La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
Ce matin, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s'arrêtant à l'amendement nos 214 , portant article additionnel après l'article 7.
Il s'inscrit dans la continuité de l'amendement précédent : en préparant sa défense, j'ai vérifié les conditions de prolongation de la garde à vue pour les mineurs et je me suis rendu compte que l'amendement précédent avait trait à la suppression de l'utilisation de la visioconférence. Nous déplorons que la première ordonnance pénale prise pendant la crise du covid-19 ait autorisé la non-présentation au magistrat. L'amendement vise donc à supprimer l'exception permettant la prolongation de la garde à vue pour les mineurs de plus de 16 ans.
Par ailleurs, j'ai été informé du fait que, depuis trois jours, certains tribunaux – des magistrats, donc, pas des militants de La France insoumise – se réunissent en assemblées générales pour adopter des motions, notamment à Agen, Nice, Boulogne-sur-Mer et Paris, ce dernier tribunal s'étant réuni d'abord en AG des magistrats du siège puis en AG plénière. Ils dénoncent un projet de code de la justice pénale des mineurs, élaboré sans réelle consultation, c'est eux qui le disent, pas moi ; je croyais qu'un questionnaire leur avait été envoyé mais, visiblement, le taux de réponse n'était pas à la hauteur, et les questions non plus. Ils regrettent évidemment le choix de légiférer par ordonnance et le recours à la procédure accélérée.
Soupirs sur les bancs de la commission.
Ils observent que la réforme de l'ordonnance de 1945 aurait été l'occasion de penser un réel code de l'enfance comprenant un volet civil et un volet pénal. Ils s'inquiètent de l'entrée en vigueur de la réforme au 31 mars 2020 – nous y reviendrons plus tard dans le débat – sans qu'il soit tenu compte des réorganisations importantes qu'elle impose à l'ensemble des professionnels.
Qu'est-ce que ça a à voir avec l'amendement ?
Ils déplorent le contenu de la réforme, qui leur apparaît depuis le début sans réelle philosophie et dessine une accélération de la répression pénale au détriment du temps éducatif, indispensable en la matière.
Enfin, et ce n'est toujours pas Bernalicis qui le dit – je parle à la troisième personne, monsieur le garde des sceaux, cela devrait vous plaire – , ils regrettent le choix de mettre de côté un certain nombre de procédures afin d'apurer les stocks.
La parole est à M. Jean Terlier, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, pour donner l'avis de la commission.
Je vais m'exprimer à propos de l'amendement no 214 , même s'il n'a pas du tout été évoqué dans votre intervention. C'est dommage, car j'avais prévu une longue réponse ; je serai donc bref. Vous souhaitez supprimer la prolongation de la garde à vue au-delà de vingt-quatre heures ; nous sommes plutôt favorables à son maintien dans les conditions fixées à l'article L. 413-11 du code de la justice pénale des mineurs : avis défavorable.
La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice, pour donner l'avis du Gouvernement.
Même position. Pour le reste, ce n'est pas devant le tribunal d'Agen ou de je ne sais où que l'on fait la loi, c'est dans l'hémicycle, en ce moment même.
Nous ne faisons pas la loi, nous ratifions une ordonnance ! Cela aurait été bien, que nous fassions la loi.
Murmures d'exaspération sur les bancs du groupe LaREM.
C'est d'ailleurs l'un des problèmes soulevés dans les motions que j'évoquais à l'instant. On nous a dit, d'une façon assez autoritaire et péremptoire, qu'il y avait eu des milliers de consultations et d'auditions en long, en large et en travers. Mais votre prédécesseure n'a tenu compte de rien, et vous non plus, en vous plaçant dans la continuité et dans la solidarité gouvernementale. Alors oui, des gens, ou plutôt des magistrats, se réunissent – c'est sûr, le tribunal de Paris, c'est anecdotique, un vague tribunal dans un coin reculé du pays !
Ils déplorent à la fois la forme et le fond de la réforme, les exceptions aux grands principes et le fait que le code aurait pu être l'occasion de parler non seulement de la justice pénale des mineurs, mais plus largement de l'enfance, ce qui n'a pas été le cas. La prolongation de garde à vue pour les mineurs de plus de 16 ans est l'une de ces exceptions dérogeant aux principes fixés à l'article préliminaire. Je la déplore, et je ne suis visiblement pas le seul. Nous ne sommes certes pas très nombreux dans l'hémicycle mais, dans la société et dans le monde du droit, nous sommes une majorité à nous opposer à cette codification. À moins que vous me fassiez la démonstration du contraire ?
L'amendement no 214 n'est pas adopté.
Sans nul doute…
Il a rencontré beaucoup d'écho sur les réseaux sociaux, et pas de mon fait : LCP a repris, dans un tweet, la séquence du débat en commission dans laquelle je demandais que l'on garantisse, sous peine de nullité de la procédure, l'effectivité de l'enregistrement audiovisuel des déclarations en matière de justice des mineurs. J'ai bien précisé qu'il s'agissait d'un outil complémentaire car je suis moi-même opposé à ce qu'il n'y ait qu'un enregistrement audiovisuel sans procès-verbal écrit, pour mettre les choses au clair. Vous n'avez pas retenu cet élément et vous m'avez accusé d'être anti-flics, parce que je soupçonnerais les policiers de ne pas vouloir procéder aux enregistrements.
Or ce n'était pas du tout le sens de mon propos. Dans bien des cas, de vrais soucis techniques se posent, quand l'enregistrement ou l'ordinateur ne fonctionne pas, et l'on passe à l'étape suivante en se disant que ce n'est pas très important. Nous considérons au contraire que c'est une garantie supplémentaire pour les mineurs, même si ce n'est évidemment pas la seule : l'avocat est présent et fait bien son travail, le policier aussi. Si l'on a eu l'idée d'ajouter la vidéo, c'est parce qu'elle apporte une garantie supplémentaire ; si elle apporte une garantie supplémentaire, autant la rendre effective sous peine de nullité.
J'ai été choqué par les propos que vous avez tenus en commission, vous, ancien avocat pénaliste attaché aux droits de la défense. Je suis sûr que vous les regrettez et j'espère recueillir un avis favorable sur cet amendement.
Comme cela a été dit en commission, la sanction de l'absence d'enregistrement audiovisuel de l'interrogatoire d'un mineur placé en garde à vue n'est pas la nullité de l'audition mais la limitation de la force probante de celle-ci.
Cette sanction est d'autant plus pertinente que l'audition du mineur se fait en présence d'un avocat. L'avis est défavorable.
Nous avons expliqué, en commission, la différence entre le caractère probant du procès-verbal et la nullité susceptible de l'affecter, mais vous n'avez rien compris, vous persistez, vous ne voulez rien entendre. Que voulez-vous que je vous dise ? Défavorable, évidemment défavorable !
J'ai sous les yeux l'arrêt d'une cour d'appel qui, pour cause de dysfonctionnement du système vidéo, prononce la nullité de l'audition d'un mineur en garde à vue réalisée le 8 mars 2017. À vous de voir ce qu'il en est mais il existe un peu de jurisprudence en la matière.
Au fond, notre idée est que, si l'on inscrit la sanction dans la loi, on s'arrangera en aval pour qu'il n'y ait pas de problème technique. Quant à la valeur probante de l'enregistrement audiovisuel, je n'en disconviens pas, mais on pourrait retourner votre argument en se demandant pourquoi le procès-verbal n'aurait pas de valeur probante en cas de dysfonctionnement de la vidéo. L'avocat fait son travail, le policier aussi ; chacun fait son travail. Cela montre bien qu'une valeur est accordée à l'enregistrement et qu'il a une utilité dans plusieurs cas.
Vous pouvez prendre le sujet à la légère, mais je trouve dommage que, dans une discussion qui vise à améliorer les garanties, y compris procédurales, pour toutes les parties, vous vous en fichiez, avec dédain et mépris. C'est dommage pour un ministre de la justice, et encore plus pour un ancien avocat pénaliste.
Nous ne prenons rien à la légère. Le texte contient des garanties qui vous ont été expliquées en commission et que M. le rapporteur vient de rappeler. Je vais être claire, à l'intention des gens qui nous regardent toujours et de ceux de nos collègues qui ne connaîtraient pas le texte.
Le principe est l'enregistrement audiovisuel du mineur, lequel est accompagné d'un avocat, chargé de veiller au respect de la procédure et au respect des droits du mineur. Le cas échéant, tout problème technique doit être noté au procès-verbal, ce qui constitue une première garantie. La deuxième garantie tient au fait qu'il faut en aviser le magistrat. La troisième garantie, essentielle, est que, si le mineur a reconnu les faits lors d'une audition qui n'a pas été enregistrée et dit le contraire lors de l'audience, on ne peut pas retenir le procès-verbal contre lui.
Exactement !
Nous protégeons donc le mineur tout en tenant compte de la pratique. C'est là toute la nuance qui manque à vos propos. Dans la réalité, il faut faire avec la pratique pour faciliter la vie des mineurs comme des professionnels, policiers et gendarmes, qui font avec rigueur un travail très difficile et qui s'astreignent à faire en sorte que les choses marchent. Toutefois il arrive qu'elles ne marchent pas, la vie est ainsi faite.
L'amendement no 215 n'est pas adopté.
Il ne vous aura pas échappé que l'amendement précédent, outre l'ajout des mots « sous peine de nullité de la procédure », remontait d'un cran la nécessité de formaliser dans le procès-verbal tout problème technique avéré. Vous faites semblant d'avoir lu les arguments, tant pis… J'invite simplement les techniciens qui nous regardent à lire l'amendement, à comparer ce qu'il propose avec les dispositions prévues, et à se faire leur propre avis. Le mien est fait ; j'espère qu'ils se feront le leur et que cela sera su.
Quant à l'amendement no 216 , il vise à indiquer clairement dans le texte : « Une copie de l'enregistrement peut être délivrée à l'avocat qui en fait la demande. » Cela ne veut pas dire qu'il faut lui donner l'enregistrement de manière automatique, en toute circonstance et à tout moment, mais seulement s'il en fait la demande, ce qui ne me semble pas disproportionné.
Nous en revenons à la question de la finalité de l'enregistrement des auditions des mineurs. Il ne paraît pas utile de le communiquer à l'avocat car l'enregistrement, nous vous l'avons dit, a uniquement pour but de vérifier si le procès-verbal est conforme à la réalité de l'interrogatoire ; …
… il n'est pas consultable de manière libre, mais uniquement en cas de contestation du procès-verbal. L'avis est défavorable.
En réalité, l'enregistrement n'est utilisé que pour trancher une contestation ; en l'absence de contestation, il ne sert à rien ; ce n'est pas plus compliqué que cela, telle est la pratique. Que vous le vouliez ou nous, que vous soyez d'accord ou pas d'accord, que vous contestiez tout et le contraire de tout, c'est ainsi que cela se passe.
Et si l'enregistrement ne fonctionne pas pour des raisons techniques, le procès-verbal perd son caractère probant, mais il n'y a pas de nullité, et c'est très bien ainsi. Pourquoi y aurait-il nullité ? Imaginons que l'on ne puisse pas procéder à l'enregistrement pour des raisons techniques, mais que les propos ne soient pas contestés ; ce serait quand même le monde à l'envers que d'obtenir la nullité d'un procès-verbal qui n'est contesté par personne ! On marche sur la tête ! On marche sur la tête ! Vous développez de grands concepts, mais la réalité pratique est à des années-lumière. Vous êtes hors sol !
Et je vous interdis d'affirmer ici, en audience – je veux dire en séance publique – , que je me fiche ou non de quelque chose ! Vous n'êtes pas mon directeur de conscience ! Pensez pour vous ce que vous voulez ; moi, je dis ce que je veux, comme je veux ! Je ne suis pas un ministre soumis à vos desiderata, voyez-vous !
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Monsieur le garde des sceaux, ce qui vaut pour vous vaut pour moi : je dis ce que je veux, comme je l'entends. Au reste, si j'étais votre directeur de conscience, j'aurais démissionné depuis longtemps pour faire un autre métier, c'est sûr et certain…
Protestations sur les bancs du groupe LaREM.
Je vais vous dire deux choses.
D'une, vous l'aurez peut-être remarqué, nous ne sommes pas en audience.
De deux, vous me dites qu'en l'état actuel des choses, on ne peut demander l'enregistrement qu'en cas de contestation.
Mais non, vous n'avez rien compris !
Mais sachez que nous sommes ici pour faire la loi, c'est-à-dire pour changer éventuellement l'état actuel des choses, ne vous en déplaise !
Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
Ce n'est pas grave, je sais que vous en êtes encore à vos débuts, mais ne vous inquiétez pas, vous finirez pas être rompu à l'exercice, tout va bien se passer !
Mêmes mouvements.
Néanmoins, souffrez que l'on puisse proposer des modifications à l'état actuel des choses.
Mais pour qui vous prenez-vous ?
Et expliquez vos désaccords ! Expliquez pourquoi vous ne voulez pas !
Quant à votre conscience, franchement, je n'en ai rien à faire ; elle ne m'intéresse pas. Ce qui m'intéresse, en l'occurrence, c'est que l'avocat puisse avoir accès à l'enregistrement à sa demande, point.
Pipeau de A à Z.
M. le garde des sceaux joint le geste à la parole.
Cela vous semble disproportionné, lunaire, déconnecté, c'est votre bon droit ; mon bon droit à moi, c'est de croire le contraire.
Allons ! Ça va bien !
Oui, il faut revenir sur le fond ; un tel travail doit être fait. Le garde des sceaux, dans le cadre de son métier, a fréquenté non-stop les enfants dont nous parlons. De mon côté, ayant été journaliste, je les connais aussi car j'ai assisté à bien des procès. Ces enfants, devenus des criminels, que l'on veut jeter en prison ou qui y sont déjà, ont été confrontés à des réalités que le garde des sceaux connaît et qu'il essaie d'expliquer. J'aimerais que ces réalités de terrain apparaissent un peu mieux dans nos débats. Excusez-moi, je ne sais pas comment le dire poliment mais, une fois de plus, nous sommes en pleine hum… hum… intellectuelle. Dans les salles d'audience, lors des procès de faits divers, on entend perpétuellement les témoins expliquer que ces jeunes adultes ont eu une enfance « de merde » – ici non plus je n'ai pas d'autres mots – , complètement déchirée, comme on ne l'imagine même pas. J'aimerais que nous abordions cela, c'est-à-dire le fond, la réalité vécue par ces enfants, ces mineurs.
J'aimerais que nous abordions les vraies questions : qu'a-t-il manqué à ces enfants à l'origine ? comment faire intervenir l'éducation, les éducateurs, etc. ? Pardonnez ce cri de colère, mais je trouve que nous défendons mal ces enfants.
Je ne sais pas comment les rédacteurs du compte rendu transcriront la « hum… hum… intellectuelle » de Mme Mörch… Moi en tout cas, j'ai bien compris de quoi il s'agit et je suis impatient de lire le compte rendu publié au Journal officiel…
Rires.
Nous l'avons déjà dit un certain nombre de fois : si seuls les députés dont le travail a concerné à un moment ou à un autre la justice des mineurs étaient autorisés à rester dans cet hémicycle, …
… il ne resterait plus grand monde, alors que nous ne sommes déjà pas très nombreux. Il ne s'agit pas d'une discussion entre spécialistes, mais d'une discussion entre parlementaires.
Et puis, selon vous, d'où me viennent mes informations ?
D'où qu'elles viennent, vous déformez tout !
Monsieur Bernalicis, je vous rappelle que vous êtes censé formuler un fait personnel.
Sachez que tous les professionnels avec qui je suis en relation désapprouvent ces dispositions.
Monsieur Bernalicis, nous avons bien compris l'objet de votre fait personnel. Aussi étrange que puisse sembler ma demande, concentrez-vous sur celui-ci, plutôt que de revenir sur le fond des débats ! Il sera de toute manière noté au compte rendu.
Mais on me fait un reproche, un procès en illégitimité, dans un langage assez fleuri ! Je le répète, chacun ici a toute légitimité pour parler de ces sujets.
L'amendement no 216 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 157 .
M. le rapporteur fait un signe de dénégation.
Voyons, monsieur le rapporteur, ne commencez pas comme cela !
L'amendement vise à réécrire les deux premières phrases du 2o de l'article L. 422-1 du code de la justice pénale des mineurs. Dans sa réaction actuelle, celui-ci dispose : « Le procureur de la République peut [… ] proposer au mineur une mesure de réparation à l'égard de la victime ou dans l'intérêt de la collectivité. Avant d'ordonner la mesure, le procureur de la République recueille ou fait recueillir l'accord du mineur et de ses représentants légaux. »
Je propose une autre rédaction, afin que le procureur de la République soit seul juge de l'opportunité de telles mesures de réparation et n'ait pas à les proposer aux mineurs. Cela correspondrait à un leitmotiv depuis le début de notre discussion, que j'approuve : il importe de faire confiance aux magistrats, aux procureurs, pour juger de la mesure la plus adaptée à la situation de chaque mineur. Si quelqu'un doit choisir, c'est évidemment le magistrat, en premier lieu, puis éventuellement la victime, qui doit avoir la faculté de refuser la mesure si elle ne lui convient pas, mais pas forcément le mineur auteur de l'infraction, ou alors seulement en dernier lieu.
Vous y mettez les formes, madame Ménard, mais, de manière sous-jacente, on a l'impression que vous proposez le retour au travail forcé !
Comment voulez-vous qu'une mesure de réparation soit instaurée sans le consentement de l'intéressé ? Il faudrait le forcer ? C'est très concrètement ce que vous proposez ! Évidemment, le juge proposera la mesure et la victime donnera son avis, mais il faut aussi que le mineur qui devra l'exécuter donne son assentiment ; sinon, elle ne sera pas exécutée. Même si j'ai compris que ce n'était pas votre intention – vous m'en voyez rassuré – , la mesure que vous proposez pourrait s'apparenter à des travaux forcés : l'avis est défavorable.
Mme Alexandra Louis applaudit.
Nous comprenons tous qu'une telle mesure implique l'adhésion du mineur concerné. Et puis je vous rappelle qu'à défaut d'acceptation, le parquet peut engager des poursuites.
C'est dommage : alors que je formule une proposition, le débat tombe encore une fois dans la caricature. J'indique simplement qu'il me semble plus légitime que le magistrat commence par proposer des mesures de réparation, l'approbation du mineur n'intervenant qu'ensuite, et vous me parlez de travaux forcés !
Supposons qu'un mineur ait tagué un mur et que le magistrat estime que la mesure de réparation appropriée consiste à le nettoyer ou à le repeindre.
Je conviens que la mesure doit être soumise à l'approbation du mineur. Toutefois, s'il refuse, parce qu'il préfère tondre la pelouse à 100 kilomètres de là, le magistrat ne sera probablement pas d'accord, et il aura raison.
Monsieur le garde des sceaux, comme vous le dites, si le mineur refuse…
Le procureur peut alors engager des poursuites !
Tout à fait : nous pouvons donc reformuler les alinéas visés.
Et c'est aussi une question de symbole : le mineur auteur de l'infraction doit se voir imposer une mesure de réparation, c'est logique, et il ne lui appartient pas d'en décider.
Soyons clairs, dans l'exposé sommaire de votre amendement, vous indiquez que le mineur choisit sa peine. Mais ce n'est pas du tout cela ! Il faut simplement qu'il donne son accord, pour que la mesure s'inscrive dans un parcours éducatif, axé sur la réparation, c'est une évidence. Je ne vois pas comment une mesure de réparation pourrait être appliquée sans un tel accord. Voilà encore une proposition complètement déconnectée de la réalité.
L'amendement no 157 n'est pas adopté.
L'amendement no 374 a pour objet d'adapter la médiation pénale à la problématique des mineurs quand une solution alternative aux poursuites est choisie.
L'amendement no 367 vise à préciser qu'avant toute proposition de solution alternative aux poursuites, une enquête doit être réalisée afin d'acquérir une connaissance suffisante de la personnalité du mineur concerné.
L'amendement no 364 vise à modifier l'article L. 422-1 du code de la justice pénale des mineurs, pour rendre possible une médiation lorsque le procureur propose une alternative aux poursuites. Il est déjà satisfait.
L'amendement no 367 tend à préciser qu'une enquête sociale doit être réalisée avant toute proposition de solution alternative aux poursuites. Or je vous rappelle que ces alternatives sont réservées aux faits de moindre gravité, et subordonnées au consentement du mineur et de ses parents. Une telle enquête n'est donc pas nécessaire.
L'avis est défavorable.
Je suis sûr qu'il trouvera grâce aux yeux du garde des sceaux puisqu'il est suggéré par le Conseil national des barreaux.
Lâchez-moi un peu !
M. le garde des sceaux frappe du poing sur son pupitre.
Protestations sur les bancs du groupe LaREM.
Je ne vais pas vous lâcher, monsieur le garde des sceaux, puisque vous êtes le membre du Gouvernement chargé de défendre le texte au banc !
Faites preuve d'un peu de respect pour autrui !
Il fait de la provocation permanente ! Il se croit en pleine perquisition !
Si cela vous dérange, faites-vous remplacer par le porte-parole du Gouvernement, par le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement ou par un autre ! Mais qu'y puis-je, moi ?
Monsieur Bernalicis, je vous prie de défendre votre amendement en évitant les provocations, qui, je vous le rappelle, sont interdites, aux termes de l'article 70 du règlement.
Avec un tel mot, il pourrait y avoir beaucoup de condamnés dans l'hémicycle, notamment sur les bancs du Gouvernement…
Actuellement, le texte prévoit seulement qu'ils seront sanctionnés s'ils ne répondent pas à une convocation. Le Conseil national des barreaux propose de laisser aux représentants légaux du mineur la possibilité d'excuser leur absence en la motivant, ce qui semble relever du bon sens. Effectivement, en l'état, le texte conduit à discréditer les parents du mineur auprès de celui-ci. Et il serait plus utile de prévoir un stage de responsabilité pénale s'ils ne se sont pas excusés de leur absence.
L'amendement vise par ailleurs à ce que les représentants légaux susceptibles de faire l'objet d'une sanction puissent être assistés d'un avocat ou, en cas de ressources insuffisantes, s'en voir désigner un. Le droit en vigueur le prévoit sans doute déjà mais, puisque nous élaborons ici un nouveau code, cette mesure regrouperait toutes les précisions pertinentes dans le même document.
Il est défavorable. Le bon sens consiste justement à impliquer les parents ; particulièrement quand il s'agit de proposer des alternatives aux poursuites, leur présence est impérative.
Avis défavorable.
Même si vous parlez hors micro, monsieur le garde des sceaux, je vous entends quand même – c'est tout le problème, dans un tel hémicycle. Je comprends bien que vous voulez systématiquement vous contenter d'indiquer d'un mot votre avis défavorable, parce que ce débat vous embête.
Monsieur le président, je vous demande d'intervenir ! Ce n'est pas une perquisition ! Il ne va pas me traiter comme il le fait avec les procureurs et la police ! Je demande un minimum de respect !
Allumez son micro que tout le monde l'entende, s'il vous plaît, monsieur le président.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à quinze heures trente, est reprise à quinze heures trente-cinq.
L'amendement no 217 n'est pas adopté.
Proposé par le Conseil national des barreaux, il fixe un cadre plus spécifique pour la médiation pénale en faveur des mineurs. En l'état, le texte reprend le dispositif applicable pour les majeurs en l'assortissant de la présence des représentants légaux, ce qui paraît tout à fait évident. Il nous paraîtrait intéressant de définir pour les mineurs une forme de médiation plus spécifique dont le cadre, au-delà des principes énoncés dans l'amendement, serait précisé par un décret, après concertation avec les avocats participant à de telles médiations. Il s'agit d'appliquer à la médiation pénale pour mineurs le principe de spécialisation que nous avons acté dans l'article préliminaire du nouveau code.
L'amendement no 223 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Nous proposons d'abroger la procédure de composition pénale prévue à l'article L. 422-3.
Si André Varinard, dans son rapport de décembre 2008, recommandait de maintenir la composition pénale instaurée par la loi du 5 mars 2007, il estimait pourtant déjà « n'avoir pas le recul nécessaire pour évaluer la pertinence de ce nouveau dispositif et en envisager l'abrogation, s'agissant d'une mesure instaurée récemment et peu utilisée ». Au vu de cette appréciation, il a été décidé de la maintenir, mais le constat fait à l'époque n'a rien perdu de son actualité : la composition pénale est toujours peu utilisée – de même que l'amende, que nous voulions également supprimer – , pour mieux se concentrer sur les mesures éducatives, plus pertinentes à notre sens, et sur l'assistance éducative en matière civile.
Selon nous, la composition pénale peut finalement laisser croire au mineur qu'on peut négocier avec la justice, ce qui est contraire aux principes pédagogiques et éducatifs présidant à la justice des mineurs, rappelés par le Conseil constitutionnel en 2002.
J'ajoute que, de manière cohérente, la France insoumise est plus que réservée sur la composition pénale pour les majeurs, cette procédure s'inscrivant dans une logique transactionnelle, éloignée de l'épure de notre système judiciaire classique et initial.
Il est défavorable car la composition pénale pour les mineurs fait partie des outils mis à la disposition du magistrat, qui ne peut l'utiliser que dans un cadre très circonscrit apportant toutes les garanties requises. En effet, elle n'est ouverte qu'aux mineurs d'au moins 13 ans ; avant toute proposition du procureur de la République, il faut que la PJJ – protection judiciaire de la jeunesse – soit saisie en vue d'établir un recueil de renseignements socio-éducatifs ; la proposition du procureur doit également être faite aux représentants légaux du mineur, qui doivent donner leur accord ; la composition pénale proposée à un mineur doit être validée par le juge des enfants ou, pour les contraventions des quatre premières classes, par le juge compétent du tribunal de police ; enfin, avant de valider la composition pénale, le juge peut procéder à l'audition du mineur ou de ses représentants légaux. Par ailleurs, les mesures prononcées dans le cadre d'une composition pénale sont plus favorables au mineur que la peine qu'une peine ; il faut donc laisser au juge la possibilité d'avoir recours à cet instrument présent dans la boîte à outils.
Plus le juge dispose d'outils, plus la décision peut être fine : avis défavorable.
J'ajoute que la composition pénale oblige le mineur à se déclarer coupable – ce qui n'est pas exactement la même chose que de reconnaître les faits – alors que, sauf émancipation, il n'a pas la capacité à s'engager. Ce serait d'ailleurs contraire aux dispositions de l'article 40 de la Convention internationale des droits de l'enfant. En effet, il est disposé, au 1 : « Les États parties reconnaissent à tout enfant suspecté, accusé ou convaincu d'infraction à la loi pénale le droit à un traitement qui soit de nature à favoriser son sens de la dignité et de la valeur personnelle, qui renforce son respect pour les droits de l'homme et les libertés fondamentales d'autrui, et qui tienne compte de son âge ainsi que de la nécessité de faciliter sa réintégration dans la société et de lui faire assumer un rôle constructif au sein de celle-ci ». Et il est précisé, au 2 : « À cette fin, et compte tenu des dispositions pertinentes des instruments internationaux, les États parties veillent en particulier à ce que [le mineur concerné ne soit pas] contraint de témoigner ou de s'avouer coupable, interroger ou faire interroger les témoins à charge, et [puisse] obtenir la comparution et l'interrogatoire des témoins à décharge dans des conditions d'égalité. » Ce sont là des raisons supplémentaires de supprimer la composition pénale.
J'ignore, monsieur le rapporteur, quelle idée vous vous faites des juges des enfants après avoir conduit vos auditions et vous être rendu sur le terrain, mais ce ne sont pas des bourreaux qui infligeraient des peines si lourdes qu'il vaudrait mieux les fuir et accepter une composition pénale. En réalité, si le pouvoir du parquet est étendu, c'est parce qu'il propose une réponse plus rapide, et ce genre de procédure répond surtout à un problème de gestion des flux, sachant qu'elle ne nécessite pas la présence d'un procureur spécialisé.
L'amendement no 218 n'est pas adopté.
Cet amendement de repli maintient la composition pénale pour les seuls dossiers dans lesquels il n'y a pas de victimes identifiées, donc pas de parties civiles. La composition pénale est une procédure complexe à mettre en oeuvre, actuellement peu utilisée et qui ne nous semble pas adaptée aux mineurs, surtout dans l'hypothèse où il y aurait d'éventuelles victimes, sachant que, si la victime peut être présente ou représentée dans la composition pénale, c'est rarement le cas. Il nous paraît donc opportun de circonscrire la composition pénale aux seuls cas qui correspondent aux objectifs qu'elle poursuit.
Il ne me semble pas pertinent de restreindre le champ d'application de la composition pénale ainsi que vous le proposez : avis défavorable.
Même avis.
Je ne saisis pas en quoi cet amendement ne vous semble pas pertinent. Dans l'article préliminaire et plus loin, nous avons beaucoup discuté de la place de la victime, et il est beaucoup plus facile pour celle-ci d'être prise en considération en dehors d'une composition pénale, d'autant que le parquetier qui intervient dans la composition pénale n'est pas nécessairement spécialisé.
Puisque nous avons acté, tout à l'heure, le fait qu'il pouvait y avoir des exceptions, il me paraît pertinent, pour reprendre votre argument, de restreindre à des cas précis l'usage d'une procédure, déjà peu utilisée. Cela ne nous engage pas à grand-chose mais va dans le sens de l'intérêt des victimes ainsi que du mineur lui-même.
L'amendement no 219 n'est pas adopté.
Il s'agit de limiter à 30 heures la durée du travail non rémunéré des mineurs, dans le cadre de la procédure de composition pénale.
L'amendement no 406 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Sur l'amendement no 408 , il est défavorable.
Quant à l'amendement no 394 , il est satisfait, car l'article L. 422-1 prévoit que peuvent être proposées au mineur, dans le cadre de la composition pénale, les mesures de l'article L. 41-2 du code de procédure pénale, parmi lesquelles figure la réparation.
Je fais miennes les explications de M. le rapporteur.
Nous demandons la suppression de l'article L. 423-1 du code, qui prévoit la compétence du tribunal de police pour les contraventions des quatre premières classes. Le tribunal de police n'est pas une juridiction spécialisée pour mineurs et les mesures qu'il peut prononcer sont réduites et inadaptées au jugement des mineurs. Il est préférable de redonner cette compétence aux juges des enfants et aux tribunaux pour enfants, y compris pour les contraventions des quatre premières classes. C'est d'autant plus nécessaire que le tribunal de police pourra revenir sur l'excuse de minorité. Nous demandons par conséquent que le juge des enfants soit seul compétent pour prononcer ces peines.
Nous estimons au contraire souhaitable que le tribunal de police soit compétent pour prononcer des contraventions de première et de quatrième classes : avis défavorable.
Ce sera la même position que celle que j'ai déjà eu l'honneur d'exprimer précédemment : nous avons déjà évoqué cette question, l'avis est défavorable.
L'amendement no 52 n'est pas adopté.
Nous en revenons au sujet de la compétence du tribunal de police pour les contraventions infligées aux mineurs. Nous pensons que l'ensemble de ces contraventions doit relever de la compétence du tribunal pour enfants, non de celle du tribunal de police. Donner cette compétence au tribunal de police pour le renforcer pose problème à nos yeux, car cela consacre, en vérité, l'alignement du droit pénal des mineurs sur celui des majeurs, qui ne permet pas de prendre en compte la spécificité de l'enfance. Le tribunal de police est le premier maillon de la chaîne pénale des enfants, alors qu'il ne dispose pas des outils appropriés au traitement de la délinquance des mineurs. Nous considérons au contraire qu'il faut, pour les actes susceptibles d'être sanctionnés par une contravention, prêter une attention particulière aux enfants, en garantissant une prise en charge spécialisée que seul le juge des enfants est à même d'assurer, en l'espèce le tribunal pour enfants.
Voilà pourquoi l'amendement vise à remplacer, à la fin de l'article L. 423-1 du code de la justice pénale des mineurs, les mots « tribunal de police » par les mots « juge des enfants ». Si, comme vous le prétendez, il s'agissait de mettre en avant l'éducatif et non de renforcer la chaîne sécuritaire, qui mettrait des jeunes en danger et finirait par en entraîner certains dans un parcours de délinquance, le premier signal à envoyer serait de les accueillir dans un cadre judiciaire spécialisé plutôt que dans celui de la police. Voilà le sens de notre amendement.
Même avis.
Nous examinerons sans doute d'autres textes sur la justice d'ici à la fin de la législature et nous réessaierons d'enlever au tribunal de police toute compétence sur les mineurs. C'est un point important car il s'agit non pas d'une petite mais d'une grande exception, qui existe certes déjà, mais est-ce une raison pour en rester là ? Je n'en suis pas convaincu ; tout est à questionner. C'est d'ailleurs l'objet d'une codification, qui remet tout à plat et offre l'occasion d'examiner l'ensemble du dispositif. L'appréhension de l'intégralité des dispositions sur les mineurs, dont la compétence du tribunal de police fait évidemment partie, est d'un intérêt non négligeable.
Je ne nourris plus guère d'espoir de faire adopter ces amendements à l'occasion de l'examen de ce texte, même si je continue de les défendre car il y va de notre honneur de parlementaire de parler et de présenter nos idées. J'espère néanmoins que ces éléments infuseront dans les nuits qui viennent chez les uns et les autres, afin que, dans quelques semaines ou quelques mois, cela revienne sur la table et que la justice des mineurs devienne totalement spécialisée, conformément au principe proclamé à titre liminaire.
L'amendement no 220 n'est pas adopté.
Ils ont trait, tout comme l'amendement no 69 à venir, à la procédure du jugement en audience unique, qui permet à la juridiction de statuer lors d'une audience unique sur la culpabilité et la sanction. Beaucoup d'organisations, comme l'Union syndicale des magistrats, le Syndicat des avocats de France ou les représentants FSU des éducateurs, s'inquiètent des conséquences d'une seule audience sur la démarche éducative. L'Union syndicale des magistrats souligne par exemple que « cette ouverture apparaît excessive, la possibilité de recourir à un jugement immédiat devant le tribunal pour enfants sur déferrement » posant plusieurs problèmes. J'aimerais obtenir une réaction sur ces amendements ; je vous en remercie par avance.
Ces amendements visent à supprimer la procédure de l'audience unique. Lors des auditions que nous avons menées avec Cécile Untermaier dans le cadre de la mission d'information sur la justice des mineurs, beaucoup de magistrats nous ont dit qu'ils étaient très favorables à cette procédure, qui a pris le relais de l'ancienne PIM – présentation immédiate devant la juridiction pour mineurs – , assez peu utilisée en raison de conditions d'application trop complexes. À l'occasion de l'élaboration du code de la justice pénale des mineurs, il y avait une attente autour de la mise en place de cette procédure, au cours de laquelle on statuera à la fois sur la culpabilité et la sanction.
Cette procédure s'adresse à des mineurs connus et multirécidivistes, pour lesquels des mesures éducatives ont déjà été appliquées et des recueils socio-éducatifs établis. Dans cette procédure, les conditions de quantum de peine et d'âge du mineur sont très encadrées, je vous le rappelle : la peine encourue doit être égale ou supérieure à cinq ans d'emprisonnement pour le mineur de moins de 16 ans ou égale ou supérieure à trois ans d'emprisonnement pour le mineur d'au moins 16 ans. En outre, je le répète, le mineur doit être connu de la justice et avoir déjà fait l'objet d'une mesure éducative, d'une mesure judiciaire d'investigation, d'une mesure de sûreté, d'une déclaration de culpabilité ou d'une peine prononcée dans le cadre d'une autre procédure. L'ouverture de la procédure est donc très encadrée.
En outre, l'article L. 521-27 du code offre une garantie supplémentaire : la juridiction saisie peut, après avoir recueilli les observations des parties présentes à l'audience et par décision motivée au regard de la personnalité et des perspectives d'évolution du mineur, statuer selon la procédure de mise à l'épreuve éducative. Ainsi, lors de l'audience unique, le juge peut décider de basculer sur la procédure de mise à l'épreuve éducative, si cela lui apparaît nécessaire au regard de la personnalité du mineur ou de son évolution.
Cette procédure est donc entourée de garanties, en amont comme en aval de son déclenchement. Elle sera donc appliquée dans des conditions restreintes, mais les juges et les procureurs doivent pouvoir l'utiliser.
Je partage l'analyse de M. le rapporteur : des garanties existent en amont et en aval, qui me paraissent suffisantes pour donner un avis défavorable à vos amendements, madame Buffet.
Nous soutenons ces amendements et voterons en leur faveur. L'audience unique fait partie des exceptions, qui finissent par être plus nombreuses que les cas dans lesquels les principes s'appliqueront.
Vous présentez une grande avancée qui s'apparenterait à la césure voulue par Mme Taubira. Il est dommage que vous l'insériez dans un délai intenable de trois mois – nous y reviendrons plus tard – et surtout que vous prévoyiez des exceptions pour les récidivistes dont les cas doivent être traités plus rapidement lors d'une audience unique, car cela arrange tout le monde. Il est vrai que cela allégera la charge de travail, encore une fois : avoir une procédure pour statuer sur la culpabilité et une autre pour fixer la sanction d'un multirécidiviste apparaît lourd et chronophage, mais les éléments qui justifient la césure trouveraient autant à s'appliquer pour le récidivant, peut-être même davantage, afin de disposer de plus de temps pour travailler sur la culpabilité.
Les trois amendements se rapportent à l'audience unique et à l'article L. 423-4, qui interrogent, il est vrai, les professionnels, notamment des avocats et des juges spécialisés dans la justice des enfants, ils nous en ont beaucoup parlé.
L'amendement no 20 vise à rendre plus exceptionnelle encore la faculté du procureur de la République de poursuivre un mineur devant le tribunal pour enfants aux fins de jugement en audience unique, en majorant le quantum de la peine de cinq à sept ans pour un mineur âgé de moins de 16 ans et de trois à cinq ans pour celui d'au moins 16 ans. Nous avons déjà défendu cet amendement en commission.
L'amendement no 98 vise à ce que le rapport sur le mineur, qui, aux termes de l'article L. 423-4, doit dater de moins d'un an, comporte les investigations accomplies sur la personne du mineur. Le document de personnalité est en effet essentiel dans le traitement du dossier, conformément au principe de l'ordonnance de 1945.
Si aucun rapport n'a été déposé, l'amendement no 21 vise à transformer en obligation la faculté du procureur à en demander un.
Voilà les trois éléments nécessaires, nous semble-t-il, pour mieux encadrer l'utilisation de la procédure de l'audience unique, ancienne PIM, qui pose problème. Comme l'a dit le rapporteur Jean Terlier, la mission d'information avait évoqué cette question : nous avions compris que certains parquetiers souhaitaient lever les obstacles entourant la PIM, mais nous manquions d'éléments statistiques et de connaissances sur ce dispositif, si bien que nous avions recommandé l'élaboration d'un bilan statistique des procédures déclenchées, proposition reprise dans un amendement que nous examinerons plus tard.
Je comprends tout à fait la philosophie de ces trois amendements : vous voulez obtenir la garantie que la procédure de l'audience unique reste exceptionnelle et ne devienne pas celle de droit commun remplaçant celle de mise à l'épreuve éducative. Vous avez raison, cette préoccupation a souvent été avancée lors de nos auditions : nous nous sommes demandé quelles garanties nous pourrions apporter.
Il est possible, comme vous le proposez, de durcir les critères pour restreindre le recours à l'audience unique. Une autre option est de conditionner l'ouverture de cette procédure, une fois que le procureur l'a demandée, à l'accord du juge des enfants ou du tribunal pour enfants, mais une telle clause serait contraire au principe d'opportunité des poursuites du parquet.
La solution retenue, qui me semble pertinente, est de donner, en aval, la possibilité au juge des enfants ou au tribunal pour enfants, une fois saisi, d'apprécier, en fonction de la personnalité du mineur et de ses perspectives d'évolution, la pertinence de cette procédure. S'il l'estime appropriée, elle pourra suivre son cours ; dans le cas contraire, il choisira la procédure de mise à l'épreuve éducative.
Cette garantie, placée sous le contrôle du juge des enfants ou du tribunal pour enfants, me semble suffisante pour ne pas modifier les critères et laisser la procédure en l'état, car elle offre l'assurance que l'audience unique restera l'exception et ne deviendra pas le principe. L'avis est donc défavorable sur les trois amendements.
Au fond, madame Untermaier, vos amendements vont dans le même sens que les précédents : vous voulez, je l'entends, des garanties légitimes. Or ces garanties existent. Nous l'avons dit tout à l'heure, la procédure de l'audience unique est encadrée, en amont et en aval, et il est toujours possible de basculer vers l'autre procédure, si vous me permettez ce raccourci de langage.
Dans ces conditions, on ne peut qu'être défavorable à vos amendements. D'une part cette procédure est exceptionnelle, d'autre part elle est réversible – là encore, pardonnez-moi pour cette simplicité langagière. En tous les cas, elle peut être à nouveau envisagée et l'autre procédure mise en oeuvre.
Je distingue deux modalités permettant d'accélérer la procédure : la présentation immédiate à magistrat et la comparution à délai rapproché. Et l'on voit bien que tous deux ont irrigué la nouvelle codification : la comparution à délai rapproché – CDR – a inspiré la future césure, qui en reprend le délai de dix jours à trois mois ; la présentation immédiate à magistrat se transforme en audience. Le caractère exceptionnel ne l'est donc pas tant que ça, ce qui pose des tas de problèmes. Je comprends parfaitement que les membres du parquet en revendiquent une utilisation plus fréquente, pour plus de facilité, mais l'avis est légèrement différent du côté du siège. C'est à nous de décider de l'endroit où placer le point d'équilibre, du rôle et des responsabilités des uns et des autres, et surtout la prise en charge de l'enfant au milieu de ces procédures.
Par principe, je suis défavorable à cette mesure, dont la description commence par les mots « à titre exceptionnel ». Je ne souhaite pas que l'on déroge aux principes, car ce ne sont alors plus vraiment des principes. En l'occurrence, les amendements de la collègue Untermaier visent à restreindre ce procédé exceptionnel à des peines plus élevées et à remplacer des formules optionnelles par des tournures plus impératives. Il me semble important d'aller dans ce sens.
Le rapporteur a rappelé les échanges en commission, laquelle avait conclu à l'absence de certitude en la matière. Faisons donc attention à nos décisions. J'ai bien compris que le code de justice pénale des mineurs a pour objectif d'être plus protecteur. Dans mon esprit – j'imagine que tout le monde partage ce point de vue – cela signifie restreindre le caractère exceptionnel de ce qui l'est. Les trois amendements mériteraient donc d'être adoptés.
L'amendement no 69 n'est pas adopté.
Il concerne lui aussi l'audience unique. J'appelle votre attention sur ses conséquences encore plus graves pour les mineurs non accompagnés. En effet, l'une des conditions pour recourir à cette procédure est la poursuite du mineur pour le délit de refus de se soumettre aux opérations de prélèvements externes. Or la pratique prouve que les mineurs isolés refusent couramment de se soumettre à de telles opérations, par crainte du croisement des données avec des fichiers dont la finalité est le contrôle migratoire. Très souvent, ils en sont aussi dissuadés par les réseaux qui les exploitent. Les conditions ne sont pas toujours réunies pour permettre aux mineurs non accompagnés d'être informés de manière claire, adaptée et complète sur les ressorts de ces procédures, afin qu'ils mesurent les conséquences de l'acceptation ou du refus. Une généralisation des audiences unique est donc à craindre, surtout pour les mineurs non accompagnés, car cela les excluait de fait des mesures de mise à l'épreuve éducative et créerait ainsi une rupture d'égalité.
Avis défavorable, pour les raisons déjà invoquées.
L'amendement no 95 n'est pas adopté.
Il vise à prévoir un délai plus réaliste de convocation à la première audience. Le délai de trois mois prévu dans le texte ne tient pas compte des moyens réels de la justice, de l'exercice des droits de la défense ni du temps nécessaire s'agissant d'un mineur.
L'amendement vise également à réintroduire la requête devant le juge des enfants pour la maîtrise de l'audiencement. Sa suppression pourrait être entendue si le Gouvernement accordait véritablement des moyens pour que la justice prenne le temps et soit rendue dans des conditions satisfaisantes, mais tel n'est pas le cas. C'est en partie pour cela que les procédures sont si longues. En tout état de cause, notre système judiciaire est encore trop insuffisamment financé et soutenu pour pouvoir assurer correctement ses missions. Il nous semble que la procédure proposée ne fera que renforcer le travail à la chaîne, plutôt que de créer de bonnes conditions d'accueil et de respect des droits de la défense.
La parole est à Mme Cécile Untermaier, pour soutenir l'amendement no 10 .
Il vise à donner un peu de souplesse à la procédure, en faisant passer le délai de dix à quinze jours au minimum. Il avait déjà été défendu en commission, avec une durée de vingt jours ; nous l'avons ramenée à quinze, afin d'aller dans le sens d'un compromis, vers lequel je m'efforce toujours de tendre.
Le délai compris entre dix jours et trois mois permettra au procureur d'opérer la saisine pour que se tienne l'audience de culpabilité. Durant ce délai, le procureur disposera du temps nécessaire pour apprécier l'affaire, en fonction de sa complexité, et appréhender d'éventuels problèmes posés par des éléments relatifs à la culpabilité. Il me semble important de maintenir un délai minimum de dix jours parce qu'en matière de pédagogie pour le mineur, une décision rapide concernant sa culpabilité est essentielle. Il peut être pertinent qu'une telle décision intervienne dès la fin du délai de dix jours.
La question est un peu superfétatoire. Imaginons un délai de convocation de quinze jours ou d'un mois ; s'il y a un problème sur la question de la culpabilité lors de l'audience et qu'il est évoqué dans le cadre d'un débat contradictoire, l'affaire sera renvoyée à une autre audience de culpabilité. Le procureur a donc tout intérêt à ce que les questions sur la culpabilité soient bordées au moment où il audience l'affaire.
Avis défavorable et maintien du délai de dix jours à trois mois.
Même position.
Contrairement à l'esprit des amendements qui viennent d'être défendus, je trouve que l'une des grandes forces de cette réforme est de permettre à la justice d'apporter une réponse rapide. La lenteur est le mal de la justice pour les mineurs en France, nous le savons tous. Nous savons aussi que, statistiquement, il y a beaucoup moins de récidives que de réitérations, car, lorsque la sanction est prononcée, elle est en général comprise : la récidive n'est pas très importante en matière de justice des mineurs. On a donc tout intérêt – c'est l'un des gros avantages de ce texte – de permettre au tribunal de statuer vite. Je trouve un peu navrant d'argumenter en objectant le manque de moyens de la justice, qui ne permettrait pas de le faire.
M. le garde des sceaux sourit.
Nous sommes l'Assemblée nationale : votons un texte, mettons la pression sur le Gouvernement pour qu'il accorde les moyens d'un bon fonctionnement. Puisque le Gouvernement est d'accord avec nous, gageons que les moyens seront mis en oeuvre pour permettre que tout cela fonctionne ; nous avons tous à y gagner.
Je suis ravie d'entendre notre collègue Savignat approuver le dispositif de procédure qu'avait envisagé par Christiane Taubira ; les temps changent…
En ajoutant cinq jours au délai minimal, je ne remets pas en question la procédure. Je voulais simplement faire entendre la voix d'avocats – mais vous ne partagez peut-être pas leur point de vue, monsieur le garde des sceaux – , qui déclarent avoir besoin d'un peu de temps pour consulter le dossier de personnalité avant d'aller devant le juge et éviter le renvoi ; parce qu'ils n'ont pas qu'une affaire à défendre, ils estiment que cinq jours supplémentaires leur permettraient d'être mieux à même de présenter le dossier et de plaider la culpabilité ou non. C'est tout ce que je voulais dire ; je ne remets pas du tout en question la procédure, à laquelle nous souscrivons.
La question des délais, notamment la césure de trois mois, est un point important et nouveau dans le code, sur laquelle nous allons passer peu de temps. Notre amendement n'est pas identique à celui de Mme Untermaier : le sien vise à allonger le délai à partir duquel une convocation est possible, tandis que le nôtre vise à supprimer le délai de trois mois, pour que le juge reste maître de l'audiencement et du temps qui lui semble nécessaire avant l'audience de culpabilité ; il connaît le mineur et sait s'il est trop tôt pour cela. Prévoir une audience de culpabilité très vite, alors que le travail des éducateurs avec le mineur n'a pas encore pu être accompli – pour voir comment il pourrait reconnaître les faits commis et commencer un travail à ce sujet – , ne permettrait pas à l'audience de bien se passer.
Y compris pour la victime, il est préférable d'entendre le mineur auteur des faits reconnaître l'infraction commise, au lieu de n'avoir connaissance du prononcé de la culpabilité par le juge lors du délibéré. C'est beaucoup plus puissant pour le mineur, le juge, la justice et la victime, bref, pour tout le monde.
Enserrer l'audience dans un délai de trois mois conditionne beaucoup de choses ; c'est ce que disent des tas de professionnels du droit. Lorsqu'ils m'ont expliqué qu'ils étaient contre la césure, je ne l'ai pas compris, car j'y suis plutôt favorable par principe – je l'avais d'ailleurs défendue pour les majeurs dans la loi de programmation de la justice, en tant que possibilité vertueuse pour séparer la culpabilité de la sanction. J'ai fini par comprendre lorsqu'ils m'ont expliqué que la césure, dans de tels délais, n'était qu'une manière de se faire plaisir sur le plan des principes. Ce n'est plus une accélération, mais une précipitation de la justice.
Dans la discussion générale, j'ai passé beaucoup de temps à parler du temps, justement, comme une composante essentielle de la manière de juger. C'est parfois trop long, nous sommes d'accord, mais, en l'occurrence, il ne s'agit pas de cela. D'ailleurs, on ne réforme pas l'instruction, dont les délais sont les plus longs ; cela montre bien que tel n'était pas l'objectif.
La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour soutenir l'amendement no 61 .
Il vise à prolonger le délai compris entre dix jours et trois mois jusqu'à six mois. Néanmoins, après avoir écouté mes collègues sur la possibilité de laisser au juge la capacité de décision, je le retire.
L'amendement no 61 est retiré.
L'amendement no 11 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il a pour objet d'obliger à rendre réellement exceptionnelle la procédure d'audience unique, en le précisant dans le texte. Je sais que vous y êtes défavorables, mais pouvez-vous expliquer à nouveau comment c'est possible, puisque vous parlez de réversibilité en cours de procédure ?
Ce sont les conditions de l'article L. 521-27 qui permettent à la juridiction – soit le juge des enfants, soit le tribunal pour enfants – , lorsqu'elle est saisie et qu'elle constate que la personnalité et les perspectives d'évolution du mineur le permettent, de passer d'une procédure à audience unique à une procédure de mise à l'épreuve éducative, laquelle doit demeurer le principe.
Qu'il me soit permis d'ajouter aux explications de M. le rapporteur que ce regroupement est dans l'intérêt du mineur : cela lui permettra d'avoir un véritable repère dans son propre parcours judiciaire. C'est en cela que cette mesure est novatrice et particulièrement intéressante. Dès lors, le Gouvernement est défavorable à l'amendement.
L'amendement no 410 n'est pas adopté.
L'article L. 433-4 du code de la justice pénale des mineurs détermine les conditions dans lesquelles la détention provisoire du mineur de moins de 16 ans peut être prolongée. Cet amendement vise à préciser qu'une révision automatique de la détention provisoire aura lieu tous les trois mois.
La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour soutenir l'amendement identique no 225 , ainsi que le no 226 ?
Ils visent effectivement à rendre automatique la révision de la détention provisoire, donc à ne pas effectuer cette dernière seulement à la demande de l'intéressé. Quand on en arrive à déposer des amendements tendant à obtenir une révision après trois mois, c'est qu'il s'agit de détentions provisoires longues et qu'on se situe peut-être déjà hors du cadre normal d'une instruction. Il est important d'examiner la pertinence d'une telle mesure.
Nos deux amendements portent sur deux articles successifs : le premier concerne les moins de 16 ans, le deuxième les plus de 16 ans. Nous sommes favorables dans les deux cas à la révision automatique. C'est cohérent avec l'objectif affiché par le Gouvernement et la majorité de dénombrer le moins de personnes possible en détention provisoire. Il faut se donner toutes les chances de l'atteindre, y compris celle d'un examen intermédiaire, d'une révision d'étape susceptible d'aboutir à une autre décision.
Quel est l'avis de la commission sur les deux amendements identiques et sur le no 226 ?
Les trois concernent la détention provisoire en matière criminelle. Pour les mineurs de moins de 16 ans, je vous rappelle qu'elle ne peut excéder six mois, renouvelables une fois. Je ne suis pas certain qu'une révision tous les trois mois conduise le juge à changer d'avis sur le caractère dangereux du mineur. Il faut u contraire, je crois, lui laisser la latitude nécessaire pour apprécier finement la personnalité de ce dernier et définir la durée de la détention. L'avis est donc défavorable.
Ici comme ailleurs, plus le juge a d'outils à sa disposition, plus sa décision sera fine, c'est une évidence. La durée de six mois était déjà inscrite dans l'ordonnance de 1945. Pendant sa détention, le mineur est évidemment assisté d'un avocat, qui peut à tout moment déposer une demande de mise en liberté. L'avis est défavorable.
Nous proposons une révision tous les trois mois : les amendements ne visent pas à retirer un outil au magistrat, cela n'enlèvera rien à la finesse de sa décision et n'empêchera pas davantage l'avocat de déposer une demande de mise en liberté. Il ne s'agit que d'imposer un examen approfondi plus régulier du placement en détention.
Pourquoi cette proposition ? Cher collègue Terrier, vous avancez la matière criminelle comme un argument d'autorité. Certes ! Néanmoins nous étions une large majorité de l'hémicycle à affirmer qu'un enfant est d'abord un enfant, même lorsqu'il commet un crime.
L'amendement no 226 n'est pas adopté.
Il vise à abroger l'article L. 434-2 du code de la justice pénale des mineurs. Nous considérons que celui-ci contredit des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, comme l'atténuation de responsabilité des mineurs en fonction de l'âge, avec l'intervention d'une juridiction spécifique, et la nécessité de rechercher le relèvement éducatif et moral par des mesures adaptées à l'âge et à la personnalité.
En effet, en vertu de cet article, lorsque les faits formeront un ensemble connexe et indivisible avec un crime commis par un mineur âgé d'au moins 16 ans, le juge d'instruction pourra, par décision motivée prise après réquisitions du procureur de la République et observations des parties, mettre ce mineur en accusation devant la cour d'assises des mineurs, pour un crime commis avant l'âge de 16 ans, comme pour un crime commis à compter de sa majorité.
Avec cette mesure, il faudrait deux audiences : une devant la cour d'assises et une devant le tribunal pour enfants.
Avec notre texte, au contraire, c'est deux en un. Il s'agit de juger le crime et les faits connexes, ce qui est cohérent : il est intéressant d'avoir une vision d'ensemble.
Vous défendez l'abrogation de toutes les procédures, sauf dans ce cas, où vous souhaitez en rajouter une. Il est parfois difficile de vous suivre… Bon…
Je vous retourne le compliment : il est aussi très difficile de vous suivre, car une logique chasse l'autre. Au sujet de la détention provisoire des mineurs, vous avez avancé qu'un enfant qui commet un crime reste d'abord un enfant. Or, dans le cas présent, vous affirmez que la présence d'éléments connexes conduit à considérer d'abord l'aspect criminel, impliquant de renvoyer l'enfant devant la cour d'assises des mineurs et non devant le tribunal pour enfants. Vous voyez bien que vous étiez de mauvaise foi en affirmant que nous ne proposions jamais rien et que nous voulions supprimer toutes les procédures ; comme quoi tout peut arriver dans les débats.
Je me demande souvent si vous ne comprenez pas ou si je m'exprime confusément, ce qui est très possible. Il ne s'agit pas de choisir entre la matière criminelle et la matière délictuelle, puisque les deux sont en cause. La question est de savoir si l'on organise une ou deux audiences.
Vous préférez qu'il y en ait deux ; je suis favorable à une seule.
C'est surréaliste !
L'amendement no 228 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 201 .
Sourires
mais je le soutiendrai car il est différent du précédent. Le texte prévoit, lorsque les faits forment un ensemble connexe et indivisible avec un crime commis par un mineur d'au moins 16 ans, que le juge d'instruction puisse renvoyer la personne devant la cour d'assises des mineurs pour un crime commis avant ses 16 ans ou après sa majorité. Quand bien même les faits seraient connexes, il convient qu'un crime commis par une personne majeure relève du droit pénal commun et que la personne ne puisse pas bénéficier des mesures spécifiques à la justice des mineurs. Le texte encourage à perpétuer après la majorité des infractions commises durant la minorité, ce qui n'est pas souhaitable.
Pour les raisons excellemment développées par le garde des sceaux, l'avis est défavorable.
Vous aviez subodoré un avis défavorable, et vous aviez raison, madame Ménard.
Sourires.
En effet, la question est identique, pardonnez ma cohérence.
L'amendement no 201 , repoussé par la commission, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 318 .
Je serai très brève. Il vise à s'assurer qu'en matière criminelle, les majeurs seront jugés selon le droit commun, tandis que les mineurs le seront selon le code pénal des mineurs, en supprimant la possibilité offerte de renvoyer tous les accusés âgés d'au moins 16 ans devant la cour d'assises des mineurs, même si certains co-auteurs sont majeurs. Là encore, vous avez déjà répondu.
L'amendement no 318 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 411 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article L. 434-6 prévoit une détention provisoire de deux mois pour les enfants de moins de 16 ans en matière correctionnelle. L'amendement vise à réduire ce délai à quinze jours et à supprimer le renouvellement d'un mois. La détention provisoire ne pourrait excéder un mois, soit une durée de quinze jours renouvelable une seule fois.
L'exposé sommaire détaille certains éléments statistiques susceptibles d'intéresser nos collègues. La détention provisoire constitue une mesure grave et l'objectif est qu'elle soit prononcée moins souvent : l'amendement est cohérent à cet égard. Or la part de la détention provisoire a fortement progressé, passant de 62 % au 1er janvier 2014 – ce qui n'est pas si vieux – à 81,5 % au 1er novembre 2020. Selon nous, il est urgent de limiter la généralisation de l'enfermement, à titre provisoire en particulier.
Il est défavorable. Le code de la justice pénale des mineurs réduit déjà considérablement la durée des détentions provisoires.
L'amendement no 227 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Ils visent tous deux à réduire la durée de la détention provisoire de deux à un mois : le no 231 concerne l'article L. 434-7 du code de la justice pénale des mineurs, et le no 237, l'article L. 434-8. Comme mon collègue Bernalicis l'a souligné, la détention provisoire d'un mineur en matière criminelle est une mesure très problématique pour les enfants de moins de 16 ans comme pour ceux d'au moins 16 ans. Nous estimons qu'il faut réduire le nombre de mesures de détention provisoire en général, tout particulièrement quand des enfants sont concernés.
Défavorable.
Je ne comprends pas bien. L'objectif est de diminuer le recours à la détention provisoire. Or le délai constitue un levier non négligeable pour y parvenir. Nous parlons d'enfants, peu importe qu'ils soient âgés de plus ou de moins de 16 ans. Comme vous l'avez compris, nous proposons parfois d'interdire la détention provisoire, et nos amendements tendent à réduire d'un cran tous les plafonds inscrits dans le texte, afin de provoquer une déflation pénale. Cet objectif nous est cher car il existe un phénomène d'inflation pénale, qui entraîne une inflation carcérale.
Les amendements nos 435 de M. Aurélien Taché et 16 de Mme Cécile Untermaier sont défendus.
Il vise à ériger en principe législatif que l'enfant victime a le droit d'être assisté d'un avocat.
L'amendement no 240 de M. Ugo Bernalicis est défendu.
Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements identiques ?
Défavorable car il est satisfait : l'enfant victime est d'ores et déjà assisté d'un avocat.
Même avis.
Peut-être faut-il préciser l'objectif de cet amendement : il ne vise pas à donner le droit à l'enfant victime d'être assisté d'un avocat, même si la rédaction va dans ce sens, mais à lui assurer la présence d'un avocat, sur le modèle de la procédure prévue pour l'enfant mis en cause.
Par ailleurs, même si cela ne figure pas dans le dispositif de l'amendement, il convient de progresser sur la spécialisation des avocats en matière de justice des mineurs – j'en ai discuté tout à l'heure avec un collègue en aparté. Le principe de spécialisation devrait s'appliquer aux avocats de la même manière qu'il s'applique aux magistrats, car il s'agit d'une matière particulière.
Les avocats qui défendent des enfants, j'imagine, sont intéressés par le sujet, ont particulièrement travaillé dans ce domaine et ont suivi une formation spécifique. Néanmoins, il y a sans doute des progrès à faire pour spécialiser l'ensemble des acteurs.
Le code de la justice pénale des mineurs prévoit déjà, et c'est heureux, que l'enfant victime a droit, comme toute victime, à la présence d'un avocat. C'est un point important, car le parcours devant la justice est toujours très compliqué.
Il est exact, monsieur Bernalicis, que la formation des avocats est une question fondamentale. De nombreux barreaux organisent des formations spécifiques relatives à la justice des mineurs. En outre, cela a été rappelé à plusieurs reprises, l'un des principes essentiels de la présente réforme est l'intervention, tout au long de la procédure, des mêmes acteurs : non seulement d'un même juge et d'un même éducateur, mais aussi d'un même avocat.
Peut-être n'est-il pas nécessaire que les avocats soient spécialisés au sens où on l'entend habituellement, mais il faut évidemment qu'ils aient suivi une formation dédiée. De nombreux barreaux en organisent, et le CNB, le Conseil national des barreaux, y est très attaché.
Je complète les propos de Mme Louis. Voilà une des incohérences de votre argumentation, chers collègues de La France insoumise : vous soutenez des amendements émanant du CNB qui demandent la spécialisation de tout le monde, …
Sauf des avocats !
… sauf des avocats, dont la carence est pourtant grande en la matière. Il va effectivement falloir appeler leur attention sur cette carence et les inviter à travailler sur cette question. La défense pénale des mineurs ne figure pas parmi les vingt-six mentions de spécialisation arrêtées dans le règlement intérieur national de la profession d'avocat, …
… lequel est validé par le garde des sceaux, la dernière liste remontant à 2011. Eu égard à la teneur des débats que nous menons depuis hier matin, je ne peux que le déplorer, comme vous. Fort heureusement, de nombreux barreaux ont déjà accordé une attention particulière à ce sujet et ont développé des groupes de défense des mineurs.
Je ne suis pas du tout spécialiste de ces questions. Il me paraît évident que toute victime doit avoir droit à un avocat, ce qui soulève la question de l'aide juridictionnelle.
L'aide juridictionnelle doit-elle être de droit en l'espèce ?
Quant à la spécialisation des avocats en la matière, elle se heurte, d'après les professionnels que j'ai entendus, à un problème compliqué : celui de la rémunération.
Nous sommes bien d'accord.
Nous avons appris hier, au détour d'une de mes interventions, que vous étiez pour partie mandatés par le CNB – vous l'avez d'ailleurs reconnu très honnêtement. Dont acte. Le CNB a choisi M. Bernalicis comme porte-voix. Pourquoi pas !
Vous nous inondez – pardonnez-moi d'employer ce terme, mais il est juste – d'amendements qui visent à spécialiser la Terre entière : le juge d'instruction, le substitut, le juge des libertés et de la détention. Selon vous, un substitut qui ne serait pas spécialisé ne devrait plus avoir la possibilité d'intervenir. Nous en avons eu pour des heures de débat, à tout le moins de très longues minutes.
Or nous constatons que vous demandez la spécialisation de tout le monde, sauf des avocats. Bien évidemment, le CNB ne vous a pas sollicité en ce sens. C'est curieux, n'est-ce-pas ? Cela relève un peu du lobbyisme, mais c'est ainsi. Cette simple remarque étant faite, je me rassois.
Les amendements nos 404 rectifié et 403 rectifié de M. le rapporteur sont rédactionnels.
Les amendements nos 404 rectifié et 403 rectifié , acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.
L'article 8, amendé, est adopté.
Nous en venons à des amendements portant article additionnel après l'article 8.
La parole est à Mme Danièle Obono, pour soutenir l'amendement no 246 .
Il porte sur les prérogatives du tribunal de police, question que nous avons déjà abordée. Nous souhaitons supprimer l'intervention de cette juridiction dans le cadre de la justice des mineurs, en application du principe cardinal de spécialisation des acteurs. Le tribunal de police est une juridiction de droit commun, non spécialisée, et n'est donc pas adapté, selon nous, à la justice des mineurs, laquelle doit privilégier, autant que faire se peut, l'éducatif par rapport au répressif.
Cet amendement est lui aussi le fruit du travail engagé depuis plus d'un an avec le Collectif des enfants. Je sais, monsieur le ministre, que vous êtes particulièrement obsédé par le CNB. Or ce collectif, dont nous sommes les porte-voix, et fiers de l'être, comprend non seulement le CNB, …
Il y a aussi le Syndicat de la magistrature !
… mais aussi la Conférence des bâtonniers, le barreau de Paris, le Syndicat de la magistrature, le Syndicat des avocats de France, le SNPES-PJJFSU – Syndicat national des personnels de l'éducation et du social de la PJJ – , la CGT, la FSU, la Ligue des droits de l'homme, le Genepi, l'Observatoire international des prisons, le SNUAS-FPFSU – Syndicat national unitaire des assistants sociaux de la fonction publique – , le SNUTER La FSU Territoriale – Syndicat national unitaire de la territoriale – , Solidaires, Sud santé sociaux, le SNEPAP-FSU – Syndicat national de l'ensemble des personnels de l'administration pénitentiaire – , Solidaires justice et la FCPE 75 – Fédération des conseils de parents d'élèves de Paris. L'ensemble de ces professionnels méritent…
Du respect.
… un peu plus de respect que vous ne leur en manifestez avec ces piques dont vous êtes coutumier, monsieur le ministre.
Dans de nombreux cas, ils pensent comme nous et nous pensons comme eux. En l'espèce, nous pensons nous aussi qu'il faut une spécialisation des acteurs, notamment des avocats. Le tribunal de police ne doit pas intervenir en matière de justice des mineurs parce que celle-ci est spécialisée.
Puis-je considérer, madame Obono, que vous avez défendu également l'amendement no 247 , qui a le même objet ?
Dans ma vie d'avant, monsieur le président, il y avait ce qu'on appelle l'autorité de la chose jugée. Je regrette qu'il n'y ait pas ici d'autorité de la chose votée. Dès lors, on peut voter trente fois sur le même sujet, on peut poser trente fois la même question.
Sourires sur les bancs du groupe LaREM.
En l'espèce, c'est le tribunal de police, le retour ! C'est même le tribunal de police récurrent ! Nous en avons déjà discuté pendant des heures. Vous y revenez sans cesse, en présentant les choses d'une autre façon, en défendant des amendements qui inversent les termes ou déplacent une virgule. Avec la constance stupide qui est la mienne, monsieur Bernalicis, je vous indique que je suis une fois de plus défavorable sur cette question que vous avez soulevée trente-deux fois.
Vous répondez à M. Bernalicis, alors que c'est Mme Obono qui a présenté l'amendement : je reconnais là votre obsession viriliste, monsieur le ministre !
Je vais vous dispenser un cours rapide, que vous n'avez peut-être pas suivi, concernant le Parlement. Celui-ci parlemente, effectivement, et peut être amené à modifier ou supprimer une référence présente dans plusieurs articles d'un même texte de loi. En l'espèce, parce que nous sommes cohérents et assez bêtement formalistes, nous proposons des amendements qui visent à supprimer toutes les références à l'intervention du tribunal de police en matière de justice des mineurs. Et nous continuerons à le faire jusqu'à la fin de la législature. Si vous êtes là jusqu'au bout de celle-ci, …
M. le garde des sceaux rit.
… vous verrez que nous reviendrons à la charge. En effet, la question n'est pas simplement technique ou légistique ; elle est politique.
J'ai compris.
Nous pensons fondamentalement que le tribunal de police n'a pas à intervenir, la justice des enfants devant être confiée à des institutions spécialisées.
Vous le savez certainement, la politique est l'art de la répétition. À force, nous espérons convaincre une majorité de collègues députés, à défaut de vous convaincre.
Vous avez dit « bêtement formalistes », madame la députée. C'est vous qui avez choisi l'adverbe…
La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour soutenir l'amendement no 49 .
Que des actions de lobbying soient exercées auprès des députés, ce n'est pas nouveau. Il convient effectivement de combattre ce phénomène, et il existe des règles qui visent précisément à empêcher les lobbies de faire pression sur nous.
En revanche, que des organisations représentatives d'une profession ou de salariés s'adressent à l'ensemble des députés – elles s'adressent effectivement à nous tous – …
… pour faire part de leurs préoccupations ou de leurs propositions, il n'y a rien de plus normal. Elles appartiennent à la société civile. Or nous avons besoin d'une société civile si nous voulons que notre démocratie fonctionne.
L'amendement no 49 vise à garantir le principe de la publicité restreinte des audiences. Nous proposons que seul le mineur devenu majeur puisse y renoncer. Il faut que l'on respecte l'enfant qu'il a été ; il convient de préserver son image et son avenir.
À mon avis, l'amendement est satisfait par l'article L. 513-3 du code : « le prévenu mineur au moment des faits, devenu majeur au jour de l'ouverture des débats [… ], peut demander à ce que l'audience soit publique ». S'il peut demander que l'audience soit publique, il peut aussi ne pas le demander.
J'ai omis d'appeler l'amendement identique no 248 .
La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour le soutenir.
Il vise à réaffirmer le principe de la publicité restreinte des audiences, lequel doit prédominer. Nous proposons donc de supprimer les dérogations prévues. Cela nous semble légistiquement plus juste, politiquement plus évident et judiciairement plus efficace.
Les représentants du CNB n'étant pas présents dans l'hémicycle, je précise qu'il existe, depuis 2011, une formation dédiée à la justice des mineurs, pilotée par le CNB. Celle-ci fait l'objet d'une convention spécifique avec le ministère de la justice. Peut-être conviendrait-il de préciser cette convention, de l'améliorer, de l'assortir de davantage de moyens.
Plusieurs collègues l'ont relevé, notamment Cécile Untermaier, les avocats qui défendent des enfants sont assez mal rémunérés, en particulier lorsqu'ils sont commis d'office. D'après ce qu'on m'a indiqué, l'unité de valeur de l'aide juridictionnelle, fréquemment sollicitée en l'espèce, s'établit à 40 euros environ. Pour une journée d'audience, la rémunération peut alors atteindre 200 euros, alors que cela représente plusieurs heures de travail. Encore ne s'agit-il que d'un chiffre d'affaires, dont il faut retrancher les cotisations sociales. Peut-être conviendrait-il de travailler cela d'ici à l'examen du texte au Sénat – je le dis aussi à l'attention de ceux qui regardent nos débats.
Reste un point de droit non négligeable : je ne crois pas que les avocats relèvent du champ de l'habilitation sur le fondement de laquelle l'ordonnance a été prise. Le Conseil constitutionnel pourrait d'ailleurs censurer toutes les dispositions qui vont au-delà du périmètre de l'habilitation initiale. Je crains que certains passages du texte ne passent pas ce couperet.
L'amendement no 49 est retiré.
L'amendement no 248 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 332 .
Merci, madame Ménard !
L'amendement no 332 est retiré.
Vous pouvez tenter de dire « retiré » ou « défendu », mais penser m'influencer ainsi, c'est mal me connaître ! Ou alors vous êtes une fois de plus taquins, comme je peux l'être moi-même.
Je reviens sur la question de l'audience unique. L'article L. 521-2 du code prévoit que, dans certains cas, « la juridiction peut, après avoir recueilli les observations des parties présentes à l'audience et par décision motivée, statuer lors d'une audience unique sur la culpabilité du mineur et la sanction ».
Notre amendement vise à préciser que le recours à l'audience unique sera possible – vous voyez que nous ne sommes pas sectaires – « si seule une mesure éducative encourue par le mineur à titre de sanction est envisagée ». Pour faire simple, il pourra y avoir une audience unique, mais à condition que l'on prévoie uniquement des mesures éducatives, à l'exclusion de toute peine.
L'article L. 521-2 prévoit en outre que la juridiction statuant lors d'une audience unique « ne peut prononcer une peine que si le mineur a déjà fait l'objet d'une mesure éducative, d'une mesure judiciaire d'investigation éducative, d'une mesure de sûreté, d'une déclaration de culpabilité ou d'une peine prononcée dans le cadre d'une autre procédure et ayant donné lieu à un rapport datant de moins d'un an versé au dossier de la procédure ». Par cohérence, nous proposons de supprimer « d'une mesure éducative, d'une mesure judiciaire d'investigation éducative » dans cet alinéa.
Je le répète, nous entendons baisser d'un cran les capacités répressives des différentes procédures.
L'amendement no 236 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il vise à supprimer le délai maximal de trois mois pour la mise en état d'une affaire, inscrit à l'article L. 521-3 du code de la justice pénale des mineurs. Outre l'impossibilité de tenir un tel délai compte tenu du manque récurrent de moyens de la justice, en particulier humains, l'objectif de célérité ne rendra l'oeuvre de la justice que plus expéditive et lui sera donc préjudiciable.
L'article L. 521-3 dispose en effet que « si elle estime que l'affaire n'est pas en état d'être jugée, la juridiction peut d'office, ou à la demande d'une partie, renvoyer l'examen de l'affaire à une prochaine audience dans un délai qui ne peut excéder trois mois, en décidant, le cas échéant, de commettre le juge des enfants pour procéder à un supplément d'information ».
Or, selon nous ainsi que selon un certain nombre de professionnels du secteur, la mise en état d'une affaire requiert un délai plus important afin de disposer de tous les éléments et informations nécessaires à l'établissement des mesures devant être prises à l'encontre d'une ou d'un mineur, en les adaptant le plus possible à son âge et à sa personnalité.
Je le répète, le délai de trois mois prévu à l'article L. 521-3 est trop court et ne pourra en pratique être tenu. C'est pourquoi le groupe La France insoumise propose de le supprimer.
Cet amendement est, au fond, assez révélateur de ce qui sous-tend la position du groupe La France insoumise dans l'examen de ce texte. Nous l'avons dit, ces dispositions nouvelles ont pour but, entre autres, de réduire les délais. Il est en effet important que la justice soit rendue rapidement, surtout lorsqu'il s'agit d'enfants, de mineurs.
Or, avec cet amendement, voilà que le supplément d'information demandé par la juridiction ne serait pas limité à trois mois ! Il apparaît donc clairement que la réduction des délais ne vous intéresse pas. Veuillez pardonner cette familiarité, mais ce qui vous intéresse, c'est de dézinguer la procédure, de la vider de sa substance et de son sens. Voilà le sens des amendements que vous défendez.
Pour quelle raison ne pas limiter à trois mois le délai d'obtention du supplément d'information ? C'est long, trois mois, surtout pour un gamin ! Nous essayons de faire en sorte que, dans des délais raisonnables et réduits en comparaison avec ce qui a cours actuellement, la culpabilité – ou l'innocence du reste – soit prononcée, puis que d'excellentes mesures allant dans le bon s'appliquent et, enfin, que la juridiction décide de la peine.
Mais, en ce qui vous concerne, décidément, vous n'en avez pas envie ! Vous souhaitez tout rallonger et ne rien changer. Le Gouvernement est donc évidemment défavorable à cet amendement, qui, je le répète, est significatif de votre état d'esprit.
Non, monsieur le ministre, au contraire nous voulons tout changer ! C'est à cela que l'on reconnaît d'ailleurs les Insoumis. Oui, nous voulons tout changer dans ce code de la justice pénale des mineurs qui nous apparaît par trop répressif et pas assez éducatif. Nous avons formulé des propositions. Elles n'ont pas été retenues, mais nous continuerons à en faire et vous aurez l'occasion de les entendre en long, en large et en travers au cours des prochaines semaines et des prochains mois.
Ce que nous défendons, tout comme de nombreux professionnels – des avocats, des magistrats, des travailleurs sociaux, des professionnels de la protection judiciaire de la jeunesse – , c'est l'exigence de prendre le temps nécessaire pour une rendre une justice spécialisée de qualité. Aussi pourrais-je vous rétorquer que c'est vous, monsieur le ministre, qui dézinguez la procédure en lui imposant une pression destinée à faire du chiffre. En effet, vous refusez encore et encore de lui consacrer suffisamment de moyens pour qu'elle accomplisse son travail dans de bonnes conditions. C'est vous qui êtes en train de mettre à bas le service public de la justice, notamment de la justice des mineurs, en poursuivant cette politique qui transforme son travail en une chaîne de montage sur laquelle il convient de faire défiler le plus vite possible les accusés mineurs ou majeurs de la case « garde à vue » à la case « prison ». Je pourrais donc vous retourner votre argument.
Nous ne sommes pas seuls à estimer sincèrement qu'il faut faire confiance au juge ou à la juge, aux spécialistes et professionnels du secteur, qui demandent du temps et des moyens. De notre point de vue, il n'y a que cela qui permettra de rendre une bonne justice, en attendant que nous remettions tout à plat.
Une bonne justice, voilà.
Lors des auditions que nous avons menées et des rencontres que nous faisons sur le terrain, s'il y a une mesure qui emporte une large adhésion, c'est bien la procédure de césure et de mise à l'épreuve éducative. Pourquoi ? Parce qu'elle concilie deux exigences.
La première est le besoin d'une réponse judiciaire prompte, même pour les mineurs. À cet égard, il est intéressant de noter que même les pédopsychiatres nous expliquent qu'il est très important d'avoir une réponse pénale rapide. Dans la pratique, je puis vous assurer qu'il est arrivé que des mineurs soient jugés dix-huit mois après les faits et qu'ils confondent les affaires lorsqu'ils sont concernés par plusieurs. Voilà pourquoi la temporalité est importante, car, sinon, la peine perd de son sens.
Quant à la seconde exigence, c'est celle de la réponse éducative, qui demande davantage de temps.
C'est pour cette raison que l'on établit un premier délai de trois mois, qui garantit également une réponse rapide pour les victimes – et je sais que vous êtes attachés à la défense de leurs droits. J'estime donc qu'il convient véritablement de conserver ces échéances, qui sont au coeur de cette réforme et qui offrent une protection avant tout aux mineurs. Je le répète, il est très important d'avoir une réponse rapide.
Ce laps de temps sera un temps éducatif, qui permettra d'évaluer le mineur et de le suivre. Interviendra alors la deuxième audience, au cours de laquelle sera prononcée une peine ou une mesure éducative selon les faits et la personnalité du mineur.
Nous sommes ici au coeur de la réforme que nous souhaitons réaliser et il ne m'étonne pas que cette procédure de bon sens ait envisagée aussi bien par la gauche que par la droite.
L'amendement no 229 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 279 .
Pouvoir remettre d'office un délinquant dans la rue en dehors de toute procédure spécifique paraît particulièrement risqué au regard de la surcharge de nos tribunaux à l'heure actuelle. Les situations dans lesquelles les jugements sur la culpabilité ne pourront être rendus dans le délai prévu d'un mois risquent en effet d'être assez fréquentes. Il me semble que notre justice doit pouvoir faire mieux que cela. C'est pourquoi je propose, à l'article L. 521-3, de supprimer les mots : « à défaut de quoi le mineur est remis en liberté d'office. »
Défavorable. Il convient en effet de prévoir les conditions dans lesquelles la libération d'office du mineur doit intervenir si la juridiction n'a pas statué, en l'occurrence dans un délai d'un mois suivant le jour de sa première audience.
C'est un classique que la possibilité de mise en détention soit enserrée dans des délais et que leur non-respect soit sanctionné d'une mise en liberté d'office ; ce n'est pas plus compliqué que cela. Et si, par impossible, pour ne pas dire par malheur, madame Ménard, une liberté d'office intervenait, le gamin en question resterait suivi. Regardez l'ensemble du texte, vous serez complètement rassurée.
Si nous ne fixons pas de délai, cela incitera à relâcher la vigilance. Or il est important d'être encore plus vigilant – et les magistrats le sont – s'agissant de la privation de liberté. C'est pourquoi le Gouvernement est évidemment défavorable à votre amendement.
Ce débat relève de la même logique que celui que nous avons eu concernant les délais de prononcé de jugement. Continuons à mettre la pression sur l'exécutif
M. le garde des sceaux sourit
et à faire en sorte qu'il donne à la justice les moyens de se prononcer dans les délais impartis pour qu'une mise en liberté d'office ne puisse pas se produire. Restons vigilants ; c'est notre travail de parlementaires.
Je suis pour partie en accord avec les propos du ministre. Aussi bien dans le cas d'une libération, d'une détention provisoire, que d'une mesure éducative, un accompagnement du mineur est prévu. Les enfants concernés ne sont pas laissés dans la nature. Le groupe La France insoumise est donc défavorable à cet amendement et, d'une certaine manière, le ministre a repris notre argumentation dans son avis. C'est tout un processus qui s'enclenche dès lors que la justice se penche sur un enfant incriminé.
Pour vous répondre, madame Louis, le problème que nous pointons n'est pas la césure, mais le temps que l'on y consacre. Nous sommes d'accord avec cette mesure et, rappelez-vous, nous avions proposé des amendements en la matière s'agissant de la justice des adultes. Je rappelle aussi que des mesures éducatives sont appliquées avant le prononcé de la sentence.
Cela étant, nos conceptions sont bien différentes en ce qui concerne le processus de justice. Il y a, d'une part, Mme Ménard, qui, pour résumer, considère qu'il faut garder le plus longtemps possible en prison les personnes reconnues coupables, d'autre part, la majorité, qui estime que le processus éducatif dépend de la sentence.
Mme Alexandra Louis proteste
En ce qui nous concerne, nous pensons que ce n'est pas le prononcé de la peine qui enclenche le travail pédagogique et éducatif, car certaines mesures sont prises avant. Ainsi les trois mois nous apparaissent-ils plus comme une contrainte qu'une aide.
L'amendement no 279 n'est pas adopté.
L'article L. 521-3 du code de la justice pénale des mineurs dispose que la juridiction peut d'office renvoyer l'examen de l'affaire à une prochaine audience dans un délai qui ne peut excéder trois mois si elle estime que l'affaire n'est pas en état d'être jugée. Mais la procédure de l'audience unique devant rester l'exception, cet amendement vise à préciser que, dans un tel cas, la juridiction a toujours la faculté, si elle l'estime nécessaire, de renvoyer l'affaire à la procédure de droit commun, permettant le prononcé d'une mesure de mise à l'épreuve éducative. En effet, cette possibilité ne figure pas textuellement dans le code.
Comme je ne sais plus comment vous le dire, …
En français ?
… et pour qu'il n'y ait pas de quiproquo, je répète que nous sommes favorables à la césure. Ce avec quoi nous sommes en désaccord, ainsi que les professionnels avec lesquels nous travaillons, ce sont les délais dans lesquels la césure est insérée.
Matin, midi et soir, vous nous invitez à faire confiance aux magistrats et à leur fournir une boîte à outils la plus complète possible, mais, en l'espèce, vous ne leur faites pas confiance. C'est tout de même assez extraordinaire ! Il faut que dans les trois mois tout soit plié, réglé ; emballé c'est pesé !
Non ! Car la première réponse n'est pas l'audience de culpabilité, mais la rapidité de la réponse pénale. Et celle-ci se concrétise par le premier rendez-vous avec le magistrat, en l'occurrence le juge des enfants. En quoi ce laps de temps de trois mois va-t-il accélérer ce premier rendez-vous ? En rien ! En revanche, il précipitera les mesures éducatives présentencielles, qui doivent pourtant permettre à l'audience de culpabilité de produire ses effets pleins et entiers, et ce d'abord et avant tout pour le mineur, ensuite pour les victimes, enfin pour la société.
Défavorable.
Cet amendement est assez technique, aussi je ne comprends pas pourquoi vous donnez un avis défavorable…
Parce que nous avons un avis défavorable !
… sur le fait de préciser dans le texte que le magistrat, en qui, me semble-t-il, nous devons avoir confiance, a la possibilité, à tout moment de la procédure, de renvoyer l'affaire à la procédure de droit commun afin qu'une mesure de mise à l'épreuve éducative soit prononcée.
Peut-être pourriez-vous donc établir une grille, monsieur le ministre, indiquant les cas pour lesquels on fait confiance au magistrat et les cas pour lesquels on ne lui fait pas confiance ? De cette manière, ce serait plus simple de s'y retrouver, car comme vous dites tout et son contraire au fil des amendements et des articles, je ne parviens pas à vous suivre ; je suis un peu perdu. Par souci d'efficacité, je suis donc preneur d'un mémo.
C'est cela. Je vais vous faire un petit mémo.
Puis j'en discuterai peut-être avec le syndicat de la magistrature et le Conseil national des barreaux pour recueillir leurs observations éventuelles.
L'amendement no 235 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 280 .
Il s'agit d'un amendement de précision. En effet, en l'état de la rédaction, on ignore comment sera appréciée la « particulière complexité » d'une affaire, critère qui permettrait l'allongement du délai de prononcé du jugement.
L'amendement a donc pour objet de permettre à la juridiction d'apprécier elle-même la durée nécessaire pour rendre un jugement sur le dossier dont elle est chargée…
Vous dites non, monsieur le ministre, mais je n'ai même pas fini de défendre l'amendement !
Il s'agit, donc, de mentionner explicitement cette faculté dans la loi.
Je pense que le ministre a déjà répondu, mais peut-être pourra-t-il nous confirmer l'avis du Gouvernement ?
J'ai en effet déjà répondu par le mime !
Sourires.
Si je vous suis bien, madame Ménard, il s'agit de remplacer : « présentant une particulière complexité », par : « dont la juridiction estime qu'elles présentent une particulière complexité ». Mais il s'agit de la juridiction, pas de la boulangerie ! C'est évident…
Ah… C'est tautologique.
En tout état de cause, avis défavorable.
Une fois de plus, c'est juste pour faire la part belle aux magistrats et leur redonner toute leur place. C'est peut-être évident pour vous, mais c'est normal, vous êtes ministre de la justice ! Pour les autres, ce n'est pas forcément si évident.
L'amendement no 280 n'est pas adopté.
La procédure de jugement en audience unique rapproche la justice des enfants de celle des majeurs, allant donc à l'encontre des principes fondateurs de l'ordonnance de 1945, qui établit la primauté de l'éducatif sur le répressif et précise la spécificité de la justice des enfants.
Cet amendement de repli vise donc à prévoir que la procédure de jugement en audience unique ne puisse déboucher que sur une mesure éducative.
Défavorable.
Je tiens à dire que nous n'avons obtenu aucune réponse s'agissant de la restriction des conséquences de l'audience unique à des mesures éducatives.
Pourtant, loin d'être un sujet anecdotique, c'est même très important ! Or, si on a évoqué le principe de l'audience unique, sa composition, ses objectifs et ses délais, on n'a pas parlé de l'amplitude des sanctions et peines qu'elle pouvait prononcer. En l'occurrence, nous voulons qu'elle ne puisse prononcer que des mesures éducatives. C'est assez simple, et je ne comprends pas, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, pourquoi vous y êtes opposés.
Parce que.
L'amendement no 71 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 132 .
Il tend à proposer que le mineur non accompagné en situation irrégulière qui a commis une infraction fasse l'objet d'une comparution immédiate.
Ce matin, j'ai eu l'occasion de rappeler plusieurs chiffres, fournis par le parquet de Paris, et qui révèlent que 75 % des mineurs jugés sont des mineurs étrangers en situation irrégulière. Un phénomène qui n'est pas isolé, puisque, selon le parquet de Nanterre, c'est le cas de 58 % des mineurs mis en examen dans les Hauts-de-Seine.
Je ne plaisante pas, monsieur le ministre ! Cette disposition de bon sens permettrait de pallier un problème élémentaire s'agissant des mineurs non accompagnés : le défaut de garantie de représentation. Si certains sont pris en charge par les départements, d'autres sont dans la nature : il y a alors évidemment un défaut de représentation, on ne peut le nier. D'ailleurs, même lorsqu'ils sont pris en charge par le département, il leur arrive de ne pas toujours rentrer, le soir, dans le foyer qui les accueille.
Un jugement en comparution immédiate permettrait donc de pallier le défaut de garantie de représentation.
J'ai déjà précisé, lors de la motion de rejet présentée par le groupe GDR, que les mineurs non accompagnés délinquants ne devaient pas être traités différemment des mineurs français délinquants, car ils restent avant tout des mineurs ! Appliquons-leur les procédures que nous instaurons dans le futur code, et ne les traitons pas différemment. Avis défavorable.
Le code de justice pénale des mineurs s'applique à tous les mineurs, madame Ménard.
Sourires sur divers bancs.
Donc un mineur français et un mineur étranger doivent se voir appliquer les mêmes règles. Mais égalité des règles ne signifie pas égalité des mesures ! En effet, ils sont dans des situations différentes.
D'accord, mais si l'un présente un défaut de garantie de représentation et pas l'autre, la situation est différente, et c'est bien pour cela que je propose d'appliquer des mesures différentes, en fonction des circonstances. D'ailleurs, c'est bien à cette fin que le juge dispose d'une faculté d'appréciation de la situation et de la personnalité du mineur, mais aussi des circonstances.
En l'espèce, les circonstances font que, bien souvent, les mineurs non accompagnés, les MNA, ne peuvent apporter de garantie de représentation.
L'amendement no 132 n'est pas adopté.
L'amendement no 12 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 13 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 62 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Avec cet amendement, nous voulons rendre impossible le prononcé d'une peine lorsque la culpabilité a été prononcée à juge unique. L'amendement vise également à corriger une erreur de rédaction dans la dernière phrase de l'article.
Rappelons que l'article L. 521-9 prévoit que lorsqu'elle déclare un mineur coupable des faits qui lui sont reprochés, la juridiction ordonne l'ouverture d'une période de mise à l'épreuve éducative, statue sur les mesures auxquelles le mineur est soumis durant cette période, et renvoie le prononcé de la sanction à une audience ultérieure. La période de mise à l'épreuve éducative court jusqu'à l'audience de prononcé de la sanction.
Or, la culpabilité et la peine qui y est associée sont des décisions déterminantes dans la construction d'un enfant ou d'un adolescent, leurs effets se font ressentir tout au long de sa vie. De notre point de vue, cela nécessite que de telles mesures soient prises par une formation collégiale. Nous avons d'ailleurs déjà eu ce débat lors de l'examen des différents textes relatifs à la réforme de la justice. Nous devons favoriser autant que possible la prise de décision par une formation collégiale, en particulier lorsqu'il s'agit de juger des mineurs.
Nous souhaitons donc que, lorsque la culpabilité a été déclarée en cabinet par le juge des enfants, le prononcé de la sanction soit renvoyé devant le tribunal pour enfants, lequel ne pourra décider que de mesures éducatives.
Nous avons déjà longuement parlé des peines prononcées en audience unique. Avis défavorable.
En effet, nous avons déjà eu maintes fois ce débat. Avis défavorable.
Je m'inscris en faux contre cette affirmation : nous n'avons pas débattu des peines qui pouvaient être prises suite à une audience unique. Nous proposons qu'elles soient restreintes à des mesures éducatives, ce qui offre déjà une boîte à outils large. En effet, nous pensons que seul le tribunal pour enfant peut prononcer des peines.
Bien que nous ayons débattu de bien des choses – quoique pas encore assez à mon goût, comme d'habitude ! – , à ce jour et à cette heure du débat, je ne sais toujours pas pourquoi vous ne voulez pas que le juge en audience unique ne puisse prononcer que des mesures éducatives.
À ce stade, il me semble qu'il faut pouvoir restreindre les sanctions prononcées, pour que les peines ne puissent être prononcées que par un tribunal, ainsi que c'est le cas dans le fonctionnement de la justice des majeurs, cette instance collégiale offrant plus de garanties.
L'amendement no 250 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 282 .
Sourires
vise à permettre d'étendre les mesures de mise à l'épreuve éducative déjà prises si le mineur est déclaré coupable de nouveaux faits, sans qu'une nouvelle mise à l'épreuve éducative soit prononcée. L'objectif est ainsi de rendre plus souple l'extension de la mise à l'épreuve éducative au nouveau fait et, partant, de diminuer les délais de procédure.
Je vous remercie pour votre optimisme, madame Ménard !
Quel est l'avis de la commission ?
C'est effectivement une bonne idée, mais elle est déjà satisfaite. En effet, l'article L. 521-1 dispose précisément que « lorsque la juridiction constate, à la date à laquelle elle statue, qu'une période de mise à l'épreuve éducative est en cours pour des faits antérieurs, elle n'ouvre pas, sauf décision contraire motivée, une période de mise à l'épreuve éducative pour les nouveaux faits pour lesquels le mineur est déclaré coupable. La mise à l'épreuve en cours s'étend à ces faits. ».
Demande de retrait.
Vous aviez raison de penser que nous serions d'accord, madame Ménard, puisque nous avons en effet eu cette idée ! Mais cela figurant déjà dans le texte, je ne peux qu'être défavorable. Au fond, d'ailleurs, c'est plutôt vous qui êtes d'accord avec nous que le contraire, si on regarde la chronologie…
Je le reconnais très volontiers. Il s'agit juste d'un amendement de précision, monsieur le ministre… Je reconnais bien volontiers que je suis d'accord avec vous – sur ce point, du moins !
Sourires sur divers bancs.
L'amendement no 282 est retiré.
Nous pensons qu'un délai minimal de dix jours ne garantit pas un temps nécessaire à l'avocat pour organiser décemment la défense du mineur. Le droit à un procès équitable doit en effet bénéficier aussi aux mineurs. Nous proposons donc de prévoir que la juridiction renvoie le mineur pour le prononcé de la sanction à l'audience déjà fixée pour le prononcé des derniers faits commis, à une date permettant de respecter un délai d'au moins un mois.
Cela permettrait de laisser le temps à tout le monde de s'organiser, et de ne pas confondre vitesse et précipitation car je ne suis pas sûr qu'en voulant aller trop vite, on rende de bons jugements. Je suis même certain du contraire !
Le délai de dix jours. Comme dans le cadre de la procédure classique de césure, l'avocat d'un mineur impliqué dans plusieurs affaires ayant déjà connu des mesures d'investigation, l'avocat disposera d'un délai de dix jours, ce qui me paraît totalement approprié à cette procédure et suffisant. Avis défavorable.
Totalement défavorable.
Il ne vous aura pas échappé, monsieur le rapporteur, que nous étions également défavorables à ce délai de dix jours pour la procédure de césure.
Je comprends que vous vous prévaliez du délai que vous avez fixé pour cette autre procédure pour fixer celui-ci, mais j'y suis, pour ma part, tout à fait opposé. C'est un sujet important : comment s'organiser, en dix jours ? Les avocats s'organisent au sein de groupes de défense spécifiques, dont j'ai cru comprendre qu'ils étaient labellisés : en effet, des déclinaisons de la convention signée entre le ministère de la justice et le Conseil national des barreaux visent à assurer des actions de formation communes au sein de chaque barreau. Étrangement, les choses ne sont donc pas si simples…
Soit vous souhaitez vous rapprocher du dispositif de comparution immédiate, pour que tout aille très vite, et dans ce cas il faut l'assumer, soit il faut allonger ce délai, car je ne connais pas beaucoup de délais de réponse, dans l'administration, qui soient de dix jours – en général, c'est au moins quinze jours, et le délai classique est même plutôt d'un mois. Cela ne me semble pas scandaleux, cela me paraît même plutôt raisonnable.
En tout cas, en fixant un délai de dix jours, on va au-devant de problèmes non négligeables, d'autant que si l'avocat demande le renvoi parce qu'il n'aura pas eu le temps de préparer l'audience, il se fera jeter : quoi qu'il arrive, l'audience aura lieu ! Voilà, en réalité, comment se dérouleront les choses demain.
L'amendement no 251 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 283 .
J'ai peur que vous me disiez encore qu'il est déjà satisfait… Il s'agit une nouvelle fois d'un amendement de précision car, plus on est précis, plus la loi est compréhensible pour le commun des mortels.
L'amendement vise donc à prévoir explicitement la possibilité de prolonger les mesures éducatives judiciaires provisoires ou les mesures de sûreté mentionnées à l'article L. 521-4, lorsque les circonstances rendent cette prolongation nécessaire et que cette dernière est légalement justifiée.
Je ne saisis pas bien le sens de votre amendement, madame Ménard. Vous dites que c'est un amendement de précision, mais il ne me semble pas utile. Avis défavorable.
Même position que le rapporteur.
L'amendement no 283 n'est pas adopté.
L'article L. 521-15 prévoit que « À tout moment au cours de la mise à l'épreuve éducative, y compris lorsqu'elle s'étend à des faits nouveaux, le juge des enfants peut prescrire, modifier ou lever la mesure éducative judiciaire provisoire ou les mesures de sûreté », et ce « d'office, à la demande du mineur ou de son avocat ou sur réquisitions du procureur de la République ».
Par cet amendement, nous voulons permettre au juge des enfants de superviser et de suivre ces mesures à son initiative, au lieu qu'il doive attendre d'être saisi.
Cela lui donnerait des outils, des leviers supplémentaires, puisqu'il pourrait de lui-même prescrire, modifier ou lever ces mesures afin de les adapter au mieux à l'âge et à l'évolution du mineur, en faisant primer encore une fois l'éducatif sur le répressif.
Votre amendement est satisfait : le « à son initiative » que vous souhaitez ajouter n'apporterait rien au texte. Avis défavorable.
Même avis. Cet amendement n'apporte effectivement rien.
L'amendement no 252 n'est pas adopté.
Cet amendement vise à maintenir la possibilité de faire cesser la mise à l'épreuve éducative de manière anticipée, ainsi qu'une voie de recours contre ces dispositions. Cette mise à l'épreuve constituera en effet la procédure de droit commun de saisine du juge des enfants en matière délictuelle ou contraventionnelle de cinquième classe. Associée à la césure du procès pénal, elle déplace le centre de gravité de la procédure : on passe de la sanction éducative judiciaire à la mise à l'épreuve éducative, ce qui se traduit par une prééminence du parquetier, que j'espère au moins spécialisé, sur le juge des enfants.
Plus de 50 % de la justice pénale des mineurs est aujourd'hui aux mains du parquet ; demain, on peut conjecturer sans trop s'avancer que ce sera 65 %, et peut-être 75 % à terme. Or certaines garanties sont associées au juge des enfants, magistrat du siège, qui n'a pas le même rôle ni les mêmes prérogatives que les magistrats du parquet.
Défavorable. Je ne vois pas en quoi la modification que vous proposez améliorerait l'article L. 521-19 : « Si l'évolution de la situation du mineur pendant la période de mise à l'épreuve éducative le justifie, le juge des enfants peut », dans certaines conditions, « modifier la date de l'audience de prononcé de la sanction », etc. Cette rédaction est plus précise que celle que vous souhaitez.
Même avis, pour les mêmes raisons.
L'amendement no 253 n'est pas adopté.
Cet amendement vise à éviter la remise en liberté d'office du mineur si le juge des enfants n'a pu statuer dans les délais fixés. Pardonnez-moi, mais je vais m'en tenir là : je ne me fais guère d'illusions sur son sort, car nous avons déjà eu cette discussion tout à l'heure.
Nous voulons supprimer la condition qui se trouve à la fin de la première phrase du second alinéa de l'article L. 521-23 : « sauf si des vérifications concernant sa demande ont été ordonnées ». La remise en liberté d'un enfant en détention provisoire pendant sa période de mise à l'épreuve éducative doit être automatique si le juge ne répond pas dans les cinq jours. Nous avons déjà abordé le sujet de la détention provisoire et du problème majeur que pose son développement, qu'il est urgent de limiter. Afin de simplifier la procédure, il faudrait d'ailleurs également supprimer ce qui précède : « le mineur peut saisir la chambre spéciale des mineurs de la cour d'appel qui, sur les réquisitions écrites et motivées du procureur général, se prononce dans les cinq jours de sa saisine ».
Avant toute chose, je voudrais revenir sur le sujet de la mise en liberté d'office à l'expiration de certains délais. Nous avons vu tout à l'heure que c'était le cas au bout d'un mois de détention provisoire : il est normal de prévoir de telles conditions. Or, cette fois, vous ne voulez pas que le silence du juge soit au bénéfice de l'intéressé. Pourtant, l'amendement no 254 nous avait été proposé, entre autres, par des magistrats : preuve que tout arrive, que tout le monde est capable de dépasser sa profession, son quotidien, pour formuler des suggestions d'intérêt général.
Quant au présent amendement, il vise à restreindre la procédure de l'audience unique au prononcé des seules mesures éducatives, à l'exclusion de tout autre type de sanction et notamment des peines, dans un objectif de déflation pénale. Cela me paraît plus sage.
Avis défavorable. Il me semblait m'être déjà expliqué au sujet de l'audience unique, dont les conditions seront très restreintes : il doit y avoir lieu de débattre à la fois de la culpabilité et de la sanction. Or qui dit prononcé de la sanction dit prononcé de mesures éducatives, mais aussi de peines. Il ne conviendrait pas d'exclure ces dernières comme vous le souhaitez.
Même avis.
Je remercie le rapporteur de sa réponse, qui correspond à son état d'esprit. Si l'on prévoit une césure, avec toute la beauté qu'il peut y avoir à dissocier la culpabilité de la peine, à faire l'effort de travailler sur les deux, précipiter les choses suppose a contrario de réduire l'éventail des sanctions ; sans quoi la césure deviendra marginale, car la gestion des dossiers poussera les uns et les autres à recourir le plus possible à l'audience unique. C'est ce qui se passe déjà avec la PIM, la présentation immédiate du mineur au magistrat – bien que celle-ci n'ait pas cours à Paris, où l'on pratique plutôt la comparution dans un délai rapproché. Les tribunaux utilisent de plus en plus ces outils : demain, pour les mêmes raisons, l'audience unique constituera la règle et la césure l'exception. C'est dommage, car j'ai bien compris que vous souhaitiez la mettre en avant, mais il existera un décalage entre les dispositions codifiées et l'effet qu'elles produiront dans les juridictions.
L'amendement no 255 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 289 .
Cet amendement vise à supprimer, pour plus de clarté, les trois derniers alinéas de l'article L. 522-1, qui me semblent déjà satisfaits. Ces alinéas prescrivent de poser des questions qui en réalité se présentent naturellement lors du travail de qualification des faits et de prise de décision du magistrat. Ils entravent donc l'activité de ce dernier et alourdissent non seulement le texte, mais la procédure, créant un nouveau vice de procédure : la nullité dans le cas où les deux questions ne seraient pas posées. Ce n'est ni très utile, ni bienvenu. Supprimer ces dispositions serait bon pour la fluidité de la procédure, la lisibilité de notre droit, la crédibilité de notre justice, et bien entendu la confiance en nos magistrats.
Très défavorable. Vous ne l'avez pas dit, mais une des questions que votre amendement veut supprimer porte sur la non-application de l'excuse de minorité. Nous nous sommes déjà exprimés à ce sujet.
Même avis. À vous entendre, madame Ménard, il s'agirait d'une sorte d'amendement de précision, sans incidence. En réalité, vous voulez qu'on ne pose pas, devant la cour d'assises des mineurs, la question relative à l'excuse de minorité. Excusez du peu ! Je suis totalement défavorable à cette suppression. Il est même inconcevable que vous ayez pu un instant envisager le contraire. La cour d'assises des mineurs sans excuse de minorité ? Enfin !
L'amendement no 289 n'est pas adopté.
Quant à nous, nous proposons clairement de supprimer cette seconde question prévue par l'article L. 522-1, qui porte sur l'exclusion de l'accusé mineur du bénéfice de l'excuse de minorité. De manière générale, le code de la justice pénale des mineurs relègue au second plan l'excuse atténuante que constitue la minorité ; l'acte et ses conséquences pour la victime sont privilégiés, au détriment des mesures d'assistance éducative adaptées et de la compréhension du passage à l'acte. Dès lors, nous ne répondons toujours pas à nos engagements internationaux. Rappelons que la justice des mineurs doit obéir aux principes de spécialisation et d'adaptation des mesures à l'âge du mineur : par conséquent, tout mineur devrait bénéficier de l'excuse de minorité.
Il s'agit du même amendement que celui de Mme Ménard, pour des motifs différents. Avis toujours défavorable.
C'est en effet le même amendement que celui de Mme Ménard, en moins subtil. J'y suis tout aussi défavorable.
L'amendement no 256 n'est pas adopté.
Je laisse de côté la partie de cet amendement relative au tribunal de police, pour me concentrer sur ce qui importe peut-être davantage : il s'agit, dans l'hypothèse de la césure, de suspendre le prononcé de la sanction tant que la juridiction d'appel n'a pas statué sur la culpabilité de l'enfant. Imaginons qu'à l'issue de l'audience sur la culpabilité, l'enfant fasse appel : l'audience de sanction pourrait avoir lieu avant la décision en appel. Rien n'interdit alors que la cour d'appel le déclare finalement non coupable alors que la sanction a déjà été appliquée ! Il y a là une logique judiciaire qui ne tourne pas rond. C'est tout le problème, lorsqu'on cherche à précipiter les choses en fixant des délais très brefs.
Toutes les décisions prononcées par le juge des enfants sont exécutoires, nonobstant appel. Je ne vois pas pourquoi nous reviendrions sur ce principe. Avis défavorable.
Même avis.
Pourquoi, monsieur le rapporteur ? Parce qu'à l'heure actuelle, la césure n'est pas tellement utilisée, si bien que nous ne sommes pas confrontés à ce cas de figure. C'est pour cela que ce principe est valable. En introduisant la césure dans le droit, vous auriez pu décider que la procédure d'appel doit arriver à son terme avant le prononcé de la sanction, et les décisions du juge n'auraient plus été forcément exécutoires. Mes explications ne vous auront pas convaincu, sur ce point de droit comme sur d'autres, mais je trouve cela dommage.
L'amendement no 267 n'est pas adopté.
Nous en avons déjà discuté en commission des lois : s'il est fait appel du jugement de culpabilité, nous demandons que la cour d'appel statue dans un délai de deux mois, et que la procédure soit suspendue dans l'attente de sa décision, pour qu'on puisse continuer ensuite en connaissance de cause.
Notre amendement vise à suspendre le prononcé de la sanction tant que la juridiction d'appel n'a pas statué sur la culpabilité de l'enfant. Nous considérons que le Gouvernement fait un mauvais choix en cherchant à accélérer la procédure judiciaire concernant les mineurs, ce qui conduit à méconnaître toute décision d'appel sur la culpabilité. L'hypothèse pourra se produire que le juge statue sur une sanction, et que la culpabilité ne soit finalement pas reconnue. De notre point de vue, il faut interdire de prononcer une sanction tant que la culpabilité n'est pas définitive.
Cet amendement propose de supprimer la mention de l'intervention du tribunal de police dans l'article du code de la justice pénale des mineurs relatif à la procédure d'appel, en application du principe de spécialisation des acteurs et actrices de la justice des mineurs et en cohérence avec l'ensemble des amendements que nous avons déposés sur ce texte.
L'amendement no 261 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 9 est adopté.
Je suis saisi de plusieurs amendements portant article additionnel après l'article 9.
La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour soutenir l'amendement no 260 .
Nous proposons d'ajouter les mots « à titre exceptionnel » au premier alinéa de l'article L. 611-5 du code de la justice pénale des mineurs et de supprimer le second alinéa, de sorte que le maintien de la compétence du juge des enfants pour les jeunes majeurs de moins de 21 ans, telle que définie à l'article L. 611-2, reste le principe, et que la saisine du juge d'application des peines soit l'exception. Il existe en effet un module de formation consacré à l'application des peines, destiné aux juges pour enfants. Ceux-ci sont donc compétents en la matière et il nous semble important d'aller dans cette direction. Cette question fait écho au débat que nous avons eu au sujet des mineurs atteignant l'âge de 18 ans en détention et dont il serait souhaitable, selon le même principe, que les dispositions les concernant soient maintenues jusqu'à ce qu'ils aient 21 ans. Le juge pour enfant, ayant connu l'intéressé lorsqu'il était mineur, doit pouvoir poursuivre son suivi plutôt que de transmettre le dossier à un collègue.
Il est défavorable. Je propose de conserver la possibilité, pour le juge d'application des peines, de prendre le relais, de la même façon que le mineur devenu majeur est basculé en détention pour adultes.
Défavorable également.
Je trouve regrettable de ne pas aller dans le sens d'une continuité du suivi. Nous avons déjà débattu dans cet hémicycle, en matière civile, de la possibilité d'étendre le suivi des mineurs jusque 23 ans plutôt que 21, qui n'avait pas été retenue. Encore une fois, traiter du civil et du pénal dans un seul texte aurait pu nous permettre de progresser en matière de suivi. Nos collègues de la majorité, Alexandra Louis notamment, nous ont rappelé que depuis 1945, des progrès ont été réalisés dans la connaissance du développement de la maturité de l'enfant. Ainsi, il est faux de dire que l'on est mature de plus en plus jeune de nos jours. La science prouve même le contraire, certains scientifiques allant jusqu'à affirmer que le cerveau n'atteint sa maturité définitive qu'à l'âge de 30 ans. Bien sûr, nous ne sommes pas tous égaux à cet égard, mais ces données doivent être prises en compte. Le fait que le juge des enfants assure à titre principal le suivi du jeune jusqu'à ses 21 ans nous semble être une mesure plus protectrice, plus cohérente et plus efficace pour prévenir la récidive et assurer un suivi de qualité.
L'amendement no 260 n'est pas adopté.
En cohérence avec le précédent amendement, nous demandons le maintien de la compétence du ou de la juge des enfants pour les jeunes majeurs de moins de 21 ans telle que définie à l'article L. 611-2 du code de la justice pénale des mineurs : celle-ci doit rester le principe et la saisine du juge de l'application des peines, l'exception.
Il est défavorable. Je précise que l'article L. 611-6 permet de déroger à la compétence du juge d'application des peines « si la juridiction spécialisée décide par décision spéciale que le juge des enfants reste compétent. » La continuité de suivi par le juge des enfants est donc possible, à condition que la juridiction spécialisée le prévoie.
Il est également défavorable.
Je ne comprends pas pourquoi vous tenez absolument à ce que le juge des enfants puisse se dessaisir au profit du juge d'application des peines. Quelle est votre motivation, au-delà du simple fait que le jeune a plus de 18 ans ? La logique est inversée : c'est au juge des enfants de demander à suivre le dossier jusqu'à ses 21 ans. Cela me semble moins protecteur pour l'intéressé, et incohérent avec l'esprit du propos liminaire, avec une partie du texte et avec le débat que nous avons eu tout à l'heure au sujet de la détention. Je ne comprends pas comment vous pouvez vous satisfaire de ce dessaisissement.
L'amendement no 259 n'est pas adopté.
Nous souhaitons que l'âge au moment des faits prévale en matière de justice des mineurs, y compris lors des audiences d'application des peines, et que ce soit le cas jusqu'à 21 ans inclus. Lorsqu'une décision est prise, le ou la jeune majeur doit être accompagné d'un avocat ou d'une avocate, si possible le même jusqu'à ses 21 ans. L'atteinte de la majorité ne signifie pas, selon nous, que la personne condamnée est moins vulnérable. L'avocat qui aura suivi son parcours judiciaire pourra apporter des éléments pertinents devant la juridiction. C'est la raison pour laquelle nous considérons qu'il convient de modifier en ce sens l'article L. 612-4 du code de la justice pénale des mineurs.
L'amendement no 258 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement nous ramène au débat que nous avons eu au sujet de l'inscription des mineurs au bulletin no 1 – dit B1 – du casier judiciaire et dans différents fichiers. Par principe, je considère qu'il est plus favorable pour un mineur de ne pas figurer dans des fichiers et de ne pas avoir de casier judiciaire. Le droit à l'oubli et l'excuse de minorité conduisent d'ailleurs à ce que les faits commis par des mineurs ne puissent faire l'objet d'inscriptions qu'au B1, et non au B2.
Le présent amendement prévoit que seules les peines y soient inscrites, et non pas les mesures ou sanctions éducatives. En effet, l'article L. 631-1 du code de la justice pénale des mineurs prévoit une inscription au casier de toutes les mentions, y compris éducatives : or, s'agissant d'un casier judiciaire, il ne devrait s'agir que des peines. Nous demandons, à tout le moins, que les mentions relatives aux mesures éducatives et dispenses soient automatiquement effacées du casier judiciaire, notamment la déclaration de culpabilité assortie d'une dispense de peine, d'une dispense de mesure éducative ou d'une déclaration de réussite éducative, ainsi que les décisions prononçant des mesures éducatives.
C'est ridicule.
Il est défavorable. Nous avons déjà eu ce débat. Le code de procédure pénale prévoit déjà les conditions d'effacement, après trois ans, à moins d'une nouvelle condamnation bien sûr. Il me semble pertinent, si le mineur a fait l'objet d'une procédure pénale au cours des trois années précédentes, que le juge dispose de cette information.
Cet amendement est ridicule, car le B1 est réservé à la justice. Si un enfant déménage et qu'il fait l'objet d'une nouvelle procédure, vous voudriez que le juge ne soit pas informé des procédures antérieures ? Il ne peut pas rendre la justice les yeux fermés ! Pourquoi la justice se priverait-elle de renseignements essentiels ? Les éléments que vous évoquez ne figurent pas au B2 et au B3 : ils sont réservés à la justice. Cet amendement n'a aucun sens. Là encore, il relève d'une posture idéologico-dogmatique. La justice a besoin de suivre les enfants, c'est une évidence ! Je ne comprends pas votre argumentation. Je vous comprends d'ailleurs de moins en moins, mais ça n'a pas d'importance. Avis défavorable.
Ne vous inquiétez pas, monsieur le ministre, les peines restent dans le B1, tout va bien se passer ! Le fait de supprimer les autres éléments n'empêchera pas le juge de suivre le mineur. Il me semble d'ailleurs que lorsqu'un mineur est suivi, cela fait l'objet de quelques mentions dans le fichier sur les plaintes CASSIOPEE, …
Vous mélangez tout encore une fois !
… au-delà de tous les bulletins que vous voulez. CASSIOPEE est un fichier interne extrêmement bien renseigné à cet égard.
Voilà ce qui motive notre amendement. On voit bien, dans les faits, que même si les textes le prévoient, certaines inscriptions ne sont pas toujours effacées. Ce n'est pas effectif. En outre, le délai de trois ans n'est valable que si le jeune n'a pas de nouveau affaire à la justice pendant cette période – un peu comme avec le permis à points. On peut donc assez vite cumuler un nombre élevé de mentions au B1, et être ainsi défavorablement connu de la justice. Ce n'est pas exactement l'idée que je me fais d'un suivi.
L'amendement no 257 n'est pas adopté.
L'amendement no 92 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement n'est pas une posture. Il est au contraire très concret, se basant sur des alertes quant à la situation actuelle d'un certain nombre de mineurs. Nous voulons qu'à la majorité de l'intéressé, les peines suivantes soient automatiquement effacées du casier judiciaire : les déclarations de culpabilité assorties d'une dispense de peine, d'une dispense de mesure éducative ou d'une déclaration de réussite éducative, et les décisions prononçant des mesures éducatives à l'égard d'un mineur.
Le caractère central du casier judiciaire et son influence sur les décisions prises en comparution immédiate de peines de prison ferme avec mandat de dépôt ne sont plus à démontrer. Dès sa promulgation, l'ordonnance de 1945 relative à l'enfance délinquante avait repris le principe de droit commun d'un casier judiciaire mais avait élaboré un régime spécifique, en y apportant d'importantes atténuations. Cette spécificité a toutefois été progressivement réduite, notamment avec la loi Perben II. Nous proposons donc de clarifier le droit en effaçant les peines correctionnelles et les mesures éducatives du B1, à la majorité du jeune ou à l'expiration du délai de trois ans, afin de tenir compte de la minorité et des principes de la justice des mineurs.
L'amendement no 266 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement concerne non plus le B1 du casier, mais un fichier judiciaire. Il vise à maintenir la possibilité, pour le mineur, de demander l'effacement de l'inscription au fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes – FIJAISV. Nous estimons en effet que la condition de minorité doit être prise en compte dans les durées de fichage.
Le traitement informatique d'informations nominatives, avec des règles particulières pour les mineurs, n'a cessé de se développer au cours des dernières années. On peut désormais être fiché au TAJ – traitement d'antécédents judiciaires – , au FIJAISV, au FNAEG – fichier national automatisé des empreintes génétiques – , au FAED – fichier automatisé des empreintes digitales – ou encore au FRP – fichier des personnes recherchées – et j'en passe. Je ne parle même pas du récent décret qui permet de ficher les opinions politiques, et non plus les activités politiques, une petite nuance que la CNIL n'a que peu goûtée.
Si nous comprenons bien les objectifs du fichage, nous estimons que l'on en oublie les conséquences pour un grand nombre de mineurs en termes de réinsertion, et donc de prévention de la récidive. Quoi qu'il en soit, il n'est pas tenu compte de la condition de minorité, ni donc des grands principes rappelés dans l'article préliminaire : spécialité, excuse de minorité, atténuation de la peine, et cetera.
La précision que vous souhaitez apporter par cet amendement ne paraît pas utile. Je rappelle que l'article L. 632-4 permet au mineur de faire une demande de rectification ou d'effacement auprès du procureur de la République à tout moment. Cet article renvoie à l'article 706-53-10 du code de procédure pénale, qui fixe les conditions de demande de rectification ou d'effacement d'une décision inscrite au casier judiciaire. Avis défavorable.
L'amendement no 265 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Par cet amendement, nous nous opposons à la possibilité, souhaitée par le Gouvernement, de ficher un enfant de moins de 13 ans. Comme dans nos amendements précédents, nous considérons en effet qu'il faut prendre en compte la condition de minorité dans les durées de fichages.
L'amendement no 264 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement vise à garantir aux mineurs et jeunes majeurs la possibilité de bénéficier du droit à l'oubli concernant le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions terroristes – FIJAIT – en modifiant pour cela l'article L. 633-3 du code de la justice pénale des mineurs. En effet, nous estimons nécessaire de prendre en compte la condition de minorité dans les durées de fichages.
L'amendement no 263 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
S'agissant du fichier des antécédents, les mineurs et les jeunes majeurs doivent pouvoir bénéficier du droit à l'oubli. L'amendement a pour objet de modifier en ce sens l'article L. 634-1 du code de la justice pénale des mineurs.
L'amendement no 262 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'accès à certains emplois du secteur public ou du secteur privé – par exemple la sécurité privée, ou le personnel intervenant sur les zones aéroportuaires – est conditionné par une enquête administrative, donnant lieu à la consultation du fichier de traitement des antécédents judiciaires. Or, contrairement au casier judiciaire, ce fichier regroupe des informations sur les personnes mises en cause et les victimes d'infractions pénales.
L'inscription au TAJ peut donc résulter d'une condamnation, mais aussi d'un classement sans suite. Pour les mineurs condamnés, la durée de conservation varie entre cinq et vingt ans. Cet amendement vise à supprimer les limitations des possibilités pour les mineurs de demander leur effacement du fichier de traitement des antécédents judiciaires, afin de leur garantir un véritable droit à l'oubli.
Vous évoquez le droit à l'oubli à propos du TAJ. Par définition, le suivi des antécédents judiciaires est utile en cas de réitération ou de récidive. Dès lors, si le mineur devenu majeur a fait l'objet de nouvelles condamnations, il est pertinent de conserver l'ensemble de son parcours délinquant. Avis défavorable.
Même avis.
Si je comprends bien, l'excuse de minorité n'est plus jamais prise en compte : en fait, pour vous, les mineurs doivent être traités comme les majeurs, c'est-à-dire que toute leur vie va se retrouver consignée dans un fichier !
Police partout, justice nulle part !
D'une mesure judiciaire, on va passer à un destin judiciaire, qui va à son tour se transformer en destin social. Vous appliquez aux mineurs tout ce qu'on voudrait éviter pour les majeurs ! Je le dis avec vigueur, c'est un vrai problème, cette histoire de fichage…
Exclamations sur quelques bancs du groupe LaREM.
Nous avons un collègue qui fait des bruits bizarres, monsieur le président…
Je n'en suis pas aussi sûr que vous, monsieur le président… Bref, à l'heure actuelle, des tas de gamins sont poursuivis par leur passé alors qu'ils devraient bénéficier du droit à l'oubli, lequel serait d'ailleurs plus efficace en matière de prévention de la récidive : sinon, les mineurs entrent dans un cycle infernal où ils ne peuvent que monter les échelons de la délinquance. Pour une bonne partie des mineurs confrontés à la justice, les choses ne tourneront pas trop mal – ils vont passer devant le juge qui prononcera une petite mesure, et ensuite ça ira mieux – mais pour les multiréitérants, ça va être l'inflation pénale. Avec toutes vos mesures mises bout à bout, on va sans doute arriver à ce qu'il y ait encore davantage de mineurs incarcérés dans notre pays !
Je vous adjure de nous entendre là-dessus : nous souhaitons juste que les mineurs puissent demander à être retirés du TAJ, rien de plus ! Et ne nous dites pas que c'est facile de nos jours, ce n'est pas vrai – le rapporteur n'a d'ailleurs pas argumenté sur ce point, mais sur le fait qu'un tel fichier était utile pour la suite. Eh bien non, ce n'est pas utile, c'est accablant !
Monsieur le ministre, je comprends tout à fait qu'il faille pouvoir connaître le parcours judiciaire d'un délinquant mineur, et cela ne me poserait aucun problème si nous avions la garantie que ce fichier restera entre les mains de la justice. Ce que je trouve anormal, c'est que le fichier puisse être consulté par des entreprises privées. Cela, c'est un vrai problème.
L'article 10 est adopté.
L'amendement no 369 rectifié de M. le rapporteur vise à corriger une erreur de plume.
L'amendement no 369 rectifié , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement no 368 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme Cécile Untermaier, pour soutenir l'amendement no 99 .
L'une des recommandations de la mission d'information sur la justice des mineurs que Jean Terlier et moi avons menée était de disposer d'un bilan statistique de l'utilisation des différentes procédures, afin de voir quelles sont celles qui marchent bien et celles qui ne marchent pas et d'éclairer la réflexion. Tel est l'objet de cet amendement.
Cet amendement me paraît satisfait dans la mesure où le rapport contiendra nécessairement des données statistiques, c'est pourquoi j'en demande le retrait.
Même avis.
L'amendement no 99 est retiré.
L'article 11, amendé, est adopté.
Je suis saisi de plusieurs amendements portant article additionnel après l'article 11.
L'amendement no 82 de Mme Marie-George Buffet est défendu.
L'amendement no 82 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement vise à reporter d'un an l'entrée en vigueur de l'ordonnance, donc à la repousser au 1er octobre 2021.
La parole est à Mme Cécile Untermaier, pour soutenir l'amendement no 5 .
Initialement, j'avais moi aussi proposé un report au 1er octobre 2021, mais c'est finalement un report au 1er juin 2021 que je demande avec cet amendement.
Nous nous sommes expliqués au début de la discussion sur la nécessité que ce texte entre en application au 31 mars 2021. Avis défavorable.
Même avis.
Je ne comprends pas pourquoi il faut impérativement que ce texte entre en vigueur au 31 mars 2021. À chaque fois qu'on vote une réforme, c'est la même chose : on se précipite pour préciser d'abord les aspects réglementaires, avec un comité technique ministériel, finalement on fait quand même évoluer le projet de loi, ce qui nécessite de tout revoir, on le met en application, mais il faut que les professionnels aient le temps de l'intégrer… Au bout du compte, évidemment, ça ne fonctionne pas, parce que le texte n'a pas été mis en oeuvre correctement, tout cela pour avoir voulu le faire entrer en vigueur trop tôt. La dernière fois qu'on a fait ça, on a dû décaler l'application de la loi de programmation de la justice de plusieurs mois parce que le fichier CASSIOPEE et le portail n'étaient pas prêts.
Et à ce propos, CASSIOPEE sera-t-il prêt pour le 31 mars 2021 ? On peut en parler ? Parce que si les magistrats ne disposent pas à temps des trames du fichier, vous pourrez toujours courir pour l'application de votre réforme, monsieur le ministre ! Voilà le monde réel, la réalité concrète. D'ailleurs, tout ce qui ne figure pas au B1 se trouve quand même sur CASSIOPEE, soit dit en passant : il y a beaucoup de choses sur ce fichier et, rien que pour ça, il faudrait le revoir.
C'est pour votre propre bien que je vous mets en garde contre cette précipitation. Ne vous inquiétez pas, de toute façon, tout sera fait avant 2022 ! Mais tout de même… Quand on voit qu'une note conjointe a été prise le 10 novembre, par les directions de la PJJ, des services judiciaire, et des affaires criminelles et des grâces, en vue d'apurer les dossiers… Nous nous sommes raconté plein de belles choses pendant plusieurs jours sur les mesures éducatives, l'accompagnement des mineurs et toutes sortes de mesures de suivi, alors que dans cette note, on conseillait aux magistrats de faire des classements sans suite en masse, afin de pouvoir commencer la nouvelle année dans de bonnes conditions et d'aider au lancement de la réforme de la justice pénale des mineurs ! C'est quand même dingue, on fait une croix sur tout le suivi juste pour apurer les stocks, pour faire place nette pour le 31 mars ! Qu'est-ce que c'est que ces méthodes ?
Des méthodes staliniennes !
Qu'est-ce que c'est que cette manière de gérer une administration ? C'est lunaire !
Avec ces amendements, nous demandons un rapport dressant une évaluation précise et détaillée du fonctionnement de chaque centre éducatif fermé – CEF – et un bilan de la prise en charge des mineurs placés, en présentant une évaluation du suivi éducatif et pédagogique dans les CEF. Le rapport évaluerait dans quelle mesure les centres éducatifs fermés favorisent la réinsertion et contribuent à lutter contre la récidive.
Nous rappelons qu'à leur création en 2002, les CEF étaient présentés comme une alternative à la détention et un moyen de lutte contre la délinquance des mineurs. Ces structures devaient offrir aux jeunes une sorte de dernière chance avant la prison. Or, en pratique, comme le souligne la Commission nationale consultative des droits de l'homme, les CEF sont plutôt devenus des alternatives au milieu ouvert, dès lors que de nombreux foyers ont été transformés en CEF et que leur création s'est accompagnée de la diminution des lieux d'hébergement.
Ils rencontrent de nombreux problèmes de fonctionnement, liés notamment à des difficultés de recrutement – 80 % de contractuels, turnover important, etc. Il apparaît donc indispensable de bénéficier d'une évaluation du fonctionnement des CEF et de leur efficacité.
Nous avons déjà adopté en commission un amendement prévoyant un rapport qui me semble couvrir votre demande, c'est pourquoi j'émets un avis défavorable.
Même avis.
J'entends votre réponse, un rapport est déjà prévu, mais il s'agit d'amendements d'appel. Il est vraiment nécessaire de disposer rapidement de ce rapport, afin que nous ayons un aperçu de la mise en oeuvre de cette codification dans les semaines et les mois à venir.
L'amendement no 81 est retiré.
L'amendement no 60 n'est pas adopté.
L'amendement no 120 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Nous ne pouvons que saluer la création du code de la justice pénale des mineurs dont nous débattons ici, mais il faut rappeler que, dans ce même hémicycle, il y a quelques mois, nous avons voté une résolution engageant notre assemblée à faire respecter les droits de l'enfant dans tous ses travaux.
Avec ce code, nous ne faisons que la moitié du chemin. L'objet de cet amendement est de demander au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport relatif à la création d'un code de protection de l'enfance, intégrant aussi les dispositions civiles relatives aux mineurs. Comme l'ont montré les débats que nous avons eus, les mesures pénales s'accompagnent souvent de mesures relevant du civil. Il apparaît donc judicieux de regrouper dans un même code dispositions pénales et dispositions civiles.
La parole est à Mme Alexandra Louis, pour soutenir l'amendement no 432 .
Cet amendement, comme celui que vient de défendre Perrine Goulet, émane du groupe d'études « Droits de l'enfant et protection de la jeunesse » que j'ai l'honneur de co-présider avec Maud Petit. Dans ce cadre, nous avons mené de très nombreuses auditions, auxquelles beaucoup de nos collègues ont pu participer, sur le code de la justice pénale des mineurs et d'autres sujets ayant trait à l'enfance. Dans presque toutes s'est exprimée la volonté de créer, au de-là d'un code de la justice pénale des mineurs, un code de la justice des mineurs ou un code de l'enfance – je n'ai pas d'avis tranché sur sa dénomination.
Nous avons progressé : la réforme de la justice pénale des mineurs constitue une avancée remarquable. Nous souhaiterions toutefois en faire un premier jalon, nous appuyer sur nos travaux d'aujourd'hui pour aller vers un code de la justice des mineurs. Cela implique de mener un travail de longue haleine, d'une grande finesse, car il faut se pencher sur nombre de sujets légistiques et juridiques. Mais c'est un souhait qui émane de nombreux membres de ce groupe d'études, qui rassemble des députés appartenant à différents groupes politiques, je dois le souligner.
Par cet amendement, nous demandons donc un rapport sur la faisabilité d'un nouveau code de la justice des mineurs et la manière dont il pourrait être conçu.
Cette demande a été entendue. Antoine Savignat, dans la discussion générale, l'a exposée et les groupes GDR et FI ont mis en avant cette nécessité. Le code de la justice pénale des mineurs est une première étape et il serait intéressant dans les mois qui viennent ou lors de la prochaine législature de créer un code des mineurs ou un code de l'enfance. Cela exige un travail considérable. Voyons déjà le temps qu'il a fallu…
… pour passer de l'ordonnance de 1945 à ce code de la justice pénale des mineurs : quinze ans de réflexion ! Espérons que la formalisation de ce code des mineurs réclame moins de temps.
Nous posons aujourd'hui une première pierre. Je ne sais pas si un rapport permettrait de faire avancer les choses. Toujours est-il que le Gouvernement a entendu qu'il y avait, sur tous les bancs de cet hémicycle, une demande en faveur de la création de ce code des mineurs ou de l'enfance.
J'ai entendu ce que vous me dites. La tentation de procrastiner est parfois forte. Mais, je vous le dis, j'ai entendu ce que vous me dites et je n'y suis pas insensible.
Cette codification – qui relève du bon sens, on ne peut qu'être d'accord là-dessus – réclame un travail titanesque. Certes, les dispositions existent déjà, ce n'est pas comme s'il fallait les créer. Mais il y a quelques autres sujets de préoccupation dans mon ministère, vous l'imaginez, et j'aimerais porter de nouveaux projets de loi. Je veux bien faire du classement, mais je ne suis pas là pour faire seulement du classement. Pourtant, je vous le redis pour la troisième fois, je vous ai entendus.
C'est une dizaine de codes au total qui sont concernés : le code civil, le code de procédure civile, le code de l'action sociale et des familles, le code de l'éducation, le code de sécurité sociale, le code de la santé publique, voire le code général des impôts et d'autres que j'oublie.
Je suis d'accord pour que l'on y réfléchisse. Nous allons faire un rapport sur la faisabilité de ce code : si c'est possible, alors allons-y, cela a du sens. Je vous invite donc à retirer vos amendements. Nous allons voir d'abord si c'est faisable, et ensuite comment avancer sur cette question, qui relève à l'évidence du bon sens puisqu'un code qui regroupe tout sera plus lisible pour tout le monde.
M. Hervé Berville applaudit.
Pour la clarté de nos débats, qui répond à une exigence constitutionnelle, monsieur le ministre, il me faut un avis précis. Si j'ai bien compris, vous demandez le retrait et à défaut, votre avis sera défavorable, n'est-ce pas ?
C'est un retrait-confiance.
Le vendredi soir, il nous arrive à tous d'avoir des élans de créativité mais le «retrait-confiance » ne figure pas dans le règlement.
Sagesse alors.
« Oh ! » sur les bancs du groupe LaREM
au moment de l'examen de la loi de programmation et de réforme pour la justice, …
Le jaloux !
… quand l'amendement ouvrant la voie à une réforme de la justice des mineurs a été adopté. Les comptes rendus des débats vous montreront que nous dénoncions la méthode de l'ordonnance et que nous estimions préférable de créer un code de l'enfance plutôt qu'un code de la justice pénale des mineurs.
Je ne crois pas qu'il y ait un problème de faisabilité : tout est faisable. C'est plutôt un problème politique. Votre problème politique est de savoir si cela peut être fait d'ici à 2022. Le nôtre, qui est tout aussi politique, est que cela se fasse au plus vite, au bénéfice des enfants. C'est le sujet de fond. Il y a une cohérence entre le civil et le pénal : c'est pourquoi nous avons demandé, y compris à la tribune, que l'éducatif prévale sur le répressif. Nous voyons bien que l'accompagnement du mineur par l'assistance éducative est aussi importante que la réponse pénale – et c'est la force du juge des enfants que de couvrir ces deux volets. Si nous pouvons faire une proposition, avec Danielle Obono et notre groupe, c'est, oui, cette création d'un code de l'enfance. Nous nous y attellerons en 2022, dès que nous le pourrons.
Nous sommes tout à fait conscients qu'il s'agit d'un travail de titan qui réclame de couvrir de nombreux codes. C'est un travail de nature différente de celui qu'a exigé la création du code de la justice pénale des mineurs, qui était un travail de fond qui a fait gagner en visibilité. Là, il s'agira de regrouper les différentes dispositions relevant du civil. Mais je pense que nous sommes tous d'accord sur ce code.
Je vais retirer l'amendement no 432 car j'ai confiance en notre garde des sceaux.
Il s'est engagé à ce qu'un travail de fond soit mené et je sais que ce sera fait. J'y serai, comme tous mes collègues, je pense, extrêmement attentive. Je suis bien consciente que ce travail exige autre chose qu'un simple rapport. Notre amendement était avant tout un amendement d'appel. Nous avons eu une réponse claire du ministre, d'où ce retrait.
L'amendement no 432 est retiré.
Maud Petit, qui est à l'origine avec Alexandra Louis de cette demande de rapport, m'avait bien signifié qu'il s'agissait d'un amendement d'appel. Je suis d'accord avec vous, monsieur le ministre : s'il s'agit juste de faire du classement, cela ne servira pas à grand-chose. Il y a des modifications à apporter, ce qui renvoie à un travail approfondi.
Monsieur le ministre, je prends acte de votre engagement à commencer à travailler sur ce code de l'enfance. Le MoDem retire donc également son amendement.
L'amendement no 359 est retiré.
Sur l'ensemble du projet de loi, je suis saisi par le groupe La République en marche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Voilà bien le problème qu'il y a à légiférer par ordonnance : c'est à la fin de la discussion que nous défendons des amendements de suppression de l'article 1er, qui ratifie l'ordonnance portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs.
Nous avions besoin de ce code, puisque de nombreuses lois sont venues modifier l'ordonnance de 1945, souvent dans un sens plus répressif. Les propositions qui nous sont faites dans ce texte sont pour certaines intéressantes, et je m'en félicite, mais nous regrettons que nous n'ayons pas été plus loin encore vers plus d'éducatif.
S'agissant de la création d'un code de la justice des enfants, je mesure l'immensité de la tâche mais c'est un beau défi que nous pouvons relever. Quelque chose nous aiderait : créer, enfin, au sein de notre assemblée une délégation aux droits des enfants.
La délégation aux droits des femmes nous a permis d'avancer sur de grands dossiers, de façon non partisane. Qu'il s'agisse de la lutte pour l'abolition de la prostitution ou la lutte contre les violences faites aux femmes, elle a joué un rôle important. Cette délégation aux droits des enfants est une proposition sur laquelle nous pouvons, je le pense, tous nous accorder.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.
Il s'agit de supprimer l'article 1er par lequel est créé ce nouveau code de la justice pénale des mineurs. Notre amendement est motivé par des raisons de méthode et des raisons de fond.
Sur la méthode, l'échange qui vient d'avoir lieu sur les amendements retirés sur la bonne foi du ministre est assez éclairant. Tout a été pris à l'envers dès le départ : par un amendement surgi de nulle part, la ministre Belloubet a décidé de cette ordonnance de réforme de la justice des mineurs, ce qui a soulevé une indignation telle qu'elle a tenté ensuite de se rattraper avec un prétendu groupe de contact. Mais en réalité, tout était déjà écrit et cette procédure n'avait d'autre but que de mettre en scène un semblant de dialogue. Professionnels et spécialistes ne s'y sont pas trompés : ils ont été plus de deux cents à signer une tribune qui dénonçait la méthode utilisée par le Gouvernement et le fond même de ce texte.
Nous voyons bien que celui-ci ne repose sur aucune vision cohérente, puisque c'est seulement à la fin que les uns et les autres se disent que la protection de l'enfance aurait peut-être dû être pensée autrement que sous le seul angle du pénal. Oui, c'est par là qu'il aurait fallu commencer – et il aurait fallu se donner cette ambition dès le début de la législature, pas vite fait à la fin, pour pouvoir dire qu'on s'en est occupé. Nous l'avons dit, pour notre part, nous allons y travailler et faire des propositions, en espérant pouvoir les concrétiser en 2022.
La réforme que vous proposez va à l'encontre de la philosophie de l'ordonnance de 1945, qui considérait les mineurs comme des enfants en danger qu'il fallait accompagner, accueillir, protéger, qui les voyait comme des citoyens en devenir sur lesquels l'ensemble de la société allait s'appuyer, qui les percevait comme une richesse et comme une chance plutôt que comme un mal à éradiquer.
Vous osez dire des choses pareilles !
Malheureusement, réforme après réforme, vous vous êtes inscrit dans cette vision qu'il fallait incarcérer, réprimer les enfants plutôt que les aider à s'émanciper et les éduquer. Voilà pourquoi nous demandons la suppression de l'article 1er. Nous réaffirmons notre engagement et notre ambition d'avoir un véritable code afin de protéger les enfants et d'être à la hauteur de nos engagements internationaux.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Vous devriez avoir honte de vos excès !
Je suis, bien évidemment, défavorable à ces deux amendements de suppression de l'article, et même un peu déçu qu'ils ne soient pas retirés. Nous avons montré, tant en commission qu'en séance publique depuis deux jours, que nous avions pu avoir un débat et aborder toutes les questions autour de la justice pénale des mineurs. Vous dites que, sur la méthode et sur le fond, les choses ne sont pas prêtes. Sur la méthode, je rappelle que cela fait quinze ans que l'on parle de la codification de cette ordonnance de 1945, et que quatre garde des sceaux se sont penchés sur la question.
Dans le cadre de cette législature, un amendement, en effet, a été proposé par Mme la garde des sceaux Nicole Belloubet, mais allant de pair avec un travail qui a été mené à la Chancellerie avec tous les groupes d'opposition. Par ailleurs, Cécile Untermaier et moi avons conduit une mission d'information sur la justice pénale des mineurs, et nous avons fait le constat qu'il était urgent de codifier cette ordonnance de 1945. J'ai vraiment du mal à entendre vos critiques sur ce travail que nous avons réalisé depuis plus de deux ans et qui est en réalité en gestation depuis plus de dix ans.
Sur le fond, je répète que ce texte a fait l'objet de onze heures de discussion en commission…
Et vous nous dites qu'il faut tout supprimer, qu'on n'a rien fait ? Soyons sérieux ! Ce code contient des avancées. Nous avons discuté de l'âge de la responsabilité du mineur, de la procédure de la césure, à laquelle vous êtes favorable, de l'assistance éducative et des mesures éducatives et judiciaires, autour des quatre modules qui ont été dégagés, de la simplification de la procédure, qui était vraiment nécessaire et urgente – dix-huit mois pour obtenir une décision, ce n'est acceptable, ni pour le mineur, ni pour la victime !
Je ne comprends pas, à ce stade de nos débats, que vous puissiez encore soutenir des amendements de suppression.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Le moment du débat, ce n'est pas nous qui l'avons choisi ! C'est le système de l'ordonnance !
Madame la députée Marie-George Buffet, vous comprendrez que je ne sois pas d'accord avec vous. J'ai infiniment de respect pour votre travail.
Madame Obono, ai-je bien entendu ce que vous avez dit ? Pour nous, l'enfance serait un mal à éradiquer ? Vous devriez avoir honte, madame. L'invective vous tient lieu de talent.
Vraiment, vous devriez avoir honte.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Monsieur le ministre, on parlera de la honte plus tard, si vous savez ce que ce mot signifie.
Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
Monsieur le rapporteur, nul procès de notre part sur le travail qui a été effectué, ni sur votre investissement. Oui, il y a bien eu des heures et des heures de débat, et c'est heureux. Mais toutes ces heures de travail se sont déroulées dans un cadre contraint, à cause du choix de l'ordonnance.
C'est le choix du Gouvernement de procéder de cette manière. Ce n'est donc pas très librement que nous avons été amenés à faire ce travail.
Donc non, nous ne considérons pas que la méthode soit juste. Par ailleurs, vous avez remarqué que nous avons présenté un certain nombre d'amendements, et qu'en matière d'invectives et de mépris, nous avons été suffisamment servis : vous n'avez cessé de nous dire que nous ne proposions rien, malgré l'existence de tous ces amendements, dont un certain nombre avaient été jugés irrecevables. Le ministre parle de honte ; en la matière, il se pose là. Nous n'avons donc pas de leçon à recevoir de ce point de vue.
Nous assumons la cohérence d'une vision de la protection de l'enfance, et nous nous opposons à la vôtre qui, de notre point de vue, est par trop guidée par un objectif que nous jugeons beaucoup trop comptable. Malheureusement, ce n'est pas le cas uniquement sur ce texte : cela fait trois ans qu'on le constate. Vous confondez vitesse et précipitation, vous considérez que l'efficacité consiste à pouvoir traiter trop de dossiers.
Du coup, la forme rejoint le fond. Voilà pourquoi la suppression de l'article 1er se justifie.
J'ai, moi aussi, beaucoup de respect pour le travail qui a été réalisé, pour tous mes collègues qui sont intervenus dans ce débat ainsi que pour M. le ministre. La question n'est pas là. Il n'y a aucune honte à défendre ses idées, et à prendre le temps de les défendre.
Ce n'est pas ce que j'ai dit.
C'est le débat parlementaire, et c'est normal. D'ailleurs, dans sa grande sagesse, la conférence des présidents avait prévu que l'on puisse discuter de ce texte jusqu'à vendredi prochain. Nous n'avons pas dépassé le temps de débat, nous avons même économisé plus de deux jours, ce qui est assez extraordinaire. Il n'y a pas eu une utilisation abusive du temps de parole.
Prenons garde à ne pas employer des expressions qui remettent en cause le caractère contradictoire du débat parlementaire. Chacun peut s'écouter. À la fin, on peut ne pas toujours être d'accord. Et parfois, on peut aussi avancer et se retrouver sur de grands dossiers.
L'article 1er est adopté.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix-huit heures vingt-cinq, est reprise à dix-huit heures trente.
C'est avec un vote par scrutin public, un vendredi, et alors que nous ne sommes pas très nombreux dans l'hémicycle, que nous allons valider ce texte, alors que nous aurions le faire par un scrutin solennel qui aurait permis aux 577 députés de se prononcer. De fait, je ne comprends pas que l'on n'ait pas donné cette solennité à la réforme de cette ordonnance de 1945 relative à la justice pénale des mineurs, qui est un pilier de la République. Je le déplore d'emblée.
Je ne suis satisfait ni de ce code ni du débat que nous avons eu au cours des journées qui viennent de s'écouler. L'invective, peut-être que c'est sympa et que ça met de l'ambiance, mais ça ne fait rien avancer.
C'est l'hôpital qui se moque de la charité !
Il est dommage que nous n'ayons pas pu être entendus sur le fond ni à propos de la question du temps, qui est celle que j'ai le plus développée, dès la discussion générale, après la motion de rejet préalable défendue par nos camarades communistes. Je le dis et le redirai autant que de besoin : oui, le groupe La France insoumise est favorable à la césure, à la séparation entre l'audience consacrée à la culpabilité et celle qui l'est à la peine, mais il est en revanche totalement défavorable aux délais dans lesquels tout cela est enserré. En réalité, tout le monde sait que si nous avions les moyens, jamais on n'aurait fixé de délai.
S'il est dans l'intérêt du magistrat, des enfants et des victimes de pouvoir aller « au plus vite », cela ne signifie pas nécessairement aller « plus vite ». Vous obligez en effet toute la chaîne à se précipiter, ce qui nous conduira, pour les profils les plus problématiques, comme les enfants réitérants, à gravir les marches répressives – car ce sont les mesures qui sont mises en avant dans le nouveau code, et elles seront plus souvent et plus vite prononcées.
Au bout du compte, à la fin de l'examen de ce texte, je me demande quelles sont véritablement les nouvelles mesures qu'il comporte qui sont plus protectrices pour les enfants. Une grande avocate spécialiste des enfants, Dominique Attias, disait que la France n'aimait pas ses enfants. Lorsque nous l'avons reçue, elle nous a adjurés d'agir, me mettant dans le même sac que tous les autres, en nous disant qu'il était de notre responsabilité de parlementaires de changer cet état de fait.
Scandaleux !
Il est vrai qu'initialement, on nous avait promis une codification à droit constant : il ne fallait pas s'inquiéter, c'était une réécriture purement technique. En examinant l'ordonnance plus en détail, nous avons pris conscience qu'il pourrait y avoir des modifications – qui sont advenues : la mise en examen a disparu, une césure sépare les audiences portant sur la culpabilité et sur la peine, le texte confirme les procédures d'exception telles que l'audience unique ou le jugement en cabinet, ainsi que les comparutions à délai rapproché, qui ne peuvent pas être considérées comme étant de bonne justice – sauf peut-être du point de vue du parquet, qui voudrait avoir le moins de dossiers possible à traiter, ce qui est en soi un objectif si l'on veut bien rendre la justice. Le nouveau code confirme donc tous ces éléments, alors que nous aurions pu diminuer fortement la détention provisoire et fixer la présomption irréfragable à 14 ans, en précisant qu'en-deçà de cet âge ne pourrait être appliquée qu'une assistance éducative – la distinction n'est pas négligeable.
C'est pourquoi nous avions dit d'emblée qu'il fallait concevoir un code de l'enfance pour prendre en compte l'intégralité des problèmes. Je regrette de devoir le dire, mais si le sujet est sur la table depuis tant d'années, cela ne tient pas au fait que les gouvernements aient procrastiné, mais au fait que les différents rapports ne faisaient pas apparaître une concordance emportant l'unanimité quant aux actions à mettre en oeuvre. La réforme a d'ailleurs été repoussée, jamais engagée en début législature, ni à la fin parce qu'elle était trop compliquée et qu'on n'avait plus le temps. Résultat : on se dit qu'on n'a qu'à le faire par ordonnance, au moins comme ça, ça passera ! Et, oui, ça passe.
Je tiens à le dire solennellement : en 2022, nous reviendrons sur cette codification, nous diminuerons d'un cran toutes les mesures répressives, afin de faire primer l'éducatif sur le répressif, nous remettrons sur le métier l'ouvrage de la codification en matière civile afin de parvenir à un code de l'enfance. Même si c'est un travail important, un travail titanesque, La France insoumise le fera.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Nous sommes à un moment un peu particulier et sans doute aussi un peu historique, car cette réforme de la justice pénale des mineurs, qui conduit à la consécration d'un véritable code de la justice pénale des mineurs, il me semble en avoir entendu parler depuis ma première année de droit. Je sais que beaucoup y ont travaillé, énormément – des gouvernements de gauche comme de droite, des collègues qui étaient ici avant nous et d'autres qui sont présents et dont je tiens, une fois encore, à saluer le travail : Jean Terlier et Cécile Untermaier, qui ont été là tout au long de ce texte, dans un esprit très constructif.
Mme Sandrine Mörch applaudit.
Cette réforme a donné lieu à un travail de longue haleine et à un débat riche. Nous voulions un débat et nous l'avons eu, un débat où nous avons pu, me semble-t-il, discuter de tous les sujets de fond. Nous avons sans doute pris acte de certains désaccords, mais ce texte a consacré une solution d'équilibre en garantissant les principes auxquels nous sommes viscéralement attachés : primauté de l'éducatif, spécialisation des juridictions, atténuation de la responsabilité pénale des mineurs. Ce n'est pas rien, évidemment, mais nous y avons encore apporté une dimension pratique. Nous avons donc eu une véritable discussion, au cours de laquelle nous avons enrichi ce texte. La représentation nationale peut saluer les avancées réalisées, notamment pour ce qui concerne l'audition libre, qui ne connaîtra plus d'exception à la présence de l'avocat pour assister le mineur, ou concernant le rôle du juge des libertés et de la détention. Nous avons encore avancé sur d'autres points, et il faut souligner ce travail constructif.
Surtout, dans ce texte, nous n'oublions pas les réalités humaines. Les principes sont un élément fondamental, le phare qui guide notre travail et que nous suivons, mais nous répondons aussi à une réalité : derrière les grands principes, derrière les idées et même derrière les dossiers, il y a des enfants et des familles, et c'est à eux que nous avons pensé – nous tous, même si nous avons des convictions différentes qui s'expriment au cours de ce débat.
Je tiens aussi à saluer tous les professionnels qui travaillent avec ces enfants : les éducateurs de la PJJ, les magistrats, les policiers et les gendarmes. Ce sont les mêmes dans toutes les situations, ces professionnels qui s'occupent des enfants sur le plan civil, c'est-à-dire en matière d'assistance éducative, pour les aider lorsqu'ils sont victimes, et aussi lorsqu'ils sont coupables d'infractions pénales. Je tiens à saluer leur travail, qui s'inscrit aussi dans le même mouvement que celui du personnel éducatif – y compris celui de l'éducation nationale.
Avec ce texte, nous avons trouvé un véritable équilibre, qui réside d'abord dans cette nouvelle procédure que la gauche comme la droite avaient appelé de leurs voeux et qui permet de concilier deux temporalités. La première temporalité est celle d'une réponse pénale qui doit être prompte, car si le mineur attend dix-huit mois une réponse sur sa situation pénale, c'est trop long : il en perd le sens, ce qui n'est satisfaisant ni pour lui, ni pour la victime, ni évidemment pour la société. La réponse pénale doit donc être rendue entre dix jours et trois mois, ce qui me semble être une bonne solution. Mais elle doit se concilier avec le temps éducatif, deuxième temporalité, auquel nous tenons. Oui, parfois, et même souvent, l'éducatif prend du temps. Après ce premier délai d'évaluation, quand arrive la deuxième audience, où l'on statue sur la sanction, tout ne s'arrête pas du jour au lendemain pour les mineurs : celui qui a besoin d'un suivi éducatif l'aura. Je ne laisserai personne dire que l'éducatif n'est pas au coeur de cette réforme et de ce nouveau code.
Nous restreignons également le recours à la détention provisoire, car il y a également un non-sens à ce que plus de 80 % des mineurs qui se trouvent dans des établissements pénitentiaires pour mineurs ou des quartiers pour mineurs y soient en détention provisoire. Il y a là un problème de sens : quand ces mineurs sont jugés, ils ont déjà purgé leur peine. La peine avant le jugement ! C'est un message qui n'a aucun sens. Nous restreignons donc, je le répète, le recours à la détention provisoire et mettons du sens partout dans cette réforme, en tenant compte de la réalité humaine.
De surcroît, la réforme n'oublie pas les victimes. J'insiste sur ce point car on les a souvent oubliées. Or, parmi les victimes, il y a aussi des mineurs.
Hugo a été souvent évoqué ici et, comme beaucoup d'entre nous, je suis moi-même très attachée à ses paroles. Permettez-moi donc de le citer moi aussi : « L'enfant, je le répète, c'est l'avenir. Ce sillon-là et généreux ; il donne plus que l'épi pour le grain de blé. Déposez-y une étincelle, il vous rendra une gerbe de lumière. »
Je conclurai en disant que la France aime ses enfants et croit en eux. Le groupe La République en marche votera évidemment en faveur de ce texte.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Voilà deux ans, lorsque nous est tombé sur le coin de la tête, en plein débat sur la loi de programmation de la justice, l'amendement tendant à habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnances sur la matière, j'aurais juré – j'ai même dû jurer, à qui a voulu l'entendre, que lorsque viendrait la question de la ratification de cette ordonnance, je m'y opposerais, que le groupe Les Républicains s'y opposerait par tous moyens, déposerait des motions de rejet, demanderait la suppression de chacun des articles du texte.
Finalement, parce que le pire n'est jamais certain, et sans doute grâce à la clairvoyance et à la qualité d'écoute dont a fait preuve votre prédécesseure, monsieur le garde des sceaux, nous avons évolué sur cette question, nous avons pu travailler et nous avons été écoutés – même si nous n'avons pas toujours été entendus, car il reste des sujets de discussion à propos de ce code de la justice pénale des mineurs.
Nous avons donc pu nous exprimer, et nous sommes parvenus à une solution qui est bonne ne serait-ce que parce que nous disposons d'un code : nous ne pouvons que nous en féliciter.
Pas seulement !
Ce code était appelé de leurs voeux par l'ensemble des professionnels de la matière, rendant lisible et intelligible la justice des mineurs. Ne serait-ce que pour cela, donc, nous pouvons nous féliciter d'y être parvenus, le travail de codification n'étant pas si aisé. Comme je l'ai dit en discussion générale, j'entends d'ailleurs que, compte tenu de sa complexité, il n'ait pu se faire que par la voie d'ordonnances, car si nous avions dû discuter les 270 articles du texte mot par mot et lettre par lettre dans cet hémicycle, nous ne serions pas parvenus à ce résultat.
Ce code doit évoluer, et j'aurais à cet égard une légère divergence avec vous, monsieur le garde des sceaux : la question de la faisabilité n'a pas besoin de se poser. Est-il nécessaire de faire évoluer ce code et de parvenir à la rédaction d'un code de l'enfance ? Oui. Tout le monde le demande, nous sommes unanimes à le dire sur ces bancs. Dès lors, la bonne question n'est pas de savoir si nous pouvons le faire, c'est de savoir si nous voulons le faire. Tout n'est question que de volonté. Il faudra y parvenir pour rendre plus lisible l'ensemble de la justice qui touche, de près ou de loin, les mineurs dans notre pays.
Il y faudra des moyens – c'est un sujet récurrent chez moi ! – afin que nos concitoyens ne viennent pas nous dire que cette réforme aggrave l'engorgement des juridictions pour mineurs. Il faudra résorber le stock et appliquer ces nouveaux et bons délais qui permettront de juger les mineurs dans un temps raisonnable et compréhensible pour eux. Il y faudra des moyens, et je ne doute pas, puisque vous l'avez affirmé et que vous avez porté ce texte, que vous ferez évidemment le nécessaire pour qu'il devienne efficace au plus vite.
Comme vous l'aurez compris, dans ces conditions, il n'est pas question de nous opposer à ce texte. Contrairement à ce que nous aurions pu dire voilà deux ans, le groupe Les Républicains votera évidemment ce code de justice pénale des mineurs.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Comme l'a dit Erwan Balanant lors de la discussion générale, notre groupe a abordé ce texte avec mesure et responsabilité. Notre fil rouge, comme pour beaucoup d'entre nous dans cet hémicycle, a été la primauté de l'éducatif sur le répressif, et nos débats ont montré que notre assemblée s'inscrit en effet dans cette approche, que vous proposez avec cette ordonnance. Certes, nous nous sommes penchés sur le code de procédure pénale des mineurs, et non pas sur un code des mineurs regroupant l'ensemble des règles civiles, pénales et administratives applicables aux enfants et aux adolescents. Mais c'est un premier pas indispensable pour l'adaptation de notre justice pénale des mineurs à la réalité de la société d'aujourd'hui. Il était en effet urgent d'aller vers plus de réactivité, plus d'efficacité et plus de lisibilité.
Nous avons travaillé avec conviction pour faire de ce code de la justice pénale des mineurs un outil à la disposition de la justice, dans l'intérêt des mineurs en danger, des mineurs délinquants, mais aussi de leurs victimes.
C'est vrai !
Bien que s'agissant d'un projet loi de ratification d'ordonnance, nous avons pu faire durant ces deux jours des propositions qui sont venues enrichir cette ordonnance. Je salue à ce propos le travail de qualité accompli depuis de longs mois par notre rapporteur et Cécile Untermaier.
Nous devons bien sûr, au travers d'une approche transversale, aller au-delà de que nous avons déjà réalisé en commission comme en séance, afin d'assurer aux mineurs une protection plus efficace et suffisamment individualisée pour prendre en compte les divers aspects de leur vie.
Je souhaite vous remercier, monsieur le ministre, pour votre engagement ferme d'examiner la faisabilité d'un tel code. Je tiens également à adresser tous mes remerciements à toutes les équipes qui ont travaillé sur ce projet de code, à tous les acteurs qui chaque jour font vivre cette justice des mineurs, essentielle car un mineur est un être en construction : on doit l'accompagner, pas être dans le tout-répressif.
Une vision nouvelle s'ouvre donc pour les mineurs, à l'heure où ils souffrent d'une déshérence de plus en plus importante. En votant ce projet de loi de ratification, c'est une main que nous tendons à cette enfance en détresse, un soutien supplémentaire que nous offrons aux victimes et un cadre rassurant que nous donnons à la société. C'est pourquoi le groupe Mouvement démocrate MoDem et démocrates apparentés le votera.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
C'est un texte fondamental que celui que nous allons voter, parce qu'il concerne des enfants et des adolescents. Je regrette qu'en ce vendredi après-midi, il y ait si peu de monde dans l'hémicycle : les enfants méritent beaucoup plus d'attention que cela. Il est vrai qu'il s'agit d'un texte très technique, qui parle d'abord à ceux qui s'y sont vraiment investis – et aucun de nous ne peut s'investir dans tous les textes que nous avons à examiner.
Ces débats ont confirmé que le recours à l'ordonnance était une erreur fondamentale : le débat parlementaire a besoin de documents clairs, d'une analyse article par article qui permette d'éviter les répétitions et d'assurer la transition entre un texte ancien et un texte nouveau : le recours à l'ordonnance ne nous permet pas ce travail d'analyse, qui est le travail du législateur. Il décourage les parlementaires de s'investir dans ces questions parce qu'il ne leur permet pas de bénéficier de tout le travail d'élaboration d'un projet de loi ni d'une étude d'impact.
Alors que nous redoutions beaucoup, avec Christiane Taubira, au cours du précédent quinquennat, qu'une codification égratigne les grands principes de l'ordonnance de 1945, je dois avouer que mon inquiétude n'a plus lieu d'être et je tiens à vous en remercier. Nous avons au contraire obtenu des avancées, tant en commission des lois qu'en séance publique, sur des points majeurs à mes yeux, tel l'intérêt supérieur de l'enfant : il n'est pas anodin que ce principe soit inscrit dans l'article préliminaire, parce que c'est lui qui donne son sens à l'ensemble du code de la justice pénale des mineurs.
Le fait que le juge des libertés et de la détention soit identifié comme un juge spécialisé qui décidera de la détention des mineurs est également une avancée importante. La question de la présence obligatoire de l'avocat en audience publique, point qui nous posait également problème, a été résolue.
S'agissant de l'excuse de minorité, nous avons vu combien il était difficile de la maintenir dans certains contextes politiques et combien il était important, monsieur le ministre, que l'excuse de minorité entre 16 et 18 ans soit vraiment confirmée comme un dispositif exceptionnel. J'exprimerai néanmoins un regret sur la présence du tribunal de police dans ce dispositif de l'excuse de minorité
Sourires
mais ma vigilance sera grande sur ce point.
La césure, tendant à une réponse éducative juste après la commission des faits, est une évidence, et le prononcé de la sanction après l'éducation est tout aussi important. C'est un dispositif qui respecte l'enfant et qui honore notre société.
L'esprit de l'ordonnance de 1945 est donc préservé. Oui, certains points sont plus répressifs, mais il y a aussi des avancées en faveur de l'éducatif.
Les débats que nous avons eus ici marqueront sans doute d'une musique nouvelle les discussions que vous pouvez avoir avec certains députés de l'opposition. Ils témoigneront de notre engagement et du vôtre pour la défense des enfants d'abord, et de notre souci de l'enfance et de l'adolescence. C'est ça qui compte. C'est ce qui préoccupait Christiane Taubira et je suis ravie de voir qu'au travers de la césure, vous avez voulu préserver cet héritage
Je voudrais pour terminer dire l'inquiétude des professionnels : ils ont le sentiment qu'on ne les entend pas, et qu'on ne les comprend pas. Pierre Joxe le disait en 2015, les magistrats sont exténués. Il y a trop de perte de temps entre l'enquête, le jugement, l'interpellation. La justice est à bout et a besoin de moyens. Ce n'est pas le texte, pas la codification en elle-même qui posera problème, mais le manque de moyens, monsieur le ministre. La politique budgétaire traduit-elle votre exigence en matière de justice des mineurs ? Dans cette politique budgétaire, le législateur a son mot à dire – et ce mot, nous le dirons en 2021.
Non, ce n'est pas le texte qui pose problème. Dire que c'est un texte répressif, comme j'ai pu l'entendre, est une posture.
Oui ! Bravo !
C'est son application qui m'inquiète : comme le disait Jean-Jacques Urvoas, le problème de la justice, c'est son budget. Avant d'envisager d'élaborer un code de la justice des mineurs, que j'appelle de mes voeux, c'est d'abord à l'application du présent code de la justice pénale des mineurs qu'il faut veiller. Je vous proposerais volontiers, dans une relation de confiance, monsieur le ministre, de fixer dès à présent une clause de revoyure à un an pour constater comment ce dispositif nouveau que nous avons élaboré s'organise effectivement.
Je terminerai en vous remerciant, au nom des députés du groupe Socialistes et apparentés, ainsi que Jean Terlier, que toute l'équipe des administrateurs ici présente et que mes chers collègues de l'hémicycle.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM ainsi que sur ceux du groupe GDR.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 50
Nombre de suffrages exprimés 49
Majorité absolue 25
Pour l'adoption 41
Contre 8
Le projet de loi est adopté.
Un mot, un dernier mot, pour vous dire d'abord l'émotion qui est la mienne. C'est un beau texte. En cet instant, je pense à ma prédécesseure Nicole Belloubet : les échanges que nous avons eus au moment de mon arrivée à la tête de ce ministère et de son départ furent en grande partie consacrés à cette réforme qu'elle appelait de ses voeux, ce qu'elle a exprimé dans son discours, les larmes aux yeux, vous vous en souvenez.
Je dois remercier bien sûr Jean Terlier pour son travail, Alexandra Louis, et la présidente de la commission Yaël Braun-Pivet. Je veux également remercier bien sûr Mme Untermaier ainsi que Mme Marie-George Buffet : nous ne sommes pas d'accord sur tout…
… mais vous ne venez pas dans l'hémicycle pour vous battre, mais pour débattre. Vous apportez toujours quelque chose, madame la députée, en commission comme dans l'hémicycle et ce que vous dites, nous l'entendons, même si bien sûr nous divergeons sur un certain nombre de points.
Je veux également saluer M. Antoine Savignat. Je vais le dire de façon familière mais efficace : c'est la grande classe ! Il est rassurant, quand on fait la loi, d'arriver à une forme d'unanimité. Enfin, presque !
Rires.
Disons que le consensus est large au point que certains que je ne pensais pas voir nous rejoindre l'ont finalement fait. C'est un bon signe, tout de même.
Je veux également bien sûr remercier Mme la députée Goulet. Je veux remercier le groupe Agir Ensemble, le groupe socialiste, les groupes UDI et indépendants et Libertés et territoires.
Bon, il faut y venir, j'en dis deux mots. Beaucoup ont critiqué la façon dont ce texte s'est élaboré – mais ils ne sont pas ici pour débattre aujourd'hui, c'est curieux.
D'autres n'ont pas participé à la mission que vous avez créée, madame la présidente : c'est facile de prétendre qu'il y a pas de débat, quand on le fuit ! Il faut rétablir la vérité sur ce point.
La justice pénale des mineurs dispose enfin d'un code de procédure clair, lisible, à vocation éducative. Nous voulons une justice plus rapide et plus juste, et je vous le dis ici : nous serons au rendez-vous de nos ambitions. Je ne peux, mesdames et messieurs les députés, que m'en féliciter. Bravo pour ce texte.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.
Je serai très rapide, mes chers collègues, pour vous dire la fierté qui est la mienne aujourd'hui de constater que sur beaucoup de bancs de cet hémicycle on salue la codification de cette ordonnance de 1945.
C'est un travail que j'ai mené grâce à vous, madame la présidente de la commission des lois, qui m'avez désigné pour être le rapporteur de la mission d'information, avec Cécile Untermaier. Pendant deux ans, nous avons travaillé d'arrache-pied, toujours avec les mêmes administrateurs que je souhaite remercier, François Joly et Claire Vaudois.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM. – Mme la présidente de la commission applaudit aussi.
Ils nous accompagnent depuis deux ans.
C'est une satisfaction pour un parlementaire de mener un tel travail, depuis les auditions dans le cadre d'une mission d'information jusqu'à l'aboutissement que constitue un projet de loi. Et quel projet de loi : un code de la justice pénale des mineurs ! Mes chers collègues, je l'ai dit lors de la discussion générale, nous pourrons tous, à chaque fois que nous ouvrirons ce code, nous féliciter d'avoir participé à son élaboration. Quelle satisfaction pour le législateur d'avoir travaillé dès l'amont à un tel aboutissement.
Sans revenir sur la méthode, je veux remercier quand même M. Savignat pour ses propos. Nous avons effectivement beaucoup débattu ensemble – vous m'avez beaucoup houspillé, quand je défendais l'amendement porté par Nicole Belloubet ! Vous avez l'intelligence de reconnaître que les engagements pris par la ministre sur la méthode vous ont permis de travailler avec nous ; de considérer que la codification que tout le monde attendait depuis quinze ans était devenue nécessaire pour nos mineurs, aujourd'hui jugés dans des délais trop longs, et qu'en cas de nécessité, on balaye les postures politiciennes, on se met à travailler et on s'accorde sur l'essentiel : les grands principes de cette ordonnance de 1945, qui vont être inscrits dans ce code, ou encore l'âge de la responsabilité pénale du mineur, afin de satisfaire à nos obligations internationales.
La richesse du débat parlementaire a permis de grandes avancées, sur la question de la détention provisoire, la notion d'impartialité – portée, entre autres, par ma chère collègue Alexandra Louis, et je l'en remercie – l'audition libre et la présence sans aucune restriction de l'avocat : c'est cela le travail parlementaire. C'est grâce à ce travail collectif que nous avons aujourd'hui un beau code de la justice pénale des mineurs. Encore une fois, merci à tous.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Prochaine séance, lundi 14 décembre, à 16 heures :
Discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi de finances pour 2021.
La séance est levée.
La séance est levée à dix-neuf heures.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Serge Ezdra