Présidence
La commission poursuit l'examen des articles 48 à 71, non rattachés (M. Joël Giraud, rapporteur général).
Après l'article 58 (suite)
La commission examine en discussion commune les amendements II-CF1231 et II-CF1232 de Mme Sarah El Haïry, ainsi que l'amendement II-CF1260 de M. Erwan Balanant.
Quand nous avons supprimé l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et créé l'impôt sur la fortune immobilière (IFI), les recettes potentielles de la générosité publique ont été divisées par près de quatre. Les amendements II-CF1231 et II-CF1232 visent donc à augmenter le plafond de la réduction d'impôt sur le revenu pour dons et de le faire passer de 20 à 25 % du revenu imposable – voire à 30 %, avec le second amendement, plus audacieux.
L'amendement II-CF1260 vise à inciter aux dons en faveur des organismes luttant contre les violences domestiques. L'idée est d'aligner le régime des dons faits aux associations réalisant des actions concrètes pour venir en aide aux victimes de la violence domestique sur celui des dons aux oeuvres, en application de l'article 200 du code général des impôts, qui permet une réduction d'impôt à hauteur de 75 % desdits dons. En France, tous les trois jours, une femme perd la vie sous les coups de son conjoint, de son concubin, de son ex-conjoint ou de son ex-concubin. Il s'agit de favoriser l'égalité entre les femmes et les hommes qui est la grande cause du quinquennat, sans oublier que les victimes peuvent être aussi des hommes et des enfants – c'est pourquoi nous parlons de violences domestiques et non pas de violences conjugales. Cet amendement ne coûterait pas cher et pourrait même rapporter beaucoup d'argent : en 2016, les seules violences qualifiées de conjugales à l'égard des femmes représentaient 3,6 milliards d'euros de dépenses publiques. À moyen terme, la mesure proposée pourrait donc éviter certaines dépenses.
S'agissant des deux premiers amendements, il y a un travail d'évaluation à mener sur la transformation de l'ISF en IFI, tout comme sur le mécénat ; pour l'instant, je préfère en rester au droit actuel. Avis défavorable.
S'agissant de l'amendement II-CF1260, je ne suis pas sûr qu'une niche fiscale soit le moyen approprié de lutter contre les violences ; il serait plus efficace de renforcer le plan déjà prévu. Je ne suis pas certain qu'une niche fiscale mette plus de cervelle dans la tête de ceux qui se laissent aller à de tels actes... Avis défavorable.
L'idée est de se caler sur les déductions accordées aux associations luttant contre la très grande pauvreté. La société évolue sur ces questions ? Ce mouvement a encore besoin d'être accompagné et les associations qui luttent contre les violences domestiques ont besoin de pouvoir pérenniser leur action. Les aider par ce petit geste fiscal leur permettrait de voir les dons multipliés et de mener des actions encore plus concrètes.
La commission rejette successivement les amendements II-CF1231, II-CF1232 et II-CF1260.
Article additionnel après l'article 58 : Rehaussement du seuil de revenus au-delà duquel le taux de prélèvement à la source n'est plus égal à zéro
La commission étudie l'amendement II-CF174 de Mme Cendra Motin.
Cet amendement a pour objet de faire en sorte que les personnes qui ont un revenu de 27 000 euros par part fiscale et qui, du fait de crédits ou de réductions d'impôt, ont un taux de prélèvement à la source de zéro, puissent bénéficier de ce taux dès le départ et être exonérés comme le sont aujourd'hui tous les foyers fiscaux qui ont un revenu de 25 000 euros de revenu par part fiscale.
L'auteur de l'amendement a pris en compte les observations formulées lors de l'examen de la première partie du présent projet de loi de finances (PLF) et modifié la date d'entrée en vigueur du dispositif. Avis favorable dans ces conditions.
La commission adopte l'amendement.
Après l'article 58
La commission en vient à l'amendement II-CF1155 de M. Charles de Courson.
Cet amendement prévoit que les contribuables percevront de manière contemporaine le versement du crédit d'impôt prévu à l'article 199 sexdecies du code général des impôts dès le versement des sommes afférentes à la réalisation des services définis aux articles L. 7231-1 et D. 7231-1 du code du travail. Cet amendement n'aura aucun effet rétroactif puisqu'il s'appliquera au 1er janvier 2020.
La commission rejette l'amendement.
Elle aborde les amendements identiques II-CF1018 de M. Thibault Bazin et II-CF1284 de Mme Sylvia Pinel.
En cas de recours contre un permis de construire, on a la possibilité de différer le paiement des taxes liées à l'obtention de ce permis mais il faut pouvoir constituer une garantie, ce qui a un coût, et comme il y a paiement différé, le montant de la taxe est majoré de 10 %. Il vous est proposé de simplifier les choses et de supprimer l'obligation de constituer une garantie pour bénéficier du différé de paiement dans la mesure où le permis fait l'objet d'un recours. C'est pourquoi mon amendement propose de viser les taxes mais aussi les pénalités encourues au titre du livre des procédures fiscales pour éviter la majoration des taxes versées à l'issue du différé de paiement accordé.
Je comprends l'argument, mais mieux vaut déjà évaluer le dispositif existant avant de le modifier. Avis défavorable.
La commission rejette les amendements identiques.
Elle examine ensuite l'amendement II-CF1139 de M. Charles de Courson.
Il s'agit de demander au Gouvernement de remettre un rapport au Parlement, au plus tard en janvier 2019, sur le dispositif « Malraux ». L'objectif est d'en connaître les forces et les faiblesses pour l'améliorer, en en modulant les taux et les plafonds.
S'agit-il de l'ancien ou du nouveau « Malraux » ? Je vous le demande car plusieurs dispositifs sont concernés. Mieux vaudrait que vous retiriez votre amendement pour le rendre plus précis d'ici à la séance publique. Par ailleurs, nous pourrions peut-être traiter nous-mêmes de ce sujet au sein de l'Assemblée nationale au lieu de demander un rapport au Gouvernement.
C'est ce que j'allais proposer. Il y a déjà eu trois ou quatre évaluations du dispositif « Malraux » au cours des dix dernières années. C'est typiquement le travail d'un rapporteur spécial.
L'amendement est retiré.
La commission est saisie de l'amendement II-CF173 de Mme Cendra Motin.
Cet amendement vise à obtenir du Gouvernement un rapport d'évaluation de tous les dispositifs fiscaux et sociaux et de toutes les aides cumulables ayant trait aux services à la personne – certains relevant de la loi de financement de la sécurité sociale, d'autres de la loi de finances. Je souhaiterais qu'on puisse avoir une vision globale de tous ces dispositifs de manière à avoir une vraie base de réflexion pour pouvoir « contemporanéiser » les avantages attribués aux familles, qu'il s'agisse de la garde d'enfants, des services à la personne ou autres.
Ce n'est pas tout à fait l'objet de votre amendement, qui demande un rapport sur les services à la personne. Je signale l'étude commandée par l'Assemblée nationale dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances qui a déjà été rendue sur ce sujet. Il ne faudrait pas que le rapport soit redondant avec cette étude, surtout dans des délais aussi proches. Je vous invite à retirer votre amendement.
L'idée était d'avoir une vision transverse, englobant les lois de finances et de financement de la sécurité sociale. Nous aurons peut-être l'occasion d'en reparler dans le cadre d'une mission.
L'amendement est retiré.
La commission examine l'amendement II-CF542 de Mme Perrine Goulet.
Cet amendement vise à sécuriser les entreprises qui paient à leurs salariés des prestations sportives, afin que celles-ci ne soient pas forcément requalifiées d'avantages en nature. Quand on veut avoir trois millions de pratiquants supplémentaires et qu'on demande aux entreprises de participer à l'effort collectif pour y parvenir, il est intéressant d'éviter aux entreprises de subir un redressement de l'URSSAF et aux salariés de voir figurer sur leur fiche de paie un avantage en nature.
Je suis un peu mal à l'aise sur cette question, car un litige est en cours avec Adidas. Je pars du principe qu'un amendement n'a pas à trancher un litige en cours. Avis défavorable.
On a beaucoup de problèmes avec les avantages en nature, que ce soit au regard des cotisations sociales ou de l'impôt sur le revenu. Il est nécessaire que le législateur intervienne pour éviter les contentieux qui durent des années. Je ne suis pas d'accord avec ce que vous venez de dire, monsieur le rapporteur général : on ne peut renvoyer à l'administration le soin de se débrouiller. Il faut fixer des critères ; cet amendement a au moins le mérite de clarifier la situation.
J'irai dans le même sens que notre collègue de Courson. Nous avons besoin d'avoir une position claire. Les multiples interprétations de l'administration créent une insécurité fiscale et juridique permanente. Il faudrait que le législateur précise les dispositions applicables en la matière.
La date d'application de l'amendement est fixée au 1er janvier 2020, dans le but précisément de ne pas interférer dans le litige avec Adidas.
Il n'est pas choquant que le législateur précise son intention et ce, pour l'ensemble du territoire national, sachant qu'il peut y avoir des interprétations très différentes d'un contrôleur à un autre.
J'entends bien ce qui vient d'être dit quant à la date d'entrée en vigueur. Néanmoins, cet amendement propose des définitions juridiquement instables : qu'entend-on exactement par « prestations sportives » ? Je pense que les choses doivent êtres très précises. Je maintiens mon avis défavorable, à moins que Mme Goulet ne le retire.
Le rapporteur général a raison : cet amendement peut également être source de contentieux si les définitions proposées sont imprécises.
J'entends les arguments du rapporteur général ; je vais retirer mon amendement pour le retravailler d'ici à la séance.
L'amendement est retiré.
Article 59 : Réduction à 5,5 % du taux de TVA sur certaines prestations de gestion des déchets
La commission est saisie de l'amendement de suppression II-CF906 de Mme Émilie Bonnivard.
Cet amendement vise à supprimer l'article 59. Vous proposez de modifier la trajectoire de la composante déchets de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) et prévoyez une entrée en vigueur de cette modification au 1er janvier 2021. Pourquoi tant d'urgences et de précipitation à voter, dans le projet de loi de finances pour 2019, une disposition qui ne s'appliquera que deux ans plus tard ? Il serait plus pertinent de voir quels sont les effets de la trajectoire de cette composante déchets pour modifier dans le courant de l'année 2019, voire en 2020, un dispositif qui entrera en vigueur en 2021.
Au contraire, modifier cette trajectoire au dernier moment poserait problème. Nous laissons du temps aux acteurs et leur donnons de la visibilité pour pouvoir modifier leurs contrats et leurs modalités de gestion. Avis défavorable.
C'est l'équilibre qui a été négocié avec les collectivités territoriales dans la feuille de route sur l'économie circulaire, entre, d'une part, la trajectoire que nous avons votée en première partie, et, d'autre part, la compensation partielle par la TVA à 5,5 %.
La commission rejette l'amendement.
Elle étudie ensuite l'amendement II-CF873 de M. Matthieu Orphelin.
Cet amendement propose de préciser que la baisse de TVA à 5,5 % prévue pour les prestations fournies aux collectivités locales concerne aussi la prévention des déchets et pas simplement le tri.
Sur le fond, tout le monde est d'accord sur le fait que le meilleur déchet est celui qu'on ne produit pas. Cependant, je ne suis pas certain qu'il faille diminuer le taux actuel. Avis défavorable.
Les conclusions des acteurs qui ont élaboré la feuille de route sur l'économie circulaire concernaient également la prévention des déchets. Il s'agit d'inciter les collectivités à développer la prévention des déchets, ce qui aura un impact très positif sur les comptes publics des collectivités et de l'État. Il serait vraiment important d'expliciter que ce taux de TVA réduit s'applique aussi aux activités de prévention des déchets : il faut qu'on change de siècle quant à notre façon d'appréhender la gestion des déchets, et c'est évidemment la prévention qui est la plus rentable économiquement pour l'ensemble des acteurs publics et privés.
Le texte gouvernemental vise « les prestations de service qui concourent au bon déroulement des opérations ». Il me semble que cela inclut la prévention.
Je n'en suis pas sûr. Cela inclut par exemple des prestations de communication auprès des usagers, comme auparavant, mais il me semble que votre amendement est plus large que cela.
Il faut que le ministre nous précise ce point en séance. Il me semble, pour avoir travaillé dans le domaine des déchets et de l'économie circulaire, que la prévention est effectivement incluse dans le dispositif.
Sur ce plan, la rédaction n'a pas changé par rapport au texte antérieur. Or, la prévention n'est pas traitée dans le Bulletin officiel des finances publiques (BOFiP) antérieur. La bonne solution est de retirer cet amendement pour que le ministre dise le droit et, au besoin, demande à ses services de rédiger un BOFiP adapté.
On voit l'intérêt de la discussion : il vaut mieux préciser les choses dans la loi. Je maintiens mon amendement.
La commission rejette l'amendement.
Elle est saisie en discussion commune des amendements identiques II-CF886 de M. Matthieu Orphelin et II-CF1151 de Mme Christine Pires Beaune, ainsi que de l'amendement II-CF874 de M. Matthieu Orphelin.
Un équilibre avait été trouvé avec l'ensemble des acteurs dans la feuille de route « économie circulaire », que le Gouvernement avait acté : une nouvelle trajectoire sur la hausse de la TGAP déchets. Il est effectivement important que le prix de la mise en décharge augmente à partir de 2021 pour laisser le temps aux acteurs de se préparer, dans une logique non de fiscalité punitive, mais de fiscalité incitative. D'autre part, est prévue dès 2019, une baisse de la TVA sur les activités de prévention et de recyclage des déchets. Cela concerne un peu plus de la moitié des collectivités. L'amendement II-CF874 prévoit cette baisse de TVA dès 2019, l'amendement II-CF886 en 2020.
L'amendement II-CF1151 vise également à avancer au 1er janvier 2020 l'extension du périmètre de la TVA à taux réduit aux prestations visées à l'article 59.
Les articles 7, 8 et 59 du projet de loi de finances constituent un ensemble qui vise à un changement de mentalité en matière de gestion des déchets. Cet ensemble a vocation à entrer en vigueur en 2021 pour laisser aux acteurs le temps de s'adapter. Je suis défavorable à une modification qui ne concernerait qu'un élément de cet ensemble cohérent.
La commission rejette successivement les amendements identiques II-CF886 et II-CF1151 et l'amendement II-CF874.
La commission adopte l'article 59 sans modification.
Après l'article 59
La commission examine l'amendement II-CF883 de M. Fabrice Brun.
Cet amendement vise à compléter le code général des impôts afin d'éviter que les taxes pour la fourniture d'électricité, de gaz et d'eau se retrouvent dans la base d'imposition de la TVA. L'idée est de ne pas appliquer une taxe à des taxes existantes.
La commission rejette l'amendement.
Puis, suivant l'avis défavorable du rapporteur général, la commission rejette l'amendement II-CF1358 de M. Daniel Labaronne.
Article 60 : Renforcement du supplément de TGAP relatif aux biocarburants
La commission examine, en discussion commune, les amendements identiques II-CF176 de Mme Lise Magnier, II-CF864 de Mme Véronique Louwagie et II-CF1172 de M. Charles de Courson, ainsi que l'amendement II-CF1243 de M. Bruno Millienne.
Le superéthanol E 85 a énormément de succès, comme vous le voyez tous les jours dans la publicité, car les adaptateurs ont enfin été autorisés et commencent à être distribués. Or, certains bons esprits voudraient considérer qu'il ne doit pas être pris en compte dans l'assiette de la taxe incitative à l'incorporation de biocarburants, ce qui est totalement erroné. Cet amendement de précision vise à ce que le Gouvernement le rappelle.
L'amendement II-CF1243 est d'inspiration identique. Sont concernés le superéthanol E 85 et le carburant éthanol pour les moteurs dédiés à l'allumage par compression.
Ces amendements me semblent satisfaits, mais je comprends que vous souhaitez une explication du Gouvernement. Je vous invite donc à les retirer et à les redéposer pour la séance publique pour voir si le ministre fait la même interprétation que moi, à savoir que le principe d'équivalence conduit à inclure l'E 85 dans l'assiette de la taxe.
Je ne doute pas que le ministre aura la même position que le rapporteur général, mais il s'agit aussi de connaître la position du Gouvernement sur les biocarburants à 100 %. Tant qu'il reste 15 % d'essence, on peut assimiler le biocarburant à de l'essence ; mais quand il est à 100 % biologique, on est dans le vide. Il faut dès à présent arrêter une position douanière en la matière, si j'ose dire.
Je retire mon amendement pour le redéposer en séance.
Les amendements II-CF176, II-CF1172 et II-CF1243 sont retirés.
La commission rejette l'amendement II-CF864.
Elle est saisie des amendements identiques II-CF182 de Mme Lise Magnier, II-CF866 de Mme Véronique Louwagie, II-CF1173 de M. Charles de Courson et II-CF1244 de M. Bruno Millienne.
L'article 60 va dans la bonne direction, mais trop lentement puisque les taux d'incorporation cibles dans l'essence ne seront que de 7,7 % en 2019 et 7,8 % en 2020 : ces taux sont trop faibles au vu de l'enjeu de décarbonation des transports et des capacités de production de bioéthanol excédentaires en France. Le bioéthanol produit en Europe réduit en moyenne de 70 % les émissions de gaz à effet de serre par rapport à l'essence fossile.
Mon amendement propose d'aller un peu plus vite que ce que propose le Gouvernement en prévoyant un taux de 8,3 % au lieu de 7,7 % en 2019 et de 8,9 % au lieu de 7,8 % en 2020. Afin permettre aux distributeurs de carburant de satisfaire à cette augmentation, nous proposons aussi de ne plus soumettre au plafond de 7 % le bioéthanol issu des résidus des industries sucrières et amidonnières. La trajectoire proposée est réalisable grâce à la dynamique de croissance de l'essence SP 95, qui comprend 10 % d'éthanol, et du superéthanol E 85, qui comprend de 65 à 87 % d'éthanol. La forte croissance actuelle du superéthanol – plus 43 % entre janvier et août 2018 par rapport à la période de janvier à août 2017 –, grâce aux boîtiers E 85 homologués, assure à elle seule l'essentiel de la progression du pourcentage cible dans l'essence. Une telle mesure favoriserait la bioéconomie française fondée sur des productions agricoles locales, dans une logique d'économie circulaire.
L'amendement II-CF1244 vise à favoriser la bioéconomie dans une logique d'économie circulaire en s'appuyant sur les productions agricoles locales.
Je comprends l'objectif, mais le droit européen ne permet pas actuellement de considérer les biocarburants issus de résidus amidonniers et sucriers comme des biocarburants avancés, susceptibles d'excéder le plafond de 7 %. L'annexe IX de la directive du 9 septembre 2015 concernant la qualité de l'essence et des carburants diesel, dite « directive CASI », considère que seuls les résidus de la filière bois ne sont pas des résidus en concurrence alimentaire.
Je vous demanderai de retirer vos amendements, à défaut de quoi j'y serai défavorable.
Monsieur le rapporteur général, il y a deux volets dans mon amendement ; vous n'avez répondu que sur le premier. Seriez-vous favorable au second ?
L'augmentation du pourcentage cible d'incorporation est techniquement très complexe, surtout sans pouvoir augmenter par ailleurs le plafond d'incorporation des résidus amidonniers et sucriers. Je vous propose de redéposer votre amendement en séance, en n'en reprenant que cet aspect, le premier volet étant contraire au droit européen.
Les amendements identiques II-CF182, II-CF1173 et II-CF1244 sont retirés.
La commission rejette l'amendement II-CF866.
Puis, elle examine les amendements identiques II-CF177 de Mme Lise Magnier, II-CF950 de Mme Marie-Christine Dalloz, II-CF1171 de M. Charles de Courson et II-CF1245 de M. Bruno Millienne.
L'objectif de ces amendements est de permettre l'incorporation dans l'essence des biocarburants produits à partir de matières lignocellulosiques, de marc de raisin ou de lies de vin, au-delà du plafond des biocarburants de première génération (1G) et du seuil concernant ceux de la partie B de l'annexe IX de la directive sur les énergies renouvelables. Il s'agit d'aider au développement de la filière des biocarburants français sans importer de produits tels que l'huile de palme, par exemple.
Il existe un débat sur la prise en compte ou non dans la détermination des plafonds d'incorporation des biocarburants produits à partir de matières lignocellulosiques – autrement dit du bois, pour simplifier –, de marc de raisin ou de lies de vin. Le but est de permettre l'incorporation dans l'essence de ces biocarburants, mais au-delà du plafond des biocarburants 1G et du seuil concernant ceux de la partie B de l'annexe de la directive sur les énergies renouvelables.
Certains voudraient qu'ils soient intégrés, mais en restant dans le cadre du plafond, ce qui risque d'entraîner des effets de concurrence interne. Par ailleurs, la portée de cette mesure reste limitée, dans la mesure où il est encore compliqué, technologiquement, de produire des biocarburants à partir du bois, ce qui influe sur le coût de revient. C'est plus facile avec le marc ou la lie de vin.
Je ne comprends pas très bien la logique de ces amendements, dans la mesure où les huiles usagées et les graisses animales ne sont absolument pas en concurrence avec les marcs de raisin et les lies de vin : elles sont transformées en esters, destinés à produire du biodiesel, et non pas incorporés à l'essence, sous peine de dégrader l'indice d'octane. Avis défavorable.
La directive sur les énergies renouvelables encourage le développement des biocarburants issus de déchets et de résidus, ce qui est très bien. Elle prévoit en particulier un objectif spécifique pour ceux qui sont produits à partir du bois, du marc de raisin ou de lies de vin, et sont regroupés dans la partie A de son annexe IX. Le problème est que certains veulent intégrer dans cette catégorie les biocarburants produits à partir d'huiles usagées, ce qui risque de fragiliser la filière des biocarburants produits à partir du bois, des marcs et des lies de vin.
Relever le plafond pour ces produits va dans le bon sens puisque cela participe à la décarbonation. Je ne comprendrais pas que l'on maintienne ce blocage.
La commission rejette les amendements identiques.
Puis elle examine les amendements identiques II-CF926 de Mme Lise Magnier et II-CF1200 de M. Charles de Courson.
Dans la mesure où les externalités négatives des effluents d'huileries de palme et rafles sont équivalentes – voire pires – à celles du tallol et du brai de tallol, qui sont des acides gras, il est juste et proportionné de soumettre la part d'énergie issue de ces matières premières au même seuil de 0,6 %.
Sans être un grand spécialiste du tallol et du brai de tallol, je ne suis pas défavorable, a priori, à une telle mesure, mais je considère qu'elle peut avoir des effets indésirables : ces amendements, tel que rédigés, diminueraient mécaniquement l'assiette de la prise en compte du brai de tallol en y ajoutant l'huile de palme, plutôt que d'ajouter dans le tableau une ligne supplémentaire qui individualiserait les résidus de palme.
Je vous invite donc à retirer ces amendements, dans l'attente d'une explication du ministre.
L'amendement II-CF1200 est retiré.
La commission rejette l'amendement II-CF926.
Elle est ensuite saisie de l'amendement II-CF1201 de M. Charles de Courson.
Cet amendement a pour objet de reporter à 2020 l'augmentation du seuil d'incorporation des matières premières énumérées à l'annexe IX de la directive sur les énergies renouvelables. Ce report est justifié par la nécessité de préserver les équilibres économiques entre les différentes filières françaises de biocarburants. Nous devons en effet faire très attention à notre filière biocarburants, totalement déstabilisée par le problème de l'huile de palme, en particulier pour ce qui concerne le biodiesel, mais également le bioéthanol.
L'annexe IX de la directive 200928 modifiée ne vise pas l'huile de palme. Par ailleurs, la production de biocarburants à partir d'huiles usagées est encore récente et marginale, et la production française en la matière est bien en dessous d'un taux d'incorporation de 0,9 %, ce qui limite l'impact de l'article lui-même. Avis défavorable.
Votre argument est réversible : s'il n'y a guère de problème, il n'y a rien d'extravagant à retarder d'un an l'augmentation du taux d'incorporation.
Il ne s'agit pas d'un taux d'incorporation, mais d'un plafond. Je reste irréversiblement défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine l'amendement II-CF1202 de M. Charles de Courson.
L'article 60, dans sa version actuelle, menace doublement le seuil de 7 % dédié aux céréales et autres plantes riches en amidon sucrières ou oléagineuses et autres produits issus des cultures principales des terres agricoles principalement utilisées à des fins de production d'énergie, sucres non extractibles et amidon résiduel, autres que les matières mentionnées à l'annexe IX de la directive sur les énergies renouvelables.
Elle le menace, d'une part, en permettant le compte simple des biocarburants avancés une fois le plafond de compte double atteint, et ce alors même qu'ils ne sont pas encore disponibles à l'échelle industrielle, puisque les biocarburants de deuxième génération, toujours pas opérationnels, ne sont pas comptabilisés de la même manière que ceux de la première génération ; d'autre part, en offrant aux biocarburants produits à partir de tallol, de brai de tallol et des matières premières mentionnées à la partie B de l'annexe IX, la possibilité d'empiéter sur ce seuil de 7 %.
En l'état, l'adoption de l'article 60 se ferait au détriment de la filière française et européenne des huiles et protéines végétales, alors même que cette dernière est porteuse d'emplois et qu'elle participe activement à l'indépendance énergétique et protéique de la France et de l'Union européenne, en réduisant notamment nos importations brésiliennes et américaines de protéines sous forme de soja. La rédaction que nous proposons améliore donc le texte gouvernemental.
Je n'ai pas le sentiment que votre amendement améliore le texte gouvernemental car permettre le double comptage des biocarburants avancés permet justement d'atteindre nos objectifs, tout en orientant progressivement la production vers les biocarburants les plus écologiquement vertueux.
Il est par ailleurs contraire à nos engagements en matière d'évolution vers des biocarburants nationaux ou européens qui ne sont pas en concurrence alimentaire. Avis défavorable.
Je ne suis pas du tout d'accord, dans la mesure où les biocarburants dits avancés ne sont pas encore au point, à supposer qu'ils soient un jour technologiquement et économiquement concurrentiels par rapport aux carburants de première génération.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle en vient à l'amendement II-CF1048 de M. Éric Coquerel.
Non seulement les biocarburants issus de l'huile de palme et du soja sont responsables de la déforestation et de la dégradation des écosystèmes, mais leur bilan carbone et par ailleurs très lourd. Or le Parlement européen a voté l'interdiction des importations d'huile de palme utilisée dans les biocarburants uniquement à partir de 2021 et de 2030 pour le soja. Dans le même temps, la France a donné son feu vert à la raffinerie Total de La Mède, qui importera 300 000 tonnes d'huile de palme par an, soit 10 % de la consommation totale d'huile de palme en Europe pour les biocarburants en 2016.
Nous souhaitons donc que les biocarburants issus de l'huile de palme et du soja soient exclus du calcul de ce taux minoré à compter du 1er janvier 2020. Cela fait partie des outils dont nous disposons pour réussir la transition écologique, et nous ne devons pas remplacer un carburant polluant par un autre carburant polluant qui provient de surcroît le plus souvent de monocultures très néfastes pour les pays qui les produisent.
La question de l'utilisation de l'huile de palme dans les biocarburants est traitée, au niveau européen, dans le cadre des négociations en cours sur la révision de la directive « énergies renouvelables ». Un accord a été trouvé mi-juin : les biocarburants ayant un fort impact sur le changement d'affectation des sols seront définis par un rapport de la Commission et leur niveau d'incorporation dans les carburants restera gelé au niveau de 2019. Il diminuera progressivement à partir de 2023 pour atteindre 0 % en 2030.
Le Gouvernement a soutenu tout au long des négociations une approche constructive et exigeante dans l'objectif de limiter l'utilisation des matières susceptibles de donner lieu à de la déforestation importée. À cet égard, la France peut se prévaloir d'une approche exigeante de la notion européenne de « durabilité » des matières premières. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 60 sans modification.
Après l'article 60
La commission examine, en discussion commune, les amendements identiques II-CF56 de M. Vincent Descoeur et II-CF78 de Mme Nathalie Bassire, ainsi que les amendements identiques II-CF57 de M. Vincent Descoeur et II-CF79 de Mme Nathalie Bassire.
L'amendement II-CF56 vise à s'assurer que la hausse de la fiscalité écologique finance bien la transition énergétique. Il propose pour cela de doter les EPCI et les régions ayant adopté soit un plan climat-air-énergie territorial (PCAET) soit le volet énergie d'un schéma régional d'aménagement et de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET) d'une part des recettes, pour financer des actions concrètes en matière de transition énergétique.
L'amendement II-CF57 s'inscrit dans le même esprit.
Nous avons déjà discuté de ces amendements. Le prélèvement au profit des collectivités est de nature à diminuer les fonds qui alimenteront les autres actions en faveur de la transition énergétique, et il faut donc faire très attention à la ressource. Ce transfert ne doit pas constituer un effet d'aubaine pour les collectivités et doit donc être obligatoirement fléché vers la mise en oeuvre des plans climat-air-énergie.
Par ailleurs, les conditions d'octroi prévues par l'amendement sont trop souples, car elles se limitent à l'écriture d'un PCAET, ce qui n'est pas très compliqué. Avis défavorable.
La commission rejette successivement les amendements.
Puis elle examine l'amendement II-CF1351 de Mme Laurianne Rossi, qui fait l'objet des sous-amendements II-CF1399 et II-CF-1400 de M. Charles de La Verpillière.
J'ai proposé dans la première partie du projet de loi de finances, au nom de la commission du développement durable, un amendement visant à instaurer sur les fluides hydrofluorocarbures (HFC), ces puissants gaz à effet de serre, une taxe assortie d'un mécanisme de suramortissement.
À la demande du ministre en séance publique, le mécanisme de suramortissement a été retiré. Nous proposons cet amendement, qui prévoit donc une taxe progressive à partir de 2021 sur l'utilisation de ces fluides. Il s'agit d'un amendement rédigé en concertation avec le Gouvernement et les professionnels, qui formalise l'engagement ministériel pris devant la représentation nationale.
Le sous-amendement II-CF1399 vise à s'assurer que le remboursement de taxe en cas d'exportation ou d'expédition à destination d'un État membre de l'Union européenne concernera aussi bien les fluides en vrac que les fluides incorporés dans des équipements fixes préchargés.
Il rappelle également que cette taxe pourra être annulée par anticipation, si les engagements volontaires de substitution de la part des importateurs et utilisateurs de ces fluides sont suffisamment forts. À cet effet, une commission parlementaire d'évaluation de ces engagements statuera au plus tard en septembre 2020 sur le niveau effectif de substitution par des fluides à faible potentiel de réchauffement global (PRG).
Le sous-amendement II-CF1400 reprend la seconde partie de l'amendement de Mme Rossi, adopté en commission sur la première partie du projet de loi de finances, en créant un mécanisme de suramortissement afin d'encourager les entreprises à investir dans des machines frigorifiques utilisant des fluides alternatifs, sans HFC, et présentant un impact climatique moindre. Le taux initialement proposé de 40 % est repris.
L'Union européenne s'est saisie de la question des HFC, et il existe un règlement, le règlement F-Gaz II, qui pose un calendrier destiné à interdire la mise sur le marché de tels fluides. Cette interdiction doit intervenir de manière progressive, avec un système d'échanges de quotas. Il me semble donc qu'il faut laisser un peu de temps aux utilisateurs de tels fluides avant de réaliser cette taxation.
Je suis donc défavorable à l'amendement et aux sous-amendements.
Des discussions sont encore en cours, car certains secteurs risquent d'être extrêmement affectés par la taxation. Des engagements volontaires vont être pris, et il me semble préférable d'attendre l'issue des négociations. Notre groupe sera donc défavorable à cet amendement.
Il faut s'assurer que l'amendement qui doit être déposé en séance concernera bien tout le dispositif et que les précisions que nous proposons y seront intégrées.
L'un des sous-amendements qui nous est proposé vise à préserver nos exportations de fluides HFC tout en taxant les importations. Je rappelle les engagements qui ont été pris par la France au niveau européen, mais également au niveau international, lors de la ratification du protocole de Kigali : nous nous sommes engagés à adopter une politique vertueuse en ce qui concerne ces fluides, qui, rappelons-le, figurent parmi les plus puissants gaz à effet de serre utilisés sur notre planète. Je vois donc mal la pertinence de ce sous-amendement, que ce soit d'un point de vue économique ou d'un point de vue environnemental, mais nous aurons le débat en séance lorsque nous entendrons la proposition du Gouvernement.
La commission rejette successivement les sous-amendements et l'amendement.
Puis elle en vient à l'amendement II-CF47 de M. Vincent Descoeur.
Près d'un tiers des déchets ménagers des Français est composé de produits n'ayant pas de filière de recyclage. Les metteurs sur le marché de ces produits ne contribuent donc pas à la gestion de ces déchets, alors que les metteurs sur le marché de biens couverts par une filière de recyclage le font par le biais de la responsabilité élargie des producteurs (REP). Cet amendement vise donc à mettre en place une TGAP amont sur les produits non fermentescibles et non couverts par la REP.
Nous avons déjà eu ce débat sur la TGAP amont, lors de nos discussions sur la première partie du projet de loi de finances, et je rappelle que la feuille de route de l'économie circulaire l'a exclue. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine, en discussion commune, les amendements identiques II-CF53 de M. Vincent Descoeur et II-CF578 de M. Éric Alauzet ainsi que les amendements identiques II-CF52 de M. Vincent Descoeur et II-CF1303 de M. Paul-André Colombani.
Il est injuste de taxer les collectivités pour l'élimination de déchets pour lesquels il n'existe aucune alternative. L'amendement II-CF53 vise donc à leur accorder une franchise correspondant à cette part de déchets résiduels inévitables.
Conformément à la feuille de route de l'économie circulaire et à la philosophie du Grenelle de l'environnement, il faut aborder le problème du recyclage de façon globale, en favorisant les filières qui sont en amont du traitement des déchets – prévention, tri, etc. – et en pénalisant celles qui sont à la fin de la chaîne, incinération et mise en décharge.
L'idée d'instaurer une franchise sur la TGAP aval, en décharge, est rendue nécessaire par les carences de la filière en amont ; il faut donc traiter les deux questions en même temps. Cette loi de finances a globalement permis des progrès, avec la TVA réduite d'un côté et l'augmentation de la TGAP en aval, mais demeure le problème des déchets non recyclables, qui sont pénalisés en aval. D'où mon amendement II-CF578, qui instaure une franchise.
Cela étant, il faut, parallèlement, transférer la taxation en amont sur le producteur, de manière à ce que ce ne soit plus le contribuable ou l'usager qui paie, mais le consommateur.
L'amendement II-CF52 procède du même esprit, l'idée est d'éviter de faire payer les collectivités qui ont en charge la gestion de ces déchets mais de taxer ceux qui les mettent sur le marché. C'est du bon sens.
Nous avons déjà débattu très longuement de ces questions ; j'avais émis un avis défavorable, que je réitère aujourd'hui.
La commission rejette successivement les amendements.
Puis elle examine les amendements identiques II-CF54 de M. Vincent Descoeur II-CF1304 de M. Paul-André Colombani.
Partant du constat que la hausse de la TGAP aura pour conséquence une hausse de la fiscalité acquittée par les collectivités, et donc par les usagers, sans aucune assurance que les déchets résiduels pourront être réduits, mon amendement propose d'affecter les recettes supplémentaires générées par la TGAP au fonds déchets de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), qui pourrait financer des actions visant à réduire de manière efficace ces déchets résiduels.
Les articles non rattachés sont souvent l'occasion de recycler, si j'ose dire, les amendements qui ont reçu un avis défavorable en première partie, et que je maintiens.
La commission rejette les amendements.
Article additionnel après l'article 60 : Suppression de la redevance pour obstacles sur les cours d'eau
La commission est saisie de l'amendement II-CF1357 de M. Daniel Labaronne.
Cet amendement vise à supprimer une redevance pour obstacle sur les cours d'eau, du fait notamment de la complexité du dispositif, de ses modalités de perception compliquées et du très faible rendement de ladite redevance. J'indique que l'Inspection générale des finances, dans un rapport de 2014, recommandait déjà sa suppression.
La commission adopte l'amendement.
Après l'article 60
La commission examine, en discussion commune, les amendements identiques II-CF50 de M. Vincent Descoeur, II-CF576 de M. Éric Alauzet et II-CF1302 de M. Paul-André Colombani, ainsi que l'amendement II-CF771 de M. Éric Alauzet.
L'idée de mon amendement, une fois de plus, est de mettre fin à une situation qui consiste à taxer aveuglément les gestionnaires qui ne sont pas responsables de la non-recyclabilité des produits. Nous proposons donc de créer un signal en amont, en mettant en place une écocontribution.
Dans une perspective globalisante, la question est toujours de savoir qui, selon le principe de taxation retenue, va payer pour les déchets non recyclables : est-ce, en aval, le contribuable, à travers la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, ou l'usager, à travers la redevance ? ou est-ce, en amont, non pas l'industriel, qui va évidemment répercuter la taxe sur ses prix de ventes, mais le consommateur ?
Cette dernière solution est évidemment beaucoup plus vertueuse, car elle incite davantage à entrer dans l'économie circulaire et à s'orienter vers l'écoconception des produits, en envoyant aux industriels un signal plus fort et plus efficace. C'est dans cette direction que nous devons poursuivre notre travail. Tel est le sens de mes deux amendements.
La commission rejette successivement les amendements.
Elle examine ensuite l'amendement II-CF1235 de M. Bruno Millienne.
Cet amendement vise, dans le cadre de la transition énergétique, à proposer des solutions aux Français pour qu'ils puissent se déplacer de manière plus éco-vertueuse. Il propose pour cela d'exonérer de taxe les certificats délivrés pour les véhicules en cas d'installation de dispositifs de conversion au bioéthanol E 85.
Cet amendement présente indéniablement un intérêt, mais ce genre de mesure nécessite une étude approfondie en termes d'impact sur l'ensemble des filières. Je vous demanderai donc de le retirer pour que nous puissions effectuer ce travail.
La même remarque vaudra pour l'amendement qui suit, II-CF1138.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle en vient à l'amendement II-CF1138 de M. Charles de Courson.
Le superéthanol E 85, composé pour 65 à 85 % de bioéthanol et pour le reste d'essence, se développe rapidement depuis qu'on a enfin, par l'arrêté du 15 décembre 2017, homologué les boîtiers de conversion qui permettent à la quasi-totalité des véhicules de bénéficier de ce carburant beaucoup moins coûteux et beaucoup plus écologique.
Le problème, c'est que les textes actuels excluent les véhicules de plus de 15 chevaux, qui ne peuvent donc bénéficier de l'exonération des certificats d'immatriculation. Je propose donc une mesure intermédiaire qui consiste à accorder un abattement de 50 % pour les véhicules de plus de 15 chevaux.
Comme je viens de l'indiquer, je demande le retrait de cet amendement. Il me semble en effet que nous devons adopter une approche plus globale, et le ministre sera probablement de mon avis.
M. de Courson marchande régulièrement le retrait de ses amendements... Je répète qu'il faut appréhender ces deux amendements dans une vision un peu plus globale, et non secteur par secteur.
Monsieur le rapporteur général, vous reconnaissez l'intérêt de ces deux amendements, mais vous réclamez une approche plus globale. Mais l'approche globale, elle est simple : on encourage l'usage du superéthanol E 85, les boîtiers ont enfin été homologués et rencontrent un tel succès que certains garages ne parviennent plus à faire face. Sans parler des débats sur les incidences de la hausse des prix des carburants. Qu'entendez-vous par une vision plus globale ?
Je souhaite que vous en discutiez au banc avec le ministre, pour réfléchir à la manière d'avancer dans la direction que vous suggérez.
Nous partageons l'exposé des motifs. Prévoir des incitations à l'installation de ce genre de boîtiers paraît intéressant. Nous travaillons aujourd'hui sur le sujet, pour voir ce qui serait possible avec le Gouvernement. Supprimer la taxe, comme vous le proposez, est-ce la meilleure solution ? N'y a-t-il pas d'autres voies à explorer ? En tout cas, il serait bon que nous puissions avancer ensemble sur le sujet.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement II-CF 971 de Mme Barbara Pompili.
Cet amendement reprend une proposition de la commission d'enquête sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires, qui a rendu son rapport le 5 juillet dernier. Afin d'assurer un financement suffisant et pérenne des commissions locales d'information (CLI) et de l'Association nationale des comités et commissions locales d'information (ANCCLI), cet amendement met en application la disposition de la loi relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire, qui est codifiée à l'article L. 125-31 du code de l'environnement, en leur attribuant 1 % du produit de la taxe sur les installations nucléaires de base. Ce montant, qui représenterait près de 6 millions d'euros, permettrait notamment aux collectivités locales de réduire leur participation au financement.
Je me demandais effectivement ce qui allait se passer avec les collectivités territoriales. Si cela devait se traduire par un désengagement, je trouverais cela un peu dommage. Au-delà, vous feriez ainsi passer de 3 millions d'euros à 9 millions d'euros le niveau de financement de de ces commissions : cela paraît beaucoup... Avis défavorable.
Nous avons adopté, en commission des finances, sur le budget de la recherche, le principe d'un document de politique transversale, un « jaune », sur l'intégralité des budgets de l'Autorité de sûreté nucléaire, de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, des CLI et de l'ANCCLI, en un mot de toutes les instances, institutions et organismes qui concourent, localement ou nationalement, avec les institutions publiques, à la surveillance et à la sûreté nucléaire. Une fois que nous disposerons de ce document, nous pourrons regarder quelle est la meilleure allocation et la meilleure mobilisation des moyens nécessaires.
L'amendement est retiré.
Article 61 : Obligation de télédéclaration de la taxe sur les salaires
La commission adopte l'article 61 sans modification.
Après l'article 61
La commission examine les amendements identiques II-CF69 de Mme Véronique Louwagie et II-CF115 de Mme Marie-Christine Dalloz.
Afin de lutter contre la fraude, le législateur a institué une obligation d'utiliser un logiciel ou système de caisse sécurisé et certifié, assorti d'une amende à chaque manquement constaté. À l'origine, de 5 000 euros, celle-ci a été portée à 7 500 euros, ce qui me semble franchement excessif et disproportionné, s'agissant d'une amende fiscale – surtout quand on connaît la situation financière de nos commerçants.
La volonté du Gouvernement est de passer d'une culture de contrôle à une culture de l'accompagnement et du conseil ; il vous est donc proposé par l'amendement II-CF69 de revenir à la volonté initiale du rédacteur, soit 5 000 euros.
J'aimerais bien savoir, monsieur le rapporteur général, quelle est la recette attendue, combien de contrôles ont eu lieu et quel est le montant des sanctions prononcées au titre de cette pénalité fiscale.
Certes, les grandes surfaces et les moyennes surfaces ont déjà des caisses sécurisées. Mais je vais vous poser une question de simple arithmétique : combien un boulanger devra-t-il vendre de baguettes et de miches de pain pour acquitter une amende forfaitaire fiscale de 7 500 euros ? Le montant prévu me paraît totalement disproportionné. Revenons à du bon sens : 5 000 euros, c'est déjà largement dissuasif. S'il n'y a pas de recettes fiscales à hauteur de ce qui est attendu, je ne vois pas l'intérêt de maintenir un tel dispositif de ce type-là. D'où la modification du barème fiscal proposée par mon amendement.
L'amende en question n'a pas forcément un objectif financier, mais un objectif comportemental : sa vocation est de dissuader. Je ne saurais donc vous donner l'équivalent en miches d'une amende qui n'a pas vocation à être perçue... Du reste, le ministre a laissé entendre que les services accompagneraient les commerçants dans cette mise en conformité des logiciels de caisse. Autrement dit, le but n'est pas de faire du chiffre, mais d'inviter nos commerçants à adopter de meilleurs standards pour éviter la fraude, qui pénalise tout le monde, à commencer par les gens honnêtes.
On ne fait pas de différence entre le cas du boucher du coin et celui de la grande surface. Les situations ne sont pourtant pas les mêmes. Si ces amendements étaient précisés sur ce plan d'ici à la séance publique, je pourrais envisager de les voter.
J'en viens à l'explication du rapporteur général. Au moment où nous avons discuté de la loi sur la fraude fiscale, notre groupe a proposé des amendes beaucoup plus lourdes, dans un même but dissuasif, et pour des faits autrement plus graves. Car, dans certains cas, le montant infime au regard de la gravité des faits. Cela ne vous a pas empêché d'émettre un avis défavorable. Mais aujourd'hui, l'argument de l'effet dissuasif vous est bien utile ! Je trouve seulement qu'il y a deux poids et deux mesures...
Il serait plus judicieux de déterminer un pourcentage du chiffre d'affaires, comme nous l'avons fait dans la loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (EGALIM). Une amende de ce montant n'a pas du tout les mêmes effets selon que vous vous en prenez à une petite PME ou à un artisan, ou bien à une entreprise beaucoup plus grande.
En retenant un pourcentage du chiffre d'affaires, on risque d'arriver à des sommes nettement plus élevées. Et si j'ai été amené à refuser un certain nombre d'amendements portant sur des amendes, monsieur Coquerel, c'était en raison de cadres légaux qui s'y opposaient, ou de leur montant disproportionné au retard de l'objectif poursuivi, ce qui nous aurait valu d'être censurés par le Conseil constitutionnel. De la même façon, j'ai fait réduire le montant d'un certain nombre d'amendes parce que le texte qui ne respectait pas le droit commun en la matière. Ne voyez donc rien de personnel dans mon avis défavorable.
La commission rejette les amendements.
Article 62 : Transfert à la DGFiP du recouvrement des taxes sur les boissons non alcooliques
La commission adopte l'article 62 sans modification.
Article additionnel après l'article 62 : Plafonnement à 5 % de la trajectoire d'augmentation de la taxe sur les entrées en salle de cinéma en outre-mer
La commission examine, en discussion commune, l'amendement II-CF1394 du rapporteur général ainsi que les amendements II-CF146 et II-CF143 de M. Raphaël Gérard.
L'amendement II-CF1394 vise à reprendre les idées développées dans des amendements II-CF146 et II-CF143 de Raphaël Gérard et soutenues par nos collègues Maina Sage et Stéphane Claireaux, à propos de la taxe sur les entrées de salles en outre-mer.
Les différents intervenants m'avaient demandé d'expertiser la question, notamment vis-à-vis du Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC). Par cet amendement, je vous propose de revenir sur la trajectoire d'augmentation de la taxe sur les entrées en salle applicable à l'outre-mer et de retenir celle qui a été prévue par Raphaël Gérard : le taux resterait fixé à 5 %, c'est-à-dire au niveau actuel – ce qui correspond à la moitié du taux pratiqué en métropole, compte tenu, notamment, du nombre beaucoup plus faible d'interventions financées par cette taxe.
Le taux de la taxe en métropole est de 10,7 %, me semble-t-il ? Qu'est-ce qui justifie un taux différent pour les outre-mer ?
Cette taxe alimente un système d'investissement dans le cinéma qui est peu opérant dans les outre-mer. Le taux applicable en métropole est difficile à justifier dans ces territoires, à plus forte raison si l'on tient compte du pouvoir d'achat. Au demeurant, le CNC est d'accord sur ces dispositions particulières à l'outre-mer.
Il faut effectivement tenir compte des spécificités d'exploitation des salles de cinéma dans les départements d'outre-mer. Ces salles sont souvent exposées à un risque météorologique et sismologique accru, mais aussi à la violence, qui sont autant de facteurs de coût d'exploitation supplémentaires.
En limitant à 5 % le taux de la taxe, on reste à la limite admissible pour préserver l'équilibre financier des salles de cinéma et garantir leur viabilité. Rappelons que le cinéma est souvent la seule activité culturelle accessible aux publics ultramarins, souvent confrontés à de graves difficultés sociales et économiques.
Je vous propose de retirer vos amendements et de cosigner le mien, pour vous associer à la démarche que je viens de présenter.
Les amendements II-CF146 et II-CF143 sont retirés.
La commission adopte l'amendement II-CF1394.
Article 63 : Encaissement des recettes fiscales par un organisme autre que le comptable public
La commission examine les amendements de suppression II-CF1153 de Mme Christine Pires Beaune et II-CF1309 de Mme Sabine Rubin.
Si je comprends l'objectif poursuivi par la direction générale des finances publiques (DGFiP) de limiter les risques de sécurité, mais aussi – même si c'est moins mis en avant – de réaliser des économies en termes de personnel, j'entends me placer du côté des usagers.
4 millions d'opérations en espèces sont encore effectuées au guichet de la DGFiP. Au vu du chiffre global, cela peut sembler effectivement très peu. Mais ceux qui utilisent ces moyens de paiement sont essentiellement des personnes âgées ou des publics très défavorisés. Or on n'a même pas pris la peine d'interroger ceux qui distribuent des secours d'urgence ou les centres communaux d'action sociale. Je me demande vraiment à quoi sert une étude d'impact ! C'est pourquoi je propose, par mon amendement, de supprimer l'article 63.
L'article 63 autorise l'encaissement de recettes fiscales par un organisme autre que le comptable public. Autrement dit, il s'agit de permettre à des prestataires extérieurs de collecter des recettes fiscales et des dus des particuliers.
J'estime pour ma part que nous avons une administration fiscale que le monde entier nous envie. Voilà la réalité. C'est grâce à elle que la France a un État qui tient encore le coup. Or, entre les suppressions de postes à Bercy et l'introduction de l'impôt à la source, nous sommes en train d'affaiblir toujours plus l'administration fiscale. Avec la disparition des centraux locaux des finances publiques, qui a déjà commencé, mais qui va s'accélérer, nous nous retrouverons dans quelques années à pleurer la perte d'une de nos compétences régaliennes, et non des moindres. Pour toutes ces raisons, notre amendement II-CF1309 propose de supprimer cet article.
Avis défavorable. Je suis convaincu que le nouveau système proposé garantira une plus grande proximité pour les usagers. Il permettra à un réseau de prestataires déjà présent sur le territoire mais relativement fragilisés sur des territoires ruraux – par exemple le réseau de La Poste ou celui des buralistes – de bénéficier de nouvelles activités. Cela me paraît un élément particulièrement favorable pour la ruralité.
Votre réponse m'étonne : il est indiqué dans l'étude préalable, que l'État va lancer un appel d'offres. Est-ce à dire que c'est La Poste qui sera retenue ?
L'appel d'offres est de droit, mais peu d'entreprises sont capables d'y répondre. Les réseaux de proximité des buralistes et de La Poste me semblent être ceux qui sont le mieux implantés sur le territoire.
Je vous trouve très optimiste, monsieur le rapporteur général. Car il y a de plus en plus de services de colis qui se développent. Lorsque je vois l'affaiblissement en cours des services publics et la transformation progressive de La Poste, qui s'éloigne de plus en plus du modèle de l'entreprise publique qu'elle devrait rester, je ne suis pas rassuré par votre réponse. Ou alors, si vos intentions sont précisément celles que vous prétendez, préparez un autre article qui garantirait la sauvegarde des bureaux de poste en leur confiant une mission supplémentaire de service public ; mais rien de cela ne figure dans l'article que nous examinons.
Je ne suis pas du tout contre cet article. Mais je me pose quelques questions sur le régime juridique de ces personnes privées qui vont recouvrer des fonds publics. Quelle sera leur responsabilité au regard de recouvrement de ces recettes publiques ? On maintient en effet la possibilité de payer en espèces, mais chez un tiers privé : dès lors, quel sera le régime juridique applicable à ce tiers ?
Dans le questionnaire que j'ai adressé à Bercy à propos de cet article, il nous a été répondu que, compte tenu du fait qu'il s'agit d'une mission de service public, les contrôles sur ces opérations seront effectués par les mêmes services que s'il s'agissait d'une administration, c'est-à-dire l'Inspection générale des finances et les services de contrôle interne classique.
Les buralistes jouiront donc d'un statut de régisseur et les contrôles effectués sur eux seront ceux qui s'exercent sur des régisseurs ?
Ce ne seront pas des régisseurs, mais ils seront contrôlés de la même façon que s'il s'agissait de régisseurs.
Mais au regard des comptables publics ? Le statut de régisseur n'est pas un statut de comptable, car c'est le comptable qui est responsable du régisseur. Quelle sera la responsabilité du comptable signataire à l'égard du réseau chargé de recevoir le paiement en espèces, à savoir vraisemblablement le réseau postal ? Imaginons que j'aille payer mes impôts locaux à La Poste, qui virera les fonds au comptable signataire. Mais quelle sera la responsabilité de ce dernier vis-à-vis du réseau collecteur ? Voilà la question que je me pose.
Je soutiendrai cet article, car il va dans le bon sens. Prenons l'exemple d'un débitant de tabac : son traité de gérance est bien encadré et n'est accordé qu'après des enquêtes de moralité. Cela existe déjà et c'est très bien organisé.
Cela montre qu'on peut tout à fait mettre en place des tiers de confiance investis de responsabilités et liés par des engagements financiers s'ils exécutent mal leur mission. Les agences postales communales fonctionnent aussi très bien.
Mais il y a aussi un problème constitutionnel : le législateur s'est déjà vu taper sur les doigts, le Conseil constitutionnel considérant que certaines fonctions régaliennes de l'État ne sont pas délégables. Ne risque-t-on pas une censure constitutionnelle ?
Concernant les dettes contractuelles encaissées par les comptables publics, il existe déjà des conventions avec des réseaux bancaires, qui portent bien sur des deniers publics. L'article 63 se borne à étendre cette possibilité de recouvrement à des dettes fiscales. En tous les cas, pour les dettes contractuelles des collectivités territoriales et des établissements publics, cela ne pose apparemment pas de problème : les ordonnateurs sont contrôlés par la chambre régionale des comptes, ainsi que les comptables. Ayant subi ce type de contrôle par le passé, je n'ai jamais eu de soucis.
Je ne suis pas sûr que tous les collègues aient lu l'exposé des motifs : « Les prestataires seront sélectionnés notamment en fonction de leur bonne implantation géographique et de leur capacité technique à assurer ces prestations pour le compte de l'État. »
Les réponses apportées par le rapporteur général aux excellentes questions de Charles de Courson sortent donc du cadre de l'article. Le cadre défini par le projet de loi est en réalité très ouvert. On veut que les buralistes puissent maintenant percevoir l'impôt ; ce n'est tout de même pas du tout la même chose que de recevoir le paiement d'une amende !
Qui plus est, des prestataires financiers privés pourraient essayer de répondre à l'appel d'offres. Et si l'on estime qu'ils doivent en être exclus, parce qu'ils n'en ont précisément pas la capacité, il faut l'écrire quelque part. Mais tel que cet article est rédigé, je vous assure qu'il y a vraiment du flou dans cette histoire.
Au-delà de mes critiques de fond relatives aux compétences, à mon sens exclusives, de l'administration fiscale, il faudrait à tout le moins, si on veut ouvrir à la concurrence, mieux cadrer les choses.
Monsieur de Courson, si le Conseil constitutionnel a effectivement réagi, c'est au sujet des gardiens de prison, ce qui n'est quand même pas tout à fait la même chose que des buralistes en termes de pouvoir régalien.
Effectivement, les buralistes encaissent déjà des droits d'amende. Mais je voudrais poser la question du sacro-saint secret fiscal, qui couvre l'encaissement des impôts par un tiers privé. Ou bien va-t-on considérer que, pour les petites gens qui payent des petits impôts, le secret fiscal n'a aucune importance ?
Les clauses de soumission de l'appel d'offres portent également sur le secret fiscal ; des sanctions pénales sont prévues en cas de non-respect.
Le contribuable aura aussi le choix de payer ailleurs : il ne sera pas obligé d'aller au bureau de tabac d'à côté. Et elle pourra payer autrement : il y a quand même plusieurs canaux de paiement.
Les évaluations préalables ont bien montré que les gens qui utilisent encore ces moyens sont soit des personnes âgées, soit des personnes défavorisées. Par définition, elles n'iront pas payer ailleurs.
Mais les facteurs de la poste remettent déjà des recommandés. Qu'ils puissent ainsi avoir connaissance de certains sujets n'est pas considéré comme attentatoire au respect des données personnelles.
La commission rejette les amendements de suppression.
Puis elle adopte l'article 63 sans modification.
Après l'article 63
La commission examine l'amendement II-CF738 de Mme Valérie Rabault.
À l'inverse, cet amendement a pour but d'obliger les personnes morales, et uniquement les personnes morales, à utiliser ce nouveau moyen de paiement et à abandonner le paiement en espèces pour les personnes morales.
Avis défavorable. Pour commencer, votre amendement ne prévoit pas de seuil. Ensuite, il ne distingue pas entre professionnels et non professionnels.
Imaginez par exemple qu'on applique ces dispositions à une association qui voudrait payer avec les fonds de caisse issus de son activité. Je crois qu'il vaudrait mieux retirer votre amendement. Si vous voulez vraiment aller dans ce sens, il faut viser des catégories particulières, et donc revoir votre rédaction, et prévoir également un différé d'entrée en vigueur pour que la disposition soit efficace.
L'amendement est retiré.
La commission examine ensuite l'amendement II-CF1156 de M. Charles de Courson.
Il s'agit d'un amendement de simplification. Vous savez qu'aujourd'hui, quand vous faites une déclaration et que vous vous rendez compte que vous vous êtes trompé, vous devez la refaire entièrement. Cela représente un coût administratif élevé qui, lorsqu'il s'agit de petites sommes, peut devenir tout à fait déraisonnable. C'est pourquoi mon amendement propose de permettre la régularisation de la base imposable de faible montant d'un exercice donné sur l'exercice suivant.
Je comprends l'esprit de votre amendement et j'y souscris. Mais il me semble qu'il poserait des problèmes sur la détermination des règles de prescription du délai de contrôle par l'administration.
En outre, il faut faire attention au fait qu'une déclaration rectificative est systématiquement contrôlée avant obtention du dégrèvement d'imposition. Ce ne serait plus le cas en l'espèce, puisque le contribuable pourrait, en quelque sorte, imputer sans contrôle le dégrèvement qu'il réclame sur l'impôt dû au titre de de l'année suivante.
Si cet amendement part d'une très bonne idée, il ne peut être aussi général que vous le proposez et devrait être limité à des cas vraiment très simples et bien déterminés.
C'est bien la raison pour laquelle je proposais de le réserver à des rectifications de faible montant.
Au-delà des seuils, la notion de « cas simple » est importante. La nature de la rectification également.
L'amendement prévoit qu'un seuil limite, les modalités de l'option ainsi que le suivi de ces rectifications seront définis par arrêté ministériel. Obliger les entreprises à refaire entièrement leur déclaration pour un écart de 500 euros, ce n'est pas raisonnable ! Mais le problème est sans doute plutôt de nature gouvernementale.
L'amendement est retiré.
La commission examine ensuite l'amendement II-CF1228 de M. Jean-Noël Barrot.
Cet amendement vise tout simplement à simplifier la vie des petites entreprises, et notamment celles qui sont soumises au régime simplifié de TVA. En effet, le régime simplifié de TVA donne lieu à deux acomptes, alors qu'auparavant il y en avait quatre.
Pour simplifier et étaler les mouvements de trésorerie de ces entreprises, l'amendement propose une déclaration et un paiement de TVA mensuels, le tout faisant l'objet d'une régularisation une fois par an.
J'ai plutôt l'impression que vous allez imposer un surcroît de travail comptable aux entreprises, ce qui risque d'être un peu contre-productif. En outre, vous renvoyez au règlement le soin de fixer la périodicité. Mais ce point doit être fixé dans la loi, faute de quoi nous nous heurtons à un problème d'incompétence négative. Pour ces deux motifs, je suis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement II-CF1259 de M. Jean-Noël Barrot.
Je crois surtout que la disposition en question a été spécifiquement mise en place dans un but de lutte contre la fraude à la TVA. Pour ce seul motif, j'y serai déjà défavorable. Mais cet amendement peut aussi poser des problèmes au regard de la simplification informatique de la comptabilisation de la TVA dans les livres-journaux.
La commission rejette l'amendement.
Article additionnel après l'article 63 : Neutralité en matière de charge de la preuve de l'avis du comité de l'abus de droit fiscal
La commission examine l'amendement II-CF1403 du rapporteur général.
Cet amendement vise à réparer une anomalie dans les procédures fiscales.
Avant toute chose, je précise que c'est un dispositif qui ne va en aucun cas faciliter l'évitement fiscal ou conduire au laxisme pour ceux qui échappent à l'impôt. Ce n'est pas son objet et ce ne sera d'ailleurs pas non plus son effet. J'ai à cette fin pris l'attache des services du contrôle fiscal, afin de connaître leur point de vue. Ils n'y sont pas opposés, dans la mesure où l'amendement ne dégrade pas la position de l'administration pour les redressements.
Dans le cadre de la procédure d'abus de droit, la loi offre aux contribuables une garantie, à savoir la saisine du comité de l'abus de droit, qui donne un avis sur le redressement fait par l'administration. Mais si cet avis va dans le sens de l'administration, la charge de la preuve s'inverse : c'est au contribuable de prouver qu'il n'a pas commis d'abus de droit. Cela me semble contraire au droit dans ce pays, puisque c'est bien à l'administration qu'il revient normalement d'apporter la charge de la preuve.
Je propose donc qu'on en revienne, sur ce plan, au droit commun, dans un souci d cohérence.
Cette question n'a-t-elle pas été traitée dans les lois de lutte contre la fraude ou dans les lois de simplification ?
La commission adopte l'amendement.
Après l'article 63
La commission examine l'amendement II-CF1163 de Mme Sabine Rubin.
Cet amendement vise à renforcer notre arsenal juridique, par la mise en place d'un délit d'incitation à la fraude fiscale.
Notre groupe avait proposé cet amendement au moment de l'examen de la loi sur la fraude fiscale. Malheureusement, j'ai l'impression que nous avons eu le nez creux : quelques semaines après éclairait le scandale des « CumEx files » !
Le premier amendement, II-CF1350, que nous vous proposions après l'article 48, et que vous n'avez pas voulu adopter, visait directement les montages « CumCum », autrement dit « légaux ». Celui-ci vise les montages de type « CumEx », qui sont illégaux. Il vise justement à faire en sorte que celui qui incitera à ce type de montage soit puni ou, en tout cas, que la sanction possible soit tellement lourde qu'elle ait un effet dissuasif.
Je rappelle que, malheureusement, le journal Le Monde révèle dans son article sur les « CumEx files » que beaucoup de très grandes banques françaises ont trempé dans ce véritable scandale, qui aura coûté 3 milliards d'euros à l'État. Il est également utile de rappeler que notre proposition s'appuie sur un rapport d'enquête de la commission sénatoriale portant sur le rôle des banques et des acteurs financiers dans l'évasion fiscale, rapport rendu public le 17 octobre 2013. Or, depuis cette date, la situation n'a fait que s'aggraver.
C'est d'ailleurs à ce titre que, depuis 2013, l'amendement est proposé chaque année et que les rapporteurs successifs répètent que la définition proposée de l'infraction est trop imprécise, ce qui rend le dispositif inconstitutionnel.
Je rappelle par ailleurs que l'article 19 de la loi du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude a créé une amende fiscale pour les intermédiaires complices non seulement de fraude, mais aussi de graves manquements. C'est déjà une avancée majeure, dont votre amendement ne tient absolument pas compte. Par ailleurs, en vertu de l'article 1742 du code général des impôts, les complices de fraude fiscale peuvent être poursuivis pénalement : la sanction est un emprisonnement de cinq ans et une amende de 500 000 euros, dont le montant peut être porté au double du produit tiré de l'infraction, ce qui me semble relativement dissuasif...
Avis défavorable donc, pour ces deux raisons : un, l'arsenal est suffisant ; deux, votre amendement n'est pas constitutionnel.
Pour ce qui est du « un », c'est votre avis : j'observe que les fraudeurs et ceux qui incitent à la fraude vont plus vite que la législation. Pour ce qui est du « deux », vous nous faites souvent cette réponse, mais vous n'êtes pas le Conseil constitutionnel. C'est au Conseil constitutionnel de dire si un article jugé nécessaire par le législateur est valable ou pas, et non à l'un d'entre nous. Ce genre d'argument d'autorité transforme de fait un rapporteur en juge constitutionnel, mais ce n'est pas votre rôle.
Il relève tout de même du rôle du rapporteur de dire s'il estime qu'existe un risque inconstitutionnel.
Ce n'est pas la même chose de dire qu'il existe un risque inconstitutionnel que de dire qu'une proposition n'est pas constitutionnelle. Il y a une nuance, surtout lorsque les mots sont prononcés par une personnalité comme M. Giraud, sachant le poids qu'il a dans ces débats – et que je lui reconnais volontiers. Il faut faire très attention, La Constitution peut être jugée de manière plus ou moins objective : mais c'est au Conseil constitutionnel, et non à nous, que cette tâche incombe.
De jurisprudence constante en matière pénale, le Conseil constitutionnel a censuré toute phrase ou membre de phrase qui, parlant de la définition d'une infraction pénale, emploie le terme « notamment », ce qui en fait une définition imprécise et contraire à l'article VIII de la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen.
La commission rejette cet amendement.
Elle examine ensuite l'amendement II-CF1164 de Mme Sabine Rubin.
Cet amendement fait partie de ces dispositions dont je trouve incroyable qu'elles ne figurent pas déjà dans la loi. Il vise en effet à faire en sorte qu'une personne sanctionnée pour fraude fiscale ne puisse pas recourir au crédit ou à la réduction d'impôt sur le revenu pour payer ce qu'il doit au fisc. Il paraît tellement évident qu'il n'est pas convenable de faire de tels cadeaux à un fraudeur.
Cet amendement a déjà été déposé dans le cadre du projet de loi relatif à la lutte contre la fraude et rejeté, tout simplement parce qu'il mélange deux choses : les règles d'imposition et le droit pénal. Le juge pénal dispose d'un très large éventail de peines. Avis défavorable.
La commission rejette cet amendement.
Puis elle examine l'amendement II-CF1162 de Mme Sabine Rubin.
Cet amendement vise à lutter contre une des fraudes les plus importantes. Les douanes, quand nous les avons auditionnées, nous ont rappelé que la fraude à la TVA est une véritable plaie en Europe, estimée à 14 milliards d'euros par la Commission européenne. Nous proposons d'instaurer une démarche préventive dans l'attribution du numéro de TVA, à l'exemple de ce qui se pratique en Belgique, c'est-à-dire que l'attribution ne se fasse pas de manière automatique mais que l'administration conduise une petite enquête pour déterminer s'il faut ou non attribuer un numéro individuel. Quand nous l'avions présenté en commission lors de l'examen du projet de loi relatif à la lutte contre la fraude, la rapporteure nous avait répondu que l'administration était déjà en droit de procéder à cette enquête. Il est donc reconnu que c'est utile. Notre amendement vise à rendre cette enquête obligatoire.
Cela a en effet déjà été vu dans le cadre de la loi « fraude » et rejeté au motif essentiellement que l'administration fiscale doit conserver une marge de manoeuvre qui lui permette d'allouer sa force de travail et ses contrôles de la manière la plus pertinente. J'en reste à cette position. Avis défavorable.
La commission rejette cet amendement.
Article additionnel après l'article 63 : Remise d'un rapport au Parlement sur la fiscalité écologique et les instruments fiscaux incitant à la prévention des atteintes portées à l'environnement
La commission examine, en discussion commune, les amendements II-CF1240 de M. Bruno Millienne, II-CF468 de Mme Bénédicte Peyrol et II-CF1241 de M. Bruno Millienne.
L'amendement II-CF1240 vise à proposer, dès le projet de loi de finances pour 2020, un « jaune budgétaire » relatif à la fiscalité environnementale. La fiscalité écologique ne fait pas l'objet d'une gouvernance appropriée. Elle se doit d'être intégrée dans une stratégie d'ensemble assurant sa cohérence avec les autres politiques environnementales et la stratégie budgétaire et fiscale. Lui consacrer un « jaune » est une première étape.
Mon amendement II-CF468, qui va dans le même sens, est issu d'une recommandation du rapport que j'ai présenté devant la commission des finances et la commission du développement durable, avec quelques précisions sur la nécessité de préciser dans ce « jaune » le produit des recettes et de quelle manière ils s'inscrivent dans la dynamique de transition et les objectifs que nous nous sommes fixés. Je pense, monsieur Millienne, que nous pourrions travailler ensemble d'ici à la séance publique, car nous poursuivons le même objectif.
L'amendement II-CF1241 est un amendement d'appel. Nous demandons pour la prochaine loi de finances un rapport sur la révision des aides publiques dommageables à la biodiversité. Cela nous permettra d'honorer nos engagements européens et internationaux en la matière. L'idée est de faire disparaître toutes les aides nuisibles à la biodiversité.
Mme Peyrol vous a proposé un travail pour la séance. Je vous invite, monsieur Millienne, à retirer vos amendements au profit d'une cosignature avec Mme Peyrol, dont l'amendement me semble être plus complet, et à travailler ensuite à un éventuel sous-amendement.
L'amendement II-CF1240 est retiré.
La commission adopte l'amendement II-CF468.
Puis elle rejette l'amendement II-CF1241.
Après l'article 63
La commission examine l'amendement II-CF1167 de M. Charles de Courson.
Dans la loi de finances pour 2017, nous avons unifié les modes de saisie de créances et notamment l'opposition administrative, devenue ce que l'on appelle la saisie administrative à tiers détenteur. Le problème est que nous n'avons pas prévu le cantonnement de cette mesure, c'est-à-dire le fait qu'il n'est pas nécessaire, pour une dette de 100 euros au fisc, de bloquer un compte de 1 000 euros à hauteur de 1 000 euros. Mon amendement consiste donc à créer un système de cantonnement permettant un meilleur fonctionnement de la saisie administrative à tiers détenteur, pour ne pas mettre un contribuable défaillant dans une grande difficulté.
Vous proposez quelque chose qui existe déjà dans le droit commun, qui permet un cantonnement. Je pense donc que votre amendement est satisfait ; encore faut-il que le Gouvernement le confirme. Je vous propose de l'interroger au banc et, s'il s'avère que le cantonnement n'est en effet pas prévu, je donnerai en séance un avis favorable à votre amendement.
D'excellents juristes assurent que le cantonnement n'est pas prévu. Je retire l'amendement et je le redéposerai ; nous aurons ainsi une réponse ministérielle.
L'amendement est retiré.
La commission est saisie de l'amendement II-CF389 de Mme Valérie Petit.
Il s'agit d'un amendement d'évaluation des politiques publiques portant sur les contrats financiers signés entre l'État et les collectivités territoriales. Il est prévu que le Gouvernement en dresse un bilan en 2020, juste avant le débat d'orientation des finances publiques (DOFP). Nous proposons que ce bilan soit transmis au Parlement et fasse l'objet d'un débat sur la reconduction du dispositif. Nous introduisons en fait une clause de revoyure.
Dans la loi de programmation des finances publiques, il est prévu que le Gouvernement dresse un bilan de l'application des dispositions de l'article 13 et du présent article ; ce bilan tient compte du rapport public annuel du Conseil national d'évaluation des normes prévues à l'article L. 1212-2 du code général des collectivités territoriales. Il faut souligner la pertinence de la loi de programmation, qui instaure un bilan de l'application de ces dispositions un an et demi après leur application : c'est conforme à la méthode d'évaluation prônée par notre majorité parlementaire. Ce bilan fera l'objet d'un débat puisqu'il devra être dressé avant le DOFP du projet de loi de finances 2020. En outre, la rédaction ne me paraît pas très conforme à l'article 48 de la Constitution, laquelle prévoit que l'ordre du jour est fixé par chaque assemblée, avec un partage de celui-ci entre le Gouvernement et le Parlement. Je vous invite à retirer l'amendement.
Comme l'objectif est en ligne avec notre objectif d'ajuster les dispositifs après leur mise en oeuvre en fonction de ce qui se passe sur le terrain, je me demandais, monsieur le rapporteur général, si nous ne pourrions pas organiser nous-mêmes ce travail au sein de la délégation aux collectivités territoriales. Je serais ravie d'en discuter avec Valérie Petit. Les parlementaires peuvent se saisir eux-mêmes de ces évaluations dans les structures qui existent au sein de notre assemblée.
L'amendement est retiré.
La commission est saisie des amendements identiques II-CF408 de M. Michel Castellani, II-CF435 de Mme Véronique Louwagie et II-CF742 de Mme Christine Pires Beaune.
Le dispositif relatif à la contractualisation financière figurant dans la loi de programmation des finances publiques prévoit une limitation de l'évolution des dépenses de fonctionnement prenant pour référence un taux prévisionnel d'évolution d'indice des prix de 1 % en 2018 et 1,1 % en 2019. Or nous constatons que l'inflation connaît un sursaut, ce qui aggrave la contrainte qui pèsera sur les collectivités territoriales. Mon amendement a donc pour objet d'intégrer le niveau réel d'inflation dans le calcul de l'objectif national d'évolution des dépenses de fonctionnement des collectivités.
Pour notre trajectoire financière des politiques publiques, nous avions établi la fameuse règle d'évolution des dépenses réelles de fonctionnement de 1,2 %, liée à une évolution de l'indice des prix à la consommation de 1 % en 2018 et 1,1 % en 2019. Or l'inflation atteint 1,6 % en 2019 et il est prévu 1,3 % en 2019, bien au-dessus des prévisions. L'amendement II-CF435 a pour objet de demander au Gouvernement d'évaluer, pour chaque annuité, l'impact financier que représente pour les collectivités territoriales ce ressaut d'inflation constaté et de formuler des propositions pour ajuster l'objectif national d'évolution des dépenses réelles de fonctionnement, devenu de facto obsolète.
Mon amendement vise également à compléter le bilan déjà prévu dans la loi de programmation, à l'article 13, notamment par rapport à l'inflation. Au moment où le Gouvernement prépare le projet de loi de finances, le taux d'inflation est souvent différent de la réalité constatée, et nous avons en même temps cet objectif de 1,2 %. Il serait logique d'ajouter cet élément.
Je préconise le retrait de ces amendements et leur présentation en séance pour que le Gouvernement réponde à cette interrogation et prenne l'engagement que ces éléments, essentiels, figureront dans son bilan de la loi de programmation.
Je maintiens mon amendement car c'est un sujet essentiel et nous avons besoin de clarté, surtout si nous voulons renouer le contact avec nos collectivités.
Je maintiens aussi mon amendement. La loi établit une estimation artificielle du rythme d'évolution des dépenses de fonctionnement des collectivités territoriales. Il ne s'agit pas de laisser déraper celles-ci, mais on ne peut pas non plus laisser augmenter à l'infini le différentiel entre les compétences déléguées et les moyens réels d'intervention.
La commission rejette les amendements.
Elle examine ensuite l'amendement II-CF414 de Mme Christine Pires Beaune.
Cet amendement rejoint la préoccupation exprimée tout à l'heure par M. Coquerel puisqu'il vise à demander au Gouvernement un rapport avant le 30 septembre 2019 pour évaluer les conséquences de l'évitement fiscal des entreprises et de leurs actionnaires, en matière notamment d'imposition sur les dividendes.
Une des modalités des stratégies d'évitement de l'affaire « CumEx », dans le contexte de laquelle le rapport que vous souhaitez obtenir s'inscrit, réside dans l'utilisation abusive de conventions fiscales, notamment celle liant la France au Qatar. Pour y mettre un terme, il faut renégocier ces conventions. Je rappelle par ailleurs que la Convention multilatérale pour la mise en oeuvre des mesures relatives aux conventions fiscales pour prévenir l'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices, élaborée sous l'égide de l'OCDE dans le cadre du projet « BEPS » et ratifiée par la France en septembre, contient une clause anti-abus générale obligatoire. Certes, le Qatar n'a pas signé l'instrument, mais la pression est forte.
Plus généralement, l'abus de droit, qu'un amendement de Bénédicte Peyrol adopté par notre commission hier matin prévoit d'étendre, permet de contrer tous les montages reposant sur des cessions rapides d'actions, avant le détachement du dividende, s'ils ont une motivation fiscale déterminante.
S'agissant des conséquences pour les recettes publiques, je rappelle que la récente mission d'information sur l'évasion fiscale internationale des entreprises appelle à une méthodologie claire pour évaluer les pertes de recettes, méthodologie pour l'instant inexistante. Le Gouvernement est réceptif à ce sujet puisqu'il a commencé à organiser des ateliers afin que des processus d'évaluation fiable puissent exister.
Enfin, pour lutter contre les montages de type « CumCum », les « CumEx » étant interdits et frauduleux, il faudrait surtout encadrer strictement l'arbitrage de dividendes, ces transferts artificiels et provisoires de la propriété des actions vers des cieux fiscaux que l'on dira cléments pour échapper à l'imposition. C'est donc plus une question de droit financier et des participations qu'un sujet relevant stricto sensu du domaine des lois de finances.
Au bénéfice de ces explications, je vous invite à retirer l'amendement.
L'amendement est retiré.
Article additionnel après l'article 63 : Rapport annuel d'activité de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR)
La commission est saisie de l'amendement II-CF1227 de M. Fabien Gouttefarde.
Cet amendement vise à redonner un pouvoir de contrôle ou tout au moins un droit de regard au Parlement et au Gouvernement sur l'activité de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR). Cette entité est chargée de préserver la stabilité du système financier dans les domaines de la banque et des assurances. Il s'avère qu'elle a perdu son statut d'autorité administrative indépendante (AAI) avec la réforme de janvier 2017, et cette perte a entraîné la disparition des obligations à la charge des AAI. Cet amendement vise simplement à rétablir à la charge de l'ACPR une obligation de rapport annuel qui constituera un instrument de contrôle indispensable de son activité et de son financement, sachant que 98 % des ressources de cette entité proviennent d'une taxe affectée.
Suivant l'avis favorable du rapporteur général, la commission adopte l'amendement.
Article 64 : Rationalisation et simplification de la fiscalité du tabac
La commission adopte l'article 64 sans modification.
Après l'article 64
La commission est saisie de l'amendement II-CF1390 de M. Éric Woerth.
Cet amendement d'appel vise à engager une réflexion sur le financement du CNC et une remise à plat des taxes qui le financent, à savoir la taxe sur les services de télévision applicable aux éditeurs (TST-E) assise sur les recettes publicitaires, une majoration sur la dernière tranche de la taxe sur les services de télévision applicable aux distributeurs (TST-D) pour les éditeurs de services autodistribués, et une taxe vidéo. Il conviendrait de rebattre les cartes entre ces différentes taxes pour assurer plus de justice et d'égalité entre les plateformes de vidéos, aujourd'hui taxées à 2 %, et les distributeurs et éditeurs historiques, taxés bien plus lourdement. Mon amendement propose de multiplier par deux la taxe de 2 % pesant sur les distributeurs tels que Netflix et d'abaisser parallèlement les taxes pesant sur les acteurs historiques.
Aurore Bergé a rendu un rapport sur le sujet, qui va dans le même sens. Le CNC n'est pas opposé à ce que l'on modifie les modalités de son financement, pour peu que l'on ne touche pas au niveau de son financement.
Je suis plutôt favorable, vous le savez, à un meilleur contrôle des dépenses de l'ensemble de ces organismes, dont le CNC. Cependant, votre proposition n'est financièrement pas très rééquilibrante dans la mesure où elle prévoit de baisser de 30 % le taux des deux premières taxes, qui rapportent 515 millions d'euros, et de doubler une taxe qui n'en rapporte que 15. Ce qui fait moins 135 millions d'euros sur le budget du CNC, sur un total de 675 millions de taxes affectées ! Cela dépasse l'objectif de rééquilibrage que vous vous étiez fixé. Ce calcul démontre qu'il serait bon de retirer cet amendement.
Je fais des plus et des moins aussi, mais pas les mêmes que vous, et je ne trouve qu'un manque à gagner de 86 millions pour le CNC. Au demeurant, l'idée n'était pas tant de rééquilibrer, puisque de toute façon c'est gagé, que d'engager la réflexion en lien avec le Gouvernement. C'est pourquoi je représenterai l'amendement. L'idée est simple : baisser la fiscalité sur les acteurs historiques pour leur permettre de résister à une concurrence internationale particulièrement rude et taxer normalement les nouveaux entrants, qui ne le sont pas suffisamment. Le niveau des ressources à allouer au CNC est un autre sujet.
L'amendement est retiré.
La commission est saisie, en discussion commune, des amendements II-CF1263, II-CF1264 et II-CF1265 de Mme Sabine Rubin.
Je sais qu'un objectif important défendu par la majorité est de faire venir les financiers de la City de Londres à Paris, mais ce n'est pas une raison pour faire des cadeaux mirifiques aux banques. En 2018, vous avez supprimé la dernière tranche de la taxe sur les salaires, une taxe qui ne vise que les employeurs qui n'ont pas à s'acquitter de la TVA, donc principalement les établissements bancaires. En termes de lobbying, la Fédération bancaire française a eu gain de cause l'an dernier. Ce n'est pas pour autant que l'on doit continuer à lui faire des cadeaux. Je rappelle que le troisième taux majoré de cette taxe était de 20 % sur les rémunérations dépassant 152 000 euros bruts par an, soit 12 666 euros brut par mois : c'est juste huit fois et demie le SMIC ! Nous proposons donc, par l'amendement II-CF1263, de le rétablir. Ce sera autant de ressources supplémentaires pour l'État, en l'occurrence pour la sécurité sociale puisque c'est elle qui se retrouve impactée par la perte de ces 2 milliards d'euros.
Le deuxième amendement, II-CF1264, est dans la même logique mais le taux de prélèvement serait de 30 % au lieu de 20 %.
Le troisième, II-CF1265, me paraît le plus important : on observe que, depuis qu'a été supprimée la dernière tranche de la taxe sur les salaires, le taux est en réalité le même pour les revenus supérieurs à 15 572 euros annuels. Que vous soyez simple salarié ou que vous gagniez 1 million d'euros, il n'y a plus de progressivité. Nous trouvons cela anormal et nous vous proposons par conséquent une progressivité qui rendrait tout cela plus juste.
Vous proposez de revenir sur une mesure votée en loi de finances pour 2018. Je souligne que la dynamique de cette taxe sur les salaires est telle que, malgré la suppression du troisième taux majoré, son produit a connu une augmentation entre 2017 et 2018. Cela étant, eu égard aux propos de la Cour des comptes dans son référé sur cette taxe, il faudrait que nous nous penchions sur la problématique de la taxe sur les salaires de manière plus globale. Je donne donc un avis défavorable à ces amendements, tout en restant persuadé que nous devrions travailler sur cette taxe.
Je maintiens les amendements, mais la réflexion du rapporteur général est encourageante pour la suite : je saurai la lui rappeler.
La commission rejette successivement ces amendements.
Elle examine ensuite l'amendement II-CF1034 de Mme Sabine Rubin.
Même si une actualité chasse l'autre, nous gardons en mémoire la catastrophe du viaduc autoroutier de Gênes. Vous savez que le Gouvernement a lancé une étude de l'état des ponts en France, qui n'est pas très positive : bon nombre de ponts sont à restaurer, dont certains de toute urgence. De façon à procéder aux travaux nécessaires, nous proposons de relever la taxe due par les sociétés concessionnaires d'autoroutes, dont nous avons à maintes occasions, de manière presque unanime, dénoncé la rente exorbitante assise sur une situation de monopole de fait et des contrats léonins accordés par l'État. D'autres, par exemple parmi Les Républicains, ont pensé faire financer des idées de ticket carburant par le même type de mécanisme. Nous estimons tous que les sociétés d'autoroutes pourraient largement contribuer à cet effort national.
J'en profite pour indiquer que l'on a observé, quand il s'agit de péages dits ouverts, où les usagers acquittent un montant forfaitaire en gare de péage quelle que soit leur destination, que la taxe est calculée sur la base du kilométrage correspondant à la moyenne des trajets possibles. Le manque de contrôle sur ces données est assez inquiétant.
Avis défavorable, car cela se répercuterait de toute façon sur le consommateur final. Cela dit, je me suis déjà exprimé sur les rapports entre l'État et les concessionnaires autoroutiers, qui me semblent partis sur de mauvaises bases. C'est un système assez pervers.
Nous pourrions prendre ces sommes sur les 20 % de rente que se sont fait les autoroutes et non sur le prix de péage acquitté par les particuliers.
La commission rejette cet amendement.
Puis elle examine l'amendement II-CF547 de Mme Lise Magnier.
Cet amendement vise à corriger une anomalie qui pénalise des entreprises taxées sans pour autant être éligibles aux formations financées par la taxe affectée à l'Association nationale pour la formation automobile. Il s'agit d'exclure du recouvrement de cette taxe les entreprises qui ne relèvent pas de la convention nationale des services de l'automobile et qui sont notamment les entreprises de distribution de pièces et d'équipements pour l'automobile, qui peuvent relever de la convention collective des commerces de gros. Il est illogique d'être soumis à une taxe alors qu'on ne bénéficie pas des formations qu'elle est censée financer.
Mme Magnier pose une question légitime et qui appelle une réponse du Gouvernement. J'invite à un retrait pour avoir en séance cette clarification indispensable.
L'amendement est retiré.
La commission est saisie de l'amendement II-CF1160 de Mme Sabine Rubin.
Cet amendement vise à augmenter le plafond de la taxe sur les demandes de visa de publicité pharmaceutique, en le doublant. Ce faisant, nous poursuivons deux objectifs : augmenter une recette pour l'État avec une taxe portant sur des industries qui sont parmi les plus lucratives – au niveau mondial, l'industrie pharmaceutique compte soixante-quinze milliardaires sur la planète, plus que l'industrie de luxe – et renforcer le contrôle sur la publicité des industries pharmaceutiques, qui peut parfois n'avoir aucun rapport avec la qualité du médicament.
Ce débat doit avoir lieu soit dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), soit dans des lois de santé, mais n'a pas franchement sa place ici. Avis défavorable.
La commission rejette cet amendement.
La commission examine, en discussion commune, les amendements II-CF887 et II-CF888 de M. Vincent Descoeur.
L'amendement II-CF887 propose de doubler l'enveloppe du fonds chaleur de l'ADEME, notamment pour accompagner plus efficacement les projets de chaleur renouvelable jugés insuffisamment rentables et donc peu attractifs pour les investisseurs. Il ne vous a pas échappé qu'il permettrait de concrétiser un engagement du Président de la République...
L'amendement II-CF888 est un amendement de repli : à défaut de doubler la dotation du fonds chaleur, nous proposons de la porter à 300 millions d'euros, comme l'a annoncé devant les sénateurs le ministre de la transition écologique. Je m'emploie cette fois-ci à concrétiser un engagement de M. de Rugy : vous conviendrez que je ne ménage pas mes efforts pour aider la majorité à ternir ses promesses !
Dans la mesure où il s'agit d'un recyclage d'amendements déposés en première partie, auxquels j'avais émis un avis défavorable, je maintiens l'avis exprimé en première partie.
Ce n'est pas seulement du recyclage : il s'agit d'amendements de qualité, dont je rappellerai qu'ils ont été adoptés par la commission du développement durable.
La commission rejette successivement les amendements.
Article 65 : Augmentation maîtrisée des prestations sociales
La commission examine les amendements de suppression II-CF116 de Mme Marie-Christine Dalloz, II-CF1020 de Mme Véronique Louwagie, II-CF1120 de Mme Sabine Rubin, II-CF1154 de Mme Christine Pires Beaune et II-CF1319 de M. Paul Molac.
Mon amendement propose purement et simplement la suppression de l'article 65. « Augmentation maîtrisée des prestations sociales »... De qui se moque-t-on ? La revalorisation prévue n'est que de 0,3 % pour les pensions de retraite, les aides personnalisées au logement (APL) et plusieurs autres prestations. Il est proprement scandaleux que l'État soit le seul à bénéficier largement des effets de l'inflation. Pourquoi faire payer toujours aux mêmes la maîtrise des dépenses publiques ?
Nous nous opposons aux non-revalorisations des prestations sociales. L'aide personnalisée au logement, l'allocation de logement familiale (ALF), l'allocation de logement sociale, la prime d'activité et l'allocation aux adultes handicapés (AAH) seront désindexées de l'inflation en 2019 et en 2020. Cela aura pour conséquence directe une perte sèche de pouvoir d'achat pour nos concitoyens, particulièrement les plus défavorisés, puisque l'inflation atteindra 1,7 % cette année.
La majorité se plaît à expliquer que la baisse des cotisations sociales et la hausse des salaires nets se traduisent par une hausse du pouvoir d'achat ; cet article montre que c'est tout l'inverse qui se produit. D'où notre amendement de suppression II-CF1120.
Mon amendement est identique. En changeant les règles qui s'appliquaient jusqu'alors, cet article va provoquer une baisse de pouvoir d'achat. Si l'on ajoute les sous-revalorisations votées dans le PLFSS 2019, ce sont 3,5 milliards d'euros d'économies que l'État s'apprête à faire sur le dos des plus modestes.
La revalorisation de 0,3 % pour 2019 et 2020 ne compense pas les effets de la désindexation par rapport à l'inflation qui sera, selon les prévisions, de 1,7 % et 1,8 % pour les deux années à venir. La perte de pouvoir d'achat est nette puisqu'elle est supérieure à 2 %. Nos concitoyens vont évidemment s'en apercevoir car ils ne sont pas plus idiots que nous.
Cela posera certainement problème, d'autant que ces mesures interviennent après que d'autres atteintes ont été portées au pouvoir d'achat. La colère gronde et la paix sociale risque d'être difficile à préserver. D'où mon amendement.
On pourrait se demander ce que fait un tel article au sein d'un projet de loi de finances : il s'agit en réalité d'un article miroir de l'article 44 du PLFSS, qui a procédé à une revalorisation maîtrisée similaire des prestations sociales.
Il me paraît important de replacer ces mesures de moindre revalorisation dans un contexte plus général de réforme des aides en faveur du logement. Pour la prime d'activité et l'AAH, l'effet sera plus que compensé par les mesures exceptionnelles déjà prises ou annoncées. La revalorisation exceptionnelle de la prime d'activité, amorcée en 2018, sera reconduite en 2019, ce qui représente un effort budgétaire de 6 milliards d'euros, et elle se poursuivra en 2020 et 2021. Quant à l'AAH, elle fera l'objet de hausses successives qui porteront son montant à 860 euros en novembre 2019, pour un coût de 500 millions d'euros, et à 900 euros en novembre 2020.
Pour toutes ces raisons, j'émettrai un avis défavorable à tous les amendements déposés à l'article 65.
Il y a des choses qu'on peut entendre et d'autres pas. Quand M. le rapporteur général dit que la revalorisation exceptionnelle de la prime d'activité va représenter un effort de 6 milliards d'euros, c'est un biais. La prime existait déjà et l'effort complémentaire est bien moindre.
Dans l'exposé des motifs de l'article 65, je lis cette phrase : « Cela implique d'optimiser la revalorisation des prestations sociales. » Ce n'est pas acceptable ! Comment parler d'optimisation quand la revalorisation n'est que de 0,3 % avec l'inflation à 1,7 % ?
Certes, il y a des revalorisations mais il y a aussi des sous-indexations. En réalité, ce que vous donnez d'une main, vous le reprenez partiellement d'une autre, ce qui contribue du reste à brouiller la communication du Gouvernement. Personnellement, je dois dire que je comprends assez mal cette politique.
Faisons un petit calcul : prenons la somme de 800 euros que vous évoquiez tout à l'heure, si on lui enlève 3 %, cela fera 24 euros de moins. Vous pouvez toujours augmenter d'un côté, mais si vous diminuez de l'autre, cela pose problème.
Nous sommes pressés par le temps mais je tiens tout de même à rappeler la philosophie de notre politique en matière sociale. Nous voulons sortir d'une logique monétaire universelle pour aller vers une logique de services.
Prenons les 2 milliards d'euros que nous consacrons au crédit d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile, qui était auparavant une réduction d'impôt. Si une heure de service à domicile coûte à une personne retraitée 15 euros au lieu de 30 euros avec les charges, elle retrouve les 15 euros que lui aurait procurés une revalorisation indexée sur l'inflation. Ajoutez-y l'aide à la complémentaire santé – 600 euros pour un couple de retraités modestes –, les 400 millions d'euros pour les hôpitaux de proximité, la valeur que constituent pour les familles le dédoublement des classes, les cours de musique à l'école, l'aide aux devoirs, l'accès à la crèche ou encore l'aide aux familles monoparentales, avec 140 euros supplémentaires par mois. Le pouvoir d'achat ne se réduit pas à une question de revenus : il est fonction des moyens dont on dispose et de l'accès à des services publics de qualité. Nous avons fait le choix de sortir d'une logique universelle et de privilégier une logique d'investissement dans les services qui répondent aux besoins quotidiens des retraités, des familles, de ceux qui cherchent un emploi...
Le meilleur exemple en est le reste à charge zéro. Vous aurez beau donner 5 euros ou 10 euros de plus à tous les Français, cela ne les fera pas aller chez le dentiste, chez l'opticien ou chez l'audioprothésiste s'ils doivent payer au prix fort leurs lunettes ou leurs prothèses dentaires ou auditives.
Je ne sais pas si vous vous rendez bien compte des implications de la position que vous défendez, madame de Montchalin. En fait, vos cadeaux sont fléchés : vous décidez à la place des pauvres quelles doivent être leurs priorités.
C'est sidérant ! De quel droit ? C'est comme si je décidais de vous enlever une partie des rémunérations que vous touchez pour vous faire des cadeaux choisis à votre place. Ça, c'est de la charité, pas de la solidarité ! Vous ne pouvez pas mener une politique d'accès à des services qui devraient être universels en ponctionnant sur le peu d'argent qu'il reste aux Français les plus défavorisés. Votre logique est incroyable ; elle a même, et je crois, pour vous connaître, que vous n'en avez pas conscience, un côté méprisant.
Mais si ! Allez expliquer aux gens que vous leur enlevez tant d'argent par mois et qu'ils doivent être contents de vos cadeaux fléchés, devoirs pour enfants et autres !
Depuis quelques années, il y a un décrochage entre le niveau des aides et les dépenses réelles des ménages. Le pouvoir d'achat, déjà affecté par la relance de l'inflation et la hausse des prix de l'énergie, est objectivement rogné. Il est indispensable de procéder à une revalorisation et de poser une limite à cette politique qui touche directement les ménages les plus modestes.
Beaucoup d'idées sont avancées et nous perdons en lisibilité dans nos débats. De quoi est-il question ? D'une sous-indexation de prestations sociales par rapport à l'inflation et d'une sous-revalorisation des plafonds de ressources. D'un côté, on fait sortir des ménages des dispositifs de soutien, de l'autre, on affiche une série de dispositifs marketing...
Je prendrai un exemple : vous mettez en avant les familles monoparentales, avec un dispositif de complément de mode de garde qui coûte 50 millions d'euros. Soit. Mais vous enlevez 500 millions, dix fois plus, aux autres familles !
Vous évoquez les dédoublements de classe. Mais peu de familles en France en bénéficient car ils ne concernent que quelques quartiers. Et dans les zones de désertification scolaire, les établissements sont tellement éloignés du domicile que les enfants doivent rester à la cantine, ce qui entraîne des coûts supplémentaires.
La plupart des familles voient leur pouvoir d'achat raboté. Et du fait de l'inflation à prévoir pour 2019, elles perdront encore plus de pouvoir d'achat. Nous ne pouvons pas souscrire à une telle politique.
Monsieur Coquerel, la France se caractérise par un modèle social bien établi : à un niveau élevé de prélèvements obligatoires correspond un niveau élevé de dépenses publiques consacrées à une large offre de services publics. Je prendrai un exemple simple : l'enseignement supérieur est quasiment gratuit. Est-ce à dire que notre modèle social reposerait sur une certaine conception de la charité ?
Il ne faut pas simplement prendre en compte l'argent donné à chaque ménage mais considérer l'ensemble des services publics et sociaux qui font la fierté de notre pays.
La commission rejette les amendements de suppression.
Elle est saisie des amendements identiques II-CF907 de Mme Émilie Bonnivard et II-CF1121 de Mme Sabine Rubin.
L'amendement II-CF907 vise à supprimer le I de l'article 65 qui prévoit une « augmentation maîtrisée des prestations sociales ». La prime d'activité et l'AAH font l'objet d'une revalorisation exceptionnelle, limitée à 2019. Rien n'est prévu pour les prestations familiales, les pensions de retraite, les pensions d'invalidité, les rentes versées au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles qui seront sous-revalorisées.
Le I, que notre amendement II-CF1121 tend également à supprimer, prévoit de désindexer de l'inflation la revalorisation de l'APL ainsi que l'ALF et l'allocation de logement sociale. L'APL a déjà subi une réduction l'an dernier, que l'on a fait supporter aux bailleurs sociaux : nous estimons qu'il ne faut pas affaiblir davantage cette aide qui apporte à beaucoup de Français un complément nécessaire pour se loger.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur général, la commission rejette les amendements identiques.
Elle examine l'amendement II-CF1122 de Mme Sabine Rubin.
Dans la même logique, cet amendement s'oppose à l'absence de revalorisation du montant forfaitaire de la prime d'activité et du montant maximal de sa bonification qui pèsera sur des populations déjà en difficulté.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur général, la commission rejette l'amendement.
Elle en vient à l'amendement II-CF1123 de Mme Sabine Rubin.
Cet amendement pointe la non-revalorisation de l'AAH. C'est peut-être le plus scandaleux, car on peut mesurer les inégalités dans un pays à l'aune de la situation qu'il réserve aux personnes en situation de handicap. Le Gouvernement a décidé de la bonifier, mais nous voyons bien, comme le disait Mme Pires Beaune, qu'il donne d'une main pour reprendre de l'autre. J'aimerais que le bon sens l'emporte et que notre commission adopte cet amendement.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur général, la commission rejette cet amendement.
Puis elle adopte l'article 65 sans modification.
Article 66 : Garantie de la redevance due à la société Rugby World Cup Limited dans le cadre de l'organisation en 2023, en France, de la coupe du monde de rugby
La commission adopte l'article 66 sans modification.
Article 67 : Garantie de l'emprunt de l'Unesco pour la rénovation d'un bâtiment
La commission adopte l'article 67 sans modification.
Article 68 : Garantie par l'État des emprunts de l'UNEDIC émis en 2019
La commission adopte l'article 68 sans modification.
Article 69 : Prorogation de la garantie de l'État au titre des prêts à taux zéro pour la création et la reprise d'entreprises
La commission adopte l'article 69 sans modification.
Article 70 : Extension de la garantie de refinancement aux crédits couverts par la garantie des projets stratégiques
La commission adopte l'article 70 sans modification.
Article 71 : Garantie de l'État au titre de prêts de l'Agence française de développement (AFD) à l'Association internationale de développement (AID) et au Fonds international de développement agricole (FIDA)
La commission adopte l'article 71 sans modification.
La commission examine ensuite les articles de récapitulation 39 à 47.
Article 39 et état B : Crédits du budget général
La commission est saisie d'un amendement II-CF1342 de Mme Sabine Rubin.
Nous présenterons une série d'amendements d'appel destinés à montrer notre désaccord avec le montant de certains crédits de ce budget d'austérité.
Nous pointons plusieurs baisses de crédits : 15 milliards en moins, soit 2 %, pour la mission Travail et emploi, qui devrait être une priorité pour notre pays ; 1,2 milliard, soit 8 %, en moins pour la mission Cohésion des territoires ; 10 % en moins pour les crédits de l'agriculture ; 0,3 % en moins pour le budget de l'éducation nationale malgré tous les beaux discours.
Vous proposez de supprimer l'article 39, qui ouvre tous les crédits pour le budget général de l'État, puis les articles qui déclinent les crédits par mission et par compte spécial. Je donnerai un avis défavorable à l'ensemble de ces amendements qui font disparaître purement et simplement le budget de l'État.
La commission rejette l'amendement.
Puis, suivant l'avis du Rapporteur général, la commission adopte l'article 39 et l'état B, modifiés compte tenu des votes précédemment intervenus lors de l'examen successif des différentes missions.
Article 40 et état C : Crédits des budgets annexes
La commission examine l'amendement II-CF1343 de Mme Sabine Rubin.
Nous nous opposons à la baisse de dotation du budget annexe Publications officielles et information administrative. Nous ne voulons pas d'un Journal officiel low cost au risque d'affecter une mission régalienne de l'État.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur général, la commission rejette l'amendement.
Elle adopte ensuite l'article 40 et l'état C sans modification.
Article 41 et état D : Crédits des comptes d'affectation spéciale et des comptes de concours financiers
La commission examine l'amendement II-CF1344 de Mme Sabine Rubin.
Nous sommes en désaccord avec le montant des crédits ouverts pour les comptes d'affectation spéciale et les comptes de concours financiers pour 2019. Nous notons des baisses de crédits de 2,5 % pour le compte de concours financiers Avances à l'audiovisuel public alors même que ce secteur aurait besoin de davantage de financements.
Le Gouvernement n'est pas en reste avec le compte d'affectation spéciale Contrôle de la circulation et du stationnement routiers, qui finance pourtant les collectivités territoriales pour l'amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routières. Cela fait écho à d'autres débats que nous avons eus sur la faiblesse de l'offre de transports communs qui pénalisent des personnes en difficulté qui n'ont pas d'autres moyens de se déplacer.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur général, la commission rejette l'amendement.
Elle adopte ensuite l'article 41 et l'état D sans modification.
II. – AUTORISATIONS DE DÉCOUVERT
Article 42 et état E : Autorisations de découvert
La commission examine l'amendement II-CF1345 de Mme Sabine Rubin.
Il s'agit là encore d'un amendement d'appel qui a pour but de s'opposer à la baisse des autorisations de découvert accordées aux ministres au titre des comptes de commerce et des opérations monétaires.
Vous figez ces autorisations de découvert au lieu de faire confiance aux gestionnaires publics.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur général, la commission rejette l'amendement.
Elle adopte ensuite l'article 42 et l'état E sans modification.
TITRE II : AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2019 – PLAFONDS DES AUTORISATIONS D'EMPLOIS
Article 43 : Plafonds des autorisations d'emplois de l'État
La commission est saisie de l'amendement II-CF1346 de Mme Sabine Rubin.
Nous nous opposons au niveau des plafonds des autorisations d'emplois de l'État pour 2019. Le Gouvernement prévoit de très nombreuses suppressions de postes dans la fonction publique pour 2019 : avec les créations de postes au ministère de l'intérieur, au ministre des armées et au ministère de la justice, on en arrive à un solde net de 4 200 suppressions. Citons, entre autres, 2 321 postes supprimés au ministère des comptes publics, 1 800 postes supprimés au ministère de l'éducation, 1 078 postes supprimés au ministère de la transition écologique et solidaire... Vous poursuivez ainsi le démantèlement de notre administration et donc de l'État.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur général, la commission rejette l'amendement.
Elle adopte ensuite l'article 43 sans modification.
Article 44 : Plafonds des emplois des opérateurs de l'État
La commission examine l'amendement II-CF1347 de Mme Sabine Rubin.
Les opérateurs de l'État vont souffrir de ce budget 2019 puisque le Gouvernement prévoit de supprimer 3 004 emplois au sein d'institutions comme le Centre national de la recherche scientifique, l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, Météo France ou Pôle emploi. Cet affaiblissement de nos capacités est une atteinte portée à l'intérêt général.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur général, la commission rejette l'amendement.
Puis elle examine l'amendement II-CF970 de Mme Barbara Pompili.
Je défends, avec cet amendement, la possibilité de redonner un peu de souffle aux agences de l'eau et aux parcs nationaux, qui voient leurs effectifs baisser assez régulièrement, malgré un très fort besoin de personnel sur le terrain. C'est d'autant plus dommageable que les agences de l'eau ont vu leurs compétences étendues à la gestion de la biodiversité par la loi sur la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. Ces emplois sont absolument essentiels, dans la mesure où ils font le lien avec les territoires, les collectivités, et permettent aux agences de l'eau de s'affirmer comme les partenaires de la mise en place des politiques liées à cette précieuse ressource.
Afin de pouvoir récupérer un peu d'équivalents temps plein travaillé (ETPT), je suis allée chercher là où les effectifs avaient augmenté : essentiellement la Société du Grand Paris (SGP), et la Société du Canal Seine-Nord Europe (SCSNE).
Les effectifs de la SGP connaîtront un quasi-doublement et devraient atteindre à peu près à 430 ETPT. Dans ces conditions, 15 ETPT représentent moins de 3,5 % de ses effectifs. Il serait donc possible de prélever ces 15 ETPT sans grever pour autant l'activité du Grand Paris, qui est évidemment essentielle. Pour ce qui est du canal Seine-Nord, les effectifs de la SCSNE pourraient quant à eux tripler, alors que pour l'année 2019, la mission essentielle de la société se limitera à faire des acquisitions foncières et à commander des études. Dans ces conditions, un doublement des effectifs devrait suffire.
L'objectif est de desserrer l'étau sur les parcs nationaux et les agences de l'eau, sans pour autant pénaliser ces établissements.
En tant que cosignataire, je suis favorable à cet amendement. Et je remercie par avance de sa générosité Gilles Carrez, qui a récupéré beaucoup d'argent hier pour la SGP...
Avant de céder la parole aux uns et aux autres, je voudrais dire à Mme Pompili qu'on ne peut ainsi pas retirer à la SCSNE un tiers de ses emplois. Cela fait vingt ans, peut-être vingt-cinq, voire plus, que l'on parle de ce canal ; nous arrivons à un moment majeur. L'État et la région Hauts-de-France, qu'elle connaît bien, ont rendu sa réalisation possible. Tout le monde est d'accord, et n'a jamais été aussi d'accord ; c'est à peu près financé. On entre dans la phase opérationnelle, et il va falloir commencer à travailler de façon rationnelle et juridiquement organisée.
Ce serait un très mauvais signal de vouloir réduire les emplois naissants d'un projet qui a mis vingt-cinq ans pour sortir de terre. Nous n'avons pas tellement de grands projets d'infrastructures en France, où la tendance est plutôt de réduire la voilure. Telle est mon opinion pour ce qui touche au canal Seine-Nord et les quinze emplois que vous voulez lui retirer.
Je commencerai en remerciant M. le rapporteur général de nous avoir aidés hier à trouver des recettes complémentaires hier pour la SGP.
Le rapport que nous avions commandé à la Cour des comptes et qu'elle nous a remis en janvier dernier traitait de deux aspects du projet du Grand Paris : son financement et les emplois. Or la Cour nous a recommandé, ce qui est tout à fait exceptionnel de sa part, d'augmenter le nombre d'emplois d'un opérateur de l'État.
Ce projet a vu ses coûts passer de 25 à 35 milliards d'euros et il s'est avéré que les effectifs en assistance à maîtrise d'ouvrage étaient deux fois supérieurs à ceux de la maîtrise d'ouvrage directe. La Cour des comptes a alors mis en évidence qu'il fallait absolument étoffer, muscler la maîtrise d'ouvrage et relever fortement le plafond d'emplois. C'est la raison pour laquelle celui-ci a été porté à 400 ETPT.
Selon la Cour, si on veut vraiment s'en tenir aux 35 milliards prévus, nous avons besoin d'un maître d'ouvrage qui soit capable d'assumer les opérations. Et contrairement au canal Seine-Nord Europe, les tunneliers sont déjà en train de creuser, et il faut pouvoir les contrôler dans leur travail.
Je vais soutenir l'amendement de notre collègue Pompili, parce que je connais les parcs nationaux et que je pense qu'ils ont vraiment besoin d'effectifs.
Je ne me prononcerai pas sur le gage qu'elle propose ; mais j'en profite pour signaler au rapporteur général qu'il serait bon à l'avenir, en cas de suppressions de postes, que l'on revienne vers nous pour nous dire exactement où elles ont été effectuées.
Je vais prendre un exemple sans citer le nom de l'opérateur de l'État concerné. Je me suis amusée à rechercher dans les rapports d'activité cinq ans en arrière, et j'ai constaté qu'il avait rendu des postes dans toutes les régions, excepté une seule, qui en a gagné au lieu d'en perdre. Voilà pourquoi je souhaiterais savoir, région par région, où les postes ont été supprimés, quel que soit le ministère touché – l'intérieur, la justice, l'éducation, etc.
Je vais aussi soutenir cet amendement : d'abord, je ne suis pas très favorable au Grand Paris quand je vois la tournure que prennent cette métropolisation et sa gouvernance ; ensuite, le Gouvernement peut toujours lever le gage s'il le veut ; enfin, je rejoins les propos qu'a tenus Barbara Pompili sur les agences de l'eau.
Parfois les gages n'ont aucun sens. En l'occurrence, celui-ci en a un, éminemment politique. Et c'est justement ce sens politique que l'on combat.
Monsieur Carrez, même si cet amendement est adopté, la SGP verra ses effectifs passer à 415 ETPT ; autrement dit, ils dépasseront les 400. Je ne voudrais en aucun cas que l'on puisse croire que je veux empêcher la réalisation du Grand Paris, dont les travaux sont en cours. Simplement, il me semble possible de prélever 3,5 % de ses effectifs, pour répondre, ailleurs, à d'autres besoins.
Pour ce qui est du canal Seine-Nord, je ne peux pas laisser dire que l'on veut réduire les effectifs : on propose de les doubler au lieu de les tripler, ce qui n'est pas vraiment pareil. J'ajoute que j'ai eu l'occasion d'en parler avec un certain nombre d'élus des Hauts-de-France, notamment au premier d'entre eux. Il n'était pas ravi, mais il a compris que l'objectif n'était pas d'empêcher la construction du canal Seine-Nord Europe. De toutes les façons, en 2019, la SCSNE n'aura que des acquisitions foncières à mener et des études à commander. Pour faire cela, franchement, 30 ETPT me paraissent suffisant.
On ne peut pas réfléchir de façon générale sur les ETPT. Imaginez que vous préleviez 15 ETPT quelque part et que ce soient les plus utiles ? Cela ne marche pas comme ça ! Aujourd'hui, on est suffisamment attentif à ne pas multiplier à l'excès les effectifs pour ne pas avoir, en plus, à les calibrer.
Pour ma part, je ne suis pas un spécialiste du canal Seine-Nord Europe, mais je vais aux réunions comme tous les élus concernés. J'ai bien vu qu'on entrait dans une phase opérationnelle, qui nécessitait la constitution d'une véritable équipe. Plusieurs milliards d'euros sont en jeu. C'est une infrastructure extrêmement coûteuse qui, je l'espère, sera extrêmement utile à notre pays. On enverrait un signal très négatif au moment où ce projet de canal est en train de se concrétiser.
J'irai dans le sens de Gilles Carrez. Quand on s'est penché sur les problèmes de la SGP, on a repéré, parmi les nombreuses causes de retards et de dérapages financiers, l'insuffisance de l'encadrement, qui s'est avérée très préjudiciable. Ce n'est donc pas du tout le poste où il faut faire des économies. Et je m'étonne qu'un homme aussi sage, aussi pondéré que notre rapporteur général s'oriente sur cette voie ! Il est tout à fait légitime que Mme Pompili défende un tel amendement. Mais venant de M. Giraud, qui est responsable de l'équilibre d'ensemble, je ne comprends plus !
C'est peut-être parce que je suis ici le plus vieil administrateur vivant d'un parc national depuis 1989 !
Monsieur le président, je comprends l'intérêt de ces grands travaux. Cela étant, les parcs nationaux ne sont pas des gadgets. Or on va créer un nouveau parc national sans avoir budgété aucun ETPT supplémentaire sur les parcs nationaux.
J'ai aussi, dans ma circonscription, le parc naturel régional des Trois Forêts. Je ne juge donc pas les parcs nationaux en tant que tels.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine, en discussion commune, les amendements II-CL976 et II-CL977 de Mme Barbara Pompili.
L'Autorité de sécurité nucléaire (ASN), qui n'est plus à présenter, assure la sûreté des installations nucléaires, et surtout des personnes qui y travaillent et qui vivent autour. Depuis quelques années, ses missions ont beaucoup augmenté, notamment ces derniers temps, avec la découverte de fraudes sur les futures pièces de réacteurs – les EPR, mais pas seulement.
L'ASN demande à pouvoir développer une section anti-fraude qui lui permettrait de travailler avec des experts sur la question ; c'est absolument crucial dans une période charnière pour le nucléaire. Pour cela, elle a besoin de 15 ETPT supplémentaires sur trois ans. Voilà pourquoi mon amendement II-CL976 propose de créer six ETPT supplémentaires, au lieu de deux, en 2019 ; l'amendement II-CL977, de repli, se limite à trois ETPT supplémentaires.
Je soutiens ces deux amendements. Je rappelle que ce service de lutte contre la fraude a déjà été mis en place par l'ASN, avant même de disposer des crédits permettant la création des ETPT correspondants pour remplir cette mission cruciale au regard des risques qui se développent.
On nous répond souvent que l'ASN est un peu « privilégiée » par rapport à d'autres opérateurs. C'est oublier que le domaine sur lequel elle intervient est d'une grande importance en termes de sécurité. Les gens de l'ASN se sont adressés à nous, et nous les avons auditionnés. Je crois vraiment qu'il faut en tenir compte, d'autant que cela ne concerne qu'un nombre restreint d'ETPT.
Enfin, au-delà de la création de ces ETPT, c'est l'expérience accumulée, qui est importante, qui pourra ainsi se transmettre. J'espère donc qu'un de ces deux amendements sera accepté. L'autre jour, en séance, c'est passé très près puisqu'il a fallu procéder à un vote par assis et levé. J'espère que cette fois-ci, la commission des finances enverra un signe favorable.
La commission rejette successivement les amendements.
Puis elle adopte l'article 44 sans modification.
Article 45 : Plafonds des emplois des établissements à autonomie financière
La commission est saisie de l'amendement II-CF1348 de M. Éric Coquerel.
Cet amendement d'appel a pour but de dénoncer la situation que connaissent les établissements à autonomie financière, c'est-à-dire les établissements de diffusion culturelle ou de recherche situés à l'étranger et dépendant du ministère de l'Europe et des affaires étrangères – principalement les instituts français à l'étranger qui participent, tout le monde en conviendra, au rayonnement de notre culture et de notre langue.
Le plafond d'emplois de ces établissements reste le même qu'en 2017 et 2018, mais dans le même temps, leurs dotations baissent de plus de 5 %, alors qu'elles avaient déjà baissé de plus de 5 % entre 2017 et 2018. Nous pensons au contraire qu'il faudrait augmenter les moyens et les effectifs des instituts français à l'étranger.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 45 sans modification.
Article 46 : Plafonds des emplois de diverses autorités publiques
La commission en vient à l'amendement II-CF1349.
Cet autre amendement d'appel a pour but de s'opposer au niveau des plafonds des autorisations d'emplois de diverses autorités publiques visées par l'article 46. Je pense à l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, une institution intégrée à la Banque de France, chargée de la surveillance de l'activité des banques et des assurances en France. Son rôle est essentiel et nous sommes en droit de nous inquiéter du gel de son plafond d'emplois. Mais on peut dire la même chose de l'Autorité des marchés financiers.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 46 sans modification.
TITRE III : REPORTS DE CRÉDITS DE 2018 SUR 2 019
Article 47 : Majoration des plafonds de reports de crédits de paiement
La commission examine l'amendement II-CF1267 de M. Éric Coquerel.
La loi organique relative aux lois de finances plafonne à 3 % les reports de crédits, d'une année sur l'autre, pour chaque programme de chaque mission. L'article 47 permet toutefois des dérogations pour certains programmes, et dans la plupart des cas, nous soutenons cette mesure.
Nous nous opposons cependant à ce qu'elle s'applique au programme Présidence française du G7. Nous pensons que les crédits de ce programme qui n'ont pas été consommés en 2018 sont inutiles, et n'ont donc pas à être reportés sur 2019. Au-delà, nous souhaitons dénoncer globalement l'allocation de fonds à la présidence du G7, symbole de l'enfermement dans une diplomatie de clubs oligarchiques, qui n'a pas sa place dans une institution comme l'ONU.
Voilà pourquoi nous proposons de supprimer la septième ligne du tableau de l'alinéa 2, qui concerne le G7.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 47 sans modification.
Elle adopte ensuite la seconde partie du projet de loi de finances pour 2019, modifiée.
Enfin, elle adopte l'ensemble du projet de loi de finances pour 2019, modifié.
Membres présents ou excusés
Réunion du jeudi 8 novembre 2018 à 9 heures 30
Présents. – M. Saïd Ahamada, M. Éric Alauzet, Mme Émilie Bonnivard, M. Jean-Louis Bourlanges, M. Gilles Carrez, M. Michel Castellani, M. Éric Coquerel, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, Mme Dominique David, M. Benjamin Dirx, Mme Sophie Errante, M. Olivier Gaillard, M. Joël Giraud, Mme Perrine Goulet, M. Romain Grau, Mme Olivia Gregoire, Mme Nadia Hai, M. Christophe Jerretie, M. François Jolivet, M. Daniel Labaronne, M. Mohamed Laqhila, M. Vincent Ledoux, M. Marc Le Fur, M. Fabrice Le Vigoureux, Mme Marie-Ange Magne, Mme Lise Magnier, M. Jean-Paul Mattei, Mme Amélie de Montchalin, Mme Cendra Motin, M. Xavier Paluszkiewicz, M. Hervé Pellois, Mme Valérie Petit, Mme Bénédicte Peyrol, Mme Christine Pires Beaune, Mme Valérie Rabault, Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas, M. Philippe Vigier, M. Éric Woerth
Excusés. – M. Olivier Serva, M. Benoit Simian
Assistaient également à la réunion. – M. Erwan Balanant, M. Thibault Bazin, M. Vincent Descoeur, Mme Sarah El Haïry, M. Raphaël Gérard, M. Fabien Gouttefarde, M. Bruno Millienne, M. Paul Molac, M. Matthieu Orphelin, Mme Barbara Pompili, Mme Laurianne Rossi, Mme Maina Sage, M. Jean-Marc Zulesi
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