La commission a poursuivi l'examen du projet de loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN) (n° 846), sur le rapport de M. Richard Lioger (titres Ier et IV) et de Mme Christelle Dubos (titres II et III).
Nous reprenons l'examen des amendements à l'article 34.
Article 34 (suite) (articles 2, 25-12, 25-13, 25-14, 25-15, 25-16, 25-17 et 25-18 [nouveaux] de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986) : Création du bail mobilité
La commission examine, en discussion commune, les amendements CE241 de Mme Stéphanie Do, CE323 de M. Martial Saddier et CE2058 de M. Mickaël Nogal.
Le projet de loi précise que le bail mobilité ne peut avoir une durée de plus de dix mois et qu'il est impossible de contracter un nouveau bail mobilité pour un même logement avec un même locataire.
Cette impossibilité de renouvellement comporte un inconvénient. En effet, certaines personnes en mobilité professionnelle ou en formation ne savent pas toujours à l'avance combien de temps elles vont rester dans un territoire. Si elles restent plus longtemps que prévu, elles ne pourront pas renouveler leur bail, ce qui est fâcheux. C'est pourquoi il devrait être possible de renouveler le bail mobilité, à l'intérieur de sa durée maximale de dix mois.
Cette modification permettrait de donner plus de souplesse à ce bail et de mieux répondre aux besoins de mobilité et de formation, tout en évitant les détournements d'usage, puisqu'il sera impossible de louer plus de dix mois à la même personne.
Chers collègues, quel plaisir de vous retrouver pour la troisième soirée consécutive ! J'ai déposé cet amendement avec ma collègue Mme Bonnivard, députée de Savoie. Monsieur le secrétaire d'État chargé de la cohésion des territoires, au cours des débats, vous nous avez dit votre fierté de défendre un texte qui ne privilégie ni les propriétaires ni les locataires. Nous partageons cette fierté et essayons, par cet amendement, d'y contribuer en rééquilibrant les droits entre bailleurs et locataires.
Je vais retirer mon amendement CE2058 pour voter celui de la rapporteure – CE2755 – car il est juridiquement mieux rédigé. Je propose à nos collègues de faire de même.
L'amendement CE2058 est retiré.
Mon amendement CE2755 à venir permet effectivement de répondre à vos demandes, dans un cadre juridique clair. Je vous demanderai donc de bien vouloir retirer vos amendements.
Vous avez déposé deux types d'amendements sur ce sujet : les premiers portent sur la durée – dix ou douze mois. Nous en avons longuement débattu. Je m'en remets à votre sagesse.
Celui de M. Saddier porte sur la prolongation du bail mobilité. À mon sens, elle ne doit être possible qu'à l'intérieur de la durée maximale du bail – ainsi un bail de deux mois pourrait être prolongé de huit mois si la durée totale du bail est fixée à dix mois.
Le prolonger au-delà pose problème : les propriétaires n'auraient plus intérêt à passer par les baux renouvelables, régis par la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs, ou meublés – d'une durée d'un an, voire de neuf mois pour les étudiants. C'est l'objet de l'amendement CE2755 que je soutiendrai.
Je vous remercie de ces explications et vous fais confiance. Néanmoins, en montagne, après une descente, en bas d'une pente enneigée, vous vous retournez pour regarder la trace que vous avez laissée. À ce moment précis de nos débats, je voudrais me retourner pour regarder cette trace et vais donc maintenir l'amendement CE323.
Je ne suis pas sûr d'avoir bien compris : souhaitez-vous que le bail mobilité puisse durer jusqu'à vingt mois ?
La durée totale du bail – de dix mois – n'est pas modifiée. Mais, dans le cadre de ces dix mois, vous pourrez renouveler deux fois votre bail initial de trois mois par exemple.
La commission rejette successivement les amendements CE241 et CE323.
Puis la commission en vient à l'amendement CE1958 de Mme Sarah El Haïry.
Dans la continuité de nos débats, cet amendement propose d'étendre la durée du bail mobilité à douze mois pour les volontaires en service civique. Il ne s'agit pas de déséquilibrer le texte mais de soutenir le service civique. Cet engagement volontaire est en effet un élément fondamental de construction et de renforcement du sentiment d'appartenance à la nation. En outre, l'engagement est une des priorités du président de la République. Nous devons donc permettre aux volontaires de s'engager plus facilement pour une durée de douze mois sur tout le territoire national, sans que leur mobilité ne soit freinée par l'absence de moyens ou de logement.
Mon avis sera favorable sur le principe, mais je souhaiterais que l'amendement soit retiré et rectifié sur deux points : la durée du bail doit être de douze mois moins un jour car une durée de douze mois correspond à un bail régi par la loi de 1989 précitée ; ces baux mobilité ne doivent pouvoir être proposés qu'à des jeunes qui n'habitent pas dans le territoire concerné.
Je m'en remets à votre sagesse.
Je me félicite de la réponse de Mme la rapporteure et de M. le ministre. Je rectifierai mon amendement pour la séance publique.
L'amendement est retiré.
La commission examine, en discussion commune, les amendements CE1793 de M. Stéphane Peu, et CE1602 et CE1603 de Mme Stéphanie Do.
Selon Pierre Rosanvallon, le marché n'est pas immoral, mais amoral et aveugle. En tant que parlementaires, nous devons être sa canne blanche. C'est l'objet de notre amendement « canne blanche » CE1793 : il vise à éviter qu'un bailleur propriétaire de plusieurs logements ne conclue un nouveau bail mobilité avec un même locataire pour un autre de ses logements.
Le bail mobilité est une réelle avancée qui permettra de favoriser la mobilité professionnelle et la formation, à condition qu'il ne soit pas détourné. Les associations de défense des intérêts des locataires craignent que des bailleurs peu scrupuleux n'utilisent le bail mobilité en lieu et place d'un bail classique d'habitation, ce qui reviendrait à précariser les locataires. Pour éviter ces abus et pour que ce nouveau bail soit bien accepté, il est nécessaire d'anticiper les tentatives de détournement. C'est l'objet de mes amendements CE1602 et CE1603.
L'un des abus consisterait à faire tourner les locataires dans plusieurs des appartements que le bailleur possède. Si ce dernier possède un ou plusieurs immeubles, il pourrait accorder des baux mobilité successivement dans tous ses appartements, en lieu et place d'un bail d'habitation classique.
C'est pourquoi nous souhaitons interdire à un bailleur d'accorder plusieurs baux mobilité dans un même secteur géographique. Le Gouvernement choisira par décret le périmètre des zones après concertation. Ce dernier devra pouvoir être modifié en fonction des retours de terrain. À l'inverse, l'amendement de M. Peu promulgue une interdiction générale.
Défavorable. La rédaction du projet de loi empêche d'ores et déjà le renouvellement du contrat avec le même locataire pour le même bien. Si je comprends et partage la volonté d'éviter les détournements, votre proposition me semble impossible à mettre en place et à contrôler.
C'est un outil de lutte contre les marchands de sommeil. Il est clair que nous ne voulons rien leur lâcher, mais vos amendements soulèvent une difficulté : le bail mobilité va-t-il être un succès ? Nous n'en savons rien et lui imposons ab initio des contraintes qui pourraient constituer un tue-l'amour… Le risque que vous évoquez existe, mais les cas seront-ils nombreux ? Le renforcement des contrôles vis-à-vis des marchands de sommeil permettra-t-il de les gérer ? Si les abus sont trop importants et que la loi doit être modifiée, je vous propose alors de revenir devant vous.
Nous poursuivons le même objectif, je n'en doute pas, mais notre philosophie est différente : nous souhaitons que ces nouvelles dispositions soient parfaitement cadrées afin que les acteurs mal intentionnés ne s'engouffrent pas dans les failles de la loi.
La commission rejette successivement les amendements CE1793, CE1602 et CE1603.
Elle examine l'amendement CE375 de M. Jean-François Mbaye.
Le projet de loi prévoit la possibilité pour le locataire de donner congé au bailleur, à condition de respecter un préavis d'un mois. Afin de respecter l'équilibre de la relation contractuelle et de tenir compte des durées très courtes applicables aux baux mobilité, le texte ne prévoit pas la possibilité pour le bailleur de donner congé au locataire. Cette position est compréhensible et pleine de bon sens.
Le présent amendement vise à compléter les dispositions de l'article 34 en permettant au bailleur de signifier de manière explicite sa volonté de voir le locataire quitter son logement à la fin du bail mobilité. Ainsi, si un locataire indélicat souhaite profiter de l'automaticité du renouvellement du bail pour continuer à occuper les lieux contre la volonté du bailleur, celui-ci pourra faire valoir qu'il ne l'a pas laissé en possession de ceux-ci, selon les dispositions prévues à l'alinéa 27. À l'inverse, durant le bail, le locataire pourra rester dans les lieux, conformément aux termes de son bail, le bailleur ne pouvant lui signifier une date de fin de bail différente de celle figurant dans le contrat.
L'alinéa 26 prévoit d'ores et déjà que le bail mobilité n'est pas renouvelable. Le bailleur n'a donc pas besoin de notifier au locataire un congé précisant que le bail ne sera pas renouvelé. Je suis cependant d'accord avec vous : la rédaction de l'alinéa 27 doit être améliorée pour interdire explicitement toute reconduction tacite du bail. C'est le sens de mon amendement CE1675.
Même avis. Le bail mobilité est, par principe, un bail à durée déterminée, de courte durée.
L'amendement est retiré.
La commission passe à l'amendement CE2755 de la rapporteure.
Nous avons déjà discuté de cet amendement qui permet de prolonger un bail mobilité à l'intérieur de la période de dix mois. Je précise qu'il s'agira d'un « avenant » au bail, et non d'un « renouvellement ».
Favorable.
La commission adopte l'amendement.
Elle examine l'amendement CE1794 de M. Stéphane Peu.
Même avis.
La commission rejette l'amendement.
Elle en vient à l'amendement CE234 de Mme Stéphanie Do.
En l'état actuel du projet de loi, un locataire peut profiter d'une faille juridique pour imposer sa présence après la fin du bail mobilité et obtenir d'office la transformation du bail mobilité en un bail d'habitation meublée renouvelable. Cela lui permettrait de rester dans les lieux contre la volonté du bailleur, si le bailleur ne lui a pas envoyé avant la fin du bail une lettre recommandée ou une lettre d'huissier lui signifiant sa volonté de récupérer son logement. Pour cela, il lui suffirait de rester dans les lieux le lendemain de la fin du bail.
C'est pourquoi il est préférable de laisser au bailleur un délai d'un mois après la fin du bail, afin qu'il puisse envoyer à son locataire une injonction de quitter les lieux.
Je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement au profit de mon amendement CE1675.
Même avis.
La commission rejette l'amendement.
La commission examine les amendements identiques CE267 de M. Thibault Bazin et CE1675 de la rapporteure.
La mise en place d'un système automatique de requalification du bail mobilité en bail classique semble peu pertinente et de nature à multiplier les contentieux et les tentatives de fraude. Le bail commercial dérogatoire de courte durée a longtemps permis au locataire de bénéficier d'un bail commercial en restant dans les lieux au terme du bail. Cette disposition a généré tant de contentieux qu'elle a été modifiée par la loi du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises – dite « loi Pinel ». Il convient donc de supprimer la disposition similaire s'appliquant au bail mobilité. C'est ce que propose cet amendement CE267.
Favorable.
La commission adopte ces amendements.
Elle en vient à l'amendement CE378 de M. Jean-François Mbaye.
Cet amendement apporte une précision sur la manière dont se poursuit la relation contractuelle entre le bailleur et le locataire à la fin du bail mobilité. Si le texte prévoit implicitement que le nouveau bail est conclu dans le même cadre, notre amendement vise à le préciser explicitement, afin que bailleurs et locataires bénéficient d'une meilleure lisibilité de l'évolution de leurs relations contractuelles – notamment concernant le montant du loyer et ses modalités de paiement.
Défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine, en discussion commune, les amendements CE1859 et CE1860 de M. Stéphane Peu.
Même s'il est difficile de faire de la prospective, il est probable que le bail mobilité se développe dans les zones tendues, qui connaissent, par définition, une pénurie de logements. Pour éviter que les bailleurs ne bénéficient d'effets d'aubaine, nos amendements proposent qu'un même logement ne puisse pas faire l'objet de plus de deux baux mobilité par période de cinq ans. Le bail mobilité permettra sans doute de remettre des logements vacants sur le marché – c'est une excellente chose –, mais il faudrait ensuite que ceux-ci reviennent dans le droit commun.
Même avis. Par ailleurs, je ne suis pas d'accord avec vous, monsieur Peu : quelles que soient les zones, il faut loger les gens ! Nous y reviendrons lors des débats sur les plateformes de type Airbnb. Dans ce dernier cas, les logements sortent totalement du marché locatif car ils servent à loger des « touristes ». Ce n'est pas le cas avec le bail mobilité. Vos craintes n'ont donc pas lieu d'être.
La commission rejette successivement les amendements CE1859 et CE1860.
Elle en vient à l'amendement CE798 de M. Éric Pauget.
Monsieur le secrétaire d'État, j'ai lu votre tribune. Avec beaucoup d'élans (Sourires), vous avez lancé un appel aux propriétaires afin qu'ils remettent leurs logements vacants sur le marché… Vous concédez qu'il y a des réticences, vous faites la publicité du dispositif Solibail et donnez même son numéro de téléphone ! Vous l'avez dit, nous ne savons pas si le bail mobilité va fonctionner. Depuis quinze jours, j'ai une obsession : quand je croise des propriétaires dont les logements sont vacants, je leur demande s'ils sont intéressés. Leur réponse est systématiquement la même : « sans dépôt de garantie, cela ne m'intéresse pas ». Notre amendement vise à répondre à cette préoccupation.
Vous avez raison, nous devons adapter au mieux le dispositif pour tenir compte des différents arguments. Pourquoi supprimons-nous le dépôt de garantie ? Pour que le locataire ne soit plus bloqué par cette barrière à l'entrée. En échange, lorsqu'il signera un bail mobilité, le propriétaire sera protégé par la garantie Visale, qui couvrira tous les locataires, quel que soit leur statut. Cette garantie est plus protectrice pour le propriétaire qu'un simple dépôt de garantie puisqu'elle couvrira le non-paiement du loyer, mais également la remise en état du bien !
Malheureusement, ce dispositif n'est pas connu ; c'est son seul point de faiblesse. Sur le papier, les propriétaires devraient se ruer sur Visale ! Mais nous devons prendre en compte cette irrationalité du monde réel… Peut-être faudrait-il autoriser cette alternative – dépôt de garantie ou Visale ? Le risque serait alors important que les propriétaires ne fassent pas l'effort de se tourner vers Visale et continuent à demander un dépôt de garantie, maintenant ainsi une barrière à l'entrée pour les locataires.
En l'état de sa rédaction, mon avis sera défavorable sur votre amendement, mais je souhaite sincèrement trouver le mécanisme approprié, afin que la suppression de la barrière à l'entrée pour le locataire ne constitue pas une nouvelle barrière à l'entrée pour le propriétaire.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CE268 de M. Thibault Bazin.
J'ai un peu l'impression d'être le dernier des Mohicans ! Mon amendement propose qu'un dépôt de garantie d'un mois maximum puisse être exigé par le bailleur. Je comprends l'esprit de votre réforme, mais ne peut-on prévoir une clause alternative ? Les réticences sont réelles.
Le bail mobilité est un dispositif intéressant, même s'il n'est pas révolutionnaire – il l'aurait été s'il avait concerné les logements non meublés. Il ne faut pas qu'il devienne un dispositif inutilisé…
Je suis défavorable pour les raisons déjà évoquées. Je ne comprends pas votre remarque sur les logements non meublés.
M. Bazin souhaite élargir le bail mobilité aux logements non meublés, au risque d'ouvrir la boîte de Pandore…
Monsieur le secrétaire d'État, qu'est-ce que le dépôt de garantie couvrirait que Visale ne couvre pas déjà ?
Je vous invite à lire mon incroyable tribune et à la diffuser ! (Sourires.)
Nous avons un rôle collégial à jouer car la question du logement donne lieu dans notre pays à des réactions totalement irrationnelles. Chacun campe sur ses positions : le locataire estimant que son propriétaire est un nanti, et le propriétaire s'inquiétant que son locataire dégrade son logement.
La même irrationalité prévaut quand le propriétaire choisit de privilégier le dépôt de garantie : certes, c'est une somme d'argent dont il dispose, alors que la garantie Visale n'existe que sur le papier. Mais elle est bien plus protectrice ! Nous devons faire la promotion de Visale, faute de quoi les propriétaires pourraient se braquer et le système se gripper…
La commission rejette l'amendement.
Elle passe à l'amendement CE1606 de M. Nicolas Démoulin.
Mon amendement rejoint celui de mon collègue tout en prévoyant que le dépôt de garantie ne pourra être demandé que pour les baux de six mois ou plus.
Monsieur le secrétaire d'État, vous avez en partie répondu à mes interrogations. Je crois vraiment au bail mobilité. Contrairement à M. Peu, je pense que le locataire bénéficiera d'un effet d'aubaine – et non le propriétaire. Nous devons veiller à ne pas freiner la mise sur le marché de logements et rassurer les propriétaires réticents, afin que les logements proposés ne soient pas de qualité inférieure. Pouvez-vous me confirmer que Visale couvre tous les locataires, notamment quel que soit leur âge ?
Défavorable également. Nous venons d'évoquer le dépôt de garantie : il faut ajuster le mécanisme au mieux pour qu'il fonctionne.
Visale est géré par Action Logement. Vous avez raison, actuellement, la mesure est limitée. Nous sommes en discussion avec l'organisme pour l'étendre : la nouvelle convention, bientôt signée, élargira le dispositif général à tous les étudiants, et à l'ensemble de la population pour les baux mobilité.
En outre, je le répète, ce dispositif garantit les impayés de loyers et la remise en état du bien. Pour le rendre attractif, reste à communiquer, afin que les propriétaires se l'approprient.
L'amendement est retiré.
La commission examine l'amendement CE1861 de M. Stéphane Peu.
Parfois, l'homme est un loup pour l'homme. L'absence de dépôt de garantie est un des atouts du bail mobilité pour le locataire – mais pas pour le propriétaire. Il faut donc s'assurer que les propriétaires qui ne respectent pas cette interdiction seront sanctionnés. Notre amendement prévoit une amende dans ce cas.
Avis défavorable. Le montant de l'amende me semble disproportionné. Par ailleurs, le non-respect de l'interdiction du dépôt de garantie peut faire l'objet d'un recours devant le juge.
Je suis totalement opposé à votre amendement. Le projet de loi prévoit déjà qu'il n'y aura pas de dépôt de garantie : si vous y ajoutez une amende, plus aucun propriétaire ne voudra signer de bail mobilité !
La commission rejette l'amendement.
Elle passe à l'amendement CE236 de Mme Stéphanie Do.
Le bail mobilité créé par le présent projet de loi est conçu pour être simple d'utilisation. C'est pourquoi les charges seront payées sous la forme d'un forfait non récupérable. Cependant le texte précise que le montant doit être calculé sur la base des charges acquittées par le précédent locataire. Cette formulation pose question : que se passe-t-il s'il n'y a jamais eu de locataire ? Et si le précédent locataire a quitté les lieux il y a une dizaine d'années ?
Il paraît donc plus pertinent de se fonder sur les charges réelles habituelles pour cette période de l'année. Le mot « habituel » permettra au bailleur de se fonder sur les charges des années précédentes et, ainsi, de pouvoir anticiper la somme à transmettre au locataire. Cela a le mérite d'être simple à mettre en oeuvre et de rendre difficile des contestations.
Le projet de loi reprend les termes de la loi du 6 juillet 1989 pour les locations meublées ou nues classiques. Il me paraît préférable de conserver une cohérence entre les différentes catégories de contrats de location. Je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement.
Même avis.
L'amendement est retiré.
La commission examine l'amendement CE269 de M. Thibault Bazin.
Défavorable.
La commission rejette l'amendement.
La commission examine, en discussion commune, les amendements CE2756 de la rapporteure et CE239 de Mme Stéphanie Do.
Le changement d'usage des locaux destinés à l'habitation est soumis à autorisation préalable dans certaines communes. L'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation (CCH) définit les locaux à usage d'habitation comme étant toutes catégories de logements, y compris les logements meublés, donnés en location dans les conditions de l'article L. 632-1 du CCH.
Or, les logements meublés loués dans le cadre d'un bail mobilité ne sont pas visés dans cet article et pourraient être considérés comme devant faire l'objet d'une autorisation de changement d'usage. Mon amendement vise à lever toute ambiguïté d'interprétation, en exonérant les logements bénéficiant d'un bail mobilité de la procédure d'autorisation de changement d'usage.
Mon amendement poursuit le même objectif que celui de Mme la rapporteure. Nous souhaitons exempter le bail mobilité de la procédure d'autorisation de changement d'usage.
Je suis favorable à l'amendement CE2756.
La commission adopte l'amendement CE2756.
L'amendement CE239 tombe.
Elle en vient à l'amendement CE238 de Mme Stéphanie Do.
L'un des objectifs du bail mobilité est d'inciter les propriétaires à mettre à la disposition des locataires en mobilité professionnelle ou en formation des logements jusqu'ici inutilisés. C'est le cas des résidences secondaires. Si les propriétaires décident de louer leur logement quand ils sont absents, cela permettra d'augmenter l'offre de logements de manière notable, en particulier dans les zones tendues.
Or la loi impose la déclaration en mairie de toute location de courte durée, dès lors que celle-ci ne constitue pas la résidence principale du bailleur. Afin d'inciter les bailleurs non professionnels à mettre leur bien en location, il serait souhaitable de les exonérer d'une telle démarche.
Le bail mobilité ne rentre pas dans la catégorie des meublés touristiques. Votre amendement est donc satisfait.
Même avis.
L'amendement est retiré.
La commission adopte l'article 34 modifié.
Après l'article 34
La commission examine en discussion commune les amendements CE1903 et CE1904 de Mme Frédérique Lardet.
De nombreuses entreprises implantées dans les communes situées en zones tendues ne parviennent plus à embaucher de nouveaux collaborateurs, ces derniers ne pouvant trouver un logement à prix raisonnable. En conséquence, certaines de ces entreprises envisagent de quitter les communes concernées. En tant que députée d'un département en forte croissance démographique et en zone tendue, je suis régulièrement interpellée par nos entreprises.
L'amendement CE1903 donne la possibilité aux entreprises implantées dans les communes situées en zones tendues de louer des logements conventionnés, afin de les sous-louer à leurs salariés. L'amendement CE1904 propose de cibler cette mesure sur les entreprises employant des saisonniers, au profit de cette seule catégorie d'employés.
Cet amendement crée un contrat de location lié au contrat de travail. Au-delà de l'impossibilité de lier un contrat de location au contrat de travail – sauf logement de fonction –, les dispositions du code de la construction et de l'habitation en vigueur permettent déjà de favoriser l'accès à une formation, un contrat d'apprentissage ou un stage par le biais de la sous-location.
Défavorable.
Les amendements CE1903 et CE1904 sont retirés.
La commission en vient aux amendements identiques CE1614 de M. Éric Bothorel et CE1917 de Mme Frédérique Lardet.
Monsieur le secrétaire d'État, vous avez rappelé à quel point il fallait lutter contre les « trous dans la raquette ». Le bail mobilité fera partie de ces outils et permettra de compléter l'offre locative et de lutter contre la vacance.
Certaines grandes villes comme Paris, Lyon, Bordeaux ont mis en place une autorisation de changement d'usage pour les résidences secondaires dont les conditions sont parfois si strictes – ouvrir une surface deux fois supérieure à la location classique dans le même arrondissement à Paris par exemple – que les autorisations sont rarement délivrées, laissant vacantes de nombreuses résidences secondaires une grande partie de l'année.
Dans ces grandes villes, mon amendement consiste à encourager les propriétaires de résidences secondaires à conclure des baux mobilité d'une durée suffisante – par exemple, huit mois, durée d'une année universitaire –, grâce à l'assurance qu'ils pourront dédier ce même logement à la location meublée touristique, plus rémunératrice, durant la période de vacance qui sépare deux baux mobilité.
Mon amendement CE2756, que nous venons juste d'adopter, répond à votre demande. Vos amendements sont donc satisfaits.
Même avis.
Les amendements sont retirés.
La commission examine l'amendement CE2474 de M. Mikaël Nogal.
Cet amendement vise à exempter de taxe d'habitation les locataires ayant contracté un bail mobilité. En l'état, il leur revient de payer la taxe d'habitation s'ils occupent le logement au 1er janvier, alors qu'ils ne sont destinés à y rester que quelques mois. Il semble injuste, pour une si courte durée d'occupation, de les assujettir à une taxe que nous souhaitons par ailleurs supprimer.
Je comprends votre argument mais cet amendement touche à l'égalité devant l'impôt – un sujet pour le moins compliqué. De surcroît, la réforme de la taxe d'habitation est en cours. Je vous propose donc de retirer l'amendement et de soumettre la question à M. Darmanin afin qu'elle soit prise en compte dans la réforme. Sauf erreur, la taxe d'habitation est payée au 1er janvier, la taxe foncière étant calculée au prorata de la durée d'occupation.
Je précise que les deux taxes sont payables au 1er janvier, le prorata n'étant qu'une convention.
Je retire l'amendement en souhaitant que nous y revenions dans le cadre de la réforme de la taxe d'habitation.
L'amendement est retiré.
La commission examine l'amendement CE1855 de M. Stéphane Peu.
Je ne cesse, depuis le rejet de mon amendement de suppression de l'article, de proposer des amendements visant à protéger les locataires ayant souscrit un bail mobilité – en vain pour l'instant, mais peut-être y parviendrai-je en vous proposant cet amendement qui vise à encadrer les frais d'agence immobilière, qui représentent parfois un coût important.
Je vous propose de retirer cet amendement car il est déjà satisfait par l'alinéa 9 de l'article 34 qui étend au bail mobilité le plafonnement des honoraires de location prévu à l'article 5 de la loi de 1989 .
Avis défavorable pour les mêmes raisons que plus tôt. Le système de paiement des honoraires des agences immobilières n'est certes pas satisfaisant. Pour tout dire, je rencontre régulièrement les agences car il me semble que de nombreux progrès sont possibles en la matière. Cependant, je préfère annoncer des freins au bail mobilité a posteriori plutôt qu'a priori : cela nous permettra de vérifier si la mesure porte ses fruits.
À chaque fois que je défends un amendement visant à protéger les locataires en bail mobilité, il m'est opposé l'argument selon lequel il constituerait un frein pour les propriétaires. De ce fait, nous laissons de vastes espaces aux dérives pourtant connues qui, de surcroît, risquent de tuer le projet si le bail mobilité devient une nouvelle niche pour marchands de sommeil incitant les propriétaires à commettre des abus ! Comment peut-on refuser d'encadrer les frais d'agence pour des baux de dix mois ?
La loi encadre déjà les frais d'agence, monsieur le député, y compris dans le cas d'un bail mobilité. Autrement dit, votre amendement est satisfait par l'article 5 de la loi de 1989.
Étant donné la très forte spécificité du bail mobilité, ce n'est pas la loi de 1989 qui devrait s'y appliquer ! Vous créez un dispositif ad hoc – le bail mobilité – mais lui appliquez le droit commun dès qu'il s'agit de protéger un tant soit peu les locataires contre des abus éventuels ! Depuis le début de l'examen de ce dispositif, pas un seul amendement protecteur des locataires n'a été adopté.
Pour aller dans le sens de M. Peu, l'amendement CE269 que j'ai défendu rapidement tout à l'heure avait à peu près le même objet : la loi de 1989 ne doit pas s'appliquer en ce qui concerne la rémunération des personnes mandatées pour le bail mobilité. Mon amendement a été rejeté, mais il y a là un véritable obstacle dont il faut se saisir.
Plusieurs mesures de protection des locataires ont été adoptées, monsieur Peu : tous les diagnostics, qui n'étaient pas prévus initialement, sont désormais inclus dans le bail mobilité.
La loi de 1989 et ses versions ultérieures sont très protectrices du locataire. La véritable question est celle-ci : le bail mobilité est-il plus protecteur encore que ladite loi ? Le bail mobilité prévu par le projet de loi tel qu'amendé se rapproche grandement du bail 1989, à deux différences près : celui-ci est tacitement reconductible tandis que celui-là est figé dans le temps, et est en outre assorti du système Visale concernant le dépôt de garantie. Ne laissons donc pas croire que nous ne protégeons aucunement les locataires, car ce n'est pas du tout le sens du bail mobilité.
La commission rejette l'amendement.
Elle passe à l'amendement CE1905 de Mme Frédérique Lardet.
La société civile immobilière (SCI) familiale peut donner congé à un locataire d'un immeuble inscrit à son actif dans le but d'y loger l'un de ses associés. Or, l'article 13 de la loi du 6 juillet 1989 définit la SCI familiale comme une SCI constituée exclusivement entre parents et alliés jusqu'au quatrième degré inclus. Les SCI composées de concubins ou de partenaires pacsés ne sont donc pas considérées comme des SCI à caractère familial.
Il serait utile d'adapter le statut de la SCI familiale aux récentes évolutions législatives de la notion de famille qui tendent à assimiler le concubin et le partenaire pacsé au conjoint marié.
Les SCI, définies par le code civil, sont couramment utilisées. Il convient toutefois de mesurer l'impact de votre proposition avant de modifier la législation en ce sens, car l'amendement risque notamment de créer une insécurité juridique liée à la définition du concubinage, encore imprécise. Je vous propose donc de le retirer au bénéfice d'une expertise d'ici à la séance publique.
Même avis.
L'amendement est retiré.
La commission examine l'amendement CE926 de Mme Frédérique Tuffnell.
Cet amendement vise à exclure les logements ayant fait l'objet d'un bail mobilité du calcul du taux de logements vacants. Si le texte vise à réduire la vacance, il ne réduira pas le taux de vacance. Le bail mobilité ne pouvant excéder dix mois, il se peut qu'un logement en faisant l'objet soit inoccupé au 1er janvier, auquel cas il entrera dans le calcul du taux de vacance. Avant de s'implanter sur un territoire, les opérateurs privés commencent par consulter deux indicateurs : le taux d'impayés et le taux de vacance. C'est pourquoi nous proposons que le bail mobilité soit exclu du calcul du taux de vacance.
En matière fiscale, un local non occupé mais meublé au 1er janvier n'est pas considéré comme vacant mais comme étant à la disposition de son propriétaire. Le bail mobilité n'a donc pas d'effet sur le taux de vacance et la taxe sur les logements vacants, qui ne vise que le parc locatif privé, ne s'appliquera pas aux logements donnés en location dans ce cadre.
Même avis.
L'amendement est retiré.
Article 35 (articles L. 441-2 et L. 442-5-1-1 [nouveau] du code de la construction et de l'habitation) : Élargissement des missions des commissions d'attribution des logements (CAL) aux questions de mobilité des locataires
La commission examine l'amendement CE1795 de M. Stéphane Peu.
Voici un article emblématique – que cet amendement tend à supprimer – de l'attaque qui vise tous les piliers du logement social, la protection des locataires et l'équilibre de leurs relations avec les bailleurs et les propriétaires, puisqu'il remet profondément en cause le droit au maintien dans les lieux dans le parc social en obligeant le réexamen du bail après six ans d'occupation.
La principale différence entre un bail privé relevant de la loi de 1989 et un bail dans le parc social est semblable à celle qui existe entre un CDD et un CDI : dans le parc social, le bail est à durée indéterminée, contrairement à un bail privé. Par définition, les occupants des HLM sont parmi les plus modestes. Permettez-moi de reprendre l'exemple de la Seine-Saint-Denis, car il me semble utile d'ancrer les argumentations dans les réalités : 25 % des locataires du parc HLM y ont plus de 65 ans. Ayant toujours exercé des « petits métiers » – qui ouvrier, qui femme de ménage –, sans jamais pouvoir acheter leur propre logement, ces personnes qui vivent dans la précarité de retraites modestes et incertaines n'ont qu'une seule garantie : celle d'un bail à durée indéterminée, c'est-à-dire la certitude d'avoir un toit en dépit des vicissitudes que pourraient connaître leurs retraites et allocations. La suppression du seul point de stabilité dans des vies en proie à d'innombrables facteurs de précarité constitue à mon sens une véritable régression sociale.
Je propose donc de supprimer cet article afin de maintenir le caractère pérenne et indéterminé du bail dans le parc social ; ce faisant, je pense en particulier aux personnes âgées qui sont beaucoup plus nombreuses qu'on ne le dit dans les HLM.
L'article 35 vise à encourager la mobilité dans le parc social sans toutefois la rendre obligatoire. Le réexamen périodique permettra de proposer aux locataires des logements plus adaptés à leur situation, notamment en cas de handicap et de suroccupation, mais le changement de logement ne sera pas imposé. Avis défavorable.
Vous semblez manifestement avoir mal compris l'objectif de l'article 35, monsieur Peu. D'emblée, dès le premier jour, j'ai affirmé que l'on ne toucherait pas au maintien dans les lieux ; le bail à vie reste un bail à vie. Le logement social est un tremplin ; s'il est nécessaire toute la vie, alors l'occupant d'un logement social – je pense aux mêmes que vous, monsieur le député – doit pouvoir y rester. Il n'y a donc aucune – je dis bien aucune – remise en cause du bail à vie, ni de près ni de loin.
L'article 35 prévoit que la commission d'attribution des logements étudie tous les six ans la situation de chacun des locataires et leur propose un logement plus adapté en cas de sous-occupation, par exemple. J'insiste : il s'agit bien d'une proposition, le changement de logement devant systématiquement se faire sur la seule base du volontariat.
Cette mesure est fondée sur des expériences concrètes. Je citerai celle de Montrouge Habitat, qui a lancé cette expérimentation il y a environ un an et demi. Depuis, dans une vingtaine de cas, la proposition a été faite à des locataires de passer d'un appartement F4 à un F3 moyennant les modifications de loyer que nous avons évoquées tout à l'heure, c'est-à-dire que le nouvel entrant dans le F3 paye un loyer inférieur au montant normal et que son successeur dans le F4 paye un loyer supérieur au montant précédent. En moyenne, les locataires acceptant la proposition de changement d'appartement économisent l'équivalent d'un mois de loyer par an et l'opération est bénéfique pour le bailleur.
Vous avez donc laissé sous-entendre une idée fausse qui n'est pas dans le projet de loi et contre laquelle j'ai pris position en affirmant que le tremplin qu'est le logement social doit être maintenu si nécessaire. En revanche, il faut améliorer sa fluidité et sa mobilité selon le principe de la proposition. Les résultats sont là : je vous invite à venir les constater à Montrouge.
Je connais ce mécanisme que je pratique depuis longtemps – j'ai même écrit un article sur ce sujet il y a quelques années. Lorsqu'un F2 ou un F3 est proposé aux occupants d'un F4 ou d'un F5, le loyer est souvent plus élevé. Plusieurs bailleurs ont donc décidé de maintenir le loyer au mètre carré, pour permettre aux intéressés de gagner du pouvoir d'achat. On prend aussi en charge le déménagement dans ses moindres détails. L'opération ne coûte pas un centime au locataire et rapporte un surcroît de loyer au bailleur.
Ce mécanisme fonctionne, en effet. Toutefois, il ne fonctionne qu'avec des bailleurs de proximité comme Montrouge Habitat, qui opère à l'échelle de la commune, ou Plaine Commune Habitat, à l'échelle du territoire, mais pas avec les grandes entreprises sociales pour l'habitat (ESH), qui entretiennent un rapport si lointain et abstrait avec la réalité vécue par les locataires qu'elles se fichent éperdument de tout cela. La proximité du terrain et des locataires est une garantie.
Cela étant, en quoi la mesure que vous proposez d'instaurer sur la base du volontariat sera-t-elle une aide ? Vous allez simplement introduire une incertitude dans la loi – et l'on pourra toujours brandir le principe du volontariat mais, sur le terrain, ce sont les bailleurs qui décident ! Les commissions d'attribution, dans leur grande souplesse et, parfois, avec leur regard condescendant, prendront des décisions contraignantes. Puisque des expériences fonctionnent déjà sur la base du volontariat, pourquoi ouvrir la porte à la contrainte dans la loi et donc – même si je crois volontiers que ce n'est pas là votre intention, monsieur le secrétaire d'État – à une remise en cause du maintien dans les lieux ?
Je rejoins M. Peu : il faudra prendre garde aux mots choisis pour éviter toute incitation forte au déménagement ou au changement de loyer. Il faut s'en tenir à une simple proposition.
Néanmoins, ayant été assistante sociale pendant vingt-cinq ans dans des quartiers et en zone rurale, je sais que certains locataires entrés dans leur logement avec deux, trois ou quatre enfants aspirent parfois, le moment venu, à emménager dans des logements plus petits. Il faut ouvrir la possibilité de leur proposer un tel changement en les accompagnant et en adaptant le loyer en conséquence, car ce type de publics existe. J'insiste cependant pour qu'il ne s'agisse bien que d'une proposition, et non d'une incitation forte.
De même que je déplore l'opposition entre locataires et propriétaires, je déplore tout autant l'opposition entre les différentes familles du logement social. Nous pouvons tous ici citer des exemples d'offices publics de l'habitat (OPH), d'ESH ou de COOP' qui fonctionnent plus ou moins bien.
Ni la taille de l'organisme, ni la famille à laquelle il appartient, ni le nombre de logements qu'il gère ne permettent de préjuger de la qualité de son lien avec le territoire. Je connais dans la métropole toulousaine des ESH qui fonctionnent très bien en étant proches du terrain et qui parviennent à une certaine mobilité sans les dispositions de cet article et des suivants. Je crois néanmoins nécessaire d'adopter cette démarche proactive qui, de surcroît, donnera aux bailleurs sociaux une plus grande visibilité sur leur parc et qui encouragera des locataires à avancer dans leur parcours résidentiel au sein du logement social, comme l'a illustré M. le secrétaire d'État avec l'exemple de Montrouge Habitat.
L'article 35 est la tarte à la crème de la direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP) et de Bercy, qui essaient d'en vendre le contenu à tout le monde depuis vingt ans.
Mais non !
Permettez tout de même que je vous fasse part de mon expérience ! Voici leur fantasme : la veuve en sous-occupation dans un F5 et le cadre moyen trop bien rémunéré pour occuper un logement social. Ils rêvent de faire partir les locataires trop riches et ceux qui sous-occupent les logements.
Au contraire, dans les quartiers relevant de la politique de la ville, il faut garder les locataires qui ont des moyens en leur déroulant le tapis rouge, car ils assurent la mixité sociale ! Loin de les surtaxer, il faut les aider à rester dans le parc social et les remercier d'assurer cette mixité ! Quant à la grand-mère qui occupe depuis quarante voire cinquante ans un F4 ou un F5 en ayant toujours payé son loyer rubis sur l'ongle, et qui souhaite conserver son logement parce qu'elle garde ses petits-enfants, il faut aussi la remercier de n'avoir jamais eu un euro de retard de loyer et l'encourager à rester où elle est. Faisons preuve d'un minimum de respect pour ceux qui tiennent les quartiers depuis cinquante ans !
Si, en revanche, la grand-mère en question, ne pouvant plus monter quatre étages sans ascenseur et ne recevant plus de visites, souhaite quitter son F5 pour un F3, il faut là aussi lui dérouler le tapis rouge et veiller à ce qu'elle paye un loyer moins élevé dans son nouvel appartement que dans son ancien.
Il faut en effet éviter la pratique de certains bailleurs qui présentent à leurs locataires des F3 plus chers que leurs anciens F5 ! C'est ainsi que les choses se passent dans la vraie vie ! Les bailleurs sont souvent irrespectueux de leurs locataires : plutôt que de les remercier d'accepter un changement, ils les mettent en demeure de payer !
Ce qu'il faut, c'est instaurer un volontariat au moyen de bourses d'échanges pour, le cas échéant, aider ceux qui souhaitent changer de logement tout en conservant toujours un minimum de respect, d'empathie et de reconnaissance à l'égard des personnes qui animent les quartiers depuis des décennies et qui ont toujours été bons payeurs. Cela s'appelle l'humanité. Si un bailleur social n'en est pas capable, alors il n'est pas un bailleur social. Malheureusement, les exemples d'irrespect des locataires sont trop fréquents.
M. Pupponi parle de pratiques sur le terrain ; il va de soi que nous ne pouvons pas être derrière chaque salarié des bailleurs sociaux pour contrôler la manière dont ils gèrent leurs dossiers. Nous élaborons la loi pour encourager un dispositif que j'estime très vertueux. La question du comportement des conseillers ne relève pas de la loi. En l'espèce, ce projet de loi n'aggravera pas la situation existante.
Si, car il encouragera les pratiques non vertueuses ! Les pratiques vertueuses, elles, n'ont pas besoin de la loi pour exister !
Nous sommes ici pour débattre mais je vous prie de respecter les autres intervenants sans les interrompre. Il est tard mais la nuit est encore longue ; ne nous échauffons pas. Achevez votre intervention, monsieur Nogal, suite à quoi M. Peu pourra vous répondre s'il le souhaite.
Encore une fois, ni cet article ni ce projet de loi n'aggraveront la situation. Nous ne sommes pas responsables des pratiques qui ont lieu sur le terrain.
J'entends que l'on soit en désaccord avec tel ou tel argument mais il faut tout de même faire preuve d'un minimum d'honnêteté intellectuelle ! Les pratiques vertueuses sont le fait de personnes vertueuses, et elles existent ; encourageons leur diffusion ! L'article 35, en revanche, ouvre la porte à des pratiques non pas vertueuses mais contraignantes dont rêvent peut-être la DHUP et surtout certains bailleurs sociaux. La voie est libre dans les faits, sinon dans le texte, pour en finir avec le principe du maintien dans les lieux.
En cas de changement de logement, le projet de loi interdira de pratiquer un loyer plus élevé : il sera égal ou inférieur à celui de l'ancien logement.
Ensuite, il faut certes encourager les pratiques vertueuses mais tout le monde ne songe pas à les adopter. Le texte vise à donner les outils nécessaires aux territoires pour qu'ils garantissent un accès équitable au logement et que les propositions faites aux locataires ne soient pas inégales. En outre, il permettra tous les six ans à des locataires ne l'ayant pas encore fait de se demander s'ils ne seraient pas mieux logés dans un appartement plus petit ou plus adapté à leur âge, ou dans un quartier plus proche de services et commerces qu'ils utilisent.
Je n'accepte plus que l'on dise que telle ou telle disposition vient de Bercy, de la DHUP ou d'ailleurs.
J'ai consacré des centaines d'heures à l'élaboration de ce texte et il me semble avoir suffisamment de conscience personnelle et politique pour défendre des mesures qui ne m'ont été soufflées ni par l'une ni par l'autre.
Vous savez très bien ce que prévoit la loi existante, messieurs Peu et Pupponi. Le code de la construction et de l'habitation dispose qu'« en cas de sous-occupation du logement telle que définie à l'article L.621-2, le bailleur propose au locataire un nouveau logement correspondant à ses besoins » et que « le locataire ayant refusé trois offres de relogement faites par le bailleur (…) ne bénéficie plus du droit au maintien dans les lieux ». J'ajoute que cette règle ne s'applique pas aux locataires âgés de plus de soixante-cinq ans, ce qui rend caduc votre argument concernant les personnes âgées. Comment le projet de loi pourrait-il avoir pour but d'inciter les bailleurs à chasser des locataires de leur appartement par la sous-location alors que le code de la construction et de l'habitation l'interdit noir sur blanc ?
La première partie du projet de loi vise à construire plus. Là encore, ne nous cachons pas derrière notre petit doigt : comment faire en sorte que les 1,8 million de personnes qui attendent un logement social puissent entrer plus rapidement dans leurs murs ? Chacun sait que de nombreux logements sociaux comptent des pièces inoccupées. Nous pourrions attendre que tous les bailleurs vertueux s'y emploient, comme à Montrouge ou sur votre territoire, monsieur Peu, car il existe en effet des personnes innovantes, vertueuses et profondément attachées à ce métier, comme vous. Toutefois, le taux de pièces inoccupées dans le parc social est deux à trois fois plus élevé que dans toutes les autres catégories de logements, notamment le parc privé.
C'est pourquoi l'objectif de la loi est de confier aux commissions d'attribution des logements, qui sont au plus près des locataires, la faculté de déterminer avec eux s'il existe des solutions adaptées à leur situation. J'ai voulu – c'est mon intention, et non celle de la DHUP – que la commission d'attribution des logements (CAL) s'en charge car c'est elle qui connaît le mieux la situation des locataires. Nous essayons de remédier à un problème fondamental – l'insuffisance de la mobilité dans le parc social – en demandant aux agents des CAL de ne plus se contenter de placer les locataires une fois pour toutes mais de s'engager à leur proposer une meilleure solution six ans plus tard. Nous sommes à des années-lumière d'une quelconque intention cachée de mettre fin au bail à vie ! Je l'ai dit le premier jour : le bail à vie est un acquis sur lequel il n'est pas question de revenir. Un logement social doit être un tremplin tout au long de la vie si nécessaire. Cela étant, 1,8 million de personnes attendent alors même que des pièces sont inoccupées…
Disant cela, je ne vise pas les pièces inoccupées des logements de locataires de plus de soixante-cinq ans, puisque la loi interdit de les inciter véhémentement à déménager, ce qui, en tout état de cause, n'est aucunement l'objectif de ce projet de loi.
Il faut donc raison garder sur ce sujet, ne pas nier l'existence du problème et ne pas contester le fait que nous tâchons d'y apporter une solution pragmatique. J'aimerais, monsieur Peu, laisser les personnes vertueuses s'en charger, mais si elles étaient assez nombreuses pour y parvenir, nous ne nous trouverions pas dans la situation actuelle que vous avez décrite vous-même.
Encore une fois, le bail à vie n'est pas remis en cause.
Une précision sur le libellé de l'article : l'objectif est bien de proposer un changement de logement, mais le verbe « proposer » n'y figure pas en toutes lettres. Je m'engage donc à l'y inclure, ou tout autre terme qui vous conviendrait, pour préciser qu'il s'agit bien de volontariat – au besoin en précisant qu'aucune pression ne doit être exercée et qu'un contrôle peut être effectué.
Levons toute ambiguïté, monsieur le ministre : je ne prétends pas que l'article 35 nous est proposé à la demande de Bercy ou de la DHUP, mais que les responsables de ces administrations essaient depuis vingt ou trente ans de vendre à leurs ministres successifs le principe du déménagement forcé des locataires en cas de sous-occupation de leur logement ; je vous le dis d'expérience. Encore une fois, je ne dis pas que vous, secrétaire d'État, avez accepté cette mesure ; je dis simplement qu'ils en rêvent et tentent le coup à chaque fois que c'est possible, parce qu'il s'agit selon eux d'une panacée.
Vous rappelez l'article de loi qui interdit de mettre une personne de plus de soixante-cinq ans dehors contre son gré ; soit. Le même article permet néanmoins au bailleur d'adresser trois propositions aux locataires âgés. Songez à la réaction d'une personne de plus de quatre-vingts ans qui reçoit la visite du bailleur ainsi qu'une lettre contenant trois propositions de changement d'appartement – lettre au demeurant rédigée sur un ton impérieux et discourtois, sans même une excuse, car voilà ce qui se passe dans la vraie vie ! Une telle lettre est reçue comme un traumatisme par une personne âgée. Celle-ci se tourne alors vers le maire, le député, l'association de locataires pour comprendre pourquoi elle est mise dehors. Le bailleur, lui, ne prend pas de gants : ni politesse, ni café ni conversation, mais des lettres recommandées qui sont reçues comme des mises en demeure de quitter le logement.
Allez donc expliquer cela à une dame de quatre-vingt-cinq ans qui ne connaît pas l'article L.442-3 du code de la construction et de l'habitation, ce que l'on ne peut guère lui reprocher, et qui reçoit une lettre de son bailleur lui proposant un appartement et lui demandant de déménager !
L'article L.442-3 du code de la construction interdit au bailleur de faire ces trois propositions à une personne de plus de soixante-cinq ans, monsieur Pupponi, contrairement à ce que vous avez dit. Je ne conteste pas le fait que certains bailleurs sociaux fassent mal leur travail et adressent quand même ces propositions mais, en l'état, la loi ne le permet pas. Je salue au passage tous les autres bailleurs sociaux qui, eux, accomplissent un travail formidable.
Si j'ai souhaité que ces réexamens se fassent dans le cadre de la CAL, c'est parce que ses membres étudient la situation concrète des hommes et des femmes qui vivent dans les logements. Encore une fois, aucune obligation n'est imposée – mais je crois que nous ne parviendrons pas à nous entendre sur ce point.
Je l'ai fait, monsieur Pupponi.
La commission rejette l'amendement.
Elle passe à l'amendement CE799 de M. Éric Pauget.
Cet amendement vise à ouvrir le débat sur le logement du personnel hospitalier, en particulier les aides-soignants et les infirmiers. L'article L.441-1 du code de la construction et de l'habitation vise des publics prioritaires au titre de l'attribution de logements sociaux en dehors des commissions de médiation prévues par la loi sur le droit au logement opposable (DALO). L'amendement vise à élargir les attributions prioritaires aux agents de la fonction publique hospitalière.
L'hôpital public, en effet, connaît un grave problème de ressources humaines, en particulier dans les établissements situés dans les centres-villes et les grandes métropoles, où le personnel hospitalier peine à se loger à proximité de l'hôpital alors qu'il est tenu de travailler selon des horaires souvent atypiques et incertains. Ce serait un signe de reconnaissance envers le personnel de l'hôpital, les jeunes infirmiers et les aides-soignants qui, chaque jour, oeuvrent pour notre vie et à qui nous devons la sérénité de se loger dignement.
Je précise avant toute chose que le personnel hospitalier ne comprend pas seulement le personnel médical, mais aussi le personnel d'entretien et du quotidien.
Le code de la construction et de l'habitation répertorie les situations qui rendent les personnes prioritaires pour l'accès au logement social en raison de leurs difficultés en matière de logement – il s'agit notamment de personnes handicapées ou vivant dans un habitat indigne. Il n'est pas souhaitable d'y ajouter des publics déterminés selon des critères sans lien avec le mal-logement. Cela n'empêche nullement les acteurs du logement de travailler au logement de ces personnes, par exemple dans le cadre d'un contingent préfectoral dédié aux fonctionnaires. Avis défavorable.
Le mécanisme de priorité proposé est attaché aux personnes mais pas à leur emploi statutaire. La question soulevée est très importante, mais l'angle d'approche me semble inadapté. Avis défavorable.
Cet amendement me semble très juste, même s'il n'y a pas eu beaucoup d'études d'impact sur ces aspects du texte. En toute franchise, le contingent dédié aux fonctionnaires ne fonctionne pas. Il est ici question des agents hospitaliers mais le problème se pose également pour les policiers, qui travaillent en trois huit avec de fortes contraintes horaires. Or, le logement est une source de difficultés immenses pour ces catégories. Il faudrait restaurer l'efficacité de ce mécanisme, mais cela n'est pas contradictoire avec la notion de public prioritaire et la création de couloirs d'accès pour les personnels qui ne bénéficient pas d'Action logement ni du 1 % logement car leurs établissements n'y cotisent pas.
Parce que les services préfectoraux ont beaucoup de mal à gérer la liste des demandeurs de logement. J'ajoute que dire, comme l'a fait Mme la rapporteure, qu'il ne faut pas donner la priorité aux personnels hospitaliers parce qu'il existe déjà des publics prioritaires…
Outre que cela revient à ne pas répondre aux besoins d'agents de service public qui jouent pourtant un rôle indispensable, c'est une attitude qui, de manière induite, n'est pas loin de conforter la ghettoïsation et la spécialisation des quartiers d'habitat social.
Parlez de cet amendement avec Mme Buzyn, monsieur le secrétaire d'État, car cet amendement s'inspire de déclarations de Martin Hirsch affirmant que l'éloignement du logement et la difficulté d'accéder au logement des fonctionnaires et des personnels hospitaliers en général, notamment en région parisienne, est l'un des premiers facteurs de souffrance au travail dans l'hôpital public.
Le contingent ne fonctionne plus pour deux raisons : la première est celle qu'a expliquée M. Peu, et la deuxième tient au fait que les fonctionnaires, qu'ils soient policiers, agents hospitaliers ou encore militaires, ne veulent plus – et ne peuvent plus – vivre dans des quartiers et des appartements isolés au milieu des dealers du coin et autres. Une solution consiste, comme nous l'avons fait à Sarcelles, à réserver un immeuble aux policiers, par exemple, un autre aux douaniers et un autre encore aux infirmiers : après le travail, ils se retrouvent ainsi dans un environnement qui leur permet de respirer. Songez aux policiers qui, rentrant chez eux le soir, trouvent les pneus de leur véhicule crevés et leur porte vandalisée d'insultes et de menaces de mort : on comprend qu'ils n'aient pas envie de vivre là avec leurs enfants !
La commission rejette l'amendement.
La commission examine l'amendement CE2316 de M. François Pupponi.
Même avis.
La commission rejette l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CE145 de M. Alain Ramadier.
L'amendement CE145 pose la question de la pertinence de la compétence de la commission d'attribution des logements (CAL) pour l'examen périodique des situations des locataires. Il semblerait qu'une structure spécifique, au sein de laquelle seraient conviés les différents réservataires concernés, serait plus adéquate que la CAL.
Avis défavorable : pour des raisons de simplicité, il ne me paraît pas pertinent de créer une nouvelle commission.
Même avis.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CE1796 de M. Stéphane Peu.
Cet amendement, qui me tient à coeur, vise à assurer la présence d'un représentant élu des locataires au sein de la commission d'attribution des logements.
La précision que vous proposez d'apporter étant de nature réglementaire, je vous invite au retrait de votre amendement.
Même avis, et j'ajoute par ailleurs que l'article R. 441-9 du code de la construction et de l'habitation apporte déjà cette précision.
La commission rejette l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CE1503 de M. Max Mathiasin.
Cet amendement vise à permettre à un représentant des locataires de siéger dans la commission d'attribution des logements et d'examen de l'occupation de logements. En effet, les locataires étant les premiers intéressés, il est logique qu'ils puissent être représentés au sein de cette nouvelle commission.
La précision que vous proposez d'apporter étant de nature réglementaire, je vous invite au retrait de votre amendement.
Même avis.
L'amendement est retiré.
La commission examine l'amendement CE146 de M. Alain Ramadier.
L'amendement CE146 vise à ajouter aux critères d'évaluation de la commission d'attribution des logements celui du patrimoine immobilier du locataire. En l'état actuel du droit, le locataire d'un logement HLM doit occuper son logement à titre de résidence principale au minimum huit mois dans l'année. Il convient donc que la commission s'assure que le locataire occupe bien son logement à titre de résidence principale.
L'accès et le maintien dans le logement social se font sur la base du contrôle des plafonds de ressources. Le respect de ces plafonds de ressources est examiné au regard du revenu fiscal de référence. C'est à ce jour l'information la plus fiable. Il convient de rester sur cette information objective : la connaissance du nombre de propriétés du locataire ne permet pas d'avoir une appréciation qualitative de celles-ci.
J'émets donc un avis défavorable à cet amendement.
Cet amendement porte en réalité sur deux sujets.
Premièrement, on entend souvent dire que de nombreuses personnes possèdent une résidence secondaire, et n'occupent leur logement social que quatre jours par semaine. Sans doute existe-t-il quelques cas de ce genre, mais je pense que la réalité de ce phénomène est surévaluée – cela dit, même s'il est limité, je conçois que vous proposiez une solution visant à y mettre fin.
Deuxièmement, je ne suis pas certain que l'on puisse se baser sur le patrimoine immobilier du locataire pour déterminer s'il occupe bien son logement à titre de résidence principale. Aujourd'hui, à l'exception des responsables publics et des personnes assujetties à l'impôt sur la fortune immobilière (IFI), personne ne déclare son patrimoine. Concrètement, retenir le critère du patrimoine immobilier susciterait donc de grandes difficultés, et nécessiterait pour le moins de demander à tous les locataires d'effectuer une déclaration volontaire.
En résumé, je comprends ce qui motive cet amendement, mais j'estime qu'il est impossible à mettre en oeuvre, c'est pourquoi j'y suis défavorable.
Lorsque nous avons engagé la réforme des APL, nous avons pris en compte le patrimoine des allocataires pour diminuer en proportion leurs APL. Cela montre bien que nous sommes capables de déterminer le patrimoine immobilier des locataires : il suffit de leur demander de le déclarer dans le cadre de l'enquête sociale, et d'effectuer éventuellement des vérifications – cela ne pose aucun problème juridique.
Pour ma part, je suis surtout gêné par le critère d'occupation durant huit mois de l'année. Si un Breton qui vient travailler en région parisienne toute sa vie et retourne dans sa région natale pour prendre sa retraite va pouvoir toucher sa retraite et continuer à bénéficier de la sécurité sociale sans problème, il en va tout autrement d'un Algérien ou d'un Malien, par exemple, qui, s'il retourne dans son pays d'origine, ne pourra percevoir sa retraite et bénéficier de ses droits sociaux, à moins de revenir régulièrement en France. C'est une aberration, mais elle existe bel et bien, et je peux vous dire que le jour où on y mettra fin, c'est-à-dire le jour où on n'obligera plus les travailleurs étrangers à conserver une domiciliation en France pour bénéficier de leur retraite et de leurs droits sociaux, on libérera une grande quantité de logements sociaux.
Je veux bien vous croire pour les droits sociaux, mais je suis un peu sceptique en ce qui concerne les retraites, car dans ma circonscription, je connais plusieurs personnes qui touchent leur retraite alors qu'ils résident au Québec ou au Portugal.
Pour ce qui est de la prise en compte du patrimoine dans la détermination du montant des APL, vous avez raison, monsieur Pupponi, si ce n'est qu'elle ne concerne que la moitié des personnes occupant un logement social, et qu'elle s'effectue sur une base déclarative. Si je comprends bien, vous seriez favorable à ce que l'examen de la situation des locataires comprenne une revue de leur patrimoine, comme le propose M. Reda ?
En tout état de cause, je m'étonne que la loi Égalité et citoyenneté, dans le cadre de laquelle la question s'était déjà posée, n'ait pas consacré la mise en oeuvre de ce dispositif.
Je vous le répète, nous avons bâti la réforme des APL sur le principe consistant à prendre en compte le patrimoine des locataires pour diminuer en proportion le montant de leurs APL, ce qui a permis quelques centaines de millions d'euros d'économies.
Pour ce qui est des étrangers, je précise que ceux qui retournent dans leur pays d'origine peuvent percevoir leur retraite, mais qu'ils perdent le bénéfice de l'assurance maladie.
Peut-être, mais veillons à ne pas confondre les Français non-résidents, que j'appelle des Français en mobilité, avec des étrangers !
La commission rejette l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CE2410 de M. François Pupponi.
Même avis.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CE2317 de M. François Pupponi.
Le présent amendement prévoit qu'en cas de refus d'attribution d'un logement à un demandeur en raison de l'insuffisance de ses ressources, la commission d'attribution fasse une proposition alternative correspondant à sa situation, afin de ne pas le laisser sans solution. En effet, puisque les demandeurs ne peuvent refuser qu'un nombre limité de logements, il faut vraiment que les propositions qui leur sont faites soient en adéquation avec leurs moyens : il est inutile de leur proposer un logement qu'ils ne peuvent pas accepter.
Je comprends la motivation de votre amendement, mais je crains qu'il n'entraîne de nombreux effets pervers, notamment la réorientation vers les quartiers prioritaires de la ville (QPV) des ménages aux ressources modestes, pour qui les loyers sociaux sont trop élevés ailleurs. Ce serait donc contre-productif en matière de mixité sociale – que nous nous efforçons de favoriser au moyen de la politique des loyers.
La commission d'attribution émet ses propositions en se basant sur un tableau faisant apparaître d'un côté les loyers fixés par le bailleur, de l'autre les ressources du demandeur, et je ne pense pas qu'elle puisse proposer un logement à un demandeur qui ne disposerait pas des ressources nécessaires.
Si tout va bien, monsieur le secrétaire d'État, la loi ELAN va être adoptée. Or, vous nous expliquez depuis le début de son examen que votre philosophie consiste à permettre de faire varier, à la hausse ou à la baisse, le loyer d'un logement afin de l'adapter à la situation de son occupant. Quand une personne n'a pas les revenus suffisants pour accepter un logement, la CAL doit être en mesure de diminuer le loyer : cela correspond, me semble-t-il, à ce que vous souhaitez.
La modulation du loyer peut s'effectuer dans le cadre de la politique de loyers pratiquée par le bailleur, mais ne saurait résulter d'une décision isolée de la CAL, qui dispose simplement de la compétence de faire des propositions d'attribution de logement, au loyer fixé par le bailleur. Je vous propose de retirer cet amendement afin que nous puissions y travailler avant la séance publique.
L'amendement est retiré.
La commission est saisie de l'amendement CE242 de Mme Stéphanie Do.
Le projet de loi ELAN prévoit que dans les zones tendues, une commission de réexamen se réunisse tous les six ans pour étudier le cas des locataires qui ne remplissent plus les conditions d'attribution. Toutefois, il précise que les articles L.442-3-1 et L.442-3-2 du CCH s'appliquent. Or, ces articles prévoient que, dans certains cas, les locataires en sous-occupation ou dont l'habitat est adapté aux handicapés alors qu'il n'y a plus de personnes présentant un handicap, devront quitter les lieux après trois propositions refusées.
Il semble donc nécessaire de proposer, en même temps qu'une plus grande vigilance dans le réexamen des conditions d'occupation des logements, une généralisation du libre choix et des possibilités d'échange. Cela permettra une meilleure rotation sur la base du volontariat, une meilleure adaptation du logement à la situation des ménages, et une plus grande satisfaction de ceux-ci en les rendant davantage acteurs dans l'attribution de leur logement.
Les mesures d'autorité ne seront appliquées, le cas échéant, que lorsque la location choisie n'aura pas eu les effets attendus. En effet ils auront un an pour choisir un logement. Après ce délai, ils se verront proposer, comme précédemment, trois logements, avec suppression du droit au maintien dans les lieux après le troisième refus.
La loi Égalité et citoyenneté a déjà prévu qu'au plus tard le 1er janvier 2020, les bailleurs seront tenus de porter à la connaissance des demandeurs les logements disponibles. Les modalités de cette publicité seront déterminées par les bailleurs, sans qu'il soit nécessaire de préciser dans la loi le fonctionnement de l'outil qui sera mis en place.
Par ailleurs, c'est à l'EPCI de définir les meilleurs moyens de traiter des demandes de mobilité au sein du parc social.
Je vous invite par conséquent à retirer cet amendement.
Même avis.
L'amendement est retiré.
La commission est saisie de l'amendement CE913 de M. Thibault Bazin.
L'amendement est retiré.
La commission examine, en discussion commune, l'amendement CE147 de M. Alain Ramadier et les amendements identiques CE800 de M. Éric Pauget et CE1466 de Mme Anne-France Brunet.
Nous estimons qu'il serait plus pertinent que l'examen des conditions d'occupation du logement par le bailleur soit réalisé tous les deux ans – périodicité à laquelle est réalisée l'enquête OPS (occupation du parc social) qui renseigne sur la situation socio-économique des ménages locataires du parc social –, plutôt que tous les six ans. Tel est l'objet de l'amendement CE147.
Si cet amendement n'était pas adopté, nous vous proposerions un amendement de repli, le CE800, visant à ce que l'examen des conditions d'occupation du logement par le bailleur soit réalisé tous les trois ans.
En tout état de cause, il nous semble nécessaire de réduire la période entre deux réexamens. En effet, la société évolue, qu'il s'agisse de changements intervenants au sein de la cellule familiale ou dans la sphère professionnelle – comme dirait OSS 117, le monde bouge, et il bouge vite !
Examiner la situation des locataires tous les deux ou trois ans ferait peser un effort très lourd sur les bailleurs. La durée de six ans me semble être un bon compromis entre la stabilité dont ont besoin les locataires et la charge de travail que peuvent supporter les bailleurs. Par ailleurs, je rappelle que le locataire peut demander à tout moment une réévaluation de sa situation. Je suis donc défavorable à ces amendements.
La situation familiale évolue généralement peu en trois ans, et la durée de six ans me paraît constituer un bon compromis entre l'évolution de la situation des locataires et la capacité de la CAL à étudier les cas, c'est pourquoi je suis défavorable à ces amendements.
J'aimerais savoir si le réexamen de la situation du locataire tous les six ans a vocation à remplacer l'enquête sociale qui, elle, est effectuée tous les deux ans.
Non, il ne la remplace pas.
Tous les six ans, en fonction de l'évolution de la situation du locataire, on va vérifier s'il n'y aurait pas pour le locataire un logement plus adapté. Procéder à cet examen tous les deux ans représenterait un travail trop important pour la CAL, et par ailleurs sans grand intérêt : un locataire ayant de jeunes enfants, par exemple, a peu de chances de les voir quitter le domicile familial avant plusieurs années.
Je ne comprends toujours pas l'intérêt de faire tous les six ans ce qui est actuellement fait tous les deux ans dans le cadre de l'enquête sociale. Ainsi, ce n'est parfois qu'au bout de quatre ou cinq ans qu'on va découvrir qu'une personne vit seule dans un appartement où elle était précédemment entourée d'une famille de cinq personnes !
Effectivement, il peut y avoir des trous dans la raquette, mais toute la question se résume à savoir ce que la loi doit demander aux CAL… Pour nous, je le répète, un examen de la situation des locataires tous les six ans semble constituer un bon compromis entre l'évolution de la situation des personnes concernées et la capacité des CAL à effectuer le travail correspondant.
La commission rejette successivement les amendements CE147, CE800 et CE1466.
Elle est saisie de l'amendement CE2619 de M. Emmanuel Maquet.
Il arrive que nos concitoyens soient scandalisés d'apprendre que des personnes fortunées ont continué à bénéficier d'un logement aidé. Selon nous, cela ne peut arriver qu'en raison de l'absence de réexamen de la situation des personnes en temps voulu. Par exemple, si une personne seule se met en couple avec un conjoint très fortuné un mois après que sa situation a été examinée par la CAL, sa nouvelle situation peut rester ignorée pendant cinq ans et onze mois. Afin d'éviter cela, le présent amendement vise à ce que soit effectué un examen de la situation du locataire à chaque fois qu'un changement de sa situation familiale est signalé.
Vous proposez que le bailleur soit tenu de procéder à l'examen de la situation du locataire en cas de signalement d'un changement de la situation familiale. Or, cette notion est très large : s'agit-il de la modification de la taille de la famille, d'une évolution des revenus, d'une évolution de la situation professionnelle ? Du fait de cette incertitude, je suis défavorable à cet amendement.
Cet amendement porte en réalité sur deux sujets différents.
Pour ce qui est des plafonds de ressources, ils sont appréciés dans le cadre de l'enquête sociale, et la loi Égalité et citoyenneté prévoit que, dès lors que les ressources d'un locataire dépassent le plafond de 50 % dans les dix-huit derniers mois, il a deux ans pour quitter le logement qu'il occupe – et doit, en attendant, s'acquitter d'un surloyer. Le projet de loi ne change rien à cela.
En revanche, nous prévoyons qu'il soit proposé aux personnes occupant un logement dont une ou deux pièces sont vacantes de prendre un logement plus petit, pour un loyer moins important.
L'amendement est retiré.
La commission examine l'amendement CE354 de M. Thibault Bazin.
Pour assurer une mobilité effective, assise sur des critères fiables, il convient de donner au bailleur une réelle visibilité. Or, les avis d'imposition donnent des éléments précieux d'appréciation sur la composition des ménages et sur les ressources réelles des locataires. C'est pourquoi l'amendement CE354 propose que ces documents soient fournis aux bailleurs.
Effectivement, cet amendement est satisfait : les bailleurs disposent déjà des avis d'imposition, qui leur sont communiqués dans le cadre de l'enquête sociale.
L'amendement est retiré.
La commission est saisie de l'amendement CE1619 de M. Nicolas Démoulin.
La sur-occupation ne devrait pas être appréciée au regard des normes CAF. Les critères d'appréciation des différents organismes concernés sont très différents les uns des autres. Ainsi, le Conseil supérieur d'hygiène publique de France (CSHPF) considère qu'une occupation normale correspond à une surface de 9 mètres carrés pour une personne seule, 16 mètres carrés pour un couple et 9 mètres carrés par personne supplémentaire, mais l'INSEE se réfère à d'autres éléments.
Quoi qu'il en soit, la sur-occupation concerne 1,4 million de logements et 5,1 millions de personnes en France. On ne peut parler du logement et apporter des solutions concrètes à celles et ceux qui sont victimes de la sur-occupation sans commencer par en définir les critères objectifs.
Le présent amendement, proposé par la Fondation Abbé Pierre, s'appuie donc sur des critères objectifs et indiscutables pour définir la sur-occupation. Ces critères sont les suivants : la surface du bien, la typologie et la composition de la famille, ainsi que l'âge et le sexe des enfants.
Votre amendement est intéressant, mais vous citez des éléments qui devraient être pris en compte sans donner véritablement de définition juridique de la notion de sur-occupation. J'émets donc un avis défavorable.
La notion de sur-occupation qui est ici abordée est extrêmement complexe, car elle répond à plusieurs définitions et renvoie à de nombreux articles de loi. De ce fait, nous ne pouvons nous contenter de modifier cette définition dans le cadre du présent projet de loi : cela aurait trop d'implications qui pourraient nous échapper. J'émets donc un avis défavorable à cet amendement.
L'amendement est retiré.
La commission examine l'amendement CE2411 de M. François Pupponi.
Cet amendement quasi rédactionnel vise à clarifier le texte en ce qui concerne les nouvelles compétences de la CAL, afin d'éviter toute ambiguïté dans son interprétation.
Pour ce qui est de la sur-occupation, je veux souligner qu'il s'agit d'un vrai fléau, auquel nous ne devrions pas trop tarder à nous attaquer.
Je suis favorable à l'amendement CE2411 s'il peut éviter des risques d'interprétations divergentes.
Je suis également favorable à cet amendement.
Par ailleurs, en ce qui concerne la sur-occupation, pour moi le vrai sujet est celui des marchands de sommeil, qui profitent de la situation en toute impunité.
J'ai été frustré par le retrait de l'amendement de M. Démoulin, car je voulais m'exprimer à ce sujet. Comme l'a dit M. Pupponi, la sur-occupation dans le parc social est un vrai fléau, que l'on peut d'ailleurs quantifier : on considère généralement qu'elle est constituée quand il y a dans un logement deux personnes de plus que le nombre de pièces – par exemple, un couple avec quatre enfants occupant un F3.
La sur-occupation chez les marchands de sommeil est effectivement un gros problème, mais il ne faut pas négliger pour autant celle existant chez les bailleurs. Très souvent, ceux-ci sont parfaitement au courant de la situation grâce au personnel d'entretien et de gardiennage, mais ils préfèrent fermer les yeux et n'engagent jamais de procédure – sans doute les choses mériteraient-elles de changer, là aussi.
La commission adopte l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CE961 de M. Jean-Carles Grelier.
Le code de la construction et de l'habitation précise, à l'article L.441-1, les conditions d'attribution prioritaires des logements sociaux.
Cet amendement a pour objectif d'élargir l'attribution prioritaire aux personnes âgées qui sont en voie de perte d'autonomie au sens de la classification GIR, c'est-à-dire aux personnes âgées présentant un handicap ou aux personnes âgées de plus de 65 ans dont l'évaluation de l'autonomie est égale ou inférieure à 4.
Cet amendement étant satisfait par la rédaction de l'alinéa 26, je vous invite à le retirer.
Même avis.
L'amendement est retiré.
La commission examine l'amendement CE1970 de M. Max Mathiasin.
Le projet de loi prévoit que, tous les six ans, le bailleur propose à la CAL un certain nombre de dossiers concernant des locataires en situation de sur-occupation ou de sous-occupation, par exemple à la suite du départ d'un locataire handicapé ou d'un handicap venant frapper une personne occupant un logement.
Cette possibilité étant prévue en cas de dépassement du plafond de ressources, il est logique de la prévoir dans le cas contraire d'une diminution des ressources. Ainsi, le locataire connaissant une baisse de ressources supérieure à 20 % devrait pouvoir bénéficier de cette révision de sa situation tous les six ans – à défaut, il risque de passer sous les radars.
Je suis défavorable à cet amendement dans la mesure où la politique des loyers doit pouvoir répondre à la préoccupation qu'il exprime.
Nous avons déjà eu le même débat tout à l'heure. Franchement, je n'ai pas d'idée préconçue au sujet de la périodicité de la révision de la situation des locataires, mais j'estime qu'il faudrait choisir : soit on procède à cette révision tous les six ans, soit on fixe pour principe de l'effectuer à chaque fois que l'enquête sociale fait apparaître une modification. J'ai tendance à penser qu'il serait plus clair pour tout le monde de considérer que cette révision doit avoir lieu tous les six ans, mais je suis disposé à entendre les arguments des uns et des autres. Je demande donc le retrait de cet amendement.
Je retire cet amendement, mais j'espère que les personnes dont les revenus baissent ne passeront pas sous les radars.
L'amendement est retiré.
La commission est saisie des amendements identiques CE486 de M. Alain Ramadier et CE2412 de M. François Pupponi.
Les personnes inscrites dans un parcours résidentiel locatif – social ou libre – ont parfois tendance à s'autocensurer lorsqu'elles envisagent d'accéder à la propriété. Afin de remédier à cela, l'amendement CE486 vise à permettre aux commissions d'attribution de préconiser l'accession sociale dans le cadre du parcours résidentiel, donc d'encourager à la sortie du locatif quand la situation des ménages le permet.
L'article 35 me paraît contenir une anomalie dans la mesure où il prévoit que le niveau de ressources fait l'objet d'une vérification par la CAL, alors que ce contrôle est déjà effectué dans le cadre de l'enquête sociale : à mon sens, les deux dispositifs risquent de se télescoper.
Par ailleurs, les lois DALO et ALUR ont établi la liste des publics prioritaires pour l'attribution de logements sociaux. Cependant, si les bailleurs envoient tous les six ans à la CAL les populations concernées par l'article 35, ces personnes ne vont-elles pas devenir prioritaires par rapport aux autres ? Si je pose cette question, c'est parce que le cas échéant, les personnes qui sont déjà en liste d'attente risquent de ne jamais voir arriver leur tour, auquel cas le problème ne serait jamais réglé…
Le mécanisme prévu est le suivant : quand une famille DALO avec quatre enfants, ayant besoin d'un F4, est adressée à la commission d'attribution, celle-ci va constater qu'un couple avec un seul enfant occupe un F4 : elle va alors proposer à ces locataires de passer dans un F2 ou un F3, pour un loyer d'un montant inférieur.
Même avis.
J'entends ce que vous me dites, monsieur le secrétaire d'État, mais si la famille en sous-occupation à qui il va être proposé un F3 n'est pas prioritaire, elle n'aura jamais accès à ce logement : à un moment donné, il faut donc qu'elle soit classée prioritaire.
La commission adopte ces amendements.
Elle examine l'amendement CE1467 de Mme Anne-France Brunet.
Certains locataires sont désireux de quitter leur logement non pas pour des motifs de changement de situation, mais plus simplement pour changer de voisinage, de quartier ou d'environnement. Ces locataires se retrouvent parfois bloqués car ils n'osent pas quitter leur logement social, sachant qu'il sera très difficile d'en trouver un nouveau. L'amendement CE1467 vise à leur donner un droit au changement de logement tous les neuf ans.
Même avis.
L'amendement est retiré.
La commission est saisie de l'amendement CE1605 de M. Stéphane Testé.
Cet amendement vise à favoriser la mutation des personnes en sous-occupation, notamment en raison de la décohabitation des enfants ou des séparations, vers des logements plus petits et plus conformes aux besoins, par la mise en place d'une politique tarifaire adaptée pour le nouveau logement afin de ne pas entraîner de surcoût pour le locataire.
Aujourd'hui, de nombreux logements sociaux sont en sous-occupation pour cette raison, ce qui constitue un frein aux mutations dans le parc social, lequel souffre d'une pénurie de grands logements. Certains bailleurs tiennent déjà compte du coût au mètre carré du logement actuellement occupé pour l'appliquer au nouveau logement proposé. L'amendement CE1605 vise à inscrire cette pratique dans la loi.
Le projet de loi prévoit déjà que la demande de mutation doit se faire à loyer équivalent ou inférieur, et cet amendement peut se révéler contre-productif dans le cadre d'une mobilité volontaire pour un loyer d'un montant supérieur – un souhait qu'il n'y a aucune raison de décourager. Je le répète, aucune mobilité ne sera forcée. Je suis donc défavorable à cet amendement.
Avis défavorable.
Pour ma part, je suis favorable à cet amendement, car je connais plusieurs bailleurs qui appliquent déjà ce principe, et j'estime que ce dispositif gagnant-gagnant – on libère un grand logement et on récupère du pouvoir d'achat – est l'outil idéal pour favoriser les mutations volontaires.
Je comprends la logique de cette proposition mais je ne peux y adhérer. En effet, le prix au mètre carré est de nature à induire en erreur le locataire, qui peut passer d'un F4 de 70 mètres carrés des années 1950 à un F3 de 85 mètres de 2018 – tous deux proposés par le même bailleur : il paiera alors plus cher le F3 que le F4, parce que le premier compte plus de mètres carrés. Dans ce cas, il faut que son loyer soit maintenu, comme le prévoit d'ailleurs l'article L.442-3-1.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CE1679 de la rapporteure.
L'objet de cet amendement est d'inclure les enfants faisant l'objet d'un droit de visite dans la définition de la sous-occupation.
Avis favorable, mais je n'exclus pas de proposer un sous-amendement en séance.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'article 35 modifié.
La réunion, suspendue à vingt-trois heures quarante, reprend à vingt-trois heures cinquante-cinq.
Après l'article 35
La commission est saisie de l'amendement CE2413 de M. François Pupponi.
Le présent amendement actualise la liste des justificatifs admis pour une individualisation des ressources des personnes en cours de séparation.
Lorsqu'un demandeur de logement social est marié ou pacsé, le principe est que les ressources prises en compte pour l'attribution d'un logement social sont celles du couple, compte tenu de la solidarité fiscale. La législation prévoit toutefois des cas où il est permis d'individualiser les ressources du seul demandeur en cours de séparation. Compte tenu des évolutions de procédure, notamment l'instauration d'un divorce extrajudiciaire, il convient de revoir la rédaction du code. Toutefois, votre amendement pose quelques problèmes rédactionnels : je vous invite donc à le retirer afin de le retravailler d'ici la séance publique.
Même avis.
L'amendement est retiré.
La commission examine l'amendement CE914 de M. Emmanuel Maquet.
Même avis.
La commission rejette l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CE958 de M. Jean-Carles Grelier.
La perception d'une indemnité légale de départ à la retraite, de licenciement ou de rupture conventionnelle, par nature ponctuelle, peut déclencher le seuil d'assujettissement au paiement du supplément de loyer de solidarité (SLS) puisqu'elle prend en compte les ressources et pas uniquement les salaires. Cependant le montant de la pension de retraite peut ne pas modifier durablement le niveau de vie des bénéficiaires. Cet amendement propose donc d'exclure de l'assiette de calcul du supplément de loyer de solidarité les indemnités légales de départ à la retraite.
Après le coup de rabot porté au niveau de vie des retraités dans le cadre du vote du projet de loi de finances pour 2018, il convient de rétablir l'équilibre : cet amendement peut y contribuer.
L'article L.441-3 du code de la construction et de l'habitation relatif au SLS prévoit que « les ressources sont appréciées selon les modalités applicables en matière d'attribution des logements ». C'est donc le revenu fiscal qui est pris en compte.
Le SLS étant la sanction du dépassement des plafonds de ressources fixés pour l'attribution du logement, il importe que les modalités de calcul des ressources pour l'attribution du logement et pour le SLS soient cohérentes.
Je suis donc défavorable à cet amendement.
Même avis.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine les amendements identiques CE606 de M. Pierre Cordier et CE2414 de M. François Pupponi.
Concernant l'instruction d'une demande de logement social, en cas de séparation de couple, seul est pris en compte l'enfant en garde alternée. L'amendement CE606 propose que l'enfant faisant l'objet d'un droit de visite soit également pris en compte au titre des personnes considérées comme vivant au foyer.
Je suggère le retrait de cet amendement, qui a trait à la question de l'attribution du logement et non à celle de la sous-occupation
Comme je l'ai déjà dit, je crois que nous ne pourrons pas régler le problème de la sous-occupation dans le cadre de ce texte, c'est pourquoi je souhaite également le retrait de cet amendement.
J'aimerais savoir si vous avez l'intention de reprendre sous une autre forme la disposition proposée, ou si vous souhaitez son retrait définitif.
J'ai déposé un amendement identique CE2414. Si on ne prend pas en compte les enfants faisant l'objet d'un droit de visite, à chaque fois que le parent isolé demandera un logement, on lui répondra que sa famille n'est pas assez nombreuse pour avoir un F3. Or, il est essentiel qu'il puisse obtenir un tel logement afin de pouvoir accueillir son enfant, car à défaut certains juges considéreront qu'il n'a pas la capacité de recevoir son enfant.
Pour ma part, je maintiens mon avis de retrait afin de réécrire cet amendement. La multiplicité des cas de figure rend le problème très complexe. Par exemple, quelle décision allez-vous appliquer à une famille dont deux enfants font l'objet d'un droit de visite ? J'ai bien conscience que ce que je viens de dire constitue un aveu de faiblesse face aux 1,8 million de personnes en attente. Aujourd'hui, le système est conçu pour favoriser les familles comprenant quatre enfants à charge, mais il n'est pas satisfaisant pour les autres. Nous devons trouver une solution, mais elle ne sera pas simple à définir.
Si je retire cet amendement, je compte sur vous, madame la rapporteure, pour veiller à ce que le Gouvernement tienne parole.
J'insiste sur l'importance de prendre en compte les enfants faisant l'objet d'un droit de visite : une personne qui a un droit de visite pour trois enfants doit être considérée comme une personne ayant trois enfants : à défaut, elle ne pourra pas obtenir un logement lui permettant de les accueillir.
J'en conviens et je m'en remets à la sagesse de la commission.
La commission adopte ces amendements.
La commission examine les amendements identiques CE607 de M. Pierre Cordier et CE2415 de M. François Pupponi.
Suivant l'avis défavorable de la rapporteure et du Gouvernement, la commission rejette ces amendements.
Puis elle en vient à l'amendement CE1976 de Mme Josy Poueyto.
Un peu similaire à celui de Mme la rapporteure concernant la définition de la sous-occupation, cet amendement demande à ce que soient pris en compte les enfants d'un parent divorcé accueillis dans le cadre du droit de visite et d'hébergement. Mme la rapporteure mentionnait l'alinéa 2 de l'article L.621-2 du code de la construction et de l'habitation mais il faut aussi modifier l'alinéa 4 du même article.
L'amendement est satisfait par mon amendement CE1679 à l'article 35, qui vient d'être adopté. Je demande donc le retrait de votre amendement.
Cohérent avec moi-même, je demande le retrait de cet amendement.
S'il est satisfait, je le retire. Vérifiez tout de même que c'est le cas parce qu'il ne s'agit pas du même alinéa.
L'amendement est retiré.
La commission examine les amendements identiques CE608 de M. Pierre Cordier et CE2313 de M. François Pupponi.
Suivant l'avis défavorable de la rapporteure et du Gouvernement, la commission rejette ces amendements.
Puis elle examine amendements identiques CE609 de M. Pierre Cordier et CE2416 de M. François Pupponi.
Même avis.
Ces amendements sont retirés.
Article 36 (articles L. 441-2-8 et L. 441-2-9 du code de la construction et de l'habitation) : Généralisation du système de cotation de la demande de logement social
La commission examine l'amendement CE1797 de M. Stéphane Peu.
Nous demandons la suppression de cet article qui introduit la cotation dans les critères d'attribution des logements sociaux. Tout ce qui nous permet de gagner en transparence est évidemment bienvenu mais les expériences de cotation qui ont été faites dans des zones tendues comme Paris montrent que le système est relativement imparfait. Je vois bien l'intérêt qu'il y a à toujours réorganiser les listes d'attente, mais le vrai problème c'est les listes d'attente elles-mêmes et leur résorption. C'est un peu comme le thermomètre et la fièvre. En outre, cette cotation ne permet pas d'avoir des attributions au plus près des préoccupations de mixité sociale, à la cage d'escalier ou au quartier.
Il ne s'agit que d'un outil d'aide à la décision, qui ne se substituera pas aux CAL. Les modalités du système local de cotation seront, par ailleurs, définies localement par les EPCI en partenariat avec les bailleurs sociaux et les réservataires. Avis défavorable.
Outil d'aide à la décision au niveau des CAL, la cotation doit aussi permettre de préciser aux personnes en attente quels sont les critères d'attribution. D'une manière générale, ces critères sont déjà définis dans le droit, et des pondérations peuvent être fixées par les EPCI. Le dernier mot revient aux CAL mais le système permet de répondre à un souci de transparence.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine les amendements identiques CE2177 rectifié de M. Mickaël Nogal et CE2318 de M. François Pupponi.
Favorable.
La commission adopte ces amendements.
Puis elle en vient à l'amendement CE2417 de M. François Pupponi.
Suivant l'avis défavorable de la rapporteure et du Gouvernement, la commission rejette l'amendement.
Puis elle passe à l'amendement CE355 de M. Thibault Bazin.
Lors de l'attribution des logements, la prise en compte du lien avec la commune d'implantation du logement peut être une véritable nécessité, afin de permettre notamment de résoudre des situations locales particulières. La capacité pour un maire d'attribuer prioritairement un logement à une personne ayant des attaches avec la commune doit être appréhendée comme un localisme intelligent. En outre, il est important que le maire d'une commune ayant un quartier prioritaire de la politique de la ville (QPV) puisse empêcher que sa commune ne se paupérise davantage.
La généralisation du système de cotation risque de provoquer une paupérisation plus grande de certains quartiers, ce qui est contraire aux objectifs recherchés.
Il est important de pouvoir prendre en compte les attaches locales du demandeur : travail, mode de garde des enfants. À dossier équivalent, il est donc opportun de conserver la possibilité de privilégier un demandeur communal vis-à-vis des demandeurs d'autres communes. Cela permet de répondre à la demande des habitants de la commune dans le respect des principes de mixité sociale.
Suivant l'avis défavorable de la rapporteure et du Gouvernement, la commission rejette l'amendement.
Puis elle en vient à l'amendement CE148 de M. Alain Ramadier.
Cet amendement me permet de vous reparler des établissements publics territoriaux (EPT) de la métropole du Grand Paris, qu'il faut supprimer ou, à tout le moins, réformer rapidement. Il faut surtout supprimer cette idée de cotation de la demande de logements. À l'échelle d'un EPT, qui est, en gros, une agglomération de 300 000 à 700 000 voire 800 000 habitants, il est totalement aberrant d'avoir ce système de cotation uniforme alors que les situations géographiques et sociales de ces territoires intercommunaux sont totalement disparates.
L'enjeu même de la cotation est de disposer d'un système harmonisé sur un territoire afin d'encourager une gestion partagée de la demande. La cotation doit donc être la même pour tous les réservataires, même si chacun d'eux reste souverain au moment de la présentation de ses candidats. Avis défavorable.
Pour ma part, je demande le retrait. Vous avez tout à fait raison : il y a un trou dans la raquette que, personnellement, je n'avais pas vu.
L'amendement est retiré.
La commission est saisie de l'amendement CE149 de M. Alain Ramadier.
Défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine l'amendement CE1607 de M. Stéphane Testé.
Cet amendement vise à apporter de la transparence puisqu'il a pour objectif d'informer les demandeurs sur les modalités de cotation, lors du dépôt initial ou du renouvellement de la demande de logement social.
Idem.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle en vient à l'amendement CE2203 de Mme Marie-Pierre Rixain.
L'accès au logement pour les victimes de violences intrafamiliales est une question ancienne et documentée. Comme l'indiquait en 2006 le rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et du conseil général des Ponts et chaussées, disposer d'un logement sûr et pérenne est un élément essentiel du parcours de reconstruction des victimes et de réappropriation de leur autonomie. Cet élément devient indispensable lorsque les victimes ont des enfants à charge.
De nombreux dispositifs existent. Ils impliquent des acteurs variés : les associations, les collectivités, les bailleurs sociaux, l'État et ses opérateurs. Ces bonnes pratiques sont limitées géographiquement et, souvent, elles ne dépassent pas le stade expérimental. C'est pourquoi cet amendement vise à les étendre.
Le système de cotation, établi par l'article 36, va contribuer, sans aucun doute, à rendre plus transparent le processus d'attribution des logements sociaux. En cela, il constitue un indéniable progrès. Il doit également en être un pour les personnes victimes de violences conjugales et intrafamiliales.
L'amendement proposé vise à prendre en compte, dans les points attribués à chaque demandeur par le système de cotation, le cas des personnes victimes de violences conjugales et intrafamiliales qui justifient d'une décision de justice.
Je demande le retrait de cet amendement car il me semble satisfait.
Actuellement, l'article L.441-1 du code de la construction et de l'habitation dispose déjà que les personnes victimes de violence au sein d'un couple et celles qui sont menacées de mariage forcé font partie des personnes prioritaires pour l'accès au logement social. L'article 36 de ce projet de loi rappelle bien que le système de cotation devra respecter les priorités d'attribution générales fixées par la loi.
Je tiens à être très précis sur ce point. Le texte indique que le plan de gestion de la demande devra respecter les priorités et les critères qui sont définis à l'article L.441-1 qui inclut déjà le public que vous mentionnez. Les collectivités qui mettent en place ce plan de gestion, c'est-à-dire les EPCI, prennent en compte ce critère en le pondérant comme ils le souhaitent. Demande de retrait.
L'amendement est retiré.
La commission examine l'amendement CE2418 de M. François Pupponi.
Même avis.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'article 36 modifié.
Après l'article 36
La commission est saisie de l'amendement CE2276 de M. François Pupponi.
Suivant l'avis défavorable de la rapporteure et du Gouvernement, la commission rejette l'amendement.
Puis elle en vient à l'amendement CE865 de M. Éric Woerth.
Il existe actuellement un seuil unique de déclenchement de l'obligation de quitter les lieux pour tous les locataires, quel que soit le type de logement social qu'ils occupent. Ce seuil est fixé à 150 % du plafond des prêts locatifs social (PLS).
Cet amendement propose de revenir sur ce seuil unique en rétablissant la situation préalable à la loi du 27 janvier 2017, avec un plafond correspondant à chaque type de logement occupé. L'idée est d'avoir vraiment un parcours dans le parc avec la mobilité que vous souhaitez.
Avis défavorable. Cette mesure, entrée en vigueur récemment, concerne, par exemple, des personnes seules qui gagnent plus de 3 750 euros par mois en Île-de-France.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Article 37 (articles L. 441-1-5 et L. 441-1-6 du code de la construction et de l'habitation) : Simplification des procédures d'attribution des logements sociaux situés en quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV)
La commission est saisie de l'amendement CE2277 de M. François Pupponi.
Je n'ai pas compris l'alinéa 1er de cet article 37. Dans la loi Égalité et citoyenneté, nous avons essayé de travailler sur la mixité sociale et nous avons pris des mesures indispensables pour faire en sorte que l'on arrête de mettre les populations les plus fragiles et en grande difficulté dans ces quartiers où elles sont déjà très nombreuses. L'idée est de limiter leur concentration dans les mêmes lieux.
Nous avons donc créé une commission spéciale d'attribution pour les QPV, qui n'a rien à voir avec la commission intercommunale qui définit les critères d'attribution. Dans les QPV, s'il n'y a pas une mise sous surveillance précise de tous les acteurs du terrain, on sait comment ça se passera : les CAL continueront à envoyer les plus gens les plus fragiles dans ces quartiers. Pour éviter ce phénomène, il faut une commission spéciale par QPV qui regarde toutes les attributions et qui fusionne tous les contingents.
Pour des raisons que je ne comprends pas – ou, au contraire, qui sont très limpides : vous ne voulez plus lutter efficacement contre la ghettoïsation de ces quartiers – vous avez supprimé cette commission.
J'ai bien entendu la définition que vous donnez de votre commission spécifique. Une commission de coordination de la convention intercommunale d'attribution a aussi été créée dans le cadre de la loi Égalité et citoyenneté. Il paraît donc plus cohérent de lui donner cette compétence. Avis défavorable.
Nous nous sommes fondés sur les retours de terrain. Les membres de cette commission, qui sélectionne les candidats aux CAL, sont souvent très peu éloignés des membres de la CAL. Selon les EPCI, le dispositif ne présente qu'une très faible utilité tout en ajoutant une étape supplémentaire dans le parcours. C'est pourquoi nous proposons la suppression de cette commission. Avis défavorable.
Il est bien évident que les EPCI ne veulent pas de cette commission spéciale ! Mettez-vous à la place d'un EPCI qui ne compte qu'un ou deux QPV. La commission spéciale l'empêche d'accueillir les populations les plus fragiles dans ces QPV. Il faut alors les mettre ailleurs, là où il n'y a pas beaucoup de populations fragiles. Si vous demandez à des gens qui ne veulent pas des populations les plus fragiles si cette commission fonctionne, ils vont évidemment vous répondre par la négative. Ils veulent continuer à gérer les attributions au niveau de l'EPCI et à concentrer les populations les plus fragiles dans les QPV. Si vous demandez à un aveugle s'il veut voir, la réponse est évidente !
C'est précisément pour lutter contre les égoïsmes locaux que nous avons créé cette commission spéciale. Dans certains EPCI où les QPV sont très peu nombreux, ils continuent à concentrer les populations les plus fragiles dans ces quartiers. Cette commission spéciale est une espèce de barrière et elle regarde ce qui se fait spécifiquement dans le QPV.
Pour la créer, nous nous sommes battus contre la ministre de l'époque, bien qu'elle ait été de notre couleur politique, et contre les égoïsmes locaux. Vous revenez sur ce dispositif en écoutant ceux qui ghettoïsent. Vous les encouragez à continuer dans cette voie. C'est inimaginable que l'on puisse supprimer cette commission sur laquelle était fondé tout le dispositif de la loi égalité et citoyenneté.
Je suis en plein accord avec François Pupponi dont nous connaissons tous l'engagement en faveur de la mixité. Il ne s'agit pas seulement d'avoir une commission d'attribution ad hoc pour les QPV. Telle que prévue, cette commission a d'autres dimensions. Elle tend notamment à fusionner les contingents, ce qui n'est pas la moindre des choses. Qui ghettoïse le plus ? La préfecture qui attribue son contingent de manière un peu automatique. Les organismes du 1 % logement, qui doivent répondre à des mandants et à des cotisants, répartissent souvent les salariés en fonction des catégories sociales : les salariés les plus captifs sont envoyés dans les lieux les moins attractifs.
Il est donc absolument nécessaire d'avoir des commissions à l'échelle des QPV, qui fusionnent les contingents et regardent au plus près des réalités et des cages d'escalier, même s'il reste à surmonter des freins culturels pour que le système soit pleinement efficient.
Fidèle à ma méthode, je vous propose de vous apporter tous les éléments concernant l'étude d'impact dont je dispose, lors du débat dans l'hémicycle, et je m'en remettrai à la sagesse des parlementaires.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine, en discussion commune, l'amendement CE1854 de M. Stéphane Peu, l'amendement CE2419 de M. François Pupponi, et les amendements CE490 et CE151 de M. Alain Ramadier.
Cet amendement-là aussi est très important ! Dans les QPV, il faut que l'on puisse déroger aux plafonds de ressources pour éviter que des gens ne soient refusés au motif qu'ils ont des revenus trop élevés comme cela arrive tous les jours. Dans un souci de mixité sociale, il faut pouvoir attribuer des logements sociaux en QPV à des gens qui ont des moyens. Si on ne le fait pas, c'est que l'on ne veut pas de mixité sociale dans ces quartiers.
Nos amendements procèdent du même esprit. Ces quartiers sont ceux qui accueillent le plus de personnes au titre de la loi sur le droit au logement opposable (DALO). Les bailleurs et les collectivités doivent se mobiliser pour garantir une vraie mixité des publics dans ces quartiers.
Je demande le retrait de ces amendements. Les propositions sont intéressantes mais la rédaction doit être revue, notamment pour mieux les encadrer dans le dispositif des orientations de la Conférence intercommunale du logement (CIL) et éviter toute dérive dans la fixation de plafonds trop élevés et contraires au SIEG.
Ces amendements sont déjà satisfaits dans la mesure où la dérogation existe même si elle passe par un arrêté préfectoral. Je fais référence à l'article R.441-1-1 du code de la construction et de l'habitat. C'est pourquoi je demande le retrait des amendements.
Comme vous dites, monsieur le secrétaire d'État, la dérogation est d'ordre réglementaire et elle doit être acceptée par le préfet. Pour que la dérogation soit accordée, il faut qu'un élu appelle le préfet pour lui demander de le faire, au cas par cas. Cela devrait être la règle, monsieur le secrétaire d'État !
Dans ces QPV, on devrait prendre tout de suite un demandeur qui a les revenus nécessaires. Pourquoi demander au préfet d'accepter de faire venir des classes moyennes dans ces quartiers ? C'est que l'on n'en veut pas ! Normalement, l'acceptation devrait être automatique.
Pour ma part, il m'arrive d'entendre parler de ce genre de cas, par hasard, environ trois fois par an. La dernière fois, c'était le chef de rang d'un restaurant parisien qui veut à tout prix habiter Sarcelles et qui gagne 2 700 euros. Les agents du service de la préfecture l'ont refusé au motif qu'il gagnait trop d'argent !
Dès que les gens qui sont au-dessus du niveau de ressources demandent un logement social dans un QPC, il faut le leur accorder. Malheureusement, ils ne sont pas nombreux. Quand cela arrive, il faut les prendre. Cela doit être dans la loi.
Le cas que vous mentionnez est particulièrement criant. C'est pour ce genre de situation que la dérogation par arrêté préfectoral existe. Si nous créons des règles prévoyant des plafonds de ressources, il est difficile de dire qu'elles ne vont pas s'appliquer à un territoire donné.
C'est compliqué. Il faut pouvoir le faire mais selon une procédure adaptée. Je maintiens mon avis.
La commission rejette successivement les amendements CE1854, CE2419, CE490 et CE151.
Puis elle adopte l'article 37 sans modification.
Après l'article 37
La commission est saisie de l'amendement CE1263 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert.
Cet amendement vise à lutter contre le phénomène de vacance de logement qui existe dans certains territoires où des HLM avaient été construites pour répondre aux besoins d'entreprises qui n'existent plus. Les HLM subsistent alors que les entreprises ont fermé. Dans certains bâtiments, les logements sont vacants à 80 %. Quand les offices parviennent à trouver des locataires, il arrive que ceux-ci soient obligés de payer des pénalités parce qu'ils ont des revenus supérieurs au plafond de ressources. L'amendement vise à permettre de déroger à ces plafonds.
Cette dérogation est déjà possible. Votre amendement étant satisfait, je demande son retrait. Sinon, j'émettrai un avis défavorable.
Même avis pour les raisons déjà évoquées pour les amendements précédents.
Je ne crois pas que nous parlons exactement de la même chose. En l'occurrence, les personnes visées par l'amendement sont acceptées mais elles doivent s'acquitter d'un surloyer. Est-ce bien cela ? Quelle est cette pénalité ?
Madame la rapporteure, vous avez indiqué que l'amendement était satisfait. Vous nous confirmez qu'il n'y a pas de surloyer dans les QPV ?
Admettons qu'il n'y a pas de surloyer dans les QPV qui existent dans les grandes villes. Cela étant, il y a, dans notre pays, des territoires qui sont en difficulté pour ne pas dire qu'ils sont oubliés de la République : les QPV mais aussi des zones rurales et des villes en décroissance.
Je suis récemment allé pour une réunion à Montluçon, une ville qui a perdu beaucoup d'industries et d'emplois, où il y a de nombreux logements vacants qui ne peuvent pas tous être démolis. Dans ces territoires en difficulté de la République, pour ne pas utiliser des termes embêtants, peut-on déroger à la règle des surloyers pour favoriser la mixité sociale ou la reconquête démographique ?
Il vaut mieux que vous le retiriez pour le réécrire : vous évoquez les QPV sans parler de surloyer, vous faites référence à des zones détendues. Il faut vraiment clarifier le point sur lequel vous souhaitez apporter une précision.
L'amendement est retiré.
La commission examine l'amendement CE1260 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert.
Cet amendement vise à faire économiser jusqu'à 165 millions d'euros par an aux organismes de logement social, en supprimant une obligation administrative à laquelle ils sont soumis et qui pourrait être satisfaite par un simple transfert automatique de données fiscales.
Les organismes de logement social sont obligés de faire deux enquêtes pour obtenir l'avis d'imposition ou de non-imposition à l'impôt sur le revenu que le bailleur doit requérir auprès des locataires, des documents disponibles dans les services fiscaux.
Nous avons fait une simulation avec l'OPAC38, en Isère, qui assure le suivi de 26 000 locataires d'HLM. L'organisme estime le coût de récupération des informations fiscales à environ 50 euros par locataire, soit 1,3 million d'euros tous les deux ans et une moyenne annuelle de 975 000 euros de coût en équivalent temps et salaire pour récupérer des informations disponibles auprès du fisc et qui pourraient être envoyées de manière numérique.
Les organismes doivent demander ces informations aux locataires qui prennent un risque locatif quand ils peinent à fournir ces documents. Il serait possible de proposer au locataire, à son entrée dans le logement, de signer une dérogation qui permettrait aux services fiscaux compétents de transmettre directement les informations nécessaires aux organismes d'HLM.
Votre intention est tout à fait louable mais, compte tenu de l'expertise technique qui me semble nécessaire, j'émets un avis défavorable à votre amendement.
Cet amendement soulève deux problèmes mais pourrait recevoir une solution à terme.
Tout d'abord, l'administration fiscale enverrait les informations concernant l'impôt sur le revenu à tous les bailleurs sociaux, de manière automatique, ce qui pose un problème de protection de données du ressort de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL). À raison, l'administration fiscale n'envoie jamais les données concernant l'impôt sur le revenu à un tiers.
Ensuite, même si l'on trouvait un moyen de surmonter ce problème, l'administration fiscale a bien d'autres choses à faire en ce moment, notamment en raison de la prochaine entrée en vigueur du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu. Il me paraît peu probable qu'elle ait, en quelques mois, les moyens de faire les modifications techniques nécessaires à l'envoi de ces données à tous les bailleurs sociaux.
En revanche, la solution réside peut-être dans le Système national d'enregistrement (SNE) où il y a des croisements de données. À terme, ce système permettra d'avancer dans le sens que vous souhaitez.
Votre intention est juste mais il ne servirait à rien d'inscrire dans la loi une telle mesure qui se heurterait à des problèmes d'application. Je demande le retrait de cet amendement. À défaut, j'émettrais un avis défavorable.
Je vais le retirer et, d'ici à la semaine prochaine, je vais vous fournir les documents qui vous manquent pour pouvoir juger favorablement cette proposition. Avant de proposer cet amendement, je me suis vraiment renseignée auprès de toutes les personnes compétentes, notamment à Bercy.
L'amendement est retiré.
Article 38 (article L. 441-1 du code de la construction et de l'habitation) : Gestion en flux des droits de réservation sur les logements sociaux
La commission est saisie des amendements identiques CE155 de M. Alain Ramadier et CE2278 de M. François Pupponi.
C'est un amendement de suppression. La gestion en stock, sur laquelle prétend revenir cet article, a quand même fait ses preuves : elle responsabilise le réservataire et lui permet de maîtriser le peuplement grâce à une identification, en proximité, des logements vacants. En outre, ce système est généralement sous-tendu par les garanties d'emprunt que donnent les réservataires, en particulier les collectivités. Il est normal qu'ils aient, en retour, un droit de regard sur les logements présents sur leur territoire.
Globalement, le système de gestion en flux existe déjà. Quand un réservataire n'attribue pas l'un de ses logements, celui-ci retourne dans le contingent global.
Vous allez mettre en place une procédure qui va complexifier les choses : j'avais le logement, je l'ai perdu, il faut que j'en récupère un qui présente la même typologie, etc. Il va falloir un sacré suivi ! En fait, c'est ingérable.
Le système actuel est plutôt performant. Si un réservataire n'utilise pas son logement, celui-ci bascule dans le droit commun : le préfet et les bailleurs le récupèrent. Il n'y a donc pas de vacances. Quant au système que vous voulez mettre en place, je ne vois pas comment il va fonctionner.
La gestion en flux apporte de la flexibilité dans la politique d'attribution. Cette flexibilité permet au bailleur de mutualiser les opportunités, de faire mieux correspondre l'offre à la demande de logement et de définir le meilleur équilibre dans l'occupation de son parc au regard des objectifs de mixité sociale. Avis défavorable.
Vous avez raison, ces mécanismes peuvent déjà exister. Tout le monde s'arrange sur le mode : je ne prends pas ce logement donc vous allez le prendre. Cependant, nous essayons de résoudre une question fondamentale : l'appartement doit revenir à un même type de public, notamment les populations prioritaires.
Après en avoir longuement débattu avec les offices et les entreprises sociales pour l'habitat (ESH), nous avons testé la mesure. Celle-ci a reçu un accueil favorable de la part des offices et des ESH. C'est pourquoi vos propos m'étonnent, même si la réforme envisagée représente un vrai changement de gestion.
Madame la rapporteure, vous avez employé plusieurs fois le terme de mixité. Vous estimez que vos mesures favorisent la mixité sociale. En réalité, ce sont des mesures anti-mixité. Pourquoi ? Le réservataire au titre du 1 % logement doit normalement attribuer le logement à un salarié. Dans nos quartiers, quand un salarié arrive, c'est de la mixité. Quelqu'un qui travaille, qui n'est pas aux minima sociaux, participe à la mixité. Dans votre système, quand un salarié s'en va, on attribue son logement à un public prioritaire, en particulier à une population éligible au DALO. C'est ce que vient de dire le ministre : un logement qui se libère va d'abord à un public prioritaire. Cela va à l'encontre de la mixité sociale. Il faut préserver la part des réservataires qui relèvent du 1 % logement pour qu'ils continuent à y mettre des salariés. Sinon, nous allons aggraver la ghettoïsation.
Comme vous donniez l'exemple du salarié, j'ai pris l'exemple contraire du public prioritaire. La gestion en flux agit dans les deux cas, à la fois pour un public prioritaire ou pour des salariés. On ne modifie pas les objectifs pour ces deux types de population. Actuellement, c'est une sorte d'arrangement. Avec ce texte, nous voulons clarifier les choses et fixer un mode pour tous et pour que, en définitive, les objectifs de ventilation entre publics, si je puis dire, soient bien respectés.
Je voudrais rappeler que j'ai travaillé pendant vingt ans sur les questions de mixité et que c'est un peu mon domaine.
Prenons l'exemple d'un logement qui était attribué au titre du 1 % logement et qui se libère dans une résidence. Si la CAL n'a pas de dossier de salarié au moment où elle se réunit, le logement reste vacant le temps de trouver un public qui réponde aux critères. Avec une gestion en flux, il est possible de l'attribuer à une autre personne, sous réserve qu'un autre logement puisse être attribué à un salarié alors qu'il était au départ réservé à une personne prioritaire. Il s'agit de modifier la gestion du stock en flux et vice versa. Cela permet de loger la personne prioritaire de façon beaucoup plus rapide.
C'est comme ça que le ghetto s'est construit. La ville de Sarcelles a été conçue par la Caisse des dépôts. Il n'y avait que des classes moyennes, que des gens qui travaillaient. La ville était le symbole de la mixité sociale.
À partir des années 1980, la prime à l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale (PALULOS) et les prêts locatifs aidés d'intégration (PLAI) ont été créés. Lorsque des personnes des classes moyennes partaient, les services de la préfecture les remplaçaient par des personnes en difficulté. Quand une famille en difficulté arrive dans un immeuble où il y a de la mixité, la famille de classe moyenne qui vit sur le même palier s'en va. Elle est alors remplacée par une autre famille en difficulté. J'ai assisté à cela en direct. C'est comme ça que ça se passe.
En particulier dans les QPV, il faut assurer la vacance du logement que l'organisme de 1 % logement ne peut pas attribuer, afin que ce soit un salarié qui remplace un autre salarié.
La commission rejette ces amendements.
La commission examine l'amendement CE1583 de M. Jean-Luc Lagleize.
Le Gouvernement propose que la mobilité dans le parc social soit favorisée pour les personnes reprenant une activité après une période de chômage de longue durée. Nous proposons d'étendre ce dispositif à toutes les personnes soumises à une mobilité en lien avec l'emploi.
Avis défavorable.
Cet amendement concerne les personnes qui prennent un autre poste, sans période de chômage, et pour une période excédant les dix mois du bail mobilité. L'article ne vise que les personnes qui retrouvent une activité, non celles qui sont déjà dans l'emploi mais doivent déménager.
Je maintiens mon avis.
Permettez-moi de répondre à M. Pupponi. Monsieur Pupponi, sur l'amendement précédent, je vous ai dit que je vous communiquerais l'étude et que je m'en remettrais à la sagesse du Parlement. En aucun cas, nous ne cherchons à faire ce dont vous nous accusez. Ces dispositions ont été décidées à l'issue de larges concertations avec les acteurs concernés. Je ne voudrais pas que vous restiez sur ce sentiment.
Monsieur Lagleize, j'ai omis de préciser que les personnes qui retrouvent un emploi après une longue période de chômage sont déjà prioritaires pour l'attribution d'un logement social.
Monsieur le secrétaire d'État, je ne dis pas que c'est ce que voulez faire, j'affirme que ce que vous mettez en place aura ce résultat.
J'ai mis dix ans à convaincre les députés, de droite comme de gauche, à créer la fameuse commission QPV et à faire en sorte que l'on ne puisse attribuer plus de 50 % des logements en QPV à des populations en difficulté. Dix ans : cela fut un long combat, y compris contre mes propres amis politiques.
Puis vous arrivez. Vous supprimez cette disposition et je vois tomber les unes après les autres toutes les mesures de mixité sociale que nous avions mises en place. Comprenez mon sentiment ! Lorsque vous créez un système et que vous le voyez démonté, il est naturel de réagir ainsi.
J'ai compris votre philosophie et j'en prends acte. Vous faites un choix que j'estime dramatique, d'un point de vue stratégique, mais aussi historique. Il me reste à défendre encore une dizaine d'amendements, qui ne seront pas adoptés, puis je vous laisserai travailler tranquilles jusqu'à samedi.
Nous sommes dans la même barque et nous ramons tous ensemble. Bonne nuit, monsieur Pupponi !
J'ai demandé aux commissaires de limiter leurs interventions à une minute. Vous n'avez jamais observé cette règle ce soir.
On ne souhaite pas bonne nuit à quelqu'un qui est en train de travailler ! Je vous demande de garder vos réflexions.
Et moi, je vous demande de nous laisser travailler. Vous pouvez rester, ou partir si vous le souhaitez.
La parole est à M. Lagleize et à lui seul.
Mme la rapporteure m'a répondu que l'amendement était satisfait par le bail mobilité. Celui-ci a, dans le texte initial, une durée maximale de dix mois. Or cet amendement vise les personnes qui ont un travail et occupent un logement social, et qui, ayant trouvé un poste ailleurs, ont besoin d'un logement stable.
C'est la raison pour laquelle je vous ai répondu que les personnes qui retrouvent un emploi après une longue période de chômage sont prioritaires pour l'attribution d'un logement social.
Je parle des personnes qui sont déjà dans l'emploi, mais qui changent de poste et de lieu de vie.
La mobilité n'est pas synonyme de précarité. Ce n'est pas parce qu'une personne est soumise à une mobilité qu'elle doit devenir prioritaire. Cette situation doit répondre à d'autres critères.
Il arrive que des personnes refusent une mobilité parce qu'au bout, il n'y a pas de logement. D'un côté, l'emploi reste inoccupé ; de l'autre, la personne ne peut évoluer, voire perd son emploi. Ce cas n'est pas visé par le projet de loi.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine les amendements identiques CE1518 de M. Alain Ramadier et CE2420 de M. François Pupponi.
Puisqu'il faut que nous nous résolvions à la gestion en flux des réservations, nous proposons de prévoir qu'un décret détermine les modalités, concertées avec les réservataires et les bailleurs, de sa mise en oeuvre.
Même avis.
Les amendements sont retirés.
La commission est saisie d'un amendement CE1703 de Mme la rapporteure.
Cet amendement vise à accorder un délai supplémentaire d'un an pour l'actualisation, dans le cadre de l'instauration de la gestion en flux, des conventions existantes.
Suivant l'avis favorable du Gouvernement, la commission adopte l'amendement.
Elle examine l'amendement CE1542 de M. Dominique Da Silva.
Les jeunes actifs et les salariés modestes avec peu ou sans droit aux APL accèdent difficilement au logement social, alors qu'ils se trouvent bien en deçà des plafonds de ressources. Deux tiers des bailleurs sociaux le reconnaissent dans une enquête réalisée en 2017 par la Cour des comptes.
Ils représentent pourtant une composante essentielle de la mixité sociale et portent la valeur « travail » au sein de ces immeubles, qui en ont bien besoin.
L'amendement vise à relativiser la méthode de calcul du taux d'effort, en prenant en compte le « reste pour vivre ». Il s'agit de ne plus exclure les travailleurs pauvres, qui ne bénéficient d'aucune allocation sociale mais doivent assumer des charges pour se rendre à leur travail, comme le crédit auto ou l'assurance.
J'approuve l'objectif de cet amendement, mais la rédaction doit gagner en précision, notamment sur la définition du « reste pour vivre ».
Je serai favorable à cet amendement, sous réserve qu'il soit sous-amendé.
L'amendement est retiré.
La commission est saisie d'un amendement CE2279 de M. François Pupponi.
Il s'agit de préciser que les conventions garantissent aux réservataires la possibilité de conserver la totalité de leurs droits de réservation sur le périmètre de la commune sur laquelle ils ont constitué ces droits.
Ce sujet relève davantage du décret d'application. Je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement.
Même avis.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte ensuite l'article 38 modifié.
Après l'article 38
La commission examine, en discussion commune, les amendements CE1609 de M. Jean-Luc Lagleize et CE545 de Mme Stéphanie Do.
La dernière enquête de l'INSEE portant sur les personnes sans abri date de 2012 et la dernière Enquête nationale logement remonte à 2013. Nous proposons que l'INSEE publie tous les quatre ans un rapport sur les personnes sans abri.
Je suis tout à fait favorable à ce que l'INSEE continue de réaliser ses enquêtes. Cependant, ce domaine ne relevant pas de la loi mais plutôt de la gestion administrative de l'État, je vous demande de bien vouloir retirer ces amendements.
Même avis.
Les amendements sont retirés.
La commission examine, en discussion commune, les amendements CE 2261, CE2262, CE2260 et CE2263 de M. François Pupponi.
Ces amendements, dont je ne doute pas qu'ils seront adoptés, visent à assurer la mixité sociale dans les QPV. La loi prévoit qu'Action logement et la Foncière logement ont l'obligation de consacrer 25 % de leurs attributions aux salariés et aux demandeurs d'emploi prioritaires. Mais réaliser toutes ces attributions en QPV revient à placer les plus pauvres chez les plus pauvres, à concentrer les populations les plus fragiles.
Pour éviter cette tendance à la ghettoïsation, l'amendement CE2261 prévoit que pas plus de la moitié de ces attributions peut se réaliser en QPV – l'amendement suivant vise à ce qu'il puisse être dérogé à cette règle en cas d'accord local. L'amendement CE2260 prévoit que pas plus du quart de ces attributions peut se réaliser en QPV – l'amendement suivant vise à ce qu'il puisse être dérogé à cette règle en cas d'accord local.
En miroir, la loi Égalité et citoyenneté de 2017 oblige les intercommunalités à fixer des objectifs d'attribution en QPV en faveur des ménages qui n'appartiennent pas à ces quartiers et disposent de ressources plus élevées. Elle prévoit qu'à défaut d'orientations à ce sujet, au moins 50 % des attributions en QPV devront être faites en faveur de ménages des trois autres quartiles des demandeurs aux ressources les plus élevées.
Il faut laisser à cette loi le temps de s'appliquer. En conséquence, j'émettrai un avis défavorable.
Les amendements vont plus loin puisqu'ils concernent les quotas des réservataires et d'Action logement.
Monsieur Pupponi, vous avez évidemment raison. La loi Égalité et citoyenneté, qui prévoit des quartiles en dehors des QPV, va dans le bon sens, mais fonctionne-t-elle vraiment ?
Le sens de l'histoire, c'est sûrement de cesser de placer les demandeurs DALO et les publics les plus pauvres dans les QPV. Mais comment alors fera-t-on pour répondre aux demandes et réussir à loger tout le monde ? En prenant cette décision, qui est juste sur le long terme, je crains que nous ne bloquions à court terme le système. Je sais que ma remarque est profondément cruelle, mais elle témoigne d'un échec collectif depuis des années.
J'ai longtemps analysé les résultats de la loi Égalité et citoyenneté, il est vrai récente, et cherché à voir si elle permettait de remplir les objectifs de mixité. Je pense que nous devons nous en tenir pour le moment à ses dispositions. Avis défavorable.
Monsieur le secrétaire d'État, vous me demandez si les préfets appliquent la loi Égalité et citoyenneté, qui limite le nombre des logements accordés aux plus fragiles en QPV. Elle a été adoptée en 2017 et les décrets d'application ont été publiés il y a moins d'un an. Il est trop tôt pour savoir si elle est à même d'inverser cinquante ans de ghettoïsation !
Dès 2016, nous avons dit qu'il fallait arrêter, compte tenu de la situation catastrophique dans les banlieues françaises, de la radicalisation de certains jeunes et des attentats perpétrés en France. C'est le Premier ministre de l'époque, aujourd'hui membre de la majorité, qui a parlé de ghettos, dénonçant un apartheid territorial, social, ethnique. Nous ne l'avons pas inventé ! Nous ne pouvons plus continuer ainsi.
Votre réponse est celle que l'on nous sert depuis quarante ans. Devant ce constat d'impuissance, la puissance publique choisit de mettre les populations fragiles toujours au même endroit, officialisant ainsi le ghetto. Nous vous proposons d'aller plus loin, de rompre avec le vieux monde. Oui, c'est compliqué, mais il faut arrêter de ghettoïser le ghetto. J'espérais que cette majorité le ferait. Je constate que vous êtes en retrait sur les amendements que nous proposons et que vous rejetez l'ambition que nous défendons. J'en prends acte.
Monsieur le président, il s'agit de quatre amendements, qui plus est sur un sujet majeur ! J'aimerais disposer de suffisamment de temps pour m'exprimer.
Nous discuterons en séance publique du sens profond de ce texte, dont la cohérence, lorsque l'on met toutes les dispositions bout à bout, aboutira à renforcer le ghetto.
Que se passe-t-il aujourd'hui dans les QPV d'Île-de-France et de certaines grandes villes ? Action logement n'affecte pas les salariés dans les mêmes endroits, selon qu'ils sont plus ou moins précarisés ou qu'ils appartiennent ou non à la couche moyenne. Plus les gens sont en difficulté, plus ils sont orientés vers les QPV !
François Pupponi a évoqué la déclaration de Manuel Valls, mais le premier qui a parlé d'apartheid en Île-de-France et de développement à la brésilienne – un comble pour un pays comme la France, ses valeurs et son histoire ! –, c'est Jean-Pierre Chevènement, alors ministre de l'intérieur, à la fin des années 1990.
Depuis, sous l'action des gouvernements successifs, le séparatisme social et les discriminations se sont aggravés. Il faut dire « stop ! ». Il y a eu un début de politique pour enrayer cette évolution et un retournement tenté dans la loi Égalité et citoyenneté. Ce projet de loi va à l'inverse. C'est terrible, car cela va finir par péter au visage de ce pays !
Dans un long entretien, Alain Minc a jugé la situation française : il félicite le Gouvernement pour sa politique macroéconomique, explique que tous les clignotants sont au vert et que l'avenir est radieux ; mais il appelle son attention sur le fait qu'il ne prend pas en compte la situation des quartiers populaires et des banlieues, et que c'est un élément qui peut venir se mettre en travers de son action. Je ne partage pas la première partie de l'analyse d'Alain Minc, mais je le rejoins sur le second point : la situation dans les quartiers constitue une fragilité terrible pour la France, et il faut y prendre garde.
Le débat a été plus qu'enrichissant. Nous savons quelles sont nos marges de manoeuvre et nous ne perdons pas de vue nos objectifs. Nous devons poursuivre les échanges sur ces différents sujets d'ici à l'examen en séance publique.
Je trouve fort intéressants les arguments de MM. Pupponi et Peu. Je ne connais pas suffisamment bien la question pour me prononcer, mais je trouve que l'on ne prend pas assez en compte le fait que les personnes refusent d'aller habiter dans les QPV. À Béziers, une proposition de logement en QPV sur deux est refusée par les demandeurs, qu'il s'agisse de personnes en difficulté ou de personnes issues des classes moyennes. Que faire ?
La commission rejette successivement les amendements.
Membres présents ou excusés
Réunion du jeudi 17 mai 2018 à 21 h 30
Présents. – M. Thibault Bazin, Mme Sophie Beaudouin-Hubiere, M. Éric Bothorel, Mme Anne-France Brunet, M. Sébastien Cazenove, M. Nicolas Démoulin, Mme Marguerite Deprez-Audebert, Mme Stéphanie Do, Mme Christelle Dubos, Mme Valéria Faure-Muntian, Mme Véronique Hammerer, M. Jean-Luc Lagleize, Mme Célia de Lavergne, Mme Marie Lebec, Mme Annaïg Le Meur, M. Roland Lescure, M. Richard Lioger, Mme Graziella Melchior, Mme Emmanuelle Ménard, M. Mickaël Nogal, M. Stéphane Peu, M. Benoit Potterie, M. François Pupponi
Excusés. – Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Grégory Besson-Moreau
Assistaient également à la réunion. – M. Dominique Da Silva, Mme Sarah El Haïry, M. Rodrigue Kokouendo, Mme Frédérique Lardet, M. Jean-Claude Leclabart, M. Jean-Paul Mattei, Mme Marjolaine Meynier-Millefert, M. Robin Reda, Mme Marie-Pierre Rixain, M. Martial Saddier, M. Stéphane Testé, Mme Alice Thourot, Mme Frédérique Tuffnell, M. Guillaume Vuilletet