La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures.
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi confortant le respect des principes de la République (nos 3649 rectifié, 3797).
Cet après-midi, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles, s'arrêtant à l'amendement no 1743 à l'article 21.
Il a été décidé de mettre en place un passeport numérique destiné aux enfants. Cet amendement vise à mettre à disposition des enseignants et des enfants les outils permettant à chacun de devenir un véritable citoyen, y compris dans l'espace numérique. Cela leur permettra d'apprendre à se battre contre la haine en ligne, mais aussi de connaître tous les bénéfices que l'on peut tirer de cette technologie.
La parole est à Mme Anne Brugnera, rapporteure de la commission spéciale pour le chapitre V du titre Ier, pour donner l'avis de la commission sur cet amendement.
Cet amendement prévoit de confier au service public du numérique éducatif la mission de proposer aux enseignants et aux enfants une offre diversifiée de ressources pédagogiques et de services contribuant à leur formation et à l'utilisation responsable des outils et des ressources numériques.
Je vous remercie pour cet amendement, chère collègue, mais je pense qu'il est en partie satisfait. Le service public du numérique éducatif inclut en effet non seulement le CNED, le Centre national d'enseignement à distance, mais aussi le réseau de création et d'accompagnement pédagogiques Canopé, qui remplit très précisément le rôle que vous avez évoqué et qui inclut le CLEMI, centre de liaison de l'enseignement et des médias d'information, l'Agence nationale des usages du numérique éducatif et Myriaé, qui ont respectivement pour mission d'éduquer aux médias et à l'information, d'intégrer le numérique dans la pratique pédagogique et d'identifier les ressources numériques pour l'école.
Ces différentes structures remplissent donc les missions que vous évoquez. Je vous encourage d'ailleurs à rencontrer leurs responsables. La commission des affaires culturelles et de l'éducation a récemment reçu, dans le cadre d'une audition passionnante, la nouvelle directrice générale de Canopé, Marie-Caroline Missir. Je pourrais bien sûr vous mettre en contact avec elle si vous le souhaitez.
Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, l'avis sera défavorable.
La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, pour donner l'avis du Gouvernement.
Même avis.
L'amendement no 2355 est retiré.
La parole est à M. Dominique Da Silva, pour soutenir l'amendement no 2379 .
Tout le monde s'accorde, je crois, sur le constat que le contrôle de l'État en matière d'instruction en famille fait défaut. Le service public du numérique éducatif et de l'enseignement à distance pourrait pallier ce manque en apportant une contribution numérique au contrôle et au suivi des enfants pour lesquels l'instruction en famille est autorisée. Cet amendement s'inscrit donc dans la logique de ce qui a été dit précédemment, mais en mettant l'accent sur la dimension de contrôle.
Les dispositifs de suivi et d'évaluation des enfants instruits en famille sont déjà établis et inscrits dans le code de l'éducation. Le travail d'évaluation relève des contrôles pédagogiques de l'éducation nationale, assurés par des inspecteurs de l'éducation nationale et des inspecteurs pédagogiques régionaux qui ont une solide expérience en la matière.
D'autre part, nous avons avancé sur la question du suivi en commission spéciale, puisque nous avons prévu l'attribution d'un identifiant national unique à chaque élève, qui permettra un meilleur suivi de ces enfants. Je vous demande donc de bien vouloir retirer cet amendement.
Même avis.
Je retire mon amendement, mais je veux rappeler qu'il est important que les outils numériques contribuent au contrôle et au suivi de ces enfants.
L'amendement no 2379 est retiré.
La parole est à Mme Liliana Tanguy, pour soutenir l'amendement no 2276 .
Il vise à faire signer une charte des valeurs républicaines aux parents qui font le choix de l'instruction en famille. Cela permettrait de s'assurer que cette forme d'éducation est bien conforme aux principes et aux valeurs républicains.
Je comprends l'ambition de votre amendement, qui vise à demander aux parents pratiquant l'instruction en famille de s'engager à respecter les principes de la République – et, si j'en crois l'exposé sommaire, à les apprendre à leurs enfants.
Je rappelle que dans le socle commun de compétences, de connaissances et de culture que les parents pratiquant l'instruction en famille doivent respecter figure bien sûr l'éducation morale et civique, qui comprend l'apprentissage de ces principes. Votre amendement est donc déjà satisfait par le code de l'éducation. Par conséquent, je vous demande de le retirer.
Même avis.
Je veux bien retirer l'amendement, mais j'espère que la réalité de cet apprentissage sera vérifiée par les autorités et par l'administration.
L'amendement no 2276 est retiré.
La parole est à M. Grégory Labille, pour soutenir l'amendement no 2484 .
Il vise à interdire à toute personne figurant au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions terroristes, le FIJAIT, d'instruire un enfant à domicile. Dans la droite ligne du texte, l'objectif de cet amendement est d'empêcher tout risque de négation des valeurs de la République, voire de radicalisation, chez les enfants.
Il est défavorable. Comme nous l'avons déjà dit en commission spéciale, le FIJAIT recense non seulement des personnes condamnées, mais aussi des personnes mises en examen. Si l'on privait du droit d'instruire en famille les titulaires de l'autorité parentale avant qu'une condamnation définitive ait été prononcée, cela pourrait constituer une atteinte à la présomption d'innocence
L'amendement no 2484 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 413 , 530 , 812 , 409 , 527 , 808 , 410 , 528 , 809 , 411 , 810 , 412 , 529 et 811 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 413 , 530 et 812 sont identiques, de même que les amendements nos 409 et 527 , les amendements nos 410 et 528 et les amendements nos 412 et 529 .
La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l'amendement no 413 .
Cet amendement et les suivants sont des amendements de repli. Malheureusement, en raison du temps législatif programmé, nous ne pourrons présenter chacun d'entre eux.
Nous souhaitons conserver le principe de la déclaration annuelle plutôt que de lui substituer celui de l'autorisation. Nous ne faisons en cela que suivre la décision du Conseil constitutionnel du 16 juillet 1971, selon laquelle l'exercice d'une liberté fondamentale ne peut être conditionné à « l'intervention préalable de l'autorité administrative ». Autrement dit, une autorisation préalable est contraire aux libertés fondamentales.
Nous verrons si cette mesure enfreint l'ordre constitutionnel même si, de toute façon, le problème n'est pas juridique, mais avant tout politique. Il s'agit de savoir si la liberté qu'ont les parents de choisir leur mode d'enseignement est uniquement théorique ou si elle est réellement accordée par l'État et par la République.
Les différents amendements de repli de cette discussion commune visent à encadrer la déclaration annuelle en lui donnant la forme d'un formulaire-type énonçant certaines conditions. Ces formulaires doivent être remplis a priori, mais le contrôle se fait a posteriori. Nous respectons donc le principe de la liberté des familles, tout en nous donnant les moyens d'un contrôle a posteriori efficace qui permet de lutter contre notre véritable ennemi, l'islamisme radical. Vous faites tout le contraire : le système d'autorisation que vous souhaitez instaurer repose sur une méfiance et une défiance à l'égard des familles a priori, mais vous ne prévoyez aucun mécanisme de contrôle a posteriori.
Les amendements nos 530 de M. Patrick Hetzel, 812 de M. Marc Le Fur, 409 de M. Xavier Breton, 527 de M. Patrick Hetzel, 808 de M. Marc Le Fur, 410 de M. Xavier Breton, 528 de M. Patrick Hetzel, 809 de M. Marc Le Fur, 411 de M. Xavier Breton, 810 de M. Marc Le Fur, 412 de M. Xavier Breton, 529 de M. Patrick Hetzel et 811 de M. Marc Le Fur sont défendus.
Nous avons déjà longuement discuté depuis ce matin de la question de la liberté du choix de l'enseignement – entre l'école publique, l'école privée et l'instruction en famille – et du dispositif d'autorisation préalable, à savoir une vérification, réduite au minimum, des motivations et des capacités des personnes souhaitant instruire leur enfant en famille. Cette autorisation sera bien suivie d'un contrôle, dont on ne peut pas dire qu'il soit négligeable, puisqu'il comporte un contrôle pédagogique annuel et un contrôle de la mairie tous les deux ans, ce qui est tout de même significatif. Avis défavorable sur tous les amendements.
Même avis, monsieur le président.
L'amendement no 808 n'est pas adopté.
L'amendement no 811 n'est pas adopté.
Je suis saisi de quatre amendements identiques, nos 249 rectifié , 408 , 531 et 788 .
L'amendement no 249 rectifié de M. Arnaud Viala est défendu.
La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l'amendement no 408 .
Monsieur le ministre, considérez-vous qu'un régime de déclaration et un régime d'autorisation sont identiques du point de vue de l'exercice d'une liberté, ou voyez-vous une différence entre ces deux régimes ? Si oui, laquelle ?
Si nous abandonnons un système de déclaration, qui consiste à dire que l'on va exercer telle ou telle activité, au profit d'un système d'autorisation, dans lequel on doit attendre un feu vert de l'État, n'y a-t-il pas une restriction de liberté ?
Nous attendons une réponse claire de votre part.
Les amendements nos 531 de M. Patrick Hetzel et 788 de M. Marc Le Fur sont défendus.
Quel est l'avis de la commission sur les quatre amendements identiques ?
Vous ne l'entendrez sans doute pas, mais je vais vous donner une dernière fois le même argument : En France, certaines libertés fondamentales sont d'ores et déjà soumises à un régime d'autorisation. J'ai une liste que je pourrais vous lire, mais je pense que ce n'est pas nécessaire.
Même avis.
Madame la rapporteure, puisque vous n'êtes pas soumise au temps programmé, donnez-nous la liste ! Ce serait très intéressant. Tout à l'heure, le permis de conduire a été évoqué. Or dans ce cas, ce n'est pas la liberté de se déplacer qui est en cause, mais celle d'utiliser tel moyen de locomotion. Quelle liberté est aujourd'hui soumise à un régime d'autorisation ?
J'ai cité par exemple la liberté d'aller et de venir, qui est soumise pour certaines personnes à l'obtention d'un visa. Il s'agit tout de même d'une liberté importante ; c'est même une liberté fondamentale.
Les amendements identiques nos 249 rectifié , 408 , 531 et 788 ne sont pas adoptés.
La parole est à Mme Nathalie Porte, pour soutenir l'amendement no 1090 .
Cet amendement permet de satisfaire la volonté du Gouvernement de pouvoir autoriser ou interdire, selon les circonstances, l'instruction en famille, mais en apportant une plus grande sécurité aux familles ayant recours ou souhaitant recourir à ce mode d'éducation. Ainsi, il ne serait plus nécessaire de recevoir une autorisation, mais les familles devraient établir une déclaration d'intention qui pourrait faire l'objet d'une interdiction. À défaut, l'accord serait tacite. Ce mécanisme paraît plus simple à mettre en oeuvre par les services de l'éducation nationale, qui n'auront pas à répondre à un nombre potentiellement important de sollicitations puisque ce n'est qu'en cas d'interdiction qu'ils auront à formaliser une réponse.
C'est un avis défavorable. En fait, vous proposez de restaurer le principe d'une déclaration, en indiquant qu'elle peut faire l'objet d'une opposition. En outre, vous ne précisez pas les modalités selon lesquelles les personnes pourraient être empêchées de pratiquer l'instruction en famille.
Même avis.
Cet amendement, comme d'autres, s'inscrit dans une logique de liberté. Madame la rapporteure, votre exemple des visas est intéressant : cela concerne des personnes étrangères, or il existe une différence objective entre un citoyen français et un citoyen étranger. Quelle différence faites-vous entre les familles en matière d'instruction et d'éducation ?
L'amendement no 1090 n'est pas adopté.
Il s'agit de prévoir que ce sont les maires et les élus locaux, acteurs au plus près des administrés, qui pourront accorder une dérogation. Ils devront suivre une formation et procéder aux entretiens déclaratifs préalables. Les maires devront donc être obligatoirement formés pour exercer le contrôle qu'on leur demande d'effectuer. Les structures habituelles de formation des élus pourront être chargées de la formation.
Il me semble que d'autres amendements suivront dans la même thématique. Vous souhaitez que l'autorisation soit délivrée non pas par les services de l'éducation nationale, mais par le maire de la commune dans laquelle réside l'enfant. C'est un changement très important, et la commission a émis un avis défavorable pour plusieurs raisons. Tout d'abord, les décisions des maires feraient courir le risque de pratiques hétérogènes à l'échelle nationale. Ensuite, ces décisions pourraient être motivées par d'autres raisons que la situation particulière de l'enfant. Un certain nombre de familles qui pratiquent l'instruction en famille et qui sont très inquiètes de cette proposition l'ont fait remarquer : elles craignent que certains maires refusent d'accorder des autorisations afin de préserver des classes ou des écoles dans leur commune, sans compter que d'autres raisons pourraient conduire un maire à s'opposer à ce type de dérogation.
L'amendement no 247 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il s'agit de répondre à une double préoccupation concernant l'instruction en famille. Premièrement, les critères d'autorisation doivent être harmonisés le plus possible au niveau national. Il y a en effet un risque, selon les endroits, les situations ou la difficulté plus ou moins grande de tel ou tel territoire, d'avoir des décisions à géométrie variable. Nous souhaiterions donc des critères nationaux harmonisés. C'est peut-être déjà prévu, mais cela mériterait d'être précisé.
Ensuite, les autorisations doivent être prises de façon collégiale. Ce sont des décisions assez lourdes, qui peuvent être sujettes à des appréciations subjectives. La collégialité nous semble donc constituer une garantie pour être absolument certain qu'il n'y aura pas de discrimination en fonction du nom, de l'adresse ou d'autres critères.
Cher collègue, je vous remercie pour cet amendement qui met en exergue deux sujets importants qui sont une source d'inquiétude pour les familles pratiquant l'instruction en famille et qui suscitent des interrogations chez plusieurs députés issus de tous les bancs. L'harmonisation des critères, qui a d'ailleurs fait l'objet d'autres amendements, sera assurée par un décret qui définira des critères nationaux.
Il n'est pas prévu que les décisions soient prises de façon collégiale. Néanmoins, je vais proposer, par un amendement que nous examinerons un peu plus tard, qu'en cas de refus de l'autorisation, la famille puisse solliciter une cellule de recours. Je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, l'avis sera défavorable.
L'amendement no 1990 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Frédéric Reiss, pour soutenir l'amendement no 2073 .
Proposé par notre collègue Nicolas Forissier, cet amendement prévoit, de façon intéressante, la possibilité de rattacher un enfant recevant une instruction en famille à un établissement scolaire afin de favoriser des interactions sociales ponctuelles entre cet enfant et les personnels enseignants et les élèves. Ces interactions pourraient s'établir à travers la pratique d'activités sportives ou culturelles régulières au sein de l'établissement. En outre, cela pourrait améliorer les conditions de contrôle de l'instruction en famille.
Cet amendement est satisfait par un amendement adopté en commission, qui prévoit le rattachement des enfants à une circonscription pour le premier degré ou à un établissement d'enseignement scolaire public pour le second degré. C'est l'objet de l'alinéa 19. Demande de retrait ou avis défavorable.
L'amendement no 2073 , ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement, est retiré.
L'amendement no 2684 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Paul Mattei, pour soutenir l'amendement no 2742 .
C'est un amendement de précision, mais pas uniquement. L'alinéa 10 de l'article 21 comporte une double négation : il s'agit donc de simplifier la rédaction en écrivant « est accordée ». Tel qu'il est rédigé, l'alinéa peut créer une sorte d'incertitude quant aux conditions d'obtention de l'autorisation. Dès lors que l'une des conditions fixées par les alinéas 11, 12, 13 ou 14 est remplie, les parents ont besoin de visibilité et de certitude. L'amendement permet de simplifier la rédaction et de les rassurer.
La commission n'a pas examiné cet amendement, qui tend à ce que l'autorisation soit automatiquement accordée dès lors que l'une des conditions est remplie. J'en comprends bien sûr l'esprit et j'entends votre désir de rassurer les parents qui pratiquent l'instruction en famille. Néanmoins, je préfère la rédaction actuelle qui me paraît plus précise…
Murmures sur les bancs du groupe Dem
… puisqu'elle indique qu'aucun autre motif que ceux listés ne peut être invoqué, ce qui ne figure pas dans votre amendement. À titre personnel, je donne donc un avis défavorable à l'amendement.
C'est un amendement intéressant qui permet, comme vous l'avez très bien dit, monsieur le député, de simplifier la rédaction et de donner confiance aux familles. Dans la lignée de tout ce qui est dit depuis tout à l'heure, le but est bien de donner confiance. Il ne s'agit pas d'avoir une approche tatillonne ou de donner l'impression d'un a priori négatif. Cette nouvelle rédaction me paraît aller dans le bon sens ; l'avis du Gouvernement est donc favorable.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe Dem et sur quelques bancs du groupe LaREM.
Comme M. le ministre, nous trouvons que l'amendement apporte une simplification qui est bienvenue : nous le voterons.
Mêmes mouvements.
Mêmes mouvements.
Il s'agit d'un amendement d'appel. L'article 21 comporte une référence à l'intérêt supérieur de l'enfant. Or celle-ci sert ici à justifier une intervention de l'État a priori. Cela pose au moins trois types de problèmes. Premier problème, cette intervention n'est pas supplétive ; elle n'est même pas respectueuse du rôle des parents, qui sont les premiers éducateurs de leurs enfants. Deuxième problème, la manière de procéder de l'article 21 n'est ni temporaire ni proportionnée.
Troisième problème, cette intervention est systématique, sans appréciation préalable au cas par cas de défaillances particulières ou de danger avéré pour l'enfant.
Autrement dit, de façon très paradoxale, le projet de loi en appelle à « l'intérêt supérieur de l'enfant » dans un sens qui est strictement contraire à celui qu'il revêt aussi bien dans la Convention internationale des droits de l'enfant que dans le code civil ou le code de l'action sociale et des familles. Tout d'abord, plutôt que témoigner de la confiance à l'égard des parents, cette approche correspond dans le texte à une logique de défiance ; ensuite, le danger et la carence ne sont pas avérés mais supposés ou hypothétiques ; enfin, les parents ne sont pas présumés capables mais on considère a priori qu'ils seraient coupables.
On voit bien qu'il y a là une modification substantielle de la notion d'intérêt supérieur de l'enfant, qui aboutit à une situation à l'opposé de son usage habituel. Cela mériterait quand même que l'on s'y attarde et que le Gouvernement nous explique en quoi il peut légitimement y recourir.
L'amendement a pour objet de supprimer la mention selon laquelle l'intérêt supérieur de l'enfant doit fonder toute demande d'autorisation. Or c'est bien cet intérêt supérieur qui doit être la boussole de ces dispositions, et sa mention à l'alinéa 10, en chapeau des motifs pour lesquels une autorisation d'instruction en famille peut être accordée, est nécessaire pour le préciser. Vous l'avez rappelé, la mention de l'intérêt supérieur de l'enfant figure dans la CIDE, la Convention internationale des droits de l'enfant, ainsi que dans le code de l'action sociale et des familles. Elle fonde aussi un certain nombre de jurisprudences.
Vous vous interrogez sur cette notion effectivement issue de la CIDE. Sachez que la Déclaration des droits de l'enfant de 1959 avait déjà mentionné le principe disposant que « l'intérêt supérieur de l'enfant doit être la considération déterminante » dans l'adoption des lois le concernant, ainsi que « le guide de ceux qui ont la responsabilité de son éducation et de son orientation ». C'est bien ce que nous faisons.
L'article 3 de la CIDE, qui introduit la notion dans la convention, a, c'est vrai, souvent été jugé trop vague, mais néanmoins l'ensemble des principes de ce texte constituent une base suffisante pour déterminer ce qui est dans l'intérêt supérieur de l'enfant. En relève, en particulier, le fait de recevoir une éducation, qui est énoncé à l'article 28 de la CIDE. L'article 18 précise que les parents exercent leur responsabilité dans l'intérêt supérieur de l'enfant. C'est donc avec le même souci qu'ils motiveront leur demande d'autorisation d'instruction en famille.
Même avis.
Il est dommage, monsieur le ministre, que vous ne répondiez pas sur ce sujet. Vous êtes juriste, regardez le code civil : jusqu'à présent, je le répète, on fait référence à l'intérêt supérieur de l'enfant en cas de défaillance des parents. Cela concerne par exemple le juge des enfants, qui, en vertu de l'article 375-1 du code civil, doit, en matière d'assistance éducative, « se prononcer en stricte considération de l'intérêt de l'enfant ». Dans le projet de loi, la situation est diamétralement inversée puisqu'on utilise la notion de façon préventive, au cas où l'intérêt supérieur de l'enfant ne serait pas respecté. Dans notre droit, jusqu'à maintenant, il en était fait un usage ex post ; là, on en fait un usage ex ante en demandant aux parents de justifier le fait qu'ils l'ont pris en considération pour agir. Avez-vous conscience de la façon dont vous êtes en train de construire une nouvelle relation juridique aux parents ? Vous créez un droit de la défiance alors que vous nous avez parlé, des semaines durant, d'une école de la confiance. C'est véritablement paradoxal.
Cher collègue, je vous avoue que je suis un petit peu étonnée : nous avons partagé sur de nombreux textes une vision commune de l'intérêt supérieur de l'enfant, et je crois me souvenir que vous avez déposé environ 300 amendements sur la proposition de loi visant à réformer l'adoption pour que ce principe soit consacré dans le code civil lorsque sont prises des décisions concernant la vie et l'éducation de l'enfant.
Vous ne devriez pas être gêné, mais plutôt vous réjouir qu'il soit pris en considération dans le projet de loi s'agissant de décisions positives et constructives.
Je trouve vraiment dommage que d'un texte à l'autre, vous soyez tenu de vous contredire. Vous défendiez hier exactement l'inverse de ce que vous dites aujourd'hui.
Vous savez parfaitement que la notion d'intérêt supérieur de l'enfant est également reprise par la Cour européenne des droits de l'homme pour développer toute sa jurisprudence à partir de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme et du droit au respect de la vie privée et familiale, ce qui lui a permis d'affirmer le droit à un environnement sain, le droit à une vie privée sociale, et le droit au développement de cette vie privée sociale pour l'enfant à l'école.
L'usage de la notion est non seulement souhaitable, mais il est aussi souhaité et conforme au droit européen comme aux besoins de développement des enfants en France.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.
La parole est à M. Pierre Dharréville, pour soutenir l'amendement no 2288 .
Il concerne ce qui me paraît constituer une bizarrerie dans l'exposé du quatrième motif qui permet l'instruction en famille. « L'existence d'une situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif » permet en effet d'accorder une autorisation, mais « sous réserve que les personnes qui en sont responsables justifient de leur capacité à assurer l'instruction en famille dans le respect de l'intérêt supérieur de l'enfant ». Cette réserve ne concerne que le quatrième motif et non les trois précédents ; je ne comprends pas bien pourquoi.
Moi, j'ai demandé en commission si l'itinérance des parents était dans l'intérêt de l'enfant… Pas de réponse !
Les trois premiers motifs ouvrent de fait la possibilité d'avoir recours au CNED : les parents délèguent l'instruction en famille au service public numérique de l'éducation. La mention sur laquelle vous vous interrogez n'a donc lieu d'être que pour le quatrième motif. À défaut d'un retrait, mon avis sera défavorable.
L'amendement no 2288 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Les amendements nos 2341 de Mme Souad Zitouni, 272 de Mme Anne-Laure Blin et 2344 de Mme Souad Zitouni sont défendus.
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 4 et 1241 rectifié .
L'amendement no 4 de M. Julien Dive est défendu.
La parole est à Mme Aude Bono-Vandorme, pour soutenir l'amendement no 1241 rectifié .
Les avancées scientifiques et juridiques de ces dernières années ont mis en lumière les troubles spécifiques du langage et des apprentissages, appelés communément troubles « dys », conséquences de troubles cognitifs spécifiques neurodéveloppementaux, reconnus par la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.
Selon les estimations, 6,6 à 7,5 % des élèves d'une classe d'âge sont dyslexiques, 3 à 4 % sont dyspraxiques, 2 % sont dysphasiques et 3 à 5 % ont un trouble de déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité. La scolarité des enfants « dys » reste un parcours du combattant, ayant en particulier pour cause un déficit de diagnostic et de la formation des enseignants pour détecter au plus vite l'existence de tels troubles, ainsi que le respect aléatoire des règles encadrant les rythmes scolaires et les modalités de passage des examens. La souffrance vécue au cours des apprentissages scolaires à l'école ou dans les établissements de certains enfants nécessite souvent une instruction en famille, notamment grâce à des cours par correspondance.
L'enquête réalisée par la Fédération française des dys, en 2019, sur les violences scolaires et les discriminations, nous a révélé que de nombreux enfants souffraient de phobies scolaires et que certains d'entre eux avaient fait des tentatives de suicide. Les familles expliquaient qu'elles n'avaient eu d'autre choix que de les déscolariser.
Dans la lignée de l'avis rendu le 3 décembre par le Conseil d'État sur le projet de loi, le présent amendement précise l'article 21 en intégrant les troubles spécifiques des apprentissages, les besoins éducatifs particuliers et la notion de situation de handicap, reconnue ou pas par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées.
Ils traitent avec justesse du cas des enfants dys et multi-dys, dont la scolarité est souvent compliquée, voire chaotique ou douloureuse, et qui doivent passer par la MDPH, la maison départementale des personnes handicapées, pour bénéficier d'une reconnaissance et de compensations. Vous alertez fort à propos au sujet de diagnostics compliqués et de notifications difficiles à obtenir. Pour toutes ces raisons, il me semble que ces situations relèvent du quatrième motif, qui est réellement fait pour cela. Parce que le premier motif – l'état de santé de l'enfant ou son handicap – , celui que vous souhaitez amender, demande une notification reconnue et un diagnostic abouti, il sera plus simple pour les familles concernées de s'inscrire dans le motif no 4. Je vous demande en conséquence de retirer vos amendements. À défaut, mon avis sera défavorable.
Il est défavorable, mais je considère, madame Bono-Vandorme, qu'il s'agit d'une proposition importante et que l'esprit de cette disposition est le bon. Je saisis l'occasion pour rappeler tous les efforts que nous faisons en faveur de l'école inclusive. Tout notre travail consiste à faire en sorte que les élèves puissent aller à l'école, quel que soit leur handicap ou ce que l'on met derrière cette appellation. Je le disais tout à l'heure : l'école, c'est bon pour les enfants. S'il y a bien quelque chose qui caractérise ce que nous avons voulu faire, c'est bien notre volonté que, quels que soient leur handicap ou leurs difficultés, les élèves puissent aller à l'école, laquelle est de plus en plus capable de personnaliser le parcours des enfants.
J'ai beaucoup entendu que l'instruction en famille constituait une sorte de défi pour l'école en dessinant parfois en creux ses insuffisances. Il faut entendre cet argument qui a une certaine validité, mais nous essayons justement de faire évoluer l'école, et nous y parvenons, par exemple en personnalisant le parcours des élèves, en particulier ceux qui connaissent des troubles dys. Je ne dis pas cela, madame la députée, pour gommer le problème que vous mentionnez à juste titre. Comme l'a indiqué Mme la rapporteure, notre objectif est de scolariser ces enfants. Si nous n'y parvenons pas – par exemple si une phobie scolaire est liée aux troubles dys – , il sera possible d'invoquer le quatrième motif pour demander l'instruction en famille.
Monsieur le ministre, je connais bien ces familles et ces enfants : un matériel spécifique est nécessaire pour l'apprentissage de la lecture et pour d'autres pratiques. Si vous vous engagez à fournir ces matériels dont le besoin est criant, je vous remercie.
Les amendements identiques nos 4 et 1241 rectifié ne sont pas adoptés.
L'amendement no 158 de M. Raphaël Gérard est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Défavorable. Comme pour l'amendement précédent, le sujet de celui-là relève du quatrième motif. Je demande donc son retrait, sinon l'avis sera défavorable.
L'amendement no 158 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je le défends pour ma collègue Jacqueline Dubois. Le nombre de voyages au long cours tend à augmenter. Le choix d'un voyage itinérant à l'étranger pendant plusieurs années résulte d'un véritable projet de vie pour les familles qui en font l'expérience. Le choix de l'instruction en famille devient alors la seule option possible en raison de l'itinérance de ces voyages. Les modalités de contrôle peuvent être adaptées pour ces cas de figure particuliers ; je crois que M. le ministre en a parlé dans certains médias. Il s'agit donc d'insérer les mots « et à l'étranger » après le mot « France ».
Les dispositions relatives à l'instruction en famille, l'IEF, ne s'appliquent qu'aux familles qui résident en France. Par conséquent, l'itinérance à l'étranger n'est pas concernée en tant que telle. En revanche, j'entends dans l'amendement que l'on pourrait avoir des nécessités d'instruction en famille avant de partir, pour poursuivre l'instruction en famille à l'étranger, puis quand on revient, et je crois que cela rejoint la problématique de Mme Cazebonne. Dès lors, cela relève plus du motif no 4, une situation particulière de l'enfant pour lequel l'instruction en famille serait appropriée, que du motif no 3. Demande de retrait.
Même avis.
Dans la mesure où c'est pris en compte dans le motif no 4, je retire l'amendement.
L'amendement no 2293 est retiré.
La rédaction actuelle du projet de loi autorise l'instruction en famille en cas d'éloignement géographique d'un établissement scolaire : c'est le motif no 3. Il conviendrait de préciser que ce critère ne concerne que les établissements publics, de façon que la famille puisse choisir de recourir à l'instruction en famille même si un établissement privé est situé à proximité du domicile. En effet, cette obligation pourrait entraîner des frais financiers importants, qui ne peuvent être imposés aux familles.
La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l'amendement no 1856 .
C'est un problème qui a été soulevé en commission par mon collègue Boris Vallaud et je me réjouis que d'autres groupes aient repris l'amendement, car cela signifie qu'il a des chances d'être adopté.
Tout à l'heure, nous avons adopté un amendement, que j'ai voté, de Jean-Paul Mattei, qui n'est pas un simple amendement de coordination ou de précision mais qui change le sens de la mesure – je ne sais pas si tout le monde l'a bien vu. C'est très rassurant pour les familles, puisqu'on a remplacé « ne peut être accordée que », une rédaction qui laissait la possibilité de refuser, par « est accordée ». C'est très sécurisant, et je tenais à remercier notre collègue.
La parole est à Mme Caroline Janvier, pour soutenir l'amendement no 2590 .
Cet amendement vise à préciser le motif n° 3 cité dans le texte. Il s'agit d'une précision qui semble importante pour éviter que la loi ne laisse entendre qu'en cas de proximité avec un établissement scolaire privé, la famille n'aurait d'autre choix que de scolariser son enfant dans l'enseignement privé plutôt que de recourir à l'instruction en famille. Des parents ne peuvent être contraints à préférer l'enseignement privé plutôt que l'instruction en famille, que ce soit pour des raisons financières ou pour des raisons liées à un éventuel projet confessionnel porté au sein de l'établissement.
La parole est à Mme la rapporteure Anne Brugnera, pour soutenir l'amendement no 2621 .
C'est un amendement identique. L'avis est donc favorable pour tous ces amendements.
La parole est à Mme Samantha Cazebonne, pour soutenir l'amendement no 604 .
Je reviens sur ces familles qui partent temporairement à l'étranger et choisissent pour leurs enfants l'enseignement à distance. Cet amendement vise à leur permettre de maintenir ce type d'instruction à leur retour en France, si elles le désirent et qu'il est profitable pour leur enfant.
Il n'est pas nécessaire de créer un nouveau motif. Pour moi, cela répond complètement au motif no 4 : une situation particulière de l'enfant du fait d'un séjour à l'étranger. Demande de retrait ou avis défavorable.
L'amendement no 604 , ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement, est retiré.
La création de quatre catégories d'un régime d'autorisation pour l'instruction en famille semble disproportionnée. La création d'une cinquième catégorie qui permettrait aux parents de pratiquer en liberté l'instruction en famille rééquilibre l'esprit de cette loi.
La parole est à M. Benoit Potterie, pour soutenir l'amendement no 1062 .
Cet amendement a pour objectif d'étendre les possibilités de dérogation permettant l'instruction en famille. Dans sa rédaction actuelle, cet article va pénaliser des familles qui pratiquent l'IEF dans l'intérêt de leur enfant et ne pourront plus le faire. L'IEF fonctionne pourtant généralement très bien lorsqu'elle est pratiquée dans l'intérêt de l'enfant. J'ai déjà énuméré un certain nombre de situations pour lesquelles il serait dommageable de retirer cette possibilité aux familles : enfant harcelé, enfant surdoué ou neuro-atypique… La liste est longue. C'est pour ne pas pénaliser ces familles que je propose cet amendement, qui permet une plus grande souplesse pour l'octroi de dérogations.
Cet amendement vise à introduire un nouveau motif pour autoriser l'instruction en famille, à savoir « le choix d'un projet éducatif par les personnes responsables de l'enfant, sous réserve qu'elles justifient de leur capacité à assurer l'instruction en famille dans le respect de l'intérêt supérieur de l'enfant. » Votre quatrième motif pour autoriser l'instruction en famille est certes une petite avancée dans le sens de la liberté d'instruction, mais selon nous, il ne va pas assez loin. Ce qui me dérange vraiment, en fait, c'est la formulation « l'existence d'une situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif » : cette rédaction nie la liberté de choix des parents d'instruire leurs enfants en famille. Pourtant, les parents sont bien titulaires de l'autorité parentale sur l'enfant, et donc du choix de l'instruire comme ils l'entendent. C'est cette liberté des parents d'instruire leurs enfants en famille que nous voulons défendre par cet amendement.
Sur l'amendement no 1024 , je suis saisi par le groupe Les Républicains d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Les amendements nos 697 de Mme Béatrice Descamps, 1025 de M. Julien Ravier et 2478 de M. Jean-Christophe Lagarde sont défendus.
Quel est l'avis de la commission ?
Vos amendements ont en commun de vouloir créer un cinquième motif autorisant l'instruction en famille. L'amendement no 837 prévoit que l'autorisation est automatique dès lors qu'il s'agit du choix des parents. Je pense que tous les parents qui demandent l'autorisation d'instruction en famille ont fait le choix de demander l'instruction en famille. Dès lors, c'est un avis défavorable.
Les autres amendements veulent créer un cinquième motif relevant du projet éducatif – projet éducatif que nous mentionnons dans le quatrième motif. Il y a une différence de réflexion entre nous. Dans le quatrième motif, qui a été amendé en commission pour introduire le projet éducatif, les familles relèvent un besoin de l'enfant à partir duquel elles élaborent un projet éducatif adapté à l'enfant, que ce soit par rapport à un sujet de rythme, à une phobie… On a parlé des « multi-dys », mais il y a aussi les troubles de déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité – TDAH – , les enfants précoces – et j'en oublie certainement, puisqu'il existe nombre de situations différentes qui font que les parents choisissent l'instruction en famille. Dès lors, le projet éducatif n'est pas le motif : le motif, c'est l'enfant et ses besoins, pour lesquels les parents élaborent un projet éducatif. Par conséquent, avis défavorable pour un cinquième motif de ce genre.
Même avis.
Je trouve que l'amendement de M. Ravier est très intéressant, parce que le quatrième motif amendé en commission, par un amendement de M. le président Studer si mes souvenirs sont exacts, visait à introduire un projet éducatif. On pourrait croire que la proposition de M. Ravier est redondante, mais pas du tout : elle constitue une ouverture intéressante en prévoyant que les parents désireux d'instruire en famille subordonnent leur démarche à l'élaboration d'un projet éducatif, dont le centre est évidemment l'intérêt de l'enfant, qui fonde une vraie légitimité. Si l'on s'en tient à vos quatre critères, nombre de familles n'auront pas accès à l'IEF…
… alors même qu'elles ont conçu un projet intéressant et bénéfique à l'enfant, sans que pour autant celui-ci présente des troubles dys, une phobie scolaire ou un quelconque problème. Certaines familles seront dès lors tentées d'invoquer un problème pour accéder à l'IEF. Y avez-vous pensé ? C'est un risque.
Il s'agit donc là d'une ouverture intéressante à même de nous rassembler. L'IEF n'est pas ouverte à tous vents, elle a toujours pour cible l'intérêt de l'enfant, garanti par un projet éducatif solide. C'est un amendement important qui mérite mieux qu'un rejet un peu rapide.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Je serais heureux que nous puissions avoir une petite discussion sur ce sujet. Annie Genevard l'a très bien dit, ce nouveau motif que nous vous proposons ne vient pas en opposition avec le quatrième motif, que nous comprenons bien et qui est une bonne solution, mais il met en avant le fait que les parents ont la liberté d'instruire leurs enfants en famille, sur la base d'un projet pédagogique, sans contrevenir à l'intérêt de l'enfant. Vous avez introduit un quatrième motif dans lequel vous placez l'intérêt de l'enfant au centre ; là, ce sont les parents qui ont la liberté d'instruire leurs enfants de la façon qu'ils pensent la meilleure. On ne peut pas contrevenir à cette liberté. C'est la liberté, pour des parents, de considérer que telle méthode d'instruction est la meilleure pour leur enfant – sachant qu'on ne pourra le voir qu'en l'appliquant.
Le nouveau motif que nous proposons n'est donc pas en contradiction avec le quatrième motif : il est complémentaire. S'il était adopté, cela satisferait un grand nombre de familles qui pratiquent l'instruction en famille et dont le choix est purement pédagogique et émane d'une conviction profonde, qui répond le plus souvent à l'intérêt de l'enfant.
J'ajoute une dernière observation : avec la formulation « l'existence d'une situation propre à l'enfant », vous ouvrez un champ infini de contentieux…
Rendons à César ce qui est à César : l'amendement adopté en commission sur le quatrième motif émanait de Géraldine Bannier et non de Bruno Studer.
Il me semble, par ailleurs, que ces amendements témoignent d'une simple volonté de défaire ce qui a été fait. Le quatrième motif est d'application large. On y parle bien de projet éducatif, monsieur Ravier, et pas de projet pédagogique. Rappelons que nous avons longuement débattu, en particulier avec ma collègue Géraldine Bannier, de la différence entre les deux. Le projet pédagogique se rapporte à un métier ; le projet éducatif est bien plus vaste. Selon moi, le quatrième motif inclut les différentes dimensions que vous évoquez. Bref, tout cela ne pose aucun problème.
Il existe une différence importante entre le quatrième motif inscrit dans le projet de loi et le cinquième motif que vous souhaitez ajouter. Vous considérez qu'il faut autoriser l'instruction en famille parce que les parents ont un projet. Nous estimons, quant à nous, que l'instruction en famille doit être centrée sur l'enfant.
Tous les parents qui pratiquent l'instruction en famille dans des conditions satisfaisantes le font pour leur enfant. Aujourd'hui, ils n'ont pas besoin de motiver leur décision, qu'ils justifient simplement par un motif de convenance personnelle, mais s'ils ont choisi l'instruction en famille, c'est bien pour leur enfant ! Il suffit de discuter avec ces parents pour constater à quel point ils ont adapté leur projet éducatif à leur enfant. Les familles qui ont plusieurs enfants instruits à domicile n'ont d'ailleurs pas le même projet éducatif pour chacun d'eux. Ils usent de la liberté pédagogique offerte par l'instruction en famille pour s'adapter à chaque enfant et à son rythme d'apprentissage.
Le quatrième motif inclut donc les dimensions auxquelles vous êtes attaché. L'instruction en famille part de l'enfant, mais s'appuie naturellement sur le projet pédagogique. Je suis persuadée que les familles qui pratiquent aujourd'hui l'instruction en famille sauront demain motiver les besoins de l'enfant en fonction de leur projet éducatif.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe Dem.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 151
Nombre de suffrages exprimés 146
Majorité absolue 74
Pour l'adoption 20
Contre 126
L'amendement no 1024 n'est pas adopté.
L'amendement no 274 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
En diminuant l'effectif des enfants en IEF, nous risquons d'isoler encore plus les enfants différents, en situation de handicap ou déjà isolés. L'IEF offre en soi une vie sociale riche et davantage de temps pour découvrir ses centres d'intérêt et s'y consacrer. Les enfants en IEF peuvent parfois devenir musiciens ou sportifs de haut niveau et développer toutes sortes de talents.
L'association Nonsc'Ô Toulouse a pour objet de réunir les familles de la région toulousaine pratiquant l'instruction en famille et d'organiser des visites de groupe pendant le temps scolaire pour aller dans les musées, voir des spectacles, brasser les âges, les fratries, les milieux sociaux et professionnels. Ces activités sont très riches pour les enfants, dont des études anglo-saxonnes ont révélé la grande maturité sociale. La rencontre des enfants instruits en famille parce qu'ils sont handicapés, parce qu'ils souffrent de troubles phobiques ou de problèmes de santé avec les enfants instruits en famille du fait du choix philosophique de leurs parents favorise la mixité sociale. La diminution du nombre d'enfants instruits en famille aurait pour conséquence la dissolution des réseaux de familles IEF, plaçant ainsi des enfants en situation d'isolement total.
Tel qu'il est rédigé, l'alinéa 14 de l'article 21 laisse penser que la capacité des personnes responsables de l'enfant à assurer l'instruction en famille ne vise que ce seul alinéa et n'est donc valable que pour « l'existence d'une situation propre à l'enfant ». Or cette capacité doit aussi pouvoir être requise pour l'instruction en famille en raison des motifs invoqués à l'alinéa 13. Le présent amendement vise par conséquent à ce que le régime de l'autorisation fasse l'objet d'un alinéa spécifique, qui englobe toutes les situations prévues par l'article 21 du projet de loi.
Les amendements nos 2479 de M. Jean-Christophe Lagarde et 1487 de M. Thibault Bazin sont défendus.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
L'amendement no 2408 propose une nouvelle rédaction du quatrième motif autorisant l'instruction en famille pour préciser qu'il est satisfait dès lors que le projet éducatif participe de l'intérêt supérieur de l'enfant. Il me semble satisfait par la rédaction actuelle de l'article, qui prévoit que l'autorisation « ne peut être accordée [… ] sans que puissent être invoquées d'autres raisons que l'intérêt supérieur de l'enfant » lorsqu'il existe une situation propre à l'enfant. Je vous invite donc à retirer votre amendement, madame Mörch.
En ce qui concerne l'amendement no 2426 , la commission y est défavorable car il supprime la référence à l'intérêt supérieur de l'enfant dans l'alinéa.
Même avis.
Je souhaite m'exprimer sur l'amendement no 2479 . Certes, l'intérêt supérieur de l'enfant est pris en compte, mais pour favoriser le lien de confiance entre l'école et la famille, on pourrait s'en tenir à une simple déclaration, complétée par un accompagnement du projet éducatif des familles.
Madame la rapporteure, vous avez expliqué tout à l'heure à notre collègue du groupe Les Républicains, Julien Ravier, que c'est toujours l'enfant qui est pris en compte dans l'instruction en famille, ce qui est vrai. Vous avez souligné par ailleurs que la famille pourrait toujours demain motiver son projet, ce qui est également exact. Néanmoins, les services de l'éducation nationale ne sont pas toujours neutres et un fonctionnaire pourrait très bien décider de rejeter la demande d'une famille au prétexte qu'elle ne satisfait pas un des quatre motifs prévus par la loi.
Vous donnez en réalité le sentiment de vouloir réduire le nombre d'enfants en instruction en famille. En effet, les dispositions que vous proposez n'atteindront pas les enfants qui reçoivent un enseignement de l'islam rigoriste.
Les parents pourraient-ils continuer à avoir le choix de l'instruction en famille ? Et être aidés dans la rédaction de leur projet éducatif ?
Les amendements nos 2354 de M. Pierre Dharréville et 1091 de Mme Nathalie Porte sont défendus.
La parole est à M. Stéphane Testé, pour soutenir l'amendement no 2051 .
Cet amendement déposé à l'initiative de Mme Cazarian vise à offrir la possibilité aux enfants harcelés de recevoir une instruction à domicile. Dans certaines situations, les enfants harcelés ne trouvent plus leur place dans le système scolaire classique et au sein du collectif. Leurs parents doivent alors avoir la possibilité de leur prodiguer un enseignement à domicile s'ils le souhaitent.
Pour rappel, l'UNICEF évalue à 700 000 le nombre d'enfants harcelés chaque année en France. Beaucoup d'entre eux développent un rejet du système scolaire classique et l'instruction à domicile est pour eux une solution précieuse.
Cher collègue, vous souhaitez par cet amendement appeler notre attention sur la situation douloureuse des enfants victimes de harcèlement scolaire, pour lesquels l'instruction en famille peut constituer une solution positive, puisqu'elle leur permet de poursuivre leur instruction dans un milieu sécurisant, dans lequel ils pourront se remettre de leur traumatisme.
Je vous remercie pour cet amendement, mais le motif du harcèlement scolaire, comme d'autres, est inclus dans l'alinéa 14, c'est-à-dire dans le quatrième motif, qui vise « l'existence d'une situation propre à l'enfant », celle-ci pouvant, hélas, être une situation de harcèlement scolaire. Votre amendement est satisfait. Je vous invite à le retirer ; à défaut, mon avis sera défavorable.
Je prends généralement la parole sur le sujet du harcèlement scolaire et je veux redire ce soir à quel point ce sujet constitue une priorité pour mon ministère. Je l'ai indiqué récemment dans cet hémicycle, nous agissons dans ce domaine à l'aide de nouvelles méthodes, souvent inspirées des meilleures pratiques internationales, ce qui nous a permis de remporter de premières victoires. En effet, une baisse des cas de harcèlement scolaire a commencé à être mesurée. Malheureusement, le cyber-harcèlement ne diminue pas et devient même pour nous une préoccupation majeure.
Nous devons bien entendu tenir compte du harcèlement scolaire dans notre approche de l'instruction en famille et vous avez souligné à juste titre l'importance de ce phénomène, que nul ici ne songe à sous-estimer. Toutefois, le harcèlement scolaire fait partie des situations prévues par le quatrième motif, ce que je réaffirme ce soir devant vous – c'est une assurance supplémentaire donnée à la représentation nationale.
Nous devons avoir une vision systémique des facteurs de la phobie scolaire, qui nécessitent parfois le retrait en urgence d'un enfant de l'école. Sur ce point, je veux tous vous rassurer, mesdames et messieurs les députés : c'est évidemment le bon sens qui doit nous guider. Nous devons lutter contre le harcèlement scolaire pour y mettre définitivement un terme. C'est le sens du dispositif des ambassadeurs contre le harcèlement que nous avons déployés dans les établissements, mais aussi, depuis la loi pour une école de la confiance, de la politique d'évaluation des établissements. Désormais, nous évaluons le climat scolaire dans chacun d'eux, au regard, notamment, du phénomène du harcèlement scolaire.
À chaque fois qu'il faut retirer un enfant d'un établissement en raison du harcèlement scolaire, c'est un échec collectif. Notre premier objectif doit être que le harcèlement cesse, mais il y a aussi des situations d'urgence : elles sont prises en compte par le projet de loi en l'état actuel du texte. Je vous demande donc de retirer l'amendement ; à défaut, mon avis sera défavorable.
L'amendement no 2051 est retiré.
La parole est à M. Stéphane Testé, pour soutenir l'amendement no 2053 .
Également déposé par Mme Cazarian, il vise à offrir la possibilité aux enfants atteints de TDAH – troubles de déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité – de recevoir une instruction à domicile. Il arrive dans certaines situations qu'ils ne trouvent plus leur place dans le système scolaire classique et au sein du collectif. Leurs parents doivent alors avoir la possibilité de leur prodiguer un enseignement à domicile s'ils le souhaitent.
Pour rappel, le TDAH toucherait environ 4 % des enfants en France. Des études ont démontré que les enfants atteints par ces troubles abandonnent davantage l'école que les autres enfants. Une autre solution doit donc leur être proposée.
Il s'agit d'une autre situation douloureuse qui concerne certains enfants. Le quatrième motif prend bien entendu en compte les enfants atteints de troubles de déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité, tout comme les enfants précoces et tous ceux qui ont besoin d'un rythme d'apprentissage différent. Est également prévu le cas des enfants pour qui le diagnostic n'est pas encore complètement établi mais dont certaines difficultés ont déjà été repérées par les parents – qui les voient évoluer quotidiennement – et l'école – qui les a vus grandir – , laissant penser que l'instruction en famille pourrait être adaptée à leurs besoins. Demande de retrait ou avis défavorable.
Même avis.
Lorsque j'ai déposé un amendement de suppression de l'article 21, j'avais notamment à l'esprit les cas de harcèlement scolaire ; j'en ai d'ailleurs parlé lorsque je suis intervenu. Je suis donc ravi d'apprendre que le quatrième motif recouvre ces situations et pallie ce qui aurait été un manquement. En effet, j'avais un doute à ce propos : je craignais que le projet de loi oblige certains enfants ayant quitté l'école après avoir subi un harcèlement à y retourner. Pour eux, cela aurait été très destructeur.
Je voudrais par ailleurs revenir sur les propos de M. le ministre. Un protocole a en effet été édité sur Eduscol pour lutter contre le harcèlement – il s'agit du prix « Non au harcèlement ». Selon une étude, 25 % de l'absentéisme au collège et au lycée est lié au harcèlement, qui mène à la désocialisation, à l'anxiété et à la dépression ainsi qu'à des conduites auto-destructrices, voire suicidaires.
Certes, un protocole existe pour traiter les cas de harcèlement et vous avez dit, monsieur le ministre, que la situation avait tendance à s'améliorer. Mais je suis tout de même satisfait de voir que le quatrième motif permettra à des enfants ayant subi de tels agissements de retourner temporairement suivre l'instruction en famille. D'ailleurs, rien ne les empêchera de revenir à l'école si leur situation le permet.
Je voudrais simplement interroger M. le ministre à propos de ces enfants harcelés. Pouvez-vous préciser dans quel délai la réponse sera fournie aux familles concernées ? Il s'agit parfois de situations d'urgence dans lesquelles l'enfant doit être extrait rapidement du système scolaire.
C'est un vaste sujet et cette soirée ne suffirait pas à en exposer tous les tenants et aboutissants. Bien entendu, les situations d'urgence feront l'objet de réponses adaptées, et c'est d'ailleurs déjà le cas – heureusement, c'est toujours le bon sens qui prévaut et en général, le chef d'établissement s'adresse au rectorat ou à l'inspection d'académie pour qu'une solution soit trouvée rapidement.
Cela dit, nos débats et le travail réalisé dans le cadre du projet de loi vont certainement nous faire encore progresser en la matière. Cela illustre bien ce que nous disons depuis ce matin : le fait de préciser cette liberté conduit aussi à lui fournir un cadre et donc à lui donner plus de chair.
J'en profite pour préciser un élément que je n'ai peut-être pas assez mis en avant : bien entendu, l'adoption de cette loi devrait aussi être l'occasion d'étoffer nos équipes, au sein des rectorats et des inspections d'académie, sur le sujet de l'instruction en famille ; cela a d'ailleurs été demandé sur tous les bancs. Je m'y engage, tout comme je l'avais fait au moment des débats sur la loi Gatel s'agissant des établissements privés hors contrat – nous avions alors effectivement étoffé nos équipes en rectorat.
Nous comptons donc augmenter nos ressources humaines tout au long de l'année scolaire 2021-2022 pour traiter cette question, et nous devrions arriver à maturité à la rentrée 2022, moment où – je le rappelle – nous envisageons que le projet de loi s'applique.
L'amendement no 2053 est retiré.
La parole est à M. Grégory Labille, pour soutenir l'amendement no 611 .
Il vise à compléter le quatrième motif, à l'alinéa 14, en mentionnant les « convictions pédagogiques » susceptibles de motiver le projet éducatif de la famille.
Cela permettrait aux familles de faire valoir leurs convictions pédagogiques pour être autorisées à réaliser l'instruction en famille. Tel que le prévoit la rédaction actuelle de l'article 21, « dans ce cas, la demande d'autorisation comporte une présentation écrite du projet éducatif ainsi que les pièces justifiant de la capacité à assurer l'instruction en famille. »
L'essentiel pour les familles est de continuer à avoir le choix, donc de conserver le droit d'opter pour une telle possibilité si elle est jugée bénéfique à l'enfant, ce qu'elle peut être pour diverses raisons – elle peut notamment permettre de respecter son rythme physiologique et d'adapter les méthodes pédagogiques à ses besoins.
Comme vous venez de le dire, l'essentiel pour les familles est de garder la possibilité d'opter pour l'instruction en famille si elles la jugent bénéfique à leur enfant. Mais c'est précisément l'objectif du quatrième motif !
Le fait qu'elles jugent cette solution bénéfique, c'est bien ce qui motive leur demande d'autorisation, comme le prévoit le quatrième motif ; elles devront ensuite l'étayer dans leur projet éducatif, qui détaillera ce que vous appelez leurs « convictions pédagogiques ».
Votre amendement est donc pleinement satisfait par la rédaction actuelle de l'article, même si les mots utilisés ne sont pas les mêmes. Demande de retrait ou avis défavorable.
Même avis.
Pour faire suite à l'exposé de M. Labille, pourriez-vous nous dire, monsieur le ministre, madame la rapporteure, quelle sera la réponse apportée par l'administration quand de telles demandes seront formulées ? Si, en vertu de leurs convictions pédagogiques, des parents disent vouloir adapter les méthodes à leur enfant pour répondre à ses besoins spécifiques, que leur répondra-t-on ? Ne se verront-il pas répondre que l'école, qui fonctionne par cycles, s'adaptera à leur enfant car c'est ce qu'elle est censée faire ?
L'inspecteur qui se retrouvera devant la famille en question ne lui dira-t-il pas que c'est exactement ce que fait l'école, qu'elle s'adapte à chacun car c'est le principe même de sa pédagogie ? Pouvez-vous me certifier qu'il ne répondra pas : « il n'y a pas de souci, l'école répondra aux besoins de votre enfant. » ? Dans de telles situations, l'instruction en famille risque de ne pas être autorisée !
J'entends bien ce que vous dites : l'autorisation est liée aux motivations de la famille et à la prise en compte des besoins de l'enfant. Mais je sais très bien, pour connaître moi aussi un peu la maison, qu'un inspecteur, un conseiller pédagogique ou tout fonctionnaire de l'éducation nationale répondra que l'école s'adapte déjà à chaque enfant. De même, si je dis vouloir respecter le rythme physiologique de mon enfant, on me répondra que c'est ce que fait l'école, qui travaille par compétences !
Voilà le problème ! On nous répondra toujours de cette manière ! Comment pouvez-vous nous assurer que l'éducation nationale, qui veut absolument que tous les enfants aillent à l'école, n'empêchera pas les parents concernés de choisir l'instruction en famille ?
L'amendement no 611 n'est pas adopté.
Dans la continuité de l'amendement no 2293 de Jacqueline Dubois, présenté tout à l'heure, celui-ci, signé par une trentaine de nos collègues, vise à prendre en compte le cas des familles qui souhaiteraient faire suivre à leurs enfants l'instruction en famille dans le contexte d'un projet de long séjour itinérant à l'étranger. En complétant la rédaction de l'alinéa 14 de l'article 21, son adoption permettrait de pallier cette omission.
Je relève une contradiction entre la rédaction de l'amendement et son exposé sommaire. Vous demandez d'insérer la mention d'un « projet familial au bénéfice de l'intérêt supérieur de l'enfant », mais j'ai déjà donné un avis défavorable à des amendements similaires.
Quant au sujet des séjours itinérants de familles à l'étranger, j'ai répondu tout à l'heure, au moment où nous avons examiné l'amendement de Jacqueline Dubois, que cette demande était satisfaite ; en effet, elle relève du quatrième motif, à condition que le voyage s'intègre dans l'année scolaire de l'enfant. Demande de retrait ou avis défavorable.
L'amendement no 2453 , ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement, est retiré.
La parole est à M. Dominique Da Silva, pour soutenir l'amendement no 2380 .
L'amendement défendu par notre collègue Gaël Le Bohec montre à quel point nous sommes nombreux, dans l'hémicycle et plus particulièrement au sein de la majorité, à trouver que le quatrième motif ne prend pas assez en compte le choix de la famille…
… lorsqu'il est parfaitement motivé et que le projet est organisé en fonction de l'intérêt de l'enfant et de son éducation. Je pense même qu'il pâtit d'une rupture d'égalité par rapport au troisième motif.
Mme Agnès Thill applaudit.
En effet, pourquoi « l'itinérance de la famille en France » – mentionnée au troisième motif – , qui est bien le fruit d'un choix familial s'imposant à l'enfant, …
… serait autorisée alors qu'elle n'est pas nécessairement décidée dans « l'intérêt supérieur de l'enfant » ?
Il faut donc sans doute faire évoluer le quatrième motif en introduisant l'idée qu'une famille, si elle s'est parfaitement organisée pour mener à bien un projet éducatif dans l'intérêt supérieur de l'enfant, doit également se voir autoriser l'instruction en famille. Nous devons avancer sur ce point ; c'est l'objet de notre amendement.
L'« organisation de la vie de famille » associée au choix de l'instruction en famille est particulièrement exigeante pour l'enfant concerné – ou les enfants, lorsqu'ils sont plusieurs. Mais vous devez comprendre que la délivrance de l'autorisation ne doit procéder que de la situation de l'enfant. La famille s'organisera ensuite de manière adéquate lorsqu'elle aura obtenu l'autorisation, comme c'est déjà le cas pour toutes les familles qui le font correctement – c'est d'ailleurs une gageure !
C'est bien ce que prévoit le quatrième motif, qui part de la situation de l'enfant pour lequel les parents doivent construire un projet éducatif adapté. Bien entendu, la vie de famille sera ensuite organisée en conséquence, mais ce n'est pas à nous ni à l'éducation nationale d'en juger. En délivrant son autorisation, l'éducation nationale ne donnera un avis que sur la capacité de la famille à dispenser l'instruction, en fonction de la situation de l'enfant et du projet éducatif présenté.
Je comprends tout à fait que vous vouliez évoquer l'importance de l'organisation familiale dans la réussite du projet, mais ce ne peut pas être un motif d'autorisation. Le motif, c'est l'enfant et le projet qui l'accompagne ; l'organisation suivra, mais nous n'aurons pas à la juger en tant que telle. Demande de retrait ou avis défavorable.
Même avis.
À chaque fois, on évoque – et c'est tant mieux – l'intérêt supérieur de l'enfant. Pourquoi un radicalisé n'invoquerait-il pas, lui aussi, l'intérêt de son enfant pour l'instruire à domicile, projet éducatif à l'appui ? Comment réagissez-vous à cela ? J'aimerais vraiment avoir des réponses.
Je vais donc répéter ma question : pourquoi un radicalisé n'invoquerait-il pas, lui aussi, l'intérêt supérieur de son enfant pour pratiquer l'instruction à domicile, en fournissant un projet éducatif ? Que répondez-vous à cela ?
Est-ce que l'ennui peut-être un argument recevable – au titre du quatrième motif prévu – pour l'octroi d'une autorisation ?
Cette question m'est inspirée par la lecture des conclusions d'un contrôle effectué pour une enfant prénommée Loïs, née à Roubaix et instruite par sa mère à Tourcoing. L'évaluation, effectuée le 9 mai 2019 par une inspectrice et un conseiller pédagogique, était une première pour cette enfant. « Loïs s'ennuie à l'école », ont indiqué les parents pour expliquer leur recours à l'instruction à domicile en classe de CE1. Est-ce que l'ennui fait partie des motifs ?
Dans leur bilan, l'inspectrice et le conseiller pédagogique notent une « très bonne » maîtrise de la langue ainsi que des principaux éléments de mathématiques et de culture scientifique et technologique. L'autonomie et l'initiative sont jugées « bonnes » pour un enfant de huit ans. En conclusion, il est indiqué que toutes les disciplines sont enseignées dans les attentes des programmes. Les évaluateurs écrivent : « Loïs est une fillette dynamique qui a bien compris les mécanismes des apprentissages. Elle est déjà capable de réaliser de petits dossiers sur différents sujets en lien avec les programmes et les situations de vie de sa famille qui voyage hors temps scolaire. Loïs apprend deux instruments de musique et pratique la danse. Elle semble bien épanouie. » Conclusion de ce rapport : avis favorable.
Je répète ma question : l'ennui qu'un enfant dit éprouver à l'école peut-il faire partie des motifs lui permettant de poursuivre son instruction en famille ?
Nous tournons en rond alors que les réponses vous ont déjà été données : le projet éducatif est motivé par la famille. Si celle-ci juge que l'ennui à l'école est une maladie et qu'un enfant a vraiment autre chose à faire, elle peut invoquer ce motif, comme le permet l'alinéa 14. À l'époque où je n'avais pas envie d'aller à l'école parce que je m'y ennuyais, on m'ordonnait d'y aller quand même, mais nous n'avons pas à traiter de ce genre de question ici.
Les parents décident si la situation motive un projet éducatif particulier, ce qui inclut toutes vos hypothèses.
Nous en revenons à la question soulevée par l'amendement no 1024 que j'ai défendu il y a quelques instants : la mention de « l'existence d'une situation propre à l'enfant » dans cet alinéa 14 conduira les parents à inventer, à mentir…
… ou à chercher un motif pouvant relever de cette catégorie, afin de mener le projet éducatif qu'ils jugent bon pour leur enfant.
Nous revenons au problème de fond qui nous pousse à rejeter le système d'autorisation pour en rester à celui de la déclaration : la liberté d'instruction appartient aux parents et le droit à l'instruction appartient à l'enfant. Un parent peut choisir l'école publique, l'école privée sous contrat ou hors contrat, ou bien l'instruction en famille, dès lors que l'intérêt de son enfant est respecté. Le respect de l'intérêt de l'enfant : voilà le seul critère à vérifier ! Rétablissons la liberté des parents.
Je comprends vos craintes concernant les parents qui font de l'instruction en famille. Nous avons tous rencontré des familles où tout se passe très bien. Toutes ont choisi ce système dans l'intérêt de leur enfant.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Dans quel autre but auraient-elles fait ce choix qui implique un investissement, un engagement, parfois au détriment d'une carrière professionnelle ? C'est bien dans l'intérêt de l'enfant !
Finissons-en avec cette suspicion, ce mantra selon lequel on voudrait mettre fin à l'instruction en famille. Ce texte ne vise qu'à l'encadrer par le biais d'une autorisation, aucunement à la supprimer si elle est pratiquée dans l'intérêt de l'enfant. Or c'est précisément dans l'intérêt de l'enfant que les parents font ce choix.
Permettez-moi de défendre brièvement la rédaction de l'alinéa puisqu'elle est issue d'un amendement que j'ai présenté en commission spéciale. On peut entendre toutes les circonlocutions possibles autour du quatrième motif mais ma formule était très simple : on part du besoin de l'enfant – une situation qui lui est propre – d'où découle un projet défini par les parents. Le projet est éducatif plutôt que pédagogique puisqu'il est du ressort de la famille, non de l'école. Ensuite, les services de l'État procèdent à une vérification, et c'est bien normal car les dérives parfois constatées commandent de surveiller l'instruction en famille. En somme, la rédaction que j'ai fait adopter était claire.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Dem et LaREM.
Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
On l'intègre pour la première fois dans le code de l'éducation alors qu'elle n'était jusqu'alors présente que dans le code de l'action sociale et des familles. Qui est juge de l'intérêt supérieur de l'enfant ?
Est-ce l'État ? Non, pour nous, il ne saurait en être le seul juge, même s'il participe à sa définition. Les parents sont les premiers à pouvoir dire quel est l'intérêt supérieur de l'enfant. Ce n'est qu'à titre subsidiaire, quand une pratique contrevient manifestement à l'ordre public et à la dignité de la personne, que l'État peut établir le non-respect de l'intérêt supérieur de l'enfant.
Dans votre vision de l'intérêt supérieur de l'enfant, l'État intervient pour contrôler. Là encore, c'est une rupture entre nous. Vous avez une vision administrative, technocratique, tutélaire de l'intérêt supérieur de l'enfant. Vous la peignez aux couleurs de la République, mais le Léviathan est là pour observer les parents et l'interprétation qu'ils font de l'intérêt supérieur de leur enfant. Or les parents savent ce qui est bon pour leur enfant.
L'amendement no 2380 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Souad Zitouni, pour soutenir l'amendement no 2345 .
À la première phrase de l'alinéa 14, je propose de remplacer « en sont responsables » par « exercent l'autorité parentale ».
La notion d'autorité parentale, définie à l'article 371-1 du code civil, précise que l'autorité parentale est un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l'intérêt de l'enfant. Elle appartient aux parents mais elle peut être déléguée en cas de carence de leur part.
Alors que l'expression « en sont responsables » relève davantage de la responsabilité civile, celle d'autorité parentale est plus juridique, fréquemment utilisée par les juges dans les décisions rendues concernant des enfants, donc plus appropriée.
Merci, chère collègue pour cette proposition. S'agissant de l'obligation scolaire, que nous traitons dans cet article 21, l'article 131-4 du code de l'éducation dispose : « Sont personnes responsables, pour l'application du présent chapitre, les parents, le tuteur ou ceux qui ont la charge de l'enfant, soit qu'ils en assument la charge à la demande des parents, du tuteur ou d'une autorité compétente, soit qu'ils exercent sur lui, de façon continue, une autorité de fait. »
Il me semble que cet article répond à votre demande d'explicitation. C'est pourquoi je vous invite à retirer votre amendement.
L'amendement no 2345 , ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement, est retiré.
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement no 2623 rectifié .
Il y a quelques instants, vous avez adopté l'un de mes amendements autorisant les parents à déléguer l'instruction en famille à une tierce personne. Par souci de coordination, je propose ici de préciser que la capacité vérifiée dans le cadre de la demande d'autorisation d'instruction en famille est celle de la personne chargée d'instruire l'enfant, et non des seules personnes responsables de l'enfant.
Je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.
L'amendement no 2623 rectifié est adopté.
La parole est à Mme Béatrice Piron, pour soutenir l'amendement no 1102 .
En commission spéciale, nous avons examiné plusieurs amendements portant sur la capacité des parents à assumer l'instruction en famille. Cependant, quels que soient le diplôme des parents et leur capacité, il faut aussi tenir compte de leur disponibilité, critère que nous voulons introduire par le biais de cet amendement.
Pardonnez-moi, mais cet amendement est devenu sans objet du fait de l'adoption de l'amendement no 2623 rectifié .
La parole est à Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe, pour soutenir l'amendement no 1914 .
Je ne comprends pas pourquoi cet amendement n'est pas en discussion commune avec celui de la rapporteure alors qu'ils sont quasiment identiques. Il s'agit de préciser dans le code de l'éducation que la vérification de la capacité et des compétences vise les parents ou la personne qu'ils ont choisie pour dispenser l'instruction à leur enfant, dans le cas où ils ne peuvent s'en acquitter eux-mêmes.
Pardonnez-moi de vous décevoir, mais après réflexion, cet amendement est également devenu sans objet du fait de l'adoption de l'amendement no 2623 rectifié .
Sourires.
La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l'amendement no 794 .
Si vous le permettez, monsieur le président, je vais défendre cet amendement mais aussi, par anticipation, l'amendement no 2117 puisqu'ils portent tous les deux sur le fait que l'instruction en famille se fait en français.
Comme je l'ai souvent fait lors de l'examen de différents textes, je souhaite mettre l'accent sur la maîtrise de la langue française, qui me paraît particulièrement importante s'agissant de l'instruction en famille. Comment enseigner à un enfant la langue française, avec toutes ses difficultés, ses nuances et ses subtilités, si on ne la maîtrise pas convenablement soi-même ?
Par l'amendement no 794 , je propose donc d'ajouter la notion de « français maîtrisé » à la définition, à l'alinéa 14, du quatrième motif justifiant l'autorisation de pratiquer l'instruction en famille.
Lors d'échanges que nous avons eus avec lui, le rapporteur général a suggéré ce qui pour moi est une formulation de repli – je fais référence à l'amendement no 2117 . Il vise à ce que la demande d'autorisation comporte « l'engagement d'assurer cette instruction en langue française ».
Ensuite, le Gouvernement a souhaité sous-amender l'amendement no 2117 . Vous suggérez d'écrire que l'enseignement dispensé par la famille se fasse « prioritairement » en langue française.
Un député s'exclame.
Rires.
Tout cela m'inspire une série de questions. D'abord, je pense que la meilleure formulation est la plus exigeante : « dans un français maîtrisé ». Maîtriser le français ne veut pas dire nécessairement pratiquer la langue de Molière, mais savoir comment il faut parler à l'enfant pour bien l'instruire.
Proposer que les parents s'engagent à assurer l'enseignement en langue française est une formulation affaiblie. Y ajouter « prioritairement »…
Non, « majoritairement ».
En effet : « majoritairement ». Y ajouter cet adverbe vous permet de tenir compte de l'enseignement bilingue, en langue régionale ou étrangère. Ces modifications affaiblissent considérablement l'objectif initial de l'amendement ; je souhaite vous entendre sur ce sujet.
Les deux amendements, no 794 et no 2117 , sont différents. Le rapporteur général et moi-même avons déposé un amendement identique au second d'entre eux, tout comme M. Benoit Potterie du groupe Agir ensemble.
L'amendement no 794 vise à insérer, à l'alinéa 14, les mots « dans un français maîtrisé ». Quant à l'amendement no 2117 , que le Gouvernement a proposé de sous-amender, il se contente de préciser que l'instruction de l'enfant doit être dispensée en langue française. Ces deux propositions – exiger que les parents qui demandent l'autorisation de l'instruction en famille maîtrisent le français ou que l'enfant soit instruit en français – ne sont pas les mêmes. En commission, il vous a été demandé de retirer l'amendement pour le retravailler. J'avais alors compris qu'il vous semblait nécessaire que l'enfant instruit en famille, qui doit acquérir le socle commun de compétences et de connaissances – toutes les matières qui le composent se déclinent en français, dont la maîtrise représente la première des compétences – , soit instruit en français, à l'exception des langues étrangères, locales ou anciennes. C'est ce que propose votre deuxième amendement no 2117 .
Les familles binationales comme celles qui parlent une langue locale et qui souhaitent la transmettre à leur enfant pourraient instruire celui-ci majoritairement en français tout en effectuant en parallèle l'apprentissage de la deuxième langue. J'ai ainsi été contactée par des familles binationales qui voulaient conserver un apprentissage conséquent de l'anglais ; il en va de même pour les familles qui veulent transmettre une langue régionale. Dans les écoles bilingues, de langue étrangère ou régionale, l'instruction est d'ores et déjà majoritairement assurée en français.
La commission est donc défavorable à l'amendement no 794 , mais elle sera favorable au no 2117.
Madame Genevard, nous avons en effet débattu en commission et je vous remercie de défendre cette idée importante. Il est évident que la maîtrise de la langue française est essentielle dans l'éducation en général. Le français est la langue de la République ; je l'ai dit dans différents débats, et c'est l'occasion de le réaffirmer. Il va de soi que parmi les savoirs fondamentaux que les enfants doivent maîtriser, en famille ou à l'école, le français est primordial. S'ils doivent apprendre à lire, à écrire, à compter et à respecter autrui, lire et écrire c'est lire et écrire en langue française. Il est donc tout à fait légitime de fixer cet objectif.
Le problème est de savoir comment l'atteindre. Comme le souligne Mme la rapporteure, ce qui compte, c'est que l'enseignement soit dispensé en français : c'est un critère plus objectif que l'exigence d'un « français maîtrisé », qui ouvre la porte à une forme de subjectivité, ce niveau n'étant pas aisé à établir. Je suis donc favorable à l'amendement no 2117 que vous avez qualifié d'amendement de repli, qui s'intéresse à ce qui va se passer : l'enseignement en français. Si nous ajoutons l'adverbe « majoritairement » – et non « prioritairement – c'est en effet, comme vous l'avez compris, pour tenir compte de la possibilité d'assurer une partie de l'enseignement en langue régionale ou étrangère.
Cette disposition a pour but de réaffirmer que la maîtrise du français est essentielle pour tous les enfants sur le territoire de la République ; il est donc normal que cette exigence vaille aussi pour l'instruction en famille, et son respect fera partie des éléments qui seront vérifiés dans le cadre des contrôles.
Je me suis moi aussi interrogée sur la question de la maîtrise de la langue française et de l'enseignement majoritairement en langue française. J'ai rencontré plusieurs familles étrangères – des expatriés de Lituanie, d'Afrique du Sud ou d'Allemagne – dont les enfants pratiquent actuellement l'instruction en famille, contrôlée et validée par des inspecteurs de l'éducation nationale, alors que ces familles parlent très peu le français et ne l'enseignent que comme une seconde langue, tout l'enseignement se faisant dans leur langue maternelle. En effet, ces enfants vont retourner dans leur pays d'origine et passer des examens dans un autre système éducatif.
Je sais, monsieur le ministre, que vous présenterez un sous-amendement faisant référence à l'article L. 121-3 du code de l'éducation, qui met en relief la maîtrise de la langue française comme objectif fondamental. Cependant le dernier alinéa de cet article précise bien que les écoles étrangères peuvent déroger à cet objectif du français comme langue principale et majoritaire de l'enseignement. Qu'en sera-t-il de ces familles qui enseignent majoritairement dans une autre langue parce qu'elles retourneront un jour dans leur pays ? Restera-t-il possible de valider leur demande d'instruction en famille ?
Je comprends l'intérêt de l'amendement visant à garantir une instruction majoritairement en langue française – les langues vivantes et anciennes sont importantes. En revanche, je ne comprends pas son emplacement dans l'article : pourquoi cette exigence ne se rapporte-t-elle qu'au quatrième motif et non aux trois autres ?
Monsieur le ministre, je vous remercie d'avoir pris en considération l'observation que j'avais faite en commission. C'est peut-être de guerre lasse que vous avez accepté un amendement relatif à la langue française.
« Mais non, allons ! » sur quelques bancs du groupe LaREM.
Non, pas de guerre lasse !
J'en ai souvent parlé, et vous avez souvent répondu que l'idée était bonne, mais le moment mal choisi. Il semble enfin que ce soit le bon ; j'en prends acte et je vous remercie.
Je ne vous cache pas que j'aurais préféré la formulation faisant référence au « français maîtrisé » ; c'est pourquoi – n'en prenez pas ombrage ! – je maintiendrai mon amendement pour le soumettre au vote. Néanmoins, le second amendement qui sera, je n'en doute pas, adopté avec votre sous-amendement vaut mieux que rien.
S'agissant des langues régionales et de l'enseignement bilingue, qui peut le plus peut le moins ! Un français maîtrisé assure d'autant mieux la maîtrise d'une langue régionale ou étrangère. Je ne vois pas en quoi l'un serait exclusif de l'autre.
Restons-en là puisque le temps nous est compté, mais je tenais à faire cette remarque.
L'amendement no 794 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Souad Zitouni, pour soutenir l'amendement no 2346 .
Il propose que l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation, qui prescrit le contrôle selon des modalités qu'elle détermine, y associe les services pertinents à l'échelle communale – la mairie – et départementale, et les associations représentatives, notamment dans le cadre de la prévention de la radicalisation. Le contrôle s'effectuerait au domicile de l'enfant, où celui-ci est instruit, et les personnes responsables de l'enfant seraient informées, à la suite de la déclaration annuelle qu'elles sont tenues d'effectuer en application du premier alinéa de l'article L. 131-5 du code de l'éducation, de l'objet et des modalités des contrôles.
L'idée est de renforcer le contrôle, la concertation de toutes les autorités permettant de mieux détecter une éventuelle radicalisation.
Vous voulez insérer à l'alinéa 14, qui vise l'article L. 131-5 du code de l'éducation, des précisions sur les contrôles réalisés en vertu de l'article L. 131-10. Ce n'est donc pas le bon endroit.
Par ailleurs, vos propositions sont déjà satisfaites par le code. Tout en vous remerciant pour votre amendement, je vous demande donc de le retirer.
L'amendement no 2346 , ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement, est retiré.
Je suis saisi de trois amendements identiques : l'amendement no 2117 , que Mme Genevard a défendu par anticipation, et les amendements nos 2528 de M. Benoit Potterie et 2624 de Mme la rapporteure, qui sont défendus.
Le sous-amendement no 2721 du Gouvernement est également défendu. Qu'en pense la commission ?
L'avis du Gouvernement sur les amendements identiques est donc favorable sous réserve du sous-amendement proposé ?
En effet.
Madame Genevard – je suis sûr, monsieur le président, que vous auriez fait cette remarque si vous n'aviez pas été au perchoir – ,…
… je cherche la logique des propositions du groupe Les Républicains. Tout à l'heure, on nous a expliqué que l'instruction en famille devait être la plus libre et la plus large possible ; et d'un seul coup, vous imposez un critère potentiellement très restrictif.
Il me semble qu'un des motifs qui pourraient justifier l'instruction en famille, c'est une situation où le cadre scolaire général – éducation nationale, enseignement privé sous contrat ou hors contrat – ne correspond pas du tout au projet pédagogique de la famille. Il en va ainsi de l'enseignement bilingue où la langue, étrangère ou régionale – je ne vais pas entrer dans des détails que le président de séance connaît parfaitement – fait l'objet d'un enseignement par immersion. Cela peut être le cas pour un couple binational franco-anglais, franco-allemand ou autre – on peut décliner à l'infini.
Heureusement que le Gouvernement a déposé son sous-amendement, mais même ainsi cela veut dire que ceux qui feront les contrôles devront vérifier que l'enfant ne fait pas trop d'anglais ou d'allemand par rapport au français. Qu'on vérifie que l'apprentissage du français est bien fait, d'accord, mais il est étrange d'imposer que l'instruction se fasse en français, …
… alors que l'un des motifs de l'instruction en famille peut justement être la volonté d'assurer un enseignement bilingue. J'invite à prendre conscience de ce que cette disposition impliquera en matière de contrôles, pour des familles soit binationales, soit qui cherchent à faire vivre une langue régionale. En effet, beaucoup de parents vivent dans une commune où ni l'école publique ni l'école privée, sous contrat ou hors contrat, ne proposent cette possibilité. Dans certains endroits, les enfants peuvent bénéficier de l'enseignement bilingue dans le système éducatif public ou privé, ou encore associatif, comme en Bretagne avec les écoles Diwan ; mais cela n'existe pas dans toutes les communes.
Disons les choses franchement : je pense que vous avez peur que des familles étrangères fassent cours en langue étrangère et n'apprennent pas aux enfants le français ; mais il faut avoir en tête les conséquences qu'une telle disposition peut avoir pour d'autres familles. Il aurait mieux valu vous joindre à notre volonté de clarifier les motifs justifiant l'instruction en famille – auxquels j'estime qu'on aurait pu ajouter l'enseignement bilingue – …
… plutôt que d'introduire, par le biais de cette exigence, une restriction qui affectera les familles dispensant précisément un enseignement bilingue à leur enfant.
Monsieur le président de la commission spéciale, vous avez un art consommé, sous couvert d'animer le débat, de prêter à autrui des intentions qui, en l'occurrence, n'étaient absolument pas les miennes.
J'affiche très clairement la couleur : l'expérience me montre qu'une partie des Français deviennent étrangers à leur propre langue, faute de la maîtriser, c'est tout.
Lorsque je vois que des enseignants, des instituteurs, des professeurs des écoles font des fautes d'orthographe, je constate qu'il y a un problème majeur dans la maîtrise de notre langue, c'est tout.
Qu'allez-vous imaginer comme préjugés, comme mauvaises intentions habillées d'une xénophobie qui ne dirait pas son nom ?
Ce n'est le cas en aucune façon ! Je dis simplement ceci : il faut que l'enfant maîtrise la langue du pays où il vit, voilà tout.
Mme Émilie Bonnivard applaudit.
Le sous-amendement no 2721 est adopté.
L'amendement no 605 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Béatrice Piron, pour soutenir l'amendement no 1103 .
Mon précédent amendement relatif à la disponibilité des responsables de l'enfant ayant été rendu sans objet, je le propose à nouveau : en plus de leurs capacités, les familles doivent justifier de leur disponibilité pour assurer l'instruction de leur enfant.
Chère collègue, votre amendement, tout comme le n° 1105 qui suit peu après, est satisfait par le décret mentionné à l'alinéa 15. Je vous invite à le retirer ; à défaut, avis défavorable.
L'amendement no 1103 , ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement, est retiré.
La parole est à Mme Natalia Pouzyreff, pour soutenir l'amendement no 1751 .
Partant du constat que les capacités propres des personnes chargées de l'instruction en famille ne sauraient suffire mais qu'elles doivent s'appuyer sur un ensemble de ressources pédagogiques, je propose que le projet éducatif fasse état des ressources en question.
Merci, chère collègue, de proposer que les familles sollicitant l'autorisation d'instruire elles-mêmes leur enfant mentionnent, dans leur demande, les ressources pédagogiques qu'elles comptent utiliser. Votre amendement étant satisfait, je vous invite à le retirer.
L'amendement no 1751 , ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement, est retiré.
L'amendement no 1105 est retiré.
La parole est à M. Benoit Potterie, pour soutenir l'amendement no 2283 .
Cet amendement, soutenu par le groupe Agir ensemble, vise à subordonner l'autorisation d'instruction en famille à la maîtrise de la langue française par les personnes chargées du suivi pédagogique.
Nous avons adopté des amendements sur ce sujet qui vous tient à coeur. Je vous invite à retirer votre amendement ; à défaut, avis défavorable.
L'amendement no 2283 , ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement, est retiré.
La parole est à Mme Florence Provendier, pour soutenir l'amendement no 2164 .
L'article 12 de la Convention internationale des droits de l'enfant, approuvée par la France en 1989, dispose qu'on donnera notamment à l'enfant la possibilité d'être entendu dans toute procédure judiciaire ou administrative l'intéressant. De même, la Défenseure des droits, dans son rapport du 19 novembre 2020, « Prendre en compte la parole de l'enfant : un droit pour l'enfant, un devoir pour l'adulte », rappelle que l'exercice de ce droit reste loin d'être effectif. Enfin, l'article 371-1 du code civil relatif à l'autorité parentale prévoit que « Les parents associent l'enfant aux décisions qui le concernent, selon son âge et son degré de maturité ».
Aussi, pour veiller à ce que le projet pédagogique d'instruction dans la famille corresponde aux besoins et à la volonté de l'enfant, cet amendement propose qu'une rencontre soit systématiquement organisée avec l'autorité de l'État au moment où les responsables de l'enfant formulent la demande d'autorisation, lors de son passage dans l'enseignement secondaire. En effet, cette période marque une étape importante, d'un côté dans le parcours scolaire de l'enfant et, de l'autre, dans son développement personnel. Il paraît opportun que l'entretien ait lieu automatiquement à ce moment clé, sans pour autant fermer la possibilité à l'autorité de l'État de rencontrer l'enfant dès son entrée dans le cycle élémentaire.
Je sais votre attachement à la Convention internationale des droits de l'enfant, qui incite à recueillir la parole de l'enfant lorsque son âge le permet pour toute situation le concernant. Néanmoins, dans le cadre de la demande d'autorisation, cela alourdirait fortement le dispositif. Nous avons prévu, par un amendement adopté en commission, que l'autorité compétente puisse entendre les familles dans le cadre de l'instruction de leur demande. Cette audition ne sera pas systématique et, dans ce cas, l'enfant pourrait être entendu. Je vous invite à retirer votre amendement.
Je comprends parfaitement l'esprit de cet amendement et la référence à la Convention internationale des droits de l'enfant. C'est d'ailleurs l'occasion de rappeler, pour répondre à certaines observations, que le projet de loi consacre l'intérêt supérieur de l'enfant. C'est une très bonne chose et je suis heureux que le code de l'éducation comprenne désormais cette notion.
Il est bon de connaître l'avis de l'enfant arrivé à l'âge de l'enseignement secondaire, sur ce sujet comme sur d'autres. Cependant, comme la rapporteure, je ne crois pas souhaitable de rigidifier ce mécanisme. Par ailleurs, vous le savez, un décret en Conseil d'État en précisera les modalités. Pour ces raisons, je vous invite également à retirer l'amendement ; à défaut, avis défavorable.
Je suis très ennuyée. Comment peut-on prendre une décision éclairée dès lors que l'intéressé, qui est capable de discernement, n'est pas considéré ? Depuis le début des débats, je n'ai pas pris la parole. Nous sommes tous en train de décider, en s'appuyant sur nos croyances et nos projections, de ce qui est bien pour nos enfants. Je nous crois tous sincères.
En revanche, je m'interroge sur le bien-fondé de certaines décisions dès l'instant, une fois de plus, où l'enfant, qui est le bénéficiaire de l'éducation que nous lui transmettons, n'est pas intégré dans le processus de décision, a fortiori quand il entre dans le secondaire – s'il en a la chance – , c'est-à-dire autour de l'âge de douze ans. Je ne retirerai pas cet amendement.
L'amendement no 2164 n'est pas adopté.
Je retire le premier. Le second prévoit que l'autorisation d'instruction soit délivrée sous réserve d'être appuyée par un avis du médecin traitant et, pour les enfants de plus de treize ans, qu'elle soit motivée par l'enfant lui-même, également sur avis du médecin traitant.
La situation propre à l'enfant motivant la demande d'instruction en famille, prévue au quatrième motif, n'est pas forcément liée à son état de santé : elle peut résulter d'une difficulté familiale déstabilisante comme la maladie grave d'un parent ou d'autres besoins particuliers. Dès lors, un certificat médical n'est pas systématiquement nécessaire, alors que tel est le cas pour invoquer le premier motif. L'ensemble des critères et des pièces justificatives seront précisés par décret. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
La parole est à Mme Béatrice Piron, pour soutenir l'amendement no 1104 .
Il propose qu'un décret en Conseil d'État précise les pièces justifiant la disponibilité et les capacités de la personne qui assurera l'instruction en famille.
L'amendement no 1104 , ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement, est retiré.
Il prévoit que l'autorisation peut être délivrée à la demande de la famille sous réserve que celle-ci justifie d'un projet pédagogique reposant sur une méthode d'enseignement que ne délivre aucune école du ressort de l'académie compétente. Il s'agit de lutter contre les inégalités géographiques en matière d'enseignement.
Les familles souhaitant utiliser une méthode pédagogique que les établissements de leur académie n'offrent pas peuvent invoquer le quatrième motif pour en demander l'autorisation, en le précisant dans le projet éducatif. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
L'amendement no 2606 , ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement, est retiré.
La parole est à M. Grégory Labille, pour soutenir l'amendement no 1590 .
C'est un amendement de bon sens. Dans près d'un cas sur quatre, le parent pratiquant l'instruction en famille est enseignant, en lycée ou en collège. Il me semble légitime, dans le cadre du régime dérogatoire de l'instruction en famille, qu'une famille où l'un des deux parents est enseignant puisse assumer elle-même l'instruction de son enfant.
Monsieur le député, vous proposez donc que du fait de ses études, tout enseignant soit autorisé à instruire son enfant en famille.
Mme Caroline Abadie rit.
En clair, vous souhaitez que l'autorisation soit donnée en fonction des parents. Or l'autorisation doit être motivée en fonction de l'enfant – j'espère avoir été claire sur ce point depuis ce matin. Il va de soi qu'un parent enseignant n'aura aucune difficulté à justifier de ses capacités, mais il doit tout de même motiver sa demande par rapport à son enfant. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Même avis.
La devise de la République française est un triptyque : liberté, égalité, fraternité. Au nom de l'égalité, je ne vois pas pourquoi, au motif qu'il serait enseignant, le parent pourrait librement instruire son enfant. Je ne trouve pas cela logique et j'ai donc déposé cet amendement de bon sens pour, au fond, démontrer l'incohérence des motifs justifiant l'instruction en famille. Si un enseignant est capable d'instruire vingt-quatre élèves, on suppose qu'il est aussi capable d'instruire son propre enfant. Mais je le répète, au nom de l'égalité, il ne devrait pas bénéficier d'un statut particulier sous prétexte qu'il est enseignant.
L'amendement no 1590 n'est pas adopté.
Il vise à ce qu'un niveau minimal de maîtrise de la langue, de l'histoire, de la culture et de la société françaises soit exigé de la part des parents qui pratiquent l'instruction en famille. Ces éléments sont par ailleurs exigés dans le cadre de dossiers de naturalisation et me paraissent nécessaires pour que l'instruction en famille ait lieu dans des conditions satisfaisantes pour les enfants concernés.
La parole est à M. Pierre-Henri Dumont, pour soutenir l'amendement no 908 rectifié .
Il vise à ce que la maîtrise de la langue française et des valeurs de la République par les parents qui pratiquent l'instruction en famille soit contrôlée par les mairies.
Les amendements identiques nos 1652 de Mme Isabelle Valentin et 2690 de Mme Josiane Corneloup sont défendus.
Quel est l'avis de la commission sur ces quatre amendements ?
En ce qui concerne l'amendement no 1061 , les exigences qu'il vise à instaurer sont très importantes. Nous avons déjà évoqué la question de la maîtrise de la langue française. Les critères de capacité des parents seront fixés par décret. L'avis est donc défavorable.
S'agissant de l'amendement no 908 rectifié , il ne revient pas aux mairies de vérifier la maîtrise de la langue française des parents – du moins n'est-ce pas ce que nous prévoyons dans le texte. Avis défavorable également.
Les amendements nos 1061 et 908 rectifié , repoussés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.
La parole est à Mme Monica Michel, pour soutenir l'amendement no 2042 .
Il vise à prévoir l'obligation, pour les responsables légaux de l'enfant qui sollicitent l'autorisation de dispenser l'enseignement en famille, de s'engager à assurer le droit à l'instruction de l'enfant. Cela implique l'acquisition du socle commun de connaissances, de compétences et de culture, lequel comprend l'apprentissage des principes de la République.
De plus, compte tenu du caractère spécifique de l'enseignement des valeurs de la République et parce que le fait qu'il soit correctement dispensé relève de l'intérêt général, le ministère de l'éducation nationale devrait mettre en ligne, gratuitement, des ressources pédagogiques à disposition des familles.
J'ai déjà répondu à un amendement similaire de Liliana Tanguy. Le présent amendement vise à obliger les parents instruisant leurs enfants en famille à les former aux principes de la République. Cet objet est déjà satisfait, car les parents en question sont déjà tenus d'inculquer à leur enfant le socle commun de connaissances, de compétences et de culture, dont fait partie l'éducation morale et civique, qui comprend au premier chef l'apprentissage des principes de la République. Je demande donc le retrait de cet amendement.
L'amendement no 2042 , ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement, est retiré.
L'amendement no 2105 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Fabienne Colboc, pour soutenir l'amendement no 2121 .
Il tend à préciser que l'autorité compétente de l'État saisie d'une demande d'autorisation d'instruction en famille prend sa décision selon des critères harmonisés au niveau national. Il s'agit d'éviter de trop grandes différences d'appréciation entre les différents services déconcentrés de l'État chargés d'examiner les demandes d'autorisation, notamment lorsque le quatrième motif est invoqué en lien avec la situation propre de l'enfant. Une telle précision serait de nature à rassurer les familles pratiquant l'instruction en famille, mais aussi à procurer une sécurité juridique aux services de l'État chargés de prendre ces décisions d'autorisation.
Je vous remercie de cet amendement portant sur la question de l'harmonisation des critères d'évaluation des demandes d'autorisation de l'instruction en famille. J'ai en partie répondu sur ce sujet tout à l'heure à la suite de l'amendement no 1990 présenté par M. Peu. Votre demande d'harmonisation sera satisfaite par un décret en Conseil d'État, qui contiendra la liste de ces critères nationaux. Quant à leur application, je vous soumettrai plus tard un amendement visant à créer une cellule rectorale de recours qui permettrait aux familles d'obtenir, en cas de besoin, un deuxième examen de leur projet d'instruction à domicile. Je vous demande donc, chère collègue, le retrait de votre amendement.
L'amendement no 2121 , ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement, est retiré.
Il vise à donner des gages aux familles qui pratiquent l'instruction à domicile, en précisant qu'il est possible de demander une autorisation – en invoquant évidemment l'un des quatre motifs dérogatoires dont nous avons débattu – tout au long de l'année et non uniquement selon les dates déterminées par l'administration.
L'amendement no 1176 de M. Éric Diard est défendu.
Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?
Les amendements de Mme de Lavergne et de M. Diard portent tous deux sur le moment où il est possible de déposer une demande d'autorisation d'instruction en famille. La première possibilité est de s'inscrire dans une année scolaire classique, auquel cas la demande devrait intervenir au printemps. C'est l'hypothèse retenue par M. Diard mais fixer une date, comme son amendement vise à le faire, relève du domaine réglementaire. La seconde option, que vous avez évoquée, madame de Lavergne, est de pouvoir déposer une demande à tout moment en cours d'année, en raison d'une situation propre à l'enfant. Je présenterai un amendement visant à rendre cela possible pour les motifs de phobie scolaire ou de harcèlement dont nous avons parlé. Le retrait de l'enfant de l'école ferait alors l'objet d'un échange avec les autorités académiques. Je demande donc le retrait des deux amendements.
L'amendement no 2539 , ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement, est retiré.
L'amendement no 1176 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Les amendements nos 1662 de Mme Josiane Corneloup, 338 de Mme Annie Genevard et 602 de M. Philippe Meyer, pouvant être soumis à une discussion commune, sont défendus.
L'amendement no 2230 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il me semble que la demande annuelle d'autorisation d'instruction en famille constitue un nouveau dispositif d'une lourdeur importante, alors même que les contrôles annuels effectués par les pouvoirs publics sont maintenus, voire renforcés. L'obligation, pour les familles, de formuler annuellement leur demande apparaît anxiogène, souvent disproportionnée et presque dissuasive. Une telle contrainte apparaît excessive au regard de l'objectif du projet de loi, qui est de faire respecter les principes républicains et non de faire renoncer à l'instruction en famille. Il me semble donc qu'il reste au législateur à trouver un équilibre dans les dispositifs prévus à l'article 21.
La commission spéciale a maintenu le caractère annuel de l'autorisation. Seule une dérogation à ce principe pour les enfants en situation de handicap ou dont l'état de santé le justifie a été introduite par l'adoption d'un amendement de Mme la rapporteure. À mon sens, cela ne suffit pas.
Éviter d'avoir à présenter annuellement une demande n'est pas possible au titre des autres motifs pouvant justifier une instruction en famille, prévus aux alinéas 12 à 14, ce qui crée un déséquilibre. Le présent amendement vise donc à supprimer le caractère annuel de la déclaration d'autorisation et à n'imposer une nouvelle procédure de demande d'instruction en famille que dans le cas où la scolarité de l'enfant a été interrompue.
Comme vient de l'expliquer mon collègue Marilossian, si une dérogation au caractère annuel de la demande d'autorisation à l'instruction en famille a été introduite par l'adoption d'un amendement de Mme la rapporteure pour les enfants en situation en handicap ou dont l'état de santé le justifie, elle ne concerne pas les autres motifs pouvant être invoqués pour obtenir cette autorisation. Cela constitue une lourdeur importante, tant pour les familles qui devront remplir une déclaration annuellement que pour l'administration qui devra traiter les demandes. De plus, une année ne correspond pas à la durée d'un cycle scolaire. C'est pourquoi cet amendement vise à ce que l'autorisation d'instruction en famille puisse être accordée pour une durée maximale de trois ans, ce qui paraîtrait plus raisonnable s'agissant du traitement administratif des demandes, moins anxiogène pour les familles, et conforme à la durée des cycles scolaires.
La parole est à Mme Nathalie Serre, pour soutenir l'amendement no 1372 .
Il est défendu sans autre précision, en raison du temps législatif programmé.
L'amendement no 2492 de M. Cédric Villani est défendu.
Quel est l'avis de la commission sur ces quatre amendements ?
Ces quatre amendements visent à revenir sur le caractère annuel de la demande d'autorisation d'instruction en famille, au motif qu'il constituerait une « lourdeur ». Il est vrai que la première demande d'instruction en famille doit contenir des informations sur la famille et l'enfant, sur le motif invoqué pour justifier la demande, sur le projet éducatif, et certainement des justificatifs attestant de la capacité des parents à instruire leur enfant eux-mêmes. Il est évident que, la première année, l'examen du dossier est approfondi et constitue un moment crucial. En revanche, l'année suivante, si la famille souhaite poursuivre l'instruction à domicile, certaines des pièces à fournir sont les mêmes. Je présume que la capacité des parents n'aura pas changé. Le motif invoqué, lui, peut changer, tout comme le projet éducatif peut être adapté d'une année sur l'autre, mais l'ensemble du dossier, ainsi présenté de manière récurrente, est beaucoup plus léger.
De surcroît, pendant la première année, des contrôles ont lieu qui, s'ils sont positifs, appuient la demande d'autorisation suivante. La famille est alors connue des services administratifs et il ne fait pas de doute que le traitement de son dossier s'en trouvera accéléré.
Pourquoi ne pas instaurer d'emblée, pour une famille dont la première demande d'instruction en famille aurait été acceptée, une autorisation de deux ou trois ans ? Justement pour avoir le temps de procéder à ces contrôles et pouvoir, s'il y a des points à régler ou des éléments insatisfaisants, remettre en question l'autorisation l'année suivante ; c'est tout l'intérêt d'une autorisation annuelle.
Je donne donc un avis défavorable à ces amendements.
Cet amendement, cosigné par une trentaine de collègues, vise à assouplir le régime d'autorisation de l'instruction en famille. Vous venez de dire, madame la rapporteure, que le dossier à constituer sera important la première année, mais qu'il s'agira ensuite d'un copié-collé.
Les familles peuvent avoir la volonté légitime d'instruire leur enfant à domicile pour la durée d'un cycle d'enseignement. De fait, l'article L. 131-10 du code de l'éducation prévoit le contrôle de « l'acquisition progressive par l'enfant de chacun des domaines du socle commun de connaissances, de compétences et de culture défini à l'article L. 122-1-1 au regard des objectifs de connaissances et de compétences attendues à la fin de chaque cycle », et non pas de chaque année scolaire. Il paraîtrait donc cohérent que le projet pédagogique des familles puisse s'inscrire dans un cycle d'enseignement de trois ans.
Mme Aina Kuric applaudit.
L'amendement no 2457 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 2462 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Anne-France Brunet, pour soutenir l'amendement no 2068 .
Nous proposons que, si les résultats du contrôle sont jugés satisfaisants, l'autorisation de recourir à l'instruction en famille puisse être accordée pour une durée supérieure à l'année scolaire. Ce nouveau régime d'autorisation vise à repérer les familles qui posent problème ; dès lors, il paraît préférable de se concentrer sur les familles qui commencent l'instruction en famille, ou dont les résultats sont jugés insuffisants.
Cette mesure de bon sens permettrait d'alléger la procédure, tant pour les familles que pour l'administration.
L'amendement no 2068 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Nous en arrivons à l'amendement no 2727 , dont il a déjà été beaucoup question, et qui fait l'objet de nombreux sous-amendements.
Il n'est pas certain que nous en terminions l'examen ce soir, à moins que les responsables des groupes n'imposent une certaine concision à leurs collègues – cela vaut également pour les rapporteurs.
Vous avez la parole pour le soutenir, monsieur le ministre.
Je vais essayer de faire droit à votre demande de concision, monsieur le président, même si cet amendement est important. Il est le résultat de l'écoute dont nous avons beaucoup parlé aujourd'hui.
Nous venons d'entendre qu'il faut faire gagner du temps aux familles qui ne posent pas problème quant aux critères fondamentaux de l'instruction en famille. On peut adhérer à cette idée, et c'est l'esprit de cet amendement, qui vise à profiter d'un autre accord auquel nous sommes parvenus en amont de cette discussion, celui sur le fait que ces nouvelles règles entreront en vigueur en septembre 2022. Dès lors, l'année 2021-2022 sera une année de transition, que nous mettrons à profit pour étoffer nos équipes de contrôle. Un contrôle systématique de l'ensemble des familles concernées sera mené au cours de cette année.
Cet amendement prévoit que, lorsque ce contrôle est positif, il vaudra autorisation pour les deux années suivantes, c'est-à-dire 2022-2023 et 2023-2024. Ainsi, les familles qui pratiquent l'instruction en famille sans poser de problème, du point de vue des valeurs de la République comme du point de vue de l'intérêt supérieur de l'enfant, pourront voir sereinement venir les deux années suivantes. Cela nous permettra, de notre côté, de nous concentrer sur les cas les plus problématiques.
Tout cela n'est pas très sérieux : le Gouvernement dépose un premier amendement, le retire, en dépose un nouveau… Cela montre qu'il hésite beaucoup sur ces questions, et qu'il n'est pas très assuré de sa rédaction.
Ce sous-amendement supprime les mots « par dérogation ». Le Gouvernement, on le voit bien, voudrait entrer dans une logique dans laquelle s'opposent d'un côté des enfants scolarisés dans des établissements, de l'autre l'instruction en famille, qui n'aurait pas le même statut, et qui aurait besoin d'une dérogation pour être légitime. Il y a là une volonté de déséquilibrer les choses, ce que nous ne comprenons pas. C'est tout à fait contraire à l'esprit de ce qui s'est pratiqué jusqu'à présent.
Là aussi, les familles ont une impression de défiance. Je le redis, monsieur le ministre : vous parlez régulièrement d'école de la confiance ; mais à chaque fois que vous intervenez sur ce texte, votre logique est celle de la défiance. À quel moment allez-vous faire confiance aux familles ?
La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir le sous-amendement no 2748 .
Quand nous écoutions le ministre, tout à l'heure, évoquer toutes ces enfants voilées, dans des hangars, nous avions l'impression qu'il y avait urgence ; et là, subitement, il y a le temps ! L'application de la mesure est reportée, et il y aura même des renforts pour le contrôle : c'est donc bien une volonté politique, ce que nous disons depuis le début.
On ne peut que s'interroger sur cet amendement du Gouvernement. Face à cette mesure qui passe très mal, il essaye de calmer ceux qui pratiquent l'instruction en famille : on les laissera tranquilles, et le nouveau système sera mis en place pour l'avenir. Le problème, c'est que vous touchez à une liberté, monsieur le ministre ; et quand on touche à une liberté, particulièrement la liberté d'éducation, cela intéresse tous les citoyens.
Monsieur le ministre, je ne vous suis plus ! Soit les familles qui instruisent elles-mêmes leurs enfants sont très dangereuses pour la République, voire radicalisées, et dans ce cas il faut agir tout de suite ; soit elles ne sont pas dangereuses, on peut prendre le temps de les contrôler, et différer, voire abandonner, cet article 21.
Vous vous emparez d'un amendement voté en commission qui repousse l'entrée en vigueur de la mesure à 2022, et j'en suis ravie, puisque c'est moi qui l'ai déposé. Mais c'était un moindre mal ! Votre proposition de report à 2024 n'est absolument pas cohérente.
Dès lors que les familles ont été contrôlées, ont convenablement mené l'instruction de leurs enfants à domicile, elles doivent pouvoir, de droit, continuer à pratiquer de cette façon.
« Sans plus de détails, en raison du temps législatif programmé ! » sur les bancs du groupe LR.
Rires.
Les sous-amendements nos 2754 et 2755 de M. Julien Aubert, et 2737 rectifié de M. Marc Le Fur sont également défendus.
Les sous-amendements identiques nos 2736 rectifié de M. Xavier Breton, 2739 rectifié de M. Marc Le Fur et 2743 rectifié de M. Patrick Hetzel sont défendus.
Le sous-amendement no 2751 de M. Marc Le Fur est défendu.
Nous en venons à deux autres sous-amendements identiques, nos 2741 et 2745 .
La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir le sous-amendement no 2741 .
Je m'interroge sur l'utilisation du terme « régulièrement ». Peu importe que l'enfant soit « régulièrement » instruit en famille ! La dérogation doit s'appliquer à tous les enfants concernés, à moins qu'il n'y ait un problème de contrôle aujourd'hui – c'est d'ailleurs le cas : les contrôles sont peu nombreux, par manque de volonté politique. La présence de cet adverbe montre que vous n'êtes pas à l'aise avec la situation actuelle !
Le sous-amendement no 2745 de M. Patrick Hetzel est défendu.
Sur l'amendement no 2727 , je suis saisi par le groupe La République en marche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Les sous-amendements identiques nos 2733 de M. Marc Le Fur, 2740 de M. Xavier Breton et 2744 de M. Patrick Hetzel sont défendus.
Les sous-amendements nos 2734 et 2735 de M. Marc Le Fur sont défendus.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement et les sous-amendements ?
Pour donner suite à l'aimable demande de M. le président, je me bornerai à émettre un avis favorable à l'amendement du Gouvernement et un avis défavorable à l'ensemble des sous-amendements.
Avis défavorable.
Pourquoi reculer, pourquoi attendre, monsieur le ministre ? Soit c'est urgent, soit ça ne l'est pas. J'ai bien compris qu'il s'agissait d'une question de moyens, et que vous alliez en déployer de nouveaux – nous verrons bien. Mais je pourrais aussi comprendre que vous agissez sous la pression des parents qui pratiquent aujourd'hui l'instruction en famille.
Il est dommage d'attendre : nous avions la possibilité de connaître assez vite et précisément les motivations des parents et les besoins des enfants. Mieux connaître ces besoins, c'est sans doute à terme pouvoir leur proposer ce qu'ils ne trouvent pas aujourd'hui à l'école. Ces données seraient très précieuses.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Les sous-amendements nos 2752 , 2754 , 2755 et 2737 rectifié , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.
Les sous-amendements identiques nos 2736 rectifié , 2739 rectifié et 2743 rectifié ne sont pas adoptés.
Le sous-amendement no 2751 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 134
Nombre de suffrages exprimés 122
Majorité absolue 62
Pour l'adoption 118
Contre 4
L'amendement no 2727 est adopté.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
La parole est à Mme Caroline Janvier, pour soutenir l'amendement no 2209 .
Cet amendement prévoit qu'un recours est possible à la décision d'autorisation, ou non, de délivrance d'une instruction en famille. Comme deux autres que je vous présenterai plus tard, il a été élaboré en lien avec le conseil national consultatif des personnes handicapées – CNCPH – qui s'inquiète de la complexité des démarches que les familles d'enfants handicapés pourraient devoir accomplir dans des situations d'urgence : dans certains cas, l'enfant ne peut plus être scolarisé et accompagné en milieu ordinaire, et faute de place dans un établissement spécialisé, la famille n'a d'autre choix que l'instruction en famille. Il faut faciliter ces démarches autant que possible.
Je vous demande de retirer l'amendement qui est satisfait à deux titres : premièrement, des voies de recours de droit commun seront proposées aux familles lorsque la réponse à leur demande d'autorisation leur sera envoyée ; ensuite, je proposerai tout à l'heure l'instauration d'une cellule de recours qui répond à votre préoccupation.
Même avis.
Je vous remercie pour cette réponse qui rassurera les familles qui m'ont sollicitée. Je retire l'amendement.
L'amendement no 2209 est retiré.
Cet amendement de Jacqueline Dubois, cosigné par une quinzaine de collègues, propose de délivrer un accord préalable à toute demande de dérogation à l'obligation de scolarisation par les responsables de l'enfant. Il s'agit, par ce principe, d'apporter de la souplesse et d'allier la liberté du choix d'instruction avec la rigueur de l'autorisation administrative relative à l'autorisation d'instruire en famille. L'amendement répond aussi aux situations qui se présenteraient au cours de l'année en prévenant une interruption d'enseignement qui pourrait nuire à l'élève concerné.
Il y a trois situations possibles : soit la demande d'instruction en famille est faite au printemps pour l'année scolaire suivante, et l'enfant reste à l'école, où tout se passe bien, le temps que le dossier soit instruit, avant de changer de régime à la rentrée ; soit il est déjà instruit en famille et continue ainsi à la rentrée ; soit un problème particulier nécessite le passage à l'instruction en famille en cours d'année scolaire. Nous avons parlé de ce dernier cas au sujet de l'amendement de Mme de Lavergne et je proposerai tout à l'heure un amendement visant à accélérer la procédure dans les circonstances particulières d'urgence. Demande de retrait.
L'amendement no 2185 , ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement, est retiré.
En cas de circonstances exceptionnelles, telle une situation d'urgence, l'amendement propose de délivrer un accord préalable à toute demande de dérogation par les responsables de l'enfant. Cette demande urgente de dérogation par la famille doit pouvoir bénéficier d'un traitement idoine par les autorités compétentes. Je devine que la réponse de Mme la rapporteure sera la même que pour l'amendement précédent, aussi je le retire pour aller plus vite.
L'amendement no 2197 est retiré.
L'objet de cet amendement est de concourir à la protection de l'enfance. Il répond aussi à la préoccupation exprimée dans certains amendements concernant l'information des élus. Il prévoit l'information du président du conseil départemental à l'occasion de la délivrance de l'autorisation. Celui-ci pourra, s'il l'estime opportun, avertir le directeur académique des services de l'éducation nationale, le DASEN, de l'existence d'une information préoccupante ou d'une autre mesure prise en conséquence. Dans ce cas, le DASEN pourra suspendre ou abroger l'autorisation délivrée.
Par cohérence, il vous est également proposé de déplacer l'alinéa 16 après l'alinéa 18. Il y est fait mention à la fois du président du conseil départemental, qui sera informé au titre de la protection de l'enfance, et du maire de la commune de résidence de l'enfant, qui pourra conduire les enquêtes de mairie prévues à l'article L. 131-10 du code de l'éducation.
Les amendements identiques nos 1653 de Mme Isabelle Valentin et 2691 de Mme Josiane Corneloup sont défendus.
La parole est à Mme Sylvie Charrière, pour soutenir l'amendement no 2278 .
Dans le cas où la famille serait convoquée pendant l'instruction de sa demande d'autorisation, il me semble essentiel que l'enfant soit présent. L'intérêt de l'enfant est au centre de tous les dispositifs éducatifs, y compris pour l'instruction à domicile ; le rencontrer, afin d'écouter sa parole et son avis, permettrait à l'autorité d'apprécier la situation de l'enfant dans sa globalité. L'amendement propose donc que l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation puisse rencontrer l'enfant afin de mieux apprécier sa situation et d'agir dans son intérêt.
Avis favorable aussi. Dans l'esprit de l'échange que nous avons eu tout à l'heure sur l'enjeu de l'intérêt supérieur de l'enfant, il est normal que celui-ci soit écouté. L'emploi du terme « peut » me paraît positif également.
L'amendement no 2278 est adopté.
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l'amendement no 2627 rectifié .
Il vise à compléter la possibilité adoptée en commission d'une rencontre entre les services académiques et la famille, dans le cadre de l'instruction de la demande d'autorisation, pour inclure la personne qui sera chargée d'instruire l'enfant, si les parents ont décidé que cette tâche serait assurée par une personne tierce.
L'amendement no 2627 rectifié , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme Perrine Goulet, pour soutenir l'amendement no 1264 .
Il porte sur le même alinéa que l'amendement précédent, celui qui permet à l'éducation nationale de convoquer les responsables de l'enfant pour apprécier la situation de l'enfant et vérifier que les parents ont la capacité d'assurer l'instruction en famille. Nous souhaiterions y ajouter les mots « et la transmission des valeurs de la République » car, même si l'instruction a lieu en famille, il faut s'assurer que les parents connaissent bien les valeurs de la République.
L'amendement rejoint ceux de nos collègues Liliana Tanguy et Monica Michel, dont j'ai parlé tout à l'heure, en proposant de vérifier que les parents qui instruisent eux-mêmes leurs enfants leur enseignent bien les principes de la République figurant dans le socle commun de compétences et de connaissances. Vous proposez d'effectuer cette vérification au moment de la convocation des familles, ce qui me semble compliqué ; pour moi, elle relève plutôt du contrôle pédagogique effectué chaque année par les inspecteurs de l'éducation nationale. Avis défavorable.
Défavorable.
En effet, il est important de vérifier ce point en cours d'année, mais je pense qu'il faudrait aussi, avant de les laisser se lancer, vérifier que les parents connaissent ces principes.
L'amendement no 1264 n'est pas adopté.
Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 1486 , 1655 , 1644 , 414 , 532 , 813 , 603 , 2470 et 700 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 1486 , 1655 et 1644 sont identiques, ainsi que les amendements nos 414 , 532 et 813 .
L'amendement no 1486 de M. Thibault Bazin est défendu.
La parole est à M. Frédéric Reiss, pour soutenir l'amendement no 1655 .
La parole est à Mme Béatrice Piron, pour soutenir l'amendement no 2556 .
Il vise à préciser qu'au dépôt de la demande d'autorisation d'instruction en famille, l'enfant reste instruit selon les mêmes modalités, c'est-à-dire qu'il reste à l'école, s'il est scolarisé, ou en famille, s'il suit une instruction en famille.
Cet amendement complète l'amendement no 2591 , cosigné par tout le groupe, qui précise qu'en cas de retrait soudain et nécessaire d'un enfant inscrit dans un établissement public ou privé, notamment dans des situations de harcèlement ou de phobie scolaire, l'enfant peut être instruit dans la famille avant même l'obtention de l'autorisation demandée en application de l'article L. 131-5 du code de l'éducation. Cette dérogation d'urgence peut être accordée en accord avec le directeur de l'établissement dans lequel l'enfant est inscrit.
L'amendement no 2556 , ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement, est retiré.
La parole est à Mme Béatrice Descamps, pour soutenir l'amendement no 2487 .
Certaines situations particulières peuvent nécessiter, en cours d'année scolaire, le passage à la scolarisation à domicile, parfois temporaire. Les familles ne peuvent alors se permettre d'attendre deux mois avant d'obtenir une réponse. L'amendement vise à inscrire une exception à l'article L. 231-1 du code des relations entre le public et l'administration en imposant une réponse sous quinze jours.
Le silence vaut accord au bout de deux mois, mais il s'agit d'un délai maximal. Bien sûr, en situation d'urgence, nous pouvons faire confiance aux services pour aller plus vite. Par ailleurs, nous adopterons plus tard un amendement qui prévoit expressément ces situations d'urgence. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
L'amendement no 2487 , ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement, est retiré.
L'amendement no 1425 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Anne Brugnera, rapporteure, pour soutenir l'amendement no 2629 .
C'est l'amendement qui traite de la cellule de recours. Plusieurs députés ont relayé les inquiétudes légitimes des familles concernant les possibilités de recours en cas de refus opposé à leur demande d'autorisation. Il est donc proposé de créer une cellule rectorale de recours, qui permettra aussi d'harmoniser les réponses faites aux demandes d'autorisation des familles. Les modalités de fonctionnement de cette cellule rectorale seront fixées par décret.
L'amendement no 2629 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Mohamed Laqhila, pour soutenir l'amendement no 1483 .
Il vise à sécuriser juridiquement le parcours de l'enfant. En cas de rejet par l'administration, les familles auront probablement tendance à déposer un recours gracieux ou hiérarchique. Pour préserver la relation de confiance entre le public et l'administration, dans le droit fil de la loi ESSOC – loi pour un État au service d'une société de confiance – que nous avons votée, je propose d'ajouter que « le silence gardé par l'autorité de l'État compétente pendant plus de deux mois vaut décision implicite d'acceptation ». Cela évitera des recours devant les tribunaux administratifs.
Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable. Il n'est pas nécessaire de déroger au droit commun car plusieurs possibilités de recours existent, à commencer par la cellule de recours et le recours administratif.
L'amendement no 1483 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Ces deux amendements répondent aux inquiétudes que je mentionnais tout à l'heure et, comme mon précédent amendement, ils ont été rédigés en lien avec le CNCPH.
Par l'amendement no 2273 , je propose que lorsqu'une décision de la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées – CDAPH – n'est pas effective deux semaines après avoir été notifiée, l'autorisation d'instruction en famille soit considérée comme acquise.
L'amendement no 2289 vise à instaurer une procédure de demande d'autorisation simplifiée, lorsqu'un certificat médical atteste que la santé mentale ou physique d'un mineur est en danger.
Vous soulevez le sujet difficile des enfants en situation de handicap qui, bien que la CDAPH ait déjà rendu sa décision, sont encore en attente d'une proposition d'instruction correspondant à leurs besoins, notamment de places dans un établissement spécialisé. En attendant d'être pris en charge, certains enfants sont maintenus dans les classes où, parfois, on les incite fortement à redoubler. Pour d'autres, il n'y a d'autre solution que de rester à la maison, où ils sont tantôt instruits, tantôt simplement gardés.
Cette situation est bien connue des services du ministère de l'éducation nationale, qui suit ces enfants et qui, depuis le début de la législature, fait progresser l'école inclusive.
Cela étant, je vous demande de retirer les deux amendements. Le no 2273 est déjà satisfait, l'avis de la CDAPH étant le document demandé à l'appui de la demande d'autorisation d'instruction en famille.
La parole est à Mme Béatrice Descamps, pour soutenir l'amendement no 2488 .
Il vise à permettre aux parents qui en font spécifiquement la demande de commencer sans délai l'instruction de leur enfant à domicile, laissant ainsi la possibilité aux inspecteurs de contrôler à leur domicile que les conditions de cette instruction respectent le projet éducatif et l'intérêt supérieur de l'enfant.
S'il apparaît que l'autorisation dérogatoire a été demandée de manière abusive, elle est retirée sans délai.
L'amendement no 2488 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Prochaine séance, demain, à neuf heures :
Suite de la discussion du projet de loi confortant le respect des principes de la République.
La séance est levée.
La séance est levée à minuit.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Serge Ezdra