La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (nos 846, 971, 881, 942 et 944).
Le temps de parole restant pour la discussion de ce texte est de onze heures dix-neuf minutes pour le groupe La République en marche, dont 585 amendements sont en discussion ; neuf heures une minute pour le groupe Les Républicains, dont 897 amendements sont en discussion ; trois heures dix-neuf minutes pour le groupe du Mouvement démocrate et apparentés, dont 152 amendements sont en discussion ; cinq heures quinze minutes pour le groupe UDI, Agir et indépendants, dont 146 amendements sont en discussion ; quatre heures trente-cinq minutes pour le groupe Nouvelle Gauche, dont 221 amendements sont en discussion ; trois heures quarante-huit minutes pour le groupe La France insoumise, dont 97 amendements sont en discussion ; deux heures cinquante-huit minutes pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine, dont 224 amendements sont en discussion, et 3 minutes et cinquante-six secondes pour les députés non inscrits, dont 134 amendements sont en discussion.
Ce matin, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s'arrêtant aux amendements nos 1180 et identiques, qui visent à supprimer l'article 14.
L'amendement de suppression no 1180 n'est pas défendu.
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 2388 et 2611 rectifié .
La parole est à M. Max Mathiasin, pour soutenir le no 2388.
La parole est à Mme Hélène Vainqueur-Christophe, pour soutenir l'amendement no 2611 rectifié .
Je ne reprendrai pas les arguments que j'ai développés ce matin, ni ceux avancés par mes collègues lors de l'examen de l'article 12 septies, mais le problème est presque le même. Pourquoi vouloir prendre des mesures qui ne sont ni attendues ni voulues par nos territoires ? Je l'ai déjà dit, le mode d'élaboration du schéma d'aménagement régional – SAR – est complexe, mais il est, selon moi, garant d'une maîtrise et d'un développement du territoire voulu et décidé par les acteurs locaux.
Monsieur le ministre de la cohésion des territoires, monsieur le secrétaire d'État auprès du ministre, le Gouvernement ne nous donne aucune assurance sur le fait que les ordonnances seront discutées et élaborées avec les acteurs de terrain. Pire, si l'intention et la philosophie sont les mêmes que celles qui inspirent ce texte, les mesures décidées par ordonnances pourraient être dangereuses. C'est comme si, chers collègues qui avez été des élus locaux, vous acceptiez que le Gouvernement puisse modifier, par ordonnance, les plans locaux d'urbanisme – PLU – et les plans locaux d'urbanisme intercommunaux – PLUI. Je pense que vous conviendrez tous que cela ne peut être fait par ordonnance.
J'accepte qu'un débat soit ouvert sur la complexité du dispositif. Je proposerai, dans un prochain amendement, de transformer, à terme, les SAR en SRADDET – schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires. Mais, surtout, n'anéantissez pas le travail longuement mûri à l'échelle locale !
Je rappelle que le SAR est un acte politique, et que la volonté des élus s'est exprimée dans le cadre de son élaboration. Si l'amendement n'était pas adopté et que l'article n'était pas supprimé, il serait important qu'il y ait une concertation très large avec les acteurs locaux et tous ceux qui ont participé à l'élaboration du SAR.
Rappels au règlement
Ce matin, un amendement du Gouvernement a été déposé à l'article 12 septies, ce qui ouvre le droit à cinq minutes de temps supplémentaire pour les députés non inscrits. Les services peuvent-ils confirmer qu'il a été été pris en compte ? À l'ouverture de la séance de ce matin, notre temps de parole était plus important, et il me semble que les trois minutes cinquante-six que vous avez évoquées à l'ouverture de la présente séance ne tiennent pas compte de ces cinq minutes supplémentaires.
Madame Pinel, aucun président de groupe n'ayant demandé à ce qu'un temps de parole supplémentaire soit ouvert, il n'y a pas de temps supplémentaire, ni pour les groupes, ni pour les députés non inscrits. Je suis confus de vous l'apprendre.
La parole est à M. Thibault Bazin, pour un rappel au règlement.
Il se fonde sur l'article 58-1 du règlement. Je me suis justement précipité pour prendre la parole avant l'examen de l'article 12 septies, monsieur le président, afin de rappeler ce droit. Nous avons eu beaucoup d'échanges sur cet article, et il me semble que nous pouvons tous convenir que l'apport des députés non inscrits a été décisif. Ils n'avaient déjà plus qu'une douzaine de minutes alors qu'il nous reste sept jours de débats ! Je crois qu'il serait regrettable, pour la bonne tenue de nos débats, que ce droit ne soit pas ouvert. En tout cas, dans l'esprit, nous l'avons demandé.
Je propose qu'on en revienne aux amendements. Dès que je le pourrai, je vous dirai ce qu'il en est précisément du temps de parole dont vous disposez.
Article 14
La parole est à M. Richard Lioger, rapporteur de la commission des affaires économiques, pour donner l'avis de la commission sur ces amendements de suppression.
Il est nécessaire de simplifier, dès que possible, certaines modalités procédurales extrêmement techniques relatives à l'élaboration et l'évolution du SAR, dans la mesure où la concertation avec les acteurs locaux, je vous rassure, sera assurée. L'ordonnance prévue à l'article 14 sera très bienvenue. Avis défavorable.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de la cohésion des territoires, pour donner l'avis du Gouvernement.
Madame la députée, je tiens à vous rassurer sur un certain nombre de points. L'article 14 vise à simplifier et compléter le régime juridique des SAR et s'inscrit dans la même logique que l'article 13, qui vise à limiter et simplifier les documents d'urbanisme. Aucun territoire ne sera traité différemment d'un autre.
Il y a plusieurs objectifs. Premièrement, il s'agit de regrouper, dans un chapitre unique du code général des collectivités territoriales, les dispositions qui, aujourd'hui, comme vous le savez, sont éparpillées dans plusieurs codes – code de l'environnement, code de l'urbanisme et code minier, si je ne me trompe pas – afin de donner une plus grande lisibilité à l'ensemble de ces documents. Deuxièmement, il convient de simplifier la procédure de modification. Comme vous le savez, aujourd'hui, les modifications sont approuvées par décrets en Conseil d'État. Il serait peut-être possible de passer à des régimes plus simples, comme un arrêté préfectoral. Il faut également mieux définir le contenu des SAR, en ce qu'ils tiennent lieu à la fois de schémas régionaux de cohérence écologique et de schémas régionaux climat air énergie, afin d'en renforcer la sécurité juridique.
Enfin, j'insiste fortement sur le fait que tout cela se fera dans la plus large concertation avec les élus locaux, et vous la première, madame la députée. Je m'y engage. Ce sont d'ailleurs des élus locaux qui nous ont demandé de procéder à ces modifications.
Les amendements identiques nos 2388 et 2611 rectifié ne sont pas adoptés.
J'interromps le débat pour répondre à M. Bazin et à Mme Pinel. Le temps supplémentaire en question a été ouvert, contrairement aux informations qui m'ont été données dans un premier temps. Madame Pinel, le temps de parole qui a été utilisé ce matin n'a pas été décompté sur le temps global des députés non inscrits. Les choses sont ainsi rétablies.
La parole est à Mme Hélène Vainqueur-Christophe, pour soutenir l'amendement no 1412 .
Par l'article 14 du présent projet de loi, le Gouvernement prévoit une modification substantielle, par voie d'ordonnances, des dispositions relatives aux SAR dans nos territoires d'outre-mer. Le présent amendement est un amendement de repli. Nous savons que ces documents sont complexes et que les modifications sont soumises à l'avis du Conseil d'État. Mais cette méthode d'élaboration longue et complexe se veut garante d'un développement maîtrisé du territoire et protectrice du patrimoine naturel, historique, matériel, culturel et humain des territoires concernés.
C'est la raison pour laquelle nous présentons cet amendement, qui vise à étendre le SRADDET aux régions ultramarines et à abandonner progressivement l'instrument qu'est le SAR – dont vous dénoncez vous-même la complexité – au terme d'une période de dix ans, qui correspond à sa durée actuellement fixée par le code général des collectivités territoriales.
En permettant ainsi aux régions d'outre-mer de disposer en lieu et place de leurs SAR d'un SRADDET, nous assouplirons les rigidités des procédures d'aménagement des SAR, tout en conservant les garanties de préservation du patrimoine naturel, historique, matériel, culturel et humain des territoires concernés.
Le SRADDET ne paraît pas adapté à la situation spécifique des territoires ultra-marins. Il est donc préférable de maintenir les SAR, qui s'imposent aux documents d'urbanisme de niveau inférieur. L'article 14 du projet de loi répond à votre souhait de voir simplifiées certaines modalités procédurales relatives à l'élaboration et l'évolution des SAR. Avis défavorable.
L'amendement no 1412 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Nathalie Bassire, pour soutenir l'amendement no 597 .
Mme Vainqueur-Christophe vient d'évoquer la rigidité de la procédure d'élaboration du SAR. Cet amendement s'inscrit dans la lignée de ses propos. La procédure d'approbation du SAR est longue et lourde, notamment en raison de sa validation en Conseil d'État. Nous proposons que cette validation soit faite par l'organe délibérant de la collectivité concernée. À La Réunion, par exemple, ce serait la région.
L'amendement no 597 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
M. le secrétaire d'État vient de dire que toutes ces mesures seront prise en concertation avec les élus locaux, notamment avec la région, chargée principalement de l'élaboration du SAR. C'est bien de le dire, mais je vous propose de l'écrire ! Après l'alinéa 6, il convient d'insérer l'alinéa suivant : « Toutes ces mesures doivent être prises en étroite concertation avec les élus des collectivités territoriales concernées. » Cela rendrait la concertation obligatoire.
Je crois que le Gouvernement a montré, tout au long des débats qui ont lieu depuis de nombreuses heures, sa réelle volonté de concertation. Nous sommes défavorables à cette inscription dans la loi. Il me semble qu'on peut faire confiance au Gouvernement, aux députés et à vous-même, qui représentez votre circonscription, pour participer aux débats sur le sujet.
La parole est à M. le ministre de la cohésion des territoires, pour donner l'avis du Gouvernement.
Il serait inimaginable que le Gouvernement n'accomplît pas ce travail en concertation étroite avec les collectivités locales. Si, à chaque fois que nous inscrivons dans la loi ce type de dispositif, il fallait préciser que cela doit se faire en concertation avec les collectivités locales, on n'en sortirait plus !
Le Gouvernement, par ma voix, s'engage à associer les collectivités locales à ce travail.
Monsieur le ministre, ce que je vais dire ne s'adresse pas spécifiquement à votre gouvernement : quelque que soit le Gouvernement, nous nous rendons compte, dans les outre-mer, que la concertation sur ce genre de texte se résume à la transmission de l'ordonnance qui a été prise au conseil régional, pour lui demander son avis. Il n'y a pas de concertation au moment de l'élaboration de l'ordonnance.
Je soutiens, pour ma part, l'amendement de M. Mathiasin. Ce que nous demandons c'est que la concertation ait vraiment lieu en amont, qu'elle ne se limite pas à un avise demandé sur un texte déjà écrit.
L'amendement no 1626 n'est pas adopté.
L'article 14, amendé, est adopté.
Je suis saisi de plusieurs amendements portant articles additionnels après l'article 14.
La parole est à Mme Nathalie Bassire, pour soutenir l'amendement no 1240 .
L'amendement no 1240 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Laure de La Raudière, pour soutenir l'amendement no 1345 .
Si vous le permettez, monsieur le président, je présenterai en même temps l'amendement no 1347 .
Ces amendements visent à répondre à un problème bien précis, relatif à la hiérarchie des normes. Il s'agit du cas où un territoire a adopté une délibération pour élaborer un plan local d'urbanisme intercommunal, et dispose déjà d'un schéma de cohérence territoriale – SCOT. Ce que l'on constate sur le terrain, c'est que pendant les trois ou quatre années que dure l'élaboration du PLUI, les communes dont les PLU ne sont pas encore conformes au SCOT, ou les communes dotées d'une carte communale, ne sont pas obligées de respecter le SCOT dans l'exercice de leurs compétences en matière d'urbanisme.
Certaines d'entre elles, même si elles ont accepté – parfois à l'unanimité – d'élaborer un PLUI, consomment rapidement des droits d'urbanisation, de sorte que les droits des autres communes seront nécessairement réduits après l'adoption du PLUI. Dans le cas où des communes se mettent d'accord pour élaborer ensemble un PLUI, document qui doit être compatible avec le SCOT, alors ce dernier doit devenir prescriptif au moins sur deux points : les droits d'urbanisation et les installations classées – sans préjudice, naturellement, des PLU existants.
J'ajoute que les mesures que je propose par ces amendements ne causeraient aucune insécurité juridique.
Il nous semble, au contraire, qu'elles entraîneraient une insécurité juridique. Prenons l'exemple d'une construction conforme à un PLU, lequel deviendrait caduc en raison du SCOT qui s'impose. Une réflexion sur cette question pourra être menée – je crois que le Gouvernement s'y est engagé – dans le cadre des travaux sur l'ordonnance prévue à l'article 13. Nous vous invitons donc à retirer cet amendement.
Madame la députée, j'irai dans le même sens que M. le rapporteur. Autant je tiendrai compte des observations judicieuses que vous avez formulées ce matin à propos de la carte communale, autant là, non. Le SCOT et les autres documents que vous avez cités doivent être compatibles. Vous proposez d'aller au-delà.
Je suis tout à fait d'accord pour travailler, au cours des semaines et des mois à venir, à améliorer la situation sur ce point. Toutefois, à ce stade, je vous propose de retirer ces amendements.
Je maintiens ces amendements : ils ont peu de chances d'être adoptés… Je ne partage pas votre analyse juridique. Je ne propose pas d'aller jusqu'à changer les PLU, les cartes communales ou les PLUI : je dis simplement qu'il faut fixer une règle du jeu pour éviter que pendant la période d'examen du PLUI, un PLU ne respecte pas le SCOT et entame les droits d'urbanisation de l'ensemble des communes.
La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l'amendement no 2612 .
L'amendement no 2612 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Thomas Rudigoz, pour soutenir l'amendement no 2442 .
Dans le cadre d'une procédure de révision du PLU, le dossier d'arrêt de projet, après avoir été délibéré par le conseil de l'EPCI ou de la collectivité compétente, est transmis pour avis aux communes. Celles-ci disposent alors de trois mois pour émettre un avis. Dans le cas où une seule commune donnerait un avis négatif, le dossier d'arrêt de projet du PLU doit être de nouveau délibéré à la majorité des deux tiers des suffrages exprimés.
Cette disposition représente un frein au développement des PLU intercommunaux. Nous proposons de la supprimer entièrement. En effet, les communes sont déjà impliquées en amont de l'arrêt de projet, à l'occasion de la collaboration obligatoire dont les modalités font l'objet d'une conférence intercommunale des maires, et le projet d'aménagement et de développement durable – PADD – est lui-même débattu avant l'arrêt de projet dans chacun des conseils municipaux. Par ailleurs la majorité des deux tiers peut être difficile à obtenir ; or, si elle n'est pas atteinte, le processus est complètement bloqué.
Nous proposons donc, par cet amendement, d'abroger l'article L. 153-15 du code de l'urbanisme.
Je comprends votre préoccupation, qui est de remédier à un certain nombre de blocages dans les intercommunalités. Il est néanmoins essentiel que les communes puissent donner leur avis sur les orientations d'aménagement : nous en avons suffisamment discuté tout à l'heure. C'est une revendication récurrente, que nous retrouverons dans nombre de débats. Avis défavorable.
Défavorable également. Nous avons déjà débattu longuement de l'articulation des pouvoirs de la commune et de l'intercommunalité. Ce que vous proposez irait trop loin : je tiens à défendre la commune, échelon de la proximité avec les citoyens. Il faut lui laisser la possibilité de s'exprimer dans tous les cas. Il serait donc préférable que vous retiriez cet amendement.
Je le maintiens. Il y a deux manières différentes de considérer ce problème. Dans certaines intercommunalités, notamment des métropoles, coexistent une commune de 500 000 habitants et d'autres de 1 500 habitants : il y a souvent entre la première et les secondes de fortes divergences. Dans ce cas, vous imaginez bien que la règle des deux tiers peut être facteur de blocage, et ne permet pas forcément la bonne représentation de la population.
L'amendement no 2442 n'est pas adopté.
Cet amendement a le même objet que le précédent : il s'agit de revenir sur la règle des deux tiers introduite par la loi ALUR – accès au logement et urbanisme rénové – pour l'approbation du PLUI. Je confirme ce qu'a dit M. Rudigoz : sur le territoire de ma circonscription, une intercommunalité comptant huit communes a passé plusieurs années à élaborer un PLUI ; l'une de ces communes, représentant moins de 50 % mais plus de 25 % des conseillers communautaires, a décidé de bloquer son adoption, au détriment du travail accompli par les sept autres.
Si l'on veut redonner du poids aux élus communautaires, si l'on veut renforcer leur légitimité, alors faut que le PLUI puisse être approuvé à la majorité. Cela me semble important car il y a, derrière cette question de procédure, des enjeux d'aménagement et de développement économique : à cause de cette règle, des projets de logements et des services publics sont bloqués.
Certes, mais ces règles ont été adoptées il y a très peu de temps. Il ne nous semble pas judicieux du tout de les changer. C'est par la discussion, par le débat démocratique à l'intérieur des EPCI qu'il faut convaincre ceux qui ne seraient pas d'accord avec un projet. Avis défavorable.
Il est également défavorable. Comme je l'ai déjà dit, nous voulons éviter que les règles de fonctionnement de nos collectivités soient constamment modifiées.
Nos collègues élus locaux savent ce que c'est que des procédures trop compliquées : sur ce point, nous avons été servis au cours des années précédentes, avec des changements ont été incessants. Nous avons globalement besoin, désormais, de stabilité.
Cela ne signifie pas qu'il ne faut rien changer. L'expérience montre que certaines adaptations sont utiles, nécessaires : il nous arrive aussi bien qu'à vous d'en proposer. Mais concernant votre amendement, au regard des délais fixés par la loi relativement aux PLUI, je pense qu'il est plus sage de laisser les choses en l'état.
L'amendement no 1943 n'est pas adopté.
La parole est à M. Thomas Rudigoz, pour soutenir l'amendement no 2443 .
Cet amendement ne concerne pas l'opposition entre communes et intercommunalités. Il s'agit d'un amendement de simplification administrative.
En l'état actuel du droit, la procédure de modification simplifiée des PLU impose deux délibérations pour la concertation du public. La première doit définir les modalités de mise à disposition du public, la seconde, à la fin de la procédure, doit approuver le document modifié.
Il est possible, selon nous, d'éviter la première délibération, en prévoyant que les modalités de mise à disposition du public seront définies par un simple arrêté du président de l'EPCI ou du maire. Il est à noter que la procédure de modification de droit commun comporte une seule délibération, car les modalités de l'enquête publique sont précisément définies par un simple arrêté du président de l'EPCI ou du maire.
C'est un amendement de bon sens.
Nous comprenons bien votre enthousiasme réformateur, mais de grâce, comme nous l'avons dit à propos de l'amendement précédent, ne modifions pas encore une fois des règles établies il y a très peu de temps. En outre l'amendement ne précise pas si l'avis est réputé favorable ou défavorable en cas de silence des personnes publiques. Enfin, il serait plus opportun de fixer ce délai par voie réglementaire que par voie législative. L'avis de la commission est défavorable.
L'amendement no 2443 n'est pas adopté.
La parole est à M. Richard Lioger, pour soutenir l'amendement no 3011 .
Cet amendement concerne la métropole du Grand Paris – MGP. La procédure d'élaboration du plan métropolitain de l'habitat et de l'hébergement – PMHH – est bien avancée. Il n'est toutefois pas certain que ce dernier puisse être dûment approuvé et rendu exécutoire d'ici la fin de l'année 2018. Il n'en demeure pas moins que le transfert des compétences en matière d'habitat ne saurait intervenir qu'une fois que la MGP aura défini, par son PMHH, sa politique commune en matière de logement et les conditions de sa mise en oeuvre.
C'est pourquoi, aux termes de cet amendement, le transfert de ces compétences à la MGP aura lieu à la date à laquelle le PMHH sera rendu exécutoire. Par cohérence, l'amendement modifie l'article 113 de la loi du 27 janvier 2017, et permet de considérer la MGP comme dotée d'un programme local de l'habitat – PLH – exécutoire reprenant les dispositions des PLH exécutoires préexistants à sa création jusqu'à ce que le PMHH soit rendu exécutoire. Pardonnez ce charabia, mais il semble nécessaire !
Sourires.
Cet amendement permettra notamment de répondre aux préoccupations de M. Pupponi.
L'amendement no 3011 est adopté.
Nous demandons que le Gouvernement remette au Parlement, dans un délai de six mois, un rapport sur l'évolution des schémas d'aménagement régional dans les régions d'outre-mer. Il s'agirait de connaître en amont le régime juridique choisi par le Gouvernement, ce qui permettrait une réelle concertation et une convergence avec les acteurs locaux des territoires concernés.
Nous ne pensons pas qu'un rapport soit de nature à accélérer les choses. Bien au contraire, cela ne ferait que retarder la mise en oeuvre de la réforme des SAR, qui est très attendue, comme nous venons de le voir. Je demande le retrait de l'amendement.
M. le ministre souhaite que nous travaillions sur la base de la confiance. Nous nous en tenons donc à la parole donnée et retirons l'amendement.
L'amendement no 2389 est retiré.
L'article 14 bis, amendé, est adopté.
L'article 14 ter est adopté.
L'article 14 quater est adopté.
Rappel au règlement
Conformément au règlement, en raison du dépôt d'amendements hors délai par le Gouvernement, je sollicite l'ouverture d'un temps supplémentaire pour les groupes et les députés non inscrits.
Aucun amendement n'a été déposé hors délai sur l'article 15, monsieur Bazin. C'était une belle tentative pour obtenir quelques minutes supplémentaires de temps de parole !
Sourires.
Article 15
La qualité des abords des monuments historiques et des sites patrimoniaux remarquables fait notre fierté nationale et, depuis le boom du tourisme, notre richesse collective. En la matière, nous devons beaucoup, je crois, à la loi Malraux, qui a sanctuarisé les trésors que constituent nos villes et nos villages anciens. Mais nous devons aussi beaucoup au travail quotidien, inlassable et méconnu des architectes des Bâtimentsde France – ABF – qui veillent à garantir à notre pays une qualité esthétique que tous les pays voisins nous envient.
En tant que maire de Mers-les-Bains de 2001 à 2017, ville dont le front de mer est classé depuis 1986, je connais particulièrement bien le travail essentiel des architectes des Bâtiments de France pour préserver le cachet de nos périmètres classés. Ce rôle est triple : ils garantissent la qualité architecturale grâce à une expertise pointue ; ils assurent la cohérence de l'ensemble architectural à l'échelle du quartier ; enfin, par leur impartialité, ils sortent le maire du temps politique, l'aidant à prendre une décision circonstanciée et éclairée.
Le présent article jette un doute injustifié sur ce travail remarquable. Certes, le développement de la couverture numérique et l'accélération des travaux de lutte contre l'habitat indigne sont prioritaires. Mais, si tant a pu être fait dans le respect de l'avis conforme des architectes des Bâtiments de France, je ne vois pas pourquoi il serait soudain urgent de se priver de leur conseil. J'appelle donc le Gouvernement à ne pas envoyer ce signal de désaveu à ceux qui sont les garants de notre qualité urbaine.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 1933 .
L'amendement no 1933 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Nous en venons aux amendements.
La parole est à M. Raphaël Gérard, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, pour soutenir l'amendement no 595 .
Cet amendement porte sur une question dont nous avons discuté hier soir et sur laquelle les membres du Gouvernement se sont déjà largement exprimés. Depuis l'examen du texte en commission, la ministre de la culture a annoncé la diffusion d'une circulaire à ses services. Je retire l'amendement.
L'amendement no 595 est retiré.
La parole est à Mme Valérie Beauvais, pour soutenir l'amendement no 1232 .
Le présent amendement, déposé par Dino Cinieri, vise à supprimer le premier alinéa de l'article 15. L'initiative de délimiter un périmètre de protection avait été réservée au seul architecte des Bâtimentsde France par la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine. Conférer cette initiative à l'autorité d'urbanisme en ne donnant à l'ABF qu'un pouvoir d'avis simple sur celle-ci, et non plus d'accord, revient à le dessaisir d'une prérogative essentielle dans la définition des priorités qui sont les siennes, dans un contexte de manque de moyens chronique. Le préfet n'est pas, nous semble-t-il, le mieux à même d'apprécier ces priorités.
Cette évolution fait partie du dispositif qui nous semble indispensable pour accélérer un certain nombre d'opérations d'urbanisme. Avis défavorable.
Avis défavorable également. La disposition relative à la définition des périmètres est un élément important qui contribuera à l'amélioration du fonctionnement mais aussi des relations entre les collectivités et l'ABF. Pour éviter tout faux débat, je tiens à signaler d'emblée que le Gouvernement ne songe nullement à faire le procès des ABF. Nous considérons que nous avons besoin d'accélérer les procédures dans un certain nombre de domaines, mais nous ne supprimons pas l'avis de l'ABF : on passera seulement de l'avis conforme à l'avis simple sur des sujets très délimités. Il y a donc toujours un avis, il faut le rappeler.
Plusieurs d'entre nous ont une expérience d'élu local. Pour ma part, j'ai été pendant dix ans chargé de l'urbanisme et du logement dans ma commune et j'ai présidé pendant seize ans une communauté d'agglomération. À ce titre, j'ai été témoin de l'évolution des relations entre les ABF et les collectivités locales. On ne peut pas dire qu'il n'y a strictement rien à changer, mais il faut être mesuré, et je crois que nous savons l'être.
Nous ne faisons pas le procès des ABF. Nous avons besoin de ces professionnels qui connaissent le patrimoine. Leurs conseils sont tout à fait utiles : ils permettent d'aiguiller les collectivités et les responsables des exécutifs sur un certain nombre de sujets relatifs à la construction et à la rénovation. Néanmoins, il nous paraît opportun de substituer l'avis simple à l'avis conforme dans certains cas. Comme nous l'avons dit, en matière de téléphonie mobile, question très prégnante dans un certain nombre de collectivités, nous devons être capables d'accélérer les procédures.
Il convient aussi de faciliter les recours et la médiation – une proposition a d'ailleurs été formulée concernant la médiation. Précisons qu'il y a très peu de recours contre les décisions des ABF.
Quand on a une connaissance pratique de la vie de nos collectivités, on sait qu'il existe des raisons très claires à ce faible nombre de recours – j'y reviendrai ultérieurement.
Nous avons donc formulé des propositions, je l'ai dit, parfaitement mesurées. Comme en toute chose, les évolutions sont utiles. Elles tiennent compte de l'expérience que nous avons les uns et les autres.
Le texte pose un autre problème, monsieur le ministre : il reporte sur le maire la responsabilité de suivre ou de ne pas suivre l'avis simple de l'ABF. Politiquement, ce sera nettement plus difficile que de valider l'avis de l'ABF, ce qui était en quelque sorte le rôle du maire quand l'ABF rendait un avis conforme. Il faut aussi mesurer cette conséquence. Cela va nécessairement dégrader un certain nombre d'opérations. Il était tout de même plus facile pour le maire de dire que l'avis de l'ABF s'imposait à tous, à moins de déposer un recours devant un tribunal, ce qui ne se produisait pas dans la majorité des situations.
Je reviens à l'avis de la commission des affaires culturelles à ce sujet. Comme l'a dit le ministre, le présent projet de loi est le fruit d'un travail d'une extrême précision – certains ont parlé de minutie ce matin. Le Gouvernement a fait preuve de beaucoup de sagesse dans la rédaction de la première version du texte. Il a véritablement cherché à résoudre des points de blocage, qui sont au demeurant très peu nombreux, comme l'indique l'étude d'impact jointe au projet de loi.
L'objectif de ce projet de loi est, je le rappelle, de permettre de faire ; de faciliter l'acte de construire et l'évolution de nos centres urbains. Comme vous l'avez dit très justement à l'instant, monsieur Maquet, cela pose la question de la responsabilité de chacun des acteurs : cela remet l'État face à sa responsabilité concernant l'engagement fort que nous avons pris collectivement de donner accès au numérique à l'ensemble de nos concitoyens, et cela pose à nouveau la question de la responsabilité des élus, puisque l'avis simple mettra effectivement les élus devant leurs responsabilités.
L'avis simple ne les obligera pas à délivrer l'autorisation de travaux. Ils seront face à leurs responsabilités d'élus et face au jugement de leurs concitoyens au moment de l'élection suivante. Enfin, cela met aussi les architectes des Bâtiments de France devant leurs responsabilités.
Je suis d'accord avec le ministre lorsqu'il estime que le système actuel a atteint ses limites. Mais je voudrais que l'on sorte du discours un peu binaire qui voudrait que, d'un côté, les architectes des Bâtiments de France soient tous, nécessairement, des empêcheurs de faire et que, de l'autre, les élus soient tous, systématiquement, des irresponsables qui n'ont pas la conscience de leur patrimoine. Ce n'est pas vrai. Aujourd'hui, nous avons besoin de réintroduire du dialogue. Selon moi, le sens politique de ce texte est de remettre chacun des acteurs face à ses responsabilités et de faire en sorte que nous reprenions tous, collectivement, une attitude de dialogue. C'est ce que me semble favoriser l'article 15.
Je tiens à éloigner le spectre d'antennes de communication qui fleuriraient partout et de façon anarchique : ce n'est pas le sujet – et vous savez à quel point je suis attaché à la qualité de notre patrimoine. Le sujet, c'est de régler les quelques cas dans lesquels le système a dysfonctionné au point que l'on ne trouve pas d'accord. Cette dynamique permettra, encore une fois, de remettre chacun face à ses responsabilités.
Comme je me suis permis de le rappeler au cours de la discussion générale, André Malraux avait déclaré à la tribune de cette assemblée, lors de l'examen, en 1962, de la loi qui porterait son nom : « un chef-d'oeuvre isolé risque d'être un chef-d'oeuvre mort ». Aujourd'hui, notre patrimoine se doit d'être vivant, d'être au coeur de l'activité économique de nos villages et de nos bourgs. Or l'attractivité touristique d'un monument, sa vitalité, sa visibilité pour le public passent par le numérique. Aujourd'hui, se priver de l'accès aux réseaux numériques dans les coeurs historiques de nos villes reviendrait à priver nos monuments de la vitalité qu'ils méritent d'avoir.
Applaudissements sur les bancs de la commission et sur quelques bancs du groupe LaREM.
L'amendement no 1232 n'est pas adopté.
Il a été déposé par Annie Genevard. Lorsqu'on élabore une loi relative à l'évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, il importe d'évoquer le patrimoine, car c'est un véritable enjeu.
Vous dites que le champ de la mesure est restreint, puisqu'elle ne s'appliquera qu'aux opérations de traitement de l'habitat indigne. Or, souvent, l'habitat indigne se trouve précisément dans les secteurs protégés au titre du patrimoine : ce sont notamment les coeurs de ville anciens, pas forcément attractifs, qui peuvent poser problème.
Selon moi, le projet de loi pourrait être l'occasion de sécuriser le cadre législatif et réglementaire en renforçant le rôle d'accompagnement des ABF en amont de la délivrance des autorisations d'urbanisme au regard des enjeux d'aménagement urbain et de revitalisation des centres historiques.
Si l'on souhaite s'engager dans une démarche de coconstruction en la matière, il faut se poser la question du rôle de l'État. À cet égard, je ne suis pas sûr que le point le plus important soit de savoir si l'ABF rend un avis simple ou un avis conforme ; c'est aussi, disons-le sans détour, une question de moyens. Il existe actuellement un certain nombre de dispositifs fiscaux intéressants. Mais, lorsque la mairie d'une petite commune sollicite l'ABF, parce qu'il y a sur son territoire un secteur en difficulté où se trouvent de belles pierres, ces dispositifs sont peu accessibles, en raison notamment de l'ingénierie nécessaire pour y faire appel. L'enjeu, c'est que les dispositifs qui permettent de sauver notre patrimoine soient plus accessibles, notamment aux petites collectivités.
La parole est à Mme Nathalie Bassire, pour soutenir l'amendement no 1419 .
L'accès au numérique sur l'ensemble du territoire constitue effectivement une priorité, mais, comme nous l'avons dit, la conservation du patrimoine architectural de nos centres-villes ne doit pas être sacrifiée.
Les décisions des ABF sont généralement peu contestées. Il importe donc de les maintenir car, loin de constituer un obstacle au bon déroulement des procédures d'autorisation d'urbanisme dans les sites protégés, elles participent à la revitalisation des centres-villes des villes moyennes, à la meilleure cohésion des territoires et à la conservation d'un patrimoine bâti, vecteur du développement touristique.
La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon, pour soutenir l'amendement no 2346 .
Je confirme que les décisions des ABF sont généralement peu contestées : on compte 100 recours, dont 30 formés par l'autorité compétente en matière d'autorisation d'urbanisme, pour 400 000 demandes.
Il importe donc de les maintenir car, loin de constituer un obstacle au bon déroulement des procédures d'autorisation d'urbanisme dans les sites protégés, elles participent à la revitalisation des centres-villes des villes moyennes, à la meilleure cohésion des territoires et à la conservation d'un patrimoine bâti, vecteur du développement touristique.
Nous sommes tous d'accord sur le fait que l'avis de l'ABF est essentiel. Pour ne pas allonger la discussion, car nous avons tous une expérience en la matière, je ne citerai qu'un souvenir : à Metz, un ABF avait décidé que les façades ne pourraient pas être peintes. Quinze jours après l'arrivée de son successeur, celui-ci demandait qu'on les peigne toutes ! Il faut avouer, et certains collègues l'ont d'ailleurs fait hier, que le maire ou les pétitionnaires rencontrent parfois des difficultés pour s'accorder avec les avis subjectifs ou changeants de certains ABF.
Au cours de la discussion, certains amendements tendront à rapprocher les ABF et les maires, à créer entre eux une concertation ou à formaliser certains éléments afin de demander à ce corps tout à fait particulier de fonctionnaires de l'État davantage de dialogue ou d'ouverture, y compris sur certains projets économiques.
Les auteurs des amendements ont rappelé que les décisions des ABF ne donnaient lieu qu'à fort peu de recours. Mais c'est parce que tout le monde en est découragé ! Pour ma part, je me souviens de beaux projets économiques qui cherchaient à s'implanter dans ma ville, lorsque j'étais premier adjoint à l'urbanisme, et dont le maire jugeait qu'ils auraient pu faire florès. Découragés, leurs auteurs ont fini par les réaliser ailleurs !
Le projet de loi propose une adaptation vraiment minimale de la législation en vigueur, justifiée par la demande de nos concitoyens sur la question du numérique. Encore une fois, M. le rapporteur pour avis l'a rappelé, les maires auront toute latitude de suivre ou de ne pas suivre l'avis de l'ABF, qui continuera à être émis. Je suis par conséquent défavorable à tous ces amendements.
J'ai le même avis que le rapporteur.
Je n'ai pas pour habitude de me cantonner dans le non-dit. Il ne faudrait pas donner l'impression qu'il n'y a jamais de problème entre les maires et les ABF. La réalité est autre.
Il y a encore un certain nombre d'élus locaux dans cette assemblée. Sans que chacun ait besoin de raconter son expérience personnelle, on peut considérer que, si tout fonctionnait parfaitement, cela se saurait !
Et quand j'entends dire que l'avis conforme est une excellente disposition au motif qu'elle déresponsabilise l'exécutif local, qui pourra se défausser de ses décisions sur l'ABF – alors que chacun réclame, selon la formule consacrée, qu'on donne plus de pouvoirs aux maires – cela me paraît pour le moins original.
Je ne fais pas le procès des ABF. En un peu plus de trois décennies pendant lesquelles j'ai exercé un mandat local, j'en ai connu d'excellents, qui ont été extrêmement utiles à la préservation du patrimoine de ma commune. Il m'est en revanche arrivé de m'interroger en constatant qu'un nouveau venu pouvait, du jour au lendemain, appliquer une vision du patrimoine totalement différente de celle de son prédécesseur – et je vous assure qu'il n'y a là aucune affabulation.
Quoi qu'il en soit, nous n'avons pas voulu mettre en cause l'existence ni le fonctionnement des ABF, qui sont profondément utiles. Et il faudra aussi, je l'ai dit clairement à la ministre de la culture, faciliter le dialogue. On parle souvent de concertation entre l'État et les collectivités. Il faut considérer que les ABF expriment la volonté de l'État en matière de préservation du patrimoine. Et il me paraît utile d'améliorer leur dialogue avec les représentants des collectivités locales.
Sortons du non-dit. Une partie des élus veut passer à l'avis simple partout. Une autre dit qu'il ne faut surtout pas toucher aux ABF, et veut maintenir l'avis conforme partout. Entre ces deux opinions, une position raisonnée consiste à penser que, sur certains sujets, il faut passer à l'avis simple. C'est toujours un avis ! Quand le maire ne suivra pas l'avis simple d'un ABF, il prendra ses responsabilités vis-à-vis de ses concitoyens et d'un certain nombre de pétitionnaires ou d'associations. Mais il disposera d'un avis, ce qui est une excellente chose.
J'ai dit tout à l'heure qu'il fallait accélérer la mise en place des périmètres de protection des monuments historiques. Nous savons tous que, sur la question de la visibilité ou de la covisibilité, il faut avancer de manière utile et efficace. Dessiner des ronds autour de certains édifices, c'est bien. Mieux vaut cependant caler le périmètre sur la visibilité.
Sur ces deux sujets, où il faut accélérer les procédures, nous proposons de passer à l'avis simple. Mais, de grâce, ne pensez pas que nous allons révolutionner le secteur ! Il est important, nous avons eu l'occasion d'en parler avec la ministre de la culture, que la volonté de dialogue et de concertation existe. En effet, de nombreux projets sont bloqués dans des conditions qui ne sont pas satisfaisantes. Améliorons le fonctionnement. Mettons de l'huile dans les rouages. C'est en tout cas ce que propose le Gouvernement.
Chers collègues, je suis très heureux de vous retrouver. J'étais rentré dans ma circonscription pour une visite du ministre d'État. Les représentants du Gouvernement ne m'en voudront pas d'être allé accueillir leur collègue.
Comme M. le ministre Mézard, j'ai eu la chance d'être maire, pendant seize ans, d'une ville qui comptait trois périmètres de protection de monuments historiques. Inutile de vous dire que, pendant cette période, j'ai dû discuter tous mes projets avec les ABF.
J'ai pris soin de préciser que c'était une chance, pour une ville, d'avoir trois périmètres ABF. Cela signifie en effet que le centre-ville est truffé de monuments historiques. J'en ai effectivement fait une chance.
Depuis des décennies, dans notre pays, les relations entre les ABF et les élus locaux se sont concentrées sur les mêmes interlocuteurs. Par définition, en effet, les maires de villes qui n'ont pas de périmètre n'ont quasiment pas de relations avec les ABF. Pour les autres, ces relations sont permanentes, voire quotidiennes – et elles ne ressemblent pas à un long fleuve tranquille.
Certes, monsieur le ministre, nous n'allons pas tous égrener des anecdotes personnelles – mais nous sommes tout de même ici pour témoigner. Je fais partie, comme vous, manifestement, des maires qui ont eu d'excellentes relations avec certains ABF, mais qui ont parfois connu certaines incompréhensions, pour ne pas dire plus, avec d'autres, et qui ont souffert de l'inconstance des décisions – lorsqu'un ABF autorise certaines choses et que son successeur vous dit diamétralement le contraire.
Je vous passe l'épisode du choix des couleurs des façades. J'ai la chance d'avoir une ville historique sarde, capitale de l'ancienne province du Faucigny, en Haute-Savoie. J'ai financé à 80 % la rénovation des façades de mon centre-ville, et même dans ces conditions, trouver un accord sur la couleur valait son pesant de cacahuètes !
Je pense moi aussi qu'il faut améliorer les relations au quotidien. En tant qu'élu local ou propriétaire d'un bâtiment historique, on peut tout accepter. Ce qui est difficile à vivre, c'est de se voir imposer une décision sans avoir le sentiment d'avoir reçu les explications nécessaires, ni que son interlocuteur ait simplement pris le temps de parcourir cinquante kilomètres en voiture pour participer à une commission municipale ou venir expliquer un choix – qui est nécessairement légitime, puisque, par définition, le sachant est l'ABF et non le maire.
J'ai connu ces situations, et je les parfois très mal vécues. Cela place le maire ou le maire adjoint chargé de l'urbanisme dans une situation très délicate quand il doit expliquer un choix lors d'une réunion publique.
Encore un mot pour celles et ceux qui n'ont pas eu la chance, le vrai bonheur, en tant que maire, de former un recours contre la décision d'un ABF.
Quand un maire est soumis pour la totalité de sa ville à l'avis conforme de l'architecte des Bâtiments de France, il n'est déjà pas très à l'aise pour faire un recours : il sait qu'il retrouvera le même ABF pour toutes les décisions suivantes, c'est-à-dire au quotidien ! Même si l'ABF est réputé impartial, je vous assure que le maire y réfléchit à deux fois avant d'appuyer sur le bouton « recours ».
Au cas où il se résout au recours, ce qui a été mon cas, par obligation, il s'adresse au préfet de région, qui convoque une commission régionale. Le dossier est alors instruit par la direction régionale des affaires culturelles – DRAC. Autant dire qu'il est instruit par ceux qui, au niveau régional, travaillent au quotidien avec l'ABF qui a refusé la décision locale. Excusez du peu !
Vient le moment du passage devant la commission. Il faut l'avoir vécu pour en parler ! En fait, c'est un tribunal de sachants. Voilà pourquoi la commission émet très peu d'avis contraires, et pourquoi très peu d'élus la saisissent : quand vous arrivez, je vous le dis comme je le pense, vous êtes mort. Vous avez tort. Donnez-moi le nombre de commissions qui ont contredit l'avis de l'ABF ! À mon sens, c'est beaucoup moins de trente.
In fine, l'avis de la commission est renvoyé sur le bureau du préfet de région. Là, nous savons tous comment ça marche : le pauvre est bien embêté, au nom de la continuité de l'État, pour aller contre l'avis de l'ABF et contre celui de ses propres services régionaux. Voilà comment se passent les recours dans la vraie vie.
C'est pourquoi je rejoins la position de M. Mézard. Ce n'est pas parce qu'on est dans l'opposition qu'on ne peut pas souscrire à certains avis du Gouvernement, surtout quand un ministre possède une expérience locale et qu'il connaît bien la procédure ! Le statu quo n'est pas possible.
D'abord, comme cela a été très bien dit, nos bâtiments historiques ont traversé les âges, mais il n'est pas interdit de leur donner aujourd'hui une connotation numérique et environnementale, quand c'est à la fois possible et acceptable, ne serait-ce qu'en matière de chauffage.
Je vis dans une région de montagne. Aujourd'hui, si vous voulez chauffer et réhabiliter un monument historique, on vous interdit la géothermie et les panneaux solaires, sans parler de la tranchée pour amener le gaz naturel. C'est bien sympathique, mais alors il ne faut pas venir nous parler de pollution ni de réhabilitation !
Ensuite, il faut voir la réalité en face. Je l'ai dit en commission et j'assume mes propos : il y a pénurie d'argent public. Si nous conservons le statu quo, si nous figeons tout, nous pourrons être fiers de nous : nous aurons effectivement appliqué le sacro-saint principe de protection des bâtiments historiques – mais certains finiront à terre. Soit nous regardons une partie de notre patrimoine finir à terre, soit nous acceptons un compromis entre ce qui est possible, ce qui est réalisable et ce qui est finançable.
Enfin, si on veut améliorer le dialogue, la procédure de recours devra aussi faire l'objet, à terme, d'un rééquilibrage. Certains, en effet, sont juge et partie, participant d'abord à la procédure de délivrance d'un avis de l'ABF sur le plan local, puis à l'instruction dans la commission. Cela étant, je ne fais pas le procès des ABF. L'histoire montre que j'ai réhabilité la quasi-totalité des bâtiments historiques de Bonneville, ce qui n'avait pas été fait auparavant, en dix-sept ans, même s'il m'est arrivé parfois de rencontrer des difficultés.
Ce qui nous est proposé va dans le sens d'un meilleur équilibre. À la sortie, c'est le patrimoine de notre beau pays qui en sortira grandi.
Applaudissements sur les bancs de la commission et quelques bancs des groupes LR et LaREM.
L'amendement no 159 n'est pas adopté.
J'ai vingt ans d'expérience comme élu local et directeur des services d'une collectivité territoriale. M. le ministre a exprimé ce que je voulais dire bien mieux que je ne l'aurais fait, et sans doute avec un peu plus de sagesse, donc je ne vais pas y revenir. Je voudrais juste rappeler à mes collègues de la majorité que nous nous étions dit que nous ne nous mentirions plus. Si un problème se posait, nous étions convenu d'en parler, de l'exposer au grand jour pour essayer d'y apporter des solutions. C'est ce que nous sommes en train de faire. Nous affirmons qu'il y a un problème et que nous devons y remédier.
Une des pistes que je propose dans cet amendement est qu'en dehors des bâtiments concernés et des communes ayant émis la volonté d'avoir un périmètre particulier de protection, l'avis de l'architecte des Bâtiments de France devienne un avis simple. Comme l'a dit M. le ministre, cela ne supprime pas l'avis mais, selon moi, permet d'engager un dialogue, une discussion véritable – qui nous manquent aujourd'hui.
Cette procédure offrirait aussi plus de temps aux ABF. Au lieu de courir après des permis qui arrivent en permanence, d'être constamment soumis à des délais, ils pourraient davantage travailler en amont pour mieux faire connaître notre patrimoine, notre architecture, et combler ainsi les graves lacunes existant dans notre pays.
Encore un mot sur l'avis simple. Certains d'entre nous ont été maires. Ils savent qu'un maire passe sa journée à prendre des décisions. Dire que le maire a besoin d'un avis conforme pour avoir la possibilité de s'abriter derrière me paraît méconnaître son travail. Je le répète, il prend des décisions tout au long de la journée, sans avoir à se dissimuler derrière quoi que ce soit.
Cela étant, les propositions faites par la commission des affaires culturelles et de l'éducation et portées par Raphaël Gérard montrent aussi qu'il ne faut pas renvoyer les responsabilités sur les uns ou les autres. Je suis tout à fait d'accord avec cela. Nous avons besoin de travailler ensemble, d'avancer sereinement et de trouver des solutions. Je pourrais essayer de faire voter mon amendement en en appelant à l'appui des anciens maires, mais ce n'est pas comme cela que nous réglerons le problème. Il faut que nous le fassions sereinement, que nous travaillions ensemble.
C'est la raison pour laquelle je vais retirer mon amendement, et même avec plaisir. En effet, au regard de tout ce que j'ai pu entendre aujourd'hui, je crois que nous ouvrons une nouvelle ère dans la façon dont les ABF vont pouvoir travailler avec les maires – et que les maires, les élus locaux, les pétitionnaires vont aussi avoir envie de travailler avec les ABF.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
L'amendement no 1552 est retiré.
La parole est à Mme Annaïg Le Meur, pour soutenir l'amendement no 2364 .
Dans le même sens, mon amendement visait à réserver l'avis conforme aux bâtiments présentant un fort intérêt patrimonial. Ce critère aurait pu être difficile à définir, mais le but était de généraliser l'avis simple. Comme M. Perea, je vais vers la sagesse et je retire mon amendement.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
L'amendement no 2364 est retiré.
La parole est à M. Raphaël Gérard, rapporteur pour avis, pour soutenir l'amendement no 596 .
C'est un amendement de la commission des affaires culturelles qui s'inscrit dans une série de trois amendements – les deux premiers ont déjà été adoptés – qui visent à répondre à tous les problèmes que vous venez de nommer. Encore une fois, il ne s'agit pas de nier que le système actuel, qui a eu bien des vertus, montre depuis des années des signes de blocage. L'idée est d'amener de la souplesse et du dialogue. La philosophie de ce projet de loi est de remettre les acteurs des différents sujets autour de la table et de leur permettre de se parler.
En commission, nous avions prévu la possibilité de recourir à un médiateur, ce qui correspond pleinement aux préoccupations de Martial Saddier, qui s'alarmait des conditions des recours. À l'avenir, un médiateur, qui sera un élu, pourra être désigné au sein de la commission régionale du patrimoine et de l'architecture – CRPA. Les élus pourront s'adresser directement à lui en cas de recours. C'était une première avancée.
Comme le soulignait le ministre il y a quelques instants, la seconde avancée permet d'avancer plus rapidement dans la détermination des périmètres intelligents.
Le troisième volet de ce dispositif, qui fait l'objet du présent amendement, consiste à conférer la capacité au maire ou au président d'EPCI, en charge de délivrer les autorisations, de pré-instruire les dossiers, sur la base de documents qui seront fournis par les services des architectes des Bâtiments de France à chaque élu, dans chaque périmètre protégé, de façon à établir par écrit un certain nombre de prescriptions qui formeront la règle générale. Sur la base de cette règle générale, les élus pourront, au moment de transmettre la demande d'avis de l'ABF, formuler leur point de vue sur l'avis qui devra être émis. Cela aura une vraie vertu, en incitant à plus de dialogue – car à cet égard, le choix de l'avis simple ou de l'avis conforme n'est pas l'alpha et l'oméga. Chacun aura la capacité de pré-instruire la demande.
Par ailleurs, la ministre de la culture, en présentant, en novembre 2017, sa stratégie pluriannuelle pour le patrimoine, a mis en place un groupe de travail comprenant des parlementaires, des élus locaux et des architectes des Bâtiments de France. Ce groupe de travail a remis, il y a quelques jours, des propositions à la ministre, qui est en train de les traduire dans une circulaire à ses services, qui vont dans le sens de la construction et de la coadministration des dossiers entre les services de l'État et l'architecte des Bâtiments de France.
Encore une fois, celui-ci applique le code du patrimoine et est là pour accompagner les élus. Il est vrai qu'il s'est de plus en plus éloigné de ce rôle dans certains territoires. Ce n'est pas le cas partout, mais c'est une réalité que je ne nie aucunement. Et aujourd'hui, tout le sens du projet de loi ELAN est de dépasser ces vieilles querelles pour relancer le dialogue et la concertation.
La mise par écrit d'un certain nombre de consignes est une avancée, au même titre que la construction et l'incitation des services de l'État à provoquer du dialogue avec les collectivités. C'est pourquoi je vous invite à adopter cet amendement, qui complète le dispositif et remet les élus en situation de peser sur les décisions qui vont concerner directement leur territoire.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Il est très favorable. Je voudrais remercier les collègues de la commission des affaires culturelles. Nous en avons beaucoup parlé, depuis que nous disposons du texte de loi. Il était très important d'entendre les interventions d'un certain nombre de nos collègues, à l'instar de Martial Saddier, qui a témoigné de le grande incompréhension des élus locaux. Je remercie le rapporteur pour avis et les membres de la commission des affaires culturelles de leur proposition.
Monsieur le rapporteur pour avis, je dois rendre hommage à votre optimisme.
Sourires.
Ayant déjà, à plusieurs reprises, employé le mot « sagesse », le Gouvernement, qui a aussi une bonne dose d'optimisme, l'utilisera à nouveau cette fois-ci. Ce qui est important, dans votre amendement, c'est que l'autorité compétente pour délivrer l'autorisation, à savoir la commune, « peut proposer » un projet de décision à l'architecte des Bâtiments de France.
Voilà ! C'est faire confiance à l'intelligence territoriale.
Je voulais saisir l'occasion de l'examen de l'amendement de la commission des affaires culturelles et de l'éducation pour livrer quelques réflexions. On a dit qu'il ne fallait plus se mentir, mais la réalité est que cette disposition consacre un recul pour les ABF, qui doivent activer, j'imagine – je n'ai jamais eu ce genre de problèmes – quelques lobbys.
Je ne vous cacherai pas que j'ai eu quelques difficultés avec les ABF. Il en est de ceux-ci comme des maires : il y en a des bons et des mauvais.
Vous êtes parvenus à un certain équilibre, grâce, à n'en pas douter, à l'intense dialogue que M. le ministre a noué dans sa sagesse avec le ministère de la culture et qui, comme l'atteste cet amendement, n'est pas terminé. L'avantage, c'est que vous ne laissez pas le problème tabou, mais je ne suis pas sûr que cet équilibre soit exactement le bon.
Aujourd'hui, ce qui ne va pas, c'est qu'en dehors du juge d'instruction, l'ABF, dans votre secteur, est l'homme le plus puissant de France ; plus puissant que le Président de la République. Vous avez peut-être en tête l'épisode de la rénovation urbaine des Courtillières de Pantin. Un ABF avait imaginé que c'était une oeuvre d'art, même si, bien évidemment, il n'aurait pas accepté d'y vivre – et c'est aussi arrivé dans ma circonscription, dans une cité encore plus triste et inhumaine. Ces oeuvres qu'il voulait protéger, on les impose aux gens. Mais d'un autre côté, si vous allez vous balader vers la cathédrale de Saint-Denis, haut lieu de l'histoire de France, vous verrez ce que les ABF ont laissé construire ! Vous pourrez en conclure que le système n'est pas parfait.
Il me semble que ce qui ne va pas, dans les relations entre les ABF et les élus locaux, c'est que l'ABF est absolument tout-puissant, mais que malgré toutes les circulaires du monde, s'il est invité au dialogue, il n'y est pas poussé. Il me semble, messieurs les ministres, que nous aurions dû aller un peu plus loin, en inversant les choses.
Il ne suffit pas de dire que dans certains cas, comme celui des antennes téléphoniques, la décision sera prise même si l'ABF n'est pas content. D'abord, il n'est pas simple de régler ce type de situation, comme le disait M. Saddier. Ainsi, pour une antenne téléphonique située à côté de la cité de La Muette – ancien camp de Drancy – je pourrai, grâce à votre loi, me passer de l'avis de l'ABF. Mais quand je devrai construire à côté, en covisibilité, je serai bien obligé de passer sous ses fourches caudines, et c'est moi qui serai obligé de dialoguer, pas lui !
C'est l'inverse qu'il faudrait faire : prescrire un avis simple sur l'ensemble, et, si l'ABF n'est pas d'accord, faire exercer le recours par le préfet ou le directeur régional des affaires culturelles. C'est à lui d'exercer le recours si l'élu va trop loin, de démontrer que ce n'est pas arbitraire, y compris vis-à-vis, non de ceux qui travaillent avec lui, mais de ceux qui appartiennent à sa corporation.
Car j'ai vu aussi des ABF qui craignaient le jugement qu'on porterait sur leur décision ultérieurement. C'est particulièrement vrai lorsqu'il s'agit de patrimoine social, de l'histoire du logement social – dans mon département, le sujet se pose souvent : l'oeuvre de tel ou tel architecte doit-elle être protégée définitivement ou pas ? Et nous en revenons à l'exemple des Courtillières. Finalement, ce n'est pas toujours par mauvaise volonté, carence ou incompétence qu'ils agissent ainsi, mais par préoccupation de l'avis des autres.
L'équilibre trouvé par le texte devra encore être encore amélioré, monsieur le ministre. Donner un avis simple et avoir la possibilité d'exercer un recours à l'encontre d'un élu local, pour un ABF, c'est avoir du pouvoir, mais plus celui de bloquer. Cela l'oblige à dialoguer – et nous ferons d'ailleurs des propositions en ce sens – alors qu'aujourd'hui, l'obligation de dialogue ne s'impose qu'à une partie, même avec votre amendement.
Enfin, il m'a semblé déceler une pointe d'humour chez le ministre lorsqu'il a donné son avis de sagesse gouvernementale. L'amendement se lit ainsi : « L'autorité compétente pour délivrer l'autorisation peut proposer un projet de décision à l'architecte des Bâtiments de France. Celui-ci donne son accord ou demande la modification de ce projet de décision, le cas échéant après examen conjoint du dossier. » Le dialogue intervient donc « le cas échéant ». S'il le veut bien. En revanche, dès lors que l'élu local a décidé de consulter, il faut que l'ABF soit donne son accord, soit demande la modification ! S'il ne donne pas son accord, l'élu qui l'a sollicité est piégé. Je crains qu'aucun élu n'utilise cette disposition, parce qu'entre un avis simple et un accord obligatoire en cas de sollicitation, peu d'élus choisiront la seconde option !
Nous sommes un certain nombre dans cette assemblée à être élus de départements ruraux où l'ensemble des petits villages ont des périmètres autour des églises, puisqu'elles sont inscrites au registre départemental. Autour d'elles, le patrimoine est délaissé et plus personne ne souhaite acheter, car personne ne connaît les positions des ABF sur les conditions de réhabilitation, d'ouverture et d'aménagement de ces patrimoines.
J'ai bien compris les avancées réalisées par la commission des affaires culturelles, avec un avis favorable du rapporteur mais, j'ai cru comprendre, pas de la commission des affaires économiques. Mais il serait intéressant d'élaborer un vrai cahier des charges, ce qui relève du pouvoir réglementaire des ministres de la culture et de la cohésion des territoires. En effet, même là où des investisseurs sont intéressés, ils renoncent dès qu'ils entendent parler des ABF ! Nous tenons là l'une des raisons de la mortalité grandissante du coeur de nos communes.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Ce cahier des charges, ou « porté à connaissance », faisait l'objet de l'amendement que j'ai retiré tout à l'heure. Il est en effet du niveau réglementaire, puisqu'il s'agit de consignes qui doivent aller du ministère vers les services.
Je voudrais m'inscrire dans la ligne des différentes prises de parole que l'on a entendues depuis tout à l'heure et saluer la volonté de mes collègues qui ont défendu des amendements illustrant les problèmes rencontrés par les élus locaux. Je n'ai jamais été élu local jusqu'à présent, mais toutes les auditions et les rencontres sur le terrain ont mis en lumière l'existence de vrais blocages. Malgré leur bonne volonté, les élus locaux se retrouvent parfois face à des obstacles, et il faut entendre ces difficultés.
Cet amendement est constructif. Son objet est d'améliorer le dialogue entre les élus locaux et les ABF, ces derniers étant, comme nous l'avons rappelé, nécessaires. Leur avis reste important et entendu par les élus locaux, même s'il devient un avis simple pour certaines opérations très ciblées.
J'appelle donc à voter pour cet amendement et à travailler sur le terrain, car certaines choses peuvent se faire sans la loi. Faire en sorte que les ABF, qui sont des fonctionnaires de l'État, travaillent en étroite collaboration avec les élus locaux est du bon sens. Cela profitera à la préservation du patrimoine et permettra aussi de changer le quotidien des Français : passer à un avis simple pour l'implantation des antennes de téléphonie mobile, par exemple, c'est du concret ! Cela contribuera à résorber les zones grises et les zones blanches dans les territoires ruraux. Les ABF doivent être à l'écoute des élus locaux. Je voterai évidemment cet amendement constructif et soutiendrai toutes les démarches visant à renforcer le lien entre les élus locaux les ABF, et à ne pas opposer les uns aux autres.
Ce n'est pas la fête à Neuneu aujourd'hui, mais c'est celle des ABF.
Oui, il y a des problèmes. Tout le monde sait qu'il est compliqué de dialoguer avec les architectes – les architectes en général, pas seulement les ABF. Ils ont des idées bien arrêtées et considèrent être les détenteurs des droits intellectuels sur leurs créations. L'architecte du Parc des Princes refuse qu'on y plante un clou sans lui demander son avis ! La loi protège les architectes dans ce pays, car ils ont le droit de se prononcer sur leurs oeuvres intellectuelles.
Mais globalement, avec les ABF, cela se passe plutôt bien. Ils ont tout de même protégé le patrimoine des Français depuis des décennies. Oui, il faut dialoguer avec eux, et avec certains, c'est très facile. J'ai à l'esprit plein de cas où cela se passe très bien. Certes, ils effectuent des choix architecturaux qui ne plaisent pas à tout le monde, mais qui sommes-nous pour dire que les architectes font de mauvais choix ? Ils reçoivent une formation, ils font parfois des choses intelligentes qui choquent le commun des mortels. Certaines oeuvres architecturales sont réalisées contre le sentiment général et, une fois le temps passé, recueillent des avis plus positifs. Ces oeuvres nous interpellent et ouvrent la discussion. Je partage donc l'avis de la commission des affaires culturelles et de l'éducation.
S'agissant de l'avis simple, notamment sur les antennes de téléphonie, nous savons très bien comment cela se passera : entre la volonté d'étendre la couverture numérique, de ne pas avoir de zone blanche, et l'avis de l'ABF, c'est la première qui l'emportera. Mais nous savons également très bien qu'il y aura de gros loupés. Certains bâtiments historiques se retrouveront avec des antennes de tous les côtés – et les élus locaux répondront qu'il faut bien que les gens téléphonent !
Nous devons nous protéger, y compris contre la pression populaire. Nous vivons un moment particulier. Il est vrai que certains ABF ont exagéré, mais basculer dans l'excès inverse est dangereux ; je ne suis pas sûr que l'on s'en félicitera dans dix ans. Nous ne serons peut-être plus là pour battre notre coulpe, mais faites attention : dans les dossiers d'antennes près de monuments historiques, dans presque tous les cas, les maires ne suivront pas l'avis simple de l'ABF ! La pression des habitants de la commune pour pouvoir téléphoner sera trop forte ! C'est normal, on veut répondre à l'urgence exprimée par la population, et on en oublie un peu le patrimoine.
La charge menée depuis tout à l'heure contre les ABF est un peu lourde. Ils ont quelques défauts, mais ils ont quand même beaucoup de qualités.
Je suis conseiller municipal d'une commune, Port-Louis, qui compte trente-huit monuments historiques classés ou inscrits au patrimoine. Nous avons très souvent affaire à l'ABF. Il a sûrement évité quelques bêtises, en embêtant systématiquement les gens qui voulaient mettre des velux ou des fenêtres qu'il n'approuvait pas. Mais, un jour, il a laissé construire une capitainerie sur le quai de Port-Louis, face à la citadelle historique : c'est un scandale architectural ! Et je lui en veux encore !
Il n'y en a pas eu, parce qu'il n'a pas donné son avis. Il a laissé filer l'affaire – il me semble qu'il n'en voulait pas – et la capitainerie s'est finalement construite sans l'avis de l'ABF.
Pour ce qui est des antennes, ne pourrait-on pas essayer de mutualiser les antennes des différents opérateurs, surtout dans les sites proches de monuments classés ? Il y en a déjà beaucoup, dans les clochers : cela éviterait peut-être d'en construire partout et n'importe où.
Je voudrais juste rappeler que cet amendement avait été rejeté par la commission des affaires économiques. Si j'avais su qu'il recevrait un avis plus favorable, je n'aurais pas retiré mon amendement. Peu importe, chacun votera comme il l'entend.
Mais il faut noter que cet amendement entraînera un transfert progressif de l'instruction de l'avis des ABF vers les collectivités territoriales. Parmi ces dernières, certaines, qui en ont les moyens, pourront, parce que le maire en a envie, compter sur des personnes qui leur rédigeront finement des avis et investiront dans ce domaine. L'ABF signera ou non, selon son envie, et au final, on n'aura renforcé à aucun moment le lien et la discussion entre les ABF et les collectivités territoriales. On aura juste transféré de la pression et des dépenses vers les collectivités territoriales, sans jamais régler le problème pour lequel nous aurions pu trouver sereinement des solutions dans les mois ou les années à venir. Je regrette vraiment ce qui vient de se passer.
J'ai déposé un amendement un peu plus loin, qui vise à organiser une concertation préalable avec l'ABF, les collectivités et les porteurs de projet. Très opérationnel, il ouvre une possibilité de concertation et oblige les ABF à y répondre. Cela permettrait à la volonté du porteur de projet et aux exigences de la mairie et de l'ABF de se rencontrer, afin de favoriser le pragmatisme.
S'agissant de l'installation d'antennes électromagnétiques dans les périmètres sauvegardés, il serait opportun par exemple de définir des prescriptions pour les opérateurs sur les types d'antenne. Aujourd'hui, certaines antennes camouflées conviennent aux paysages et aux bâtiments à protéger. Avec une circulaire ou un organe de discussion avec les opérateurs, nous pourrions combiner les deux objectifs que sont la couverture numérique du territoire dans les périmètres sauvegardés et la protection du patrimoine. Nous regretterions de ne pas le faire.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, qui sera la douzième à prendre la parole sur cet amendement. On pourra considérer qu'il aura été largement débattu.
Je ne défendrai pas mes amendements suivants,monsieur le président.
Il n'est évidemment pas question de remettre en cause la nécessité d'implanter des antennes-relais. J'ai encore en mémoire vos arguments, monsieur le ministre, lors de notre discussion en commission des affaires économiques sur ce sujet. Je les fais totalement miens, car il est nécessaire de faire vivre nos territoires et de les rendre attractifs, les antennes-relais participant de ce mouvement.
Reste qu'il me semble indispensable d'associer l'architecte des Bâtiments de France, lorsque l'installation d'une telle antenne est prévue dans un secteur sauvegardé, au patrimoine historique certain. Je rejoins Mme de La Raudière : associer les ABF leur permettrait de préconiser des emplacements moins polluants visuellement ou des techniques de camouflage, qui existent, pour sauvegarder notre patrimoine architectural, culturel et environnemental. Il faut concilier le besoin de protection du patrimoine avec le besoin d'attractivité des territoires.
Chacun peut s'inscrire dans la coconstruction, nous sommes d'accord. Le vrai problème, et c'est un ancien maire qui vous parle, c'est que lorsqu'on sollicite un rendez-vous avec un ABF pour coconstruire, en tant que professionnel ou en tant qu'élu, dans les départements où la demande d'urbanisme est forte, il est impossible de l'obtenir. L'ABF est de bonne foi, mais il n'a pas le temps ! Prenez les Landes : une population de 400 000 habitants, avec 2 % de croissance par an, donc une explosion démographique. Lorsque je sollicitais l'ABF, il mettait, de bonne foi, deux mois à m'accorder un rendez-vous, et il ne recevait pas les professionnels, parce qu'il n'en avait pas le temps !
Quels moyens prévoyons-nous ? Il s'agit d'une vraie question. D'ailleurs, je défendrai ultérieurement un amendement d'appel sur ce sujet. Pour co-construire, il faut disposer d'un peu de temps ainsi que de collaborateurs et d'un secrétariat efficaces, afin que l'architecte des Bâtiments de France ait le temps d'étudier les dossiers qui lui sont transmis.
L'amendement no 596 est adopté.
C'est un amendement d'appel. Il vise à porter le délai de recours contre l'avis de l'architecte des Bâtiments de France, initialement fixé à sept jours – ce qui est trop court – , à au moins quinze jours, afin que le maire puisse introduire un recours sereinement.
Nous comprenons votre préoccupation, cher collègue. Toutefois, nous ne sommes pas certains que l'actuel délai de recours – qui est d'ordre réglementaire et non législatif, comme vous le savez – pose de réelles difficultés aux collectivités territoriales. Avis défavorable.
L'amendement no 884 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Les amendements nos 885 et 2000 rectifié peuvent être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement no 885 .
Il est issu d'un débat que nous avons eu en commission, au cours duquel MM. les ministres m'ont suggéré une amélioration de l'amendement. L'amendement no 885 précise donc bien que la notification de l'avis de l'architecte des Bâtiments de France « ne préjuge pas de la délivrance ou non de l'autorisation par l'autorité compétente ».
L'idée est d'instituer – comme c'est le cas s'agissant des recours ouverts à l'autorité compétente – le principe selon lequel le silence de l'autorité administrative vaut avis favorable de l'architecte des Bâtiments de France, et surtout de donner aux pétitionnaires la faculté d'introduire un recours. À l'heure actuelle, celle-ci est réservée aux maires. Dans le cadre d'une co-construction, le porteur de projet en est exclu.
La disposition proposée ne préjuge pas de la décision ultérieure du maire. L'objet de notre débat en commission était de donner la possibilité au porteur de projet de dialoguer avec l'architecte des Bâtiments de France, et le cas échéant d'introduire un recours, sans préjuger de la décision de l'autorité compétente pour délivrer les permis de construire.
La parole est à M. Sébastien Cazenove, pour soutenir l'amendement no 2000 rectifié .
Il s'agit sensiblement de la même chose. À l'heure actuelle, le pétitionnaire peut s'adresser au préfet de région, mais uniquement après avoir essuyé un refus auprès du maire. Cela ne rime plus à rien ! Il s'agit de permettre au pétitionnaire d'introduire un recours dans le cadre de l'instruction.
L'avis de la commission est défavorable. Vous supprimez, pour le pétitionnaire, la possibilité de faire appel à un médiateur, chers collègues. Le pétitionnaire peut d'ores et déjà introduire un recours après rejet de sa demande d'autorisation. Il ne me semble pas souhaitable de prévoir la possibilité d'un recours dès la phase d'instruction de la demande de permis de construire, ce qui aurait pour effet d'allonger sa durée.
Les amendements nos 885 et 2000 rectifié , repoussés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.
La parole est à M. Richard Lioger, pour soutenir l'amendement no 2482 .
Il porte sur la première phrase de l'alinéa 8 – relatif à la désignation du médiateur – , dans laquelle il vise à substituer aux mots « parmi les membres de la commission régionale du patrimoine et de l'architecture » les mots « par le président de la commission régionale du patrimoine et de l'architecture ».
L'amendement no 2482 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Je l'évoquais tout à l'heure. Il prévoit une phase de concertation entre les porteurs de projet et l'architecte des Bâtiments de France avant le lancement dudit projet, ainsi que la publication des décisions de ceux-ci.
Il me semble intéressant, typiquement dans le cas d'installation d'antennes électromagnétiques, de permettre une telle concertation avec les opérateurs, afin que l'architecte des Bâtiments de France puisse par exemple autoriser l'implantation d'une antenne sous réserve qu'elle fasse l'objet d'un certain camouflage. Cela permettra d'exercer une pression sur les opérateurs afin qu'ils respectent ces prescriptions.
J'ajouterai un argument : rendre publiques les décisions des architectes des Bâtiments de France permettrait de créer une jurisprudence.
Il nous semble que les dispositions proposées sont davantage de l'ordre de la circulaire que de la loi. Avis défavorable.
Les amendements sont en partie satisfaits par le droit en vigueur. En effet, la publicité de l'avis de l'architecte des Bâtiments de France est déjà assurée, dans la mesure où celui-ci est annexé à l'autorisation d'urbanisme.
Au reste, vous proposez de formaliser une phase de concertation. Je constate que de nombreuses demandes visant à prévoir une concertation – émanant de la commission, du Gouvernement et des groupes politiques de cette assemblée – sont formulées. J'en déduis qu'une concertation n'a pas toujours lieu !
Tel devrait pourtant être le cas.
Les dispositions législatives que nous prenons permettront-elles de faire en sorte qu'une concertation ait lieu ? Je le souhaite vivement. J'ai déjà rappelé qu'on ne peut pas vraiment dire que le nombre d'architectes des Bâtiments de France, ainsi que celui de leurs services, a été multiplié – et cela ne date pas des derniers mois.
Pour autant, le droit en vigueur permet déjà aux porteurs de projet de dialoguer avec l'architecte des Bâtiments de France à toute étape de leur projet. Le leur imposer pourrait aboutir à un ralentissement de la procédure, ce qui soulèverait une difficulté.
Je tombe d'accord avec vous sur un point : s'agissant des antennes électromagnétiques, il est nécessaire de parvenir à des solutions techniques – elles existent – permettant d'en limiter les inconvénients visuels. Introduire cet objectif dans nos relations avec les opérateurs relève de la responsabilité du Gouvernement, notamment à l'échelle des services déconcentrés de l'État, afin de parvenir à la situation voulue.
Il faut en effet conjurer le risque que l'on installe des antennes dans de mauvaises conditions. Nous sommes tous attachés, me semble-t-il, à ce que tel ne soit pas le cas.
Monsieur le rapporteur, j'aurais aimé obtenir de votre part une réponse sur le fond et non uniquement sur la forme. S'il arrive que nous inscrivions dans la loi des dispositions relevant peut-être de la circulaire, c'est parce que nous estimons, dans le cadre du contrôle de l'action du Gouvernement qu'il nous incombe d'exercer, que celui-ci ne prend pas les dispositions nécessaires à la réalisation des objectifs que nous cherchons à atteindre.
Votre réponse me semble donc un peu légère. J'estime que vous auriez pu répondre sur le fond.
Monsieur le rapporteur, je ne suis pas du tout certain que les dispositions proposées sont de l'ordre de la circulaire. Je reprendrai le raisonnement que j'ai développé tout à l'heure, démontrant que seul l'élu local est obligé de dialoguer avec le porteur de projet, ce qui n'est pas le cas de l'architecte des Bâtiments de France. Si les amendements identiques étaient adoptés – du moins leur première partie – , il le serait.
Les dispositions proposées ne sont donc pas de l'ordre de la circulaire. En effet, aux termes de la circulaire de Mme la ministre de la culture que l'on nous annonçait, l'architecte des Bâtiments de France n'est pas tenu de dialoguer. Si nous adoptons les amendements identiques, il le sera juridiquement.
Quant au deuxième volet des amendements prévoyant de rendre publiques les décisions des architectes des Bâtiments de France, il n'a pas fait l'objet d'une réponse sur le fond. J'approuve l'argument avancé par M. Lainé : il peut être utile de disposer d'une jurisprudence, y compris pour les architectes des Bâtiments de France, dont j'ai rappelé tout à l'heure qu'ils peuvent craindre le jugement de leurs pairs. Disposer de quelques guides peut leur être utile, ainsi d'ailleurs qu'aux architectes et aux élus locaux.
Certes, il ne s'agit pas d'une disposition absolument déterminante, mais j'estime que prévoir une concertation à la demande du porteur de projet oblige l'architecte des Bâtiments de France à s'asseoir autour de la table. Tel n'est pas le cas des autres dispositifs.
Monsieur Lagarde, vos propos sont identiques aux conclusions rendues par le groupe de travail sur ce sujet à Mme la ministre de la culture. Il s'agit d'un diagnostic partagé tant par les architectes des Bâtiments de France que par les élus qui participaient à ce groupe de travail – dont le sénateur Rémy Pointereau, qui n'est pas connu pour apprécier particulièrement les architectes des Bâtiments de France !
Sans présumer des instructions que Mme la ministre de la culture donnera à ses services, la publication systématique des avis des architectes des Bâtiments de France, qu'ils soient favorables ou défavorables, est une demande bien établie, notamment en vue de susciter le dialogue avec les élus.
L'amendement no 596 adopté tout à l'heure prévoit la possibilité de procéder à une instruction préalable, laquelle doit être opposable à un architecte des Bâtiments de France de mauvaise volonté. Faut-il pour autant coucher par écrit la doctrine, périmètre par périmètre, déterminant les références en fonction desquelles lutter contre la volatilité réelle des avis bien décrite tout à l'heure par M. le ministre ?
Les dispositions proposées sont d'ordre réglementaire. En effet, elles prendraient la forme d'instructions données par l'État à ses services, en l'espèce par la ministre de la culture aux services déconcentrés de l'État.
Il me semblait important – c'est la raison pour laquelle la commission des affaires culturelles et de l'éducation a souhaité présenter l'amendement no 596 – de faire en sorte que le maire puisse opposer son avis à celui de l'architecte des Bâtiments de France, ce qui permet de lui conférer une valeur. À défaut, un architecte des bâtiments de France pourrait répondre à un élu formulant une proposition : « Vous êtes bien gentil, mais le sachant, c'est moi ».
Notre amendement va dans le sens de vos propos, monsieur Lagarde, et de ceux tenus tout à l'heure par notre collègue Alain Perea. Il vise à introduire davantage de dialogue dans le processus, de façon contraignante, afin que l'avis final, qu'il soit conforme ou simple, ne soit qu'une formalité dès lors qu'il aura été co-construit avec l'autorité administrative.
La nécessité de disposer d'un avis conforme de l'architecte des Bâtiments de France est motivée par les éventuelles conséquences des constructions envisagées sur le cadre patrimonial ou paysager. Toutefois, elle ne prend pas suffisamment en considération l'usager final de l'opération.
L'amendement vise à assurer la prise en considération des besoins particuliers suscités par l'accueil des personnes handicapées dans un logement. En effet, les familles désireuses d'accueillir des personnes à mobilité réduite doivent souvent procéder à des aménagements de leur logement.
Or nombre de nos concitoyens se heurtent à l'opposition de l'architecte des Bâtiments de France dans le cadre de la réalisation d'équipements destinés à permettre à leurs proches handicapés ou à mobilité réduite d'accéder à leur logement. En effet, l'architecte des Bâtiments de France émet souvent un avis défavorable aux projets qui lui sont soumis.
La maison individuelle semble ainsi échapper à la réglementation relative à l'accessibilité des bâtiments. Parfois, pour quelques centimètres supplémentaires sur une porte-fenêtre, les gens voient leur projet de rénovation annulé ou déclaré non-conforme.
L'amendement vise donc à rendre consultatif l'avis de l'architecte des Bâtiments de France en matière de projets de rénovation de maisons individuelles visant à permettre l'accueil des personnes à mobilité réduite ou en situation de handicap, afin de faciliter leur prise en charge plus rapide par leur famille ou leurs proches.
Bien entendu, nous comprenons ce qui motive votre proposition, chère collègue. Comprenez néanmoins, à l'issue du débat que nous venons d'avoir, qu'on ne peut que s'en remettre à la sagesse – qui certes n'est pas constante – des architectes des Bâtiments de France pour déterminer comment permettre aux usagers handicapés, grâce à un dialogue s'inscrivant dans le cadre des commissions que nous venons de mettre en place, d'accéder par exemple à leur balcon ou à d'autres espaces qui pourraient leur être inaccessibles en raison de l'avis négatif qui leur a été opposé.
L'amendement no 3008 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je suis l'élu d'un territoire où l'importance du patrimoine et le rôle des architectes des Bâtiments de France ne sont plus à démontrer. Je n'idéalise pas les relations avec eux, qui peuvent être compliquées, avec leur lot d'incompréhensions et même de recours.
Je ne sais pas ce que Stéphane Bern, chargé du patrimoine par le Président de la République, pense de cet article.
Mais je sais bien ce que la France doit à André Malraux et aux architectes des Bâtiments de France, dans un pays au patrimoine si riche, en ville comme à la campagne. Grâce aux lois Malraux, la France a changé de visage ; son patrimoine a été réhabilité et remis au centre de notre politique culturelle. Le rôle même des architectes des Bâtiments de France est d'être parfois des empêcheurs de tourner en rond – mais c'est à ce prix que nous avons pu préserver notre patrimoine, et empêcher que, sous prétexte d'aller vite ou d'aller à l'économie, on ne sacrifie ou on ne maltraite des trésors séculaires.
Cet amendement propose donc de supprimer les alinéas 9 à 18 de l'article 15, qui rendent l'avis des architectes des Bâtiments de France seulement consultatif dans plusieurs cas. Ce n'est pas comme cela que nous construirons plus vite et mieux, et nous risquons de reproduire des erreurs urbaines et architecturales qui nous ont coûté cher, et de sacrifier un patrimoine qui mérite d'être respecté, même dans un département récent comme la Seine-Saint-Denis – et peut-être même là plus encore qu'ailleurs.
Je préfère donc qu'un débat contradictoire, voire conflictuel, mais fécond, se noue avec les architectes des Bâtiments de France, plutôt que de les voir renvoyés à un statut d'observateurs impuissants des constructions. Ce que vous nous proposez constitue une régression par rapport aux lois Malraux.
Nous avons longuement débattu de cette question, et je ne reprendrai pas les arguments qui nous conduisent à proposer cette toute petite dérogation. Avis défavorable.
Monsieur Peu, vous êtes souvent sage, mais vous êtes aussi malin ; j'entends bien la petite musique : « ah, ils touchent au patrimoine ! » Eh bien ce n'est pas le cas, je vous en réponds.
Je connais bien des élus de votre sensibilité qui partagent des opinions largement émises dans cet hémicycle : ils sont aussi au contact du terrain. Je ne peux pas vous laisser dire que nous allons toucher à notre patrimoine, que nous mettrions en danger les belles lois qu'André Malraux a fait adopter lorsqu'il était ministre de la culture.
Il faut aussi dire les choses telles qu'elles sont : si l'on considère qu'il est des sujets sur lesquels tout débat est interdit, sur lesquels toute modification est interdite, alors cela s'appelle, ou cela s'est appelé dans un autre temps, le conservatisme.
Rires sur les bancs du groupe FI.
Nous considérons qu'il est nécessaire de tenir compte de certaines évolutions, et de dire certaines choses, comme l'a fait M. Saddier, entre autres. Lorsque l'on a exercé des mandats électifs pendant plusieurs années, on sait que sur certains sujets, comme celui-ci, nous devons évoluer.
Ce que nous proposons, ce n'est pas de remettre en cause la protection du patrimoine. Vous ne me ferez jamais avaler une chose pareille ! Je rappelle que cette dérogation ne concerne que deux sujets, soit quelques centaines d'antennes par an et quelques dizaines d'immeubles. Et nous ne faisons que passer à l'avis simple ! Il y aura donc toujours un avis.
Tous les maires, tous les élus locaux ne sont pas parfaits. Quand un maire recevra un avis négatif, il poursuivra peut-être l'opération ; mais si l'avis est frappé au coin du bon sens, il en tiendra compte ! Nous agissons, avec bon sens. C'est bien normal. Les députés ont aussi, dans cet hémicycle, expliqué ce qui se passe sur le terrain et voulu délivrer un message, et le Gouvernement en fait autant.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Ah, monsieur le ministre, vous êtes décidément celui à qui on ne la fait pas ! Vous avez utilisé à peu près les mêmes arguments hier, à propos de la loi Littoral : nous voudrions vous faire dire des choses que jamais au grand jamais vous n'avez ne serait-ce que pensées.
Je n'ai pas entendu Stéphane Peu expliquer que vous vouliez saccager le patrimoine ; c'est vous qui abordez cette discussion comme cela. Mais vous savez, la dérégulation, monsieur le ministre, ce n'est pas le progressisme ! Je ne sais pas de quel conservatisme vous parlez, mais déréguler, déréguler, déréguler, ça n'a jamais été spécialement progressiste. Et c'est une fois de plus ce que vous faites.
« Il ne s'agit que de quelques cas », dites-vous. Mais pourquoi faut-il, dans ces quelques cas, que l'avis des architectes des Bâtiments de France devienne simplement consultatif ? On sait très bien que ces avis ont souvent empêché la destruction du patrimoine. Bien sûr, parfois, ils sont contraignants – mais ils se sont révélé extrêmement utiles !
Le rappel de M. Peu me semble très digne d'intérêt au moment où vous allez procéder, une fois de plus, par dérogation. Une fois que l'on a commencé à déroger à un principe, les lois suivantes viennent souvent agrandir la brèche ainsi ouverte.
Vous le dites vous-mêmes : cette dérogation, c'est presque rien. Mais alors pourquoi une dérogation pour si peu de chose ? Pouvez-vous nous l'expliquer ?
Nous voterons évidemment cet amendement et nous ne comprenons pas la raison de ces dérégulations permanentes – à moins que ce ne soit un choix idéologique.
Mme Mathilde Panot applaudit.
Nous ne sommes donc pas nombreux ici à défendre la mémoire d'André Malraux.
Protestations sur les bancs du groupe LaREM.
Sourires.
Quand bien même je serai seul, je continuerai de le faire.
L'une de ces dérogations concerne les antennes relais. Mais pourquoi les contraintes seraient-elles toujours du même côté ? Pourquoi les quatre opérateurs de téléphonie, qui ont chacun leurs antennes, n'ont-ils pas l'obligation d'installer des antennes communes ? Cela en diviserait le nombre par quatre, et cela ferait bien des problèmes en moins. Mais cela, oh non ! Il y a la libre concurrence. On n'impose aucune contrainte aux opérateurs.
Quant à la résorption de l'habitat insalubre, franchement ! À Saint-Denis, la basilique royale est entourée d'habitats insalubres. Concilier la résorption de l'insalubrité avec la préservation du patrimoine, en l'occurrence la basilique, mais aussi la maison d'éducation de la Légion d'honneur, c'est donc possible – compliqué, certes, mais possible, et surtout souhaitable pour le respect de notre histoire et de notre culture.
Je ne dis pas qu'il ne faille pas, parfois, demander un peu de souplesse aux architectes des Bâtiments de France, ni leur donner des orientations. Mais on peut concilier le respect du patrimoine et l'action.
Qu'il s'agisse des antennes relais ou de l'habitat insalubre, vous renvoyez tout au maire, qui ne peut pas toujours, légalement, s'opposer à des opérations. Le jour où le Centre des monuments nationaux, qui a de moins en moins d'argent, demandera l'installation d'antennes relais sur la basilique de Saint-Denis ou sur Notre-Dame de Paris, et qu'il n'y aura plus personne pour s'y opposer, notre pays aura fait un grand pas en arrière !
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.
Monsieur Coquerel, vous nous dites : libéraliser, libéraliser, ce n'est pas très progressiste ; j'ai envie de vous dire : caricaturer, caricaturer, ce n'est pas très positif !
Pardon. Il ne s'agit pas ici de faire se retourner André Malraux dans sa tombe…
Nous parlons de deux priorités stratégiques : la lutte contre l'habitat insalubre, qui a fait l'objet d'un consensus durant les discussions en commission, et l'accès de tous au numérique, de façon à résorber la fracture territoriale et à donner accès à l'emploi, à l'entrepreneuriat, à l'éducation à des gens qui aujourd'hui en sont privés.
Pour ces deux cas particuliers, les avis des architectes des Bâtiments de France – que nous respectons au plus haut point – seront consultatifs ; ils ne prendront plus la décision. Ceux qui devront prendre leurs responsabilités, ce sont les élus, les maires, dont c'est effectivement le boulot : faire des choix politiques.
En effet, dans le cadre légal. Il s'agira donc de faire des choix – ce qui n'est jamais facile – entre des priorités, toutes stratégiques : lutte contre l'habitat insalubre, fracture numérique, préservation des monuments historiques. Je fais confiance aux élus, éclairés par les avis des architectes, pour prendre leurs responsabilités. Je n'ai aucune doute là-dessus !
Quant à la couverture numérique et à la capacité des opérateurs à travailler ensemble, nous en avons parlé en commission. M. le secrétaire d'État va vous répondre. Mais c'est prévu : les opérateurs devront se coordonner pour éviter la multiplication des antennes, afin que tout le monde soit couvert ; et ainsi, avec quatre fois moins d'antennes, nous pourrons peut-être couvrir quatre fois plus de territoire ! Tout ça, c'est du bon sens, c'est de la responsabilisation des acteurs, dans un cadre légal, s'appuyant sur des avis autorisés de gens dont on ne remet en aucun cas en cause l'expertise.
M. le rapporteur et M. Pacôme Rupin applaudissent.
Déréguler, c'est toujours du bon sens pour vous ! C'est comme pour le code du travail !
Il faut raison garder ; notre état d'esprit est le même ici que pour la loi Littoral. Ce que nous avons voulu faire, c'est répondre à deux problèmes : apporter le téléphone et l'internet à tous, résorber l'habitat indigne. Cela ne veut pas dire que tout va changer, ni que nous dérégulons tout !
En revanche, dans certains cas – des cas avérés, même s'ils ne correspondent pas à vos expériences, monsieur Coquerel, monsieur Peu – ces dérogations sont nécessaires.
Très concrètement, j'ai visité il y a quatre mois un village en Isère qui compte 350 habitants ; il a fallu dix ans pour y apporter le téléphone, parce que l'avis de l'ABF nécessitait des tests sur toutes les collines qui entouraient le village. Dix ans ! La conséquence, c'est que tous les jeunes ont quitté le village.
Exclamations sur les bancs du groupe FI.
C'est mon expérience, et nous pouvons y aller ensemble si vous le souhaitez – vous demanderez à votre collègue Marie-Noëlle Battistel, qui m'accompagnait.
Nous ne cherchons absolument pas à déréguler, à casser les équilibres actuels. Nous cherchons seulement, de manière précise, à faire de la dentelle et à trouver des solutions pour que ces enfants qui ont quitté le village puissent, demain, y revenir.
Je vous remercie de votre confiance, monsieur Coquerel, elle me va droit au coeur.
S'agissant de la mutualisation, monsieur Peu, l'accord que nous avons signé avec les opérateurs de téléphonie mobile leur impose d'aller desservir les zones difficiles, ce que l'on appelle les zones blanches, de manière mutualisée.
… mais permettez-moi une petite note personnelle. Si je devais réduire le combat de ma vie à un seul sujet, ce serait celui de la lutte contre l'habitat insalubre, dans lequel je suis engagé depuis des années.
M. Roland Lescure et Mme Sylvia Pinel applaudissent.
Ces dix dernières années dans la ville où j'étais élu, on a déploré vingt-cinq morts, dont celle de neuf enfants. J'ai prévenu les familles, je me suis rendu à leur chevet. J'arrête là, je ne vais pas vous raconter ma vie mais dans une ville comme la nôtre, Saint-Denis, touchée par l'insalubrité en son coeur, là même où se trouvent la Basilique, la Maison d'éducation de la Légion d'honneur, le Carmel où a étudié Louise de France, on est parvenu à élaborer un programme national de requalification des quartiers anciens dégradés, qui, aux dires du aux dires du Commissariat général à l'égalité des territoires, est le plus actif parmi les cinquante qui existent, celui qui obtient les meilleurs résultats, avec l'avis conforme des architectes des Bâtiments de France, dans un dialogue parfois conflictuel mais toujours fructueux.
Pour écrire la loi, prenons exemple sur les méthodes vertueuses qui ont fait leurs preuves, et généralisons-les plutôt que de nous focaliser sur les problèmes et d'en faire une règle générale pour le pays, en affaiblissant la règle et la norme. Surtout, n'opposons pas les choses les unes aux autres. Prenons ce qui marche pour en faire la règle générale.
Mme Mathilde Panot applaudit.
Il est procédé au scrutin.
Nombre de votants | 62 |
Nombre de suffrages exprimés | 58 |
Majorité absolue | 30 |
Pour l'adoption | 18 |
contre | 40 |
L'amendement no 2055 n'est pas adopté.
L'amendement no 836 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 2502 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je comprends bien qu'il faille accélérer le déploiement du numérique et des télécommunications sur l'ensemble du territoire national, afin d'en finir avec les zones blanches. Nous partageons cet objectif, mais il n'autorise pas tout. Il doit se concilier avec d'autres impératifs, d'autres principes, parfois supérieurs.
Ce matin, nous avons longuement discuté de la préservation du littoral. Imagine-t-on un instant autoriser, par dérogation à la loi, l'installation d'antennes de téléphonie dans les espaces protégés ? Non. Il devrait en aller de même pour les espaces d'intérêt patrimonial.
Tel est le sens de cet amendement par lequel nous vous demandons de conserver la portée contraignante de l'accord de l'architecte des Bâtiments de France pour le déploiement des antennes et des relais radiotéléphoniques. Le maintien de cet avis conforme présente d'autant plus d'intérêt qu'il force à discuter avec les opérateurs, incite au dialogue et mène davantage à des solutions concertées qu'à des blocages.
Combien de cas sont concernés ? Vous avez parlé de deux tout à l'heure mais en commission, vous n'en aviez évoqué qu'un seul. Votre cabinet n'a pas su nous répondre. Ce seul cas mérite-t-il qu'il soit porté atteinte à notre patrimoine ?
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 1891 .
Avis défavorable. Nous l'avons déjà dit : le projet de loi ne supprime pas l'avis de l'architecte des Bâtiments de France, qui pourra toujours le faire connaître.
Votre projet de loi prévoit de diminuer la portée de l'avis de l'architecte des Bâtiments de France, qui n'aura plus à être conforme pour les opérations de traitement d'un péril imminent, d'un péril ordinaire ou la procédure d'insalubrité dans les secteurs protégés au titre du patrimoine.
Or, dans ces situations, les travaux engagés peuvent ne pas porter uniquement sur la situation ayant déclenché la procédure. D'autres travaux pour cohérence technique ou selon le désir du propriétaire peuvent être envisagés. Il n'y a donc pas de raison de ne pas soumettre ces travaux corrélatifs à l'accord de l'architecte des Bâtiments de France.
L'accord préalable de l'architecte des Bâtiments de France est une garantie essentielle pour la préservation de notre patrimoine. La neutralité et l'impartialité de cette autorité indépendante permettent au maire d'appuyer sa politique d'urbanisme sur des décisions qui n'appartiennent pas au temps politique.
Par ailleurs, aux termes du V de l'article L. 511-2 du code de la construction et de l'habitation, le maire peut, en cas de péril imminent et en l'absence de réalisation des travaux par le propriétaire de l'immeuble, procéder d'office à leur exécution. C'est d'ailleurs ce que j'ai en son temps fait avec mon équipe municipale à Mers-les-Bains. La puissance publique est donc déjà en mesure de remédier aux situations visées aux alinéas 12 à 14.
Pour toutes ces raisons, cet amendement vise à maintenir l'avis conforme de l'architecte des Bâtiments de France pour les travaux relevant de la résorption de l'habitat indigne.
Nous soutenons, nous aussi, le maintien de l'avis conforme de l'architecte des Bâtiments de France dans le cadre des opérations de lutte contre l'habitat indigne et insalubre. Nous présenterons un peu plus tard, d'ailleurs, un amendement no 1634 qui tend à créer une commission consultative en amont du dépôt de projet.
Aujourd'hui, nous avons vraiment l'impression que tout se joue à la roulette russe, dans certains secteurs. Les porteurs de projet prient pour que l'architecte des Bâtiments de France n'ait pas le temps d'étudier les dossiers. Les résultats sont beaucoup trop aléatoires et il est devenu nécessaire d'introduire davantage de transparence, ce qui impose d'engager des consultations en amont.
C'est ce que nous proposons par la création d'une commission consultative, qui permettra de gagner du temps et de simplifier les procédures, ce qui correspond à l'esprit du projet de loi ELAN.
Avis défavorable, évidemment. L'important est d'intervenir le plus rapidement possible. Vous citiez l'exemple de votre propre expérience. La mienne me fait dire que nous pouvons certes intervenir, mais seulement pour mettre le bâtiment en sécurité. La puissance publique ne peut se permettre d'investir dans des bâtiments dont elle n'est pas propriétaire, sauf à ce que l'argent coule à flot dans certaines municipalités !
Nous maintenons l'avis de l'architecte des Bâtiments de France, mais cet avis n'aura plus à être conforme.
La parole est à Mme Pascale Boyer, pour soutenir l'amendement no 2831 .
J'appelle à nouveau cet amendement, dont j'ai cru tout à l'heure qu'il n'était pas défendu, mais je rappelle à l'ensemble des députés que, lorsqu'un amendement est appelé, il convient de se signaler en se levant.
C'est ce que j'ai fait, mais je ne polémiquerai pas.
Il est dommage de priver les propriétaires de la possibilité d'installer des panneaux photovoltaïques sur les toits d'immeubles, dans les zones protégées. Pas moins de 40 000 bâtiments en France sont classés ou inscrits au titre des monuments historiques. Les périmètres de protection sont étendus à 500 mètres autour de chacun de ces monuments, ce qui limite considérablement le développement de l'énergie solaire en France.
Nous sommes revenus sur la disposition dans les secteurs côtiers. Avis défavorable.
L'amendement no 2831 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix-sept heures dix, est reprise à dix-sept heures vingt.
La séance est reprise.
La parole est à Mme Sylvia Pinel, pour soutenir l'amendement no 2503 .
L'amendement no 2503 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Sacha Houlié, qui arrive d'un pas lent mais assuré, pour soutenir l'amendement no 127 .
Monsieur le président, ne m'accusez pas d'avoir un train de sénateur, ces derniers le prendraient pour une concurrence malvenue, compte tenu surtout du projet de loi constitutionnelle.
Sourires.
Cet amendement, qui s'inscrit, monsieur le ministre, dans la continuité du plan Action coeur de ville que vous avez présenté à Châtellerault, vise à ce que l'avis de l'architecte des Bâtiments de France ne soit que consultatif sur les projets urbains de rénovation, visant à lutter contre l'habitat indigne dans les centres-villes et les centres-bourgs. Cela permettrait de responsabiliser les maires dans la conduite des projets urbains et de faciliter ces projets. Ce serait un encouragement salutaire pour ces villes où il est difficile d'investir, de rénover et d'entreprendre.
Il est dommage que Mme de La Raudière se soit absentée : nous évoquions en effet tout à l'heure ensemble le fait que ce type d'amendement avait été adopté dans le cadre du plan de relance de 2009 – elle en était la rapporteure – et qu'elle avait été obligée de revenir en arrière. La commission pense également qu'il convient de maintenir l'avis favorable de l'architecte des Bâtiments de France, y compris dans ces cas.
L'amendement no 127 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Benoit Potterie, pour soutenir l'amendement no 2365 .
L'amendement no 2365 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Benoit Potterie, pour soutenir l'amendement no 2016 .
Cet amendement a pour objet de rendre simples les avis de l'architecte des Bâtiments de France pour les interventions réversibles, limitées aux rez-de-chaussée et qui ne sont pas susceptibles de porter atteinte à la conservation ou à la mise en valeur d'un monument historique. Il vise à donner une plus grande liberté aux commerces, locaux associatifs et autres lieux accueillant du public, s'agissant de l'apparence des vitrines et devantures.
Cette simplification serait bienvenue pour l'ensemble des acteurs des territoires. Des enseignes, en effet, préfèrent s'installer en périphérie pour éviter les surcoûts liés aux exigences des ABF : le poids des normes et des contraintes est un frein au maintien de l'activité en coeur de ville. Un assouplissement permettrait d'atténuer ce poids.
Lorsque j'ai défendu cet amendement en commission, vous m'avez demandé d'en retravailler la rédaction, parce qu'elle était trop restrictive. Vous avez évoqué précédemment les difficultés que vous rencontriez, en tant qu'élu, avec les ABF. Les commerçants aussi ont des difficultés avec eux, si ce n'est que cela touche directement leur porte-monnaie. Il peut arriver qu'ils continuent de payer un loyer sans savoir du tout pourquoi leur projet a été rejeté. Ils peuvent rester six mois sans obtenir de réponse, ce qui, je le répète, se traduit pour eux par une perte financière. Parfois, nous commerçants, pourrions devoir mettre la clé sous la porte avant même d'avoir commencé notre activité ! Un peu de souplesse pour les commerçants serait bienvenue.
Vous avez compris, monsieur le député, que ni le Gouvernement ni la commission ne souhaitent aller plus loin dans les dérogations, même s'ils comprennent les difficultés que vous avez évoquées. J'espère que le signal envoyé dans le cadre du débat que nous avons eu sur le sujet avec cette corporation est bien passé.
L'amendement no 2016 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement a pour objet de supprimer l'alinéa 15, qui rend obligatoire le fait, pour l'architecte des Bâtiments de France, d'assortir son avis d'un volet économique, en cas d'avis de péril ou de mise en danger de la vie d'autrui.
En effet, le rôle de l'ABF est de donner un avis et non de réaliser une étude de faisabilité économique. L'ABF doit pouvoir se concentrer sur ses seules missions qui sont déjà assez…
… larges, en effet, c'est le mot – nous en avons discuté. Son rôle fondamental vise le respect de la qualité architecturale des constructions et la préservation du patrimoine, non le coût des projets qui les sous-tendent. Voter la suppression de l'alinéa 15 est une mesure de sagesse, car cet alinéa risque de se retourner contre ceux qui souhaitent une solution mesurée et de bon sens.
J'avais émis, en commission, un avis favorable à l'amendement visant à obliger les ABF à assortir leur avis d'un volet économique, parce que je pensais que nous devions les inciter à se préoccuper des questions économiques, ce qui permettrait également de répondre au problème soulevé à l'instant par M. Potterie.
Je m'en remets à la sagesse du Parlement.
J'étais l'auteur, en commission, de l'amendement qu'a évoqué M. le rapporteur. Même si je peux comprendre que le Gouvernement veuille supprimer l'alinéa 15, j'ose toutefois espérer que l'adoption de mon amendement en commission et tous les débats que nous venons d'avoir dans l'hémicycle sur le sujet inciteront, monsieur le ministre, le ministère de tutelle des ABF, corporation pour laquelle j'ai un profond respect, à leur demander de se concentrer effectivement sur la justification de leur mission qui est exclusivement patrimoniale.
Si j'ai déposé, en toute bonne foi, cet amendement en commission, c'est en réaction à l'avis négatif d'un ABF à la démolition d'un bâtiment situé dans ma circonscription – avis que je vous ai transmis – , fondé sur l'argument selon lequel notre secteur était bien assez riche pour que nous trouvions une solution alternative. Vous avouerez qu'invoquer un tel motif n'entre pas dans la mission des ABF. Je tenais à expliquer le bien-fondé de l'amendement que j'avais présenté en commission.
Je souhaite par ailleurs rendre hommage à André Malraux, en vous rappelant, cher collègue Stéphane Peu, que vous n'êtes pas le seul à le faire. J'ai en effet l'honneur d'être le député de la circonscription où se trouve le plateau des Glières, sur lequel André Malraux a inauguré, le 2 septembre 1973, le monument national à la Résistance, prononçant, au nom des dizaines de maquisards tués sur le plateau – le département de Haute-Savoie fut le premier libéré de France – ces mots : « Passant, va dire à la France que ceux qui sont tombés ici sont morts selon son coeur. » Il y a donc aussi, sur les bancs des Républicains, des députés qui honorent la mémoire d'André Malraux.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR. - M. Stéphane Peu applaudit également.
La parole est à M. Richard Lioger, pour soutenir l'amendement no 2483 .
L'amendement no 2483 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Cet amendement fait suite aux discussions que nous avons eues en commission.
Le projet de loi prévoit de diminuer la portée de l'avis de l'ABF pour les opérations de traitement d'un péril imminent, d'un péril ordinaire ou d'une procédure d'insalubrité dans les secteurs protégés au titre du patrimoine. Or, dans ces situations, les travaux engagés peuvent ne pas porter uniquement sur la situation ayant déclenché la procédure. D'autres travaux pour cohérence technique ou selon le désir du propriétaire peuvent être envisagés. L'amendement no 886 prévoit donc que l'avis conforme de l'architecte des Bâtiments de France soit nécessaire pour ces travaux corrélatifs.
On comprend bien ce qui motive l'amendement de notre collègue Thibault Bazin. Cependant, la notion de travaux corrélatifs me semble assez peu claire juridiquement et de nature à brouiller les pistes, si je puis dire. Avis défavorable.
L'amendement no 886 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 887 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je l'ai déjà défendu tout à l'heure. À ce sujet, nous avons longuement discuté de la nécessaire consultation de l'ABF en amont d'une opération. Aujourd'hui, ce qui fait peur aux porteurs de projets et aux maires, c'est l'aléa. Pour réduire cet aléa en amont, il convient de discuter ensemble et de consulter l'ABF, de sorte que l'avis conforme de ce dernier – en effet, nous aurions souhaité que cet avis demeure conforme – ne soit plus qu'une formalité.
L'amendement no 1634 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Luc Lagleize, pour soutenir l'amendement no 1635 .
L'amendement no 1635 est retiré.
L'article 15, amendé, est adopté.
La parole est à M. Thomas Rudigoz, pour soutenir l'amendement no 2436 portant article additionnel après l'article 15.
La présence d'anciennes règles d'urbanisme dans des actes de droit privé peut être un sérieux obstacle au renouvellement urbain. Cet enjeu, pourtant important, est en effet freiné par l'application de règles obsolètes de droit privé pouvant entraver l'aboutissement d'un projet permettant la création de logements ou d'activités, lequel nécessite souvent l'accord de l'ensemble des propriétaires d'une unité ou d'un groupement d'habitations. Parfois, ces actes anciens ne prévoient pas les modalités de leur modification. Aussi l'amendement no 2436 propose-t-il, dans une optique de simplification administrative, que les anciennes règles de droit privé n'entravent pas les instructions émises par les plans locaux d'urbanisme.
Défavorable. Cet amendement pose problème au regard de la liberté contractuelle.
J'entends bien l'argument du rapporteur, mais j'aimerais que nous nous penchions sur ce sujet.
Prenez un ancien lotissement comptant 437 pavillons. À un moment donné, vous voulez faire évoluer un bâtiment sur les 437 : vous devez alors recueillir l'avis et l'accord des 437 propriétaires, lesquels ignorent même qu'ils font partie d'un lotissement. Le simple fait de leur annoncer cela pose sur vos épaules une charge assez lourde !
Certes, l'amendement de M. Rudigoz ne pourrait peut-être pas fonctionner en l'état, mais permettez-moi de prendre un second exemple. En plein centre-ville, vous voulez aménager une zone commerciale – nous en parlions tout à l'heure – ou une zone d'habitations. Vous vous trouvez confrontés à la servitude d'un puits que tout le monde a oubliée, mais qu'un notaire a ressortie. Or il n'y a plus de propriétaire avec qui vous pourriez vous entendre pour supprimer cette servitude. Nous avons tous connu pareille situation. À un moment donné, il faut bien qu'il existe une procédure d'extinction permettant d'épurer le passé.
Je comprends l'argument de M. le rapporteur, mais il va falloir trouver une solution ! Dans les 36 000 communes de France, tout le monde se retrouve confronté à de telles difficultés, qui bloquent une opération, sans aucune raison, sans aucune légitimité, alors même que nous cherchons à débloquer un certain nombre de situations absurdes.
Pour reprendre mon premier exemple, je me souviens d'avoir convoqué 437 personnes : seules huit d'entre elles étaient présentes au rendez-vous. Sans doute les 429 autres propriétaires ont-ils pensé qu'ils n'étaient pas concernés et qu'ils n'avaient strictement rien à faire de ce qui se passait à un kilomètre et demi chez eux – en effet, le lotissement en question était très étendu.
Je prends date de l'amendement de M. Rudigoz. Monsieur le président de la commission, il y aurait sans doute un travail à faire sur ce sujet afin de trouver une solution juridique tenable, que nous ferions adopter par voie d'amendement à un moment ou un autre.
Sourires.
Je vous remercie, monsieur Lagarde, d'avoir défendu mon amendement en nous faisant profiter de votre expérience de maire. Moi-même, en tant que maire d'arrondissement, j'ai connu une situation absolument ubuesque, il y a quelques années, dans le cadre d'une importante opération de logements dans le secteur du vieux Lyon – un autre secteur sauvegardé, d'ailleurs, qui avait été créé par André Malraux. Dans les documents contractuels anciens, nous avons découvert qu'il y avait un lotissement sur ce terrain, qui avait été occupé par une école. Les descendants des anciens propriétaires se sont alors découvert un droit sur ce terrain, qu'ils ont pu faire jouer pour négocier une soulte en échange de leur autorisation. Cela a augmenté le coût de l'opération. Ainsi, les vieux contrats constituent parfois des obstacles à la réalisation d'opérations d'intérêt général.
Je ne sais pas si cet amendement est opérationnel, mais je vais le soutenir. En effet, certains imbroglios juridiques vont à l'encontre de la loi ALUR et de la densification. Parfois, sur d'anciens lotissements, on ne peut pas densifier comme le prévoit la loi ALUR.
L'amendement no 2436 n'est pas adopté.
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 16.
La parole est à M. Jean-Paul Mattei.
Le 1° de l'article 16 vise à donner une valeur législative à l'interdiction, pour les services instructeurs, de solliciter des pièces étrangères aux dispositions du code de l'urbanisme.
Certes, les professionnels de la construction – promoteurs, constructeurs et architectes – se plaignent régulièrement des pratiques de certains centres instructeurs consistant, dans le cadre de l'instruction de demandes d'autorisation d'urbanisme, à leur demander des pièces additionnelles à celles limitativement énumérées par le code de l'urbanisme. Il n'est pas inintéressant de noter qu'une partie de ces documents figuraient dans la demande de permis avant la réforme de 2007. Pour autant, ces pratiques contribuent à l'allongement des délais d'instruction des demandes d'autorisations d'urbanisme et peuvent ralentir certains projets de construction.
L'article R. 431-4 du code de l'urbanisme prévoit déjà qu'aucune autre information ou pièce que celles énumérées aux articles R. 431-5 et suivants ne peut être exigée par l'autorité compétente. Cependant, mes chers collègues, il me semble étonnant d'avoir recours à la loi pour faire appliquer une disposition réglementaire qui peut faire l'objet d'un contrôle de légalité des préfets.
Le 2° de l'article 16 vise à supprimer le troisième alinéa de l'article L. 432-1 du code de l'urbanisme. Il me semble pourtant que cette disposition, introduite dans la loi ALUR à l'initiative du député Michel Piron et permettant aux maires d'avoir une meilleure connaissance du contenu des projets de construction est utile. Elle avait été adoptée contre l'avis du Gouvernement, qui ne souhaitait pas complexifier la procédure, mais avec le soutien de notre collègue François Pupponi et l'avis favorable, à titre personnel, de la rapporteure. Dès lors, nous pouvons nous interroger sur l'opportunité de supprimer cette disposition, qui donne aux maires une information utile ; je vous proposerai de la maintenir afin de permettre aux maires de contrôler la bonne réalisation des projets qui leur sont présentés, notamment dans le but d'assurer la mixité sociale.
Comme cela vient d'être dit, il est assez difficile pour les élus que nous sommes de rentrer dans les questions de procédure d'instruction du droit des sols. En effet, les articles du code de l'urbanisme relèvent du domaine réglementaire. Pourtant, les dispositions relatives au dépôt, à l'affichage et aux délais doivent être toilettées. Vous en avez pris l'engagement en commission, monsieur le ministre : nous ne pouvons que nous en féliciter.
S'agissant de l'article 16, il est fondamental à au moins deux titres.
D'une part, il garantit l'égalité de traitement de tous les citoyens face à l'administration. Il est aujourd'hui inconcevable qu'un même dossier soit traité différemment dans deux communes parce qu'il ferait l'objet d'une demande de pièces complémentaires – ce qui allongerait la procédure – dans l'une de ces communes et non dans l'autre.
D'autre part, il renforce la sécurité juridique, tant pour les instructeurs des demandes d'autorisations d'urbanisme que pour les pétitionnaires et évidemment, en bout de chaîne, pour le juge.
Pour ce qui est du toilettage dont je parlais tout à l'heure, monsieur le ministre, sachez que le groupe d'études de l'Assemblée nationale sur l'urbanisme, que j'ai l'honneur de coprésider et dont de nombreux membres sont aujourd'hui présents sur nos bancs, est à votre disposition pour travailler sur ces questions et sur toutes celles que vous voudriez aborder.
Il se trouve qu'il reste dans notre assemblée quelques députés élus depuis maintenant quelques années.
Sourires.
Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, je suis vraiment ébahi de voir combien votre administration a une certaine forme d'obstination. Cette disposition qui permet aux maires de savoir ce qui se passe à l'intérieur d'un immeuble de logements collectifs avait été abrogée sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy. Lors de la dernière législature, nous avons réussi à la réintroduire dans la loi pour que les maires puissent connaître le contenu d'une opération de construction collective. Au début de ce nouveau quinquennat, voilà que l'on revient à la charge !
Pardon de le dire, mais il faudrait que l'on s'entende. Quelle est la raison de cette obstination ? En réalité, la transmission de ces informations aux maires ne complexifie en rien la procédure ; elle n'alourdit en rien le projet.
C'est simple : un architecte qui construit un immeuble collectif dessine les plans de l'intérieur – je vous jure qu'il les dessine, il ne peut pas faire autrement ! – et réalise même des plans d'exécution. La transmission de ces documents aux maires n'alourdit donc pas le coût du projet. Que l'architecte remette ses plans aux services instructeurs de la commune ou de l'intercommunalité ou qu'il ne les remette pas, cela ne change rien au temps qu'il passe à les réaliser.
De même, pour les services instructeurs, l'étude détaillée d'un dossier de permis de construire est finalement assez simple. Les services examinent l'extérieur, les prospects, le PLU et parfois le règlement national d'urbanisme. En revanche, l'information donnée sur les constructions intérieures permet à la commune d'anticiper, en trois ans – le temps qui s'écoule généralement entre le moment où le dossier arrive sur le bureau du maire ou de ses adjoints et l'achèvement du projet – , les besoins que le projet entraînera pour la commune, en fonction du nombre de familles qui arriveront dans le quartier et du moment où elles s'installeront.
Je ne comprends vraiment pas cette obstination. Mieux encore, il se trouve que la loi impose qu'une commission de sécurité composée de sapeurs pompiers rende un avis sur la sécurité incendie d'un immeuble collectif. Or, pour donner un avis, il faut bien que les sapeurs pompiers aient les plans intérieurs ! Pourquoi le maire ne les aurait-il pas ? De même, la loi impose un avis de la commission départementale du handicap. Cet avis peut-il être rendu sans disposer des plans intérieurs ? Encore une fois, pourquoi le maire serait-il le seul à ne pas les avoir ? Je ne comprends pas cette obstination.
Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, je vous demande de nous entendre, d'autant que, dans les zones tendues, certains projets peuvent respecter parfaitement le règlement à l'extérieur mais constituer une insulte au droit de vivre correctement dans un logement à l'intérieur.
Il m'est arrivé de voir un projet qui, de l'extérieur, avec 240 mètres carrés de construction sur un terrain de 300 mètres carrés, donnait l'impression d'une belle maison bourgeoise, dans laquelle on pourrait peut-être faire deux appartements, alors qu'en réalité, son propriétaire était en train d'y faire quatorze studios – avec quels stationnements, sur une façade de 12 mètres ? – , qui s'empilaient les uns sur les autres avec des surfaces que je considère insuffisantes ou, du moins, peu dignes. C'est là un sujet sur lequel je me bats depuis longtemps sans jamais avoir eu gain de cause.
Priver le maire de la possibilité d'échanger avec la personne qui porte le projet, c'est favoriser le marchand de sommeil contre le maire qui s'efforce d'équilibrer le logement – car il ne s'agit pas de gagner du temps ou de bloquer des projets. Monsieur le ministre, comme je vous l'ai dit en commission, si j'étais encore maire ou si je le redevenais un jour, j'agirais comme je le faisais hier : …
Sourires.
Un peu de sérieux : lorsque M. Sarkozy a supprimé cette disposition, j'étais maire. Je demandais les plans : si on ne me les donnait pas, je refusais le permis. Vous voulez accélérer les procédures, vous partez pour trois ans de délais devant le tribunal administratif. Si le maire veut avoir les plans, il les aura.
Alors, par pitié, ne supprimez pas cette disposition de la loi, qui permet des relations claires, limpides, transparentes. Un maire qui voudrait refuser un permis de construire à cause d'un plan intérieur est sûr de faire casser sa décision par le tribunal administratif : ce n'est donc qu'un outil de négociation et de prévision pour les communes. Je demande donc qu'il soit maintenu dans notre législation.
Nous en venons à l'examen des amendements à l'article 16.
La parole est à M. Fabien Lainé, pour soutenir l'amendement no 1612 .
Alors que le projet de loi les rend optionnels, cet amendement vise à maintenir les critères relatifs à l'insertion paysagère parmi les pièces exigibles au titre des demandes de permis construire. Cette demande rejoint donc d'une certaine manière celle de M. Lagarde relative aux plans intérieurs.
De fait, qu'instruiront, demain, nos services instructeurs ? Si on ne peut plus voir les plans intérieurs et si on n'impose plus de notice d'insertion paysagère, comment juger de la bonne insertion de l'architecture d'un bâtiment dans le site ? Aujourd'hui, les logiciels dont disposent les architectes – je ne citerai pas de nom de marque – maîtrisent très bien ces aspects. Il suffit de prendre quelques photos de l'environnement. Ce n'est pas très compliqué. Nous vous demandons donc de revenir en arrière sur ce point et de maintenir l'exigence de la notice d'insertion dans le site.
Comme vous l'avez compris, j'ai souvent répondu que notre idée n'était pas d'imposer des obligations. Votre amendement, cher collègue, est déjà satisfait, car l'insertion paysagère relève des règles relatives à l'implantation des constructions et l'autorité compétente doit, pour délivrer ces autorisations, en vérifier le respect. Je vous demande donc de retirer l'amendement.
L'amendement no 1612 n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 973 et 1973 .
Sur l'amendement no 973 , je suis saisi par le groupe UDI, Agir et indépendants d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour soutenir l'amendement no 973 .
J'ai déjà longuement défendu cet amendement et je ne le referai donc pas. J'espère obtenir l'écoute et le soutien du ministre, qui a certainement dû avoir, en tant que maire-adjoint à l'urbanisme, des discussions avec les promoteurs. Nous évoquions tout à l'heure les discussions obligatoires avec les architectes des Bâtiments de France : ne nous privons pas de rendre obligatoire la discussion avec le promoteur – il semble qu'elle le soit par nature.
Je souhaite que nous aboutissions sur ce point car, si je comprends toutes les formes que l'on veut adopter, je ne vois pas, en revanche, ce qu'on y gagne. L'expérience des élus ici rassemblés, qu'ils aient été ou non élus locaux, doit permettre de faire entendre raison, y compris lorsque s'exprime une certaine obstination, que je dénonçais tout à l'heure.
La parole est à M. Jean-Paul Mattei, pour soutenir l'amendement no 1973 .
Je défendrai certainement mon amendement avec moins de talent que ne vient de le faire le président Lagarde, mais il me semble tout à fait normal de pouvoir demander des plans complémentaires. Le maire qui va signer le permis doit avoir toute sécurité sur le plan juridique.
En outre, cet amendement n'est pas seulement le mien, car il a recueilli le soutien de la délégation aux collectivités territoriales, dont plusieurs membres sont cosignataires.
Encore une fois, nous allons peut-être montrer à la fois la sagesse de la commission et celle du Gouvernement en émettant un avis de sagesse. Les débats qui ont eu lieu et le plaidoyer pro domo de notre collègue Lagarde nous ont convaincus.
J'ai écouté Monsieur Lagarde et je me suis souvenu des dix ans où j'ai été adjoint à l'urbanisme et au logement – certes pas en Île-de-France : chacun à son niveau !
J'émets donc un avis de sagesse, en rappelant toutefois que chacun doit faire des efforts. Certains maires rallongent en effet les procédures, pour les bloquer, en formulant des demandes de pièces complémentaires qui ne découlent pas de la nécessité de l'application de la loi. Nous y réfléchirons d'ici à l'examen de ce texte par la Haute Assemblée, mais il nous faut trouver des réponses adéquates. L'une de ces réponses est la dématérialisation, qui me semble être le bon moyen de faire avancer ce genre de choses. Sagesse, donc.
Je remercie à la fois notre rapporteur et M. le ministre, et ferai une suggestion à ce dernier en vue de la navette parlementaire. Je souscris en effet pleinement à l'idée que les maires qui multiplient les entraves doivent être sanctionnés pécuniairement, car ils engagent leur responsabilité et contreviennent à la loi – pour dire les choses comme elles sont : ils trichent. Pour un maire, accepter un permis de construire sans avoir les pièces nécessaires ou en demander trop relèvent la même démarche : il outrepasse son pouvoir. Cela doit pouvoir être sanctionné et je serais favorable à ce que nous ne votions une mesure infligeant une sanction à un maire qui tricherait ainsi.
Si le maire sait faire son boulot, il n'a pas besoin de demander des pièces complémentaires pour discuter et trouver une solution avec le promoteur : il cherche, en réalité, à gagner du temps et il devrait donc pouvoir être sanctionné.
Il est procédé au scrutin.
Nombre de votants | 43 |
Nombre de suffrages exprimés | 42 |
Majorité absolue | 22 |
Pour l'adoption | 42 |
contre | 0 |
Applaudissements sur tous les bancs.
L'amendement no 32 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 16, amendé, est adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 27 rectifié et 33 rectifié , portant article additionnel après l'article 16.
La parole est à Mme Nathalie Bassire, pour soutenir l'amendement no 27 rectifié .
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement no 33 rectifié .
Les amendements identiques nos 27 rectifié et 33 rectifié , repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.
La parole est à M. Dominique Da Silva, pour soutenir l'amendement no 3086 .
Cet amendement vise à corriger une erreur à l'article L. 425-14 du code de l'urbanisme, qui porte sur le différé des travaux entre l'autorisation de construire et l'autorisation environnementale. Ce différé de travaux n'est prévu que pour les permis de construire soumis à autorisation au titre des installations, ouvrages, travaux et activités entraînant des prélèvements d'eau – IOTA – , et non pour ceux soumis à autorisation environnementale. Le b) de cet article est donc inapplicable dans sa rédaction actuelle.
Dans un souci de clarté, cet amendement se contente de modifier, dans le code de l'urbanisme, les références au code de l'environnement, afin de les actualiser. Il n'apporte aucune modification au droit applicable et s'applique sans préjudice des dispositions relatives à l'exécution anticipée des permis de démolir, que le code de l'urbanisme n'a pas vocation à remettre en cause.
L'amendement no 3086 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l'amendement no 535 .
Cet amendement a été déposé par mon collègue Vincent Rolland. La France a eu la chance d'accueillir les Jeux olympiques, mais aussi celle d'obtenir l'organisation des championnats du monde de ski alpin en 2023.
Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, j'ai déjà eu l'occasion de dire en commission que, les montagnards ayant salué l'obtention des Jeux olympiques d'été à Paris et voté toutes les adaptations législatives et réglementaires nécessaires pour faciliter leur organisation, nous attendons, en retour, qu'il en aille ainsi pour l'organisation de tous les autres grands événements sportifs mondiaux. Nous demandons donc l'application des mêmes règles afin de contribuer, en 2023, à la renommée internationale de la France – qui est, je le rappelle, la première station de ski au monde.
Nous reconnaissons pleinement que la France est la première station de ski au monde, mais il ne nous semble pas opportun pour autant d'adopter cet amendement, car des adaptations seront sans doute nécessaires pour les championnats du monde de ski alpin qui auront lieu en 2023. Avis défavorable.
Je suis gêné car, comme je vous l'ai déjà dit, monsieur le député, cela me semble être une très bonne idée. Je précise à l'intention de ceux qui ne sont pas pleinement au fait de cette question que, pour la première fois, nous avons instauré dans la loi relative à l'organisation des Jeux olympiques la possibilité pour les élus locaux de donner un permis de construire portant non seulement sur l'installation concernée, mais également sur l'héritage de cette installation. Cette disposition est très pertinente, car cette nouvelle vision permet non seulement de développer l'événement, mais aussi l'héritage qui lui est lié.
Nous rencontrons cependant une difficulté car, si nous avons réussi à le faire pour les Jeux olympiques et paralympiques, c'est parce que tout était défini dans des documents-cadres qui étaient notamment ceux qui avaient été discutés avec le Comité international olympique : nous savions donc précisément en amont de quoi il était question, ce qui n'est, si je ne m'abuse, pas encore le cas – mais je parle sous votre contrôle – pour les championnats du monde de ski alpin de 2023.
En l'état, donc, je ne saurais donner un avis favorable, ce qui ne signifie pas pour autant qu'il ne faille pas continuer à travailler sur le sujet, notamment en vue de l'examen du texte au Sénat. En l'état, je le répète, je ne sais pas le faire, mais je vous confirme que je suis d'autant plus friand de cette idée que nous l'avons poussée très fort dans le cadre des Jeux olympiques. Il faut néanmoins la rattacher à des éléments permettant de définir le cadre dans lequel elle doit s'inscrire.
Merci, monsieur le secrétaire d'État, pour cette argumentation un peu plus développée que celle du rapporteur – mais ce n'est pas un reproche à l'encontre de celui-ci.
Je vois la perche que vous tendez en prévision de l'examen du texte au Sénat et de la fin de la discussion mais le contexte général est celui d'une opposition entre la ville et la campagne : lorsqu'on n'est pas élu de Paris, on a le léger sentiment que beaucoup de choses qui sont possibles à Paris deviennent plus compliquées ailleurs. Je le répète : nous avons soutenu la candidature de Paris et voté en ce sens, et Dieu sait qu'il ne passe presque plus de semaine que nous ne soyons saisis, en commission ou dans cet hémicycle, d'un amendement relatif aux Jeux olympiques de Paris – que nous soutenons systématiquement.
Nous en avons encore eu un en commission pour cette loi ELAN. Alors, s'il vous plaît : tous les territoires de France peuvent et doivent être capables d'accueillir un grand événement mondial. Ces championnats du monde, pour ceux qui ne connaissent pas le ski, sont vraiment le plus grand événement que la France puisse accueillir. Des centaines de personnes se sont mobilisées pour que l'on gagne cette candidature, comme Paris a gagné les Jeux olympiques. J'entends donc votre message mais, s'il vous plaît, essayons d'apporter une chance identique à tous les événements.
Je vous ai exposé la difficulté qui se pose, mais sur le fond, je suis totalement convaincu de l'utilité de l'avancée adoptée dans la loi sur les Jeux olympiques et paralympiques. Je vous ai exposé les difficultés qui s'y rattachent. Je m'en remettrai à la sagesse du Parlement puisque je l'ai éclairé sur l'ensemble du dispositif.
Je n'ai pas du tout voulu me montrer cavalier à l'égard de Martial Saddier, qui a fourni un gros travail en commission. Il nous semblait simplement que 2023 était une date très éloignée et qu'il ne fallait pas se saisir dans l'urgence de certains dispositifs valables pour Paris, avec les difficultés particulières de l'urbanisme à Paris, et qui ne nous semblent pas devoir être étendus. Toutefois, étant donné que le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée, le rapporteur que je suis ne peut pas faire autrement que de faire de même.
L'amendement no 535 est adopté.
L'article 16 bis, amendé, est adopté.
La parole est à Mme Bénédicte Taurine, première oratrice inscrite sur l'article 17.
Cet article concerne la dématérialisation. Il ne faudrait pas que, sous couvert de simplification, nous en arrivions à réduire le nombre de personnels dans les différentes administrations. Du fait de la fracture numérique, la dématérialisation des documents et des procédures ne facilite pas forcément la vie des gens.
Je souhaite aussi que l'on s'interroge sur la raison pour laquelle les communes peuvent être favorables à cette dématérialisation : cela vient-il de ce que les procédures sont plus simples ou de l'état de leur budget, qui les oblige à trouver des alternatives moins chères ?
Par ailleurs, l'étude d'impact précise que l'économie pour les entreprises serait de 4 millions d'euros. En revanche, pour les particuliers, elle indique qu'il serait plus rassurant, dans un premier temps, de préférer le papier, qui donne lieu à un contact humain. Je m'interroge sur le fait de privilégier la dématérialisation sans forcément favoriser l'intérêt de la population.
L'article 17 concerne tout d'abord les données demandées aux collectivités territoriales. Il existe en effet un « Système d'information et de traitement automatisé des données élémentaires sur les logements et les locaux », dit Sitadel, qui est un fichier à finalité statistique rassemblant toutes les autorisations d'urbanisme délivrées par les collectivités locales.
L'objectif du nouvel article L. 423-1 du code de l'urbanisme, introduit par le projet de loi, consiste à élargir le champ des documents demandés au service instructeur des collectivités pour répondre aux nouveaux enjeux de la dématérialisation de l'instruction des demandes d'urbanisme. Il convient de rappeler à cet égard que la loi ALUR a mis fin, au 1er juillet 2015, à la mise à disposition gratuite des services de l'État pour toute commune compétente en matière d'urbanisme, dès lors qu'elle appartient à une communauté de 10 000 habitants et plus. La loi NOTRe a encore réduit le nombre de ces communes en portant la taille minimale des EPCI à 15 000 habitants, sauf dérogation. L'organisation d'un service commun reposant sur la dématérialisation des procédures à l'échelle de la commune a été retenue par une grande majorité des territoires. Mais si ce processus paraît bien avancé en zone urbaine, il est à l'évidence moindre dans certaines zones rurales, où l'impact risque d'être plus important.
Par ailleurs, l'article 17 confirme les objectifs très exigeants fixés aux collectivités territoriales en matière de dématérialisation de l'instruction des permis de construire. Or l'Association des maires de France souhaite que l'ensemble des obligations en matière de dématérialisation des permis de construire soit reportées à 2022. Il s'agit d'un sujet très sensible dans la mesure où ce dispositif constitue la première des mesures relatives au vaste chantier de la dématérialisation des autorisations d'urbanisme voulu par le Gouvernement dans le cadre de sa stratégie logement et réaffirmé encore par le Premier ministre Edouard Philippe, le 1er février, dans le cadre du programme Action publique 2022. Je vous proposerai donc un amendement pour accompagner cette transition.
Ces deux amendements ne portent pas sur le même alinéa mais visent le même objectif. L'article 17 prévoit l'élargissement des finalités et du champ du fichier Sitadel, qui rassemble les données statistiques sur les autorisations d'urbanisme. J'aimerais que ces nouvelles dispositions ne créent pas de charges pour les collectivités, qui auront de nouvelles données statistiques à établir. Il faut donc prévoir une transmission automatique à partir des fichiers de demandes d'autorisation d'urbanisme et d'instruction des communes, pour un traitement automatisé vis-à-vis de l'administration et un remplissage automatique du fichier Sitadel. Tel est l'objet de ces deux amendements. Je vous laisse choisir celui que vous préférez, messieurs les ministres !
Pour le premier, demande de retrait. Un décret est prévu à l'alinéa 3 de l'article 17 : il précisera les modalités et les conditions de transmission des informations aux autorités administratives compétentes.
Pour le deuxième amendement, toutes les communes n'ont pas forcément les moyens informatiques suffisants pour mettre en place dès aujourd'hui un système de communication automatique des données. Avis défavorable à ce deuxième amendement.
Je partage avec Mme de La Raudière l'idée que la numérisation et le transfert des données vont vraiment dans le sens de l'histoire. Du reste, pour répondre aux propos du député Lagarde, la principale sanction des maires ne sera pas forcément financière. De par la loi, à partir de fin 2022, l'ensemble des dépôts et du traitement des documents d'urbanisme se fera de manière dématérialisée. Dès lors, cela sera très simple. Nous savons tous que nous ne pouvons envoyer un dossier que s'il est complet ; mais inversement, une fois qu'il est envoyé, plus personne ne peut venir vous dire qu'il n'est pas complet ! Demain, c'est-à-dire en 2022, …
… nous passerons à ce nouveau dispositif, ce qui est la meilleure des certitudes pour accélérer véritablement, pour ne plus avoir à se demander s'il manque encore une pièce, pour ne plus s'entendre dire qu'il faut revenir parce qu'il en manque une ou qu'elle n'est pas au bon format. Informatiser l'ensemble de ce traitement permettra de lutter efficacement contre cela.
Concernant le transfert de données, il faudra effectivement y venir un jour ou l'autre. La difficulté, pour vous parler franchement, c'est qu'on ne sait pas le faire aujourd'hui. On pourrait l'inclure dans la loi, mais on ne sait pas faire. Ma responsabilité et mon honnêteté m'obligent à vous dire que si nous le faisions, je mets ma main à couper que dans deux ou trois ans, un amendement serait déposé pour demander de rallonger ce délai.
C'est le sens de l'histoire, vous avez fondamentalement raison ! Aujourd'hui, nous faisons en sorte que tout soit numérisé et que cette base de données existe, sachant que le secteur du logement est très en retard sur ce sujet, ou en tout cas vraiment pas en avance. Mais vous donner un avis favorable serait une solution de facilité, avec beaucoup d'optimisme mais pas de réalisme. Je vous demande donc de retirer ces amendements ; à défaut, avis défavorable.
Je retire ces amendements. J'aimerais que la conception de la téléprocédure des demandes d'autorisation intègre cela. J'en profite pour souligner qu'à l'alinéa 4 – « les communes dont le nombre total d'habitants est supérieur à un seuil défini par décret disposent d'une téléprocédure spécifique » – il faut prendre en compte que dans certains territoires, ce sont les communautés de communes qui instruisent les dossiers d'autorisations d'urbanisme. Celles-ci le font aussi pour des communes de 150 à 200 habitants : j'ai donc peur que ce seuil, qui ne précise pas que cela peut inclure les communautés de communes, soit réducteur par rapport à ce qui se passe dans certains territoires.
Cet amendement, déposé avec le soutien de la délégation aux collectivités territoriales, vise à sensibiliser le Gouvernement à la problématique de la dématérialisation des demandes d'autorisation d'urbanisme. Il complète l'amendement adopté en commission, qui a permis de laisser subsister dans le code de l'urbanisme l'obligation d'un traitement dématérialisé de l'ensemble de la procédure des autorisations d'urbanisme à compter du 1er janvier 2022.
Le présent amendement vise donc à préciser quelles communes feront l'objet de cette obligation de disposer d'une téléprocédure spécifique pour recevoir et instruire les demandes d'autorisation d'urbanisme dématérialisées à compter du 1er janvier 2022. L'étude d'impact indique que ce seuil pourrait être fixé à 3 500 habitants, pour être cohérent avec les obligations de la réglementation relative à l'open data. Il y a 2 948 communes qui comptent plus de 3 500 habitants. Elles regroupent 42 millions d'habitants, soit 67 % de la population totale. Du point de vue de la volumétrie, elles représentent 51 % de l'ensemble des actes pris annuellement.
La parole est à M. Jean-Luc Lagleize, pour soutenir l'amendement no 1609 .
Le présent amendement a pour objet de préciser que ce seuil ne sera pas inférieur à 3 500 habitants.
Vous gardez la parole, monsieur Bazin, pour soutenir l'amendement no 258 .
Cet amendement vise à préciser que le seuil ne sera pas inférieur à 5 000 habitants dans un premier temps.
Sur le seuil de 3 500 habitants, nous sommes d'accord mais cela doit être fixé par voie réglementaire et non législative. Demande de retrait, sinon avis défavorable.
Dans la mesure où l'on m'assure qu'un décret prévoira ce seuil de 3 500, je retire mon amendement.
L'amendement no 1974 est retiré.
L'amendement no 1609 est retiré.
L'amendement no 888 est retiré.
L'amendement no 258 est retiré.
Cet amendement de M. Maquet vise à baser le seuil de dématérialisation de l'instruction des demandes de permis de construire sur les rôles de la taxe foncière sur les propriétés bâties, plutôt que sur la simple démographie des communes. En effet, il peut y avoir d'énormes variations sur ce point, notamment dans les communes non touristiques.
Nous avons eu ce débat en commission : le nombre d'habitants nous paraît davantage pertinent que le nombre de personnes assujetties à la taxe foncière. Avis défavorable.
Les amendements ayant été retirés, je n'ai pas pu présenter un sous-amendement, dont je pense que nous devrions nous inspirer. Mme de La Raudière a raison : il n'est pas très compliqué pour vous, messieurs les ministres, de déposer un amendement précisant « communes ou intercommunalités ». Vous pouvez le faire très vite, dès maintenant ou dans la navette, mais il faut absolument le préciser.
Ce sera fait dans la navette !
J'ai moi aussi une proposition à faire pour rendre le dispositif plus efficace. Je comprends très bien la logique qui vous a conduit à proposer ce seuil des 3 500 habitants mais il faudrait que cette faculté soit ouverte aussi aux communes de moins de 3 500 habitants volontaires. Or la rédaction actuelle exclut cette possibilité.
Je vous invite donc à faire en sorte au cours de la navette que les communes de 1 000 habitants qui veulent recours à ce dispositif de téléprocédure puissent le faire.
L'amendement no 604 n'est pas adopté.
La parole est à M. Martial Saddier, pour soutenir l'amendement no 152 .
L'amendement no 152 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 17 est adopté.
Je suis saisi de deux amendements portant article additionnel après l'article 17.
La parole est à M. Guillaume Vuilletet, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, pour soutenir l'amendement n° 3072 .
Cet amendement a été adopté par la commission des lois saisie pour avis.
Le géoportail qui va permettre de consulter l'ensemble des documents d'urbanisme sous forme numérique est absolument nécessaire en ce qu'il permettra de conduire des projets de construction en sachant où on va. C'est vrai pour l'existant, mais c'est vrai aussi pour les modifications en cours ou auxquelles les collectivités souhaitent procéder. Elles sont nombreuses à les présenter sur leur site mais il nous paraît utile qu'un dispositif central soit dédié à recueillir ce type d'informations, sur la base du volontariat.
Même si cet amendement n'a pas survécu à son examen par la commission des affaires économiques, nous ne perdons pas l'espoir de vous convaincre de sa pertinence.
Cet amendement n'a pas survécu en effet parce qu'il nous semble qu'il est problématique de mettre en ligne des documents à caractère provisoire et qui pourraient induire en erreur ceux qui les consulteraient. C'est la raison essentielle de notre avis défavorable.
Même avis. Il y a là en effet un risque d'insécurité : mettre en ligne des projets encore en discussion n'est pas conforme à l'objectif qui est le nôtre.
L'amendement no 3072 est retiré.
Considérant les assurances que M. Mézard nous a données tout à l'heure, je retire cet amendement.
L'amendement no 1744 est retiré.
L'article 17 bis, amendé, est adopté.
L'article 17 ter est adopté.
Cet amendement vise à maintenir la présence de l'architecte tout au long de la réalisation des travaux, pour en assurer le suivi. Je pense d'abord que c'est de bonne pratique et qu'en outre c'est pour les bailleurs sociaux privés ainsi que pour les usagers une garantie de durabilité et de réussite des projets. Enfin cela peut également garantir le maintien dans nos quartiers du beau, de l'agréable et de l'utile.
La parole est à Mme Brigitte Kuster, pour soutenir l'amendement no 1422 .
Cet amendement déposé par Mme Valentin vise à garantir aux maîtres d'ouvrage, bailleurs sociaux ou promoteurs privés et surtout aux usagers la qualité des logements et la conformité de leur réalisation, que ce soit dans le cadre d'une construction neuve ou d'une rénovation que l'on ne peut envisager du seul point de vue énergétique. Pour cela il est nécessaire de renforcer le suivi des travaux et leur direction.
La présence d'un architecte concepteur tout au long de la réalisation des travaux permettra d'atteindre ces objectifs. Ce dernier pourra également adapter le projet aux modifications souhaitées ou nécessaires, obtenir éventuellement des permis modificatifs, jusqu'à la signature de la déclaration d'achèvement et de conformité des travaux – DACT.
Il est défavorable, même si on voit l'intérêt de ce qu'on appelle en termes d'architecture et d'urbanisme la « mission complète », par laquelle l'architecte qui établit le projet en suit la réalisation. Il faut cependant, dans l'hypothèse notamment où les moyens financiers manqueraient, laisser au maître d'ouvrage la liberté de choisir qui aura la charge de suivre la réalisation du projet. Cela pourra être d'ailleurs par des hommes de l'art qui, sans être architectes, seraient tout à fait compétents pour s'acquitter de cette tâche.
De nombreux amendements, qui émanent d'un certain nombre de membres de l'Assemblée, sont identiques. Identiques à la virgule près.
Sourires.
Pour être franc, madame de La Raudière, cela m'est arrivé à moi aussi ! Mais quand cela arrive, c'est qu'il y a une signature commune…
Ceci étant dit, je suis tout à fait d'accord avec la commission : l'important c'est qu'on doive recourir à un architecte pour obtenir le permis de construire. Cette obligation a d'ailleurs été étendue au fil des années et c'est très bien ainsi. Mais aller jusqu'à prévoir que « Pour la construction neuve, la rénovation ou la réhabilitation de logements collectifs ou de groupements d'habitations de plus de deux logements, l'architecte chargé d'établir le projet architectural mentionné à l'alinéa précédent assure le suivi de la réalisation des travaux, et le cas échéant, leur direction » me semble excessif ! D'autant que cela interdirait de changer d'architecte : il serait impossible de recourir à un autre architecte que celui qui aura établi les plans, alors que cela peut s'avérer nécessaire dans la vraie vie.
Nous tenons au régime de l'autorisation d'urbanisme mais là, ce serait aller beaucoup trop loin.
L'article 18 A est adopté.
Il s'agit là encore des architectes, plus précisément des architectes conseils. Je vois sourire le rapporteur : nous en avons déjà débattu en commission… Cet amendement a pour objet de rendre obligatoire la consultation d'un architecte conseil pour l'examen des demandes de permis de construire des constructions de plus de 50 mètres carrés d'emprise au sol.
Il ne s'agit pas de compliquer la tâche des services instructeurs, mais de les aider au contraire. L'aide d'un architecte serait utile à ces personnels administratifs, éloignés du terrain, pour améliorer leur appréciation du projet du point de vue architectural voire de celui de l'insertion. Je pense que nos paysages urbains, périurbains et ruraux s'en trouveraient améliorés.
Il est défavorable. Les services chargés de délivrer les autorisations d'urbanisme peuvent déjà faire appel à un regard extérieur et ils le font très souvent. Ainsi les communes disposent souvent d'un architecte conseil.
De manière générale nous sommes défavorable à l'institution de ce type d'obligations.
Je partage l'avis du rapporteur. Finalement vous demandez que le service instructeur ait l'obligation de consulter un architecte conseil pour toutes les constructions de plus de 50 mètres carrés d'emprise au sol. Pour avoir pendant de longues années suivi l'instruction de demandes de permis en tant qu'adjoint au maire, je vous assure que cela ne serait pas très raisonnable !
Qu'en revanche on puisse faire appel à un architecte conseil en cas de difficulté, cela me paraît une évidence, et les collectivités locales consultent des architectes autant que de besoin. Certains ont passé des contrats en ce sens ! Mais de là à rendre cette consultation obligatoire pour tout projet de plus de 50 mètres carrés d'emprise au sol ! C'est aller trop loin.
Quand j'étais maire d'une commune du littoral landais en plein développement, avec une population qui augmentait de 4 % par an, j'ai dû recourir aux services d'un architecte conseil et je peux vous dire que l'urbanisation a changé du tout au tout d'un point de vue qualitatif, surtout s'agissant des lotissements. Ce sont eux qui savent gérer un paysage, insérer un motif d'architecture... Car il est bon que les Landes ressemblent aux Landes et que l'Alsace reste l'Alsace, même avec de l'architecture contemporaine !
L'amendement no 1765 n'est pas adopté.
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article.
La parole est à Mme Mathilde Panot.
Comme beaucoup, et comme je l'avais déjà dit lors de la discussion générale, nous allons défendre des amendements visant à supprimer cet article.
Sans doute, chers collègues, avez-vous tous reçu des mails de la part d'associations représentant des personnes en situation de handicap qui s'inquiètent des dispositions de cet article tendant à diminuer les exigences des normes d'accessibilité. Ces treize organisations représentatives notent, en particulier, que la loi ELAN rompt avec le principe de l'universalité de l'accessibilité au logement, laquelle ne concerne d'ailleurs pas les seules personnes en situation de handicap, mais aussi des parents avec une poussette, des personnes âgées… Bref, c'est le confort de toutes et de tous qui est en jeu.
Cet article revient sur ce qui avait été voté en 2005 dans la loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées dite loi handicap : dans le neuf, les logements situés près des ascenseurs et en rez-de-chaussée devaient être accessibles à 100 %. Vous proposez de revenir à 90 % de logements évolutifs ce qui, selon les professionnels, relève d'un enfumage puisqu'on ne sait pas si cela sera réalisable.
En outre, personne ne saura dire – peut-être pourrez-vous nous éclairer ? – comment se feront les contrôles : une personne en situation de handicap aura-t-elle un véritable accès au logement si un propriétaire rechigne à lui en louer un parce qu'il faudrait réaliser des travaux, même minimes ? Qui paiera cette évolution du logement ? Il faut noter d'ailleurs que tous les murs ne seront pas concernés, comme quand deux chambres sont séparées par un mur. Et comment les personnes en situation de handicap – et au-delà l'ensemble de la population, puisque les mesures d'accessibilité bénéficient à toutes et tous – pourraient-elles rendre visite à leurs amis, à leur famille ?
Nous nous opposons fermement à cet article et j'espère que vous nous donnerez des réponses satisfaisantes à ces questions.
Mme Bénédicte Taurine applaudit
Je vais m'exprimer un peu longuement sur l'article mais je serai un peu plus rapide sur les amendements.
De quoi parle-t-on ? La France compte 35 millions de logements, dont 29 millions, environ, de résidences principales. Nous produisons dans les très belles années 350 000 logements collectifs – l'objectif étant de 500 000, mais on a du mal à y arriver. Sur le parc total, cela fait 1,2 % des logements qui sont concernés par an, sur lesquels vous proposez que 10 % soient accessibles, le reste étant évolutif.
Je me pose une question sur ces logements collectifs, dont les deux tiers bénéficient directement ou indirectement d'aides publiques, en financement initial ou sur un plan fiscal : on compte à peu près 120 000 logements « aidés », et quasiment la moitié des autres logements collectifs privés est destinée à des investissements locatifs, en dispositif Pinel et autres.
Avec le vieillissement de la population, il y a des enjeux d'adaptation. Nous savons bien que lorsque quelqu'un est victime d'un accident de la vie, il se tourne vers le maire en demandant s'il dispose d'un logement accessible rapidement. N'a-t-on pas un devoir d'exemplarité en la matière, alors que la production de ce type de logements, sur le parc total, est minime ?
Vous ne manquerez pas de faire état d'un de vos amendements, qui devrait nous rassurer quant à ce que vous entendez par « évolutif » et par transformation en « accessible ».
Pour gagner des concours, des promoteurs ont proposé que leurs logements soient évolutifs. Vous allez dire que c'est étonnant mais, pour eux, le socle technique universel, c'est le logement accessible. Ils se vantent d'aller plus loin et demandent au maire un îlot pour construire des logements évolutifs, leur objectif étant en fait de « plugger » un certain nombre de dispositifs destinés aux familles, ou aux personnes âgées qui vieilliront dans le logement. L'accessibilité, d'une certaine manière, c'est le socle technique.
Si votre amendement vise à ce que les volumes puissent être facilement adaptés et accessibles, on en revient finalement au même. L'argument initial pour diminuer l'exigence d'accessibilité, c'est qu'il faut que ça coûte moins cher. Mais il n'est pas valable, puisque dès la construction du bâtiment, il faudra que les trames soient idéales, pour faciliter les choses. Il risque d'ailleurs d'y avoir des contentieux, avec des acquéreurs, après revente, qui jugeront que les travaux à réaliser ne sont pas minimes. Pour ne pas subir de recours, les promoteurs assureront l'accessibilité d'office, et l'on en sera revenu au point initial.
Je suis plutôt favorable au maintien de l'accessibilité pour 100 % et que l'on travaille à des incitations fiscales pour aller au-delà, pour rendre des logements vraiment évolutifs, au-delà de l'accessibilité. Ce serait là une véritable avancée sociale. Nous savons bien que cela a un coût : des packs pour rendre des logements vraiment évolutifs peuvent représenter jusqu'à 10 000 euros pour un logement qui en coûte 200 000. Peut-être pourrait-on imaginer une TVA réduite ou des déductions fiscales ?
Il s'agit d'une vraie question. Il faut entrer dans la technique, sinon, on risque d'avoir un problème. Je comprends votre intention – construire moins cher – mais si on adopte votre amendement, je ne suis pas sûr qu'in fine les producteurs pourront construire moins cher. Ils seront juste dans le flou, et comme toujours dans pareil cas, on a tellement peur de ne pas donner satisfaction au client que l'on cherche à se prémunir. Le malaise, en l'occurrence, est réel.
Sans doute ne prendrait-on aucun risque en gardant notre socle technique universel tel qu'il est et en prévoyant des évolutivités qui aillent au-delà de ce que vous envisagez. Je pense à la domotique par exemple, qui est un vrai sujet. De ce point de vue-là, ce qui a été fait au Fort d'Issy est remarquable – mais on voit bien qu'on a été au-delà de l'accessibilité ! Cela demande des moyens mais, à mon avis, le projet de loi de finances pourrait inclure des dispositifs très intéressants.
Je suis heureux que l'on arrive à ce débat, qui a lui aussi fait l'objet de discussions intéressantes en commission des affaires économiques.
La dimension principale de cet article, selon moi, est l'évolutivité. Cette loi ELAN vise à proposer des solutions aux Français, à s'adapter à l'évolution de la société et des parcours et, s'agissant de cet article 18, à l'évolution du handicap.
Nous proposons d'en venir à 100 % de logements accessibles, c'est-à-dire que tous les logements continueront à l'être, notamment pour des personnes en fauteuil roulant – 850 000 personnes à mobilité réduite – PMR – en utilisent un.
Se posent aussi les questions, que nous avons longuement évoquées en commission des affaires économiques, du handicap, du vieillissement de la population et de la façon d'adapter un logement en raison de l'évolution du handicap. A mon sens, l'évolutivité est essentielle. C'est le coeur du sujet, et je suis heureux que nous puissions discuter bientôt de l'amendement du Gouvernement clarifiant sa définition.
Je vais être rassurant : avec les rapporteurs, notamment, nous avons rencontré l'association des paralysés de France. Nous proposons une évolution de bon sens – nous pourrons débattre de la question des prises en charge – qui permet d'être au plus près des besoins des Français. C'est pour cela que nous défendons cette loi ELAN. C'est ce vers quoi nous devons tendre.
Je voterai bien entendu cet article après nos discussions. Il faut répondre aux attentes des Français touchés par de telles situations, qu'il s'agisse d'un handicap de naissance ou d'un accident de la vie – nous en connaissons tous. La rédaction de cette loi, les améliorations que nous lui apporterons à travers cet article 18 permettront de garantir que nous pourrons nous adapter aux besoins de ces personnes en fonction de l'évolution de leur vie et, le cas échéant, de leur handicap.
Nous allons discuter de cette belle avancée. Encore une fois, la notion d'évolutivité est au coeur de nos débats.
Applaudissements sur les bancs de la commission et du groupe LaREM.
Sur les amendements identiques nos 545 , 562 , 889 , 1901 , 2223 et 3070 , je suis saisi par le groupe La France insoumise d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Alain Ramadier, pour soutenir l'amendement de suppression no 545.
La parole est à Mme Constance Le Grip, pour soutenir l'amendement no 562 .
Il s'agit donc d'un de ces amendements de suppression que défendent plusieurs groupes parlementaires dont, donc, Les Républicains.
Nous avons bien entendu les incompréhensions, voire les inquiétudes d'un certain nombre d'associations, d'organisations représentant les personnes en situation de handicap. Je pense que le Gouvernement les a également entendues, d'où son amendement visant à modifier l'article initial.
Compte tenu des incompréhensions, des inquiétudes et de la difficulté que nous avons à envisager un recul, une marche arrière du principe d'accessibilité universelle, le plus simple serait de supprimer l'article 18 afin de repartir sur d'autres bases. Comme l'a dit Thibault Bazin, il faut maintenir le principe d'accessibilité à 100 % des logements neufs et travailler à proposer des dispositifs innovants en matière d'évolutivité des logements, dans le cadre de différents rendez-vous parlementaires comme celui-ci ou la discussion du budget.
Nous, députés Les Républicains, souhaitons réaffirmer que le principe d'accessibilité universelle est à nos yeux très important. Le retour en arrière nous semble ouvrir une boîte de Pandore et, en tout cas, constituer un signal extrêmement négatif envoyé à toutes les familles, à toutes les personnes en situation de handicap, sans que cela soit tout à fait conforme aux évolutions liées notamment au vieillissement de la population que nous connaissons.
Pour répondre à l'inquiétude, nous souhaitons supprimer la version actuelle de l'article 18. Encore une fois, nous considérons la rédaction que vous proposez comme une remise en cause, un renoncement aux grandes lois, aux grandes avancées législatives et sociétales qui ont été emblématiques de notre pays – je pense à la grande loi handicap de 2005, à l'engagement de plusieurs gouvernements, de plusieurs Présidents de la République. Il s'agit d'une atteinte au principe d'égalité qui contient un risque potentiel de discrimination qui va à l'encontre des grands principes.
Pour pouvoir retravailler et repartir sur de meilleures bases plutôt que de se contenter d'un correctif, d'un toilettage avec votre amendement, nous souhaitons donc la suppression pure et simple de cet article.
Je connais votre rigueur intellectuelle, monsieur le ministre. Je souhaite un débat de fond. J'ai travaillé chez un promoteur pendant dix ans : je sais exactement ce qu'ils demandent. Vous leur demandez comment faire pour construire moins cher et ils vous répondent qu'il faut réduire les normes, notamment celle sur l'accessibilité.
Mais dans le coût de la construction, la norme accessibilité ne représente pas grand-chose pour des logements qui sont vendus 8 000 euros le mètre carré. On sait très bien que la part du coût de construction n'est pas l'essentiel et que, de surcroît, d'autres normes sont beaucoup plus coûteuses, notamment la thermique – même si elle est souhaitable compte tenu de certains objectifs.
Construire moins cher, cela suppose que l'évolution de la norme permette de construire des surfaces moins importantes, en particulier pour les pièces humides. Depuis la loi sur l'accessibilité, il a fallu que les toilettes soient assez spacieuses. Qu'ont fait les promoteurs ? Ils ont diminué la taille des séjours – et tout le monde a pu se faire la réflexion que les studios étaient assez disproportionnés, par exemple.
L'amendement que vous allez proposer suppose la possibilité de faire évoluer l'appartement : la personne qui se retrouverait en fauteuil roulant continuerait ainsi à pouvoir entrer dans les toilettes et se servir des différentes pièces. Mais pour rendre cette évolutivité possible, le constructeur doit prévoir les surfaces adéquates. Il n'y aura donc ni surface en moins ni gain de coût. Je pense que certains pourraient même, de façon subtile, rogner un peu de surface, et ce sont les acquéreurs qui se retrouveront alors face à un problème, quelques années plus tard, quand leur locataire ou eux-mêmes devront faire évoluer le logement.
Je ne suis pas sûr que ce soit la bonne voie. Nous sommes là pour donner un élan à la construction de logements plus accessibles, plus adaptés au vieillissement de la population. Cela demande de prendre pour base notre socle technique universel en matière d'accessibilité, qui fait notre fierté, pour ensuite avancer vers l'évolutivité, qui va plus loin encore – car il n'y a pas que la surface qui compte.
Menons un débat de fond, pas un débat tronqué. Non seulement votre proposition ne répond pas aux objectifs de votre texte, mais elle peut être contreproductive. On est en train de demander aux bailleurs sociaux d'accueillir un public qui a besoin de logements à l'accessibilité facilitée, aux promoteurs d'offrir des logements adaptés au vieillissement, et on leur dit en même temps de ne pas le faire !
C'est compliqué. Je vous demande de renoncer à ce projet et d'envisager, dans le cadre du projet de loi de finances, des dispositifs attractifs et incitatifs pour aller au-delà de l'accessibilité.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 1901 .
On le sait, le handicap est aujourd'hui le premier motif de discrimination dans les saisines du Défenseur des droits en France. Or ce texte, qui prévoit de passer de 100 % de logements neufs accessibles à 100 % de logements évolutifs, inquiète énormément, et c'est un euphémisme, les handicapés et les associations qui les défendent. En effet, la définition du logement évolutif reste très imprécise et cette disposition représente une véritable régression pour les personnes handicapées. L'adopter constituerait un signal extrêmement négatif et un simple toilettage ne me semble pas suffisant. Il est donc souhaitable de supprimer purement et simplement l'article 18.
La parole est à Mme Bénédicte Taurine, pour soutenir l'amendement no 2223 .
Notre groupe demande également la suppression de cet article. La législation actuelle, en l'occurrence la loi de 2005, prévoit que l'ensemble des logements situés en rez-de-chaussée des bâtiments d'habitation collectifs – BHC – ainsi que tous les logements situés dans un BHC de quatre étages ou plus doivent être accessibles et adaptés à l'usage des personnes handicapées. Le présent article prévoit de passer d'un principe général d'accessibilité à un quota de 10 % d'accessibilité et 90 % de logement évolutif. La Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés, avec plusieurs organisations représentatives des personnes en situation de handicap et de lutte contre l'exclusion ainsi que le Conseil national consultatif des personnes handicapées, ont exprimé leur incompréhension face à cet article 18.
D'une part, avec seulement 2 300 logements neufs chaque année, cette mesure réduit considérablement l'offre de logements accessibles ; d'autre part, le terme de logement évolutif ne renvoie aucunement à la législation actuelle. Enfin, l'article ne précise ni le délai ni le coût des travaux, pas plus que la personne devant les financer. Jusqu'à présent, nous n'avons pas eu de réponse à ces interrogations.
Cette mesure est contraire à tout projet d'amélioration de l'accessibilité visant la construction d'une société digne et solidaire. Elle risque d'exclure encore davantage les personnes en situation de handicap en renforçant le cercle vicieux : problèmes d'accès au logement, difficultés d'accès à l'emploi, freins à l'inclusion, etc.
Selon l'étude d'impact, l'objectif poursuivi est que les logements dits évolutifs sont livrés accessibles jusqu'à la porte d'entrée – encore heureux ! – y compris le séjour et le cabinet d'aisance. Pour le reste, la mise en accessibilité de l'ensemble des pièces de l'unité de vie est réalisable ultérieurement par des travaux simples. On ne sait pas très bien ce que signifie l'expression « travaux simples », et cela ne semble pas correspondre aux propos de notre collègue Nogal. C'est pour ces raisons que nous vous demandons la suppression de cet article.
Le débat sur ces amendements de suppression tourne à la discussion générale sur le sujet. Monsieur Bazin, nous nous connaissons bien : vous ne pouvez pas imaginer une seule seconde que nous ayons fait cette proposition pour faire plaisir aux promoteurs ! C'est un état d'esprit : construire des logements adaptables pour tous les Français, handicapés ou non. C'est l'essence même de la notion d'évolutivité, qui est au centre de l'article 18, et je voudrais vous en convaincre.
Mme Taurine vient de rappeler le cadre dans lequel s'inscrit cette proposition : une grande partie de l'appartement livré doit déjà être accessible, le reste étant évolutif. Cet article vise à trouver un équilibre optimal entre l'accessibilité et ce qu'il est convenu d'appeler la qualité d'usage des logements, que vous avez vous-même évoquée. Comme le souligne le rapport d'évaluation de la loi handicap de 2005, la législation et la réglementation actuelles n'offrent pas un espace suffisant à l'adaptabilité des logements neufs, voulus, à peu d'exceptions près, comme immédiatement utilisables par des personnes contraintes.
Je voudrais tous vous convaincre que notre état d'esprit est de privilégier l'évolutivité, sans ostracisme à l'égard d'aucune catégorie de handicapés. Je vous invite donc à rejeter ces amendements de suppression.
L'article 18 a déjà fait l'objet de longs débats en commission. Je suis défavorable aux amendements de suppression, mais je voudrais revenir sur certains points, car il nous faut être clairs sur la proposition, l'intention et la méthode du Gouvernement.
Pour commencer, l'enjeu ne porte pas uniquement sur les personnes en situation de handicap, ou à mobilité réduite : il s'agit bien plutôt de la société d'inclusion sur laquelle le Gouvernement est pleinement mobilisé, comme en témoignent notamment les travaux de Sophie Cluzel. Je ne reviendrai pas sur notre action dans ce domaine, au travers des budgets ou des initiatives, mais il est bien question de la société de demain, qui se doit d'être inclusive. Comme vous l'avez souligné, monsieur Bazin, le vieillissement de la population doit être pris en compte dès maintenant.
Ensuite, le sujet, et surtout l'expression même de « logement évolutif » ne viennent pas de nous, mais d'une association représentant les personnes en situation de handicap. Comme le rapporteur, je voudrais vous convaincre, monsieur Bazin, que la proposition ne vient pas de telle ou telle personne, mais bien du travail réalisé en commun.
Je ne dis pas du tout que c'est ce que vous vouliez sous-entendre, et je vous en remercie ; mais cela va mieux en le disant.
Cette proposition résulte d'un long travail que nous avons mené avec les associations représentant les personnes en situation de handicap, pour passer d'une logique de 100 % de logements adaptés à une logique de 100 % de logements évolutifs qui accompagnent l'individu tout au long de sa vie. En effet, on peut avoir un accident, on est appelé à vieillir. Un jeune couple avec enfants qui a la chance de ne pas être en situation de mobilité réduite préférera que les mètres carrés de la salle de bain, qui doit actuellement être très grande, soient affectés à la chambre des enfants. Mais si un drame survient, ou la vieillesse venue, il faut pouvoir adapter l'appartement et reconstruire la salle de bain facilement. D'autres questions se posent alors, sur la manière de faire réaliser ces travaux rapidement et de s'assurer que ceux qui n'en ont pas les moyens puissent les financer. Ce sont des sujets importants et on y reviendra ; l'essentiel est que le logement m'accompagne dans les étapes de ma vie.
Tout au long de la vie, on peut également recevoir chez soi des personnes en situation de handicap ; c'est pourquoi les logements évolutifs sont aujourd'hui conçus de façon à rendre les visites de personnes en situation de mobilité réduite possibles. Je corrigerai un détail, monsieur Bazin : vous avez mentionné les toilettes, mais celles-ci sont aujourd'hui, dans les logements évolutifs, des pièces adaptées. En effet, lorsqu'on rend visite à quelqu'un, on doit pouvoir utiliser le salon et les toilettes, pas forcément la salle de bain.
On opère donc un changement d'approche, passant d'un logement 100 % adapté à un logement qui vous accompagne tout au long de votre vie. J'insiste : nous avons travaillé la question avec des associations de personnes en situation de handicap. Cela ne veut pas dire que les associations sont toutes d'accord avec notre proposition ; mais celle-ci, et jusqu'aux termes utilisés, vient bien des consultations que nous effectuons régulièrement.
Enfin, et je veux être très ferme sur ce point, il ne s'agit ni de près ni de loin d'une question de coût. Ce changement d'approche ne permet en aucun cas, à quiconque, de faire un euro d'économie. En effet, la seule réponse qu'apporte cette mesure est en termes d'espace disponible à un moment de votre vie : il s'agit d'utiliser plus ou moins de mètres carrés dans la chambre ou dans la salle de bain. Ce n'est donc pas une question d'économie.
J'ai bien entendu que vous vous demandiez si certains n'allaient pas essayer de vendre des appartements plus petits. Cependant, d'une part le prix du mètre carré est fonction de la surface, d'autre part les logements doivent pouvoir être adaptés avec des travaux simples, et donc disposer de caractéristiques permettant cette transformation.
Je m'arrête là, car nous y reviendrons à la faveur des amendements suivants. Il me semble qu'il y a là une question qui importe à tous : il s'agit de définir la société d'inclusion de demain. Personne ne peut être ne serait-ce que soupçonné de vouloir déserter le chemin qui y conduit. En l'occurrence, le débat porte sur la possibilité d'imaginer un logement évolutif qui accompagne l'individu, et aussi sur les garde-fous et les financements à prévoir. Toutes ces questions méritent réponse et nourriront nos débats.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Comme nous l'avons dit en commission, les députés du groupe MODEM soutiennent le Gouvernement sur ce point : nous considérons que les mesures figurant à cet article sont de bonnes mesures de simplification. Le concept d'évolutivité permettra en effet d'assouplir les normes d'accessibilité. S'il n'avait pas été obligatoire que les toilettes – les lieux d'aisance, comme disait Mme Taurine – ou le séjour soient aux normes en matière d'accessibilité pour les personnes à mobilité réduite, nous aurions pu nourrir de légitimes interrogations, mais ce n'est pas le cas.
J'ai néanmoins des réserves, monsieur le secrétaire d'État, en ce qui concerne le coût. Si les chambres des logements font 10 mètres carrés contre 13 quand elles respectent les normes PMR, et si le séjour est un peu plus petit, on gagnera vite 5 mètres carrés. À 3 000 ou 4 000 euros du mètre carré, c'est un vrai bénéfice pour celui qui accède à la propriété. Abaisser ainsi le prix d'un logement de 10 000 ou 15 000 euros, cela permettra aujourd'hui à des gens de devenir gens propriétaires. C'est la même chose pour les locataires : cela permettra de faire baisser les loyers. Quand on connaît le niveau des loyers en zone tendue, notamment en région parisienne, c'est un vrai bénéfice. Nous nous en réjouissons et vous soutiendrons.
Je m'exprimerai brièvement, pour ne pas ralentir les débats. Je ne voudrais pas passer pour un vieux conservateur…
Sourires.
Dans les meilleures années, 350 000 logements neufs sont construits chaque année. Grâce à Mme Pinel, cela a été le cas, mais avec l'arrivée de ce gouvernement, monsieur le ministre, les chiffres sont en train de diminuer. En application de ce projet de loi, 10 % des nouveaux logements devront être accessibles, soit 35 000 logements – même si je pense que certains opérateurs feront plus.
Vous allez tenter de nous rassurer par l'amendement no 2997 , en nous disant que les logements évolutifs sont presque mieux que les logements accessibles. Mais si « évolutif » et « accessible » sont synonymes, alors je ne vois pas l'intérêt de ce changement !
La conception de ces logements pose un vrai problème, car cela coûte beaucoup plus cher de faire des travaux d'adaptation a posteriori que d'intervenir au stade de la conception. Prenons, par exemple, un appartement doté d'une toute petite salle de bain. Ce n'est pas très pratique pour ceux qui ont des enfants en bas âge ; le besoin d'une salle bain d'une certaine taille ne se fait pas sentir uniquement pour les personnes d'un âge avancé. Ce n'est pas négligeable.
Prenons la question des cloisons. Quand vous êtes jeune, en couple, sans enfant, dans la force de l'âge, vous préférez avoir un grand séjour et une petite salle de bain. Supposons que vous souhaitiez un jour décaler cette cloison : cela a un coût, mais vous le faites. Supposons qu'après un accident, vous vous retrouviez en situation de personne à mobilité réduite : il faudra alors installer des poignées sur la cloison. Or de nos jours ces cloisons sont généralement assez fragiles : on le voit avec les sèche-serviettes, sur lesquels il ne faut pas trop forcer sous peine d'arracher la paroi – certains en ont sans doute fait l'expérience.
L'évolutivité, cela n'a donc rien d'évident, surtout quand on n'a pas posé solidement les cloisons dès le début, de façon qu'elles puissent supporter le poids des personnes y prenant appui. J'ai choisi cet exemple concret pour que chacun ait bien conscience de ce problème fondamental. Je suis pour l'évolutivité, mais pour qu'elle soit possible, la base, c'est l'accessibilité.
Les deux tiers de notre production de logements collectifs sont destinés à des bailleurs qui les mettront en location. Le jour où les locataires auront besoin de faire réaliser des travaux, la question du coût de ces travaux se posera aux bailleurs, sociaux ou privés. Imaginez-vous bien ce que cela représente ?
Concernant l'évolutivité, vous ne m'avez pas convaincu. Nous allons à présent voter ces amendements identiques de suppression. Je continue à penser que quand il y a un flou, il y a parfois un loup. Je vous invite vraiment à considérer cette question avec le plus grand sérieux : parfois, derrière de bonnes intentions, peut se cacher une mauvaise idée.
Mmes Constance Le Grip, Mathilde Panot et Bénédicte Taurine applaudissent.
Nous sommes plutôt d'accord avec M. Bazin. Vous avez dit, monsieur le ministre, que les logements doivent être évolutifs pour s'adapter au vieillissement de leurs habitants. Il est vrai que cet aspect doit être pris en considération. Mais alors, pourquoi ne pas exiger que tous les logements soient par principe accessibles, et que le caractère évolutif joue dans l'autre sens ? Pourquoi ne pas renverser la logique ? Ce ne serait pas à la personne en situation de handicap de faire des travaux dans son appartement pour le rendre accessible, mais aux personnes valides de transformer le logement accessible selon leurs goûts ou leurs besoins.
Dernier point : votre amendement no 2997 ne mentionne pas la salle de bain parmi la liste des pièces qui devront obligatoirement être accessibles. Vous m'avez dit que, selon le type de visite, cet accès n'était pas indispensable. Je maintiens, pour ma part, que lorsque vous allez rendre visite à quelqu'un, ce n'est pas parce que vous êtes handicapé que vous n'avez pas besoin d'un accès à la salle de bain.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
J'ai écouté très attentivement vos explications, comme je l'avais fait en commission : je ne suis toujours pas convaincu. Je m'interroge sur les motivations de cette évolution. Tous ceux qui ont défilé dans mon bureau, depuis plusieurs années que je m'occupe d'urbanisme en tant qu'élu, pour se plaindre des normes d'accessibilité pour les personnes handicapées, étaient des promoteurs immobiliers.
En tout cas, ceux que j'ai entendu se plaindre de ces normes étaient principalement les promoteurs, pas les représentants des associations de personnes handicapées. Vous avez rencontré les associations, nous dites-vous : il n'en reste pas moins qu'elles ne sont pas convaincues par ce que vous proposez. Il y a eu concertation, mais vous n'avez pas emporté leur conviction ! C'est un problème car, qu'on le veuille ou non, la loi de 2005, malgré toutes ses imperfections, représentait une avancée, pour des personnes qui n'en ont pas connu beaucoup.
Deuxièmement, je suis d'accord avec Thibault Bazin : le plus important, dans un logement, c'est sa conception et sa réalisation initiale. C'est à ce stade que les choses doivent être faites. Vous voulez, quant à vous, rendre les logements évolutifs. Vous n'inventez rien : ils l'ont toujours été plus ou moins, car on peut toujours casser des éléments et en construire d'autres. Mais cela coûte cher, sans parler du fait que ces dispositions semblent en recul en matière d'accessibilité, le coût de ces travaux risque de causer une fracture sociale.
J'y insiste : le coût de l'évolutivité sera considérable. Qui le prendra en charge ? S'il s'agit de logement social – si tant est que subsiste demain du logement social dans notre pays – , les bailleurs pourront supporter le coût de ces travaux. Mais dans le secteur locatif privé, ces coûts très élevés seront assumés par le locataire ou le propriétaire occupant. Ceux qui pourront payer pourront adapter leur logement et ceux qui n'en auront pas les moyens vivront, comme c'était le cas il y a quelques années, dans des logements non adaptés.
Je n'ignore pas les problèmes que pose la législation actuelle, mais je ne considère pas que les réponses que vous y apportez soient satisfaisantes. Je vous le dis en face : pour moi, ces mesures représentent une régression.
Applaudissements sur le banc des groupe FI.
Monsieur Peu a parlé de « fracture sociale ». Notre famille politique, héritière de Jacques Chirac – je sais bien, monsieur le président, que nous n'avons pas de leçons de chiraquisme à vous donner – , ne peut souscrire à des dispositions qui représenteraient un recul par rapport à la loi de 2005, dont le principe est de prendre systématiquement en compte le handicap dans tous les champs de l'action publique.
Je ne vous reprocherai pas, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, de ne pas souhaiter plus de logements accessibles. En revanche, il faut faire attention à l'application, qui pourrait être mesquine, de ce seuil de 10 % de logements accessibles et de la notion de logements évolutifs. J'ai la même expérience que Stéphane Peu : tous les promoteurs que j'ai rencontrés m'ont expliqué, à un moment ou à un autre, qu'ils auraient pu faire mieux, plus spacieux, moins cher, si seulement il n'y avait pas les normes d'accessibilité pour les personnes handicapées.
Moi-même, lorsque j'ai vu vos pistes de travail, je me suis interrogé : j'étais plutôt favorable, sur le principe, à la réduction des normes, à l'allègement des contraintes. Mais en réfléchissant bien, je me suis demandé où seront situés les 10 % de logements accessibles : ce seront certainement les moins agréables. Les personnes à mobilité réduite qui souhaitent acheter un appartement seront-elles contraintes d'aller au rez-de-chaussée ou dans les logements les moins bien exposés, les moins valorisés ?
Par ailleurs, comment la notion d'évolutivité sera-t-elle appliquée concrètement par les constructeurs sur le terrain ? Quelles seront les marges de manoeuvre réelles pour faire évoluer les logements, compte tenu des coûts que cela occasionnera ? De nombreuses familles seront sans doute forcées, à un moment ou à un autre, de quitter l'appartement qu'elles ont acheté et où elles ont élevé leurs enfants.
Cet article soulève des interrogations sociétales, quasi philosophiques. De ce point de vue, les normes d'accessibilité pour les personnes handicapées permettent de poser un cadre. Comme cela a déjà été dit, l'accessibilité est une prémisse, une base, qui permet d'aller vers l'évolutivité. En fait, il faudrait les deux.
Je serai bref, car je présenterai tout à l'heure un amendement à cet article. À titre personnel, je ne voterai pas ces amendements de suppression déposés par différents groupes politiques. Je crois en effet que le statu quo n'est pas possible : il est nécessaire d'avancer et d'assouplir la législation. Nous avons entendu beaucoup de personnes à ce sujet, pas seulement des promoteurs.
En revanche, il est vrai que la proportion de 10 % logements accessibles me semble très faible. Nous devons trouver un point d'équilibre : après en avoir discuté avec un certain nombre d'associations, nous avons déposé plusieurs amendements à cet article afin de faire évoluer notre législation, par exemple en fixant un seuil de 25 % qui semblerait mieux adapté aux besoins.
La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.
J'ai entendu Mmes Le Grip et Taurine dire qu'il y a, sur ce sujet, de l'incompréhension et de l'inquiétude. Le rôle du débat parlementaire, notre rôle à tous, c'est de rassurer et d'expliquer. Je vais m'y employer.
Ce que nous proposons, par cet article, c'est de passer de la taille unique au sur-mesure. Aujourd'hui, tous les logements doivent être accessibles aux personnes à mobilité réduite, comme l'a bien expliqué M. Nogal. Celles-ci représentent environ 2 % de la population, soit 850 000 personnes. L'objectif de la proportion de 10 % de logements accessibles, c'est de faire en sorte que toutes les personnes à mobilité réduite puissent toujours trouver un tel logement.
Pourquoi 10 % et non pas 8 % ou 12 % ? Le logement n'est pas une science exacte, mais nous avons raisonné de la sorte : nous avons imaginé appliquer cette proportion au parc de logements existants en France, soit 34 millions de logements. Cela donnerait environ 3,5 millions de logements accessibles pour 850 000 personnes à mobilité réduite, ce qui semble raisonnable.
Par ailleurs, au cas où 12 % ou 15 % de personnes à mobilité réduite demanderaient un logement accessible dans un ensemble immobilier, alors l'évolutivité obligerait le promoteur à adapter les logements. Pour le reste, on passe au sur-mesure. Il s'agit de tenir compte de l'ensemble des handicaps au XXIe siècle.
Nous avons beaucoup débattu de ce sujet en commission. Marie Lebec a alors évoqué le cas de l'un de ses voisins, qui est une personne de petite taille. Sa préoccupation n'est pas l'accessibilité aux fauteuils roulants ; le problème pour lui est que les interphones sont trop hauts. Il préférerait donc que les budgets affectés à l'adaptation des logements au handicap soient dépensés pour adapter les interphones plutôt que les salles de bains. Il y a de très nombreux cas analogues, et il y en aura de plus en plus.
Nous proposons non pas une régression ou un retour en arrière, mais une évolution positive. On tiendra compte de l'acquis ; on mettra tout en oeuvre pour que les personnes à mobilité réduite continuent à disposer de logements dans lesquels elles auront accès à toutes les pièces ; en sus, on favorisera l'adaptabilité des logements pour tous les autres. J'espère avoir dissipé certaines incompréhensions et, surtout, rassuré ceux qui sont inquiets.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.
Je tiens d'abord à remercier les intervenants pour la qualité de cet échange. C'est un sujet difficile, qui appelle à la fois la sérénité et, bien sûr, le respect. Tous les orateurs ont compris quel était notre état d'esprit, même si certains d'entre eux ne sont pas d'accord avec les propositions du Gouvernement.
Comme l'ont indiqué le secrétaire d'État, le président de la commission et le rapporteur, il s'agit non pas d'une régression, mais d'une évolution législative, portant sur la loi du 11 février 2005. Vous avez eu raison de rappeler, monsieur Bazin, que cette loi avait constitué un progrès, salué comme tel. Mais elle a aussi été source de bien des difficultés d'application et de réalisation – nous en avons fait l'expérience, les uns et les autres, dans nos collectivités locales. D'ailleurs, si tel n'avait pas été le cas, il n'y aurait pas eu tous ces reports de délais que les uns et les autres ont été amenés à constater, quelle que soit leur sensibilité politique. Vous vous êtes posé à juste titre, monsieur Reda, en héritier du président Chirac. Or un ancien ministre du logement de votre sensibilité a été, en 2013, particulièrement dur à propos de l'application de la loi de 2005, pour des raisons qui ne sont pas les nôtres aujourd'hui.
Je tiens à expliquer ce qui nous a motivés dans cette volonté de faire évoluer la législation, comme l'ont fait avant moi, excellemment, le secrétaire d'État, le président de la commission et le rapporteur. Sur la question de l'accessibilité, les mots ont effectivement un sens. Si l'on suit les propositions qui figurent dans ce texte de loi, 100 % des logements seront évolutifs. Toutes les personnes en situation de handicap – il a été rappelé qu'elles étaient environ 3 % dans notre pays – , y compris les personnes à mobilité réduite, pourront accéder à ces logements et, à l'intérieur de ces logements, aux pièces de séjour et aux toilettes. En revanche, il n'y aura pas, effectivement, de travaux particuliers réalisés dans les salles de bains. Par ailleurs, il y aura 10 % de logements accessibles, c'est-à-dire dans lesquels toutes les pièces seront accessibles. Le secrétaire d'État a très bien posé les termes du débat : permettre à 97 % des personnes qui vont acquérir ces logements de disposer d'un plus grand nombre de mètres carrés pour le séjour, la chambre ou l'entrée, ce n'est pas régresser par rapport à la situation actuelle s'agissant du handicap.
Je partage votre avis, monsieur Bazin : nous devons préparer ensemble les évolutions à venir. Vous avez évoqué la domotique, qui va changer considérablement les choses pour la construction de logements neufs, c'est une évidence. Il faut accélérer ce mouvement. Ceux qui ont présidé des exécutifs locaux ont d'ailleurs constaté les améliorations considérables réalisées au cours des dernières années grâce aux nouvelles technologies et à la domotique, non seulement pour les personnes à mobilité réduire, mais aussi pour les personnes aveugles ou qui souffrent de problèmes d'audition. Voilà les bonnes pistes.
Rappelons que la loi de 2005 concerne tous les logements neufs, sauf les maisons individuelles qui seront habitées par le propriétaire qui en entreprend la réalisation. Pour les logements collectifs, elle s'applique pour les immeubles à R+4.
Je vous assure, monsieur Peu, que notre proposition n'est pas une régression. En tout cas, telle n'est pas notre volonté. Nous avons au contraire la conviction que, en avançant dans la direction que nous proposons, nous répondrons aux nouveaux besoins de nos concitoyens. Plusieurs d'entre vous ont rappelé, avec raison, que la société évolue, que la population vieillit et que de plus en plus de nos concitoyens ont des problèmes de mobilité et de santé. C'est une réalité, et nous voulons anticiper les choses. Pour ma part, je crois que le logement évolutif est un progrès, qui nous permettra d'apporter les bonnes réponses aux nouvelles questions posées par nos concitoyens.
Je vous remercie, encore une fois, pour la qualité du débat et le ton que vous avez adopté. C'est un sujet grave. Je martèle que la volonté du Gouvernement est d'aller dans le sens indiqué. Nous allons effectivement toucher à des dispositions législatives, mais on ne pouvait pas considérer qu'elles étaient immuables. Nous avons fait de même ce matin, ensemble, sur la loi littoral. Le Gouvernement a alors démontré sa capacité d'écoute, mais nous devons aussi constater qu'il faut savoir faire évoluer certaines choses, dans le respect de l'intérêt général.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.
Il est procédé au scrutin.
Nombre de votants | 61 |
Nombre de suffrages exprimés | 59 |
Majorité absolue | 30 |
Pour l'adoption | 12 |
contre | 47 |
La parole est à M. le secrétaire d'État, pour soutenir l'amendement no 2997 .
Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, nous sommes convenus, à la suite des travaux que nous avons menés avec les associations et leurs représentants après l'examen du texte en commission, de définir plus précisément, par la loi, ce que l'on entend par « logement évolutif ». Il s'agira d'un logement qui s'adapte à l'individu et dans lequel celui-ci doit pouvoir faire rapidement des « travaux simples » au moment où il a besoin de les faire.
Dans la loi, nous allons définir les grands principes de ce qu'est un logement évolutif, tout en renvoyant le détail technique à un décret. Celui-ci est en cours d'élaboration ; il fait l'objet d'une consultation avec les associations, une réunion s'étant tenue à ce sujet aujourd'hui même.
Vous avez eu parfaitement raison d'affirmer, monsieur Bazin, que la possibilité de faire évoluer rapidement un logement dépend de la conception, c'est-à-dire, au fond, du gros oeuvre. L'objectif est le suivant : il faut absolument que le gros oeuvre prévoie, dès le début, cette évolution. C'est ce que définit dans son principe l'amendement que je vous présente et qui sera précisé ensuite par le décret que j'ai mentionné.
Je prends des exemples très concrets. Lorsque l'on veut remplacer une baignoire par une douche, la question fondamentale, c'est la place du siphon. Cela paraît anodin dit comme cela, mais toute personne ayant été confrontée à ce problème comprend aisément ce que cela signifie. C'est d'ailleurs souvent l'un des postes de coût les plus importants.
Exactement !
Autre exemple : comme vous l'avez évoqué, monsieur Bazin, si l'on veut pouvoir déplacer rapidement des parois, par exemple une paroi de cuisine, il faut qu'elles ne contiennent aucune canalisation de fluide. Elles ne doivent pas non plus être des murs porteurs, tout en étant suffisamment résistantes.
Bref, par cet amendement, nous proposons d'établir les principes définissant le logement évolutif, afin d'éclairer le débat, tout en renvoyant la définition précise et technique des « travaux simples » à un décret, qui est en cours d'élaboration et fait l'objet d'une consultation avec les associations.
Je souscris aux propositions du Gouvernement. Lors des auditions des acteurs, Christelle Dubos et moi-même avons pu constater que c'était effectivement le coeur du problème. Le dispositif proposé, qui sera complété ensuite par décret, permettra vraiment de répondre à la demande de l'ensemble des Français.
Pour la clarté de nos débats, je signale à l'attention de tous mes collègues que, si nous adoptons le présent amendement, tous les autres amendements à l'alinéa 3 de l'article 18 tomberont. Certains de ces amendements visent à préciser la notion de logement évolutif ; d'autres tendent à augmenter la proportion de logements accessibles, comme Pierre-Yves Bournazel l'a indiqué tout à l'heure.
Commençons par une précision. Il a été expliqué tout à l'heure que les travaux ultérieurs seraient à la charge du promoteur. Or, quand on vend un logement, il y a un nouveau propriétaire, qui peut soit occuper le logement à titre personnel, soit le louer, s'il s'agit d'un investisseur. Dans ce cas, on n'ira pas chercher le promoteur cinq, dix ou vingt ans plus tard pour lui demander de faire des travaux. Les choses ne peuvent pas fonctionner ainsi ; il faut que nous soyons très clairs sur ce point. On ne peut pas faire croire que c'est le promoteur qui supportera le coût des travaux ultérieurs. Ou alors, il faut modifier d'autres points de notre législation.
Vous avez indiqué, monsieur le ministre, que la loi de 2005 avait posé des difficultés d'application. Mais ces difficultés ont concerné non pas la production de logements, mais, essentiellement, l'aménagement des espaces publics, notamment parce que les moyens n'ont pas été donnés à ceux qui devaient les rendre accessibles. La question des moyens est essentielle, et c'est cela qui a posé problème.
À la différence des espaces publics, les logements ont vocation à être à usage privé, même lorsqu'ils appartiennent à un bailleur. La construction de ces logements est aidée, d'une manière ou d'une autre, et c'est d'ailleurs une des spécificités, jusqu'à présent, de la politique du logement en France. Comme Robin Reda l'a très bien dit, c'est parce que la construction de ces logements est aidée que nous avons pu imposer des normes d'accessibilité.
La question qui se pose est celle des moyens pour accompagner l'évolution des logements. Il y aura finalement un socle de 10 % de logements accessibles et 90 % de logements qui auront vocation à évoluer, par des travaux certes mineurs – si le décret est bien écrit – , mais le problème sera de savoir qui les finance.
Ensuite, il y a des questions très concrètes. Quand un candidat à la location arrive devant un propriétaire, bailleur social ou privé, et souhaite que le logement soit accessible à une personne handicapée, est-il en droit de demander qu'on le rende accessible ? C'est une véritable question. Nous devons aller au bout de la démarche.
Et, quand un locataire occupe un logement, peut-il obliger le propriétaire à faire les travaux pour le rendre accessible ? Nous devons obtenir des réponses concrètes à ces questions sur l'adaptabilité et l'évolutivité.
En d'autres termes, que se passera-t-il quand il faudra rendre un logement accessible ?
J'aimerais bien sûr que l'on puisse débattre de mon amendement no 1144 et le voter. Je propose en effet propose de porter la part des logements accessibles de 10 % à 25 % dans les nouveaux immeubles d'habitation collectifs. Je crains toutefois que l'adoption de l'amendement en discussion ne fasse tomber le mien.
Quoi qu'il en soit, je me réjouis de l'initiative du Gouvernement. Nous attendons encore de sa part éclaircissements et précisions. M. Bazin a formulé des questions que la représentation nationale a légitimement le droit de se poser.
Ensuite, ce sont les décrets qui compteront. Nous suivrons de près, puisque des demandes ont été formulées, votre écoute et les réalités qui découleront des décrets.
J'y insiste : l'amendement no 2997 est un moindre mal, compte tenu des demandes qui émanent de divers groupes, mais j'aurais préféré un taux de 25% de logements accessibles. Au moins le message aura-t-il été entendu.
Je me contenterai de deux réflexions.
Tout d'abord, ce dispositif est sans doute un des plus intelligents et des plus utiles du projet de loi. Je ne le dis pas par flatterie car, dans quelques heures, je ferai probablement cas de certains désaccords.
Député en 2005, à l'heure où Marie-Thérèse Boisseau avait proposé certaines évolutions, je n'avais pas mesuré à quel point la loi allait influer sur la manière dont les promoteurs se saisiraient du sujet. J'ai été élu maire en 2001. Nous avons adopté la loi en 2005. Un ou deux ans plus tard, toutes les constructions de logements collectifs ont changé radicalement pour respecter le texte.
La plupart du temps, dans les zones tendues, où le prix est le plus élevé, on met les toilettes dans la salle de bains. Il n'y a plus de toilettes séparées ni de cuisine fermée. Il faut se battre avec les promoteurs pour qu'ils prévoient une cuisine fermée au moins en option.
Les dispositions législatives que nous adoptons changent totalement la structure et le choix de l'habitat. Fort du recul que procure l'expérience, je peux dire que ce que vous permettez en fixant une base – 10 % de logements accessibles, une évolutivité, laquelle appelle certaines questions, comme celles qu'a posées M. Bazin – permettra la modularité.
Ensuite, j'ai toujours trouvé choquant que le secteur social soit exempté des contraintes qu'on impose au secteur privé. Quand on construit un logement social, on n'est pas tenu de respecter les mêmes règles que le secteur privé.
Vous l'avez dit : en termes de volume, la solution proposée permettra largement d'accueillir les personnes handicapées, dont, en France, jusqu'en 2005, on n'a pas du tout considéré la situation. Quand on a voulu le faire – je ne dis pas que Mme Boisseau a fait du mauvais travail, car le Président Chirac a créé une vraie prise de conscience dans notre pays pour l'intégration de ces citoyens – ,…
… on est passé d'un excès, qui était celui de la négation, à un autre, celui de la totalité.
C'est d'ailleurs la même chose pour les bâtiments publics : à un moment, il y a eu un déséquilibre ; vous rétablissez l'équilibre. Je ne le dirai pas de tous les articles du projet de loi, mais je pense que, sur cet article, vous le faites intelligemment. Le président de la commission a quitté momentanément l'hémicycle, mais le rapporteur le lui transmettra : ces mesures appellent peut-être un suivi, dans les années qui viennent, afin qu'on puisse mesurer avant la fin de la législature l'impact qu'elles auront sur la construction.
M. Bazin nous a dit qu'il avait travaillé dans ce secteur économique. Il sait donc que les promoteurs vont vite. Au moment où nous parlons, peut-être sont-ils déjà en train de modifier leurs plans. Modifier des plans, rendre les appartements plus modulaires et rétablir de libres choix sur la taille de la chambre, l'endroit où l'on place l'armoire ou la disposition du couloir, c'est plutôt mieux.
La mesure donnera un nouveau souffre aux architectes, dont nous parlions tout à l'heure. Ils vont se remettre à travailler au lieu de faire de la mécanique réglementaire.
La parole est à M. Mickaël Nogal, pour soutenir l'amendement no 2952 rectifié .
Monsieur Nogal, des modalités d'aide existent déjà et il n'est pas utile de prévoir un décret. Je vous suggère de retirer l'amendement. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Je vous propose également de retirer l'amendement, mais je profite de cet intervention pour répondre à la question légitime de M. Bazin sur les financements et éclairer la représentation nationale à ce sujet.
L'amendement de M. Nogal propose des modalités d'accompagnement financier précises pour adapter les logements. Aujourd'hui, il existe plusieurs cas de figure : un logement peut appartenir au monde privé ou au monde social. Pour ce type de travaux, les bailleurs sociaux disposent d'une exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties – TFPB. Il n'y a donc pas de difficulté pour eux. Nous leur en parlerons, car nous les voyons souvent et nous discutons beaucoup avec eux. Quoi qu'il en soit, ce sont des travaux qu'ils savent gérer.
La vraie question concerne le domaine privé : quand un locataire demande qu'un logement soit rendu accessible, peut-il demander à un propriétaire privé de financer ces travaux ? Je pense que c'est impossible et que ce serait peut-être même inconstitutionnel. En outre, il y aurait un gros risque que le propriétaire évince toute personne présentant un risque de mobilité réduite.
On ne peut donc pas imposer au propriétaire ni en droit ni en opportunité de réaliser ces travaux. Il existe en revanche une agence dont c'est le métier : l'Agence nationale de l'habitat – ANAH – chargée à la fois de la rénovation énergétique et de la mise en accessibilité des logements.
J'aurais pu le signaler d'entrée : l'an dernier, l'ANAH a rendu accessibles environ 15 000 logements. Au regard des chiffres qu'a cités M. Bazin, on mesure l'importance de ces 15 000 logements.
Si j'osais chambrer certains députés qui siègent à droite de cet hémicycle, je rappellerais qu'ils n'ont pas tous voté le renforcement significatif des crédits que la majorité a accordés à l'ANAH lors de la dernière loi de finances, même si je constate aujourd'hui leur entrain pour financer le logement privé. Je ne doute pas que, lors du prochain budget, leur attitude aura changé.
Reste que le budget de l'ANAH a été significativement relevé. Cet effort se montera à environ 1,2 milliard d'euros pendant le quinquennat, sachant que l'ANAH avait déjà vu son budget renforcé par le gouvernement précédent.
D'autres dispositifs ont également été renforcés. L'amendement porte d'ailleurs sur les crédits d'impôt pour les travaux d'accessibilité ou de rénovation énergétique, qu'a relevés la dernière loi de finances.
J'espère avoir répondu à l'interrogation légitime de M. Bazin, relayée par M. Lagarde. Il faut envisager le cas du public comme du privé. Dans le secteur privé, quand le propriétaire n'en a pas les moyens, c'est la tâche de l'État de l'accompagner, grâce aux dispositions que nous avons renforcées, et que nous continuerons de renforcer, par le biais de l'ANAH et des crédits d'impôt.
Si l'amendement n'est pas retiré, j'émettrai un avis défavorable.
Non, monsieur le président. Je remercie le secrétaire d'État de ses explications, et je retire l'amendement, qui est satisfait.
L'amendement no 2952 rectifié est retiré.
La parole est à Mme Bénédicte Taurine, pour soutenir l'amendement no 2224 .
Par cet amendement nous proposons que soient modifiées les normes applicables à la construction de maisons individuelles, qui doivent être pleinement adaptées aux personnes en situation de handicap.
Nous avons déjà évoqué ce lot de douze maisons individuelles dans un lotissement du parc social construit récemment. N'étaient accessibles que le séjour, la cuisine et les toilettes, alors que les chambres et la salle de bains, situées à l'étage, étaient inaccessibles pour une personne en fauteuil roulant.
Il paraît donc nécessaire de modifier les normes pour rendre les maisons individuelles, surtout si elles font partie du parc social, pleinement accessibles aux personnes à mobilité réduite.
L'amendement est satisfait. Les maisons individuelles sont et demeureront accessibles dans les conditions prévues par la réglementation.
Je vous suggère de retirer l'amendement. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Je vous demande également le retrait de l'amendement. Je profite de l'occasion pour préciser que les mesures relatives aux logements évolutifs concernent les habitations collectives, non les habitations individuelles. Pour les habitations individuelles, les dispositions restent les mêmes.
À vous entendre, monsieur le rapporteur, monsieur le secrétaire d'État, il ne devrait pas être possible de construire le lot de maisons que j'ai évoqué. Il l'a cependant été. Je maintiens l'amendement.
Merci, madame Taurine, de me donner la possibilité de rebondir sur votre amendement. Je souhaite évoquer un point : l'ANAH peut aider surtout dans le cadre d'une opération programmée d'amélioration de l'habitat.
Pas uniquement !
Est-elle capable d'aider partout à rendre un logement accessible, sur simple demande, y compris quand il s'agit d'un logement neuf, …
Non, sous conditions de ressources. C'est normal.
Il est bon de le préciser. Cela veut dire que l'accessibilité du logement est conditionnée aux ressources.
Quand les logements étaient produits, les occupants arrivaient dans des logements accessibles.
Madame Taurine, si vous avez connaissance d'un tel fait, il me semble qu'il faut dénoncer la construction, qui est illégale. Aujourd'hui, quand on fait construire des logements individuels – cela m'est arrivé, car j'essaie de refaire des pavillons avec jardin, comme dans les années 1930 – , vous êtes obligé de prévoir ce qu'on appelle une « base vie » – sanitaire, cuisine, séjour, ainsi qu'une chambre – au rez-de-chaussée. Cette mesure contraint d'ailleurs considérablement la construction quant à la typologie du logement.
À mon tour, je profite de l'amendement pour indiquer au secrétaire d'État qu'il a pris un risque heureux. En revanche, je ne sais pas s'il sera heureux d'avoir pris ce risque ! Il nous a en effet expliqué que l'ANAH devait prendre l'accessibilité en charge. Il va de soi que cet effort ne peut incomber au propriétaire, car on courrait tout droit à la discrimination de personnes en situation de handicap, qui, du fait de la faiblesse de leurs revenus, sont déjà en difficulté pour se loger dans le privé. C'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles nous cherchons à les héberger dans le parc social.
Je ne sais pas sais si vous serez heureux d'avoir pris le risque, mais je serais curieux de savoir combien de logements, parmi les 15 000 qu'a financés l'ANAH, concernent la rénovation énergétique ou des copropriétés dégradées, et combien concernent l'accessibilité dans le privé.
l'ANAH a financé 50 000 logements pour la rénovation énergétique et 15 000 logements pour l'accessibilité.
Je vous demandais si vous étiez heureux d'avoir pris le risque, car des amendements pourraient demander l'abondement du dispositif. Vous disiez que tout le monde ne votait pas l'ensemble du budget, ce qui est vrai, car certaines dispositions paraissent toujours discutables. En revanche, cette disposition a toutes les chances de recueillir l'unanimité, ce qui vous aidera vis-à-vis de Bercy, si j'ose dire.
L'amendement no 2224 n'est pas adopté.
La parole est à M. le secrétaire d'État, pour soutenir l'amendement no 3210 .
Parmi toutes les questions que vous avez évoquées, il en est une à laquelle je n'ai pas encore répondu, car j'attendais cet amendement pour pouvoir le faire. On a parlé de la vision qui sous-tend la construction de ces logements évolutifs, des besoins auxquels ils répondaient. Par voie d'amendement, on a précisé dans la loi ce qu'est un habitat évolutif. On a ensuite indiqué comment le financer et à quelles conditions. Plusieurs d'entre vous ont soulevé une troisième question : comment un locataire – pour un propriétaire, il n'y a pas d'enjeu, puisqu'il agit selon son libre arbitre – peut-il s'assurer que les travaux nécessaires à l'adaptation seront réalisés ? Deux cas sont à distinguer. Dans l'hypothèse d'un logement social, il existe des dispositions particulières concernant les relations d'un bailleur social avec les habitants en situation de handicap. Dans le cas d'un logement privé – nous avons étudié la chose en détail – , il est très difficile à un locataire, d'un point de vue juridique, d'imposer à un propriétaire d'effectuer des travaux. En revanche, le droit actuel autorise le locataire à effectuer les travaux s'il a prévenu le propriétaire et que celui-ci ne lui a pas répondu. Toutefois, le délai de réponse, fixé à quatre mois, nous semble trop long. Par cet amendement, nous vous proposons de ramener à deux mois le laps de temps pendant lequel le propriétaire peut s'opposer au projet ; s'il ne dit rien, à l'expiration de ce délai, le locataire a le droit de réaliser les travaux.
La parole est à Mme Sylvia Pinel. Il ne vous reste que quelque deux minutes de temps de parole.
Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, je trouve votre idée intéressante mais ne peut-on pas continuer à réfléchir à une protection supplémentaire du locataire dans le cas où le propriétaire s'opposerait aux travaux ? Pourrait-on réfléchir à un délai d'instruction de l'ANAH raccourci dans ces situations, pour éviter de cumuler deux périodes de deux mois ?
L'amendement no 3210 est adopté.
L'article 18, amendé, est adopté.
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement no 1019 portant article additionnel après l'article 18.
L'amendement no 1019 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement vise à permettre la réalisation de travaux de mise en accessibilité des logements par la mise en place d'un crédit d'impôt plafonné de 25 % pour l'autonomie des personnes âgées ou handicapées. Il s'agit d'une réponse ciblée aux personnes qui souhaitent aménager leur domicile.
L'amendement no 567 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Le présent amendement vise à autoriser les collectivités à voter un dégrèvement de la taxe d'aménagement. Il est inspiré par la même philosophie que l'amendement précédent, en ce qu'il a pour objet l'adaptation de notre système fiscal à la prise en compte de l'évolutivité, puisque c'est aujourd'hui que se prépare l'adaptation progressive du parc de logements au vieillissement de la population.
L'amendement no 605 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Laurianne Rossi, pour soutenir l'amendement no 2869 .
Cet amendement est assez différent de celui de Mme Taurine. Il a pour objet d'anticiper, dès la construction d'un immeuble, l'éventuelle installation ultérieure d'un ascenseur. Aujourd'hui, le code de la construction et de l'habitation impose de prévoir un espace dédié à l'installation ultérieure d'un ascenseur dans les bâtiments de moins de trois étages mais comptant plus de quinze logements. Cet amendement vise à ramener ce nombre de logements à huit, soit deux logements par étage. Je rappelle que l'obligation d'installation d'un ascenseur ne concerne que les immeubles de plus de trois étages. Cet amendement ne vise donc absolument pas à imposer l'installation d'un ascenseur mais seulement à prévoir dès la conception de l'immeuble, la possibilité de l'installer, en anticipant l'évolutivité des parties communes et, par là même, l'accessibilité future du bâtiment.
Défavorable dans les deux cas. L'amendement de Mme Taurine est d'ordre réglementaire. Par le second amendement, madame Rossi, vous créez de nouvelles normes et ne répondez pas à l'un des objectifs posés par le projet de loi : optimiser les surfaces.
Madame Taurine, madame Rossi, vous soulevez un débat très important concernant, non pas l'accessibilité des logements, mais l'accessibilité des immeubles, notamment de ceux qui ne sont pas, aujourd'hui, soumis à une réglementation en la matière. Madame Taurine, vous avez défendu votre amendement sans en détailler le contenu, mais il vise à imposer l'installation d'ascenseurs dans des immeubles collectifs qui seraient de hauteur R + 3, et non R + 4, comme la législation le prévoit actuellement .
La question se pose d'ailleurs dès la hauteur R + 2. Dans tout immeuble collectif, faut-il imposer un ascenseur ? Le débat est évidemment important, essentiel même pour cette société d'inclusion que nous appelons tous de nos voeux. D'une part, comme l'a dit à très juste titre le rapporteur, cela ne relève pas de la loi mais du règlement. D'autre part, cette disposition emporte d'autres conséquences. Premièrement, imposer des ascenseurs dans des immeubles collectifs entraîne de facto un coût supplémentaire, qui se décompose en un coût positif pour la société, du fait de l'inclusion que cela permet, et un coût négatif pour ceux qui y habitent, puisque l'installation se traduit en moyenne par un accroissement de 200 euros par an et par logement. Deuxièmement, il faut tenir compte du coût de l'installation elle-même, mais, au-delà, les élus locaux – nombre d'entre vous l'ont été ou le sont encore – savent comment cela influe sur la densification. Lorsque la loi a réduit la hauteur des immeubles à partir de laquelle un ascenseur était nécessaire, on a constaté une moindre densification dans les zones tendues, c'est-à-dire que les immeubles construits étaient de moindre hauteur.
Il nous faut réfléchir aux solutions permettant, dans le cadre d'une société inclusive, de rendre les immeubles plus facilement accessibles, y compris pour ce qui est des ascenseurs. Nous ne disposons pas, actuellement, de solution ; nous devons y travailler, étant rappelé que le sujet est d'ordre réglementaire. L'enjeu est de trouver des solutions qui n'amputent pas le pouvoir d'achat des locataires, ou plutôt de faire en sorte que les locataires aient les moyens de bénéficier de cette solution d'inclusion, que nous devons préparer. Nous devons continuer à y travailler sereinement, car nous appelons tous de nos voeux une société beaucoup plus inclusive, avec des immeubles beaucoup plus facilement accessibles.
Je suis saisi de deux amendements identiques de suppression, nos 1183 et 1932.
La parole est à Mme Brigitte Kuster, pour soutenir l'amendement no 1183 .
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 1932 .
Cet amendement a pour objet d'améliorer la rédaction de la disposition adoptée en commission, en prévoyant que la préfabrication peut se faire non seulement en dehors du chantier mais aussi, à présent, grâce aux progrès effectués dans le secteur du bâtiment, sur le chantier : on parle alors de préfabrication foraine.
L'amendement no 2956 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme Bénédicte Taurine, pour soutenir l'amendement no 2226 .
L'amendement no 2226 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 2491 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 19, amendé, est adopté.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt heures.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Catherine Joly