Je voudrais en premier lieu saluer le travail de grande qualité conduit par les équipes de l'administration, sous la direction de M. Bruno Parent, directeur général des finances publiques, et Mme Véronique Bied-Charreton, directrice de la législation fiscale. Je tiens également à saluer le travail de notre ancienne rapporteure générale Valérie Rabault et de notre collègue Marc Le Fur, qui ont sensiblement amélioré le texte. Je n'oublie pas enfin Marie-Christine Dalloz qui, grâce à l'un de ses amendements qui modifiait radicalement l'ensemble du dispositif, a réussi à nous faire gagner vingt-quatre heures... Malgré son amélioration, le texte présente ...
Véronique Louwagie complétera mon propos, qui, je vous rassure, sera très court.
Je veux d'abord remercier la Cour des comptes, qui a rendu un rapport tout à fait remarquable, extrêmement utile en ce début de législature. La Cour des comptes est tout à fait dans son rôle en posant la question de la sincérité des comptes publics, de même que le Conseil constitutionnel. L'opposition a saisi le Conseil constitutionnel au mois de décembre dernier à propos de la loi de finances initiales pour 2017. Notre saisine posait, entre autres, la question de la sincérité des prévisions de recettes et de dépenses. La Cour des comptes insiste sur un élément nouveau, qu'a souligné le président de notre commission : la question de la sincérité porte sur ...
On peut même continuer de le faire au bout de cinq ans...
C'est précisément l'objet de l'amendement. Nous ne parlons pas des aléas, mais des « sous-budgétisations manifestes ». Ce faisant, nous avons voulu cerner un problème spécifique.
Je partage ce qu'ont dit M. Sapin et M. Eckert sur les deux exercices 2017 et 2018. À mes yeux, le problème est moins 2017 que 2018. En 2017, il y a un peu plus de sous-budgétisation que les années précédentes, notamment sur deux missions : l'agriculture et le travail. Cette sous-budgétisation sur les dépenses est cependant compensée par une grande prudence sur les recettes et, pour ma part, je n'ai jamais contesté l'hypothèse d'un taux de croissance de 1,5 %. Compte tenu du montant de la réserve de précaution, je pense donc que les choses devraient se dérouler correctement en exécution. En revanche, prendre un décret d'annulation pour un montant aussi ...
Dans le prolongement de ce que vient de dire Christine Pires Beaune, je veux relever un élément extrêmement important dans l'exécution, c'est le décret d'avance qui nous a été présenté ce matin. Même si nous ne disposons que d'une semaine pour donner un avis, je pense qu'il faudrait recevoir au plus vite des responsables de programmes et de missions concernés, en particulier dans les secteurs qui font l'objet de très importantes annulations des crédits. Comme l'a souligné à juste titre ce matin Valérie Rabault, notre ancienne rapporteure générale, les annulations ne portent pas uniquement sur des crédits mis en réserve, loin s'en faut. Il y a un effet ...
La compensation se faisait en général par transfert de recettes inscrites au budget de l'État – notamment de morceaux de TVA – vers le budget de la sécurité sociale. Dans ce cas, exceptionnellement, ce ne sont pas des recettes, mais des dépenses – les 4 à 5 milliards d'euros d'allocations logement payées par les caisses d'allocations familiales – qui ont été transférées au budget de l'État. C'est ce qui explique la forte augmentation des dépenses d'intervention.
Je ne suis pas convaincu par l'argument de la loi organique : nous avons pris la précaution de ne demander un avis au Haut Conseil que pour la seule année 2018. Il ne s'agirait donc pas d'une extension pérenne des compétences du Haut Conseil. Mais je voudrais insister sur un point : il est rarissime de voir un rapporteur spécial dénoncer ce qu'il estime une sous-budgétisation d'une mission. Or, avant de saisir un organisme tel que le Haut Conseil, c'est à nous, parlementaires, que revient ce travail ; c'est le travail des futurs rapporteurs spéciaux de mettre en garde le Gouvernement sur de possible sous-budgétisations. Sur le plan positif, grâce à la mission du ...
Le barème est fixé par voie réglementaire, donc le Gouvernement peut le modifier facilement, et si quelques dizaines ou centaines de milliers de ménages sortent du barème, cela fera tout de suite une économie importante. Mais, si l'on fait cela en cours d'année, on va en entendre parler très rapidement !
Et je crains que cela ne continue !
C'est, là aussi, complètement illusoire.
Monsieur le ministre, vous avez à plusieurs reprises à cette tribune prononcé le mot « insincérité ».
Je souhaiterais que le Gouvernement applique le principe de sincérité à ses propres prévisions.
Mais l'État a reçu des actions !
Parfaitement.
Mais si, c'est vrai !
C'est vrai !
Bienvenue, mon cher collègue !
Très bien !
Exactement !
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, pourquoi présenter une motion de renvoi en commission sur un projet de loi de règlement ? Tout simplement parce que les résultats de 2016 sont tellement médiocres et alarmants que leurs conséquences sur l'exécution du budget 2017 ne me paraissent pas, à ce jour, suffisamment prises en compte par le Gouvernement. Le décret d'avance, le décret d'annulation et les mesures que vous appelez vous-même de « refroidissement budgétaire », qui représentent 4,5 milliards d'euros d'économies, ne sont pas à la hauteur ...
Cela permettrait d'avoir un débat approfondi ici à l'Assemblée nationale, parce que la responsabilité financière et la responsabilité budgétaire sont probablement les principales que nous, députés, ayons à exercer.
J'aurais donc aimé qu'au lieu de la discussion, certes importante, que nous aurons tout à l'heure en commission des finances pour donner un avis sur ces décrets d'avance et d'annulation sur la base du rapport de notre rapporteur général, qui sera je pense excellent, …
…nous ayons un véritable débat sur les mesures de redressement, sans attendre la fin de l'année pour constater l'étendue des dégâts car vous seriez alors, monsieur le ministre, obligé d'élaborer un projet de loi de finances rectificative. Lorsque l'on regarde de près les annulations - le rapport de notre rapporteur général contiendra, je le pense, cette information -, on constate que le programme 203 « Infrastructures et services de transports » sera sollicité à hauteur de 450 millions d'euros et celui consacré à la recherche de 150 millions. Je me souviens que l'an dernier, grâce à notre rapporteure générale, courageuse, la commission des finances ...
Comme vous le voyez, chers collègues qui arrivez dans cet hémicycle, il s'agit de vrais débats que l'on devrait avoir à l'occasion de l'examen d'un projet de loi de finances rectificative. Le précédent Gouvernement a axé sa communication sur la réduction du déficit public de 3,6 à 3,4 % entre 2015 et 2016. Il nous a dit que les objectifs ont été tenus par rapport à la loi de finances initiale pour 2016 et même dépassés par rapport à la loi de programmation pluriannuelle des finances publiques de 2014, et cela est vrai. Mais, chers collègues, regardons les choses d'un peu plus près et nous verrons, comme le président de la commission des finances vient de ...
…qui figure dans l'excellent rapport de notre rapporteur général : la contribution du commerce extérieur à la croissance du PIB aura été, en 2016, de moins 0,8 %. Cela démontre l'ampleur du problème de compétitivité de nos entreprises. J'estime à cet égard que le renvoi à 2019 de la transformation du CICE en baisse directe de charges est très problématique. Plus encore, se borner à cette mesure, nécessaire au demeurant, et à la baisse du taux de l'impôt sur les sociétés, déjà votée par la précédente majorité, …
…est insuffisant pour régler le problème de compétitivité de nos entreprises, notamment de celles qui exportent. Le dispositif d'exonération de charges sociales patronales, dit Fillon, qui coûte 20 milliards d'euros, ne joue, de manière dégressive, que jusqu'à 1,6 SMIC, et le CICE n'intervient que jusqu'à 2,5 SMIC. Autrement dit, ces 40 milliards d'euros d'allégements de charges des entreprises, montant énorme qui représente deux points de PIB, bénéficient essentiellement à des entreprises et à des secteurs protégés de la concurrence.
Tout simplement parce que, dans l'automobile, la pharmacie, la chimie et les secteurs à haute valeur ajoutée, le niveau des salaires est en général supérieur. Je demande donc à cette majorité d'aller plus loin dans les baisses de charges et de reprendre une disposition indispensable, qui figurait dans beaucoup de programmes de la dernière campagne électorale et qui consiste à supprimer ce qui reste des 30 milliards de cotisations patronales « famille », quel que soit le niveau de salaire ; sinon, nous ne redresserons pas la compétitivité de nos entreprises.
Autre donnée macroéconomique, le taux de chômage est resté très élevé, autour de 10 % en 2016, même si le nombre de créations d'emploi dans les entreprises s'est redressé. Le chômage des jeunes reste anormalement élevé, et ce n'est pas le traitement social du chômage à travers les contrats aidés qui apportera la solution. Ce sont les entreprises qui nous permettront de redresser la situation.
On a un problème de charges et de compétitivité en termes de coût, de prix et de qualité, d'où l'importance de sécuriser des dispositifs comme le crédit d'impôt recherche. Lors de la précédente législature, nous avions fait beaucoup de propositions pour mener la nécessaire et indispensable réforme du code du travail. Le déficit public de notre pays, qui s'établit à 3,4 % en 2016, est le plus élevé de la zone euro après celui de l'Espagne. Nous sommes en procédure de déficit excessif depuis 2009 ! Nous accusons également un déficit primaire. Cette notion très importante de déficit primaire correspond au niveau du solde budgétaire, une fois enlevée ...
C'est dire la gravité de la situation. Ma phrase sur l'excédent primaire italien était destinée, mes chers collègues, à vous donner quelques éléments de comparaison. J'en viens aux recettes fiscales. Comme l'a dit le rapporteur général, l'évolution spontanée des recettes, c'est-à-dire hors mesures nouvelles, est très décevante : moins 3,5 milliards par rapport à la prévision. C'est très inquiétant.
Vous avez raison, madame Dalloz, de pointer l'impôt sur les sociétés. Mais, chers collègues qui siégez le plus à gauche de l'hémicycle, ce n'est pas lié au CICE ; c'est lié au problème du niveau de marges de nos entreprises.
Les marges moyennes des entreprises françaises sont très inférieures à celles que l'on constate dans les autres pays européens. Or de faibles marges induisent de faibles recettes au titre de l'impôt sur les sociétés. Par ailleurs, on ne parle pas assez de l'impôt sur le revenu qui, monsieur le ministre, est miné par les niches fiscales. Et si j'étais à votre place, je ferais très attention à la niche du CITE – crédit d'impôt pour la transition énergétique – qui est en train d'exploser.
On a connu la même chose, il y a une dizaine d'années, avec le crédit d'impôt développement durable, le CIDD, dont les dispositions étaient régies par l'article 200 quater du code général des impôts : le Gouvernement avait prévu 900 millions et on a terminé à plus de 3 milliards ! L'autre problème dont on ne parle pas assez est celui des délocalisations de contribuables. Avec Éric Woerth, nous avions réussi, à la fin de l'année 2012, à obliger le Gouvernement à rédiger un rapport annuel sur les départs et les retours de contribuables, dont on peut penser que la fiscalité n'est pas complètement étrangère à leur décision de quitter le pays, en ...
Le grand espoir du Gouvernement, celui du Président – on le lit régulièrement dans la presse –, c'est que grâce au retour de la croissance, estimée à 1,5 %, 1,6 % ou même 1,7 % dès 2017, les recettes fiscales rentreront en masse dans les caisses de l'État. Or je m'interroge sur ce point, car le taux d'élasticité de nos recettes fiscales par rapport à la croissance, notamment pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, semble s'être érodé au fil du temps. Voilà plusieurs années que ce taux est inférieur à 1 ; vous l'avez noté, monsieur le rapporteur général. Il faudrait que la commission des finances et le Gouvernement engagent un ...
À force de presser ainsi nous finirons rapidement par atteindre les limites. Malgré tout, malgré ces 5 milliards d'économies générées par des éléments exogènes, comme l'a dit tout à l'heure Éric Woerth, il a fallu augmenter les reports de crédits de 2016 sur 2017. Ces derniers ont atteint – c'est un record – 3,5 milliards d'euros, soit une progression de 1 milliard par rapport à l'année précédente. Je reconnais bien volontiers que le rythme de progression de la dépense publique de l'État s'est ralenti entre 2012 et 2017, ou du moins jusqu'en 2016, par rapport à ce que nous avions connu sous les précédentes législatures. Cependant, chers collègues, ...
La séquence d'évolution des effectifs de l'État qui figure dans le rapport montre qu'il y a eu une baisse en 2012, 2013 et 2014, une légère hausse en 2015 et une augmentation réelle en 2016. Avec la conjonction du protocole PPCR et l'augmentation des effectifs, ce sont chaque année des milliards que nous serons dans l'incapacité de financer. Il va donc falloir s'atteler au problème des effectifs ; à défaut, vos annonces ne seront pas réalistes. Et il en va de même des transferts sociaux et du nécessaire reparamétrage du financement des retraites. Quand le Président de la République affirme que le financement des retraites ne posera pas de « problème ...
On pourrait alors progresser dans la discussion. Si des réformes structurelles ne sont pas enfin engagées, menées à bien, le scénario de paupérisation de l'État, qui touche au premier chef ses missions régaliennes, va se poursuivre. Tout à l'heure, en commission des finances, le directeur général de la police nationale et le directeur général de la gendarmerie nous ont affirmé que les annulations ne remettaient pas en cause les missions essentielles, mais qu'elles venaient rogner une partie des dotations en équipement, notamment pour le remplacement des véhicules. Cette paupérisation de l'État, nous la constatons tous dans nos commissariats, dans nos ...
Par les primes à l'émission, un outil extraordinaire qui représentait en 2015 21 milliards d'euros, soit un point de PIB, et 20 milliards en 2016. On nous explique que la pratique présente un intérêt compte tenu de l'écart entre les taux des anciennes souches obligataires et les taux d'intérêt actuels ; il serait intéressant que le directeur de l'Agence France Trésor soit reçu à la commission des finances pour nous éclairer. Ce que nous contestons, ce n'est pas le principe. Que l'on enregistre chaque année 4 ou 5 milliards d'euros de primes d'émission, pourquoi pas ! En revanche, 21 ou 22 milliards, soit plus de 40 milliards en deux ans, c'est extrêmement ...
Et pourquoi pratique-t-on de tels niveaux de primes d'émission ? Tout simplement pour ne pas dépasser la fameuse limite de 100 % du PIB. La dette publique se situe aujourd'hui à 96 ou 97 % du PIB ; sans les primes d'émission, elle aurait percuté la barre des 100 %.
Je dirai un dernier mot sur la situation nette de l'État, que le rapporteur général a évoquée. J'ai observé qu'à la commission des finances siègent beaucoup de nouveaux collègues experts-comptables, notamment, ou à tout le moins très versés dans la finance. La situation nette de l'État est la suivante : moins 1 200 milliards d'euros. Joël Giraud a toutefois eu la charité de ne pas mentionner les engagements hors bilan de l'État.
Sur les seules retraites du secteur public, ils représentent 2 400 milliards d'euros. Je sais bien que l'État n'est ni une entreprise ni une collectivité territoriale. Cela devrait néanmoins vous convaincre, chers collègues, si vous ne l'étiez déjà, qu'à regarder de près les comptes de 2016 on ne peut nier l'évidence : la situation de nos finances publiques est grave. Elle n'est pas désespérée, …
…mais elle est grave. Ce sera le principal point d'achoppement, la principale difficulté de cette législature. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle vous avez été choisi, monsieur le ministre des comptes publics : pour accomplir cette tâche difficile. On a pu le constater ces derniers jours : en quarante-huit heures à peine, le Président de la République a ouvert deux nouveaux fronts, l'un sur la défense, l'autre sur les collectivités territoriales. On n'avait pas beaucoup parlé des finances publiques durant la campagne électorale ; personne ne voulait aborder le sujet. Aujourd'hui, ces questions s'imposent comme une évidence. Je vous invite donc, mes chers ...
Un rapporteur général doit anticiper, monsieur Giraud !
Vous avez tout à fait raison, monsieur le ministre : la responsabilité de l'évaluation de la pertinence du bon dimensionnement des crédits revient d'abord au Parlement. Ce sera notamment aux rapporteurs spéciaux et aux rapporteurs pour avis d'apprécier, à l'automne prochain, la sincérité des inscriptions budgétaires dans le projet de loi de finances pour 2018. L'expérience des dernières années nous a néanmoins enseigné que lors de l'examen des budgets en commission élargie, notamment, un certain nombre de rapporteurs mettaient en évidence ces sous-budgétisations sans être suivis. Bref, les ministres considéraient que le rapporteur avait tort, mais la suite ...
C'est un effet connu, que nous n'avons jamais contesté.