Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Réunion du mercredi 24 octobre 2018 à 10h05

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • atteinte
  • démocratie
  • hongrie
  • pologne
  • traité

La réunion

Source

La réunion débute à 10 heures 05.

Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet, présidente.

La Commission examine la proposition de résolution européenne relative au respect de l'État de droit au sein de l'Union européenne (n° 1300) (M. Vincent Bru et Mme Coralie Dubost, rapporteurs).

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Notre commission est invitée à examiner la proposition de résolution européenne (PPRE) relative au respect de l'État de droit au sein de l'Union européenne, déposée par M. Vincent Bru, du groupe MoDem et apparentés, et par Mme Coralie Dubost, du groupe La République en Marche, le 10 octobre 2018, en conclusion d'un rapport d'information dont la publication a été autorisée le même jour. C'est la première fois sous cette législature que la commission des Lois est saisie d'un tel texte. Je vous rappelle donc la procédure qui s'applique.

Nous allons nous prononcer sur la base du texte adopté par la commission des Affaires européennes. Le texte qui sera adopté aujourd'hui pourra être inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale par la Conférence des présidents dans un délai de 15 jours. Si cette inscription n'est pas demandée ou qu'il n'y est pas fait droit, il sera considéré comme définitif.

Je précise que nous avons demandé à auditionner les ambassadeurs de Pologne et de Hongrie préalablement à la réunion d'aujourd'hui ; ni l'un ni l'autre n'a souhaité donner suite à cette proposition.

En travaillant sur le sujet qui nous réunit, j'ai retrouvé une interview croisée de M. Laurent Fabius, président du Conseil constitutionnel, et de la présidente de la cour constitutionnelle allemande, datant de 2016. Il y déclare qu'en Europe, l'État de droit n'est pas une option, c'est une obligation, et que les valeurs contenues dans l'article 2 du Traité sur l'Union européenne constituent notre bien commun européen et doivent le rester. C'était il y a deux ans, et il semble que le propos reste d'actualité. Je remercie donc nos rapporteurs de nous permettre d'échanger à ce sujet aujourd'hui en commission des Lois.

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Madame la présidente, puis-je intervenir pour un propos liminaire ?

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Je vous remercie. Je veux, au nom du groupe Les Républicains, dénoncer la forme que prend cette proposition de résolution européenne. Il est de tradition d'associer les oppositions à une telle démarche, au moins son groupe principal. On a choisi l'entre-soi, désigné des rapporteurs pour instruire le dossier, à charge et non pas à décharge. Il aurait été bon d'associer l'opposition, puisqu'il s'agit ici d'un sujet majeur, l'Union européenne.

Je partage totalement l'opinion que les droits de l'homme ne sont pas optionnels, qu'il n'y a pas de « menu » des droits fondamentaux où chacun ferait son choix. En outre, depuis le dépôt de cette proposition en janvier de l'an dernier, la situation a évolué. Le Parlement européen, instance parfaitement démocratique, s'est prononcé en faveur de l'activation de l'article 7. Ce vote engage l'Union européenne. Dès lors, quel est l'intérêt d'une telle proposition ? Elle apparaît plutôt comme une manoeuvre. Les ambassadeurs de Pologne et de Hongrie ne s'y sont pas trompés et n'ont pas souhaité être auditionnés. Ils ont le sentiment qu'il s'agit d'un procès d'intention et que l'affaire est déjà réglée. Elle semble l'être, d'une certaine façon, puisque l'opposition n'a pas voix au chapitre. Pour nous, un parlement national n'est pas dans son rôle en se lançant dans cette aventure.

C'est pourquoi notre groupe ne participera pas à ce que nous considérons comme une forme de mascarade. D'ailleurs, la faible présence ce matin montre que beaucoup de commissaires ne veulent pas tomber dans ces travers. Donc, nous ne resterons pas plus longtemps. Je le regrette, il aurait pu en être autrement s'il y avait eu une volonté d'écoute. Mais pour ne pas participer à une mascarade, nous quittons cette réunion.

Les commissaires du groupe Les Républicains se lèvent.

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Je vois que vous n'attendez même pas ma réponse…

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Nous allons vous écouter et nous quitterons la réunion ensuite.

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Je voudrais que, dans cette commission, le dialogue l'emporte, non les coups d'éclat. Nous en sommes bien d'accord, je pense. Les rapporteurs, vous le savez, ont été nommés par la commission des Affaires européennes…

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… et il est de tradition, vous le savez aussi, que la commission des Lois poursuive le travail avec ceux qui l'ont commencé et n'en nomme pas d'autres. Cela a toujours été le cas au cours de la dernière législature.

En outre, la commission des Lois associe toujours l'opposition aux rapports, à tous les déplacements qu'elle organise. Nous n'entendons pas changer de pratique, en tout cas pas sous ma présidence.

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Madame la présidente, je m'adresse à vous sur un ton courtois, mais nous serons fermes sur les principes. Mon propos n'est nullement une attaque contre la présidence de la commission des Lois. Reste que la commission des Affaires européennes n'a pas souhaité associer l'opposition, comme il est normal sur un sujet extrêmement sensible. Cela aurait pu éviter un certain nombre de difficultés. La présidence de la commission des Lois n'en est pas directement responsable. Mais nous avons déjà dénoncé la semaine dernière cette volonté de ne pas associer l'opposition. Avec les mêmes rapporteurs aujourd'hui, les mêmes causes produisent les mêmes effets.

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Je ne crois pas que les choses se soient passées exactement comme cela. Je laisse Mme la rapporteure vous répondre sur ce point.

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Monsieur Gosselin, j'entends vos préoccupations. Mais puisque l'État de droit au sein de l'Union européenne vous importe, je m'étonne que, lorsque le rapport a été proposé, il n'y ait eu aucun candidat du groupe Les Républicains. Évidemment, si l'on ne se porte pas candidat, on ne peut pas être associé aux travaux. Vous ne pouvez le reprocher ni à la commission des Lois ni à la commission des Affaires européennes.

Vous considérez que le récent vote du Parlement européen, le 12 septembre, en faveur de l'activation de l'article 7 à l'encontre de la Hongrie, constitue une évolution majeure. Mais quand la commission des Affaires européennes a proposé ce rapport en janvier, ce n'était pas ex nihilo. En décembre 2017, l'article 7 avait été mis en oeuvre à l'encontre de la Pologne. Il était donc parfaitement justifié que nous nous saisissions de ces questions. Des atteintes à l'État de droit portent aussi atteinte au principe de coopération loyale et de confiance mutuelle, donc de l'application du droit au sein de l'Union européenne. Il est fondamental que la commission des Lois, dans son ensemble, puisse statuer sur ces points.

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En outre, il y a eu un débat au sein de la commission des Affaires européennes. Il est dommage que votre groupe ne soit pas resté pour faire valoir…

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Pas du tout, il est, comme vous, intervenu, puis il est parti. C'est un peu dommage car nous avons discuté avec Mme Karamanli et Mme Obono, par exemple, de certains amendements tout à fait intéressants. Quant aux ambassadeurs, effectivement, il était souhaitable de les recevoir avant l'examen de la résolution par la commission des Lois. En revanche, pour préparer le rapport, nous n'avons pas fait appel à eux, même si nous avons rencontré – à deux reprises pour ma part – l'ambassadeur de Hongrie. Il est vrai que nous avions rencontré des ministres à Varsovie, à Bucarest et à Budapest. S'entretenir directement avec les exécutifs de ces pays valait mieux que passer par leurs ambassadeurs en poste à Paris.

Enfin, vous nous renvoyez au Parlement européen. À nos yeux, le respect de l'État de droit concerne l'ensemble des citoyens de l'Union, donc l'ensemble des parlements nationaux. Ce qui se passe dans certains pays et qui serait éventuellement contraire à l'État de droit a des conséquences sur la confiance mutuelle et sur la sécurité juridique pour l'ensemble des États. Aussi les parlements, s'ils le souhaitent, peuvent-ils se saisir de cette question.

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Le parlement allemand ne l'a pas fait, ni les parlements de certains pays importants.

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Je suis ravie de vous annoncer que le parlement allemand a ouvert une enquête sur le sujet, ainsi que le parlement portugais. Mais je comprends que la situation soit difficile pour Les Républicains, étant donné les votes de leurs eurodéputés le 12 septembre dernier.

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Encore une fois, nous assistons à une jolie manoeuvre politicienne. Ne voulant pas y participer, nous vous saluons et nous vous laissons entre vous.

Les commissaires du groupe Les Républicains quittent la salle.

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Nous allons donc commencer l'examen de la proposition. La parole est à la rapporteure.

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La commission des Lois est saisie à son tour de la proposition de résolution européenne que j'ai déposée avec mon co-rapporteur Vincent Bru, il y a plus de neuf mois. Depuis, nous avons procédé à des visites, enquêtes et auditions. Le sujet nous paraît fondamental. Il doit interpeller chaque citoyen européen et ne peut laisser la Représentation nationale sans réaction. L'Union européenne s'est bâtie sur un socle de valeurs communes que nous pensions définitivement acquises, comme une fin de l'histoire marquée par la généralisation de la démocratie. Elles sont consacrées à l'article 2 du Traité sur l'Union européenne. Or nous sommes confrontés à un phénomène sans précédent, l'émergence de régimes semi-autoritaires qui mettent en oeuvre une stratégie délibérée de démantèlement des pouvoirs et des contre-pouvoirs, autrement dit de remise en cause de l'Etat de droit. Ainsi, en Pologne, ce ne sont pas moins de deux cents présidents et vice-présidents de tribunaux qui ont été limogés suite à une réforme de l'organisation judiciaire, ce qui a modifié l'ensemble du système.

Plus inquiétant, c'est par une sorte de contagion, partie de Hongrie il y a longtemps, que le phénomène a gagné la Pologne et menace de s'étendre à la Roumanie, peut-être bientôt à la Bulgarie. Certes, chacun de ces États membres présente un contexte politique, économique, social, juridique propre, qui interdit l'amalgame entre eux. Face à cette menace d'atteinte à l'État de droit, les institutions européennes ne sont pas dépourvues d'instruments juridiques, même si leur efficacité est susceptible d'être améliorée.

Il existe d'abord une procédure d'infraction à portée générale qui peut être mobilisée pour toute violation des traités, y compris pour protéger l'État de droit. Elle permet, en cas de manquement, à la Commission ou à tout État membre de demander à la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) d'infliger des pénalités financières à l'État concerné, en vertu des articles 258 et 259 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.

Depuis 2014, – la situation est donc loin d'être nouvelle – existe aussi un cadre spécifique à la protection de l'État de droit, qui repose sur l'article 7 du traité sur l'Union européenne. Cet outil est plus délicat à mettre en oeuvre, en particulier dans son volet « sanctions » : il a été activé en décembre 2017 contre la Pologne, où les atteintes à la Constitution sont flagrantes. Une résolution votée le 12 septembre par le Parlement européen ouvre désormais la voie à sa mise en oeuvre à l'encontre de la Hongrie également. L'ouverture de ces procédures a pu paraître un peu tardive. Mais la détermination des États membres et des institutions européennes à faire cesser les violations de l'État de droit est un facteur essentiel. Disons-le clairement : il y faut du courage politique, et en ce sens je regrette qu'une partie de nos collègues se soient abstenus de débattre. La France s'engage en ce sens : le mois dernier, lors d'un débat à Luxembourg, le Président de la République a appelé à être plus ferme avec les pays européens qui ne respecteraient pas l'État de droit. La présente résolution doit y concourir en appelant l'ensemble des parlements nationaux volontaires et les États membres qui le souhaitent à s'unir pour soutenir toute initiative allant dans le sens d'un strict respect de l'État de droit au sein de l'Union européenne. Vincent Bru va vous présenter la proposition plus en détail.

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Sur le contexte, vous trouverez plus de détails dans l'état d'avancement des travaux que nous vous avons adressé, comme c'est l'usage, hier matin. La proposition de résolution dont la commission des Lois est saisie a fait l'objet d'un débat devant la commission des Affaires européennes, il y a deux semaines, à l'occasion de la présentation de notre rapport d'information. Ce sont les étapes normales de la procédure parlementaire pour ces textes particuliers que sont les résolutions européennes.

Je tiens à insister, en particulier pour la presse, sur le fait que les ambassadeurs de Pologne et de Hongrie ont été invités à s'exprimer devant la commission des Lois par sa présidente. Il était prévu que cette audition ait lieu mercredi dernier, c'est-à-dire avant le débat au fond par notre commission du texte de la résolution. Nous déplorons que l'un comme l'autre, après quelques jours de réflexion, ait décidé de décliner l'invitation et manqué l'occasion de s'exprimer publiquement.

Notre texte est organisé en plusieurs blocs. Les alinéas 1 à 9, soit les « visas » de la résolution, mentionnent les différents textes déclaratifs ou contraignants déjà édictés en matière de protection de l'État de droit. C'est plus important qu'il n'y paraît, car il s'agit d'énumérer les instruments de référence qui peuvent être ou qui ont été mobilisés. Nous vous proposerons par amendement d'élargir la liste à la Convention européenne des droits de l'homme et aux avis de la Commission de Venise, qui dépend du Conseil de l'Europe. Ce dernier n'est en effet pas resté inactif dans la protection de l'État de droit, même si, bien sûr, les sanctions ne sont pas extrêmement efficaces.

Les alinéas 20 à 28 rappellent les principales violations de l'État de droit, en Pologne, en Hongrie et en Roumanie, sans méconnaître au demeurant les divergences, les différences de situation entre ces trois États. Force est de reconnaître qu'il y a eu des risques ou des violations avérées dans trois domaines. Il s'agit d'abord du fonctionnement du contrôle de constitutionnalité, qui est essentiel ; la loi est librement votée par les parlements, mais elle doit obéir à des règles constitutionnelles qui doivent être préservées. Il s'agit ensuite de l'indépendance de la justice, un fondement de notre société démocratique : le juge national coopère à l'application du droit de l'Union européenne et peut d'ailleurs poser des questions préjudicielles devant la Cour ; il est donc très important pour l'ensemble des citoyens de l'Union de savoir quel est le degré d'indépendance de la justice dans les États membres. Il s'agit enfin de la prévention de la corruption et des conflits d'intérêts.

Toutes ces atteintes portées à l'application uniforme des principes fondamentaux de l'Union européenne répondent à la volonté de remettre en cause, selon nous de manière systémique et intentionnelle, l'État de droit, dans la plupart de ces États et, en tout cas, spécifiquement en Pologne et en Hongrie. Il nous a semblé plus opérant de ne pas donner de définition substantielle de l'État de droit, mais de laisser à la Cour de justice de l'Union européenne le soin de délimiter précisément la notion par sa jurisprudence. C'est l'objet de l'un de nos amendements.

Dans les alinéas 29 à 35, il vous est proposé que l'Assemblée nationale affirme son soutien aux procédures déjà engagées par les institutions européennes à l'encontre de la Pologne et à l'ouverture d'une procédure au titre de l'article 7, alinéa 1, pour risque clair de violation grave de l'État de droit à l'encontre de la Hongrie ; qu'elle prenne parti pour le maintien du mécanisme de coopération et de vérification en Roumanie, comme en Bulgarie. Sur ce bloc comme sur les précédents, nous vous proposerons des amendements rédactionnels.

Enfin, les alinéas 40 à 42 de la proposition de résolution préconisent la création de nouveaux mécanismes pour permettre une meilleure anticipation et plus de rapidité. Ils visent à assurer le respect effectif de l'État de droit par l'ensemble des États, et pas simplement par les États que nous visons. En particulier, nous proposons la mise en place d'un réseau d'alerte rassemblant des autorités administratives indépendantes nationales, mais également des personnalités qualifiées, afin de détecter d'une manière beaucoup plus précoce les violations ou risques de violation de l'État de droit. Nous y ajouterons, par un amendement final, deux alinéas qui vous invitent à demander à l'ensemble des parlements nationaux volontaires d'adopter une résolution de même nature que celle-ci. Nous sommes en effet persuadés que seul un soutien politique sans faille permettra aux institutions européennes d'aller au terme des procédures qu'elles ont engagées.

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Pour le groupe La République en Marche, la parole est à Mme Élise Fajgeles.

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Le départ de nos collègues du groupe Les Républicains et leur refus de débattre de cette proposition de résolution est loin d'être anecdotique. Il a, au contraire, une réelle signification politique car en votant cette résolution, mes chers collègues, il s'agit, dans le respect des institutions européennes et de notre Constitution, d'exprimer la position de l'Assemblée nationale sur ce qui pourrait, sur ce qui devrait, faire consensus entre nous, le respect des valeurs fondatrices de l'Union européenne, affirmées par l'article 2 du traité sur l'Union, qui sont la dignité humaine, la liberté, la démocratie, l'égalité, l'État de droit, le respect des droits de l'homme.

« Se fixant de grandes ambitions, l'Europe pourrait faire entendre sa voix et défendre des valeurs fortes : la paix, la défense des droits de l'homme, davantage de solidarité entre les riches et les pauvres. L'Europe, c'est le grand dessein du XXIe siècle ». Ces phrases de Simone Veil me font penser à ce qui a conduit nos prédécesseurs à vouloir cette Europe, à la construire : l'idée de pardonner sans jamais oublier, d'aller chercher ce qui nous rassemble, de construire pierre après pierre un édifice qui transcende nos particularismes sans renier nos identités, pour avoir compris qu'ensemble nous serions plus forts.

Oui, on peut, on doit même, pour aller de l'avant, entendre les doutes qui s'expriment sur l'Europe, sa remise en cause par ceux qui ne comprennent rien à ces règles absurdes, par ceux qui ne trouvent pas leur place dans cette Europe absconse. Il y a un an, à la Sorbonne et à Athènes, le Président de la République, affirmait que si l'on aime l'Europe, on doit l'améliorer pour la renforcer, pour la rapprocher de nos concitoyens et pour relancer, comme jadis ses fondateurs optimistes, un projet visionnaire. Il nous encourageait, pour ce faire, à favoriser l'émergence d'une Europe plus souveraine, plus unie et plus démocratique, car, je le cite : « L'essence du projet européen, c'est la démocratie. Je dis même que c'est sa force la plus grande, son aliment véritable. »

C'est pourquoi nous devons rappeler que nous partageons un socle commun de valeurs sur lequel nous devons être intransigeants et qui ont fait une Europe humaine, une Europe pacifique, une Europe caractérisée par le pluralisme, la non-discrimination, la tolérance, la solidarité, l'égalité entre les hommes et les femmes, une Europe qui garantit le principe de légalité, la sécurité juridique, l'interdiction de l'arbitraire du pouvoir exécutif, l'indépendance de la justice, la séparation des pouvoirs et l'égalité devant la loi.

Dès lors, quand un pays bat en brèche ces principes, ces valeurs, il nous appartient de nous exprimer pour les préserver, pour dénoncer les dérives, pour affirmer que les atteintes à la liberté de la presse et à l'indépendance du pouvoir judiciaire et l'instrumentalisation de l'identité nationale n'ont pas de place dans ce projet commun. Pour ce faire, si les instruments dont nous disposons ne suffisent pas, il convient de compléter cet arsenal pour en garantir le respect et rappeler qu'adhérer à l'Union européenne, c'est adhérer pleinement à sa philosophie.

La notion d'État de droit mérite-t-elle d'être clarifiée ? Certainement. La proposition de résolution envisage donc de le faire à l'occasion d'une prochaine révision des traités. Les outils juridiques existants pour faire respecter l'État de droit au sein de l'Union européenne sont-ils insuffisants et pas assez contraignants ? Oui également. Aussi la proposition de résolution conditionne-t-elle l'accès aux fonds structurels au respect, vérifié, de l'État de droit – tout en garantissant la protection des populations – et la mise en place de nouveaux mécanismes pour assurer ce respect.

Au-delà, si nous voulons garantir le caractère démocratique de l'Europe, cette réflexion sur le respect de l'État de droit doit être alimentée par l'ensemble de la société et nous mettre en mesure d'alerter les institutions compétentes le cas échéant. Aussi la proposition de résolution prévoit-elle la création d'un comité qui traitera des questions relatives à l'État de droit et l'instauration d'autorités administratives dotées d'un pouvoir d'alerte.

L'Europe est pour certains d'entre nous une évidence parce que nous n'avons connu qu'elle et qu'elle signifie paix et progrès. Mais nous savons tous qu'elle est aujourd'hui fragilisée par des velléités de repli nationaliste. L'Europe est jeune, adolescente pourrions-nous dire, et c'est à nous, collectivement, de la guider pour qu'elle atteigne la maturité. Sans l'Europe, nous serions démunis, et l'histoire nous a prouvé tragiquement qu'elle est le meilleur garde-fous contre les dérives qui naissent parfois de l'esprit des hommes. Le groupe La République en marche soutient donc cette proposition de résolution sans ambiguïté et réaffirme que le projet européen est au coeur de son engagement.

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Pour le groupe du Mouvement Démocrate et apparentés, la parole est à Mme Isabelle Florennes.

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Je tiens d'abord à remercier les rapporteurs pour le travail qu'ils ont effectué sur un sujet important et pour les propositions contenues dans leur rapport. Par ailleurs, je regrette que le groupe Les Républicains ne participe pas à ce débat, alors qu'il aurait été intéressant de pouvoir dialoguer avec eux. Dont acte.

Explicitement consacrée par l'article 2 du traité sur l'Union européenne comme l'une des valeurs sur lesquelles celle-ci est fondée, la notion d'État de droit, bien qu'ayant des origines variées, n'est pas un concept abstrait au regard de la construction européenne. Certains de ses principes, comme l'indépendance de la justice ou le respect de la hiérarchie des normes, contribuent directement à l'application uniforme et sereine du droit européen dans l'ensemble de l'Union et constituent par conséquent le terreau fertile d'une construction européenne saine.

Néanmoins votre rapport appelle notre attention sur les faits de violation grave de l'État de droit en Pologne et en Hongrie. S'agissant de la Pologne, la dégradation de l'indépendance de la justice ainsi que les atteintes à la protection juridictionnelle de la Constitution peuvent être soulignées. S'agissant de la Hongrie, la difficulté à laquelle la Cour constitutionnelle est aujourd'hui confrontée pour se prononcer, alors qu'elle est l'unique autorité publique en charge de la régulation des contenus et de la nomination de l'ensemble des directeurs exécutifs des médias publics, figure, avec les atteintes à la liberté académique, parmi les pratiques difficilement conciliables avec l'État de droit. Un mécanisme de sanction est prévu à l'article 7 du traité sur l'Union européenne, mais il est d'une application difficile car il nécessite l'unanimité des États membres. Ce mécanisme et le mécanisme préalable à l'activation de l'article 7, proposé par la Commission européenne et qui s'est appliqué à la Pologne dès le 13 janvier 2016, ont été peu efficaces. Aussi le rapport souligne-t-il à juste titre qu'il est nécessaire de trouver des solutions complémentaires. La Commission européenne, concomitamment à la publication de sa proposition pour le prochain cadre financier pluriannuel 2021-2027, a émis le 2 mai 2018 une proposition de règlement visant à conditionner l'octroi des fonds européens au respect de l'État de droit dans les États-membres, en s'appuyant sur le principe d'une bonne gestion financière définie à l'article 317 du traité fondateur. Cette proposition, dont l'avenir paraît incertain, devrait toutefois être mise en oeuvre avec parcimonie, comme le souligne le rapport, afin d'éviter l'aggravation de certaines situations.

Le Mouvement Démocrate et apparentés accueille avec un grand intérêt la proposition formulée par les rapporteurs consistant à créer un réseau européen d'agences et de juristes, destiné à assurer le respect de l'État de droit. Notre groupe soutient pleinement cette proposition de résolution et la votera.

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Je donne la parole, pour le groupe Nouvelle Gauche, à Mme Cécile Untermaier.

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Socialistes et apparentés, madame la présidente.

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Je vous prie de m'excuser, chère collègue. Votre groupe ne s'appelle en effet plus Nouvelle Gauche depuis un certain temps.

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Un fait d'importance dans la politique française !

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Soyons précis dans les termes que nous utilisons, surtout à la commission des Lois. Par ailleurs, monsieur, ce n'est pas un sujet de plaisanterie. Je vous rappelle l'importance qu'ont les oppositions, vous venez d'ailleurs d'en voir la manifestation. Vous nourrissez avec elles un rapport compliqué et cela mériterait un peu plus de réflexion de votre part.

J'en viens à la proposition de résolution. Les rapporteurs ont excellemment travaillé et je tiens à les en remercier. À la différence du groupe Les Républicains, nous considérons que cette initiative est importante et que les parlements nationaux doivent se saisir des questions liées à l'État de droit.

L'Europe, à mon sens, ne se partage pas entre nationalistes et progressistes. C'est beaucoup plus compliqué, et la réflexion qui s'annonce permet peut-être d'avancer dans cette direction. Le Parlement européen a enclenché la procédure de l'article 7, et l'État de droit a été bousculé en Hongrie, en Pologne, en Roumanie et peut-être en Bulgarie. Mais, en raison de la règle de l'unanimité, cet article 7 n'est pas applicable et le problème reste entier. La proposition a le mérite d'éclairer un peu cette impasse. Il faut absolument préserver l'État de droit, et vous proposez des dispositions tout à fait intéressantes comme de mettre en place un comité des parties prenantes et d'instituer un mécanisme global.

Il me semble que nous devrions aussi nous interroger sur la voie de la judiciarisation ouverte par la Cour de justice de l'Union européenne, qui a élargi ses moyens et sa saisine pour avoir à connaître des cas de non-respect de l'État de droit. C'est dans ce cadre qu'un État peut saisir la CJUE, aux termes d'un arrêté du 27 février 2018. Nous devons en tenir compte dans notre réflexion. Le Parlement doit, me semble-t-il, éclairer le Gouvernement sur la nécessité ou non de faire nôtre cet outil judiciaire, qui est désormais à notre disposition puisque chaque État membre de l'Union européenne peut traduire un autre État devant la Cour pour manquement à l'un des principes contenus dans les traités. Je n'ignore pas la difficulté d'une telle démarche mais, à titre personnel et au nom du groupe Socialistes et apparentés, je considère que des procédures contre la Pologne et la Hongrie sont indispensables pour arrêter l'évolution de l'État de droit dans ces pays.

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Pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine, la parole est à M. Stéphane Peu.

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D'emblée… (Interruptions.)

Il me faut rappeler, puisque nous faisons ici des observations sur l'État de droit et la démocratie, que le principe de base de la démocratie, c'est le respect des oppositions, et que ce respect s'accommode mal des sourires qui nous entourent.

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Il y a toujours beaucoup de respect dans cette commission, vous le savez bien. Je tiens à respecter les noms des groupes, Mme Untermaier m'y a rappelée tout à l'heure.

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Dans ce cas, on évite les commentaires ! Il est quand même paradoxal, quand on s'érige en donneur de leçons à des pays qui ne respecteraient pas l'État de droit et la démocratie, de tenir des propos qui ne sont pas respectueux vis-à-vis des oppositions. Il faut commencer par s'appliquer à soi-même les leçons qu'on se propose de donner aux autres.

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Je peux avoir beaucoup d'humour, mais il s'agit d'être respecté. Est-ce que je vais pouvoir m'exprimer ? Je sens qu'il va me falloir faire preuve de pédagogie.

D'emblée, donc, je voulais dire, avant qu'on me coupe la parole, que notre groupe votera en faveur de cette proposition de résolution, parce qu'il va de soi que, devant les atteintes à l'État de droit, les tentations antidémocratiques et totalitaires de certains pays membres de l'Union européenne, celle-ci doit rappeler ses valeurs fondatrices,

Je voudrais néanmoins faire plusieurs remarques. Tout d'abord, l'Europe ne se divise pas en deux camps, qui seraient les progressistes d'un côté et les nationalistes ou les antidémocrates de l'autre. Les gouvernements que l'on met en cause ne sont pas arrivés au pouvoir par effraction, mais par le choix des peuples. Et si ces derniers sont de plus en plus nombreux à être tentés par des pouvoirs forts, voire antidémocratiques, par des replis nationalistes, l'Europe ne peut pas ne pas s'interroger sur elle-même et sur l'échec d'une tentative d'imposer aux peuples des politiques qui échappent à leur souveraineté et à leur contrôle.

Ainsi, on ne peut pas examiner cette résolution sans parler de la décision, de mon point de vue scandaleuse, prise hier par la Commission européenne vis-à-vis du budget italien. Au nom de quoi la Commission européenne s'arroge-t-elle le droit de remettre en cause le choix démocratique du peuple italien, aussi contestable soit-il ? Donc ne pas voir le lien qu'il y a entre une Europe…

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Franchement, c'est très désagréable ! J'ai toujours été respectueux, je n'ai jamais coupé la parole à personne dans cette commission. Alors, avoir quelqu'un qui parle dans votre dos, quelqu'un qui parle dans la rangée d'en face, quelqu'un qui rigole sur le côté, ce n'est pas très respectueux…

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J'essaie, mais j'aimerais le faire dans de bonnes conditions, si c'est possible.

On ne peut pas ne pas faire le lien entre une politique européenne extrêmement autoritaire, une orthodoxie libérale qui enlève aux peuples une partie de leur souveraineté, et la possibilité de faire des choix politiques différents. On peut se demander, et la presse le fait d'ailleurs ce matin, si la décision de la Commission de Bruxelles sur le budget italien ne va pas s'appliquer demain au Portugal ou à l'Espagne, qui annonce, dans le cas d'un nouveau pacte majoritaire au parlement espagnol, des orientations divergeant des cadres budgétaires imposés par l'Union européenne. Une Europe qui s'assoit sur une partie de la souveraineté des peuples européens peut les jeter dans les bras de nationalistes ou des tenants du repli.

Enfin, je pense à la France. Il faut avoir beaucoup d'humilité quand on prétend donner des leçons ou s'arroger le droit de sanctionner tel ou tel État au nom de nos principes fondamentaux. La France a été plusieurs fois condamnée par la Cour européenne des droits de l'homme : sur la rétention des enfants, sur la garantie de l'autonomie du parquet – on touche ici à la séparation des pouvoirs –, sur la situation des prisons. Pour faire le lien avec l'actualité, je dirai aussi qu'il serait bon que l'Union européenne, en vertu de ses principes fondateurs, parle d'une seule voix sur l'Arabie Saoudite et l'affaire Khashoggi. Or, entre la position d'Angela Merkel vis-à-vis de l'Arabie Saoudite et celle de la France, il y a une différence, de notre fait, qui rend impossible l'expression de l'Union européenne sur un événement extrêmement grave. Je regrette de voir notre pays à la traîne, derrière l'administration Trump elle-même – c'est dire à quel point il n'est pas exemplaire !

Nous voterons, je l'ai dit, cette résolution, mais j'en appelle à l'humilité et à une réflexion sur la marche de l'Union européenne : si elle continue, malgré ses principes fondateurs, à imposer aux peuples une politique austéritaire et à brandir comme un étendard l'orthodoxie libérale, malheureusement les nationalismes monteront. Elle portera une responsabilité, et ce ne sera pas la nôtre.

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Au nom du groupe Libertés et territoires, la parole est à M. Jean-Félix Acquaviva.

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Après avoir salué le très bon travail des rapporteurs, je voudrais replacer ce débat, comme on vient de le faire avant moi, dans le contexte de la crise politique de l'Union européenne. Tenir ce débat est une avancée. Jusqu'à présent, l'Union européenne se comportait comme un syndic de copropriété qui ne s'occupait pas, ou pas suffisamment, de ce qui se passait dans chaque appartement, au mépris de ses principes fondateurs et de ses valeurs : l'État de droit, les valeurs humanistes et progressistes.

Changer de paradigme, avec la montée des populismes, et alors que l'Union européenne est au milieu du gué sur les plans économique et politique, est évidemment un chemin difficile. Cela demande du courage politique, et la révision de certains mécanismes. C'est bien l'objet de cette proposition de résolution européenne, mais on ne peut en débattre seulement sur le plan juridique. Il s'agit fondamentalement d'un problème politique, qui concerne la gouvernance politique de l'Union européenne. Avons-nous aujourd'hui les moyens aujourd'hui de mener pleinement un tel débat ? C''est là que le bât blesse. La montée des populismes est telle qu'elle appelle des réponses politiques à la hauteur des enjeux. L'Union européenne, la Commission européenne ne les apportent pas.

Dans ce contexte, la proposition de résolution va dans le bon sens. On peut, bien sûr, se demander qui désignera le comité des parties prenantes, qui s'assurera du caractère indépendant du réseau. Mais elle repose sur l'idée noble que l'État de droit s'applique à tous, y compris à l'État français, à l'État espagnol ou à l'État allemand s'il commet une violation. La Cour européenne a notamment condamné l'État français, mais pas seulement lui. Pour ma part, et j'ai déposé un amendement à cet effet, je veux attirer l'attention sur la situation difficile de la Catalogne. Au-delà des opinions sur l'objet du référendum – pour ou contre l'indépendance –, on ne peut pas admettre, dans une Union européenne fondée sur l'Etat de droit, que l'on puisse embastiller demain des leaders politiques et que ceux-ci risquent trente ans de prison pour le simple fait d'avoir organisé, sans violence, un référendum.

Ce problème de fond, qui pourrait se poser ailleurs demain, renvoie à des débats internes aux États, qui doivent se régler par des méthodes politiques, par des compromis politiques, et non par des solutions judiciaires dépendant des tenants du pouvoir de l'État en question, et bafouant les droits des citoyens, des individus ou des minorités aux termes de l'article 2 du traité sur le fonctionnement d'Union européenne.

Notre groupe votera cette proposition de résolution.

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La parole est à Mme Emmanuelle Ménard au titre des non-inscrits.

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Je ne prétends pas parler au nom de tous les non-inscrits, mais je le fais également au nom de Mme Marie-France Lorho.

Chaque fois qu'un pays prend une orientation différente du progressisme que vous prônez, il ne peut, selon vous, qu'aller dans la mauvaise direction. Or il n'existe pas, à ma connaissance, un moule dans lequel devraient se fondre tous les pays de l'Union européenne. Quand certains de ces pays se réclament d'une solution alternative conservatrice souverainiste, et, dans le cas de la Hongrie, démocrate-chrétienne – je reconnais que cela fait beaucoup de gros mots pour vous –, contraires aux orientations libérales de l'Union européenne, ils sont forcément condamnables, au simple motif qu'ils adoptent une voie différente.

Pourtant, ces choix reposent tout simplement sur la volonté des peuples de ces pays. Cela s'appelle la démocratie.

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Je donne maintenant la parole à ceux de nos collègues qui l'ont demandée.

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Je tiens d'abord à saluer le travail des rapporteurs sur un sujet fondamental pour l'Union européenne.

On l'a dit, l'État de droit est un fondement de l'Union européenne. Il est donc primordial que l'Assemblée nationale s'intéresse au sujet. J'ajoute, en tant que membre de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, que le respect de l'État de droit est l'une des valeurs centrales du Conseil de l'Europe qui appelle à chaque occasion les États membres à mettre en oeuvre le principe de la prééminence du droit. En octobre 2017, l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe avait voté une résolution relative aux nouvelles menaces contre la primauté du droit dans les États membres du Conseil de l'Europe, dont font partie nombre de membres de l'Union européenne. Nous avons alors pris note avec inquiétude de certains cas et adopté des recommandations vis-à-vis de la Pologne. Nous avons appelé les autorités de ces pays à s'abstenir de procéder à toute réforme qui pourrait constituer un risque pour l'État de droit et la séparation des pouvoirs.

Le Conseil de l'Europe, comme l'Union européenne, doit avoir un rôle d'accompagnement de ces États. Il ne s'agit pas d'agir uniquement par des sanctions ; il y a un travail d'accompagnement, de coopération, pour que l'État de droit existe partout dans l'Union européenne. Ce doit être une préoccupation de chaque instant, de chaque État car, en matière d'État de droit, rien n'est jamais acquis, on ne le rappellera jamais assez. Au Conseil de l'Europe, on voit tous les jours des exemples qui, des moins graves aux plus graves, démontrent que c'est, en Europe, un réel problème, qui doit nous préoccuper, tous groupes confondus. Je regrette que tout le monde ne soit pas aujourd'hui dans cette salle pour en discuter. Il s'agit là d'un sujet sur lequel nous ne pouvons faire l'impasse.

Je tiens donc à saluer cette proposition de résolution. En effet, il importe de clarifier la notion d'État de droit. Au Conseil de l'Europe, la Commission de Venise joue un rôle très important en la matière. Je salue les propositions d'amendement qui permettraient de la prendre en compte. Pour ce qui est de l'article 7, évidemment, si l'accompagnement et le dialogue doivent toujours prévaloir sur les sanctions, il faut, par souci de rendre le droit effectif, renforcer les outils de l'Union européenne dans ce domaine. Mais, j'y insiste encore, l'essentiel est de pouvoir dialoguer, se remettre en question, avoir une réflexion globale sur ce qu'est l'État de droit, sachant que c'est le fondement de l'Union européenne et qu'il n'y a pas d'autre choix.

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De quoi parlons-nous en fait ? D'une proposition de résolution déposée en vertu de l'article 88-4, alinéa de la Constitution, ayant pour objet de prendre une position politique, symbolique, morale, à l'égard d'une situation qui se dessine dans certains pays de l'Europe de l'Est, dont un certain nombre de grains de sable grippent le fonctionnement. Les institutions de l'Union se sont saisies du problème et nous sommes invités aujourd'hui à relayer cette préoccupation. Il ne s'agit en aucun cas de s'ériger en juge, ni de s'immiscer dans les affaires d'États souverains, ni de blâmer ni d'incriminer qui que ce soit. Il s'agit seulement d'interpeller la conscience collective européenne et française sur les dysfonctionnements qui semblent se faire jour, et finalement de nous inviter à une réflexion sur ce qu'est aujourd'hui l'État de droit. Je ne partage pas du tout la définition qu'en a donnée, il y a un instant, Emmanuelle Ménard. L'État de droit, c'est un ensemble de procédures qui s'imposent aux pouvoirs publics, mais c'est aussi un ensemble de valeurs : l'État de droit est celui qui s'engage, justement, par principe, à limiter l'exercice du pouvoir, et l'on ne saurait se prévaloir de l'accession démocratique à l'exercice du pouvoir pour s'autoriser toutes les dérives à l'égard des principes qui ont justement fait que l'on est arrivé au pouvoir.

Pour en revenir au contenu de la résolution, je ne vois pas du tout ce qu'il peut y avoir de choquant à vouloir préciser ce qu'est l'État de droit. Quant à la conditionnalité dans l'octroi et la réalisation des financements européens, elle existe pour toutes les aides internationales, et constituer des organismes de veille, d'alerte sur les violations me semble tout à fait naturel. Cette proposition m'apparaît donc pour ce qu'elle est : une manifestation d'intérêt de la Représentation nationale pour l'Union européenne, une affirmation forte de notre attachement à ses principes fondamentaux : la démocratie, l'État de droit, mais aussi les libertés fondamentales. Elle constitue un appel de la représentation politique française à un sursaut démocratique, un peu partout dans l'Union. Je regrette que, ce matin, nous n'arrivions pas à dépasser nos dissensions pour parvenir à une forme de de consensus sur l'État de droit, car si nos dissensions sont possibles, c'est justement la preuve que notre pays respecte l'État de droit, et nous devrions nous en réjouir.

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Je remercie à mon tour les rapporteurs pour leur travail et pour cette invitation qui nous est faite de porter haut et fort les valeurs auxquelles nous croyons tous : les valeurs de l'Union européenne, la démocratie, les libertés publiques, l'égalité face à la loi. C'est rappeler que l'Union européenne n'est pas uniquement un club économique : c'est aussi une communauté de valeurs, valeurs qui ne sont pas négociables, et que, face au constat que nous faisons, l'impuissance n'est pas une fatalité.

Dans ma circonscription, en Amérique latine, j'ai bien connu cette impuissance face à des organismes internationaux qui échouent dans certains pays à garantir les bases du fonctionnement démocratique, à des crises politiques et institutionnelles qui deviennent des crises économiques, sociales, voire humanitaires. Je pense, par exemple, au Venezuela, au Nicaragua, et j'espère du fond du coeur que le Brésil ne suivra pas cette voie dans les prochains mois.

Je crois qu'il nous faut agir au niveau de l'Union européenne. Certains outils proposés nous y aideront, en particulier le fait d'associer la société civile à la défense de l'État de droit. On le sait en effet, la société civile est en général la première victime du manquement à l'État de droit, et c'est aussi en son sein que l'on trouve les premiers garants de la vitalité d'un régime démocratique : associations, ONG, experts. Les associer leur permettra de récupérer cette capacité à participer à l'action publique, qui a été amoindrie dans ces États. Encore une fois, je remercie ceux qui ont fait ce travail, et regrette que nous ne puissions discuter ici tous ensemble du fond, et pas seulement de la procédure.

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Je souhaite simplement revenir sur une affirmation que nous venons d'entendre : le rejet du budget italien par la Commission européenne serait une atteinte à la démocratie. De quel droit, demande-t-on, agit-elle ainsi ? Ce droit, c'est simplement celui issu des traités qui ont été signés, ratifiés, par l'ensemble des pays dans un processus totalement démocratique.

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Que vous ne soyez pas content de la façon dont cela a été fait ou du contenu des traités, soit. Il n'empêche que la hiérarchie des normes aujourd'hui, c'est celle-là. On doit respecter les traités et c'est à ce titre que l'Europe a décidé de rejeter le budget italien hier, en proposant une procédure qui va suivre son cours. C'est aussi ce qui nous permet de débattre d'une telle proposition au sein de la commission des Lois. Cela me paraît totalement nécessaire, et je suis vraiment marri de ce qui s'est passé en début de séance et qui ne donne pas au public la meilleure image de notre Commission.

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Pour ma part, je suis plutôt satisfait : Je viens d'entendre Stéphane Peu nous expliquer, au nom du groupe GDR, qu'il fallait aller vers une politique étrangère et une diplomatie européenne commune. Je suis entièrement d'accord avec lui : nous souffrons non pas de trop d'Europe mais, bien souvent, de pas assez d'Europe. J'ai cru comprendre en effet, cher collègue, que, sur ce qui s'est passé au consulat d'Arabie Saoudite à Istanbul, vous auriez souhaité une réaction unique de l'Europe, autrement dit une politique diplomatique européenne. Ce serait tout à fait souhaitable, et créerait aussi des contraintes : à chaque fois que l'on s'engage dans une politique commune au sein de l'Union, cela signifie qu'on partage des valeurs, des outils communs. C'est le cas pour la politique économique, pour la politique monétaire, et c'est ce qui conduit aujourd'hui à la position de l'Europe par rapport à l'Italie. L''Italie n'est pas isolée : elle se situe dans le cadre d'une politique monétaire commune, dans laquelle elle s'est engagée tout à fait volontairement dans le cadre de la construction de l'Union européenne.

Nous sommes engagés les uns envers les autres, sur un socle de valeurs communes extrêmement solide. Ces valeurs viennent de notre histoire, et il est extrêmement important qu'elles soient au coeur de la construction européenne et de l'Union européenne.

L'Europe, ce sont aussi des politiques communes qui nous engagent, qui engagent donc la Hongrie et la Pologne qui ont choisi, à un moment donné, de rejoindre l'Union, d'être pleinement dans l'Union. Un certain nombre d'entre nous, Européens convaincus, ont critiqué un élargissement trop rapide et auraient préféré que l'on consolide d'abord l'Europe des premières nations. Si l'élargissement s'est fait, c'est parce que la Hongrie, la Pologne et d'autres ont voulu rejoindre l'Union européenne, ce qui comporte des droits et des devoirs. L'adhésion ouvre des droits fantastiques : celui de participer à un marché commun, celui d'être porteur de valeurs communes. Cela donne aussi l'accès – et, il faut bien le dire, pour la Pologne et la Hongrie, ce n'est pas neutre – aux fonds européens. Mais cela crée aussi un certain nombre des devoirs, dont celui de partager les mêmes valeurs, de respecter des logiques économiques, l'équilibre budgétaire. Je m'étonne d'ailleurs que ceux qui mettent constamment en avant cette logique des droits et des devoirs dans nos territoires considèrent qu'il serait tout à fait normal qu'un pays puisse se dégager de ses devoirs et bénéficier uniquement des droits. Ceux-là devraient réfléchir aux valeurs communes que nous portons et qui assurent cet équilibre des droits et des devoirs.

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Je donne la parole aux rapporteurs pour répondre aux orateurs.

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Je remercie les membres de La République en marche, du Modem et des groupes politiques qui ont déclaré s'associer à ce combat commun pour les valeurs communes de l'Union européenne et le respect de l'État de droit. Comme l'a dit Christophe Euzet, l'État de droit fait partie d'un triptyque indissociable : État de droit, démocratie, droits de l'homme. S'il y est porté atteinte, il peut être porté atteinte beaucoup plus facilement aux deux autres piliers. Il faut être extrêmement vigilant.

Des inquiétudes se sont exprimées. Monsieur Peu, la question de l'union monétaire ne touche pas directement celle de l'État de droit. Pour autant, les engagements de l'Italie, vous le savez, ressortent des traités, mais ce n'est pas l'objet de la proposition de résolution. Selon Mme Ménard, ceux qui ont été élus avec une majorité démocratique peuvent faire ensuite tout ce qu'ils veulent. C'est faux. En Roumanie par exemple, 30 % du budget provient de fonds européens. Il y a une seule autoroute, qui vient d'être reconstruite, presque uniquement sur des fonds européens. Il a donc fallu passer des marchés publics. Si l'indépendance de la justice, le principe de légalité, la séparation des pouvoirs et l'égalité devant la loi ne sont pas assurés, qu'est-ce qui nous garantit que ces marchés publics ont été passés correctement et dans l'intérêt des citoyens roumains ? Vous assimilez, et c'est très dommage, les actes délétères de gouvernements et les sentiments de populations qui sont europhiles, attachées aux valeurs européennes. Nous sommes allés sur place, nous avons rencontré la société civile en Roumanie, en Hongrie et en Pologne. On y attend de nous que nous rappelions ce qui est indispensable et que nous nous opposions aux dévoiements.

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Mme Untermaier a rappelé, très utilement, le rôle de la Cour de justice de l'Union européenne. Cependant, qu'un État puisse saisir directement la Cour n'est pas une nouveauté. Il est vrai que la CJUE a produit en 2018 une jurisprudence particulièrement intéressante, avec l'arrêt concernant l'indépendance des juges portugais, et la réponse donnée à la demande d'avis formulée par la Cour suprême d'Irlande sur une extradition vers la Pologne suite à un mandat d'arrêt européen. On voit là que des solutions juridictionnelles seraient possibles si ce type de question était plus largement instruit devant la Cour pour mieux faire respecter l'État de droit.

M. Peu et M. Acquaviva ont élargi le sujet à des questions plus politiques. Que tout soit lié, je ne le nie pas. Mais il importe de rester dans le domaine juridique et de traiter strictement de l'État de droit. Sur la Catalogne, à titre personnel, je suis tout à fait d'accord pour dénoncer ce qui se passe, mais nous tenons à rester dans le cadre des questions traitées directement par l'Union européenne.

Madame Ménard il ne s'agit évidemment pas de stigmatiser certains États, ni de mettre en cause le libre choix par les citoyens de leurs gouvernants et du programme que ceux-ci vont mettre en oeuvre. C'est la démocratie. Mais, dans une démocratie, il faut respecter les contre-pouvoirs, il faut respecter les principes constitutionnels. Ce n'est pas le cas en Pologne, où la présidente de la Cour suprême, nommée pour six ans, c'est-à-dire jusqu'en 2020, a été obligée début juillet de quitter son poste – en fait elle n'a pas quitté son bureau et est entrée en résistance – sous prétexte de l'application d'une loi contraire à la Constitution polonaise. Ces États qui, lorsqu'ils sont entrés en 2004 dans l'Union européenne ont accepté les critères de Copenhague, les principes et valeurs inscrites à l'article 2 du traité de l'Union européenne, doivent respecter ces mêmes valeurs et ces mêmes principes aujourd'hui. En outre, la Pologne a reçu, dans le cadre financier pluriannuel 2014-2020, 86 milliards d'euros. On ne peut pas demander à l'Europe de donner des fonds et mettre de côté les principes fondamentaux. Pour la Hongrie, les fonds européens représentent 4 % du produit intérieur brut, ce qui est un montant considérable. Nous reviendrons plus tard sur le principe de conditionnalité.

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Un de nos collègues nous a appelés à l'humilité. Nous en sommes parfaitement d'accord, et les critères dits de Copenhague sont les mêmes pour tous les États membres et s'appliquent à chacun de la même façon. Ce sont des critères parfaitement objectifs, et c'est pourquoi nous proposerons des amendements pour les préciser et les réintégrer dans cette résolution.

On a également cité certaines affaires pour rappeler que nul n'est infaillible en matière d'organisation judiciaire et de contre-pouvoirs. Certes, mais il y a une grande différence entre faire parfois des erreurs, ensuite corrigées, et mener une entreprise de déconstruction de tout un système de contre-pouvoirs. C'est cette attitude extrêmement grave qu'ont constatée la Commission européenne, la Commission de Venise et la commission des Affaires européennes de notre Assemblée.

La Commission en vient à l'examen de l'article unique de la proposition de résolution.

Article unique

La Commission est saisie des amendements identiques CL 10 de Mme Emmanuelle Ménard et CL14 de Mme Marie-France Lorho.

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Je rappelle que chacun dispose de deux minutes pour défendre son amendement.

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Madame la présidente, je me permettrai de revenir sur le respect de l'État de droit, car il en existe déjà des définitions. Les deux minutes que vous m'accordez sont un temps trop court.

Cette proposition de résolution relative au respect de l'État de droit au sein de l'Union européenne vise à condamner la Pologne et la Hongrie sous prétexte que ces deux États porteraient des valeurs contraires à celles de l'Union européenne. D'abord, je ne savais pas qu'il existait un juge suprême, en l'occurrence des commissions non élues qui décident du contenu de ces valeurs en faisant fi des spécificités des pays.

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D'autre part, ces États participent de la diversité politique et nationale constitutive du projet européen. Vous regrettez que les ambassadeurs de Hongrie et de Pologne n'aient pas souhaité être auditionnés par la commission des Lois. Franchement, vu le contenu de la résolution, ce n'est pas très étonnant ! Personne n'aimerait se présenter devant une sorte de tribunal qui a déjà jugé l'affaire qui doit être examinée. Je ne suis pas la porte-parole de ces deux États, mais puisque leurs ambassadeurs ne se sont pas présentés devant nous, je voudrais citer les propos de l'ambassadeur de Hongrie en France, qui explique : « Les Hongrois n'ont jamais accepté d'être gouvernés par d'autres. Après l'occupation ottomane, nous avons subi la tutelle des Habsbourg ; après 1945, ce fut l'occupation soviétique. Voilà pourquoi nous n'accepterons jamais de nous faire dire par d'autres ce que nous devons faire. L'Union européenne ne doit pas nous dicter sa loi, nous souhaitons simplement que l'Europe occidentale respecte nos valeurs comme nous respectons les siennes. »

Si nous respectons les pays qui souhaitent plus d'immigration, respectons ceux, dont la Hongrie, qui ont une autre position. Je ne crois pas que la France doive s'ériger en arbitre ou en juge de ce que les peuples hongrois et polonais ont jugé bon pour leur pays, à moins que pour vous, et j'y reviens encore une fois, la démocratie et la voix des peuples n'aient pas la même valeur pour tous.

Je reviendrai ensuite sur l'État de droit si vous me le permettez.

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Madame Ménard, en vertu de l'organisation nos travaux, vous aviez droit à cinq minutes dans la discussion générale, puis à deux minutes comme pour toute défense d'amendement. Ce sont les règles que nous appliquons depuis le début.

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« Nous souhaitons simplement que l'Europe occidentale respecte nos valeurs comme nous respectons les siennes. » Cette remarque proférée par l'ambassadeur de Hongrie en France Georges Karolyi dans la revue Conflits résume en une phrase le problème fondamental posé par ce texte. L'Union Européenne n'est pas une entité globale mais une union d'États souverains ; certains de ses membres, sortis tardivement du joug soviétique, aspirent à la préservation de leur identité et de leurs valeurs, qui ne saurait être remise en question sous prétexte qu'elle ne correspond pas à la vision globalisante de certains autres.

Le texte que vous proposez à la commission des Lois aujourd'hui contrevient au respect de l'autorité souveraine des États ; il insulte certains pays, accusés de ne pas respecter l'État de droit parce qu'ils ne veulent pas encourager l'immigration illégale. Et ce, alors même qu'aucun article du traité sur l'Union européenne n'impose un État de faire entrer des clandestins qu'il n'aurait pas admis sur son territoire.

C'est la raison pour laquelle je m'oppose sans hésitation à ce texte, dont le caractère provoquant et insultant est attentatoire à l'entente qui devrait régner entre les différents membres de l'Union européenne.

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Madame Ménard, vous aviez un temps d'intervention en discussion générale, et vous n'avez pas proposé de définition de l'État de droit. Si cela vous tenait à coeur, c'est alors qu'il fallait le faire. Il était possible aussi de le proposer par amendement.

Les deux amendements tendent à supprimer la totalité de ce texte qui soutient la défense des valeurs communes fondées sur la démocratie, les droits de l'homme, l'État de droit en Europe. J'émets donc, évidemment, un avis défavorable.

Par principe, vous allez vous opposer tout au long de l'examen du texte.

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Vous opposez la communauté de valeurs au sein de l'Union européenne et l'autonomie des États, c'est-à-dire que vous êtes contre l'Union européenne telle qu'elle est conçue. L'article 2 du traité sur l'Union européenne est particulièrement clair. Un pays candidat à l'adhésion sait parfaitement qu'il va devoir se soumettre à ses valeurs. D'ailleurs, au moment de leur intégration au sein de l'Union européenne, la plupart de ces États ont augmenté leurs niveaux de garanties juridiques et fait faire des progrès phénoménaux à leur système judiciaire. C'est ainsi que la Roumanie s'était dotée de l'un des systèmes de lutte contre la corruption les plus performants, jusqu'à la décision toute récente de la Cour constitutionnelle de priver de pouvoir le président de la République pour limoger de force la procureure en chef de la Direction nationale anticorruption. Il y a des régressions sur ces sujets dans certains États. C'est alarmant, et nous nous opposons à votre volonté d'être attentistes, de fermer les yeux, de laisser déconstruire les valeurs fondamentales.

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En complément à l'excellente réponse de Mme la rapporteure, je rappelle que l'Union européenne est une des constructions politiques, mais aussi philosophiques, les plus complexes que l'humanité ait créées. Cette affirmation peut paraître présomptueuse, mais c'est aussi une façon de reconnaître ses imperfections. On oublie aussi trop souvent de rappeler que, depuis que nous avons commencé à construire cet objet politique incroyable, nous vivons en paix. Une paix de soixante-dix ans, c'est une anomalie dans l'histoire de notre continent et dans l'histoire de l'humanité. Le rappeler, en préliminaire à la discussion que nous aurons sur l'État de droit, est important. Cette paix, nous devons la préserver, et c'est exactement le sens de cette résolution, qui rappelle un certain nombre de choses et qui nous permettra d'avancer sur le plan juridique pour préserver cet équilibre institutionnel, historique, humain, que nous avons construit depuis soixante-dix ans.

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Sans revenir sur la caricature qu'a faite Mme Dubost et sur les intentions qu'elle me prête à propos de l'Union européenne, je voudrais rappeler que je suis profondément européenne. Simplement, je crois pas à la même Europe que vous. Je ne crois pas à cette Europe technocratique, froide, éloignée du citoyen, que vous prônez. La démocratie, madame Dubost, c'est aussi de respecter les conceptions divergentes. De même, la Hongrie et la Pologne ont le droit d'avoir, en respectant l'État de droit, des conceptions divergentes de celles de nos sociétés occidentales – française, allemande ou autre.

Je reviens sur l'État de droit. Il en existe une définition. Je ne vois pas pourquoi vous voulez en chercher une, à moins que celle qui existe ne vous convienne pas. Mais alors, il faut le dire. Un État de droit, c'est un État dans lequel tous les individus ou collectivités ont leurs activités déterminées et sanctionnées par le droit. À un État de droit s'oppose donc un État où règne l'arbitraire, le bon plaisir du prince, bref l'État où certaines personnes ou autorités ne voient pas leurs activités et pouvoirs encadrés, limités par le droit.

Je ne ferai pas de parallèle avec l'affaire Benalla, ce serait un peu trop facile.

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Eh oui, cela vous dérange ! Mais avant de donner des leçons de morale à la Pologne et à la Hongrie, expliquez-moi si le cadre juridique dont je viens de parler n'y existe pas, si les activités des individus ou collectivités n'y sont pas encadrées par des règles juridiques…

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Si vous avez accès au rapport, qui explique comment ces règles juridiques sont mises à mal dans ces États, vous n'aurez pas de mal à le comprendre.

Vous n'avez pas cité la source de votre définition de l'État de droit, c'est curieux si votre démarche est sérieuse. L'État de droit est également défini par la Commission de Venise, de façon convergente avec la Commission européenne et la Cour de justice de l'Union européenne. Ce n'est pas la France qui s'érige en tribunal…

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… c'est la France qui respecte l'autorité de la chose jugée, de la Cour de justice de l'Union européenne.

Regardez ce qui se passe réellement dans ces États, où des cours constitutionnelles sont démantelées pour être aux mains du pouvoir politique….

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Lisez le rapport, tout est dedans. Des lois, des réformes constitutionnelles ont permis de limoger des juges par centaines…

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… de changer des générations de juges, de modifier la composition des cours constitutionnelles, cours suprêmes, cours de cassation, conseils supérieurs de la magistrature, de fusionner le poste de ministre de la justice avec celui de procureur général en lui donnant tous pouvoirs disciplinaires sur les juridictions inférieures, la faculté de se saisir au fond. Vous pensez que ce ne sont pas des attentats à l'État de droit ? Vous pensez que ce ne sont pas des atteintes à la démocratie ? Et je n'ai pas mentionné les atteintes, en parallèle, à la liberté de la presse, à la liberté d'enseignement, à la liberté académique, à l'activité des ONG. Mélangez tout cela, et vous aurez un très bon cocktail contre la démocratie !

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Les majorités décident en fonction de ce que souhaitent les citoyens, mais lorsqu'une loi est contraire à la Constitution, dans tous les pays du monde démocratique, y compris en Europe, cette loi peut être invalidée…

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Vous, vous réformez bien les constitutions !

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… par une juridiction constitutionnelle, Ce n'est pas le cas en Pologne, et ce n'est plus le cas en Hongrie : le contrôle de constitutionnalité y est réduit à néant. Une majorité doit se plier à des règles supérieures : c'est aussi cela, l'État de droit. Ce sont les règles constitutionnelles, les principes à valeur constitutionnelle et les principes fondamentaux qui fondent l'Union européenne à laquelle ces pays, librement, ont adhéré en 2004. S'il n'y a pas ces contrôles, s'il n'y a pas ces contre-pouvoirs, il n'y a plus de démocratie, mais une tyrannie de la majorité, qui décide librement et sans limite, et c'est extrêmement grave. Il faut des contre-pouvoirs, car la démocratie, ce n'est pas simplement élire ceux qui dirigent, c'est aussi respecter des principes constitutionnels supérieurs, des valeurs fondamentales de l'Union, et permettre à des contre-pouvoirs de s'exercer librement. S'il n'y a pas de liberté de la presse, les élections sont faussées.

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Je veux simplement informer Mme la rapporteure de la réponse de l'ambassadeur de Pologne en ce qui concerne la fusion des postes de ministre de la Justice et de procureur général : une situation similaire existait entre 1990 et 2010, donc au moment de l'adhésion de la Pologne à l'Union européenne, et n'avait jamais fait l'objet de questions.

La Commission rejette les amendements.

Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL44, CL31, CL32, CL15, CL33, CL16, CL18, CL19, CL22, CL 34 et CL25 des rapporteurs.

Elle examine ensuite l'amendement CL9 de M. Erwan Balanant.

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Cet amendement substitue aux mots « de la tradition constitutionnelle des » les mots « notamment des traditions constitutionnelles communes aux ». Ce petit changement est en réalité très important.

Mme Ménard donne de l'État de droit une définition parfaitement incomplète dans le cadre de notre construction européenne. En effet, l'État de droit est issu des traditions constitutionnelles de chacun des membres de l'Union. L'État de droit, c'est un certain nombre d'éléments que je ne vais pas tous énumérer, par exemple le respect de la hiérarchie des normes, l'égalité devant le droit, l'indépendance de la justice, la séparation des pouvoirs, etc…Et quand nous-mêmes commettons certains manquements à ce socle de valeurs, comme l'a dit M. Peu, il est important que la Cour européenne de justice ou d'autres institutions nous le disent. C'est ça qui fait la beauté de l'objet politique, « Union européenne ».

La Commission adopte l'amendement.

Elle adopte ensuite l'amendement CL35 des rapporteurs.

Puis elle examine l'amendement CL23 des rapporteurs.

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Cet amendement va rassurer Mme Ménard. Il précise en effet que la notion de l'État de droit à laquelle renvoie l'article 2 du Traité sur l'Union européenne a été éclairée et précisée par les interprétations de la Commission européenne et de la CJUE. C'est vrai aussi de la Commission de Venise du Conseil de l'Europe.

La Commission adopte l'amendement.

Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL36, CL24, CL37, CL38, CL26 et CL39 des rapporteurs.

Puis elle examine l'amendement CL40 des rapporteurs.

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Cet amendement décrit le remplacement « d'une génération de hauts magistrats par des juges sélectionnés par un organe sous le contrôle du parti au pouvoir et choisis en fonction de la compatibilité de leurs opinions avec le pouvoir en place ».

La Commission adopte l'amendement.

Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL20, CL41, CL27, CL42 et CL28 des rapporteurs.

Puis elle examine l'amendement CL1 de Mme Marie-France Lorho.

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Je m'étonne du ton menaçant adopté ici : vous dénoncez, madame et monsieur les rapporteurs, les ambitions « idéologiques » de la Hongrie et de la Pologne. La France serait-elle à ce point irréprochable que vous puissiez vous permettre de condamner nos voisins européens, dont j'ose rappeler qu'ils sont à la fois des partenaires mais aussi des homologues égaux ?

Non seulement l'affirmation que vous formulez est offensante et injustifiée, mais elle contrevient au respect du traité de l'Union Européenne, qui dispose que l'Union se doit de promouvoir la solidarité entre les États membres.

J'entends que votre opinion diffère de celle de Viktor Orbán, notamment en matière migratoire. Ainsi qu'il l'a clairement énoncé, M. Orbán ne souhaite pas que son pays devienne un pays d'immigration. C'est aussi le cas de 58 % des Français, selon un sondage réalisé par l'IFOP il y a peu. Les Français sont-ils pour autant des « idéologues » ?

Il serait paradoxal qu'au nom de la liberté vous condamniez non des excès, mais la possibilité même de mener une politique différente de la vôtre. Le jugement que vous portez à l'égard de ce pays membre aura une portée diplomatique grave ; c'est la raison pour laquelle je demande la suppression de l'alinéa 31.

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Je ne sais pas si vous avez pu lire la totalité du rapport. Il y est dit clairement que ce caractère idéologique ne tient pas à la politique migratoire. Je comprends que vous préfériez mettre l'accent sur ce sujet. Mais, au bord des routes hongroises, on voit de grands panneaux publicitaires qui promeuvent non pas, comme ailleurs, des marques commerciales, mais des campagnes diffamatoires contre les magistrats en exercice, en disant qu'il faut tous les limoger car ils ont été nommés sous le régime communiste. Il s'agit bien d'une campagne idéologique.

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Cette campagne s'intitule « Voulez-vous encore des juges corrompus ? » Nous ne jugeons pas des politiques, chacun peut avoir ses idées. Mais on constate dans ces deux pays des atteintes qui n'ont rien à voir avec les atteintes mineures qui peuvent se produire dans tous les pays de l'Union européenne. Tous les États ont des progrès à faire, y compris la France, et la révision de la Constitution y a aussi pour objet d'améliorer l'État de droit, notamment en ce qui concerne le Conseil supérieur de la magistrature et le Conseil constitutionnel, qui ne comportera plus de membres de droit et à vie. Dans ces pays, on assiste en revanche à une remise en cause systémique et intentionnelle de la démocratie, pour faire taire les oppositions et la presse et empêcher le contrôle de constitutionnalité et l'indépendance des juridictions. Nous ne nous érigeons pas en juges, nous mettons en cause ces dérives.

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Comme nous l'avons dit, il s'agit bien ici de soutenir les institutions européennes et de leur donner des moyens supplémentaires pour défendre l'État de droit, le pluralisme des médias, l'indépendance de la justice, la séparation des pouvoirs.

Il me semble que c'est vous, au contraire, qui avez une position idéologique en instrumentalisant la politique migratoire ; or ce n'est pas de cela qu'il est question dans le rapport. Vous mettez ce sujet, si j'ose dire, sur le tapis, pour faire valoir votre position en faveur d'une politique migratoire complètement fermée. J'aimerais savoir si, oui ou non, vous soutenez les institutions européennes pour défendre la pluralité des médias, l'indépendance de la justice, la séparation des pouvoirs.

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Je vais vous donner quelques exemples très concrets, sans rapport aucun avec les politiques migratoires. En Hongrie, a été créée une sorte d'autorité des médias, totalement à la main du Gouvernement et dotée de pouvoirs extrêmement étendus : le droit d'octroyer de retirer les licences, d'évaluer les contenus diffusés par les médias et d'imposer des sanctions financières si ces contenus ne sont pas politiquement corrects selon l'évaluation faite par le Gouvernement. Si ce n'est pas de l'idéologie, je ne sais pas ce que c'est. De même, les nouvelles références et les modifications apportées à la Constitution hongroise, remettant en cause au nom d'un prétendu caractère historique des droits fondamentaux largement partagés au sein de l'Union, sont parfaitement idéologiques, et inacceptables dans une communauté de droit.

La Commission rejette l'amendement.

Elle adopte l'amendement rédactionnel CL45 des rapporteurs.

Puis elle examine l'amendement CL11 de Mme Emmanuelle Ménard.

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J'ai l'impression que l'on fait de Mme Lorho et de moi-même les avocates de la Pologne et de la Hongrie. Ce n'est pas notre intention. Notre intention, c'est d'expliquer le pourquoi de certaines mesures que, depuis la France, on s'arroge le droit de dénoncer ou de juger.

J'ai bien entendu vos explications, et d'ailleurs je n'approuve pas un certain nombre de mesures qui ont été décidées par l'État de Pologne ou l'État de Hongrie. Mais je ne m'arroge pas le droit de décider à leur place ni de les juger de ma place, bien confortable, à l'Assemblée nationale française. À aucun moment je ne vous ai entendus mentionner les explications des gouvernements pour justifier ces réformes. Or on ne peut pas comprendre – je dis bien « comprendre », pas « excuser » ni « approuver » – les réformes polonaises, sur lesquelles porte mon amendement, si l'on fait fi du passé, de l'occupation qu'a subie la Pologne et de sa résistance face au communisme. Le Gouvernement polonais explique qu'il était déterminé à améliorer son système judiciaire, qui ne punit pas suffisamment la corruption. Vous avez dénoncé ces campagnes qui pointaient du doigt certains juges ; je ne les ferai pas miennes, en tout cas pas de cette façon-là. Mais on ne peut pas faire fi de l'explication qui est donnée par le Gouvernement polonais, qui dit : « Savez-vous que des juges du temps de l'état de siège en 1981, du temps du général Jaruzelski, des juges qui avaient prononcé des sentences honteuses, siègent aujourd'hui à la Cour suprême que vous défendez ? » Si l'on ne donne pas aussi cet élément d'explication historique, on ne peut pas prendre position sur les réformes polonaises ou hongroises en toute connaissance de cause.

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C'est un argument plutôt facile. La présidente de la Cour suprême n'était pas du côté des communistes : elle a soutenu Solidarność. Vous reprenez les arguments de l'ambassadeur qui dit que la Pologne n'a pas connu de purge, contrairement à la France sous la Révolution française et à la Libération, et que c'est aujourd'hui qu'il faut faire cette purge de magistrats qui auraient été des serviteurs d'un régime et d'une idéologie communistes. Cela ne correspond pas tout à fait à la réalité. L'actuelle présidente de la Cour suprême a été nommée pour six ans, jusqu'en 2020, en vertu d'un article de la Constitution – et en Pologne, il n'y a pas de majorité pour modifier la Constitution, contrairement à la Hongrie – , et voilà qu'en application d'une simple loi on lui demande, début juillet, de quitter ses fonctions. Trouvez-vous cela normal, et digne d'un État de droit ?

Ensuite, au sein de cette Cour suprême, équivalent de notre Cour de cassation, on a créé deux chambres. L'une est composée de personnes qui ne sont pas toutes des magistrats et qui vont examiner les actions disciplinaires contre les magistrats. L'autre est chargée d'examiner les « plaintes extraordinaires » susceptibles d'être portées contre des décisions de justice ayant l'autorité de la chose jugée, et s'occupera également du contentieux des élections. Ne trouvez-vous donc pas essentiel que les questions disciplinaires et le contentieux électoral soient confiés à des magistrats indépendants ?

Mettre à la retraite anticipée une trentaine des quatre-vingts plus hauts magistrats du pays au motif qu'ils auraient peut-être été en poste dans la période antérieure au rétablissement de la liberté en Pologne, c'est user d'un prétexte fallacieux, qui permet à l'autorité politique de les remplacer dans des conditions critiquables et de créer un organe désigné par le parlement polonais, donc par la majorité en place.

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Encore une fois, je n'ai pas dit que je cautionne ou approuve toutes les réformes introduites par la Pologne et la Hongrie. Ne nous faites pas dire, à Mme Lorho et à moi-même, ce que nous n'avons pas dit.

J'essaie d'apporter un éclairage culturel ou historique sur ces décisions.

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Il faut bien rappeler le contexte, puisque personne ne l'a fait avant. Vous n'êtes ni polonais ni hongrois, et ils savent mieux que nous de quoi ils parlent.

Cela fait deux fois que vous m'opposez le respect de la Constitution. Effectivement, c'est contraire à la Constitution, et dès lors, cela pose question. Mais je ne crois pas que ce soit à l'Union européenne de s'en mêler, et d'autre part une constitution n'est pas un texte figé – votre majorité a bien l'intention de réviser la nôtre dans quelques mois. On ne manquera pas de vous dire, sur certains bancs, que votre majorité va restreindre le droit des parlementaires à s'exprimer. Pour prendre un seul exemple, pourquoi un député non-inscrit a-t-il beaucoup moins de temps de parole dans l'hémicycle que les autres ? Mais nous sortons de notre sujet.

Puisqu'en commission on peut parler – merci, madame la présidente, de nous garantir ce droit à la parole –, je répète que les constitutions ne sont pas des textes figés, qu'on peut les réformer. Donc, arrêtez de mettre en avant une constitution à laquelle on ne pourrait pas toucher. Je ne reprendrai pas les termes quelque peu offensants de Mme la rapporteure, qui qualifie mes arguments de fallacieux tandis que les vôtres seraient formidables, mais il faut, à un moment donné, replacer les choses dans leur contexte.

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Madame Ménard, vous venez d'illustrer, en creux, ce qu'est l'État de droit : quand on révise une constitution, on suit des procédures et on respecte la hiérarchie des normes. C'est ce que n'ont pas fait les deux pays dont nous parlons.

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Si vous n'avez pas dit le contraire, quel problème vous pose cette résolution ? Disons que vous en profitez pour dire aussi ce que vous pensez de notre fonctionnement démocratique. Rien ne devrait vous empêcher de voter la PPRE, sauf un choix idéologique, celui de valeurs qui ne sont pas les nôtres dans cette majorité.

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Madame Ménard, vous venez de nous montrer encore combien vos arguments sont fallacieux. Vous dites que ces pays peuvent changer leur Constitution, comme nous allons le faire en France. Mais si nous l'envisageons, c'est que nous avons la majorité en France pour le faire démocratiquement. Or ce n'est pas le cas dans ces pays ! Ils votent donc des lois contraires à leurs Constitution sans l'avoir réformée démocratiquement auparavant. CQFD, chère madame : vos arguments sont bien fallacieux.

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Je ne doute pas de la sincérité de Mme Ménard, je vais donc la rassurer. Elle nous dit que l'on peut porter atteinte à l'équilibre que permet le contre-pouvoir de la Cour suprême, dès lors que c'est fait de façon constitutionnelle. Mais sachez que cette atteinte à la Cour suprême est la dernière pierre d'un édifice dont la construction a commencé dès 2015. En décembre de cette année-là, le Tribunal constitutionnel a très clairement jugé inconstitutionnels les amendements du Gouvernement tendant à modifier sa composition. Le Gouvernement est néanmoins allé jusqu'au bout, et a même refusé de publier la décision du Tribunal. Depuis lors, il y a eu mainmise du pouvoir politique, et une cour constitutionnelle sous contrôle. Comment voulez-vous que la Cour suprême ou n'importe quelle juridiction ordinaire soit ensuite protégée ? Heureusement que les valeurs de l'État de droit sont affirmées au niveau de l'Union européenne !

Enfin vous avancez des considérations historiques. Encore une fois, lisez le rapport, et vous verrez que nous y avons sérieusement tenu compte des particularités de chaque pays, qui d'ailleurs sont différentes. Les éléments que vous mettez en avant sortent d'un courrier de l'ambassade de Pologne qui a été envoyé à bon nombre de nos collègues. A défaut d'envoyer les ambassadeurs se faire auditionner, on recourt donc au lobbying… Et vous, vous reprenez mot pour mot les termes de ce courrier. Il est dommage que quelqu'un qui proclame son sérieux et son indépendance d'esprit cède à un tel lobbying.

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Je voudrais rassurer Mme la rapporteure : je n'ai aucun intérêt en Pologne, ni aucun en Hongrie. Mais m'accuser de faire du lobbying pour ces deux pays est une attaque, pour le coup, assez fallacieuse et désagréable à mon égard.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle examine l'amendement CL6 de Mme Marie-France Lorho.

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Je conteste l'ensemble de l'alinéa 34, mais je concentrerai mon propos sur la « dégradation » supposée de la « liberté académique ».

Il semble clair, à la lecture de votre proposition, que cet alinéa vise une fois encore notre partenaire hongrois, pour son refus d'ériger les « études de genre » au rang de discipline académique. Je rappelle, à toutes fins utiles, que ces études sont le fruit de discours militants, notamment féministes, issus des États-Unis. La France les reconnaît et certains établissements d'enseignement supérieur en dispensent les leçons. Néanmoins, que certains de nos partenaires européens ne veuillent pas enseigner cette discipline, qui ne repose sur aucune réalité naturelle mais sur un présupposé de construction sociale qui l'éradique de fait de toute intégration dans le champ des sciences, est leur droit le plus absolu.

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Nous ne sommes évidemment pas d'accord. Le Gouvernement hongrois porte atteinte à l'Université d'Europe centrale, qui a d'ailleurs des liens assez distendus avec M. Soros, sauf sur le plan financier : ce n'est pas lui qui nomme l'autorité académique. Lui-même a fait l'objet de menaces hier. Il est très grave d'empêcher un système d'enseignement de se développer à Budapest. Pourquoi le pouvoir politique vise-t-il spécifiquement cette université, qui a d'ailleurs dû prouver qu'elle avait un campus américain pour s'installer ? Nous avons rencontré le président de cette université. Il n'était même pas sûr de pouvoir accueillir des étudiants début septembre. Il est scandaleux et attentatoire aux libertés académiques de menacer ainsi l'existence d'une université.

La commission rejette l'amendement.

Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL43 et CL29 des rapporteurs.

Puis elle examine l'amendement CL8 de M. Jean-Félix Acquaviva.

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Cet amendement fait référence, comme je l'indiquais dans mon propos général, à la situation de la Catalogne. La réponse de Vincent Bru m'agrée en ce qu'il reconnaît que ce qui se passe en Catalogne pose problème à l'Union européenne puisque des principes fondamentaux ne sont pas respectés. Elle m'agrée moins dans la mesure où la PPRE sur laquelle nous travaillons, tout en s'appuyant sur la situation en Hongrie et en Pologne, se limite à des propositions de portée générale : la modification de la définition de l'État de droit, qui n'est pas neutre, la création de mécanismes qui devraient être mis en place quelles que soient les situations, notamment pour garantir le droit des personnes et des contre-pouvoirs, y compris dans un État où par ailleurs, au nom de la majorité, on pourrait bafouer le droit des personnes, la liberté d'expression, la dignité humaine et les droits des personnes appartenant à des minorités.

C'est d'ailleurs, paradoxalement, au nom de l'État de droit et de la hiérarchie des normes que l'Espagne revendique la possibilité de poursuivre cette répression disproportionnée. Elle invoque même le motif de rébellion, alors qu'il n'y a pas eu de violence. C'est évidemment un prétexte fallacieux : l'État de droit ne peut pas se résumer à la hiérarchie des normes, il implique aussi le respect d'un certain nombre de principes fondamentaux, auxquels cette hiérarchie des normes est elle-même assujettie. Il existe aujourd'hui des prisonniers d'opinion au sein même de l'Union européenne, dans un pays, la Catalogne, qui compte sept millions d'habitants, soit une population équivalente à celle de la Croatie. Faute de solution démocratique et politique, qui serait normale dans le cadre de l'Union, cette situation peut avoir des suites gravissimes pour la stabilité de l'Union elle-même. Il me semble donc important que cette PPRE expose que pourrait être le traitement par le Conseil de l'existence de violations graves et persistantes par l'Espagne.

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M. Acquaviva connaît bien ma position sur ce sujet. Mais nous ne traitons pas ici de tous les cas en Europe qui peuvent poser des problèmes similaires. Il n'y a d'ailleurs pas que la Catalogne, et l'on constate ici ou là, y compris en France, des entorses à l'État de droit. Tous les pays démocratiques ont des progrès à faire en matière de respect de la démocratie, de respect de l'opposition, mais également de respect de l'État de droit. On l'a dit, la France a été condamnée à plusieurs reprises par la Cour européenne des droits de l'homme. Au demeurant, les propositions que nous faisons ne visent pas seulement les trois États cités. Nous souhaitons qu'il y ait des systèmes d'alerte dans tous les États-membres, qui ont tous des progrès à faire.

En revanche, sur cet amendement, notre avis est défavorable. En effet, la situation politique que vous avez fort bien décrite est d'une autre nature que celle que l'on constate en Pologne et en Hongrie. Vous aurez constaté que nous sommes un peu méfiants sur l'intégration à ce groupe de la Roumanie, marquée par une très forte corruption par rapport aux deux autres États. Et, en Espagne, on ne constate pas une atteinte systémique généralisée et intentionnelle qui remette en cause totalement, sauf pour le cas de la Catalogne, tout le système judiciaire espagnol ; on ne peut pas dire qu'il n'y ait pas de contrôle de constitutionnalité ni que les principes contenus dans l'article 2 soient remis de manière systémique et intentionnelle en cause par les gouvernements.

Il s'y pose un problème politique grave, sur lequel je partage votre opinion. Mais mentionner la Catalogne, comme vous le proposez, voudrait dire qu'il faut traiter tous les cas, ce qui affaiblirait la portée de cette résolution, qui ne vise que des attaques systémiques et intentionnelles graves selon la Commission de Venise et la Commission européenne.

Il existe d'autres situations qu'il faut dénoncer, auxquelles il faut réagir, j'en suis aussi d'accord avec vous, mais pas dans le cadre de cette résolution, qui concerne deux États où se mettent en place des systèmes quasi-autoritaires avec remise en cause des contre-pouvoirs, de manière extrêmement grave.

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Vous prenez malgré tout en compte la situation en Espagne. Dont acte. Je crois quand même que la gravité, les implications juridiques et judiciaires – on y risque trente ans de réclusion pour avoir exprimé une opinion – et le caractère systémique de ce qui se passe en Espagne, notamment le problème de l'indépendance de la justice, posent question. Je comprends la difficulté à généraliser, mais j'insiste sur le degré de gravité de la situation, les implications juridico-politiques du manque d'indépendance de la justice, de possibles condamnations pour opinion, ce qui serait fouler aux pieds les principes fondateurs de l'Union.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle examine l'amendement CL12 de Mme Emmanuelle Ménard.

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Mon amendement consiste à supprimer l'alinéa 38 selon lequel, considérant que, dans la situation actuelle, l'unanimité est inenvisageable, il faut mettre fin, sous prétexte de défendre les valeurs de l'Union européenne, au principe d'unanimité. C'est instaurer un climat de rapport de forces et de défiance entre les États membres, au détriment de l'esprit de coopération qui a présidé à la construction de l'Union européenne. Le Conseil européen doit voter à l'unanimité sur un certain nombre de domaines que les États membres jugent sensibles, comme la politique étrangère et de sécurité commune ou l'adhésion à l'Union européenne.

Si vous supprimez cette règle de l'unanimité, la donne change et les États voudront sortir de l'Union. Vous m'avez dit qu'en entrant dans l'Union, la Pologne et la Hongrie, avaient adhéré à l'obligation de respecter quelques valeurs communes et l'État de droit. Aujourd'hui vous voudriez revenir, en cours de route, non pas sur les obligations – vous voulez toujours les leur appliquer –, mais sur les droits de ces États, notamment leur droit de s'opposer à des décisions qui les concernent sur des sujets sensibles. Mais on ne peut pas appliquer ou non les principes de l'Union européenne selon qu'ils nous conviennent ou non, ni reprocher à ces deux États de ne pas respecter les règles auxquelles ils ont souscrit en adhérant et changer les règles du jeu en décidant de revenir sur le principe de l'unanimité, c'est-à-dire en ne permettant plus à un État de s'opposer à une décision qui le concerne directement.

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Vous faites une confusion dans la lecture de cet alinéa 38, qui est pourtant assez simple. Considérer que, dans la situation actuelle, l'unanimité du Conseil est inenvisageable pour mettre en oeuvre l'article 7 est tout simplement un constat. Nous ne proposons en rien de modifier la règle de l'unanimité. Cela relève du fantasme.

Puisque vous aimez les références historiques, rappelons qu'en écrivant l'article 7 on ne pensait même pas l'utiliser un jour. Jamais, il y a encore dix ou quinze ans, il n'était venu à l'esprit de personne que des États membres porteraient un jour atteinte aux valeurs fondamentales de l'Union inscrites à l'article 2. L'article 7 était conçu comme une sorte d'arme « nucléaire » de dissuasion diplomatique, qui n'avait pas vocation à être effectivement mis en oeuvre. Toujours est-il que la situation s'est dégradée et que l'Union a été contrainte d'utiliser cet article puisque, dans la phase précontentieuse et contentieuse, la procédure de dialogue n'est pas suffisante. Cela, nous l'expliquons longuement dans le rapport.

Ce que nous proposons, c'est d'utiliser, en sus de l'article 7, d'autres voies de recours, ne nécessitant pas la règle de l'unanimité, comme la procédure générale d'infraction qui est parfaitement opérationnelle et qui permet à la Cour de répondre très rapidement sur des sujets importants, comme elle l'a fait vendredi dernier par une ordonnance, qu'elle confirmera prochainement, demandant expressément au Gouvernement polonais de suspendre ses réformes constitutionnelles qui tendent à limoger toute une génération de magistrats. J'ai peur que vous ne fassiez preuve d'un peu de mauvaise foi.

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La mauvaise foi, je ne sais pas de quel côté elle se trouve, car vous m'expliquez que vous ne revenez pas sur le mécanisme de l'unanimité mais que vous mettez en place des mécanismes permettant de le contourner.

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Alors, expliquez-moi cet alinéa 40 qui tend à mettre en place de nouveaux mécanismes visant à assurer le respect effectif de l'État de droit par l'ensemble des États membres de l'Union européenne. Effectivement, je ne dois pas avoir bien compris car il me semble évident qu'il s'agit de contourner l'article 7 qui nécessite l'unanimité. Si ce n'est pas cela, expliquez-moi.

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Madame Ménard, vous connaissez les critères d'adhésion, – je vous renvoie aux chapitres 23 et 24 des traités de l'Union. L'État candidat doit satisfaire à certaines garanties, dont les mécanismes en question. Même s'il s'agit d'un article inclus a posteriori, le droit de l'Union européenne infuse de ces principes et procédures diverses, et c'est le cas de tous les articles qui traitent des procédures d'infraction. L'un n'empêche pas l'autre : ce n'est pas parce que la Commission va mettre en oeuvre des procédures d'infraction que la règle de l'unanimité inscrite à l'article 7 est mise à mal. Encore une fois, nous ne proposons pas de la modifier. Nous pensons que son utilisation ne suffit pas et qu'il est pertinent d'utiliser d'autres procédures.

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Madame Ménard, il ne faut pas voir dans cet alinéa 38 plus de choses qu'il n'en contient, ni interpréter de manière abusive ce que nous avons écrit. L'article 7 est précédé d'une période de précontentieux, de dialogue, pendant laquelle les gouvernements sont appelés à défendre leur position devant la Commission. L'article lui-même comporte trois alinéas. Le premier alinéa concerne les risques d'atteinte grave à l'État de droit et, sur cette base, le Conseil statue à la majorité des quatre cinquièmes ; c'est ce qui s'est passé le 20 décembre 2017 pour la Pologne. Le deuxième alinéa, qu'on peut actionner directement sans passer par la phase de l'alinéa premier, concerne non plus de simples risques, mais des atteintes graves et avérées à l'État de droit, et sa mise en oeuvre exige l'unanimité. Le troisième alinéa porte sur les sanctions, qui ne sont pas votées à l'unanimité mais à la majorité super-qualifiée.

S'agissant de la Pologne, il y a eu la majorité des quatre cinquièmes pour engager l'alinéa premier. Ensuite, il faut l'unanimité – moins la Pologne, bien sûr –, qui est impossible car la Hongrie, la République Tchèque et la Slovaquie, peut-être d'autres États encore, y seraient défavorables. Cela ne veut pas dire que l'article 7 ne soit pas important : il constitue un moyen de dialogue et de pression. Je rappelle que, sur la Pologne, la Commission avait fait quatre recommandations, et qu'à chaque fois la Pologne n'a pas répondu aux questions posées. C'est pourquoi nous disons il faut conserver cet article 7, qui est une arme atomique, pas forcément très efficace, longue à utiliser, et doubler cette procédure, sans la supprimer ni la modifier, d'autres procédures que nous présentons dans le rapport.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle examine l'amendement CL4 de Mme Marie-France Lorho.

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Vous évoquez l'appel au cadre financier pluriannuel en cas de défaillance systémique de l'État de droit. Le terme « systémique » est inapproprié : il induit en effet un présupposé rationaliste à l'origine duquel se trouveraient certains partisans de l'Union européenne, en l'occurrence les pays en adéquation avec les remarques soulevées par les rapporteurs du texte, et invite, par conséquent, à une hiérarchisation malsaine des États en fonction de leurs opinions.

Dans un pays où les affaires judiciaires sont étalées dans la presse moins de vingt-quatre heures après les faits, c'est présomptueux. En aucun cas, cette valorisation de certains États membres par rapport aux autres n'a vocation à figurer dans un texte comme celui que vous proposez aujourd'hui à notre examen. Il s'agit là d'une remarque contestable sur le plan factuel comme sur le plan de la diplomatie.

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Votre amendement reviendrait à rendre notre texte beaucoup plus coercitif, puisque vous supprimez la phrase relative au ciblage de la conditionnalité. Avis défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle examine l'amendement CL2 de Mme Marie-France Lorho.

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Les sanctions prononcées à l'encontre de la Russie n'ont-elles pas servi d'exemple ? A l'issue de l'embargo prononcé contre la Fédération de Russie il y a quelques années, nos éleveurs et nos agriculteurs ont payé le prix fort. Vous aspirez à ce que les sanctions n'atteignent que les responsables supposés des violations prétendues de l'État de droit. Mais, dans l'éventualité où la Commission européenne prendrait des mesures par l'intermédiaire de son cadre financier pluriannuel, les répercussions financières qui s'ensuivront pèseraient nécessairement sur les épaules des partenaires commerciaux des pays visés. Vouloir calibrer spécifiquement les sanctions sur le pays responsable des violations supposées est impossible. Il s'agit d'une simple question de bon sens. L'Europe est en guerre commerciale contre les États-Unis de Donald Trump. Et vous jugez intelligent de lui offrir nos partenaires hongrois sur un plateau ? Ce n'est plus de l'ingénuité, mais de la naïveté.

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Vous mettez en cause le principe d'une conditionnalité des fonds. Sur ce sujet extrêmement délicat, nous avons beaucoup écouté les ONG, les associations, les élus également. Ils n'y sont pas très favorables, et les gouvernements non plus, bien sûr.

Cependant, il ne s'agit pas de conditionnalité, mais de versement des fonds. Ils seraient accordés à ces pays, mais leur versement effectif serait lié au respect de l'État de droit ; en cas de défaillance systémique, ils ne seraient pas versés. Ensuite, la Commission avait précisé que ne seraient pas concernés des fonds qui vont directement aux particuliers ou aux groupes – associations, ONG, chercheurs, étudiants du programme Erasmus…

Nous avons pleinement conscience que diminuer le versement des fonds, c'est appliquer une sorte de double peine à des pays qui ont besoin de réformer leurs infrastructures, leurs hôpitaux : la Roumanie surtout, mais aussi la Hongrie et la Pologne. Frapper au portefeuille est toutefois une arme efficace dont il ne faut pas se priver. L'Union européenne peut exercer une pression en disant à la Pologne qu'elle ne peut, d'un côté, obtenir 85 milliards d'euros du cadre financier pluriannuel annuel 2014-2020, – pour la Hongrie, c'est même 4 % du PIB –, et, d'un autre côté, ne pas respecter les principes fondamentaux. En Hongrie, 36 % des appels d'offres ne donnent lieu qu'à une seule offre, et des membres de la famille de M. Orbán ont été mis en cause pour des attributions de marchés. La menace est donc utile. Pour sa mise en oeuvre, il faut veiller très attentivement à ce qu'il n'y ait pas de double peine pour les citoyens. Les Polonais sont des Européens convaincus, les Hongrois aussi, il ne faudrait pas dresser les uns contre les autres. Pour autant, pourquoi ne pas soutenir l'initiative de la Commission et, le cas échéant, dans des cas très caractéristiques, suspendre le versement des fonds en le conditionnant à l'amélioration de la situation de l'État de droit dans le pays concerné ?

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle examine l'amendement CL5 de Mme Marie-France Lorho.

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L'Union européenne n'a pas vocation à se composer d'un agrégat de pays indifférenciés. Elle se compose, et c'est ce qui fait sa richesse, de peuples disposant de leur souveraineté, dont les gouvernements font des choix politiques que l'Union n'a pas à contester. Que vous souhaitiez proposer l'établissement de nouveaux mécanismes pour juger du respect de l'État de droit est une chose, mais il convient que cette démarche s'adapte à la volonté des pays, dans le respect des dispositions législatives de chacun des Etats membres. Il serait impossible de ne pas comprendre la suspicion de certains détracteurs de l'Union européenne dans l'éventualité où cette dernière se permettrait ainsi indument d'imposer des mécanismes sans s'adapter aux volontés nationales.

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À l'alinéa 40, après le mot « mécanismes », vous proposez d'insérer les mots « respectueux des décisions nationales souveraines des États membres ». C'est déjà le cas. L'Union européenne ne dit pas aux pays comment organiser l'État de droit : elle demande qu'il soit garanti et qu'on en apporte les preuves. Cette précision n'est pas utile, et il ne faudrait pas faire de la souveraineté une sorte de paravent pour empêcher qu'aboutissent les procédures qui tendent à protéger les valeurs communes et décidées ensemble qui sont celles de l'Union européenne. Avis défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle examine l'amendement CL7 de Mme Marie-France Lorho.

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À l'alinéa 40, les termes de « respect effectif » sont offensants à l'égard des autres pays de l'Union Européenne : mettre en doute la capacité des pays à faire régner l'État de droit sur leur territoire constitue une immixtion dans la politique souveraine d'un pays européen. En l'état, la formulation est particulièrement offensante en ce qu'elle induit la violation du règlement européen par certains États.

Émettre une telle suspicion à l'égard de nos partenaires européens est grave : c'est un jugement de valeur qu'il conviendrait de justifier. La Hongrie, puisque c'est là votre préoccupation, a voté la pénalisation de l'aide aux clandestins illégaux. Les décisions politiques prises par ce voisin européen, dont vous jugez qu'elles contreviendraient ici à l'État de droit alors qu'elles pénalisent des criminels, peuvent faire l'objet de l'adhésion commune de ses acteurs politiques. Le parlement a même adopté cette mesure à près de 80 % ! Indiquer à nos homologues hongrois qu'ils « votent mal », est pour le moins déplacé.

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En proposant de remplacer les termes « respect effectif » par celui, plus banal, de « maintien », vous cherchez à affaiblir le contenu de l'alinéa. Avis défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle examine l'amendement CL30 des rapporteurs.

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Cet amendement vise modifie l'ordre des alinéas 40 à 44.

La Commission adopte l'amendement.

Elle examine ensuite l'amendement CL3 de Mme Marie-France Lorho.

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Je suis particulièrement surprise par la composition pour le moins hétérodoxe du « comité des parties prenantes » que vous appelez de vos voeux. Le terme de « juristes reconnus » fait planer le doute sur l'autorité légitime pour accorder un tel statut, lequel reste d'ailleurs extrêmement flou. Sous une couverture libérale, c'est un comité de censeurs que vous établissez.

Par ailleurs, la présence de journalistes dans un tel comité est malvenue. Les journalistes doivent donner des informations d'ordre factuel. En dépit du mot d'ordre unanime qui semble circuler parmi beaucoup de journalistes de la grande presse, la Hongrie et la Pologne n'ont pas vocation à être condamnées par leur plume de manière irrévocable.

Quant aux ONG, ce sont peut-être les plus mal placées pour y figurer. Dans votre empressement à délégitimer la Hongrie sur la scène européenne, vous entendiez vraisemblablement que les ONG visées par la mesure adoptée en juin 2018 par le Parlement hongrois, relative à la pénalisation du soutien à l'immigration illégale, condamnent unanimement le Gouvernement de M. Orbán. Je vous rappelle que la France a les mêmes difficultés avec l'Aquarius.

En somme, les nominations que vous proposez me semblent pour le moins déplacées, si ce n'est partisanes.

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J'entends que vous êtes pleine de suspicion contre cette proposition. Elle nous paraît cependant tout à fait fondamentale. Le comité des parties prenantes vise à répondre à une censure qui s'exerce dans le pays concerné, et non au sein de l'Union européenne. On fait taire des ONG, on fait taire des organes de presse. D'ailleurs, certains juges constitutionnels limogés de force prêtent main forte à ces ONG, dont le niveau de compétence est ainsi des plus solides. Il est très important que l'ensemble de ces parties prenantes constituent un lieu d'expression dans des États qui occultent l'existence des forces vives de leur société civile, pourtant indispensables au pluralisme démocratique. Il faut que ces personnes qui ont des choses à dire puissent être mises en relation avec des juristes experts qui vont pouvoir arbitrer sur tel ou tel sujet, donner des éléments de compréhension. Nous en serons tous mieux construits. Quant à la précision des termes, c'est une proposition que nous faisons à l'Union européenne mais il appartiendra évidemment au législateur européen de définir les termes de la façon dont il l'entend.

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Puisque c'est le dernier amendement présenté par Mme Lorho, je veux dire que j'ai trouvé qu'elle-même et Mme Ménard se comportaient vraiment en ambassadrices : elles ont repris, l'un après l'autre, les arguments de la Hongrie d'Orbán et de la Pologne de Mateusz Morawiecki. J'ai quand même été surpris que vous vous fassiez à ce point, pour reprendre la formule de Marie-France Garaud, les porte-parole du « parti de l'étranger »…

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Je le répète, ni Mme Lorho ni moi-même n'avons d'intérêts en Pologne ou en Hongrie, nous n'y possédons ni maison ni propriété. Nous ne sommes payées par personne et par aucun gouvernement. Cette suspicion est assez désagréable. Évidemment, vous retrouvez dans nos bouches des arguments qui sont avancés par ces deux États. Mais le passé communiste de la Pologne est un fait, je ne vais pas l'inventer. Que nous nous appuyions sur les mêmes faits n'a rien d'extravagant.

Ensuite, comme Mme Lorho, j'aimerais que vous disiez qui décide qu'un juriste est « reconnu », un citoyen « éclairé », ou qu'on ressort de cela « mieux construit » ? Ce sont vos expressions. Vous disiez aussi que la souveraineté ne devait pas servir de « paravent ». C'est tout simplement inadmissible. L''Europe, ce n'est pas l'abolition des souverainetés nationales. Je trouve tout cela condescendant envers ces deux États, et encore une fois, je n'y aucun intérêt et je n'ai même jamais rencontré ni l'ambassadeur de Pologne ni celui de Hongrie. Il y a les faits. Qu'on les reprenne pour expliquer un certain nombre de choses, cela me semble plutôt normal.

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Madame Lorho, on ne prend pas parti uniquement quand on a des intérêts. On peut aussi prendre parti parce qu'on a des similitudes, des proximités idéologiques. Comme vient de le dire avec talent M. Rebeyrotte, nous sommes surpris de vous entendre reprendre les « éléments de langage » des courriers que nous avons reçus de la part des ambassadeurs de Hongrie et de Pologne.

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Ma réponse sera technique, et sur le fond. Soit dit au passage, madame Ménard, je ne sais pas où vous avez trouvé l'expression « citoyen éclairé » dans l'alinéa 41, elle n'y figure pas.

Le comité des parties prenantes fait partie des pratiques nouvelles que, je le pense, vous connaissez. On y recourt notamment en matière de bonne gouvernance, de responsabilité sociale et sociétale des organisations. Le Conseil de l'Europe attribue son propre label européen d'excellence en matière de gouvernance. Nous pensons que, pour avancer collectivement sur des sujets complexes qui concernent différentes parties prenantes, le mieux est de les mettre autour de la table pour qu'elles discutent ensemble.

Vous nous avez appelés aussi à nous interroger sur le caractère de la crise politique en Europe. Nous l'avons fait et nous avons considéré qu'il était important, l'Europe ayant souffert, à un moment donné, d'un déficit de compréhension démocratique, de remettre le citoyen en position de débattre du coeur de ses valeurs fondamentales, de ces valeurs communes qui sont défendues aussi par des ONG et des médias. Si, sur ce point, nous avons une position très différente, je l'assume parfaitement.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle examine l'amendement CL21 des rapporteurs.

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Avec ce dernier amendement, nous souhaitons conclure la proposition de résolution en lançant un signal à l'ensemble des parlements nationaux afin qu'ils soutiennent les initiatives prises par les instances européennes en faveur de l'État de droit. Le mouvement a commencé. Comme je le rappelais en introduction, le Bundestag et le le Parlement portugais se sont saisis de la question. C'est seulement ensemble que nous défendrons solidement nos valeurs fondamentales, qui ne sont pas négociables. Au cours de nos différents déplacements, nous avons rencontré des magistrats, des professeurs d'université, des représentants de la société civile, d'ONG, de médias qui tentent encore d'être libres. Tous guettent notre soutien, puisqu'eux-mêmes ne peuvent plus s'exprimer dans leur pays. Nous souhaiterions donc que tous les parlements nationaux volontaires puissent s'inscrire dans cette démarche et qu'enfin, des responsables politiques nationaux défendent des politiques européennes.

La Commission adopte l'amendement.

Puis elle adopte l'article unique de la proposition de résolution, modifié, et, par voie de conséquence, la proposition de résolution modifiée.

La réunion s'achève à 12 heures 30.

Membres présents ou excusés

Présents. - Mme Caroline Abadie, M. Jean-Félix Acquaviva, Mme Laetitia Avia, M. Erwan Balanant, Mme Yaël Braun-Pivet, M. Xavier Breton, M. Vincent Bru, Mme Émilie Chalas, M. Éric Ciotti, Mme Typhanie Degois, M. Éric Diard, Mme Coralie Dubost, Mme Nicole Dubré-Chirat, M. Philippe Dunoyer, M. Christophe Euzet, Mme Élise Fajgeles, M. Jean-Michel Fauvergue, Mme Isabelle Florennes, Mme Paula Forteza, M. Raphaël Gauvain, M. Philippe Gosselin, Mme Marie Guévenoux, M. David Habib, M. Dimitri Houbron, M. Sacha Houlié, M. Sébastien Huyghe, Mme Élodie Jacquier-Laforge, Mme Catherine Kamowski, M. Philippe Latombe, Mme Marie-France Lorho, Mme Alexandra Louis, M. Olivier Marleix, M. Jean-Louis Masson, M. Fabien Matras, M. Stéphane Mazars, Mme Emmanuelle Ménard, M. Jean-Michel Mis, M. Paul Molac, M. Pierre Morel-À-L'Huissier, Mme Naïma Moutchou, M. Stéphane Peu, M. Jean-Pierre Pont, M. Éric Poulliat, M. Rémy Rebeyrotte, M. Robin Reda, M. Thomas Rudigoz, M. Pacôme Rupin, M. Antoine Savignat, M. Raphaël Schellenberger, M. Jean Terlier, M. Alain Tourret, Mme Cécile Untermaier, M. Arnaud Viala, M. Cédric Villani, M. Guillaume Vuilletet, M. Jean-Luc Warsmann, Mme Hélène Zannier

Excusés. - Mme Huguette Bello, M. Jean-François Eliaou, M. Mansour Kamardine, Mme Marietta Karamanli, Mme Maina Sage, Mme Laurence Vichnievsky

Assistaient également à la réunion. - Mme Emmanuelle Anthoine, M. Olivier Marleix, M. Michel Zumkeller