La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
Cet après-midi, l'Assemblée a commencé la discussion des articles du projet de loi, s'arrêtant aux amendements portant articles additionnels après l'article 6.
Je vous rappelle qu'à la demande du Gouvernement, nous examinons par priorité ce soir les articles 10 à 13.
La parole est à M. Olivier Dussopt, premier orateur inscrit sur l'article.
L'article 10 fixe la manière dont les collectivités territoriales vont participer à l'effort de redressement des comptes publics et d'apurement d'une partie de la dette publique.
Pour commencer, je voudrais prendre acte de deux points positifs. D'abord, entre l'année passée et celle qui vient, la dotation globale de fonctionnement – DGF – ne diminue pas. C'est une bonne nouvelle, et cela correspond à l'engagement pris par le Président de la République et rappelé par plusieurs membres du Gouvernement. Ensuite, il se trouve que j'exerce par ailleurs des fonctions dans une association d'élus et nous demandions depuis longtemps que, si effort de la part des collectivités il devait y avoir, celui-ci fût calculé par rapport à l'évolution tendancielle des dépenses. C'est le cas.
S'agissant du contenu de l'article et de la participation des collectivités territoriales à hauteur de 13 milliards d'euros, du fait de l'accroissement attendu de leurs excédents de financement – je vous renvoie au débat que nous avons eu à l'article 3 – , nous prenons là encore acte de la mise en place d'un mécanisme de convention, qui nous paraît plus habile et moins brutal que la baisse nette des dotations. J'aurais néanmoins trois questions précises à poser au ministre afin d'éclairer notre assemblée avant le vote.
Premièrement, dans quelle mesure les représentants de l'État pourront-ils adapter les conventions qui seront conclues avec les collectivités territoriales ? Les spécificités locales pourront-elles être prises en compte ? Je précise qu'il s'agirait d'aller plus loin que la seule différenciation du jaune budgétaire – à savoir 1 % pour les communes et à 1,4 % pour les départements.
Deuxièmement, le mécanisme de correction qui est évoqué et dont les modalités ne sont pas fixées semble s'appliquer à l'ensemble des collectivités territoriales. Il y aurait une incohérence entre le fait de conclure des conventions avec 319 collectivités et le fait que le non-respect de ces engagements concerne l'ensemble des collectivités !
Je fais vite, monsieur le président, mais je suis sûr que le ministre sera ravi d'apporter une réponse à ces points précis.
Troisièmement, la DGF est un prélèvement sur recettes, régi par l'article 6 de la loi organique relative aux lois de finances et par deux décisions du Conseil constitutionnel.
Dans quelle mesure un mécanisme de correction pourrait-il consister en une amputation de ce prélèvement sur recettes ?
Chers collègues, je vous demanderai, vu le nombre d'amendements que nous avons à examiner, de respecter scrupuleusement le temps de parole qui vous est imparti, à savoir deux minutes. Il ne s'agit pas seulement de se conformer à l'article 95 de notre règlement ; la concision permettra de souligner la clarté de vos propos.
La parole est à M. Christophe Jerretie.
L'article 10 ouvre des perspectives intéressantes pour les collectivités territoriales. Pour la première fois, il offre la possibilité d'un conventionnement, c'est-à-dire une liberté et une responsabilisation pour les collectivités territoriales. C'est là un enjeu majeur, et une nouveauté intéressante.
À ce sujet, M. Dussopt voudra bien noter – car on sait, à l'Association des petites villes de France, combien la liberté et la responsabilité des élus locaux sont importantes – que l'article laisse toute liberté au représentant de l'État de négocier individuellement avec chaque type de collectivité qui sera contractualisée.
Au-delà, il importe de signaler que l'objectif de 1,2 % fixé à l'évolution des dépenses de fonctionnement est largement acceptable. On sait que, durant la précédente législature et le mandat de François Hollande, on était arrivé à un niveau de déficit représentant 0,54 % de PIB. Cela signifie que les collectivités territoriales ont fait des efforts ; c'est peut-être grâce à, ou à cause de la contribution au redressement des finances publiques, mais c'est aussi parce qu'elles ont démontré leurs capacités à gérer et maîtriser leurs dépenses.
L'article 10 constitue donc un enjeu important. Il est l'occasion d'engager un débat sur la contractualisation, sur des bases saines et sereines, ce qui permettra aux élus locaux de reprendre confiance, l'objectif de l'État étant de travailler avec eux. Cette confiance partagée nous offrira de meilleures collectivités pour le territoire français.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM.
Nous ne voterons pas cet article, qui vise à inscrire d'ici à 2022 une baisse sévère des dotations aux collectivités, une baisse comme jamais elles n'en ont subi, et qui fait suite aux 11 milliards de baisses de dotation réalisées au cours de la précédente législature : 13 milliards en cinq ans ! Les collectivités sont déjà à l'os, hélas – comme aurait dit de Funès – , et cette nouvelle purge sera difficile à supporter. En outre, vous prévoyez un mécanisme de correction suivant une règle de calcul que l'on ne connaît pas encore, mais dont on sait déjà qu'elle sera l'occasion de leur demander des efforts. Bref, vous demandez aux collectivités de se passer elles-mêmes les menottes et de vous dire combien d'économies elles seront capables de faire ! Nous ne pouvons pas accepter une telle politique.
Encore une fois, on va imposer des choses aux collectivités territoriales, sans concertation préalable, puisqu'aucune des trois associations – l'Assemblée des départements de France, l'Association des maires de France et l'Association des régions de France – n'a été consultée sur les mesures proposées.
Bien sûr que si !
On se rassure en affirmant qu'en 2018, le changement sera inexistant. Or j'ai lu avec intérêt le rapport de l'Observatoire des finances et de la gestion publique locales. Un fonds de 200 millions avait été instauré pour permettre à certains départements de faire face aux règles qui leur sont imposées par l'État en matière de versement des allocations individuelles de solidarité – AIS. Quand on regarde dans le détail ce qui est prévu pour compenser ces dépenses, on est loin des 100 % ! Pour certaines politiques comme le handicap, la compensation n'atteint même pas les 50 % ! Cette réalité, il faudra bien qu'un jour, vous la preniez en considération.
On annonce une trajectoire en douceur pour la réduction des dotations. Ce qui serait intéressant, ce serait de connaître avec précision les bases de la négociation. Ce n'est pas le cas aujourd'hui. En ce qui me concerne, je crains, mesdames et messieurs les députés de la majorité, que les communes qui ont été vertueuses, que les départements qui ont fait les efforts pour redresser la situation financière qu'ils ont pu hériter d'autres majorités, ne se trouvent confrontés à des difficultés insurmontables et que ce soit encore une fois l'investissement qui en fasse les frais.
Vous dites, cher collègue des hauteurs, que l'objectif de 1,2 % est supportable ? En théorie, peut-être, à condition de considérer qu'il n'y a pas de charges supplémentaires pour les collectivités territoriales.
Ces charges supplémentaires, vous ne les avez pas prises en considération. Vous n'avez pas expliqué que tout le monde serait soumis aux mêmes règles, que le manque pour les régions et les départements allait se répercuter sur la collectivité qui est en bout de chaîne, celle que l'on appelle la commune, et qui, en ce moment, reçoit les associations qui ne peuvent plus bénéficier de la réserve parlementaire. On lui dit que pour que sa dotation augmente, il lui faudra contractualiser. Or il n'y a pas d'égalité entre les communes en la matière. Le président de l'Association des petites villes de France, notre collègue Dussopt, qui est intervenu tout à l'heure, le sait bien. Nous n'avons pas les mêmes moyens techniques, ni les mêmes staffs pour monter des dossiers. Si l'on veut contractualiser avec l'État, la région ou le département, il vaut mieux être une grande ville, qui dispose de services pour monter des dossiers et obtenir des financements. Si l'on est une petite ville ou un groupement de petites villes, cela devient très compliqué ; on n'a pas les experts qu'il faut. Quand il s'agit de dotations versées sur des critères objectifs, sans qu'il soit nécessaire de monter des usines à gaz, on peut considérer que nous sommes à peu près à égalité. Avec ce dispositif, ce ne sera plus le cas.
D'autre part, si l'on additionne tous les éléments, cela ne fera pas 1,2 % ; je suis persuadé que l'évaluation montrera que l'on dépasse les 2 %. Il y aura un manque.
Les articles 7, 10 et 24, qui concernent notamment les collectivités locales, semblent poursuivre un objectif inavoué de recentralisation.
L'article 10 fixe un indicateur de 1,2 %, s'agissant de la progression des dépenses réelles de fonctionnement pour la période 2018-2022. En commission, j'avais plaidé pour un indicateur différencié par catégorie de collectivités, comme c'est le cas dans le « jaune budgétaire ».
L'indicateur de 1,2 % ne me semble pas pertinent, en particulier, pour le bloc communal : entre les établissements publics de coopération intercommunale – EPCI – et les communes, le taux d'évolution des dépenses est en effet très différent, puisque les nouvelles compétences transférées sont exercées par les EPCI.
D'autre part, l'objectif de 1,2 % me semble difficile à tenir compte tenu du niveau de rigidité des charges de fonctionnement, notamment pour le personnel. Cet objectif concerne-t-il toutes les collectivités ou seulement les 319 visées par la contractualisation ? Cette question est d'importance, dès lors que l'ODEDEL – objectif d'évolution de la dépense publique locale – , qui n'était jusqu'alors qu'indicatif, deviendrait prescriptif : bien que cela soit dit entre les lignes, c'est quand même très clair. Il importe donc de savoir qui devra appliquer l'ODEDEL.
Je profite du retour de M. le ministre sur nos bancs pour l'interroger, car je suis resté sur ma faim quant aux réponses à mes questions.
Il faut manger !
Sourires.
J'ai quand même eu le temps de dîner, monsieur le ministre, je vous remercie.
Sourires.
J'aimerais être éclairé sur l'articulation entre le présent article et l'article 3, c'est-à-dire sur la possibilité de tenir à la fois l'objectif de 1,2 % pour les dépenses de fonctionnement et l'objectif assigné aux administrations publiques locales, les APUL, étant entendu que, selon le rapport annexé au projet de loi de finances pour 2018, l'investissement, très dynamique, progresse de 1,9 %. Nous entrons de surcroît dans un cycle électoral plutôt favorable à l'investissement des collectivités. Le risque est donc que, pour maîtriser le déficit des APUL, on touche aux dépenses de fonctionnement.
D'autre part, comment envisagez-vous la contractualisation ? Toutes les collectivités, grandes communes ou grandes régions, seront-elles logées à la même enseigne ? Les spécificités de chaque collectivité territoriale seront-elles au contraire prises en compte ? Se posera en effet la question des bons gestionnaires : quel sort sera réservé à ceux qui respectent les objectifs ? Verront-ils leurs dotations augmenter ? Y aura-t-il des incitations ? Bref, comment cela se passera-t-il exactement ?
Chaque collectivité mettra bien entendu en avant, par exemple, un taux de chômage élevé ou une bonne gestion pour solliciter un assouplissement des règles de contractualisation. Nous touchons ici, monsieur le ministre, à la pierre angulaire de votre réflexion pluriannuelle. Or, pour l'instant, les choses sont assez floues, voire assez gazeuses – pour ne pas parler de la planète Jupiter…
Je veux réagir à quelques contrevérités que nous venons d'entendre. Il me semble, monsieur Roussel, que vous confondez les recettes et les dépenses des collectivités locales. On baisse les dotations, dites-vous, on ne va pas en plus baisser les dépenses ! Mais je vous rappelle, d'une part, que les dotations ne baissent pas – voici pour les recettes – , et que, d'autre part, les dépenses pourront augmenter à hauteur de 1,2 %. Si vous ne voulez pas de la concertation qui permet d'adapter le niveau des dépenses, préférez-vous le coup de rabot ? Telle est la question que l'on a envie de vous poser.
Mme Dalloz se plaint de l'absence de concertation préalable. Mais quel sens y aurait-il à organiser une concertation avant la concertation ? L'intérêt de la négociation avec les 319 collectivités visées est précisément de permettre une adaptation.
Le maintien d'un objectif de progression des dépenses à 1,2 % affectera les investissements, ajoutez-vous. Mais c'est exactement le contraire ! C'est grâce à l'effort consenti pour maîtriser les dépenses de fonctionnement que l'on pourra libérer des capacités d'investissement.
Les communes, dites-vous enfin, n'auront plus de moyens. C'est justement pour cette raison, mes chers collègues, que nous souhaitons adapter les objectifs assignés sur cinq ans pour chacune d'entre elles, sur la partie « investissements » comme sur la partie « frais de fonctionnement ». Cette adaptation se fera aussi au bénéfice des collectivités qui, on a eu raison de la souligner, ont fait des efforts importants au cours des dernières années.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM.
À travers ce projet de loi de programmation, ce sont beaucoup d'efforts qui sont demandés aux collectivités locales. Le présent article fait état du taux d'évolution des dépenses réelles de fonctionnement des collectivités territoriales, fixé à 1,2 % par an de 2018 à 2022. L'article 7, lui, fixe à moins 0,1 %, soit un taux négatif, la croissance des dépenses en volume des administrations publiques locales pendant six ans, de 2017 à 2022. Vous rendez-vous compte de ce que cela représente ? L'effort demandé est considérable.
Deuxième point : le critère retenu pour la contractualisation avec les 319 collectivités, dont le nombre d'habitants est respectivement fixé à 50 000 pour les communes et à 150 000 pour les EPCI. Qu'est-ce qui justifie ce critère ? Le critère du niveau des recettes réelles de fonctionnement par habitant ne serait-il pas plus opportun ? Cela répondrait à une préoccupation exprimée par certains de nos collègues à propos des collectivités vertueuses. On pourrait par exemple cibler les communes dont le niveau de ces recettes dépasserait une moyenne nationale : il me semble que cela aurait du sens. Quel est votre point de vue sur le sujet, monsieur le ministre, étant entendu qu'un amendement sera défendu en ce sens ?
M. Dussopt et les orateurs qui lui ont succédé ont ouvert une discussion importante, puisque le présent article inaugure la série de ceux qui, dans un contexte budgétaire contraint, tendent à encadrer les nouveaux rapports entre les collectivités locales et l'État. Je constate qu'à de très rares exceptions près, aucun intervenant n'a dit que personne ne devait faire des économies, certaines collectivités locales étant les premières à devoir en faire. Nous avons donc déjà bien avancé par rapport à ce que l'on a pu entendre au cours des questions au Gouvernement ou en commission.
Je prendrai un peu de temps pour exposer la position du Gouvernement sur les amendements, même si j'y reviendrai plus précisément lorsque nous débattrons de chacun d'entre eux.
Je vous remercie, monsieur Dussopt, pour vos prises de position constantes, bien entendu au nom de la nation – puisque vous siégez ici en tant que député – , mais aussi en faveur des communes les plus rurales, pour lesquelles votre engagement est connu de tous. Je me félicite des réflexions que vous nous avez soumises dans cette discussion liminaire.
Vous m'avez posé trois questions, auxquelles je m'efforcerai de répondre le plus sincèrement possible, étant entendu que nous entamons seulement l'examen des articles de ce projet de loi de programmation. Le sujet dont nous parlons sera également abordé dans le cadre du projet de loi de finances pour 2018, un travail est en cours dans le cadre de la Conférence nationale des territoires, et la Haute assemblée s'en saisira à son tour, dans un troisième temps, avec un intérêt tout particulier de par son positionnement institutionnel.
Vous m'avez demandé, monsieur Dussopt, comment les représentants de l'État organiseront la contractualisation et si les spécificités locales seraient prises en compte. Sur la seconde partie de la question, la réponse est affirmative : le principe du contrat est d'être adaptable, selon une norme que nous définirons ensemble. On incrimine une prétendue recentralisation, mais c'est tout le contraire, puisque celle-ci impliquerait une baisse uniforme des dotations. À cause d'un tel système, où les difficultés locales disparaissent dans un tout indifférencié, certaines communes se sont retrouvées avec une DGF négative, effet un peu absurde d'un but poursuivi par les gouvernements successifs.
Une cible de progression des dépenses a été définie, en effet ; M. de Courson, qui nous rejoindra sans doute, dirait peut-être qu'il s'agit là d'un pari fou, et peut-être prendrait-il date aussi pour les difficultés à prévoir en termes d'équilibre des finances publiques. Mais nous faisons le pari de l'intelligence, de la contractualisation et de l'adaptation.
Le rapporteur, tout à l'heure, a eu raison de répéter par trois fois qu'il n'y avait aucune baisse des dotations, contrairement à ce que j'ai pu entendre. La contractualisation concerne les 319 plus grosses collectivités françaises, c'est-à-dire toutes les régions, tous les départements, toutes les communes de plus de 50 000 habitants et toutes les agglomérations de plus de 150 000 habitants.
Si, effectuant une opération un peu grossière, vous soustrayez 319 collectivités des 36 000 communes que compte notre pays, vous vous apercevrez que la très grande majorité – pour ne pas dire la quasi-totalité – des collectivités ne sont pas concernées par la contractualisation, sauf – et nous en discuterons tout à l'heure – si elles le souhaitent.
Pourquoi ces 319 collectivités-là ? Parce qu'elles concentrent les deux tiers de la dépense publique locale et, en même temps – si j'ose dire – , parce qu'elles disposent d'un budget de fonctionnement élevé. Le dispositif, j'insiste en effet sur ce point, vise le seul budget de fonctionnement, non le budget d'investissement ; c'est d'ailleurs pour cela qu'il devrait selon moi vous convaincre, monsieur Aubert : il ne s'agit pas de décourager l'investissement local mais au contraire de l'encourager, quand les baisses de dotations, elles, le découragent, pour les raisons que nous évoquerons ultérieurement.
Je suis tout à fait prêt à entendre les arguments, non seulement de la représentation nationale, mais aussi des associations d'élus et des élus eux-mêmes, avec lesquels je multiplie les rencontres pour essayer d'adapter le système au mieux ; mais j'imagine que le préfet, en particulier de région – mais je ne veux pas m'avancer sur le terrain de mon collègue ministre d'État, ministre de l'intérieur – , puisqu'il a une vision plus régionale, donc une vision des contrats qui associe un plus grand nombre de collectivités, pourra lui aussi, épaulé par le directeur des finances publiques, rencontrer un certain nombre d'élus afin de leur proposer un contrat. La cible générale en sera une évolution des dépenses limitée à 1,2 %, mais il prendra en compte les spécificités locales – votre collègue Pupponi a d'ailleurs déposé un amendement relatif aux quartiers prioritaires de la politique de la ville, preuve que chacun semble avoir compris l'adaptabilité du contrat.
Qu'est-ce qu'une « spécificité locale » ? La question, me direz-vous, peut nous conduire assez loin. Le taux de chômage n'a pas grand-chose à voir dans l'affaire : je puis en témoigner, ayant été maire d'une commune qui a l'un des taux de chômage les plus élevés de France. En revanche, l'évolution des dépenses de fonctionnement dépend beaucoup de la question de savoir, par exemple, si la commune gagne ou non des habitants. Les communes dynamiques, où la population s'accroît, voient bien évidemment leurs dépenses de fonctionnement – qu'il s'agisse des crèches, de l'accueil de la petite enfance, de l'accueil des écoliers ou des personnes âgées – suivre une pente inverse de celles où elle décroît. L'adaptation du contrat par le corps préfectoral est donc un premier principe, et j'ai même déclaré, monsieur le député, que j'étais prêt, en tant que ministre, à travailler avec les élus qui pourraient rencontrer un problème de compréhension avec le représentant de l'État. Je pourrai ainsi, avec mon collègue de l'intérieur, signer les contrats et répondre aux interrogations que se posent, notamment, les plus grosses collectivités – régions, départements ou grandes métropoles.
La contractualisation, je le répète, ne concerne pas toutes les collectivités ; mais la cible de 1,2 %, elle, doit s'imposer à la totalité d'entre elles, même en l'absence, si j'ose dire, de base obligatoire – nous avons déjà eu cette discussion.
Nous avons tous compris que les élus locaux, notamment des plus petites communes, ne peuvent engager des dépenses somptuaires, à quelques rares exceptions près – puisque, si ces communes peuvent elles aussi être riches, la grande majorité d'entre elles connaissent des difficultés qui les ont conduites à se regrouper dans des intercommunalités – de façon un peu contrainte et forcée, il faut bien le dire. Ce sont donc certaines des plus grosses collectivités qui sont responsables d'une partie de la dérive de la dépense publique, même si beaucoup d'entre elles sont très bien gérées.
Si des collectivités souhaitent opter pour la contractualisation – certaines m'en ont déjà fait la demande – , les portes de l'État leur seront bien entendu ouvertes une fois adopté le projet de loi de finances.
Vous m'avez aussi interrogé, monsieur le député, sur les mesures de correction. C'est là une vraie question. Vous l'aurez constaté, le pari de l'intelligence repose sur la confiance. Celle-ci n'exclut certes pas le contrôle, mais le fait est qu'aucune mesure corrective n'est prévue pour 2018. Nous discuterons cependant de mesures de ce type dans le cadre du projet de loi de finances, et ce dès cette année, mais aussi l'année prochaine.
Je puis vous donner mon avis si vous le souhaitez, mais il n'engage pas le Gouvernement : c'est celui de l'élu local devenu ministre. Il faut, ce me semble, encourager les collectivités qui respectent la cible ; pour elles, je suis donc plutôt favorable à l'octroi de dotations d'investissement – lequel, pour le coup, s'en trouverait ainsi encouragé. Je suis également favorable à des mesures de correction individuelles, mais via la DGF plutôt que par une retenue d'impôt : cela serait plus respectueux pour les collectivités, même si l'on pourra toujours discuter du dispositif.
Nous faisons le pari que l'intelligence territoriale l'emportera et qu'il n'y aura pas de baisse unilatérale des dotations des collectivités locales. Nous marquons là un pas révolutionnaire dans notre relation avec les collectivités locales.
M. Roussel a évoqué, une nouvelle fois, la baisse des dotations. Une différence fondamentale sépare le fait de ne pas baisser les dotations, comme c'est le cas dans le projet de loi de finances, et celui de demander une moindre dépense. Que signifie l'objectif de 1,2 % ? Si une ville lambda dépense 100 millions d'euros en frais de fonctionnement une année, elle devra s'engager, l'année suivante, à ne pas dépenser plus de 101,2 millions, c'est-à-dire qu'on lui autorise une dépense de fonctionnement supplémentaire de 1,2 million.
C'est vrai, il existe des charges obligatoires que l'élu maîtrise peu, voire pas du tout, …
… et qui représentent, en général, entre 50 % et 60 % des dépenses des collectivités locales.
Rappelons tout d'abord que le personnel ne représente pas, dans son intégralité, une dépense obligatoire pour une collectivité locale.
Même si on n'embauche pas, il faut tenir compte des évolutions de carrière !
Certaines dépenses de personnel sont statutairement obligatoires, mais certains élus acceptent aussi de continuer à embaucher, alors que personne ne les y oblige. Ils doivent alors l'assumer, et faire des arbitrages dans leur budget de fonctionnement.
J'en reviens aux dépenses obligatoires. Si vous n'étiez pas schizophrènes par moments, vous auriez dû applaudir des deux mains l'absence d'augmentation du point d'indice et le jour de carence, car ces mesures permettent aux collectivités locales de ne pas aggraver leurs dépenses !
Applaudissements sur les bancs du groupe REM.
On ne peut pas, aux questions d'actualité, reprocher au Gouvernement de ne pas augmenter le point d'indice, et me conjurer ensuite de ne pas alourdir les charges qui pèsent sur le budget des collectivités !
Pour ce qui est du GVT – glissement vieillesse technicité – , le Président de la République a eu le courage de répéter devant la Conférence nationale des territoires, avant les sénatoriales, ce qu'il avait déclaré au cours de sa campagne : il faut laisser aux employeurs territoriaux le soin de gérer, le plus possible, leur masse salariale. Aujourd'hui, les agents publics, notamment par le biais de leurs syndicats, négocient leur point d'indice à Paris et leurs échelons dans leurs communes. Ce système encourage la dépense publique.
Je vous ai écoutés, laissez-moi vous répondre.
J'ai le droit de porter un jugement sur vos prises de position. Écoutez-moi jusqu'au bout, vous verrez que l'on pourra s'entendre, et même se répondre.
Pourquoi pas ? J'ai tout mon temps.
Il est juste que les employeurs territoriaux veuillent gérer leur masse salariale, et vous avez raison, de votre côté, de nous demander de faire évoluer le dispositif. Je suis d'ailleurs certain que vous nous soutiendrez lorsque nous demanderons aux représentants de la fonction publique d'évoluer sur le statut de la fonction publique, notamment la fonction publique territoriale.
Mme Dalloz dénonce l'absence de concertation. Au-delà des excellents arguments de M. Cazeneuve, j'allais lui répondre que c'est tout le contraire. Au comité des finances locales, les régions m'ont rappelé par la voix de M. Richert, indépendamment du désaccord que nous pouvons avoir sur le montant de recapitalisation de la TVA, leur accord. Pour avoir abordé le sujet avec Mme Pécresse, M. Bertrand et M. Muselier, je sais que les régions de France sont d'accord pour signer ces contrats, dont nous devons encore discuter la forme.
Les présidents de départements, par l'intermédiaire de Dominique Bussereau, sont d'accord avec l'idée de contrat à condition que nous réglions dans le même temps, ce qui est légitime, les difficultés assez graves que posent la question des mineurs isolés et celle du RSA. J'ai bien conscience que les dépenses de certaines collectivités sont lourdes, comme l'a rappelé Vincent Descoeur, mais les collectivités de France, au travers de M. Jean-Luc Moudenc, dont l'association France urbaine représente tout de même nombre de très grosses collectivités, approuvent ce contrat. Nous devons encore en discuter ; c'est ce que nous faisons aujourd'hui.
Mme Pires Beaune propose de différencier les types de collectivités, ce qui serait assez juste, en effet. Vous voterez donc sans mal, suivant en cela l'avis favorable du Gouvernement, l'amendement no 53 rectifié du rapporteur général, qui distingue les différents types de collectivités. Nous serons au rendez-vous de cette spécificité.
Enfin, Mme Louwagie me demande s'il ne serait pas plus pertinent de retenir pour la contractualisation le critère du niveau de recettes réelles de fonctionnement par habitant. C'est un débat qui pourrait être intéressant dans l'hémicycle, mais cela reviendrait à créer une distorsion équivalente à celle de la taxe d'habitation. Les recettes réelles de fonctionnement par habitant, cela favorise les villes qui n'ont pas de centralité, mais dont les dépenses de fonctionnement sont importantes, souvent pauvres, et qui n'ont pas la chance de bénéficier de recettes dynamiques, en particulier grâce à la taxe foncière. Dans certaines communes de France, seulement 25 % de la population paie l'impôt alors que la demande sociale, notamment du fait du nombre d'habitants, est forte. Je ne pense pas que ce soit le bon ratio.
Applaudissements sur les bancs du groupe REM.
Rappel au règlement
C'en est un, fondé sur l'article 58 alinéa 1, du Règlement. Notre groupe a été qualifié de schizophrène.
Exclamations sur les bancs du groupe REM.
Il s'agit d'un fait relatif à la séance, inhérent aux députés qui siègent, et qui justifie que nous nous expliquions.
Le ministre peine à convaincre qu'en ponctionnant 13 milliards d'euros…
Exclamations sur les bancs du groupe REM.
… il n'asphyxie pas les collectivités locales. Il nous fait supporter sa propre schizophrénie, et peine à nous convaincre du bien-fondé de ces mesures qui pèseront lourdement sur les intercommunalités, les régions et les départements.
Exclamations sur les bancs du groupe REM.
Après ce rappel au règlement, dont je vous remercie, monsieur Jumel, nous allons passer à la discussion des amendements.
Auparavant, M. le président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire a demandé à prendre brièvement la parole.
Je n'avais pas l'intention de reprendre la parole après M. le ministre, mais je voudrais simplement éclairer les débats. Quel sera le rôle exact du préfet ? J'imagine que vous répondrez à l'occasion de la discussion des articles, monsieur le ministre. S'agit-il d'une mise sous tutelle déguisée des collectivités locales par le préfet ? C'est une vraie question pour tous ceux qui demeurent attachés à la libre administration des collectivités.
Je comprends qu'il soit nécessaire de limiter les dépenses des collectivités et je considère que le passage par le contrat est plutôt une bonne idée, mais quelle liberté la collectivité conserve-t-elle ?
Par ailleurs, cette progression de 1,2 % des dépenses de fonctionnement se mesure-t-elle en volume ou en valeur ? Sur la même période, quelle est l'augmentation, dans le même périmètre, avec la même norme de calcul, en volume ou en valeur, des dépenses de l'État ? N'exigez-vous pas des collectivités locales plus que vous n'exigez de vous-même ?
Absolument ! On nous ressert le même plat de lentilles à chaque fois ! Cela fait des années qu'on nous fait le coup de la contractualisation ! M. Woerth a raison !
Nous en venons aux amendements. Vous aurez d'autres occasions de prendre la parole ce soir, monsieur Wulfranc. La parole est à Mme Sabine Rubin, pour soutenir l'amendement de suppression no 42.
Je n'ergoterai pas sur les chiffres, monsieur le ministre, qui d'ailleurs varient d'un côté ou de l'autre de l'hémicycle, mais je vous remercie pour vos précisions. J'en viendrai directement à l'esprit de cet article, dont nous comprenons qu'il conduit à imposer aux collectivités le traitement que l'Europe vous impose, ou que vous-même avez choisi mais dont elles n'ont pas voulu : supporter plus de dépenses pour remplir plus de missions, avec moins de recettes.
Cet article les soumet à une trajectoire qu'elles ne peuvent respecter. Nous demandons par conséquent sa suppression.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
La parole est à M. Joël Giraud, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l'avis de la commission.
Vous parlez d'austérité dans votre exposé sommaire. Pour avoir été maire durant des années, j'ai subi des ponctions, des baisses de dotations territoriales…
… et je ne comprends pas que l'on qualifie d'austère un budget qui autorise une augmentation des dépenses de fonctionnement de 1,2 % par an – d'autant plus que nous parlons non pas de dépenses d'investissement, mais bien de dépenses de fonctionnement, qui se doivent par principe d'être plus vertueuses.
Par ailleurs, vous évoquez la problématique des transferts de compétences aux collectivités territoriales, mais cet article ne s'inscrit pas dans ce cadre. De surcroît, la Constitution impose que les transferts de compétences s'accompagnent de ressources équivalentes.
Pour toutes ces raisons, avis défavorable.
Avis défavorable.
Vous auriez pu prononcer le mot de ruralité, monsieur le ministre, car on nous le sert en permanence ici. Or s'il est bien des mesures qui serviront la ruralité et les communes rurales en 2018, ce sont celles que vous avez inscrites dans votre projet de loi de finances.
Applaudissements sur les bancs du groupe REM.
Depuis plus de quatre ans, les maires ruraux souhaitent que l'on ne vote pas une nouvelle loi du type loi portant nouvelle organisation territoriale de la République – loi NOTRe – ou loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles – loi MAPTAM – , qu'elles qu'aient pu en être les vertus et les qualités. Je salue l'honnêteté intellectuelle de M. Olivier Dussopt, mais nous avons aujourd'hui besoin de laisser de côté les notions de périmètre et de compétences pour asseoir véritablement nos projets intercommunaux et communaux. On n'en parle donc pas aujourd'hui dans notre hémicycle.
Par ailleurs, ils appelaient au maintien des dotations de fonctionnement et d'investissement, ce qui est le cas, et à une forme de contractualisation, là où jusqu'ici, reconnaissons-le, ils ont dû supporter l'arbitraire de coupes budgétaires qu'il fallait mettre en oeuvre du jour au lendemain.
Même si elles ne sont pas concernées directement, ce qui est préférable, les communes rurales pourront entrer dans la contractualisation. Elles auront ainsi le sentiment de pouvoir mener leur propre politique, dans les cadres qui leur seront fixés, sans que l'on vienne brutalement baisser leurs dotations et leurs moyens.
On parle souvent ruralité avec le numérique, l'accès à la médecine générale et les projets du Gouvernement en la matière. Voilà bien une politique, celle des collectivités, qui enfin retrouve le sens de la ruralité.
Applaudissements sur les bancs du groupe REM.
Ces objectifs peuvent apparaître très ambitieux et je voudrais aborder la question de la méthode. Vous avez choisi de contractualiser avec 319 grandes collectivités, qui représentent environ 70 % de la dépense, ce qui permet d'opérer une sorte de péréquation, en régulant l'effort sur ces 319 collectivités.
Mais qu'en sera-t-il des autres, des petites villes ? Ma circonscription compte de nombreuses petites villes dont les spécificités et les réalités budgétaires sont bien différentes les unes des autres. Nous appliquons encore l'ancienne méthode, qui vous laisse sceptique. Nous ne pouvons pas bénéficier de ce dialogue de gestion, de cette contractualisation, qui pourraient nous permettre de prendre en compte les particularités de chacune de ces petites villes. Je le regrette un peu.
En nous vantant les mérites de la contractualisation, vous ne faites que prolonger un processus en cours depuis déjà bien longtemps, et qui consiste à faire cracher les communes au gré du désengagement de l'État.
Vous voulez que je vous en cite, des contractualisations ? Le contrat local de sécurité : le maire se retrouve seul à porter les projets en matière de prévention et de sécurité publique.
Vous voulez que je vous en cite, des contractualisations ? Le contrat local de santé : l'ARS replie ses gaules un an plus tard lorsqu'il faut développer les ateliers santé ville.
Vous voulez que je vous en cite, des contractualisations ? Le contrat unique dans le cadre de la politique de la ville, sur lequel vous avez renié vos engagements au coeur de l'été.
Vous voulez que je vous en cite, des contractualisations ? Le contrat éducatif local : les municipalités sont mises à contribution sans arrêt, et bien plus que l'État.
Aujourd'hui, vous souhaitez contractualiser sur les dépenses de fonctionnement des collectivités locales, et vous consentez à envisager la prise en compte des spécificités locales. Mais, le chômage, ça compte ! Lorsque le centre communal d'action sociale, le CCAS, développe l'aide sociale facultative, vous allez mettre en difficulté la capacité locale à développer une politique de solidarité. Quand le CCAS reçoit de la municipalité une contribution afin de rendre la restauration scolaire accessible au plus grand nombre, vous allez mettre en difficulté notre capacité à redistribuer pour permettre aux enfants de déjeuner tous les midis.
Derrière tout cela, il y a des marchés énormes. Le marché de la restauration communale attise la convoitise des prestataires. On va droit à la privatisation. Alors, la contractualisation, monsieur le ministre...
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.
S'agissant des 13 milliards, votre argument est étonnant. Il me fait penser à celui du Président de la République expliquant qu'il ne peut pas s'adresser aux journalistes, car ils ne sont pas capables de comprendre sa pensée. Manifestement, vous souffrez du même problème avec toutes les associations d'élus, qui ne saisissent pas votre raisonnement lorsque vous affirmez que la baisse de 13 milliards d'euros des dotations est simplement une baisse des augmentations.
Soit aucune des associations d'élus, qui rassemblent des personnalités de couleurs politiques différentes, ne comprend vos calculs, soit vous nous faites une entourloupe. 13 milliards de moins, cela ne peut pas être une augmentation ! Lorsque vous supprimez les contrats aidés, cela ne peut pas être une augmentation, d'autant que, dites-vous, les collectivités pourront prendre en charge une partie du financement de ces contrats, ce qui occasionnera pour elles des dépenses supplémentaires.
Vous supprimez la taxe d'habitation, sans apporter aucune garantie d'une compensation intégrale. Depuis des années, les collectivités subissent les politiques d'austérité, sans que, par ailleurs, les transferts de compétences soient assumés financièrement par l'État – pour la seule région Île-de-France, la dette de l'État s'élève à environ 1 milliard d'euros. Dans ce contexte, vous aurez du mal à nous persuader que vous proposez une politique de croissance pour les collectivités territoriales.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Manifestement, je me suis mal exprimé, monsieur Coquerel. Je vais donc apporter quelques précisions.
Tout d'abord, pour les communes de moins de 50 000 habitants, la cible n'est pas obligatoire. Certaines seront peut-être au-dessus, d'autres seront sans doute en dessous. Un tiers des collectivités, les 36 000 communes qui restent – cela a été dit, c'est une grande mesure pour les villes moyennes et pour la ruralité – n'ont pas d'obligation. Si elles souhaitent contractualiser pour montrer leur exemplarité à leurs habitants ou pour bénéficier d'une dotation d'investissement…
… ou du conseil de l'État, elles peuvent le faire, mais elles ne sont pas soumises à la contrainte.
Je peux vous citer des cas dans lesquels on aurait pu imaginer des économies dans les collectivités : lorsque deux régions fusionnent et que les dépenses de fonctionnement de la nouvelle entité sont plus importantes que celles des deux précédentes additionnées, on peut s'interroger ; lorsqu'une intercommunalité est créée et que la commune et l'intercommunalité sont toutes deux en charge de l'économie, cela pose question.
On peut opposer les collectivités locales à l'État, mais nous ne sommes pas dans un État fédéral. Je vous rappelle que le maire est élu, mais qu'il est aussi le représentant de l'État dans sa commune, et qu'à ce titre, il reçoit une indemnité. Il fait des choses au nom de l'État, notamment des actes d'état civil qui sont la raison d'être de la création de la commune. La commune n'est pas une entité opposée à l'État. Je suis très heureux de vivre dans un pays qui permet ainsi l'application de la loi sur l'ensemble du territoire.
En réponse à M. le président de la commission, d'abord, le préfet joue un rôle, non pas de recentralisation ou de tutelle, mais de conseil, que nous avons à définir ensemble afin de permettre la meilleure contractualisation possible.
Ensuite, la collectivité n'est pas mise sous tutelle. Si ses dépenses de fonctionnement évoluent de 2, 3 ou 4 %, des mesures de correction lui seront appliquées, comme c'était le cas avec la baisse des dotations.
Enfin, demande-t-on plus aux collectivités qu'à l'État ? En valeur, avec l'inflation, l'objectif est une augmentation annuelle des dépenses d'1,2 % pour les 319 collectivités les plus importantes. Ce chiffre, qui correspond, le rapporteur l'a dit, à la moyenne sur les dix dernières années, ne représente pas une exigence particulière, compte tenu de l'augmentation du point d'indice l'année dernière, d'un GVT très dynamique, de l'absence de jour de carence et des baisses de dotation.
Cette année, l'évolution de la dépense pour l'État sera de 1,6 % au nom de la sincérité budgétaire que nous revendiquons ; elle est fixée à 0,6 pour les années suivantes. L'État se trouve parfaitement dans la cible. Si nous n'avions pas rebudgétisé 4,5 milliards d'euros, la progression de la dépense publique serait de 0,9 %, donc en deçà de l'objectif que nous assignons aux collectivités les plus importantes.
Applaudissements sur les bancs du groupe REM.
L'amendement no 42 n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements, nos 53 rectifié et 24 , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Joël Giraud, pour soutenir l'amendement no 53 rectifié .
Cet amendement répond pour partie à l'amendement no 15 de M. Serva ainsi qu'aux préoccupations exprimées par M. Dussopt sur les spécificités des territoires.
Les contrats proposés aux collectivités, puisqu'ils sont négociés localement, me paraissent par nature à même de prendre en considération les demandes ou les caractéristiques particulières des territoires. Je vous propose de le préciser et de lever toute ambiguïté en indiquant que les contrats tiennent compte des catégories de collectivités ainsi que des caractéristiques économiques, financières et sociales des territoires.
L'amendement donne satisfaction à ceux qui souhaitaient faire référence à l'égalité réelle outre-mer ou à ceux, comme Olivier Dussopt, qui réclamaient une déclinaison des objectifs par catégorie de collectivités et par catégorie d'EPCI à fiscalité propre pour tenir compte de la situation financière de ces différentes catégories.
Cet amendement de précision permettra ainsi de guider les préfets dans la négociation qu'ils auront à mener sur les différents contrats.
La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l'amendement no 24 .
Cet amendement poursuit la même finalité que celui du rapporteur général, à savoir décliner l'objectif d'évolution des dépenses par catégorie de collectivités, sachant qu'au sein du bloc communal, je le répète, il faut distinguer les communes et les EPCI.
Monsieur le ministre, il y a forcément un lien entre fonctionnement et investissement. L'objectif porte sur les dépenses de fonctionnement, mais la règle imposant une capacité d'autofinancement pour financer l'investissement, nous le verrons à l'article 24, aura nécessairement un impact sur l'investissement. Nous aurons l'occasion d'en reparler tout à l'heure lorsque nous examinerons l'article 7.
La Commission est favorable à l'amendement no 53 rectifié . Je propose à Mme Pires Beaune de retirer son amendement au profit de ce dernier.
Je tiens à remercier M. le rapporteur général et Mme Pires Beaune pour ces amendements qui font suite aux débats en commission et qui permettront aux représentants de l'État de comprendre la volonté du législateur. Le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement du rapporteur général et remercie Mme Pires Beaune d'avoir retiré le sien.
Vous avez raison, madame la députée, de distinguer les EPCI des communes. On pourrait même faire une distinction entre les EPCI, entre ceux auxquels toutes les dépenses de fonctionnement ont été transférées, à rebours de la philosophie des EPCI, et les EPCI d'investissement. Cette réflexion mérite d'être approfondie.
Le lien entre fonctionnement et investissement est évident lorsqu'on crée de nouveaux équipements. Mais de nombreux investissements correspondent à de la rénovation. Certains élus souhaitent consacrer leurs investissements, par exemple, à la rénovation des écoles, ce qui n'implique pas pour autant une augmentation des dépenses de fonctionnement. Nous aurons ce débat sur l'autofinancement ultérieurement.
L'amendement no 24 est retiré.
Je remercie le rapporteur pour son amendement qui apporte une précision utile.
En écho aux propos du ministre, je me permets de souligner l'importance, dans les instructions qui seront données aux préfets par le Gouvernement, de ne pas s'en tenir à la seule classification par catégorie, mais de prendre en compte la situation particulière de chacune des collectivités. Je sais le ministre particulièrement sensible à la question des mineurs isolés : on ne peut pas demander à un département de contraindre le rythme d'évolution de ses dépenses de fonctionnement dès lors qu'il est confronté à l'accueil d'un nombre croissant de mineurs isolés, qui reste une compétence obligatoire sur laquelle il n'a pas de maîtrise. Ce point est important, il facilitera les discussions sur les contrats.
Lorsque vous dites, monsieur le ministre, que les efforts consentis par l'État seront plus intenses que ceux demandés aux collectivités, je ne partage pas votre point de vue dans la mesure où – nous le verrons à l'article 7 – l'indice d'évolution des dépenses des administrations publiques locales est systématiquement, à l'exception de 2019, inférieur à celui des autres administrations publiques. Aux termes de l'article 7, l'indice des dépenses des administrations publiques, notamment de l'État, confond le fonctionnement et l'investissement. Pour les collectivités locales, l'article 10 fixe une cible pour le fonctionnement à 1,2 %, mais l'article 7 prévoit une croissance négative des dépenses publiques locales pour 2020, 2021 et 2022, fondée sur l'hypothèse d'un tassement de l'investissement, ce qui au passage signifie que vous acceptez la baisse des investissements que nous avons connue ces dernières années.
Le projet de loi évoque le mécanisme correcteur pour les collectivités qui ne respecteraient pas leur engagement ; mais quid de l'État ? En contractualisant, l'État prend également des engagements. Est-il prévu un mécanisme de correction ou un bonus, pas forcément en investissement, si l'État impose des dépenses supplémentaires aux collectivités ?
Le rapporteur général a tenu compte dans son amendement des débats en commission des finances sur les critères et particularités, au-delà de la population, qui doivent entrer en ligne de compte.
Monsieur le ministre, l'année 2018 sera celle des contractualisations. Les premiers effets n'interviendront pas avant cette date. Pour les 13 milliards après lesquels vous courez, il faudra attendre.
Si on veut travailler dans la confiance, il faut en créer les conditions. Le Gouvernement est-il prêt à s'engager à ce que, pendant les cinq prochaines années, les collectivités soient épargnées par les nouvelles normes ? Tout le monde connaît ici l'effet dévastateur des nouvelles normes en matière de construction et des demandes d'études en tous genres.
Tout cela a un coût, comme l'a rappelé notre collègue de la Seine-Maritime. C'est le cas pour les contrats locaux de sécurité ou les diagnostics demandés par les agences régionales de santé. Sur les normes, le Gouvernement doit s'engager : il ne peut pas, d'un côté, laisser filer les dépenses de fonctionnement et, de l'autre, les générer.
D'autre part, il faudra tenir compte du fait que certains ont été vertueux. Mais quand une commune de 50 000 habitants construit un centre nautique, cet investissement génère aussi un coût de fonctionnement, surtout si l'on inclut les normes concernant le nombre de maîtres nageurs ou de personnes qui encadrent. Comment allez-vous prendre ces frais en compte ?
Sur des questions aussi sérieuses, nous sommes prêts à consentir des efforts. Nous l'avons prouvé. Cela dit, sous le quinquennat précédent, la confiance a été rompue lorsque les dotations ont été réduites de 13 milliards. Je ne prétends pas qu'elles baissent aujourd'hui, mais si l'État demande des efforts complémentaires, il doit montrer l'exemple.
L'amendement apporte des précisions, mais en tout état de cause, à l'intérieur d'une même collectivité, il faudra examiner chaque situation avec discernement. On ne pourra pas traiter de la même manière un département comme la Lozère, où vivent 77 000 habitants, et la Gironde, qui en compte 1,376 million. Je le répète : puisque vous affinez les objectifs, il faudra faire preuve de discernement.
D'autre part, il faut deux parties pour signer un contrat : en l'occurrence, les services de l'État et la collectivité. Le Haut conseil des finances publiques a d'ailleurs considéré votre objectif comme un pari, faute de certitude sur l'aboutissement du processus. Que se passera-t-il si le contrat avec une collectivité n'est pas signé ? Quelles solutions envisagez-vous ? Il est important que nous le sachions à ce stade de la discussion.
Très juste ! Le Gouvernement ne répond pas ? Je vais faire un rappel au règlement.
L'amendement no 53 rectifié est adopté et l'amendement no 4 tombe.
Dans le cadre de la maîtrise de la dépense publique des collectivités, comme vous l'avez dit, monsieur le ministre, vous faites confiance à l'intelligence collective des 319 plus grandes collectivités pour trouver les bons équilibres. Je partage votre confiance en l'intelligence collective dont j'ai pu mesurer les bénéfices dans ma ville de Châlons-en-Champagne, en tant qu'adjointe au maire chargée des finances.
Grâce au travail de toute l'équipe municipale et des services municipaux, nous avons pu diminuer de 10 % en deux ans nos dépenses de fonctionnement, ainsi que notre endettement, pour absorber les baisses de dotations de l'État, mais surtout pour diminuer les impôts des Châlonnais et augmenter de 50 % notre capacité d'investissement.
Alors que nos territoires sont organisés en près de 40 000 collectivités, millefeuille que nous devrons un jour alléger, pourquoi nous limiter aujourd'hui à l'intelligence de 319 d'entre elles ? L'amendement propose que nous nous appuyions sur l'ensemble de l'intelligence collective des élus locaux, qui sont des gens responsables, et que nous permettions à toutes les collectivités volontaires de contractualiser avec l'État, dans le cadre de la maîtrise de la dépense publique.
Il nous restera ensuite à définir effectivement les engagements réciproques, tant pour accompagner les collectivités vertueuses, qui maîtrisent leurs dépenses de fonctionnement et investissent pour l'avenir, que pour contraindre celles qui n'auraient pas encore engagé cette saine gestion des deniers publics.
J'émets un avis favorable à l'amendement, sous réserve qu'il soit sous-amendé deux fois. Le sous-amendement no 70 est rédactionnel : à l'alinéa 2, « autres » me semble préférable à « les ». Le sous-amendement no 71 vise à compléter l'alinéa par la phrase : « Leur intégration à cette démarche se fait de manière progressive. »
Nous craignons en effet, si la contractualisation rencontre un très vif succès, que les services de l'État ne puissent accéder à toutes les demandes.
Dès lors que nous nous inscrivons dans un cadre qui n'est pas obligatoire, et qu'il s'agit de fixer de manière générale l'esprit de ces contrats, l'amendement gagnerait à être ainsi sous-amendé.
Applaudissements sur les bancs du groupe REM.
Madame Magnier, la commission a particulièrement apprécié votre démarche. Non seulement l'amendement va dans le sens du Gouvernement, mais il va étayer l'effort de maîtrise de la dépense pour les collectivités. La démarche est donc parfaitement légitime. La commission émet un avis favorable sous réserve de l'adoption des sous-amendements, car il est indispensable que le processus puisse être étendu de manière progressive, pour que nous travaillions dans la sérénité même en cas d'afflux des demandes.
Même position.
Je remercie le ministre et le rapporteur général. Je souhaite moi aussi l'adoption des deux sous-amendements.
Je n'ai rien contre l'amendement. Pourquoi en effet ne pas offrir aux collectivités qui le souhaitent la possibilité de contractualiser ? Cela dit, puisque nous n'avons encore déterminé ni le bonus ni le malus, j'appelle votre attention sur le fait que le bonus ne doit pas pouvoir figurer au sein de l'enveloppe normée.
Si aujourd'hui certaines collectivités peuvent contractualiser parce qu'elles disposent d'une marge de manoeuvre, tant mieux pour elles ! Mais celles qui, ayant déjà fait des efforts, ne pourront pas en consentir de nouveaux, ne doivent pas se retrouver pénalisées du fait qu'on attribuera des bonus à d'autres.
Avec cet amendement, qui généralise la possibilité de signer des contrats, nous sommes au fond de la République contractuelle que vous cherchez à instaurer. Vous nous avez imposé l'idée que, sur le marché du travail, le contrat d'entreprise primait sur la loi. Et voilà que vous établissez un nouveau rapport contractuel généralisé avec les collectivités territoriales, en lieu et place de la loi qui protège l'égalité de toutes et tous sur le territoire, dans une République une et indivisible.
Faut-il rappeler les réserves qui viennent d'être émises ? Les communes et les collectivités ne seront pas toutes égales vis-à-vis de ces contrats. Comment appréciera-t-on qu'un contrat est bien réalisé ? Comment évaluera-t-on le potentiel de telle collectivité pour atteindre ses objectifs ? Enfin, on nous parle beaucoup du bonus. Qu'en sera-t-il du malus qui, si j'ai bien suivi les débats en commission, sera envisagé à partir de 2019 sous des formes encore mal connues ? Peut-on nous éclairer à ce sujet ?
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Exceptionnellement, je vais rebondir sur les propos de M. Coquerel. Sur une enveloppe constante, si l'on contractualise et qu'on prend en compte les besoins spécifiques envisagés dans l'amendement 53 rectifié et si l'on en rajoute une couche sur la bonne vertu financière des collectivités, on aura bien du mal à donner un plus sans réduire la part de celles qui auraient peut-être bien voulu faire des efforts, mais qui n'ont plus de marge. C'est un vrai problème.
Mais surtout, monsieur le ministre, on ne parle que des communes dans l'amendement no 5 , dans le sous-amendement no 71 , des grandes communes et des EPCI. Quid des départements et des régions ? Tout à l'heure, nous avons réfléchi sur d'autres collectivités territoriales.
Elles figurent déjà dans le dispositif !
Ma question va plus loin : quelle est votre vision de la répartition des collectivités territoriales sur le territoire ? Quel est votre projet ? Sincèrement, nous perdons de vue votre conception de l'organisation territoriale.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Pour les communes volontaires, peut-on considérer que le deal comporte une remise en cause de l'effort au redressement des comptes publics ? Les communes sont déjà considérablement ponctionnées à ce titre, compte tenu de mesures dont vous n'êtes pas responsables. La politique que vous mettez en oeuvre va-t-elle annuler ces dispositions – auquel cas chacun partirait sur la base d'une contractualisation pour limiter la hausse des dépenses à 1,2 % par an – ou s'y ajouter ?
Je peux citer le cas d'une commune qui, le 12 octobre, s'est vu annoncer par la préfète une DGF négative. Sa contribution au désendettement de l'État se montera à 922 000 euros. Autant dire que ce sont les citoyens, et non l'État, qui assument le désendettement. Ces communes peuvent-elles se dégager de cette obligation en contractualisant ?
Madame Dalloz, il est normal que l'amendement et le sous-amendement no 71 ne mentionnent pas les départements et les régions : ils sont déjà concernés par nature. La mesure concerne en effet toutes les collectivités, régions et départements, et les communes de plus de 50 000 habitants, ainsi que les agglomérations de plus de 150 000 habitants. Il n'y a donc pas lieu d'établir des distinctions entre les uns et les autres.
Monsieur Lecoq, votre question est extrêmement intéressante, puisqu'elle porte sur le lien de confiance qui peut exister entre l'État et les collectivités locales. Je me propose de vous répondre précisément lors de l'examen du projet de loi de finances. J'ai en effet une idée personnelle sur la question, qui sort peut-être du cadre interministériel. Il faut que j'en reparle à Gérard Collomb, avec qui j'ai déjà eu un échange sur ce point.
À mon sens, si elles contractualisent, les collectivités qui se verrraient attribuer une DGF négative – comme la commune que vous avez citée – devraient pouvoir cesser de verser cette contribution. Reste à savoir si cette solution est possible, dans le cadre du rétablissement des finances publiques.
Pour l'heure, aucune des 319 collectivités envisagées ne reçoit de DGF négative.
L'agglomération du Havre, peut-être ? Le Premier ministre devrait pouvoir nous répondre !
Je lui poserai la question. Peut-être une collectivité parmi ces 319 reçoit-elle une DGF négative, mais j'en serais surpris. Bref, nous allons déjà travailler avec elles. Le lien de confiance qui s'établira alors peut être intéressant pour les collectivités locales.
J'ai émis un avis favorable à l'amendement n° 5 de Mme Magnier, parce que les collectivités comptant 45 000, 30 000, 25 000 ou 10 000 habitants et qui seraient tentées par ce système ne doivent pas en être écartées si elles ont envie d'être vertueuses et d'élargir le cercle des 319.
Tout au long du débat que nous poursuivrons l'an prochain, surtout dans le cadre de la Conférence nationale des territoires, nous verrons si le contrat a un bon esprit, si nous respectons nos engagements, et nous réfléchirons à l'intéressante question du bonus et du malus.
Pour l'heure, nous sommes dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques. Nous nous pencherons sur cette question dans le cadre du projet de loi de finances.
Il s'agit toujours de nourrir le débat sur le mécanisme de correction, et le dispositif de bonus-malus qui lui est associé. Avant de présenter l'amendement, je souhaite apporter deux précisions. Premièrement, Christine Pires Beaune a raison de souligner que si bonus il y a, il ne doit pas figurer dans l'enveloppe normée, car dans cette hypothèse, il serait soustrait à des collectivités n'ayant pas la même capacité à accomplir des efforts. Deuxièmement, monsieur le ministre, je vous invite à abandonner l'idée que le bonus doit apparaître en dotation d'investissement, et le malus en dotation de fonctionnement. En effet, si l'on suit la logique du projet de loi de programmation, on constate que votre objectif consiste à réduire la dette publique, ce qui suppose que les investissements soient financés par l'autofinancement plutôt que par l'emprunt. Cela signifie que la préservation de la capacité des collectivités à dégager des marges et de l'épargne sur les dépenses de fonctionnement constitue la condition de l'investissement et du désendettement. C'est pourquoi il faut arrêter de penser que le seul bonus peut être porté sur la section d'investissement, puisque l'on sait, par ailleurs, que les accompagnements de l'État en matière d'investissement nécessitent, pour être mobilisés, une part minimum des maîtres d'ouvrage ; or, s'il n'y a plus d'épargne en fonctionnement, il n'y a plus de capacité à abonder la part minimale.
L'amendement, qui vise à préciser le texte, s'inscrit dans cette logique. Il a pour objet d'établir que, si le mécanisme de correction défini à l'article 10 doit être appliqué, il ne le sera qu'aux collectivités ayant fait l'objet d'une convention, que ce soit sur la base de l'obligation légale ou de la mise en oeuvre de la faculté que l'on vient d'instituer.
La parole est à M. Nicolas Forissier, pour soutenir l'amendement no 58 .
Olivier Dussopt a présenté les choses très clairement. C'est en effet un amendement de précision, monsieur le ministre, et je pense qu'il devrait faire l'objet d'un consensus, et, partant, recueillir l'assentiment du Gouvernement. Son adoption permettrait en effet de rassurer les différents acteurs quant à la question du périmètre.
J'ajoute que vous n'avez pas répondu à la question que vous a posée Véronique Louwagie : que se passe-t-il à défaut de signature d'un contrat ? Quelle est la conséquence concrète d'une telle décision ?
Messieurs les députés, cet amendement n'a pas été examiné par la commission, qui n'en a eu connaissance que dans le cadre de la réunion tenue en application de l'article 88 du Règlement. Je comprends très bien votre demande de précision, et il me paraît en effet utile que le lien entre mécanisme de contractualisation et dispositif dit « de correction » soit explicité. La commission n'ayant pas émis d'avis, j'exprime à titre personnel un avis de sagesse. Le ministre va, je le pense, nous apporter une précision à ce sujet.
Je suis sensible aux arguments de M. Dussopt et de M. Forissier ; je comprends qu'ils souhaitent apporter cette précision. Je répondrai par la même occasion à Mme Louwagie. Bien que votre initiative me semble animée par une bonne intention, messieurs, je vous demande de retirer vos amendements ; à défaut, je me verrais contraint de leur donner un avis négatif. Toutefois, dans un esprit constructif, comme je l'ai fait avec Mme Pires Beaune en commission, je vous propose que, dans le cadre de la navette, nous travaillions ensemble pour parvenir à une meilleure rédaction, quitte à ce que vous fassiez usage de votre droit d'amendement en nouvelle lecture si cela ne correspondait pas tout à fait à vos intentions.
Madame Louwagie, ce qui nous intéresse, c'est que les 319 plus grandes collectivités respectent la limite de 1,2 % de hausse annuelle de leurs dépenses de fonctionnement. La Conférence des territoires nous permettra d'expliciter un certain nombre de choses, mais, pour les 319 collectivités concernées, nous proposons la contractualisation, ne serait-ce que pour prendre en considération les desiderata locaux et un certain nombre de spécificités. J'en profite pour dire au député de La République en marche de la Guadeloupe, qui avait déposé un amendement à ce sujet, que la spécificité ultramarine était prise en compte par l'amendement no 53 rectifié du rapporteur général. Cette contractualisation permet de tenir compte de cette spécificité et d'accéder au mécanisme du bonus.
Si une collectivité parmi les 319 précitées ne recourt pas à la contractualisation – les communes rurales et moyennes ne sont pas concernées – , elle devra se plier à la règle de la limitation de l'évolution de ses dépenses réelles de fonctionnement à 1,2 % sur la période 2018-2022. Si la collectivité atteint sa cible, il n'y aura aucune conséquence ; si elle ne l'atteint pas, elle se verra appliquer un malus en 2019. Ces 319 collectivités ont donc, me semble-t-il, intérêt à contractualiser, tant pour bénéficier du bonus que pour obtenir la prise en compte de spécificités locales. Si, pour des raisons politiques, certaines d'entre elles ne souhaitaient pas contractualiser, elles se verraient appliquer la règle du 1,2 % de manière homothétique. J'ajoute qu'en principe, ces 319 collectivités n'ont pas de DGF négative.
Je demande donc le retrait de ces amendements, afin de parvenir à une réécriture de la disposition au Sénat, conformément à l'objectif poursuivi par M. Dussopt et M. Forissier. Ils auront l'occasion de le vérifier d'ici à la nouvelle lecture.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe REM.
Dans le cadre de cette discussion sur l'article 10, deux surprises politiques sont survenues. Premièrement, nos collègues du groupe Les Républicains ont beaucoup insisté sur l'importance qu'ils accordaient à la maîtrise de notre dette publique. Or, l'approche contractuelle mise en oeuvre par le texte permet précisément de tenir la dette publique ; en effet, elle favorise l'investissement des collectivités locales par l'autofinancement et non par l'endettement.
Il ne faut pas confondre la dette des collectivités locales et celle de l'État !
Je suis donc surprise de constater que vous nourrissez autant de doutes à l'égard de cette approche contractuelle, puisqu'elle est précisément le gage de la maîtrise de la dette publique à long terme.
Deuxièmement, un amendement, qui visait à réduire de 20 milliards les dépenses des collectivités locales, a été déposé mais n'a pas été discuté. Pourtant, on aurait tous aimé en débattre, puisqu'il constituait l'application de votre programme. Il serait intéressant de savoir ce que vous en avez fait.
Vous nous avez rappelé ce soir l'importance que vous attachiez à l'objectif de maîtrise de la dette publique et avez estimé que nous ne ferions pas assez d'efforts pour réduire la dépense publique. Or, nous proposons ici une approche contractuelle qui permet d'atteindre cet objectif.
En effet. Nous proposons ici de tenir la dette des administrations publiques locales, qui ont connu une certaine dérive au cours des dernières années.
Applaudissements sur les bancs du groupe REM.
Le ministre a affirmé vouloir apporter des précisions sur cette question d'ici à la nouvelle lecture et faire en sorte que les mécanismes de correction s'appliquent à celles et ceux qui se seront engagés dans le débat sur la nature du bonus et du malus, et sur son imputation. Je retire donc cet amendement. Si mon collègue Forissier en est d'accord, nous le redéposerons, peut-être dans une rédaction différente, en nouvelle lecture, et, dans cette attente, nous retravaillerons le sujet avec vous.
L'amendement no 50 est retiré.
L'amendement no 58 est retiré.
Je voudrais à nouveau interroger le ministre sur l'effort demandé aux collectivités locales et à l'État. Il me semble que l'effort de l'État est très nettement inférieur à celui qui est demandé aux collectivités.
« Eh oui ! » sur les bancs du groupe LR.
Vous présentez un tableau sur les administrations publiques centrales et locales. Je sais bien que cela ne concerne pas toutes les collectivités et que l'État n'est pas seul concerné, mais il représente tout de même une très large part de l'ensemble, c'est l'alouette et le cheval ! De surcroît, c'est un tableau en volume, qui montre bien que l'État ne se contraint pas de la même manière qu'il souhaite contraindre les collectivités locales. C'est d'autant plus vrai qu'en fait de dépenses, les collectivités ont moins d'autonomie que l'État : de fait, l'État impose un certain nombre d'engagements financiers, notamment en matière de fonction publique, qui représente près de 50 % des dépenses des communes. Pouvez-vous donc nous dire pourquoi les collectivités locales doivent engager des efforts plus importants que ceux qui sont consentis par l'État ?
D'autant plus qu'elles les accomplissent déjà depuis un certain nombre d'années !
J'ai beaucoup de considération pour les questions du président de la commission et je ne voudrais pas les laisser sans réponse. Effectivement, les administrations publiques locales ne comprennent pas seulement les collectivités mais incluent également, pour citer un exemple de structure assez dépensière, qui pourrait sans doute faire l'objet de certaines économies de fonctionnement, la Société du Grand Paris. Cette catégorie comprend également les lycées. Il faut donc comparer ce qui est comparable.
Pour ce qui concerne les dépenses de l'État, je répète à nouveau qu'elles augmenteront de 1,6 % l'année prochaine, en prenant en compte les crédits des ministères – notamment la rebudgétisation des 4 milliards – , puis de 0,6 % – en tout cas de moins de 1,2 %, soit à un niveau inférieur à celui des collectivités locales. Dans le tableau que vous évoquez, monsieur le président, figure aussi, me semble-t-il, la charge de la dette et la contribution à l'Union européenne. Il faut donc, j'y insiste, comparer ce qui est comparable.
L'article 10, amendé, est adopté.
L'article 11 est adopté.
Je voudrais expliquer pourquoi nous allons voter contre cet article. Celui-ci présente une trajectoire de baisse de crédits entre 2018 et 2020 pour de nombreuses missions budgétaires, qui ont pourtant un rôle clé pour l'État. J'en citerai deux : - 3,1 milliards d'euros pour la mission « Cohésion des territoires » avec, notamment la baisse des aides personnalisées au logement – APL ; - 4,1 milliards d'euros pour la mission « Travail et emploi ». Ce sont de bonnes illustrations de ce qu'il convient d'appeler des politiques d'austérité en matière de dépenses publiques.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
L'article 12 est adopté.
Vous avez compris que, sur les articles précédents, malgré la question de l'évolution tendancielle, nous pouvions nous accorder sur la méthode retenue tout en regrettant l'ampleur de l'effort demandé aux collectivités. L'article 13, quant à lui, est d'une autre nature. En effet, il a pour objet de plafonner les transferts financiers entre l'État et les collectivités, et définit l'enveloppe normée. Cet article soulève deux problèmes, qui nous paraissent inacceptables. S'agissant du second, nous avons tenu, au sein du groupe socialiste, une position constante au cours des années précédentes, et le Gouvernement, bon gré mal gré, avait fini par nous entendre.
Premier problème : l'article 13 inclut dans l'enveloppe normée le Fonds de compensation pour la TVA – FCTVA – , ce qui est une mauvaise idée. En effet, nous considérons que le FCTVA constitue un remboursement calé sur le niveau des investissements, et qu'il ne doit donc pas relever de l'enveloppe normée.
Second problème, plus grave : la fraction de TVA allouée aux régions en remplacement de la DGF qu'elles percevaient jusqu'à présent est aussi incluse dans cette enveloppe normée. Nous souhaitons tous que la croissance économique soit au rendez-vous, que l'activité se développe et que, par voie de conséquence, les recettes de TVA s'accroissent, ce qui signifierait que la fraction de TVA aurait aussi vocation à augmenter. Mais, au sein de l'enveloppe normée, cette augmentation et ce dynamisme de la fraction de TVA au profit des régions s'effectuerait, en réalité, aux dépens des collectivités locales.
À l'occasion d'un comité de pilotage consacré aux enjeux financiers de la Conférence nationale des territoires, l'engagement avait été pris de retravailler l'article 13, de manière à ce que le dynamisme de la fraction de TVA ne puisse pas avoir une incidence négative sur les autres collectivités, les autres strates, dans le cadre de l'enveloppe normée. À ce stade, je regrette de ne pas voir la traduction de cet engagement.
J'avais proposé un certain nombre d'amendements sur cet article ; l'un d'eux, d'ailleurs, est appelé à tomber. Il faut revenir à la loi NOTRe, qui a conféré la compétence économique à la région sans l'accompagner de transferts financiers, puisque ce n'était pas une compétence obligatoire des départements, contrairement par exemple aux transports. Le Gouvernement et les régions ont mené des négociations pour financer cette nouvelle compétence, mais celles-ci se sont révélées infructueuses. J'appelle l'attention du Gouvernement sur ce point. La région s'occupe de la formation professionnelle et de l'économie, et l'État n'a pas d'autre choix que de s'accorder avec cette collectivité s'il veut véritablement relancer l'économie.
Comme M. Dussopt l'a rappelé, à l'origine, une fraction de la TVA, qui connaissait une évolution dynamique, était sortie de l'enveloppe normée. À cela s'ajoutait un Fonds de compensation de la TVA.
Je sais que certaines négociations sont encore en cours, et j'appelle tout le monde à être responsable et à trouver un terrain d'entente qui nous permette d'avancer sur cette question et de développer économiquement notre pays, car là est l'enjeu.
Nous en venons aux amendements relatifs à l'article 13.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 66 .
Il est des moments qui offrent des satisfactions plus importantes que d'autres dans la vie parlementaire, et cet amendement fait partie de ces motifs de satisfaction.
En effet, nous avons beaucoup parlé en commission de la problématique du FCTVA et de la fraction de TVA affectée aux régions, notamment avec MM. Christophe Jerretie et Jean-René Cazeneuve du groupe La République en marche, avec Mme Stella Dupont, qui siège avec moi au Comité des finances locales, le CFL, mais également avec nos collègues Christine Pires Beaune, Valérie Rabault, Lise Magnier et Véronique Louwagie, qui partagent la même préoccupation.
Ce qui vient d'être exprimé va trouver un aboutissement au travers de l'amendement que je vous propose avec l'accord du Gouvernement. Cet amendement illustre très clairement ce qu'est une politique de co-construction, qui est permise par nos travaux en commission. Conformément à l'engagement du ministre, qui s'est exprimé en commission sur ce sujet, je suis à même de vous présenter cet amendement qui répond à de nombreuses remarques et demandes avancées par la commission des finances et par le CFL.
Cet amendement vise à exclure le FCTVA et la fraction de TVA des plafonds de concours financiers de l'État aux collectivités territoriales pendant la période de programmation. Au cas où vous vous inquiéteriez de les voir dans un tableau reprenant l'ensemble des concours de l'État, ces deux éléments ne sont présentés qu'à titre indicatif. Ces deux agrégats possédant une dynamique qui a été soulignée, leur exclusion des plafonds permettra de ne pas compenser sur d'autres concours financiers. Cette dynamique est importante pour les collectivités, les régions en premier lieu, mais également l'ensemble des collectivités concernées.
Aujourd'hui, on assiste à une avancée extrêmement importante pour les collectivités territoriales. Il s'agit d'un engagement très fort du Gouvernement, qui répond à une demande ancienne. Je voulais souligner ce gage de confiance et de respect en prévision des négociations à venir. Au travers de cet amendement, je suis certain que vous serez tous sensibles à notre volonté conjointe de faire en sorte que le renouveau des collectivités passe aussi par cette marque de confiance du Gouvernement et de l'ensemble des personnes qui ont travaillé sur cet amendement à la commission des finances.
J'indique d'ores et déjà que je donnerai un avis défavorable aux autres amendements à l'article 13 ou demanderai leur retrait.
Pour répondre à M. Dussopt, le Gouvernement donne en effet un avis favorable à l'excellent amendement de votre rapporteur général, qui prévoit la distinction du FCTVA et de la TVA affectée aux régions dans l'enveloppe normée. J'avais pris cet engagement devant le CFL et devant la commission des finances.
Je ne sais pas si la relation entre l'État et les régions est fondée sur un malentendu, monsieur Molac, mais elle est fondée sur une histoire. Les régions, et j'ai participé à la négociation de l'autre côté de la barrière, si j'ose dire, ont demandé fortement au Gouvernement d'avoir la compétence économique. Le Gouvernement ne souhaitait pas, dans un premier élan, la donner – qu'importe si la compétence économique n'était pas une compétence obligatoire des départements.
Il faut souligner, me semble-t-il, monsieur Molac, si l'on respecte la démarche d'honnêteté intellectuelle qui doit tous nous animer, État comme collectivités locales, que ce sont les régions qui ont demandé à plusieurs reprises cette compétence. C'est sans doute une très bonne chose, la région constituant probablement le meilleur échelon pour accompagner le développement économique.
Les régions ont demandé par ailleurs à bénéficier de dotations dynamiques, fondées sur la richesse nationale – les recettes de TVA constituent une contrepartie de richesse nationale et, le jour où les richesses baissent, une petite difficulté apparaît, ce que connaissent tout à fait les régions. Elles ont donc souhaité, monsieur Molac, avoir un point de TVA en dynamique, ce qui représentera 100 millions d'euros de recettes supplémentaires l'année prochaine et 700 millions d'euros d'ici à la fin de la législature.
Dans la négociation avec le Gouvernement, la loi de finances pour 2016 prévoyait un rattrapage de 450 millions d'euros, afin de compenser, de manière exceptionnelle, le transfert de cette compétence. Le Parlement va voter cette année les 250 millions d'euros qui restent, car le Gouvernement précédent avait budgétisé 450 millions, mais n'en a payé que 200 millions.
Si on faisait un rebasage de 450 millions d'euros, monsieur Molac, on prendrait aux communes, aux départements ou aux intercommunalités. Soyons honnêtes, d'autres collectivités perdraient dans cette opération, et il ne nous a pas semblé que les communes ou les départements soient aujourd'hui en mesure de compenser une telle perte, alors que contrairement aux régions, ils ne bénéficient pas d'un point de TVA dynamique. C'est une question de justice entre les collectivités locales.
Au total, nous avons décidé de tenir notre engagement sur l'enveloppe normée – engagement assez fort qu'aucun Gouvernement précédent n'avait pris, notamment sur le FCTVA – , de payer les 250 millions d'euros de la facture laissée par l'ancien gouvernement, alors que l'on aurait pu ne pas la payer, et de maintenir ce point de TVA dynamique pour les régions – ce qui représentera une augmentation de 100 millions d'euros l'année prochaine – , mesure dont ne bénéficie aucune autre collectivité locale.
Nous ne maintiendrons pas en effet le fonds de 450 millions d'euros, car chacun constate que les finances publiques connaissent quelques petites difficultés. Entre nous, et je sais que vous êtes un ardent régionaliste, monsieur Molac, certes, nous ne transformons pas un fonds exceptionnel en fonds ordinaire, mais ce point de TVA dynamique permet aux régions de faire des jaloux parmi les départements et les communes, qui n'en bénéficient pas.
Monsieur le rapporteur général, je vous remercie de votre amendement, et je vous remercie, monsieur le ministre, de votre engagement pour que la dynamique du FCTVA puisse continuer à bénéficier aux régions.
Dans votre amendement, vous dites mettre en oeuvre cet engagement, mais vous présentez un tableau dans lequel la TVA affectée aux régions fait partie de l'ensemble des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales. J'ai l'impression que le tableau montre le contraire de l'objectif que vous voudriez poursuivre.
Peut-être pourrions-nous sous-amender cet amendement en supprimant le tableau ou le mot « Dont » dans la colonne « Dont TVA affectée aux régions » ? Monsieur le rapporteur général, monsieur le ministre, confirmez-vous que la dynamique de la TVA affectée aux régions continuera bien de bénéficier aux régions ? Le tableau dit le contraire de l'objectif que vous annoncez.
Je rejoins les propos de Valérie Rabault, le tableau affiche l'inverse du troisième paragraphe de cet amendement, puisque la recette est plafonnée et que le FCTVA et la TVA affectée aux régions sont compris dans le total des concours.
J'ai une autre solution, qui consiste à traiter la TVA des régions comme de la fiscalité transférée, puisque la TVA est un impôt. Cela serait beaucoup plus simple.
J'ai déposé un amendement, le no 7, qui propose tout simplement de supprimer l'alinéa 6 de l'article 13, puisque cet alinéa indique que « le plafond comprend le produit de l'affectation de la taxe à la valeur ajoutée [… ] ». Cela nous éviterait d'avoir une enveloppe normée qui prenne en compte la TVA, si bien que l'on ne casserait pas du tout l'effet dynamique de la TVA.
Concernant l'amendement du rapporteur général, on peut effectivement se demander s'il ne donne pas plus de contraintes, à cause de ce tableau qui plafonne chaque montant. Il serait préférable d'en rester au plafond total, qui figurait dans l'article 13. On a l'impression que l'on se donne moins de latitude et plus de plafonds !
Monsieur le rapporteur, lorsque l'on lit votre formulation, on comprend que l'on plafonne les concours financiers, à l'exception du FCTVA et de la TVA. Mais si l'on plafonne les autres concours et le plafond total, le FCTVA et la TVA affectée aux régions ont beau être mobiles, ils ne peuvent pas s'émanciper de ce plafond bas et de ce plafond haut. Du coup, votre tableau donne l'impression de contredire votre texte.
Ou alors, quelque chose n'est pas très clair, car je vois M. le ministre hocher négativement de la tête, ce qui montre qu'il aurait raison seul contre tous, puisque nous avons tous mal compris la formulation, y compris Mme Rabault, dont on connaît l'expertise budgétaire.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Monsieur le ministre, pardonnez-moi de rejoindre le groupe croissant de ceux qui ne comprennent pas bien, mais qui vont avoir besoin d'une explication complémentaire.
C'est parce que l'amendement a été écrit par le rapporteur général !
Sourires
Je ne suis pas sûr que ce soit la seule explication.
Le tableau montre en effet que l'on est en train de plafonner la dynamique liée à l'affectation de la TVA aux régions. Ce n'est pas l'esprit de ce que nous avons porté et de ce que les régions ont compris. Puisque les concours financiers de l'État aux collectivités territoriales seront constants entre 2018 et 2022, les régions ne bénéficieraient pas de la dynamique du point de TVA si les évolutions liées à la TVA devaient croître et entraîner une nouvelle répartition à l'intérieur des concours.
Il faut que les choses soient clairement énoncées : la dynamique liée au point de TVA est-elle acquise compte non tenu de l'évolution des dotations aux régions ? Telle est la question, et le mot « Dont » du tableau crée quelque chose de subreptice. Cela gagnerait à être dit clairement, ce qui nous permettrait de ne pas voter cet amendement en connaissance de cause, ou, au contraire, le doute pourrait être levé, et nous le voterions avec joie.
M. Ferrand a raison, parce que l'amendement no 66 est dangereux. Si l'investissement augmentait, le FCTVA croîtrait. Si l'amendement de notre collègue était voté, il faudrait donc, et ce n'était pas son intention, réduire la DGF à due concurrence. La situation serait similaire si la TVA affectée aux régions croissait encore plus vite que ce que l'amendement prévoit.
Je partage le sentiment du président du groupe La République en marche : cet amendement est très dangereux.
Il vaudrait mieux annoncer ce qui est envisagé mais en conservant le montant global, ou se contenter de la dernière ligne, où on préciserait que c'est hors TVA affectée aux régions et hors fonds de compensation pour la TVA, ce qui serait peut-être la solution la plus raisonnable.
À défaut, on risque de se ficeler les mains. Certes, il sera toujours possible de modifier la loi de programmation, mais le faire chaque année ne ferait pas très sérieux.
À la suite de MM. de Courson et Ferrand, j'aimerais souligner très brièvement qu'un problème de rédaction se pose : la volonté du rapporteur de sortir le FCTVA et la fraction de TVA de l'enveloppe normée est en contradiction avec le maintien dans le tableau du I. de l'amendement du même montant de plafonnement de l'enveloppe normée que dans la loi initiale.
La seule solution, si on devait sous-amender cet amendement, serait de préciser que ce tableau doit être ajusté du montant de l'évolution du FCTVA et de la TVA, ce qui rend la rédaction extrêmement compliquée, puisqu'alors il ne serait qu'indicatif.
Il faut donc absolument rectifier cet amendement.
La difficulté tient à un fait que Christine Pires Beaune a évoqué : au travers de cet article 13, le Gouvernement propose de traiter un transfert de fiscalité comme un concours financier. Dans la mesure où l'idée initiale est d'affecter aux régions une fraction de TVA au titre de l'autonomie fiscale, cette recette doit plutôt être traitée comme de la fiscalité transférée, donc sortir du périmètre de l'enveloppe normée de façon claire et définitive.
Je répondrai à la fois à MM. Dussopt, Aubert, de Courson et Ferrand.
S'agissant de l'interrogation de Mme Pires Beaune reprise à l'instant par M. Dussopt, ce qui a toujours été négocié par l'État, y compris par le gouvernement précédent, c'est non pas un point de TVA, mais l'équivalent en dynamique d'une recette qui correspond à un point de TVA, tel qu'inscrit dans la dernière loi de finances. À ce titre, l'évolution sera positive si les recettes dynamiques de l'État, notamment la TVA, sont positives, et il y a alors des avantages à partager la richesse nationale. En revanche, il y a un risque de baisse si l'équivalent de cette recette baisse.
Pour répondre à M. de Courson sur le FCTVA, s'il y a plus d'investissement, ce qui n'est pas plafonné, il y a alors plus d'argent.
Puisque vous êtes un certain nombre à le dire, je dois comprendre qu'un certain nombre de coquilles émaillent l'amendement du rapporteur général.
Sourires.
Ce que je vous propose, afin de clarifier la situation, c'est qu'avec son accord nous sous-amendions l'amendement ainsi : « L'ensemble des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales, exprimés en milliards d'euros courants, est évalué comme suit à périmètre constant ». Il s'agit en effet d'une évaluation, puisque par définition les recettes peuvent être plus dynamiques, et il n'y a pas de plafonnement. On pourrait donc inscrire dans le tableau « Total des concours financiers » et supprimer les trois cases introduites par « dont », car cela semble vous gêner, et on comprendrait mieux ainsi que le produit de l'affectation de la TVA n'est pas plafonné.
Si vous vous reportez au III. , qui n'est pas l'exposé des motifs, madame Rabaud, mais qui sera une disposition de la loi dès lors que vous aurez adopté l'amendement du rapporteur général ainsi modifié, vous comprendrez qu'il y a des exceptions qui ne concernent pas les collectivités locales que vous évoquez.
Au bénéfice de ces modifications, chacun comprendra que ce qui est transféré, c'est non pas un point de TVA mais l'équivalent des recettes d'un point de TVA, car c'est ainsi que cela a été négocié, et que ce n'est pas plafonné.
En outre, avec l'explication que chacun pourra lire dans le compte rendu de la séance, que le président de la commission des finances collectionne religieusement chez lui, on pourra constater, en cas de désaccord, que le ministre s'est engagé personnellement.
Certes, cette discussion est créative, mais il y a un principe constitutionnel de clarté des amendements et des avis. Par conséquent, si vous sous-amendez l'amendement de M. le rapporteur général, monsieur le ministre, il faut alors prendre quelques minutes pour rédiger votre proposition et redonner votre avis. Je ne souhaite pas qu'il soit procédé uniquement oralement au vu de la complexité de la discussion que nous venons d'avoir.
Je vais donc laisser la parole au président de la commission des finances puis au rapporteur général, et suspendre ensuite la séance brièvement, monsieur le ministre, afin que le sous-amendement soit rédigé, le cas échéant.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
Afin d'être tout à fait clair, c'est non pas un point de TVA pour les régions mais l'équivalent des recettes d'un point de TVA. On se demande toujours s'il y a une entourloupe dans ce type de formulations, mais l'idée est ici de redonner aux régions l'équivalent exact de ce que représente un point de TVA, ce qui inclut la dynamique des recettes.
C'est tout à fait cela !
C'est comme le Canada Dry !
Pour être certain que nous sommes bien d'accord sur le sous-amendement qui va être rédigé, et pour que les choses soient bien claires, nous allons remplacer le terme « évolue », car il pouvait laisser penser qu'il s'agissait non pas d'une évaluation mais de montants enfermés dans une enveloppe normée. Les « dont » étaient relativement français, me semble-t-il.
Ce qui compte, dans cette affaire, c'est le III. : « Pour la durée de la programmation, l'ensemble des concours financiers autres que le fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée prévu à l'article L. 1615-1 du code général des collectivités territoriales et que le produit de l'affectation de la taxe sur la valeur ajoutée aux régions, au département de Mayotte et aux collectivités territoriales de Corse, de Martinique et de Guyane prévue à l'article 149 de la loi no 2016-1917 de finances pour 2017 est plafonné, à périmètre constant, aux montants du tableau du I. » Il est donc très clair que tout ce qui est mentionné est hors plafonnement.
Toutefois, si la clarté l'impose, nous allons modifier le texte de l'amendement. Nous pourrions d'ailleurs le rectifier, plutôt que le sous-amender, si le service de la séance en était d'accord, bien sûr.
Il sera donc procédé à une rectification. Je vais suspendre la séance jusqu'à vingt-trois heures trente pour vous laisser le temps de la rédiger.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à vingt-trois heures vingt-cinq, est reprise à vingt-trois heures trente.
La séance est reprise.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement no 66 rectifié .
Conformément aux propos tenus avant la suspension de séance, nous avons apporté trois modifications au premier alinéa de l'amendement no 66 . Le mot « évolue » est remplacé par les mots « est évalué » ; les mots « concours financiers de l'État aux collectivités territoriales » sont précédés des mots « total des » ; et les trois occurrences du mot « dont » précédant respectivement « fonds de compensation pour la TVA », « TVA affectée aux régions » et « autres concours » sont supprimées.
Cette rédaction me semble parfaitement claire. Si la rédaction initiale pouvait prêter à confusion, elle ne cachait aucun loup. D'ailleurs, pour un habitant des Alpes, il est très embêtant d'avoir un loup dans la bergerie et je ne l'aurais pas toléré !
Sourires.
Par-delà cette plaisanterie, il importe que le FCTVA et la fraction de TVA affectée aux régions soient exclus de cette enveloppe normée. Je précise à Mme Louwagie que l'amendement qu'elle a déposé concerne uniquement la fraction de TVA affectée aux régions. L'amendement no 66 rectifié , dont je répète qu'il est issu d'une coconstruction de la commission des finances et du Gouvernement, est donc le plus complet.
C'est un oui franc et massif, monsieur le président !
Je remercie M. le rapporteur général et M. le ministre, grâce auxquels nous sommes parvenus à une rédaction somme toute compréhensible, qui redonne confiance aux collectivités régionales. Celles-ci auraient été troublées de ne pas bien comprendre les règles du jeu. Ce qui va sans dire va toujours mieux en le disant, et encore mieux en l'écrivant, comme vous l'avez fort justement dit, monsieur le président.
Nous en revenons donc aux amendements portant articles additionnels après l'article 6.
Il s'agit d'un amendement de responsabilité budgétaire prévoyant les cas de surplus de recettes sociales ou fiscales. Afin d'éviter des débats susceptibles d'éloigner du sérieux budgétaire certains membres du Parlement ou du Gouvernement, il propose d'en affecter durablement la moitié à la réduction des déficits, ce qui nous semble de bonne vertu financière, et de restituer l'autre sous forme de baisses d'impôt ou de dépenses d'investissement, ce qui pourrait donner lieu à un débat tout à fait intéressant ici même. J'espère que cet amendement recueillera l'assentiment, sinon l'unanimité de votre assemblée ou du moins de sa majorité, mesdames et messieurs les députés.
Je ne peux qu'émettre un avis favorable à cet amendement, car il introduit un système vertueux dont j'ai souhaité la mise en place en commission. Je remercie le Gouvernement de cette réponse.
Je me permets de signaler une erreur dans les deux premiers alinéas prévoyant d'affecter tout ou partie du surplus « à la réduction du déficit et de la dette ». Il faut supprimer les mots « et de la dette ». Par définition, si on réduit le déficit, on réduit l'endettement. Je propose donc de rectifier ainsi l'amendement du Gouvernement, si M. le ministre en est d'accord.
Je demande une précision à M. le ministre. L'amendement évoque l'excédent des administrations publiques sans préciser lesquelles. L'article 3 auquel il renvoie comporte un tableau récapitulatif mentionnant les administrations centrales, locales et de Sécurité sociale. Dans l'hypothèse où on constate un excédent supérieur aux prévisions dans les comptes des administrations publiques locales, comment le Gouvernement envisage-t-il de l'affecter à une réduction de la dette telle que la prévoit l'amendement ?
J'imagine que le Gouvernement compte affecter ses propres excédents à la réduction de la dette de l'État, mais il n'est pas en mesure de mobiliser un excédent des administrations locales, fût-il supérieur au sien, ni de décider de son affectation. J'aimerais donc obtenir des précisions sur le fonctionnement du dispositif prévu par cet amendement.
Cette proposition part certes d'un bon sentiment, mais, comme toujours, le passage à l'acte nous semble discutable. Aux termes de la proposition, si nous l'avons bien comprise, il s'agit d'affecter un excédent budgétaire à la réduction du déficit public et, si cette dynamique se confirme, de le répartir entre réduction du déficit, baisse d'impôt et croissance de l'investissement.
Nous pensons pour notre part qu'il faut profiter de l'amélioration de la conjoncture, que vous qualifiez de bonne nouvelle, monsieur le ministre, et tout faire pour la rendre durable, ce qui est le meilleur moyen de réduire le déficit. La meilleure façon d'améliorer les dynamiques économiques consiste à soutenir l'investissement, qui est le premier facteur d'accroissement de la productivité et de la production, donc de croissance et d'élargissement de l'assiette de l'impôt. Nous proposons donc d'affecter directement et intégralement toute ressource supplémentaire non inscrite, toute « bonne nouvelle », au chapitre de l'investissement public.
Je répondrai à M. Dussopt, qui a peur qu'un éventuel excédent de recettes des collectivités locales soit employé à combler sans effort …
J'entends bien, mais nous débattons ici de la loi de programmation des finances publiques 2018-2022, qui n'impose pas une contrainte absolue. Les collectivités locales présentant un surplus de recettes en seraient naturellement les bénéficiaires. Il s'agit de déterminer la conduite à tenir en cas de surplus. Nous en sommes encore assez éloignés, mais nous travaillons à l'échelle du quinquennat. Je constate que vous êtes tous, mesdames et messieurs les députés, favorables à l'idée optimiste de la réussite du quinquennat, et vous remercie de ce soutien affiché !
Je suis par ailleurs tout à fait d'accord avec la proposition de M. de Courson et émets d'avance un avis favorable à la rectification de l'amendement du Gouvernement qu'il a proposée.
La rectification de l'amendement no 55 consiste à supprimer les mots « et de la dette » à la fin du premier alinéa et à la fin de la première phrase du deuxième alinéa.
Approuvez-vous cette rectification, monsieur le rapporteur général ?
L'amendement no 55 , tel qu'il vient d'être rectifié, est adopté.
Deux orateurs sont inscrits sur l'article.
La parole est à M. Olivier Dussopt.
Cet article classe l'évolution des dépenses selon les catégories d'administration publique. Je fais à nouveau part d'un regret, qui est même une défiance. Le taux d'évolution indicatif des dépenses des collectivités locales prévu par la loi de programmation est systématiquement – sauf en 2019 – inférieur aux taux d'évolution des dépenses des autres acteurs de l'action publique, tant les administrations sociales que les administrations d'État. Cet état de fait renforce le sentiment que l'effort demandé aux collectivités locales est plus lourd que celui demandé aux autres administrations, alors même qu'elles ont réalisé l'essentiel des efforts consentis lors de la précédente législature.
J'observe par ailleurs que le taux d'évolution indicatif des dépenses des collectivités locales est de 0,3 % en 2017 et de 0,7 % en 2018 avant de devenir négatif en 2019 en raison de l'hypothèse d'un amoindrissement de leurs investissements. On avance des considérations de cycle électoral avec lesquelles je suis en désaccord. Ces chiffres entérinent surtout l'idée selon laquelle le niveau d'investissement des collectivités locales, qui a énormément diminué depuis trois ans, serait suffisant, alors qu'un effet de rattrapage est nécessaire en la matière.
Je soulèverai les mêmes questions que celles soulevées par M. Dussopt. La croissance des investissements prévue est faible voire négative, en particulier en 2019 et 2020. Pourquoi le Gouvernement prévoit-il une telle diminution des investissements ? Est-ce dû aux politiques de réduction de la dépense publique imposées aux collectivités ? Cette diminution des investissements endommage l'économie locale.
J'ai déjà débattu de ce sujet avec M. Dussopt, je répondrai donc plus particulièrement à M. Roussel. Cette évolution s'explique par le cycle électoral. Elle est d'ailleurs observée lors de tous les cycles électoraux. L'investissement devrait augmenter jusqu'en 2019, car les élus tâcheront de mener à bien leurs projets avant la fin de leur mandat afin d'améliorer leur bilan avant de se présenter devant les électeurs. L'élection peut amener un changement de majorité, ainsi qu'un budget rectificatif et éventuellement une diminution de l'investissement par rapport à l'année précédente.
Le Gouvernement n'applique donc aucune politique d'austérité aux collectivités locales mais les lois du cycle électoral, qui sont aussi anciennes que les élections municipales, départementales et régionales. En l'occurrence, nous vivrons en 2020 et 2021 la rare concentration de tous les cycles électoraux des collectivités locales aux investissements les plus importants : communes, intercommunalités, départements et régions.
Nous en venons aux amendements. La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l'amendement no 23 .
Cet amendement tire les conséquences des propos que vient de tenir Olivier Dussopt sur l'article 7. L'influence du cycle électoral nous semble exagérée. Nous proposons donc de revoir la trajectoire des dépenses des collectivités locales.
Cette position est orthogonale à celle du Gouvernement ! Au-delà, il est faux de dire que l'intégralité de l'effort portera sur les administrations publiques locales ; elles ne représentent que 19 % de la dépense publique. Avis défavorable.
L'amendement no 23 n'est pas adopté.
L'article 7 est adopté.
L'article 8 est adopté.
Cet article, où sont fixés les objectifs de dépenses des régimes obligatoires de base de Sécurité sociale, montre que ces dépenses sont programmées à la baisse pour les années 2018, 2019, 2020. Les régimes obligatoires de base de Sécurité sociale subiront donc une cure d'amaigrissement, ce qui est mauvais pour la santé publique, et mauvais pour la santé de nos concitoyens. Voilà encore une fois un exemple concret de ce que la réduction de la dépense publique coûte aux Français.
L'article 9 est adopté.
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l'amendement no 28 .
Cet amendement vise à demander au Gouvernement un rapport annuel sur les restes à charge et les reports prévus au présent article.
Cet amendement a recueilli un avis défavorable en commission. Les restes à payer, distincts des charges à payer, sont indiqués par mission budgétaire et détaillés, pour les sommes les plus significatives, avec des éléments explicatifs. Nous pouvons, je pense, inciter le Gouvernement à présenter ces informations de façon plus claire et didactique – c'est sans doute là le sens de votre amendement. Si le Gouvernement voulait bien avoir quelques paroles rassurantes sur ce point, je vous inviterais à retirer votre amendement.
L'amendement est en grande partie satisfait. Les débats en commission ont montré que cela était bien le cas dans les documents fournis aux parlementaires. Mais le Gouvernement s'engage dans cette voie, madame la députée.
Pour reprendre l'expression du rapporteur général, les paroles du ministre ont été rassurantes. Je retire cet amendement.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe REM.
L'amendement no 28 est retiré.
L'article 14 est adopté.
Nous ne sommes pas opposés au fait de réglementer par principe les affectations de taxes, mais les critères semblent opaques. Qu'entend-on par « bases objectives » ou « actions d'intérêt commun » ?
D'autre part, le plafond nous pose problème : pourquoi contraindre toujours les ressources, et ne pas imaginer un seuil pour assurer les ressources minimales ?
Enfin, ne s'agirait-il pas d'une règle supplémentaire qui aurait pour effet de contraindre la gouvernance des finances publiques ?
M. Coquerel interroge finalement le pouvoir du parlementaire vis-à-vis du budget que lui présente le Gouvernement. Si vous affectez toutes les taxes, il n'y a plus beaucoup de débat parlementaire. La limitation du nombre de taxes garantit à chacun des députés d'avoir un avis sur des recettes qui sont ensuite redistribuées, le plus possible, selon des crédits que le Parlement accepte de ventiler, voire d'amender. Le principe évoqué dans cet article préserve plutôt les droits du Parlement, puisqu'il garantit l'unité du budget, des recettes qui vont dans un pot commun et des dépenses qui sont réparties selon un principe politique, selon qu'on gagne ou non les élections.
Alors que l'on s'apprête une fois de plus à démembrer l'État en amoindrissant ses ressources et en comprimant ses dépenses, il nous paraît indispensable de préciser dans cet article les objectifs prioritaires qui doivent guider l'action publique. Gouverner, c'est choisir, et les buts assignés à l'affectation des ressources issues d'une imposition de toute nature doivent nécessairement refléter les priorités que se fixe aujourd'hui la représentation nationale.
Deux crises majeures secouent notre pays, minent notre pacte républicain et hypothèquent gravement l'avenir des générations futures : la crise sociale sans précédent qui ronge notre République et menace notre cohésion nationale réclame que nous agissions en faveur de la justice sociale, pour parer à cette urgence indéniable ; la crise écologique, dont les signes sont de plus en plus manifestes, suppose d'importants financements pour amorcer la transition de notre appareil productif. De tels maux supposent des engagements fermes et précis. Nous demandons donc que ces deux objectifs soient inscrits explicitement dans le présent article.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
À l'heure actuelle, une action oeuvrant pour la justice sociale ou la transition écologique rentre parfaitement dans le cadre des taxes affectées. La rédaction de l'amendement tend à réduire, de fait, l'objet des taxes affectées. Avis défavorable.
L'objectif de transition écologique ne saurait figurer dans cet article puisque la politique fiscale qui est menée n'y obéit pas. Lorsque l'on prévoit de taxer à plus de 60 % le foncier non bâti, on vise les forêts qui permettent d'absorber le CO2, on pousse à l'artificialisation des territoires ruraux en encourageant les propriétaires à bâtir pour échapper à la taxe sur le foncier non bâti. Par ailleurs, les espaces naturels rentreront dans le cadre du fameux IFI. À la limite, celui qui possédera des actions dans une société pétrolière, avec une taxe à 30 %, paiera deux fois moins d'impôts que le propriétaire de bois et de forêts, ceux-là mêmes qui permettent de lutter contre le réchauffement climatique. L'objectif que vous visez, chers collègues, est inconciliable avec les moyens que se donne le Gouvernement pour poursuivre la transition écologique !
L'amendement no 43 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l'amendement no 29 .
Comme les taxes sont de la compétence du Parlement, il est important que les taxes affectées aient un plafond. Ce principe a fait l'objet d'une relative unanimité sous la précédente législature. Le présent amendement prévoit que le Gouvernement présente chaque année dans une annexe la liste des taxes affectées qui n'auraient pas de plafond.
Cet amendement me semble satisfait dans la mesure où, dans le tome I de l'annexe « Évaluation des voies et moyens », sont recensées à la fois les taxes affectées plafonnées, avec tous les organismes bénéficiaires, le reversement prévisionnel au budget général, et les taxes affectées non plafonnées, avec les organismes bénéficiaires relevant de différents secteurs.
Comme l'amendement no 28 , cet amendement est surtout une invitation faite au Gouvernement à rendre l'annexe plus didactique et plus claire. Vous aviez retiré cet amendement en commission, je vous demande de faire de même, car je ne doute pas que le Gouvernement nous rassure une nouvelle fois.
Je veux d'abord vous remercier, madame la députée, car je sais que, sous la législature précédente, vous avez défendu le même principe. Il y a encore un travail à mener collectivement, mais M. le rapporteur général a raison de dire que votre demande est satisfaite. Je vous invite donc à retirer votre amendement.
Je remercie M. le ministre et M. le rapporteur général, et je retire cet amendement.
L'amendement no 29 est retiré.
Nous partageons le même constat, l'affectation des taxes est un régime dérogatoire au principe d'universalité budgétaire, mais qui se justifie par la nature particulière de cette catégorie d'imposition, notamment la mutualisation et la solidarité au sein d'un même secteur d'activité. Ainsi, les acteurs d'un même secteur acceptent une fiscalité supplémentaire qui leur permet de financer leurs structures, leurs actions communes et de travailler ensemble pour être plus efficients. L'État perçoit le produit de ladite taxe, avant de la reverser. Toutefois, avec le système de plafonnement, qui doit devenir la règle, l'État conserve une partie des recettes liées à cette fiscalité, normalement affectée pour la réintégrer au budget général.
Cet amendement, que je qualifierai de prudent, fixe une règle simple : le plafond d'une taxe affectée ne peut être inférieur de plus de 20 % au montant total des recettes de cette même taxe ; il ne semblerait pas cohérent que l'État préempte plus de 20 % des recettes d'une taxe affectée.
Nous avons calculé l'évolution de ces plafonnements et la réalité de ce qui a été affecté au budget général de l'État plutôt qu'à l'affectataire de la taxe. En 2017, le niveau des plafonds correspond à 94 % de rendement prévisionnel, en 2018, à 90 % : l'essentiel du rendement des taxes continue de bénéficier aux affectataires. Il ne me paraît donc pas utile de mettre en oeuvre un tel mécanisme.
Mais, au travers de cet amendement, vous nous interrogez sur la pertinence des taxes affectées et plafonnées, comme mode de financement des opérateurs ; vous nous demandez s'il est toujours opportun de considérer le plafond comme un outil de pilotage. Ce questionnement est intéressant et je propose que nous en débattions de manière plus large. À ce stade, avis défavorable.
M. de Courson n'ayant pas cosigné l'amendement de Mme Magnier, j'aimerais savoir s'il partage cette proposition. Pour ce qui me concerne, je ne peux qu'être défavorable à cet amendement, pour trois raisons.
Il me paraît tout d'abord contraire à l'esprit des lois de finances. L'article 46 de la loi de finances initiale pour 2012 interdit ainsi au Gouvernement de demander que certaines recettes, notamment si elles sont très dynamiques, contribuent au redressement des comptes publics.
Ensuite, l'amendement conduirait à une augmentation des dépenses fiscales, à hauteur de 500 000 euros environ, sur la base des plafonds des recettes du projet de loi de finances pour 2018.
Enfin, madame Magnier, vous oubliez que la taxe affectée peut impliquer des recettes multiples, pour une multiplicité d'acteurs. C'est le cas par exemple pour la Société du Grand Paris, pour laquelle un calcul extrêmement savant, voire très compliqué, serait nécessaire.
J'attire l'attention de la représentation nationale sur le fait que le projet de loi de finances que nous allons étudier comporte plus de 150 modifications de taxes et plafonnements. L'outil existe. Je pense, mesdames, messieurs les députés, que vous l'utilisez largement. On pourrait parfois se demander si multiplier ces taxes affectées ne revient pas à pas limiter le pouvoir du Parlement. C'était la discussion que nous avons eue tout à l'heure.
Cet amendement a au moins le mérite de poser une question : est-il normal qu'une part croissante de certaines taxes soit reversée au budget de l'État, grâce à un plafonnement fixé à un niveau adéquat ?
S'agissant par exemple des agences de bassin, est-il normal que nos concitoyens paient une taxe qu'ils croient affectée aux investissements en matière d'eau ou à l'amélioration de l'assainissement, alors qu'on en retrouve une part croissante dans les recettes non affectées du budget général de l'État ? Gilles Carrez et moi-même avions soulevé ce problème auprès du Conseil constitutionnel, en demandant si une limite à ce transfert existait.
Cet amendement a l'intérêt de proposer une limite, à 20 % des recettes : au-delà, les plafonds seront remontés, ce qui signifie que les recettes seront affectées à telle ou telle structure. Aujourd'hui, une taxe affectée produisant 100 millions d'euros pourrait aller pour 1 million d'euros à l'organisme auquel elle était initialement affectée ; les 99 millions d'euros restant, désaffectés, tomberaient dans les recettes générales de l'État.
J'aurais certes préféré une démarche analytique, non globale. S'il y a trop, on baisse le taux de la taxe, mais on ne reverse pas ses recettes dans un autre budget. D'ailleurs, lorsqu'on augmente le taux de la taxe, tout va au budget général, si l'on ne touche pas au plafond.
Par ailleurs, monsieur le ministre, en droit constitutionnel français, il n'y a que quatre catégories de recettes : les impositions de toute nature ; les cotisations sociales ; les rémunérations pour service rendu ; et le prix libre de marché.
Or, dans votre 1°, monsieur le ministre, vous laissez entendre qu'une taxe peut être la contrepartie d'un service rendu. Il ne s'agirait alors plus d'une taxe.
J'irai dans le sens de cet amendement et des explications de M. de Courson, qui me satisfont. Je déposerai d'ailleurs prochainement un amendement visant le groupe France Télévisions.
En effet, nous avons voté une taxe sur les opérateurs de communication, qui dépasse de beaucoup le montant affecté à l'opérateur. Doit-on la réduire, si l'on considère que l'opérateur ne vaut pas plus que 86 ou 100 millions d'euros ? Si l'on perçoit 300 millions d'euros, c'est qu'il y a un loup quelque part. On considère que ceux qui utilisent les opérateurs de télécommunication paieront des montants qui, en réalité, iront dans le budget de l'État, au lieu de financer les besoins de France Télévisions, en échange de la suppression de la ressource de la publicité – ce pourquoi elle avait été créée.
Pour résoudre ce problème général, il semblerait plus intelligent de fixer un principe, celui de considérer que la taxe s'arrête au plafond. Il faut alors plafonner – l'opérateur ne peut pas engranger des recettes grâce à une dynamique dont il n'est pas nécessairement responsable – ou rectifier l'année d'après. Je partage donc votre principe, madame Magnier, visant à plafonner, ou du moins à limiter le pourcentage des prélèvements obligatoires.
Compte tenu de la multitude des taxes affectées, il serait de bonne gestion de considérer qu'elles financent ce qu'elles doivent financer, et pas davantage.
En réponse au président Woerth et à Charles de Courson, j'ai dit tout à l'heure que plus de 150 amendements avaient été déposés. Le Parlement a le pouvoir de modifier les plafonds de ces taxes. Il serait un peu absurde de se prémunir contre soi-même : le pouvoir du parlementaire est d'abord de limiter le nombre de ces taxes, et de les corriger l'année suivante.
Si, vraiment, il semble gênant que des taxes soient affectées selon ce principe, il est possible d'introduire un impôt tout court, avec des crédits budgétaires. De manière générale, les ministres des comptes publics ont plutôt plaidé pour moins de taxes affectées et un peu plus de crédits budgétaires.
L'amendement no 37 n'est pas adopté.
L'article 15 est adopté.
La parole est à Mme Danièle Obono, pour soutenir l'amendement no 44 , visant à supprimer l'article.
L'article 16 consacre le principe du plafonnement annuel des baisses de prélèvements obligatoires, sans tenir compte de la différence de nature entre les impôts. Ainsi, le plafond englobe l'ISF et la fiscalité pesant sur les foyers les plus modestes dans un même calcul.
Pour parler plus clairement, le Gouvernement pourra continuer à diminuer les impôts des plus riches et à faire porter tout l'effort de solidarité nationale sur les foyers modestes, tout en respectant ces plafonds. Cette programmation permettrait donc au Gouvernement de poursuivre sa politique fiscale en faveur des plus aisés dans les années à venir. Elle pourrait participer pleinement à la prolongation de ce budget des riches, que le Gouvernement nous propose et que nous examinerons en séance après ce texte, en ne garantissant aucune justice fiscale entre les foyers les plus riches et les foyers les plus pauvres.
C'est pourquoi nous proposons de supprimer cet article.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
La commission a émis un avis défavorable. Il ne vous a pas échappé, madame Obono, que c'est une divergence de fond que vous exprimez, avec le programme de baisse des impôts prévue par le Gouvernement.
Les prélèvements obligatoires ont atteint un niveau record sur la période récente. Ils ont encore augmenté de 0,3 point de PIB en 2017 ; le projet de loi de programmation prévoit une baisse du taux de prélèvement obligatoire d'environ 1 point de PIB. Je maintiens donc l'avis défavorable qui a déjà été donné en commission.
Avis défavorable.
Tout en n'étant pas favorable à l'amendement de suppression, j'estime que l'article 16 est mal rédigé. Il faudrait en effet parler de l'incidence nette des mesures afférentes aux prélèvements obligatoires, parce qu'il peut y avoir des plus ou des moins : on peut créer un nouvel impôt et en réduire d'autres. Aussi, monsieur le rapporteur général, monsieur le ministre, pourriez-vous confirmer qu'il s'agit bien du montant net ?
Cette année, par exemple, il y a une baisse d'impôts de 14 milliards d'euros, mais 8 milliards d'euros de hausse des prélèvements obligatoires. L'incidence nette est d'environ 6 milliards d'euros.
Cet article ne sert donc à rien, si l'on ne précise pas « incidence nette ». Pouvez-vous confirmer cette interprétation ?
L'amendement no 44 n'est pas adopté.
L'article 16 est adopté.
Cet amendement satisfait à l'engagement que j'avais pris en commission de modifier la trajectoire, notamment pour prendre en compte la ligne du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi – CICE.
Favorable. Je m'étais étonné en commission que cet article n'ait pas prévu de baisse des dépenses fiscales à partir de 2020, compte tenu de la suppression du CICE.
Cet amendement répond donc parfaitement à la demande de la commission des finances.
Cet amendement de bon sens emportera vraisemblablement l'adhésion de notre assemblée. Dans un moment où, nous l'avons compris, le Gouvernement veut faire des économies, nous proposons que les dépenses fiscales soient justifiées chaque année, non tous les quatre ans, comme c'est déjà le cas pour les dépenses budgétaires. Ce qui est appelé « dépense fiscale » n'est rien d'autre qu'une niche fiscale, une réduction d'impôts. Il est nécessaire et justifié que des comptes soient rendus chaque années sur ces dispositifs, pour que la représentation nationale puisse débattre et juger chaque année de la pertinence et de l'efficacité de ces niches.
Nous savons d'ores et déjà que certaines de ces dépenses fiscales, comme vous les appelez, sont inefficaces et coûtent très cher au budget de l'État. Ne devoir en justifier qu'une fois tous les quatre ans permet de laisser vider nos caisses et, parfois, de remplir les poches des plus riches de notre pays.
Animés par un souci d'économie, que nous pensons être aussi la volonté du Gouvernement, nous estimons qu'il serait pertinent et utile d'évaluer les dépenses fiscales année après année.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l'amendement no 31 .
Cet article a pour objet d'évaluer ces dispositifs tous les quatre ans. Or la définition des niches fiscales vaut pour trois ans. Nous aurions donc souhaité une harmonisation entre le texte que propose aujourd'hui le Gouvernement et les textes existants.
Cet amendement vise donc à faire passer de quatre à trois ans la durée maximale des créations ou extensions de dépenses fiscales.
Il ne s'agit pas de justifier les dépenses chaque année : celles-ci sont évaluées dans la seconde partie du projet de loi de finances, tous les ans. Le choix d'une durée maximale de quatre ans vise à trouver un équilibre entre l'objectif de stabilité fiscale et la réévaluation régulière des dépenses fiscales.
Mme Panot propose un an ; Mme Rabault, trois. La commission, estimant que l'équilibre trouvé était bon, est défavorable à ces amendements.
Avis défavorable.
Je trouve un peu étrange l'article 17, ainsi que les amendements du Gouvernement et de mes collègues à cet article.
En effet, les dépenses fiscales représentent 100 milliards d'euros en 2018 et les recettes fiscales du budget général, nettes des remboursements et dégrèvements, moins de 300 milliards. Au passage, monsieur le ministre, il est écrit dans votre amendement « nettes des remboursements et dégrèvements, et des dépenses fiscales », ce qui me paraît incompréhensible : on ne peut pas mettre la même chose au numérateur et au dénominateur ! Nous parlons ici du budget général : vous excluez tous les budgets annexes et les comptes spéciaux du Trésor. Je ne vois donc vraiment pas comment vous pouvez respecter le seuil de 28 % : 100 divisés par 300, cela fait déjà environ 33 %. Vous devez être ric-rac – et, à mon avis, plutôt ric que rac !
Ensuite, entre nous, vous vous donnez du mou, puisque vous ne réduisez le taux que d'un point alors que 2019 sera l'année de la grande opération CICE, qui représente 22 milliards, ce qui signifie que le montant des dépenses fiscales va dégringoler de 100 à 78 milliards. On aboutit à 78 divisés par environ 300 – puisque le montant des recettes brutes, lui, ne va guère varier. Je ne comprends donc pas du tout : c'est à cette date que vous auriez dû « décrocher ». Mais vous vous laissez beaucoup de mou, alors que je croyais la mesure destinée à empêcher que l'on continue à laisser flamber les dépenses fiscales comme on n'a cessé de le faire depuis vingt ans…
Monsieur le rapporteur général, vous m'avez répondu qu'il y avait une évaluation chaque année ; c'est vrai, mais il n'y a pas un vote chaque année.
Nous votons bien sur les autres dépenses. Pourquoi donc notre amendement, qui propose que nous votions chaque année sur les dépenses fiscales pour que la représentation nationale puisse juger de leur efficacité, ne serait-il pas adopté ?
Un peu comme mon collègue de Courson, je trouve, monsieur le ministre, que votre amendement est trop dur dans ce qu'il a de mou et trop mou dans ce qu'il a de dur.
Sourires.
En tout cas, le calcul pose un vrai problème.
Par ailleurs, j'ai été un peu étonné de votre argumentation, monsieur le rapporteur général. Car les deux amendements en discussion procèdent de deux logiques totalement différentes : l'un porte sur l'annualité budgétaire, l'autre sur la pluriannualité, et les critères ne sont pas les mêmes.
Il me semble que l'on devrait plutôt se demander, d'une part, au bout de combien d'années on dispose d'un recul suffisant pour évaluer un dispositif de dépense fiscale en connaissant son plein effet – sachant qu'il peut exister des effets d'aubaine ou une distorsion – et, d'autre part, quelle visibilité donner à des opérateurs qui se plaignent souvent de l'insécurité fiscale qui règne dans notre pays. À l'intersection de ces deux besoins de recul et de visibilité, et compte tenu de la durée de notre mandat, le délai de trois ans proposé par Mme Rabault me semblait pertinent.
Or vous l'avez écarté d'un revers de main, alors que le sujet mérite d'être débattu. Nous ne discutons jamais au moment de la loi de finances de la stabilité fiscale, de l'insécurité fiscale et des attentes des acteurs économiques, qui voudraient que le Parlement cesse de modifier la loi tous les ans.
Madame Panot, j'ai bien indiqué en vous répondant la nuance qui distingue évaluation et vote.
S'agissant des chiffres, monsieur de Courson, l'ensemble des calculs figurent à la page 114 du rapport. Le Gouvernement ne nous les ayant pas fournis, ils ont été directement effectués par les services de l'Assemblée.
Monsieur Aubert, les quatre ans sont une durée maximale, justifiée par la prorogation pour quatre ans du dispositif Pinel.
J'aimerais apporter quelques précisions à M. de Courson. Je pourrai lui envoyer les calculs s'il le souhaite.
Le montant des dépenses fiscales est d'environ 100 milliards d'euros en 2018 – 99,811 milliards exactement. Le montant des recettes fiscales, toujours en 2018, est de 276 milliards. Le pourcentage de dépenses fiscales s'élève à 26,5 %. Comment est-il calculé ? En divisant 100 – ou 99 – par 276 plus 100.
C'est cela.
Je vous propose, monsieur de Courson, de vous envoyer le détail de ces calculs, qui remonte jusqu'à 2002.
L'article 17, amendé, est adopté.
Dans la continuité de notre précédent amendement, nous proposons que les exonérations de cotisations sociales soient justifiées chaque année plutôt que tous les trois ans.
Il nous semble en effet nécessaire que des comptes soient rendus annuellement sur ces exonérations, pour que la représentation nationale puisse débattre et juger chaque année de la pertinence et de l'efficacité de niches qui peuvent mettre dangereusement en cause notre système de Sécurité sociale. Nous l'avons vu avec le CICE, que le Gouvernement va transformer en exonération de cotisations sociales alors même qu'il ne crée pas autant d'emplois que prévu, comme on peut le lire dans le rapport de France Stratégie, organisme que le Premier ministre vient de mettre sous tutelle. Le dispositif a été reconduit sans faire l'objet d'un vote annuel. Cet exemple devrait suffire à emporter l'adhésion à notre amendement.
Dans une période où le Gouvernement, comme ceux qui l'ont précédé, nous dit qu'il faut à tout prix réduire les dépenses, il serait normal que nous nous donnions les moyens de contrôler l'efficacité d'exonérations qui coûtent cher aux Français et aux Françaises, d'évaluer leur pertinence et de les supprimer lorsqu'elles ne produisent pas les effets positifs attendus.
Nous n'avons pas été convaincus par l'argumentation du rapporteur général à propos de notre précédent amendement. Nous souhaitons pouvoir voter chaque année sur ces dépenses, comme sur les autres.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Je sens que je ne vais pas davantage convaincre que précédemment…
Je vous signale simplement que vous trouverez toutes les évaluations annuelles dans l'annexe 5 du PLFSS.
L'amendement no 46 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 18 est adopté.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 67 .
Cet amendement de pure légistique tend à replacer l'article 18 bis au sein du titre II consacré aux dispositions normatives, puisque c'est de telles dispositions qu'il s'agit dans cet article.
N'est-il pas un peu bizarre de parler de « rapport sur la conformité des projets de loi de programmation à la loi de programmation des finances publiques » ? Je sais bien qu'il est minuit passé, mais cela n'empêche pas de garder l'esprit clair…
Nous avons voté l'article 18 bis en commission. L'amendement tend simplement à le replacer au sein du titre correspondant à sa nature normative. Je le répète, il ne s'agit que de légistique.
L'amendement no 67 est adopté.
L'article 18 bis est adopté.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 68 .
Il s'agit d'un amendement de conséquence qui découle de l'amendement no 67 .
L'amendement no 68 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Les articles 19, 20, 21 et 22 sont successivement adoptés.
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l'amendement no 32 .
Nous avons longuement débattu du déficit de l'État. Or, comme nous l'avons précisé à plusieurs reprises, l'État, au fond, paie pour les administrations de Sécurité sociale, puisqu'il compense chaque année pour elles quelque 37 milliards d'euros de recettes. En effet, toutes les exonérations qui affectent le budget de la Sécurité sociale sont au moins en partie compensées par l'État.
Aux termes de cet amendement, la présentation de ces compensations devrait préciser si elles sont totales ou partielles.
Cet amendement est si bon que nous l'avons voté en commission et qu'il est déjà intégré au texte !
Sourires.
Comme il ne me semble pas utile de l'y faire figurer deux fois, je suggère son retrait.
L'amendement no 32 est retiré.
L'article 23 est adopté.
Sur l'article 24, plusieurs orateurs sont inscrits
La parole est à Mme Christine Pires Beaune.
Dans son dernier rapport sur les collectivités locales, la Cour des comptes écrit que « la contribution au redressement des comptes publics demandée aux collectivités depuis 2014 a fait la démonstration de son efficacité et doit être poursuivie ».
Je vous remercie, monsieur le ministre, de ne pas suivre la Cour des comptes en mettant fin à cette contribution et en privilégiant la contractualisation. Mais qui dit contractualisation dit confiance ; or, avec cet article, vous mettez à mal la confiance que les élus locaux accordent encore au Gouvernement.
En 2016, les collectivités locales ont été responsables. Leurs dépenses ont reculé de 1,1 % et leurs recettes ont progressé de 0,2 %. Au vu de ces chiffres, il n'est pas besoin d'instaurer une nouvelle règle, un nouveau carcan, au moment où les élus locaux vous demandent moins de règles. Un autre chiffre mérite également votre attention : celui de l'encours de dette, toutes collectivités confondues, qui est inférieur à six ans. En matière de dettes, je rappelle également que les collectivités locales doivent obéir à la règle du remboursement du capital par des ressources propres. Pour toutes ces raisons, le groupe Nouvelle Gauche demande la suppression de cet article, lequel instaure une nouvelle règle prudentielle susceptible de voir un préfet régler un budget local, ce dont nous ne voulons pas, évidemment.
« Non ! » sur plusieurs bancs des groupes REM et MODEM
et maintenant on limite aussi leur capacité d'endettement. Ça fait un peu beaucoup ! Beaucoup de collectivités territoriales n'arrivent pas à obtenir des prêts des banques. Un collègue expliquait en commission qu'elles s'y prenaient mal et que les banques privées étaient le garant et, d'une certaine manière, l'arbitre de la qualité du projet de telle ou telle collectivité. Mais ce 0n'est pas le problème ! On sait que les banques prêtent selon leurs propres intérêts, et non selon l'intérêt général. Aussi ferions-nous mieux de réfléchir à un pôle bancaire public plus important, qui serait à même de prêter aux collectivités territoriales. Pour toutes ces raisons, nous sommes favorables à la suppression de l'article 24.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Nous avons bien compris que vous ne baissiez pas les dotations aux collectivités.
« Ah ! »sur les bancs des groupes REM et MODEM.
Expliquez-le à votre voisin !
Vous les empêchez de dépenser en fonction de leurs besoins, en contraignant leurs dépenses.
On avance !
Cela revient donc au même ! Il est bien inscrit dans le projet de loi de finances que les collectivités devraient faire un effort de 13 milliards d'euros. Il y aura donc, quand même, 13 milliards d'euros en moins pour les collectivités, afin qu'elles puissent répondre à leurs dépenses.
« Non ! »sur les bancs des groupes REM et MODEM.
En plus de cela, quand bien même vous nous expliquez que cette mesure d'austérité ne s'appliquerait qu'à 319 collectivités, vous imposez à toutes les autres une mesure contraignant leur capacité d'endettement, alors qu'elles doivent déjà emprunter auprès des marchés financiers, depuis qu'il n'y a plus de banques publiques. Elles paient donc des intérêts – car, même quand les taux sont bas, elles doivent les régler – qui représentent, même pour des communes, des sommes importantes.
Nous défendrons un amendement visant à créer une banque publique au service des collectivités afin que l'on puisse leur prêter à taux zéro pour servir l'investissement. Ce serait une belle source de ressources nouvelles pour elles. Nous vous demandons de faciliter la vie des communes et de ne pas ajouter de règles.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI.
Dans ce projet de loi, vous demandez des efforts très importants aux collectivités, comme nous l'avons vu dans l'article 3, bien plus importants que les objectifs que l'État se donne. On leur impose une évolution des dépenses de 1,2 % chaque année pendant cinq ans ; 319 collectivités devront contractualiser avec l'État ; et voilà une nouvelle règle sur l'endettement ! Vous avez parlé de confiance avec les collectivités, monsieur le ministre, et c'est important, si vous voulez contractualiser avec elles.
Par ailleurs, il existe une règle d'or qui s'applique aux collectivités. Imposer aujourd'hui de nouvelles contraintes en termes d'endettement, c'est quasiment de la défiance. Il faut faire preuve de discernement. En commission des finances, l'une de nos collègues avait raconté que sa collectivité avait subi des inondations importantes, qu'elle avait dû faire reconstruire une école très rapidement et, pour des besoins exceptionnels qui n'étaient pas prévus, s'endetter fortement. En imposant des règles d'une telle nature, vous ne prenez pas en compte les situations exceptionnelles susceptibles de se produire et vous ne laissez pas aux collectivités la possibilité d'y répondre.
Tout à l'heure, monsieur le ministre, quand vous avez évoqué les contrats que vous vouliez passer avec les collectivités, je me suis demandé si vous alliez faire changer ou non le périmètre des normes et des contraintes imposées aux collectivités. Y aura-t-il une stabilité sur l'étendue des cinq ans ? Vous ne pouvez pas dire aux collectivités qu'elles doivent arrêter de dépenser plus et baisser leurs dépenses de fonctionnement, sans garantir de stabilité. D'ailleurs, la CSG, qui sera compensée à perte par les collectivités, rentre dans le périmètre.
Par ailleurs, le texte est extrêmement précis sur le nombre d'années d'endettement. J'ai vu que la ville de Lyon bénéficiait d'un traitement particulier.
Oui ! Cherchez l'erreur ! Cherchez l'intrus ! Comment se fait-il que vous ayez prédéfini le nombre d'années pour chacune des collectivités ? La confiance, ce n'est pas cela, ça ne se décrète pas, ça se crée, à moins que vous n'ayez choisi cette solution, parce que vous n'imaginez pas une seule seconde parvenir à vos fins par la voie de la contractualisation.
Enfin, il est très habile de diminuer des dépenses de fonctionnement et de limiter le nombre d'années d'endettement. Lorsque l'on emprunte, il y a les intérêts et le capital : les intérêts, ce sont les dépenses de fonctionnement. Bravo ! Mais nous avons vu votre manoeuvres…
Madame Pires Beaune, j'ai un autre avis de la Cour des comptes, qui précise que les dépenses des collectivités locales devraient être mieux encadrées et que la règle d'or actuelle est très utile, mais insuffisante. Le dispositif proposé par le Gouvernement me paraît assez souple. Il s'agit d'une règle prudentielle, dans une logique d'alerte plutôt constructive, puisqu'elle permet d'établir une discussion et de responsabiliser les collectivités locales. Elle n'est pas extrêmement contraignante, puisqu'elle suppose un plan pluriannuel qui définisse les perspectives pour retrouver les seuils précisés dans l'article. La loi du 7 août 2015 préparait déjà à ce type de responsabilisation.
Dans l'article, les seuils sont adaptés aux différents types de collectivités locales. Soit, ce n'est pas très agréable d'avoir ce type de contrôle, mais, quand une collectivité locale est endettée depuis plus de treize ans, il n'est pas mauvais de se demander pourquoi elle en est arrivée là.
Enfin, le niveau d'endettement actuel des collectivités locales est à peu près égal à la moitié des seuils proposés, soit entre cinq et six ans. Quand on regarde concrètement quelles collectivités territoriales dépasseraient le seuil ou seraient dans cette phase d'examen collectif, une région et trois départements seraient concernés. C'est assez limité.
Ci-gît la libre administration des collectivités territoriales ! Je suis un peu étonné par la rédaction de cet article. Il est déjà assez drôle de voir que l'État donne des leçons qu'il ne s'applique pas à lui-même. Il serait intéressant d'instaurer le même ratio d'endettement avec la même procédure. Cela nous donnerait l'occasion d'avoir de véritables débats.
Dans le cas du contrôle du plafond national de référence, on comprend bien que les métropoles de Paris et Marseille, qui sont des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, aient entre onze et treize années, mais la métropole de Lyon aura entre neuf et onze années. Si les citoyens comprennent…
… pourquoi des collectivités territoriales qui ont le même nom de « métropole » ne suivent pas les mêmes règles… On fait tout pour compliquer les choses !
Par ailleurs, ce qui me gêne, c'est que les collectivités territoriales ont de moins en moins la main sur leur situation budgétaire. Elles sont irresponsables, puisque l'État les tient en laisse sur les ressources et les culpabilise sur la sortie avec le ratio d'endettement. On sait très bien que certains départements sont pris à la gorge à cause de décisions anciennes. Ce type de procédure est-il vraiment utile, dans un contexte où l'on ne pourra constater que le dynamisme de certaines ressources et les incohérences de la politique budgétaire de l'État, qui aura conduit certaines collectivités à revoir leur taux d'endettement ? La principale dépense, celle relative aux personnels, est totalement rigide.
Mais si ! On sait très bien que l'on est contraint à un moment donné.
Le sujet sur lequel nous devons ouvrir le débat, monsieur le ministre, c'est le statut de la fonction publique territoriale. Nous pourrons ensuite commencer à essayer de responsabiliser les collectivités.
Notre collègue a déjà répondu en partie à la question, mais pas totalement : que va-t-il se passer pour les collectivités locales qui seraient au-delà des seuils définis dans cet article ? Vous citez une région et trois départements, mais j'imagine qu'il y a aussi des communes et des communautés de communes. Combien y en a-t-il sur les 36 000 ?
Je vous propose de rapprocher ces 138 communes du classement des communes bénéficiant de la dotation de solidarité urbaine – DSU. Bien entendu, les communes qui seront le plus touchées, celles qui sont les plus endettées, ce sont les communes pauvres qui n'ont pas beaucoup de ressources. Parlons avec des simulations ! Donnez-nous les noms des communes ; regardons les taux de redressement ; ensuite nous discuterons concrètement de communes concernées.
Levallois ! Antibes !
Communiquez-nous la liste des villes concernées. Un article de loi va fortement contraindre les collectivités locales : nous avons le droit de savoir quelles seront les premières concernées. Il n'est pas insupportable que le Parlement soit informé.
Je suis tout à fait d'accord !
C'est la moindre des choses. Vous verrez, lorsque nous examinerons les amendements à l'article 24, que la plupart des communes les plus pauvres sont les plus endettées parce qu'elles se sont impliquées dans des programmes de rénovation urbaine à la demande de l'État. Le ministre de la ville et le Président de la République disent qu'ils vont donner 10 milliards d'euros pour inciter ces communes à aller encore plus loin. Il est alors paradoxal que nous soyons encouragés à stimuler la rénovation urbaine, à rénover des écoles, à emprunter.
Quand une commune qui relève de la politique de la ville emprunte, elle est contrôlée par la Caisse des dépôts, le trésorier-payeur général, le ministère des finances ou la chambre régionale des comptes, lesquels n'autorisent le financement de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine – ANRU – que s'ils considèrent que, malgré le taux d'endettement, l'emprunt est possible. Ces communes font toutes parties d'un réseau d'alerte. Comme elles sont pauvres, leurs représentants sont convoqués tous les ans par le préfet qui leur explique quelles sont leurs possibilités pour sortir de ce réseau ou pour s'y maintenir.
Pour ces communes, les contrôles existent déjà, et vous en ajoutez. À un moment, les financements ne seront plus là. Si vous ne voulez pas que la rénovation urbaine continue, restez dans le déni et considérez que ceux qui viennent de l'ancien monde ne savent rien. Mais peut-être nous arrive-t-il de ne pas dire que des bêtises…
Mes chers collègues, quelle est la situation du droit existant ? C'est très simple, c'est ce qu'on appelle la règle d'or, laquelle figure dans le code général des collectivités territoriales. Selon cette règle, la couverture des annuités d'emprunt doit être assurée par des ressources propres, c'est-à-dire par les ressources issues de la section de fonctionnement majorées d'éventuelles recettes propres de la section d'investissement.
Quel est l'inconvénient de ce critère, qui déclenche la procédure de déficit excessif et la saisine de la chambre régionale des comptes ? Pour le contourner, il suffit de faire des emprunts perpétuels, des emprunts à cinquante ans ou des emprunts dont le remboursement est différé, afin de continuer à s'endetter, tout en respectant la règle d'or fixée dans le code général des collectivités territoriales.
J'avais déposé des amendements, il y a bien longtemps, pour essayer de définir une norme, c'est-à-dire l'équivalent d'une annuité dite normale.
L'article du Gouvernement est astucieux puisqu'il propose d'abandonner cette définition du déficit pour prendre l'endettement total – budget principal et l'ensemble des budgets annexes – , comparer cet encours à l'excédent de fonctionnement, en recettes réelles, et à faire la division. La loi fixe alors des valeurs minimales et maximales du ratio, mais c'est un décret qui fixera la durée précise. Il est un peu bizarre de donner au Gouvernement le pouvoir de la fixer par décret, alors que les fourchettes sont très serrées : onze à treize années pour les communes de plus de 10 000 habitants… Tout le monde se demande combien de communes cela concerne ; mais leur nombre dépendra du décret. Nous avons donc besoin des lumières de M. le ministre. Si l'on prend les taux minimaux, à peu près un tiers des communes seront concernées.
Quand on parle des collectivités locales, cela renvoie à des choses très concrètes. Je voudrais mettre le doigt sur quelque chose que je ne comprends pas. J'ai entendu de la part du Gouvernement trois injonctions qui m'apparaissent contradictoires : on nous dit qu'il faut un choc de l'offre en matière de logements, mais en même temps nous étudions un projet de loi de finances qui envisage de supprimer la petite aide qui existait jusqu'à présent pour les maires bâtisseurs. Moi qui suis un élu local d'une ville qui a gagné 25 000 habitants en douze ans, qui construit un groupe scolaire par an pour faire face à la croissance démographique – donc plutôt un bon élève en matière de choc de l'offre – , comment puis-je faire face à ce défi, d'autant que – troisième injonction – on cherche maintenant à limiter et à encadrer l'endettement des collectivités ? C'est punir les villes vertueuses.
L'article 10 et l'article 24 sont liés. Nous en avons débattu il y a deux ou trois heures, mais il faut retenir que la contractualisation est liée à la règle prudentielle ; cela apparaît logique. Il faut toutefois se demander si l'on souhaite aller vers une façon plus souple et intelligente de concevoir la règle prudentielle, ou bien revenir au système en vigueur il y a quelques années, à savoir la contribution au redressement des financements publics. Voilà la question : en reste-t-on à l'ancien système ou bien part-on sur le nouveau ? Liée à la contractualisation, la règle prudentielle permet d'avoir un endettement mesuré. Or tous les élus savent comme moi que, si votre endettement est mesuré, vous pouvez bâtir des budgets efficaces qui rendent le réinvestissement et l'intervention plus faciles. Voilà la logique de ce projet de loi, qui fait la jonction entre les articles.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe REM.
La difficulté à emprunter que rencontreraient certaines collectivités, c'est un peu du passé. Aujourd'hui, nous sommes revenus à un rythme normal, avec davantage de facilités d'emprunt.
Mais je veux également insister sur un point de méthode. C'est la première fois que le Gouvernement nous propose une telle innovation – contractualiser avec les 319 collectivités – , et cela paraît incroyable à certains, car, jusqu'à présent, ils considéraient que sa politique consistait plutôt à imposer des mesures drastiques sans discuter. Aujourd'hui, on vous propose quelque chose d'innovant, et vous avez du mal à le comprendre !
C'est pourtant la bonne méthode et je pense, messieurs, qu'il va falloir vous y habituer car c'est la méthode du Gouvernement : contractualiser et non imposer.
La réalité, mes chers collègues, c'est que nous ne parlons pas uniquement de la contractualisation. Selon vous, l'article 10 définirait les règles de celle-ci, et l'article 24 les formaliserait. Non, l'article 24 fait un rappel du droit. Voici les règles qui s'imposent aux collectivités territoriales dans le cadre de l'élaboration d'un budget. Premièrement, les deux sections – fonctionnement et investissement – doivent être votées en équilibre. Deuxièmement, l'emprunt ne peut financer que des dépenses d'investissement – une règle de droit commun. Troisièmement, la couverture des annuités d'emprunt doit être assurée par des ressources propres. C'est aussi précis que cela.
Plutôt que d'y substituer votre nouvelle règle, vous êtes en train de conserver ce socle existant auquel vous ajoutez une deuxième couche. Le plafond de ratio d'endettement constitue un très mauvais signe, car, alors que vous parlez de contractualisation – qui consiste, comme l'a rappelé Véronique Louwagie, à négocier un contrat entre deux parties – , vous dites qu'on va certes vous donner quelque chose, mais en contrepartie vous contraindre. Ce n'est pas un bon élément dans la négociation.
Et puis il y a une phrase dans votre rapport, monsieur le rapporteur général : « le Gouvernement fait le constat d'une absence de corrélation entre l'évolution du taux d'endettement et les dépenses d'investissement des collectivités territoriales ». Où êtes-vous allé chercher une idée pareille ? Il y a forcément une relation entre le niveau d'endettement des collectivités et leur investissement ; c'est inévitable car les collectivités ne peuvent pas financer des dépenses de fonctionnement avec de l'emprunt. Je ne comprends pas cette phrase.
Le dispositif proposé n'a rien d'une innovation, cela fait des années qu'on parle d'une référence pour les collectivités territoriales. Celles-ci sont nombreuses et leurs situations, différentes ; mais pourquoi ne fait-on pas confiance aux élus ?
Il y a la chambre des comptes et nombre d'autres organismes qui vous contrôlent en permanence dès que vous êtes en contact avec l'État. Certes, certaines collectivités ont exagéré ; on est venu à leur secours, probablement de façon anormale, comme on l'a évoqué ici. Mais je ne crois pas que ce soit le cas de la majorité d'entre elles. On a commencé cette législature avec une loi portant sur la moralisation de la vie politique : il fallait moraliser les élus, comme si ceux-ci étaient des êtres immoraux. Maintenant, il faut moraliser les collectivités locales parce qu'elles feraient n'importe quoi
Protestations sur les bancs du groupe REM
et il leur faudrait des plans de référence. C'est une monstruosité administrative et rien d'autre !
Je ne crois pas qu'il faille caporaliser la gestion des collectivités comme vous le faites. Ou alors laissez carrément le soin de gérer vos communes à des délégations de la préfecture et de la chambre des comptes. Pour ma part, je crois à la liberté des élus. Il y a des règles, il y a des sanctions ; tout cela est réel. Mais faites confiance aux acteurs de ce pays !
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Merci, monsieur le président. Beaucoup de choses ont été dites, mais j'essaierai d'éclairer le plus de lanternes possible. D'abord, je suis étonné que certains, après avoir défendu la vertu budgétaire, défendent le surendettement !
Que demande-t-on ? Simplement que ceux qui ont une capacité de désendettement anormale puissent en retrouver une qui soit normale. Vous avez raison, une grande partie de ces règles existe déjà : c'est tellement vrai que, lorsque vous êtes maire et que l'endettement de votre commune est trop important, le préfet vous écrit pour vous dire que vous êtes dans le réseau d'alerte des villes de la préfecture.
Les ratios n'ont pas non plus été inventés dans une cave ou un sous-sol de Bercy ; ils existent déjà. Douze ans, c'est la capacité de désendettement que l'on demande actuellement à une commune ; au-dessus de douze ans, le préfet vous écrit. Si votre commune a peu d'importance politique dans le territoire, le préfet, sans doute après un rapport de la chambre régionale des comptes, met courageusement les élus sous tutelle et prend un certain nombre de dispositions. Si la commune a un poids politique, le préfet envoie des lettres qui ne sont pas publiques. Quand je suis arrivé aux responsabilités dans ma commune, qui en était à trente-six ans d'endettement, j'en ai trouvé huit.
Les citoyens et les élus municipaux de l'opposition, dont j'étais, ne savaient pas que la préfecture souhaitait simplement nous rappeler à la règle d'or dont la Cour des comptes a eu raison de dire qu'elle était intéressante, mais inutile pour la capacité de désendettement. Ce n'est donc pas parce que 85 % des collectivités ne sont pas dans un endettement de ce type qu'il ne faut pas s'intéresser aux 15 % qui ont le malheur de le connaître.
Ensuite, vous dites que l'État ne fait pas son travail ; Mme Dalloz nous fait de grandes leçons de morale, nous reprochant de ne pas réaliser suffisamment d'économies, mais les amendements au PLF qu'elle a déposés proposent des dépenses fiscales pour plus de 3 milliards d'euros ! Et elle nous fait aujourd'hui la leçon sans aucune demande de baisse de dépenses.
On arrive, dans les articles qui concernent les collectivités locales, à dire qu'il faut que l'État fasse des économies…
… mais rien que pour vous, madame Dalloz, on ajoute 3 milliards de dépenses fiscales !
Il y a là un petit problème de cohérence, mais je suis sûr que nous aurons l'occasion d'en reparler.
Je préfère rester fidèle à mes convictions dehors qu'être infidèle dedans, mais nous aurons cette discussion plus tard !
Je voudrais dire à M. Pupponi que cette liste existe, et, si vous me la demandez par écrit, je peux vous l'envoyer. Elle recoupe en partie, mais en partie seulement, les collectivités en politique de la ville. D'ailleurs Roubaix, la ville la plus pauvre de France, n'y figure pas ; mais on y trouve Fréjus, Saint-Raphaël, Lourdes, Saint-Maur, Antibes, Levallois-Perret, Sceaux, Fontainebleau, Provins, Rueil-Malmaison.
Oui, mais combien y en a-t-il en politique de la ville ? C'est important !
En l'occurrence, monsieur Pupponi, il y a peut-être des facteurs explicatifs, mais certaines villes en politique de la ville, telles que Roubaix, la ville la plus pauvre de France, ne sont pas dans cette situation. C'est aussi une question de gestion des collectivités locales. Et même si, de temps en temps, il y a des pics d'endettement à l'occasion de projets, les élus s'expliquent ; c'est justement la règle que nous vous proposons.
Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de lire l'article jusqu'au bout : il précise qu'il existe déjà une volonté d'autofinancement collectivité par collectivité ; quant au nombre d'années, les chambres régionales des comptes et les préfets utilisent déjà ce critère dans leurs rapports avec les collectivités locales. Nous n'avons rien inventé.
Et s'il y a une exception pour la métropole de Lyon, c'est que c'est la seule métropole qui soit en même temps conseil départemental.
C'est donc une entité sui generis : elle n'a pas les mêmes dépenses sociales puisqu'on a fusionné une grande partie du département du Rhône avec la collectivité de Lyon.
Ainsi, les collectivités locales de plus de 10 000 habitants pour les communes et de plus de 50 000 habitants pour les agglomérations – la ruralité est exclue de cette règle prudentielle – doivent, si elles dépassent les capacités existantes d'endettement, parler à leur assemblée délibérante.
En effet, il est bon que les élus de l'opposition, la presse locale et les habitants soient informés des capacités d'endettement d'une commune, d'une région ou d'un département. Les collectivités concernées doivent adopter un rapport dans lequel elles expliquent comment elles comptent retrouver une capacité d'endettement normale sur plusieurs années. Nous n'avons même pas indiqué le nombre d'années nécessaire : cinq, six, sept, huit ? Ce rapport est délibéré, et le préfet et la chambre régionale des comptes constatent la trajectoire évoquée par la délibération de la collectivité.
Si cette trajectoire n'est pas réaliste, ou si, ou bout de cinq ou six ans, ses objectifs ne sont pas atteints, …
Non, il n'y aura pas de convocation : vous avez mal lu cet article, monsieur Vigier, et cela m'étonne beaucoup de vous !
Je reprends : si les objectifs ne sont pas atteints, la chambre régionale des comptes soumet ses observations à l'assemblée délibérante pour qu'elle en débatte – comme c'est le cas pour toutes les observations de la chambre régionale des comptes. Il y a alors une nouvelle délibération – cinq, six ou sept ans après la première – de l'assemblée délibérante, afin d'expliquer pourquoi les objectifs n'ont pas été atteints. Dans le cas d'une commune, cette nouvelle délibération serait nécessairement séparée de la première par des élections.
Si, au terme de ce deuxième processus, la chambre régionale des comptes constate qu'effectivement la collectivité en cause n'a pas une capacité d'endettement suffisante, c'est-à-dire qu'elle est en surendettement, alors – mais c'est une procédure qui existe déjà à l'heure actuelle dans le code général des collectivités territoriales – cette collectivité peut être mise sous tutelle du représentant de l'État.
Je voudrais vous donner quelques chiffres. Entre 2012 et 2016, l'endettement des collectivités locales a augmenté de 12 %. Cette augmentation est le fait de 15 % d'entre elles, dont l'endettement a cru très fortement ; or, dans le même temps, l'investissement des collectivités locales a baissé de 14 % – ce qui montre combien l'investissement est décorrélé de l'endettement.
Ce sont des agrégats nationaux, cela ne signifie pas grand-chose. Il faut examiner la situation collectivité par collectivité.
Quant aux régions – dont nous avons parlé tout à l'heure – , leur endettement a augmenté de 35 % en cinq ans. Cela prouve que, contrairement à ce qui est dit, la baisse des dotations de l'État a poussé à un endettement qui pèse par ailleurs sur les charges de fonctionnement.
Nous sommes bien d'accord. Les baisses de dépenses que nous demandons n'ont rien à voir avec ce que vous avez fait pendant cinq ans ! Il est bien dommage que le gouvernement précédent n'ait pas mis en pratique vos bonnes idées, cela nous aurait épargné bien des débats !
Ce que nous disons, monsieur Pupponi, c'est qu'il y a un effort à faire pour les collectivités qui se trouvent, malheureusement, en situation de surendettement. Il faut que l'assemblée délibérante soit consciente de la trajectoire qu'il faut suivre pour se désendetter, et que la population elle-même soit avertie de la capacité d'endettement de sa collectivité. Peut-être alors celle-ci reviendra-t-elle d'elle-même à un niveau d'endettement supportable, sans aucun mécanisme contraignant, sans aucune tutelle. Je pense très sincèrement que l'autofinancement est la meilleure manière de gérer une collectivité locale.
Pour que les choses soit claires, je rappelle que la discussion sur l'article est suivie, le cas échéant, d'une réponse de M. le ministre, avant que l'on passe à l'examen des amendements. On ne peut pas donner deux fois la parole à la même personne pour s'exprimer sur l'article, puisque les interventions sur l'article sont limitées à deux minutes : si l'on pouvait redonner la parole aux orateurs qui se sont déjà exprimés, cette limite n'aurait plus aucun sens !
Mais enfin, monsieur le président, laissez-moi répondre à M. le ministre !
Il est une heure du matin, et nous avons encore du travail devant nous. Je suis soucieux de préserver votre week-end : aussi, je vous propose de poursuivre l'examen de ce texte, en espérant que la concision de vos interventions nous permettra d'avancer rapidement.
À vous entendre, monsieur le ministre, je me demande si le Gouvernement n'a pas une idée derrière la tête. Toutes vos propositions nous poussent à nous interroger sur trois hypothèses.
Premièrement, n'auriez-vous pas l'intention de tuer l'investissement local ? En interdisant aux collectivités d'avoir recours à des financements par l'emprunt, en effet, vous y mettrez un sérieux coup d'arrêt.
Deuxièmement, ne chercheriez-vous pas à mettre complètement sous tutelle les collectivités territoriales ? Dans les faits vous les encadrez, vous les contrôlez, vous ne laissez plus aucune latitude aux élus.
Troisièmement, n'auriez-vous pas en tête l'idée de réformer les collectivités territoriales, de modifier des échelons ?
N'est-ce pas là ce qui se dissimule derrière chaque mesure du projet de loi de programmation des finances publiques ? Compte tenu des mesures que vous avez annoncées concernant les collectivités, de l'évolution de leurs dépenses, des efforts que vous leur demandez, de la contractualisation que vous entendez mettre en place, et des mécanismes de contrôle de l'endettement que vous nous proposez à présent, il y a de quoi se poser des questions.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LR et FI.
La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l'amendement no 33 .
Nous avons déjà fait des efforts, l'an dernier, en matière de transparence, en instituant des règles supplémentaires applicables aux communes de plus de 3 500 habitants. En conséquence, un décret a été pris en juin 2016, qui institue de nouvelles obligations, au niveau du débat d'orientation budgétaire, concernant la dette : sa structure, sa gestion, sa perspective dans les budgets futurs.
J'ajoute que, au terme de débats assez longs, nous avons décidé d'obliger les communes de plus de 10 000 habitants à transmettre leurs orientations budgétaires au président de l'EPCI dont elles font partie.
Instituer ce nouveau ratio serait donc aller trop loin. Je vous rappelle en outre qu'il y a déjà de nombreux ratios, dont le onzième mesure précisément le taux d'endettement. Je le répète, inscrire dans la loi la règle que vous proposez par cet article serait aller beaucoup trop loin ; cela briserait la confiance entre les communes et le Gouvernement, confiance dont vous avez pourtant besoin pour passer contrat avec elles.
Pour ne pas allonger les débats, et compte tenu du fait que M. le ministre a développé les arguments en faveur de cet article, je me bornerai à rappeler que la commission a donné un avis défavorable à ces deux amendements.
Défavorable.
Monsieur le ministre, certaines collectivités locales se sont comportées de façon vertueuse, tandis que d'autres ont dérapé : nul ne le conteste. Quoi qu'il en soit le dispositif que vous nous proposez ne tient pas, et il me suffira de souligner un point pour vous le prouver : il ne distingue pas le budget général et les budgets annexes.
Mes chers collègues, quand le responsable d'une intercommunalité s'attaque à des défis tels que le numérique et la fibre optique – comme je l'ai fait – , il doit emprunter des sommes considérables sur quarante ans. Même financés en partie par le troisième volet du programme des investissements d'avenir – ou PIA3 – , ces investissements restent à 40 % à la charge de la collectivité.
Mais tout cela peut très bien s'expliquer, se justifier !
Et alors ? Vous savez bien que le coût du service payé par l'usager ne permet pas d'absorber complètement les dépenses engagées : ce genre d'investissement grève donc nécessairement la dette des collectivités.
Deuxièmement, concernant l'eau et l'assainissement, les agences de l'eau nous demandent des investissements tels qu'ils doivent être adossés à des emprunts sur quarante ans. Cette dette sera prise en compte par votre ratio, alors que l'on sait très bien qu'elle sera payée par l'usager au cours du temps.
Troisièmement, en matière de rénovation urbaine – sujet que M. Pupponi connaît parfaitement – , nous avons engagé des opérations qui nous ont conduits à emprunter sur trente-cinq ans.
Pour conclure, monsieur le ministre, si votre ratio concerne uniquement le budget général, alors nous trouverons des solutions pour rester en deçà du plafond fixé à onze ou treize ans. Mais s'il s'applique au budget général ainsi qu'à tous les budgets annexes, alors on n'y arrivera pas !
J'ai une dernière question à vous poser, monsieur le ministre, à laquelle vous ne répondez pas depuis le début de la soirée : quelles évolutions le Gouvernement envisage-t-il quant au rôle des collectivités territoriales dans les cinq ans à venir ?
Dites-nous simplement les choses : votre objectif est-il de réduire drastiquement le nombre de collectivités ? Est-ce que vous allez vous appuyer sur les territoires, ou à l'inverse allez-vous continuer de les garrotter ?
L'un de nos collègues a parlé d'innovation. Mais la vraie innovation, chers collègues, ce serait de reprendre ce que nous avions fait en 2008, avec Charles de Courson…
Je termine, monsieur le président, mais c'est important ! Il s'agirait de fixer une règle d'or pour les dépenses de fonctionnement de l'État. J'aimerais vous entendre à ce sujet, monsieur le ministre. Cela, ce serait vraiment innovant !
Notre collègue Philippe Vigier a très bien montré que l'endettement, c'est l'investissement : certaines collectivités s'endettent pour de bonnes raisons, pour financer des projets importants pour elles. D'ailleurs le Président de la République a lui-même fixé des objectifs ambitieux en matière d'équipement pour le numérique, qui représentent une véritable invitation à investir dans ce domaine – il faut tenir compte de cela.
Deuxièmement, monsieur le ministre, vous avez utilisé un argument que je n'accepte pas : vous justifiez les nouvelles règles que vous voulez appliquer à toutes les collectivités par le fait que – selon vous – les préfets ont peur d'appliquer la loi aux grandes collectivités. Je ne crois pas que cet argument soit recevable. Si les préfets ont peur d'appliquer la loi aux grandes collectivités, ce ne sont pas les dispositions de cet article qui les feront changer de comportement ! Il faudrait que le ministre de l'intérieur, ancien maire de Lyon, fasse en sorte que les préfets appliquent les règles qui existent déjà, plutôt que d'ajouter encore de nouvelles règles. Ce serait déjà un bon début !
Je ne suis pas fermé à toute évolution, car les dispositions actuelles en la matière peuvent être très facilement contournées : il suffit pour cela de s'endetter sur cinquante ans.
Néanmoins votre texte souffre de plusieurs inconvénients. Premièrement, vous incluez les budgets annexes dans le calcul du ratio. C'est une erreur. Les grands budgets annexes concernent les ordures ménagères, l'eau et l'assainissement. Or – à quelques exceptions près – ces budgets doivent être équilibrés.
Absolument ! Il ne faut donc pas appliquer la même règle, le même plafond d'endettement exprimé en années, au budget général et aux budgets annexes. Je rappelle que ce plafond, pour les communes et les intercommunalités, sera compris entre onze ans et treize ans. Mais quand une collectivité décide de construire une station d'épuration, elle ne s'endette pas seulement pour onze ou douze ans, elle emprunte au moins à vingt ou vingt-cinq ans ! Même chose pour celles qui décident de construire une usine d'incinération. Il faut donc sortir les budgets annexes du champ de cette mesure, et leur appliquer des règles propres.
Deuxièmement, je ne comprends pas pourquoi vous n'appliquez pas le même ratio au bloc communal, aux départements et aux régions. La durée diminue quand on gravit les échelons, pour arriver à une fourchette comprise entre huit et dix ans pour ces dernières. J'ai du mal à saisir la raison qui justifie cela, puisque les régions ont notamment compétence en matière économique.
Or je ne vois pas comment une région pourrait intervenir, par exemple pour financer des bâtiments industriels, en s'endettant seulement à dix ans ! Je suis donc ouvert à l'évolution, mais le texte tel qu'il est…
Merci, monsieur de Courson.
La parole est à M. Jean-Paul Mattei.
Je prie les orateurs de s'en tenir à leur temps de parole de deux minutes.
Je tiendrai un discours quelque peu différent. Je trouve pour ma part que cet article a le mérite de la clarté. En tant que contribuable au budget de ma commune, j'aimerais bien savoir comment est encadré son budget. J'ai moi-même géré une commune pendant seize ans : mon souci était de bien équilibrer mon budget, pour dégager un excédent de fonctionnement qui me permette d'amortir mes dettes. Tous mes investissements, je les calculais de manière à me laisser assez de marge.
Je le répète : je trouve que cet article a le mérite de la clarté, et dessine bien la limite d'endettement qu'il ne faut pas dépasser.
Je n'ai pas très bien compris votre argument sur les budgets annexes, mais vous allez sans doute m'expliquer ce qui m'a échappé. Il me semble que l'eau et les autres compétences que vous avez évoquées sont financées par les redevances, non ?
Tout à fait, mais ça ne change rien au problème des investissements de long terme !
Tout à fait, mais ça ne change rien au problème des investissements de long terme !
Cet article a au moins le mérite de fixer des critères clairs. L'article L. 1612-14 du code général des collectivités territoriales est relativement flou ; il laisse une grande latitude aux collectivités dans leurs rapports avec la chambre régionale des comptes. C'est donc une bonne chose de préciser les critères. En outre ce mécanisme parlera à nos concitoyens, qui ont aussi besoin de savoir la vérité sur l'état financier de nos collectivités.
Je comprends tout à fait votre intention, monsieur le ministre, et j'ai presque envie de vous dire : banco. Mais, si vous voulez que la situation des collectivités territoriales s'améliore vraiment, c'est autre chose qu'il faut faire. Donnez-nous le montant des sommes dues par l'État au titre des compensations. Selon les chiffres qui nous ont été communiqués l'an dernier, l'État doit 4 milliards d'euros par an aux différentes collectivités, tandis que le montant effectif des compensations ne s'élevait en 2015 qu'à 1,2 milliard d'euros. Cette année, ce sera encore moins. Vous devez donc à peu près 3 milliards d'euros par an aux collectivités locales, que vous ne payez pas depuis des années !
Nous devrions ajouter à cet article, par amendement, des dispositions obligeant l'État à payer ses dettes aux collectivités locales. Une fois que ce sera fait, on pourra passer aux dettes des collectivités locales elles-mêmes !
Tout d'abord, monsieur Pupponi, j'ai déjà donné à Mme Rabault le rapport sur lequel je me suis engagé. Ce rapport est annexé au projet de loi de finances que nous avons transmis au Parlement : vous l'avez. Nous en discuterons donc au moment de l'examen du projet de loi de finances. J'ajoute que c'est la première fois qu'un ministre du budget ou des comptes publics fournit un tel rapport, puisqu'il répond à une demande que vous avez formulée au mois de juillet dernier.
J'en viens à M. Vigier et à M. de Courson. Je pense que les interrogations de M. Vigier sont bien intentionnées, mais je vais apporter des correctifs s'agissant des budgets annexes, et que M. de Courson a fait une mauvaise lecture de l'article.
Monsieur Vigier, vous connaissez comme moi des sociétés, des conseils, qui viennent expliquer aux élus locaux – notamment ceux qui sont pris par des dépenses compliquées à gérer – comment dissimuler leur dette dans des budgets annexes. On peut citer l'exemple d'une commune du Sud qui avait des budgets annexes concernant des ports, d'où provenaient parfois les emprunts toxiques, et qui y voyaient une façon de cacher là une partie de sa dette. C'est en effet du domaine du possible.
Je pense que la démonstration a été faite qu'à l'origine des gros investissements, il y a d'abord une redevance. Et puis, lors du débat d'orientation budgétaire, l'ordonnateur présentera un rapport spécial sur les perspectives financières pluriannuelles si le ratio d'endettement est supérieur au plafond national de référence, ledit rapport étant transmis à la Chambre régionale des comptes, au préfet, mais aussi aux membres de l'assemblée délibérative locale – je pense au conseil municipal – et, en définitive, à l'opinion publique, ce qui permettra parfois d'expliquer pourquoi la gestion de la dette est en l'espèce particulière. Si des écoles brûlent, tout le monde comprend pourquoi la collectivité s'endette davantage : il s'agit de financer leur reconstruction. Il n'y a dès lors aucune obligation de tenir le ratio d'endettement normalement prévu pour maintenir sa capacité de désendettement.
Mais vous, monsieur de Courson, vous faites à mon avis un grave contresens : nous ne disons pas qu'il faudra faire des emprunts ne dépassant pas douze ans. Où avez-vous vu qu'il serait interdit d'emprunter à plus de douze ans ? Il est seulement indiqué que la capacité de désendettement de votre commune, compte tenu de son autofinancement, devrait lui permettre de rembourser sa dette en douze ans. Cela n'a rien à voir avec le fait de pouvoir souscrire des emprunts sur trente ou quarante ans.
Exclamations sur de nombreux bancs des groupes LR et LC.
Il n'est pas question de répondre aux réponses aux réponses faites aux réponses.
Mêmes mouvements.
Cet amendement est à examiner par rapport à l'amendement no 16 de Jean-René Cazeneuve. Notre collègue souhaite que le calcul du ratio d'endettement porte sur la moyenne de la capacité d'autofinancement brute au cours des trois derniers exercices écoulés et non seulement sur celle du dernier. Cette méthode peut sembler légitime, en raison du caractère variable de la capacité d'autofinancement brute. Mais elle pourrait dans certains cas s'avérer défavorable à des collectivités, par exemple quand elles améliorent leur capacité d'autofinancement. Je propose donc une méthode de calcul qui reprend les deux versions, la plus favorable à la collectivité étant celle qui sera appliquée dans le calcul du ratio.
La parole est à M. Jean-René Cazeneuve, pour soutenir l'amendement no 16 .
L'amendement du rapporteur général me convient très bien. Je retire le mien.
L'amendement no 16 est retiré.
Je me range à l'amendement du rapporteur général. Il illustre la souplesse qu'entend adopter le Gouvernement pour permettre aux élus de montrer de la meilleure façon comment ils gèrent la dette, y compris les efforts qu'ils ont effectués depuis leur élection. En outre, la durée de trois ans nous paraît conforme à la date des dernières élections municipales.
J'ajoute, monsieur Pupponi, que cet amendement étant lié à ceux que vous allez défendre, il serait préférable que vous les retiriez.
L'amendement no 69 est adopté.
L'amendement no 34 propose d'exclure du dispositif les communes signataires d'une convention dans le cadre du NPNRU – le nouveau programme national de renouvellement urbain – , car on ne peut à la fois inciter ces communes à financer des équipements, donc à s'endetter, et leur reprocher ensuite de s'être endettées, l'autorisation de financement au titre du NPNRU ayant déjà eu lieu de surcroît après contrôle de la part des services du ministère des finances et de la Caisse des dépôts.
Si cet amendement n'était pas retenu, j'ai déposé un amendement qui, lui, exclut expressément du dispositif les emprunts souscrits dans le cadre du financement d'un projet NPNRU.
Sur l'article 24, je suis saisi par le groupe Nouvelle Gauche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?
La commission a été défavorable à l'amendement no 34 , qui inclut dans la dérogation au dispositif des dépenses qui n'ont rien à voir avec la situation particulière des communes concernées. J'ai donc invité M. Pupponi à travailler à un amendement de repli qui ne concerne que les dépenses afférentes à cette situation particulière.
Cela étant, je pense qu'on répond pour partie à sa préoccupation avec l'amendement qui vient d'être voté, mais je ne peux bien évidemment qu'émettre un avis de sagesse sur l'amendement no 16 . Je laisse à M. le ministre le soin de préciser les choses pour que ces situations particulières puissent être bien prises en compte.
J'espère convaincre M. Pupponi de retirer ces amendements en lui expliquant que le principe même de l'article 24, c'est la souplesse. Une ville a pu souscrire des emprunts au titre d'une convention signée avec l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, mais elle peut aussi en avoir fait à la suite d'une catastrophe naturelle ou en raison de mutations économiques dans un quartier – par exemple, si Peugeot devait quitter Poissy, je suppose qu'il y aurait à mener un travail très important de requalification urbaine, indépendamment du statut du quartier au regard de la politique de la ville.
Tout cela fera partie des explications que le maire fournira à l'assemblée délibérative lorsqu'elle le rapport lui sera soumis, l'État pouvant dès lors comprendre pourquoi la collectivité dépasse la durée de remboursement prévue au titre du nouveau plafond national d'endettement. Au cours des travaux préparatoires, le Gouvernement a consenti un effort, puisqu'il était initialement prévu d'inscrire dans la loi un délai maximal de cinq ou six ans pour le type de commune évoqué. Dans la rédaction finale, la ville de Sarcelles pourra fort bien arguer qu'elle a souscrit des emprunts conditionnés par l'accord de l'ANRU à l'initiative de l'État, ce qui justifiera un délai de dix ou douze ans, alors que la ville voisine ne pourra mettre que six ans hors ANRU. Ce sera tout à fait compréhensible.
Le principe, monsieur Pupponi, est bel et bien d'éviter un endettement insoutenable, sachant que des collectivités dont des quartiers sont en politique de la ville n'ont pas pour autant une gestion vertueuse de leurs finances publiques. Les préoccupations que vous évoquez sont parfaitement prises en compte par le rapport spécial sur les perspectives financières pluriannuelles prévues à l'article 24.
Je veux bien retirer l'amendement no 34 , mais l'amendement no 18 , lui, est le fruit d'une sollicitation du rapporteur général. Quand une commune passe devant le comité d'engagement de l'ANRU, il y a un contrôle a priori de sa capacité d'endettement. Si l'Agence et les services de l'État considèrent que celle-ci est insuffisante, la convention est refusée. Or vous nous proposez en plus un contrôle a posteriori. L'État va donc dire d'abord : « On vous autorise à emprunter » puis, un an après : « Mais attention, avez-vous eu raison d'emprunter ? », et l'élu de répondre : « Mais c'est le préfet qui m'a demandé d'emprunter… » On peut s'amuser à s'écrire pour expliquer que c'est la faute du préfet, mais il vaudrait mieux, l'ANRU ayant déjà signé la convention autorisant la collectivité à s'endetter pour financer son programme et sachant que le préfet et des services du ministère siègent à l'agence, donner quitus à la commune sur les emprunts concernés, et uniquement eux, mais on ne peut pas y revenir un an après pour lui demander de s'expliquer. L'amendement propose donc que les emprunts qui concernent des équipements validés par l'ANRU n'entrent pas dans le calcul du ratio d'endettement de la collectivité.
François Pupponi a repris ma question : si vous fixez par décret un plafond, disons de treize ans pour le bloc communal, au regard des emprunts d'une durée de plus du double, de vingt-cinq ans ou de trente ans, dans le cas d'investissements lourds, votre critère sera totalement inadaptée. Avec un autofinancement de 100, on peut faire face aux annuités sur vingt-cinq ans, mais pas sur douze ans. Il est donc impossible de financer certains investissements très importants avec des emprunts à seulement dix ans ou douze ans.
Enfin, je n'ai toujours pas compris pourquoi la loi ne définit que des limites minimales et maximales, renvoyant pour le reste à un décret : vous auriez pu fixer clairement le plafond dans le texte, mais c'est un détail par rapport au fond du problème, à savoir le plafonnement. Votre dispositif n'est pas cohérent.
Je crois, monsieur de Courson, que je ne réussirai pas à vous convaincre, car il me semble que vous avez mal lu l'article 24, mais je vais répondre à M. Pupponi. Rappelons tout d'abord que l'ANRU n'est pas l'État : c'est un opérateur, surtout depuis que l'État n'apporte plus sa contribution. Même si le préfet et le directeur départemental des territoires et de la mer – le DDTM – y siègent et que le directeur général de l'ANRU a une conscience de l'État, il n'est pas l'État. Pour avoir siégé moi aussi au Comité national d'engagement – moins que vous et avec moins de responsabilités – , je peux témoigner que l'ANRU a pour fonction d'examiner le plan de financement et les emprunts souscrits dans ce cadre au nom de votre commune ou de votre intercommunalité, et destinés à aboutir à votre quartier ANRU, afin de voir si c'est ou non soutenable.
Il s'agit d'ailleurs souvent d'un emprunt intercommunal, puisque, depuis la loi Lamy, c'est désormais la métropole ou l'agglomération qui porte le projet. Mais imaginons que vous évoquiez à raison le cas de certaines communes, je pense à celle de Sarcelles qui a fait beaucoup d'opérations et qui a malheureusement porté à un haut niveau ses capacités d'endettement sans solidarité intercommunale – mais, désormais ; il y en a une.
En tout cas, l'opérateur considère votre plan de financement et les emprunts que vous faites au nom de votre commune ou de votre intercommunalité à destination de votre quartier ANRU pour savoir s'ils sont soutenables. Aux termes de l'article 24, l'État examine, lui, l'ensemble de l'endettement. Si vous pouvez justifier un emprunt plus long – soit au titre d'un quartier en politique de la ville, soit pour d'autres raisons qui justifieraient d'ailleurs des amendements parlementaires, qu'il s'agisse de stations d'épuration, de la contribution au canal Seine-Nord, à la liaison Lyon-Turin ou à je ne sais quelle autre grande infrastructure. La collectivité aura ainsi justifié de cet endettement comme elle pourrait justifier d'une augmentation d'impôts. Mais, désormais, tout le monde en sera informé et le législateur aura donné à l'État la capacité de vérifier, notamment par l'intermédiaire de la chambre régionale des comptes, si cela est justifié ou non. Monsieur Pupponi, les élus pourront ainsi justifier que la ville de Sarcelles ou la ville de Tourcoing mette dix ans, douze ans ou quatorze ans pour rembourser l'endettement.
L'amendement no 18 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Nombre de votants | 71 |
Nombre de suffrages exprimés | 71 |
Majorité absolue | 36 |
Pour l'adoption | 54 |
contre | 17 |
L'article 24, amendé, est adopté.
L'article 25 est adopté.
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l'amendement no 35 .
Cet amendement est tellement judicieux que la précision qu'il apporte figure déjà dans le texte : il serait par conséquent bon de le retirer.
L'amendement no 35 est retiré.
L'article 26 est adopté.
Cet amendement vise à annexer au projet de loi de finances un document détaillant tous les prestations commandées par les ministères et les établissements publics placés sous leur autorité aux cabinets privés, ainsi que leur coût.
Il est désormais admis que l'administration puisse recourir à des cabinets de conseil privés dans toute une série de domaines allant de la stratégie aux ressources humaines, en passant par la communication.
Ces tâches pourraient cependant bien souvent être réalisées en interne, soit par les différents corps d'inspection, soit en recrutant – par voie interne ou externe – sur des profils spécifiques.
En effet, si les effectifs sont insuffisants pour réaliser toutes ces missions, recruter serait très probablement moins coûteux pour l'État, au vu des dépenses actuelles en prestations de conseil ainsi que des tarifs pratiqués dans ce secteur pour le moins lucratif.
En tout état de cause, cette annexe nous permettrait de disposer de tous les éléments nécessaires afin d'évaluer correctement les coûts et les alternatives possibles.
Les exemples nous permettant de dénoncer les dérives du recours aux cabinets de conseil sont nombreux. Ainsi, le scandale des déboires financiers du système de paye du ministère de la défense – qualifié de manière informelle de « vache à lait » par de nombreux cabinets de conseil – doit nous interroger sur le niveau de dépenses adéquat pour des prestations extérieures, ainsi que sur leur réelle utilité.
En outre, les risques de conflits d'intérêts sont nombreux et renforcés par la pratique du pantouflage qui voit nombre de hauts fonctionnaires franchir régulièrement la barrière qui sépare le prestataire de l'administration qui en est cliente.
Le Gouvernement semblant décidé à faire des économies, nous lui proposons ici une piste de réflexion, car aucune décision ne pourra être prise avant que nous ayons une vision complète de la situation.
En outre, cette proposition permettrait d'instaurer un débat sur les dangers de l'externalisation de telles fonctions, ainsi que sur les choix stratégiques en la matière, et poserait la question, qui n'est pas anodine, de l'accès à certaines informations sensibles.
Monsieur le député, l'information que vous demandez figure dans les documents budgétaires relatifs à chaque mission du budget général de l'État. Les prestations de services de conseil et de services externalisés y sont parfaitement référencées.
J'estime par conséquent que votre amendement est satisfait et vous prie de bien vouloir le retirer. À défaut, la commission y serait défavorable.
L'amendement no 47 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Muriel Ressiguier, pour soutenir l'amendement no 48 .
Cet amendement propose que soit jointe au projet de loi de finances de l'année une annexe générale détaillant l'évolution de la dette privée des sociétés financières et non financières. Depuis des années, nous avons pour habitude de débattre de la dette publique et d'en faire un indicateur économique permettant de juger du fonctionnement des États.
Il existe cependant un autre type de dette : la dette privée. Or il est particulièrement difficile d'accéder aux informations relatives aux montants de cette même dette, notamment celle des sociétés financières, alors même qu'elle constitue, au niveau mondial, un facteur important d'instabilité.
Nous l'avons vu lors de la crise des subprimes : lorsque les banques sont fragilisées, les États le sont également. Cette crise nous l'a malheureusement démontré : ne raisonner qu'à partir de la dette souveraine n'était pas judicieux, car elle ne constitue pas un bon indicateur.
Pour nous prémunir contre de potentielles crises à venir, il est nécessaire que nous puissions disposer, a minima, d'informations relatives au montant de la dette privée ainsi qu'à son évolution.
Je vous demande en outre, concernant mon accent anglais, un avis favorable.
Sourires.
Madame la députée, votre amendement propose que soit créée une nouvelle annexe au projet de loi de finances qui détaille l'évolution de la dette privée des sociétés financières et non financières.
Ce type de données relève davantage de l'Institut national de la statistique et des études économiques, l'INSEE, et de la comptabilité nationale, que du projet de loi de finances. L'INSEE publie sur son site internet, de manière très accessible, les ratios de dette des administrations publiques, des ménages et des sociétés non financières. L'avis de la commission est, par conséquent, défavorable.
Défavorable.
L'amendement no 48 n'est pas adopté.
Les articles 27 et 27 bis sont successivement adoptés.
La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne, pour soutenir l'amendement no 13 rectifié , qui fait l'objet d'un sous-amendement no 36 , troisième rectification.
Cet amendement vise à renforcer l'information des parlementaires et de la population quant à l'allocation des dépenses fiscales et sociales rattachées à l'impôt sur le revenu.
Il propose que le Gouvernement établisse une liste précisant, pour chacune de ces dépenses, la répartition par décile des bénéficiaires des niches fiscales. L'adoption de cet amendement permettrait que tout le monde connaisse la typologie des bénéficiaires des dispositifs dérogatoires à l'impôt sur le revenu que nous votons.
Il permettrait également d'identifier les éventuels effets d'hyper-concentration sur certains revenus et d'en tirer les conséquences au niveau législatif. Cet amendement prend en compte les remarques tout à fait justes formulées à son propos par M. le rapporteur général lors de son examen en commission des finances la semaine dernière.
Il propose donc que cette liste concerne les dix principales dépenses fiscales et sociales rattachées à l'impôt sur le revenu, et non l'ensemble d'entre elles, comme il le prévoyait initialement.
L'amendement suggère en outre que cette liste soit publiée dans un format permettant sa réutilisation par nos concitoyens, dans une logique d'ouverture de nos données publiques.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir le sous-amendement no 63 , troisième rectification, à l'amendement no 13 rectifié .
Ce sous-amendement a tout simplement pour but de faciliter la démarche introduite par l'amendement no 63 , troisième rectification, qui a été effectivement modifié en fonction des remarques formulées en commission des finances et limité aux dépenses fiscales de plus de 1 milliard d'euros.
Cette limitation porterait le nombre de dépenses devant figurer sur la liste en question à huit, et non à dix, de façon à circonscrire la demande aux dispositifs significatifs.
Il est favorable à l'amendement no 13 rectifié , sous réserve de l'adoption du sous-amendement no 63 troisième rectification.
Le sous-amendement no 63 , troisième rectification, est adopté.
L'amendement no 13 rectifié , sous-amendé, est adopté.
La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne, pour soutenir l'amendement no 14 rectifié , qui fait également l'objet d'un sous-amendement no 34 deuxième rectification.
Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, je vous remercie pour l'adoption de l'amendement précédent. L'amendement no 14 rectifié est assez similaire, puisqu'il propose que le Gouvernement procède de la même manière concernant les niches fiscales rattachées à l'impôt sur les sociétés.
Son objectif est d'améliorer l'information de la représentation nationale, comme de la population, sur la typologie des bénéficiaires des différents dispositifs liés à l'impôt sur les sociétés.
À l'heure actuelle, cette information est insuffisante : elle pourrait – et devrait – être considérablement améliorée, notamment au regard des montants en jeu, qui sont particulièrement importants comme le révèle la lecture attentive de l'annexe « Voies et moyens » au projet de loi de finances.
Il serait ainsi particulièrement intéressant de connaître la typologie des entreprises bénéficiaires, par exemple, du crédit d'impôt recherche : cela permettrait d'identifier d'éventuels phénomènes d'hyper-concentration au niveau des grands groupes, d'établir une traçabilité dans le temps du dispositif concerné et d'en tirer les conclusions nécessaires.
L'amendement no 14 rectifié propose, pour chacune des principales dépenses fiscales liées à l'impôt sur les sociétés, la distribution par taille d'entreprises, appréciée en fonction des effectifs et du chiffre d'affaires.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir le sous-amendement no 64 , deuxième rectification, à l'amendement no 14 rectifié .
Je remercie d'abord notre collègue Jean-Paul Dufrègne d'avoir tenu compte des remarques que j'ai émises lors de l'examen de cet amendement en commission. J'émets toutefois une réserve rédactionnelle : il vous faudrait, cher collègue, inclure dans votre amendement les dépenses fiscales relatives au bénéfice des entreprises relevant de l'impôt sur le revenu, sans quoi cela exclurait une partie du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi, le CICE.
Par ailleurs, il serait, de la même façon, judicieux de limiter ladite liste aux dépenses supérieures à 1 milliard d'euros, c'est-à-dire essentiellement au CICE et au crédit d'impôt recherche. C'est pourquoi je propose un sous-amendement reprenant ces dispositions.
Je vous le dis comme je le pense : cet amendement m'embête au titre du secret fiscal. Autant le précédent, qui a été sous-amendé par M. le rapporteur général, me paraissait de bon aloi en ce qu'il améliorait l'information des parlementaires, autant celui-ci me pose problème, notamment pour les grandes entreprises.
Des éléments existent déjà : je pense au rapport du Conseil des prélèvements obligatoires – intitulé « Adapter l'impôt sur les sociétés à une économie ouverte » – ainsi qu'aux annexes au projet de loi de finances, dans lesquelles figurent d'ores et déjà les informations dont vous demandez la communication.
En revanche, votre rédaction pose problème : le recoupement entre les principales dépenses fiscales et sociales rattachées à l'impôt sur les sociétés et les entreprises concernées peut être assez rapidement opéré.
Cet amendement devrait donc objectivement être, à mon sens, retiré, sachant qu'il est déjà très largement satisfait en matière de dépenses fiscales rattachées à l'impôt sur les sociétés : l'information a déjà – notamment dans le rapport rendu public en janvier 2017 et dans l'annexe au projet de loi de finances « Voies et moyens - tome II » – été très largement évoquée.
Par conséquent, je vous remercie, monsieur le député, de bien vouloir le retirer. Il me semble que, sur l'amendement précédent, je me suis montré ouvert à l'amélioration de l'information fournie aux parlementaires. Mais, je le répète, l'amendement no 14 rectifié fait surgir une petite difficulté liée au secret fiscal.
Je retire le sous-amendement no 64 , deuxième rectification, et par conséquent l'avis de la commission est, concernant l'amendement no 14 rectifié , défavorable.
Le sous-amendement no 64 , deuxième rectification, est retiré.
L'amendement no 14 rectifié n'est pas adopté.
Je propose qu'une question courte appelle une réponse également courte. Nous soutenons les initiatives qui visent à améliorer l'information du Parlement.
Cependant, nous nous interrogeons sur la suppression de la précision concernant le fait que les mêmes informations seront disponibles sur l'Agence française de développement et sur l'établissement public à caractère administratif Masse des douanes.
Serait-ce parce que ces deux organismes sont considérés comme des opérateurs de l'État, et que, par conséquent, cette précision était inutile ? Le Gouvernement peut-il nous garantir que la même information sera toujours disponible concernant ces deux organismes ?
La réponse est oui, mais dans d'autres documents.
L'article 28 est adopté.
L'article 29 abroge les dispositions de la précédente loi de programmation des finances publiques. Or un certain nombre d'entre elles nous paraissent, à nous, groupe Nouvelle Gauche, utiles à maintenir. Via ces deux amendements, nous proposons donc le maintien des articles 23, 28, 31 et 32 de la précédente loi de programmation. L'article 32, par exemple, avait trait au montant de la dette publique que le Gouvernement déclare à Bruxelles ; il serait intéressant que le Parlement connaisse ce chiffre !
Lors de l'examen du texte en commission, j'avais demandé à Mme Rabault de toiletter l'amendement no 36 , en ôtant toute référence à des rapports ou informations désormais obsolètes ou inutiles.
Exclamations sur les bancs du groupe NG.
Ainsi, vous proposez de maintenir les informations relatives aux hypothèses retenues pour le calcul de la croissance tendancielle de la dépense publique. Or nous avons changé de Gouvernement, et le nouveau Gouvernement a indiqué qu'il entendait chiffrer les économies de l'État en fonction non pas de la dépense tendancielle, mais de la variation de la part des dépenses publiques dans le produit intérieur brut. Je suis donc contraint de donner un avis défavorable sur cet amendement.
En revanche, le toilettage de l'amendement no 54 a été bien fait. Avis favorable sur ce dernier, donc.
L'amendement no 36 est retiré.
L'amendement no 54 est adopté.
L'article 29, amendé, est adopté.
Je suis saisi de deux amendements portant article additionnel après l'article 29.
La parole est à M. Stéphane Peu, pour soutenir l'amendement no 11 rectifié .
Bien que nous ayons examiné dans le détail le projet de loi, nous n'avons rien vu qui concerne la stratégie et les indicateurs en matière de lutte contre la fraude et l'évasion fiscales.
Je rappelle que l'évasion et la fraude fiscales coûtent chaque année entre 60 et 80 milliards d'euros au budget de l'État, soit l'équivalent du déficit public, du budget de l'éducation nationale ou du produit annuel de l'impôt sur le revenu. Autant dire que c'est un enjeu important, et même essentiel. Or nous n'avons pas trouvé une once de précision sur la trajectoire politique dans ce domaine, et nous nous interrogeons quant aux raisons de ce silence.
L'évasion, l'optimisation et la fraude fiscales sont des phénomènes endémiques qui polluent la société. Le problème doit être pris à bras-le-corps, sans complaisance. La puissance publique doit être ferme.
Nous proposons que la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales soit érigée en cause nationale, mobilisant l'ensemble des moyens humains, financiers, techniques, juridiques de l'État. Cela passe par une stratégie pluriannuelle, avec des indicateurs précis et des objectifs ambitieux. Chaque année, le Gouvernement remettrait un rapport précis sur lequel la représentation nationale pourrait débattre en séance publique. Nous sommes en effet nombreux sur ces bancs à être sensibles à cette question.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI.
Votre amendement constitue une injonction faite au Gouvernement. Vous m'en voyez navré, mais les injonctions au Gouvernement, je les ai fait retirer en commission, car elles sont interdites.
Je présume qu'il s'agit d'un amendement d'appel, afin que le ministre donne des informations sur les moyens de la lutte contre la fraude fiscale. Si tel n'était pas le cas et que vous ne le retiriez pas, je me verrais contraint d'émettre un avis défavorable.
Monsieur le député, nous partageons les attendus de la demande exprimée, par votre voix, par la représentation nationale. Un document nouvellement créé sera prochainement diffusé ; il s'intitule Lutte contre la fraude et l'évasion fiscales. Je crois qu'il correspond exactement à ce que vous demandez.
Indépendamment du problème de l'injonction faite au Gouvernement, et tout en comprenant votre demande, j'émets donc un avis défavorable sur l'amendement.
L'amendement no 11 rectifié n'est pas adopté.
La parole est à M. Fabien Roussel, pour soutenir l'amendement no 12 rectifié .
Nous proposons que le Gouvernement remette chaque année au Parlement un rapport visant à mieux connaître l'identité des détenteurs de la dette publique française.
Nous avons beaucoup parlé de ce sujet aujourd'hui. C'est en effet une question importante, et il faudrait un jour s'interroger sur l'origine et l'ampleur de cette dette. Par suite de la crise de 2008, l'endettement des pays de l'OCDE, dont la France, qui était de 73 % en 2007, a atteint 100 % en 2011. Un document datant de 2012 et provenant de la Commission européenne, ce qui fait qu'on pourra difficilement le contester, indique que les aides des États au secteur financier dans l'Union européenne se sont élevées à 1 600 milliards d'euros entre 2008 et décembre 2011. Les États ont financé le système bancaire à hauteur de 1 600 milliards d'euros : on comprend que leurs dettes aient enflé !
Jamais n'a été posée la question de la responsabilité du système bancaire. En revanche, le système bancaire, lui, se nourrit de la dette : l'État va verser 41 milliards d'euros d'intérêts aux banques en 2018. C'est beaucoup !
Il s'agit donc d'une question importante, tout comme celle de savoir qui détient aujourd'hui la dette de la France. Monsieur Le Maire nous a dit que les deux tiers étaient détenus par des capitaux étrangers. Voilà qui pose un problème démocratique ! C'est pourquoi nous proposons que le Gouvernement remette chaque année au Parlement un rapport sur l'identité des détenteurs de la dette publique française et le niveau des montants détenus.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Votre amendement est intéressant, monsieur Roussel ; il renvoie à un excellent rapport de la commission des finances, publié en 2016 et signé notamment par Nicolas Sansu. Les conclusions en étaient extrêmement instructives. Premier constat : « Les échanges de titres sur les marchés secondaires sont permanents, considérables et internationaux. Il n'est pas possible d'en référencer les détenteurs. » Deuxième constat : « L'État n'a pas juridiquement la possibilité d'identifier les détenteurs de la dette. » Dès lors, l'information n'existe pas de manière précise, pas même à la Banque de France – ce que l'on peut regretter.
En outre, la Banque de France a précisé qu'il ne serait guère pertinent de publier ces informations, sous peine de voir se dégrader l'attractivité de la dette publique française auprès des investisseurs.
Je signale que la Banque de France et l'Agence France Trésor assurent toutefois un suivi de la détention par les non-résidents des titres de la dette négociable de l'État, ainsi qu'une publication trimestrielle. Au deuxième trimestre 2017, les non-résidents détenaient ainsi 56,4 % de la dette de l'État, un chiffre qui est en baisse par rapport à 2009, puisqu'ils en détenaient alors 68 %.
Pour ces raisons, j'émets un avis défavorable sur l'amendement – même si je comprends votre démarche.
Au 31 août 2017, l'encours total de la dette négociable française s'établissait à 1 687 170 529 203 euros. Sachez que, comme l'ont expliqué non seulement le rapporteur général, mais aussi votre ancien collègue M. Sansu, la liste nominative des détenteurs change, et qu'elle change presque chaque jour. Cela prouve qu'ils nous font confiance ! Dans ces conditions, je ne vois pas comment il serait matériellement possible de fournir la liste des détenteurs de la dette, euro par euro. En outre, ce serait un signe de défiance envers les investisseurs.
Cependant, je précise que, parmi les détenteurs non-résidents de la dette publique et privée française, les pays de la zone euro en détiennent 48,6 %, soit un peu plus de 1 000 milliards, le reste de l'Europe, 15,7 %, les pays d'Asie, 10,3 %, les pays d'Amérique, 7,3 % et 1,1 % appartient au reste du monde, avec des réserves de charge de 17 %.
Vous avez l'air de vous plaindre que cette dette appartienne à des étrangers. Vous avez l'air de vous plaindre aussi que l'on paie beaucoup trop de charge de la dette. Dans ces conditions, je ne comprends pas pourquoi vous vous plaignez que l'on rembourse la dette !
Ce que vous venez de dire, monsieur le ministre, est intéressant. Vous avez expliqué que plein de gens se poussaient pour pouvoir prêter à l'État français.
Oui : c'est parce que nous remboursons.
On nous explique sans arrêt que nous sommes trop endettés et que ce serait un legs pour les générations à venir. Mais savez-vous pourquoi les investisseurs prêtent de l'argent à l'État français ? pourquoi, dans le cadre des partenariats public-privé – je pense au Lyon-Turin, qui, je l'espère, sera bientôt abandonné – , les assurances privées demandent à tout prix la garantie des États, y compris de l'Italie, pour contribuer au financement ? C'est que, dans la situation actuelle, le patrimoine des États constitue encore la meilleure garantie, y compris sur les marchés. Voilà qui remet à leur place les discours alarmistes et déclinistes sur ces États prétendument trop endettés !
Nous sommes solides, notre patrimoine est robuste. Je trouve par conséquent étonnant, alors que vous prétendez que les investisseurs étrangers se battraient presque pour prêter à la France, que vous nous répondiez qu'on risquerait de les faire fuir en publiant un rapport. Je rappelle qu'un des atouts du Japon, dont le taux d'endettement s'élève à plus de 200 %, est justement que sa dette est détenue pour l'essentiel par des Japonais. Nous devrions nous en inspirer !
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
L'amendement no 12 rectifié n'est pas adopté.
Nous avons achevé l'examen des articles du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.
Je rappelle que la conférence des présidents a décidé que les explications de vote et le vote par scrutin public sur l'ensemble du projet de loi auront lieu le mardi 24 octobre, après les questions au Gouvernement.
Je précise qu'à la demande du Gouvernement, nous examinerons par priorité, demain matin, les articles 10 à 15 du projet de loi de finances pour 2018, ainsi que les amendements portant article additionnel après l'article 15. Cette discussion aura lieu immédiatement après celle des articles liminaire et premier.
Prochaine séance, aujourd'hui, à neuf heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2018.
La séance est levée.
La séance est levée, le jeudi 19 octobre 2017, à deux heures.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Catherine Joly