La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
Cet après-midi, l'Assemblée a commencé la discussion des articles non rattachés à des missions, s'arrêtant à l'amendement no 2551 à l'article 57.
La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour soutenir l'amendement no 2551 .
La parole est à M. le ministre de l'action et des comptes publics, pour donner l'avis du Gouvernement.
Avis favorable.
L'amendement no 2551 est adopté.
Il s'agit de restreindre le champ d'application de l'expérimentation aux activités occultes, aux domiciliations fiscales frauduleuses et à certains manquements à la législation douanière sur les alcools, le tabac et les métaux précieux.
Avis évidemment favorable aux amendements identiques et demande de retrait sur l'amendement no 2165 qui est satisfait par les précédents.
L'amendement no 2165 est retiré.
Cet amendement vise à préciser que les informations collectées ne devront pas seulement être disponibles mais « manifestement rendues publiques » par les utilisateurs des plateformes en ligne.
Cet amendement diffère des deux amendements identiques puisqu'il propose de substituer au mot : « publiés », les mots : « manifestement rendus publics », soit les termes utilisés à l'article 10 de la directive relative au traitement de données personnelles à des fins pénales. Il serait judicieux de faire ainsi référence à un texte qui a déjà une existence juridique, ce qui permettra de clarifier ensuite les éventuels cas de contestation.
Avis bien sûr favorable aux amendements identiques. Quant à l'amendement no 2334 , j'avais déjà précisé à notre collègue que sa rédaction aurait le même effet. Le sujet des données se rapportant aux personnes concernées est clairement traité par un autre amendement sur lequel j'émettrai un avis favorable. Pour celui-ci, l'avis est défavorable pour une raison de forme.
Avis favorable sur les amendements identiques. Quant au vôtre, monsieur Latombe, le Gouvernement est tout à fait d'accord sur le principe, mais préfère la rédaction des deux premiers amendements, qui poursuivent le même but en sécurisant davantage la défense du principe que vous défendez. À défaut de retrait, l'avis serait défavorable.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 1079 .
Cet article prévoit d'autoriser l'administration fiscale à collecter et à exploiter les contenus librement accessibles publiés sur internet. Cette autorisation, même donnée à titre expérimental, porte atteinte au principe selon lequel toute personne a droit à la protection de la loi contre les immixtions dans sa vie privée. C'est un des fondements de la démocratie. Il convient donc de préciser que cette expérimentation peut être arrêtée dès lors qu'elle porte atteinte, de façon disproportionnée, à ce droit.
Dans son avis, la Commission nationale de l'informatique et des libertés – CNIL – a relevé que faute pour l'administration d'être en mesure de déterminer a priori les caractéristiques principales du traitement des données, il convient de prévoir la transmission d'un bilan intermédiaire de l'expérimentation à l'issue de la phase d'apprentissage.
Cet amendement a été rejeté par la commission car, comme l'a rappelé le ministre, l'expérimentation sera sous le contrôle de la CNIL et du Parlement, et tous les amendements déposés à ce sujet par la commission des finances visent à éviter l'atteinte à la vie privée que vous redoutez, madame la députée. À défaut de retrait, je confirmerais l'avis défavorable de la commission.
L'amendement no 1079 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 2639 .
Il s'agit par cet amendement de protéger davantage la vie privée des Français. À ce titre, les traitements des données doivent être exclusivement mis en oeuvre par des agents habilités.
Il y a en effet des raisons de craindre que le traitement des données personnelles de nos compatriotes devienne un outil de profilage destiné à identifier directement des fraudeurs prévisibles. Or ceux qui s'intéressent à la modélisation prédictive savent que la prédiction produit la présomption, que les fraudeurs prévisibles seront inévitablement considérés comme des fraudeurs probables, et qu'entre ceux-ci et les fraudeurs présumés, le pas est vite franchi.
Défavorable. Je rappelle tout d'abord que nous ne sommes pas dans le domaine de la prédiction. Par ailleurs, l'article prévoit que seuls des agents habilités procéderont aux traitements, et d'autres amendements vont proposer d'interdire la sous-traitance pour la collecte et pour la conservation des données, ce qui me semble satisfaire votre amendement. Vous devriez le retirer. Sinon, l'avis serait défavorable.
L'amendement no 2639 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 2554 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Comme il s'agit à l'origine d'un amendement de la commission des lois que nous avons repris en commission des finances, je propose que M. Latombe le défende.
Monsieur Latombe, je vous propose de soutenir en même temps votre sous-amendement no 3028 .
Un amendement de la commission des lois avait en effet proposé l'interdiction de la sous-traitance sur les opérations de traitement et de conservation, car le traitement des données personnelles ne doit pas être sous-traité à des sociétés extérieures à l'État, en l'espèce la direction générale des finances publiques – DGFiP – ou les douanes.
Mon sous-amendement vise à rigidifier encore davantage le dispositif pour être sûr qu'il n'y aura pas de sous-traitance, proposant ainsi de remplacer le mot « et » par le mot « ou », afin qu'il n'y en ait ni pour le traitement ni pour la conservation des données. En effet, il faut à cet égard limiter au maximum le champ d'application du dispositif pour éviter le problème de proportionnalité au regard du principe de protection de la vie privée.
Puis-je considérer, monsieur Latombe, que l'amendement no 2336 de la commission des lois a été défendu ?
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 2624 .
Il s'agit de bien s'assurer que, eu égard au caractère éminemment privé des informations collectées, elles resteront en la possession exclusive de l'administration, et en aucun cas de quelque sous-traitant que ce soit. Sans doute, cela paraît une évidence, mais il vaut mieux, parfois, graver les évidences dans le marbre de la loi.
Avis favorable aux amendements identiques, et défavorable au sous-amendement.
Même avis que M. le rapporteur général, mais je vais m'arrêter quelques instants sur le sous-amendement de M. Latombe. Qu'il ne faille pas sous-traiter les éléments collectés par la direction générale des finances publiques, notamment ceux provenant de la collecte sur les réseaux sociaux, qu'on ne soit pas obligé de dire à un tiers : « merci d'utiliser pour nous les critères permettant le contrôle fiscal », j'en suis évidemment d'accord.
Mais le sous-amendement propose de refuser aussi de sous-traiter les éléments qui vont permettre de créer le système informatique pour faire fonctionner lesdits critères. Cela supposerait alors que l'algorithme soit créé exclusivement en interne et pas du tout sous-traité à des sociétés. Or cela me paraît compliqué, car il se peut que des prestataires privés aident le ministère à monter la machinerie informatique sans disposer des données personnelles.
Pour répondre aux interrogations légitimes de M. Latombe et d'autres députés, je voudrais préciser comment la direction générale des finances publiques va travailler. Les éventuels prestataires interviendraient sur le matériel et dans les locaux de l'administration, pas à l'extérieur sur un matériel qui n'appartiendrait pas à l'État ; leurs travaux seraient placés sous la responsabilité et le contrôle uniques des agents de l'administration, et bien sûr en permanence tracés et surveillés ; l'intégralité des travaux serait enregistrée et transmise à la CNIL ; la construction de l'algorithme serait réalisée à partir de données anonymisées et non pas sur un échantillon ou sur une partie de véritables données collectées sur les réseaux sociaux. Je crois donc que les réserves que vous exprimez, monsieur Latombe, sont levées et que vous pourrez retirer votre sous-amendement au bénéfice de ces explications. Cette méthode allie l'efficacité de la machinerie informatique sans utiliser de données personnelles et donne toute garantie pour que le travail s'effectue dans l'administration et sous son autorité, ainsi que sous la surveillance de la CNIL.
Monsieur le ministre, êtes-vous sûr que ces amendements soient constitutionnels ?
Il y a des précédents. Peut-on faire collecter, ou a fortiori traiter, ce type de données par des entreprises privées ?
Nous disons justement que ce sera l'inverse !
Ah non. Je lis le texte des amendements : « Les données à caractère personnel mentionnées au premier alinéa ne peuvent faire l'objet d'une opération de traitement et de conservation de la part d'un sous-traitant. » Comme je peux avoir l'esprit mal tourné, je peux comprendre qu'a contrario, il sera possible de faire appel à des sociétés privées pour collecter les informations, puisque la disposition proposée ne concerne que le traitement et la conservation desdites informations.
Mais non ! C'est très clair !
Il faudrait préciser ce qu'il en est, monsieur le ministre. Une interprétation a contrario justifie juridiquement pour moi l'appel à la sous-traitance pour des opérations autres que le traitement et la conservation. Ce serait alors anticonstitutionnel. J'ai en mémoire le célèbre exemple des écrous : on a voulu privatiser les écrous dans les prisons pour que le système fonctionne mieux, et le Conseil constitutionnel a estimé que c'était impossible, parce qu'il est des fonctions régaliennes que l'État ne peut sous-traiter. Encore une fois, je vous mets en garde.
Vous avez évoqué le contrôle de la CNIL, monsieur le ministre, mais j'ai une question à poser. Puisqu'il s'agit d'assurer le stockage et le traitement algorithmique des données personnelles, l'Agence nationale de la sécurité informatique – l'ANSI – sera-t-elle intégrée dans le contrôle de l'algorithme et du stockage ? Avant même de parler des délais de conservation, il serait très important que les citoyens soient rassurés sur la sécurité du stockage des données personnelles conservées. Depuis le début, nous ne parlons que de la CNIL, mais dans la mesure où nous intervenons ici dans le domaine du régalien, et où il s'agit de technique et de données personnelles, l'ANSI devrait aussi avoir un droit de regard sur le dispositif.
Deux questions distinctes me sont posées. Je répondrai d'abord à M. de Courson. Pardonnez-moi, mais les amendements qui seront peut-être adoptés sont très clairs : ils visent à interdire à l'administration de sous-traiter. C'est tellement vrai que seuls les agents publics pourront collecter et traiter les données, à l'aide des moyens informatiques qui seront mis à leur disposition.
L'amendement de la commission des finances – ce n'est pas moi qui l'ai rédigé – est limpide : aucune sous-traitance ne sera possible. Je ne peux pas me montrer plus clair.
Monsieur Latombe, l'ANSI, qui est une grande agence, travaille déjà à sécuriser le fonctionnement informatique de l'État, et singulièrement celui de la direction générale des finances publiques. Vous vous demandez si les données qui seront collectées pourraient être récupérées par des tiers, à la suite d'intrusions informatiques.
La direction générale des finances publiques se pose régulièrement ces questions, y compris s'agissant des données fiscales. Je peux ainsi vous assurer que, lorsque nous avons instauré le prélèvement à la source, l'ANSI a très largement participé à nos travaux. Nous avons tenu plusieurs réunions avec elle, car nous craignions – comme, me semble-t-il, toutes les administrations, au vu des données que nous manipulons, lesquelles sont d'ailleurs bien plus riches que celles diffusées sur les réseaux sociaux – qu'une intrusion permette à des personnes extérieures de collecter les données des citoyens et de les publier ou de les utiliser de façon malfaisante.
L'ANSI sécurise et audite très régulièrement le système informatique de la Direction générale des finances publiques. Elle en fera évidemment de même pour le système de data mining, d'intelligence artificielle et de collecte des données que nous souhaitons déployer – peut-être cette mission devra-t-elle faire partie des éléments qui feront l'objet du rapport parlementaire. Nous ne soumettrons pas à l'ANSI le fonctionnement général du système, qui relève de la CNIL, mais nous lui demanderons de l'auditer.
Nous faisons d'ailleurs de même pour lutter contre les attaques informatiques, qui sont d'importance variable mais surviennent presque tous les mois – fort heureusement, nous sommes jusqu'à présent parvenus à nous en protéger. Les augmentations des crédits informatiques de la DGFiP ont d'ailleurs vocation non seulement à résorber sa dette numérique et à accompagner ses projets de modernisation – dont celui-ci – , mais aussi à renforcer sa sécurité.
L'ANSI sera donc évidemment invitée à auditer régulièrement le système que nous souhaitons instaurer, comme les autres, et je propose que le résultat de ces audits soit rendu public dans le rapport parlementaire.
Nous sommes tous d'accord sur le fond, monsieur le ministre, mais tels qu'ils sont formulés, les amendements…
Ce n'est pas moi qui les ai rédigés !
Justement : vous pouvez d'autant plus vous en distancier ! La collecte des données n'est pas visée par ces amendements, ce qui, du point de vue juridique, signifie que, si l'administration le veut bien, elle sera autorisée. Je vous mets en garde sur ce point.
Les choses me semblent très claires : les amendements interdisent la collecte et le traitement des données. D'autres opérations, comme la conception mathématique d'un algorithme, pourront en revanche être réalisées indépendamment de la collecte et du traitement des données à caractère sensible.
Si vous en êtes convaincu, déposez un sous-amendement ou un amendement en ce sens lors de la prochaine lecture. Je ne peux rien vous dire de plus.
Le sous-amendement no 3028 n'est pas adopté.
L'amendement vise à réduire le délai de conservation des données sensibles et des données sans lien avec les infractions qui seront recherchées dans le cadre du contrôle fiscal, en les détruisant après cinq jours, au lieu de trente.
La parole est à M. Joël Giraud, rapporteur général, pour soutenir le sous-amendement no 3033 .
Il vise à préciser juridiquement le terme « sensibles », en renvoyant à la définition de la loi du 6 janvier 1978, dite loi informatique et libertés, ce qui me semble préférable.
L'amendement no 2170 de Mme Cécile Untermaier est défendu.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Avis favorable sur les amendements et sur le sous-amendement.
Monsieur le ministre, si l'administration fiscale, en chalutant, découvre des infractions – crimes, délits ou contraventions – ne la concernant pas, l'article 40 du code de procédure pénale, qui dispose que tout agent public découvrant une infraction doit en saisir le procureur de la République s'appliquera-t-il, même dans le délai de cinq jours ?
Cela ne pourra pas être le cas, monsieur de Courson. Le dispositif prévu à l'article 57 retiendra trois critères : les ventes de produits illicites sur internet, comme le tabac, les activités occultes – la DGFiP m'a fait part du besoin exprimé cette semaine par des artisans et commerçants qui lui signalaient la concurrence injuste et inappropriée qui s'exerce malheureusement sur internet et demandaient à savoir ce que faisait l'administration pour y remédier – , et la domiciliation fiscale. Les algorithmes seront conçus dans ce but : seuls ces trois filets seront lancés, et seules les données correspondant à nos critères de recherche seront remontées.
Il n'y aura pas de remontées correspondant à d'autres critères que ceux que nous aurons définis.
Il n'y en aura pas. Ces données ne seront pas enregistrées dans les tablettes de l'administration, puisque le dispositif que nous vous proposons ne consistera pas à surveiller la totalité d'internet. En outre, même si un comportement correspondant à un des trois critères précédemment énoncés nous remontait, cela ne signifiera pas nécessairement qu'une infraction aura été commise : certaines alertes seront peut-être, en réalité, des faux positifs. C'est bien la vérification humaine qui déterminera alors s'il convient ou non de contrôler.
Je précise, monsieur de Courson, que, constatant sur internet la commission d'un acte délictueux, chacun doit désormais pouvoir utiliser l'article 40 du code de procédure pénale, et non uniquement les agents publics. En l'occurrence, toutefois, la question ne se posera pas : seuls s'appliqueront les critères définis par l'algorithme que nous aurons créé et que vous aurez autorisé si vous votez en faveur de l'article 57.
La rédaction que vous proposez soulève une véritable interrogation quant à la conformité de l'amendement à l'article 9 du RGPD, le règlement général sur la protection des données. Ce dernier pose une interdiction de principe des traitements des données sensibles – c'est-à-dire des données relatives à l'origine raciale ou ethnique, aux opinions politiques, aux convictions religieuses, etc. Il ne permet des exceptions qu'en cas de « motifs d'intérêt public important », qui doivent « respecter l'essence du droit à la protection des données ».
Or, dans la rédaction retenue et dans l'exposé des motifs, vous indiquez que seront recueillies des informations dont vous n'avez pas besoin, et que vous les conserverez cinq jours alors que vous ne devriez même pas les collecter. J'y vois un véritable problème de conformité à l'article 9 du RGPD.
Il s'agit là d'un sujet majeur de discussion. C'était d'ailleurs pour cette raison que nous avions proposé l'effacement sans délai des données sensibles : ce dispositif, bien que présentant des limites puisqu'il autorisait la collecte d'informations, permettait au moins de les supprimer immédiatement. En l'espèce, vous proposez un dispositif prévoyant à la fois la collecte et la conservation des données pendant cinq jours, tout en expliquant que cela ne servira à rien. Il est totalement orthogonal à l'article 9 du RGPD, ce qui pose un véritable problème.
Le sous-amendement no 3033 est adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 2652 .
Il vise à supprimer l'alinéa 3 de l'article 57. Le fait que des données soient accessibles sur internet ne signifie pas qu'elles peuvent être librement aspirées dans un but autre que celui dans lequel elles ont été publiées. La CNIL vous a d'ailleurs indiqué, monsieur le ministre, que la création volontaire de profils sur les plateformes en ligne n'emporte pas, par principe, la possibilité de leur aspiration ainsi que de leur rediffusion sur d'autres supports non maîtrisés par les personnes concernées.
Pour qu'une collecte de données soit loyale, l'intéressé doit en être informé afin de pouvoir éventuellement exercer son droit d'accès et de rectification. Or, évidemment, par hypothèse, la collecte de ces données ne pourra pas être loyale, puisque, l'objectif de ce traitement étant la poursuite d'infractions, les droits d'information et d'opposition en seront exclus. Un droit d'accès est prévu, mais on voit mal comment il pourrait s'exercer : faute d'information des intéressés, il restera lettre morte.
Supprimer l'alinéa 3 reviendrait à supprimer l'article 57, puisque les données collectées seraient inutilisables. Si l'administration dispose de données sur le contrôle fiscal sans possibilité de les utiliser, je ne vois pas à quoi servirait l'expérimentation.
J'émets donc un avis très défavorable.
Je ne peux pas me contenter de la réponse du ministre selon laquelle l'éventualité que j'évoquais ne pourrait pas se concrétiser : bien sûr que ces cas se présenteront ! La deuxième phrase de l'alinéa 3 le dit d'ailleurs explicitement, puisqu'elle dispose que, « Toutefois, lorsqu'elles sont utilisées dans le cadre d'une procédure pénale, fiscale ou douanière, ces données peuvent être conservées jusqu'au terme de la procédure ». Cela signifie bien qu'on pourra découvrir des crimes et des délits sans lien avec la procédure – qu'il s'agisse de procédures pénales révélant des problèmes fiscaux ou de procédures fiscales dont émergeraient des problèmes pénaux. Nous en avons discuté longuement à l'occasion de la réforme du verrou de Bercy.
Vous apportez donc une réponse de techno : vous prétendez que cela n'arrivera jamais, alors que cela arrivera forcément ! Demandez à des juges d'instruction !
Sourires sur le banc du ministre.
Tout à fait, c'est une réponse de techno, du même acabit que « les centrales nucléaires sont parfaites et jamais il n'arrivera rien » ! Notre collègue du MODEM a tout à fait raison de dire qu'il y a un vrai problème. Le texte dit d'ailleurs explicitement que le délai de destruction de cinq jours ne sera pas respecté – ce qui est logique, parce que dans le cas contraire l'article 40 du code de procédure pénale ne pourrait pas s'appliquer. Il y a bien un problème.
C'est bien la première fois qu'on me traite de techno… Je ne le prends pas négativement, surtout venant de la part d'un expert – car je crois que vous étiez magistrat de la Cour des comptes, monsieur de Courson.
Sourires.
Je n'ai pas dit que vous étiez un techno, j'ai dit que votre réponse était celle d'un techno, ce qui n'est pas tout à fait la même chose !
L'amendement no 2652 n'est pas adopté.
Il vise à remplacer, à la première phrase de l'alinéa 3, les mots « de nature à concourir » par les mots « strictement nécessaires ». Toute notre discussion est surplombée par la question de la proportionnalité du dispositif. Or, clairement, les mots « de nature à concourir » sont tellement vagues et larges que cette proportionnalité n'est pas assurée. Nous proposons donc d'y substituer les mots « strictement nécessaires », afin de cadrer davantage le dispositif – même si ce n'est, selon moi, pas encore tout à fait suffisant.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 2560 .
Il se distingue du précédent en ce qu'il tend à conserver les deux critères – « de nature à concourir » et « strictement nécessaires » – , pour mieux verrouiller encore le dispositif.
L'amendement no 2337 n'est pas adopté.
L'amendement no 2560 est adopté.
L'amendement no 2561 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement no 2562 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Cet amendement de repli tend, à la première phrase de l'alinéa 3, à substituer aux mots : « d'un an » les mots : « de quatre mois ». La conservation des données personnelles doit en effet être la plus brève possible.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l'amendement no 2166 .
Cet amendement du groupe Socialistes et apparentés vise, dans la ligne de l'avis de la CNIL, à réduire les délais de conservation des données prévus à l'article 57, lequel, dans sa rédaction actuelle, permet de conserver pour une durée maximale de un an les données collectées de nature à concourir à la constatation d'infractions fiscales ou douanières et pour une durée maximale de trente jours les autres données. Il est ainsi proposé de réduire ces délais à six mois et quinze jours respectivement.
Chères collègues, nous avons adopté des amendements qui satisfont partiellement les deux vôtres – je pense au délai de cinq jours prévu par l'amendement présenté tout à l'heure par Mme Cariou et à la disposition que nous venons de voter, qui prévoit un double critère en précisant que les données conservées au-delà de trente jours ne doivent pas être seulement « de nature à concourir » à la constatation des faits, mais être aussi « strictement nécessaires ». En revanche, un délai de quatre ou six mois semble un peu court s'il faut exploiter des données. Votre préoccupation est donc satisfaite pour les données sensibles ou en cas de problème particulier, mais pas dans les autres cas. Avis défavorable.
La question est intéressante et le fait que le rapporteur général réponde en évoquant d'autres amendements attise notre curiosité. Pourquoi ce délai de un an ? Peut-être est-ce la durée d'un exercice fiscal ? J'ai cru comprendre que les données devaient être collectées uniquement dans le cadre d'une enquête. Cela ne me semble pas aberrant sur le principe, mais pourquoi conserver ces données pendant un an, alors que la vitesse de recherche des algorithmes est très rapide, à moins qu'elle ne soit très ciblée ? La durée d'une enquête me paraît plus adaptée que celle d'un exercice fiscal.
Monsieur le député, lorsque nous aurons mis en place l'algorithme qui récupérera les données et introduit certains critères au titre de l'expérimentation que vous autoriserez peut-être en votant l'article 57, l'administration se donnera un an pour procéder aux contrôles. En effet, si les remontées sont très nombreuses, comme c'est le cas, notamment, dans le contexte très différent des contrôles sociaux – dont Mme Pires Beaune nous parlera peut-être demain – , les aviseurs nous fournissent une liste de comptes à vérifier, mais cette vérification ne pourra pas se faire en un instant et il faudra plusieurs jours, plusieurs semaines et parfois plusieurs mois pour que les équipes de contrôle fiscal fassent ce travail, qui doit en effet être programmé.
Dans le cas des données intéressantes et parfaitement conformes à ce qu'autoriserait le législateur, on donne un an à la DGFiP et aux vérificateurs pour procéder, s'il y a lieu, au contrôle fiscal, en fonction des critères et des nouvelles possibilités que permettent les données : cela peut se faire aussi bien le lendemain de la réception de ces données que trois ou quatre mois plus tard.
L'amendement no 2563 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Cet amendement vise à indiquer que seules peuvent être exploitées les données mentionnées au premier alinéa manifestement rendues publiques par la personne concernée et se rapportant à elle. Il s'agit en effet de limiter le champ de collecte et d'utilisation des données sur la base de tags ou de commentaires qui ne sont pas publiés par les personnes concernées, mais par des tiers. En effet, il a été expressément dit que l'on chercherait les données manifestement rendues publiques par les personnes concernées elles-mêmes et il importe donc de le préciser, sans quoi vous verrez fleurir de fabuleux aviseurs électroniques : tous les tags et tous les commentaires les plus malveillants et les plus malfaisants possibles utiliseront aussi ce système pour engorger votre algorithme. En outre, sur le plan des libertés publiques et de la proportionnalité, il faut absolument pouvoir limiter le champ aux personnes concernées.
L'amendement identique no 2668 de Mme Sarah El Haïry est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Votre amendement priverait votre dispositif de beaucoup d'efficacité. De fait, et pour faire écho à la présentation qui en a été faite en séance publique, quand on veut « truander » par le biais d'un réseau social, on utilise un tiers de confiance, qui envoie différentes informations pour promouvoir l'activité occulte de son commanditaire et qui ne sera pas concerné. L'adoption de votre amendement poserait donc un énorme problème.
Techniquement, au surplus, il n'est pas toujours possible d'identifier la personne qui a publié le contenu en cause : il faudrait alors détruire toutes les données collectées, faute d'en identifier l'auteur avec certitude.
En troisième lieu, nous venons d'adopter des amendements qui restreignent considérablement le champ et la portée de cet article 57, ce qui me semble apporter des garanties suffisantes. Avis défavorable.
Nous avons déjà eu cette discussion en commission des finances. Cet amendement permettait de régler un problème de proportionnalité et je le maintiens donc, même si je sais le sort qui lui sera réservé. Le dispositif prévu par le texte pose un vrai problème du point de vue des libertés, publiques ou individuelles, et de la protection de la vie privée.
Je suis tout à fait d'accord avec M. Latombe : autoriser la collecte d'informations venant de tiers soulève un vrai problème. C'est la porte ouverte aux règlements de comptes sur les réseaux sociaux et il est évident que des tiers, parfois tout à fait innocents, mais parfois pas du tout, exprimeront des commentaires qui pourront inciter l'administration fiscale à regarder avec plus d'attention les données concernant n'importe quel utilisateur qui n'aurait peut-être pas fait l'objet d'un contrôle sans ces commentaires provenant de tiers. C'est vraiment là une porte ouverte à la délation.
J'ai du mal à comprendre. Vous raisonnez comme s'il ne devait y avoir que des algorithmes. Les critères que nous mettons en place fonctionneront certes comme un moteur de recherche, avec des mots qui permettront d'indiquer, le cas échéant, une suspicion forte de vente de tabac sur internet ou de résidence manifeste en France pour des personnes domiciliées fiscalement à l'étranger, et les données qui remonteront seront analysées par des algorithmes que nous nous efforçons de rendre aussi performants que possible, mais il y aura évidemment une vérification humaine. Quelqu'un pourrait assurément remonter du lac de données et être confondu, par exemple, pour vente de tabac sur internet si ses amis les plus proches placent des commentaires destinés à attirer l'attention sur lui – car c'est là, je l'ai compris, votre crainte la plus absolue – , mais le vérificateur dispose de données variées, car les informations de l'administration fiscale ne se limitent pas au seul internet. Madame Pires Beaune, les indications fournies par les aviseurs sont vérifiées et le contrôle n'est déclenché que si ces informations sont sérieuses.
En deuxième lieu, je comprends aussi que vous tentez de faire en sorte que le Conseil constitutionnel, en se penchant sur nos débats, considère que l'article 57 ne serait pas constitutionnel – comme si le principe de la proportionnalité et des libertés individuelles était son seul critère. Mais, comme l'ont relevé la CNIL et le Conseil d'État, et comme le relèvera sans doute le Conseil constitutionnel lui-même, qui l'a du reste fait dans plusieurs décisions – notamment à propos du verrou de Bercy, alors qu'on faisait le même procès pour dire qu'il n'était pas constitutionnel de pouvoir être condamné deux fois pour la même chose – le Gouvernement, conformément à la loi votée par le Parlement, doit obéir aussi au principe qui lui commande de lutter contre la fraude fiscale. Il lui appartiendra donc de fixer le bon équilibre.
C'est précisément cet équilibre que nous offre le dispositif proposé par le Gouvernement et amendé par le Parlement, avec l'expérimentation et le passage par la loi et par le décret, ainsi que par la CNIL et le Conseil d'État, puis avec l'évaluation de l'expérimentation rendue au bout d'un an et demi, et encore au bout de trois ans. S'y ajoute aujourd'hui une nouvelle clé de contrôle : le Parlement ad hoc, si je puis dire, qui sera associée à toutes les étapes.
Cela me paraît le bon équilibre entre l'objectif de protection des libertés individuelles, auquel nous sommes tous attachés, et celui de la lutte contre la fraude. Ce texte n'est donc pas déséquilibré. Malgré les prises de parole consistant essentiellement à nous reprocher de nier la liberté individuelle et la protection des données personnelles – car c'est ainsi que le débat pourrait être lu – , j'espère que ceux qui jugeront de la constitutionnalité de la loi y trouveront cet équilibre.
Comment peut-on utiliser des données fournies par des tiers sans autorisation de la personne mentionnée, alors qu'il est affirmé qu'on utilise des données manifestement rendues publiques ? Il y a là un véritable problème de libertés publiques et de libertés individuelles. Nous ne sommes donc pas ici dans le cadre de l'article 9 du RGPD.
J'ai déjà défendu cet amendement et serai donc bref. Il tend, une fois encore, à ajouter la mention « sans délai » pour ce qui concerne la suppression des données sensibles. Vous avez en effet expliqué avec l'amendement précédent, qui a été adopté, que vous supprimeriez ces données dans un délai de cinq jours parce qu'elles ne servent à rien. Or, conformément à l'article 9 du RGPD, elles n'ont pas à être collectées. Vous devez donc les détruire sans délai lorsqu'elles l'ont été.
Je comprends bien que, compte tenu de la technique utilisée, les données sont d'abord aspirées, avant de passer par des filtres, opération pour laquelle vous estimez avoir besoin de cinq jours. Pour les données sensibles, cependant, on ne peut pas se permettre d'attendre cinq jours et un filtre doit s'appliquer immédiatement après l'aspiration des données pour les évacuer et les effacer de l'ensemble des serveurs.
L'amendement no 2669 de Mme Sarah El Haïry est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
C'est, en effet, toujours la même discussion. Si toutefois on veut que l'expérimentation fonctionne, il convient de maintenir les délais prévus dans l'article, d'autant plus que nous avons adopté en commission des amendements propres à vous satisfaire, notamment avec la réduction à cinq jours du délai de conservation pour les données sensibles manifestement sans lien avec les manquements recherchés. L'avis est donc défavorable.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 2564 .
Étant donné qu'il s'agit d'un amendement du groupe La République en marche, je propose qu'il soit défendu par Mme Émilie Cariou ou par un de ses collègues.
Comme je l'ai également exposé tout à l'heure, il s'agit de faire en sorte qu'à l'issue de la collecte des données, un contrôle fiscal en bonne et due forme soit réellement programmé. Les données collectées ne peuvent pas donner lieu à des redressements automatiques réalisés par un algorithme : elles doivent être remises aux services chargés des contrôles fiscaux ou douaniers, qui mettront ensuite en place la procédure classique de contrôle, à laquelle s'appliqueront normalement toutes les garanties et tous les droits des contribuables.
Monsieur le ministre, je vous poserai une question un peu impertinente : actuellement, les services ne procèdent-ils pas déjà ainsi sans autorisation ? En d'autres termes, des amis inspecteurs des impôts nous racontent bien comment ils procèdent : ils vont sur les sites, sans aucune autorisation. Oui ou non ?
Monsieur le député, votre question n'est pas impertinente, ou alors elle l'est en retard. Nous avons en effet expliqué que la loi autorise déjà les contrôleurs à le faire – mais ils le font manuellement. Certaines histoires, que je ne souhaite pas détailler ici, …
… montrent que certaines personnes, qui ont passé plus de temps sur le territoire national qu'en dehors, …
… auraient dû payer leurs impôts en France.
Le contrôleur fiscal peut donc déjà faire une vérification manuelle. C'est d'ailleurs pour cela que nous avons un peu de mal, il faut bien l'avouer, à comprendre une certaine résistance de la part d'une partie de l'hémicycle – même si nous sommes évidemment là pour que le texte passe sous les fourches caudines des parlementaires à travers une discussion et un vote.
Il nous semble hypocrite d'autoriser le contrôle manuel et d'interdire le contrôle informatique. Cela reviendrait à appliquer la recommandation de M. Coquerel, dont je ne voudrais pas caricaturer une nouvelle fois les propos mais qui disait, en substance : « N'investissez pas dans les moteurs de recherche mais dans les postes d'agents. » Nous pourrions donc louer le CNIT et y placer 2 000 à 4 000 agents de la DGFiP pour qu'ils surveillent manuellement, sans ordinateur, les réseaux sociaux des contribuables que nous souhaitons contrôler ! Vous voyez bien dans quelle situation absurde nous nous trouverions. Nous proposons plutôt d'utiliser les moyens modernes, informatiques, technologiques, qui nous permettent d'avoir recours à ce type de contrôle, sous couvert de la loi relative à la protection des données personnelles. Mais vous avez tout à fait raison : les contrôles existent déjà.
L'amendement no 2564 est adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 2657 .
Il vise à instaurer auprès de la CNIL un droit d'accès facile et rapide pour les utilisateurs contrôlés.
Ce type d'amendement n'a aucune portée juridique. Les termes « facile » et « rapide » ne relèvent pas du registre normatif. Sur le fond, il faut tout de même faire confiance à la CNIL pour surveiller l'expérimentation de très près. L'avis est défavorable.
L'amendement no 2657 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je propose que M. Latombe défende son amendement, qui a été adopté en commission des finances.
La parole est à M. Philippe Latombe pour soutenir l'amendement no 2340 .
Il s'agit simplement de corriger une erreur de référence, figurant dans le dispositif prévu par le Gouvernement, à propos de la loi relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, celle-ci ayant été recodifiée. Ce changement de référence, qui semble nécessaire, avait été accepté par la commission des finances.
Cet exposé vaudra également pour les amendements identiques nos 2566 de la commission des finances et 2341 de la commission des lois.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 1083 .
Par cet amendement, je propose d'insérer, après l'alinéa 5, l'alinéa suivant : « L'utilisation abusive, la transmission et la vente de données personnelles sont évidemment interdites. » Il s'agit de préciser que les données personnelles sont par définition attachées aux personnes et que, à ce titre, elles ne peuvent être traitées comme de simples données mais doivent être strictement protégées. C'est d'ailleurs tellement vrai que l'article 57 a fait l'objet d'un double avertissement de la part de la CNIL et du Conseil d'État.
Cet amendement est totalement superfétatoire. Nous avons déjà ajouté énormément de garanties. Il n'est pas nécessaire de rappeler celles qui existent déjà en l'état actuel du droit. L'avis est défavorable.
Monsieur le rapporteur général, lorsqu'il s'agit de libertés individuelles, cela va mieux en le disant.
L'amendement no 1083 n'est pas adopté.
Je laisse la parole à M. Latombe pour soutenir son amendement adopté en commission des finances.
La parole est à M. Philippe Latombe pour soutenir l'amendement no 2341 .
Comme je le disais tout à l'heure, il s'agit une nouvelle fois de corriger une erreur de référence.
La parole est à Mme Albane Gaillot, pour soutenir l'amendement no 2130 .
Cet amendement vise à préciser que la CNIL est saisie pour le décret en Conseil d'État nécessaire à la mise en oeuvre effective des traitements permettant la collecte et l'exploitation des données à caractère personnel. Vous l'avez dit tout à l'heure, mais il est toujours bon de l'écrire.
L'avis de la CNIL est requis par la loi informatique et libertés pour la mise en place de divers traitements automatisés. Dès lors, prévoir un avis de la CNIL pour le décret d'application de l'expérimentation me semble particulièrement intéressant à condition bien sûr qu'il ne s'agisse pas d'un avis conforme qui lierait trop fortement le Gouvernement. Cet amendement reprend d'ailleurs une proposition de la CNIL qui a souhaité être saisie sur le décret d'application – la commission a accepté cet amendement à l'article 88. L'avis est favorable.
L'amendement no 2130 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Philippe Latombe, pour soutenir l'amendement no 2342 .
Monsieur le ministre, je pense que nous ne trouverons pas d'accord ce soir sur ce point qui nous oppose. C'est un problème de proportionnalité qui se pose. Nous n'avons pas du tout la même vision de ce que pourrait dire le Conseil constitutionnel. Vous rappelez que, dans certains cas, par exemple le verrou de Bercy, il n'a rien trouvé à redire. Cependant, en juin 2019, à l'occasion d'une question prioritaire de constitutionnalité sur la fraude sociale, il a précisé que la vie privée était plus importante que plusieurs dispositifs prévus il y a quelques années dans le cadre d'un PLFSS.
Avec cet amendement, nous proposons, sans toucher à la partie parlementaire, de cadrer ce qui figurera forcément dans le décret en Conseil d'État, à savoir la mention détaillée de toutes les étapes de l'expérimentation, de la phase de construction de votre algorithme à celle de sa mise en production.
Je trouve ces deux amendements assez étranges du point de vue législatif. Faudrait-il donc maintenant inscrire dans la loi que les décrets doivent respecter la Constitution – puisqu'il est question du principe de proportionnalité, qui est constitutionnel ? Je ne sais pas ce qu'en pense M. le ministre, mais ces amendements sont inutiles puisque ce principe s'applique déjà. Ils offrent une fausse garantie.
La parole est à Mme Albane Gaillot, pour soutenir l'amendement no 2131 .
Conformément à la délibération rendue par la CNIL portant avis sur le projet de loi de finances, le présent amendement vise à prévoir qu'une analyse d'impact relative à la protection des données – AIPD – est réalisée et transmise à la CNIL, dans les conditions prévues par la réglementation applicable.
Même si cet amendement est moins essentiel que le précédent, il me semble tout de même intéressant. J'émets donc un avis de sagesse.
L'amendement no 2131 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Il s'agit de prévoir le bilan d'étape intermédiaire dix-huit mois avant la fin de l'expérimentation que j'ai présentée tout à l'heure.
Cet amendement, qui avait été déposé en commission des lois, prévoit que l'expérimentation puisse faire l'objet d'un bilan annuel dans le cadre du PLF grâce à une clause de revoyure, même si le Conseil d'État estime que ce n'est pas dans ce cadre du PLF que ce bilan doit être fait.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l'amendement no 2167 .
Il est favorable aux amendements des commissions et défavorable à ceux de Mme Untermaier.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 2619 .
Il s'agit de proposer une évaluation de cette expérimentation dès septembre 2020 pour que les parlementaires puissent la juger à l'occasion du prochain projet de loi de finances. Car, dans cet article, l'autorisation est donnée à titre expérimental pour trois ans. Il s'agit, ni plus ni moins, du droit de chacun à la protection de la loi contre les immixtions dans sa vie privée, ce qui est, comme on l'a dit, un des fondements de la démocratie. Il convient dès lors de hâter cette évaluation une première fois, en septembre 2020.
Je pense que cette évaluation serait prématurée et n'apporterait pas grand-chose. Je demande donc le retrait et émets à défaut un avis défavorable.
L'amendement no 2619 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 57, amendé, est adopté.
L'amendement no 2659 de Mme Sarah El Haïry est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
L'amendement no 2659 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet article va évidemment dans le bon sens, en simplifiant les déclarations d'impôts, en prévoyant une déclaration tacite pour plus de 10 millions de foyers fiscaux. Mais, puisqu'il s'agit d'un article de simplification, j'en profite pour vous alerter une seconde fois, monsieur le ministre, sur un point.
La taxation des revenus financiers s'effectue directement à travers le PFU – le prélèvement forfaitaire unique – dont le taux est de 30 %, ce qui est désavantageux pour une très grande partie des contribuables. Le PFU n'est avantageux que pour ceux qui disposent de gros revenus financiers. En clair, le PFU s'applique par défaut, et ceux qui veulent rester imposés selon le barème progressif doivent cocher la fameuse case « 2OP ». J'ai eu affaire à un contribuable pénalisé en raison de ses revenus financiers modestes. Nous avons demandé pour lui un dégrèvement, qu'il a obtenu. Après avoir rencontré une autre personne se trouvant dans le même cas, je me suis dit que cette situation concernait peut-être un nombre de personnes important, qu'on n'a pas pu déterminer pour l'année 2019. Je suggère donc, pour l'année prochaine, que vous acceptiez que le maintien du barème progressif devienne le choix par défaut et que les contribuables souhaitant passer au PFU cochent, eux, une case.
La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne, pour soutenir l'amendement de suppression no 1508.
Cet article a pour objet de permettre aux contribuables pour lesquels l'administration a la raisonnable assurance de disposer des informations nécessaires à l'établissement de leur impôt sur le revenu de remplir leurs obligations déclaratives par validation tacite de ces informations.
Dès 2020, les foyers fiscaux concernés pourront remplir leurs obligations de manière tacite, l'absence de souscription valant confirmation de l'exactitude des informations dont dispose l'administration fiscale. Au prétexte de simplifier les obligations déclaratives de quelque 12 millions de contribuables, il est en réalité proposé de ne plus formellement exiger que le contribuable consente à l'impôt.
Ce consentement est aujourd'hui matérialisé dans la souscription de la déclaration prévue à l'article 170 du code général des impôts. La mesure proposée porte un coup de canif au principe constitutionnel de libre consentement à la contribution publique. Ce point peut être discuté juridiquement, mais, en tout état de cause, nous estimons nécessaire que les contribuables matérialisent formellement leur consentement, ce qu'interdit le dispositif que vous proposez et qui rapproche un peu plus le prélèvement à la source de la dîme de l'Ancien régime. Nous le regrettons, car il nous paraît essentiel de ne pas défigurer l'impôt républicain au nom de l'optimisation du traitement des déclarations.
C'est pour cette raison que nous demandons la suppression de l'article.
Défavorable. Je ne vois pas en quoi une mesure de simplification, de nature à favoriser le consentement à l'impôt, pourrait nuire à ce consentement.
L'amendement no 1508 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Anthoine, pour soutenir l'amendement no 1086 .
Par cet amendement de notre collègue Le Fur, nous sollicitons la remise au Parlement, avant le 30 juin 2020, d'un rapport sur l'application du crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement.
En application de l'article 60 modifié de la loi de finances pour 2017 du 29 décembre 2016, les contribuables peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement – CIMR – à raison des revenus non exceptionnels qui, perçus ou générés en 2018, entrent dans le champ du prélèvement à la source.
Toutefois, cet article fait l'objet d'appréciations divergentes de la part des contribuables et de la DGFiP.
Dans le contexte de la loi pour un État au service d'une société de confiance, dite ESSOC, et compte tenu de la volonté du Gouvernement d'améliorer la relation de confiance entre l'administration et les contribuables, deux éléments d'application du prélèvement à la source, pour la quasi-totalité des contribuables ayant perçu une rémunération variable en 2018, font aujourd'hui l'objet, de leur part, d'interrogations dont ils saisissent régulièrement les antennes locales de la DGFiP et les parlementaires.
Ces interrogations portent, d'une part, sur la nature de la rémunération variable qui, sans être mentionnée sur le contrat de travail, figure dans tout document à valeur contractuelle au sens de la jurisprudence de la Cour de cassation ; et, d'autre part, sur les règles de détermination du crédit d'impôt pour la modernisation du recouvrement applicables aux indépendants et aux salariés, au regard de la comparaison entre les rémunérations perçues en 2018 et celles perçues en 2015, 2016 et 2017, puis, le cas échéant, en 2019.
Le rapport s'attachera donc à préciser les conditions d'application du CIMR et à fournir une évaluation précise du montant de l'impôt collecté sur les revenus de 2018 qualifiés d'exceptionnels.
Lors de l'examen en commission du projet de loi de finances rectificative, le ministre a précisé que les données ici demandées seraient disponibles l'année prochaine. Je suppose qu'elles nous seront alors transmises ; si tel n'est pas le cas je vous inviterai, madame Anthoine, à déposer le même amendement. À ce stade, donc, demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
L'amendement no 1086 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 58 est adopté.
L'amendement no 2939 du Gouvernement est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Nous avions présenté cet amendement qui vient d'être fort bien défendu par le Gouvernement, auquel nous ne demanderons pas de droit d'auteur.
Sourires.
L'amendement no 2939 est adopté.
La parole est à M. Jean-Paul Mattei, pour soutenir l'amendement no 2831 .
Cet amendement, que j'ai déposé avec Éric Coquerel, est issu de notre rapport d'information sur l'impôt universel. Il vise à instaurer une contribution de 5 % sur des revenus supérieurs à 240 00 euros par an. Si les personnes qui résident à l'étranger y ont déjà payé un impôt supérieur à celui qu'ils paieraient à travers cette contribution, ils n'auraient pas à s'en acquitter, bien entendu.
Cette disposition s'inspire d'un système déjà en vigueur dans d'autre pays européens, notamment en Allemagne, pour des contribuables qui, installés dans des pays à fiscalité privilégiée, continueraient à bénéficier dans le nôtre d'avantages sociaux tels que l'assurance maladie.
Selon un article paru aujourd'hui dans Le Figaro, le nombre d'exilés fiscaux va diminuant : en somme, on se trouve bien en France. S'il peut en choquer quelques-uns, cet amendement, sérieux, mérite à mes yeux un examen attentif ; il aura en tout cas été un amendement d'appel s'il n'est pas adopté.
Nous avons déjà eu ce débat à plusieurs reprises, y compris en première partie du PLF ; je ne m'y étendrai donc pas.
Il est ici fait référence à des dispositions qui existent en Allemagne, mais sous un régime bien plus encadré, qui exige en particulier le maintien d'un lien avec le pays d'origine. Pour être applicable, la mesure implique, outre-Rhin, un seuil minimal de revenus de source allemande et impose aux intéressés d'avoir leurs principaux centres d'intérêt économiques en Allemagne.
Votre amendement n'est donc pas inintéressant, monsieur Mattei, mais il ne me semble pas opportun à ce stade : demande de retrait et, à défaut, avis défavorable.
L'amendement no 2831 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 2627 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 2571 .
Cet amendement, adopté par la commission à l'initiative de Mme Do, tend à proroger le dispositif « Cosse », qui incite à louer à un prix plus abordable en contrepartie d'une déduction spécifique, de 15 à 85 % selon les zones et les ressources du locataire. Ce dispositif arrive en effet à échéance le 31 décembre prochain.
L'amendement no 2571 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme Frédérique Tuffnell, pour soutenir l'amendement no 2861 .
La mission qui m'a été confiée l'an dernier par le Premier ministre avait pour objectif de formuler des propositions pour enrayer la dégradation et la disparition des zones humides, et par là même de préserver les nombreux services qu'elles nous rendent.
Je propose ici de créer un environnement fiscal favorable à la préservation et à la restauration de ces zones, opérations qui peuvent être financièrement dissuasives pour leurs propriétaires. À cette fin, l'amendement rend déductibles des revenus fonciers les dépenses consenties pour des travaux de restauration et de gros entretien afférentes aux milieux humides, en vue de leur maintien et de leur restauration en bon état écologique.
Cette déduction est déjà applicable dans les zones humides situées dans des parcs nationaux et des réserves naturelles, nationales ou régionales. N'y sont éligibles que les travaux qui concourent à la remise en état de l'espace naturel concerné, tel qu'il était avant sa dégradation, et les travaux d'importance qui concourent à l'entretien de l'espace naturel, à l'exclusion des travaux répétitifs que requiert l'entretien courant du site.
De plus, cette déduction d'impôt est plafonnée à 18 % des dépenses exposées en vue du maintien et de la protection du patrimoine naturel, dans la limite annuelle de 10 000 euros.
Par cet amendement de justice, les propriétaires des zones humides pourraient y engager des travaux de restauration dans de très bonnes conditions.
Défavorable, d'abord parce que l'article 31 du code général des impôts permet déjà, dans sa rédaction actuelle, de déduire, au titre des revenus fonciers des propriétés rurales, les charges des travaux de restauration et de gros entretien effectués dans les zones humides situées dans les espaces naturels protégés. Étendre la déduction au-delà de ces espaces ne garantit aucune mesure de préservation de la zone humide, dont la définition, ainsi élargie, ne permettrait pas de déterminer les terrains éligibles.
Aussi conviendrait-il de retravailler votre amendement avec le ministère de l'écologie pour que les propriétaires de tels terrains, déjà bénéficiaires d'un avantage fiscal dérogatoire, puissent être éligibles au dispositif complémentaire que vous proposez, tout en évitant, donc, une définition trop large, non liée aux espaces naturels protégés, de la « zone humide ».
Je me fais ici le porte-parole du ministère de l'écologie, et vous invite à ce stade à retirer votre amendement, quitte à le retravailler avec Mme Borne et, sans doute, Mme Wargon ou Mme Poirson, c'est-à-dire également avec le ministère du logement.
J'ai du mal à comprendre cette réponse, car les zones humides ont bel et bien été définies dans le rapport que je leur ai consacré. Le présent amendement a d'ailleurs été travaillé avec Emmanuelle Wargon. Les zones humides sont déjà cartographiées dans beaucoup de communes ou intercommunalités.
Cet amendement est intéressant en ce qu'il ferait reconnaître la contribution des terres humides et, de façon plus générale, des territoires ruraux à la préservation de la biodiversité et à la lutte contre le réchauffement climatique. Nous devons réfléchir à la façon de prendre en compte les aménités – autrement dit les plus-values – environnementales, que ce soit à travers un environnement fiscal favorable ou des dotations.
Le définition et la cartographie précise des zones humides peuvent poser problème, mais le présent amendement va dans le bon sens.
Les zones humides sont peut-être définies en tant que telles, madame Tuffnell, mais elles ne le sont pas dans le code général des impôts. La difficulté, donc, est qu'une telle zone pourrait être éligible à une aide fiscale – puisque vous préférez cette solution à celle des crédits budgétaires – sans avoir reçu de définition précise dans ce code.
Sans doute existe-t-il une définition des zones humides en dehors des espaces naturels : je n'en disconviens pas mais, si votre amendement était adopté en l'état, nous serions bien en peine de l'appliquer, pour les raisons que je viens de dire. C'est pourquoi je me permettais de vous renvoyer vers le ministère de l'écologie, pour trouver, sans doute en lien avec Bercy, une définition que l'on puisse inscrire dans le code général des impôts.
L'amendement no 2861 n'est pas adopté.
L'amendement no 1845 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Louis Bricout, pour soutenir l'amendement no 1985 .
Cet amendement fait suite à un rapport de Mme Louwagie.
Le 13 juin 2018, l'ANSM – Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé – a fait savoir que le valproate de sodium serait interdit à toutes les femmes en âge de procréer. Le présent amendement du groupe Socialistes et apparentés vise donc à étendre aux victimes de ce produit ainsi qu'à ses dérivés les dispositions des articles applicables aux victimes de l'amiante.
Les indemnités nécessaires aux soins des victimes ne seraient donc plus soumises à l'impôt sur le revenu et sortiraient de l'assiette de base du calcul des successions.
Je vous invite à retirer cet amendement, car il est satisfait : d'une part, les indemnités versées en capital – et non sous la forme de rentes – ne sont par définition pas soumises à l'impôt sur le revenu, et c'est bien sous cette forme que se présentent les indemnités versées par l'ONIAM – Office national d'indemnisation des accidents médicaux – dans le cadre du dispositif Dépakine ; d'autre part, l'article 775 bis du code général des impôts prévoit déjà que « les rentes et indemnités versées ou dues au défunt en réparation de dommages corporels liés à un accident ou à une maladie » sont déductibles de l'actif de succession.
Oui, monsieur le président, je suis satisfait par les explications du rapporteur général.
L'amendement no 1985 est retiré.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l'amendement no 2680 .
L'État, monsieur le ministre, doit à nos forces de l'ordre, police et gendarmerie, 274 millions d'euros d'heures supplémentaires, une somme assez colossale. De plus, nos forces de l'ordre effectuent chaque année 3 millions d'heures supplémentaires.
Sur le paiement de cette somme, le secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur a annoncé un calendrier. L'objet de cet amendement de Marc Le Fur n'est pas de vous demander s'il a été fixé ou non, mais de défiscaliser intégralement le paiement de ces heures supplémentaires.
Les membres des forces de l'ordre attendent depuis des années ; ils ont été patients. La première des reconnaissances serait de leur payer leurs heures supplémentaires – et de les défiscaliser.
Je vous invite à retirer l'amendement. D'abord, il crée un effet d'aubaine ; ensuite, il convient d'attendre la fin des négociations – qui sont de la même nature que les négociations entre un employeur et ses salariés. Il ne s'agit pas d'un problème fiscal en soi, mais si vous voulez le traiter par la fiscalité, il faudrait, par cohérence, défiscaliser également tous les rappels d'heures supplémentaires antérieurs à 2019 que les salariés du privé obtiennent aux prud'hommes. Une telle exonération ne serait pas logique, donc je vous saurais gré de retirer l'amendement ; sinon, avis défavorable.
L'amendement no 2680 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il tend à sécuriser le dispositif IR-PME pour les foncières solidaires – structures qui viennent accompagner un public fragile en matière de logement. L'amendement vise à protéger un dispositif qui nous est cher parce qu'il répond à l'intérêt général. Pour ne pas prendre le risque de ne pas être en adéquation avec les règles communautaires, nous proposons une mesure de cohérence qui vient sécuriser des organismes qui servent la cohésion de notre pays.
La parole est à Mme Stella Dupont, pour soutenir le sous-amendement no 3075 .
S'inscrivant dans la continuité de l'amendement présenté par Mme El Haïry, le sous-amendement tend à élargir le mandat de service d'intérêt économique général, SIEG, pour y inclure les foncières solidaires à vocation agricole et environnementale. Sans cette disposition, les foncières agricoles verront le taux de réduction d'impôt sur le revenu des personnes physiques sur la souscription de leurs parts sociales passer de 18 % à 0 % en 2020, ce qui risque de menacer la pérennité de leur modèle. L'utilité de ces foncières est pourtant avérée : par exemple, Terre de Liens Pays de la Loire a permis, depuis 2010, de sécuriser en agriculture biologique plus de 500 hectares de terre et de créer ou de maintenir cinquante emplois agricoles grâce à l'acquisition collective de terre et de fermes. C'est pourquoi le présent sous-amendement les intègre dans le dispositif proposé.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir le sous-amendement no 3047 .
Il vise également à sous-amender l'amendement de nos collègues du groupe MODEM. En effet, l'amendement pose les bases d'un mandat de SIEG pour les foncières immobilières solidaires qui oeuvrent dans le domaine du logement social, mais – Mme Stella Dupont l'a dit à l'instant – exclut une foncière telle que Terre de Liens, qui a pourtant prouvé son utilité sociale et environnementale. Chacun connaît ici le système : grâce à l'épargne citoyenne, la foncière achète des fermes qui sont ensuite mises en location à des agriculteurs aux pratiques respectueuses de l'environnement et des ressources naturelles. Nous souhaitons évidemment que le cadre du SIEG puisse bénéficier également aux foncières agricoles et environnementales ; c'est pourquoi nous proposons un sous-amendement en ce sens.
L'amendement no 2987 de Mme El Haïry procède à une mise en conformité avec le droit européen, donc avis favorable. Quant aux sous-amendements, dont je comprends parfaitement l'intérêt, je vous prie de bien vouloir les retirer pour qu'on puisse retravailler les sujets que vous évoquez dans le cadre de la navette. En effet, les pistes proposées me semblent intéressantes, mais impossibles à adopter sans se pencher sur la question de leur compatibilité avec le droit européen. L'amendement propose un dispositif en conformité pure et dure avec le droit européen ; vous proposez une extension, donc il faut étudier la question à l'occasion de la navette. Demande de retrait ou avis défavorable aux deux sous-amendements.
Avis favorable à l'amendement. Les questions posées par les sous-amendements sont intéressantes, mais ceux-ci – et c'est compréhensible – n'ont pas fait l'objet du long travail que nous avons mené avec Mme El Haïry. En effet, les dispositions proposées doivent passer sous les fourches caudines de la Commission européenne. Il ne s'agit pas d'adopter des dispositions générales, mais de faire du cas par cas. Si les parlementaires le souhaitent, nous pouvons travailler sur ces thématiques dans le cadre de la navette pour présenter des amendements qui intégreraient les précisions proposées. En attendant, avis défavorable – sur le texte, non sur le principe – aux sous-amendements.
Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, j'entends votre proposition de retrait ; néanmoins, il me semble que la décision 201221UE de la Commission du 20 décembre 2011 – relative à l'application de l'article 106, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne aux aides d'État sous forme de compensations de service public octroyées à certaines entreprises chargées de la gestion de SIEG – , mentionnée dans cet amendement, pose le cadre d'un SIEG ouvert à tous les secteurs, sans le restreindre au logement social, tant que le montant de la compensation est inférieur à 15 millions d'euros. L'État est donc libre de définir ses SIEG ; c'est une précision importante.
Monsieur le ministre, merci pour votre proposition. Il est vrai que j'ai moi-même pris connaissance du sujet tardivement, donc je n'ai pas pu solliciter les uns et les autres. Je pense que c'est un vrai enjeu pour nos territoires, donc si j'accepte de retirer le sous-amendement à ce stade, je souhaite en effet qu'on le retravaille dans le cadre de la navette, en lien avec les sénateurs.
L'amendement no 3075 est retiré.
Nous retirons également le sous-amendement, étant donné votre engagement d'organiser un travail collectif.
L'amendement no 3047 est retiré.
Je voudrais rassurer nos collègues : l'amendement vise à sécuriser dans un premier temps les foncières solidaires, en les mettant en conformité avec le régime des SIEG. Mais je connais très bien Terre de Liens et la qualité de ses travaux ; pour être honnête, j'ai eu le même débat avec moi-même, me demandant s'il était possible d'élargir l'amendement. Vu la prise de risque que cela représente – si les dispositions adoptées ne sont pas en conformité avec le droit européen, les foncières solidaires seraient mises en danger – , j'ai décidé pour commencer de sécuriser les foncières en matière de logement. Ensuite, il faudrait travailler avec Terre de Liens sur la sécurisation des foncières agricoles, qui font un travail génial ; nous sommes un certain nombre ici à connaître leurs initiatives dans nos territoires. Pendant la navette parlementaire, je comptais également améliorer la rédaction de la proposition. En attendant, je remercie mes collègues d'adopter la disposition en l'état.
L'amendement no 2987 est adopté.
La parole est à Mme Sarah El Haïry, pour soutenir l'amendement no 2812 .
L'amendement no 2812 est retiré.
L'amendement no 745 est-il défendu ? Je vois des signataires dans la salle… La parole est à Mme Cendra Motin, pour soutenir l'amendement.
Vous n'allez pas me priver du plaisir de réveiller un peu cet hémicycle…
… avec un amendement un peu disruptif qui propose de réaliser une économie de 10 millions d'euros en supprimant les exonérations relatives aux primes allouées à l'occasion de la remise de la médaille d'honneur du travail.
En effet, parce qu'elles tiennent à des accords d'entreprise, ces primes sont en général versées par des grandes entreprises. Les accords en question, non reconductibles, sont d'ailleurs parfaitement pérennes et la fin de cet avantage ne les mettra absolument pas en danger. Un autre argument, c'est qu'aujourd'hui, les salariés bougent beaucoup plus, donc leur ancienneté dans les entreprises est moindre ; ils reçoivent la médaille du travail en enchaînant des expériences dans des entreprises différentes. La médaille ne revêt plus le caractère symbolique qu'elle avait lorsqu'elle récompensait toute une carrière dans une entreprise. Elle continuera évidemment à exister et les primes pourront continuer à être versées, mais elles ne seront plus exonérées d'impôt. Voilà en tout cas ce que propose l'amendement.
Honnêtement, c'est une exonération qui coûte peu – 10 millions d'euros – et qui accompagne la reconnaissance du mérite au travail par une reconnaissance financière. Je ne pense pas qu'il soit judicieux de la supprimer. Avis défavorable.
Je suis très étonné de cet amendement. Si j'étais d'extrême gauche, je dirais, madame, que vous êtes antisociale !
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
N'avez-vous jamais remis de médaille du travail à des gens qui ont travaillé trente ou quarante ans ? C'est une petite récompense, tout à fait modeste : on remet une enveloppe au bénéficiaire, et la somme n'est pas imposable. À ce train, rendez également imposables les prix qu'on gagne dans les concours sportifs, ou que sais-je d'autre… En plus, madame, ce n'est pas un revenu puisque le gain n'a rien de régulier ; il arrive une ou deux fois dans la vie qu'on vous remette une médaille grand or ou une médaille vermeil.
Applaudissements sur les bancs des groupes LR, LT et GDR. – M. Régis Juanico applaudit également.
On ne peut avoir que des réserves face à l'amendement proposé ; j'en ai deux en particulier qui complètent ce qui a été fort justement dit par mon collègue Charles de Courson. D'abord, il ne s'agit pas de grosses primes parce que si je ne m'abuse – dans ce cas, le ministre me corrigera – , les seules primes qui n'entrent pas en compte dans le calcul des revenus soumis à l'impôt sont celles qui ne dépassent pas un mois de salaire. Ce sont donc des petites primes qu'on va pénaliser.
Ensuite, votre majorité prétend vouloir revaloriser le travail, alors pourquoi punir les gens qui se sont engagés pendant des années, parfois des décennies, souvent dans la même entreprise, faisant preuve de fidélité ? Ce n'est pas bien !
D'ailleurs, madame Motin, vous précisez dans l'exposé des motifs que vous voulez, avec cet argent, financer les jeunes entreprises innovantes. Donc pour financer les start-up de la « start-up nation » – qui sans doute n'en ont pas besoin – , vous allez pénaliser des gens qui ont eu un engagement au long cours dans une entreprise. Cela ne me paraît pas aller dans le sens de la revalorisation du travail, notamment de celui des salariés les plus modestes.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Je ne suis pas vraiment étonné de l'amendement, qui me semble correspondre à la mentalité de la majorité ; je le trouve tout simplement petit.
Protestations sur les bancs du groupe LaREM.
C'est un manque de respect pour les travailleurs et pour leur engagement dans une ou plusieurs entreprises – ce n'est pas la question. Je voudrais saluer la sagesse du rapporteur général et du ministre ; rejeter un tel amendement, c'est la moindre des choses !
Mme Agnès Thill applaudit.
Rires.
L'amendement no 745 n'est pas adopté.
C'est un amendement du groupe Les Républicains ; je propose que Mme Dalloz le défende.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l'amendement no 11 .
C'était un amendement de notre collègue Marc Le Fur, que j'ai défendu en commission des finances et que la commission a adopté. Il part d'un principe très simple : l'impôt français étant progressif, tous les revenus ne subissent pas le même taux d'imposition. Ce que l'on connaît en général, parce que c'est noté sur les feuilles d'impôts, c'est le taux moyen d'imposition. La donnée qui manque, c'est le taux marginal, qui permettrait aux contribuables, en fonction de leur dernier revenu, de connaître la fiscalité qui va frapper un investissement ou des revenus complémentaires. Pour donner cette information à l'ensemble de nos concitoyens, il suffirait d'ajouter le taux marginal d'imposition sur les avis d'imposition. Cela offrirait aux contribuables une parfaite connaissance et une meilleure maîtrise de notre système fiscal, assez complexe. La mesure n'a pas de coût particulier, c'est juste une information à l'adresse de l'ensemble des contribuables.
La parole est à M. Joël Giraud, pour soutenir le sous-amendement no 3031 .
En commission, Charles de Courson a fait observer qu'il convenait de mieux définir le taux marginal. C'est pourquoi je propose de bien préciser qu'il s'agit du taux prévu au 1 du I de l'article 197 du code général des impôts – le taux auquel est imposée la dernière fraction du revenu imposable.
Le Parlement est souverain, mais définir le nombre de taux devant figurer sur le site du prélèvement à la source est-il vraiment de nature législative ? De minimis non curat praetor… De plus, vous allez introduire de la confusion. Le taux moyen d'imposition était peu connu des contribuables ; c'est le prélèvement à la source qui l'a mis en valeur. Ils y sont depuis habitués. À l'occasion de l'examen du prélèvement à la source, Mme Louwagie avait présenté des amendements auxquels je m'étais montré favorable et qui ont été adoptés. Nous avons tenu parole et chacun, sur le site des impôts, peut voir, dans son espace particulier, comment sont calculés les taux d'imposition le concernant, même si la formule est complexe.
Introduire plusieurs taux, mesdames et messieurs les députés, qui vont s'afficher quand on va vouloir changer son taux parce qu'on part à la retraite, parce qu'on se marie, parce qu'on divorce, c'est, je le répète, rendre confus un système qui marche bien. Je crois en l'honnêteté de Mme Dalloz et je comprends bien son argument, c'eût été un amendement proposé par un autre député, je me serais dit : tiens, il veut introduire de la confusion dans un dispositif qui fonctionne bien…
Ce n'est pas du tout votre genre, madame la députée, car je sais que vous soutenez avec force la politique gouvernementale et mon action en particulier et je vous en remercie ; mais je ne crois pas qu'il faille accepter de faire figurer un deuxième ou un troisième taux sur l'avis d'imposition du contribuable. Je donne donc un avis défavorable au sous-amendement et aux amendements identiques car l'impôt à la source a tout au moins un grand avantage : sa simplicité.
Je n'ai pas dit que c'est ce que vous vouliez vous-même.
… et quant à mon soutien à votre politique, il n'est pas question que je fasse un chèque en blanc au Gouvernement.
Je vais prendre un exemple très simple, monsieur le ministre. Vous avez vous-même, à l'article 57, donné l'exemple des gendarmes qui couraient après des voleurs dans leur 4L.
Ils la conduisaient !
Imaginons un couple de retraités qui louent un appartement dans leur maison. Avec le prélèvement à la source, ils connaissent le taux auquel leurs revenus de retraite sont imposés. Or vous savez bien que le fait de percevoir des revenus locatifs peut les faire changer de tranche d'imposition. Aussi l'idée, avec ces amendements, est-elle que chacun puisse mesurer sa fiscalité grâce à une présentation affinée, par l'affichage du taux marginal d'imposition. Autrement dit, il s'agit de connaître les conséquences des revenus supplémentaires sur la fiscalité.
Une telle mesure ne sera pas source de confusion mais bien de précision : les contribuables n'utiliseront cette possibilité que s'ils le souhaitent. Il faut que le citoyen français, qui est un contribuable en puissance, soit informé de tout cela.
En effet, monsieur le ministre, nos concitoyens sont plus intelligents que vous ne croyez !
Je pense un peu, comme le ministre, qu'adopter une telle mesure créerait de la confusion.
Il y a plusieurs tranches d'imposition et la visibilité de l'avis d'imposition sera brouillée. Aujourd'hui, quand vous consultez votre compte fiscal, on vous indique votre taux moyen d'imposition. Y ajouter le taux marginal serait source de confusion.
Je vois du reste mal comment on pourra l'identifier sur le site. Vos amendements partent d'un bon sentiment mais, encore une fois, ils sont de nature à créer la confusion. Je ne les voterai pas.
L'argument de la simplicité devrait convaincre une très grande majorité d'entre vous. Des taux, des taux, au bout d'un moment les totaux seront difficiles à faire ! Un seul suffit. En revanche, madame Dalloz, si le souci est de savoir à quel moment on change de tranche, il suffit de faire une simulation pour connaître son taux d'imposition en fonction de la variation de ses revenus, de quelque nature qu'ils soient. Cette simulation permettra à ce couple de retraités que vous prenez en exemple de savoir s'il est intéressant pour eux de louer, ou non, l'appartement dont ils disposent dans leur maison. Votre objectif, louable, d'information des contribuables est donc satisfait par le dispositif en vigueur. Ne complexifions pas ce qui marche très bien, je le répète, et qui est très simple.
Le sous-amendement no 3031 n'est pas adopté.
Il s'agit d'un amendement de réparation, un amendement de justice sociale et fiscale, qui vise à mettre fin à un traitement différent entre les veuves d'anciens combattants qui peuvent bénéficier d'une demi-part fiscale – la condition pour l'obtenir étant qu'elles soient âgées de plus de 74 ans et que leur conjoint soit décédé après son 74e anniversaire – et les veuves d'anciens combattants dont le conjoint est décédé avant l'âge de 74 ans et qui ne peuvent dès lors pas bénéficier de la demi-part additionnelle.
Le présent amendement a failli être adopté, à deux voix près, lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2020. Ce vote a eu une conséquence très concrète : si l'amendement avait été adopté, la mesure que je propose aurait été applicable dès le 1er janvier 2020 et non, comme il est prévu ici, au 1er janvier 2021. Nous aurons donc perdu un an.
Les comptes publics gagnent donc un an de plus sur le dos des veuves d'anciens combattants ! Mais, lors de la discussion, monsieur le ministre, vous avez sans doute quelque peu surestimé le coût de mon amendement en l'évaluant à 150 millions d'euros. De mon côté, je l'avais sans doute sous-estimé. L'amendement de M. Dufrègne, rapporteur spécial, adopté à l'unanimité par la commission des finances, et dont j'espère qu'il sera voté tout à l'heure, estime le coût de 30 millions d'euros…
… avec une portée beaucoup plus large puisqu'il concerne toutes les veuves dont le conjoint décédé possédait la carte du combattant.
Je tiens à saluer la qualité, sur le sujet, de nos débats en commission des finances – qui nous ont permis d'avancer – et j'espère que notre discussion sera de la même teneur ce soir. Il est hélas permis d'en douter au vu de certaines propositions. Je tiens également à saluer l'engagement au long cours, toujours sur cette question, de plusieurs de nos collègues, notamment Marie-Christine Dalloz, Jean-Paul Dufrègne et Régis Juanico. Cette demande est très ancienne ; il s'agit de réparer une injustice majeure dont sont victimes les veuves d'anciens combattants dont le mari est décédé avant l'âge de 74 ans.
Si le présent amendement était voté, elles pourraient bénéficier de la demi-part fiscale supplémentaire de leur mari ancien combattant défunt, dès l'âge de 70 ans. Ce n'est pour nous, je le répète, que justice ; il faut en finir, pour que réparation soit faite, de la discrimination liée à l'âge.
M. Maxime Minot et Mme Christine Dalloz applaudissent.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement no 435 .
Deux questions se posent. L'une, que nous allons traiter dans un moment, concerne les veuves dont l'époux ancien combattant décède avant l'âge de 74 ans, et qui dès lors ne bénéficient pas d'une demi-part fiscale supplémentaire. L'autre est que les veuves, actuellement, ne bénéficient d'une demi-part fiscale supplémentaire, quand bien même leur mari est mort après l'âge de 74 ans, que lorsqu'elles ont 74 ans elles-mêmes. Il est assez bizarre, d'ailleurs, qu'on ait retenu le même âge pour les veuves et pour les maris alors que l'observation montre que, en moyenne, un homme épouse une femme de trois à quatre ans de moins que lui.
Sourires.
Je vous propose donc de passer de 74 à 70 ans l'âge à partir duquel les veuves pourront bénéficier de la demi-part fiscale supplémentaire. Vous me répondrez que c'est une atteinte à l'égalité entre les hommes et les femmes, n'est-ce pas, madame Motin ? Non, au contraire, il s'agit de prendre en considération la réalité sociologique de l'écart d'âge entre l'époux et l'épouse.
La parole est à M. Philippe Dunoyer, pour soutenir l'amendement no 2726 .
Le présent amendement, dans le même esprit que les précédents, est toutefois moins onéreux puisqu'il est ici question d'abaisser l'âge d'accès à la demi-part de 74 à 73 ans, à la fois pour l'ancien combattant et pour la veuve. Il s'agirait donc d'un premier signal – et d'une mesure au coût modeste.
De nombreux amendements traitent du même sujet, et je m'efforcerai d'être synthétique afin de ne pas avoir à reprendre la parole à plusieurs reprises. Je voudrais rappeler l'état du droit qui, à juste raison, ne satisfait pas le monde des anciens combattants. Le code général des impôts attribue une demi-part additionnelle aux anciens combattants âgés de plus de 74 ans et aux veuves âgées de plus de 74 ans d'un mari ancien combattant qui avait plus de 74 ans au moment de son décès. Il s'ensuit une différence de traitement entre les veuves selon l'âge de décès du mari, ce qui est très difficile à comprendre et à justifier.
Ainsi, une veuve de 75 ans a droit à la demi-part si son mari est mort à 75 ans ; mais pas s'il est mort à 73 ans.
La différence de traitement est aggravée par le fait que l'administration fiscale considère que même si le mari avait plus de 74 ans lors de son décès, la veuve n'a pas droit à la demi-part s'il est mort avant d'avoir fait sa déclaration fiscale en vue d'obtenir la demi-part.
Lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances, j'ai donné un avis défavorable aux amendements qui modifiaient les bornes d'âge – c'est le cas de ceux-ci. C'est en effet un débat sans fin. Chaque année on va vouloir abaisser l'âge d'accès à la demi-part… Et si je ne veux pas qu'on touche aux bornes d'âge, c'est aussi, il faut le dire clairement, non seulement parce que cela coûterait cher – M. Juanico l'a souligné – , mais encore parce que cela aggraverait les différences de traitement.
Ainsi, si l'amendement de M. Juanico était adopté, une veuve de 74 ans dont le mari est décédé avant 74 ans et avant 2020 ne touchera jamais la demi-part. En revanche, une veuve de 55 ans dont le mari décéderait à 70 ans après 2020 – cas plus atypique que celui présenté par Charles de Courson : la différence d'âge n'est pas la même – , aurait droit à vie à la demi-part. Bref, l'adoption de cet amendement aggraverait le problème qu'il est censé résoudre.
Entre l'examen de la première partie du budget et celui de la seconde, le rapporteur spécial de la mission « Anciens combattants, mémoire et lien avec la nation », Jean-Paul Dufrègne, a rédigé un amendement qui règle le problème de la différence de traitement et qui a également le mérite de coûter moins cher. En outre, il ne change pas les bornes d'âge – on en reste à 74 ans – et il se contente d'étendre le bénéfice de la demi-part à toutes les veuves dont le mari percevait la retraite du combattant. Le critère de la retraite du combattant est très bon car il repose sur une logique de reconnaissance consécutive à l'arrêt d'une carrière professionnelle. Je rappelle qu'il s'agit d'une retraite forfaitaire qui n'est par conséquent pas soumise à conditions de ressources à partir de 65 ans, tandis que, de 60 à 65 ans, elle est soumise à des conditions de ressources. Ce critère, simple, facilite les contrôles de l'administration fiscale car l'attribution de la retraite du combattant a fait l'objet d'un contrôle avant attribution.
C'est donc à mon avis le meilleur amendement et c'est pourquoi nous l'avons adopté en commission.
Cet amendement no 2570 fait partie de la prochaine série d'amendements pouvant être soumis à une discussion commune. Il coûtera 30 millions d'euros en 2022 – chiffre qui résulte de la démographie des veuves, communiqué par l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre, l'ONAC, et qui résulte du coût moyen de la dépense fiscale qui figure dans le Voies et moyens. Il n'aura pas d'effet en 2021 car il n'implique pas un changement de situation ouvrant droit automatiquement à modification du taux de prélèvement à la source. Pour en bénéficier en 2021, il faudrait procéder à une modulation volontaire, ce qui n'est pas très fréquent.
Il n'y aura donc pas de hausse de la dépense fiscale puisque celle-ci baissera naturellement de 20 millions d'euros par an. J'ajoute que les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et lien avec la nation » et les dépenses fiscales afférentes auront baissé de 320 millions d'euros, soit onze fois plus que le coût de l'amendement. En effet, les crédits budgétaires diminuent d'environ 140 millions d'euros par an et les dépenses fiscales, je l'ai dit, d'environ 20 millions d'euros par an.
Je souhaite que nous cessions, chaque année, de revenir sur cette question sans qu'on y apporte de véritable solution, et j'aimerais que nous n'en fassions pas un psychodrame – et que nous adoptions l'amendement no 2570 à l'unanimité. C'est pourquoi je demande le retrait à son profit de tous les amendements portant sur ce sujet.
Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes LaREM, MODEM, LR, LT, SOC et GDR.
Le Gouvernement donnera un avis favorable à l'amendement no 2570 de la commission des finances. Effectivement, monsieur Juanico, le débat que nous avons eu était intéressant, et nos chiffrages étaient très différents.
Chacun connaît les difficultés que rencontrent une partie des veuves d'anciens combattants. Je me permettrai de proposer un sous-amendement à l'amendement présenté par M. le rapporteur général, pour pallier une rupture d'égalité qui concerne l'attribution de la demi-part – M. le président Woerth a eu l'occasion d'expliquer lors de précédents débats l'origine de la demi-part supplémentaire de quotient familial, dite « des vieux parents », tout comme vous, monsieur de Courson. Pour en bénéficier, il faut avoir eu seul un enfant à charge pendant cinq ans.
Afin de respecter le parallélisme des formes, nous proposons d'imposer une condition : le mari – puisque nous parlons des veuves – doit avoir perçu la retraite du combattant pendant cinq ans. Nous sommes entre nous : une telle mesure coûte 10 millions d'euros, cela représente un effort très important de l'État, sans doute légitime.
M. de Courson évoquait les bornes d'âge ; je comprends bien le sens de son propos, mais j'émets également un avis défavorable aux amendements tendant à modifier les bornes d'âge. Retenir un âge différent pour les femmes, pour des raisons statistiques, est discutable, pour ne pas dire très techno, monsieur de Courson –
Sourires
ce qui n'a rien d'insultant.
Non, non, il existe des amours différentes ! Les bornes d'âge sont de mauvaises mesures : on voit bien en quoi le fait d'établir une limite à 74 ou 75 ans peut être absurde administrativement. Adopter le critère de cinq ans de perception de la pension pour octroyer aux veuves le bénéfice d'une demi-part fiscale supplémentaire fait sauter la borne d'âge. Cela serait équitable du point de vue du droit fiscal, et conforme à l'esprit de concorde républicaine appelé de ses voeux par M. le rapporteur général.
L'avis du Gouvernement est donc favorable à l'amendement de la commission des finances, sous réserve de l'adoption du sous-amendement.
Pour la pleine clarté de nos débats, je rappelle que vous évoquez des amendements qui seront examinés postérieurement à la discussion commune qui nous occupe. Je comprends que vos avis sont défavorables à tous les amendements en discussion commune.
Sur l'amendement no 2570 , déjà évoqué par le rapporteur général et le ministre, je suis saisi par les groupes Les Républicains, Socialistes et apparentés et Libertés et territoires d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Sur le sous-amendement no 3073 du Gouvernement, je suis saisi par les groupes Les Républicains et Libertés et territoires d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. le président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
L'amendement de la commission a été largement discuté et j'estime qu'il est important. J'y suis favorable, mais ce n'est pas le cas du sous-amendement du Gouvernement.
Applaudissements sur les bancs des groupes LR, UDI-Agir et LT. – M. de Courson applaudit également.
L'amendement de la commission éclaircit ce sujet, qui ne concerne pas un très grand nombre de gens, et son adoption ne coûterait pas si cher.
Monsieur le ministre, un bon projet de loi de finances comporte toujours une petite mesure, qui ajoute un peu de justice sociale, qu'on n'a jamais prise alors qu'il l'aurait peut-être fallu, jusqu'au jour où on estime normal de la prendre. Je comprends vos réticences ; j'aurais probablement les mêmes si j'étais à votre place. Mais peut-être est-ce le moment de fendre l'armure et de vous dire que l'idée est bonne.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LR, UDI-Agir et LT. – M. Jean-Louis Bricout applaudit également.
Concernant l'amendement no 6 , j'approuve l'argumentaire de M. le président de la commission des finances. Après un débat en commission, l'amendement no 2570 a été voté à l'unanimité, sans le sous-amendement du Gouvernement. J'aurais retiré mon amendement au profit de celui adopté en commission des finances, mais je le maintiens à cause du sous-amendement no 3073 , que nous n'agréons pas.
Je voudrais donner mon avis sur le sous-amendement, parce que la question me semble importante. J'appelle à voter contre…
Applaudissements sur les bancs des groupes LR et LT.
Exclamations sur les mêmes bancs.
Je veux bien être hué.
Ce sous-amendement vise à réintroduire une condition d'âge pour l'obtention de la demi-part supplémentaire, alors que l'amendement no 2570 , proposé par M. Dufrègne, tend à la supprimer.
Cela reviendrait à recréer la différence de traitement que je dénonçais tout à l'heure, puisque les veuves dont le mari aurait perçu la retraite du combattant pendant quatre ans seulement n'y auraient pas droit. Si nous adoptions ce sous-amendement, la discussion reviendrait chaque année afin d'abaisser la limite, tandis que l'amendement no 2570 résout le problème une fois pour toutes.
Le critère de la retraite du combattant est à la fois le plus logique et le plus juste, puisqu'il repose sur la reconnaissance. Ajouter à la carrière cinq années de perception de la retraite est dépourvu de signification. Sur le plan financier, l'adoption de ce sous-amendement remettra dans le système 5 millions d'euros, à tout casser ; passer de 30 à 25 millions d'euros n'a pas de sens.
L'argument de la cohérence avec les autres dispositifs n'est pas non plus pertinent. Il faut avoir élevé un enfant pendant cinq ans en tant que personne isolée pour avoir droit à une demi-part fiscale supplémentaire : l'objectif était d'exiger une durée de charge assumée. Or, ici, nous ne parlons pas d'une compensation de charge, mais d'une reconnaissance pour service rendu à la nation, ce qui n'a absolument rien à voir. Pour ces raisons, j'émets un avis défavorable au sous-amendement no 3073 .
Merci, monsieur le rapporteur, pour votre sens de l'anticipation. Au risque d'être désagréable, je rappelle que nous n'avons pas terminé la première discussion commune, quand bien même celle qui suit aborde des sujets connexes.
Sourires.
Je suis prêt à retirer l'amendement no 435 , au profit de l'amendement de la commission des finances, que j'ai voté, sous réserve que nous votions tous contre le sous-amendement du Gouvernement.
Que dit-il ? Que la demi-part ne sera accordée que si le défunt a perçu sa retraite pendant cinq ans. C'est donc un amendement d'économie, …
… qui revient à relever de 74 à 79 ans l'âge des anciens combattants à partir duquel…
Il faut avoir 74 ans, or, jusqu'à preuve du contraire, 74 plus 5 font 79 ans.
Je me demande même si l'adoption du sous-amendement ne rapporterait pas un peu d'argent à l'État !
M. Philippe Vigier applaudit.
Ce serait comique !
Un autre argument, monsieur le ministre, pour que vous retiriez ce sous-amendement : dans l'exposé sommaire, vous évoquez l'article 195 du code général des impôts. Je l'ai relu : le délai de cinq ans n'y est mentionné que dans un cas, celui de l'amendement de Courson – c'est moi qui l'ai fait voter.
Il s'agit du maintien de la demi-part pour les veuves civiles lorsqu'elles ont élevé au moins un enfant pendant cinq ans. Cela n'a rien à voir avec notre débat !
M. Éric Coquerel applaudit.
Enfin, c'est l'équivalent d'une pension de réversion, monsieur le ministre. Avez-vous déjà vu des conditions d'âge du type que vous évoquez au versement d'une pension de réversion ?
Ce n'est pas possible ! Je vous en supplie, monsieur le ministre : retirez votre sous-amendement, nous voterons tous l'amendement de la commission des finances, et nous passerons à autre chose !
Applaudissements sur les bancs du groupe LT et sur quelques bancs du groupe LR.
Le sujet, c'est l'égalité. Le bien, monsieur de Courson, peut s'avérer aussi terrible que le mal lorsqu'il est mal fait. L'amendement que vous avez déposé il y a quelques années prévoyait en effet qu'il fallait avoir élevé cinq ans son enfant seul pour avoir droit à la demi-part supplémentaire : c'est vous qui avez fixé une condition d'âge.
Ce qu'a dit le Conseil constitutionnel, c'est qu'il n'était pas nécessaire d'établir une distinction : vous précisez dans l'hémicycle qu'il s'agit de veuves civiles, mais le Conseil constitutionnel n'a rien affirmé de tel, et c'est d'ailleurs pour cela que la demi-part a été remise en cause – nous avons eu ce débat sur d'autres sujets, sans rapport avec les veuves de guerre. Le délai de cinq ans est applicable à tous.
Je dis qu'il est possible que l'amendement de la commission – que le Gouvernement soutient, qui ne met pas de condition d'âge puisque vous avez supprimé le bornage, ni de durée, puisque vous refusez le sous-amendement – soit censuré par le Conseil constitutionnel.
Je vous propose donc de retirer le sous-amendement du Gouvernement ;
Approbations sur les bancs du groupe LR
mais je précise qu'il serait utile qu'avant la navette parlementaire nous demandions quelques avis juridiques. Nous verrons ce qui adviendra ; peut-être serons-nous étonnés par la décision du Conseil constitutionnel.
Si nous considérons qu'aucune difficulté juridique ne s'élève, je suppose que nos amis sénateurs ne modifieront pas la disposition que vous allez adopter, à la suite de la commission.
Cependant, je pense que nous ferons bien de tous relire les avis du Conseil constitutionnel ; il serait bon que cette disposition ne soit pas censurée. En effet, la conséquence de cette mesure sera de rendre la situation financière de certaines veuves d'anciens combattants plus favorable que celle d'anciens combattants encore en vie, puisqu'elles recevront la pension de réversion et disposeront de la demi-part supplémentaire. Vous êtes donc en train de créer une rupture d'égalité.
Si ! Ils étaient deux, avec deux revenus ; la veuve d'ancien combattant aura donc plus de revenus que l'ancien combattant encore vivant.
Mais si, monsieur le rapporteur général ! Ce sera parfois le cas !
Je retire le sous-amendement no 3073 et j'alerte sur la nécessité de se livrer à une analyse juridique solide pour éviter la censure du Conseil constitutionnel et ainsi de perdre une année supplémentaire, comme le dit M. Juanico.
M. le ministre propose de retirer le sous-amendement du Gouvernement. L'ensemble des amendements de la première discussion commune seraient également retirés.
Sourires.
Les amendements précédant l'amendement no 2570 , à savoir les nos 397 de M. Juanico, 697 de Mme Rabault et 2727 de M. Lagarde, sont retirés.
Le sous-amendement no 3073 est retiré.
J'ai retiré l'amendement no 398 parce qu'il visait à abaisser à 70 ans le seuil pour bénéficier de la demi-part supplémentaire, or le principe de la borne d'âge n'est effectivement pas satisfaisant. J'ai également retiré l'amendement no 397 , qui visait à supprimer toute condition d'âge, qu'il s'agisse du décès du conjoint ou de l'âge du survivant.
J'aimerais toutefois obtenir une précision. Selon le rapporteur général, la mesure n'aurait d'effet financier qu'en 2022. Pouvez-vous me confirmer cette date ?
D'autre part, sur quel montant porte-t-elle ? M. le ministre a parlé de 10 millions d'euros, mais le chiffrage de la commission des finances est de 30 millions, puisque l'avantage représente en moyenne 600 euros et que seules la moitié des 100 000 veuves concernées paient l'impôt sur le revenu. Pouvez-vous confirmer ce chiffre à la représentation nationale ?
L'amendement no 2420 de M. Mohamed Laqhila est défendu.
Quel est l'avis du Gouvernement sur ces amendements identiques ?
Avis favorable.
Je vais donner la parole à un orateur de chacun des groupes qui souhaiteront s'exprimer.
La parole est à Mme Sarah El Haïry.
Nous allons vivre un moment important. C'est toujours un plaisir de voir la concorde s'installer sur tous les bancs. Profitons-en ! Merci, cher Jean-Paul Dufrègne, d'avoir ouvert ce débat, auquel tous les groupes ont participé. Nous mettons fin à une inégalité. Parce que la manière de traiter nos anciens fait la grandeur de notre société, le groupe MODEM est fier de voter ces amendements.
La discussion sur la première partie du projet de loi de finances pour 2020 avait été très intéressante. Les amendements que nous avions soutenus, M. Juanico, M. Brun et moi-même, ont failli être adoptés.
En commission des finances, à la demande du rapporteur général, nous avons à nouveau ouvert la discussion. Je m'étais engagée à ne pas redéposer d'amendement, puisque nous avons tous cosigné celui de M. Dufrègne. Je rends hommage à notre collègue, qui a beaucoup travaillé sur le sujet.
Applaudissements sur les bancs des groupes LR, MODEM, SOC et GDR.
Ces amendements consacrent aujourd'hui une juste réparation. La mesure était attendue par le monde combattant, et par les veuves d'anciens combattants. Nous allons faire oeuvre de justice en la votant.
Je salue donc la concorde qui nous unit. Il reste cependant quelques détails à régler sur le plan administratif. J'ai en effet constaté une confusion, notamment dans l'intervention de M. de Courson, entre retraite du combattant et demi-part fiscale. Il faut distinguer ces deux notions.
Les amendements permettront d'ouvrir la demi-part fiscale aux veuves dès l'âge de 74 ans. Le reste viendra peut-être ultérieurement, mais du moins ce bornage est-il rassurant. Nous allons voter une mesure de justice et de réparation.
Au risque de passer pour un mauvais comptable qui n'aurait pas compris le chiffrage des amendements, j'avoue de ne pas savoir, au final, combien coûtera la mesure.
Je me félicite que nous nous apprêtions à adopter l'amendement de la commission, et je remercie M. Giraud et M. Dufrègne d'avoir mené à bien ce travail. J'aimerais toutefois recevoir plus d'informations sur le détail et sur le coût de la mesure.
Je rappelle en effet que les amendements de M. Juanico, si pertinents qu'ils soient, ont été rejetés lors de l'examen de la première partie du PLF, et que l'amendement adopté par la commission des finances, que nous nous apprêtons à voter, ne sera finalement pas sous-amendé par le Gouvernement. Nous aimerions donc être mieux informés du coût de la mesure avant la nouvelle lecture.
Mme Christine Verdier-Jouclas applaudit.
Je salue à mon tour ce moment important. Monsieur le ministre, s'agissant du délai de cinq ans, ce dispositif et celui que vous avez évoqué tout à l'heure ne sont pas comparables. De ce fait, si nous ne voulons pas prendre le risque d'une saisine du Conseil constitutionnel et d'une censure, pourquoi ne pas supprimer simplement ce délai de cinq ans dans les textes concernés ?
À mon tour, je remercie M. Dufrègne et M. Giraud pour ce travail collectif. Chaque année, depuis que je suis députée, nous proposons des mesures en faveur des anciens combattants. Je me souviens que Jean Launay et Dominique Baert avaient déjà travaillé à améliorer leur situation. Le coût de la mesure – 30 millions d'euros – apparaît dans l'exposé sommaire de l'amendement de la commission, mais, puisque le nombre de ses bénéficiaires se réduit mécaniquement, on ne peut parler d'une charge – terme d'ailleurs impropre, quand il s'agit des veuves des anciens combattants – pour le budget de l'État.
Rires.
Tout a été expliqué. Chacun a bien compris l'esprit dans lequel a été rédigé l'amendement, sur lequel j'ai pu travailler en tant que rapporteur spécial sur la mission « Anciens combattants, mémoire et lien avec la nation ». J'espère que nous allons unanimement corriger une anomalie. Les veuves nous en seront certainement reconnaissantes. Je remercie donc par avance tous ceux qui s'associeront à cette décision.
Applaudissements sur les bancs des groupes FI, GDR, SOC, MODEM, LT, UDI-Agir et LR, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 106
Nombre de suffrages exprimés 106
Majorité absolue 54
Pour l'adoption 105
Contre 1
Applaudissements sur les bancs des groupes FI, GDR, SOC, MODEM, LT, UDI-Agir et LR, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Merci pour ce très beau moment parlementaire.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement no 438 .
L'amendement no 438 est retiré.
L'amendement no 2661 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Philippe Dunoyer, pour soutenir l'amendement no 2724 .
Par cet amendement, j'appelle votre attention sur la difficulté qu'ont les territoires d'outre-mer à accueillir les personnes âgées dans des maisons de retraite, médicalisées ou non. Dans quelques années, en Guadeloupe ou en Martinique, les personnes âgées seront plus nombreuses que les jeunes. Compte tenu de l'augmentation de cette population, les maisons de retraite seront insuffisantes à Mayotte, à La Réunion, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française.
Je propose donc d'ouvrir le champ de la défiscalisation afin de soutenir l'investissement dans la construction, plus onéreuse dans des départements d'outre-mer du fait de leur éloignement, de maisons de retraite. Si nous ne soutenons pas ces investissements et que nous n'obligeons pas ensuite les établissements à pratiquer des tarifs encadrés, il arrivera ce que je constate déjà dans ma circonscription de Nouvelle-Calédonie : des maisons hors convention pratiquent des tarifs de l'ordre à 3 500 à 4 500 euros par mois, de sorte qu'elles ne sont accessibles qu'à une clientèle très privilégiée.
Le vieillissement de la population constituera un défi pour les pouvoirs publics dans les années à venir, et pas seulement dans les outre-mer. Mais le recours à l'investissement des particuliers ne me semble pas la manière la plus efficace de le relever. Je vous suggère de retirer l'amendement. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.
L'amendement no 2724 n'est pas adopté.
Je suis saisi de trois amendements, nos 2573 , 2805 et 2849 rectifié , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 2573 .
L'amendement a été rédigé à l'initiative de Mme Benin afin d'ouvrir le débat en séance sur les micro-STEP, stations de transfert d'énergie par pompage, dans les outre-mer. C'est à ce titre qu'il a été adopté par la commission des finances. Je laisse à M. Mignola le soin de le présenter.
Nous partageons tous le même objectif : accélérer la transition énergétique en tout point du territoire national, y compris et peut-être surtout dans les outre-mer. Cependant, alors que nombre d'élus et d'acteurs associatifs ou économiques s'étaient prétendus d'accord pour effectuer la transition entre les batteries et les micro-STEP, la concertation s'est mal déroulée. En différents points du territoire guadeloupéen et dans d'autres départements d'outre-mer, la discussion n'a même jamais été ouverte.
Or, pour avoir assisté dans nos territoires à la création de micro-STEP, nous savons à quel point le débat public et la concertation sont nécessaires pour qu'on puisse ensuite, sans porter trop lourdement atteinte à l'environnement, recourir à ces solutions de production alternative d'énergie.
Par conséquent, sans rien abandonner de l'objectif qui doit nous être commun – le remplacement par les micro-STEP, au cours de la prochaine décennie, des batteries, constituées en partie de métaux rares dont l'extraction porte atteinte à l'environnement – , nous considérons qu'une concertation globale, en vue d'une transition économique et industrielle, doit avoir lieu.
Si nous votions ce soir l'amendement no 2573 , nous adopterions une mesure allant à l'encontre des objectifs que nous visions légitimement en commission des finances. Au nom de Mme Benin et du groupe MODEM, je considère que la sagesse et l'objectif de transition écologique doivent nous amener à rejeter cet amendement.
Puis-je considérer, monsieur le rapporteur général, que l'amendement est retiré ?
Oui, monsieur le président. Nous souhaitions ouvrir le débat. Le président du groupe MODEM vient de préciser sa position. Je retire l'amendement au nom de la commission des finances.
L'amendement no 2573 est retiré.
La parole est à M. Philippe Dunoyer, pour soutenir l'amendement no 2805 .
Je remercie M. Mignola et M. le rapporteur général pour la sagesse dont ils ont fait preuve. Je confirme qu'il n'y a pas eu de discussion sur nos territoires. Si l'on peut y envisager la construction de micro-STEP, il faudra résoudre certains problèmes liés à la géographie. Dans ma circonscription de Nouvelle-Calédonie, il faudrait beaucoup de chance pour que ces installations puissent compenser la production énergétique des centrales photovoltaïques. Je vous remercie donc d'avoir retiré l'amendement no 2573 , dont l'adoption aurait créé de grandes difficultés dans la mise en oeuvre de notre politique énergétique.
En déposant l'amendement no 2805 , nous voulions obtenir confirmation que les investissements nécessaires au stockage de l'électricité et de l'énergie renouvelable produite dans les centrales photovoltaïques sont éligibles à la défiscalisation. Si tel est le cas, je retire l'amendement.
L'amendement no 2805 est retiré.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement no 2849 rectifié .
La première signataire de l'amendement est Nathalie Bassire. J'entends les arguments développés ; nous avons nous aussi été alertés des effets pervers que pourrait avoir un tel dispositif. Je retire donc l'amendement.
L'amendement no 2849 rectifié est retiré.
La parole est à M. Gabriel Serville, pour soutenir l'amendement no 2963 .
L'amendement a pour objet d'appliquer un taux de réduction d'impôt de 53,55 % aux investissements en faveur de la rénovation et de la réhabilitation des hôtels et résidences de tourisme à Saint-Martin ; c'est déjà le cas en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à Mayotte et à La Réunion.
Le taux de réduction d'impôts pour de tels investissements est depuis 2015 de 45,9 % à Saint-Martin, collectivité qui ne bénéficie pas, en outre, du dispositif du crédit d'impôt.
Deux ans après le passage du cyclone Irma, Saint-Martin, troisième collectivité la plus pauvre de France en PIB par habitant, demeure en pleine reconstruction. Alors que les besoins restent très importants en matière de rénovation et de réhabilitation hôtelières, la collectivité a donc, plus que jamais, besoin à la fois de la solidarité nationale et d'incitations fortes permettant d'attirer les investisseurs privés.
Saint-Martin ne saurait continuer à être soumis à un taux minoré par rapport à d'autres collectivités ultramarines qui connaissent, au demeurant, les mêmes contraintes et difficultés.
Le taux de réduction d'impôt pour les investissements productifs en outre-mer est déjà de 45,9 %. Vous souhaitez porter ce taux à 53,55 %. Très honnêtement, je ne suis pas sûr qu'une telle mesure résolve les problèmes de reconstruction du territoire – dont je ne nie pas l'existence, et qui doivent être pris en considération.
Par ailleurs, après le passage de l'ouragan Irma, quelque 500 millions d'euros de crédits ont été ouverts pour la reconstruction de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy. L'État n'a pas ignoré la situation de ces îles. Je vous demande donc le retrait ; à défaut, avis défavorable.
Je prends acte de vos réponses négatives. Simplement, je vous rappelle que les travaux sont toujours en cours. Saint-Martin n'est pas tout à fait rétabli, et subit encore les conséquences du cyclone Irma. L'effort qui vous est demandé n'est pas surhumain ; il est même minime. Augmenter le taux de réduction permettrait de renforcer la solidarité nationale.
On peut toujours énumérer les crédits affectés à la reconstruction de l'île. Il reste qu'aujourd'hui nous n'avons pas encore atteint les objectifs. Pour cette raison, je maintiens l'amendement.
L'amendement no 2963 n'est pas adopté.
Si vous le permettez, je souhaite défendre en même temps trois amendements, les nos 2736, 2742 et 2738. Je retire dès à présent l'amendement no 2740 .
Tous ces amendements concernent le même dispositif. L'an dernier, le dispositif d'aide fiscale à l'investissement a été étendu aux navires de croisière. Nous avions eu un débat avec M. le ministre sur les critères d'éligibilité à cette aide.
Nous avons fait un premier pas l'an dernier, mais les critères restent très stricts, dissuasifs. Ces trois amendements visent à assouplir trois des critères adoptés l'an dernier.
L'amendement no 2736 vise à faire passer de quinze à dix ans la durée minimale d'exploitation sur zone des navires concernés par le dispositif.
Je rappelle que la durée minimale d'exploitation pour bénéficier de mesures de défiscalisations est de sept ans pour les avions ou pour l'hôtellerie. Notre proposition de porter le délai à dix ans est raisonnable ; elle aura des effets incitatifs, tout en permettant d'éviter les effets d'aubaine.
L'amendement no 2742 vise à assouplir le critère relatif à la zone économique exclusive – l'an dernier, nous en avions déjà débattu. Le dispositif de défiscalisation adopté était accompagné d'une condition : l'exploitation du bateau devait avoir lieu intégralement dans la ZEE du territoire d'outre-mer concerné. Cette condition constitue un frein au développement de croisières régionales.
Nous proposons donc de fixer le volume annuel minimal d'opération du navire au sein de la ZEE du territoire concerné à 90 % des têtes de ligne – c'est-à-dire des départs et des arrivées – du navire et à 75 % des escales. Cet assouplissement permettrait de favoriser les croisières régionales.
Enfin, l'amendement no 2738 concerne un débat qui fut nourri l'an dernier, celui sur les taux du crédit d'impôt. Vous avez fixé la base éligible de la réduction d'impôt à 20 % du coût de revient, ce qui nous semble très faible. Nous souhaitons le porter à 50 %, et porter le taux de la réduction d'impôt à 38 %.
Concernant l'amendement no 2738 , je trouve que les taux sont déjà très généreux. La situation actuelle est déjà bien plus favorable depuis l'adoption de la loi de finances pour 2019, puisqu'auparavant, aucun dispositif n'était prévu. Je vous demande donc le retrait de l'amendement.
Concernant l'amendement no 2742 , nous avons déjà débattu l'an dernier de la condition géographique. M. Philippe Gomès avait fait part de son inquiétude et demandé si une escale sur une île étrangère ferait perdre le bénéfice de l'avantage. Le ministre au banc avait répondu que ce ne serait pas le cas, s'il s'agissait seulement d'une escale au cours d'un circuit.
Le ministre avait pris soin de préciser que le bureau des agréments et rescrits de la DGFiP ferait preuve de bienveillance, et que la rigidité n'était pas de mise. Là encore, je demande donc le retrait.
Concernant l'amendement no 2736 , vous faites observer qu'une durée minimale d'exploitation de quinze ans est peut-être excessive, et qu'un délai de dix ans reste long. Sur ce point, je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.
Je suis ennuyé, madame la députée, puisque le dispositif n'a été adopté que l'an dernier. Des investissements importants sont réalisés dans les territoires ultramarins et particulièrement ceux du Pacifique. Il paraît difficile de tirer dès maintenant des conclusions. Évitons l'instabilité fiscale.
Vous l'avez reconnu vous-même : suite à mes déplacements en Polynésie et en Nouvelle-Calédonie, le fonctionnement du bureau des agréments a été adapté. Il était d'une grande complexité, et la durée de traitement des dossiers pouvait atteindre 18 mois.
C'est que, comme vous le savez, les dossiers doivent faire l'objet d'un avis du gouvernement local, compétent en matière de fiscalité ; ils sont ensuite examinés par le haut-commissariat de la République du territoire concerné, puis par la DGOM – la direction générale des outre-mer – au ministère des outre-mer, avant d'arriver au ministère de l'action et des comptes publics. Vous le signaliez vous-même : au niveau local, les acteurs économiques se plaignent qu'un an après avoir déposé leur dossier, celui-ci n'était toujours pas arrivé sur mon bureau.
Le délai d'un an ne me semble pas suffisant pour évaluer un dispositif.
Je ne crois pas, monsieur le rapporteur général, que le dispositif soit « généreux » envers les territoires ultramarins ; il me paraît nécessaire. Je salue d'ailleurs le traitement de la question des agréments fiscaux en Polynésie comme en Nouvelle-Calédonie et le sérieux du travail du haut-commissariat de la République en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie, comme du gouvernement de ces deux collectivités. Ces dispositifs sont nécessaires au développement économique et touristique de ces territoires.
À l'origine, les bateaux de croisière n'étaient pas concernés par le dispositif de défiscalisation. Mon déplacement en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie – j'ai en outre tout récemment reçu le nouveau président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie – m'a poussé à proposer un ensemble de modifications.
Si ces défiscalisations sur les investissements dans les territoires ultramarins sont nécessaires, elles sont tout de même exorbitantes du droit commun, surtout s'agissant d'un territoire où l'impôt sur le revenu n'existe pas ! Notre souci est d'éviter que ces dispositions ne profitent à des personnes extérieures à la Nouvelle-Calédonie et à la Polynésie française.
Ces deux territoires, malgré leur ressemblance et leur proximité géographique, sont aussi fort différents. Le territoire de Polynésie française est grand comme l'Europe, il peut accueillir l'intégralité du circuit d'une croisière, à une ou deux étapes près. Il faudra veiller à ce que, de l'équipage aux armateurs, le dispositif profite bien aux territoires de la République et en particulier à la Polynésie.
Pour la Nouvelle-Calédonie, dont le territoire est moins étendu, j'ai bien entendu les remarques que l'on m'a faites. Les circuits concernés par le dispositif peuvent inclure des escales dans les îles proches du Pacifique – sans aller jusqu'à l'Australie et la Nouvelle-Zélande – à la condition que les ports de départ et d'arrivée se trouvent dans le territoire national.
Le rapporteur général a bien rapporté mon propos : j'ai donné consigne au chef du service juridique de la fiscalité de la direction générale des finances publiques, M. Édouard Marcus, de traiter avec bienveillance les demandes, tout en veillant à ce que les emplois et l'activité économique concernés profitent aux territoires polynésien et néo-calédonien et contribuent à leur développement touristique.
Enfin, je donne un avis favorable à l'amendement no 2736 . Nous sommes très à l'écoute du territoire polynésien dont vous êtes l'élue ; je sais que l'amendement est en outre soutenu par le président de la Polynésie française, M. Édouard Fritch. Il vise à réduire à dix ans la période minimale d'exploitation des navires concernés par la défiscalisation : c'est une durée qui correspond à la vie économique.
Des dispositifs fiscaux ont maintenant été adoptés en faveur des territoires polynésien et néo-calédonien, tant pour les logements sociaux – nous en avons discuté avec MM. Dunoyer et Gomès – , que pour la pêche – nous avons débloqué des dossiers d'investissements en faveur de l'activité halieutique, notamment en Polynésie – , et pour le tourisme – des investissements ont aussi été débloqués pour Bora-Bora, comme pour l'île des Pins et l'île d'Ouvéa, en Nouvelle-Calédonie.
Il faut désormais garantir la stabilité fiscale, ne serait-ce que pour les acteurs économiques qui investissent dans ces territoires. Attendons la fin du quinquennat pour voir comment les acteurs économiques répondent à ces mesures.
J'insiste sur un point : nous traiterons avec le plus grand sérieux les dossiers d'agrément, même les plus petits. Je pense notamment aux mines en Nouvelle-Calédonie, où l'application des obligations sociales et en matière de droit du travail rencontre des difficultés particulières ; des discussions ont lieu avec les représentants néo-calédoniens.
Le système fiscal actuel est stable. Il est généreux, ou en tout cas responsable à l'égard des territoires du Pacifique, et il prend en considération leur géographie.
Il faut veiller à traiter les dossiers rapidement – ce sera le cas grâce aux gouvernements de ces deux territoires, à leurs hauts-commissariats, à la DGOM et au ministère de l'action et des comptes publics. Je remercie les services de ce ministère, puisque nous travaillons désormais de manière beaucoup plus rapide.
Enfin, mon bureau est toujours ouvert à tous les représentants de la nation, particulièrement ceux qui viennent des territoires du Pacifique.
J'apporte mon soutien à l'amendement no 2742 défendu par ma collègue Maina Sage. Si la ZEE de la Polynésie française est très étendue, ce n'est pas le cas de celle de Saint-Pierre-et-Miquelon. Si un bateau de croisière devait s'y limiter, il devrait faire des petits ronds dans l'eau : la croisière perdrait tout son intérêt. Les bateaux doivent pouvoir aller jusqu'en zone sub-arctique.
Merci pour ces réponses et pour ce premier pas, monsieur le ministre, concernant la durée minimale d'exploitation : dix ans est un délai plus réaliste.
Monsieur le ministre, j'entends bien que le dispositif n'a été adopté qu'il y a un an. Pourtant, si un seul dossier a été déposé, c'est que les critères sont trop exigeants. Peut-être faudra-t-il une année supplémentaire pour mieux s'en rendre compte ?
Il est dommage qu'aucun assouplissement ne soit prévu concernant le critère relatif à la zone économique exclusive, qui crée un obstacle important. En revanche, j'ai bien noté que vous avez donné instruction aux services compétents d'appliquer ce critère de manière souple, en permettant des exceptions, si j'ai bien compris. Il faudrait peut-être l'écrire, afin de clarifier la situation. Ce critère constitue un frein important pour les dépôts de dossiers. Si cette requête n'aboutit pas ce soir, elle aboutira peut-être lors de l'examen du prochain PLF.
L'essentiel, au fond, est d'assouplir la notion d'exclusivité des croisières dans les ZEE des territoires concernés. Je maintiens les amendements nos 2736 et 2742 mais je retire les amendements nos 2738 et 2740 .
Le débat ne me semble pas trop long pour des territoires dont les représentants n'abusent pas, tant s'en faut, de leur droit de parole dans l'hémicycle, et qui connaissent des difficultés géographiques et économiques éloignées de celles de l'hexagone. Permettez-moi donc de répondre avec intérêt aux regrets qu'exprime Mme Sage. En premier lieu, la loi fiscale a été promulguée au début du mois de janvier ; il n'y a donc que dix mois à peine que les nouvelles dispositions sont en vigueur. Compte tenu des montants d'investissement, il est bien normal que le nombre de dossiers déposés soit peu élevé. Il appartient aux élus du territoire, soucieux de l'activité économique comme vous l'êtes, d'accompagner ces dossiers.
Prenons l'exemple de l'aviation : il se trouve que c'est moi qui ai débloqué les dossiers liés à la compagnie polynésienne. Les dossiers étaient certes peu nombreux mais les montants, eux, étaient très élevés. Ne comptons pas en bateaux ou en avions : attachons-nous plutôt au montant de la défiscalisation – un critère à valoriser du point de vue du territoire.
Comme je l'ai dit au président Fritch et aux représentants de l'ancien et du nouveau gouvernement de Nouvelle-Calédonie, nous entretenons d'excellentes relations de travail. S'agissant cependant de la question de la défiscalisation ultramarine – et cela vaut aussi pour les Antilles – , convenons qu'un dossier ne profitant pas directement à la Polynésie ou à la Nouvelle-Calédonie, et donc à la France – parce que l'emploi aurait bénéficié à d'autres, parce que les investisseurs auraient servi des intérêts économiques non français, parce que le dossier en question n'aurait pas été à la hauteur du sérieux attendu d'un processus qui a tout de même pour résultat une perte de recettes fiscales pour l'État – donnerait une très mauvaise image de la défiscalisation, dans toute la France comme dans les territoires concernés. Vous en êtes d'ailleurs bien consciente.
Préservons donc la stabilité, faisons de la publicité en faveur de ces projets économiques pour lesquels le Gouvernement de la France aide les gouvernements des territoires concernés, tenons compte de la stabilité fiscale qui vaut dans le Pacifique comme elle vaut dans l'hexagone, et appliquons les dispositions avec souplesse, y compris celles qu'adopte la représentation nationale. Encore une fois, vous savez que mon bureau est toujours ouvert pour qu'avec les services, nous travaillions avec sérieux, efficacité et rapidité – j'insiste sur le sérieux, car je rends compte à la Cour des comptes et au Parlement des mesures de défiscalisation consenties par le Parlement, précisément.
L'amendement no 2736 est adopté.
La parole est à M. Gabriel Serville, pour soutenir l'amendement no 2964 .
Les différents dispositifs prévus aux articles 199 undecies B et C et 244 quater W du code général des impôts ont pour objectif d'instituer une aide fiscale à l'investissement réalisé outre-mer. Ces articles subordonnent notamment l'octroi de l'aide fiscale à la formalité de dépôt des comptes annuels auprès du registre du commerce et des sociétés que prévoit le droit des sociétés commerciales. Une telle obligation soulève de nombreuses interrogations et entraîne une forte insécurité juridique et fiscale, ainsi que de profondes incertitudes financières pour les investisseurs, qui peuvent subir de lourds rappels d'impôts si l'exploitant n'a pas observé ladite obligation légale plusieurs années auparavant. En particulier, les investisseurs n'ont pas la capacité de vérifier si les exploitants ont bien déposé leurs comptes au greffe du tribunal dans le mois suivant l'approbation de leurs comptes annuels, sur une période indéterminée.
Parallèlement, les textes en vigueur subordonnent l'aide fiscale au dépôt des comptes à la date de la réalisation de l'investissement alors que le législateur a fixé le fait générateur de l'aide fiscale à l'investissement à la mise en exploitation de l'investissement en question.
Cet amendement vise donc à préciser cette condition d'application de l'aide fiscale à l'investissement pour lever toutes les incertitudes et rassurer les investisseurs quant à l'octroi de l'aide fiscale prévue par les textes en vigueur. Dans un souci d'homogénéité et de précision, la modification proposée subordonne l'aide fiscale au dépôt des comptes annuels avant la date de mise en service tout en précisant qu'il s'agit des comptes annuels du dernier exercice clos à cette date.
S'il existe un problème d'interprétation, il concerne plutôt la doctrine et n'est pas de nature législative. Sur le fond, il semble normal – et même sécurisant – que l'obligation au sujet de laquelle vous souhaitez légiférer s'applique dès la réalisation de l'investissement et non, comme vous le suggérez, lors de sa mise en service. S'il existe un problème doctrinal, il faut l'examiner avec le ministère, afin que la disposition soit appliquée de manière cohérente partout sur le territoire. Demande de retrait.
Sous réserve que l'amendement soit retiré, je m'engage à préciser la doctrine, par exemple en répondant à une question écrite de votre part, monsieur le député, afin que ma réponse figure au Journal Officiel et pour lever toute ambiguïté.
J'ignore s'il s'agit d'un problème de doctrine mais, sur le terrain, il y a un problème d'organisation. Ces difficultés, que l'on évoque souvent dans l'hémicycle, sont liées à l'empilement de règles et de normes très contraignantes qui ne correspondent pas tout à fait à la situation de l'économie et des entreprises dans les outre-mer.
Cela étant, j'entends vos interrogations et la proposition du ministre. Je prends donc la décision qui, en la circonstance, me paraît sage de retirer l'amendement et d'adresser rapidement un courrier au ministre pour obtenir des précisions sur la manière dont nous pourrons agencer et réguler autrement la relation parfois très difficile entre les entreprises et les investisseurs d'un côté et, de l'autre, les services fiscaux. Je retire l'amendement en attendant mieux.
L'amendement no 2964 est retiré.
La parole est à M. Philippe Dunoyer, pour soutenir l'amendement no 2721 .
L'exposé des motifs de cet amendement est strictement le même que celui de l'amendement précédent, même s'il propose une solution un peu différente. Par anticipation, je suis prêt à le retirer si M. le ministre m'apporte une réponse de même type. Je précise simplement qu'il faut sans doute confirmer la doctrine sur laquelle repose la règle en vigueur car la rédaction du code général des impôts permet une interprétation très large autorisant à remonter loin en arrière pour vérifier l'irrespect de l'obligation, ce qui fait peser une incertitude injustifiée sur les investisseurs et les exploitants – même s'il faut naturellement qu'ils soient à jour lorsqu'ils réalisent l'investissement et le mettent en oeuvre, jusqu'à trois années avant, selon ma proposition, en cohérence avec la prescription en la matière.
Si cette solution n'est pas souhaitable, je me propose d'écrire un courrier en commun avec MM. Serville et Serva au ministre.
Je m'engage auprès de vous, monsieur Dunoyer, et de tous les députés ultramarins concernés, à publier avant la fin de l'année dans le Bulletin officiel des finances publiques, qui fait quasiment office de parole d'évangile pour l'administration des finances publiques, une explication simple et claire de la doctrine, et à vous l'adresser par courrier, ainsi qu'au rapporteur général, au président de la commission des finances et à tous les parlementaires ultramarins. En attendant, puisque nous sommes tous d'accord sur le principe, je vous propose de retirer l'amendement.
L'amendement no 2721 est retiré.
L'amendement no 2742 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à la prochaine séance.
Prochaine séance, ce matin, à neuf heures :
Suite de l'examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2020 : articles non rattachés.
La séance est levée.
La séance est levée, le jeudi 14 novembre 2019, à zéro heure dix.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Serge Ezdra