La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures.
Cet après-midi, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s'arrêtant à l'amendement no 6702 après l'article 13.
Il nous reste plus de 4 000 amendements à examiner, soit presque deux fois le nombre d'amendements déposés cet après-midi sur une proposition de loi.
Sourires.
L'amendement no 6702 n'est pas défendu.
Les amendements nos 1044 de Mme Paula Forteza et 3395 de M. Guillaume Garot, qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune, sont défendus.
La parole est à Mme Cendra Motin, rapporteure de la commission spéciale pour le titre II, pour donner l'avis de la commission.
Les mesures de baisse de TVA ont leur place dans un projet de loi de finances (PLF), pas ici, d'autant moins que cet article 13 permet déjà de soutenir le secteur de la réparation. C'est donc un avis défavorable.
La parole est à Mme la ministre de la transition écologique, pour donner l'avis du Gouvernement.
Même avis : ce genre de débat doit avoir lieu dans le cadre d'un PLF. En outre, cette mesure soulèverait de délicates questions de périmètre sur le plan juridique et opérationnel, engendrant une complexité préjudiciable in fine aux acteurs économiques. Il y a des mesures plus adaptées pour soutenir l'économie circulaire.
Défavorable au sous-amendement et sagesse sur l'amendement.
Le sous-amendement no 7296 n'est pas adopté.
L'amendement no 6134 n'est pas adopté.
L'amendement no 1047 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Chantal Jourdan, pour soutenir l'amendement no 3439 .
Cet amendement vise à renforcer la recherche sur le climat et ses interactions avec l'océan et les îles.
Défavorable : nous avons déjà, en commission, mis en cohérence la stratégie nationale de recherche (SNR) avec la stratégie nationale de la biodiversité (SNB), ce qui répond aux enjeux de votre amendement.
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable, pour donner l'avis du Gouvernement.
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
L'amendement no 3439 est retiré.
L'amendement no 3399 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 14 est adopté.
Nous pouvons nous féliciter de l'encadrement des activités industrielles et de la place réservée à la stratégie d'achats publics dans ce projet de loi, qui tend à la rendre plus vertueuse. C'est le sens de cet article 15, puisque nous y proposons non seulement la prise en compte de l'impact environnemental dans les conditions d'exécution des marchés publics, mais également des considérations relatives à l'économie, à l'innovation, au domaine social, à l'emploi et, par extension, à la lutte contre les discriminations, domaines que nous avons regroupés en commission dans la prise en compte des objectifs de développement durable dans les spécifications techniques des marchés publics.
Cependant, pour tenir compte de nos engagements, ceux du pacte pour l'inclusion et du projet de loi que nous avons adopté à l'unanimité, ici même, relatif au renforcement de l'inclusion dans l'emploi par l'activité économique et à l'expérimentation territoire zéro chômeur, mes collègues, Marie-Christine Verdier-Jouclas, Christine Cloarec et tous les députés signataires des amendements dont nous allons débattre maintenant, nous pensons qu'il faut aller beaucoup plus loin. Ce texte est l'occasion unique de concrétiser l'engagement effectif de tous de réaliser 140 000 parcours d'insertion supplémentaires et, ainsi, de faire baisser significativement le nombre de personnes durablement privées d'emploi. Cet objectif ne peut être atteint qu'avec le soutien massif de la commande publique, où les clauses sociales sont insuffisamment développées.
Aussi profitons de l'examen de cet article pour faire aujourd'hui de la commande publique un moteur de la transition écologique et sociale car, derrière les processus d'achat, ce sont probablement 140 000 Français qui retrouveront, avec notre soutien, le chemin de l'emploi durable.
Cet article présente l'intérêt d'imposer aux acheteurs publics la prise en compte des enjeux environnementaux lors de la passation de marchés de travaux, de services ou de fournitures. Il y en a qui sont écolo depuis très longtemps : c'est ce à quoi je me suis moi-même efforcé durant les vingt-quatre ans où j'ai été maire, et c'était très compliqué.
Ainsi quand nous avons voulu construire un bâtiment avec un nouveau matériau inventé par un maçon de la commune, le cematerre, il a fallu établir une nouvelle norme qui autorise la construction d'un bâtiment public avec ce matériau, puis il a fallu convaincre la DGCCRF – Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes – que ce matérieau est conforme à la réglementation européenne des marchés publics, car il s'agissait d'un grand bâtiment – or votre texte ne semble pas nous affranchir de cette réglementation.
Un autre exemple parlera à tous ceux qui sont maires, celui de la restauration collective. Pour pouvoir acheter aux producteurs installés sur le territoire de la commune des produits alimentaires pour les cantines scolaires, il a fallu prévoir trois sortes de lots : les lots de produits bio, les lots de produits issus des multinationales habituelles et des lots de proximité, ce qui a multiplié par trois le travail des services. Il a fallu en effet étudier trois fois plus de dossiers et goûter trois fois plus de produits. Nous nous sommes associés avec trois autres communes pour répartir la tâche entre nos différents services et pour convaincre Bercy que le code des marchés publics ne l'interdisait pas et que c'était possible au prix de cette charge de travail colossale.
On aurait pu s'attendre à ce que ce projet de loi facilite l'achat de produits de proximité ou de produits bio pour la restauraton scolaire. Or je dois bien avouer que nous n'y avons trouvé que des appels incantatoires à être plus écolo, à favoriser la proximité, à être plus efficace pour l'environnement, mais nous n'y avons pas trouvé – mais il en ira peut-être différemment à l'issue de cette séance – , la volonté politique de travailler avec des acteurs de proximité, de faire de l'écologie concrète. Vous ne cessez de répéter qu'il faut responsabiliser les maires, notamment sur la question de l'affichage publicitaire. Eh bien ! responsabilisons les maires en leur permettant d'acheter local et en leur donnant les outils pour le faire.
Nous espérons que cette discussion permettra à la proposition que vous nous faites et qui est bien trop timide d'évoluer dans ce sens.
Si je prends la parole sur cet article c'est parce que je pense qu'il s'y passe quelque chose, alors que nous avons pointé l'inutilité de nombreuses dispositions. Il faut certes dire pour être honnête que le code des marché publics n'a jamais cessé d'être réformé, mais l'article permet de réaliser un saut qualitatif, puisque ce qui est facultatif deviendra obligatoire, et que désormais, vous nous l'avez appris, madame la rapporteure, 100 %, et non plus 15 % des marchés publics, seront concernés.
Certes les problèmes évoqués par mon collègue Lecoq, et que je connais bien pour avoir moi-même présidé des collectivités adjudicataires de marchés publics ou de concessions, ne disparaîtront pas. Néanmoins, la taxonomie européenne, qui est en train d'évoluer – et la France y prend une part importante, Mme la ministre le rappellera – , va nous aider à clarifier ce dont nous parlons et permettre, je l'espère, de classifier, non seulement les produits, ce qui n'est pas négligeable, mais également les entreprises qui les produisent.
Nous vous demanderons des précisions sur les clauses environnementales, notamment en ce qui concerne le carbone, mais il n'y a pas que l'environnement : il y a également les critères sociaux, pour lesquels nous allons militer, sans trop insister, en raison du temps programmé, au travers d'une dizaine d'amendements. Nous demanderons des précisions sur le carbone notamment. Surtout, nous sommes assez fiers d'avoir étendu cette nouvelle conception de l'achat public aux concessions publiques : ce serait pour le coup un saut quantitatif, puisque nous passerons de plus de 80 milliards à près de 200 milliards d'euros et 8 % du PIB. Dans quelques années, près de 10 % du PIB seront conditionnés par des critères environnementaux, qui seront mieux définis grâce à l'Europe et grâce à la France.
Nous pourrons nous féliciter d'avoir contribué ensemble à faire avancer notre planète et l'économie par le biais des collectivités. Je voulais donc saluer ce moment. Nous sommes particulièrement fiers de défendre un amendement, que nous avons travaillé avec Mme la rapporteure, qui permettra d'apporter une réponse adaptée à la question des concessions. Sans vouloir relancer le débat de mardi soir, je regrette que les critères sociaux n'aient pas été inclus, parce que cela nous aurait permis d'aller un petit peu plus loin sur ce dossier.
Les amendements nos 2873 rectifié de Mme Anne-Laure Blin, 3682 de M. Christophe Jerretie, 3452 de M. Gérard Leseul, 6406 rectifié et 6417 de Mme Sandrine Le Feur, 4865 de Mme Claire Pitollat et 2378 de Mme Lise Magnier sont défendus.
Les amendements nos 2873 rectifié , 3682 , 3452 , 6406 rectifié , 6417 , 4865 et 2378 , repoussés par la commission et le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.
L'amendement no 3576 de Mme Sophie Beaudouin-Hubiere est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Je tiens à saluer la mission sur les achats responsables que Sophie Beaudoin-Hubière accomplit en ce moment et qui la retient loin de l'hémicycle – Mme la secrétaire d'État en dira certainement un mot, puisque c'est elle qui la lui a confiée.
Je répète notre volonté d'étendre l'obligation pour les adjudicateurs de marchés publics d'adopter un schéma de promotion des achats publics socialement et écologiquement responsables (SPASER), afin de formaliser leur démarche.
L'objectif – nous avons déjà fait évoluer le texte dans ce sens en commission spéciale – est de nous donner trois ans pour abaisser le seuil de 100 millions d'euros au-dessus duquel les acheteurs publics doivent se doter d'un SPASER, pour rendre publics les engagements pris par lesdits acheteurs et pour définir des indicateurs de suivi.
L'amendement de ma collègue est un amendement d'appel visant à abaisser le seuil de 100 à 50 millions d'euros de commande publique. Nous sommes parfaitement conscientes de la nature réglementaire d'une telle disposition. Mon avis est défavorable mais nous attendons tous beaucoup de la parole de Mme la secrétaire d'État sur le sujet.
Elle est attendue mais elle s'inscrira dans la droite ligne des propos de la rapporteure. Je salue, à mon tour, l'engagement de Sophie Beaudouin-Hubiere, ainsi que celui de la sénatrice Nadège Havet, qui travaillent actuellement à la mission sur les achats publics dont le Gouvernement les a chargées.
En complément de ce qu'a dit Mme Motin, je rappelle que l'État doit remettre dans un délai de trois ans après la promulgation de la loi un bilan des SPASER. Les ajouts de la commission spéciale me semblent particulièrement pertinents et permettront d'améliorer la gouvernance des SPASER – nous aurons l'occasion d'y revenir lors de l'examen des amendements suivants.
Le volume d'achats publics à partir duquel les acheteurs sont tenus d'élaborer un SPASER ne peut être déterminé sans une étude préalable pour évaluer les catégories d'acheteurs concernés, notamment les collectivités locales qui seraient désormais soumises à l'obligation. Il s'agit d'une précision d'ordre réglementaire.
Le Gouvernement est favorable à la démarche. L'appel lancé par l'amendement a été entendu. Nous attendons les recommandations de la mission de Mmes Beaudoin-Hubière et Havet. À cette heure, l'amendement est prématuré. C'est pourquoi je suggère son retrait ; à défaut, l'avis sera défavorable.
L'amendement no 3576 est retiré.
Cet amendement de Mme Duby-Muller vise à promouvoir la durabilité des produits et leur sobriété numérique dans la politique d'achats publics. Il est inspiré de la proposition de loi du sénateur Patrick Chaize visant à réduire l'empreinte environnementale du numérique, qui a été adoptée par le Sénat.
Il devrait faire consensus entre nos deux assemblées, puisqu'il incite à davantage de durabilité et de sobriété dans les achats publics. C'est bon pour les finances publiques et c'est bon pour le bilan carbone de la France.
Les amendements identiques nos 1136 de Mme Paula Forteza et 6710 de M Loïc Prud'homme sont défendus.
Quel est l'avis de la commission ?
J'émets un avis défavorable, non pas parce que je suis en désaccord avec vous sur l'importance de la sobriété numérique, mais parce que les SPASER doivent être adaptés à chaque collectivité, qui doit pouvoir en choisir le contenu. En outre, la durabilité des produits fait déjà partie des éléments à caractère écologique que doivent comporter les objectifs des SPASER.
Je vous propose de retirer l'amendement, car il n'appartient pas au législateur d'intervenir en la matière. Mme la secrétaire d'État nous éclairera certainement sur les moyens réglementaires à disposition.
Je sais que Mme Duby-Muller a travaillé sur le sujet. Il faut laisser aux collectivités locales la liberté – c'est l'équilibre que le projet de loi recherche – de tenir compte des enjeux qui leur semblent les plus importants dans le cadre des schémas de promotion des achats publics socialement et écologiquement responsables. La sobriété numérique et la durabilité des produits sont, bien entendu, des considérations environnementales à part entière. Elles peuvent être, et elles le sont largement, prises en compte dans les appels d'offres des collectivités locales, sans que nous ayons eu besoin de l'inscrire dans la loi. Il ne me semble ni nécessaire, ni même possible de dresser ici une liste exhaustive des enjeux environnementaux.
Je comprends l'intention, et je prendrai quelques minutes ultérieurement pour vous présenter la palette des outils à disposition des acheteurs publics – et Dieu sait s'il y en a – , mais une telle disposition n'est, à mon sens, pas du ressort de la loi.
Je vous invite donc à retirer les amendements ; à défaut, j'y serai défavorable.
Les amendements nos 5684 de M. Éric Poulliat, 3469 de M. Gérard Leseul et 710 de M. François-Michel Lambert sont défendus.
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir le sous-amendement no 7305 .
Je remercie le groupe Agir ensemble, en particulier Patricia Lemoine, pour la précision que son amendement permet d'apporter aux indicateurs relatifs aux SPASER. Je conditionne néanmoins mon avis favorable à la modification consistant à substituer au mot « achats » le mot « contrats », qui est plus précis et correspond à une norme juridique. Tel est l'objet du sous-amendement.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement et le sous-amendement ?
L'amendement de Mme Lemoine apporte une précision utile sur la proportion des achats responsables dans les SPASER qui devront être exprimés « en nombre d'achats ou en valeur », sous réserve de l'adoption du sous-amendement qui remplace la notion d'achats par celle de contrats, moins sujette à interprétation juridique. Donc, avis favorable à l'amendement ainsi sous-amendé.
Le sous-amendement no 7305 est adopté.
L'amendement no 3194 , sous-amendé, est adopté.
La parole est à Mme Florence Lasserre, pour soutenir l'amendement no 6192 .
Afin d'encourager les achats publics socialement et écologiquement responsables, l'obligation de publier, dans le cadre du SPASER, le pourcentage réel d'achats relevant de ces catégories a été adoptée en commission spéciale. Cet amendement, de précision, sur la périodicité de la publication des indicateurs permettra d'évaluer les cibles atteintes et la progression de l'achat responsable.
Il est, en effet, très utile, d'imposer un rythme de publication des indicateurs – il n'y a rien de pire qu'un indicateur qui ne bouge pas. La périodicité annuelle ne me paraît pas très contraignante et n'empêchera pas les collectivités qui le souhaitent de faire mieux. J'émets donc un avis favorable.
Il faut parfois avoir des désaccords.
Je vous prie de m'en excuser, monsieur le vice-président de la commission spéciale. Le désaccord ne porte pas sur le fond.
Je considère que ce n'est pas à la loi de choisir le rythme de publication. Certaines collectivités n'ont pas eu besoin de la loi pour rendre compte de leur action en faveur des achats publics responsables. Il est déjà prévu la publication d'un bilan des SPASER dans un délai de trois ans à compter de la promulgation de la loi. Je rappelle que ceux-ci concernent aujourd'hui 20 % des collectivités locales. L'objectif est d'encourager leur développement au plan territorial.
Je suis ouverte à un travail sur le sujet avant les prochaines lectures, mais le rythme annuel me semble trop contraignant – c'est un point de désaccord avec la rapporteure, ce qui est assez rare pour être souligné. Mon avis est donc défavorable.
L'amendement no 6192 est adopté.
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement no 5602 .
L'amendement no 5603 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'un est plus ambitieux que l'autre. Il propose d'intégrer dans les SPASER les enjeux de réduction de l'empreinte carbone du numérique public et d'encourager une meilleure prise en compte de l'éco-conception des produits numériques dans les marchés publics. Il retranscrit, à l'échelon des territoires, l'ambition de la mesure no 20 de la circulaire de du 25 février 2020 portant engagements de l'État pour des services publics écoresponsables.
Je suis défavorable à l'amendement no 6069 . S'agissant de l'amendement no 5947 , le Gouvernement partage votre souhait de renforcer la prise en compte de l'environnement par les SPASER et par les acheteurs soumis à l'obligation d'adopter de tels schémas ainsi que de leur donner un rôle plus important.
Le travail très sérieux mené en commission prévoit déjà des dispositions très précises sur les SPASER en imposant l'établissement d'un indicateur portant sur la proportion de marchés socialement et écologiquement responsables, la publication des SPASER sur le site internet des collectivités, ainsi que l'obligation pour l'État de remettre un bilan dans un délai de trois ans. Les améliorations importantes apportées par le travail des parlementaires en commission me semblent pertinentes et suffisantes. Mon avis sera donc défavorable également au second amendement.
Je n'étais pas intégré à la commission spéciale : si vous m'assurez, avec le plus grand sérieux du monde, qu'elle a fait un très beau travail, je retire cet amendement .
Je retire le premier et, avant de retirer le second, je voudrais vous inviter, madame la secrétaire d'Etat, puisque vous êtes membre du Gouvernement, …
Vous me l'apprenez…
Sourires.
… à sensibiliser le plus grand nombre aux enjeux de la pollution du numérique, qui est souvent ignorée – je ne redonnerai pas l'exemple qu'a adoré M. Renson ce matin. Il faut communiquer, surcommuniquer, éduquer et parler de cet enjeu pour que chacun ait conscience de ce que nous faisons toute la journée avec nos portables et nos mails, qui polluent plus que beaucoup d'autres choses.
Dans la commande publique, le prix a souvent, comme on le sait, beaucoup plus de poids que les critères environnementaux. Cet amendement a donc pour ambition de favoriser les pratiques durables en imposant aux acheteurs publics la publication d'un bilan, qui devrait les y inciter.
Monsieur Vialay, vous me donnez l'occasion de rappeler une chose très importante que nous avons faite lors du débat en commission, à laquelle vous avez d'ailleurs beaucoup participé : aujourd'hui, le critère pris en compte n'est plus le prix, mais le coût. C'est important, car l'intégration du critère environnemental permettra précisément aux acheteurs de se détacher de la dictature du prix pour passer à la liberté du coût, avec notamment des outils qui seront mis à leur disposition pour calculer, par exemple, le cycle de vie de leurs produits, ce qui devrait tout changer.
Quant à votre proposition sur les SPASER, je rappelle tout d'abord que 160 collectivités seulement entrent aujourd'hui dans le champ de ce dispositif et 34 seulement, soit 20 % d'entre elles, ont donné suite à leur obligation de créer ces schémas. Nous avons beaucoup de travail à faire dans ce domaine avec elles et il ne faudrait pas les décourager en leur imposant trop d'obligations. Nous avons déjà fait beaucoup avec les indicateurs, comme vient de le rappeler Mme la secrétaire d'État, et votre amendement va un peu loin. Je rappelle aussi que l'Observatoire économique de la commande publique (OECP) fait déjà un recensement de cette commande publique, ce qui permet également de répondre à vos attentes. Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, avis défavorable.
Pour les mêmes raisons, même avis défavorable.
L'observatoire que vous évoquez est une bonne chose, mais il a un caractère global, alors qu'une incitation particulière, qui permette de rendre compte devant ses concitoyens, est toujours plus efficace.
L'amendement no 1134 n'est pas adopté.
La parole est à M. François-Michel Lambert, pour soutenir l'amendement no 4828 .
Cet amendement de ma collègue Jennifer De Temmerman vise à assurer la cohérence des achats publics avec les dix-sept objectifs de développement durable (ODD) que comporte l'Agenda 2030.
Cet amendement est satisfait car, dans le cadre de la commande publique, les objectifs de développement durable figurent déjà parmi les critères d'attribution – nous les avons ajoutés, en commission, parmi les spécifications techniques et nous allons maintenant encore plus loin avec la proposition du Gouvernement de prise en compte des critères environnementaux. Je demande donc le retrait de l'amendement.
En effet, inscrire l'obligation du critère environnemental parmi les critères d'attribution et les critères d'exécution me semble être de nature à garantir que le développement durable et la transition écologique soient intégrés à l'achat public dans les cinq années. Je sais l'engagement du groupe Libertés et territoires en ce sens, ainsi que celui de Mme De Temmerman et le vôtre, et cette mesure me semble fondamentale. Je demande donc le retrait de l'amendement ; à défaut, avis défavorable.
Nous sommes en période de coconstruction et je suis très satisfait de votre réponse, dont je vous remercie. Je suis certain que Jennifer De Temmerman y trouvera les éléments jusitifiant que je retire cet amendement.
L'amendement no 4828 est retiré.
L'amendement no 3443 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 2613 de Mme Carole Grandjean, 4159 de Mme Laurianne Rossi, 4312 de Mme Jennifer De Temmerman, 4912 de M. Yves Hemedinger et 7276 de Mme Sandrine Le Feur, pouvant faire l'objet d'une discussion commune. Les amendements nos 2613 , 4159 , 4312 et 4912 sont identiques.
Ces amendements sont défendus.
Quel est l'avis de la commission sur l'ensemble de ces amendements ?
L'obligation faite aux marchés publics de prendre en compte les clauses environnementales dans leurs critères d'exécution couvre un champ très large. Ce que proposent ces amendements pourrait restreindre ce champ, ce qui serait dommage. D'autres outils, comme le sourçage, permettront d'aller plus loin et d'assurer des exécutions vertueuses sur le plan environnemental. Je propose donc le retrait de ces amendements. À défaut, l'avis serait défavorable.
L'amendement no 7276 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 6026 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement de mon collègue Richard Ramos, proposé par l'association Chimie du végétal, vise à remettre au centre des dispositions de cet article la notion de lutte contre le réchauffement climatique, objet principal de ce projet de loi, qui implique une réduction des émissions de gaz à effet de serre. La commande publique doit prendre en compte en priorité les considérations relatives à l'impact climatique des produits et services consommés par les administrations publiques, au-delà de leurs caractéristiques environnementales, plus difficiles à appréhender de manière visible par l'acheteur public.
Cet amendement met ainsi en cohérence la rédaction du texte avec ses attendus et avec les dispositions prévues à l'article 1er, aux termes desquelles un affichage environnemental fera ressortir de façon facilement compréhensible l'impact, en matière d'émissions de gaz à effet de serre, des biens et services sur l'ensemble de leur cycle de vie. Ces informations pourront orienter utilement les choix des acheteurs publics.
L'amendement identique no 7002 de Mme Sophie Mette est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Défavorable à ces deux amendements car, en fait, ces ajouts précisant la nature des considérations environnementales à prendre en compte restreindraient le champ des possibles pour les acheteurs. Il faut donc parvenir aussi à leur faire confiance et à les laisser libres. En effet, les marchés sont très divers et le fait d'avoir un lien systématique avec l'objet de son marché reste la règle première : nous risquerions d'atténuer ce lien et de créer une fragilité juridique, alors que les acheteurs sont très attachés à la solidité des marchés conclus, car il est très grave, notamment pour une collectivité, de devoir casser un marché public. Je demande donc le retrait de ces amendements. À défaut, avis défavorable.
Je comprends tout à fait le sens de ces amendements. Cependant, si nous partageons ces préoccupations et ces objectifs, il n'y a pas lieu de tout inscrire dans la loi.
Je vais prendre le temps de revenir sur ces questions, et j'ai même apporté les documents avec moi, pour que vous puissiez les avoir entre les mains. Au moment où je vous parle, ce qui accompagne les acheteurs publics dans la rédaction des marchés publics, pour que ces marchés soient juridiquement valables et pour éviter de devoir casser des appels d'offres publics – situation difficile que vient d'évoquer Mme la rapporteure – , n'est pas intégralement écrit dans la loi : ce sont des outils réglementaires. Il en existe au moins deux, sur lesquels nous reviendrons, et un troisième arrive, puisque je travaille en ce moment sur le label « acheteurs responsables » au sein de Bercy.
Nous sommes donc d'accord sur l'objectif, mais quelle meilleure garantie de la prise en considération du critère environnemental dans l'analyse du cycle de vie que l'obligation, d'ici à 2025 – et non pas dans dix ans comme le suggérait la Convention citoyenne sur le climat – d'intégrer ce critère parmi les critères d'attribution et d'exécution, ce qui correspond, si vous me permettez ce parallèle, au cycle de vie des appels d'offres publics ?
Si donc, sur le fond, je comprends la démarche, je ne crois pas que ce soit dans la loi qu'il faille énumérer l'ensemble des considérations environnementales qui doivent être prises en compte dans les marchés d'exécution. En fonction des types de marché et en tenant compte de la liberté des acheteurs publics des collectivités locales, à laquelle je suis viscéralement attachée et sur laquelle nous reviendrons, l'impact carbone peut être prépondérant, ce qui justifie alors une référence à l'empreinte carbone, mais il faut entendre que, parfois, les enjeux porteront davantage, par exemple, sur la préservation de la biodiversité ou le maintien des ressources.
Cette liberté des acheteurs publics doit être conciliée avec l'équilibre du texte que je défends et, si je comprends le fond, il me semble indispensable de rappeler – ce que je n'ai pas fait lors de la présentation du texte – que, comme l'a souligné Dominique Potier, que je remercie de l'avoir fait, cet article 15 impose, dans les cinq ans, l'intégration d'un critère environnemental dans 100 % des marchés publics, dans les critéres d'attribution comme dans les critères d'exécution. C'est, selon moi, la garantie la plus solide et il est important que les collectivités locales gardent la liberté d'orienter certains éléments en fonction de leurs considérations environnementales.
Je tiens, en outre, à souligner que de nombeuses collectivités locales n'ont pas attendu la loi pour intégrer ces critères environnementaux, comme nous l'évoquerons un peu plus tard. Il en va de même pour les critères sociaux. Cette liberté est précieuse, et c'est cet équilibre que nous voulons respecter. Pour cette raison, avis défavorable.
C'est déjà ça !
Sourires.
Je comprends bien que l'aspect environnemental englobe l'ensemble des conditions posées, mais ces amendements ont pour seul but de mettre l'accent sur l'une de ces conditions : l'impact climatique, pour la raison très simple – et qui n'empêche pas de développer les autres conditions – qu'on revient ainsi à l'origine de ce projet de loi, qui était de réduire nos émissions de gaz à effet de serre. Introduire les conditions qui ont un lien avec l'impact climatique et y mettre l'accent n'empêche pas de prendre en compte les autres. Je conçois cependant que vous ne soyez pas d'accord et considériez que tout est dit avec le terme de critère environnemental.
J'essaie de me mettre dans la situation de la commission d'appels d'offres, de celui qui écrit le marché public et de celui qui va l'attribuer et le juger. Je souscris pleinement à la philosophie d'une prise en considération des critères climatiques et environnementaux, mais s'il est relativement facile de démontrer, face à un critère de prix, quelle entreprise est la moins chère, il sera moins facile de juger, à partir d'éléments déclaratifs, puis vérifier ensuite ce qu'il en est sur le terrain.
Si, par exemple, on attribue à un maçon la construction d'un mur, d'où vient le ciment ? Peut-être de la cimenterie du Havre – je vais parler de chez moi. Auparavant, le ciment arrivait à la cimenterie du Havre sur un tapis roulant depuis la carrière qui se situait tout à côté. Mais aujourd'hui, le ciment de la cimenterie du Havre – une cimenterie Lafarge, tout de même ! – arrive du Maroc, d'Espagne, du Portugal, où le clinker a été chauffé. Il débarque à Honfleur et est ensuite embarqué sur des camions qui franchissent le pont de Normandie pour arriver à la cimenterie, où il est broyé.
On pourrait croire qu'acheter son ciment à la cimenterie du Havre est écologiquement vertueux, mais quand on gratte le vernis, on découvre qu'il s'agit en réalité d'une absurdité écologique ! Vous pouvez aller vérifier. Nous sommes juste à côté, donc nous le savons, mais quelqu'un qui vit à 90 ou 100 kilomètres ne connaît pas forcément cette histoire, et achètera son ciment en se disant qu'il est produit localement et que ce n'est donc pas mauvais pour l'écologie et le climat.
Vous dites qu'il faut faire attention à ce que les marchés ne soient pas cassés par des recours sur les critères environnementaux. Mais, en l'occurrence, dans le cas que je viens de vous exposer, l'entreprise concurrente, qui connaît le sujet, dénoncera la tricherie : comment gérerez-vous alors la situation ? La philosophie est bonne, mais les élus – les maires notamment – qui vont attribuer les marchés ont besoin d'outils pour être en mesure de l'appliquer, car pour l'instant, il n'y en a pas suffisamment. Voilà ce dont nous avons besoin que vous décidiez par voie réglementaire.
Vous posez parfaitement le problème et les termes du débat, monsieur Lecoq : nous sommes tout à fait en phase sur ce sujet.
Sourires.
Vous avez bien résumé toute la difficulté de ce que nous essayons d'accomplir. Néanmoins, je peux vous apporter certaines réponses.
Tout d'abord, cela fait près de quinze ans que l'État travaille sur ce sujet avec les acheteurs, notamment à travers les plans nationaux d'action sur les achats publics durables (PNAAPD). Un nouveau plan devrait d'ailleurs voir prochainement le jour, beaucoup plus robuste que les précédents. Il est en consultation depuis cette semaine et je vous invite vivement à le lire : le volet formation, notamment, a été renforcé.
En outre, le plan est destiné non pas uniquement aux acheteurs, mais également aux élus et aux entreprises. En effet, en décidant d'intégrer des critères environnementaux aux marchés publics, ce n'est pas seulement l'État ou les collectivités que nous faisons évoluer, mais tous ceux qui répondent aux marchés publics. C'est d'ailleurs pour cette raison que nous avons besoin de cinq ans pour publier le décret d'application de cet article – j'en profite pour le dire car je sais que de nombreux amendements tendent à réduire ce délai.
Encore une fois, vous avez très bien posé le problème : il va falloir du temps et des outils pour accompagner les collectivités qui passent des marchés publics. Des outils sont en cours de construction, beaucoup existent déjà, qui seront déployés plus largement, à la fois grâce à des actions de formation et aux réseaux d'achats durables, que je tiens à saluer pour le fantastique travail qu'ils effectuent sur le terrain. Ils démontrent à ceux qui n'y croient pas que c'est possible, et assurent une formation entre pairs particulièrement efficace. Nous allons donc développer ces réseaux, et créer des outils, même s'il en existe déjà beaucoup portant sur les critères aussi bien environnementaux que sociaux – nous aurons l'occasion d'y revenir.
Nous allons continuer d'accompagner les acheteurs publics, à travers le décret qui sera publié au plus tard dans cinq ans, et aux fameux SPASER, que nous avons déjà évoqués et qui permettront aux collectivités qui ont un gros volume d'achat d'aller plus vite dans la passation des marchés. Enfin, les concessions, dont nous parlerons plus tard, sont également un levier important, à la fois pour les collectivités et pour les entreprises qui les accompagnent.
Il s'agit d'un amendement de notre collègue Vincent Descoeurs et, si vous le permettez, madame la secrétaire d'État, je le défendrai même si vous l'avez rejeté d'emblée avec votre argumentation précédente. Si vous rejetez d'avance tous les amendements de l'opposition, même ceux qui ne font pas l'objet d'une discussion commune, …
Ce n'est pas très élégant !
L'amendement no 170 propose de compléter la première phrase de l'alinéa 10 par les mots : « et en particulier à l'empreinte carbone ». Il serait important que les commissions d'appels d'offres des collectivités puissent prendre en considération les émissions de gaz à effet de serre dans leurs décisions d'attribution des marchés publics.
Je vais d'abord prendre le temps de vous dire, monsieur Meyer, le plaisir que nous avons à vous avoir en séance : ce serait dommage de partir en week-end si tôt !
Présences réciproques ! Je suis là avec plaisir, et je tenais à vous dire mon plaisir à ce que vous soyez là aussi, car j'ai senti que vous présagiez que nous ne retiendrions aucun des amendements de l'opposition. Je ne voudrais pas casser le suspense, mais restez avec nous jusqu'à minuit : ce que vous craignez n'est absolument pas certain, et j'espère avoir le plaisir de vous le prouver à l'occasion d'amendements qui seront discutés un peu plus tard.
Nous abordons les amendements sans aucun sectarisme et avec beaucoup de respect pour les travaux de l'ensemble des groupes. Même si, par cohérence avec ce que j'ai dit précédemment, j'émettrai un avis défavorable sur cet amendement, d'autres arrivent et nous aurons le plaisir de retenir les belles propositions que vous avez faites.
L'amendement no 170 n'est pas adopté.
Cet amendement du groupe Les Républicains tend à spécifier que, dans le cas d'un marché public de fournitures, les considérations environnementales liées aux conditions d'exécution et d'appréciation des offres se fondent en particulier sur les émissions de gaz à effet de serre produites par le transport des biens.
Une telle disposition serait de nature à réduire les émissions liées au transport, d'une part, et à contribuer à la relocalisation de productions sur le territoire national, d'autre part, entraînant ainsi des effets bénéfiques sur l'environnement.
Depuis le début de l'examen du texte, nous défendons une position commune s'agissant de la liberté des acheteurs. Pour vous répondre plus précisément, je rappelle que l'article 36 de la loi relative à la transition énergétique et à la croissance verte dispose déjà que, « lorsque les marchés publics impliquent pour leur réalisation que des opérations de transport de marchandises soient exécutées, la préférence, à égalité de prix ou à équivalence d'offres, peut se faire au profit des offres qui favorisent l'utilisation [… ] de tout mode de transport non polluant ».
Rendre obligatoire un critère d'exécution environnemental nous offre donc un levier très important en matière de transport. Je pense que ce sera l'un des choix privilégiés des acheteurs. Nous l'inscrirons d'ailleurs dans les cahiers des charges qui accompagnent les acheteurs, pour leur permettre de s'assurer que la rédaction de leurs contrats est juridiquement solide. Avis défavorable.
Ce débat est très intéressant : il nous a d'ailleurs longuement occupés en commission. Je m'étais alors engagée à démontrer que les émissions de gaz à effet de serre imputables aux transports – sujet important – seraient bien prises en considération.
Comme je l'ai déjà souligné, il ne me semble ni possible, ni même souhaitable, d'énumérer l'intégralité des considérations relatives à l'environnement devant être obligatoirement prises en compte dans les conditions d'exécution, au risque de dresser une liste non exhaustive.
Toutefois le transport est un sujet particulier, puisqu'il est évidemment au coeur de la problématique des émissions de gaz à effet de serre – cela va de soi, excusez-moi de proférer une évidence. Ainsi que je l'avais annoncé en commission, le cahier des clauses administratives générales (CCAG) des marchés publics de fournitures courantes et services a été publié hier. Cette nouvelle version précise bien, à l'alinéa 20-3, que le transport fait partie des critères importants à prendre en considération, et conseille aux acheteurs publics de l'intégrer dans la rédaction de leurs marchés publics.
Cette spécificité a donc bien été créée et renforcée dans le nouveau cahier des clauses administratives générales, qui mobilise, inspire, accompagne les acheteurs publics dans la rédaction comme l'exécution des marchés publics. Sa prise en considération au plan réglementaire – puisque de telles mesures relèvent bien du domaine réglementaire – est assurée par l'obligation inscrite à l'article 15 et les précisions que j'apporterai tout au long de nos débats sur cet article.
Sur le fond, je partage votre avis mais, sur la forme, ces mesures relèvent du domaine réglementaire. C'est pourquoi j'émettrai un avis défavorable sur ces amendements.
Je n'ai pas lu le cahier des clauses administratives générales, mais je vous fais confiance, madame la secrétaire d'État, et je retire donc l'amendement.
Sur les amendements identiques nos 4927 rectifié , 5498 rectifié et 5591 rectifié , je suis saisi par le groupe Socialistes et apparentés d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
L'amendement no 503 de Mme Élisabeth Toutut-Picard est défendu.
L'amendement no 503 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 4927 rectifié , 5498 rectifié et 5591 rectifié .
Les amendements identiques nos 4927 rectifié de M. Benoit Simian et 5498 rectifié de M. Stéphane Viry sont défendus.
La parole est à M. Didier Baichère, pour soutenir l'amendement no 5591 rectifié .
Puisqu'il est indiqué dans l'exposé des motifs du projet de loi que la justice sociale est au coeur de la philosophie du texte, l'amendement vise à placer les questions sociales et relatives à l'emploi au même niveau que celles relatives à l'environnement s'agissant des conditions d'exécution d'un marché.
Je vais prendre un peu de temps, car ma réponse concerne l'ensemble des amendements qui visent à aller plus loin encore dans le dispositif et, comme l'a proposé M. Potier, de rendre les clauses sociales obligatoires au même titre que les clauses environnementales – je sais que M. Baichère et Mme Verdier-Jouclas sont très attachés, eux aussi, à cette idée.
Vous avez évoqué le pacte d'ambition pour l'insertion par l'activité économique (PAIAE). J'ai regardé dans le détail les mesures qu'il propose : elles sont très importantes et traduisent un engagement fort du Président de la République. La mesure no 20, en particulier, vise justement à « accélérer le déploiement des clauses sociales dans la commande publique et les achats privés ». Or le vecteur juridique identifié pour son application n'est pas la loi, mais bien des outils d'ordre réglementaire, comme le développement des clauses sociales dans les CCAG – Mme la secrétaire d'État vient de l'évoquer – ou encore le recours aux labels.
C'est le cas, par exemple, du fameux label RFAR, le label « relations fournisseurs et achats responsables » qui, dans la commande publique, a un poids beaucoup plus important que certains labels du privé. En effet, tout étant très codifié en matière de commande publique, il est difficile d'obtenir un label valide pour les achats. Je pense que Mme la secrétaire d'État pourra nous en parler, puisqu'elle mène avec les acheteurs un véritable travail de fond, visant à les sensibiliser aux labels et à permettre que beaucoup plus d'entreprises soient labellisées. M. Pelouzet, médiateur des entreprises, lui a d'ailleurs remis cette semaine un rapport portant sur le déploiement du label RFAR.
Le fameux plan national d'action pour les achats publics durable, que j'ai déjà évoqué, procure des formations, des outils d'accompagnement, du réseau, le tout destiné à favoriser les clauses non seulement environnementales, mais aussi sociales, puisque l'objectif d'au moins 30 % de marchés comprenant au moins une clause sociale y sera désormais inclus. Je vous accorde que nous en sommes aujourd'hui à 10 %, c'est-à-dire en-dessous de notre précédent objectif : mais, jusqu'ici, nous ne nous étions pas donné les moyens de notre ambition. Aujourd'hui, le nouveau PNAAPD, par son détail et son ampleur, nous prouve que les moyens sont là. La secrétaire d'État et le Gouvernement tout entier sont très impliqués dans cette question : ils feront bouger les choses d'ici à 2022.
Le sourçage constitue un autre outil de la plus grande importance : la plateforme inclusion. beta. gouv. fr offre ainsi la possibilité d'identifier toutes les entreprises d'insertion par l'emploi existant autour de soi, avant même d'en avoir besoin. Nous disposons donc à présent de multiples instruments. Je pourrais également citer les PEC, les parcours emploi compétences : la ministre du travail et la secrétaire d'État sont très engagées en la matière. Vous l'avez dit à juste titre : la puissance publique quelle qu'elle soit – État, collectivités, entreprises publiques – doit continuer d'oeuvrer à l'inclusion des gens qui se trouvent éloignés de l'emploi. C'est aussi notre rôle !
Je vais à présent vous expliquer pourquoi il ne convient pas d'intégrer au texte les dispositions que vous proposez, ou plus exactement pourquoi il est impossible de les y intégrer. Malheureusement, nous n'avons pas trouvé de rédaction assez solide pour cela ; nous avons pourtant tous – vous aussi – cherché à créer une vraie porte d'entrée. La loi du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l'action publique (ASAP), dont Guillaume Kasbarian a été rapporteur, ouvre déjà très largement aux adjudicateurs la possibilité de réserver des marchés ou des parties de marché à des entreprises appartenant au secteur de l'inclusion par l'emploi : c'est très important. M. Thiébaut avait également promu ces dispositions, dont nous pouvons nous féliciter.
Nous sommes toutefois soumis à des règles européennes – vous avez raison sur ce point, monsieur Lecoq – qui valent dans les deux sens : les entreprises des autres pays de l'Union doivent pouvoir répondre librement à nos appels d'offres, mais nos entreprises peuvent en faire autant dans ces pays, et elles le font. Tout cela plaide en faveur de l'utilisation d'outils réglementaires, dont la solidité permet à nos acheteurs d'agir en toute sécurité, essentielle pour eux comme pour les élus, encore une fois, car il s'agit d'argent public. En matière de sécurité juridique de la commande publique, notre objectif consiste avant tout à pouvoir rassurer les Français concernant l'utilisation des fonds publics : il y a eu trop de scandales, ces dernières années, pour que nous puissions nous dispenser de cette solidité et risquer de voir nos concitoyens perdre confiance en leurs élus.
La volonté politique est bien présente : très bientôt, la volonté d'accompagner sera plus encore que présente, elle sera concrète pour les acheteurs, les élus, les entreprises. Cependant, je le répète, nous ne pouvons intégrer ces amendements dans le texte. Bien que je comprenne parfaitement leur objectif, je demande donc leur retrait ; à défaut, avis défavorable.
Le sujet est important : si vous m'y autorisez, je prendrai également le temps d'une explication générale, quitte à me répéter. Nous sommes d'accord sur le fond, non sur la forme. Pour le dire très clairement, il n'a pas été question une seule seconde de négliger le pilier social du développement durable. Ce projet de loi ne doit pas être l'arbre qui cache la forêt de l'action gouvernementale en la matière. L'inclusion de publics éloignés de l'emploi mobilise les structures de l'insertion par l'activité économique (IAE), les entreprises adaptées, les établissements ou services d'aide par le travail (ESAT), les chantiers d'insertion ; elle constitue une priorité du Gouvernement, à laquelle nous sommes plusieurs ministres ou secrétaires d'État à travailler de concert. Il est manifeste que les marchés publics représentent un levier considérable pour transformer cette priorité en réalité.
Nous avons les outils nécessaires à cela. Vous connaissez le principal, monsieur Baichère : c'est le PNAAPD, dont la version 2021-2025, achevée il y a quelques jours, sera consultable en ligne dès la semaine prochaine. Il comprend un volet social important. Je me permets de vous le citer en avant-première : l'un de ses objectifs – l'objectif 3 – est d'« accélérer la prise en compte des considérations sociales et environnementales » afin que, « d'ici à 2025, 30 % des marchés notifiés au cours de l'année comprennent au moins une considération sociale ».
Il y est également écrit noir sur blanc que « la dimension sociale est entendue au sens large, comme par exemple l'insertion des publics éloignés de l'emploi, la lutte contre les discriminations, notamment la promotion de l'égalité femmes-hommes, le respect des exigences éthiques ou équitables, la performance dans la protection ou la formation des salariés ». En outre, « sur la base de la définition du besoin, qui doit obligatoirement prendre en compte des objectifs de développement durable, l'intégration de considérations sociales dans un marché public peut être réalisée par les différents outils juridiques que sont l'objet du marché, une clause du marché, un marché réservé ou un critère d'attribution ».
Une fois établi cet objectif de 30 % de marchés incluant une dimension sociale, il existe deux outils réglementaires importants visant à guider les acheteurs dans la rédaction du cahier des charges de leur appel d'offres, le PNAAPD étant le premier. Vous me connaissez : je n'ai pas changé. L'objectif de 25 % du précédent PNAAPD n'ayant pas été atteint, nous avons voulu savoir pourquoi et comment faire en sorte que les suivants le soient. Nous nous sommes penchés sur ce point pendant des jours, voire des semaines, ce qui me donne l'occasion de remercier les services concernés, notamment la direction des affaires juridiques de Bercy, avec laquelle nous avons travaillé d'arrache-pied, et le commissariat général au développement durable.
De tout cela, il ressort des informations que je souhaite partager avec vous – avec M. Viry, M. Baichère et l'ensemble des parlementaires mobilisés à ce sujet. Tout d'abord, dans le cadre du PNAAPD 2021-2025, cet objectif sera piloté beaucoup plus étroitement qu'il ne l'était jusqu'ici. Nous allons créer une instance de suivi, un suivi statistique des marchés clausés, des indicateurs qualitatifs. Cendra Motin l'a indiqué : nous développerons les actions de sensibilisation des plateformes d'acheteurs publics, notamment du réseau des administrations publiques intégrant le développement durable (RAPIDD).
Par ailleurs, le second outil permettant aux acheteurs publics de façonner leurs appels d'offres, à savoir le cahier des clauses administratives générales qui vient d'être publié, incite à la prise en considération systématique des clauses sociales lorsque celles-ci ont un lien avec l'objet du marché. Pour chaque type de marché – prestations intellectuelles, travaux, maîtrise d'oeuvre – , une clause sociale et une clause environnementale sont systématiquement proposées.
Certes, ces deux documents sont de nature réglementaire et non législative, mais nous ne les avons pas rédigés dans notre coin. Ils ont été coconstruits avec des parties prenantes, en l'occurrence plus de 200 personnalités représentant les acheteurs publics – État, collectivités territoriales, hôpitaux – , les entreprises et les fédérations professionnelles. Des experts juridiques et financiers ont été associés à l'élaboration du cahier des clauses administratives générales, auquel 99 % des collectivités ont recours pour bâtir leurs appels d'offres – j'ai vérifié l'information entre la commission et la séance. Cette proportion tombe à 70 % au ministère des armées, les marchés de défense et de sécurité étant spécifiques – nous avons déjà évoqué le sujet en commission.
Il a fallu batailler, précisément, pour que la clause sociale figure en toutes lettres dans ce cahier ; de même pour la faire inclure dans le PNAAPD, avec une gouvernance renforcée. Cendra Motin l'a évoqué, je le dirai clairement : cela n'aurait pas eu lieu sans l'action conjuguée de plusieurs membres du Gouvernement. Agnès Pannier-Runacher, Élisabeth Borne, Sophie Cluzel, Brigitte Klinkert ont également lutté dans ce but et pourraient aussi bien que moi se trouver ce soir devant vous.
En raison de l'importance de ce sujet, encore une fois, je tiens à prendre le temps qu'il faut pour le traiter. Avant-hier, le médiateur des entreprises, Pierre Pelouzet, m'a remis un autre rapport, que j'avais également demandé, en vue de moderniser le label RFAR – relations fournisseurs et achats responsables. L'un des piliers de ce label est l'évaluation concrète engagée par l'organisation afin d'intégrer des enjeux sociaux dans sa politique d'achat. La labellisation d'organisations publiques, en particulier des ministères, constitue pour les prochains mois un objectif très important, que je stabiliserai dans les semaines à venir en fonction de ce rapport.
Dans ce cadre, nous fixerons aux ministères des objectifs sociaux. Enfin, la mission parlementaire consacrée aux achats publics durables comportera un volet social de nature à garantir que les préoccupations fortes, légitimes, exprimées dans ces amendements, seront bien prises en considération. Cette mission a été confiée à la sénatrice Nadège Havet et à la députée Sophie Beaudouin-Hubière. Vous savez avec quelle ardeur elles y travaillent : ce soir même, elles sont en train de mener des consultations pour leur rapport.
Pour résumer, nous avons deux documents sur la table : un label, qui sera refondu, modernisé et renforcé, et une mission parlementaire, qui s'achèvera dans les prochaines semaines. Munis de ces outils, nous souhaitons tous progresser sur ces sujets : encore faut-il avancer dans la bonne direction. Même si je comprends que cela puisse en agacer certains, mes fonctions m'imposent de considérer la nature juridique de ce que nous nous apprêtons à écrire. On ne peut exposer les marchés, les acheteurs et les soumissionnaires à un risque juridique qui leur porterait préjudice : véritablement, c'est là ce qui motivera mon avis défavorable. Vous remarquerez que je n'ai pas commencé par vous parler de droit et en droit : reste que les bonnes intentions du législateur ne doivent pas être de celles dont l'enfer est pavé. En l'état, il m'est impossible de donner un avis favorable à ces amendements, qui n'apportent pas une garantie juridique suffisante.
Comme l'a rappelé Cendra Motin, le droit de la commande publique se doit de préserver plusieurs principes, dont certains sont protégés par le droit de l'Union européenne. Une première série d'amendements prévoit ainsi de rendre obligatoire la présence d'un critère social dans les marchés publics ou dans les concessions. Or, en vertu d'un principe fondamental du droit européen, les conditions d'exécution doivent nécessairement avoir un lien avec l'objet du marché : l'absence de ce lien est régulièrement censurée par le juge européen.
Cela peu donner l'impression, parfois agaçante, que le droit bloque l'initiative politique. Mais il n'en est rien, comme le démontre l'article 15 : nous avons besoin d'un droit rigoureux, ainsi que de conditions juridiques stables. Les clauses sociales ne peuvent pas être généralisées à tous les marchés, car cela risquerait de les fragiliser.
D'autres amendements proposent de privilégier les entreprises titulaires de l'agrément entreprise solidaire d'utilité sociale (ESUS) dans la commande publique. Je connais bien ces entreprises qui interviennent dans le champ de l'économie sociale et solidaire, le portefeuille dont j'ai l'honneur d'avoir la charge. Or il en va de même des ESUS : l'intégration de clauses les concernant ne peut pas se faire à tout prix ni dans n'importe quelles conditions. Il existe déjà, cela a été dit, des dispositifs de marchés réservés pour les structures d'insertion, dont l'importance a augmenté dans la loi ASAP. J'ajouterai que, dans le cadre des procédures concurrentielles, nous n'avons pas le droit de privilégier un type de structure au détriment d'un autre.
Je tiens néanmoins à vous rassurer : une très grande majorité des 1 800 entreprises ESUS qui existent aujourd'hui sont des PME. Elles disposeront donc déjà de fait du régime dérogatoire.
Je souhaite être très claire sur ce sujet, sur lequel nous avons beaucoup travaillé : le Gouvernement soutient sans réserve les clauses sociales dans les outils réglementaires et, sans réserve non plus, les structures de l'insertion par l'activité économique (IAE). Il le fait d'abord financièrement : faut-il rappeler les 320 millions d'euros octroyés dans le cadre du fonds d'inclusion du plan France relance ou les aides aux postes pour 35 000 jeunes supplémentaires en IAE ? Je sais, monsieur Baichère, que vous suivez ce sujet de près. En un mot, nous travaillons sur les clauses sociales, avec les bons outils et les bons leviers qui, en l'occurrence, ne sont pas toujours du ressort de la loi.
Je vous prie de pardonner la longueur de mon intervention. Nous suivons de près ce sujet et il me semblait que la moindre des choses, au regard des travaux que vous avez entamés, était de vous apporter une réponse que j'espère exhaustive.
Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, d'avoir pris le temps de développer vos arguments, de nous expliquer votre travail, de nous indiquer où vous en étiez aujourd'hui et de présenter ce que vous nous proposez. Je vous prie de m'excuser, chers collègues, mais je vais aussi prendre le temps nécessaire pour vous expliquer pourquoi nous maintiendrons ces amendements et les voterons.
Vous avez parlé, madame la secrétaire d'État, de volonté politique, en indiquant que ces clauses ne peuvent figurer dans la loi – nous l'entendons – , parce qu'il faut utiliser des outils réglementaires – nous l'entendons aussi. Mais les outils réglementaires existants sont des plans et des incitations, certes utiles, mais dotés d'un faible impact. Vous avez notamment évoqué le nouveau plan national d'action pour des achats publics durables, dont le démarrage est imminent et qui renforcera les incitations.
Mais rappelez-vous que le précédent plan national d'action prévoyait que 25 % des marchés publics contiendraient une disposition sociale et qu'il a fallu dix ans à l'État pour atteindre péniblement 10 %.
Mme la rapporteure a évoqué le pacte d'ambition pour l'IAE, qui a dix-huit mois. Nous avons de nouveau évoqué la clause sociale lors de l'examen de la proposition de loi relative au renforcement de l'inclusion dans l'emploi par l'activité économique et à l'expérimentation territoire zéro chômeur de longue durée. Finalement, le temps passe et il n'y a toujours pas de clause sociale dans la commande publique ! Il nous faut des leviers d'accélération, des mesures puissantes et rapides pour atteindre nos objectifs, car la feuille de route de l'IAE et des entreprises adaptées est sacrément ambitieuse. Vous l'avez rappelé, madame la secrétaire d'État : elle prévoit 140 000 emplois en plus d'ici à la fin de l'année 2022. Jamais une telle ambition n'avait été affichée, durant aucune législature. Mais au rythme où nous avançons aujourd'hui, si nous ne déployons pas plus d'incitations ni ne développons d'actions concrètes, il faudra trente-cinq ans pour réaliser la croissance prévue de 60 %. Nous devons être à la hauteur de nos ambitions.
Je serais peinée que l'article 15 ne mentionne que des clauses environnementales : cela signifierait que l'environnement est privilégié par rapport au social, sous prétexte que le premier peut figurer dans la loi mais non le second. Cela reviendrait à créer une hiérarchie entre les deux enjeux, alors qu'ils devraient se situer au même niveau. Voilà ce que nous affirmons simplement lorsque nous défendons nos amendements.
Je souhaite aussi vous répondre au sujet du cadre juridique : contrairement à ce que vous affirmez, nos propositions sont juridiquement bordées et s'inscrivent dans les marges de manoeuvre autorisées par le droit européen. La France a trop souvent l'habitude de surtransposer les textes européens : or, si elle s'en abstient, la proposition que nous faisons peut être abordée. Quant à la mise en danger que vous évoquez, je voudrais que vous m'expliquiez comment certains de nos collègues ici présents – qui pourraient témoigner, si nous disposions de plus de temps – ont pu, sans aucun problème, mettre en place des clauses sociales dans les marchés publics de leur commune. Il est vrai, il faut pour cela davantage que des incitations.
Ça suffit !
Il faut du concret et, à défaut d'outils réglementaires, il faut intégrer les clauses sociales dans la loi : c'est justement ce que nous voulons faire aujourd'hui.
Je vous remercie pour le temps que vous avez consacré à nous répondre. Nous ne mettons pas en doute, madame la secrétaire d'État, votre engagement très clair sur le sujet qui nous occupe. La présentation des actions que vous avez prévu de mettre en place démontre que des choses concrètes vont enfin se passer. Malheureusement, l'histoire est longue. Elle a commencé bien avant la rédaction de la proposition de loi relative à l'IAE, à l'occasion de laquelle des engagements fermes avaient été pris, qui n'ont pas été concrétisés. Certes, vous n'étiez alors pas au Gouvernement. Quoi qu'il en soit, les acteurs de l'insertion ont besoin aujourd'hui d'éléments tangibles. Ils ont besoin de mesurer, au travers d'une modification véritable de la loi, que notre engagement est ferme et solide.
Je retiens de vos propos, madame la rapporteure, que tout cela s'inscrit dans le cadre européen des marchés publics, c'est-à-dire dans celui des règles européennes. Sans doute est-ce là le point de blocage ! Sans doute est-ce la raison pour laquelle nous ne pouvons pas faire ce que nous voulons et répondre aux besoins qui s'expriment en matière sociale. Selon vous, il faut que les entreprises d'autres pays européens puissent gagner des marchés chez nous, et inversement. Or je ne sais pas s'il est bon, pour le climat, de transporter, dans des camions, du matériel et des personnes pour répondre à un marché quelque part en Europe ! Peut-être avez-vous mené des évaluations à ce sujet.
Ce que je sais pour ma part, c'est que ce qui était bon pour l'activité sociale, c'était le travail mené par l'association d'insertion de l'office HLM du Havre : elle avait recruté des jeunes dans les quartiers et leur confiait l'entretien des espaces verts et des cages d'escalier, ainsi que de petits travaux. Un jour, elle a dû devenir une entreprise pour pouvoir répondre à des appels d'offre. Pourtant, c'était un outil d'insertion tellement simple ! Mais la loi a changé et a durci les conditions, dans le but d'assurer une mise en concurrence libre et non faussée des différents acteurs. Il est dommage que cela se soit passé ainsi. Je ne suis pas certain, pour ma part, qu'en rejetant les amendements qui nous sont proposés nous faciliterons la vie des acteurs qui souhaitent oeuvrer à l'insertion sociale dans l'ensemble des marchés publics. Ces amendements méritent réellement d'être soutenus.
Vous dites que la clause sociale relève du niveau réglementaire. Mais la loi conduit régulièrement à modifier des articles de codes – heureusement ! Le Parlement a justement pour vocation première d'inciter à faire évoluer les choses. Édouard Philippe a introduit la limitation à 80 kilomètres par heure dans le code de la route !
Je vous l'accorde. Mais il existe de nombreux autres exemples de ce qu'il n'a pas fait de mieux !
Quoi qu'il en soit, les amendements proposés me semblent utiles. C'est la question qu'il faut nous poser : ces dispositions seront-elles utiles demain à l'insertion ? Je pense pour ma part qu'elles le seront car, compte tenu de la puissance des marchés publics à l'échelle européenne, il est bon que la loi s'en mêle pour expliquer à nos collègues des autres pays européens qu'en France, nous avons décidé d'intégrer une dimension relative à l'insertion. Il faudra la transposer dans la réglementation européenne.
Ce ne serait pas la première fois, en effet, que la France invente et qu'elle inspire l'Europe. Il ne manquera pas une voix à gauche pour voter ces amendements, mais ce n'est pas pour ennuyer le Gouvernement que nous les voterons. Ils rejoignent en effet un combat que nous menons depuis le début de l'examen du texte : pour nous, la transition sera sociale et écologique. Nous avons même débattu une heure et demie, mardi soir, pour déterminer si les clauses relatives au travail des enfants et à l'esclavage moderne doivent faire l'objet d'études et d'expérimentations comme le suggéraient certains opérateurs, tels l'organisation non gouvernementale Max Havelaar : nous n'avons pas eu cette audace. Chers collègues qui défendez aujourd'hui l'insertion des plus pauvres au bout de la rue, je regrette qu'il ait manqué une voix pour que nous fassions preuve d'audace mardi soir.
Pour notre part, nous serons solidaires de votre combat car il est porté par des acteurs très importants. C'est donc sans rancune que nous soutenons ces amendements dont nous connaissons bien ceux qui les ont inspirés : ce sont les représentants du monde de l'insertion, de l'expérimentation « zéro chômeur de longue durée » et des associations. Nous avons contribué à leur essort lorsque nous étions aux responsabilités.
Il est normal que nous continuions de les soutenir et il me semble que c'est aujourd'hui le moment de faire un pas supplémentaire.
Sur le fond, je suis totalement d'accord avec vous, chers collègues : il est essentiel que nous donnions une dimension sociale aux décisions que nous prenons. En vous écoutant tous, je réfléchissais cependant aux éventuelles conséquences que pourraient avoir ces amendements.
Je ne pense pas aux conséquences sociales, car j'imagine que si nous imposons des clauses, elles seront appliquées. Il me semble en revanche que, dans les marchés publics, le risque juridique évoqué par Mme la secrétaire d'État est important. Les marchés publics sont passés par des établissements qui sont au service de nos concitoyens, comme des établissements ou cantines scolaires. Or, si l'obligation d'une clause sociale soulève des problèmes et aboutit à des contentieux importants, nous risquons de ne pas rendre à nos concitoyens le service que nous leur devons.
Sur le fond des amendements, je rejoins l'avis de mes collègues, mais je m'interroge : les bénéfices sont-ils supérieurs aux risques ? En toute honnêteté, je n'ai pas la réponse à cette question. Depuis qu'elle est au Gouvernement, Olivia Grégoire oeuvre remarquablement dans le domaine social, dans le sens que nous souhaitons tous. Lorsqu'elle s'exprime, j'ai tendance à l'écouter. Ce n'est pas contre vous que je m'exprime ainsi, monsieur Baichère, car vous connaissez ma position sur le sujet. Mais les risques de nouvelles dispositions législatives peuvent être supérieurs aux bénéfices. À titre personnel – cela n'engage que moi – , je suivrai l'avis de la rapporteure et de la secrétaire d'État.
Je l'ai souligné à plusieurs reprises dans cet hémicycle, au sujet de ce projet de loi ambitieux qui comptait soixante-neuf articles à l'origine et qui en compte bien plus après son passage en commission spéciale : nous avançons dans un travail de coconstruction. Sans doute l'opposition est-elle critique, regrettant que trop peu d'amendements soient retenus, mais là n'est pas la question. Il se trouve qu'après son examen ici, le texte sera discuté par la chambre haute ; il sera ensuite de nouveau débattu soit en commission mixte paritaire, soit à l'Assemblée. Nous pouvons donc prendre des risques ce soir, sans doute plus que le Sénat ne peut le faire. Il est donc important de voter des amendements tels que ceux-ci, quitte à ce qu'ils soient ensuite modifiés, car nous ne pourrons plus le faire plus tard. Ils ont une importance majeure et, pour ma part, je les voterai.
Mes propos s'inscrivent dans le fil de ceux qui ont été tenus par M. Millienne. Ayant moi aussi une expérience de terrain, je constate que les élus locaux souhaitent souvent donner une dimension sociale à leur acte de commande publique mais en sont empêchés par la complexité des procédures. Je crains que l'inscription d'une clause sociale obligatoire n'ait un effet contre-productif, raison pour laquelle je suivrai l'avis de la rapporteure.
L'article 15 est l'un des plus significatifs du projet de loi en matière d'impact environnemental : pour la première fois, nous allons introduire des critères relatifs à l'impact environnemental de l'exécution de la commande publique. Nous avons déjà eu le même débat au sujet de l'article 1er : nous avions alors souligné que le texte concernait l'environnement et que c'est dans ce domaine qu'il devait nous faire faire un pas de géant.
Ça ne veut pas dire que d'autres critères ne pourront pas ou ne devront pas être introduits demain ; cela veut dire que l'on doit conserver la cohérence, la clarté, la lisibilité d'un projet de loi consacré aux questions environnementales. En repoussant les amendements, on ne repousse pas l'idée qu'ils proposent ; on garantit seulement la clarté du projet de loi afin qu'il soit déterminant pour garantir notre trajectoire carbone et qu'il ait bien un effet sur l'environnement. Je soutiens évidemment la position de la rapporteure et de la secrétaire d'État, et je voterai contre les amendements.
Tout d'abord, outre le fait que le PNAAPD proposé est beaucoup plus détaillé, fourni et précis que les anciens, il s'en démarque largement par un suivi qui n'a pas de précédent. La secrétaire d'État mettra en place un suivi des objectifs afin qu'ils soient vraiment atteints. Parce que nous sommes tous attachés à l'évaluation, nous pouvons tous admettre qu'il s'agit bien d'un élément qui peut faire la différence.
Ensuite, comme l'ont dit M. Herth et d'autres collègues, nous devons faire très attention aux PME. Nous avons fait en sorte, dans la loi ASAP, de leur ouvrir des marchés et même de leur en réserver certains. Je vous rappelle qu'il est prévu que des parts minimales d'exécution de marchés de partenariat et des marchés globaux sont confiées à des PME ou des artisans. La plupart des ESUS sont des PME qui peuvent soumissionner et, dans le cadre que je viens de décrire, l'acheteur public peut les favoriser. Il est également possible, j'en ai parlé, de réserver certains marchés à la fois aux IAE et aux entreprises adaptées, mais aussi d'en réserver tout ou partie à des entreprises de l'ESS, et d'imposer le recours à l'IAE au délégataire en cas de concession.
Tout cela est inscrit dans la loi, pas dans le règlement, et c'est nous qui l'avons voté. Nous avons fait avancer les choses, mais en préservant nos PME-TPE.
Permettez-moi de vous parler de Moulin TP, une entreprise de ma circonscription, qui refait les routes d'un tas de petits villages. Elle n'a pas les moyens de recruter un nouveau salarié ou un nouvel apprenti pour chaque nouveau chantier. L'entreprise est trop petite pour cela ; ce n'est pas possible. En introduisant une clause sociale obligatoire, nous exclurions systématiquement Moulin TP de marchés qui permettent l'emploi d'une cinquantaine de salariés à Bourgoin-Jallieu – et moi, je tiens à ces emplois.
Je parle d'une structure de cinquante salariés, mais nos circonscriptions en comptent de bien plus petites qui rencontreraient le même problème.
Nous avons fait beaucoup de choses. Nous avons allégé les formalités afin d'ouvrir les marchés publics à ces entreprises ; voulons-nous leur en fermer la porte demain en leur faisant peur parce qu'elles ne sont pas prêtes et qu'elles ne disposent pas des outils nécessaires ? Nous n'aurions alors réussi qu'à casser ce que nous étions heureux de leur donner hier. Ce serait vraiment dommage.
Monsieur Lecoq, l'Europe n'est pas responsable de nos décisions, de nos actions et de notre comportement sur notre marché. Il ne s'agit pas pour nous d'appliquer une règle extérieure de libre concurrence : nous souhaitons que nos TPE et PME puissent répondre à des offres de marché. Je ne me cacherai pas derrière l'Europe pour argumenter.
Enfin, je réfute totalement l'idée que nous établirions une hiérarchie entre l'environnemental et le social. Ce que nous faisons aujourd'hui est un acte majeur : nous prenons en compte un coût global et nous cessons de ne raisonner qu'avec le prix. Nous mettons l'environnement en avant, mais pas seulement, car nous savons tous qu'il va de pair avec le social – c'était même le motif de la réunion de la Convention citoyenne pour le climat. Environnement et social vont de pair, avec cependant une contrainte toute simple : le lien avec le marché. Si ce lien n'existe pas, vous vous retrouvez dans la situation de la métropole de Nantes : vous choisissez un critère RSE qui concerne toute l'entreprise et le marché tombe. Ça ne marche pas.
Soyons fiers de faire avancer les choses comme nous le faisons ce soir. Faisons en sorte d'accompagner les acheteurs, les élus, les entreprises. Nous devons tisser encore plus fortement le maillage des entreprises d'insertion par l'emploi, parce qu'elles sont nécessaires. Poursuivons ce travail afin qu'il aboutisse, même si tout ne passe pas par la loi.
J'ai le plaisir de m'occuper de l'économie sociale, solidaire et responsable depuis neuf mois, et je rencontre chaque semaine les acteurs de l'insertion. C'est parce que je considère que le sujet est important que je vous dis très simplement qu'il y a dans ces amendements non pas le risque mais la certitude d'un contentieux au Conseil d'État. C'est au nom de mon attachement au sujet dont nous parlons que je peux prétendre que la meilleure façon d'avancer n'est ni de voter les amendements ni de leur donner un avis favorable, car ces dispositions feraient l'objet de contentieux devant le Conseil d'État, et probablement au niveau européen.
Pour moi, la meilleure façon de progresser sur ce sujet, c'est d'avancer dans le réel, au plan réglementaire, et non d'être encalminé au Conseil d'État ; c'est pourquoi je maintiens mon avis défavorable.
Comme Aurore Bergé qui vient de le rappeler, il n'est pas souhaitable que ces dispositions fassent oublier ce que permet l'article 15.
Beaucoup l'attendent, et depuis longtemps ; il va devenir une réalité grâce à vous : nous intégrons le critère environnemental dans les critères d'exécution et d'attribution de 100 % des marchés publics à horizon 2025, soit cinq ans plus tôt que ce qui était demandé par la Convention citoyenne. Voilà pour moi l'objectif majeur de cet article, et je suis trop attachée à l'insertion pour vouloir que le débat finisse en contentieux devant le Conseil d'État, car c'est ce qui se produira si vous adoptez ces amendements, c'est une certitude dont je tiens à vous faire part. À vous de voter !
Mme Aurore Bergé applaudit.
Madame la secrétaire d'État, madame la rapporteure, le Gouvernement et la majorité aiment bien le conditionnel. Stéphane Viry et quelques autres collègues des Républicains qui ont cosigné son amendement ont eu raison de vouloir ajouter, à la première phrase de l'alinéa 10 de l'article 15, les mots : « et au domaine social et à l'emploi ». Cela donnera une phrase ainsi rédigée : « Les conditions d'exécution prennent en compte des considérations relatives à l'environnement et au domaine social et à l'emploi. » Je préfère aussi « prennent » à « peuvent prendre », formule pour laquelle vous optez souvent dans les dispositions que nous avons examinées depuis une semaine.
Protestations sur quelques bancs du groupe LaREM.
Le droit de la commande publique, c'est du conditionnel !
Je mets aux voix les amendements identiques nos 4927 rectifié , 5498 rectifié et 5591 rectifié .
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 70
Nombre de suffrages exprimés 66
Majorité absolue 34
Pour l'adoption 38
Contre 28
Les amendements identiques nos 4927 rectifié , 5498 rectifié et 5591 rectifié sont adoptés.
L'amendement no 4713 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 3466 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à vingt-deux heures quarante, est reprise à vingt-deux heures cinquante.
Dans les critères que nous pourrions et devons inscrire, il s'agit aussi de transformer notre perception de ce qu'est la valeur. Madame la secrétaire d'État, vous êtes très engagée au niveau de l'Europe sur la comptabilité intégrée, les triples comptabilités, des choses de cet ordre pour aller au-delà de la seule comptabilité financière. Eh bien, c'est ce qui est proposé ici : nous proposons d'ajouter la mention des « coûts évités », afin de permettre, dans les appels d'offres publics, d'accueillir une offre qui, par la coopération souvent d'acteurs divers, réduit les impacts.
La parole est à Mme Claire Pitollat, pour soutenir l'amendement no 4870 .
Nous avons eu l'occasion d'échanger sur le sujet des coûts évités. Il s'agit de passer à une logique de prévention dans les commandes de marchés publics, de vraiment réfléchir en amont afin d'éviter des consommations. Il faut le redire, l'énergie la plus propre est celle que l'on ne consomme pas. Ajouter des clauses environnementales ne suffit pas, il faut s'intéresser aux « coûts évités » en nous passant d'achats supplémentaires de matériels qui ne servent à rien.
C'est valable aussi dans le champ du social, où l'on parle de plus en plus de coûts évités. Plus on agit tôt, et plus on permet aux personnes de retrouver leur autonomie ; la solidarité en est d'autant plus efficace.
Cette notion de coûts évités est donc pertinente pour l'environnement comme pour le social. Nous suggérons de l'ajouter dans le texte, par une mention très courte qui vous permettra ensuite de la détailler dans les textes réglementaires. Ce n'est pas quelque chose de complexe ; vous aurez le temps de définir ce que cela représente, par une mission parlementaire, si vous le souhaitez – il y en a dans de nombreuses en cours sur le sujet – , ou lors de la publication de décrets. Ce serait un signal important pour les acteurs de l'économie sociale et solidaire, indiquant que vous valorisez la réflexion par coopération transversale, une réflexion axée vers l'innovation et vers le fait de consommer moins et d'agir plus tôt dans le champ du social.
Cet amendement de Mme Le Feur va dans le même sens. Nous sommes là dans ce que l'on pourrait appeler de l'acupuncture législative, c'est-à-dire que nous appuyons au bon endroit. Il convient de passer d'une logique de dépense à une logique d'investissement, et pour cela il faut mesurer les choses. De très grands chercheurs pourraient nous y aider, en s'appuyant comme je le rappelais en commission, sur des théories qui existent en sciences de gestion sur les coûts et performances cachés. On peut rendre hommage à Henri Savall, Véronique Zardet, Marc Bonnet et Laurent Cappelletti, qui ont mené des travaux sur ce sujet depuis plus de quarante ans et sont à la disposition du Gouvernement. Ils ont prouvé, et cela va dans le sens de l'action de Mme la secrétaire d'État, que le capitalisme socialement responsable existe, à condition de mettre en oeuvre de nouvelles pratiques et de nouveaux paradigmes.
Ces amendements sont satisfaits : cette notion de coûts évités peut être utilisée dans le cadre des considérations existantes. Elle peut s'appliquer à tous les domaines qui sont déjà, de manière obligatoire ou facultative, disponibles pour les acheteurs. C'est possible au niveau du social, dans l'emploi, l'environnement, l'innovation… Demande de retrait, ou à défaut un avis défavorable.
Même avis.
J'entends la réponse de Mme la rapporteure et je l'en remercie, mais Pierre-Alain Raphan a tout à fait raison : l'achat public, ce sont des femmes et des hommes qui, souvent malgré les formations reçues, ou peut-être parce qu'ils n'ont pas eu de formation, sont dans une certaine retenue. Et c'est justement de l'acupuncture, pour reprendre le terme de notre collègue, que nous pourrions pratiquer en votant ces amendements, c'est-à-dire donner un signal, rassurer et leur permettre d'aller jusqu'au bout dans leur construction de programmes d'achat public.
L'amendement no 423 n'est pas adopté.
L'économie circulaire, en réduisant l'usage des matériaux, la consommation d'eau et d'énergie, contribue aux stratégies respectueuses du climat. L'objectif de cet amendement est de l'inclure parmi les considérations subsidiaires des conditions d'exécution des marchés publics, au même titre que l'économie ou l'innovation.
L'amendement no 2380 de Mme Lise Magnier est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
La liste des considérations facultatives utilisables englobe l'économie circulaire. Cette liste n'est pas exhaustive : on peut toujours imaginer, dans les contrats de commande publique, beaucoup d'autres possibilités. Avis défavorable.
Le Gouvernement partage la volonté, et je pense le dire assez souvent et avec assez d'énergie et de conviction, de favoriser l'économie circulaire. C'est d'ailleurs pour cela que loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire – AGEC – du 10 février 2020 comporte un volet important relatif à l'achat public, comme cela a été mentionné. Le décret d'application relatif à l'obligation d'acquisition par la commande publique de biens issus du réemploi ou de la réutilisation ou des matières recyclées a été signé le 9 mars dernier. Par conséquent, eu égard, aussi, à la liberté des acheteurs d'exercer pleinement leurs responsabilités, et compte tenu des détails du décret d'application de ces dispositions, j'émets un avis défavorable à ces amendements.
L'amendement no 1230 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'obligation de prendre en compte des considérations relatives à l'environnement dans les conditions d'exécution des marchés publics est une avancée. Son application pourrait toutefois être délicate dans le cas particulier des marchés de prestations intellectuelles, dans lesquels la quasi-totalité de la prestation est constituée de main-d'oeuvre. C'est pourquoi je propose, sans en rabattre sur l'ambition globale du texte, de laisser à l'acheteur, lorsqu'il s'agit d'une étude ou de prestations intellectuelles, la faculté d'apprécier au cas par cas si l'inclusion de considérations liées à l'environnement est adaptée ou non à l'objet du marché. L'amendement propose de compléter en ce sens le dixième alinéa de l'article 15.
Il est identique au précédent. Je signale, une fois n'est pas coutume, que je suis parfaitement en accord avec M. Potier sur ce sujet.
Sourires.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l'amendement no 4206 et nous dire s'il est lui-même d'accord avec M. Herth !
J'espère que ce ne sera pas la dernière fois que nous sommes d'accord, cher Antoine Herth !
Sourires.
Cet amendement émane de France urbaine. Il est donc normal qu'il nous rassemble.
Je suis désolée de briser ce bel esprit de concorde, mais je ne partage pas la position des auteurs de ces amendements, et pour deux raisons.
Tout d'abord, rappelons que s'il est réellement impossible, pour une prestation, de faire le lien entre des considérations relatives à l'environnement et l'objet du marché, alors l'obligation de prendre en compte ces considérations dans les conditions d'exécution de ce marché ne s'applique pas. Cette disposition pourrait d'ailleurs susciter de la déception s'agissant de la mesure que nous venons d'adopter sur les clauses sociales. Dans les nombreux cas où l'obligation ne s'applique pas, on peut en effet s'inquiéter que l'acheteur soit, en quelque sorte, exonéré de toute préoccupation environnementale.
Ensuite, Mme la ministre vous le dira mieux que moi, dans les nouveaux CCAG, il est prévu de laisser à l'acheteur la faculté d'apprécier au cas par cas si l'inclusion de considérations liées à l'environnement est adaptée ou non à l'objet du marché, y compris lorsqu'il s'agit d'une étude ou de prestations intellectuelles.
Je prendrai pour exemple mon cas personnel. Lorsque j'étais chef d'entreprise, je vendais des prestations intellectuelles…
… et je témoigne qu'il est tout à fait possible de prendre des mesures concrètes en faveur de l'environnement. On peut notamment s'engager à supprimer les courriers papier ou à numériser les documents des études volumineuses. De tels gestes sont de véritables gestes écologiques, qui concourent à la protection de l'environnement. Il existe donc des solutions pour agir. En outre, je le redis, les acheteurs et les entreprises seront accompagnés dans cette démarche. Avis défavorable.
Je ne suis pas d'accord non plus avec les auteurs de ces amendements, mais alors vraiment pas du tout. Je peine à vous comprendre : d'un côté, légitimement, vous voulez enrichir le texte afin qu'il soit mieux-disant ; de l'autre, vous proposez de réduire l'ambition de l'article 15 en excluant les prestations intellectuelles du champ de l'obligation de tenir compte du critère environnemental dans les clauses d'exécution du marché public. Il ne me semble pas qu'il soit antinomique de vendre des prestations intellectuelles et de considérer la portée environnementale de ces prestations dans le cadre de l'exécution du marché. Au contraire, je crois important de démontrer que les marchés de prestations intellectuelles peuvent tout à fait se plier à cette nouvelle obligation. Précisons que nous parlons ici d'études, de réflexions, de conseils, d'expertises.
Le CCAG des marchés publics traite d'ailleurs des prestations intellectuelles dans son article 7. 1 : « Le titulaire veille à ce que les prestations qu'il effectue respectent les prescriptions législatives et réglementaires en vigueur en matière d'environnement, de sécurité et de santé des personnes [… ]. Il doit être en mesure d'en justifier, en cours d'exécution du marché et pendant la période de garantie des prestations, sur simple demande du pouvoir adjudicateur. »
Il serait dommage d'exclure les prestations intellectuelles du champ de l'article 15 du projet de loi, d'autant qu'il existe différents exemples de la manière dont les prestations intellectuelles peuvent tenir compte des préoccupations environnementales. Je pense notamment à la limitation des impressions, aux impressions sur papier recyclé, à l'utilisation de cartouches réutilisables ou encore au recyclage des cartouches.
Bref, mon avis sur ces amendements est défavorable, mais pour des raisons différentes de celles invoquées pour les précédents amendements. Nous devons respecter l'esprit du texte et éviter d'être moins-disants sur les prestations intellectuelles.
Depuis le début de l'examen du texte, vous nous appelez à l'enrichir par nos amendements. C'est du moins ce que nous a dit Mme Bergé, ici présente, quand nous avons examiné l'article 1er du titre Ier. Force est de constater que vous avez une autre définition de la notion d'enrichissement : vous n'avez accepté aucun de nos amendements, …
Ce n'est pas vrai ! Je me souviens très bien de l'amendement de M. Bazin !
J'ai été convaincu par les arguments de Mme la rapporteure et de Mme la secrétaire d'État. Je retire mon amendement. En échange d'un avis favorable sur le suivant !
Rires.
L'amendement no 1938 n'est pas adopté.
L'amendement no 4714 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je suis saisi de quatre amendements, nos 5558 , 5596 , 5552 et 5595 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 5558 et 5596 sont identiques, ainsi que les amendements nos 5552 et 5595 .
L'amendement no 5558 de M. Stéphane Viry est défendu.
La parole est à Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas, pour soutenir l'amendement no 5596 .
Je serai brève car nous avons déjà beaucoup parlé de ce sujet. Par cet amendement, nous proposons qu'une part minimale de l'exécution du marché soit confiée à des entreprises solidaires d'utilité sociale ou à des structures équivalentes et que cette part ne puisse pas être inférieure à 5 % du montant prévisionnel du marché.
Contrairement à ce que vous avez dit, madame la rapporteure, une telle disposition ne contient aucun risque de marchés infructueux ou cassés. Nous avons en effet prévu une porte de sortie puisque la disposition s'appliquerait « sauf lorsque la structure économique du secteur concerné ne le permet pas ».
Je vais même plus loin : afin de permettre aux toutes petites entreprises qui le souhaitent de recourir à cette possibilité, la création par les employeurs de groupements d'intérêt économique pourrait être envisagée avec l'aide de Mme la ministre déléguée chargée de l'insertion, Brigitte Klinkert.
Les amendements identiques nos 5552 de M. Stéphane Viry et 5595 de M. Didier Baichère sont défendus.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements ?
Nous avons longuement développé nos arguments tout à l'heure ; ils valent bien évidemment pour ces amendements. L'expertise juridique que nous avons demandée l'a confirmé : la simple mention d'une porte de sortie ne suffit pas à dédouaner les acheteurs.
Nous aimerions qu'elles soient bien plus nombreuses, mais les ESUS ne sont aujourd'hui que 1 800 dans notre pays et elles conservent un caractère franco-français. Leur maillage n'est pas suffisant pour répondre aux demandes de l'ensemble des acheteurs du territoire. La mention que vous mentionnez ne suffirait donc pas à sécuriser juridiquement les marchés. Avis défavorable.
Je ne reprendrai par l'argumentaire auquel vous avez tous été si sensibles tout à l'heure !
Quelques mots cependant pour souligner que s'il est possible de réserver des marchés aux entreprises de l'économie sociale et solidaire, le droit européen et la jurisprudence constitutionnelle interdisent, dans le cadre de procédures pleinement concurrentielles, de privilégier une catégorie de structures. Si un tel dispositif est possible pour les PME et les artisans, c'est parce qu'il peut être justifié par l'objet d'intérêt général visant à corriger une inégalité entre ces entreprises et les autres dans l'accès aux marchés. Je rappelle à nouveau que les ESUS sont des PME et qu'elles ont donc accès aux marchés publics. Il n'est donc pas possible de justifier une dérogation au principe de la commande publique dans le cadre de marchés allotis en vue de permettre le plus large accès à cette commande publique.
Je vous invite à retirer les amendements ; à défaut, mon avis sera défavorable.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 65
Nombre de suffrages exprimés 63
Majorité absolue 32
Pour l'adoption 33
Contre 30
Suspension et reprise de la séance
À la demande du groupe La République en marche, la séance est suspendue.
La séance, suspendue à vingt-trois heures dix, est reprise à vingt-trois heures vingt.
La séance est reprise.
L'amendement no 6520 de M. Jean-Charles Colas-Roy est défendu.
L'amendement no 6520 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il nous tient à coeur et je suis certain qu'il en sera de même pour Mme la secrétaire d'État, au vu de son engagement sur le sujet. Il a trait au devoir de vigilance et plus précisément aux plans de vigilance.
La clause que nous proposons vise à exclure de la procédure de passation des marchés publics les entreprises soumises à la loi sur le devoir de vigilance – ce sont de très grandes entreprises – qui n'ont pas publié de plan de vigilance. Ces plans servent à oeuvrer à la prévention des atteintes à l'environnement – nous sommes donc au coeur du sujet – mais aussi des atteintes graves aux droits humains.
La loi française sur le devoir de vigilance est en train de devenir une référence : une version allemande a été votée il y a moins de trois semaines ; elle a aussi inspiré une proposition qui a fait l'objet d'un vote favorable du Parlement européen et se trouve actuellement étudiée dans le cadre d'un trilogue. Celle-ci pourrait devenir une directive européenne, notamment sous l'impulsion de la présidence française de l'Union européenne en 2022.
Cette loi comporte cependant une carence : nous ne disposons pas de la liste des entreprises concernées et leurs DPEF – déclarations de performance extra-financière – ne permettent de toute façon pas de vérifier si elles ont publié ou non un plan de vigilance, que l'on pourrait pourtant considérer comme leur permis de conduire dans la mondialisation. Sans même parler de sa qualité, la simple existence de ce document et le simple fait de le produire pourrait être une condition requise pour accéder aux marchés publics. Ce serait le minimum du minimum : le plan de prévention permettrait de vérifier que l'entreprise à laquelle un marché public serait accordé ne fait pas travailler des enfants, ne favorise pas l'esclavage moderne ou ne contribue pas à des écocides à l'autre bout du monde.
Je précise qu'il s'agit d'une recommandation formulée dans un rapport rendu il y a exactement dix jours par la mission d'information sur la conditionnalité des aides publiques aux entreprises, composée de députés de trois commissions du Parlement et présidée par Stéphane Viry – malgré son absence, c'est décidément une des vedettes de cette soirée. Ses quatre rapporteurs, Saïd Ahamada, Barbara Bessot Ballot, Dominique Da Silva et Laurianne Rossi, ne sont pas de dangereux gauchistes ; ils sont issus de la majorité. La proposition no 8 dudit rapport vise précisément à conditionner toute aide publique à l'existence d'un plan de vigilance.
Si nous pensons que les marchés publics doivent, comme les aides publiques, répondre à un minimum d'exigence à l'égard de l'environnement et des droits humains, la production d'un plan de vigilance doit être une condition requise. Ce qui est vrai pour les aides publiques l'est a fortiori pour les marchés publics.
Je m'appuie également sur un rapport remis en janvier 2020 par le conseil général de l'économie au ministre de l'économie, des finances et de la relance ; il pointait une défaillance en la matière et le besoin de connaître l'existence ou non d'un tel plan.
Monsieur Potier, vous avez cité le rapport remis par la mission d'information commune sur la conditionnalité des aides publiques. Il se trouve que nous y avons tous les deux participé, et nous avons participé ensemble à un certain nombre d'auditions. Si je partage votre objectif, je n'approuve pas nécessairement le moyen que vous nous proposez et qui me semble beaucoup trop restrictif.
En réalité, vous proposez d'imposer directement l'exclusion de certaines entreprises, sans qu'il soit possible de revenir sur cette décision à un moment ou à un autre. Il existe actuellement des motifs d'exclusion de plein droit des marchés publics ; ils résultent d'infractions lourdes telles que des condamnations définitives, des manquements aux obligations fiscales ou sociales, ou encore des défaillances en matière de négociation syndicale. Ce que vous proposez, c'est de les exclure de fait ! Vous allez beaucoup trop loin et votre proposition risque en outre de faire augmenter significativement le niveau de discrimination et donc de contentieux. Demande de retrait ; à défaut…
Si, j'ai très bien compris, monsieur Potier. Je répète : certaines entreprises n'ont pas encore respecté l'obligation de produire un plan de vigilance mais peuvent être en train de le faire.
En l'occurrence, vous les excluez de fait sans même leur laisser la place…
Elles sont hors-la-loi pour cette déclaration mais concrètement, vous proposez de les exclure toutes et donc de produire une véritable discrimination qui peut aussi comporter un risque juridique élevé de contentieux. Avis défavorable.
M. Potier l'a dit, nous sommes en train d'y travailler au niveau européen. Le Parlement européen a adopté le 27 janvier dernier un rapport d'initiative législative sur le devoir de vigilance et il me paraît important qu'en la matière, nous nous inscrivions dans un cadre européen afin d'éviter de pénaliser les entreprises françaises, d'autant plus que nous y travaillons ardemment avec mon collègue Clément Beaune en vue de la présidence française de l'Union européenne. Nous sommes mobilisés sur ce sujet mais c'est à l'échelon européen et non national qu'il faut légiférer. Avis défavorable.
Qui trop embrasse mal étreint, si j'ose dire. Je crains qu'en accumulant les objectifs, on perde de vue ce que nous souhaitons faire par l'intermédiaire de cette loi. Ce que nous voulons, c'est lutter contre le dérèglement climatique, et utiliser tous les leviers possibles pour le faire, auprès des entreprises comme des citoyens.
Les citoyens nous ont recommandé d'intégrer des clauses environnementales dans la procédure de passation des marchés publics. L'article 15 concerne 200 milliards d'euros d'achats ; en y incluant une double clause environnementale, nous avons fait quelque chose de très important. Si nous avions voulu faire un projet de loi relatif aux marchés publics, il nous aurait fallu procéder à plusieurs études d'impact sur tous les sujets dont nous parlons depuis tout à l'heure. En adoptant cet amendement, nous nous tromperions : cela reviendrait à dénaturer le projet de loi.
Je ne veux pas opposer le social et l'environnemental mais à chaque fois que l'on ajoute une condition – avec un objectif qui peut être en lui-même louable – , cela rend la mesure moins efficace sur le plan environnemental. Cela contribue donc à affaiblir la portée du présent article et du présent projet de loi. Il faut donc arrêter d'ajouter des éléments car ils ne conduiront qu'à détricoter la loi.
Je pense ne pas être en contradiction avec mon collègue Potier. Madame la secrétaire d'État, vous nous renvoyez vers l'Europe alors que nous vous parlons d'une disposition de la loi française…
… qui est passée au niveau européen !
Merci, je suis au courant !
L'initiative législative a bien été prise ici !
Nous vous proposons d'en tenir compte et de considérer que les entreprises qui n'ont pas déposé le document exigé par la loi française ne puissent pas répondre à des marchés publics français, en France.
Il semble évidemment nécessaire que la procédure de passation des marchés publics fasse respecter la loi française ! Vous pouvez toujours évoquer une future disposition européenne – j'espère qu'elle verra le jour, et voter cet amendement permettrait d'ailleurs de le garantir ; quoi qu'il en soit, en France, on ne peut pas attribuer un marché public à une entreprise qui est dans l'illégalité au regard du droit français.
M. le rapporteur général nous accuse de sortir du périmètre de la loi : c'est un mauvais procès. Nous avons passé plus d'une heure sur les règlements municipaux ou préfectoraux de publicité, qui n'ont rien à voir avec le carbone, et je pourrais donner de nombreux autres exemples. La loi sur le devoir de vigilance, monsieur le rapporteur général, a à voir avec l'environnement ! Le procès en cours pour déforestation en Amazonie concerne une chaîne de distribution agroalimentaire française, qui est poursuivie pour sa contribution à la déforestation et donc à la libération de carbone. Nous sommes en plein dans le sujet !
La question du travail des enfants et de l'esclavage moderne constitue un autre sujet tout aussi peu marginal. Nous avons manqué l'occasion d'instaurer une expérimentation en la matière à une voix près ; faisons au moins ce que demande Bercy dans son rapport de janvier et ce que demandent des rapporteurs du groupe LaREM dans un rapport sur la conditionnalité des aides publiques.
La loi française qui inspire l'Europe ; renforçons son application et n'utilisons pas le prétexte européen pour dénaturer le modèle français des droits de l'homme et de l'environnement.
Monsieur le rapporteur général, je pense que vous n'avez pas bien perçu le sens de ce que nous voulons faire. Le présent projet de loi porte sur le climat, mais il intègre dans son titre même la notion de résilience. Pour ma part, engagé sur ces questions depuis maintenant plusieurs décennies – je ne renie pas mes engagements ni ne critique ceux qui y sont arrivés plus récemment – , je peux vous dire qu'il n'a jamais été question de traiter le climat et l'environnement en excluant les autres dimensions de l'existence.
C'est bien pour cela que le terme de développement soutenable, malheureusement traduit en français par « développement durable », a émergé dans les années 1990 et s'est imposé au tournant des années 2000. Le développement soutenable ne peut pas faire fi de ces autres dimensions évoquées par Dominique Potier et le groupe Socialistes dans leur amendement ; c'est ce que nous devons mettre en oeuvre.
Dominique Potier a rappelé que nous avons raté quelque chose il y a deux jours, à une voix près. Nous ne pouvons pas rater le rendez-vous que nous avons avec l'inclusion et la réflexion sur le modèle que nous voulons développer. Nous ne pouvons pas rester concentrés sur le seul aspect froid, technique et parfois technocratique du climat. S'il est si important, c'est qu'il représente bien plus que cela.
Il y a en France des entreprises qui font des efforts dans ce domaine et qui, au moment de l'attribution d'un marché public, sont doublées par des entreprises étrangères qui n'en font aucun. Je sais qu'à Bercy vous vous battez notamment pour la clause dite de réciprocité, afin que les marchés publics ne soient pas ouverts à des pays qui ferment leurs propres marchés publics à nos produits. Allons jusqu'au bout et votons l'amendement de Dominique Potier.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 59
Nombre de suffrages exprimés 58
Majorité absolue 30
Pour l'adoption 13
Contre 45
L'amendement no 4302 n'est pas adopté.
Il reprend une disposition facultative qui existe pour les PME, et qui prévoit que dans les documents de consultation, les soumissionnaires peuvent « indiquer dans leur offre la part du marché qu'ils ont l'intention de sous-traiter à des tiers, notamment à des PME », sans néanmoins pouvoir en tirer une quelconque conséquence lors de l'attribution du marché. Elle s'appliquerait ici aux ESUS. Cette visibilité est nécessaire.
Les ESUS étant des PME, elles remplissent totalement les critères et elles ont accès aux marchés réservés aux PME. Vos amendements étant satisfaits, j'en demande le retrait. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Environ 95 % des ESUS sont effectivement des PME, couvertes et intégrées en tant que telles. Vous proposez d'obliger les soumissionnaires à indiquer la part du marché sous-traitée aux entreprises de l'économie sociale et solidaire, ce qui revient à cibler cette information sur une structure spécifique. Cela ferait courir un risque important aux acheteurs. Les ESUS étant des PME, elles ne sont en rien empêchées de candidater aux appels d'offres publics.
L'amendement no 4501 n'est pas adopté.
Permettez-moi de revenir d'abord sur l'ensemble de cet article. S'il contient des avancées en matière d'achats responsables et durables, nous sommes loin des fameux pas de géant évoqués. J'en veux pour preuve qu'il n'y a aucune obligation expresse d'attribuer le marché au mieux-disant, au mieux-offrant écologiquement. Cet amendement en propose une : obliger l'acheteur, dans le cadre d'un marché public, à favoriser les offres françaises – ce serait une sorte de French buy Act.
À cet égard, j'aimerais rappeler les propos tenus par Emmanuel Macron, en mars 2020, alors qu'il visitait une usine de fabrication de masques. « Je veux que d'ici à la fin de l'année nous ayons obtenu une indépendance pleine et entière », disait-il. Or, à la fin de l'année 2020 et même actuellement, le secteur public continue de s'approvisionner massivement à l'étranger. En l'occurrence, cela représente 127 000 tonnes de masques importés de Chine, soit une dizaine de tonnes de CO2.
Si votre intention – que je pense réelle et sincère – est de reprendre notre souveraineté, notamment dans le domaine des industries stratégiques, cet amendement pourrait y contribuer tant l'achat public est un levier pour les entreprises et leurs investissements. Vous avez dit vous-même que la commande publique pouvait avoir une influence. Si nous inscrivions une telle obligation dans la loi, les entreprises seraient incitées à réinvestir ici, en France.
J'aime beaucoup l'emphase des amendements de votre collègue François Ruffin dont je reconnais la patte : « L'acheteur doit toujours sélectionner l'offre qui apporte le plus à l'économie française, l'emploi et l'intérêt général. » Rassurez-vous, l'intérêt général est préservé puisque les acheteurs publics l'ont toujours à coeur – je pense que M. Lecoq pourra en témoigner.
Le code de la commande publique leur permet, par la sécurité juridique qu'il leur apporte, de toujours agir dans l'intérêt général, ce que tous les élus recherchent.
Dans cet article 15, nous avons fait le choix d'obliger les acheteurs à faire des offres écologiquement et environnementalement responsables, ce qui est une manière de veiller à l'intérêt général. Vous avez voté tout à l'heure pour prendre en considération le critère de l'emploi. Quant à l'économie française, nous cherchons toujours à la rendre plus forte, plus compétitive, plus socialement et écologiquement responsable. C'est toute la vocation de ce titre II. J'aime beaucoup l'emphase, mais je ne pense pas qu'elle soit nécessaire dans ce texte. J'émets donc un avis défavorable pour cet amendement.
Même avis, pour les mêmes raisons.
Il n'est pas question d'emphase ni de M. Ruffin. C'est moi qui défends cet amendement, et le plus sobrement possible.
Mme Danièle Obono applaudit.
J'ai mentionné les kilos de CO2 dus à des commandes publiques passées par des acheteurs qui ne sont pas obligés de privilégier, quand c'est possible, des entreprises françaises. Nous sommes bien dans le cadre de cette loi visant à lutter contre les dérèglements climatiques, me semble-t-il. Je ne comprends pas votre réponse. Compte tenu de l'importance des marchés publics pour les entreprises, l'obligation que nous voulons imposer aux acheteurs serait une bonne incitation à produire en France, et cela irait dans le sens de l'écologie.
L'amendement no 6711 n'est pas adopté.
L'amendement no 6712 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je défendrai en même temps les amendements nos 1332 de M. Hemedinger et 2370 de Mme Beauvais.
Madame la secrétaire d'État, vous disiez que ce qui guide le marché doit être l'attente de l'acheteur. Certes. Si l'acheteur attend que les offres présentent des caractéristiques environnementales, il doit pouvoir juger qu'une offre reçue est anormalement basse quand elle ne remplit pas ce critère. Il s'agit de dissuader de ne pas traiter ce point, sans aller jusqu'à considérer ces offres incomplètes.
Les amendements identiques nos 1619 de M. Paul-André Colombani et 3145 de Mme Lise Magnier sont défendus.
Quel est l'avis de la commission ?
Cette notion d'offre anormalement basse est destinée à protéger les acheteurs d'offres à première vue très intéressantes mais en réalité peu solides car émanant par exemple d'entreprises à fort risque de défaillance. Je ne pense pas qu'il faille modifier cette définition : les acheteurs ont besoin de la sécurité juridique qu'elle leur donne. Avis défavorable.
En fait, la notion européenne d'offre anormalement basse ne repose pas sur des considérations de qualité mais sur le niveau trop bas du prix par rapport aux caractéristiques de la prestation. Elle ne dépend pas de l'appréciation subjective de l'acheteur, mais des éléments objectifs de formation du prix. Le rejet d'une offre anormalement basse ayant des conséquences importantes sur la concurrence et l'égalité de traitement, il doit rester encadré par des éléments objectifs, sous peine de faire naître un risque contentieux important pour l'acheteur. C'est la raison pour laquelle j'émets un avis défavorable.
Je suis saisi de huit amendements, nos 4439 , 5494 , 5590 , 4952 , 5098 , 3464 , 4224 et 4223 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 4439 , 5494 et 5590 d'une part, les amendements nos 3464 et 4224 d'autre part, sont identiques.
La parole est à Mme Nadia Essayan, pour soutenir l'amendement no 4439 .
Il s'agit de rédiger ainsi l'alinéa 11 : « 2° La première phrase du premier alinéa de l'article L. 2152-7 est remplacée par deux phrases ainsi rédigées : "Le marché est attribué au soumissionnaire ou, le cas échéant, aux soumissionnaires qui ont présenté l'offre économiquement la plus avantageuse, sur la base d'un ou plusieurs critères dont l'un au moins prend en compte des caractéristiques environnementales et sociales de l'offre. Ces critères sont objectifs, précis et liés à l'objet du marché ou à ses conditions d'exécution. " »
Il vise à inscrire dans le code de la commande publique la notion « d'offre écologiquement et économiquement la plus avantageuse », pour ne pas s'en tenir à celles qui sont les plus intéressantes d'un point de vue économique. Cette précision offre une sécurité juridique, ce qui intéressera Mme la secrétaire d'État.
L'attribution des marchés est régie par les objectifs de développement durable, qui reposent sur trois piliers, dont le social et l'environnemental. Les amendements sont satisfaits sur ce point, car les acheteurs ont tout ce qu'il faut pour prendre en compte ces critères.
Qu'en est-il de la notion d'offre économiquement et écologiquement la plus avantageuse ? Pour l'exécution de son marché, l'acheteur devra prendre en compte un critère économique et un critère environnemental puisque c'est tout l'objet de l'article 15. Cette demande me semble donc aussi parfaitement satisfaite.
Plus que le prix, c'est le coût qui sera pris en compte, ce qui correspond à la démarche que vous appelez de vos voeux.
Quant à l'approche globale fondée sur le cycle de vie, nous y travaillons, notamment par le biais des outils réglementaires qui sont mis en place – Mme la secrétaire d'État a évoqué le PNAAPD. Les amendements me semblant satisfaits, je demande donc leur retrait. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Le Premier ministre, comme vous savez, a confié une mission à la députée Sophie Beaudouin-Hubiere et à la sénatrice Nadège Havet sur la commande publique, en particulier sur les achats durables, mission qui comportera un volet social – il s'agira de garantir que les préoccupations exprimées dans ces amendements soient bien prises en considération.
Il n'est pas plus possible maintenant que tout à l'heure d'approuver votre proposition parce qu'elle pose un principe de généralisation des critères sociaux ; or je rappelle l'exigence juridique de lien avec l'objet du marché, exigence qui ne peut être vérifiée que par l'acheteur lui-même, au cas par cas, en fonction des caractéristiques de l'achat. Aussi cette fort légitime préoccupation relève-t-elle moins du domaine de la loi que de l'encouragement à la mobilisation des acheteurs, objet des outils réglementaires déjà mentionnés, parmi lesquels le plan national des achats durables, qui sera ouvert à la consultation publique à compter de la semaine prochaine. Je rappelle en outre le risque d'éviction des TPE et PME des procédures de marché public si l'on adoptait le type de proposition que vous faites.
Pour toutes ces raisons, je vous demande de retirer vos amendements, faute de quoi j'émettrai un avis défavorable.
La parole est à M. Jean-Paul Lecoq – je sentais que vous voudriez intervenir.
J'ai émis des vibrations qui sont allées jusqu'à vous, monsieur le président – sans doute les effets de la 5G déployée au Havre, je vous avais pourtant dit d'arrêter…
Sourires.
Plus sérieusement, dites-moi en quoi le fait de vouloir ajouter le mot « écologiquement » au mot « économiquement » vous pose problème d'un point de vue juridique. C'est un acte politique. Vous expliquez vous-même que l'article 15 a été conçu pour cela ! La rédaction doit être la plus compréhensible possible pour tous ceux qui vont devoir appliquer la loi.
Ne croyez pas qu'on cherche à vous embêter, madame la secrétaire d'État, parce que, parfois, quand on voit certaines de vos réactions…
M. Lecoq, dont le masque est assorti à la cravate, fait preuve d'une élégance qui mérite qu'on lui réponde.
Quel talent !
Rires.
Rires.
Vous êtes impliqué dans la discussion, monsieur Lecoq, et la moindre des choses est que je vous réponde d'un point de vue juridique. C'est le Conseil d'État, dans son avis sur le texte, qui explique que le droit européen ne permet pas de promouvoir la notion d'offre écologiquement la plus avantageuse, au même niveau que celle d'offre économiquement la plus avantageuse. Je n'émettrai pas de jugement mais c'est le droit, rappelé par le Conseil d'État. Je saisis bien l'intérêt de votre amendement mais ce qui importe est que nous parvenions à atteindre l'objectif visé.
L'amendement no 4223 n'est pas adopté.
L'amendement no 504 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Raphaël Schellenberger, pour soutenir l'amendement no 5411 .
Cet amendement de notre collègue Olivier Marleix est très simple, compréhensible par tous. Il vise à donner du corps à l'article 15 en s'assurant que le critère environnemental, lors de l'attribution d'un marché, compte au moins pour un tiers de la note finale. Voilà qui donnerait de la force à la prise en considération du critère environnemental.
Avec la même force et la même simplicité, j'indiquerai que la pondération n'est possible que pour les procédures formalisées. Une hiérarchisation des critères est toutefois possible. Avis défavorable.
L'amendement no 5411 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Philippe Meyer, pour soutenir l'amendement no 3024 .
Notre collègue Descoeur souhaite compléter l'alinéa 11 par les mots : « excepté le cas où l'objet du marché est manifestement insusceptible de pouvoir intégrer de telles caractéristiques ». Tout en comprenant, bien sûr, l'intérêt et la nécessité de mieux prendre en considération la dimension environnementale dans la commande publique, il ne faut pas exclure les rares cas où ce ne serait pas possible, d'où cette proposition d'introduire une exception à la règle.
Je vais vous rassurer : l'article L. 2152-7 du code de la commande publique satisfait votre demande. Les critères doivent en effet être « objectifs, précis et liés à l'objet du marché ou à ses conditions d'exécution », sans quoi le marché ne peut être attribué. Je serais curieuse d'avoir un exemple où cette règle ne s'appliquerait pas – jusqu'à présent nous n'en avons pas trouvé. Avis défavorable.
L'amendement no 3024 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je défendrai en même temps, si vous le permettez, monsieur le président, les amendements nos 1320 de M. Yves Hemedinger, 2344 de Mme Valérie Beauvais et 4531 de M. Jean-Marie Sermier. Il est fréquent, dans les documents de la consultation, qu'on n'objective pas assez les méthodes d'appréciation des critères environnementaux. Aux termes de ces amendements, les documents de la consultation devront les préciser et définir la méthode retenue pour les évaluer.
Là encore, ils sont satisfaits par l'article R. 2152-11 du code de la commande publique qui dispose que « les critères d'attribution ainsi que les modalités de leur mise en ? uvre sont indiqués dans les documents de la consultation ». Vos demandes d'ajouts sont par conséquent superfétatoires. Avis défavorable.
L'amendement no 2136 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Thierry Michels, pour soutenir l'amendement no 2517 .
Il vise à renforcer l'information des acheteurs publics relative à l'impact carbone lié à l'origine géographique des différents composants ou matières premières. Il s'agit d'inciter à mieux acheter et à valoriser les productions décarbonées dans la fabrication et l'acheminement d'un bien. La présente proposition a été élaborée avec le concours des acteurs français du secteur photovoltaïque qui s'attache à produire en France en s'appuyant prioritairement sur des fournisseurs français et européens. Leurs produits de qualité seront plus souvent retenus si les acheteurs agissent en connaissance de cause ; cela me paraît être une ambition à transcrire dans le droit de la commande publique – ce que nous proposons ici.
J'en demande le retrait et, à défaut, j'y serai défavorable. En effet, la précision que vous souhaitez apporter relève du domaine réglementaire. Il est de plus important que nous préservions la liberté des acheteurs sur les marchés publics – même si je suis d'accord avec vous : nous devons encourager les acheteurs à aller dans le sens que vous préconisez.
Sur le fond, le Gouvernement partage pleinement vos intentions, monsieur Michels. Il n'est toutefois pas possible de fonder l'appréciation de l'impact carbone d'une prestation uniquement sur des considérations géographiques ou d'éloignement. Pour cette raison, en particulier, je vous demanderai de retirer votre amendement, faute de quoi j'émettrai un avis défavorable.
L'amendement no 2517 est retiré.
La parole est à M. Raphaël Schellenberger, pour soutenir l'amendement no 2588 .
L'évaluation environnementale des critères d'attribution des marchés sera forcément complexe sur le terrain. Cet amendement de M. Bazin vise à donner la priorité aux critères environnementaux conduisant à la préservation des ressources naturelles nationales. C'est une évidence, je crois !
Encore une fois, la priorité dépend systématiquement de l'objet du marché. En outre, les principes fondamentaux de la commande publique font obstacle à la prise en considération d'un critère géographique. Avis défavorable.
L'amendement no 2588 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 2982 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il vise à favoriser le développement des entreprises solidaires d'utilité sociale et à valoriser leur participation à l'exécution des marchés en leur attribuant une bonification, qui restera à déterminer par voie réglementaire, lorsqu'elles sont soumissionnaires ou qu'elles participent pour au moins la moitié de l'exécution du marché quand elles interviennent en cotraitance ou en sous-traitance.
Les amendements identiques nos 5518 de M. Stéphane Viry et 5592 de M. Didier Baichère sont défendus.
Quel est l'avis de la commission ?
Nous avons longuement traité de ces sujets, en effet, et c'était bien normal. Je demande le retrait de ces amendements, sinon j'émettrai un avis défavorable.
Le présent amendement vise à favoriser le développement des entreprises solidaires d'utilité sociale et propose qu'on leur applique les dispositions prévues à l'article L. 2152-9 du code de la commande publique pour les PME et artisans, afin que l'acheteur puisse tenir compte de la part d'un marché qui sera exécutée directement ou en sous-traitance par des PME. Ce qui est déjà prévu pour les PME et artisans doit en effet être étendu aux entreprises solidaires d'utilité sociale qui, avec une taille plus de dix fois moindre, rencontrent plus de difficultés encore pour accéder aux marchés publics.
Au risque de me répéter, si les acheteurs publics peuvent réserver certains marchés de services aux entreprises de l'économie sociale et solidaire, le droit européen et la jurisprudence constitutionnelle interdisent de favoriser une catégorie de structures dans le cadre des procédures de mise en concurrence. Avis défavorable.
L'amendement no 2589 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Guillaume Kasbarian, pour soutenir l'amendement no 6262 .
Il vise à augmenter la part réservée à la location de véhicules dans les marchés publics de fourniture de véhicules à moteur, et ce afin d'accélérer la transition écologique. Lorsque nous en avions débattu en commission spéciale, vous aviez expliqué que cette règle serait difficile à respecter pour les petites communes. Nous avons donc restreint le champ d'application de la mesure à l'État et aux EPCI – établissements publics de coopération intercommunale. En encourageant la location, on favoriserait l'utilisation de véhicules plus récents – et donc plus propres – qu'en procédant à des acquisitions, lesquelles constituent donc des investissements moins vertueux.
L'adoption de cet amendement contribuerait donc à la transition écologique. J'écouterai vos retours avec intérêt.
Je vous remercie d'avoir retravaillé cet amendement, cher collègue, mais je dois hélas à nouveau vous demander de le retirer ou vous opposer un avis défavorable : en l'adoptant, nous nous confronterions, là encore, au risque que de telles clauses soient considérées comme sans lien avec l'objet du marché.
Il est malheureusement défavorable.
Au vu de l'objectif affiché dans l'exposé sommaire de l'amendement, à savoir la baisse des émissions de gaz à effet de serre grâce à une rotation régulière des véhicules utilisés, on pourrait croire que son adoption serait bénéfique. Cependant, non seulement rien n'est prévu concernant la charge financière qui pourrait incomber aux collectivités, mais surtout, l'utilisation des véhicules n'est nullement mise en question.
J'ai soutenu tout à l'heure un amendement, no 710 , qui a été trop vite balayé – mais peut-être l'avais-je mal défendu – et qui visait à inclure, parmi les critères de passation des marchés publics, la promotion de l'économie de la fonctionnalité. Cette notion, tout à fait distincte de la location, consiste à acquérir le seul usage d'un objet, sans en devenir propriétaire. Peut-être était-ce le sens de votre proposition, cher collègue, mais le but est loin d'être atteint. Pour ma part, si votre amendement était maintenu, je voterai contre.
L'amendement no 6262 est retiré.
Prochaine séance, mardi 6 avril, à neuf heures :
Questions orales sans débat.
La séance est levée.
La séance est levée à minuit.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra