Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Réunion du mercredi 14 octobre 2020 à 9h30

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • oeuvre
  • pénitentiaire
  • stupéfiants

La réunion

Source

La réunion débute à 9 heures 35.

Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet, présidente.

La Commission procède à un bilan de son activité et de l'application des textes promulgués relevant de sa compétence, puis de la mise en œuvre de certains de ses travaux.

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En trois ans, notre commission s'est réunie 350 fois, ce qui représente 15 % des réunions des huit commissions permanentes, nous situant un peu au-dessus de la moyenne. Ces 350 réunions représentent un total de 674 heures, dont 194 heures au cours des 94 réunions de la session 2019-2020. Cette année l'impact du confinement se lit dans l'ensemble de nos travaux.

Au cours de la législature, nous avons examiné 112 textes, dont 54 propositions de loi (PPL) (soit 48 %). À chaque fois qu'il existe une journée réservée, quel que soit le groupe qui en est titulaire, il y a toujours des textes pour la commission des Lois. Nous dénombrons par ailleurs 38 projets de loi (PJL) au fond, 8 PJL pour avis et 10 propositions de résolution (PPR) examinés par la Commission. Il faut noter que 41 PPL venaient de l'Assemblée nationale et 15 du Sénat.

En 2019-2020, nous avons examiné 35 textes, dont 15 PJL au fond, 1 seul PJL pour avis, ce qui est peut-être un effet de la réforme du règlement, 15 PPL au fond et 4 PPR.

Entre 2017 et 2020, 11 000 amendements ont été examinés, et 25 % d'entre eux ont été adoptés. Lors de la session 2019-2020, 2 300 amendements ont été examinés, 559 d'entre eux ont été adoptés. Ce total de 11 000 amendements est supérieur à celui de la XIIIe législature (10 500 amendements) mais encore inférieur à celui de la XIVe législature (17 000 amendements).

La commission a entendu 57 personnes en 2019-2020. Dans le contexte épidémiologique que nous connaissons 32 auditions se sont tenues en visioconférence, ce qui a contribué à augmenter les chiffres. Ont été entendues 5 personnes en application de l'article 13 de la Constitution et 14 membres du gouvernement. Au total, sous la XVe législature, 137 personnes ont été entendues par la commission des Lois, ce qui est colossal. 34 % de ces auditions concernent des membres du gouvernement.

Les rapporteurs ont entendu 1 100 personnes durant la session 2019-2020, dont 300 personnes pour des rapports législatifs au fond et 200 personnes pour des rapports législatifs pour avis (dont les projets de loi de finances). Au total, 4 600 personnes ont été entendues par les rapporteurs au cours de la XVe législature. Les chiffres contredisent donc l'affirmation selon laquelle la législation s'opérerait hors sol, sans consultation des bons connaisseurs des sujets examinés.

Au cours de la session 2019-2020, 55 rapports législatifs (45 rapports au fond, 10 rapports pour avis) et 15 « autres rapports » (10 rapports de missions d'information, 4 rapports sur des PPR et un autre rapport d'information) sont comptabilisés. Sur la période 2017-2020, 175 rapports législatifs (soit 15 200 pages) et 38 « autres rapports » (soit 3 600 pages) sont comptabilisés.

Par ailleurs, 33 missions d'information ont été menées par la commission, et quatre groupes de travail ont été constitués autour du thème de la détention. La XVe législature a d'ores et déjà mené davantage de missions d'information que les législatures précédentes (19 pour la XIVe législature, 24 pour la XIIIe législature). Les rapporteurs de certaines missions présenteront tout à l'heure les suites données à leurs travaux par le gouvernement.

Sur les 11 commissions mixtes paritaires (CMP) comptabilisées en 2019-2020, 9 ont été conclusives. Sur les 35 CMP dénombrées sur l'ensemble de la législature, 26 ont été conclusives pour 9 échecs comptabilisés. Ces résultats sont satisfaisants. Il est important de réussir à converger quand cela est possible.

S'agissant des travaux en séance, la commission des Lois y a passé 156 heures en 2019-2020, et 735 heures sur l'ensemble de la législature. Environ un quart des séances publiques (23 %) sont conduites par des rapporteurs de la commission.

En outre, 46 % des lois promulguées depuis le début de la législature (soit 64 lois) ont été examinées au fond par la commission des Lois, ce qui atteste une très forte activité législative.

Le taux d'application des lois promulguées s'élève à 86 %. 271 dispositions sur 314 appelant un décret ont reçu application. 7 lois sont en attente de décrets d'application. J'ai écrit à chaque ministre concerné et au ministre chargé des relations avec le Parlement le 8 octobre, en leur listant les textes qui attendaient un ou plusieurs décrets d'application et en leur demandant des explications sur le retard pris.

39 rapports ont été demandés dans les textes examinés au fond par la Commission : 13 ont été remis, 26 sont attendus et 7 sont en retard. J'ai demandé aux ministres que les rapports ayant une date échue nous soient remis. Je vous tiendrai informés des réponses qui me seront apportées.

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Pouvez-vous nous dire ce que représente l'activité de la commission des Lois par rapport à l'activité globale des commissions de l'Assemblée nationale ?

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Les réunions de notre commission correspondent à 15 % des réunions de l'ensemble des commissions. Nous nous réunissons donc un peu plus que les autres. Notre commission représente surtout 45 % de l'activité législative. Elle est en effet plus législative que d'autres commissions, notamment la commission des affaires étrangères ou celle de la défense.

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Il serait intéressant que la présidence mette à notre disposition une présentation globale de l'activité de toutes les commissions. J'aimerais également connaître le nombre des PPL adoptées, car il est très difficile de les faire aboutir.

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Il existe un bilan statistique global et des données pour chaque commission, je pourrai vous les fournir. Par ailleurs il arrive que des groupes inscrivent à l'ordre du jour un grand nombre de PPL qui ne peuvent être examinées en séance dans le temps qui leur est imparti. Les administrateurs effectuent un travail fouillé, et il est très gênant qu'il n'arrive pas jusqu'à la séance publique. Cela revient à utiliser les moyens de l'Assemblée à des fins qui ne sont pas celles pour lesquelles ils existent.

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À l'instar de ce que nous avons fait l'année dernière, j'ai souhaité effectuer un focus sur des lois que nous avons votées et des rapports d'information que nous avons rédigés. Durant les 18 mois de mandature qu'il nous reste, j'aimerais que nous soyons attentifs aux suites données au travail déjà effectué. Je vous propose de commencer par la loi n° 2018-1244 du 27 décembre 2018 visant à faciliter la sortie de l'indivision successorale et à relancer la politique du logement en outre-mer.

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Il y a maintenant près de deux ans, nous avons voté un texte de combat contre l'indivision successorale outre-mer, ce qui est justifié par la situation catastrophique dans laquelle se trouvent ces territoires en matière foncière. Dans certains départements et régions d'outre-mer, la moyenne des terres en indivision se situe entre 40 % et 50 %, ce qui entraîne des blocages fonciers, des problèmes de sécurité et des difficultés sanitaires.

La principale disposition de la loi consiste à passer de la règle de l'unanimité à la règle de la majorité simple pour disposer des biens immobiliers en indivision. À partir de 51 % des droits, les indivisaires peuvent solliciter le notaire pour établir l'acte de vente ou de partage. En cas de contestation, une procédure judiciaire classique est engagée.

Dans ce dispositif, la place du notaire est centrale. Or, la profession considère qu'il existe des risques qui peuvent exposer ses membres à des contentieux. Depuis deux ans, nous avons subi un retard qui a obligé le Gouvernement à prendre un décret que la loi n'exigeait portant pas, notamment en matière d'affichage et de publicité des actes. Grâce à la Chancellerie, ces problèmes sont en voie de résolution. Mais nous considérons qu'il faut aller plus loin en faisant respecter, d'une façon ou d'une autre, l'obligation d'instrumenter.

Il faut également aller plus loin en matière de gouvernance et d'accompagnement des populations. Dans certains territoires, un protocole a été instauré. Des « référents indivision » ont été nommés dans les communes ; des soutiens aux familles les plus démunies ont été organisés. Les avocats et les juridictions se sont mobilisés. Le travail de concertation doit se poursuivre, de sorte que les notaires puissent assumer leurs responsabilités et établir les actes comme le garde des Sceaux les a récemment incités à le faire à l'occasion de leur congrès annuel.

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Je rappelle, en préalable à mon intervention, que nous avions approuvé cette loi à l'unanimité. Le problème de l'indivision successorale bloque totalement les opérations d'aménagement alors que les collectivités ont besoin de développer des activités.

Nous n'avons identifié aucune malfaçon dans cette loi, qui ne nécessitait d'ailleurs aucun décret. Néanmoins, elle connaît des difficultés à entrer en application. On nous a rapporté qu'elle était toutefois dissuasive : c'est parce que sa mise en œuvre est possible que certains indivisaires ont trouvé des solutions plus rapidement qu'ils ne l'auraient fait auparavant. C'est déjà un point qu'il faut saluer : les personnes concernées cherchent parfois à éviter que la loi ne s'applique en s'accordant sur des solutions amiables, ce qui est finalement une façon d'atteindre l'objectif que s'était assigné le législateur.

Nous avons parfois peiné à comprendre pourquoi certains praticiens refusaient la mise en œuvre de la loi, mais je pense que nous allons pouvoir dépasser cette difficulté. Il faut convenir que la difficulté d'établir la généalogie de la succession est une réalité que complique le nombre d'indivisaires, souvent sur plusieurs générations. Quand elle est se double d'une valorisation des successions basée sur la valeur actuelle du bien et non sur sa valeur potentielle, ce n'est pas évident d'instrumenter. Peut-être un soutien financier des professionnels serait-il nécessaire…

Nous avons compris que certaines successions ne sont tout simplement pas ouvertes parce que les personnes qui occupent les lieux craignent d'en être chassées. Il convient de les accompagner dans leurs démarches. Peut-être faudrait-il envisager une évolution législative pour les cas où il existe un motif d'intérêt général majeur, comme la mise en œuvre d'un schéma d'aménagement. Cela permettrait l'acquisition des biens nécessaires au développement du territoire par les pouvoirs publics.

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Cette question de l'indivision n'est pas nouvelle. Plusieurs textes législatifs antérieurs à la loi dont nos collègues ont suivi l'application se fondaient sur les mêmes constats.

Je partage les propos des rapporteurs : il n'y a pas de malfaçon dans la loi. Sur le papier, la question était bien réglée. Mais les normes législatives se heurtent à des incompréhensions, des résistances psychologiques et des réalités sociales. Chaque territoire a sa mentalité, ses traditions, son rapport à la terre et à la propriété. Il en résulte que nous ne parvenons pas à franchir certaines étapes. Ce travail prendra du temps. Il faut que les notaires jouent le jeu, mais la question de la généalogie pose un problème réel. Or, il faut que celle-ci soit complète. La valorisation du bien n'est pas aisée non plus. Il existe beaucoup de résistances pratiques qui ne relèvent pas de la mauvaise volonté mais qui limitent l'impact de la loi.

En outre, le deuxième objectif de cette loi consistait à relancer la politique du logement outre-mer. Il n'est pas toujours possible d'acquérir les terrains privés, mais il faut tout de même insister sur cette nécessité du logement : les besoins y sont encore plus fondamentaux que dans le reste du pays.

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Il est important que nous tenions ce point d'étape aujourd'hui. Vous illustrez bien les difficultés d'un texte voté à l'unanimité mais pour lequel nous n'obtenons pas les résultats attendus. M. Fabien Matras et moi-même avons mené une mission d'information sur le travail des notaires, qui me semble faire écho à vos interrogations sur la déontologie et sur l'obligation d'instrumenter.

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Il faut distinguer les vraies inquiétudes des faux problèmes. La crainte qu'un notaire soit attrait à un contentieux après avoir établi un acte est légitime, même si elle nous semble infondée. En revanche, sur la question de la généalogie, il existe une obligation de moyens, pas une obligation de résultats. Cette confusion est-elle volontaire ? Je ne ferai pas de procès d'intention, mais je m'interroge.

J'entends que le temps passé à ouvrir la succession et à la régler, à identifier les différentes branches, notamment quand la personne est décédée depuis trente ou quarante ans, ne correspond pas aux honoraires perçus. Plusieurs notaires m'ont dit qu'ils y avaient consacré beaucoup de temps sans résultat. Il faut absolument résoudre ce problème, que ce soit par la coercition ou par l'incitation.

L'interrogation portant sur les modalités de la publicité a été réglée par un décret, qui n'était pas obligatoire, mais qu'il serait judicieux d'accompagner de directives d'application. Il conviendrait également de soutenir des familles fragiles, par exemple en suggérant au ministère des Outre-mer de mobiliser des moyens financiers dans ce but. Il reste tout de même étonnant qu'après deux ans, le texte n'ait été appliqué ni à La Réunion, ni en Martinique, ni en Guadeloupe.

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Il existe bien une obligation de déclencher et d'ouvrir les successions, mais il faut tenir compte du fait que celles dont nous parlons sont un peu particulières. Il faut également saluer l'attitude des collectivités locales qui se sont beaucoup impliquées pour accompagner les personnes concernées. Il suffira d'un exemple réussi pour lancer le mouvement. J'espère que les collectivités locales, par leurs outils d'aménagement et de maîtrise foncière, y parviendront.

Je vais conclure sur la dernière remarque de M. Philippe Gosselin. L'un des débats que nous ayons eus lors de la discussion de la loi portait sur son titre, la question étant de savoir si le mot « logement » devait y apparaître. Certains collègues ultramarins ne le souhaitaient pas. Je pense que nous avons finalement atteint un équilibre : la nécessité du logement s'impose, mais elle n'est pas incompatible avec le respect de l'identité des outre-mer.

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La parole est maintenant à Mme Alice Thourot, qui a travaillé sur l'application de la loi de 2018 sur les caméras mobiles.

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Le texte relatif à l'harmonisation de l'utilisation des caméras mobiles par les autorités de sécurité publique a été voté le 31 juillet 2018 et publié le 3 août suivant.

Les deux premiers articles visaient respectivement la mise en œuvre d'une expérimentation des caméras mobiles par les sapeurs–pompiers et par les agents de l'administration pénitentiaire. Le troisième article avait pour objet la pérennisation de ce dispositif pour les polices municipales. Le bilan de l'application de ce texte est très positif.

En 2018, s'agissant des polices municipales, le constat était unanime : il fallait que le dispositif soit pérennisé et étendu. Des délais importants de mise en œuvre de la loi ont néanmoins été observés, le décret d'application ayant été complexe à rédiger. L'intérêt des caméras mobiles est notamment de pacifier les relations entre les agents de police municipale et la population. Si, en 2018, nous avions disposé d'un rapport d'évaluation recensant l'utilisation des caméras par les communes, il n'est prévu de poursuivre cette pratique. Cela constitue une piste d'amélioration possible. Une autre évolution envisagée est celle de la récupération des images en temps réel.

En ce qui concerne les pompiers, 14 départements ont été équipés de ces caméras mobiles, ainsi que les sapeurs-pompiers de Paris. Le décret d'application de la loi du 3 août 2018 a été pris le 17 juillet 2019.

Des groupes de travail ont été mis en place dans les onze premiers SDIS qui expérimentent le dispositif. Trois axes de travail sont identifiés : la déclinaison territoriale du décret, le cahier des charges technique, la définition d'une doctrine d'emploi. Les caméras ont été embarquées lors de 250 000 interventions, et utilisées à 303 reprises. Dans 60 % des cas, la fonction préventive est remplie ; dans 86 % des cas, la présence du matériel apaise la situation, ce qui est l'objectif poursuivi. Quatre axes d'amélioration ont été définis : systématiser le dépôt de plainte en cas d'agression ; ajouter au texte que l'utilisation du matériel doit se faire « en tous lieux » ; supprimer la mention relative au secret médical ; travailler sur le suivi de la réponse pénale.

L'expérimentation auprès des agents de l'administration pénitentiaire prendra fin en 2022. Le décret d'application date de décembre 2019 et intègre un cadre d'évaluation très structuré. Un comité d'évaluation et de pilotage a été mis en place. Il faut noter que la situation sanitaire du pays a retardé la mise en œuvre du dispositif, dont le démarrage date du 15 septembre 2020. Un rapport sera réalisé en septembre 2021. Le dispositif a été mis en place dans des quartiers spécifiques, ainsi que dans le cadre de la lutte contre la radicalisation des détenus. Il est important que toutes les interventions soient filmées afin de disposer d'un retour en termes de formation. 40 personnes des services déconcentrés ont été formées afin de pouvoir faire des remontées de terrain. Les images seront utilisées à des fins pédagogiques. Chaque expert devra remplir un formulaire, lequel comporte cinq axes d'analyse : les types d'incidents, les types de missions, les types d'interventions, le contexte de la détention et les pointages mensuels. Enfin, je précise que 640 caméras ont été distribuées dans le cadre de cette expérimentation.

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Avant de lire votre rapport, j'étais défavorable à l'utilisation des caméras par les pompiers, car je pensais qu'elle compliquerait la relation de confiance avec les victimes, mais j'ai changé d'avis, les retours de terrain étant positifs. Dans les départements qui ont participé à l'expérimentation, des chiffres montrent-ils une diminution des agressions envers les sapeurs-pompiers ? Mais peut-être est-ce trop tôt pour le dire.

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Cette évaluation ne peut pas être très probante en ce qui concerne l'administration pénitentiaire, compte tenu des difficultés que vous avez évoquées. Je m'interroge moi aussi sur l'impact positif du dispositif sur l'ampleur des incidents et éventuellement des violences. Il faudrait que le retour sur investissement soit probant à cet égard. Par ailleurs, y a-t-il eu des contrôles sur les images stockées ? Comment ces stocks d'images sont-ils gérés ? Qui détient ces images, et pour combien de temps ?

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Je suis demandeur de statistiques sur les effets de l'utilisation des caméras. Le Président de la République a récemment fait une annonce sur l'extension du dispositif. Quelles conséquences ce prolongement aura-t-il sur votre travail ?

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J'aimerais vous entendre sur la question du traçage. Par ailleurs, avez-vous des chiffres à nous donner sur le retour sur investissement ? Quel est le coût d'une caméra ?

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Je ne connais pas le prix d'une caméra, mais je me renseignerai pour vous fournir cette information. Le dispositif des caméras mobiles a pu faire peur au départ, mais l'effet est positif sur le terrain, les échanges s'en trouvant pacifiés. La plupart du temps, le matériel n'est pas utilisé mais joue un rôle dissuasif.

Les premiers indicateurs sont similaires pour les pompiers et les policiers municipaux. Je vous invite à lire le rapport qui avait été présenté en juillet 2018 sur les polices municipales. Il permettait de comprendre pourquoi le dispositif contribue à pacifier les échanges.

Nous ne pouvons pas tirer de conclusion sur l'utilisation du matériel par les agents de l'administration pénitentiaire, puisque l'expérimentation n'a été mise en place que le 15 septembre. Un travail très important a été fourni pour fixer le cadre d'évaluation avec les agents et les partenaires sociaux.

S'agissant des pompiers, les images n'ont pu être utilisées pour des poursuites que dans 4 % des cas. La caméra n'est pas toujours allumée, et le dispositif est assez peu utilisé dans le cadre des procédures.

Nous avions évoqué le stockage des images pour les polices municipales il y a deux ans. Le cadre avait été fixé par la CNIL. Les règles sont très strictes. Le policier n'a pas d'accès direct aux images. Les données sont conservées six mois au maximum, sauf dans le cas d'une procédure judiciaire ou administrative. Si vous le souhaitez, je pourrai vous transmettre tous les éléments de cadrage fixés par la CNIL.

Pour le moment, 14 SDIS sont expérimentateurs. Vous avez souligné – et je vous en remercie – les dernières annonces du Président de la République en la matière.

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Je n'ai pas souvenir du montant exact, mais le prix des caméras est de l'ordre de quelques dizaines d'euros.

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Nous en venons à une mission d'information lancée à l'occasion de la loi pour la confiance dans la vie politique, portant sur le « verrou de Bercy ». Cette mission a rendu ses conclusions, et une loi a été votée depuis pour les mettre en œuvre.

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Je vais en effet vous présenter un bilan du suivi des recommandations de la mission commune sur les procédures de poursuite des infractions fiscales, que j'avais présidée en 2018, et dont notre collègue de la commission des finances, Mme Émilie Cariou, était rapporteure. Je tiens à remercier la commission des infractions fiscales, la direction générale des finances publiques (DGFIP), TRACFIN, la direction des affaires criminelles et des grâces et le parquet national financier, qui ont participé à la réalisation de cette évaluation par des contributions écrites. Le rapport formulait huit recommandations, au service de deux ambitions principales : permettre au législateur de se réapproprier le processus de sélection des dossiers présentant un profil pénal à l'issue d'un contrôle fiscal, et accroître les marges de manœuvre de l'autorité judiciaire en lui donnant un rôle plus actif en matière de fraudes fiscales.

La plupart des propositions ont fait l'objet d'évolutions législatives ou réglementaires. La proposition principale consistait à mettre fin au « verrou de Bercy », en définissant dans la loi les critères auxquels doit répondre un dossier issu d'un contrôle fiscal pour donner lieu à un examen systématique de l'opportunité d'engager des poursuites. Nous avions constaté que seuls les dossiers les plus simples étaient orientés au pénal, par crainte d'un échec de la procédure pour les autres. Les montages frauduleux les plus complexes et astucieux y échappaient ainsi, de manière tout à fait paradoxale.

La loi du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude, très inspirée par les conclusions de nos travaux, a supprimé le « verrou de Bercy », vieux de presqu'un siècle, en prévoyant que l'administration fiscale est désormais contrainte de dénoncer au procureur de la République les faits de fraude fiscale les plus graves. Je tiens d'ailleurs à rappeler que cette évolution majeure est le résultat du travail parlementaire puisqu'elle ne figurait pas dans le projet de loi initial. En 2019, 965 dénonciations obligatoires au parquet ont été enregistrées, et 378 l'ont été au cours du premier semestre de l'année 2020.

Nous proposions également que les liens entre l'administration fiscale et le parquet soient renforcés. C'est chose faite depuis la circulaire du 7 mars 2019, qui prévoit notamment la mise en place d'un comité d'échange entre le procureur de la République, la direction régionale ou départementale des finances publiques et la direction spécialisée du contrôle fiscal, la mise en place de référents « fraude fiscale » dans les parquets et l'instauration d'une réunion annuelle entre les procureurs généraux et les directeurs des finances publiques. Le déploiement de ces dispositifs a déjà commencé. Certains d'entre eux sont achevés.

Plusieurs autres recommandations ont également été mises en œuvre. Conformément à notre recommandation n°5, la loi de 2018 de lutte contre la fraude permet aujourd'hui au parquet d'exercer directement l'action publique à l'encontre de faits de fraude fiscale portant sur le même contribuable ou sur des impôts ou périodes différents de ceux mentionnés dans la plainte initiale.

La recommandation n°6-b, qui visait à institutionnaliser le suivi du traitement des informations transmises par l'autorité judiciaire à l'administration fiscale, est évoquée dans la circulaire du 7 mars 2019 qui invite les parquets à veiller à ce que ce suivi, prévu par les textes, soit effectif.

La modernisation de la chaîne pénale de répression des infractions fiscales, que nous appelions de nos vœux dans la proposition n° 8, a été engagée. Par exemple, les procédures de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité et les conventions judiciaires d'intérêt public ont été étendues aux délits de fraude fiscale par la loi de 2018. La DGFIP a également mis en place de nouvelles pratiques ayant pour objet de mieux prévenir les risques de contrariété de décisions entre le juge de l'impôt et le juge pénal. Je me réjouis, enfin, que la loi de 2018 ait délié les agents de l'administration fiscale du secret professionnel à l'égard du procureur, ce qui permet d'ouvrir un nouvel espace de dialogue entre l'autorité judiciaire et l'administration fiscale.

Cependant, je souhaiterais revenir sur deux propositions en particulier, qui n'ont pas été suivies d'effet. En premier lieu, la recommandation n°4 prévoyait de supprimer la commission des infractions fiscales (CIF) ou de rendre ses avis consultatifs. Pour rappel, la recevabilité des plaintes de l'administration fiscale était, avant la réforme de 2018, soumise à un avis conforme de la commission des infractions fiscales. Sans aller jusqu'à la suppression de cette commission, la réforme du « verrou de Bercy » réduit considérablement son rôle en supprimant par exemple de son champ de compétence les faits devant faire l'objet d'une dénonciation obligatoire au procureur de la République. Alors que la commission avait été saisie de 964 dossiers en 2018, elle n'a été saisie qu'à 575 reprises en 2019 et à 214 reprises depuis le 1er janvier 2020. Bien que la recommandation n'ait pas été reprise telle quelle, le rôle de la CIF s'est donc nettement réduit.

En second lieu, la recommandation n°7 n'a pas été mise en œuvre. Une disposition législative de 2013 prévoit en effet qu'un débat annuel doit être tenu à la commission des finances sur les conditions du déclenchement des poursuites pénales en matière de fraude fiscale. Cette disposition n'était pas effective jusqu'à 2018 et, malgré notre préconisation, elle ne l'est toujours pas aujourd'hui. Nous proposions également que ce débat ait lieu simultanément devant la commission des finances et devant la commission des lois, compétente en matière de droit pénal et de procédure pénale. Je crois que cette évolution reste souhaitable pour évaluer régulièrement la cohérence et les résultats de cette politique publique majeure.

Outre ces deux points, nous pouvons donc nous féliciter collectivement que ce rapport ait joué un rôle important dans l'évolution de l'organisation de la lutte contre les infractions fiscales les plus graves.

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Votre mission a considérablement fait évoluer la législation, mais je n'irais pas jusqu'à dire que le « verrou de Bercy » a été supprimé. Il reste que les procureurs de la République retrouvent une marge de manœuvre importante pour certains types de dossiers, et que les échanges d'informations entre l'administration fiscale et les procureurs de la République seront beaucoup plus fréquents et porteurs à l'avenir. Cette mission est une belle illustration du travail parlementaire, puisque nous étions partis de la loi confiance, dans l'hémicycle, et que nous avions été plusieurs à nous mobiliser sur ce sujet. La mission a déposé ses conclusions. Un travail législatif largement co-construit a été mené. À titre personnel, j'aurais souhaité que nous allions plus loin, mais de grands progrès ont été réalisés. Au moment du vote de ce texte, une police fiscale a été évoquée. Je regrette que nos effectifs de police judiciaire classique n'aient pas été confortés dans le travail très conséquent qu'ils réalisent actuellement.

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Vous avez raison de noter que ce travail parlementaire a été de très bonne qualité du début à la fin, et qu'il a produit des effets concrets, ce dont nous ne pouvons que nous féliciter. Je me rapprocherai du président de la commission des finances pour voir comment organiser un débat sur le suivi des poursuites.

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Mme Vichnievsky a été l'un des fers de lance du travail réalisé, et je l'en remercie. Le « verrou de Bercy » n'est peut-être pas entièrement supprimé, mais au-dessus de 100 000 euros, l'examen du dossier par le procureur de la République est systématique. Les infractions les plus graves sont traitées. Nous sommes donc allés assez loin.

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Nous en venons au suivi des recommandations du rapport relatif à l'application d'une procédure d'amende forfaitaire au délit d'usage illicite de stupéfiants. Il est important de souligner que c'est un rapport parlementaire qui a travaillé en premier sur ce sujet.

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Nous avons présenté notre rapport en janvier 2018. Nous recommandions la mise en place d'une amende forfaitaire, préconisation qui a été mise en œuvre par l'article 58 de la loi de programmation pour la justice du 23 mars 2019 qui a sanctionné l'usage de stupéfiants d'une AFD (amende forfaitaire délictuelle) d'un montant de 200 euros. L'AFD a été expérimentée à Rennes, à Reims et à Créteil à compter de juin 2020, puis à Lille et à Marseille à partir de juillet 2020.

Entre juin et août 2020, 426 amendes ont été prononcées, pour un taux de recouvrement de 30 %.

Une circulaire commune des ministères de l'Intérieur et de la Justice du 31 août 2020 a annoncé la généralisation de l'AFD pour usage de stupéfiants à l'ensemble du territoire à compter du 1er septembre.

Le ministère de la Justice a précisé que le recours à l'AFD était exclu au-delà des quantités suivantes saisies : 50 grammes pour le cannabis ; 5 grammes pour la cocaïne ; 5 cachets ou 5 grammes de poudre pour l'ecstasy (MDMA).

Cependant, les parquets peuvent avoir une approche territoriale et fixer des seuils inférieurs de quantité de produits au-delà desquels les forces de l'ordre ne pourront pas mettre en œuvre cette procédure.

Entre le 1er et le 15 septembre 2020, 2 625 amendes ont été prononcées, dont 1 820 dans la zone de compétence « police » et 805 en zone de gendarmerie. Les cours d'appel sur les ressorts desquelles le plus d'AFD ont été prononcées sont celles de Paris (728 amendes), Aix-en-Provence, Douai et Rennes.

Si nous manquons encore de recul sur la mise en œuvre de cette amende, qui n'a été généralisée que depuis 6 semaines, nous avons souhaité évaluer la mise en œuvre de cette procédure de façon très concrète, notre objectif n'étant pas de dresser un bilan de la politique de lutte contre les stupéfiants, sujet qui fait partie des axes de travail de la mission d'information commune sur la réglementation et l'impact des différents usages du cannabis.

Nous avons donc auditionné la direction centrale de la sécurité publique (DCSP), la direction des affaires criminelles et des grâces (DACG), mais également les syndicats de police et la gendarmerie pour connaître leur avis sur la mise en place de cette nouvelle procédure.

Sur le plan pratique, ces amendes sont dressées au moyen des tablettes Néo, dont sont dotées les forces de sécurité. Les terminaux communiquent ensuite les données saisies au Centre national de traitement de Rennes, qui adresse un avis d'infraction au domicile de l'auteur de l'infraction par lettre recommandée. Il n'y pas de règlement sur la voie publique. Le traitement d'antécédents judiciaires (TAJ) est ensuite alimenté grâce à une interconnexion avec le système informatique du Centre national de traitement.

Les constatations étant réalisées sur place, les produits stupéfiants découverts ne font l'objet ni d'un test relatif à leur nature, ni d'une pesée. Les forces de l'ordre doivent décrire de façon très précise et complète les produits dans le procès-verbal électronique. C'est une procédure simple et rapide mais il reste plusieurs points à éclaircir et à faire évoluer.

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Lorsque nous avons rédigé ce rapport sur la proposition d'amende forfaitaire délictuelle, nous n'avons jamais prétendu régler avec cet outil la question de la consommation parfois très importante de stupéfiants dans notre pays, et notamment chez les jeunes, mais nous voulions combattre l'impunité dans l'espace public, qui fatigue nos forces de l'ordre et nos concitoyens.

Nous pouvons nous satisfaire du fait qu'il y a désormais moins de timidité de la part du Gouvernement pour se saisir de cet outil, mais plusieurs points ont retenu notre attention quand nous avons interrogé les forces de l'ordre et les services du ministère de la Justice.

Le premier point qui attire notre attention est l'identification de l'auteur de l'infraction. Premier point de satisfaction : alors que la présentation d'une pièce d'identité était obligatoire dans la phase d'expérimentation, il a été décidé, lors de la généralisation, de permettre l'identification de l'auteur de l'infraction au moyen de « tous les éléments permettant d'établir l'identité de la personne mise en cause ». Parmi les moyens dont disposent les forces de l'ordre pour établir l'identité de l'auteur figure la consultation du TAJ. Cependant, cette consultation n'est pas optimisée pour un usage sur smartphone ou tablette. Il n'est donc évident de le consulter sur le terrain et d'évaluer si l'auteur de l'infraction est un primo-délinquant. Le matériel et les solutions logicielles doivent donc s'améliorer en la matière.

Le deuxième point d'attention est celui de la saisie et du stockage des produits stupéfiants. Les représentants des forces de l'ordre sont apparus sceptiques sur la possibilité d'estimer, sans balance, le poids des produits stupéfiants. De même, l'ensemble des forces de l'ordre ne semble pas disposer du matériel nécessaire au transport et au stockage des produits stupéfiants avant leur destruction, qui est parfois attendue très longtemps. L'équipement des commissariats et des gendarmeries en boites hermétiques, voire en armoires réfrigérées, qui permettent de stocker les produits stupéfiants de façon sécurisée avant leur destruction, est d'autant plus nécessaire que les saisies de petites quantités de stupéfiants devraient se multiplier avec le développement de l'AFD.

Le troisième point d'attention porte sur les exclusions, qui ont été précisées par le ministère de la Justice dans une dépêche du 30 août 2020 et qui sont nombreuses. Elles créent une limite à la réelle généralisation de l'AFD. Ainsi, la procédure de l'amende forfaitaire délictuelle n'est pas applicable :

– lorsque le délit a été commis par un mineur. Nous avions eu ce débat au moment de la rédaction du rapport et nous avions exclu les mineurs. Mais je pense que les mineurs, à partir de 16 ans, pourraient se voir appliquer cette procédure, l'amende reçue au domicile des parents pouvant avoir un effet dissuasif pour un certain type de jeunes consommateurs ;

– lorsque plusieurs infractions, dont l'une au moins ne peut donner lieu à une amende forfaitaire, ont été constatées simultanément ;

– aux conducteurs de véhicule terrestre à moteur. Cela peut conduire à certaines incohérences : ainsi, si le conducteur n'a pas consommé mais détient des stupéfiants, la procédure de l'AFD étant exclue il se voit appliquer une procédure judiciaire « classique » qui peut éventuellement se conclure par un rappel à la loi, sanction plus douce que l'AFD. Le passager peut se voir, en revanche, appliquer l'AFD s'il détient des stupéfiants ;

– lorsque sont découverts plusieurs types de produits stupéfiants différents, y compris si les quantités sont inférieures à celles fixées par les parquets ;

– lorsque le mis en cause ne peut justifier de son identité ou ne déclare aucune adresse postale. C'est une vraie limite : on peut craindre que s'instaure un « petit jeu » entre les délinquants et les forces de l'ordre conduisant à ne pas appliquer l'AFP et à maintenir des procédures judiciaires chronophages ;

– lorsque le mis en cause conteste les faits, ou est sous l'emprise de stupéfiants ou montre des difficultés de compréhension de la langue française.

Dans ces cas, l'auteur de l'infraction se verra appliquer la procédure « classique » avec une saisine du parquet, qui aboutira potentiellement à un certain laxisme puisque ce genre de procédure aboutit actuellement le plus souvent à des rappels à la loi.

Compte tenu de ces nombreux cas d'exclusion, deux évolutions nous semblent nécessaires. En premier lieu, s'il n'est pas possible d'appliquer une procédure forfaitaire délictuelle à un mineur, il nous semble essentiel de mettre en place une sanction adéquate pour les mineurs et de développer une politique de prévention plus active. Rappelons que 40 % des adolescents ont déjà fumé du cannabis à 17 ans et que l'adolescence est une période de vulnérabilité accrue aux stupéfiants.

En second lieu, compte tenu des nombreux cas dans lesquels l'AFD n'est pas applicable, il est indispensable que les parquets durcissent la réponse pénale lorsqu'ils seront saisis. Rappelons que jusqu'à présent, la majorité des affaires d'usage de stupéfiants faisaient l'objet d'alternatives aux poursuites et que ces alternatives étaient très souvent de simples rappels à la loi. Il faudra donc éviter qu'une personne qui ne peut se voir appliquer la procédure de l'AFD se voie appliquer in fine une sanction moins sévère, comme un rappel à la loi, alors qu'elle devrait être sanctionnée plus sévèrement en raison d'une récidive ou qu'elle devrait faire l'objet d'une prise en charge sanitaire, si elle est dans une logique de polyconsommation.

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Les représentants des forces de l'ordre que nous avons auditionnés se sont inquiétés des instructions des parquets qui ajoutent des exclusions, par exemple en faisant sortir la cocaïne du champ de l'AFD, en excluant certaines populations (les jeunes de 18 à 25 ans, par exemple) ou en rajoutant des conditions supplémentaires d'application. L'idée de l'amende forfaitaire était de mettre en œuvre une réponse pénale harmonisée dans l'ensemble du territoire. Même s'il est normal que les parquets adaptent l'application d'une mesure en fonction des particularités territoriales, ces adaptations ne sont pas assez limitées pour l'instant et remettent en cause l'application effective de cette procédure.

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Cette réforme est intéressante, efficace, rapide et dissuasive. Je ne crois pas que l'exclusion des mineurs soit justifiée au plan des principes et au plan juridique. L'exclusion est encore moins justifiée s'agissant des récidivistes. Plusieurs récidives de contraventions établissent théoriquement un délit, mais cela est difficile à mettre en œuvre pour les parquets et à juger pour les juridictions. In fine, ce sont parfois des injonctions thérapeutiques qui sont prononcées. À mon sens, cette réforme était indispensable. Elle mérite d'être étendue dans ses applications.

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La mesure proposée paraît assez naturelle, mais sa mise en œuvre concrète n'est pas si facile. Il faut voir la manière dont elle est utilisée par les forces de sécurité, notamment dans un contexte un peu particulier où l'on discute beaucoup de la libéralisation de la consommation du cannabis. Le chiffre de 2 625 amendes en peu de temps est assez significatif pour montrer que la mesure répond à une préoccupation et à une demande. Je relève toutefois une certaine longueur de mise en œuvre puisque rien n'avait été fait depuis mars 2019. Il a fallu une décision du Premier ministre pour que l'on voie enfin une traduction concrète.

En outre, je ne comprends pas bien la difficulté qui se pose en matière de délinquance routière. Durant le débat sur la loi de programmation pour la justice, il a été dit que les mesures proposées n'étaient pas contradictoires avec les mesures de rétention ou de suppression de permis de conduire, ou d'immobilisation du véhicule. Je n'avais pas intégré le fait qu'il pouvait y avoir des conséquences en terme d'affaiblissement de la réponse pénale, ce qui serait catastrophique.

Je ne suis pas choqué que certains parquets aient une politique pénale spécifique, la consommation de drogues n'étant pas la même partout en France. Enfin, il ne s'agit pas d'une politique de santé publique, mais de voie publique. Elle donne enfin aux forces de l'ordre une réponse immédiate, qui permet de juguler tout ou partie de ce phénomène condamnable.

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S'agissant de l'exclusion des mineurs du dispositif, je rappelle que l'ordonnance de 1945 met en place un certain nombre de principes, dont la primauté de l'éducatif sur le répressif et le fait de ne pas considérer un majeur comme un mineur. Je ne crois pas qu'il soit pertinent, au détour d'une procédure de voie publique, de revenir sur ces grands principes.

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Sur le terrain, le dispositif est plutôt bien reçu par les forces de l'ordre et les parquets. Ce n'est pas l'alpha et l'oméga de la lutte contre la consommation ou le trafic de produits stupéfiants, mais c'est un outil supplémentaire, et il est perçu comme tel par les acteurs du terrain.

Les instructions des parquets restreignent trop le champ d'application de ce dispositif. Je m'interroge sur l'application du dispositif au délinquant primaire, car l'on peut encore lui adresser un discours de prévention et de santé publique. S'agissant de l'application du dispositif aux jeunes de 16 à 18 ans, le débat mérite d'être posé. La consommation de produits stupéfiants par les jeunes de cette tranche d'âge est très importante. Il semble nécessaire d'avoir une réponse adaptée et de responsabiliser les parents.

S'agissant de la phase expérimentale, avez-vous comptabilisé les contestations de l'AFD devant les juridictions ? Si oui, y a-t-il eu surtout des confirmations ou des infirmations de l'AFD, sur le fond comme sur la forme ?

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Il me semble difficile de requalifier cette expérimentation en gestion de troubles de la voie publique. Elle a un sens beaucoup plus profond. Nous devons nous réinterroger sur les exclusions des mineurs et des personnes qui ne peuvent présenter de pièces d'identité. Sera-t-il possible de disposer de chiffres précis, notamment sur les contestations, ainsi que de chiffres territorialisés ?

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Je pense qu'il ne faut pas se montrer angélique sur la question de la consommation et du deal chez les mineurs. Quand un jeune de 16 à 18 ans se trouve dans l'économie de la drogue, il est déjà très haut dans l'échelle sociale. Ce parcours de délinquance peut commencer dès le collège, voire l'école primaire. Quand on parle du fait de privilégier le sanitaire sur le répressif, il faut également prendre en compte le fait que le trafic de drogues constitue un moyen de gagner facilement de l'argent dès le plus jeune âge. Le trafic des drogues chez les mineurs doit être regardé avec une grande attention.

Avant de parler des contestations, il faudra que nous connaissions les chiffres du recouvrement. Il convient de savoir si cette amende est réellement dissuasive parce qu'elle touche au portefeuille. Sur le recouvrement, les services du ministère de l'Intérieur et du ministère de la Justice renvoient vers la DGFIP. Un échange est donc à prévoir afin de savoir ce qu'il en est.

En ce qui concerne la consommation en voiture, mon propos n'était pas de dire que l'amende devait s'appliquer à des conducteurs consommateurs. Si le conducteur détient une petite quantité de cannabis, il passe sous le coup de la législation pour détention et usage de cannabis au volant, alors que le passager qui en détiendrait pourrait se voir appliquer l'AFD et échapper à la réglementation sur la sécurité routière et l'usage des stupéfiants, alors qu'il pourrait proposer ce produit au conducteur. Cette difficulté pratique mérite d'être regardée.

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En ce qui concerne les mineurs, nous devons entrer dans une logique de réponse graduée. Aujourd'hui, nos jeunes sont confrontés au cannabis pour la première fois à l'âge de 15 ans. Il n'est pas judicieux de « regarder ailleurs » jusqu'à 18 ans. Nous avons besoin, outre d'une politique de répression, d'une vraie politique d'information sur les stupéfiants.

Je rappelle en conclusion que cette amende est plutôt bien accueillie et qu'elle permet une réponse effective et rapide dans l'espace public. Elle sert également à lutter contre les trafics de stupéfiants en limitant la consommation publique près des points de deal. Mais elle ne constitue pas un outil pédagogique et nous avons besoin d'une vraie politique de prévention et d'information, tout en ayant une vraie politique de répression de l'usage. Par ailleurs, il pourrait être opportun de permettre aux policiers municipaux de verbaliser les usagers de stupéfiants au moyen de l'AFD. Je rappelle enfin les travaux menés dans le cadre de la mission d'information commune sur la réglementation et l'impact des différents usages du cannabis, présidée par Robin Reda, qui permettent de mener une réflexion sur la possibilité de développer une double réponse de prévention et de maitrise de l'usage des stupéfiants sans considérer que la libéralisation constitue la seule réponse.

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Nous en venons au rapport consacré à la déontologie des fonctionnaires et à l'encadrement des conflits d'intérêts. Ce rapport avait fait moins de bruit mais ses effets sur l'administration ont été très marqués.

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Le 31 janvier 2018, la mission que nous avions menée avec Olivier Marleix avait formulé 16 propositions pour sensibiliser et former les agents et leurs référents déontologues, renforcer les procédures de contrôle des allers-retours entre le privé et le public et limiter les conflits d'intérêts.

La loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique a mis en œuvre, grâce à un amendement d'initiative parlementaire, l'une de nos principales propositions : l'absorption de la commission de déontologie de la fonction publique par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Celle-ci exerce donc désormais son contrôle sur l'ensemble des acteurs publics, qu'ils soient fonctionnaires ou élus.

Le dispositif est entré en vigueur le 1er février 2020. Un premier bilan, présenté par M. Didier Migaud, président de la HATVP, lors de la préparation de cette intervention, fait état d'une activité élevée. Entre le 1er février et le 31 août 2020, 377 saisines sont comptabilisées, dont 50 % pour des pré-nominations (membres de cabinets, directeurs d'administrations centrales ou d'établissements publics d'État), 31 % pour des reconversions et 19 % pour des cumuls d'activité. Au total, la HATVP a émis 101 avis de compatibilité, 93 avis de compatibilité avec réserve et 14 avis d'incompatibilité. Les 117 dossiers restants n'ont pas fait l'objet d'une décision car ils échappaient à la compétence de la Haute Autorité.

L'ampleur de l'activité s'explique notamment par l'absence de saisine du référent déontologue, qui est censé opérer un filtre dans l'appréciation du conflit d'intérêts. Je vous rappelle que nous avions mis en place un système « à double vitesse » : pour les agents les plus exposés, un contrôle systématique de la HATVP, et pour les autres une appréciation du risque par le supérieur hiérarchique et le référent déontologue. Certaines administrations n'ont pas désigné leur référent déontologue, alors qu'il s'agit d'une obligation légale depuis 2016. Les autorités hiérarchiques saisissent donc parfois la HATVP même en l'absence de doutes sérieux, ce qui risque de l'engorger.

La direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP) nous a indiqué qu'elle veillait à l'animation des référents déontologues. C'est un point sur lequel nous devons être vigilants.

Les premiers résultats de cette fusion sont satisfaisants. Le président de la HATVP nous a assuré du suivi très strict des réserves émises dans certains avis de compatibilité. Nous l'avions recommandé car la commission de déontologie de la fonction publique n'exerçait pas ce contrôle.

Néanmoins, nous signalons quelques insatisfactions. D'une part, seulement 4 ETP sont consacrés à ce contrôle. D'autre part, nous regrettons que notre proposition de rendre publics les avis de la HATVP n'ait pas été suivie d'effets car cela aurait permis aux agents d'anticiper le risque d'incompatibilité. La HATVP a toutefois indiqué que les rapports seraient prochainement mis en ligne, après anonymisation, ce dont nous nous réjouissons.

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Dès la loi pour la confiance dans la vie politique de 2017, nous avions ouvert le débat pour étendre à la haute fonction publique des dispositions applicables aux élus en matière de prévention des conflits d'intérêts. Notre rapport en 2018, puis la loi de transformation de la fonction publique de 2019, ont permis de réaliser notre principale proposition : le transfert des compétences de la commission de déontologie de la fonction publique à la HATVP. Je crois qu'il s'agit d'un travail législatif exemplaire.

J'aimerais insister sur la publication des décisions de la HATVP concernant le « pantouflage ». Nous n'avons pas rendu la publication des avis obligatoire, mais la HATVP a la faculté de les publier. Nous espérons que sa pratique évoluera vers une publication automatique.

L'absence de référent déontologue dans certaines administrations est extrêmement regrettable, alors même que cette obligation est entrée en vigueur il y a trois ans.

Je veux enfin insister sur la nécessité de corriger le décret du 9 mai 2017 relatif au répertoire numérique des représentants d'intérêts qui va à l'encontre de l'intention du législateur. Il limite la définition de la notion de représentant d'intérêt à toute personne qui effectue plus de dix prises de contact par an ou qui consacre plus de la moitié de son temps à des activités de lobbying. Ces critères sont trop faciles à contourner. Le président de la HATVP partage nos observations et nous a indiqué avoir écrit au Premier ministre pour en demander la modification.

S'agissant du recouvrement de la « pantoufle », nous avions soulevé qu'elle n'était pas systématique réclamée. Il semble malheureusement que les choses n'aient pas beaucoup évolué. Il est urgent que cela change.

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Comme pour nos autres collègues dont les missions ont débouché sur des évolutions législatives, nous vous félicitons, car le texte sur la transformation de la fonction publique a suivi bon nombre de vos recommandations. Il est même allé plus loin sur certains points. Pour ma part, j'avais proposé un amendement qui avait été adopté pour rendre obligatoire le respect des avis de la HATVP. Nous n'avons presque que des motifs de satisfaction, les points restant à améliorer étant très circonscrits.

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Cette fusion n'a pas été simple et a représenté un gros travail parlementaire. Il faut insister pour que la diffusion de la culture de la déontologie soit confiée à la HATVP. Il y a encore beaucoup de progrès à réaliser : s'il n'y a pas de référent déontologue dans les administrations et si les avis ne sont pas rendus publics, cela ne marchera pas.

Nous avons encore beaucoup de travail sur les représentants d'intérêts, car le dispositif actuel n'est pas très opérationnel, notamment à cause du décret que vous avez mentionné.

Concernant la « pantoufle », j'ai appris que le procureur Éric Russo devrait partir prochainement pour servir une multinationale alors qu'il travaillait pour le parquet national financier. Ce dispositif échappe à la HATVP mais j'aimerais savoir comment nous pourrions avancer sur des questions aussi majeures, à l'heure où nous parlons beaucoup de l'indépendance de la justice. Comment la « pantoufle » est-elle gérée lorsqu'il s'agit d'un magistrat ? Le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) exerce-t-il un contrôle ?

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Cette information a également retenu mon attention. Je rejoins votre préoccupation.

Je m'engage à regarder ce décret sur les représentants d'intérêts et la commission pourra également saisir le Premier ministre sur ce point.

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La publication des avis est impérative car c'est la seule façon pour des tiers de vérifier que ces avis sont respectés. Nous espérons donc que leur publication sera systématique.

Concernant la « pantoufle », la loi de transformation de la fonction publique prévoit la remise d'un rapport annuel sur la question. De nombreuses petites réformes ont également vu le jour dans les différentes écoles de la fonction publique.

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Nous avions déposé un amendement sur ce point, puisqu'aujourd'hui la loi ne comporte pas l'obligation de payer la « pantoufle » pour un fonctionnaire qui y est soumis et qui s'en va. Cet amendement n'a pas été adopté, mais ce débat devra être rouvert.

S'agissant du décret sur les représentants d'intérêt, la définition retenue neutralise toutes les possibilités de contrôle. De plus, il n'est pas acceptable que l'administration rédige un décret qui va à l'encontre de la volonté du législateur. Cela mérite que nous nous mobilisions pour avancer sur ce point.

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Quand il s'exprime à travers une mission d'information transpartisane, le travail parlementaire permet de faire beaucoup avancer les sujets. Cela est plus long, mais souvent plus efficace.

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Nous examinons maintenant le rapport consacré aux fichiers mis à disposition des forces de sécurité, qui a été remis le 17 octobre 2018.

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À la lecture des réponses adressées à nos questionnaires, nous avons eu l'impression que nos interlocuteurs (ministère de l'Intérieur, ministère de la Justice, CNIL) découvraient le rapport. C'est pourquoi nous recommandons de recommencer l'exercice, avec cette fois une audition des ministres concernés. Il ne semble pas que nos recommandations aient été contestées, à la réserve près que la vision d'un ministre n'est pas tout à fait la même que celle d'un service opérationnel.

Dans l'ensemble, nous avons reçu des réponses parfois beaucoup plus techniques que les propositions que nous avions formulées. Nous avons le sentiment que quelques évolutions sont en cours, même si elles nous paraissent lentes, comme la rationalisation des fichiers.

Nous avons formulé des recommandations pour mieux détecter les utilisations irrégulières de fichiers. Elles semblent être prises en compte via l'augmentation des capacités d'exploitation des traces, ou via les outils de contrôle développés par la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN).

Nous soulevons plusieurs points d'inquiétude, notamment sur le cadre juridique du fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG). Depuis deux ans, il nous est dit que le problème va être résolu et que le décret de règlement du FNAEG est en cours d'élaboration, ce qui pose une difficulté de fond et de liberté publique importante, ainsi qu'une difficulté de méthode. Nous recommandons que la CNIL soit saisie en amont de la création d'un fichier pour pouvoir donner un avis en temps utile.

Par ailleurs, certains chantiers importants et/ou urgents ne semblent pas avoir beaucoup progressé, comme celui du traitement d'antécédents judiciaires (TAJ), dont le « nettoyage » n'a toujours pas été réalisé. Des personnes y figurent alors qu'elles ne devraient pas y figurer ; les connexions avec le casier judiciaire ne sont pas faites. J'évoquerais aussi la question des identifiants communs, qui ne semble pas avoir été résolue. Je me souviens d'une personne travaillant à la gare Saint-Charles à Marseille et qui disposait de huit identifiants différents, ce qui l'avait retardée lors d'opérations de police. De même, les connexions de CASSIOPEE avec le TAJ semblent très faibles.

Nous souhaitions également que la direction générale de la sécurité intérieure ait accès au fichier national des personnes sortant de prison. Cette proposition n'a pas encore été mise en œuvre, alors qu'elle nous semble aller dans le sens de la sécurité nationale. L'accès aux fichiers spécialisés pour certaines structures de renseignement n'est pas encore opérant, pas plus que la mise en œuvre effective du droit à l'information.

Quelques propositions sont néanmoins satisfaites ou en bonne voie de l'être, comme celle consistant à confier au service national des enquêtes administratives de sécurité un champ plus large d'enquêtes administratives relevant actuellement des services de police et des unités de gendarmerie. S'agissant de l'alimentation du système d'information Schengen, les connexions s'effectuent manuellement et de manière insuffisante par rapport aux objectifs de sécurité publique.

Enfin, les travaux sur la mise en place d'une interface entre les différents fichiers auxquels un agent peut avoir accès sont en cours depuis un certain temps. Il serait souhaitable que ce travail aboutisse. S'agissant de la généralisation à l'ensemble des États membres de l'Union européenne de la transmission automatisée des antécédents judiciaires, la Commission européenne pourrait proposer une initiative législative, ce qui constituerait une bonne avancée sur laquelle prendre appui pour améliorer les systèmes français.

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Il est tout à l'honneur de la commission des lois de s'être intéressée à un sujet aussi technique. Les policiers et les gendarmes que nous avons rencontrés nous ont demandé de les aider à sortir du foisonnement des fichiers, à renforcer l'interconnexion. Certains ont même avoué qu'ils prenaient parfois des libertés afin de créer eux-mêmes les fichiers dont ils ont besoin. Notre mission était importante, et nous pouvons nous féliciter d'avoir fait évoluer la situation. Nous avons des difficultés à faire admettre qu'il faut réglementer sur un certain nombre de points qui peuvent porter atteinte aux libertés individuelles ou aux libertés publiques. Un chemin important a été parcouru, nous avons provoqué un certain nombre de réponses techniques, mais qu'il faudrait compléter par une nouvelle mission et de nouvelles auditions.

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J'ai indiqué à M. Didier Paris que nous pourrions demander aux ministres de venir en commission des lois s'exprimer sur ce sujet. Nous en reparlerons prochainement.

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Nous en venons au rapport sur les fouilles en détention, thématique qui avait été mise en avant à la suite d'une longue grève dans l'administration pénitentiaire.

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Le rapport de la mission d'information sur les fouilles en détention formulait neuf recommandations concernant, d'une part, la modification du cadre légal de ces fouilles et, d'autre part, la modernisation des équipements et des moyens des établissements pénitentiaires.

Afin d'en étudier la mise en œuvre, nous avons sollicité trois acteurs : la direction centrale de l'administration pénitentiaire, l'administration du Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) et le Conseil national des barreaux, que nous tenons à remercier pour leurs réponses écrites.

Notre rapport d'information préconisait de consacrer dans la loi la jurisprudence du Conseil d'État permettant de réaliser des fouilles en détention systématiques pour certains détenus dangereux, pendant une période limitée. Cette préconisation a fait l'objet d'un amendement adopté par l'Assemblée nationale dans le cadre des débats parlementaires sur ce qui est devenu la loi du 23 mars 2019 de programmation et de réforme de la justice.

Nous avions également souhaité que les avocats qui adressent une demande motivée au directeur d'établissement pénitentiaire puissent avoir accès aux informations contenues dans le registre des fouilles. La direction de l'administration pénitentiaire considère que cette possibilité leur est déjà offerte en application de l'article L. 311-1 du code des relations entre le public et l'administration, qui pose le principe selon lequel l'administration doit communiquer les documents administratifs qu'elle détient aux personnes qui en font la demande, sous réserve d'occulter d'éventuelles mentions protégées.

Cette disposition d'ordre général semble néanmoins s'appliquer difficilement en pratique. Le Conseil national des barreaux, qui a interrogé des avocats et organisations d'avocats dans le cadre de cette évaluation, précise qu'aucun d'entre eux n'a eu accès à un tel registre. Le CGLPL observe d'ailleurs que tous les établissements pénitentiaires n'en disposent pas systématiquement.

En revanche, depuis l'adoption de la loi du 23 mars 2019, le CGLPL constate que les directeurs d'établissement formalisent et enregistrent davantage les décisions de fouilles intégrales systématiques qu'ils autorisent.

Nous avions également formulé plusieurs recommandations portant sur les équipements et les moyens des établissements pénitentiaires. Le rapport de la mission d'information appelait à développer le recours aux portiques à ondes millimétriques tout en évaluant leur intérêt, à déployer des équipes cynotechniques, et à mettre en place des dispositifs anti-projection et des dispositifs de brouilleurs d'ondes.

Seuls onze portiques à ondes millimétriques étaient déployés en 2017 et ce nombre n'a pas augmenté depuis trois ans, contrairement aux préconisations de la mission d'information. L'administration pénitentiaire estime que ce moyen de détection est aujourd'hui trop coûteux et que son utilisation est complexe. Elle a néanmoins engagé un travail de formation des personnels à cette utilisation ainsi qu'à la maintenance de cet équipement.

Le CGLPL observe par ailleurs que l'image renvoyée par les portiques en fonctionnement permet de distinguer nettement les corps et est susceptible d'être regardée par plusieurs agents. Pensés pour constituer une alternative à la fouille intégrale pour les détenus, ces portiques n'offrent pas de garantie contre une atteinte à l'intimité ou à la dignité, selon l'institution.

Leur efficacité semble donc assez limitée. Une réflexion a été mise en place l'an dernier au sein de la direction de l'administration pénitentiaire afin de procéder à leur remplacement par des moyens de détection plus performants et moins coûteux, mais ce travail prospectif n'a pour l'heure pas été conclusif. Il a donc été choisi d'équiper les maisons centrales plutôt que les maisons d'arrêt, compte tenu des difficultés d'utilisation de cet équipement.

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La mission d'information a également souhaité que soit modernisé le système de vidéosurveillance, qu'une réflexion soit menée sur le survol des établissements par drones, et que la problématique des projections soit prise en compte lors de la construction de futurs établissements pénitentiaires.

Selon le CGLPL, la qualité des images captées par le système de vidéosurveillance demeure inégale en fonction des établissements et il n'y aurait pas actuellement de programme de rénovation dans les centres pénitentiaires. La direction de l'administration pénitentiaire nous a néanmoins précisé que davantage de zones sont aujourd'hui vidéosurveillées dans les établissements, par rapport au référentiel établi en 2012.

Par ailleurs, le CGLPL a souligné plusieurs initiatives locales de modernisation du système existant : ainsi, dans le centre de détention d'Oermingen, dans le Bas-Rhin, les caméras de vidéosurveillance ont été rénovées en 2018. Elles devraient l'être prochainement dans la maison d'arrêt de Fresnes et dans le centre pénitentiaire de Liancourt.

Notre rapport a également abordé la question du survol des établissements par des drones malveillants. Les statistiques font état d'une croissance de ces survols (48 signalements en 2018 pour 22 établissements concernés, 54 signalements en 2019 pour 27 établissements, et déjà 43 signalements pour 19 établissements au terme des trois premiers trimestres de 2020). La mission d'information a préconisé de mieux prendre en compte cette menace. Une réflexion est en cours, avec la désignation d'un cadre référent au sein de la direction de l'administration pénitentiaire et avec la perspective d'une convention de partenariat entre cette direction et l'aviation civile, selon les informations transmises par le CGLPL. À titre expérimental, de nouvelles solutions techniques ont également été déployées l'année dernière et 12 nouveaux dispositifs seront mis en fonctionnement d'ici au premier semestre 2021. Ils permettront de doter quinze établissements parmi ceux présentant un risque élevé de survol.

Enfin, la direction de l'administration pénitentiaire a indiqué prendre en considération la problématique des projections dans le cadre d'une réflexion plus large sur la modification du nouveau programme immobilier (NPI) établi en 2012, qui a servi de cahier des charges pour la construction de plusieurs établissements pénitentiaires. Ce NPI a fait l'objet d'évolutions depuis 2016. Ainsi, la localisation du glacis à l'intérieur de l'enceinte de l'établissement, l'internalisation des cours, la modernisation des dispositifs de barrières physiques, l'installation d'éclairage aux abords immédiats ainsi qu'un recours plus large à la vidéosurveillance contribuent à réduire les risques de projection.

En 2020, 119 dispositifs anti-projections sont dénombrés dans les établissements. 21 nouveaux dispositifs ont été installés depuis 2017, et 19 ont fait l'objet d'opérations de maintenance. Au-delà de ces chiffres, il reste à évaluer l'efficacité des dispositifs installés. L'établissement de Bourg-en-Bresse, par exemple, est équipé depuis 2016 mais reste concerné par des problèmes de projections.

Ainsi, parmi l'ensemble des mesures préconisées par la mission d'information, seule celle relative aux portiques à ondes millimétriques a été volontairement écartée par le gouvernement. Celle concernant le registre des fouilles mérite encore une clarification opérationnelle. Les autres préconisations sont en cours d'application, mais de manière partielle. Il conviendra donc de rester vigilant sur ces sujets et de procéder à une nouvelle évaluation d'ici quelques mois.

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Quels sont les moyens technologiques qui empêchent le survol par des drones ?

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C'était un questionnement majeur de notre mission d'information car cette problématique se rencontre de plus en plus souvent. Il existe de nombreux dispositifs technologiques, notamment des brouilleurs d'ondes, dont certains sont en cours d'expérimentation. La direction de l'administration pénitentiaire mobilise des efforts importants pour mettre en place des dispositifs efficaces.

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Nous devons veiller à ne pas prendre de retard par rapport aux progrès de cette technologie, qui devient accessible dans le commerce courant. Il faut continuer à travailler tant sur les moyens de détection que sur l'analyse de la menace et les réponses à lui apporter, tout en poursuivant le ciblage des établissements les plus exposés. Cette année, les signalements augmentent mais le nombre d'établissements concernés par ces signalements diminue.

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Nous allons aborder la loi du 2 août 2019 relative aux compétences de la Collectivité européenne d'Alsace.

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L'objectif de cette loi était de traduire la volonté des Alsaciens de restituer une unité institutionnelle à leur territoire afin qu'il puisse porter leur réalité historique et géographique singulière au sein de notre République. La loi a donc créé la nouvelle collectivité européenne d'Alsace, qui regroupera, à compter du 1er janvier 2021, les conseils départementaux du Bas-Rhin et du Haut-Rhin. Il a été estimé que l'attribution de ces compétences ne méconnaissait pas le principe d'égalité car elle répondait à des motifs d'intérêt général et que les compétences transférées étaient limitées et précisément identifiées.

La loi prévoit que la collectivité européenne d'Alsace sera le « chef de file » de la coopération transfrontalière sur son périmètre, et établira un schéma alsacien de coopération transfrontalière. Elle s'investira dans le renforcement de la politique du bilinguisme et du plurilinguisme. Elle coordonnera l'action des collectivités territoriales et de leurs établissements publics dans le domaine du tourisme. Enfin, la loi transfère à la nouvelle collectivité le réseau routier national non concédé.

C'est dans ce contexte que nous avons mené un certain nombre d'auditions pour vérifier la mise en œuvre de cette nouvelle collectivité.

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La mise en application de cette loi a fait l'objet d'attentions et d'attentes de la part de nos concitoyens. La construction de cet objet institutionnel a mobilisé beaucoup de discours politiques. Ce point d'étape est important pour le territoire et fait suite à la création d'un tableau de suivi qui identifie 19 actions à mener pour mettre en œuvre la loi.

La question la plus récurrente porte sur le rapprochement des politiques publiques entre les deux conseils départementaux. Il ne s'agit pas tellement de la mise en application de la loi, mais de son efficience. Les départements ont identifié 400 politiques publiques à rapprocher, dont 80 % l'ont apparemment été, ce qui est difficile à vérifier pour le législateur.

Les maisons départementales pour les personnes handicapées disposent d'un an avant de fusionner. Les deux services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) vont subsister, tout comme les agences techniques et les centres de gestion.

L'ordonnance institutionnelle est prête. Elle sera présentée en Conseil des ministres le 28 octobre prochain. La question du siège reste pour le moment en suspens. Par définition, une collectivité peut toujours décider par elle-même, sans autorisation, de l'adresse de son siège.

S'agissant du budget et de la fiscalité, l'ordonnance est prête et nous a été communiquée tardivement. Ce point ne pose pas de problème particulier, les fiscalités des deux départements étant très proches. Le budget de la collectivité européenne d'Alsace sera, au 1er janvier 2021, la somme des budgets des deux départements.

Un point d'attention concerne le sujet des routes, qui est le moins avancé mais le plus innovant. Le transfert des infrastructures, et en particulier des autoroutes, constitue une première. Le transfert des personnels sera opéré par décret, et les agents disposeront d'un droit d'option pour décider de rester dans la fonction publique d'État ou non. L'État entend transférer 185 agents, mais les conseils départementaux espèrent que 209 agents seront transférés. La question des moyens financiers est encore en discussion, notamment en ce qui concerne l'état de l'infrastructure transférée et les programmes de rattrapage. L'État entend accompagner les infrastructures d'une dotation de 22 millions d'euros par an, alors que les collectivités en espèrent 30.

La future redevance poids lourds, qui a entraîné beaucoup de débats au plan national, est une vraie volonté sur le territoire alsacien. Le dossier n'est pas encore prêt. L'ordonnance devait être présentée en février 2021, mais la crise du Covid entraîne un délai supplémentaire de quatre mois. Une étude a permis d'objectiver la réalité des flux. La question porte aujourd'hui sur la technique de cette fiscalité, ainsi que sur les liens que la collectivité pourra avoir avec les entreprises de transport, compte tenu du fait qu'elle ne possède pas la compétence économique.

L'article 5 de la loi a été introduit par un amendement parlementaire. Il prévoit qu'un décret du ministère des Sports pourra ouvrir la possibilité pour les fédérations sportives de créer des fédérations à l'échelle de la nouvelle collectivité. Mais le ministère juge ce décret inutile car les fédérations peuvent déjà demander une dérogation en faveur d'un ressort territorial différent de celui des services déconcentrés du ministère. Je ne suis pas sûr de partager l'analyse du ministère. L'intention du législateur est claire : il s'agit de permettre la création de fédérations (culturelles, sportives, professionnelles) à l'échelle de la collectivité d'Alsace. Je ne vois pas pourquoi le ministère des Sports pourrait s'y opposer. Il est nécessaire de prévoir l'automaticité de la dérogation lorsqu'elle est fondée sur la question du découpage à l'échelle alsacienne. J'invite donc le ministère des Sports à s'exprimer clairement sur ce sujet.

Il reste maintenant à transformer une institution en outil politique. Beaucoup d'attentes ont vu le jour autour de l'institution, mais ce n'est pas elle qui répondra aux besoins du territoire. Ce sont les projets politiques. La compétition politique ne se construira pas seulement autour de personnalités, mais autour de la vision du projet politique pour l'Alsace et de la projection dans l'avenir des spécificités qui ont conduit à la construction de cette institution.

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L'objectif est surtout que l'institution soit au service des Alsaciens. Sur la question du transport routier, la population nourrit de fortes attentes, car elle vit très mal l'engorgement de ses moyens de transports. Il en va de même du domaine transfrontalier.

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La création d'une ligue sportive alsacienne fait débat même au sein du mouvement sportif, car certaines personnes craignent un affaiblissement des ligues concernées. Je ne sais pas sur quoi se base la position du ministère des Sports, car l'organisation interne des fédérations est propre à chacune.

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Il n'est pas question d'imposer l'organisation des différentes fédérations à l'échelle alsacienne, mais d'en ouvrir la possibilité. La Fédération française de tennis a formellement engagé un dossier, et un débat est en cours dans le milieu du football. En fonction des enjeux de la discipline, l'une ou l'autre des échelles peut être pertinente. Nous souhaitons que l'alternative soit possible.

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Ce sujet est arrivé dans la discussion parlementaire sans que nous ayons effectué un travail en amont avec le ministère des Sports. Il existe une vraie volonté de certains acteurs de se réorganiser à l'échelle du territoire alsacien. Il est essentiel qu'un débat s'engage entre le milieu du sport et le ministère, les enjeux d'organisation n'étant pas négligeables, d'autant plus que ce cas pourrait constituer un précédent si d'autres processus de différenciation voyaient le jour dans d'autres territoires.

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La disposition votée ici consiste à retirer au ministère la capacité de refuser la dérogation. Cela ne veut pas dire qu'il n'accompagnera pas les clubs. Il est étonnant d'entendre dire que le ministère est réticent à appliquer la loi car ce n'est pas une option, c'est une obligation.

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Il existe une sorte de flou. La rédaction de l'article 5 englobe la question sportive, mais également la question culturelle et celle des organisations professionnelles. Elle conduit à parler d'échelle « infrarégionale », terme dont le sens n'est pas clair. Si une fédération culturelle ou sportive, organisée aujourd'hui à l'échelle du Grand Est, demande à s'organiser à l'échelle alsacienne, il n'y a pas de raison que le ministère s'y oppose.

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N'oublions pas l'acteur qu'est la région en matière de soutien au sport. Il faut que la région Grand Est soit consultée, car les régions ont un rôle majeur de financement des fédérations et des investissements sportifs.

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Nous abordons la dernière loi dont nous contrôlons l'application. Il s'agit de la loi n° 2019-1480 du 28 décembre 2019 visant à agir contre les violences au sein de la famille. Eu égard aux particularités de son objet et à l'importance des mesures d'application ce travail donnera lieu à un rapport.

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La loi a été votée par l'Assemblée nationale le 15 octobre 2019 et, après un accord avec le Sénat, elle a été promulguée le 28 décembre 2019 par le Président de la République. Nous nous sommes attachés à vérifier sa bonne application et que les mesures qu'elle comporte avaient porté leurs fruits en termes de transformation de la société et de meilleure protection des victimes de violences. Nous avons conduit un nombre significatif d'auditions auprès des interlocuteurs ministériels et des acteurs de terrain capables de nous donner un ressenti sur la bonne ou mauvaise application des différentes dispositions.

Le premier volet de la loi concernait l'ordonnance de protection, outil sur lequel notre pays a souhaité fonder son dispositif d'urgence au bénéfice des victimes de violence. Il a d'abord été question de renforcer l'arsenal des mesures de l'ordonnance de protection. Nous avions constaté à quel point les différentes dispositions étaient peu utilisées par les magistrats, notamment en matière de port d'arme. Il n'était pas acquis que la disposition qui impose aux magistrats d'interroger les parties afin de statuer sur les différentes mesures soit opérationnelle. Les parlementaires ont tenu bon dans les débats : il s'agit aujourd'hui d'une des plus grandes satisfactions de la loi. Désormais, les magistrats, la Chancellerie et les avocats conviennent que les juges aux affaires familiales utilisent l'ensemble des possibilités offertes dans le cadre de l'ordonnance de protection.

Nous avons avancé à marche forcée sur le délai de délivrance de cette ordonnance de protection. La moyenne se situait à plus de quarante jours. La loi fixe désormais un délai maximum de six jours. Un premier décret du 27 mai 2020 est venu contredire ce que la loi voulait mettre en place, entraînant une levée de boucliers des parlementaires, des associations, des avocats et des magistrats. Ce décret, qui imposait la caducité de l'ordonnance de protection si des délais intenables étaient dépassés et qui faisait peser sur la victime un certain nombre de charges, a été retiré. Un nouveau décret, qui convient à tous, a été publié un mois plus tard. Lors des auditions, nous avons constaté que le délai de six jours n'était pas toujours respecté mais que les améliorations étaient très significatives.

Le bracelet anti-rapprochement, qui aurait pu être mis en place au 1er janvier 2020, ne l'a pas encore été. Il est expérimenté dans cinq tribunaux depuis quinze jours. Je serai attentif à ce que toutes les juridictions en soient dotées d'ici la fin de l'année.

Le téléphone grave danger (TGD) est une réussite significative de la loi. Son accès n'est plus soumis au respect de multiples procédures. En janvier 2020, sur 1 153 équipements disponibles, 793 étaient attribués. En septembre 2020, sur 1 560 TGD, 1 173 sont attribués. La clarification du dispositif a donc été nette.

D'autres dispositions ne sont en revanche pas du tout appliquées, dont la perte de la pension de réversion pour la personne ayant commis un crime sur son conjoint. La Caisse nationale d'assurance vieillesse est prête à mettre la mesure en œuvre mais elle n'a pas accès aux fichiers qui le lui permettraient. Les expérimentations sur le logement n'ont pas été mises en œuvre non plus ; le décret qui doit fixer le comité de pilotage est toujours attendu. S'agissant de l'application numérique, outil incontournable pour protéger les victimes, un rapport devait être remis dans les trois mois suivant la promulgation de la loi, mais il n'a pas été rédigé.

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Nous avons voté ce texte à l'unanimité car il s'agissait d'une loi d'urgence. Nous avons fait diligence pour répondre à une situation qui pouvait devenir chaque jour plus dramatique.

Nous avons beaucoup travaillé et beaucoup innové. Je pense en particulier au lien entre le contentieux civil et les poursuites pénales. En outre, le fait que le juge civil énonce la liste des mesures possibles lors de l'audience sur l'ordonnance de protection, qui avait provoqué une sorte de scepticisme, est parfaitement mis en œuvre. Le nombre de décisions liées au port d'arme est important, tout comme la disposition sur la motivation de la décision de le maintenir. Les magistrats jouent pleinement le jeu, ce dont il faut se féliciter.

Il est parfois difficile de respecter le délai de six jours, mais il y a de toute façon un gain puisque nous sommes très en deçà de la situation initiale de quarante jours. J'espère que, dans quelques années, nous constaterons de nouvelles pratiques de façon à rendre plus fluides les circuits de décision.

S'agissant du logement, une convention a été signée entre les associations des victimes de violences conjugales et Action Logement pour que des hébergements soient attribués. C'est une bonne initiative des acteurs de terrain qui vient pallier une déficience dans l'application de la loi.

En ce qui concerne le bracelet anti-rapprochement, l'objectif était de garantir le respect des interdictions de contact et de paraître prononcées contre le conjoint violent. En l'espèce, le dispositif s'avère efficace. Nous avons constaté que la Chancellerie avait parfaitement accompli sa mission dans un délai de neuf mois qui me semble remarquable compte tenu des événements sanitaires. Le décret a été publié le 23 septembre 2020 après avis positif de la Commission nationale de l'informatique et des libertés et du Conseil d'État. Il a été présenté à Pontoise dès le lendemain. Le dispositif est donc mis en œuvre dans les délais annoncés par la Chancellerie lors du vote, soit avant la fin de l'année 2020. Le matériel est disponible ; la formation des acteurs a été dispensée ; il reste des protocoles à parfaire, mais ils sont en cours de rédaction. Je crois que nous aurons réussi à mettre en œuvre dans des délais record un dispositif de nature à sauver des vies.

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Il s'agit en effet d'une loi d'urgence et les chiffres constatés à la fin du confinement montrent que cette urgence est encore plus forte aujourd'hui. S'agissant des ordonnances de protection, les tribunaux appliquent la loi et les femmes sont protégées beaucoup plus rapidement qu'auparavant. C'est donc une avancée extrêmement positive. Par ailleurs, il faut que nous accentuions nos efforts pour exiger une mise en place du bracelet anti-rapprochement plus rapidement.

Je me félicite qu'Action Logement ait réagi car le 115 n'est pas une solution pour les victimes de violence. Il faut absolument obtenir que l'ensemble des bailleurs sociaux leur réservent des logements. À l'hôpital Robert-Ballanger, en Seine-Saint-Denis, il est prévu de créer un pavillon dans lequel les femmes victimes et leurs enfants pourront rester au maximum six mois. Cette initiative pourrait être reproduite ailleurs.

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Le cœur du dispositif porte sur l'ordonnance de protection et sur la réduction du délai à six jours. Des améliorations considérables s'observent mais j'ai cru comprendre que 30 % des affaires n'étaient pas traitées dans ce délai, ce qui reste important. Quels sont les obstacles ? Est-il possible de disposer de statistiques pour évaluer la bonne tenue des délais ?

On parle de trente-et-un jugements mensuels concernant le retrait de l'exercice de l'autorité parentale. Que représente ce chiffre dans la globalité des affaires ? En ce qui concerne le bracelet anti-rapprochement, je loue votre détermination, mais je doute un peu de sa généralisation à l'ensemble de nos juridictions d'ici la fin de l'année 2020.

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Il est important, dix mois après le vote de cette loi, de connaître la façon dont les magistrats et ceux qui doivent faire appliquer ses dispositions se saisissent de la question. Des difficultés subsistent quant à l'ordonnance de protection. Dans de nombreuses juridictions, le dépôt de plainte est presque une exigence à défaut de laquelle l'ordonnance peut être refusée. Nous devons tous insister sur le fait qu'il n'y a pas besoin de déposer plainte au préalable.

Le délai ramené à six jours est une très bonne chose. Il faudra être attentif, dans les prochains mois, à ce que les affaires ne soient pas ensuite renvoyées à un mois ou un mois et demi.

Par ailleurs, le « pont » établi entre le civil et le pénal pouvait sembler un peu baroque. Mais je constate que cela fonctionne, en tous cas que le juge pénal prononce davantage de retraits de l'autorité parentale. Nous n'avons pas encore les retours de l'application par le juge aux affaires familiales de la mise en place du bracelet anti-rapprochement. C'est un point de vigilance.

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Il est essentiel que nous avancions sur le logement, qui n'est pas une question accessoire. Dans une écrasante majorité d'affaires à la conclusion tragique, le fait que les victimes ne soient pas parties est lié à cette question matérielle. Si nous voulons sauver ces vies, il faut régler ce sujet.

En ce qui concerne le respect du délai de six jours, nous n'avons pas de statistiques, le chiffre de 30 % avancé dans le rapport étant issu de sondages ponctuels et donc à considérer avec beaucoup de réserve. La Chancellerie n'est pas organisée aujourd'hui pour disposer de ce type de données sur l'ensemble du territoire. Il est fondamental que le ministère de la Justice se dote des outils nécessaires. Nous constatons toutefois que l'inscription du délai de six jours dans la loi a permis de se rapprocher significativement de l'objectif.

En 2019, 4 200 ordonnances de protection ont été comptabilisées. L'objectif est de parvenir à 6 000 ordonnances cette année. Ce sujet progresse, mais nous sommes encore assez loin du compte.

S'agissant du bracelet anti-rapprochement, je partage la nécessité d'être attentif à la tenue des délais. Notre loi généralise le bracelet mais ne prévoit pas d'expérimentation. Il ne faudrait pas que celle qui vient, en pratique, de débuter, se prolonge avant d'aboutir à un enterrement de première classe. L'objectif est une généralisation avant la fin de l'année. En outre, la question du financement devra être traitée : sur les 7 millions d'euros nécessaires, 2,7 millions sont apportés par un fonds expérimental – le fonds de transformation de l'action publique – qui ne présente pas un caractère pérenne. Il nous faudra sanctuariser le financement du bracelet pour l'année prochaine.

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En ce qui me concerne, c'est la première fois que je prends part à une initiative législative qui va de bout en bout : nous avons décidé le bracelet anti-rapprochement et nous l'avons mis en œuvre.

Quant à l'ordonnance de protection, je me souviens qu'un de nos débats portait sur le principe même d'un délai maximum. Aujourd'hui, ce délai de six jours figure dans la loi et personne ne nous presse de le supprimer.

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Y a-t-il une opposition à la publication de ce rapport d'information ?

Aucune opposition n'est relevée.

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Nous autorisons donc la publication du rapport. Je vous remercie pour ce travail.

La réunion s'achève à 13 heures 05

Information relative à la Commission

La Commission a créé une mission d'information sur le régime juridique de l'état d'urgence sanitaire. MM. Sacha Houlié et Philippe Gosselin ont été désignés co-rapporteurs.

Membres présents ou excusés

En raison de la crise sanitaire, les relevés de présence sont suspendus.