La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
Le message d'Emmanuel Macron a bien été entendu par les soignants : il va falloir faire des efforts. Par exemple, au CHRU – centre hospitalier régional et universitaire – de Nancy, après quelques exercices physiques, ils se sont tous unis et ont essayé – de toute leur force – de bouger les murs pour avoir plus de place et ouvrir des lits. On ne peut pas dire qu'ils ménagent leurs efforts, et ce malgré la fatigue cumulée : à Nancy, les soignants n'ont pas eu de répit depuis mars 2020. Malgré leur acharnement, force est de constater qu'ils n'ont pas réussi. Ils ont donc transformé des lits de réanimation pédiatrique en lits de réanimation pour adultes.
Huées sur les bancs du groupe FI
Vous savez ce que cela signifie : désormais, des opérations sont également déprogrammées dans les services de pédiatrie et les enfants sont aussi concernés.
Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, j'hésite entre cynisme, ironie et colère. Cela fait dix mois que mon groupe vous demande d'auditionner les 180 000 infirmiers diplômés d'État ayant quitté la profession,
Applaudissements sur les bancs du groupe FI – M. Sébastien Jumel applaudit également
pour savoir à quelles conditions ils seraient prêts à revenir. En tout cas, une chose est sûre : celles du Ségur de la santé ne sont pas suffisantes.
Nous avons perdu dix mois. Aujourd'hui, on déprogramme à tour de bras. Selon les professionnels concernés, les effets collatéraux pour les patients seront préjudiciables et irrattrapables, pour ne pas dire mortels. Ne trouvez-vous pas que le goût du risque a de graves conséquences ?
Il y a quelques semaines, non sans cynisme, vous avez jeté en pâture les soignants – dont je fais partie – , affirmant qu'ils étaient inconscients puisque, en ne se vaccinant pas, ils mettaient la vie de leurs patients en danger. Quel mépris ! Savez-vous qu'au CHRU de Nancy, aucune dose n'est disponible depuis trois semaines pour vacciner le personnel soignant ?
Plutôt que de nous accuser de tous les maux, donnez-nous les moyens de nous protéger. Monsieur le ministre, vous nous avez conduits dans le mur ; allez-vous – au moins – admettre votre responsabilité ?
Applaudissements sur les bancs du groupe FI et sur plusieurs bancs du groupe GDR.
Madame la députée, merci pour cette question, encore une fois toute en modération…
Exclamations sur les bancs du groupe FI.
… à laquelle je vais bien sûr répondre.
Tout d'abord, je tiens à saluer le travail extraordinaire des soignants, dans tous les hôpitaux comme en médecine de ville, et, évidemment, au CHRU de Nancy.
À ce propos, comme vous ne l'avez pas souligné, je vais me permettre de le rappeler : grâce au Ségur de la santé, plus de 400 millions d'euros d'investissements ont été annoncés pour reconstruire l'hôpital de Nancy. De plus, comme je m'y étais engagé, j'ai renoncé à toutes les suppressions d'emplois programmées il y a quelques années, de même qu'aux suppressions de lits, dont le nombre va au contraire augmenter. Ces mesures sont soutenues – et c'est heureux – par le maire de Nancy, par la communauté médicale et paramédicale locale et par l'agence régionale de santé.
Parmi les messages que vous avez souhaité faire passer, je crois comprendre que vous vous inquiétez au sujet des renforts médicaux et paramédicaux dont pourraient bénéficier, dans une période difficile, les personnels hospitaliers. Certes, nous comptons avant tout sur la mobilisation des personnels qui travaillent déjà à l'hôpital, et qui font des efforts énormes depuis plus d'un an.
Je ne trouverai jamais suffisamment de mots pour les remercier pour leur courage, leur abnégation et leur détermination à soigner et à sauver des vies, de jour comme de nuit.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe Dem.
Ces soignants pourront compter sur les renforts issus de la réserve sanitaire, sur la mobilisation des médecins retraités, des soignants retraités, des étudiants et des professionnels de santé libéraux.
Je l'ai annoncé, j'ai signé un arrêté permettant de majorer de 50 à 100 % la rémunération des soignants, lorsqu'ils prêtent main forte à leurs collègues.
S'agissant des déprogrammations de soins, elles sont décidées progressivement, à mesure qu'il faut libérer des équipes et des lits pour sauver la vie des malades touchés par des formes graves du covid-19. Rassurez-vous, la déprogrammation de certains soins n'est pas dictée dans le bureau du ministre…
Interruptions persistantes sur les bancs du groupe FI – Brouhaha.
Je ne m'entends pas parler !
La déprogrammation est décidée localement, par les directeurs, les équipes médicales et paramédicales, en fonction des besoins en lits de réanimation et en maintenant évidemment les interventions urgentes – notamment en cancérologie.
C'est pour cela que nous vous proposons depuis plus d'un an de voter avec nous des mesures de protection de la population.
Nouvelles interruptions sur les bancs du groupe FI.
Vous ne l'avez jamais fait,
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe Dem
jugeant plus intéressant de…
Merci, monsieur le ministre…
M. Jean Lassalle n'étant pas présent, nous passons à la question suivante.
La France vaccine à flux tendus : 13 millions d'injections ont été administrées, sur 13,7 millions de doses réceptionnées. En avril, la France recevra 12 millions de doses supplémentaires, soit presque autant qu'elle en a reçu depuis le début de la campagne de vaccination. Des vaccinodromes ont ouvert et continuent d'ouvrir partout dans le territoire, par exemple au stade Vélodrome, au Stade de France, au stade Océane – au Havre – ou à celui de La Beaujoire - Louis Fonteneau, à Nantes. La cadence attendue est de 400 000 vaccinations par jour. L'objectif est clair et nous l'atteindrons : dépasser les 10 millions de personnes vaccinées à la mi-avril ; puis atteindre 20 millions à la mi-mai et 30 millions à la mi-juin car la France va – et voit – plus loin. Dès juin 2020, elle a souhaité renforcer ses capacités de recherche de solutions thérapeutiques, augmenter ses capacités de production, sécuriser son accès aux produits de santé et construire, à l'échelle européenne, la résilience face aux crises sanitaires. Depuis lors, 460 millions d'euros ont été investis pour atteindre ces objectifs. Cette semaine, la France va se lancer dans la production massive de vaccins : Delpharm démarre le flaconnage du vaccin Pfizer-BioNTech, dans son usine d'Eure-et-Loir ; Recipharm en fera autant dans le courant du mois, en Indre-et-Loire, pour le vaccin de Moderna ; Sanofi devra aussi mettre à disposition son laboratoire du Rhône pour la production du vaccin de Johnson& Johnson. Il y a ceux qui s'agitent, s'épanchent et s'éplorent, et il y a ceux qui s'organisent pour produire des vaccins pour tous.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM.
En ayant refusé de se livrer à une guerre des vaccins avec ses voisins, la France s'est honorée. Elle le fera encore davantage en contribuant à bâtir, dans l'Union européenne, une industrie résiliente et innovante. Madame la ministre déléguée chargée de l'industrie, pouvez-vous nous indiquer comment ont été utilisés les fonds de France relance, …
… ainsi que ceux des différents appels à projets, pour mobiliser le tissu industriel français ? Combien de sites de production seront opérationnels et quand ? La production de vaccins, dans 53 sites de l'Union européenne, permettra-t-elle d'atteindre l'immunité collective pour les 450 millions d'Européens, annoncée par le commissaire Thierry Breton pour le 14 juillet ?
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM.
Merci de souligner l'engagement de tous les industriels dans cette bataille pour trouver des traitements, pour trouver un vaccin et pour fabriquer dans un pas de temps extrêmement étroit : c'est une prouesse à la fois scientifique, technologique et industrielle, c'est une prouesse européenne et française.
Vous l'avez souligné : le Gouvernement s'est mobilisé en juin dernier, parce qu'aucun site en France n'était alors capable de fabriquer de l'ARN messager, et seul Sanofi s'était lancé dans la course à la recherche du vaccin. Grâce au Gouvernement et au dispositif que nous avons mis en place avec Olivier Véran, trois lignes de production ont pu s'organiser. Demain, le vaccin de Pfizer-BioNTech sera fabriqué chez Delpharm ; dans quinze jours le vaccin de Moderna sera produit par Recipharm et, dans un mois et demi, celui de CureVac le sera dans deux sites de l'entreprise Favera. C'est également à l'initiative du Gouvernement que Sanofi – seul laboratoire à l'avoir fait – va produire deux vaccins de ses concurrents, …
… celui de Janssen sur son site français, et celui de Pfizer-BioNTech en Allemagne.
Oui, la France va prendre toute sa part à la guerre du vaccin, puisque près de 250 millions de doses sortiront de nos lignes de production d'ici à la fin de l'année. Mais ce n'est qu'une première étape. Que s'est-il passé depuis quinze ans ?
On a assisté au détricotage systématique de notre industrie pharmaceutique ; notre part de marché en matière de fabrication de produits pharmaceutiques a été divisée par deux. C'est le Gouvernement actuel qui a inversé la vapeur et qui, pour la première fois, a rouvert le financement du médicament et a réinstallé des capacités de production en France. Alors…
Malgré les rigueurs du règlement, je donne la parole est à M. Jean Lassalle.
… que je connaissais depuis longtemps, tout comme celui du Premier ministre. Mes chers collègues, je ne parlerai pas du vôtre… On m'avait indiqué que j'occupais la dix-neuvième place pour poser ma question.
Je voulais vous entretenir d'un sujet qui, certes, peut encore paraître supportable aujourd'hui, mais qui ne le sera plus du tout dans deux ans : l'organisation de la Coupe du monde de football au Qatar en 2022. Bien sûr, je ne suis pas le premier à m'en émouvoir, et certainement pas le dernier.
Depuis l'Antiquité, les sports ont toujours réuni les hommes, qui abandonnaient la guerre pour aller se battre autrement. Mais, il y avait peut-être moins de milliards en jeu, et moins de pétrole, d'armes et de sang qui dégoulinaient partout. Je ne veux pas mettre en cause le football, encore moins les sportifs et ceux qui travaillent toute une vie durant pour avoir le bonheur de marquer un but qui arrachera au commentateur égosillé un fameux « goooool » à n'en plus finir.
Sourires.
Aujourd'hui, le monde est en train de changer. Notre jeunesse aspire à un autre idéal. D'ailleurs, peut-on encore parler d'idéal, alors que 6 000 morts ont déjà été recensés, et que des stades climatisés vont être construits sur la mer ?
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.
Cela se passe au moment même où, en France, on discute d'un projet de loi visant à lutter contre le dérèglement climatique, qui contraindra sans doute certaines entreprises à fermer pour satisfaire à nos objectifs : on ne peut pas continuer à mentir !
Applaudissements sur les bancs des groupes FI et GDR et sur quelques bancs du groupe LR.
Merci de cette… intervention,
Sourires
car elle méritait d'être faite.
Au-delà de la transformation que vous avez évoquée, grâce aux buts potentiels à marquer, il y a quelques jours, j'ai lu – comme vous – l'article dans The Guardian. Avec beaucoup d'intérêt – et de soutien – , je constate que des manifestations sont organisées, et qu'une partie du monde sportif se mobilise à l'approche de la Coupe du monde qui se tiendra au Qatar en 2022. Votre intervention contribue à cette prise de conscience : il faut alerter, vous l'avez fait.
La France ne reste pas inactive : depuis plusieurs mois, nous avons – comme nos partenaires européens – des discussions avec l'émirat du Qatar, pour lui faire prendre en considération la nécessité d'améliorer les conditions de travail dans le pays, ainsi que les droits des migrants qui travaillent à la préparation de la Coupe du monde. Des efforts ont été faits : des mesures préconisées par le Bureau international du travail ont été mises en oeuvre ; le système injuste de la kafala a été supprimé l'année dernière ; un salaire minimum a été instauré, ainsi qu'un service de suivi médical gratuit de l'ensemble des salariés qui travaillent dans l'émirat.
Mais tout cela ne suffit pas. Ensemble, il importe de poursuivre nos efforts, dans un dialogue exigeant avec le Qatar, qui déclare vouloir poursuivre son action pour que les droits de l'homme en général, et ceux des salariés en particulier, soient préservés…
… dans la préparation de la Coupe du monde de football.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, qualifier la campagne de vaccination de laborieuse s'apparente à une aimable litote tant la situation constatée dans tout le pays par les professionnels de santé et les Français accuse la désorganisation la plus complète et un manque criant de doses alors que seule la vaccination massive peut mettre fin à la pandémie de covid-19.
Or la France se classe à la vingt-deuxième place mondiale pour la première injection administrée, au sein d'une Europe sévèrement critiquée par l'OMS, qui juge « inacceptable » la lenteur de son processus de vaccination. Nous manquons aujourd'hui cruellement de vaccins : ils sont distribués avec une parcimonie telle que les professionnels de santé sont réduits à inscrire les Françaises et les Français sur d'interminables listes d'attente.
Les patients sont bien au rendez-vous, pas les vaccins !
Contrairement à ce que vous affirmez, monsieur le ministre, votre logistique vaccinale n'est pas une réussite. Non, elle ne marche pas « du feu de Dieu » ! Tous les jours, dans les cabinets des médecins libéraux, des infirmiers, des sages-femmes, depuis peu, des vétérinaires et des dentistes, dans les pharmacies d'officine, il faut expliquer aux patients qu'on ne peut pas les vacciner, tout simplement parce qu'il n'y a pas de vaccins. La réalité est implacable.
Notre pays dispose pourtant d'un maillage médical exceptionnel avec l'ensemble des praticiens qui offrent une couverture vaccinale maximale de proximité. Pour ne citer qu'elles, les 21 000 pharmacies d'officine, qui ne demandent qu'à participer à la lutte contre le covid-19, seraient en mesure de vacciner de 400 à 500 000 personnes par jour, mais, parce que les doses font défaut, ce formidable atout dont dispose notre pays est inopérant. C'est désespérant ! Les patients ne comprennent pas que le Gouvernement ne cesse d'annoncer l'ouverture de nouveaux lieux de vaccination alors qu'ils ne peuvent pas se faire vacciner à deux pas de chez eux.
Face à ce constat, que pouvez-vous faire, monsieur le ministre, pour pourvoir enfin, rapidement et en nombre, l'ensemble des professionnels de santé de vaccins, et permettre aux Françaises et aux Français de reprendre une existence plus sereine ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Votre question porte davantage sur la production de vaccins que sur l'organisation de la stratégie, je vais néanmoins vous répondre…
… pour vous rappeler que nous avons pris, devant les Français, il y a deux mois, un engagement clair et chiffré : 10 millions de nos concitoyens auraient reçu au moins une injection de vaccin au 15 avril. Nous sommes le 6 avril et environ 9,5 millions de Français ont reçu au moins une injection : nous aurons donc largement anticipé l'objectif, et c'est heureux.
Par ailleurs, le mois d'avril constitue une étape importante puisque nous recevons 12 millions de doses de vaccin, dont 8 millions de doses Pfizer, ce qui nous permet d'augmenter le rythme des vaccinations, et a justifié d'accroître à la fois le nombre de centres et les capacités de vaccination de chacun d'entre eux. Les médecins et les pharmaciens sont sur le pont et, cette semaine, pour la première fois, les infirmières et infirmiers libéraux de ce pays pourront prescrire et injecter des vaccins AstraZeneca au domicile des personnes âgées isolées.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Cette semaine 1,4 million de doses AstraZeneca seront distribuées aux médecins libéraux et aux pharmaciens.
C'est une bonne nouvelle. Vous l'avez dit vous-même : les soignants et les centres savent vacciner et tout l'enjeu pour l'Europe – j'ajoute que cela vaut aussi pour le monde – c'est que la production de vaccins s'accélère pour que les quantités livrées soient plus importantes. À mesure que nous recevons des vaccins, nous protégeons les Français.
Les objectifs sont clairs et les populations concernées par une phase de vaccination sont au courant, mais, à la demande du Président de la République, nous contacterons aussi individuellement, à son domicile, chaque personne âgée de 75 ans et plus qui n'aurait pas pu trouver de rendez-vous parce que c'était difficile par téléphone ou par internet, ou parce qu'au bout d'un moment, n'ayant pas trouvé le créneau, elle a renoncé. Nous allons les chercher pour leur proposer des rendez-vous.
Nous avons vacciné plus de 92 % des personnes âgées en EHPAD ; plus de 60 % des personnes âgées de 75 ans et plus ; plus de 60 % des personnes âgées de 55 ans et plus avec comorbidité. Depuis le début, la vaccination cible volontairement les plus fragiles, et elle continuera. Elle augmentera crescendo à mesure que les livraisons augmenteront crescendo.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe Dem.
Madame la secrétaire d'État chargée de l'éducation prioritaire, face à la situation exceptionnelle que nous vivons depuis un an, je tiens à féliciter le monde enseignant qui a su se mobiliser pour protéger nos enfants tout en assurant la continuité pédagogique.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.
En assurant un enseignement à distance qui tienne compte de la spécificité des situations de chaque enfant, tous les acteurs de l'éducation nous ont démontré leur engagement sans faille.
Ainsi, alors que le Gouvernement a mené une politique active pour maintenir les écoles ouvertes, les professeurs et l'ensemble des équipes pédagogiques se sont montrés proactifs pour assurer l'accueil des élèves. La mise en place d'enseignements numériques puis le respect des nouvelles normes sanitaires les ont conduits à faire preuve d'une grande réactivité et d'adaptabilité.
Aujourd'hui, la situation sanitaire nous contraint à adopter de nouvelles mesures exceptionnelles. Mercredi dernier, le Président de la République annonçait l'adaptation du calendrier scolaire avec une fermeture des établissements pendant trois semaines pour les écoles, et quatre semaines pour les collèges et les lycées. De nouveau, le Gouvernement déploie de nombreux dispositifs afin d'assurer la continuité pédagogique. Il s'agira aussi, pendant la période des vacances scolaires, de maintenir le soutien apporté à nos élèves.
Dans ce cadre, je souhaite vous interroger sur les dispositifs du plan de continuité pédagogique et sur les outils mis à disposition des professeurs pour assurer cette continuité dès cette semaine, dans les meilleures conditions possibles. Par ailleurs, nous devons porter une attention particulière aux élèves en situation de précarité : pouvez-vous détailler le soutien qui leur sera apporté ? Enfin, parce que nos professeurs jouent un rôle majeur dans notre pays, il est de notre devoir de les protéger : pouvez-vous détailler le calendrier vaccinal qui les concerne afin de donner plus de clarté et de les rassurer tous pour la période qui court jusqu'à la fin de l'année scolaire ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de l'éducation prioritaire.
Cette question va me permettre de détailler le plan de continuité pédagogique que nous mettons en oeuvre dès aujourd'hui, 6 avril. Ce matin, 12,4 millions d'élèves et leurs professeurs sont entrés dans la phase des apprentissages à distance. Nous avons déjà connu cette expérience l'année dernière : nous l'avions vécue dans la douleur et dans la sidération mais, depuis, nous avons beaucoup progressé.
Tout d'abord, je veux rappeler que des ressources sont à la disposition de nos élèves et de nos professeurs. Je pense aux sites Lumni et Éduscol, au dispositif Ma classe à la maison, au site du CNED – Centre national de l'enseignement à distance – ,…
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LR
… qui a connu, ce matin, c'est vrai, quelques ralentissements suite à des actes malveillants. Je pense également à France Télévisions ou à Radio France qui relancent aujourd'hui l'opération Nation apprenante, un service de haute qualité.
Vous m'interrogez également sur les ressources. Quand on parle de plan de continuité pédagogique, il faut évidemment que les élèves soient équipés. Je vais être sincère avec vous : nous avons beaucoup progressé, mais certains de nos élèves n'ont pas encore d'équipement informatique, malgré le fait que l'éducation nationale a pris sa part et que l'État a pris la sienne – 105 millions d'euros d'abondement dans le plan de relance – , de même que les collectivités – les départements et les régions. C'est la raison pour laquelle nous mobilisons fortement nos réseaux : les 1 092 réseaux d'éducation prioritaire répartis sur le territoire, et les alliances éducatives, qui connaissent mieux que quiconque les familles et les élèves et qui peuvent donc identifier les fragilités et bien utiliser nos fonds sociaux pour doter nos élèves. Je rappelle aussi que nos professeurs ont été formés – c'est le cas de 125 000 d'entre eux.
Pour lutter contre les inégalités, nous maintenons le dispositif Devoirs faits à distance, pendant toute cette période, ainsi que, pendant les vacances, nos stages de réussite à distance, à destination des élèves les plus fragiles.
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.
Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, au-delà de la crise sanitaire particulièrement grave que nous affrontons, et du besoin d'accueillir les personnes atteintes du coronavirus, je veux évoquer l'inquiétude et le désarroi de nos concitoyens concernés par l'annulation de leurs consultations, de leurs soins et actes chirurgicaux pourtant indispensables. Déjà en 2020, cette déprogrammation a touché l'ensemble du territoire. Elle atteint actuellement jusqu'à 80 %, dans certains hôpitaux, tant il devient impératif d'accroître le nombre de lits et de soignants, dont je salue l'engagement, au profit des malades du covid-19, plus spécialement ceux qui sont en réanimation.
Nous mesurons les conséquences d'une opération reportée, d'une greffe annulée, d'un diagnostic devenu impossible. Selon des projections, les retards de prise en charge des patients atteints du cancer pourraient entraîner plusieurs milliers de décès supplémentaires dans les années à venir. L'année dernière, 100 000 dépistages n'ont pas pu être effectués, et plus d'un millier de greffes n'ont pas eu lieu. Combien en compterons-nous cette année ? L'année 2021 s'annonce à nouveau dramatique en termes de pertes de chance pour nos malades. Aggravation des symptômes, déprime, anxiété : entre sentiment d'abandon et impact sur leur santé, ces malades sont les victimes collatérales de la crise sanitaire. Nous ne pouvons pas faire un pari sur la santé de certains pour soigner les autres.
Comment expliquer que notre système de santé en soit arrivé là et qu'il ne puisse pas mieux s'adapter à une telle crise ? Pourquoi tous les lits de réanimation promis ne sont-ils pas opérationnels ? Qu'allez-vous faire pour ces patients qui ne peuvent pas être soignés ? Comment limiter les conséquences sanitaires à court et long terme, notamment pour les maladies chroniques ? Nous ne pouvons pas, vous ne pouvez pas, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, accepter que des vies puissent être sacrifiées.
Applaudissements sur les bancs des groupe LR, FI et GDR. – M. Nicolas Dupont-Aignan applaudit également.
Votre question me permet d'envoyer un message à la population, le même que l'année dernière : ce n'est pas parce que des soins sont déprogrammés et parce qu'il y a une pandémie que les Françaises et les Français doivent faire moins attention à leur santé en général.
Exclamations sur les bancs du groupe FI.
Je parle en particulier de dépistages de cancers qui ne font l'objet d'aucune déprogrammation et qui sont pourtant en recul depuis plusieurs mois. Ce recul est inquiétant. Le nombre de mammographies, celui des dépistages du cancer colorectal ou des dépistages des infections sexuellement transmissibles sont des indicateurs que nous surveillons particulièrement ; leurs évolutions sont des conséquences indirectes de la crise sanitaire.
Vous soulignez à juste titre que la déprogrammation des soins peut avoir des conséquences sur la santé des Français. C'est bien pour cela que je répondais encore la semaine dernière à la question de savoir pourquoi on n'était pas tout de suite passé à 10 000 lits de réanimation en expliquant que nous augmentions progressivement leur nombre – nous avons dépassé les 8 000 lits – à mesure que les besoins augmentaient, afin de déprogrammer le moins de soins possible. Il ne faut pas que la déprogrammation soit une variable d'ajustement et nous faisons attention à la santé de tous les Français, qu'ils soient atteints du covid-19 ou d'autres pathologies.
Ces décisions sont médicales, soignantes, prises localement en fonction des besoins de lits de réanimation.
Le sujet n'est pas le lit physique, vous le savez…
Le sujet, ce sont les ressources humaines, les médecins, les infirmiers et infirmières spécialisés de réanimation. En un an, les hôpitaux en ont formé des centaines, des milliers aux actes du quotidien de réanimation, mais la spécialité de réanimation médicale nécessite douze ans d'études et de formation. Nous relançons évidemment la machine, vous le savez, mais, dans un délai aussi bref, cela ne peut pas être la solution.
Je le répète, nous parlons de choix du quotidien, extrêmement importants. C'est aussi la raison pour laquelle le Président de la République a annoncé des mesures fortes pour freiner la circulation du virus, protéger nos hôpitaux et tous les Français, qu'ils aient le covid ou non.
M. Philippe Berta applaudit.
En son absence, je m'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Le 30 août dernier, vous affirmiez haut et fort en une du Journal du dimanche : « Nous sommes préparés à tout. »
Pourtant, depuis un an, très peu a été fait : la fermeture des écoles vient d'être décidée dans les mêmes conditions qu'en mars dernier, et aucune stratégie nationale tirée de l'expérience du premier confinement n'a été élaborée pour préparer l'école à distance, laissant les enseignants à nouveau seuls pour inventer une organisation efficiente. J'en veux pour preuve les nombreux bugs des ENT – espaces numériques de travail – , constatés dès ce matin avec la reprise des cours en visioconférence.
L'école est devenue pour le Gouvernement un enjeu idéologique binaire entre fermeture et ouverture, au détriment d'une préparation efficace de ce distanciel, que ce soit en matière d'équipement des enseignants et des élèves, de formation, ou encore de dispositifs d'aide pour accompagner les familles confrontées à des difficultés de garde d'enfant à domicile. Le récent rapport de la Cour des comptes sur le bilan de la continuité pédagogique numérique tiré du premier confinement a pourtant souligné ces manquements. Ce n'est pas faute de vous avoir interrogé à plusieurs reprises sur les moyens humains et matériels supplémentaires que vous entendiez déployer pour sécuriser cette continuité pédagogique. En réponse, vous avez plutôt jugé utile de supprimer, cette année, 1 883 postes dans le secondaire, et d'économiser 250 millions de crédits.
Si nous pouvons à nouveau compter sur le professionnalisme des enseignants pour franchir ce cap difficile,
M. Guillaume Garot applaudit
une reprise prochaine des cours ne pourra se dérouler dans le même déni que ces derniers mois et devra passer par un protocole sanitaire sécurisé, adapté au niveau de circulation du virus, y compris pour les cantines, et par une campagne massive de vaccination de l'ensemble des personnels éducatifs dont les CPE – conseilleurs principaux d'éducation – , les AED – assistants d'éducation – et les AESH – accompagnants d'élèves en situation de handicap.
Or, là encore, nous sommes dans un flou total : la vaccination des personnels interviendra-t-elle mi ou fin avril, comme l'indiquait le Président, à partir de mi-mai, selon Olivier Véran, ou dans les deux mois, si l'on en croit vos propos sur RTL ? Ce n'est pas sérieux au regard de l'enjeu pour nos enfants. Pouvez-vous nous assurer que tout le personnel éducatif sera vacciné pour la reprise ?
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe GDR.
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de l'éducation prioritaire.
Vos questions sont nombreuses, tout comme vos critiques, …
… je vais donc essayer de faire le tri.
Oui, nous sommes préparés au plan de continuité pédagogique : je l'ai dit précédemment à votre collègue Maud Petit, nous l'avons en effet expérimenté dans la douleur l'année dernière mais, depuis, nous avons beaucoup progressé,
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LR
notamment grâce à l'engagement sans faille de nos professeurs, que je salue à nouveau.
Vous avez pointé des difficultés de connexion aux ENT de nos élèves et de nos professeurs, ce matin. J'ai moi-même expliqué que le CNED avait été victime d'un acte de malveillance. Je veux bien endosser beaucoup de responsabilités mais les ENT sont sous la responsabilité des collectivités territoriales.
Exclamations sur les bancs des groupes LR et SOC.
S'agissant du plan de continuité pédagogique, je le disais, bon nombre de ressources sont en ligne.
Vous avez également évoqué les professeurs. Je l'ai dit aussi, nous avons formé, notamment grâce à la CanoTech, 125 000 professeurs afin qu'ils soient prêts à utiliser les outils et à entrer vraiment dans les apprentissages à distance.
Prétendre que les moyens humains manquent est totalement faux ! Dans le premier degré, nous n'avons cessé de renforcer les effectifs, avec 11 900 professeurs de plus, alors que la démographie diminue constamment depuis 2017.
Enfin, le dispositif Devoirs faits à distance sera mis en place dès cette semaine pour accompagner les collégiens en situation de fragilité, tandis que des stages de réussite seront destinés aux élèves les plus fragiles.
L'école est restée ouverte, oui ; c'est une fierté française, une exception française ! Nous avons tout fait pour assurer et garantir la réussite de nos élèves.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe Dem et sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Il y a un an, lorsque la pandémie est entrée dans nos vies, le Président de la République a affirmé clairement que nous devions être aux côtés des Françaises et des Français quoi qu'il en coûte. Un an plus tard, après un plan de relance inédit, après des mesures d'accompagnement des plus vulnérables parmi les plus protectrices au monde, nous n'avons pas à rougir de notre système de solidarité et de l'engagement de l'État, qui ont répondu présent.
Depuis le début de la crise, un peu plus de 6,6 milliards d'heures d'activité partielle ont été validées. Selon les données relatives aux demandes d'indemnisation, 790 millions d'heures ont été consommées au mois d'avril 2020, ce qui représente 8,1 millions de salariés, soit 44 % de ceux du privé. Il va de soi qu'en 2021, particulièrement en ces temps troublés, nous devons redoubler d'efforts pour accompagner et protéger toujours plus et toujours mieux celles et ceux de nos concitoyens qui en ont le plus besoin : c'est notre devoir.
À la suite des récentes mesures visant à freiner la circulation du virus dans le pays, de nombreuses entreprises sont contraintes de poursuivre la fermeture administrative qu'elles vivent parfois depuis de nombreux mois, et elles placent ainsi leurs salariés en chômage partiel. La culture, les transports, le sport ou l'événementiel figurent parmi les champs d'activité particulièrement touchés. Nul ne doute que l'ensemble des salariés n'attendent qu'une chose, comme nous tous d'ailleurs : la réouverture et un retour à la vie normale.
Directement liée aux mesures de freinage annoncées comme la fermeture des écoles depuis aujourd'hui, la situation de nombreuses familles est telle que certains salariés se trouvent dans l'incapacité de télétravailler. Là encore, nous ne pouvons pas faire supporter aux familles les conséquences financières de décisions qui ont bouleversé les habitudes mais qui, il faut le noter, ont été accueillies avec un civisme et un sens du collectif qu'il nous faut louer.
Madame la ministre, vous avez eu l'occasion de vous prononcer sur le sujet. Pouvez-vous, pour rassurer les familles qui seraient dans l'inquiétude, confirmer à la représentation nationale que les salariés dans cette situation bénéficieront de l'activité partielle pour garder leurs enfants de moins de seize ans ou sans limite d'âge, s'ils sont en situation de handicap ?
La parole est à Mme la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion, que nous sommes heureux de retrouver en bonne santé.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem et sur plusieurs autres bancs.
Merci, monsieur le président.
Le Président de la République l'a dit clairement, nous voulons donner un coup de frein pour casser la dynamique préoccupante de l'épidémie. C'est dans ce contexte qu'est intervenue la décision de fermer l'accueil dans les établissements scolaires et de modifier les vacances scolaires. Le Gouvernement est bien conscient des difficultés que cela peut entraîner sur l'organisation familiale.
En premier lieu, les employeurs sont invités à faciliter les prises de congés de leurs salariés qui ont des enfants aux nouvelles dates de vacances scolaires, lorsqu'ils avaient prévu des congés à des dates ultérieures.
Par ailleurs, grâce à l'activité partielle pour garde d'enfants, nous accompagnons les parents qui doivent garder leurs enfants. Très concrètement, si vous avez un ou des enfants de moins de seize ans et que vos activités ne peuvent être faites à distance, vous pouvez être pris en charge à ce titre, de même que si vous étiez en télétravail et que vous ne pouvez pas à la fois garder votre enfant et poursuivre votre activité en télétravail. Nous avons en outre modifié les taux de prise en charge de l'activité partielle afin que, lorsque le salarié est en activité partielle pour garde d'enfant, cela ne coûte rien à l'employeur.
L'activité partielle va bien sûr continuer à jouer son rôle pour protéger les emplois : nous avons décidé de prolonger jusqu'à fin avril les taux très protecteurs pour les entreprises et pour les salariés.
Vous le voyez, nous sommes plus mobilisés que jamais aux côtés des entreprises et des salariés dans cette nouvelle période de restrictions sanitaires.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Monsieur le ministre de l'intérieur, depuis quelques semaines, nous ne pouvons que constater dans l'ensemble du territoire un important regain de violence et des faits souvent d'une extrême gravité.
Jeudi dernier à Pontoise, deux hommes sont morts, dont un père de famille, victime collatérale d'un coup de feu. Toujours dans le Val-d'Oise, une gendarmerie a été attaquée au mortier, laissant un traumatisme important dans les familles de gendarmes. Il y a un mois, deux adolescents tuaient l'une de leurs camarades de classe dans des conditions atroces. Globalement, depuis un an, dans l'ensemble du territoire, les atteintes aux biens diminuent alors que les atteintes aux personnes ne cessent d'augmenter et sont de plus en plus violentes.
Pendant ce temps, 90 000 policiers et gendarmes sont mobilisés pour le contrôle d'attestations que les Français établissent eux-mêmes dans le cadre d'un énième confinement. Pourriez-vous, monsieur le ministre, demander au ministre de la santé de bien vouloir vous rendre vos forces de l'ordre afin de permettre à tous nos concitoyens de vivre en paix ?
Nous voulons plus de sécurité pour nos concitoyens et des missions plus efficientes pour nos forces de l'ordre, auxquelles nous ne manquons pas de rendre hommage pour l'abnégation dont elles font preuve dans l'exercice de leurs fonctions. La crise sanitaire que nous vivons ne doit pas se transformer en crise sécuritaire ; les moyens du ministère de l'intérieur doivent être mis au service de la protection des Français et non compenser les carences du ministère de la santé.
Nous attendons du concret, les Français ne peuvent plus accepter de telles violences. Que comptez-vous faire ? De grâce, des actes, pas des paroles.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Nous n'avons pas la même vision…
… de la façon dont nous devons travailler. Nous ne devons pas le faire en opposition avec le ministère de la santé mais en collaboration avec lui : le ministère de l'intérieur n'est pas que celui de la sécurité, et les policiers et gendarmes accomplissent le travail d'autorité publique que nous leur demandons pour empêcher la propagation du virus. C'est une longue tradition du ministère de l'intérieur que d'être présent lorsque la sécurité civile de nos compatriotes est en danger. Nous sommes parfaitement dans notre rôle lorsque policiers et gendarmes assurent ces contrôles, et ils le font avec courage et abnégation ; c'est ce qui a poussé le Président de la République à dire qu'avec les enseignants ils seront les premiers à être vaccinés lorsque ce sera possible.
S'il y a des violences urbaines, comme nous avons pu le constater avec le Premier ministre à Creil, c'est pour deux raisons essentielles. La première, c'est parce que les mesures sanitaires doivent être respectées partout sur le territoire national. Aussi, je remercie les policiers et gendarmes qui mettent fin à des rassemblements qui sont des foyers de propagation du virus : il ne s'agit pas simplement de contrôler des attestations, mais d'éviter que le virus contamine d'autres personnes et touche les plus fragiles.
La seconde raison, vous le savez très bien, surtout dans votre département, comme dans les autres de l'Île-de-France et dans de grandes métropoles, c'est que notre lutte contre les stupéfiants donne des résultats très impressionnants, auxquels tous les services contribuent, notamment ceux du ministère de la justice et du ministère des comptes publics… Il y a un bras de fer contre les voyous et c'est la police qui va le gagner.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Nous ne remettons évidemment pas en cause le travail de nos forces de l'ordre, qui est exceptionnel au quotidien. Donnez-leur confiance, passez-leur des messages forts, demandez-leur d'arrêter de s'exposer vis-à-vis des Français qui n'ont plus confiance en eux parce qu'ils ne font que contrôler des attestations,
Protestations sur quelques bancs du groupe LaREM
rassurez-les. Que le ministère de la justice les rassure également. J'ai vu hier un fonctionnaire de police avec un mois d'ITT, l'auteur des violences ayant fait l'objet d'une ordonnance pénale. Les forces de l'ordre ont besoin d'être accompagnées et rassurées.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Merci de vos encouragements aux forces de l'ordre. Ce que nous faisons en ce moment même avec le Beauvau de la sécurité, auquel je sais que vous contribuez, débouchera sur une grande loi de sécurité intérieure, mais avec le budget 2020, négocié par Christophe Castaner, et avec le budget 2021, nous donnons, tous les jours, des preuves d'amour aux policiers et aux gendarmes.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.
Madame la ministre du travail, en pleine crise économique et sociale, vous avez remis sur la table la réforme de l'assurance chômage. Partout il vous est dit que réduire les droits au chômage est insensé, alors vous sortez les rames et tentez de vanter les bienfaits de votre réforme. Les organisations syndicales la rejettent, tant pis pour elles. Les intermittents de l'emploi vous disent qu'ils agonisent, vous leur dites : « Patience. » Un des initiateurs de la réforme exprime ses doutes sur l'opportunité du moment, vous accélérez. L'Unédic vous alerte, vous balayez son avis d'un revers de main.
La nouvelle méthode de calcul va faire s'effondrer brutalement le montant des allocations chômage.
Plus d'un million de personnes seront concernées dès la première année par cette baisse – un million ! Le montant journalier va être amputé jusqu'à 40 % dans certains cas et, pour ceux qui exercent une activité réduite, la sentence est terrible : non seulement le montant journalier va baisser mais le nombre de jours indemnisés aussi.
Mais non !
Dans certaines conditions, travailler pourra non pas faire gagner plus mais se traduira par une perte nette de revenus. Pire, les congés maternité vont faire baisser les allocations. Là encore, l'Unédic vous a alertée mais vous ne changez rien.
Le Conseil d'État a déjà remis en cause votre arrogance en annulant une partie de votre réforme du fait d'inégalités qui allaient du simple au quadruple. Alors, à la va-vite, parce que vous voulez mener cette réforme quoi qu'il en coûte, vous avez bidouillé, et tellement mal que vous créez encore plus d'inégalités.
À emploi égal et salaire égal, les indemnités pourront au total être jusqu'à vingt-quatre fois moins élevées. Le plafond que vous vous félicitez d'avoir mis en place ne fera qu'aggraver les choses.
Mais vous continuez de vanter une réforme qui va mettre de la justice grâce au bonus-malus sur les contrats courts ; vous omettez juste de dire qu'il sera introduit en automne 2022, ce qui le rend quand même beaucoup moins certain que les effets dévastateurs de votre réforme dès cet été. Madame la ministre, ne trouvez-vous pas qu'il y a déjà assez de pauvres dans ce pays ? Arrêtez cette folie ! Abrogez la réforme !
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, SOC et FI – M. Jean-Michel Clément applaudit aussi.
La parole est à Mme la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion.
Que je ne partage pas votre lecture de la réforme de l'assurance chômage ne vous surprendra pas. Pour ma part, je considère que le système actuel a enfermé de nombreux demandeurs d'emploi dans le chômage…
… et a encouragé la précarité. Un chiffre l'illustre : en dix ans, le nombre de CDD de moins d'un mois a augmenté de 250 %. Depuis trop longtemps, on répond aux besoins de flexibilité des entreprises sans assurer la sécurité des salariés et l'équité entre demandeurs d'emploi. Personne ne peut se satisfaire d'un système qui n'assure pas la même allocation à deux demandeurs d'emploi ayant travaillé le même nombre d'heures.
Il est temps de faire évoluer un système qui produit des effets pervers, ne permet pas de résorber le chômage de masse et en plus est déficitaire, ce qui menace sa pérennité.
Contrairement à ce que vous laissez croire, nous avons bien entendu adapté l'entrée en vigueur de la réforme au contexte actuel, …
… qui ne nous a pas échappé !
La réforme a été décalée au 1er juillet et son déploiement sera progressif. Ainsi, les dispositions importantes n'entreront en vigueur que lorsque que le marché du travail sera revenu à la normale.
Je ne peux pas laisser dire qu'un million de demandeurs d'emploi verront leurs droits baisser le 1er juillet.
Exclamations sur les bancs des groupes GDR et FI.
Aucun demandeur d'emploi actuellement indemnisé ou qui le sera d'ici au 1er juillet ne verra ses droits baisser. Par ailleurs, le montant global d'indemnisation des demandeurs d'emploi restera le même. Lorsque le montant mensuel baisse, alors l'allocation est versée plus longtemps. Nous avons en outre ajouté un plancher.
Dénoncer la précarité, c'est bien ; agir pour la faire reculer, c'est mieux !
Applaudissements sur les bancs du groupe Agir ens et sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
L'évolution du statut d'infirmier anesthésiste vers la pratique avancée a été écartée et renvoyée à la rédaction d'un rapport : un rapport de plus qui préconisera cette évolution, car les professionnels de santé ne demandent finalement rien d'autre qu'une mise en adéquation de leur profession aux besoins de la société.
Or le besoin impérieux de notre société est de sortir de la crise qui nous paralyse tous et cette sortie est subordonnée à la capacité de notre système de santé à prendre en charge les personnes malades, ce que nos médias résument par ces mots : « taux d'occupation en réa ». Mais aucun service de réanimation ne peut fonctionner sans soignants et les qualifications ne sont pas interchangeables. La réanimation exige des compétences longues à acquérir et seuls les infirmiers anesthésistes ont bénéficié d'une formation qui leur permet d'être rapidement opérationnels dans ce service.
C'est pourquoi l'une des clés majeures de la sortie de crise est le respect et la reconnaissance des professionnels de santé. Alors que nous avons besoin de cohésion et d'union pour faire face à l'épreuve que nous traversons, le report de cette évolution a créé une incompréhension totale, il faut bien le reconnaître, sapant la confiance de la profession d'infirmier anesthésiste, qui continue pourtant à répondre présente malgré la fatigue physique et morale.
Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, les considérations techniques qui ont motivé le report de l'évolution du statut d'infirmier anesthésiste vers la pratique avancée ne doivent pas prendre le pas sur les nécessités humaines. Je le répète, les difficultés technocratiques ne doivent pas primer sur ces nécessités. Aussi, pour leur rendre justice et pour ouvrir la voie aux autres professions paramédicales, peut-être moins emblématiques en ce moment mais tout aussi essentielles, pouvez-vous nous communiquer un calendrier précis, détaillant les grandes étapes de la reconnaissance en pratique avancée de la profession des infirmiers anesthésistes, et annoncer quel texte nous permettra de défendre enfin l'évolution des professions de santé dans leur globalité ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Agir ens et sur de nombreux bancs du groupe LT.
Je partage vos affirmations quant au rôle incontournable des infirmiers anesthésistes diplômés d'État – IADE – dans les services de réanimation et de leur qualification particulière. Tous les infirmiers n'ont pas de spécialité, mais les infirmiers anesthésistes, si.
Vous demandez que les infirmiers qui ont une spécialité deviennent aussi des infirmiers en pratique avancée – IPA – , mais ces deux champs d'évolution de la profession sont distincts. L'IPA n'a pas un statut supérieur à celui d'un infirmier spécialisé : il a simplement développé des qualifications particulières qui le rendent autonome vis-à-vis du médecin prescripteur et qui lui permettent de disposer de compétences propres par rapport à un infirmier généraliste. Les IADE ont déjà des compétences qui leur sont propres du fait de leur spécialité et des études supplémentaires qu'ils ont menées dans un champ spécifique. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle ils sont extrêmement précieux et irremplaçables.
Le Parlement a souhaité étudier les voies et moyens de faire évoluer la profession des IADE. Ceux qui demandent à être reconnus comme IPA expriment surtout, selon moi, un besoin de reconnaissance. Lors de mes déplacements dans les services de réanimation, je rencontre souvent des infirmiers anesthésistes qui ne désirent pas tant devenir IPA que bénéficier d'une reconnaissance accrue.
Dans le cadre du Ségur de la santé, les IADE, comme tous les autres infirmiers, ont obtenu la plus grosse revalorisation de salaire de toute l'histoire de la profession. À l'initiative du député Julien Borowczyk, le Parlement a créé une mission d'information pour déterminer les conditions d'évolution de l'ensemble des professions infirmières, notamment des IADE. Cette spécialité autonome doit-elle évoluer vers les IPA ou d'une autre manière ? Nous le verrons à l'issue de ce travail parlementaire.
Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre, mais ce que nous demandons, c'est un calendrier précis. Le rapport à venir ne dira rien que nous ne sachions déjà.
Reprise de la vie culturelle
Monsieur le Premier ministre, le Président de la République a annoncé le 31 mars, outre les nouvelles mesures sanitaires, l'élaboration d'un calendrier de réouverture des lieux culturels et sportifs entre la mi-mai et le début de l'été.
Les artistes et les acteurs du monde de la culture ont besoin de se projeter dans l'avenir et d'avoir des perspectives. Faire des annonces est un exercice aisé, mais anticiper, prévoir et planifier des politiques culturelles en période de crise sanitaire exige une coordination avec les acteurs et les associations d'élus locaux pour se préparer et faire revivre l'espoir dans les territoires d'ici à l'été. Lorsque l'on suscite l'espoir, on a le devoir d'y répondre avec efficience, s'agissant, en particulier, de la programmation dans les villes et les villages des festivals d'été, en extérieur et avec un protocole adapté à la crise sanitaire.
La circulation du virus et la fermeture administrative des salles de spectacle, des centres d'art, des musées, des cinémas, des théâtres et des écoles de danse ont plongé le monde de la culture dans une souffrance indescriptible et nous privent tous d'une part d'humanité. L'accès à la culture nous manque à tous. Son impossibilité prive les artistes et le public du lien privilégié qui les unit, les nourrit, les inspire et les fait se sentir vivants. En ce moment même, une mobilisation nationale sans précédent en faveur de la vie culturelle, soutenue largement par nos concitoyens, gagne tout le territoire.
Pis, des décrets ministériels pris en catimini en pleine crise sanitaire, comme celui du 17 février dernier, réduisent la pratique de la danse et la classent de façon inédite dans une nouvelle catégorie, celle des « activités artistiques et sportives ».
Que répondez-vous aussi à ces collectivités locales, principales commanditaires des troupes et des compagnies, qui souhaitent programmer et organiser des événements culturels cet été sous le label « La culture pour tous » ?
Monsieur le Premier ministre, il y a urgence. Nous disposons pour le moment d'un vague calendrier indexé sur une stratégie de vaccination dont nous voyons bien les difficultés. Il est primordial d'élaborer un véritable programme en concertation avec l'ensemble du secteur. Je compte sur vous pour nous apporter des réponses et pour favoriser la reprise de l'offre culturelle.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.
Permettez-moi d'avoir une pensée pour notre ministre de la culture, Mme Roselyne Bachelot, toujours en convalescence. Je suis d'accord avec vous, madame Santiago : la culture nous manque à tous. À titre personnel et au nom du Gouvernement, je veux dire que la ministre de la culture nous manque aussi beaucoup en cette période.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.
Mme Bachelot est extrêmement engagée pour la défense du monde de la culture. Les mesures prises par son ministère ont permis d'aider le milieu culturel et de l'accompagner dans cette période si difficile et si particulière de son histoire. Aucun pays n'a pris des mesures aussi importantes que la France pour soutenir la culture grâce à des aides financières directes et indirectes et un accompagnement de l'ensemble des acteurs.
Vous avez raison de souligner que nous avons tous hâte que la vie culturelle reprenne. Et contrairement à cet automne, nous pourrons bientôt envisager de discuter concrètement des conditions de réouverture des lieux culturels.
Le fait que le ministre en charge de la santé vous réponde aujourd'hui est un symbole : il n'y a pas lieu d'opposer la culture et la santé. Si nous avons été amenés à fermer certains lieux et à interrompre la vie culturelle du pays, c'était non seulement pour protéger la santé, mais également pour protéger la culture : c'est grâce à une santé retrouvée que nous pourrons retrouver une culture encore plus vive et plus forte qu'avant.
Aucune des décisions que nous avons prises depuis plus d'un an n'a été prise de gaieté de coeur, dans le domaine de la culture comme dans les autres.
Croyez bien, madame Santiago, que l'accompagnement constant des acteurs de la culture par l'État – je pense notamment aux allocations chômage pour les intermittents, prolongées jusqu'à la fin de l'été 2021 – …
… vise avant tout à les rendre plus forts.
Le Président de la République a indiqué la semaine dernière qu'il s'exprimerait prochainement sur les conditions pratique de la réouverture des lieux culturels. Sans doute retrouverons-nous les activités de plein air avant les musées, les concerts et les salles de spectacle, qui nous manquent beaucoup. Je le dis une fois encore : sur ce sujet, il ne s'agit pas tant de politique que d'humanité.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe Dem.
Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, malgré les annonces du Gouvernement, la santé mentale des Français reste la grande absente de la gestion de la crise du covid-19. Les nombreuses restrictions prises par le Gouvernement depuis plus d'un an ont cassé des vies : isolement social et sentimental, impossibilité de faire son deuil, soins hospitaliers reportés, hausse des violences familiales, perte d'emploi, diminution des salaires. Les trois confinements, le couvre-feu généralisé et les interdictions de déplacement vécues comme des assignations à domicile, auxquels s'ajoute la fermeture des écoles, ont autant de conséquences sur la santé des Français que le covid lui-même. Ces conséquences prennent des formes multiples : dégradation de la santé mentale, troubles dépressifs d'anxiété et du sommeil, comportements addictifs. Les derniers chiffres sur les pensées suicidaires des adolescents sont plus qu'alarmants et témoignent de l'impact psychologique des restrictions des libertés et de l'urgence de prendre des mesures à la hauteur de la détresse de nos jeunes.
Pour soulager leur souffrance, les Français consomment plus d'antalgiques, d'anxiolytiques et d'antidépresseurs que d'habitude. La lenteur de la campagne de vaccination ne fait qu'aggraver la situation et les mesures prises pour lutter contre la détresse psychologique de nos concitoyens sont très insuffisantes. Certaines complémentaires santé ont instauré un dispositif visant à prendre en charge au moins quatre consultations de psychologue par an, sur prescription médicale et à hauteur de 60 euros la séance. Cependant, faute de moyens et de remboursement par la sécurité sociale, nos compatriotes renoncent à consulter un psychologue ou un ostéopathe.
Je vous incite donc, monsieur le ministre, à instituer une prime santé à destination des Français les plus modestes, qu'ils soient bénéficiaires de la CMU – couverture maladie universelle – ou qu'ils dépassent son plafond mais ne disposent pas des revenus suffisants pour accéder à ces soins onéreux. Plus généralement, que comptez-vous faire pour lutter contre les risques qui pèsent sur la santé mentale des Français ? Il s'agit, là aussi, d'un enjeu de santé publique.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – M. Meyer Habib applaudit également.
La question que vous posez est fondamentale. La santé mentale des Français s'est dégradée pendant la crise sanitaire.
Différents indicateurs l'attestent et nous connaissons les causes de cette dégradation, qui sont d'ailleurs multiples. Vous avez évoqué la peur de l'enfermement. La peur du virus, mais aussi le deuil, qui se déroule parfois dans des conditions difficiles, et la présence de la maladie autour de soi constituent également des facteurs négatifs, soulignés par les études et que nous ne devons pas sous-estimer. D'ailleurs, quand nous prenons des mesures pour protéger la population contre le virus, nous soulageons l'anxiété des Français qui ont peur de la maladie et dont on parle finalement assez peu.
De fait, 66 % des Français interrogés déclarent présenter des troubles du sommeil et 31 % des symptômes anxio-dépressifs. Vous le savez, l'État, les collectivités territoriales et le tissu associatif, très riche dans notre pays, sont mobilisés depuis plus d'un an à travers des lignes téléphoniques et des numéros verts, …
« Ah ! » sur les bancs du groupe FI
… mais aussi des structures physiques, qui permettent de répondre à la détresse psychologique des personnes en leur présence.
Vous riez quand je parle des numéros verts, mais quand une personne est toute seule chez elle, isolée, et qu'elle n'a pas la chance d'être un parlementaire entouré des membres de son groupe, la possibilité de passer un coup de téléphone à un spécialiste qui saura l'écouter et l'accompagner peut lui sauver la vie !
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – M. Philippe Berta applaudit également.
Vous pouvez tout ringardiser : c'est votre vision de la société, ce n'est pas la mienne !
Au-delà de ces dispositifs, nous avons renforcé les cellules d'urgence médico-psychologiques, y compris à destination des soignants, très mobilisés en cette période, qui ont parfois besoin d'un soutien psychologique.
Nous avons également décidé le recrutement de plus de 150 psychologues dans les centres médico-psychologiques, en particulier dans les structures infanto-juvéniles. Je l'ai annoncé, nous déploierons prochainement les premiers secours en santé mentale et nous allons renforcer l'accès aux soins psychologiques. Sur ces différents sujets, des propositions seront bientôt présentées.
Mme Danielle Brulebois et M. Philippe Berta applaudissent.
Monsieur le ministre de l'intérieur, nous le savons, les forces de l'ordre sont en première ligne pour lutter contre l'insécurité. Ce sont elles qui sont confrontées tous les jours à l'augmentation des violences, au séparatisme et à la menace terroriste. Ce sont aussi elles qui accueillent la parole des victimes. Pourtant, la relation de proximité avec les Français se dégrade. Pour la réparer, vous organisez le Beauvau de la sécurité, dont l'un des huit chantiers consiste à dresser un état des lieux du lien entre les forces de l'ordre et la population.
J'ai adapté cette consultation dans ma circonscription, à Saint-Nazaire, sous la forme d'un « Beauvau en circo ».
Cela m'a permis de dresser un diagnostic de l'insécurité croissante qui existe sur le territoire nazairien et des agressions subies par les forces de l'ordre. J'ai interrogé de nombreux acteurs – syndicats, parquet, élus, associations – et j'ai organisé des immersions sur le terrain aux côtés des policiers et des gendarmes.
Monsieur le ministre, vous le verrez dans la synthèse que je vous remettrai tout à l'heure : ces acteurs m'ont confié sans filtre la réalité de leur quotidien. Je vous l'assure : oui, l'amélioration du lien entre les Français et les forces de l'ordre est prioritaire ; oui, ils ont besoin de renforts pour ne pas laisser les trafics de drogue rendre invivable la vie dans nos quartiers.
Il faut recréer une vraie police de proximité. Il faut davantage de complémentarité entre l'action immédiate des forces de l'ordre et l'accompagnement des travailleurs sociaux sur un temps plus long. C'est la clé du succès pour créer de la confiance, car la sécurité est avant tout un combat social.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous proposer un point d'étape sur le Beauvau de la sécurité ? Comment comptez-vous vous inspirer des travaux réalisés sur le terrain pour alimenter les conclusions de votre consultation, et quelles sont les premières pistes pour renouer la confiance entre les forces de l'ordre et la population ?
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.
Voulue par le Président de la République, la grande concertation sociale menée avec les forces de l'ordre se décline sur l'ensemble du territoire national, à Paris et ailleurs. Je remercie d'ailleurs mes collègues du Gouvernement qui y contribuent, Mme Jacqueline Gourault s'agissant des relations que nous entretenons avec les maires, et Julien Denormandie, qui a rencontré des agriculteurs dans l'Allier – j'aurai moi-même l'occasion de le faire avec le ministre de la justice, garde des sceaux, dans le cadre d'une table ronde et peut-être d'un déplacement. Je pense aussi à Jean-Michel Blanquer pour la jeunesse. C'est donc tout le Gouvernement qui est mobilisé pour soutenir nos forces de l'ordre.
Augmenter les moyens, c'est évidemment ce que vous avez fait par le vote de plusieurs budgets qui ont pour la première fois créé 10 000 postes de policiers et de gendarmes supplémentaires ; ils nous permettent enfin de recréer cette police de proximité que vous évoquez, et ainsi de garantir de l'îlotage et de la présence qui s'ajoutent au renseignement, cet outil qui a tant manqué à notre territoire au lendemain des attentats terroristes que nous avons vécus.
Ce n'est pas très sympa pour le livre blanc de Castaner ! C'est très moche, même !
L'augmentation des moyens concerne aussi le maintien de l'ordre – gendarmes mobiles et CRS – , afin d'éviter que les policiers de sécurité publique n'en assument la charge et soient malheureusement blessés parce qu'ils n'ont pas suivi la même formation que ceux dont c'est le métier.
… grâce à des mesures telles que la généralisation des caméras, notamment les caméras portatives pour les policiers et les gendarmes, la création d'une réserve opérationnelle de la police nationale, sur le modèle de celle qui existe pour la gendarmerie, mais aussi l'approfondissement de la formation – initiale et continue – des policiers et des gendarmes. Nous le devons à nos forces de l'ordre qui sont souvent projetées très rapidement sur des théâtres d'hyperviolence, susceptibles de faire naître les conflits que nous avons constatés.
Le Beauvau de la sécurité va encore durer trois mois. Au moment du prochain déconfinement, nous aurons l'occasion de poursuivre ses travaux et je serai très heureux de prendre connaissance de la synthèse issue de vos échanges avec nos compatriotes.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Monsieur le Premier ministre, vos diversions ont assez duré. Votre Gouvernement se donne un mal de chien pour construire de toutes pièces des polémiques à mille lieux des préoccupations quotidiennes des Français. Votre objectif : évacuer la question sociale du débat public. Peine perdue ! Vous n'échapperez pas à la réalité à laquelle votre politique concourt. Un cataclysme social est en cours.
À côté des entreprises qui pâtissent de la crise et qu'il faut soutenir se cachent les coronaprofiteurs
Approbation sur les bancs du groupe FI. – Exclamations sur quelques bancs du groupe LaREM
qui bénéficient des aides de l'État sans aucune contrepartie, servent des dividendes à leurs actionnaires et suppriment des emplois massivement à travers le pays. Airbus, Renault, Safran, Sanofi, Total, Schneider Electric, Michelin, Danone, Cargill, TUI, et combien d'autres ! Françaises, Français, c'est avec l'argent de vos impôts que l'on rémunère les actionnaires et que l'on vous jette au chômage.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
En pleine période de pandémie, les multinationales du CAC 40 ont atteint de nouveaux records en matière de versement de dividendes.
Seules treize firmes ont annulé ou suspendu les versements initialement prévus. La quatrième vague est sociale : l'épidémie dont vous ne voulez pas qu'on parle, c'est l'épidémie de plans sociaux.
Au total, on attend pour 2021 une perte de 790 000 emplois salariés et le taux de chômage devrait grimper à 10,6 %. Et c'est à ce moment précis que vous choisissez d'appliquer votre honteuse réforme de l'assurance chômage, …
Sifflets sur les bancs du groupe FI
… qui va provoquer une baisse allant de 17 % à plus de 40 % des indemnités de 1,15 million de personnes, dès la première année.
Avec la suppression de l'impôt de solidarité sur la fortune, Emmanuel Macron s'est vu coller l'étiquette de président des riches. Avec la réforme de l'assurance chômage, il est le président qui mène une guerre sociale sans relâche contre les pauvres. Nous ne le laisserons pas faire ! Aux côtés des salariés de tout le pays et des professionnels de la culture mobilisés contre ces mauvais coups, nous exigeons deux choses. Aux entreprises qui bénéficient des aides de l'État et continuent de verser des dividendes, il faut interdire les licenciements, et vous devez abandonner votre déclaration de guerre sociale. Renoncez à la réforme de l'assurance chômage !
Applaudissements sur les bancs du groupe FI et sur plusieurs bancs du groupe GDR.
La parole est à Mme la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion.
Depuis le début de la crise, le Gouvernement accompagne massivement les salariés…
… en protégeant leurs emplois au moyen de l'activité partielle.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM et quelques bancs du groupe Dem.
L'activité partielle représente près de 30 milliards d'euros investis en 2020, et ce seront encore plus de 10 milliards d'euros qui le seront en 2021. Vous voyez, monsieur le député, nous n'avons aucune leçon à recevoir quant à la protection des salariés et des emplois dans notre pays.
Protestations sur les bancs du groupe FI.
S'agissant de la réforme de l'assurance chômage, à vous entendre, on a l'impression que tout fonctionne formidablement bien
Vives protestations sur les bancs du groupe FI
dans le système tel qu'il existe actuellement. Celui-ci n'a pourtant pas empêché le maintien d'un chômage de masse dans notre pays, y compris quand l'activité économique était dynamique. Il n'a pas empêché le quasi-triplement des contrats courts, au détriment des salariés précarisés. Ce système est totalement injuste.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Vous semble-t-il normal qu'un salarié qui travaille tous les jours à mi-temps reçoive une allocation de moitié inférieure à celle reçue par celui qui travaille une semaine sur deux à temps plein ?
Il est donc indispensable de le réformer, y compris pour assurer la pérennité de notre assurance chômage.
Ah ! La concurrence entre les pauvres ! Mais l'ISF, vous n'en parlez pas !
Je veux dire très clairement qu'aucun demandeur d'emploi actuellement indemnisé ou qui le sera d'ici au 1er juillet ne verra ses droits baisser. Par ailleurs, le montant global d'indemnisation sera préservé pour chaque demandeur d'emploi, …
… ce qui signifie que si l'allocation mensuelle baisse, le salarié sera indemnisé plus longtemps. Monsieur le député, nous n'avons donc aucune leçon à recevoir. Nous protégeons les Français et nous continuerons à le faire.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem. – Protestations sur les bancs du groupe FI.
Monsieur le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, je souhaite vous interroger encore une fois sur la réforme de la politique agricole commune (PAC), qui est en cours de discussion. Vous allez présenter en juin 2021 le plan stratégique national devant la Commission européenne. Or, vous le savez, son élaboration inquiète profondément le monde agricole.
Si j'ai bien conscience qu'à ce jour, les arbitrages ne sont pas définitifs, comment ne pas être inquiet lorsqu'on entend dire que la France pourrait consacrer 20 % de ses paiements directs à des écorégimes, alors même que 70 % des agriculteurs n'auraient pas la possibilité d'en bénéficier ? Comment ne pas être inquiet lorsqu'est évoquée une baisse des aides couplées animales, qui pourrait être de l'ordre de 16 %, …
… alors même que la survie de nos éleveurs, qui vivent pour beaucoup avec moins de 700 euros par mois, en dépend entièrement ?
M. Jean-Paul Dufrègne applaudit.
Le ministère envisagerait aussi de fusionner les enveloppes destinées aux vaches laitières et aux vaches allaitantes, ce qui aurait des conséquences encore plus graves pour l'élevage bovin allaitant, pourtant très vertueux mais déjà très fragilisé. Au total, les aides spécifiques à l'élevage bovin allaitant pourraient passer de 610 millions à 360 millions d'euros, c'est-à-dire une baisse de 250 millions. Monsieur le ministre, vous n'avez pas contesté ce chiffre, qui a été avancé par la Fédération nationale bovine. Jusqu'à maintenant, nous n'avons pas reçu de réponse claire à ce sujet.
S'y ajoute une autre interrogation – je sais que vous en êtes conscient – qui concerne la juste répartition des aides de la PAC sur l'ensemble de notre territoire national, et en particulier sur les zones intermédiaires qui en couvrent une large partie, notamment en région Centre-Val de Loire – je peux en témoigner. Ce sont des zones déjà très désavantagées structurellement par la qualité de leur sol, des rendements plus faibles et des systèmes d'exploitation plus diversifiés. Qu'allez-vous faire ? Allez-vous simplement entendre ou allez-vous agir pour les aider ?
C'est un sujet vieux de trente ans et qui n'a toujours pas été résolu ; je pense que c'est le moment de le faire.
Quelles réponses concrètes et déterminées allez-vous apporter au monde agricole et plus généralement à la communauté nationale sur ces questions majeures ?
Applaudissements sur les bancs des groupes LR, UDI-I et LT.
Vous l'avez dit, la politique agricole commune est en cours de discussion avec la profession agricole. Comme vous, j'entends ici ou là des chiffres. Mais, vous le savez, j'ai fait le choix de travailler à livre ouvert, c'est-à-dire de donner accès à tous les scénarios et à toutes les options envisagés. Il est ensuite assez facile de reprendre telle ou telle ligne et de faire en sorte que tel montant soit divulgué un peu partout.
Je prends ce risque parce que je considère que si l'on veut travailler en confiance et de concert, il faut le faire à livre ouvert. En revanche, quand certains sélectionnent les mauvaises lignes et les additionnent toutes sans que cela corresponde à un seul des scénarios réellement envisagés, cela crée une tension – je le constate ; cette tension repose sur de fausses informations.
Je prends un exemple dont vous avez parlé, celui de l'écorégime, qui est très important et constitue une victoire française. Nous avons obtenu que ce nouveau mécanisme d'agroécologie soit obligatoire pour tous les États membres et pas seulement pour la France, afin d'enfin lutter contre cette compétition déloyale qui faisait que les principales pratiques vertueuses étaient respectées dans notre pays sans l'être dans d'autres.
Vous avez dit que 70 % des agriculteurs n'auraient pas accès à l'écorégime. Or, alors que les discussions sont toujours en cours – la prochaine réunion se tient demain à mon ministère – , la première évaluation dit strictement l'inverse.
Au niveau national, 70 % des agriculteurs sont éligibles à ce dispositif. C'est très concret. Vous le voyez, si certains chiffres peuvent être diffusés, voici la réalité, et nous continuons à adopter une démarche de consultation et de concertation.
S'agissant des zones intermédiaires, il y a un deuxième élément à mettre en avant. Je l'ai dit, un débat est ouvert concernant le transfert entre les territoires. Je veux préserver les zones intermédiaires, donc ne pas réitérer les transferts qui ont eu lieu lors des deux précédentes réformes de la politique agricole commune. Je m'y engage.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM et sur plusieurs bancs du groupe Dem.
Madame la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées, à l'occasion de la journée nationale de sensibilisation à l'autisme qui a eu lieu le vendredi 2 avril 2021, le Président de la République a effectué une visite en Isère, en votre présence, sur le thème du repérage précoce des enfants présentant des troubles du neurodéveloppement. Cela a été l'occasion de mettre en avant le travail formidable des soignants mais aussi de faire un point sur la stratégie nationale pour l'autisme adoptée en 2018.
Si, malgré la crise sanitaire, l'application de cette stratégie s'est heureusement poursuivie et commence à porter ses fruits, les familles d'enfants autistes sont inquiètes en ce moment où une nouvelle période de restriction débute. En effet, ces familles, comme celles d'enfants en situation de handicap psychique, ont été fortement éprouvées psychologiquement depuis le début de l'épidémie. Elles ont en particulier été très fragilisées par la fermeture des structures d'accueil de leurs enfants, qui a résulté de la décision de confinement prise au printemps. Elles ont notamment trouvé du réconfort grâce à des solutions de répit, par exemple l'accueil des enfants au cours des week-ends et des vacances scolaires au sein de centres dédiés, gérés par des associations comme Loisirs Pluriel dans ma circonscription, et par des bénévoles fortement impliqués sur l'ensemble de nos territoires. Qu'ils en soient publiquement remerciés.
Les parents s'interrogent aujourd'hui sur le maintien de ces solutions à la suite de l'instauration cette semaine, sur le territoire national, des mesures de freinage prises face à la progression de la covid-19. Madame la secrétaire d'État, pouvez-vous préciser les mesures spécifiques prises par le Gouvernement permettant une continuité dans la prise en charge des enfants par les centres médico-sociaux, ainsi que des solutions de répit ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées.
Tout d'abord, permettez-moi de remercier l'ensemble de la représentation nationale et les mairies qui ont vraiment participé, par l'illumination des monuments, à la mobilisation de la nation autour de cette cause qui nous rassemble.
En effet, la journée du 2 avril a été consacrée à l'autisme. Le Président de la République a décidé de mettre en lumière un des axes majeurs de la stratégie nationale : le dépistage, l'intervention et le suivi précoces des enfants concernés. Nous avons rencontré des soignants au centre hospitalier de Saint-Égrève ; vous étiez présente, et nous avons pu échanger avec les familles : elles nous ont dit que c'est ainsi qu'il faut procéder, en faisant démarrer le suivi dès la petite enfance.
Le nombre d'enfants repérés est passé de 151 à 6 800 en un an. Les familles bénéficient d'un reste à charge zéro et d'une prise en charge des forfaits des psychomotriciens, des ergothérapeutes et des psychologues. Le Président de la République a même demandé d'aller au-delà de la période de deux ans prévue pour les forfaits, afin d'éviter les ruptures de parcours. Quelque 41 000 enfants porteurs d'autisme, au sein des troubles du neurodéveloppement, sont scolarisés dans l'école de la République.
Je tiens à rassurer les familles : le Président de la République a dit que tous les établissements médico-sociaux et les services demeureront ouverts afin que soit assurée cette indispensable continuité pédagogique et thérapeutique.
Si une famille restait néanmoins en difficulté, elle pourrait être accompagnée en composant le 0 800 360 360, ce numéro vert que nous développons pour qu'il y ait une seule porte d'entrée pour l'entourage ayant besoin de répit. Pendant les vacances scolaires, les associations gestionnaires se mobilisent pour que toutes les vacances adaptées puissent se réaliser.
Tout le Gouvernement est mobilisé et l'investissement est massif pour que ces enfants et leur famille ne subissent pas de conséquences psychologiques.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.
Monsieur le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, le 1er février dernier, un coup d'État militaire a eu lieu en Birmanie : les dirigeants démocratiquement élus étaient arrêtés sur le champ par la junte ; la cheffe du gouvernement, Aung San Suu Kyi, était assignée à résidence.
Depuis, un vaste mouvement de désobéissance civile s'est développé dans tout le pays, porté notamment par la jeunesse. Ce mouvement s'est spontanément organisé autour de marches pacifiques pour la liberté et la démocratie.
En réponse, une répression brutale et sauvage s'est abattue sur le peuple, causant la mort de 550 personnes. Cette répression s'aggrave de jour en jour et, le 27 mars dernier, plus de 100 manifestants pacifiques – des enfants, des femmes et des hommes – ont été tués en une seule journée. La junte militaire tue son propre peuple. Mais le peuple birman est courageux et décidé à poursuivre la lutte pour la démocratie.
Ce coup d'État a eu lieu il y a maintenant deux mois, et la communauté internationale reste pour le moins peu active, alors que le risque de guerre civile est évident. La Chine et la Russie, quant à elles, cachent à peine leur appui à la junte. La confiscation du pouvoir par un groupe particulier, ici une junte militaire, ne nous rappelle que trop le modèle chinois. Ne laissons pas s'exporter ce mode de gouvernance.
L'opposition birmane a lancé un appel à la communauté internationale. Nous devons y répondre. Notre siège au Conseil de sécurité de l'ONU doit nous permettre de faire entendre notre voix. En attendant, nous devons aller plus loin dans notre soutien au gouvernement légitime. Nous pourrions apporter notre aide aux ONG et aux mouvements civils.
Monsieur le ministre, quelles initiatives concrètes compte prendre la France pour que cesse ce bain de sang et pour aider le peuple birman ?
Applaudissements sur les bancs des groupes LT, Dem, Agir ens et UDI-I, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Monsieur le député, je partage entièrement votre indignation. Ce coup d'État a eu lieu il y a deux mois, et la situation – vous l'avez décrite – est extrêmement grave. Le week-end dernier, une vingtaine de manifestants ont encore été tués, s'ajoutant aux 550 déjà assassinés par la junte depuis le 1er février. Nous avons rarement vu une telle répression aveugle et brutale.
Vous avez raison de dire que, face à cela, les déclarations ne suffisent pas, même s'il est essentiel de les faire ici, devant cette assemblée, afin qu'elles soient entendues partout. Il faut aussi prendre des mesures telles que les sanctions déjà décidées dans le cadre de l'Union européenne, à notre initiative, à l'égard des onze principaux organisateurs et chefs de la junte militaire, y compris le commandant en chef.
Les vingt-sept États membres vont aussi prendre des sanctions économiques, qui vont entrer rapidement en application, contre les entités liées à l'armée – cela n'aurait guère de sens de le faire à l'échelle d'un seul pays. Tant l'Europe que la France ont suspendu tous les soutiens budgétaires aux programmes gouvernementaux, tout en accroissant leur aide aux organisations humanitaires afin que les populations civiles, qui vivent dans le drame, puissent être secourues.
Nous allons continuer à agir dans ce sens, ce qui présente une difficulté particulière : il faut frapper au coeur les intérêts économiques des forces armées sans pénaliser encore davantage les populations qui vivent dans ce pays.
Telle est la logique de l'Union européenne, du Conseil de sécurité et de nos partenaires de l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est (ASEAN) et de tous les pays directement concernés. Nous menons une offensive notamment pour que la Chine prenne les initiatives nécessaires parce qu'elle a le pouvoir de le faire.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.
Dans son discours d'Orange, en septembre 1963, le général de Gaulle disait : « L'essentiel pour [le Président de la République], ce n'est pas ce que peuvent penser le comité Gustave, le comité Théodule ou le comité Hippolyte ; l'essentiel, c'est ce qui est utile au peuple français. »
Le 30 janvier 2019, je suis intervenu ici même afin de relayer les travaux de mon assemblée de circonscription. Ses soixante membres, tous issus de la société civile, préconisaient la baisse des dépenses de fonctionnement de l'État, en se référant au rapport alarmant de l'Inspection générale des finances (IGF) qui a inventorié quelque 1 244 agences d'État, dont les coûts annuels de fonctionnement atteignent près de 60 milliards d'euros. Je rappelle que nos voisins allemands n'en comptent que 122, soit plus de dix fois moins. À la suite de mon intervention, mon groupe a déposé une proposition de résolution, sans succès.
Dans le même temps, et à l'initiative du Premier ministre, une circulaire appelait à « simplifier le paysage administratif » par la « réduction du nombre d'instances et de commissions rattachées aux administrations centrales » et demandait aux administrations de faire des propositions de fusions ou de suppressions.
Quelques structures ont été supprimées, mais nous constatons qu'un nouveau millefeuille d'une quinzaine d'organismes en tout genre gèrent au quotidien cette crise sanitaire sans précédent, le dernier-né étant le conseil d'orientation de la stratégie vaccinale. À ce propos, Le Monde publiait un organigramme sur « l'organisation complexe des circuits de décision ». Quant à François Bourdillon, ancien directeur de Santé publique France, il mettait en garde contre « l'empilement des structures d'expertise, qui peut mettre à mal le programme national de vaccination ».
Plus de deux ans se sont écoulés depuis ma première intervention. Pouvez-vous nous indiquer si un bilan est disponible et si la circulaire du Premier ministre a permis une rationalisation de ces agences et opérateurs ? Est-il nécessaire qu'autant d'organismes, en sus du ministère de la santé et des agences régionales de santé, interviennent dans la stratégie de lutte contre l'épidémie de covid-19 ?
Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-I.
La parole est à Mme la ministre de la transformation et de la fonction publiques.
Au fond, vous m'interrogez sur l'efficacité de l'action publique. En la matière, le Gouvernement a défini quatre principes.
Premier principe : les lois doivent être applicables. Actuellement, 90 % des dispositions que vous avez adoptées sont assorties d'un décret d'application. Le taux était inférieur à 50 % sous le quinquennat de François Hollande.
Deuxième principe : simplifier les processus de décision. Pour ce faire, nous avons supprimé un tiers des commissions consultatives – précisément 86, dont 18 par la loi – , afin de mettre fin à ces processus trop lourds, trop lents et trop complexes.
Troisième principe : prendre des décisions au plus près des territoires. Après la publication de cette circulaire, 99 % des décisions individuelles sont rendues au niveau départemental ou infradépartemental pour les projets des élus, des entreprises et des particuliers. Au cours des prochains mois, quelque 2 500 fonctionnaires des administrations centrales vont être envoyés vers les territoires.
Quatrième principe : l'État doit être capable de parler d'une seule voix et de piloter ses résultats. Nous nous sommes engagés à rendre publics tous nos résultats – par politiques prioritaires et par départements – sur le site du Gouvernement.
Le 5 février dernier à Mont-de-Marsan, le Premier ministre a ainsi pu annoncer que nous allions, dans les prochaines semaines, donner à chaque préfet une feuille de route interministérielle qui permettra de mettre en cohérence l'action de l'ensemble des agences, opérateurs et administrations dans chaque département. Les priorités seront établies sous l'autorité du Premier ministre, afin que le mille-feuille administratif n'empêche pas d'obtenir des résultats.
L'enjeu principal, c'est le pilotage. Si tout n'a pas réussi pendant cette crise, des corrections ont été systématiquement apportées. Nous faisons des ajustements permanents afin d'obtenir des résultats au plus près des territoires. C'est une manoeuvre qui n'implique pas des grands débats, mais une action résolue et déterminée. C'est ce que nous faisons.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.
Monsieur le Premier ministre, pendant que dans les beaux salons, privilèges des intouchables, certains déconfinent à la louche le caviar, le homard et les milliards,
Exclamations sur les bancs du groupe LaREM
samedi à Dieppe, 500 personnes se sont rassemblées à l'air libre, usant de leur droit à manifester.
Dehors, 500 citoyens masqués mais pas muselés ont, dans le respect des gestes barrières, chanté, joué de la musique, regardé un film et débattu ensemble pour qu'enfin on permette à la culture asphyxiée de respirer, pour qu'enfin on mette la société des liens au centre du village.
Cette société des liens nous a permis de tenir. Il faut vous rappeler la belle déclaration du Président de la République : « Notre pays, aujourd'hui, tient tout entier sur des femmes et des hommes que nos économies reconnaissent et rémunèrent si mal. »
C'était il y a un an. Depuis, que s'est-il passé ? Sous la pression, les soignants de l'hôpital ont obtenu un coup de pouce sous forme de primes. C'était la moindre des choses. Qu'en a-t-il été de tous les autres, dont la crise a révélé le rôle essentiel ? Les salariés du secteur médico-social, en charge des personnes handicapées, n'ont pas été oubliés mais exclus du Ségur de la santé. Citons aussi les assistantes maternelles, les animatrices périscolaires, les accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) et les auxiliaires de vie qui sont le rayon de soleil de nos aînés. Tous ces professionnels permettent de tisser des liens du berceau jusqu'à la tombe, pour reprendre l'expression de mon copain Ruffin. Eux, ils attendent encore.
Nous n'avons plus entendu un mot même si, depuis, d'autres discours ont été prononcés et d'autres promesses faites. Ces métiers du vivre-ensemble, tournés vers les autres, sont pourtant marqués par la précarité et les faibles salaires. Ils sont exercés très majoritairement par des femmes.
Si rien n'est fait pour ces salariés, ils formeront une armée de 2 millions d'emplois précarisés d'ici à 2040. Ces femmes et ces hommes que nos économies reconnaissent et rémunèrent si mal manifesteront le 8 avril. Qu'allez-vous faire, au-delà des mots, pour répondre à la promesse présidentielle du 13 avril 2020 ?
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SOC.
Monsieur Jumel, je partage une partie de votre constat : dans notre pays, certaines professions sont invisibles en temps ordinaire mais deviennent visibles en temps de crise. C'est quand nous nous sentons collectivement et individuellement plus vulnérables que nous nous rendons compte qu'elles sont indispensables.
Nous ressentons cette vulnérabilité aux deux âges extrêmes de la vie – tout petit ou très vieux et en perte d'autonomie – mais aussi quand la société affronte une pandémie comme celle que nous avons connue. Il a bien fallu que ces personnes continuent de travailler à un moment où d'autres étaient invitées à rester chez elles.
Je fais aussi le même constat que vous en ce qui concerne la féminisation de ces métiers. C'est d'ailleurs un peu la poule et l'oeuf. Ces métiers sont-ils mal rémunérés parce qu'ils sont féminisés ou sont-ils féminisés parce qu'ils sont mal rémunérés ?
Il faut remonter dans nos archives au moins cinquante ou soixante ans en arrière pour comprendre. Au lendemain de la seconde guerre mondiale, les femmes ont aspiré à travailler. Les hommes – les insiders – , les ont alors dirigées vers des métiers supposés correspondre à leur moralité propre et à leurs savoir-faire : les soins aux petits, aux malades, aux vieillards, aux personnes en situation de handicap. Et sous prétexte qu'ils étaient occupés par des femmes, ces métiers étaient peu rémunérés.
Si je ne prétends pas que nous avons achevé le travail, car nous en sommes loin, je peux vous apporter des éléments factuels, en m'appuyant sur le Ségur de la santé. Environ 1,5 million de salaires ont été revalorisés, ce qui est inédit dans notre histoire et représente quasiment 9 milliards d'euros de hausse de salaire par an.
Mme Danielle Brulebois applaudit.
Dans l'histoire de notre pays, c'est la plus grosse réduction d'écart de salaire entre les hommes et les femmes puisque 85 % de ces métiers sont exercés par des femmes.
Le Gouvernement et la majorité – élargie – sont fiers d'avoir adopté le Ségur de la santé, qui constitue une étape essentielle. Avec Brigitte Bourguignon, nous travaillons pour les aides à domicile. Avec Jean-Michel Blanquer, nous allons le faire pour tout le personnel scolaire. Nous avançons, monsieur le député. Il y avait un retard criant, de cinquante à soixante ans. Reconnaissez qu'une partie du chemin a été faite.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
En l'absence de ministre de l'éducation nationale, ma question sur l'organisation du bac en 2021 s'adresse à M. le Premier ministre.
Auparavant, je confirme que les environnements numériques de travail étaient totalement saturés aujourd'hui.
Jean-Michel Blanquer a pourtant affirmé que tout était prêt pour l'école à distance.
Résultat : la plateforme du CNED était inaccessible ce matin. Heureusement, madame la secrétaire d'État chargée de l'éducation prioritaire, que nous avons beaucoup progressé depuis l'année dernière ! Pour le moment, cet énorme bug a suscité incompréhension et grogne de la part des internautes.
On craint le pire pour la suite, notamment pour le baccalauréat 2021.
Le ministre Blanquer a récemment affirmé avoir bon espoir que le baccalauréat de français, ainsi que les épreuves de philosophie et du grand oral, se déroulent « dans des conditions normales ».
Le baccalauréat 2021 devrait reposer sur une part de contrôle continu et une part d'épreuves terminales. S'agissant du grand oral, pour l'instant, c'est plutôt le grand flou qui domine ! Les professeurs sont aussi angoissés que les élèves et leurs familles, d'autant que l'ordonnance publiée au Journal officiel du 24 décembre en guise de cadeau de Noël n'est pas pour les rassurer : elle précise que les modalités d'organisation des examens devront être adaptées en fonction de l'épidémie de covid-19 et que le Gouvernement pourra les modifier jusqu'à quinze jours avant le début des épreuves. Ira-t-on vers un diplôme accordé sur la seule base du contrôle continu, comme en 2020 ?
La réforme du lycée interroge toujours : le choix de trois spécialités en première, les épreuves portant sur deux spécialités en terminale, les stages de formation des professeurs en vue du grand oral, ainsi que la prise en compte des notes et des bulletins par la plateforme Parcoursup sont autant de questions auxquelles les enseignants, les élèves et leurs parents doivent obtenir des réponses claires.
Le ministère de l'éducation nationale ne pourrait-il pas être, un peu plus, celui de l'anticipation ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – M. Jean-Louis Bricout applaudit également.
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de l'éducation prioritaire.
Vous commencez votre question en pointant…
… les dysfonctionnements observés ce matin sur la plateforme du CNED. J'ai déjà eu l'occasion de le dire deux fois, mais je vais le répéter : des lenteurs de connexion ont été constatées et un acte de malveillance a effectivement causé un dysfonctionnement entre huit heures et dix heures du matin.
Malgré cela, à dix heures, la fréquentation enregistrée sur la plateforme atteignait 500 000 élèves et professeurs, et 150 000 classes virtuelles étaient actives.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe Dem.
S'agissant de l'organisation de la session 2021 du baccalauréat, comme vous le savez, nous tiendrons bien évidemment compte des conséquences de la crise. Plusieurs dispositions ont été prises.
D'abord, pour ce qui concerne les classes de première et de terminale, nous avons annulé les évaluations communes, afin que les élèves disposent de plus de temps pour apprendre et soient donc plus sereins. Les épreuves de spécialité initialement prévues en mars seront ainsi transformées en contrôle continu, tout comme les épreuves communes. L'épreuve écrite de philosophie, quant à elle, devrait se tenir le 17 juin, tandis que le grand oral devrait se tenir entre le 21 juin et le 2 juillet, dans le respect des protocoles et des gestes barrières.
Enfin, pour accompagner au mieux les enseignants dans cette période, nous mettons deux outils à leur disposition : un guide de l'évaluation pour les classes de terminale des voies générales et technologiques, contenant des recommandations pour chaque discipline et spécialité, et une méthodologie à l'intention des jurys d'examen.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.
J'associe à ma question l'ensemble de mes collègues membres de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire.
Hier, le magazine MIT Technology Review a publié un classement mondial des pays les plus verts. La France y figure en quatrième position. Nous pouvons, je le crois, être fiers de la politique environnementale menée dans notre pays.
Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes LaREM et Dem.
Nos progrès et nos engagements en faveur d'un avenir sobre en carbone sont ainsi reconnus.
La loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite loi ÉGALIM, la loi relative à l'énergie et au climat, la loi d'orientation des mobilités, et la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, accompagnées des près de 30 milliards d'euros du plan de relance consacrés à la transition écologique, sont autant d'actions contribuant au bon rang de la France dans ce classement. Pour ne prendre qu'un exemple, la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire modifiera profondément nos modes de production et de consommation.
Faire de l'économie française une économie adaptée aux enjeux environnementaux et sociétaux, c'est investir dans des énergies plus propres et renouvelables, décarboner les industries française et européenne, développer des transports plus propres, mieux prendre en considération les conséquences sociales de nos activités, et orienter notre agriculture vers un modèle plus durable. Cela contribuera clairement à renforcer notre compétitivité sur la scène internationale. Le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets que nous examinons actuellement nous permettra de prolonger cette dynamique vertueuse pour l'environnement.
Comment le Gouvernement entend-il agir pour poursuivre nos efforts et faire en sorte que, dans dix ans, la France figure toujours en haut de ce classement international des pays les plus verts ?
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.
Vous avez raison de citer ce classement réalisé par le MIT, qui place la France au quatrième rang sur soixante-seize, la classant parmi les pays les plus avancés en matière de transition énergétique.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.
Il s'agit là d'une reconnaissance de tous les efforts qui ont été faits, en particulier durant cette législature. Ce résultat reflète notre volonté de mettre la transition écologique au coeur de notre action, comme en témoignent le plan de relance et ses 30 milliards d'euros d'investissements consacrés à la transition écologique.
Cette volonté s'exprime en matière énergétique, avec la fermeture des centrales à charbon et l'investissement dans le solaire, l'éolien et l'éolien en mer. Elle transparaît dans l'effort de décarbonation de notre industrie, à travers les appels à projets lancés sous l'égide de France Relance – 750 000 tonnes d'émissions de CO2 seront ainsi évitées dans le secteur industriel pour la seule année 2021.
Elle ressort aussi de l'accent mis sur la rénovation énergétique des bâtiments et des logements. L'adoption du projet de loi climat et résilience nous permettra d'ailleurs d'aller encore plus loin dans l'interdiction à la location des passoires thermiques, puisqu'à compter de 2025 puis de 2028, 1,8 million de logements devront être rénovés avant de pouvoir être loués.
Cette volonté est également illustrée par le dispositif MaPrimeRénov', financé dans le cadre du plan de relance : alors que nous avions enregistré 200 000 demandes en 2020, 180 000 dossiers ont déjà été déposés durant les trois premiers mois de 2021. Nous instruirons ainsi 750 000 à 800 000 dossiers cette année. La montée en charge de l'administration est au rendez-vous.
Je salue d'ailleurs les agents de l'État qui traitent ces dossiers chaque jour.
Vous le voyez : l'ambition est immense et les résultats sont là. Nous continuerons en ce sens.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.
Ma question porte sur la proposition de loi relative à l'évolution statutaire de la collectivité de Corse afin de lutter contre le phénomène de spéculations foncière et immobilière dans l'île, déposée par le groupe Libertés et territoires. S'il n'est pas question d'anticiper le débat de jeudi, permettez-moi de dire combien les résidents permanents de Corse doutent de la pertinence de ses deux principales dispositions, à savoir l'instauration d'un droit de préemption par la collectivité de Corse et la création d'une taxe annuelle sur les résidences secondaires.
Nous ne comprenons pas les raisons qui conduiraient, sur cette question, à traiter la Corse différemment du bassin d'Arcachon ou de la Côte d'Azur.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.
Nous ne comprenons pas pourquoi le droit à la propriété et à la jouissance libre de son bien serait ainsi limité pour la seule Corse. Nous ne comprenons pas le fondement de l'attribution de pouvoirs si exorbitants à l'Assemblée de Corse, qui interviendrait du reste dans un champ de compétences relevant normalement du bloc communal. Nous sommes toujours convaincus de la faiblesse constitutionnelle de ce texte.
Surtout, nous ne comprenons pas comment un texte aussi déconnecté des réalités a pu voir le jour, alors qu'en Corse, près de la moitié des résidences secondaires sont des maisons familiales de village appartenant à des résidents permanents de l'île. Au fond, ce sont avant tout les Corses eux-mêmes qui risquent d'être injustement pénalisés par l'adoption de ce texte.
Tous ces éléments, la majorité semble les avoir ignorés en commission des lois, suivant la position pour le moins hasardeuse de l'orateur du groupe majoritaire. Pouvez-vous me rassurer en me garantissant que le Gouvernement a bien l'intention de clarifier les choses et de témoigner de sa connaissance des réalités corses ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
La parole est à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Vous anticipez, vous l'avez dit vous-même, un débat qui se tiendra jeudi dans l'hémicycle, à la faveur de la discussion d'une proposition de loi déposée par le groupe Libertés et territoires, particulièrement par le député Acquaviva et ses collègues corses.
Cette proposition a le mérite de mettre sur la table un réel sujet de préoccupation pour les habitants de Corse, à savoir le logement – préoccupation que vous et moi, je le sais, partageons également : l'augmentation des prix du foncier ne permet plus de construire des logements adaptés aux besoins réels, notamment pour les ménages les plus modestes. Le texte cherche à répondre à ce problème en confiant un triptyque de nouvelles compétences à la collectivité de Corse.
Vous vous en doutez, nous n'allons pas faire le match avant le match. Je veux néanmoins vous assurer que ma volonté est d'apporter des réponses à de réels problèmes, avec pour fil rouge le respect de deux principes de rang constitutionnel : celui d'égalité et celui interdisant la tutelle d'une collectivité sur une autre.
Je reste en effet persuadée que le partage des compétences entre le bloc local et la collectivité de Corse reste la meilleure garantie d'un développement équilibré du territoire.
Je vous assure également que le Gouvernement est pleinement engagé pour accompagner la Corse et ses habitants. D'abord, comme vous vous en rappelez, nous étions prêts à reconnaître la spécificité de la Corse et à lui conférer un rang constitutionnel dans le cadre du projet de révision constitutionnelle qui n'a malheureusement pas abouti.
Ensuite, le Parlement a adopté récemment la loi organique relative à la simplification des expérimentations mises en oeuvre sur le fondement du quatrième alinéa de l'article 72 de la Constitution, qui permettra de répondre facilement aux propositions que les élus de Corse pourraient formuler. Enfin, le projet de loi 4D – différenciation, décentralisation, déconcentration et décomplexification – permettra de travailler, notamment avec l'ensemble des parlementaires de Corse, sur la question d'une meilleure accession au foncier, afin de construire plus de logements et d'équipements publics.
Merci pour les éléments que vous avez bien voulu fournir. Je connais la sincérité de votre engagement au service des territoires. La Corse et les Corses comptent sur vous.
Ma question concerne le problème du renouvellement des agriculteurs. Dans les campagnes françaises, depuis plusieurs décennies, le nombre d'agriculteurs décroît régulièrement, inexorablement, tout comme le nombre d'exploitation agricoles. De nombreuses causes expliquent ce phénomène, parmi lesquelles figure, malheureusement, la dégradation des conditions de vie et de travail des exploitants.
Pour remédier à ce phénomène, plusieurs mesures ont été prises durant ce quinquennat, notamment dans la loi ÉGALIM. Elles ne sauraient toutefois être considérées comme suffisantes, tant ces métiers subissent une crise des vocations, doublée d'un vieillissement important de leur population. L'âge moyen des agriculteurs atteignait 52 ans en 2016, et environ deux tiers des agriculteurs assurent qu'ils n'ont pas identifié de repreneur en prévision de leur départ en retraite. Cette situation est préoccupante, puisque la difficulté à trouver un successeur risque d'accentuer le phénomène de rassemblement des exploitations, mais aussi les achats des terres agricoles par des acteurs étrangers.
La relève du monde agricole doit être assurée pour garantir l'indépendance alimentaire de la France et le modèle familial, plus vertueux pour les agriculteurs et pour l'environnement. Ce renouvellement se joue également dans les lycées et les lieux de formation agricole, qui doivent s'adapter pour répondre aux nouveaux enjeux de ce secteur.
Quelles sont les intentions du Gouvernement pour assurer la relève du secteur agricole et revaloriser cette filière ?
M. Sylvain Waserman applaudit.
Votre question m'offre tout d'abord l'occasion de saluer l'enseignement agricole, une spécificité française qui subit exactement les mêmes conséquences de la crise de la covid-19 que l'enseignement général même si on en parle beaucoup moins.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, LR, Dem, UDI-I et GDR.
Le personnel éducatif, les professeurs et les directeurs de ces établissements accomplissent pourtant un travail absolument remarquable.
On choisit aujourd'hui les métiers de l'agriculture par passion. Or la passion ne peut pas tout. Elle ne saurait suffire à assurer le renouvellement des générations, lequel représente un défi que nous devons relever si nous ne voulons pas, comme vous l'avez dit, que notre souveraineté soit remise en question.
Il faut donc agir avec beaucoup de force et de conviction en matière de rémunération, une dimension qui ne sera jamais occultée, quelle que soit la passion. C'est pourquoi nous travaillons notamment sur cette question avec ma collègue Agnès Pannier-Runacher, sous le contrôle du Premier ministre, en nous demandant comment aller plus loin dans la direction tracée par la loi ÉGALIM.
Deuxièmement, pour susciter des vocations, nous devons aussi montrer à quel point les métiers de l'agriculture sont innovants.
L'accès au foncier représente un troisième enjeu. Un travail important a été mené sur cette question par des députés, nous aurons l'occasion d'en débattre prochainement.
Nous devons ainsi montrer que les agriculteurs sont des entrepreneurs du vivant qui nourrissent le peuple. J'aime cette définition car elle allie la passion – « nourrir le peuple » – , la complexité qui exige d'être innovant – « le vivant » – et la nécessité d'être rémunéré – « entrepreneurs ».
Pour susciter des vocations, nous lancerons au printemps une grande campagne de communication, d'un montant supérieur à 10 millions d'euros, afin de dire que ce sont des métiers de passion, qu'ils recrutent et que nous nous battrons pour eux avec beaucoup de détermination.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.
Concernant la vaccination, nous sommes à la traîne. La France est la seule grande économie qui n'ait pas inventé de vaccin. Mais je suis au regret de vous dire, monsieur le Premier ministre, que vous êtes aussi en train de rater le départ de la relance.
Votre plan est un de ceux, parmi les grandes économies, dont le montant est le plus faible : 4 % du produit intérieur brut – PIB – contre 10 % aux États-Unis. Il est aussi le plus fouillis, sa seule boussole étant le saupoudrage. Il compte 103 programmes dont aucun, sauf le plan hydrogène, ne permet réellement un effet d'entraînement.
C'est aussi le plan le moins concerté avec les collectivités locales et les industriels : aux États-Unis, 20 % du plan de relance va vers les collectivités locales, contre 5 % en France.
Pendant ce temps, d'autres économies sont en mode commando, avec un État central réellement à la manoeuvre, y compris dans les pays libéraux.
Je pense notamment aux États-Unis, où est prévu un plan de relance massif, concentré sur quelques secteurs clés qui ont un vrai effet d'entraînement sur l'économie.
Monsieur le Premier ministre, je vous demande de reprendre les choses en main sans tarder, sinon notre déclassement que nous vivons en matière de vaccins ne sera qu'un avant-goût de ce qui attend le reste de notre économie.
Il faut un plan de relance clair autour de quatre secteurs clés – énergie, transports, agriculture et santé – qui ont un réel effet d'entraînement sur le reste de l'économie.
Il faut des actions définies en totalité plutôt que du bricolage. Vous consacrez 205 millions d'euros à un déploiement très limité de bornes de recharge pour les véhicules électriques alors que l'Allemagne y consacre 3 milliards, soit quinze fois plus, ce qui permettra d'installer 1 million de bornes en concertation avec les constructeurs automobiles. Une concertation avec tous les industriels est nécessaire.
Il faut enfin que vous nommiez un « M. Monnet » ou une « Mme Marshall » pour donner un cap clair et une vraie boussole.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.
Le plan de relance français, ne vous en déplaise, est très bon et se déploie massivement dans nos territoires et dans les secteurs économiques concernés.
Je suis heureux d'entendre dans votre bouche une apologie des États-Unis d'Amérique…
… qui, comme l'a annoncé le président Biden, viennent de donner une impulsion supplémentaire à leur plan de relance – mais il s'agit de rattraper le retard du précédent.
Vous connaissez parfaitement, tous, l'historique de la relance européenne, et non nationale, qui fut d'ailleurs lancée à l'initiative du Président de la République française et de la chancelière allemande.
Vous savez aussi que j'ai décidé de présenter il y a plusieurs mois un plan de relance d'un montant de 100 milliards d'euros, un tiers étant consacré à la transition écologique.
Puisque vous vous êtes livrée à des comparaisons européennes, je précise que la France se situe très largement en tête des pays européens s'agissant des crédits du plan de relance consacrés à la transition écologique.
Si l'on poursuit les comparaisons, ce plan est également extrêmement ambitieux concernant la reconquête de notre souveraineté industrielle ainsi que les crédits affectés à la modernisation et à la transition de notre agriculture.
Je veille enfin à ce que la territorialisation du plan de relance – une question que vous avez évoquée – soit la plus complète possible. L'association avec les collectivités territoriales, pour assurer un effet démultiplicateur du plan, est très forte. Nous avons contractualisé avec quasiment toutes les régions, et avec un tiers des départements à ce jour. En outre, grâce aux contrats de relance et de transition écologique, dont est chargée la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, notre ambition, qui est à notre portée, est que l'ensemble des intercommunalités de France aient signé un tel contrat d'ici au 1er juin prochain.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.
Je vous remercie pour votre réponse mais ce qui compte, c'est d'assurer un effet d'entraînement, un effet, pour reprendre votre mot, démultiplicateur. Aujourd'hui nous sommes, avec la Roumanie, le pays dont la part d'industrie dans le PIB est la plus faible.
Le plan de relance que vous nous proposez comporte de nombreuses demi-mesures alors qu'en Allemagne sont prévus des plans globaux, concertés avec les industriels. Parlez aux industriels, monsieur le Premier ministre !
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et LT.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à seize heures cinquante, est reprise à dix-sept heures, sous la présidence de Mme Annie Genevard.
Le président de l'Assemblée nationale a reçu du Premier ministre une lettre l'informant qu'il avait décidé de prolonger la mission temporaire confiée à Mme Brune Poirson, députée de la troisième circonscription du Vaucluse. En conséquence, il est pris acte d'une part de la cessation le 5 avril 2021 à minuit du mandat de Mme Brune Poirson, d'autre part de son remplacement par M. Adrien Morenas, élu en même temps qu'elle à cet effet.
Vendredi 2 avril, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s'arrêtant à l'amendement no 5620 à l'article 15.
C'est un amendement qui vise à exclure les marchés de défense et de sécurité de la prise en considération des objectifs de développement durable – ODD – dans les spécifications techniques, compte tenu de la nature particulière de ces marchés.
La parole est à Mme Danielle Brulebois, pour soutenir le sous-amendement no 7335 .
Ce sous-amendement vise à exclure les marchés de produits médicaux qui présentent des spécificités très techniques et qui doivent répondre à des conditions de sécurité particulières ne permettant pas la prise en considération des ODD. Je pense aux plastiques à usage unique, par exemple, qui seront interdits. Or on a découvert que le polypropylène était notre meilleur allié pour lutter contre le covid-19.
Je comprends votre objectif. Toutefois, votre amendement présente un problème de forme car, tel qu'il est rédigé, il ne vise pas l'objectif que vous souhaitez mais s'applique aux spécifications techniques ou sanitaires.
Sur le fond, les marchés publics sanitaires, notamment ceux des hôpitaux, sont déjà très contraints par la réglementation. Pour le reste, je pense qu'il est important que les hôpitaux s'inscrivent dans la même démarche que les autres acteurs et qu'ils prennent en considération les ODD lorsque cela est possible, ce qui ne peut pas concerner tous les marchés notamment lorsqu'ils sont soumis à des réglementations sanitaires strictes. C'est pourquoi je vous invite à retirer votre sous-amendement. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable.
Si je comprends l'intention du sous-amendement de Mme Brulebois, j'y serai défavorable pour les mêmes raisons que Mme la rapporteure. En revanche, je suis favorable à l'amendement no 5620 de Mme Motin qui exclut la prise en considération des ODD pour les marchés de défense et de sécurité.
Le sous-amendement no 7335 est retiré.
L'amendement no 5620 est adopté.
L'amendement no 5100 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il faut enclencher une dynamique ; dans le cadre de la passation de marchés publics, ma collègue Jennifer De Temmerman propose d'obliger les entreprises qui souhaitent répondre à des appels d'offres publics à publier le bilan de gaz à effet de serre en données ouvertes.
La parole est à M. Hubert Wulfranc, pour soutenir l'amendement no 5099 .
Il vise à imposer aux entreprises de plus de 500 salariés soumissionnaires à la commande publique de publier leur bilan de gaz à effet de serre. En effet, si l'on considère que la commande publique est un levier majeur pour la transition écologique, alors il convient de faciliter l'accès aux marchés des entreprises les plus vertueuses.
L'amendement no 7041 de Mme Chantal Jourdan est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Tout d'abord, sur la forme, l'alinéa que vous visez est relatif aux marchés de défense et de sécurité, qui sont très spécifiques. Sur le fond, l'obligation pour toute entreprise soumissionnaire de publier un bilan de gaz à effet de serre exclurait de fait un bon nombre d'entreprises, notamment les TPE et PME qui ne sont pas aujourd'hui soumises à cette obligation. En raison de ce caractère trop restrictif, et potentiellement discriminatoire, de ces amendements, j'émets un avis défavorable.
Pour la même raison, celle du risque d'éviction de certaines entreprises, notamment des PME, j'émets un avis défavorable.
La parole est à Mme Josiane Corneloup, pour soutenir l'amendement no 787 .
Il vise à donner son plein effet à l'article 15 qui, en l'état, n'a qu'une portée purement symbolique, en créant une notion d'anormalité de l'offre qui ne répondrait pas à des critères environnementaux minimaux, librement déterminés par l'acheteur, en vue de tenir compte des caractéristiques du marché, notamment.
Vous visez de nouveau les alinéas relatifs aux marchés de défense et de sécurité. Sur le fond, nous avons déjà répondu à votre amendement. La notion d'offre anormalement basse vise à protéger l'acheteur ; nous ne souhaitons pas lui faire courir de risques supplémentaires.
L'amendement no 787 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement no 5623 .
Nous allons aborder le sujet des concessions, qui devrait tous nous rassembler. En cohérence avec les modifications que j'ai proposées en commission spéciale, cet amendement précise que les spécifications techniques des contrats de concession devront prendre en considération les ODD, dans leurs trois dimensions économique, sociale et environnementale.
L'amendement no 5623 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Je suis saisie de onze amendements, nos 2385 rectifié , 427 , 1784 , 5102 , 6525 , 4200 , 6957 , 4197 , 6511 , 7194 et 3961 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 427 , 1784 , 5102 et 6525 d'une part, nos 4197, 6511 et 7194 d'autre part, sont identiques.
L'amendement no 2385 rectifié de Mme Lise Magnier est défendu.
La parole est à M. François-Michel Lambert, pour soutenir l'amendement no 427 .
Il vise à élargir le champ d'application de l'article 15 qui, actuellement, ne comprend que les marchés publics, excluant de fait les concessions et les délégations de service public. Or celles-ci représentent 120 des 200 milliards d'euros qu'atteint chaque année la commande publique, soit 10 % du PIB, et qui est gérée par les décideurs et les élus.
La parole est à M. Jean-Marie Sermier, pour soutenir l'amendement no 1784 .
Si l'on souhaite réaliser une avancée significative, il importe de voter cet amendement de Dino Cinieri, déjà défendu par notre collègue François-Michel Lambert. Au-delà des marchés publics, les concessions sont importantes, notamment dans le domaine de l'eau et de l'assainissement. Il ne s'agit pas de remettre en cause ce modèle ni les entreprises qui effectuent un travail important en matière environnementale, mais de prévoir que les mêmes obligations s'appliqueront à l'ensemble de la commande publique.
La parole est à M. Hubert Wulfranc, pour soutenir l'amendement no 5102 .
J'ajouterai aux arguments développés par nos collègues François-Michel Lambert et Jean-Marie Sermier qu'aux concessions et aux délégations de service public relatives aux réseaux d'eau et d'assainissement s'ajoutent celles relatives aux déchets, aux transports et à l'énergie, secteurs particulièrement sensibles à la question de la transition écologique et qui devraient être naturellement inclus dans le champ d'application de l'article 15. Du reste, le Conseil d'État a considéré que l'exclusion des concessions et des délégations de service public était relativement incohérente.
Je suis assez heureux que nous ayons, avec mes collègues du groupe Socialistes, proposé en commission spéciale d'élargir le champ d'application de l'article 15 aux concessions, si importantes aujourd'hui dans les domaines de l'eau, des transports, du numérique, qui s'inscrivent dans le temps long, et qui sont des partenariats public-privé.
Cet élargissement porte le volume des commandes concernées de 80 à 210 milliards d'euros, ainsi que l'a précisé la rapporteure. Une fois n'est pas coutume, je salue le dialogue que nous avons mené – et que nous n'avons pas eu sur d'autres articles ou concernant d'autres dispositions – et qui a permis d'aboutir à une rédaction commune, celle de l'amendement no 4197 .
Toutefois, nous avons aussi déposé deux amendements d'appel, puisque nous aurions aimé, comme pour l'éco-score dont nous avons si longuement débattu, que les contrats de concession prennent en considération la dimension sociale.
Par défaut, je me rallie à la rédaction commune : grâce à cet amendement, la part de la commande publique qui prendra en compte les émissions de gaz à effet de serre, mais pas seulement, pèsera bien plus lourd dans le PIB. Et un jour, j'en suis convaincu, la question sociale sera intégrée.
Sur les amendements identiques nos 4197 , 6511 et 7194 , je suis saisie par les groupes La République en marche et Socialistes et apparentés d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
L'amendement no 6511 de Mme la rapporteure est défendu.
La parole est à Mme Nathalie Sarles, pour soutenir l'amendement no 7194 .
Cet amendement, que je défends au nom du groupe La République en marche, est identique aux deux précédents. Je ne sais pas qui a la paternité de cette idée, mais il me semble que nous sommes unanimement engagés en faveur du verdissement des contrats de concession.
L'amendement no 3961 de M. François-Michel Lambert est défendu.
Quel est l'avis de la commission sur ces onze amendements ?
Nous avions eu, en commission spéciale, une discussion sur l'opportunité d'intégrer les contrats de concession à notre démarche d'ambition écologique pour la commande publique. Cela supposait de demander aux concessionnaires de service public – appellation qui englobe aussi les délégataires de service public – d'accepter que l'exécution des contrats soit assortie de critères environnementaux.
Vous étiez nombreux à défendre une telle disposition et j'avais demandé à M. Lambert, au groupe Socialistes et apparentés et au groupe La République en marche de retirer leurs amendements, le temps de m'assurer que les acteurs concernés, qui n'avaient pas été consultés, étaient prêts à s'engager dans une telle démarche. À cet égard, je tiens à dire qu'obtenir leur assentiment a été facile. Ces acteurs ont une réelle volonté d'accompagner ce mouvement, ce dont nous pouvons tous nous féliciter.
Tout le monde partage le souhait de verdir non pas 87 milliards d'euros de marchés publics, comme le texte le prévoyait initialement, mais près de 210 milliards d'euros en incluant les concessions dans le champ d'application de l'article 15. Parmi ces concessions, nous avons tous en tête les autoroutes. Les réseaux d'eau et le transport d'énergie sont peut-être moins connus. Plus proches de nous figurent aussi les concessions relatives aux transports collectifs. Tous ces acteurs sont prêts à mettre les considérations environnementales au coeur de l'exécution de leur contrat de concession de service public.
Je le répète, grâce à ce levier, l'État ne sera pas le seul acteur exemplaire : ce sont des milliers d'entreprises que nous embarquerons avec nous dans la transition écologique concrète, du quotidien, en intégrant des critères environnementaux dans l'exécution de leur prestation. Je crois que nous pouvons être très heureux de réaliser cette avancée ensemble.
J'émets donc un avis favorable aux amendements identiques nos 4197 , 6511 et 7194 et je demande aux députés ayant déposé les autres amendements de la discussion commune de s'y rallier. À défaut, l'avis sera défavorable.
M. Jimmy Pahun applaudit.
Il s'agit d'un progrès considérable. J'ai eu l'occasion de le dire en commission spéciale ainsi qu'en séance publique vendredi et au risque de me répéter, avec cette mesure nous allons beaucoup plus loin que ce que proposaient les membres de la Convention citoyenne pour le climat.
Nous avons d'abord agi pour inclure un critère environnemental aussi bien dans l'attribution que dans l'exécution d'un marché public. Nous avons également avancé l'entrée en vigueur de cette disposition au plus tard cinq ans après la promulgation du projet de loi, au lieu des dix années initialement prévues. Et maintenant nous élargissons cette mesure aux concessions. Cela peut apparaître comme un détail à l'échelle du texte, mais il s'agit bien d'une avancée absolument essentielle.
Cela a été dit, mais rappelons-le : on évalue à 120 milliards d'euros le montant total des concessions et délégations de service public. Si l'on ajoute les 80 milliards d'euros de marchés publics, ce sont donc désormais 200 milliards d'euros de commande publique qui seront concernés par cette disposition.
Cette extension aux concessions, qui avait été réclamée par de nombreux groupes en commission spéciale, va nous permettre d'intégrer des secteurs déjà bien engagés dans une démarche environnementale ; je pense aux transports et aux réseaux d'eau dont parlait Mme la rapporteure, mais aussi au secteur du traitement des déchets. La commande publique en sera plus écologique et plus durable. Le Conseil d'État, qui l'indiquait dans son avis sur le projet de loi, et les associations d'élus, que je souhaite saluer, nous confortent dans cette voie et je les en remercie. Nous pouvons être fiers de faire ainsi évoluer le droit de la commande publique.
Je note la différence intéressante apportée par Mme la rapporteure et par Dominique Potier sur ce sujet, sur lequel nous nous impliquons toutes et tous depuis un temps certain et sur lequel j'ai moi-même essayé de mobiliser. Je retire donc mes deux amendements aux profits des nos 4197, 6511 et 7194.
Eu égard à ce qui vient d'être dit, je retire également l'amendement no 1784 de Dino Cinieri, tout en rappelant à Mme la secrétaire d'État que s'il est intéressant d'intégrer les grandes entreprises concessionnaires au dispositif, il est aussi important de travailler avec les petites entreprises locales, trop souvent laissées pour compte. On nous explique qu'il est préférable de sélectionner une entreprise d'envergure nationale capable de réaliser certaines avancées, mais cela a pour conséquence de laisser les petits artisans de côté. Il faut donc absolument que nous travaillions avec l'ensemble des entreprises sans oublier les artisans locaux, dont les performances en matière d'émissions de CO2 sont d'ailleurs souvent meilleures que celles des entreprises opérant à l'échelle nationale.
L'amendement no 1784 est retiré.
L'amendement no 5102 est retiré.
L'amendement no 6525 est retiré.
Les amendements nos 2385 rectifié , 4200 et 6957 , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 119
Nombre de suffrages exprimés 116
Majorité absolue 59
Pour l'adoption 115
Contre 1
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
L'amendement no 4313 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement, qui reprend certaines des propositions que contenaient des amendements qui viennent d'être retirés, impose aux concessionnaires de décrire, dans leur rapport annuel, les mesures qu'ils ont prises « pour garantir la protection de l'environnement et l'insertion par l'activité économique dans le cadre de l'exécution de leur contrat ».
Nous le savons tous, les concessions sont souvent des contrats d'assez longue durée ; les concessionnaires doivent donc chaque année produire un rapport permettant aux collectivités qui délèguent les prestations de les renégocier. Il s'agit d'un élément très important étant donné que l'Union européenne insiste fortement pour que les États membres renégocient régulièrement leurs contrats de cette nature.
C'est sur cette base que je vous propose que le rapport annuel des concessionnaires intègre des indicateurs concrets attestant du respect de leurs obligations environnementales dans le cadre de leur contrat.
Nous en profitons pour intégrer la dimension sociale, qui nous tient tous à coeur : avec cet amendement, la dimension écologique sera accompagnée du souci d'insertion sociale que nous partageons tous.
C'est un amendement dont le Gouvernement partage l'ambition. Il nous semble effectivement important que le rapport que doit remettre le concessionnaire à l'autorité concédante contienne la description des mesures prises pour la protection de l'environnement et l'IAE – insertion par l'activité économique – dans le cadre de l'exécution du contrat. Avis favorable.
Je vous prie de m'excuser, j'ai omis d'appeler l'amendement no 2387 de Mme Lise Magnier, qui est défendu.
Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ?
J'en demande le retrait au profit de celui que j'ai présenté. À défaut, avis défavorable.
Même avis.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 127
Nombre de suffrages exprimés 120
Majorité absolue 61
Pour l'adoption 120
Contre 0
Par cet amendement, nous souhaitons ramener à deux ans à compter de la promulgation du projet de loi le délai pour l'entrée en vigueur des mesures prévues à l'article 15, avec une possible modulation pour tenir compte de certaines spécificités, notamment en ce qui concerne les concessions. En effet, aux termes de cet article que nous venons d'amender de manière unanime, un délai maximal de cinq ans est prévu, soit au-delà de 2026, avant que ne soient enclenchées les transformations que nous attendons. Or vous savez que les concessions peuvent courir sur des durées très longues. Si entre-temps certaines devaient être renouvelées, elles ne seraient pas soumises à la stratégie que nous sommes en train d'adopter et que Mme la secrétaire d'État défend à juste titre avec ardeur.
Cet amendement vise donc à ce que les dispositions que nous votons cet après-midi entrent en vigueur au plus tôt.
La parole est à M. Jean-Pierre Vigier, pour soutenir l'amendement no 1780 .
L'article 15 du projet de loi entend obliger les acheteurs publics à prendre en compte, dans la passation des marchés de travaux, de services et de fournitures, certains aspects environnementaux. C'est une bonne chose, puisque cela permettra de concrétiser les objectifs des pouvoirs publics en matière de transition écologique.
Le délai de cinq ans prévu à l'alinéa 22 pour appliquer ces dispositions apparaît toutefois trop long, eu égard aux enjeux et aux défis climatiques. Cet amendement propose par conséquent de le ramener à deux ans, tout en ouvrant la possibilité aux décrets d'application de le moduler selon les catégories d'acheteurs, des seuils de passation et de la nature des marchés.
Nous avons déjà évoqué cette question des délais vendredi soir. Au vu de nos ambitions environnementales mais aussi sociales et compte tenu de l'attention particulière que le groupe Les Républicains nous demande d'avoir pour les TPE, les PME et tous nos artisans, il me semble primordial de faire les choses dans le bon ordre et selon le bon tempo.
J'entends votre volonté de mettre en place un calendrier adapté aux différents acheteurs et aux différents types de marché, mais nous devons surtout opter pour des dispositions simples et compréhensibles.
Nous nous sommes donné un horizon de cinq ans, ce qui, on l'a vu, ne sera pas de trop pour atteindre nos objectifs, car il s'agit d'emmener avec nous non seulement les acheteurs mais aussi les élus et les entreprises – ne les oublions pas, car ce sont elles qui vont devoir procéder à des changements majeurs. C'est la raison pour laquelle je suis défavorable à ces amendements.
La Convention citoyenne avait demandé un délai de dix ans. Nous proposons cinq ans, avec un objectif : ouvrir 200 milliards de commandes publiques pour les TPE et les PME. Si nous avons arrêté ce délai de cinq ans, c'est que nous estimons que, compte tenu de la très forte volonté politique, il est possible d'aller plus vite que ce qu'envisageaient les 150 citoyens de la Convention, ce qui est plutôt une bonne nouvelle.
Cela étant, il est absolument nécessaire de laisser à nos TPE, à nos PME et à nos ETI – établissements de taille intermédiaire – dans les territoires le temps de s'adapter et d'être de bons soumissionnaires, afin de pouvoir bénéficier des appels d'offres publics, et notamment des concessions.
Toutes les PME ne sont pas encore prêtes ; dans un souci d'équilibre, nous avons proposé ce délai de cinq ans qui, tout en exprimant une volonté d'avancer encore plus forte que celle de la Convention citoyenne, encourage l'accès des petites entreprises aux marchés publics. Aller trop vite leur ferait courir le risque d'être évincées. J'émets donc un avis défavorable.
Nous entendons ce que vous dites, madame la secrétaire d'État, mais comprenez nos arguments en faveur des entreprises locales, qui devront s'organiser. Pour les préserver, il serait souhaitable qu'à tout le moins vous donniez aux collectivités des directives pour qu'elles prennent en compte, parmi leurs critères, la distance, puisque tout kilomètre effectué par une entreprise génère du CO2. C'est important de le rappeler aux maires et aux différents responsables des marchés publics.
Si la première partie de notre amendement ramène le délai d'entrée en vigueur des dispositions de cinq à deux ans, j'appelle plus spécialement votre attention sur la seconde partie de notre amendement, qui propose que le décret prévoie, le cas échéant, une modulation de ce délai, « en fonction des catégories d'acheteurs, des seuils de passation ou de la nature du marché – délégation ou concession ».
Autrement dit, nous souhaitons accélérer le mouvement en particulier en ce qui concerne les concessions les plus importantes économiquement. Vous parlez de préserver les TPE et les PME, au motif que leurs difficultés seraient plus importantes ; il n'est pas prouvé qu'elles s'adaptent avec moins d'agilité que les grands groupes, mais soit. L'essentiel, toutefois, c'est que cet amendement donne à l'État la possibilité d'aller plus vite que les cinq années prévues pour les marchés de concession majeurs.
Si notre amendement n'était pas adopté aujourd'hui, nous y reviendrions dans la navette, car on ne peut envisager de se trouver en 2026 avec des appels d'offres pour des concessions de trente ans, portant sur des dizaines de millions d'euros, qui ne seraient pas couvertes par les dispositions que nous avons votées. Nous perdrions des marges de manoeuvre importantes.
Que les plus réactifs n'attendent pas la loi ! Il est bien précisé dans le texte que le présent article entre en vigueur à une date fixée par décret, au plus tard à l'issue d'un délai de cinq ans. En d'autres termes, ceux qui le veulent peuvent parfaitement intégrer des critères environnementaux dans leurs appels d'offres, et de nombreuses collectivités locales le font déjà. Libre à tous ceux qui le souhaitent de lancer des concessions avant cinq ans, ce n'est pas moi qui les en empêcherai. Je comprends votre intervention, mais il me semble que l'article est assez clair.
Je me rallie au délai de cinq ans. En revanche, comme l'a souligné Jean-Marie Sermier, il est indispensable que les marchés publics passés par les collectivités locales intègrent des critères environnementaux notamment en termes de distances à parcourir, et donc d'économies de CO2. Cela nous permettra de retenir, en toute légalité, nos entreprises locales. Certes, il s'agit d'argent public, mais il faut faire travailler nos entreprises locales.
Je n'ai pas eu le plaisir d'en discuter avec vous vendredi soir, puisque vous n'étiez pas là, mais nous en avons longuement débattu…
J'espère donc que vous allez mieux. Sachez en tout cas que les clauses administratives générales (CCAG) comme le Plan national d'action pour des achats publics durables (PNAAPD), ce guide de rédaction des marchés publics qui est soumis à consultation publique depuis le début de cette semaine, mentionne très clairement la question que vous soulevez des distances parcourues.
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement no 5633 .
Il s'agit d'un amendement de précision permettant aux mesures que nous avons adoptées sur les schémas de promotion des achats socialement et écologiquement responsables (SPASER) de s'appliquer très rapidement.
L'amendement no 5633 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 1131 , 4892 , 6713 , 1256 , 4233 , 4349 et 617 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 1131 , 4892 et 6713 , ainsi que les amendements nos 1256 , 4233 et 4349 , sont identiques.
La parole est à M. Michel Vialay, pour soutenir l'amendement no 1131 .
Cet amendement propose de remplacer le délai de cinq ans par un délai d'un an, sans quoi la portée de ces dispositions visant à renforcer les clauses environnementales dans les marchés publics restera purement symbolique.
La parole est à Mme Valérie Petit, pour soutenir l'amendement no 4892 .
L'amendement no 4892 est retiré.
Cet amendement vise à accélérer l'entrée en vigueur des dispositions de l'article 15, en fixant à deux ans au lieu de cinq, après publication de la loi, leur délai de mise en oeuvre.
Les amendements nos 4349 de Mme Fiona Lazaar et 617 de Mme Stéphanie Do sont défendus.
Quel est l'avis de la commission ?
Comme je l'ai dit, nous proposons d'aller plus vite que ce que recommandait la Convention citoyenne, tout en prenant le temps d'informer et de former les acheteurs publics et en laissant aux PME celui de s'adapter, sachant que la plupart des collectivités locales n'ont pas attendu la loi pour intégrer des critères environnementaux dans leurs marchés publics. Avis défavorable.
L'amendement no 617 n'est pas adopté.
Cet amendement fixe l'entrée en vigueur des dispositions adoptées en commission renforçant l'obligation de publicité des SPASER au 1er janvier 2023. Une telle date constituera une étape intermédiaire entre la publication de la présente loi est la date butoir d'entrée en vigueur des autres dispositions de l'article 15 relatives à l'obligation d'introduire des critères environnementaux dans les marchés publics.
M. Saddier avait en effet proposé en commission que l'obligation de publicité des SPASER entre en vigueur au 1er janvier 2023, pour donner une échéance claire à tout le monde.
C'est un amendement auquel je suis favorable. Il est d'ailleurs très proche de l'amendement no 5635 , qui propose la même date d'entrée en vigueur pour les mesures concernant, lui, les indicateurs figurant dans les SPASER.
Je considère donc votre amendement no 5635 comme défendu, madame la rapporteure.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Pour ceux d'entre vous qui se poseraient la question, les deux amendements sont complémentaires. Compte tenu de la position que nous avons défendue en commission ainsi que des échanges intéressants que nous avons eus avec M. Saddier sur le sujet, avis favorable aux deux amendements, le sien et celui de Mme Motin.
L'amendement no 1216 est adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 118
Nombre de suffrages exprimés 106
Majorité absolue 54
Pour l'adoption 106
Contre 0
L'amendement no 5635 est adopté.
L'amendement no 248 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Sur l'article 15, je suis saisie par le groupe La République en marche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
L'Assemblée observe le temps d'attente réglementaire.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 135
Nombre de suffrages exprimés 125
Majorité absolue 63
Pour l'adoption 125
Contre 0
L'article 15, amendé, est adopté.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Il se place dans la continuité de l'article que nous venons d'adopter à une très large majorité – et même à l'unanimité – en demandant que les acheteurs publics s'assurent de la conformité des marchés aux principes de l'achat responsable de leurs fournisseurs et prestataires, sur le modèle de ce que font les entreprises en respectant les normes ISO 26000 et NF X50-135-1.
La parole est à M. Thierry Benoit, pour soutenir l'amendement no 3771 .
Pour permettre à nos collègues d'en comprendre la portée, je vais illustrer l'amendement par un exemple, celui d'une collectivité, comme la ville de Paris, qui lancerait une consultation pour employer un matériau noble comme le granit : si on l'enjoint à prendre en compte la responsabilité sociale de l'entreprise, si les choses sont clairement établies dans le cahier des charges, je vous assure qu'entre un granit de Bretagne, un granit du Tarn et un granit chinois, la collectivité sera plus encouragée à retenir un granit breton ou un granit du Tarn.
Pour remettre les choses dans leur contexte, monsieur Benoit, l'amendement n'évoque pas le critère social ni le critère environnemental, mais l'achat responsable. Les dispositions que nous avons votées à l'article 15 satisfont parfaitement le critère environnemental dont vous parlez dans votre exemple, puisque les émissions de CO2 liées au transport entre la Chine et la France joueront forcément en faveur du produit français, et nous nous en réjouissons.
La proposition que vous faites d'introduire la référence à l'achat responsable dans les grands principes de la commande publique, monsieur Lambert, est en réalité satisfaite par les modifications que nous venons d'y apporter avec l'article 15, en incluant l'obligation de prendre en compte les ODD dans les critères d'attribution et de spécification du marché, ainsi que celle d'inclure les considérations environnementales dans les conditions d'exécution. Je vous en demande donc le retrait ; à défaut, avis défavorable.
Même avis, défavorable. Je suis plutôt favorable à l'introduction du principe particulier double, prévu à l'article 15, qu'est l'introduction du critère environnemental dans les clauses d'attribution et d'exécution de l'ensemble des marchés publics à un horizon de cinq ans, qu'à l'introduction d'un principe général d'achat durable.
L'amendement souligne la responsabilité qui incombe à la collectivité publique de mettre en avant la responsabilité sociale et environnementale des entreprises. Je me permets d'insister car, dans le cas d'un granit chinois – nous avons eu le même débat sur le textile la semaine dernière – , tout le monde imagine bien que ce sont des enfants qui tapent sur les cailloux.
Dans nos régions, et notamment dans l'Union européenne, que ce soit un granit des Vosges, du Tarn ou de Bretagne, ce n'est pas du tout la même chose. Il est donc important de pointer la responsabilité des collectivités quand elles lancent leurs consultations, et encore plus lorsqu'elles attribuent les marchés.
Je m'associe à l'amendement qui vient d'être défendu sur le granit. Nous sommes aux limites de l'absurde : il y a parfois des granits européens, voire français, qui prennent le bateau pour aller se faire tailler en Chine avant d'en revenir ! C'est absolument inadmissible en termes d'émissions de CO2. Si vous voulez lutter contre les excès en la matière, il faut interdire ce type de pratique, d'où l'intérêt de l'amendement.
Je n'ai sans doute pas été assez claire. Vous avez ouvert un débat extrêmement intéressant, monsieur Benoit, mais ce n'est pas du tout celui que contient votre amendement.
L'amendement indique que vous voulez ajouter une référence relative à l'achat responsable à l'article L. 3 du code de la commande publique, selon des modalités fixées par décret en Conseil d'État, ce qui n'a rien à voir. Mais cela n'enlève rien à l'intérêt de votre question – j'en profite d'ailleurs pour signaler que notre collègue Sophie Beaudouin-Hubiere, ici présente, et notre collègue sénatrice Nadège Havet sont chargées d'une mission sur l'achat responsable.
La question est bien évidemment au coeur de nos débats, et nous l'avons montré en votant à l'unanimité l'article 15, ce dont je me réjouis et dont je vous remercie. Mais votre amendement n'ouvre pas du tout le même débat. La notion d'achat responsable peut être justifiée ; toutefois, je vous invite à faire attention. Une décision du Conseil d'État a récemment cassé un marché de la métropole de Nantes qui, en substance, reposait sur la responsabilité sociétale et environnementale de l'entreprise, au motif que ce critère ne vaut pas pour la commande publique s'il n'a pas de lien direct avec l'objet du marché. Je maintiens donc mon avis défavorable.
Nous avons réactivé les SPASER, ces schémas qui doivent inciter les plus grands acheteurs publics nationaux et locaux à acheter plus vert et plus responsable socialement. Or nous manquons de lignes directrices sur le contenu et sur la façon de construire cet outil de planification avec les acteurs économiques et avec l'ensemble des parties prenantes ; d'où la proposition faite à travers ces deux amendements d'en formaliser les modalités de manière à en maximiser les effets.
Monsieur Michels, vous avez raison de souligner que les SPASER, dont nous avons parlé vendredi dernier, sont un outil important. Ces feuilles de route, dont se dotent les collectivités publiques pour effectuer des achats plus responsables et plus durables, contiennent des objectifs qu'elles se fixent pour elles-mêmes. Mais, plutôt que de les établir conjointement avec les chambres consulaires ou avec les acteurs publics, nous voulons mettre à leur disposition, avec le PNAAPD, des modèles et des réseaux pour les aider à prendre des engagements qui tiennent la route tout en étant au niveau de notre ambition. En effet, on a pu voir certains se contenter d'une feuille A4 recto-verso et ne pas aller aussi loin que ce que nous voudrions. Tout est prévu au niveau réglementaire dans le nouveau PNAAPD pour les aider à rédiger des feuilles de route opérationnelles.
En outre, vous proposez, avec l'amendement no 2519 , de rendre certains critères publics tous les deux ans. L'amendement de notre collègue Sylvain Waserman, que nous avons adopté précédemment, a précisé que ces indicateurs seraient publiés de manière annuelle, ce qui va un peu plus loin. Demande de retrait, donc ; à défaut, avis défavorable.
La parole est à M. François-Michel Lambert, pour soutenir l'amendement no 736 .
Le présent amendement vise à accélérer le verdissement de la commande publique de l'État par l'inscription dans la loi d'objectifs contraignants. Une telle mesure est nécessaire, au regard de la faible progression des critères environnementaux dans les marchés publics dans les années 2010. En 2018, seuls 18 % des marchés publics d'un montant supérieur à 90 000 euros contenaient une clause environnementale.
L'État doit fournir un effort exemplaire dans la transition écologique. Comme nous l'avons déjà dit, ses commandes représentent un levier important.
Même si nous avons voté l'article 15 et vous avons donné un délai de cinq ans, il faudra probablement accélérer. La crise du covid-19, notamment, démontre que des transformations profondes sont nécessaires ; elles doivent partir de la commande publique de l'État.
Monsieur Lambert, nous partageons indéniablement votre ambition de faire de l'État un acteur exemplaire en matière d'environnement, notamment au travers de la commande publique. Les différentes stratégies que nous élaborons, notamment grâce au plan national d'action pour l'achat public durable, le démontrent à travers leurs objectifs ambitieux. Je rappelle que 30 % des marchés passés doivent contenir au moins une disposition environnementale et que 60 % des organisations publiques seront amenées à signer la charte pour l'achat public durable. Mme la secrétaire d'État nous a également parlé vendredi de la labellisation, extrêmement importante pour avancer de manière concrète.
Je ne suis pas favorable à l'inscription d'une obligation dans la loi. En revanche, nous devons maintenir notre volonté politique, pour aller plus vite et plus loin avec les acheteurs, tout en donnant le temps à toutes les entreprises, notamment aux TPE et aux PME dans les territoires, pour qu'elles grandissent en même temps que notre ambition. Avis défavorable.
Nous partageons, monsieur Lambert, l'objectif de fixer des indicateurs pour mesurer la réalité de l'action menée en matière d'achats publics.
Votre amendement prévoit un décret qui déterminerait « le champ d'application et la durée de la stratégie », fixerait « des objectifs d'intégration des clauses environnementales », d'autres en matière « d'utilisation des biens composés de manière recyclée », et inclurait des « mesures de sensibilisation et d'accompagnement ». Mais tout cela, c'est le PNAAPD ! C'est le coeur de cet outil réglementaire, consulté, je vous le rappelle, par 99 % des acheteurs publics avant l'établissement d'un appel d'offres – et ce ne sont pas mes chiffres, mais ceux de l'Observatoire économique de la commande publique.
Je partage votre volonté, qui est bonne. D'ailleurs, je m'en suis assurée, juste avant de vous répondre : le chapitre II du nouveau PNAAPD s'intitule « Les objectifs », parce que, dans ce texte, il s'agit bien d'en fixer.
J'irai même plus loin car, comme je l'ai dit vendredi soir, certains objectifs fixés dans les PNAAPD précédents n'ont pas été atteints. Nous nous appuierons donc sur le rapport de la mission confiée à Pierre Pelouzet, mais aussi sur les futures conclusions de la mission parlementaire en cours de Mmes Sophie Beaudouin-Hubiere et Nadège Havet, pour réfléchir à un renforcement de la gouvernance.
Si les objectifs fixés par le PNAAPD ne sont pas respectés, ils ne font pas avancer le schmilblick, j'entends bien. Si je comprends l'objectif de votre amendement, je ne pense pas, toutefois, que nous l'atteindrons à travers un décret, mais plutôt par un resserrement de la gouvernance et par une application effective des mesures inscrites dans le PNAAPD 2021-2025. Pour cette raison uniquement, avis défavorable.
Je vous remercie pour ce travail constructif. À la faveur de vos engagements, madame la secrétaire d'État et de vos explications concernant notre stratégie collective, madame la rapporteure, je choisis de retirer l'amendement.
Toutefois, madame la secrétaire d'État, je me permets de vous avertir, il ne peut y avoir d'échec, cette fois-ci. Je retiens vos mots : il faut « resserrer » la gouvernance pour atteindre les objectifs.
Le PNAAPD est soumis à consultation publique – c'est une nouveauté. Or, vous, parlementaires, êtes des citoyens à part entière et avant tout. Puisque je connais l'inspiration qui vous anime, sur l'ensemble des bancs, n'hésitez à faire remonter vos propositions.
En tout cas, comptez sur ma volonté de renforcer la gouvernance. Je ferai en sorte que l'application des objectifs fasse l'objet d'un suivi, avec des rendez-vous d'étape, afin de nous assurer qu'ils soient atteints : ils ne seront pas là pour faire joli, comptez sur moi.
L'amendement no 736 est retiré.
Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 37 , 252 , 458 , 901 , 1161 , 2142 , 2192 , 2202 , 2590 , 2647 , 2670 , 5185 , 5901 , 2141 , 5676 rectifié et 7195 rectifié , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 37 , 252 , 458 , 901 , 1161 , 2142 , 2192 , 2202 , 2590 , 2647 , 2670 , 5185 et 5901 sont identiques, de même que les amendements nos 5676 rectifié et 7195 rectifié .
La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l'amendement no 37 .
Il vise à permettre à l'acheteur public de « se procurer en direct, sans formalité, publicité ni mise en concurrence préalables, des produits alimentaires répondant à un besoin et présentant une origine unique et territorialisée », dans la limite d'un montant annuel de 80 000 euros.
En effet, la crise sanitaire a démontré la nécessité, pour les acheteurs publics, de disposer de réelles marges de manoeuvre en la matière, pour être acteurs de la solidarité nationale envers les filières agricoles françaises de production. Le seuil des marchés visés ici a récemment été relevé à 40 000 euros, puis a été doublé par le Gouvernement, mais seulement pour certaines catégories de produits agricoles et sous certaines conditions, afin de faciliter l'achat de produits ayant fait l'objet de stockage pendant la crise sanitaire. Je vous propose ici d'assouplir les conditions d'élévation du seuil à 80 000 euros pour l'approvisionnement en produits frais, présentant une origine unique et territorialisés.
Pour compléter les propos de M. Vincent Descoeur, les produits frais présentent un intérêt en matière environnementale et ces achats, en circuit court notamment, bénéficient à nos territoires et à nos cantines. Je vous remercie d'étudier ces amendements identiques avec toute la sagesse qui vous caractérise.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.
Cet amendement, qui vise à relever le seuil en dessous duquel les conditions d'achat des produits frais et territorialisés sont assouplies, répond à un double objectif : celui de permettre le fonctionnement des écosystèmes locaux – c'est très important pour la qualité des assiettes proposées dans la restauration publique collective ; celui de réduire l'impact carbone lié aux transports – puisque, si l'on achète localement, on réduit cet impact. La période récente a d'ailleurs démontré que les produits locaux apportent des réponses tout à fait adaptées aux demandes des acheteurs publics.
De plus, même si le seuil proposé, 80 000 euros, semble élevé, la mesure concernerait des structures de petite taille, où la production est loin d'être industrielle et qui sont en difficulté à cause des contraintes auxquelles elles sont soumises.
Sur les amendements identiques nos 5676 rectifié et 7195 rectifié , je suis saisie par le groupe La République en marche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Les amendements nos 2202 de Mme Lise Magnier, 2590 de M. Thibault Bazin, 2647 de M. Bernard Perrut, 2670 de Mme Marie-Christine Dalloz sont défendus.
La parole est à M. Jean-Pierre Vigier, pour soutenir l'amendement no 5185 .
Je rejoins l'argument de mes collègues : une telle mesure permettrait d'aider nos petits producteurs, qui en ont bien besoin en période de crise. Achetons localement, surtout en cette période.
La parole est à M. Rémy Rebeyrotte, pour soutenir l'amendement no 5901 .
La mesure proposée à travers ces amendements est l'une des conditions pour faire vivre, dans les territoires, les circuits courts qu'il faut faciliter et encourager.
Les amendements nos 2141 de M. Stéphane Travert et 5676 rectifié de Mme Cendra Motin, rapporteure, sont défendus.
La parole est à M. Stéphane Travert, pour soutenir l'amendement no 7195 rectifié .
Mes deux amendements précédents, au sein de cette discussion commune, résument l'esprit de celui-ci, que je vous présente au nom des députés du groupe de La République en marche.
Cet amendement vise à introduire, pour une durée limitée, la possibilité, pour les acheteurs publics, de conclure des marchés de fourniture de produits agricoles et de denrées alimentaires sans publicité ni mise en concurrence, dans la limite de 100 000 euros hors taxes. Cette mesure présente un double objectif d'intérêt général.
Tout d'abord, elle permettra la reprise du secteur alimentaire et en particulier d'exploitations agricoles, et d'entreprises agroalimentaires de taille modérée, grandement affectées par la crise et la fermeture des débouchés, avec la fermeture de la restauration privée et collective, des marchés événementiels, festifs et touristiques ainsi que les perturbations rencontrées à l'export comme dans les marchés de proximité. Nous savons tous que des stocks se sont formés à cette occasion ; la situation financière des exploitations agricoles comme des entreprises concernées est fragile.
Par ailleurs, cet amendement permettrait aux gestionnaires des marchés publics de tester d'autres types d'approvisionnements que ceux habituellement pratiqués.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
Nous avons tous à coeur de soutenir notre agriculture et les exploitations…
… et de faire en sorte que les enfants, dans les cantines notamment, mais aussi tous ceux…
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Il est difficile de s'exprimer quand tout le monde parle en même temps…
S'il vous plaît, mes chers collègues, seule Mme la rapporteure a la parole.
Je disais donc que nous avons tous à coeur de soutenir notre agriculture et de faire en sorte que nos enfants, notamment, aient les meilleurs produits possible dans leurs assiettes. Nous menons fermement ce combat et en avons longuement débattu au titre V de ce projet de loi, parce que c'est un enjeu majeur, auquel nous sommes tous très attachés, de santé publique et de souveraineté nationale.
Je ne pourrai émettre un avis favorable sur certains des amendements en discussion, car, comme vous le savez, il est interdit d'introduire un critère territorial dans la commande publique.
Ne vous laissez pas impressionner, madame la rapporteure.
De même, nous ne pouvons pérenniser des seuils trop élevés au regard de nos engagements européens – auxquels nous tenons, je le rappelle – , pour les commandes sans publicité. Une dérogation est pour l'instant possible ; il est utile et nécessaire de la prolonger. J'appuie donc l'amendement no 7195 rectifié , identique au mien et défendu par M. Travert, parce que nous sommes loin d'être sortis de la crise.
C'est un geste d'ouverture : la rapporteure pour le titre V de ce texte, Célia de Lavergne, prévoit de renforcer nettement les plans alimentaires territoriaux. Ceux-ci sont vraiment importants pour les élus locaux, pour les producteurs locaux et pour nos agriculteurs, parce qu'ils permettent de les associer, dans le cadre de commandes publiques et de tout un écosystème local. C'est sur ces dispositifs que nous devons travailler.
Comme Célia de Lavergne l'a indiqué à plusieurs occasions à propos du titre V, c'est la qualité du contenu de nos assiettes, notamment de celles de nos enfants, qui compte.
Avis favorable, par définition, à mon amendement no 5676 rectifié et à l'amendement no 7195 rectifié , qui lui est identique. J'invite les auteurs des autres amendements à s'y rallier ; à défaut, avis défavorable sur tous ces amendements.
Notre position est très simple : tout d'abord, nous vous remercions d'avoir été nombreux, avec Stéphane Travert notamment, à soulever cette question en commission. L'avis est très favorable aux amendements nos 5676 rectifié et 7195 rectifié . Stéphane Travert l'a rappelé, l'objectif est de lutter contre le gaspillage alimentaire et d'assurer un écoulement rapide des stocks.
Notre position, sur cette question de droit, a ainsi évolué entre l'examen en commission et l'examen en séance, pour autoriser les acheteurs publics à acquérir sans publicité ni mise en concurrence les denrées alimentaires stockées jusqu'à 100 000 euros. Ce montant est même légèrement supérieur à celui envisagé en commission.
J'aurais souhaité un avis tout aussi favorable aux amendements déposés par les députés Les Républicains. L'argument avancé par Mme la rapporteure sur les règles européennes pose le sujet. En effet, nous respectons la libre concurrence, c'est-à-dire la possibilité d'importer les biens alimentaires. Le dilemme écologique est là ! Nous ne parviendrons jamais à réduire les émissions de CO2 si nous persistons, en raison du prix facial, à importer de la viande de Pologne ou de tout autre pays de l'Union européenne plutôt que de l'acheter sur place.
En effet, le coût facial de ces denrées importées est faux puisqu'il n'intègre pas le coût écologique et les externalités négatives d'un modèle de consommation dépendant de l'étranger.
Ce système – importer des fraises de l'autre bout de l'Europe et émettre du CO2 pour gagner quelques centimes d'euro de marge, alors que notre pays en produit – paraîtra abscons à nos successeurs. Au lieu de l'invoquer et de le perpétuer, je vous invite à adopter les amendements déposés par les collègues de mon groupe, car ils s'attaquent au coeur du sujet. C'est de cela que nous devons débattre ! Tant que nous refuserons de trancher le noeud gordien, nous danserons autour de lui et maintiendrons un modèle qui émet beaucoup de CO2.
Le groupe La France insoumise s'oppose aux amendements nos 5676 rectifié et 7195 rectifié , qui lèvent les règles des marchés publics et ont reçu le soutien de la secrétaire d'État, laquelle a même remercié je ne sais qui.
Ce n'est pas le respect qui vous étouffe !
C'est hideux, honteux !
Depuis des heures, nous débattons de règles figurant dans le code des marchés publics pour finir par les écarter au motif de circonstances exceptionnelles !
La dernière fois que nous avons suivi cette logique, c'était lors de l'examen du texte devenu la loi du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l'action publique : …
Lisez donc les amendements avec vos petits yeux !
… vous souvenez-vous du sort réservé au non-respect du code des marchés publics ? La censure du Conseil constitutionnel !
Surréaliste !
C'est précisément dans les moments de crise qu'il faut respecter les règles, afin d'éviter que ce soient toujours les mêmes qui remportent le gros lot.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
On aura tout entendu, un vrai best of ! Mais c'est ridicule et je ne répondrai pas.
Après l'intervention de M. Bernalicis, la qualité des amendements ne fait maintenant plus aucun doute. Je vais me ranger aux deux amendements de Mme la rapporteure et de M. Travert : la France insoumise est à la fois pour et contre les circuits courts car elle a toujours tendance à être pour ce qui est contre et contre ce qui est pour.
Ces amendements s'inscrivent dans le contexte que nous vivons actuellement : il ne vous a pas échappé que les restaurants sont toujours fermés et qu'il y a donc un problème de débouchés pour les denrées alimentaires.
Exclamations continues sur les bancs du groupe LR.
Exclamations sur les bancs du groupe FI.
La restauration hors domicile, qui est un débouché important pour les agriculteurs, est à l'arrêt. C'est dans ce contexte que s'inscrivent ces amendements.
Monsieur Aubert, rassurez-vous, l'article 15, que nous avons adopté, répond parfaitement à votre préoccupation. En ajoutant un critère environnemental au critère économique, nous nous sommes libérés, comme je l'ai expliqué en commission, de la dictature du prix. C'est désormais le coût qui comptera. C'est bien ce que vous dites : la fraise espagnole, dont le CO2-score est bien plus mauvais, ne sera plus bien notée dans les appels d'offres, si bien que les élus et les acheteurs publics pourront penser différemment et prendre en compte, comme vous y appelez, les externalités négatives. Votre demande est donc parfaitement satisfaite par l'article 15.
… que la simple introduction d'un critère environnemental suffira. Combien coûte un kilogramme de fraises ?
Ce n'est pas de saison, mon petit monsieur !
Bonne question, n'est-ce pas ? Un kilogramme de fraises d'Espagne coûte entre 1,80 et 1,90 euro, quand un kilogramme de fraises françaises du Vaucluse coûte entre 7 et 9 euros.
Penser que la seule insertion d'un critère environnemental dans les marchés publics suffira à compense une telle différence de prix est illusoire.
Vous êtes fantastique !
Voilà pourquoi la proposition de mes collègues d'effectuer un choix politique et de ne pas se contenter d'un choix économique est bonne. En effet, jouer sur le code des marchés publics en introduisant des variables est un choix économique dont la portée est insuffisante. Je suis beaucoup plus clair : je veux la fraise française, je choisis la fraise française, j'assume la fraise française.
Il est épuisant !
C'est une différence de méthode fondée sur la volonté de faire de la politique. Ce n'est pas servir l'Europe que de la rendre responsable de nos absences de choix.
Il y a ceux qui parlent et ceux qui font !
L'intervention de Mme la rapporteure nous renvoie à ce que j'avais dit sur l'éco-score : cet indicateur sera établi à la sortie du site de production et non sur le lieu de vente. Il n'est donc pas impossible qu'il soit plus favorable aux fraises espagnoles qu'à celles de Carpentras et du Sud de la France. Le risque de distorsions et de choix erronés existe.
Madame la rapporteure, vous venez de démontrer la justesse des propos que j'ai tenus lors de l'examen des articles précédents : l'éco-score risque de défavoriser notre activité économique, notamment celle de l'industrie agroalimentaire.
La parole est à M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général de la commission spéciale.
Il est assez incroyable de nous reprocher de ne pas avoir modifié les seuils ! C'est justement parce que nous voulons simplifier la vie des entreprises et favoriser l'activité des plus petites d'entre elles et l'économie locale que nous avons, le 1er janvier 2020, augmenté le seuil de dispense de procédure pour les appels d'offres de 25 000 à 40 000 euros. Cela, c'est nous qui l'avons fait, et c'est nous également qui, compte tenu de la crise du covid, avons relevé le seuil de manière exceptionnelle, pour le porter de 40 000 à 70 000 euros. C'est encore nous qui allons maintenir ce seuil pendant une certaine période. Ne nous faites donc pas ce reproche car il est totalement infondé !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
L'amendement no 2141 n'est pas adopté.
Je mets aux voix les amendements identiques nos 5676 rectifié et 7195 rectifié .
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 131
Nombre de suffrages exprimés 115
Majorité absolue 58
Pour l'adoption 102
Contre 13
Les amendements identiques nos 5676 rectifié et 7195 rectifié sont adoptés.
Le numérique est de plus en plus présent et nécessaire dans le déploiement des politiques publiques. C'est un outil formidable au service de nos territoires mais, malheureusement, tous les acteurs de ce marché ne sont pas vertueux en matière environnementale.
Nous avons déjà évoqué ce problème à plusieurs reprises au cours de l'examen de ce projet de loi et je vous propose de faire preuve de cohérence en faisant de l'impact environnemental des solutions numériques un critère d'évaluation des offres de marché public.
Cet amendement est issu d'une proposition de loi sénatoriale et d'un travail mené avec l'association The Shift Project.
L'amendement no 7246 de M. Dominique Potier est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Il est défavorable car les acheteurs pourront, grâce aux dispositions que nous avons votées, prendre en compte les impacts environnementaux de tous les types de marché et de tout ce qui sera utilisé. Il n'est donc pas utile que la loi aille plus loin.
Ces amendements sont satisfaits : j'en demande le retrait, à défaut, l'avis sera défavorable.
Mme la rapporteure et Mme la secrétaire d'État ont rappelé leur volonté de traduire dans la loi la proposition de la Convention citoyenne pour le climat visant à introduire un critère environnemental dans l'achat public, voire d'aller plus loin.
Cet amendement, Thierry Benoit le précisera pour le granit de Bretagne, vise à éviter le risque d'avoir à choisir, dans les achats publics, des matériaux de construction moins chers dont le prix n'intègre pas le coût environnemental lié à leur importation.
Nous constatons trop souvent que de très belles places, à mon goût trop minérales, sont construites avec des pierres et du granit venus de l'autre bout du monde. Ce n'est plus acceptable !
La parole est à M. Thierry Benoit, pour soutenir l'amendement no 3774 .
Notre proposition rejoint le débat alimenté – c'est le cas de le dire – par Julien Aubert et ses collègues du groupe Les Républicains, puisqu'elle porte sur les externalités environnementales et le transport.
Les producteurs de fraises français et européens, comme les industriels ou les artisans qui extraient du granit, sont fatigués de se faire damer le pion par des entreprises de l'autre bout du monde dont l'avantage concurrentiel repose sur des distorsions sociales – objet de l'amendement sur la RSE, la responsabilité sociétale des entreprises, inspiré par l'UNICEM, l'Union nationale des industries de carrières et matériaux de construction – et environnementales liées au transport qu'a évoquées Marc Le Fur et qui sont l'objet de cet amendement.
Depuis quinze ans, les granitiers bretons me disent : « Monsieur le député, vous et vos collègues qui êtes sensibles à la question environnementale, pourquoi n'intégrez-vous pas dans les lois que vous votez les aspects environnementaux liés au transport des marchandises ? »
Ce projet de loi est l'occasion, pour moi en tant que député breton, de relayer l'attente des granitiers bretons et les propositions de l'UNICEM ; mais bien d'autres députés pourraient le faire pour d'autres matériaux. La question est celle de l'équité ; elle vaut pour la dimension européenne comme pour la dimension internationale. Je pense en particulier à l'Asie, parce que nous en avons beaucoup parlé au sujet du textile, mais elle est aussi concernée par la production de granit.
Cela fait rire Mme la rapporteure…
Madame la secrétaire d'État, tout à l'heure, alors que je défendais un amendement proposé par l'UNICEM, vous avez fait ce signe
M. Thierry Benoit fait tourner sa main près de la tempe.
Je n'ai pas bien compris ce qu'il signifiait : est-ce que l'UNICEM proposait un amendement insensé ? L'amendement était-il mal défendu ? Peut-être me répondrez-vous cette fois-ci.
Vous me sommez de répondre ? C'est nouveau, ça !
Monsieur Benoit, je vous rassure : bien loin de nous l'idée de critiquer qui que ce soit, et certainement pas des gens impliqués. Il arrive parfois que, sur les bancs des commissions et du Gouvernement, nous parlions d'autre chose : cela peut arriver… Ne vous inquiétez pas, ce signe ne vous était pas destiné. Je tiens à saluer votre engagement aux côtés de l'UNICEM, que je connais bien moi aussi ; je pourrais parler de l'IGP – indication géographique protégée – « pierre de Villebois », chez moi.
Le transport est un sujet dont on parle souvent. Et justement, que permet l'article 15 ? Plutôt que de simplement dire que l'on veut acheter français, ou selon des critères environnementaux dès le lancement de l'offre, nous avons souhaité que soient pris en compte, dans les spécifications techniques, les ODD selon leurs trois dimensions – environnementale, économique, mais aussi sociétale. Les pierres chinoises, dites-vous, sont taillées par des enfants alors que les nôtres ne le sont pas : sur ce sujet, les critères fixés par les ODD peuvent aussi jouer dans les spécifications techniques. L'exécution du contrat concerne également la façon dont les matières sont transportées jusqu'à nous. Vous avez raison de le dire : il faut y faire attention.
Monsieur François-Michel Lambert, vous parliez tout à l'heure de l'éco-score ; bien sûr, l'éco-score concerne la production, mais en l'étendant à l'exécution du contrat dans les commandes publiques, les acheteurs pourront intégrer des critères liés au transport, ce qui aura un impact très important sur la commande publique. Le transport est, de façon directe, un critère environnemental d'exécution. Nous venons donc de donner aux acheteurs publics les bons outils pour faire ce que vous nous demandez. Ces amendements sont satisfaits par l'article 15, que nous venons d'adopter à l'unanimité. Aussi je vous propose de les retirer ; à défaut, avis défavorable.
J'ajouterai aux éléments précisés par la rapporteure que l'esprit de l'article 15 consiste à fixer dans la loi des obligations aux acheteurs, tout en laissant ces derniers déterminer la façon de les remplir. C'est une démarche de responsabilisation et non de contrainte. Pour ces raisons, ainsi que pour celles détaillées par Cendra Motin à l'instant, j'émets un avis défavorable.
Voyez ma bonne foi et ma bonne volonté : je retire l'amendement no 3774 et j'expliquerai à celles et ceux qui me l'ont proposé que l'article 15 et le projet de loi que nous sommes susceptibles d'adopter règlent la question des externalités environnementales
Approbations sur les bancs des commissions et du gouvernement
L'amendement no 3774 est retiré.
Merci pour ces précisions. Madame la rapporteure, vous venez donc de confirmer ce que j'ai dit : l'acheteur public pourra introduire la question du transport dans ses critères d'achat, mais le citoyen lambda sera face à un éco-score qui ne l'intégrera pas. Il y a un bug, qui ne vous concerne pas, madame la rapporteure, puisque vous ne défendiez pas l'article correspondant. Peut-être le rapporteur général pourra-t-il l'expliquer, mais cela n'est pas le sujet. Il faudra revenir sur l'éco-score, parce que tel qu'il est présenté, sans intégrer le transport, le citoyen lambda achètera des produits qu'il croira moins chargés en CO2.
Compte tenu de nos relations et de nos échanges sur ces articles, je retire l'amendement no 1046 . Nous examinerons cette question plus profondément et si nécessaire, nous apporterons des compléments par le biais de nos collègues sénateurs. Je vous remercie pour les présentations relatives à l'article 15.
L'amendement no 1046 est retiré.
Les amendements nos 1408 de M. Bertrand Pancher et 4559 de M. Jean-Marie Sermier sont défendus.
La parole est à M. Yves Hemedinger, pour soutenir l'amendement no 5050 .
Il vise à faciliter les achats durables en restauration collective par le biais des marchés publics. Achetons local, auprès de petites exploitations bien souvent exclues de fait des marchés publics – c'est d'ailleurs ça, le problème. C'est un bon signal, tant sur le plan d'une écologie de bon sens que pour le soutien aux importantes filiales agricoles locales. Alors que l'on parle de réduire l'empreinte carbone – c'est l'objectif de ce texte – , il ne serait pas logique de ne pas retenir cet amendement, qui est bien au coeur du sujet. Évitons de faire manger à nos enfants des fraises ou des quetsches – pour rester local – , même bio, au mois de janvier. Je vous propose de tester une expérimentation, qui permettrait de déroger au droit européen de la concurrence, en retenant le principe de la discrimination d'origine pour les denrées alimentaires.
Pour les raisons que nous avons déjà longuement évoquées, avis défavorable.
L'amendement no 5050 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je suis saisie de quatre amendements, nos 4483 , 4929 , 5543 et 5594 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements identiques nos 4483 de M. Mohamed Laqhila et 4929 de M. Benoit Simian sont défendus.
Les amendements identiques nos 5543 de M. Stéphane Viry et 5594 de M. Didier Baichère sont également défendus.
La parole est à Mme Danielle Brulebois, pour soutenir le sous-amendement no 7338 à l'amendement no 5543 .
Il vise à ajouter le mot « éligible », afin d'intégrer l'ensemble des structures qui peuvent bénéficier de l'agrément ESUS – entreprise solidaire d'utilité sociale. Certaines sont agréées, mais d'autres sont éligibles : l'agrément n'est pas toujours obtenu. Le sous-amendement vise à lever cette limitation, rencontrée dans la pratique.
Madame Brulebois, hélas votre sous-amendement ne fonctionne pas d'un point de vue légistique ; je ne puis lui donner un avis favorable pour cette raison, mais aussi pour des raisons de fond. Nous avons beaucoup élargi les possibilités offertes aux entreprises pour se déclarer comme ESUS ; la procédure est désormais relativement bien comprise. Il est assez facile d'intégrer ce dispositif et il n'est donc pas nécessaire d'inclure les entreprises qui y sont éligibles.
Avis défavorable pour les amendements ; nous en avons longuement parlé vendredi soir et je ne reviendrai pas sur les problèmes, notamment juridiques, soulevés à cette occasion.
Avis défavorable sur le sous-amendement. S'agissant des amendements, je me positionne dans la droite ligne de ce que j'ai dit vendredi soir en tant que secrétaire d'État à l'économie sociale, solidaire et responsable, économie à laquelle appartiennent les ESUS, avec lesquelles je travaille ardemment. Les ESUS sont des PME ; en tant que telles, elles ont la possibilité de participer à la commande publique. Le droit n'a pas bougé depuis vendredi soir – c'est un avantage ; le droit européen et la jurisprudence constitutionnelle dont nous disposons à ce jour interdisent de favoriser une catégorie de structure. Avis défavorable.
Le sous-amendement no 7338 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Mathilde Panot, pour soutenir l'amendement no 6716 .
Il me tient à coeur, parce qu'il vise à utiliser la commande publique pour veiller à l'emploi de matériaux tels que le bois, la terre et la paille, c'est-à-dire à développer l'écoconstruction. Il y a une histoire que j'aime bien raconter pour expliquer à quoi servent ces matériaux. La ville de Shibam, au Yémen, est appelée la Manhattan du désert ; ses immeubles ont été construits en terre crue. À Dubaï, les immeubles ont été construits en béton et en verre. Le point commun à ces deux villes, c'est qu'il y fait régulièrement jusqu'à 45 degrés l'été. À Shibam, on n'a pas besoin d'utiliser de climatiseurs, alors qu'à Dubaï, on y est obligé, à tel point qu'en trente ans, la température extérieure de la ville a augmenté de six degrés ; c'est considérable.
En France, 70 % des déchets sont produits par le secteur de la construction, avec un impact carbone très fort : l'impact carbone des matériaux de construction et la vie des bâtiments en exploitation représentent 40 % du bilan carbone. Le ciment est responsable à lui seul de 6,9 % du bilan carbone mondial. Il nous faut impérativement faire bifurquer nos modes de production, en concertation avec les travailleurs du bâtiment. Des études menées par une centaine d'experts ont montré qu'avec une bifurcation des modes de construction, on pourrait économiser 90 millions de tonnes équivalent carbone en dix ans, c'est-à-dire diviser par deux le bilan carbone de la construction et par cinq celui de la France.
Il faut impérativement privilégier les matériaux crus plutôt que cuits et ceux qui stockent temporairement du CO2, comme la paille ou le bois. Nous avons déjà 5 000 bâtiments en paille dans notre pays : des crèches, des groupes scolaires, des collèges, des maisons de retraite. Il faut nécessairement inscrire cela dans la loi pour aider à effectuer la bifurcation en matière d'éco-construction.
Mme Caroline Fiat applaudit.
Je crains de décevoir Mme Fiat. Non pas que je ne partage pas ce point : les matériaux de construction biosourcés sont très précieux. S'agissant des achats publics en matière de construction, nous avons déjà procédé à une modification de l'article L. 228-4 du code de l'environnement, dans la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (AGEC). Nous y avons précisé qu'on pouvait avoir recours à des matériaux de réemploi – parce que c'est important aussi de réemployer des matériaux – ou issus des ressources renouvelables. Ces termes de « ressources renouvelables » recouvrent ce que vous proposez. C'est pourquoi je vous demande un retrait ; à défaut, avis défavorable.
J'aurai le même avis que celui exprimé par la rapporteure. S'il est indispensable, comme vous l'avez fait, d'imposer l'intégration d'un critère environnemental dans les clauses d'attribution et d'exécution de l'ensemble des marchés publics d'ici à 2025, il est important de laisser aux acheteurs publics la liberté de choix, comme pour les bâtiments que vous avez cités, madame Panot, tout en considérant qu'ils auront l'obligation d'intégrer ce critère dans les cinq ans à venir. Avis défavorable, donc.
Je serai brève, puisque nous sommes en temps législatif programmé – que nous adorons toutes et tous. Votre réponse, consistant à dire qu'il faut laisser le choix, ne tient pas, madame la secrétaire d'État. Elle illustre tout ce qui nous oppose quant au fait de savoir qui doit impulser la bifurcation écologique et solidaire.
Tous les précédents montrent que si vous laissez le choix, il y aura du moins-disant social et environnemental. Sans un levier puissant, comme la commande publique, nous n'imposerons pas la bifurcation de la formation. Malheureusement, nous prenons du retard à chaque étape, parce que nous laissons le libre marché décider.
Mme Caroline Fiat applaudit.
Il ne s'agit pas ici du libre choix du marché, que vous aimez tant à dénoncer, mais de la liberté des acheteurs publics. Si c'est ce que vous voulez entendre, sachez que j'assume volontiers de dire que tout n'a pas vocation à être écrit dans la loi.
Mme Mathilde Panot proteste
Laissez-moi terminer, je serai brève, peut-être même aussi incisive que vous – j'y travaille : la liste exhaustive des matériaux n'a pas vocation à être gravée dans le marbre de la loi. J'en suis désolée.
Je ne prétends pas trouver un consensus, mais je soutiens Mme Panot concernant l'importance de l'éco-construction, tout en respectant les entreprises et l'industrie. On observe des signes encourageants, néanmoins nous sommes toujours à la peine. L'exemple du ciment recyclé le montre : certaines entreprises proposent de très belles innovations, mais nous n'avons pas su les encourager par un petit effort législatif, notamment dans la loi AGEC. On peut trouver un équilibre entre la liberté, des entreprises notamment, et le soutien aux entreprises responsables.
L'amendement no 6716 n'est pas adopté.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix-huit heures cinquante, est reprise à dix-huit heures cinquante-cinq.
La séance est reprise.
Sur les amendements nos 158 et identiques, je suis saisie par le groupe Les Républicains d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à Mme Sophie Mette, pour soutenir les amendements nos 7020 , 7013 et 7012 , qui peuvent faire l'objet d'une présentation groupée.
Je poursuis le débat sur les matériaux biosourcés. Ils stockent le carbone et sont au coeur de la performance environnementale des bâtiments, prônée par la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ÉLAN).
Il faut montrer l'exemple dans les commandes publiques en adoptant des pratiques vertueuses. Le code de l'environnement prévoit l'usage de matériaux de construction biosourcés dans les bâtiments publics ; il convient désormais d'inscrire dans la loi des objectifs chiffrés. C'est ce que je propose avec ces amendements.
Vous proposez d'intégrer des objectifs chiffrés dans la loi. Habituellement, on les fait plutôt figurer dans les décrets, afin que les ministres puissent les faire évoluer.
Dans le cas qui nous occupe, ce n'est même pas nécessaire. D'abord, la future réglementation environnementale 2020 (RE2020), en cours de discussion, intègre massivement des matériaux biosourcés, en particulier le bois. Ensuite, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) a publié en 2019 le guide Des Produits biosourcés durables pour les acheteurs publics et privés, et la Fédération française du bâtiment (FFB) propose le sien : Les Matériaux biosourcés dans le bâtiment. La puissance publique comme les acteurs de la construction partagent votre objectif : il n'est donc pas nécessaire de l'inscrire dans la loi. Je vous propose de retirer vos amendements ; à défaut, l'avis sera défavorable.
Défavorable. Nous approuvons votre objectif de réduire l'empreinte environnementale des bâtiments. Les matériaux biosourcés, comme la paille, le bois ou le chanvre, y concourent : ils permettent de stocker le carbone tout en favorisant le développement de filières d'emplois locales.
Toutefois, ces amendements sont déjà satisfaits en droit. La loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte a confirmé l'intérêt d'utiliser les matériaux biosourcés dans le secteur du bâtiment ; l'article 144 prévoit que « [la] commande publique tient compte notamment de la performance environnementale des produits, en particulier de leur caractère biosourcé. » La loi ÉLAN, portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, a renforcé l'intérêt pour les matériaux issus de ressources renouvelables. Avec la RE2020, que Mme la rapporteure a mentionnée, la construction neuve prendra en compte l'impact environnemental des bâtiments et des modes de construction, afin de privilégier ceux qui émettent peu de gaz à effet de serre.
Ainsi, l'application de la politique d'incitation est en plein développement ; passer à une obligation qui s'appliquerait de facto à tous les marchés de construction ou de rénovation peut présenter des risques que l'on ne peut pas négliger. Les matériaux biosourcés nécessitent un savoir-faire et le respect de conditions d'utilisation strictes, à défaut, on risque de fragiliser les constructions. La paille est sensible à l'humidité, qui peut entraîner des moisissures et autres sinistres ; le béton de chanvre nécessite quant à lui une conception attentive, une organisation spécifique du chantier. Ces caractéristiques techniques impliquent qu'une semblable mesure pourrait mettre en péril la durabilité des constructions. Nous ne saurions rendre obligatoire l'utilisation des matériaux biosourcés dans toutes les constructions, même si, dans ce texte comme dans ceux précédemment mentionnés, nous encourageons leur usage dans les marchés de construction et de rénovation.
Je maintiens les amendements : les produits biosourcés ont besoin d'un coup de pouce.
Mme Delphine Batho applaudit.
L'un de mes collègues disait que leur utilisation ne démarre pas. Les professionnels savent s'en servir ; il faut les soutenir.
Il s'agit d'un débat intéressant. La Fédération du bâtiment m'a alerté sur l'impossibilité de basculer du jour au lendemain dans un usage trop massif des matériaux biosourcés, eu égard au coût de construction, au métier et à la formation. En même temps, on admet que la seule incitation risque de faire durer la transition plusieurs décennies.
Le Gouvernement dispose-t-il d'éléments pour évaluer ce qui serait faisable ? Les amendements visent respectivement à rendre obligatoire 75, 50 ou 25 % de matériaux biosourcés : ils n'impliquent pas la même montée en puissance ; dans le domaine économique, cela va d'un choc mortel sur le crâne à un bobo sur le menton.
Plutôt que d'avoir une discussion assez théorique pour savoir qui est le plus volontariste sur les matériaux biosourcés, je préfère que nous débattions sur ce qu'il serait possible de faire à l'horizon de dix ans, pour éviter une explosion du coût et pour remédier au problème du manque de formation. Quel pourcentage serait accessible pour la France, compte tenu des contraintes économiques et des contraintes des acteurs du bâtiment ?
Mieux vaudrait, par exemple, se fixer un objectif de 10 % des rénovations et des constructions utilisant des matériaux biosourcés, et l'atteindre, plutôt que de se faire plaisir en adoptant des amendements qui portent ce pourcentage à un objectif inatteignable de 50 % ou de 75 %. Les mêmes comportements ont rythmé le débat sur l'énergie, lors du précédent mandat, certains députés s'enthousiasmant à imaginer un pays sans parc nucléaire ; quelques années plus tard, soit ils étaient devenus ministres, soit ils étaient devenus beaucoup plus réalistes sur la capacité de montée en charge…
Je suis à l'origine, grâce à l'appui de beaucoup de parlementaires de tous les groupes, de l'article de la loi ÉLAN qui a été évoqué, relatif au changement du code de la construction et de l'habitation ainsi que du code de l'environnement, en vue de favoriser le biosourcé et, ce faisant, de réduire les émissions de gaz à effet de serre.
La RE2020, on l'a dit, fixe une trajectoire assez claire, s'agissant notamment des maisons individuelles et du logement. Pour que la filière du biosourcé puisse s'adapter, il lui faut de la visibilité. Or la fixation d'objectifs précis risque d'être contreproductive car, si le temps d'adaptation laissé à la filière est trop court, nous pourrions être confrontés à la situation paradoxale de devoir importer des matériaux biosourcés, à l'inverse des objectifs recherchés. Je préfère conserver la trajectoire que nous avons définie aujourd'hui : elle est appuyée par le Gouvernement, notamment à travers la RE2020.
J'insiste, au contraire, sur l'importance d'aller dans le sens des objectifs que propose Mme Mette, qu'ils soient de 25 %, de 50 % ou de 75 %. Il est essentiel d'affirmer une trajectoire, comme vient de le dire notre collègue Thiébaut. Je m'inscris en faux sur le fait que le marché ne serait pas possible.
Dans ma circonscription, un CFA – centre de formation des apprentis – propose des formations sur les matériaux biosourcés. Cependant la commande est faible, car il n'y a pas d'artisans qualifiés dans ce domaine. Pour sortir de ce cercle vicieux, il faut un objectif clair, permettant de former les personnels adaptés.
Je vous livre une anecdote : ma fille, qui réside dans les Cévennes dans une maison entièrement construite en matériaux biosourcés, vient de m'envoyer à l'instant un texto, qualifiant sa maison de « dingue », puisqu'il y fait chaud à l'intérieur lorsqu'il fait froid à l'extérieur, et vice-versa, sans qu'il y ait besoin ni de climatisation ni de chauffage.
La filière du chanvre fonctionne remarquablement bien : des maisons sont construites avec des parpaings en chanvre, avec une réglementation spécifique, qui préconise de telles constructions permettant, en sus, de sauver toute une filière agricole. Il faut appuyer beaucoup plus fortement l'usage des matériaux biosourcés, …
Je n'ai jamais dit le contraire !
La réglementation environnementale 2020 ne passe pas nécessairement par la loi : elle s'appliquera à tous. Par exemple, à titre personnel, le fait qu'il n'y ait plus une maison individuelle ne disposant pas d'une ossature en bois à partir de 2030 m'interpelle…
Ce qui m'inquiète n'est pas le savoir-faire des artisans, car, vous avez raison, madame Chapelier, la formation professionnelle a été repensée de façon à s'adapter aux besoins du marché. Nous évoquerons d'ailleurs, dans la suite de la discussion, les OPCO, les opérateurs de compétences, qui, au sein de la filière de la construction, sont plus que prêts puisqu'ils sont déjà en train de former des jeunes – et des moins jeunes, d'ailleurs, beaucoup de personnes ayant besoin de se former sur ces nouveaux matériaux.
La RE2020 s'appliquera avec une temporalité qui permettra aux industriels de s'adapter. Elle a notamment effrayé les cimentiers, qui travaillent à fabriquer du béton de chanvre, consistant en l'alliage de matériaux biosourcés avec du béton de réemploi : il leur faut juste un peu de temps pour y parvenir. C'est la raison pour laquelle la RE2020 prévoit des objectifs échelonnés dans le temps, de façon à toucher l'intégralité du secteur du bâtiment, même s'il ne relève pas de la commande publique, y compris les maisons individuelles, les immeubles d'habitation, le secteur tertiaire. Bref, on y va tous.
Si je comprends votre objectif, la loi a déjà fixé beaucoup de principes. Des réglementations ont également été instaurées ces dernières années, comme la règlementation thermique, dite RT2012, ou la norme BBC – bâtiment basse consommation. Nous progressons donc très vite, avec l'ambition de construire de manière plus responsable : nous en avons la volonté, et la part de matériaux biosourcés dépassera peut-être même 25 %.
L'amendement no 7012 est adopté.
Applaudissements sur divers bancs.
L'amendement no 6717 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il vous fera plaisir, madame la secrétaire d'État, puisqu'il nous invite à être responsables ! Cet amendement de notre collègue Duby-Muller propose en effet de prendre en compte des critères de durabilité lors de l'achat public de produits numériques.
Les amendements nos 1146 de Mme Paula Forteza et 4989 de Mme Aude Luquet sont défendus.
Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements ?
Comme je l'ai dit précédemment, l'objectif du texte n'est pas d'entrer dans le détail, les acheteurs publics devant disposer d'une certaine souplesse. De plus, il n'existe pas de lien systématique avec l'objet de leurs marchés, ce qui me conduit à donner un avis défavorable.
L'article 15 a permis d'introduire le critère environnemental, qui inclut ceux de réparabilité et de durabilité. Il n'est pas utile de décliner le critère de la durabilité sur l'ensemble des segments d'achat. Je souscris à cet égard aux propos de Cendra Motin : laissons la liberté à l'acheteur de choisir, parmi les critères environnementaux, celui qui lui semble plus adéquat et le plus adapté. Ce sera donc un avis défavorable.
L'amendement no 4989 n'est pas adopté.
Je suis saisie de cinq amendements, nos 1789 , 2390 , 431 , 5101 et 6419 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements identiques nos 1789 de M. Dino Cinieri et 2390 de Mme Lise Magnier sont défendus.
Les amendements identiques nos 431 de M. François-Michel Lambert et 5101 de M. Hubert Wulfranc sont également défendus.
L'amendement no 6419 de Mme Sandrine Le Feur est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Il existe déjà un guide pour aider les acheteurs dans leur analyse du cycle de vie des produits, et l'engagement a été pris de mettre des outils à leur disposition. Je vous invite donc à retirer ces amendements, et, à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Même avis.
L'amendement no 6419 n'est pas adopté.
Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 5621 , 158 , 694 , 879 , 2513 , 2558 , 2698 , 2826 , 3400 , 4624 , 5524 , 5704 , 6418 , 6723 , 7181 et 2580 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 158 , 694 , 879 , 2513 , 2558 , 2698 , 2826 , 3400 , 4624 , 5524 , 5704 , 6418 , 6723 et 7181 sont identiques.
La parole est à Mme Annie Chapelier, pour soutenir l'amendement no 5621 .
J'espère que l'on sera sensible à ce petit amendement qui ne mange pas de pain. Il vise à privilégier les solutions de réemploi des emballages lors des achats publics, témoignant de la volonté de réaliser des investissements, pour faire ensuite rapidement des économies conséquentes, en exigeant une commande publique exemplaire.
J'en profite également pour défendre l'amendement no 2580 de ma collègue Maina Sage, presque identique au mien : je propose une date d'effet à compter du 1er janvier 2023, tandis qu'elle la fixe au 1er janvier 2025.
De manière très synthétique, l'amendement vise à orienter, lorsque c'est possible, les acheteurs publics vers des dispositifs de réemploi des emballages.
Le développement des solutions de réemploi des emballages comme alternative aux emballages jetables nécessite la création de nouvelles infrastructures sur tout le territoire français : laveuses, équipements pour le transport et la logistique, parcs d'emballages et de caisses, adaptation des lignes de conditionnement, communication et affichage dans les lieux de vente, etc. Si ces infrastructures sont créatrices d'emplois et moins coûteuses à terme que la gestion des déchets d'emballages jetables, elles requièrent néanmoins un investissement initial qui peut être important pour certains acteurs.
Dans cette perspective, la loi AGEC prévoit qu'au moins 2 % des éco-contributions perçues par l'éco-organisme en charge des emballages soient consacrés au développement de solutions de réemploi et réutilisation des emballages. Ces financements pourraient être complétés par une commande publique exemplaire, privilégiant les dispositifs de réemploi des emballages et orientant ainsi les investissements des acteurs. C'est le sens du présent amendement, qui entend orienter les acheteurs publics vers des dispositifs de réemploi des emballages, lorsque cela est possible.
En outre-mer, et notamment à La Réunion – territoire d'élection de Mme Bassire, qui a déposé l'amendement – , la situation est encore plus marquée. En effet, un certain nombre de matériaux sont livrés dans des caisses ou avec des emballages très importants. Certes, l'emballage est nécessaire, mais il doit être réemployé. Cela permet d'économiser des matériaux et de créer des filières. Il nous semble que cet amendement, et tous ceux qui lui sont identiques et qui ont été déposés de façon transpartisane, sont importants pour l'économie solidaire et sociale.
Les amendements no 5524 de M. Hubert Julien-Laferrière, 5704 de Mme Valérie Gomez-Bassac, 6418 de Mme Sandrine Le Feur, 6723 de Mme Mathilde Panot et 7181 de M. Jean-Michel Mis sont défendus.
L'amendement no 2580 de Mme Maina Sage a été défendu par Mme Chapelier en même temps que le no 5621.
Quel est l'avis de la commission sur l'ensemble de ces amendements en discussion commune ?
J'espère vous faire plaisir en vous indiquant que nous avons été plus ambitieux que ne le sont vos amendements.
En effet, la loi AGEC prévoit déjà que les biens acquis par l'État soient issus du réemploi ou de la réutilisation. Il se trouve que le décret d'application de cette mesure a été pris le 10 mars dernier, et qu'il comporte, en annexe, un tableau dans lequel figure l'intégralité des produits – issus du réemploi, de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées – , pour lesquels sont fixées des proportions minimales annuelles d'achat. Parmi ces produits, on trouve les sacs d'emballage.
Je vous invite donc à vous reporter à ce décret, de même qu'aux CCAG applicables aux marchés publics, dont les dernières versions ont été publiées au Journal officiel le 1er avril, et qui proposent également de prendre en considération le réemploi s'agissant des critères environnementaux. Je vous demande donc de retirer vos amendements ; à défaut, l'avis sera défavorable.
Je préciserai simplement que le décret a été pris le 9 mars, jour de la sainte Françoise. Je n'y peux rien, j'ai les éphémérides en tête.
Les mots ayant un sens – c'est souvent rappelé à bon escient sur ces bancs – , le décret no 2021-254 du 9 mars 2021 relatif à l'obligation d'acquisition par la commande publique de biens issus du réemploi ou de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées, pris pour l'application de l'article 58 de la loi AGEC, précise, dans son article 1er, que « la liste et les proportions minimales des produits ou catégories de produits acquis par l'État et par les collectivités territoriales et leurs groupements au titre de marchés de fournitures devant être issus du réemploi ou de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées, au sens de l'article L. 541-1-1 du code de l'environnement, sont fixées en annexe du présent décret ».
Le tableau annexé, que je tiens à votre disposition et que vous trouverez évidemment en ligne, comprend une liste très détaillée de produits pour lesquels sont fixées des proportions minimales de montant annuel d'achat de biens issus du réemploi ou de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées, ainsi qu'une part spécifique pour les biens issus du réemploi ou de la réutilisation. Le tableau comporte dix-sept lignes, chacune comprenant entre un et six produits ou catégories de produits. Je vous laisserai prendre connaissance des proportions minimales figurant dans le décret et mentionnées dans les CCAG applicables aux marchés publics, comme l'a indiqué la rapporteure. Les amendements étant satisfaits, je vous en demanderai le retrait ; à défaut, l'avis sera défavorable.
L'amendement no 6418 est retiré.
Le décret étant, dans sa rédaction, conforme aux attentes de mon amendement, il va de soi que je le retire.
L'amendement no 7181 est retiré.
L'amendement no 5621 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 112
Nombre de suffrages exprimés 103
Majorité absolue 52
Pour l'adoption 23
Contre 80
L'amendement no 2580 n'est pas adopté.
La parole est à M. François-Michel Lambert, pour soutenir l'amendement no 749 .
Cet amendement, pour le présenter très rapidement, fixe un cadre pour les achats publics de l'État en définissant des objectifs à atteindre, s'agissant notamment des téléphones reconditionnés et des pneumatiques rechapés. Il s'agit d'enclencher, avec volontarisme, la transition vers une économie circulaire qui fait durer les produits, et qui sait les réemployer et les réutiliser.
Cher collègue, je vais, là encore, vous renvoyer au décret dont nous venons de parler : dans le tableau annexé, vous trouverez les téléphones ainsi que les divers biens d'ameublement. En outre, l'article 60 de la loi AGEC prévoyait déjà ce que vous demandez s'agissant des pneumatiques rechapés. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Je reconnais là votre détermination, monsieur Lambert. Votre amendement s'inscrit dans le même esprit que les objectifs que vous souhaitiez insérer, il y a quelques minutes. Je comprends la dynamique qui vous anime. Je vous renvoie également au décret du 9 mars 2021, et plus particulièrement à la ligne 9 du tableau annexé, qui précise que 20 % des téléphones mobiles et des téléphones fixes doivent être issus du réemploi, de la réutilisation ou intégrer des matières recyclées. Votre amendement étant satisfait, je vous demande de le retirer ; à défaut, l'avis sera défavorable.
Je ne connaissais pas le contenu du décret qui, si j'ai bien compris, concerne notamment les téléphones portables.
Les deux : les fixes et les portables.
S'agissant des pneumatiques rechapés, je relirai la loi AGEC – que je maîtrise moins bien que vous, madame la rapporteure. Restera le sujet des biens d'ameublement, dont nous pourrons reparler dans un autre cadre. Je retire mon amendement.
L'amendement no 749 est retiré.
Les matières plastiques peuvent contenir des perturbateurs endocriniens qui sont facteurs de maladies graves comme le cancer, le diabète, l'obésité, les maladies de la reproduction. Aussi, dans un souci d'exemplarité, l'achat de bouteilles en plastique pourrait être interdit dans le cadre des commandes publiques passées par l'État ou une collectivité territoriale. Cela nous permettrait d'amorcer une dynamique qui, à mon sens, est indispensable.
Vous ne pouvez pas nier que le Gouvernement et la majorité ont déjà fait beaucoup pour lutter contre les plastiques à usage unique. La loi AGEC l'a démontré et nous avons mis en oeuvre, dès cette année, un certain nombre de mesures, notamment en ce qui concerne les pailles ou encore les gobelets. Je comprends ce que vous proposez : vous voulez aller encore plus loin, notamment à travers la commande publique. Pour autant, interdire totalement ce type d'achat serait excessif. Cela pourrait, par exemple, poser des problèmes sanitaires dans les hôpitaux. Je vous propose de retirer votre amendement, sinon l'avis sera défavorable.
Sur le fond, monsieur Vialay, j'adhère totalement à votre idée. En revanche, le tempo que vous proposez impose un délai qui me semble trop court. Votre angle est intéressant, c'est un sujet sur lequel nous travaillons depuis des années : si vous l'acceptez, et c'est une invitation qui n'engage que moi, nous devrions en discuter dans le cadre de la refonte, à la suite de la remise du rapport de Pierre Pelouzet, du label « relations fournisseurs et achats responsables » qui engagerait les organismes publics, peut-être un peu plus vite, avec des objectifs à atteindre. Si cela vous intéresse, travaillons ensemble pour intégrer votre idée aux propositions que je formulerai. Pour l'heure, l'avis est défavorable mais votre intention est louable et va dans le sens de la lutte contre les plastiques à usage unique.
La loi AGEC a instauré la consigne des plastiques, mais cela aura deux conséquences. D'une part, sachant qu'ils ne se recyclent pas tous de la même façon, il faudra en produire plus afin qu'une assiette économique suffisante permette de s'inscrire dans un cycle de recyclage. D'autre part, contrairement à ce que dit Mme la rapporteure, les plastiques posent des problèmes de santé bien réels. Un rapport estime le coût sanitaire de l'exposition aux perturbateurs endocriniens à 168 milliards d'euros par an en Europe – et encore ne s'agit-il que d'un chiffrage extrêmement minimal. Il y a donc là un véritable enjeu de santé publique.
Que l'on avance grâce à ce projet de loi ou à un autre, je resterai évidemment à votre disposition, madame la secrétaire d'État, pour échanger de façon précise sur le sujet, établir des règles et trouver, cette fois, le bon tempo. Je maintiens toutefois mon amendement aujourd'hui pour que chacun puisse se positionner.
L'amendement no 954 n'est pas adopté.
Prochaine séance, à vingt et une heures :
Suite de la discussion du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.
La séance est levée.
La séance est levée à dix-neuf heures trente.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra