La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de transformation de la fonction publique (nos 1802 et 1924).
Cet après-midi, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s'arrêtant à l'article 9.
Avec l'article 9, nous abordons directement la question de l'ouverture des emplois permanents, notamment de la fonction publique d'État, à des contractuels. Cet article me pose problème, car la rédaction que vous avez retenue recèle une vraie ambiguïté juridique, qui ne fait que traduire l'ambiguïté de vos intentions. Ainsi, le fameux alinéa 13 ouvre les emplois permanents de la fonction publique d'État à des contractuels, « lorsque l'emploi ne nécessite pas une formation statutaire donnant lieu à titularisation dans un corps de fonctionnaires. » Cette formulation est extrêmement ambiguë et tout à fait étonnante sur le plan juridique : le concept de « formation statutaire » n'étant pas défini par la loi, c'est le pouvoir réglementaire qui décidera au fil de l'eau des emplois qui requerront ou non une formation statutaire. En définitive, c'est le pouvoir exécutif qui décidera de restreindre le champ du statut au profit du champ du contrat.
Je répète que nous n'avons rien contre l'ouverture au contrat, bien au contraire, mais on aimerait que cela soit fait de manière claire, précise, avec une vision, notamment en préservant les missions régaliennes. Les partenaires sociaux ont compris que cet alinéa permettait d'exclure tout le champ des écoles, comme l'École nationale de la magistrature – ENM – , l'École nationale d'administration – ENA – , les écoles supérieures du professorat et de l'éducation – ESPE – , les écoles nationales de police, l'École nationale supérieure de la police qui forme notamment les commissaires, et cela vaudra tant qu'existent des formations statutaires donnant lieu à titularisation. Si, demain, il n'y en a plus, il sera possible de recruter des contractuels pour ces emplois.
Monsieur le secrétaire d'État, la rédaction de ce texte est très ambiguë. Il est très important de la préciser et de l'améliorer, le cas échéant au cours de ce débat, pour apporter les véritables garanties qu'elle n'offre pas pour l'instant. On ne sait pas réellement où vous allez, ce que seront, demain, les formations statutaires, et quels métiers seront réservés à des recrutements statutaires.
Nous croyons au statut. Nous croyons que le fonctionnaire doit être régi par des règles statutaires et être soumis, non au contrat, mais à la loi, pour oeuvrer à l'intérêt général. Nous croyons aux vertus du concours, lequel permet d'assurer l'impartialité et l'égalité dans le recrutement. Nous croyons que le statut doit être protecteur et garantir la neutralité du service public. Nous croyons, enfin, que le statut doit permettre de responsabiliser l'agent public, afin que celui-ci puisse rendre compte de sa mission à la société. Nous sommes les héritiers de cette histoire et, par conséquent, nous sommes très attachés à notre fonction publique de carrière.
Or, c'est précisément à cette histoire que ce projet de loi de réforme de la fonction publique tourne le dos. Oui, sans y toucher frontalement – personne n'imaginait ce gouvernement agir de manière si grossière – , vous préparez l'extinction du statut. Pour ce faire, le texte reprend à bon compte toutes les lubies néolibérales et les poncifs du new public management. Le premier d'entre eux concerne le recours massif aux agents contractuels, y compris pour des emplois permanents ou des postes de direction. Il s'agit là de répondre à une obsession de cette majorité, qui croit que le salut ne peut venir que du secteur privé. Évidemment, cela revient à nier l'immensité des compétences de nos fonctionnaires et leur dévotion pour faire tenir nos services publics, sans moyens et sans soutien de la puissance publique.
Cela fait surtout courir un risque accru de conflits d'intérêts, de clientélisme et de captation de l'action publique par l'oligarchie financière. En effet, comment penser l'autonomie des fonctionnaires, lorsque ceux-ci dépendront de personnes venues du secteur privé, ce qui accentuera la part d'arbitraire et la dépendance de l'agent à son supérieur hiérarchique ? Comment les nouveaux recrutés pourront-ils penser à l'intérêt général, quand leur mérite consistera à faire plus avec moins, sur la base de l'évaluation de managers éduqués par le néolibéralisme ?
Tel est ici l'objet de la démarche : avec le recours aux contractuels, les plans de départs volontaires et la rémunération au mérite, le statut sera progressivement contourné et mis en extinction. Ce gouvernement et cette majorité peuvent se cacher derrière un argumentaire technique, mais, au fond, personne n'est dupe : vous vous apprêtez à porter un coup fatal à notre fonction publique, dans des proportions jusque-là inédites. Au nom de la morale républicaine, qui donne la primauté à l'intérêt général et affirme le principe d'égalité et l'éthique d'une citoyenneté responsable, nous refusons cette privatisation de l'État.
Avec cet article 9, vous souhaitez ébranler un des principes séculaires de la fonction publique. Jusqu'à présent, le recrutement en qualité de titulaire était la règle, et le recours au contrat l'exception. Je conçois qu'il faille apporter de la souplesse aux modes de recrutement et que certains besoins ne soient pas perpétuels, mais la rédaction du projet de loi ne pose pas suffisamment de garde-fous. Je dis cela en ayant à l'esprit la situation de milliers d'auxiliaires de vie scolaire – AVS – et d'assistants d'éducation, qui enchaînent, pendant six années, les contrats d'une année scolaire sur l'autre dans nos écoles et nos collèges. Leur contrat est renouvelé cinq fois car, le plus souvent, ces agents donnent satisfaction. Mais au terme de la sixième année de contrat, pour solde de tout compte, ces agents ne reçoivent aucune proposition de renouvellement de la part de l'État et se retrouvent dans leur situation de départ.
Ce mode de fonctionnement, reproduit des milliers de fois, est une honte. Vous comprendrez, monsieur le secrétaire d'État, ma perplexité, car s'il paraît nécessaire de donner une souplesse aux recruteurs, nous connaissons l'usage et les abus dans nos circonscriptions. Vous comprendrez aussi la situation morale et sociale difficile de ces personnes que l'État laisse dans la précarité. Elles ne peuvent pas se construire d'avenir familial, ne pouvant tout simplement pas, par exemple, s'acheter une maison.
Mon collègue et camarade Jean-Paul Lecoq, et d'autres avant lui, ont dit à quel point nous étions attachés au statut, d'abord pour des raisons historiques : il a été fondé pour lutter contre les dérives possibles de clientélisme et de corruption. Ensuite, la contractualisation de la fonction publique prévue par le Gouvernement aura un certain nombre d'effets néfastes : elle aggravera par exemple la précarité statutaire de ces nouveaux personnels. En outre, la contractualisation et l'individualisation des situations accentueront à coup sûr les inégalités salariales entre les femmes et les hommes. Nous ne voyons pas comment il pourrait en être autrement.
Les débats ni en séance ni en commission ne nous ont pas rassurés : en favorisant le recours massif aux contractuels, sans aucun garde-fou, et alors même qu'il existe déjà des contractuels dans la fonction publique, vous organisez l'extinction du statut. Nous sommes opposés à cet article, comme à de nombreux autres dans ce projet de loi, et nous en demandons donc la suppression.
M. Jean-Paul Lecoq applaudit.
Sans surprise, dans la logique de notre position sur l'article 7, nous souhaitons la suppression de l'article 9, car il prévoit d'élargir les possibilités de recourir au contrat dans la fonction publique. Il ne s'agit pas ici de s'opposer systématiquement au recours à des contractuels dans la fonction publique, mais de rappeler qu'au titre de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, ce ne doit être qu'une dérogation. Or l'ampleur de l'ouverture opérée par l'article 9 sort du cadre de la simple dérogation.
Il est d'ailleurs frustrant, pour les partenaires sociaux comme pour les parlementaires, de voter à l'aveugle, car la liste précise des emplois ouverts sera définie par décret en Conseil d'État. Le Gouvernement s'était engagé à publier les projets de décrets en même temps que le projet de loi, mais cette promesse n'a pas été tenue. Monsieur le secrétaire d'État, avez-vous l'intention de le faire avant la fin de ce débat ?
On peut s'étonner que l'étude d'impact ne fournisse aucun chiffre sur le nombre d'emplois qui seraient concernés. On peut également s'étonner que rien ne soit dit de l'impact de cet article sur le parcours professionnel de ceux des agents publics qui sont des fonctionnaires. Voilà pourquoi nous demandons la suppression de l'article 9.
L'article 9 tend à étendre le recours aux contractuels dans la fonction publique d'État à tous les emplois permanents des établissements publics, excepté dans le domaine de la recherche, et aux emplois de toutes les catégories – et non plus la seule catégorie A, comme c'est le cas actuellement – , lorsque la nature des fonctions ou les besoins des services le justifient. Il aligne les dispositions relatives aux contractuels des autorités administratives et autorités publiques indépendantes sur celles de la fonction publique d'État, et précarise encore plus les contractuels.
Pour ces emplois, le recrutement en CDI – contrat à durée indéterminée – est un impératif dans le droit en vigueur. En effet, aux termes de la loi du 11 janvier 1984 : « Les agents occupant ces emplois sont recrutés par contrat à durée indéterminée ». Le présent article transforme cette obligation en possibilité, puisqu'il prévoit que les agents occupant ces emplois « peuvent » être recrutés par CDI. Alors que l'exposé des motifs du projet de loi évoque de « nouvelles garanties pour les agents concernés », cette modification semble bien inciter au recrutement par contrat à durée déterminée – CDD.
Nous estimons que cet article généralise les dérogations à l'emploi de fonctionnaires et que la promotion du recours aux contrats, en particulier précaires, menace le statut. Nous y sommes opposés. Ce recours aux contractuels dans la fonction publique d'État remet en cause le statut et les garanties qu'il apporte en matière de préservation de l'intérêt général.
L'amendement no 1073 de M. Julien Aubert est défendu.
La parole est à Mme Émilie Chalas, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, pour donner l'avis de la commission sur ces quatre amendements.
La commission a donné un avis défavorable à ces amendements de suppression de l'article 9, qui permet d'étendre les possibilités de recrutement contractuel dans la fonction publique de l'État.
Nous avons une divergence de fond sur la question de l'ouverture de la fonction publique aux agents contractuels. Je considère que c'est une opportunité et une chance, tant pour l'administration que pour les agents venus du secteur privé : la diversité des profils dans la fonction publique et la diversification des carrières permettent des enrichissements mutuels.
Sur le fond, l'article 9 donne des outils managériaux efficaces aux administrations de l'État en ouvrant notamment la possibilité de recruter des agents contractuels de catégorie B ou C lorsque la nature des fonctions ou les besoins du service le justifient. L'administration n'a évidemment aucune obligation de recruter des agents contractuels : il s'agit simplement d'élargir les possibilités d'y recourir. Cet article étend également la possibilité pour l'administration d'effectuer des primo-recrutements en CDI, ce qui n'est actuellement permis que dans des cas bien définis. Là encore, c'est une double avancée qui bénéficie à la fois aux administrations et aux agents, lesquels voient leur carrière sécurisée.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics, pour donner l'avis du Gouvernement.
Défavorable, pour les raisons invoquées par la rapporteure et en cohérence avec les discussions que nous avons eues jusqu'à présent.
Monsieur le secrétaire d'État, sur cet article assez central, vous devez à la représentation nationale des réponses un peu plus complètes. Je vous ai posé tout à l'heure une question très précise : quels seront les emplois qui ne bénéficieront pas d'une formation statutaire ?
Prenons un exemple très clair : il n'existe pas, à ma connaissance, d'école de formation des directeurs d'école. En d'autres termes, il n'y a pas de formation statutaire des directeurs d'école. Pouvez-vous me garantir qu'en droit, votre texte ne permettra pas de recruter des directeurs d'école contractuels ? Il en est de même des principaux de collège, qui accèdent à cette fonction par un concours ou un examen mais ne bénéficient pas d'une formation statutaire.
Sur le cas très clair des directeurs d'école, je vous pose donc cette question : existe-t-il une formation statutaire permettant de réserver cet emploi à des personnels sous statut ?
En effet, monsieur le secrétaire d'État, votre réponse est un peu courte. Aujourd'hui, certaines fonctions font l'objet d'une formation statutaire. Par quelle voie de droit cette dernière peut-elle être supprimée ? Que se passera-t-il alors ?
Nous avons besoin d'un peu plus d'informations. Vous demandez quand même à la représentation nationale de voter les yeux fermés ! Il y a peut-être certains députés que cela ne dérange pas… Or, je le répète, vous aviez pris l'engagement de publier les projets de décrets. Faites-le, afin que nous sachions de quoi on parle !
Par ailleurs, Mme la rapporteure a dit que l'article 9 était une chance pour sécuriser la carrière des agents publics. Ce sera peut-être le cas pour certains contractuels, mais certainement pas pour les fonctionnaires, qui seront en concurrence avec un certain nombre de contractuels auxquels les postes n'étaient pas ouverts jusqu'à présent.
Monsieur Marleix, vous m'avez posé des questions précises sur les commissaires de police. Cet emploi est associé à l'exercice de prérogatives de puissance publique : il ne sera donc pas ouvert aux contrats.
Quant aux directeurs d'école, aux principaux de collège et aux proviseurs de lycée, ils n'occupent pas des emplois fonctionnels – j'ai dit tout à l'heure que le terme n'était pas tout à fait juste, mais on voit bien de quoi on parle – et ne sont donc pas concernés par l'article 7. Les directeurs d'école ne bénéficient pas d'une formation spécifique, puisque ce sont des enseignants qui sont amenés à exercer des fonctions de direction, mais ils sont formés par les ESPE, de la même façon que l'ensemble des professeurs des écoles. En termes de doctrine d'emploi, le ministère de l'éducation nationale a eu l'occasion de préciser qu'il n'envisageait pas le recours à des contractuels.
« Ah ! » sur plusieurs bancs des groupes SOC et GDR.
Nous ne changeons pas le droit existant en la matière.
Nous ne changerons pas non plus de doctrine, puisque le ministre a précisé qu'il ne souhaitait pas recruter de contractuels.
Vous savez bien que les ministres ne sont pas éternels ! Il vaudrait mieux inscrire ce principe dans la loi !
C'est le droit existant : pas plus, pas moins.
Monsieur le secrétaire d'État, je vous invite à faire le rapprochement entre l'article 9, qui autorise le recrutement de contractuels lorsque l'emploi ne nécessite pas une formation statutaire donnant lieu à titularisation, et l'article 22, où vous nous demanderez de vous autoriser à prendre des ordonnances pour « réformer les modalités de recrutement, harmoniser la formation initiale et développer la formation continue, notamment en matière d'encadrement, des corps et cadres d'emplois de catégorie A ». Ainsi, nous vous donnerons un blanc-seing pour déterminer, demain, les emplois qui auront droit ou non à une formation statutaire.
Je prends un très bon exemple : l'ENA est aujourd'hui la porte d'entrée exclusive aux emplois d'administrateur civil des ministères. La suppression de l'ENA se fera par voie réglementaire, puisque je ne vois pas de fondement législatif à l'existence de cette école, ou alors très ténu et très symbolique. Après avoir supprimé l'ENA par une voie essentiellement réglementaire, vous pourrez, sur la base de l'habilitation demandée à l'article 22, ouvrir grand les portes aux recrutements contractuels sur n'importe quel type d'emploi, dès lors qu'il n'y aura plus de formation statutaire.
Aussi, monsieur le secrétaire d'État, votre réponse ne m'a pas convaincu, et je pense qu'elle ne convaincra pas grand monde parmi tous ceux qui se posent ce type de question dans notre pays.
Je note que M. le secrétaire d'État s'efforce de répondre aux questions clairement posées. Or je crois que la mienne avait été clairement posée : disposerons-nous des projets de décrets avant la fin de la discussion de ce projet de loi ?
Monsieur Marleix, l'ENA a été créée par l'ordonnance du 9 octobre 1945, un texte qui a valeur législative.
Non, c'est une ordonnance dont l'essentiel du contenu est réglementaire !
Nous aurons l'occasion d'en débattre à nouveau dans le cadre de la concertation ad hoc, de la préparation et surtout de la ratification de l'ordonnance que nous prendrons à ce sujet.
La question majeure qui vient d'être soulevée est extrêmement anxiogène pour les personnels en place. Monsieur le secrétaire d'État, vous semblez nous rassurer en nous disant qu'un certain nombre d'emplois, notamment ceux qu'a mentionnés M. Marleix, ne seront pas concernés par ce dispositif. Cependant, vous ne nous rassurez pas lorsque vous dites que le ministre de l'éducation nationale « n'envisage pas » le recours à des contractuels. Pouvez-vous être plus clair sur ce point et prévoir l'inscription de ce principe dans la loi, de sorte que nous ayons une lecture commune, partagée par l'ensemble des professionnels qui s'inquiètent à juste titre de cette situation ?
Rappel au règlement
J'interviens sur le fondement de l'article 58, alinéa 2, de notre règlement. Pour le bon déroulement de la séance, il serait bienvenu que le Gouvernement réponde aux questions précises qui lui sont posées. Je précise que la mauvaise information de la représentation nationale est un motif d'invalidation de la loi par le Conseil constitutionnel. Lorsque nous posons des questions, nous aimerions obtenir des réponses.
Je prends bonne note de votre remarque, monsieur Vallaud, même si je doute qu'il s'agissait précisément d'un rappel au règlement.
Article 9
La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon, pour soutenir l'amendement no 676 .
Cet amendement de repli vise à encadrer le recours aux contractuels dans la fonction publique en limitant le nombre de contractuels pouvant être recrutés au sein d'une structure, mais surtout en leur garantissant une gestion dédiée en termes de ressources humaines. Outre l'instauration d'un plafond de 15 % de contractuels au sein des effectifs de l'ensemble des fonctions publiques, nous proposons que chaque département des ressources humaines comporte nécessairement une entité dédiée à la gestion et au suivi des contractuels. En effet, une grande lacune de la gestion actuelle des ressources humaines est l'insuffisante prise en compte des contractuels, notamment dans leur suivi et leur évolution professionnelle.
Je ne partage pas la logique qui sous-tend le principe d'un objectif chiffré du nombre d'agents contractuels ou de fonctionnaires, comme je l'ai déjà expliqué en commission. Le renforcement de notre fonction publique et de son efficacité, de même que l'amélioration de la fluidité et de la valorisation des parcours professionnels des agents, ne dépendent pas de ratios, qui seraient rigides et complexes à mettre en oeuvre. Je rappelle en outre que le recours aux contractuels est un dispositif proposé aux employeurs publics, et non obligatoire. Avis défavorable.
Je l'ai déjà dit à propos d'autres amendements sur le même sujet, nous ne nous sommes fixé ni plancher ni plafond de contractuels. Avis défavorable.
Je ne crois pas que fixer un plafond à ce qui devrait être une exception soit contraire à l'exigence de mobilité dans la fonction publique. Le statut donne à l'administration la possibilité d'utiliser les compétences existantes au sein de la fonction publique pour répondre à ses besoins, même ponctuels.
Par ailleurs, il y a des chiffres qui circulent. Lors de l'examen de l'avant-projet de loi par le Conseil d'État, les représentants du Gouvernement ont affirmé que, selon différentes hypothèses, la fonction publique pourrait compter à terme jusqu'à 40 % de contractuels. Au cours des débats en commission des lois, notre collègue Ugo Bernalicis a interrogé le Gouvernement sur ce chiffre, mais il n'a obtenu aucune réponse – ni confirmation, ni infirmation. Ce chiffre n'a suscité aucune réaction, dans d'autres cadres, de la part du secrétaire général de La République en marche.
Nous comprenons que l'administration puisse avoir besoin de recruter des contractuels, mais cette pratique doit être encadrée. À défaut de vous convaincre d'adopter notre amendement, qui nous semble constituer une forme de garantie, nous aimerions obtenir une confirmation ou une infirmation de ce chiffre de 40 % qui a été évoqué. Vous pourriez nous rassurer en nous communiquant les résultats de vos calculs et projections, qui existent assurément puisque nous ne voulons pas croire que vous avancez à l'aveugle sur cette question. Dites-nous que ce chiffre de 40 % ne correspond pas à ce que vous souhaitez pour la fonction publique !
Je ne connais pas la nature du contrat entre M. le secrétaire d'État et les députés de la majorité, mais il nous pose un problème.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
La majorité a sans doute contractualisé le fait de ne pas demander au Gouvernement tous les éléments nécessaires au vote de la loi. Or, en tant que représentants du peuple, nous voulons voter la loi en connaissance de cause. M. le secrétaire d'État avait dit qu'il nous donnerait les éléments à travers la publication des projets de décrets d'application du texte dont nous discutons – ces projets de décrets contiennent sans doute plus d'informations que nous n'arrivons à en obtenir dans le cadre de ce débat.
J'ai compris que M. le secrétaire d'État ne répondrait pas aux collègues de son ancien groupe, mais comme il n'a pas été membre du groupe GDR ni du parti communiste, …
Sourires.
… j'espère qu'il nous respectera et nous donnera les éléments que nous demandons concernant ces projets de décrets.
Mme Elsa Faucillon applaudit.
Soyez prudent, monsieur Lecoq : vous ne savez pas tout de mon passé…
Sourires
Ni le vôtre ! Des membres éminents du Gouvernement ont vécu cette expérience, et cela donne plutôt de très bons résultats.
J'ai eu l'occasion de répondre à plusieurs reprises à la question relative aux décrets d'application. L'étude d'impact dresse la liste des textes réglementaires qui devront être publiés. Lors du débat sur l'article 6 relatif aux procédures de sélection, lors du débat sur l'encadrement de la rémunération des contractuels, lors du débat sur les compétences des instances de dialogue social, article après article, j'ai eu l'occasion de préciser le contenu prévisionnel des décrets. La rédaction de ces derniers sera calée lorsque le projet de loi sera définitivement adopté. Je réitère l'engagement que j'ai pris en commission de vous associer très largement à ce travail.
L'amendement no 676 n'est pas adopté.
L'amendement no 585 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Sophie Beaudouin-Hubiere, pour soutenir l'amendement no 17 .
Cet amendement vise à rendre limitatifs les cas justifiant un recours aux contrats tels qu'ils sont exposés dans la nouvelle rédaction du 2o de l'article 4 du statut de la fonction publique. En effet, les cas énoncés, qui permettent de préciser de manière concrète quel type de situation correspond aux besoins du service ou à une nature de fonctions particulières, ne sont pas limitatifs, ce qui laisse l'employeur libre d'imaginer d'autres possibilités d'embauche. Je ne crois pas que ce soit l'inventivité de l'employeur public, dont je ne doute pas qu'elle puisse être large, mais bien à la loi de décider de ce qui justifie le recours à des contractuels.
Défavorable, car l'objectif est bien de préciser dans la loi les critères liés à la nature des fonctions ou aux besoins de service, mais de manière non limitative, afin précisément de prévoir une certaine souplesse permettant aux employeurs publics de s'adapter à la diversité des situations auxquelles ils sont confrontés.
Aujourd'hui, ce sont la circulaire du 20 mai 2013 et la jurisprudence qui déterminent les cas de recours au recrutement contractuel sur ces fondements, selon une approche assez rigide, puisqu'il est exigé que la nature des fonctions corresponde à des « compétences hautement spécialisées » et que la procédure de recrutement d'un fonctionnaire soit déclarée infructueuse. L'objet des alinéas 9 et 11 est de desserrer ces contraintes, afin de donner une marge de manoeuvre plus importante aux employeurs publics pour recruter des agents contractuels de toutes catégories selon ces critères.
Avis défavorable aussi, puisque nous avons calé la rédaction du texte sur la jurisprudence évoquée par Mme la rapporteure, avec la volonté de laisser de la liberté dans le cadre que nous avons défini. J'entends la demande de précision, mais elle ne me semble pas utile, ou du moins son apport au texte n'est-il pas assez explicite pour qu'elle puisse être retenue. Je demande donc le retrait de cet amendement, à défaut de quoi j'émettrais un avis défavorable.
L'amendement no 17 est retiré.
La parole est à M. Jean-Charles Larsonneur, pour soutenir l'amendement no 364 .
Cet amendement vise à souligner l'intérêt et l'actualité du statut d'ouvrier de l'État dans le monde de la défense. Comme vous le savez, les ouvriers de l'État ont un statut particulier, car ce ne sont pas des fonctionnaires titulaires ni des agents contractuels au sens classique. Ce mode de recrutement est toutefois très intéressant pour assurer des missions et la continuité du service public et, surtout, pour conserver au fil du temps des compétences techniques, notamment dans des secteurs d'intérêt stratégique ou dans le cas de compétences particulièrement rares, souvent désignées comme des compétences « orphelines ».
Ce statut a permis de développer des filières magnifiques dans les industries navale, terrestre et aéronautique – je pense en particulier à nos techniciens à statut ouvrier – , ainsi que dans des secteurs spécifiques, par exemple celui de la dissuasion où, comme on le dit parfois, les compétences sont longues à acquérir, rapides à perdre et parfois impossibles à retrouver.
L'objet de cet amendement est donc d'établir, par un décret en conseil d'État, la liste des emplois susceptibles d'être pourvus par des ouvriers de l'État.
Les ouvriers de l'État sont des agents soumis à des statuts particuliers, différents du statut général, et qui travaillent majoritairement au sein du ministère de la défense et dans ses établissements industriels, comme les arsenaux et les poudreries. Ils répondent à des conditions de recrutement dérogatoires, car ils détiennent des compétences très techniques et spécialisées, que vous avez évoquées, monsieur Larsonneur, notamment en lien avec les métiers de l'armement, ce qui explique qu'il soit, par nature, délicat de dresser une liste exhaustive de l'ensemble des emplois susceptibles d'être pourvus par des ouvriers de l'État et pour lesquels l'État dispose de marges de manoeuvre nécessairement larges.
En revanche, l'ensemble des catégories d'ouvriers de l'État sont répertoriées en annexe du décret no 2004-1056 du 5 octobre 2004, ce qui permet de disposer d'une vue d'ensemble de la répartition statutaire des ouvriers de l'État selon l'administration à laquelle ils sont rattachés. Avis défavorable.
Outre les éléments évoqués par la rapporteure, qui rappelle que les ouvriers d'État peuvent intervenir dans des domaines très larges et qu'il est ainsi difficile d'en établir la liste, je rappellerai d'abord qu'un travail est actuellement en cours au ministère de la défense et au ministère de la transition écologique et solidaire sur cette catégorie d'emplois particulière que constituent les ouvriers d'État et qui présente des spécificités parfois héritées de l'histoire. Les deux ministres principalement concernés travaillent avec nous en vue d'accompagner ces agents et de revoir certaines conditions d'emploi, même si nous savons que des écarts ou des désaccords subsistent entre nos propositions et les attentes.
Pour ce qui est par ailleurs de la spécificité et de la technicité des ouvriers de l'État, même s'il n'y a plus aujourd'hui, pour l'essentiel des corps concernés, de recrutement avec le statut d'ouvrier de l'État, mais des recrutements différents, nous avons prévu, pour la fonction publique d'État, de favoriser le recours à des primo-recrutements en CDI. S'il ne s'agit pas du statut particulier d'ouvrier de l'État, du moins ces recrutements donnent-ils aux contractuels concernés, dont les postes ne font pas toujours l'objet d'un concours spécifique, la garantie d'un recrutement pérenne. Nous travaillons donc sur ses deux aspects que sont le primo-recrutement en CDI et la « gestion » des difficultés ou des questions afférentes au corps des ouvriers de l'État.
En revanche, il paraît techniquement un peu compliqué d'en dresser la liste comme vous le proposez, et celle-ci risquerait même d'être trop limitative pour les principaux concernés. Je demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi j'émettrai un avis défavorable.
L'amendement no 364 est retiré.
Monsieur le ministre, plus j'entends vos réponses, plus je suis inquiet. À propos de l'ENA, vous évoquez l'ordonnance de 1945. Or, sauf erreur de ma part, cette ordonnance a été aujourd'hui entièrement replacée dans le champ réglementaire. Si donc le Gouvernement supprime l'ENA par voie réglementaire, comme il peut le faire, il n'existe plus de formation statutaire au métier d'administrateur civil, et vous ouvrez tous les emplois d'administrateurs civils des ministères aux contractuels, ainsi du reste que beaucoup d'autres fonctions, comme celle de directeur d'école. En effet, les notions fonctionnelles ou les doctrines d'emploi constituent un cadre très peu protecteur pour les personnels concernés.
De la même façon, vous ouvrez des emplois que la loi de 1983 reconnaît comme participant à la souveraineté nationale. De fait, s'il n'existe plus d'école de formation statutaire pour ces emplois relevant de la souveraineté, rien n'empêchera d'y recruter des contractuels. À ce stade, je ne suis donc pas rassuré et j'espère que nous aurons l'occasion, au cours des discussions et des navettes, d'avoir des précisions de votre part sur ce sujet.
L'amendement no 903 a pour objet d'interdire le recrutement contractuel d'agents en position de disponibilité. Cette pratique, qui peut paraître anecdotique, a cours aujourd'hui, par exemple pour des emplois de cabinet dans des collectivités territoriales, des fonctionnaires titulaires pouvant ainsi être recrutés comme contractuels des collectivités.
Il ne faudrait évidemment pas, notamment dans la haute fonction publique, que se produise un mouvement de hauts fonctionnaires partis pantoufler et qui, toujours en position de disponibilité, se feraient recruter comme agents contractuels. Ce n'est pas complètement ubuesque, car certains hauts fonctionnaires de l'État sont effectivement partis dans le privé en position de disponibilité et facturent à prix d'or leurs services à l'État au titre de missions de conseil. Aujourd'hui, cela ne gêne personne mais, d'un point de vue éthique, cette façon de faire est un peu étrange. Je ne donnerai pas de nom, car ils sont déjà relativement connus.
Il faudrait donc fixer une limite à ce genre de plaisanteries. Il est important de dire et d'écrire que les emplois de contractuels ne sont évidemment pas ouverts à des fonctionnaires en disponibilité.
Il a le même objet que celui de M. Marleix. J'ai notamment été alertée par des fonctionnaires qui craignent que des personnes qui n'auraient pas forcément l'ancienneté ou l'expérience fonctionnelle requises puissent se mettre en disponibilité afin, n'ayant pu entrer par la porte pour obtenir un poste, de passer par la fenêtre. Puisque nous cherchons aussi une équité de traitement, il est important qu'un fonctionnaire en disponibilité ne puisse pas prendre un poste en qualité de contractuel.
Nous avons déjà eu ce débat en commission des lois. Cette option professionnelle est utile pour les fonctionnaires dont la mise en disponibilité répond à des convenances personnelles, par exemple pour suivre leur conjoint, et qui souhaitent retrouver rapidement un travail dans le secteur public en mettant à profit leurs compétences, permettant ainsi, parallèlement, de satisfaire les besoins des employeurs publics en termes de ressources humaines. Avis défavorable.
J'apporterai quelques éléments de réponse à l'intention de M. Marleix, après quoi nous pourrons passer à autre chose. De toute façon, nous pourrons revenir sur le sujet à l'article 22.
L'article 5 de l'ordonnance du 9 octobre 1945 créant l'ENA a été modifié par la loi du 27 janvier 2007, ce qui lui confère un caractère législatif. C'est aussi pour cette raison qu'au-delà de la réforme de la formation initiale et continue, le chantier de la réforme de la haute fonction publique que nous voulons ouvrir pour toutes les écoles de cette haute fonction publique – dont l'ENA, mais pas seulement – , nécessite aussi une ordonnance, et non pas un simple texte réglementaire.
Pour en venir aux amendements identiques, je rappelle que s'applique aujourd'hui une règle selon laquelle un fonctionnaire en disponibilité ne peut être recruté sur contrat dans son administration d'origine. En revanche, la rédaction proposée pour ces deux amendements soulève une difficulté dans certains cas. Certains agents publics peuvent en effet, comme l'a évoqué la rapporteure, se mettre en situation de disponibilité pour suivre leur conjoint dans le cadre d'une mutation essentiellement forcée. C'est par exemple le cas dans l'enseignement, où certains enseignants se mettent en position de disponibilité dans le cadre d'une mutation de conjoint et peuvent poser leur candidature – en dehors, évidemment, de l'éducation nationale – sur des postes contractuels ouverts par d'autres administrations, qu'il s'agisse de collectivités, d'hôpitaux ou d'autres ministères, parce qu'ils possèdent les compétences requises et peuvent donc être retenus.
Si donc nous adoptions votre amendement, non seulement un fonctionnaire en disponibilité ne pourrait pas prétendre à un contrat dans son administration d'origine – ce qui est déjà le cas, et c'est très bien, compte tenu notamment des exemples que vous citiez, et même si le cadre juridique est différent – , mais il ne pourrait pas non plus prétendre à occuper un emploi contractuel dans un autre ministère ou dans une collectivité.
La situation de détachement n'est pas forcément évidente, notamment lorsqu'on change de catégorie ou de versant. Nous avons donc des difficultés avec votre amendement, qui bloquerait les possibilités « honnêtes » d'occuper un emploi de contractuel lorsque la disponibilité n'est pas choisie, mais plutôt contrainte. Avis défavorable, donc.
Je me réjouis que M. le secrétaire d'État vienne de mettre le doigt sur une réforme à faire : celle de la simplification des corps et, peut-être, l'unification des corps à travers les trois versants, afin de permettre une mobilité d'un versant à l'autre sans qu'il soit nécessaire de se mettre en position de disponibilité pour prendre un emploi de contractuel.
C'est totalement aberrant ! Vous prétendez, avec ce texte, améliorer la mobilité. De grâce, trouvez une solution simple et lisible pour tout le monde, qui garantisse les principes habituels de la fonction publique ! De fait, si nous n'avions en France que cinquante corps au lieu de cinq cents, les mobilités seraient beaucoup plus faciles. C'est là l'une des grandes réformes de la fonction publique, une vraie transformation – et celle-là, les agents l'attendent.
Je ne suis pas du tout convaincu par votre réponse ni par celle de Mme la rapporteure. Rejoindre son conjoint en province est incontestablement mignon. Sans doute y a-t-il quelques cas de ce genre, dans lesquels le contrat offre peut-être plus de possibilités et où l'on pourrait envisager cette option.
A contrario, l'on pourrait considérer qu'un haut fonctionnaire ne peut pas se faire recruter en contractuel sur un emploi de direction. Intégrer un corps ou une fonction par la voie du contrat, simplement parce que l'on n'a pas l'ancienneté requise pour être nommé, est une forme de détournement des procédures. Ce sujet mériterait donc d'être très sérieusement retravaillé. Je veux bien entendre les cas évoqués par la rapporteure, notamment le rapprochement au sein d'une famille, mais, pour les autres, je pense que vous connaissez comme moi les risques d'abus. Pour certains emplois de direction, il faudrait interdire purement et simplement cette possibilité, qui ne me paraît pas moralement acceptable.
Je souhaite ajouter un argument : ce texte a un objectif et donne les moyens, dans la gestion RH, d'accompagner la mobilité des agents, qu'elle soit inter-versants ou qu'elle concerne leur projet de carrière. Nous pourrions nous enorgueillir de mieux accompagner les agents de la fonction publique, notamment pour diminuer le célibat géographique. Ainsi, le corps de la préfectorale rencontre un vrai problème pour attirer les jeunes sur des postes de préfet car ils se retrouvent envoyés loin de leur famille ; or on ne démissionne pas systématiquement ou on ne se met pas systématiquement en disponibilité pour suivre son conjoint aujourd'hui. Ce texte nous propose des outils pour accompagner la mobilité des agents, qui permettent de surmonter la difficulté que vous nous avez signalée dans quelques cas. Des agents ne seraient ainsi pas obligés de se mettre en disponibilité et pourraient être beaucoup mieux accompagnés dans leur mutation à la suite d'une mobilité forcée. Je veux bien que l'on rediscute de la rédaction des amendements mais il nous faut acter le principe.
La parole est à M. Sébastien Leclerc, pour soutenir l'amendement no 1074 .
Je défends cet amendement déposé par M. Julien Aubert. Si l'extension de la possibilité de nomination de contractuels à certains emplois normalement réservés à des fonctionnaires d'État peut se justifier dans certains cas, notamment lorsqu'il s'agit de faire appel à des compétences particulières, la possibilité de recourir à une telle nomination directement par la voie d'un contrat à durée indéterminée contrevient au principe de l'occupation des emplois civils permanents de l'État par des fonctionnaires. Cet amendement, en proposant de substituer, à l'alinéa 16, les mots « ne peuvent l'être initialement » aux mots « peuvent l'être », vise donc à restreindre la possibilité d'un primo-recrutement en CDI.
Avis défavorable car le primo-recrutement d'agents par CDI est déjà autorisé en cas d'absence de corps de fonctionnaires et d'emploi à temps incomplet inférieur à 70 %. Il sera en outre étendu à l'ensemble des recrutements fondés sur l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984 tel que modifié par l'article 9 du projet de loi, c'est-à-dire aux emplois de toutes catégories ouverts aux contractuels lorsque la nature des fonctions ou les besoins du service le justifient, ou pour les emplois ne nécessitant pas une formation statutaire donnant lieu à titularisation dans un corps de fonctionnaires.
L'extension de la faculté de recrutement en CDI – il ne s'agit pas d'une obligation, je le redis – constitue une double avancée : d'une part, cela permettra de renforcer l'attractivité des métiers de la fonction publique en sécurisant le parcours professionnel des agents ainsi recrutés. D'autre part, le CDI permettra de fidéliser davantage ces agents afin que leurs compétences soient durablement mises au service de la fonction publique. Avis défavorable.
L'amendement no 1074 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 643 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 9 est adopté.
Je suis saisi de deux amendements portant article additionnel après l'article 9.
La parole est à Mme Sophie Beaudouin-Hubiere, pour soutenir l'amendement no 16 .
Les postes d'assistants d'éducation avaient, lors de leur création en 2003, vocation à être occupés en priorité par des étudiants, les étudiants boursiers étant d'ailleurs toujours prioritaires sur ce genre d'emploi. Cet état de fait, comme certains d'entre vous l'ont peut-être déjà constaté dans leur circonscription, induit cependant des effets indésirables, notamment dans les collèges ruraux qui, de par leur éloignement géographique avec les universités les plus proches, sont dans l'incapacité de recruter des étudiants pour leurs postes d'assistants d'éducation et se trouvent dans l'obligation de licencier, après six ans, les contractuels non-étudiants recrutés sur ces postes. Ces licenciements, ressentis comme une grande injustice, sont souvent très mal vécus par la communauté éducative. Le présent amendement vise donc à rendre possible la « CDIsation » des assistants d'éducation à l'issue de la durée maximale de leur CDD, c'est-à-dire six ans.
Je ne suis pas favorable à l'introduction de mesures strictement catégorielles dans ce projet de loi, même si vous soulevez en l'espèce un sujet qui a été récemment débattu au sein de notre assemblée à l'occasion de l'examen de la proposition de loi de notre collègue Christophe Bouillon, qui a été adoptée à l'unanimité dans notre hémicycle le 31 janvier dernier. Ces dispositions prévoient ainsi que, dès la rentrée 2019, tous les accompagnants d'élèves en situation de handicap – AESH – bénéficieront d'un contrat d'une durée de trois ans, renouvelable une fois avant éventuelle transformation en CDI.
Cette mesure se conjugue à la mise en place d'une formation de soixante heures par an pour l'ensemble des accompagnants afin de garantir une meilleure qualité de scolarisation des élèves, ainsi qu'à la création de pôles inclusifs d'accompagnement localisés qui permettront aux établissements de s'adapter aux différents types de besoins des élèves en situation de handicap sur leur temps scolaire. Dans cette perspective, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, avis défavorable.
Le cadre spécifique des assistants d'éducation – AED – est pensé pour des étudiants dans une perspective d'accès ultérieur à l'emploi. La CDIsation que vous proposez aurait pour conséquence de rigidifier le cadre d'emploi et de pérenniser les personnels – c'est l'objectif de votre amendement – , au risque de fermer cette possibilité aux étudiants. Des dispositions ont été adoptées concernant les AESH ; Mme la rapporteure les a rappelées. Pour ce qui est des AED, nous tenons à maintenir le dispositif suffisamment ouvert pour les étudiants, notamment dans la filière des sciences de l'éducation, afin de leur permettre de préparer leur avenir professionnel. C'est la raison pour laquelle nous sommes défavorables à cet amendement.
L'exposé sommaire de l'amendement est très précis. De même qu'il existe sur le territoire des déserts médicaux, il existe des déserts dans lesquels on n'arrive pas à embaucher des assistants d'éducation. Il faut identifier ces zones rouges. Notre collègue propose à l'ensemble de l'Assemblée nationale, et donc à ses collègues de la majorité, une solution pour que ces zones, généralement dépourvues de tout, puissent au moins avoir des assistants d'éducation. Il ne s'agit pas d'auxiliaires de vie scolaire, madame la rapporteure, mais d'assistants d'éducation, avec un métier durable, qui n'est pas lié à la présence d'un enfant en difficulté. Cela concerne donc le fonctionnement ordinaire des collèges.
Ne nous dites pas qu'il n'est pas possible d'en établir une cartographie : l'INSEE sait le faire. Si, depuis des années, certains collèges n'arrivent pas à trouver des assistants d'éducation, alors on peut estimer que leur problème est permanent et qu'il faut trouver une solution leur permettant de fonctionner normalement. Il est déjà difficile de vivre dans ces territoires où l'on manque de beaucoup de choses, inutile d'en rajouter dans les collèges quand il existe une solution !
Par grand respect pour le territoire que je représente, je maintiens évidemment cet amendement. Je peux toutefois proposer au Gouvernement, s'il le souhaite, de le sous-amender pour le circonscrire à des régions en désertification. Quoi qu'il en soit, par respect pour tous les collèges que j'ai visités dans ma circonscription, qui tous m'ont fait état de cette difficulté, je maintiens cet amendement et j'invite tous mes collègues, de la majorité comme de l'opposition, à bien vouloir le voter.
L'amendement no 16 n'est pas adopté.
Par cet amendement, issu d'une sollicitation de la CGT, nous proposons de sécuriser les agents précaires et d'inciter les employeurs publics à limiter le recours au contrat à durée déterminée. L'amendement a donc pour objet la requalification des contrats passés irrégulièrement en contrats à durée indéterminée, ainsi que l'engagement de recours par les organisations syndicales en lieu et place des agents, dans les mêmes cas et conditions que ce qui est prévu par le code du travail.
Contrairement au secteur privé, il n'existe pas aujourd'hui, dans la fonction publique, de dispositions prévoyant la requalification en CDI des contrats passés en CDD sous des motifs fallacieux ou illégaux. Cette absence de sanction déresponsabilise les employeurs publics et ne les incite pas à limiter l'emploi précaire dans les administrations et établissements publics des trois versants de la fonction publique. Selon les chiffres de la DGAFP – direction générale de l'administration et de la fonction publique – , plus de 9 % des agents publics sont aujourd'hui en CDD d'une durée inférieure à un an. Cette situation s'aggravera encore avec la mise en application du présent projet de loi, qui élargit considérablement les possibilités de recours aux contrats dans la fonction publique. Cet amendement permettrait au moins de donner davantage de sécurité à ceux qui sont parmi les plus précaires.
Les juridictions administratives opèrent déjà un contrôle du recours au contrat à durée déterminée par l'administration et peuvent ainsi procéder à des requalifications de CDD en CDI en cas d'erreur de fondement juridique. C'est notamment la position du Conseil d'État, qui précise qu'il relève de l'office du juge administratif de requalifier le motif du recours au CDD, afin de procéder à la requalification en CDI, comme en témoigne son arrêt rendu le 29 mars 2017. Par conséquent, avis défavorable.
Même avis.
Même si, dans son exposé sommaire est évoqué le problème de la requalification, le présent amendement vise à encadrer le recours au CDD, ce à quoi vous n'avez pas répondu, madame la rapporteure. C'est problématique compte tenu des propositions des organisations syndicales, que vous semblez déterminés à ne pas écouter alors que vous prétendez être ouverts au dialogue sur cette question.
L'amendement no 678 n'est pas adopté.
Cet amendement de suppression n'étonnera personne compte tenu de ce que nous avons défendu jusque-là. L'article 10 élargit encore le recours au contrat dans la fonction publique territoriale, par dérogation au principe de l'occupation des emplois permanents par des fonctionnaires. D'une part, les communes de moins de 1 000 habitants et les groupements de communes regroupant moins de 15 000 habitants pourront recourir aux contractuels pour l'ensemble de leurs emplois permanents. D'autre part, l'article 10 légalise le recours aux agents contractuels sur des emplois à temps non complet pour une quotité de temps de travail inférieure à 50 % de la durée légale afin d'éviter de recourir à la vacation pour pourvoir ces emplois. Je n'en dirai pas davantage : nous avons suffisamment dit tout le mal que nous pensions de ces dérogations. Je soulignerai simplement qu'elles risquent de rompre les principes d'égalité, d'indépendance et de responsabilité. Nous demandons donc la suppression de cet article.
Nous abordons avec cet article la question de l'ouverture au contrat des emplois de la fonction publique territoriale. Les cas très pratiques qui ont été évoqués, notamment par notre collègue Olivier Marleix, soulignent la nécessité d'un certain nombre de précisions. Sans vouloir paraître trop insistant, si nous demandons de pouvoir prendre connaissance des projets de décrets, c'est aussi parce que la rédaction de ces textes aura une incidence sur le recours aux contractuels.
Certaines informations mériteraient d'être confirmées – ou infirmées – par le ministre. Selon la façon dont sera rédigé le décret, on pourrait aller jusqu'à 40 % de contractuels. Sur ce point j'ai deux questions. Est-ce bien la DGAFP qui est commissaire du Gouvernement près du Conseil d'État sur ce texte ? L'administration a-t-elle formulé l'hypothèse d'un taux de recours aux contractuels qui pourrait un jour atteindre ces 40 % ?
Voilà pourquoi nous demandons la suppression de cet article.
Cet article renforcera tout ce que nous dénonçons depuis plusieurs heures en étendant les possibilités de recours aux contrats, notamment précaires, dans la fonction publique territoriale. Selon le rapport annuel sur l'état de la fonction publique, en 2018, 65,4 % des contractuels, soit plus de trois contractuels sur cinq, y étaient en CDD, contre 33,7 % en CDI, alors que ce nombre descend à 45 % dans la fonction publique d'État. De plus, 72 % des CDD de la fonction publique territoriale étaient d'une durée inférieure à un an et seulement 5,9 % d'une durée supérieure à trois ans – contre 14,7 % dans la fonction publique d'État pour ces derniers.
Le Conseil d'État a estimé que l'étude d'impact est insuffisante sur ce chapitre, ne comportant aucune donnée chiffrée sur le nombre de fonctionnaires en attente d'affectation ni sur l'impact d'une augmentation de la proportion de contractuels et la coexistence de deux catégories d'agents.
Enfin, alors que dans la fonction publique territoriale, les plus précaires sont déjà les femmes, on voit toute l'hypocrisie qui consiste à prétendre défendre leurs conditions de travail et promouvoir l'égalité tout en perpétuant et même en renforçant une précarité dont elles sont les premières victimes.
Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de cet article.
La commission est défavorable à ces amendements de suppression de l'article 10. Celui-ci, qui s'inscrit dans la suite logique du précédent relatif à la fonction publique d'État, étend les possibilités de recrutement contractuel dans la fonction publique territoriale. Il élargit pour l'ensemble des collectivités la faculté de recrutement par contrat aux emplois de la catégorie B dès lors que la nature des fonctions ou les besoins du service le justifient. Il ne l'ouvre pas en revanche aux emplois de la catégorie C.
Cet article constitue un premier levier d'action pour lutter efficacement contre le fléau que constitue en effet la multiplication de pratiques illégales comme le recours abusif à des vacataires horaires, agents publics ne bénéficiant pas des garanties applicables aux agents contractuels, bien que leur emploi réponde à un besoin permanent. Le recours croissant à ces faux vacataires n'est pas une solution pérenne pour les collectivités, dans le même temps qu'il enferme ces personnes dans la précarité. Je partage ce diagnostic avec vous, madame Obono.
L'article 10 répond à ces enjeux en ouvrant sans condition le recrutement de fonctionnaires et d'agents contractuels pour des emplois à temps incomplet dont la quotité est inférieure à 50 %, sans distinction de seuil démographique ni de cadre d'emploi. Il va dans le bon sens. C'est la raison pour laquelle je suis défavorable à ces amendements de suppression.
Même avis que la rapporteure bien évidemment. Cet article est le fruit d'une concertation avec les employeurs territoriaux. En effet, l'avant-projet de loi limitait pour la fonction publique territoriale la possibilité de recruter par contrat sur emploi permanent à la catégorie A. Les employeurs territoriaux nous ont dit qu'il serait bon de l'étendre à la catégorie B, sans intérêt particulier en revanche de le faire pour la catégorie C. C'est la raison pour laquelle, dans le respect de la position des employeurs territoriaux, nous n'avons étendu qu'à la catégorie B la possibilité de conclure des contrats de deux fois trois ans.
Nous voulons lutter contre la précarité et le système des faux vacataires, Mme la rapporteure l'a dit. Mais comme pour la fonction publique d'État et la fonction publique hospitalière, aucun plancher ni plafond n'a été fixé, non plus qu'aucun objectif. Nous ne faisons qu'ouvrir une possibilité de recrutement. La proportion de 40 % de contractuels, chiffre que vous avez cité, madame Obono, a été évoquée, je le sais, sous forme de question. Ce n'est ni la position ni l'objectif du Gouvernement, pas plus que des commissaires qui le représentaient.
Je suis très étonné, monsieur le secrétaire d'État, que vous ne répondiez pas de façon précise aux questions de nos collègues, notamment de Boris Vallaud, sur l'article 10. Découvrant les ordonnances de la loi EGALIM et de la loi PACTE, nous avons été sidérés par le peu de respect porté aux positions du Parlement dans la rédaction de ces ordonnances. Nous allons de surprise en surprise et irons donc de recours en recours pour déformation de l'esprit de la loi par les ordonnances.
Un encadrement est a minima nécessaire. Or, vous ne répondez pas à cette demande. Vous évoquez à l'envi le sujet de la précarité. Aussi je m'étonne, monsieur le secrétaire d'État, que vous prétendiez lutter contre la précarité des vacataires en organisant une précarité structurelle.
Au-delà des questions de précarité et de concertation – je note d'ailleurs à ce sujet que vous évoquez celle avec les employeurs mais ne dites mot de celle avec les syndicats, qui ont unanimement condamné cet article 10 – , je tiens à vous mettre en garde. Les collectivités locales ont mis deux décennies à parer à tous les risques de corruption des marchés publics pour financement des systèmes partisans. Nous ne voudrions pas qu'un recrutement qui soit le fait du prince, sans norme et sans concours, donne lieu à de nouvelles dérives entachant la réputation et la dignité de nos collectivités.
Il s'agit ici de permettre aux employeurs territoriaux de recruter des contractuels pour remplacer les fonctionnaires absents au titre d'une mise en disponibilité pour convenance personnelle ou d'office prévue à l'article 72 du statut de la fonction publique territoriale.
On a évoqué tout à l'heure les fonctionnaires susceptibles de se mettre en disponibilité pour postuler à un autre poste en tant que contractuel. Je voudrais aborder ici le problème des mises en disponibilité par l'autre côté. Au 31 décembre 2016, 36 220 fonctionnaires civils de l'État étaient en disponibilité, certes une toute petite minorité des 5,6 millions de fonctionnaires qu'on comptait en 2017, mais une minorité extrêmement visible pour les collectivités ou les services qui les emploient et doivent se passer de leur travail.
Sans remettre en question la mise en disponibilité pour les fonctionnaires, qui est une bonne chose et qu'il faut conserver, il faut être pragmatique. Un fonctionnaire en disponibilité, c'est un fonctionnaire en moins ; c'est tout un service qui est chamboulé et une charge de travail plus lourde, souvent mal répartie entre ceux qui restent. Cela porte directement préjudice à l'efficacité et à la continuité du service public, notamment dans les collectivités. S'il faut moderniser et adapter la fonction publique à des enjeux contemporains, il faut aussi se pencher sur cette question.
Je propose donc que la mise en disponibilité d'un fonctionnaire puisse faire l'objet d'un remplacement, comme dans le cadre d'un congé particulier, tel que cela s'applique aux termes de l'article 3-1 de la loi du 26 janvier 1984. Les collectivités pourraient ainsi établir des contrats pour une durée déterminée et renouvelée par décision expresse, dans la limite de la durée de l'absence du fonctionnaire ou de l'agent contractuel à remplacer. Ces contrats pourraient prendre effet avant le départ de cet agent.
J'ai déjà présenté cet amendement en commission, et certainement me fera-t-on ici la même réponse qu'alors.
Alors que j'expliquais à des directeurs généraux des services de collectivités, que j'avais réunis, que notre réforme avait notamment pour objectif, conformément à notre politique de l'emploi, de donner de la souplesse et qu'elle favoriserait donc les mises en disponibilité, ils ont immédiatement souligné la nécessité de régler ce problème. On se ment en permanence, m'ont-ils dit. Pour remplacer les agents en disponibilité, on prend des arrêtés qui mentent, c'est-à-dire qui ne sont pas faits pour remplacer des agents en disponibilité.
Comme cela vient d'être rappelé, si la loi a bien prévu le remplacement des agents en congé maladie, ce n'est pas le cas pour ceux qui sont en disponibilité. C'est pourquoi on recrute des contractuels. Mais si jamais l'agent en disponibilité demande sa réintégration, on se retrouve en surnombre, ce qui peut causer un certain nombre de difficultés. Si la disponibilité dure, il arrive un moment où le contractuel passe en CDI. On se retrouve, comme cela m'est arrivé à plusieurs reprises, avec deux, voire trois, agents sur un même poste. C'est pourquoi j'espère que cet amendement sera adopté.
Avant toute chose, je voudrais rappeler à Mme Ménard qu'il y a 5,5 millions d'agents publics, et non pas de fonctionnaires, puisque l'on compte déjà 1 million de contractuels.
Pour le reste, en effet, nous avons déjà débattu en commission de cette proposition. La loi du 26 janvier 1984 permet déjà de répondre aux situations que vous évoquez. Je rappelle qu'un fonctionnaire en disponibilité pour une durée supérieure à six mois ou pour convenance personnelle peut être remplacé sur la base de la déclaration par la collectivité de la vacance d'emploi, celui-ci étant alors pourvu dans les conditions de droit commun. Par conséquent, je vous invite à retirer cet amendement, ou j'y donnerai un avis défavorable.
Pour les disponibilités d'une durée inférieure à six mois, le remplacement se fait soit par prise d'un arrêté soit par conclusion d'un contrat court pour besoin occasionnel. Ce n'est pas le cas le plus compliqué à traiter ; c'est même relativement facile à anticiper.
Pour les disponibilités plus longues, l'agent en disponibilité a droit à la réintégration mais celle-ci n'est pas de droit sur le poste qu'il occupait. Pour le remplacer, on peut donc recruter en priorité un titulaire, et un contractuel seulement en cas de carence de candidature pour le poste de titulaire.
Vous évoquez le risque d'une CDIsation dans ce dernier cas et d'un personnel surnuméraire qui devienne pérenne. Par un décret du 27 mars de cette année, nous avons limité la disponibilité à cinq années consécutives, ce qui écarte le risque de CDIsation auquel vous avez pu être confronté au cours de votre carrière en raison de disponibilités qui dépassaient six ans, la transformation du CDD en CDI intervenant au bout de six ans.
Je pense qu'entre la possibilité de recrutement pour besoin occasionnel en cas de disponibilité courte, le principe pour les disponibilités plus longues du recrutement prioritaire d'un titulaire, celui d'un contractuel n'étant possible qu'en l'absence de candidature d'un titulaire, et la protection que nous avons mise en place en limitant à cinq ans la durée possible d'une disponibilité – ce qui exclut le risque d'avoir à transformer le CDD en CDI – , ces amendements sont satisfaits. Leur adoption risquerait de déséquilibrer les modalités de recrutement et de priorité statutaire.
Au bénéfice de ces explications, je vous invite à les retirer. À défaut, l'avis sera défavorable.
Je ne retire pas cet amendement parce que je ne comprends pas cette réponse, qui ne correspond pas à la réalité. C'est en effet quotidiennement que des directeurs généraux de services sont ennuyés !
Si on veut faire simple et tout aligner, qu'on supprime tant qu'à faire la possibilité en cas de congé maladie ! Si vous voulez, je peux déposer un amendement en ce sens ! Il est possible de recruter un contractuel pour remplacer un agent en congé maladie, et tout le monde en est très content, mais il ne l'est pas de remplacer un agent en disponibilité ! On est alors obligé de procéder à des montages tordus de CDD, au risque de devoir un jour les transformer en CDI – même si vous dites qu'après un récent décret ce risque n'existera plus.
Le dispositif proposé ne coûterait rien à personne et faciliterait la vie des directeurs des ressources humaines, de même que les contrôles de légalité ! On veut accompagner les collectivités, les aider, favoriser la mobilité, et on rejette mon amendement !
Je le maintiens, voilà tout.
Je comprends notre collègue car il est vrai que nous vivons de telles situations, y compris en cas de postes vacants suite à des disponibilités. Dans la fonction publique et jusqu'à preuve du contraire, monsieur le secrétaire d'État, on est titulaire de son grade et pas de son poste.
C'est ce que j'ai dit.
Le poste peut donc être pourvu par un titulaire, en interne, par exemple suite à une promotion décidée en commission administrative paritaire. Vous dites que la question soulevée sera résolue avec le décret limitant la durée d'une disponibilité à cinq années consécutives, mais vous ne dites pas tout ! Il existe en effet plusieurs types de disponibilités. Cinq ans de disponibilité pour convenance personnelle, c'est entendu. Quid en revanche d'une disponibilité pour fonction élective ? J'en connais certaines qui ont duré 25 ans ! Comment fait-on dans ce cas-là pour le contrat, pour le poste ? Vous devez donc préciser les choses dans chaque cas de figure.
En ce qui me concerne, j'ai toujours considéré que c'est le statut qui protège les fonctionnaires. J'ai connu des agents qui n'ont pas pu retrouver leur poste dans leur collectivité territoriale parce qu'il avait été pourvu. Mais ils ont pu être mis à disposition d'autres collectivités territoriales par le centre de gestion car ils étaient titulaires de leur grade. Le statut permet une telle protection et c'est pourquoi nous y sommes attachés. Les collectivités, ainsi, disposent du personnel nécessaire pour travailler.
Les propos de notre collègue sont justes et légitimes. On sent l'expérience de terrain !
M. Lecoq a raison : un agent est titulaire de son grade, non de son poste, je l'ai moi-même rappelé en répondant à M. Perea.
Vous avez raison de souligner ce cas particulier qu'est l'exercice d'un mandat. La seule solution serait de limiter la durée de la disponibilité à un seul mandat, mais je ne suis pas sûr que ce soit très satisfaisant démocratiquement, vous en serez sans doute d'accord.
La disponibilité libère le poste alors que l'agent reste titulaire de son grade. En priorité, c'est un titulaire qui est recruté et, à défaut, un contractuel. Cela fonctionne lorsque l'employeur dispose de suffisamment d'emplois pour qu'au retour du titulaire celui-ci puisse être réintégré sans que cela soit nécessairement à son poste précédent. En revanche, le fonctionnaire de retour après un congé maladie retrouve de droit le poste qu'il occupait. Ce modèle devient problématique pour de très petites collectivités, avec très peu de postes, puisque lorsque la personne revient, il est difficile de trouver un autre poste…
Je disais à peu près la même chose avec des mots différents !
Sourires
Peut-être faudra-t-il réfléchir à un système dédié uniquement aux collectivités qui n'atteignent pas un certain nombre d'effectifs. Je ne sais pas lequel, je vous livre cette réflexion telle quelle mais j'entends vos propos concernant les petites collectivités.
L'amendement no 684 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement est issu des travaux de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation.
Dans la fonction publique territoriale, en cas de vacance temporaire d'emploi et dans l'attente du recrutement d'un fonctionnaire, cela a été dit tout à l'heure, il est possible de conclure un contrat pour les besoins de continuité du service d'une durée maximale de deux ans. Cet amendement propose de la passer à trois ans.
Pourquoi un tel délai ? Tout simplement parce que, dans la fonction publique territoriale, le temps maximal entre deux concours est en général de trois ans. Considérant que le recours aux contrats est certes une bonne chose, je suis aussi favorable à ce que les intérêts de tous les agents publics qui décident de faire durablement carrière dans la fonction publique soient favorisés pour qu'ils puissent accéder aux concours dans les conditions les plus favorables.
Il importe donc d'accompagner ces agents contractuels jusqu'au concours suivant – je pense notamment à la filière culturelle. Un passage à trois ans renforcera un tel accompagnement et diminuera leur précarité.
La parole est à M. Sébastien Leclerc, pour soutenir l'amendement no 408 .
M. Poulliat a excellemment présenté cet amendement dont le dispositif, qui pourrait être étendu à la fonction publique territoriale, simplifie et harmonise les choses.
Nous avons en effet discuté de cette question en commission des lois et je maintiens l'avis défavorable à ces amendements d'extension à une durée totale de trois ans – trois fois un an – des CDD d'agents recrutés pour faire face à une vacance temporaire d'emploi dans l'attente du recrutement d'un fonctionnaire.
La disposition prévue à l'article 3-2 de la loi du 26 janvier 1984 permettant le recrutement d'un agent contractuel pour un CDD d'un an renouvelable au maximum une fois se justifie eu égard au caractère strictement temporaire de la vacance de l'emploi. Je ne pense pas que rendre possible la succession de trois CDD d'un an soit véritablement efficace afin de lutter contre la précarité au sein de la fonction publique territoriale. J'entends votre argument, mais, avis défavorable.
Même avis qu'en commission. Je partage les arguments de la rapporteure.
J'ajoute que la possibilité de recruter en catégorie B sur des contrats de trois ans répondra à l'une des problématiques soulevée par ces amendements.
L'amendement no 582 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 452 .
En 2018, les fonctionnaires de catégorie C représentaient 20 % de la fonction publique d'État, 48 % de la fonction publique hospitalière et 76 % de la fonction publique territoriale. C'est donc tout naturellement vers elle qu'il faudrait faire porter nos efforts afin de développer la contractualisation de ces emplois, très largement représentés comme ces chiffres le démontrent.
Mon amendement vise donc à revenir sur le dispositif de la loi de 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, de façon qu'en fonction des besoins de l'administration, des agents contractuels puissent occuper des emplois permanents. Ce serait, me semble-t-il un bon moyen de redynamiser notre administration, notamment la fonction publique territoriale qui, contrairement aux craintes de certains, pourrait ainsi gagner en souplesse.
Comme j'ai déjà eu l'occasion de le rappeler tout à l'heure lors de l'examen de l'article 8, des contraintes pèsent sur les collectivités territoriales. Je vous rappelle que, selon le rapport de la Cour des comptes sur l'exécution du budget 2018, les effectifs des fonctionnaires d'État ont augmenté l'an dernier, le Gouvernement ayant singulièrement manqué d'ambition dans sa politique de contrôle des dépenses publiques et comptant d'abord sur les collectivités locales pour faire cet effort.
De fait, celles-ci rechignent de plus en plus à recruter des fonctionnaires et préfèrent faire appel à des contractuels, ce qui permet une plus grande souplesse, je l'ai dit. Entre aucun emploi, un CDD ou un CDI, je connais peu de gens qui optent pour le premier choix. C'est pourquoi je regrette le vote de l'article 8, excluant finalement les catégories C du bénéfice des contrats de projet. Je souhaite que nous les associions afin qu'ils puissent bénéficier d'un recrutement en tant que contractuels dans la fonction publique territoriale.
Nous avons déjà eu cette discussion lors de l'audition de M. le secrétaire d'État en commission des lois. L'extension des recrutements contractuels sous la forme de CDD de deux fois trois ans pour les emplois de catégorie C n'était pas une demande expressément formulée par les employeurs territoriaux, ce qui explique la différence avec la mesure d'ouverture prévue pour la fonction publique de l'État. Avis défavorable.
Même avis. S'agissant de la catégorie C, nous avons transcrit dans le texte une demande conjointe des employeurs et des organisations syndicales.
Je me souviens parfaitement de votre réponse lors de votre audition en commission des lois mais, comme je vous l'avais dit alors, l'avis de certaines collectivités territoriales n'a probablement pas été sollicité. J'ai eu l'occasion de discuter avec un certain nombre de directeurs des ressources humaines de certaines communes ou EPCI qui m'ont expliqué l'inverse. Je ne sais pas quelles organisations vous ont donné un tel avis. En ce qui me concerne, on m'en a donné d'autres. D'où ma défense de cet amendement visant à revenir sur cette disposition de la loi de 1984.
L'amendement no 452 n'est pas adopté.
L'amendement no 838 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il s'agit de supprimer les seuils pour recruter les contractuels dans les communes et groupements de communes. Dans ma circonscription, on compte une majorité de petites communes de moins de 1 000 habitants pour qui il est parfois très long et compliqué de recruter sous statut. Souvent, elles renoncent, alors que des contractuels sont tout aussi précieux dans une petite commune que dans une grande. Cette discussion sur les seuils devrait conduire à changer de curseur et à ne pas se fonder sur la seule taille de la commune.
Pas très loin de chez moi, le Bugey accueille une belle centrale électrique, sur une toute petite commune mais qui dispose donc d'une manne financière lui permettant d'avoir de très nombreux services, de très nombreux agents. C'est peut-être sur ce chiffre-là qu'il conviendrait de se fonder plus que sur la taille de la commune et le nombre d'administrés pour savoir s'il est ou non possible de se passer du statut.
En ce qui me concerne, je considère que toutes les communes pourraient y être éligibles.
La parole est à M. Sébastien Leclerc, pour soutenir l'amendement no 642 .
Dans la droite ligne de l'amendement de Mme Motin, cet amendement de notre collègue Forissier vise à porter le seuil de 1 000 à 15 000 habitants, notamment pour les communes nouvelles, et à donner ainsi un peu de souplesse. Peut-être le secrétaire d'État pourrait-il d'ailleurs le sous-amender en limitant une telle souplesse dans le temps, par exemple, jusqu'en 2026 ? Cela permettrait aux maires des communes qui se regroupent, qui sont tous de bonne volonté, d'avoir le temps de se réorganiser.
Monsieur Leclerc, je vous redonne la parole pour soutenir l'amendement no 409 .
L'article 10 limite le recrutement de contractuels sur les emplois permanents à temps non complet en ne le rendant possible que si la quotité de temps de travail est inférieure à 50 %. Il maintient la dérogation dont bénéficient les communes et les groupements de communes de moins de 1 000 habitants de recruter des contractuels sur des emplois permanents à temps complet ou à temps non complet, quelle que soit la quotité de temps.
Toutefois, cette nouvelle disposition ne tient toujours pas compte des conséquences liées au mouvement de création des communes nouvelles. 754 communes nouvelles ont vu le jour au 12 février 2019 en près de quatre ans et près de 50 % des communes nouvelles se situent en dessous du seuil de 2 000 habitants.
Cet amendement vise à élargir aux communes de moins de 2 000 habitants la dérogation du recrutement direct sur des emplois permanents qui n'est jusqu'alors possible que pour les communes de moins de 1 000 habitants.
La parole est à Mme Hélène Vainqueur-Christophe, pour soutenir l'amendement no 463 .
Cet amendement propose de relever à 2 000 habitants le seuil permettant aux communes de recruter des agents contractuels sur tous les emplois.
Pour des communes de Guadeloupe – Terre-de-Haut, Terre-de-Bas et Désirade – qui vivent une situation de double insularité, dont la population est située entre 1 000 et 2 000 habitants et qui présentent une attractivité professionnelle moindre du fait de leur isolement, ce relèvement favoriserait l'ouverture de leur mode de recrutement. À titre indicatif, il est intéressant de noter que le poste de responsable des services de l'une de ces communes est actuellement occupé par un agent de catégorie C par intérim, faute de candidatures de fonctionnaires.
L'amendement no 800 de M. Xavier Roseren est défendu
Quel est l'avis de la commission ?
J'émets un avis défavorable à l'ensemble de ces amendements qui modifieraient l'équilibre qui a été proposé par le Gouvernement.
L'amendement no 283 aurait pour effet de rendre possibles, sans aucune condition et pour tous les emplois, les recrutements contractuels dans l'ensemble de la fonction publique territoriale.
Le plafond de 1 000 habitants, qui existe déjà en l'état actuel du droit pour le recrutement des secrétaires de mairies selon l'article 3-3 de la loi du 26 janvier 1984, permet de viser les collectivités qui éprouvent le plus de difficultés de recrutement, ce qui légitime donc le renforcement des moyens juridiques dérogatoires mis à leur disposition afin qu'elles puissent satisfaire leurs besoins en ressources humaines dans les meilleures conditions. Ce seuil de 1 000 habitants, puisqu'il n'est pas question dans votre amendement du nombre d'agents, concernerait près de 22 000 communes et 70 000 emplois, cible à mon avis bien suffisante. En revanche, pour les collectivités d'une taille supérieure, il ne m'apparaît pas nécessaire de dupliquer ce dispositif dans la mesure où les autres dispositions de cet article 10 assouplissent déjà largement les facultés de recrutement contractuel qui leur sont offertes.
L'article 10 permet aux communes de moins de 1 000 habitants – soit 19 000 communes – de recruter à temps non complet, quelle que soit la quotité. Jusqu'à présent, ce dispositif concernait uniquement les postes de secrétaire de mairie. Nous proposons ici de l'élargir à l'ensemble des cadres d'emplois pour ces petites communes. Les communes de plus de 1 000 habitants pourront, quant à elles, recruter sur contrat pour une quotité inférieure à 50 % et uniquement pour les contrats les plus réduits en volume. En revanche, toutes les collectivités auront désormais la possibilité de recruter des titulaires sur des emplois à temps non complet, quelle que soit la quotité. Nous leur donnons cette souplesse car elles ont aujourd'hui de grandes difficultés à le faire.
Ces trois dispositions visent à résorber les systèmes de fausses vacations. Vous proposez d'élargir considérablement le système, à rebours d'ailleurs de la position de la commission des lois qui a adopté, pour les groupements de communes, un plafonnement à 15 000 habitants qui ne figurait pas dans le texte initial du Gouvernement.
Madame Motin, l'amendement que vous avez cosigné avec M. Perea me paraît aller vraiment très loin. Nous sommes attachés à un dispositif plus équilibré. Quant aux autres amendements qui visent à modifier les seuils, ils posent eux aussi des difficultés.
C'est la raison pour laquelle je demande le retrait de ces amendements. À défaut, j'émettrais un avis défavorable.
Au bénéfice des explications de M. le secrétaire d'État, je retire l'amendement no 800 .
L'amendement no 800 est retiré.
Le texte ne prévoit pas de durée minimale de quotité du temps de travail pour un emploi permanent à temps non complet pouvant être exercé par un contractuel. Je propose par cet amendement que la quotité de travail ne puisse pas être inférieure à 30 % de la durée légale du travail.
Bien sûr, je ne pense pas que l'on puisse vivre correctement avec une quotité de travail de 30 %.
En tout cas, si c'est un choix, la quotité de travail doit être au moins de 30 %. En dessous, il s'agit de petites vacations déguisées.
Il ne faudrait pas que dans les plus petites communes, et la délégation aux collectivités territoriales avait précisément travaillé sur ce sujet, les agents soient soumis à une double peine en y ayant les plus petits contrats, donc les plus faibles revenus. En effet, s'il s'agit d'un temps de travail subi, les agents auront tendance à rechercher d'autres contrats dans d'autres collectivités. Or s'ils habitent dans une petite commune ou un territoire rural, cela leur prendra du temps.
Pour lutter contre la précarité, il faut assurer un minimum de 30 %, tout en sachant que c'est largement insuffisant pour pouvoir vivre dignement si ce temps de travail est subi.
Même avis défavorable qu'en commission où ce sujet a déjà été évoqué.
Monsieur Poulliat, je ne partage pas tout à fait votre analyse. Fixer une quotité horaire minimale applicable aux recrutements contractuels ne permettra pas de résoudre le problème majeur du recours abusif aux faux vacataires, qui ne disposent pas des mêmes droits que les agents contractuels en matière de congés, de formation, de compléments de rémunération ou de reclassement. Cela aurait pour effet de prolonger le recrutement de vacataires horaires plutôt que de les basculer en postes titulaires, même à un temps de travail inférieur à 30 %, et ainsi de faire perdurer des situations précaires contre lesquelles nous essayons de lutter.
Tout le monde partage, je crois, l'analyse de M. Poulliat selon laquelle une quotité de travail inférieur à 30 % de la durée légale du travail n'est pas suffisante pour vivre. C'est le cas d'ailleurs aussi pour une quotité inférieure à 50 %…
… selon la région où l'on habite et le prix de l'immobilier.
Votre amendement pose problème pour deux raisons.
Premièrement, mieux vaut bénéficier d'un contrat à durée déterminée ou d'une titularisation à temps non complet, même sur une faible quotité, car cela ouvre des droits sociaux bien plus avantageux que ceux de la vacation. En l'état du droit, les titulaires de contrats ou d'emplois à temps très partiel peuvent en cumuler plusieurs, jusqu'à 115 %. Nous avons inscrit dans le texte, à l'initiative d'ailleurs des parlementaires, et en écho aux demandes d'organisations syndicales, la possibilité de favoriser la constitution de groupements d'employeurs au niveau des centres de gestion.
La seconde raison est très pragmatique. En effet, pour certains emplois, les quotités nécessaires sont très basses. Je prendrai un exemple qui ne concerne pas les plus petites collectivités mais les communes qui disposent d'une école municipale de musique. Celles-ci peuvent, pour certains instruments, avoir besoin d'un enseignant, qu'il s'agisse d'un emploi de contractuel ou de titulaire, sur une quotité de travail très faible.
Effectivement. Pour ma part, pour avoir eu à recruter des professeurs de cor, je ne vous cache pas que je n'avais pas vraiment besoin d'une quotité hebdomadaire de 30 % de la durée légale.
Je demande le retrait de cet amendement.
Je connais bien la question de la filière culturelle. Vous avez raison, monsieur le secrétaire d'État, on a rarement besoin de certains professeurs de musique à plein temps, ni à mi-temps, ni même pour un tiers-temps. Mais cela pose la question de la manière dont on conçoit l'éducation musicale dans les collectivités. La bonne idée, c'est de créer des écoles intercommunales de façon que les professeurs puissent avoir accès à un vrai statut et une vraie rémunération plutôt que de multiplier les écoles municipales où les professeurs sont employés à temps très partiel et de manière très précaire, ce qui rend compliqué l'exercice de ce très beau métier, alors qu'il faut continuer à promouvoir partout l'éducation musicale.
L'amendement no 1050 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Delphine Bagarry, pour soutenir l'amendement no 839 .
Cet amendement prévoit de fixer à deux fois le nombre maximal de renouvellements de CDD pour les contractuels à temps non complet, pour lutter contre la précarisation de l'emploi et l'incertitude liée à l'enchaînement de CDD.
Le régime fixé par la directive européenne du 28 juin 1999 et par la loi du 26 juillet 2005 fixe déjà un cadre clair et protecteur vis-à-vis des agents contractuels en limitant les CDD à une durée maximale de trois ans renouvelables une fois, dans la limite donc de six ans avant CDIsation.
J'ajoute que la jurisprudence du Conseil d'État contrôle déjà de façon stricte la multiplication de recours au CDD puisque la haute juridiction estime, dans un arrêt rendu le 20 mars 2017, qu'en cas de renouvellement abusif de contrats à durée déterminée, l'agent concerné peut se voir reconnaître un droit à l'indemnisation du préjudice subi lors de l'interruption de la relation d'emploi. Je pense que l'encadrement législatif et jurisprudentiel est suffisant à cet égard. Il ne m'apparaît donc pas nécessaire d'introduire dans la loi un nombre maximal de renouvellements de CDD, qui aurait pour conséquence de rigidifier de façon excessive le recours au recrutement contractuel sans véritablement apporter de bénéfice en matière de lutte contre la précarité.
Je demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, j'y suis défavorable.
En l'état du droit, il y a des contrats d'un an renouvelables une fois ou des contrats de trois ans renouvelables deux fois, avec CDIsation au bout de six ans. La formulation que vous proposez pourrait laisser entendre une durée de neuf ans pour les contrats de trois ans, ou au contraire de trois ans pour les contrats d'un an. Votre dispositif serait donc difficile à mettre en oeuvre. Il est préférable de rester sur la logique de 2012 qui propose la CDIsation de droit au bout de six ans, quel que soit le nombre de contrats.
Je demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, j'émettrais un avis défavorable.
L'amendement no 839 est retiré. )
La parole est à Mme Carole Grandjean, pour soutenir l'amendement no 471 .
Cet amendement vise à instaurer un seuil pour la proportion respective de fonctionnaires et de contractuels dans les communes de moins de 1 000 habitants. Un quota de 50 % pourrait être un juste équilibre entre fonctionnaires et contractuels, ce qui garantirait les principes d'impartialité, d'intégrité, de probité et de laïcité.
Nous avons déjà eu ce débat en hémicycle. Pour les raisons que j'ai exposées, nous sommes défavorables à la fixation de quotas, minimum ou maximum, dont les effets seraient néfastes pour la gestion des ressources humaines au sein des administrations. Je vous invite à retirer cet amendement, sinon j'y serai défavorable.
L'amendement no 471 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 414 .
Cet amendement tend à insérer, après l'alinéa 6, les phrases suivantes : « Le recrutement de trois contractuels ou titulaires par une collectivité territoriale ouvre un poste en promotion interne pour les agents ayant réussi un examen professionnel. Les modalités d'application du présent alinéa sont définies par décret ».
Cet amendement tend à mettre un terme à la règle selon laquelle trois recrutements de fonctionnaires en externe ou nominations à concours sont nécessaires pour ouvrir un poste en promotion interne aux agents ayant réuni un examen uniquement.
Jusqu'à présent, à chaque fois que les collectivités territoriales recrutaient des fonctionnaires en externe ou nommaient les lauréats d'un concours, il devenait possible de nommer des agents en interne, parce qu'ils avaient atteint l'ancienneté requise ou qu'ils avaient réussi un examen.
Cela étant, les collectivités recrutent beaucoup moins de fonctionnaires, en raison de la nécessité de réduire la masse salariale et de respecter les contraintes imposées par l'État, et le recrutement de contractuels n'ouvre pas droit à cette règle. Par conséquent, beaucoup de fonctionnaires perdent toute perspective d'évolution.
Cette situation est très mal vécue par de nombreux fonctionnaires et crée des frustrations. À l'heure où l'on facilite le recrutement de contractuels, il est à craindre que la situation ne s'améliore pas. Il faudrait supprimer cette règle ou la revoir pour comptabiliser les contractuels et ne pas décourager tous ceux qui ont fait l'effort de passer un examen et qui l'ont réussi.
Monsieur Lecoq, ce décret existe déjà.
Madame Ménard, cette mesure relève effectivement du domaine réglementaire mais je répète, après l'avoir affirmé dans d'autres enceintes, que je suis prêt à revoir certaines règles pour favoriser les promotions.
Je vous invite à retirer cet amendement qui n'est pas du domaine législatif, sinon j'y serai défavorable.
L'amendement no 414 n'est pas adopté.
L'article 10 est adopté.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à vingt-trois heures quinze, est reprise à vingt-trois heures trente.
Je suis saisi de plusieurs amendements portant article additionnel après l'article 10.
La parole est à Mme Danièle Obono, pour soutenir l'amendement no 691 .
L'amendement no 691 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il s'agit d'amendements qui font suite aux sollicitations de la CGT. Ils proposent de revenir sur le recours à l'intérim dans les fonctions publiques d'État, territoriale et hospitalière afin de permettre le retour à une pleine responsabilité des employeurs publics tout en assurant des économies budgétaires. Seraient donc abrogés trois articles de loi qui prévoient un recours élargi à l'intérim. Cela permettrait aussi de prévenir les conflits de compétences entre juridiction administrative et juge de droit commun qui ne manqueraient pas sinon de voir le jour.
Il ne fait pas de doute que c'est sous la pression des entreprises d'intérim, très demandeuses depuis des années de l'ouverture de ce nouveau marché, que sont préparées de nouvelles dispositions en la matière. L'intérêt de cette mesure pour l'État se trouve non pas dans des économies budgétaires, mais dans l'abandon de ses responsabilités d'employeur.
Pour ce qui est de la fonction publique territoriale, le seul bilan de l'intérim, publié par le ministère de la fonction publique en 2011, indique que 5 019 personnes ont été employées au moins un jour par une collectivité dans le cadre d'un travail temporaire. Au lieu de titulariser ces personnels, il est ainsi possible pour les employeurs d'évacuer le problème en renvoyant la gestion des agents précaires à des entreprises privées, guère réputées pour leurs pratiques respectables en matière de droit du travail.
Et dans la fonction publique hospitalière, les bilans en la matière sont particulièrement problématiques. Rappelons que les missions d'intérim sont le plus souvent courtes : de 1 à 2,5 jours. Il s'agit dans 73 % des cas du remplacement momentané d'un agent et dans 20 % des cas de faire face à une vacance temporaire d'emploi. Parmi les inconvénients du recours à l'intérim, soulevés d'ailleurs par les gestionnaires eux-mêmes, plusieurs rapports ont souligné son coût. Selon la Fédération hospitalière de France, il représentait près de 105,5 millions d'euros en 2011. Le seul avantage pour l'employeur public de ce recours à l'intérim est très loin, de notre point de vue comme de celui des organisations syndicales et de plusieurs observateurs critiques de cette pratique, de ce qui pourrait justifier son utilisation, qui devrait être dérogatoire et exceptionnelle. L'intérim favorise de fait la précarité des personnes ainsi employées.
C'est pourquoi ces amendements proposent la suppression de ces trois articles de loi.
Ces amendements proposent de supprimer l'application à la fonction publique des dispositions du code du travail relatives à l'intérim. Je rappelle que la possibilité de recours à l'intérim dans la fonction publique a été ouverte par la loi du 3 août 2009, qui a permis aux employeurs publics de faire appel à des entreprises de travail temporaire dans des cas limitativement énumérés et pour des durées limitées.
L'intérim permet d'assurer ainsi le remplacement d'un agent momentanément absent en raison notamment d'un congé maladie, maternité ou parental, et aussi de répondre à un accroissement temporaire ou saisonnier de l'activité. L'agent intérimaire est recruté pour une mission correspondant à la durée de l'absence de l'agent qu'il remplace, dans la limite de dix-huit mois. Cette mission doit obéir à des principes stricts et est encadrée par un contrat de mise à disposition conclu entre l'agence d'intérim et l'administration.
L'intérim est globalement peu utilisé dans la fonction publique, même si le versant hospitalier y recourt davantage. Je considère qu'il s'agit d'un outil RH. Mis à la disposition des employeurs publics depuis maintenant dix ans, il est parfaitement encadré et peut s'avérer utile, notamment en cas de difficulté de recrutement, pour satisfaire des besoins temporaires ou occasionnels et ainsi assurer le respect du principe de continuité du service public. Il ne m'apparaît donc pas opportun de le supprimer. Avis défavorable.
Même avis.
La parole est à M. Philippe Chalumeau, pour soutenir l'amendement no 372 .
L'article 10 de l'ordonnance no 2017-53 du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique a créé le congé pour invalidité temporaire imputable au service. Ce congé est une importante avancée pour les agents confrontés à un accident du travail ou à une maladie professionnelle en matière d'accompagnement personnalisé et de maintien de la rémunération jusqu'à la reprise du travail. La durée de ce congé est déterminée en fonction de la durée de l'arrêt de travail, et automatiquement prolongée en cas de prolongation de ce dernier. Il est dès lors important de prévoir la possibilité de remplacer l'agent en congé pour invalidité temporaire imputable au service jusqu'à son retour, et ce dans l'intérêt du service. Le présent amendement propose ainsi d'ajouter le congé pour invalidité temporaire imputable au service à la liste des congés pendant lesquels le remplacement d'un fonctionnaire par un agent contractuel est autorisé dans les trois versants de la fonction publique.
L'ordonnance que M. Chalumeau évoque va donner lieu à un décret sur la mise en application du congé d'invalidité temporaire imputable au service. L'amendement qu'il propose vient utilement compléter le dispositif législatif pour l'articuler avec ledit décret. L'avis du Gouvernement est très favorable.
L'amendement no 372 est adopté.
Au risque de rallumer le feu, il procède de la même intention que celle de mon collègue Alain Perea, s'agissant de la possibilité de recruter un contractuel pour couvrir une vacance d'emploi. L'objectif est d'offrir à l'employeur une couverture adéquate et simplifiée de ses besoins pendant la durée de l'absence du fonctionnaire, tout en assurant au contractuel remplaçant une meilleure lisibilité et une moindre précarité. Je précise que cet amendement ne s'appliquerait pas qu'à la fonction publique territoriale, mais aussi à celle de l'État.
L'article 6 quinquies de la loi du 11 janvier 1984 prévoit le cas spécifique du recrutement d'agents contractuels pour faire face à une vacance temporaire d'emploi. Il ne s'applique pas au remplacement d'un fonctionnaire ou d'un contractuel pendant la durée de son absence, qui constitue un cas de recrutement distinct. Il n'est donc par définition pas possible de connaître à l'avance la durée de la vacance – sauf que celle-ci ne peut excéder un an pour être qualifiée de temporaire. C'est la raison pour laquelle l'avis du Gouvernement est défavorable.
L'amendement no 282 n'est pas adopté.
À l'occasion des concertations sur l'avant-projet, puis lors de l'examen du projet de loi en commission, il a été évoqué une différence majeure entre les contrats de droit privé et les contrats de droit public.
En matière de contrats à durée déterminée de droit public, il n'est pas prévu dans la loi d'indemnité de fin de contrat pour les contrats les plus courts. C'est la raison pour laquelle des députés de la majorité avaient déposé en commission des amendements proposant de créer une indemnité de fin de contrat, autrement dit une prime de précarité pour les contrats courts. Ces amendements ayant été déclarés irrecevables au titre de l'article 40, le Gouvernement s'était engagé par ma voix à présenter lui-même un tel amendement. C'est le no 1121, qui crée un nouvel article instituant une indemnité de fin de contrat, qui concernera les contrats d'un an au plus.
Je précise que, comme dans le secteur privé, en seront exclus les contrats dits saisonniers ainsi que les futurs contrats de projet – la durée minimale de ces derniers les écartant de facto du dispositif. Je précise aussi que le décret d'application de cette disposition fixera le montant maximal de rémunération au-delà duquel la prime ne sera pas versée, en tout cas pas de droit, qui devrait être autour de 2 SMIC.
Applicable aux contrats d'une durée inférieure ou égale à un an et d'une rémunération allant jusqu'à 2 SMIC, cette prime concernera ainsi environ 90 % des titulaires de tels contrats : il faut avoir en tête que les salaires jusqu'à 20 % au-dessus du SMIC représentent déjà les deux tiers des effectifs de la catégorie.
Ce sont ainsi de 180 000 à 220 000 personnes par an qui pourront bénéficier d'une indemnité d'un montant de 10 % de la rémunération perçue. Il est utile de rappeler que la convergence entre le secteur public et le secteur privé doit se faire aussi au bénéfice des agents publics lorsque ceux-ci ne bénéficient pas d'un droit qui s'applique dans le secteur privé.
Enfin, je précise pour la bonne compréhension de tous, que le dispositif s'appliquera à partir du 1er janvier 2021 et non pas dès 2020, pour une raison pratique. Nous considérons que le texte, s'il est adopté par le Parlement, entrera en vigueur pour l'essentiel de ses mesures au 1er janvier 2020. Or dans ces mesures figurent des dispositions de lutte contre la précarité telles que la possibilité accrue d'avoir recours à des contrats de trois ans ou la titularisation à temps non complet. Il nous paraît de bonne gestion de donner le temps aux employeurs publics de se saisir de ces nouveaux outils de déprécarisation avant de leur faire appliquer la prime de précarité. En 2021, l'ensemble de ces nouveaux outils devraient être parfaitement intégrés.
Tout d'abord, permettez-moi, monsieur le secrétaire d'État, au nom de la majorité, de nous féliciter pour la coconstruction de cet amendement, qu'appelaient par ailleurs de leurs voeux nombre d'organisations syndicales. Il répond à un objectif spécifique et clair : aligner les régimes public et privé vers le haut. Car, vous l'avez dit, monsieur le secrétaire d'État, cette prime de précarité existe dans le secteur privé. Cet amendement fait écho à la taxation des contrats courts que nous entendons mettre en oeuvre dans ce secteur privé, qui se matérialisera très bientôt par la réforme de l'assurance chômage et par l'introduction d'un bonus-malus. Il aurait été quelque peu étrange que l'État, les collectivités locales et les établissements hospitaliers, qui trop souvent montrent le mauvais exemple en termes de précarité et de traitement des agents concernés, soient exempts de tout dispositif relatif à la précarité des agents contractuels.
C'est la raison pour laquelle, dans la logique qui nous guide – celle de faire du CDI la norme, de sécuriser les parcours professionnels et de lutter contre la précarité des agents du public comme des salariés du privé – nous souhaitons décourager le recours aux contrats courts ou du moins indemniser tous ceux qui y sont contraints. Vous avez précisé que le dispositif concernera tous les agents contractuels dont la durée du contrat est égale ou inférieure à un an, soit 70 % des effectifs totaux. C'est un pourcentage très significatif qui marque une avancée notoire. Certes, l'avancée est coûteuse, mais je crois que la lutte contre la précarité est à ce prix. Il faut tous se féliciter de cette avancée.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
La parole est à Mme Émilie Chalas, pour soutenir l'amendement no 1063 .
J'ai ici une pensée émue pour les quelque 200 000 agents – entre 180 000 et 220 000, comme l'a dit M. le secrétaire d'État – qui bénéficieront, au 1er janvier 2021, de cette prime de précarité.
Dans le cadre du travail que j'occupais avant d'être députée, j'ai rencontré ces hommes et ces femmes, surtout elles d'ailleurs, peu ou pas qualifiés, vivant souvent seuls avec des enfants à charge. Les difficultés de la vie les frappent durement.
Je pense tout particulièrement à ces femmes qui, entre deux périodes de vacances scolaires, enchaînent des CDD d'un mois ou de quelques semaines, souvent à temps partiel et qu'elles peinent à compléter par d'autres heures de travail car, lorsqu'on est employée dans le secteur périscolaire ou femme de ménage, le temps de travail est scindé dans la journée. Au final, ce n'est pas un travail dont on peut vivre dignement.
Ce que nous proposons ne vise certainement pas à généraliser les temps complets, mais permet de lever le voile enfin sur la précarité dans la fonction publique, ce dont nous pouvons tous nous réjouir.
L'objectif de cette prime de précarité est double. D'abord, il s'agit d'augmenter ces revenus très faibles, qui ne suffisent pas à vivre. Soyons clairs, ce bonus de pouvoir d'achat représente pour l'État un coût d'un demi-milliard d'euros. Je remercie ici M. le secrétaire d'État d'avoir tenu l'engagement qu'il avait pris en commission, le Gouvernement d'avoir entendu la demande des parlementaires et des syndicats et aussi le Président de la République, qui a pris nettement position sur ce sujet il y a trois semaines.
Le second objectif de la prime de précarité est de pousser les employeurs publics à mieux structurer leurs offres d'emplois. Ce surcoût, sensible, les incitera à reconsidérer la durée des offres d'emploi à temps partiel qu'ils proposent et à préférer des contrats d'une durée supérieure à un an. Nous ne pouvons que nous en réjouir.
Bien sûr, certains ne manqueront pas de déclarer, dans les médias et peut-être sur ces bancs ce soir, que nous aurions pu aller plus loin. Mais cela fait vingt ans qu'on attend ! Je ne peux que me réjouir que la majorité et, sans doute, l'ensemble des parlementaires présents ici ce soir votent pour ce début de sortie de la précarité dans la fonction publique.
Merci beaucoup. C'est une sacrée révolution, et je suis très heureuse d'y participer avec vous ce soir.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Nous nous associons à cet amendement. Il répond à une demande sinon générale, du moins formulée par plusieurs groupes de l'Assemblée nationale, qui étaient empêchés de la proposer au vote par l'article 40 de la Constitution.
Mais, oui, nous regrettons que le dispositif n'aille pas plus loin, et notamment que les contrats de projet soient exclus. La majorité se targue de vouloir pénaliser le recours aux CDD dans le secteur privé. Toutefois, dans le privé, les indemnités de précarité existent pour les contrats de plus d'un an ! Il aurait été souhaitable d'étendre le dispositif aux contrats de projets.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Mais je tiens à vous dire que nous n'avons pas du tout la même conception de la révolution !
Rires.
Nous vous expliquerons ce que c'est. En attendant, nous voterons l'amendement, mais avec quelques observations.
D'abord, si votre volonté était si forte que cela, ce dispositif n'aurait pas été introduit par un amendement du Gouvernement en séance, mais intégré dans la loi. Il s'agissait de réparer une injustice, celle que subissent les travailleurs précaires de la fonction publique, qui n'ont pas le même statut que ceux du secteur privé. Quand on a la volonté de réparer une injustice, quand on le conçoit, quand on le désire, on ne le fait pas comme cela au dernier moment. À plus forte raison une révolution : une révolution cela se pense, alors que votre dispositif n'était clairement pas pensé dans ce texte au départ !
Ensuite, nous regrettons bien sûr le caractère restrictif de l'amendement, qui ne concernera pas l'ensemble des contractuels.
Troisième remarque : le dispositif ne s'appliquera qu'en 2021. C'est vraiment très surprenant. Quand on fait des réformes dans un certain sens, ça va toujours très vite. Quand on décide de supprimer l'impôt de solidarité sur la fortune par exemple, c'est voté en juillet et applicable trois mois plus tard. Mais quand il s'agit d'aider les plus précaires, c'est plutôt trois ans… Il y a vraiment un truc bizarre, que je trouve assez inexplicable.
Quatrième remarque : comme l'a souligné M. Brindeau, vous excluez du dispositif les contrats de projet. La conséquence, même si ce n'est pas voulu, c'est que plutôt que d'employer des contractuels en CDD de courte durée en leur versant une prime, les employeurs préféreront recourir aux contrats de projet : ils peuvent être d'une durée très courte, et ne sont pas soumis à la prime de précarité !
On peut s'interroger : s'agit-il d'un oubli de votre part, ou d'une volonté de remplacer les CDD contractuels dans la fonction publique par des contrats de projet de courte durée ? Le diable se niche dans les détails, et cette inquiétude est réelle.
Nous voterons donc cet amendement parce qu'il répare une injustice, tout en soulignant qu'il n'est pas entièrement satisfaisant, pour les raisons que j'ai indiquées, et qu'il porte le danger d'une précarisation accrue des agents par un recours massif aux contrats de projet.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.
Je souhaite d'abord dire mon admiration pour les tentatives rhétoriques de notre collègue Sacha Houlié. Puisqu'il suit attentivement le travail de la commission, il a entendu la critique que nous adressions au Gouvernement : en effet, il y a une énorme contradiction à vouloir, d'un côté, imposer aux partenaires sociaux, dans la négociation sur l'assurance chômage, la taxation des contrats courts, et de l'autre, dans votre projet de loi initial, favoriser le recours aux contrats courts, en ouvrant le contrat de projet aux agents de catégorie C.
Nous avons été entendus, vous êtes revenus sur cette idée, et nous nous en félicitons. Mais avec les amendements dont nous parlons, monsieur Houlié, le Gouvernement, ne fait qu'imposer à lui-même et aux employeurs publics ce qu'il exige des employeurs privés. C'est la moindre des choses ! Et cela rend les discours triomphalistes quelque peu déplacés.
Monsieur le secrétaire d'État, j'ai bien entendu vos arguments pour une entrée en vigueur au 1er janvier 2021, au lieu de 2020 pour le reste du texte. Mais nous parlons ici de contrats inférieurs à un an : les agents recrutés en contrats courts au premier semestre 2020 rateront la prime de précarité ! Il me semble que l'arbitrage aurait pu être un peu plus généreux et que l'on pouvait commencer en 2020.
Bref, bien que les efforts des marcheurs, devenus ce soir rameurs,
Sourires
soient insuffisants, nous voterons cet amendement. Mais ce qui m'étonne, c'est que La République en marche ait réussi à déposer un amendement qui n'était pas gagé.
Il aurait dû être jugé irrecevable au titre de l'article 40 de la Constitution ! J'ai beau faire, je ne vois aucun gage dans le texte de l'amendement, et je n'ai pas non plus entendu M. le secrétaire d'État le lever. Pourtant, le service de la séance s'est amusé à faire tomber d'autres amendements, alors même qu'ils étaient précisément dans l'objet du texte. Il me semble que ses interprétations mériteraient d'être un peu précisées.
Mais je ne veux pas paraître mauvais joueur : nous voterons bien sûr ces amendements en nous réjouissant des avancées qui sont faites.
Sachant que 75 % des agents de la fonction publique territoriale appartiennent à la catégorie C, on voit bien que la question de la précarité se pose pleinement. La délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation avait donc à coeur de régler ce problème de la prime de précarité. Elle n'a pas redéposé d'amendement en ce sens en séance, dans la mesure où d'autres l'ont fait et où la proposition du Gouvernement la satisfait entièrement.
On pourrait effectivement s'interroger sur les contrats de projet. Néanmoins, je pense honnêtement que dans le cas des collectivités territoriales, la précarité de ces contrats est admise par toutes les parties, puisqu'on se trouve sur un projet.
À mon tour de me féliciter. Le débat sur la prime de précarité est ancien au sein de la fonction publique. Je me réjouis que nos travaux, tout au long de la préparation du texte puis en commission et en séance, aient enfin abouti à une rédaction permettant d'appliquer la prime de précarité qui existait déjà dans le secteur privé à la fonction publique, en l'encadrant afin de cibler les emplois précaires et ainsi de lutter contre la précarité au sein de la fonction publique.
Je me réjouis de constater que cet objectif est partagé par tous les groupes, qui s'apprêtent à voter l'amendement, et je tiens à féliciter notre rapporteure et M. le secrétaire d'État, dont le travail commun a permis d'éviter l'application de l'article 40.
J'ai failli être la seule gardienne de la maison socialiste au moment de voter ces amendements, mais mes collègues arrivent. Je ne voulais pas que vous vous demandiez ce que faisaient les socialistes à ce moment ! Nous voterons ces amendements en faisant nôtres les observations des orateurs qui m'ont précédée.
Nous voterons ces amendements, car ils représentent une avancée. Nous émettrons cependant les mêmes réserves que Stéphane Peu. Oui, calmez vos ardeurs, vous n'en êtes pas encore à la révolution !
Par ailleurs, nous avions nous aussi présenté des amendements sur cette prime de précarité, qui ont été jugés irrecevables. L'action coordonnée de la rapporteure et du Gouvernement a permis de faire passer les leurs. On voit que l'application de l'article 40 est à géométrie variable…
C'est pourquoi je voudrais rappeler nos propositions : une prime de précarité pour tous les CDD, de 15 % pour les CDD en dessous d'un an et de 10 % au-delà ; une prime de 15 % pour les CDD mentionnés par le Gouvernement ; et enfin une prime de 15 % en cas de CDD successifs.
Si jamais le secrétaire d'État était inspiré par ces amendements, il pourrait les reprendre et ainsi aller quelques pas plus loin dans ses avancées. Nous sommes bien évidemment prêts à vous les envoyer, pour que vous les regardiez en détail.
Quoi qu'il en soit, même en l'état, nous voterons les amendements qui nous sont proposés.
Puisque notre assemblée vit ce soir un moment de communion comme il n'en arrive pas si souvent, il faut en profiter.
Je voudrais remercier et féliciter tout particulièrement notre rapporteure. Je sais le combat qu'elle a mené pour aboutir à cet amendement. Bravo et merci, donc, Émilie Chalas, d'avoir conduit cette démarche. Bravo et merci également à Guillaume Gouffier-Cha, qui l'a soutenue et a porté la voix de l'ensemble des députés de La République en marche.
L'on peut faire toutes les critiques que l'on veut à propos de l'incomplétude de ce dispositif : c'est néanmoins un nouveau principe de protection qui est créé pour les contractuels de la fonction publique. Quand on introduit un nouveau principe, il s'agit toujours d'une révolution favorable et nous devons tous en être heureux.
Après les mois que la France a traversés, un tel signal – toute l'Assemblée votant une véritable avancée en matière de protection des contractuels – est une excellente nouvelle.
Merci encore donc à la rapporteure, et au Gouvernement d'avoir déposé son amendement. Merci à l'ensemble des groupes politiques qui le voteront.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Un mot pour me féliciter à l'avance du rassemblement autour de ces amendements. Je pense qu'il est effectivement très utile de mieux protéger les agents, de reconnaître et donc d'indemniser la précarité des agents publics titulaires de contrats courts.
Monsieur Peu, vous craignez que ce ne soit un moyen détourné pour généraliser le recours au contrat de projet. Il me semble que l'intervention de M. Poulliat est de nature à vous rassurer assez largement : l'essentiel des contrats courts relèvent de la catégorie C et de la fonction publique territoriale, qui ont été exclus du champ du contrat de projet par un amendement voté par l'Assemblée.
Cela renforce encore selon moi l'intérêt de ce dispositif. En l'état, il est estimé à 410 millions d'euros par an, mais j'ai la conviction que la charge pour les employeurs pourrait être inférieure dès lors qu'ils s'approprieront les outils relatifs aux contrats longs et aux possibilités de titularisation, qui doivent les inscrire dans une démarche de lutte contre la précarité.
Moins il y aura de précarité, moins il y aura de primes de précarité à payer. Mais là où il y aura de la précarité, il y aura une prime.
Enfin, je réponds à M. Marleix à propos de l'article 40, en laissant évidement le soin au président de la commission des finances d'entrer dans les détails, puisqu'il s'agit d'une de ses prérogatives. De mémoire, M. Gouffier-Cha et Mme Chalas ont déposé leurs amendements exactement dans les mêmes termes et donc pour un coût identique à celui du Gouvernement, après que celui-ci eut déposé le sien. Pas nature, cela lève le gage sur ces amendements identiques.
Avant de procéder au scrutin, j'aimerais également expliquer à M. Marleix que dès lors que le Gouvernement a déposé un amendement qui crée une charge, les députés peuvent déposer des amendements identiques sans que l'article 40 puisse être invoqué.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 51
Nombre de suffrages exprimés 50
Majorité absolue 26
Pour l'adoption 50
Contre 0
Applaudissements.
La parole est à Mme Sophie Beaudouin-Hubiere, pour soutenir l'amendement no 19 .
À la différence des agents non titulaires recrutés sur des emplois permanents ou pour faire face à un besoin saisonnier ou occasionnel, les vacataires recrutés pour répondre à un besoin déterminé ne sont pas soumis aux dispositions du décret du 15 février 1988 qui encadre les procédures de recours aux contractuels et définit leurs droits.
Brouhaha.
Ils n'entrent d'ailleurs dans le champ d'application d'aucun texte applicable aux agents publics. Ainsi, à défaut d'être cités à l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984, ils ne bénéficient d'aucune disposition de cette loi ni de celle du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.
Ainsi leur situation juridique est-elle précaire et leurs droits très limités, aussi bien pendant la durée de leur engagement que lorsque celui-ci prend fin.
S'il n'est pas possible d'interdire le recours aux vacataires par le biais législatif, le présent amendement vise à organiser la possibilité de procéder à des remplacements ponctuels par des agents non-titulaires dont la rémunération pourrait être lissée de manière annuelle, afin de garantir à ces personnels de remplacement un revenu stable ainsi que l'accès aux droits garantis aux contractuels.
Votre amendement concerne la situation des agents vacataires, qui sont généralement rémunérés sur une base horaire en vue de l'exécution de missions ponctuelles.
Les dispositions que vous proposez visent en quelque sorte à intégrer les vacataires au régime applicable aux agents contractuels, régis par les décrets du 17 janvier 1986 et du 15 février 1988 : si je comprends la philosophie de votre amendement, je pense que l'objectif que nous devons atteindre est avant tout de lutter efficacement contre le recours abusif, donc illégal, à de faux vacataires qui sont en réalité des agents ne bénéficiant pas des droits dévolus aux contractuels, vous l'avez dit, alors même qu'ils exercent des fonctions correspondant à des besoins permanents.
C'est précisément le sens de l'article 10 du projet de loi, qui permettra en effet à toutes les collectivités de recruter des agents contractuels sur des emplois à temps non complet dont la quotité est inférieure à 50 %. Je pense que cette disposition est essentielle afin de régulariser la situation de dizaines de milliers de personnes aujourd'hui vacataires alors qu'elles devraient être considérées comme agents contractuels.
Pour ces raisons, il me semble que votre amendement est satisfait. Je vous demande donc de le retirer, ou j'y serai défavorable.
L'amendement no 19 est retiré.
L'article 11 est celui par lequel le Gouvernement entend faire sortir du champ des commissions administratives paritaires – CAP – les avis relatifs aux mutations. Il s'agit donc d'une disposition assez centrale de votre texte qui ne concerne pas la fonction publique territoriale mais bien la fonction publique d'État.
Monsieur le secrétaire d'État, nous n'avons pas la même approche que vous. Nous ne sommes pas hostiles par principe au contrat : nous pensons au contraire que le contrat peut tout à fait avoir sa place dans la fonction publique, sous réserve de faire un effort intellectuel de définition et de distinction entre des missions régaliennes, qui doivent être exercées par des agents au statut, avec tout ce qu'il a de protecteur, et des missions plus proches de celles du secteur privé, qui peuvent donc tout à fait être assurées par des agents contractuels.
Vous n'avez pas fait ce choix, qui aurait sans doute été plus courageux.
Au lieu de cela, vous proposez, nous l'avons bien compris, un mitage de ce statut qui vous amène en définitive à le dégrader un peu partout, y compris, nous le croyons, à mauvais escient, s'agissant de fonctions et de missions pour lesquelles il convient d'être plus attentifs et plus protecteurs pour les agents.
En clair, vous allez supprimer la transparence et les garanties qu'apportent aujourd'hui les CAP en matière de mutations.
Je reprends mon exemple des très nombreux brigadiers de la préfecture de police de Paris qui chaque année demandent leur mutation – par exemple pour des départements bretons. Nombreux parmi eux ont exactement la même ancienneté et sont au même stade en matière de mutation. Vous aurez beau faire tous les efforts que vous voudrez pour hiérarchiser leurs dossiers, en réalité, au bout du compte, c'est la recommandation de telle ou telle hiérarchie, certaines influences, qui permettront d'obtenir la mutation.
Je trouve cela assez malsain et regrettable, dans la mesure où la hiérarchie peut parfois, monsieur le secrétaire d'État, se montrer injuste. Lorsqu'on est un employeur public, on a le devoir d'anticiper de telles situations et de chercher des façons de les corriger.
Or, avec votre texte, il n'y aura plus de garde-fous. Vous nous avez avoué un peu plus tôt dans la discussion que le recours administratif préalable obligatoire était une illusion, puisqu'il n'est en aucun cas suspensif. Pour les intéressés, le train des mutations sera passé et il leur faudra en réalité attendre l'année suivante pour avoir une petite chance d'obtenir un poste, puisque les postes vacants auront été dans l'intervalle attribués à d'autres agents, et cela même si leur droit à mutation est reconnu.
Vous allez donc finalement créer de l'iniquité, ce qui, dans l'administration, ne rime pas avec attractivité. C'est une mauvaise solution, un mauvais chemin que celui sur lequel vous vous êtes engagés.
Monsieur le secrétaire d'État, selon l'argumentaire de l'article 11, celui-ci va simplifier les procédures de mutation des fonctionnaires de l'État.
Je rappelle que simplification ne rime pas toujours avec progrès, notamment lorsqu'il faut faire face à des situations complexes.
Ces nouvelles modalités d'organisation du dialogue social supprimeront la consultation des CAP, dont on connaît la qualité de services rendus. Il est à craindre que la disparition de ces CAP n'entraîne de profondes inégalités de traitement d'un fonctionnaire à l'autre.
Nous craignons également que cette disparition ne corresponde à une restriction pure et simple du droit à la mutation, laissant libre cours aux employeurs, qui pourront agir sans le contrôle des représentants syndicaux en matière de respect des règles. Bref, cela pourrait porter un sacré coup à la démocratie sociale.
Par ailleurs, monsieur le secrétaire d'État, j'aimerais exprimer quelques inquiétudes relatives aux procédures de mutations des fonctionnaires d'État originaires des outre-mer.
Je vous invite à porter une attention très particulière au respect de certaines dispositions de la loi no 2017-256 du 28 février 2017 dite loi pour l'égalité réelle outre-mer – c'est à se demander si l'égalité était virtuelle jusqu'à cette date… – qui sont relatives à la prise en compte du centre des intérêts matériels et moraux – CIMM.
Le nombre de fonctionnaires originaires des outre-mer dans la fonction publique en France hexagonale, dont un grand nombre éprouve les pires difficultés à obtenir une mutation dans leur territoire d'origine après de longues années passées à offrir de bons et loyaux services, justifierait effectivement, monsieur le secrétaire d'État, toute votre attention.
Nous faisons face, dans certains territoires d'outre-mer, à une situation qui est tellement ubuesque en termes d'affectation qu'aujourd'hui des voix s'élèvent pour dénoncer ce que certains appellent une espèce d'apartheid institutionnel, organisé au sein de certaines administrations des services déconcentrés de l'État en outre-mer.
Monsieur le secrétaire d'État, je le répète, la situation est compliquée et pourrait devenir littéralement explosive. Si l'on veut éviter de nouveaux événements du Chaudron, il faut s'occuper de ces jeunes des territoires d'outre-mer qui ont besoin de travailler, de ces ressortissants qui travaillent en France hexagonale et demandent à rentrer dans leur territoire d'origine pour retrouver leurs parents. Pour cela, il serait bien que vous accordiez une attention particulière aux amendements que nous allons vous soumettre tout à l'heure.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.
Dans le cadre de cet article 11, je voudrais appeler votre attention sur la problématique des CIMM dont Gabriel Serville vient de parler.
L'objectif poursuivi par cet article est noble. Nous le soutenons. La priorité doit effectivement être accordée aux cas qu'il énumère, dont font partie les dossiers fondés sur l'existence d'un centre d'intérêts matériels et moraux. Le problème réside dans l'attribution des « certificats » de CIMM, et dans la façon de les faire valoir.
Je précise que 80 % des demandes de particuliers que nous recevons concernent ces sujets. Je reconnais que bien souvent, le Gouvernement répond à nos demandes, lorsque nous soutenons une demande de mutation. Un réel effort est fourni en la matière : quels que soient les ministères, les réponses que nous recevons montrent l'attention que vous portez à cette question.
Mais, monsieur le secrétaire d'État, je profite de l'examen de cet article pour vous demander de clarifier les choses en ce qui concerne l'application du CIMM. Ce matin, deux de nos collègues ont rendu un rapport d'information traitant, notamment, de la question des congés bonifiés. Certains des critères aujourd'hui utilisés pour établir l'existence d'un CIMM sont ubuesques. On demande à un agent ultramarin qui vit dans l'hexagone de justifier que ses enfants sont inscrits dans une école en outre-mer ! Cela signifie que, dans les faits, il lui sera impossible d'obtenir la reconnaissance de l'existence d'un CIMM – et ce n'est là qu'un exemple parmi d'autres.
S'il est bon d'affirmer que priorité sera donnée au CIMM, encore faut-il que, dans les faits, on puisse l'obtenir, et aussi qu'il y ait une certaine transparence sur les demandes qui seront satisfaites.
Cela m'amène à aborder un point qui me paraît fondamental : la suppression des CAP, qui étaient précisément des lieux de transparence. Les territoires d'outre-mer sont trop souvent victimes de leur succès. Ce sont des territoires attractifs, c'est évident par exemple pour la Polynésie française, et il y a souvent de longues listes d'attente pour y être affecté. On peut comprendre que nos fonctionnaires aient envie d'avoir une expérience outre-mer : c'est une très bonne chose, car cela favorise les échanges et améliore la compréhension du fonctionnement des milieux insulaires, mais cela bloque aussi l'accès aux postes pour les Ultramarins qui souhaitent retourner dans leur territoire d'origine.
Vous allez donc supprimer les CAP, qui étaient le lieu où s'examinaient, en toute transparence, l'ensemble des demandes de mutation.
Depuis tout à l'heure, vous souriez, monsieur le secrétaire d'État…
Vos propos n'en sont pas la cause, madame la députée.
J'ignore ce qui se passe dans les autres territoires, mais, pour avoir fait le tour des corps d'État et des structures syndicales en Polynésie, je peux vous dire qu'ils sont tous vent debout contre votre projet de loi, vent debout contre la suppression des CAP. Quand on se trouve à 20 000 kilomètres de distance, la base, c'est qu'il y ait un minimum de transparence sur les décisions relatives aux mutations ! Demain, ce ne sera plus le cas et il faudra donc faire des recours. C'est déjà compliqué depuis l'hexagone, alors imaginez ce qu'il en est lorsqu'on se trouve à 20 000 kilomètres !
C'est pourquoi nous allons vous proposer des amendements visant à exclure les territoires d'outre-mer du champ d'application de la mesure de suppression des CAP.
Monsieur le président, cette intervention fera office de défense de nos amendements no 921 et 920 . Ceux-ci reprennent ceux de Mme Bareigts, du groupe Socialistes et apparentés. En effet, il nous paraissait inutile de chercher une autre rédaction alors que celles de notre collègue sont pertinentes.
Depuis la loi de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer – loi ÉROM – les fonctionnaires peuvent mettre en avant leur « centre des intérêts matériels et moraux » pour faire valoir une demande prioritaire de mutation dans un territoire ultramarin. Cette mesure est une forme de réparation pour les Ultramarins qui ont été affectés de force dans l'hexagone, contre leur volonté, et qui souhaitent retrouver leur territoire et leur famille.
Néanmoins, il existe encore des problèmes. En effet, les barèmes d'affectation divergent d'un ministère à l'autre. Pire encore : au sein du ministère de l'intérieur, il existe une différence de traitement entre les fonctionnaires de la gendarmerie nationale, qui peuvent se voir reconnaître l'existence d'un CIMM, et les policiers, qui ne le peuvent pas. Le ministère de l'intérieur a même été condamné par le Conseil d'État pour cette raison. Il convient donc d'harmoniser les barèmes de l'ensemble de la fonction publique. Tel est l'objet de l'amendement no 920 . De son côté, l'amendement no 921 vise à étendre l'application des CIMM aux diplômés des instituts régionaux d'administration.
Considérant les amendements nos 2 , 921 , 997 , 815 , 920 , 996 et 1031 , on voit bien que plusieurs groupes ont déposé des amendements allant dans le même sens. Je vous appelle donc, chers collègues de la majorité, à entendre raison et à les adopter. Nous ne faisons que défendre une mesure de justice envers les Ultramarins.
Monsieur le secrétaire d'État, souhaitez-vous répondre aux inscrits sur l'article ?
Oui, ce qui me permettra d'être plus bref pour donner l'avis du Gouvernement sur les différents amendements.
L'article 11 soulève deux débats. Le premier porte sur la réforme des compétences des CAP. Nous l'avons déjà eu à l'article 4, concernant d'autres dispositions. Je ne reviendrai pas sur cette question, car je ne pense pas que les positions aient beaucoup évolué depuis l'examen de l'article 4.
Le deuxième débat découle des demandes de nos collègues ultramarins concernant le CIMM et les mutations dans l'outre-mer. Ce débat recoupe une question que M. Marleix m'avait posée en commission concernant l'articulation entre les priorités légales d'affectation et les lignes directrices de gestion des ressources humaines.
Les priorités légales d'affectation prendront bien évidemment toujours le pas sur les lignes directrices de gestion des ressources humaines, qui sont arrêtées par les instances de dialogue social et doivent être conformes à la loi. Or c'est la loi qui fixe les priorités légales d'affectation – qui sont d'ailleurs rappelées à l'article 11.
Le fait de justifier du centre de ses intérêts matériels et moraux dans un territoire ultramarin fait partie des priorités légales d'affectation. Le CIMM, madame Sage, est aujourd'hui une construction jurisprudentielle. Le Conseil d'État a établi, dans plusieurs arrêts, vingt-deux critères devant être pris en considération pour identifier l'existence d'un centre des intérêts matériels et moraux.
Comme M. Serville l'a rappelé, le CIMM est devenu une priorité légale d'affectation avec la loi de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer, adoptée au début de l'année 2017 mais qui ne s'applique en réalité que depuis les mouvements de 2018. Sur la base des données statistiques dont nous disposons, je puis affirmer que l'essentiel des demandes de mutation dans les territoires ultramarins effectuées au titre de l'existence d'un CIMM ont été satisfaites, puisque le taux de satisfaction est de 73 %. Les refus sont liés à l'absence de poste correspondant à la demande de mutation.
La difficulté, je le dis aux parlementaires ultramarins car ce peut être un élément de réponse aux saisines individuelles dont ils font l'objet, c'est que l'existence d'un centre des intérêts matériels et moraux ne peut être constatée qu'au moment du dépôt par l'agent de son dossier de demande de mutation. Cela signifie que, pour les agents affectés en métropole et qui ont déposé un dossier arguant d'un CIMM avant l'entrée en vigueur de la loi pour l'égalité réelle outre-mer, ce CIMM ne leur donne pas de priorité légale d'affectation. Ils doivent donc déposer un nouveau dossier faisant mention de ce CIMM qui, entre-temps, est devenu une priorité légale d'affectation.
À l'occasion d'une séance de questions d'actualité au Sénat, nous nous sommes engagés, il y a quelques semaines, à procéder avant la rentrée prochaine à une évaluation quantitative et qualitative de la première année d'application de la loi ÉROM. Cette évaluation sera faite. À son terme, si des modifications doivent être apportées, elles le seront.
L'essentiel des modifications qui sont proposées par voie d'amendement relèvent du domaine réglementaire. J'y donnerai un avis défavorable, pour cette raison et parce que l'évaluation n'est pas encore faite.
Dans un arrêt récent, en date du 18 mars 2019, le Conseil d'État a rappelé que la priorité légale d'affectation liée à l'existence d'un centre des intérêts matériels et moraux dans un territoire ultramarin était d'application immédiate et générale. En l'occurrence, il avait été décidé au ministère de l'intérieur de reporter de quelques mois la prise en compte de l'existence de CIMM pour les mutations de policiers : le Conseil d'État a sanctionné cette décision, soulignant qu'il s'agissait d'une obligation légale, générale et immédiate, ce qui vient conforter la prise en considération de l'existence de CIMM pour la totalité des mouvements de mutation de l'année 2019. Nous y veillerons.
L'article 11 consacre la réduction drastique des compétences des commissions administratives paritaires, en mettant fin à la consultation préalable de ces commissions sur les décisions individuelles relatives aux mutations. Au prétexte de rénover le dialogue social, le Gouvernement entend se passer des élus du personnel pour le contrôle du bon déroulement des carrières. Ils en seraient réduits à examiner les seuls recours sur l'initiative des collègues, une fois les décisions prises par leur hiérarchie.
Dans notre vision de la fonction publique de carrière, les CAP jouent un rôle déterminant. Elles demeurent essentielles à la vitalité du dialogue social au sein de la fonction publique. Instances paritaires, élues au suffrage direct, les CAP constituent des outils majeurs pour la promotion de la démocratie sociale. Dans l'esprit du Gouvernement et des parlementaires de gauche et de droite qui les avaient instaurées, il s'agissait d'assurer la participation tant des agents que de l'autorité hiérarchique, afin de protéger le fonctionnaire des pressions des pouvoirs politiques. Par l'intermédiaire de cette instance, les décisions sont discutées puis acceptées, ce qui est à l'opposé de la démarche qui vous anime. Je souligne à cette occasion que l'ensemble des organisations syndicales sont hostiles à votre projet de loi. Toutes, sans exception, en demandent le retrait. Je souligne aussi que l'ensemble des acteurs de la fonction publique exige le maintien en l'état des commissions administratives paritaires.
En somme, par petites pièces, vous réduisez en cendres la démocratie sociale dans la fonction publique, prenant ainsi le contre-pied de notre héritage social. Nous continuons à en chercher la raison. Peut-être souhaitez-vous réduire les enjeux politiques de la fonction publique, au profit de la logique du marché et de la loi de l'argent, lesquelles nous conduisent inévitablement vers une fonction publique d'emploi, autrement dit vers la privatisation de l'État et le détournement de l'intérêt général ? Quoi qu'il en soit, nous refusons de voir détruire les spécificités d'un modèle qui, de la Révolution française au Conseil national de la Résistance, ont permis à notre pays de disposer d'une fonction publique exemplaire, mais trop injustement traitée par les gouvernements qui se sont succédé.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI.
Nous demandons la suppression de l'article 11, qui supprime l'avis obligatoire des commissions administratives paritaires sur les mutations, octroie à l'autorité compétente le pouvoir de définir des durées minimales et maximales d'occupation de certains emplois, et impose à l'autorité compétente d'édicter, en respectant les priorités et après avis des comités sociaux, des lignes directrices fixant les orientations générales et les grandes priorités en matière de mobilité, promotion et valorisation des parcours.
Cet article prévoit une régression des droits des fonctionnaires – nous ne sommes pas les seuls à le penser : comme on l'a rappelé, l'ensemble des organisations syndicales y sont radicalement opposées. Il renforce les pouvoirs des gestionnaires centraux, qui pourront procéder à des mutations sans même passer par le simple avis consultatif des CAP qui existe aujourd'hui, et imposer la durée d'occupation d'un emploi.
De notre point de vue, cela ouvre la voie à l'arbitraire et aux discriminations syndicales, politiques ou autres, et entrave la protection des conditions de travail des fonctionnaires, lesquels subissent ainsi une nouvelle attaque du Gouvernement. Ce mouvement est conforté par le devoir des gestionnaires de mettre au point des lignes directrices « en matière de mobilité, de promotion et de valorisation des parcours », sans même inclure directement les agents et agentes dans leur élaboration, lesquels sont réduits à de simples masses, à des forces de travail amovibles selon le bon vouloir de leur « patron ». C'est pourquoi nous demandons la suppression de l'article.
La parole est à M. Pascal Brindeau, pour soutenir l'amendement no 952 .
Cet amendement de suppression est cohérent avec ce que nous défendons depuis le début, à savoir le maintien des prérogatives des commissions administratives paritaires, instances de qualité du dialogue social. En l'espèce, il s'agit de leur intervention en matière de mutation des agents de l'État, et Maina Sage a précisé les questions particulières que cela soulève pour les territoires ultramarins.
La commission a donné un avis défavorable à ces amendements de suppression.
Premièrement, cet article 11 s'inscrit dans la logique de la réforme des instances consultatives, dont nous avons abondamment discuté lors de l'examen du titre Ier, s'agissant notamment du recentrage des attributions des CAP prévu par l'article 4. Il s'agit donc ici de mesures de coordination relatives aux mouvements de mutation des fonctionnaires de l'État.
Deuxièmement, cet article permettra à l'administration de fixer, dans des conditions prévues par décret en Conseil d'État, des durées minimales et maximales pour l'occupation de certains emplois, en vue d'améliorer la gestion prévisionnelle des ressources humaines dans certains services.
Mme la rapporteure l'a dit, l'article 11 va en cohérence avec l'article 4. Nous avons donc déjà évoqué les questions posées ici, hormis pour ce qui est des outre-mer, dont j'ai parlé dans mon intervention liminaire. Par cohérence avec l'article 4, donc, avis défavorable.
Cet amendement vise à déroger aux dispositions ici envisagées en maintenant l'avis des CAP sur les mutations dans les outre-mer.
Franchement, le sujet est tout sauf anecdotique. Nos territoires sont très éloignés, et vous ne pouvez pas être derrière toutes les directions régionales. Je sais que votre objectif est de faciliter les mutations, en donnant plus de souplesse au niveau régional. Mais, dans des territoires comme les nôtres, il faut le dire ici, les salaires sont majorés : jusqu'à 1,8 fois en Polynésie française ! Autrement dit, lorsque vous touchez 1 000 euros dans l'hexagone, vous en touchez 1 800 en Polynésie française ! Bien sûr que cela rend nos territoires très attractifs, sans compter les primes d'éloignement, les avantages en termes de logement ou encore les bonus si l'on reste pour un deuxième, voire un troisième contrat.
À l'origine, bien sûr, l'objectif était que nos territoires puissent bénéficier des meilleures compétences, que les gens aient envie de s'y installer. À l'époque où ces mesures furent mises en oeuvre, faut-il le rappeler, il n'existait même pas de liaison aérienne ! D'où le fait que, par exemple, certains corps d'État touchent encore des primes de chauffage en Polynésie…
Ce dont nous parlons est donc fondamental. Vous voulez faciliter les mutations, j'entends bien, mais pour nos territoires, il est important qu'elles continuent à faire l'objet de transparence. L'avantage de la CAP, de ce point de vue, c'est le paritarisme. Les CAP permettent en effet un lien avec les syndicats locaux : elles permettent de vérifier que les choses se déroulent correctement, en dehors de tout « copinage ». Je dirai même que ce système protège les directions qui, demain, auront la charge des recrutements.
Vous ne pouvez imaginer le nombre de fois où des fonctionnaires viennent me voir pour se plaindre que le directeur a encore fait venir tel ou tel ami. Ce sont des choses qui arrivent dans nos territoires, car ils sont attractifs. Et cela bloque les progressions de carrière de nos agents locaux.
J'ajoute que nous avons des corps d'État spécifiques – il en a d'ailleurs été question en commission. Peut-être imaginez-vous généraliser les concours nationaux à vocation locale, ce qui serait une très bonne chose pour l'océanisation des cadres dans la fonction publique ; mais, en attendant, il y a une sorte de suspicion, disons-le, quant à des avantages qui, demain, seront octroyés au détriment de nos agents. Je le répète : j'ai été moi-même étonnée de constater à quel point cet article a fait l'unanimité contre lui en Polynésie. Tout le monde est contre ! Je n'ai pas trouvé une seule personne qui y soit favorable, tant les risques qu'il comporte sont grands.
Peut-être pourrez-vous le corriger pendant la navette. Je ne vous demande au demeurant pas d'y renoncer : je comprends que vous vouliez faire sauter les CAP. Mais vous devriez les maintenir dans les territoires d'outre-mer ou, à tout le moins, trouver un moyen d'y assurer davantage de transparence sur les mutations.
Aussi mon amendement vise-t-il à exclure des dispositions envisagées à l'alinéa 2 les collectivités mentionnées à l'article 72-3 de la Constitution.
Entre l'article 4, qui recentre les CAP mais ne les supprime pas – contrairement à ce que vos propos, madame Sage, pourraient laisser penser – et l'article 14, relatif aux lignes directrices de gestion, l'objectif est clair : replacer le dialogue social dans la proximité. Or, y compris dans un territoire comme le vôtre, les lignes directrices de gestion pourront justement fixer des critères objectifs et de transparence sur les mutations et les mobilités.
Par conséquent, demande de retrait, dès lors que le texte satisfait, par l'articulation que je viens d'indiquer, votre demande quant à la transparence et à la proximité ; à défaut, avis défavorable.
Même avis : retrait ou avis défavorable.
Nous avons eu le même débat sur l'article 4. J'entends, madame Sage, votre souhait d'un dispositif particulier pour l'outre-mer. La transparence que nous devons assurer pour l'ensemble des mobilités est évidemment de mise pour l'outre-mer.
D'après ce que j'entends de vos propos, aujourd'hui, alors même que le projet de loi ne s'applique pas et que les CAP sont toujours compétentes en matière de mutations, vous recevez déjà des sollicitations, des doutes, des suspicions, des questions. Le système tel qu'il existe n'empêche donc pas ces doutes autant que vous le dites.
La transparence doit être garantie, et les priorités légales d'affectation maintenues. Nous devons aussi avoir à l'esprit les difficultés spécifiques de territoires comme celui dont vous êtes l'élue, à commencer par l'éloignement ; d'où la présence de corps spécifiques.
Par ailleurs, un travail doit être fait sur le CIMM : cela relève, je l'ai dit, du domaine réglementaire. D'autres aspects doivent aussi être examinés. Vous avez évoqué les sur-rémunérations. Sur ce point, j'ai eu l'occasion de dire à une sénatrice originaire des outre-mer que nous n'envisagions pas de les remettre en cause, y compris pour des raisons d'attractivité et de différences de coût de la vie.
Je ne suis pas convaincu que les difficultés spécifiques des outre-mer en matière de gestion de la fonction publique soient liées à la réforme des CAP, mais plutôt à d'autres spécificités auxquelles nous devons nous attaquer. Je ne pense donc pas que l'amendement que vous proposez permettrait de les résoudre.
Non, monsieur le président, il est maintenu. J'ai bien noté, monsieur le secrétaire d'État, que vous comptiez faire un bilan de la loi ÉROM. C'est une très bonne chose, et j'aimerais que vous vous engagiez aussi à faire le bilan de la suppression des CAP. Ce bilan doit comporter une analyse qualitative qui nous démontre l'absence de liens, directs ou indirects, entre les personnes qui seront chargées des mutations dans nos territoires et celles qui en bénéficieront.
Les CAP, avez-vous dit, n'ont pas permis de résoudre les problèmes liés aux mutations, aux choix d'ouvrir ou non un poste. Certes, mais si les agents en ont eu vent, c'est aussi grâce aux CAP et au fait que les organisations syndicales y siègent. Les CAP permettent une meilleure transparence en amont. Elles permettent de régler bien des problèmes avant qu'ils ne s'enveniment dans nos territoires. J'espère donc que vous aurez la même exigence pour le bilan de l'application du présent texte.
Enfin, madame la rapporteure, la cohérence entre l'article 4 et l'article 14 ne m'a évidemment pas échappée. Je ne crois cependant pas que l'outil que vous créez puisse répondre aux problèmes dont nous parlons : c'est un outil de pilotage qui réunira toutes les parties prenantes, mais ne permettra pas d'analyser les situations individuelles au cas par cas. Celles-ci seront relégués à d'éventuels recours, alors que la CAP, je le répète, permet de traiter ces sujets beaucoup plus en amont. Et, croyez-moi, cela a désamorcé bien des conflits et bien des tensions dans nos territoires.
Les CAP seront maintenues, c'est vrai, mais plus du tout avec les mêmes attributions. Désormais, les choses se régleront toujours a posteriori, ce qui est toujours beaucoup plus difficile. C'est pourquoi je maintiens mon amendement.
Je veux appuyer les propos de Maina Sage. La loi prévoit régulièrement des dérogations pour son application dans les territoires d'outre-mer. Les arguments de Mme Sage sont donc très pertinents. Nous avons défendu les mêmes pour d'autres collectivités mais s'il est bien un endroit où il convient de faire des exceptions, c'est bien les outre-mer, pour les raison exposées tout à l'heure par M. Serville ou celles, de nature différente, évoquées à l'instant par Mme Sage.
Les outre-mer ont évidemment une sensibilité particulière sur les questions de mutation, et un fort besoin de transparence s'y fait sentir. Les enjeux qui s'y posent sont différents : je pense bien sûr, par exemple, à la question de l'éloignement et à une perception des décisions qui n'est pas la même. Nous devons donc redoubler d'efforts, s'agissant de la transparence et de l'équité des décisions prises dans ces territoires.
J'entends vos arguments, madame la rapporteure, mais ils traduisent une vision très « bisounoursienne » des choses : sur le sujet dont nous parlons, les enjeux sont quand même très lourds et très personnels pour les agents. Sur ces enjeux forts que sont la transparence et l'équité, nous aurions donc tort, monsieur le secrétaire d'État, de ne pas apporter une réponse, fût-ce pendant la navette, aux questions soulevées par Mme Sage.
C'est le dernier qui parle qui a raison, prétend l'adage : peut-être, donc, me donnera-t-on raison ce soir…
Sourires.
Je crains que vous ne soyez pas le dernier à vous exprimer, monsieur Serville…
Maina Sage a utilisé des mots très forts. Elle a parlé de « suspicions » ; pour ma part, je parlerai de passe-droits.
J'ai évoqué un sentiment d'apartheid dans nos territoires, dans un contexte où les mutations se font de façon relativement transparentes grâce aux CAP. Et voilà que l'on s'oriente vers de nouvelles procédures dont nous n'avons aucune expérience et dont nous ne savons pas comment elles vont se dérouler !
Dans ce contexte, la moindre des précautions voudrait que l'on s'attache au principe de sagesse suivant lequel des territoires très éloignés de la métropole, notamment par leurs modes de vie et de fonctionnement, devraient pouvoir bénéficier d'un traitement différencié de leurs problèmes. Le Président de la République lui-même ne cesse d'invoquer ce fameux droit à la différenciation qu'il veut étendre à toutes les parties du territoire national, à commencer par les plus distantes de Paris.
Monsieur le secrétaire d'État, vous avez dit tout à l'heure que 73 % des demandes de mutation au titre du CIMM avaient obtenu des réponses favorables. Cela ne correspond pas aux chiffres dont nous avons connaissance, ni au sentiment que j'ai lorsque je suis sollicité, comme je le suis régulièrement, par des originaires d'outre-mer qui forment le voeu de retourner chez eux et qui sont confrontés aux pires difficultés.
Le maintien du dispositif de la CAP ne pourrait que nous rendre service, dans l'attente d'une évaluation beaucoup plus poussée du dispositif. Le résultat de cette évaluation nous permettra de déterminer en toute sagesse la meilleure solution à adopter dans le traitement de ces dossiers.
Voilà pourquoi j'apporte tout mon soutien à l'amendement de Maina Sage.
Je souhaite moi aussi soutenir cet amendement. Les syndicats de la fonction publique que j'ai reçus à Saint-Pierre-et-Miquelon sont tous vent debout contre la modification du fonctionnement des CAP. Maina Sage et Gabriel Serville ayant très bien exposé le problème, je me bornerai à appeler l'attention du Gouvernement sur les alertes qui lui sont données ici.
L'amendement no 115 n'est pas adopté.
La parole est à M. Pascal Brindeau, pour soutenir l'amendement no 966 .
C'est un amendement rédactionnel. On ne sait trop ce qu'il faut entendre, à l'alinéa 6 de l'article, par la formule « quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles ». On sait précisément au contraire ce qu'est un quartier prioritaire de la politique de la ville, et je propose donc d'utiliser cette formule. Sinon, on ne peut que se demander qui, lors de la mutation, appréciera si le quartier en question est « urbain » ou non, et dans quelle mesure il s'y pose des « problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles »…
La rédaction actuelle de l'alinéa reprend, à droit constant, la formule de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984. La modification que vous proposez restreint trop le critère que nous souhaitons voir prendre en considération. Avis défavorable.
J'ajoute que le décret qui prévoit notamment de valoriser les services effectués dans les quartiers ainsi désignés deviendrait inapplicable si l'on modifiait l'appellation de la priorité légale d'affectation comme vous le proposez, monsieur le député. Or je doute que vous souhaitiez supprimer des dispositions bénéficiant aux agents qui servent dans ces territoires.
Pour préserver la cohérence rédactionnelle entre les différents textes, je demande donc le retrait de l'amendement.
Je vais le faire, si M. le secrétaire d'État veut bien m'éclairer sur la question de savoir qui, dans ces cas de mutation, apprécie la notion de « quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles ». Est-ce la personne chargée de proposer la mutation, ou existe-t-il une possibilité d'objectivation de ces caractéristiques ? D'un ministère à un autre, l'appréciation pourrait diverger. Je pense en particulier aux personnels de police ou d'éducation.
Les décrets établissant la cartographie des quartiers en question – je pense moi aussi aux textes applicables aux services de police et ceux de l'éducation nationale, en effet principalement concernés – sont précisément ceux qui utilisent la formulation que vous vouliez réviser. Voilà pourquoi votre amendement, en rendant ces textes inopérants, priverait d'effet les dispositions dont ils font bénéficier les agents exerçant dans ces quartiers.
L'amendement no 966 est retiré.
La parole est à Mme Sophie Beaudouin-Hubiere, pour soutenir l'amendement no 224 .
Nombre des interpellations qui nous sont adressées et de nos propres réflexions portent sur les personnes en situation de handicap ou de dépendance du fait de la maladie ou de l'âge. Ainsi s'est très vite posée à nous la question du cas du proche aidant, pour qui il n'est pas toujours simple de concilier vie professionnelle et engagement auprès du proche qu'il aide.
Aussi notre amendement vise-t-il à accorder une priorité de mutation, de détachement, d'intégration directe et de mise à disposition aux fonctionnaires proches aidants, pour leur permettre de se rapprocher de la personne qu'ils aident.
L'article 11 reprend à droit constant les critères prioritaires de mutation figurant à l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984.
Quant au fond, votre préoccupation me semble satisfaite par la rédaction de l'alinéa 4 de cet article 60, aux termes duquel « les affectations prononcées doivent tenir compte des demandes formulées par les intéressés et de leur situation de famille ». C'est dans ce cadre qu'il pourra être tenu compte de la situation des proches aidants, sans qu'il soit nécessaire de modifier les critères prioritaires actuellement en vigueur. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Même avis.
Le critère que vous proposez, à savoir la prise en charge « des activités de la vie quotidienne », paraît très large, surtout eu égard au nombre de cas que vous visez – mise à disposition, intégration, mobilité… Dans la mesure où les priorités légales d'affectation priment sur les autres critères de mutation, cela me paraît excessif, non dans l'intention mais dans l'application.
Du point de vue du résultat recherché, comme l'a dit Mme la rapporteure, le fait que l'alinéa 4 de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 inclue la situation de famille parmi les priorités légales permet de répondre à la demande sans avoir besoin de pousser la précision jusqu'à la mention des aidants.
L'amendement no 224 est adopté.
Monsieur le secrétaire d'État, j'ai attentivement écouté vos explications au sujet du CIMM, et j'ai eu le sentiment que nous allions dans le bon sens, mais pas assez loin.
Le CIMM, nous dites-vous, fait l'objet d'une construction jurisprudentielle. Pourquoi pas ? Mais l'intervention de Maina Sage, en particulier l'exemple qu'elle a cité, me plonge dans la perplexité. On pourrait voir dans cet exemple l'illustration des limites de l'exercice : la possibilité de faire droit à la demande d'un fonctionnaire dont, pour des raisons peu ordinaires, les enfants seraient scolarisés outre-mer risquerait à terme de devenir un couperet pour tous les autres fonctionnaires dont les enfants seraient naturellement scolarisés dans leur commune de résidence… En d'autres termes, la construction jurisprudentielle n'est pas la panacée !
Voilà pourquoi il nous semble nécessaire de clarifier les critères caractérisant le CIMM, afin d'éviter des interprétations aléatoires et les remises en cause afférentes. Tel est le sens de cet amendement.
Dans le même esprit, cet amendement de Philippe Gomès, député de Nouvelle-Calédonie, propose que les critères de détermination des CIMM soient précisés par décret et soient d'application générale pour l'ensemble de l'administration.
L'amendement no 851 de M. Gabriel Serville est défendu.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements ?
Ils proposent des dispositions qui sont en réalité d'ordre réglementaire. Demande de retrait, ou avis défavorable.
J'en ai parlé tout à l'heure en m'exprimant sur l'article : une évaluation aura lieu et nous nous sommes engagés à ce qu'elle soit rapide, afin de pouvoir apporter, si nécessaire, les clarifications réglementaires requises. Il nous semble à ce stade plus utile, si les parlementaires en sont d'accord, de retirer les amendements dans l'attente de cette évaluation. Je rappelle que la prise en considération du CIMM comme priorité légale d'affectation est très récente puisque, votée en 2017, elle n'est réellement applicable que depuis 2018.
Je profite de l'occasion pour dire à M. Serville ainsi qu'à Mme Sage que j'ai bien conscience de l'écart qu'il y a entre les 73 % de demandes satisfaites et les réclamations qu'ils entendent au quotidien. Notre chiffre concerne les dossiers déposés en 2018 et mentionnant expressément le recours au CIMM comme priorité légale d'affectation : ceux qui ne comportaient pas cette mention ne pouvaient être retenus à ce titre, non plus que ceux déposés avant l'entrée en vigueur de la loi. C'est ce qui explique le décalage entre le sentiment dont vous font part nos concitoyens et la réalité statistique que nous avons pu constater.
Je maintiens les miens, car l'inscription dans la loi de la disposition en question permettrait de mieux sécuriser le dispositif et d'éviter ainsi qu'un futur gouvernement ne vienne à détruire le fruit de notre travail.
Je remercie M. le secrétaire d'État des précisions qu'il vient d'apporter.
Il est tout de même étonnant que les demandes antérieures à 2017 ne puissent bénéficier des critères votés en 2017. Je dois en être au cent quatre-vingt-douzième dossier de ce type, mais c'est la première fois que j'entends cette réponse ! Monsieur le secrétaire d'État, n'y a-t-il pas un moyen de permettre aux personnes ayant déposé un dossier avant cette date de se prévaloir du dispositif sans avoir besoin de redéposer un dossier ? On est encore en train de tout compliquer, d'ajouter une couche au mille-feuilles !
J'invite tous mes collègues à regarder un dossier de demande d'affectation au titre du CIMM. Vraiment, ouvrez-en un : vous verrez la pile de documents administratifs requis pour y prétendre ! Et voilà que j'apprends ce soir, comme tous ceux, certainement, qui s'intéressent au sujet, qu'il faut tout redéposer quand la demande est intervenue avant 2017 ? Je vous remercie d'ailleurs, monsieur le secrétaire d'État, d'avoir cité cette modification de 2017 pour laquelle nous nous sommes âprement battus, d'abord afin de la faire voter, ensuite afin de la faire appliquer, jusqu'à la dernière décision, très encourageante, c'est vrai, du Conseil d'État.
De grâce, monsieur le secrétaire d'État, trouvez un moyen ! Faites recontacter toutes les personnes concernées ! Que l'administration, au lieu de demander à chaque fonctionnaire de refaire son dossier, prenne en considération le nouveau critère pour tous les dossiers antérieurs !
Vous me demandez de retirer mon amendement. Je vais faire preuve d'un esprit constructif en acceptant, dans l'attente de votre bilan du mois de septembre ; mais comprenez que de sérieux doutes planent sur les chiffres que vous annoncez. Peut-être les éléments que vous venez d'avancer permettent-ils d'expliquer vos 73 % de cas réglés pour les dossiers postérieurs à 2017, mais qu'en est-il du reste ? Auriez-vous d'autres statistiques à ce sujet ?
L'amendement no 986 est retiré.
Les dossiers déposés antérieurement non pas au vote mais à l'entrée en vigueur de la loi ÉROM sont soumis au principe de non-rétroactivité de la loi : c'est pourquoi nous ne pouvons pas vous répondre favorablement ce soir. Néanmoins, la concertation que j'ai évoquée et qui portera sur le bilan du CIMM au bout d'un an sera évidemment l'occasion d'examiner le cas des dossiers qu'on pourrait considérer comme « en stock ».
Je tiens à préciser, madame Sage, que, même si nous pouvions prendre en compte le CIMM de manière générale pour tous les dossiers en attente, la décision d'attribuer un poste en application de la priorité légale dépend aussi du fait qu'un poste correspondant soit vacant ! Elle ne vaut pas autorisation automatique de mutation.
Prochaine séance, ce matin, à neuf heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi de transformation de la fonction publique.
La séance est levée.
La séance est levée, le vendredi 17 mai 2019 à une heure.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Serge Ezdra