La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
Alors que l'épidémie du coronavirus continue chaque jour de faire des victimes…
… que notre personnel soignant enchaîne les vagues de contaminations, que notre économie est à l'arrêt, que nos commerçants et notre monde culturel sont en pleine détresse ; alors qu'en pleine épidémie, la vague d'attentats islamistes continue de déferler sur le territoire français et que, chaque week-end, l'extrême gauche attaque nos forces de l'ordre et casse nos commerces lors de manifestations, le Président a sorti hier de son chapeau un référendum visant à inscrire la lutte pour le climat dans la Constitution.
Sérieusement, monsieur le Premier ministre, qui serait contre ?
Soyez rassuré, cela tombe bien : c'est avec beaucoup de fierté que je vous informe que ma famille politique l'a déjà fait, dès 2005, avec la Charte de l'environnement
Applaudissements sur les bancs du groupe LR
qui a intégré le bloc de constitutionnalité et a été hissée au niveau des droits de l'Homme. Or, vous menacez aujourd'hui de fracturer la société en rendant clivant un sujet qui doit nous rassembler. Alors, pourquoi ce référendum ?
Peut-être pour masquer votre inaction politique ?
Approbation sur plusieurs bancs du groupe LR
Peut-être, aussi, parce que vous êtes bien empêtrés avec les conclusions d'une convention de citoyens tirés au sort, qui vous demande des comptes ? Peut-être, également, parce que vous êtes discrètement en train de rouvrir des centrales à charbon, très polluantes, en raison de la fermeture absurde et idéologique de la centrale nucléaire de Fessenheim…
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Peut-être aussi parce que vous soutenez la ratification du CETA, cet accord de libre échange entre l'Union européenne et le Canada qui, en autorisant l'importation de boeufs aux hormones après 7 000 kilomètres d'avion, améliorera assurément la vie des Français ? Peut-être, enfin, parce que votre majorité s'apprête à refuser, ce soir, la proposition du Sénat de diminuer la TVA sur les billets de train, alors qu'il s'agissait d'une proposition de la convention citoyenne !
Monsieur le Premier ministre, dans les rangs de notre famille politique, la protection de l'environnement a toujours été une priorité – et c'est une députée de ce magnifique territoire qu'est la Haute-Savoie qui vous le rappelle aujourd'hui.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Quand cesserez-vous donc d'instrumentaliser cette cause, comme vous le faites avec un référendum gadget visant à sauver la face après un bilan peu glorieux sur la question environnementale ?
« Très bien » et applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Vous venez de nous donner un bel exemple de ce qui se passe souvent lorsqu'on parle de la protection de l'environnement : ce n'est jamais le moment. Vous dites être préoccupée par cette question : vous avez raison, elle doit tous nous rassembler car, de toutes les crises que nous vivons, sanitaire ou économique, la crise climatique, elle, nous surplombe et ne s'arrête jamais.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM. – M. Erwan Balanant applaudit également.
Le Président de la République a donc décidé, hier, de nous unir autour de la volonté d'inscrire cette question dans notre texte suprême qu'est la Constitution. Il s'agit tout simplement de la préciser et d'enrichir le travail mené avec la Charte de l'environnement…
Exclamations sur les bancs du groupe LR
… qui érigeait en principe le droit à vivre dans un environnement protégé. Ainsi, inscrire explicitement dans la Constitution la protection de la biodiversité et la lutte contre le changement climatique la précise et, partant, la renforce et conforte le droit de l'environnement.
Nous vivons un moment très important, auquel les parlementaires seront évidemment associés puisque, vous le savez, notre Constitution précise qu'avant d'être soumis au référendum, le texte devra être adopté dans les mêmes termes par l'Assemblée nationale et le Sénat. Ce sont ensuite 60 millions de nos concitoyens qui pourront se réunir autour de cet enjeu essentiel.
J'espère, pour l'avenir de nos enfants, que nous saurons nous réunir sur cet enjeu de fond qu'est l'inscription de cette belle thématique dans notre texte fondateur. J'y crois.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Sourires.
Lors de son discours aux Mureaux, le 2 octobre, le Président de la République annonçait que l'instruction à l'école serait rendue obligatoire pour tous, dès 3 ans, au motif que, chaque mois, des enfants dits hors système seraient découverts dans des écoles clandestines ou, pire encore, instruits à la maison par des parents nourrissant des projets séparatistes.
De nature curieuse, je me suis demandé quel était réellement le visage des 50 000 terroristes en herbe instruits à domicile chaque année. Le 9 décembre, j'ai donc organisé une visioconférence à laquelle plus de quatre-vingts enfants instruits en famille m'ont exposé leur quotidien.
Eh bien, monsieur le Premier ministre, mon avis est sans appel : vous avez bien raison de supprimer l'instruction en famille. Quelle ne fut pas ma terreur lorsqu'Anouk, 16 ans, sourit à la caméra en expliquant que l'instruction en famille – IF – lui permettait de faire plus de vingt heures de musique par semaine ! Comment ne pas être transi d'effroi à l'écoute du témoignage du petit Julien, qui me narra son quotidien en IF, partagé entre les lectures et son association pour la protection de l'environnement ?
Si les conséquences n'étaient pas si fâcheuses, je rirais de l'amalgame fait par le Président de la République entre les familles instruisant leur enfant à domicile et les enfants hors système. Mais, à travers l'article 21 du projet de loi confortant le respect des principes de la République, vous vous apprêtez à supprimer cette liberté fondamentale qu'ont les parents de choisir l'instruction pour leur enfant, et à la remplacer par un régime d'autorisation.
Monsieur le Premier ministre, l'article 21 pose problème. Juridiquement intenable, il bouleversera la vie de nombreuses familles sans pour autant résoudre le problème des enfants hors système. Depuis quand la liberté s'accorde-t-elle ? Comment entendez-vous défendre ce régime d'autorisation, qui soulève pourtant, aux termes de l'avis rendu le 8 décembre par le Conseil d'État, de délicates questions de conformité à la Constitution ?
Cet article ne réglera en rien le cas des enfants hors système, dénoncé par le Président de la République, car les familles en IF doivent se déclarer et sont contrôlées chaque année. Les rapports d'inspection sont souvent élogieux, et l'arsenal législatif existant, notamment avec la loi dite Gatel, visant à simplifier et mieux encadrer le régime d'ouverture et de contrôle des établissements privés hors contrat, et la loi pour l'école de la confiance, permet déjà de sanctionner pénalement les parents défaillants.
Au nom du groupe UDI et Indépendants, je vous le demande donc : pourquoi souhaitez-vous supprimer la liberté d'instruire en famille et la soumettre à un régime d'autorisation… ?
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.
Merci, cher collègue.
La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Mon propos devrait être de nature à vous rassurer :
Exclamations sur les bancs du groupe LR
en effet, en vous écoutant, je ne reconnaissais rien du projet de loi dont je vais donc maintenant vous donner la nature.
Je tiens d'abord à vous rassurer sur le cas de la jeune fille à la pratique artistique intensive : c'est justement l'une des exceptions prévues, depuis le début, par le texte, car nous ne cherchons évidemment pas à empêcher l'instruction en famille dans certains cas particuliers justifiés.
En revanche, vous auriez tort de minimiser le phénomène auquel nous voulons mettre fin, et qui est loin, comme on pourrait le penser en vous écoutant, d'être inexistant. Savez-vous que, lorsque nous démantelons des structures clandestines, la moitié des élèves sont déclarés comme étant instruits en famille ? Et encore, cela fait à peine deux ans que nous nous sommes dotés des lois que vous avez rappelées. Il existe donc un phénomène important…
… et je suis un peu surpris que, sur les mêmes bancs où l'on nous accuse de mollesse en la matière, on fasse semblant de ne pas voir le problème ! Car il est évident qu'il y a un problème.
Il ne s'agit pas d'empêcher l'instruction en famille pour celles qui le font bien. Comme je le disais la semaine dernière, le projet de loi est un texte d'équilibre, qui prévoit des exceptions, notamment pour les pratiques sportives et artistiques intensives, et les projets pédagogiques particuliers. Il permet, surtout, de passer d'un système de vérification a posteriori, pas toujours mené uniformément, à un régime d'autorisation préalable. Cela nous permettra d'être certains que les enfants sont effectivement instruits à domicile, et non pas dans des structures intégristes, dangereuses non seulement pour la République, mais aussi pour les droits de l'enfant.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.
Monsieur le Premier ministre, EDF est le premier producteur et fournisseur d'électricité en France et en Europe, et le troisième au niveau mondial.
Pour nous, Français, cette entreprise source de technologie, d'invention, d'ingénierie et d'efficacité est une fierté. Depuis 1946, aucun Gouvernement, qu'il soit de droite ou de gauche, n'aurait osé imaginer démanteler EDF.
La semaine dernière, trois députés de bords différents, en particulier ma collègue Marie-Noëlle Battistel, vous ont interrogé à ce sujet sans obtenir de réponse.
Je vous repose donc cette question simple : monsieur le Premier ministre, envisagez-vous, à travers le projet Hercule ou un autre, de couper EDF en trois – autrement dit, de la démanteler ?
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, FI et GDR.
Je tiens à préciser le plus solennellement possible à la représentation nationale
« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe SOC
que le Gouvernement, loin d'avoir l'intention d'affaiblir ou de démanteler cette grande entreprise nationale qu'est EDF, entend, bien au contraire, l'adapter…
… et lui donner les armes pour remplir sa mission historique.
Exclamations sur les bancs du groupe GDR.
Alors, de quoi s'agit-il ?
Je commencerai en évoquant la question de l'hydroélectricité…
… chère au coeur de bien des parlementaires et sur laquelle – faut-il le rappeler à l'Assemblée nationale ? – nous sommes en contentieux depuis plus de douze ans avec la Commission européenne.
« Et alors ? » sur plusieurs bancs des groupes SOC et GDR.
Ce problème, qui l'a réglé ? Au terme des discussions avec la Commission, qui permettront à EDF de conserver ses prérogatives en matière d'hydroélectricité, nous l'aurons fait.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Nous devons aussi donner à EDF – qui est, je vous le rappelle, soumise à la concurrence d'autres entreprises au niveau européen – , les moyens de financer ses projets, comme le mix énergétique, et de continuer à investir dans les énergies renouvelables.
Exclamations sur les bancs des groupes FI et GDR.
C'est le sens du mandat donné à la ministre de la transition écologique, Barbara Pompili, et au ministre de l'économie, des finances et de la relance, Bruno Le Maire, pour les discussions en cours avec la Commission européenne.
Exclamations sur les bancs des groupes FI et GDR.
Je le répète : nous n'avons nullement l'intention de démanteler EDF, qui restera un grand groupe public. Le statut des personnels des industries énergétiques et gazières sera préservé : je m'y engage devant la représentation nationale.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Exclamations sur les bancs des groupes LR et GDR.
J'entends votre engagement, monsieur le Premier ministre, et nous allons vous aider à le tenir. En effet, nous allons déposer une proposition de loi visant à créer un référendum d'initiative partagée pour empêcher la sécabilité d'EDF.
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, FI et GDR.
Monsieur le Premier ministre, vous êtes gaulliste : il faut maintenir l'intégrité d'EDF.
Protestations sur les bancs du groupe LR.
Il est hors de question de la découper, de la démanteler. Nous en appelons donc à l'ensemble des collègues qui souhaitent protéger l'intégrité d'EDF. Pour que ce fleuron puisse continuer de vivre : nous proposons qu'un référendum d'initiative partagée permette à l'ensemble des Français et des Françaises de s'exprimer sur ce sujet. Avec 1,2 million d'entre eux, nous vous avons empêché de privatiser Aéroports de Paris, décision qui se serait révélée catastrophique ; nous vous empêcherons aussi de démanteler EDF, quelle que soit la manière dont vous entendez le faire.
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, FI et GDR. – MM. Jean-Louis Bricout et Hubert Wulfranc se lèvent et applaudissent, suivis par plusieurs députés du groupe SOC.
Toutes et tous, dans l'hémicycle, avons salué l'engagement des élus locaux dès le premier jour de la pandémie. Nous connaissons, monsieur le Premier ministre, votre attachement aux territoires ;
Exclamations sur les bancs du groupe LR
vous avez d'ailleurs souligné à de très nombreuses reprises le rôle clé des collectivités, et vous souhaitez que la relance soit territorialisée.
Cependant, même si l'impact est moindre que nous l'avions craint initialement, les conséquences de la crise sur les finances des collectivités territoriales sont violentes et représentent 3 % à 4 % des recettes réelles de fonctionnement. Grâce aux quatre textes budgétaires adoptés dans l'hémicycle, un effort considérable est fourni par notre majorité pour apporter aux collectivités territoriales un soutien inédit de près de 7 milliards d'euros, sous forme de compensations, d'avances et de soutien à l'investissement.
La relance que nous impulsons doit se faire avec les collectivités, qui supportent pas moins de 60 % de l'investissement public. Nous devons donc leur apporter de la visibilité sur leurs futures ressources : dans cette optique, vous avez signé, en septembre, un accord avec les régions. Il leur permettra de voir leurs recettes augmenter significativement en 2021. Les départements ont également obtenu un soutien très important de l'État pour faire face à l'augmentation prévisible de leurs dépenses sociales. Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous apporter des précisions sur l'accord signé ce week-end avec les départements ?
Enfin, ne faudrait-il pas aller plus loin pour apporter plus de visibilité au bloc communal ?
C'est maintenant que les élus locaux adoptent leur budget ; c'est maintenant qu'ils décident d'augmenter ou non leurs investissements ; c'est donc maintenant qu'il faut leur donner de la visibilité, car nous devons agir tous ensemble, avec les collectivités territoriales, si nous voulons réussir la relance.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Merci de cette importante question : elle me permet d'évoquer dans cet hémicycle le sujet majeur que constituent les finances des collectivités territoriales.
Je voudrais tout d'abord m'associer à vos propos en rappelant à quel point, depuis le début de la crise sanitaire, ces collectivités se sont mobilisées, combien l'impact sur leurs finances, comme du reste sur celles de l'État, a été fort, et surtout quelle solidarité ce Gouvernement, cette majorité, leur manifestent.
Je souhaiterais également vous remercier et vous féliciter, monsieur Cazeneuve, des travaux considérables que vous avez menés, au nom de l'Assemblée nationale, sur ce sujet essentiel.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Vous m'avez ainsi remis au mois de juillet un rapport extrêmement précieux, …
… nourri, concernant les conséquences de la covid-19 sur les finances des collectivités territoriales : je vous en remercie encore, car il inspire la ligne de conduite du Gouvernement.
Notre objectif est double. Il réside d'une part dans un effort de solidarité financière envers les collectivités locales : la solidarité, c'est la réponse de l'État à tous ceux qu'affecte cette crise. Il consiste d'autre part à nous tourner vers l'avenir et, une fois que nous aurons restauré les capacités d'autofinancement de ces collectivités, à leur permettre de concourir, aux côtés de l'État, à la relance par laquelle notre économie pourra renouer avec la croissance.
Vous l'avez dit : j'ai commencé par signer, en septembre, un accord avec Régions de France. Il y avait urgence, car les recettes des régions se ressentiront de la baisse significative des impôts de production, notamment de la CVAE, la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, prévue par le plan de relance. La représentation nationale a bien voulu retenir une base favorable, permettant aux régions de gagner 300 millions d'euros dans la compensation de cette baisse de la CVAE ; moyennant quoi j'ai obtenu, dans le cadre de cet accord, qu'elles s'associent à l'État à hauteur d'au moins 10 milliards afin de participer à la relance. Cela va être décliné dans les semaines et les mois à venir.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
S'agissant des départements, qui font l'objet de votre question, j'ai signé à La Rochelle…
… un accord de méthode avec le président de l'Assemblée des départements de France. Cet accord concerne entre autres un abondement du fonds de péréquation des DMTO, les droits de mutation à titre onéreux, qui atteindra ainsi 1,6 milliard en 2021 ; la disposition figure au sein du projet de loi de finances pour 2021. Il a également été décidé de porter le fonds de stabilisation de 115 millions en 2020 à 200 millions en 2021. Les départements aussi prendront donc part à l'effort de relance, grâce à des comités départementaux de relance auxquels je tiens tout particulièrement à ce que les parlementaires soient étroitement associés.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Reste le bloc communal. Jacqueline Gourault et Olivier Dussopt animent, avec des représentants de l'Assemblée, du Sénat et, bien sûr, des associations d'élus, un groupe de travail consacré à la question des finances des communes et intercommunalités. Je peux vous assurer de l'entier soutien du Gouvernement à l'amendement que vous déposerez en vue de reconduire en 2021 le filet de sécurité pour les recettes fiscales des communes et communautés de communes.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – « Allô ? » sur plusieurs bancs du groupe LR.
Monsieur le Premier ministre, le coronavirus a-t-il muté ? Y a-t-il aujourd'hui deux formes de covid-19 en France ? Si je vous le demande, c'est parce que ce virus se comporte décidément de manière bien étrange.
Il y a dix jours, pour le Black Friday, tous les magasins du boulevard Haussmann étaient bondés : pourtant, le covid-19 ne s'y propageait pas. Ce week-end, les chalands ont fait la queue devant Zara : le virus se tenait sagement dans son coin. En revanche, il existe des lieux où il se répand, se déchaîne, sort ses griffes et ses crocs ; des lieux où le masque, le gel, la distance ne protègent plus.
… il surgit soudain, il bondit. Pourquoi justement dans ces endroits ? Comment expliquez-vous ce mystère de la science ?
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement.
Votre question portant essentiellement sur le secteur de la culture, je vous prie d'excuser le retard de Roselyne Bachelot, qui nous rejoindra dès que possible : …
… elle se trouve actuellement au Sénat, en raison de la nouvelle lecture du projet de loi relatif à la restitution de biens culturels à la République du Bénin et à la République du Sénégal.
Cependant, vous n'avez que peu évoqué les lieux culturels ; ce qui sous-tendait votre question, c'était l'impression d'une certaine incohérence dans les décisions prises pour lutter contre l'épidémie.
Exclamations sur les bancs du groupe FI.
Il est vrai que nous découvrons cette épidémie, qu'elle se révèle difficilement contrôlable dans tous les pays du monde, ce qui rend compliqué de prendre des mesures compréhensibles par tous.
En revanche, s'il faut chercher une cohérence et une constance chez vous, elle réside dans votre opposition systématique aux mesures qui, dans l'état de nos connaissances, permettent de protéger les Français !
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Protestations sur les bancs du groupe FI.
Vous étiez contre le couvre-feu, contre la fermeture des restaurants, de tous les lieux où nous savons que le coronavirus se propage ; vous êtes désormais contre le vaccin. C'est votre conception de la cohérence, ce n'est pas la nôtre. Non, monsieur Ruffin, nous ne considérons pas, comme vous, qu'il faudrait tout rouvrir d'un coup ! Ce serait le meilleur moyen que l'épidémie reparte. Vous ne ferez pas de nous, comme vous l'êtes, des pompiers pyromanes !
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem. – Protestations sur les bancs du groupe FI.
Est-ce que vous mesurez ce que vous dites ? Nous parlons d'un secteur qui est en train de crever ! Le Premier ministre ne daigne pas prendre la parole ; la ministre de la culture n'est pas là ; vous-même, vous n'avez pas eu un mot pour la culture : c'est dire votre mépris pour elle.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI – Protestations sur les bancs du groupe LaREM.
En trois ans, que peut-on retenir de votre politique culturelle ? Un bingo du patrimoine !
Mêmes mouvements.
La vérité, monsieur le Premier ministre, c'est que pour vous, les macronistes, l'économie passe avant la vie, y compris la vie de l'esprit.
La vérité, c'est que vous redoutez la circulation d'autres virus : les idées ! Quel rêve pour vous, marcheurs, start-uppeurs, ces Français qui travaillent, consomment et restent devant leurs écrans ! C'est ce qui m'effraie le plus chez Emmanuel Macron : il veut des femmes et des hommes qui fonctionnent sans perte de temps, c'est-à-dire sans perte d'argent. L'humanité se trouve dans la tendresse, la colère, l'espoir, le temps perdu, le dysfonctionnement ! Les idées, la culture, font douter de votre sainte trinité : productivité, compétitivité, rentabilité !
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Elles font naître d'autres espérances que le PIB ! Bref, dans votre nouveau monde, elles constituent une nuisance.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI. – Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
M. le président coupe le micro de l'orateur, qui continue à s'exprimer.
Vous nous accusez de faire passer l'économie d'abord. Dans toutes nos décisions, nous faisons passer la santé d'abord ; nous avons d'ailleurs parfois été critiqués pour cela !
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Avec vous, il s'agit toujours de démagogie, de critiques sans fondement. Ce qui transparaît dans toutes vos questions, c'est que vous ne voulez pas que nous arrivions à nous en sortir !
Citez-moi les pays d'Europe où les lieux culturels sont actuellement ouverts : leur nombre est très restreint.
« Eh oui ! » sur les bancs du groupe LaREM.
Citez-moi d'autres pays européens qui soutiennent autant que nous le secteur culturel : là encore, il y en a très peu, voire aucun. Nous lui avons accordé 7 milliards d'euros, la prolongation des droits des intermittents du spectacle pendant un an, la compensation de la jauge des billetteries, des dispositifs de soutien supplémentaires face à la situation actuelle. Nous sommes au rendez-vous, car la culture fait partie de notre identité. Nous la défendons mieux que vous !
Vifs applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.
Monsieur le Premier ministre, vous venez de présenter en Conseil des ministres le projet de loi que vous intituliez il y a peu « contre les séparatismes » et aujourd'hui « confortant les principes républicains ». Ces tergiversations concernant son titre démontrent votre incapacité à vous saisir du sujet de la lutte contre la radicalisation, particulièrement dans le sport, qu'évoque sommairement l'article 25.
« Très bien ! » sur quelques bancs du groupe LR.
Pourtant, vous n'ignorez pas les tentatives de noyautage d'abord insidieuses, puis décomplexées, voire agressives, dont des clubs et des organisations sportives font l'objet de la part de mouvements religieux communautaires, politisés, radicalisés. Elles ne cessent de croître : …
Approbation sur plusieurs bancs du groupe LR.
… non-respect des tenues réglementaires, comme dans le cas des footballeurs arborant un collant sous leur short, refus de la mixité, port de signes ostentatoires, prières organisées au sein d'enceintes sportives, entraînements et compétitions soumis au calendrier religieux ; cette liste n'est pas exhaustive.
« Eh oui ! » et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.
Face à cette radicalisation islamiste, le milieu sportif se trouve livré à lui-même, désemparé, impuissant, les bénévoles et les dirigeants dépassés, tétanisés. Les clubs de sport deviennent parfois des lieux d'embrigadement et – n'ayons pas peur des mots – d'aguerrissement.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.
En 2019, 1 270 individus figurant dans le FSPRT, le fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste, les fréquentaient assidûment, certains même en tant qu'éducateurs sportifs.
Un rapport parlementaire rédigé par deux députés, dont mon collègue Éric Diard, a récemment constaté l'ampleur menaçante de ce fléau ; néanmoins, même le ministère chargé des sports semble n'en avoir pas pris la mesure, préférant opter pour le déni. La demande d'entretien de nos deux rapporteurs n'a pas reçu de suite.
Exclamations sur les bancs du groupe FI.
Je vous le demande, monsieur le Premier ministre : laisserions-nous nos enfants, nos petits-enfants, entre de telles mains ? Cette posture n'est plus acceptable. À dix-huit mois de la fin du mandat présidentiel, …
… quelles mesures concrètes, quels contrôles entendez-vous enfin décider pour lutter contre ce phénomène croissant de radicalisation dans le sport ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Il s'agit d'une vraie question, que vous avez raison de poser. Nous avons bien sûr lu le rapport auquel vous faites référence ; une réponse est nécessaire, et cette réponse passe d'abord par l'affirmation de ce que doit être le sport. Ses valeurs sont celles de la République : engagement, respect d'autrui, respect des lois.
Les mesures à venir sur ce sujet résultent de deux éléments nouveaux. D'une part, l'élargissement du ministère de l'éducation nationale à la jeunesse et aux sports…
… nous a dotés de moyens d'inspection et de références telles que le Conseil des sages de la laïcité, …
… qui élaborera désormais le vade-mecum et les règles en la matière, ainsi que la formation des équipes chargées des contrôles. D'autre part, le projet de loi confortant les principes républicains prévoit des dispositifs grâce auxquels nous contrôlerons beaucoup mieux ce qui se passe dans les clubs : outre les normes et les contrôles, il existera en particulier un agrément…
… qui sera retiré au club, signifiant pour lui la perte de ses subventions, en cas de constat d'une violation des principes de la République.
Alors que la fin de l'année approche, monsieur le Premier ministre, l'heure n'est pas encore à la fête en France. Pourtant, de Marseille au Calvados en passant par Strasbourg, les Français de 7 à 77 ans ne demandent qu'à retrouver une vie normale, à se retrouver.
« Eh oui ! » sur quelques bancs du groupe LR.
Ils ont soif de liberté, de festivité, de redonner de la vie aux jours. La France s'ennuie, d'où la multiplication des soirées clandestines organisées avec une insouciance certes compréhensible, mais que l'on ne peut tolérer, et surtout avec une inconscience qui donnera lieu à des clusters. Ces fêtes interdites, hors de contrôle, balaieront tous nos efforts collectifs pour juguler l'épidémie. Ce fut le cas cet été, en dépit de nos alertes : nous en subissons toujours les conséquences !
L'heure n'est pas encore à la fête en France. Pourtant, les salles privées et les loueurs de matériel sonore croulent sous les demandes tous les week-ends, et plus encore en vue du 31 décembre ! Ces organisateurs ne sont pas des rebelles en quêtes de liberté, mais des irresponsables qui, en ne voyant pas plus loin que l'appât du gain, retardent notre libération à tous. Dans le même temps, la colère et l'amertume montent chez les Français qui se privent, chez les professionnels qui savent encadrer la fête, mais qui ne peuvent toujours pas exercer. Si l'interdiction est la règle, elle doit l'être pour tous. Ils ne comprennent pas notre déni, notre manque d'anticipation ; ils ne conçoivent pas que l'illégalité devienne la norme, que les matériels sonores ne soient pas saisis, qu'il n'y ait pas davantage de sanctions.
Il est urgent de prévenir, de responsabiliser, d'interdire, de contrôler, de sanctionner, d'agir et non de réagir, de cesser d'être spectateurs. L'heure n'est pas à la fête : pour que la fête ait lieu en 2021, pour qu'elle soit belle, nous devons, cette année, nous l'interdire. Par conséquent, monsieur le Premier ministre, quelles sont donc les mesures envisagées ?
« Excellent ! » et applaudissements sur les bancs du groupe Dem.
Je vous assure, monsieur Blanchet, que l'envie de lendemains chantants, voire dansants, est largement partagée par nos concitoyens – fussent-ils âgés de 77 ans – , par les députés de l'ensemble des bancs de l'hémicycle, ainsi que par le Gouvernement.
Exclamations sur quelques bancs du groupe LR.
Mais comme vous, le Gouvernement fait face à une crise sanitaire qui demeure très préoccupante, ainsi que vous l'avez rappelé. En témoignent d'ailleurs les choix de nos voisins européens que certains, ici, érigeaient en modèles il y a encore quelques semaines. Les efforts de nos concitoyens payent : ils ont permis, avec l'ensemble des mesures prises, de faire chuter le taux d'occupation des lits de réanimation par des patients atteints du covid-19. Nous nous trouvons toutefois dans une situation épidémique en plateau, qui nous oblige à la prudence.
Nos concitoyens ont besoin de se retrouver. Ils ont parfois profité du confinement pour créer de nouvelles solidarités, pour échanger différemment. Certes, cela ne remplace pas la possibilité de se serrer dans les bras l'un de l'autre, mais il me semble que le meilleur cadeau que l'on puisse offrir, ce Noël, est…
… de protéger nos proches et tous ceux qui nous sont chers. Vous en conviendrez : l'État ne peut pas – et il ne veut pas – s'inviter aux fêtes de Noël. Nous ne pouvons que nous en remettre à la compréhension de chacun et, par-delà les bancs de cet hémicycle, à la conscience de la gravité du moment. Si une tolérance a été prévue pour les retrouvailles familiales, dont nous avons besoin, une réouverture des établissements recevant du public n'est pas envisageable à ce jour. Nous mesurons le sacrifice que cela représente. Le virus se diffuse dans les lieux fermés, lorsque l'on est proche les uns des autres, en particulier après certaines heures de la nuit. Le Gouvernement a pris des mesures de soutien exceptionnel aux discothèques mais ce qu'il faut aujourd'hui, c'est que chacun prenne la mesure du moment. Les fêtes clandestines ne doivent plus se tenir non plus tant que la situation reste aussi tendue qu'aujourd'hui. Les contrôles seront donc renforcés, comme l'a rappelé M. le ministre Gérald Darmanin. Néanmoins, le meilleur contrôle sera celui que chacun assurera lui-même.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Monsieur le Premier ministre, votre gouvernement a fait le choix délibéré de sacrifier la culture. Cela devient une marque de fabrique : on se souvient du sort fait aux librairies, voici désormais jeté à bas le travail engagé en vue de la réouverture des salles. Tout cela serait donc à ranger sur l'étagère de ce qui est non essentiel – sauf lorsque cela peut s'acheter dans les grands magasins ou sur les plateformes en ligne. Vous avez un sérieux problème de logiciel : nul ne méconnaît le risque sanitaire lié au virus mais, parmi d'autres, cette décision n'est pas défendable. Comment peut-on faire expressément de la culture la cible des mesures les plus implacables ?
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.
Comment peut-on continuer plus longtemps à vivre bien sans la rencontre, sans le partage, sans l'émotion, sans l'imaginaire, sans l'interrogation, sans le plaisir, sans l'émancipation que nous apportent la création et la représentation artistiques ? Ce mal n'attaque peut-être pas les corps mais il atrophie les esprits, il diminue l'humain dans l'être, il replie et il isole. La culture nous est essentielle pour affronter des épreuves et imaginer en sortir, pour mettre des mots, des sons et des formes sur ce que nous vivons, pour faire humanité. Un pays qui ne danse plus, ne chante plus, ne se regarde plus, ne se parle plus, ne s'émerveille plus, ne se rêve plus, est un pays qui dépérit.
Partout se sont tenus ce midi des rassemblements ; il y avait du monde sur la place de la Bastille. Ce matin, des propositions vous ont de nouveau été faites. Les actrices et les acteurs du monde de la culture veulent travailler. S'ils expriment la détresse d'un tissu économique insuffisamment soutenu, ils disent d'abord leur souffrance de ne pas pouvoir assurer le partage vital dont ils avaient pourtant créé les conditions. Jusqu'à quand ? Cette fin d'année 2020 si éprouvante promettait de nous laisser goûter de nouveau à ce vent frais. Vos décisions ont eu un effet dévastateur ; si elles ont déjà causé du tort, il est encore temps néanmoins d'y revenir. Nous vous le demandons, nous le revendiquons.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR – Mme Mathilde Panot applaudit aussi.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement.
Je vous prie à votre tour d'excuser le retard de ma collègue Roselyne Bachelot, qui se trouve au Sénat et qui nous rejoindra. De votre question, je comprends qu'il est un point sur lequel nous nous retrouvons : la culture fait partie de notre identité, et tirer un trait sur la culture reviendrait à tirer un trait sur un part de nous-mêmes.
Nous refusons de faire ce choix. Sans revenir sur les dispositifs que j'ai présentés précédemment lors de ma réponse à M. Ruffin, je voudrais rappeler que c'est la raison pour laquelle nous avons développé un soutien massif en faveur des acteurs de la culture depuis le début de la crise. À la fin du mois de novembre, le Président de la République a annoncé une stratégie en plusieurs étapes, dans l'objectif de donner de la visibilité à l'ensemble des acteurs de notre pays.
À l'époque, cette stratégie a été saluée par certains partis politiques y compris, je crois, La France insoumise. Nous ne vous avons pas entendu, alors, monsieur le député, remettre en question le fait que la deuxième étape ne pourrait être franchie que si nous maîtrisions l'épidémie et réduisions le nombre de contaminations à 5 000 par jour.
Exclamations sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe FI.
Cette question n'a pas été abordée sur ces bancs, et le Gouvernement n'a pas été interpellé à ce sujet.
Force est de constater, aujourd'hui, que l'objectif de 5 000 contaminations par jour et de maîtrise de l'épidémie n'est pas atteint. Dès lors, nous avons eu un choix à faire. Nous aurions pu, comme vous semblez nous y inciter, considérer que le critère de maîtrise de l'épidémie ne comptait plus et que nous pouvions franchir une nouvelle étape en faisant fi des conditions que nous y avions posées.
Ce n'est pas le choix que nous avons fait.
Je vous le dis, monsieur le député : lorsque nous nous levons le matin, nous ne sommes pas heureux de fermer des théâtres et des salles de cinéma. Nous nous levons le matin après avoir rêvé de pouvoir les rouvrir.
C'est en ce sens que nous travaillons avec les acteurs de la culture. Vous indiquez qu'ils ont fait de nouvelles propositions : c'est justement parce que nous les réunissons. Roselyne Bachelot travaille ces jours-ci avec eux pour préparer leur réouverture et adapter le soutien que nous leur apportons.
Exclamations sur les bancs du groupe FI.
Nous continuerons d'être au rendez-vous.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Monsieur le Premier ministre, le 9 novembre dernier, l'Azerbaïdjan et l'Arménie ont signé, sous l'égide de la seule Russie, un accord de cessez-le-feu dans le conflit du Haut-Karabakh. J'ai une première question : pourquoi la France, pourtant membre du Groupe de Minsk, n'était-elle pas à la table des négociations ? L'accord signé entérine les victoires azerbaïdjanaises.
Le statut de ce qu'il reste de la République de l'Artsakh demeure flou. Dans ces conditions – c'est ma deuxième question – , pouvez-vous nous expliquer ce qu'a voulu dire le chef de l'État lorsqu'il a déclaré : « Un travail devra être mené pour définir les paramètres d'un règlement politique durable du conflit, qui assure le maintien dans de bonnes conditions des populations arméniennes au Haut-Karabakh » ? L'Assemblée nationale et le Sénat ont donné leur vision de ces fameuses bonnes conditions en invitant le Gouvernement à reconnaître l'indépendance du Haut-Karabakh. C'est ma troisième question : allez-vous entendre les parlementaires quasiment unanimes des deux chambres ? Enfin, le président Erdogan est allé signer sa victoire avec son allié Alyiev lors d'une parade militaire à Bakou.
Exclamations sur quelques bancs LR.
Il y a fait l'éloge de l'un des génocidaires de 1915. Qu'est-ce qui justifie dès lors votre mutisme ?
Il y a quelques jours, je me suis rendu à Stepanakert avec Isabelle Santiago. Tous nos interlocuteurs, le président de la République d'Artsakh en tête, nous ont fait part de leur attente vis-à-vis de notre pays. La France entretient un lien séculaire avec le peuple arménien.
Approbations sur plusieurs bancs LR.
C'est le moment de ne pas détourner la tête. Les nouveaux empires testent nos réactions. Les cartes de la puissance sont redistribuées. Hier, les Kurdes ont été abandonnés ; aujourd'hui, les Arméniens ; demain, qui : les Chypriotes ? Monsieur le Premier ministre, votre silence n'est pas une option.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe GDR.
Monsieur Faure, j'ai entendu quant à moi le ministre des affaires étrangères d'Arménie, qui est venu me rencontrer il y a trois jours. Nous avons eu une longue conversation et avons tenu une conférence de presse.
Il venait, au nom du gouvernement arménien et de son Premier ministre Nikol Pachinian, nous remercier de l'action de la France et remercier le Président de la République de sa détermination. Il venait me dire également qu'il fallait faire respecter l'accord du 9 novembre, que l'Arménie a signé, et que son pays comptait sur la France pour contribuer à la stabilisation de la situation. Il compte aussi sur la France, à titre personnel – et ces propos sont publics, monsieur Faure – pour rester membre de la coprésidence du Groupe du Minsk, indispensable pour la suite. Voilà ce qu'il m'a dit ! Je compte sur les autorités arméniennes pour donner le point de vue des Arméniens : cela me paraît naturel, et la base de la compréhension diplomatique.
Au-delà de ces éléments, des sujets sont sur la table, notamment celui de la consolidation du cessez-le-feu. Il est vrai que les déclarations provocatrices qui ont été faites il y a quelques jours à Bakou sont inacceptables. Le cessez-le-feu n'est pas encore tout à fait consolidé ; il doit l'être. Il nous faut aussi poursuivre notre action pour faire en sorte que les personnes déplacées puissent retourner vivre dans le Haut-Karabakh. Il faut également que l'ensemble des milices extérieures se retirent de la région. Nous agissons actuellement en ce sens…
… et notre action comprend un volet humanitaire très important ; deux nouveaux avions partiront ainsi avant Noël à Erevan. Enfin, une discussion politique doit être abordée avec les différents acteurs, dans le cadre du Groupe de Minsk, qui est mandaté pour le faire. C'est la raison pour laquelle ses représentants sont en ce moment même à Erevan.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe Dem.
Monsieur le Premier ministre, les négociations du Brexit nous font craindre un no deal le 1er janvier 2021, qui entraînerait le durcissement de nos relations économiques avec le Royaume-Uni. Cette situation est particulièrement à craindre sur le plan maritime, au-delà de l'épineuse question de la pêche, car le Premier ministre britannique Boris Johnson a confirmé sa volonté de créer jusqu'à dix ports francs outre-Manche d'ici la fin de l'année 2021. Ces ports francs devraient bénéficier de règles fiscales et sociales avantageuses. L'objectif avoué est de faire en sorte que les ports britanniques profitent du Brexit.
Vous en conviendrez, monsieur le Premier ministre, Londres ne doit pas devenir une enclave logistique et industrielle aux portes du marché européen. Pour éviter ce scénario, la France doit être une porte pour l'Europe. À cet effet, le groupe Agir ensemble a soumis au Gouvernement une proposition relative à la création de zones économiques spéciales – ZES – dans le cadre du plan de relance. Nous avons proposé que ces zones soient installées à proximité des aéroports, des ports maritimes et des gares de fret pour encourager l'implantation d'activités d'intérêt stratégique liées à la transition écologique, de la métropole aux outre-mer. Cette proposition permettrait à la fois de lutter contre les effets économiques délétères qui suivront le Brexit, de relancer économiquement notre pays et de décarboner notre industrie pour la rendre plus compétitive dans l'économie de demain.
J'ai déjà pu mesurer l'intérêt de ce dispositif dans mon territoire à Dunkerque, tout comme mes collègues Agnès Firmin Le Bodo au Havre et Jean-Charles Larsonneur à Brest. Il s'agit d'inscrire la France, au travers de ses ports, dans un schéma économique compétitif et durable. Je rappelle également que, lors de sa dernière visite à Calais, M. le Président de la République avait accepté le principe de la création de zones économiques spéciales sur le littoral. Aussi, monsieur le Premier ministre, quelle appréciation portez-vous sur l'opportunité de créer ces zones économiques spéciales pour répondre à la crise économique et environnementale ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Agir ens.
Cher Paul Christophe, le Président de la République a été clair, le 14 juillet dernier : la France est une puissance maritime de premier plan et va renforcer ses moyens pour se hisser à la hauteur de ses ambitions. Celles-ci – vous les connaissez – sont triples : renforcer la compétitivité et la souveraineté de nos ports, en faire des acteurs de l'intermodalité et du développement économique de nos territoires et accélérer le verdissement et la transition numérique du secteur.
Exclamations sur quelques bancs du groupe LR.
Vous m'interrogez plus spécifiquement, compte tenu de la période, sur les impacts du Brexit sur nos ports maritimes français. Je vous confirme que nous suivons évidemment ce sujet avec attention. Pour le moment, nous n'avons pas retenu l'option des ports francs ou des zones économiques spéciales, à la différence du Royaume-Uni, mais nous proposerons plusieurs mesures dans le cadre de la stratégie qui sera présentée à la rentrée.
Je vous rappelle que nous avons déjà mis en oeuvre plusieurs mesures, prévues notamment dans la feuille de route présentée lors du CIMER – comité interministériel de la mer – en fin d'année 2019 et que nous approfondissons aujourd'hui. Depuis cet été, nous avons mis les bouchées doubles. En septembre, nous avons ainsi annoncé des investissements massifs dans le cadre du plan de relance, dont 400 millions d'euros seront dédiés aux secteurs maritime et fluvial et 200 millions à la création d'autoroutes de fret ferroviaire permettant de relier les grands ports entre eux – Calais et Sète notamment, mais aussi Cherbourg ou Dunkerque, cher à votre coeur monsieur le député. En octobre, la ministre de la mer et le ministre délégué chargé des transports ont signé avec des partenaires sociaux une charte portuaire, dans laquelle l'ensemble de la chaîne logistique s'engage pour renforcer les ports français. En novembre enfin, nous avons posé de nouveaux jalons sur le projet Haropa, en nommant notamment un directeur général préfigurateur. Les discussions se poursuivent pour approfondir ce projet portuaire majeur. Vous le savez, la stratégie nationale sera présentée en début d'année prochaine. Elle a fait l'objet d'une concertation avec l'ensemble des acteurs et le ministre délégué chargé des transports a confirmé que la représentation nationale serait bien sûr associée au suivi de ces travaux. Nous aurons alors tous les atouts pour que vole haut le pavillon français.
Madame la ministre du travail, l'an dernier déjà, la réforme de l'assurance chômage était très mal engagée. Le Gouvernement avait décidé de reprendre la main après l'échec des négociations entre les partenaires sociaux – un échec au demeurant inévitable, tant la feuille de route que vous leur aviez adressée était intenable. Dès le départ, nous avions été nombreux à souligner les effets pervers de cette réforme qui semblait répondre à un seul objectif, celui de l'optimisation budgétaire, avec une approche purement comptable ne tenant aucun compte des impératifs de solidarité et de justice sociale.
Avant même la publication des décrets, une note de l'UNEDIC est venue corroborer nos craintes en confirmant les importantes économies engendrées par la réforme, mais en montrant aussi ses impacts négatifs sur le montant de l'allocation, la durée de l'indemnisation et, surtout, la difficulté à accéder à l'assurance chômage, avec une aggravation annoncée de la précarité. À l'époque, la situation économique et les chiffres du chômage étaient par essence meilleurs qu'aujourd'hui, puisque, entre-temps, une crise sanitaire, économique et sociale sans précédent est venue tout balayer.
Cette réforme qui était très mal engagée est aujourd'hui complètement caduque. Si elle l'est en raison du fait que le Conseil d'État a annulé certaines dispositions, elle l'est aussi par nature, car elle n'est plus adaptée à la situation. Au lieu d'aller de report en report et de pousser les partenaires sociaux à reprendre les échanges alors qu'ils y sont opposés, nous vous le demandons à nouveau, en un mot : abandonnez cette réforme !
Les chiffres du chômage sont durablement dégradés et la pauvreté explose. Dans un contexte à ce point anxiogène, il est fondamental d'offrir des perspectives rassurantes à nos concitoyennes et à nos concitoyens, à celles et ceux qui se sont retrouvés du jour au lendemain sans travail, à ceux qui n'ont pas pu signer ou renouveler leur contrat, à ceux qui savent leur emploi menacé. Madame la ministre, nous vous le demandons : abandonnez cette réforme injuste et obsolète !
Applaudissements sur les bancs du groupe LT et sur quelques bancs des groupes FI et GDR.
La parole est à Mme la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion.
Je n'ai pas de leçons à recevoir sur l'attention portée aux demandeurs d'emploi et aux plus fragiles durant la crise sanitaire, économique et sociale que nous traversons.
Exclamations sur quelques bancs des groupes SOC et GDR.
Je vous rappelle que nous avons décidé de proroger les droits des demandeurs d'emploi qui arrivaient en fin de droits pendant le confinement – très concrètement, les demandeurs d'emploi dont les droits auraient dû s'arrêter en novembre ou en décembre 2020 les verront prolongés jusqu'à fin janvier 2021. Nous avons décidé d'allonger de la durée du confinement la période de référence pour le calcul de l'allocation chômage. Nous avons décidé une aide exceptionnelle portant à 900 euros par mois pendant quatre mois la rémunération de ceux qui peuvent être fragilisés par la crise, je pense en particulier aux saisonniers ou à ceux qui enchaînaient les contrats courts. Nous avons décidé de prendre en charge au titre de l'activité partielle les saisonniers des stations de ski qui ne pourront pas démarrer la saison normalement. Nous avons également instauré un bouclier anti-licenciements massif, avec les dispositifs d'activité partielle et d'activité partielle de longue durée qui mobiliseront 30 milliards d'euros en 2020 et plus de 10 milliards en 2021.
Je vous confirme que le Gouvernement souhaite néanmoins poursuivre la réforme de l'assurance chômage.
Exclamations sur les bancs du groupe GDR.
Ce n'est pas une surprise, puisque c'est inscrit dans l'agenda social que nous avons partagé avec les partenaires sociaux dès le mois de juillet. Cette réforme vise aussi à lutter contre la précarité pouvant résulter d'un recours excessif aux contrats courts, et à assurer plus d'équité dans le calcul de l'allocation chômage. Nous allons donc poursuivre cette réforme, en adaptant naturellement les paramètres dans la concertation avec les partenaires sociaux afin de tenir compte du contexte actuel.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Ma question, à laquelle j'associe mon collègue Yannick Haury, s'adresse à Mme la ministre de la transition écologique.
Le Président de la République a réuni hier la Convention citoyenne pour le climat afin de faire le point sur les 149 propositions faites au printemps par des Français tirés au sort. Cette rencontre a notamment permis d'ouvrir la perspective d'un référendum pour inscrire la lutte pour le climat et la préservation de l'environnement dans la Constitution. Cette consultation permettra ainsi de placer l'écologie au coeur du droit, des lois et de la République. Nous ne pouvons que nous réjouir de cette démarche à l'heure où, selon l'Organisation mondiale de la santé, environ 100 000 Français décèdent chaque année de maladies chroniques liées à l'environnement, ce qui représente 14 % de la mortalité enregistrée pour une seule année.
La dégradation de l'environnement constitue en effet l'une des toutes premières causes de mortalité. Au cours des derniers mois, j'ai eu l'honneur de présider une commission d'enquête sur les politiques publiques de santé environnementale. Le constat a été fait que nos politiques publiques en la matière paraissent encore bien insuffisantes pour répondre à ces enjeux. Les soixante-quatre auditions auxquelles nous avons procédé ont permis de dresser un large état des lieux de nos politiques et d'en identifier les pistes d'amélioration, notamment dans la gouvernance nationale ou territoriale. Ce travail s'inscrit en complémentarité du quatrième Plan national santé environnement – PNSE4 – , dont la consultation publique vient de prendre fin. Madame la ministre, comment envisagez-vous de mieux intégrer la santé environnementale au sein des politiques publiques françaises ?
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
En tant que parlementaire, puis en tant que ministre, j'ai pu constater à quel point vous êtes investie sur ce sujet qui est effectivement majeur. Les chiffres que vous mentionnez sont éloquents et démontrent l'importance d'agir maintenant pour améliorer la santé de nos concitoyens. À ce titre, vous l'avez dit, nous sommes en train de finaliser le quatrième Plan national santé environnement. Il se distinguera de ceux qui l'ont précédé dans la mesure où nous avons souhaité, conjointement avec Olivier Véran, proposer une approche systémique de la santé environnementale. Nous prévoyons donc un plan chapeau qui couvrira l'ensemble des politiques publiques et donnera une cohérence globale, ce qui me semble le plus important.
Concrètement, nous allons poursuivre trois objectifs : approfondir les connaissances sur les effets de l'environnement sur la santé – nous en avons besoin ; permettre à chaque citoyen de mieux connaître les risques auxquels il est exposé, afin de mieux agir pour réduire son exposition aux polluants et nuisances du quotidien ; enfin, mobiliser les collectivités pour développer des actions concrètes au sein des territoires.
Ce quatrième Plan national santé environnement sera finalisé entre février et mars. Ce délai nous permettra notamment de prendre en compte les propositions faites par la commission d'enquête que vous avez présidée, mais aussi les conclusions que nous pourrons tirer de la pandémie de covid-19, car je crois beaucoup à l'approche « Une seule santé » qui traduit l'importance du lien entre santé humaine et animale et, plus globalement, entre le bon état de la biodiversité et notre santé. Vous le voyez, nous sommes mobilisés pour améliorer la santé des Français et je sais pouvoir compter sur votre engagement plein et entier.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Monsieur Le Drian, madame Parly, combien de temps allez-vous continuer à mentir devant la représentation nationale ?
Protestations sur les bancs du groupe LaREM.
En février dernier, je vous ai interrogée, madame la ministre des armées, au sujet du site gazier de Balhaf, situé en territoire yéménite et occupé par l'armée émiratie. Selon plusieurs ONG, mais aussi selon l'ONU, ce site appartenant en partie à Total servirait de lieu de détention secret permettant la pratique de la torture et d'exécutions sans procès. Mme Parly m'avait répondu n'avoir aucun élément relatif à cette affaire, prétendant même ne pas avoir lu l'article que le journal Le Monde venait précisément d'y consacrer. En septembre, j'ai de nouveau fait part de mes interrogations au ministre Le Drian. Sa réponse ne manquait pas de sel : « Nous vous renvoyons vers les entreprises concernées »… On se demande à quoi sert le corps diplomatique !
Aujourd'hui, face à la cécité du Gouvernement, je me fais donc la porte-voix des cinquante et un parlementaires qui, à l'initiative de mon collègue Hubert Laferrière, vous ont adressé un courrier demandant que toute la lumière soit faite sur ce qu'il se passe réellement à Balhaf. À la création du site, l'État français avait garanti un crédit au consortium dont fait partie Total, pour un montant de 216 millions d'euros. C'est dire si nous sommes en droit de demander des comptes, sous peine d'être clairement complices de ce qui passe sur ce site.
Plus de dix mois après les premières alertes, prétendez-vous toujours n'être au courant de rien, alors même qu'un rapport de la Direction du renseignement militaire – DRM – montre l'inverse, c'est-à-dire que vous savez ! Dans cette affaire, c'est la responsabilité de la France qui est engagée. Comment pouvez-vous couvrir des crimes de guerre ?
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Il y a quelques jours, c'est un tortionnaire de son peuple, le président égyptien Sissi, que vous avez décoré de la Légion d'honneur. Aujourd'hui, votre silence vient recouvrir d'une chape de lâcheté les exactions commises par les Émirats dans une usine construite avec le soutien actif de la France.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Je vous ai déjà répondu, madame Autain, mais je vais le faire à nouveau et, si nécessaire, je répondrai chaque semaine à la même question portant sur le port de Balhaf.
Exclamations sur les bancs du groupe FI.
Je rappelle qu'à la suite de la dégradation de la situation sécuritaire au Yémen, le consortium dont fait partie Total, qui réunit des entreprises yéménites et des entreprises étrangères, a décidé de mettre fin à ses opérations industrielles dès 2015. Par la suite, ce consortium nous a indiqué s'être vu notifier à plusieurs reprises, notamment en avril 2017, par les autorités yéménites légales, reconnues par la communauté internationale – donc par les Nations unies – , la réquisition de la plus grande partie du site. La zone réquisitionnée est aujourd'hui séparée physiquement du reste du site, et le consortium, qui a par ailleurs mis fin à ses activités, n'y a plus accès : voilà quelle est la situation.
Puisque vous connaissez très bien le Yémen, vous savez que, pour les mêmes raisons sécuritaires, la France a décidé de fermer son ambassade et de rapatrier l'ensemble de ses personnels à Ryad. Comme je vous l'ai déjà dit à plusieurs reprises, madame la députée, nous mettons tout en oeuvre pour éclaircir la situation politique en apportant notre soutien à l'envoyé spécial du secrétaire général des Nations unies au Yémen, M. Griffiths, avec qui nous travaillons, pour essayer d'aboutir à un processus de discussion et de paix dans cette sale guerre.
Nous ne ménageons pas non plus nos efforts, à la fois auprès du gouvernement yéménite et de la coalition militaire, pour faire la lumière sur ce qui se passe sur le site de Balhaf. Le grand sujet, c'est de faire en sorte que l'ensemble des acteurs au Yémen se réunissent pour un processus de paix sous la houlette des Nations unies.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe Dem.
Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.
Ils ont témoigné d'un engagement sans faille en première ligne dans le cadre de la réserve sanitaire et sont devenus un pilier indispensable à l'hôpital public. Si les étudiants en santé sont les soignants de demain, aujourd'hui leur état de santé mentale est jugé alarmant : 27,7 % des étudiants en médecine présentent des signes de dépression, un tiers des futures infirmières prennent des anxiolytiques, 80 % des étudiants en maïeutique se sentent plus stressés depuis qu'ils ont commencé leur formation.
En plus des risques psychosociaux auxquels ils s'exposent au cours de leur formation, les étudiants nous ont alertés sur leur précarité croissante et la souffrance de leurs familles. Ils s'inquiètent, à juste titre, et de la récente décision de la Direction générale de l'enseignement supérieur et de l'insertion professionnelle – DGESIP – d'exclure d'office les étudiants positifs à la covid ou cas contact du concours de première année commune aux études de santé – PACES – , un examen classant, ainsi que du parcours accès santé spécifique – PASS – et de la licence accès santé – LAS – , les invitant à redoubler. Ces étudiants devront donc se résoudre à perdre une année, voire deux, ou à se rendre quand même aux examens en prenant le risque de créer un cluster, alors même que certaines facultés ont permis le passage des épreuves en aménageant des salles séparées.
M. Jean Lassalle applaudit.
Par ailleurs, le flou administratif dans lequel se met en place la réforme du premier cycle des études de santé n'en finit pas d'ajouter de l'angoisse à la détresse psychologique déjà palpable parmi les étudiants en santé confrontés à l'incertitude et au manque de soutien liés pour partie au contexte sanitaire, ainsi qu'à la nouveauté de la réforme.
Madame la ministre, quelles mesures entendez-vous prendre pour accueillir tous les élèves de la PACES, des PAS et des LAS, dans des conditions sanitaires satisfaisantes et en toute égalité de traitement ? Pouvez-vous nous faire un point d'étape de cette première année de la réforme du premier cycle d'études en santé et des mesures d'accompagnement qui pourraient assurer le bon déroulement de cette année et l'augmentation attendue et effective du nombre d'étudiants admissibles au regard des besoins prospectifs ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Dem.
La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.
Je veux commencer par vous remercier pour votre question qui me permet à mon tour de saluer, devant la représentation nationale, l'engagement et le courage dont ont fait preuve l'ensemble des étudiants inscrits dans les filières de santé, médicales ou paramédicales.
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur quelques bancs du groupe LaREM.
Vous le savez, nous accordons une attention particulière au suivi psychologique et social de l'ensemble des étudiants. C'est pourquoi le Premier ministre a annoncé le doublement des effectifs de psychologues et le recrutement de soixante assistantes sociales pour continuer à accompagner les étudiants qui, comme l'ensemble de nos concitoyens, vivent dans une situation d'incertitude, et plus encore peut-être les étudiants en santé, vous avez raison de le souligner, monsieur Hammouche, qui sont en effet confrontés au tout début de leurs études à la douleur, à la souffrance, à la mort, sans y être pleinement préparés.
Nous confortons le Centre national d'appui à la qualité de vie des étudiants en santé, qui a notamment pour mission de s'intéresser à l'impact psychologique de ces études. Nous avons aussi ouvert un numéro vert et recruté des personnes pour répondre aux appels. Bien sûr, nous continuerons à accompagner les associations et les étudiants.
Quant à la réforme des études de santé, rappelons son objectif : mettre fin au numerus clausus et à la PACES. Évidemment, cette année est compliquée dans tout l'enseignement supérieur, et peut-être plus encore lorsqu'il s'agit de mener une réforme. L'ancien doyen de la faculté d'Angers a accepté d'animer les réflexions et a voulu mettre des informations à la disposition de tous les étudiants en santé, car c'est d'informations qu'ils ont besoin. Et n'oublions pas que tout cela nous permettra de former des médecins dans tous les territoires.
Enfin, s'agissant des concours, un protocole sanitaire strict a été mis en place afin qu'ils puissent se dérouler dans des conditions garantissant confiance et sécurité. Avec le ministère des solidarités et de la santé, nous avons pris des mesures préventives. L'objectif est que les étudiants concernés aient la possibilité de repasser leur concours.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
J'associe à ma question ma collègue Constance Le Grip.
Cinémas fermés, théâtres aux rideaux baissés, musées éteints, spectacles annulés : le monde de la culture est en deuil, monsieur le Premier ministre.
« Eh oui ! » sur les bancs du groupe LR.
À la suite de vos annonces de jeudi dernier repoussant une fois encore la réouverture des lieux culturels, leur survie est en jeu, sans aucune perspective d'avenir.
Les acteurs du secteur culturel sont nombreux dans la rue en ce moment pour exprimer leur colère d'être inlassablement la variable d'ajustement. Ils dénoncent une triple incohérence.
Première incohérence : il serait moins dangereux de faire la queue dans les magasins ou de s'entasser dans le métro que de se rendre dans une salle de spectacle où le protocole sanitaire est strict.
Deuxième incohérence : le « quoi qu'il en coûte » de Jupiter…
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
… trouve ses limites dans le détricotage systématique et aveugle de ce qui a été adopté au Sénat pour adapter les mesures aux réalités.
Troisième incohérence : la ministre de la culture, qui a fait naître des espoirs très vite déçus, n'a pas les moyens de défendre ses convictions et doit en tirer toutes les conséquences.
Nous ne disons pas que l'État ne tente pas d'éviter que la création soit sacrifiée sur l'autel de la crise sanitaire ; nous disons juste qu'il s'arrête au milieu du chemin. Ce qu'attendent ces femmes et ces hommes, dans nos villes comme dans nos campagnes, qu'ils oeuvrent dans des grandes structures comme dans de plus modestes ou des associations, c'est avant tout de garder le lien avec le public, après dix mois d'attente.
« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe LR
Sans eux, c'est l'exception culturelle française qui va disparaître et cet art de vivre unique au monde. Ce sont eux qui sont à même d'apporter les émotions positives dont les Français ont tellement besoin en ce moment et dont vous les privez sciemment pour des raisons obscures et incompréhensibles.
Monsieur le Premier ministre, quand publierez-vous les résultats scientifiques qui motivent vos décisions ? La France sans sa culture n'est plus que l'ombre d'elle-même.
« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je voudrais tout d'abord vous présenter des excuses pour n'avoir pas pu assister au début de cette séance de questions au Gouvernement : j'étais retenue au Sénat par l'examen du projet de loi relatif à la restitution de biens culturels à la République du Bénin et à la République du Sénégal.
Monsieur Minot, je partage votre avis au moins sur un point : la souffrance, la déception du monde du spectacle vivant, secoué parfois par la révolte, …
… après ce report imposé par la gravité de la situation sanitaire à laquelle est confronté notre pays mais aussi l'Europe entière. Nous l'avions indiqué, cette réouverture était conditionnée par l'hypothèse que nous enregistrerions moins de 5 000 contaminations par jour. Or celles-ci atteignaient 14 000, chiffre très inquiétant.
Nous avons évidemment travaillé sur ce sujet avec les acteurs du théâtre et du cinéma. Nous avançons dans trois directions.
Il faut d'abord prendre des mesures d'urgence pour accompagner jusqu'à la fin de l'année…
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Laissez-moi parler, monsieur Minot, si vous voulez des explications !
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Il faut des mesures d'urgence, disais-je, pour accompagner le secteur culturel pendant les quinze derniers jours de 2020.
Il faut ensuite préparer l'année 2021, car il ne faut pas se faire d'illusions : la pandémie n'est pas finie …
… et nous aurons besoin d'accompagner le secteur culturel sans doute pendant une bonne partie de l'année prochaine.
Nous nous employons à élaborer un budget qui va prendre en compte ces difficultés et y remédier. Nous le faisons avec Olivier Dussopt, nous le faisons avec Bruno Le Maire, sous l'égide du Premier ministre.
Nous devons aussi régler le dossier de l'intermittence : vous savez en effet que les droits des intermittents sont en train de s'épuiser, et nous allons aussi remédier à cela.
Il faut enfin préparer avec les acteurs du secteur culturel les conditions d'une reprise durable et résiliente du spectacle vivant et du cinéma.
Tels sont les trois chantiers qui sont sur mon établi.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM et quelques bancs du groupe Dem.
Madame la ministre, votre réponse traduit un peu votre embarras. Écoutez ces acteurs du secteur culturel, qui sont dehors, plutôt que les technocrates ! Nous n'avons obtenu aucune réponse qui justifie ces annonces. Hier, tout ce que le Sénat avait accordé au spectacle vivant a été détricoté.
Donnez-leur espoir, une date précise, et faites enfin le choix de la transparence !
Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
Monsieur le secrétaire d'État chargé de la ruralité, je souhaite vous remercier ainsi que le Premier ministre pour l'invitation faite aux membres de la mission « Agenda rural » de participer au deuxième comité interministériel aux ruralités qui s'est tenu récemment.
Édouard Philippe s'était engagé à ce que deux comités interministériels aux ruralités se tiennent chaque année et cet engagement a été tenu : le premier a eu lieu en février 2020 et le deuxième, le 14 novembre dernier, par visioconférence. Ce deuxième comité a inscrit l'agenda rural dans le plan de relance et ouvre de nouveaux programmes comme celui des « Petites villes de demain ».
Il fixe la nouvelle définition des territoires ruraux, proposition fondamentale de l'agenda rural. L'Institut national de la statistique et des études économiques – INSEE – retient une définition fondée sur la densité de population, ce qui soulève de nombreuses questions sur l'avenir des dispositifs zonés existants. Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous nous expliquer le travail qu'il reste à faire pour appliquer cette nouvelle définition aux futures politiques publiques ?
Autre point important abordé par le comité : une plus grande importance donnée aux aménités rurales. Nos campagnes sont riches en biodiversité, en patrimoine, en paysages et ce sont autant de richesses qui méritent d'être valorisées. Pouvez-vous nous indiquer quelles pistes de réflexion dans ce domaine sont tracées ?
Enfin, les mesures de l'agenda rural doivent être expliquées et promues au plus près du terrain, et territorialisées pour que les élus locaux, les acteurs économiques et sociaux, les services préfectoraux en fassent des outils de développement, d'épanouissement et d'attractivité des territoires ruraux. Quels sont les outils de suivi de ces mesures ? Comment le Gouvernement compte-t-il s'assurer qu'elles s'appliquent rapidement dans les territoires ruraux ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Monsieur le député, vous m'interrogez sur plusieurs aspects de la politique que nous menons en faveur des territoires ruraux avec votre appui et celui de l'ensemble des membres de la mission « Agenda rural ». Je connais votre engagement en la matière, notamment s'agissant de la problématique de l'ingénierie locale et de celle des volontaires territoriaux en administration que nous souhaitons déployer dès l'année prochaine au plus près des territoires.
Vous soulignez l'intérêt de la nouvelle définition des territoires ruraux, fondée sur la grille communale de densité. Cette approche conforme à celle recommandée par les institutions européennes permet, j'en suis convaincu, de rapprocher la définition statistique de la ruralité de la perception que les habitants des territoires ruraux ont de leur environnement. Au demeurant, cette définition a recueilli un consensus auprès des associations d'élus, au premier rang desquelles l'Association des maires ruraux de France. Nous allons la partager dans le cadre de la gouvernance de l'agenda rural avec l'ensemble des ministères. Plusieurs vont l'utiliser comme support de leurs politiques publiques, ce qui permettra de faire évoluer sur le long terme notre perception de la ruralité.
Cette nouvelle définition sera, par exemple, utilisée dès l'année prochaine pour la répartition des enveloppes de la dotation d'équipement des territoires ruraux, conformément aux mesures adoptées dans le cadre du projet de loi de finances à l'initiative de Jean-René Cazeneuve et Christine Pires Beaune.
Vous évoquez ensuite la question des aménités rurales, qui constitue un axe fort de vos propositions pour l'agenda rural. Le rapport définitif de la mission vient de nous être remis et nous allons travailler dès janvier, sur cette base, à une évolution de la dotation de biodiversité, évolution à laquelle les parlementaires seront associés, comme je l'ai indiqué au Sénat.
Enfin, vous rappelez l'importance de la gouvernance de l'agenda rural et du suivi, y compris au niveau local, des 181 mesures que comporte son plan d'action. Je peux d'ores et déjà vous indiquer qu'une circulaire aux préfets rappelant l'esprit du dispositif et mettant l'accent sur les mesures qui doivent faire l'objet d'un suivi par les services déconcentrés va bientôt être diffusée. Un tableau de suivi de certaines mesures emblématiques sera également décliné au niveau local et pourra être transmis aux acteurs locaux.
Je veillerai personnellement à ce que les parlementaires puissent avoir accès à toutes ces informations pour promouvoir et développer cette politique publique dans tous les territoires ruraux.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Ma question s'adresse à Mme la ministre de la transition écologique.
Hier, l'annonce par le Président de la République d'un projet de révision de l'article 1er de la Constitution a marqué une tentative d'éclipser le reste des arbitrages et de masquer certains renoncements. Certes, ce référendum correspondait à une demande de la convention citoyenne pour le climat. Une parmi cent quarante-neuf !
Cette modification, si elle était adoptée, témoignerait certes d'une prise de conscience du défi environnemental, mais ne viendrait combler en rien le déficit de l'action publique face à l'ampleur du changement climatique. C'est fort dommage.
Vendredi dernier, le Conseil européen a décidé de revoir à la hausse son ambition climatique. L'objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre passe de 40 % à 55 % à l'horizon 2030. Il va plus loin que l'accord de Paris, mais nous aurons bien du mal à l'atteindre au regard des décisions prises par ailleurs. Ne renvoyons pas tout à l'Europe.
Pour combler ce retard, nous attendons des propositions qui trouvent une traduction concrète au plus vite. Le projet de loi issu de la convention européenne pour le climat est une occasion historique à cet égard.
Prenons l'éducation tout d'abord. Notre modèle scolaire doit être revu. Il existe des initiatives locales ; il faut les encourager et les rendre pérennes en inscrivant l'éducation à l'environnement et au développement durable dans le code de l'éducation. Vous vous y êtes engagée, madame la ministre, mais allez-vous dédier de nouveaux moyens à nos écoles et former le corps professoral à ces enjeux ?
Sur la rénovation énergétique des bâtiments, ensuite, vous avez écarté l'obligation de rénovation globale au profit d'une mise à contribution de tiers financeurs. Quand nous proposerez-vous un dispositif cohérent et pérenne pour accélérer enfin ce chantier crucial ?
S'agissant, enfin, de la transition agro-écologique – l'agriculture est le deuxième émetteur de gaz à effet de serre – comptez-vous renforcer le soutien aux agriculteurs qui s'engagent dans des pratiques plus vertueuses pour l'environnement ?
L'urgence écologique requiert une écologie de l'action et non de l'incantation.
Applaudissements sur les bancs du groupe LT.
Effectivement, nous sommes à un moment crucial : nous devons prendre en main notre avenir. Je le dis assez gravement, car beaucoup de choses sont en jeu. L'Europe le fait en affichant un objectif très ambitieux de réduction des émissions de gaz à effet de serre : 55 % d'ici à 2030. C'est très important et la France a défendu cette position dans les enceintes européennes. D'autres pays s'engagent également en ce sens.
Mais, je suis d'accord, il faut sortir de l'incantation pour entrer dans l'action. C'est toute la difficulté, une fois que les grands objectifs sont fixés : entrer dans la mécanique, dans ce travail de fourmi
Exclamations sur les bancs du groupe LR
qu'il faut fournir pour faire aboutir tout ce que l'on a dit, et le faire aboutir surtout dans une exigence de justice sociale. Ne laisser personne sur le bord du chemin, ne laisser personne sans solution, telle est notre préoccupation.
Elle se manifeste notamment à travers la rénovation des bâtiments. Nous voulons faire en sorte, dans le projet de loi issu de la convention climat, que toutes les passoires énergétiques soient rénovées. Et nous considérons que, dès lors qu'il y a une obligation, l'on ne peut pas laisser ceux qui n'ont pas les moyens de faire ces travaux sans solution. C'est tout le travail que nous allons faire pendant trois mois, notamment avec Pascal Canfin.
Nous essaierons de trouver des solutions de tiers financement : chacun sera accompagné pour se conformer à cette obligation faite au nom de l'intérêt public, personne ne doit la subir. Cela demande du temps, mais nous allons y arriver. Cela fait vingt ans que nous travaillons sur le tiers financement et dans trois mois nous aurons abouti : les mécanismes figureront dans la loi.
Je pourrais vous parler de tous les autres sujets. L'éducation à l'environnement sera aussi dans ce projet de loi et nous nous donnerons les moyens nécessaires.
Cette loi marque un tournant. Elle va faire entrer l'écologie dans le quotidien des Français…
… et je compte sur vous pour nous y aider.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM. – M. Sylvain Templier et Mme Élisabeth Toutut-Picard applaudissent également.
Conditions de travail dans les entreprises du bâtiment
Je tiens à vous alerter, monsieur le Premier ministre, sur la situation très préoccupante des entreprises du bâtiment et des travaux publics – BTP – , mises à mal par la crise que nous traversons. Les commandes et les appels d'offres sont insuffisants. À cela s'ajoutent des conditions difficiles pour les travailleurs dans les chantiers, en raison de la fermeture des restaurants jusqu'au 20 janvier au moins – et peut-être au-delà, d'après vos propos qui les désespèrent. Outre les problèmes sanitaires que cela pose, ils n'ont plus de lieu pour déjeuner au chaud, alors que l'hiver est là. On nous a promis des améliorations, mais elles tardent. Un communiqué du Gouvernement vient de paraître ce matin : il y est seulement question de la mise à disposition de salles municipales, sous la responsabilité des entreprises, après un accord préalable.
C'est un premier pas, qu'avec mon collègue Marc Le Fur nous ne trouvons ni assez pragmatique, ni suffisant, et trop lourd pour des communes déjà bien sollicitées.
Pourquoi ne pas imaginer rapidement un dispositif plus simple et plus adapté, comme pour les routiers, en agréant des restaurants qui seraient accessibles sur présentation de la carte professionnelle du BTP ? Monsieur le Premier ministre, quand permettrez-vous aux ouvriers et aux artisans de disposer d'une pause déjeuner digne de ce nom ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Comme vous venez de le dire, monsieur Bazin, Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, et Alain Griset, ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises, ont annoncé que les communes et les collectivités territoriales pouvaient désormais mettre des salles polyvalentes à disposition des salariés des entreprises du BTP, pour qu'ils y effectuent leur pause déjeuner.
Depuis l'annonce du deuxième confinement, la restauration des salariés du BTP a été rendue difficile par les conditions climatiques de cette période hivernale. Alerté par des fédérations professionnelles du secteur et par l'Association des maires ruraux de France – AMRF – , le Gouvernement a cherché une solution permettant de répondre aux difficulté de restauration rencontrées par 500 000 salariés. Dans les communes qui ont des locaux disponibles et répondant aux recommandations sanitaires, le chef d'entreprise pourra envoyer simplement au maire un courriel sollicitant la mise à disposition d'une salle pour une période prédéfinie, en s'engageant à respecter certaines clauses comme la responsabilité de l'employeur et le protocole sanitaire. Le maire lui donnera son accord par courriel, en ajoutant éventuellement des conditions supplémentaires propres à l'équipement. Cette mise à disposition de salles par les collectivités se fera à titre gracieux. Telle est la conclusion de l'accord avec l'AMRF. Les risques sanitaires étant plus élevés à l'occasion des repas, il conviendra d'organiser la présence simultanée de groupes réduits, de privilégier un échelonnement des pauses et d'aérer les locaux entre les groupes. Le Haut Conseil de la santé publique, dans son avis du 4 octobre 2020, a émis des recommandations dont il conviendra de s'inspirer.
Les préfectures ont déjà été informées de la démarche ; elles sont à la disposition des entreprises et des collectivités locales pour en assurer la bonne application. Vous en conviendrez, nous ne pouvons que nous réjouir que la concertation sur la gestion de la crise, conduite de manière permanente avec, notamment, les associations représentant les élus locaux, ait permis de trouver une solution concrète, au service des entreprises. De telles solutions pragmatiques répondent à un impératif autant économique qu'humain ; et tout ce qui contribue à faciliter l'activité des entreprises, en particulier des plus petites, doit être encouragé.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Ce n'est pas satisfaisant, et trop complexe : il faut encore améliorer votre réponse, monsieur le secrétaire d'État. Outre cette situation déjà tendue, le projet de loi de finances menace le secteur du BTP d'un coup de poignard dans le dos. En effet, le taux de TVA réduit à 5,5 % ne serait plus éligible pour certains travaux de rénovation énergétique, comme les changements de fenêtres, de portes d'entrée et de volets isolants.
Je n'avais pas compris que la question portait sur la TVA !
L'article comportant ces dispositions, issu de Marcheurs au Sénat et adopté avec le soutien du Gouvernement, entraînerait deux conséquences graves : d'une part, une limitation du périmètre du taux de TVA réduit, d'autre part, une nouvelle obligation de qualification pour les artisans dès le 1er juillet. Encore de la paperasserie et des démarches ! Heureusement, la commission des finances de l'Assemblée nationale a rejeté cet article. Monsieur le secrétaire d'État, lèverez-vous, en séance, cette menace qui pèse sur un secteur déjà durement touché ? Lui permettrez-vous de retrouver une activité tant nécessaire ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
En quelques semaines, la démocratie sociale a permis des avancées remarquables et prometteuses en matière de télétravail et de santé au travail. Ce climat serein avec les partenaires sociaux est un atout, dans la période singulière que nous traversons, pour préparer la relance. Permettez-moi de saluer, au nom du groupe La République en marche, la méthode soutenue par le Premier ministre, qui fait du dialogue social le levier de la relance et le relais de la confiance.
Le télétravail est entré brusquement et massivement dans la vie de millions de salariés et d'entreprises. Avec le recul, nous mesurons le potentiel de cette nouvelle organisation du travail, et, en même temps, ses limites, voire les risques qui en découlent. L'accord national interprofessionnel du 26 novembre 2020 pour une mise en oeuvre réussie du télétravail permettra de poser les jalons de la négociation au niveau des entreprises et des branches, afin de déployer le télétravail le plus efficacement possible. Pour être efficaces, gardons en tête que, partout en France, les espaces de coworking offrent des conditions de travail équivalentes, voire meilleures, à celles des bureaux, tout en étant proches des lieux de résidence des salariés. Ils sont adaptés à leur temps et aux circonstances, et des consultants y sont disponibles pour accompagner les entreprises vers les nouvelles formes de travail.
S'agissant de la santé au travail – attente légitime des salariés et des chefs d'entreprise – les députés des trois groupes majoritaires ont souhaité ardemment que les négociations avec les partenaires sociaux aboutissent. Ils ont veillé à construire collectivement une proposition de loi, qui sera prochainement soutenue par nos collègues Carole Grandjean et Charlotte Parmentier-Lecocq.
L'accord national interprofessionnel du 10 décembre 2020 sur la santé au travail intervient donc dans un contexte où l'importance des actions de santé au travail est prégnante, pour garantir la protection de la santé et assurer la continuité de la vie économique du pays – je pense notamment à la prévention de la désinsertion professionnelle. Nous savons pouvoir compter sur les réseaux dans les territoires, notamment sur les associations de santé au travail.
Madame la ministre du travail, alors que s'ouvre une nouvelle étape du déconfinement, quelles seront les prochains engagements du Gouvernement concernant le télétravail et la santé au travail ?
La parole est à Mme la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion.
Comme vous, madame Lenne, je salue l'accord trouvé entre les partenaires sociaux, jeudi dernier, au sujet de la santé au travail.
Mme Anne-Laure Cattelot et M. Cyrille Isaac-Sibille applaudissent.
Il intervient quinze jours après un autre accord sur le télétravail. Je tiens à saluer la vitalité du dialogue social, auquel le Premier ministre et moi-même sommes très attachés.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.
La situation sanitaire nous invite à faire preuve d'une grande prudence quant à l'évolution du télétravail et des règles applicables dans la période actuelle. Nous devons également prendre en considération les difficultés des salariés qui sont entièrement en télétravail depuis le début du deuxième confinement. C'est pourquoi, hier, j'ai proposé aux partenaires sociaux d'envisager deux jalons au cours du mois de janvier. Le premier est fixé au 7 janvier : à cette date, les salariés qui sont entièrement en télétravail depuis le début du confinement pourront revenir un jour par semaine dans leur entreprise. Le deuxième jalon interviendra le 20 janvier, sous réserve de l'évolution de la situation sanitaire : il s'agira alors de redonner pleinement la main au dialogue social pour définir les règles du télétravail dans les entreprises, en s'appuyant sur l'accord conclu entre les partenaires sociaux. En tout état de cause, le télétravail restera un levier important de notre stratégie de lutte contre l'épidémie, car il permet de réduire les interactions et, par conséquent, les contaminations.
S'agissant de la santé au travail, je salue l'initiative parlementaire des députées Charlotte Parmentier-Lecocq et Carole Grandjean, qui nous permettra de transposer l'accord trouvé entre les partenaires sociaux. Avec Laurent Pietraszewski, nous sommes particulièrement attachés à la prévention dans le cadre de la santé au travail, à la qualité de vie au travail, à l'offre de services de santé et, bien sûr, à la gouvernance de l'ensemble du système de santé au travail. Soyez-en assurée : je suis convaincue que c'est par la concertation et la négociation que nous répondrons le mieux à la crise.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.
Il y a un an, le Président de la République reconnaissait que la crise des gilets jaunes l'avait obligé à changer d'attitude face aux Français ; il affirmait qu'il fonderait l'acte II de son quinquennat sur l'écoute et la proximité. Or, au vu du projet de déremboursement des médicaments homéopathiques, prévu dès le 1er janvier 2021, nous ne pouvons que déplorer, une fois encore, que les actes de l'exécutif soient aux antipodes de ses bonnes paroles.
Murmures sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.
Cet oukase, qui obéit à des considérations plus dogmatiques que raisonnables, constitue une faute grave, car il remet en cause la liberté de se soigner des Françaises et des Français. Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, en suivant la Haute Autorité de santé, vous faites fi des 72 % de Français qui font confiance à l'homéopathie, ainsi que du tiers des médecins généralistes, de 78 % des sages-femmes et de 100 % des pharmaciens, qui l'ont intégrée à leur pratique. Une évaluation objective de l'homéopathie est difficile à réaliser, vous le savez, mais le poncif, valant argument scientifique, selon lequel les médicaments homéopathiques ne présenteraient qu'un effet placebo ne tient pas lorsqu'on sait qu'ils sont administrés avec succès aux bébés et aux animaux.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes LR et LT.
Cela fait deux siècles que la médecine homéopathique procure de nombreux bienfaits à ses utilisateurs. Nos voisins allemands l'ont d'ailleurs bien compris, puisque votre homologue a fort opportunément décidé que les médicaments homéopathiques continueraient à être remboursés.
M. Jean Lassalle applaudit.
Du fait du déremboursement, se soigner par homéopathie en France coûtera plus cher. C'est une bien mauvaise nouvelle pour les foyers les plus modestes, particulièrement en ces temps où la pauvreté explose.
Monsieur le Premier ministre, à l'heure où les médecines complémentaires, dont fait partie l'homéopathie, jouent un rôle significatif dans le dispositif de santé ; parce qu'il faut préserver une liberté de soins pour tous les patients, riches ou pauvres ; parce que l'homéopathie répond à un réel besoin médical et procure un bénéfice majeur pour la santé, je vous demande solennellement d'écouter enfin des millions de Françaises et de Français et de revenir sur cette décision infondée, inefficace et injuste, qui ne fera que des perdants.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur plusieurs bancs du groupe LT.
Je ne vous ferai pas l'injure, madame Corneloup, de vous rappeler comment est déterminé le remboursement des médicaments par l'assurance-maladie : la décision revient à la Haute Autorité de santé, dont les experts sont indépendants et n'obéissent à d'autres règles que les données scientifiques.
À partir de l'ensemble des données médicales et scientifiques disponibles, la Haute Autorité de santé a mis en évidence que les produits homéopathiques n'avaient pas démontré leur efficacité dans la lutte contre les affections pour lesquelles des données étaient disponibles, ni dans la réduction de la consommation d'autres médicaments.
Après avoir écouté les professionnels et les usagers, une procédure a été lancée par les autorités sanitaires, visant à retirer les produits homéopathiques de la liste des médicaments pris en charge à compter du 1er janvier 2021. Cette décision nous oblige à revenir sur le statut dérogatoire dont l'homéopathie disposait depuis les années soixante ; elle ne remet bien sûr pas en cause son utilisation, mais uniquement son remboursement.
Il nous semblait nécessaire de prévoir une étape intermédiaire et transitoire. Le déremboursement ne sera donc effectif qu'au terme d'une période de transition. Cela permettra d'informer et d'accompagner au mieux les patients, et même de laisser le temps aux prescripteurs et aux industriels de s'adapter progressivement au déremboursement total de ces produits.
C'est d'ailleurs par une démarche progressive et accompagnée que le taux de remboursement était passé de 30 à 15 % le 1er janvier dernier.
Vous mettez des moyens pour augmenter l'aide médicale d'État, mais pas pour continuer à rembourser l'homéopathie !
J'insiste : cette décision ne remet pas en cause la commercialisation de l'homéopathie, que vous connaissez bien, ni la liberté pour les patients d'y recourir.
M. Philippe Berta applaudit.
Chacun l'aura compris : pour le Gouvernement, la culture n'est malheureusement qu'une variable d'ajustement.
Murmures sur les bancs du groupe LaREM.
Pire, il y a, dans la manière de traiter le monde de la culture, un véritable mépris.
Exclamations sur les mêmes bancs.
Oui, du mépris : on ne dit pas à un secteur économique qu'il ne pourra pas relancer ses activités cinq jours seulement avant la reprise prévue. C'est un délai indécent, pour une décision prise sans concertation.
Le monde de la culture n'en peut plus du « stop and go » à répétition !
Mépris aussi pour les acteurs de la culture, qui travaillent depuis des semaines en vue d'accueillir le public dans des conditions sanitaires sécurisées : spectateurs assis, distanciation physique, port du masque, jauge réduite, gel hydroalcoolique…
Les exclamations se poursuivent.
Le danger d'ouvrir des salles de cinéma et de théâtre, ou encore des musées, serait-il supérieur au danger, par exemple, d'accueillir chaque jour plus d'un million d'enseignants et de personnels administratifs dans les établissements scolaires ?
Pour prouver l'inégalité de traitement et l'incohérence de la situation, un film sera projeté demain dans une église à Caen, en respectant le protocole.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SOC.
Cette seule projection démontrera l'absurdité et l'injustice de votre choix. Madame la ministre de la culture, une nouvelle date a été évoquée pour la reprise des activités culturelles, le 7 janvier ; mais déjà, on entend dire que ce n'est pas certain.
Si vous voulez la restaurer, je vous demande une chose, une seule : fournissez à la représentation nationale les études scientifiques qui vous permettent d'affirmer, sans ambiguïté, que les lieux culturels sont des vecteurs de propagation du virus. Sinon, laissez-les vivre, laissez-les rouvrir et laissez-nous les fréquenter, en responsabilité !
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et GDR.
Madame la députée, la culture est au coeur du projet politique français, et nous l'avons préservée de toutes les façons pendant cette période.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Oui, je participe à votre idée que le monde de la culture souffre. Il nous demande d'être écouté, il nous demande d'être accompagné, il nous demande de la visibilité.
Il nous demande d'être écouté, et c'est ce que je fais toute la journée au ministère de la culture avec les partenaires, les opérateurs de la culture, les artistes, afin de trouver les solutions pour les accompagner dans cette crise. Oui, les lieux de culture sont fermés partout en Europe.
Ils sont fermés en Allemagne, en Autriche, en Belgique, en Italie…
… en Hongrie, en Tchéquie, au Royaume-Uni, et aujourd'hui nous avons appris qu'ils étaient fermés également aux Pays-Bas. Tous ces pays l'ont fait sur la base d'un certain nombre d'études scientifiques.
Le secteur a besoin d'être écouté et d'être accompagné. C'est ce que nous faisons.
Un responsable culturel allemand et un responsable culturel anglais indiquent, dans les colonnes des journaux, qu'il n'y a pas un pays au monde qui accompagne autant ses artistes que la France ! Voilà la vérité !
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem et Agir ens.
Il a besoin enfin de visibilité, et nous voulons bâtir avec eux un modèle résilient et durable pour fonctionner pendant l'année 2021. C'est à cela que je travaille avec les acteurs de la culture.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.
Ma question s'adresse aussi à Mme la ministre de la culture et concerne la situation tant évoquée du monde de la culture face aux incertitudes de la prolongation des contraintes sanitaires.
La crise du covid que nous traversons depuis le début de l'année affecte considérablement la culture. Elle fut la première à faire face aux mesures de restriction du public et sera sans doute la dernière à les lever.
Elle fait partie de l'art de vivre à la française : nous savons combien elle est essentielle dans le quotidien – le patrimoine, la presse, les livres, les jeux vidéo, l'audiovisuel, la création artistique, le cinéma, le théâtre, les concerts en live, les spectacles et l'ensemble de nos musées. Or, avec la prolongation des contraintes sanitaires, les lieux qui devaient redémarrer ce jour sont de nouveau plongés dans l'incertitude quant à la reprise de leurs activités, sauf partiellement les conservatoires et écoles de musique.
Cependant, à défaut de pouvoir retirer notre masque, j'invite certains d'entre nos collègues à retirer leurs oeillères et à sortir de l'outrance.
« Oh ! » sur les bancs du groupe LR.
En effet, face à cette situation, le Gouvernement a su apporter des solutions saluées par les professionnels. Il faut les rappeler : prolongation des droits des intermittents, accès au fonds de solidarité, création de fonds structurels, ajustement des crédits d'impôt…
… soutien au livre et au cinéma, grand plan de commandes publiques pour la création artistique, ou encore majoration inédite de la subvention du Centre national de la musique, ce qui lui a donné un rôle majeur.
Madame la ministre, je sais votre attachement chevillé au corps à défendre les artistes et les acteurs du monde culturel et de l'événementiel qui participent à notre enchantement.
Pouvez-vous revenir sur les raisons justifiant la poursuite des contraintes sanitaires et sur les premiers échos des concertations que je sais que vous menez en ce moment même ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Merci d'avoir rappelé l'ensemble des mesures budgétaires qui ont été décidées, tant les mesures d'urgence prises en 2020 que celles que nous préparons pour le budget 2021. Il s'agit aussi bien d'argent frais, bien entendu, que d'un certain nombre de mesures de crédit d'impôt qui touchent tout le spectacle vivant, les représentations théâtrales et de variétés, les achats d'oeuvres phonographiques, et bien entendu le crédit d'impôt audiovisuel pour les captations de spectacles vivants.
Nous allons, bien sûr, continuer. Nous allons également préparer, avec les professionnels, des mesures qui donneront de la visibilité. Dans le cadre d'une pandémie extrêmement grave, ces choses ne se préparent pas sur le coin d'une table. Nous avons besoin de savoir quels sont les modèles économiques qui leur permettront de subsister, quels sont les modèles économiques viables.
Les mesures de couvre-feu sont indispensables. Sont-elles compatibles avec un fonctionnement normal des institutions du spectacle vivant ? Si elles ne le sont pas, comment allons-nous les accompagner ? De quel argent ont-ils besoin ?
C'est tout ce travail de concertation que je mène au ministère de la culture.
À ce point de mon propos, je voudrais saluer l'esprit de responsabilité des acteurs du secteur culturel. Ils ne sont absolument pas mis en accusation dans les mesures que nous prenons. Les acteurs du spectacle culturel et du spectacle vivant ont observé les protocoles avec un grand soin. Ce n'est pas eux qui sont en cause, mais l'impact de la situation sanitaire sur l'ensemble du pays. Je veux rendre hommage aux acteurs de la culture pour leur sens de la responsabilité.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.
Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, les inquiétudes des parents et familles de personnes victimes de troubles autistiques restent très vives, et si je pose ma question aujourd'hui, c'est parce que vos réponses de septembre demeurent vagues et qu'elles ne les ont pas rassurés.
Les associations qui les aident, notamment SOS Autisme, ne le sont pas non plus, votre propos se contentant de rappeler votre attachement au strict respect des procédures sanitaires.
Depuis 2012, une prescription de médicaments antibiotiques a été faite à 5 000 enfants autistes sans autorisation de mise sur le marché d'un traitement, dans une étude menée sans encadrement, sans période de tests. Les effets de ces prescriptions médicamenteuses non autorisées ont été dramatiques pour un grand nombre de ces 5 000 enfants, passés de personne souffrant d'un handicap à patient, et de patient à cobaye. Leur santé a été gravement affectée, leur confiance médicale a été trahie. J'ai une pensée toute particulière pour eux et pour leurs familles.
Malheureusement, le flou demeure, et vous savez que le flou est la pire des postures.
Que la justice soit saisie ou non, vous devez, par une position publique, rassurer aujourd'hui ces familles, non par la parole laconique que vous avez eue en septembre mais par un exposé détaillé. Deux minutes ne sont peut-être pas suffisantes, mais ces deux minutes sont indispensables pour rassurer les personnes autistes, leurs familles et les associations, car jusqu'à aujourd'hui, votre parole n'a pas rassuré mais inquiété.
« Eh oui ! » sur les bancs du groupe LR.
Dès lors, quelle protection et quelles garanties pouvez-vous apporter aux autistes et à leurs proches, ainsi qu'aux associations qui les accompagnent au quotidien, afin que le statut bien involontaire et absolument insupportable de cobaye qui leur a été attribué ne puisse se renouveler ; afin de leur expliquer comment un tel protocole de soins non autorisé a pu voir le jour dans notre pays ; afin que chacun, ici et partout en France, soit assuré de sa confiance en tout temps dans notre système de santé français ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – M. Jean Lassalle et M. Yannick Favennec-Bécot applaudissent également.
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées.
Monsieur le député, vous m'interrogez sur le traitement de l'autisme. Le trouble du spectre de l'autisme est un trouble du neuro-développement qui ne se guérit pas mais nécessite des interventions comportementales adaptées, recommandées par la Haute Autorité de santé. Ces interventions, et vous le savez, doivent intervenir le plus précocement possible…
… pour influer positivement sur la trajectoire de développement de l'enfant, limiter le sur-handicap et permettre autant que possible à chaque enfant de fréquenter l'école du quartier puis de trouver un emploi, d'avoir un logement, de vivre avec nous.
Le Gouvernement mobilise aujourd'hui des moyens sans précédent dans le sens du repérage précoce, de la scolarisation, de la vie adulte, de l'accompagnement des familles, mais aussi dans le domaine de la recherche. Au total, près de 400 millions sont mobilisés.
S'agissant des antibiothérapies dénoncées par plusieurs lanceurs d'alerte depuis plus d'un an, je suis déterminée, avec le ministre des solidarités et de la santé, à faire toute la lumière sur ces pratiques qui mettent notamment en cause des professionnels de santé agissant hors protocole, et hors protocole de recherche.
La délégation interministérielle à l'autisme et aux troubles du neuro-développement et le ministère des solidarités et de la santé se sont mobilisés suite à ces alertes et la justice est saisie.
Les pratiques de prescription d'antibiotiques dénoncées ne sont pas validées scientifiquement dans le champ de l'autisme. Je serai particulièrement attentive aux conclusions de l'enquête en cours et aux conséquences engendrés par ces pratiques sur les enfants concernés. Il faut accompagner leurs familles. Nous leur devons la juste information, toutes les informations, et nous les accompagnerons comme il le faut.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.
Ma question s'adresse à M. le ministre des outremer et j'y associe mes trois collègues députés de la Martinique.
Du 6 au 15 novembre 2020, des pluies diluviennes se sont abattues sur les Antilles, en particulier sur le Nord Atlantique de la Martinique, causant de graves dégâts, notamment des coulées de boue, des mouvements de terrain entraînant des glissements de routes, des destructions de canalisations d'eau et des destructions d'habitations. Plus d'un millier de personnes sont concernées.
Un arrêté de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle pour les communes du Nord Atlantique a été publié rapidement le 3 décembre, et je vous en remercie. Mais les sinistrés viennent pour beaucoup de se voir refuser toute indemnisation par les assurances, au motif que l'arrêté ne prévoit que deux conditions d'indemnisation, les inondations et les coulées de boue. Or la grande majorité des sinistres sont dus, comme en 2009, à des mouvements et des glissements de terrain.
Vous venez de nous indiquer qu'un nouvel arrêté était à l'étude ; c'est une bonne nouvelle. Pouvez-vous nous confirmer que les mouvements et glissements de terrain y sont bien inscrits ? Dans quel délai cet arrêté sera-t-il publié ? Enfin, concernera-t-il bien toutes les communes touchées ?
Au-delà de l'indemnisation du phénomène, devant son caractère récurrent lié au dérèglement climatique, il faut définir une politique de prévention systémique, à l'instar de ce qui existe déjà pour les chutes de pierres et éboulements. Monsieur le ministre, que répondez-vous aux Martiniquais, aujourd'hui sinistrés, démunis et désormais sous la menace ?
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs du groupe SOC.
Permettez-moi de vous redire toute notre solidarité avec les habitants de la Martinique qui ont connu ces intempéries terribles et d'exprimer, au nom du Gouvernement et, j'en suis certain, au nom de la représentation nationale, notre reconnaissance pour les élus locaux, les agents des collectivités territoriales, les agents de l'État, les pompiers et les gendarmes qui se sont largement mobilisés pour venir au secours de nos concitoyens, sans oublier les salariés des entreprises de réseaux, puisqu'il a fallu rétablir également l'électricité, le téléphone et l'eau courante dans la plupart des collectivités et des communes de Martinique.
Votre question est précise ; ma réponse le sera tout autant. Effectivement, il fallait englober la question des glissements de terrain dans les conditions de catastrophe naturelle. La commission du 8 décembre dernier a instruit les différents dossiers, l'arrêté a été signé par mon ministère ce matin, et il est en cours de cosignature par les autres ministres. Il sera donc publié dans les prochains jours, ce qui permettra d'englober l'ensemble des cas d'indemnisation que vos concitoyens ont porté à votre connaissance.
J'en profite pour vous dire que soixante-trois dossiers au titre du fonds de solidarité pour l'outre-mer ont été déposés – je me tourne vers le député Letchimy, qui m'avait interrogé dans cet hémicycle à ce sujet. La commission rendra son avis sous le délai désormais d'un mois. La réponse de solidarité nationale est donc véritablement la plus rapide possible. Elle permet aux différents assureurs de venir faire droit aux demandes d'indemnisation de nos concitoyens.
Il m'est difficile de vous répondre sur la résilience climatique en 36 secondes, mais nous aurons l'occasion d'y retravailler avec l'ensemble des parlementaires d'outre-mer, députés et sénateurs, ainsi que des élus locaux. Cela soulève la question du plan séisme Antilles, des différents documents stratégiques qu'il nous faut remettre à jour. Mais nous aurons l'occasion de le faire dans des séances de travail à venir.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Monsieur le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chaque semaine et depuis trop longtemps, de nombreuses personnes m'interpellent sur un sujet majeur et inquiétant : l'absence de remplacement de professeurs dans le département de la Seine-Saint-Denis.
M. Stéphane Peu applaudit.
Les représentants de parents d'élèves ne cessent de faire état de situations aussi impensables qu'inacceptables. Il y a un mois, je vous interpellais par courrier au sujet du lycée Voillaume, il y a quelques jours j'interpellais le directeur académique sur le collège Pablo Neruda, la semaine dernière je vous interpellais encore sur les absences non remplacées depuis la rentrée scolaire au collège Le Parc d'Aulnay-sous-Bois. Cette liste demeure malheureusement non exhaustive.
Je ne nie absolument pas votre attachement à ce département, et je n'ignore pas non plus que vous êtes conscient de ces situations catastrophiques qui sacrifient en partie l'éducation que nous devons à tous les enfants de la République, à tous les élèves de France. Mais accordez que déplorer et regretter une situation n'a jamais permis et ne permettra jamais d'y répondre.
Nous attendons des solutions, des mesures pour mettre fin à cette forme d'injustice sociale qu'est celle de ne pas former, instruire, éduquer tous nos enfants de la même manière. Car qu'importe l'endroit du territoire dans lequel ils naissent et grandissent !
Monsieur le ministre de l'éducation nationale, nous n'acceptons plus les discours, les objectifs affichés, les promesses, aussi nobles soient-ils : il est urgent et impératif que les élèves aient tous l'instruction à laquelle ils ont droit. Que comptez-vous donc faire pour remédier à l'absence de dizaines de professeurs dans mon département de Seine-Saint-Denis, et pour en attirer de nouveaux ? Quelles mesures envisagez-vous pour que les professeurs s'installent et restent en Seine-Saint-Denis ?
Monsieur le ministre, chaque enfant de France mérite une instruction de qualité !
Applaudissements sur les bancs des groupes LR et GDR. – M. Jérôme Lambert applaudit également.
La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Je partage en grande partie les termes de votre question qui soulève un sujet important, et qui l'est depuis très longtemps, en réalité depuis des décennies : la difficulté à assurer pleinement le remplacement des enseignants, en France en général et en Seine-Saint-Denis en particulier. La question n'est pas tant celle des moyens en la matière – même s'il faut toujours chercher à les développer, ce que le ministère a fait encore en cette rentrée en prévoyant plus de postes pour le remplacement alors qu'il y a moins d'élèves dans le premier degré – que celle du taux d'efficacité. Le taux de remplacement en Seine-Saint-Denis est actuellement de 72 %. Ce n'est pas un bon chiffre, je vous l'accorde volontiers. Ce n'est pas non plus nouveau. Il faut donc adopter une véritable stratégie, …
… ce que sous-entend d'ailleurs votre question, une stratégie qui soit à la fois directe et plus complète.
La stratégie directe consiste à continuer à développer les moyens de remplacement. Mais je connais des cas où il y a eu dix-sept remplacements dans l'année ! Le sujet est donc beaucoup plus celui de l'absentéisme et de ses causes que celui du remplacement. Nous connaissons ces causes : je pense en particulier au fait que ce sont parfois des professeurs jeunes, sans expérience, qui viennent en Seine-Saint-Denis, et qu'ils ne sont pas incités à y rester, ou qu'ils n'en ont pas envie. Ce n'est pas le cas de tous les jeunes professeurs, mais ce constat doit nous conduire à beaucoup plus personnaliser l'affectation.
Les inciter à rester est l'objectif de la prime sur laquelle le Premier ministre s'est engagé : 10 000 euros au bout de cinq ans de présence pour les fonctionnaires, y compris bien évidemment les professeurs. De même, les mécanismes prévus par Amélie de Montchalin en matière de fidélisation sur un territoire s'appliqueront. Et puis, dans le cadre du Grenelle de l'éducation, nous étudions tous les enjeux relevant du bien-être au travail, y compris la question du logement et de l'appui social apporté aux professeurs et celle du travail en équipe – avec parfois la possibilité de muter en équipe. Toutes ces améliorations doivent nous permettre, en plus des moyens supplémentaires importants dégagés depuis trois ans – je rappelle que le taux d'encadrement a été amélioré significativement – d'apporter des solutions à une situation qui, en effet, ne peut pas durer.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Nous avons terminé les questions au Gouvernement.
Au terme de cette dernière séance de questions au Gouvernement de l'année 2020, et même si nos débats vont se prolonger jusqu'à la fin de la semaine, je vous souhaite déjà, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les membres du Gouvernement, mes chers collègues, des fêtes de fin d'année prudentes, sobres, saines, joyeuses, fraternelles et amicales.
Applaudissements.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à seize heures cinquante, est reprise à dix-sept heures, sous la présidence de M. David Habib.
L'ordre du jour appelle la discussion en lecture définitive du projet de loi organique relatif au Conseil économique, social et environnemental (no 3692).
Mes chers collègues, je vous rappelle que les interventions dans la discussion générale valent explications de vote.
Le vote aura lieu dans les salles voisines de l'hémicycle. Le scrutin sera ouvert pour trente minutes durant lesquelles la séance sera suspendue.
Nous voici réunis une dernière fois pour examiner le projet de loi organique relatif au Conseil économique, social et environnemental – CESE. Je veux avant toute chose rendre hommage au travail de grande qualité qui a été mené par votre commission, qui a permis d'enrichir considérablement le texte tout au long des débats. Je tiens à remercier chaleureusement votre rapporteur, Erwan Balanant, et la députée Nicole Dubré-Chirat. Je tiens également à remercier le CESE, avec lequel le Gouvernement a pu nouer des échanges constructifs. Je salue en particulier l'engagement de son président Patrick Bernasconi dans cette réforme, qui nous fait aujourd'hui l'honneur de sa présence dans l'hémicycle.
Nous examinons aujourd'hui le texte tel qu'issu de la nouvelle lecture à l'Assemblée nationale. Cette version rend au CESE la place qu'il mérite au sein de nos institutions constitutionnelles. À l'issue de la navette parlementaire, il ne me semble plus nécessaire d'exposer le détail du texte. Je veux en revanche revenir une dernière fois sur les grands apports de cette réforme défendue par votre assemblée.
En premier lieu, ce projet de loi organique renforce la démocratie participative, en particulier en développant le droit de pétition, qu'il ouvre aux jeunes de 16 ans. J'ai déjà eu l'occasion de dire à quel point j'étais attaché à cette mesure issue de nos débats, qui offre à de jeunes citoyens en devenir la possibilité de prendre part à la réflexion et au débat public.
Le texte consacre aussi la possibilité pour le CESE de recourir au tirage au sort, ce qui ne menace en rien la démocratie représentative. Je l'ai déjà dit : il n'y a pas de confusion et encore moins de concurrence entre, d'une part, l'intérêt de recueillir l'avis de citoyens tirés au sort et, d'autre part, l'exercice de la souveraineté nationale par les représentants de la nation élus au suffrage universel, qui, seuls, ont la légitimité démocratique.
Renforcer la démocratie participative, ce n'est pas affaiblir la démocratie. Je crois au contraire que plus nos concitoyens seront associés au débat public, plus la légitimité de ceux qu'ils éliront sera forte. C'est le voeu des Français exprimé à maintes reprises ces dernières années ; nous devons les entendre.
En deuxième lieu, le texte fait du CESE un carrefour des consultations publiques. Il renforce tout d'abord les liens entre les CESE et les conseils consultatifs locaux. Il affirme ensuite la primauté de la consultation du CESE sur les autres consultations. Nos discussions ont permis d'affiner le périmètre de l'effet substitutif de la consultation du CESE tout en préservant la consultation d'instances éminentes, comme le Comité des finances locales. En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a en outre apporté une nouvelle garantie qui me paraît essentielle : le CESE pourra toujours consulter dans le cadre de l'élaboration de ses avis les instances consultatives compétentes. L'expertise de divers organismes pourra donc nourrir les avis du CESE et enrichir nos réflexions sur les projets de loi concernés.
En troisième lieu, le texte permet une refonte de la composition du CESE. Le nombre de ses membres est réduit de 25 %. Ils seront répartis en quatre grandes catégories dont le détail sera fixé par la voie réglementaire après avis d'un comité consultatif. Ces modifications permettent d'atteindre un équilibre entre tous les intérêts représentés, tout en offrant une certaine souplesse pour suivre les évolutions de notre société.
La représentation des outre-mer au sein du CESE a suscité une attention toute particulière et bien légitime de la part de votre assemblée. Si le CESE ne représente pas les outre-mer, en revanche, la représentativité équilibrée de l'ensemble des composantes économiques et sociales de notre pays implique bien sûr qu'ils y soient suffisamment représentés.
C'est dans cet esprit qu'une place particulière leur a été donnée grâce à nos débats et que huit représentants des outre-mer seront nommés dans la troisième catégorie des membres du CESE au titre de la cohésion sociale et territoriale et de la vie associative.
Si je regrette qu'un accord n'ait pu être trouvé en commission mixte paritaire, je suis rassuré par le texte qui fait l'objet de nos débats aujourd'hui : je crois qu'il nous permettra d'atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés et de répondre aux attentes de nos concitoyens. C'est pourquoi, mesdames et messieurs les députés, je vous propose de l'adopter.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.
La parole est à M. Erwan Balanant, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
Le projet de loi organique relatif au Conseil économique, social et environnemental a été examiné successivement par l'Assemblée nationale et le Sénat en première lecture sur la base d'un constat que nous partagions tous. Il était nécessaire de réformer cette institution mal connue, et parfois mal aimée, qui peinait à endosser le rôle que lui donne la Constitution : être le trait d'union entre la société civile organisée et les pouvoirs publics.
Les sénateurs ayant adopté, en nouvelle lecture, une motion opposant la question préalable à la délibération du projet de loi organique, nous sommes saisis en lecture définitive du texte voté par l'Assemblée en nouvelle lecture.
Quels sont les principaux points de la réforme ? J'en retiendrai trois. Première avancée : nous actons la suppression des personnalités qualifiées. Avec cette mesure et la réforme de la composition du CESE, nous redonnons toute leur place aux représentants des différentes activités de notre pays. Ces derniers fondent la légitimité du Conseil économique, social et environnemental : nous leur redonnons ainsi la main pour formuler des préconisations qui pourront être utiles au débat public.
Deuxième avancée : Sénat et Assemblée nationale s'accordent sur la nécessité de redonner du sens à la saisine par voie de pétition du CESE, introduite dans la Constitution lors de la révision de 2008. En l'état, nous savons tous que cette saisine ne fonctionne pas. Le seuil de 500 000 signatures est beaucoup trop élevé, et les conditions de dépôt des pétitions sont dépassées. En conséquence, au-delà de la dématérialisation des pétitions, nous avons abaissé le seuil à 150 000 signataires lors de la première lecture. Par ailleurs, le droit de pétition pourra s'exercer dès l'âge de 16 ans. Plus qu'un signal, cette disposition très importante et innovante est une ambition de notre part afin de mieux associer les jeunes à notre démocratie. J'espère qu'ils seront nombreux à s'en saisir.
Pour que le CESE se réforme et qu'il trouve sa place au sein de nos institutions, pour qu'il soit mieux connu et plus utile, il nous faut faire bouger certaines lignes. Sans cela, cette réforme n'aura pas de portée. J'en viens donc au troisième point, qui doit donner une nouvelle dimension au CESE. L'article 4 du projet de loi organique pose les conditions de la participation du public aux travaux du CESE, en prévoyant des garanties importantes : les principes de sincérité, d'égalité, de transparence et d'impartialité seront ainsi inscrits dans le texte, ainsi que les garanties de bonne information des participants, de représentativité des panels sélectionnés et de reddition des comptes.
Je rappelle que le CESE recourt déjà à la participation citoyenne ainsi qu'au tirage au sort. Les inscrire ou non dans la loi n'y changera donc rien. En revanche, ce que nous faisons est très important : nous fixons des règles et nous sécurisons les conditions d'organisation. Nous avons ainsi prévu qu'en cas de recours au tirage au sort, le CESE nomme des garants pour s'assurer du respect des garanties introduites à l'article 4. Ces derniers seront tenus à une obligation de neutralité et d'impartialité. Avec cet article, je pense que nous avons fait un travail de fond attendu par de nombreux acteurs, et que nous proposons les moyens de réellement garantir le bon déroulement des consultations à venir.
Avec cette réforme, une nouvelle ère s'ouvre pour le CESE. Nous avons travaillé dans le cadre de la Constitution – en allant au plus près du bord. J'ai la conviction, comme certaines personnes parfois un peu frustrées par cette réforme, qu'il faudra aller plus loin. Nous devrons sûrement réviser notre Constitution pour permettre une meilleure articulation entre la société civile, la démocratie participative et la démocratie représentative. En attendant, le CESE dispose des outils pour continuer des expérimentations démocratiques vitales à l'amélioration de nos institutions.
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Le Conseil économique, social et environnemental, auquel la Constitution consacre son titre XI, est considéré classiquement comme la troisième assemblée constitutionnelle, aux côtés de l'Assemblée nationale et du Sénat. Son rôle consultatif présente la spécificité, à la différence de celui du Conseil d'État et d'autres organismes administratifs, de fournir une consultation à la fois technique et d'opinion. Cependant, l'activité du CESE est fluctuante, et 80 % de ses avis relèvent de l'autosaisine. Cela pousse à s'interroger sur son rôle, censé éclairer par des avis, des rapports et des études les choix économiques, sociaux et environnementaux du Gouvernement et du Parlement.
La loi organique du 28 juin 2010 relative au CESE, qui l'a modifié de façon substantielle, n'a malheureusement pas permis de conforter sa place au sein de nos institutions. C'est pourquoi le projet de loi organique que nous examinons est absolument nécessaire, non seulement pour lui permettre de surmonter les difficultés qui sont des freins à son utilité et à sa légitimité, mais aussi pour en faire un carrefour de la consultation citoyenne.
Cette assemblée consultative doit en effet pleinement contribuer au juste équilibre entre démocratie participative et démocratie représentative. Cette évolution, attendue par nos concitoyens, est essentielle au bon fonctionnement du dialogue avec les Français et à l'exercice de la proximité qui nourrit les politiques publiques. Notre groupe Mouvement démocrate MoDem et démocrates apparentés a d'ailleurs eu l'occasion de le rappeler à plusieurs reprises.
Dans le cadre de la navette parlementaire, nous avons pu constater que nos collègues sénateurs partageaient ce jugement. Cependant, ils ont fait preuve d'une certaine ambivalence, affirmant d'un côté que le projet de loi organique allait trop loin, et d'un autre qu'il n'était pas majeur sur un certain nombre de points. Cet entre-deux est regrettable, d'autant que nous avons travaillé avec eux – et je veux saluer en cela le rapporteur Erwan Balanant – pour aboutir à un texte commun. Nous avions repris certaines de leurs modifications et avions proposé des amendements de compromis : cela n'aura malheureusement pas suffi.
Pourtant, nos visions de la place à accorder au CESE ne sont pas si éloignées. Il ne s'agit pas de conférer au Conseil un rôle qui ne lui revient pas mais de donner un sens à son action, de lui rendre sa légitimité et de lui permettre d'être réinvesti par nos concitoyens. C'est tout le sens de l'abaissement à 16 ans de l'âge requis pour être pétitionnaire, proposé par notre rapporteur, ainsi que de l'abaissement à 150 000 du seuil de pétitionnaires requis pour sa saisine. C'est également le sens de la dématérialisation des procédures. Dans le même esprit, nous avions bien avancé s'agissant de la composition du CESE : avec nos collègues sénateurs, nous nous étions mis d'accord sur la suppression de la présence de personnalités qualifiées, dont le mode de désignation faisait, à juste titre, débat. Nous soutenions les apports du Sénat, notamment sur le volet déontologique. Ainsi, nous avancions vers un CESE nouveau, plus accessible, plus légitime, plus transparent, plus pertinent et plus utile.
Ce projet de loi organique a pour unique ambition de rendre au CESE la place qu'il mérite, et de renforcer notre démocratie participative. Nous pourrons redonner du sens au pacte citoyen en permettant aux Français de se réapproprier les outils qui leur appartiennent, en associant pleinement la société civile organisée à l'élaboration des politiques publiques et en donnant un vrai cadre à la consultation citoyenne. Pour toutes ces raisons, et parce que les députés du groupe Mouvement démocrate MoDem et démocrates apparentés mesurent tout l'atout de ce texte pour notre démocratie, nous voterons en sa faveur.
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et quelques bancs du groupe LaREM.
Voilà, une fois encore, un texte très décevant par rapport aux ambitions affichées, et qui démontre la grande capacité du Gouvernement, qui se la joue champion de l'expression populaire, à nous enfumer. Comme pour de très nombreux textes examinés ici, c'est, malheureusement, une montagne qui accouche d'une souris.
Faire du CESE l'assemblée des consultations publiques : les termes utilisés pour qualifier le projet de loi organique font rêver. Emmanuel Macron, plus royaliste que le roi, a même parlé d'une chambre des conventions citoyennes quand le Gouvernement en appelle à un forum de la société civile, carrefour des consultations publiques. Rien que ça !
Sans vouloir insulter qui que ce soit, connaissez-vous vraiment la signification des mots consultation publique, convention, citoyens ? Sincèrement, je ne le crois pas. Votre marque de fabrique, c'est plutôt la noblesse, les édiles, les ordonnances !
Toutes vos réformes ont été combattues dans la rue et ont entraîné, dans tout le pays, de grosses manifestations : pouvoir d'achat, santé, services publics, retraites, justice fiscale, climat, sécurité, et j'en passe… Le peuple s'exprime, mais l'écoutez-vous ? Non. Vous utilisez la force, la répression, l'intimidation contre les citoyens qui vous disent : assez, nous n'en pouvons plus, partagez les richesses ! Non seulement vous restez sourds à leurs appels de détresse, mais vous bafouez également le rôle de leurs représentants, qu'il s'agisse des syndicats ou des députés.
Vous utilisez toutes sortes d'artifices pour rejeter, détourner nos amendements et nos propositions de loi. L'exemple récent du débat sur le prolongement de l'état d'urgence sanitaire est encore dans toutes les mémoires, le ministre de la santé nous privant même de vote. Votre loi sur la sécurité globale ne porte-t-elle pas de graves atteintes aux libertés, à différents niveaux ? Vous souhaitez même museler la presse. Alors, ne me faites pas croire, dans ce cadre autoritaire, que vous voulez faire du CESE la chambre des conventions citoyennes ! Vous excellez dans l'hypocrisie.
Le projet de loi organique a été annoncé le 29 juin dernier par le Président de la République devant les membres de la convention citoyenne pour le climat. Or le texte ne satisfait pas leurs demandes : premièrement, rendre systématique la consultation du CESE lors de la rédaction de projets ou de propositions de loi ; deuxièmement, rendre ses avis plus contraignants ; troisièmement, tirer au sort des conseillers du CESE, avec une part identique de citoyens et de personnalités ou, au moins, une part de citoyens comprise entre 15 et 20 % de l'ensemble des membres. Voilà des exemples de manquement à la parole donnée.
En somme, votre carrefour des consultations publiques n'est que le carrefour de l'hypocrisie et de la démagogie. Vous faites mine d'écouter les citoyens en organisant des grands débats, mais c'est autant de temps perdu pour le peuple, face à l'urgence sociale autant qu'écologique. Où est passée la promesse d'Emmanuel Macron de faciliter le référendum d'initiative populaire en abaissant le seuil du nombre de signatures nécessaires ? Depuis trois ans, vous piétinez l'expression populaire. Le projet de loi organique réformant le CESE n'est qu'une continuité de votre politique et de vos méthodes : de la com', rien que de la com' !
Le nouveau CESE est en fait une caution démocratique que vous n'hésiterez pas à brandir chaque fois que vous porterez de mauvais coups contre les gens. Nous ne serons pas complices de vos agissements. Le confinement est devenu votre devise ; la liberté, l'égalité, la fraternité, vous les avez, elles aussi, confinées.
Oui, nous avons tout confiné…
Le groupe La France insoumise ne vous suivra pas dans cette voie. Nous n'avons pas confiance en vous et nous nous abstiendrons donc sur ce texte.
Après tout ce qui a été dit ? C'est un résultat correct pour le Gouvernement !
Bravo, monsieur le garde des sceaux, vous avez convaincu La France insoumise !
Reconnaissons-le, notre démocratie est profondément malade : on vote de moins en moins aux élections nationales, présidentielles comme législatives, ainsi qu'aux municipales ; on remet en permanence en cause les grands projets d'aménagement et beaucoup de grandes réformes ; on va de plus en plus dans la rue, et de plus en plus violemment.
Si nous n'étions pas une grande démocratie disposant de forces de l'ordre bien structurées, la crise des gilets jaunes aurait pu entraîner le pays dans une révolution orange, balayant toutes les institutions.
Est-ce le fait de la majorité actuelle ? Non, ce phénomène est beaucoup plus profond. Jamais nos concitoyens n'ont été aussi formés et informés, et jamais ils n'ont remis en cause, comme ils l'ont fait, autant de projets ; c'est une grande évolution dans l'engagement des citoyens.
Ce phénomène est-il seulement français ? Pas uniquement : dans de grandes démocraties, les populistes sont arrivés au pouvoir. Heureusement, ce n'est pas encore le cas en France, mais cela nous guette.
Il faut une véritable révolution démocratique avant qu'il soit trop tard. Voilà la conviction du groupe Libertés et territoires. Cette révolution pourrait passer à travers le projet de loi organique qui nous est présenté, mais pas uniquement : la France a d'abord besoin d'une vaste révolution girondine, d'un énorme pack de décentralisation, sans quoi nous ne nous en sortirons pas.
Car nous n'y sommes pas du tout : face à l'hyper-concentration des pouvoirs et des moyens entre les mains du Président de la République, un renforcement très important du rôle du Parlement est essentiel, lui qui est, parmi les démocraties occidentales, l'un des moins influents.
Nous avons également besoin de renforcer et de structurer la concertation avec nos concitoyens et avec les corps intermédiaires. Le projet de loi organique va dans ce sens, mais il faut aller beaucoup plus loin en généralisant les référendums d'initiative populaire à choix multiples.
Plus de réponse simple à une question simple ! Il faut aussi faire en sorte que les pétitions de nos concitoyens puissent être portées auprès des autorités qui décident, c'est-à-dire les collectivités territoriales et le Parlement. Si on saisit nos concitoyens, leurs idées doivent être débattues dans nos instances ; si on leur propose de dresser des pétitions sans qu'elles soient transmises au Parlement, cela ne sert à rien. Nous avons besoin d'un choc de participation citoyenne.
Le texte nous permet-il de faire un grand pas ? Non, c'est un petit pas, un petit renforcement du Conseil économique, social et environnemental : on rééquilibre sa composition, on développe le droit de pétition. Mais enfin, allez dire à celui qui se plaint, au bistrot du coin, …
… de la limitation à 80 kilomètres heure qu'il peut toujours saisir le CESE, il va vous rire au nez !
Il y aura un peu plus de liens entre le Conseil économique, social et environnemental et le Parlement, tant mieux. Mais enfin, le compte n'y est pas ! Vous faites aussi une petite place aux conférences citoyennes. Bref, il s'agit tout de même d'une petite avancée et nous voterons donc en faveur du texte. Mais si nous n'engageons pas une véritable révolution démocratique, il ne faudra pas se plaindre quand les populistes arriveront au pouvoir : nous l'aurons bien mérité.
Il n'est jamais trop tard pour agir : le groupe Libertés et territoires encourage le Gouvernement à aller plus loin dans l'ensemble de ces directions.
Toute réforme du Conseil économique, social et environnemental n'aura qu'une incidence marginale si nous continuons avec le même système institutionnel : c'est l'idée portée par le groupe GDR à l'occasion des débats concernant ce texte.
Rendre du pouvoir au Parlement, renforcer les communes, lieu par excellence de l'exercice de la citoyenneté, multiplier les espaces d'écoute et d'échange en allant chercher des personnes souvent éloignées de la chose publique : tel est le fil conducteur de notre groupe, lorsque nous travaillons sur les sujets institutionnels et de démocratie. N'oublions pas, non plus, le soutien indispensable au monde associatif, car il est souvent la porte d'entrée dans l'engagement, en particulier chez les plus jeunes.
Aussi, cette « chambre de l'avenir » telle que l'a voulue le Président de la République, ne pourra voir le jour si nous ne changeons pas le cadre institutionnel et, vous l'aurez compris pour ce qui nous concerne, si nous ne construisons pas une VIe République. Nous constatons chaque jour l'essoufflement de nos institutions : les citoyens ont de moins en moins confiance en la parole politique, les lieux de concertation sont sous-utilisés et les corps intermédiaires s'affaiblissent.
Ne nous trompons pas, ce n'est pas une crise de l'engagement citoyen : celui-ci existe au quotidien et la période de crise que nous traversons en témoigne un peu plus chaque jour. Ce n'est pas non plus le fait d'un désintérêt pour les affaires de la cité ou d'un repli sur soi au détriment de l'intérêt général. Mais c'est l'affaiblissement d'une démocratie active et délibérative qui freine le dialogue entre le peuple et ses représentants et, par conséquent, affaiblit la légitimité de toute parole émanant d'une autorité, qu'elle soit politique, bien sûr, mais aussi, par exemple, scientifique – et nous le constatons chaque jour à l'occasion de la crise sanitaire que nous traversons.
C'est donc pour ces raisons que nous considérons le CESE comme une institution utile et qui peut en effet être réformée ; mais son importance ne tient pas seulement à sa structure même. Nous pensons qu'il sera vain de réformer le CESE, que nous n'atteindrons pas l'objectif fixé si, partout, règne la verticalité du pouvoir inhérente à la Ve République. Voyez la place du Parlement : plus les législatures passent, plus il se trouve affaibli, et plus le discours politique, pourtant vecteur d'éducation populaire et d'action, s'affaiblit également. Seul l'exécutif ne perd jamais son pouvoir.
Aussi, prétendre donner de la place à l'initiative citoyenne sans réformer nos institutions est un vain projet. Avec le présent texte, le Gouvernement propose d'effectuer quelques ajustements au fonctionnement du CESE. Certains sont positifs, comme l'abaissement du seuil à 150 000 signatures pour pouvoir saisir le Conseil par voie de pétition, ainsi que celui de l'âge requis à 16 ans. D'autres le seront à condition d'être correctement encadrés, comme le tirage au sort.
Cependant, nous sommes opposés à la diminution du nombre des membres du CESE, qui n'apporte rien si ce n'est d'en réduire la représentativité. La réforme de l'article 7 de l'ordonnance de 1958, qui allège considérablement les obligations en matière de représentativité des différents champs de la société, est inquiétante. Nous avions alerté en première lecture sur la représentation des territoires d'outre-mer par exemple. Nous appelons une nouvelle fois votre attention sur le collège représentant les jeunes dans leur diversité, les travaux de la commission d'enquête parlementaire, constituée à l'initiative du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, pour mesurer et prévenir les effets de la crise du covid-19 sur les enfants et la jeunesse, ont montré de graves carences dans l'écoute et la prise en considération de leur parole. Il est donc indispensable à nos yeux de garantir leur présence au CESE à moins d'affaiblir encore un peu plus la parole des jeunes et la prise en considération de leur spécificité.
Nous vous mettons par ailleurs en garde sur les conséquences de l'article 6, qui permettra de se passer de la consultation, pourtant prévue par la loi, d'un certain nombre de structures dès que le CESE sera saisi. Nous partageons en cela la volonté du Conseil d'État que cet article soit supprimé.
Enfin, si les travaux du CESE sont, comme nous le constatons, insuffisamment valorisées, il appartient aussi au législateur comme au Gouvernement de les prendre en considération. En dépit, donc, de quelques avancées, le caractère inessentiel de ce texte et certains reculs comme la baisse du nombre des membres du CESE avec, je le répète, et c'est important pour notre groupe, une sous-représentation des ultramarins, nous conduiront à voter contre ce texte.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI.
En juillet 2017, devant le Parlement réuni en Congrès, le Président de la République énonçait son souhait de réformer en profondeur le Conseil économique, social et environnemental. Le CESE était selon lui « une de ces institutions de la République que le temps a figées dans les situations acquises, quand le sens véritable de leurs missions eût été d'incarner le mouvement vivant de la société ». Cette perte de sens et d'utilité de l'institution, nous ne pouvons la nier : ni les gouvernements successifs ni les citoyens n'ont su s'appuyer sur le CESE pour faire avancer la démocratie. Pourtant, il a toutes les prédispositions pour favoriser le développement de la démocratie participative, pour devenir le carrefour des consultations publiques et le conseil des pouvoirs publics.
Chers collègues, ici réside tout l'enjeu du texte que nous allons voter : moderniser le CESE pour lui permettre d'être la grande instance consultative qui fait aujourd'hui défaut à notre démocratie. À cette fin, nous avons modifié la composition du Conseil afin qu'il reflète au mieux la société dans laquelle nous vivons, en ramenant à 175 le nombre de membres permanents.
Surtout, conscients de la dynamique introduite par le grand débat national et par la convention citoyenne pour le climat, nous avons modernisé son fonctionnement afin d'y laisser une place significative aux citoyens, tant dans la consultation que dans l'élaboration des travaux. C'est suivant cette idée de modernisation et de simplification que le seuil du nombre de pétitionnaires a été abaissé de 500 000 à 150 000. Conscients également du souhait de notre jeunesse, de s'investir dans des sujets d'intérêt général structurant pour leur avenir, nous avons abaissé l'âge requis de 18 à 16 ans : la majorité ne doit pas être un frein à l'engagement de la jeunesse et le CESE sera ainsi un des moyens de leur expression.
La gestion interne et administrative du CESE a été actualisée en favorisant le numérique. Nous rendons ainsi les délais de traitement plus courts. Le dispositif de consultation et de participation du public est assorti d'un processus de tirage au sort qui garantira la représentation territoriale incluant les territoires ultramarins et, bien évidemment, la parité.
J'entends les craintes de nos collègues sénateurs, qui ne souhaitent pas voir la démocratie représentative mise en danger ou en concurrence. C'est l'argument qu'ils ont invoqué lors de leur vote en première lecture, en commission mixte paritaire, et sur la question préalable. Cependant, faire évoluer nos institutions pour qu'elles soient en phase avec le besoin de nos concitoyens, qu'elles nous permettent de nous rapprocher et de nous exprimer sur les grandes évolutions de la société, ce n'est pas mettre en danger la démocratie, c'est la renforcer. C'est pourquoi le groupe La République en marche vous propose de voter ce texte tel qu'issu de la deuxième lecture par l'Assemblée.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Je salue le président du CESE, Patrick Bernasconi, présent dans les tribunes du public.
Nous voilà donc réunis pour la lecture définitive d'un texte tant attendu, pas nécessairement par l'opinion publique, pas nécessairement par une foule en délire – vous me permettrez cette trivialité – , mais attendu, oui, réellement, par les socio-professionnels, par les forces vives de la nation parce que ces forces vives, comme nous, croient en la démocratie, non seulement la démocratie participative, j'y reviendrai, qui est celle que nous mettons en avant aujourd'hui, mais aussi la démocratie représentative – et il n'est pas question que l'une chasse l'autre.
Reste que nous avons besoin du dialogue social, nous avons besoin que les forces vives syndicales, patronales, associatives, territoriales – et je pense ici aux outre-mer – puissent s'exprimer dans une enceinte dédiée, en quelque sorte, et sans qu'il y ait confusion des genres. Car, bien évidemment, si j'évoque la démocratie participative et la démocratie sociale, la démocratie représentative, quant à elle, doit garder toute sa place, nous l'avons dit depuis le début : il ne saurait y avoir de marchandage, il ne saurait y avoir d'atténuation des prérogatives du Parlement. L'Assemblée et le Sénat demeurent en effet les assemblées incontournables.
Seulement, ce postulat énoncé, la place des institutions réaffirmée au sein de la Ve République, nous devons aussi nous attacher à d'autres formes d'expression. Cette expression, c'est celle des territoires, c'est celle des associations, c'est celle des forces professionnelles et syndicales, bref, je le disais il y a quelques instants, celle des forces vives. Et nous devons être à leur écoute. Voilà le rôle du Conseil économique, social et environnemental, depuis 2008.
Si j'insiste sur la réforme constitutionnelle qui, elle, avait abouti, contrairement à celle de 2018, c'est que le Président de la République a dressé un tableau peu flatteur d'une évolution qui n'aurait pas eu lieu. Or le CESE a bien évolué, depuis 1958 ; le CESE, depuis 2008, a bien intégré d'autres préoccupations. Il s'agit aujourd'hui de le mener un peu plus loin, tout en restant dans un cadre constitutionnel qui est bien celui de la Ve République. Cela a pesé dans notre engagement pour ce texte : nous sommes à périmètre constitutionnel constant.
Des adaptations, des évolutions sont toutefois nécessaires, afin que cette institution de la République apporte sa pierre à l'édifice démocratique, permette d'enrichir non seulement les débats mais les propositions et permette à davantage de groupes de trouver leur place dans la société.
Certes, des questions demeurent, nous les avons évoquées à plusieurs reprises et il nous faudrait les rappeler parce que, malheureusement, toutes n'ont pas trouvé réponse. Monsieur le ministre nous demandions il y a encore quelques semaines un effort supplémentaire pour la représentation ultramarine et je regrette que nous soyons bloqués à huit représentants car, certes, les ultramarins ne sont pas des concitoyens différents des autres, puisqu'ils sont citoyens de la République, mais les territoires concernés, dispersés sur tous les continents, ne sauraient être comparés avec ceux de la métropole, ou de la France continentale, pour ainsi dire.
L'évolution envisagée du droit de pétition nous pose également problème. Nous ne sommes pas tout à fait d'accord sur l'abaissement du seuil de pétitionnaires. Si le chiffre de 500 000 était trop élevé, celui de 150 000 nous paraît un peu faible, présentant un risque d'embolisation de l'institution.
Nous regrettons par ailleurs l'absence de consultation des instances prévues à cet effet quand le CESE lui-même sera consulté. Pourquoi se priver de certaines compétences ?
Ensuite, pour un certain nombre des membres du groupe Les Républicains, le principe même des « conventions citoyennes », en tout cas le principe de citoyens tirés au sort malmène un autre principe, celui de la représentation nationale. Et je dois dire que, depuis hier soir, nous avons perdu, sur les bancs du groupe LR, un certain nombre de collègues qui étaient prêts à suivre la réforme. Pourquoi ? Parce qu'ils ont le sentiment que ces jurys de citoyens, en fin de compte, viennent un peu bouleverser le jeu politique, surtout quand un Président de la République sort par miracle d'une pochette-surprise le recours au référendum pour faire droit à ces demandes de citoyens.
Bien sûr que c'est prévu par la Constitution, en particulier dans son article 89 ; mais elle ne dit pas que la procédure de révision constitutionnelle doit nécessairement résulter d'un engagement pris devant 150 citoyens tirés au sort. Il en est résulté un débat au sein de notre formation et, du reste, cette participation citoyenne est un des éléments qui a amené une majorité de sénateurs à voter contre le texte.
Nous resterons néanmoins, pour la grande majorité d'entre nous, favorables à l'évolution de cette institution, non seulement parce qu'elle nous paraît conforme au besoin de dialogue social, au besoin de démocratie sociale, mais aussi parce qu'elle est à périmètre constitutionnel constant, enfin parce qu'elle constitue une ouverture vers la société civile.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Nous voici donc au terme de la procédure parlementaire concernant le projet de loi de réforme du Conseil économique, social et environnemental. Nous sommes convenus au cours de nos échanges qu'il ne s'agissait pas d'une réforme d'une ampleur de nature à remettre en question la place du CESE au sein des institutions de la République – ce n'était pas l'objectif du Gouvernement – mais qu'il s'agissait d'une réforme, à laquelle sont favorables les députés du groupe UDI et indépendants, visant à faire du Conseil un carrefour des consultations publiques.
Ces consultations publiques, cette participation de nos concitoyens, non pas forcément à la décision politique elle-même mais à sa construction, a été au coeur du mouvement des gilets jaunes puis du grand débat.
C'est une des grandes questions de l'évolution de nos institutions, qui doivent trouver un équilibre renouvelé entre la démocratie représentative, dont nous continuons d'affirmer qu'elle ne peut être remise en cause, et la place nouvelle à accorder à nos concitoyens dans la participation au débat public conduisant à la décision politique. En tout état de cause, surtout dans la période actuelle, le rôle des deux chambres du Parlement doit être plutôt renforcé qu'abaissé : nous faisons ce constat malheureux à la suite d'un certain nombre de textes ou de réformes, je pense notamment à la réforme du règlement de notre assemblée.
Nous soutenons donc l'esprit général de ce projet de loi. Nous avions quelques réserves, notamment sur l'abaissement du seuil pour l'introduction d'une pétition auprès du CESE. Surtout, nous souhaitions que les avis issus des consultations publiques et recueillis par le CESE ne restent pas lettre morte mais soient, de manière assez systématique, transmis aux chambres parlementaires pour faire l'objet d'un débat, pour ne pas donner à penser à nos concitoyens que leur consultation ne donnera lieu qu'à un rapport de plus, venant gonfler les bibliothèques des uns et des autres.
Une autre préoccupation concernait la réduction du nombre de membres du CESE. Si celle-ci ne nous pose pas de difficulté dans le principe, il n'en est pas de même, en revanche, du mode de désignation, qui pose deux problèmes, s'agissant de la composition de certaines catégories qui relèvent non du pouvoir législatif mais du pouvoir réglementaire.
Le premier problème concerne l'équilibre à l'intérieur des collèges. Nous réaffirmons que le CESE est la représentation des forces vives, économiques et sociales du pays. C'est sa raison d'être au départ et il ne faut pas que cela change. S'agissant du monde associatif, en particulier des associations qui oeuvrent dans le domaine de la protection et de la valorisation de l'environnement, nous souhaitons que ne soient pas exclues de cette représentation les fédérations de chasseurs ou les fédérations de pêche, qui, au même titre que d'autres associations, protègent la nature et l'environnement.
Le second problème concerne la représentation des outre-mer. Le fait de prévoir huit représentants au maximum est un recul que nous regrettons et que regrettent particulièrement nos collègues ultramarins, parce que toutes les spécificités de ces territoires ne pourront pas être prises en compte, demain, au sein du CESE. Les trois espaces océaniques présentent des spécificités à l'intérieur même des collectivités d'outre-mer : la Nouvelle-Calédonie n'est pas la Polynésie française, chaque territoire est particulier. Rien ne garantit, je le répète, qu'ils pourront dorénavant faire valoir leurs spécificités, notamment géographiques, dans les débats du CESE.
La majorité du groupe UDI et indépendants votera ce texte. Plusieurs de nos collègues, en particulier ultramarins, voteront contre.
Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-I et sur plusieurs bancs du groupe LR.
Je tiens tout d'abord à saluer le travail de notre rapporteur et l'écoute du ministre de la justice. Je remercie également le rapporteur pour l'engagement commun qui nous a permis de convaincre le Gouvernement de fixer des règles déontologiques qui s'imposent dans toute institution et qui prévaudront désormais au sein du Conseil économique, social et environnemental ; c'est en quelque sorte une norme ISO en déontologie que nous avons contribué à mettre en place.
Je ferai cinq observations. La première est que cette réforme se traduit par la diminution d'un quart du nombre des membres de l'institution, qui passera de 233 à 175, ce qui provoquera un déficit de représentation de certains acteurs : je pense en particulier au secteur coopératif et solidaire et au monde universitaire et artistique. Cette décision satisfait des attentes populistes et conforte l'idée néfaste que nous sommes toujours trop nombreux à nous occuper de la chose publique. Une telle réduction n'apporte aucune garantie, ni du point de vue de la performance de la réflexion ni de celui de la qualité de la démocratie. Espérons que la qualité des rapports du CESE pourra toujours être au rendez-vous.
Deuxième observation : dans le même esprit, il est regrettable qu'ait été maintenue, contre l'avis du Sénat et le nôtre, la disposition prévoyant que la saisine du CESE exclut celle d'autres organismes. Si le CESE a vocation à être le carrefour des consultations, cet objectif aurait dû conduire la majorité à maintenir cette ouverture. Nous, parlementaires, saurons consulter ces organismes ainsi écartés par l'exécutif.
Nous avons combattu pour que l'outre-mer soit bien représenté en tant que tel ; il l'est désormais, me semble-t-il, par huit membres contre onze auparavant.
Troisième observation : l'ouverture du Conseil aux citoyens est un premier pas vers une démarche participative qui trouve toute sa place dans notre système représentatif et s'impose pour renforcer la démocratie. Cette démarche permet l'ouverture au débat public de thématiques clivantes et complexes. Elle conforte la légitimité des décisions prises ensuite par le Parlement. Elle favorise des politiques plus inclusives prenant mieux en compte la diversité. Elle nourrit notre réflexion, en nous faisant entendre d'autre voix que celles des lobbies, dont nous ne méconnaissons pas l'utilité mais dont nous mesurons aussi les limites et les obstacles au changement.
Ce que nous voyons de la convention citoyenne pour le climat n'est sans doute pas l'exemple qui convertira les plus réticents à ce principe d'action. Mais, là encore, il faut établir des règles claires en amont de la consultation, organisant la prise de décision à venir sans jamais méconnaître le rôle du Parlement. C'est ce que pourrait faire le nouveau CESE en traitant par cette voie, dans l'indépendance, par exemple la question des déserts médicaux ou celle de la fracture numérique. Il ne peut s'agir d'un outil au service d'un gouvernement, quel qu'il soit, qui souhaiterait, de manière opportuniste et dangereuse, contourner le Parlement.
Quatrième observation : plusieurs dispositions sont inspirantes. Je pense notamment à l'abaissement du seuil des pétitions à 150 000 et à l'ouverture de ces pétitions dès 16 ans, ou encore à la possibilité de tirer au sort des citoyens dans le cadre de consultations publiques. Cette ouverture satisfait celles et ceux qui, comme moi, militent depuis des années pour que leur expression soit sollicitée par tous moyens.
Un regret, toutefois – ce sera ma cinquième observation : le rejet de notre proposition d'introduire la possibilité pour une minorité de parlementaires de solliciter le Conseil, afin qu'il ait recours à une consultation du public.
Rappelons enfin que la parole des citoyens ne saurait être réservée qu'à une seule institution et que notre assemblée peut se saisir de cette ouverture pour devenir un Parlement davantage ouvert aux citoyens.
Le groupe Socialistes et apparentés constate que nous sommes loin de l'ambition espérée, loin de l'Assemblée du futur que nous avions envisagée dans la réforme des institutions avec le président Claude Bartolone. Si le CESE a le mérite de s'ouvrir à la parole des citoyens, il est regrettable que cette opportunité ne soit pas saisie pour en faire un meilleur outil de prospective travaillant sur le long terme à côté du Parlement. Les regrets ainsi exprimés, appliquant une sorte de théorie du bilan que nous utilisons en droit administratif, mon groupe votera majoritairement pour cette réforme.
M. le rapporteur applaudit.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.
Hier, le Sénat a adopté une motion de rejet du texte adopté, après l'échec de la commission mixte paritaire, par l'Assemblée nationale. Tout en réitérant son accord sur la nécessité d'une réforme et en saluant le dialogue constructif qui s'était noué entre les deux chambres, il a regretté « le manque d'ambition » du texte – je reprends ses termes – , exprimé son inquiétude quant au sort réservé aux associations et fondations et à la qualité des études d'impact, et refusé le principe du tirage au sort. Le groupe Agir ensemble considère que ces trois objections ne sont pas fondées.
Le texte poursuit trois objectifs principaux : institutionnaliser les outils de démocratie participative, faire du Conseil économique, social et environnemental le carrefour des consultations publiques et réduire le nombre de ses membres de 25 %. Le Conseil devient ainsi le conseil des pouvoirs publics sur les sujets économiques, sociaux ou environnementaux. Il a la faculté d'émettre des avis sur la mise en oeuvre des lois dans son domaine de compétences par des procédures simplifiées et accélérées. Il est désormais en mesure d'examiner des pétitions de citoyens, avec un apport notable : l'introduction du tirage au sort pour les consultations ou concertations publiques.
On doit se réjouir que le texte ait été considérablement bonifié durant la navette : l'ouverture à soixante députés ou soixante sénateurs de la faculté de saisir le Conseil, en plus de l'autosaisine et de la saisine du Gouvernement, l'abaissement du droit de pétition à l'âge de 16 ans, l'abaissement de la jauge à 150 000 pour les pétitions, le renforcement des obligations déontologiques des membres du Conseil, la précision, utile selon nous, de la représentation des outre-mer.
Le groupe Agir ensemble votera pour cette loi organique, …
… parce qu'elle va dans le bon sens et qu'elle obéit à des trajectoires nouvelles, appelées de ses voeux par la société dans laquelle nous vivons, au-delà même de la crise démocratique que nous traversons. Ce n'est pas un manque d'ambition, c'est un premier pas que notre groupe considère comme expérimental, vers une évolution nouvelle de la démocratie. Il n'y a pas à nourrir d'inquiétude particulière. Rappelons qu'il s'agit en tout et pour tout d'avis non normatifs, non contraignants. Il n'y a pas davantage lieu, selon nous, de refuser le tirage au sort, qui peut être un complément utile aux mécanismes existants et qui sera testé à la marge des processus décisionnels.
Nous serons donc favorables à ce texte. Cela étant, le groupe Agir ensemble voudrait appeler l'attention sur deux points. Tout d'abord, une interrogation d'ordre technique : celle de la concurrence, qui existe de plus en plus au coeur de nos institutions, entre les mécanismes de démocratie participative qui se cumulent : référendum d'initiative partagée, pétition auprès de l'Assemblée nationale, consultation ad hoc du type de la convention citoyenne pour le climat. Ces dispositifs gagneraient selon nous à être clarifiés dans un avenir proche.
Une interrogation d'ordre plus général ensuite : nous avons vu le débat qu'a provoqué la question de la représentation des outre-mer, soulignée par notre collègue Maina Sage, qui se réjouit de la représentation des outre-mer au CESE tout en regrettant que leur nombre n'ait pas été remonté à onze représentants. Le sujet, marginal en apparence, pose en réalité des questions beaucoup plus générales : celle de la représentation pertinente de la diversité de la nation, à laquelle nous devrions nous atteler, celle de la capacité des plus vulnérables et des plus excentrés à s'exprimer et à être entendus, problème auquel, députés de cette vénérable assemblée, nous pouvons à l'occasion être confrontés dans l'organisation des travaux. Au final, ce sujet pose une question beaucoup plus profonde encore : celle de la revivification souhaitable de la représentation dans notre pays et de l'articulation entre les principes et les outils de la démocratie participative et ceux de la démocratie directe. Bref, des interrogations cruciales dont nous ne pourrons faire durablement l'économie.
Nous en venons au vote sur le projet de loi organique dans le texte adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, conformément à l'article 114, alinéa 3, du règlement.
Je rappelle que l'adoption de ce texte en lecture définitive nécessite la majorité absolue des membres composant l'Assemblée, soit 288 voix.
Le scrutin est ouvert pour trente minutes dans les salles voisines de l'hémicycle. Il sera donc clos à dix-huit heures trente.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix-huit heures, est reprise à dix-huit heures trente.
La séance est reprise.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 506
Nombre de suffrages exprimés 480
Majorité absolue 288
Pour l'adoption 418
Contre 62
Le projet de loi organique est adopté.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem et Agir ens.
La séance, suspendue quelques instants, est immédiatement reprise.
Hier soir, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles de la première partie du projet de loi, s'arrêtant à l'article 4 nonies.
La parole est à M. le président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Avant que nous ne nous reprenions la discussion des articles, permettez-moi de souligner, car je n'y reviendrai pas, que l'ordre du jour de cette séance est extrêmement chargé. Nous devons examiner plus de 800 amendements d'ici à la fin de la séance de ce soir. Je n'ai pas besoin d'insister : vous comprenez ce que je veux dire, chers collègues !
L'ordre du jour a été mal préparé, monsieur le président, et je tiens à exprimer mon insatisfaction. Contrairement à ce qui se passait auparavant, de nombreux amendements sont désormais déposés en nouvelle lecture du projet de loi de finances. Or des séances qui commencent à dix-sept heures ou à dix-huit heures trente ne permettent pas de travailler dans de bonnes conditions. Certains amendements portent sur des sujets sérieux et mériteraient de faire l'objet d'une discussion approfondie. Le Gouvernement a procédé à d'importants mouvements de crédits depuis la première lecture. C'est bien entendu son droit et la situation actuelle l'y oblige sans doute. Mais il en résulte un nombre important d'amendements de crédits.
Pour conclure, j'appelle chacun d'entre vous à faire preuve de concision dans la défense de ses amendements. S'il vous prend l'envie de ne pas les défendre, ne vous en privez pas !
Sourires.
La parole est à M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Dans le prolongement de l'intervention du président de la commission des finances, je veux souligner le défi que constitue l'examen de 807 amendements d'ici à la fin de la nuit. C'est ambitieux !
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
… chacun devra faire preuve d'autodiscipline.
L'autodiscipline n'est pas l'autocensure et, je vous rassure, chers collègues, nous aurons le temps d'aborder tous les sujets importants. Nous ne ferons l'impasse ni sur les amendements de crédits, ni sur les autres. En revanche, je formulerai des avis brefs, notamment sur les sujets que nous avons déjà abordés en première lecture ou qui relèvent de suppressions ou de rétablissements liés à la navette parlementaire. Je vous remercie par avance de votre compréhension.
J'émettrai des avis tout aussi brefs sur les amendements de crédits, mais cela ne vous empêchera nullement de reprendre la parole. L'essentiel est que nous adoptions un rythme relativement rapide et que nous examinions entre 80 et 100 amendements par heure, sous peine de ne pas réussir à relever le défi.
Les propos de M. le président de la commission et de M. le rapporteur général font écho à ceux tenus ce matin par le président de l'Assemblée lors de la conférence des présidents. Notre intérêt à tous est de favoriser le débat tout en faisant preuve d'autodiscipline. Il sera peut-être nécessaire, au cours de la séance, de rappeler chacun à ce double impératif. Monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur général, je ne manquerai pas de vous solliciter si cela se révèle nécessaire.
La parole est à Mme Émilie Cariou, pour soutenir l'amendement no 1202 , tendant à supprimer l'article 4 nonies.
L'article 4 nonies, adopté par voie d'amendement au Sénat, étend le régime fiscal des fusions. Ce sujet n'a pas été examiné en première lecture et je m'interroge sur la portée et les conséquences de cet article.
Le régime fiscal des fusions permet, en cas de restructuration, d'absorber certains déficits et donc de réduire le montant de l'impôt pour les groupes résultant de telles opérations. La mesure prévue par l'article 4 nonies sera peut-être nécessaire à terme, mais une étude d'impact est indispensable compte tenu des montants en jeu – des centaines de millions d'euros échapperaient potentiellement à l'impôt sur les bénéfices.
La réforme proposée, qui conduirait à modifier les articles 223 I et 210 A du code général des impôts, exige une étude approfondie et un projet de loi dédié, et ne saurait être introduite dans le projet de loi de finances pour 2021 par la voie d'un article ajouté par le Sénat.
La mesure proposée par l'article n'est pas une mesure d'optimisation. Reste qu'elle nécessite d'être ajustée et encadrée. Tel est l'objet de l'amendement no 661 de la commission des finances, que nous allons examiner juste après.
Je suis défavorable à la suppression de l'article. Le dispositif introduit par le Sénat doit être conservé et amélioré. Avis défavorable.
La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics, pour donner l'avis du Gouvernement.
Avant de donner mon avis sur l'amendement, je précise que j'observerai, pendant la discussion, la même discipline que M. le rapporteur et M. le président de la commission, en particulier sur les dispositions qui auront déjà été examinées pendant le débat ou en première lecture.
L'article 4 nonies ne vise pas à étendre le régime fiscal des fusions, mais concerne le régime d'intégration fiscale et, plus particulièrement, le dispositif d'imputation des déficits sur une base élargie. Il n'entraîne pas une imposition différée. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement soutient le dispositif, à condition qu'il soit amendé comme le propose M. le rapporteur.
Avis défavorable à l'amendement no 1202 .
Vous ne nous avez pas du tout expliqué pourquoi nous avons besoin d'un tel dispositif ! Par ailleurs, si on peut imputer des déficits sur une base élargie, de fait, le dispositif introduit un nouveau régime vecteur d'optimisation fiscale dans le code général des impôts. Nous parlons ici de montants potentiellement très importants ! Quand des groupes fusionnent, les recettes fiscales atteignent rapidement des centaines de millions d'euros. Un tel dispositif doit nécessairement faire l'objet d'une étude d'impact. Il est très grave de créer une nouvelle niche fiscale à l'impôt sur les sociétés sans définir précisément son périmètre.
Avons-nous réellement besoin de cette mesure au beau milieu du plan de relance ?
L'amendement no 1202 n'est pas adopté.
L'amendement no 661 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 4 nonies, amendé, est adopté.
L'article 5 bis est adopté.
Les amendements nos 131 et 132 , que je vais défendre en même temps, visent à rétablir l'article 7 supprimé par le Sénat. Cet article prévoit de supprimer progressivement la majoration de 25 % du bénéfice des entreprises qui n'adhèrent pas à un organisme de gestion agréé – OGA. L'amendement no 131 propose cette suppression dès 2021.
La mesure prévue à l'article 7 constitue une mesure de justice fiscale en faveur de tous ceux qui ne sont pas adhérents à un OGA. Oui à la justice fiscale, non à la présomption de fraude. Cet article n'est aucunement orienté contre les OGA qui, en théorie, mènent d'autres missions, notamment en matière de formation. La seule question que doivent se poser les OGA est celle de leur utilité. Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2018, j'avais déjà soutenu un amendement en faveur de cette suppression.
Je comprends toutefois pourquoi le Gouvernement a prévu une sortie en sifflet dans le projet de loi de finances pour 2023. Je retire donc l'amendement no 131 au profit de mon amendement de repli no 132 et de l'amendement no 662 de la commission des finances, qui proposent de rétablir l'article 7 dans sa version initiale.
L'amendement no 131 est retiré.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 662 de la commission des finances.
Il vise à rétablir l'article 7 dans sa version adoptée par l'Assemblée en première lecture. Il va moins loin que l'amendement no 131 de M. Laqhila puisqu'il ne propose pas une suppression directe, mais progressive, ce qui, précisément, fait l'intérêt de l'article 7. Il s'agit non pas de dénoncer l'inutilité des OGA, mais d'interroger, par une sortie en sifflet, leur modèle économique et le service qu'ils proposent. Les OGA sont utiles, il faut le dire, mais la majoration de 25 % du bénéfice des entreprises qui n'adhèrent pas à l'un d'eux n'est plus justifiée.
L'amendement no 132 de M. Mohamed Laqhila est défendu.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Avis favorable.
Les OGA sont ce qu'ils sont. Leur fonctionnement n'est certes pas parfait, mais il n'est pas non plus entièrement critiquable. Ils constituent des intermédiaires efficaces. Je sais bien que la tendance actuelle est de supprimer les intermédiaires – rappelons le sort qui a été réservé aux commissaires aux comptes dans la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, la loi PACTE – , mais la Cour des comptes a souligné leur utilité dans un rapport.
Pour ma part, je crois à l'intermédiation. Il faut consolider les déclarations fiscales et le service rendu par les OGA permet de gagner beaucoup de temps aux fonctionnaires. Cette forme de détachement de mission est selon moi très importante. Avec la sortie en sifflet que vous prévoyez, vous dites aux OGA qu'ils n'ont plus de raison d'exister. L'augmentation de la base fiscale de ceux qui n'y recourent pas s'explique par l'histoire, une histoire qu'il convient de respecter. Les OGA ne coûtent pas cher. Ils sont utiles et jouent un rôle important, même s'ils doivent se moderniser. Pour ma part, je ne suis pas favorable au rétablissement de l'article 7 supprimé par le Sénat.
Je veux moi aussi défendre les OGA. Le changement de régime fiscal prévu par l'article 7 menacerait lourdement le devenir des OGA, pourtant essentiels pour de nombreuses entreprises du commerce, de l'artisanat et de l'agriculture. Il entraînerait également une perte importante pour la puissance publique, les OGA constituant un outil de sincérité fiscale et de lutte contre la fraude.
À ce jour, la majoration de 25 % du bénéfice imposable des entreprises non adhérentes à un OGA est une mesure d'équité fiscale, qui trouve sa légitimité dans la suppression de l'abattement de 20 % pour adhésion à un OGA.
Dans ma circonscription, j'ai pu justement mesurer le rôle joué par le centre de gestion agréé de la Haute-Corse ; en conséquence, je vous appellerai à ne pas rétablir l'article 7.
Je m'associe aux propos de notre collègue Michel Castellani. Alors que la Cour des comptes n'est pas particulièrement réputée pour sa clémence envers les organismes qu'elle évalue, son rapport sur les OGA met en avant leur utilité pour 1,25 million d'artisans, de commerçants et d'agriculteurs, à qui ils rendent de précieux services. Je ne comprends donc pas que vous vouliez supprimer un dispositif qui semble bien fonctionner.
Je m'associe également aux propos de M. Castellani et à ceux de Mme Pires Beaune, qui ont bien souligné l'utilité des OGA. Ces outils permettent en effet de lutter contre la fraude, d'oeuvrer pour une meilleure transparence, d'éviter des erreurs et d'accompagner des chefs d'entreprise qui ne disposent pas toujours du temps et du recul nécessaires pour recueillir les informations ou effectuer les vérifications dont ils ont besoin. Pourquoi cet acharnement à vouloir les supprimer ?
Notre collègue Mohamed Laqhila dit qu'ils ne seront pas supprimés. Mais si l'article 7 était rétabli, les OGA ne présenteraient plus aucun intérêt !
Je considère moi aussi que le Gouvernement fait une erreur, car les OGA sont de précieux intermédiaires entre l'administration fiscale et les nombreuses entreprises qu'ils conseillent ou qu'ils orientent. Il s'agit d'un dispositif vertueux qui a largement fait ses preuves, et je voudrais que le Gouvernement lui reconnaisse au moins ce mérite. Il n'est pas possible d'annoncer sans cesse de grands plans pour lutter contre la fraude tout en faisant disparaître les OGA.
En outre, le rétablissement de l'article 7 menacerait 3 500 emplois. Avons-nous vraiment les moyens, dans l'époque que nous vivons actuellement, de nous offrir le luxe d'un tel plan social ? Je vous pose la question en toute conscience et en toute responsabilité, car il y a là un vrai problème. Les OGA occupent un espace spécifique auprès des commerçants et des agriculteurs qu'ils conseillent ; cela gêne certainement d'autres professionnels exerçant dans ce domaine, mais c'est la réalité.
Si vous finissez par supprimer effectivement ces emplois, quelles propositions ferez-vous aux personnes concernées ? Ne pourriez-vous pas établir un seuil de chiffre d'affaires en dessous duquel leur compétence serait certifiée ? Que leur proposez-vous pour qu'ils se reconvertissent, notamment en matière de formation ?
En l'état, le texte manque d'une vision précise quant à la manière dont sera remplacé le conseil que les OGA prodiguent à leurs clients, et c'est franchement un mauvais sort que leur réserve cet article 7.
Je voudrais simplement rappeler que la proposition qui est faite s'étale sur trois ans. Les OGA auront donc largement le temps de renforcer leur offre, notamment en améliorant les prestations qu'ils proposent aux petits commerces, qui constituent une partie importante de leur clientèle. La réduction d'impôt dont bénéficient leurs adhérents, qui peut aller jusqu'à 915 euros par an, reste d'ailleurs d'actualité et continue de rendre leurs services attractifs.
Nous avons maintenu la certification des logiciels de caisse : de nombreuses vérifications sont déjà effectuées automatiquement par les nouveaux logiciels dont disposent beaucoup d'entreprises. Quant aux agriculteurs, ils sont nombreux à bénéficier des services des experts-comptables, qui sont tout aussi capables de réaliser efficacement ce type de tâches.
Enfin, je ne me fais pas trop de souci s'agissant des 3 500 postes. En trois ans, il est possible de mettre en place des plans de formation pour faire monter en compétence certains de ces salariés : ils seront très utiles dans les cabinets d'expertise comptable qui ont actuellement besoin de bras.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 663 , tendant à supprimer l'article 7 bis.
Cet amendement de suppression de l'article introduit par le Sénat est issu des débats que nous avons eus en première lecture.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l'amendement no 87 , tendant à supprimer l'article 8.
Le mécanisme de doublement de l'assiette du CIR – crédit d'impôt recherche – pour les dépenses relatives aux opérations sous-traitées à des organismes de recherche publics ou assimilés incite au développement des liens entre la recherche publique et la recherche privée ; or il y a un problème, en France, s'agissant du lien entre le privé et le public.
En supprimant ce dispositif, l'article 8 pourrait fragiliser le secteur de la santé au moment où il a le plus besoin que ces deux modes de financement se combinent. C'est pourquoi nous avons déposé cet amendement de suppression de l'article.
Je ne referai pas le débat sur l'article 8, mais je rappelle qu'il ne met en aucun cas les organismes de recherche publique en difficulté : ils pourront tout à fait continuer de sous-traiter des activités et le donneur d'ordres bénéficiera du CIR. L'article se contente de supprimer le doublement de l'assiette. J'entends très bien que cela puisse vous inquiéter, mais je rappelle qu'une plainte a été déposée auprès de la Commission européenne à ce sujet ; elle implique un risque réel contre lequel nous devons nous prémunir.
Par ailleurs, les actions que nous menons en faveur de la recherche publique, que ce soit dans le plan de relance ou dans la LPPR – loi de programmation pluriannuelle de la recherche – , devraient être de nature à vous rassurer : elle est encouragée et renforcée. Avis défavorable.
L'amendement no 87 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il vise à supprimer le crédit d'impôt recherche. Du fait de la transformation du CICE – crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi – en baisse de cotisations, le CIR est devenu en 2020 la première dépense fiscale du budget de l'État ; son coût dépasse les 6 milliards d'euros.
Quel en est le résultat ? Plafonné à l'échelle d'une filiale mais pas à celle d'un groupe dans sa totalité, il peut être utilisé dans des montages d'évasion fiscale : les groupes l'utilisent, puis cèdent leurs brevets à une de leurs filiales établie par exemple dans un paradis fiscal et déduisent des redevances de leur bénéfice imposable en France.
En outre, le dispositif souffre d'une trop inégale répartition : en 2015, sur 14 000 entreprises ayant bénéficié du CIR, quarante-deux grandes entreprises – soit 0,3 % des bénéficiaires – se sont accaparées à elles seules 31 % des créances du CIR. Pourtant, un rapport sénatorial a montré que 80 % des créations d'emploi en R& D – recherche et développement – se font dans des entreprises de moins de 500 salariés.
Prenons le cas de Nokia : le groupe veut supprimer 1 233 postes en France, dont 83 % dans la R& D, alors qu'il a touché 273 millions d'euros de CIR entre 2016 et 2019 ! Le fait que Nokia maintienne cinq filiales différentes en France lui a notamment permis de bénéficier de 30 millions d'euros de CIR supplémentaires en 2019. Ce n'est malheureusement qu'un exemple parmi tant d'autres : on pourrait aussi évoquer IBM, qui a annoncé la suppression de 400 postes en France après avoir touché 130 millions d'euros de CICE et de CIR ces six dernières années.
Le présent amendement vise donc la suppression du CIR, car il nous semble qu'il serait bon d'allouer ses crédits défectueux et inefficaces à la recherche publique, qui en a cruellement besoin dans ce contexte de crise sanitaire.
Défavorable. Monsieur Larive, nous ne referons pas le débat sur la pertinence du crédit d'impôt recherche ou du crédit d'impôt innovation ; nous n'avons pas le même avis quant à l'utilité de ces outils.
Je ne me prononcerai pas sur le fond de l'amendement proposé par notre collègue, mais je voudrais dire que, pour les petites entreprises, le crédit d'impôt recherche apparaît comme pratiquement indispensable – je pense ici en particulier au tissu d'entreprises de Corse. Nous avons pu obtenir que le crédit d'impôt innovation soit fixé à un taux relativement favorable, mais le crédit d'impôt recherche, lui, a été abaissé en vertu des dispositions communautaires. Nous trouvons cela très regrettable et nous attendons qu'il soit rétabli à un niveau acceptable. Voilà ce que je voulais dire en particulier à M. le ministre délégué.
L'amendement no 356 n'est pas adopté.
Il s'agit d'un amendement de repli. Compte tenu des effets négatifs du crédit d'impôt recherche sur les finances publiques mais aussi de son accaparement par les plus grandes entreprises, comme vient de le préciser mon collègue, nous proposons de revoir ses modalités d'attribution en suggérant que son plafond – actuellement fixé à 100 millions d'euros de dépenses par an et au-delà duquel son taux passe de 30 % à 5 % – soit estimé à l'échelle du groupe et non plus à celle des filiales, afin d'éviter les montages d'évasion fiscale évoqués précédemment.
Je pense que cela peut s'entendre, et c'est d'ailleurs ce qu'avait demandé M. Joël Giraud, rapporteur général du PLF pour 2020.
L'amendement no 357 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne, pour soutenir l'amendement no 440 .
Nous ne remettons pas en cause le crédit d'impôt recherche, mais nous proposons de le plafonner pour chaque entreprise à 16 millions d'euros.
Ce plafonnement permettrait de limiter la concentration du CIR sur les grandes entreprises : en effet, comme l'a montré un rapport d'Oxfam en 2017, deux tiers de ses créances étaient attribués aux grandes entreprises et aux entreprises intermédiaires. Pour limiter les effets d'aubaine des grands groupes, nous proposons ainsi de réinstaller un plafond à 16 millions d'euros, soit le niveau qui était le sien en 2008, avant sa suppression.
Je ne nie pas que la question du plafond mérite d'être posée, mais nous avons démontré que son relèvement avait un impact réel sur la dépense en recherche et développement dans notre pays. Même si je sais qu'il coûte beaucoup d'argent – je vous donne raison sur ce point – , un tel dispositif a prouvé son efficacité en créant des externalités positives. Avis défavorable.
Défavorable également.
Vous avez donné une réponse concernant le plafond et nous en prenons acte, mais vous n'avez rien dit sur le fait qu'il est établi à l'échelle de chaque filiale et non d'un groupe.
L'amendement no 440 n'est pas adopté.
Sur l'amendement no 358 , je suis saisi par le groupe La France insoumise d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 570 et 1093 . L'amendement no 570 de M. Julien Aubert est défendu.
La parole est à M. Jean-Pierre Vigier, pour soutenir l'amendement no 1093 .
Le présent article prévoit, aux alinéas 6 à 15, de supprimer le doublement du CIR pour les travaux de recherche et développement menés avec des instituts publics. Or, comme vous le savez, il est fondamental pour l'avenir de la recherche française et de ses avancées que cette collaboration entre privé et public continue d'être encouragée. Cela passe sans aucun doute par le maintien de ce dispositif. En l'absence de doublement du CIR, il deviendra financièrement impossible de réaliser une partie de nos travaux de recherche et développement.
Il ne faut pas exagérer, cher collègue. Quand vous dites que l'article 8 empêchera la sous-traitance par les instituts de recherche publics et entravera les projets de recherche et développement, ce n'est pas vrai.
Nous empêchons le dédoublement de l'assiette entre recherche publique et recherche privée, afin d'aligner les deux ; surtout, nous évitons un gros contentieux européen sur ce sujet. Avis défavorable.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 664 .
Il vise à supprimer deux modifications introduites par le Sénat, qui prévoient des hypothèses de remboursement du crédit d'impôt recherche mal calibrées et juridiquement très fragiles.
L'amendement no 664 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Nous l'avons bien compris, vous considérez que le crédit impôt recherche est absolument essentiel pour la recherche française. Il y a un instant, mon collègue Castellani le justifiait en parlant des petites entreprises qui en ont besoin. Si nous reconnaissons que les entreprises peuvent avoir besoin d'aides pour leur recherche, nous contestons le fait que cette aide soit distribuée sans critères à toutes les entreprises.
Avec le présent amendement, qui est un peu l'amendent Sanofi, nous proposons d'imposer au moins un critère : nous voulons qu'une entreprise, qui touche du CIR alors qu'elle supprime des postes de chercheurs, soit pénalisée.
Rappelons que Sanofi a supprimé 5 000 salariés et treize sites en dix ans. L'entreprise va encore supprimer 1 000 emplois d'ici à la fin de 2022 et 45 % des postes en recherche et développement. Rencontre-t-elle des difficultés ? Non. En matière de bénéfices, elle devrait passer de la troisième place en 2019 à la première place cette année, en raison de la crise du covid-19. Elle va verser 3,95 milliards d'euros de dividendes cette année, un montant en hausse de plus 3 %, en pleine crise sanitaire.
On pourrait se dire qu'une telle entreprise, qui réalise des bénéfices et verse des dividendes tout en supprimant des postes en recherche et développement et des sites, ne va pas toucher d'argent public. Eh bien si : elle reçoit 130 millions d'euros par an d'argent public ! Ce n'est plus supportable ! Il n'est plus supportable que des entreprises comme Sanofi – il y en a plusieurs – bénéficient de l'argent public, vu ce qu'elles sont en train de faire de la recherche française.
À travers cet amendement, nous voudrions au moins envoyer un signal : qu'elles ne peuvent plus se le permettre. Pour l'instant, elles avancent à tout va d'ici à 2022, en supprimant des secteurs absolument essentiels : anti-infectieux, cardiologie, neurologie, Alzheimer et diverses autres maladies. Pour réagir, envoyer un signal, je vous demande de voter pour cet amendement.
Même avis !
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 91
Nombre de suffrages exprimés 90
Majorité absolue 46
Pour l'adoption 12
Contre 78
L'amendement no 358 n'est pas adopté.
Quasiment similaire à celui de mon collègue Coquerel, cet amendement vise à instaurer une pénalité financière correspondant au montant du CIR perçu, majoré de 10 %, en cas de licenciements. C'est d'autant plus nécessaire que la France connaît une vague de licenciements qui va aller grandissant : plus de 30 000 suppressions d'emplois ont été recensées au cours des trois derniers mois, et le pire est à venir, une fois que la perfusion financière administrée par l'État aux entreprises se tarira.
Dans ce contexte, comme l'a dit mon collègue Coquerel, il est insupportable que des entreprises suppriment des postes alors qu'elles bénéficient d'aides de l'État. Pour que cessent ces comportements inacceptables – et malheureusement répandus – nous devons, je le répète, exiger le remboursement du CIR perçu, majoré de 10 %.
L'amendement no 359 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Notre groupe ayant décidé de choisir ses priorités pour gagner du temps dans ce débat, je me contenterai de dire « défendu » pour certains amendements, dont celui-ci.
J'espère que les autres groupes feront de même.
Je regrette d'ailleurs que cette espèce de rappel à l'ordre qui nous a été fait aujourd'hui n'ait pas eu lieu dès la première séance sur ce texte. Si nous regardions les temps de parole des différents groupes, nous aurions quelques surprises concernant ceux qui devraient maintenant faire un effort pour accélérer les débats.
Cela étant, la gestion de l'ordre du jour est très regrettable, car elle conduit à une situation qui ne grandit pas la démocratie.
La parole est à Mme Émilie Cariou, pour soutenir l'amendement no 1191 .
Même si je souscris aux propos de mon collègue Bricout, je vais défendre cet amendement qui tend à utiliser le crédit impôt recherche comme d'un outil de relocalisation. Vous n'êtes pas d'accord, mais je vous demande de l'examiner quand même et, qui sait, peut-être progresser dans la voie du succès d'ici à l'année prochaine. L'idée est celle-ci : au-dessus d'un certain montant de crédit d'impôt recherche, son octroi est conditionné, par voie d'agrément, à un engagement de relocalisation d'unités de production industrielle en France et en Europe.
Je pourrais aussi l'appeler l'amendement Sanofi. Il n'est plus possible de continuer à payer du CIR et des équipes de chercheurs de gros groupes industriels en France, sans penser à la suite industrielle de ces groupes car, sinon, nous devenons dépendants de la Chine, du Brésil ou de je ne sais quel autre pays où sont situées les usines employant des ouvriers payés à bas prix.
Ces groupes cumulent optimisation sociale et fiscale, ce qui n'est plus possible, sans compter les risques que nous fait courir une perte de souveraineté, comme nous l'avons vu pendant la crise du covid-19.
S'il vous plaît, monsieur le rapporteur général, voyez d'un oeil un peu bienveillant ce type d'amendement de relocalisation industrielle.
Applaudissements sur les bancs des groupes FI et GDR.
Monsieur Bricout, je ne choisis pas les amendements auxquels je réponds mais, pour que nous puissions finir dans les temps impartis, je réponds de manière brève à ceux que nous avons déjà vus en première lecture, et plus longuement à ceux qui correspondent à un nouveau débat. Je ne déroge pas à ce principe.
Quant à la relocalisation industrielle, nous voulons la favoriser par la baisse des impôts de production prévue notamment à l'article 4, ce que vous refusez. Il peut y avoir différents outils de relocalisation industrielle.
Défavorable.
Écoutez, monsieur le rapporteur général, je sais bien que vous essayez de nous faire prendre des vessies pour des lanternes : la relocalisation par des politiques de compétitivité et de moins-disant fiscal, cela ne marche pas ! Cela fait dix ans que vous et vos prédécesseurs essayez d'imposer cette politique. Quel est le résultat ? Les entreprises ferment les unes après les autres et délocalisent, notamment parce que le libre-échange fonctionne de telle manière, surtout dans l'Union européenne, que vous pouvez donner tous les avantages fiscaux que vous voulez, les entreprises iront toujours vers celui qui fera encore pire.
Arrêtez avec ce type de politique et faites des réformes structurelles. En l'occurrence, Mme Cariou propose d'intervenir à l'égard d'entreprises qui prennent l'argent public tout en délocalisant. Comment pouvez-vous supporter cela ? Comment pouvez-vous supporter que Sanofi délocalise des sites de recherche, alors qu'il touche 130 millions d'euros d'argent public par an ? C'est intenable !
Vous êtes pour le libéralisme et le capitalisme, mais vous permettez à des groupes comme celui-là de prendre l'argent public et d'en faire ce qu'ils veulent. C'est insupportable pour les salariés et la recherche. Pouvez-vous le comprendre ? Les chercheurs, les salariés de Sanofi pensent que ce n'est plus vivable et ils vous disent : arrêtez-les ! Et vous restez là à nous expliquer que vous êtes en train de relocaliser, alors que vous permettez la délocalisation.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 665 .
L'amendement no 665 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 8, amendé, est adopté.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 666 .
Cet amendement vise à supprimer la demande de rapport, adoptée par le Sénat, sur l'application d'un abattement partiel sur les plus-values immobilières réalisées dans le périmètre d'une grande opération d'urbanisme.
L'amendement no 666 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 8 quater, amendé, est adopté.
Cet amendement tend en effet à supprimer cet article introduit au Sénat, qui revient sur une extension de la taxe sur les bureaux.
Il s'agit en effet de supprimer cet article qui modifie les conditions relatives à l'exonération totale de plus-value immobilière pour la résidence principale des contribuables non-résidents.
Il s'agit de supprimer cet article qui vise à étendre aux zones dites B1, le bénéfice de l'abattement applicable aux plus-values immobilières en zone tendue.
Il s'agit de supprimer la prorogation de l'abattement sur les plus-values immobilières.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 671 .
Il tend à supprimer le relèvement du plafond du déblocage de l'épargne salariale.
L'amendement no 671 , accepté par le Gouvernement, est adopté. En conséquence, l'article 8 sexies A est supprimé.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 672 .
Il s'agit de supprimer l'exonération de l'impôt sur le revenu en cas de transfert des droits d'un compte épargne temps – CET – vers un plan d'épargne salariale.
L'amendement no 672 , accepté par le Gouvernement, est adopté. En conséquence, l'article 8 sexies B est supprimé.
Il s'agit de supprimer l'extension aux acquisitions de logements neufs à usage de résidence principale, de l'exonération de droits de donation adoptée dans le troisième projet de loi de finances rectificative.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 674 .
Il s'agit de supprimer le renforcement de l'exonération partielle des droits de donation et de succession pour des biens ruraux donnés en bail à long terme.
L'amendement no 674 , accepté par le Gouvernement, est adopté. En conséquence, l'article 8 septies B est supprimé.
Il s'agit de supprimer le relèvement à 90 ans de l'âge plafond des donateurs pour l'exonération des dons en sommes d'argent dans le cadre familial jusqu'à 31 000 euros.
Les articles 8 septies D et 8 octies A sont successivement adoptés.
Cet article prévoit que les éléments accessoires d'une offre composite doivent se voir appliquer le même régime de taxe à la valeur ajoutée – TVA – que les éléments principaux de cette opération. Or ce texte ne prévoit pas une définition juridique de la notion d'éléments accessoires d'une offre composite au regard de la TVA.
Les clubs professionnels de football – je pense notamment au Stade de Reims – et plus largement tous les acteurs proposant de la billetterie – musées, salles de concert, spectacles vivants – , qui sont durement éprouvés lorsqu'ils proposent des packs complets – billets, merchandising, restaurant, places de parking et autres – , sont directement concernés. Des taux de TVA différents sont alors appliqués à ces diverses prestations.
Le texte initial omettait de préciser la définition juridique alors même que la jurisprudence de la Cour de justice européenne l'a établie. Au Sénat, monsieur le rapporteur général, votre groupe parlementaire avait déposé un amendement qui prévoyait d'inclure dans le code des impôts la définition retenue par la jurisprudence européenne. Le groupe LR avait également voté pour cet amendement.
Monsieur le ministre délégué chargé des comptes publics vous vous y étiez opposé, arguant que cette précision n'allait pas dans le sens d'une plus grande clarification. Pourtant, je veux vous alerter : si le texte initial était rétabli, cela ferait peser un risque juridique important sur des milliers d'entreprises déjà très affectées par la crise du covid-19 et qui ont plus besoin d'une simplification que de tracasseries administratives supplémentaires.
Au contraire, maintenir les dispositions de l'article 9, telles qu'adoptées aux Sénat, aurait plusieurs effets positifs : mettre en cohérence et de manière globale la jurisprudence de la Cour de justice européenne et le droit français ; permettre une simplification de l'application de ces règles complexes de TVA ; enfin, améliorer la sécurité juridique et, par extension, limiter les risques, notamment financiers, courus par plusieurs milliers d'entreprises.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 676 .
Il vise à revenir à la rédaction de l'article adoptée par l'Assemblée nationale.
Je ne comprends pas votre position. Le Sénat s'est calé sur la définition donnée par la Cour de justice de l'Union européenne. Notre texte, il est vrai, est un peu vaseux. Par rapport à celui que nous avions voté en première lecture, il définit les produits liés en indiquant : « Un élément est accessoire dès lors qu'il ne possède pas de logique économique propre en dehors de l'élément principal ou qu'il ne constitue pas une fin en soi pour le consommateur mais seulement un moyen de bénéficier dans de meilleures conditions de l'élément principal de la prestation rendue. » C'est la position de la jurisprudence européenne. Nous avons donc tout à gagner à mettre cette jurisprudence dans notre droit : cela permettrait d'éviter la prolifération de contentieux.
L'argumentaire de votre amendement est très faible. Il y est écrit : « Si des précisions peuvent être amenées, elles peuvent ressortir de compétence de la doctrine administrative. » En l'indiquant dans la loi, on procéderait à une simplification qui, je le répète, permettrait d'éviter des contentieux.
L'amendement no 676 est adopté.
L'article 9, amendé, est adopté.
L'article 9 bis A est adopté.
Je suis d'accord avec M. le rapporteur général pour demander la suppression de cet article même si les raisons sont sans doute différentes.
Cet article est issu d'une proposition de la convention citoyenne pour le climat, qui induit malheureusement un manque à gagner important du point de vue des finances publiques. En raison de l'absence de toute étude d'impact, de conclusions écrites à l'avance et de l'indéniable orientation politique des experts sollicités, les propositions de cette convention entrent en contradiction frontale avec la réalité économique et sociale de notre pays. C'est pourquoi je demande la suppression de cette mesure.
J'aimerais demander à M. le rapporteur général ce qui s'est passé entre l'examen en commission des finances, pendant lequel vous n'aviez pas déposé d'amendement visant à supprimer cette disposition du Sénat, et l'examen en séance publique.
Je veux souligner les incohérences de la majorité. Tout d'abord, quand cela vous arrange, vous faites valoir les dispositions de la convention citoyenne. En revanche, quand cela ne vous arrange pas, vous ne les retenez pas.
Ensuite, vous nous dites qu'il faut trouver des solutions alternatives à la voiture pour des raisons écologiques. Or cette mesure a des effets sur le prix du billet et encourage donc le recours au train, puisque la SNCF avait pris l'engagement de diminuer le prix du billet de train à due concurrence de la suppression de la TVA.
J'ajoute que l'Allemagne a retenu ce dispositif vertueux, qui favorise les trajets en train et contribue à la hausse du pouvoir d'achat des citoyens qui paient leur billet à un prix inférieur.
Monsieur le rapporteur général, vous êtes pris en flagrant délit de contradiction par rapport à l'amendement précédent. Avec le no 676, vous ne vouliez pas tirer les conséquences de la jurisprudence communautaire en matière de TVA. À présent, avec le no 536, vous renversez totalement votre position puisque vous invoquez l'argument européen pour refuser l'abaissement de la TVA. Indépendamment du point de vue de chacun sur la pertinence économique d'une telle mesure, ce n'est pas cohérent.
Monsieur de Courson, il n'y a aucune contradiction entre ma position sur l'amendement précédent et ma position sur celui-ci. Vis-à-vis du droit communautaire, le point de vue est identique.
Madame Louwagie, l'explication concernant l'absence de cet amendement en commission est beaucoup plus simple que ce que vous laissez entendre : il s'agit d'un oubli. C'est d'ailleurs pour cette raison que je l'ai proposé dans le cadre de l'article 88, et en mon nom, afin d'éviter toute confusion et changement d'avis entre la commission et la séance publique. Cette situation s'est d'ailleurs déjà produite sur de précédents articles.
La presse étant la profession la plus subventionnée en France, l'instauration d'un taux préférentiel de TVA ne paraît absolument pas justifiée au moment où la dette publique explose.
L'amendement no 534 de M. le rapporteur général, visant à supprimer l'article, est défendu.
L'amendement no 534 , accepté par le Gouvernement, est adopté ; en conséquence, l'article 9 bis D est supprimé.
Le Sénat a adopté une mesure qui figurait dans la seconde partie du projet de loi de finances, visant à étendre la TVA à taux zéro aux vaccins à compter de 2022. Cet amendement propose de la replacer dans la première partie afin qu'elle soit effective dès 2021. Je précise donc dès à présent que, lorsque cette disposition sera supprimée de la deuxième partie, cela ne signifiera évidemment pas que je suis opposé à cette mesure mais bien qu'elle aura été transférée en première partie.
La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l'amendement no 939 .
Cet amendement identique me donne l'occasion de dire à M. le rapporteur général qu'il est parfois bon de revenir sur le taux de la TVA.
Certes, mais je me souviens de débats autour du taux de TVA lors de l'examen en première lecture. Par exemple, lors de la discussion sur des amendements adoptés au Sénat à propos de la baisse du taux de TVA sur les transports – qui est une bonne mesure – , votre position, assez radicale, consistait à refuser de toucher au taux de TVA. Cette extension de la TVA à taux zéro aux vaccins est en tout cas une excellente mesure.
L'article 9 bis E, amendé, est adopté.
Ils portent sur les baux réels solidaires, les BRS, qui permettent une accession sociale à la propriété. Par ces amendements nous souhaitons compléter l'article 9 ter adopté par le Sénat.
L'article tel qu'il a été adopté devrait vous satisfaire, notamment concernant la question des frottements fiscaux. M. le ministre délégué pourra vous apporter ces précisions. Pour moi c'est une demande de retrait. Sinon, avis défavorables.
Demande de retrait sur le no 992 car l'article 9 ter, tel qu'adopté, permet d'appréhender l'ensemble des montages opérationnels utilisés pour la mise en place d'un BRS. Je confirme donc au banc que l'amendement est satisfait.
S'agissant du no 999, relatif à l'extension du bénéfice du taux réduit, nous privilégions une modification du champ des opérations réalisées dans le cadre du BRS au taux réduit de 5,5 %, tel que prévu par l'amendement no 2677 de M. Jolivet, qui sera présenté plus tard. C'est donc également une demande de retrait au bénéfice de cet amendement.
Je retire le no 992. Il me semblait que le no 999 venait compléter l'article 9 ter, mais si vous préférez que l'amendement de M. Jolivet soit adopté plutôt que le mien, je le retire également. Ce n'est pas grave, je ne suis pas susceptible.
L'article 9 ter est adopté.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 678 , tendant à supprimer l'article.
Nous proposons en effet de supprimer l'article 9 quinquies introduit par le Sénat et qui vise à appliquer les taux réduits de TVA aux créations de logements sociaux réalisées à partir de la transformation d'immeubles anciens aux mêmes conditions, et sous les mêmes garanties, que celles applicables aux constructions neuves.
J'en profite pour répondre à Mme Pires Beaune que je m'efforce de donner des avis cohérents concernant la baisse du taux de TVA. Je n'ai jamais dit que j'y étais opposé par principe. Je pense même que nous sommes plutôt d'accord pour estimer qu'il faut distinguer les cas où cette mesure a un réel impact et ceux où elle a assez peu d'effet sur l'évolution des prix. Concernant les trains – un sujet dont nous avons parlé précédemment – , je répète que cette mesure serait inefficace et n'aurait pas d'effet incitatif sur l'achat d'un billet.
Je maintiens donc que, non seulement, nous devons respecter le cadre fourni par le droit communautaire à travers la directive TVA mais, par ailleurs, la baisse du taux de TVA n'a pas toujours l'impact souhaité.
Nous vous demandons de ne pas supprimer cet article et d'adopter les amendements nos 228 et 990 que M. Pupponi, s'agissant du second, et moi-même, s'agissant du premier, avons déposés à cet article, afin de nous permettre d'agir contre la spéculation. Je demande même au Gouvernement d'aller bien au-delà de ce que prévoient nos amendements en matière de lutte contre la spéculation, qui est une véritable plaie pour la Corse. Ne supprimez pas cet article s'il vous plaît, nous pourrons ainsi discuter de nos amendements.
Monsieur le ministre délégué, comme je vous l'ai dit tout au long de l'examen de la première partie du projet de loi de finances, il faut que le Premier ministre fasse un discours pour annoncer un plan de sauvetage de l'économie corse. La situation devient urgente. Tout le monde a eu droit à son plan de sauvetage sauf la Corse, alors même que le Président de la République avait évoqué cette idée en septembre dernier. Je sais que vous me répondrez que c'est à lui de s'exprimer mais plus le temps passe et plus la situation est catastrophique. Il serait bon d'apporter une réponse.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 679 , tendant à supprimer l'article.
Nous proposons en effet de supprimer l'article 9 sexies visant à étendre l'application du taux de TVA réduit aux constructions de logements locatifs sociaux construits dans le cadre des conventions de rénovation urbaine du PNRU, le programme national de rénovation urbaine.
L'amendement no 679 , accepté par le Gouvernement, est adopté ; en conséquence, l'article 9 sexies est supprimé.
L'amendement no 680 de M. le rapporteur général, tendant à supprimer l'article, est défendu.
L'amendement no 680 , accepté par le Gouvernement, est adopté ; en conséquence, l'article 9 septies est supprimé.
La parole est à M. Laurent Saint-Martin, pour soutenir l'amendement no 681 , tendant à supprimer l'article.
Il vise à supprimer l'extension de l'application du taux de TVA à 5,5 % aux livraisons et livraisons à soi-même de locaux directement destinés ou mis à la disposition d'établissements mentionnés à l'article L. 281-1 du code de l'action sociale et des familles.
J'ai bien compris que le Gouvernement et le rapporteur général ne voulaient pas d'une politique du logement conçue autour de la baisse du taux de TVA. Soit. Mais dans ce cas, sur quoi reposera la politique du logement nécessaire dans le cadre de la relance ?
L'amendement no 681 , accepté par le Gouvernement, est adopté ; en conséquence, l'article 9 octies est supprimé.
L'amendement no 682 de M. le rapporteur général, tendant à supprimer l'article, est défendu.
L'amendement no 682 , accepté par le Gouvernement, est adopté ; en conséquence, l'article 9 nonies est supprimé.
L'amendement no 683 de M. le rapporteur général, tendant à supprimer l'article, est défendu.
L'amendement no 683 , accepté par le Gouvernement, est adopté ; en conséquence, l'article 9 decies est supprimé.
L'article 9 undecies est adopté.
Il vise à revenir sur une disposition adoptée par le Sénat, qui aurait pour conséquence la redéfinition du périmètre actuel des travaux de rénovation énergétique dans les logements éligibles au taux de TVA réduit. En effet, dans une période où le secteur du bâtiment a besoin d'être particulièrement accompagné, il serait contre-productif de maintenir une telle mesure, puisqu'elle aurait pour conséquence d'exclure certains équipements et travaux du taux réduit de TVA, alors qu'ils y sont actuellement éligibles
L'amendement propose donc tout simplement de supprimer l'article 9 duodecies.
Les amendements nos 832 de M. le rapporteur général et 874 de M. David Habib sont défendus.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Je serai très bref : je souhaitais simplement faire deux observations, qui rejoignent celles de François Pupponi.
Au final, vous supprimez toutes les avancées qui avaient été faites en matière de politique de la TVA. Je ne reviendrai pas en détail sur chacun des nombreux sujets, mais deux dispositifs en particulier, que vous avez supprimés, touchent directement à la mixité sociale.
Demain devrait se tenir la réunion constitutive de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi confortant le respect des principes de la République, qui traite du séparatisme. Or, dans son discours prononcé aux Mureaux, le Président de la République indiquait que deux politiques étaient particulièrement importantes en la matière : la politique du logement et la politique de peuplement, qui ne seront probablement pas traitées dans le cadre du projet de loi. Or vous supprimez des mesures permettant justement d'assurer plus de mixité là où il y en a besoin, comme le périmètre autour des quartiers prioritaires de la politique de la ville dans lequel les constructions peuvent bénéficier d'une TVA à taux réduit.
N'oublions pas que, derrière les politiques de TVA, il n'y a pas que des politiques de relance, il y a également des politiques qui ont du sens socialement : on ne peut pas tenir un discours comme celui des Mureaux et se priver ensuite de tous les outils qui pourraient nous permettre d'infléchir un peu le séparatisme social dans notre pays.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, SOC et FI.
La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à la prochaine séance.
Mes chers collègues, en une heure, nous avons examiné un peu plus de 100 amendements : c'est donc possible. Simplement, comme il y en a 800 amendements, il nous faudra donc huit heures en tout pour terminer l'examen du texte.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures :
Suite de la discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi de finances pour 2021.
La séance est levée.
La séance est levée à dix-neuf heures trente.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Serge Ezdra