La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
Cet après-midi, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles de la troisième partie du projet de loi, s'arrêtant à l'amendement no 408 à l'article 11.
Monsieur le président, madame la ministre des solidarités et de la santé, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur général de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, avec Arnaud Viala et de nombreux députés du groupe Les Républicains, nous proposons d'introduire une mesure d'accompagnement à l'article 11. Cet amendement prévoit l'élaboration d'une liste aussi précise que possible des mesures transitoires applicables jusqu'à la mise en oeuvre complète du nouveau dispositif pour les assurés du régime social des indépendants – RSI.
Le comité chargé du pilotage des opérations s'engagerait à fournir une nomenclature précise des dispositions transitoires ainsi que le schéma d'organisation du processus, avant la fin du premier trimestre de 2018. Il lui incomberait par ailleurs d'établir un processus mensuel pour le parcours d'un assuré, pendant la période transitoire.
Nos échanges sur les précédents amendements confirment la nécessité de préciser ce processus, pour que chaque assuré soit bien pris en compte dans cette période de transition.
La parole est à M. Olivier Véran, rapporteur général de la commission des affaires sociales, pour donner l'avis de la commission.
Votre amendement est doublement satisfait par les alinéas 293 et 294 de l'article 11. Par exemple, vous souhaitez que le schéma d'organisation du processus soit mis en place avant la fin du premier trimestre de 2018. L'alinéa 294 précise que ce schéma doit être mis en place au plus tard le 31 mars 2018, ce qui correspond précisément à la fin du premier trimestre. Si vous en êtes d'accord, vous pouvez retirer votre amendement.
Votre réponse me rassure sur le dispositif de transition et j'accepte de retirer l'amendement.
L'amendement no 408 est retiré.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 838 .
La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé, pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement.
L'amendement no 838 est adopté.
Le présent amendement précise les missions du comité de surveillance de la réforme, qui validera, avant leur déploiement effectif, les principales transformations affectant le partage des missions, le statut des personnels et les systèmes d'information. Le projet de loi prévoit, pour assurer la mise en oeuvre de la réforme, un comité chargé du pilotage opérationnel, composé des directeurs des branches concernées et de la structure héritière de la Caisse nationale du RSI, ainsi qu'un comité de surveillance. Étant donné l'ampleur de la réforme, il est souhaitable que le comité de surveillance ait des missions qui dépassent la seule validation des transferts des contrats de travail, comme le prévoit le projet actuel.
Le comité de surveillance interviendra ainsi pour sécuriser les principales étapes de la réforme, dans ses différents aspects. Cet amendement a donc pour objet d'améliorer la gouvernance de la phase de transition.
L'amendement no 1204 est adopté.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 119 rectifié .
Cet amendement, adopté en commission, a pour objet de permettre au personnel des caisses héritières du RSI de signer les actes nécessaires à l'exercice de leurs missions exercées pour le compte du régime général, pendant la période transitoire de deux ans.
L'amendement no 119 rectifié , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 839 .
L'amendement no 839 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 840 .
L'amendement no 840 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Le présent amendement prévoit l'équilibrage financier des dépenses de gestion administrative de la structure héritière du RSI au cours de la période transitoire, puisque cette dernière ne se verra plus affecter de recettes propres. La suppression du RSI et l'affiliation des travailleurs indépendants au régime général conduit à la suppression des recettes propres de ce régime. Pendant la période transitoire, toutefois, la structure héritière du RSI supportera des dépenses de gestion administrative. Par le présent amendement, il vous est proposé de maintenir un mécanisme d'équilibre financier de ces dépenses financé par le régime général, pendant la période transitoire.
L'amendement no 1198 , accepté par la commission, est adopté.
Je reviens sur l'amendement précédent. La caisse du RSI a une trésorerie assez importante – de plus de 11 milliards, d'après ce qu'un membre de la commission des finances m'a rapporté. Je voulais savoir ce qu'il allait advenir de cette trésorerie, puisque l'amendement précédent du Gouvernement vise à équilibrer les comptes. J'aurais pu penser qu'elle allait servir de garantie pour les retraites complémentaires.
Aucun changement : cette caisse de retraite complémentaire reste à la main des travailleurs du RSI.
La parole est à Mme Nadia Ramassamy, pour soutenir l'amendement no 1218 .
J'associe à la défense de cet amendement ma collègue Nathalie Bassire, qui ne peut être présente aujourd'hui.
Le transfert du RSI au régime général des caisses générales de Sécurité sociale – CGSS – aura des conséquences importantes sur les entreprises réunionnaises, notamment celles qui sont très petites, petites et moyennes. Pour le RSI, il existe, à La Réunion, un moratoire sur le recouvrement des dettes des entreprises qui ne sont pas à jour de leurs cotisations. Cela concerne 50 % de ces entreprises. Que va-t-il advenir de ce moratoire, une fois que le RSI et le régime général auront fusionné ?
Par cet amendement, nous proposons d'accorder une remise gracieuse de toutes les dettes sociales des entreprises affiliées au RSI et d'annuler ainsi les créances existantes des travailleurs indépendants. Cela permettrait à nos entreprises d'accéder à la commande publique, conformément au code des marchés publics, et surtout de redonner une impulsion importante au tissu économique local, qui est actuellement en très grande difficulté, du fait de la vie chère et du taux de chômage élevé à La Réunion – plus du double de celui de la métropole.
Cet amendement a été déposé mercredi et n'a donc pas pu être examiné par la commission. Si j'ai bien compris, il reviendrait à annuler les dettes de toutes les entreprises des outre-mer, qui ne sont pas à jour de leurs cotisations. Vous proposez une forme d'amnistie, dont le coût n'est pas estimé. Il me paraît vraiment extrêmement difficile d'y être favorable. La commission ne s'est pas exprimée, mais, à titre personnel, j'émets un avis défavorable.
Le coût est estimé à plusieurs centaines de millions d'euros et c'est une mesure totalement dérogatoire. Plusieurs questions majeures se posent, au regard du principe d'égalité de traitement : pourquoi supprimer les dettes accumulées de toutes les entreprises, quelles que soient leurs situations économiques ? Comment justifier que ceux qui ont payé leurs cotisations soient défavorisés par rapport à ceux qui ne les ont pas payées ? Bref, cet amendement soulève de nombreuses difficultés, au-delà même de son coût. Nous y sommes défavorables.
Madame la ministre, vous soulevez le problème de l'inégalité de traitement, mais, dans le département de La Réunion dont je suis l'élu, par exemple, plus de 50 % des entreprises sont aujourd'hui endettées auprès du RSI, car ce régime est inadapté à la situation locale. Le tissu économique réunionnais est composé essentiellement d'indépendants et de très petites entreprises. Avec l'alignement du RSI sur le régime général de la Sécurité sociale, si toutes les dettes doivent être payées, les entreprises risquent de traverser une crise sans précédent dans les départements et les territoires d'outre-mer. Je souhaite que cette demande soit étudiée de façon approfondie, car la situation des outre-mer est loin d'être identique à celle de l'Hexagone, et nous sommes véritablement en grande difficulté. La France insoumise votera cet amendement, qui dépasse les clivages politiques.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
L'amendement no 1218 n'est pas adopté.
Sur l'article 11, je suis saisi par le groupe du Mouvement démocrate et apparentés d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Nous en venons à l'amendement no 1047 de M. Quatennens, qui n'est pas présent. Puisqu'il en est le seul signataire, l'amendement ne peut pas être défendu.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 843 .
Rappel au règlement
Ce rappel au règlement est fondé sur l'article 58, alinéa 1. Nous avions demandé que tout le groupe soit signataire des amendements de M. Quatennens. Le service de la séance nous avait dit que c'était bien le cas.
Après vérification, le service de la séance confirme que M. Quatennens est bien le seul signataire de l'amendement. Je rappelle que vous ne pouvez défendre les amendements que si vous en êtes cosignataires. Je préfère m'en tenir à l'application stricte du règlement.
C'est dommage, car c'est l'un des rares amendements que la majorité aurait pu adopter !
Sourires.
Article 11
L'amendement no 843 est adopté.
La parole est à Mme Carole Grandjean, pour soutenir l'amendement no 120 .
Cet amendement vise à favoriser une pratique trop peu valorisée actuellement par les travailleurs indépendants : celle de l'auto-estimation. L'article L. 131-6-2 du code de la Sécurité sociale précise le principe du calcul des cotisations dues par les travailleurs indépendants non agricoles ne relevant pas du statut du micro-entrepreneur : elles sont calculées à titre provisionnel sur les revenus de l'avant-dernière année, puis régularisées sur la base du revenu d'activité définitif de la dernière année. Cette pratique est trop peu valorisée, alors qu'elle permet d'anticiper et d'améliorer la gestion des comptes des indépendants.
Avec cet amendement, nous avons souhaité promouvoir cette démarche, en la rendant plus accessible et moins contraignante. Afin de faciliter le paiement des cotisations, nous avons souhaité favoriser la capacité d'estimation des indépendants. Pour l'heure, un travailleur indépendant qui constate ou anticipe une baisse ou une hausse significative de son activité peut demander la prise en compte, pour le calcul de ses cotisations provisionnelles, d'une estimation, qu'il transmet aux organismes sociaux, de son revenu de l'année en cours. Néanmoins, en cas d'écart trop important entre le montant de revenu estimé et celui finalement constaté, le travailleur indépendant est redevable d'une majoration de retard. Nous proposons de supprimer cette sanction pour les deux années à venir, afin de favoriser le recours à cette faculté d'estimation des revenus annuels et de faciliter la gestion.
Cet amendement répond à une demande forte de leur part. Aussi l'adossement au régime général du régime social des indépendants est-il une chance pour tous les travailleurs indépendants. Nous souhaitons leur simplifier les lourdeurs administratives. Tel est l'objet de cet amendement.
L'amendement no 120 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Vous aviez raison, madame Fiat : il y a bien eu une erreur matérielle. L'amendement no 1047 peut donc être défendu.
La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon.
Cet amendement vise à éviter l'éloignement géographique des salariés des caisses du RSI qui seront reclassés. La suppression du RSI nous semble relever du bon sens, tant l'échec d'une prise en charge efficace des indépendants est patent. Certains ont même parlé d'un naufrage auquel il faut mettre un terme. Toutefois, il ne faudrait pas faire couler l'équipage.
Nous soulignons la nécessité de veiller à ce que les salariés des caisses qui ont fait de leur mieux dans un contexte difficile ne pâtissent pas de la fusion avec le régime général. Ces salariés ont tenté de parer au mieux aux difficultés rencontrées en traitant sérieusement les demandes des cotisants. Ils n'ont pas à souffrir de la suppression d'un dispositif mal ficelé.
Cet amendement vise à protéger les salariés du RSI de toute mobilité géographique forcée et à veiller à une application circonstanciée en fonction des régions et de la durée des transports. En commission, le rapporteur, M. Véran, a voulu nous convaincre de faire confiance au Gouvernement quant au respect de ces salariés. Malheureusement, les garanties apportées, qui sont bien trop insuffisantes, appellent notre vigilance. Si la création du RSI a été bâclée, tâchons de ne pas bâcler également sa suppression.
Je tiens à rappeler qu'une injustice est vécue dans les outre-mer concernant les professeurs de l'éducation nationale et les policiers qui, de manière très inhumaine, sont affectés dans l'Hexagone sans tenir compte de leur situation. Nous espérons que ces problèmes seront résolus très rapidement et nous ne souhaitons pas les retrouver dans le reclassement des salariés du RSI.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Nous avons en effet débattu en commission des conditions de reprise des salariés du RSI dans le régime général. Des engagements forts oraux et écrits ont été pris par les ministres concernés. Cet amendement, qui prévoit de limiter les capacités de transfert au département de la circonscription, peut poser des problèmes d'ordre pratique. Imaginons un centre du régime général situé à cinq kilomètres d'une caisse du RSI mais dans le département voisin : la contrainte géographique prévue dans l'amendement nuirait à la reprise des salariés.
Même si j'ai bien compris que vous n'avez pas été rassuré par les propos que les ministres ont tenus en commission, j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
Je rappelle que le Gouvernement s'est engagé à ce qu'il n'y ait pas de mobilité forcée. De plus, en 2018, nous négocierons avec les salariés un accord d'accompagnement qui précisera les conditions de transfert. Avis défavorable.
Pour l'examen de l'amendement en commission, nous avons rencontré les syndicats représentant les salariés du RSI, qui nous ont fait part de leur angoisse. Ces salariés se demandent en effet où ils seront mutés, car il arrive que plus de cent kilomètres les séparent de la plus proche CPAM – caisse primaire d'assurance maladie. Nous ne souhaitons pas vous ennuyer avec ce problème, mais il faut le prendre en compte : ces gens que, je le répète, nous avons rencontrés, ont vraiment très peur. Lorsqu'un des deux conjoints a déjà un travail, se demander où l'autre sera muté et s'il faudra déplacer sa famille est très difficile à vivre. Nous devons faire en sorte que ces personnes puissent travailler de façon sereine.
Je souhaite répondre à Mme Fiat : nous avons pris un engagement fort vis-à-vis des salariés dans l'ensemble de nos communications. Nous nous sommes bien sûr engagés à ce qu'il n'y ait aucune suppression de poste et à ce que la mobilité géographique reste très sectorielle.
J'ai entendu cette réponse lors de plusieurs réunions de la commission. Toutefois, la question posée par Mme Fiat est fondée parce qu'il arrive que des caisses primaires d'assurance maladie soient éloignées de 100, voire de 150 kilomètres d'une caisse du RSI. Il est important de savoir, au moment où nous débattons de ce dossier, comment seront traités ces salariés.
L'amendement no 1047 n'est pas adopté.
Cet amendement propose la suppression de l'alignement progressif vers les taux de cotisation de droit commun pour la retraite complémentaire pour les personnes concernées par la bascule CIPAV– Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse – vers le RSI.
L'article 11 du présent texte reprend les dispositions du PLFSS pour 2017 relatives à la transformation de la CIPAV. Il garantit que l'affiliation au régime général se traduira non pas par une hausse des cotisations retraite, mais par l'application de taux spécifiques pour le calcul des cotisations de retraite complémentaire à la demande des assurés. Ce taux spécifique de cotisations sera ouvert aux professionnels affiliés au régime des professions libérales avant 2019 qui feront le choix d'être transférés au régime général. Il sera également ouvert à ceux qui créent leur activité et qui relèveront désormais du régime général.
Le présent amendement sécurise cet objectif dans le temps sans limitation de durée. Il supprime également en cohérence l'alignement progressif des taux spécifiques de cotisations vers ceux de droit commun.
Cet amendement très important répond à l'inquiétude qui était née tant du côté de la CIPAV que des professions libérales. Avis évidemment favorable.
Madame la ministre, je profite de cet amendement où vous évoquez l'avis du Conseil de protection sociale des travailleurs indépendants pour vous faire part de ce qui nous chiffonne, voire nous chagrine : ce conseil n'aura qu'un avis consultatif et jamais délibératif, y compris pour les représentants du conseil qui seront membres des conseils d'administration de la CARSAT – Caisse d'assurance retraite et de la santé au travail – , de la CIPAV ou de la Caisse nationale d'assurance maladie. Quel sera son rôle ? Sera-t-il réduit à faire de la figuration ?
Il est très regrettable que les travailleurs indépendants, en particulier dans le cadre de cette caisse, ne puissent pas prendre la parole alors que vous leur donnez la possibilité de siéger dans les conseils d'administration. Certes, vous précisez que les décrets seront « pris après avis du conseil » : s'il s'agit d'un simple avis, vous savez aussi bien que moi qu'il sera considéré comme superfétatoire.
Pouvez-vous également nous répondre sur la question, soulevée par mon collègue, relative à l'éloignement géographique entre les caisses de RSI et les caisses primaires, qui sont parfois très éloignées les unes des autres au sein des départements ?
Le conseil sera chargé de la gestion de la retraite complémentaire et des commissions d'action sociale – CAS. Concernant la question d'ordre géographique, à ma connaissance, seuls deux sites du RSI n'ont pas de CPAM dans un rayon très proche. Ce problème concerne donc très peu de salariés sur les 6 000 du RSI. Nous devrons traiter leur cas de manière spécifique.
L'amendement no 1214 est adopté.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 846 .
Je souhaite revenir sur l'amendement précédent, qu'a soutenu le Gouvernement. Je m'interroge sur sa signification, car ni la lecture du rapport sur l'article 11 ni celle de l'étude d'impact ne nous apporte d'éclaircissements. Je me demande ce que cet amendement, qui soulève de nombreuses questions, vient faire dans cet article !
L'amendement no 846 est adopté.
Le diable est dans les détails. Et celui-là n'est pas anodin, puisqu'il concerne la possibilité pour les travailleurs indépendants de bénéficier du régime d'auto-déclaration mensuelle ou trimestrielle.
L'alinéa 335 laisse la possibilité aux organismes de recouvrement des cotisations sociales d'opter pour la déclaration mensuelle ou trimestrielle. C'est une simple possibilité qui relève du bon vouloir de ces organismes.
Cet amendement vise donc à les obliger à proposer aux indépendants d'opter pour un tel dispositif. Ce texte que vous présentez comme ambitieux ne contraindra même pas les organismes de recouvrement à proposer aux indépendants le régime de la déclaration mensuelle ou trimestrielle dès le 1er janvier 2018. Pourquoi les faire attendre, alors que vous savez très bien qu'ils réclament cette mesure depuis très longtemps pour soulager une trésorerie très fragile ?
L'amendement no 518 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 121 .
Cet amendement vise à décaler de six mois la fin de l'expérimentation relative au paiement mensuel ou trimestriel des cotisations dues par les travailleurs indépendants. Cet amendement a recueilli l'avis favorable de la commission.
L'amendement no 121 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement no 519 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Bruno Bilde, pour soutenir l'amendement no 520 rectifié .
L'amendement no 520 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 847 .
L'amendement no 847 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Cet amendement tend à évaluer la réforme visant à adosser le régime social des indépendants au régime général.
Une telle évaluation permettrait d'avoir une analyse précise des effets de cette mesure – le RSI avait en effet connu des difficultés opérationnelles importantes lors de sa création – et une vision claire du sort des 6 000 salariés qui assurent la gestion du RSI au quotidien et dont les inquiétudes sont réelles et régulièrement relayées.
Après tout ce qui a été dit depuis le début de l'examen de cet article, voilà une réponse un peu courte. C'est pourtant bien le moment d'argumenter.
Monsieur le rapporteur général, madame la présidente de la commission, combien de rapports n'avons-nous pas présentés ensemble au cours de la dernière législature ? Et ils portaient sur des sujets beaucoup moins importants ! Or ce qui est en jeu ici, ce n'est pas rien. S'il y a un système dont il faut évaluer l'efficacité au moyen d'un rapport, c'est bien celui-là. Nous aurions donc pu espérer de votre part une argumentation un peu plus nourrie. Au demeurant, une telle étude ne vous coûterait rien. Monsieur Véran, madame la présidente de la commission, ces dizaines de rapports que nous avons produits portaient sur des sujets ridicules. Nous essayions par là d'exister, aussi bien quand nous étions dans l'opposition que quand nous étions dans la majorité.
Le rapport que nous demandons ici porte sur un objet dangereux, un objet qui présente à nos yeux un risque. Et l'ensemble des amendements que vous avez déposés montrent que vous en êtes conscient, monsieur le rapporteur général. D'une certaine manière, et je peux le comprendre, on essaie de régler les problèmes le mieux possible en fonction de l'urgence de la situation. Tous les députés ici présents ont dû intervenir auprès des CARSAT ou du RSI individuellement pour nombre de nos concitoyens, et pour des situations dramatiques.
Tout le monde sait donc qu'il y a un risque. Un gouvernement, une majorité, un Parlement dans son ensemble ne peut accepter un tel risque s'il ne permet pas d'établir parallèlement un rapport sur l'efficacité de la réforme en cause.
Par ailleurs, et vous l'avez très bien expliqué, l'ensemble des travailleurs du RSI s'inquiètent aujourd'hui de leur devenir. Le rapport doit donc avoir un double objet : il doit porter à la fois sur l'efficacité du système et sur la possibilité pour les travailleurs du RSI de conserver de bonnes conditions de travail. La réponse qui a été donnée – défavorable, défavorable – n'est pas satisfaisante sur un tel amendement.
Madame la ministre, monsieur le rapporteur général, comme notre collègue l'a dit à l'instant, c'est un peu court. Nous pouvons en effet être d'accord sur le fait que, dans sa configuration actuelle, le RSI ne fonctionne pas correctement et que des mesures correctives sont nécessaires.
Toutefois, sur certains bancs, nous sommes en désaccord quant à ce qu'il conviendrait de mettre en place. Le Gouvernement disposant d'une majorité, il passe en force ; dont acte. Mais parce que nous sommes un certain nombre à douter que ces mesures soient les bonnes, nous estimons qu'accepter la proposition de notre collègue, la publication d'un rapport établissant un bilan un an après la mise en oeuvre, est la moindre des choses. D'ailleurs, si tout se passe comme vous le souhaitez, le bilan sera positif, et ce sera l'occasion pour votre majorité de valoriser son action. De quoi avez-vous peur pour vouloir rejeter un tel rapport ? Je ne comprends vraiment pas.
J'entends les mots « risque », « danger », « peur ». Vis-à-vis des indépendants, le risque aurait été de ne pas prendre la décision de changer le dispositif, le système de cotisation et de protection sociale, de ne pas supprimer le RSI, de ne pas tenir ce qui était un engagement présidentiel.
Applaudissements sur les bancs du groupe REM.
Il n'y a pas d'autre danger. Les pouvoirs publics exerceront une vigilance particulière quant au sort des salariés de la structure RSI, quant au bon fonctionnement des systèmes d'information dans la future structure et au temps d'acclimatation qui sera nécessaire ; personne ne l'a caché ici.
Concernant la demande de rapport, je vous ferai la même réponse qu'en commission, monsieur le député. Nous en avions discuté, et je vous avais suggéré que vous pouviez présenter votre proposition en séance sous réserve de modification. Vous souhaitez que nous présentions d'ici à douze mois une évaluation sur une réforme, la suppression du RSI, qui va se mettre en place en deux ans. Pour reprendre les mots de M. Hetzel, c'est un peu court !
Proposez un sous-amendement, dans ce cas ! Inscrivez dix-huit mois ! C'est un faux problème !
Nous aurons bien le temps de procéder à une évaluation, et le Parlement sera bien entendu plus qu'informé et plus que vigilant sur l'avancée de cette réforme et sur ses implications pour les indépendants.
Il n'y aura pas de réponse à la réponse de la réponse, mes chers collègues ! Nous allons nous en tenir aux règles usuelles et passer au vote.
C'est pourtant une question majeure d'évaluation des politiques publiques !
Vous aurez l'occasion de vous exprimer sur de nombreux autres articles, cher collègue.
L'amendement no 964 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Nombre de votants | 104 |
Nombre de suffrages exprimés | 95 |
Majorité absolue | 48 |
Pour l'adoption | 80 |
contre | 15 |
L'article 11, amendé, est adopté.
Nous en venons aux amendements portant article additionnel après l'article 11.
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement no 90 .
Madame la ministre, M. Brun, de très nombreux collègues et moi-même vous faisons une proposition concrète, qui n'a rien à voir avec l'aide à l'installation, pour lutter contre la désertification médicale : que les médecins exerçant au-delà de l'âge légal de départ en retraite bénéficient d'un abaissement de charges sociales.
Cet amendement vise ainsi à renforcer le bénéfice du cumul emploi-retraite pour les territoires sous-dotés qui en ont le plus besoin. Cela permettrait d'agir à court terme et, « en même temps », de vous laisser déployer les mesures attendues.
Cet amendement recoupe les annonces de la ministre des solidarités et de la santé ; je la laisserai d'ailleurs revenir sur leur contenu si elle le souhaite.
Nous attendons tous un dispositif sur ce sujet, et l'urgence évoquée par beaucoup d'entre vous justifie sans doute le caractère dérogatoire de la présente proposition. Si la commission a repoussé cet amendement, c'est aussi parce que le terme « abaissement » est trop imprécis juridiquement. Je vous suggère donc, monsieur Bazin, de retirer votre amendement après avoir écouté l'avis de la ministre.
Vous souhaitez favoriser le cumul emploi-retraite ; je le souhaite aussi. C'est d'ailleurs prévu dans mon plan pour l'égal accès aux soins dans les territoires. Cependant, si nous partageons le même objectif, nos moyens pour l'atteindre divergent. Alors que vous souhaitez vous appuyer sur une baisse de charges sociales, nous prévoyons de relever le plafond de revenu annuel en deçà duquel les médecins peuvent être dispensés de cotiser au régime de prestation complémentaire vieillesse. Ce plafond passera de 11 500 à 40 000 euros par an, ce qui constitue déjà une forte incitation, et satisfait d'ailleurs en partie votre demande.
Vous souhaitez aller plus loin en touchant aux cotisations vieillesse du régime de base. Une telle mesure entraînerait une rupture d'égalité devant les charges publiques, non seulement entre les médecins, mais aussi entre les professions libérales, qui cotisent auprès d'un même régime de retraite de base.
L'avis est donc défavorable.
J'ai bien écouté votre réponse, madame la ministre, mais le Gouvernement pourrait opportunément proposer un sous-amendement pour aller dans votre sens. À défaut, je serai contraint de maintenir mon amendement.
J'y suis défavorable.
Madame la ministre, voilà dix ans que je dépose ce même amendement, chaque année, dans le cadre du PLFSS. Nous l'avions même déposé lors de la discussion de la loi santé dé fendue par votre prédécesseur.
Il vise à permettre aux médecins retraités qui le souhaitent d'exercer dans les zones dites fragiles en étant exonérés des cotisations à la CARMF, la Caisse autonome de retraite des médecins de France. Près de 8 000 médecins retraités sont prêts à prendre leur bâton et leur petit bagage pour se rendre dans les territoires.
Il faut donc les y inciter.
Or, chaque fois que nous en avons fait la demande, nous avons essuyé un refus. Le même amendement a été déposé au Sénat ; cette proposition figure également dans un rapport sénatorial récent sur les déserts médicaux. Ces amendements sont très importants. Il s'agit non pas d'une exonération de charges sociales, mais d'une interruption de versement des cotisations à la CARMF pour les seuls médecins retraités choisissant d'exercer dans des zones sous-médicalisées. On ne va tout de même pas leur demander de travailler pour rien !
L'amendement no 90 n'est pas adopté.
La parole est à M. Mohamed Laqhila, pour soutenir l'amendement no 51 rectifié .
Avec le RSI, on peut presque dire qu'une page s'est tournée. C'est un dossier que je connais très bien : depuis douze ans, j'ai autour de moi des chefs d'entreprise, des indépendants qui souffrent à l'idée même d'évoquer le RSI. Il faut aller un peu plus loin, madame la ministre, et faire confiance aux praticiens. Derrière chacun d'entre nous, derrière chacun des 577 députés, il y a des praticiens, des experts-comptables ; faites-leur confiance.
Faites confiance également à Bruno Le Maire, qui avait déposé un amendement identique à celui-ci au cours de la dernière législature.
Faites confiance aux entrepreneurs, qui aujourd'hui font leur déclaration d'impôt sur les sociétés, gèrent leur déclaration d'impôt sur le revenu et leurs acomptes, pour lesquels la régularisation est automatique.
Vous l'aurez compris, cet amendement vise à simplifier la tâche de l'administration et à lui permettre, éventuellement, d'effectuer davantage de contrôles, procédures pour lesquelles il manque peut-être de moyens. Il tend à laisser faire les professionnels, les entrepreneurs grâce à l'autoliquidation et à l'autodéclaration. Ces pratiques sont très simples, puisque ce sont déjà celles des auto-entrepreneurs. Pour chaque prélèvement, il y a une retenue. Une fois payées les charges sociales, il ne reste que du revenu disponible. Les mêmes règles pourraient s'appliquer aux commerçants, aux indépendants, aux professions libérales, à tout le monde, en prévoyant une régularisation au mois d'avril ou de mai.
Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM.
Monsieur le député, tel que vous le présentez de manière convaincante, le système paraît simple. En outre, parmi les syndicats patronaux que nous avons entendus en commission, un en particulier avait rapidement abordé le sujet de l'auto-liquidation.
La commission a néanmoins émis un avis défavorable sur cet amendement, car l'affaire est moins simple qu'il n'y paraît. Dans un rapport rendu public en juillet 2016, l'inspection générale des affaires sociales, l'IGAS, émet plusieurs propositions, dont l'une, la dixième, s'intitule : « Écarter le scénario d'une mise en oeuvre de l'auto-liquidation, même sous forme expérimentale. »
Trois raisons sont avancées. Tout d'abord, l'auto-liquidation présente un intérêt limité par rapport au nouveau dispositif « 3 en 1 » instauré depuis 2015.
Deuxièmement, toujours selon le rapport de l'IGAS, « l'auto-liquidation des cotisations ne semble possible que pour une partie des travailleurs indépendants ». Elle n'est en effet intéressante que pour les cotisants « capables d'avoir une visibilité sur leur rémunération nette en cours d'année, notamment les dirigeants majoritaires des sociétés imposées à l'impôt sur les sociétés, dont la rémunération est assimilée fiscalement à un salaire », qui ne représentent que 45 % des travailleurs indépendants, hors micro-entrepreneurs.
Le troisième argument mis en avant par l'IGAS concerne le VIII de l'article 11, qui prévoit de permettre aux travailleurs indépendants « d'acquitter leur cotisations et contributions sociales provisionnelles sur une base mensuelle ou trimestrielle [… ] en fonction de leur activité ou leurs revenus mensuels ou trimestriels ». Cette mesure répond donc en partie à vos préoccupations.
L'amendement no 51 rectifié n'est pas adopté.
Depuis 2013, les sociétés commerciales dont l'associé est soumis au RSI ne peuvent bénéficier du régime fiscal de droit commun des distributions de dividendes qu'à hauteur de 10 % du capital social. L'amendement no 998 vise à supprimer cette mesure pour les TPE et PME qui sont majoritairement soumises au RSI et imposer les dividendes versés au régime de droit commun – la flat tax.
Il s'agirait d'un geste fort au bénéfice des TPE, qui ont été regardées par la précédente majorité comme une classe sociale privilégiée.
« Oh ! » sur quelques bancs du groupe NG.
De nombreuses TPE PME ont donc choisi de se transformer en société par actions simplifiée unipersonnelle – SASU – ou en société par actions simplifiée – SAS – , afin d'éviter cette taxation. Le basculement d'un grand nombre de TPE et PME dans le régime des SAS majoritaires n'engendrerait pas un coût exorbitant pour les caisses de Sécurité sociale et serait un geste fort en direction des plus petites de nos entreprises.
Madame la députée, j'ai confessé en commission des affaires sociales que la lecture de ces amendements avait posé quelques difficultés de compréhension et que les administrateurs et moi-même avions passé du temps à tenter d'en comprendre pleinement la teneur. Je dois vous avouer qu'une semaine plus tard, j'en suis rendu à peu près à la même conclusion : si l'on a compris la mesure proposée, c'est généralement parce qu'on nous l'a mal expliquée ! Cette mesure a des conséquences financières importantes et je ne peux donc que renouveler ma demande de retrait de ces amendements, à défaut de quoi j'émettrai un avis défavorable.
Madame la ministre, vous allez supprimer le RSI. Dans la même logique que les précédents, cet amendement, propose de maintenir dans le système existant la garantie de simplification des procédures administratives pour les indépendants. Il est donc proposé que l'absence de réponse du RSI équivaille à un accord implicite de l'administration pour toute question posée par un affilié. Ainsi, dans le cadre du rescrit social, l'absence de réponse à une demande portant sur le recouvrement vaudrait accord implicite de l'organisme social, une fois dépassé le délai fixé par décret.
Monsieur Bazin, une fois encore, votre amendement est satisfait par l'état du droit, qui prévoit en effet que, si l'URSSAF ne répond pas dans un délai de trois mois, « il ne peut être procédé à un redressement de cotisations ou contributions sociales, fondé sur la législation au regard de laquelle devait être appréciée la situation de fait exposée dans la demande ». Je vous invite donc à retirer votre amendement, car il est vraiment satisfait.
Je demande le retrait de cet amendement. À défaut, avis défavorable, car la disposition proposée figure déjà dans le texte.
L'amendement no 587 est retiré.
Sourires.
Cet amendement propose de limiter le recours à des huissiers de justice pour le recouvrement des cotisations par le RSI aux seuls cas ayant donné lieu à une décision du tribunal des affaires sociales qui donne raison au RSI, tout en imposant à ce dernier de privilégier la voie amiable et raisonnable avant toute action juridique. Vécue comme un véritable traumatisme par l'ensemble des familles, l'arrivée d'huissiers de justice frappant à la porte des indépendants et saisissant les meubles est récurrente – je suis certain que certains d'entre vous ont reçu des témoignages en ce sens.
L'amendement tend en outre à suspendre l'application des majorations de retard sur les montants appelés en cas de contentieux, afin d'alléger la pression financière sur les entrepreneurs qui ne peuvent, bien souvent, plus faire face au paiement des sommes exigées.
L'opportunité de cette disposition me semble pouvoir être entendue par la majorité.
Jamais deux sans trois, monsieur Bazin ! Depuis la proposition de loi de M. Aubert, la situation a évolué : au mois de juin 2015, vingt mesures ont été mises en place pour les assurés du RSI, dont quatre recoupent précisément le dispositif que vous proposez. Un exemple : en cas de recouvrement de petites sommes, une lettre recommandée avec accusé de réception est envoyée, et ce n'est plus l'huissier qui se rend chez l'indépendant pour réclamer les sommes dues. Je vous invite donc à retirer l'amendement.
Après votre confession, je me ferai fort de porter la bonne parole à M. Aubert. Je retire donc l'amendement.
L'amendement no 585 est retiré.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l'amendement no 40 .
Comme l'amendement no 41 , cet amendement a été défendu en commission. Il vise à permettre, dans le cadre du régime d'assurance vieillesse de base des professionnels libéraux, une cotisation proportionnelle unique, déterminée en pourcentage des bénéfices non-salariés.
En effet, bien qu'on se situe ici dans le régime général, une cotisation minimale forfaitaire s'applique lorsque les revenus sont inférieurs ou égaux à 11,50 % du plafond annuel de la Sécurité sociale. Jusqu'en 2015, une dérogation à ce principe de cotisation minimale forfaitaire était appliquée aux professionnels justifiant d'une autre activité professionnelle.
Monsieur le rapporteur général – si vous voulez bien m'écouter – ,…
… vous nous avez répondu en commission, sur cet amendement. Nous avions donné l'exemple des moniteurs de ski, qui travaillent très occasionnellement – une semaine ou deux pendant les vacances scolaires – , et en particulier des jeunes stagiaires, qui sont étudiants et doivent, au cours de leur formation, effectuer des heures de pratique dans une école de ski. Ils ont évidemment des revenus très faibles et sont soumis à ce plafond de cotisations, puis, lorsque le plafond est dépassé, cotisent, proportionnellement aux heures travaillées, ce qui a un impact particulièrement fort quand leurs revenus sont très faibles.
Vous nous avez répondu que les moniteurs pouvaient choisir le régime du micro-social et échapper à la cotisation forfaitaire. Notre analyse est que le régime micro-social est très désavantageux pour cette profession, qui supporte énormément de frais professionnels. Monsieur le rapporteur, la réponse que vous nous avez faite ne convient pas à la situation que j'ai évoquée.
Sourires.
Plus sérieusement, Mme Battistel et moi partageons une passion pour l'Isère et ses montagnes. Je cherchais donc tout à l'heure à bien comprendre les raisons pour lesquelles je suis obligé de donner à nouveau un avis défavorable.
De nombreuses modifications ont été apportées au régime des cotisations minimales forfaitaires. C'est en effet très complexe, car de nombreuses réformes successives sont intervenues. Jusqu'au 31 décembre 2015, s'appliquait l'article D. 612-5 du code de la Sécurité sociale, puis l'article 26 de la loi du 18 juin 2014 et l'article 9 de la loi de financement de la Sécurité sociale – LFSS – pour 2015. L'article 21 de la LFSS pour 2016 est revenu sur les dispositions précédentes, de telle sorte qu'en matière de dispense de cotisation forfaitaire minimale pour l'ensemble des professions libérales, la mesure que vous proposez serait extrêmement problématique, car elle viserait toutes les professions libérales affiliées à la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés – CNAVTS – , polyactifs ou non, alors qu'il n'y a pas de raison de traiter ces travailleurs indépendants différemment des autres travailleurs indépendants.
Quant à votre amendement no 41 rectifié , sur lequel vous avez anticipé en évoquant les moniteurs de ski, il est plutôt satisfait, car la cotisation minimale n'est pas indispensable pour ces professionnels, qui peuvent relever du régime du micro-social et, ainsi, ne pas s'acquitter des cotisations minimales.
L'amendement no 40 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l'amendement no 41 rectifié .
Monsieur le rapporteur, je me permets d'insister, car la réponse que vous avez donnée à propos du micro-social ne correspond pas du tout à cette situation, compte tenu des frais professionnels très importants supportés dans le cas de figure que j'ai évoqué. Le dispositif en vigueur n'est donc pas du tout adapté à la situation et votre réponse n'est pas satisfaisante.
À propos de cet amendement no 41 rectifié , je tiens à citer le rapport du Haut conseil du financement de la protection sociale sur la protection sociale des non-salariés et son financement, qui souligne que « l'absence de bénéfice d'un allègement général de cotisations sur les faibles revenus d'activité, comparable à celui dont bénéficient les salariés, contribue par ailleurs à des situations contrastées entre non salariés et salariés dans la zone des bas salaires » et qu'« il serait logique qu'un régime d'indépendant aligné dans ses règles sur le régime général et intégré financièrement à celui-ci repose sur des contributions de ses affiliés proches de celles observées pour les salariés ». La logique voudrait donc que ces travailleurs indépendants paient leurs cotisations proportionnellement aux résultats, comme les autres salariés.
Si je comprends bien, madame Battistel, vous dites que, bien que qu'ils aient la possibilité de relever du régime micro-social, et ainsi d'être dispensés de cotisation, ils sont tout de même soumis à une cotisation, quelle que soit la solution proposée.
Je ne peux pas émettre un avis favorable sur cet amendement, du fait de la complexité du dispositif – et, à en juger par le visage de certains députés, je ne suis pas seul à percevoir cette complexité. Je puis au moins demander au Gouvernement d'intervenir sur ce sujet, ou peut-être pourrons-nous creuser la question en prévision de l'examen du texte au Sénat ou en deuxième lecture à l'Assemblée nationale.
Il ne s'agit pas de vous opposer un non de principe, mais, si je vous dis que nous nous creusons la tête sur ce sujet et sur cet amendement, c'est bien parce que nous disposons d'éléments contredisant ceux que vous nous présentez.
Je vous propose de vous recevoir au ministère pour discuter spécifiquement de la situation des moniteurs de ski, qui semble être une spécificité.
S'ils bénéficient du régime micro-social, ils doivent s'acquitter d'une cotisation strictement proportionnelle à leur chiffre d'affaires. Ils ont, en fait, le choix entre deux situations : relever du régime micro-social ou être soumis à la cotisation minimale qui permet à tous les travailleurs indépendants de valider au moins trois trimestres de retraite par an. La situation des moniteurs de ski stagiaires, que vous évoquez, est très précise. Je propose donc que nous en discutions au ministère.
Je vous remercie, madame la ministre, de me proposer cette solution. Ce sujet est en effet relativement technique et recouvre d'autres cas de figure que celui des moniteurs de ski, comme les saisonniers, dont je souhaiterais également parler avec vous. J'accepte donc très volontiers votre rendez-vous et retire par conséquent mon amendement dans l'attente d'une nouvelle proposition.
L'amendement no 41 rectifié est retiré.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l'amendement no 865 .
Depuis le début de ce débat, nous entendons dire que la majorité s'attache à réformer le pays en appliquant les promesses du Président de la République. Cela tombe bien car, étant vraiment des Constructifs, nous proposons un amendement visant à supprimer les régimes spéciaux : j'ai entendu que c'était une promesse électorale du Président de la République.
Pour éviter une suppression pure et simple, qui serait un coup de hache dans les régimes spéciaux, le présent amendement vise à mettre en extinction ces régimes spéciaux. À partir du 1er janvier 2019, l'ensemble des salariés concernés rentreraient dans le régime général, permettant une réforme de fond, une réforme structurelle des retraites.
Comme vous le savez peut-être, les régimes de retraite se dégraderont à nouveau à partir de 2020. Il paraît donc important de s'atteler dès maintenant à la tâche, sans attendre plusieurs années qu'ils se dégradent complètement.
Depuis la création du compte pénibilité, les régimes spéciaux n'ont plus de raison d'être : ils avaient été créés pour permettre un départ en retraite anticipé pour les métiers difficiles et pénibles. Dès lors qu'un autre régime de pénibilité est mis en place, il n'y a plus de raison de maintenir ces régimes spéciaux. Pour cette raison, je propose l'extinction de ces régimes.
Rappel au règlement
Je fais un rappel au règlement sur la base de l'article 58, alinéa 1, qui a trait au bon déroulement de la séance. Il concerne un amendement portant sur la pratique du tiers payant, présenté par le Gouvernement sans possibilité de débat. Cela représente un mépris du Parlement et un non-respect de la procédure législative, d'autant qu'il introduit une nouvelle disposition qui n'est même pas mentionnée dans le texte. C'est un amendement de taille, puisqu'il était la mesure phare de la loi santé du précédent gouvernement ; il affecte la vie de nos concitoyens, notamment les classes moyennes. À ce titre, et en application de l'article 88, alinéa 1, du règlement, je demande son renvoi en commission.
Pour la clarté des débats, pouvez-vous préciser le numéro de l'amendement en question ?
Cet amendement sera examiné après l'article 44. J'espère que nous parviendrons à l'examiner au cours de la présente séance.
Après l'article 11
Certains régimes spéciaux préexistaient à la création de la Sécurité sociale. Nous nous situons donc plutôt dans une convergence progressive. La convergence est déjà accomplie pour la branche famille ; la branche maladie a également achevé cette convergence. S'agissant de la branche AT-MP – accidents du travail, maladies professionnelles – , des régimes particuliers peuvent encore s'expliquer en fonction de l'activité exercée et sont en tout état de cause très assurantiels.
Reste le risque vieillesse : sur ce point, le Président de la République et la majorité se sont engagés à conduire une réflexion d'ampleur en vue d'une réforme importante. Sans vouloir porter un jugement de valeur, cela mérite mieux qu'un amendement dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Vous avez dit vous-même que vous étiez constructif : vous avez donc toute votre place dans la future réflexion. Nous nous retrouverons pour discuter des propositions du Gouvernement.
Je compléterai les propos du rapporteur général en vous indiquant que nous avons nommé un haut-commissaire à la réforme des retraites, Jean-Paul Delevoye, qui s'attelle, à mes côtés, à une réflexion globale sur la réforme structurelle des retraites. Il ne me semble pas judicieux de s'attaquer à un régime spécial par le biais d'un amendement dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Avis défavorable.
J'admets qu'il est curieux de s'attaquer à un régime spécial avec un amendement de ce type. Toutefois, l'article 11 s'attaque, lui aussi, à un régime : le régime social des indépendants. J'ai donc cru que le Gouvernement voulait réformer les régimes spéciaux par amendement. C'est la raison pour laquelle j'ai déposé cet amendement car cela me paraissait de bon aloi.
L'amendement no 865 n'est pas adopté.
Il s'agit d'un amendement d'équité, de justice fiscale et sociale. Nous avons voté à peu près le même amendement la semaine dernière pour rétablir l'équilibre entre la retraite des fonctionnaires, avec le Préfon, et celle des TNS – travailleurs non salariés – , prévue par la loi Madelin.
Le présent amendement vise à rétablir la justice entre les salariés et les non-salariés. Les premiers bénéficient de titres restaurant, auxquels les seconds n'ont pas droit : nous proposons donc de rétablir l'équité. Nous avons estimé à 40 millions d'euros supplémentaires les recettes qui viendraient alimenter les comptes de l'État et de la Sécurité sociale. En adoptant cet amendement, vous rendriez justice et équité aux travailleurs non salariés.
Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM.
Votre amendement vise à exonérer de cotisations sociales l'acquisition des titres restaurant par les indépendants. Or, en l'état du droit, les indépendants peuvent bénéficier de déductions fiscales pour leurs repas, en frais réels, dans le cadre de l'établissement de l'impôt sur le revenu. Si votre amendement était adopté, il y aurait une double niche fiscale : vous bénéficieriez à la fois d'une déduction des frais réels pour les repas et des déductions sur les tickets restaurants qui pourraient éventuellement être utilisés pour payer ces repas.
Si un dispositif se substituait à l'autre, il n'est pas certain que les indépendants y gagneraient. Mieux vaut une déduction fiscale sur un repas de 20 euros que sur la part de ticket restaurant qui participerait au paiement de ce repas de 20 euros. La commission a donc émis un avis défavorable, à moins que vous ne soyez d'accord pour retirer cet amendement.
Outre les précisions apportées par le rapporteur général sur le fait que les frais de repas sont déjà déductibles, j'ajouterai que nous avons évalué cette mesure aux alentours de 1 milliard d'euros. Je préférerais donc que cet amendement soit retiré, sinon l'avis du Gouvernement sera défavorable.
L'amendement no 69 est retiré.
Cet amendement entend préparer la mise en place d'un bouclier social pour l'ensemble des indépendants, en demandant au Haut conseil du financement de la protection sociale de remettre un rapport au Parlement sur la question, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi. Ce rapport étudierait la création d'un plafond au-delà duquel les indépendants ne seraient plus appelés à cotiser davantage et d'une garantie d'un revenu préservé pour les entrepreneurs.
Il s'agit d'une véritable inquiétude : les indépendants veulent une réforme du RSI, mais sa suppression les inquiète à moyen et long termes concernant les cotisations. Ce rapport serait de nature à les rassurer.
L'amendement no 586 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement propose de mener une étude – encore un rapport ! – sur l'indemnisation des naufragés du RSI, qui en ont subi les dysfonctionnements. La suppression du RSI prévue par le PLFSS pour 2018 ne résoudrait en rien les dysfonctionnements du passé, dont les victimes doivent être décemment indemnisées ; nous devons tous y être attentifs.
Afin que l'État prenne ses responsabilités et indemnise ceux qui en ont été victimes, le présent amendement a donc pour objet la remise d'un rapport au Parlement afin d'étudier les conditions d'un fonds d'indemnisation destiné aux victimes des failles du RSI. S'il n'y a pas de nouveaux malades, il faut quand même soigner les anciens malades !
Vous êtes d'accord avec moi ! Il y a sur ce sujet un rapport de la Cour des comptes, qui commence à dater, nous l'avons évoqué plusieurs fois ce soir, ainsi que d'autres rapports. J'ai parlé tout à l'heure du marché et du réflexe assez fort, assez vif que le sigle RSI peut parfois déclencher.
Les dysfonctionnements sont connus ; pour autant, il n'a jamais été question d'un fonds d'indemnisation des victimes du naufrage du RSI. Maintenant que nous voulons mettre en place un système qui remplacera le RSI, auquel vous n'êtes pas nécessairement favorable, en tout cas pas de la façon dont nous voulons le conduire, vous voudriez que nous mettions en place ce système d'indemnisation. C'est un peu difficile !
Plus sérieusement, les dysfonctionnements du RSI, qui ont pu causer des torts aux indépendants dans la gestion de leurs dossiers, sont progressivement, et pour un grand nombre d'entre eux, mis à jour. Des mesures correctives sont systématiquement appliquées, de façon que personne ne soit lésé.
Cette démarche ira à son terme ; il n'est pas nécessaire d'établir un rapport pour cela puisque les choses s'organisent structurellement et que les indépendants doivent évidemment être dédommagés pour les désagréments subis. Ceux-ci sont parfois très importants, nous en avons reçu des témoignages. Je ne vais pas revenir ici sur l'article 11, que nous avons longuement examiné et adopté tout à l'heure, mais nous avons parfaitement conscience du sujet ; je pense que vous pouvez être rassuré.
Quelques précisions techniques : les difficultés des travailleurs indépendants ont été prises en compte par la caisse. Aujourd'hui, le RSI apporte différentes aides, comme l'octroi de délais de paiement. Plus de 220 000 salariés en ont bénéficié en 2016 : cela représente près de 1,2 milliard de cotisations.
Par ailleurs, un fonds d'action sanitaire et social permet de couvrir un ou plusieurs mois de délais de cotisation, avec la prise en charge de 32 millions d'euros en 2016.
L'avis du Gouvernement est donc défavorable : nous souhaitons nous projeter dans l'avenir et ces salariés naufragés semblent avoir été pris en compte par la caisse.
Je soutiendrai cet amendement, car nous avons rencontré, avec les dysfonctionnements du RSI, des situations assez ubuesques, voire dramatiques. Il y a donc sans doute un devoir de réparation et peut-être aussi de prévention car je ne suis pas sûr que la nouvelle fusion n'entraîne pas encore quelques désagréments, qui nécessiteront aussi d'être réparés.
L'amendement no 590 n'est pas adopté.
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 12.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard.
Le 4 octobre dernier, les buralistes de France ont manifesté à Paris contre la hausse du prix du paquet de cigarettes à 10 euros. Vous comme moi savons bien sûr que le tabac est nocif : il est responsable de 47 000 décès chaque année en France, soit 30 % de l'ensemble des décès dus à des cancers.
Comme vous, j'aimerais que les Français fument moins. Actuellement, un quart des personnes de plus de quinze ans fument en Europe. Une lutte efficace est donc nécessaire mais, et c'est là où ma position diverge de la vôtre, pas au détriment des buralistes. Il est en effet possible de mener une politique efficace contre le tabagisme sans que les buralistes aient à mettre la clef sous la porte.
C'est ce que j'avais proposé dans l'un de mes amendements, qui a été retoqué, car, sous la Ve République, les députés ne peuvent pas créer de charges : c'est inconstitutionnel, même lorsqu'il s'agit d'une mesure juste et nécessaire.
Je tiens à le dire : la hausse du paquet de cigarettes n'est pas le remède à tous les maux. La Suède obtient des résultats édifiants alors qu'un paquet de cigarettes y coûte en moyenne entre 5 et 6 euros, moins cher qu'en France où il oscille aujourd'hui entre 6,50 et 7 euros.
Pire, cette hausse du prix du paquet de cigarettes risque de nous exposer à plusieurs écueils, comme l'augmentation significative de la contrebande de tabac, surtout dans les régions frontalières. Il est donc impératif de renforcer le contrôle à nos frontières et de ne permettre l'achat que d'une seule cartouche de l'autre côté de la frontière.
Évitons de transformer une guerre contre le tabac en guerre contre les buralistes en France, surtout en province, dans des villages où les buralistes sont parfois les derniers à maintenir le lien social.
Dernier écueil, celui de ne pas « mettre le paquet » – si vous me permettez ce jeu de mots – sur une véritable politique de prévention du tabagisme en direction notamment des mineurs, qui sont les fumeurs de demain. Le plus efficace n'est pas d'inciter à l'arrêt de la consommation de tabac mais de la prévenir.
L'article 12 vise en effet à augmenter par paliers le prix du paquet de cigarettes pour qu'il atteigne le 1er novembre 2020 la somme symbolique de dix euros.
Si cette disposition peut paraître louable du point de vue d'une lutte contre le tabagisme que personne ne remet en cause, elle semble néanmoins, madame, par sa rapidité et par sa brutalité, faire peu de cas d'acteurs économiques importants pour le monde rural – je veux bien sûr moi aussi parler des buralistes.
En effet, après le premier « coup dur » qu'a constitué pour eux l'instauration du paquet neutre, dont nous attendons toujours les résultats en matière de santé publique, les buralistes vont de nouveau connaître des mois, voire des années très difficiles du fait de ce paquet à dix euros.
Vous le savez bien, madame la ministre, la France ne vit pas en autarcie ; elle compte de nombreuses zones frontalières. Je suis moi-même député d'une circonscription frontalière avec la Suisse et l'Allemagne. Or les prix pratiqués dans ces deux pays sont déjà beaucoup plus bas qu'en France et cet écart de prix va encore s'accroître avec ces nouvelles augmentations. Celles-ci ne feront qu'alimenter un peu plus encore le marché parallèle.
Il y a 24 000 buralistes en France, qui emploient quelque 100 000 personnes. Quarante-trois pour cent de ces buralistes exercent dans des communes de moins de 3 500 habitants et, on l'a rappelé à l'instant, c'est souvent le seul commerce qui subsiste dans certains villages ou petites villes. Vous devrez, madame, assumer aussi la fermeture inéluctable de centaines de bureaux de tabac, notamment en zones frontalières.
Une telle mesure ne peut être prise qu'à la condition d'être assortie d'engagements très clairs quant à la mise en place d'un vrai plan de lutte contre le marché parallèle, en liaison avec la gendarmerie, la douane, la police et la justice, et une telle mesure ne peut se concevoir qu'en instaurant dès à présent une harmonisation au niveau européen. Comme vous n'en faites pas état, nous serons nombreux à nous opposer à cette mesure que vous préconisez.
Plus de 30 % des cancers seraient liés au tabac ; le tabagisme est également à l'origine de maladies respiratoires et cardiovasculaires. Le tabac est un poison qui provoque nombre de maladies graves.
Les grands producteurs de tabac enrichissent leurs actionnaires grâce aux addictions qu'ils suscitent. Les pouvoirs publics doivent donc déployer une politique antitabac offensive, notamment en matière de prévention, mais aussi accompagner les fumeurs pour leur permettre d'en sortir.
Il est regrettable que d'autres formes de lutte ne puissent être imaginées, mais, dans ce contexte, il est indéniable que les politiques tarifaires ont des effets sur la consommation. Il convient pourtant d'interroger leur absence de progressivité, d'autant plus que se développe un marché de contrebande dont les produits sont encore plus nocifs. Il ne faudrait pas que l'addiction pousse nombre d'individus à sacrifier d'autres investissements, non sans dommage pour leur santé, pour pouvoir la satisfaire.
Avec la prévention c'est sans doute l'accompagnement des fumeurs qui sera décisif. La question se pose de savoir s'il sera efficace et soutenable d'augmenter les tarifs sans rembourser intégralement les traitements de substitution et d'aide à la sortie du tabac.
Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, responsable de 80 000 décès par an en France, le tabac est un fléau pour la santé de nos concitoyens. Alors que la France compte près de 30 % de fumeurs, l'augmentation du prix du tabac est une mesure qui permet de diminuer la consommation : cela a été prouvé par le passé.
De plus l'augmentation progressive du prix du paquet de cigarette jusqu'au chiffre symbolique de dix euros aura un véritable effet dissuasif chez les jeunes, dont la consommation est parmi les plus élevées en Europe.
Il s'agit là d'une mesure de santé publique que je ne peux que soutenir sans réserve. Je suis d'autant plus favorable à cette hausse que le Gouvernement n'a pas fait la sourde oreille : il a été à l'écoute des buralistes, qui lui ont fait part de leurs inquiétudes et de leurs propositions.
Le temps de l'action est venu et je ne doute pas, madame la ministre, que vous saurez mettre en place une véritable politique pour éviter les effets d'aubaine au travers de négociations intenses à Bruxelles visant à obtenir d'ici à la fin du quinquennat l'harmonisation de la fiscalité du tabac au niveau européen et au travers d'un plan de lutte contre la contrebande et le trafic illicite du tabac. Ce plan renforcera considérablement les moyens des douaniers qui effectuent déjà un travail remarquable.
Madame la ministre, vos engagements sont forts et nous sommes convaincus qu'ils seront tenus. C'est pourquoi la majorité votera en faveur de l'article 12.
Je tiens à dire en préalable que nous sommes tous attachés à la santé de nos concitoyens ; nous n'ignorons pas que le tabac fait des dégâts considérables, sans parler du coût pour la Sécurité sociale.
Depuis quelques années il n'est pas de projet de loi relatif à la santé ou de projet de loi de financement de la Sécurité sociale qui ne compte de disposition relative au paquet de cigarettes. Ainsi le projet de loi de modernisation de notre système de santé proposait l'instauration du paquet neutre, donnant lieu à un débat au sein même de la majorité d'alors, certains préférant l'augmentation du prix du tabac.
Il faudrait que l'on puisse disposer d'un premier bilan des effets du paquet neutre sur la consommation de tabac. Je l'avais dit à la tribune de l'Assemblée lors de la troisième lecture du projet de loi de modernisation de notre système de santé : j'étais de ceux qui ne croyaient pas que le paquet neutre serait susceptible de réduire la consommation et, aujourd'hui, les chiffres semblent nous donner raison.
L'autre problème touche ceux qui vendent ces paquets de cigarettes, parmi bien d'autres choses, à savoir les buralistes. Ces professionnels souffrent beaucoup des décisions que nous prenons au sein de cette assemblée. J'entends que le Gouvernement les a écoutés et a pu dialoguer avec eux. Je voudrais savoir quel type de solutions il compte proposer aux buralistes pour leur permettre de maintenir leur commerce, qui est quand même dans nos communes les plus rurales le dernier lien entre les habitants. Bien souvent, quand le « tabac-journaux » disparaît, il ne reste plus rien. C'est pourquoi nous avons le devoir d'être extrêmement vigilants quant à la situation de ces professionnels.
Cet article visant à inciter les fumeurs à arrêter de fumer est insuffisant. En effet, plusieurs études prouvent que les augmentations progressives du prix du paquet de cigarettes n'ont qu'un impact minime sur la consommation de tabac. En outre, ce sont encore une fois les plus pauvres qui vont en faire les frais, car ce n'est pas chose simple que d'arrêter de fumer.
Parce que nous ne pouvons pas abandonner les fumeurs à leur triste sort, nous vous proposons par deux amendements à cet article de reconnaître le tabagisme comme une maladie au même titre que l'alcoolisme en créant une autorisation de mise sur le marché – AMM – pour les substituts nicotiniques et le remboursement à 100 % des consultations en addictologie.
Mieux vaut prévenir que guérir. Donnons aux fumeurs tous les moyens d'avoir envie d'arrêter de fumer, parce que c'est bien la motivation qui permet de mettre fin à cette addiction. Mettons tout en oeuvre dans le domaine de la prévention du tabagisme chez les adolescents. Il y a eu des progrès en la matière, mais ils semblent insuffisants. Avec 40 % de fumeurs réguliers chez les 16-25 ans, la France est très touchée par le problème du tabagisme des jeunes.
Il semblerait que vous n'ayez pas pris en compte les différences tarifaires avec les pays frontaliers. À l'heure actuelle, un habitant de la Meurthe-et-Moselle peut acheter jusqu'à cinq cartouches au Luxembourg voisin. L'achat de cinquante paquets permet une économie de cent euros.
Une fois de plus vous déplacez le problème, sans parler du développement du marché noir, qui, loin de favoriser l'arrêt du tabac, permet aux jeunes fumeurs de se procurer des cigarettes.
Le tabagisme est une maladie difficile à combattre. Prenons-le en compte en donnant aux fumeurs toutes les cartes pour sortir sereinement de cette addiction.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cet article est un pas de plus dans la lutte contre ce fléau qu'est le tabagisme.
La France détient le triste record du nombre de fumeurs en Europe, notamment chez les jeunes. L'augmentation du prix du tabac est dans ce contexte une mesure de bon sens – et j'espère que ce constat est partagé sur tous ces bancs.
Mais la France détient un autre record européen : celui de la consommation de cannabis. En effet, près de 50 % des jeunes Français de dix-sept ans déclarent avoir déjà fumé du cannabis dans leur courte vie. Il s'agit de la drogue la plus consommée en France. Environ 40 % des 18-65 ans ont consommé du cannabis au moins une fois.
Si le cannabis peut avoir des effets thérapeutiques dans le traitement de certaines pathologiques, il peut causer des dommages psychologiques graves et parfois irréversibles, notamment chez les jeunes.
La volonté du Gouvernement, en accord avec les préconisations des acteurs des forces de l'ordre, de contraventionnaliser l'usage du cannabis va permettre une procédure beaucoup moins contraignante. Alors que la prévention est une des priorités du Gouvernement, l'amende pécuniaire va amoindrir la sanction. Cependant, la consommation de cannabis augmente inexorablement. Il est aussi de notre devoir de combattre ce fléau par des campagnes de prévention beaucoup plus efficaces.
Nous soutenons le Gouvernement dans sa lutte contre le tabagisme. Dans la mesure où il s'agit de la première cause de mortalité évitable, c'est en effet une sage décision que d'augmenter le prix du paquet de cigarettes pour le faire passer progressivement à dix euros.
Cependant, pour que cette politique soit pleinement efficace, il convient de l'assortir d'une réforme profonde du code des douanes visant à s'attaquer à la contrebande de tabac étranger, notamment dans les zones frontalières. Ma circonscription touchant l'Espagne et n'étant pas éloignée de l'Andorre, je peux en parler longuement, d'autant plus que les buralistes s'y font de plus en plus rares.
On ne peut pas parler du tabagisme sans parler des autres addictions, notamment en ce qui concerne les jeunes. Je pense à la consommation d'alcool et de substances toxiques, qui constituent un réel problème de santé publique.
C'est pourquoi, madame la ministre, je vous demande quelles sont vos intentions en matière de traitement de ces addictions dans le cadre d'une politique de santé publique, en espérant que vous pourrez me répondre !
Nous partageons votre combat, madame la ministre. Il s'inscrit dans une longue histoire dont nous allons ce soir franchir une nouvelle étape.
Mais je voudrais profiter de ce débat pour évoquer un sujet également difficile, la deuxième cause de mortalité évitable avec 49 000 décès et la première cause d'hospitalisation, pour un coût de 2,6 milliards d'euros : je parle de l'abus d'alcool. Il faut que nous nous attelions à combattre ce fléau, qui tue, qui détruit, provoquant accidents de la route et violences intrafamiliales.
Nous avons en la matière une lourde responsabilité et je souhaiterais, madame la ministre, que nous puissions, au cours des prochains mois et des prochaines années, avancer sur ce sujet.
Je n'ignore pas qu'il est toujours délicat d'aborder ce problème, mais je suis certaine que nous pouvons le faire de façon intelligente, c'est-à-dire en affirmant notre volonté de protéger nos familles, nos jeunes contre l'abus d'alcool et, en même temps, en reconnaissant que la France dispose d'un réel savoir-faire en matière de production d'alcool, notamment de vin ou de rhum, et qu'il s'agit aussi de protéger ces filières.
Sur ce sujet, la population attend les réponses que nous devons lui apporter.
Avec 78 000 morts par an, 200 décès par jour, le tabac est un meurtrier effroyable ; le coût estimé du tabac en tant qu'impôt indirect s'élève à 1 846 euros par Français ; il fait peser chaque année 15 milliards d'euros sur les finances publiques.
La lutte contre le tabagisme se doit d'être implacable et c'est ce à quoi concourt cette politique de hausse des prix, laquelle doit être importante pour être efficace. Une augmentation des prix particulièrement nette en 2003 et 2004 a fait chuter la vente des cigarettes de 14 % et 20 %. Un accroissement de 10 % du prix entraîne une diminution de la consommation de 4 %.
Ce PLFSS prévoit trois hausses significativement élevées. Cette politique sera accompagnée d'un contrôle renforcé des ventes du tabac et de sa circulation, en particulier transfrontalière – Mme Buzyn nous en a parlé. D'après l'étude menée en 2010-2011 par l'Office français de lutte contre les toxicomanies, une cigarette sur cinq est achetée hors réseaux de buralistes : 15 % des achats sont transfrontaliers ; 5 % illicites.
Bien sûr, la politique de prévention du tabagisme ne peut se résumer à cette seule mesure. C'est un ensemble de dispositions d'accompagnements, d'incitations, d'évolutions culturelles qui est nécessaire. J'ai fait une telle expérience en tant que médecin tabacologue et je sais qu'il est possible de changer la donne.
Presque 33 % des jeunes de quinze à dix-neuf ans déclarent fumer régulièrement ; un jeune de dix-sept ans sur trois déclare fumer quotidiennement. La consommation des jeunes est un enjeu majeur et il est nécessaire de faire évoluer les représentations positives qu'ils associent au tabac. Le prix du tabac influence fortement leur consommation, de même que celle des personnes en situation de précarité. Oui, une hausse significativement élevée est une mesure de prévention efficace ! Oui, elle se justifie sans aucune réticence ! Oui, tout doit être tenté pour enrayer ce fléau qui met en jeu la santé publique !
Nous avons déjà eu l'occasion de débattre longuement de la fiscalité du tabac dans cette même enceinte avec l'examen du PLF, mais l'optique est aujourd'hui différente – puisqu'il s'agit du financement de la Sécurité sociale – , même si le dossier reste le même.
Madame la ministre, nous soutenons la démarche gouvernementale en faveur de la santé publique : c'est un objectif prioritaire sur lequel je ne reviens pas.
Cependant, la Corse se trouve confrontée à une double évolution : la dynamique d'alignement entre le prix du tabac en Corse et le prix général ainsi que la croissance très soutenue de ce dernier, qui se traduira par un quasi-doublement du prix du tabac et posera des problèmes aux buralistes face à la diminution prévisible de la demande touristique en particulier et au risque d'achats transfrontaliers.
Le basculement dans le droit commun mettra également en danger la manufacture MACOTAB – il est important de le rappeler, la Corse étant une île très largement désindustrialisée. Nous demanderons donc des mesures spécifiques pour les buralistes – de même nature que celles qui ont déjà été prises dans des régions transfrontalières – et l'étude de mesures permettant d'assurer la pérennité de la MACOTAB.
Dans le cadre de l'architecture fiscale générale de la Corse, l'État récupérera la fiscalité sur le tabac. Nous demandons donc logiquement que la perte pour la collectivité soit compensée à due concurrence par un transfert de la part de TVA, puisque la compétence de la gestion des routes – pour laquelle cette fiscalité sur le tabac nous a été attribuée – demeure. Le ministre Darmanin nous a renvoyé au collectif budgétaire : nous verrons bien.
Pour finir, je dirai plus largement que nous ne nous inscrivons pas dans cette démarche de normalisation fiscale. Bien au contraire, nous demandons que, dans le cadre des compétences futures, la Corse puisse bénéficier de la dévolution fiscale qui lui donnera plus d'autonomie et de maîtrise quant à ses choix politiques.
Par rapport à la moyenne nationale, le nombre de cancers du poumon est 25 % plus élevé en Corse et l'île compte 30 % de jeunes fumeurs en plus. L'alignement de la fiscalité comportementale y est justifié, mais des mesures transitoires sont indispensables pour préserver l'activité des buralistes et la requalification des employés de l'usine MACOTAB de Bastia.
La Corse perçoit la TVA tabac, mais cette ressource, pour nous, est empoisonnée. La collectivité de Corse est là pour assurer le bien commun des Corses et pas pour faire des recettes sur la dégradation de leur santé. La collectivité unique sera mise en place au 1er janvier prochain et devra être financée à long terme par des ressources dynamiques, comme la TVA affectée.
On ne peut que souhaiter une baisse rapide de la perception de la TVA tabac et, avec elle, du nombre des cancers. La collectivité ne peut pas tabler sur la consommation de tabac afin de maintenir ses ressources : c'est contradictoire avec les objectifs de santé publique. Les Corses n'ont pas à choisir entre la solidité de leurs finances locales et la santé de leurs enfants.
La politique de santé et la fiscalité comportementale relèvent pour le moment de la compétence de l'État, non des régions. C'est à l'État de récupérer cette fiscalité et d'en assumer la baisse progressive liée au fait que l'alignement des prix mettra fin aux achats saisonniers.
Nous venons de remplacer la dotation globale de fonctionnement régionale par une fraction de TVA. Il est logique que la Corse dispose d'une part de TVA normale équivalente à la TVA tabac. Nous avons été reçus par M. Darmanin pour discuter du PLF, mais il nous a expliqué, madame la ministre, qu'il était tenu par votre avis. Nous discutons donc maintenant du PLFSS, mais, si les ministres veulent se renvoyer la balle, les électeurs prendront acte dès le mois de décembre des réponses que l'État est ou non capable d'apporter.
Le tabac provoque une hécatombe insidieuse, silencieuse, sournoise. Certains d'entre vous ont rappelé les chiffres : 80 000 morts par an, 200 morts par jour, comme si un tiers de cet hémicycle disparaissait quotidiennement sous nos yeux.
Le tabac est aussi un marqueur d'inégalités sociales, puisque 50 % des demandeurs d'emploi sont fumeurs, point qu'il faut évidemment garder à l'esprit.
Pour autant, le tabagisme n'est pas une fatalité. Des pays européens, dont le Royaume-Uni, par exemple, ont montré qu'ils pouvaient obtenir une réduction forte, drastique, de la consommation de tabac grâce à des mesures volontaristes. Voilà ce qu'il faut : un arsenal de mesures et du volontarisme, du courage politique.
Au moment où nous parlons de dépassement des clivages, s'il est un sujet qui devrait tous nous rassembler, c'est bien celui-là, celui de la santé publique, de la lutte contre le tabagisme. C'est d'ailleurs le courage politique de Jacques Chirac qui a permis d'interdire la consommation de tabac dans les lieux publics, c'est le courage politique de Marisol Touraine qui a permis que le paquet neutre soit mis en place et c'est aussi le courage politique dont vous faites preuve avec le Président de la République, madame la ministre, qui permettra de parvenir à une très forte hausse du prix du tabac. Si, dans notre arsenal, une mesure peut avoir un peu plus d'effets que les autres, c'est bien celle de la fiscalité, à condition que celle-ci augmente fortement et très rapidement, comme en dispose ce texte.
Je tiens aussi à rappeler – puisque la question a été posé, notamment par Mme Fiat – que chaque Français qui le souhaite est en droit de demander depuis l'année dernière 150 euros à la Sécurité sociale pour s'acheter des substituts nicotiniques.
L'accompagnement est là. Aujourd'hui, nous devons prendre nos responsabilités et voter cette hausse du prix du tabac en continuant de mettre en oeuvre toutes les mesures permettant de lutter contre le tabagisme.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe REM.
Après avoir oublié hier de compenser l'augmentation de la CSG pour les agriculteurs, vous malmenez maintenant nos buralistes. Et nous devrions vous croire lorsque vous affirmez avoir un regard bienveillant sur les territoires ruraux !
Cet article prévoit donc la hausse du prix du tabac, donc, corollairement, celle des recettes fiscales. Permettez-moi d'émettre un doute sur la sincérité budgétaire, madame la ministre, puisque toute hausse du prix du tabac s'est traduite par une baisse de recettes pour l'État. Je pense donc que vous rencontrerez quelque problème pour équilibrer votre budget.
Par ailleurs, madame la ministre, la lutte contre le tabagisme et pour la santé publique, que nous devons tous défendre, ne pourra être efficace que si elle est accompagnée par deux autres actions fortes.
La première : une lutte contre le trafic des cigarettes importées. La seconde : un alignement avec nos pays limitrophes pour éviter la fuite des fumeurs vers les buralistes voisins. Madame la ministre, nous comptons sur vous pour nous indiquer quelles mesures et quels moyens vous consacrerez à ces deux actions nécessaires.
Enfin, madame la ministre, vous avez annoncé la hausse du prix du tabac pour porter le prix du paquet de cigarettes à dix euros en 2020. Soit, mais pourquoi ne pas aligner la hausse des autres produits sur celle de la cigarette ? Pourquoi avoir choisi un traitement si inégal des différents produits – les cigarillos et les cigares connaissant une augmentation nettement supérieure ?
Madame la ministre, quelle fiscalité adopterez-vous pour les produits de substitution aux cigarettes qui vont être importés, notamment, d'Italie ?
Madame la ministre, lutter contre le tabagisme est évidemment une bonne chose. Vous prenez comme exemples l'Australie et la Grande-Bretagne, où la hausse massive du prix du tabac a entraîné une baisse de la consommation, mais vous savez fort bien que ce sont deux îles et que ce n'est évidemment pas le cas de la France.
Les mesures que vous proposez n'auront aucun effet positif sur la consommation de tabac, parce que, d'une part, la contrebande augmentera – le tabac consommé sera de moins bonne qualité – et, d'autre part, vous diminuerez les recettes fiscales pour l'État, comme vient de le dire notre collègue. Vous ne rendrez donc service à personne.
J'ajoute que la Belgique et le Luxembourg, pays limitrophes, ont récemment encore baissé les taxes sur le tabac pour attirer les acheteurs français.
Au lieu d'augmenter le prix du tabac, vous devriez procéder à une harmonisation européenne et, là, le Gouvernement auquel vous appartenez aurait en effet intérêt à aller beaucoup plus loin.
Par ailleurs, vous êtes en train de tuer une profession, celle des buralistes, surtout en milieu rural. Nous le disons depuis le début du quinquennat : vous ne proposez aucune mesure en faveur de la ruralité. Vous vous apprêtez à fragiliser les très nombreux buralistes, alors qu'ils jouent un rôle très important pour nos concitoyens, puisque 60 % d'entre eux ont une activité de café et de vente de journaux. Aucune étude d'impact n'a été réalisée dans ce PLFSS pour évaluer ce qu'ils deviendront après une telle augmentation du prix du tabac.
Madame la ministre, mon propos sera peut-être un peu iconoclaste. Je suis un député du vieux monde, je dirais même, d'un autre monde. Je suis médecin – je ne sais pas si j'ai bien fait de l'être… – , je suis fumeur – je suis sûr de ne pas avoir bien fait de l'être – et j'ai été membre de la commission des affaires sociales pendant dix ans.
Depuis dix ans, le tabac est un peu le monstre du Loch Ness qui donne lieu à des manifestations parfaitement hypocrites dans cet hémicycle. Le dernier exemple date de notre réunion, tout à l'heure, en commission des affaires sociales, où l'article contesté était lui-même gagé sur une augmentation du prix du tabac, ce qui est tout de même assez extraordinaire.
Le problème, c'est que, à travers les taxes qu'il prélève, l'État est le premier commerçant de tabac. Et cette hypocrisie, qui ne date pas d'hier, est totale. Nous allons parler du tabac pendant deux heures ! Sur l'article concernant le RSI, on a compté dix fois moins d'orateurs inscrits que sur celui-ci !
Je vous soutiens pleinement : mettez le prix du paquet à 50 ou 60 euros. Si je peux arrêter de fumer, je mets des patchs, je les retire lorsque la majorité m'énerve et je fume à nouveau –
Sourires
et je ne demande jamais leur remboursement à la Sécurité sociale. J'essaie donc de faire des efforts.
Enfin, 30 % des Français fument. De temps en temps, j'entends des propos extrêmement stigmatisants. C'est terrible ! Il ne faut pas diaboliser les fumeurs ! Ce ne sont pas des drogués ! Il me semble essentiel de les respecter pendant le débat que nous allons avoir.
La question du tabac est si grave qu'elle est devenue un marronnier du PLFSS. Nous parlons de lui chaque année. L'année dernière, nous avions débattu du paquet neutre.
Il semble ne pas donner les résultats promis par la ministre à qui vous avez succédé. C'est que la France n'est pas une île. L'augmentation du prix du tabac est une bonne mesure, qui a fait ses preuves sur des durées plus ou moins longues. Pour être efficace, elle doit être brutale, importante et rapide.
Malheureusement, cette mesure est inefficace dans un département comme le mien, les Ardennes, car il est frontalier avec la Belgique. À mesure que les bureaux de tabac ardennais ferment, des supérettes de vente en gros de cigarettes, cigares et tabac en vrac s'ouvrent en Belgique, juste derrière la frontière, puisque c'est la clientèle française qui est visée. Pour nous, dans les Ardennes, point de salut sur ce sujet sans mesures au niveau européen. Nous comptons donc sur vous pour militer dans ce sens, madame la ministre.
La contrebande organisée, jusque dans les établissements scolaires, la vente par internet de produits tabagiques, dont la composition est parfois plus que douteuse, le fléau du tabac, tout cela mérite que nous cherchions des solutions, mais la France, je le répète, n'est pas une île. Évitons de nous bercer d'illusions.
Je suis convaincu qu'il est nécessaire de lutter contre le tabagisme, mais je veux, moi aussi, apporter mon soutien aux buralistes. Il a été rappelé que sont souvent adossées au bureau de tabac d'autres activités – bar, presse, articles de pêche, photocopieur. Quand l'une de ces activités décline, c'est tout l'équilibre du commerce qui est affaibli, et l'on assiste à la fermeture d'établissements et de commerces de ce type, qui sont souvent le dernier du village. Cette question est particulièrement problématique dans les territoires ruraux – même si j'entends les problèmes de concurrence que connaissent les départements frontaliers.
Qu'a-t-on prévu pour ces buralistes, pour ces gens qui, du jour au lendemain, risquent de se retrouver en difficulté ? On va faire passer le prix du paquet de cigarettes de 7 à 10 euros. Combien le buraliste va-t-il récupérer sur ces 3 euros d'augmentation ? J'ai essayé de décrypter les tableaux qui figurent à l'article 12, mais je n'ai pas réussi à trouver la table de conversion entre l'augmentation du prix et ce qui reviendra au buraliste. Or il me semble que ceux qui vendent le tabac doivent profiter aussi d'une partie de cette augmentation, de façon à ce que leur perte de recettes soit compensée et que leur commerce ne soit pas mis à mal. Il faut les accompagner et les aider à pérenniser de nouvelles activités, si c'est encore possible.
Je soutiens évidemment la démarche du Gouvernement sur ce sujet important de santé publique. L'Organisation mondiale de la santé indique qu'une augmentation des prix de 10 % sur le paquet de cigarettes devrait entraîner en moyenne une baisse de 4 % de la demande dans les pays à revenus élevés et de 4 à 8 % dans les pays à faibles revenus.
En France, de telles mesures ont été relativement efficaces, puisque nous sommes passés, entre 2010 et 2014, de 50 000 tonnes à 45 000 tonnes de tabac vendu. Cependant, il importe de renforcer aussi la prévention, car l'impact sur le portefeuille est inégal selon les catégories sociales. Entre 2000 et 2008, le tabagisme a nettement diminué pour les cadres, il a peu diminué parmi les ouvriers et pas du tout parmi les chômeurs. Nous devons avoir ces données à l'esprit.
J'insiste sur la nécessité de mettre en oeuvre des politiques de prévention adaptées en complément de cette hausse importante du prix du tabac. Madame la ministre, pouvez-vous nous indiquer les mesures complémentaires de prévention que vous comptez mettre en oeuvre ? Comme mes collègues, je pense que nous devons également être attentifs à l'avenir des buralistes et les accompagner. Comment envisagez-vous de renforcer cet accompagnement ? Enfin, il faudra lutter sans relâche contre les trafics qui se développent jusqu'à nos portes. Allez-vous solliciter le ministère de l'intérieur pour lutter contre ces trafiquants, qui font beaucoup de dégâts, aussi bien pour les consommateurs que pour les buralistes ?
Je serai bref, puisque beaucoup de choses ont déjà été dites.
J'entends certains collègues regretter la hausse du prix du tabac, mais il faut reconnaître que depuis des années, gouvernement après gouvernement, l'Assemblée nationale a eu la volonté d'augmenter le prix du tabac, avec le sentiment – et c'est aussi la réalité des choses – que cela avait un effet sur la consommation. On ne peut pas nier qu'il existe un mouvement continu, en dépit des alternances politiques, en faveur de la hausse du prix du tabac. Il va de soi que nous soutenons cette mesure, dont nous espérons qu'elle nous permettra, par son ampleur significative, de passer un cap. Il importe néanmoins de mener, en plus de cette politique incitative, une politique de prévention, comme plusieurs collègues l'ont souligné. Il faut conjuguer les effets de la hausse du prix et ceux de la prévention.
Le deuxième sujet, c'est celui des buralistes. Madame la ministre, la question de l'équilibre de ces bars tabac est une vraie question, même si elle dépasse sans doute les attributions de votre ministère. Ces établissements, dans un certain nombre de communes, sont le dernier lieu de commerce, à la fois bar, tabac, maison de la presse, voire multiservices – et leur équilibre économique tient beaucoup à la taxe sur les tabacs. Puisque nous allons augmenter ces taxes, il faudrait que le Gouvernement s'interroge sur l'éventuelle évolution de la répartition entre ce qui revient à l'État et ce qui revient au buraliste. Par ailleurs, je pense qu'il faudrait que nous ayons avec les buralistes une réflexion plus profonde sur la façon dont ils pourront équilibrer leur activité, grâce à d'autres ressources, comme la taxe sur les jeux, par exemple. Il importe en effet que ces établissements, qui sont un élément structurant dans de nombreux territoires, puissent être maintenus.
Si cette mesure est efficace, il y aura de moins en moins de fumeurs, et les buralistes verront leurs recettes s'effondrer. Si nous voulons maintenir ce tissu, il faut que nous trouvions un nouveau modèle économique.
Je tiens, pour finir, à saluer notre collègue Christian Hutin pour son intervention. J'ai trouvé très justes ses propos sur notre schizophrénie collective et sur le fait qu'il ne fallait pas stigmatiser les fumeurs – j'en suis un moi-même – mais plutôt les accompagner pour les aider à changer de comportement.
Applaudissements sur les bancs des groupes MODEM et REM.
La parole est à M. Éric Alauzet, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
On a souvent présenté cette mesure comme une atteinte au pouvoir d'achat, alors qu'en réalité, c'est exactement le contraire. En effet, tous ceux que l'on va mener jusqu'au sevrage vont faire des économies colossales – 200 euros d'économies potentielles pour tous ceux qui vont arrêter de fumer. Cette mesure, loin d'altérer le pouvoir d'achat, va l'accroître pour bon nombre de nos concitoyens.
Je n'ai aucun doute sur la volonté du Gouvernement d'accompagner les buralistes pour qu'ils préservent leur pouvoir d'achat, sur sa volonté d'obtenir une harmonisation européenne et de lutter contre le trafic aux frontières. C'est de l'accompagnement des fumeurs eux-mêmes que je souhaiterais parler. Le prix du tabac est une motivation importante : pour avoir accompagné des centaines et des centaines de fumeurs, je sais que c'est souvent l'un des motifs de leur consultation. Mais il faut prendre en compte cette autre dimension importante du problème qu'est la dépendance. Il existe évidemment une dépendance physique, mais elle est beaucoup moins forte que celle que provoque l'alcool : cela n'a rien à voir.
Il faut avoir à l'esprit que la dépendance est essentiellement psychologique, lorsqu'on accompagne un fumeur vers le sevrage. Les patchs, c'est très bien et cela peut mettre en confiance, mais l'accompagnement psychologique est absolument essentiel. Vous ne mettrez pas un alcoolique dans un avion, mais vous pouvez y mettre un fumeur. L'alcoolique, au bout d'une heure ou deux, va avoir des syndromes de sevrage, tandis que le tabagique va se conditionner. Que le voyage dure deux heures ou dix heures, c'est au cours de la dernière demi-heure qu'il va commencer à gamberger en se disant qu'il va bientôt pouvoir fumer.
La dépendance, même lorsqu'on fume un paquet par jour, est essentiellement psychologique. Il importe donc de prévoir des mesures d'accompagnement d'ordre psychologique et comportemental pour lutter contre les réflexes du type : « Je fume parce que je m'ennuie », « Je fume parce que je me détends », « Je fume parce que c'est la pause », « Je fume parce que je partage un moment de convivialité ». C'est là dessus qu'il faut le plus travailler.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM.
Le tabagisme, je l'ai vu de près pendant de nombreuses années, du fait de ma profession. J'ai vu le pire que l'on puisse imaginer – et même le pire du pire – s'agissant des effets du tabac sur le coeur. Je voudrais simplement rappeler, dans le prolongement de l'intervention de Marc Fesneau, que tous les ministres, depuis vingt ans, ont dû subir ces débats, en se demandant ce qu'il fallait faire pour mettre fin au tabagisme.
Madame la ministre, tous vos prédécesseurs ont eu, année après année, à revenir sur cette question, qui est extrêmement difficile à résoudre. Personne n'a la solution miracle. Si nous la connaissions, ce serait très simple et le problème serait réglé en cinq minutes. Mais personne ne l'a. Je ne suis pas d'accord avec vous, monsieur Alauzet. En réalité, les fumeurs se fichent du prix.
Ils sont prêts à faire n'importe quoi, y compris à aller piquer dans la poche de leur voisin ou à récupérer une cigarette dans un cendrier. Vous avez parlé de problème psychologique, mais la vraie question, c'est celle du dialogue entre un médecin et son patient – point à la ligne. Il est vrai que c'est une question difficile, mais la lutte contre le tabagisme est un objectif prioritaire, madame la ministre. Les plans Chirac qui se sont succédé entre 1995 et 2000, puis les plans cancer – vous étiez alors directrice de l'Institut national du cancer, l'INCa, si ma mémoire est bonne – ont eu des effets importants…
… et l'un de vos prédécesseurs, Xavier Bertrand, a réussi à faire interdire le tabac dans les lieux publics – un résultat dont chacun peut se réjouir.
Ce qui m'inquiète le plus, c'est la consommation des jeunes, et particulièrement des jeunes filles, qui fument souvent leur première cigarette à onze ou douze ans.
Mesdames et messieurs les députés, j'espérais – et je l'espère encore – que ce débat, pour la première fois, serait un débat transpartisan et qu'il arriverait à nous mettre tous d'accord. Le choix que nous avons fait, Gérald Darmanin et moi, c'est celui du « en même temps ». Cela signifie que nous voulons arrêter d'opposer stérilement les buralistes et les objectifs de santé publique.
Applaudissements sur les bancs du groupe REM.
On peut le faire : les buralistes en sont d'accord. Nous avons donc négocié avec eux avant de prendre cette décision. L'idée, en effet, n'est pas de les pénaliser, alors que nous avons cet objectif de santé publique en commun et que 100 % de cette assemblée pense qu'il faut limiter le tabagisme en France.
Certains me disent que la France n'est pas une île : ce sont ceux qui, soutenant le gouvernement Chirac en 2003, avaient autorisé l'augmentation du prix du tabac de 28 %, grâce au premier plan cancer, ce qui avait abouti à une réduction de 20 % du tabagisme. Il y a un lien absolu entre l'augmentation du prix et la réduction du tabagisme. À cette époque-là, cette augmentation du prix ne vous avait pas choqués et vous n'aviez pas peur de la fraude transfrontalière.
Applaudissements sur les bancs du groupe REM.
Nous avons pris, avec Gérald Darmanin, des engagements très fermes vis-à-vis des buralistes, de façon à ce que cela ne pénalise pas leur retraite, puisque nous avons besoin d'eux sur les territoires et qu'ils sont même prêts à s'engager dans des actions de santé publique. Nous leur avons promis, d'abord, une lutte acharnée contre la fraude, que nous avons commencé à mettre en oeuvre avec la Direction générale des douanes. Nous avons également prévu, dans le protocole d'accord sur la modernisation du réseau des buralistes, une hausse du taux de remise net. Ce taux passera ainsi de 6,9 % en 2016 à 8 % en 2021. Le Gouvernement est même prêt à amender ce protocole pour accompagner encore davantage les débitants de tabac.
Enfin, nous allons travailler avec la Commission européenne sur une harmonisation des prix, sur la traçabilité des produits du tabac et sur une convergence des prix entre tous les produits du tabac, qu'il s'agisse de tabac à rouler, de cigarillos ou de cigarettes, de façon à éviter un report de la consommation.
Oui, la hausse que nous proposons est importante, car nous savons que seules les hausses importantes sont capables de réduire la consommation. Au cours des dix dernières années, pendant les quinquennats des présidents Sarkozy et Hollande, aucune mesure réellement courageuse n'a été prise sur le prix du tabac dans les plans cancer successifs, ce que je regrette. Or les hausses minimales et continues qui ont été décidées n'ont pas abouti à une réduction, mais plutôt à une augmentation de la consommation, alors que les autres pays européens réussissaient à réduire leur tabagisme.
Nous avons les pires chiffres de prévalence du tabagisme chez les femmes de vingt à cinquante ans au monde ! Ce n'est pas simplement un tabagisme réservé aux personnes des catégories socio-professionnelles les plus défavorisées. Les femmes fument, quelle que soit leur catégorie socio-professionnelle. C'est pareil pour les jeunes : 33 % des jeunes de dix-sept ans sont des fumeurs quotidiens – quotidiens ! Nous savons l'impact que cela aura sur leur santé et leur dépendance. Un fumeur sur deux aujourd'hui mourra du tabac. Il s'agit donc d'un enjeu majeur. C'est pourquoi je vous demanderai, dans les débats qui s'annoncent, d'arrêter d'opposer stérilement les buralistes à la lutte contre le tabagisme, car ils en sont d'accord. Ce sera l'enjeu du « en même temps » de ce gouvernement.
Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.
Madame la ministre, nous n'avons pas du tout opposé les buralistes à la lutte contre le tabagisme ; mais nous les avons rencontrés dans nos territoires. Je vous ai d'ailleurs écrit le 3 octobre dernier au sujet du tabac. Comme mes collègues – et si pour ma part je ne fume pas – , je suis bien conscient de la nécessité de lutter contre les effets du tabagisme sur la santé et d'éviter à nos jeunes une addiction qui leur serait préjudiciable. En revanche, votre stratégie n'est pas la bonne. En Allemagne, où les prix ne se sont pas envolés, la prévalence est bien moindre. On voit donc bien que ce n'est pas le prix qui joue sur tout.
Vous proposez dans l'article 12 un paquet à 10 euros. Mais cette politique d'augmentation continue du prix du paquet de cigarettes a des effets encore plus préjudiciables, à savoir l'augmentation du marché parallèle, qui déstabilise notre réseau de buralistes – dire cela n'est pas les opposer à la lutte contre le tabagisme – , notamment dans les zones transfrontalières, comme dans mon département de Meurthe-et-Moselle, faute d'harmonisation européenne à très court terme. Ma collègue Caroline Fiat a évoqué la même situation avec le Luxembourg. Cette nouvelle hausse du prix du tabac ne va pas diminuer la consommation réelle, celle qui importe vraiment, mais encouragera le commerce de produits de très mauvaise qualité dans le réseau parallèle – ce qui peut d'ailleurs poser d'autres problèmes de santé. C'est pourquoi nous vous proposons de supprimer cet article.
Derrière les enjeux de santé, votre décision a des conséquences non négligeables en termes de pouvoir d'achat, qui plus est de manière inégalitaire. Les fumeurs, beaucoup plus nombreux dans les foyers à faibles revenus, seront nettement frappés au portefeuille. Cet enjeu est loin d'être négligeable, en plein débat sur le budget pour 2018, où le Gouvernement se voit accusé de favoriser les plus riches au détriment des plus pauvres. À elle seule, la hausse des prix du tabac représente une perte moyenne de pouvoir d'achat d'environ 0,8 % pour les ménages français, selon l'OFCE, qui y a consacré une note détaillée. Or, elle pénalisera les plus pauvres, parce qu'ils fument plus en moyenne et que le prix du tabac est le même pour tous.
En outre, à l'heure de l'absence de toute frontière, nul ne sait aujourd'hui si cette politique fera réellement baisser la consommation ou si elle favorisera la contrebande. Enfin, l'article 12, qui prévoit une évolution fiscale jusqu'en 2020, est contraire au principe constitutionnel de l'annualité budgétaire.
Madame la ministre, le tabagisme est bien un fléau. C'est un vrai enjeu de santé publique, parce qu'il est à l'origine de maladies graves et létales, comme le cancer du poumon, les maladies cardio-vasculaires ou encore la bronchopneumopathie chronique obstructive – BPCO. Il est également vrai qu'il coûte cher en termes de dépenses de santé. Augmenter le prix du paquet pour qu'il soit à 10 euros fera bien baisser la consommation de cigarettes achetées dans le réseau des buralistes. Mais que se passera-t-il pour les achats hors réseau ? Dans le rapport que j'avais réalisé sous la précédente législature avec Frédéric Barbier, il apparaissait que le marché parallèle hors réseau représente 20 % des cigarettes consommées en France et fait perdre plus de 2 milliards d'euros de taxes non perçues par l'État français.
Le vrai sujet est là : nous avons autour de nous des pays qui vendent des cigarettes qui sont quasiment moitié moins chères. Depuis mon département des Hautes-Pyrénées, si vous allez en Espagne ou en Andorre, vous trouverez des cigarettes moitié moins chères. Cela signifie que la consommation hors réseau va augmenter, que ce soit par le biais d'achats sur internet, de la contrebande ou de réseaux illicites. Madame la ministre, pouvez-vous nous donner des éléments précis sur votre plan pour lutter contre les ventes illicites ? Par ailleurs, où en sommes-nous de la ratification du protocole européen de l'OMS pour éliminer le commerce illicite dans l'Union européenne ?
Madame la ministre, vous nous avez dit tout à l'heure que vous vous inspiriez d'une décision prise sous la présidence de Jacques Chirac, dont le gouvernement avait procédé à une augmentation massive du prix du tabac. Mais vous ne pouvez pas transposer tout simplement ce qui s'est fait alors. En réalité, votre mesure, comme j'ai eu l'occasion de le dire tout à l'heure, s'inscrit dans un contexte tout à fait particulier. La France est environnée par plusieurs pays étrangers.
Aussi, en augmentant le prix du tabac, comme vous êtes en train de le faire, vous provoquerez deux effets. Dans les zones frontalières, les consommateurs conserveront leurs habitudes et iront acheter leur tabac à l'extérieur de la France ; les autres auront plus massivement recours au marché parallèle : tous continueront donc à consommer. La baisse que vous allez provoquer ne sera pas une baisse de la consommation, mais des achats auprès des buralistes. Votre combat est tout à fait légitime, et nous ne mettons pas en cause votre objectif. Mais les moyens dont vous vous dotez pour l'atteindre sont faux, erronés, et ils auront des effets contre-productifs, largement supérieurs aux effets positifs sur la santé publique auxquels vous aspirez. En effet, la contrebande mettra sur le marché des produits bien plus nocifs pour la santé que ceux qui sont contrôlés dans le réseau des buralistes. En réalité, les effets sont contre-productifs. L'étude que vous nous soumettez dans le bleu budgétaire n'est pas très convaincante. Nous sommes un certain nombre à vouloir obtenir des précisions afin de savoir comment vous justifiez vos décisions politiques.
Le tabac n'est pas un produit comme les autres. Sa consommation constitue la première cause de mortalité évitable en France. La baisse du tabagisme chez les jeunes est un enjeu de santé public majeur, comme l'a rappelé Jean-Pierre Door. Toutefois, nous sommes à un tournant. Alors que notre pays pratique des prix sensiblement supérieurs à ceux des pays voisins, un marché parallèle très important s'est implanté, estimé à 27 % des ventes, rendant de moins en moins opérantes les mesures mises en oeuvre sur notre territoire.
La priorité absolue, c'est de lutter réellement contre le trafic parallèle. La seule façon de lutter contre le marché parallèle du tabac, c'est la traçabilité. Il faut mettre en application la convention de l'OMS. Quel est votre avis sur ce point, madame la ministre ?
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 302 .
Je ne suis pas hostile à l'augmentation du prix du tabac ; car j'entends que payer un paquet de cigarettes 10 euros puisse éventuellement être dissuasif. Mais j'entends aussi les slogans des buralistes, qu'il n'est pas question d'opposer à une politique de santé publique. Ils ne sont pas des gens irresponsables. Ils scandaient ce mois-ci dans les rues : « Paquet à 10 euros, clients rackettés, commerces de proximité menacés » ou encore « Hausse des prix du tabac = trafic à tout va ». Le 20 octobre, M. le ministre Darmanin est intervenu devant le congrès des buralistes et s'est voulu rassurant pour la profession, en affirmant que le Gouvernement menait une action au niveau européen pour harmoniser la fiscalité des tabacs et mettre en place un système européen de traçabilité.
C'est très bien, mais en attendant, que fait-on concrètement pour les buralistes ? Et surtout, que fait-on concrètement pour protéger la santé des mineurs ? Frappons fort ! Réformez pour qu'il ne soit vraiment plus possible à un mineur d'acheter des cigarettes. Vous savez bien qu'ils le font, même si c'est interdit officiellement, aussi bien en France qu'à l'étranger. Que chaque mineur pris en train de fumer paie une amende de 33 euros, par exemple. Vous verrez comme cela sera dissuasif ! Pour que les buralistes puissent vivre décemment, réformez vraiment, de sorte que leurs marges soient augmentées, et non pas seulement, comme vous le préconisez, en fonction du dynamisme des jeux, mais en vous servant de ce que le tabac rapporte à l'État. S'il coûte 19,6 milliards d'euros, il en rapporte 20,6 milliards. Ne sacrifiez pas les buralistes au nom de notre bonne conscience collective !
La parole est à Mme Nadia Ramassamy, pour soutenir l'amendement no 784 .
L'article 12 prévoit d'augmenter le prix du tabac. Cette augmentation n'est pas la solution à privilégier pour lutter efficacement contre le tabagisme. Plus de 30 % des cigarettes proviennent du marché parallèle, lequel comprend la contrebande et les contrefaçons. Étant donné qu'il y a de nombreuses zones transfrontalières en France, il est nécessaire de lutter contre le développement de ce marché parallèle.
Le marché légal étatique devrait être protégé, car il permet de contrôler l'ensemble du processus de fabrication et de vente du tabac. Or, en l'absence d'une harmonisation législative européenne en la matière, le marché légal français est en grande difficulté. En effet, les buralistes ne peuvent faire face à la concurrence des autres pays européens.
Par ailleurs, augmenter le prix du tabac pénalise les catégories sociales défavorisées. En effet, la dépendance au tabac prend différentes formes : elle est tant physique que psychologique et comportementale. La seule augmentation des prix ne permet pas de faire disparaître soudainement une telle dépendance. Ainsi, les personnes les plus démunies qui sont dépendantes au tabac devront soit payer plus cher leur paquet sur le marché légal, soit se résoudre à acheter leur paquet sur le marché noir, dont les produits portent encore plus atteinte à leur santé.
Cela aggrave donc doublement les inégalités sociales, en pénalisant le pouvoir d'achat et la santé des plus démunis. Pour lutter efficacement contre le tabagisme, davantage de moyens devraient être consacrés à la prévention, en particulier auprès des jeunes, afin d'obtenir une réelle baisse de la consommation du tabac. Il est également nécessaire de promouvoir l'éducation pour la santé. Cet amendement propose donc la suppression de la hausse du prix du tabac, laquelle aurait pour conséquence première d'aggraver les inégalités sociales. Vous savez que je suis également médecin, madame la ministre…
La parole est à Mme Béatrice Descamps, pour soutenir l'amendement no 1033 .
Cet amendement vise à supprimer l'article 12, qui, appliqué tel quel, n'atteindra pas son objectif de baisse du tabagisme et n'aura pas l'effet escompté sur la santé publique. La lutte contre ce fléau – c'en est réellement un – doit être menée à l'échelle européenne, et c'est en tant qu'élue frontalière que je vous parle. Cette augmentation du prix du tabac aura pour conséquence, comme cela a été dit, une hausse des ventes sur les marchés illicites parallèles et en contrebande, avec tous les risques que cela comporte et que vous connaissez, madame la ministre. Le tabac illégal étant plus accessible, plus nombreux seront les fumeurs, particulièrement la jeune clientèle, qui est la cible des cigarettes à bas prix.
Par ailleurs, il ne faut pas oublier les enjeux économiques, en particulier pour les buralistes, a fortiori frontaliers. Je sais que vous avez commencé à travailler avec eux ; ils veulent être écoutés, entendus et rassurés. Je vous demande de supprimer cet article afin de mettre en place une véritable politique de prévention, qui nécessite de tenir compte de nombreux paramètres et exige donc davantage de temps et de réflexion.
Quel est l'avis de la commission sur l'ensemble de ces amendements de suppression ?
Mes chers collègues, il y a eu tellement de prises de parole sur le prix des cigarettes que pendant ce temps, selon les statistiques, dix personnes sont mortes du tabac dans notre pays. En effet, 200 personnes meurent chaque jour du tabac. Dans ces conditions, il est surprenant d'entendre Mme Ménard parler de bonne conscience collective alors que nous essayons collectivement de trouver un moyen pour permettre aux jeunes de ne pas entrer dans la prison du tabac, et à celles et ceux qui y sont entrés, de pouvoir en sortir. Selon les statistiques, dix personnes sont mortes depuis qu'on a commencé de parler de l'augmentation du prix du tabac.
La lutte contre le tabac est multifactorielle. Elle ne se réduit ni au prix, ni au paquet neutre ; elle renvoie aussi aux outils de sevrage – et nous espérons des progrès dans ce domaine – et à une prévention efficace, qui arrive à toucher les jeunes. Il n'y a pas de raison que 25 % des jeunes fument dans notre pays, alors qu'ils sont dix fois moins nombreux en Australie ! Il n'y a pas de raison que des pays – y compris frontaliers – s'en sortent bien mieux que le nôtre. Le prix du tabac dans ces pays est supérieur ou inférieur à la France ; mais ce facteur prix fonctionne. Mme la ministre de la santé l'a rappelé : lorsqu'en 2004, le prix du paquet de cigarettes a été porté à 5 euros, il y a eu 1,5 million de fumeurs en moins dans notre pays. Quand on sait qu'un fumeur sur deux mourra du tabagisme, cela en fait, des vies épargnées ! C'est une mesure de santé publique indiscutable. Contester cette statistique, c'est faire injure à celles et ceux qui se sont battus dans d'autres pays pour sauver des vies à travers l'augmentation du prix du tabac.
Mais vous avez raison de souligner qu'il ne faut pas méconnaître les difficultés. Ainsi, 200 équivalents temps plein de plus seront embauchés dans les douanes pour lutter contre la contrebande. La ministre a parlé de l'attention particulière accordée à la situation des buralistes qui font vivre les villages, les petites communes rurales et les coeurs de ville. Il ne s'agit de pénaliser personne ; mais il faut sortir de l'ambivalence entre le souhait de voir les gens arrêter de fumer et le besoin de voir les buralistes continuer à vendre des cigarettes. Cette ambivalence nous bouffe politiquement, dès qu'on aborde la question des politiques de santé publique. Il faut en sortir en accompagnant les buralistes. La ministre a annoncé travailler sur cette question avec Gérald Darmanin ; cela montre l'attention particulière accordée à cette situation.
La traçabilité est également un sujet important : en 2019, des mesures seront prises en ce sens. Mais la traçabilité ne sauve pas des vies ; aussi n'empêche-t-elle pas de se poser la question du prix du tabac et des mesures à prendre pour aider nos jeunes. Le Fonds national de prévention du tabagisme, doté de plus de 100 millions d'euros, lancera des actions ambitieuses pour protéger les jeunes et réduire les inégalités de santé. Bien sûr, un prix du tabac plus élevé aura un impact particulier sur des personnes qui ont peu de ressources ; mais peut-on considérer qu'il est moins grave de mourir du tabac si l'on est pauvre ? Je ne le crois pas. Je vous invite collectivement à retirer vos amendements de suppression et à continuer de débattre de ces questions. Il faut faire vite, car il y a une urgence sanitaire.
Applaudissements sur les bancs du groupe REM.
La parole est à Mme Caroline Fiat, pour soutenir l'amendement no 1069 .
Nous avions proposé dans un autre amendement de reconnaître le tabagisme comme une maladie, au même titre que l'alcoolisme, afin que les substituts nicotiniques fassent l'objet d'une autorisation de mise sur le marché et d'un remboursement ; mais il a été retoqué au prétexte de l'article 40. Pourtant, ces mesures étaient largement gagées par l'économie en santé et en soins d'oncologie – que vous connaissez bien, madame la ministre, vu votre spécialité. Nous proposions la prise en charge à 100 % des substituts nicotiniques, et plus largement de tout ce qui peut aider les gens à arrêter de fumer. Les 150 euros dont on peut bénéficier actuellement sont insuffisants. De plus, même si c'est un progrès, il faut avancer l'achat des substituts, la CPAM ne les remboursant qu'a posteriori, et après un délai conséquent. Or tout le monde n'a pas les moyens de dépenser autant, et les substituts coûtent plus cher qu'un paquet de cigarettes. Il faudrait remédier à ce problème.
Selon l'OMS, une baisse de la consommation n'est véritablement observée que lors d'augmentations des prix brutales et significatives, dès lors qu'il y a une rupture ne permettant pas une adaptation immédiate des budgets, et renforçant l'incitation, voire la motivation des personnes souhaitant arrêter. Notre idée était de rembourser à 100 % toutes les solutions existantes – substituts nicotiniques, hypnose, réflexologie… – pour que tout le monde puisse arrêter de fumer très facilement. Il faut laisser aux gens six mois pour arrêter de fumer ; en parallèle, il faut passer le paquet à 20 euros dans toute l'Europe – et tant pis si les industriels du tabac sont vexés et en colère. Mme la ministre a raison de souligner qu'à un moment donné, il faut choisir entre faire plaisir aux industriels et en finir avec le tabagisme !
Madame Fiat, les substituts nicotiniques sont en effet remboursés à hauteur de 150 euros par la Sécurité sociale, et tous les Français qui souhaitent arrêter de fumer peuvent en bénéficier. Malheureusement, ces produits remboursés par le Fonds de prévention du tabagisme sont largement sous-utilisés par les Français, qui restent très peu nombreux à y avoir recours. Vous dites que ces produits devraient faire l'objet d'une autorisation de mise sur le marché pour être remboursés ; mais l'autorisation dépend des industriels, or ceux-ci n'ont jamais souhaité soumettre les substituts nicotiniques à l'évaluation nécessaire à leur remboursement. En revanche, le Champix est un nouveau médicament qui permet d'arrêter de fumer ; il a obtenu une autorisation de mise sur le marché l'année dernière et est désormais remboursé. Avis défavorable.
Pourquoi ne peut-on pas adopter l'amendement d'origine, puisque je vous ai prouvé qu'il était gagé ? Le médicament que vous avez évoqué est une bonne chose ; mais j'attire votre attention sur la nécessité de trouver une solution pour que les personnes qui n'ont pas beaucoup d'argent puissent bénéficier des 150 euros sans les avancer.
L'amendement no 1069 n'est pas adopté.
Madame la ministre, la destination sera la même, mais si vous me permettez cette image alpine qui a su nous rassembler ce soir – c'est le seul amendement de notre groupe qui est passé – , je vous propose d'emprunter une piste bleue plutôt que noire. Je m'explique : cet amendement vise à étaler l'augmentation des droits de consommation sur les produits du tabac. Dans le même esprit que les paliers des deux augmentations par an, en 2019 et 2020, prévus par le Gouvernement, le présent amendement propose d'étaler l'augmentation de l'année 2018 en deux paliers fixés au 1er avril et au 1er novembre. Il permettra ainsi d'améliorer l'intégration de la mesure par les buralistes et les consommateurs, sans remettre en cause la cible fixée par le Gouvernement d'un prix de 10 euros pour un paquet de cigarettes au 1er novembre 2020.
De même, je suis plus favorable à la piste rouge : l'augmentation d'un euro, en une fois, pour envoyer un signal fort aux fumeurs et montrer que nous sommes déterminés à les aider à arrêter de fumer. Avis défavorable.
L'amendement no 592 n'est pas adopté.
Sans revenir sur les débats d'hier soir, je me faisais une réflexion : un retraité avec 1 450 euros de revenu, qui roule au diesel et qui fume va être fortement touché au portefeuille…
Rires sur divers bancs.
Ah, je vous ai réveillés ! Bien sûr, je vous rejoins, monsieur le rapporteur : sa santé et son pouvoir d'achat pourraient s'améliorer s'il arrêtait de fumer, mais beaucoup ne le peuvent pas seuls. Plutôt que de taxer, il faudrait d'abord accompagner !
Je voudrais rassurer M. Bazin : bien entendu, la lutte contre le tabagisme est une politique globale, qui ne se résume pas à une augmentation du prix du tabac, même si nous savons qu'il s'agit du levier le plus puissant pour pousser les gens à arrêter de fumer. Un premier plan de réduction du tabagisme, qui avait promu le paquet neutre, arrive à son terme fin 2017. Dans le cadre du premier axe de la stratégie nationale de santé, nous écrirons un deuxième plan national de réduction du tabagisme, avec des mesures d'accompagnement pour aider les fumeurs à arrêter et pour prévenir l'entrée dans le tabagisme des jeunes. Donc bien entendu, monsieur Bazin, l'accompagnement sera au rendez-vous ! Avis défavorable.
L'amendement no 409 n'est pas adopté.
La parole est à M. Éric Alauzet, rapporteur pour avis, pour soutenir l'amendement n° 909 .
Notre collègue François-Michel Lambert m'a demandé de présenter son amendement, que je résumerai en une question : celle de la comparaison entre la trajectoire d'augmentation des cigares et cigarillos et celle du tabac. Avant l'augmentation, les cigares et cigarillos étaient moins chers ; avec l'augmentation de 2 euros, ils deviennent plus chers. Pouvez-vous éclairer l'Assemblée sur cette différence de trajectoire ?
Lors des rencontres entre les buralistes et Gérald Darmanin et moi-même, et lors du passage du ministre des comptes publics au congrès des buralistes, il y a une semaine, il a été saisi de la question de l'augmentation du prix des cigares et cigarillos. Il s'est engagé auprès des buralistes à étudier spécifiquement cette question. En l'état, je donne un avis défavorable à cet amendement.
L'amendement no 909 n'est pas adopté.
Vous vous demanderez peut-être en quoi cet amendement diffère du précédent, mais il faut savoir être imaginatif au cas où vous auriez changé d'avis !
Sourires.
Ce nouvel amendement propose une nouvelle écriture. Je pourrais en appeler à la sagesse de notre collègue Marc Fesneau et à son témoignage quant à la nécessité d'être accompagné, mais je voudrais plutôt revenir sur la stratégie que vous avez déployée, madame la ministre. Nous sommes d'accord sur les objectifs de santé publique – moi-même, je n'ai pas envie que mes filles se mettent à fumer ! – mais vous faites totalement abstraction du marché parallèle. Or ce problème va s'amplifier avec la hausse du prix. On ne prévoit ni mesures concrètes ni délais certains ; l'horizon européen semble aujourd'hui mystérieux. C'est pourquoi nous vous proposons à nouveau cet amendement, en espérant que vous puissiez nous rassurer sur les objectifs que vous vous êtes fixés et les garanties que vous avez obtenues de la part de vos homologues européens.
M. Bazin met beaucoup d'énergie à me convaincre, ce soir ; je veux lui faire plaisir et mettre autant d'énergie à le convaincre des efforts que nous faisons vis-à-vis des buralistes. Premièrement, nous allons les accompagner : une négociation est déjà en cours afin de les intéresser au capital de La Française des jeux, possibilité qui semble les séduire. Deuxièmement, comme je l'ai dit tout à l'heure, un amendement au protocole d'accord pour la modernisation de leur réseau devrait permettre de constituer une sorte de bouclier contre les potentielles pertes de revenus, un filet de sécurité en cas de baisse de chiffre d'affaires. Nous mettons en place ce dispositif avec eux.
Nous travaillons à la lutte contre la fraude, la contrebande, avec la Direction générale des douanes, de façon très active : comme l'a rappelé M. le rapporteur général, cela implique 200 postes dédiés. Nous augmentons ainsi notre capacité de renseignement et d'enquête, nous identifions les ventes par internet, nous augmentons énormément les contrôles transfrontaliers.
Nous utilisons en outre l'arsenal juridique actuel – qui n'avait jamais été utilisé : il existe dans la loi, et la loi devrait être appliquée – pour lutter contre la fraude. Normalement, le prix des amendes doit représenter deux fois le prix de la vente, et il doit y avoir une saisie de la vente frauduleuse. Il peut y avoir une saisie du véhicule et des peines de prison allant de trois à dix ans. Nous allons faire en sorte, avec Mme Belloubet et M. Collomb, que les fraudeurs soient pénalisés.
C'est aussi un enjeu européen : à ce sujet, vous savez que la France travaille activement à une future directive sur la traçabilité. Nous oeuvrons par ailleurs à une harmonisation des prix du tabac au niveau européen : j'ai déjà commencé des discussions avec mes homologues à ce propos, et j'ai demandé que cette question figure à l'ordre du jour du prochain conseil des ministres de la santé de l'Union européenne, qui aura lieu dans un mois.
Cela rejoint, du reste, l'offensive menée par le directeur général de l'OMS contre le tabac : c'est un enjeu de santé publique auquel il est personnellement attaché. Il a rencontré le commissaire européen à la santé pour demander aux Européens d'harmoniser les prix du tabac dans l'Union européenne, afin de lutter contre le tabagisme.
Avec toutes ces explications, j'espère vous avoir convaincu, monsieur Bazin ! Quoi qu'il en soit, l'avis du Gouvernement est défavorable.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes REM et MODEM.
Madame la ministre, la question que je voudrais vous poser ne concerne pas directement l'amendement dont nous discutons. Vous venez d'évoquer la possibilité – si j'ai bien compris – d'intéresser les buralistes au capital de La Française des jeux. Or depuis plusieurs semaines, des bruits courent : La Française des jeux serait en passe d'être privatisée. Cela soulève de vives inquiétudes parmi ses salariés.
C'est pourquoi les propos que vous venez de tenir à propos de La Française des jeux m'ont pour le moins intrigué, voire inquiété.
Je n'ai pas du tout participé à ces travaux. Je pense donc qu'il vaut mieux que je reprenne les propos exacts tenus par M. Darmanin devant le congrès des buralistes la semaine dernière : « La Française des jeux est un partenaire de premier plan pour vous : 85 % de vos commerces ont aujourd'hui une activité de jeux. Le jeu représente ainsi une part importante et croissante de votre activité et de vos revenus : près de 26 000 euros en moyenne l'an dernier pour chacun d'entre vous. Ce montant a doublé en dix ans : cela représente donc plus de 1 000 euros par mois en plus. »
« La présidente de La Française des jeux m'a d'ailleurs récemment confirmé son souhait d'étendre au maximum la couverture de votre réseau. Près de 4 000 d'entre vous ne vendaient pas de jeux à la fin de l'an dernier. Suite à la conclusion de cet accord, et comme La Française des jeux s'y était engagée, une baisse progressive des loyers mobiliers que vous acquittez a été engagée avec une première réduction d'un tiers du montant des loyers, qui sera effective dès 2018. Cette baisse des loyers représentera à terme 13 millions d'euros, soit l'équivalent de 0,1 point de rémunération. »
« Cette baisse montre que La Française des jeux est très attentive à son réseau, en particulier à la situation des plus petits points de vente. Pour conclure sur ce sujet, je souhaite qu'une négociation s'engage avec La Française des jeux sur votre rémunération, notamment pour réviser la modulation de la rémunération en fonction des types de jeu. Ceci vous permettra de profiter pleinement de la dynamique de certains jeux. »
Je pense qu'il était préférable de vous rapporter exactement les propos tenus par Gérald Darmanin.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe REM.
Je voudrais vous faire remarquer, madame la ministre, qu'il suffit de taper les mots « cartouche de cigarettes » dans un moteur de recherche sur internet pour trouver des cartouches à un prix de 40 euros, soit 4 euros le paquet.
L'amendement no 410 n'est pas adopté.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 122 .
Il s'agit, par cet amendement, d'associer le ministère des solidarités et de la santé à la signature de l'arrêté de revalorisation des parts spécifiques et des minima de perception au 1er janvier de chaque année. La procédure applicable pour cette revalorisation a toujours prévu la signature du ministre du budget et celle du ministre de la santé, mais la mention de ce dernier avait disparu dans le projet de loi initial.
Or les débats qui portent sur la santé publique montrent qu'il est fondamental que le ministère soit associé aux mesures qui touchent à la santé publique, ce qui est toujours le cas lorsqu'il s'agit de tabac.
Je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.
L'amendement no 122 est adopté.
L'article 12, amendé, est adopté.
Cet amendement vise à remplacer la taxe sur les fournisseurs agréés de produits de tabac, créée par la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017, par une augmentation de la part spécifique du droit de consommation.
Telle qu'elle est rédigée dans le code de la Sécurité sociale, la taxe sur les fournisseurs agréés de produits de tabac fait peser la charge de la contribution sur les distributeurs, alors que l'intention du Gouvernement, qu'il avait exprimée lors des débats qui avaient eu lieu dans cet hémicycle, était d'atteindre directement les fabricants.
La réintégration de cette contribution par une augmentation du droit de consommation permettra de pérenniser la ressource financière, désormais assise sur les fabricants de tabac, mais également de la sécuriser, en évitant les nombreux contentieux liés aux difficultés de répercussion de la contribution par les distributeurs aux fabricants, et ainsi de protéger les recettes du Fonds de prévention du tabagisme, conformément aux objectifs de santé publique fixés par le Gouvernement.
Cet amendement nous a été proposé en l'état par plusieurs cigarettiers, comme Philip Morris ou Japan Tobacco International. Vous comprendrez donc qu'en l'état, la commission y soit défavorable.
Je rappelle que cette taxe permet d'alimenter le Fonds de prévention du tabagisme, qui est nécessaire à l'action globale du Gouvernement, notamment pour aider au déploiement du deuxième plan national de réduction du tabagisme que nous préparons pour le mois de janvier prochain.
Cette taxe est donc, je le répète, absolument indispensable à une action globale de prévention. Je suis donc défavorable à sa suppression.
L'amendement no 106 n'est pas adopté.
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement no 1089 .
Il est nécessaire de s'assurer de l'efficacité de la lutte contre la contrebande et le trafic illégal des produits du tabac. Sur ce point, madame la ministre, nous nous rejoignons enfin : il s'agit d'un enjeu de santé publique et d'un enjeu financier pour la Sécurité sociale.
Pour lutter efficacement contre le trafic de tabac, il faut d'abord disposer d'un système fiable et indépendant de traçabilité des produits du tabac. Or le mécanisme actuel de traçabilité ne semble pas suffisant pour endiguer le commerce parallèle : il est en effet en grande partie contrôlé par les fabricants de tabac eux-mêmes. Il gagnerait sans doute en efficacité s'il devenait indépendant des fabricants de tabac, comme le prévoit le protocole de l'OMS – que vous avez citée tout à l'heure – pour éliminer le commerce illicite du tabac, protocole ratifié par la France en 2015.
Nous espérons que cet amendement retiendra toute votre attention, et même qu'il recueillera votre assentiment.
Sourires.
Encore une fois, je voudrais rassurer M. Bazin : la France travaille à l'élaboration de la prochaine directive sur la traçabilité, afin que celle-ci soit assurée de façon totalement indépendante. C'est pourquoi nous essayons de nous rapprocher le plus possible des objectifs fixés par la CCLAT – la convention-cadre de l'OMS pour la lutte antitabac – que notre pays a signée. Je suis donc défavorable à votre amendement.
L'amendement no 1089 n'est pas adopté.
J'ai cru comprendre qu'il était de coutume, lorsqu'un député prenait la parole dans cet hémicycle le jour de son anniversaire, que ses collègues lui souhaitent – précisément – un bon anniversaire. C'est sans doute pour cela que M. Bazin a pris si souvent la parole aujourd'hui !
Rires et applaudissements sur divers bancs.
J'en reviens à l'article. Cette mesure va dans le bon sens : face aux enjeux climatiques et de pollution, il convient de valoriser les bons comportements et de sanctionner les mauvais par des mesures telles que la taxe sur les véhicules polluants. Mais nous ne sommes pas complètement dupes : vos explications sur cet article sont décevantes.
Vous dites encourager l'achat de véhicules électriques ou hybrides. Vous profitez ainsi de la méconnaissance des gens sur le sujet, en leur faisant croire que ces véhicules représentent une solution. Les études sur le sujet montrent au contraire que ces voitures dites écologiques sont loin d'être une panacée : elles comprennent des matériaux issus des « terres rares », non durables et dont l'extraction est très polluante. Elles utilisent en outre de l'électricité produite par des centrales nucléaires, et leurs coûts de construction et de démantèlement sont très élevés. Ce culte de la voiture dans lequel vous persistez satisfait les attentes des compagnies automobiles, des publicitaires et des industries du BTP, mais porte atteinte à notre santé, à notre environnement, et aux générations futures.
Osons dire non : les transports en commun et les modes de transport doux, dont le potentiel de développement est énorme, doivent être encouragés. Par ailleurs, votre mesure est uniquement répressive et non incitative : c'est une fois de plus les entreprises les moins dotées qui ressentiront de plein fouet les effets de cette mesure. Nous voterons cet article, mais proposerons des amendements afin d'en faire une vraie mesure écologique et sociale.
La parole est à Mme Agnès Firmin Le Bodo, pour soutenir l'amendement no 878 .
Cet amendement a pour objet d'aligner la règle d'exception de la taxe sur les véhicules de société – TVS – sur celle concernant l'exception à la non-déduction de TVA régie par l'article 273 septies A du code général des impôts.
Ainsi la TVS ne serait pas due au titre des véhicules utilisés exclusivement pour les activités d'enseignement à la conduite, qui comprend, outre la formation initiale délivrée par les auto-écoles, la formation continue, la spécialisation, le perfectionnement et l'enseignement à caractère sportif ou de loisir. La non-applicabilité de la taxe serait également étendue aux véhicules pris en location si leur destination durant la période de location est conforme aux usages que je viens d'énoncer.
L'alignement des règles pour les activités d'enseignement à la conduite a toujours été observé par le biais de la doctrine administrative.
Cependant, suite à une réponse ministérielle, l'administration fiscale a restreint son champ en excluant explicitement les entreprises de pilotage sportif sur circuit. Cette modification de la doctrine ouvre la voie à une interprétation de plus en plus restrictive des activités d'enseignement à la conduite, et justifie donc le présent amendement. Alors que le secteur réalise un chiffre d'affaires de 30 millions d'euros, ce revirement arbitraire correspond à plus de 2 millions d'euros de taxes, amplifiés par la non-déductibilité de la TVS. C'est une pression fiscale supplémentaire de 8,9 % qui frappe le secteur. Cet amendement, en rétablissant la règle jusque-là en vigueur, permettrait de protéger les 400 emplois directs, mais également les engagements pris par ces sociétés envers plus de 50 000 familles.
L'amendement no 878 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 411 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Madame la ministre, le parc des flottes d'entreprises est dieselisé à 90 %. Il convient de les aider à remplacer leurs véhicules fonctionnant aux énergies fossiles par des véhicules fonctionnant aux énergies renouvelables. Cet amendement propose donc d'octroyer l'exonération de TVS pendant une période de douze trimestres aux véhicules fonctionnant au superéthanol E85, comme cela existe déjà pour les véhicules fonctionnant au gaz naturel carburant ou au gaz de pétrole liquéfié. Le superéthanol E85 contient entre 65 % et 85 % de bioéthanol, ce qui, suivant la réglementation européenne, réduit d'au moins 50 % les émissions de gaz à effet de serre par rapport à l'essence fossile. Promouvoir l'utilisation du bioéthanol contribuerait à la réduction des émissions de gaz à effet de serre et à l'amélioration de la qualité de l'air. Une telle mesure permettrait de répondre aux objectifs de réduction de CO2 et de particules émises par les flottes automobiles.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l'amendement no 874 .
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l'amendement no 879 .
L'adoption de l'un de ces amendements conduirait à appliquer un abattement de 40 % du taux d'émission de CO2 par kilomètre uniquement pour le superéthanol en plus de l'exigibilité à l'exonération. Cette rédaction intègre donc une niche dans une niche, ce qui pose, on en conviendra, une difficulté même si la commission peut partager l'objectif poursuivi. L'avis est donc forcément défavorable.
J'ajouterai, en grande spécialiste des voitures, que les redevables pourraient ainsi bénéficier de l'avantage fiscal lié au superéthanol sans que l'administration n'ait aucune garantie que le conducteur utilise effectivement ce type de carburant. En outre, les voitures qui fonctionnent au superéthanol bénéficient déjà d'autres avantages fiscaux en matière de taxe sur les certificats d'immatriculation ou par rapport au malus pour les véhicules d'occasion. L'avis est défavorable.
Le sous-amendement no 1217 n'est pas adopté.
L'amendement no 879 n'est pas adopté.
Dans les territoires ruraux, les distances à parcourir sont beaucoup plus longues et les déplacements nécessairement plus onéreux. L'offre en matière de transports en commun est souvent très limitée du fait de la diversité des trajets. Et puis, il faut aussi penser aux foyers aux faibles revenus qui ont investi dans un véhicule gazole en vue de faire des économies : il faut leur laisser le temps de se préparer en douceur à cette transition énergétique par le maintien de la taxation en vigueur en 2017. Sa hausse brutale serait une mauvaise mesure, non seulement pour les territoires ruraux mais aussi pour ces foyers.
Avis défavorable. Le barème que vous proposez, monsieur Bazin, est celui en vigueur aujourd'hui. Cet amendement vise donc en réalité à supprimer l'article en entier, ce qui n'est pas l'objectif de la commission. Je vous propose donc de le retirer. À défaut, l'avis serait défavorable.
Bien que ce soit l'anniversaire de M. Bazin, je me vois dans l'obligation d'émettre un avis défavorable.
Sourires.
L'amendement no 412 n'est pas adopté.
L'amendement no 668 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Dominique Da Silva, pour soutenir l'amendement no 1134 .
Je rappelle que 8 % des TPE-PME s'acquittent de 64 % de la taxe sur les véhicules de société. C'est dire l'ampleur de l'évitement fiscal généré par la TVS. C'est une taxe qui pousse plus de deux millions d'entrepreneurs à choisir le remboursement des frais kilométriques au détriment, il faut bien le constater, de l'objectif écologique et de santé publique. C'est pourtant un objectif majeur, que je partage pleinement avec vous, madame la ministre, ainsi que tout le Gouvernement à travers le plan Climat. Mais si 92 % des TPE-PME cherchent à éviter la TVS, c'est parce que la possession d'un véhicule de tourisme pour une petite entreprise est une charge financière difficile à assumer.
C'est pourquoi cet amendement vise à accorder, notamment aux 8 % de TPE-PME déjà fortement taxées, un délai de six mois pour faire rependre leurs anciens véhicules afin d'éviter autant que possible l'augmentation sensible du barème de la TVS en 2018. La baisse de recettes fiscales qu'implique l'amendement serait largement compensée, voire au-delà, par les taxes perçues sur les ventes de véhicules neufs et ceux d'occasion ainsi cédés.
Mais au-delà, madame la ministre, il conviendrait de repenser la TVS en TVP, « taxe sur les véhicules polluants ». Car la lutte contre la pollution automobile n'est pas seulement l'affaire des sociétés, c'est aussi l'affaire de tous.
Monsieur Da Silva, comme le montant de la TVS est calculé par trimestre, votre requête me semble de fait parfaitement satisfaite. Je vous propose donc de retirer votre amendement.
J'ai tout de même besoin d'une explication, parce que le calcul par trimestre ne résout pas le problème du délai. Il est important que les entreprises puissent disposer du temps nécessaire pour faire reprendre leurs véhicules et les remplacer par des véhicules propres. Mais je comprends qu'il y ait un problème budgétaire, puisqu'on est passé de 930 millions de recettes fiscales en 2012 à 800 millions en 2016. C'est pourquoi je propose de flécher les gains de TVA des véhicules vendus grâce à cet amendement vers la Sécurité sociale. Je crains, sinon, que la hausse de TVS ne permette pas de récupérer les 112 millions attendus aux termes de l'étude d'impact, pour trois raisons principales : les grandes entreprises vont s'engager, sans trop de difficultés, vers des véhicules très propres et donc peu fiscalisés ; les TPE-PME auront toujours la possibilité de basculer vers le remboursement des frais kilométriques ; et puis surtout, cela n'a pas été suffisamment mesuré, il y a depuis cette année l'instauration du retrait de points des conducteurs de véhicules de société, ce qui rend l'avantage encore moins attractif pour les chefs d'entreprise et les cadres dirigeants. Mais tout cela ne doit pas nous faire oublier les motifs de l'article 13 : la lutte contre la pollution automobile. C'est au nom des entrepreneurs et du plan Climat, et aussi en cohérence avec le programme d'Emmanuel Macron, que je maintiens sans réserve mon amendement.
Vous évoquez un fléchage de TVA vers la protection sociale, mais l'amendement ne fait absolument pas allusion à la TVA, ni à la protection sociale, mais plutôt à des compensations de pertes de recettes à travers l'augmentation de la fiscalité sur le tabac et sur l'alcool. Avis défavorable.
L'amendement no 1134 n'est pas adopté.
La parole est à M. Dominique Da Silva, pour soutenir l'amendement no 1138 .
S'agissant de la taxe sur les véhicules de société, derrière le mot « société », il y a plusieurs millions d'entrepreneurs employant moins de dix salariés. Ils sont comme nous nombreux à utiliser un véhicule de tourisme pour se déplacer dans le cadre de leurs besoins de représentation. Comme nous, pour le bien du pays, ils créent chaque jour de la valeur ; c'est la richesse de la France. Rien, chers collègues, ne justifie que nous ne soyons pas, nous aussi, assujettis à la TVS – qu'il conviendrait, je l'ai expliqué, de rebaptiser TVP. Mais j'ai bien compris la logique du rapporteur, et je pense qu'il y a de la bonne foi dans la volonté de répondre ainsi à l'enjeu écologique. Je préfère donc, même si je tiens à ce que l'on soit sensibilisés à la cause des entreprises, retirer mon amendement.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe REM.
L'amendement no 1138 est retiré.
La parole est à Mme Mathilde Panot, pour soutenir l'amendement no 1063 .
La France Insoumise soutient évidemment la lutte contre la pollution atmosphérique et le réchauffement climatique. Pour autant, la transition souhaitée par le Gouvernement ne va selon nous pas dans le bon sens : il veut encourager l'achat de véhicules électriques ou hybrides, alors que – ma collègue Caroline Fiat l'a expliqué tout à l'heure – ce type de véhicules nécessite l'utilisation de terres rares et a une empreinte écologique considérable si l'on prend en compte les coûts de fabrication, d'utilisation, de recyclage et de démantèlement. Cet article s'inscrit dans une orientation politique qui continuera à profiter aux grands constructeurs automobiles et au BTP, d'autant plus qu'il favorise les grandes entreprises, qui ont les moyens de s'équiper de ces véhicules, et défavorise, en particulier, les plus petites entreprises.
Notre objectif est clair : sortir du culte de la voiture, nocif pour l'environnement et pour la santé, engager une stratégie nationale volontariste en faveur des transports collectifs et des modes doux, et diminuer les inégalités. C'est pourquoi notre amendement propose que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur le fléchage des recettes issues de la taxe sur les véhicules de société pour les injecter dans le soutien aux entreprises désireuses de faire bénéficier leurs employés de transports collectifs et de modes doux. Ce développement pourrait passer par la fin de la casse des transports collectifs publics – en favorisant l'accès aux transports en autocar, TER, trains intercités, TGV, bus, tramways, etc. – , par l'accessibilité des transports collectifs aux personnes à mobilité réduite et par le développement des itinéraires cyclables ainsi que l'incitation à l'achat de vélos, y compris à assistance électrique.
L'idée est incontestablement intéressante, chère collègue, et l'objectif louable. Cependant, si les recettes de la TVS ne sont plus affectées à la protection sociale, elles risquent de lui manquer.
En l'occurrence, ce sont 130 millions d'euros de recettes qui manqueraient à la branche famille, ce qui poserait tout de même problème.
Pour cette raison, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Je réponds à M. le rapporteur : sachant que l'adoption d'un tel dispositif aurait pour conséquence de faire baisser le taux de particules fines dans l'air, et donc d'atténuer tous les problèmes qui leur sont associés, notamment les soins en oncologie, qui sont coûteux, les 130 millions en question seraient très facilement remboursés.
Ce ne serait donc pas prendre un grand risque que d'adopter cet amendement, étant donné qu'il est gagé.
L'amendement no 1063 n'est pas adopté.
L'article 13, amendé, est adopté.
Mes chers collègues, je vous rassure, nous n'avons plus que 540 amendements à examiner.
Sourires.
Il s'agit d'un enjeu de santé publique, puisque cet amendement que j'ai déposé à titre personnel vise à favoriser le remplacement des véhicules à moteur thermique – et principalement ceux à moteur diesel, qui émettent le plus de dioxyde de carbone et de poussières – par des véhicules électriques peu émetteurs.
De quoi parle-t-on précisément ? De l'utilisation par les salariés des entreprises des véhicules d'entreprise. Il est intéressant de savoir que si les flottes d'entreprise représentent la moitié des immatriculations dans notre pays, le parc des véhicules de société ne comporte que 1 % de véhicules peu polluants.
Ce n'est pas tant parce qu'il n'existe pas de dispositifs à l'acquisition, car il existe des dispositifs favorables pour les entreprises, que parce que l'aval, c'est-à-dire l'utilisation par les salariés, ne suit pas.
Du fait du prix supérieur des véhicules non polluants, ces mêmes salariés se voient en effet affecter un avantage en nature qui a un impact sur leur feuille de paye et sur leur feuille d'impôt. Cela explique qu'ils ne choisissent pas de tels véhicules, car le surcoût passe de 100 euros à 600 euros. On peut les comprendre.
Cet amendement vise donc à effacer cet avantage en nature supplémentaire qui les dissuade d'utiliser ces véhicules. Le parc automobile professionnel est important et son taux de rotation est assez rapide, puisqu'il se renouvelle tous les trois ou quatre ans. Il pourrait de ce fait constituer un moyen de mettre sur le marché, en seconde main, beaucoup de véhicules électriques.
On est encore loin de l'objectif de pénétration de 50 % de véhicules électriques dans la flotte professionnelle dont j'ai parlé tout à l'heure, puisque elle est aujourd'hui de seulement 1 %.
La parole est à M. Bruno Fuchs, pour soutenir l'amendement identique no 1141 .
La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l'amendement no 151 .
Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements en discussion commune ?
L'objectif poursuivi par ces amendements est louable. Nous en avons d'ailleurs parlé en commission des affaires sociales, et nous avons décidé de les rejeter.
En effet, ils posent plusieurs problèmes. Tout d'abord, les assiettes des prélèvements sociaux ont été largement préservées jusqu'à présent, contrairement à celles des prélèvements fiscaux.
Le faible nombre de niches applicables aux cotisations a permis de ne pas miter leur assiette et d'en assurer la cohérence. Or vous proposez ici de créer une niche sociale, qui irait à l'encontre de la préservation de l'assiette et sur laquelle il serait ensuite difficile de revenir.
Rappelons que l'intégration des avantages en nature dans l'assiette des cotisations se justifie par l'économie de frais de transport réalisée par le salarié lorsqu'il se rend sur son lieu de travail.
En second lieu, le verdissement du parc automobile est déjà bien entamé. C'est notamment l'objet de l'article 13 que nous venons d'adopter, y compris pour les voitures mises à disposition, qui seront soumises à ce régime à compter du 1er janvier 2018. Il s'agit déjà d'un levier incitatif qui peut encourager l'acquisition d'un parc moins polluant.
Par conséquent, la commission a donné un avis défavorable à ces trois amendements.
Pour faire un peu d'humour, l'exposé sommaire de l'amendement no 75 de M. Alauzet correspond parfaitement à son dispositif.
Sourires.
Même remarque : l'exposé sommaire de cet amendement no 75 n'a absolument rien à voir avec ce que l'on vient de nous raconter.
L'amendement no 151 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Sarah El Haïry, pour soutenir l'amendement no 1085 .
Le groupe MODEM a déposé plusieurs amendements visant à rénover la fiscalité sur les produits agro-alimentaires. Celui-ci propose de supprimer les taxes sur l'eau embouteillée ainsi que sur les boissons non alcoolisées.
Pourquoi ? Notre réflexion est globale : pour favoriser et stimuler la consommation de boissons non sucrées – donc meilleures pour la santé – et pour permettre aux personnes les plus modestes de consommer des produits meilleurs pour leur santé, nous proposons la suppression de la taxe frappant les eaux embouteillées et les boissons non alcoolisées.
Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM et sur quelques bancs du groupe REM.
Je m'exprimerai plus longuement dans quelques instants sur ce sujet qui fait partie de mes préoccupations. Les amendements identiques qui suivent proposent un dispositif qui englobe plusieurs dispositions en matière de boissons rafraîchissantes non alcoolisées.
Par conséquent, je vous propose, chère collègue, de retirer cet amendement afin que nous puissions examiner les amendements suivants, qui permettront d'aborder cette question dans son ensemble.
Ayant bien entendu les explications de M. le rapporteur, nous retirons cet amendement. Nous serons cependant vigilants lors de l'examen des amendements suivants.
L'amendement no 1085 est retiré.
De quoi s'agit-il ? Si je vais présenter cet amendement, il faut savoir qu'il a été déposé par pas moins de six groupes parlementaires – le groupe Les Républicains, le groupe Les Constructifs, le groupe du Mouvement démocrate et apparentés, le groupe La République en marche, le groupe de la Nouvelle Gauche…
… et le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Cette démarche traduit bien le consensus qui s'était dégagé en commission des affaires sociales la semaine dernière. Il s'agit d'un objectif de santé publique que nous poursuivons tous : limiter les risques d'apparition d'obésité et de diabète de type 2 chez les enfants.
Il existe aujourd'hui une taxe qui frappe l'ensemble des boissons rafraîchissantes non alcoolisées, mais elle n'est pas modulée en fonction de leur teneur en sucre. Or l'OMS – qui disait encore il y a dix jours que l'obésité infantile avait été multipliée par dix en quarante ans dans le monde – recommande la mise en place de dispositifs de taxes modulés en fonction des taux de sucre sur les sodas ou, plus généralement, les boissons rafraîchissantes non alcoolisées.
Nous avons travaillé avec un seul objectif, celui d'améliorer la santé des enfants, en prenant une précaution particulière : qu'il n'y ait pas de taxation additionnelle, de façon à ce que le dispositif ne coûte pas plus cher demain aux Françaises et aux Français.
Quel est le mécanisme à l'oeuvre dans ce dispositif ? Il vise à inciter les industriels à réduire le taux de sucre dans les boissons rafraîchissantes non alcoolisées qu'ils fabriquent, puisque dès lors qu'ils le réduisent, ils bénéficient d'une fiscalité plus avantageuse.
En commission, un amendement avait proposé d'instaurer trois niveaux de seuil : 5 grammes, 8 grammes et 10 grammes de sucre. Nous avons considéré qu'il était plus intéressant de gommer les effets de seuil, de façon à ce que les industriels concernés soient incités à réduire, ne serait-ce que d'un gramme, la quantité de sucre dans leurs boissons pour bénéficier d'un effet immédiat en termes de fiscalité.
En schématisant, si une canette de soda contenait sept morceaux de sucre et qu'elle n'en contient plus que six, le consommateur ne sentira pas la différence au goût, mais son corps, lui, sentira une différence. Demain, les industriels ressentiront eux aussi une différence à travers la fiscalité.
C'est animés de cet esprit de synthèse que nous avons travaillé pour déposer cet amendement en séance publique. La commission, qui l'a examiné, y a donné un avis favorable.
La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir l'amendement identique no 866 .
Souvenez-vous : la taxe sodas a été créée par le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2012, alors que nous siégions dans la majorité. Elle pouvait effectivement être améliorée.
En commission, le rapporteur général a donc présenté un amendement qui proposait des seuils. Notre débat a notamment porté sur ces seuils et leur lissage, ainsi que sur les modalités de modulation de cette taxe. Il s'agissait de ne pas passer notre temps à faire de la taxe et de ne pas gêner les entreprises du secteur, qui sont majoritairement françaises.
Il est difficile de s'opposer au principe de cette mesure. Ces boissons sucrées sont responsables de cas d'obésité, en particulier chez les enfants. Un article tout à fait remarquable est d'ailleurs paru la semaine dernière dans l'hebdomadaire Le Point. Il montrait les dégâts liés au fructose et au lactose – mais pas au glucose – , dont la consommation entraîne jusqu'à des cancers du foie.
Une personnalité de la télévision a été personnellement très touchée par cette obésité liée au sucre. Peut-être avez-vous lu cet article, chers collègues.
Quoi qu'il en soit, nous avons voulu, avec cet amendement, montrer notre volonté de suivre la démarche initiée par le rapporteur général. Pour autant, nous avons également voulu rester attentifs à la question complexe du lissage, qui est nécessaire si l'on veut rendre cette taxe plus intelligente.
M. le rapporteur général a évoqué une modification de son amendement. Nous l'avons étudiée et avons décidé de faire le chemin ensemble.
Nous avons ainsi abouti à un amendement commun de nature à satisfaire tout le monde.
Monsieur le président, cela peut également vous intéresser. Se pose en effet la question des boissons dont la fabrication intégrerait des édulcorants, certaines entreprises ayant fait le choix de tels adjuvants qui donnent le goût du sucre et leur permettent d'échapper à la taxe sodas.
Je vous remercie. La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l'amendement identique no 1015 .
Le groupe Les Constructifs a également déposé cet amendement, qui lisse le montant de la taxe en fonction de la concentration en sucre des boissons concernées. Je n'ajouterai rien à ce qui a été dit par M. le rapporteur général, puis par Jean-Pierre Door. L'heure tardive devrait nous pousser à accélérer le rythme d'examen des amendements…
La parole est à Mme Sarah El Haïry, pour soutenir l'amendement identique no 1016 .
Nous sommes tout à fait d'accord avec les arguments de M. le rapporteur général ainsi qu'avec l'amendement qui a été voté en commission. Cependant, et nonobstant l'heure tardive, je vous propose de faire preuve d'audace. De beaucoup d'audace.
Dans la logique de ce que vous nous avez proposé, madame la ministre, et pour rester fidèles à cette logique du « en même temps », nous vous proposons de taxer ces boissons sucrées et en même temps, de supprimer les taxes sur l'eau embouteillée ainsi que sur les boissons non alcoolisées.
Pourquoi ? D'abord parce que les taxes sur l'eau embouteillée sont peu pertinentes au sens fiscal du terme, puisque leur rendement est faible. Ensuite parce que nous enverrions un signal donnant aux plus jeunes et aux familles les plus modestes l'envie de consommer de préférence ces boissons non sucrées.
En définitive, une telle proposition constituerait une bonne réponse à l'enjeu de santé publique dont nous discutons, tout autant qu'une solution pragmatique pour nos finances publiques.
Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM.
La parole est à M. Thomas Mesnier, pour soutenir l'amendement identique no 1091 .
La parole est à M. Joël Aviragnet, pour soutenir l'amendement identique no 1215 .
Cet amendement prévoit une taxation en fonction du taux de sucre dans les boissons concernées, et également un fléchage du produit de la taxe, qu'il s'agit d'affecter à la mise en oeuvre d'actions déployées dans un objectif de prévention et de santé publique, afin de sensibiliser notamment les plus jeunes à la nécessité de réduire leur consommation.
La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne, pour soutenir l'amendement n° 1216 .
Je ne vous surprendrai pas : avis favorable, en me félicitant du consensus manifesté autour de cet objectif de santé publique.
Je ne reviendrai pas sur l'objectif de santé publique, que je partage bien entendu pleinement.
L'outil fiscal qui vous est proposé vise non pas à gagner de l'argent sur la vente des boissons sucrées, mais à inciter les industriels à mettre moins de sucre dans les boissons, dans le but de diminuer la consommation de sucres ajoutés. Il s'agit donc d'une simple reformulation d'une taxe existante pour la rendre plus efficace.
Si, sur le principe, cette évolution recueille l'accord du Gouvernement, le barème, lui, pourrait faire encore l'objet d'échanges avec les parties prenantes, afin de l'ajuster au plus près des objectifs que nous visons. Des discussions complémentaires sur le niveau du barème pourraient donc intervenir dans le processus parlementaire. Cela rejoint l'amendement proposé par le groupe MODEM concernant les eaux. Pour l'heure, nous sommes favorables au retrait de ce dernier au profit de l'amendement du rapporteur, sur lequel nous en appelons à la sagesse de l'Assemblée.
Je ne vais pas faire l'unanimité. Peut-être allez-vous me reprocher, comme pour le tabac, de rapprocher les intérêts économiques et la santé publique. Pourtant, ce n'est évidemment pas l'objectif de santé publique visé par une telle mesure qui sous-tend mon intervention, mais bien l'impact économique significatif qu'elle pourrait avoir sur la filière. Elle intervient en effet dans un contexte particulièrement complexe pour les agriculteurs et les entreprises du secteur sucrier, puisque, le 1er octobre dernier, après cinquante ans de quotas sucriers, la filière betterave-sucre a été libéralisée. Il s'agit d'une période délicate pour l'ensemble de la filière, qui nécessiterait un soutien et un accompagnement bienveillant de la part des pouvoirs publics. Le précédent laitier est dans tous les esprits.
D'autre part, en ce moment même, les professionnels de la filière se réunissent avec les autres interprofessions pour mettre au point une stratégie de filière. Il serait incohérent qu'une telle mesure soit votée sans tenir compte des réflexions collectives à venir et des engagements futurs. En outre, le deuxième chantier des États généraux de l'alimentation doit rendre ses conclusions à la fin de l'année. Il est surprenant que cette mesure ne fasse pas l'objet d'une discussion approfondie.
Enfin, cette nouvelle taxe aurait un impact important sur la compétitivité de la filière sucre. Elle l'affaiblirait, alors que ses principaux concurrents, allemands notamment, n'y seraient pas soumis. Le risque est également grand que les clients répercutent la mesure sur les négociations commerciales à venir, alors que les cours du sucre sont extrêmement déprimés et qu'ils le resteront durablement.
Tout cela pourrait avoir des conséquences à l'échelle des territoires, notamment le mien – je pense bien sûr à ma circonscription, où est implantée une importante usine Tereos, qui emploie 600 personnes.
Nous serons deux à ne pas faire l'unanimité ce soir dans l'hémicycle, car je vais abonder dans le sens de mon collègue Bricout.
Évidemment, nous sommes favorables à une politique de santé, mais plutôt sous la forme d'un apprentissage à l'équilibre alimentaire ; c'est ce que nous devons tous défendre si nous voulons vraiment lutter efficacement contre l'obésité, notamment chez les jeunes enfants.
Cette taxe sur les sodas n'impactera pas les grands industriels qui fabriquent des boissons sucrées, ni les consommateurs. En effet, les grandes firmes ne changeront pas le prix de vente de leurs produits ; en revanche, elles mettront la pression sur les industriels sucriers français, qui eux-mêmes la répercuteront sur le prix d'achat des betteraves produites en France. Nous venons déjà de supprimer les quotas sur le marché des sucres, demandant un effort considérable à une filière complète de notre agriculture, et vous êtes en train de prendre le risque de lui faire perdre encore des revenus déjà bien faibles ! Je vous rappelle que la betterave est souvent une source de revenu complémentaire pour les agriculteurs céréaliers.
Décidément, nous avons le sentiment que les agriculteurs sont malmenés par ce projet de loi de financement de la Sécurité sociale !
Madame la ministre, nous avons bien entendu votre avis de sagesse. Mes chers collègues, je vous invite à faire preuve d'audace ! La suppression de la taxe sur les eaux n'est pas contradictoire avec la modification de la taxe sur les sodas : nous sommes dans la logique du « en même temps ». Il y a eu en commission un vote favorable, qui a fait l'unanimité. Alors, ce soir, marquons l'histoire et supprimons la taxe sur les eaux en même temps que nous faisons acte de responsabilité par rapport aux boissons sucrées !
L'amendement sur les eaux a été retiré !
Puisqu'il est question d'audace, je voudrais évoquer un autre projet, lui-même quelque peu audacieux.
Les Français consomment en moyenne vingt-cinq kilos de sucre par an. Le coût de l'obésité représente pour la France 2,6 % du PIB, soit 54 milliards d'euros. Il est clair qu'il est important de diminuer la quantité de sucre ingérée ; mais il est tout aussi important de se bouger. Il convient de pratiquer une activité physique régulière adaptée si l'on veut lutter contre le surpoids et les maladies chroniques.
Pour vous maintenir en éveil,
Sourires
je voudrais vous présenter un projet strasbourgeois : 300 médecins généralistes ont signé une charte d'engagement « sport-santé sur ordonnance ». Dans le cadre de ce dispositif, ils peuvent prescrire à leurs patients une activité physique modérée et régulière. L'impact sur la santé a été démontré scientifiquement : cela contribue à la prévention primaire et secondaire des maladies chroniques.
Un engagement interministériel permettrait la création de 500 maisons du sport santé à l'échelle nationale. Nous ne trouverons bien évidemment pas la solution aujourd'hui, mais il serait bon d'envisager, dans les prochains projets de loi de financement de la sécurité sociale, de soutenir financièrement ce projet et de trouver un forfait qui, à l'instar du forfait de 150 euros pour engager le sevrage tabagique, permettrait d'engager une activité physique adaptée prescrite sur ordonnance.
Sur les amendements identiques nos 1210 , 866 , 1015 , 1016 , 1091 , 1215 et 1216 , je suis saisi par le groupe La République en marche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
… …… …… …… …… …… …… …… …… …… …… …… …… …… …… …….
Je vais maintenant mettre aux voix les amendements identiques nos 1210 , 866 , 1015 , 1016 , 1091 , 1215 et 1216 .
Il est procédé au scrutin.
Nombre de votants | 89 |
Nombre de suffrages exprimés | 83 |
Majorité absolue | 42 |
Pour l'adoption | 80 |
contre | 3 |
Applaudissements sur les bancs du groupe REM.
La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille, pour soutenir l'amendement no 494 .
Un grand pas vient d'être fait ! Nous nous réjouissons de l'adoption de ces amendements et de ce que le Gouvernement introduise la prévention et la promotion de la santé au coeur de son projet.
Pour contribuer à cette ambition, le présent amendement propose de réaffecter la taxe sur les boissons édulcorées au financement de la promotion et de la prévention de la santé, au bénéfice du lancement ou de la généralisation d'expérimentations nouvelles, telles l'éducation à l'alimentation ou l'aide par le sport. Un tel financement serait un geste fort, d'autant que, dans son rapport de 2017, Santé publique France associe le surpoids et l'obésité à une morbidité et une mortalité accrues, juste derrière le tabac. Surtout, une étude scientifique publiée par Nature en 2014 montre que les édulcorants de synthèse non caloriques seraient responsables d'une perturbation de la flore intestinale et accéléreraient notre intolérance au glucose. « Ils seraient directement responsables d'une épidémie d'obésité qu'ils étaient supposés éviter », concluent les auteurs.
Le sucre, ce n'est pas bien, les édulcorants, c'est bien pire ! Allons jusqu'au bout de la démarche, et réaffectons la taxe sur les boissons édulcorées au financement de la promotion et de la prévention de la santé !
Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM.
La taxe qui existe sur les édulcorants a été très peu modifiée. Elle reste davantage une taxe de rendement, dans l'esprit de la loi de 2012, contrairement à la taxe sur les sucres ajoutés que nous venons de modifier.
Vous avez raison : il faut développer les actions de prévention et promouvoir la santé publique. Le « manger bouger », les messages de prévention à destination du grand public, auprès des gamins, dans les écoles, dans les familles : tout cela est indispensable, il faut le développer. Il convient donc de réfléchir à des modes de financement.
Actuellement, la taxe sur les boissons édulcorées est affectée à la caisse centrale de la Mutualité sociale agricole. Il serait très compliqué d'en changer l'affectation, dans la mesure où son périmètre n'a pas été changé. Si vous en êtes d'accord, vous pourriez retirer l'amendement, afin que nous puissions travailler à partir de la mesure que nous venons d'adopter en vue de développer de nouveaux modes de financement.
Je retire l'amendement, mais je le répète : si le sucre, ce n'est pas bien, les édulcorants, c'est bien pire ! Il faut faire rapidement quelque chose dans ce domaine.
L'amendement no 494 est retiré.
Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 68 rectifié , 1077 rectifié et 633 rectifié , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 68 rectifié et 1077 rectifié sont identiques.
La parole est à M. Éric Alauzet, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances, pour soutenir l'amendement no 68 rectifié .
Je préfère laisser la parole à Mme El Haïry, qui est également signataire de l'amendement identique no 1077 rectifié .
La parole est donc à Mme Sarah El Haïry, pour soutenir l'amendement no 1077 rectifié .
Nous avons adopté en commission des finances, après la taxe dite « sodas », la mesure dite « chouquettes ».
Rires.
Nous proposons en effet de supprimer la taxe sur les farines.
Madame la ministre, nous vous interpellons : une maladie guette nos villes et nos villages ; cette maladie, c'est la ville-dortoir. Les collectivités territoriales luttent ensemble contre ce fléau et pour revitaliser nos bourgs. Dans ces bourgs, il y a des soldats : ce sont les boulangeries et les pâtisseries. C'est parce que nous les aimons, parce que nous tenons à elles et parce que, encore une fois, nous défendons la philosophie du « en même temps » que nous proposons la suppression de la taxe sur les farines, mesure qui a fait l'unanimité en commission des finances. De surcroît, cette taxe est l'une des plus coûteuses à recouvrir – à hauteur de presque 20 % – et elle n'est plus justifiée.
La parole est à Mme Lise Magnier, pour soutenir l'amendement no 633 rectifié .
Mes chers collègues, les amendements identiques qui viennent d'être présentés sont gagés sur la taxe sur les boissons sucrées : vous ne pouvez pas, en dix minutes de temps, augmenter celle-ci par deux fois ! On ne peut pas doubler ainsi la peine des betteraviers français !
Je suis moi aussi favorable à la suppression de la taxe sur les farines, mais je propose de la compenser par une augmentation de la fiscalité sur les alcools forts. Nous ne pouvons pas faire tout le temps porter les efforts sur les mêmes !
Je veux d'abord vous rassurer, madame Magnier : je ne connais pas de marque de boisson rafraîchissante sans alcool, et encore moins de soda, qui fasse appel aux betteraviers français.
Beaucoup de tables rondes et de concertations ont eu lieu avec les industriels du sucre, les artisans et les producteurs de boissons rafraîchissantes, et j'ai aussi reçu un courriel qui m'interpelle sur le sujet de la betterave. Je veux bien en discuter, mais je ne crois pas que le problème se pose.
La question de la taxe sur les farines est récurrente et légitime sur le fond, puisque cette taxe avait été jugée injuste au moment même où elle fut votée. Beaucoup de sujets sont mis sur la table, avec les agriculteurs et les industriels, dans le cadre des États généraux de l'alimentation. La fiscalité est l'un d'entre eux, car elle peut grever le fonctionnement de certains commerces et le pouvoir d'achat de certains agriculteurs.
Je ferai, aux questions que soulèvent ces amendements, une double réponse. Tout d'abord, je le répète, une concertation est en cours dans le cadre des États généraux de l'alimentation. Serait-il bienvenu d'anticiper sur leurs conclusions dans un texte tel que le PLFSS ? Je ne le crois pas. La concertation, à mon sens, doit d'abord aller à son terme.
Deuxième remarque : avec la suppression de la taxe sur les farines, le manque à gagner serait de 70 millions d'euros pour Mutualité sociale agricole. L'objectif n'est certes pas de baisser les pensions ou d'augmenter les cotisations pour les affiliés.
Aussi je vous propose plutôt une réflexion d'ensemble, moins dans le cadre d'un PLFSS que dans celui des États généraux de l'alimentation et des engagements du Président de la République.
Dans ces conditions, l'avis est plutôt défavorable.
La taxe sur les farines, on a eu raison de le souligner, n'est pas un prélèvement très performant. Toutefois, elle finance la retraite complémentaire des agriculteurs à hauteur de 70 millions d'euros. Comme nous ne pouvons aujourd'hui gager sa suppression sur le produit d'une autre taxe – celle sur les sodas, on l'a dit, n'étant pas vouée à rapporter de l'argent – , je puis m'engager à une réflexion d'ici à l'année prochaine, afin d'étudier les moyens de la substituer à une autre recette.
Puisque ne sommes donc pas en mesure, aujourd'hui, d'accepter la suppression de cette taxe, l'avis est défavorable.
J'étais vigilant sur cette question, mais je serai bref puisque des éléments de réponse viennent d'être apportés, suite également à un échange avec notre collègue André Chassaigne.
La taxe sur les farines finance en effet un certain nombre de retraites agricoles, sujet délicat s'il en est. Le niveau de ces retraites est suffisamment bas pour que l'on n'ajoute pas encore aux difficultés.
Peut-être pourrons-nous discuter du bien-fondé de la taxe sur les farines, mais prenons garde à la conséquence de nos actes.
Les amendements identiques nos 68 rectifié et 1077 rectifié ne sont pas adoptés.
L'amendement no 633 rectifié n'est pas adopté.
Prochaine séance, ce matin, à neuf heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2018.
La séance est levée.
La séance est levée, le vendredi 27 octobre, à une heure cinq.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Catherine Joly