La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
Ce matin, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles, s'arrêtant à l'amendement no 152 à l'article 1er.
Le présent amendement vise à accroître la part des dons au sein de l'aide au développement française. Le choix par les bailleurs des modalités et des instruments d'aide n'est pas neutre : recourir au prêt peut augmenter la dette des pays qui en bénéficient. Or, si l'on considère le ratio entre prêts et dons au sein de l'aide publique au développement, la France fait partie des trois plus gros prêteurs mondiaux, derrière le Japon et la Corée du Sud, alors que des pays comme le Danemark ou l'Australie ont une APD exclusivement constituée de dons.
La parole est à Mme Clémentine Autain, pour soutenir l'amendement no 496 .
Notre amendement vise également à porter à 85 % d'ici à 2025 la part des dons par rapport aux prêts dans notre APD. Graver cela dans le marbre de la loi serait très important : nous n'avons cessé de dénoncer la pente savonneuse dans laquelle s'est engagée la France au point de se retrouver, avec le Japon, en tête des principaux pays qui prêtent plutôt qu'ils ne donnent ; elle le fait même de plus en plus, alors que d'autres, comme le Danemark, privilégient le don.
La parole est à M. Hervé Berville, rapporteur de la commission des affaires étrangères, pour donner l'avis de la commission sur ces amendements identiques.
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du tourisme, des Français de l'étranger et de la francophonie, pour donner l'avis du Gouvernement.
Même avis.
Il s'agit également d'accroître la part des dons, afin qu'elle atteigne en 2022 au moins 22 % de notre APD.
L'amendement no 118 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement vise à affecter au moins 50 % de l'APD aux services sociaux de base.
La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l'amendement no 363 .
Avis défavorable. Cela a déjà été dit : nous ne souhaitons pas d'objectifs sectoriels, non parce que nous n'aurions pas envie de les atteindre, mais pour nous concentrer sur l'impact de l'aide publique au développement. L'APD est multifactorielle, multidimensionnelle ; pour atteindre un but donné en matière d'éducation, par exemple, il faut parfois passer par l'alimentation ou par les infrastructures. Il serait donc contreproductif de rigidifier les dépenses, d'autant que nous sommes souvent plusieurs donneurs à intervenir dans un même pays en développement : si chacun arrive avec ses indicateurs, cela deviendra très compliqué, sans parler des objectifs de la déclaration de Paris ou du partenariat de coopération de Busan en matière d'alignement des stratégies. Nous souhaitons bien évidemment améliorer les services sociaux de base : encore une fois, l'objectif est évidemment partagé, mais nous divergeons sur la question des moyens et de la sectorialisation.
Même avis. On ne saurait mieux dire.
Cet amendement vise à compléter l'alinéa 10 de l'article 1er en prévoyant que le Gouvernement se fixe comme objectif de consacrer au moins 30 % de cette aide bilatérale aux dix-neuf pays prioritaires dont la liste a été établie en 2018 par le CICID, le comité interministériel de la coopération internationale et du développement, au plus tard en 2025. La qualité de l'APD dépend en partie de son ciblage géographique : elle doit être destinée aux populations qui en ont le plus besoin. Or elle souffre encore d'une forte dispersion et ne bénéficie pas en priorité aux pays les moins avancés, ces PMA où se concentre pourtant l'extrême pauvreté.
Nous proposons d'insérer après l'alinéa 10 la phrase suivante : « Dans la perspective de concentration des moyens vers les zones prioritaires de l'aide publique au développement, le Gouvernement se fixe comme objectif de consacrer au moins 25 % de l'aide publique au développement totale de la France aux dix-neuf pays prioritaires définis par le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement, au plus tard en 2025. »
Actuellement, ces dix-neuf pays – tous des PMA africains, sauf Haïti – ne reçoivent à eux tous que 15 % de l'aide française. Selon la loi, la moitié de l'aide-projet de l'État doit être répartie entre eux, ainsi que les deux tiers des subventions de l'Agence française de développement. Mais cette cible est tout à la fois obsolète et insuffisante : d'une part, depuis l'adoption de ces dispositions, la liste a été portée de seize à dix-neuf pays ; d'autre part, l'aide-projet et les subventions de l'AFD ne représentent qu'une part minime de l'APD française. En outre, dès que le montant total de ces subventions baisse – comme entre 2011 et 2016, où il a chuté de 11,3 % – , les pays les plus pauvres en pâtissent, même s'ils en reçoivent toujours la même proportion.
Nous souhaitons également inscrire dans la loi qu'en 2025, 25 % de l'APD devront revenir à ces dix-neuf pays : ils n'en reçoivent pour l'instant que 15 %, ce qui est bien insuffisant pour traduire une volonté de priorisation.
Vos amendements, chers collègues, arrivent trop tôt : dans la mesure où notre aide publique au développement est pour l'heure majoritairement constituée de prêts, leur adoption aboutirait à endetter encore davantage les pays les plus pauvres, alors que nous visons plutôt au contraire. Dans quelques décennies, dans quelques années, je l'espère, …
… lorsque nous aurons inversé la tendance et que l'APD comprendra beaucoup plus de dons que de prêts, la mesure que vous proposez pourra trouver sa place ; mais en attendant, l'avis de la commission sera défavorable.
Même avis.
Pour en revenir à mon amendement no 25 , nous souhaitons que l'aide française consacrée à la solidarité internationale soit en mesure d'apporter aux crises une réponse beaucoup plus efficace et rapide, notamment grâce à des priorités d'intervention plus ciblées. Que ce soit en flux ou en volume, aucun des dix-neuf pays prioritaires ne figure parmi les dix principaux bénéficiaires, parmi lesquels on retrouve le Maroc, la Côte-d'Ivoire, l'Inde, la Colombie, la Turquie, l'Indonésie, pour ne citer qu'eux. Nous voulons donner la priorité aux PMA.
Je peux entendre la réponse de notre rapporteur ; toutefois, nos amendements précisent que l'objectif de 25 % doit être atteint au plus tard en 2025. Quelle autre échéance pourriez-vous nous proposer pour que la chose devienne possible ?
L'amendement no 497 n'est pas adopté.
Nous proposons que, d'ici à 2022, 50 % de l'APD transite par la mission budgétaire « Aide publique au développement ». Cette mesure aurait plusieurs effets positifs : elle faciliterait le respect des priorités fixées par la dernière réunion du CICID, car les fonds de cette mission sont au coeur de nos actions en ce sens ; elle accroîtrait la transparence et la lisibilité de notre aide, ce qui aiderait en outre au contrôle parlementaire : entre 2017 et 2020, la mission « APD » a représenté en moyenne 35,09 % de notre APD totale, et la hausse de celle-ci, ces dernières années, ne s'est traduite par aucun rééquilibrage de la part relevant de la mission. En 2020, le montant de la mission « APD » s'élevait ainsi à 4 milliards d'euros, soit 35,5 % des 12,86 milliards de l'APD.
Enfin, les contributions financières ne correspondent pas aux priorités thématiques et géographiques. Il serait nécessaire que la France respecte au moins ses objectifs internationaux, à commencer par la cible retenue par l'OMS, l'Organisation mondiale de la santé, de consacrer 0,1 % du RNB – revenu national brut – à l'aide à la santé, soit environ 15 % de notre APD. Or, pour cela, il faudrait parvenir à faire transiter le plus de fonds possible par la mission « APD ».
La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l'amendement no 364 .
Comme celui de M'jid El Guerrab, mon amendement vise à ce que l'État s'assure qu'en 2022, 50 % de l'APD transitera par la mission « APD », afin de financer les priorités que constituent la santé, l'éducation, l'adaptation au changement climatique, l'égalité entre hommes et femmes, et l'aide humanitaire dans les pays en crise. Nous l'avons rappelé à de nombreuses reprises dans le cadre de nos travaux en commission et lors des débats en séance : nous voulons inscrire dans la loi des objectifs globaux, très ciblés, ce qui faciliterait d'autant leur contrôle par le Parlement. Et vous-mêmes les mentionnez comme prioritaires…
Même avis. Depuis 2017, nous avons fait un effort considérable et doublé le montant de la mission « APD ». Le cap est défini, le chemin tracé. Les dispositions que vous allez voter nous aideront à l'accroître.
Cet amendement a pour finalité de mettre en cohérence les moyens humains des services de l'État qui concourent à la politique de développement solidaire avec la trajectoire des ressources consacrées aux politiques d'aide publique au développement. Pour la première fois, la trajectoire financière définie pour 2021 n'impose pas de baisses d'effectifs au Quai d'Orsay : nous saluons l'engagement que le ministre avait alors pris devant nous. Il est essentiel de continuer à oeuvrer en faveur de la cohérence entre la trajectoire financière et le nombre des opérateurs de l'État, notamment au sein de ce ministère, où ils ont d'ailleurs participé à l'élaboration ce projet de loi de programmation.
M. M'jid El Guerrab applaudit.
L'amendement no 626 de M. Vincent Ledoux est défendu.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements identiques ?
Avis favorable. Ces amendements sont importants : ils traitent de la cohérence entre nos ambitions et nos moyens. Après quinze ans de réduction continue et assez significative des moyens de nos ambassades et de certains de nos ministères, on constate que la mondialisation, la résolution des conflits et des questions de développement demandent tout simplement une certaine quantité de facteur humain. Grâce à l'intervention du ministre et de ses services, nous avons réussi à stabiliser les effectifs ; désormais, nous nous trouvons dans un moment politique où, pour accroître encore nos ambitions et relever un certain nombre de défis globaux, nous devons avoir une trajectoire humaine cohérente.
C'est d'ailleurs ce que nous avons fait avec l'AFD, dont nous avons augmenté les crédits et donc les moyens afin que la voix de la France soit encore mieux entendue, que nous soyons présents sur le terrain, où l'on a toujours besoin en dernier lieu d'hommes et de femmes pour négocier, discuter, promouvoir des projets importants. Je profite d'ailleurs de l'occasion – ce sera peut-être la dernière au cours de ces débats – pour remercier de leur engagement tous ceux qui, au Quai d'Orsay, à Bercy ou ailleurs, travaillent dans les services où l'on s'occupe de notre aide au développement.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Je me joins naturellement aux remerciements exprimés par le rapporteur. Jean-Yves Le Drian a ? uvré pour que la loi de finances pour 2021 marque la fin de la réduction des effectifs. Nous nous trouvons à un moment important : des actes ont été posés, qu'il convient naturellement de poursuivre. Avis favorable aux amendements nos 625 et 626 .
Je m'interroge, car nous avions adopté en commission un amendement précisant que les services de l'État disposent d'une trajectoire de moyens humains « cohérente avec la hausse des ressources prévue ». Cette formulation me semble plus forte que la vôtre, qui prévoit que les services de l'État « disposent de moyens humains cohérents avec les ressources prévues ». J'y vois un affaiblissement de la rédaction adoptée en commission – grâce à un amendement de la commission des finances, me semble-t-il.
L'amendement que nous avions adopté, madame Dumont, concernait les seuls services de l'État à l'étranger. Il nous a semblé trop restrictif d'établir une distinction entre les services de l'État ? uvrant au développement à l'étranger et ceux qui le font en France. C'est la raison pour laquelle nous avons proposé ces amendements qui englobent l'ensemble des agents de l'État qui travaillent dans le secteur du développement.
Le mot « hausse », qui figurait dans le texte initial, semble avoir disparu. Mais peu importe, nous avons trouvé un atterrissage satisfaisant avec le terme « cohérents ». Nous comprenons le sens de la rédaction, et nous comprenons aussi que le Quai d'Orsay ou même – soyons fous ! – Bercy ne souhaite pas se lier les mains. Reste que nous étions sortis de la réunion de commission heureux d'avoir fait ? uvre utile et retrouvé la foi en nos services à l'étranger ; or la formulation de ces amendements, dont j'imagine qu'elle a été vue par l'ensemble des services, est légèrement moins forte que celle qui avait été adoptée en commission. Je tenais à le souligner.
La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l'amendement no 366 .
Le présent amendement vise à cibler clairement une part significative de l'aide au développement vers les organisations de la société civile – OSC – , au profit des bénéficiaires des projets dans le domaine de la solidarité internationale, en fixant l'objectif d'atteindre 1 milliard d'euros en 2022, c'est-à-dire le double de la part de l'aide publique au développement qu'elle représentait en 2017. Ces associations et organisations d'aide au développement fournissent un travail considérable sur le terrain ; je tiens vraiment à les en remercier et à saluer leur engagement. De nombreux Françaises et Français font preuve d'une grande générosité, tout comme les entreprises et les collectivités qui soutiennent ces associations. Cependant, lorsque celles-ci s'adressent à l'État, notamment à l'AFD, elles se voient opposer une fin de non-recevoir en raison du manque de moyens. J'ajoute que les aides versées à des organisations qui ? uvrent sur le terrain sont souvent beaucoup plus efficaces.
Monsieur le rapporteur, vous avez indiqué en commission que les aides versées à ces organisations avaient déjà connu une hausse significative. J'appelle tout de même votre attention sur le fait que le comité interministériel de février 2018 n'accorde qu'une place très réduite à ces organisations ; certes, il s'engage à doubler, entre 2017 et 2022, non pas la part de l'APD bilatérale mais, dans une formulation très générale, les fonds transitant par les organisations de la société civile. Considérant que ce qui se conçoit bien s'expose clairement, je crois que cet amendement aura vraiment une utilité dans ce texte.
Vous abordez un point essentiel : le rôle des organisations de la société civile. J'émettrai pourtant un avis défavorable à votre amendement, d'abord parce que, comme vous pourrez le constater au travers de différents amendements ultérieurs, nous reconnaissons la part importante que prennent ces organisations dans la mise en ? uvre des projets et dans le processus de démocratisation, où je salue sincèrement leur rôle de plaidoyer. Ensuite, de longues discussions ont eu lieu sur ce sujet au sein du CNDSI, le Conseil national pour le développement et la solidarité internationale, et si nous ne sommes pas forcément tombés d'accord, nous nous sommes accordés sur le fait que le doublement inscrit ici et prévu par le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement – CICID – permettra de répondre à de nombreux objectifs. En outre, un amendement de M. Lecoq, que nous examinerons ultérieurement, pourra vous rassurer sur la question du volume, en évitant que les calculs en pourcentages ne vous induisent en erreur.
Pour la première fois, nous donnons aux organisations de la société civile une place importante, accrue non seulement dans le développement mais aussi dans l'humanitaire, au travers du guichet ONG – organisations non gouvernementales. N'oubliez pas non plus les financements du FSPI – fonds de solidarité pour les projets innovants – qui sont aux mains des ambassades, et qui sont passés de 20 à 70 millions d'euros.
Il est défavorable. Je rappelle la trajectoire que nous venons de réaliser : les moyens dédiés aux OSC ont doublé, passant de 310 millions d'euros à 620 millions en 2022. Dans la mesure où l'enveloppe globale augmente elle aussi, cette hausse n'est pas aussi évidente au niveau des pourcentages globaux, mais la part des OSC n'en passera pas moins de 3 ou 3,5 % à 7 %. Certes, l'OCDE – Organisation de coopération et de développement économiques – est à 14 %, mais nous n'avons pas à rougir des montants en jeu. Je tiens d'ailleurs à saluer aussi le travail conduit en commission, qui aboutira sans doute tout à l'heure lorsque nous débattrons d'un article reconnaissant le travail des OSC. Cette reconnaissance très attendue témoigne, avec le doublement des montants, de l'importance et de l'intérêt que nous attachons à leur action.
Je comprends vos arguments, mais je voudrais tout de même former le v? u que la distribution des aides soit effectuée dans la plus grande transparence. Je peux en témoigner : certaines ONG qui réalisent un travail formidable, essuient toujours des refus lorsqu'elles s'adressent à l'AFD notamment. Elles en ont marre et finissent même par ne plus présenter de demandes ! Il y a réellement besoin de transparence dans ce domaine, je vous l'assure.
L'amendement no 366 n'est pas adopté.
Je vous informe dès à présent que, sur les amendements identiques nos 176 , 482 , 536 et 582 , je suis saisie par le groupe La République en marche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Jean-Paul Lecoq, pour soutenir l'amendement no 229 .
J'ai entièrement réécrit cet amendement, afin d'améliorer l'explication de mon idée initiale qui consistait, comme l'a si bien dit M. Bourlanges, à obtenir un effet cliquet. En effet, les objectifs de ce projet de loi sont nobles ; il est dommage que Jean-Yves Le Drian ne soit plus là car, ce matin, je ne lui ai pas fait tellement de compliments ! Le doublement du montant de l'aide publique au développement alloué à des projets mis en ? uvre par des organisations de la société civile est l'un de ces nobles objectifs – en passe d'être validé de surcroît. Face à cette ambition, il m'a néanmoins semblé important de faire en sorte que les efforts réalisés maintenant ne retombent pas dans les années à venir, ce qui ferait à nouveau de la France un mauvais élève en termes de partage de ses fonds avec les OSC. C'est la raison pour laquelle je propose une formule précisant que la France « s'engage à maintenir sa progression afin de tendre – convenez que le terme n'est pas trop agressif – vers la moyenne des pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques concernant les montants de l'aide publique au développement transitant par les organisations de la société civile. »
L'avis de la commission est défavorable mais le mien, à titre personnel, est favorable.
Le Gouvernement s'en remet à la sagesse bienveillante de l'Assemblée.
J'observe les accommodements raisonnables entre le groupe GDR, la majorité et le Parlement. Au nom du groupe Socialistes et apparentés, j'aimerais alerter sur le risque que l'adoption de cet amendement, qui est probable, ne fasse tomber les suivants. Qu'en est-il, madame la présidente ?
Dans la mesure où ils portent sur le même objet, je voulais m'assurer qu'ils ne tomberaient pas. C'est une forme d'exigence morale que je tenais à exprimer !
Sourires.
L'amendement no 229 est adopté.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Avec cet amendement, qui porte sur le même objet, on entre dans le dur. Coordination SUD propose de fixer à 70 % la part des fonds qui transitent par les organisations non gouvernementales disposant d'un droit d'initiative au sens des textes qui régissent l'économie sociale et solidaire. L'objectif est de prévoir qu'une part de l'aide passe par la société civile mais aussi, dans le même esprit que les amendements précédents de nos collègues Lecoq et Pancher, de fixer la part – deux tiers, soit environ 70 % – de l'aide consacrée à des mécanismes d'économie sociale et solidaire. C'est essentiel. Il existe d'autres canaux, qu'il n'est pas question de mettre en cause ici ; mais si la France souhaite privilégier la voie des principes coopératif et associatif, du principe « un homme, une voix », et rechercher d'autres logiques que celles de la communication ou de l'appât du gain, elle doit s'appuyer sur des dispositifs intrinsèquement porteurs de ces valeurs, qui les mettent en ? uvre de façon effective sur le terrain. Cette proposition de fixation d'un seuil vient parfaitement compléter l'amendement no 229 , en le précisant.
La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l'amendement no 367 .
Mon amendement, très similaire, ayant été excellemment défendu par mon collègue et ami Dominique Potier, j'aurais mauvaise grâce à ajouter des commentaires. J'espère que son argumentaire trouvera écho au sein de la majorité.
Il est défavorable. Le texte reconnaît très clairement, pour la première fois, le droit d'initiative des organisations de la société civile. En outre, ces amendements vont sans doute à l'encontre de l'objectif affiché, car vous cherchez à cibler un secteur de l'économie alors que le droit d'initiative consiste, par définition, à laisser leur liberté d'action aux OSC. En fixant un objectif lié à l'économie sociale et solidaire, que je respecte et partage, nous irions à l'encontre de leur demande d'un droit d'initiative sur un montant donné. L'avis est donc défavorable, même s'il est nécessaire d'aller vers un plus grand développement de l'économie sociale et solidaire.
J'ai déjà évoqué ce sujet. Cet amendement propose de rédiger ainsi le début de l'alinéa 13 : « L'État reconnaît le rôle, l'expertise et la plus-value des organisations de la société civile, tant du Nord que du Sud, et de l'ensemble des acteurs non étatiques impliqués dans la politique de développement solidaire et de lutte contre les inégalités mondiales. » Il s'agit d'une avancée majeure pour les organisations et pour toutes celles et tous ceux qui militent sur le terrain dans ce domaine. L'objectif est d'affirmer, premièrement, qu'il n'y a pas que l'État, le Gouvernement et l'AFD qui soient capables d'avoir de bonnes idées et d'apporter des solutions innovantes, au plus près du terrain ; deuxièmement, de reconnaître de façon symétrique les OSC du Sud et celles du Nord : des ONG éthiopiennes, qui n'ont même aucun lien avec des ONG françaises ou américaines, sont parfaitement capables de trouver des solutions et d'apporter des réponses très concrètes à la lutte contre les inégalités et la pauvreté.
Il s'agit enfin de reconnaître la capacité de ces organisations à mobiliser ainsi qu'à démocratiser et territorialiser les questions d'aide au développement, en France comme dans les outre-mer. Je m'en suis rendu compte en travaillant sur le sujet ici même et je tiens à les en remercier : elles contribuent à faire en sorte que cette belle politique ne soit pas seulement discutée dans les travées de l'Assemblée nationale, dans les couloirs de Bercy ou du Quai d'Orsay – même si ces institutions le font très bien. Il est en effet nécessaire, en termes d'éducation civique et citoyenne notamment, d'avoir un débat le plus large possible sur ce sujet. Il est temps de le reconnaître enfin et de dire aux OSC qu'elles contribuent très fortement à l'efficacité de cette politique.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Je remercie le rapporteur pour cet amendement important, qui tire les conclusions de nombreuses discussions que nous avons conduites au sein du Conseil national pour le développement et la solidarité internationale. Depuis deux ans, le CNDSI a beaucoup travaillé sur l'avant-projet de loi en apportant des idées, des propositions et des suggestions. La reconnaissance des OSC, pour laquelle Philippe Jahshan a longtemps plaidé au nom de Coordination SUD, était très attendue, et le Gouvernement émet donc un avis très favorable à cet amendement.
L'amendement no 535 est adopté.
La parole est à M. Jean-Paul Lecoq, pour soutenir l'amendement no 230 .
J'ai reformulé l'amendement que j'avais déposé en commission afin d'indiquer dans la loi l'ambition de ne pas revenir en arrière une fois que seront atteints les objectifs chiffrés. Les collectivités territoriales sont assez délaissées dans l'organisation de l'aide publique au développement française ; c'est pourquoi il me semble intéressant que nous nous rapprochions peu à peu de l'objectif de 1 % de l'APD française transitant par les collectivités territoriales.
Si l'approche par les pourcentages n'est pas idéale – je la combats généralement et, faute de mieux, je fais en sorte de l'aménager en la complétant – , l'objectif minimal qu'elle détermine permettrait de créer une dynamique en la matière, d'autant que les municipalités, par exemple, en sont au début de leur mandat et que certaines doivent être prêtes à franchir le pas pour faire parvenir des aides aux pays du Sud qui souffrent notamment de la crise liée à la pandémie.
Même avis.
L'amendement no 230 n'est pas adopté.
Cet amendement complète l'alinéa 14 pour faire de l'enregistrement des naissances un champ prioritaire de la coopération décentralisée auprès des dix-neuf pays prioritaires, pour deux raisons principales. Premièrement, on a beaucoup dit depuis le début du débat qu'un quart des enfants de moins de cinq ans sur la planète ne sont pas enregistrés à l'état civil, mais il faut savoir que dans les pays prioritaires, par exemple en Guinée, au Libéria ou en RDC, ce n'est pas un quart des enfants qui ne sont pas enregistrés, mais un quart qui le sont : en d'autres termes, 75 % des enfants ne sont pas enregistrés.
Deuxièmement, l'organisation et la tenue d'un état civil sont des éléments sur lesquels nous avons en France une expertise réelle, qui peut et doit se transmettre. J'ai toujours considéré que, dans ce domaine, les fonctionnaires d'état civil de nos collectivités ne sont absolument pas valorisés à la hauteur de l'importance de leurs fonctions. Dans le cadre du rapport d'information sur les enfants sans identité qu'Aina Kuric et moi-même avons rédigé, nous avons constaté que certaines collectivités que nous avons auditionnées – je pense notamment à La Roche-sur-Yon ou à Grenoble – ont développé en matière de coopération décentralisée des projets remarquables. Sur la base de ce constat, l'amendement n° 178 vise à ce que l'enregistrement des naissances devienne un champ prioritaire de la coopération décentralisée.
M. M'jid El Guerrab et Mme Annie Chapelier applaudissent.
Je soutiens pleinement l'amendement que vient de présenter Laurence Dumont et, pour ma part, je propose avec l'amendement n° 52 de compléter l'article 1er par l'alinéa suivant : « L'évolution des moyens prévue par le présent article contribuera notamment au renforcement des projets visant à améliorer l'enregistrement des naissances et l'enrôlement de la population et, ce réalisable notamment via l'accès à un état civil fiable. » Quand on débat des moyens de l'aide publique au développement, il faut commencer par déterminer quel public est ciblé, ce qui passe par l'enregistrement des naissances. Ce combat est prioritaire : comme l'a dit Laurence Dumont, un enfant sur quatre dans le monde n'est pas enregistré à la naissance.
M. M'jid El Guerrab et Mme Laurence Dumont applaudissent.
Je comprends tout à fait l'objectif de ces amendements, mais j'émettrai un avis défavorable car il n'appartient pas à cette assemblée ni à l'État de déterminer les priorités de la coopération décentralisée des différentes collectivités. En vertu du principe de la libre administration des collectivités dans les domaines où elles sont compétentes, des assemblées se réunissent et prennent des décisions, des conventions sont passées et, si nous pouvons parfois faire quelques incitations, nous n'avons pas à intervenir en imposant des priorités.
Le Gouvernement a donné un avis favorable en commission à deux amendements qui permettent d'inscrire l'objectif consistant à établir l'identité juridique des enfants, notamment grâce à des états civils fiables, dans le cadre de partenariat global ; or le CPG a valeur prescriptive, autrement dit il nous engage au regard de l'objectif et des principes affirmés un peu plus loin dans le texte, sur lesquels nous sommes tous d'accord. J'émettrai donc un avis défavorable à ces amendements.
J'avais déposé un amendement qui, à l'instar du 1 % sur l'eau qui existe déjà et du 1 % sur les mobilités que ce texte prévoit d'instaurer, visait à ce que les collectivités locales puissent, dans la limite de 1 % de leur budget consacré au service de l'état civil, financer des actions de coopération, mais il a été déclaré irrecevable au titre de l'article 40. Si l'idée vous paraît pertinente, je vous invite à la reprendre, monsieur le ministre : à mon sens, ce serait un bon moyen d'inciter les collectivités locales à affecter des moyens à des projets de coopération décentralisée consacrés à l'état civil. Une aide de ce type serait très utile aux pays ayant des états civils qu'on pourrait qualifier de faibles ou de défaillants, et permettrait aux fonctionnaires de l'état civil de notre pays de faire valoir leur grande expertise dans ce domaine.
Contrairement à ce qu'a dit M. le rapporteur, il ne s'agit pas d'imposer des montants précis, mais simplement de renforcer les moyens, conformément à l'une des recommandations du rapport sur l'enregistrement des naissances que nous avons présenté en septembre dernier à la commission des affaires étrangères, qui l'a adopté à l'unanimité. Les membres de la commission des affaires étrangères qui sont présents ont tous lu ces vingt-trois propositions, nous en avons débattu et avons tous été d'accord pour considérer qu'il fallait au moins nous donner les moyens d'agir dans ce domaine. Je vous invite à rester dans la même dynamique en votant ces amendements ; il ne s'agit pas d'imposer de montants particuliers, mais simplement de renforcer les moyens.
En l'absence de Marielle de Sarnez, j'ai eu l'honneur de présider la réunion de la commission des affaires étrangères lors de laquelle nos collègues Laurence Dumont et Aina Kuric ont présenté leur rapport, et j'en profite pour rendre hommage à Marielle de Sarnez, qui accordait une très grande importance à cette question des enfants sans identité. La France a effectivement une grande expertise en matière d'état civil, et je comprends le souhait de nos collègues de voir cette incitation inscrite dans la loi.
M. le secrétaire d'État nous dit que l'objectif consistant à établir l'identité juridique des enfants figure déjà dans le CPG, mais, comme nous avons déjà eu l'occasion de le souligner ce matin, si le CPG existe, c'est sans doute qu'il n'équivaut pas exactement à la loi. Sur ce point, on entend dire beaucoup de choses : certains affirment que le CPG et la loi ont la même valeur normative, d'autres que ce n'est pas le cas ; nous aimerions bien que les choses soient plus claires. À plusieurs reprises, des amendements ont été repoussés par la commission et le Gouvernement au motif qu'ils étaient satisfaits par le CPG, qui semble jouer un rôle de fourre-tout, pour ne pas dire de rebut. Pour ma part, j'estime que la question de l'état civil des enfants aurait mérité de figurer dans la loi, et je sais que notre collègue Marielle de Sarnez souhaitait que cette question fasse l'objet d'un débat dans l'hémicycle.
Mme Aina Kuric applaudit.
Nous comprenons bien évidemment l'idée soutenue par Laurence Dumont et Aina Kuric et, pour répondre à ce que vient de dire Michel Herbillon, il y aura le 4 mars prochain un débat en séance publique sur le rapport d'une mission d'information demandée par l'ensemble des commissaires des affaires étrangères, à l'époque sous la présence de Marielle de Sarnez. Je ne suis pas insensible à ces amendements, dont j'ai parlé avec Laurence Dumont et Aina Curic. Je sais que dans un État comme le Sénégal, un grand nombre d'enfants sont sans identité ; j'ai moi-même évoqué, dans un rapport rédigé dans le cadre d'une mission d'information, la question des enfants Rohingyas réfugiés au Bangladesh, qui se trouvent dans une situation les condamnant à ne pas avoir d'identité, autrement dit pas d'existence juridique.
Compte tenu des explications qui vous été données, je vous invite, chers collègues, à profiter du débat que nous aurons prochainement en séance publique pour affiner votre proposition à laquelle, je le répète, nous sommes sensibles, et que nous soutiendrons dès lors qu'elle trouvera sa place dans un véhicule législatif plus adapté. En l'état actuel des choses, comme nous l'avons déjà dit en commission, nous sommes défavorables à ces amendements, malgré tout l'intérêt qui s'attache à cette thématique.
Ayant été maire durant de longues années, je comprends les réticences exprimées par le Gouvernement et le rapporteur. En effet, si le 1 % sur l'eau, le 1 % sur le logement et le 1 % sur la mobilité portent sur des activités à caractère commercial, il en va tout autrement en matière d'état civil, où seuls les timbres apposés sur les documents peuvent revêtir un caractère commercial. Il me paraît compliqué de demander à une ville d'affecter à l'aide au développement 1 % du budget qu'elle consacre à l'état civil alors que ce budget n'a pas de caractère commercial.
Toutefois, je voterai cet amendement, car il faut bien à un moment donné clarifier les choses et prendre la décision que des moyens exceptionnels – cette notion est importante – doivent être consacrés à l'amélioration de l'état civil dans les pays bénéficiant de l'aide au développement. L'idée que, sur la planète, chaque individu dispose d'une identité, est absolument fondamentale, car elle conditionne de nombreux droits : les partenariats, par exemple, ne peuvent ne conclure qu'avec des personnes ayant une existence juridique.
Si je comprends les raisons de la fin de non-recevoir opposée par le Gouvernement, j'estime qu'il doit au moins faire en sorte qu'une réflexion s'engage afin de trouver la porte qui permettrait de répondre à la préoccupation exprimée dans ces amendements.
Nous sommes nombreux à travailler sur cette thématique absolument essentielle, notamment dans le cadre de l'Assemblée parlementaire de la francophonie…
Exact !
… mais, pour ma part, je me pose deux questions. Premièrement, devons-nous commencer à hiérarchiser les priorités ? Par exemple, les questions relatives aux mutilations faites aux jeunes femmes ou aux enfants soldats ne sont-elles pas plus prioritaires que celle de l'état civil ? Si nous entrons dans cette logique, nous allons avoir du mal à écrire une loi cohérente.
Deuxièmement, ce sont tout de même les politiques publiques des différents États qui sont ici en jeu. Un ministre africain, avec lequel j'évoquais cette question dernièrement, me disait que, s'il a des moyens, il préfère les consacrer à soigner les gens dans les hôpitaux qu'à améliorer l'organisation de l'état civil de ses concitoyens… Il y a des choix à faire et ils ne peuvent être faits qu'en concertation afin de ne pas court-circuiter la volonté des États concernés et les politiques publiques qu'ils conduisent. Ce sujet que nous considérons tous comme essentiel est traité au plan international, et il ne me paraît pas opportun qu'il fasse l'objet d'un amendement dans le texte dont nous débattons aujourd'hui.
Ces deux amendements poursuivent deux objectifs distincts : le no 178 invite à donner la priorité aux procédures d'état-civil dans la coopération décentralisée ; le no 52 d'Aina Kuric vise à renforcer les moyens qui leur sont dédiés. Ce dernier a été voté à l'unanimité en commission et je trouve dommage que l'engagement qui a été pris de le reprendre en séance n'ait pas été respecté. Il serait plus honnête d'y donner suite aujourd'hui, d'autant que le débat du 4 mars évoqué par mon collègue Mbaye ne se conclura par aucun vote.
L'amendement no 178 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 60
Nombre de suffrages exprimés 58
Majorité absolue 30
Pour l'adoption 25
Contre 33
L'amendement no 52 n'est pas adopté.
Je suis saisie de trois amendements, nos 537 rectifié , 448 et 458 , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no 537 rectifié .
Cet amendement reprend, pour leur donner plus de force et de cohérence, deux excellentes propositions que Mme Poletti et M. Potier avaient faites en commission – je les ai évoquées ce matin. D'une part, il prévoit la création d'une base de données ouvertes regroupant les informations relatives à l'aide publique au développement. Cela répondra au souhait exprimé par plusieurs d'entre vous d'améliorer la transparence et la centralisation des données. D'autre part, comme le demandait Mme Poletti, il propose qu'un rapport du Gouvernement soit remis au Parlement dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi. Il étudierait les différentes activités susceptibles d'être comptabilisées au titre de l'aide publique au développement. Autrement dit, nous mettons dans un même alinéa, au c? ur de cet article 1er, la question de la transparence des données et de l'accessibilité des informations au sein d'une base de données ouvertes, le Gouvernement s'engageant de son côté sur la meilleure façon d'en garantir la publicité.
Je vous indique dès à présent que, sur le sous-amendement no 614 , je suis saisie par le groupe Socialistes et apparentés d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir les amendements nos 448 et 458 .
Je dois dire, monsieur le rapporteur, que votre amendement suscite un peu d'incompréhension de notre part. La transparence était une revendication forte du groupe Socialistes et apparentés et de Mme Poletti. Nous avions cherché un instrument adéquat et je suis surpris que votre réécriture vienne appauvrir notre intention initiale sur laquelle vous me permettrez de revenir.
Nous voulions créer une banque de données unique et nous avions, en lien avec le Gouvernement, établi une rédaction cohérente. J'en découvre une autre, qui fait référence à un rapport portant sur les activités susceptibles d'être comptabilisées. Faire figurer dans la loi que la banque de données doit regrouper toutes les informations disponibles me paraît suffisant ; point n'est besoin de prévoir un rapport six mois après. Cet ajout superfétatoire rend la loi bavarde.
Le point en revanche auquel nous devons accorder une attention particulière, ce sont les conditions d'appropriation des données par l'ensemble des parties prenantes. Il ne suffit pas que la banque de données soit complète, encore faut-il que les informations qu'elle contient soient explicites et accessibles par le jeu d'une pédagogie et de synthèses, qui ménagent des portes d'entrée pour tout un chacun. Bref, si nous voulons la transparence, il convient de faire en sorte que la base de données soit facile à utiliser pour tous ceux qui voudraient vérifier la part des dons, des prêts, des décaissements, les flux par région du monde et par secteur d'activité.
La rédaction que nous avions construite constituait une avancée importante et il me semble que votre amendement l'a légèrement déconstruite en procrastinant. En outre, il oublie notre proposition consistant à prendre en compte l'accessibilité de la base de données pour toutes les parties prenantes.
Si vous partagez notre philosophie, chers collègues, je vous propose de voter par priorité notre amendement no 448 , l'amendement no 458 étant de repli.
Monsieur Potier, nous ne procrastinons pas. Nous avons adopté en commission un amendement de Mme Poletti qui visait à demander au Gouvernement de remettre un rapport au Parlement sur les différentes activités pouvant être comptabilisées. Cela renvoie à toute la discussion que nous avons aujourd'hui sur ce qui relève de l'APD. Comme votre amendement proposait la création d'une base de données sur les informations qui s'y rapportent, il nous a paru de bon aloi de rattacher votre proposition à celle de votre collègue. Notre amendement prévoit comme le vôtre un délai d'un an pour créer cet outil, cela ne change strictement rien.
Eh oui !
Simplement, nous avons intégré à notre amendement le rapport, pour continuer à améliorer cette base de données en prenant mieux en compte les informations qui l'alimentent.
Vous aviez déposé ces mêmes amendements en commission et nous avions dit notre préférence pour le deuxième. C'est pourquoi je l'ai repris dans celui que je propose. Il va dans le sens de la volonté collective qui s'était dégagée.
Il n'y a donc ni contradictions ni incohérences. Nous renforçons simplement votre proposition, monsieur Potier.
Même avis que le rapporteur.
Nous débattons d'un point très important : la base de données est le seul outil concret qui permet de rassembler de manière transparente les informations sur la politique dont nous débattons. Il ne suffit pas de voter des volumes, et de créer des commissions d'évaluation, il faut garantir la transparence et l'accessibilité des informations à travers une banque de données ouverte. Lors de la précédente législature, j'ai eu le privilège de siéger pendant cinq ans au conseil d'administration de l'AFD : nous ne parvenions pas à comprendre ce sur quoi nous votions et il nous était parfois difficile de saisir l'ensemble des subtilités.
Si vous n'êtes pas favorable à mon amendement no 448 , je plaide pour que nous ajoutions à votre amendement la phrase suivante, monsieur le rapporteur : « Il veille particulièrement à créer les conditions d'une appropriation de ces données par l'ensemble des parties prenantes ». C'est un aspect qui a fait consensus et il y a manifestement eu un malentendu. Il faut inscrire dans la loi ce souci permanent dont le Gouvernement doit être animé de faire comprendre les données.
Ce sujet nous a passionnés en commission et nous y avons consacré de larges débats. Je soutiens la proposition de mon collègue. Et je plaiderai aussi pour que l'auteur de cette proposition soit aussi le premier signataire de l'amendement que votera notre assemblée. Ce serait une marque d'élégance.
Nous voterons l'amendement du rapporteur car il va dans le sens des objectifs de transparence, de lisibilité des informations et de cohérence qui étaient les nôtres. D'une part, il nous permettra de disposer d'une base de données ouvertes et accessibles et bien sûr lisibles et compréhensibles, ce qui me paraît aller de soi car je ne vois pas l'intérêt qu'il y aurait à construire une base de données complètement absconse. D'autre part, il prend en compte la proposition que nous avions faite à travers un amendement que j'ai défendu en commission visant à ce que le Gouvernement remette au Parlement un rapport étudiant les différentes activités susceptibles d'être comptabilisées au titre de l'aide publique au développement. Autrement dit, toutes les conditions nous semblent réunies.
Vous dites qu'il faut éviter de faire une loi bavarde, monsieur Potier, mais si nous vous suivions, elle le serait. Depuis le début, nous avons exprimé notre volonté que tout le monde puisse s'approprier cet outil et cela nous paraît aller de soi. Toutefois, pour vous montrer ma bonne volonté, je vous propose une deuxième rectification de mon amendement consistant à ajouter après les mots « dont il assure la tutelle », les mots : « . Il veille particulièrement à créer les conditions d'une appropriation de ces données par l'ensemble des parties prenantes ». Il me semble inutile de détailler qui sont les parties prenantes. Vous le voyez, il n'y a pas de loup, et dans la loi figurera exactement ce dont nous avons discuté pendant le week-end.
Sans ambigüité, le Gouvernement y est favorable. Mais j'aimerais verser un nouvel élément au débat : ce n'est pas seulement au Gouvernement qu'il appartient de veiller à la bonne appropriation des données par l'ensemble des parties prenantes. Dans cette loi, nous insistons sur le fait que l'aide publique au développement fait intervenir une multitude d'acteurs : au-delà de l'État et des opérateurs, il y a aussi les organisations de la société civile et les collectivités locales. Une bonne appropriation dépendra de l'engagement de tous. C'est à chacun qu'il appartient de faire ? uvre de pédagogie. Peut-être profiterons-nous de la navette pour intégrer cette dimension.
L'amendement no 537 rectifié , tel qu'il vient d'être à nouveau rectifié, est adopté ; en conséquence, les amendements nos 448 et 458 tombent.
La France est partie à la convention des Nations unies contre la corruption dont l'article 57 prévoit la restitution des biens mal acquis. Le Gouvernement a pris l'engagement de proposer un dispositif de restitution des produits de cession desdits biens à la suite d'une proposition de loi examinée au Sénat en mai 2019. Cet engagement s'inscrit également dans la continuité de travaux menées par la société civile et par des parlementaires – je pense en particulier au rapport rédigé par Laurent Saint-Martin et Jean-Luc Warsmann sur la confiscation des avoirs criminels et la restitution des biens mal acquis, qui recommandait de mettre en ? uvre « un dispositif législatif, budgétaire et organisationnel ad hoc et pragmatique permettant la restitution des avoirs confisqués dans les dossiers dits de '' biens mal acquis'' ».
Actuellement, les produits de cession de ces biens, dont la gestion est confiée à l'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués – AGRASC – sont portés aux recettes du budget général de l'État. Aucun mécanisme de restitution n'était prévu, mais aucun n'a été jusqu'à présent nécessaire puisqu'aucune procédure relative à la restitution n'avait encore abouti.
Le présent amendement vise à inscrire dans la loi le principe de ces restitutions en complétant les dispositions déterminant le contenu du document de politique transversale « Aide publique au développement ». Celui-ci devra désormais mettre en évidence les montants reçus et l'utilisation faite des recettes provenant de la cession des biens mal acquis. Il apporte en outre une définition législative de la notion de « biens mal acquis » en précisant les infractions à laquelle elle renvoie. Voilà qui permettra, par l'intermédiaire de l'AFD, de rendre aux populations ce qui leur aura été volé.
Cette disposition a été parfaitement défendue par notre collègue El Guerrab. J'ajouterai simplement deux remarques : d'une part, c'est une dimension extrêmement importante de ce projet de loi que d'inscrire dans la loi un mécanisme de restitution des biens mal acquis ; d'autre part, nous pourrions aller plus loin dans la procédure de restitution aux pays et donc aux populations spoliées ; le Sénat l'a déjà proposé et nous défendrons un amendement en ce sens à l'article 6. Nous voterons ces amendements avec enthousiasme.
Monsieur El Guerrab, il y a des moments particulièrement satisfaisants au cours d'une législature et celui que nous vivons en fait partie. Je n'irai pas jusqu'à dire qu'il est historique, mais il est sans nul doute inédit : un large consensus s'est dégagé sur tous ces bancs autour de la nécessité d'avancer fortement dans la restitution des biens mal acquis. Je remercie et je félicite toutes les ONG et tous les acteurs de la société civile, en France mais aussi et surtout dans les pays du Sud où demander la restitution de tels biens revient à se mettre en danger soi-même et sa famille et à s'exposer à être emprisonné, voire torturé.
Je voudrais également saluer particulièrement le travail de Transparency International qui, depuis le début, se bat pour trouver des véhicules législatifs et faire entendre l'enjeu de la restitution des biens mal acquis.
Nous avions proposé une première version, pour border le sujet, à l'initiative de plusieurs parlementaires. Même si cet amendement est imparfait – et nous pourrons sans doute l'affiner encore au cours de la navette parlementaire – , il permettra trois choses importantes : d'abord, de rendre hommage au travail du sénateur Jean-Pierre Sueur et des députés Laurent Saint-Martin et Jean-Luc Warsmann ; ensuite, de faire en sorte que ce soit à l'Assemblée nationale, lieu de la représentation du peuple et de la nation, que l'on discute de l'utilisation de l'argent et de sa destination, en toute transparence ; enfin, que cela se fasse d'État à État.
Autre point important, l'argent restitué ne sera pas comptabilisé comme de l'aide au développement, puisqu'il s'agit de biens qui ont été volés aux pays ; il devra servir à mener des projets efficaces, avec un impact fort. Je souhaite vraiment remercier tous ceux qui se sont battus depuis des années sur ce sujet et dire qu'il s'agit d'une belle avancée.
M. M'jid El Guerrab applaudit.
La parole est à M. Jean François Mbaye, pour soutenir l'amendement no 582 .
Comme l'ont souligné mes collègues, derrière ce sujet se cache une réalité très affligeante, celle des spoliateurs qui abusent de leur position, profitent de certains privilèges et qui, finalement, portent préjudice à la fois aux institutions publiques de leur pays, mais aussi aux populations. Je veux moi aussi remercier les ONG, notamment Transparency International, nos collègues Jean-Luc Warsmann, Laurent Saint-Martin et le sénateur Jean-Pierre Sueur qui se sont investis sur le sujet, comme je l'avais moi-même fait lorsque nous avions examiné les crédits de la mission « Aide publique au développement ». Je suis heureux que nous puissions aboutir, avec l'ensemble des parlementaires et le Gouvernement, sur un dispositif qui permettra d'organiser l'aide publique au développement en toute transparence, en toute sincérité, et au profit de l'intérêt général, notamment des populations des pays partenaires avec lesquels nous sommes engagés dans cet effort de solidarité internationale.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Nous sommes arrivés en effet à un moment important de nos débats. La semaine dernière, lors de la réunion de la commission des affaires étrangères, le Gouvernement s'était engagé à finaliser une rédaction afin que le sujet des biens mal acquis trouve enfin une solution dans la loi. Nous y sommes, grâce aux amendements défendus aujourd'hui.
Je vous confirme que le Gouvernement est favorable à l'amélioration du dispositif de restitution des produits de cessions des biens mal acquis. Nous remercions d'ailleurs les parlementaires qui se sont mobilisés sur le sujet, MM. Saint-Martin, Warsmann, mais aussi la société civile et les ONG – nous avons mené, ces jours derniers encore, un travail avec Transparency International.
Le dispositif que nous proposons permettra de financer des actions de coopération et de développement, au plus près des populations concernées, et de leur restituer ces montants qui leur ont échappé à travers l'ouverture de crédits au sein d'un programme ad hoc, qui sera créé spécifiquement et placé sous l'autorité du ministère de l'Europe et des affaires étrangères. Ces modalités permettront au Parlement d'assurer, chaque année, le suivi de l'application du mécanisme de restitution, d'autoriser et de contrôler l'emploi des crédits ouverts, et de garantir la transparence et la redevabilité.
Le Gouvernement est favorable aux amendements no 536 et identiques, et proposera un sous-amendement permettant de s'assurer de l'ouverture des crédits budgétaires au sein de la mission « Aide publique au développement ».
Monsieur le secrétaire d'État, je vous propose de donner la parole d'abord à M. Potier pour défendre son sous-amendement no 614 . Je vous redonnerai ensuite la parole pour défendre le vôtre.
Il me semble que mon sous-amendement aurait pu être examiné en amont de la présentation des amendements identiques, mais peu importe. Je voudrais me joindre aux félicitations que vous avez exprimées et souligner une sorte de continuum politique en la matière : je veux rendre hommage à Jean-Pierre Sueur, à des personnalités comme Antoine Dulin qui se sont investies avec le Comité catholique contre la faim et pour le développement, à Transparency International, qui mènent ce combat depuis longtemps. Nous arrivons aujourd'hui à un aboutissement. Le rapport publié par Jean-Luc Warsmann et son collègue allait dans le même sens ; nous sommes en train de le traduire en actions.
Mais le diable est parfois dans les détails, d'où le sous-amendement que nous vous proposons. Il est tout sauf anodin : il s'agit d'éviter que l'argent restitué ne revienne in fine en boucle à des États corrupteurs, à des dictateurs, finalement aux criminels à l'origine de ces biens mal acquis. Il pose un principe de précaution, qui décrit le processus de restitution et le verrouille. Je souhaite que l'on prenne le temps de distinguer ce que mon sous-amendement comporte de différent par rapport à celui du Gouvernement ; il ne faudrait pas que l'on ait le sentiment d'aboutir et qu'on crée, en définitive, un risque de boucles, contre lequel l'Organisation des Nations unies nous met en garde lorsqu'elle dénonce les crimes de la drogue et d'autres trafics ; l'étude de la jurisprudence montre qu'il existe des dangers réels au sein des États ayant bénéficié de biens mal acquis restitués. C'est le moment pour la France de faire une loi, une loi pour de bon, et le présent sous-amendement vient préciser le dispositif qui préviendra ces dérives.
La parole est à M. le secrétaire d'État, pour soutenir le sous-amendement no 615 .
Le sous-amendement vise, d'une part, à lever le gage et, d'autre part, à clarifier le mécanisme budgétaire en précisant que les recettes issues des cessions de produits confisqués donnent lieu à une ouverture de crédits au sein de la mission « APD », et qu'ils serviront à financer des projets de coopération et de développement au bénéfice des populations des pays d'origine. La loi de finances apportera l'ensemble des précisions techniques nécessaires, comme la création du programme budgétaire ad hoc, au sein de la mission APD.
Je comprends tout à fait l'esprit et l'objectif du sous-amendement de M. Potier. Malheureusement, en créant pour ainsi dire deux catégories de justiciables, étant donné qu'il s'agit de biens mal acquis – dont la définition en elle-même a été longue à arrêter – , il présente un risque très fort d'inconstitutionnalité : vous ne pouvez pas rayer d'un trait de plume le code de procédure pénale. Bien sûr, nous partageons l'esprit du sous-amendement et je vous rejoins sur l'idée de mettre ceinture, bretelles, casque pour éviter que, par des jeux procéduriers, ils ne parviennent à récupérer l'argent par un autre biais. Mais, je le répète, en créant deux catégories de justiciables, vous faites courir un risque d'inconstitutionnalité.
J'émets bien évidemment un avis favorable au sous-amendement du Gouvernement, qui nous permettra de concrétiser cette belle avancée et de faire en sorte que, lors de l'examen du prochain budget, je l'espère comme vous, nous puissions examiner cette ligne de crédits et voir à quoi elle servira et comment elle profitera aux pays qui ont été spoliés.
Ce point est très important. L'argent ira-t-il, in fine, à la coopération et profitera-t-il aux populations ? Mon sous-amendement, tel qu'il est rédigé, ne laisse aucune ambiguïté, à mon sens, sur sa constitutionnalité. Il ne s'agit pas en effet de cibler a priori des criminels et des non criminels, mais de respecter un principe universel auquel notre Constitution ne peut pas faire obstacle, en disposant que « la procédure de restitution des fonds repose sur les principes de transparence et de redevabilité. Les organisations de la société civile, française et du pays d'origine, sont pleinement et entièrement impliquées au processus de restitution. » Qui peut s'opposer à ce type de précaution ? Il faudrait prendre le temps de nous expliquer en quoi il est inconstitutionnel. Il est universel et reprend des principes de transparence, de participation, que nous proclamons à l'envi tout au long de l'examen de ce projet de loi. Il convient de les appliquer de façon effective ; c'est le moment ou jamais.
Je voudrais remercier M. M'jid El Guerrab et le Gouvernement pour ces amendements qui constituent un premier pas vers la restitution des fonds récupérés sur les ventes de biens mal acquis ayant fait l'objet de saisies. C'est un sujet sur lequel je travaille depuis plus de deux ans avec Jean-Pierre Sueur, avec qui nous avions engagé une réflexion lorsque je faisais partie de la précédente majorité, pour avancer sur sa proposition de loi relative à l'affectation des avoirs issus de la corruption transnationale, que le Sénat a du reste adoptée à l'unanimité.
Je regrette que l'on n'ait pas plus prospéré sur la proposition de loi du sénateur Jean-Pierre Sueur. Je reconnais le premier pas que vous faites avec cet amendement et ce sous-amendement. Je regrette, cela étant, qu'il intervienne à l'article 1er parce qu'il me semble que nous n'avons pas la portée normative immédiate en matière d'entrée en vigueur dans le droit positif, ou d'opposabilité notamment devant les juridictions. C'est pourquoi, afin de compléter l'article 1er, nous avons déposé un amendement portant article additionnel après l'article 6, qui sera examiné plus loin.
Par ailleurs, j'aurais préféré une rédaction qui permette une plus grande traçabilité, beaucoup plus précise, de l'usage des fonds. Une fois qu'ils seront affectés, notamment par l'intermédiaire de l'AFD, à de l'aide au développement, ma crainte est de les voir se fondre dans la masse budgétaire de l'AFD, alors qu'ils devraient très clairement être fléchés vers les populations spoliées. Nous aurions souhaité une rédaction plus précise pour permettre la transparence et la traçabilité de ces fonds. C'est pourquoi, avec Dominique Potier, nous défendrons après l'article 6 une autre proposition qui, à mon sens, viendrait compléter la vôtre et permettrait d'en renforcer la portée normative.
Je vous rejoins sur le fléchage. C'est pourquoi il est bien précisé que les recettes issues des cessions de produits confisqués donnent lieu à une ouverture de crédits au sein de la mission « APD ». Contrairement aux fonds versés à l'AFD, qu'il est compliqué de regarder dans le détail chaque année, le Parlement sera parfaitement en mesure de vérifier chaque année, action par action, comment les sommes sont dépensées.
Par ailleurs, monsieur Potier, ce que vous avez expliqué est parfait, à ceci près que vous avez omis d'exposer le premier point de votre sous-amendement, qui vise, à l'alinéa 1, à supprimer les mots : « et sous réserve de l'article 706-164 du code de procédure pénale ». C'est cela qui crée la difficulté et qui explique mon avis défavorable.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 71
Nombre de suffrages exprimés 70
Majorité absolue 36
Pour l'adoption 17
Contre 53
Le sous-amendement no 614 n'est pas adopté.
Le sous-amendement no 615 du Gouvernement est adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 73
Nombre de suffrages exprimés 71
Majorité absolue 36
Pour l'adoption 71
Contre 0
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Nous en venons aux amendements portant sur le cadre de partenariat global.
La parole est à Mme Nicole Le Peih, pour soutenir l'amendement no 27 .
Depuis plusieurs années, la dynamique en faveur de la transition climatique s'accélère. Nous avons toutes et tous pris acte de la nécessité de changer nos modes de vie. Désormais, tous les sujets sont climatiques, toutes nos politiques publiques doivent prendre en considération ce facteur. La transition climatique revêt un caractère systémique. C'est le sujet du rapport d'information sur l'objectif européen de neutralité climatique en 2050, que j'ai rendu avec mon collègue Bernard Deflesselles, au nom de la commission des affaires européennes.
Après l'Europe, toutes les grandes puissances se sont engagées sur un horizon de neutralité carbone et, pour y parvenir, toutes devront investir dans la transformation de leur appareil économique et industriel. C'est le sens de l'engagement de la France et de l'Europe à accompagner les pays les plus fragiles, comme l'illustre le cofinancement de la Grande muraille verte de 9 000 kilomètres de long et 15 kilomètres de large qui ira de Dakar à Djibouti.
Dans ce contexte, j'ai souhaité insister sur le défi du dérèglement climatique. Le présent amendement vise donc à ajouter le dérèglement climatique à l'alinéa 2 du préambule du cadre de partenariat global.
L'amendement no 27 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Le préambule du cadre de partenariat global mentionne, dès ses premiers mots, la pandémie de covid-19 ; dans une loi de programmation, cela nous semble donner un poids disproportionné à cet événement circonstantiel. La pandémie est certes importante, mais, en y faisant référence, le préambule ne doit pas masquer les autres grandes difficultés et catastrophes naturelles. Nous proposons donc d'ajouter la mention suivante à la fin de l'alinéa 2 : « La pandémie de covid-19 ne saurait éclipser les crises écologiques en lien avec le réchauffement climatique, l'érosion de la biodiversité et les catastrophes naturelles. Dans certaines régions du monde, la lutte contre le virus se conjugue avec les crises politiques et sécuritaires, les conflits armés et la lutte contre le terrorisme. » Nous faisons notamment référence au Sahel, où la déstabilisation sécuritaire et terroriste est plus importante encore que la covid-19 – dont nous ne minimisons pas, pour autant, la gravité. Nous pondérons ainsi l'ensemble des facteurs de risque.
L'amendement no 130 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Paul Lecoq, pour soutenir l'amendement no 243 .
Comme je l'ai dit à plusieurs reprises, il faut marteler que la France doit respecter les résolutions des Nations unies. En tant que membre permanent du conseil de sécurité de l'ONU, elle doit montrer l'exemple et prouver que le droit international est une norme suprême qu'on ne saurait trahir. Ce principe d'autocontrainte doit être une valeur universelle. À ce titre, la France doit évidemment – et au moins – commencer par respecter le seuil de 0,7 % du revenu national brut dédié à l'aide publique au développement. Le présent projet de loi est l'occasion idéale pour la France d'apparaître comme une puissance respectable, parce que respectueuse du droit international.
L'amendement no 243 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Mireille Clapot, pour soutenir l'amendement no 485 .
Il vise à préciser qu'en cas de crise, les populations les plus vulnérables, à savoir les femmes et les filles, doivent faire l'objet d'une attention particulière. En effet, ce sont souvent elles qui dispensent les soins aux enfants et aux aînés, tandis qu'elles ont moins accès à la santé et à l'éducation. Il convient donc de rappeller qu'elles constituent une population vulnérable.
L'amendement no 485 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Paul Lecoq, pour soutenir l'amendement no 244 .
L'emploi du terme « croissance » dans le projet de loi n'aide pas à la compréhension du texte ; pire, il semble induire l'idée que la croissance est une des seules sources de développement. Le problème est qu'on ne sait pas bien comptabiliser la croissance économique, et que l'indicateur du produit intérieur brut conduit à la catastrophe : les États sont tellement obsédés par la croissance de cet indicateur qu'ils en oublient pourquoi, initialement, nous voulions qu'il croisse. Finalement, l'aide publique au développement, c'est un peu la blague du sage qui montre la lune et de l'imbécile qui regarde le doigt… Pour éviter que l'APD ne pousse les pays les moins avancés vers un tel écueil, je propose, à l'alinéa 3, de substituer au terme « croissance » la formulation suivante de l'économiste Joseph Stiglitz : « processus de développement et d'expansion des libertés réelles dont jouissent les individus ». Elle est plus précise, notamment quand elle se rapporte à l'indice de développement humain.
La croissance telle que nous la connaissons a conduit les pays développés dans une impasse écologique et sociale totale, marquée par une explosion des inégalités, une destruction des emplois et un déréglement climatique qui nous échappe et s'apprête à bouleverser notre monde – et surtout, celui de nos enfants et petits-enfants. La croissance n'a jamais été inclusive ni durable ; ce modèle économique ne doit pas être encouragé. Les pays les plus fragiles devraient être aidés à se développer différemment du modèle européen, en se focalisant davantage sur les véritables enjeux : le respect de l'humanité, de la biodiversité et de la planète. Tel est le sens de mon amendement.
L'amendement no 244 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il vise à préciser l'objectif de lutte contre le dérèglement climatique que s'est fixé l'Union européenne, en lui associant la trajectoire de neutralité carbone à l'horizon de 2050.
L'amendement no 29 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Rodrigue Kokouendo, pour soutenir l'amendement no 498 .
Cet amendement vise à compléter l'alinéa 3 du préambule par la phrase suivante : « La France devra accompagner ses principales contributions financières dans les grandes institutions d'aide internationale, d'une présence accrue au sein de leurs structures de gouvernance. » La France doit renforcer sa présence et son action dans les institutions, alors même que l'aide multilatérale se caractérise par une prolifération d'institutions qui rend son pilotage difficile, voire impossible. Dans un contexte où la création de nouvelles organisations s'accélère, il nous semble nécessaire que la France, qui jouit d'un leadership dans de nombreux domaines – la sauvegarde des biens mondiaux et la lutte contre le changement climatique, entre autres – , étoffe ses équipes au sein de ces institutions.
À titre d'illustration, la coordination étroite qu'entretient la France avec la Banque mondiale, dont elle est le cinquième actionnaire, s'exerce au bénéfice des États fragiles : alors que, conformément à son mandat, la Banque mondiale s'occupait principalement de gestion fiduciaire et intervenait peu dans le domaine régalien et dans la gouvernance, c'est avec l'appui de la France qu'elle a renforcé ses actions à l'égard des États fragiles. Aussi faut-il augmenter le nombre d'administrateurs français dans ce type d'organisation.
Autre exemple : depuis 2011, dans le cadre de la stratégie « L'Initiative » – anciennement Initiative 5 % – , la France consacre une partie de sa contribution au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme à fournir de l'expertise technique aux pays francophones. Voilà une illustration concrète de ce que peuvent faire nos administrateurs dans ces institutions, et voilà pourquoi il faut les renforcer.
Nous agissons déjà en ce sens, puisque nous avons doublé le nombre de nos experts techniques dans les instances multilatérales et auprès de nos partenaires. Cependant, il ne nous semble pas opportun à ce stade d'inscrire cet objectif dans le préambule du cadre de partenariat global. Mon avis est donc défavorable.
Je soutiens pleinement cet amendement, tant la faiblesse de la France dans les conseils d'administration des institutions internationales est notoire : M. Le Drian l'a d'ailleurs reconnu à l'occasion de l'exercice budgétaire, quand nous avons soulevé ce problème. Nous avons un vrai problème de représentation : c'est pourquoi la mention proposée par M. Koukouendo mérite d'être inscrite dans le cadre de partenariat global.
L'amendement no 498 n'est pas adopté.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l'amendement no 470 .
Je défendrai également l'amendement no 478 . Tous deux visent à promouvoir le concept de souveraineté solidaire, cher à Mireille Delmas-Marty, que j'ai évoqué lors de la discussion générale : les États sont souverains non seulement pour défendre leurs intérêts nationaux, mais aussi pour défendre les biens communs.
Parmi mes deux propositions, j'avoue une préférence pour l'amendement no 478 ; il affirme que, dans un esprit de souveraineté solidaire, la politique de développement de la France lui permet de projeter ses valeurs et ses priorités à l'international : défense des libertés, lutte contre la pauvreté et défense des biens. Le concept de souveraineté solidaire est novateur : dans l'esprit de Mireille Delmas-Marty, il s'oppose à la « souveraineté solitaire » des protectionnistes et des souverainistes – dont nous ne sommes pas. Nous affirmons ici tout à la fois la souveraineté des peuples – que nous voulons pour eux et pour nous-mêmes – , et notre solidarité indéfectible, au nom de notre interdépendance.
L'amendement no 470 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Paul Lecoq, pour soutenir l'amendement no 245 .
Il vise à compléter l'alinéa 4, en insistant sur cinq grandes ambitions de la France : défendre les droits humains et environnementaux, ainsi que le droit international humanitaire ; valoriser le multilatéralisme et toutes les instances internationales qui s'y rapportent ; lutter contre l'évasion fiscale et responsabiliser davantage les entreprises donneuses d'ordre vis-à-vis de leur chaîne de sous-traitance ; adopter une politique d'accueil bien plus hospitalière ; n'oublier personne – et, surtout, ne pas oublier la question du genre, qui est transversale. Sur ce dernier point, le rapport de Jean-François Mbaye et Moetai Brotherson, « Le droit international humanitaire à l'épreuve des conflits », fait des recommandations fortes : veiller à l'application de l'agenda Femmes, paix et sécurité de l'ONU, et continuer à ? uvrer en faveur de l'accès des femmes à la santé et aux droits sexuels et reproductifs en toutes circonstances – ce souci devant prévaloir y compris au sein du conseil de sécurité des Nations unies.
Enfin, la question du multilatéralisme a toute sa place dans le préambule du contrat de partenariat global. L'Organisation internationale du travail devrait également y être mentionnée, alors qu'elle ne figure nulle part dans le projet de loi ; il serait regrettable de ne rien dire de cette institution fondamentale. Je vous invite donc à voter cet amendement, pour donner plus d'ambition au préambule du contrat de partenariat global. Vous pourriez me répondre que certaines de nos propositions y figurent déjà, mais si le préambule a une vertu d'affichage en proclamant des valeurs à défendre, ces précisions y ont toute leur place.
L'amendement no 245 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 478 de M. Dominique Potier a déjà été défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Même avis.
J'avoue ma déception : monsieur le rapporteur et monsieur le secrétaire d'État, vous ne manifestez guère d'ouverture, ni sur le plan pratique, lorsque nous soumettons des amendements pourtant précis, ni sur le plan philosophique. Cela ne présage rien de bon pour la suite des débats ; j'en suis vraiment déçu.
L'amendement no 478 n'est pas adopté.
Il s'agit de préciser l'alinéa 6 du préambule, que j'avoue, monsieur le rapporteur, avoir du mal à comprendre. Tout à l'heure, vous avez rappelé les fondements de l'aide publique au développement, en faisant notamment référence à la déclaration de Paris sur l'efficacité de l'aide au développement et à l'accord de partenariat de Busan pour une coopération efficace au service du développement – j'en connais bien la teneur, puisque j'ai participé aux deux conférences. Ces déclarations, celle de Paris en particulier, affirment les grands principes d'appropriation par les pays bénéficiaires de l'aide, et d'alignement sur leurs stratégies et leurs politiques publiques, et ce dans le cadre d'un dialogue. Elles ont tiré les leçons des désastreux programmes d'ajustement structurel du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale, lesquels ont d'ailleurs fait leur mea culpa quelques années après les avoir déployés.
Dans l'alinéa 6 du contrat de partenariat global, plutôt que d'affirmer que la France projette à l'international « ses valeurs, ses priorités et ses intérêts, ainsi que ceux de l'Europe », il serait préférable qu'elle y projette les priorités définies en CICID, alignées sur les besoins des pays, comme le recommande la Déclaration de Paris sur l'efficacité de l'aide au développement. C'est précisément l'objet de mon amendement. Quelle cohérence y a-t-il entre votre rédaction de l'alinéa 6, selon laquelle l'aide publique au développement doit être alignée sur les valeurs, les priorités et les intérêts de la France, et l'affirmation par la France de son attachement à la déclaration de Paris, selon laquelle l'aide au développement doit se fonder sur l'appropriation par les pays bénéficiaires et s'aligner sur leurs stratégies de politique publique ?
Si vous y tenez, madame la présidente…
Il me semble tout à fait inapproprié de mettre en exergue, dans le cadre du partenariat global, l'idée que l'aide publique au développement de la France lui permet de projeter à l'international « ses priorités et ses intérêts ainsi que ceux de l'Europe ».
C'est un point sur lequel nous sommes fermement en désaccord avec vous, monsieur le secrétaire d'État, qui nous avez rappelé que l'APD était un instrument de la puissance de la France : l'APD ne doit pas servir nos intérêts, elle sert à réparer les inégalités mondiales. Et ce n'est pas parce que d'autres pays le font, comme vous me le rétorquerez sûrement, que cela en fait une bonne idée. L'image de la France sera d'autant plus forte qu'elle saura garder une voix singulière dans le monde.
Il est donc préférable de parler de priorités alignées sur les besoins des pays, en faisant référence à la déclaration de Paris sur l'efficacité de l'aide.
S'agissant de l'Europe, les députés communistes ont souhaité valoriser le Consensus européen pour le développement, dans la mesure où c'est le seul document européen auquel nous pouvons faire référence dans ce domaine. On limitera ainsi le flou de la proposition actuelle. Je pense donc que l'amendement no 246 recueillera vos avis favorables.
Le second amendement est une sorte d'amendement de repli, vous l'aurez compris. Puisque vous m'avez dit en commission que les intérêts de l'Europe étaient ceux qui étaient validés par le Consensus européen pour le développement, eh bien ! c'est le moment de l'inscrire dans un texte en votant cet amendement.
La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l'amendement no 370 .
Que la France assigne certaines priorités à sa politique étrangère et de développement, ce n'est pas du tout contradictoire avec la déclaration de Busan, qui dit bien qu'on doit aligner notre stratégie avec les besoins des populations. Vous-même avez proposé un certain nombre d'amendements qui tendaient à définir des priorités. Il ne s'agit pas forcément de les fixer ad vitam eternam. En ce moment, c'est, par exemple, l'éducation, la santé et l'adaptation aux changements climatiques.
Il ne faut certes pas que ce soit la seule priorité qui guide l'action de la France. Nous avons d'ailleurs inscrit dans ce cadre de partenariat stratégique – et c'est une innovation – la question des CLD, des contrats locaux de développement, qui sont des instruments de dialogue, de politique publique pour faire en sorte que les priorités françaises et celles du pays partie au contrat soient prises en considération de façon cohérente et coordonnée.
Pour ma part, j'assume le fait que notre politique internationale soit fondée sur des valeurs – auxquelles vous êtes vous-même attaché, vous le dites souvent – et une approche par les droits. « Projeter » ne veut pas dire « imposer » : « projeter » , c'est la capacité à dire en dehors de notre maison, en dehors du territoire français, que l'on partage un certain nombre de valeurs, nous l'avons déjà dit ici, en matière de droits humains, de lutte contre les mutilations et les violences à l'encontre des jeunes filles et des jeunes femmes.
Par ailleurs l'intérêt n'est pas synonyme d'égoïsme : j'ai plutôt intérêt à ce qu'on réduise la pauvreté, les inégalités partout dans le monde ; j'ai plutôt intérêt à ce que la plus grande partie de l'humanité soit vaccinée si je veux que l'on sorte définitivement de cette pandémie mondiale.
Enfin l'Europe, ce n'est pas seulement le Consensus européen : c'est aussi la politique de la Commission européenne en matière notamment de neutralité carbone, ou encore les décisions du Conseil de l'Europe. Il ne s'agit pas d'en limiter le sens par une telle précision. Défavorable.
Le développement a certes une finalité propre qui est la lutte contre la pauvreté, mais on ne peut pas ignorer qu'il y a aussi une géopolitique du développement. Si nous ne projetons pas ces valeurs, eh bien ! d'autres le feront – suivez mon regard – qui n'ont pas tout à fait la même vision humaniste. Il n'y a donc pas d'ambiguïté de ce point de vue et la rédaction de cet alinéa est pleinement satisfaisante. L'avis est donc défavorable sur ces amendements.
Cet amendement tend à reconnaître la place centrale de la lutte contre le réchauffement climatique au travers de la réduction des émissions de gaz à effet de serre.
L'amendement no 31 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
M. le rapporteur applaudit.
La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour soutenir l'amendement no 64 .
C'est exactement l'amendement que j'ai défendu tout à l'heure concernant le principe de non-discrimination de l'attribution de l'aide aux populations. Même s'il n'a pas été voté alors, il m'a semblé pouvoir l'être sur le CPG.
Défavorable, puisque cela a été ajouté au CPG en commission, madame la députée.
L'amendement no 64 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 371 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Paul Lecoq, pour soutenir l'amendement no 248 .
Je l'ai dit à l'occasion de la discussion générale, les députés communistes soutiennent la paix et par conséquent défendent le respect des résolutions des Nations Unies, garantes du droit international. Mais ce n'est pas par la violence qu'on en fera assurer le respect : seule la diplomatie peut-être victorieuse. La table ronde consacrée mercredi à l'Afghanistan par la commission des affaires étrangère l'a d'ailleurs confirmé : les personnes auditionnées à cette occasion ont été unanimes pour dire que l'on ne pouvait résoudre les conflits que par la voie diplomatique et que la guerre finalement n'avait servi à rien.
Non, l'aide publique au développement ne peut se faire la supplétive de l'action militaire ; le développement n'est pas fait pour être l'auxiliaire de la guerre : il est fait pour l'éviter. Le développement n'est pas fait pour faire accepter nos armées à des populations qui les ressentent comme des troupes d'occupation. Les guerres menées par la France et plus largement par l'Occident ne peuvent engendrer le moindre début de développement. La guerre ne s'arrête que là où la justice commence et le développement avec elle. Surtout méfions-nous des va-t-en guerre qui finiront par proposer que l'aide publique au développement serve à recruter des soldats, comme le président Hollande l'a peut-être fait pour Serval.
L'amendement no 248 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Oui, la politique de développement solidaire et de lutte contre les inégalités mondiales concourt à la politique étrangère de la France. C'est pourquoi la rédaction que je vous propose vise à mettre en valeur le fait que l'action de la France en matière de développement et de solidarité internationale est au service du rayonnement et de l'influence des valeurs de la République française, la liberté, l'égalité et la fraternité, et ce dans les domaines culturels, économiques et diplomatiques.
L'amendement no 91 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. M'jid El Guerrab, pour soutenir l'amendement no 439 .
Cet amendement vise à intégrer pleinement les diasporas, véritables passerelles, dans les politiques de développement. Elles sont un atout précieux qu'il faut mieux valoriser dans le cadre de notre politique d'aide au développement, sur le modèle des initiatives d'Expertise France. En effet, Expertise France est engagée dans deux programmes visant à mobiliser les talents et les ressources de la diaspora vivant en Europe ou récemment réinstallée en Afrique : le dispositif Meet Africa II, qui favorise la création d'entreprises et d'emplois en Afrique, et le dispositif des cadres en mobilité volontaire en Afrique, CMVA, qui vise à placer les diasporas africaines au c? ur de la relation entre la France et l'Afrique, conformément au voeu exprimé par le Président de la République à Ouagadougou.
Cet amendement est né d'un sentiment de décalage entre l'ambition affichée par nous-mêmes, la majorité, ainsi que l'exécutif, et la réalité de la politique d'attribution des visas que ma collègue Sira Sylla et moi-même avons pu constater il y a quelques semaines encore sur le terrain, où nous avons pu mesurer toutes les difficultés rencontrées par nos services consulaires en la matière. Nous voulons donc faciliter cette circulation entre le Nord et le Sud.
J'en profite, monsieur le secrétaire d'État, pour me faire l'avocat auprès de vous des centaines de couples, notamment franco-algériens, qui, au moment où nous parlons, se trouvent séparés à cause de ces blocages et qui vivent aujourd'hui des situations dramatiques. Il faut entendre leur désarroi et leur souffrance et leur permettre de se retrouver au plus tôt et de vivre enfin pleinement leur amour.
Applaudissements sur les bancs du groupe Agir ens. – M. Bertrand Pancher applaudit également.
Je sais, mon cher collègue, votre attachement et celui de Mme Sira Sylla à cette question des diasporas, d'autant que vous êtes l'élu d'une circonscription où beaucoup font des aller-retours entre les deux rives de la Méditerranée, partageant leur vie entre les deux continents.
Si j'ai donné un avis défavorable sur votre amendement, c'est tout simplement parce que la question des diasporas a déjà été intégrée, grâce à vous d'ailleurs en partie, au cadre de partenariat global, non pas simplement comme sources d'investissement sur le plan financier, auxquelles on les a trop souvent réduites, mais surtout, je le dis ici très clairement, comme des éléments indispensables, moteurs de la politique de partenariat et de solidarité internationale. On doit leur permettre d'apporter à la construction de cette politique leur regard, leur histoire et leur expérience afin de la rendre beaucoup plus pertinente, au plus près du terrain.
Surtout, on doit absolument s'appuyer sur leur expertise et c'est pourquoi dans mon rapport au ministre de l'Europe et des affaires étrangères, je préconise le recrutement d'experts techniques issus de la diaspora, de favoriser le volontariat de ses membres de façon à ce que l'AFD, mais aussi les différents ministères bénéficient de la voix, de l'expérience, de l'expertise des diasporas et que l'on reconnaisse leur savoir-faire et leur rôle dans nos sociétés.
La politique des visas n'entre pas dans le périmètre de la loi, mais je veux moi aussi rendre hommage au travail mené par vous-même, monsieur El Guerrab, et par Sira Sylla sur ce sujet. Il y a quelques jours encore, nous nous en sommes entretenus pour trouver les moyens d'avancer sur certaines de vos recommandations.
J'ai bien conscience de la situation des couples séparés par la pandémie et nous espérons tous naturellement que ces séparations seront le plus courtes possible. C'est pourquoi j'ai veillé à mettre en place en août dernier une procédure de laissez-passer au bénéfice d'un certain nombre de couples non mariés et non pacsés, que nous avons dû hélas suspendre en raison des dernières restrictions en matière de mobilité internationale.
À ce stade, avis défavorable sur l'amendement.
L'amendement no 439 est retiré.
La parole est à M. Jean-Paul Lecoq, pour soutenir l'amendement no 249 .
Il tend à marteler combien il importe que la France respecte les résolutions des Nations Unies, seule et unique règle du vivre-ensemble mondial. Ne pas les respecter, c'est retourner à l'état de nature, et donc à un état de guerre potentielle. Même si cela ne nous arrange pas nécessairement, il est indispensable de nous conformer au droit international, si imparfait soit-il, et de nous en faire les plus fervents défenseurs, d'autant plus que la France, en tant que membre permanent du Conseil de sécurité, a une responsabilité envers de nombreux autres pays du monde. Il est donc proposé d'ajouter à l'alinéa 13 les mots : « à travers le respect absolu des résolutions des Nations Unies et du droit international humanitaire ».
L'amendement no 249 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 13 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il vise à faire de la Convention internationale des droits de l'enfant un cadre de référence, à l'instar des objectifs de développement durable ou de l'accord de Paris. Eu égard aux enjeux, il apparaît en effet particulièrement nécessaire de faire de la CIDE un pivot de la politique de développement et que les enfants, détenteurs de droits spécifiques, soient considérés à ce titre dans le cadre élaboré par cette assemblée. Il est donc proposé de compléter comme suit l'alinéa 16 : « e) la Convention internationale des droits de l'enfant, premier traité international à énoncer les droits de tous les enfants et à contraindre les États parties à respecter chacun de ses articles ».
La parole est à Mme Florence Provendier, pour soutenir l'amendement no 591 .
Il est identique au précédent. La Convention internationale des droits de l'enfant, faute d'avoir pu être mentionnée dans le texte ce matin, trouverait toute sa place après l'alinéa 16 du cadre de partenariat global.
Je remercie le Gouvernement d'avoir permis ce matin de citer les droits de l'enfant dans la loi. Mais ces droits doivent s'inscrire dans un cadre, et la CIDE me semble être le meilleur possible à cet égard. L'engagement de la France en la matière prend racine dans le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, qui dispose que la nation « garantit à tous, notamment à l'enfant, [… ] la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. » Il se prolonge, au plan international, avec la Convention internationale des droits de l'enfant, adoptée en 1989, qui doit figurer comme cadre de référence de la politique de développement solidaire et de lutte contre les inégalités mondiales, à l'instar des objectifs de développement durable et de l'accord de Paris.
La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l'amendement no 372 .
Même si le cadre multilatéral et européen s'impose naturellement à nous, il est important de l'évoquer dans les principes d'action. De ce point de vue, nous sommes satisfaits que l'alinéa 16 cite le cadre élaboré par les Nations Unies, dont vous détaillez les objectifs. Il est surprenant, en revanche, que ne soit pas évoquée la Convention relative aux droits de l'enfant, qui pose des principes aussi importants que la non-discrimination, la recherche de l'intérêt supérieur de l'enfant, le droit à la vie, à la survie et au développement ou la participation des enfants.
Dans ce domaine, nous avons, grâce à vous, réalisé plusieurs avancées tout au long de ce texte. L'avis de la commission est néanmoins défavorable, car cet alinéa vise les Nations Unies et tout ce qui y est décliné se rapporte à de grands accords ou à des instruments conclus dans ce cadre. C'est d'ailleurs aussi dans celui-ci que s'inscrivent les ODD, les objectifs de développement durable, dont relève la question de l'enfant et qui renvoient également à la CIDE.
C'est la raison pour laquelle nous avons, en commission, fait le choix d'inscrire à l'alinéa 61 le lien avec cet instrument crucial qu'est la Convention internationale des droits de l'enfant. Votre demande est donc satisfaite.
Même avis.
Permettez-moi un retour en arrière. Dans les années 1990, jeune journaliste, j'accompagnais Médecins sans frontières sur plusieurs fronts de guerre civile, comme au Libéria, ou, durant les génocides, au Rwanda et au Burundi. Au sentiment d'impuissance qui nous prenait à la gorge devant trop de morts et à la vue de camps de réfugiés qui s'agrandissaient à perte de vue, s'ajoutait la honte. J'ai ainsi interviewé des médecins qui, devant ma caméra, pleuraient de la honte d'être français, d'être occidentaux. À des milliers de kilomètres de là, l'indifférence était à peu près générale, tandis que, sur le terrain, les médecins triaient jour et nuit les enfants pouvant être soignés et ceux que leurs parents devaient remporter dans leurs bras. C'est un gâchis humain incommensurable, auquel s'ajoutent l'amertume, la honte et un terrible constat d'impuissance.
Le respect des droits de l'enfant n'est pas seulement un impératif de justice sociale : c'est également une façon de défendre les intérêts de la France. C'est aujourd'hui un vrai sentiment de fierté qui m'anime face à ce nouvel élan de diplomatie solidaire au niveau mondial, où il est question de prévention et d'attention à autrui. Ces notions peuvent paraître un peu galvaudées, mais ce sont les remèdes à de nombreux maux dans une société d'interdépendance, où nous devons gagner les batailles décisives de l'éducation et de l'égalité.
Applaudissements sur les bancs du groupe Agir ens. – M. Bertrand Pancher applaudit également.
Monsieur le rapporteur, vous dites que l'alinéa concerne des mécanismes propres aux Nations Unies, mais il ne vous aura pas échappé que la CIDE a elle aussi été adoptée par cette organisation. Puisque vous dites que vous envisagez de l'intégrer à l'alinéa 61, qui traite des droits humains, pourriez-vous nous donner plus de précisions sur l'amendement qui l'y introduirait ?
! C'est une erreur de ma part. Cette convention a en effet été adoptée par les Nations Unies, selon des modalités différentes il est vrai. À titre personnel, je suis donc désormais favorable à l'amendement.
Je me suis laissé convaincre. Avis favorable.
Mmes Aina Kuric et Florence Provendier applaudissent.
La question de la place que prennent, dans la politique de développement de la France, les textes internationaux auxquels elle est partie nous a beaucoup occupés lors des débats en commission, et plusieurs collègues ont voulu citer diverses conventions dans ce volet du CPG. Pour les contenter peut-être, et parce que leur volonté est tout à fait légitime, je propose, avec cet amendement, de viser globalement « les obligations internationales résultant de l'application des traités et conventions auxquelles [la France] est partie ».
Bien entendu, notre pays est tenu en toute hypothèse de respecter ces normes. C'est la raison pour laquelle je n'ai pas voulu en dresser la liste, me bornant à préciser que l'approche de la France doit tenir compte de l'ensemble de ces conventions. Du reste, l'exhaustivité n'est pas conseillée et il n'est pas question de les énumérer toutes, au risque d'exprimer une hiérarchie involontaire et d'envoyer des signaux contradictoires.
La parole est à Mme Mireille Clapot, pour soutenir l'amendement no 486 .
Il est regrettable que la partie du texte relative au cadre multilatéral et européen ne fasse pas expressément mention des grands textes qui ont fait avancer la cause et les droits des femmes, surtout en cette année 2021 où se tiendra le forum Génération Égalité et où nous fêterons le vingt-sixième anniversaire de la déclaration de Pékin de 1995. Il faudrait aussi citer la Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à égard des femmes et la violence domestique, ou convention d'Istanbul, la CIDE, et la CEDAW, la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. Cependant, comme le disait M. Mbaye, il faut éviter l'effet catalogue, qui induit le risque d'oublier un texte. C'est la raison pour laquelle nous proposons la formule générique suivante : « Dans le cadre de cette approche fondée sur le multilatéralisme, la France tient particulièrement compte [… ] des obligations internationales résultant de l'application des traités et conventions auxquels elle est partie. »
L'amendement no 92 de Mme Sira Sylla est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Nous avons intégré la francophonie à l'alinéa 31. Pour cette raison, avis défavorable.
L'amendement no 92 n'est pas adopté.
Je propose d'apporter un complément utile à l'alinéa relatif au renforcement du tissu économique local des TPE et PME, en mentionnant expressément le rôle des chambres consulaires, définies comme structures intermédiaires représentant le secteur privé local et proposant des services qualifiés aux entreprises. Le compagnonnage consulaire est un vecteur essentiel pour renforcer les compétences locales par la transmission de savoir-faire et le partage d'expertises et d'expérience. Il oriente les jeunes créateurs d'entreprise vers des activités génératrices de croissance durable et d'emploi inclusif. Il y a un engagement fort des acteurs en France et en Afrique, attesté par le récent manifeste de la CPCCAF, la Conférence permanente des chambres consulaires africaines et francophones. Il me semble donc utile de mentionner expressément les chambres consulaires dans le cadre de partenariat global.
Applaudissements sur les bancs du groupe Agir ens.
Monsieur Ledoux, je comprends très bien l'objectif de votre amendement, …
… mais, afin de n'oublier personne – car vous connaissez les susceptibilités qui s'exacerbent parfois sur ces questions – , j'émets un avis défavorable et propose de renvoyer la question aux ambassadeurs… et aux autres.
Rires sur les bancs du groupe Agir ens.
Tout le monde a bien conscience de l'engagement des institutions citées par M. Ledoux. Cela figura au compte rendu de la séance, ce qui vaut reconnaissance.
Rires sur les bancs du groupe Agir ens.
L'amendement no 61 n'est pas adopté.
L'amendement no 93 de Mme Sira Sylla est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Nous avons déjà pris en compte ce point dans le texte. Avis défavorable.
L'amendement no 93 n'est pas adopté.
La parole est à M. Rodrigue Kokouendo, pour soutenir l'amendement no 427 .
Les inégalités entre les femmes et les hommes sont très présentes dans le milieu de la recherche, particulièrement dans les domaines scientifiques et technologiques. Cela a un effet non seulement sur le nombre des chercheuses, mais aussi sur le choix des sujets, ce qui, en médecine, par exemple, a longtemps conduit à écarter les projets de recherche consacrés aux pathologies plus courantes chez les femmes. Le rapport d'information sur les femmes et les sciences des députés Céline Calvez et Stéphane Viry préconise de promouvoir l'égalité dans le domaine de la recherche, en faisant notamment en sorte que la recherche publique et l'enseignement supérieur donnent l'exemple.
L'amendement no 427 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 556 tend à préciser que la France encourage la participation de tous les citoyens, en particulier ceux qui appartiennent aux publics traditionnellement les plus éloignés de la politique de développement. Une avancée a été réalisée en commission avec la reconnaissance de l'éducation à la citoyenneté et à la solidarité internationale. Cette belle politique ne doit pas être réservée à ceux qui sont les plus insérés, les plus intégrés, et qui résident plutôt dans les métropoles, mais aussi bénéficier à d'autres, qui en sont plus éloignés, ce que permet notamment l'éducation populaire. Il s'agit donc de permettre la participation citoyenne, notamment celle des plus jeunes.
L'amendement no 402 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Mireille Clapot, pour soutenir l'amendement no 483 .
L'efficacité, la transparence, la « redevabilité » dont nous parlons nécessitent l'analyse de données. Or nous ne sommes plus à l'époque des rapports papier ou des fichiers Excel : en 2021, nous sommes à l'heure des données ouvertes – open data en anglais – , auxquelles chacun doit pouvoir accéder pour les exploiter.
Ces données permettent d'évaluer et de piloter les politiques publiques et sont donc, en définitive, à la source des décisions. Elles représentent donc un enjeu fort de démocratie.
Par conséquent, l'amendement vise à compléter la première phrase de l'alinéa 25 par les mots : « et en matière de données ouvertes, conformément à la charte des données ouvertes du G8 pour l'ouverture des données publiques signée par la France en 2013 ». La charte fixe en effet le cadre de l'accès aux données ouvertes et de leur utilisation.
L'amendement no 483 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
L'amendement no 559 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
J'ai lu avec beaucoup d'attention le rapport annexé établissant le cadre de partenariat global, et je l'ai trouvé particulièrement naïf s'agissant de la Chine.
En effet, la Chine est très présente dans plusieurs pays parmi les plus pauvres. C'est particulièrement vrai s'agissant des pays africains, dont elle est souvent à la fois le premier fournisseur, le premier client et le premier prêteur. La Chine est certes un pays très respectable, dont le réseau diplomatique est très étendu – il est désormais le deuxième plus grand réseau au monde, place que nous occupions auparavant – , mais il nous faut tout de même être attentifs à sa politique internationale.
Par cet amendement, je souhaite que la Chine, qui est désormais un pays très puissant, cesse de se considérer comme un pays du tiers-monde, car c'est l'argument qu'elle utilise pour s'exonérer de contraintes auxquelles nous devons pourtant nous astreindre, en particulier s'agissant de la conditionnalité des aides publiques. En effet, alors que nos aides ne peuvent être liées à des bénéfices directs pour nos entreprises, celles de la Chine le sont systématiquement.
Je souhaite donc que nous affirmions notre volonté d'exister dans les pays les plus pauvres, ainsi que notre vigilance à l'égard des interventions chinoises, pour très respectables qu'elles soient. La Chine doit intervenir avec des moyens comparables et en respectant les mêmes règles que nous : il n'y a pas de raison de faire une exception en sa faveur.
Avis défavorable.
Le sujet que vous abordez dépasse le cadre du texte dont nous débattons. Même s'il n'est pas sans lien, il n'a pas totalement sa place dans le cadre du cadre de partenariat global. Peut-être pourra-t-il faire l'objet d'un rapport de la commission des affaires étrangères.
Deux éléments pour vous répondre : premièrement, il n'y a pas 1 euro de don dans les prêts que la France accorde à la Chine à travers l'AFD. C'est une critique que l'on entend souvent, mais je répète, pour que ce soit très clair, qu'aucun élément concessionnel ne figure dans les prêts français consentis à la Chine.
Deuxièmement, il est vrai que la Chine pratique la conditionnalité, ou tout du moins que ses aides sont liées. Sur ce sujet aussi, la France est très claire : comme cela a été rappelé à de nombreuses reprises, ses aides ne sont pas liées. Cela ne nous empêche pas de mener la bataille, dans les différents forums internationaux, pour faire entendre raison à nos amis chinois : nous avons bon espoir d'y parvenir un jour. Cela étant, il n'est pas question de renoncer au principe de non-conditionnalité des aides, gage d'efficacité et de pertinence de notre aide au développement.
Le Gouvernement a bien conscience des difficultés que vous abordez, et le débat est d'ailleurs à l'ordre du jour dans plusieurs instances internationales, notamment l'Organisation mondiale du commerce – OMC.
Néanmoins, je rappelle à Marc Le Fur l'héritage que le général de Gaulle nous a légué avec la Constitution, dont l'article 52 prévoit justement que « le Président de la République négocie et ratifie les traités. » Il ne saurait donc, ainsi que tend à le faire son amendement, donner d'injonction au Gouvernement en matière de ratification des conventions internationales. Par conséquent, avis défavorable, même si nous sommes bien conscients du problème qu'il a exposé.
Monsieur le rapporteur, vous ne m'avez pas tout à fait compris : je n'évoque pas les relations avec la Chine, mais sa présence dans un certain nombre de pays qui, à nos yeux, sont prioritaires – nous l'avons d'ailleurs réaffirmé.
Arrêtons d'être naïfs : dans ces pays, le poids de la Chine est considérable, bien plus important que le nôtre ! Elle est leur premier fournisseur, bien souvent le premier client pour leurs matières premières, parfois un prêteur très important. Pourtant, elle n'obéit pas aux exigences et contraintes qui nous sont imposées en tant que pays occidental. À un moment donné, cette situation doit nous interroger.
Je prends un exemple concret : peut-être, demain, renoncerons-nous au remboursement d'une partie de la dette, qui nous est pourtant dû. Le club de Paris, c'est-à-dire les grandes nations, y est prêt, mais que feront les Chinois ? Il est tout à fait possible qu'ils renoncent au remboursement, mais en imposant aux pays concernés des contraintes relatives à leurs ports ou à leurs matières premières. Elle exercera donc une véritable pression sur ces pays. Resterons-nous alors les bras ballants ?
Ce que je souhaite, c'est non seulement que le Gouvernement prenne le sujet en main, mais encore qu'il puisse le faire en se prévalant, au-delà de la simple logique gouvernementale, de l'aval de la représentation nationale.
La Chine joue son rôle sur la scène internationale, et c'est bien légitime : c'est un très grand pays. Seulement, il faut que notre gouvernement s'assure qu'elle ne le fasse qu'avec des moyens comparables aux nôtres, et non grâce à des armes parfois surprenantes. Par exemple, alors que nous investissons dans des stations d'épuration pour améliorer les conditions sanitaires, la Chine investit bien souvent dans d'immenses stades de foot, très populaires. Cela doit vous interroger.
L'amendement no 14 n'est pas adopté.
L'amendement no 373 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Comme je l'ai dit lors de la discussion générale, les députés communistes ont été très étonnés à la lecture de l'alinéa 26 du cadre de partenariat global. Que signifient ces mots : la France « promeut vis-à-vis [des pays en développement] une logique de réciprocité » ?
La France voudrait-elle qu'on lui rende la monnaie de sa pièce ? L'État français souhaite-t-il que les pays aidés se sentent redevables ? L'aide publique deviendrait-elle conditionnée, et le cas échéant, à quoi ? À retenir des entreprises françaises lors de marchés publics ?
Mes interrogations rejoignent un peu celles du collègue Le Fur qui citait l'exemple chinois. Les tenants du capitalisme sont prêts à toutes les ruses lorsqu'il s'agit de faire de l'argent.
N'intégrons pas ce genre de précision dans la loi : comme le rappellent la déclaration de Paris de 2005 et la déclaration de Busan de 2011 – d'ailleurs citées dans le texte – , seuls les besoins des pays en développement doivent guider l'élaboration d'une politique de développement. Il ne faut pas perdre de vue ce principe, au risque de s'égarer dans les concepts dangereux et contreproductifs que sont la « redevabilité » ou la conditionnalité.
La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l'amendement no 375 .
Il faut en effet supprimer la fin de la seconde phrase de l'alinéa 26 : en vertu du principe de l'alignement de l'aide, seuls les besoins des pays doivent guider l'élaboration et la mise en ? uvre de la politique de développement de la France. Partant, une logique de réciprocité à l'égard des pays partenaires ne saurait être promue car, comme vient de l'indiquer M. Lecoq, cela reviendrait à soumettre l'octroi de l'APD à des conditions. L'amendement vise à écarter ce risque.
En outre, l'utilisation de l'APD pour assouvir des objectifs politiques propres aux bailleurs a prouvé son caractère inefficace, voire contreproductif, en matière de développement. Cela va d'ailleurs à l'encontre de principes internationalement reconnus, en particulier par les déclarations de Paris en 2005 et de Busan en 2011.
La parole est à M. Hubert Julien-Laferrière, pour soutenir l'amendement no 453 .
L'alinéa 26 dispose que la France « fait preuve d'une exigence accrue vis-à-vis des pays partenaires en développement » : c'est une évidence, de tels partenariats se nouent dans le dialogue.
S'agissant de la « logique de réciprocité », je rejoins les réticences exprimées par mes deux collègues. Peut-être que vos arguments, monsieur le rapporteur, monsieur le secrétaire d'État, me conduiront à retirer l'amendement, mais pour le moment, eu égard à nos débats de tout à l'heure au sujet des grands principes de l'aide publique au développement, et compte tenu des déclarations de Paris et de Busan, je ne comprends pas très bien ce que la réciprocité vient faire ici.
Nous avons déjà eu ce débat en commission. Pour moi, cet alinéa indique précisément ce que nous souhaitons faire, c'est-à-dire sortir de l'aide au développement pour entrer véritablement dans une logique de partenariat. C'est d'ailleurs ce que nous demande la jeunesse des pays aidés, qui considère que nous devrions être dans une relation d'égal à égal, et non pas dans une relation asymétrique ou de domination.
Vous-mêmes avez défendu la nécessité d'améliorer encore la transparence de l'aide au développement et de faire preuve d'une exigence accrue vis-à-vis des pays partenaires en développement : c'est bien l'objectif que nous visons en promouvant une logique de réciprocité.
Le volontariat et la mobilité étudiante sont deux bons exemples de cette logique. Jusqu'à présent, la loi ne prévoyait que le volontariat des pays du nord vers les pays du sud. Désormais, le volontariat pourra également s'effectuer dans l'autre sens, car les jeunes des pays du sud partenaires ont aussi des choses à nous apprendre. Il en va de même pour la mobilité étudiante : elle s'exerce dans les deux sens.
Ces deux exemples, très concrets, illustrent parfaitement notre volonté de nous inscrire dans la réciprocité et la responsabilité mutuelle, dans le respect de l'histoire de chacun.
Même avis.
Au départ, j'étais plutôt d'accord avec le rapporteur sur la question de la réciprocité : il me semblait important de ne pas placer les pays aidés en état de dépendance, et de leur faire savoir qu'eux aussi étaient en mesure de nous apporter quelque chose.
Cependant, j'ai entendu les différents arguments développés, et certaines situations me semblent un peu tendancieuses : c'est notamment le cas dans l'exemple cité par le rapporteur à l'instant, mais aussi de notre accueil de professionnels, comme les médecins, qui vont alors manquer aux pays en développement. Parce que nous ne formons pas suffisamment de médecins, nous avons tendance à dépouiller les pays en développement de compétences dont ils ont pourtant vraiment besoin.
Je pense donc que le terme de « réciprocité » peut engendrer des situations problématiques – nous en vivons d'ailleurs déjà certaines.
Nous avons effectivement eu le débat en commission, mais la situation n'a pas évolué : l'expression « logique de réciprocité » n'est absolument pas claire. Vous venez d'en donner deux exemples positifs, mais la demande de réciprocité pourrait porter sur des sujets tout à fait différents, comme le niveau d'investissement ou d'engagement dans un pays. C'est donc un terme qui veut à la fois tout et rien dire.
Nous vous demandons donc d'écrire explicitement dans la loi les situations que vous visez, comme celles que vous venez de présenter : cela sera plus clair que l'utilisation du mot « réciprocité ».
L'amendement no 250 n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Paul Lecoq, pour soutenir l'amendement no 251 .
Il vise à insérer, après l'alinéa 26 du contrat de partenariat global, la phrase suivante : « La France s'engage à ce que les entreprises ayant leur siège social en France et qui sont présentes dans les pays fragiles paient des impôts équitables, respectent les populations locales et l'environnement, et soient responsables des agissements de toute leur chaîne de sous-traitance. »
Chers collègues, les députés de mon groupe jugent important d'associer les entreprises privées à la construction de la politique de développement solidaire.
En plein scandale sur l'évasion fiscale au Luxembourg, alors que ce sont près d'une centaine de milliards d'euros qui échappent au fisc français chaque année, il faut imaginer l'ampleur du drame que représente l'évitement de l'impôt dans les pays les moins bien administrés. Dans le rapport sur les flux financiers illicites, la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement – la CNUCED, que M. le secrétaire d'État connaît bien – , a indiqué que le coût de l'évitement fiscal représentait environ 90 milliards d'euros par an. D'autres sources, notamment l'enquête de Christian Savestre sur l'évasion fiscale, indiquent des pertes pour l'Afrique allant jusqu'à 225 milliards de dollars par an. En comparaison, l'aide publique au développement totale pour le continent africain représente environ 120 milliards de dollars ; 100 milliards de dollars, c'est aussi ce dont l'Afrique aurait besoin pour lutter contre la covid-19 et relancer l'économie à l'échelle du continent.
La lutte contre l'évasion fiscale est un instrument fondamental de l'APD puisqu'elle permet aux États de collecter plus de ressources fiscales pour mener leur propre politique et être moins dépendants de notre aide, nous permettant de notre côté de concentrer cette même aide sur les espaces les plus en difficulté. Alors montrons l'exemple et commençons par nos entreprises en les obligeant à respecter les règles de l'équité fiscale, sociale et environnementale, car chaque euro récupéré pour et par le continent africain sur ces actions permettra à l'APD mondiale d'être plus efficace.
Défavorable, car l'amendement est satisfait. Il y a eu des avancées en commission, et même avant. À cet égard, deux passages du CPG sont importants. Nous rappelons à l'alinéa 99 que la question de la mobilisation des ressources domestiques, publiques et privées, et de la coopération dans la lutte contre les flux illicites est un élément essentiel de notre politique, et nous le redisons à l'alinéa 137 : « La France accorde une attention particulière à la mobilisation de ressources nationales, principal pilier du financement du développement. » Nous rappelons que les entreprises, comme tous les acteurs, doivent prendre leur part, parce que nous savons bien que si nous souhaitons nous projeter sur le long terme, cela passe par une lutte acharnée, sans relâche, de coopération et de coordination pour prévenir l'évasion fiscale et les flux illicites qui sont au détriment des plus vulnérables et des plus pauvres. Avis défavorable, donc, car satisfait par deux fois.
Même avis.
Non, je ne suis pas satisfait. J'entends le message et je le partage, mais la question posée par l'amendement est aussi celle de l'exemplarité des entreprises françaises. Que le Parlement demande aux entreprises françaises de payer équitablement leurs impôts dans les pays où elles ont obtenu des marchés me semble la moindre des choses. On ne peut pas se contenter d'une généralité, même si elle va dans le bon sens. Demandons à nos entreprises d'être exemplaires.
M. Lecoq dit qu'il ne faut pas se contenter de généralités. Je ne voudrais que, par le biais de cet amendement, on ait le sentiment que les entreprises françaises agissant dans certains pays fragiles sont systématiquement suspectes. Ces acteurs font face à des environnements juridiques et fiscaux pour le moins mouvants, et les critères selon lesquels des contributions leur sont demandées ne sont pas toujours bien établis. Ne généralisons donc pas. Bon nombre d'entreprises françaises s'acquittent scrupuleusement d'obligations que Dominique Potier a permis d'inscrire dans la loi en matière de responsabilité sociale et environnementale. Je trouve que l'amendement a tendance à jeter un certain doute sur cet engagement. Et je ne suis pas le seul à le penser, puisque je vois Mme Lakrafi opiner du chef…
Nous défendons l'amendement de notre collège. J'entends l'argument du ministre. Sur ce point, évasion fiscale, exemplarité, devoir de vigilance, il existe deux écoles, à Bercy et dans les ministères, quelles que soient d'ailleurs les majorités. Pour avoir porté pendant cinq ans, dans l'adversité, le projet sur le devoir de vigilance, je peux vous en parler. Il y a ceux qui pensent que c'est une entrave à notre capacité à être présents à l'export et dans le monde, et il y a ceux qui font le pari que c'est notre arme numéro un pour être présents dans le monde : l'exemplarité, l'éthique. Je fais partie de cette école-là et j'espère que vous aussi. On ne devrait pas avoir peur de ce type d'amendement.
À entendre les auteurs de l'amendement, on a le sentiment que nos entreprises seraient prédatrices. Non, elles sont présentes en Afrique et concourent à son développement. Une certaine musique dans la presse nationale dénonce ces entreprises alors que leur présence est indispensable. On montre du doigt un Bolloré qui concourt énormément à l'activité économique, par la présence dans les ports, qu'il gère, par les transports qu'il organise… Cette petite musique, il faut la faire cesser.
Avec mon collègue Jean François Mbaye, nous avons rencontré les responsables des grandes banques centrales : ils nous disent qu'ils aspirent à ce que les grandes banques françaises restent présentes en Afrique. Il y a certes des banques turques, marocaines, et autres, mais ils souhaitent que les françaises restent car ils les connaissent et ont confiance. Arrêtons de montrer les entreprises du doigt. Sachons dire clairement qu'elles concourent, depuis longtemps car elles sont restées fidèles à l'Afrique même dans des périodes plus compliquées qu'aujourd'hui, au développement de ce continent, et nous avons tout intérêt au développement du continent africain.
L'amendement no 251 n'est pas adopté.
La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l'amendement no 376 .
Sourires.
Bien tenté !
L'amendement no 376 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l'amendement no 499 .
Pour répondre à M. Le Fur, si on circule un peu dans le monde, comme j'ai eu l'occasion de le faire dans des enceintes onusiennes ou invité par le Parlement canadien, il n'y a aucun doute : les entreprises européennes, dans les mines du Pérou, les mines du Mozambique, partout dans l'extractif, l'industrie automobile, la sous-traitance de la chimie, sont réputées comme les plus éthiques, les plus morales, les plus respectueuses des droits humains et de l'environnement. Dont acte. Si on l'affirme dans la loi et si on en fait un positionnement clair, ce sera, par rapport à des concurrents sans scrupules, une force sur tous les marchés que j'ai évoqués et tant d'autres.
Il ne faut pas être dans la demi-mesure. Je propose par cet amendement de faire la clarté sur ce sujet de la morale et du respect de la loi et des dispositions fiscales. Il est très simple, il prévoit qu'à l'horizon 2025 « l'ensemble des flux financiers de l'aide publique au développement et de ses partenaires privés n'utilise aucun dispositif ayant trait directement ou indirectement avec les paradis fiscaux, au sens de la liste de l'Union européenne des pays et territoires non coopératifs ». L'APD utilise parfois le relais de banques privées qui, en la matière, ne sont pas très claires, les lois que nous avons votées sur les paradis fiscaux permettent de le révéler. Cet assainissement peut donc prendre un peu de temps : c'est pourquoi je parle de cinq ans. Je rêve d'une France en 2025 qui puisse dire 0,7 % d'APD par rapport au PIB et 0 % de paradis fiscaux.
L'amendement no 499 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Paul Lecoq, pour soutenir l'amendement no 252 .
Nous vous proposons de compléter l'alinéa 29 par la phrase suivante : « Une cohérence de la France sera également recherchée dans les instances internationales où siège la France pour lutter contre la pauvreté, les discriminations, les dumpings sociaux, fiscaux, environnementaux, notamment en tant que membre permanent du Conseil de sécurité des Nations Unies, de l'Organisation internationale du travail, du Conseil de l'Europe, ou encore à l'Union internationale pour la conservation de la nature. »
Il est important d'améliorer cette partie du cadre de partenariat global en affirmant la nécessité pour la France d'agir en cohérence avec ses objectifs d'APD et sa position dans les organisations internationales. Il faut impérativement que la France soit plus visible et plus mobilisée, notamment à l'Organisation internationale du travail – OIT – ou au Conseil de l'Europe.
L'OIT et ses recommandations devraient être au coeur de notre aide publique au développement car les Français se sont battus pour conquérir des droits et des protections au travail, et nous devons essayer d'exporter ces conquêtes et les valeurs qui en découlent. La recommandation no 205 de l'OIT sur l'emploi et le travail décent pour la paix et la résilience est par exemple un texte fondamental qui reprend les principes cardinaux de l'OIT, indiquant qu'une paix universelle et durable ne peut être fondée que sur la base de la justice sociale. La France devrait chercher à porter ces valeurs dans tous ses projets d'APD.
L'OIT est bien citée dans à l'alinéa 76 : « La France soutient également l'OIT dans la mise en oeuvre du travail décent dans les pays en développement. » Avis défavorable.
L'amendement no 252 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 560 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Il vise à souligner que la définition des priorités géographiques et thématiques doit être déclinée au niveau des pays. Elle doit permettre une gestion fondée sur les résultats et ne pas seulement être au service de mécanismes de redevabilité.
L'amendement no 165 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Rodrigue Kokouendo, pour soutenir l'amendement no 465 .
Il s'agit d'insérer le mot « économique » à l'alinéa 34. L'Afrique est un continent très dynamique au sein duquel se posent cependant des défis d'ordre social, démographique, climatique, d'urbanisation accélérée, politique, sécuritaire, mais également économique. Le développement et la réponse aux défis économiques constituant l'un des aspects majeurs de l'APD, il paraît nécessaire de le mentionner à cet alinéa.
L'amendement no 465 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme Frédérique Dumas, pour soutenir l'amendement no 144 .
Nous avons eu la discussion tout à l'heure. J'ai entendu l'argumentation du ministre, qui dit que le cap est clair et le chemin tracé. J'ai également entendu le rapporteur, qui a rappelé que cet amendement pourrait tenir la route lorsqu'il y aurait un rééquilibrage de l'aide vers les dons, mais que ce n'était pas le cas aujourd'hui. Comme je pense que l'important est d'être cohérent et efficient, je retire l'amendement.
L'amendement no 144 est retiré.
Il prévoit d'allouer, au plus tard en 2025, 25 % d'APD aux dix-neuf pays pauvres prioritaires, tout en supprimant l'objectif associé aux subventions de l'AFD, qui manque d'ambition.
La parole est à M. Rodrigue Kokouendo, pour soutenir l'amendement no 33 .
Il vise le même objectif tout en continuant à faire des pays du G5 Sahel une cible spécifique.
Il tend à allouer 25 % de l'APD de la France aux dix-neuf pays pauvres prioritaires.
La parole est à M. Hubert Julien-Laferrière, pour soutenir l'amendement no 457 .
Nous abordons un volet important du CPG, celui des aires géographiques prioritaires en matière d'aide au développement, sur lesquelles nous avons beaucoup insisté depuis le début de la législature. L'alina 35 tend à donner la priorité à l'Afrique et à la Méditerranée, avec 75 % des dons et prêts. Mais dans cette zone, on trouve des pays comme la Turquie, qu'il ne serait pas très normal de voir passer devant les dix-neuf pays cités dans l'alinéa suivant.
Ces dix-neuf pays sont ceux définis par le CICID du 8 février 2018. On nous dit depuis des années qu'ils sont prioritaires mais, d'après mes calculs, ce qui est proposé dans le cadre du CPG, soit 50 % de l'aide projet de l'État et les deux tiers des subventions mises en oeuvre par l'AFD, représente en réalité – tenez-vous bien, chers collègues ! – 5 % de notre APD ! Peut-être pourrez-vous me prouver le contraire, mais mes calculs aboutissent à ce résultat pour le moins problématique.
Je me félicite bien sûr que les pays pauvres prioritaires fassent l'objet d'une aide opérationnelle, mais je propose de compléter l'alinéa 36 par un nouvel objectif : celui d'attribuer 25 % de notre APD à ces pays.
La parole est à Mme Annie Chapelier, pour soutenir l'amendement no 434 .
Il va dans le même sens que celui de mon collègue Hubert Julien-Laferrière et propose de concentrer l'aide vers ces pays pauvres prioritaires, qui sont les pays les moins avancés et qui méritent à ce titre de bénéficier de la plus grosse part de l'APD de la France.
La parole est à M. Hubert Julien-Laferrière, pour soutenir l'amendement no 454 .
Il propose d'attribuer, d'ici 2025, 50 % de notre APD aux pays les moins avancés.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
Avis défavorable. Le projet de loi de programmation prévoit plusieurs mesures à destination des pays les moins avancés – appellation que je déteste tant elle est péjorative et peu amène pour les habitants de ces pays.
Quant à votre résultat, monsieur Julien-Laferrière, je ne sais pas comment vous l'avez obtenu – vous n'êtes pas le seul à aboutir à ce chiffre – , mais voilà les éléments dont je dispose pour ma part : entre 2010 et 2016, la part de l'Afrique dans l'APD totale nette est passée de 52 % à 40 % ; entre 2010 et 2017, celle de l'Afrique subsaharienne est passée de 45 % à 28 % et celle des pays pauvres prioritaires de 16 % à 13 %. Nous sommes donc loin du tableau que vous dressez, d'autant que les chiffres de l'APD augmentent.
Si nous voulons être les plus objectifs possible et si nous nous concentrons sur les dons et les secteurs prioritaires, la part de l'Afrique, des pays pauvres prioritaires et des pays du Sahel est majoritaire dans notre APD – ce qui va donc plus loin que ce que vous demandez.
Au total, les amendements sont satisfaits par le texte, qui est même plus précis qu'eux s'agissant des objectifs stratégiques de l'AFD et de l'État français en matière d'APD.
Même avis.
Je suis sensible à ces amendements. Notre priorité est claire : ce sont d'abord les cinq pays du Sahel ; viennent ensuite les dix-neuf pays pauvres prioritaires et les pays les moins avancés. Nous devons traduire cela en chiffres, ce qui paraît assez simple.
Si nous énonçons des objectifs sans les accompagner de chiffres, nous restons dans le verbe. Or le but de ce projet de loi de programmation est précisément de passer du verbe à des engagements concrets. Bien évidemment, nous ne respecterons pas les objectifs quantitatifs au pourcentage près, mais nous pourrions ainsi, chaque année, vérifier si la France se situe en deçà ou au-delà de ses objectifs. Cela relève du bon sens !
Si nous ne réussissons pas à nous fixer des objectifs clairs, alors nous resterons dans la situation actuelle et les principaux pays bénéficiaires de l'APD ne seront pas ceux que nous énonçons, mais la Turquie, la Colombie et d'autres encore.
Nous voulons sortir de cette situation. C'est la raison pour laquelle nous demandons que les priorités de la France soient quantifiées.
Dans le prolongement de ce que vient de dire Marc Le Fur, permettez-moi de poser une question simple : sur les 13 milliards d'euros actuels de l'APD, combien de milliards ou de millions représentent les 50 % de l'aide projet mise en oeuvre par l'État et les deux tiers des subventions mises en oeuvre par l'AFD dont bénéficient les pays pauvres prioritaires ? D'après mes calculs, c'est un peu plus de 5 % de 13 milliards, mais je ne demande qu'à être détrompé.
Comme l'a dit mon collègue Marc Le Fur, nous avons besoin de chiffres. Des orientations sont fixées dans le CPG, mais quels sont les chiffres ?
Je propose de consacrer 25 % de l'APD aux pays pauvres prioritaires. Si vous me dites qu'ils bénéficient actuellement d'une part plus élevée que 25 %, alors la question ne se pose pas, mais je crains que leur part n'approche plutôt les 5 %.
Je n'aurais pas mieux dit que M. Le Fur. Il est essentiel d'inscrire dans le projet de loi de programmation que les pays les moins avancés doivent bénéficier de la moitié de l'aide publique au développement. Je propose la moitié, mais ce pourrait être aussi 25 %. Les calculs effectués par les ONG et par le Gouvernement aboutissent à des chiffres diamétralement opposés.
Je ne mets pas en doute votre méthode de calcul, monsieur le rapporteur, mais chacun sait que l'impossibilité de flécher les crédits de l'APD est sa principale difficulté. C'est d'ailleurs ce que nous disent les Français : ils veulent savoir où va l'argent, à quel pays, à quel secteur. Voilà pourquoi il est essentiel de fixer des chiffres clairs. Fixer un seuil, qu'il soit de 50 % ou de 25 %, ne pourrait qu'être profitable à la stratégie même de l'APD.
Nous attendons ce texte depuis trois ans et demi. Soyons aujourd'hui précis dans les mesures que nous proposons.
La parole est à M. Jean-Paul Lecoq, pour soutenir l'amendement no 253 .
Cet amendement arrive à point nommé après la discussion que nous venons d'avoir puisqu'il propose, à la fin de l'alinéa 36, de substituer aux mots « la moitié de l'aide projet mise en oeuvre par l'État, dont un tiers est concentrée sur les pays du G5 Sahel (Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger et Tchad), et des deux tiers des subventions mises en oeuvre par l'AFD » les mots « 25 % de l'aide publique au développement mise en oeuvre par l'État ».
La rédaction issue de la commission selon laquelle « dix-neuf pays prioritaires bénéficient de la moitié de l'aide projet mise en oeuvre par l'État » est trop réductrice. Les chiffres relatifs à l'aide projet sont d'ailleurs flous : le site du ministère des affaires étrangères indique celui de 2,5 milliards d'euros tandis qu'il est de 800 millions en crédits de paiement et d'un peu plus de 1 milliard en autorisations d'engagement dans le bleu budgétaire du projet de loi de finances pour 2021. En tout état de cause, l'aide projet de l'État ne représente pas du tout 25 % de l'APD mise en oeuvre par l'État. Or c'est précisément ce que nous demandons.
Il importe de faire en sorte que les pays prioritaires le soient réellement. Autrement à quoi bon les désigner comme tels ? La difficulté que j'ai eue à trouver des chiffres identiques dans le bleu budgétaire, le document transversal, les documents du Quai d'Orsay et différents rapports prouve qu'il y a bien une difficulté dans la désignation des lignes budgétaires. Nous nous disions en commission qu'il existait un flou sur les chiffres de l'APD ; en voici la preuve !
En m'exprimant sur cet amendement, je veux répondre aussi aux remarques précédentes. On peut bien entendu considérer que d'autres chiffres sont nécessaires et fixer des priorités en pourcentages de l'APD, mais l'alinéa 35 fixe clairement l'objectif : « La France a décidé de consacrer 75 % de l'effort financier total de l'État en subventions et en prêts et au moins 85 % de celui mis en oeuvre via l'Agence française de développement dans la zone Afrique et Méditerranée. » Un tiers équivaut à un peu plus de 33 %. Les choses sont donc claires !
Reste qu'il est possible de fixer des objectifs chiffrés de multiples manières : en pourcentages des dons, en pourcentages des prêts, en pourcentages de l'APD totale, etc. Si nous avions choisi des pourcentages des prêts, vous nous auriez sans doute dit que cet indicateur ne convient pas aux populations les plus vulnérables et vous auriez réclamé des pourcentages en dons. Si nous avions choisi des pourcentages en dons, vous nous auriez demandé de garantir que les dons ne concernaient pas des aides projet…
Le texte actuel me semble satisfaisant. Il précise à quelle utilisation doivent être destinés les crédits de l'APD : aux pays et aux géographies les plus vulnérables et à des dons. On peut évidemment discuter de la pertinence pour l'AFD de faire des prêts à l'Argentine, à la Colombie ou à la Turquie, mais la priorité n'est évidemment pas là. Il ne suffit pas que le gâteau de l'APD augmente, il faut aussi des priorités claires, ce qui est le cas ici. Les objectifs fixés permettront de répondre aux enjeux. Avis défavorable.
Permettez-moi de donner quelques chiffres pour démontrer que nous nous réengageons massivement dans les zones prioritaires : 41 % de l'APD totale a été allouée au continent africain en 2019, soit 4,5 milliards d'euros ; pour l'APD bilatérale, l'Afrique est également destinataire de 40 % des crédits, soit une augmentation de 30 % entre 2015 et 2019.
Avis défavorable.
Je faisais partie de ceux qui pensaient que l'objectif fixé par le texte n'était pas suffisant, mais mon amendement souffrait d'un déséquilibre entre les dons et les prêts – vous y avez fait allusion, monsieur le rapporteur.
Dans ces conditions, pourquoi ne retenons-nous pas la formule proposée par Hubert Julien-Laferrière et ne fixons-nous pas comme objectif un rééquilibrage en faveur des dons ? Ce ne serait sans doute pas simple, mais cela permettrait de résoudre le problème complexe auquel nous sommes confrontés.
Je ne suis pas tout à fait satisfait de votre réponse, monsieur le secrétaire d'État. Vous nous dites que 40 % de l'APD bénéficie au continent africain. Soit, mais de grands pays africains sont sortis de la liste des pays les moins avancés – ce dont nous nous réjouissons évidemment pour eux. La France les soutient et concourt à leur développement, ce qui est une bonne chose, mais nous souhaitons quant à nous cibler l'APD de la France sur certains pays africains en particulier, ce qui correspond exactement aux objectifs que vous affichez.
Nous ne proposons pas d'orienter l'APD vers d'autres pays que ceux que vous nommez et qui font l'objet d'un consensus. Ce que nous demandons, c'est que les objectifs définis dans le texte prennent un tour concret, un tour chiffré.
L'amendement no 253 n'est pas adopté.
L'amendement no 15 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il demande que davantage de pays les moins avancés soient destinataires de l'APD brute bilatérale de la France. En 2018, selon l'OCDE, l'aide française se concentrait encore majoritairement sur des pays à revenus intermédiaires qui sont, par ordre d'importance, la Colombie, l'Indonésie, la Côte d'Ivoire, le Maroc, le Cameroun, l'Inde, la Turquie, le Sénégal, l'Égypte et la Chine. Or un seul de ces pays appartient à la liste des dix-neuf pays prioritaires.
L'amendement no 166 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Le cadre de partenariat global dont nous débattons occupe en tout trente-cinq pages, dans lesquelles le mot « Liban » n'apparaît jamais. Il s'agit selon moi d'une erreur et presque d'une faute. Nous entretenons avec ce pays des relations très particulières. Le Liban doit donc être évoqué. Le Liban : vous m'avez bien entendu, monsieur le secrétaire d'État ! Nous devons porter une attention spécifique à ce pays. Puisque le CPG s'appliquera au cours des années à venir, le Liban doit être explicitement mentionné. Ma demande est on ne peut plus simple : n'oublions pas ce grand pays.
Très sensibles à la situation du Liban et à la douleur d'un peuple qui vit catastrophe sur catastrophe depuis trop longtemps, nous sommes désireux de continuer à préserver nos relations historiques avec ce pays. Cela étant, nous n'allons pas dresser la liste de nos partenaires les plus anciens dans le CPG.
S'il faut discuter de l'intégration du Liban parmi les pays définis comme prioritaires, nous aurons l'occasion de le faire lors des débats annuels sur l'APD. En tout cas, il ne semble pas judicieux de prendre une telle mesure dans le présent texte, même si cela ne nous empêche pas d'augmenter les financements destinés à ce pays. Rappelons qu'après la terrible explosion qui a balayé une partie de Beyrouth, le Président de la République s'est rendu sur place et l'AFD s'est impliquée dans le financement de projets dans le domaine de la santé.
La France se tient, sans aucun doute ou ambiguïté, aux côtés du peuple libanais, notamment au cours de cette difficile période qu'il traverse. Pour m'y être rendu encore au mois d'août, à la suite de ce terrible événement, je peux vous assurer que nous avons mis en place des dispositifs exceptionnels, notamment pour accompagner les travaux de reconstruction des écoles.
Le chef de l'État s'y est lui-même rendu à plusieurs reprises en quelques mois, preuve de son attention permanente à l'égard de ce pays. Le Liban figure en bonne position dans la liste des pays récipiendaires de l'APD, pour un montant qui, de mémoire, atteignait 61 millions d'euros en 2019. Nous allons rester aux côtés du Liban, mais j'émets un avis défavorable à l'amendement.
Je ne comprends vraiment pas votre logique. Dans ce document, qui se veut exhaustif, nous nous donnons les moyens d'expliciter notre politique. Or, à l'égard du Liban, nous conduisons une politique singulière en raison de notre proximité avec ce pays, des drames récents qu'il a vécus, notamment l'explosion du port de Beyrouth.
Elle est tellement singulière que nous avons recours à la Conférence économique pour le développement par les réformes et avec les entreprises – CEDRE – , un mécanisme de financement international lui-même singulier où nous exerçons, en quelque sorte, une fonction de chef de file.
Pour respecter cette singularité, nous devons faire figurer le Liban dans le CPG. Si celui-ci est destiné à mettre en avant certaines priorités, il me semble que ce pays doit être très clairement classé comme prioritaire. Je regrette vraiment les réponses du rapporteur et du secrétaire d'État.
L'amendement no 16 n'est pas adopté.
Mes chers collègues, l'hémicycle n'est pas le lieu idéal pour faire des interventions en direct sur vos comptes Facebook, encore moins quand vous utilisez un flash. Merci de vous en abstenir.
La parole est à M. Jean-Paul Lecoq, pour soutenir l'amendement no 254 , qui fait l'objet du sous-amendement no 616 du rapporteur.
Il propose de substituer, dans la deuxième phrase de l'alinéa 39, aux mots : « à la croissance économique inclusive et durable » les mots : « au développement humain, à la protection de la planète et de ses ressources ».
Fidèles à leur idée de ne pas mettre en avant le mot « croissance » – qui fait référence à la croissance du PIB, l'une des obsessions du monde occidental qui nous a menés dans le mur sur le plan écologique et social – , les députés communistes proposent d'insister sur les notions de développement humain et de protection de la planète.
Pour nous, ce n'est pas la croissance du PIB, c'est-à-dire la croissance de la valeur ajoutée produite dans un pays, qui crée de la richesse et encore moins du bien-être, mais plutôt le développement humain.
En outre, la croissance du PIB est actuellement captée de manière maladive par une petite élite qui s'enrichit, au point qu'une poignée d'humains possède désormais davantage de richesses que la moitié la plus pauvre de l'humanité. C'est tout bonnement inconcevable et totalement insoutenable.
Plutôt que la croissance économique, il faut viser un développement humain dont l'indice est un agrégat statistique mêlant PIB par habitant, espérance de vie à la naissance et niveau d'éducation des enfants de dix-sept ans. Fondé sur des critères qui ont du sens, cet indice est beaucoup mieux construit que le PIB.
Voilà un indice statistique qui pourrait tout à fait nourrir les ambitions de ce texte sur les inégalités mondiales. Il a d'ailleurs été corrigé en 2010 pour tenir compte des inégalités, si bien qu'en le prenant comme référence, on remarque que les pays africains sont parmi les moins dotés de la planète. Cela renforce notre conviction que la course à la croissance du PIB et au capitalisme dérégulé n'apporte rien d'autre à l'Afrique que l'enrichissement d'une extrême minorité au détriment des peuples et des ressources naturelles.
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir le sous-amendement no 616 .
L'indice de développement humain, outil de mesure très important du Programme des Nations Unies pour le développement – PNUD – , permet de ne pas en rester au PIB. Avec ce sous-amendement, qui va nous demander de faire une petite gymnastique légistique, je vous propose de garder la notion de croissance économique inclusive et durable, mais d'y ajouter celle de développement humain, « mesuré par l'indice de développement humain ».
Monsieur le rapporteur, je me permets de vous interrompre. N'étant pas coutumière de la gymnastique légistique, je propose de suspendre la séance pour quelques minutes.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix-sept heures cinquante, est reprise à dix-huit heures.
Le sous-amendement no 616 est retiré.
L'amendement no 254 est rectifié. Aucun des termes de la deuxième phrase de l'alinéa 39 n'est supprimé ; l'amendement vise désormais à insérer dans cette phrase les mots « au développement humain, à la protection de la planète et de ses ressources » après le mot « assainissement ». Monsieur Lecoq, souhaitez-vous ajouter quelque chose ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Cette formulation est bien meilleure dans la mesure où elle permet de respecter les orientations et le vocabulaire onusiens, conformément au voeu que M. Lecoq avait exprimé quelques amendements plus tôt.
Sourires.
L'amendement no 254 , tel qu'il vient d'être rectifié, est adopté.
Il vise à modifier la fin de la deuxième phrase de l'alinéa 39 du cadre de partenariat global.
Je propose d'ajouter, après le mot « durable », les mots : « à la gouvernance démocratique et à la réduction de la fracture numérique ». La réduction de la fracture numérique doit figurer parmi les domaines pour lesquels les synergies doivent être accrues en vue de préserver les biens publics mondiaux. L'Agenda 2030 du développement durable reconnaît que « l'expansion de l'informatique et des communications et l'interdépendance mondiale des activités ont le potentiel d'accélérer les progrès de l'humanité, de réduire la fracture numérique et de donner naissance à des sociétés du savoir ». La connectivité elle-même fait l'objet de l'objectif de développement durable 9. c qui vise à « accroître nettement l'accès aux technologies de l'information et de la communication et faire en sorte que tous les habitants des pays les moins avancés aient accès à internet à un coût abordable d'ici à 2020 ».
L'accès au numérique est aujourd'hui un enjeu transversal en matière d'objectifs du développement et de réduction des inégalités mondiales, que la crise de la covid-19 a mis en exergue. En Afrique subsaharienne, 89 % des apprenants ne disposent pas d'un ordinateur à la maison et 82 % n'ont pas accès à internet. Or du fait des mesures sanitaires liées à l'épidémie de covid-19, 191 pays ont fermé leurs établissements d'enseignement, du pré-primaire jusqu'au niveau tertiaire, cette situation touchant au moins 1,5 milliard d'apprenants dans le monde. Or la jeunesse compte beaucoup pour l'Afrique !
Applaudissements sur les bancs des groupes Agir ens et LT.
Mêmes mouvements.
Même avis.
Pour aller dans le sens de Mme Sylla, l'avenir de l'Afrique est dans l'accès au numérique. Forte de sa jeunesse, elle pourrait très vite prendre la tête de la révolution numérique internationale. Il faut offrir à ces populations particulièrement vulnérables la possibilité d'acquérir les compétences nécessaires au codage et aux métiers du développement web. L'aide au développement ne sera pas efficace si elle n'accompagne pas la révolution numérique qui s'opère aujourd'hui, particulièrement en période de couvre-feu et de confinement. Il ne faut pas rater le tournant de la formation de la jeunesse aux outils du numérique, d'autant qu'aujourd'hui, la maîtrise du codage est une compétence de plus en plus demandée.
Il existe des initiatives formidables dont je voulais vous faire part. L'exemple que je citerai n'est pas situé en Afrique, mais l'innovation en question pourrait être dupliquée dans tous les camps de réfugiés du monde. Quelques entrepreneurs français ont créé une ONG qui s'appelle Chams. Il s'agit d'une école de codage pour les réfugiés syriens en Jordanie. C'est une première : cette ONG offre une formation à ces jeunes, souvent étudiants, qui ont fui la guerre et qui croupissent pendant des années – parfois plus de cinq ou six ans – dans ces camps. Imaginez les dégâts psychologiques et le gâchis de potentiel que cela représente pour cette jeunesse ! Ces formations in situ dans les camps de réfugiés permettent d'amorcer un cercle vertueux. Elles offrent un avenir à ces jeunes souvent arrêtés en plein vol dans leurs études, freinent la tentation de l'immigration irrégulière et stabilisent la jeunesse par la formation professionnelle.
Madame la présidente, avant tout, je tenais à vous présenter mes excuses pour le flash de mon appareil photo, tout à l'heure. La semaine dernière, en commission, j'ai décidé de faire un direct pour expliquer à celles et ceux qui nous suivent sur les réseaux sociaux comment se déroulent nos réunions, sans jamais pointer la caméra sur qui que ce soit, dans le respect du droit à l'image des uns et des autres.
S'agissant de l'amendement de mon amie Sira Sylla, je tiens à exprimer à celle-ci tout mon soutien. Nous allons souvent en Afrique, nous y sommes encore allés récemment. La jeunesse africaine est en effet au coeur du développement et l'enjeu est bien dans l'accès au numérique, donc à l'électricité. Je profite de l'occasion pour dire toute mon admiration et toute mon amitié pour Jean-Louis Borloo qui fait un travail exceptionnel et qui se bat au quotidien, avec sa fondation, pour l'électrification du continent.
M. Bertrand Pancher applaudit.
Je salue tous ceux qui travaillent à cet objectif. Merci pour ton amendement, chère Sira !
J'accepte vos excuses, cher collègue, mais les films ne sont pas autorisés dans l'hémicycle.
Il propose de dédier au moins 50 % de l'aide publique au développement française aux services sociaux de base : la santé, l'éducation, l'eau, l'assainissement, l'hygiène ou les systèmes de protection sociale. Il est important de le préciser car certains projets financés par l'aide au développement française laissent perplexe.
Voici un exemple : certains responsables politiques de l'île Rodrigues, qui fait partie du pays de Maurice – je vois M. le secrétaire d'État opiner de la tête – ,…
Sourires.
… souhaitent agrandir l'aéroport Plaine Corail, alors que l'enquête publique a montré de façon formelle que la population y était totalement opposée. Les 80 millions d'euros de financement permettant d'allonger la piste ne devraient pas tarder à arriver. Or je rappelle que Rodrigues est une toute petite île de 38 000 habitants, dotée d'un écosystème très fragile. L'alinéa 44 du cadre de partenariat global précise pourtant : « Dans le cadre de sa stratégie climat, l'AFD s'est engagée à ce que son activité soit 100 % compatible avec l'accord de Paris d'ici à 2020 », date déjà dépassée. L'île Rodrigues est fragile, le lagon, qui a déjà été piétiné, est très peu profond, et il y a un énorme problème de ressources en eau. Le tourisme de masse est bien la dernière chose dont cette île a besoin.
La parole est à M. Rodrigue Kokouendo, pour soutenir l'amendement no 569 .
Il a pour objectif de flécher l'aide de la France en priorité vers les pays qui en ont le plus besoin. Il s'agit de garantir que la majorité des fonds publics consacrés à l'aide au développement iront aux populations les plus vulnérables. En effet, ces pays et leur population sont particulièrement affectés par les inégalités sociales et économiques. La pauvreté, la corruption, les trafics illicites, la menace et parfois la présence de groupes terroristes empêchent tout projet de développement sur le long terme. La crise liée au covid-19 a empiré la situation des PMA et la France doit affirmer que c'est avant tout à ces pays qu'elle destine son aide.
Je comprends l'objectif de ces amendements. La question est importante et je tiens à m'y arrêter, quitte à ne plus y revenir par la suite.
Avec cette loi, nous devrions sortir des indicateurs de moyens pour privilégier les indicateurs d'impact. Je vous donne un exemple tiré des travaux que mène Esther Duflo, prix Nobel d'économie. Fixer des seuils de 30 % ou 50 % à réserver aux services sociaux de base, à l'hygiène et à l'assainissement ou à tout autre secteur semble contradictoire avec la volonté de laisser les pays concernés décider de leurs priorités. Surtout, ce n'est pas parce qu'on y met les moyens qu'on arrivera à améliorer la situation d'un secteur – par exemple de l'éducation ou de la santé.
L'indicateur de moyens renvoie à l'argent qu'on investirait, par exemple, dans l'éducation ; l'indicateur de résultat, au nombre d'écoles construites ou à celui d'écoliers qui les fréquentent. Ce que nous recherchons, ce n'est pas d'investir des millions dans la construction des écoles, mais d'améliorer le taux d'alphabétisation des jeunes et faire en sorte qu'ils viennent en classe. Y parvenir peut nécessiter d'augmenter le budget de l'éducation nationale, mais peut-être aussi de construire une route et de financer des bus pour que les enfants se rendent à l'école sans parcourir de longues distances à pied, ou encore d'augmenter le budget du ministère de l'agriculture pour qu'ils bénéficient de repas gratuits.
Comme le montrent les travaux d'Esther Duflo, l'aide au développement est multidimensionnelle, multifactorielle et multisectorielle. Sortons des indicateurs de moyens pour nous concentrer sur les indicateurs d'impact !
Avis défavorable.
Même avis.
La réponse de M. le rapporteur est intéressante, mais j'insiste malgré tout sur la notion de services sociaux de base. Les acteurs locaux que nous avons auditionnés sur place nous ont expliqué que rien n'était possible sans quelques services publics tels que la sécurité sociale – ils nous l'enviaient. Ils soulignaient qu'avant de penser à la covid-19, il fallait déjà parvenir à soigner des maux simples de tous les jours. C'était un véritable appel et il ne faudrait pas le laisser sans réponse. C'est pourquoi j'insiste sur la nécessité de prendre cette dimension en compte dans le fléchage des fonds, même si je partage par ailleurs l'analyse du rapporteur.
J'entends vos arguments, monsieur le rapporteur, mais je ne pense pas manquer de cohérence en demandant qu'une partie du budget alloué à l'aide au développement soit destinée à certains pays qui en ont a priori le plus besoin, et que certains services, en particulier les services sociaux de base, soient financés en priorité. L'exemple que je vous donnais n'avait pas d'autre objectif que d'illustrer le fait que de nombreux projets financés par l'aide au développement française n'ont pas de raison d'être et sont rejetés par la population. Ils sont totalement incohérents par rapport à ce que nous promouvons.
En bordant l'aide apportée et en précisant dans le CPG quels sont les critères appliqués et les objets précis – les fameux indicateurs auxquels vous faites référence – , nous empêcherons que des projets de ce type soient conçus et a fortiori qu'ils aboutissent. Cela me paraît absolument essentiel : nous ne pouvons pas, d'un côté, prétendre que nous manquons de moyens pour investir dans certains pays dont nous considérons qu'ils sont des PMA, et, de l'autre, investir dans des projets qui n'ont pas lieu d'être.
Je crois qu'il y a une confusion. Si nous votons en faveur de ces amendements, d'abord nous devrions en adopter une multitude d'autres du même type, et surtout cela rigidifierait l'ensemble du dispositif. Le rapporteur l'a dit, nous avons créé des mécanismes qui nous imposent de travailler avec les partenaires locaux et les ONG. C'est la meilleure garantie de la bonne utilisation de l'aide au développement. En revanche, prétendre décider à la place de ces acteurs affaiblirait cette logique de coopération et produirait, d'ici cinq ou dix ans, des effets parfaitement contraires à ceux vous appelez de vos v? ux.
Nous avons débattu, le 26 novembre dernier, d'une proposition de résolution pour la création de la CEMER – Communauté méditerranéenne des énergies renouvelables.
Exact !
Je remercie à nouveau le secrétaire d'État pour les mots précieux qu'il a eus en commission et pour son soutien à ce texte.
Je peux le réitérer, si vous le souhaitez !
L'amendement vise à faire une piqûre de rappel et à inscrire cette résolution dans le dur de la loi. Je remercie également le rapporteur, l'ensemble de la majorité et le très grand nombre de députés qui ont soutenu dans l'hémicycle ce projet qui me tient à c? ur.
Merci pour votre ténacité, monsieur El Guerrab. La mention de la CEMER dans le texte répond à un engagement. Elle est le fruit de nos discussions. Je suis favorable à ce beau projet, qui permettra d'accélérer encore la transition écologique sur les rives de la Méditerranée. Je souhaite simplement le sous-amender en remplaçant le mot « ? uvrera » par le mot « participera ». Sous réserve de l'acceptation de cette légère modification, j'émets un avis favorable aux amendements.
C'est beau comme du Schumann.
Sourires.
Avis favorable au sous-amendement et aux amendements identiques.
Le sous-amendement no 611 est adopté.
L'amendement no 561 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Si vous le souhaitez, je peux les soutenir successivement, madame la présidente, mais ils n'ont pas vraiment le même objet.
L'amendement no 596 vise, dans la continuité de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire votée en février 2020, à indiquer dans le cadre de partenariat global que « la France veille à l'encadrement des exportations de déchets à l'étranger en cohérence avec les principes de justice environnementale et de respect des droits humains » que nous réaffirmons tout au long de ce projet de loi de programmation. La politique des déchets étant totalement absente du texte, je demande simplement à ce que, par une formulation très vague, nous ouvrions la voie à l'encadrement de pratiques qui constituent pour l'heure un angle mort des politiques publiques en matière d'exportation.
L'amendement no 597 a pour objet de prévoir un affichage des performances sociales et environnementales de l'industrie textile. Pourquoi le textile et pas toutes les autres filières auxquelles la France coopère, me demanderez-vous ? Parce que le textile est l'industrie la plus polluante au monde après l'énergie fossile : elle représente 10 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, 500 000 tonnes de microplastiques déversées dans les océans, 25 % des pesticides utilisés dans le monde – c'est très étonnant – , etc. Elle entraîne en outre des atteintes majeures aux droits humains. L'expérimentation d'un affichage social et environnemental de la filière, que nous avons évoquée par le passé et qui figurera dans le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, serait donc particulièrement bienvenue.
Les deux amendements sont donc de nature différente : le premier porte sur l'encadrement des déchets, qui présente d'énormes enjeux de pollution exportée et d'atteintes aux droits humains, tandis que le second concerne la filière textile, à propos de laquelle je rappelle que le Président de la République s'était exprimé avec beaucoup de force en marge du G7 à Biarritz.
Sur l'amendement no 596 , la commission a émis un avis défavorable. J'émets, à titre personnel, un avis favorable. Si l'on s'éloigne quelque peu de la question de la coopération, le lien existe tout de même, dans la mesure où nous menons de nombreuses actions en coopération en particulier avec l'initiative « 1 % déchets ».
Sur l'amendement no 597 , j'émets un avis défavorable.
L'amendement no 596 est adopté.
L'amendement no 597 n'est pas adopté.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l'amendement no 601 .
Il est taquin !
… puisqu'il s'agit de respecter les dispositions du règlement européen relatif aux « minerais du conflit ». Il s'agit là d'une question extrêmement grave. Ces termes désignent les terres rares et tous les métaux qui font l'objet de combats fratricides, notamment dans la région des Grands Lacs, et qui sont la cause de désordres incommensurables. Il importe de rappeler, comme nous l'avons fait pour l'ensemble des politiques extractives, que l'application de ce texte européen par la France doit être exemplaire.
Défavorable. Nous avons déjà adopté un amendement de M. Jean-François Mbaye aux termes duquel la France applique tous les règlements et conventions auxquels elle est partie. Votre demande est donc satisfaite.
L'amendement no 601 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l'amendement no 213 .
Ces dernières années, l'accent a été mis, dans les coopérations agricoles, sur les questions de sécurité alimentaire – c'est d'ailleurs heureux. Nous sommes également très fortement investis dans l'amélioration des bilans carbone des pays en voie de développement ou des pays pauvres que nous accompagnons, notamment grâce au génie du CIRAD – Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement – , de l'INRAE, l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement, et de tous les instituts de coopération mobilisés par la France. De l'avis de nombreux observateurs, la question de la biodiversité a en revanche été quelque peu négligée ces derniers temps, alors même que nous savons qu'elle est une de nos assurances vie.
L'amendement vise à souligner l'importance d'une évaluation très précise de l'incidence des projets agronomiques que nous soutenons ou dont nous sommes partenaires sur la biodiversité. J'estime que si nous ne nous appuyons pas sur ces trois piliers que sont l'alimentation, le bilan carbone et la biodiversité, nous commettrons à coup sûr des erreurs. Il s'agit donc simplement de rappeler l'orientation qui est la nôtre et d'insister sur la nécessité de mettre en ? uvre les politiques les plus tangibles possible en la matière.
L'amendement no 213 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il vise à accroître encore la mobilisation de la France en faveur du Fonds vert pour le climat, qui constitue le principal outil multilatéral de financement des politiques climatiques des pays en voie de développement. Comme l'a indiqué le Président de la République, il s'agit d'une « priorité immédiate ». Le projet de loi de programmation dispose que la France entend faire de ce fonds un outil de transformation au service des États africains et des populations les plus vulnérables. Il est donc très important qu'il soit pleinement utilisé au profit du développement solidaire et de la lutte contre les inégalités mondiales dans le domaine environnemental, mais aussi que les pays ciblés puissent se l'approprier – car, comme tout mécanisme financier, il n'est pas exempt de complexités. De la même façon, la conception et le déploiement de politiques en faveur du climat demandent une expertise technique importante.
L'amendement vise donc à ce que la France mobilise son expertise technique, à travers son agence Expertise France, au profit des États africains, afin de leur permettre de bénéficier pleinement des financements proposés par le Fonds vert. Il s'agit d'associer notre engagement multilatéral à des modalités d'action bilatérales. Il semble pertinent que l'agence Expertise France assume cette mission. Le texte accroît en effet son rôle d'acteur de la politique française d'aide publique au développement.
La mobilisation concrète du Fonds vert par cette agence pourrait s'inspirer du dispositif dit « Initiative 5 % » – devenu « Initiative » – déjà appliqué par Expertise France au profit des pays récipiendaires de financements issus du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, et qui donne de très bons résultats sur le terrain.
Merci beaucoup, chère collègue, pour votre attachement à Expertise France. Cet amendement, qui s'inspire de ce qui a été fait dans le domaine de la santé, me semble très intéressant. Avis favorable.
Je rappelle que la France finance à hauteur de 1,4 milliard d'euros le Fonds vert pour le climat, dont le directeur exécutif est un Français, le Breton Yannick Glemarec, et qui est donc entre de bonnes mains. L'adoption de votre amendement permettra de mettre en avant l'expertise de la France, notamment sur les questions d'adaptation au changement climatique, qui sont l'enjeu prioritaire pour les pays les plus vulnérables et les populations les plus fragiles.
Très favorable !
L'amendement no 26 est adopté.
Il vise à modifier l'alinéa 50 du cadre de partenariat global en insérant, après le mot « économiques », les mots « et la jouissance de tous les droits économiques qui en découle ». Il s'agit de renforcer les actions susceptibles de lever les restrictions entravant la capacité des femmes africaines à posséder et produire des ressources et à en contrôler la gestion. Dans les pays prioritaires de l'aide publique au développement, malgré leur forte présence dans les travaux de la terre et leur contribution indéniable à la lutte contre la faim et la malnutrition, les femmes sont souvent exclues de l'héritage foncier et ne détiennent presque jamais de titre de propriété sur les terres agricoles qu'elles exploitent. Or la femme africaine est l'avenir de l'Afrique.
À titre d'exemple, les femmes africaines sont à l'origine de 70 % de la production alimentaire. Elles représentent également près de la moitié de la main-d'? uvre agricole et prennent en charge 80 % à 90 % de la transformation, du stockage et du transport des aliments, ainsi que les travaux de sarclage et de désherbage. Pourtant, force est de constater qu'elles ne disposent d'aucun droit foncier. L'acquisition des droits fonciers par les femmes est au c? ur des défis de développement les plus urgents.
Je le répète : la femme africaine est l'avenir de l'Afrique. Les objectifs de développement durable des Nations unies à l'horizon 2030, conçus pour accompagner les efforts de développement, reconnaissent l'importance des droits de propriété pour les femmes, surtout en milieu rural. Ils visent notamment à faire en sorte que d'ici à 2030, les hommes et les femmes aient les mêmes droits d'accès à la propriété foncière et au contrôle des terres.
MM. Bertrand Pancher et Vincent Ledoux applaudissent.
L'amendement no 94 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je m'efforcerai d'être bref, la pertinence de ce que nous proposons me paraissant évidente. L'alinéa 50 du CPG embrasse un périmètre assez large, mais nous jugeons nécessaire de le compléter en mentionnant notamment, à la deuxième phrase, deux grands combats sur lesquels nous sommes tous réunis, sans distinction partisane : la lutte contre les mariages forcés et contre les mutilations sexuelles.
La parole est à Mme Valérie Thomas, pour soutenir l'amendement no 141 .
L'alinéa 50 s'attache à décliner l'ensemble des droits des femmes que la France s'engage à défendre. Au moment où l'on débat des violences faites aux femmes, il conviendrait d'y ajouter la protection contre les mutilations sexuelles. La France est en effet le premier pays à avoir contribué au fonds du docteur Mukwege qui vient précisément en aide aux femmes victimes de mutilations sexuelles. Il me semble important de mentionner les mutilations sexuelles à cet endroit du texte.
Il est défavorable à l'amendement no 132 au profit du no 133, qui arrivera un peu plus tard dans la discussion, et favorable au no 141.
Même avis.
L'amendement no 132 n'est pas adopté.
L'amendement no 141 est adopté.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM et sur les bancs des groupes Agir ens. et LT.
La parole est à M. Guillaume Gouffier-Cha, pour soutenir l'amendement no 417 .
Cet amendement est issu des travaux de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes de notre assemblée.
Le rapport annexé consacre la notion de « diplomatie féministe », ce qui constitue une avancée majeure que nous saluons. Il convient toutefois de rappeler que la politique extérieure féministe va au-delà de la seule diplomatie et doit bien entendu impliquer l'ensemble des composantes de la politique extérieure, en matière de défense, de relations commerciales, financières… C'est ce que cet amendement vise à préciser.
Il est défavorable. À titre personnel, cependant, j'émets un avis favorable.
L'amendement no 417 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Hubert Julien-Laferrière, pour soutenir l'amendement no 460 .
Nous discutons d'un aspect important du texte, relatif à l'égalité de genre. Cet objectif est une priorité sectorielle mais aussi transversale, commune à l'ensemble de notre aide publique au développement. Je veux saluer, d'une part, le travail mené sur cette question la semaine dernière en commission des affaires étrangères et, d'autre part, mon collègue Guillaume Gouffier-Cha pour son excellent rapport sur le projet de loi au nom de la délégation aux droits des femmes de l'Assemblée.
Nous pouvons faire mieux que ce qui est proposé dans le projet de loi. Alors que la cible européenne est bien indiquée dans le CPG, je ne comprends pas pourquoi l'objectif fixé par la France, mentionné quelques lignes plus loin, est inférieur de 10 %. Est-ce par souci de montrer que l'on est réaliste ? Pouvez-vous me donner une explication, monsieur le rapporteur ? Il m'aurait semblé préférable que nous nous alignions sur la cible européenne.
L'égalité entre les femmes et les hommes représente un engagement fort. Depuis 2017, nous nous attachons à en faire une priorité qui s'applique à toutes les actions de la France de façon transversale.
J'émettrai cependant un avis défavorable à votre amendement. La France est en effet dans une logique de mieux-disant par rapport à l'Union européenne dont l'engagement porte sur les nouveaux projets. L'ambition de notre pays est plus forte, nous avons avancé sur cette question, notamment grâce à l'engagement et aux propositions de notre collègue Mireille Clapot.
L'amendement no 460 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 562 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Cet amendement est également issu des travaux de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes.
Il vise à accroître la proportion des projets et programmes soutenus par l'AFD ayant le genre pour marqueur principal ou significatif. Le taux proposé dans la version initiale du rapport annexé, de 50 %, correspondait au niveau actuel des engagements. La commission des affaires étrangères a fixé ce taux à 75 %. Cet amendement propose de le porter à 85 %, afin qu'il soit conforme aux objectifs de l'Union européenne décrits dans le plan d'action sur l'égalité des genres et l'émancipation des femmes dans l'action extérieure 2021-2025.
La parole est à Mme Annie Chapelier, pour soutenir l'amendement no 436 .
Il serait préférable que la France s'aligne sur les objectifs de l'Union européenne. J'ajoute, comme argument en faveur de cet amendement identique, que ce taux est déjà de 85 % dans d'autres pays comme le Canada ou la Suède, régulièrement cités en exemple. On peut penser que si le Canada le peut, la France le peut aussi. Mais j'aimerais aussi le formuler de la façon suivante : si la France le veut, elle le peut. Donnons-nous en les moyens et passons à 85 %. Depuis trois ans, j'en ai très régulièrement discuté avec M. le rapporteur, auquel j'affirmais même que nous devrions aller jusqu'au bout de notre ambition et viser les 100 %.
Nous avons célébré l'an dernier les dix ans de la résolution de l'ONU relative aux femmes, à la paix et à la sécurité – même si, en raison de la pandémie, aucune célébration n'a pu avoir lieu. Nous constatons malheureusement que cette résolution est très peu suivie d'effet. Les mesures en faveur de la place des femmes, les indicateurs genrés, sont pourtant un gage de réussite de l'aide au développement.
M. Bertrand Pancher applaudit.
Il ne faut pas avoir peur d'être ambitieux. Une augmentation de 10 % pour s'aligner sur l'Union européenne, c'est peu mais cela signifie énormément.
Mêmes mouvements.
La question étant très importante, je tiens à dissiper tout malentendu. L'objectif de 75 % est déjà très ambitieux. Tous les pays de l'Union européenne ne se le sont pas fixé. Je disais tout à l'heure que cette question représentait une priorité à la fois sectorielle et transversale.
En commission nous avons fixé ce taux à 75 %, et aujourd'hui vous nous demandez de le porter à 85 %. Si nous l'avions fixé à 85 %, certains auraient peut-être demandé qu'on le porte à 95 %.
Or il faut prendre en considération la réalité. Car ces engagements doivent ensuite être mis en oeuvre par l'AFD – le CPG a bien une dimension prescriptive – et cette application peut se heurter à certains obstacles, tels que ceux qu'a évoqués M. Pancher tout à l'heure. Si vous partez d'un pourcentage de volumes d'engagements de 30 à 35 %, il n'est pas évident de passer directement à 85 %. Comme l'a dit M. le secrétaire d'État, ce n'est pas réaliste. Si nous nous alignons sur les demandes des pays, sur leurs besoins, cela poserait de réelles difficultés sur le terrain, par exemple pour les ONG, notamment les plus petites, qui devraient passer des journées à remplir des tableaux et n'auraient plus le temps de se concentrer sur leurs priorités.
Le « Manuel relatif au marqueur de la politique d'aide à l'appui de l'égalité homme-femme établi par le CAD-OCDE », le comité d'aide au développement de l'OCDE, indique que le marqueur de genre « ne permet pas et n'a pas pour finalité de mesurer les résultats ou l'impact d'un programme ou d'un projet ».
Or je crois fondamentalement que si nous prenons ces mesures, ce n'est pas pour le plaisir de remplir des tableaux mais pour qu'elles aient un effet. Vous conviendrez qu'un indicateur, tel que l'évolution du nombre de décès de femmes à la suite de violences conjugales, ne baissera pas uniquement grâce aux crédits alloués à des programmes marqués « genre » mais que cela doit aussi passer par la formation des policiers ou, par exemple, par la diffusion de téléphones d'urgence. C'est multifactoriel.
J'entends la demande d'une augmentation qui aurait une portée symbolique mais il faut faire attention à ne pas voter des mesures qui ne seraient pas applicables et qui ne permettraient pas d'améliorer l'indicateur d'impact, ce qui est pour moi l'objectif principal.
La commission est défavorable aux deux amendements.
Défavorable.
J'aimerais vous faire part d'une conversation que j'ai eue en tant que membre du conseil d'administration de l'AFD, et dont M. Berville se souvient peut-être. L'AFD devait cofinancer un projet lié à un tramway dans un pays – était-ce le Pakistan ? – où, comme l'avait alors fait remarquer un autre membre du conseil d'administration, il existait une ségrégation entre les hommes et les femmes dans les transports, certaines rames étant réservées aux premiers, d'autres aux secondes, ce qui n'est pas franchement satisfaisant en matière d'égalité entre les femmes et les hommes. Or tout le monde sait que cette égalité figure parmi les objectifs de l'AFD.
Une discussion s'est alors engagée. J'ai demandé à des membres d'ONG qui militent en faveur d'objectifs très ambitieux en matière d'égalité entre les femmes et les hommes quelle serait leur réaction face à ce type de situation : refuseraient-ils ces financements en raison de la ségrégation ou les attribueraient-ils malgré tout ? Ils m'ont répondu qu'il fallait les donner : selon eux, ce n'est pas à nous de juger ce qui se passe dans un pays entre les hommes et les femmes.
Je tenais à vous rapporter cette conversation qui, me semble-t-il, illustre la difficulté que l'on éprouve parfois lorsque l'on doit fixer des limites dans ce domaine.
La parole est à Mme Isabelle Rauch, pour soutenir l'amendement no 360 .
Cet amendement est issu des travaux de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes.
Dans sa version initiale, le rapport annexé avait fixé un objectif global de 50 % des projets et programmes soutenus par l'AFD ayant le genre pour marqueur principal ou significatif, ce qui ne permet pas de distinguer les projets ayant principalement le genre comme marqueur – ceux notés 2 par le comité d'aide au développement de l'OCDE. La commission des affaires étrangères a complété cette disposition afin de prévoir qu'un socle minimal de 20 % de projets ou programmes aurait le genre comme marqueur principal. Cet amendement propose de porter ce socle à 30 %.
L'amendement no 360 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Rodrigue Kokouendo, pour soutenir l'amendement no 407 .
Cet amendement fait suite à certains faits que nous avons pu constater lors de nos déplacements à l'étranger, notamment au Niger.
La difficulté d'accès de toutes les femmes aux protections hygiéniques de qualité constitue un obstacle de taille au développement, à l'autonomisation des femmes et par conséquent à l'égalité entre les femmes et les hommes. Elle peut provoquer des problèmes de santé, nuire à la scolarisation des filles ainsi qu'au travail des femmes.
Le problème de la précarité menstruelle, mis en avant par le rapport de la sénatrice Patricia Schillinger en 2019, lui-même enrichi par un rapport d'information des députées Laëtitia Romeiro Dias et Bénédicte Taurine en février 2020, est une priorité du Gouvernement qui, à la suite d'expérimentations conduites l'année dernière, a décidé d'augmenter le budget consacré à la lutte contre la précarité menstruelle en le portant à 5 millions d'euros en 2021. Il convient d'intégrer la même ambition dans les objectifs de la politique française de développement.
L'amendement no 407 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il vise à mentionner explicitement la lutte contre les mutilations sexuelles à la dernière phrase de l'alinéa 52.
L'amendement no 133 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
Le fonds français Muskoka est un programme crucial pour l'accès aux droits de la santé sexuelle et reproductive, en particulier des adolescents, mais il paraît également important de rappeler qu'il a pour objectif la réduction de la mortalité maternelle, néonatale et infantile. Tel est l'objet de cet amendement.
Sagesse.
L'amendement no 79 est adopté.
La parole est à Mme Florence Provendier, pour soutenir l'amendement no 75 .
Cet amendement de mon collègue Jean-François Eliaou vise à compléter la quatrième phrase de l'alinéa 55 par les mots « et les structures dédiées à la protection de l'enfance ».
En effet, les structures dédiées à la protection de l'enfance, comme les orphelinats et les foyers, constituent le dernier rempart de l'enfance en danger. Lors de crises humanitaires – tsunamis, tremblements de terre – , politiques, sociales et sécuritaires, ces lieux doivent être préservés. Cet amendement entend ainsi souligner l'attachement de la France à la protection des plus vulnérables.
L'amendement no 75 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Jean-Paul Lecoq, pour soutenir l'amendement no 256 .
Sourires
Par cet amendement nous proposons de substituer, à la dernière phrase de l'alinéa 55, aux mots « reconnaît le lien étroit entre sécurité et développement », les mots « promeut l'avènement de sociétés pacifiques et ouvertes à tous aux fins de développement durable, qui vise à assurer l'accès de tous à la justice, et à mettre en place, à tous les niveaux, des institutions efficaces, responsables et ouvertes à tous ».
Cette rédaction n'émane pas de notre groupe, mais de l'ODD 16. Puisque vous y faites référence dans le CPG, en notant qu'il « reconnaît le lien étroit entre sécurité et développement », nous vous invitons à reprendre cette rédaction, ce qui permettra de rappeler les objectifs et les principes fondamentaux de l'aide publique au développement.
Malheureusement, cher collègue, à un moment, les séries s'arrêtent ! Avis défavorable.
Sourires.
Eh oui, c'est comme au football ! Avis défavorable.
L'amendement no 256 n'est pas adopté.
Cet amendement vise à rappeler le rôle majeur que joue le Programme des Nations unies pour le développement, pour la promotion de la paix, pour la stabilité et une gouvernance efficace dans le cadre du traitement des fragilités et des crises.
L'amendement no 563 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme Florence Provendier, pour soutenir l'amendement no 593 .
Il vise à insérer l'alinéa suivant après l'alinéa 55 : « Pour lutter contre le triptyque fragilité-conflit-violence, la France agit pour promouvoir la réalisation, en particulier, de la cible 2 de l'ODD 16 qui tend à mettre un terme à la maltraitance, à l'exploitation et à la traite, et à toutes les formes de violence et de torture dont sont victimes les enfants. [… ] ».
Selon les Nations unies, un enfant sur deux dans le monde est victime d'actes de violence physique, sexuelle ou psychologique qui entraînent des traumatismes, des handicaps, voire la mort. D'après les chiffres de l'UNICEF, le Fonds des Nations unies pour l'enfance, il y a aujourd'hui environ 200 millions de femmes excisées dans le monde, dont un peu moins d'un quart de jeunes filles de moins de 15 ans, soit 44 millions – ce n'est pas vraiment l'objet du texte, mais j'indique qu'il y aurait en France plus de 60 000 femmes excisées.
Les violences faites aux enfants, c'est aussi les 250 millions d'enfants sans certificat de naissance dont nous parlons depuis ce matin, et qui, sans identité, sont des victimes absolues, la cible de toutes les formes de violence, et encore 12 millions de filles mineures mariées de force chaque année dans le monde, mais également, au Moyen-Orient, 15 millions d'enfants directement affectées par les combats, sans parler des enfants recrutés dans les conflits armés et ceux vendus pour la prostitution. D'où cet amendement.
Mme Aina Kuric applaudit.
Je partage tout ce que vous venez d'exprimer brillamment, ma chère collègue mais, sur la forme, l'insertion de l'alinéa que vous proposez après l'alinéa 55 pose problème, surtout, sur le fond, il est déjà satisfait par d'autres alinéas. Même si tout ce que vous dites sur le triptyque fragilité-conflit-violence sera bien évidemment intégré dans les priorités de l'aide publique au développement, l'avis est donc défavorable.
Même avis.
Je suis pour ma part complètement d'accord avec l'amendement, mais j'ai tout de même une question : concrètement, que doit-on faire ? On sait qu'il y a des pays où les enfants sont vendus pour être prostitués. On a bien vu à Madagascar, quand nous nous y sommes rendus, monsieur le rapporteur, que des vieux s'y rendent pour consommer des enfants. C'est bien de promouvoir les droits des enfants, mais devons-nous conditionner le maintien de nos aides aux efforts des pays en la matière ? Comment réagir s'ils ne font rien ? On est aujourd'hui confronté à une impasse. Il ne suffit pas de parler du sujet entre nous en approuvant les uns et les autres nos propos respectifs, car on voit bien que les choses n'avancent pas vraiment localement.
J'entends que la rédaction est imparfaite, mais l'avantage du point 16. 2 des ODD, c'est qu'il couvre le spectre de tout ce qu'on dénonce depuis ce matin, des enfants fantômes jusqu'aux mutilations génitales, en passant par les enfants soldats, les mariages forcés, etc. Je regrette vraiment que l'amendement ne soit pas rédigé comme il le faudrait, mais introduire la cible 2 de l'ODD 16 dans le CPG nous permettrait d'aborder l'ensemble des situations où les enfants sont des victimes.
L'amendement no 593 n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Paul Lecoq, pour soutenir l'amendement no 257 .
Cet amendement propose de supprimer l'alinéa 56 car ce paragraphe valorise l'idée du continuum entre sécurité et développement que nous ne considérons pas comme un concept à valoriser dans notre aide publique au développement, je l'ai déjà dit dans la discussion générale. Nous ne pouvons pas laisser écrire ici que la France s'efforce de coordonner l'ensemble des acteurs dans le domaine de la sécurité.
Cet alinéa alambiqué propose de recentrer les missions des acteurs internationaux de la stabilisation, du développement, de l'humanitaire et de la sécurité pour que chacun agisse sur place dans le but de résoudre les problèmes de crise. Cela peut se comprendre pour les humanitaires et les acteurs du développement, encore qu'ils savent bien mieux ce qu'il y a à faire sur le terrain que nous-mêmes, le rapporteur le dit lui-même. Qu'un paragraphe pour demander aux acteurs de faire ce qu'ils savent faire n'est pas davantage intéressant. Mais que font les acteurs de la sécurité dans un texte sur la réduction des inégalités mondiales et sur l'aide publique au développement ? La question se pose d'autant plus qu'à terme, rien ne garantit que les interventions militaires ou les sociétés privées de sécurité n'entreront pas un jour dans le chiffrage de l'aide publique au développement et qu'à l'inverse, on n'enverra plus des acteurs de la solidarité internationale dans les guerres françaises que pour faire passer la pilule aux populations locales d'une présence militaire étrangère sur leur territoire.
L'amendement no 257 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement vise à affirmer la nécessité du renforcement du respect des principes guidant l'action humanitaire et la gestion des crises en ce domaine.
L'amendement no 167 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 564 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Jean François Mbaye, pour soutenir l'amendement no 589 .
Il vise à compléter l'alinéa 56 en précisant que, dans la mesure du possible, les populations sont activement associées à l'élaboration et au déploiement des initiatives qui sont entreprises à leur bénéfice. En effet, comme il s'agit dans cet alinéa d'optimiser la coordination et plus largement l'action en faveur de la résolution des crises, il me paraît important que la coopération des populations bénéficiaires de l'aide humanitaire soit un prérequis indispensable pour mener des actions en la matière.
L'amendement no 589 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
Mon amendement sur l'approche territoriale intégrée répond, je le crois, précisément à la fausse question soulevée par notre collègue Jean-Paul Lecoq.
Je vous rappelle, mon cher collègue, qu'il y a quinze ans, tous les bailleurs de fonds auraient déserté le Mali en disant : « La sécurité n'est pas assurée, nous ne pouvons pas exposer les hommes ; contentons-nous donc de faire un petit peu d'aide humanitaire mais pour le reste, abandonnons le terrain. » Depuis dix ans, le paradigme a changé et on estime que, même dans ces territoires, il faut faire tous les efforts pour rétablir les services sociaux de base auprès des populations, ce qui suppose évidemment de répondre à un enjeu de sécurité qui ne peut que s'inscrire dans la continuité entre sécurité et développement. Mais il faut alors faire un peu la révolution en matière de développement en oubliant les projets classiques qui prennent des années et qui sont complexes à mener, de même que les opérations sectorielles avec par exemple la santé d'un côté et l'éducation de l'autre, et prendre en considération sur le territoire l'ensemble des problématiques et des besoins immédiats des populations pour leur permettre de résister et de rester sur place. Cette approche territoriale intégrée a été à nouveau annoncée comme un enjeu principal dans la zone du Sahel à l'occasion du sommet de N'Djamena il y a quelques jours.
Je remercie M. Jacques Maire d'avoir accepté de retravailler son amendement avec nous, ce qui permet à la commission d'émettre un avis favorable.
L'amendement no 510 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
M. le rapporteur applaudit.
La parole est à Mme Isabelle Rauch, pour soutenir l'amendement no 365 .
Cet amendement, issu des travaux de la délégation aux droits des femmes, vise à mentionner, dans le cadre général orientant la politique française de développement solidaire et de lutte contre les inégalités mondiales, l'impact sur la situation des femmes de la crise liée au covid-19.
L'amendement no 365 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
L'amendement no 134 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Le ministère de l'Europe et des affaires étrangères rappelle que l'approche fondée sur les droits vise à rendre les bénéficiaires de la coopération au développement acteurs et actrices de leur propre développement afin de s'assurer qu'il soit véritablement durable, dans la logique du principe onusien de l'Agenda 2030 de « ne laisser personne de côté ». Alors que ce principe est absent du texte dont nous débattons, le Conseil économique, social et environnemental a rappelé dans son avis sur le projet de loi de programmation rendu en février 2020 que : « Le développement solidaire doit respecter le principe transversal de ne laisser personne de côté, à commencer par les publics les plus vulnérables, au premier rang desquels les enfants ».
Ainsi, notre amendement vise à faire reconnaître les populations bénéficiaires, en particulier les femmes et les enfants, comme des acteurs à part entière de la résilience, de l'instauration d'une paix durable et des dynamiques de transformation sociale en encourageant leur participation systématique à l'élaboration, à la mise en oeuvre et au suivi des programmes et des politiques publiques les concernant.
Je les retire et j'émets un avis défavorable à l'amendement parce qu'il est satisfait par celui de M. Jean-François Mbaye.
Même avis.
Pourrais-je avoir une explication, monsieur le rapporteur ? Vous aviez sous-amendé mon amendement à deux reprises et maintenant vous retirez vos sous-amendements en donnant un avis défavorable. Cela mérite bien tout de même une explication.
Votre amendement est satisfait, comme mes sous-amendements, par l'amendement no 589 de M. Jean-François Mbaye que nous venons d'adopter à l'alinéa 56. Ils ne sont plus pertinents.
L'amendement no 424 n'est pas adopté.
Il s'agit de mettre en avant un sujet sur lequel la France a toujours été en pointe, en particulier lors de l'adoption de plusieurs résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies, à savoir les enfants soldats. Le groupe Dem propose donc d'insérer à l'alinéa 57 la phrase suivante : « La France attache une attention particulière au sort des enfants dans les conflits armés, notamment en lien avec les résolutions 1539 et 1612 adoptées au Conseil de sécurité de l'ONU. » Ce serait la poursuite d'un engagement pionnier de la France.
L'amendement no 135 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Sourires.
J'ai déposé cet amendement identique à celui de mon collègue pour que nous puissions ensemble défendre l'idée de l'importance de la préservation de l'espace humanitaire ; lui l'a déposé parce qu'il est l'un des deux auteurs du rapport d'information sur le droit international humanitaire à l'épreuve des conflits, et moi au nom de l'autre auteur de ce rapport, mon excellent collègue Moetai Brotherson.
La présence de l'espace humanitaire est une problématique parfaitement perçue par tous les acteurs du monde de l'humanitaire et également au plus haut niveau politique puisque le Président de la République a indiqué être préoccupé par les menaces qui portent sur l'espace humanitaire. La conférence nationale humanitaire de décembre 2020 a également rappelé cet enjeu. Par conséquent, ce sujet est parfaitement défini et il semble important de démontrer que nous sommes également conscients, les uns et les autres, de son importance en invitant dans ce projet de loi la France à préserver avec beaucoup d'énergie l'espace humanitaire. Je pense d'ailleurs que la commission des affaires étrangères ayant dans sa totalité voté le rapport de mes deux collègues, l'adoption de leurs amendements identiques ne posera pas de problème.
Même avis. L'esprit de ces amendements est satisfait par ceux, relatifs à l'espace humanitaires, que vous avez adopté à l'article 1er A.
La commission a enrichi le volet prévention et traitement des crises en rappelant, à l'initiative de notre collègue Jean-François Mbaye, l'attachement de notre pays au principe de non-discrimination des populations bénéficiaires de notre assistance humanitaire, ce qui exclut notamment le criblage.
Je propose d'ajouter une précision supplémentaire, pour mieux cerner encore la spécificité des situations de conflit armé, termes qui n'apparaissent pas dans le texte adopté par la commission. Or les obligations impératives du droit international humanitaire établies par les conventions de Genève exigent, en cas de conflit armé, de faciliter les activités des organisations humanitaires impartiales, indépendantes et neutres – au premier chef le CICR – pour l'accès aux prisonniers, l'identification des disparus et l'assistance aux populations.
La France intervient dans des zones géographiques où le CICR est fortement présent et elle respecte et promeut le droit international humanitaire. Il me semble donc important de le rappeler dans ce texte qui présente la stratégie de la France en matière de prévention et de sortie de crise. Ce rappel n'est pas inutile : dans certaines situations, la mise en oeuvre des sanctions prises à l'encontre des acteurs impliqués dans les conflits armés risque de méconnaître des obligations du droit humanitaire international, ce qui constitue des obstacles à l'activité des organisations humanitaires et fragilise directement les populations civiles qui ont besoin d'une assistance humanitaire.
L'amendement no 60 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Les amendements nos 259 de M. Jean-Paul Lecoq et 17 de M. Marc Le Fur sont défendus.
Je vais laisser le soin à ma collègue Aina Kuric, qui a déposé un amendement similaire au mien, de présenter le sien. Ils abordent un sujet sur lequel elle a beaucoup travaillé dans le cadre de son rapport d'information. Je préfère donc que ce soit elle qui intervienne. Mon amendement est défendu.
M. Vincent Ledoux applaudit.
Merci, chère collègue de votre attention. Il s'agit de préciser que l'action de la France en matière de défense des droits humains passe par le fait de garantir aux populations l'accès à un état civil fiable, ce qui suppose une approche plus précise de la problématique de l'enregistrement des naissances. Ainsi que nous l'avions expliqué dans notre rapport d'information remis en septembre dernier sur les enfants sans identité, un état civil fiable contribue à ce que les enfants soient moins exposés à la traite d'êtres humains – notre collègue Florence Provendier l'a évoqué dans un de ses amendements – ou au risque d'enrôlement dans les conflits armés, comme le précisait l'un des amendements de Mme Perrine Goulet du groupe Dem. Il s'agit donc de garantir une action forte et concrète de la France.
Nous en venons à no 188 sur lequel je suis saisie par le groupe Socialistes et apparentés d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à Mme Laurence Dumont, pour soutenir l'amendement.
Un amendement adopté en commission a permis de compléter la première phrase de l'alinéa 61 du CPG par les mots « au premier rang desquels figure l'identité juridique, réalisable, notamment, via un état civil fiable ». Il s'agit de préciser cette rédaction, car le ministre de l'Europe et des affaires étrangères avait indiqué en commission que ce sujet ne pouvait figurer en dur dans la loi, et qu'il faudrait un article descriptif et prescriptif sur le droit à l'identité. Nous nous y sommes donc employés.
Le texte de notre amendement est un peu long puisque les deux premières phrases que nous proposons d'introduire à l'alinéa 61 décrivent une situation que désormais tout le monde connaît bien. Viennent ensuite des préconisations, parmi lesquelles figurent la promotion de l'enregistrement des naissances, l'accompagnement de la création d'états civils fiables et la mobilisation de notre réseau diplomatique. Beaucoup d'éléments sont repris du rapport d'information que Aina Kuric et moi avons rédigé, comme l'importance de la coopération décentralisée sur ce sujet et de l'investissement de la France au niveau multilatéral, notamment par un soutien renforcé aux organisations internationales en charge du plaidoyer sur l'état civil et, on y reviendra, une participation volontaire au groupe de travail de l'ONU pour l'agenda sur l'identité juridique.
Il faut bien comprendre que les enfants sans identité sont les cibles privilégiées de tous les maux qui existent sur la planète. Tous les amendements déjà adoptés en commission sur la lutte contre le travail forcé, la traite d'êtres humains, etc. fixent des objectifs qui resteront inopérants si l'existence légale des enfants n'est pas assurée.
Nous ne l'avons pas évoqué du tout depuis ce matin, mais beaucoup d'adultes sont également concernés : la Banque mondiale estime qu'un milliard de personnes ne disposent pas d'un document permettant de prouver leur identité, ce qui a de nombreuses conséquences.
Je crois que cet amendement répond à la demande formulée par le ministre en commission la semaine dernière ; j'espère que nous serons entendus.
Mme Aina Kuric applaudit.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
Merci beaucoup pour vos interventions qui portent – nous l'avons évoqué ce matin – sur un sujet important. Il s'agit de donner à des enfants à la fois une identité et une existence, ce qui leur permet d'accéder à un certain nombre de droits ; c'est donc un des enjeux prioritaires en matière de droits humains et de droits des enfants.
Je donne un avis défavorable à l'amendement no 578 de Mme Thomas et un avis favorable à l'amendement no 55 de Mme Kuric qui s'inscrit dans la droite ligne de nos discussions en commission. Chacun pourra relire le compte rendu des travaux de la commission : d'une part, nous voulions rappeler, dans la partie du CPG relative à l'approche fondée sur les droits humains, que la capacité à donner une identité juridique aux enfants en constitue un élément essentiel ; d'autre part, nous souhaitions que, dans la partie du CPG relative à la gouvernance comme priorité sectorielle, la question des enfants sans identité soit davantage détaillée.
Sur ce second point, madame Dumont, vous avez parfaitement accompli le travail, mais nous pensons qu'il faut introduire les dispositions de votre amendement ultérieurement, et non à l'alinéa 61. C'est la raison pour laquelle je suis défavorable à l'amendement no 188 , alors que je serai favorable à votre amendement n° 189 après l'alinéa 97.
Même avis que la commission.
Monsieur le rapporteur, nous aurions souhaité que ces dispositions figurent dans les priorités transversales, mais si vous préférez les mentionner dans les priorités sectorielles, cela ne pose pas de problème. Si j'ai l'assurance que les avis de la commission et du Gouvernement seront favorables à l'amendement n° 189 , je retire l'amendement n° 188 en me réjouissant que l'amendement de Mme Kuric recueille un avis favorable.
J'en prends l'engagement. En fait, votre demande est en partie satisfaite, même si l'amendement de Mme Kuric n'est pas aussi détaillé que le vôtre : la précision apportée concernant les droits humains permet de rappeler que la question des enfants sans identité est une priorité transversale. Un peu plus loin dans le texte, votre amendement no 189 exposera de manière beaucoup plus détaillée les priorités en matière de gouvernance.
Madame Thomas, Mme Dumont retire son amendement, maintenez-vous le vôtre.
L'amendement no 55 est adopté.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Agir ens.
La parole est à Mme Isabelle Rauch, pour soutenir l'amendement no 374 .
Cet amendement, à nouveau issu des travaux de la délégation aux droits des femmes, rappelle l'attachement de la France à l'interruption volontaire de grossesse qu'elle reconnaît comme un droit fondamental.
L'amendement no 374 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
Il s'agit de compléter la priorité transversale relative au respect des droits humains en mentionnant notamment l'accès à l'éducation et à la culture, ainsi que le caractère inacceptable de l'extrême pauvreté, considérée comme une grave violation des droits humains. La responsabilité en matière sociale et environnementale est également abordée.
L'amendement no 168 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l'amendement no 574 .
Si vous le permettez, je défendrai également l'amendement n° 575 que vous alliez appeler immédiatement après celui-là : il introduit seulement une variante dans la rédaction.
En commission, l'avis était favorable. J'ai simplement voulu proposer une rédaction plus conforme aux textes de l'ONU et qui rende hommage à Ressources humaines sans frontières, ONG qui travaille activement à la participation de la France à l'Alliance 8. 7, partenariat mondial qui lutte contre la traite des êtres humains, l'esclavage moderne et le travail des enfants, en conformité avec le point 7 de l'ODD 8.
Pour s'engager encore plus fermement dans ce domaine, la France s'est portée candidate pour faire figure de pays pionnier et les déclarations qui ont déjà été faites vont se concrétiser par un comité interministériel. Cette initiative du Président de la République honore la France et relie les combats pour la maison commune, l'environnement, et la dignité humaine. Comme j'ai pu l'indiquer dans une question au Gouvernement adressée à M. Jean-Yves Le Drian, 152 millions d'enfants dans le monde sont aux champs ou à l'usine au lieu d'être à l'école : c'est non seulement indigne, mais c'est aussi une perte pour l'ensemble de l'humanité. C'est une chance que la France s'engage en ce sens. J'ai rencontré la déléguée interministérielle de l'Organisation internationale du travail en charge de ce dossier et discuté de ce qui est en train de se préparer. Cela ne pouvait pas être absent du texte, et il fallait que ce soit bien rédigé.
Je propose deux rédactions : celle de l'amendement no 574 fait référence aux ODD sans citer l'Alliance 8. 7, contrairement à celle de l'amendement no 575 . Je laisse le rapporteur choisir la meilleure version, mais je rappelle qu'il s'agit uniquement d'un effort de rédaction concernant un accord politique qui avait suscité l'adhésion de tous.
J'y suis très favorable. Je sais votre engagement dans ce combat qui n'est pas suffisamment mis en lumière. Pour tenir l'objectif de 2030, il est crucial d'éradiquer le travail forcé et l'esclavage moderne dans la décennie à venir. C'est tout simplement insupportable de constater que le travail forcé est utilisé pour fabriquer nos téléphones portables, nos ordinateurs, nos vêtements. Cela devrait nous révolter tous les jours. Il y a sans doute besoin d'une campagne politique pour ne pas s'habituer aux images que l'on voit trop souvent.
Avis très favorable.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 59
Nombre de suffrages exprimés 59
Majorité absolue 30
Pour l'adoption 59
Contre 0
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et SOC.
La parole est à M. Jean-Paul Lecoq, pour soutenir l'amendement no 260 .
Je vous propose de compléter l'alinéa 61 par les phrases suivantes : « Afin de prévenir les conflits, la France s'engage plus fermement pour respecter et faire respecter le droit international humanitaire, et à créer un statut international du personnel humanitaire. Elle s'engage également à tenir une position constructive pour mettre fin aux conflits gelés. Enfin, elle montre un engagement infaillible à mettre en place l'autodétermination des peuples. »
Il existe un lien intime entre demande d'application du droit international humanitaire et son respect. Travailler à un statut international du personnel humanitaire des conflits gelés est important. Par exemple, selon le droit international, le Sahara occidental est occupé par le Maroc, comme l'indique la résolution 3437 de l'Assemblée générale des Nations unies de 1979 et toutes les suivantes. Juridiquement, le cessez-le-feu de 1991 ne permet pas de lever la question de l'occupation, dans la mesure où l'article 2, commun aux conventions de Genève de 1949, indique que « la Convention s'appliquera également dans tous les cas d'occupation de tout ou partie du territoire d'une haute partie contractante, même si cette occupation ne rencontre aucune résistance militaire », d'autant plus que le Front Polisario et le Maroc sont tous deux signataires des conventions.
La situation justifierait donc l'application de ce droit et l'intervention du Comité international de la Croix-Rouge, mais celui-ci semble refuser d'intervenir, délaissant une situation qui se complexifie depuis la rupture du cessez-le-feu du 13 novembre dernier. Son intervention permettrait pourtant d'apaiser la situation, dont se sont alarmées plusieurs ONG, dont Amnesty International.
Vu la gravité de la situation, cet amendement permettrait de redonner un cap pacifiste à la France.
L'amendement no 260 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Paul Lecoq, pour soutenir l'amendement no 220 .
Comme l'indique un rapport de nos anciens collègues Pierre Lellouche et Karine Berger, consacré, en 2016, à l'extraterritorialité de la législation américaine, cette question est au c? ur de la mondialisation telle qu'elle se construit, surtout parce que le dollar, qui circule aujourd'hui partout dans le monde, appartient à un État qui peut intervenir sur sa monnaie et l'utiliser comme outil politique. Un président américain a d'ailleurs déclaré que le dollar était « notre monnaie, votre problème ».
Le renforcement de l'embargo américain contre l'Iran a fait chuter les investissements français dans ce pays, et le mécanisme d'échanges qui devait être mis en place semble totalement inopérant. Il en est de même à Cuba : les entreprises non américaines qui y investissent peuvent être poursuivies alors même que l'embargo n'a pas été décidé par leur État de « rattachement ». La France gagnerait donc à s'engager au niveau international afin que l'extraterritorialité des lois et des sanctions américaines ne s'applique pas, ou au moins qu'elle ne s'applique pas au secteur de l'action humanitaire et du développement. Empêcher les ONG françaises d'intervenir à Cuba, en Iran ou ailleurs pose un problème d'égalité, et les populations fragiles n'iront pas manifester dans leurs capitales pour renverser les régimes en place, comme l'espèrent les Américains. Je pense donc qu'il faut insister sur ce point pour permettre au secteur de l'action humanitaire de défendre la valeur de neutralité afin de promouvoir un développement efficace partout dans le monde.
À plusieurs reprises, en commission comme en séance, nous avons affirmé qu'il ne faut pas choisir entre telle ou telle population : toutes ont le droit à l'aide publique au développement. Passons des discours aux actes ; tel est l'objet de cet amendement.
Sur ce sujet, la France est particulièrement active, notamment en matière de politique commerciale ; rappelons le règlement européen de 1996. Cette disposition n'a guère sa place à un tel endroit du texte. Avis défavorable.
Permettez-moi de revenir un instant sur l'amendement précédent.
J'ai eu la chance d'effectuer une excellente mission d'information avec Moetai Brotherson au cours de laquelle nous avons abordé la question des conflits gelés. J'espère avoir l'oreille attentive du président de la commission des affaires étrangères en rappelant que nous avons demandé à poursuivre nos travaux.
Très pertinent, l'amendement no 220 de M. Lecoq faisait écho à la douzième recommandation de notre rapport de mission, dans lequel nous recommandions que la France promeuve le renforcement de la protection du personnel humanitaire dans les zones de crise. Les événements survenus au Niger au mois d'août en ont illustré l'importance.
Quoi qu'il en soit, je tenais à saluer l'engagement de M. Brotherson – M. Lecoq lui en fera part – avec lequel nous avons produit ce travail conséquent.
Ça n'a pas convaincu le Gouvernement. Dommage ! Il aurait fallu qu'un membre de la majorité fasse partie des signataires du rapport !
L'amendement no 220 n'est pas adopté.
Cet amendement a été suggéré par le CCFD-Terre solidaire et d'autres ONG membres du réseau Coordination SUD. Il soulève la question, à laquelle ATD Quart Monde nous a sensibilisés, des discriminations à l'égard des personnes en situation de vulnérabilité qui pourraient être laissées de côté et de leur caractère intersectionnel – une expression quelque peu « techno » à laquelle il faut donner de la chair et de l'humanité. Elle renvoie à un principe onusien selon lequel il est reconnu qu'une même catégorie de personnes peut subir plusieurs discriminations et qu'il faut favoriser leur participation effective à la société, car elles sont traditionnellement les plus exclues.
Concrètement, on peut être exclu parce qu'on est une femme, pour son orientation sexuelle, pour son appartenance religieuse, en raison d'un handicap ou parce qu'on est pauvre. Or toutes ces raisons peuvent s'additionner. Les ONG, en particulier celles qui, comme ATD Quart Monde, travaillent au plus près des personnes les plus exclues, nous alertent sur le risque que ces dernières cumulent les exclusions au point de ne plus entrer dans aucune des catégories existantes.
De ce point de vue, mon plaidoyer va dans le même sens que celui du rapporteur en faveur d'une approche holistique. À force de compartimenter, on risque de passer à côté du problème concret qu'il fallait initialement résoudre. Il est essentiel de tenir compte de l'intersectionnalité des facteurs : on peut être dix fois pauvre pour dix raisons différentes. Loin d'être anecdotique, cette question est très sensible ; en y faisant référence, la loi éclairera tous ceux qui, sur le terrain, luttent contre l'exclusion et contre la pauvreté.
La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l'amendement no 377 .
La politique dont nous débattons vise les plus fragiles. Pour les atteindre, il faut évidemment qu'ils soient associés aux décisions prises, notamment dans les pays les plus vulnérables. C'est la raison de cet amendement fondé sur les droits humains et sur les droits de l'enfant, qui prône la participation des plus fragiles à la mise en ? uvre d'une politique de développement ; c'est le gage de son efficacité.
L'amendement no 400 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il vise simplement à rappeler que la crise sanitaire liée à la propagation du covid-19 est survenue dans un monde où la moitié de la population était déjà privée d'accès aux services de santé de base. La pandémie, qui a entraîné un recul drastique de ces services, exige que des efforts supplémentaires soient déployés pour répondre aux besoins urgents et croissants dans ce secteur essentiel.
La parole est à M. Hubert Julien-Laferrière, pour soutenir l'amendement no 461 .
En effet, il s'agit d'une priorité sectorielle essentielle. Rappelons que le CICID a défini cinq priorités sectorielles dans le sillage de la volonté qu'avait exprimée le Président de la République devant la communauté internationale. Or dans la période actuelle, le texte dont nous débattons rencontre un écho particulier ; il est donc justifié d'y faire état de cette priorité sans pour autant le rendre bavard. M. Pancher vient de le dire : en matière de santé, les besoins ont bondi alors que la moitié de la population mondiale n'avait déjà pas accès aux services de santé. Il nous semble opportun de le rappeler à cet endroit du CPG.
Défavorable. Ils sont pleinement satisfaits : la crise du covid-19 est citée dès le préambule du CPG – c'est encore mieux que dans le corps du texte.
La santé étant l'une des cinq priorités définies par le CICID, la France devrait suivre les recommandations de la commission macroéconomie et santé de l'OMS et y consacrer 0,1 % de son revenu national brut en 2022, soit 15 % du montant total de l'aide publique au développement, sous forme de dons.
Il vise à ce qu'une part plus importante de l'aide française soit consacrée au secteur de la santé. La France fait déjà beaucoup mais, compte tenu de la situation sanitaire, elle doit faire davantage. Bien qu'il figure parmi les cinq priorités définies par le CICID, le secteur de la santé ne fait l'objet dans le projet de loi de programmation d'aucune indication chiffrée concernant la part de financement qui lui est consacrée. L'amendement vise à y remédier.
La parole est à M. Hubert Julien-Laferrière, pour soutenir l'amendement no 462 .
Il faut en effet fixer des objectifs cohérents avec la recommandation de l'OMS de consacrer 0,1 % du revenu national brut à l'aide publique au développement du secteur de la santé, soit environ 15 % de l'aide octroyée sous forme de dons en 2022. Cette part est de 10 %, mais même si elle était déjà de 15 %, pourquoi ne pas inscrire cette priorité dans la loi, étant entendu qu'elle fait sans doute l'unanimité parmi nous ?
J'ajoute que j'approuve tout à fait la remarque du rapporteur selon laquelle nous devons avoir une vision intégrée des incidences de l'aide que nous apportons. Le financement d'un réseau de bus permettant d'accéder à une école, par exemple, n'est pas comptabilisé dans les dépenses consenties dans le secteur éducatif. De même, comme je le dis depuis vingt ans, les dépenses consacrées à des travaux d'assainissement ou d'accès à l'eau potable ont une incidence sur la lutte contre le paludisme, donc sur la santé ; elles ne sont pourtant pas comptabilisées au titre des dépenses de santé, comme le serait le financement de la construction d'un hôpital. J'attends donc avec impatience que nous puissions mesurer les effets réels de l'aide.
En attendant, qui peut le plus peut le moins : consacrons 15 % de l'aide publique au secteur de la santé. Si nous améliorons davantage la situation sanitaire grâce aux financements accordés dans le domaine de l'assainissement et de l'accès à l'eau, ce sera encore mieux !
La parole est à Mme Valérie Thomas, pour soutenir l'amendement no 140 .
Cet amendement va dans le même sens que les précédents : il vise à insérer dans le texte les préconisations de l'OMS. Néanmoins, je propose de n'inscrire ni chiffres ni dates. Dans cette période d'incertitude sanitaire nouvelle, cela ne me semblerait pas judicieux.
Dans cette période de pandémie, c'est un sujet très important. J'émets un avis défavorable aux trois premiers amendements au profit de l'amendement no 140 , qui est rédigé dans le même esprit mais ne fixe aucun pourcentage. Fixons un objectif, suivons les recommandations de l'OMS et tenons compte de la dimension multisectorielle de l'aide publique. Si nous atteignons ou dépassons l'objectif, c'est encore bien mieux ! Il faut néanmoins laisser la porte ouverte à l'imprévu qui, au reste, se produit presque chaque année.
Même avis défavorable sur les trois premiers amendements au profit de l'amendement no 140 .
L'amendement no 379 n'est pas adopté.
L'amendement no 140 est adopté.
L'amendement no 95 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
À cette heure, il nous reste 280 amendements à examiner. Les séances de samedi n'étant pas ouvertes, il n'est pas certain que nous parviendrons à achever l'examen du texte cette nuit.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures :
Suite de la discussion du projet de loi de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales.
La séance est levée.
La séance est levée à dix-neuf heures trente.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Serge Ezdra