La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
Il devrait recevoir un avis favorable du ministre, qui l'avait lui-même déposé en son temps. Il s'agit de permettre aux personnes handicapées de bénéficier d'un prêt à taux zéro. Il me semble en effet important que nous envoyions ce signal.
La parole est à M. Joël Giraud, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l'avis de la commission.
Si nous partageons tous l'objectif exprimé, le véhicule utilisé ne me paraît franchement pas adapté. Je demande le retrait de cet amendement.
La parole est à M. le ministre de l'action et des comptes publics, pour donner l'avis du Gouvernement.
M. le député Abad pose une question importante.
M. le ministre constate que les membres des groupes d'opposition présents sur les bancs sont majoritaires.
Sourires.
Sans doute M. le président de la commission des finances pourra-t-il d'ailleurs intervenir lui aussi…
Il existe de nombreux dispositifs budgétaires et fiscaux en faveur des personnes en situation de handicap qui souhaitent aménager leur domicile. J'ai d'ailleurs moi-même, dans ma mairie, mis en place un prêt à taux zéro – même s'il s'agissait d'une mesure non pas fiscale mais budgétaire.
Oui : j'en suis toujours le premier adjoint, monsieur le député. Il est vrai que vous ne pouvez pas faire de même.
Les députés ne peuvent plus cumuler avec une telle fonction, effectivement !
Mes chers collègues, veuillez laisser M. le ministre poursuivre – même si je crois que ces interruptions l'arrangent !
Sourires.
Ils sont jaloux !
Sourires sur les bancs du groupe LR.
Je disais donc qu'à Tourcoing, nous avons mis en place un prêt à taux zéro, à partir non pas de la fiscalité mais du budget.
L'aménagement du domicile des personnes handicapées constitue évidemment un enjeu très important. Du reste, il permet parfois de réaliser des économies, les places en établissement spécialisé ou les aménagements plus lourds se révélant plus coûteux.
Nous avons instauré des aides budgétaires qui répondent au moins en partie à votre préoccupation. Ainsi, je rappelle que les départements sont soutenus, notamment, pour financer l'aide à l'aménagement du logement qu'ils délivrent dans le cadre de la prestation de compensation du handicap. En outre, comme vous le savez – puisque vous avez présidé un conseil départemental – , les aides de l'Agence nationale de l'habitat pour les travaux d'accès sont très élevées : versées sur justification du handicap, elles représentent 35 % du montant hors taxe des travaux aménagés pour les foyers modestes, …
… sous un plafond de 7 000 euros, et 50 % du montant des travaux pour les foyers très modestes, dans la limite de 10 000 euros.
Pour ce qui est des aides fiscales, l'article 200 quater A du code général des impôts prévoit d'ores et déjà un crédit d'impôt sur le revenu de 25 %, accordé au titre des dépenses supportées par les contribuables pour l'installation ou le remplacement, dans leur résidence principale, d'équipements spécialement conçus pour les personnes handicapées. Dans la limite d'un plafond global pluriannuel des dépenses de 5 000 euros pour une personne seule et de 10 000 euros pour un couple, majoré de 400 euros par personne à charge, cet avantage fiscal s'applique sans distinction aux contribuables propriétaires, locataires, ou occupant à titre gratuit leur habitation principale. Le Gouvernement a prorogé la période d'application de ce dispositif au 31 décembre 2020, tout en en réformant le champ d'application, afin que le crédit d'impôt puisse être adapté aux enjeux actuels, notamment au vieillissement de la population.
Les personnes handicapées bénéficient également d'un taux de TVA réduit de 5,5 % pour l'acquisition d'appareillage et d'équipements spécieux… spéciaux, pardon…
Les personnes handicapées bénéficient également du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée de 5,5 % pour l'acquisition d'appareillage et d'équipements spéciaux leur permettant de continuer à vivre à leur domicile, et du taux réduit de 10 % pour les travaux réalisés pour une meilleure accessibilité des personnes à mobilité réduite portant sur des locaux à usage d'habitation achevés depuis plus de deux ans.
Faute de chiffrage, je ne connais pas le montant de la disposition que vous proposez dans votre amendement, monsieur Abad.
Connaissez-vous le montant de la mesure proposée ?
Peut-être puis-je demander une brève suspension de séance afin de prendre connaissance de ce chiffrage ?
Sourires.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à quinze heures cinq, est reprise à quinze heures dix.
Malheureusement, monsieur Abad, comme nous ne connaissons pas le public concerné par votre amendement, nous n'identifions pas de façon précise les personnes qui bénéficieraient de cette mesure, ce qui ne nous permet pas d'effectuer un chiffrage.
Je vous propose donc, si vous ne retirez pas votre amendement – j'imagine que vous le maintiendrez – , que nous en rediscutions, en vue peut-être d'une application dans quelques départements pilotes, avant d'envisager une extension. Cela nous permettrait d'évaluer le coût de la disposition fiscale que vous proposez.
J'émets donc une demande de retrait ou, à défaut, un avis défavorable.
Je vous remercie pour cette explication très détaillée, monsieur le ministre – je ne doute pas que vous ferez de même pour chaque amendement.
Sourires.
J'ai été très sensible à cette réponse extrêmement argumentée, qui traduit l'importance que vous accordez à ma proposition.
Mêmes mouvements.
Au-delà, je prends note de votre ouverture quant à la possibilité de désigner des départements pilotes.
Je souhaite également souligner que cet amendement concerne les personnes handicapées, mais aussi celles qui hébergent une personne handicapée. De ce point de vue, la question mérite examen, car le prêt à taux zéro peut représenter un outil fiscal intéressant et un levier financier important.
Des aides existent en effet, mais elles sont multiples, et il me semble important de travailler sur ce point. Je maintiens donc mon amendement, et espère que l'hémicycle enverra un signal positif dans la perspective de travaux ultérieurs.
L'amendement no 416 n'est pas adopté.
Vous aviez décidé, l'an dernier, de permettre le versement d'une prime exceptionnelle défiscalisée que les entreprises pouvaient accorder à leurs salariés si elles le souhaitaient et en avaient les moyens. Vous avez décidé de reconduire cette prime, ce qui me semble être une bonne chose. Nous en reparlerons dans le cadre de l'examen du PLFSS – le projet de loi de financement de la sécurité sociale – , si j'ai bien compris.
D'abord, je suis un peu inquiet quant aux conditions que vous posez au versement de cette prime, en particulier quant à la nécessité d'un accord d'intéressement ; je ne sais pas comment cette obligation pourra être respectée dans une entreprise, une association ou une autre structure salariant une ou deux personnes.
Mon amendement ne porte cependant pas sur ce point. Il vise à ce que cette prime exceptionnelle ne soit pas comptabilisée dans le revenu fiscal de référence. Ce dernier est important pour nos compatriotes car il conditionne divers droits. Il y aurait un paradoxe à ce que cette prime, dans un premier temps perçue favorablement – il s'agit d'un effort fourni par l'entreprise, ce qui est positif, le Gouvernement l'admet, et je suis loin d'y être hostile – , conduise, dans un second temps, à augmenter le revenu fiscal de référence et à priver nos compatriotes de certains dispositifs sociaux qui y sont liés. La conclusion me semble relativement logique : pour que cette prime produise réellement tous ses effets, l'adoption de mon amendement serait nécessaire.
Je compléterai l'argumentation de mon collègue. La reconduction de cette prime en faveur du pouvoir d'achat est effectivement demandée mais il importe qu'elle soit exclue du revenu fiscal de référence, afin de ne pas modifier les droits fiscaux et sociaux des bénéficiaires.
Comme M. Le Fur l'a indiqué, cette question sera abordée dans le PLFSS, qui satisfait en grande partie votre attente. La disposition prévue par votre amendement est même, dans une certaine mesure, moins favorable que celle prévue dans le PLFSS. Ce débat devrait donc avoir lieu dans le cadre de l'examen du PLFSS, pas maintenant. Je demande donc le retrait de ces amendements.
Je comprends que l'objectif poursuivi par cet amendement sera satisfait à l'occasion de l'examen du PLFSS. N'ayant aucune raison de ne pas faire confiance à nos autorités, je retire mon amendement.
Je repose toutefois la question incidente, relative à la condition que vous posez à l'octroi de cette prime : comment cela apparaîtra-t-il dans l'accord d'intéressement ?
Cela relève du PLFSS !
Je le sais bien. Tout est dans tout, et la mesure aura une incidence fiscale.
Il faudrait en revenir au PLF à proprement parler !
Je pose en tous les cas les bases de ce débat, dont j'estime qu'il sera assez sensible.
L'amendement no 2 est retiré.
Oui. Je précise, en complément aux arguments de M. Le Fur, que de nombreuses petites entreprises ont versé volontairement cette prime l'an dernier, et que peu d'entre elles disposent d'accords d'intéressement. Il conviendra donc d'éclaircir cette question lors de l'examen du PLFSS.
L'amendement no 12 est retiré.
Cet amendement de notre collègue Joachim Son-Forget revient sur un sujet que nous avons abordé hier soir : la fiscalité des revenus de source française de nos compatriotes expatriés. En effet, l'article 13 de la loi de finances pour 2019, applicable au 1er janvier prochain, se traduirait par des hausses conséquentes d'imposition pour nombre de nos compatriotes français de l'étranger. Cet amendement a donc pour vocation d'abroger le nouveau barème forfaitaire et de maintenir par conséquent la retenue à la source libératoire sur les revenus de source française des Français non-résidents en France.
Madame Magnier, votre amendement est satisfait par le report que nous avons voté hier. Je vous demande donc de bien vouloir le retirer car la question sera traitée dans ce cadre.
Au nom de mon collègue Joachim Son-Forget, je retire cet amendement et je remercie le Gouvernement du moratoire adopté hier soir en séance.
L'amendement no 124 est retiré.
Cet amendement, qui porte sur le même sujet que celui qui vient d'être retiré, étant satisfait, je le retire. Je tiens à remercier à nouveau M. le ministre de l'écoute dont il a fait preuve sur ce sujet.
L'amendement no 1513 est retiré.
Cet amendement, déposé à l'initiative de mon collègue Jean-Louis Bricout, vise à supprimer le PFU, prélèvement fiscal unique.
Hier soir, au cours du débat portant sur le fameux amendement relatif aux EHPAD – les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes – , je m'étais référée à un document de l'INSEE paru hier, faisant apparaître une augmentation de 0,6 point du taux de pauvreté en 2018, ce taux atteignant désormais 14,7 % de la population.
Le rapport de l'INSEE pointe également du doigt la hausse des inégalités et surtout la cause de cette hausse. Selon ce document, qui n'émane pas du groupe SOC et que je vous invite à lire, l'augmentation des inégalités serait surtout liée à la forte augmentation des revenus de capitaux mobiliers désormais soumis à la flat tax, concentrée évidemment chez les plus aisés. L'amendement de M. Bricout et de notre groupe a donc toute sa pertinence.
Je me référerai moi aussi à ce rapport accablant de l'INSEE, qui montre à la fois l'augmentation de la pauvreté dans notre pays et celle des inégalités, due notamment aux mesures prises par la majorité et le Gouvernement en faveur des plus riches. Comme beaucoup ici sans doute, je suis convaincu qu'une société qui voit les inégalités s'accroître est une société qui régresse, pas une société qui progresse.
Cet amendement tend donc à la suppression de la flat tax, du prélèvement forfaitaire unique, dont l'instauration était l'une des décisions les plus injustes que vous ayez prises ; sans aucun effet vertueux sur l'économie de nos pays, elle pèse chaque année pour 1,6 milliard d'euros dans les comptes de la nation. Cette mesure injuste, qui profite aux plus riches, a pour effet, comme nous l'avons évoqué précédemment, qu'une partie des personnes concernées ont préféré se rémunérer en dividendes plutôt qu'en salaire. Un autre effet pervers de cette mesure est qu'elle assèche les comptes sociaux.
La parole est à Mme Danièle Obono, pour soutenir l'amendement no 1193 .
Il tend également à supprimer le prélèvement forfaitaire unique sur les revenus du capital, instauré en janvier 2018. Outre la récente étude de l'INSEE invoquée par nos collègues, je citerai les travaux de l'ONG – organisation non gouvernementale – Oxfam montrant que la France fut championne du monde de versement de dividendes en 2018. A-t-on vraiment besoin d'inciter encore les entreprises à verser des dividendes à leurs actionnaires, alors qu'elles sont déjà friandes de ce mode d'engraissement capitaliste ? Alors que l'un des arguments principaux pour la suppression de l'ISF – l'impôt de solidarité sur la fortune – était la relance de l'investissement productif, la flat tax a créé des effets d'aubaine en faisant privilégier par les entreprises le versement de dividendes à court terme plutôt que l'investissement à long terme.
Taxer moins les revenus du capital que ceux du travail n'est pas acceptable, et n'a d'ailleurs pas été accepté par une grande partie de nos concitoyens et concitoyennes, qui l'ont exprimé sur les ronds-points durant de longs mois. Pour répondre à cette demande, le Président de la République avait promis d'évaluer la suppression de l'ISF et la mise en place de la flat tax. Cette évaluation, pilotée par France stratégie – qui n'est pas une officine insoumise, mais un organisme dépendant des services du Premier ministre – , n'a pas fait ressortir le moindre effet positif sur l'économie ni sur les investissements. L'étude confirme cependant que la flat tax a bénéficié aux plus riches, leur procurant un gain moyen de 1 000 euros par an.
À celles et ceux qui, sur ces bancs, se gargarisent de recettes supérieures d'1 milliard d'euros à celles que le Gouvernement avait prévues initialement, je rappelle que, comme le montre le comité d'évaluation des réformes de la fiscalité du capital, c'est dû au bond des dividendes de plus de 60 % en 2018 par rapport à 2017. Or c'est exactement ce que nous craignions, à la suite notamment de l'alerte en ce sens lancée par l'économiste Gabriel Zucman dès 2017.
La hausse des dividendes peut s'expliquer par le fait que les chefs d'entreprise ont préféré se rémunérer par ce biais, comme l'a indiqué M. Peu. Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de la flat tax.
Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements identiques ?
Je ne veux pas rouvrir des débats qui ont déjà eu lieu, mais ces amendements, comme d'autres examinés en fin de matinée, posent la question des effets d'aubaine, notamment liés au transfert de la partie salaire sur la partie dividende. Pourrions-nous obtenir une réponse à ce propos ? Cet effet d'aubaine est-il réel ou non ? Le constatez-vous ou non ? Considérez-vous que ce n'est pas grave et que, dans ce cas, il ne faut toucher à rien, ou faut-il en tenir compte et, à défaut de supprimer la flat tax comme nous le proposons, peut-on au moins la corriger pour en corriger les effets pervers et les conséquences négatives sur notre budget ?
Monsieur Coquerel, puisque vous n'étiez pas dans l'hémicycle ce matin, je vous donnerai la parole après Mme Hai, par courtoisie, mais après cela, nous nous en tiendrons aux dispositions du règlement, qui prévoit que, pour chaque amendement, deux avis puissent s'exprimer : l'un pour et l'autre contre.
La parole est à Mme Nadia Hai.
Madame Obono, votre interprétation du rapport rendu par le comité d'évaluation des réformes de la fiscalité du capital, au sein duquel j'ai siégé, est très drôle. Nous ne parvenons pas du tout aux mêmes conclusions, et votre interprétation est légèrement biaisée.
Vous pouvez sourire, mais vous énoncez des contrevérités lorsque vous affirmez que le prélèvement forfaitaire unique a eu des effets négatifs sur les investissements et a au contraire accentué la distribution des dividendes.
En réalité, si la distribution des dividendes a atteint un niveau élevé en 2018, c'est parce qu'elle retrouvait son niveau de 2013. En effet, la réforme fiscale – le choc fiscal – de 2012 a entraîné, dans un contexte de crise financière, une conservation des dividendes comme liquidités par les entreprises. Pendant toute cette durée, ils n'ont donc ni servi à financer un certain niveau de production des entreprises, ni bénéficié aux actionnaires. Même si le lien de cause à effet n'est pas encore établi – le comité d'évaluation y travaille – , la distribution de dividendes qui a eu lieu en 2018 a eu pour effet de faire atteindre des niveaux records aux montants levés par les fonds de capital investissement : 18,7 milliards d'euros en 2018, contre 16,5 milliards d'euros en 2017, montant qui était déjà historique à cet égard. Vous pouvez certes interpréter les rapports dont nous disposons mais, s'il vous plaît, ayez-en une vision neutre et vraie.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Je n'avais pas entendu la règle que vous avez évoquée, monsieur le président.
Je suis heureux de reprendre la parole, car nous poursuivons ici la discussion que nous avons eue hier autour d'un amendement relatif à l'abattement de 40 % sur les dividendes, à propos duquel M. Saint-Martin et M. Mattei m'ont répondu que l'on ne recourait pratiquement plus à cette mesure, du fait de la flat tax : c'est donc maintenant celle-ci qui s'applique.
Pour ce qui concerne, tout d'abord, les analyses de l'IPP, l'Institut des politiques publiques, Mme Obono n'a pas dit que cette mesure avait eu des effets négatifs, mais qu'elle n'avait pas eu d'effets positifs sur l'investissement. Pour avoir assisté, voici quelques jours, à la réunion de l'IPP, je peux confirmer que c'est bien le cas. En revanche, on a observé une augmentation de 15 % des dividendes versés, cette explosion étant bien plus forte dans les entreprises françaises que partout ailleurs en Europe. Il me semble donc qu'il y a une corrélation entre l'espèce de bouclier que vous avez créé pour le capital et l'explosion des dividendes.
Pour toutes ces raisons, une revoyure avait été prévue, mais ce qui apparaît, c'est qu'il n'y a pas d'investissement et que cette mesure coûte cher à l'État – on saura l'année prochaine combien elle coûte exactement, car elle aura certainement des effets différés, puisque l'argent ainsi employé n'ira pas vers d'autres formes de revenus. Ce sont là également les conclusions exprimées l'autre jour par l'IPP. Nous verrons donc l'année prochaine si cette mesure coûte plus de 448 millions d'euros, son coût actuel. Il me semble que ce sera le cas, car l'argent, loin de se volatiliser, va d'un endroit à un autre : si les gens décident de se rémunérer d'une certaine manière, ils se rémunèrent moins d'une autre et la fiscalité porte sur le mode de rémunération choisi, compte tenu de la flat tax que vous avez instaurée. C'est, selon moi, la raison pour laquelle on recourt beaucoup moins dorénavant à l'abattement de 40 %.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
L'article 3 nous invite à réfléchir sur une réalité : l'importante fuite de recettes de l'État que nous constatons. Le principe de la liberté individuelle doit être respecté : lorsque des gens exercent un travail effectif à l'étranger et que leur entreprise y est enracinée, il n'y a pas de problème. En revanche, il convient d'éviter – c'est le cas de le dire – l'évitement fiscal. Doivent ainsi être ciblées les personnes qui profitent des faiblesses du système alors que leur entreprise a des activités substantielles en France. C'est là une forme injustifiable de fuite de recettes pour l'État. De même, il faut faire une place particulière, en la matière, aux patrons de grands groupes d'État ou de groupes dans lesquels l'État investit fortement, qui doivent être considérés comme des hauts fonctionnaires.
Nous nous réjouissons de cet article, qui avait du reste été annoncé à la fin de l'année 2018 par le Gouvernement, à la suite de l'affaire liée aux indemnités de départ de Carlos Ghosn et à la découverte de sa domiciliation fiscale aux Pays-Bas depuis 2012. Cet article est d'ailleurs en cohérence avec la jurisprudence administrative car, dans son arrêt USG France du 10 août 2017, le Conseil d'État avait considéré que les mandataires sociaux d'une société ayant son siège social en France devaient être considérés comme y exerçant leur activité. Curieusement, en revanche, l'évaluation préalable ne dit rien et ne donne aucun chiffre quant au nombre de dirigeants qui pourraient être concernés par cet article, ni quant au rendement fiscal potentiel de cette mesure. Est-ce compliqué ? Ou couvert par je ne sais quel secret ? Avez-vous des éléments à nous communiquer ?
M. Jean-François Mattei, qui doit arriver dans quelques minutes, et moi-même défendrons alternativement une série d'amendements fondés sur le rapport d'information sur l'impôt universel, que nous avons produit tous les deux. Comme vous le savez, nous avons rédigé un rapport relatif à l'impôt universel. L'idée, mise en place aux États-Unis, consiste à faire payer à un citoyen français la différence entre le montant d'impôts qu'il paie à l'étranger et celui qu'il paierait en France. Cette piste n'a finalement pas été retenue dans le rapport pour différentes raisons, entre autres l'absence d'accord entre nous sur ce point. Nous avons néanmoins travaillé de manière pragmatique autour de ce principe, qui vise à lutter contre l'évasion fiscale. Les amendements que nous proposons vont dans ce sens.
Le premier vise à inscrire dans la loi la règle des 183 jours, qui fixe comme critères, pour définir le revenu de la personne qui choisit d'établir sa résidence fiscale à l'étranger, la durée de présence effective sur le territoire national et la contribution à la production de richesses sur ce même territoire. On considère généralement que la durée de présence effective pertinente est de 183 jours mais cette durée ne figure dans aucun texte. Nous proposons donc de l'inscrire dans la législation.
Cet amendement avait été retiré lors de l'examen du texte en commission au titre de l'article 86 du règlement, parce que j'avais fait observer que rigidifier les choses à ce point pouvait présenter des risques, y compris celui d'obtenir un résultat contreproductif. Pour certains, la durée de présence est inférieure à 183 jours, mais il existe un faisceau d'indices justifiant leur statut de résident fiscal ; d'autres, a contrario, se retrouveraient automatiquement intégrés au groupe des résidents fiscaux, alors que c'est l'existence d'un domicile familial à l'étranger qui les contraint à faire des allers-retours entre la France et un autre pays. Je préfère donc ne pas rigidifier, afin de ne pas passer à côté de cas avérés d'abus.
L'amendement no 2292 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement no 502 .
D'une simplicité biblique, il consiste à rappeler que les mesures fiscales doivent être prises dans le respect des conventions bilatérales. J'ai en effet été troublé, en lisant l'article 3, par l'absence de mention aux conventions fiscales qui concernent 130 à 140 États du monde. Cet article est-il donc compatible avec toutes les conventions fiscales bilatérales que nous avons signées ?
Les conventions fiscales, en tant que norme supérieure, doivent être respectées par les dispositifs français. Toutefois, si on le précisait par écrit, cela voudrait dire qu'il y a des cas où elles ne doivent pas l'être, ce qui, à mon avis, serait vraiment contreproductif. L'avis est donc défavorable, sachant que, quoi qu'il en soit, la hiérarchie des normes s'impose, et que cet article la respecte.
Monsieur de Courson, votre amendement est déjà satisfait : vous pouvez donc le retirer. Les conventions fiscales s'appliqueront évidemment. J'en dirai d'ailleurs un mot lorsque nous discuterons des amendements relatifs au seuil de 250 millions d'euros – je rappelle qu'il s'agit là d'une promesse du Président de la République lors du grand débat, et que j'avais déjà évoqué cette question peu de temps auparavant dans l'hémicycle. Le Gouvernement sera favorable à cet amendement, dans le respect des conventions fiscales – il n'y aura pas de double imposition. Cela n'empêchera pas la France, qui a commencé à s'atteler à ce dossier, de faire éventuellement en sorte que ces conventions soient modifiées – ces travaux pourront d'ailleurs vous être présentés.
J'avais déposé cet amendement pour que vous me disiez ce que vous venez de me dire.
Et ben voilà !
D'ailleurs il n'y avait pas d'autre réponse possible. Mais, ayant l'esprit d'escalier, je me demande à qui s'applique cet article, puisqu'on dénombre environ 140 conventions bilatérales – je ne crois pas qu'il en existe une entre la France et les îles Samoa occidentales, mais connaissez-vous beaucoup de grands chefs d'entreprise français qui s'y rendent ?
Je retire mon amendement parce qu'il est superfétatoire mais j'aimerais qu'on me réponde. Quel est donc le véritable contenu de cet article : s'agit-il d'un affichage, d'une coquille vide ?
L'amendement no 502 est retiré.
Il ne s'agit pas d'une coquille vide. Je pensais que nous aurions l'occasion d'en débattre à propos des amendements relatifs au seuil de 250 millions d'euros, que le Gouvernement vous invitera à adopter. Mais vous me demandez à quoi sert l'article 3 s'il existe des conventions fiscales qui empêchent son application. Je vais donc vous répondre.
Tout d'abord, il n'existe pas de convention fiscale avec chaque pays, toutes les conventions fiscales ne se valent pas et elles ne fournissent pas toutes les mêmes éléments d'appréciation. Donc ce qui vaut pour tel pays ne vaudra pas pour tel autre. D'ailleurs, en tant que parlementaire, c'est vous qui approuvez ces conventions.
D'autre part, à propos du nombre de dirigeants concernés – une question soulevée par Mme Pires Beaune – , je suis tenu, y compris devant le Parlement, par le secret fiscal.
En effet. Mais si le chiffre fourni par les statistiques est peu élevé, on peut procéder à des recoupements et donc découvrir de qui on parle !
Voici des chiffres que nous n'avons pas encore donnés, concernant les seuils de chiffres d'affaires, sachant que la catégorie « dirigeant » désigne un président-directeur général etou un directeur général. Le seuil d'1 milliard d'euros de chiffres d'affaires concerne 223 entreprises bénéficiaires, en prenant en compte les groupes fiscalement intégrés, soit 440 à 450 personnes au maximum. Une très grande partie de ces personnes sont bien sûr déjà domiciliées fiscalement en France, mais une petite partie, non négligeable, ne le sont pas. Dans certains cas, la non-domiciliation en France est permise par les conventions internationales mais, dans d'autres cas, l'article 6 s'appliquerait – pour le montant qui avait été retenu au début de la discussion par le Gouvernement. Le seuil de 750 millions de chiffre d'affaires concerne 286 entreprises ; le seuil de 250 millions – celui dont il est question dans l'amendement que le Gouvernement vous encouragera à adopter – concerne 765 entreprises, soit environ 1 500 dirigeants.
Je le répète, la majorité de ces dirigeants paie ses impôts en France. Le projet de loi de finances permettra de régler la situation des autres dirigeants, en faisant en sorte qu'ils soient domiciliés fiscalement en France.
Je suis désolé que vous ne disposiez pas de ces éléments d'information mais, comme il s'agit d'un amendement adopté en commission, vous comprenez que le Gouvernement ne se soit pas précipité pour procéder à son évaluation exacte – il n'en avait pas forcément pas les moyens.
En ce qui concerne les montants supérieurs à 1 milliard d'euros, je peux assurer à M. de Courson que l'article 3 s'appliquerait à certains grands dirigeants de très grandes entreprises qui ne sont pas domiciliés fiscalement en France. Je ne peux pas vous donner plus de précisions, mais cela ne me semble pas négligeable. Le Parlement ne fait pas oeuvre inutile.
Monsieur le ministre, je vous remercie pour votre franchise. Globalement, il s'agit d'un bon article, qui essaie d'exprimer les choses telles qu'elles sont, mais son effet, dans un premier temps, sera limité. En effet, les dirigeants déjà domiciliés en France ne sont pas concernés et la plupart des dirigeants domiciliés à l'étranger sont couverts par une convention fiscale qui impose leur revenu dans le pays où ils habitent. Cet article ne pourra rien changer à cette situation. Certes, il va dans le bon sens. Quelques chefs d'entreprise seront concernés, très bien, mais dans un premier temps, il s'agit en quelque sorte d'un effet d'annonce.
L'amendement no 672 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Nous en venons à plusieurs amendements, nos 503 , 542 , 1210 , 2089 , 2186 , 2643 et 534 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 503 , 542 , 1210 , 2089 , 2186 et 2643 sont identiques.
Sur l'amendement no 503 , je suis saisi par le groupe Socialistes et apparentés d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour le soutenir.
Pour être honnête, je précise que nous avions présenté en commission des finances un amendement qui ne prévoyait pas un abaissement du seuil aussi important, puisque nous l'avions alors fixé à 750 millions d'euros. Face à la bienveillante attitude de notre rapporteur général, nous avons décidé de faire preuve d'un peu plus d'ambition, d'où cet amendement qui fixe le seuil à 250 millions d'euros.
Je vous remercie, monsieur le ministre, d'avoir été transparent en nous communiquant ces données chiffrées. Je regrette simplement qu'elles ne figurent pas dans l'étude préalable, pas même celles qui correspondent au seuil d'1 milliard.
J'irai dans le même sens que ma collègue. Notre amendement vise à donner un plus d'ambition aux promesses formulées par le Président de la République, qui avait déclaré, à la suite du mouvement des gilets jaunes : « Le dirigeant d'une entreprise française doit payer ses impôts en France et les grandes entreprises qui y font des profits doivent y payer l'impôt, c'est la simple justice. » Cette promesse, reprise ensuite par le Gouvernement, ne réglait pas le problème des sans domicile fixe mais clarifiait la situation.
Le projet de loi de finances, tel qu'il nous a été présenté, propose, en son article 3, une mesure pertinente, mais bornée aux dirigeants d'entreprises dont le siège est situé en France et qui y réalisent un chiffre d'affaires annuel supérieur à 1 milliard d'euros. Cette somme, bien trop élevée, limite la portée de cette mesure.
Dans cet état d'esprit, à la suite des discussions en commission, nous proposons, comme l'a formulé également le rapporteur général, d'abaisser le seuil à 250 millions d'euros. En agissant de la sorte, nous donnons à l'article 3 un rayonnement un peu plus large. Puisque moins de 500 entreprises étaient concernées par le seuil du milliard d'euros, on peut s'attendre à un chiffre sensiblement plus élevé.
Cela dit, aucun indicateur chiffré n'existe à propos des recettes fiscales consécutives à une telle mesure, et nous avons bien conscience de sa portée limitée. N'oublions pas, de plus, que la France a signé 121 conventions fiscales bilatérales, qui limiteront son rayon d'action. Il est important d'adopter cette mesure, mais sans fermer les yeux sur une partie du problème, à savoir les entreprises elles-mêmes et pas seulement leurs dirigeants. Cette deuxième partie de la promesse faite par le Président semble avoir été oubliée dans ce projet de loi de finances.
La parole est à Mme Danièle Obono, pour soutenir l'amendement no 1210 .
Il vise à abaisser le plancher de chiffre d'affaires évoqué dans le présent article, en le faisant passer d'1 milliard à 250 millions d'euros, afin d'élargir le champ des grandes entreprises françaises visées.
En commission, nous avions proposé de supprimer totalement ce seuil, en arguant qu'un dirigeant ou une dirigeante d'entreprise française – quelle que soit la taille de celle-ci – devait payer ses impôts en France. En effet, une entreprise française réalise ses profits notamment grâce aux services publics et aux infrastructures de notre pays. Son dirigeant ou sa dirigeante est donc rémunéré grâce à ces mêmes biens communs. Au regard de cette rémunération, il est tout naturel qu'il ou elle paie ses impôts en France.
En l'état, l'article 3 apparaît malheureusement comme un simple acte de communication. Notons d'ailleurs qu'il est indiqué, dans l'évaluation préalable de l'article, que la mesure proposée pourra entraîner une augmentation des recettes fiscales non chiffrable pour l'État à compter de 2020. Comme l'ont observé nos collègues précédemment, on ignore le nombre de patrons et patronnes réellement concernés par cette disposition.
Néanmoins, à la suite de la commission, nous acceptons la concession faite par le rapporteur général, qui nous a suggéré de proposer de nouveau notre amendement avec cette fois un seuil de 250 millions. Cela représenterait, de notre point de vue, une petite amélioration par rapport à l'article tel que présenté par le Gouvernement, lequel a du mal à aller au bout de la logique et au-delà de la posture. Nous présentons donc cet amendement et espérons qu'il sera effectivement adopté.
La parole est à M. François Jolivet, pour soutenir l'amendement no 2089 .
Je n'allongerai pas le débat. L'objet de l'amendement est de ramener le seuil de 1 milliard à 250 millions d'euros. Toutefois, après avoir entendu le ministre donner une définition des dirigeants, je souhaite préciser qu'Aude Bono-Vandorme et moi visons les présidents de conseil d'administration et de conseil de surveillance, les directeurs généraux, les présidents de directoire, les membres de directoire, ainsi que tous les directeurs fonctionnels des entreprises, car le PDG n'est pas le seul dirigeant d'une entreprise.
La parole est à M. Jean-Paul Mattei, pour soutenir l'amendement no 2186 .
C'est avec Éric Coquerel que nous déposons le présent amendement – comme quoi tout est possible – , et c'est important symboliquement. Dans notre rapport sur l'impôt universel, nous avons formulé plusieurs propositions et nous sommes heureux qu'une d'entre elles soit retenue dans l'article 3. Celui-ci me semble plus que symbolique car il obligera les dirigeants et les mandataires sociaux – François Jolivet les évoquait à l'instant – , c'est-à-dire ceux qui figurent sur l'extrait d'immatriculation, qui représentent officiellement la société et en sont la vitrine, à être fiscalement domiciliés en France. En commission, nous avions évoqué le seuil de 500 millions, mais celui de 250 millions est mieux connu. La mesure va dans le bon sens et donne une bonne image des dirigeants des entreprises françaises.
M. Éric Coquerel et M. François Jolivet applaudissent.
Sourires.
Je suis heureux d'avoir provoqué autant de conversions ; c'est rare ! Premièrement, le travail effectué par M. Mattei et M. Coquerel nous obligeait à donner du corps à l'article 3. Deuxièmement, j'avais en effet rejeté les seuils non connus, difficiles à appliquer. Troisièmement, les chiffres relatifs au nombre d'entreprises, madame Pires Beaune, ne figuraient certes pas dans l'étude d'impact, mais se trouvaient bien dans mon rapport, me conduisant à considérer que le seuil de 250 millions était plus adapté pour faire de l'article 3 un véritable signal, conformément au souhait exprimé par M. Mattei. Comme je l'avais annoncé en commission des finances, je donne donc un avis favorable aux amendements identiques.
Il est également favorable.
Madame Obono, vous avez, de votre côté, du mal à reconnaître que l'action du Gouvernement correspond bien aux promesses du Président de la République et traduit une volonté forte de changer la loi fiscale pour lutter contre l'optimisation fiscale agressive. C'est si vrai que vous avez lu votre argumentaire après mes explications sur le nombre de dirigeants concernés. Pourrait-on s'écouter dans le débat, même si on n'est pas d'accord ? J'ai été le premier à reconnaître que l'amendement de M. Coquerel et M. Mattei était frappé au coin du bon sens et représentait un apport constructif. On n'est pas obligé, à chaque fois, de se prêter des arrière-pensées ; avoir des pensées, de temps en temps, serait déjà une bonne chose…
M. de Courson – il n'est pas là, mais là où il est, il nous entend –
Rires
a dit tout à l'heure qu'il allait voter pour l'article 3, même si on allait baisser le seuil, mais que la disposition prévue ne s'appliquerait pas à cause des conventions fiscales. Je voudrais souligner à nouveau qu'à côté de la grande majorité des dirigeants – au sens large – des entreprises françaises, qui paient leurs impôts en France, certains bénéficient de conventions ; mais celles-ci ne concernent pas tout le monde et ne se valent pas. Une partie de l'argent que touchent les dirigeants habitant à l'étranger vient de sources non françaises ; si la personne bénéficie d'une convention fiscale, il est normal que la France ne perçoive pas d'impôts qui correspondent à ces sommes, seuls les revenus provenant de sources françaises étant taxés en France. L'article 3 prévoit ce cas de figure. C'est une oeuvre utile que fait l'Assemblée nationale ; je remercie les services de Bercy qui y ont travaillé et bien sûr les parlementaires de tout bord de nous permettre de baisser le seuil à 250 millions d'euros.
L'article 3, je le rappelle, correspond à un engagement du Président de la République : moraliser la vie des affaires et établir plus de justice fiscale dans notre pays en obligeant les patrons des grandes entreprises françaises à être fiscalement domiciliés en France. Les résidents fiscaux français déclarent en France leur revenu monde, les conventions fiscales bilatérales leur permettant d'éviter d'être imposés deux fois sur le même revenu. L'article 3 instaure une présomption de domiciliation pour certaines catégories d'entreprises. Visiblement, il y a un consensus pour baisser le seuil du chiffre d'affaires annuel à 250 millions d'euros. La mesure bénéficiant d'un avis favorable du rapporteur général et du ministre, nous proposons de suivre le ministère de l'action et des comptes publics.
Puisque le ministre a daigné répondre à la présentation de l'amendement – alors qu'il ne s'était pas abaissé à réagir au précédent – , je me permets de lui dire que, si j'ai effectivement lu l'extrait qui posait problème, relatif au nombre de dirigeants et dirigeantes, je l'ai bien écouté. Oui, je l'ai entendu se prévaloir du grand esprit du Président de la République et de la majorité qui nous octroieraient cette mesure. Je vous rappelle tout de même que celui-ci est issu d'un travail collaboratif : depuis deux ans et demi que nous siégeons dans cette assemblée, nous avons régulièrement proposé ce type de mesures.
Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
Votre réponse, qui insulte l'intelligence des députés, est typique de votre manière de faire, monsieur le ministre, et de la mauvaise foi qui caractérise la majorité et le Président de la République.
Protestations sur les bancs du groupe LaREM.
Cela ne nous empêchera pas de voter pour l'amendement car, voyez-vous, même si ce n'est que de la communication…
D'accord, mais vous n'êtes pas obligée d'agresser un membre du Gouvernement.
Je pense, monsieur le président, que ses paroles étaient particulièrement désobligeantes.
Madame Gregoire, je ne vous ai pas entendue réagir quand un membre du Gouvernement s'est permis de m'interpeller en faisant allusion au manque de pensée de ma part.
Je suis parlementaire et je réponds au ministre ! Nous voterons pour l'amendement car contrairement à vous, monsieur le ministre, nous ne faisons pas preuve de mesquinerie…
Protestations sur les bancs du groupe LaREM
… et nous sommes fiers du travail que nous avons mené pour le faire accepter.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 61
Nombre de suffrages exprimés 58
Majorité absolue 30
Pour l'adoption 53
Contre 5
La parole est à M. Jean-Paul Mattei, pour soutenir l'amendement no 2189 .
Peut-être M. Coquerel rebondira-t-il sur ma présentation. Le présent amendement, que nous avons évoqué ce matin, porte sur l'exit tax : il vise à supprimer le dégrèvement fiscal en cas de départ à l'étranger. Je rappelle le contexte. L'année dernière, on avait modifié la réglementation sur l'exit tax. Désormais, une personne qui crée une entreprise en France puis décide, pour des raisons personnelles, de quitter le territoire français, bénéficie d'un régime de sursis d'imposition sur ses plus-values. En cas de cession de son entreprise, après plusieurs années à l'étranger, elle peut bénéficier d'un dégrèvement. On peut s'étonner du régime de faveur que cela représente : je ne vois pas pourquoi cette personne devrait être traitée différemment que quelqu'un qui reste en France et qui, s'il vend son entreprise, paiera la flat tax. L'amendement vise à modifier cette disposition.
L'amendement no 2189 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 3, amendé, est adopté.
La parole est à M. Jean-Paul Mattei, pour soutenir l'amendement no 2250 .
Il propose une modification en matière de droit de transmission. Amendement d'appel, il invite à réfléchir sur la suppression des successions au quatrième degré. J'ai bien conscience que la mesure exige de modifier d'autres règles, notamment du code civil, mais l'idée serait qu'à partir du quatrième degré, sauf testament, ce soit l'État et non des cousins très éloignés qui hérite du patrimoine. Dans l'état actuel des choses, au-delà du quatrième degré, les successions sont taxées à 60 % et s'avèrent très compliquées à régler. Si, en l'absence de testament le patrimoine allait à l'État, cela représenterait des recettes non négligeables et éviterait des états d'indivision souvent néfastes pour les collectivités.
Je demande également le retrait. Premièrement, la succession s'effectue jusqu'au sixième degré ; si l'on adoptait votre amendement, il y aurait donc une incohérence entre les codes. Deuxièmement, le sujet ne devrait pas être évoqué dans la loi de finances, mais dans un texte relatif au code civil. Le rapporteur général a donc raison de vous suggérer de retirer l'amendement ; la légistique impose d'introduire une telle disposition dans le cadre d'un autre véhicule législatif. À défaut de retrait, j'émettrai un avis défavorable.
Je vais retirer l'amendement, mais nous devrions mener une réflexion sur la fiscalité de la transmission, notamment par degrés. Je voudrais, monsieur le ministre, qu'on y travaille avec vos services.
L'amendement no 2250 est retiré.
Il vise à taxer réellement les propriétaires de grands navires de plaisance ou de sport. Nous proposons en effet de revoir à la hausse la taxe qui avait été introduite dans le projet de loi de finances pour 2018. Préparée à la va-vite, elle ne servait qu'à contrer le qualificatif de « président des riches » dont commençait à être affublé Emmanuel Macron. Son rendement avait alors été largement surévalué pour faire croire à son efficacité, bien que les 10 millions annoncés paraissaient déjà bien dérisoires en comparaison des 3,2 milliards perdus avec la suppression de l'ISF. Surtout, une fois la taxe appliquée, son rendement s'est avéré carrément ridicule, confirmant que la mesure n'avait d'autre but que de faire croire que notre pays allait continuer à taxer les riches.
Alors de deux choses l'une. Soit il s'agissait d'amateurisme de la part du Gouvernement : mauvais chiffrage initial, mauvaise application, incapacité de justifier des erreurs manifestes dans la collecte et de lutter contre la fraude – certes, c'était le premier budget du mandat, mais quand on prétend vouloir tout changer du jour au lendemain, il faut être plus préparé. Soit la mesure relevait d'un pur effet de communication. Comme nous sommes bienveillants, nous vous proposons, par le présent amendement, de réparer ces erreurs et de remettre le sujet sur la table. Multiplier le rendement de la taxe par dix permettrait d'engranger des recettes supplémentaires, mais nous voulons surtout, par ce biais, dénoncer une supercherie : pour réellement taxer les yachts, il suffirait de les réintégrer dans le barème de l'ISF. Nous espérons que vous finirez par revenir sur la suppression inique de cet impôt ; en attendant, on pourrait commencer par adopter l'amendement.
Sur l'amendement suivant, le no 2328, je suis saisi par le groupe La France insoumise d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement no 504 ?
Tout le monde n'est pas de mauvaise foi, madame Obono. Puisque je suis à l'origine de la mesure que vous incriminez, je ne subirai pas plus de procès en mauvaise foi que je n'en ferai à d'autres – ce n'est pas mon habitude et vous le savez.
Cette taxe se heurte à une difficulté de recouvrement. C'est pourquoi j'ai diligenté une enquête sur pièces et sur place. J'en ai déjà donné les premières conclusions devant la commission des finances. J'ai reçu récemment – il y a vingt-quatre heures pour être précis – des documents complémentaires, afin que nous puissions continuer à investiguer.
Le problème n'est pas lié au montant de la taxe mais, je le répète, à son recouvrement. Ce dernier n'est en effet pas effectué. Je vous dirai enfin en toute transparence devant la commission des finances les conclusions définitives de l'enquête. L'avis est défavorable.
Je rappelle que cette taxe dite « sur les yachts » n'est pas le fait du Gouvernement mais une idée, à l'origine, du rapporteur général.
Une taxe concerne les voitures de luxe – de mémoire, elle a produit une recette de 30 millions d'euros et elle n'est pas contestée – et une autre les yachts. Le rapporteur général utilise les pouvoirs d'enquête dont il dispose et il en rendra compte aux députés. Ce que je peux vous dire, c'est que sept bateaux ont été concernés. Il faudrait peut-être changer les dispositions législatives pour aider l'administration à faire exactement ce que souhaite le législateur. Certains possèdent un bateau de ce type – c'est même fréquent – et d'autres en louent. Sur les sept navires concernés, cinq ont intenté des recours et ont échappé à l'impôt. Seuls deux, par conséquent, en effet, se sont acquittés de cette taxe. Si je résume, il y a donc un problème lié au modèle économique et un problème lié au fait que peu de bateaux sont concernés. En outre, il faut prendre en considération le fait que des bateaux ont pu changer de pavillon, certains propriétaires désirant profiter, pour leur yacht, d'une essence moins chère, notamment en Italie.
Pour ce qui est des voitures de luxe de plus de 36 chevaux, soumises à une taxe de 8 000 euros, le produit a été de 30 millions d'euros – l'impôt, donc, qui a montré son efficacité.
L'avis est défavorable.
Je tiens avant tout à vous rassurer, monsieur le rapporteur général : je ne doute pas de sa bonne foi ni du travail effectué. Je rappelle d'ailleurs que, d'après votre propre rapport, la taxe sur les voitures de luxe a elle aussi rapporté beaucoup moins que prévu, et le constater ne revient pas à remettre en cause vos efforts. Or il me semble que notre amendement contribuerait à améliorer le dispositif en vigueur en attendant qu'on puisse taxer plus de sept yachts – nombre ridicule comparé à celui de propriétaires de navires de ce type en France. La majorité parlementaire, en adoptant ce dispositif, a exécuté une commande du Gouvernement et ce n'est pas faire injure au rapporteur général que de le rappeler. Le but était d'étouffer un feu nourri puisque la mobilisation qui a suivi a porté sur la justice fiscale, enjeu toujours d'actualité.
Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
Madame Gregoire, voulez-vous que je recommence pour chaque amendement ? Je peux le faire. Si vous permettez que je finisse de répondre comme c'est de droit…
Mêmes mouvements
Mais calmez-vous, chers collègues : je serai de toute façon interrompue dans une minute !
Madame Obono, il est vrai que vous n'avez pas épuisé votre temps de parole, mais il est tellement plus agréable de ne pas se disputer.
Vous n'êtes pas obligée d'utiliser le temps qui vous est imparti pour interpeller vos collègues.
J'étais en train de répondre très gentiment au rapporteur général et au ministre.
Voilà, j'ai fait valoir nos arguments et je rassure mes camarades : j'interviendrai aussi longtemps que je serai présente. Pendant…
M. le président coupe le micro de Mme Danièle Obono.
Je ne voudrais m'attirer l'agressivité de personne.
Sourires sur les bancs du groupe LaREM.
Si je vous rétorque que vous vous êtes trompée, madame Obono, ce n'est pas agressif. Vous avancez que les résultats obtenus ne sont pas conformes aux évaluations ; mais le Gouvernement n'a jamais fait d'évaluation, ni sur la taxe sur les yachts ni sur celle sur les voitures de luxe.
Non, madame Obono, pardonnez-moi d'insister : il n'y a pas eu d'évaluation, d'autant que le dispositif est le fruit d'amendements parlementaires. C'est le rapporteur général qui les a défendus en 2017, quand nous avons pris soin de supprimer l'impôt de solidarité sur la fortune et de le remplacer par l'impôt sur la fortune immobilière. Les députés du groupe majoritaire, alors présidé par Richard Ferrand, souhaitaient en effet instaurer des taxes sur des signes extérieurs de richesse. Le Gouvernement les a soutenus. Reste, je le répète, qu'il n'y a pas eu d'évaluation : prenez tous les documents budgétaires, toutes mes déclarations, celles du ministre de l'économie et des finances, et vous ne trouverez rien de tel. Nous allons néanmoins aider le Parlement à atteindre le but pour lequel il a voté ces taxes, qui mériteraient en effet d'être affinées – notamment celle sur les yachts – et bien appliquées.
L'amendement no 504 n'est pas adopté.
Il est également cosigné par M. Mattei et aussi issu de notre rapport d'information sur l'impôt universel.
Je vous ai entendu, monsieur le ministre, donner un avis favorable à l'amendement que nous avons présenté de concert avec M. Mattei. Vous avez alors évoqué votre volonté de « lutter contre l'optimisation fiscale agressive ». Eh bien, le présent amendement devrait vous y aider. Dans notre rapport, M. Mattei et moi-même avons conclu pour x raisons qu'on ne pouvait étendre l'impôt universel tous azimuts. Nous en avons en revanche retenu le principe, de façon pragmatique, dès lors qu'il nous semblait utile pour lutter contre l'évasion fiscale.
Tout d'abord, le dispositif que nous proposons ne concerne pas seulement l'impôt sur le revenu mais également le capital et le patrimoine, car on se rend compte que certains pays pratiquent une politique de dumping en la matière. Ensuite, je qualifierais le mécanisme en question d'« impôt universel ciblé ». Pourquoi « ciblé » ? Parce qu'il vise les pays dont les taux d'imposition sont 50 % inférieurs à celui de la France, ce qui nous permettrait de réviser moins de conventions bilatérales que si l'impôt universel n'était pas ciblé. Enfin, il est prévu pour une durée de dix ans.
Je tiens à rassurer ceux qui seraient inquiets de la conformité du dispositif avec les traités européens : d'autres pays européens, en effet, ont déjà instauré un tel impôt. C'est le cas de l'Allemagne – sur dix ans – , de la Finlande ou de la Suède. Pendant une durée limitée, y sont assujettis les ressortissants de ces pays qui partent à l'étranger et qui ont résidé au moins trois ans dans leur pays d'origine.
Cet impôt serait facile à mettre en place et permettrait, sinon de prévenir leur départ, du moins d'aller chercher ceux de nos concitoyens qui s'exilent pour des raisons fiscales – et ils sont très minoritaires, je tiens à le souligner. J'ai rappelé aux représentants des Français de l'étranger qui m'ont reçu récemment que cela ne concernait qu'environ 7 % d'entre eux ; il s'agit donc d'une petite minorité mais qui coûte cher à la France – plusieurs milliards d'euros par an.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Cette discussion n'est pas sans intérêt d'un point de vue intellectuel puisque vous inventez ce qu'on pourrait appeler un « droit du sang fiscal », à rebours de la logique territoriale que nous défendons.
De plus, je l'ai déjà dit en commission, vous n'encadrez pas assez le dispositif. Ainsi, vous ne précisez pas depuis combien de temps il faut être Français : faut-il avoir obtenu la nationalité depuis dix ans ou bien suffit-il d'être naturalisé depuis peu ? Vous n'êtes pas non plus suffisamment précis sur l'entrée en vigueur de votre mécanisme qui aurait un effet rétroactif, ce qui poserait un énorme problème.
Vous faites référence à l'Allemagne mais son dispositif est encadré. Un seuil minimal de revenus de source allemande est prévu ; autrement dit, on demande un lien avec le pays d'origine. Et il faut que les personnes concernées aient principalement leur centre d'intérêt économique en Allemagne.
De surcroît, on ne peut traiter une telle question par le biais d'un simple amendement ; une réforme complète du système fiscal en vigueur serait nécessaire.
Pour ces raisons, je vous demande de retirer votre amendement, faute de quoi j'émettrai un avis défavorable.
Monsieur Giraud, je vous ai connu meilleur que cela : il est un peu provocateur que de parler de droit du sang ; je vous rappelle que la nationalité française, fort heureusement, contrairement à ce que voudraient certains, n'est pas encore fondée sur le droit du sang. Je ne vois donc pas ce qu'une telle considération vient faire ici.
Ensuite, j'entends bien vos remarques, que vous aviez déjà formulées en commission. Néanmoins, on aurait pu imaginer que vous déposiez un sous-amendement, car j'ai cru comprendre que vous n'étiez pas opposé au principe, puisque vous citez vous-même le cas de l'Allemagne sans ajouter qu'un tel dispositif poserait problème en soi. Il aurait donc dû être possible de sous-amender notre amendement en fonction de vos conseils. Voilà du reste à quoi devrait servir le débat parlementaire puisque vos objections sont, en fin de compte, de détail.
Encore une fois, notre amendement est assez précis : il concerne bien les personnes qui ont résidé au moins trois ans en France durant les dix années ayant précédé leur changement de résidence fiscale – le bornage est donc tout de même assez simple. Si vous avez d'autres méthodes pour aller chercher les gens qui partent à l'étranger parce que la fiscalité sur le patrimoine et sur les successions est plus avantageuse qu'en France, soit, mais je trouve que celle que nous proposons est la moins agressive et comporte même une dimension préventive – un peu, d'ailleurs, comme l'exit tax. Vos arguments ne me semblent donc pas bons.
Je le répète, chers collègues, complétons les amendements qu'on estime devoir être adoptés, moyennant quelques modifications ; voilà qui changera la vie parlementaire.
Même si je vous ai bien écouté, monsieur Coquerel, j'entends alerter nos collègues sur l'impôt universel. J'ai bien noté toutes les nuances et les précautions dont vous assortissez votre proposition, que je considère comme réfléchie et intelligemment conçue. Cela dit, l'idée de payer son impôt en fonction de sa nationalité, quel que soit son lieu de résidence, est prévue par le fisc américain et crée des situations vraiment très préjudiciables pour les franco-américains qu'on appelle les « Américains accidentels ». Ces derniers sont en effet persécutés, pourchassés par l'IRS – Internal Revenue Service – pour qu'ils rendent au fisc américain ce qu'ils ne doivent pas puisqu'ils n'ont jamais vécu aux États-Unis et qu'ils n'y ont donc jamais bénéficié des services publics.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 57
Nombre de suffrages exprimés 56
Majorité absolue 29
Pour l'adoption 9
Contre 47
L'amendement no 2328 n'est pas adopté.
Je défendrai en effet en même temps l'amendement no 2389 de Mme Tuffnell et l'amendement no 2369 de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire. Nous abordons ici un sujet qui me tient particulièrement à coeur, comme c'est le cas de tous nos collègues : notre capacité à faire face au changement climatique et à préserver la biodiversité à l'aide d'un outil assez méconnu, l'obligation réelle environnementale, outil qu'il s'agit ici de développer.
L'obligation réelle environnementale est un contrat qui permet la mise en place sur un bien immeuble, pour une durée de quatre-vingt-dix-neuf ans au plus, des modalités de gestion écologique. Celles-ci sont des charges réelles et s'attachent au bien en cas de vente ou de donation. Ces obligations sont prévues par la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, promulguée en 2016 – vous comprendrez donc que j'y sois attachée. Je salue au passage le travail réalisé par notre collègue Frédérique Tuffnell, qui s'est fortement investie sur la question et qui regrette beaucoup de ne pouvoir être parmi nous pour défendre son amendement.
En gros, ces deux amendements visent à créer un contexte fiscal favorable à la préservation et à la restauration des espaces non bâtis faisant l'objet d'une obligation réelle environnementale – ou ORE – , comme le préconise la feuille de route issue des assises de l'eau – je fais référence à l'action 10. c.
Ils visent à aligner la fiscalité des immeubles non bâtis concernés par une obligation réelle environnementale, sur celle des forêts en ce qui concerne les droits de mutation à titre gratuit, et à rendre déductibles les dépenses résultant de travaux de restauration et de gros entretien découlant de ces obligations.
L'amendement no 2389 , qui est le plus ambitieux des deux, propose, en plus, lorsque l'obligation est en place depuis plus de quinze ans, de récompenser la bonne gestion écologique du bien par une exonération totale des droits de mutation à titre gratuit.
J'ajoute que les implications budgétaires de ces amendements seront vraiment très faibles. En effet, aujourd'hui, seulement six ORE ont été signées en dehors d'une démarche de compensation. Notre idée est vraiment de lancer ce dispositif, bel outil pour la préservation et la reconquête de la biodiversité.
Je l'ai déjà dit s'agissant d'un amendement rigoureusement comparable : nous avons affaire à des amendements qui peuvent être déposés en seconde partie du projet de loi de finances ; en première partie, je crains un effet d'aubaine. Je veux bien que l'on dépose en première partie des amendements dont nous avons dit qu'ils devaient être examinés en première partie, mais mon avis demeure défavorable, ce que je répéterai en seconde partie. Une fois aurait suffi ; nous aurions tous gagné du temps.
L'amendement no 2389 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 2369 est retiré.
Je défends en effet ces amendements car Mme Tuffnell y tenait beaucoup et je respecte infiniment le travail de mes collègues.
L'amendement no 2371 vise à limiter l'étalement urbain et l'artificialisation des espaces naturels, agricoles et forestiers, en invitant à l'acquisition et à la dépollution de friches polluées, afin que ces espaces soient aménagés en priorité. Je rappelle que l'ADEME – l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie – évalue entre 100 000 et 150 00 hectares la surface des friches polluées en France.
Cette proposition a été travaillée avec les entreprises de la dépollution. Elle vise à stimuler l'acquisition de friches polluées, grâce à une exonération de droits d'enregistrement ou de taxe de publicité foncière pour les acquéreurs de ces sites. Un tel dispositif serait bien sûr subordonné à l'engagement de l'acquéreur de confier à une société certifiée ou à un équivalent, la réalisation des diagnostics de pollution et les travaux de dépollution qui en découlent, dans un délai de deux années consécutives à l'achat.
Puis-je défendre dans la foulée le sous-amendement no 3040 ?
Il vise à permettre aux départements de conserver un pouvoir de décision s'agissant de l'exonération de la taxe de publicité foncière ou de droits d'enregistrement sur des acquisitions d'immeubles situés sur des sites pollués en friche.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement et le sous-amendement ?
Le sous-amendement relève de la seconde partie du PLF, ce qui n'est pas le cas de l'amendement lui-même. Toutefois, ce dernier propose de mettre en place une dépense fiscale qui n'est pas évaluée alors que l'exonération envisagée est large. Il me semblerait judicieux de réfléchir à un taux réduit plutôt qu'à une exonération totale. L'avis est défavorable.
Le sous-amendement no 3040 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 2371 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement no 257 .
Nicolas Forissier, premier signataire de l'amendement, est particulièrement attaché à la question de la transmission des entreprises. Il est important de prendre des mesures qui la favorisent. L'amendement vise à instaurer un taux unique pour les droits d'enregistrement s'appliquant aux cessions de parts sociales et aux cessions des actions. Je pense que ce dispositif aura un effet favorable sur les cessions d'entreprises.
L'amendement no 257 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Noël Barrot, pour soutenir l'amendement no 2638 .
Cet amendement, dont nous avons pu discuter en commission, vise à revenir à la marge, pour le futur, sur un avantage fiscal dont bénéficient les contrats d'assurance vie. Les contrats déjà ouverts bénéficient d'un abattement de droits de succession de 150 000 euros pour les versements réalisés avant soixante-dix ans, âge après lequel il est limité à 35 000 euros. Nous souhaitons abaisser de soixante-dix à soixante ans l'âge en deçà duquel l'abattement est fixé à 150 000 euros, avec l'objectif de faire circuler plus rapidement le capital dans l'économie.
Je vois que M. Barrot veut me faire vieillir en abaissant le seuil de soixante-dix à soixante ans.
Sourires.
Au-delà de ma personne, qui n'a guère d'importance, une telle modification déstabiliserait le régime de l'assurance vie, alors qu'on a trouvé un équilibre en la matière.
L'amendement no 2638 , repoussé par le Gouvernement, est retiré.
La parole est à M. Sébastien Huyghe, pour soutenir l'amendement no 1718 .
Il est relatif à la dernière dépense que chacun d'entre nous fera : celle des frais funéraires. Le montant déductible de l'actif successoral n'a pas été revalorisé depuis 2003, c'est-à-dire depuis dix-sept ans – cela remonte à la loi de finances pour 2003, la première à l'examen de laquelle j'ai participé, ce qui ne me rajeunit pas… Sachant que le coût moyen des frais funéraires atteint désormais 3 350 euros hors concession et hors marbrerie, il serait de bon aloi que nous puissions porter le montant déductible de 1 500 à 3 000 euros.
Avant l'examen du projet de loi en deuxième lecture, ne pourrions-nous pas examiner cela ? Si vous ne voulez pas aller jusqu'à 3 000 euros, nous pourrions nous entendre sur un montant intermédiaire, de l'ordre de 2 000 à 2 500 euros. Les frais d'obsèques sont très lourds pour les familles ; il serait bon de leur permettre de déduire une partie de ces sommes de l'actif de la succession.
L'amendement no 1718 n'est pas adopté.
Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 36 , 2030 , 7 , 1152 , 1059 , 1745 et 2646 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 7 et 1152 sont identiques.
L'amendement no 36 de Mme Valérie Bazin-Malgras est défendu.
La parole est à M. Éric Woerth, pour soutenir l'amendement no 2030 .
Monsieur Darmanin, vous êtes sensible aux questions de donations, et vous avez dit à plusieurs reprises qu'il fallait que l'argent circule : nous avions envie de vous donner satisfaction. Puisqu'on vit plus longtemps, il faut transmettre son patrimoine plus vite, plus tôt, pour que l'argent soit investi, car arrivé à un certain âge, on investit moins.
L'amendement rétablit la situation qui prévalait en matière de donations avant le quinquennat de M. François Hollande. Il porte d'abord de 100 000 à 150 000 euros le montant de l'abattement personnel en ligne direct en cas de succession ou de donation. Il réduit ensuite de quinze à dix ans le délai au-delà duquel il n'est plus tenu compte tenu compte de donations passées pour la liquidation des droits de mutation à titre gratuit. Il rétablit enfin l'indexation des tranches du barème des droits de mutation à titre gratuit. C'est efficace, c'est simple et c'est lisible. J'espère que nous aurons votre approbation.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l'amendement no 7 .
Marc Le Fur, qui en est le premier signataire, s'inscrit dans la même logique, mais avec une ambition supplémentaire : il propose, d'une part, que le montant de l'abattement soit fixé à 160 000 euros, soit 100 000 euros supplémentaires, et, d'autre part, que le délai de quinze ans, qui semble trop long pour faire tourner le capital, soit ramené à dix ans.
Il convient de revenir à un dispositif qui a fait ses preuves entre 2007 et 2012. Grâce à mon amendement, il serait possible de transmettre 160 000 euros tous les dix ans à chacun de ses enfants.
Au-delà de l'amendement, je rejoins le président de la commission des finances, Éric Woerth, qui souhaite que nous entamions une véritable réflexion sur la transmission des petits et moyens patrimoines, souvent le fruit des économies de toute une vie, qui sont déjà lourdement taxées à chaque étape de leur constitution. Avec l'augmentation de l'espérance de vie, la transmission du patrimoine se fait désormais de plus en plus tard – elle saute même parfois une génération. Tout cela a des répercussions bien réelles sur le pouvoir d'achat et le parcours de vie de nos concitoyens. Mon amendement vise à apporter des solutions concrètes en la matière.
La parole est à M. Pierre-Henri Dumont, pour soutenir l'amendement no 1059 .
Dans la même veine que les précédents, il vise à ramener le délai entre chaque donation à dix ans et à porter le montant de l'abattement à 150 000 euros. D'une part, on entre de plus en plus tard dans la vie active et il faut que l'argent circule ; d'autre part, la jeune génération n'est plus en mesure d'acheter un bien immobilier, à cause de la hausse des prix, en particulier dans certaines régions de France. La difficulté que rencontrent certains jeunes couples d'actifs pour obtenir un prêt bancaire attractif afin de s'installer et de construire une vie de famille rend nécessaire de mettre en place un double système de seuil de délai et de montant plus favorable.
Je suis sûr que cela vous rappelle à votre passé, monsieur le ministre : à l'époque où vous siégiez sur nos bancs, d'où vous avez certainement dû combattre les modifications apportées à ces seuils par le gouvernement socialiste.
Sur un plan philosophique, nous pensons que la solidarité est nécessaire. C'est d'abord vrai à l'intérieur de la famille quand c'est possible. Parce que nous considérons qu'il est responsable de favoriser la solidarité intergénérationnelle, nous vous proposerons des amendements assez simples pour rendre possibles les flux d'argent et l'aide au sein de la famille.
Le premier d'entre eux vise à ramener le délai de quinze à douze ans et de porter l'abattement de 100 000 à 120 000 euros. La raison est toute simple : en 1983, on héritait de ses parents à l'âge de 44 ou 45 ans ; de nos jours, on hérite en moyenne à environ cinquante ans ; en 2035, on héritera vers cinquante-cinq ans. On vit plus longtemps, c'est très bien, mais nous devons permettre à l'argent de circuler afin que la famille, premier socle de la société, fasse vivre la solidarité.
Il y a une question que personne ne se pose s'agissant de tous ces amendements : combien coûtent-ils ? Certains coûtent plusieurs milliards d'euros, et le moins onéreux, celui que vient de soutenir Mme El Haïry, coûterait plusieurs centaines de millions.
Dans un pays où l'on ne veut pas que la dette s'accroisse, on a un solde à tenir ! Je suis défavorable à tous les amendements.
Vous ne tenez pas compte du fait que l'augmentation de la circulation du capital générerait de la richesse !
Monsieur le président Woerth a raison de faire observer qu'il s'agit d'une proposition que nous faisons de concert. Je l'ai portée dans l'opposition et je la porte maintenant dans la majorité : je l'ai présenté au Premier ministre et au Président de la République.
Il est certain que, à titre personnel, je suis très attaché à favoriser le capital jusqu'à un certain niveau. Il ne faut pas qu'il y ait un trop fort effet d'aubaine, mais le bon niveau correspond sans doute à ce qui a été retenu sous la présidence de Nicolas Sarkozy, avant d'être corrigé par le Président François Hollande – nous pourrions en discuter. En tout cas, il faut favoriser la mobilité du capital parce qu'on hérite dorénavant assez tardivement, à plus de cinquante ans. Je suis sensible, en revanche, à l'idée que le capital puisse se transmettre facilement de génération en génération. Cependant – c'est peut-être une différence entre nous – , je suis assez défavorable à un allégement de la fiscalité sur les successions. Une donation de son vivant et une succession, ce n'est pas tout à fait la même chose.
En tout état de cause, il s'agit d'un débat important car il soulève la question de la reproduction des inégalités, qui doit être discutée. Je me range cependant à l'argument très fort du rapporteur général : comme j'ai eu l'occasion de le dire, notamment lors de mes interventions médiatiques, j'approuve ces mesures, qui doivent être massives pour être pérennes et utiles.
Le Président de la République a choisi cette année d'abaisser de 5 milliards l'impôt sur le revenu, de poursuivre la défiscalisation des heures supplémentaires et d'octroyer de nouvelles primes. Sans doute le prochain projet de loi de finances prévoira-t-il un allégement de la fiscalité des donations ; tel est en tout cas mon souhait personnel, qui n'engage pas le Gouvernement.
Mon avis est donc défavorable sur ces amendements, qui ne sont pas financés. Je m'en étonne d'ailleurs, car leurs auteurs sont connus pour leur attachement à la famille. Or quand on aime la famille, on veut lui léguer une dette la plus réduite possible. Madame El Haïry, il me semblait que votre famille politique avait également cette préoccupation.
Dans la droite ligne des propos de M. le ministre, j'aimerais dire que je suis également étonnée par cette proposition qui vise à faciliter les donations.
Nous sommes encore sous le barème Hollande.
Nous sommes passés de 9,1 milliards d'euros en 2012 à 14,4 milliards en 2019. Le retour au barème Sarkozy représenterait donc 5 milliards de manque à gagner pour les caisses de l'État. Pour ceux qui sont sensibles à la nécessité de limiter la dépense publique, cet amendement, qui se traduirait par un trou de 5 milliards, est significatif.
De nombreux amendements portent sur la fiscalité des successions, mais je ne prendrai la parole qu'une seule fois, pour rappeler la promesse du candidat Emmanuel Macron en avril 2016. Je le cite : « Si on a une préférence pour le risque face à la rente, ce qui est mon cas, il faut préférer la taxation sur la succession aux impôts de type ISF. » Il a tenu une partie de sa promesse, puisqu'il a supprimé l'ISF, mais nous attendons toujours que le Gouvernement s'attaque à la rente.
Reste que l'on ne peut pas, selon moi, toucher à l'imposition des successions, qu'il s'agisse des donations ou des successions à la suite d'un décès, avec des amendements sur un projet de loi de finances. La réforme de la fiscalité des successions mérite mieux que cela, et à tout le moins un débat qui lui soit entièrement dédié.
Je suis personnellement favorable à cette réforme, tout simplement parce que les chiffres dont nous disposons, publiés récemment par plusieurs instituts, montrent que si nous ne faisons rien, ce sera le retour d'une société d'héritiers. La part du patrimoine hérité dans le patrimoine total était en effet tombée de 80 % en 1910 à 30 % en 1970. Or savez-vous, mes chers collègues, à quel taux elle s'établit aujourd'hui ? À 60 % ! Il y a donc de bonnes raisons, en effet, si l'on préfère le risque à la rente, de légiférer sur les droits de succession. Mais légiférons de manière sérieuse, en examinant un texte exclusivement sur cette question.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Monsieur le ministre, la sempiternelle réponse qui nous est donnée par le Gouvernement est que la mesure n'est pas financée et qu'elle coûte 5 milliards, 4 milliards, 3 milliards… Mais nous ne vous disons pas autre chose sur la taxe d'habitation ou sur l'impôt sur le revenu.
Ces baisses ne sont pas davantage financées. Vous auriez pu faire d'autres choix, par exemple annuler le troisième tiers de la taxe d'habitation. Vous auriez pu vous dire aussi que les donations jouent un rôle important dans une société et qu'il est justifié de réduire les délais entre deux donations, pour éviter que l'argent ne dorme, notamment sur des comptes d'assurance vie, et le réinjecter dans la vie réelle, dans la vie quotidienne, dans la consommation et l'investissement.
Une telle décision aurait eu du sens. Vous auriez donc pu tout aussi bien la prendre. Mais arrêtez de nous dire que nous dépensons l'argent que nous n'avons pas. Même si, bien sûr, vous vous inscrivez dans une continuité, c'est vous qui dépensez l'argent que vous n'avez pas ! Les déficits, aujourd'hui, c'est vous !
Exclamations et rires sur les bancs du groupe LaREM. – Approbations sur les bancs du groupe LR.
Ce n'est pas l'opposition ! Oui, mes chers collègues, il faut assumer. Soit vous êtes dans la majorité, et vous assumez ; soit vous êtes dans l'opposition, et c'est une autre histoire.
Nouvelles exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
J'ai beaucoup de respect et d'estime pour le président Woerth.
Je lui ferai néanmoins observer que, quand je suis né, nous étions déjà en déficit.
Depuis quarante ans – avant même la naissance du Président de la République, si vous me permettez d'être encore plus impoli et insolent – , ceux qui ont réduit les impôts l'ont fait sur le dos du déficit de l'État.
Alors ne présentez pas des amendements qui aggravent la situation.
Si nous faisions le compte des mesures que vous avez proposées depuis le début de la discussion du PLF – j'avais l'habitude d'en faire de même sur des PLF passés, mais je m'assagis avec l'âge, comme les bons bordeaux – , nous serions déjà à 20 milliards d'euros de dépenses supplémentaires, entre les 6 milliards d'euros liés à la suppression de la CSG déductible et non déductible, les anciens combattants, la demi-part des veuves et maintenant les droits de mutation, toutes mesures conduiraient à creuser beaucoup trop le déficit !
Je ne dis évidemment pas au président Woerth qu'il est responsable de tous les déficits, mais que la majorité a choisi de supprimer certains impôts, dont la taxe d'habitation, plutôt que d'autres, ce qui fait sans doute la différence entre nous.
Je constate d'ailleurs que vous n'avez pas voté comme votre groupe, monsieur le président de la commission des finances, et M. de Courson non plus : ni vous ni lui n'avez soutenu hier la baisse de l'impôt sur le revenu pour les Français. Cette cohérence vous confère une certaine autorité pour proposer de nouvelles baisses d'impôts. D'autres, en revanche, ont voté la baisse de l'impôt sur le revenu comme un seul homme et ils nous reprochent aujourd'hui de refuser d'autres baisses…
Choisissez votre camp, camarades, comme on dit de l'autre côté de l'hémicycle !
Sourires. – Mme Olivia Gregoire applaudit.
Vous avez rappelé, monsieur le ministre, que ma famille politique est particulièrement engagée sur la question du déficit de l'État. Les amendements que nous proposons, permettez-moi de le souligner, ne touchent absolument pas à la succession et sont très équilibrés, qu'il s'agisse de la durée ou du plafond – celui-ci est augmenté, mais faiblement.
Par ailleurs, nous avons également proposé des recettes.
Il y avait aussi des dépenses !
Nous avons proposé hier la non-indexation des plus hautes tranches du barème de l'impôt sur le revenu. Nous ne sommes donc pas dans la facilité : nous traitons aussi bien des dépenses que des recettes. Nous défendons des priorités et la question du déficit en fait partie.
Monsieur le ministre, vous avez fait le décompte du coût en milliards d'euros des mesures que nous proposons. Celle sur les donations représenterait, il est vrai, 5 milliards d'euros pour les finances publiques. Mais la réalité, c'est que cet argent dort en grande partie sur des comptes et ne travaille pas. S'il était transmis plus simplement, il pourrait être réinvesti dans l'économie réelle.
Il faut augmenter la CSG alors !
Quand on favorise la solidarité intergénérationnelle, quand, pour reprendre mon exemple de tout à l'heure, on facilite l'accès à la propriété des jeunes couples, quand un jeune qui entre dans la vie active finance ses premiers achats, c'est de l'argent qui entre dans l'économie, qui va faire des petits et entraîner des recettes fiscales supplémentaires ! Je ne crois pas que vous l'ayez pris en compte dans le chiffre de 5 milliards.
J'aimerais répondre, en outre, à l'argument de nos collègues socialistes. Nous parlons de 50 000 euros sur dix ans, et donc de la classe moyenne, pas de la classe aisée. Cette mesure toucherait directement la classe moyenne. Elle est simple, lisible et ne favoriserait pas les rentiers, qui d'ailleurs n'en auraient pas besoin, pardonnez-moi de le dire !
Enfin, monsieur le ministre, vous parlez régulièrement des propositions de dépenses supplémentaires formulées par les députés du groupe Les Républicains. Ayez l'honnêteté intellectuelle, puisque vous êtes assis à côté du président Woerth, de dire aussi que nous avons proposé, il y a quelques mois, un plan d'économie annuel de 20 milliards d'euros.
La réalité, c'est que la politique économique et fiscale que nous proposons diffère de celle que vous menez. Certaines de nos propositions engendreront certes des coûts supplémentaires pour les finances publiques, mais d'autres permettront surtout de diminuer la dépense publique, ce que vous ne faites pas pour votre part puisque vous financez vos baisses d'impôts par l'endettement.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.
Quel est l'intérêt d'hériter à 60, 65 ou 70 ans ? Aucun. À ces âges, votre vie est accomplie.
Si, depuis des années, on a essayé de favoriser la donation par anticipation, c'est parce qu'il vaut mieux aider ses enfants quand ils sont jeunes ; il est absurde d'attendre sa propre mort pour qu'ils héritent.
Monsieur le ministre, ces amendements sont juridiquement gagés, mais il n'est pas nécessaire de les gager puisqu'ils vont susciter des recettes supplémentaires !
Sourires.
C'est avéré, puisque la transmission d'une partie du patrimoine des personnes âgées aide leurs enfants à s'installer dans la vie.
Vous êtes keynésien maintenant !
Il y a donc une dimension sociale à cette mesure, pour des sommes qui ne sont pas énormes. Elle n'est pas destinée au « grand capital », comme disent nos collègues du groupe FI, mais aux classes moyennes, qui ont mis de côté entre 500 000 et 700 000 euros, et qui aident leurs enfants à s'installer dans la vie.
Ce n'est plus sérieux…
Il est inverse au précédent, vous allez le constater…
L'un des plus grands scandales de ces dernières décennies est l'augmentation de la part du patrimoine hérité dans le patrimoine total du pays : elle est passée de 45 % en 1970 à près de 70 %. On peut donc parler sans hésiter d'une noblesse d'argent qui se constitue, se reproduit et continue d'ailleurs de profiter : si l'on en croit l'étude de l'IPP, les 0,01 % les plus riches, détenteurs d'un patrimoine de plus de 33 millions d'euros – montant au-delà duquel nous proposons un taux de 100 % d'impôt sur l'héritage – , sont ceux qui, parmi les très riches, profitent le plus des mesures du Gouvernement. Leur revenu et leur patrimoine continuent de s'accroître. On peut donc penser que leurs héritiers continueront également de voir croître leur capital. C'est insupportable ; c'est sans doute la principale source des inégalités dans notre pays. L'impôt sur l'héritage explique aussi les départs à l'étranger de gens qui fuient leur devoir vis-à-vis de la nation.
Pour ces différentes raisons, nous proposons d'ajouter des tranches à l'actuel barème de l'impôt sur l'héritage, afin de le rendre plus progressif et de faire régresser la rente insupportable de l'argent.
Un taux de 100 % me semble légèrement confiscatoire ! L'avis est défavorable.
Je rassure M. le rapporteur : le taux de 100 % porterait sur la tranche d'héritage supérieure à 33 millions d'euros, ce qui laisse, je crois, de la marge pour vivre et assurer les fins de mois !
Ce ne sera pas pour tout de suite, de toute évidence, mais quand nous arriverons au pouvoir, nous mettrons en oeuvre cette mesure.
Pour le moment, nous vous proposons cet amendement, qui permet de rendre un peu plus progressif l'impôt sur l'héritage, tout comme nous proposons quatorze tranches pour l'impôt sur le revenu, à la place des cinq actuelles. Vous le voyez, ce ne sont que de petits pas. Bref, nous n'en sommes pas encore à la confiscation générale de tous les biens et de toutes les rentes des ultra-ultra-riches ; nous n'y arriverons pas, mais nous essaierons de faire en sorte que les richesses soient un peu plus partagées, notamment celles dont il est question ici. Soyez donc rassuré, monsieur le rapporteur général : vous pouvez approuver notre amendement sans mourir d'apoplexie face à cette confiscation bolchevique !
Sourires.
Sourires
Mêmes mouvements.
Un taux de 120 ou 130 %, voilà ce qu'il faudrait pour exterminer les riches : ce serait beaucoup plus adapté !
Rires et applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et LR.
L'amendement no 1974 n'est pas adopté.
Je suis saisi de quatre amendements, nos 2147 , 790 , 419 et 1155 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 419 et 1155 sont identiques.
L'amendement no 2147 de Mme Laurence Trastour-Isnart est défendu.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement no 790 .
Cet amendement, dont notre collègue Nicolas Forissier a eu l'initiative, tend à modifier les abattements applicables aux successions afin de faciliter celles-ci.
Je profite de l'occasion pour revenir sur les propos que vous avez tenus, à l'instant et hier, monsieur le ministre, au sujet des 5 milliards d'euros de cadeaux que vous auriez faits aux Français par l'intermédiaire de l'impôt sur le revenu. Je vous le répète, nous ne validons pas ce chiffre : vous ne nous avez pas convaincus hier, car vous ne l'avez pas justifié. Or il nous paraît très éloigné de la réalité, puisque vous avez préalablement procédé, par différentes corrections que nous avons détaillées hier après-midi, touchant notamment le prélèvement à la source, à une augmentation d'impôt de 3,7 milliards d'euros entre 2019 et 2020. Oui, oui, monsieur le ministre : les chiffres sont là, dans l'exposé des motifs du projet de loi. La somme n'est donc pas de 5 milliards.
On ne va pas refaire le débat chaque jour… Avançons !
Cosigné par Nicolas Forissier et moi-même, entre autres, il tend à porter l'abattement fiscal applicable aux donations ou successions en ligne directe entre parent et enfant de 100 000 à 159 325 euros, c'est-à-dire de revenir au plafond précédemment en vigueur, un niveau raisonnable compte tenu de l'état de nos finances publiques.
Il nous semble en effet important de favoriser la transmission du vivant du donateur. Le seul qui l'ait fait jusqu'à présent était le président Nicolas Sarkozy. Il serait bon que nous revenions à cette politique car elle permet de réinjecter des deniers publics dans l'économie.
Dans notre amendement précédent, nous proposions de faire varier et le montant et la durée applicables aux abattements en matière de donations. Ici, nous ne modifions que le montant, en le portant à 159 325 euros. Un peu plus loin, à l'amendement no 1158 , c'est la durée que nous proposerons de changer, en la ramenant de quinze à dix ans.
J'insiste à nouveau sur le fait que l'on ne saurait aborder le sujet sous le seul angle de son coût pour les finances publiques : la transmission des patrimoines familiaux de petite taille et de taille moyenne réinjectera dans l'économie de nouveaux investissements et mettra le pied à l'étrier aux nouvelles générations.
Je profite de l'occasion pour interroger M. le ministre.
Si nous voulons travailler sérieusement sur les droits de mutation, il faut que nous ayons accès à des données fiables. Or, aux dernières nouvelles, l'enquête exhaustive qui devait porter sur les transmissions de 2017 serait à l'arrêt. Le confirmez-vous ?
La DGFIP – la direction générale des finances publiques – souhaitait utiliser la base nationale des données patrimoniales, qui retrace l'ensemble des mutations à titre onéreux et gratuit. Néanmoins, si les informations semblent de bonne qualité concernant les mutations à titre onéreux, de gros problèmes se poseraient touchant celles à titre gratuit. La Cour des comptes l'avait d'ailleurs signalé dans son rapport. Comment pourrons-nous faire un travail sérieux si vous-même n'avez pas accès à des données fiables ?
Je voulais vous interroger par écrit à ce sujet, j'avais même commencé un courrier, mais je profite de votre présence pour vous poser directement la question.
Je ne la comprends pas très bien, madame Pires Beaune. Je n'ai connaissance – mais je vais vérifier – d'aucun problème actuel à la direction générale des finances publiques.
En ce qui concerne celui qui s'est posé l'année dernière, qui fait l'objet du rapport de la Cour des comptes cette année, j'ai écrit aux présidents des commissions des finances et aux rapporteurs généraux de chacun des deux assemblées. Il s'agissait d'un problème informatique de compte à la DGFIP qui a bloqué près de 2 milliards d'euros dans les tuyaux. Les droits acquittés auprès des notaires avaient bien été prélevés, mais n'ont pas été intégralement reversés aux collectivités locales, singulièrement aux départements. Nous ne nous en sommes pas aperçus immédiatement, car les droits de mutation ont connu une hausse particulièrement dynamique cette année-là. Dès qu'a été repérée cette erreur – qui n'a pas eu d'incidence sur le budget ni sur les lois de règlement que nous vous avons présentées – , j'ai prévenu la Cour des comptes, ainsi que, comme je vous le disais, les deux rapporteurs généraux et les présidents des deux commissions des finances, mais aussi les départements, que nous allions reverser à ces derniers l'argent que nous leur devions. Nous l'avons fait. Depuis lors, nous avons procédé à un audit et changé de méthode pour que ce type d'erreur ne se reproduise pas à la DGFIP. Nous en avions parlé avec M. le directeur général des finances publiques de l'époque.
Bref, s'il s'agit de ce point-là, tout est réglé ; s'il s'agit d'un autre, je n'en ai pas connaissance, mais je vérifierai.
Il s'agit d'un autre point, monsieur le ministre : de la fameuse enquête sur les données patrimoniales qui devait être remise à jour en 2017 et qui aurait été interrompue faute de fiabilité des informations provenant des DDFIP, les directions départementales des finances publiques.
Je n'ai pas la réponse ; je vous propose de vous l'envoyer par écrit, madame Pires Beaune.
Il s'agit de ramener de quinze à dix ans la durée minimale requise entre les donations pour donner lieu à abattement.
Monsieur le ministre, vous avez invoqué le coût pour les finances publiques, mais disposez-vous d'une évaluation du coût de cette mesure spécifique ?
L'amendement no 2645 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Noël Barrot, pour soutenir l'amendement no 2639 .
La voici, la mesure permettant de financer la facilitation des donations du vivant du donateur : elle consiste à durcir la fiscalité des transmissions au moment du décès s'agissant des très hauts patrimoines. Mais nous avons compris que nous en discuterons sans doute l'année prochaine ; nous allons donc retirer l'amendement.
L'amendement no 2639 est retiré.
Il porte sur la transmission des entreprises – nous en avons brièvement parlé hier soir. Nous proposons d'aligner le coût de la transmission en France sur la moyenne européenne, qui est de 5 %. Il faudra évoluer à ce sujet car la transmission d'entreprise se heurte à de grandes difficultés dans notre pays.
L'amendement no 2644 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Les amendements nos 1621 de M. Damien Abad et 649 de M. Nicolas Forissier, pouvant être soumis à une discussion commune, sont défendus.
La parole est à M. Jean-Noël Barrot, pour soutenir l'amendement no 2640 .
Cet amendement, dont Mme El Haïry a eu l'initiative, tend à faciliter les transmissions des grands-parents aux petits-enfants du vivant des premiers.
Il s'agit à nouveau d'une discussion que nous pourrons avoir l'année prochaine : nous retirons l'amendement.
L'amendement no 2640 est retiré.
L'amendement no 634 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Comment maintenir un capitalisme familial ? Vieille question, dont nous discutons ici depuis une vingtaine d'années. Familial, c'est-à-dire composé de petites et moyennes entreprises qui se transmettent au sein d'une même famille. Si on leur applique le droit commun, nombre d'entre elles sont vendues car on ne trouve pas toujours de repreneur parmi les héritiers.
Pour l'éviter, l'idée ici proposée, également ancienne, est d'exonérer la transmission, dans ce cas, de droits de mutation à titre gratuit, à condition que soit maintenu le caractère familial de l'entreprise pendant au moins quinze ans – une contrepartie d'intérêt public. Le pacte Dutreil allait dans ce sens, mais il s'agit là d'une disposition également applicable aux entreprises personnelles, qu'il s'agisse de petites entreprises artisanales, industrielles ou commerciales, voire agricoles.
Il s'agit bien entendu d'un amendement d'appel ; on va encore nous dire qu'il faut y réfléchir encore, dans un cadre plus large, etc. Vous voyez que je vous prépare votre réponse, monsieur le ministre : on connaît la chanson, comme on disait autrefois ! Cependant le problème de fond demeure, et, à force de ne pas traiter ce type de problèmes, nous assistons à une dégénérescence de notre tissu entrepreneurial.
Même avis – M. de Courson a si bien parlé pour moi !
L'amendement no 653 n'est pas adopté.
Par cet amendement, auquel nous avons travaillé avec la CNAOC, la Confédération nationale des producteurs de vins et eaux de vie de vin à appellation d'origine contrôlée, nous entendons contribuer à l'effort de résilience des exploitations agricoles en soutenant les transmissions familiales face à la hausse du foncier viticole, notamment.
Pour y parvenir, nous proposons d'exonérer d'impôt sur la fortune immobilière les propriétaires qui affectent durablement leurs terres à l'exploitation agricole par un bail à long terme d'au moins dix-huit ans. Le dispositif existe déjà en Allemagne et en Italie.
Il s'agit de maintenir le caractère familial des exploitations agricoles. Je rejoins les excellents propos que vient de tenir Charles de Courson à ce sujet : la transmission pose un problème et les dispositifs existants ne suffisent plus. Voici la question à laquelle nous devons collectivement répondre : souhaitons-nous que, demain, nos plus beaux terroirs – je parle de notre foncier agricole et viticole, de notre terre de France – appartiennent aux Chinois ou à des fonds de pension américains ? Il faudra bien trouver un moyen de nous protéger de l'invasion de capitaux étrangers et de préserver notre patrimoine agricole et viticole.
J'ai compris en commission que plusieurs députés n'étaient pas favorables à la disposition que je défends. Nous attendons donc vos propositions, mes chers collègues !
La parole est à M. Pierre-Henri Dumont, pour soutenir l'amendement no 25 .
Qu'ajouter à un tel réquisitoire ? Il semble cohérent, nécessaire et salutaire pour la transmission de notre patrimoine d'adopter ces amendements et, à défaut, de formuler des propositions allant dans le même sens en vue d'un prochain projet de loi de finances.
La parole est à Mme Émilie Bonnivard, pour soutenir l'amendement no 222 .
Il vise à protéger les exploitations agricoles et viticoles familiales en allégeant la fiscalité des donations et successions lorsque les héritiers s'engagent à ne pas vendre les biens reçus et à continuer de les affecter à l'exploitation familiale pendant une longue durée, en l'occurrence dix-huit ans.
Il s'agit d'une proposition très importante pour les exploitations agricoles et viticoles, déjà défendue excellemment par mes collègues.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement no 510 , ainsi, s'il le veut bien, que le no 511.
D'accord, monsieur le président. Comme mon amendement no 653 , de portée générale, a été repoussé, votez au moins pour l'un de ceux-là.
Quel est le problème ? Dans la viticulture comme dans l'agriculture, on n'arrive plus à transmettre parce que la valeur vénale a tellement augmenté qu'il est impossible aux héritiers de payer les droits de mutation à titre gratuit, d'autant plus que seul un membre de la famille est prêt à reprendre l'exploitation. Alors on vend. Et à qui ?
On vend à ceux qui ont les moyens d'acheter au prix fort. Ainsi, dans le Bordelais, nombre de nos châteaux se sont retrouvés entre les mains des Japonais, de quelques Chinois… Est-ce l'intérêt de notre pays ? Non, bien entendu.
Il faut donc prendre des mesures pour contrebalancer cette situation, en assurant le maintien du caractère familial pendant dix-huit ans, durée des baux à long terme. Sinon, arrêtons au moins de pleurer en se demandant comment se fait-il qu'on nous ait rachetés des vignobles dans le Bordelais, à Cognac ou ailleurs.
Quant au coût de la dépense fiscale, il dépendrait de la réaction des intéressés, mais je peux vous dire ce qu'il passera si on ne fait pas ce que je propose, car je le vois, notamment en Champagne : une partie des acquéreurs sont de faux agriculteurs ; ils font tout faire à façon pour conserver le caractère professionnel du bien, qui ainsi, en plus, est exonéré d'impôt sur la fortune immobilière. Il faut choisir ce qu'on veut.
Il poursuit le même objectif que les précédents : protéger les exploitations agricoles et viticoles familiales. Toutefois, à la différence de mes collègues, je propose une exonération de 75 % des droits de mutation, tout en conservant la limite de 20 millions d'euros de capitaux et l'obligation de maintenir l'exploitation pendant au moins dix-huit ans. Le taux de 75 % permettrait de se rapprocher du dispositif Dutreil, à la suite des échanges que nous avons eus avec le rapporteur général en commission. Il est en effet judicieux de considérer les terres agricoles et viticoles comme un outil de production et donc de leur appliquer le même régime d'exonération que celui prévu par le dispositif Dutreil, même si la durée obligatoire de conservation de l'exploitation serait plus contraignante, puisqu'elle n'est que de quatre ans dans le dispositif Dutreil.
M. Charles de Courson a défendu l'amendement no 511 .
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
Nous en avons longuement débattu en commission, de nombreux arguments ont été échangés, la discussion a été riche. Je me contenterai donc de confirmer mon avis défavorable sur l'ensemble de ces amendements.
La parole est à Mme Brigitte Kuster, pour soutenir l'amendement no 2600 .
L'acquisition et la conservation d'une résidence principale constituent bien souvent, nous le savons, le fruit de toute une vie de travail. Or, malgré l'existence d'abattements – lesquels ont du reste été réduits durant le quinquennat de François Hollande – , il est difficilement acceptable que la transmission d'une propriété familiale soit assujettie à un paiement de droits de mutation à titre gratuit dans le cas d'une succession. En effet, les revenus qui ont permis d'acquérir cette résidence principale ont eux-mêmes déjà fait l'objet de prélèvements fiscaux. Mon amendement propose donc d'exonérer de paiement de droits de succession la transmission de la résidence principale à la suite du décès d'un des propriétaires lorsque cette transmission se fait au bénéfice de ses enfants ou du conjoint survivant.
Il est défavorable. Les successions de conjoint sont déjà exonérées et, pour les enfants, rien ne peut justifier ce qui est ici proposé.
Défavorable.
Comme pour les donations, la transmission par succession est tout de même soumise à la double peine : on paie déjà des impôts lorsqu'on devient propriétaire de sa maison au terme d'une vie de labeur, et les enfants, ou le conjoint, qu'on aimerait en faire bénéficier, sont à leur tour contraints de devoir payer. Comment expliquer que vous continuiez à appliquer cette double peine au moment où les enfants ont le plus besoin d'une aide, ne serait-ce que pour eux-mêmes s'installer ? En tant que députée de Paris, je peux vous dire que cet amendement a du sens, même s'il en a peut-être moins pour vous, monsieur le rapporteur général.
Face à la difficulté que j'ai évoquée, il est important de pouvoir aider les enfants au moment où l'un des parents décède.
L'amendement no 2600 n'est pas adopté.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix-sept heures cinq, est reprise à dix-sept heures vingt-cinq.
La séance est reprise.
Sur les amendements nos 2079 et 2088 , je suis saisi par le groupe La France insoumise de deux demandes de scrutins publics.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je suis saisi de quatre amendements, nos 512 , 583 , 2079 et 2088 , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l'amendement no 512 .
C'est original !
Cet amendement poursuit le même objectif que le précédent : le rétablissement de l'ISF. J'ajouterai quelques précisions.
S'agissant des inégalités dans notre pays, nous assistons à une concentration toujours plus forte des patrimoines. Le patrimoine net des 1 % les plus riches s'élève à 1,8 million d'euros en moyenne. C'est trois fois supérieur au patrimoine des 10 % les plus riches et surtout 600 fois supérieur à celui des 10 % les moins dotés. En France, 55 % du patrimoine est détenu par les 10 % les plus riches. Tel est le constat.
Grâce à la politique conduite par la majorité depuis son arrivée au pouvoir, les 500 familles les plus riches de France ont vu leur patrimoine passer de 570 milliards à 700 milliards d'euros : leur fortune a donc progressé de 22 % en deux ans.
Plusieurs rapports d'évaluation ont, sur ce sujet, été publiés récemment, indiquant que nous sommes toujours à la recherche du ruissellement tant loué. En l'absence de ciblage et de conditionnalité, le capital circule librement et la mesure n'a pas eu d'incidence positive sur la croissance, l'emploi ou encore l'investissement.
Dans une enquête réalisée par la commission des finances du Sénat, à la question « Avec la suppression de l'ISF, à quoi avez-vous consacré les sommes que vous payiez auparavant en ISF ? », on apprend que les deux réponses les plus fréquentes sont, de loin : « en dépenses de consommation » et « en épargne classique », à respectivement 42 et 41 %. Elles devancent largement la réponse suivante – « en investissements dans des entreprises » – , choisie par 29 % des redevables interrogés.
Le coût, absolument dément au regard du faible nombre de bénéficiaires, de la suppression de l'ISF, s'élève à 3,1 milliards d'euros. Nous savons ainsi que 57 % de ce montant a été capté par les 5 % des ménages les plus aisés. Ces dommages collatéraux, qui nous apparaissaient évidents, sont confirmés notamment par le montant des dons aux associations : celles-ci auraient eu à subir une baisse de leurs ressources de l'ordre de 150 millions d'euros. En supprimant l'ISF, nous ont indiqué les syndicats, vous avez également retiré une source d'information majeure à notre administration fiscale en matière de contrôles.
Convenons-en, l'ISF n'est pas parfait – pensons ici aux effets du plafonnement qui agissait tel un bouclier pour les ultra-riches – , mais il est toujours réclamé et attendu par nos concitoyens…
… car il s'agit d'une véritable mesure de justice fiscale.
Je ne comprends pas bien les règles du temps de parole, monsieur le président…
En tout cas, vous les avez largement outrepassées.
La parole est à M. Éric Coquerel, pour soutenir l'amendement no 2079 .
Il y a peu, un candidat à la présidentielle s'est engagé sur plan zéro SDF. L'an dernier, le même lançait un plan pauvreté, pour lequel les premiers résultats ont été communiqués par l'INSEE : le taux de pauvreté est en augmentation de 0,6 %, atteignant 14,7 % de la population et concernant 9,1 millions de personnes ; 400 000 personnes supplémentaires sont ainsi passées sous le seuil de pauvreté en un an. Le chiffre est à retenir !
Dans le même temps, à cause de la politique menée par le Gouvernement, 0,1 % des Français se sont partagé 400 millions d'euros supplémentaires, fruits des cadeaux fiscaux que vous leur avez accordés. Ainsi, 400 000 personnes de plus se trouvent en situation de pauvreté, quand 400 millions d'euros supplémentaires sont accordés aux 0,1 % les plus riches, notamment grâce à la suppression de l'ISF, qui, fin 2020, pèsera pour environ 10 milliards d'euros de manque à percevoir pour l'économie. Ces 10 milliards seront contrebalancés une baisse des dépenses publiques qui, une fois de plus, pénalisera les plus pauvres. Cette politique est insupportable.
Alors que, plus tôt, nous demandions la réduction des écarts entre les plus fortunés et les plus pauvres afin de parvenir à un plus d'égalité, un collègue a répondu que nous souhaitions éradiquer les riches. Je ferais remarquer qu'on ne meurt pas dans ce pays d'être un peu moins riche, mais qu'on meurt quand on devient pauvre. Voilà la réalité !
Pour ces raisons, nous avons proposé ces deux amendements : l'un visant à rétablir l'ISF, l'autre à le rendre plus progressif. En effet, nous pensons que la progressivité doit aussi s'appliquer à la richesse ; nous proposons donc une échelle allant d'un taux marginal de 0,1 % appliqué aux fortunés, à 2 % pour ceux dont la fraction de la valeur nette taxable du patrimoine est supérieure à 5 millions d'euros.
L'égalité devrait redevenir dans ce pays un mot qui a du sens. L'indice de Gini montre que les inégalités n'ont jamais été si fortes que depuis 2010 en France : voilà le résultat de votre politique !
M. Coquerel l'a fait : il a indiqué qu'il présenterait les deux amendements en même temps.
Protestations sur les bancs du groupe LaREM.
L'amendement no 2088 vise à rétablir l'impôt de solidarité sur la fortune et à supprimer en conséquence l'impôt sur la fortune immobilière.
Le remplacement de l'ISF par l'IFI a constitué un des grands marqueurs du début du quinquennat. Le Gouvernement entendait complaire aux citoyens et citoyennes les plus fortunés en les délestant du devoir de participation à l'effort national que l'ISF représentait. Cette décision fut et reste largement contestée par une majorité de nos concitoyens et son abrogation a été demandée sur de nombreux ronds-points. Selon un sondage IFOP de janvier 2019, près de 77 % des Français et Françaises se disent favorables à un rétablissement de l'ISF, dont près de 61 % se disant par ailleurs proches de La République en marche !
Une mesure de justice fiscale conforme à la volonté du peuple français, profondément épris d'égalité, consisterait donc à rétablir l'ISF, et à le rendre plus progressif, comme l'a expliqué M. Coquerel.
Il est défavorable.
Les avis défavorables du rapporteur général et du ministre montrent que vous conservez votre logique de suppression de l'impôt sur la fortune. Or on s'aperçoit en regardant les chiffres que les plus fortunés gagnent toujours plus. Aussi, quand on entend qu'il manque de l'argent dans le budget pour financer tel ou tel dispositif en faveur des plus pauvres, on pense que 3,1 milliards feraient du bien.
Mon intervention sera très rapide car nous avons déjà eu cette discussion à plusieurs reprises lors de l'examen de la loi de finances pour 2019 et en commission. C'est un débat sans fin, mais je voudrais rétablir quelques vérités.
Je vous entends dire, monsieur Bruneel, que la suppression de l'ISF bénéficie aux plus riches. Or c'est une contrevérité : les contribuables qui paient l'IFI sont les ménages les plus aisés ; et la suppression de l'ISF et l'instauration de l'IFI ont bénéficié aux ménages les moins aisés. Ce n'est pas moi qui le dis, mais c'est écrit dans le rapport du comité d'évaluation des réformes de la fiscalité du capital : « au sein du premier décile de patrimoine ISF, neuf contribuables ISF de 2017 sur dix ne sont plus contribuables à l'IFI en 2018. Parmi les 0,1 % très fortunés en 2017, seul un sur dix n'est pas contribuable à l'IFI en 2018. »
Contrairement à ce que certains affirment sur ces bancs, les tenants de la suppression de l'IFI ne sont pas en majorité les petits riches ; ce ne sont pas les petits riches qui payent l'IFI.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 50
Nombre de suffrages exprimés 50
Majorité absolue 26
Pour l'adoption 5
Contre 45
L'amendement no 2079 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 53
Nombre de suffrages exprimés 53
Majorité absolue 27
Pour l'adoption 6
Contre 47
L'amendement no 2088 n'est pas adopté.
Rappel au règlement
Il est fondé sur l'article 58. Nos orateurs ont été interrompus à plusieurs reprises. Vous nous avez expliqué tout à l'heure, monsieur le président, que l'on allait peut-être devoir siéger ce week-end à cause de nos interventions.
Je voudrais seulement dire que le groupe La France insoumise a déposé 65 amendements sur 2 500. Nous avons l'habitude de déposer un seul amendement pour un même contenu, et non plusieurs signés chacun par un seul député. Nous aimerions donc disposer d'un temps de parole normal, même si cela énerve la majorité que nos avis soient parfois à l'opposé des siens, et nous voudrions pouvoir exposer ceux-ci sans être la cible de remontrances et de cris, comme si nous faisions perdre du temps à l'Assemblée.
Mme Caroline Fiat applaudit.
Je ne peux que partager votre souci de vous exprimer dans de bonnes conditions et vous donner acte que vos orateurs ont été plusieurs fois interrompus, néanmoins c'est aussi le cas de ceux de la majorité.
Cependant j'ajoute, au sujet de ce règlement – pour lequel je n'ai pas voté, mais que la majorité a adopté – , qu'il est impossible désormais de faire des rappels au règlement sur la foi de l'article 58. Il existe toute une liasse d'articles, et je suis persuadé, monsieur Coquerel, que vous trouverez sans difficulté un fondement juridique pour en faire d'autres…
Après l'article 3
Il est très simple : il vise à supprimer l'impôt sur la fortune immobilière. La majorité a transformé l'impôt de solidarité sur la fortune en IFI, ce qui revient à s'arrêter au milieu du gué, car on conserve un impôt sur la fortune, mais seulement sur la fortune immobilière. Un des reproches auparavant formulés à l'encontre de l'ISF était d'assujettir à l'impôt notamment des gens qui avaient hérité d'un bien, avec l'exemple classique de la petite retraitée de l'île de Ré qui possède un bien potentiellement vendable mais ne lui rapportant rien, et qui se retrouve à devoir payer l'ISF. La transformation de l'ISF en IFI n'a pas arrangé ces cas particuliers.
Ceux qui sont assis sur les bancs d'en face feront remarquer que l'IFI touche les grandes fortunes. Pas seulement, puisque 20 % des contribuables qui y sont redevables perçoivent des revenus inférieurs à 60 000 euros par an. C'est une vraie question : est-on riche avec 60 000 euros de revenus annuels ? On n'est pas pauvres, mais pas riche non plus.
En outre, tous ceux qui ont de hauts revenus ne payent pas l'IFI : environ 20 % des ceux dont les revenus sont supérieurs à 10 millions d'euros par an sont exonérés. Cet impôt touche également les classes moyennes. Nous sommes le dernier pays de l'OCDE – l'Organisation de coopération et de développement économiques – à maintenir une imposition de ce type sur la fortune immobilière, ce que nous jugeons hors du temps.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement no 809 .
Les amendements nos 923 de M. Éric Pauget et 2564 de Mme Constance Le Grip sont défendus.
Je suis saisi de cinq amendements, nos 906 , 987 , 2563 , 8 et 1746 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 906 , 987 et 2563 sont identiques.
Les amendements nos 906 de M. Éric Pauget, 987 de Mme Véronique Louwagie, 2563 de Mme Constance Le Grip, 8 de M. Marc Le Fur et 1746 de M. Jean-Louis Masson sont défendus.
L'amendement no 2157 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 928 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 2862 .
L'amendement ayant été initialement déposé par M. Carrez et Mme Dalloz, je propose de laisser Mme Dalloz le présenter.
Il porte sur les monuments historiques, sujet que M. Gilles Carrez connaît bien. La mesure proposée est encadrée par des obligations déclaratives annuelles aux services chargés des monuments historiques.
Comme Stéphane Bern lui-même le fait valoir à l'ensemble de nos concitoyens, le patrimoine est la ressource des territoires qui n'en ont plus d'autres. Dans de nombreuses régions en déprise économique, tout particulièrement en zone rurale, les immeubles classés ou inscrits au registre des monuments historiques constituent un enjeu de développement et d'attractivité. Point de référence pour le tourisme patrimonial, ils peuvent également constituer le support d'activités commerciales. Pour faire vivre leur famille et assumer les charges de ces monuments, leurs propriétaires doivent presque toujours exercer un emploi à l'extérieur, qui est réputé principal ; cela les prive du bénéfice de l'exonération de l'impôt sur la fortune immobilière.
Il convient donc d'appliquer aux monuments historiques l'abattement spécifique de 75 % déjà applicable aux propriétés en nature de bois et forêts. Je répète que le dispositif est encadré et fait l'objet d'une déclaration spécifique. Gilles Carrez est très attaché à cette proposition, élaborée dans le cadre de la mission qu'il a menée sur le patrimoine – c'est bien cela, monsieur le rapporteur général ?
À mon avis, cette mesure permettra de faciliter l'entretien du patrimoine historique en cours de dégradation ou situé dans des territoires ruraux, en créant une attractivité nécessaire.
J'ai l'impression que M. le rapporteur général soutient l'amendement assez mollement.
Le Gouvernement donne un avis défavorable. C'est une contradiction de la part de M. Carrez de créer une niche ; mais enfin, il n'est pas là, et je ne parlerai pas à sa place. J'entends toujours dire que les niches sont trop nombreuses, que l'impôt est mité...
Nous avons supprimé l'ISF et instauré l'IFI, qui rapporte beaucoup moins, ce qui a d'ailleurs fait l'objet de critiques. Or, un an après, vous nous proposez de miter cet impôt avec une niche. On comprend pourquoi notre droit fiscal compte 468 de ces dispositifs.
Du point de vue de la fiscalité, les choses sont complexes. Les monuments historiques reconnus comme tels sont déjà aidés, sous la forme de crédits budgétaires ou de subventions. Ils bénéficient d'un accompagnement fiscal s'ils sont ouverts au public un nombre donné de jours de l'année, comme chacun sait.
Enfin, l'imposition a baissé avec la suppression de l'ISF. Arrêtons-nous sur la situation des contribuables qui possèdent un bien aujourd'hui soumis à IFI. Dans le passé, non seulement leurs biens immobiliers, mais aussi leurs assurances-vie et leurs capitaux étaient soumis à l'ISF. Il n'existe pas, à ma connaissance, de contribuables soumis à l'IFI qui n'aient pas connu de baisse de leur imposition grâce à la suppression de l'ISF – s'il en existe, ce n'est pas dans les proportions que vous évoquez. Ces contribuables ne sont plus assujettis à cette imposition du capital productif qui a pu être tenue pour excessive. En revanche, et conformément à une promesse du Président de la République, la fortune immobilière continue d'être taxée ; elle n'est pas délocalisable, ni, en tant que telle, productive.
S'il s'agit d'aider les détenteurs de patrimoine du monde rural et plus particulièrement des monuments historiques, instaurer une niche fiscale n'est pas le bon outil. Il faut plutôt favoriser un accompagnement culturel et patrimonial. Le Parlement trouverait un motif de fierté s'il simplifiait notre droit fiscal.
À gauche de l'hémicycle, certains demandent à supprimer un impôt établi il y a un an, alors qu'il n'est pas encore évaluable. À droite, certains demandent à miter un impôt nouvellement créé avec une niche, ou à le remplacer. Je crois que notre droit fiscal a besoin d'un peu de stabilité. Beaucoup le réclament, mais peu agissent en ce sens.
Je ne comprends pas votre opinion, monsieur le ministre. L'IFI rapporte plus d'argent que vous ne le prévoyiez. Certains paient des montants importants. Cet impôt est calculé sur des bases moins favorables aux détenteurs de biens immobiliers que ne l'étaient celles de l'ISF, notamment parce que la déductibilité de l'impôt est moindre. Vous l'assumez vous-même : l'IFI est un impôt qui pénalise la propriété de biens immobiliers.
Le présent amendement a trait à un type très particulier d'immobilier, pleinement concerné par la mission de sauvegarde du patrimoine confiée à Stéphane Bern. Les immeubles dont nous parlons ne sont pas des très grands monuments ; ils se trouvent dans des zones de revitalisation rurale. Ils doivent être ouverts au public. Les contraintes sont nombreuses.
J'entends bien que les monuments historiques bénéficient déjà d'une aide, mais enfin, celle-ci sert à financer les travaux. Le problème qui nous occupe est différent : c'est la ponction exercée sur l'immobilier. Faire vivre ces monuments est en soi une charge. Considérer que les propriétaires de ces biens sont d'affreux riches, aux portefeuilles d'actions et d'assurances-vie bien fournis, c'est être très loin de la réalité. Le présent amendement s'inscrit dans la lignée de l'action de la majorité en faveur des monuments.
M. Saint-Martin et Mme Grégoire veulent supprimer des niches ; ils ont raison, mais n'oubliez pas que la majorité crée à peu près autant de niches qu'elle n'en supprime ! Ce n'est pas étonnant : quand les dispositions fiscales foisonnent, il y a nécessairement des exceptions. S'il y avait moins de dispositions, les exceptions seraient moins nombreuses.
Vous-même, lorsque vous voulez augmenter les taxes sur tel ou tel billet d'avion, vous créez immédiatement une niche pour tel ou tel territoire.
Monsieur le président de la commission des finances, ne caricaturez pas mon propos. Il faut d'abord rappeler quelles sont les dispositions légales. Ceux qui possèdent un monument historique en pleine propriété bénéficient déjà d'une niche : ils peuvent déduire de leur impôt sur le revenu le montant, parfois très important, des charges d'entretien de leur bien, s'ils l'ouvrent au public et satisfont un certain nombre de conditions. Cette niche est largement utilisée sur le territoire français. On ne peut donc pas dire que rien n'est fait pour le patrimoine d'un point de vue fiscal. Les dispositifs d'aide, les accompagnements, les crédits budgétaires alloués au patrimoine sont nombreux, comme j'ai eu l'occasion de le rappeler à M. Carrez.
Vous soulignez que l'IFI rapporte plus que prévu, comme si les prévisions donnaient un droit particulier. Je rappelle d'abord – nous aurons peut-être l'occasion d'en discuter un jour en commission – que les modalités de déclaration de l'IFI ont été modifiées : désormais, et au contraire de ce qui était pratiqué pour l'ISF, il est déclaré en même temps que les revenus. Le calendrier n'est donc pas le même. Par ailleurs, au cours des années précédentes, le patrimoine avait sans doute été sous-évalué dans certaines déclarations – les médias se font d'ailleurs l'écho du redressement fiscal de certains. Ce n'est pas forcément que les propriétaires dissimulent à dessein ; l'évaluation est parfois complexe. N'allez pas croire, en tout cas, que nous avons augmenté l'IFI. Quelqu'un qui nous écouterait pourrait penser que nous avons augmenté le taux d'imposition applicable aux biens immobiliers : ce n'est pas le cas. En réalité, cet impôt est mieux recouvré et entre donc davantage dans les caisses de la nation.
Enfin, n'oublions pas une autre niche qui concerne le patrimoine historique : il peut être exonéré de droits de succession. La représentation nationale doit choisir : soit vous souhaitez, comme M. Dumont, supprimer l'impôt sur la fortune immobilière, auquel cas cet amendement est un amendement de repli qui vous permet de miter l'impôt ; soit vous considérez qu'il faut éviter, en bonne logique, d'instaurer chaque année des niches sur les impôts nouvellement créés et vous travaillez à simplifier les choses.
Monsieur le président Woerth, il est vrai que la majorité instaure parfois des niches. Je note toutefois que le Gouvernement et la commission des finances proposent d'en supprimer dix-huit et de n'en créer que seize. Et encore, parmi ces créations, certaines ne sont pas défendues par le Gouvernement, comme c'est le cas pour le présent amendement. Espérons que nous pourrons terminer l'examen du projet de loi de finances avec moins de niches qu'il n'y en avait au départ. Œuvrons-y dès maintenant !
Mme Olivia Grégoire applaudit.
À vrai dire, le présent amendement a été adopté par la commission des finances contre l'avis de la majorité. Son adoption en séance emporterait la création d'une niche supplémentaire et permettrait d'exonérer le patrimoine de ce qui reste de l'ISF, de ce que nous avions gardé dans l'IFI. Nous n'y sommes pas du tout favorables, puisque la logique que nous avons suivie lorsque nous avons instauré l'IFI consistait à continuer de taxer les biens dits non productifs, notamment les biens immobiliers.
Vous souhaitez soutenir le patrimoine. Nous partageons cet objectif. Je rappelle toutefois que les monuments historiques bénéficient déjà de nombreuses subventions publiques.
Ils bénéficient d'un régime fiscal particulier lors de la déclaration des revenus, qui permet de déduire le coût des travaux. Il ne faut donc pas dire que l'argent public ne soutient pas les monuments historiques, puisque c'est faux.
L'argumentaire développé par M. Carrez mentionnait aussi l'ouverture au public. Vous savez pourtant que si un bien immobilier est affecté à une activité commerciale, il est inscrit au bilan comptable de celle-ci et sort du champ de l'IFI.
J'ajoute que cet amendement ne tient pas compte de la situation patrimoniale des personnes soumises à l'impôt sur la fortune immobilière.
Pour toutes ces raisons, nous ne souhaitons pas exonérer les monuments historiques de l'IFI. Avis défavorable.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Tout le monde ici s'accordera à dire que Gilles Carrez ne demande jamais sans raison la création de niches fiscales.
Le dispositif qu'il propose est très encadré. Premièrement, il concerne uniquement les bâtiments inscrits ou classés. Deuxièmement, ces bâtiments doivent être situés dans une zone de revitalisation rurale – cela restreint encore le champ d'application.
C'est le texte de l'amendement, monsieur le ministre.
Troisièmement, ces bâtiments doivent être affectés, en tout ou partie, à l'une des activités mentionnées au premier alinéa du I de l'article 975 du code général des impôts, ou à la visite. Enfin, le propriétaire doit s'engager à conserver le monument pendant au moins quinze ans à compter de son acquisition. Ainsi, le dispositif est très précisément encadré. N'allez donc pas dire qu'il aurait un coût pharaonique.
Vous parlez, monsieur le ministre, d'une nouvelle niche. Ce n'est pas le cas. Les propriétés en nature de bois et de forêt sont exonérées de l'IFI à concurrence de 75 % de leur valeur. Le présent amendement vise simplement à élargir cette disposition.
En réalité, la création de l'IFI a eu un impact profond sur la propriété immobilière, comme nous l'avons dit et répété.
Exclamations sur quelques bancs du groupe LaREM.
S'il n'a plus le nom d'ISF, cet impôt concerne tout le patrimoine immobilier. Aux yeux de la majorité, il vaut mieux être millionnaire grâce à un portefeuille d'actions ou disposer de propriétés boisées immenses ayant une valeur largement supérieure aux immeubles concernés par cet amendement. Quand il s'agit de patrimoine, vous faites de beaux discours, vous choisissez des figures médiatiques comme M. Bern, mais vous n'agissez pas.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
L'amendement no 2862 n'est pas adopté.
Cet amendement de Nicolas Forissier vise à exonérer le foncier non-bâti de l'IFI.
Je souhaite rappeler quelques chiffres à propos de cet impôt. Comme cela a déjà été dit, le Gouvernement avait prévu, pour cet impôt, un produit de 850 millions d'euros pour l'année 2018 et de 1,9 milliard d'euros pour l'année 2020. L'augmentation est importante ; elle traduit, il me semble, l'échec de la politique que vous vouliez mener avec cet impôt. Au moment d'instaurer l'IFI, vous expliquiez vouloir inciter les redevables de cet impôt à délaisser la rente immobilière au profit de l'économie réelle. Or on constate que les propriétaires ont conservé leur patrimoine immobilier et ne se sont pas du tout tournés vers l'économie réelle. Ces chiffres traduisent donc l'échec de la politique que vous vouliez mener en créant l'IFI.
L'amendement no 10 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement no 1106 .
C'est un vieux débat : que peut-on faire pour préserver les habitats sensibles classés ? Certains considèrent qu'il faudrait au minimum les exonérer de l'IFI à hauteur des trois quarts de leur valeur, comme c'est déjà le cas pour les forêts. Cela aiderait à maintenir la biodiversité dans ces espaces. Je rappelle que, dans la plupart des cas, ces biens ne rapportent rien – il s'agit par exemple de marais.
L'amendement no 1106 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l'amendement no 284 .
Cet amendement de M. Pancher vise à exonérer les propriétés non bâties du plateau de Saclay à concurrence des trois quarts de leur valeur imposable. Vous en trouverez une présentation plus détaillée dans l'exposé sommaire.
L'amendement no 284 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je suis saisi de six amendements, nos 27 , 223 , 662 , 908 , 934 et 65 , respectivement déposés par Mme Valérie Bazin-Malgras, Mme Émilie Bonnivard, M. Charles de Courson, Mme Valérie Beauvais, Mme Marie-Christine Dalloz et M. Vincent Descoeur, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 27 , 223 , 662 , 908 et 934 sont identiques.
Ces six amendements sont défendus.
L'amendement no 65 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Actuellement, les biens fonciers loués à long terme sont exonérés d'impôt sur la fortune immobilière à 75 % de leur valeur dans la limite d'un montant d'un peu plus de 100 000 euros, et de 50 % au-delà. L'amendement vise à appliquer le taux de 75 % quel que soit le montant du bien.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l'amendement no 675 .
Chacun connaît la précision horlogère de M. de Courson, mais permettez-moi d'ajouter un élément technique : le plafond est fixé à 101 897 euros. Il est donc nécessaire de le revaloriser.
L'amendement no 811 de Mme Véronique Louwagie est défendu.
Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements identiques ?
Je précise qu'il s'agit d'une mesure de coordination avec l'augmentation, décidée l'an passé, du seuil applicable aux droits de succession, que nous avions porté de 100 000 à 300 000 euros.
La parole est à M. Éric Woerth, président de la commission des finances, pour soutenir l'amendement no 2042 .
Le barème de l'impôt sur la fortune immobilière n'est pas indexé. Or les prix immobiliers ne cessent d'augmenter. Il est donc naturel, comme cela se fait pour l'impôt sur le revenu – même si je suis conscient qu'un impôt sur le capital ne répond pas forcément à la même logique – de l'indexer, et je propose de le faire sur l'indice des prix à la construction, qui me paraît pertinent car il actualise les prix de l'immobilier. Si nous procédions à cette actualisation pour 2020 sur la base des prix à la construction, qui augmentent de 2,8 % environ, le seuil d'entrée dans le barème passerait de 800 000 à 822 400 euros.
Défavorable. Je rappelle au président Woerth que l'impôt sur la fortune n'était pas non plus indexé.
L'IFI ayant remplacé l'ISF et en ayant repris le mode de fonctionnement, nous ne soutenons pas l'amendement de M. Woerth.
L'amendement no 2042 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l'amendement no 755 .
Dans la même logique et selon la continuité qui nous est chère, après avoir proposé tout à l'heure de relever le plafond de déduction des dons dans le cadre d'une donation simple, nous proposons par cet amendement de relever de 50 000 à 100 000 euros le plafond de déduction des dons au titre de l'impôt sur la fortune immobilière, afin d'améliorer la fluidité en matière de donations. Je ne reprendrai pas les arguments de M. de Courson mais il est vrai qu'à partir d'un certain âge, les donations ne produisent plus d'effet parce qu'elles ne sont pas réinvesties. En revanche, si elles sont destinées à des jeunes, elles peuvent avoir des effets concrets sur l'économie.
L'amendement no 755 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
En supprimant l'ISF l'an passé, vous avez également supprimé le dispositif qui incitait les contribuables redevables de l'ISF à investir dans les PME en défiscalisant 50 % du montant de leur investissement dans la limite de 45 000 euros.
En 2016, ce dispositif avait permis d'investir 1,2 milliard d'euros dans les PME. Nous vous proposons de le rétablir dans le cadre de l'IFI afin d'inciter les contribuables qui y sont assujettis à investir des liquidités dans les PME. Cet amendement me semble aller tout à fait dans le sens de la réforme que vous avez menée l'an dernier et permettra même de faire aboutir cette ambition d'investir au maximum dans les PME afin de dynamiser l'économie, notamment les petites entreprises présentes dans les territoires.
Ces deux amendements de M. Jean-Paul Mattei visent à faire converger la fiscalité des contrats d'assurance-vie vers la norme en matière de droits de succession.
Cet amendement de M. Pupponi est très important : il vise à faciliter l'accès au logement des personnes les plus démunies. L'Union sociale pour l'habitat a proposé un dispositif visant à développer l'intervention des organismes HLM dans le parc privé avec le concours d'associations agréées d'intermédiation locative volontaires. Sur le modèle du dispositif « Solibail », qui a fait la preuve de son efficacité, l'amendement vise à faire porter par des organismes HLM des logements privés dans le diffus sur une période de dix ans en vue de les louer à des associations agréées d'intermédiation locative afin de libérer des places d'hébergement d'urgence dans le cadre d'un parcours d'insertion et de fluidifier le parcours résidentiel des personnes les plus éloignées du logement. Pour soutenir ce dispositif, il est proposé de soumettre les acquisitions de logements réalisées dans ce cadre par des organismes HLM à un droit fixe de 125 euros. L'application de ce tarif serait subordonnée à un engagement de l'organisme à louer le logement à des organismes bénéficiant de l'agrément relatif à l'intermédiation locative, pour une durée de six ans au moins. Le non-respect de cet engagement serait sanctionné.
L'amendement no 1550 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Après deux ans d'attente, le crédit d'impôt pour la transition énergétique – CITE – est transformé en prime. C'était sans compter, cependant, avec l'obsession de la réduction des déficits publics qui, une fois de plus, paralyse l'action du Gouvernement et transforme le dispositif en nouvelle mesure d'économie budgétaire. En effet, 800 millions d'euros seulement seront ainsi mobilisés en 2020 en faveur de la rénovation de logements au titre du crédit d'impôt pour la transition énergétique, contre 900 millions d'euros l'an dernier et 1,6 milliard en 2017. C'est tout simplement inadmissible.
De surcroît, vous créez par ce nouveau dispositif d'aide une véritable usine à gaz : d'un crédit d'impôt accessible à tous, vous faites une prime versée sur demande par l'Agence nationale de l'habitat, l'ANAH, auprès de laquelle il faudra constituer un dossier. Autant dire que le taux de recours au dispositif sera très faible !
Ensuite, vous prétendez vouloir recentrer le dispositif sur les plus modestes afin de leur permettre de réaliser des travaux d'amélioration de leur logement. En affirmant cela, vous trompez les Français car le reste à charge d'un système d'isolation ou de chauffage restera bien trop élevé pour que les ménages modestes et très modestes y aient recours. Dans ces conditions, il y a de fortes chances que vous ne dépensiez même pas les 800 millions d'euros que vous avez budgétés.
Je rappelle simplement que l'objectif de rénovation de 500 000 logements par an constitue la priorité devant être accordée à la rénovation des passoires thermiques, soit les quelque 7,4 millions de logements qui consomment plus de 300 kilowattheures par mètre carré et par an. La réforme que vous proposez n'est pas réaliste ; elle est une véritable tromperie dénoncée tant par les professionnels du bâtiment que par les associations environnementales. Pour notre part, nous continuerons de défendre le principe de la mobilisation de moyens proportionnés aux engagements de la France en matière d'émissions de CO2 et de consommation d'énergie.
Par cet article, vous modifiez, restreignez et complexifiez profondément le crédit d'impôt pour la transition énergétique.
Tout d'abord, vous le transformez en 2020 en prime forfaitaire pour les ménages les plus modestes. Le principe est plutôt positif, même si la question du reste à charge excessif pour ces ménages n'est pas réglée. Vous ne faites donc pour eux qu'une partie du chemin.
Ensuite, vous maintenez le dispositif pour les ménages des classes moyennes, en excluant toutefois certaines dépenses jusqu'alors éligibles comme l'acquisition de chaudières à gaz de haute performance. Cela devient compliqué !
Enfin, vous supprimez dès 2020 tout dispositif incitatif de transition pour les ménages les plus aisés, catégorie dont vous fixez le seuil dès 27 000 euros de revenu fiscal de référence pour une personne seule et 48 000 euros pour un couple avec deux enfants.
Cet article perd le nord ! En effet, quel est l'objectif ? Renforcer la transition énergétique dans le bâtiment, l'un des premiers secteurs d'émission de gaz à effet de serre, ou raboter une dépense fiscale en attisant, une nouvelle fois, une opposition stérile entre les Français, divisés entre les moins et les plus aisés, alors que la transition énergétique concerne tout le monde ?
En excluant ces ménages du CITE, vous excluez ceux qui ont réalisé, ces dernières années, plus de la moitié des travaux de rénovation thermique, et vous supprimez une incitation à la rénovation, qui devrait être massive.
Si la transformation du crédit d'impôt en prime est une bonne chose pour les ménages les plus modestes, elle ne suffira pas à déclencher massivement des travaux. Le reste à charge pour ces ménages sera de 2 000 euros pour 3 000 euros de travaux. Même avec le versement anticipé de la prime, alors que le crédit d'impôt est perçu après coup, vous ne luttez pas contre les freins à la réhabilitation.
Vous complexifiez le dispositif et risquez de le fragiliser en créant trois catégories de Français, qui n'auront pas les mêmes droits ni les mêmes dépenses éligibles – les chaudières à gaz le seront ainsi pour les plus modestes, mais pas pour les classes moyennes. Difficilement compréhensible et peu lisible, le nouveau dispositif compromettra les chances d'atteindre l'objectif de 500 000 logements rénovés par an.
Il est opportun de transformer le CITE en prime pour une partie de la population, surtout avec une sortie « en sifflet », car cela crée un décalage de trésorerie bienvenu, mais il est beaucoup moins heureux d'oublier 20 % de la population, surtout que les ménages concernés réalisent 50 % des travaux. Ces personnes n'ont pas des revenus si élevés, du moins pour la moyenne des déciles concernés ; en outre, elles ont un peu les moyens de faire des travaux et possèdent des logements qui en ont besoin, mais elles doivent être aidées. Les amendements que j'ai déposés vont dans ce sens.
Il me semble que les locataires ne peuvent plus accéder au CITE, pas plus que les propriétaires bailleurs. Il y a là un trou noir à éclaircir, si je ne me trompe pas.
Les amendements de la majorité m'étonnent : certes, ils ouvrent un peu la porte du dispositif aux neuvième et dixième déciles, mais avec un mécanisme d'une complexité effrayante. Seuls certains travaux très précis, parfois compliqués à identifier, sont éligibles, et un barème progressif est instauré selon l'appartenance à tel ou tel décile : vous érigez un monument de complexité ! Nous devrions au contraire privilégier la clarté afin que les entreprises et les ménages s'y retrouvent. Ce découpage en rondelles n'est pas une bonne méthode d'élaboration d'un dispositif fiscal, surtout avec une couche de complexité aussi effroyable.
Monsieur le ministre, vous avez affiché un objectif ambitieux de rénovation de 500 000 logements anciens par an, que nous pouvons partager et dont nous comprenons les raisons. En 2018, les émissions de gaz à effet de serre du secteur de la construction et de l'habitat ont dépassé la trajectoire assignée par la programmation pluriannuelle de l'énergie – PPE – de 14 %. Ni l'objectif de 500 000 logements rénovés chaque année ni celui de la PPE ne sont atteints, et ce n'est pas le dispositif que vous proposez qui va nous aider à les remplir ! M. le président de la commission des finances l'a très bien montré, votre mécanisme est totalement opaque, à tel point que même les membres de la commission des finances ont du mal à s'y retrouver.
Le dispositif actuel coûte 950 millions d'euros par an. Vous vous engagez à donner 400 millions d'euros par an, sous la forme d'une prime, à partir de 2020. L'année prochaine, vous récupérerez 100 millions d'euros dans le budget général. Mais en 2021, vous récupérerez beaucoup plus, puisque le delta passera de 950 millions à 400 millions d'euros. Vous transformez le crédit d'impôt en prime avec un effet incitatif pour les ménages les plus modestes, mais le mécanisme est beaucoup trop complexe et opaque.
Vous n'avez pas retenu la leçon des gilets jaunes. Pensez-vous sérieusement que les ménages les plus modestes pourront engager des travaux avec une prime alors qu'ils devront décaisser la soulte de leurs investissements dans le domaine énergétique ?
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement no 997 .
Il propose de supprimer l'article 4. Vous voulez faire progressivement disparaître, à partir de 2020, le dispositif actuel d'aide à la transition énergétique. Au motif que la moitié du crédit d'impôt bénéficie aux 20 % des foyers aux revenus les plus élevés, vous souhaitez exclure ces ménages du mécanisme d'aide. En procédant à ce ciblage, vous découragerez sûrement les ménages les plus aisés, pourtant les plus à même d'engager des travaux de rénovation énergétique des logements.
Votre mesure risque d'être contre-productive, à la fois pour l'économie et l'environnement. L'angle mort de la politique de rénovation énergétique, que l'article 4 ne cible pas du tout – nous en avons longuement parlé en commission des finances – , reste le parc locatif privé. Permettez-moi de rappeler que 43 % des 7 millions de logements privés en France sont classés dans les catégories F et G du diagnostic de performance énergétique : les besoins sont très élevés, et je crains que vous n'empêchiez certains ménages, en les privant de soutien, de rénover des logements à la performance énergétique très faible.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.
Nous ne comprenons rien à ce labyrinthe fiscal inédit. Pourquoi cette complexité ? Parce que vous ne savez pas quel objectif poursuivre. Est-il écologique ? Social, à savoir aider les plus modestes ? Budgétaire, afin de réduire la dépense publique ? Comme vous ne choisissez pas, vous créez une usine à gaz.
Comme l'a dit ma collègue Véronique Louwagie, les 20 % des ménages les plus aisés effectuent actuellement 50 % des travaux qui relèvent du crédit d'impôt. Vous refusez la transition écologique qualitative.
Nous devons reconnaître ensemble que la transition écologique se fait aussi par les classes moyennes et les classes moyennes supérieures. Si l'objectif principal est la transition écologique – nos amendements reposent sur cette orientation – , votre système sera défectueux et produira une usine à gaz.
Je ne vais pas prendre la parole sur tous les amendements, nombreux, déposés sur cet article.
Madame Dalloz, vous avez assené quelques contrevérités, peut-être à votre corps défendant. La transformation du crédit d'impôt pour la transition énergétique en prime est positive, comme l'ont reconnu Mme Louwagie et M. Woerth. Il n'y a rien de très compliqué, monsieur Abad, même s'il n'est pas si facile de convertir un crédit d'impôt en prime.
Il y aura un effet double : ce changement s'opérera sur deux exercices budgétaires, comme la réforme du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi, le CICE. Excusez-moi de vous le dire, madame Dalloz, mais vos chiffres sont erronés. La première étape est une prorogation du CITE jusqu'à la fin de l'année 2020, pour une partie de nos compatriotes, …
… selon leurs revenus. Il y aura ensuite une année pleine de prime.
La mise en oeuvre de cette transformation est complexe, puisque nous fusionnons des aides de l'ANAH. Vous oubliez d'ailleurs de dire que nous créons 350 postes équivalents temps plein, affectés à l'ANAH pour gérer la prime – c'est pourquoi parler d'économie budgétaire me fait doucement rire…
Pourquoi une prime plutôt qu'un crédit d'impôt ? Les neuvième et dixième déciles de l'échelle des revenus n'appartiennent pas à la classe moyenne – peut-être certains de ces ménages appartiennent-ils à la classe moyenne supérieure, comme vous l'avez dit, mais par définition, ils ne se situent pas au milieu de l'échelle ! Nous ne parlons pas du cinquième décile, monsieur Abad.
Pourquoi 50 % des travaux de rénovation énergétique sont-ils réalisés par les ménages ayant le plus d'argent ? Vous me répondrez que ces ménages ont justement les moyens de les lancer, leur coût étant assez élevé malgré le crédit d'impôt. Surtout, ils disposent de la trésorerie nécessaire pour engager ces travaux. En général, les gens aisés vivent dans des logements consommant moins d'énergie et occupent moins de passoires thermiques que les ménages des classes populaires. Ces derniers achètent des maisons et des appartements moins chers, qui présentent souvent des défauts d'isolation, notamment dans les caves et la toiture, entraînant des factures énergétiques élevées. Les travaux de rénovation énergétique rapporteraient donc, à terme, de l'argent à ces ménages, puisque les économies de fonctionnement couvriraient l'investissement qu'ils n'ont pas les moyens de réaliser.
On bénéficie certes du crédit d'impôt même lorsqu'on ne paie pas d'impôt, mais on ne perçoit l'argent qu'après avoir payé l'entreprise, bien que ce décalage soit atténué par le prélèvement de l'impôt à la source, comme l'a noté le président Woerth, que je remercie. Avec le crédit d'impôt, il n'y a pas l'effet déclencheur qui existe avec la prime. Voilà pourquoi le président Woerth et Mme Louwagie reconnaissent avec honnêteté la supériorité de la prime sur le crédit d'impôt : la prime fournit la trésorerie permettant d'engager les travaux de rénovation.
Monsieur Bruneel, vous avez dit que l'on attendait que se concrétise enfin la promesse du Président de la République dans ce domaine. Voilà qui est fait, même si cette transformation est complexe parce que les montants sont élevés et que l'ANAH doit recruter des fonctionnaires et gérer la prime. C'est en tout cas une bonne chose pour la transition énergétique !
On l'a dit, la moitié du crédit d'impôt bénéficie aujourd'hui aux neuvième et dixième déciles de l'échelle des revenus. Nous souhaitons réaffecter cet argent vers les classes populaires et les classes moyennes. Ce changement sera positif, car les gens qui ont peu d'argent doivent pouvoir réaliser des travaux de rénovation énergétique.
Madame Dalloz, je ne vais pas répéter que vos chiffres sont faux, car vous allez m'en vouloir et croire que je vous poursuis de ma vindicte...
J'ai d'autres plaisirs, madame Dalloz !
Sourires.
Aujourd'hui, le coût s'élève à 800 millions d'euros. Nous vous demandons de voter, pour l'année 2020, la répartition suivante : 400 millions d'euros de crédit d'impôt et 400 millions d'euros de prime. En 2021, madame Dalloz, la prime représentera un coût de 800 millions d'euros. Il n'y a rien de très compliqué, si ce n'est que la transformation s'opère en deux temps.
M. le président Woerth et M. Abad ont déploré une complexité excessive du dispositif, s'agissant notamment des barèmes et des mesures contenues dans les amendements de la majorité parlementaire visant à accompagner la transition. Nous essaierons de les simplifier le plus possible, mais le mécanisme n'est pas si compliqué que cela. Un amendement prévoit d'engager 45 millions d'euros pour accompagner d'autres dispositifs.
Je rappelle à la majorité comme à l'opposition que le crédit d'impôt, transformé en prime, ne constitue pas la seule aide à la rénovation énergétique. Outre les certificats d'économie d'énergie, l'argent consacré à la rénovation énergétique est souvent extrabudgétaire, comme le Premier ministre a eu l'occasion de le dire. N'oublions pas les 3,5 milliards d'euros investis dans le cadre d'opérations menées par des agences telles que l'ANAH et l'ADEME, qui ne figurent pas toujours dans le budget.
Le Gouvernement repousse bien entendu ces amendements de suppression, mais je tenais à m'assurer que chacun comprend bien que nous consacrons beaucoup d'argent à la rénovation énergétique des logements.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Monsieur le ministre, j'ai pour habitude de vérifier les chiffres que j'avance. Je vais donc citer mes sources : je me réfère au tome II du rapport. En commission des finances, la semaine dernière, M. le rapporteur général a affirmé : « En préalable, je réponds à la question de Véronique Louwagie : il y a bien 350 millions d'euros pour la prorogation du CITE et 450 millions pour la prime. » Si l'on rapporte ces chiffres au coût du CITE pour les finances publiques en 2019, soit 950 millions d'euros, on constate qu'il y a bien une perte en ligne de 150 millions d'euros. Or la prorogation du CITE n'aura cours qu'en 2020, pas au-delà. Les chiffres que je viens de citer posent donc problème.
Monsieur le ministre, je souhaite vérifier un point, sur lequel j'aimerais obtenir une réponse. Il y a quelques années, les propriétaires bailleurs ont été exclus du bénéfice du CITE, mais les locataires ou occupants à titre gratuit peuvent toujours réaliser des travaux et bénéficier du crédit d'impôt. Je comprends que le nouveau dispositif exclut du CITE les locataires comme les propriétaires bailleurs. Il y a donc un petit problème, voire un trou noir dans votre raquette. Ce n'est pas le statut du logement qui doit commander l'éligibilité au CITE, mais les travaux à réaliser.
Monsieur le président de la commission des finances, vous avez raison, il y a un trou noir, mais il est dans la pratique. En effet, 95 % des bénéficiaires du CITE sont des propriétaires – Mme Wargon, qui nous rejoindra tout à l'heure, vous en dira peut-être davantage.
Le ministère de la transition écologique et solidaire, au lieu de faire preuve d'une légère hypocrisie législative, tâche de réfléchir à ce que l'on peut faire pour les locataires, sachant que la rénovation d'un logement incombe au propriétaire. Non seulement le principe retenu est bon, mais le CITE, en pratique, est pour l'essentiel utilisé par les propriétaires.
Nous regrettons la complexité du dispositif, même si nous ne remettons pas en cause le passage d'un crédit d'impôt à une prime.
Cette complexité découle de la modification des barèmes et des règles d'éligibilité, qui sont particulièrement incompréhensibles. Certains travaux, qui étaient subventionnés, ne le seront plus, ce qui brouille complètement la lisibilité de la stratégie écologique du Gouvernement.
Ainsi, le Gouvernement exclut certaines chaudières à gaz du dispositif, mais il y maintient d'autres. Soit on les exclut toutes car on considère que le chauffage au gaz n'est pas de nature à réduire les émissions de CO2 en France, soit on les maintient toutes car on considère que le gaz est une énergie verte – ou que l'on peut verdir – constituant un moyen de la transition écologique.
Je pense sincèrement que le chauffage au gaz est un moyen de réduire les émissions de gaz à effet de serre en France. Depuis la publication, il y a trois ans, d'un rapport de l'ADEME sur ce sujet, nous savons que la France est en capacité de produire autant de gaz vert qu'elle ne consomme de gaz.
Nous n'avons donc aucun intérêt à ne pas soutenir le remplacement des chaudières au fioul par des chaudières au gaz. Malheureusement, vous pénalisez des territoires où l'amélioration du système de chauffage des logements constitue souvent le seul moyen de réduire leur consommation énergétique.
La parole est à Mme Patricia Lemoine, pour soutenir l'amendement no 2703 .
Il s'agit d'un amendement de repli visant, d'une part, à supprimer la condition de ressources afférente à la prime amenée à remplacer le CITE au 1er janvier 2020 – nous considérons que la transition énergétique est l'affaire de tous, y compris des ménages aisés – , et d'autre part, à faire en sorte que son entrée en vigueur soit accompagnée d'une évaluation permettant d'ajuster au mieux cette politique, en fonction de son efficacité, à l'issue d'une période de test. Pour ce faire, nous demandons au Gouvernement de remettre au Parlement, au plus tard le 15 septembre 2021, un rapport d'évaluation de l'expérimentation visant à en tirer les conséquences.
L'amendement no 2703 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 1415 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il vise à élargir le bénéfice du crédit d'impôt pour la transition énergétique des logements aux propriétaires bailleurs.
La lutte contre la location des passoires énergétiques doit être une priorité de la réforme du CITE. D'après l'Observatoire national de la précarité énergétique, la majorité des ménages en situation de précarité énergétique sont locataires de leur logement. Il nous semble donc indispensable d'étendre les aides à la rénovation énergétique aux propriétaires bailleurs, afin d'inciter ces derniers à réaliser des travaux permettant à leurs locataires de réduire le montant de leur facture énergétique.
Demande de retrait ou avis défavorable. Nous devrions ouvrir une réflexion sur la pertinence d'une extension du bénéfice de la prime aux propriétaires bailleurs.
Je prends note des observations de M. le rapporteur général. Toutefois, il me semble que sa réponse manque de précision. S'il admet que l'extension du bénéfice de la prime aux propriétaires bailleurs mérite réflexion, il n'évoque aucun calendrier et ne propose aucune ouverture en la matière. Quant à M. le ministre, il n'a pas répondu. Je maintiens donc l'amendement.
L'amendement no 714 n'est pas adopté.
L'amendement no 1029 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je suis saisi de dix-sept amendements, nos 635 , 178 , 578 , 760 , 812 , 1416 , 1469 , 1479 , 1634 , 1972 , 1387 , 1481 , 989 , 1939 , 550 , 2376 et 2374 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 178 , 578 , 760 , 812 , 1416 , 1469 , 1479 , 1634 , 1972 sont identiques. Il en est de même des amendements nos 989 et 1939 , ainsi que des amendements nos 550 et 2376 .
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l'amendement no 635 .
Il vise à rétablir le crédit d'impôt pour la transition énergétique pour les chaudières à haute performance énergétique, à hauteur de 1 000 euros par chaudière, à l'exclusion des chaudières au fioul.
Cet amendement et ceux qui suivent visent à remédier à une incohérence du présent projet de loi de finances.
Monsieur le ministre, d'un côté, vous affirmez vouloir massifier les travaux de rénovation énergétique des logements, et de l'autre, vous réduisez le périmètre du crédit d'impôt pour la transition énergétique. Vous le supprimez même pour les ménages à revenus intermédiaires, qui représentent la moitié des travaux d'isolation des logements et de changement de chaudière. De là à dire que vous inventez un CO2 de classe, il n'y a qu'un pas ! Non seulement vous manquez votre cible environnementale, mais vous fragilisez aussi l'emploi dans la filière du bâtiment, qui est déjà pénalisée par la suppression de l'exonération de taxe sur le gazole non routier et par la suppression du prêt à taux zéro en zone rurale.
Cet amendement est pour moi l'occasion de rappeler que le BTP représente un emploi sur dix, dans tous les niveaux de qualification. Il mérite que vous lui apportiez un soutien beaucoup plus prononcé !
Mme Lardet, qui en est la première signataire, m'a demandé de le défendre. Nous convenons tous de la nécessité de la transition énergétique. Il convient d'aider les ménages à revenus intermédiaires à réduire leurs dépenses énergétiques en contribuant au remplacement de leur chaudière, dans la limite de 600 euros par chaudière.
Comme l'amendement précédent, il porte sur les chaudières à haute performance énergétique. Nous proposons d'accompagner les ménages à revenus intermédiaires dans le remplacement de leur équipement devenu obsolète.
Il est identique à l'amendement no 2376 et proche de l'amendement no 2374 , tous deux adoptés par la commission du développement durable. Il vise à maintenir un dispositif incitatif au remplacement des chaudières existantes par des chaudières à gaz à très haute performance énergétique, pour les ménages appartenant aux déciles 5 à 8. Il s'agit de simplifier le dispositif et de massifier le recours à ces outils.
Avis défavorable sur l'ensemble des amendements, mais je tiens à remercier les uns et les autres pour la brièveté de leur présentation.
Le Gouvernement est défavorable à ces amendements – Mme Wargon, dont la venue est retardée par un problème de train, l'aurait dit sans doute mieux que moi.
D'abord, le soutien au changement de chaudières est maintenu pour les foyers modestes par le biais des aides de l'ANAH. Ensuite, il faut faire preuve de cohérence : il me semble difficile d'ériger en priorité la fin des énergies fossiles, que nous souhaitons tous, tout en conservant un dispositif de soutien au chauffage au gaz. Ce sujet pourra être abordé plus longuement lors de l'examen des crédits du ministère de la transition écologique et solidaire.
Vous ne pouvez pas affirmer que vous excluez les chaudières à gaz au nom de la transition écologique. Ce n'est pas exact.
Aujourd'hui, une stratégie est menée – le Gouvernement en est partie prenante – afin de verdir le gaz. Je l'ai dit précédemment, la France dispose d'un potentiel de production de gaz vert, qui est une énergie propre, décarbonée – son cycle carbone est tout à fait acceptable – et qui permettrait de couvrir les besoins français. Le remplacement d'une chaudière au fioul par une chaudière au gaz, en supposant que la durée de vie de cette dernière lui permettra d'utiliser le gaz vert qui serait produit par notre pays, participe au verdissement du système de chauffage des particuliers.
Je souligne un point éminemment important : nous avons tout intérêt à inciter les particuliers à adopter des systèmes de chauffage raccordés à des réseaux énergétiques, qu'ils soient électriques ou gaziers, car il sera toujours plus facile de changer un réseau qu'une multitude de chaudières individuelles.
Faire le pari du tout-électrique alors même que vous n'êtes pas en mesure, compte tenu des incertitudes sur vos choix sur le nucléaire, d'assurer une capacité de production électrique française suffisante et sobre en émissions de gaz à effet de serre n'est pas le bon choix, monsieur le ministre.
Je souscris aux propos de mes collègues. Nous nous inscrivons, en effet, dans une logique de décarbonation du gaz. Les nombreux amendements déposés montrent la difficulté de l'exercice. Ainsi, lors de la pointe hivernale, l'objectif de la décarbonation n'est pas simple à atteindre avec les solutions électriques : il faut, en effet, importer de l'électricité moins décarbonée. Les chaudières à haute performance permettent de décarboner la production d'énergie.
L'amendement no 635 n'est pas adopté.
L'amendement no 2374 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marjolaine Meynier-Millefert, pour soutenir l'amendement no 2959 .
Cet amendement vise à maintenir le crédit d'impôt pour les parois vitrées, selon les mêmes modalités que l'année dernière, notamment pour le remplacement de fenêtres en simple vitrage, qui n'est pas sans intérêt pour les projets de rénovation énergétique des ménages les plus précaires.
L'année dernière, le crédit d'impôt avait été limité de manière drastique afin d'éviter l'inflation qu'avait suscitée le CITE dans son format précédent. Ce faisant, il a été mis fin aux dérives. Il importe aujourd'hui de maintenir un système d'aide pérenne et de ne pas réintroduire de l'instabilité en modifiant les règles du jeu pour la filière. Les entreprises ont besoin de stabilité – on le répète régulièrement. Je ne vois aucun intérêt à changer le modèle choisi l'an dernier, surtout si c'est pour le remplacer par un système dans lequel les aides sont trop faibles pour aider les ménages précaires à changer leurs fenêtres en simple vitrage – le reste à charge restant trop important – et trop élevées pour éviter les effets d'aubaine.
Il faut soit supprimer l'aide aux huisseries, soit la recentrer pour renforcer l'incitation à changer les simples vitrages.
Défavorable. Une concertation a eu lieu entre juillet et septembre 2019. L'ADEME et le CSTB – le Centre scientifique et technique du bâtiment – ont remis un rapport, sur les bases duquel a été instauré le barème forfaitaire prévu à l'article 4.
Je connais bien le rapport de l'ADEME et du CSTB, mais il définit des règles qui ignorent tant la problématique du reste à charge que l'aspect incitatif. Or ces deux questions doivent être traitées en priorité si l'on veut amplifier les travaux de rénovation énergétique.
L'amendement no 2959 n'est pas adopté.
Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 1655 , 1962 , 1652 et 1960 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 1655 et 1962 sont identiques, de même que les amendements nos 1652 et 1960 .
L'amendement no 1655 de M. Dino Cinieri est défendu.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement no 1962 .
Le meilleur moyen de protéger l'environnement est de diminuer nos consommations. L'amendement vise à rendre éligibles au CITE les systèmes de régulation de chauffage. Ces dispositifs sont très importants car ils permettent d'assurer une programmation et de diminuer de manière significative la consommation d'énergie. L'amendement tend à supprimer un angle mort du CITE.
Les amendements nos 1652 de M. Dino Cinieri et 1960 de Mme Véronique Louwagie sont défendus.
Quel est l'avis de la commission sur les quatre amendements ?
Défavorable. Je renvoie au rapport que j'évoquais pour l'amendement précédent.
Nous passons à côté d'une opportunité. L'amélioration de notre système énergétique passe non seulement par la réduction des consommations, mais aussi par le développement d'une intelligence de ces dernières. Le législateur a fait ce choix depuis le Grenelle de l'environnement. Des outils de mesure intelligents tels que les compteurs Linky ou Gazpar ont été créés. Désormais, il faut équiper les foyers d'outils de régulation et de programmation du chauffage permettant d'assurer une réduction de la consommation : il s'agit d'éviter que les usagers oublient de couper le chauffage en sortant, de calibrer la température au moyen d'une sonde ou de l'adapter selon le moment de la journée. C'est ainsi que nous améliorerons la performance énergétique des logements et que nous réduirons les émissions de gaz à effet de serre de notre nation.
Cet amendement vise à accompagner la transition énergétique des ménages par des mesures pragmatiques. Moins cher et bien moins volatile que les autres sources d'énergie, doté de propriétés écologiques, le bois séduit un nombre croissant de foyers français désireux de se chauffer autrement. Si 15 % des nouvelles maisons individuelles sont pré-équipées d'un appareil de chauffage au bois, l'essentiel du marché repose aujourd'hui sur l'acquisition d'un appareil de chauffage au bois dans des logements déjà équipés d'appareils alimentés par des énergies conventionnelles. Le chauffage au bois est alors utilisé comme mode de chauffage principal ou d'appoint pour réduire la facture énergétique.
Afin d'atteindre les objectifs de la PPE, il paraît donc essentiel de maintenir l'éligibilité au CITE du premier achat d'un appareil de chauffage au bois performant, qu'il soit à bûches ou à granulés. Tel est l'objet de cet amendement.
La parole est à M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis, pour soutenir l'amendement no 2385 .
Cet amendement supprime la condition de renouvellement d'un foyer fermé ou d'un insert ou d'équipement d'un foyer ouvert. Il s'agit de permettre aux ménages installant pour la première fois un appareil indépendant fonctionnant à la biomasse de bénéficier du dispositif de soutien et d'être orientés vers des appareils labellisés flamme verte.
Le sous-amendement no 3031 du Gouvernement est rédactionnel.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements et sur le sous-amendement ?
Il s'agit de réparer une erreur. Ces dispositions avaient été validées lors de la concertation mais ont été omises lors de la rédaction de l'article. Avis favorable.
Avis favorable aux amendements identiques, sous réserve de l'adoption du sous-amendement qui vise à lever le gage.
Il faut de la cohérence. Je n'ai rien contre le chauffage au bois, mais le chauffage au gaz a été exclu au motif que la France n'était pas capable d'envisager la production de gaz vert. Or le chauffage au bois est soutenu alors même qu'il n'est plus autorisé dans une partie du territoire.
Je pense à des villes comme Paris et à des territoires qui utilisent de longue date le chauffage au bois, comme la vallée de l'Arve qui sait à quel point une mauvaise gestion du chauffage au bois peut être dramatique pour la qualité de l'air.
Alors que l'on peut imaginer un système autour de la biomasse, de la méthanisation ou du gaz vert, on s'interdit de soutenir les outils de consommation. Mais pour le bois, alors que l'on est incapable de gérer individuellement, foyer par foyer, la qualité de la combustion et donc l'absence de pollution de l'air, on instaure une incitation fiscale. Je ne comprends pas la cohérence de cette mesure, même si, à titre personnel, je suis plutôt favorable au recours au bois pour le chauffage.
Vous constatez tous les limites de la modification du règlement adoptée au printemps. Vous êtes quatre à demander la parole alors que la règle veut qu'après la présentation des amendements, seuls deux orateurs s'expriment, un pour et un contre – les auteurs des amendements n'y font pas exception, madame Magnier. Cette règle, vous l'avez votée, moi non. Je sais que le président Le Fur, en particulier, partage mon analyse. Pour autant, je vais donner la parole à plusieurs d'entre vous, puisque le président de séance a la possibilité de déroger au règlement.
La parole est à M. Erwan Balanant.
Je voudrais répondre rapidement à M. Schellenberger sur le chauffage au bois. Ne vous trompez pas, les dispositifs d'aide au financement d'appareils de chauffage au bois concernent des équipements dont les rendements ne sont pas ceux des anciennes cheminées. Ce sont des appareils à haut rendement – souvent plus de 90 % – , dont les émissions sont contrôlées, de sorte qu'ils ne polluent pas. Il ne faut pas confondre la cheminée d'un vieil appartement et un poêle à granulés dont le rendement atteint 95 %, qui est extrêmement vertueux et qui offre en outre un débouché aux filières bois des territoires…
Non, monsieur Le Fur. Vous qui êtes breton, vous savez par exemple qu'il existe en Bretagne une filière productrice de granulés de bois extrêmement performante, qui fonctionne très bien, et que c'est extrêmement vertueux. Le bois est un combustible d'avenir pour le chauffage individuel, tout simplement.
J'ai entendu vos observations, monsieur le président : je serai donc très brève. Nous soutiendrons ces amendements, qui vont dans le bon sens. Nous regrettons simplement, en écho aux objections présentées tout à l'heure par le président Woerth, que les locataires ne bénéficient pas de ces dispositifs. Nous savons bien que les locataires faisaient parfois le choix d'équiper leurs logements d'appareils de ce type. Cela montre encore une fois que la transformation du CITE pose problème.
Cette disposition est une bonne nouvelle pour les chaudières à granulés de bois à haute performance, mais il est regrettable que les appareils de chauffage au gaz à haute performance ne bénéficient pas de la même clémence.
Merci, monsieur le président, de me donner la parole. Je crois que je ne fais pas partie des députés les plus bavards de cet hémicycle. Je tenais simplement à remercier M. le rapporteur général et M. le ministre : par cet amendement, nous apportons aussi un soutien à la filière française du bois. Il est important de le souligner.
Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-Agir et sur quelques bancs du groupe LaREM.
Madame Magnier, ce n'est pas en fonction des paroles déjà prononcées que le président donne la parole aux uns ou aux autres, mais en fonction du règlement.
Le sous-amendement no 3031 est adopté.
Les amendements identiques nos 1651 de M. Dino Cinieri et 1959 de Mme Véronique Louwagie sont défendus.
Je suis saisi de cinq amendements, nos 1649 , 1956 , 1439 , 2378 et 2384 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 1649 et 1956 sont identiques.
Les amendements nos 2378 et 2384 font respectivement l'objet du sous-amendement no 3033 et du sous-amendement no 3034 du Gouvernement.
Les amendements nos 1649 de M. Dino Cinieri et 1956 de Mme Véronique Louwagie sont défendus.
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l'amendement no 1439 .
Ce sont des amendements rédactionnels, qui visent simplement à supprimer une condition posée par cet article : celle que la pompe à chaleur ait pour finalité essentielle la production d'eau chaude sanitaire. Or nous souhaitons que le dispositif bénéficie avant tout aux équipements de chauffage.
Je suis favorable aux rectifications du tableau proposées par les amendements nos 2378 et 2384 sous-amendés par le Gouvernement. Ils sont certes inspirés par le même esprit que l'amendement no 1439 , mais ce dernier n'ayant pas été scindé en deux, je suis contraint d'en demander le retrait. Enfin, je suis défavorable aux amendements identiques nos 1649 et 1956 .
L'amendement no 1439 n'est pas adopté.
Le sous-amendement no 3033 est adopté.
L'amendement no 2378 , sous-amendé et modifié par la suppression du gage, est adopté.
Le sous-amendement no 3034 est adopté.
L'amendement no 2384 , sous-amendé et modifié par la suppression du gage, est adopté.
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l'amendement no 1417 .
Il vise à rendre éligibles au CITE les dépenses afférentes à l'acquisition de tout appareil permettant d'individualiser les frais de chauffage ou d'eau chaude sanitaire.
L'amendement no 1417 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Monsieur le ministre, vous excluez du bénéfice du CITE les neuvième et dixième déciles, composés de personnes censées être un peu aisées. Or le seuil du neuvième décile se situe, pour un célibataire, à 27 706 euros, et pour un couple avec deux enfants, à 56 438 euros. Selon votre définition, au-delà de ces revenus annuels, on est supposé être aisé, voire riche, et ne pas avoir besoin du soutien public.
Je suis tout à fait favorable à ce que l'on donne la priorité aux gens les plus modestes, mais il ne faut pas oublier que les contribuables appartenant aux deux derniers déciles effectuent 50 % des travaux éligibles au CITE. On se trouvera donc face au paradoxe suivant : ceux qui ont les moyens de faire quelque chose n'auront aucune aide, et ceux qui n'en ont pas les moyens devront supporter un tel reste à charge qu'ils ne feront pas les travaux. C'est d'ailleurs le rêve de Bercy, c'est bien connu : faire en sorte que l'effet d'affichage joue, mais qu'il reste sans suite.
Constatez vous-même l'accumulation : dans ma circonscription, les gens qui accèdent à la propriété n'ont plus droit au prêt à taux zéro dans le neuf ni à l'aide personnalisée au logement pour l'accession. Quant aux travaux et équipements éligibles au CITE, nous avons vu, à l'occasion de l'examen des amendements précédents, que ces personnes sont désormais privées de beaucoup d'occasions d'investir pour faire des choses pourtant très simples et reconnues comme bénéfiques.
Il faut que nous réfléchissions avant d'organiser un système qui exclura, me semble-t-il, des gens qui sont peut-être relativement favorisés, mais qui ne le sont pas tant que cela. Je rappelle que les seuils en cause se situent à 27 706 euros de revenus annuels pour un célibataire et à 56 438 euros pour un couple avec deux enfants.
Mon intervention vaudra aussi défense de l'amendement no 1428 , qui sera appelé un peu plus tard.
Marc Le Fur vient de décrire remarquablement le tour de passe-passe qui est en train de se réaliser pour les bénéficiaires du CITE. Le bâtiment est certes la première source d'émissions de CO2 dans notre pays, mais il constitue aussi un gisement d'emplois au coeur de nos territoires, à tous les niveaux de qualification. Voilà pourquoi cet amendement propose de maintenir un dispositif large en faveur de la rénovation énergétique afin de concilier écologie et économie.
Mme Pompili a déposé cet amendement afin de permettre l'utilisation du CITE pour améliorer de manière conséquente la performance thermique des logements tout en simplifiant les démarches pour les ménages. Elle retirera cependant son amendement au profit de l'amendement no 3038 du Gouvernement.
L'amendement no 2534 est retiré.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements restant en discussion ?
L'amendement no 1994 est retiré.
L'étude TREMI – « travaux de rénovation énergétiques des maisons individuelles » – de l'ADEME a montré une corrélation entre une prescription de travaux indépendante et la performance de la rénovation énergétique. Pour être efficaces, les travaux de rénovation énergétique doivent être coordonnés, et des priorités doivent être établies grâce à des études préparatoires. Le suivi de la qualité d'exécution des travaux en dépend.
Il nous paraît donc essentiel d'encourager les ménages à recourir à une maîtrise d'oeuvre afin de renforcer le niveau global des rénovations énergétiques. En effet, la preuve est faite que l'accumulation de petits travaux non coordonnés, que favorise le dispositif actuel, est particulièrement inefficace.
J'aurais voulu intervenir sur bien des points, mais beaucoup de mes amendements ont été déclarés irrecevables. Je suis donc un peu frustrée de ne pas pouvoir participer davantage aux débats.
Cela tombe bien !
Je me permettrai donc de vous proposer une analyse globale de ce que nous sommes en train d'inscrire dans la loi.
Nous avons transformé en prime un dispositif déjà existant – l'ANAH soutenait déjà les plus modestes. Il s'agit là de lutter contre la précarité énergétique, et je crois que ce que nous avons voté constitue une amélioration. Mais on ne peut pas demander à des gens qui sont déjà précaires, qui ne se chauffent déjà pas assez, de se chauffer moins : la lutte contre la précarité énergétique ne réduit pas la consommation d'énergie.
D'un autre côté, le CITE permettait de lutter contre le changement climatique, en réduisant la consommation d'énergie des ménages les plus aisés, qui se chauffent bien, y compris lorsqu'ils habitent des passoires thermiques – un appartement haussmannien à Paris, par exemple, où ils peuvent se permettre de mettre le chauffage à fond, donc de chauffer non seulement leur appartement mais aussi l'extérieur. En supprimant les aides des neuvième et dixième déciles, nous risquons de régresser dans la lutte contre le changement climatique. Une série d'amendements demandent des aides plus importantes pour des rénovations globales. Bien sûr, je soutiens l'idée de rénovations globales, mais une telle opération coûte 60 000 euros. Or le niveau de vie moyen du neuvième décile est 33 000 euros par an, et celui du dixième décile est de 57 000 euros ; autrement dit, une rénovation globale représente une ou deux années de revenus… C'est une somme importante ! Il ne faut pas renoncer à accompagner ces ménages, même s'ils sont aisés.
Il faut les inciter à agir, pour qu'ils ne se désengagent pas – aujourd'hui, ils réalisent la moitié des travaux.
La suppression de ces aides pourrait, en outre, entraîner des conséquences très importantes pour les entreprises du bâtiment ; or nous voulons soutenir ces filières vertes, dont nous avons besoin qu'elles se structurent et se consolident.
Dans la loi relative à l'énergie et au climat, nous avons fait la promesse que nous renforcerions les incitations à la rénovation énergétique, puisque nous n'imposerions pas de contraintes ou d'obligations.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Vous parlez depuis trois minutes : votre temps de parole est largement dépassé.
Défavorable.
J'ai bien compris le règlement : j'ai le droit de défendre mon amendement.
Sourires.
L'idée de cet amendement est d'encourager les ménages à réaliser des diagnostics complets de leurs maisons, afin de disposer d'une vision des travaux futurs, plutôt que de faire des petits travaux au fur et à mesure. Nous proposons donc une aide à la maîtrise d'ouvrage, ce qui me paraît essentiel.
L'amendement no 2234 n'est pas adopté.
L'amendement no 1422 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 2330 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Le projet de loi, tel qu'il est rédigé, est incohérent avec la mise en place d'un montant forfaitaire de prime et de crédit d'impôt spécifique à chaque équipement, matériel, appareil ou prestation éligible, qui incitera les ménages à se tourner vers les équipements et gestes les plus performants. En effet, une personne seule qui voudrait, par exemple, faire installer une chaudière à alimentation automatique fonctionnant au bois ou grâce à une autre biomasse performante ne pourra bénéficier que d'une somme maximale de 2 400 euros au titre du CITE, alors que le montant maximal du crédit d'impôt pour cet équipement est de 4 000 euros. Si un ménage souhaite engager une rénovation performante complète, le plafond sera très vite atteint. Dans les deux cas, cette mesure est peu incitative et risque d'orienter les ménages vers les solutions les moins performantes.
L'amendement no 725 vise ainsi à établir des plafonds d'aide plus élevés : 8 000 euros pour une personne célibataire, veuve ou divorcée, et 16 000 euros pour un couple. La majoration pour personne à charge serait de 120 à 400 euros.
Les amendements nos 726 et 727 sont des amendements de repli.
La parole est à M. Jean-Marc Zulesi, pour soutenir l'amendement no 1430 .
Cet amendement a été très bien défendu par mon collègue Anthony Cellier.
Nous proposons d'appliquer le même plafond pour un célibataire et un couple, tout en conservant une majoration supplémentaire par personne à charge.
Défavorable.
J'appelle l'attention du Gouvernement sur un problème : une rénovation globale coûte, je le redis, 60 000 euros. En fixant les plafonds de travaux à 30 000 euros, nous inciterons les gens à ne pas faire de rénovations complètes, mais à effectuer les travaux en deux fois. Nous risquons de ne pas avoir beaucoup de rénovations globales !
Je suis saisi de huit amendements, nos 1750 , 467 , 1063 , 749 , 1428 , 1937 , 2310 et 2311 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 467 et 1063 sont identiques, de même que les amendements nos 749 , 1428 et 1937 .
La parole est à M. Éric Woerth, président de la commission des finances, pour soutenir l'amendement no 1750 .
Je n'ai pas besoin d'une réponse immédiate si vous n'en disposez pas, monsieur le ministre, mais je reviens à une question que j'ai déjà posée tout à l'heure. Il y a des passoires énergétiques, et je comprends bien qu'il faut les combattre, mais il y a aussi des passoires dans le CITE. Un propriétaire bailleur n'a plus accès au CITE depuis 2014. Dans votre texte, vous excluez les locataires. Pourquoi ?
C'est une situation somme toute banale : des locataires louent un logement privé à des propriétaires. Ces logements ne sont pas toujours très récents et ne bénéficient pas tous d'une bonne isolation. Pourquoi leur refuser le bénéfice du CITE ? L'essentiel est d'isoler le logement et donc de réaliser les travaux nécessaires : qu'il appartienne à tel ou tel, c'est un autre sujet.
Mme Sylvia Pinel applaudit.
Il s'agit de conserver le bénéfice du CITE pour l'année 2020 à l'ensemble des ménages, y compris ceux dont les revenus sont élevés.
L'amendement no 1750 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 551 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement vise à encourager les propriétaires et les occupants engageant des travaux de rénovation énergétique globaux ; l'efficacité est alors bien plus grande que si l'on procède par petits pas. Or certains ménages hésitent à se lancer dans de tels travaux car le retour sur investissement n'est pas immédiat.
L'amendement no 716 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement adopté par la commission des finances règle un problème juridique : les seuils de revenus mentionnés à l'article 4 ont été arrêtés pour la métropole, mais pas pour les outre-mer, ces derniers étant renvoyés à un décret. Face au risque d'incompétence négative, nous proposons de fixer ces seuils – ils sont légèrement en deçà de ceux applicables en métropole et identiques à ceux utilisés pour les plafonds des logements locatifs sociaux.
Le sous-amendement no 3032 , accepté par la commission, est adopté.
L'amendement no 2990 , accepté par le Gouvernement, sous-amendé et modifié par la suppression du gage, est adopté.
L'amendement no 2329 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Il vise à rendre éligibles au CITE, sans condition de ressources, les contribuables qui effectueraient des travaux de rénovation globale dans des logements énergivores de classe F ou G, à condition d'aboutir, grâce à ces travaux, à des logements de classe C, B ou A.
Il vise à faire figurer la rénovation globale et performante – c'est-à-dire la combinaison de plusieurs gestes réalisés en 2020 permettant un gain d'efficacité énergétique constaté après travaux de plus de 25 % – parmi les dispositifs éligibles au CITE pour les ménages appartenant aux déciles 9 et 10.
L'amendement no 1431 de M. Jean-Marc Zulesi est défendu.
Quel est l'avis de la commission sur ces cinq amendements ?
Nous devons agir pour améliorer la rénovation énergétique, dans un objectif de lutte contre la précarité et le changement climatique. La fixation d'un montant élevé de crédit d'impôt pour les ménages habitant dans un logement de catégorie F ou G et voulant effectuer des rénovations globales correspond précisément aux engagements que nous avons pris ensemble dans la loi relative à l'énergie et au climat.
Je voulais souligner, s'agissant des amendements précédents, qu'ils renvoyaient à l'amendement no 3038 , que l'Assemblée a adopté. Je n'ai pas souhaité reprendre la parole car il me semblait que nous avions déjà eu ce débat.
L'amendement no 3037 porte sur l'extension des travaux, la pose de nouvelles cloisons intérieures et l'installation d'échafaudages en vue d'une reprise de la toiture. Il s'inscrit dans la logique d'ajustement des forfaits en fonction des capacités financières du ménage. Nous avons déjà évoqué, avec M. le rapporteur général, ces corrections apportées par le Gouvernement.
L'amendement no 2587 de M. Jean-Charles Colas-Roy est défendu.
Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?
Je demande le retrait de cet amendement, au profit de l'amendement gouvernemental.
L'amendement no 2587 est retiré.
Je souhaite simplement m'assurer que cet amendement vise bien à soutenir les installations de parois opaques, c'est-à-dire les travaux permettant de mieux isoler les murs. Il s'agirait enfin d'une bonne nouvelle pour la rénovation énergétique : il importe, en effet, de traiter l'enveloppe d'un logement avant d'en changer les éléments actifs. Il est très important que nous soutenions ces travaux lourds et compliqués, du fait notamment des échafaudages. L'adoption de cette disposition constituerait donc un bon signal.
Il serait intéressant que les autres dispositifs d'accompagnement que nous avons évoqués, notamment les primes énergie qui peuvent encourager la rénovation énergétique, soient eux aussi conditionnés au respect de cet ordre, l'isolation des murs devant précéder l'installation d'éléments de chauffage actifs.
Je vous confirme, madame la députée, que l'amendement porte bien sur les parois opaques.
Mme Marjolaine Meynier-Millefert applaudit.
L'amendement no 3037 est adopté.
Les amendements nos 2619 de M. Jean-Charles Colas-Roy, 745 de M. Vincent Descoeur, 2676 de M. Jean-Luc Lagleize et 1423 de Mme Marie-Noëlle Battistel sont défendus.
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l'amendement no 2007 .
Il s'agit d'un amendement auquel mon collègue Jean-Louis Bricout tient beaucoup. Il a d'ailleurs réussi à me convaincre sur ce sujet qui peut paraître quelque peu baroque.
Cet amendement vise à introduire une modulation du montant du crédit d'impôt selon les territoires, pour prendre en compte le fait qu'on a moins besoin d'allumer son chauffage dans le sud de la France que dans le nord. J'avoue avoir été initialement sceptique mais, au vu des données, l'impact est effectivement très sensible. La législation française introduit d'ailleurs déjà une distinction entre les territoires, selon la température qu'il y fait – même s'il est clair que, quand on vient du sud, on ne s'en rend pas tellement compte !
Sourires.
Il s'agit donc de rendre possible une majoration du CITE en fonction de la géographie, qui peut influer sur la consommation de chauffage.
Je soutiens très fermement cet amendement de mon collègue Jean-Louis Bricout. Nous avons eu de longues discussions sur cette question, à laquelle je ne croyais pas réellement au départ, et j'estime désormais qu'une véritable inégalité peut s'instaurer, en lien avec les conditions météorologiques.
Sourires.
Défavorable. J'ajouterai qu'il fait encore plus froid dans le sud – au moins dans ma commune – que dans les Hauts-de-France !
Sourires.
Je ne suis pas favorable à cet amendement, même si vous tentez de me prendre par les sentiments, madame Rabault,
Sourires
d'abord parce qu'il fait très beau dans le Nord…
Non, il y fait très beau, comme d'ailleurs dans le sud de l'Aisne ! Mais surtout, les conditions météorologiques dans les différentes régions ne peuvent pas faire l'objet d'une distinction aussi nette : le rapporteur général a raison de dire, par exemple, que les territoires de montagne sont également soumis au froid. Ce n'est pas ainsi que nous pourrons faire de la rénovation énergétique.
Il faut moduler les aides en fonction de la modestie des foyers : c'est ce que nous faisons avec la prime. Si nous devions prendre en considération les conditions d'exposition au soleil, en revanche, je crois que nous serions confrontés à de grandes difficultés. L'intention de Jean-Louis Bricout est à saluer, mais elle se heurte malheureusement à la complexité de la loi. L'incidence des conditions météorologiques serait en outre à relativiser.
Voyons, monsieur le ministre, vous qui êtes originaire du Nord, vous nous décevez !
Sourires.
Pour une fois, nous avions l'occasion, non pas de pointer le mauvais climat du Nord – au contraire, chacun sait qu'il y fait très beau et que le soleil de Tourcoing y brille – , mais de prendre en compte l'impact des conditions climatiques, au-delà du Nord ou des zones de montagne – il peut également faire froid dans le sud, n'est-ce pas, monsieur le rapporteur général ? Au vu du poids de l'énergie dans le budget des ménages que le lieu d'habitation expose malheureusement, pour des raisons climatiques, à des factures élevées, ne pourrions-nous pas envisager de travailler avec le CEREMA – le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement – à établir un zonage ? La France a toujours été capable de réaliser des zonages multiples – je pense aux quartiers prioritaires de la politique de la ville, aux zones de revitalisation rurale… Il semblerait donc possible, dans le cas présent, de définir simplement une bonification par zone.
La bonne nouvelle, c'est qu'avec le réchauffement climatique, on aura bientôt aussi un pic d'été, en plus du pic d'hiver…
Sourires.
Ainsi, dans le sud, on aura bientôt aussi besoin du crédit d'impôt pour se protéger l'été.
En tant que représentant de la partie méridionale de ce pays, et de l'Ardèche méridionale en particulier,
Sourires
je souhaitais simplement dire que, si je comprends l'idée présentée par Mme Rabault, sa mise en oeuvre me semble très délicate. En Ardèche méridionale, par exemple, la ville d'Aubenas bénéficie de 300 jours d'ensoleillement par an mais connaît aussi des hivers très froids. Il s'agit d'un des lieux présentant les plus grandes amplitudes thermiques du pays, avec moins 20 degrés l'hiver et 40 degrés l'été. Cette seule donnée suffit à résumer la complexité de l'équation.
Je savais par avance que cet amendement susciterait des réactions – encore M. Mattei n'est-il pas présent pour défendre le Béarn, ce que je devrais faire à sa place !
Sourires.
Je ne défendrai pas le nord, le sud, l'est ou l'ouest, même si la proposition est intéressante. La question essentielle réside, en réalité, dans le nombre de logements qui constituent des passoires thermiques.
Il ne s'agit pas d'un problème de température : le bassin minier, par exemple, a bénéficié du programme « Engagement pour le renouveau du bassin minier », qui a notamment concerné les logements miniers, ces derniers étant des passoires thermiques. S'il est une idée forte, c'est bien celle d'une enveloppe supplémentaire, qui nous permette de bénéficier du label rénovation tel qu'il était alors défini.
Je reste cependant persuadé qu'une étude plus spécialisée pourrait être conduite, par région et par département, pour définir précisément le nombre de logements à rénover.
Nous avons parlé du sud et du nord : il fallait également évoquer l'ouest ! L'enjeu est réel : si le temps, dans l'ouest, est relativement doux, il est aussi venteux, ce qui nécessite, là encore, une isolation. Le dispositif que vous proposez, madame Rabault, complexifie donc énormément l'approche : il faudrait pouvoir appliquer de multiples critères – le vent, la pluie… Il serait intéressant d'approfondir cette question mais, en l'état, la mesure proposée ne peut pas fonctionner.
L'amendement no 2007 est retiré.
Ce que dit M. Bruneel me paraît très juste : ce sont les bâtiments, les appartements et les maisons qu'il faut prendre en compte, et non les conditions météorologiques. La condition sociale est plus importante que la condition météorologique. Si le Nord-Pas-de-Calais ainsi que l'Aisne, le département de M. Bricout, comptent davantage de passoires thermiques qu'ailleurs, c'est parce que les gens y sont, en moyenne, plus pauvres qu'ailleurs. Là se trouve le vrai sujet.
Une deuxième difficulté tient à la complexité du dispositif proposé.
Pour conclure, il me semble nécessaire de citer ici Renaud Séchan, qui chantait que, dans le Nord, « quand y'a du soleil, c'est un mauvais présage, c'est qu'y va pleuvoir ».
Sourires.
Ils visent à conserver un crédit d'impôt pour les ménages les plus aisés. Les ménages appartenant aux déciles 9 et 10 représentent en effet, aujourd'hui, près de 50 % des projets aidés par le CITE. Exclure complètement les ménages aisés du bénéfice de la future prime risque de ralentir très fortement la rénovation énergétique des logements. Un recentrage vers les travaux les plus efficaces serait plus pertinent. La fixation d'un maximum de consommation énergétique après les travaux constituerait une solution pour s'assurer de l'efficacité de la rénovation. Tous ces amendements proposent différents seuils pour juger de l'efficacité des travaux.
Ces sous-amendements visent à mettre le futur crédit d'impôt pour les déciles 9 et 10 en cohérence avec les objectifs climatiques et énergétiques votés en 2005 dans la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte et en 2019 dans la loi relative à l'énergie et au climat. Le sous-amendement no 3017 présente un caractère général, tandis que les trois autres sont des sous-amendements de repli.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements et sous-amendements ?
J'en demande le retrait car l'amendement du Gouvernement, qui reprend la notion de dépense de rénovation globale, me semble satisfaire les objectifs présentés.
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, pour donner l'avis du Gouvernement.
Les débats ont effectivement permis d'avancer sur la question de l'accès des ménages appartenant aux déciles 9 et 10 à la rénovation énergétique, notamment au travers des travaux d'isolation. La demande me paraît donc satisfaite, d'autant que, comme l'a indiqué Gérald Darmanin, nous aurons l'occasion de continuer à travailler sur cette question dans le cadre de la navette, notamment pour ce qui relève de la rénovation globale.
L'amendement no 2387 n'est pas adopté.
Cet amendement de mon collègue Jérôme Nury, que nous avons évoqué en commission des finances, tend à supprimer la limitation de l'amende à 50 % de l'avantage fiscal indûment obtenu. Il nous a été répondu qu'il était satisfait : si c'est toujours le cas, je le retire.
Une ambiguïté subsistait quant au fait de savoir si l'amende consistait en un remboursement de 50 % de l'avantage obtenu. En réalité, elle s'ajoute au remboursement de 100 % des sommes indûment perçues. L'amendement peut donc être retiré.
L'amendement no 2308 est retiré.
L'amendement no 2335 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Il vise à garantir qu'avec la réforme du CITE, les ménages modestes ne verront pas diminuer le niveau du soutien dont ils bénéficient. Aujourd'hui, ces ménages peuvent cumuler le CITE et les aides accordées par l'ANAH dans le cadre du programme « Habiter mieux ». Le projet du Gouvernement prévoyant une fusion de toutes ces aides, l'amendement tend à préciser que les caractéristiques et les conditions d'octroi de la prime à la rénovation énergétique devront être au moins aussi favorables pour les ménages modestes que le cumul du CITE et des aides de l'ANAH.
Jusqu'à présent, certains ménages pouvaient bénéficier à la fois du CITE et de la prime de l'ANAH. Nous ne voudrions pas qu'avec la réforme du CITE que vous prévoyez, et qui tend à fusionner plusieurs aides, ces ménages perçoivent moins que précédemment.
Par ailleurs, madame la secrétaire d'État, le rapport sur la prime de l'ANAH, dont le Gouvernement avait annoncé la remise au Parlement pour septembre, n'a toujours pas été remis, de telle sorte qu'il nous faut voter sur un dispositif que vous voulez modifier sans que nous disposions des données que vous vous étiez engagée à nous fournir.
L'amendement no 2388 de la commission du développement durable est défendu.
Quel est l'avis de la commission sur ces cinq amendements identiques ?
Je demande leur retrait. Leurs auteurs attendent que Mme la secrétaire d'État confirme que la nouvelle prime sera toujours plus intéressante que le cumul entre le CITE et l'aide fusionnée de l'ANAH. Cela me semble être la seule question posée.
Par ailleurs, on ne facilite pas le travail du Parlement, en particulier celui du rapporteur général, en ne remettant jamais les rapports attendus, notamment dans le cas d'une réforme telle que celle-ci. Ce rapport était en effet attendu en septembre : il serait bon que le Gouvernement respecte le Parlement sur de telles questions.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM, LR, MODEM, SOC et UDI-Agir.
Quand le Gouvernement propose un mécanisme de fusion entre les aides de l'ANAH et le CITE, ce n'est évidemment pas pour que cela se fasse au détriment des ménages les plus modestes. Il s'agit d'un mécanisme de simplification, qui permettra aussi d'avoir accès plus rapidement à l'aide, puisqu'un crédit d'impôt, qui était versé ex post, est remplacé par une prime. Le barème a été conçu à la fois pour soutenir en particulier les travaux de rénovation des ménages très modestes et modestes, et pour s'adapter mieux aux différents types de rénovations en étant proportionnel à la tonne de CO2 évitée. Cependant, pour ce qui concerne les ménages modestes et très modestes, le barème sera plus favorable dans la version fusionnée que dans la version précédente en cas de cumul de la prime de l'ANAH et du CITE.
Mme Marjolaine Meynier-Millefert applaudit.
L'amendement no 2584 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 2336 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme la secrétaire d'État, pour soutenir l'amendement no 3036 .
Cet amendement important vise à permettre de mieux lutter contre la fraude dans le nouveau régime, qui fusionne dans cette nouvelle prime l'ancienne aide de l'ANAH et l'ancien CITE. En effet, dans le régime actuel des primes de l'ANAH, les ménages peuvent s'en remettre à un mandataire qu'ils désignent pour recevoir à leur place l'argent de la prime. Or, dans certains cas, il peut y avoir des abus et des risques, avec des mandataires qui ne sont pas dignes de la confiance que nos concitoyens leur accordent. L'amendement vise donc à renforcer les conditions et le contrôle de la capacité à être habilité comme mandataire. Nous pourrons ainsi nous assurer que les intermédiaires désignés par les Français pour recevoir la prime à leur place, ce qui leur évite de faire l'avance des frais au moment des travaux, soient dignes de confiance.
Le régime de sanctions mis en place est similaire à celui qui existe pour les certificats d'économie d'énergie, et donc cohérent. Avis favorable.
Je tiens à saluer tous les dispositifs mis en place par le Gouvernement pour lutter contre les fraudes, qui sont un vrai problème et jettent le discrédit sur l'ensemble des artisans qui, pour la plupart, travaillent sérieusement et dans la légalité.
Nous lutterons également contre les fraudes en insistant beaucoup sur la formation. Aujourd'hui, en effet, la France dispose d'un outil de production capable de réaliser 350 000 ou 400 000 rénovations par an, de différents degrés d'importance. Or si, en même temps que l'on massifie les rénovations, on n'augmente pas au même rythme le nombre de formations dispensées pour accroître le nombre d'artisans capables de travailler sur la rénovation énergétique, les fraudes seront inévitables et on trouvera des non-professionnels qui feront de travaux. Il faut donc travailler en même temps sur la formation des professionnels, et je sais que Mme la secrétaire d'État est sensible à cet aspect.
L'amendement no 3036 est adopté.
Je suis saisi de quatre amendements, nos 1495 , 94 , 268 et 2391 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 94 , 268 et 2391 sont identiques.
L'amendement no 94 fait l'objet de deux sous-amendements,
Les amendements nos 1495 de M. Dino Cinieri et 94 de M. Vincent Descoeur sont défendus.
La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l'amendement no 268 .
Nous demandons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport évaluant, pour chaque type de travaux bénéficiant du crédit d'impôt ou de la prime de transition énergétique, divers indicateurs que je ne détaillerai pas ici. Il s'agit de mettre en parallèle les émissions de gaz à effet de serre évitées et le montant des aides accordées. Tout cela répond, bien entendu, à l'objectif d'optimiser la dépense publique et d'orienter les aides vers les opérations les plus efficaces.
La parole est à M. Jean-Marc Zulesi, rapporteur pour avis, pour soutenir l'amendement no 2391 .
Cette évaluation a pour objet de rationaliser la dépense publique, ce qui est essentiel en ces temps. Surtout, il s'agit de pouvoir contribuer plus efficacement à des dispositifs tournés vers la transition énergétique et écologique.
Il me semble prématuré de demander, dans les six premiers mois de son entrée en vigueur, un rapport visant à évaluer le dispositif, ne serait-ce que parce que celui-ci sera mis en oeuvre en deux fois : cela commencera avec la prime elle-même à compter d'avril 2020, la suite de la transformation intervenant en 2021.
Par ailleurs, nous avons voulu installer un observatoire de la rénovation, qui était absolument indispensable car les données dont nous disposons sont trop parcellaires. Cet observatoire, confié au CGDD, le Commissariat général au développement durable, qui relève du ministère de la transition écologique et solidaire mais qui travaillera avec tous les acteurs, devrait nous permettre de disposer des données nécessaires. Le Gouvernement est donc défavorable à cette demande de rapport.
Je saisis néanmoins cette occasion de redire que nous allons continuer à travailler sur la question des propriétaires bailleurs, qui a été soulevée en commission des finances. Pouvoir leur ouvrir le dispositif dès l'exercice 2021 doit faire partie de nos objectifs.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et LT.
L'amendement no 1495 n'est pas adopté.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 2863 .
Cet amendement, adopté par la commission des finances, tend à demander au Gouvernement la remise d'un rapport sur l'opportunité d'élargir la prime de transition énergétique aux propriétaires bailleurs.
Sagesse.
C'est le qualificatif qui vous va le mieux, monsieur le rapporteur général !
Sourires.
L'amendement no 2863 est adopté.
Afin d'évaluer au mieux la pertinence de la transformation du dispositif du CITE, apprécié des Français et utile dans nos objectifs d'économies d'énergie et pour nos engagements environnementaux, il conviendrait que le Gouvernement établisse, au plus tard au 1er septembre 2022, un rapport indiquant le coût total qu'aura représenté le CITE pour les finances publiques jusqu'à sa suppression au 31 décembre 2020 et le coût de la nouvelle prime forfaitaire dans sa forme définitive au 1er janvier 2021.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l'amendement no 759 .
Madame la secrétaire d'État, vous dites qu'un rapport au bout de six mois serait prématuré. Or, si la disposition prend effet au mois d'avril, nous aurons une vision claire sur le plan des finances publiques six mois plus tard, c'est-à-dire en octobre, alors que nous examinerons le prochain projet de loi de finances, ce qui n'est pas anodin. L'impôt étant contemporain, nous aurons une vision précise des conséquences sur les déciles d'une part, et sur les finances publiques d'autre part.
Au début de l'examen de l'article 4, j'ai pointé du doigt une ambiguïté concernant une perte de 100 ou 150 millions d'euros par rapport à la situation actuelle, compte tenu du coût de la fameuse prime et de celui de la prorogation du CITE. Il me semble donc important qu'au moment où nous discuterons du projet de loi de finances pour 2021, nous connaissions les conséquences de l'instauration de cette prime sur les déciles.
Demande de retrait, sinon avis défavorable. J'insiste sur le fait que, si nous avions disposé de ce rapport, dont la remise était prévue en septembre, il n'y aurait pas eu de demande de rapport complémentaire.
J'entends la remarque de M. le rapporteur général sur le fait que le rapport prévu aurait pu être utile à la réflexion des parlementaires.
S'agissant du caractère contemporain de l'impôt, je précise que ce ne sera pas le cas du CITE. L'an prochain, la prime sera bien versée de façon contemporaine, mais le CITE sera, lui, toujours versé avec un an de décalage. L'année prochaine, les parlementaires ne pourront donc pas encore avoir de vision claire sur les conséquences du versement du CITE et de son utilisation par les Français.
Comme nous le disions tout à l'heure, si nous demandons un rapport, c'est parce que nous avons un doute en ce qui concerne la réforme du CITE. Vous poursuivez à la fois un objectif écologique, un objectif social et un objectif budgétaire, si bien qu'il est difficile de percevoir quel sera l'impact réel de cette réforme. Dites-nous aujourd'hui si l'objectif écologique est bien prioritaire.
Je suis favorable à la transformation de ce dispositif en prime pour les ménages les plus modestes, mais je suis gêné qu'on en exclue les 20 % des ménages les plus aisés, qui représentent tout de même 50 % des bénéficiaires de ce crédit d'impôt. Il faut assumer ensemble le fait que la transition énergétique doit aussi être qualitative. C'est sur ce point que nous nourrissons des inquiétudes.
Il s'agit également d'une demande de rapport afin de s'assurer de l'efficacité des dispositifs contenus dans ce projet de loi de finances. Nous avons émis des doutes à propos de la transformation du CITE pour les ménages les plus modestes. Le problème des propriétaires bailleurs et celui des locataires ont également été évoqués. Il est important d'évaluer les dispositifs que nous votons.
Demande de retrait ou avis défavorable, comme pour toutes les autres demandes de rapport.
Je partage le souhait d'une évaluation de cette réforme importante, qui va changer beaucoup de choses, par exemple en transformant, en deux temps, plusieurs aides – dont une aide fiscale – en une prime. Il faut aussi accomplir, autour de cette réforme, un travail important d'accompagnement et d'information des ménages, et mener une réflexion sur la montée en compétences des artisans et la lutte contre la fraude. Il s'agit d'une réforme globale, qui suppose que nous en présentions une évaluation et des résultats. Mais un rapport remis trois mois après la promulgation de la loi ne pourrait pas nous fournir une vision globale et opérationnelle de l'impact de cette réforme, dont l'application s'étalera sur une durée plus longue.
Je salue l'intention qui sous-tend cet amendement, y compris la demande d'un travail sur la rénovation globale. Je salue les travaux de la commission des finances et de la commission du développement durable, qui nous ont permis d'introduire la rénovation globale pour les déciles 5 à 8 et d'exprimer notre volonté de continuer à travailler, dans le cadre de la navette, sur le même sujet pour les déciles 9 et 10, auxquels nous avons par ailleurs accordé des mesures de soutien concernant l'isolation. Il faudra poursuivre notre travail sur ces différents dispositifs, mais un rapport remis dans un délai si court ne nous aiderait pas à avancer. L'avis est donc défavorable.
J'entends les arguments de Mme la secrétaire d'État et son engagement à poursuivre le travail sur tous ces points. J'ajoute au programme la question des propriétaires bailleurs et des locataires, que nous avons déjà évoquée, compte tenu de son impact économique et de son importance dans la lutte contre les passoires énergétiques. Si nous voulons vraiment être efficaces, nous ne pouvons pas passer à côté de ces sujets.
L'amendement no 2373 est retiré.
Je m'engage à ce que la question des propriétaires bailleurs fasse l'objet d'études complémentaires.
L'amendement no 1738 concerne le reste à charge zéro. Il nous paraît urgent et nécessaire de rendre accessible le plus rapidement possible un soutien financier à la rénovation performante, par exemple sous forme de prêts bonifiés, en s'adossant à un acteur financier. Notre amendement vise à faire en sorte que, grâce à la mobilisation des financements existants, le reste à charge pour les plus modestes tende vers zéro dès que ceux-ci engagent des travaux leur permettant d'atteindre le niveau d'exigence du label BBC rénovation. Nous proposons que les publics concernés puissent cumuler la prime de transition énergétique et les financements du programme « Habiter mieux sérénité » de l'ANAH.
L'amendement no 1763 porte sur le label BBC rénovation. Les outils actuels de financement de la transition énergétique n'incitent qu'à des travaux uniques et non coordonnés, au détriment des rénovations efficaces. La plupart des acteurs et analystes sont d'accord pour considérer que nous n'arriverons pas à atteindre l'objectif de 500 000 rénovations par an, fixé par la loi, sans encourager les propriétaires. Seules quelques dizaines de milliers de rénovations de ce type sont réalisées chaque année. Sans aide suffisante, les ménages continueront à privilégier les travaux d'urgence et peu ambitieux au détriment de la planète et de la facture énergétique. Par cet amendement, nous invitons donc le Gouvernement à remettre au Parlement un rapport pour avancer sur ce dossier et aboutir à des propositions concrètes.
S'agissant de l'amendement no 1738 , je tiens à dire que la transformation en prime ne relève pas de la même logique qu'un reste à charge zéro. Elle suppose en effet une contribution, au moins partielle, à la rénovation énergétique. On ne parle pas d'une paire de lunettes ! L'avis est donc défavorable.
Quant à l'amendement no 1763 , il est satisfait et donc sans objet, puisque l'amendement du Gouvernement que nous venons d'adopter élargit le CITE aux opérations de rénovation globale pour les ménages intermédiaires. L'avis est donc défavorable, à moins que l'amendement ne soit retiré.
Même avis que M. le rapporteur général.
Le cumul de l'offre « Habiter mieux sérénité » et du CITE ne me paraît pas souhaitable puisque la première est une aide à la rénovation lourde, d'un montant très élevé, qui accompagne les ménages modestes ou très modestes en rendant possible la réalisation de travaux. Dans ce projet de budget, nous augmentons d'un peu plus de 100 millions d'euros les crédits de l'ANAH pour le programme « Habiter mieux sérénité », un dispositif qui fonctionne très bien. De ce point de vue, l'amendement no 1738 me semble satisfait.
L'amendement no 1763 est également satisfait puisque, comme l'a dit M. le rapporteur général, vous venez d'adopter un amendement du Gouvernement prévoyant une aide à la rénovation globale pour les ménages des déciles 5 à 8. Je m'engage à ce que la question de la rénovation globale pour les déciles 9 et 10 continue à être approfondie au cours de la navette.
Tout en saluant le travail accompli concernant l'ANAH et les ménages intermédiaires, j'apporte mon soutien à l'idée de tendre vers un reste à charge nul pour les ménages très précaires. Ces derniers ont en effet des difficultés à mener à bien des travaux en raison du reste à charge, qui constitue toujours pour eux un obstacle insurmontable. Or on sait que les conséquences du mal-logement ont un coût financier ; si l'on investissait l'argent nécessaire à l'éradication de ce fléau, le retour sur investissement serait positif au bout de dix-huit mois. Monsieur le rapporteur général, si vous raisonnez en termes d'économies, sachez que le fait de ne laisser aucun reste à charge s'avérerait une solution plus rentable.
L'article 4, amendé, est adopté.
La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à la prochaine séance.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2020.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt heures dix.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Serge Ezdra