La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
Le président de l'Assemblée nationale a reçu de M. Éric Straumann, député de la première circonscription du Haut-Rhin – et je suis particulièrement heureux de l'annoncer – …
… une lettre l'informant qu'il se démettait de son mandat de député à compter du mardi 28 juillet 2020. Par une communication du 27 juillet 2020, le ministre de l'intérieur a informé le président que M. Éric Straumann est remplacé jusqu'au renouvellement de l'Assemblée nationale par Mme Brigitte Klinkert, élue en même temps que lui à cet effet.
Le président de l'Assemblée nationale a reçu de Mme Brigitte Klinkert une lettre l'informant qu'elle se démettait de son mandat de députée. Il est pris acte de cette décision, qui sera notifiée au Premier ministre.
Hier soir, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s'arrêtant à l'amendement no 492 à l'article 1er.
Rappels au règlement
Nous entamons notre troisième journée de discussion autour du projet de loi. Je rappelle que cette deuxième lecture s'effectue dans le cadre du temps programmé et que le Gouvernement, invoquant la nécessité de traiter le sujet en urgence, a demandé qu'elle intervienne pendant la session extraordinaire.
Dès lors qu'il n'a pas daigné être présent en commission spéciale, c'est dans l'hémicycle que se déroulera le débat. Trois ministres de plein exercice doivent s'y investir : celui des solidarités et de la santé, le garde des sceaux et la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.
Une nouvelle fois, nous constatons – avec tout le respect que nous vous devons, monsieur le secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles – qu'aucun ministre n'assiste au débat.
Le Gouvernement affirme que le projet de loi est important, voire essentiel, mais, quand nous nous retrouvons dans l'hémicycle, aucun ministre de plein exercice ne siège au banc. Voilà toute la considération qu'il accorde au texte et au Parlement ! Nous sommes scandalisés, parce que, je le répète, cette attitude n'est pas digne. Monsieur le président, en tant que représentant de l'Assemblée nationale, vous devriez vous en émouvoir.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur plusieurs bancs du groupe UDI-I.
Nous nous devons de respecter le principe constitutionnel selon lequel le Gouvernement est libre de sa représentation sur nos bancs.
En première lecture, Mme Agnès Buzyn avait assisté à toute la discussion !
C'est faux !
Monsieur Hetzel, nous avons pris acte de votre intervention, dont je vous remercie.
La parole est à M. Pascal Brindeau, pour un rappel au règlement.
Mon rappel se fonde sur l'article 58 de notre règlement, qui traite du déroulement de la séance. À mon tour, je m'étonne que M. le ministre des solidarités et de la santé – et ma remarque n'a rien de désobligeant à l'égard de M. le secrétaire d'État – n'ait à ce jour passé qu'une heure à défendre un texte qui traite de sujets aussi importants que sensibles, et dont on nous impose la deuxième lecture à la fin de la session extraordinaire.
Je vous demande donc, monsieur le président, de vous informer auprès du ministre chargé des relations avec le Parlement des raisons pour lesquelles le ministre responsable du texte ne siège pas au banc du Gouvernement.
Applaudissements sur les bancs des groupes UDI-I et LR.
Pour votre pleine information, monsieur Brindeau, je rappelle que l'on ne peut invoquer l'article 58 pour effectuer un rappel au règlement.
La parole est à M. Gilles Le Gendre, pour un rappel au règlement.
J'entends ce qui vient d'être dit à l'occasion de ces deux rappels au règlement.
Mais, mes chers collègues, quand nous perdons du temps sur ces considérations, nous nous éloignons du fond du sujet. Puisque vous voulez absolument établir une comparaison entre la première et la deuxième lecture, écoutez ce que les commentateurs disent depuis lundi.
M. Le Gendre peut faire un rappel au règlement sans préciser sur quel article ? C'est injuste !
Les commentateurs répètent que, cette fois, l'Assemblée nationale n'est pas capable d'organiser un débat de la même qualité que lors de la première lecture. C'est pourtant ce que nous devrions tous avoir à coeur de réussir.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Je vais faire le point. J'indique à tous les députés ici présents que les rappels au règlement visent non à ouvrir un débat, mais à pointer un manquement au règlement et à expliquer en quoi le déroulement du débat en a trahi la lettre.
C'est pour cette raison, et non pour un motif purement administratif, qu'on demande aux orateurs de préciser sur quel l'article il se fonde – sachant qu'il ne peut d'agir de l'article 58, comme le spécifie l'article 58, alinéa 2.
Dans le cas présent, même si les articles n'ont pas été spécifiquement invoqués, les interventions ont été claires.
Je vais donc donner la parole à M. le secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles.
Mesdames et messieurs les députés, en espérant que ce soit une fois pour toutes – même si j'en doute – , je vous remercie de la considération dont vous faites preuve à mon égard, quand bien même je la trouve légèrement suspecte.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Nos institutions veulent qu'un secrétaire d'État puisse représenter le Gouvernement dans cet hémicycle, ce que je fais avec fierté.
Vous le savez, car j'étais à vos côtés il y a quelque temps : ma considération, ainsi que celle de l'exécutif, pour le Parlement est pleine et entière.
Je crains que les propos qui viennent d'être tenus ne soient dictés par quelque mauvaise foi, puisque, vous le savez, j'ai participé pleinement aux débats lors de la première lecture, que ce soit en commission ou en séance publique, à l'Assemblée nationale comme au Sénat.
Ne me présentez donc pas comme un substitut, qui découvrirait à peine le texte, car vous savez qu'il n'en est rien.
Pour être tout à fait complet, j'ajoute que M. le ministre des solidarités et de la santé, M. le garde des sceaux et Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche seront à mes côtés pour défendre les parties du texte qui les intéressent cet après-midi, ce soir ou dans les jours qui viennent.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Sur l'amendement no 492 , je suis saisi par les groupes Socialistes et apparentés, UDI et indépendants, Écologie démocratie solidarité, d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je suis saisi de deux amendements, nos 492 et 909 , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Alain David, pour soutenir l'amendement no 492 .
Cet amendement, particulièrement cher à Hervé Saulignac, qui en est le premier signataire, vise à empêcher que les personnes ou les membres d'un couple en parcours d'AMP – assistance médicale à la procréation – soient contraints de recourir à un don de gamètes, alors qu'ils disposent de leurs propres gamètes frais ou cryopréservés.
On évitera ainsi que la technique de FIV-ROPA – fécondation in vitro et réception d'ovocytes de la partenaire – soit refusée aux couples de femmes et l'on s'assurera que les personnes, lorsque c'est possible, peuvent procréer à l'aide de leurs propres gamètes. Cette disposition est conforme à la réglementation prévoyant que les procédures d'AMP sont réalisées en priorité avec les gamètes du couple, avant qu'on ne recoure à un don de gamètes ou d'embryon.
Le projet de loi ouvrant le double don, à savoir la possibilité pour une femme receveuse de recevoir un don de spermatozoïdes et un don d'ovocytes, il serait incompréhensible que celle-ci ne puisse pas recevoir d'ovocytes de sa compagne et doive faire appel à des ovocytes provenant d'une tierce donneuse.
Issu des échanges de vues et d'un travail transpartisan entre les membres du groupe d'études sur les discriminations et LGBTQI-phobies dans le monde, l'amendement vise à inscrire le principe d'autonomie à l'article 2141-2 du code de la santé publique, c'est-à-dire à permettre à chacun des membres du couple candidat à l'assistance médicale à la procréation de disposer librement de ses gamètes. Je pense que tout le monde aura à coeur de le voter, surtout dans un contexte où l'on redoute de manquer de gamètes.
La parole est à M. Jean-Louis Touraine, rapporteur de la commission spéciale, pour donner l'avis de la commission.
J'émets un avis favorable sur ces deux amendements comparables, tout en préférant le deuxième, pour des raisons de rédaction. Si la commission ne les a pas votés, elle s'est prononcée à deux reprises en faveur du dispositif qu'ils proposent, au point que la ROPA figure désormais dans le texte.
Il faut considérer tant des aspects pratiques que des éléments d'ordre éthique.
Sur le plan pratique, quand une femme qui va porter un enfant dans son utérus n'a pas d'ovocyte susceptible d'être fécondé, il faut un don d'ovocyte. Dans un tel cas, il serait absurde d'attendre cinq ans – délai moyen pour obtenir des ovocytes d'une donneuse anonyme, à laquelle il faudrait imposer des conditions parfois difficiles pour effectuer ce don – alors qu'elle dispose d'une volontaire, qui sera en outre la mère de l'enfant.
À cet égard, je récuse par avance le terme de GPA, que j'ai entendu prononcer. Répéter cent fois une contre-vérité ne suffit pas à la rendre réelle. La ROPA et la GPA sont même antagonistes, puisque la première s'effectue à l'intérieur du couple et pour l'enfant du couple. Par définition, elle ne peut donc se faire pour autrui. Une fois pour toutes, pour la clarté du débat, je vous engage à bannir des abus de langage regrettables.
Au-delà de ces aspects pratiques, venons-en à la dimension éthique. Depuis les débuts de la bioéthique en France, avant même la première loi qui lui a été dédiée, et notamment dans les considérations du Comité national d'éthique, les gamètes d'origine masculine et féminine sont considérés de la même façon. Sur le plan éthique, on ne peut distinguer l'ovocyte du spermatozoïde. Les deux véhiculant la moitié du patrimoine transféré à l'enfant, ils doivent être considérés de la même façon – même si je reconnais que le don d'ovocyte est un peu plus pénible pour la femme que le don de spermatozoïde pour l'homme.
Mes chers collègues, que se passera-t-il si vous interdisez le don d'ovocytes au sein du couple ? Vous serez obligés d'interdire le don de spermatozoïdes au sein du couple…
… parce que des PMA avec le sperme du mari ont lieu quotidiennement – par exemple à chaque fois qu'une femme stérile, pour des raisons anatomiques notamment, est contrainte de recevoir les spermatozoïdes de son mari par ce moyen.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et SOC. – Mme Caroline Fiat et M. Maxime Minot applaudissent également.
De même, quand un homme est porteur d'une maladie sexuellement transmissible telle que le SIDA, on ne lui demande évidemment pas de procréer avec sa femme au risque de la lui transmettre ; il donne des spermatozoïdes, lesquels sont traités in vitro et implantés chez sa femme, la protégeant de tout risque de transmission, tandis qu'ils continuent à avoir des relations sexuelles avec un préservatif.
Chaque jour, dans tous les services de gynécologie obstétrique de France, des PMA sont réalisées au moyen de transferts de gamètes masculins.
Nous demandons que, de la même manière, celles-ci puissent être pratiquées avec des gamètes féminins.
Si nous le refusons, les femmes concernées seront demain en droit de protester contre la double discrimination dont elles sont victimes – parce qu'elles sont femmes et parce qu'elles sont homosexuelles.
Cela n'est pas tolérable. Nous devons appliquer aux femmes la même règle que celle que nous avons adoptée il y a des décennies pour les hommes. Je vous invite donc à adopter ces amendements.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI ainsi que sur quelques bancs du groupe LaREM. – M. Alain David applaudit également.
L'avis du Gouvernement est défavorable, comme l'était celui de la commission en première lecture, quand bien même elle a émis un avis inverse en deuxième lecture – nous aurons l'occasion d'y revenir.
Les amendements visent à autoriser la méthode dite de la ROPA, au mépris d'un principe fondamental de la médecine : celui de ne pas pratiquer d'acte médical non nécessaire et non justifié médicalement.
Dans la grande majorité des cas, dans un couple de femmes, il suffit, pour mener à bien une grossesse, de procéder à une insémination artificielle. Or la ROPA suppose plusieurs stimulations ovariennes du membre du couple donneur d'ovocytes qui viennent s'ajouter à la fécondation in vitro, au transfert d'embryons et à la congélation d'embryons.
Monsieur le rapporteur, vous qui êtes médecin, vous ne pouvez pas dire que ce procédé est « un peu plus pénible » pour la femme ; c'est bien plus que cela, et vous le savez.
Que les choses soient claires : nous sommes évidemment sensibles à la volonté de deux mères de partager le projet parental, …
… mais la conception de la double maternité qui est défendue ici entre en contradiction avec la philosophie du projet de loi selon laquelle le projet parental repose sur l'amour et l'attention donnés à un enfant, sans que la biologie ne prime. Ce fut tout le sens de nos débats hier.
Si on pose que deux femmes doivent participer à la fusion des gamètes pour être considérées l'une et l'autre comme mères, alors, monsieur le rapporteur, on peut en effet s'interroger sur le risque de discrimination. Mais nous devons également réfléchir à notre vision de la parentalité dans le cas des FIV avec tiers donneur dans un couple hétérosexuel. Soyons cohérents : l'ensemble du projet de loi repose sur le principe selon lequel un donneur de gamètes n'est pas forcément un père ou une mère, les parents étant ceux qui élèvent l'enfant, lui portent attention et sécurité.
Ce sont les raisons pour lesquelles nous sommes défavorables aux deux amendements.
Monsieur le rapporteur de la majorité, à vous écouter, je me demande où est le prétendu équilibre auquel nous serions parvenus en première lecture. N'y a-t-il pas un double discours de votre part ?
L'amendement socialiste…
… vise à autoriser la technique de la ROPA, qui constitue un don dirigé, contrevenant au principe d'anonymat entre le donneur et le receveur –
M. Patrick Hetzel applaudit
ce n'est pas moi, mais la ministre Mme Agnès Buzyn qui l'avait affirmé.
Puisque nous refusons de nous affranchir de nos principes éthiques, il convient de s'opposer à une telle proposition.
Si une femme dispose d'ovocytes, pourquoi demanderait-elle à une autre de se charger de la gestation ? Le glissement vers une gestation pour autrui est patent.
L'amendement no 909 de M. Lachaud est en effet issu des travaux menés dans le cadre du groupe d'études sur les discriminations et LGBTQI-phobies dans le monde.
À ceux sur ces bancs qui critiquent un don dirigé, je confirme que la ROPA en est bien un, mais au sein d'un couple. Le recours à cette technique permettrait d'apaiser les craintes de pénurie de gamètes ou de flux tendu, puisqu'elle dispense de solliciter la banque de sperme ou d'ovocytes ; il rendrait l'accès à la PMA bien plus rapide pour les couples.
Je vous demande de soutenir les amendements.
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et FI. – M. Mounir Mahjoubi applaudit également.
L'autorisation de la ROPA avait été repoussée en première lecture parce que celle-ci constitue un don dirigé, lequel est proscrit dans le cas d'une assistance médicale à la procréation – le don est anonyme.
Les auteurs des amendements veulent faire admettre l'idée qu'un enfant peut être l'enfant de deux femmes : l'une donne ses ovocytes, l'autre porte l'enfant. « C'est notre enfant à toutes les deux » diront-elles, comme peut le faire un couple hétérosexuel. Les amendements traduisent une volonté d'évincer une réalité biologique au profit d'une autre réalité qui trahit précisément la première à laquelle chacun d'entre nous est pourtant confronté. C'est très dangereux et très grave.
Lors de son audition, la sociologue Irène Théry prônait l'abandon de la réalité biologique au profit d'une réalité sociale, sociétale, idéologique. C'est une telle dérive que nous refusons et condamnons en rejetant les amendements.
Mme Emmanuelle Ménard applaudit.
La gestation pour autrui est définie comme le fait qu'une femme porte l'enfant de quelqu'un d'autre. Elle se déroule souvent à l'étranger puisqu'elle est interdite en France et fait l'objet d'un contrat financier.
Quelle est la différence avec ce que proposent les amendements ? Il n'y a pas de contrat financier. Cela s'appelle la GPA éthique. La femme porte l'enfant d'une autre femme. Vous arguez de ce que cela a lieu au sein d'un couple, mais il n'en demeure pas moins qu'une femme porte l'enfant d'une autre. Il s'agit d'un prêt d'utérus, en l'absence de tout lien affectif. La GPA n'est rien d'autre que cela. Nous y sommes donc !
La ROPA est un don fléché. Or quelle est la définition du don si ce n'est qu'il est désintéressé, je dirai même autotélique ? La ROPA remet donc en cause la règle de droit en vertu de laquelle le receveur n'a pas à connaître l'identité du donneur. La non-discrimination en matière d'assistance médicale à la procréation conduit également à proscrire toute hiérarchisation entre les demandes.
Ensuite, la communauté médicale mais aussi une grande partie de la communauté LGBT relèvent la lourdeur du dispositif médical. La finalité médicale de la PMA repose sur la qualité de l'équipe, la pertinence mais aussi sur l'absence de solution alternative. Or de telles solutions existent.
En outre, le projet parental tel que le conçoit le projet de loi n'est pas un droit à l'enfant.
Enfin, la méthode ROPA n'est pas sans risques ; c'est un parcours du combattant pour les femmes – il y a des risques d'éclampsie, d'hypertension.
Ne nous engageons pas dans cette voie.
Nous sommes à un des moments de vérité de l'examen en deuxième lecture du projet de loi relatif à la bioéthique. C'est la raison pour laquelle j'ai demandé un scrutin public sur les amendements et je regrette l'absence du ministre des solidarités et de la santé. Mais je crois comprendre désormais les raisons de cette dernière.
Monsieur le secrétaire d'État, vous avez mis en avant le meilleur des arguments en invoquant le principe déontologique selon lequel il faut éviter tout acte médical non nécessaire. Ce principe devrait s'imposer même au risque d'une discrimination – ce qui n'est pas le cas en l'espèce, dès lors que d'autres solutions existent en dehors de la réception d'ovocytes de la partenaire. Le don d'ovocytes est en effet bien plus qu'un acte un « peu plus pénible » que le don de spermatozoïdes, pour reprendre les mots du rapporteur.
Chers collègues, réfléchissez bien avant d'adopter ces amendements qui rompraient l'équilibre dont le Gouvernement affirme être le garant depuis le début de la première lecture, il y a un an.
Monsieur le rapporteur non pas de la majorité mais de la commission spéciale, je vous remercie d'avoir rappelé le choix de cette dernière d'autoriser en deuxième lecture la technique de la ROPA. J'aimerais que l'hémicycle le confirme.
L'assistance médicale à la procréation est un parcours médical qui se solde souvent par des échecs et des souffrances : des tentatives infructueuses à répétition, des fausses couches récurrentes.
Le recours à la ROPA permet d'accroître les chances de succès. Pourquoi ? D'abord, parce que nous sommes confrontés à un risque de pénurie de gamètes, et singulièrement d'ovocytes. Autoriser un couple de femmes à utiliser leurs propres ovocytes, c'est leur faire gagner du temps et leur épargner des mois et des années d'attente au risque de dépasser l'âge limite pour recourir à la PMA.
Ensuite, la technique de la ROPA permet de sélectionner les ovocytes les plus prometteurs de l'un des membres du couple et de confier la gestation à celui qui fait encourir le moins de risques à la grossesse afin de maximiser les chances de succès de l'AMP.
Mes chers collègues, vous connaissez les chiffres : après six inséminations avec tiers donneur ou quatre fécondations in vitro – soit les limites de la prise en charge de ces actes par la sécurité sociale – , les chances de succès sont de 60 %, soit un taux d'échec de 40 % : quatre fois sur dix, les femmes qui s'engagent dans un parcours d'aide médicale à la procréation ne parviennent pas à mener à bien un projet parental.
Il me semble que nous devons adopter l'un de ces deux amendements. En autorisant tout couple à recourir à ses propres gamètes, nous permettrions aux femmes concernées de mener à bien leurs projets parentaux avec les plus grandes garanties de succès.
Monsieur le ministre, permettez-moi d'insister. Si nous voulons permettre aux couples de femmes d'accéder à la ROPA, en dépit des inconvénients qu'elle comporte, et que vous avez rappelés à raison, ce n'est en rien pour obliger toutes les femmes à recourir à cette technique invasive, mais simplement pour le permettre à celles qui voudraient en bénéficier. Contrairement à ce qu'a affirmé notre collègue Genevard, les dispositions prévues par les amendements n'ont rien de dangereux.
Depuis l'introduction de la PMA en France, nous privilégions le recours aux gamètes présents au sein du couple, autrement dit la PMA intraconjuguale, par laquelle l'homme fait don de son sperme pour une fécondation des ovocytes de sa compagne. Pourquoi interdire cette possibilité aux couples de femmes ?
J'ai déjà eu l'occasion de rappeler dans cet hémicycle que notre groupe est plutôt opposé à la méthode ROPA. Il l'est donc aux amendements qui visent à l'autoriser.
Tout d'abord, il nous semble que cette technique altère, voire contredit la philosophie du don telle que nous la concevons dans notre pays, et à laquelle nous sommes attachés. Nous ne pensons pas que la mettre en défaut soit une bonne chose, car cela pourrait provoquer certaines évolutions qui ne sont pas souhaitables.
Ensuite, nous estimons qu'il y a là une forme de rebiologisation de la parentalité, alors même que la démarche éthique située au coeur de la PMA, notamment de la PMA avec tiers donneur, repose au contraire sur une conception historico-sociale de la parentalité et de la logique de filiation. Nous pensons que les parents sont celles et ceux qui élèvent les enfants.
Je dis les choses avec les mots les plus ajustés possibles, et avec sensibilité, car je sais combien les questions que nous nous posons ici ont des conséquences sur les individus, et combien elles peuvent parfois affecter chacune et chacun dans son être profond. Mais cette forme de reconstitution biologique de la parentalité ne nous semble pas correspondre aux fondements éthiques qui doivent guider la révision de la loi relative à la bioéthique. Elle présente le risque d'affaiblir la cohérence globale de nos choix.
Plusieurs collègues ont estimé qu'un don de gamètes ne saurait être dirigé. Je leur apprendrai que c'est pourtant très régulièrement le cas.
En effet, la PMA, chez un couple hétérosexuel, consiste bien souvent en un don de gamètes de l'homme à la femme : c'est donc bien un don dirigé.
Brouhaha sur les bancs du groupe LR.
Chers collègues, je constate que vous ne m'écoutez pas, ce qui est dommage ! Après, vous ferez semblant de ne pas avoir compris et vous vous plaindrez que l'on ne répond jamais à vos questions !
Le don dirigé de gamètes existe donc d'ores et déjà.
Concernant les amendements proposés, je me contenterai de donner un exemple. Soit un couple de femmes désireuses d'avoir un enfant. L'une a de bons gamètes, mais souffre d'une maladie chronique telle qu'une grossesse la mettrait en danger ; l'autre n'a pas de gamète. La seconde devra attendre pendant des années pour bénéficier d'un don anonyme, alors même que son épouse, elle, pourrait lui donner ses ovocytes. Mesdames, messieurs, voilà un exemple concret, celui d'un couple de femmes que l'on empêcherait d'avoir un enfant en refusant la ROPA, ce qui serait vraiment dommage.
M. Maxime Minot applaudit.
Enfin, à notre collègue qui a jugé que le recours à cette technique s'apparentait à une GPA, je dirai que de nombreuses PMA sont pratiquées en France pour aider les femmes souffrant d'infertilité. Il n'y a pas que le don de gamètes masculins dans notre pays ; certaines femmes donnent aussi leurs gamètes. Heureusement, de nombreux bébés sont nés dans notre pays grâce au don d'ovocytes ! C'est une réalité, madame Thill ! Il faut se tenir au courant !
Applaudissements sur de nombreux bancs.
M. le secrétaire d'État s'est montré préoccupé par les lourdes conséquences que la technique de la ROPA et les procédures qu'elle suppose peuvent entraîner. Chacun ici en a conscience, car cela fait plusieurs mois que nous travaillons sur le sujet. Et c'est justement pour cette raison que nous avons proposé un amendement visant à proscrire les stimulations ovariennes non nécessaires, reprenant ainsi une demande formulée par plusieurs associations. Il a été rejeté, mais peut-être y reviendrons-nous au cours des débats. Quoi qu'il en soit, l'adopter permettrait de répondre à l'un des principaux arguments mis en avant pour rejeter la ROPA.
Par ailleurs, nous ne pensons pas que cette technique remet en cause la philosophie et l'éthique générale du don de gamètes, qui admettent d'ores et déjà des exceptions. Dans les couples hétérosexuels ayant recours à la PMA, l'homme donne son sperme. Des exceptions sont aussi possibles pour des nécessités médicales – de ce point de vue, ROPA peut se justifier dans certains cas. Enfin, en matière de don d'organes, certaines procédures prévoient la possibilité de dons fléchés, notamment au sein de la famille, pour des raisons de compatibilité. Il existe donc bien des exceptions, qui se justifient par des conditions particulières – or nous parlons bien là de conditions particulières.
Il ne s'agit pas de « rebiologiser » – ce que propose d'ailleurs le Gouvernement en matière de filiation. Nous considérons la parentalité dans sa globalité, notamment sous l'angle du rapport social. On n'est pas plus parent parce que ses gamètes ont participé à la conception de l'enfant ; on est un parent, une mère ou un père, parce que l'on a participé à son éducation. Pour nous, c'est la base. Dès lors, pourquoi ne pas autoriser une méthode susceptible d'augmenter les chances de conception ?
Mmes Caroline Fiat et Laurence Vanceunebrock applaudissent.
Nous sommes confrontés à une situation très particulière : celle d'un couple de femmes désireuses d'avoir un enfant en procédant à un transfert d'ovocytes à l'intérieur du couple. Dans un tel cadre, il paraît absurde de recourir à un don anonyme et d'utiliser d'autres ovocytes que les gamètes du couple, d'autant que cela priverait d'autres couples de la possibilité de les utiliser. C'est pourquoi je suis favorable aux dispositions proposées.
Par ailleurs, assimiler la ROPA à la GPA, comme l'ont fait certains collègues, n'a aucun sens. Lors d'une GPA, une femme porte un enfant et le donne à un couple à sa naissance. Ici, nous ne sommes pas du tout dans ce cadre : le don d'ovocytes est effectué au sein du couple et l'enfant, porté par l'une des deux femmes, sera élevé par les deux comme celui du couple.
Si le sujet n'était pas si grave, on parlerait d'amendements de bon sens. Cette pratique existe au sein des couples hétérosexuels ; il n'y a pas de raison de l'interdire aux couples homosexuels.
Par ailleurs, quand on sait que quatre stimulations ovariennes sur cinq aboutissent à un échec, quand on connaît la violence du parcours afférent, la souffrance imposée au corps d'une femme ainsi que les douleurs et les déchirements vécus par un couple en cas d'échec, on doit tout faire pour que cet acte médical assez lourd aboutisse à un processus qui donnera la vie.
Grâce à ces amendements, nous pourrons donner la vie là où il n'y en aurait pas eu ! Nous allons faire naître des enfants supplémentaires, qui n'auraient eu aucune chance de naître dans le cadre du parcours de procréation tel qu'il existe aujourd'hui ! Il n'y a donc guère d'hésitation à avoir.
Dangereux ! Monsieur le secrétaire d'État, musclez votre jeu, comme Robert Pires !
Je m'exprimerai en tant que premier signataire de l'amendement no 492 . L'essentiel des arguments des uns et des autres a été exposé. Je rappellerai simplement que le projet de loi autorise le double don de gamètes – même si la question de l'origine de ces dons reste parfaitement légitime.
Je conçois parfaitement que l'on ne puisse pas accepter un don dirigé de gamètes effectué en dehors de tout cadre. Mais, même si certains feignent de croire le contraire, les amendements proposés imposent justement une règle : ils ne tendent à autoriser le don dirigé d'ovocytes que dans le cas avéré d'un projet parental élaboré par deux femmes.
De mon point de vue, exclure le don d'ovocytes au sein d'un couple de femmes est dépourvu de fondement éthique, et de surcroît discriminatoire. En effet, dans le cadre d'une FIV sans tiers donneur pour un couple hétérosexuel, nous avons bien affaire à un don dirigé de gamètes. Dès lors, comment exclure cette possibilité pour un couple de femmes sans introduire une discrimination ? Si j'ai soumis à votre examen cet amendement, avec le soutien de mes collègues du groupe Socialistes et apparentés, c'est précisément pour éviter cela.
Enfin, j'aurais aimé ne pas entendre des arguments dont j'estime qu'ils sont infondés : nous sommes là très loin de la GPA, nous sommes là très loin de tout risque de commercialisation de l'embryon. Pour ces raisons, j'estime que nous devons adopter l'un des deux amendements.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.
Tout d'abord, j'indique à Mme Thill que, d'après sa définition de la GPA, on en pratique de nombreuses chaque jour en France. En effet, sitôt qu'un ovocyte provenant d'une donneuse anonyme est utilisé, d'après elle, il s'agit d'une GPA ! Et il en est de même pour les dons d'embryons ! Ainsi, notre pays pratique chaque année des GPA par milliers !
Mme Caroline Fiat applaudit.
Madame Thill, je vous demande de prendre en considération cet état de fait : les cas dont nous débattons sont bien éloignés de la GPA, plus encore que ceux que je viens de citer.
Ensuite, la ROPA n'est pas à proprement parler un don, à moins de considérer qu'un père ou une mère fait un don chaque fois qu'il procrée ! Mais nous ne sommes plus à l'époque où le mari disait à sa femme : « je te fais don de ses spermatozoïdes pour que nous puissions avoir un enfant ensemble »… Non !
La logique ici est différente ; je dirais même que la notion de don dirigée est beaucoup moins pertinente pour la ROPA que dans d'autres cas de dons entre humains, comme les dons d'organes pour un proche ou un ami.
Dans le cas de la ROPA, la femme contribue à la naissance de son propre enfant. Elle ne fait pas un don à quelqu'un de plus ou moins proche. Notre droit indique d'ailleurs que la PMA doit utiliser prioritairement les gamètes du couple : nous enfreignons notre propre règle si, alors qu'un couple dispose de gamètes, nous n'en tenons pas compte et que nous allons en chercher d'autres, à l'extérieur du couple !
Enfin, je voudrais convoquer ici les professionnels de santé, et pas les moindres : la totalité des gynécologues et obstétriciens de France, notamment représentés par le président de leur collège national et la présidente de la société française de gynécologie. Ils nous disent qu'il serait parfaitement hypocrite de prétendre que le don d'ovocyte est davantage pénible quand la femme donneuse est destinée à devenir la mère de l'enfant issu du don que quand elle est inconnue, étrangère, anonyme. Dans tous les cas, sans ovocytes chez celle qui portera l'enfant, il faut en trouver – et il vaut mieux que le don vienne d'une proche.
À leur sens, il n'y a aucune raison autre qu'idéologique à refuser la ROPA.
Mes chers collègues, ne préférons pas l'idéologie à la confiance dans les femmes et dans les professionnels de santé qui oeuvrent aux biens de leurs patientes. Je vous exhorte à voter ces amendements.
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et FI ainsi que sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.
Le sujet étant à la fois important et complexe, j'appelle l'attention de tous sur l'attention qui doit être accordée à chaque orateur. Écoutons-nous.
La parole est à M. le secrétaire d'État.
J'ai beaucoup parlé après votre fuite, hier soir, monsieur Aubert ; j'ai même regretté votre absence.
Oh, je ne m'inquiète pas…
Nulle idéologie, monsieur le rapporteur ! Le Gouvernement a évidemment la plus grande considération pour les souhaits de nos concitoyens et de certaines de nos concitoyennes.
Mais je me dois de rappeler, et je suis sûr qu'en tant que médecin vous ne pourrez que me suivre, le principe fondamental qui doit nous guider : il ne peut être pratiqué d'acte médical qui ne soit nécessaire, justifié. Or, comme le soulignait M. Delatte, il existe en l'occurrence certains risques pour les femmes soumises à une stimulation ovarienne.
Exclamations.
Oui, nous discutons, nous échangeons… nous sommes des législateurs, pas des médecins.
Vous êtes bien tatillon, aujourd'hui, monsieur Le Fur !
C'est la réalité, monsieur le président. Et puis de toute façon on ne comprend rien à ce qu'il dit !
Nous ne connaissons pas forcément les risques de la stimulation ovarienne. Thrombose veineuse, risque d'embolie pulmonaire, hémorragie interne post-ponction, douleurs pelviennes sévères, insuffisance rénale : voici, très concrètement, les risques induits par la stimulation ovarienne.
Madame Obono, nous estimons qu'il n'est pas nécessaire d'inscrire dans la loi la limitation du recours à la stimulation ovarienne. Nous aurons l'occasion d'y revenir. Mais vos propos vont servir ma démonstration : les médecins doivent appliquer le principe fondamental de non-réalisation des actes non nécessaires. Ils évaluent donc le rapport entre bénéfice et risques. On privilégie d'abord l'insémination, puis la stimulation et enfin, si nécessaire, la FIV. Or, lorsque l'on stimule une personne pour donner ses ovocytes à une autre, le rapport entre le bénéfice et les risques est négatif ! L'appréciation de l'intérêt de la technique relève naturellement de l'équipe médicale mais, dans le cadre de la ROPA, on « force » l'équipe médicale, si vous me permettez ce terme.
Par ailleurs, comme l'a très bien expliqué M. Dharréville, cette technique percute en effet la philosophie du don, qui reste dans notre pays non dirigé – j'apprécie votre sens de la rhétorique, monsieur le rapporteur, mais il s'agirait bien là d'un don dirigé – et anonyme. Ne contrevenons pas à nos principes : le code de la santé publique dessine, vous le savez, un cadre général dans lequel l'anonymat du don est un principe fondamental.
Enfin, introduire cette technique reviendrait en effet à rebiologiser la parentalité.
Cela me semble contradictoire avec les débats d'hier sur l'assistance médicale à la procréation.
Pour toutes ces raisons, je redis que le Gouvernement est opposé à ces amendements.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM.
Revenons à l'esprit de ce projet de loi. L'objectif affiché du Gouvernement est de donner les mêmes droits à toutes les femmes ; il veut ainsi que les femmes célibataires et les femmes en couple lesbien aient accès à la PMA, autorisée aujourd'hui pour les couples hétérosexuels. C'est dans cette logique que nous prévoyons une prise en charge totale par la sécurité sociale : c'est ce qui se fait aujourd'hui pour les femmes en couple hétérosexuel. Pourquoi traiter différemment les femmes célibataires et les femmes en couple lesbien ? C'est encore dans cette logique que nous avons supprimé la notion d'évaluation psychologique : elle n'existe pas pour les femmes en couple hétérosexuel, pourquoi l'infliger aux autres ?
C'est encore dans cette logique que nous avons prévu des bornes d'âge pour l'accès à l'assistance médicale à la procréation, parce que cela existe aujourd'hui comme cela.
Pourquoi alors figer cette différence précise entre les femmes en couple hétérosexuel et les femmes en couple lesbien ? L'esprit de ce projet de loi, c'est, je le redis, celui d'une stricte égalité des droits dans l'accès à une pratique médicale.
Ces amendements ne font que cela : autoriser les couples de femme à recourir à une pratique déjà utilisée pour les couples hétérosexuels. Nous ne pouvons pas adopter une approche différenciée selon les sujets, et traiter différemment les modèles familiaux.
Je reprends mon exemple de tout à l'heure : celui d'un couple de femmes, l'une atteinte d'une maladie chronique qui rendra très difficile de mener une grossesse à son terme, et l'autre, sa compagne ou son épouse, infertile, c'est-à-dire qu'elle aura besoin d'un don de gamètes. Monsieur le secrétaire d'État, vous demanderez donc à une femme lambda de prendre tous ces risques que vous venez de nous citer pour subir une stimulation ovarienne et faire un don extrêmement généreux, anonyme ; mais vous allez refuser à la compagne de la femme concernée de subir cette même procédure parce que ce serait trop dangereux ? On marche sur la tête !
On ne peut pas demander à une femme de subir des stimulations ovariennes pour faire un don généreux, anonyme, et le refuser à la compagne de la femme qui portera l'enfant ! Vous rendez-vous compte de ce que vous dites ?
De plus, on nous dit que ces dons sont de plus en plus rares. Or vous effrayez toutes les femmes qui veulent bien donner leurs ovocytes en décrivant cette procédure comme très dangereuse. Je l'ai déjà dit hier, faisons attention aux mots que nous prononçons dans cet hémicycle. Mesdames, vous pouvez donner vos gamètes ! Nous en manquons déjà. Effectivement, pour une stimulation ovarienne, il faut voir avec le médecin pour que les dosages ne soient pas trop élevés, mais les risques ne sont pas démesurés. Si vous écoutez le secrétaire d'État, nous n'aurons plus de dons de gamètes féminins, et on nous dira que ce sera la faute de quelqu'un d'autre !
Si on peut permettre à une femme de faire anonymement ce don si généreux, permettons-le aussi à la compagne de la femme concernée de lui faire ce joli cadeau.
J'entends vos arguments, monsieur le secrétaire d'État, mais ils paraissent un peu contraints : on a plutôt l'impression que vous cherchez des raisons pour ne pas faire évoluer le texte…
Mme Fiat vient de le dire : si la stimulation ovarienne est dangereuse, alors il faut l'interdire pour tout le monde ; pourquoi l'autoriser seulement pour les dons anonymes et non pour quelqu'un qui le fait pour son propre couple ?
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et FI.
S'agissant du don de gamètes, cela a été dit à plusieurs reprises : il est possible de faire un don fléché dans un couple hétérosexuel. Pourquoi ne pas l'autoriser à un couple homosexuel ? Je ne suis pas convaincu par vos arguments, et ces amendements me paraissent au contraire pertinents.
Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM et sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 123
Nombre de suffrages exprimés 109
Majorité absolue 55
Pour l'adoption 31
Contre 78
L'amendement no 492 n'est pas adopté.
L'amendement no 909 n'est pas adopté.
Avis défavorable : ces amendements visent à supprimer la prise en charge de l'AMP par la solidarité nationale.
Il est défendu en raison du temps législatif programmé, qui ne nous permet pas de développer nos arguments.
La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l'amendement no 1037 .
Il est défendu en raison du temps législatif programmé : je ne peux m'exprimer !
L'amendement no 467 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 2141 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 214 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Le secrétaire d'État pourrait dire pourquoi il donne un avis défavorable !
M. le secrétaire d'État a tout loisir de s'exprimer et il le fait quand il le souhaite.
On ne comprend pas toujours ce qu'il dit, mais il pourrait s'exprimer !
Je constate, monsieur le président Le Fur, que vous êtes très en forme, mais je vous prierai de veiller, comme vous le faites toujours, à la sérénité de nos débats.
L'amendement no 211 de Mme Emmanuelle Ménard est défendu.
L'amendement no 211 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'alinéa 4 rétablit l'impossibilité d'opérer des distinctions entre les couples en fonction de l'orientation sexuelle ou du statut matrimonial des demandeurs et des demandeuses s'agissant de l'accès à l'AMP. Nous souhaitons insister sur le fait que le projet de loi, en l'état, contient un angle mort important en ne permettant pas de façon explicite aux personnes ayant procédé à un changement de sexe à l'état civil de recourir à l'aide médicale à la procréation. Cet amendement vise à ajouter le changement de sexe à l'état civil parmi les éléments ne pouvant justifier une différence de traitement. Il nous semble en effet nécessaire de corriger ce manque pour que nous ne créions pas, au moment où nous prétendons faire avancer l'égalité, de nouvelles discriminations en excluant certaines personnes du dispositif en raison de la nature de leur sexe à l'état civil.
Je partage votre intention, madame Obono, mais j'estime que la notion d'identité de genre est plus large que la seule mention du changement de sexe à l'état civil, en ce qu'elle couvre toutes les personnes susceptibles d'être concernées par une AMP, qu'elles aient, ou non, fait une démarche auprès de l'état civil. Je vous propose donc de retirer votre amendement au profit du suivant, que je soutiendrai, et qui permettrait d'assurer un accès plus large à cette technique.
Nous avons déjà eu, la nuit dernière, un passionnant débat sur cette question, au cours duquel le Gouvernement a exposé tous les arguments en défaveur de ce que vous proposez.
L'amendement no 917 est retiré.
Comme cela a déjà été évoqué, l'identité de genre des personnes demandeuses d'une AMP ne peut pas constituer une discrimination nouvelle pour son accès. Depuis 2016, nous avons facilité la possibilité, pour les personnes transgenres, de changer de sexe à l'état civil. De plus, les hommes transgenres peuvent enfanter par les voies charnelles sans que cela ne pose aucun problème. Au nom de quel droit empêcherions-nous ces personnes d'accéder à l'AMP, quand aucune considération ni physiologique ni éthique ne s'y oppose ?
C'est à titre personnel que je soutiens cet amendement, auquel la commission spéciale a donné un avis défavorable.
La parole est à M. Guillaume Chiche, pour soutenir l'amendement no 377 .
À l'instar de l'amendement de M. le rapporteur, le mien vise à faire fi de toute discrimination dans le traitement des demandes d'AMP, qu'il s'agisse du statut matrimonial, de l'orientation sexuelle ou de l'identité de genre. De cette manière, nous permettrions un accès plein et entier à l'aide médicale à la procréation.
L'amendement no 1215 de Mme Emmanuelle Fontaine-Domeizel est défendu.
La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, pour donner l'avis du Gouvernement.
Ces amendements visent à garantir que toutes les personnes qui s'engagent dans un parcours d'AMP bénéficient de la même bienveillance et des mêmes conditions de prise en charge, sans discrimination en fonction de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre, ce qui est, bien sûr, indispensable. Or le texte proposé pour l'article L. 2141-2 du code la santé publique prévoit déjà cette absence de discrimination. Le principe de non-discrimination constitue en effet un élément central du droit français et se trouve au c? ur de la volonté du Gouvernement et de la majorité d'élargir l'accès à l'AMP à toutes les femmes. Amender ou compléter le projet de loi en la matière ne nous semble donc ni opportun ni utile ; il n'existera aucun obstacle à l'accès à l'AMP lié au fait qu'une personne ait procédé à une transition de genre.
En revanche, le genre indiqué à l'état civil définit l'identité de genre de la personne, dont dépendent les techniques auxquelles elle a accès. Depuis la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice, fournir la preuve qu'une intervention médicale ou chirurgicale a eu lieu n'est plus exigé pour faire modifier la mention de son sexe. Dans la vie civile, seule l'identité indiquée à l'état civil est prise en considération. Une femme devenue un homme à l'état civil, même en ayant gardé son appareil reproducteur féminin, est un homme. Par conséquent, elle est également un homme au regard de l'assistance médicale à la procréation. Cela signifie qu'un homme à l'état civil ne peut avoir accès à l'AMP s'il est seul ou en couple avec un autre homme, mais qu'il pourra y avoir accès s'il est en couple avec une femme, pourvu que celle-ci porte l'enfant après une insémination ou un transfert d'embryon.
L'avis du Gouvernement est donc défavorable.
Il ne suffit pas d'invoquer le principe de non-discrimination, qui est inscrit au fronton de tous les bâtiments publics de notre pays car, dans la réalité, il existe bien des discriminations envers certaines personnes. Vous l'avez dit vous-même, madame la ministre : suivant son statut matrimonial, une même personne peut ne pas avoir un égal accès à l'AMP.
Il existe donc bien un problème dans la rédaction du projet de loi, et un risque de discrimination pour les personnes transgenres parvenues à une certaine étape dans leur transition. Nous savons bien que celle-ci constitue un parcours compliqué et difficile, au cours duquel le changement d'état civil peut intervenir à tout moment. Il est justement de notre rôle de parlementaire de chercher à couvrir de tels angles morts afin d'améliorer le projet de loi.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Monsieur le rapporteur de la majorité La République en marche, je découvre vos amendements successifs et ils m'apparaissent comme autant de propositions de transgressions éthiques. Par l'amendement no 2173 , vous proposez d'élargir l'accès à l'AMP aux hommes transgenres. Dès lors, madame la ministre, je me permettrai de vous reposer une question restée sans réponse hier. Que se passera-t-il si la personne transgenre qui a accouché procède à un changement de sexe à l'état civil après avoir eu accès une AMP en tant que femme, mais avant la naissance de l'enfant ? La personne accouchera-t-elle en tant qu'homme ? S'agira-t-il d'un « homme-mère » pour l'enfant ? Veuillez nous répondre !
L'amendement no 2173 n'est pas adopté.
Il est défendu en raison du temps législatif programmé qui nous opprime !
Sourires.
Rires.
L'amendement no 1320 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il est important d'indiquer dans le code de la santé publique que l'homme et la femme doivent être en âge de procréer et avoir tenté de procréer par les voies naturelles pendant un certain temps, pour éviter tout abus. Cet amendement vise donc à procurer un gage de sécurité juridique, sanitaire et sociale.
Il est défendu en raison du temps législatif programmé et pour montrer à M. Le Fur que je donne l'exemple.
Les amendements nos 193 de Mme Emmanuelle Ménard et 1017 de M. Xavier Breton sont défendus.
La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l'amendement no 1038 .
Cet amendement est légèrement différent des autres présentés dans cette discussion commune, étant donné qu'il vise à préciser que les membres du couple doivent être chacun en âge de procréer, et ce pour éviter tout abus.
Mme Thill souhaiterait imposer aux couples qui souhaiteraient avoir recours à l'AMP une condition préalable de tentative infructueuse de procréation par les voies naturelles pendant deux ans. Mais, concrètement, comment voudriez-vous que nous vérifiions cette condition sans attenter à la vie privée et à l'intimité des couples ? Je suis donc contraint de m'inscrire en faux contre cette proposition qui instaurerait une prescription attentatoire aux droits et libertés de chacun.
Plus généralement, il convient de ne pas adopter une rédaction qui enjoindrait aux équipes médicales de vérifier l'invérifiable. L'avis est donc défavorable sur l'ensemble de ces amendements.
Même avis pour les mêmes raisons que M. le rapporteur.
Après avoir eu des ministres constamment absents, nous avons la chance d'en avoir deux au banc. Ceux-ci n'ont pas encore fui, mais nous nous apercevons qu'ils n'ont pas répondu à la question posée par mon collègue. Sans doute la distance était telle que le son s'est perdu. Je vous la repose donc : si une femme, aux yeux de l'état civil, obtient une PMA et qu'elle change ensuite de sexe pour devenir un homme, sera-t-elle considérée comme un « homme-mère » ? Il s'agira en effet d'une femme devenue homme qui aura accouché. Madame le ministre, monsieur le secrétaire d'État, si l'un d'entre vous souhaitait nous répondre et ne pas fuir ce débat apaisé et serein, cela nous serait très agréable.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.
Monsieur le député, je souhaite comme vous un débat apaisé et serein, et que toutes les questions soient abordées avec le plus grand respect. Mais peut-être n'avez-vous pas eu l'occasion de connaître des gens qui font la démarche de changer de sexe à l'état civil : elle est tout sauf facile, et je ne pense pas qu'on soit dans le même état d'esprit quand on souhaite changer de sexe à l'état civil ou quand on souhaite accéder à la maternité au travers de la PMA.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et MODEM. – Mme Valérie Petit applaudit également.
C'est ce droit que nous souhaitons donner à toutes les femmes.
Mêmes mouvements.
Sur les amendements nos 488 et 489 , je suis saisi par le groupe Socialistes et apparentés d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 488 , 571 , 2149 , 914 , 382 , 2176 rectifié , 1352 , 1070 , 575 , 905 , 489 , 699 , 2111 , 2177 rectifié , 2030 , 443 et 911 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 571 et 2149 sont identiques.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l'amendement no 488 .
Cet amendement vise à permettre au membre survivant d'un couple – s'il s'agit d'une personne susceptible de porter un enfant – de poursuivre le projet parental, comme l'ont recommandé l'Agence de la biomédecine, le Conseil d'État et le rapport de la mission d'information parlementaire.
Peut-on, comme dans la rédaction actuelle du texte, ouvrir la PMA aux femmes seules tout en la refusant à une femme veuve qui ne fait que poursuivre un projet engagé avant le décès de son conjoint ? Peut-on demander à une femme endeuillée de donner ou de détruire les embryons conçus avec son compagnon, tout en lui proposant de poursuivre son parcours avec un tiers donneur ? À ces questions, nous répondons par la négative. Nous pensons au contraire qu'il faut lui offrir cette possibilité.
Il faut toutefois fixer des délais : quand la loi espagnole limite ce transfert à une période de six mois après le décès, la législation belge l'autorise au terme d'un délai de six mois prenant cours le jour du décès et au plus tard dans les deux ans qui suivent ce décès. Nous proposons de nous inspirer de la législation belge pour permettre à la femme veuve de faire son deuil et lui laisser deux ans pour décider si elle souhaite aller au terme de la PMA entamée avec son compagnon décédé, détruire les embryons ou les donner à un couple ayant besoin d'un double don.
La parole est à Mme Laurence Vanceunebrock, pour soutenir l'amendement no 571 .
Cet amendement vise à autoriser l'assistance médicale à la procréation pour le membre survivant d'un couple en cas de décès de l'autre membre, à condition que le couple en ait exprimé ex ante la volonté par écrit. Cet amendement, qui s'inspire du modèle belge d'AMP post mortem, propose que les démarches d'assistance médicale à la procréation puissent être poursuivies au minimum six mois après la mort du défunt et au maximum deux ans après son décès. Ce temps de latence permet au membre survivant de vivre son deuil avant de s'engager dans des démarches éprouvantes. Au-delà de la période légale de la poursuite de l'AMP, le membre survivant peut choisir soit de faire don des embryons et des gamètes, soit d'en demander la destruction.
La parole est à Mme Camille Galliard-Minier, pour soutenir l'amendement no 2149 .
Cet amendement vise également à autoriser l'assistance médicale à la procréation pour le membre survivant du couple en cas de décès de l'autre membre. Comme l'a souligné le Conseil d'État dans son avis du 18 juillet 2019, il serait paradoxal de maintenir cette interdiction alors que la loi va ouvrir l'AMP aux femmes non mariées. En effet, une femme dont l'époux ou le concubin décède devra renoncer à tout projet d'AMP avec les gamètes de ce dernier ou les embryons du couple et n'aura que le choix de les donner ou de les détruire, alors que, dans le même temps, elle sera autorisée à réaliser cette AMP seule avec un tiers donneur.
En outre, dix-huit ans après, la veuve pourrait être contactée par l'enfant issu du don de gamètes de son défunt mari ou concubin, s'il choisit alors de connaître l'identité du donneur. Ainsi, comme l'a également rappelé le Conseil d'État, il paraît nécessaire, dans un souci de cohérence de l'ensemble de la réforme, d'autoriser le transfert d'embryon ou l'insémination post mortem.
Toutefois, il convient d'encadrer cette pratique et de la soumettre à deux conditions cumulatives : la vérification du projet parental, afin de s'assurer du consentement du conjoint ou concubin décédé, et l'encadrement dans le temps de la possibilité de recourir à cette AMP, celle-ci devant être poursuivie au minimum six mois après la mort du défunt et au maximum deux ans après son décès.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Cet amendement vise à permettre aux personnes en couple et qui ont entamé un projet d'assistance médicale à la procréation de le poursuivre même en cas de décès de l'un des membres du couple. Que l'insémination artificielle post mortem ne soit pas autorisée dans ce projet de loi donnera lieu, de notre point de vue et de celui de plusieurs spécialistes, à la création d'une situation tout à fait paradoxale pour la personne survivante et souhaitant mener le projet à bout. Nous proposons que lui soit accordé, pour réaliser l'insémination, un délai compris entre six mois et deux ans après le décès de l'un des membres du couple.
Il nous semble que l'argument avancé par le Gouvernement en première lecture, et qui consiste à affirmer qu'on ne pourrait pas s'assurer de la véracité du consentement d'une personne dans la situation de recevoir un embryon ou des gamètes issus de son conjoint ou de sa conjointe décédée, nous semble extrêmement paternaliste. Toute décision de donner vie à un enfant peut avoir plusieurs sources, la pression de la société, de la famille ou de la conjointe, tout cela existe. Décider à la place des personnes ce qu'elles souhaitent ou ne souhaitent pas faire, cela ne nous semble être le rôle ni de l'État ni des parlementaires que nous sommes. Nous proposons donc d'encadrer la procédure, mais de donner ce droit et cette liberté d'aller jusqu'au bout de ses projets.
La parole est à M. Guillaume Chiche, pour soutenir l'amendement no 382 .
Cet amendement vise à autoriser une femme qui a entrepris un parcours d'aide médicale à la procréation, qui a défini et construit un projet parental avec son conjoint ou sa conjointe, à le poursuivre et à le mener à terme si ledit conjoint ou ladite conjointe venait à décéder.
En l'état actuel du droit, la conjointe survivante a trois possibilités : soit procéder à la destruction des embryons, soit en faire don à la recherche, soit en faire don pour un autre projet parental. Soumettre quelqu'un à un tel choix, au moment même où il est confronté au deuil, c'est absolument inhumain. Cela revient à lui dire que son projet parental s'effondre, même en présence du consentement éclairé de la personne décédée.
C'est pourquoi cet amendement propose que le consentement du conjoint ou de la conjointe à la poursuite du parcours d'aide médicale à la procréation en cas de décès soit recueilli, au plus tôt six mois et au plus tard vingt-quatre mois après le décès. Il faut s'en remettre pleinement à la volonté de la femme survivante pour savoir si elle peut mener à bien son projet parental, sachant que, si ces amendements identiques ne sont pas adoptés, elle ne pourra le poursuivre qu'avec un donneur anonyme. Je vous encourage donc vivement à les voter.
Sur les amendements nos 2176 rectifié et 2177 rectifié , je suis saisi par le groupe UDI et indépendants d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Jean-Louis Touraine, rapporteur, pour soutenir l'amendement no 2176 rectifié .
Il semble en effet que l'heure soit venue d'autoriser l'AMP de volonté survivante. J'utilise cette terminologie puisqu'il nous a été expliqué que l'ancienne dénomination de « PMA post mortem » n'est pas adaptée : stricto sensu, elle signifie en effet la réalisation d'une PMA chez une femme décédée. Ce n'est bien sûr pas de cela qu'il s'agit.
De quoi s'agit-il ? Un couple entame un projet parental. Chacun de ses membres – le mari et la femme, par exemple – signe un document précisant que, même si le mari décède, il souhaite que le projet parental soit pérennisé. En cas de décès du père de l'embryon concerné, six mois plus tard, la femme, qui a fini son temps de deuil, sans qu'elle subisse aucune pression d'aucune nature, se pose la question et, à nouveau, soit infirme la proposition initiale de prolonger ce projet parental, soit, au contraire, le confirme et demande l'implantation de l'embryon pour avoir un enfant, comme elle l'avait décidé avec son mari.
Il serait difficile de ne pas accéder à cette volonté. Nous donnons aujourd'hui à toutes les femmes seules la possibilité d'accéder à l'AMP. Je rappelle d'ailleurs que, déjà en 2011, à l'occasion d'une révision précédente de la loi de bioéthique, ce projet d'AMP de volonté survivante avait été adopté. Si nous sommes revenus en arrière ensuite, si ce vote a été annulé, c'est parce que, et uniquement parce que, l'AMP n'était pas ouverte aux femmes seules et que, une veuve étant une femme seule, elle ne pouvait pas y accéder.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Désormais, nous autorisons les femmes seules à concevoir un enfant par AMP. Le Conseil d'État nous y a d'ailleurs exhortés, demandant que nous accordions naturellement ce droit et insistant pour que nous légiférions en ce sens afin d'éviter des contentieux qui promettraient, sinon, de devenir de plus en plus complexes.
Cette AMP de volonté survivante évite aux veuves de subir, en plus de la perte de leur conjoint, la fin définitive du projet parental qu'elle partageait avec lui. Elle évite aussi une situation qui serait excessivement embarrassante, tant du point de vue humain que sur le plan affectif, voire juridique, puisque l'embryon qu'elle avait fait avec son mari pouvant être accordé au don, il pourrait se développer et prospérer jusqu'à la naissance d'un enfant chez une femme ou un couple inconnus d'elle.
Du fait du droit à l'accès aux origines, à 18 ans, l'enfant pourrait se présenter devant cette femme et lui annoncer : « Bonjour madame, même si vous n'êtes pas ma maman, je suis le fruit de l'embryon que vous avez conçu avec votre mari ». Si en plus ce jeune homme ressemblait à son père biologique, imaginez le choc pour cette femme, privée de la possibilité de porter son enfant, qui le rencontrerait après qu'il a grandi dans une autre famille !
Voilà qui doit nous conduire, de manière naturelle, sans polémique ni idéologie, à accepter cette évolution souhaitable du droit. Dès lors que l'on permet aux femmes seules de bénéficier de l'AMP, ne pas accorder ce droit aux femmes survivantes constituerait un très mauvais signal pour nos compagnes, et toutes les femmes de France – comme si l'on considérait qu'elles n'étaient pas suffisamment libres pour décider par elles-mêmes, comme si elles n'étaient pas adultes, capables de choisir.
Un tel manque de respect pour les femmes serait préjudiciable. Depuis 1975, les femmes de ce pays ont le droit de choisir si elles prolongent ou non leur grossesse. Il serait heureux qu'en 2020, elles puissent décider si elles veulent prolonger ou non leur projet parental.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM, MODEM et SOC.
La parole est à M. Brahim Hammouche, pour soutenir l'amendement no 1352 .
L'expression « PMA post mortem » est très mal choisie ; il faudrait plutôt parler de « PMA pro vita », puisqu'il s'agit de prolonger la vie, …
… notamment le sens et l'existence de la vie d'un couple, quand celui-ci a été percuté par l'issue difficile d'une maladie, comme je peux en témoigner après avoir accompagné un couple qui a souhaité se marier juste avant le décès d'un des conjoints.
Je pense à eux, au moment de défendre cet amendement ; grâce à cette disposition ils auraient pu prolonger leur couple, et donner du sens à son existence.
Il est assez incohérent d'autoriser la PMA pour des familles monoparentales et de l'interdire pour les couples dont l'un des conjoints a hélas disparu.
La PMA pro vita repose sur un choix très raisonné. Elle a été recommandée par l'Agence de la biomédecine, le Conseil d'État et le rapport d'information fait au nom de la mission d'information sur la révision de la loi relative à la bioéthique, dans des avis très bien documentés. Avec une telle mesure, il ne s'agit pas de céder à un fantasme de transgression, ni au transhumanisme, mais de faire un choix raisonné.
Le dispositif, enfin, est bien cadré, puisque l'AMP ne peut intervenir qu'entre le sixième et le vingt-quatrième mois suivant le décès, pour garantir la valeur du consentement, tout en accompagnant le deuil.
Certains parlent de changement civilisationnel. Ce n'est pas du tout le cas. Permettez-moi de rappeler que le père de la médecine, Hippocrate, disait déjà au Ve ou IVe siècle avant notre ère : « ars longa, vita brevis, occasio præceps, experimentum periculosum, iudicium difficile », c'est-à-dire « l'art est long, la vie brève, l'occasion fugitive, l'expérience périlleuse et le jugement difficile ». Nous en sommes toujours là.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes MODEM et LaREM.
La parole est à M. Jean François Mbaye, pour soutenir l'amendement no 1070 .
Nous avons déjà abordé la question de la PMA post mortem en première lecture, et en commission spéciale. Après avoir bien écouté les uns et les autres, à mon sens, aucun argument solide ne semble justifier le refus qu'opposent certains à cette mesure.
M. Hammouche et le rapporteur, entre autres collègues, viennent de le rappeler : depuis 1993, avant même l'adoption de la première loi de bioéthique, le Comité consultatif national d'éthique n'a eu de cesse d'indiquer que rien ne faisait obstacle à la poursuite du processus d'AMP en cas de décès du conjoint.
Il l'a d'ailleurs répété récemment, dans son dernier avis, qui porte sur ce texte. Et pour cause ! Alors que nous envisageons l'ouverture de l'AMP à toutes les femmes – mesure qui sera adoptée, je l'espère – , autoriser la poursuite d'une procédure d'AMP malgré le décès du conjoint s'impose.
En effet, à partir du moment où l'AMP sera ouverte à toutes les femmes, comment pourrons-nous expliquer aux femmes qu'elles n'ont pas le droit d'utiliser les gamètes de leur défunt conjoint, avec lequel elles ont bâti un projet parental, mais peuvent bénéficier d'une AMP en tant que femme seule, en faisant intervenir un tiers donneur ?
D'ailleurs, monsieur le secrétaire d'État, quand il s'agit d'utiliser les gamètes du tiers donneur, personne ne se soucie de savoir si celui-ci est vivant ou décédé.
Prenez cela en considération. Pour moi, l'interdiction actuelle n'a donc aucun sens.
Tout comme mes collègues, je propose, par cet amendement, d'encadrer la possibilité de recours à l'AMP dans ces situations grâce à un délai fixé par décret. Par ailleurs, le recours à cette procédure serait impossible dès lors qu'un enfant du couple serait déjà né à l'issue d'une AMP. De tels garde-fous devraient permettre de rassurer les plus sceptiques d'entre nous.
Enfin, chers collègues, les femmes n'ont pas besoin que nous décidions à leur place – ce que nous ferions, en maintenant l'interdiction actuelle. Si elles estiment être en mesure de poursuivre un processus d'AMP malgré le décès de leur conjoint, pourquoi les priver de cette liberté ?
Pourquoi se sentir obligé de s'immiscer dans l'intimité de ces femmes ?
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM, MODEM et SOC.
Nous le répétons depuis plusieurs heures : ce texte touche à l'intime. Refuser de voter en faveur de ces amendements reviendrait à nier la liberté et le choix de ces femmes de poursuivre le projet parental construit avec leur conjoint défunt. Laissons-leur le choix, …
… ne nous immisçons pas dans leur intimité, respectons leur autonomie.
Je conclurai en rappelant que nous sommes tous attachés au principe de liberté, dans ce pays. Laissons aux femmes la liberté de choisir ce qu'elles veulent faire avec les gamètes de leur mari décédé.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.
Cette question est délicate, sensible, et touche à l'intime. Je ne comprends pas, cependant, que l'on puisse concevoir d'ouvrir la PMA à toutes les femmes, et donc de permettre à une femme dont l'époux est décédé de réaliser une PMA seule avec un tiers donneur, tout en refusant à la même femme dans le même texte de réaliser une PMA avec les gamètes de l'homme qu'elle a aimé, et avec qui elle avait engagé un projet parental.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM, MODEM et SOC.
Je ne comprends pas ce paradoxe, souligné par bon nombre de mes collègues et le Conseil d'État.
En l'état actuel du droit, les embryons sont détruits, donnés à la recherche, ou donnés à un autre couple. Or, comme l'a rappelé le rapporteur, le droit à l'accès aux origines donne la possibilité de découvrir son histoire à 18 ans.
En autorisant la PMA pour les femmes survivantes, nous évitons de priver de leur histoire intime les enfants dont l'embryon avait déjà été créé avant le décès de leur père.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.
La parole est à Mme Michèle Victory, pour soutenir l'amendement no 489 .
Par cet amendement de repli, le groupe Socialistes et apparentés propose de permettre à la femme survivante d'utiliser uniquement les embryons issus de gamètes de leur conjoint défunt.
Cela vient d'être dit et nous l'avons déjà répété : ce serait une immense, une incompréhensible contradiction que de refuser à des femmes devenues veuves ce que nous autoriserons à des femmes seules. C'est une question de cohérence.
Reconnaissons que bénéficier de ce droit ne serait que justice pour ces femmes, et leur permettrait de pallier la situation lourde et dramatique de la perte d'un conjoint.
Mais jusqu'où allez-vous nous emmener ? À un moment, il faut respecter la mort !
Redonnons un peu d'espoir à ces femmes comme à leurs familles, en leur permettant d'aller au bout de leur projet parental. Hier, nous avons beaucoup parlé d'amour sur ces bancs. C'est quand même une preuve d'amour qui dure, que de donner vie à un projet imaginé par deux êtres qui menaient leur vie ensemble ! Permettons-le.
Tous les arguments, même si certains sont plus techniques que d'autres, sont très intéressants, mais sur le fond, on aurait du mal à comprendre que quiconque s'oppose à une idée aussi simple et belle.
Depuis la première lecture de ce projet de loi, je me suis posé beaucoup de questions concernant la continuation du projet parental après le décès d'un conjoint.
Il me semble qu'il faut prendre en considération le stade d'avancement du projet parental. Une fois qu'un embryon a été créé, je ne me vois pas empêcher à une femme de poursuivre son projet parental.
L'amendement no 699 vise à encadrer le transfert d'embryon, en fixant des délais de réflexion minimum et maximum. Le délai minimum, nécessaire avant de réaliser ce transfert, serait fixé à six mois, afin que la personne concernée puisse faire le deuil de son conjoint et réfléchir à la poursuite de son projet parental.
Le délai maximal pour le transfert d'embryon serait de deux ans. Passé ce délai, on peut raisonnablement considérer que la femme ne souhaite plus poursuivre ce projet parental.
L'amendement no 2111 vise à permettre la conclusion de contrats testamentaires afin de sécuriser le sort de l'embryon.
La parole est à M. Jean-Louis Touraine, pour soutenir l'amendement no 2177 rectifié .
Il concerne le cas spécifique des embryons congelés créés à partir des gamètes des deux parents. Leur implantation serait possible dès lors que les parents ont exprimé leur volonté que le projet se prolonge au-delà de l'éventuel décès de l'un d'eux, et que la femme survivante a confirmé qu'elle le désire, au minimum six mois après le décès de son conjoint, sans avoir été soumise à aucune pression, évidemment.
Ce délai minimum, de six mois, permet de garantir que la décision sera prise après la phase de deuil ; le délai maximum, de dix-huit mois, permet d'éviter de différer la succession du défunt.
La parole est à Mme Laëtitia Romeiro Dias, pour soutenir l'amendement no 2030 .
En première lecture, j'avais choisi de vous dépeindre le plus sensiblement possible l'injustice subie par les femmes veuves concernées, la douleur ajoutée à leur douleur. Mais cela n'a pas suffi à emporter la majorité des voix.
Depuis hier, nos collègues du groupe Les Républicains, que j'ai écoutés attentivement, nous disent que les arguments d'amour et de compassion ne sont pas audibles et ne doivent pas appartenir au vocabulaire d'un législateur, celui-ci devant légiférer en dehors – je cite – « de tout sentiment ».
Dans ce contexte, vous comprendrez qu'il n'est pas aisé de savoir comment défendre un amendement en espérant que le débat ne sera pas émaillé d'une série de mots blessants pour les personnes qui nous écoutent.
Je parlerai juste en législateur et défendrai la PMA pour toutes les femmes, quel que soit leur statut matrimonial, en incluant le seul de ces statuts qui n'a pas été pris en considération : la femme veuve.
Je me suis penchée sur la jurisprudence du Conseil d'État, qui a accepté de contourner la législation française en autorisant le transfert des embryons à l'étranger. Il a estimé que « le refus [d'implantation à une femme veuve] porte une atteinte manifestement excessive à son droit au respect de la vie privée et familiale. »
Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et SOC.
Les juges insistent sur le respect de la décision du couple et sur l'autonomie du projet parental de la femme.
Par ailleurs, saisi du projet de loi actuel, le Conseil d'État a indiqué qu'il serait paradoxal de maintenir l'interdiction alors que le législateur ouvre l'AMP aux femmes non mariées.
J'ai aussi consulté les travaux législatifs passés. Les députés Alain Claeys et Jean Leonetti, qui ont tous deux travaillé sur ce sujet, ont préconisé cette évolution dans leur rapport ; je reviendrai sur leurs arguments.
Dans son rapport de 2008, l'OPECST – Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques – préconisait déjà cela, non pas dans le sens des législations les plus permissives mais dans celui de l'adoption d'une solution médiane raisonnée, que j'ai reprise.
Protestations sur les bancs du groupe LR.
La question du droit des femmes sur les embryons se pose. Sur le plan juridique comme sur le plan éthique, pourquoi le décès de l'homme ferait-il disparaître les droits de la femme sur cet embryon, qui procède à la fois d'elle et de son conjoint ?
Pour M. Leonetti, le projet parental est certes interrompu mais, une fois l'homme disparu, aucune autorité ne serait apte à faire prévaloir sur les embryons des droits égaux ou supérieurs à ceux de la femme qui est à l'origine de leur conception.
Ces travaux rejoignent ceux du Comité consultatif national d'éthique, d'Axel Kahn, de Caroline Chabault-Marx et d'autres.
En examinant le débat sous l'angle du devenir des embryons, refuser cette implantation met la femme face à une offre qualifiée d'absurde par beaucoup de professionnels de terrain. Le député Alain Claeys avait repris ce terme dans son rapport de 2002 pour la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la bioéthique. Ce choix absurde est effectué entre la destruction des embryons, leur don à la recherche ou leur accueil par un autre couple ou une autre femme seule. Les deux premières options – si l'on peut parler ainsi – aboutissent à la disparition des embryons. La troisième prive un enfant de sa mère biologique, alors qu'elle est vivante et souhaite l'élever. Plusieurs psychanalystes, notamment Geneviève Delaisi de Parseval, estiment que les répercussions psychologiques pour l'enfant né dans ce contexte semblent identiques à celles qui affectent un orphelin.
En tant que législateur et de manière objective, autorisons la PMA à toutes les femmes quel que soit leur statut matrimonial, c'est-à-dire aussi aux femmes veuves. Autorisons-la selon un modèle plus exigeant que celui prévu par les législations étrangères : avec une limitation aux seuls embryons, à la condition du consentement de l'époux à un tel transfert et dans un délai encadré, qui peut être assorti d'un accompagnement.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM et sur les bancs des groupes SOC et EDS.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement no 443 .
Nous sommes face à une question délicate qui en recouvre en réalité deux, souvent mélangées. En cas de décès, le premier cas de figure est la présence de gamètes mais l'absence d'embryons ; implicitement, l'amendement prévoit qu'une insémination n'est alors pas possible. Le second cas de figure est la présence d'embryons. Je suis de ceux qui ont toujours défendu, depuis maintenant vingt-cinq ans, le principe selon lequel la vie commence lors de la fécondation. Dans ce second cas, nous sommes donc en présence d'un être en devenir. Notre amendement est proche de l'amendement de repli no 2177 rectifié du rapporteur. Nous pourrions nous rassembler autour de cette position : en présence d'embryons, la possibilité est donnée à une femme ayant perdu son mari de bénéficier de la transplantation et de porter un enfant.
S'agissant du premier cas de figure en revanche, nous serons fondamentalement divisés. Est-il sage de concevoir, c'est-à-dire de procéder à une insémination, plusieurs mois après le décès du conjoint ? La question est ardue. C'est pourquoi cet amendement, comme l'amendement no 2177 rectifié du rapporteur, apporte une solution d'équilibre, quelles que soient les positions des uns et des autres sur la PMA pour les femmes seules ou les femmes en couple. Il s'agit là d'un être en devenir, qui existe : dire à une femme qu'elle ne peut pas recevoir cet enfant…
Si, chère collègue. Ce ne sont pas des gamètes, mais un embryon, c'est-à-dire un être en devenir ; lorsque j'ai été conçu, j'étais un être en devenir et je n'ai pas fini de l'être !
Sourires et applaudissements sur quelques bancs des groupes LT, MODEM et LaREM.
En tout état de cause, ces deux amendements proposent une solution équilibrée de rassemblement, quelles que soient nos positions, y compris celle des partisans de la limitation de la PMA aux couples hétérosexuels stables.
Nous proposons de supprimer l'alinéa 7. Comme le souligne le Conseil d'État, dès lors que des personnes seules ont la possibilité d'avoir accès à la procréation médicalement assistée, ne pas permettre que ce projet puisse se faire avec les gamètes de la personne décédée contraindra la personne survivante à avoir recours à des gamètes issus d'un don anonyme. Ce changement brutal de projet n'est pas sans risque pour la personne désireuse de porter un enfant.
Afin que cette insémination artificielle post mortem puisse être réalisée, le ou la conjointe devra obligatoirement, en amont du parcours d'insémination, indiquer par écrit au corps médical qu'il accepte que la personne partageant sa vie ait recours à ses gamètes s'il décédait avant que l'insémination puisse avoir lieu.
En première lecture, nous avions prévu qu'en cas de décès d'un des membres du couple, l'assistance médicale à la procréation se poursuive dans un délai compris entre six mois et trois ans après le décès, dès lors que la personne décédée y a consenti explicitement de son vivant. Le consentement de la personne à poursuivre cette démarche est constaté lors des entretiens prévus à l'article L. 2141-10 du code de la santé publique.
Nous encourageons vivement le Gouvernement à reprendre l'amendement à son compte, afin de faire cesser cette absurdité.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Il est favorable, en particulier concernant l'amendement no 443 . La commission privilégie le projet parental plus avancé, qui prend la forme d'un embryon. Vous avez raison, monsieur de Courson, de parler d'être en devenir ; la terminologie officielle est la suivante : « personne humaine potentielle ». Par conséquent, si cet embryon prospère jusqu'à devenir un nouveau-né, il héritera du père décédé et jouira des mêmes droits qu'un enfant déjà né au moment du décès. En filigrane, on note l'acceptation du fait que l'embryon appartient à la famille et que la femme a le droit d'en faire son enfant si elle le désire – ce choix personnel lui incombe.
Je renouvelle donc l'avis favorable de la commission et le mien propre, notamment concernant l'amendement no 433 .
C'est au titre de l'article 88 du règlement intérieur que cet avis est favorable, ce n'est pas un avis de la commission qui s'est réunie il y a trois semaines !
Soyons précis : quel est l'avis de la commission sur chacun des amendements en discussion commune ?
La commission est favorable à l'amendement no 443 et défavorable à tous les autres.
Protestations sur divers bancs
Il faut le dire ! Est-ce l'avis du rapporteur ou celui de la commission ?
Mêmes mouvements
La parole est à Mme Agnès Firmin Le Bodo, présidente de la commission spéciale.
L'amendement no 443 de Mme Sylvia Pinel a reçu un avis favorable lors de la réunion de la commission conformément à l'article 88 du règlement intérieur ; les autres amendements ont reçu un avis défavorable. Initialement, la commission spéciale avait donné un avis défavorable à l'ensemble des amendements.
Le rapporteur et la présidente de la commission spéciale confirment donc que seul l'amendement no 443 reçoit un avis favorable.
On n'y comprend rien, pourtant le secrétaire d'État n'a pas encore parlé !
Il est défavorable à l'ensemble des amendements en discussion commune.
« Très bien ! » sur les bancs du groupe LR.
Nous avons beaucoup entendu parler de projet parental pour les défendre ; or un projet parental construit par un couple diffère de celui construit par une femme seule. Dans le premier cas, le décès de l'un des membres du couple, par définition, détruit le projet tel qu'il avait été imaginé. Cela ne signifie pas que la femme ne peut pas avoir un nouveau projet parental, mais il sera différent. Croyez-moi, la disparition d'un conjoint modifie brutalement un projet.
Nous avons beaucoup parlé des pressions familiales qui pourraient contraindre les femmes. Au-delà de ces pressions, je souhaite évoquer un souvenir de la première lecture, concernant notamment les problèmes de filiation.
Ne peut être considéré comme enfant du père décédé qu'un enfant né entre des dates autorisant la présomption de conception. Nous ne serons plus dans cette situation : il faudrait donc changer complètement le principe de filiation pour le père.
Que dire aux héritiers ? Que faire de la succession ? Faut-il imaginer un droit de succession pour l'embryon, voire pour les gamètes, en attendant que la décision soit prise ? C'est une véritable transformation de plusieurs codes qui deviendrait nécessaire avec l'adoption de ces amendements.
L'avis du Comité consultatif national d'éthique est important mais, sauf erreur, ce n'est pas lui qui vote les lois. En l'état actuel du code civil et compte tenu de ce qui est souhaitable pour l'enfant, les amendements qui ont été défendus en discussion commune posent encore énormément de questions. C'est pourquoi l'avis du Gouvernement est défavorable.
Applaudissements sur certains bancs du groupe LaREM et sur les bancs du groupe LR.
Nous nous opposons à la PMA post mortem. Vous avez dressé un parallélisme entre une femme seule et une femme qui le deviendrait, mais une veuve et une femme seule vivent des situations différentes. Dans le premier cas, le deuil modifie complètement la famille. On ne peut donc pas comparer les deux situations.
La PMA post mortem fait courir un risque psychologique, comme l'a d'ailleurs dit une psychologue que vous avez citée, qui a affirmé qu'un enfant né d'une PMA post mortem ne serait pas plus perturbé qu'un orphelin. Cela revient à reconnaître la perturbation que crée la naissance d'un enfant suite à une PMA post mortem.
Faire naître un enfant d'un homme décédé est une situation qui n'est pas normale et qui n'est pas sans risque. Il faut donc appliquer le principe de précaution, que l'on déploie dans de nombreux cas dans notre pays : s'il y a bien un domaine dans lequel il faut faire valoir ce principe, c'est celui qui engage l'intérêt d'un enfant.
Mes chers collègues, je souhaiterais que vous soyez un peu plus habités par le doute. Vous n'avez presque pas parlé de l'intérêt de l'enfant, vous n'avez évoqué que les adultes et le désir de la femme. Un enfant peut redonner de l'espoir à une femme, a-t-on entendu : ce propos m'a particulièrement choquée.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR, ainsi que sur quelques bancs des groupes UDI-I et Agir ens.
Ce n'est pas la fonction d'un enfant, qui est un sujet et non un objet de réparation.
Mêmes mouvements.
Plusieurs arguments peuvent être mis en avant pour rejeter ces amendements. J'en reprendrai quatre, que le Conseil d'État a développés dans son avis de 2018 sur un projet de loi relatif à la bioéthique. Tout d'abord, l'autorisation d'une AMP post mortem pourrait entraîner la naissance d'un enfant dont le père est décédé avant même sa conception dans le cas de l'utilisation des gamètes, ou avant le début de sa gestation pour les embryons. L'enfant ne sera élevé que par un seul parent, ce qui est une source de vulnérabilité que l'on créerait ipso facto.
Ensuite, le Conseil d'État affirme que naître dans un contexte de deuil est une situation qui pourrait marquer le récit identitaire de l'enfant, subissant nécessairement l'impact du deuil de son père. Symboliquement, cette PMA revient à faire engendrer un mort, cette charge psychologique pesant sur l'enfant. Or, comme l'a excellemment indiqué Annie Genevard à l'instant, c'est l'intérêt de l'enfant qu'il faut prendre en considération.
Dans un tel contexte, il est difficile de créer les conditions d'une décision apaisée de la mère, d'autant, comme l'a dit Mme la ministre avec laquelle nous sommes en plein accord sur le sujet, que des pressions familiales pourraient s'exercer sur la mère en deuil.
Le dernier argument, que vous avez également avancé, madame la ministre, est juridique : si cette technique était autorisée, il faudrait profondément modifier le droit de la filiation et celui des successions, afin d'intégrer l'enfant à la lignée du défunt. Cela n'aurait ni pour objet ni pour effet de faire de l'embryon ou des gamètes conservés des sujets de droit : nous avons été très choqués par l'idée d'élaborer un contrat, qui mène à une marchandisation du corps. Nous n'imaginons pas la signature d'un contrat chez le notaire portant sur un embryon.
Mme Annie Genevard applaudit.
J'ai bien entendu les différents arguments sur ce sujet délicat. Effectivement, une veuve n'est pas une femme seule, ce fait est à prendre en compte.
Beaucoup de choses me viennent à l'esprit. Tout d'abord, on ne donne pas la vie après la mort, l'enfant n'est pas destiné à prolonger la vie d'un couple. C'est ainsi. Nous en avons parlé, des pressions familiales peuvent s'exercer. Le deuil est impossible, voire difficile, quand on vit pendant des années avec celui qui ressemble à l'être cher et disparu.
En outre, il y aura une réelle inégalité entre les enfants d'une même famille, entre ceux qui ont connu le père et celui qui ne l'a pas connu. Encore une fois, le grand oublié est l'enfant.
Enfin, comment justifierez-vous la différence de traitement entre une femme qui a obtenu le consentement du conjoint décédé et une autre qui ne l'a pas obtenu, notamment si elle a subi un refus de son ancien conjoint ? Personne ne sait ce que l'un pense de l'autre après le décès, si bien que le consentement doit être considéré comme nul.
Dans ma vie professionnelle et mon mandat de députée, l'intérêt supérieur de l'enfant m'a toujours guidée, que ce soit pour l'adoption – il me semble que vous avez évoqué le projet de loi sur l'adoption hier soir – ou pour la procréation post mortem.
Assumer symboliquement de ne pas permettre aux futurs nouveau-nés de se référer à un point d'appui paternel vivant dans la lignée de la filiation est inacceptable d'un point de vue éthique. Laissons cette veuve vivre sa vie comme elle l'entend après le décès de son époux, et nous verrons bien le chemin qu'elle prendra. Il ne faut pas faire porter à l'enfant conçu dans ce cadre cette charge affective et symbolique toute sa vie.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et LR.
Je souscris aux propos de mes collègues qui ont rappelé la nécessité de laisser les femmes choisir.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM. – M. Guillaume Chiche applaudit également.
C'est un héritage cher que nous ne devons pas abîmer.
Madame la ministre, j'ai écouté avec attention votre intervention, dont l'un des éléments m'a perturbée. Vous avez évoqué un changement brutal du projet parental : le décès est brutal, la perte de l'être cher est brutale mais, dans la vraie vie, la question de la disparition de l'un des conjoints se pose dans tous les couples qui élaborent des projets. L'aboutissement d'un projet parental reposant sur la PMA est si long que ce sujet entre forcément dans les discussions du couple. Les amendements prévoient d'ailleurs le consentement de l'époux. Le projet parental peut intégrer l'éventuel décès de l'un des deux époux.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Soyons vigilants sur ce point : imaginons que nous ne parlons pas de la PMA et soyons très attentifs aux termes que nous utilisons. Un enfant conçu le lundi, dont le père décède dans un accident de voiture le mardi, se trouvera dans une situation très proche de celle dont nous discutons aujourd'hui.
Que disent les propos que l'on entend – charge mentale pour l'enfant, poids que l'on ferait peser sur la mère – aux femmes qui ont conçu un enfant avec une personne décédée hier ? Faisons très attention à ce que nous disons !
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.
Vos arguments contre l'amendement no 443 , que j'ai cosigné, ne sont pas recevables, madame la ministre. Tout d'abord, vous affirmez brutalement que la mort met fin au projet parental : non, madame la ministre !
J'ai dit qu'elle le modifiait.
Si un enfant est conçu avant la mort de son père dans un accident de voiture ou dans une autre circonstance malheureuse de la vie, le projet parental continue.
Non !
Cet enfant verra le jour, il fera partie des enfants que l'on nomme post mortem. Votre argument ne tient pas, comme notre collègue le rappelait avec raison à l'instant.
Le deuxième argument, que vous n'utilisez pas, est d'ordre patrimonial : savez-vous qu'il est possible de faire hériter un enfant conçu non né ? Vous pouvez vérifier ce point avec M. le garde des sceaux. Un homme se trouvant à la veille de sa mort peut faire une donation à sa femme enceinte pour telle ou telle raison.
Ce n'est pas la même chose !
Vous avancez un dernier argument, qui touche à la filiation : vous avez raison, mais il est possible d'ajuster le droit de la filiation en prévoyant un délai. C'est faisable et simple !
Enfin, vous n'avez pas abordé le sujet du mariage post mortem, dont le régime juridique existe. Si vous étiez cohérente, vous supprimeriez le mariage post mortem.
Protestations sur plusieurs bancs.
Nous sommes nombreux dans cette assemblée à avoir vu des femmes vivant cette situation : dans ma circonscription, une femme et son compagnon avaient deux enfants ; les bans étaient publiés, mais lui, passionné de moto, s'est tué dix jours avant le mariage. Cette femme et moi avons écrit au Président de la République, qui a accordé le mariage post mortem. Elle a ainsi pu défendre ses droits et ceux de ses enfants. Vous le voyez, madame la ministre, vos arguments ne tiennent pas.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM – MM. Brahim Hammouche et Hervé Saulignac applaudissent également.
Charles de Courson vient de très bien dire les choses : en tant que maire, j'ai eu deux mariages post mortem, autorisés par le Président de la République, à célébrer. Il ne faut pas dire que ce n'est pas pareil : là aussi, un homme et une femme avaient un projet parental et souhaitaient construire leur vie ensemble. Le droit actuel permet le mariage post mortem.
Madame la ministre, vous avez dit que le projet parental était modifié par le décès de l'un des conjoints, mais nous pouvons tous nous retrouver sur l'amendement no 443 – Jean-Louis Touraine l'a très bien compris – car il est équilibré. L'embryon prouve que le couple s'était déjà inscrit dans une démarche de PMA, car l'embryon marque le début de la vie. À la souffrance folle d'une femme qui perd son compagnon, alors qu'elle se trouvait dans un processus de PMA, on répond par une deuxième violence en lui refusant l'implantation d'un embryon qui existe déjà. Réfléchissons à ces situations, mes chers collègues !
Enfin, cette question avait été soulevée en commission spéciale, Agnès Firmin Le Bodo s'en souvient, combien de cas aurons-nous à traiter chaque année ?
Arrêtons-nous sur ce point : les cas seront moins nombreux que les doigts de la main. Réfléchissons avant de décider ! La solution proposée par Sylvia Pinel, relayée par Charles de Courson et soutenue par Jean-Louis Touraine est équilibrée, humaine et juste.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM, ainsi que sur quelques bancs du groupe MODEM.
Nous traitons un sujet très délicat et je déplore que l'on s'accuse d'avancer des arguments irrecevables. Il faut débattre sereinement.
Je me souviens que Mme Agnès Buzyn…
… nous avait dit qu'il n'y avait eu que dix cas en dix ans.
Les défenseurs des amendements ont parlé de consentement éclairé : dans quelle mesure une femme endeuillée et fragilisée peut-elle donner un consentement éclairé ? Elle peut subir des pressions familiales, qui rendront difficile sa prise de décision.
En outre, concevoir un enfant orphelin me met mal à l'aise.
Cette situation pourrait faire du nouveau-né un enfant réparateur, qui comble un deuil et qui console.
Enfin, quelles seront les conséquences psychologiques pour un enfant né d'un parent mort ?
Madame Genevard, vous avez dit tout à l'heure que l'enfant n'était pas un palliatif à la perte du conjoint : je suis tout à fait d'accord avec vous sur ce point, qu'il faut garder à l'esprit. Mes chers collègues, regardez la vie de la femme dont nous parlons : elle est en couple avec un homme et souhaite avoir un enfant avec lui. Le bonheur ! La vie fait que l'homme décède. Le bonheur est brisé. N'infligeons pas à cette femme une double peine et ne la laissons pas perdre son projet d'enfant en plus de son mari. La vie lui ôte son mari, évitons que la loi prononce une double peine à l'encontre de cette femme.
Laissons à cette femme le choix d'avoir un enfant de son défunt mari ou d'y renoncer, d'avoir un enfant grâce à un don, de rencontrer quelqu'un d'autre ou de ne pas avoir d'enfant. Laissons le choix aux femmes !
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Je soutiens l'amendement no 443 , défendu par M. de Courson. En effet, on ne peut parler d'enfant réparateur puisque le projet a débuté avant le décès du père et qu'il a presque abouti – un embryon est formé. Il s'agit donc d'un projet parental, familial, qui se poursuit. Si nous adoptons ce texte, les femmes seules pourront prétendre avoir accès à la PMA : cet amendement tend à offrir le même droit aux veuves.
Vous avez évoqué la présomption de conception, madame la ministre. L'embryon ne laisse pas place au doute sur la filiation : les médecins et tous ceux qui ont accompagné le couple en sont témoins.
La femme a le choix de poursuivre le processus de PMA, comme de donner l'embryon à un autre couple, de le détruire ou de l'offrir à la recherche.
Vous avez souligné, madame la ministre, que le Comité consultatif national d'éthique publiait des avis mais ne faisait pas la loi. Je suis parfaitement d'accord avec vous, mais nous avons longtemps considéré que les avis de ce comité apportaient un éclairage essentiel aux débats concernant la bioéthique.
Tout à fait.
Le Président Macron avait d'ailleurs pris l'engagement d'élargir l'accès de la PMA à toutes les femmes quand le débat serait suffisamment éclairé et apaisé, après la publication de ses avis. À l'époque, j'en sais quelque chose, les précédents avis du comité allaient dans le sens d'une PMA à visée thérapeutique, accessible aux couples hétérosexuels en âge de procréer. La publication de l'avis de 2017 a été à l'origine de notre décision de défendre fièrement l'accès de la PMA à toutes les femmes.
Toutes les femmes, y compris les couples de femmes et les femmes seules, auront désormais accès à une technique de procréation artificielle – je l'espère, en tout cas – pour mener à bien leur projet parental. Quels arguments pourrez-vous opposer à une femme veuve – donc seule – qui viendra nous demander pourquoi la loi lui interdit de poursuivre son projet parental, en voie d'aboutissement, interrompu par le décès de son conjoint ?
C'était leur projet, pas son projet !
Vous devriez demander une suspension de séance pour organiser une réunion de la majorité !
Certes, madame la ministre, mais ce projet peut être poursuivi après le décès du père : la loi permettra aux femmes d'utiliser d'autres gamètes, sans d'ailleurs savoir si leur donneur est décédé ou vivant – pourquoi alors ne leur laissons-nous pas la liberté, le choix, comme l'a dit ma collègue Émilie Chalas, de poursuivre leur projet initial ? Pourquoi nous sentir obligés de nous immiscer dans leur intimité ?
Ce point constitue à mon sens un des sujets les plus compliqués du débat en cours.
Les interventions se sont toutes caractérisées par une grande dignité, quelles que soient les idées défendues. J'en retiens que leur élévation fait écho à l'immense dignité de l'embryon,
Murmures sur plusieurs bancs du groupe LaREM
être en devenir, selon l'expression, ou « personne humaine potentielle ». Il est d'ailleurs curieux que ceux-là mêmes qui ne sont pas sensibles à cet argument…
… soient aussi ceux qui défendent la PMA post mortem, tandis que ceux qui y sont plus sensibles la refusent. C'est dire l'ampleur de mes interrogations. Je retiendrai que chacun a souligné la dignité de l'embryon,
Protestations sur divers bancs
En tant que législateur, nous ne sommes confrontés à cette question que parce que nous avons accepté qu'une femme seule puisse bénéficier d'une PMA. Sans cette étape, le problème ne se poserait pas dans les mêmes termes. Donner ce droit à une femme seule non veuve soulève la difficulté de savoir si une veuve doit en bénéficier.
Je conclus négativement. Je me suis exprimé longuement en première lecture, en évoquant une histoire personnelle ; je me souviens du propos de Mme Buzyn, que j'avais trouvé extrêmement pertinent. Un enfant n'est pas un substitut, …
… il ne remplace pas : il est un être de plein exercice. Il est certes issu de la conception réalisée par son père et sa mère, mais il connaîtra une existence propre.
Toujours pour reprendre les propos de Mme Buzyn, j'insiste sur l'extrême fragilité de la veuve. Sans évoquer d'autre pression, la seule hypothèse que demain ce projet, comme vous dites, devienne réalisable, constitue déjà en soi une pression : pendant six mois, et au-delà, elle vivra dans l'obsession de l'être qu'elle a perdu et voudra l'incarner, d'une manière ou d'une autre. Le rôle de la société, de la famille et des amis en de telles circonstances est d'affirmer que ce qui est arrivé est très triste, dramatique, mais que la vie doit continuer, différemment – il ne s'agit pas de trouver un substitut à l'être cher perdu, mais de vivre une autre vie, avec d'autres réalités. Voilà pourquoi, en dernière analyse, je considère que ce serait une erreur d'autoriser cette possibilité, qui à elle seule exercerait une pression sur la femme : la société doit savoir dire à celui qui a subi un tel drame qu'il faut continuer à vivre et ne pas se projeter en permanence dans un passé hélas révolu.
Je veux répondre à un argument de M. Hetzel et d'autres collègues selon lequel l'ouverture de la PMA post mortem autoriserait à « faire engendrer un mort ». Au-delà du problème des mots, sans doute un peu durs, je signale que tel est déjà le cas, alors même que la PMA post mortem est interdite.
Lorsque l'époux meurt pendant le parcours de PMA, la femme a trois options, que j'ai précédemment citées : la destruction, le don pour la recherche ou le transfert à un autre couple. Avec cette dernière, l'enfant naîtra, mais chez un autre couple. La législation n'empêche donc pas la naissance de l'enfant considéré ; la seule chose que vous empêcherez, en rejetant l'amendement, c'est le lien avec sa mère. Je vous invite à faire attention en utilisant cet argument, il me paraît contraire à vos intentions – ou allez au bout de votre raisonnement, en imposant la destruction de l'embryon.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM. – M. Maxime Minot applaudit également.
Concernant l'embryon susceptible d'être donné à un autre couple, les auditions menées en amont de l'examen du texte, comprenant des témoignages très clairs de médecins, ont montré tout au long que les couples considéraient qu'il était trop douloureux d'accepter le don d'un embryon lié à un projet parental qui n'était pas le leur. Dans les faits, cette situation n'existe donc pas. Peut-être en effet faudrait-il interdire cette disposition pour plus de clarté.
D'autre part, bien que je reconnaisse le talent de M. Le Fur, mon attention a été appelée par ses propos concernant le statut juridique de l'embryon, entendu comme un être en devenir : je les juge inquiétants au regard du droit des femmes. Je ne voudrais en aucun cas voir le droit à l'IVG remis en cause.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Je veux répondre à ma collègue Monique Limon, qui nous invitait à penser à l'enfant. J'ai vécu cette situation : mon neveu est décédé d'un cancer alors que sa compagne était enceinte de deux mois. Leur fille a dix ans aujourd'hui ; elle va bien mais elle a vécu un traumatisme – évidemment. Elle a perdu son père sans l'avoir connu et lorsqu'elle veut le voir, elle ne peut se tourner que vers sa tombe. Elle s'y est rendue pour la première fois à l'âge de trois ans. Ce traumatisme est redoublé par l'idée inscrite en elle qu'elle est peut-être porteuse d'un cancer que son père a pu lui transmettre, puisque la maladie était déjà déclarée au moment de la conception. Le problème du traumatisme de l'enfant est réel – il ne faut pas l'oublier.
J'ai été également troublée, à l'instar de ma collègue Aurore Bergé, par la description de l'embryon comme d'un être en devenir. Attention à nos propos : certaines personnes et associations s'en serviront évidemment pour mettre en cause l'avortement. Nous avons là une responsabilité importante : je n'ai certainement pas envie de retourner quarante ans en arrière. Nous devons être attentifs à ne pas détruire, avec l'intention de donner une chance à une femme qui vit un drame épouvantable, d'autres acquis, en revenant sur ce débat unique. Je tiens à ce que nous puissions continuer à avorter, en respectant bien sûr les délais définis par la législation.
Un autre problème se pose, celui de l'égalité entre les couples, car il arrive qu'un projet parental soit interrompu au sein d'un couple par la mort du mari. Si le couple ne connaissait pas de problème de stérilité, le mari n'aura pas donné de gamètes et l'épouse survivante sera bien obligée de vivre avec ce drame et de renoncer au projet parental qu'elle avait conçu avec son conjoint. Faisons attention car les couples qui ne sont pas confrontés à la difficulté de la stérilité pourraient bien vouloir, eux aussi, donner leurs gamètes et profiter du dispositif de la PMA si leur projet parental était interrompu, quelques années plus tard, par le décès de l'homme.
Pour toutes ces raisons, je voterai contre ces amendements.
Je voudrais revenir sur les arguments développés par nos collègues du groupe Les Républicains mais aussi par certains députés de La République en marche. Je suis favorable à l'ensemble de ces amendements, y compris celui qu'a présenté M. de Courson, mais pour des raisons différentes.
En particulier, je récuse l'argument de M. Le Fur tiré de la dignité de l'embryon car il relève d'une logique qui met en danger le droit à l'avortement que nous défendons et pour lequel nous continuerons à nous battre : ce droit, loin d'être acquis, est régulièrement remis en cause, y compris dans notre pays, sous de nombreux prétextes, alors qu'une loi existe.
De même, j'approuve ces amendements non pas au nom de la dignité de l'embryon, mais de la liberté de choisir, pour les femmes, d'interrompre une grossesse ou de poursuivre le projet parental grâce aux techniques de la PMA. C'est cette raison qui me semble fondamentale, et non pas celle de la dignité de l'embryon.
Nous devons également respecter la personne qui a fait ce choix. Nous savons qu'en dehors même de la survenue d'un événement aussi dramatique que le décès au sein du couple, la démarche de la PMA peut être longue et douloureuse. Savoir qu'il est possible de l'interrompre peut être apaisant.
Par ailleurs, certains ont déclaré que l'enfant n'était pas un substitut. C'est vrai : dès sa naissance, toute personne existe en soi mais avant de naître, elle est le fruit du désir de ses parents, de leur volonté de donner naissance à un enfant. L'enfant peut être un substitut même s'il n'a pas été conçu dans le cadre d'une PMA mais en faisant les choses à l'ancienne. Il peut être un substitut aux blessures d'un couple, aux traumatismes de l'enfance. Il peut avoir été voulu pour combler un vide.
Nous sommes toujours le fruit d'un désir, qui trouvera son expression dans notre propre vie, nos propres traumatismes, que nous transmettrons à nos enfants, peut-être à l'excès. Mais c'est la vie et, une fois que les enfants sont là, il faut respecter leurs droits.
En l'espèce, ce n'est pas le sujet. Nous n'avons pas à juger les raisons pour lesquelles les gens décident d'avoir des enfants ou non, ni la façon dont ils seront conçus. Nous devons consacrer le droit, pour toutes les personnes, d'accéder à la PMA, y compris après la mort d'un conjoint. Je voterai pour ces amendements.
Ce débat lourd et douloureux se prolonge, ce qui est légitime. De nombreuses situations ont été exposées, y compris des situations personnelles. Beaucoup d'arguments ont été développés par les uns et les autres. Nous comprenons tout cela mais le débat se poursuit car, depuis le début, nous confondons projet parental et procréation.
L'ouverture, légitime, de la PMA aux femmes seules et aux couples de femmes a inversé la hiérarchie entre la possibilité de procréer et l'émergence d'un projet parental. Désormais, seul le projet parental compte et toutes les techniques médicales existantes doivent être employées pour le servir, quel que soit le statut de la femme qui enfantera demain, même si elle a perdu son conjoint.
Un argument n'a pas été présenté contre ces amendements : que répondre à un homme qui survit à sa conjointe alors que le couple avait engagé une démarche d'assistance médicale à la procréation et dont les embryons sont disponibles ?
Notre groupe soutiendra tous les amendements présentés, en particulier celui de M. de Courson qui semble le plus susceptible de recueillir le consensus. Nos amendements nos 488 et 489 sont quasiment identiques mais moins précis concernant l'accord donné par le conjoint avant son décès.
Nous ne pouvons pas entraver la liberté, pour la femme en deuil, de choisir de poursuivre ou non son projet parental.
Madame la ministre, le projet parental peut être différent, mais ne croyez-vous pas que la vie de cette femme, que son projet de vie, ne sera pas changé ?
Justement !
Pourquoi décider à sa place plutôt que de lui faire confiance ? Ne lui appartient-il pas de décider elle-même ce qui sera mieux pour elle ou son avenir ? Pour toutes ces raisons, nous soutiendrons ces amendements.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.
Je voudrais tout d'abord remercier l'ensemble de nos collègues pour la tenue des débats autour d'un sujet aussi important. Les Français peuvent être fiers de l'Assemblée nationale.
J'ai été marqué, lors du travail en commission, par l'audition d'une psychologue qui nous alertait sur le risque que la famille du défunt puisse exercer une pression sur la femme. Bien évidemment, la femme peut faire son deuil – c'est même essentiel – mais ses beaux-parents, sa belle-famille, ne le feront sans doute jamais et pourraient presser la femme de poursuivre ce projet parental pour avoir un petit-enfant.
Le délai durant lequel la PMA post mortem pourrait être réalisée après le décès du conjoint est un autre problème. Certains évoquent une durée de six mois, d'autres de dix-huit mois. La Belgique a retenu deux ans. Pour quelle raison ? Nous n'en savons rien.
Par ailleurs, la légalisation de la PMA post-mortem poserait en effet un problème d'égalité, entre les couples mais aussi entre les hommes et les femmes. Pourquoi les couples stériles recevraient-ils un traitement de faveur par rapport aux couples fertiles ? Pourquoi les hommes ne bénéficieraient-ils pas du même régime que les femmes ?
Enfin, notre société a besoin de repères. En l'espèce, ceux dont il est question aujourd'hui sont la naissance, la vie et la mort. En acceptant la PMA post mortem, nous nierions le repère fondamental de la mort.
Notre société nie la mort et veut la rendre invisible. La PMA post mortem s'inscrit dans cette logique en considérant que la vie peut être possible après la mort. Pour toutes ces raisons, je serai défavorable à ces amendements.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et UDI-I.
Je partage l'opinion de mon collègue. Dans une société qui nie la mort, nous devons accepter notre propre finitude. Il serait vertigineux d'accepter de pouvoir engendrer après la mort, au-delà du poids que nous ferions peser sur l'enfant né dans ces conditions.
Je voudrais, par ailleurs, réagir aux propos de MM. de Courson et Le Fur au sujet de l'embryon. Beaucoup de mes collègues l'ont dit : nous devons faire attention au statut juridique que nous donnons à l'embryon. Nous ne sommes pas d'accord avec l'idée selon laquelle l'embryon serait une personne. Prenons garde aux termes employés.
Nous sommes, sur ces bancs, de fervents défenseurs de l'IVG et je pense que nous ne devrions pas trop charger de sens l'embryon, en particulier ne pas lui donner de statut, car nous courrions le risque de ne plus pouvoir défendre la dignité de l'embryon, considéré comme une personne en devenir, et l'interruption volontaire de grossesse.
Je considère l'embryon, non comme un enfant, mais comme un amas de cellules. Il appartient à la femme de décider de poursuivre sa grossesse pour avoir un enfant ou de recourir à l'IVG.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Nous évoquons, les uns et les autres, des situations qui sont d'abord des drames et nous devons les aborder avec toute la retenue qui s'impose.
Par ailleurs, la distinction soulevée par M. de Courson entre les gamètes et l'embryon nous semble discutable, notamment en raison de l'usage qui pourrait en être fait. Si la décision était prise d'autoriser la PMA post mortem, nous devrions approfondir le sujet pour que l'ensemble soit cohérent.
Pour notre part, le décès du compagnon, du père potentiel, bouscule profondément le projet parental et modifie considérablement la donne. Un nouveau projet pourrait être mené mais peut-être ne serait-il pas souhaitable que celui, initialement formé, se poursuive.
Je remercie tous les députés qui se sont exprimés et ont permis que se tienne un débat particulièrement riche, apaisé, sérieux, d'une qualité à la hauteur de la gravité du sujet.
J'ai été personnellement très sensible à un grand nombre des arguments qui ont été développés, en particulier à la justesse de ceux de M. de Courson, lequel n'est pas réputé être un libertaire,
Sourires
mais il a bien indiqué comment nous pouvons nous retrouver. Cette recherche de rassemblement, au-delà de la diversité représentée dans l'hémicycle, est un atout. Je le remercie de son effort.
M. Hetzel a voulu citer le Conseil d'État. Or il faut le faire avec ses propres mots : « Le Conseil d'État estime qu'il est paradoxal de maintenir cette interdiction alors que le législateur ouvre l'AMP aux femmes non mariées. » Pour le Conseil d'État, c'est ni l'un ni l'autre, ou tous les deux.
Ce n'est qu'une indication ; je voulais toutefois rapporter les mots exacts du Conseil d'État.
La pression familiale a, par ailleurs, été beaucoup évoquée : certes, il est toujours possible de craindre des pressions familiales pour tous les épisodes de la vie. En tout état de cause, le risque qu'elle s'exerce est plus grand du vivant du conjoint : je pense, par exemple, à un mari qui veut absolument que sa femme recoure à une AMP alors que celle-ci n'y tient pas vraiment. Il a, de son vivant, des moyens de pression plus importants que lorsqu'il ne sera plus là.
Je tiens également à rappeler – la comparaison est peut-être hasardeuse – que nos prédécesseurs, ici même, ont longtemps refusé d'accorder le droit de vote aux femmes sous le prétexte qu'elles seraient soumises à leur mari.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Ce n'est pas avec de tels arguments que vous maintiendrez un débat apaisé !
Il faut se méfier de l'argument de la soumission des femmes. Les femmes, aujourd'hui plus que jamais, sont totalement capables de décider : elles sont indépendantes, elles sont libres, elles sont majeures et nous n'avons pas à leur dicter leur conduite.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
C'était d'ailleurs un terrible manque de confiance à l'égard des femmes, qui a été heureusement dénoncé et corrigé. Encore, n'allait-il pas jusqu'à arguer qu'elles soient soumises à la pression des autres membres de la famille, ce que j'ai entendu ici même, puisque nous sommes dans le cas où le mari est décédé : le beau-père, un cousin ou qui sais-je encore ferait pression. Non ! La femme est tout à fait capable en son âme et conscience de faire le meilleur choix pour elle et pour son enfant à venir.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM, MODEM, SOC, FI et LT.
Quant à la succession, Mme Belloubet, alors garde des sceaux, avait indiqué qu'elle ne posait aucun problème jusqu'à deux ans. En effet, les successions sont, pour mille raisons, retardées très facilement durant deux ans. C'est donc sur sa recommandation que nous avions prévu un délai de dix-huit mois : toute succession – je ne parle pas des grandes successions, comme celle de Johnny Hallyday – peut légitimement faire l'objet d'un délai. L'enfant qui naîtra de cet embryon, à sa naissance, pourra prétendre à l'héritage, conformément au droit français.
Enfin, de l'avis des psychiatres et des psychanalystes que nous avons auditionnés – l'une a été citée – , l'enfant né dans de telles conditions ne sera pas perçu comme un substitut ou un supplétif du mari défunt. C'est une crainte qui est souvent avancée ; dans les faits, l'enfant existera par lui-même et sera apprécié pour lui-même par sa mère.
Je n'avais pas prévu de m'exprimer mais puisque M. Philippe Vigier a cité mon nom, je tiens à préciser mon avis sur le sujet.
Je l'ai souligné hier dans ma question au Premier ministre : c'est le sujet qui nous a conduits au débat le plus long, le plus beau et le plus difficile. J'étais opposée depuis le début à cette disposition : j'y suis toujours défavorable, parce qu'une AMP est un projet parental – conçu donc à deux. Le deuil, c'est-à-dire la disparition du mari, comme l'a fort bien observé Pierre Dharréville, le modifie nécessairement. Monsieur le rapporteur, je n'ai pas réussi à franchir le pas.
De plus, quid de l'intérêt de l'enfant, qui a été beaucoup évoqué hier ? Quel poids lui fera-t-on porter ? Il est à mes yeux beaucoup trop lourd. Donc, ni pour la femme, qui continuera d'assumer ce projet, ni pour l'enfant, je le répète, je ne réussis pas à franchir le pas.
Je tiens enfin à rappeler, afin que chacun soit éclairé, que la commission spéciale a bien émis un avis défavorable sur ce sujet.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Agir ens, LaREM, MODEM, UDI-I et LR.
Il ne vous aura pas échappé, mesdames et messieurs les députés, que j'ai pris, en tant que ministre, ce texte en cours de route : il a été préparé par Agnès Buzyn, qui m'a précédé dans mes fonctions actuelles, ainsi que par Frédérique Vidal et Nicole Belloubet, alors garde des sceaux. Il a également été discuté entre le Président de la République et les membres du gouvernement de l'époque. Je crois profondément que le travail qui a été réalisé sur ce texte, avant qu'il ne vous soit proposé, a permis de mesurer pleinement les enjeux inhérents à ces sujets qui provoquent des débats d'envergure, voire un clivage, parce qu'ils font appel à la conscience ou aux inclinaisons naturelles de chacun, ainsi qu'à des choix idéologiques.
J'ai été amené, auparavant, en tant que parlementaire, à me prononcer sur plusieurs enjeux du texte, notamment sur la question, qui est arrivée par voie d'amendement parlementaire, de la PMA post-mortem. Ceux qui étaient comme moi, lors de la première lecture, membres de la commission spéciale le savent : ma religion n'était pas faite a priori en la matière. J'ai écouté, j'ai lu, j'ai regardé, j'ai débattu avec vous, et s'il est possible d'hésiter sur certains points d'un texte d'une telle nature, en raison de marges d'incertitude, ma conviction profonde au moment de voter était forgée et elle demeure la même aujourd'hui : je suis opposé à la PMA post mortem sur la forme et sur le fond, même si je comprends qu'elle puisse faire débat et qu'il ne me revient pas de contester la légitimité de qui que ce soit en la matière.
À mes yeux, il y a des progrès qui n'en sont pas : je ne parlerai donc jamais comme d'un progrès de cette méthode pour les femmes et, encore moins, pour les enfants. Nous parlons d'une femme qui se retrouve veuve, à la suite d'un traumatisme, qui peut avoir été brutal, comme un accident, ou d'une maladie, alors qu'elle était engagée dans une PMA. Cette femme est marquée par le deuil et la douleur : elle peut être forte, libre, indépendante, elle peut ne subir aucune pression, il n'en reste pas moins qu'elle se trouve dans une situation particulière. Tous ceux qui ont connu un tel deuil et la souffrance qui l'accompagne savent qu'il s'agit d'un moment très particulier, je le répète, qui demande qu'on arrête quelque temps le cours normal de sa vie pour récupérer et repartir plus fort.
Que nous disent par ailleurs les chiffres ? Que plus de 80 % – hélas – des PMA engagées se soldent par une fausse couche, c'est-à-dire par un échec. Plus de 80 % des femmes qui s'engageraient dans une démarche de PMA post mortem auraient donc à subir dans les semaines ou les mois qui suivent la mort de leur conjoint une fausse couche, précoce ou tardive. Il n'est pas possible de considérer qu'il ne s'agit pas d'un traumatisme supplémentaire.
On peut bien sûr arguer qu'une femme est libre de ses choix et que, si elle veut prendre le risque de subir un nouveau traumatisme, on n'a pas le droit de l'en empêcher. Je considère, malgré tout, qu'on prend le risque de fragiliser encore plus cette femme.
Un autre élément m'a permis de me forger une conviction : c'est, paradoxalement, le plaidoyer d'une femme qui avait malheureusement perdu son mari, mort d'une maladie chronique. Elle avait demandé à bénéficier d'une PMA avec les gamètes du défunt. Elle avait alors lu la lettre que son mari avait laissée à son intention. J'en retiens, en toute pudeur et en toute prudence, un seul paragraphe, sans porter aucun jugement : « Je souhaiterais vivement que ma femme puisse utiliser les embryons que nous avons conservés, parce que, de là-haut, je serais le plus heureux de voir tout cela. » Il est possible de considérer ces lignes comme une marque d'amour ; on peut aussi considérer qu'une femme, qui vient de perdre un mari qu'elle aimait du fond de son coeur, subit une pression réelle lorsqu'elle les lit, même si elles ne constituent pas une pression familiale ou sociale.
L'avis du Gouvernement, comme l'avis, monsieur le rapporteur, de la commission spéciale en première lecture et en deuxième lecture, et comme dans l'hémicycle en première lecture – c'est la quatrième fois que nous débattons du sujet – demeure formellement et fortement défavorable. Je tiens à ajouter que d'autres éléments du texte sont au moins aussi importants, qui concerneront des milliers, voire des millions de Français.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM, MODEM, Agir ens, UDI-I et LR.
Je tiens à vous dire combien je suis heureux de présider aujourd'hui des débats d'une telle dignité, d'une telle qualité et d'une telle richesse, qui honorent notre assemblée.
Applaudissements sur tous les bancs.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 135
Nombre de suffrages exprimés 132
Majorité absolue 67
Pour l'adoption 37
Contre 95
L'amendement no 488 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 131
Nombre de suffrages exprimés 129
Majorité absolue 65
Pour l'adoption 41
Contre 88
L'amendement no 2176 rectifié n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 132
Nombre de suffrages exprimés 129
Majorité absolue 65
Pour l'adoption 37
Contre 92
L'amendement no 489 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 134
Nombre de suffrages exprimés 132
Majorité absolue 67
Pour l'adoption 43
Contre 89
L'amendement no 2177 rectifié n'est pas adopté.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix-huit heures, est reprise à dix-huit heures quinze.
La séance est reprise. Je regrette que les orateurs devant défendre les prochains amendements ne soient pas présents, mais nous devons reprendre nos travaux.
L'amendement no 134 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement no 2044 .
Il est également défendu en raison du temps programmé, monsieur le président.
L'amendement no 138 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 231 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 342 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Louis Touraine, pour soutenir l'amendement no 2178 .
Il vise à corriger une incohérence. Une disposition se trouvant actuellement à l'article 2, où elle a été adoptée, devrait légitimement figurer à l'article 1er. Curieusement, la commission n'a pas adopté cet amendement lorsqu'il lui a été proposé, sans qu'un argument particulier n'ait été avancé. Je pense néanmoins, pour ma part, qu'il serait préférable que l'alinéa concerné retrouve sa bonne place. Il s'agit donc simplement d'un amendement de cohérence.
Cet amendement porte sur l'autoconservation ovocytaire proposée à l'occasion du recueil d'ovocytes lui-même réalisé par ponction à l'occasion d'une AMP. La disposition qu'il contient est envisagée dans un esprit très différent à l'article 2, puisque la notion d'échange y est adjointe : il est prévu, en plus de l'autoconservation, de proposer un don, qui pourrait répondre à la pénurie de gamètes, notamment féminins. Or une telle disposition pourrait susciter une tentation commerciale : on sait que les délais de l'AMP sont contraignants, en raison surtout de l'interdiction du double don. Elle élargirait donc les possibilités, mais présenterait aussi le risque de dérives marchandes – ce qui nous inquiète dans le présent amendement.
Il me semble important que nous adoptions cet amendement afin de pouvoir au moins proposer aux femmes poursuivant un parcours d'AMP de constituer une réserve ovocytaire. Dans quelques instants, le Gouvernement nous présentera un amendement visant à supprimer une disposition adoptée par notre commission spéciale au motif, selon ses arguments précédents à ce sujet, qu'elle nécessite le recours à des techniques particulièrement intrusives et difficiles à supporter pour les femmes. Le Gouvernement estime que la méthode de la ROPA doit être encadrée par le plus grand nombre de garde-fous et donc purement et simplement interdite. Je m'oppose totalement à cette vision. Tout en ayant la même préoccupation à l'esprit, je pense qu'il faut pouvoir profiter de l'acte médical pour constituer une réserve ovocytaire si la femme le désire, afin qu'elle ne soit pas ultérieurement amenée voire contrainte à subir une seconde intervention invasive pour conserver ses ovocytes.
L'amendement no 2178 est adopté.
Je suis saisi de deux séries d'amendements identiques, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 2166 rectifié , 1222 et 2272 rectifié sont identiques, de même que les amendements nos 234 , 343 , 823 , 966 , 1040 , 1251 , 1376 , 1421 , 2200 et 2216 .
Sur les amendements nos 2166 rectifié et identiques, je suis saisi par le groupe UDI et indépendants d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement no 2166 rectifié .
Cet amendement du Gouvernement vise à ne pas autoriser la méthode de la ROPA, introduite par la commission spéciale de l'Assemblée nationale en deuxième lecture, au motif de l'infertilité de l'un des deux membres du couple. Cette introduction remet en cause un principe fondamental de la médecine, celui de ne pas pratiquer d'acte médical non nécessaire et non justifié médicalement. Dans la grande majorité des cas, il suffit, pour aboutir à une grossesse au sein d'un couple de femmes, de procéder à une insémination artificielle. La femme qui porte l'enfant ne subit donc pas de stimulation ovarienne ou hormonale, ni de ponction ovocytaire. On lui insémine directement les spermatozoïdes du donneur dans l'utérus. Il s'agit donc bien d'une méthode clairement moins invasive que la ROPA, comme vient de l'évoquer M. Chiche par anticipation. L'autorisation de la ROPA contreviendrait au principe selon lequel on ne pratique pas d'acte médical qui ne soit justifié par l'état de santé.
Le principe de la ROPA conduit à imposer plusieurs stimulations ovariennes à l'autre membre du couple donneur d'ovocytes, qui viendraient s'ajouter à la fécondation in vitro et au transfert ainsi qu'à la congélation d'embryons. Ces mesures sont excessives, considérant les objectifs sous-tendus par l'amendement adopté par la commission spéciale. Comme je l'ai indiqué, le rapport bénéfices-risques est injustifié sur le plan médical.
Par ailleurs, cette méthode constitue un don dirigé, qui s'oppose à un principe essentiel de la santé en France : l'anonymat du don, qu'il s'agisse de sang ou de gamètes. La ROPA permettrait au contraire de cibler la bénéficiaire de ses propres ovocytes.
En outre, le projet de loi repose sur la philosophie selon laquelle c'est le projet parental qui fonde le recours à l'AMP, bien davantage que la filiation biologique. Or c'est ce dernier concept qui sous-tend la pratique de la ROPA. Le projet de loi est l'aboutissement d'un important travail législatif défendant l'idée que l'amour parental, le projet parental et l'éducation sociale ont une valeur extrêmement forte. Or l'amendement introduisant la ROPA contrevient à ce principe, en reconnaissant qu'une femme peut, pour se sentir pleinement mère, préférer que ses propres ovocytes soient, après stimulation ovarienne, implantés dans l'utérus de l'autre mère. Tout le projet de loi repose sur le principe selon lequel un donneur de gamètes n'est pas forcément un père ou une mère, les parents étant ceux qui élèvent l'enfant et lui apportent amour et sécurité.
Enfin, la disposition réintroduit paradoxalement la vérification de l'origine pathologique de l'infertilité qui, dans ce texte, ne conditionne plus l'accès à l'AMP compte tenu de son ouverture aux couples de femmes et aux femmes seules. Une telle méthode apporterait donc des nuances importantes à la philosophie du texte, pour suivre un objectif dont on peut comprendre le principe – offrir à l'une des deux mères la possibilité d'apporter son ovocyte tandis que l'autre porte l'enfant – mais qui contrevient à l'esprit et à la lettre du texte, ainsi qu'à un principe général de la médecine.
L'amendement no 1222 de Mme Agnès Thill est défendu.
La parole est à M. Marc Delatte, pour soutenir l'amendement no 2272 rectifié .
Cet amendement identique à celui du Gouvernement vise à supprimer la possibilité de recourir à la ROPA. Je ne m'étendrai pas davantage sur ce qui a été dit concernant la finalité médicale, la lourdeur des techniques employées et la notion même de don dirigé. Nous sommes défavorables à cette méthode.
La parole est à M. Jacques Marilossian, pour soutenir l'amendement no 966 .
Rappelons que le projet parental tel que nous l'avons évoqué repose sur l'amour que l'on souhaite donner à un enfant, sans que la biologie ne prime. L'alinéa 15, issu d'un amendement voté en commission spéciale en deuxième lecture, propose une forme de double maternité en contradiction avec la philosophie du projet parental telle que nous l'avons définie dans le projet de loi. Ce dernier autorise en effet une réception d'ovocytes par la partenaire pour les couples de femmes, indépendamment de l'infertilité de l'une des deux mères.
Un tel dispositif porte atteinte à un principe fondamental de la médecine : on ne peut pas pratiquer d'acte médical non nécessaire et non justifié médicalement. Pour un couple de femmes, il suffirait d'une insémination artificielle pour aboutir à une grossesse. La femme qui porte le bébé ne subit pas de stimulation ovarienne, dont on connaît tous les inconvénients : on lui insémine simplement des spermatozoïdes dans l'utérus. Avec la ROPA, au contraire, l'autre membre du couple est contrainte de subir les stimulations ovariennes, dont nous connaissons les risques. C'est précisément tout ce que nous avons souhaité éviter dans la version initiale du projet, adoptée en première lecture par la commission spéciale et en séance publique, en cohérence avec l'idée que le projet parental est fondé sur le don d'amour. Je vous invite donc, mes chers collègues, à supprimer l'alinéa 15.
Il est défendu, d'autant que l'amendement identique no 966 a été très bien présenté par M. Marilossian.
Je serai très rapide, en raison du temps législatif programmé.
Je ne partage pas la totalité des arguments qui ont été exposés par le ministre. Si j'ai déposé, avec mon collègue Jacques Cattin, cet amendement de suppression de la légalisation de la ROPA, c'est d'abord parce que celle-ci balaierait le principe d'anonymat du donneur, ce dernier étant en l'espèce évidemment connu. En outre, il s'agit pour moi d'un premier pas vers une forme d'exploitation du corps de la femme qui, je le maintiens, est attentatoire à sa dignité.
La parole est à M. Jean-Louis Thiériot, pour soutenir l'amendement no 2216 .
Je n'ajouterai qu'un mot à ce qui a été très bien dit : méfiez-vous des précédents ! Au cours de nos débats d'hier, on a justifié l'autorisation pour les femmes seules de recourir à l'AMP au nom de la possibilité qui leur avait été reconnue après la guerre de 1914, par une loi tenant aux circonstances de l'époque, d'adopter des orphelins de guerre. Croyez-en l'ancien président de conseil départemental que je suis, qui a reçu des mères seules qui savaient qu'elles étaient atteintes d'une maladie incurable et qu'elles allaient laisser un orphelin. C'est en pensant à elles que je vous mets en garde contre le risque extrêmement grave d'un tel vote.
La ROPA, sur laquelle vous nous demandez de statuer aujourd'hui, dépasse totalement la finalité de cet article par lequel votre majorité fait le choix de permettre à des couples, homosexuels ou hétérosexuels, ou à des femmes seules de bénéficier de l'AMP. Quel besoin d'une ROPA pour cela ? Ce serait franchir un pas de plus que de permettre ainsi à un couple de choisir, à sa convenance, qui portera l'enfant et qui donnera son ovocyte. Ce serait remettre en cause deux principes, et d'abord celui de l'anonymat des dons de parties du corps humain – je vous renvoie à l'article 168 du code civil – , puisqu'il y a bien une destination et une origine identifiées. La légalisation d'un tel choix de convenance d'actes médicaux non nécessaires ouvrirait bel et bien la possibilité d'aller, demain, beaucoup plus loin.
Je vous le demande solennellement : ne faisons pas ici le teasing de réformes sociétales qui interviendraient dans une dizaine d'années parce que nous aurions accepté aujourd'hui le don d'ovocytes dirigé. Mes chers collègues, à l'heure de voter sur cet amendement de suppression, ayons en tête le principe de précaution qui vaut pour l'ensemble de la biodiversité : n'en exceptons pas l'homme, et surtout le petit d'homme, le plus fragile.
La commission a donné un avis défavorable à ces amendements puisqu'elle a voté les dispositions qu'ils tendent à supprimer. Elle a en effet adopté la légalisation de la ROPA à deux reprises : d'abord au bénéfice des femmes stériles pour leur permettre de réaliser leur projet parental, puis au bénéfice de toutes les femmes.
Il faut prendre le temps de réfléchir avant de remettre en cause ce que notre commission a voté à la suite d'un débat qui a déjà été assez long. Il était en effet indispensable d'entendre tous les professionnels de la procréation, qui réalisent déjà ces actes en France comme ailleurs, et connaîtraient demain de grandes difficultés s'ils étaient interdits, tant sur le plan pratique qu'éthique, sans parler de l'incompréhension des personnes concernées.
Je voudrais rappeler quelques éléments du débat. L'argument selon lequel on ne saurait accepter un acte médical qui ne serait pas justifié par l'état de santé n'est pas audible, puisque tous les dons feraient exception à un tel principe. Quand on prélève un rein pour le greffer à un patient, cet acte n'est pas justifié par l'intérêt du donneur lui-même. Un prélèvement de moelle osseuse ne l'est pas davantage puisqu'il n'est effectué que dans l'intérêt du malade que l'on va traiter et non de celui qui subit le prélèvement. Il en va de même des dons d'ovocytes : la stimulation ovarienne de la donneuse n'est faite qu'au bénéfice de la receveuse. De plus, cette stimulation n'est ni plus ni moins pénible ou invasive que la donneuse soit un membre du couple ou qu'il s'agisse d'une donneuse anonyme. Or une femme stérile ne peut pas porter d'enfant sans l'intervention d'une donneuse.
Tant la présidente de la Société française de gynécologie que le président du Collège national des gynécologues et obstétriciens français disent qu'il serait hypocrite de considérer que le prélèvement d'ovocytes est plus pénible quand il est effectué sur la femme du couple plutôt que sur une autre femme. Une telle réflexion ne vaut donc pas qu'on s'y attarde.
Les mêmes professionnels de santé considèrent par ailleurs qu'après toutes les analyses, toutes les réflexions et toutes les auditions qu'ils ont pu conduire pendant des années, ils n'ont trouvé aucune raison autre qu'idéologique de supprimer la ROPA et d'imposer à leurs patientes une attente de trois à cinq ans, qui est le délai moyen d'obtention d'ovocytes, alors qu'ils pourraient dans le mois effectuer un prélèvement d'ovocytes sur celle qui s'est d'elle-même proposée comme donneuse après que son avis aura été éclairé et qu'elle aura été informée de toutes les modalités d'un tel acte.
Il importe également de rappeler que notre droit donne la priorité à l'utilisation des gamètes du couple sur la recherche de gamètes extérieurs. Et on refuserait à la femme de celle qui veut enfanter de proposer ses gamètes pour aller les chercher ailleurs ? Ce serait aller contre le droit constant.
Il ne s'agit naturellement pas d'un don dirigé mais d'un don pour soi-même, pour son enfant. Aucun de nous n'a considéré que nous faisions un don en procréant : nous avons contribué à la procréation avec notre conjoint. Il en va de même dans le cas de la ROPA.
Voilà quelques-uns des éléments qui doivent nous amener à sortir des réflexes idéologiques que dénoncent tous les professionnels de la procréation pour nous attarder sur l'aspect pratique. Il s'agit d'un couple dont un membre donne ses gamètes et l'autre les reçoit. Si nous leur refusons cette possibilité, nous devons refuser toutes les PMA entre un mari et sa femme.
Chaque mois dans notre pays, des milliers de PMA sont réalisées au bénéfice de femmes en recourant aux spermatozoïdes de leur mari, soit parce qu'elles ne peuvent pas, pour des raisons diverses, accueillir naturellement des spermatozoïdes, soit parce que leur mari est porteur d'une maladie sexuellement transmissible telle que le sida. Dans ce dernier cas, les spermatozoïdes du mari sont triés et traités afin de les purger du virus avant d'être utilisés dans le cadre de la PMA au bénéfice de la femme. Si nous refusons aujourd'hui le don d'ovocytes d'une femme à sa femme alors que nous l'acceptons du mari à sa femme, nous instituons une discrimination qui sera dénoncée…
Applaudissements sur les bancs du groupe FI – Protestations sur les bancs du groupe LR
Pourquoi refuser à un couple homosexuel ce qu'on permet à un couple hétérosexuel ?
Il est clair qu'on ne peut pas sans danger interdire cette PMA entre deux femmes, sauf à vouloir interdire aussi la PMA entre mari et femme.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM, ainsi que sur les bancs des groupes FI et EDS.
Je prendrai moins de sept minutes, monsieur le président, pour ne pas gaspiller un temps précieux pour les parlementaires qui doivent examiner tout ce texte !
Mme Sophie Beaudouin-Hubière applaudit.
Malgré tout le respect que j'ai pour vous et pour votre expertise de médecin, monsieur le rapporteur, l'honnêteté m'oblige à vous dire que vous vous êtes un tout petit peu emmêlé les pinceaux dans vos explications, me semble-t-il.
Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LaREM et LR.
Tout d'abord lorsque vous dites que voter l'amendement du Gouvernement reviendrait à supprimer la possibilité d'effectuer une pratique qui est parfaitement légale et quotidienne en France. Pardonnez-moi, mais non seulement la ROPA est parfaitement illégale, mais elle ne saurait exister puisque les couples de femmes n'ont pas accès aujourd'hui à la PMA, hélas ! Soyons factuels : l'adoption de cet amendement ne changera donc aucune pratique d'aucun médecin dans aucune démarche de PMA conduite dans ce pays.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.
Deuxièmement, vous dites que tous nos confrères demandent la possibilité d'effectuer une ROPA dans le cadre d'une PMA. Permettez-moi à nouveau de vous appeler à un tout petit peu de prudence. Je me suis entretenu avec des spécialistes de la PMA, notamment des hôpitaux parisiens, qui ne sont absolument pas favorables à ce qu'on autorise le recours à la ROPA. Ne généralisons pas des opinions qui ont pu s'exprimer au cours de certaines auditions : j'ai rencontré des professionnels qui y étaient favorables et d'autres qui y étaient tout à fait opposés.
L'honnêteté m'oblige également à rappeler que s'il est vrai que la commission spéciale a voté en deuxième lecture la légalisation de la ROPA, l'Assemblée dans sa sagesse, en première lecture en commission spéciale puis dans l'hémicycle, avait voté contre cette légalisation. Ce que le Gouvernement propose, c'est de retourner à l'équilibre trouvé en première lecture, et non pas de supprimer une disposition qui aurait été adoptée de haute lutte en première lecture par les parlementaires.
Enfin, je n'ai pas entendu de réponse sur deux enjeux, et d'abord celui de la cohérence avec le reste du texte du point de vue de la distinction entre filiation biologique et filiation sociale. Je rappelle que ce texte vise à faire en sorte que la filiation sociale soit une filiation à part entière ; légaliser la ROPA constituerait une entorse au regard de ce principe important, à mes yeux en tout cas. Ensuite, la légalisation de la ROPA réintroduirait la nécessité de prouver une infertilité pour engager une démarche de PMA, ce qui contreviendrait à l'objectif même du texte d'ouvrir la PMA aux couples de femmes.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement souhaite que l'Assemblée adopte l'amendement no 2166 rectifié .
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.
Et quel est l'avis du Gouvernement sur la deuxième série d'amendements identiques ?
Ils tomberont si l'amendement du Gouvernement est adopté, mais s'il ne l'est pas, il nous faut bien connaître l'avis du ministre !
Si l'amendement du Gouvernement n'était pas adopté, je serais favorable, par cohérence, à la deuxième série d'amendements identiques.
Je voudrais tout d'abord revenir sur ce prétendu retour à l'équilibre trouvé en première lecture, défendu par le Premier ministre dans cet hémicycle un peu plus tôt dans la semaine, à la faveur des questions au Gouvernement. Très sincèrement, mes chers collègues, cette démarche me semble trahir un certain mépris envers nos institutions et les résultats de la navette parlementaire.
Nous ne siégeons pas en cette fin du mois de juillet, comme le Premier ministre l'a expliqué ici, exclusivement pour rétablir la version issue de la première lecture. En deuxième lecture, nous n'étudions pas un texte dans le seul but d'annihiler les travaux du Sénat.
Nous ne siégeons pas, aujourd'hui, pour corriger ou annihiler les débats que nous avons eus en commission spéciale !
Chaque étape du débat qui préside à notre démocratie parlementaire est importante ; chaque étape du présent débat enrichit une loi qui, demain, encadrera les pratiques de l'ensemble des Françaises et des Français. L'apport de la commission spéciale chargée d'examiner le projet relatif à la bioéthique, qui autorise la ROPA, me paraît bienvenu.
Nous ne parlons pas ici de choix de convenance, comme l'a dit un collègue du groupe Les Républicains. Il ne s'agit pas, monsieur le ministre, de répondre à l'envie de femmes de participer à une grossesse. Nous parlons de femmes touchées par une infertilité : cela n'a rien à voir avec un choix de convenance, ni avec la volonté de participer à une grossesse et de trouver moyen de mener un projet parental ; il s'agit simplement du désir de fonder une famille !
Vous l'avez dit vous-même, monsieur le ministre : 80 % des tentatives de PMA se soldent par des échecs, parfois en raison de l'âge de la femme. Cela conduit à des situations tragiques, à des fausses couches ou à des tentatives répétées qui, à chaque fois, amoindrissent les chances de succès. Comme l'a précisé M. le rapporteur, le temps moyen d'attente des ovocytes en vue de réaliser une PMA est de trois à cinq ans. Durant cette période, la vie suit son cours, les personnes engagées dans la PMA vieillissent, et les chances de succès s'amenuisent. Pour toutes ces raisons, le recours à la ROPA dans le cadre d'une PMA a un fondement strictement médical, visant à accroître les chances de succès.
Contrairement à ce que prétendent M. le ministre et certains députés, les dons effectués dans le cadre d'une ROPA ne s'apparentent en rien à des dons dirigés – d'ailleurs, ils sont déjà autorisés pour les PMA.
Enfin, le prélèvement est certes un acte invasif, comme l'a souligné Marc Delatte, à la nuance près qu'il s'effectue de façon volontaire dans le cadre d'une ROPA. Sachant que notre pays encourt une pénurie de gamètes, il est prévu d'encourager les femmes à donner des ovocytes, et donc à subir des actes invasifs. Comment peut-on, dans le même temps, encourager les dons d'ovocytes – ce qui implique une stimulation ovarienne et un prélèvement – et juger cet acte trop invasif pour un couple de femmes qui souhaite recourir à une PMA avec les ovocytes de l'une des deux conjointes ? On voudrait, en quelque sorte, protéger la femme d'elle-même : l'acte serait trop invasif, mieux vaudrait qu'il soit supporté par une femme qui en a fait le choix délibéré – et dont le don sera anonyme, alors que le couple peut bénéficier du don de la conjointe ! Cette position manque de cohérence. J'invite donc la représentation nationale à poursuivre le cheminement qu'elle a déjà engagé et à s'inscrire dans les pas de la commission spéciale, qui s'est exprimée par un vote.
Je partage pleinement les propos de M. Guillaume Chiche. Conformément à la position que j'ai exprimée hier au sujet de la ROPA, je voterai contre la suppression de l'alinéa 15. N'oublions pas que ce texte prône l'équité entre les couples hétérosexuels et homosexuels, et que la stimulation ovarienne présente les mêmes risques pour les femmes hétérosexuelles et homosexuelles. Ne faisons pas peur aux potentielles donatrices de gamètes en brandissant inconsidérément l'épouvantail de la stimulation ovarienne.
Qu'implique l'alinéa 15 ? En autorisant la ROPA, il promeut le désir de porter un enfant en son sein en recourant à la PMA, même si le couple n'a nul besoin de cette technique médicale pour concevoir un enfant. M. Adrien Taquet l'a très bien expliqué : cela remet en question la conception de la parentalité et du lien à l'enfant qui sous-tend le projet de loi. Un enfant serait-il davantage celui de la femme qui le porte que de l'autre membre du couple ? Dans un couple hétérosexuel, est-il moins l'enfant du père que de la mère ? Au-delà des risques médicaux et des dérives potentielles que la ROPA peut induire, elle remet en cause le principe de parentalité, qui ne relève pas tant des conditions biologiques que de la reconnaissance et de l'accompagnement d'un enfant dès sa conception. Il n'y a pas lieu d'assimiler la ROPA à une PMA réalisée par un couple hétérosexuel dont l'un des conjoints souffre d'infertilité, et qui doit recourir à des techniques médicales pour concevoir un enfant – car dans un couple homosexuel, l'une des femmes peut porter l'enfant ! Avec l'alinéa 15, veut-on permettre à un couple de concevoir un enfant, ou veut-on répondre au désir de porter soi-même son enfant ?
Je ne partage pas les arguments de M. Guillaume Chiche. Dans un couple de femmes, si l'une des conjointes a un problème de fertilité, pourquoi l'autre ne porterait-elle pas l'enfant ? Il n'est pas justifié, dans ce cas, d'apporter une assistance médicale à celle qui ne peut pas enfanter.
Par ailleurs, le parallélisme que vous établissez entre la ROPA et la PMA pour les couples hétérosexuels ne tient pas : dans un couple hétérosexuel, l'homme ne donne pas un ovocyte à sa femme – biologiquement, il ne le peut pas !
Vous n'avez pas apprécié, monsieur Bazin, que je vous demande d'écouter les réponses qu'on vous fait. Qu'importe, je vous répondrai une deuxième fois – et je suis sûre que cette fois, vous m'écouterez ! Prenons l'exemple d'un couple de femmes dont l'une souffre d'une maladie chronique : une grossesse lui ferait prendre des risques morbides.
Cela peut arriver. Puisque vous demandez des exemples concrets, je vous en donne. Vous voudriez refuser à cette conjointe d'effectuer une stimulation ovarienne, au motif que ce serait trop dangereux. Vous voudriez l'empêcher de donner des gamètes à son épouse alors que, dans le même temps, vous incitez les femmes à faire des dons anonymes de gamètes, et donc à réaliser des stimulations ovariennes. La stimulation ovarienne ne serait pas dangereuse pour les dons anonymes, mais le serait quand on fait un don à sa compagne ? Vous rendez-vous compte de ce que vous dites ?
Soyons honnêtes intellectuellement : la stimulation ovarienne n'est pas plus dangereuse pour un don à sa compagne que pour un don anonyme. Le cas que je viens d'évoquer doit être pris en considération : madame et monsieur les ministres, que répondrez-vous à ce couple de femmes ? Devra-t-il attendre un don anonyme pendant deux ou trois ans ? On marche sur la tête ! Depuis le début de l'examen de ce texte, vous ne cessez de dire que notre pays manque de dons de gamètes. Mais aujourd'hui, c'est vous qui en faites une publicité négative ! Faites attention aux termes que vous employez !
J'ajoute qu'en première lecture, nous avions déposé un amendement visant à empêcher les stimulations ovariennes excessives, et que vous l'aviez refusé.
J'espère avoir répondu à votre question, monsieur Bazin, et que vous voterez contre cet amendement.
Reconnaissez que le couple de femmes que j'ai évoqué mérite d'avoir un enfant, et qu'il serait dommage qu'il recoure à des gamètes anonymes alors que l'une des conjointes peut en offrir à l'autre !
Applaudissements sur les bancs des groupes FI et EDS.
Hier soir, j'ai évoqué le changement que j'avais observé en matière d'adoption en une vingtaine d'années. En tant que conseiller général et vice-président du conseil général des Pyrénées-Atlantiques, j'ai beaucoup oeuvré en faveur de l'adoption. À l'époque, les réseaux sociaux n'existaient pas.
J'ai le souvenir d'un événement fort, le premier qui m'ait marqué à ce sujet. Dans une famille d'amis, le fils a lancé à ses parents : « Pourquoi m'avez-vous enlevé aux rues de Saïgon ? C'est là-bas que je devrais vivre, puisque j'y suis né ! » Quelques années plus tard, sa soeur a posé la même question : « Pourquoi m'avez-vous enlevée aux rues d'Alger, où j'aurais dû grandir ? » Pourtant, leurs parents étaient bienveillants et avaient mis des années à obtenir l'adoption – je suis même témoin du supplice qu'on leur a fait subir pour les y préparer ! Il arrive d'ailleurs que des couples divorcent parce qu'ils n'arrivent pas à suivre la cadence.
Avec ce texte, nous nous engageons dans un processus comme l'humanité n'en a jamais connu. Certes, nous avons eu de grands débats, par exemple sur l'avortement, mais ils concernaient des hommes et des femmes qui existaient bel et bien, et qui avaient une capacité de réflexion. Aujourd'hui, nous prenons des décisions pour des êtres qui n'existent pas encore, et dont nous ignorons parfaitement ce qu'ils penseront dans vingt ou trente ans.
En tout cas, quand on voit ce que nous faisons de l'intelligence artificielle, que nous ne sommes plus capables de gérer avec les deniers publics et que nous confions à de grands groupes industriels qui en font une utilisation entièrement au profit de leurs actionnaires, quand on voit ce que l'armée est obligée de faire pour les mêmes raisons, quand on voit l'état de désunion qui règne dans notre pays, avec un communautarisme qui se développe un peu partout et la fragmentation désormais criante de la France – même si elle ne remonte pas à trois ans et demi, mais a commencé bien avant – , quand on voit la situation dans laquelle se trouvent nos concitoyens et qu'on entend ce que vous dites, à savoir qu'en ce magnifique soir de la fin du mois de juillet, on va se faire un petit plaisir, passer cette deuxième lecture en cachette et faire en sorte que le texte soit voté nuitamment, dimanche, sans que cela fasse de bruit, puisque toutes les gazettes seront en train de dormir lundi… Vous pensez vraiment que cela ne va pas laisser de traces ?
Je ne voulais pas le dire, mais, après tout, je suis député et j'ai été élu suffisamment de fois pour avoir le droit de dire ce que je pense. J'avais prédit que M. Macron ne terminerait pas ce mandat ; eh bien, désormais, j'en ai la certitude
Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
Quand je l'avais dit à Sarkozy, il avait rigolé ! Et pourtant, il était arrivé à l'époque avec une majorité de 330 députés encore plus décidés que vous ; ils disaient qu'ils allaient tout casser mais sont rentrés à la maison avec armes et bagages. Là, on a pu sauver quelques hollandistes qui allaient subir le même destin – mais faire cela, des choses aussi graves, sur des sujets de cette importance et sans tenir compte de l'état des connaissances actuelles !
En effet, de même que les collègues qui, au sein du groupe Libertés et territoires, ont travaillé sur le sujet – bien plus que moi d'ailleurs – , j'ai compulsé les études d'impact : sur cette matière, nous ne savons pratiquement rien. Et pourtant, nous y allons quand même… Arrêtez ! C'est votre mandat même que vous êtes en train de remettre en cause.
Je vous le dis, chers collègues de la majorité : vous serez tous battus.
Rires sur les bancs des groupes FI et GDR.
Non, je ne vous dis pas cela parce que j'aurais entendu des voix, bien que je sois passé à Domrémy au cours de mon tour de France pédestre ;
Sourires
… qui se demande, en son âme et conscience, s'il a le droit, pour quelques personnes pour lesquelles il a beaucoup de respect et d'estime, d'aller aussi loin – car si nous votons cela aujourd'hui, demain, nous devrons voter la même chose pour les hommes.
Il est intéressant de statuer sur cette question qui a fait débat et sur laquelle ont pu être émis par le passé des avis différents. Toutefois, nous en arrivons maintenant à un stade où la réflexion est mûre ; par deux fois lors de ses dernières réunions, la commission s'est montrée favorable à cette méthode, alors que précédemment, faute peut-être de connaissances suffisantes sur le sujet, elle n'y avait pas été favorable.
En outre, je le répète, nous disposons en parallèle de l'avis des professionnels de santé et – je me permets de corriger ce qui a été dit tout à l'heure – ce n'est pas la majorité, c'est la totalité des sociétés savantes qui a rédigé une tribune demandant aux parlementaires d'autoriser la pratique de la ROPA. Il convient d'en tenir compte.
Certes, c'est à nous de décider, monsieur Bazin, mais permettez-moi de vous dire, si vous avez un peu de patience, pourquoi elles le demandent.
De toute évidence, mes explications n'ont pas été suffisamment développées pour que vous les entendiez. La pédagogie suppose la répétition – et c'est peut-être encore plus vrai pour vous, monsieur Bazin, que pour d'autres.
Protestations sur les bancs du groupe LR.
J'ai le souhait d'être à votre service, de vous apporter toutes les informations nécessaires et de vous satisfaire.
« Nous demandons aux parlementaires en charge du projet de loi relatif à la révision des lois de bioéthique d'inclure la FIV-ROPA dans les nouvelles dispositions ouvertes aux couples de femmes » : je tiens à votre disposition la liste de toutes les sociétés savantes qui ont signé cette tribune. Pourquoi ? Parce qu'elles sont aujourd'hui confrontées à des difficultés considérables. Ces difficultés sont dues au fait que, chaque année, entre 15 000 et 20 000 couples hétérosexuels se rendent à l'étranger pour faire des PMA et des fécondations in vitro utilisant des ovocytes en raison de la pénurie considérable d'ovocytes en France. Malheureusement, ces couples se procurent à l'étranger des ovocytes sous une forme rétribuée, donc sans respecter nos règles éthiques. Et demain, avec la PMA pour toutes les femmes, si nous ne faisons rien, ce sont quelques dizaines de milliers de demandes supplémentaires qui seront elles aussi adressées à l'étranger.
En d'autres termes, ce dont nous devons prendre conscience à ce moment du débat, c'est que nous élaborons une loi visant à offrir à toutes les femmes la possibilité d'accéder à la PMA, mais nous n'accordons pas en parallèle les moyens pour que cela se concrétise. Ainsi, nous ne voyons toujours pas se développer de grandes campagnes de promotion du don de spermatozoïdes. Or, comme je l'ai déjà dit hier, dans notre pays, seulement 7 % des hommes savent qu'ils peuvent donner des spermatozoïdes. Il faudrait donc lancer une campagne d'information, sur le modèle des campagnes pour le don du sang.
De même, s'agissant du don d'ovocytes, nous refusons d'autoriser le recours à la propre femme de celle qui ne peut procréer. Cela a été très bien dit par Caroline Fiat : il existe des couples dans lesquels l'une peut procurer l'utérus, mais n'a pas d'ovocytes, tandis que l'autre peut procurer les ovocytes, mais ne peut pas porter d'enfant. Dans ces cas-là, il serait absurde de ne pas utiliser les moyens dont le couple dispose – c'est d'ailleurs une nécessité d'utiliser les gamètes du couple avant de chercher ailleurs. Le principe de parentalité n'en serait pas remis en question pour autant : c'est la même chose que pour un couple hétérosexuel.
Je vous exhorte donc, mes chers collègues, à ne pas rayer d'un trait de plume une disposition qui a été introduite par la commission spéciale à deux reprises et après une longue réflexion. Il convient de faire en sorte que se concrétise demain ce dont nous adoptons aujourd'hui le principe.
J'ai l'impression, monsieur le rapporteur, que vous faites là une petite confusion. En effet, hormis dans le cas très particulier évoqué par Mme Fiat, à savoir celui d'un couple de femmes stériles pour des raisons différentes, l'une du fait d'un déficit d'ovocytes, l'autre d'un problème au niveau de l'utérus – j'y reviendrai – , pour les couples de femmes, il n'est nul besoin de don d'ovocytes. Ne dites pas que la PMA pour toutes entraînera une pénurie d'ovocytes pour les couples hétérosexuels qui en ont besoin ! Ce faisant, vous dénaturez le texte, en donnant l'impression qu'il y aurait une opposition entre les couples de femmes et les couples hétérosexuels qui ont besoin d'une PMA pour devenir parents et qui se trouveraient de ce fait lésés.
Sur cette question, il convient de faire très attention à ce que l'on dit. Il existe déjà des campagnes de promotion des dons de spermatozoïdes, même si elles ne sont peut-être pas suffisantes ; il faudra en effet travailler dans ce sens, et plus encore si l'Assemblée adopte la disposition concernant l'accès aux origines.
Indépendamment de cela, je répéterai ce qu'a déjà dit Olivier Véran : les sociétés savantes ne représentent pas l'ensemble des praticiens. Mon collègue a d'ailleurs indiqué qu'il connaissait des praticiens qui estimaient que la ROPA n'était pas souhaitable, pour des raisons qui leur appartiennent et qui sont tout aussi respectables que celles avancées par ceux qui y sont favorables.
Par ailleurs, ne perdons pas de vue l'esprit de ce texte, qui est d'affirmer l'importance de la filiation sociale. Je trouverais regrettable, pour certains couples de femmes de mes amies, que l'on puisse imaginer que si l'une ne donne pas ses ovocytes et l'autre ne porte pas l'enfant, alors elles ne seraient pas toutes les deux mères.
Je pense qu'être mère, cela n'engage pas le fait de donner biologiquement un ovocyte. Il me semble important, pour la philosophie du texte, de le rappeler.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Contrairement à ce que vous aviez annoncé, vous n'avez pas répondu à ma question !
Je voudrais répondre à l'attaque dirigée contre mon collègue Thibault Bazin.
D'abord, transposez sur un couple hétérosexuel votre exemple de couple de femmes, l'une étant stérile et l'autre ayant des problèmes de santé : la PMA n'est pas la seule solution ! Le bon sens serait peut-être d'engager une procédure d'adoption, qui serait beaucoup plus protectrice de la santé.
On ne peut pas toujours avancer des cas particuliers pour justifier des dispositions juridiques bouleversant la philosophie de la filiation et du don de gamètes !
Ensuite, vous avez tendance, monsieur le rapporteur, tout en donnant des leçons à notre collègue Thibault Bazin, à vous appuyer sur des arguments d'autorité : « Toutes les sociétés savantes, tous les experts, tous les médecins disent… ». Mais vous trouverez toujours une société savante, un expert ou un médecin qui dira le contraire ! La science fonctionne par la confrontation, et non par le consensus – on l'a vérifié au début de la crise du covid.
Sourires.
Vous devriez donc renoncer à ce type d'arguments d'autorité.
Enfin, ce que dévoile ce débat, c'est la fracture évidente entre le rapporteur et le Gouvernement. Alors que vous n'avez cessé de nous ressasser vos principes éthiques, madame le ministre, on s'aperçoit que le Gouvernement est dépassé par l'aile gauche de la majorité, une aile gauche qui ne cesse de crier à la discrimination. C'est ce raisonnement que nous combattons, car nous craignons qu'il n'aboutisse à la GPA. Vous l'avez démontré par A plus B : il conduit à repousser toujours plus loin les limites au nom d'une égalité théorique, et vous force à inventer de nouveaux concepts, comme celui de « filiation sociale ». Nous préférons pour notre part en rester à des choses très basiques, qui ont fonctionné pendant quand même 2 000 ans.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR et parmi les députés non inscrits.
Je mets aux voix les amendements identiques nos 2166 rectifié , 1222 et 2272 rectifié .
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 98
Nombre de suffrages exprimés 95
Majorité absolue 48
Pour l'adoption 74
Contre 21
Les amendements identiques nos 2166 rectifié , 1222 et 2272 rectifié sont adoptés ; en conséquence, les amendements nos 234 , 343 , 823 , 966 , 1040 , 1251 , 1376 , 1421 , 2200 , 2216 tombent et les amendements nos 1020 , 1041 , 1322 , 1810 , 2100 , 2217 , 12 , 143 , 189 , 574 , 825 , 1415 , 1814 , 1892 , 2114 , 2219 , 2206 , 828 , 1308 , 2220 , 2002 , 602 , 2180 , 2179 , 635 , 1787 , 253 , 829 , 1021 , 1042 , 1253 , 1375 , 1417 , 1757 , 1815 , 2017 , 2032 , 2183 , 380 et 2182 deviennent sans objet.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.
Il s'agit d'un amendement de coordination. Le troisième alinéa de l'article 1er prévoit déjà la possibilité, pour les couples de femmes et les femmes non mariées, d'accéder à l'AMP. Les alinéas 16 et 17 avaient été introduits par le Sénat lors de sa réécriture du texte. Dès lors que la commission spéciale de l'Assemblée nationale a rétabli l'article 1er dans sa rédaction adoptée par l'Assemblée en première lecture, il n'y a aucune raison de les conserver.
Comme l'a expliqué M. Mbaye, il s'agit là d'un amendement de cohérence. Les auteurs de ces amendements identiques obéissent à des motivations diverses, mais tous concluent qu'il importe de supprimer ces deux alinéas introduits par nos collègues du Sénat et devenus inopportuns.
Je suis saisi de neuf amendements, nos 383 , 344 , 1225 , 1228 , 1234 , 1414 , 2099 , 246 et 1327 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 344 , 1225 , 1228 , 1234 , 1414 et 2099 sont identiques, ainsi que les amendements nos 246 et 1327 .
La parole est à M. Guillaume Chiche, pour soutenir l'amendement no 383 .
Il vise à autoriser le double don de gamètes en cas de double infertilité. Actuellement, les couples doublement infertiles peuvent bénéficier du dispositif de l'accueil d'embryon, c'est-à-dire de la possibilité d'obtenir les embryons surnuméraires d'un autre couple. Je vous propose de leur permettre de produire des embryons issus d'un double don de gamètes.
La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l'amendement no 344 .
Il vise à supprimer la possibilité du double don de gamètes. Cette limitation est indispensable pour permettre à l'enfant conçu in vitro d'avoir un lien biologique avec au moins l'un de ses deux parents. Même si l'affection et le fait d'avoir été désiré, dont il a été longuement question au cours de ce débat, jouent un rôle considérable dans la construction de l'enfant, la composante biologique demeure essentielle au lien de filiation.
Tout à fait, monsieur le président, pour la même raison que d'habitude.
La parole est à M. Bernard Perrut, pour soutenir l'amendement no 2099 .
Il est primordial pour nous que, dans le cadre de toute PMA, l'embryon soit conçu avec les gamètes d'au moins l'un des membres du couple. Mme Genevard vient de rappeler que le lien biologique est essentiel et que rien ne saurait le remplacer. Le double don de gamètes a toujours été interdit par le droit français et nous souhaitons que cette interdiction perdure.
L'amendement no 1327 de M. Marc Le Fur l'est également.
Quel est l'avis de la commission sur l'ensemble de ces amendements ?
Monsieur Chiche, votre intention est satisfaite par l'alinéa 19, que votre amendement vise à supprimer. Soyez rassuré : je vous assure qu'en définitive, cet alinéa lève l'interdiction du double don de gamètes. Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, avis défavorable.
Concernant les autres amendements, l'avis de la commission sera défavorable, puisqu'ils tendent à interdire le double don de gamètes, que nous entendons autoriser.
Monsieur Chiche, vous demandez la suppression de la disposition même que vous réclamez : je vous invite donc à retirer votre amendement, faute de quoi je lui donnerai un avis défavorable.
Avis défavorable aux autres amendements également. Nous souhaitons autoriser le double don de gamètes ; ne pas le faire empêcherait les femmes seules et infertiles d'avoir accès à l'AMP, que nous voulons, par ce texte, ouvrir à toutes les femmes.
Là encore, madame la ministre, vous ne parlez que de l'adulte, jamais de l'enfant.
Il est absolument essentiel à la construction d'un enfant qu'il ait un lien biologique avec au moins l'un de ses deux parents. Les enfants issus d'un don de gamètes n'ont dans la vie qu'une seule quête, celle de leurs origines. Or vous doublez le problème !
Que faites-vous des enfants adoptés ?
Mon amendement visait à faire figurer après l'alinéa 15 l'autorisation du double don de gamètes. Ayant entendu les explications de M. le rapporteur, je le retire.
L'amendement no 383 est retiré.
La notion de fécondation in vivo ne figure pas dans le code de la santé publique, ce qui obligerait à la définir. De toute manière, l'avis de la commission sera tout à fait défavorable à votre amendement, puisque celui-ci vise à « exclure la possibilité d'inséminer à la fois des ovocytes et des spermatozoïdes étrangers [… ] à la femme ».
L'amendement no 824 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 243 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'appariement est une pratique consistant à choisir les gamètes du donneur en fonction des caractéristiques du receveur, soit pour motif médical, soit – c'est le point contesté – pour motif de vraisemblance physique, les donneurs retenus ayant un phénotype proche de celui des membres du couple receveur.
L'arrêté ministériel qui fixe les conditions de l'appariement précise : « Outre l'appariement résultant d'un facteur de risque relatif présent chez le donneur et le receveur, un appariement entre le couple receveur et le donneur ou la donneuse de gamètes prenant en compte les caractéristiques physiques et les groupes sanguins du couple receveur est proposé, dans la mesure du possible et si le couple le souhaite ».
Cette pratique est le fruit d'une époque où l'AMP était taboue, voire honteuse, qualifiée d'« adultère sans joie ».
Les praticiens pensaient alors bon de soulager les parents en organisant une correspondance biologique. Or l'appariement est aujourd'hui contraire aux principes éthiques énoncés à l'article 16-4 du code civil, ainsi qu'à l'objectif positif de ce texte, qui tend précisément à lever le tabou, à mettre fin à l'organisation du secret entourant l'AMP. Il serait nécessaire de voir disparaître cette pratique de nos centres d'étude et de conservation des oeufs et du sperme humains, les CECOS.
Pourtant, en commission, un amendement permettant aux parents d'opter pour l'appariement a été adopté. Sans doute s'agissait-il de restreindre une pratique aujourd'hui généralisée, souvent imposée aux futurs parents, qui ne sont parfois même pas consultés. Mais ce vote a eu pour effet de consacrer l'appariement en faisant entrer cette pratique dans la loi, lorsqu'il faudrait la supprimer. Aussi l'amendement no 569 vise-t-il à supprimer l'alinéa 20 relatif à l'appariement adopté en commission spéciale, à notre sens par erreur.
La parole est à Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe, pour soutenir l'amendement no 1691 .
L'alinéa 20 vise à ce que l'appariement des caractères phénotypiques ne puisse avoir lieu qu'avec l'accord du couple receveur ou de la femme receveuse. Cet amendement tend à le supprimer, car l'arrêté ministériel relatif aux bonnes pratiques en matière d'AMP établit déjà les conditions de l'appariement : celui-ci est proposé « si le couple le souhaite ». Le choix constitue donc déjà la règle. Outre le fait que tout n'a pas vocation à figurer dans la loi, il paraît nécessaire et souhaitable de répéter qu'il faut également faire confiance aux équipes médicales, aux professionnels, concernant ce sujet.
Il vise à supprimer le consentement des demandeurs d'AMP à l'appariement de leur phénotype avec celui du tiers donneur. Il faut rappeler que le phénotype est constitué de l'ensemble des traits apparents d'un individu, résultant de l'expression des gènes et de l'environnement.
Catherine Rongières, médecin au centre hospitalier universitaire – CHU – de Strasbourg, a consacré au sujet un excellent mémoire pour le diplôme interuniversitaire – DIU – d'éthique. Il en ressort que personne n'a pu démontrer que le bien de l'enfant consistait à ressembler à ses parents. L'enfant à naître est le fruit d'un projet d'amour ; c'est la parenté qui fait la ressemblance, et non l'inverse.
Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements identiques ?
Je suis tout à fait d'accord avec ces amendements. Mesdames, vous avez raison : même si l'appariement n'apparaît pas dans la loi, nous avons entendu parler, lors des auditions, de son utilisation parfois systématisée, voire imposée aux familles. C'est très regrettable. Pour autant, cette pratique est organisée sur le terrain par certains centres ; la loi, qui ne l'a pas prévue, ne peut en faire état. Encore une fois, vous avez donc raison de vouloir faire disparaître l'appariement de ce texte.
Pour ma part, je serais très reconnaissant au Gouvernement d'être de plus en plus attentif à ce sujet. Certains de nos compatriotes, notamment dans les territoires ultramarins, peuvent à juste titre se sentir privés d'accès rapide à un parcours d'AMP car l'appariement leur est imposé alors même qu'il n'y a pas d'appariement possible, faute de donneur satisfaisant. Il faudrait s'exonérer de cette pratique d'un autre temps, non seulement injustifiée, mais source d'injustice et de douleur pour des familles qui se sentent exclues de l'AMP.
Au vu des arguments avancés, je donne un avis favorable à ces amendements de suppression de l'alinéa 20, mais je demande que des actions soient entreprises au niveau réglementaire pour satisfaire les couples concernés.
Favorable également. Les bonnes pratiques professionnelles, fixées par un arrêté du ministre des solidarités et de la santé, précisent déjà que l'appariement peut être proposé dans la mesure du possible et si le couple le souhaite. Il n'y a donc aucune raison de le mentionner dans la loi.
Je pense que l'appariement est une bonne chose car il obéit au principe de la vraisemblance biologique – ce même principe qui fondait l'adoption, du moins jusqu'à la loi de 2013. Pourquoi la vraisemblance biologique serait-elle valable pour les ultramarins, mais pas pour les autres ? Pourquoi serait-il utile de préciser ce principe dans un arrêté, mais pas de le faire figurer dans la loi ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.
Je souhaite rappeler clairement quelle disposition ces amendements proposent de supprimer. L'alinéa 20 est le suivant : « Dans le cadre de l'attribution et de la mise à disposition de gamètes ou d'embryons pour la réalisation d'une assistance médicale à la procréation avec tiers donneur, l'appariement des caractères phénotypiques ne peut se faire qu'avec l'accord du couple receveur ou de la femme receveuse. »
La commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la bioéthique a eu des échanges nourris à ce sujet, mais ceux-ci ne portaient pas sur les points soulevés dans l'hémicycle. Nous avons adopté l'amendement de M. Saulignac insérant cet alinéa dans le projet de loi car certains de nos compatriotes, qui présentent des caractères phénotypiques représentés de manière minoritaire au sein de la population générale, ne peuvent pas recevoir de don en raison d'un manque patent de gamètes correspondants dans les stocks existants.
Dans les faits, si vous présentez des caractéristiques phénotypiques comparables aux miennes, par exemple, vos chances de trouver des donneurs compatibles, c'est-à-dire des gamètes ou des embryons correspondant aux mêmes caractéristiques phénotypiques, sont bien moindres. Si nous souhaitons l'égalité dans l'accès à cette pratique médicale, dans l'accès au don, c'est pour qu'aucune discrimination ne soit faite, ni en raison du statut matrimonial, ni en raison de l'orientation sexuelle ou des caractéristiques phénotypiques des demandeurs.
Mes chers collègues, il serait faux de dire : « Tout va bien, ne l'inscrivons pas dans la loi. » Dans la pratique, comme nous l'avons entendu tout au long de nos travaux, certains cas posent problème. M. le rapporteur vient de rappeler qu'un usage perdure et que certaines personnes qui s'attendent à recevoir des embryons ou des gamètes se les voient refuser pour des contingences d'appariement.
Malgré nos désaccords, je remercie Mme Genevard de poser le sujet en ces termes. Ne faisons pas comme si le problème n'existait pas : la question de l'appariement se pose, dans les faits, de manière pleine et entière. Je vous appelle donc à rejeter ces amendements.
Je souhaiterais, moi aussi, quelques précisions. Je dois avouer que j'ai découvert l'existence de l'appariement il y a un an, au cours des premières auditions que nous avons menées dans le cadre de l'examen du projet de loi ; avant cette date, je ne savais pas que la pratique était courante dans le cadre des PMA avec tiers donneur. Mme Genevard y est favorable et, sur ce point, nous sommes en désaccord : quand j'ai découvert l'existence de l'appariement, cela m'a profondément choquée, et je continue de penser que cette pratique ne devrait pas exister.
Finalement, la commission spéciale a adopté un amendement en respectant le fil conducteur qu'elle s'était donné, et qui est aussi le mien, celui du choix. Je me suis donc prononcée en faveur de ce compromis. Bien sûr, en séance publique, tout ne doit pas se passer exactement comme en commission spéciale, ni comme en première lecture ; cela n'aurait pas de sens. Nous évoluons et notre avis est susceptible de se renforcer, ou au contraire de changer, en fonction des informations dont nous prenons connaissance.
En l'occurrence, la situation est un peu plus compliquée, car les personnes qui avaient défendu l'idée du choix en commission spéciale nous disent aujourd'hui qu'il faudrait supprimer l'alinéa faisant apparaître ce terme dans la loi.
C'est le « en même temps » de La République en marche ! Ils ne sont pas à une incohérence près !
Mme la ministre avance que le choix des couples est déjà respecté dans la pratique. Or, de mémoire – il faudrait vérifier le contenu des auditions d'août dernier – , il me semble que ce n'est pas exactement le cas, que les professionnels considéraient que l'appariement s'imposait ou, du moins, qu'il était extrêmement courant ; mais il l'est peut-être parce que les gens le demandent beaucoup. Est-ce une pratique très demandée ? Le choix est-il présenté par les professionnels de manière étayée, en expliquant les répercussions ? Est-il accompagné psychologiquement ? Nous aurions besoin de ces informations avant de nous prononcer.
L'alinéa concerné est issu d'un amendement du groupe Socialistes et apparentés adopté en commission spéciale. Nous souhaitions que le choix soit encadré, conformément à la position exprimée par la Commission nationale consultative des droits de l'homme – CNCDH – , qui recommande l'encadrement de la pratique et prévoit la reconnaissance du droit des parents de renoncer à l'appariement de leur phénotype avec celui du donneur. Notre amendement est allé plus loin en précisant que l'appariement ne pouvait avoir lieu qu'avec l'accord des parents. En tout état de cause, la pratique mérite d'être encadrée plus strictement.
Le procès d'intention fait aux professionnels, notamment aux CECOS, me laisse perplexe. Quand un couple se présente pour une demande d'AMP, des entretiens sont prévus, au cours desquels un échange a lieu sur les attentes des parents en matière de conception. Je m'étonne que l'on puisse penser que l'équipe médicale, n'ayant pas de gamètes appariés, décide, sans rien demander aux parents, de ne pas leur proposer la possibilité d'une PMA. C'est grave et ce n'est pas du tout l'écho que j'ai de la part des professionnels des CECOS.
En outre, le cas évoqué par Mme Genevard est celui de l'accompagnement d'un couple en demande d'enfant. Dans cette situation, c'est ce que le couple peut concevoir dans sa démarche qui est pris en compte par l'équipe médicale.
Les amendements identiques nos 255 de Mme Emmanuelle Ménard et 595 de Mme Agnès Thill sont défendus.
Il concerne le problème des embryons surnuméraires. On sait qu'une législation trop souple en ce domaine incite à la création d'embryons, lesquels posent ensuite des problèmes d'éthique compliqués. Quand ils ne font plus l'objet d'un projet parental, que doivent-ils devenir ? Doivent-ils être détruits, utilisés pour la recherche ? Les quelque 210 000 à 220 000 embryons à disposition aiguisent l'appétit du monde de la recherche et la question se pose régulièrement, de révision de la loi de bioéthique en révision de la loi de bioéthique.
Dans le même temps, les techniques évoluent : la conservation des gamètes masculins existait déjà, et l'autoconservation des ovocytes est désormais possible par leur vitrification. Il existe donc une autre solution. La législation de 2011 prévoit de privilégier la conservation des ovocytes à celle des embryons, mais je crois qu'il faut aller plus loin en limitant la production d'embryons au strict minimum nécessaire pour un couple.
Les amendements nos 144 de M. Patrick Hetzel, 1418 de M. Marc Le Fur, 1254 de Mme Blandine Brocard, 597 de Mme Agnès Thill et 1326 de M. Marc Le Fur sont défendus.
Il ne sera pas possible d'accepter ces amendements visant à réduire le nombre d'embryons développés, et par conséquent les stocks très importants d'embryons surnuméraires congelés que conservent les laboratoires. Vous anticipez une situation que nous souhaitons prochaine, mais qui n'existe pas encore, en supposant qu'on pourrait totalement suppléer aux besoins par la seule vitrification des ovocytes et par des prévisions qui, pour l'heure, restent souvent du domaine théorique.
Nous aimerions éviter aux femmes de subir des stimulations ovariennes répétées, dont on a rappelé qu'elles peuvent être pénibles, mais il faut tenir du compte du taux d'échec des fécondations in vitro, qui, en France, se monte à 80 %.
Parce que nous n'employons pas les moyens qui permettraient de réduire ces échecs, comme le DPI-A – dépistage préimplantatoire des aneuploïdies – ou la recherche sur les embryons. Nous en reparlerons demain.
Quoi qu'il en soit, dans notre pays qui était pionnier en matière de fécondation in vitro peu après que cette technique a été décrite par Bob Edwards, le taux de succès n'est pas suffisant. Pour atteindre un objectif qui ne se situe à terme qu'à 60 % de bons résultats, il faut répéter encore et toujours les implantations d'embryon. D'où l'obligation d'en prévoir un nombre élevé, voire excessif, en sachant que, par la suite, il faudra nécessairement les garder sans objet ou les détruire, ce qui se produira de toute façon après quelques années.
Dans aucun pays, on n'a substitué une technique à l'autre. Toutes deux sont complémentaires et, pour l'instant, on ne peut pas éviter de recourir aux embryons.
Je comprends l'intention des auteurs des amendements. À terme, leur ambition sera réalisable mais, pour l'instant, reconnaissons-le, la technique n'est pas encore au rendez-vous. Nous sommes aujourd'hui obligés de disposer d'un nombre d'embryons surnuméraires probablement excessif, ou du moins d'un peu plus d'embryons qu'on n'en utilisera effectivement.
Aujourd'hui, il existe un stock de 220 000 embryons conservés dans les laboratoires !
J'émettrai également un avis défavorable, en rappelant que les embryons sont majoritairement conservés pour permettre aux couples de faire plusieurs essais dans le cadre d'une PMA. Pour citer un chiffre à titre indicatif, 19 000 embryons ont été donnés à la recherche et sont disponibles aujourd'hui, tandis que 3 000 embryons ont été utilisés à des fins de recherche – parce que les parents ont préféré cette solution à la destruction – au cours des dix à douze dernières années.
Il y aurait beaucoup à dire, mais c'est impossible, en raison du temps programmé !
Je suis saisi de sept amendements, nos 329 , 258 , 261 , 1023 , 1044 , 1434 et 264 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 1023 , 1044 et 1434 sont identiques.
L'amendement no 329 de Mme Marie-France Lorho est défendu.
Il en va de même des amendements nos 258 et 261 de Mme Emmanuelle Ménard.
La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l'amendement no 1023 .
Est-ce également le cas de votre amendement no 1044 , monsieur Hetzel ?
Les amendements nos 1434 de M. Marc Le Fur et 264 de Mme Emmanuelle Ménard sont défendus.
L'amendement no 264 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 345 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Sur les amendements identiques nos 493 et 918 , je suis saisi par le groupe Socialistes et apparentés d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je suis saisi de quatre amendements identiques, nos 13 , 145 , 593 et 1420 .
La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l'amendement no 13 .
Il s'agit de supprimer, à la fin de la première phrase de l'alinéa 22, les mots « dans l'intention de réaliser ultérieurement leur projet parental ». S'il va de soi qu'il existe un projet dans la procréation, un enfant ne peut être réduit à cette seule dimension.
L'introduction de cette formule, lors de la première lecture, a été opérée par le biais de ce qu'on a appelé « l'amendement Ferrand », adopté dans des conditions scandaleuses par le seul président de l'Assemblée.
Nous entendons revenir sur cette notion de projet parental, à laquelle on ne saurait réduire un être humain.
Défavorable. Depuis le début de la semaine, monsieur Breton, nous parlons, les uns et les autres, de projet parental. Il serait difficile de revenir en arrière.
Au reste, l'adoption des amendements n'atteindrait pas l'objectif visé : en supprimant la mention d'un cadre pour lequel est effectuée la conservation des ovocytes, vous ne borneriez pas cette conservation et priveriez les couples d'une information sur la possibilité de donner un embryon surnuméraire à un autre couple, évitant ainsi sa conservation inutile.
Je vous rappelle que la pratique actuelle est déjà fondée sur l'expression du projet parental – pardon d'utiliser encore ce terme – sans qu'ait été ouverte à un seul instant la possibilité de recourir à la GPA.
Même avis.
Il faudrait tout de même réparer l'injustice commise en première lecture !
Je pense, monsieur Bazin, que le résultat du vote ne fait plus aucun doute.
L'amendement no 485 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 268 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Nous souhaitons tous épargner des souffrances inutiles aux femmes bénéficiant de la PMA. C'est pourquoi le groupe Socialistes et apparentés propose que l'on évite la stimulation hormonale préalable à l'insémination artificielle, dès lors qu'elle n'est pas nécessaire. On évitera ainsi aux femmes de subir un traitement hormonal important non sans effets indésirables. Il paraît surprenant que, même lorsque l'infertilité est exclusivement liée à l'homme, un tel protocole ne soit pas révisé.
Les membres du Gouvernement ont longuement présenté les stimulations hormonales comme trop fréquentes et trop dangereuses dans les protocoles de PMA. Dès lors, comment pourraient-ils émettre un avis défavorable sur ces amendements qui proposent, quand c'est possible, que les femmes ayant recours à une insémination artificielle puissent choisir le degré de médicalisation du processus dans lequel elles s'engagent, sans être forcées de subir des stimulations hormonales qui ne seraient pas obligatoires ?
Je rappelle qu'à l'heure actuelle, pour les couples hétérosexuels, la femme doit subir des stimulations hormonales même quand l'infertilité est le fait de l'homme.
Bien que j'approuve l'intention qui a guidé ces amendements, je n'émettrai malheureusement pas un avis favorable à leur sujet, car les dispositions visées ne relèvent pas de la loi : il n'appartient pas au législateur de formuler des prescriptions à l'intention des équipes médicales. Ce que vous préconisez relève des bonnes pratiques cliniques. Il existe déjà des recommandations que l'on peut sans doute renforcer. On peut aussi transmettre par voie réglementaire des indications supplémentaires aux services concernés, mais celles-ci ne sauraient figurer dans la loi.
Si les prescriptions médicales ne sont pas pertinentes, il faut les dénoncer. On estime qu'environ 25 % des actes médicaux pratiqués ne devraient pas être réalisés. C'est dire que les responsables de la santé doivent effectuer un vaste travail – pas seulement en gynécologie – pour mettre un terme à des pratiques inutiles, surtout quand elles sont invasives.
Je souhaite répondre à Mme Fiat, qui m'a interpellé. Lors de la discussion relative à la ROPA, je n'ai pas cherché à dissuader qui que ce soit à procéder à des dons, mais il est de notre responsabilité d'évoquer les risques de la stimulation ovarienne, que vous connaissez et que les Françaises qui y ont recours connaissent. Il s'agit seulement de formuler une appréciation bénéfices-risques qui, en l'espèce, me semble négative, ce qui m'a conduit à émettre des avis défavorables.
Comme le rapporteur, je donne un avis défavorable aux amendements en discussion, les dispositions qu'ils visent relevant non de la loi mais de la libre appréciation des équipes clinico-biologiques, auxquelles il appartient d'appréhender le bilan bénéfices-risques afin de préserver la santé des patientes.
Je ne suis d'accord ni avec le rapporteur ni avec le secrétaire d'État. Notre amendement tend à insérer, après l'alinéa 22, les phrases : « L'aide médicale à la procréation s'adapte à toutes les situations. Lorsqu'elle n'est pas nécessaire, aucune stimulation hormonale n'est proposée. » Il s'agit, non d'influer sur la décision du médecin, mais de lui apporter une précision.
J'ajoute que cette proposition provient du Planning familial, dont les membres connaissent leur travail.
En l'occurrence, on s'adresse à des médecins !
Il n'y a pas de médecins, au Planning familial ? Il s'agirait de comprendre un peu le système français !
Sourires.
Nouveaux sourires et exclamations.
Il s'agit, non de nous substituer au médecin, mais de préciser dans la loi – que l'on étudie en faculté de médecine – que l'aide médicale à la procréation s'adapte à toutes les situations et que, lorsqu'une stimulation hormonale n'est pas nécessaire, il n'y a pas lieu de la proposer. En quoi cet alinéa interfère-t-il avec la décision médicale finale ?
Je ne vois pas pourquoi vous ne voteriez pas cet amendement, d'autant que, depuis le début de l'après-midi, vous n'arrêtez pas de nous parler des risques de la stimulation hormonale.
Il importe de partir de l'origine de notre amendement. Mme Fiat a rappelé qu'il procède d'une initiative du planning familial ainsi que d'associations de personnes concernées ; engagées dans ce processus, celles-ci sont prêtes à subir certaines procédures lourdes et non sans conséquences. D'après les constats réalisés sur le terrain, dans la réalité, certaines procédures sont poussées à un point tel qu'elles en deviennent un problème, car les personnes concernées ne souhaitent pas les mener plus avant et y sont pourtant contraintes.
Monsieur le rapporteur, vous affirmez que les dispositions que nous proposons relèvent du domaine réglementaire. Mais lorsqu'on élabore une loi de bioéthique ou une loi en général, on part aussi de la réalité et de ce qui, peut-être, manque dans la législation existante.
L'encadrement de cette pratique suppose d'envoyer un signal fort aux équipes médicales, consistant à légiférer au lieu de s'en remettre aux bonnes pratiques. Ce ne serait pas une première car la loi encadre bel et bien les pratiques médicales – encore heureux ! Certaines pratiques sont interdites, et la décision de tel ou tel praticien, à un moment donné, est limitée par les bornes que nous fixons. En l'espèce, il existe véritablement des cas de surmédicalisation, qui vont à l'encontre du souhait des personnes concernées, quand bien même elles souhaitent mener leur PMA à son terme.
Dès lors, il faut entendre cette revendication des associations et des personnes concernées, et non se contenter de les renvoyer aux bonnes pratiques, dont on sait, grâce aux constats de terrain, qu'elles ne suffisent pas à faire cesser l'hypermédicalisation.
Mme Caroline Fiat applaudit.
J'avoue très humblement que je découvre ces amendements avec grand intérêt. On a tendance à croire que tout est possible et que tout se fait facilement, sans aucun souci. Bien entendu, nous faisons confiance à nos médecins, mais ces amendements ont le mérite de resituer un peu les choses et de nous faire prendre conscience qu'il s'agit d'un processus difficile et douloureux. C'est pourquoi je les soutiens.
En revanche, le moyen pour l'atteindre n'est pas approprié.
Cet objectif est d'ores et déjà inscrit dans la loi française, qui interdit de pratiquer tout geste médical ne présentant pas d'intérêt principalement pour la personne elle-même, et, de façon bien moins fréquente et bien plus accessoire, pour d'autres personnes. J'évoquais tout à l'heure, à titre d'illustration, les prélèvements d'organes réalisés pour des dons. Chaque geste doit présenter une utilité bénéfique ; à défaut, il est interdit de pratiquer un acte médical quelconque. Les amendements sont donc satisfaits s'agissant de leur objectif.
Ce qui manque ici, vous l'entendez bien, c'est la définition des indications qui sont justifiées et de celles qui ne le sont pas. Cela ne peut pas figurer dans la loi. Nous ne pouvons pas dire ici quelles sont les stimulations ovariennes excessives et quelles sont celles qui sont vraiment justifiées. Une telle distinction ne peut figurer que dans un guide de bonnes pratiques, qui peut être renforcé d'une façon ou d'une autre s'il n'est pas appliqué correctement. La loi ne peut se substituer aux pratiques professionnelles.
J'ai pleinement confiance dans les professionnels de santé et ne doute pas qu'ils partagent notre objectif. Toutefois, monsieur le rapporteur, l'utilité bénéfique en médecine n'est pas toujours construite avec le patient ou la patiente. D'après ce que j'ai pu constater, elle est certes définie en fonction d'un objectif unique, qui est aussi celui de la patiente ou du patient : faire en sorte que la PMA fonctionne et aboutisse à la naissance d'un enfant. Mais toutes les patientes et tous les patients ne vivent pas la même chose. Ils ont beau avoir le même objectif, tous ne veulent pas l'atteindre de la même façon.
J'aimerais en donner un exemple. Souvent, les médecins spécialisés en PMA proposent aux femmes – plus elles sont âgées, plus c'est le cas – de leur transférer plusieurs embryons pour leur donner plus de chances d'avoir un enfant, quitte à en avoir deux ou trois à 40 ans. S'agit-il là d'une utilité bénéfique construite avec la patiente ? Pas toujours. Une stimulation ovarienne visant à accroître les chances de la patiente, au motif qu'elle a 37, 38 ou 39 ans, qu'elle n'a que quatre essais et doit agir le plus rapidement possible du fait de son âge, même si ce n'est pas toujours bénéfique pour sa santé à long terme, est-elle toujours menée avec l'adhésion de la patiente ? Non, pas systématiquement.
L'objectif est bien commun : il s'agit d'avoir un enfant. Mais par tous les moyens possibles ? Non ! Chacun a ses expériences et ses volontés, qui ne sont pas toujours pleinement écoutées. Inscrire dans la loi le paradigme proposé me semble très important, d'autant qu'il s'agit d'une loi de bioéthique.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 70
Nombre de suffrages exprimés 68
Majorité absolue 35
Pour l'adoption 11
Contre 57
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi relatif à la bioéthique.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt heures cinq.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Serge Ezdra