuxième contribution la plus élevée est acquittée par la compagnie suédoise Lundin. La première a repris les forages de Total et d'Esso ; la seconde a repris la société International Petroleum Corporation, dont les activités sont situées en Malaisie, en France et aux Pays-Bas.
Certes, cette taxe pèse aussi sur quelques sociétés plus petites, mais le montant de leur redevance augmentera peu, car l'assiette fiscale est très faible. Par exemple, la redevance acquittée par la société alsacienne Holweg augmentera d'environ 1 700 euros. L'avis de la commission sur les amendements tendant à la suppression de l'article est donc défavorable.
L'avis est défavorable pour les mêmes raisons que celles évoquées par M. le rapporteur général, auxquelles j'ajouterai deux arguments. Tout d'abord, la distinction des tarifs opérée en 1992, sur laquelle le Gouvernement souhaite revenir et que ces amendements tendent à maintenir, résultait de la volonté du Gouvernement d'alors de relancer la recherche d'hydrocarbures.
De fait, cette distinction n'a plus aucun sens. Sa suppression est même cohérente avec la présentation du projet de loi mettant fin à la recherche ainsi qu'à l'exploitation des hydrocarbures conventionnels et non conventionnels et portant diverses dispositions relatives à l'énergie et à l'environnement.
Par ailleurs, l'augmentation de 20 % des tarifs applicables aux gisements d'hydrocarbures permet d'augmenter les recettes des collectivités territoriales en vue de mieux accompagner la reconversion de leur territoire d'ici à 2040. Enfin – et cela permettra peut-être d'apaiser les inquiétudes exprimées – , cette hausse doit être remise en perspective, car elle est déductible des bénéfices imposables et exonère les opérateurs concernés de la contribution économique territoriale applicable aux activités d'exploitation minière.
Quelque chose m'échappe, monsieur le secrétaire d'État. On lit, à la page 136 de l'étude d'impact jointe au projet de loi, que l'intégralité de la recette supplémentaire, soit 5,6 millions d'euros, sera affectée à l'État. Pourtant, la redevance communale et départementale des mines n'est pas affectée à l'État, mais aux conseils départementaux et en partie aux communes. L'étude d'impact prévoit que la recette passera de 14,2 millions d'euros à 19,9 millions d'euros, soit en effet une recette supplémentaire de 5,7 millions d'euros. Le Gouvernement prévoit-il de modifier son affectation ?
Je salue la perspicacité de M. de Courson, qui fait peut-être partie de ceux qui lisent le plus précisément les études d'impact et peuvent ainsi relever d'éventuelles erreurs. Je vous confirme, monsieur de Courson, que la redevance communale et départementale des mines est affectée aux départements et en partie aux communes, et non à l'État. Si possible, l'étude d'impact sera corrigée. En tout état de cause, vous avez bien fait de relever cette erreur.
L'article 23 est adopté.
Prochaine séance, ce matin, à neuf heures trente :
Discussion de la proposition de loi visant à étendre le dispositif de dons de jours de repos non pris aux aidants familiaux ;
Discussion de la proposition de loi visant à instaurer une taxe sur les transferts de sportifs professionnels ;
Discussion de la proposition de loi créant une Agence nationale pour la cohésion des territoires ;
Discussion de la proposition de loi permettant une bonne application du régime d'asile européen ;
Discussion de la proposition de loi relative à la création chèque-emploi collectivités territoriales.
La séance est levée.
La séance est levée, le jeudi 7 décembre 2017, à une heure cinq.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Catherine Joly