La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine et durable (nos 627, 902, 838).
Le temps de parole restant pour la discussion de ce texte est de huit heures cinquante-huit pour le groupe La République en marche, dont 192 amendements sont en discussion ; cinq heures huit pour le groupe Les Républicains, dont 376 amendements sont en discussion ; deux heures trente-neuf pour le groupe du Mouvement démocrate et apparentés, dont 38 amendements sont en discussion ; trois heures dix pour le groupe UDI, Agir et indépendants, dont 63 amendements sont en discussion ; trois heures quinze pour le groupe Nouvelle Gauche, dont 64 amendements sont en discussion ; trois heures dix pour le groupe La France insoumise, dont 73 amendements sont en discussion ; trois heures pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine, dont 21 amendements sont en discussion ; et onze minutes pour les députés non inscrits, dont 100 amendements sont en discussion.
Cet après-midi, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles, s'arrêtant à l'amendement no 577 à l'article 11 decies.
Après avoir beaucoup parlé de bon vin cet après-midi, nous allons parler un peu de miel. Le sujet n'est pas de moindre importance, notamment pour des régions telles que la Bretagne. Nous devons soutenir les apiculteurs, qui voient leur cheptel diminuer cruellement, du fait, en grande partie, des néonicotinoïdes.
J'en viens à l'objet du présent amendement. Le décret no 2003-587 du 30 juin 2003, actuellement en vigueur, n'oblige pas à fournir une indication exhaustive de l'origine du miel en cas de mélange de miels provenant de différents pays. Il dispose en effet : « Le pays ou les pays d'origine où le miel a été récolté sont indiqués sur l'étiquette. Toutefois, si le miel est originaire de plus d'un État membre de la Communauté européenne ou de plus d'un pays tiers, cette indication peut être remplacée par l'une des indications suivantes, selon le cas : 1° "Mélange de miels originaires de la CE" ; 2° "Mélange de miels non originaires de la CE" ; 3° "Mélange de miels originaires et non originaires de la CE". »
Ces indications imprécises nuisent à la lisibilité du ou des pays d'origine. Dans une étude de juin 2016, FranceAgriMer a ainsi conclu à « une origine française déclarée très importante pour les consommateurs, mais un décalage frappant entre la part réelle des miels français disponibles sur le marché et la perception des consommateurs, qui pensent acheter essentiellement du miel français ». On trompe dans une certaine mesure les consommateurs : ils pensent acheter du miel français mais achètent en réalité des mélanges de miels provenant de différents pays de l'Union européenne.
Il convient donc de modifier le décret en vigueur par un nouveau décret en Conseil d'État, qui supprimerait l'exception consentie actuellement en cas de miel récolté dans plusieurs pays et obligerait à indiquer de manière exhaustive chaque pays d'origine sur l'étiquette. Tel est le but du présent amendement.
La parole est à M. Jean-Baptiste Moreau, rapporteur de la commission des affaires économiques, pour donner l'avis de la commission.
La modification que propose le Gouvernement par son amendement no 2248 me semble plus efficace que celle que vous proposez. Avis défavorable.
La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, pour donner l'avis du Gouvernement.
Il est également défavorable.
L'amendement no 577 n'est pas adopté.
En l'absence d'André Chassaigne, je suis chargé de défendre le présent amendement en son nom. Je vais tenter d'être à la hauteur, même si je sais que la tâche est difficile.
La barre est haute, en effet, surtout qu'il s'agit de transcrire dans le présent texte les dispositions d'une proposition de loi qu'il avait fait adopter avec un large consensus dans cet hémicycle.
Le présent amendement vise à modifier la rédaction de l'article 11 decies, adopté par la commission des affaires économiques, en précisant que l'indication du pays d'origine pour tous les miels est effective dès la parution de la présente loi et selon des modalités définies par décret. En effet, l'article tend à compléter l'alinéa premier de l'article L. 412-4 du code de la consommation en prévoyant l'obligation d'indiquer l'origine des miels, mais sa rédaction actuelle empêche son application, puisque cette obligation sera soumise à l'arbitrage de la Commission européenne, qui devra au préalable la déclarer compatible avec le droit de l'Union européenne. Cela en réduit donc considérablement la portée.
Il convient donc de lever toute ambiguïté sur l'application de cette disposition – tel est l'objectif, qui fait, je crois, consensus – en revenant à une rédaction qui la rende immédiatement applicable, comme le prévoyait l'excellente proposition de loi déposée par André Chassaigne.
En 2016, la consommation française de miel s'établissait à 45 000 tonnes. Depuis plus de dix ans, cette consommation est en progression. Toutefois, les organisations d'apiculteurs font le constat d'un fossé grandissant entre la part de la production nationale et la part des importations de miel dans la consommation. Ainsi, selon les dernières données, issues du bilan de la campagne de FranceAgriMer sur l'année 2016, ces importations ont représenté 35 583 tonnes alors que la production française a plafonné à 16 099 tonnes. L'année 2017 semble également avoir été marquée par un fort recul de la production, désormais estimée à 10 000 tonnes à l'échelle nationale. Ce déclin de la production française se révèle particulièrement saisissant lorsque l'on prend pour référence le niveau de la production dans les années 1990, à savoir 30 000 tonnes d'après les évaluations.
Certes, la filière apicole française a connu de graves difficultés, notamment en raison de l'important taux de mortalité des abeilles. Mais la croissance fulgurante des importations de miel se fait aujourd'hui directement au détriment de la relance souhaitée des productions nationales, et sans garantie ni de traçabilité, ni de qualité, ni de transparence pour les consommateurs. À la suite du premier bilan sur le plan de développement durable de l'apiculture lancé en 2013, de nombreuses actions ont été engagées en matière de structuration de la filière et d'accompagnement de la production, mais beaucoup reste à accomplir. Dans le cadre du prolongement de ce plan, il apparaît aujourd'hui indispensable de prendre une mesure de soutien immédiat à la filière : garantir la transparence et la traçabilité des miels commercialisés en France.
Comme vous le savez – nous en avons discuté en commission – , les logiques de marges financières de certains transformateurs et de la grande distribution poussent à substituer de plus en plus les miels importés aux productions françaises. Les prix d'achat de ces miels importés sont de deux à trois fois inférieurs : de l'ordre de 1,60 euro le kilogramme en provenance de Chine et de 2,50 euros le kilogramme en provenance d'Argentine, pour un prix moyen de vente en France de 11 euros le kilogramme dans la grande distribution. Cette différence entre les prix d'achat et de vente permet d'autant plus de conforter les marges des transformateurs et de la distribution que les miels vendus sont, pour l'essentiel, des miels mélangés portant la mention « mélange de miels originaires et non originaires de l'Union européenne ». Les consommateurs n'ont donc aucune possibilité de connaître l'origine des miels, ni leur part respective dans le produit vendu.
Le cadre réglementaire européen prévu par la directive 201463UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 modifiant une précédente directive relative au miel sert aujourd'hui d'appui à toutes les pratiques d'importations abusives et de fraude. Alors que l'article 1erde la directive prévoit que « le ou les pays d'origine où le miel a été récolté sont indiqués sur l'étiquette », les quatre alinéas suivants introduisent une possibilité de déroger à cette obligation d'indication du pays d'origine pour le miel « originaire de plus d'un État membre ou de plus d'un pays tiers » en recourant à l'un des trois étiquetages mentionnés, notamment « mélange de miels originaires de l'Union européenne ».
Vous comprenez donc qu'il est nécessaire de clarifier la situation. André Chassaigne insiste beaucoup pour que nous donnions un signe concret, palpable, immédiat et lisible aux apiculteurs français, afin de relancer ce savoir-faire. Tel est le sens du présent amendement. J'imagine qu'il obtiendra l'appui du Gouvernement.
« Très bien ! » sur les bancs du groupe LR.
Si vous me passez l'expression, nous allons faire notre miel du travail précurseur d'André Chassaigne. Nous vous proposons un amendement de coordination qui tend à repositionner l'obligation d'étiquetage du miel au sein de l'article L. 412-4 du code de la consommation. Il en résultera clairement que cette obligation ne devra pas faire l'objet d'une notification à la Commission européenne.
J'en déduis que l'avis du Gouvernement est défavorable sur l'amendement no 1750 ?
Quel est l'avis de la commission sur les deux amendements en discussion commune ?
L'amendement no 577 , que j'ai défendu, a été rédigé par Mme Louwagie. Je le retire néanmoins au profit de l'amendement du Gouvernement, qui me paraît résoudre la question que nous avons soulevée.
J'ai déjà mis aux voix l'amendement no 577 , monsieur Lurton, et il a été rejeté.
La parole est à M. Sébastien Jumel.
Par sagesse, je retire l'amendement no 1750 , en vous remerciant, monsieur le ministre, d'avoir intégré le travail réalisé par le président Chassaigne pour promouvoir l'apiculture française.
L'amendement no 1750 est retiré.
L'amendement no 2248 est adopté.
La parole est à M. Patrice Verchère, pour soutenir l'amendement no 117 .
Il vise à rendre obligatoire l'indication du pays de production du miel sur l'étiquette. Il me paraît en effet crucial que les consommateurs de miel – dont je fais partie – connaissent la provenance du produit qu'ils achètent. Cela les amènera peut-être à préférer le miel français, dont la qualité est reconnue par tous.
En cas de pluralité de pays d'origine, l'obligation de mentionner le pays de la récolte tombe au profit d'une mention assez floue, voire opaque – il faut bien le reconnaître. L'amendement du Gouvernement que nous venons d'adopter répond en partie à ce problème, …
Non, complètement !
… mais le présent amendement est peut-être plus précis. Ainsi, les consommateurs français sauront exactement de quel pays provient le miel qu'ils consomment et dans quelles conditions il a été récolté, ce qui est également important.
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l'amendement no 281 .
Nous sommes animés du même souci de transparence et de bonne information du consommateur. Ayant été très attentif aux arguments du rapporteur, j'ai compris qu'il allait nous donner satisfaction grâce à la disposition qu'il a prévu de prendre.
Si je voulais faire plaisir au rapporteur, je pourrais presque le retirer…
Ces amendements sont satisfaits par l'amendement no 2248 du Gouvernement, que nous venons d'adopter. Avis défavorable.
Avis défavorable.
L'amendement no 14 est retiré.
La parole est à Mme Delphine Batho, pour soutenir l'amendement no 1461 .
L'amendement propose une clarification utile, même si elle n'est pas indispensable. On avance et on construit ensemble ! Je m'en remets à la sagesse de l'assemblée.
L'amendement no 1461 est adopté.
La parole est à M. Jean-Claude Bouchet, pour soutenir l'amendement no 1047 .
En ce samedi soir, je salue M. Ferrand, président du groupe La République en marche, qui vient d'arriver dans l'hémicycle.
Rires sur les bancs du groupe LR.
C'était une formule de politesse, mais il ne l'a pas écoutée. Tant pis !
L'amendement no 1047 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 11 decies, amendé, est adopté.
La parole est à M. Sébastien Jumel, pour soutenir l'amendement no 1749 rectifié , portant article additionnel après l'article 11 decies.
Quand un État est membre de l'Union européenne, il peut difficilement s'exonérer de ses règles. Avis défavorable.
L'amendement no 1749 rectifié n'est pas adopté.
L'article 11 undecies fixe pour objectif d'affecter 15 % de la surface agricole utile française à l'agriculture biologique au 31 décembre 2022. Depuis le début de nos travaux, nous répétons qu'il faut redonner de la liberté aux agriculteurs, dont les décisions doivent rester souveraines. C'est pourquoi nous proposons d'ajouter que cet objectif doit être atteint dans le respect de la liberté d'usage des terres agricoles.
Les agriculteurs bénéficient déjà du droit de propriété et de la liberté d'entreprendre. À quoi pensez-vous en insistant sur la liberté d'usage de leur surface agricole, évidemment dans la limite du réglementaire ? Si l'amendement vise les autorisations d'exploiter, le moment me semble mal venu, compte tenu du risque actuel d'accaparement des terres, d'assouplir leur droit.
Nous attendrons la fin de la mission d'information sur le foncier agricole présidée par Jean-Bernard Sempastous, dont les rapporteurs sont nos collègues Anne-Laurence Petel et Dominique Potier, avant de changer quoi que ce soit au foncier.
Si nous avons l'ambition que 15 % de notre surface agricole soient affectés à l'agriculture biologique, nous n'avons pas l'intention de contraindre les agriculteurs dans l'utilisation des terres qu'ils exploitent, laquelle est encadrée par des règles. Avis défavorable.
Je remercie le rapporteur et le ministre. Depuis le début de nos discussions, le Gouvernement n'avait indiqué ni en commission ni dans cet hémicycle comment il comptait atteindre son objectif. Je déduis de la réponse du ministre qu'on recourra à l'encouragement et, puisqu'il nous indique qu'aucune démarche contraignante ne sera entreprise à l'égard des agriculteurs, je retire l'amendement.
L'amendement no 363 est retiré.
La parole est à M. Jean-Claude Bouchet, pour soutenir l'amendement no 882 .
L'article 11 undecies fixe pour objectif qu'au 31 décembre 2022, 15 % de la surface agricole utile soient affectés à l'agriculture biologique. Le délai nous semble trop court. Même si un tel objectif est louable, il est préférable de le viser à court et moyen termes.
Nous proposons par conséquent de supprimer la date du 31 décembre 2022, puisque cette échéance risque de ne pas être respectée ou d'imposer de nouvelles contraintes aux agriculteurs. Il serait plus judicieux de les laisser libres de convertir leur production, d'autant que cette évolution est déjà en marche.
Avis défavorable. La date est importante. Elle donne un souffle et elle permet de fixer un cap, ce qui encouragera les agriculteurs à la conversion. Sachant qu'à peine 6 % de la surface agricole utile sont consacrés à l'agriculture biologique, l'objectif d'atteindre 15 % en 2022 ne nous semble pas déraisonnable.
L'amendement no 882 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Nicolas Turquois, pour soutenir l'amendement no 2524 .
Cet amendement, dont M. Mathiasin est le premier signataire, vise à tenir compte de la situation des territoires d'outre-mer, dans lesquels il sera très difficile de consacrer 15 % de la surface agricole utile à l'agriculture biologique d'ici à 2022.
La surface agricole biologique y est très actuellement réduite. Les surfaces sont limitées. On déplore en outre un manque de recherches sur ce sujet comme sur les techniques alternatives. Et surtout, les terres contaminées par le chlordécone ne peuvent être intégrées à l'agriculture biologique.
Il semble donc nécessaire de prévoir un délai plus long avant d'appliquer la mesure dans ces territoires.
Les surfaces agricoles ultramarines sont comprises dans le total de la surface agricole utile française. Un retard temporaire de leur part pourrait être compensé par un effort accru en métropole. Il n'est donc pas opportun de prévoir des objectifs différenciés suivant les territoires. Avis défavorable.
L'amendement no 2524 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. François Ruffin, pour soutenir l'amendement no 2029 .
L'amendement no 2029 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Sébastien Jumel, pour soutenir l'amendement no 1753 .
L'article tend à « promouvoir l'indépendance alimentaire de la France à l'international, en préservant son modèle agricole ainsi que la qualité et la sécurité de son alimentation ». Nous proposons d'ajouter qu'il faut aussi « soutenir au niveau européen et international les principes de souveraineté et de sécurité alimentaires des peuples. »
Par cet amendement de soutien au ministre, nous souhaitons l'aider à défendre ces principes dans les débats qui s'ouvriront bientôt sur les traités de libre-échange, lesquels risquent de percuter ou de bousculer notre agriculture.
Tel qu'il est rédigé, l'article satisfait en grande partie vos attentes. Nous ne pouvons aller plus loin en visant des objectifs qui s'apparentent à des injonctions en matière de négociation.
L'ajout pose plusieurs problèmes. Au plan européen, il renie le marché européen et nous prive de la politique agricole commune, ce qui n'entre pas dans les projets du Gouvernement. Au plan international, il légitime les tentatives protectionnistes, qui freinent nos échanges. Certains pays, parmi les plus pauvres, dépendent des importations pour assurer la sécurité alimentaire de leur population. La proposition est donc irrecevable. Avis défavorable.
Vous faites dire à l'amendement ce qu'il ne dit pas. À plusieurs reprises, nous avons réaffirmé notre attachement à la politique agricole commune. Nous sommes d'ailleurs très inquiets de la manière dont le Président de la République, loin de la défendre, l'a remise en cause et fragilisée. Il a même obligé son ministre de l'agriculture à corriger le tir, ce qui nous semble assez intéressant…
Selon nous – nous y reviendrons en défendant d'autres amendements – , les produits issus de l'agriculture ne sont pas des biens de consommation comme les autres, puisqu'ils déterminent la souveraineté des peuples – pas seulement le nôtre – et la sécurité alimentaire des populations.
L'amendement ne constitue pas une injonction à négocier. Il s'inscrit dans l'esprit de l'article : à l'heure où l'on promeut l'indépendance alimentaire de la France à l'international, notamment en préservant son modèle agricole, nous plaidons pour que les principes de souveraineté et de sécurité alimentaires soient consubstantiels à cette promotion.
Je soutiens l'amendement. M. le ministre nous répond qu'il ne faut pas aller dans le sens du protectionnisme. Or ce que propose M. Jumel, ce n'est pas le protectionnisme, c'est la souveraineté, c'est-à-dire la possibilité, notamment pour les pays du Sud, de mener la politique commerciale qui leur convient. Si celle-ci repose sur le libre-échange, laissons-les entrer dans des accords de libre-échange. Si celle qui leur convient sur le terrain suppose davantage de protection, qu'on les laisse libres de l'organiser !
Je suis sensible à cette question pour m'être entretenu, notamment au Burkina Faso, avec des interlocuteurs qui m'ont expliqué que, dans les accords commerciaux concernant l'Ouest de l'Afrique, ils avaient proposé des taxes douanières sur les produits agricoles, afin de développer certaines productions locales, comme le lait, en vue de la consommation locale.
Ils se sont heurtés à un lobby qui s'est monté autour des ministères burkinabés et des présidents de l'Ouest de l'Afrique, puis aux délégations de l'Organisation mondiale du commerce – OMC – et du Fonds monétaire international – FMI – ainsi qu'à celles de l'Union européenne, notamment à la délégation française, qui ont tout fait pour que les pays de l'Ouest de l'Afrique n'instaurent pas ces mesures de protection.
Je souhaite que ces pays aient la possibilité de mener la politique commerciale qui leur sied, qu'elle relève du libre-échange ou du protectionnisme. Laissons-leur le plus de marge de manoeuvre et d'autonomie possible pour mener la politique qui leur convient, au lieu de faire pression sur eux pour qu'ils se rangent à la politique dominante dans l'ordre économique mondial, laquelle ne convient pas nécessairement à des pays en voie de développement.
L'amendement no 1753 n'est pas adopté.
L'article 11 undecies est adopté.
Je suis saisi de plusieurs amendements portant articles additionnels après l'article 11 undecies.
La parole est à M. François Ruffin, pour soutenir l'amendement no 2318 .
Cet amendement vise à modifier le code rural et de la pêche maritime afin de rééquilibrer la production de protéines d'origine animale et végétale. Aujourd'hui, parce qu'il faut grosso modo sept kilogrammes de céréales pour produire un kilogramme de boeuf et deux kilogrammes de céréales pour produire un kilogramme de poulet, on constate localement un déséquilibre entre les productions animales et végétales. L'objectif de cet amendement est d'aller vers un rééquilibrage.
Fixer comme objectif de la politique agricole un équilibre entre les protéines d'origine animale et végétale n'a pas grand sens. De quoi parle-t-on ? De surfaces ? Du nombre de choux-fleurs et de vaches ? Cela ne veut absolument rien dire. Avis défavorable.
Avis défavorable.
L'amendement est beaucoup plus clair et précis que la défense que j'en ai faite. Il s'agit, en l'occurrence, de surfaces.
L'amendement no 2318 n'est pas adopté.
Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 17 , 134 , 318 , 361 , 216 , 18 , 119 , 136 , 317 , 359 , 463 , 139 , 316 , 362 , 141 et 315 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 17 , 134 , 318 et 361 sont identiques, de même que les amendements nos 18 , 119 , 136 , 317 , 359 et 463 , les amendements nos 139 , 316 et 362 et les amendements nos 141 et 315 .
La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l'amendement no 17 .
Les accords de libre-échange en voie de ratification ou en cours de négociation, comme le CETA – Comprehensive Economic and Trade Agreement, accord économique et commercial global– et l'accord avec le Mercosur, dont il a déjà été question, prévoient notamment l'ouverture du marché communautaire à plusieurs centaines de milliers de tonnes de viandes issues de bovins engraissés aux farines animales et aux antibiotiques utilisés comme activateurs de croissance. Or ces viandes sont parfaitement incompatibles avec le modèle agricole français.
Aussi, cet amendement vise à renforcer le livre préliminaire du code rural et de la pêche maritime fixant les grands objectifs de la politique agricole et alimentaire française en définissant plus précisément le modèle agricole à valoriser sur nos territoires et en exprimant clairement le refus de la France d'importer des produits ne répondant pas strictement aux mêmes normes de production que celles imposées aux producteurs français pour protéger l'environnement, la santé des consommateurs et le bien-être des animaux. Mon collègue Xavier Breton est cosignataire de cet amendement.
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l'amendement no 134 .
Cet amendement a le même objectif que celui de mon collègue. Il s'agit de défendre et de promouvoir le modèle agricole prôné par la France, un modèle familial, à taille humaine et économe en intrants. Il importe, pour ce faire, de veiller à ce que ne soient pas importés, demain, des produits qui ne satisferaient pas aux mêmes obligations que ceux qui proviennent de notre pays.
Il faut que la France exprime clairement son refus d'importer des viandes issues de bovins engraissés aux farines animales et aux antibiotiques utilisés comme activateurs de croissance. Même si je connais déjà votre réponse, monsieur le ministre, je voulais à nouveau vous alerter sur les risques liés à ces accords de libre-échange.
La réglementation européenne oblige aujourd'hui les opérateurs de la filière de l'élevage à identifier, puis à suivre individuellement chaque animal, depuis son lieu de naissance jusque sur le lieu d'abattage. Il n'en est pas de même au Brésil, par exemple, où il n'existe aucun suivi individuel des bovins, mais seulement un suivi par lots au départ de l'exploitation – si on peut appeler cela une exploitation. Or, à la sortie de l'abattoir, ces lots ne sont plus clairement identifiables. Dans ce pays, comme dans d'autres, il n'y a ni suivi ni traçabilité.
Vous ne pouvez pas me faire la réponse que vous m'avez déjà faite à plusieurs reprises, monsieur le ministre, car les viandes brésiliennes qui arriveront en France n'auront aucune traçabilité, alors que l'élevage français, lui, répond strictement aux normes européennes et que les viandes françaises sont identifiables et traçables.
Que pouvez-vous nous dire par ailleurs, de l'accord que l'Union européenne a conclu dernièrement avec le Mexique, et qui prévoit l'entrée de 20 000 tonnes de viande bovine sur le marché européen ? Leur importation était interdite jusqu'ici, pour des raisons sanitaires, et elle va désormais être autorisée, alors qu'aucune avancée n'a été faite dans ce domaine. Il importe donc, je le répète, que nous prenions des mesures strictes pour protéger efficacement nos éleveurs, nos élevages et, surtout, la santé des consommateurs français.
Monsieur le ministre, cette série d'amendements vous invite, un an après votre prise de fonction, à dessiner des perspectives pour l'agriculture française et pour les agriculteurs français. Votre prédécesseur, Stéphane Le Foll avait fondé son projet pour les agriculteurs sur le concept de l'agroécologie.
Nous avons travaillé longuement en commission, nous travaillons ici depuis le début de la semaine, vous êtes ministre depuis un an…
… il faut que, très vite, se dessine votre projet pour l'agriculture française. Quelle est votre vision ? Quelles sont vos perspectives ? Quelle est la ligne d'horizon ? Tel est, pour moi, le sens de l'amendement no 361 et des amendements identiques que nous vous soumettons. Il serait bon que vous vous exprimiez sur ces questions.
Nous avons déjà eu de longs débats. Je vous ai dit dans la discussion générale, et je crois l'avoir répété hier, que nous sommes dans une période d'eaux calmes pour les agriculteurs français. Les prix agricoles sont moins mauvais qu'en 2015 et 2016, mais il faut se préparer à des à-coups et à des périodes difficiles. Votre rôle, monsieur le ministre, c'est de baliser le chemin pour l'avenir de l'agriculture française. Avec ces amendements, nous défendons une agriculture française diverse, mais dont la racine demeure le modèle familial, qui est précieux.
Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-Agir.
Monsieur Benoît, nous pouvons considérer que vous avez défendu l'amendement no 216 ?
La parole est à M. Patrice Verchère, pour soutenir l'amendement no 119 .
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l'amendement no 136 .
Peu d'entre nous siégeaient déjà à l'Assemblée nationale en 1996, lorsque nous avons dû faire face à une crise importante, celle de la vache folle, due à l'utilisation de farines animales dans l'alimentation des bovins. Une commission d'enquête, coprésidée par notre ami Charles de Courson, député de la Marne, avait alors abouti à l'adoption d'une réglementation très stricte au sujet de l'utilisation des farines animales dans l'alimentation des bovins sur le sol français.
Aujourd'hui, nous ne devons rien lâcher sur cette question, s'agissant notamment des viandes importées. Soyons stricts : c'est ce que vous demandent aujourd'hui les députés.
Il s'agit maintenant de coucher sur le papier toutes ces bonnes intentions et de rappeler que nous ne souhaitons pas importer d'animaux ayant été nourris à partir de farines animales.
Ce que nous demandons ici, c'est la réciprocité. Nous demandons au Gouvernement de tracer une ligne claire : partant du constat que l'agriculture française met à disposition des consommateurs français et mondiaux des produits respectueux de l'environnement et du bien-être animal et qu'elle ne fait pas usage de farines animales pour nourrir ses animaux, nous souhaitons la réciprocité lorsque la France ou l'Europe signe des contrats avec ses partenaires.
Je répète que nous devons profiter de l'examen de ce projet de loi pour coucher sur le papier toutes ces belles intentions, tout ce que nous jugeons important. Mon amendement précédent demandait que l'on interdise l'importation d'animaux ayant consommé des farines animales. Avec celui-ci, je demande que l'on écrive de manière très claire que les animaux auxquels ont été administrés des antibiotiques comme activateurs de croissance n'ont pas à être commercialisés dans notre pays.
Nous partageons évidemment vos préoccupations. Mais, d'une part, nombre de ces amendements fixent des objectifs non quantifiables et non vérifiables. J'ai déjà indiqué tout à l'heure qu'il est impossible de vérifier qu'un animal n'a pas reçu d'antibiotiques comme activateurs de croissance, à moins d'aller contrôler in situ, puisqu'on ne peut pas exercer ce contrôle sur les produits eux-mêmes. De même, l'expression « normes de production » me paraît trop vague.
S'agissant de l'indépendance de notre système de production, je vous rappelle que j'ai déposé un amendement à l'article 11 undecies, portant sur son alinéa 5, qui visait à « promouvoir l'indépendance alimentaire de la France à l'international, en préservant son modèle agricole, ainsi que la qualité et la sécurité de son alimentation ». Cet amendement allait dans le sens que vous souhaitez et je ne pense pas que cette série d'amendements apporte beaucoup plus. Je répète que la notion de « normes de production » me paraît trop imprécise juridiquement. Défavorable.
Le rapporteur vient de répondre précisément sur ces amendements. Pour ma part, je souhaite adopter une perspective un peu plus large, afin de répondre en même temps aux quelques questions qui m'ont été posées, notamment au sujet des accords commerciaux.
Vous avez raison, monsieur Benoit : par temps calme, il faut relever la tête pour essayer de voir la ligne d'horizon. Demain, les exploitants agricoles devront pouvoir investir davantage, innover et atteindre ainsi les objectifs qui se sont dessinés au cours des États généraux de l'alimentation, à savoir créer de la valeur, procéder à une montée en gamme et offrir à nos concitoyens une alimentation sûre, saine et durable.
Nous poursuivons les mêmes objectifs avec les accords commerciaux. La France, vous le savez, a fixé des lignes rouges, d'abord en fixant des contingents au sein de chaque accord – les 20 000 tonnes de viande dans le contrat avec le Mexique et les 100 000 tonnes éventuelles dans le contrat avec le Mercosur. Ces lignes rouges, nous les maintiendrons, puisqu'elles sont les garantes de la viabilité de nos filières.
Je répète que l'accord avec le Mercosur n'est pas encore signé. Lorsqu'il le sera, nous aurons encore six ans avant son entrée en application, au cours desquelles la filière pourra se préparer, au travers d'un plan de filière, que le Gouvernement accompagnera et contrôlera. Ce plan de filière reposera sur la montée en gamme, sur l'augmentation de la compétitivité, pour servir les marchés nationaux et la restauration collective et il veillera à ne pas opposer les modèles agricoles les uns aux autres.
Bien évidemment, ce Gouvernement est très attaché à la définition de l'agroécologie, telle qu'elle avait été portée par le Gouvernement précédent : une agriculture respectueuse de l'environnement, des consommateurs et soucieuse de réduire son empreinte environnementale.
Nous avons posé des garde-fous, que nous ne cessons de rappeler à nos partenaires, et nous restons vigilants face aux accords commerciaux. Cela ne nous empêche pas d'essayer de convaincre nos partenaires de l'Union européenne de travailler avec nous. Dans le cadre de la COPA-COGECA – comité des organisations professionnelles agricoles de l'Union européenne et comité général de la coopération agricole de l'Union européenne – , nous sommes une douzaine de pays à avoir décidé, il y a quelque temps, de résumer dans un document destiné au commissaire européen Phil Hogan les grands axes de progrès que nous envisagions pour la filière bovine.
La filière bovine doit consentir des efforts. Elle doit ainsi travailler sur la segmentation, la valeur ajoutée, l'export, ce qu'elle réussit particulièrement, depuis un an. D'ailleurs, puisque vous demandiez un bilan des actions réalisées, je rappellerai brièvement que, en un an, nous oeuvrons à la réouverture de la route de la Chine pour les exportations de viande de boeuf. Nous avons rouvert celle vers la Turquie pour les exportations de viande et de bêtes sur pied, celle vers l'Irak, également pour l'exportation de volaille. Nous avons rouvert d'autres marchés, par exemple celui du foie gras au Japon, de la pomme de terre au Vietnam. Je ne les citerai pas tous, mais nous menons une politique d'encouragement des filières pour exporter l'excellence. Les produits français ont une belle image au niveau international. Nous ne devons pas nous priver de ces exportations qui favorisent la compétitivité et nous permettent de dégager les marges dont nous avons besoin pour accompagner nos filières.
Nos filières sont également soutenues par le grand plan d'investissement, qui prévoit des aides pour les structurer, encourager la recherche, l'innovation, la numérisation des filières. Les filières peuvent également se saisir du plan Ambition Bio que nous avons mis en place, qui permet d'engager des démarches de progrès et de qualité.
Bien évidemment, je le répète, ces accords commerciaux retiennent toute notre vigilance. La France continue à pointer les difficultés qui pourraient en découler. Nous tenons la barre fermement. La Commission vient de publier ses propositions relatives au cadre financier pluriannuel. Je serai à Madrid jeudi prochain pour présenter, avec d'autres pays européens, un document de travail qui permette de refuser la baisse drastique et inacceptable du budget de la PAC.
Nous travaillons pour une agriculture prospère, une agriculture qui relève la tête, une agriculture qui soit fière de ses territoires, une agriculture dont nos agriculteurs, et les Français dans leur ensemble, puissent s'enorgueillir !
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Monsieur le ministre, nous sommes tous, ici, fiers de nos agriculteurs, ce qui explique que nous acceptions de siéger aussi longtemps sans discontinuer. C'est parce que nous tenons à notre agriculture et que nous voulons la défendre, que nous débattons ainsi.
Cela étant, je tiens à vous poser une question qui me préoccupe depuis plusieurs mois, monsieur le ministre. Comment se fait-il que le CETA soit applicable dans notre pays depuis le 21 septembre 2017 sans que nous n'ayons jamais eu à en débattre dans cet hémicycle, ni même à ratifier le traité ? Peut-être n'ai-je pas tout compris, mais j'aimerais savoir pourquoi nous n'avons jamais été saisis de ce dossier, alors que nous passons notre temps à ratifier des traités de l'Union européenne.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Je voudrais soutenir avec force les amendements de nos camarades du groupe Les Républicains.
Nous parlons de réciprocité dans les échanges internationaux. Dès lors que notre pays interdit les farines animales, il me semble normal que les produits importés soient soumis à la même interdiction – le raisonnement vaut également pour les antibiotiques.
Or la réponse du rapporteur est pour le moins inquiétante ! Sous prétexte que nous ne savons pas trop comment sont conçus les produits importés, nous devrions les accepter sans chercher à comprendre !
C'est ce que j'ai entendu, mais comme vous me prenez pour une machine à polémiques…
Nous nous occupons pour l'heure de la filière bovine mais n'oublions pas que nos inquiétudes se sont révélées fondées dans le passé pour un certain nombre de secteurs, en particulier celui des fruits, qui a subi cette concurrence déloyale, tant sur le plan fiscal, environnemental, que social.
Si nous devons rétablir des mesures de réciprocité dans les accords internationaux, je souhaite qu'elles ne concernent pas seulement la filière bovine mais s'étendent à celle des fruits et légumes, qui a particulièrement souffert – les cerises, les abricots.
Plus généralement, en négligeant d'insérer des clauses environnementales, fiscales et sociales, vous arrêtez le progrès, puisque c'est le moins-disant qui gagne. Voyez la situation en Espagne ou au Maroc, pour les fraises : la concurrence y est extrêmement déloyale, et c'est le moins-disant social qui l'emporte.
Je suis d'accord pour soutenir les amendements des camarades du groupe Les Républicains, mais il me semble que nous devrions étendre le dispositif et ne pas le cantonner à la filière bovine.
Lorsque nos collègues de droite s'insurgent contre les traités de libre-échange, il ne faut pas ménager notre appui !
Je le ferai avec d'autant plus de conviction que le débat que vous avez lancé, monsieur le ministre, tend aussi à mener une campagne d'opinion publique pour faire tomber les préjugés à l'égard du monde agricole. Je mesure combien les agriculteurs sont prêts à consentir des efforts colossaux pour changer le modèle. Ils sont soucieux de l'environnement, de la santé de nos concitoyens, ils ont compris qu'un certain nombre de pratiques du passé n'avaient plus cours aujourd'hui, ils veulent réfléchir aux problématiques soulevées par la traçabilité et la qualité des produits pour progresser dans ce domaine. Nous devrons d'ailleurs, tout au long de nos débats, veiller à ne pas stigmatiser à nouveau nos agriculteurs.
Ils sont d'autant plus enclins à se soumettre à des normes sociales, sanitaires, environnementales que les produits importés les respectent également. À défaut, nos agricultures pourraient disparaître face à la concurrence déloyale à laquelle elles seraient livrées.
La clause de réciprocité dans les traités de libre-échange s'impose si l'on ne veut pas que nos engagements deviennent un miroir aux alouettes.
J'avais dit en commission, par provocation, que je n'étais pas de ceux qui avaient trinqué au CETA, même si ma ville entretient des liens forts avec le Canada. Cinq siècles d'histoire commune, ce n'est pas rien ! Les Dieppois ont mêlé leur sang à celui des Canadiens au moment de la Libération. Je ne crois pas que nos agriculteurs tireront un quelconque bénéfice du CETA. Au contraire, le CETA, comme le Mercosur, achèvera de déstabiliser l'agriculture.
Nous devons donc envoyer le signal, au travers de ce texte, que nous sommes prêts à préserver notre modèle français. C'est le sens des amendements de nos collègues du groupe Les Républicains et c'est pourquoi nous les voterons avec enthousiasme !
M. Lurton a posé une question très importante. Le CETA, partiellement appliqué pour le moment, sans avoir donné lieu à un quelconque débat dans cet hémicycle, pose de vrais problèmes, notamment pour la filière bovine.
Nous espérons, monsieur le ministre, que vous pourrez nous répondre, car beaucoup des dispositions que la majorité a votées n'auront plus beaucoup de sens le jour où le CETA s'appliquera pleinement sur notre territoire.
Les interrogations de M. Lurton ont d'ailleurs été reprises par nos collègues des groupes La France insoumise et de la Gauche démocrate et républicaine, que nous remercions.
La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.
Pour ou contre les échanges internationaux ? Pour ou contre la réciprocité ? La réciprocité va-t-elle dans un seul sens ou dans les deux ? J'ai lu un certain nombre d'amendements, ce soir, qui visaient à ce que les normes doivent être identiques en France et au niveau international. Une telle disposition nous interdirait donc d'importer des produits soumis à des règles plus strictes que les nôtres !
Soit nous décidons de donner des leçons au monde entier, soit nous adoptons une logique adulte et responsable pour engager des négociations, d'égal à égal, et intégrer les enjeux environnementaux et sanitaires du XXIe siècle. Soit on ne donne pas le choix en imposant notre modèle, soit on se comporte en adulte.
Venons-en au CETA, négocié sous les deux majorités précédentes. Lancé sous l'UMP, il a été poursuivi par les socialistes ! Je reconnais que les négociations, menées en catimini, ont manqué de transparence à l'égard des parlementaires et ont négligé les questions environnementales. Mais qu'avons-nous fait, depuis ? Nous avons engagé la discussion avec le Gouvernement pour qu'un débat ait lieu au Parlement – je pense que ce sera le cas – et que soit mis en place un véritable plan d'action, qui intègre les considérations environnementales.
Vous avez raison, le CETA est maintenant en place depuis le 21 septembre, comme prévu, de manière transitoire, jusqu'à la validation par tous les parlements nationaux.
Depuis cette date, nous avons doublé nos exportations de fromages au Canada, et nous avons limité le quota d'importation de viande bovine. C'est grâce à un tel commerce extérieur que nous avons pu, au bout de dix ans, revenir à une balance extérieure positive. L'industrie agroalimentaire française est l'un des trois premiers soldes positifs, en France, depuis des décennies.
Pas moins de 8 milliards de solde extérieur positif, alors que le déficit extérieur se chiffre à plusieurs dizaines de milliards. Nous pouvons être fiers de l'agriculture française, qui parvient à s'exporter ! Portons-la sur les marchés internationaux ! Félicitons-nous que l'on ouvre les marchés chinois ou turcs. Ne nous refermons pas sur nous-mêmes, mais partons à la conquête du monde !
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Je remercie M. le président Roland Lescure, car je suis effaré de notre autosatisfaction à l'égard de nos produits. Je suis le premier, en tant qu'agriculteur, à pester contre l'importation de produits qui ne sont pas soumis aux mêmes normes que nous, mais reconnaissons que notre agriculture dépend beaucoup des exportations. Je me souviens des contraintes qu'ont pu imposer nos amis américains à nos fromages au lait cru, à notre foie gras.
Je m'étonne de l'esprit protectionniste de nos collègues du groupe Les Républicains. Je peux le comprendre pour certains produits, mais notre filière à l'export est importante et nous devrions éviter de donner des leçons au reste du monde.
Notre filière à l'export est importante. Ne donnons pas de leçons au reste du monde. Essayons de faire au mieux en invitant nos concitoyens à consommer des produits de meilleure qualité. Des amendements ont été votés, avec lesquels je n'étais pas entièrement d'accord, sur l'étiquetage, visant à valoriser ce qui se fait de mieux. Invitons les pays voisins à importer nos produits. Ne stigmatisons pas systématiquement les produits que nous importons, car il faudra craindre alors le retour de balancier.
L'intervention du président de la commission des affaires économiques illustre, s'il en était besoin, la nécessité d'une plus grande transparence. En effet, à aucun moment nous n'avons eu connaissance des informations qu'il a délivrées. Ce n'est pas faire du protectionnisme que d'exiger que les produits importés, destinés à la consommation dans notre pays, satisfassent aux mêmes exigences que ceux que nous produisons ? Ce n'est pas non plus donner des leçons au monde entier, c'est protéger le consommateur.
L'étiquetage a fait ici l'objet de débats passionnés : si vous considérez que c'est se protéger au plan économique que d'exiger que les produits importés soient soumis aux mêmes normes que celles qui sont imposées à nos producteurs, vous commettez une erreur. Il s'agit simplement de protéger le consommateur.
Je tiens à aller dans le sens du président de la commission. Il convient tout d'abord de rappeler qu'adhérer à l'Union européenne implique d'adhérer également à ses principes, notamment au fait que la politique commerciale est menée par elle.
Vous avez évoqué les traités internationaux, dont le CETA, sur lequel, vous avez raison, nous avons peu de recul, puisqu'il n'est entré en vigueur que depuis quelques mois. C'est pourquoi je préfère évoquer le traité de libre-échange signé entre l'Union européenne et la Corée du Sud, sur lequel nous avons plus de recul : grâce à cet accord international, aujourd'hui, la France est le deuxième partenaire commercial de la Corée du Sud, avec des exportations supérieures aux importations.
Nous avons évoqué la diminution de la consommation de viande comme un phénomène structurel. Il est évidemment possible de parler des inquiétudes de la filière bovine en raison des négociations actuelles de l'Union européenne avec le Mercosur. Il ne faut toutefois pas entretenir une vision étroite de la politique commerciale : il faut la regarder dans son ensemble pour bien mesurer ses implications. Or, s'il est vrai que les pays d'Amérique latine bénéficieront de quotas de viande, nous aussi nous pourrons saisir des opportunités dans d'autres pays dans lesquels nous avons créé de nouveaux marchés. Vous ne parlez ni du Japon, ni de Singapour, ni du Vietnam, alors que ces nouveaux marchés représentent des opportunités extraordinaires pour notre filière bovine. C'est ainsi que la filière agroalimentaire à destination du Japon représente un marché de 10 milliards d'euros pour l'ensemble de l'Union européenne.
Je le répète : il ne faut pas porter un regard restrictif sur les accords internationaux mais avoir une vision d'ensemble.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Il ne faut pas s'écarter de l'objet des amendements que nous avons déposés ou cosignés et qui est d'ordre sanitaire. Dois-je vous rappeler le drame que nous avons vécu autour de 1996 ? Sur notre propre sol était vendue à des fins de consommation alimentaire de la viande issue de bovins nourris avec des farines animales. Les conséquences d'une telle consommation étaient importantes : la mission parlementaire que j'ai précédemment évoquée avait émis comme probable, à terme, l'hypothèse de plusieurs milliers de décès. Fort heureusement, le drame ne s'est pas produit. Seuls deux ou trois décès ont paru douteux et auraient dû faire, à l'époque, l'objet de recherches plus approfondies – cela fait maintenant plus de deux décennies.
Il ne s'agit pas, aujourd'hui, dans le cadre d'un accord avec le Mercosur ou dans celui du CETA, de prendre le risque d'élargir ces menaces. L'utilisation des farines animales dans l'alimentation des bovins destinés à la consommation humaine pose un problème particulier. La question est la suivante : faut-il, oui ou non, permettre l'importation sur notre sol de viandes issues de bovins nourris avec des farines animales ? Si j'ai déposé un amendement visant à interdire, notamment, de telles importations, c'est pour des raisons sanitaires.
Il appartient maintenant à l'Assemblée nationale de prendre ses responsabilités en se déterminant sur le sujet.
Je tiens à rappeler que le CETA fera l'objet d'un débat à l'Assemblée en principe au second semestre, à la suite de son entrée en vigueur provisoire – il est important de le confirmer.
De plus, aujourd'hui, la filière bovine française est mieux organisée que la filière bovine canadienne, qui n'utilise que 425 tonnes de son contingent de 15 000 tonnes, qui sera porté, post-CETA, à 45 000 tonnes. Il est donc préférable de voir le verre à moitié plein plutôt qu'à moitié vide. Pour les agriculteurs français, ce traité représente une aubaine, puisque les Canadiens devront s'adapter au marché français, c'est-à-dire à nos conditions, qui sont celles d'une viande sans hormones ni antibiotiques. Les Canadiens étant loin derrière nous, nous devons nous montrer combatifs et surtout ne pas donner de nous une image négative.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Il n'est jamais bon de recourir à des généralités. Les amendements en discussion ont pour objet l'équilibre des relations commerciales, une concurrence équitable et, surtout, la sécurité sanitaire.
On a évoqué le CETA et le Mercosur, alors que ce sont deux cas complètement différents. Le CETA ne concerne aujourd'hui que les trente-six fermes canadiennes capables d'exporter des viandes bovines en France pour un total de 4 000 têtes. C'est pourquoi les Canadiens n'utilisent à l'heure actuelle que 1 % de leur quota. On sait que l'accord avec le Canada n'est pas seulement viable : il est même favorable à l'agriculture française.
Nous sommes en pleines négociations avec le Mercosur : c'est donc sur elles qu'il convient aujourd'hui de peser. Monsieur le ministre, ces amendements ont été déposés afin de vous sensibiliser sur le sujet et vous inciter à porter dans cette discussion la voix de la France, en faisant valoir que le gouvernement français et la représentation nationale sont attentifs au contenu des futurs accords avec le Mercosur.
Il y va de la sécurité sanitaire des Européens et des Français : ces amendements sont bons, parce qu'ils servent à montrer que nous sommes attentifs à ces négociations.
Le discours de La République en marche manque de cohérence. D'un côté, le ministre nous assure que le Gouvernement tiendra bon dans les négociations avec le Mercosur et ira jusqu'à jouer des muscles pour défendre les agriculteurs – je pense que le ministre est sincère ; de l'autre, la VIP du groupe La République en marche nous demande de laisser l'Europe négocier les traités de libre-échange.
Or que nous apprennent Les Échos du 22 mai dernier ? Que l'accord entre le Mercosur et l'Union européenne est très proche d'être signé. Qui nous ment ? Qui nous dit la vérité ? Je vous invite à étudier la carte du vote agricole aux législatives : si vous alimentez l'idée que l'État est prêt à renoncer à sa souveraineté qui est d'appliquer les mêmes règles aux produits importés qu'aux produits fabriqués en France, alors, vous ferez grandir la désespérance. Soit on a un ministre qui est capable de revendiquer avec force, soit on est dans le laissez-faire et le laisser-passer.
Monsieur le ministre, comme pour les normes sanitaires, pouvez-vous lever cette ambiguïté ? Sinon, cette loi ne sera qu'un chiffon de papier, puisque l'ensemble des objectifs que vous y avez fixés et que nous partageons ne seront plus que des promesses de Gascon, totalement inopérantes à modifier la réalité du monde agricole.
Nous avons déposé des amendements visant à défendre une exception agriculturelle et à vous demander un rapport d'évaluation de l'impact d'un accord avec le Mercosur, sur le modèle du très bon rapport de la commission d'évaluation de l'impact du CETA, présidée par Katheline Schubert, qui faisait état des forces et des faiblesses de la France dans le cadre de cet accord.
Je tiens à dénoncer les deux points qui froissent notre logique sociale-démocrate. Le premier est que nous ne saurions être protectionnistes uniquement lorsque cela nous arrange, s'agissant, par exemple, des marchés céréaliers européens. Il faut avoir de la cohérence idéologique. On ne peut pas, au plan philosophique, défendre des politiques d'exportation uniquement par opportunité.
Je réfute en même temps – c'est le second point – les arguments en faveur de la mondialisation qu'ont avancés le président de la commission et Mme Lebec, et qui sont fondés sur un optimisme béat. Je rappelle que nous vivons dans un monde fini. La question du changement climatique est capitale. Nous ne pouvons pas faire comme avant : échanger de la viande avec Singapour ou n'importe quels produits avec la terre entière n'a plus aucun sens, car ce modèle insensé est mortifère pour la planète. Il faudra, demain, déterminer la juste part de ce que nous voudrons échanger.
Il faudra ensuite organiser ces échanges dans un esprit de justice, en bâtissant des traités de nouvelle génération. Le CETA, le prochain traité avec le Mercosur ou ceux qui sont envisagés avec l'Asie sont des traités de vieille génération : ils n'intègrent pas le changement climatique ou le dumping social. Il faut inventer une nouvelle génération de traités.
Je refuse de choisir entre un protectionnisme d'opportunité et une vision de la mondialisation relevant d'un optimisme béat. Il nous faut trouver une troisième voie : elle reste à construire. Nous aurons ce débat à un autre moment.
Nous souhaitons pour notre part avancer dans notre rendez-vous législatif et revenir le plus vite possible à des propositions permettant de consolider le texte. Nous avons une sorte de contrat : nous devons passer encore trois jours ensemble. Faisons avancer les questions propres à ce texte.
Je tiens à faire une citation : « Pour moi, en 1992, avec la réforme de la PAC, l'Europe a raté un tournant. Et la suite en 1994 avec les accords de Marrakech. Se lancer dans la compétition à tout-va, dans le libre-échange sans frein, là, ça s'est mis à déconner. » Qui a tenu ces propos ?
C'est Olivier Allain, un des deux coordonnateurs des États généraux de l'alimentation, lors de notre classe verte à Rungis. Je répète : « Pour moi, en 1992, avec la réforme de la PAC, l'Europe a raté un tournant. Et la suite en 1994 avec les accords de Marrakech. Se lancer dans la compétition à tout-va, dans le libre-échange sans frein, là, ça s'est mis à déconner. »
Je l'ai interrogé sur le protectionnisme, parce que je suis, moi, un protectionniste. Je pense qu'il faut savoir recourir à des outils douaniers pour réguler cette mondialisation folle. Il me répond : « Protectionniste, oui, interventionniste, régulationniste. » Nous poursuivons notre dialogue : « Vous voyez, l'intéressant, j'estime, dans la période qu'on traverse, c'est que je ressens une souplesse idéologique chez les agriculteurs. Ça peut bouger dans les têtes. » Lui me répond : « Forcément, les crises, ça interroge. On est dans ce moment. » Je reprends : « Le productivisme est au bout du rouleau, mais le nouveau monde n'est pas encore né. » Il me dit : « C'est précisément ça. » Je lui fais part alors de mon scepticisme, de mon doute sur le fait que les États généraux de l'alimentation portent ce nouveau monde, ce nouveau contrat social. Il me répond : « Qui vivra verra. »
Or, aujourd'hui, chacun voit bien que, loin de porter un nouveau contrat social, on est dans une complète schizophrénie, puisque, d'un côté, on assure que les agriculteurs doivent monter en gamme et que, de l'autre, on s'inscrit toujours plus dans une mondialisation dérégulée.
Je réponds à Dominique Potier que je suis protectionniste dans les deux sens. Je le suis pour la France, mais également pour le Burkina Faso, le Cameroun ou d'autre pays du Sud. Je suis pour la construction d'un protectionnisme solidaire dans les deux sens.
Monsieur le président de la commission a plaidé pour que nous agissions en adultes responsables. Je ne prétends pas que ceux qui font aujourd'hui le choix du libre-échange n'agissent pas en adultes responsables. Mais nous aussi, qui prônons une autre politique, sommes adultes et responsables. Deux types de politiques se sont affrontés durant les dernières décennies, qui ont vu la casse de l'agriculture et de l'industrie en raison du choix, qui a été opéré, d'une concurrence libre et, en vérité, complètement faussée.
Avec les accords de libre-échange, nous sommes vraiment au coeur du débat, parce que nous voulons un texte qui permette de relever le revenu des agricultures et favorise une alimentation plus saine. Or, comme je l'ai déjà souligné, 20 000 tonnes de viande vont arriver en Europe en provenance du Mexique. Je suis, certes, favorable aux échanges, mais, tout de même, 20 000 tonnes de viande arrivant en Europe en provenance du Mexique sans aucune garantie sanitaire !
C'est fait. Allez voir les professionnels pour leur demander où cela en est. L'Europe n'a posé aucune condition sanitaire. Ce sont bien, en provenance du Mexique, 20 000 tonnes de viande issue de bêtes nourries avec des farines animales et des activateurs de croissance qui arriveront sur le marché européen. Il en sera de même avec la viande en provenance du Brésil. Face à des feedlots à 26 000 têtes de bétail, comment voulez-vous que je lutte avec mon exploitation de soixante-dix vaches ?
Et vous me dites que l'on va relever le revenu des agriculteurs ? Vous êtes en plein rêve !
Aujourd'hui, le marché est terrible pour l'agriculture. Nous ne disposons pas des chiffres relatifs au CETA : je ne sais donc pas ce qui a été négocié pour la viande. En revanche, je sais pourquoi les Canadiens ont réclamé avec véhémence ce fameux droit à exporter sans droit de douane 15 000 tonnes de viande. Contrairement à ce qui a été dit, ils ne se contentent pas de 450 tonnes… Expliquez-moi ! Vous dites qu'ils ne seront pas capables de produire davantage, mais rassurez-vous : ils produiront la quantité qu'ils auront négociée ! Demain, il n'y aura pratiquement plus de droits de douane, alors que c'est justement ce qui faisait notre force et qui nous protégeait. Je veux bien tout entendre, mais là…
Nous négocions nos broutards avec la Turquie et l'Italie : je vous assure que nous sommes très ouverts aux marchés extérieurs. Mais nous sommes aussi très méfiants quant à la qualité sanitaire. Voilà justement les deux sujets dont nous discutons depuis mardi : la qualité et le revenu. Pensez aux consommateurs qui vont bouffer de la merde !
Applaudissements sur les bancs des groupes LR et GDR. – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Nous oeuvrons effectivement pour l'augmentation des revenus des agriculteurs ; nous ne sommes pas là pour faire du protectionnisme d'opportunité.
Je veux juste soumettre à votre réflexion une demande que la filière viande nous a adressée récemment. Dans le contexte du Brexit, elle nous demande de maintenir les accords commerciaux, parce que nous recevons tous les ans des tonnes et des tonnes de viande ovine venant de Nouvelle-Zélande et que, à partir d'août ou de septembre, nous importerons aussi de la viande bovine, car nous n'en produisons plus assez. Certes, nous avons des ressources chez nous, mais nous ne pouvons pas refuser les importations de viande lorsque nous n'en avons pas besoin alors que nous allons nous fournir à l'étranger lorsque nous en avons besoin.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LR.
Ces amendements visent à interdire les importations de produits ne respectant pas strictement les normes de production imposées au niveau national telles que l'interdiction des farines animales. Avec votre projet de loi, monsieur le ministre, sommes-nous sûrs que nous n'importerons pas de viande de bovins nourris aux farines animales ? Ce matin, nous avons débattu des menus végétariens. Bientôt, alors que la plupart d'entre nous mangerons des plats végétariens, les animaux que nous allons importer pour ceux qui mangeront encore de la viande auront été nourris avec leurs propres carcasses ! J'aimerais donc savoir si nous pouvons être sûrs que la viande que nous allons importer ne proviendra pas d'animaux nourris aux farines animales.
L'amendement no 216 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Nombre de votants | 87 |
Nombre de suffrages exprimés | 83 |
Majorité absolue | 42 |
Pour l'adoption | 22 |
contre | 61 |
La parole est à M. François Ruffin, pour soutenir l'amendement no 2621 .
Cet amendement fait écho au débat que nous venons d'avoir. Nous voulions le présenter avant l'article 1er, mais il a été déplacé, semble-t-il, après l'article 11 undecies. Nous souhaitons engager, ce soir dans notre assemblée, un débat sur la politique agricole commune. Il me semble que nous sommes tous frais et prêts pour cela !
Les traités de libre-échange comme le CETA ou l'accord avec le Mercosur sont négociés par l'Union européenne. Ainsi, discuter du revenu des paysans sans discuter de la politique agricole commune, c'est regarder la paille plutôt que la poutre ! De même, qui se charge de la régulation des marchés agricoles ? C'est toujours l'Union européenne ! À qui sont destinées les aides de la politique agricole commune ? Quels sont les pesticides à interdire ? Tous ces débats ont lieu, pour l'essentiel, au niveau européen. C'est pourquoi il nous semble nécessaire d'engager dès ce soir un débat à l'Assemblée nationale pour connaître les orientations que défendra le ministre sur toutes ces questions et bouleverser la politique agricole commune. Il serait dommage de ne discuter que de ce qui se passe dans notre petit périmètre alors que des décisions touchant un espace beaucoup plus vaste risquent d'être négociées dans les semaines à venir !
La France insoumise a pondu une présentation des orientations que devrait prendre la politique agricole commune selon nos vues. Vous trouverez ce document en annexe de l'exposé sommaire de notre amendement.
Le premier point s'intitule : « Pour un renforcement de la régulation des marchés agricoles, afin de garantir aux paysans de l'Union européenne un revenu décent. »
Pour ce faire, le premier outil serait la « mise en place, pour certaines productions, de prix minimums aux producteurs ». En effet, on nous dit que les prix planchers, auxquels je suis très attaché et qui me paraissent toujours être le seul outil à même de garantir un revenu décent aux agriculteurs, sont interdits par l'Union européenne. Il serait bon que la France monte au créneau sur ce sujet et demande à l'Union européenne de mettre en place des prix planchers. Le ministre va-t-il porter à Bruxelles cette demande, que je désire vivement et qu'il partage sans doute ? Nous aimerions le savoir.
Les autres outils que nous défendons dans le cadre de la politique agricole commune sont : « régulation des volumes de production et instauration de quotas de production » ; « mise en place, sur certaines productions, de taxes à l'importation » ; « instaurer le protectionnisme solidaire et mettre en échec des accords de libre-échange » ; « construire une alliance stratégique avec les pays engagés dans la défense de la souveraineté alimentaire et de l'agriculture paysanne ».
Le deuxième point porte sur la destination des aides de la politique agricole commune. Les propositions de la France insoumise sont : « suppression du système actuel d'aides à l'hectare » ; « subventions destinées à compenser les investissements et autres coûts générés par la transition écologique de l'agriculture » – nous parlons là d'un financement par la PAC – ; « rémunération de services spécifiques fournis à la société par l'agriculture écologique » ; « soutien au revenu des exploitations agricoles situées en zones défavorisées, montagnes et zones sèches » ; « soutien à l'installation de nouveaux agriculteurs » ; « soutien à la transition du système alimentaire, y compris via des dotations à la restauration collective ».
Le dernier volet de notre stratégie porte sur « l'interdiction des pesticides les plus dangereux pour la santé humaine et pour l'environnement, et notamment les néonicotinoïdes, les herbicides à base de glyphosate, des "OGM cachés" échappant à l'actuelle législation sur les OGM ».
Sur tous ces points, il nous semble nécessaire d'entendre la parole du ministre pour savoir dans quel cadre il veut faire évoluer notre agriculture. En effet, nous sommes en train de regarder un point de détail dans un vaste tableau. Il me semble que tout le monde a le vif désir et l'énergie d'engager ce débat ce samedi soir, à vingt-trois heures.
Sourires.
Mes chers collègues, avez-vous trois jours pour que nous développions l'ensemble des thématiques abordées par M. Ruffin ? Je pense que ce n'est pas à moi de répondre, mais au ministre.
Cet amendement n'a pas de portée normative : je comprends bien qu'il s'agit d'un amendement d'appel déposé pour inciter le ministre à s'exprimer sur la politique agricole commune. Cependant, nous commencerons à négocier la nouvelle politique agricole commune dans quelque temps : aujourd'hui, nous ne sommes pas encore en pleine négociation.
Ce projet de loi vise à redonner aux agriculteurs la capacité de vivre de leur travail et de devenir de plus en plus autonomes par rapport aux aides – c'est aussi l'un des objectifs du titre Ier. Je ne dis pas que nous y arriverons demain ni après-demain. Nous voulons redonner de la valeur à ce que produisent et vendent nos agriculteurs pour leur permettre de s'autonomiser par rapport aux aides.
Je ne veux pas rouvrir le débat, mais la France et l'agriculture française, notamment la filière des céréales, ont besoin d'exportations. Nous ne pouvons pas vivre comme si le monde était fermé – cette situation n'existera plus. De toute façon, dans un monde fermé, l'agriculture ne s'est jamais tirée d'affaire : il n'y a qu'à voir ce qui s'est passé en URSS, notamment, où les agriculteurs étaient les premiers qui mouraient de faim.
Défavorable. J'entends bien l'invitation qui m'est faite à parler de la PAC, mais j'ai déjà eu l'occasion de présenter nos intentions en la matière avant d'engager le débat sur ce projet de loi ; j'ai aussi eu l'occasion de les rappeler à deux reprises depuis le début de nos discussions.
J'aurai vraiment grand plaisir à vous retrouver, monsieur Ruffin, en commission des affaires économiques, dans le cadre d'une table ronde ou pour être interrogé sur ces sujets importants. Pour le moment, il faut que nous avancions, car nous avons encore de beaux sujets à débattre ensemble.
Je le répète, j'aurai grand plaisir à venir débattre avec vous de ce que nous souhaitons faire dans le cadre de la prochaine PAC. Croyez-moi, nous nous en occupons, nous y travaillons et nous essaierons de faire en sorte qu'elle réponde aux intérêts de nos agriculteurs.
À défaut de balayer ce vaste paysage, monsieur le ministre, quelle voix la France portera-t-elle sur la question de l'accord avec le Mercosur que nous venons d'évoquer ?
Une question a été posée de manière récurrente par les élus du groupe Les Républicains, mais nous n'avons pas entendu de réponse : allons-nous laisser entrer sur le territoire français de la viande bovine venant d'animaux potentiellement nourris aux farines animales ?
Je le répète, cette question a été récurrente et vous n'y avez pas répondu de manière franche.
L'amendement no 2621 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Élisabeth Toutut-Picard, pour soutenir l'amendement no 2125 .
La visite médicale est obligatoire pour les salariés agricoles, mais pas pour les non-salariés, en particulier pour les chefs d'exploitation et les membres de leurs familles, pourtant exposés aux mêmes risques dans le cadre de leur activité, notamment aux pathologies consécutives à une exposition aux produits phytopharmaceutiques.
L'enquête nationale de surveillance médicale des expositions des salariés aux risques professionnels de 2010 avance les chiffres suivants : 25 % des salariés agricoles auraient été exposés aux produits phytopharmaceutiques au cours des douze mois précédant l'enquête ; 10 % auraient été exposés spécifiquement aux produits phytopharmaceutiques classés CMR – cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques – ; 8 % auraient été exposés à ces produits au cours de la semaine précédant le questionnaire.
Par manque de statistiques issues des visites médicales, il n'y a pas de données similaires mesurables pour les exploitants, alors que leur santé physique et mentale est particulièrement exposée.
S'agissant de la santé physique, une enquête de l'Institut de veille sanitaire – InVS – publiée en octobre 2013, effectuée auprès des exploitants agricoles sur la période 2007-2009, a montré que les cancers, la maladie de Parkinson et les lymphomes non hodgkiniens constituent leur première cause de décès, devant les suicides.
S'agissant de la santé mentale, le risque de décès par suicide est trois fois plus élevé pour les hommes et deux fois plus élevé pour les femmes chez les agriculteurs que dans les autres professions. Ainsi, 485 suicides ont été recensés sur la période 2007-2009. L'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation – ANSES – estime aussi que 1 million de personnes seraient potentiellement exposées aux produits phytopharmaceutiques dans l'exercice de leur métier agricole. Il faut y ajouter des centaines de milliers de riverains.
L'amendement no 2125 propose que, dans le cadre de la politique de protection et de prévention de la santé des agriculteurs, un parcours de soins spécifique soit mis en place pour les chefs d'exploitation agricole et leurs familles. Il pourrait prendre la forme d'une coordination entre la médecine de ville et les médecins de la Mutualité sociale agricole – MSA – , notamment via le dossier médical partagé. Cela permettrait de collecter des données épidémiologiques et d'identifier les pathologies physiques spécifiques à cette population, ainsi que d'anticiper les situations de détresse psychique et d'y remédier.
Vous visez, avec votre amendement, l'article L. 1 du code rural et les objectifs de la politique en faveur de l'agriculture et de l'alimentation. Ce n'est pas à cette politique agricole qu'il incombe de mettre en place un parcours de soins spécifique pour les agriculteurs et pour leurs familles, mais à la politique de santé et à la Mutualité sociale agricole – MSA. Cet amendement a donc plus sa place dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale que dans le présent projet de loi. Avis défavorable.
Madame la députée, vous avez tout à l'heure soulevé une question relative à la santé des agriculteurs. Or, comme vous le savez, si les salariés ont aujourd'hui la possibilité – et même l'obligation – de subir des visites médicales régulières, bien souvent, les chefs d'exploitation ne le font pas, pour des raisons économiques, et il serait difficile de leur imposer une nouvelle charge. De même, il serait compliqué d'assurer un suivi pour l'ensemble de leur famille, du fait du statut des familles des agriculteurs et aussi, tout simplement, parce que nous manquons de médecins du travail – mais cela, vous le savez aussi.
Nous avons cependant envie, comme je vous l'ai dit l'autre jour, de faire évoluer ce système et d'y travailler. Je souhaite que nous puissions trouver des solutions permettant de mieux protéger les agriculteurs, qui sont confrontés à des risques pour leur santé du fait de l'utilisation de produits phytosanitaires, mais aussi à cause des troubles musculo-squelettiques auxquels les exposent le fait de porter des charges lourdes et leurs conditions de travail difficiles.
Nous avons évoqué cette question avec Mme Agnès Buzyn, ministre de la santé et des solidarités, et souhaitons aussi travailler à la révision du tableau des maladies professionnelles pour l'agriculture, qui nous permettra de déceler et d'identifier certaines pathologies liées aux travaux des chefs d'exportations agricoles et de progresser pour leur assurer des visites médicales permettant de déceler et d'anticiper les pathologies qu'ils pourraient contracter.
Je suis donc défavorable à votre amendement, mais nous souhaitons avancer dans ce sens et continuerons à le faire d'ici aux prochaines lectures de ce texte.
L'amendement no 2125 n'est pas adopté.
Dans un récent rapport d'information produit par une mission de l'Assemblée nationale présidée par Mme Toutut-Picard et ayant pour co-rapporteur Didier Martin, député de la Côte-d'Or, intitulé Vers des solutions alternatives aux produits phytopharmaceutiques, une solution culturale préconisée comme étant à privilégier est celle de l'agriculture dite « de conservation ». Cette solution, fondée sur l'observation de la vie des plantes et des sols, permet, grâce à des pratiques culturales appropriées, comme le non-labour et le couvert végétal permanent, d'améliorer la qualité des sols tout en diminuant l'apport des intrants tels que les engrais et les produits phytosanitaires.
Il s'agit donc de vous mobiliser, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, en faveur de cette solution novatrice qui se développe notamment dans les grandes plaines céréalières et permet d'améliorer très nettement la qualité des sols au niveau national.
Je souscris à l'idée qu'il faut développer et valoriser l'agriculture de conservation des sols, mais je ne suis cependant pas certain qu'il soit nécessaire d'en faire un objectif de la politique agricole pour la valoriser et développer. Avis défavorable, donc.
L'amendement no 464 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Sébastien Jumel, pour soutenir l'amendement no 1754 rectifié .
La question de la précarité alimentaire – et, du reste, celle de la précarité tout court – est importante : près de 9 millions de Français vivent sous le seuil de pauvreté et 4 millions de nos concitoyens ont recours à l'aide alimentaire. Cette précarité entraîne un recours à des produits de médiocre qualité, ce qui se traduit, dans nos territoires respectifs, et en tout cas dans ceux qui sont les plus bousculés par la crise, par des problèmes de santé importants : obésité, maladies cardio-vasculaires et taux de morbidité supérieur à la moyenne nationale.
Pour faire face à cette précarité et à cette pauvreté structurelles, l'aide alimentaire est déterminante. Or cette aide alimentaire risque d'être fragilisée, voire remise en cause, à l'échelle européenne. Sur un territoire comme le mien, les Restos du coeur, le Secours populaire, la Soupe des bénévoles et Emmaüs sont, au quotidien, chargés d'une mission d'intérêt public, d'utilité publique, de salubrité publique et de sauvegarde de nos populations les plus fragiles, et ils s'inquiètent de cette remise en cause de l'aide alimentaire à l'échelle européenne.
Cet amendement vise donc simplement à préciser que l'objectif de l'aide alimentaire doit être au coeur de la politique menée par la France à l'échelle européenne. C'est de l'affichage, mais il s'agit aussi d'un amendement de soutien aux différents ministres dans les négociations qu'ils devront mener. Il me semble intéressant et important de l'adopter.
Je comprends la logique qui sous-tend votre amendement, mais le contenu du cadre communautaire n'est pas lié aux objectifs nationaux que nous nous fixerions ainsi dans le code rural et de la pêche maritime. Ce cadre doit être négocié par l'État, mais nous ne pouvons pas nous fixer ce renforcement comme un objectif à atteindre. Avis défavorable.
Défavorable.
Je rappelle – on l'a redit plusieurs fois – que la courbe de la pauvreté suit celle de l'obésité. C'est là un vrai problème et nos associations sont inquiètes.
Il faudra aussi, sur les territoires, accompagner la possibilité donnée aux cantines scolaires de servir aux plus démunis de notre pays les repas qui n'auront pas été consommés. Au-delà du fait que, grâce à l'action menée, cela sera désormais possible, il conviendra d'accompagner cette démarche pour qu'elle devienne une réalité.
Il nous faudra aussi réfléchir sur ces repas destinés aux plus humbles, car les collectes donnent le plus souvent lieu à la distribution de conserves : comment travailler pour que les populations les plus défavorisées aient accès à des fruits et légumes frais – car elles ont évidemment le droit de manger comme tout le monde ?
L'amendement no 1754 rectifié n'est pas adopté.
La parole est à Mme Delphine Batho, pour soutenir l'amendement no 1465 .
Selon moi, cet amendement est en grande partie satisfait par l'alinéa 5 de l'article 11 undecies. Avis défavorable, donc.
L'amendement no 1465 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Guillaume Garot, pour soutenir l'amendement no 2457 .
Pour poursuivre les débats que nous avons eus au cours de cette dernière heure, nous souhaitons valoriser le rôle singulier de l'agriculture dans les échanges économiques internationaux et dans les échanges commerciaux.
Nous considérons en effet – comme vous, sans doute – que l'agriculture n'est pas une marchandise comme les autres, d'abord parce qu'il s'agit de la base de notre nourriture quotidienne, ensuite parce qu'elle est une contribution essentielle à la lutte contre le changement climatique, et enfin parce qu'elle est aussi un enjeu de souveraineté pour les peuples et les États. Si l'on pose ces enjeux dans cet ordre, on se demande immédiatement s'il ne faut pas affirmer ce rôle singulier.
François Mitterrand, lorsqu'il était Président de la République, avait arraché l'exception culturelle. Nous proposons, quant à nous, de mener le combat d'une exception agriculturelle et voudrions que la France mène ce combat dans les échanges internationaux. Les défis, comme on l'a bien compris ce soir, sont devant nous et au sein de l'Union européenne.
Voilà donc l'amendement que nous vous proposons en faveur d'une défense et d'une valorisation de l'exception agriculturelle.
, cet amendement est en partie satisfait – même s'il ne l'est certainement pas entièrement – par la rédaction que j'ai proposée pour l'alinéa 5 de l'article 11 undecies. Toutefois, l'interpellation de M. Garot s'adressant plutôt au ministre, je vais le laisser répondre.
Je rattrape la balle.
Sourires.
L'accompagnement de la transition écologique et la prise en compte du caractère spécifique de l'agriculture dans les négociations commerciales sont des orientations fortes de la politique agricole française et le Gouvernement est évidemment mobilisé pour garantir aux producteurs français l'égalité de la concurrence avec leurs homologues européens et les autres, comme l'illustre le plan d'action que nous avons instauré pour la mise en oeuvre du CETA.
Cependant, une exception agriculturelle comparable à l'exception culturelle qui, comme vous l'avez rappelé, monsieur Garot, a été défendue en son temps et arrachée, après une dure lutte, par le gouvernement français, reviendrait à soustraire le secteur agricole français au cadre commercial multinational et international de l'Organisation mondiale du commerce – OMC – et priverait nos exploitants agricoles de débouchés économiques importants.
En outre, la France perdrait aussi le bénéfice du cadre de régulation des échanges agricoles et la protection des standards internationaux, notamment sanitaires, dont nous avons besoin. Or, nous ne pouvons pas transiger sur les écarts sanitaires fournis par l'OMC.
Ainsi, avec la rédaction de cet amendement et en l'état, même si ce combat est important, il ne peut pas être mené de cette manière. J'émets donc un avis défavorable.
Vous aurez remarqué que nous n'avons pas cultivé l'emphase ni multiplié les amendements : deux ou trois seulement évoquent la mondialisation vue par le groupe Nouvelle Gauche. Nous demanderons tout à l'heure, bien entendu, un rapport sur le Mercosur, à l'instar de ce qui a été fait sur le CETA, afin de sortir de l'angélisme qui s'est exprimé jusqu'ici.
Pour ce qui est de l'exception agriculturelle, nous affirmons une idée très largement partagée à travers le monde. J'ai sous les yeux la conclusion no 12 de l'atelier 11 des États généraux de l'agriculture, auquel participaient Sandrine Le Feur et d'autres, comme la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles – FNSEA – ou la Confédération paysanne : tous se sont mis d'accord sur des principes aussi simples qu'« Une Europe harmonisée », « Une nouvelle génération de traités internationaux » et une relation privilégiée entre l'Europe et l'Afrique, faite de codéveloppement.
Ces principes d'exception agriculturelle, tels que Guillaume Garot vient de les développer, sont fondés philosophiquement sur le fait que l'agriculture, l'alimentation, n'est pas une marchandise comme les autres. En effet, autour des sols, de leur qualité, du partage de la nourriture et de la terre et du juste commerce se joue une grande part de l'avenir de notre humanité en termes d'écosystème et d'anthropocène, mais aussi une part de notre humanité en termes de dignité des personnes – je parle des personnes les plus défavorisées chez nous, mais également des travailleurs de la terre, victimes de l'accaparement de la part de certaines multinationales, au bout du monde.
Je n'ai aucune sympathie pour cette idée d'échanges multiples à travers le monde qui, je le répète, correspond – les plus anciens d'entre nous comprendront – à un schéma « Shadok » : échanger du lait contre du boeuf ! Je ne sais pas comment vous l'expliquerez à vos enfants ou à vos petits-enfants – il est déjà assez difficile de dire aujourd'hui que nos sociétés n'ont rien trouvé de plus évolué que de procéder à ces échanges multiples.
Qu'une part du commerce mondial donne lieu à des échanges dans des conditions réciproques et justes, parce que nous avons des signes d'identification de l'origine et de la qualité – SIQO – , qu'une part de notre champagne doit voyager et qu'une part de notre blé doit contribuer à l'équilibre alimentaire du Maghreb, soit. Mais faire du libre-échange mondial une norme, banaliser la nourriture en oubliant qu'elle est la clé de la paix du monde et peut-être l'une des clés de la survie de notre humanité, c'est faire fi d'une évidence.
Selon l'ONU, en 2017, l'accaparement des terres a fait dans le monde plus de victimes de la violence et de la misère que n'en ont fait les guerres. La souveraineté alimentaire, le juste échange, la dignité des personnes et la lutte ici contre l'obésité et ailleurs contre la faim dans le monde ne sont-ils pas prioritaires par rapport aux règles marchandes ? C'est la question que nous posons et qui justifie l'amendement que nous vous proposons.
Je prends quelques secondes pour dire que cette idée mériterait vraiment que nous travaillions ensemble – sans doute ailleurs. L'exception agriculturelle pose une vraie question de société. Les produits agricoles ne sont pas des produits comme les autres : cela mériterait la réflexion proposée dans cet amendement.
Monsieur Orphelin, pourquoi repousser cela à plus tard ? Un « tiens » vaut mieux que deux « tu l'auras » – M. Chassaigne dirait que « tout ce qui rentre avant l'hiver ne craint pas la gelée » !
Sourires.
Dès maintenant, nous pouvons l'inscrire dans la loi. Ayant déposé un amendement quasiment similaire – l'amendement no 1992 ; je ne sais pas pourquoi ils n'ont pas été examinés en discussion commune – , nous venons en évident soutien à cette proposition du groupe Nouvelle Gauche : il faut sortir les aliments et l'agriculture de cette machine qu'est la mondialisation.
Cela ne signifie pas que nous nous fermons au monde et que nous voulons vivre en autarcie, comme nous l'entendons de façon systématique. Cela veut dire que nous pensons qu'il existe d'autres formes de liaisons commerciales que celles faisant de la concurrence et de la compétitivité la vertu suprême. La coopération peut exister entre les pays, notamment sur le plan agricole. Je soutiens donc cet amendement du groupe Nouvelle Gauche qui, je le pense, fera de même sur l'amendement no 1992 – ayant lu les deux, je ne leur trouve pas de grosses différences.
Pour mémoire, Nicolas Hulot, aujourd'hui ministre du Gouvernement, avait signé en 2016 une tribune dans Libération demandant la reconnaissance d'une « exception agriculturelle dans le commerce mondial ». Il me semble nécessaire ce soir de passer aux actes, c'est-à-dire d'inscrire ces quelques mots dans la loi.
Dans tout échange, il y a des gagnants et des perdants. Avec le CETA – Comprehensive economic and trade agreement –, nous avons gagné avec les laitiers mais nous perdons avec le boeuf. La différence, c'est que, dans les accords internationaux, l'agriculture ne doit pas servir de variable d'ajustement. Nos agriculteurs, qui sont tout petits face à la grande distribution, ne s'appellent pas Veolia ou Suez : ils n'ont pas les équipes pour négocier dans les échanges internationaux. Il ne faut donc pas, dans ces échanges, privilégier systématiquement les accords industriels.
Il faut veiller à ce que notre agriculture ne soit pas la variable d'ajustement de ces accords internationaux : voilà ce qui importe. Notre Parlement représente cette multitude de petits paysans ; nous sommes les défenseurs de ceux qui n'ont pas les moyens d'agir dans le cadre de ces accords internationaux. Le Parlement doit les défendre, car ils ne sont pas aussi bien défendus que les grandes sociétés multinationales.
Sur l'amendement no 2457 , je suis saisi par les groupes Nouvelle Gauche et La France insoumise d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Sébastien Jumel.
Je veux à mon tour, au nom des députés communistes, soutenir cet amendement puisque nous en avons déposé un semblable, qui sera examiné un peu plus tard – il n'a pas été classé au même endroit, pour des raisons qui m'échappent. Les arguments développés par Dominique Potier sont vraiment pertinents, de même que l'argument complémentaire apporté par M. Ramos sur la variable d'ajustement des traités internationaux. Tout cela doit, à mon avis, emporter le consensus dans cette assemblée.
J'ajoute un argument supplémentaire : nous avons, et cela fait la fierté de la France, reconnu depuis longtemps une exception dans le domaine culturel. La reconnaissance de cette exception n'interdit pas à la France d'être à l'offensive – je pense notamment au secteur cinématographique – , y compris au plan international, au plan commercial. Cette reconnaissance de l'exception n'est pas un obstacle aux échanges, mais constitue simplement une manière de réaffirmer que l'agriculture, les produits issus de l'agriculture, les enjeux liés à l'agriculture – santé, sécurité alimentaire, souveraineté alimentaire – sont des éléments consubstantiels à l'existence même de l'État, de la nation, de la souveraineté. Tel est le sens de ces amendements.
Il est procédé au scrutin.
Nombre de votants | 52 |
Nombre de suffrages exprimés | 49 |
Majorité absolue | 25 |
Pour l'adoption | 15 |
contre | 34 |
L'amendement no 2457 n'est pas adopté.
Le présent amendement a pour objet la remise d'un rapport sur les conséquences des accords commerciaux internationaux de type CETA ou Mercosur – je pense que le groupe Nouvelle Gauche fera une demande dans le même sens. Le Président de la République avait fait une promesse aux jeunes agriculteurs en ouverture du Salon international de l'agriculture : le rapport permettra de vérifier s'il existe une possibilité de contrôler aux frontières la qualité sanitaire et si, oui ou non, nous aurons sur le sol français du boeuf nourri aux farines animales.
La parole est à M. M'jid El Guerrab, pour soutenir l'amendement no 511 .
La parole est à M. Sébastien Jumel, pour soutenir l'amendement no 2200 .
Cet amendement va dans le même sens. Nous avons longuement débattu des traités internationaux d'actualité ; le président Lescure en a présenté une vision idyllique, positive…
… et très offensive. Faisons donc en sorte d'en dresser le bilan, d'une manière transparente. J'ai cru comprendre que, désormais, la mode était à l'évaluation des politiques publiques. Nous proposons donc un outil pour évaluer ce sujet – rien de révolutionnaire : un bilan, un rapport annuel sur l'impact de ces deux traités sur l'agriculture, au moins pour les deux premières années ; cela me semble intéressant.
La demande de rapport est excessivement vaste, puisqu'elle vise l'ensemble des politiques internationales : cela peut concerner la PAC, cela peut concerner un peu tout.
Sur les traités internationaux, une partie de la demande est déjà satisfaite puisque, s'agissant du CETA, un plan d'action a été mis en route, qui fera l'objet d'un suivi, avec des comptes rendus réguliers de la part du Gouvernement sur l'application du CETA ; c'est donc déjà valable. Le Mercosur n'est pas signé ; si un jour il doit l'être, il donnera lieu au même type de plan d'action et au même type de plan de suivi. Avis défavorable.
Défavorable.
Rappel au règlement
Je sais bien que nous siégeons depuis de nombreuses heures depuis mardi dernier – des journées, des soirées et des nuits – , mais je souhaiterais quand même que le délai de cinq minutes soit respecté pour que l'on puisse voter en cas de scrutin public annoncé. Sur le dernier scrutin public, et avec tout le respect que je dois à la présidence, vous n'avez pas, monsieur le président, respecté ce délai de cinq minutes.
Cela a empêché un certain nombre de nos collègues, à commencer par moi, de prendre part à ce scrutin et de voter. Je sais que ce débat est long, néanmoins certains sujets sont extrêmement importants et je souhaiterais que nous puissions nous exprimer.
C'est bien noté mais le scrutin, je tiens à le dire, avait bien été annoncé dans l'Assemblée nationale ; je crois que vous n'étiez pas dans l'hémicycle à ce moment-là, madame la présidente du groupe. C'est pour cela que le scrutin est annoncé : pour permettre à chacun de rejoindre l'hémicycle.
Si des collègues n'ont pas pu voter parce qu'ils sont arrivés juste au moment du vote, ils peuvent demander une rectification du procès-verbal de vote : leur nom et leur vote seront ainsi indiqués au compte rendu.
Après l'article 11 undecies(suite)
Je rappelle que les avis de la commission et du Gouvernement sur ces amendements en discussion commune sont défavorables.
L'amendement no 2277 n'est pas adopté.
La parole est à M. Sébastien Jumel, pour soutenir l'amendement no 2181 .
La parole est à M. M'jid El Guerrab, pour soutenir l'amendement no 509 .
La parole est à Mme Élisabeth Toutut-Picard, pour soutenir l'amendement no 2056 .
La parole est à Mme Élisabeth Toutut-Picard, pour soutenir l'amendement no 2074 .
L'agriculture de conservation « sans labour » ou « semis direct » présente d'énormes avantages en termes environnementaux, économiques et même sanitaires. Elle permet en effet d'améliorer la qualité du sol, de l'eau, de l'air ; elle séquestre du carbone ; elle favorise l'infiltration d'eau ; elle diminue le lessivage du sol par les eaux de ruissellement ; elle permet, grâce à des successions culturales diversifiées, l'allongement des rotations, ainsi que la réduction des maladies et donc du besoin de recourir aux produits phytopharmaceutiques.
Nous souhaitons que le recours à ce type d'agriculture fasse l'objet d'un intérêt un peu plus marqué. Aujourd'hui, elle ne représente que 4 % de la surface en grandes cultures et n'est pratiquée que par 2 % des agriculteurs. Le présent amendement propose d'assigner aux politiques publiques un objectif de 10 % de la SAU – surface agricole utile – en agriculture de conservation d'ici 2025. Il reprend ainsi la proposition no 15 du rapport de la mission d'information commune sur l'utilisation des produits phytopharmaceutiques, paru début avril 2018.
Nous fixons déjà beaucoup d'objectifs chiffrés dans la loi : parvenons déjà aux 50 % de bio, labels et mentions dans les cantines, aux 15 % de SAU en bio. Ne dilapidons pas nos efforts, notamment financiers, avec une multitude d'objectifs potentiellement contradictoires. Avis défavorable.
Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation incite déjà beaucoup les agriculteurs français à s'engager dans la transition agroécologique de leurs exploitations, qui permet de prendre en compte la biodiversité, les sols, la gestion des intrants, en promouvant différentes techniques agroécologiques. Nous sommes aussi membres fondateurs de l'initiative « 4 pour 1 000 » relative à la séquestration de carbone dans les sols. Nous travaillons beaucoup sur ces sujets au plan international et nous cherchons aussi, au fur et à mesure, de nouveaux partenaires. Nous faisons déjà beaucoup de choses dans ce domaine. Les objectifs que nous avons fixés en matière d'agriculture biologique sont connus : il nous faut maintenant atteindre ces objectifs. Je suis donc défavorable à votre amendement.
L'occasion est trop tentante de vous faire un petit cours d'agronomie.
L'agriculture de conservation est effectivement prônée par des organismes comme la FAO – Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture – pour protéger les sols de l'érosion, du vent. Surtout développée en Amérique du sud à l'origine, elle a fait des adeptes en France.
Ce mode de culture consiste à ne jamais laisser le sol à nu pour éviter les phénomènes de ruissellement et d'érosion, ce qui a comme toute technique de culture des avantages, mais aussi des inconvénients. En France, cela suppose l'emploi du glyphosate, qui fera certainement l'objet d'un débat animé demain.
Cette technique de culture est donc intéressante du point de vue de la protection des sols, via l'augmentation et l'incorporation de matières organiques, mais présente l'inconvénient d'imposer l'utilisation du glyphosate. C'est un exemple typique qu'en agriculture, tout n'est pas noir ou blanc.
J'ai du mal à vous suivre, monsieur le rapporteur. Vous avez l'air de penser que l'agriculture biologique et l'agriculture de conservation se font concurrence : pas du tout ! On sait qu'il faut entre trois et cinq ans pour passer de l'agriculture conventionnelle à l'agriculture biologique – et encore, moyennant financement. L'agriculture de conservation a l'avantage d'être une solution intermédiaire entre une agriculture qui use de nombreux intrants chimiques et l'agriculture biologique, qui demande beaucoup de temps et d'argent. Il est vrai qu'elle nécessite l'apport de glyphosate en interculture, mais nettement moins que l'agriculture conventionnelle.
On pourrait donc inciter les agriculteurs se tourner vers cette technique relativement vertueuse et qui règle en grande partie le problème du recours aux produits phytopharmaceutiques tels que le glyphosate.
Je voudrais aller dans le sens de Mme Toutut-Picard. Les pouvoirs publics ne peuvent pas rester absents du débat relatif à la protection de la biodiversité. De ce point de vue, on ne peut que favoriser des pratiques culturales de conservation, qui permettent de limiter le recours aux produits phytopharmaceutiques et aux engrais. Vous parlez du glyphosate, mais l'agriculture de conservation en emploie 0,7 à 1 litre à l'hectare au lieu de 5 ou 6 litres.
Aujourd'hui, il faut trouver des alternatives qui conviennent aux agriculteurs tant sur le plan économique que sur le plan agronomique, en particulier en ce qui concerne la conservation des sols. Rappelons que dans les grandes régions céréalières, une parcelle qui comptait à l'origine 500 kg de vers de terre à l'hectare en compte 2 000 kg à l'hectare au bout de deux ans en agriculture de conservation. De tels éléments montrent qu'elle permet d'améliorer non seulement la conservation des sols, mais également la biodiversité.
Voilà pourquoi je compte sur l'agriculteur qu'est notre rapporteur pour soutenir cet amendement.
Avant de devenir député, et jusque pendant la campagne électorale, considérant que j'avais beaucoup à apprendre dans le domaine qui nous occupe aujourd'hui, tout m'était prétexte pour rencontrer des agriculteurs et visiter des fermes pour entendre le monde agricole. J'ai mesuré à cette occasion que sur mon territoire, notamment dans le pays de Bray, les jeunes générations avaient fait d'énormes efforts pour réduire leur recours au glyphosate, notamment en passant à l'agriculture de conservation.
Dans le pays de Bray, les jeunes générations se sont tournées vers ce mode de culture, et je pense qu'il faut encourager cette évolution. Je suis pour qu'on sorte du glyphosate d'ici trois ans, à condition qu'il y ait des mesures d'accompagnement. Il faut créer les conditions concrètes pour que cela ne se limite pas à un effet d'affichage, mais devienne réalisable. Soutenir l'agriculture de conservation participe de cela.
L'amendement no 2074 n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Baptiste Moreau, rapporteur, pour soutenir l'amendement no 2148 rectifié .
Cet amendement a pour objet d'améliorer la gouvernance de la politique publique de l'alimentation, d'une part en conférant au CNA – Conseil national de l'alimentation – un rôle plus prononcé de coordination du PNA – programme national pour l'alimentation – et du PNNS – programme national relatif à la nutrition et à la santé – , et d'autre part en mettant à sa disposition, en tant que de besoin, l'observatoire de l'alimentation pour l'exercice de ses missions.
Un sous-amendement est venu compléter les dispositions relatives au CNA, en ajoutant un député et un sénateur à la composition du conseil, conformément à la demande d'un certain nombre de députés – notamment vous, monsieur Ramos, et Mme Maillart-Méhaignerie. C'est pourquoi je demande le retrait de cet amendement.
L'amendement no 2148 rectifié est retiré.
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 1792 rectifié et 2458 rectifié .
La parole est à Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure pour avis, pour soutenir l'amendement no 1792 rectifié .
Cet amendement de la commission du développement durable n'a pas été adopté par la commission des affaires économiques.
Il vise à ce que « les actions du programme national pour l'alimentation prennent en compte des critères environnementaux et de nutrition favorisant l'atteinte des objectifs français de lutte contre les changements climatiques. » L'articulation de l'alimentation et de la lutte contre le changement climatique a du sens et il convient d'éviter de raisonner en silo sur ces questions.
La parole est à M. Guillaume Garot, pour soutenir l'amendement no 2458 rectifié .
Cet amendement a en effet trait au PNA, qui a à l'évidence un rôle majeur à jouer dans la transition agricole et alimentaire. Il faut améliorer la qualité générale de l'offre alimentaire, non seulement sur le plan nutritionnel mais également sur celui des modes de production et de l'environnement. Il faut en permanence articuler ces deux plans, nutritionnel et environnemental.
Aujourd'hui, le PNA comporte quatre axes : la lutte contre le gaspillage alimentaire, l'ancrage territorial, la justice sociale et l'éducation. Cependant, seulement un quart des financements des appels à projet du PNA concernent les questions environnementales et de nutrition. Cet amendement vise à étendre les critères environnementaux et nutritionnels à l'ensemble des actions financées par le PNA.
Le PNA n'a pas pour objet principal de lutter contre les changements climatiques. Je crains qu'en multipliant les objectifs qui lui sont assignés, on ne nuise à l'efficacité et à la visibilité de son action. Demande de retrait ou défavorable.
Les amendements identiques nos 1792 rectifié et 2458 rectifié , repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.
Je suis saisi de trois amendements, nos 969 , 2199 et 2459 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 2199 et 2459 sont identiques.
Sur l'amendement no 969 , je suis saisi par le groupe Les Républicains d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l'amendement no 969 .
Cet amendement est en lien direct avec l'article 9, qui vise à favoriser la montée en qualité de la restauration collective. C'est pourquoi je ne vois pas très bien pourquoi il ne vient que maintenant en débat, après la clairette de Die et l'exception agriculturelle.
Il est important parce qu'il aborde une question centrale, sur laquelle ce projet de loi fait curieusement l'impasse : celle du financement des objectifs fixés par l'article 11. Au regard des objectifs fixés par ce texte, en effet, cette montée en qualité de la restauration collective se traduira immanquablement par une augmentation du coût des denrées alimentaires entrant dans la composition des repas, et donc de ces repas eux-mêmes. Il est impératif que ce surcoût ne soit pas supporté par les familles, ce qui, vous en conviendrez, risquerait d'avoir des conséquences sur le plan social.
Il faut s'engager à accompagner les collectivités qui, pour absorber l'impact de cette hausse, seraient contraintes de prendre en charge tout ou partie de ce surcoût.
Monsieur le ministre, rien n'est prévu dans ce texte et c'est une des lacunes de cet article qui, si rien n'est fait, va se traduire par un nouveau transfert de charges vers les collectivités dont relève la restauration collective – les communes pour les écoles élémentaires, les départements et les régions pour les collèges et les lycées.
Ne pas accompagner cette montée en qualité serait admettre qu'on édicte des règles tout en laissant à d'autres le soin de financer leur mise en oeuvre. Cette question importante ne peut pas rester sans réponse, monsieur le ministre.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
La parole est à M. Sébastien Jumel, pour soutenir l'amendement no 2199 .
J'ai eu la chance, à l'occasion de responsabilités précédentes, d'être en charge de la gestion de l'ensemble des collèges de mon département de la Seine-Maritime, qui avait fait le choix de recourir aux filières courtes et au bio pour la restauration des collèges.
La complexité et l'absence de structuration des filières courtes furent le premier problème que nous avons dû affronter, car nourrir 60 000 demi-pensionnaires nécessite des filières structurées. Le deuxième problème fut celui du coût que ce choix occasionnait pour la collectivité. Cette problématique du coût est particulièrement sensible dans les territoires les plus fragilisés, tels que les ZEP ou les REP +. Je suis certes favorable à ce qu'on accompagne toutes les collectivités, mais particulièrement les territoires où le repas pris à la cantine constitue le seul repas équilibré des enfants.
On a déjà évoqué la précarité alimentaire, les difficultés d'accès à une alimentation saine ; on sait que les diagnostics territoriaux de santé attestent que c'est dans ces territoires que les pathologies telles que l'obésité ou le diabète sont particulièrement présentes.
Cet amendement – ou, d'une certaine manière, ce « sous-amendement » – vise, si nous ne parvenons pas à accompagner l'ensemble des collectivités pour concrétiser ces objectifs, à le faire au moins pour les zones les plus fragiles de notre territoire.
Pendant ces dernières heures ou ces derniers jours – je ne sais plus très bien ! – , nous avons voté des dispositions pour améliorer la qualité de l'assiette dans la restauration collective, en particulier pour les enfants, mais aussi pour les personnes âgées dans les EHPAD, pour ne citer que quelques exemples de restauration collective.
Nous avons ainsi fixé des objectifs nutritionnels. Nous avons ainsi soutenu l'ancrage territorial de l'alimentation. Nous avons également permis que les filières puissent se structurer à l'échelle locale. Très bien ! Mais qu'en est-il des collectivités, celles qui sont chargées de la gestion de la restauration collective ?
Selon nous, il faut les accompagner ou, en tout cas, accompagner celles d'entre elles dont les moyens sont les plus limités. Sans doute faut-il faire un effort de solidarité nationale en direction des collectivités qui ont le moins de moyens, que ce soit en milieu urbain ou en milieu rural. À cette fin, cet amendement propose de soutenir les collectivités et les établissements les plus fragiles, qui seraient éligibles au titre des territoires ZRR – zones de revitalisation rurale – pour les territoires ruraux ou REP et REP + – réseaux d'éducation prioritaires – pour les territoires urbains.
J'entends vos préoccupations, mais contrairement à ce que vous indiquez, vous ne mettez pas en place une prime à la conversion des cantines en bio, car votre amendement, qui se situe dans les objectifs généraux de la politique agricole et de l'alimentation, n'a aucun impact sur le financement des services de restauration scolaire. Faute d'effet normatif, avis défavorable.
Vous créez une charge nouvelle pour le budget de l'État. Ce n'est pas dans le cadre de ce texte que nous pouvons en discuter. Compte tenu de cet élément, je suis défavorable à ces amendements.
Nous avons eu ce débat en commission du développement durable, et la République en marche avait eu l'occasion de vous dire qu'elle partageait absolument ces objectifs, y compris les actions renforcées vers les populations les plus défavorisées, qu'elles vivent dans les quartiers de la politique de la ville ou dans les zones rurales défavorisées.
Votre amendement, cependant, soulève toujours le même problème : les financements seraient exclusivement destinés à ces zones, en excluant toutes les autres. Depuis son examen en commission, il n'a pas évolué. Il nous est donc difficile de le soutenir.
Je reviens sur l'amendement de M. Descoeur, qui ne privilégie pas une zone puisque sa portée est générale.
Je reviens également sur le principe de la nouvelle politique impulsée par le Gouvernement. On peut bien sûr dire qu'il n'est pas utile d'aider certaines communes ou je ne sais qui, mais quand le Gouvernement, quand la puissance publique décident de lancer un plan d'action ambitieux, quel que soit le secteur, l'État accompagne toujours sa mise en route. Prenons l'exemple de la politique de la ville, des banlieues, de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, l'ANRU : à un moment donné, l'État a donné une impulsion pour que les communes puissent, en quelque sorte, se mettre au niveau.
En l'occurrence, nous parlons d'un plan ambitieux pour l'agriculture, nous avons fixé un objectif de 50 % de bio dans les cantines scolaires. Ce n'est pas la routine, c'est un nouvel élan que nous voulons donner pour que l'on franchisse une, deux, trois marches supplémentaires ! Il est évident qu'au démarrage, il faudra bien aider les collectivités locales – sinon, elles constateront encore une fois qu'on leur demande des efforts, des efforts, des efforts, et qu'elles sont seules invitées à les faire. Il faut donc les aider un peu pour que ce plan réussisse.
Je tiens à rassurer Mme la rapporteure pour avis : pour le coup, mon amendement n'exclut personne. Si vous voulez satisfaire l'ensemble des collectivités du territoire, il suffit de choisir celui que j'ai défendu.
Monsieur le ministre, je ne peux pas vous laisser dire que nous créons une charge supplémentaire pour l'État. Nous souscrivons à vos objectifs, mais pour le coup, ce qui crée une charge pour l'État, c'est ce projet ambitieux, dont nous avons rappelé qu'il serait sûrement difficile à réaliser dans les délais impartis. C'est ce projet ambitieux qui crée une charge ! Votre texte crée une charge que les collectivités devront assumer, même celles qui le feront avec enthousiasme.
L'étude d'impact que vous avez pris le soin d'annexer à ce projet de loi fait état d'un surcoût de 40 centimes par repas…
Oui, mais ce n'est pas ici que cela se décide.
… ce qui n'est pas rien si on le rapporte au nombre de jours ouvrables, au nombre d'établissements publics – je rappelle que nous, nous ne voulions pas nous limiter aux établissements scolaires – et à l'impact sur le pouvoir d'achat, puisque c'est là un sujet que l'on aborde de temps en temps dans cette assemblée, car il faut rapporter ce surcoût au nombre d'enfants d'une fratrie.
Je vous mets en garde – non, d'ailleurs, car les problèmes seront pour les autres ! Il me semble qu'une sorte d'engagement avait été pris au lendemain de la Conférence nationale des territoires, consistant à dire que l'État ne créerait pas de nouvelles charges pour les collectivités. Or nous assistons là à un transfert de charges caractérisé.
Si vous ne répondez pas à cette situation, vous faites en quelque sorte le choix de la facilité : vous décidez des objectifs à atteindre tout en imaginant que les autres accepteront avec enthousiasme d'en supporter la charge.
Madame la rapporteure pour avis, vous avez le choix entre un amendement qui tend à accompagner l'ensemble des collectivités et un autre, plus raisonnable – quoique le premier m'aille bien – , qui tend à accompagner les collectivités les plus en difficulté ou, en tout cas, celles qui accueillent les publics les plus précaires en matière d'accès à une alimentation saine et équilibrée.
Votre premier argument, selon lequel notre amendement serait exclusivement réservé à certaines zones, tombe donc de lui-même.
Un deuxième élément contredit votre argumentation. Nous proposons certes de réserver les aides aux seules ZEP, REP et REP +, mais les collectivités ne reçoivent aucune aide en matière de restauration. Les cantines sont payées soit par la collectivité, soit par l'usager. Là où les publics sont les plus fragiles, les collectivités choisissent souvent une tarification différenciée qui prend en compte le revenu des parents, pour éviter que le coût soit un obstacle à l'inscription d'un enfant à la cantine.
S'agissant de la charge supplémentaire, monsieur le ministre, j'ai une question à vous poser. Nous partageons certains objectifs de votre loi, nous adhérons même pleinement à d'autres, mais pour être opératoire, elle doit être musclée – nous l'avons beaucoup dit – et nous devons savoir de quels moyens financiers elle disposera. De quels moyens budgétaires disposerez-vous pour mettre en oeuvre les objectifs que vous vous êtes assignés dans votre loi ? Pour l'instant, nous n'avons pas la moindre information, pas le moindre kopeck, pas la moindre indication pour savoir si vous aurez les moyens de votre politique. Or, cela nous intéresse !
Nous ne sommes pas complètement imbéciles, nous savons bien que ces choses-là se traitent en loi de finances, mais si nous ne voulons pas que votre loi soit mort-née s'agissant de la régulation et des moyens que l'on se donne pour l'appliquer, il est temps de répondre à ces deux questions !
L'amendement de notre collègue Vincent Descoeur et les autres ont leur importance pour les collectivités.
Vous dites, monsieur le rapporteur, ne pas vouloir rajouter de charges supplémentaires pour l'État.
Le problème, c'est qu'une telle ambition, importante, partagée d'ailleurs par de nombreuses collectivités qui se sont déjà lancées dans le bio – je vois ce qu'il en est des lycées de la région Auvergne-Rhône-Alpes – et qui le font à leur rythme, car elles connaissent leur budget, devra être financée demain à partir de budgets de plus en plus contraints. Je rappelle qu'une partie des collectivités de notre pays ont subi la baisse de nombreuses dotations ces dernières années. Certaines parmi elles ont stagné cette année, c'est exact, d'autres ont diminué, mais force est de constater que l'on critique souvent aujourd'hui les collectivités, qui ne feraient pas d'effort sur leurs dépenses de fonctionnement. Or comme ce sont elles les plus proches de nos concitoyens, nous savons très bien ce qu'entraînera l'augmentation du coût engendrée par cette légitime ambition : les citoyens, les parents d'élèves viendront voir le maire en espérant que la commune absorbe ce coût.
Nous allons donc encore augmenter les coûts de fonctionnement, et l'on expliquera ensuite aux collectivités locales qu'elles ne font aucun effort. Oui, mais si on les accable en permanence de coûts et de contraintes supplémentaires, notamment sur le plan financier, il est clair qu'elles n'y arriveront jamais ! On pourra leur taper dessus éternellement !
Il s'agit donc d'un amendement important et, à mon avis, vous devez donner des éléments de réponse pour savoir comment les collectivités, mais aussi les EHPAD – M. Garot l'a expliqué tout à l'heure – , pourront financer cette légitime ambition qui, qu'on le veuille ou non, a un coût.
Soit vous avez l'ambition d'y arriver et l'État donnera l'impulsion en permettant aux collectivités et aux EHPAD d'atteindre les objectifs fixés, soit ce sera très compliqué.
Lorsque j'étais maire et que nous avons lancé le plan « Un fruit à l'école », nous l'avons fait aussi parce que nous disposions d'aides, sinon, nous aurions peut-être regardé à deux fois, faute d'avoir les moyens. Si l'on n'a pas d'aides, il faut une impulsion – et pour ce faire, l'État doit jouer son rôle, notamment à destination de ceux qui sont un peu réticents, souvent plus pour des raisons financières que philosophiques.
Si ce n'est celui de Vincent Descoeur, les autres amendements doivent être adoptés par cette assemblée.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe UDI-Agir.
Je suis désolé, mais cette vision-là est vraiment conservatrice. La réalité du terrain, telle qu'elle est vécue dans les collectivités qui ont innové, pas depuis cette année, pas depuis la loi, mais depuis dix ans parfois – je pense au département des Ardennes – , c'est que dans les collèges, tout le travail de qualité est financé par la lutte contre le gaspillage.
Le ministre a donné des chiffres significatifs concernant les hôpitaux, qui ne constituent pas un terrain de jeu évident pour lutter contre le gaspillage alimentaire. La réalité du monde bio, des SIQO – signes d'identification de la qualité et de l'origine – et des opérateurs ne correspond pas du tout à celle que vous décrivez.
Une part de la poignée de centimes de différence viendra de la meilleure compétitivité de la bio et des SIQO, massifiés grâce à cette loi. On y gagnera en prix parce que l'on en fera et que l'on en vendra plus. La « bio » passera à 10 %, 15 %, j'espère un jour à 30 % dans notre paysage national, et elle sera alors moins chère, parce que moins de frais seront perdus dans la logistique.
Le deuxième effort sera accompli par le citoyen qui, cela a été dit brillamment, devra faire un effort pour mieux payer sa nourriture. Il le fera également en faisant un effort civique afin de consommer autrement.
Troisième part, la seule dont vous devriez parler : celle de l'État, non pas providence mais stratège, qui investit dans le domaine écologique et dans la santé publique. Il devrait être capable d'accompagner notamment les collectivités les plus fragiles, parce que la santé publique, pour les gamins des milieux défavorisés, cela ne se négocie pas. C'est en cela que l'amendement de Guillaume Garot est très intelligent.
Je suis souvent d'accord avec notre collègue Potier sur un certain nombre de points, mais, en l'occurrence, je ne le suis pas du tout.
Je suis convaincu que les mesures que nous avons prises – encore une fois, légitimes, que nous ne contestons pas, que nous approuvons – pour améliorer la restauration dans les écoles et y introduire une alimentation plus saine auront un coût pour les collectivités.
Je me souviens de notre discussion à l'article 9 il y a quelques jours – comme notre collègue Guillaume Garot, je n'ai plus tout à fait la mémoire des dates, car on a l'impression de ne pas avoir quitté l'hémicycle depuis mardi dernier. Nous avons évoqué 40 centimes d'euro par repas. Je suis désolé, cela n'est pas compensable par les économies réalisées sur le gaspillage alimentaire.
Pour ce qui concerne les financements supplémentaires qui pourraient être demandés aux parents d'élèves et aux citoyens, je dois vous dire, pour avoir travaillé sur un rapport sur la famille, que beaucoup de familles de France qui mettent leurs enfants à la cantine ne peuvent pas financer les repas de leurs enfants, qui sont pris en charge par les aides sociales dont ils peuvent bénéficier en grande partie. Nous sommes nombreux à avoir été élus locaux, et certains d'entre nous sont encore membres de conseils municipaux : vous verrez que les maires s'arracheront les cheveux pour savoir comment ils parviendront à financer ces dépenses.
Sourires.
Vous le contestez : nous verrons d'ici quelques mois ! Effectivement, pour M. Potier, c'est foutu mais, cher collègue, vous n'êtes plus maire, donc vous n'aurez pas à résoudre ce problème ! Vous voyez que le cumul des mandats peut présenter un intérêt, en ce qu'il permet de voir les deux aspects d'une question.
Croyez-moi, l'expérience locale vous montrera que ça posera de grosses difficultés aux collectivités.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Je soutiens ces amendements, car nous devons préserver les finances de nos collectivités,
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UDI-Agir et LR
qui ont toutes consenti des efforts pour réduire le gaspillage dans les cantines scolaires et pour offrir à nos enfants une alimentation plus saine. Dans le département de la Marne, nous avons mis en place une plateforme d'approvisionnement local, à la fois pour soutenir nos agriculteurs et pour permettre à nos enfants de manger des produits sains et de saison. L'argument selon lequel le surcoût induit par cet article va être compensé par une lutte contre le gaspillage n'est pas recevable : nous avons déjà engagé cette lutte dans nos collèges, dans nos écoles.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.
Qui va payer le surcoût ? Les finances des collectivités ne leur permettent pas de le faire. Par ailleurs, l'objectif n'est pas de faire appel aux familles, et les contribuables locaux sont exsangues. Il est donc nécessaire d'inscrire dans la loi que l'État accompagnera les collectivités en faveur d'une cantine plus saine et plus durable.
Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-Agir et sur quelques bancs du groupe LR.
Je suis étonné de la réaction de M. Potier, car je pensais qu'il serait séduit par l'amendement de M. Garot, qui soulève tout de même une vraie question, celle du financement de cette montée en qualité.
Monsieur Potier, dans une école rurale du département du Cantal se côtoient à la cantine des enfants riches et pauvres, et certains habitent des collectivités plus riches que d'autres. Il serait malaisé de distinguer les élèves. Le surcoût que j'évoque – 40 centimes par repas – correspond à un montant annuel de 70 euros, soit 150 ou 220 euros pour des familles ayant deux ou trois enfants scolarisés, ce qui n'est pas neutre. J'entends ce que vous dites sur le gaspillage. Comme l'a justement dit Mme Magnier, beaucoup de collectivités ont travaillé sur ce sujet mais, en la matière, le résultat n'est pas arithmétique : ce n'est pas le principe des vases communicants. Sur une tablée de huit enfants, mettons que l'un n'ait pas mangé, qu'un autre n'ait pas fini sa portion, on ne transforme pas ça immédiatement en un gain susceptible d'être réinvesti. Finalement, vous affichez une politique de l'alimentation ambitieuse mais, je suis au regret de le dire, sans vous inquiéter de son financement. Si demain ce devait être aux collectivités d'assumer cette charge, ce serait dommageable ; si les familles devaient être mises à contribution, ce serait très dommageable – pour peu, de surcroît, qu'elles doivent conduire leurs enfants dans un véhicule fonctionnant au gasoil – car elles ont déjà beaucoup perdu en termes de pouvoir d'achat.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Les économies que nous réalisons ne se limitent pas au gaspillage alimentaire. Nous avons voté un certain nombre d'amendements qui permettront d'en obtenir dans des domaines tels que la suppression des bouteilles en plastique ou la diversification des menus, grâce au plan relatif aux protéines végétales. Il faudra donc dresser un bilan d'ensemble. Le plan global, tel qu'il est proposé, permettra d'amoindrir le surcoût éventuel des cantines.
Par ailleurs, vous dites que ni le budget communal ni le budget des familles ne doivent être mis à contribution, mais que seul le budget national doit l'être. Mais, au bout du compte, c'est toujours le même contribuable qui paie. Le budget national, c'est aussi la mise à contribution du contribuable.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
On ne fabrique pas d'argent dans l'hémicycle. Revenons aux réalités.
Par ailleurs, les collectivités ont souscrit des engagements très forts sur d'autres sujets, par exemple les questions climatiques. Mais la qualité de l'alimentation est une cause nationale, tout comme le fait de maintenir un réseau d'agriculteurs sur le territoire.
Que l'on puisse partager cette cause nationale me paraît légitime. Comme ancien maire et ancien président d'une communauté de communes, je suis content, comme vous tous, je crois, de voir qu'un agriculteur produit une plus grande valeur ajoutée, accroît son niveau de richesse et paie probablement plus d'impôts. Ce sont des valeurs que l'on va réussir à maintenir sur le territoire. C'est l'ensemble de ces éléments qu'il faut défendre. Nous ne voterons donc pas ces amendements.
Marc Fesneau disait que c'était une cause nationale. Il me paraît donc naturel qu'une bonne part en soit portée par le budget national.
En effet, au niveau national, il est possible d'établir plus de justice par le biais de la redistribution, par des impôts plus justes, tels l'impôt sur le revenu, ou ce qu'il reste de l'ancien ISF – impôt de solidarité sur la fortune – , à savoir l'IFI – impôt sur la fortune immobilière. Cela permet d'assurer un équilibre entre les collectivités, entre leurs habitants, qui sont dans une situation d'inégalité. Le budget national constitue la garantie qu'on en fait une cause nationale et qu'on pourra obtenir une homogénéité sur le territoire. Dans le cas contraire, ce serait beaucoup plus facile pour certaines communes, dont les habitants sont plus aisés ou qui reçoivent des revenus liés à la présence d'entreprises. À l'inverse, d'autres communes – ma circonscription en abrite plusieurs – , qu'elles se situent dans les campagnes ou dans les quartiers populaires, vont éprouver davantage de difficultés à mettre en oeuvre cette mesure. Il me paraît donc normal que, si l'on prétend en faire une grande cause nationale, on aide les collectivités, et que cela passe en partie par le budget national.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Il est procédé au scrutin.
Nombre de votants | 87 |
Nombre de suffrages exprimés | 85 |
Majorité absolue | 43 |
Pour l'adoption | 18 |
contre | 67 |
L'amendement no 969 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Nombre de votants | 88 |
Nombre de suffrages exprimés | 87 |
Majorité absolue | 44 |
Pour l'adoption | 22 |
contre | 65 |
De nombreux députés, de toutes sensibilités, ont participé aux ateliers des États généraux de l'alimentation. Cet amendement a pour objet de faire perdurer ce travail autour de l'alimentation. Le Conseil national de l'alimentation – CNA – est certes présidé par notre collègue Garot, mais ce n'est pas en sa qualité de député qu'il exerce cette fonction. Cet amendement vise à ce que le travail effectué par les parlementaires, notamment à la commission des affaires économiques, trouve un écho au-delà du périmètre de l'Assemblée nationale. Il s'agit également de faire en sorte que, dans les grandes discussions sur l'alimentation, les députés – je sais, monsieur le président de l'Assemblée nationale, que vous y travaillez – jouent un rôle à l'extérieur. Aussi je propose, par cet amendement, que les députés qui ont beaucoup travaillé dans le cadre des États généraux de l'alimentation puissent continuer cette tâche et porter la voix parlementaire au sein du CNA.
Ce sous-amendement vise, dans la ligne de ce que propose le dispositif initial, à ce que des parlementaires siègent au sein du CNA ès qualités. Conformément aux usages dans les organismes extraparlementaires, un député et un sénateur devraient être désignés par le président de chaque chambre.
Favorable au sous-amendement et donc à l'amendement sous-amendé.
Le sous-amendement no 2713 est adopté.
L'amendement no 1938 , sous-amendé, est adopté.
La parole est à Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure pour avis, pour soutenir l'amendement no 1557 .
Cet amendement vise à renforcer l'action du Conseil national de l'alimentation. Depuis sa création, celui-ci a développé une capacité de concertation reconnue, qui lui confère une indiscutable légitimité. Il n'a, en effet, émis que des avis adoptés par consensus de tous les représentants impliqués – notamment des professionnels, des consommateurs et des associations de protection de l'environnement. Le choix de ses membres, fondé sur la compétence technique et la capacité à représenter un secteur économique ou une catégorie d'acteurs économiques, assure à ses propositions une plus grande acceptabilité sociale. Sa gouvernance, à la fois interministérielle et transpartisane, et ses recommandations engagent chaque partie prenante. Le Conseil est donc un acteur majeur de la politique alimentaire. Toutefois, ses avis sont encore insuffisamment exploités. L'objet de cet amendement est de renforcer le CNA en l'associant davantage à la politique publique de l'alimentation.
L'amendement no 1557 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme Mathilde Panot, pour soutenir l'amendement n° 2374 .
L'amendement no 2374 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Sébastien Jumel, pour soutenir l'amendement no 2224 .
Il s'agit d'exprimer dans la loi l'attachement que nous avons à la PAC et notre volonté de la préserver, en garantissant ses moyens. C'est aussi un soutien exprimé au ministre, dont nous voyons bien qu'il peut être un peu bousculé par les déclarations contradictoires du Président de la République. Il aura besoin du soutien plein et entier du Parlement pour défendre une PAC de plein exercice, même si elle mérite d'être actualisée, et préserver ses moyens. À défaut, les agriculteurs risquent de connaître des lendemains difficiles.
Il s'agit d'un amendement d'appel, dans le contexte de la négociation en cours de la PAC. J'entends l'appel, mais je pense que c'est plus au ministre de répondre. Demande de retrait ou défavorable.
J'ai bien entendu, en partie répondu, et j'exprime un avis défavorable.
L'amendement no 2224 n'est pas adopté.
Chers collègues, nous avons écouté, tout au long de la journée, de nombreux débats sur des sujets très variés. Globalement, depuis quatre jours, avec Guillaume Garot et l'ensemble des collègues du groupe de la Nouvelle Gauche, nous avons une ligne politique très claire : nous faisons des propositions constructives, issues des États généraux de l'alimentation. Nous n'en avons pas rajouté, nous ne nous sommes pas dispersés.
Je peux vous dire que l'on est stupéfait. Au bout de six mois de dialogue, la société civile, Célia de Lavergne peut en témoigner, était arrivée à des niveaux de consensus, d'innovation et d'audace incroyables. Nous devons assumer collectivement, et je veux bien en prendre ma part, le fait que le Parlement n'est pas au rendez-vous de ce que la société civile a formulé il y a moins de trois mois. Ce décalage mériterait un travail d'analyse politique pour le comprendre.
Des gens qui se livraient une guerre de tranchées, ici sur une molécule chimique, là sur une pratique agricole ou sur le bien-être animal, ont été capables de dépasser leurs clivages pour envisager des solutions nouvelles et innovantes. Et là, nous retrouvons beaucoup des mêmes travers, des mêmes conflits et des mêmes guerres picrocholines, qui ne font pas avancer notre société. Je leur dis, voulant emporter l'adhésion du rapporteur et du Gouvernement, que nos propositions, tous les témoins peuvent l'attester, sont issues des EGA. Elles visent à les consolider et à en retrouver l'esprit.
Tel est le cas de la haute valeur environnementale, la HVE. De quoi s'agit-il ? Au Grenelle de l'environnement, cette notion valorisante a été lancée avec trois niveaux : un premier certificat, qui correspond aux bonnes pratiques agricoles, un deuxième, qui consacre un effort d'amélioration de ces bonnes pratiques, et un troisième, celui de la HVE, qui peut devenir une mention valorisante pour des produits. Le Grenelle a également créé la taxe générale sur les activités polluantes – TGAP – et la redevance incitative, qui ont révolutionné les déchets.
Dix ans après, on constate que la haute valeur environnementale n'a pas été utilisée. En revanche, une véritable révolution s'est produite dans le monde agricole. En 2012, je peux en témoigner, lorsque Stéphane Le Foll, prenant acte des travaux pionniers de mouvements associatifs, de l'agriculture biologique et d'innovations multiples, a lancé le concept d'agroécologie, il a suscité une polémique. Cinq ans plus tard, personne, aux États généraux de l'alimentation, n'a contesté l'agroécologie, et tout le monde la considère désormais comme un acquis. Les seuls débats portent sur les scénarios de transition vers l'agroécologie. Nous avons vécu en cinq ans, dans notre pays, une révolution en matière d'adoption de ce « en même temps » de l'économie, du social et de l'environnemental. Une loi l'a écrit, et la pratique l'a mis en oeuvre grâce à la mise en mouvement de la société. Les EGA ont constaté ce processus et ont organisé un débat fructueux sur ce sujet.
L'une des propositions, que l'on a retrouvée dans quatre ou cinq ateliers sur les quatorze, porte sur le nom à donner à cette agroécologie. La précédente majorité – à laquelle appartenait le député Stéphane Travert, à l'époque à nos côtés – défendait une version inclusive de l'agroécologie. Le ministre disait que le moment de distinguer les bons des mauvais n'était pas venu et que l'agriculture de conservation, la biodynamie et de nombreuses autres pratiques allaient dans le sens de l'agroécologie. Cette étape était nécessaire pour inclure, associer et éviter des guerres de chapelle.
Aujourd'hui, nous sommes dans un monde nouveau dans lequel l'agroécologie a pris sa place. Elle est devenue un argument de marché, convainc de plus en plus d'agriculteurs et séduit de plus en plus de nos concitoyens. Mais le paysage s'est brouillé, parce que des certifications privées sont venues combler l'absence d'un label public clair rassemblant toute l'agroécologie.
Tous ceux qui ont fréquenté le Salon de l'agriculture de cette année ont été frappés – c'est votre cas, monsieur le ministre, nous en avons parlé, et j'ai également cheminé avec M. le rapporteur et M. le président Lescure au cours des trois jours que j'y ai passés – par une certaine ébullition ; j'ai ainsi vu la naissance d'une vingtaine de marques : un grand distributeur, le premier collecteur laitier coopératif la semaine dernière, un transformateur, tout le monde invente sa marque relative à la nature, au bien-être ou au bonheur, ou garantie sans OGM ou autres. Cela n'est bon ni pour les consommateurs, qui sont victimes des modes, des légendes et des rumeurs plus que de la science et de la raison, ni pour les producteurs, qui sont soumis à des injonctions contradictoires.
Dans l'atelier que j'ai eu l'honneur d'animer, la nécessité de nommer l'agroécologie s'est imposée. Nous sommes arrivés à un moment où un label public qui la définisse est indispensable, comme cela avait été le cas pour l'agriculture biologique. Or, plutôt que de créer ce label, nous avons pensé à recycler la HVE, cette certification environnementale ayant été lancée à titre expérimental au moment du Grenelle de l'environnement.
Cette certification environnementale nous apparaît comme un levier puissant ; il ne s'agit pas d'obliger, mais de donner à la société un outil dont elle va se saisir. Qui pourra s'en saisir ? Je parie que si nous adoptons cette démarche aujourd'hui et que nous en faisons une politique publique, dans toutes les déclinaisons que je vais vous proposer, elle sera demain l'un des principaux résultats des États généraux de l'alimentation. Je parie que des métropoles encourageront, avec les régions, des arrière-pays et que des agences de bassin choisiront ce mode de production labellisé pour contractualiser avec l'agriculture dans des territoires sensibles pour l'eau ou la biodiversité. Je parie que des chaînes de distribution, ciblant les classes moyennes cultivées, diront qu'elles sont entièrement HVE3 dans dix ans. Je parie que les contrats tripartites que nous avons votés il y a deux jours s'appuieront sur cette HVE de niveau 3. Nous aurons donné un outil à la société – acteurs économiques et sociaux, collectivités – pour transformer le pays. Pour cela, la puissance publique doit s'investir pour donner un nom à l'agroécologie. Tout se fait par décret, si bien que l'on n'impose aucune obligation au ministre, mais il faut relier l'intuition du Grenelle de l'environnement à celle de 2014 portée par la loi du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt.
L'amendement que je porte est fondateur des autres demandes que je vais décliner dans les minutes qui viennent. Il dit que la certification liée au texte de loi référent n'est pas l'une des mentions valorisantes de l'agroécologie, comme nous l'avions voté avec votre sous-amendement, monsieur le ministre, lors du débat en commission des affaires économiques, mais la mention valorisante de l'agroécologie.
La perspective est très importante. Avec l'Institut national de la recherche agronomique – INRA – et l'ensemble des experts, nous pouvons estimer que la France présentera un paysage divisé en trois en 2030 : un tiers d'agriculture biologique, un tiers de haute valeur environnementale et un tiers d'agriculture conventionnelle pour les produits de mélange de l'agro-industrie et pour nos exportations. Nous pourrons assurer tous les marchés et devenir le leader de l'agroécologie par les technologies et les savoirs en Europe. Je fais le pari que cela nous permettra de régler 75 à 90 % des questions d'environnement liées aux pratiques agricoles dans notre pays.
Nous avons besoin de ce dessein et de ce souffle aujourd'hui. Cette déclaration de principe ne doit pas faiblir ; elle doit être claire. La mention HVE doit devenir la marque territoriale de l'agroécologie.
Sur l'amendement no 2485 , je suis saisi par le groupe Nouvelle Gauche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Monsieur le rapporteur, quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ? Pouvez-vous également soutenir l'amendement no 1150 ?
Je demande le retrait des deux amendements de M. Potier au profit de celui que j'ai déposé ; à défaut, j'émettrais un avis défavorable à leur adoption.
Mon amendement, qui sera sous-amendé par M. Potier, vise à supprimer l'expression de « mentions valorisantes », qui a un sens précis dans le code rural puisque les mentions de produits de montagne, de pays ou de la ferme sont des mentions valorisantes, pour lui substituer les mots « concourt à la valorisation ».
Il est défavorable aux deux amendements de M. Potier et favorable à celui de M. Moreau, qui propose une modification rédactionnelle ne posant pas de problème.
Je vous remercie de votre soutien, monsieur le rapporteur, puisque, même si vous ne l'avez pas dit, vous êtes favorable au fond de ma proposition. Il y a un problème de rédaction, et j'entends votre exigence rédactionnelle, mais je propose de sous-amender votre amendement, afin d'insérer les mots « de façon majeure » entre « concourt » et « à la valorisation ». En effet, ce concours de la certification n'est pas banal, il ne s'agit pas d'un SIQO comme un autre, mais de la marque qui entraînera l'agroécologie dans les territoires, les filières, etc. Pouvons-nous insérer les mots « de façon majeure », comme nous l'avions convenu dans nos discussions à l'extérieur de l'hémicycle ?
Je partage votre intérêt et votre diagnostic sur l'importance que peut revêtir la HVE dans l'avenir, c'est d'ailleurs pour cela que j'ai déposé un amendement sur le sujet. J'émets un avis favorable à l'adoption de votre sous-amendement.
Je les retire si l'on peut adopter l'amendement du rapporteur sous-amendé par ma proposition.
La proposition de M. Potier et de M. le rapporteur est très importante. Nous avons des débats d'un très bon niveau sur ce sujet et nous dessinons les objectifs des EGA qu'étaient l'agriculture et l'alimentation de demain.
Je vous remercie, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre et monsieur Potier, de ne pas opposer les trois agricultures que sont l'agriculture conventionnelle, l'agriculture biologique et l'agriculture de la HVE. Nous pourrons, dans l'ensemble du territoire, cour de ferme par cour de ferme, trouver ce qui nous tire vers le haut et vers une meilleure agriculture.
Nous venons de bâtir les trois piliers d'une meilleure agriculture. Avec la HVE, il y aura un label initié par la puissance publique, lisible et compréhensible par l'ensemble des acteurs, qui tranchera par rapport aux logos privés, qui vont fleurir et qui ne seront pas maîtrisés par la puissance publique.
Monsieur le ministre, vous voulez donner l'avis du Gouvernement sur le sous-amendement de M. Potier.
Oui. J'y suis défavorable, car je ne veux pas réduire l'agroécologie à la HVE.
La commission a émis un avis favorable et le Gouvernement un avis défavorable au sous-amendement de M. Potier, à qui je donne la parole.
Il y a un léger dissensus, même si je remercie M. le ministre de faire un pas. Il faut choisir à un moment donné et poser des actes clairs. Le label « AB » pour l'agriculture biologique a été un choix clair et sans ambiguïté, qui a été un succès. Si l'on fait de la HVE la marque de l'agroécologie, cela marchera aussi, car tous les acteurs publics et privés nous envoient des signaux en ce sens.
Je me réjouis que le rapporteur soutienne l'idée que la certification concourt de façon majeure, c'est-à-dire de façon significative, sans être un label comme un autre, à la démarche agroécologique.
Je vous remercie pour les pas accomplis aujourd'hui et pour votre confiance.
Pourrait-on nous repréciser ce que l'on insère dans la loi avec l'amendement sous-amendé ?
Voici ce que sera la rédaction de l'article 11 duodecies après l'adoption de mon amendement sous-amendé par M. Potier : « Cette certification concourt de façon majeure à la démarche agroécologique (…) ».
Monsieur Potier, je veux bien croire que la HVE a pris beaucoup de place, mais je pense être assez investi dans le domaine agricole et je n'en ai jamais entendu parler. Pourrait-on repréciser en quelques mots de quoi il s'agit ? Je ne demande qu'à faire confiance, mais je confesse ma totale ignorance sur le sujet et suis un peu surpris de cette démarche.
Ce sont des choses que nous avons travaillées et créées, nous n'avons pas copié. J'ai écrit une tribune dans La France agricole, qui a eu beaucoup d'échos et qui est reprise dans l'exposé des motifs de mes deux amendements. Vous avez là une description parfaite de ce qu'est la HVE aujourd'hui.
La HVE est un outil créé au moment du Grenelle de l'environnement, qui n'a été utilisé que très marginalement dans quelques secteurs d'activité, parce qu'il n'y avait pas d'enjeu. Désormais, l'agroécologie est installée dans le paysage, mais elle souffre d'une certaine confusion liée au fait que les acteurs privés sont en train de déterminer ce qui est la bonne et ce qui est la mauvaise agriculture. Comme beaucoup d'entre vous, je considère que c'est à la puissance publique d'imposer une norme et de dire ce qu'est l'agroécologie. Ensuite, nous pourrons utiliser cet outil créé par le Grenelle de l'environnement.
L'amendement se contente de dire que l'invention par le Grenelle d'une certification de l'agroécologie s'applique à la démarche initiée par la loi d'avenir pour l'agriculture de 2014.
Par ce sous-amendement, nous proposons, avec l'accord de M. le rapporteur, de préciser que la certification HVE concourt « de façon majeure » à la démarche de l'agroécologie, ou qu'elle en est à tout le moins le signe, la marque. Ce faisant, nous plaçons simplement nos pas dans ceux des États généraux de l'alimentation et reprenons des propositions formulées par Marion Guillou ainsi que dans le cadre de nombreux ateliers, notamment ceux consacrés aux OGM.
Monsieur Potier, vous êtes tellement spécialiste du sujet qu'il est parfois difficile de vous suivre.
J'aimerais bien comprendre l'objectif visé par votre sous-amendement. Voici ce que j'ai compris – vous me direz si je suis dans le vrai ou non.
L'agriculture me semble présenter deux pôles clairement identifiés, l'agriculture conventionnelle et l'agriculture biologique. Vous semblez indiquer qu'il existe entre les deux de nombreuses situations de transition, relevant de labels distincts et qui, comme tels, ne sont pas identifiés dans l'espace public. Je crois comprendre que vous proposez d'unifier tout cela dans un label commun permettant une telle identification.
Cette démarche me semble très intéressante. Si Mathilde Panot estime que telle n'est pas la position du groupe La France insoumise, elle corrigera mes propos, mais j'estime à titre personnel qu'il y a là une démarche très intéressante. Je rencontre de nombreux agriculteurs de bonne volonté, mais pour lesquels franchir directement le pas vers l'agriculture biologique semble irréalisable – sauf peut-être à long terme – tant en termes de marchés que de changements de pratiques.
En fin de compte, vous proposez la création d'un troisième pôle, monsieur Potier, qui peut être en même temps une étape intermédiaire pour aller plus loin. Cette démarche – pour autant que je l'aie bien comprise – me semble intéressante.
Nous franchissons là un pas important vers la reconnaissance du label HVE, qui permet de tirer vers le haut notre agriculture. Je rappellerai à nouveau les raisons pour lesquelles le Gouvernement a émis un avis défavorable au sous-amendement no 2740 .
On ne peut pas résumer l'agroécologie au seul label HVE. Plusieurs exemples connus dans la sphère de l'agroécologie, tels que l'initiative du « 4 pour 1000 » de captation du carbone dans les sols visant à améliorer leur fertilité, le bio ou le groupement d'intérêt économique et environnemental, le GI2E, ne s'inscrivent pas dans ce cadre.
Nous souhaitons éviter d'enfermer l'agroécologie dans le label HVE, ce qui risque de créer une forme de contrainte, ou à tout le moins un circuit fermé restreignant la portée de l'idée que nous nous en faisons en vue de promouvoir des démarches de qualité. Attention, donc : tout ce qui concourt à l'agroécologie n'a pas vocation à relever du label HVE.
Je tiens à dire à François Ruffin que, pour quelqu'un qui se décrit souvent – avec humilité – comme néophyte, découvreur, journaliste, enquêteur sur ces sujets, il a bien compris la voie que je propose. J'entretiens un dialogue assez approfondi avec la Fédération nationale d'agriculture biologique des régions de France, France Nature Environnement et de nombreux acteurs comme l'INRA et des opérateurs industriels, que je n'aime pas citer. Tous sont passionnés par l'idée d'un label public et sont un moteur de changement de notre économie.
Le débat porte sur la norme publique. On ne peut pas laisser au secteur privé le soin de dire ce qui est bon et ce qui est mauvais. Il incombe à la puissance publique de le dire, de façon démocratique et scientifique. Or, par le biais d'un décret, le Gouvernement aura toute la liberté de définir la HVE. Si vous voulez y inclure ce que vous avez mentionné, vous le pourrez, monsieur le ministre.
Aucun acteur de l'agroécologie ne peut y voir un handicap. Même les acteurs de la filière bio considèrent que l'existence d'étapes intermédiaires permettant d'amener à l'agriculture bio, ou du moins à des pratiques vertueuses pour l'environnement et reconnues par les citoyens, est positive. En effet, nous visons à faire de la société, de façon authentiquement libérale au sens philosophique du terme, un moteur du changement.
Pour ce faire, il faut l'informer, donc se réapproprier la norme publique et ne pas tolérer qu'elle soit privatisée. Il me semble que nous sommes tous d'accord sur ce point. J'estime avoir répondu aux questions soulevées et comprends les réserves exprimées par M. le ministre. Néanmoins, à tous les acteurs que je connais, privés et publics, d'obédiences différentes mais tous favorables à cette notion, nous devons fournir un outil pour travailler et transformer notre pays.
Telle est la promesse des États généraux de l'alimentation ; telle est la promesse de la loi d'orientation agricole ; telle est aussi la promesse du Grenelle de l'environnement.
Depuis trop longtemps, nous vivons sur une opposition entre le bio et le conventionnel, qui a parfois pris des aspects très idéologiques, et souvent irrationnels. L'idée dont procède le label HVE est de rassembler tout ce qui permet de faire mouvement en vue d'une amélioration de la qualité de la production agricole. Le secteur conventionnel y a sa place, ainsi que le secteur bio. Il se développe très rapidement.
Toutefois, il existe une myriade de labellisations, bien souvent d'origine privée, auxquelles il faut donner une trajectoire, une perspective et une cohérence. Tel est le sens du label HVE. Dominique Potier n'a peut-être pas suffisamment insisté sur sa dimension territoriale, dont découleront un mouvement et une qualité permettant d'entraîner plusieurs acteurs. Il s'agit véritablement d'une labellisation d'avenir, qui fera de la France le pays en pointe de l'agroécologie.
J'aimerais interroger M. le ministre, M. le rapporteur ou les auteurs du sous-amendement no 2740 , qui vise à préciser que la HVE est une mention valorisante concourant « de façon majeure » à la démarche de l'agroécologie. Le texte de loi que nous examinons traite des relations commerciales agricoles, dans lesquelles nous voulons réintroduire de la morale. L'enjeu est humain et social.
Le deuxième volet du projet de loi traite d'une alimentation saine et constitue sa dimension nutritionnelle. Enfin, il s'agit de faire en sorte que l'alimentation soit durable : c'est le volet environnemental. Si nous votons l'amendement no 1150 sous-amendé comme le propose M. Potier, cela permettra-t-il d'employer d'autres mentions valorisantes, notamment celles qui sont relatives à l'enjeu social et humain du texte ?
Nous avons évoqué le modèle agricole il y a deux heures. Plusieurs amendements visaient à promouvoir un modèle agricole plutôt familial, distinguant nos exploitations françaises de celles que l'on trouve par exemple au Brésil, comme les feed lots. Certains agriculteurs engagent des démarches relatives à la qualité nutritionnelle, débouchant sur des initiatives mettant en avant des mentions valorisantes. Le vote de l'amendement bloquera-t-il les autres aspects du texte ? Sinon, ceux-ci pourront-ils être complétés à l'avenir ?
Sur l'amendement no 1150 , je suis saisi par le groupe La France insoumise d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Sur le sous-amendement no 2740 , je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Dominique Potier.
Afin de respecter le rythme de nos débats et d'employer le temps de parole qui nous est imparti – nous avons écouté toute la journée, mais il s'agit ici d'un débat important à nos yeux – , je prendrai le temps de répondre à la question de Thierry Benoit, avec qui nous cheminons depuis plusieurs années, menant un dialogue et une recherche commune dans le cadre de plusieurs projets de loi, et parvenant toujours à des accords et des votes unanimes sur ces grands sujets. Je répondrai en même temps à Thierry Benoit et à Nicolas Turquois, qui m'a inspiré lorsqu'il a évoqué des indicateurs de synthèse.
En effet, Guillaume Garot et moi-même sommes terrifiés par l'empilement des normes auquel nous avons assisté tout au long de cette journée. Pour le monde économique, c'est terrifiant ! Le label HVE a ceci de génial qu'il ne propose pas des moyens, mais des objectifs à atteindre.
Je connais bien l'agriculture bio, que j'ai pratiquée pendant vingt-cinq ans – je n'aime pas en parler, mais ce débat m'y incite. Nous nous conformons à un cahier des charges édictant cinq interdits ; pour le reste, la liberté de l'entreprise est complète. Le transformateur est libre, le distributeur aussi. Un certificateur privé, cautionné par l'État, contrôle la véracité de ce qui est annoncé. Cela a créé un marché et transformé le monde agricole.
Nous proposons de créer un deuxième moteur de changement, sous forme d'un indicateur de synthèse, comme le proposait Nicolas Turquois tout à l'heure. Dès lors qu'il est créé par décret, il peut intégrer une dimension sociale minimale – sans doute pas l'intégralité de la RSE, mais quelque chose qui y ressemble. Pourquoi ne pas y intégrer une dimension sociale et humaine, fondée sur l'attachement au territoire que rappelait tout à l'heure Guillaume Garot ?
Bref, nous aurons un instrument permettant de nommer l'agriculture de demain, dont l'agriculture biologique fera partie, même si elle sera spécifiquement distinguée. Nous aurons demain des produits labellisés « AB-HVE », d'autres « HVE », d'autres encore banalisés mais toujours de marque France, qui sera toujours une fierté pour nous. Notre filière agroalimentaire en a besoin, notamment pour l'export. Tels sont les contours du moteur public destiné à encourager un esprit d'entreprise citoyen, afin que les consommateurs ne soient pas trompés au gré des modes et des caprices, mais disposent d'un repère solide, fondé sur un contrat public validé par la puissance publique.
Afin de mettre un terme au débat et d'en venir au vote, je rappelle que l'article 11 duodecies porte exclusivement sur l'agroécologie, dont il n'aborde ni les enjeux sociaux ni les enjeux économiques. L'amendement no 1150 précise que la HVE concourt à l'agroécologie. Le sous-amendement no 2740 renforce le lien entre les deux.
Compte tenu du débat qui vient d'avoir lieu, le Gouvernement émet un avis de sagesse sur celui-ci. Chacun prendra ses responsabilités et décidera.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Les membres du groupe UDI, Agir et indépendants voteront l'amendement ainsi sous-amendé. En effet, les initiatives s'inscrivant dans les pas de votre texte, monsieur le ministre, dans le cadre des trois enjeux que j'ai déclinés tout à l'heure – social, environnemental et nutritionnel – permettant une alimentation saine et durable, demeurent possibles.
Il est procédé au scrutin.
Nombre de votants | 68 |
Nombre de suffrages exprimés | 65 |
Majorité absolue | 33 |
Pour l'adoption | 65 |
contre | 0 |
Le sous-amendement no 2740 est adopté à l'unanimité.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, MODEM, NG et UDI-Agir.
Il est procédé au scrutin.
Nombre de votants | 63 |
Nombre de suffrages exprimés | 60 |
Majorité absolue | 31 |
Pour l'adoption | 60 |
contre | 0 |
L'amendement no 1150 , sous-amendé, est adopté à l'unanimité.
Mêmes mouvements.
L'article 11 duodecies, amendé, est adopté.
Je suis saisi de plusieurs amendements portant article additionnel après l'article 11 duodecies.
La parole est à Mme Marie Lebec, pour soutenir l'amendement no 1927 .
Défendu.
L'amendement no 1927 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l'amendement no 2465 .
Je serai bref, car j'ai déjà exposé l'argument de fond. Il s'agit de décliner notre démarche. Nous avons un objectif et un outil, il faut à présent travailler à leur mise en oeuvre économique.
Je propose que celle-ci prenne la forme d'un crédit d'impôt accordé aux entreprises s'inscrivant dans une démarche de certification. Nous pouvons prendre rendez-vous dès aujourd'hui, comme la loi le permet. Nous pouvons aussi prendre rendez-vous pour le prochain projet de loi de finances initiale.
Quoi qu'il en soit, nous proposons de cranter dès maintenant ce que nous venons de voter, et de favoriser les acteurs qui s'inscrivent dans une démarche de certification.
Cet amendement pourrait être intéressant, mais c'est dans le projet de loi de finances qu'il aurait sa place, et non ici. Avis défavorable.
L'amendement no 2465 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement vise à inscrire dans la loi une définition des « petites fermes », sur le fondement de la définition validée en 2002 par le Conseil supérieur d'orientation et de coordination de l'économie agricole et alimentaire du ministère de l'agriculture. Nous proposons de retenir une surface de 30 hectares, c'est-à-dire 58 % de la surface moyenne des fermes françaises. En officialisant la définition de la petite ferme, cet amendement doit d'abord permettre aux citoyennes et citoyens, aux élus, aux personnes morales de droit public ou privé qui souhaitent favoriser l'emploi en milieu rural de s'approvisionner en produits alimentaires issus de fermes répondant à cette définition.
Au moment où le milieu rural souffre des disparitions successives de petites exploitations, il met aussi l'accent sur l'importance des fermes à dimension humaine, qui favorisent l'emploi et le maillage du territoire. Elles pourront ainsi faire l'objet de mesures de soutien spécifiques.
En acceptant cet amendement, le Gouvernement montrerait sinon sa volonté de lutter contre les fermes mastodontes, en tout cas celle de soutenir spécifiquement ces petites fermes à taille humaine.
La parole est à Mme Mathilde Panot, pour soutenir l'amendement no 2013 .
Cet amendement est presque identique au précédent : ils ont été préparés en commun et avec la Confédération paysanne.
L'avenir est aux petites fermes à taille humaine, intensives en main-d'oeuvre, qui créent de l'emploi et répondent ainsi à l'urgence sociale. Il est important de rééquilibrer notre politique agricole, qui aujourd'hui favorise énormément les grandes surfaces. La définition des « petites fermes » que nous proposons pourrait y contribuer.
Nous avons déjà eu hier, avec M. Chassaigne, une discussion sur les petites fermes. Ces amendements reposent sur l'idée que small is beautiful, mais ce n'est pas toujours le cas… Je vais citer à nouveau l'exemple de mon voisin qui n'a ni la télé, ni internet, mais qui a sept vaches. Je vous invite à venir voir le résultat : croyez-moi, vous n'avez pas envie de manger la production de cette ferme-là !
Sourires.
Sourires.
La taille n'est représentative ni de la qualité, ni de la viabilité d'une exploitation agricole. Avis défavorable.
Avis défavorable aux deux amendements.
La parole est à M. François Ruffin, pour soutenir l'amendement no 2031 .
L'amendement no 2031 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. François Ruffin, pour soutenir l'amendement no 2398 .
Il s'agit toujours de favoriser les petites fermes. Les aides de la PAC vont plutôt aux grandes exploitations. Nous proposons que les aides de l'État soient dirigées de façon préférentielle vers les petites fermes identifiées par un label « agriculture biologique » ou « haute valeur environnementale ».
Comme tout à l'heure, je vous répondrai que c'est une discussion qui doit avoir lieu dans le cadre du projet de loi de finances. Avis défavorable.
Avis défavorable.
Je ne comprends pas pourquoi nos amis de la France insoumise essayent depuis tout à l'heure d'encourager une guerre entre les petites fermes et les grandes fermes, comme si les secondes ne faisaient que des choses absolument dégueulasses et les petites fermes que des choses formidables. Ce n'est évidemment pas le cas ! Cela me rappelle la guerre entre le bio et le conventionnel. Avez-vous vu où cela nous a menés ? Pendant trente ans, il ne s'est rien passé !
Mettons un terme à ces guerres intestines absurdes, et produisons de la qualité, quelle que soit la taille de la ferme.
Au cours de son audition par la commission, M. Bruno Dufayet s'est interrogé de façon très pertinente sur les perspectives que nous voulons donner à notre agriculture : souhaitons-nous aller vers une agriculture à la néo-zélandaise – je ne prétends pas que les grandes fermes françaises correspondent en quoi que ce soit à ce modèle…
… ou bien voulons-nous préserver une agriculture familiale ?
Nous ne jetons la pierre à personne. Nous posons la question : dans quelle direction voulons-nous aller, et, en particulier, faut-il davantage orienter les aides vers les fermes labellisées « haute valeur environnementale » ou « agriculture biologique » ?
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Il est dommage que cette discussion se focalise sur la taille des exploitations, en laissant de côté la question du nombre de paysans qui travaillent dans ces fermes. Un groupement agricole d'exploitation en commun, un GAEC, par exemple, peut être d'assez grande taille, mais il emploiera un nombre de travailleurs important.
Il me semble qu'il faudrait mieux définir ce qu'est la taille d'une exploitation. À mon sens, il faut raisonner par travailleur et non par hectare.
Nous ne l'avons pas lu in extenso, mais c'est justement ce que fait l'amendement : la définition que nous proposons de la « petite ferme » repose en partie sur le nombre de salariés.
Notre objectif est double, environnemental – la transformation de notre agriculture pour aller vers plus de haute valeur environnementale et de bio – et social. Nous sommes animés par la conviction que l'agriculture est un secteur d'avenir aussi en matière d'emploi.
Il y a une manne d'emplois qui pourrait naître du remplacement partiel de la mécanisation et de la chimie par de la main-d'oeuvre. C'est pourquoi nous proposons une modulation des aides en fonction notamment du nombre d'emplois.
L'amendement no 2398 n'est pas adopté.
Je suis saisi de quatre amendements, nos 2117 rectifié , 2470 rectifié , 2466 rectifié et 1463 , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Barbara Pompili, pour soutenir l'amendement no 2117 rectifié .
Cet amendement vise à intégrer dans les cahiers des charges des signes d'identification de la qualité et de l'origine, les SIQO, la notion de biodiversité. C'est déjà souvent le cas, mais nous proposons de l'inscrire dans la loi. Les SIQO doivent aller vers la HVE : c'est la trajectoire que nous souhaitons tous.
Sur l'amendement no 2466 rectifié , je suis saisi par le groupe Nouvelle Gauche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Les amendements nos 2470 rectifié et 2466 rectifié peuvent faire l'objet d'une présentation groupée.
La parole est à M. Dominique Potier, pour les soutenir.
Je retire l'amendement no 2470 rectifié , car il me semble que l'amendement no 2466 rectifié est mieux rédigé. En commission des affaires économiques, le ministre de l'agriculture a estimé que les SIQO ne pouvaient pas se lancer, d'un jour à l'autre, dans une démarche de certification.
Cet amendement prévoit donc que tous les produits sous SIQO – 2 700 en France, tout de même, dont les plus célèbres sont la mirabelle de Lorraine et le vin AOC des Côtes de Toul, qui fête ses vingt ans – doivent être caractérisés par des qualités organoleptiques particulières et par un enracinement dans un territoire, mais aussi adopter une démarche agroécologique et contribuer positivement à l'environnement, à la santé humaine…
Ce n'est pas encore le cas de tous les SIQO, et les situations varient énormément de l'un à l'autre. Or nous ne pouvons pas à la fois mettre au menu des cantines de nos enfants la moitié de produits SIQO et bio, proclamer que les SIQO seront notre force exportatrice, et prendre le risque d'une polémique sur leurs effets environnementaux ou sanitaires.
Notre amendement propose une démarche très progressive, avec un décret établi d'ici à 2021 – ce qui laisse au ministre le temps de dialoguer avec la profession – et un respect des règles de la certification HVE de niveau 1, 2 ou 3 par tous les cahiers des charges d'ici à 2030. C'est cela qu'attend la profession, et c'est le pas que nous pouvons faire aujourd'hui.
C'est pourquoi je propose à Mme la présidente de la commission du développement durable de se rallier à notre proposition.
L'amendement no 2470 rectifié est retiré.
La parole est à Mme Delphine Batho, pour soutenir l'amendement no 1463 .
J'émets un avis favorable à l'amendement no 2466 rectifié , qui indique que les SIQO reçoivent, d'ici à 2030, une certification de niveau HVE 1 au moins. C'est un pas en avant vers la démarche agroécologique.
En conséquence, j'invite les auteurs des autres amendements à les retirer.
Les États généraux de l'alimentation ont réaffirmé la nécessité pour les SIQO de prendre davantage en considération l'environnement. L'amendement de Mme Pompili porte sur la notion de biodiversité, idée à laquelle je suis favorable, mais qui est difficile à cerner sur le plan juridique.
Je préfère donc l'amendement no 2466 rectifié , qui fait référence à la certification HVE, et j'émets un avis défavorable aux autres amendements.
L'amendement no 2117 rectifié est retiré.
Il est procédé au scrutin.
Nombre de votants | 62 |
Nombre de suffrages exprimés | 52 |
Majorité absolue | 27 |
Pour l'adoption | 52 |
contre | 0 |
L'amendement no 2466 rectifié est adopté et l'amendement no 1463 tombe.
Je suis saisi de deux amendements, nos 2445 rectifié et 2364 , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l'amendement no 2445 rectifié .
L'amendement no 2445 rectifié est retiré.
La parole est à M. François Ruffin, pour soutenir l'amendement no 2364 .
L'amendement no 2364 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. François Ruffin, pour soutenir l'amendement no 2365 .
L'amendement no 2365 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Élisabeth Toutut-Picard, pour soutenir l'amendement no 2170 .
Le statut d'entreprise des exploitations agricoles les empêche d'accueillir des volontaires en service civique. Cet amendement vise à autoriser l'accueil par les exploitations en agriculture biologique ou en conversion de volontaires en service civique. Cela permettrait de susciter parmi les jeunes d'éventuelles vocations pour la profession agricole.
Il faut réserver l'accueil de volontaires en service civique aux associations, collectivités et autres organismes. Ces volontaires sont indemnisés par l'État. Ils seraient donc de la main-d'oeuvre quasi gratuite pour les exploitations bio. Avis défavorable.
L'amendement no 2170 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l'amendement no 2488 .
L'amendement no 2488 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l'amendement no 2490 .
L'amendement no 2490 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Prochaine séance, ce matin, à neuf heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine et durable.
La séance est levée.
La séance est levée, le dimanche 27 mai 2018, à une heure.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Catherine Joly