La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
Cet après-midi, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s'arrêtant à l'amendement no 1277 à l'article 4.
Les conférences des maires devront désormais être créées dans tous les établissements publics de coopération intercommunale – EPCI – à fiscalité propre. L'amendement no 1277 vise à ce que les avis et les voeux qu'elles émettront soient adressés à l'ensemble des conseillers municipaux des communes membres de l'EPCI. L'amendement no 1276 impose la même obligation s'agissant des seuls avis.
Conformément au sens général du projet de loi, ces amendements permettent de réaffirmer la place des maires au sein des intercommunalités. Les opinions des maires doivent être connues par tous les conseillers municipaux des communes membres de l'EPCI afin que les votes et délibérations puissent avoir lieu en connaissance de cause.
La parole est à M. Bruno Questel, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, pour donner l'avis de la commission sur les amendements en discussion commune.
Sourires.
Étendre aux voeux, au-delà des seuls avis, l'obligation de transmission à tous les conseillers municipaux des communes de l'EPCI amènerait à transmettre des éléments dont l'objet peut être totalement étranger aux prérogatives des collectivités locales et des intercommunalités.
En conséquence, je suis défavorable à l'amendement no 1277 , dont je demande le retrait, et favorable aux amendements identiques nos 1276 et 1400 .
La parole est à M. le ministre chargé des collectivités territoriales, pour donner l'avis du Gouvernement.
L'amendement no 1277 est retiré.
Parce que nous ne sommes pas suffisamment innovants dans notre volonté de simplifier et de moderniser la diffusion de l'information des EPCI vers les conseillers municipaux, j'ai déposé des amendements de suppression de plusieurs alinéas de l'article 4. Celui-là vise l'alinéa 4.
Je l'ai dit lors des travaux de la commission des lois, introduire l'automaticité de la transmission d'informations des EPCI vers les conseillers municipaux en indiquant le détail des modalités retenues – papier, informatique ou les deux – me paraît contraire à l'esprit du projet de loi.
Il me semblerait en revanche justifié que l'on permette de recourir à des dispositifs modernes déjà utilisés dans de nombreuses collectivités et établissements publics afin que chaque élu qui le souhaite puisse aller chercher l'information dont il a besoin. Je soutiendrai dans quelques instants un amendement en ce sens, qui correspond davantage que le présent amendement à nos échanges en commission des lois.
Avis défavorable. Nous avons déjà eu ce débat à la fin de la séance de l'après-midi.
Cette fois, c'est M. Viala qui a fait une partie de mon travail ! Je demande le retrait de son amendement, sachant que nous examinerons dans un instant l'amendement no 1402 de M. Sacha Houlié, qui permet d'aller dans le même sens sans supprimer l'intégralité de l'alinéa 4. À défaut d'un retrait, mon avis sera défavorable.
L'amendement no 487 est retiré.
Comme l'amendement précédent – qui est un amendement du groupe Les Républicains – , il vise non plus à supprimer l'alinéa 4, mais à en modifier la rédaction afin que l'EPCI puisse mettre les documents mentionnés à l'alinéa 3 à disposition des conseillers municipaux sur une plateforme sécurisée. Nous préférons un système innovant et moderne à la rigidité d'un mode de diffusion déterminé par avance.
Les deux amendements sont intéressants. Je me range à l'avis du rapporteur pour une meilleure rédaction de l'article 4.
L'amendement no 272 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Fannette Charvier, pour soutenir l'amendement no 1402 .
Afin de clarifier et de simplifier le dispositif, il vise, tout en conservant l'obligation d'information relative aux délibérations de l'EPCI, à ce que ce dernier reste seul responsable de l'envoi des documents à tous les conseillers municipaux des communes membres.
L'amendement no 696 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
L'amendement no 488 est retiré.
La parole est à M. Sébastien Huyghe, pour soutenir l'amendement no 1485 .
À l'heure où l'on souhaite rapprocher les EPCI des citoyens, il peut sembler utile d'étendre à tous les électeurs des communes concernées la communication des documents mentionnés à l'article 4. Il est toujours utile que les citoyens s'intéressent au fonctionnement de notre démocratie.
Monsieur le ministre, en donnant votre avis sur un amendement sensiblement équivalent que je soutenais en commission, vous m'avez dit qu'il fallait en retravailler la rédaction pour la séance, ce que j'ai fait. Vous m'avez également dit que vos services prendraient contact avec moi, mais comme je n'ai rien vu venir, je me suis permis de travailler seul à la présente rédaction. Elle devrait mieux convenir puisqu'il est proposé de mettre les documents à disposition de manière dématérialisée, ce que vous sembliez approuver.
À défaut d'un retrait, mon avis sera défavorable. L'amendement est satisfait, puisque les électeurs ont accès à tous les documents administratifs qu'ils souhaitent consulter en mairie ou auprès de l'EPCI. Cette consultation ne peut pas leur être refusée : la leur permettre est déjà une obligation légale.
Avis défavorable.
Vos réponses ne correspondent pas à la teneur des échanges qui furent les nôtres en commission. Monsieur le ministre, vous sembliez favorable à la mesure – à vrai dire, vous y étiez favorable, il suffit pour le vérifier de lire le compte rendu de la réunion. Je suis un peu surpris de ce changement de pied. On m'avait assuré que si la formule était plus adaptée à la dématérialisation des documents, le Gouvernement ne verrait pas d'inconvénient à ce que l'on rende obligatoire la mise à disposition de tous les documents à l'intention de nos concitoyens.
En commission, j'ai dit que j'étais ouvert à l'idée d'un amendement dont la rédaction serait modifiée, mais cette modification ne s'est pas produite. Votre amendement vise à ce que le stock de documents que l'EPCI doit transmettre à l'ensemble des conseillers municipaux des communes membres soit consultable par n'importe quel citoyen. J'entends ce que vous dites, mais est-ce bien ce que nous devons faire dans un texte visant à simplifier la vie des élus locaux ?
C'est pourtant bien ce qui est écrit dans votre amendement : « Les documents mentionnés sont consultables en mairie par tout électeur de la commune ou mis à disposition de manière dématérialisée. » Je ne vois pas un grand changement par rapport à l'amendement que vous défendiez en commission.
Vous pouvez défendre cette position. Si tel était le cas, je respecterais votre conviction, mais faut-il vraiment que chaque convocation, chaque ordre du jour, chaque rapport – il faudrait citer l'ensemble des documents visés à l'article 4 – fasse l'objet d'une communication aux habitants dans chaque mairie de chaque commune de l'intercommunalité ? Reconnaissez qu'il pourrait s'agir de l'une de ces mesures contraignantes dont les membres de votre groupe ne voulaient pas entendre parler tout à l'heure ! Je maintiens donc mon avis défavorable ; croyez bien que je le regrette.
Peut-être aurait-il fallu mieux encadrer les choses en se limitant à la mise à disposition de manière dématérialisée ou en réservant à l'EPCI l'obligation de diffusion. Mais on ne peut pas demander à toutes les communes de diffuser les documents pour le compte de leur EPCI !
Les amendements un peu techniques que nous examinons depuis un moment visent à réfléchir à la manière de construire des liens entre les intercommunalités et les habitants. Ils posent une question de fond : l'absence de légitimité politique des intercommunalités. Vous le savez mieux que quiconque, monsieur le ministre, on a construit les intercommunalités en s'asseyant sur les conseils municipaux et, plus généralement, sur les habitants eux-mêmes.
L'élaboration des SDCI – schémas départementaux de coopération intercommunale – a fait l'objet de trocs de nature politicienne. L'objectif, que j'ai décrit cet après-midi en posant une question au Gouvernement, était de construire des intercommunalités XXL, au nom d'un projet politique assez limpide dont nous devrions parler aujourd'hui : transformer les régions en Länder dans lesquels on aura éloigné les services de l'État des territoires de vie ; créer des intercommunalités mastodontes et technocratiques, au sein desquelles même les conseillers municipaux membres de l'assemblée délibérante auront du mal à savoir sur quoi ils délibèrent.
En fait, c'est à ce sujet que vous interpellent les collègues qui veulent resserrer les liens entre intercommunalités et citoyens et améliorer l'information de ces derniers. Vous avez construit un fonctionnement technocratique qui vise à dessaisir les élus locaux, les communes et les maires de ce qui se passe sur leur territoire. Il faut réintroduire de la démocratie et de la transparence dans tout ça. Il faut faire en sorte que les habitants s'approprient ces enjeux, qu'il s'agisse des problèmes de transport, d'eau, d'assainissement, d'environnement ou d'aménagement du territoire. C'est de cela que nous parlons ce soir !
Non, monsieur le ministre, ce n'est pas ce que nous avons dit en commission ! Je vous renvoie au compte rendu des travaux de la commission et à l'amendement que j'avais soutenu, puis retiré à votre demande afin de le retravailler pour la séance publique. Il s'agissait que chaque citoyen qui le demande puisse recevoir par mail une copie des convocations, projets de délibération et autres documents issus de l'EPCI. Vous m'aviez répondu que l'on pouvait mettre en place une procédure beaucoup plus légère puisque chaque collectivité dispose d'un site internet qui permet au citoyen de consulter des documents.
Permettre cette consultation n'alourdit donc pas le dispositif mais, comme l'a souligné M. Jumel, contribue à rapprocher de l'EPCI le citoyen. Au moment où l'intercommunalité acquiert toujours plus de compétences et prend d'autant plus de décisions qui affectent le quotidien de ce dernier, cette transparence est plus nécessaire que jamais.
Je vous l'avoue, monsieur Huyghe, j'ai du mal à vous suivre. Nombre des amendements déposés par votre groupe visaient à s'assurer qu'aucune obligation ne serait imposée aux EPCI. Je ne reprendrai pas le débat que nous avons eu hier sur le pacte de gouvernance et la conférence des maires : vous connaissez mes convictions et, par conséquent, la position du Gouvernement.
Ainsi, votre collègue M. Viala vient de défendre, avec sincérité et talent, plusieurs amendements nous engageant à ne pas créer de contraintes supplémentaires s'agissant de la circulation des documents au sein de l'EPCI, qui doit rester libre.
Nous sommes quelques-uns à avoir soutenu qu'il fallait néanmoins prévoir une base légale garantissant que les conseillers municipaux seraient suffisamment informés, c'est-à-dire autant que les conseillers communautaires. C'était notamment – pardonnez-moi de le souligner, monsieur Jumel – le point de vue des députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine ; je vous rassure, ainsi que cela a été annoncé en fin de séance de l'après-midi, votre demande en ce sens sera satisfaite – le président Chassaigne a d'ailleurs témoigné de sa vigilance à cet égard dans son intervention sur l'article – par voie d'amendement.
Que le conseiller municipal de la plus petite commune rurale dispose des mêmes informations que le conseiller communautaire de la commune la plus importante constitue déjà en soi une petite révolution dans l'organisation entre les communes et l'intercommunalité.
Mais votre amendement est différent, monsieur Huyghe, puisqu'il tend à ce que la commune s'assure de la publicité des documents de l'EPCI.
De l'accessibilité, soit. Votre circonscription est relativement dense mais, de mémoire, elle compte quelques communes rurales. Or l'on voit bien, dans ce contexte, à quoi aboutirait une telle disposition.
J'ajoute à l'attention des députés du groupe LR, par cohérence avec ce que je disais à la fin de la précédente séance, qu'il s'agirait de rendre publics des documents quasi préparatoires. Les projets de délibérations à inscrire à l'ordre du jour du conseil communautaire font l'objet de documents certes publics, mais avant tout destinés aux élus. Demander à une mairie rurale de rendre accessibles des documents de l'EPCI encore au stade préparatoire me paraît délicat.
Je tenais à m'expliquer sur mon avis défavorable : je ne veux pas que l'on dise que le Gouvernement a manqué à sa parole. Je m'étais engagé, en commission, à examiner cet amendement si sa rédaction était revue. Elle ne l'a pas été avec mes collaborateurs, mais c'est votre droit, monsieur Huyghe. Reste que l'amendement dit la même chose qu'en commission et qu'il est contradictoire avec les positions de votre groupe.
Mais il y a une contradiction entre l'avis de la commission et celui du ministre : le rapporteur, lui, a dit que l'amendement était satisfait !
L'amendement no 1485 n'est pas adopté.
L'article 4, amendé, est adopté.
La parole est à M. Rémy Rebeyrotte, pour soutenir l'amendement no 1541 .
Je l'ai annoncé à la fin de la séance précédente : il s'agit de rendre obligatoire, à chaque séance du conseil municipal, un point d'actualité sur la vie communautaire. Il pourrait être très court s'il n'y a rien de particulier à signaler, ou plus long, selon les cas ; il permettrait en tout cas de faire circuler l'information et, peut-être, d'inciter les élus à s'informer par eux-mêmes sur le portail de l'EPCI et à lire les documents qui leur sont envoyés, pour préparer le débat.
Il n'est pas rare qu'un point sur l'intercommunalité soit fait à chaque conseil municipal, soit par le maire, soit par un adjoint qui a reçu délégation de compétence.
Je l'ai observé pendant quinze ans et cela marchait très bien. Avis défavorable.
Cela peut aller de soi, en effet. En outre, les délibérations inscrites à l'ordre du jour du conseil communautaire permettent de faire circuler la parole – comme, d'ailleurs, chaque amendement dans cet hémicycle !
Demande de retrait.
C'est un amendement déconnecté ! On voit que son auteur n'a jamais siégé dans un conseil municipal !
L'amendement no 1541 est retiré.
L'amendement no 30 de Mme Valérie Bazin-Malgras est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Il serait ennuyeux d'étendre les règles relatives à l'information des conseillers communautaires aux EPCI ne comportant pas une commune d'au moins 3 500 habitants, comme le propose l'amendement.
Avis défavorable.
Pour les raisons précédemment évoquées, avis défavorable.
L'amendement no 30 n'est pas adopté.
Il vise à donner plus de temps aux nouveaux élus des EPCI pour préparer leur représentation et leurs projets intercommunaux, en portant de quatre à six semaines après l'élection des maires le délai au terme duquel se réunit l'organe délibérant de l'EPCI.
Le délai de quatre semaines est tout à fait suffisant dans la pratique. Avis défavorable.
Madame la députée, je comprends votre volonté de laisser davantage de temps aux élus, mais je n'en ai jamais ressenti le besoin en tant qu'élu local, et les nombreuses associations d'élus que j'ai consultées dans le cadre de la préparation du projet de loi ne m'ont pas non plus fait part d'une telle demande. L'échéance du vendredi de la quatrième semaine est généralement considérée comme satisfaisante. Demande de retrait ou avis défavorable.
L'amendement no 817 est retiré.
La parole est de nouveau à Mme Aurore Bergé, pour soutenir l'amendement no 820 .
Il a pour objectif d'accroître la légitimité des EPCI, dont les citoyens peuvent avoir l'impression qu'ils sont peu représentatifs. À cette fin, les candidats à la fonction exécutive doivent pouvoir développer un projet à l'échelle des EPCI et le présenter aux élus afin de renforcer l'identité territoriale des EPCI.
Il est inutile d'inscrire cela dans la loi. Quelle que soit la taille de l'intercommunalité, les candidats potentiels à sa présidence sont connus ; les élus ont discuté entre eux ; la transparence est totale. Avis défavorable.
J'ai déjà expliqué notre philosophie en commission : nous sommes par principe hostiles à toute mesure qui ferait peser sur les élus locaux des obligations que, d'ailleurs, les élus nationaux ne s'imposent pas à eux-mêmes. Les obliger à prononcer une profession de foi, à présenter un projet électoral, est pour le moins curieux.
Ce serait comme rendre obligatoires les réunions de compte rendu de mandat pour les députés. Une telle mesure est à la fois contraire aux principes démocratiques et, à mon avis, à la Constitution, qui consacre le principe de libre administration des collectivités territoriales.
Dans notre démocratie, si un député souhaite envoyer une page blanche en guise de profession de foi, il en a le droit. Il n'existe pas de contrôle dans ce domaine.
Vous le savez d'expérience : c'est ce que vous avez fait ! Vous avez simplement ajouté la photo du Président de la République !
Monsieur Jumel, soyez respectueux des députés de la majorité qui ont été élus sur un programme électoral. Il est vrai que certains ici font la même profession de foi depuis maintenant plus de soixante ans !
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Le principe que nous devons retenir, s'agissant des listes communautaires, c'est que nous ne pouvons pas imposer de contrôle préalable sur le contenu des documents électoraux. Imposer au sein des EPCI une campagne électorale, une propagande électorale, en somme, n'est donc pas opportun.
Cet amendement est en réalité un amendement d'appel, qui nous invite à favoriser le débat parmi les élus locaux et les élus communautaires, mais l'esprit de ce texte n'est pas d'imposer une obligation nouvelle.
L'amendement dévoie l'objectif initial du projet de loi, qui est de redonner aux élus et aux communes du poids dans les EPCI. Considérer que les candidats à la présidence de l'EPCI peuvent, avant même d'accéder à cette fonction, définir un projet pour le territoire, sans avoir consulté les élus – ils ne connaissent pas le corps électoral qui va les désigner au moment où ils se portent candidats, à la suite des élections municipales – , est proprement aberrant. Je ne comprends pas, en vérité, le sens de cet amendement.
À moi, il ne me paraît pas totalement inintéressant. Je le trouve même plutôt pertinent !
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Comme vous, j'ai été élu local, mesdames et messieurs les députés du groupe LR ! Nous sommes nombreux ici à l'avoir été et nous en avons assez de vos leçons !
Comme j'ai eu l'occasion de le dire lors de la discussion d'un autre amendement, les citoyens ne connaissent pas le programme intercommunal pour la simple et bonne raison que la plupart du temps, il n'y en a pas ! Le sujet est pourtant important et nous devons y réfléchir.
L'amendement propose une mesure intermédiaire afin de permettre aux conseillers municipaux et aux futurs conseillers communautaires de disposer du projet défendu par les candidats à la présidence de l'EPCI. Car, en la matière, rien n'est automatique et des rapports de force s'établissent en fonction des élections.
À titre personnel, je soutiendrai l'amendement.
J'ai dit tout à l'heure qu'il était normal qu'une majorité sans cap soutienne la liberté de ne pas avoir de programme, mais c'était pour plaisanter !
Sur le fond, je partage l'avis du ministre : cet amendement est dangereux, et pour plusieurs raisons.
Je m'étonne des propos de M. Balanant, qui n'a visiblement pas lu le texte.
Tout d'abord, le projet de loi prévoit l'actualisation du projet de territoire dans les six mois qui suivent le renouvellement des conseils intercommunaux et l'établissement d'un pacte de gouvernance. Les nouvelles intercommunalités ont donc l'obligation de se mettre d'accord sur un projet de territoire.
Ensuite, l'amendement consacre le règne de la supracommunalité en actant la domination des exécutifs intercommunaux sur les communes. Une intercommunalité est l'addition, à l'échelle d'un territoire, des projets des différentes communes. Laisser passer cet amendement, au beau milieu du congrès des maires, reviendrait à dire aux communes que vous n'accordez aucune valeur au projet sur lequel elles ont été élues ! Ce serait profondément dangereux et contraire à l'esprit même de l'intercommunalité.
Enfin, comme cela a été dit, l'amendement est contraire au principe de libre administration des collectivités territoriales.
Pour toutes ces raisons, les députés du groupe GDR s'y opposeront lors du vote. Dans cette démocratie du nouveau monde, nous avons l'habitude que l'on nous dise ce qu'il faut faire ou ne pas faire, mais cela ne peut s'appliquer aux intercommunalités !
Dans la démocratie du nouveau monde, nous sommes simplement à l'écoute des élus locaux et des maires des communes membres d'EPCI ! Ceux que j'ai rencontrés regrettaient, tout comme nos concitoyens, le manque de lisibilité de l'action de certains EPCI, dont ils ne connaissaient ni les attributions, ni les compétences, ni les projets de territoire. Dans une collectivité territoriale que je connais bien, à quelques mois des élections municipales, aucun projet de territoire n'a encore été porté à la connaissance des citoyens.
C'est bien pourquoi cet amendement propose uniquement que les élus qui veulent se porter candidats à la présidence de l'EPCI transmettent un projet. Ainsi, l'EPCI serait mieux incarné et son action plus lisible pour nos concitoyens. L'enjeu de ce texte étant de renforcer la place des élus locaux, accroître la lisibilité de leur action en tant que membres de l'EPCI et développer plus de démocratie au sein de celui-ci ne me paraît pas complètement superfétatoire.
L'amendement no 820 n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Félix Acquaviva, pour soutenir l'amendement no 1062 .
L'article L. 5211-39 du code général des collectivités territoriales dispose que « les représentants de la commune [au sein de l'organe délibérant de l'EPCI] rendent compte au moins deux fois par an au conseil municipal de l'activité de l'établissement public de coopération intercommunale ». En cohérence avec l'un de nos amendements qui a été adopté par la commission des lois, nous proposons qu'ils en rendent compte à chaque réunion du conseil municipal au lieu de deux fois par an minimum, afin de faire reculer un tant soit peu le sentiment de dépossession de leurs prérogatives qu'éprouvent les élus communaux. Il semble en effet nécessaire d'instaurer le plus de transparence possible quant aux activités de l'intercommunalité.
Rien n'interdit aujourd'hui aux représentants de la commune au sein de l'EPCI de rendre compte à leur conseil municipal plus de deux fois par an, voire après chaque réunion de l'organe délibérant de l'EPCI. Mais l'imposer serait une contrainte excessive et un facteur de blocage. Avis défavorable.
Je comprends l'esprit de l'amendement, mais rendre obligatoire à chaque réunion du conseil municipal de faire le point sur l'intercommunalité me paraît très lourd. Demande de retrait. À défaut, l'avis serait défavorable.
L'amendement no 1062 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Danielle Brulebois, pour soutenir l'amendement no 856 .
L'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales prévoit que l'envoi par courrier papier est, sauf demande expresse de l'intéressé, la seule façon de transmettre les convocations. À l'heure de la transition numérique et de la dématérialisation de la plupart des documents administratifs, nos concitoyens sont familiarisés avec les usages numériques. Le présent amendement propose donc que l'envoi dématérialisé ait un caractère officiel tout en maintenant l'obligation de continuer à envoyer une convocation papier.
Madame Brulebois, une obligation plus une obligation, cela fait deux obligations. J'émets donc un avis défavorable car votre amendement propose de cumuler deux modalités d'envoi obligatoires. C'est inutile et cela compliquerait le dispositif actuel, qui fonctionne très bien.
Longtemps le principe a été le papier, le numérique restant l'exception ; le Gouvernement considère que l'on peut commencer à inverser la donne, le numérique devenant le principe et le papier l'exception. Mais il ne s'agit certainement pas d'interdire un mode d'envoi par respect, là aussi, pour les libertés locales. Nous faisons confiance aux élus locaux de l'EPCI pour déterminer si les caractéristiques du territoire de l'intercommunalité permettent de transmettre par voie numérique le cas échéant. De ce point de vue, la rédaction de l'article après son examen par votre commission va dans le bon sens et est équilibrée. Demande de retrait ou, sinon, avis défavorable.
Je vais le retirer, mais je voulais attirer l'attention sur le fait que l'envoi de convocations papier peut poser des problèmes quand il y a des difficultés de distribution du courrier.
L'amendement no 856 est retiré.
L'article 4 bis A est adopté.
Cet amendement inverse la logique de la rédaction de l'alinéa 4 afin de ne pas instaurer ce qui ressemblerait à une tutelle de la métropole de Lyon sur les communes membres. Il prévoit à cet effet qu'il appartiendra à cette métropole de décider de transmettre aux conseillers municipaux les convocations et les rapports sur les affaires devant être soumises aux conseillers métropolitains.
Cet amendement a le mérite de rendre constitutionnelle la disposition adoptée au Sénat. Avis favorable.
L'amendement no 1228 est adopté.
L'article 4 bis, amendé, est adopté.
Cet article prévoit que la réunion du conseil communautaire puisse se tenir par téléconférence.
Je comprends bien la nécessité d'apporter une solution à des élus de territoires ruraux inclus dans une intercommunalité XXL et qui ont des difficultés à être présents à ces réunions, sachant qu'il leur faut parfois plusieurs heures de trajet. Mais je ne peux pas m'empêcher de penser qu'on est en train de traiter le symptôme plutôt que le problème. Les intercommunalités sont devenues trop grandes et ne correspondent plus à des réalités territoriales, à des bassins de vie, à des territoires vécus par les habitants et donc par les élus.
Si faciliter l'accès de ces derniers aux réunions par la téléconférence peut avoir un intérêt, cela signifie tout de même casser les modalités de construction de la délibération qui prévalaient jusqu'alors et la façon de concevoir l'élaboration de l'intérêt général en France. Au-delà de l'expression d'une somme d'intérêts particuliers, l'intérêt général naît de nos échanges physiques à l'Assemblée nationale, et il en est de même dans une communauté locale. Cette nouvelle disposition va ainsi porter une atteinte fondamentale à l'une des composantes de notre système démocratique, de notre conception de l'intérêt général.
S'il y a des raisons techniques objectives à autoriser la téléconférence, il y a aussi des raisons de philosophie politique qui devraient nous amener à y regarder à deux fois.
M. Hubert Wulfranc applaudit.
C'est l'intervention de M. Schellenberger qui m'a incité à m'inscrire sur cet article.
Sourires.
Sourires.
Je rappelle que l'article 4 ter a été introduit en commission pour organiser la téléconférence dans les conseils intercommunaux. On observera que si le nouveau dispositif est dans cet article réservé aux communautés de communes et aux communautés d'agglomération, je proposerai par voie d'amendement de l'étendre aux communautés urbaines et aux métropoles pour que l'ensemble des intercommunalités soient concernées.
Vous vous opposez à cet article, monsieur Schellenberger, au motif que le périmètre des intercommunalités aurait trop grossi par l'effet des fusions consécutives à la loi NOTRe – loi portant nouvelle organisation territoriale de la République – de 2015. Mais il ne traite pas de ce sujet : ce sont les articles 9, 10 et 11 qui permettront de faire évoluer ce périmètre, soit par le rattachement d'une commune à un autre EPCI, soit par la scission de l'EPCI, mais avec un garde-fou : en présenter préalablement les conséquences financières – un amendement proposera alors d'en présenter aussi les conséquences sociales.
On essaie dans cet article de trouver une solution technique – la numérisation – à une question politique. Le faible taux de participation aux réunions intercommunales, au point que, régulièrement, le quorum n'est pas atteint – de même dans les conseils municipaux des communes nouvelles – ,…
… ne tient pas au fait qu'il faille prendre sa voiture pour s'y rendre, mais à ce que les élus ont le sentiment que les décisions se prennent ailleurs, que l'on a dévitalisé leur collectivité, dessaisi l'instance de proximité de ce qui est utile aux habitants – l'urbanisme, les services publics de proximité, la capacité à délivrer des cartes d'identité… – et que les maires ont été transformés en de simples officiers d'état civil. Il ne reste plus à ceux-ci qu'à couper les rubans et à délivrer des actes d'état civil. Voilà votre vision technocratique de l'intercommunalité.
Protestations sur de nombreux bancs des groupes LaREM et MODEM.
Je suis désolé de vous le dire, mais c'est ainsi.
J'ajoute que ce ne sont même pas les exécutifs intercommunaux qui prennent la main : ce sont les technocrates des services administratifs. Cela satisfait les libéraux que vous êtes,
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM
Mouvements divers.
Mais c'est ce qui crée la colère des maires, notamment des maires ruraux qui se disent qu'ils n'ont plus la main sur ce qui concerne les habitants de leur commune. Voilà ce qu'il faut corriger !
Une fois n'est pas coutume, je ne serai pas d'accord avec mon collègue Jumel. Il ne s'agit que d'un outil technique, en l'espèce la téléconférence.
Et s'il est vrai que certains EPCI XXL ne marchent pas bien, ce n'est pas le cas pour d'autres. Il y a même de petits EPCI qui ne fonctionnent pas bien. Le problème n'est pas là. Il s'agit uniquement de permettre aux intercommunalités d'utiliser un outil moderne. On leur en donnerait la simple faculté, et pas pour toutes les réunions puisque les plus importantes – je pense notamment à l'élection du président et à l'adoption du budget primitif – en sont évidemment exclues. Mais, pour des délibérations du quotidien, je ne vois pas pourquoi on ne le permettrait pas. J'irai même plus loin : je trouve dommage qu'on ne le permette pas également aux départements et aux régions qui le souhaiteraient.
On devrait le faire pour l'Assemblée aussi ! Ça rendrait service aux absents !
Je voudrais abonder dans le sens de notre collègue Pires Beaune : pourquoi limiter l'utilisation de la téléconférence aux réunions des conseils communautaires alors que l'on pourrait l'étendre à celles des commissions permanentes – ce serait tout de même intelligent pour les élus situés en zone de montagne – , et aussi aux départements et aux régions ?
J'appartiens à l'une des trois plus grandes régions de France, le Grand Est ; autant vous dire que pour les conseillers régionaux qui habitent en bordure de l'Île-de-France et qui doivent aller à Strasbourg, c'est un truc de fou : ils mettent plus d'une journée, aller et retour compris, pour une réunion de deux heures. La téléconférence apporterait une solution.
Est-ce que le Gouvernement serait prêt à étendre la portée de cet article ? Je signale au passage que j'en ai discuté tout à l'heure avec Mme Pires Beaune et avec votre éminente collègue, Mme Gourault, qui a trouvé l'idée excellente – manière de faire le lien entre deux membres du Gouvernement.
Sourires.
J'avoue avoir bien du mal à suivre ce débat : la loi dont nous discutons porte notamment sur l'engagement dans la vie locale ; dans ce cadre, on facilite l'engagement des élus locaux au quotidien de la manière la plus pratique possible, en mettant à leur disposition les outils les plus modernes, d'ailleurs déjà utilisés dans l'entreprise – beaucoup de conseils d'administration fonctionnent par téléconférence – …
… ainsi que dans le monde associatif.
Il s'agit d'un texte plutôt simple et pragmatique, destiné à trouver des solutions pratiques aux élus. Certes, monsieur Jumel, ce peut être pour des raisons de fond que certains, comme vous l'avez dit, se sentent dépossédés de leurs prérogatives et ne viennent donc plus aux réunions. Mais souffrez que ce puisse aussi être parce qu'ils ont par ailleurs une profession et des obligations familiales qui les détournent de leur engagement d'élu local.
Protestations sur les bancs du groupe LR.
Dès lors qu'il ne s'agira pas d'une obligation mais d'une faculté, il faut être cohérent : je ne vois pas quel problème cela pose d'ouvrir à la téléconférence les réunions des assemblées délibérantes. Il y a dans ce débat quelque chose qui me dépasse, un manque de bon sens.
À moins que certains ne souhaitent pas que les Français qui ont un vrai métier, qui sont éventuellement pères ou mères de famille ou bien ont d'autres obligations privées, puissent s'engager dans des conseils municipaux.
J'indique à Mme Pires Beaune et à M. de Courson, qui ne peuvent plus amender le texte, que je m'apprête à déposer un amendement au nom du Gouvernement qui étend le dispositif aux commissions permanentes des conseils départementaux et des conseils régionaux.
J'estime néanmoins qu'il faut se fixer deux limites – je rejoins, en cela, les propos de M. Schellenberger – , qui ne sont pas des limites de principe, mais des limites de fond. La première concerne les discussions budgétaires : peut-on voter à distance le budget de l'EPCI dans lequel on siège ?
Je ne le pense pas : le sujet mérite que l'on se déplace. Peut-on élire son président d'intercommunalité par visioconférence ?
Je ne le pense pas non plus. Nous pouvons donc exclure du champ de l'article ces deux types de délibérations, qui – pardon de le rappeler – font déjà l'objet d'un traitement spécifique par le CGCT, lequel définit les majorités ou les modalités de scrutin à observer dans ces cas – un vote à bulletin secret est par exemple obligatoire pour procéder aux nominations.
La mesure proposée me semble de bon sens. Parfois, cependant, le bon sens est la chose du monde la moins partagée.
Je rappelle qu'il n'est pas possible, à ce stade de la discussion sur l'article, de répondre au ministre. Vous aurez cependant l'occasion de le faire, chers collègues, dans le cadre de la discussion des amendements.
La parole est à Mme Sandrine Mörch, pour soutenir l'amendement no 607 rectifié .
Cet amendement, dont Élisabeth Toutut-Picard a eu l'initiative, vise à permettre l'organisation de conseils communautaires ou municipaux par téléconférence dans les communautés de communes, les communautés d'agglomération et les conseils municipaux. La téléconférence n'est aujourd'hui possible que pour certaines communes, en application de l'article L. 2573-5 du code général des collectivités territoriales.
Les distances parfois grandes et les intempéries, notamment en période hivernale, peuvent rendre difficile, pour les élus, l'accès au lieu de réunion du conseil communautaire. La possibilité de recours à la téléconférence éviterait ainsi aux conseillers communautaires des déplacements parfois longs et faciliterait l'exercice de leur mandat.
Je peux tout entendre s'agissant des régions qui comptent entre dix et treize départements ou des conseils départementaux qui peuvent être amenés à se réunir, en commission permanente par exemple, de manière urgente ou dont certains membres sont empêchés. S'agissant des conseils municipaux, toutefois, c'est franchement au-dessus de mes forces ! Avis défavorable.
Je répondrai avec le même pragmatisme : la téléconférence me semble envisageable pour les EPCI et pour les conseils départementaux ou régionaux. En revanche, la prévoir pour assurer le fonctionnement du conseil municipal, qui n'implique que quatre réunions obligatoires par an, serait à mon sens aller un peu trop loin.
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Je comprends les explications selon lesquelles la distance, notamment dans les territoires ruraux, ne permet pas aux élus communautaires de participer aux assemblées, mais, au-delà de l'enjeu technique, il va falloir modifier le dictionnaire. Lorsqu'on en ouvre un pour y consulter la définition du mot « assemblée », il y est en effet écrit qu'il s'agit de « personnes réunies en un même lieu pour un motif commun ».
En considérant que toute assemblée peut se réunir à distance, on ouvre la voie à l'introduction de la visioconférence à l'Assemblée nationale.
Je viens du Vaucluse : le trajet est long, pour venir ici, et il y a parfois des intempéries ! Pourquoi ne resterais-je pas chez moi, pour y suivre confortablement les débats ?
Je mets cet argument sur la table, car j'estime que le fait d'être réunis dans un même lieu facilite le débat et la concentration, et crée une plus-value. Nos échanges l'illustrent d'ailleurs : passé un certain point, on suit mieux la discussion, on se répond, on interagit. La démocratie est aussi un fait social.
Je ne suis pas hostile à la visioconférence, mais je crois que le sujet mérite réflexion – car d'une certaine façon, en catimini, c'est une évolution de la conception de la démocratie que vous nous proposez.
Or il me semble que la démocratie, c'est de l'humain, et qu'en ayant une machine pour seul intermédiaire, on perd quelque chose qui nous vient des Grecs et qui est né un jour sur une agora. C'est pourquoi je suis hostile à votre amendement.
Applaudissements sur les bancs des groupes LR et GDR.
Je crois, cher collègue, que la démocratie grecque est née contre l'agora, et non sur elle – mais c'est un autre débat.
Je voulais réagir aux propos de M. Jumel concernant les relations entre les citoyens et l'administration. Pour connaître la situation qui prévaut dans de nombreux pays, je crois que la France doit être fière de son administration, qui est très solide. Ne jetons pas le bébé avec l'eau du bain : si l'administration est parfois toute-puissante et peut agir en dehors de tout contrôle des élus – y compris au sein de cette assemblée – , la responsabilité en revient avant tout à ces derniers. Ne nous plaignons pas d'avoir une administration trop forte, mais d'avoir des élus qui – peut-être par manque de moyens – ne s'élèvent pas au niveau de leur administration.
Et pour résoudre le problème, on leur dit qu'ils n'ont pas besoin d'aller voir leur administration et qu'ils peuvent rentrer chez eux ?
Je connais de nombreux pays où l'administration n'est pas à la hauteur : c'est bien plus gênant que quand elle est forte. J'appelle donc à mener cette réflexion de manière beaucoup plus profonde : nous devons aider les élus à se former et à prendre la mesure du rôle de leur administration, mais ne nous plaignons pas d'avoir en France des administrations solides.
Mme Anne Blanc applaudit.
On a pu constater, à la faveur de la réforme de la justice, votre volonté de rendre la République numérisée, désincarnée et déshumanisée – vous promouvez d'ailleurs cette évolution dans tous les champs de l'action publique. Vous nous proposez maintenant la démocratie virtuelle. Or si on renonce à se réunir en assemblée, on ne peut pas se nourrir du débat et de la confrontation, y compris, le cas échéant, pour changer d'opinion ou forger un avis permettant de dégager l'intérêt général – nos collègues du groupe LR ont raison sur ce point. C'est une drôle de conception de la démocratie à laquelle vous nous préparez.
Enfin, j'avais cru comprendre que le projet de loi visait, entre autres objectifs, à aider les élus à resserrer leurs liens de proximité avec les habitants, donc à réduire la fracture politique majeure qui existe entre les citoyens et leurs représentants. Pensez-vous vraiment y parvenir en expliquant à nos concitoyens qu'on va désormais, pour des raisons pratiques ou pour prendre en considération les intempéries, permettre aux élus de discuter à distance ? Mais sur quelle planète vivez-vous ?
Et puis, monsieur Lecornu, je sais que vous assumez de représenter la droite décomplexée,
Exclamations sur les bancs du groupe LR
mais vous comparez des assemblées délibérantes à des assemblées d'actionnaires ! Personnellement, je suis heureux que ces organes ne fonctionnent pas de la même façon ! Un conseil municipal, c'est autre chose : c'est la sève de la démocratie vivante et de ses instances de proximité. C'est cela qu'il nous faut préserver.
En favorisant l'absentéisme ?
L'amendement no 607 rectifié n'est pas adopté.
Comme je l'avais déjà indiqué, il vise à étendre à toutes les intercommunalités la faculté de téléconférence, qui ne se limiterait ainsi pas aux communautés de communes ou aux communautés d'agglomération, mais s'appliquerait également aux communautés urbaines et aux métropoles.
J'émets un avis favorable, dans un souci de cohérence.
Monsieur Jumel, il n'est nullement question d'étendre la téléconférence aux conseils municipaux. Vous n'avez visiblement pas écouté ou entendu les échanges précédents.
Favorable.
Une fois cette décision prise, elle posera sans doute moins de problème aux métropoles qu'aux petites communes, mais tout de même : sous couvert de pragmatisme, de modernité et de simplification, vous êtes en train d'effacer tout ce qui fait le liant humain que conservent encore un tant soit peu les petites collectivités rurales éclatées.
M. Pierre Vatin applaudit.
La mesure proposée ne permettra pas de réaliser des économies, car les élus locaux se déplacent aujourd'hui à leurs frais pour assister aux réunions. En revanche, qui, à l'avenir – mon collègue Cordier soulevait fort justement ce point il y a quelques instants – , paiera le matériel informatique nécessaire pour que tous les conseillers aient accès à une salle de téléconférence dans leur salon, d'où ils pourront, comme vous le suggériez, vaquer à leurs occupations, faire leur repassage ou que sais-je ?
Protestations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Mais pour qui prenez-vous les élus locaux ?
Vous supprimez par ailleurs toute possibilité d'interaction. Or ce qui fait le sel de nos débats, c'est tout de même de pouvoir s'interpeller et d'interagir directement. Des réunions d'information très verticales peuvent se tenir par téléconférence, mais pas des réunions décisionnelles prévoyant des débats et des votes ! En tout cas, nous ne partageons pas la conception très verticale du débat et du vote qui peut exister dans votre nouveau monde macronisé.
Tout cela ne poussera pas les gens à s'engager, bien au contraire ! Je prendrai l'exemple de la communauté de communes du Saulnois, qui compte 128 communes pour 148 délégués communautaires.
Vous voulez les mettre chacun devant un écran. Qui continuera à participer à de telles réunions ? Les conseillers se connecteront peut-être pour faire acte de présence, mais ils seront encore plus privés d'accès à l'information et de possibilité d'expression qu'aujourd'hui. Vous obtiendrez l'effet inverse à celui recherché. Il faut au contraire remettre du liant, de l'humain, et surtout redonner du pouvoir aux élus locaux plutôt que de les éloigner des centres de décision en les cantonnant chez eux comme de simples spectateurs des décisions technocratiques qui seront prises !
Je veux réagir au nom du groupe Socialistes et apparentés, pour dire que nous sommes évidemment très favorables à cet amendement.
Bien évidemment, puisqu'il est cohérent avec les absurdités de la loi NOTRe !
Nous souhaitons remercier le ministre et le rapporteur d'avoir accepté d'inclure les conseils départementaux et régionaux dans le champ de l'article 4 ter. Nous rencontrons, sur le terrain, beaucoup d'élus harassés par le nombre de réunions auxquelles ils doivent assister chaque semaine.
Protestations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
La téléconférence représente une possibilité et un outil nouveau. Adaptons notre démocratie aux outils qu'on nous propose. S'agissant du matériel, une réflexion sera menée…
« Adapter la démocratie » ? Vous rendez-vous compte de ce que vous dites ?
La démocratie s'exercera, puisque l'on échangera grâce à la visioconférence.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Nous remercions le ministre de la possibilité ainsi offerte, qui n'est nullement attentatoire à la démocratie, mais permet au contraire de la faciliter et de l'adapter au XXIe siècle.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Merci.
Qu'essaye-t-on de contourner par ces nouvelles possibilités données aujourd'hui, étendues demain, puis rendues obligatoires dans quelques années ? Précisément ce que réclament les élus depuis des années : un véritable statut de l'élu, qui va bien au-delà des techniques de visioconférence, mais touche à la faculté même de certains de nos concitoyens à simplement accéder à la fonction d'élu !
Le ministre parlait tout à l'heure des gens qui travaillent. Mais cherchez les travailleurs, les ouvriers, les employés, dans les assemblées élues !
Voilà ce que nous vous demandons depuis des années : pouvoir exercer un mandat dans de bonnes conditions.
Par ailleurs, qu'est-ce qu'une réunion de conseil métropolitain ou de conseil d'intercommunalité ? C'est quelque chose de vivant : c'est un public, qui participe, qui proteste, et qui, de plus en plus, est écarté de la scène du débat.
Exclamations sur divers bancs.
Un exemple nous en a encore été donné il y a un mois à l'occasion de l'incendie de l'usine Lubrizol à Rouen, où les citoyens voulant obtenir des réponses ont été accueillis par des CRS !
Or demain, on voudrait faire en sorte que les élus s'expriment entre eux, à travers des écrans ? Qu'est-ce que cela veut dire ?
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI, et sur quelques bancs du groupe LR.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LR.
Restons calmes, chers amis : je serai brève. Je voulais simplement répondre à quelques-uns de nos collègues à propos de la dématérialisation.
Nous connaissons tous des élus – pour l'avoir été nous-mêmes, avoir travaillé avec eux dans les territoires et en circonscription, ou même avoir travaillé pour eux – , et nous savons que 90 % d'entre eux sont très responsables. Contrairement à ce que vous affirmiez, monsieur Di Filippo – de façon quelque peu choquante, selon moi – , ils ne se connecteront pas en téléconférence simplement pour faire « acte de présence ».
Les élus locaux, lorsqu'ils s'engagent, sont responsables de leur mandat. Ils l'assument généralement jusqu'au bout, y compris tard le soir et de façon dématérialisée.
Enfin, je rappelle que le télétravail se développe de plus en plus, dans les entreprises mais aussi dans les services publics, …
… et que, de ce fait, les élus peuvent moderniser leur façon de faire de la politique dans les territoires. Je suis donc très favorable à cet amendement.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
L'amendement no 1406 est adopté.
L'article 4 ter, amendé, est adopté.
La parole est à M. Stéphane Travert, pour soutenir l'amendement no 601 .
Vous ne voulez pas le défendre de manière virtuelle ? Envoyez-nous donc un mail !
Sourires.
L'amendement, qui vise à faciliter l'organisation de la téléconférence dans les différentes assemblées, est âprement défendu, madame la présidente.
Sourires.
De la manière la plus courtoise et la plus diplomatique possible, j'opposerai un avis défavorable, mon cher collègue, à cet amendement qui concerne les municipalités.
Aujourd'hui, les seules collectivités autorisées à avoir recours aux téléconférences et visioconférences sont les communes de Polynésie française, où existe un statut particulier de « commune associée » pour les petits atolls éloignés qui, afin d'atteindre le quorum du conseil municipal, ont besoin de recourir à la téléconférence. Comme vous le savez, le Caillou – la Nouvelle-Calédonie – est beaucoup plus ramassé que la Polynésie française et il ne me semble donc pas opportun d'ouvrir à ce territoire la faculté dont dispose cette dernière. Chemin faisant, en effet, on en reviendrait à l'amendement précédent et on ouvrirait le dispositif à toutes les communes de métropole et d'outre-mer. Demande de retrait.
L'amendement no 601 est retiré.
Chers collègues, si vos tablettes numériques ne sont pas encore mises à jour, je vous indique que je suis saisie d'un amendement, no 1623 , du Gouvernement.
Je l'ai déjà présenté tout à l'heure, madame la présidente. Il est donc défendu.
Avis favorable à cet amendement inspiré d'une proposition de Mme Pires Beaune…
Et de M. de Courson !
… et de M. de Courson, en effet, qui ne pouvait faire l'objet d'un amendement de leur part vu les délais – il faut rendre à César ce qui revient à César.
Merci, monsieur le ministre, d'avoir tenu compte de la remarque, et merci à M. le rapporteur de son avis favorable. Malgré les caricatures, l'objet de cet amendement n'est absolument pas de supprimer toutes les réunions et de faire en sorte que, demain, on ne se réunisse plus que par visioconférence ! Convenez toutefois que, dans certains cas, la visioconférence peut être utile pour une commission permanente – ainsi, un élu qui se serait cassé la jambe pourrait, avec un simple téléphone, participer à la réunion depuis son domicile.
Dans quel monde vivons-nous ? Nous ne sommes pas en train de mettre à bas la démocratie : nous nous contentons de dire que nous disposons d'outils modernes qui, dans certains cas, peuvent être utiles. Et s'ils le sont pour les EPCI, ils peuvent l'être également pour les départements et pour les régions.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes SOC et LaREM.
Monsieur le ministre, le débat qu'a fait naître cette proposition n'est tout de même pas dénué d'arguments de fond. Je dirai très amicalement à Mme Pires Beaune que, si elle a pu percevoir des propos caricaturaux, telle n'était absolument pas notre intention, et que nous avons du reste parfois, de ce côté-ci de l'hémicycle, la même perception.
Chacun sait que la dématérialisation d'une réunion enlève aux débats certains de leurs aspects. On ne réagit pas de la même manière aux questions posées et aux sujets abordés selon qu'on se trouve devant un écran ou dans une salle, au contact d'autres élus qui ont des avis concordants, divergents ou complémentaires. Le débat n'est pas de la même nature et ne peut pas progresser de la même façon. Ce qui se passe ici ce soir en est la preuve vivante.
Monsieur le ministre, puisque vous déposez séance tenante un amendement visant à étendre cette possibilité – ce que je peux comprendre, car si on l'ouvre aux EPCI, il est invraisemblable, en remontant, d'empêcher les conseils départementaux et les conseils régionaux de faire de même – , il serait en revanche opportun que cet amendement l'encadre pour qu'elle ne devienne pas la règle et conserve un caractère exceptionnel. Je n'ai pas immédiatement de solution à proposer à cet effet, …
Le bon sens !
… mais il importe de le souligner.
Sans être élu régional, je suis élu de la région Occitanie et je sais que les réunions de commission s'y tiennent toujours par téléconférence ; ce n'est pas bien. Si nous légiférons sur ce point, nous ne devons pas laisser cela devenir systématique.
Monsieur Viala, l'amendement ne vise pas les réunions de commission, mais les réunions des commissions permanentes.
Permettez-moi de vous répondre, s'il vous plaît.
Le dispositif proposé par le Gouvernement évoque bien des conditions fixées par décret en Conseil d'État. Nous ne voulons pas mettre à mal le principe de l'exercice du mandat par chaque élu départemental ou régional.
Bien au contraire, nous voulons faciliter le fonctionnement quasi quotidien, hebdomadaire ou mensuel des collectivités visées.
L'amendement no 1623 est adopté.
Madame la présidente, il va falloir que vous regardiez un peu plus sur votre gauche, sinon ça ne va pas aller !
Rappel au règlement
La parole est à M. Raphaël Schellenberger, pour un rappel au règlement.
Il se fonde sur l'article 98, alinéa 1, du règlement, qui organise la possibilité pour le Gouvernement de déposer des amendements en séance.
Le Conseil constitutionnel, examinant la réforme de notre règlement, a rappelé que, lorsqu'un sujet est assez important pour le justifier, il revient au président de séance de laisser au débat le temps nécessaire. Or, alors que nous sommes en train de modifier profondément la manière dont on délibère dans le cadre de la démocratie locale,
Protestations sur les bancs du groupe LaREM
vous précipitez les débats sur ce sujet essentiel. Cette façon de présider est scandaleuse, madame la présidente !
Applaudissements sur les bancs des groupes LR, SOC et GDR.
Monsieur Schellenberger, vous ne pouvez pas vous appuyer sur cet article pour vous permettre de remettre en cause ma présidence.
Voulez-vous qu'il soit mentionné au compte rendu des débats que vous la remettez en cause ? Nous avons entendu deux avis contradictoires, conformément au règlement, et le débat a été éclairé par le rapporteur et le ministre.
Après l'article 4 ter
La parole est à M. Pascal Brindeau, pour soutenir l'amendement no 1440 .
Il vise à traiter la situation des communes faiblement peuplées dans des EPCI ou dans des communautés de communes ou d'agglomérations plus importantes pour ce qui concerne la représentation des élus au sein d'organismes extérieurs, tels que les syndicats mixtes. En effet, le droit positif actuel ne permettant pas que son suppléant siège dans des organismes extérieurs, le maire est seul à pouvoir siéger au niveau de la communauté dans le syndicat responsable, par exemple, des ordures ou de l'eau, de telle sorte que, souvent, ces syndicats et organismes extérieurs n'atteignent pas le quorum, en raison de l'absence des élus titulaires.
L'amendement tend donc à permettre au suppléant du conseiller communautaire titulaire – lequel est donc, en l'occurrence, le maire de la commune qui ne dispose que d'un représentant – d'être désigné pour siéger dans des syndicats mixtes ou organismes extérieurs où l'EPCI est représenté en tant que tel. Il s'agit d'une mesure de bon sens.
Auparavant, il était possible de faire siéger dans des syndicats des conseillers municipaux qui n'étaient pas conseillers communautaires, ce qui distendait le lien entre l'EPCI et le syndicat, mais nous allons aujourd'hui être confrontés à des situations dans lesquelles ces syndicats n'obtiendront jamais le quorum, parce que les maires des petites communes ne peuvent pas être partout à la fois.
Je comprends l'esprit de l'amendement, mais il ne peut malheureusement recueillir un avis favorable. La notion de « réunion des organismes extérieurs » est en effet trop large ; l'amendement est donc impossible à satisfaire dans les faits.
L'amendement no 1440 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est de nouveau à M. Pascal Brindeau, pour soutenir l'amendement no 1416 .
Il tend à permettre de traiter la situation résultant du retrait, par un maire ou un président d'EPCI, de la délégation d'un vice-président. Dans le cadre du droit actuel, si un président d'exécutif, pour toutes sortes de raisons possibles, retire une délégation à un vice-président, ce retrait met fin aux délégations de tous les conseillers communautaires délégués. L'amendement tend donc à ce qu'en cas de retrait de délégation en cours de mandat, les délégations des autres conseillers communautaires délégués ne tombent pas.
L'amendement est, en effet, déjà satisfait. Lorsqu'un arrêté porte délégation de fonction du président aux différents vice-présidents, si le président, en retirant les délégations d'un vice-président, abroge l'intégralité de l'arrêté, il va sans dire que toutes les délégations tombent.
Je vous garantis que si, car j'ai une petite expérience en la matière. Il suffit donc d'abroger uniquement la partie qui concerne le vice-président visé, ou de prendre un arrêté pour chaque vice-président, auquel cas l'affaire est jouée. Pour avoir regardé de près cette question, je vous le garantis, monsieur le député. Faites-moi confiance. Avis défavorable.
D'expérience, monsieur le ministre, je suis en total désaccord avec votre analyse. J'ai déjà vécu cette situation. Aux termes de l'article 5211-9 du code général des collectivités territoriales, vous ne pouvez opérer une délégation de fonction et de signature à un autre membre du bureau communautaire que si tous les vice-présidents en ont une.
Si, monsieur le ministre. Cela m'est arrivé. Demandez au préfet de mon département, il vous le dira !
Si donc vous retirez la délégation de fonction et de signature à un vice-président, celles des conseillers communautaires délégués tombent. Pour qu'il en soit autrement, il faut l'inscrire dans la loi, ce qui est précisément l'objet de cet amendement.
L'amendement no 1416 n'est pas adopté.
La commission a supprimé l'article 5 A.
Je suis saisie de quatre amendements, nos 1359 , 1411 , 258 et 862 , visant à le rétablir, qui peuvent être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 1359 et 1411 sont identiques, ainsi que les amendements nos 258 et 862 .
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no 1359 .
Il ne s'agit pas de créer une intercommunalité à la carte, comme on aurait pu le craindre à la lecture de certaines dispositions adoptées au Sénat, mais simplement d'apporter la souplesse nécessaire aux EPCI qui souhaitent adapter spécifiquement l'exercice des compétences qui leur sont dévolues. Je laisse M. Houlié compléter mes propos en présentant l'amendement identique du groupe La République en marche.
Avec ces amendements, nous entrons dans un deuxième bloc : celui de l'intercommunalité, relatif aux compétences. Nous aurons tout à l'heure un débat sur l'eau et l'assainissement, mais ce dont il est ici question est le schéma construit par le Sénat en matière de restitution de compétences, de l'EPCI à la carte, des compétences optionnelles et du CIF – coefficient d'intégration fiscale – inversé, auquel le Sénat a heureusement fait un sort avant qu'il ne parvienne jusqu'à nous : nous n'avons donc plus à traiter que de cet amendement relatif à la différenciation intracommunautaire.
Pour éclairer ce barbarisme, je citerai l'exemple de la communauté de communes du Haut-Poitou, qui regroupe trois anciennes communautés de communes. Deux d'entre elles, le Vouglaisien et le Neuvillois, disposaient d'écoles dans tous les villages, de telle sorte que les temps périscolaires relevaient de l'échelle communale. En revanche, dans la troisième communauté de communes située plus au nord, le Mirebelais, il n'y avait d'école que dans quelques villages, de telle sorte que la compétence périscolaire était exercée à l'échelle intercommunale. Cette situation a été compliquée par la fusion de ces trois EPCI, et il a fallu bricoler pour parvenir à une solution prévoyant de faire de la gestion des temps d'activités périscolaires une compétence facultative exercée parfois par les communes et parfois par l'intercommunalité.
Afin de sécuriser ce dispositif pour les élus et d'en clarifier et faciliter l'utilisation, l'article instaure une sorte d'EPCI à la carte ou une forme de différenciation intracommunautaire, permettant d'exercer différemment les compétences facultatives des intercommunalités. Je vous propose donc d'adopter cet amendement, avant d'aborder les articles 5B, relatif à la restitution de compétences, et 5D, qui porte sur la neutralisation des compétences optionnelles.
La parole est à Mme Emmanuelle Anthoine, pour soutenir l'amendement no 258 .
Il a pour objet de rétablir l'article 5A, qui autorise le transfert à la carte de compétences facultatives aux EPCI à fiscalité propre par certaines de leurs communes membres. L'EPCI toucherait le produit de certains impôts à la place de la commune pour financer la compétence transférée.
Il s'agit ainsi de répondre aux attentes des collectivités du bloc communal qui souhaitent disposer localement de plus de libertés. Il est donc proposé de rétablir des dispositions qui offrent plus de souplesse dans l'organisation des compétences entre les communes et leur intercommunalité, conformément aux objectifs du texte.
La parole est à M. Raphaël Schellenberger, pour soutenir l'amendement no 862 .
Cet amendement qui, de prime abord, semble viser le même objectif que celui du rapporteur et de M. Houlié, n'a pas grand-chose de commun avec eux. En effet, il permet, en réalité, de donner un corps et une réalité à cet objectif.
Il s'agit de pouvoir transmettre, à la carte, une compétence large à l'EPCI, en choisissant un équipement particulier que l'on souhaite lui transférer sans le faire pour les autres équipements.
Si on prend l'exemple des stades de football, on choisira de transférer à l'EPCI la gestion d'un seul stade, celui pour lequel l'opération présente le plus d'intérêt. Généralement, et quasi automatiquement, cette mesure s'applique à des compétences facultatives et non obligatoires. Par conséquent, il est nécessaire de définir l'intérêt communautaire. En vertu de celui-ci, on peut déjà avoir recours à ce mécanisme : plutôt que de transférer une compétence dans son ensemble, on choisit de n'en transférer qu'une partie en fonction de l'intérêt communautaire.
L'avantage de l'article voté par le Sénat, tel que nous souhaitons le rétablir, réside dans le fait que l'accompagnement financier de ce transfert à la carte pourrait être distinct des moyens déjà existants. Nous proposons par exemple qu'il se traduise par le transfert d'une part de fiscalité et pas uniquement par une diminution des attributions de compensation, pour créer une dynamique au sein de l'intercommunalité en matière de ressources.
Cet amendement est opérant en ce qu'il rétablit un système complet. L'amendement de M. Houlié et celui du rapporteur n'ont aucun intérêt ni sens, puisqu'ils ne font qu'enfoncer une porte ouverte sans accompagner de moyens le transfert de la compétence partielle.
Cette discussion porte sur un sujet d'actualité puisqu'il a été abordé aujourd'hui au congrès des maires de France – j'aperçois d'ailleurs certains élus locaux dans les tribunes du public. Je vais essayer d'en traduire les termes dans un langage plus commun pour quiconque a déjà siégé dans un conseil communautaire.
La rédaction du Sénat prévoit une intercommunalité à la carte concernant les compétences facultatives et certains équipements d'intérêt communautaire. Tout cela est très judicieux. D'ailleurs, ce que la majorité souhaite rétablir aujourd'hui, comme le Sénat hier, ce sont des pratiques qui ont déjà existé dans le passé, mais sans être toujours dotées d'une base légale. Il s'agit donc de restaurer, de protéger – au sens juridique du terme – et de clarifier les procédures permettant, au début d'un mandat, de choisir les compétences que l'on souhaite transférer ou non à l'intercommunalité.
Ce matin, on m'a dit qu'il fallait beaucoup s'inspirer de la rédaction du Sénat. En l'occurrence, je ne souhaite pas le faire – et je comprends que les députés aient décidé de clarifier les choses, en commission des lois puis ce soir en séance. Car l'intercommunalité à la carte telle que prévue par le Sénat aurait pour inconvénient d'entraîner un sectionnement du conseil communautaire. C'est-à-dire que si le maire d'une commune choisit de conserver telle ou telle compétence, il ne pourra plus s'exprimer au sein de l'intercommunalité. Pour chaque délibération, la morphologie du conseil communautaire change donc en fonction de l'intérêt communautaire de tel ou tel équipement et de l'exercice d'une compétence facultative par telle ou telle commune. En matière de simplification, on a vu mieux ! Si l'objectif était d'offrir davantage de liberté, on la pousse ici à un tel degré que cela risque d'aboutir à la partition des conseils communautaires.
De tels amendements risquent en outre de faire jurisprudence. Le prochain s'attaquera à la commune nouvelle. Nous nous retrouverons donc avec le conseil municipal de la commune déléguée A et celui de la commune déléguée B qui auront survécu au dépeçage. Or nous refusons un tel scénario ; nous en avons déjà débattu à l'occasion de la proposition de loi de Mme Gatel relative aux communes nouvelles. Dès lors, comment peut-on vouloir que l'ancien conseil municipal de la commune nouvelle décide du transfert de certaines compétences ou de certains équipements ? Bref, on joue vraiment aux apprentis sorciers. L'intention était de simplifier et de donner davantage de liberté aux élus locaux. À l'arrivée, on construit une usine à gaz inimaginable, même dans les pires cauchemars qu'avait suscités la loi NOTRe.
Il faut donc rester concentrés sur nos objectifs : donner de la liberté aux intercommunalités, permettre de transférer plus facilement les compétences facultatives et d'intérêt communautaire, sans toucher au conseil communautaire en tant que tel.
De même, concernant l'accompagnement financier, Monsieur Schellenberger, votre amendement vise à permettre à une fraction du conseil communautaire, et non plus à l'intégralité de celui-ci, de décider où vont les attributions de compensation, autrement dit où va l'impôt. L'intercommunalité a certes des défauts, mais en croyant ainsi lui apporter plus de liberté, on ne fait qu'y mettre la pagaille.
L'avis du Gouvernement est donc défavorable aux amendements nos 258 et 862 , qui rétablissent la rédaction du Sénat, et favorable aux nos 1359 et 1411, dont la rédaction est sécurisante.
Sourires. – M. Sacha Houlié applaudit.
C'est suffisamment rare pour être souligné.
Il faut tout de même avoir à l'esprit le contexte de l'intercommunalité contrainte, au forceps, dans laquelle des maires ont découvert après la décision d'une CDCI – commission départementale de coopération intercommunale – dans quel périmètre ils se retrouvaient.
Cependant, en se tournant vers une intercommunalité à la carte, on risque d'enfoncer un coin en matière d'égalité territoriale et devant l'impôt – car certaines intercommunalités prévoient une fiscalité unique. En optant pour une fiscalité et des attributions de compensation à la carte, on installe une République à géométrie variable.
Non seulement le principe de différenciation enfonce un coin dans l'égalité républicaine – nous y reviendrons – , mais son application au champ de l'intercommunalité est mortifère et creuserait la fracture entre les élus et l'intercommunalité comme entre les habitants et l'intercommunalité. Il faut donc savoir raison garder et ne pas ouvrir une telle boîte de Pandore.
Par ailleurs, il faudra veiller à ce que le principe de libre administration des collectivités locales soit pris en considération dans la loi et à renforcer les prérogatives des communes en matière de compétences de proximité – nous ferons des propositions en ce sens.
J'ai moins peur que M. Jumel d'être d'accord avec le ministre ! Il dit juste : si on ouvre la possibilité de créer un puzzle de compétences réparties entre les communes et l'EPCI, on aboutit à une situation parfaitement ingérable, notamment en donnant naissance à des organes délibérants à géométrie variable.
En revanche, ce qui disparaît dans l'article réécrit par la majorité, par rapport à la version du Sénat, c'est la question des moyens afférents. Dès lors qu'on abandonne le modèle de gestion globale des compétences par la communauté de communes, plusieurs questions se posent à propos de la répartition des moyens entre les communes et l'EPCI. L'article, tel qu'il serait rédigé en tenant compte des amendements de nos collègues, serait insuffisant de ce point de vue. Il aurait fallu conserver les éléments introduits par les sénateurs.
J'appuie les propos tenus par le ministre. J'ai présidé une communauté urbaine, j'ai même été membre d'une CDCI. Si on instaure une organisation à la carte, la situation deviendra ingérable. Le fonctionnement actuel, concernant les compétences optionnelles, donne satisfaction : des débats ont lieu au sein des conseils communautaires pour décider de la gestion d'un équipement, par exemple sportif ou culturel, lorsque ce choix présente un intérêt communautaire. Tout cela se passe très bien. Les élus demandent plutôt une sécurité administrative et juridique. Mais veillons à ne pas transformer nos collectivités en syndicats à vocation multiple. Le sens de l'histoire exige au contraire davantage de cohérence. Les observations du Gouvernement vont dans ce sens et je les approuve.
La parole est à M. Charles de Courson, pour conclure de façon pythagoricienne cette discussion !
Le Sénat a créé l'intercommunalité à fiscalité propre à géométrie variable, de même qu'il existait des syndicats à la carte. Ce schéma est complètement contradictoire : puisqu'il est impossible de moduler les taux d'imposition, comment procéder aux ajustements que supposent les compétences à géométrie variable ? La rupture entre les communes qui ont transféré une compétence et celles qui ne l'ont pas transférée serait complète. C'est indémerdable ! De ce point de vue, monsieur le rapporteur, la rédaction de votre amendement laisse planer une certaine ambiguïté.
Quand vous écrivez « les communes membres », cette formule désigne-t-elle toutes les communes ou certaines d'entre elles ? Dans le premier cas, il n'y a pas de problème puisque cela correspond à ce qu'on appelle l'intérêt communautaire. Nous le définissons au sein de nos intercommunalités avant de répertorier très précisément les compétences qu'il recouvre. Cela permet de procéder à des transferts sans être obligé de modifier les statuts de l'intercommunalité.
En revanche, si cette formule ne désigne qu'une partie d'entre elles, je vote contre votre amendement car alors vous réinventez un système à la carte. Pouvez-vous donc m'apporter cette précision ?
Je mesure pleinement que je vais devoir me priver de votre voix, monsieur de Courson, et j'en suis désolé.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
J'ai répondu à cette question : il s'agit effectivement de certaines communes, et non de toutes.
L'article 5 B prévoit la procédure de restitution des compétences par un EPCI à ses communes membres. Je tiens à souligner que nous avons accompli un effort important depuis plusieurs années pour accentuer la coopération au sein d'un même EPCI et coordonner les politiques de ses communes membres. Il ne faudrait pas que ce travail soit détricoté trop facilement ; j'y serai attentif.
Les différentes lois votées et décisions prises au cours de ces dernières années visaient à regrouper les compétences afin de créer des ensembles cohérents. Il faut bien sûr prévoir la possibilité d'une restitution dans des cas très particuliers, mais un encadrement trop peu strict risquerait de donner lieu à des disparités et au développement d'un système d'EPCI à la carte. La prudence est donc de mise. Lorsqu'une commune souhaite se défaire d'une compétence, elle peut avoir des raisons objectives de faire ce choix, mais un encadrement juridique solide est nécessaire, sinon la gestion de la communauté de communes risque d'être plus complexe.
Je suis fondamentalement hostile à cet article. Vous rendez-vous compte de ce qu'on est en train de faire ? On autoriserait des intercommunalités à restituer certaines compétences à certaines communes, sans rien dire des moyens d'équilibrer financièrement le dispositif !
Comment voulez-vous faire si vous conservez les mêmes taux d'imposition ? Je prends un exemple : une commune aimerait bien récupérer son école, on décide donc de la lui restituer. Mais qui financera ensuite cette école ? Si cette charge incombe à la commune, les électeurs et le conseil municipal réagiront en faisant valoir que leur taux d'imposition est le même que celui des autres. Ils ne comprendront pas qu'on leur demande de payer deux fois : une contribution destinée à l'ensemble des établissements scolaires plus une contribution destinée à leur école. Dans ce cas, créera-t-on des compensations ? Rien n'en est dit dans l'article !
L'article 5 A et l'article 5 B sont symétriques. Dans un cas, on transfère certaines compétences plus haut ; dans l'autre, on les transfère plus bas. Mais comment faites-vous pour financer ces transferts et maintenir l'égalité de financement ? Vous n'en dites rien ni dans l'article 5 A ni dans l'article 5 B ! Expliquez-moi donc comment vous procédez et quelles sont les incidences sur le CIF – pardonnez-moi d'évoquer ce que vous considérez peut-être comme un détail, mais en principe le CIF tient compte de ces transferts.
Chers collègues, ne mettons pas le doigt dans un tel engrenage !
Je veux réagir aux propos de M. de Courson. L'article 5 B, mon cher collègue, n'est pas symétrique du 5 A : son esprit n'est pas de permettre une redescente à la carte des compétences. Il vise des compétences facultatives qui seraient remontées à l'EPCI, parfois involontairement, par exemple à la suite d'une fusion d'intercommunalités. Dans ce dernier cas, l'intercommunalité résultant de la fusion peut en effet se voir transférer, de façon globale, des compétences qui n'étaient exercées, au préalable, que par une partie d'une intercommunalité. Ce sont ces compétences optionnelles qu'il serait possible de faire redescendre.
Vous incriminez ensuite une sorte de flou quant au financement. Il n'en est rien : lors d'un transfert de compétences, les relations financières sont d'ores et déjà réglées par la loi, en particulier à travers les attributions de compensation, qui font elles-mêmes l'objet d'une évaluation obligatoire par les CLECT, les commissions locales d'évaluation des charges transférées. Le projet de loi, d'ailleurs, comporte un article fort intéressant sur les CLECT et sur la nécessité d'une évaluation, de leur part, des décisions dont nous parlons.
Bref, l'article 5 B n'est pas le pendant du 5 A : il vise seulement à remédier à un problème particulier, bien identifié par les sénateurs.
Nous en avons terminé avec les inscrits sur l'article, chaque groupe ayant pu s'exprimer par la voix d'un de ses membres.
Dès lors que vous n'avez pas encore appelé les amendements, madame la présidente, chacun est libre de s'inscrire sur l'article !
Exclamations sur divers bancs.
Le règlement ne prévoit qu'un seul inscrit par groupe, monsieur Vigier.
Nous, nous nous en fichons, puisque nous n'avons pas voté la réforme du règlement !
Sourires.
Nous en venons donc aux amendements à l'article.
La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l'amendement no 1188 .
Pour vous faire une confidence, je ne suis pas sûr que la totalité des membres de mon groupe approuvent cet amendement qu'ils ont pourtant cosigné.
Sourires et exclamations sur divers bancs. – M. Erwan Balanant applaudit.
Il y a à cela une raison bien simple : le débat que nous avons, très intéressant, peut aussi, je le dis en toute humilité, nous conduire à revoir nos positions sur tel ou tel de nos amendements.
Nous proposons ici que la commune soit la seule à pouvoir demander la récupération d'une compétence non obligatoire : cela va encore plus loin que le texte, qui prévoit une décision conjointe de l'EPCI et des communes.
Je veux quand même appeler votre attention sur des situations très particulières. Dans ma circonscription, par exemple, de grandes communautés de communes sont nées du regroupement de cinq, six ou même sept petites communautés de communes, dont chacune exerçait des compétences non obligatoires qui lui étaient propres. Ainsi, la gestion de deux gendarmeries, dont une communauté de communes avait la charge, s'est retrouvée de facto transférée à la nouvelle communauté de communes, alors qu'en son sein, d'autres gendarmeries ne relèvent pas de la compétence intercommunale.
Notre amendement, donc, donnerait à une commune la possibilité de récupérer, dans une situation très particulière et si elle le juge opportun, une compétence qu'elle avait auparavant abandonnée.
Vous avez eu l'honnêteté, monsieur Chassaigne, de dire que votre amendement ne recueillait pas l'assentiment de l'ensemble de votre groupe. Je ne dirai pas que cela me rassure – ni que cela m'inquiète – , mais…
Je vous sais facile à convaincre, monsieur Jumel, du moins à huis clos…
Mon avis, cependant, est défavorable, car l'amendement me semble aller un peu loin dans le sens de la liberté des communes : il risquerait, ce faisant, de déséquilibrer les intercommunalités.
Rassurez-vous, monsieur de Courson : l'attribution de compensation et l'intégration, autrement dit le CIF, continuent de varier en fonction des changements de compétences. Le Sénat, on l'a rappelé en commission, souhaitait, de façon un peu curieuse, neutraliser le CIF : en clair, les compétences pouvaient faire des allers-retours entre le bloc communal et l'intercommunalité, tandis que cette dernière – accrochez-vous – pouvait décider, en plus des attributions de compensation, de la répartition du CIF aux communes. Au Sénat, une disposition en ce sens avait été adoptée en commission des lois avant d'être repoussée dans l'hémicycle.
Il est donc seulement proposé ici, je vous rassure, de permettre à des conseils communautaires sans sectionnement – je vous renvoie sur ce point à nos débats précédents – , d'adapter, soit en montée – pour l'article 5 A – , soit en descente – pour l'article 5 B – , un certain nombre de compétences facultatives, pour lesquelles la définition de l'intérêt communautaire offre déjà des possibilités. Tout changement dans l'exercice d'une compétence fait automatiquement apparaître un impact financier.
Oui, monsieur le député, mais ce sont les élus qui en décident ainsi : le principe de la décision à la carte, c'est la liberté, et la liberté ne va pas sans responsabilité. Il ne s'agit donc que de codifier des mesures de liberté. C'est pourquoi les amendements que nous avons présentés me paraissent être d'équilibre.
Quant à votre amendement, monsieur Chassaigne, je vous confirme qu'il pique légèrement les yeux,
Sourires
car il signerait à certains égards la fin des intercommunalités. Je l'interprète plutôt comme un amendement d'appel, et vous invite par conséquent à le retirer. À défaut, l'avis serait défavorable.
Merci de vos éclaircissements, monsieur le ministre. De fait, la souplesse ici offerte permettra une évolution de la répartition des compétences entre l'intercommunalité et certaines communes membres. Cela a une conséquence directe, chacun l'a bien compris – et vous venez de le préciser encore – , sur les attributions de compensation, déterminées sur la base des évaluations de la CLECT. Il y a quelques années, je le rappelle, l'attribution de compensation était gelée une fois la compétence transférée ; après quoi on pouvait la recalculer sur le fondement de critères objectifs. Si des compétences redescendent de l'intercommunalité vers les communes, la dotation globale de fonctionnement, la DGF, diminuera avec le CIF, et tout le monde paiera la facture ! Chacun, ici, doit en être conscient.
Cela dit, je suis assez d'accord avec la proposition d'André Chassaigne : un conseil municipal doit avoir la possibilité de demander la restitution d'une compétence exercée par l'intercommunalité. En revanche, cher collègue, les conséquences financières d'une telle décision doivent être bien connues de la commune, mais aussi de l'intercommunalité : celle-ci n'est pas la communauté réduite aux aguets, ni aux acquêts. L'intercommunalité, c'est une aventure entre des hommes et des femmes qui, dans un territoire, ont décidé de travailler ensemble ; et cela n'est pas gagnant tous les jours.
Les choses sont un peu plus compliquées que ce que l'on vient de dire, car certaines intercommunalités ont été imposées par la contrainte.
Je soutiens évidemment l'amendement présenté par André Chassaigne, pour la bonne raison qu'il me paraît nécessaire de changer de modèle. Peu à peu, on transforme les intercommunalités en collectivités territoriales à part entière. Je conteste un tel modèle institutionnel, car il nous faut plutôt, je crois, inventer un nouveau modèle de coopération, ce qui est précisément le sens de l'amendement. Il est en effet bien légitime que des projets communs soient définis au sein de l'intercommunalité dès lors qu'ils intéressent tous ses membres, mais, sur un certain nombre de sujets, des décisions peuvent aussi être prises avec celles et ceux qui sont d'accord.
Cependant, des difficultés peuvent survenir lors d'une fusion entre intercommunalités. Ainsi, dans le Poitou, l'une d'elles gérait un EHPAD – établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes – dont le président de la nouvelle intercommunalité a décidé de céder la gestion, contre l'avis même de la commune concernée.
Nous souhaitons donc que les communes conservent leur pouvoir, et pour cela éviter qu'il soit transféré en permanence vers l'échelon supérieur. Cela, bien entendu, doit se concevoir avec toutes les conséquences financières qui en résultent : sur ce point, je rejoins ce qui vient d'être dit par Philippe Vigier.
« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe GDR.
L'amendement no 1188 n'est pas adopté.
L'article 5 B est adopté.
La commission a supprimé l'article 5 D.
Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 1463 rectifié , 1278 rectifié , 1378 rectifié , 1414 rectifié , 1597 rectifié , 787 , 863 et 763 , tendant à le rétablir et pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 1463 rectifié , 1278 rectifié , 1378 rectifié , 1414 rectifié et 1597 rectifié sont identiques, de même que les amendements nos 787 et 863 .
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement no 1463 rectifié .
Il tend à corriger une disposition importante de la loi NOTRe aux termes de laquelle les EPCI doivent exercer un nombre minimal de compétences optionnelles. Il se trouve en effet que l'eau et l'assainissement basculent peu à peu dans le champ des compétences obligatoires – mais nous en débattrons tout à l'heure. Or la stabilité ne peut signifier un degré supplémentaire d'intégration. Faute de modifier la loi, si deux compétences optionnelles migrent vers le champ des compétences obligatoires, on contraindra de facto l'EPCI, qu'il soit communauté de communes ou communauté d'agglomération – les métropoles et les communautés urbaines, elles, étant mangées à une autre sauce – , à assumer deux compétences nouvelles. Cela, pour le coup, serait contraire à la stabilité, nul n'ayant demandé cette intégration supplémentaire.
Je vous propose donc de neutraliser la chose en permettant aux communautés de communes et aux communautés d'agglomération de choisir une compétence optionnelle parmi une liste de cinq ou sept. C'est là une vraie mesure de simplification : une simplification non perceptible, mais nécessaire pour éviter, à l'avenir, les inconvénients que je viens d'indiquer.
La parole est à M. Stéphane Baudu, pour soutenir l'amendement no 1278 rectifié .
Je ne veux pas être redondant par rapport à ce qu'a bien expliqué M. le ministre. Il s'agit ici, dans le respect des principes de souplesse et de liberté qui prévalent dans le projet de loi, d'éviter que le transfert de l'optionnel vers l'obligatoire ne contraigne les intercommunalités à intégrer de nouvelles compétences optionnelles. Une seule compétence optionnelle serait désormais requise.
La parole est à M. Bruno Questel, rapporteur, pour soutenir l'amendement no 1378 rectifié .
Défendu : M. le ministre et M. Baudu ont très bien expliqué les enjeux de cette mesure.
La parole est à M. Sacha Houlié, pour soutenir l'amendement no 1414 rectifié .
Il est défendu. Ces amendements, je veux tout de même le préciser, ne peuvent être déconnectés de la discussion que nous aurons tout à l'heure sur l'article 5, relatif à la compétence eau et assainissement. La neutralisation des compétences optionnelles doit aussi être vue comme une compensation du transfert progressif de la compétence eau et assainissement vers le champ obligatoire : nos collègues devront l'avoir à l'esprit lorsque nous examinerons des amendements à ce sujet.
La parole est à Mme Anne Blanc, pour soutenir l'amendement no 1597 rectifié .
Nous avons connu la course au CIF et à la DGF bonifiée par la prise de compétences. Le présent amendement opère, en ce sens, une neutralisation au vu des compétences exercées, en vue de simplifier le fonctionnement de nos intercommunalités.
L'engagement dans la vie locale implique en premier lieu le respect de tous les élus, de la plus grande des métropoles au plus petit des villages. Je tiens, à travers cet amendement, à mettre en avant le sentiment d'abandon et de dépossession que ressentent légitimement de nombreux maires de petites communes.
La suppression des compétences optionnelles que nous proposons là vise à rééquilibrer le rapport entre les communes et les intercommunalités, alors que le périmètre de compétences de ces dernières ne cesse de s'accroître.
Je prendrai un exemple. Dans ma circonscription, la communauté d'agglomération de Béthune-Bruay Artois Lys Romane est l'une des plus vastes de France, avec cent communes. Si cette organisation satisfait certains élus locaux, elle contribue en réalité à créer un véritable sentiment d'injustice chez de nombreux élus, perdus dans cet ensemble où ils ne peuvent faire entendre leur voix, pourtant essentielle à l'équilibre de nos territoires.
Il est temps d'arrêter le transfert illimité de compétence aux intercommunalités. Revenons au principe de subsidiarité. L'immense majorité des élus locaux sont en première ligne pour faire face aux besoins de nos concitoyens mais n'ont plus les moyens d'agir. Ces élus sont volontaires et ne ménagent pas leurs efforts pour améliorer la qualité de vie de leurs administrés. L'amendement vise donc à replacer les maires au coeur du processus de décision dans leur commune.
Signé par l'ensemble des membres du groupe Les Républicains, il consiste à rétablir la suppression de la catégorie des compétences optionnelles proposée par le Sénat, pour deux raisons. D'une part, l'architecture des intercommunalités est d'une complexité telle qu'on finit par ne plus s'y retrouver. D'autre part, comme cela a été dit, si le nombre de compétences transférées aux intercommunalités a augmenté, c'est du fait de l'instauration de la DGF – dotation globale de fonctionnement – bonifiée.
Nous souscrivons à la logique de l'amendement no 1463 rectifié ; je note qu'après vous être écartés de la rédaction proposée par le Sénat, vous vous en approchez de nouveau. Une question subsiste toutefois : celle de la DGF bonifiée, puisque nous ne partons pas d'une feuille blanche. Si l'amendement du Gouvernement est adopté, une nouvelle ventilation des compétences deviendra possible. Les EPCI sont en droit de se demander quelles seraient ses conséquences sur le montant de la dotation globale de fonctionnement. Il est de notre devoir de clarifier ce point ; nous attendons vos indications, ce soir, dans l'hémicycle.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l'amendement no 763 .
Il vise à consacrer dans la loi un droit à la différenciation intraterritoriale dans l'exercice d'une compétence par un établissement public de coopération intercommunale, en permettant à celui-ci d'opter pour des modes de gestion distincts dans son périmètre communautaire. Cela permettra aux EPCI de s'adapter à la diversité des situations géographiques et techniques, et d'apprécier, en matière de convergence des prix pour les usagers d'un même territoire, quelles modalités et quelle temporalité sont pertinentes, voire de choisir des solutions différenciées, dans certaines conditions.
Quel est l'avis de la commission sur cette série d'amendements en discussion commune ?
L'avis de la commission est favorable sur les amendements nos 1463 rectifié , 1278 rectifié , 1378 rectifié , 1414 rectifié et 1597 rectifié ; en conséquence, il est défavorable sur les amendements nos 787 , 863 et 763 .
J'émets un avis favorable sur l'amendement no 1463 rectifié , celui du Gouvernement – ce qui est peu surprenant, en l'absence de schizophrénie – , ainsi que sur les amendements identiques nos 1278 rectifié , 1378 rectifié , 1414 rectifié et 1597 rectifié .
Je serai défavorable aux autres, à moins qu'ils ne soient retirés.
Monsieur Viala, la DGF bonifiée a été supprimée lors de la réforme de la dotation de l'intercommunalité adoptée l'an dernier. Désormais, le calcul de la dotation se fonde uniquement sur le CIF. Les conséquences en cascades sont lisibles : si le niveau d'intégration intercommunale diminue, le CIF diminue et la dotation de l'intercommunalité aussi.
Comme l'a indiqué le président Vigier, le tout est de rester clair. Or certaines contributions sénatoriales n'ont pas suffisamment dissocié les questions juridiques de compétences des questions financières, les premières ayant certes inévitablement un impact sur les secondes.
Comme l'a aussi souligné le président Vigier, si une compétence redescend au niveau de la commune, la dotation de l'intercommunalité diminue mais la DGF de la commune, bien évidemment, augmente. Tout dépend du point de vue où l'on se situe.
Je voudrais réagir à l'amendement no 1463 rectifié du Gouvernement. Comme M. Houlié l'a rapidement évoqué, je ne sais pas si l'on réfléchit dans le bon ordre. Je fais partie des élus qui considèrent que les communes devraient conserver les compétences eau et assainissement – nous aurons le débat lors de l'examen de l'article suivant. Or vous m'expliquez que, parce qu'à partir du 1er janvier 2020, ces compétences basculeront du côté des compétences obligatoires des intercommunalités, il faut limiter, à l'article 5 D, le nombre de compétences optionnelles des EPCI. On peut résumer le débat ainsi.
Il aurait fallu organiser le débat en sens inverse : d'abord l'article 5 puis l'amendement du Gouvernement. Nous aurions alors pu décider collectivement de différer ou d'annuler le transfert des compétences eau et assainissement aux intercommunalités ; dans ces conditions, le problème que vise à résoudre votre amendement ne se poserait pas.
Je regrette que le débat ait été scindé en deux. En nous faisant voter sur l'amendement no 1463 rectifié dès maintenant, vous signifiez sans le dire clairement que le débat sur l'article suivant est déjà clos : vous maintiendrez de toute manière la date du 1er janvier 2020 – nous savons qu'en la matière, les dérogations seront subordonnées à des conditions si restrictives qu'elles seront difficilement applicables. Il y a là un problème d'organisation du débat parlementaire ; il aurait fallu que vous preniez en compte ce problème dans votre amendement. Nous aurions pu avoir un débat global sur ce que devront être les compétences optionnelles et obligatoires des EPCI en 2020 ou en 2026.
… qui est de bon sens. En effet, tous les élus locaux – à moins que nous ne rencontrions pas tous les mêmes – souhaitent la stabilité institutionnelle.
J'ai bien compris que, quand vous proposez de limiter à une le nombre de compétences optionnelles des communautés de commune ou des communautés d'agglomération, il ne s'agit que d'un minimum. L'instauration des intercommunalités, depuis la loi ATR – relative à l'administration territoriale de la République – de 1992 et la loi Chevènement – relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale – de 1999, repose sur un constat : en mettant les moyens en commun et en instaurant des politiques publiques partagées sur les territoires, on bénéficie d'équipements et de services publics plus performants, au bénéfice des populations. Le sens de l'intercommunalité, c'est cela, plutôt que de chercher à majorer sa dotation en augmentant son coefficient d'intégration fiscale. L'intercommunalité repose sur des projets de territoire et le souci de rendre le meilleur service public possible.
En revanche, je ne comprends pas très bien l'organisation de la discussion commune : je ne vois pas de rapport entre la première série d'amendements identiques et le no 763 de Mme Battistel, par exemple, qui porte sur la question – par ailleurs tout à fait légitime – de la différenciation intraterritoriale de l'exercice de ses compétences par un EPCI.
Monsieur Aubert, je vais répondre à votre interpellation concernant l'ordre d'examen des articles. Ce texte a d'abord été examiné par le Sénat, où il a été décidé d'insérer les dispositions des articles 5 A, 5 B, 5 C et 5 D avant l'article 5.
Je fais du reste observer de nouveau que l'article 5 C a disparu parce que le Sénat s'est rendu compte de lui-même qu'inverser la course au CIF serait une erreur – toutes les intercommunalités qui maintenaient inchangée la répartition des compétences voyaient leur DGF stagner, alors que celles qui la faisaient évoluer, dans le sens de la centralisation ou de la décentralisation, voyaient leur CIF évoluer, plutôt à la hausse.
Soyons clairs : j'aurais moi aussi souhaité que nous abordions d'abord la question de l'attribution des compétences eau et assainissement, puis celle de la neutralisation des compétences. Il me fallait apporter cette précision afin que chacun vote en connaissance de cause.
Monsieur le ministre, pouvez-vous préciser les raisons de votre avis défavorable sur l'amendement no 763 ? Je considère, comme notre collègue Pascal Brindeau, qu'il n'a pas le même objet que les amendements précédents. Vous vous engagez sur la voie de la différenciation – vous l'avez répété maintes fois, sur des sujets divers et variés. Or, pour anticiper le sujet qui va venir, il serait pertinent d'adapter les tarifications à la diversité des modèles et des technologies des territoires comme des contraintes géographiques.
Les amendements identiques nos 1463 rectifié , 1278 rectifié , 1378 rectifié , 1414 rectifié et 1597 rectifié sont adoptés ; en conséquence, l'article 5 D est ainsi rétabli et les amendements nos 787 , 863 et 763 tombent.
J'avais demandé la parole bien avant la mise aux voix, madame la présidente, et vous ne me l'avez pas accordée.
C'est comme pour l'amendement repoussant l'exclusion de l'huile de palme des biocarburants !
Et M. le ministre n'a même pas eu le temps de me répondre ! Vous l'avez censuré, madame la présidente !
J'avais cru comprendre que vous faisiez signe pour vous inscrire sur l'article 5, monsieur de Courson.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
En matière d'eau et d'assainissement, pourquoi ne pas choisir la simplicité et faire confiance aux élus ? Mon intercommunalité s'est déclarée compétente en matière d'assainissement, mais elle n'a pas pris l'eau potable. Pourquoi ? Parce qu'elle dispose de ressources d'eau verticales, si bien que rendre cette compétence intercommunale ne présente aucun intérêt.
Dans d'autres parties de mon département, les intercommunalités gèrent l'eau potable : comme il n'y a pas de ressources verticales, il faut interconnecter les réseaux.
Pourquoi s'acharner à obliger les intercommunalités à prendre les compétences eau assainissement ?
Ayez un peu de bon sens ! Le jour où vous contraindrez à « intercommunaliser » la gestion de l'eau potable, je sens qu'il y aura une insurrection chez moi ! En effet, les prix de revient de l'eau ne sont pas du tout les mêmes d'une commune à l'autre. Or, à partir du moment où la gestion de l'eau passe à l'intercommunalité, celle-ci est condamnée – au moins à terme, si elle choisit une évolution en sifflet – d'instaurer un tarif unique. Toutes les communes où le prix de l'eau augmentera trouveront l'intercommunalité formidable, vous imaginez ; et les autres devraient être plus silencieuses, bien entendu. Ne cherchez pas à appliquer une règle générale !
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Chère amie, j'exerce des fonctions d'élu local depuis trente-deux ans, et je connais tout mon département : il ne faut pas appliquer des règles uniques car les départements sont très variés ; faisons confiance aux élus locaux, plus intelligents que la représentation nationale !
Applaudissements et exclamations de soutien sur les bancs des groupes LT, LR et GDR, sur plusieurs bancs des groupes SOC et UDI-Agir ainsi que parmi les députés non inscrits.
Jamais vous ne trouverez une règle adaptée à toutes les situations françaises.
Par ailleurs, certains syndicats d'eau potable se trouvent à cheval sur deux, parfois trois intercommunalités. Ils seront maintenus, car on ne peut pas les dissoudre.
Applaudissements sur les bancs des groupes LT et LR ainsi sur plusieurs bancs du groupe GDR.
L'article 5, dans sa rédaction actuelle, ne nous satisfait pas, puisqu'il ne permet pas aux communes de refuser le transfert des compétences eau et assainissement. Alors que le texte a pour objectif de rendre du pouvoir aux maires, il serait bon de revenir sur la rédaction de l'article. Il n'est pas normal que des communes soient obligées de transférer des compétences alors que leurs élus et leurs administrés ne sont pas d'accord, comme je l'ai expliqué dans la discussion générale.
Monsieur le ministre, vous avez souvent souligné la liberté dont doivent disposer les élus locaux et leur sens des responsabilités. Plusieurs amendements visant à supprimer l'obligation de transférer ces compétences vous permettront de faire correspondre vos paroles et vos actes.
Cette disposition, héritée de la loi NOTRe, affaiblit les communes, en contradiction avec l'objectif du texte sur lequel nous travaillons.
Souvenez-vous de Grand Bourgtheroulde, monsieur le ministre, lorsque la France invisible éclairait les ronds-points et qu'il y avait le feu au lac. Vous avez lancé le grand débat devant une salle « blindée » – mais l'arbitre jouait à domicile puisque vous étiez le grand manager de l'événement. Or, comme il y avait le feu au lac, le Président de la République a annoncé la réécriture de la loi NOTRe et a découvert son amour pour les maires, qui peuvent être utiles. Quand la République vacille, les maires peuvent en effet jouer un rôle de bouclier, d'où les déclarations d'amour à n'en plus finir du Président de la République, qui leur a notamment dit qu'ils pourraient reprendre la main dans un certain nombre de domaines, y compris sur le sujet important de l'eau et de l'assainissement. Des engagements ont été pris, au point que le président du Sénat est rouge de colère en constatant le non-respect de la parole donnée.
Sourires.
Vous oubliez Grand Bourgtheroulde. Il est vrai que les promesses n'engagent que ceux qui les croient ; en ce qui nous concerne, nous n'avons pas cru le discours de Grand Bourgtheroulde.
Vous procédez là à un toilettage au coton-tige de la loi NOTRe, dont vous ne remettez pas les fondamentaux en cause.
Les régions sont transformées en Länder, les « intercos » mastodontes sont des outils technocratiques qui nient les instances de démocratie vivante que sont les communes, et vous refusez aux maires la possibilité de reprendre la main dans un domaine qui n'est pas neutre, car l'eau n'est pas une marchandise. C'est une question très politique que la gestion de l'eau, la politique tarifaire de l'eau, la capacité d'en prendre soin en tant qu'élément essentiel à l'environnement. Même sur ce point, vous ne respectez pas…
Le règlement, madame la présidente, prévoit qu'il puisse être accordé du temps au débat sur des sujets importants !
Protestations sur les bancs du groupe LaREM.
Je vous invite à tenir parole, monsieur le ministre, sur un sujet aussi important. Tous les maires revendiquent la possibilité de reprendre la main quand ils le désirent.
Nous savons tous ici que la question de l'eau, pour des raisons démographiques, environnementales et climatiques, n'est pas un problème communal.
Exclamations sur les bancs des groupes LR et LT.
Nouvelles exclamations sur les bancs des groupes LR et LT.
Vous n'avez qu'à nationaliser la gestion de l'eau, pendant que vous y êtes !
En 2006, nos prédécesseurs avaient inscrit ici même, dans la loi sur l'eau et les milieux aquatiques, le principe suivant : « L'eau fait partie du patrimoine commun de la nation. »
Comment peut-on imaginer que les communes puissent gérer l'eau et l'assainissement…
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Certes, on entend des maires dire qu'ils conservent la compétence de la gestion de l'eau, mais c'est le petit cycle de l'eau qu'ils gèrent ! Or nous savons tous désormais que le petit cycle de l'eau est intimement lié au grand cycle de l'eau !
Pour ça, le bon échelon est la planète, pas la communauté de communes !
À chaque fois que l'on refuse de se pencher sur le petit cycle, nous avons des problèmes avec le grand cycle !
D'un autre côté, il se trouve des maires et des territoires qui, pour des raisons techniques ou géographiques, ont la possibilité d'adopter une approche plus pragmatique. Telle est l'équation que nous devions résoudre. Par le passé, il fallait transférer tout ou rien.
Cette équation était totalement insoluble. Sans doute certains collègues n'ont-ils pas relu l'article tel qu'il est désormais rédigé.
Nous y proposons le transfert obligatoire à l'intercommunalité dans les délais initialement prévus parce que la gestion ne peut se faire qu'à l'échelle intercommunale.
Exclamations sur divers bancs.
Lorsqu'une approche communale, ciselée, est nécessaire, l'intercommunalité pourra de nouveau déléguer la compétence aux communes.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Quelle légitimité l'intercommunalité possède-t-elle en matière de gestion de l'eau ?
Madame la présidente, vous avez interrompu M. Jumel après deux minutes et deux secondes de temps de parole tandis que vous avez laissé M. Perea poursuivre ses explications pendant deux minutes et vingt secondes.
Nous ne remettons pas en cause votre vice-présidence mais la façon dont vous l'exercez.
Nous avons tous entendu dire que ce projet de loi traiterait l'ensemble des irritants liés à différentes lois ayant concerné les collectivités locales depuis une dizaine d'années. Parmi ces irritants, la gestion de l'eau et de l'assainissement pose de réels problèmes dans les territoires. Force est de constater que ce projet de loi n'y apporte qu'une réponse très partielle. Vous maintenez toujours la possibilité d'un report de la compétence jusqu'à 2026 alors que les élus locaux demandent le retrait de cette année butoir.
Vous proposez d'instaurer un mécanisme complexe de délégation de la compétence par l'EPCI vers un syndicat ou une commune. Pourquoi ne pas permettre tout simplement aux syndicats à taille humaine de continuer de fonctionner ?
Je suis convaincu que, dans dix ans, la Cour des comptes rendra un rapport pour informer nos successeurs que la prise de compétence sur l'eau et l'assainissement par les EPCI n'aura produit aucune amélioration réelle du service rendu.
En revanche, le prix de l'eau aura augmenté pour nos concitoyens, c'est écrit d'avance.
Pour avoir siégé dans un syndicat d'eau, je peux vous assurer que l'on y trouve beaucoup d'intelligence humaine et une connaissance inestimable du terrain. Tout cela est voué à disparaître. Sur ce point, votre projet de loi n'est pas à la hauteur des enjeux et des attentes.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.
Permettez-moi de rebondir en toute sérénité sur les propos qui viennent d'être tenus et de défendre le caractère optionnel du transfert des compétences eau et assainissement, qui me semble être la voie raisonnable. Nous entendons dire chaque jour que le choix doit être donné aux élus car ils savent ce qui correspond le mieux à leur territoire et comment exercer au mieux leurs fonctions.
Pour montrer à M. Perea que son exposé ne pourra pas s'appliquer dans tous les cas, je prendrai l'exemple d'une intercommunalité qui se compose de quarante-quatre communes de montagne, dont certaines sont distantes d'une soixantaine de kilomètres les unes des autres, et de trois bassins-versants. Comme il y est impossible d'optimiser les réseaux d'eau potable, les coûts imputables aux communes vont s'additionner.
Mais si. Je peux terminer ?
S'y ajouteront les frais d'astreinte liés à la gestion intercommunale.
Vous proposez, monsieur le ministre, un transfert obligatoire assorti de la possibilité de redéléguer. Quel est l'intérêt, pour une intercommunalité comme celle que j'ai citée, dont toutes les communes – je dis bien toutes, les quarante-quatre – ont choisi de maintenir la gestion de l'eau à leur échelle ? En clair, l'intercommunalité prendra la compétence avant de la redéléguer à chacune des communes : elle devra donc faire quarante-quatre délégations de services afin que les communes puissent les assurer.
On aura donc créé une usine à gaz administrative pour, en fin de compte, continuer de faire ce qui se fait déjà aujourd'hui.
Votre projet ne tient pas la route, monsieur le ministre ! Vous le savez très bien !
L'absence de sérénité de nos débats sur la question de la gestion de l'eau illustre les dégâts incommensurables de la loi NOTRe en la matière.
Ceux qui affirment que le niveau communal est le bon pour gérer la ressource en eau ont raison.
Ceux qui disent que le niveau intercommunal est adapté à la gestion stratégique de la future ressource en eau ont raison eux aussi. Chaque territoire a ses spécificités.
De ce fait, toutes les orientations stratégiques concernant le petit cycle comme le grand cycle de l'eau doivent être spécifiques.
Une solution radicale consistait à rétablir le droit dans son état antérieur en supprimant la disposition de la loi NOTRe ; chacun rentre chez soi et tout le monde sera content. Chacun d'entre nous sait cependant que, dans toutes les circonscriptions, certains syndicats fonctionnent bien et certaines communes gèrent bien leur ressource en eau.
Mais vous savez qu'il y existe aussi des réseaux obsolètes avec des fuites d'eau énormes. Ce n'est pas acceptable au regard des effets que produira le dérèglement climatique sur la ressource en eau potable. Dans ces cas, l'intercommunalité peut fournir des moyens supplémentaires et une vision stratégique.
Il faut donc trouver l'équilibre entre la possibilité laissée aux communes et aux syndicats de communes qui le souhaitent de conserver la gestion de l'eau pour le compte d'une intercommunalité, et le fait de veiller – c'est l'objet de nos amendements – à ce que, le cas échéant, les charges et capacités de financement de la ressource en eau soient bien transférées aux intercommunalités, de sorte que les communes qui devront effectuer ce transfert puissent le faire en toute sincérité.
Je suis saisie de nombreux amendements, nos 432 , 132 , 133 , 399 , 440 , 794 , 864 , 1115 , 1128 , 639 , 705 , 1184 , 360 , 441 , 517 , 521 , 1185 et 599 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 132 , 133 , 399 , 440 , 794 , 864 , 1115 et 1128 sont identiques, de même que les amendements nos 639 , 705 et 1184 d'une part, et les amendements nos 360 , 441 , 517 et 521 d'autre part.
La parole est à M. Sébastien Leclerc, pour soutenir l'amendement no 432 .
Cet amendement de mon collègue Fabrice Brun vise à maintenir l'eau et l'assainissement parmi les compétences optionnelles des communautés de communes. En effet, la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République a transformé cette compétence jusqu'alors optionnelle en une compétence obligatoire, avec effet au 1er janvier 2020. Par conséquent, les compétences eau et assainissement seront exercées de plein droit par les intercommunalités. C'est pourquoi il convient, comme l'a fait le Sénat, de revenir sur cette réforme des compétences du bloc communal. Je n'entrerai pas davantage dans le détail afin de laisser le débat se dérouler.
La parole est à Mme Emmanuelle Anthoine, pour soutenir l'amendement no 132 .
Nous sommes tous attachés au principe constitutionnel de libre administration des collectivités locales. Il convient donc de rétablir la version de l'article adoptée par le Sénat, qui laisse précisément le choix aux communes de transférer ou non les compétences eau et assainissement. Comme on l'a vu, un report de six années n'est pas une solution satisfaisante. Il convient d'aller plus loin en mettant fin à une contrainte inadaptée. En effet, le périmètre de l'EPCI n'est pas toujours le meilleur pour les services d'eau et d'assainissement : cet éloignement peut se traduire par une perte de compétences, alors que les équipes municipales, nous le constatons tous dans la pratique, possèdent une connaissance fine des réseaux de leur commune.
Sur les amendements identiques nos 132 , 133 , 399 , 440 , 685 , 794 , 864 , 115 et 1128 , je suis saisie d'une demande de scrutin public par le groupe Les Républicains, le groupe Socialistes et apparentés et le groupe Gauche démocrate et républicaine.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La majorité ne croyait tout de même pas que nous allions voter sur ce sujet en catimini ? Il faut que lors de leur congrès, les maires sachent que la parole n'a pas été tenue !
Nous abordons l'un des points durs du texte. Ce sujet a déjà plusieurs fois occupé l'Assemblée nationale depuis deux ans, sans que jamais nous ne parvenions à trouver une solution satisfaisante – la preuve, nous ne cessons d'y revenir. Les débats de ce soir montrent qu'en fin de compte, si nous ne tranchons pas définitivement la question, nous devrons sans doute y revenir à nouveau.
J'apporterai un élément supplémentaire au débat : je crois qu'on se trompe en opposant les communes et les EPCI s'agissant du niveau le plus adapté à cette compétence. Comme je l'ai dit hier dans la discussion générale, voici la question cohérente : ne faut-il pas loger cette compétence dans les grands syndicats d'alimentation en eau potable ou dans les syndicats de bassin ? Il faut franchir le pas du transfert de compétences en direction de ces syndicats, dont le périmètre territorial correspond à un bassin d'alimentation en eau potable et qui pourront rapprocher, à très court terme, le petit cycle de l'eau du grand cycle de l'eau.
Si l'on poursuit une réelle ambition écologique et si l'on veut vraiment préserver la ressource en eau, c'est l'objectif qu'il faut avoir. Un transfert de la commune à l'EPCI alourdirait considérablement la gestion – surtout avec le mécanisme choisi – , sans rien apporter à la seule préoccupation qui vaille : une meilleure gestion et la préservation de la ressource.
La parole est à Mme Cécile Untermaier, pour soutenir l'amendement no 399 .
Il vise à supprimer le transfert obligatoire des compétences eau et assainissement aux communautés de communes et aux communautés d'agglomération. Le report systématique de la date du transfert montre la difficulté qu'il soulève et la nécessité de ne pas le rendre obligatoire. Nous estimons désormais qu'il faut privilégier le périmètre du bassin-versant, à travers un syndicat.
Identique à celui d'autres collègues, il vise à conserver un caractère facultatif au transfert. Le projet de loi vise à redonner du pouvoir et des prérogatives aux élus locaux ; il me semble qu'en la matière, il convient de leur faire confiance,
Mme Marie-Noëlle Battistel applaudit
après qu'ils ont tant pâti de certaines lois et de regroupements au sein d'EPCI parfois forcés, effectués à marche forcée, plutôt que volontaires.
Tout cela éloigne les citoyens des EPCI et délégitime le rôle des élus locaux.
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, FI et GDR ainsi que sur plusieurs bancs des groupes LR et LT.
La parole est à M. Raphaël Schellenberger, pour soutenir l'amendement no 864 .
Nous ne rappellerons jamais assez que nous discutons de ce sujet dans l'hémicycle pour la troisième fois en moins de trois ans.
Cela prouve que l'on n'a pas encore trouvé de solution satisfaisante, monsieur Balanant, car les mesures intermédiaires proposées jusqu'à maintenant par la majorité n'ont pas été concluantes.
L'adoption de cet amendement, identique à ceux défendus par la plupart des groupes de l'Assemblée, ne remettrait pas en cause l'article précédent. En effet, au stade actuel de la construction intercommunale, l'existence d'un bloc de compétences obligatoires et le développement d'un projet intercommunal adapté aux réalités du territoire sont tout à fait compatibles. Ce point fait consensus dans la classe politique depuis trois ans !
Le Sénat avait adopté l'amendement que nous vous proposons à l'unanimité, y compris la voix de Jacqueline Gourault, alors sénatrice, qui n'avait pas encore retourné sa veste sur ce sujet, comme elle l'a fait après son entrée au Gouvernement…
Enfin, élément qui ne me semble pas le moins important, l'argument principal de la majorité concernant la compétence eau tient à la nécessité, pour une ressource aussi précieuse, d'une coopération entre les communes, certaines d'entre elles en ayant naturellement, d'autres pas. Mais la maille intercommunale, à cet égard, n'est pas pertinente, parce que les intercommunalités qui n'exercent pas les compétences eau et assainissement sont précisément celles qui ne rencontrent pas de problème de partage de ressource, grâce à l'abondance de celle-ci. Le transfert obligatoire de ces compétences aux EPCI ne réglera pas un problème qui se pose à l'échelle nationale ! On perd les repères de la superposition des cartes en choisissant des échelons non pertinents.
Le choix le plus logique, c'est la liberté locale et le caractère optionnel du transfert de ces compétences.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.
Monsieur le ministre, vous avez choisi de faire figurer le mot « proximité » dans le titre du projet de loi, dont le fil rouge serait de redonner du pouvoir aux communes. L'attribution actuelle des compétences eau et assainissement est un héritage socialiste : une scorie de la loi NOTRe.
Je sais qu'au fond de vous, vous êtes également en désaccord avec ce texte. Nous avons essayé de trouver un entre-deux, mais celui-ci ne fonctionne pas. À mes yeux, le vote de ces amendements constitue un test. Vous avez dit, monsieur le ministre, vouloir revenir à plus de flexibilité et tourner la page de la loi NOTRe.
… vous pouvez, ce soir, choisir entre une petite loi et une grande loi, et pas seulement entre le petit cycle de l'eau et le grand cycle de l'eau !
Les compétences eau et assainissement sont différentes : dans ma circonscription, il y a des communes, comme Caromb et Sarrians, qui possèdent leur eau depuis le Moyen Âge ! Leur demander de céder leur eau, gratuite, à l'intercommunalité ne va pas de soi.
Exclamations sur quelques bancs du groupe LaREM.
Le dernier à avoir tenté de mettre la main sur l'eau de Caromb, ce fut le pape Clément V : il s'est retrouvé avec une guerre sur les bras, au cours de laquelle les habitants de Caromb ont détruit les canalisations !
Mêmes mouvements.
Révisez votre histoire, cher monsieur Morenas !
Bref, les gens sont attachés à la propriété de l'eau. On peut faire preuve de flexibilité et considérer que ceux qui gèrent bien leur eau à faible prix doivent la conserver. Pour ces raisons, chaque intercommunalité devrait pouvoir choisir la répartition qu'elle préfère, en fonction de l'organisation existant dans chaque commune. Je vous invite donc, monsieur le ministre, à envoyer un signal positif ce soir.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.
La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l'amendement no 1128 .
Peut-on dire qu'il y aurait un seul bassin hydrographique dans un EPCI ?
Comment dire que ce périmètre artificiel satisfait, comme cela a été avancé, les exigences de l'alimentation en eau ?
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, SOC, LR et LT.
Au contraire, nous sommes plusieurs à affirmer que les maires ont l'intelligence, la connaissance et la compétence suffisantes pour savoir si l'intercommunalité est nécessaire !
Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
… qui a pris conscience, à un certain moment, qu'il fallait entrer dans un syndicat intercommunal pour répondre aux besoins. Nous l'avons fait, parce que nous l'avons voulu ! Mais de quel droit allez-vous imposer aux maires de France un transfert de compétences et leur dire qu'ils ne sont pas intelligents ?
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, LR, SOC, FI et LT ainsi que sur quelques bancs des groupes LaREM et UDI-Agir.
Vous n'êtes pas capables d'en juger ! Vous méprisez les maires ! Vous les insultez, parce que vous n'avez pas la connaissance du terrain !
Applaudissements et exclamations d'encouragement sur de nombreux bancs.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, SOC et FI ainsi que sur quelques bancs des groupes LR et LT. – Protestations sur les bancs du groupe LaREM. – Invectives.
Le 29 avril dernier, alors qu'il préparait le projet de loi, le Premier ministre a réaffirmé la volonté du Président de la République et du Gouvernement de supprimer les irritants de la loi NOTRe, c'est-à-dire tout ce qui empêche ou restreint l'exercice des libertés des collectivités locales au quotidien. Pour de nombreux élus locaux, le transfert obligatoire des compétences eau et assainissement fait partie de ces irritants.
Aussi notre amendement vise-t-il à rétablir le caractère optionnel du transfert de ces compétences à l'échelon intercommunal. Il est primordial, comme l'ont indiqué de nombreux collègues, de laisser les maires décider du système le mieux adapté à leur territoire.
Il ne s'agit pas d'empêcher les transferts de compétences, mais de laisser la liberté de choisir aux élus, d'autant que les enjeux liés à ces deux compétences sont éminemment locaux.
En revenant sur le caractère obligatoire du transfert des compétences eau et assainissement, prévu par la loi NOTRe, nous proposons simplement de faire davantage confiance aux élus, en leur laissant la responsabilité de décider eux-mêmes de la solution la plus pertinente. Ils sauront, mieux que quiconque, tenir compte de l'intérêt général de leurs concitoyens et des besoins du service public local.
Applaudissements sur les bancs des groupes LT et UDI-Agir, sur plusieurs bancs des groupes LR et GDR ainsi que parmi les députés non inscrits.
Sur les amendements identiques nos 639 , 705 et 1184 , je suis saisie par le groupe Libertés et territoires et le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à Mme Bénédicte Taurine, pour soutenir l'amendement no 705 .
Je vais simplement répéter ce que j'ai dit tout à l'heure : cette disposition, héritée de la loi NOTRe, affaiblit la place et le rôle des communes, si bien qu'il s'avère nécessaire de rétablir la version de l'article 5 supprimant le transfert obligatoire des compétences eau et assainissement.
La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne, pour soutenir l'amendement no 1184 .
Gouvernement et majorité se sont arc-boutés sur l'idée selon laquelle le transfert obligatoire des compétences eau et assainissement serait une bonne chose pour nos concitoyens et pour l'ensemble des collectivités locales. Où ont-ils trouvé cela ?
Tout leur propos converge sur ce point : il ne faut pas remettre en cause la loi NOTRe ! Pourtant, celle-ci est totalement inadaptée et incohérente en matière de gestion de l'eau et d'assainissement, comme cela a été dit et redit ; en effet, elle vise à transférer de force des compétences aux intercommunalités, au détriment des modalités de gestion construites patiemment et intelligemment, sur le terrain, par les élus municipaux, au service des usagers. Il n'y a aucun intérêt à ôter arbitrairement des compétences exercées dans d'excellentes conditions par des communes en régie directe ou par des syndicats intercommunaux – quand l'intercommunalité était nécessaire, les élus y ont eu recours. Les syndicats intercommunaux sont fondés sur les caractéristiques propres de chaque bassin-versant et sur une coopération librement consentie !
Nous le redisons : la loi NOTRe est mauvaise, particulièrement sur ce point précis. Elle n'est pas un totem, à moins que des intérêts privés supérieurs ne soient cachés derrière les rédacteurs et les défenseurs de cette mauvaise loi !
Protestations sur les bancs du groupe LaREM.
C'est scandaleux de dire cela !
Il nous paraît donc indispensable d'adopter les amendements que nous défendons, afin d'accorder aux municipalités et aux élus, qui sont intelligents, la possibilité de conserver ces compétences à l'échelle communale, sans faire référence à un transfert obligatoire en 2026. Nous appelons une nouvelle fois le Gouvernement et la majorité à faire preuve d'un peu de courage politique, plutôt que de continuer à justifier l'injustifiable sous des prétextes, quand ce n'est pas sous la pression du lobby des industriels de l'eau, …
Protestations sur les bancs du groupe LaREM
… en quête de nouveaux marchés et de délégations au niveau intercommunal !
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR. – Exclamations sur divers bancs.
Mme la présidente coupe le micro de l'orateur.
Absolument pas.
La parole est à Mme Emmanuelle Anthoine, pour soutenir l'amendement no 360 .
Cet amendement, dont le premier signataire est notre collègue Bony, vise à supprimer la disposition incriminée afin de rétablir le caractère optionnel du transfert des compétences eau et assainissement à l'échelon intercommunal.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement no 441 .
Comment le transfert obligatoire des compétences eau et assainissement est-il arrivé ? Par un amendement, …
Qui dit absence d'étude d'impact dit évidemment absence de concertation avec les acteurs concernés. Il me semble utile de le rappeler.
Depuis lors, que se passe-t-il ? Tous les ans, nous abordons le sujet, car nous constatons, les uns et les autres, que des difficultés surviennent sur les territoires. Il importait de rappeler cette situation.
Or, monsieur le ministre, vous proposez en somme de retarder un peu la résolution de ces difficultés, qui pour l'heure ne sont aucunement résorbées. En repoussant à 2026 le transfert obligatoire de ces compétences, vous ne faites qu'en retarder la résolution.
La compétence eau ne peut être traitée de la même façon que les autres. En effet, vous savez très bien que la fourniture d'eau ne s'organise pas à l'échelle d'une commune ou d'un EPCI ; c'est la nature elle-même qui l'organise.
La situation actuelle provoque de nombreuses réticences parmi les élus. Le Gouvernement prévoit d'intervenir dans le cadre d'un futur projet de loi, baptisé « 3D » – décentralisation, différenciation, déconcentration – , visant à garantir que l'on agira avec discernement.
Je termine, madame la présidente.
Monsieur le ministre, faute d'écouter les acteurs locaux, les élus locaux, vous ne faites pas preuve de ce discernement qu'ils attendent ni de cette différenciation dont vous faites pourtant la promotion.
Il y a une vraie contradiction entre votre proposition et la différenciation dont vous annoncez la mise en oeuvre. Le présent amendement, dont notre collègue Stéphane Viry est le premier signataire, en tire les conséquences.
Applaudissements sur les bancs des groupes LR et LT.
La parole est à M. Charles de la Verpillière, pour soutenir l'amendement no 517 .
L'affaire du transfert obligatoire des compétences eau et assainissement aux intercommunalités fait partie des « irritants de la loi NOTRe », selon une expression du Premier ministre.
Je dirai plus modestement qu'elle s'apparente au sparadrap du capitaine Haddock.
Chacun comprend pourquoi : l'eau et l'assainissement sont gérés sur des bases géographiques, au premier rang desquelles les bassins-versants, auxquels le périmètre des intercommunalités, notamment celui des grandes intercommunalités issues de la loi NOTRe, ne correspond pas forcément – c'est même rare.
Depuis 2015, nous savons que le transfert obligatoire de ces compétences est une source – c'est le cas de le dire – de problèmes. On a essayé de le résoudre en différant l'entrée en vigueur de l'obligation.
Vous inventez maintenant une nouvelle formule, sans doute très intelligente : leur redélégation. Toutefois, quatre pages sont nécessaires, dans le projet de loi, pour faire comprendre ce dont il s'agit. C'est de l'acharnement thérapeutique !
Non !
Le plus simple est de rétablir le caractère optionnel de la prise des compétences eau et assainissement par les intercommunalités et de faire confiance aux élus locaux.
Applaudissements sur les bancs des groupes LR, FI, GDR et LT.
La parole est à M. Sébastien Leclerc, pour soutenir l'amendement no 521 .
Par cet amendement, Mme Josiane Corneloup souhaite supprimer les dispositions incriminées afin de rétablir le caractère optionnel du transfert des compétences eau et assainissement au niveau intercommunal.
De 2013 à 2015, les CDCI avaient déjà commencé à réorganiser les syndicats des eaux et la distribution d'eau en général, en veillant notamment à sa sécurisation. Les préfets ont alors demandé aux syndicats des eaux de travailler ensemble à des rapprochements, ce qui fut fait, en leur laissant, ainsi qu'aux communes, le choix de travailler ensemble ou non, sans brutalité.
La parole est à M. Hubert Wulfranc, pour soutenir l'amendement no 1185 .
Madame la présidente, je vous remercie de me permettre de prendre la parole à cette heure tardive.
La gestion de l'eau, sur laquelle je reviens, puisque vous me le permettez, est véritablement une question politique. Son transfert forcé à des intercommunalités XXL ouvre en effet la possibilité d'un marché.
Dès lors que l'eau est plus abondante et plus profonde, les requins s'y nichent !
Rires sur les bancs du groupe LaREM. – Conciliabules sur de nombreux bancs.
Voilà ce que voulait dire tout à l'heure mon collègue Jean-Paul Dufrègne ! Dès lors que les requins s'y nichent, le débat sur le caractère public ou privé de la gestion de l'eau auprès de nos concitoyens est ouvert !
Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
Madame la présidente, je vous prie de bien vouloir décompter de mon temps de parole ces quelques instants qui m'ont été dérobés.
Merci, madame la présidente.
Ce débat en ouvre un autre, cher à notre collègue Battistel : celui de la gestion publique de l'eau retenue par les barrages et des centrales hydrauliques qui s'y trouvent.
Nous traitons bien là de questions politiques. Il y va de la faculté des élus locaux à offrir un service de première nécessité à leurs administrés !
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI.
L'amendement no 599 de M. Stéphane Travert est défendu.
Quel est l'avis de la commission sur tous ces amendements ?
Mes chers collègues, vous me permettrez de formuler une réponse globale à l'ensemble de ces amendements.
Tous ont suscité un intérêt certain de l'Assemblée. Certains, lorsqu'ils ont été défendus, ont donné lieu à des propos dont je n'ose imaginer qu'ils reflètent une réflexion authentique et assurée de leurs auteurs. Je pense notamment à ceux tenus par M. Dufrègne, qui a suggéré que nous serions, majorité et Gouvernement, sous la pression de lobbies et de considérations financières nous privant de notre capacité de discernement.
Monsieur Dufrègne, j'ose espérer que de tels propos sont à mettre sur le compte de l'heure avancée.
Exclamations sur les bancs du groupe GDR.
Quand le niveau du débat baisse, il suffit de donner la parole à M. Questel !
Merci, monsieur Jumel. Il est vrai que vous êtes pour moi un maître en matière d'apaisement de débat.
Monsieur Chassaigne, vous avez évoqué tout à l'heure l'intelligence des maires. J'ai été maire pendant près de dix-sept ans.
Sans doute l'étais-je dans un département où les élus sont arriérés, car il existait un syndicat des eaux depuis quarante ans !
Vives exclamations sur les bancs des groupes LR et GDR.
S'il vous plaît, chers collègues. On ne s'entend plus parler. Une fois que les avis de la commission et du Gouvernement auront été formulés, je donnerai la parole à tous les groupes, et chacun pourra s'exprimer. Il importe d'entendre ce que le rapporteur a à dire, de grâce !
Merci, madame la présidente.
Sauf erreur de ma part, les intercommunalités n'existaient pas il y a quarante ans,
« Mais si ! » sur plusieurs bancs du groupe LR
Exclamations sur les bancs du groupe LR
Chers collègues, laissez M. le rapporteur achever son propos. On ne s'entend pas parler, c'est pénible !
Oui, on va le laisser parler, puisqu'on est d'accord avec ce qu'il dit, là !
Sauf erreur de ma part, l'intercommunalité, dans sa forme actuelle, n'existait pas il y a quarante ans. Néanmoins, les maires étaient tout à fait enclins à additionner leurs intelligences personnelles pour travailler sur des territoires formant aujourd'hui les communautés de communes et d'agglomération.
Applaudissements et exclamations sur les bancs du groupe GDR.
Non, toutes, cher collègue. C'est pourquoi il reste assez peu de territoires qui ne s'y trouvent pas.
Il est très surprenant d'entendre dire ici que le maintien de la compétence eau à l'échelle communale garantirait la préservation de la ressource en eau et la protection de la planète, puisque c'est également de cela dont il s'agit.
Vous auriez dû prendre connaissance du dispositif dans son ensemble, tel qu'il a été adopté en commission : il affirme le principe de la compétence intercommunale en matière de gestion de l'eau tout en permettant aux communes qui le souhaitent, et délibèrent à cet effet, de s'entendre avec l'EPCI pour gérer la fourniture d'eau à l'échelle communale – là est l'intelligence première, monsieur Chassaigne – et mener leurs politiques publiques communales en la matière dans les meilleures conditions.
Conciliabules.
Ah oui, j'oubliais : il y a une pompe qui aspire et une pompe qui rejette !
Rires sur les bancs des groupes GDR et SOC.
Plutôt que d'aspiration, je préfère parler d'inspiration : le mécanisme adopté en commission satisfait à la fois aux exigences institutionnelles et environnementales.
Sur les questions relatives à la politique de gestion de l'eau, je me vois contraint d'émettre – non pas en raison de l'heure avancée, mais parce que les mesures prévues par le texte sont de bon sens – un avis défavorable sur chaque amendement.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Je tâcherai de répondre de la façon la plus précise et la plus respectueuse aux différentes interventions, en formant le voeu que nous ayons un échange complet, tant sur les aspects politiques de la question – certains orateurs ont rappelé qu'elle en a – que sur ses aspects techniques – car il est vrai que l'ingénierie de l'eau est très technique – et financiers – car il est aussi question de financements. Ne pas procéder ainsi reviendrait à considérer que la question est uniquement politique, au sens politicien du terme, et qu'elle doit nécessairement séparer celles et ceux qui auraient gagné de celles et ceux qui auraient perdu.
Nous aurions alors un mauvais débat, au détriment de nos 600 000 collègues élus locaux du pays. Mieux vaut donc que nous prenions le temps de dépouiller la question et de détailler l'article 5 dans chacune de ses dispositions.
Je tiens à dire d'emblée que je suis d'accord avec certains constats formulés sur divers bancs. Madame Louwagie, vous avez raison – je commencerai par les constats sur lesquels nos avis convergent – au sujet de la production d'eau potable.
Je rappelle au passage que, même si les compétences eau et assainissement ont été réunies, nous nous pencherons surtout sur la première. S'agissant de l'eau potable, la sécabilité de la compétence demeure possible pour les communautés de communes ; nous y reviendrons ultérieurement. Pour l'heure, restons-en aux grands principes, dès lors que vos amendements invitent, me semble-t-il, à des réflexions de ce niveau.
Il est évident que la production d'eau potable, d'une part, et sa distribution, d'autre part, outre qu'elles soulèvent des questions de solidarité, dépassent la carte des intercommunalités telle qu'elle a été imaginée par les CDCI. Historiquement, elle dépasse même celui de la carte des communes, dont les syndicats ont très vite épousé les contours.
Monsieur Gosselin, tout va bien se passer.
Sourires.
J'avance, en tâchant d'introduire de la méthode dans le débat, ce qui me semble utile. Ou bien je considère, je le répète, qu'il y a ceux qui ont raison et ceux qui ont tort, auquel cas je donne mon avis et je me rassieds !
Si l'on prend le temps de se pencher sur la question, on constate qu'il existe un problème de cartographie hydrique. Martial Saddier, qui a quitté l'hémicycle, connaît ces sujets sur le bout des doigts, en tant que président de comité de bassin. Nous avons participé ensemble aux assises de l'eau, lorsque j'étais secrétaire d'État chargé de l'écologie. Chacun ici sait très bien que le sujet est complexe, au point qu'il est parfois difficile de lire la carte des syndicats.
Cela m'amène au deuxième constat. Nous savons très bien que nous devrons résoudre des problèmes de pénurie d'eau potable tout à fait préoccupants. Cet état de fait nous amène à deux sous-catégories de problèmes, qui ne sont pas négligeables, du moins pour celles et ceux ici qui, comme M. le ministre Travert, sont passionnés par les questions agricoles : la question de l'irrigation, bien souvent inséparable de celle de la fourniture d'eau, dans certaines régions où il n'y a pas pléthore de réseaux ; l'important besoin d'interconnexion des réseaux pour assurer la solidarité.
En clair, certaines communes ont une source de production d'eau potable, avec un système qui fonctionne, bon an, mal an. Mais il se pourrait bien, surtout dans les zones de montagne, les zones littorales et les zones insulaires, c'est-à-dire dans les endroits particulièrement soumis au stress hydrique, que des communes possédant un outil de production d'eau se voient demain en situation de pénurie.
Pas toutes, monsieur le président Chassaigne.
Merci, madame la présidente. Je le dis à la représentation nationale : je prendrai le temps qu'il faudra pour répondre à toutes les questions, mais j'aimerais pouvoir le faire sereinement.
Nous rencontrons déjà des difficultés pour l'adduction d'eau potable. C'est un point sur lequel il ne faut pas mentir devant la représentation nationale. Nous avons tenu des assises de l'eau réunissant les représentants de chacun des groupes politiques de cette maison, de chacun des groupes politiques du Sénat, de toutes les associations d'élus, de tous les syndicats du monde agricole, de toutes les associations et ONG. Tout ce petit monde n'est certainement pas d'accord sur tout, mais tous s'accordent pour dire que la situation de l'adduction d'eau potable est préoccupante : je vous rappelle qu'1 litre sur 2 à 1 litre sur 4, selon les réseaux, se perd en fuite d'eau potable ; …
… telle est la situation actuelle, selon le diagnostic partagé par tous, et la situation risque de se dégrader demain.
Mais il ne s'agit pas, président Chassaigne, de stigmatiser les élus. Personne ne le fait ici, du moins je ne le crois pas. Mais l'investissement public a une histoire : pendant vingt-cinq ans, globalement, on a encouragé les collectivités territoriales, singulièrement les élus locaux, les maires, à investir dans les eaux grises et les eaux noires pour rattraper notre retard important en matière d'assainissement, qu'il soit collectif ou non collectif. Moyennant quoi – je peux moi aussi en parler en tant qu'élu local – , nous nous trouvons désormais face à un mur d'investissements à consentir pour l'eau potable, parce qu'au fond, ce sera le grand enjeu des vingt ou vingt-cinq ans à venir. Il s'imposera certes de manière différenciée selon les territoires, mais on sera quand même face à un problème assez homogène : le rendez-vous de demain, c'est l'investissement en eau potable, tant pour sa production que pour son adduction ; voilà ce qui est devant nous et ce qui va directement nous concerner. Je tenais à le dire, parce que l'argument qui consiste à dire que tout va bien et tout est correctement géré…
Je ne vous en ferai jamais, pas plus que vous ne m'en faites ! Puisque vous n'avez jamais dit cela, je prends acte, à ce moment du débat, que la situation n'est déjà pas complètement satisfaisante sur le plan écologique et même sur celui de la solidarité.
Quand on va dans certains départements, que voit-on ? J'étais il y a quelque temps au congrès des maires de l'Ardèche. La vraie séparation, dans la salle, n'était pas entre ceux qui sont pour les « intercos » et ceux qui sont contre, ou entre ceux qui sont pour la loi NOTRe et ceux qui sont contre…
Une fois de plus, je l'ai combattue, je ne le répéterai jamais assez. La séparation est surtout – et c'est beaucoup moins drôle, monsieur Jumel – entre celles et ceux qui ressentent des craintes pour leur ressource en eau, pour demain, et celles et ceux qui n'en ressentent pas. Telle est la véritable difficulté.
Troisième constat, je ne veux pas qu'on caricature la position du Gouvernement, et peut-être aussi celle de la majorité parlementaire, chemin faisant. À part M. de la Verpillière, qui, tout en ne croyant pas au dispositif que je propose, a eu la gentillesse de me donner acte, au moins, de ce que je proposais quelque chose, de même que M. Viala, et je les en remercie. Tous les autres orateurs sont passés assez vite sur le sujet, mais j'aimerais m'y arrêter un instant : faut-il, oui ou non, simplifier la loi NOTRe sur la question de l'eau et l'assainissement ?
La réponse est oui ! Donc, pas de procès d'intention, là non plus : il ne s'agit pas de maintenir le statu quo. Madame Louwagie, cette simplification se limite-t-elle à un report calendaire, comme cela a pu être imaginé dans le passé ? Dans l'article que le Gouvernement vous propose ce soir, adopté au terme des travaux de la commission des lois, la réponse est non.
Il nous faut donc avancer vers une simplification de la loi NOTRe.
Moi, je suis très direct avec vous, d'autant que je n'ai pas retourné ma veste, monsieur Schellenberger. Ce n'est d'ailleurs pas très élégant de dire cela à un membre du Gouvernement, et je ne me permets jamais ce genre de formule à l'égard des députés – faisons attention à nos propos. Je considère qu'il nous faut trouver des solutions de simplification qui aillent dans le bon sens et qui soient pragmatiques.
Je crois à la délégation, telle qu'on vous la propose ce soir, pour une simple et bonne raison. Peut-être reparlerez-vous, en commission mixte paritaire avec les sénateurs, des questions liées aux compétences optionnelles, dont vous débattiez il y a un instant. En tout cas, au moment où nous parlons, la question de la compétence optionnelle ou obligatoire est déjà un débat un peu ringard, ou dépassé. Pourquoi ? Parce qu'au fond, c'est encore une version ancienne de la loi NOTRe, qui, en plus, a fait grandir les intercommunalités. Voilà comment on se retrouve face à des EPCI très grands, et dans lesquels c'est tout ou rien. Je vous parle de l'état actuel du droit : soit l'intercommunalité assume la compétence, et la situation est homogène sur l'ensemble de son territoire ; soit elle ne l'assume pas, et la situation varie au cas par cas.
La difficulté, c'est que cela ne permet justement pas une différenciation communautaire. Or il faut allier la contrainte écologique et la nécessaire simplification. Sur ce point, je donne raison à l'ensemble des parlementaires qui, quels que soient leurs bancs, ont appelé de leurs voeux, par ces amendements, une mesure de simplification importante de la loi NOTRe sur la question de l'eau et de l'assainissement. Oui, on doit trouver une mesure de simplification.
Que permettrait la délégation ? On part du principe que l'intercommunalité devient propriétaire, en quelque sorte, des compétences eau et assainissement, notamment pour des raisons de clarification des CIF – j'y reviendrai tout à l'heure, parce que, dans tous vos amendements, vous n'avez jamais parlé d'argent, d'où une foule d'idées, parmi vos propositions, qui auraient pour conséquence de faire redescendre les CIF. La proposition que je défends, au contraire, a aussi pour but, précisément, de protéger la dotation d'intercommunalité des EPCI. Personne ne le dit, mais je pense que cela est nécessaire. Donc, en clair, on fixe les compétences eau et assainissement au niveau de l'intercommunalité, on fixe le CIF en même temps, après quoi l'intercommunalité, avec une majorité classique – on ne change rien à ce sujet, il n'y a pas de raison de complexifier les choses – décide de redéléguer – je vais définir les termes – tout ou partie de ces compétences.
Moquez-vous ! Vous ne respectez pas les élus de montagne en disant cela, messieurs ! Ces idées nous ont été données par des congrès des maires de certains départements de montagne.
Je ne me permets pas de vous dire cela, monsieur Chassaigne.
Eh bien vous avez tort, parce que je suis un élu local, que vous devriez écouter en tant que tel, après tout. Vous n'avez pas l'apanage de la vérité des élus locaux ! Vous n'êtes pas le seul à détenir la vérité en la matière !
Vifs applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.
Le Gouvernement respecte la représentation nationale dans sa diversité.
« Pas toujours ! » sur les bancs du groupe LR.
J'aimerais que vous respectiez les membres du Gouvernement, qui respectent les différents groupes politiques de cet hémicycle.
Je vais continuer mon explication, mais j'ai l'impression qu'elle vous dérange.
On peut sourire en silence, monsieur le président Chassaigne.
Reprenons le fil des choses, si nous pensons que ce débat est sérieux pour nos collègues élus locaux et nos concitoyens. Dans les intercommunalités de montagne, certains EPCI ont beaucoup grandi – cela n'a pas échappé à la loi NOTRe. Cela signifie qu'il existe des intercommunalités dans lesquelles une commune se trouve, par exemple, au col d'une montagne et possède une régie d'eau fonctionnant remarquablement bien depuis un siècle ; pour celle-ci, la prise de compétence obligatoire viendra abîmer la situation – j'y reviendrai dans un instant. Il peut aussi exister un groupe de communes dans la vallée, dotées d'un syndicat historique qui fonctionne bien et fait le job – pardonnez-moi l'expression – , mais qui se trouve menacé par la loi NOTRe, puisque la disparition des syndicats va de pair avec la prise de compétence obligatoire. Et puis, elle englobe enfin un autre groupe de communes, qui souhaitent – même si on a l'impression, à vous entendre, que ce n'est pas le cas, mais je peux vous assurer qu'il en existe, j'en ai des exemples très concrets – que les compétences eau et assainissement soient assumées au niveau intercommunal.
Eh oui : le principe d'une compétence optionnelle – il en irait de même si elle était facultative, d'ailleurs – , c'est, par définition, que certains peuvent la vouloir.
On ne peut pas avoir fait grandir les intercommunalités – je le dis à l'intention des députés qui ont voté pour la loi NOTRe – et repousser maintenant des instruments de différenciation infracommunautaire qui permettront justement aux communes de se différencier au sein de l'intercommunalité ! Cela signifie que l'intercommunalité en question, qui est compétente, peut redéléguer à la commune – je vous réponds, madame Untermaier – dont la régie fonctionne bien depuis un siècle, et, de manière différenciée, au syndicat gestionnaire pour trois communes, et qu'elle peut enfin garder la compétence au niveau intercommunal pour d'autres !
Je suis désolé, mais c'est vous qui êtes rigides. Si l'on adopte vos amendements, c'est tout ou rien : soit l'intercommunalité prend la compétence, soit toutes les communes se débrouillent.
Nous, nous proposons de suivre le cours des choses : l'intercommunalité prend la compétence puis peut la déléguer.
Pardonnez-moi, mais c'est une mesure de bon sens. Ne répétons pas les débats de 2015 ! Dès lors que les intercommunalités ont beaucoup grandi, il nous faut des outils de simplification infracommunautaire.
Monsieur de la Verpillière, la loi est certes bavarde dans ses explications, mais l'application est simple. Vous pourrez dire qu'elle ne vous convient pas, et je le respecterai, mais c'est un autre débat. En tout cas, vous ne pourrez pas dire que la simplification n'existe pas et que la liberté n'est pas là. Pourquoi ? On délègue ce que l'on veut, à qui l'on veut.
Non, c'est le conseil communautaire, c'est-à-dire, monsieur le président Abad, les élus municipaux. Pardon, mais vous êtes un fin connaisseur de ces questions : si les compétences eau et assainissement devenaient optionnelles, comme vous le proposez, ce serait aussi le conseil communautaire qui déciderait.
Si, c'est la même.
Merci, madame la présidente, de vos encouragements, mais j'essaie d'être le plus pédagogue possible avec vos collègues…
Monsieur Jumel, si ce n'est que la question des majorités qui vous chagrine, on peut même en discuter ; il ne faut pas que ce soit un point de blocage.
Ce n'est pas la gouvernance de la compétence qui fait une différence, puisque, pour la compétence optionnelle, le mécanisme est le même : si vous décidez de déléguer uniquement la production, vous ne déléguez que la production ; si vous décidez de déléguer la production et la distribution, vous déléguez la production et la distribution ; si vous décidez de déléguer la fixation du prix au syndicat, vous déléguez la fixation du prix au syndicat ; si vous décidez de déléguer un plan d'investissement sans la fixation du prix, parce que le conseil communautaire veut garder cette prérogative, il peut la garder.
En fait, vous avez déposé des amendements comme si le Gouvernement n'avait pas pris de mesures. Mais tous vos arguments sur la liberté et la simplification ne tiennent plus parce que le principe de la délégation, c'est précisément que le conseil communautaire peut faire ce qu'il veut ! Donc ne venez pas me dire que c'est trop rigide !
Monsieur le ministre, poursuivez votre argumentation. Cela fait quinze minutes de pédagogie, et je crois que tous les groupes ont envie de s'exprimer.
Quinze minutes pour deux ans et demi ; …
… bref, je crois que ce n'est pas complètement inutile.
Le conseil communautaire, monsieur Jumel, pourra décider de déléguer à une structure qui acceptera de recevoir délégation – par définition, on ne pourra pas forcer quiconque à recevoir délégation. C'est là encore un instrument de liberté, alors que dans vos différents amendements…
Par définition, les maires siègent au conseil communautaire, même pour récupérer la compétence optionnelle !
Et dans l'hypothèse où le maire veut la délégation et où l'intercommunalité ne veut pas l'accorder ?
Vous êtes pleins de contradictions : vous déposez des amendements pour rendre cette compétence optionnelle ; mais, pour repousser une compétence optionnelle, qui décide ? Vous voulez la rendre facultative, alors ? Ce n'est pas l'amendement que vous avez déposé. Tâchons de parler de ces questions de manière un peu sérieuse, sans quoi nous n'en sortirons pas !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM. – Protestations sur les bancs des groupes LR, SOC et GDR.
Je vous le dis comme je le pense : tous vos arguments relatifs à la simplification ou à la liberté ne tiennent plus. Maintenant, après avoir fait cette démonstration, je m'en tiendrai là.
La vraie question est : faisons-nous de la politique politicienne parce que vous tenez un totem et que vous souhaitez vous y accrocher jusqu'au bout, ou bien accepterez-vous une forme d'excuses du Gouvernement, que je peux vous présenter, peut-être, pour avoir pris trop de temps pour vous proposer cette mesure ce soir ? Je peux le reconnaître : peut-être que, si nous vous étions venus vers vous plus tôt avec cette proposition, les débats auraient été inutiles. En tout cas, nous allons mesurer ce soir notre pragmatisme collectif : …
… s'agit-il, oui ou non, d'un débat de politique politicienne où chacun se regarde et veut se tenir par la barbichette, où est-ce qu'au contraire nous optons pour cette innovation, beaucoup plus forte pour ce qui concerne ses effets sur la liberté et la différenciation territoriales que le retour à la compétence optionnelle ?
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM.
Exclamations.
Comme mon groupe n'a déposé qu'un seul amendement, j'aimerais m'exprimer, sans aucune visée politicienne.
Si nous avons voté pour la loi NOTRe, cela ne signifie pas qu'on a voté pour tous ses articles.
Je pense en particulier à l'amendement déposé de nuit, auquel nous sommes plusieurs à nous être opposés, y compris le rapporteur du texte, Olivier Dussopt ! Il est facile de retrouver les interventions des uns et des autres.
Exclamations sur les bancs des groupes UDI-Agir et LT.
Vous teniez là un texte fédérateur, susceptible de rétablir de la confiance avec les élus. Or vous êtes en train de le gâcher, me semble-t-il. Depuis votre arrivée au pouvoir, vous n'avez de cesse de critiquer la loi NOTRe et ses irritants.
Pourtant, l'irritant le plus important pour l'ensemble des élus, les maires ruraux ou les autres, est le transfert obligatoire des compétences eau et assainissement. En refusant de le laisser facultatif, vous allez gâcher une belle occasion de recréer de la confiance avec les élus.
Ce sont aussi bien des syndicats, des EPCI que des communes qui gèrent ces compétences. Parfois cela se passe mal, parfois cela se passe bien, et je ne suis pas sûre que cela se passe toujours mieux dans les EPCI que dans les communes, je le dis comme je le pense. Je prends deux exemples : dans ma circonscription, une commune de moins de cent habitants gère son eau en régie, et je peux vous assurer que les investissements ont été réalisés et que l'eau est bien gérée ; la commune de Volvic, que tout le monde connaît, gère aussi son eau en régie et elle le fait très bien.
Au nom de quoi allez-vous, demain, obliger ces deux communes, la petite et Volvic, à transférer la gestion à l'« interco » ? Qui vous dit que demain l'eau sera mieux gérée ?
Applaudissements sur quelques bancs des groupes SOC et GDR.
Parce que j'ai de la suite dans les idées, je veux citer les propos exacts tenus par Emmanuel Macron à Grand Bourgtheroulde : « moi, je suis prêt à rouvrir la loi NOTRe [… ]. On voit bien qu'il y a besoin d'une respiration sur des choses qui ont été mal faites [… ]. Je souhaite qu'il puisse y avoir un travail à l'initiative du ministre de la cohésion sociale et du ministre chargé des collectivités territoriales ».
C'est ce que nous faisons !
« Non ! » sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Monsieur le ministre, je vais vous dire quelque chose pour vous rendre service. Vous avez été désigné par le premier d'entre vous, d'une certaine manière, pour renouer le lien avec les maires, et, grâce à votre réseau, vous y êtes d'une certaine manière parvenu. Mais, en refusant de tenir parole sur la question de l'eau et de l'assainissement, vous gâchez votre loi, vous allez même parasiter le congrès des maires : je pronostique que vous aurez la gueule de bois demain matin car les maires auront pris conscience que le discours consistant à les cajoler et à leur dire que vous les aimez n'est que théorique !
C'est une question centrale, le président du Sénat et le président de l'AMF – l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité – le disent.
Et quoi ? L'AMF est une association plurielle, dans laquelle toutes les sensibilités politiques sont représentées. Vous n'aimez pas les maires, monsieur Questel.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Exclamations sur divers bancs.
Oui, les maires et leurs associations sont nos amis, nous l'assumons et nous le leur dirons demain !
M. Jean-Louis Bricout applaudit.
Vous perdez l'occasion de présenter un texte qui aurait pu être consensuel. Je n'étais pas très favorable, mais nous aurions pu nous laisser convaincre qu'il allait dans le bon sens. Ce que vous proposez dans cet article est rédhibitoire : vous allez vous mettre l'ensemble des groupes à dos.
Pourquoi ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe GDR.
Je m'exprime au nom du groupe La République en marche et je vais tâcher d'être concise.
La loi NOTRe prévoyait le transfert sec des compétences eau et assainissement, et les communes avaient cinq ans pour s'y préparer. Force est de constater que cela a été plutôt efficace puisque 70 % des communes ont transféré ces compétences optionnelles.
En 2018, nous avons adopté la loi, promulguée le 3 août, relative à la mise en oeuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes et aux communautés d'agglomération, destinée à assouplir le dispositif pour les 30 % de communes qui n'avaient pas encore effectué le transfert. Il s'agissait déjà d'assouplir le dispositif initial de 2015, selon le dispositif suivant : instaurer une minorité de blocage permettant aux communes de reporter le transfert obligatoire jusqu'en 2026 ; ne pas ouvrir cette faculté aux communes des communautés d'agglomération, afin de les inciter à continuer de transférer, puisque 90 % des communes avaient déjà opéré leur transfert. Ces taux montrent que la dynamique de transfert était bien effective.
Le Sénat a supprimé à brûle-pourpoint l'obligation de transfert, remettant en cause l'intérêt de l'intercommunalité dans cette matière.
Nous le savons, l'eau et l'assainissement soulèvent des questions techniques et financières.
Nous souhaitons assouplir de nouveau le dispositif qui avait été adopté en 2018. Le reprendre, ce n'est pas reconnaître que l'on s'est trompé mais continuer à l'améliorer sans renoncer au transfert.
Exclamations sur les bancs des groupes LR et GDR.
Le texte apporte donc de la souplesse en autorisant les communes à user de la minorité de blocage jusqu'au 1er janvier 2020, en rendant sécables les compétences et en instituant un mécanisme de délégation aux communes.
Les autres orateurs se sont exprimés longuement ; j'aimerais pouvoir terminer.
Vives protestations sur les bancs des groupes LR et GDR.
En matière d'eau et d'assainissement, plus le nombre d'habitants est important, plus les tarifs sont bas ; la rentabilité augmente à mesure que les regroupements s'opèrent.
Exclamations continues sur les bancs des groupes LR et GDR.
La solidarité en cas de sécheresse ou d'inondation est un enjeu crucial.
Mme la présidente coupe le micro de l'oratrice.
Monsieur le ministre, n'allez pas croire que nous n'avons pas regardé de près le mécanisme que vous proposez – nous y viendrons peut-être tout à l'heure.
En attendant, la solution la plus simple et la plus efficace serait de rétablir purement et simplement le caractère optionnel du transfert des compétences eau et assainissement.
Votre raisonnement comporte des éléments intéressants mais d'autres sont biaisés. Vous prétendez ainsi que votre mécanisme constitue une innovation en matière de différenciation territoriale.
D'abord, c'est faux d'un point de vue juridique car, au regard de la Constitution, la différenciation concerne les collectivités territoriales, ce que les EPCI ne sont pas pour le moment.
C'est la raison pour laquelle le mécanisme est constitutionnel !
Vous imaginez une différenciation là où elle existe déjà. En gros, vous introduisez de la complexité : actuellement, tout est possible, puisque la compétence peut être exercée par une intercommunalité, une commune ou un syndicat ; vous la transférez à l'intercommunalité et vous créez une différenciation pour revenir à la situation antérieure par le biais d'un mécanisme juridique nécessairement complexe !
Ensuite, vous caricaturez en mettant en avant un problème financier : c'est tout ou rien. Or l'exercice de la compétence ne pose pas de problème financier, pour deux raisons. Premièrement, en France, le principe est que l'eau paie l'eau, à l'exception des très petites communes, dans lesquelles le budget général peut financer la gestion de l'eau ; le financement est donc assuré. Deuxièmement, le CIF suscite un vrai faux débat car, pour les collectivités concernées, les redevances liées aux compétences eau et assainissement n'y sont pas encore intégrées ; le fait de ne pas modifier la règle sera donc sans incidence sur leur CIF.
Après avoir analysé et pesé tous les arguments, de manière objective et non politicienne, nous en sommes arrivés à la conclusion que le caractère optionnel du transfert des compétences eau et assainissement est la seule solution.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur plusieurs bancs des groupes SOC, FI et GDR.
Je pensais à celles et ceux qui, même à cette heure tardive, peuvent suivre nos débats. Nos concitoyens pourraient légitimement se demander pourquoi leurs représentants sont en désaccord sur un sujet aussi simple que la fourniture d'eau.
La loi NOTRe – que certains n'assumaient plus tout à l'heure, alors qu'ils devraient le faire puisqu'ils avaient voté pour – a imposé de délimiter un périmètre administratif absurde, au nom d'impératifs quantitatifs : des communes ont été obligées de se regrouper en fonction du nombre d'habitants, sans tenir compte de la géographie ni des bassins de vie, ni même des bassins hydrauliques.
C'est là que se trouve l'origine du problème. Depuis plusieurs années, les maires des communes concernées sont donc contraints de se débrouiller comme ils peuvent avec une loi absurde.
Il est difficile, peut-être même impossible, de légiférer pour autant de cas particuliers : nous représentons 577 circonscriptions, soit au moins autant, et même bien plus, de bassins hydrauliques, incompatibles entre eux.
Monsieur le ministre, vous essayez d'introduire de la souplesse dans le système. D'aucuns pensent que cette souplesse n'est pas suffisante, mais vous êtes persuadés qu'elle le sera. Elle peut l'être lorsque les élus parviennent à s'entendre, notamment pour activer la minorité de blocage et ainsi prendre les choses en main – telle est votre logique. Mais elle peut ne pas l'être dans d'autres cas.
En écoutant nos collègues, compte tenu de la diversité des territoires qu'ils représentent – même si je suis élu d'une circonscription où la gestion relève du SEDIF, le Syndicat des eaux d'Île-de-France, qui n'est pas confronté à ce genre de problème – , je vous aurais volontiers demandé une suspension de séance pour réunir le groupe que je préside. Vu l'heure, je ne le ferai évidemment pas, je vous rassure. J'en terminerai par là, madame la présidente. Nous ne pourrons sans doute pas en débattre avant la CMP, mais sans doute faudrait-il inscrire dans la loi l'obligation pour les élus locaux de fournir l'eau potable aux citoyens, charge à l'État de se substituer à eux s'ils ne parviennent pas à le faire. Le système serait à la carte : lorsque les élus locaux sont assez intelligents pour le faire, ils le font ; quand ils ne le sont pas, l'État garantit l'égalité des citoyens.
L'amendement no 432 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 114
Nombre de suffrages exprimés 106
Majorité absolue 54
Pour l'adoption 48
Contre 58
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 113
Nombre de suffrages exprimés 106
Majorité absolue 54
Pour l'adoption 47
Contre 59
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Suite de l'examen du projet de loi relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique.
La séance est levée.
La séance est levée, le mercredi 20 novembre, à zéro heure quarante-cinq.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Serge Ezdra