La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
La question du terme fixé au partage des données du système d'information a animé une partie des débats de la commission des lois. La proposition initiale du Gouvernement, telle qu'elle est parvenue au Sénat, était de fixer ce terme à une année. Après en avoir discuté en commission des lois à l'Assemblée, nous avons formulé une proposition, qui était présentée par le groupe majoritaire, mais qui semble avoir recueilli l'assentiment d'un grand nombre de députés. Elle consiste non seulement à fixer un terme plus court qu'une année en s'inspirant de l'amendement soutenu en commission par Mme Laurence Vichnievsky au nom du groupe MODEM, qui tendait également à réduire cette durée, mais encore d'y adjoindre une clause de revoyure au fond, afin que la prolongation du partage des données du système d'information ne soit pas possible sans un débat et une décision à l'Assemblée nationale. C'est là une démarche digne et respectueuse des libertés fondamentales et de l'État de droit dans une grande démocratie comme la nôtre.
L'amendement que le groupe La République en marche vous propose de débattre et, le cas échéant, d'adopter, consiste donc à ramener le délai à neuf mois et à instaurer une obligation de repasser devant le Parlement.
La parole est à Mme Isabelle Florennes, pour soutenir l'amendement identique no 390 .
Ma collègue Laurence Vichnievsky avait en effet proposé, lors du débat en commission des lois, de ramener le délai à six mois. Après des échanges avec M. Boudié, nous étions d'accord pour trouver un bon tempo et un bon timing pour la revoyure, et il nous semblait important, compte tenu notamment de l'avis de la CNIL, la Commission nationale de l'informatique et des libertés, de trouver une solution proportionnée, car le délai d'un an nous paraissait un peu long. Celui de neuf mois nous convient – d'où cet amendement.
La parole est à Mme Marie Guévenoux, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, pour donner l'avis de la commission sur les amendements identiques.
Je suis cosignataire de l'amendement de M. Boudié, qui correspond en effet à une discussion qui a eu lieu hier en commission. Je remercie Mme Vichnievsky, Mme Florennes et M. Boudié du travail qu'ils ont mené pour aboutir à une rédaction qui comporte un délai de neuf mois et une clause de revoyure. J'insiste toutefois sur le fait que la durée est d'abord conditionnée au fait que le dispositif soit nécessaire pour lutter contre l'épidémie. En d'autres termes, si l'épidémie s'arrêtait avant le délai de neuf mois, le système d'information prendrait fin. Avis favorable.
La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé, pour donner l'avis du Gouvernement.
Je tiens à remercier les membres de la commission des lois pour ce travail. Je pense moi aussi qu'on peut réduire la durée du système d'information. Si nous pouvons nous passer du fichier au bout de neuf mois, je ne ferai pas de baby blues – ce serait même plutôt une bonne nouvelle. Quant au fait de passer par la loi pour prolonger ce délai, j'en suis tout à fait d'accord. Avis favorable.
Monsieur le ministre, je ne demande qu'à vous croire, mais j'ai tendance à penser que, même si, au bout de trois mois, ce fichier n'est plus forcément utile d'un point de vue épidémiologique, il continuera d'être alimenté, de vivre et d'être entretenu par l'administration. Je n'ai à peu près aucun doute à ce propos.
Du reste, ces amendements, qui sont meilleurs que la rédaction initiale du texte, …
… pose une question et met l'accent sur une contradiction majeure de ce projet de loi, déjà soulignée lors des discussions que nous avons eues cet après-midi sur les temporalités. Nombre de nos amendements ont été écartés au motif que la discussion que nous devions avoir sur ce texte ne concernait pas le déconfinement, mais l'état d'urgence, et donc les moyens de privation de liberté confiés au Gouvernement pour lutter contre l'épidémie. Or, avec cet article de façon générale et plus particulièrement avec la question du délai, vous introduisez dans le texte des éléments relatifs au déconfinement.
Par principe, j'aurais donc tendance à considérer que, du point de vue de la logique purement juridique et politique qui est la vôtre, puisque vous nous expliquez que tous nos amendements liés au déconfinement doivent être écartés parce que ce texte ne concerne que l'état d'urgence, la durée de toutes ses dispositions ne saurait excéder celle de l'état d'urgence sanitaire.
La durée de neuf mois proposée par les amendements de M. Boudié et de Mme Vichnievsky est, je l'espère, plus longue que celle de l'état d'urgence sanitaire. Cela me semble toutefois encore bien long. Nous serons évidemment vigilants afin que la durée de vie de ce système d'information soit la plus brève possible et qu'il soit dissous le plus rapidement possible, même si je ne fais pas trop confiance à l'administration pour l'effacer lorsqu'il ne sera plus utile.
La parole est à Mme Valéria Faure-Muntian, pour soutenir l'amendement no 454 .
Cet amendement dont Mme Christine Hennion est la première signataire tend à remplacer, à la première phrase de l'alinéa 1, les mots « à caractère personnel concernant la santé » par les mots « de santé à caractère personnel », qui préexistent dans l'article L. 1111-8 du code de la santé publique et auxquels correspondent certaines règles de sécurité, notamment la certification des hébergeurs.
Je demande le retrait de l'amendement. Comme je m'y étais engagée hier en commission, j'ai demandé au Gouvernement une réponse plus précise sur l'hébergement des données de santé et les procédures de certification. Il se trouve que ces procédures sont assez complexes et nécessitent du temps, ce qui ne permettrait pas la mise en oeuvre de ces systèmes d'information dans des délais compatibles.
L'amendement no 454 est retiré.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 534 .
En l'état actuel de sa rédaction, l'alinéa 1 ne définit pas clairement avec qui pourront être partagées les données personnelles des patients, ce qui pose des problèmes en termes de protection de ces données. Cet amendement d'appel soulève la question de savoir si les données doivent être partagées entre toutes les personnes énumérées à l'article 6, en particulier en son alinéa 13 et, si tel est le cas, combien de personnes cela représente.
Les données partagées le sont toujours selon les nécessités des interventions. Avis défavorable.
Défavorable. Nous avons déjà eu ce débat.
La question est fondamentale. En effet, le texte indique que les établissements sociaux pourront avoir accès aux fichiers, mais de qui s'agit-il ? Les médecins sont habilités au secret médical, mais quelles sont les autres personnes qui auront accès à ce fichier ?
Je ferai écho à ce que vient de dire Mme Rabault : qui sont ces personnes ? J'ai l'habitude, depuis hier, qu'on ne réponde pas à mes questions, mais il serait bon d'avoir, au moins une fois dans la journée, une réponse précise. Combien de personnes cela représente-t-il ? L'échelle est-elle celle des 20 000 à 30 000 personnes évoquée tout à l'heure, ou s'agit-il plutôt de 3 000, comme vous le laissiez entendre ? Ce n'est pas très compliqué, et je ne pense pas que mes questions soient illégitimes !
La question est d'autant plus intéressante qu'en réalité, le partage ne se limitera pas aux deux systèmes d'information créés par l'article 6 de la loi prorogeant l'état d'urgence sanitaire. L'alinéa 2 précise en effet que les systèmes existants peuvent eux aussi, pour les mêmes finalités, être adaptés, partagés ou améliorés. Cela multiplie donc les partages d'informations et il est réellement important que nous ayons des précisions sur cette notion de partage.
Cela me donne aussi l'occasion d'interroger le ministre à propos de l'amendement no 375 , adopté il y a quelques minutes : la durée de neuf mois s'applique-t-elle uniquement aux deux systèmes d'information visés à l'alinéa 1, ou également aux systèmes d'information déjà existants, visés à l'alinéa 2, qui pourraient être élargis ? Ce n'est pas la même chose et, si c'est le cas, il faudrait le préciser.
Monsieur Gosselin, je tiens à vous confirmer que nous n'avons pas du tout l'intention de supprimer le fichier des ALD, les affections de longue durée, ni celui des arrêts de travail, ni l'ensemble des fichiers nationaux qui existent dans le cadre de l'assurance maladie depuis plus d'une décennie, voire deux.
Ces fichiers existent, ils ont leur vie et ils sont indispensables, car ils permettent aux Français d'avoir accès aux soins.
Nous parlons ici d'un dispositif que nous espérons tous être le plus transitoire possible. Du reste, le meilleur moyen pour qu'il le soit est de voter ce projet de loi : si nous le votons, le dispositif prévu nous permettra d'être plus efficaces dans la lutte contre le virus. Une fois qu'il aura disparu, je vous garantis que je n'ai pas pour habitude de garder les mauvais souvenirs.
Murmures sur les bancs du groupe LR.
Seul le ministre a la parole. C'est la deuxième fois qu'il s'exprime et il me semble que l'Assemblée est éclairée.
J'étais un peu gêné d'entendre M. Schellenberger dire qu'il savait très bien que l'administration garderait les fichiers.
Vous avez dit que vous saviez très bien que l'administration ne détruirait pas le fichier. C'est une accusation. Comme je l'ai déjà dit hier, je suis républicain, je crois en l'État, en l'administration, en son efficacité et en sa capacité à suivre le droit et la loi. Je ne me permettrai donc jamais de dire dans l'enceinte de l'Assemblée nationale qu'une agence de l'État, une administration centrale pilotée par l'État s'affranchirait de la loi et du droit. Sinon, pourquoi sommes-nous ici ?
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM. – Exclamations prolongées sur les bancs du groupe LR.
Je le dis sans provocation. J'exprime mon opinion comme vous avez exprimé la vôtre tout à l'heure. Nous sommes là pour ça, cela s'appelle un débat.
Monsieur le député, vous avez également affirmé qu'il existait une interaction entre les différents fichiers. Eh bien, non.
On renforce un fichier national existant en lui ajoutant un module appelé Covid-19 qui ne communique ni avec le fichier des ALD, ni avec celui des arrêts de travail, ni avec celui des maladies chroniques, ni avec ceux qui permettent les remboursements. Cela n'aurait aucun intérêt.
Monsieur le député, vous êtes là pour vous exprimer, mais moi aussi : vous prendrez la parole plus tard !
Quant à moi, je suis là pour en décider ! Nous passons au vote de l'amendement.
L'amendement no 534 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 87 .
Depuis hier, je n'ai toujours pas eu de réponse à ma question. Je voulais simplement savoir combien de personnes étaient concernées par l'article 6, et qui pourrait partager les données du fichier. Je me demande même s'il est utile que je continue de défendre mes amendements puisque, de toute façon, je n'obtiens jamais de réponse à mes questions…
Peut-être puis-je, pour la dixième fois, poser celle de la politique du « deux poids, deux mesures » entre Paris, Marseille et Béziers en matière de tests destinés aux personnels des écoles et des crèches. Peut-être obtiendrais-je enfin une réponse même si, au fond, je n'y crois pas.
Mon amendement concerne l'anonymisation des données. En effet, les Français n'auront pas le choix de figurer ou non dans le fichier s'il apparaît, après le dépistage, qu'ils ont contracté le Covid-19. Il faut au moins leur laisser la liberté d'anonymiser leurs données. Ils ne doivent pas être obligés de donner leur nom, contrairement à ce que vous prévoyez.
Défavorable. Il serait compliqué d'anonymiser des personnes que l'on cherche à identifier !
Je voudrais profiter de cette discussion pour répondre au ministre que, contrairement à ce qu'il expliquait à mon collègue du groupe Les Républicains, il ne s'agit pas, de la part de ceux qui s'inquiètent, de manifester une forme de défiance à l'égard des fonctionnaires. En revanche, nous sommes habitués à vous voir vous servir de lois votées dans le cadre d'un état d'urgence en les introduisant finalement dans le droit commun. Vous l'avez fait avec les mesures sécuritaires prises lors de l'état d'urgence déclaré en 2015.
Je m'interroge sur un point. Si j'ai bien compris, nous avons voté un amendement qui prévoit que la durée de conservation des données du fichier est limitée à neuf mois. Or le premier alinéa de l'article 6 prévoit que « par dérogation à l'article L. 1110-4 du code de la santé publique, aux seules fins de lutter contre la propagation de l'épidémie de Covid-19 et pour la durée de l'état d'urgence sanitaire [… ] des données à caractère personnel concernant la santé relatives aux personnes atteintes par ce virus et aux personnes ayant été en contact avec elles peuvent être traitées et partagées [… ] ». Il est donc bien spécifié que ces dispositions s'appliquent dans le seul cadre de l'état d'urgence sanitaire, soit une période qui court jusqu'au 23 juillet prochain et qui peut certes faire l'objet d'une prolongation, ce que je ne souhaite pas.
Par conséquent, je ne comprends pas pourquoi on évoque une période de neuf mois à propos d'un fichier qui, en théorie, devra disparaître automatiquement le 23 juillet si l'état d'urgence n'est pas prolongé au-delà. Je m'interroge donc sur le bien-fondé de ces dispositions. Cela ne me semble pas cohérent, à moins que vous n'anticipiez le fait qu'on continuera à appliquer les mesures prises dans le cadre des lois sur l'état d'urgence sanitaire. Il s'agit pourtant de textes qui mettent notre État de droit entre parenthèses et qui ne devraient s'appliquer que dans des conditions exceptionnelles.
Je souhaite revenir sur la question que j'avais posée au ministre et à laquelle il n'a pas répondu…
Je ne m'inquiète pas : j'ai noté que vous aviez répondu à mon collègue Raphaël Schellenberger avec un temps de décalage, donc j'attendrai mon tour !
Sourires.
Plus sérieusement, l'alinéa 2 évoque la possibilité, afin de lutter contre la propagation de l'épidémie, de procéder à des adaptations de systèmes d'information et à un partage des données dans le cadre du nouveau système. Mais les fichiers existants peuvent eux aussi être adaptés à la situation actuelle. Ma question était donc la suivante : dans quelle mesure le délai de neuf mois s'applique-t-il aussi à ces fichiers ? Les données peuvent-elles être partagées dans leur totalité ? Ne parlons pas uniquement des systèmes d'information prévus à l'alinéa 1 : n'oublions pas l'alinéa 2. Il ne faudrait pas que l'arbre masque la forêt.
Monsieur Gosselin, il existe un seul délai, il est de neuf mois. Au-delà de ce délai, on cessera d'utiliser le fichier Covid-19.
On cessera d'utiliser tout ce qui est en lien avec le Covid-19. J'espère que c'est ce qui arrivera, car cela signifierait que l'épidémie est derrière nous.
Monsieur Coquerel, s'il est prévu que l'utilisation des fichiers se prolonge au-delà de la période d'état d'urgence sanitaire, c'est parce que, même si elle se termine le 23 juillet – ce que j'espère – , cela ne signifiera pas forcément que l'épidémie sera définitivement terminée. Le virus continuera peut-être de circuler faiblement. Nous n'aurons alors plus besoin des mesures de l'état d'urgence sanitaire, mais des outils de suivi seront toujours nécessaires pour nous assurer que le virus, terrassé, ne bouge plus. Sortir de l'état d'urgence sanitaire ne signifie pas qu'il faut relâcher totalement notre vigilance. C'est ainsi qu'on procède chaque fois qu'on lutte contre une épidémie depuis que l'épidémiologie existe.
L'amendement no 87 n'est pas adopté.
La parole est à M. Pascal Brindeau, pour soutenir l'amendement no 568 .
Il vise à préciser, lorsqu'il est fait mention que les données peuvent être partagées, que ce n'est possible qu'entre les organismes cités dans le projet de loi, et ce afin de dissiper toute crainte – même infondée – de dissémination de ces informations d'ordre médical et personnel.
Cette précision n'est pas utile. Le texte indique déjà que les personnes et organismes concernés sont habilités à accéder à certaines données spécifiques. Si l'amendement n'est pas retiré, l'avis sera défavorable.
Je m'excuse d'avoir recours au procédé consistant à prendre la parole pour poursuivre le dialogue entamé avec le ministre sur un amendement précédent, mais il y a une chose que je ne comprends pas dans son explication.
Vous dites que vous espérez qu'au moment de la sortie de l'état d'urgence sanitaire – dont la date a d'ailleurs été avancée au 10 juillet par Sénat – on n'aura plus besoin du fichier, mais que, comme on ne sait pas combien de temps l'épidémie durera – sur ce point, vous avez raison, on risque de devoir gérer cette crise pendant un certain temps – , il est préférable de prévoir une durée d'utilisation plus longue. Or il est écrit à l'article 6 que ce fichier, créé dans le cadre de la lutte contre l'épidémie, n'existe que pour la durée de l'état d'urgence sanitaire déclaré par la loi du 23 mars 2020.
De deux choses l'une : soit on vote une prolongation de l'état d'urgence sanitaire, dans ce cas le fichier sera toujours utilisable et la mention du délai de neuf mois devient inutile, soit l'usage de ce fichier devra être précisée dans un autre cadre législatif qu'une loi d'urgence. En revanche, en l'état, il n'est pas possible d'utiliser, après la sortie de l'état d'urgence, un fichier destiné à n'exister que pendant cette période. Vos propos me laissent donc très perplexe.
L'amendement no 568 n'est pas adopté.
Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 90 , 181 , 174 , 332 , 478 , 542 , 581 , 105 , 439 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 174 , 332 , 478 , 542 et 581 sont identiques, de même que les amendements nos 105 et 439 .
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 90 .
Il pose la question du consentement des personnes qui figureront dans le fichier alors qu'elles ne sont pas malades. Je peux comprendre que, pour des raisons sanitaires, les personnes malades figurent dans le fichier même si elles ne le souhaitent pas. En revanche, que ceux qu'on appelle les cas contacts, soit vingt-cinq à trente personnes qui ont approché un malade, qui ne sont pas elles-mêmes forcément touchées, et à qui on n'a pas demandé si elles étaient consentantes, figurent dans le fichier, voilà qui pose un sacré problème en matière de libertés individuelles.
La parole est à Mme George Pau-Langevin, pour soutenir l'amendement no 181 .
Nous souhaitons revenir sur la question du consentement des personnes inscrites dans le fichier. Il est selon nous inacceptable que des personnes figurent dans un fichier sans avoir donné leur accord préalable – elles devraient même le faire par écrit.
Le ministre affirme que ce n'est pas grave car le fichier est créé pour une certaine période et qu'ensuite tout sera détruit. Or tout ce que nous savons aujourd'hui du sort des fichiers, de la simplicité avec laquelle on peut reproduire numériquement des données ou de l'impossibilité de faire disparaître des données sur internet ne peut que nous rendre extrêmement sceptiques à propos de la disparition effective du fichier une fois qu'il aura été constitué.
C'est la raison pour laquelle nous demandons que de nombreuses précautions soient prises avant d'établir ce fichier, notamment en matière de consentement. Car on sait bien qu'une fois un fichier créé, il n'est plus possible d'encadrer véritablement son utilisation. On a pu lire des articles très précis sur le sujet, signés par des sommités de la science qui nous mettent en garde : à partir du moment où les données sont assemblées, il ne sera plus possible de maîtriser l'utilisation du fichier. Nous demandons donc que toutes les garanties soient apportées au moment de sa création.
Tout d'abord, je tiens à dire clairement que nous ne sommes pas contre le principe de ce dispositif – c'est d'ailleurs pour cela que nous n'avons pas déposé d'amendement de suppression. Il nous paraît essentiel de dépister, d'isoler, de casser les chaînes de transmission. Cependant, il faut prendre en considération le débat qui a été ouvert ici autour de la question des garde-fous et des bornes que l'on pose pour être efficace sans porter atteinte aux libertés individuelles.
Parmi les points forts de désaccord déjà évoqués, le recueil du consentement de la personne nous semble essentiel du point de vue du respect de la vie privée et des libertés individuelles en raison du caractère très intrusif de ce système, notamment en matière de prélèvement de données médicales et personnelles.
« Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement », mais, en l'espèce, vous avez beaucoup de mal à nous expliquer clairement votre dispositif.
Tout d'abord, comme on ne trouve pas les mots exacts en français, on emprunte du vocabulaire à la langue anglaise, comme si, en réalité, le mot français révélait un peu trop la vraie nature du projet. Ensuite, on utilise des mots qui semblent proches, et paraissent ainsi avoir la même signification : le mot « fichage » se transforme progressivement en « traçage », …
… ce qui ne veut plus du tout dire la même chose.
Aujourd'hui, vous créez une dynamique entre des lignes parallèles. Nous nous dotons de l'outil qui permet de faire le lien entre ces lignes. Encore une fois, le problème n'est pas que vous ayez ajouté une colonne – ce que nous acceptons parfaitement – , mais que vous ayez créé une interaction entre les différentes lignes de votre fichier.
Peut-être est-ce parce que vous avez trop de mal à avouer ce qu'est votre projet, en tout cas, les mots pour le décrire ne vous viennent pas aisément. Cette absence de mots et de concepts clairs nous conduit à vous demander des garanties, parmi lesquelles l'une des plus essentielles est le consentement des intéressés. Tel est l'objet de notre amendement.
Défavorable. On ne peut recueillir le consentement de personnes qu'on cherche à identifier.
Je reprends le procédé utilisé par Éric Coquerel pour interroger de nouveau le ministre sur le même sujet. Si j'ai bien compris, il est établi que nous votons pour un fichage qui interviendra jusqu'au 10 juillet, mais vous concédez, monsieur le ministre, qu'un traçage est nécessaire pendant neuf mois – avec des arguments qu'on peut d'ailleurs entendre. Mais quel sera le cadre légal de ce traçage à partir du 10 juillet ? Vous devez nous en dire plus. Si le fichage prend fin le 10 juillet, comment un traçage, aussi pertinent soit-il, pourrait-il se poursuivre jusqu'au terme des neuf mois prévus ? Sur le terrain juridique cela me semble bien flou, et votre réponse sur ce sujet est peu claire.
Cette même question a été posée par de nombreux collègues. Il est nécessaire que vous apportiez des précisions, parce que vous ne pouvez pas dire que la conservation des données est nécessaire pendant neuf mois pour éviter le retour de l'épidémie, ce que nous pouvons entendre, tout en nous demandant d'adopter la création d'un fichier dont le cadre juridique ne serait fixé que jusqu'au 10 juillet. J'espère que vous verrez cette contradiction.
Le problème du consentement est réel. Tout le monde conviendra que vous proposez un dispositif très intrusif, pour le malade comme pour les personnes ayant été en contact avec lui. Conserver des données à caractère personnel dans un fichier sans expression d'un consentement me paraît une atteinte considérable à la liberté de chacun.
Monsieur le ministre, si je commençais à ressentir des symptômes et si je déclarais avoir fait du bateau avec vous au large de la Corse le week-end dernier, vous seriez évidemment embarrassé. Au-delà de l'anecdote, il s'agit d'une énorme atteinte à la liberté individuelle, surtout pour la personne qui n'est pas atteinte par le virus, puisque la nature des données à caractère personnel n'est pas précisée. Pour que les données de la personne soient conservées dans le fichier, le consentement de celle-ci est indispensable ; dans le cas contraire, la liberté individuelle ne serait pas protégée.
Je souhaite clarifier deux aspects pour la deuxième ou troisième fois, mais il est normal que des questions se posent.
Monsieur le député, le cas échéant, il n'apparaîtra nulle part que nous étions ensemble sur un bateau en Corse. On pourra simplement savoir que vous avez été atteint par le virus et que j'ai été en contact avec vous. Il faut vraiment se débarrasser de l'idée d'un fichage recueillant des informations très précises sur les interactions entre les individus. Il s'agit d'un dispositif binaire : test PCR positif ou négatif, cas contacts positifs ou négatifs, patients positifs ou négatifs. C'est tout ! Notre présence commune sur un bateau en Corse ne sera pas renseignée. Cela n'intéresse ni les médecins ni l'assurance maladie.
Cela n'apparaît pas dans le fichier !
Vous ne me répondez pas : le simple fait que deux personnes qui ne sont pas censées se rencontrer aient été en contact constitue une information !
Monsieur Corbière, l'amendement que votre assemblée a adopté en début de séance fixe un nouveau cadre temporel de neuf mois, que ce soit pour les brigades de suivi épidémiologique ou pour le fichier national du système d'information. Ces neuf mois sont décorrélés de la durée de l'état d'urgence sanitaire.
Le Sénat avait introduit une disposition visant à faire disparaître le fichier une fois l'état d'urgence sanitaire levé. Nous ne voulons évidemment pas que cet état d'urgence dure neuf mois. En revanche, nous aurons besoin, après que nous en serons sortis, de continuer les enquêtes épidémiologiques pendant quelques mois, jusqu'à ce que le virus soit complètement vaincu. J'espère avoir clarifié les choses.
Si l'on ne prévoit pas que les personnes consentent à l'enregistrement de leurs données de santé, la moindre des choses est de les informer de la collecte et de l'enregistrement de ces données. D'ailleurs, si certaines données d'une personne apparaissent dans un fichier, celle-ci dispose de droits, conférés par des lois que nous avons votées dans cet hémicycle. Parmi ces droits figurent, entre autres, l'accès aux données à caractère personnel et la possibilité de demander leur rectification si elles sont incorrectes, ou leur effacement si leur conservation n'est plus nécessaire ou si leur traitement est illicite.
Comment le citoyen pourra-t-il faire valoir ses droits s'il n'est pas informé que des données le concernant apparaissent dans le fichier ?
Il va dans le même sens que celui de Mme Ménard : si des personnes n'ont pas consenti à l'enregistrement de leurs données de santé, il est impérieux de les informer de cet enregistrement, pour les raisons qui viennent d'être exposées.
L'alinéa 5 de l'article 6 satisfait votre demande. Je demande donc le retrait des amendements.
La réponse précédente de M. le ministre me donne l'impression que nous sommes pris pour des gens ignorant tout de l'informatique et d'internet. Vous greffez votre outil sur l'interface de la sécurité sociale, qui utilise internet, mais vous le présentez comme une simple case supplémentaire à cocher, indiquant si l'intéressé est positif ou négatif au Covid-19.
Certes, mais cette case générera d'autres informations : l'identité de celui qui l'a cochée, ainsi que le moment et le lieu où il l'a fait. Voilà comment naissent les métadonnées ! En se connectant à l'ordinateur, le médecin, qui indiquera la nature positive du test réalisé par son patient, transférera des métadonnées, dont le recoupement permettra de lier le cas contact au malade. Avec une seule saisie, des données dynamiques de mise en relation seront transférées. C'est cela qui pose problème et qui exige de recueillir le consentement des personnes intéressées.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 532 .
Il propose de remplacer, à l'alinéa 1er de l'article 6, les mots « créé par décret en Conseil d'État » par « soumis au contrôle du Parlement ».
Nous sommes en train d'élaborer un système d'information destiné à lutter contre l'épidémie de Covid-19, qui, état d'urgence oblige, sera soustrait au contrôle du Parlement. Cela pose problème, car un décret en Conseil d'État est insuffisant au regard des nombreuses libertés fondamentales en jeu – leur liste ne cesse de s'allonger depuis le début de l'examen de l'article 6. Le choix final doit revenir au Parlement auquel revient également le contrôle du dispositif.
Avis défavorable. La commission a prévu un contrôle renforcé du Parlement sur le dispositif créé par l'article 6.
L'amendement no 532 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 541 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 396 .
Il me semble que tout le monde soutiendra cet amendement, qui supprime la seconde phrase de l'alinéa 1 de l'article, qui interdit que la collecte des données personnelles à caractère médical donne lieu à rémunération.
Affirmer que la collecte de données médicales ne peut donner lieu à rémunération est une chose, mais, comme vous l'avez souligné, monsieur le ministre, une consultation pour un cas de Covid-19 chez un médecin généraliste sera bien plus longue qu'une consultation habituelle. Il me semble donc logique que la rémunération des consultations pour un Covid-19 soit indexée sur le temps qu'y consacre le médecin. Ce dernier devra récolter les données, chercher les cas contacts et recenser les noms et les numéros de téléphone des vingt, vingt-cinq ou trente personnes que le malade aura pu croiser lors des quarante-huit heures précédentes : tout ce temps ne pourra pas être consacré à recevoir d'autres patients, si bien qu'il ne serait que justice que le médecin en tire une rémunération plus élevée.
Les données que le médecin devra communiquer seront normalement protégées par le secret médical, mais, avec votre fichier, vous demandez en quelque sorte aux praticiens de le violer. Il vous sera donc difficile de refuser, sous couvert de légalité, une quelconque rémunération particulière, dès lors que vous leur demandez d'enfreindre des principes fondamentaux de la médecine.
L'amendement suivant, déposé par le Gouvernement, traite de ce sujet. Avis défavorable.
L'amendement no 396 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il autorise le directeur général de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie à fixer, en tant que de besoin, les modalités de rémunération des professionnels de santé conventionnés participant à la collecte des données. Cette dernière ne peut faire l'objet d'aucune rémunération liée au nombre et à la complétude des données recensées pour chaque personne enregistrée.
La consultation médicale donnant lieu au diagnostic d'une infection à coronavirus sera longue et complexe. Il faudra préparer le diagnostic, prévoir le test, assurer le suivi de celui-ci, organiser l'isolement du malade, expliquer la procédure, recenser les besoins de la personne lors de son isolement, puis, dans un climat de confiance, initier le traçage des personnes croisées au travail, à la maison, dans les transports et lors des repas dans les quarante-huit heures ayant précédé l'apparition des premiers symptômes. Il faut réaliser cette enquête pour identifier le plus rapidement possible les cas contacts. Il conviendra, le cas échéant, de transmettre ensuite le relais à l'assurance maladie pour qu'elle élargisse le cercle.
Ce travail, qui prendra du temps, n'est pas habituel pour un médecin. Avec le déconfinement, la mission fondamentale de diagnostic et de suivi des malades sera transmise à la médecine de ville ; lorsque l'épidémie a commencé, la consigne était de composer le 15 et de se faire soigner à l'hôpital. La médecine de ville va passer en première ligne où elle remplira des fonctions plus complexes. Il est donc normal de l'encourager financièrement, d'autant que les médecins libéraux sont payés à l'acte.
Notre amendement prévoit que la rémunération n'est pas corrélée à la complétude des données enregistrées pour lutter contre la diffusion du virus.
Nous avons beaucoup modifié l'article 6, notamment la durée du dispositif et son contrôle par le Parlement, ce qui est heureux. En commission, nous avons remanié les dispositions sur la rémunération des médecins. Le directeur général de la Caisse nationale de l'assurance maladie nous a indiqué que deux types de rémunération étaient prévus pour une seule des catégories de professionnels qui procéderont au traçage.
Il y aura une rémunération forfaitaire de 55 euros, soit 30 euros de plus que le tarif de la consultation d'un médecin généraliste. Le ministre a raison de souligner que le travail sera considérable pour le médecin : il est donc tout à fait légitime de fixer un forfait représentant plus du double du tarif de la consultation.
Il y aura également un complément de 2 euros par cas contact recensé, qui pourra atteindre 4 euros si les coordonnées de la personne concernée sont renseignées.
Cette approche me pose deux problèmes. Le premier est que l'on ferait appel à la cupidité des individus, ce qui ne me semble pas souhaitable. Les médecins sont des héros, nous l'avons tous constaté. Ils sont en première ligne ; ils ont assumé la charge la plus lourde au cours de la lutte contre la maladie. Ces personnels méritent toute notre reconnaissance, et non d'être mal considérés – un tant soit peu – , ce dont le conseil régional d'Occitanie de l'Ordre des médecins s'est récemment offusqué.
Le second problème est que l'on introduit une discrimination au sein des personnes chargées de procéder au traçage : les médecins libéraux seront rémunérés au mérite ; les autres – salariés de la caisse primaire d'assurance maladie, membres des brigades sanitaires – ne le seront pas. L'amendement que nous avons adopté en commission, à mon initiative, présente l'inconvénient d'interdire la rémunération de toute collecte. Celui présenté à l'instant par M. le ministre présente à mes yeux celui de ne pas revenir sur la rémunération de 2 euros et de 4 euros.
L'amendement no 271 vise à interdire uniquement la rémunération à l'acte, à la complétude des données, tout en conservant la base forfaitaire, qui pourra même être améliorée si M. le ministre et ses services en décident ainsi.
Si je vous comprends bien, monsieur Houlié, vous nourrissez une inquiétude au sujet de la possibilité que nos médecins, nos soignants, nos infirmiers et les salariés de l'assurance maladie – bref ceux qui seront en première ligne pour identifier les personnes malades ou ayant été en contact avec elles – procèdent à une forme de collecte de données, ou de démarchage. Je ne partage pas cette inquiétude, mais je peux concevoir qu'on l'éprouve.
Toutefois, il me semble que l'amendement du Gouvernement y répond. En effet, il indique précisément que « la collecte des données ne peut faire l'objet d'une rémunération liée au nombre et à la complétude des données recensées pour chaque personne enregistrée ». Les médecins et les soignants ne procéderont donc à aucun démarchage téléphonique. L'amendement du Gouvernement est précis sur ce point. Je vous suggère donc de retirer le vôtre à son profit, et émettrai à défaut un avis défavorable.
Monsieur le ministre, vous êtes donc favorable à l'amendement du Gouvernement !
Sourires.
Je souligne l'audace du Gouvernement, qui est d'accord avec lui-même ! Tel n'est pas toujours le cas, surtout ces temps-ci !
Un amendement dont les premiers mots sont « peut, en tant que de besoin » est doublement suspect à mes yeux. Il s'agit bien d'une question essentielle, d'un vrai sujet, d'un vrai débat relatif à un véritable outil, que l'on doit pouvoir mobiliser. Ouvrir un fichier, c'est bien beau, mais si personne ne le remplit, on sera bien ennuyé ! Or les seuls à même de le remplir sont les médecins libéraux, qu'on avait écartés de la stratégie de lutte contre le coronavirus jusqu'à présent, et qui sont désormais largement mobilisés.
En tant que professionnels de santé et défenseurs du secret médical, ils pourraient, par déontologie, être amenés à ne pas adhérer à ce système. Il a donc fallu trouver un moyen de les motiver. On s'est alors avisé qu'un médecin, d'après la vision que peut en avoir le Gouvernement, doit être sensible à une logique pécuniaire.
Pouvait-on envisager de les rémunérer au rendement ? Cela aurait fait mauvais genre. On a donc interdit qu'ils soient rémunérés au nombre ; mais de quel nombre s'agit-il ? Le nombre de rendez-vous consacrés au coronavirus ? Le nombre de cas contacts identifiés au cours d'un rendez-vous ? Tout cela est si flou que l'effort de précision qui semble caractériser l'amendement fait surtout apparaître la répétition d'un doute, d'une incertitude, ce qui le rend suspect.
Tout d'abord, je tiens à préciser que je crois à l'utilité du tracing des cas contacts, qui sera réalisé par des humains. J'ai suffisamment défendu sa mise en oeuvre par des humains, et non par des outils numériques, pour m'abstenir d'y revenir.
Je ne pense pas que les médecins libéraux se livreront à un démarchage téléphonique ; rien de tel n'est attendu d'eux. Il n'en est pas moins nécessaire de les rémunérer. C'est pourquoi la solution adoptée en commission ne correspond pas tout à fait à ce qu'il convient de faire.
En tout état de cause, ils sont animés par le sentiment de l'intérêt général. Ils sont nos anges gardiens veillant à la mise en oeuvre de la doctrine « protéger, tester, isoler ». Nous ne chercherons donc pas à introduire une dimension lucrative là-dedans. Qu'ils soient bien rémunérés, par le biais d'un forfait supplémentaire, cela est tout à fait légitime. Ce que je crains, en revanche, ce sont les effets de la rémunération de 2 euros par nom et de 4 euros par coordonnées, que le Gouvernement conserve.
Des personnes malveillantes pourraient tirer avantage de ce dispositif, même si la quasi-totalité des médecins ne le fera pas. Pour nous protéger contre ce risque, pour que le dispositif soit irréprochable aux yeux de la population, dont on sait combien son adhésion totale aux outils de lutte contre l'épidémie importe, je souhaite vraiment que nous adoptions l'amendement no 271 .
Monsieur Schellenberger, je ne partage pas du tout votre vision du secteur libéral.
Après la mise en cause de l'État, c'est au tour du secteur libéral. Vous en êtes sûr de vous ?
Monsieur Houlié, je comprends que vous fassiez preuve de vigilance. Votre réflexion peut parfaitement s'entendre. Nous parlons des médecins libéraux, qui sont rémunérés à l'acte, contrairement aux médecins de l'assurance maladie et aux membres des équipes des ARS, qui sont des salariés. Un médecin libéral doit pouvoir reprendre une activité, d'autant plus que beaucoup d'entre eux ont dû fermer leur cabinet faute d'équipements de protection, ou parce que les patients consultaient davantage à l'hôpital et moins en ville.
Nous avons prévu une consultation très complexe, faisant l'objet d'un forfait spécifique, ce qui ne pose pas de problème. Dans ce cadre, les médecins feront le tour du premier cercle familial, procéderont à l'évaluation des risques et prescriront des tests à ses membres.
Par la suite, deux possibilités s'offrent à eux : ou bien ils transféreront le dossier à l'assurance maladie, qui mobilisera des salariés pour appeler à nouveau la personne concernée et prendre le temps de dresser avec elle la liste des individus qu'elle a côtoyé au cours des jours précédents ; ou bien ils estimeront avoir la possibilité de le faire eux-mêmes et iront un peu plus loin dans l'enquête menée avec leurs patients, au-delà du premier cercle familial.
Cette seconde solution prendra du temps ; or, pour un médecin libéral, le temps, c'est un peu de l'argent. Nul ne nie qu'ils soient animés par une éthique les incitant à opter pour cette solution. Les médecins ont une éthique robuste. Ils l'ont démontré au cours de la période qui s'achève. Nonobstant, entre prendre une heure pour faire une consultation complexe et prendre trente minutes en renonçant au traçage des contacts, chaque médecin, à un moment donné, sera obligé de faire des choix.
Nous avons donc eu l'idée, confortée par la concertation avec les médecins, d'encourager la première option. Nous aurions pu prévoir une consultation majorée, semblable à celle que nous prévoyons dans le présent projet de loi, suivie d'une autre au cours de laquelle le médecin aurait continué d'explorer les cas contacts du patient. Cela ne nécessite pas même de passer par la loi.
Toutefois, le mécanisme aurait été le même. Il s'agit d'inviter le médecin à mener ce travail à son terme, et de lui permettre de le faire sans qu'il en soit de sa poche. Tel est le principe du dispositif retenu. Prévoir une deuxième consultation aurait obligé à convoquer à nouveau le patient, ce qui nous a semblé trop complexe.
Le mécanisme pensé par l'assurance maladie permet de tout faire en un, de reconnaître tant la durée de travail effectué par le médecin que les exigences inhérentes à sa mission. Il s'inscrit dans la logique de la rémunération sur objectifs de santé publique – ROSP – , indexée sur la performance de la médecine libérale, et introduite dans notre pays il y a dix ans, en demandant aux médecins libéraux de réduire le nombre de doubles et de triples prescriptions de psychotropes parmi les personnes âgées en échange d'un bonus attribué à la fin de l'année. Cette évolution a fait débat.
Il n'en demeure pas moins qu'elle a produit des résultats remarquables en matière de santé publique. Tous les indicateurs des maladies chroniques incluses dans la rémunération à la performance se sont améliorés. Les médecins auxquels nous nous adressons ont beau avoir une solide vocation, ils sont aussi médecins libéraux. Ils doivent faire tourner leur cabinet, ce qui est normal.
La parole est à M. Pascal Brindeau, pour soutenir l'amendement no 582 .
Il vise à faire en sorte que la collecte de données prévue par le projet de loi satisfasse aux critères définissant le principe de minimisation des données énoncé par le RGPD, le règlement général sur la protection des données. Elles doivent être adéquates, pertinentes et limitées à ce qui est nécessaire au regard des finalités pour lesquelles elles sont traitées.
Monsieur Brindeau, je vous ai répondu en commission sur ce sujet, sans vous convaincre manifestement. Pour l'information de nos collègues présents, je vous répondrai à nouveau.
Madame la rapporteure découvre la procédure parlementaire : c'est formidable !
Je n'ai rien dit d'autre, monsieur Gosselin.
Monsieur Brindeau, le respect du principe de minimisation s'impose au législateur, sans qu'il soit nécessaire de le préciser dans la loi, dès lors qu'il est prévu par le RGPD. Par ailleurs, la minimisation des données sera appréciée in concreto par la CNIL lorsqu'elle examinera le décret en Conseil d'État prévu par l'article 6, puis dans le cadre de sa mission du contrôle de la mise en oeuvre de ses dispositions. Avis défavorable.
Avis défavorable.
La situation ne manque pas de sel : Mme la rapporteure vient d'indiquer que la CNIL devra se prononcer lorsqu'elle examinera le décret en Conseil d'État prévu par l'article 6 alors que la CNIL s'est prononcée ce matin même. Je ne trahis ici aucun secret car je n'évoque ni la publication de l'avis ni la délibération. Elle s'est réunie ce matin et avait pour ordre du jour l'examen du décret d'application de la loi dont nous débattons depuis hier. Tous les calendriers se bousculent un peu ; il est bon de le savoir !
La minimisation des données est toujours mise en avant. Toutefois, préciser que seules les données strictement nécessaires seront collectées ne mange pas de pain et permet de rassurer.
Je m'inscris dans le débat que nous avons eu hier soir, au cours duquel nous avons entendu dire qu'il fallait dire les choses, et que la loi n'était peut-être pas assez bavarde. En d'autres occasions, nous avons entendu dire qu'elle l'est trop. Pour ma part, j'estime que la loi n'est ni trop bavarde ni pas assez. Elle est précise dès lors qu'elle comporte certains éléments et qu'elle permet de rassurer. J'estime qu'elle peut rassurer en précisant, même si cela va de soi, que seules les données strictement nécessaires seront collectées. Cela ne mange pas de pain, je le répète, et deux lignes supplémentaires au Journal Officiel ne changeront pas la face du monde. Une telle précision serait réellement de nature à rassurer. Madame la rapporteure, je vous invite à reconsidérer votre position négative sur l'amendement.
L'amendement no 582 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 400 .
« Oh ! » sur les bancs du groupe LR.
Je n'y crois pas ! Je veux bien réentendre cela madame la rapporteure !
Sourires.
Sourires sur plusieurs bancs des groupes LaREM, MODEM et LR.
L'amendement no 400 est adopté.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 106 .
Mme Lorho en est la première signataire. Il porte sur l'alinéa 2 et vise, après la seconde occurrence du mot « santé », à insérer les mots « , en accord avec le médecin des personnes concernées et dans le respect du secret médical dont celui-ci est garant, ». L'immixtion d'organismes extérieurs dans les dossiers médicaux et la maîtrise des données médicales soulève la question de la préservation du secret médical. Certes, nous en avons débattu lors de l'examen d'amendements défendus précédemment, mais il est bon d'y revenir.
L'amendement no 106 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 622 vise à ajouter à la nécessité d'un décret du Conseil d'État, d'ailleurs imposé par celui-ci, un avis conforme de la CNIL, dont l'éclairage sur les libertés numériques est tout à fait pertinent, de sorte que celles-ci seraient bien protégées.
L'amendement no 623 est un amendement de repli prévoyant un avis simple de la CNIL.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 107 .
Il s'agit de compléter l'alinéa 2 en prévoyant la nécessité d'un avis conforme de la CNIL. Si le ministre, l'Agence nationale de santé publique, un organisme d'assurance maladie ou les agences régionales de santé peuvent être autorisés à adapter le fonctionnement du fichier collectant les données de santé, il convient qu'ils le soient après un avis contraignant et conforme de la CNIL. L'intention qui nous anime est inchangée : protéger les données des Français et leurs libertés.
Cet amendement propose une sorte de garde-fou, si vous me permettez l'expression : toute modification du fichier devrait être soumise à l'avis de la CNIL. On ne perdrait pas en efficacité, tout en garantissant que la CNIL effectuera un contrôle.
Ces amendements sont satisfaits. La CNIL rendra un avis sur le décret. Elle peut par ailleurs contrôler le dispositif avant le déploiement, pendant la phase opérationnelle puis après la phase opérationnelle. Elle pourra par exemple examiner les questionnaires utilisés.
Demande de retrait ou avis défavorable.
En 2006, le Conseil constitutionnel a considéré que la Constitution n'autorisait pas le législateur à subordonner à l'avis conforme d'une autorité administrative l'exercice, par le Premier ministre, de son pouvoir réglementaire. Il a déclaré contraire à la Constitution le mot « conforme » dans une disposition du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 qui prévoyait un « décret en Conseil d'État, après avis conforme de la Commission nationale de l'informatique et des libertés ». Je suis rodé sur le sujet parce que nous en avons débattu au Sénat.
En revanche, l'avis de la CNIL sera public, et il sera suivi. Demande de retrait – sinon, on est mal !
Il s'agit ici, en réalité, d'assurer la coordination entre l'alinéa 2 du I de l'article 6 avec le IV de ce même article, qui dispose que « les modalités d'application du présent article sont fixées par le décret en Conseil d'État mentionné au I après avis public conforme de la Commission nationale de l'informatique et des libertés ». Il faut de la cohérence ! Écrire, au I, aussi bien à l'alinéa 1 qu'à l'alinéa 2, qu'un avis public conforme est nécessaire nous paraît important ; et puis on verra bien ce que dira le Conseil constitutionnel ! Après tout, les revirements de jurisprudence sont possibles. Et encore faut-il que le Conseil soit saisi, même si le Président de la République a annoncé que tel serait le cas.
Le parallélisme des formes et des compétences nous paraît important : avis conforme au IV, avis conforme au I. Sinon, le texte est bancal : seuls les systèmes d'information créés ce soir relèveraient d'un avis conforme, tandis que ceux qui existent déjà, et que j'évoquais à dessein tout à l'heure, relèveraient d'un autre régime. La finalité est pourtant la même.
L'amendement no 622 est retiré.
L'obligation d'un avis de l'autorité régulatrice est inscrite dans le RGPD. La CNIL sera donc bien saisie. Je renouvelle ma demande de retrait.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 536 .
Il s'agit d'un amendement de cohérence avec l'amendement no 534 que j'ai soutenu au début de cette séance, relatif au partage des données.
Monsieur le ministre, je repose ma question : combien de personnes auront accès à ces données ?
L'amendement no 536 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l'amendement no 479 .
Cet amendement, dont le premier signataire est notre collègue Yannick Favennec Becot, vise à réécrire une partie de l'article 6, sans le modifier sur le fond, pour que les professionnels de santé y figurent en meilleure place, car leur rôle est essentiel.
Avis défavorable. Vous souhaitez supprimer une précision introduite en commission, à l'initiative de Jean-François Eliaou, qui permet la collecte des données relatives à l'imagerie médicale, essentielles au diagnostic.
Avis défavorable.
Il ne s'agit pas ici de supprimer une référence à l'imagerie médicale, mais uniquement de donner une plus grande place dans le texte aux professionnels de santé – c'est une question de forme…
L'amendement no 479 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 588 .
Nous en revenons à la question de l'anonymisation : il s'agit de s'assurer que les données des cas contacts non malades seront bien anonymisées.
Avis défavorable.
Je saisis cette occasion de vous poser à nouveau, monsieur le ministre, une question à laquelle vous n'avez pas répondu : comment seront traitées les métadonnées ? J'entends bien que la donnée enregistrée dans ce fichier est très simple ; mais le risque réside dans le traitement des métadonnées. Dans les faits, la technique peut, derrière une apparence d'objectivité, se transformer, sous l'effet d'une volonté politique contraire à l'esprit du texte dont nous débattons.
L'enregistrement des données dans ce fichier se fera, si j'ai bien compris, sur une plateforme de la sécurité sociale, sur internet, à partir de l'ordinateur de n'importe quel cabinet médical, non sécurisé, sans flux particulier. Seront donc créées de nombreuses données annexes, géolocalisation, datation… D'où ma question sur les métadonnées.
L'amendement no 588 n'est pas adopté.
Cet amendement, dont la première signataire est Valérie Rabault, vise à limiter autant que possible la conservation des données personnelles rassemblées dans ce fichier. Dès lors que l'état médical des personnes concernées ne le justifie plus, il faut faire disparaître leurs données du fichier, et les en informer.
Dans le même esprit, cet amendement, qui reprend une préconisation de la CNIL, vise à interdire la conservation des données recueillies au-delà d'un mois. Cette période est suffisante pour une lutte efficace contre la pandémie. Nous nous préserverions ainsi des risques que présente un fichier mal maîtrisé.
Même argumentation : il s'agit de limiter à trente jours au maximum la durée de conservation des données.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 109 .
Nous avons déjà largement débattu de la durée de conservation des données lorsque nous avons parlé du délai de neuf mois. Avis défavorable.
Avis défavorable.
Mme la rapporteure ne répond pas aux arguments développés. Tout à l'heure, vous avez décidé que la durée même du fichier ne pouvait excéder neuf mois, et qu'il faudrait revenir devant le législateur pour demander une éventuelle prolongation de ce délai. Mais ce n'est plus de cela qu'il s'agit ici ! Ici, il s'agit de la conservation des données au sein du fichier.
Je ne comprends pas comment vous pouvez vous opposer au fait qu'un mois après, quelqu'un qui est rentré dans le fichier en sorte. Pour combattre l'épidémie, nous dites-vous, il faut retracer les contacts de chaque personne malade, et informer ces contacts afin qu'ils s'isolent et ne transmettent pas la maladie. Pour cela, un mois suffit : soit on n'a pas été malade, soit on est guéri ! Pourquoi conserver ces données au-delà ?
Votre réponse ne peut que susciter des inquiétudes. Tout cela est terriblement contradictoire !
Ce fichier a plusieurs finalités : il vise d'abord bien sûr à identifier les personnes contaminées et celles qui ont été en contact avec ces malades ; mais il servira aussi à des fins de surveillance épidémiologique à l'échelle nationale, ainsi qu'à la recherche, notamment pour pouvoir travailler sur un vaccin et des solutions de plus long terme. Tout cela est prévu par l'article 6.
Si l'on supprime des données, on s'interdit de mener un travail efficace.
Si c'est votre argument, les données vont être conservées très longtemps ! Ça peut durer trois ans !
J'ai expressément posé la question de l'encadrement de la conservation des données à la présidente de la CNIL lors de son audition devant la commission des lois : elle a indiqué qu'une durée d'un an – et non d'un mois – était proportionnée.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Quelle réponse ! C'est énorme ! Je n'en reviens pas : on en a pour des années !
Contrairement à ce qui vient d'être dit, il y a là évidemment une atteinte à la vie privée ! Dès lors que l'on a la certitude que la personne n'est plus porteuse du virus, ou n'a pas été contaminée, il n'y a pas d'intérêt à conserver ces données.
Je vous renvoie à la théorie de Milgram : en quelques mois, ce fichier comportera le nom de tous les Français, ou tout au moins une grande majorité d'entre eux – ce qui le rendra complètement inexploitable. Aujourd'hui, nous sommes réunis ici, venus de tous les coins de France. Si – ce que je ne souhaite à personne – l'un d'entre nous développe la maladie dans les quarante-huit heures, c'est une bombe !
Je réagis à l'intervention de Mme Avia. Initialement, le fichier devait permettre de recenser les malades et les cas contacts. Mais c'est autre chose de vouloir conserver ces données pendant un an – au moins, car une loi peut toujours prolonger cette durée – pour nourrir des études épidémiologiques !
Que les données d'un malade soient utilisées pour mener des recherches, je peux le comprendre. Mais le fichier contiendra aussi des informations sur des personnes qui n'ont pas été touchées. Quel est l'intérêt de ces données-là ?
Ce qui pose problème depuis le début, ce n'est pas le fait de recenser les malades mais de conserver des traces concernant des personnes qui ont été en contact avec des malades sans l'avoir été eux-mêmes. Cela constitue une atteinte aux libertés. Dès lors que la personne testée n'est pas malade, elle doit disparaître du fichier ; elle n'a plus rien à y faire. Le maintien de données la concernant est inévitablement suspect.
Si nous devions réduire la durée de conservation à un mois ou à la seule durée de l'enquête sanitaire, cela ferait perdre de précieuses données aux autorités chargées de contenir l'épidémie.
Il sera utile de garder les résultats des tests pendant plusieurs mois pour s'assurer de la fiabilité des tests sérologiques et apprécier l'immunisation au virus. Lorsque, dans quelques mois, nous en saurons plus sur les tests sérologiques, nous pourrons chercher à tester l'immunité des personnes atteinte plusieurs mois auparavant ; croiser les résultats d'un test virologique positif avec celui d'un test sérologique ; apprécier le degré d'immunisation de la personne plusieurs mois après son infection.
De la même manière, il sera utile de conserver des données relatives aux cas contacts pendant plusieurs mois pour faciliter la vie des Français et des enquêteurs sanitaires. Sur la base des historiques de données du système, une enquête sanitaire sur un cas contact qui aurait déjà été testé positif il y a plusieurs mois pourrait être estimée moins prioritaire au vu de la probabilité que ce denier ait acquis une immunité. Cela évitera à la personne concernée de devoir refaire un test et de s'isoler à nouveau par précaution le temps de recevoir les résultats. À l'inverse, les enquêteurs pourront se focaliser sur les cas plus risqués.
Ainsi, une personne qui serait cas contact et dont on réussirait à établir qu'elle a déjà été malade pourrait se voir épargner la quarantaine. En dépit des interrogations qui demeurent sur l'immunisation, le Haut Conseil prévoit cette possibilité dans l'avis dont j'ai fait état ce matin. Mais pour cela, nous avons besoin de conserver les données de la personne pendant un certain temps. Il serait dommage de lui suggérer une nouvelle quarantaine parce que nous aurions perdu les données montrant que son test PCR était positif.
Exclamations sur les bancs du groupe FI.
Enfin, la conservation des données est évidemment fondamentale pour permettre à la recherche et à ceux qui observent l'épidémie de comprendre comment se forment les clusters complexes en remontant l'historique des contaminations. En outre, le fait de remonter la chaîne de dépistage permettra d'identifier d'éventuels produits défectueux ou, si la responsabilité d'une erreur était recherchée, de contacter le patient pour l'inviter, le cas échéant, à renouveler le test.
Exclamations sur les bancs du groupe FI.
L'amendement no 183 n'est pas adopté.
L'amendement no 365 de Mme Émilie Cariou est rédactionnel.
Quel est l'avis de la commission ?
Je suis désolé de devoir recourir à ce procédé pour reprendre la parole, mais ce que vous venez de dire, monsieur le ministre, est énorme.
Pour justifier le fait de ne pas effacer les données, vous expliquez que l'inscription dans le fichier permettrait à une personne qui a déjà été malade d'éviter la quarantaine. Cet argument est ahurissant.
Si demain je consulte mon médecin et s'il apparaît après un test que je suis positif, cela figurera dans mon dossier médical. J'espère que cela suffira pour que, le jour où je dois être placé en quarantaine parce que j'ai été en contact avec une personne contaminée, je puisse m'y soustraire en fournissant une attestation du médecin montrant que j'ai déjà atteint du Covid-19 !
Il me paraît aberrant de privilégier le recours fichier dans ce qui relève en réalité de la relation entre un médecin et son patient. Nous sommes tous amenés à fournir des attestations médicales pour prouver que nous avons déjà eu certaines maladies.
Votre réponse me laisse perplexe. Désormais, il faudrait être inscrit dans un fichier pour pouvoir échapper à la quarantaine. C'est inquiétant pour les libertés individuelles, pour la relation entre médecin et patient et pour le secret médical. Plus vous apportez des réponses, plus ce fichier m'inquiète.
Alors je vais devoir arrêter de vous répondre !
Que voulez-vous que je vous dise ?
Il y a une certaine confusion dans les mots employés et les symboles. Le mot « fichier » fait sursauter certains tandis que le mot « métadonnées » plaît à d'autres. Tous n'ont peut-être pas compris à quoi ils pouvaient servir, peut-être faut-il encore que le ministre le répète.
J'ai travaillé pendant trente-cinq ans dans les systèmes d'information, donc je crois savoir de quoi il s'agit. Laetitia Avia l'a dit précédemment, un système d'information sert non seulement à suivre les malades mais aussi à comprendre l'épidémie. Dans ce but épidémiologique, nous avons besoin de conserver toutes les données le plus longtemps possible…
Donc il faut les conserver des années ! Dites-le clairement, dans ce cas !
Mais non : la durée de conservation est précisée dans le texte.
Certains d'entre vous sont habités d'une peur qui me semble déraisonnable. Les alinéas 16 à 24 prévoient la création d'un comité de contrôle et de liaison Covid-19, chargé de suivre l'application du système d'information. Celui-ci devra, par des audits réguliers, évaluer l'apport des outils numériques et vérifier « tout au long de ces opérations le respect des garanties entourant le secret médical et la protection des données personnelles ».
Le Parlement sera-t-il mis à l'écart ? Absolument pas : deux députés et deux sénateurs, désignés par les présidents des deux assemblées, seront membres du comité.
Arrêtons de fantasmer et de faire peur à tout le monde. Un contrôle est prévu et celui-ci sera utile à tous.
Vous n'écoutez pas ce que l'on vous dit. La question que j'ai posée est simple : que vient faire dans ce fichier une personne qui n'est pas malade ?
Que des études soient menées sur des personnes malades, je peux le comprendre. Mais que vient faire pendant neuf mois dans un fichier le cas contact dont le test est négatif ? Lorsque le fichier StopCovid sera créé, les choses iront encore plus loin, des centaines de milliers de Français seront fichés. Je ne vois pas l'intérêt de recenser ceux dont les tests ont établi qu'ils ne sont pas malades.
L'amendement no 365 n'est pas adopté.
La parole est à M. Pierre-Henri Dumont, pour soutenir l'amendement no 540 .
Nous venons d'avoir la confirmation – nous l'avions déjà compris – qu'en définitive, tous les Français – pas seulement les malades, mais aussi les cas contacts ainsi que les cas contacts des cas contacts – seraient fichées, et ce non seulement pendant la période où les personnes seraient susceptibles d'être contaminées, mais pendant toute la durée de validité du système. Il est donc d'autant plus nécessaire de protéger l'accès aux informations qu'il contient. Cela concerne les personnes autorisées à accéder aux données mais aussi le lieu ou les modalités de stockage de celles-ci.
C'est là tout l'intérêt de l'amendement de Julien Aubert, qui précise que les données doivent être obligatoirement stockées dans un centre de données de l'assurance maladie situé sur le territoire national.
Ces données sont ultra-sensibles et il convient de les protéger, a fortiori si elles concernent, à terme, l'ensemble de la population française.
Défavorable. Cela relève davantage du décret en Conseil d'État, sur lequel la CNIL devra se prononcer. C'est cette dernière qui s'assurera des conditions de sécurisation des données, notamment pour ce qui concerne le stockage.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Il y a trois raisons de ne pas voter cet amendement, la première étant que les données ne seront pas uniquement stockées dans le centre de données de l'assurance maladie. En pratique, en effet, les données relatives aux résultats des tests seront hébergées par le serveur de l'AP-HP – Assistance publique-Hôpitaux de Paris – tandis que seront stockées par l'assurance maladie les données nécessaires au suivi des cas contacts. La rédaction de l'amendement empêche donc de l'adopter.
Ensuite, il serait contraire au droit communautaire dans le domaine numérique d'imposer un stockage sur le territoire français – même si, je vous rassure, ce sera bien le cas.
Enfin, nous n'avons aucune intention de transférer des données vers un État tiers, à telle enseigne que les finalités restrictives définies par la loi y font totalement obstacle.
Exclamations sur les bancs du groupe LT.
Je vous propose donc de retirer l'amendement.
Admettons l'impossibilité de transfert dans un État tiers, même si je conteste ce point.
Les données de santé seront hébergées en France, par l'assurance maladie ou l'AP-HP – très bien. Mais il faudrait distinguer les données dormantes et les données en traitement. Je veux bien croire que les premières resteront en France, mais qu'en est-il des secondes ? Pouvez-vous nous garantir qu'à aucun moment ces données ne sont envoyées à l'étranger pour y être traitées d'une manière ou d'une autre ?
Elles seront traitées en France !
Ce serait une bonne chose que vous répondiez clairement au micro pour que vos propos soient consignés.
Je vous l'ai dit !
Exclamations sur les bancs du groupe FI.
L'amendement no 540 n'est pas adopté.
Brouhaha sur les bancs des groupes LR et FI.
Nous avons encore quelques heures à passer ensemble, nous aurons l'occasion de débattre.
Je vous ai répondu, monsieur Gosselin. Si ma réponse ne vous satisfait pas, vous n'êtes pas obligé de m'interpeller jusqu'à ce que je cède car ce n'est ainsi que nous procédons. Vous le savez, et ce n'est pas votre habitude de vous comporter ainsi.
Ce n'est tout de même pas compliqué de se lever pour répondre au micro ! C'est la tradition ici. Nos collègues de gauche ne vous ont pas entendu !
Monsieur Gosselin, je crois avoir parlé plus qu'à mon tour depuis hier et m'être levé presque systématiquement pour donner l'avis du Gouvernement sur tous les amendements. Si cela ne vous suffit pas…
Exclamations sur les bancs des groupes LR et FI.
Mes chers collègues, seul le ministre a la parole pour soutenir l'amendement no 608 . Si je dois suspendre la séance, je le ferai.
L'amendement visait, à l'origine, à supprimer l'alinéa 4, relatif à la définition des données médicales figurant dans le système d'information. Le Gouvernement souhaite le rectifier afin de ne supprimer que la référence à l'arrêté du ministre chargé de la santé. Il propose en effet de renvoyer la question à un acte supérieur – en l'occurrence, le décret en Conseil d'État mentionné au quatorzième alinéa, qui sera pris après avis de la CNIL et définira l'ensemble des conditions d'application des dispositions de l'article 6. En adoptant l'amendement ainsi rectifié, vous entourerez l'usage du fichier de meilleures garanties.
Je vous prie de m'en excuser : nous venons seulement d'effectuer cette modification.
Protestations sur les bancs des groupes LR et LT.
Mes chers collègues, l'amendement no 608 du Gouvernement est retiré. Un nouvel amendement sera présenté dans quelques minutes, le no 641, dont je vous livre d'ores et déjà le contenu : « À la fin de l'alinéa 4, substituer aux mots : « arrêté du ministre chargé de la santé après avis du Haut Conseil de la santé publique » les mots : « le décret en Conseil d'État prévu au présent I ».
L'amendement est en cours de diffusion. Si vous ne l'avez toujours pas à votre disposition lorsqu'il viendra en examen, je suspendrai la séance.
L'amendement no 608 est retiré.
Rappel au règlement
Il porte, madame la présidente, sur la tenue des séances et se fonde sur l'article 58, alinéa 1.
Je reviens sur ce qui vient de se dérouler. Je vous prie de m'excuser, monsieur le ministre, mais la réponse que vous avez apportée à M. Gosselin intéresse l'ensemble de l'hémicycle, à gauche comme à droite. Or vous vous êtes exprimé hors micro et je ne l'ai pas entendue.
Mais non, je l'ai faite au micro !
Ce qui est dit hors micro ne figure pas nécessairement au compte rendu officiel de nos séances publiques. Aussi j'aimerais que vous répétiez ce que vous avez dit à M. Gosselin, faute de quoi nous pourrions considérer que cette réponse n'a pas vraiment été donnée.
Par souci d'apaisement, je veux bien le faire.
Je crois qu'il y a un malentendu, parce que j'ai bien formulé cette réponse au micro. Vous pourrez consulter le compte rendu de la séance. Peut-être également que je ne parle pas assez fort.
Je répète donc que les données des résultats des tests seront stockées à l'AP-HP en France et seront ensuite transférées, toujours en France, au centre de données de la Caisse nationale d'assurance maladie, qui s'occupera de les stocker dans la durée.
Telle est la réponse que j'ai donnée à M. Gosselin qui, après que je me sois rassis, m'a interpellé en me disant que je n'avais pas précisé que c'était en France. Mais l'AP-HP et la CNAM sont toutes les deux situées à Paris, qui est bien une ville française ! Le traitement des données se fera donc en France, sans transiter par un autre pays. C'est ce que j'ai dit au micro.
Exclamations sur les bancs des groupes LR et FI.
Vous ne me faites pas confiance, monsieur Gosselin, mais c'est bien ce que je vous ai dit.
Nouvelles exclamations sur les bancs du groupe LR.
Article 6
La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l'amendement no 482 .
Il vise à limiter au maximum les informations recueillies, et donc à s'en tenir à l'identité et aux données virologiques, à l'exclusion des autres données de santé. C'est ce qu'a recommandé la présidente de la CNIL lors de son audition – notre collègue Laetitia Avia pourra le confirmer.
C'est précisément ce que nous faisons, monsieur Pupponi, en maintenant l'alinéa 4 qui encadre fortement la collecte des données de santé. L'avis est défavorable.
L'alinéa 4 prévoit le recueil de plusieurs catégories de données de santé. Pour ma part, je souhaite exclure tout ce qui ne relève pas de la virologie. Nous sommes donc en désaccord, mais ce n'est pas grave.
L'amendement no 482 n'est pas adopté.
La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l'amendement no 481 .
Cet amendement de notre collègue Philippe Vigier vise à ce que les données à caractère personnel concernant la santé transmises par les personnels de santé soient limitées à l'identité du patient pris en charge, au résultat de l'examen biologique médical et à l'identité des personnes avec lesquels il a été en contact, ce dernier élément ne pouvant être communiqué que de façon volontaire.
L'amendement no 481 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Suspension et reprise de la séance
Pour que vous puissiez prendre connaissance de l'amendement no 641 dans de bonnes conditions, la séance est suspendue pour cinq minutes.
La séance, suspendue à vingt-trois heures cinq, est reprise à vingt-trois heures dix.
La séance est reprise.
L'amendement no 641 du Gouvernement a été défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Nous avons dû suspendre la séance pour prendre connaissance de l'amendement du Gouvernement, et il faudrait en rester là ? En réalité, il n'apporte pas grand-chose. Certes, pour définir les éléments pouvant être collectés, un décret en Conseil d'État est préférable à un simple arrêté. Mais qu'en est-il de l'avis scientifique qui devait précéder ce dernier ? Il a disparu ! Nous avons certes gagné en solidité juridique, mais les fondements scientifiques de l'acte, elles, seront moins claires.
Je ne suis donc pas certain que la rédaction proposée soit meilleure. Vous pourriez éventuellement prévoir que le décret en Conseil d'État soit pris après avis public du Haut Conseil de la santé publique ; dans ce cas, nous serions tout à fait satisfaits.
Je ne voudrais pas jeter le trouble, ni susciter une controverse…
Nous proposons de remplacer l'arrêté prévu, pris après avis du Haut Conseil de la santé publique, par un décret en conseil d'État, pris après avis de la CNIL. Cette procédure plus sécurisée me semble aller dans le sens de ce que vous souhaitez. Je ne vous oblige évidemment pas à voter l'amendement ; je vous présente les choses pour ce qu'elles sont. Le dispositif me paraît solide.
Mes collègues et moi souhaitions que des précisions soient apportées en séance publique. Ne vous en déplaise, monsieur Schellenberger, la garantie juridique que le Gouvernement entend ainsi fournir nous satisfait pleinement. J'avoue ne pas comprendre le sens de votre intervention, à moins qu'elle ne vise à faire durer le débat pour le plaisir…
Sourires et applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
L'amendement no 641 est adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 110 .
Mme Lorho en est la première signataire. Il tend à limiter l'accès aux données enregistrées dans le fichier, notamment à celles qui concernent les comorbidités, lesquelles sont souvent responsables du décès. Il est évidemment essentiel que ces données soient connues du personnel de santé, mais elles ne doivent pas faire l'objet d'un traitement par des autorités administratives qui n'ont en aucun cas à les connaître. L'amendement vise donc à garantir le respect du secret médical.
C'est bien le principe de minimisation qui sera appliqué : seules les données directement et strictement utiles à l'efficacité du dispositif pourront être renseignées. Les comorbidités sont exclues de ce champ, la CNIL ayant fortement insisté sur ce point. J'émets donc un avis défavorable.
Mon avis est en tout point identique à celui de Mme la rapporteure. Il en va d'ailleurs de même pour les données relatives aux pathologies préexistantes. Je serai donc également défavorable à l'amendement suivant.
L'amendement no 110 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 538 .
J'en explique la teneur même si M. le ministre a déjà donné son avis. La sécurité du système prévu à l'article 6 ne me semble pas complètement assurée en ce qui concerne les données relatives aux pathologies préexistant à l'infection par le Covid-19. Il convient de préciser, à l'alinéa 4, que ces données ne peuvent être collectées.
L'amendement no 538 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 168 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l'amendement no 516 .
Il prévoit que l'intégralité des données ayant vocation à alimenter le système d'information seront pseudonymisées en vue de leur traitement et de leur partage.
L'amendement no 516 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 111 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement de mon collègue Thomas Rudigoz a été écarté un peu rapidement en commission. L'alinéa 5 prévoit qu'un décret en Conseil d'État précise les modalités de transmission et de communication des données ainsi que les modalités d'accès des personnes à leur dossier médical. Nous proposons plutôt que la loi renvoie à un dispositif existant, celui de l'article L. 1111-7 du code de la santé publique, qui figure dans la section relative aux principes généraux en matière d'information des usagers du système de santé.
Même avis. Je vous renvoie au RGPD.
L'amendement no 419 est retiré.
Les caractéristiques essentielles des systèmes d'information qui seront mis en oeuvre dans le cadre du dispositif de contact tracing seront déterminées par décret en Conseil d'État, pris après avis de la CNIL. Les droits d'information, d'opposition et de rectification devront être exercés en fonction des exigences propres du système et de sa fiabilité.
L'objectif de protection de la santé publique peut justifier de déroger au principe de consentement à l'inscription de données – nous en avons longuement débattu – , y compris à l'initiative de tiers, pour permettre un suivi véritable des chaînes de transmission, afin de limiter le nombre de cas contacts. C'est l'un des objets essentiels de l'article 6. Celui-ci prévoit déjà que les personnes contaminées pourront refuser que leur identité soit communiquée aux cas contacts, ce qui suffit à satisfaire la préoccupation qui a sous-tendu l'introduction de l'alinéa 5 par le Sénat. Nous proposons donc de supprimer les termes « garantit et » de cet alinéa.
L'amendement no 607 , accepté par la commission, est adopté.
Ils portent l'un et l'autre sur l'alinéa 5. La création du fichier en question suscite de nombreuses inquiétudes quant au risque d'utilisation des données à des fins détournées. L'amendement no 451 vise à rassurer les Français en précisant les conditions de stockage de ces données. L'amendement no 452 tend à fixer les conditions précises de leur destruction.
La parole est à Mme Isabelle Florennes, pour soutenir l'amendement no 391 .
La première signataire en est ma collègue Laurence Vichnievsky. Aux termes de l'alinéa 5, introduit par le Sénat, un décret en Conseil d'État doit préciser les conditions dans lesquelles les personnes peuvent exercer une certaine maîtrise sur leurs données personnelles collectées dans les systèmes d'information à l'initiative d'un tiers. Nous avons un doute quant à l'identité de ce tiers.
Dans une première hypothèse, l'alinéa 5 donne aux personnes infectées comme aux cas contacts une maîtrise de leurs données personnelles. Si tel est le cas, nous sommes satisfaits. Dans une seconde hypothèse, seule la personne contact bénéficie des garanties apportées par le Sénat, notamment des droits de rectification et d'opposition, et rien n'est dit sur les droits de la personne atteinte. Notre amendement vise à préciser clairement quelles sont les personnes concernées.
Il me semble que le décret en Conseil d'État aurait levé toute ambiguïté. Cependant, la précision que vous proposez mérite d'être apportée. Mon avis est donc favorable.
La rédaction de l'amendement nous paraît un peu ambiguë. Vous proposez que le décret en Conseil d'État précise les modalités de recueil du consentement et l'information des personnes atteintes, telles que données et finalités, droit d'opposition, droit de rectification…
M. le ministre s'interrompt.
Pardon, cela peut arriver…
Blanc.
Sourires et murmures.
Puisque c'est un amendement de précision, considérons-le comme tel. Avis favorable.
L'amendement no 391 est adopté.
L'amendement no 441 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Les médecins et les laboratoires joueront un rôle essentiel dans le diagnostic et la collecte des données. Nous avons eu l'occasion de le dire depuis le début de ce débat, mais encore faudrait-il l'inscrire dans la loi – cela va toujours mieux en le disant. Il s'agit de reconnaître leur place et de graver dans le marbre qu'ils informent le patient à l'occasion de l'inscription de ces données, conformément à la règle déontologique qui s'impose à eux.
L'amendement no 406 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
L'amendement no 131 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 113 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l'amendement no 484 .
Les mesures d'isolement auront nécessairement des conséquences sur les personnes concernées. Il faudra continuer à les accompagner une fois qu'elles en seront sorties. L'amendement prévoit qu'elles puissent bénéficier à ce moment-là, si elles en ont besoin et qu'elles le demandent, d'un accompagnement sanitaire, médical et social.
L'amendement no 484 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Aux termes de l'alinéa 9, les systèmes d'information en question ont notamment pour finalité « l'orientation des personnes infectées, et des personnes susceptibles de l'être, en fonction de leur situation, vers des prescriptions médicales d'isolement prophylactiques, ainsi que le suivi médical et l'accompagnement de ces personnes pendant et après la fin de ces mesures ». Notre amendement vise à exclure le suivi médical du dispositif, de façon à respecter le principe et la logique du médecin traitant, lequel est précisément chargé d'assurer ce suivi. Nous faisons ainsi écho à une inquiétude exprimée par le Conseil national de l'ordre des médecins.
Dans ce fichier, M. Gosselin l'a relevé, il importe de garder uniquement les données nécessaires. Or les données relatives au suivi médical individuel me paraissent superflues dans le cadre de la lutte contre la propagation du virus. Aussi, je propose de supprimer le suivi médical individuel de la liste des finalités du fichier.
La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l'amendement no 483 .
Il est identique aux précédents. De deux choses l'une : soit l'on retire du texte la mention du suivi médical ; soit l'on écrit que ce suivi médical est lié exclusivement au traitement du Covid-19. En tout cas, l'expression « suivi médical », sans plus de précision, est trop large. Comme l'a indiqué M. Peu, la rédaction actuelle inquiète l'ordre des médecins.
Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements identiques ?
C'est une bonne démarche engagée par trois groupes – la Gauche démocrate et républicaine, La République en marche, Libertés et territoires – et fondée sur une demande de l'ordre des médecins. J'émets donc un avis favorable et enthousiaste.
L'amendement no 114 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 116 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 217 de Mme Valéria Faure-Muntian est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
L'amendement no 217 est retiré.
La parole est à M. Pascal Brindeau, pour soutenir l'amendement no 584 .
L'amendement no 584 est retiré.
Il vise à remplacer la notion d'anonymisation des données par celle de pseudonymisation, selon les conditions prévues par le RGPD.
L'amendement no 606 , accepté par la commission, est adopté.
Il s'agit de préciser une disposition adoptée en commission des lois et visant à préserver le secret médical des patients infectés par le Covid-19. En effet, il doit également l'être pour les personnes qui finalement se trouveront ne pas avoir été infectées. Néanmoins, en écoutant les débats, j'ai cru comprendre que Mme la rapporteure avait une préférence pour l'amendement no 35 de Mme Untermaier ; je suis à l'écoute de votre suggestion – je pense que c'est un bon amendement de précision, mais je suis prêt à le retirer.
Il s'agit assurément d'un bon amendement, mais celui de Mme Untermaier a ma préférence : demande de retrait, ou avis défavorable.
L'amendement no 409 est retiré.
L'amendement no 118 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je ne serai pas long, puisque nous avons déjà abordé le sujet à propos de StopCovid. Le Premier ministre a pris l'engagement devant la représentation nationale que le recours à une application de ce type ferait l'objet d'un débat et d'un vote au Parlement. L'amendement vise à graver cette promesse dans le marbre : les écrits valent mieux que les paroles dans ce domaine. Nous proposons donc d'insérer l'alinéa suivant, après l'alinéa 12 : « Le déploiement d'une application informatique telle que mentionnée au précédent alinéa fait l'objet d'un texte législatif. »
Un alinéa ajouté au Sénat et conservé par la commission précise bien que les finalités énoncées au II de l'article 6 ne pourront servir au développement ou au déploiement d'une application de type StopCovid. L'avis est donc défavorable.
Monsieur Peu, vous souhaitez vous assurer que l'application StopCovid fera l'objet d'un débat parlementaire : je renouvelle ici l'engagement du Premier ministre et confirme qu'il aura lieu.
Je n'ai pas encore terminé ! Mais je salue votre enthousiasme, que je partage !
Le Premier ministre a aussi expliqué que rien ne nécessitait de recourir à la loi. Un débat se tiendra, suivi d'un vote, mais pas sur un texte, car le sujet n'est pas d'ordre législatif. Je vous propose donc de retirer votre amendement ; à défaut, l'avis sera défavorable.
Ce sujet suscite chez moi de vraies questions. Le débat a été annoncé – aux dernières nouvelles, il se tiendrait les 25 et 26 mai, pour un lancement de l'application le 2 juin, si l'on en croit le ministre Cédric O. Cependant, il me semble bien que dans sa délibération du 24 avril, la CNIL a demandé que son déploiement fasse l'objet d'un texte législatif. Il ne faut d'ailleurs pas considérer son avis comme un blanc-seing, mais plutôt comme un cahier des charges – ce qui est logique, puisque la commission a été consultée sur un projet, et non sur l'application en tant que telle. Il serait donc souhaitable de répondre à sa sollicitation. En effet, même suivi d'un vote, un simple débat parlementaire n'a pas d'effet de droit. Je serais très heureux que le Parlement puisse émettre un avis, mais ce n'est pas sa fonction première : il vote la loi, et c'est préférable ainsi.
L'énoncé de l'amendement n'est pas dû au hasard ou à une erreur d'inattention : nous demandons que le débat et le vote aient lieu sur le fondement d'un texte législatif, parce que j'ai entendu le Premier ministre tenir au Sénat des propos quelque peu différents de ceux qu'il avait eus ici, en affirmant qu'il n'était pas besoin d'une loi. Or, quand bien même il n'y aurait pas juridiquement besoin d'une loi – cela se discute, ce que M. Gosselin vient de dire concernant l'avis divergent de la CNIL le montre – , une loi peut s'avérer nécessaire sur le plan politique. Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine considère qu'un sujet aussi sensible et qui suscite autant de débats implique une nécessité politique de légiférer : un texte nous permettra de travailler précisément et d'éviter un débat qui restera par définition très général, s'il n'est pas adossé à un texte.
Le groupe Socialistes et apparentés votera cet amendement. En effet, il concerne la garantie des libertés individuelles, qui constitue un domaine important : nous ne pouvons pas nous contenter de discuter dans le flou, trois jours avant la mise en service de l'application. Nous sommes là pour avoir un vrai débat, donner notre avis et voter.
C'est ce que je viens de dire ! Il ne faut pas une loi, mais un débat, suivi d'un vote !
Je voulais abonder les propos précédents : le groupe La France insoumise soutient l'amendement déposé par M. Peu. La question est moins, selon nous, de savoir s'il est nécessaire qu'il y ait une loi, que de l'utilité politique de légiférer sur un texte précis, et non de répondre à une consultation ou de voter sur une simple déclaration générale. Il n'aura échappé à personne que la position du Gouvernement sur ce sujet a beaucoup évolué, après de multiples contradictions ; vous avez d'abord considéré que cela ne méritait même pas un débat, vous avez désormais compris qu'il en fallait un : entendez qu'il s'agit d'un sujet tellement sensible qu'il faut aller plus loin. Cet amendement est utile et j'espère qu'il sera adopté.
L'amendement no 335 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Valéria Faure-Muntian, pour soutenir l'amendement no 227 .
Il vise à exclure toute exploitation commerciale ou publicitaire des données à caractère personnel collectées. Cela va de soi, mais il vaut mieux l'écrire.
Il est déjà satisfait, en effet. Même avis.
L'amendement no 227 est retiré.
La parole est à Mme Cécile Untermaier, pour soutenir l'amendement no 34 .
Il vise à insérer l'alinéa suivant : « Chaque connexion à ce système d'information est subordonnée à une signature électronique de l'utilisateur et donne lieu à un enregistrement de l'action réalisée. » Il s'agit de rendre le système d'information traçable ; dès lors que cette base de données sera très largement accessible, il est impératif que chaque utilisateur puisse justifier de chacun de ses accès, chacune de ses actions. Je pense que les outils numériques rendent possible une telle précaution. Une mesure semblable est peut-être prévue dans le décret, malheureusement ne sera soumis qu'à l'avis de la CNIL : il aurait été intéressant que nous puissions en consulter le projet.
Il est défavorable. Ce point est important, mais il relève effectivement du décret.
L'amendement no 34 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il va dans le même sens que celui de ma collègue Faure-Muntian, qu'elle a retiré ; il s'agit de renforcer la protection effective des données personnelles. Le texte établit la liste des usages possibles des données ainsi collectées aux alinéas 7 à 10, mais il n'énonce pas les usages interdits. L'amendement vise donc à inscrire dans le texte l'interdiction de l'usage de ces données à toute autre fin que celles citées dans les 1o, 2o, 3o et 4o du II de l'article 6.
L'amendement no 381 est retiré.
Il a été déposé par Mme Véronique Hammerer. Avec la crise du Covid-19, un lien particulier s'est créé entre les structures sanitaires et les établissements médico-sociaux, ce qui assure une chaîne de soin complète pour les personnes atteintes par le virus. Cependant, de nombreux témoignages provenant des structures d'aides à domiciles et des EHPAD illustrent la difficulté que pose le fait d'intervenir auprès d'une personne revenant d'une hospitalisation sans savoir si celle-ci avait un lien avec le Covid-19.
Le présent amendement vise donc à permettre aux structures médico-sociales travaillant avec des personnes vulnérables telles que les EHPAD, les SAAD – services d'aide et d'accompagnement à domicile – ou les SSIAD – services de soins infirmiers à domicile – , ainsi qu'aux établissements et services accueillant des personnes handicapées, d'avoir accès à certaines informations qui leur permettront de déterminer, par exemple, si le port d'un équipement de protection individuelle est nécessaire lors d'une intervention.
Cette autorisation, strictement encadrée par le décret d'application, aurait pour effet de créer une chaîne d'information complète, susceptible d'assurer la protection des patients comme du personnel soignant.
La parole est à Mme Béatrice Piron, pour soutenir le sous-amendement no 637 .
Il précise que seraient concernés tous les établissements, médicalisés ou non, qui accueillent des personnes âgées. Pendant la période de confinement, nous avons en effet rencontré des problèmes dans certains EHPA, qui ne sont pas médicalisés et ne sont pas soumis aux mêmes réglementations que les EHPAD.
Quel est l'avis de la commission sur cet amendement et ce sous-amendement ?
Ils sont satisfaits ; j'en demande le retrait, sinon l'avis sera défavorable.
Les services d'aide à domicile et de soins infirmiers à domicile ont vocation à intervenir plus particulièrement auprès des personnes âgées. Concernant plus précisément les services d'aide à domicile, ils s'inscrivent dans le cadre des communautés professionnelles territoriales de santé, identifiées dans la loi comme faisant partie des acteurs du dispositif créé. Un agent habilité de la communauté professionnelle territoriale de santé aura accès aux données de contact Covid, ce qui permettra d'informer les acteurs de cette communauté, notamment pour participer à l'identification des personnes contact et à leur suivi, ainsi qu'au suivi des personnes infectées. L'amendement et le sous-amendement sont donc satisfaits ; je propose leur retrait.
Dès lors que nous connaissons l'importance de ces services, que nous avons pu mesurer dans nos circonscriptions, pourquoi ne pas les nommer dans le texte, afin de leur donner toute leur place et de leur témoigner la confiance qu'ils méritent ? Nous savons tous qu'ils interviennent au début de l'épidémie et qu'ils nous permettront de recueillir le plus grand nombre d'informations possible.
Mme Hammerer tenait à s'assurer que l'amendement est satisfait. Compte tenu des garanties apportées par M. le ministre, je le retire.
Il s'agit simplement d'ajouter les pharmaciens à la liste des personnels de santé qui peuvent avoir accès aux informations.
L'amendement no 605 , accepté par la commission, est adopté.
L'amendement no 460 de M. Florent Boudié est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
L'amendement no 460 est retiré.
La parole est à Mme Marie Guévenoux, rapporteure, pour soutenir l'amendement no 344 .
L'amendement no 344 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme Marie Guévenoux, rapporteure, pour soutenir l'amendement no 343 .
L'amendement no 343 est adopté.
La parole est à M. Pascal Brindeau, pour soutenir l'amendement no 585 .
Le décret visé à l'alinéa 14 précise déjà certains éléments. Pourquoi ne pas y ajouter les modalités de réalisation des enquêtes sanitaires, notamment les informations qui seront recueillies, ainsi que les critères retenus pour déterminer les personnes potentiellement infectées ?
L'amendement no 585 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Afin de renforcer le principe du secret médical, nous demandons que l'ensemble des personnes désignées par dérogation à l'article L. 1110-4 du code de la santé publique ayant accès à des informations et données à caractère médical par le biais de ce fichier soit soumis aux mêmes obligations de secret médical que l'ensemble des personnels médicaux.
La parole est à Mme Cécile Untermaier, pour soutenir l'amendement no 35 .
L'amendement vise à compléter l'alinéa 13 en précisant que les personnes ayant accès à cette base de données sont soumises au secret médical. En cas de révélation d'une information collectée dans ce système d'information, elles encourront les peines prévues par l'article 226-13 du code pénal.
C'est parce que nous sommes préoccupés par l'existence d'une brèche dans ce système d'information que nous souhaitons soumettre les personnels qui y travaillent au secret médical.
Quel est l'avis du Gouvernement sur ces amendements et ce sous-amendement ?
Avis favorable à l'amendement no 35 , sous-amendé. Je remercie Mme Untermaier pour son amendement. La précision me semble importante. En outre, je préfère qu'on retienne, comme le suggère Mme la rapporteure, la notion de secret professionnel à celle de secret médical. La notion est en effet plus vaste et elle regroupe d'autres catégories professionnelles.
L'amendement no 442 n'est pas adopté.
Le sous-amendement no 639 est adopté.
L'amendement no 35 , sous-amendé, est adopté.
J'ai proposé en commission un amendement visant à instaurer une infraction spécifique pour la violation du secret professionnel. Mme la rapporteure m'a répondu qu'il était satisfait par l'article 226-16 qui punit le fait, y compris par négligence, de procéder ou de faire procéder à des traitements de données à caractère personnel sans qu'aient été respectées les formalités préalables à leur mise en oeuvre prévues par la loi, de cinq ans d'emprisonnement et de 300 000 euros d'amende.
Pour sécuriser la situation juridique, je propose d'instaurer un dispositif rappelant ces sanctions pénales aux personnes qui auront accès audit fichier.
L'amendement no 272 n'est pas adopté.
L'amendement porte dispense de prescription pour les tests et pour les masques. Les tests liés au Covid-19 doivent pouvoir être réalisés et remboursés sans prescription médicale quand les personnes se rendront dans un laboratoire d'analyses médicales. Il en va de même pour la délivrance de masque par les pharmaciens en officine. La présence de l'identité de la personne dans le système d'information « contact Covid », renseignée en première intention par les personnels de santé, doit pouvoir valoir prescription médicale.
La parole est à Mme Marie Guévenoux, rapporteure, pour soutenir le sous-amendement no 640 et donner l'avis de la commission sur l'amendement.
Le sous-amendement no 640 est adopté.
L'amendement no 602 , sous-amendé, est adopté.
La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l'amendement no 521 .
Nous proposons de viser, à la première phrase de l'alinéa 14, l'ensemble des décrets de l'article 6, qui permettront l'adaptation et le partage des données des fichiers existant, et non pas simplement, comme le prévoit le IV de l'article, du système d'information mis en place à l'alinéa 1. Nous parlons beaucoup, dans nos débats, du nouveau système d'information, qui s'est d'ailleurs dédoublé, mais l'on oublie que d'autres fichiers mentionnés à l'alinéa 2 devront être adaptés et partagés.
On nous dit que ces dispositions pourront être prises par décret. Soit. Mais nous souhaitons également obtenir un avis de la CNIL pour éviter que l'on crée des catégories différentes pour des dispositifs visant des finalités identiques.
L'amendement no 521 , approuvé par le Gouvernement, est adopté à l'unanimité.
Applaudissements.
L'amendement tend à supprimer, à la première phrase de l'alinéa 14, le mot « conforme » et à préciser que le décret en Conseil d'État détermine les obligations d'habilitation et d'assermentation minimales obligatoires adéquates pour tous les agents amenés à rechercher les données, même non soumises au secret médical, mentionnées au I, en termes notamment de compétences, de responsabilité et de contrôle hiérarchique.
L'amendement no 601 tend à supprimer, après le mot « avis », le mot « conforme », ce qui paraît indispensable pour les raisons déjà évoquées. Selon une décision prise par le Conseil constitutionnel en 2006, il est impossible de subordonner la décision du Premier ministre à un avis conforme d'une autorité différente.
Avis défavorable à l'amendement no 625 .
L'amendement no 625 est retiré.
Le rappel de M. le ministre est sans doute utile. La jurisprudence du Conseil constitutionnel existe. Il y a eu un débat à ce sujet au Sénat. Mais le Conseil constitutionnel peut aussi changer d'avis. On l'a vu opérer des revirements. Rien ne dit que, dans une autre décision, il n'adoptera pas une approche différente. Je suggère donc que l'on maintienne le mot « conforme », puisque le Sénat était arrivé à un point d'équilibre.
Le Président de la République a annoncé qu'il saisirait le Conseil constitutionnel. J'ignore s'il le fera. À défaut, le président du Sénat s'en chargera.
Il ne semble pas que le texte comporte un risque d'inconstitutionnalité. Le cas échéant, prenons ce risque et, si le Conseil constitutionnel le dénonce, nous inclinerons devant sa décision. Ce sera bien la moindre des choses.
En attendant, tenons-nous en à l'avis du Sénat, qui, me semble-t-il était aussi celui de la majorité, avant que le Gouvernement ne dépose son amendement. Nous verrons bien ce qu'il adviendra. Les foudres ne s'abattront pas sur nous !
L'amendement no 601 est adopté.
La parole est à Mme Valéria Faure-Muntian, pour soutenir l'amendement no 456 .
Le RGPD exige la fixation d'une durée de conservation des données personnelles. Mentionner « la durée de cet accès » n'apporte pas une précision suffisante. Nous proposons qu'une durée de conservation soit déterminée, en fonction de l'objectif ayant conduit à la collecte des données, dans le décret du Conseil d'État.
L'amendement no 456 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
Il vise à restreindre à la seule collecte des données le recours à la sous-traitance. Il n'est pas opportun d'externaliser leur traitement.
La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l'amendement no 485 .
Cet amendement tend à prévoir des conditions d'intervention aussi strictes pour les sous-traitants que pour les organismes mandataires, en matière de collecte des informations relatives aux contacts des personnes infectées et pour la réalisation d'enquêtes sanitaires.
L'amendement no 485 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement, dont Mme Hennion est la première signataire, tend à préciser les exigences auxquelles seront soumis les sous-traitants. Aux termes de son avis no 400104, le Conseil d'État a en effet estimé que les modalités encadrant le recours à la sous-traitance devraient être précisées au sein du décret détaillant les modalités d'application, dans le respect des conditions posées par l'article 28 du RGPD.
L'amendement no 604 est retiré.
L'amendement no 455 est adopté.
La parole est à Mme Valéria Faure-Muntian, pour soutenir l'amendement no 210 .
L'amendement vise à rappeler l'exigence de suivi permanent du système d'information par la CNIL.
L'amendement no 210 , ayant reçu un avis défavorable de la commission et du Gouvernement, est retiré.
Cet amendement vise à conférer un caractère obligatoire à la transmission des données relatives au Covid-19 par les professionnels de santé à l'autorité sanitaire, dans le cadre du système d'information visé par l'article 6.
Il permet également de montrer le rôle central des médecins et des responsables de laboratoires de biologie médicale dans le dispositif. C'est le fameux amendement auquel j'ai fait allusion tout à l'heure, en annonçant la création d'un équivalent à la déclaration obligatoire.
L'amendement no 603 , accepté par la commission, est adopté.
La parole est à Mme Mireille Clapot, pour soutenir l'amendement no 551 .
L'amendement de Mme Claire Pitollat souhaite rétablir le V de l'alinéa 15. Il s'agit d'établir une charte pour les 40 000 personnes qui travailleront dans ces équipes, qui ne seront pas toutes soumises au secret médical ni bien formées. Cette charte, rédigée par l'Agence nationale de santé publique en lien avec la CNIL, vise à les protéger et à les informer de la réglementation ; ils devront la signer.
L'amendement no 551 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 345 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 117 .
L'amendement vise, dans l'instauration du comité de contrôle, à supprimer la mention de la société civile, pour ne laisser que celle du Parlement. Celui-ci représente le peuple français et tire sa légitimité d'une élection. Lui associer la société civile me paraît bien trop général et bien trop flou, et sera malheureusement sujet à discussion concernant la légitimité de tel ou tel de ses représentants ou de ses acteurs.
L'amendement no 117 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Mireille Clapot, pour soutenir l'amendement no 552 .
L'amendement de Mme Claire Pitollat concerne le comité de contrôle et de liaison du Covid-19, qui permettra d'associer la société civile et le Parlement aux opérations. L'amendement propose, dans l'alinéa 17, de remplacer le mot « réguliers » par celui d'« hebdomadaires » et, par conséquent, de faire débuter ses travaux une semaine après la promulgation de la loi.
L'amendement no 552 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l'amendement no 546 .
Ce comité regroupe la société civile et les parlementaires : on nous fait l'aumône de deux postes de députés et de deux postes de sénateurs. Je dis cela en souriant, mais je partage l'avis de certains de nos collègues quant à la place prééminente qui devrait être celle du Parlement dans ce contrôle. Cependant, c'était l'objet de l'amendement précédent, que je ne commente pas puisqu'il a malheureusement été rejeté.
Quoi qu'il en soit, il me paraît important d'assurer la coordination des travaux de ce comité avec ce que fait et fera la CNIL. Il n'est pas question qu'un comité ait sa propre jurisprudence ou puisse court-circuiter une des plus anciennes autorités administratives indépendantes. La CNIL existe effet depuis la loi de 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.
Je ne reviendrai pas sur l'épisode des fichiers SAPHIR, qui avait suscité beaucoup d'émois ; je ne voudrais pas faire de transposition malheureuse.
Dans la période actuelle, nous devons rappeler la prééminence de la CNIL, qui exerce un contrôle avec le RGPD et d'autres textes à valeur législative, voire supra-législative ; assurer, par un décret en Conseil d'État, la coordination entre les travaux de ce comité et les responsabilités et compétences de la CNIL ; réaffirmer également la prééminence de la CNIL dans le domaine de l'informatique et des libertés.
Cela ne relève pas du domaine de la loi. Demande de retrait, sinon avis défavorable.
J'entends votre avis défavorable, madame la rapporteure, il peut se comprendre, mais encore faudrait-il en comprendre les raisons : je ne vois pas en quoi cela ne relèverait pas du domaine de la loi. Je peux avoir sous-estimé l'article 34 ou mal lu l'article 37 qui réserverait cette compétence à un décret, mais il faudrait néanmoins que vous m'apportiez des explications. Cela revient sinon à botter en touche ; or quand on fait la loi, on ne botte pas en touche, on répond.
L'amendement no 546 n'est pas adopté.
Nous nous félicitons de la création de ce comité réunissant des parlementaires et la société civile, mais nous voudrions faire la remarque suivante : telle qu'est prévue sa composition du point de vue de la représentation parlementaire, la pluralité politique est restreinte. Or c'est une donnée importante à intégrer pour le bon fonctionnement de ce comité.
Nous proposons une autre composition, plutôt que deux sénateurs et deux députés, dont je vous laisse imaginer le rétrécissement de la pluralité politique auquel elle conduit. Certes, des parlementaires seraient représentés, mais si l'on prend en considération l'électorat, ce rétrécissement est encore plus flagrant. C'est la raison pour laquelle nous proposons que chaque groupe parlementaire soit représenté dans ce comité, charge au président de chaque groupe de désigner le membre qui sera présent.
La parole est à Mme Mireille Clapot, pour soutenir l'amendement no 636 .
L'amendement propose que la composition du comité passe de deux députés et deux sénateurs à trois députés et trois sénateurs, dont un membre des commissions des affaires sociales de chaque assemblée. Cela permettra d'avoir des parlementaires spécialisés dans les questions sanitaires.
Il me semble que l'idée du comité, introduite par le Sénat, était d'avoir une représentation équilibrée entre la société civile et les parlementaires. Dans ces conditions, ces amendements déséquilibreraient l'intention du comité.
Par ailleurs, je rappelle que sur cet article, nous avons adopté hier en commission un contrôle renforcé exercé par l'Assemblée nationale. Défavorable.
C'est un avis de sagesse, parce qu'il ne revient pas au Gouvernement de déterminer les modes de répartition et d'attribution des postes au sein de ce comité : cela relève du droit parlementaire.
Je veux appuyer l'amendement de M. Stéphane Peu. Cet important sujet a déjà été abordé dans le cadre de précédentes discussions : dire que le Parlement serait représenté par deux députés, c'est ne pas dire que le Parlement est représenté. Nous comptons aujourd'hui huit groupes parlementaires, demain peut-être davantage ; par conséquent, deux députés, cela signifie un député du groupe majoritaire – on avait compris – et éventuellement un député issu d'un autre groupe, mais qui soutient peut-être la majorité d'ailleurs, que sais-je !
Je ne me sens pas représenté, en tant que parlementaire, par n'importe quel collègue : nous avons nos opinions, comme membres d'un groupe.
Si l'on veut véritablement que ce comité soit pluraliste et transparent, soit nous sommes obligés d'en passer par une proposition d'organisation dans laquelle chaque groupe est représenté, soit sa composition ne permettra pas d'établir un lien de confiance.
Cette question de fond doit être abordée ; on ne peut se contenter de se référer à je ne sais trop quel usage, ou de dire que c'est réglementaire, comme vient de le dire M. le ministre. Cette affaire est politique et non pas réglementaire. En rester à la participation de deux députés est une non-prise en compte de la grande majorité des groupes parlementaires, sans même parler des électeurs, comme l'a souligné M. Stéphane Peu.
C'est un très mauvais signal en matière de confiance et de pluralisme, que ce comité pourrait permettre s'il intégrait au moins un représentant de chaque groupe parlementaire.
Je partage les préoccupations de M. Stéphane Peu. J'aimerais ajouter, en plus des représentants des groupes parlementaires, un représentant tiré au sort parmi les députés non-inscrits.
On comprend bien qu'il s'agit d'un amendement partisan : le parti communiste ne sera manifestement pas représenté parmi les deux députés membres de ce comité. En réalité, si chaque groupe parlementaire doit être représenté, d'une part de nouveaux groupes s'ajouteront éventuellement, d'autre part, il y aura un déséquilibre entre l'Assemblée et le Sénat car le nombre de groupes dans les deux chambres peut être différent et il faudra bien mettre une limite.
Peut-être que deux députés, ce n'est pas suffisant, et que le bon chiffre est trois, mais que chaque groupe parlementaire envoie un représentant n'a pas beaucoup de sens : ce ne serait plus une représentation, mais quasiment l'ensemble de l'Assemblée nationale ! Nous connaissons de plus la propension des uns et des autres à créer des groupes parlementaires ex nihilo à travers les temps, les usages et l'avancée du quinquennat. Définissons un nombre fixe de parlementaires dans ce comité ; il sera beaucoup plus simple, partant de là, de répartir cette représentation entre les majorités et les oppositions des deux chambres.
Je n'avais pas prévu de faire durer les débats à ce sujet, j'en suis désolé. Monsieur Pierre-Henri Dumont, cet amendement n'est pas du tout partisan ; il s'agit de tenir compte du pluralisme, ce qui n'est pas la même chose. L'objectif n'est pas tant que ma sensibilité soit représentée dans ce comité, bien que cela compte, mais que toutes les sensibilités politiques le soient.
Si l'on considère la majorité au Sénat et à l'Assemblée nationale, ainsi que le principal groupe d'opposition dans chacune des chambres : les quatre parlementaires seront issus soit du groupe Les Républicains, soit du groupe La République en marche. Or lors de l'élection présidentielle, ces deux partis ont recueilli 40 % des voix. La pluralité consiste à faire en sorte, si l'on veut que cela fonctionne, que toutes les sensibilités suffisamment significatives pour avoir un groupe parlementaire soient représentées, afin de garantir un regard pluriel sur le fonctionnement de ce comité. Cela n'a rien de partisan. Par ailleurs, je ne suis pas défavorable à la demande de Mme Ménard pour la représentation des députés non-inscrits.
Je m'oppose à ces deux amendements, non pas en raison de leur origine partisane, mais parce que nous ne sommes pas là pour écrire le règlement de l'Assemblée nationale, mes chers collègues, mais pour écrire la loi. Il convient de préserver le mécanisme de représentation institutionnelle des deux chambres que sont l'Assemblée nationale et le Sénat dans la Constitution, et rien d'autre.
La parole est à Mme Huguette Tiegna, pour soutenir l'amendement no 626 .
Voilà une proposition qui va satisfaire les auteurs des amendements précédents. Alors que nous nous sommes appuyés sur la science pour prendre nos décisions politiques depuis le début de cette crise, cet amendement vise à préciser la composition du comité de contrôle créé par le présent article.
Il serait logique que les députés et sénateurs présents dans le comité soient membres de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques – OPECST. Créé par la loi du 8 juillet 1983, l'OPECST a pour mission d'informer le Parlement des conséquences des choix à caractère scientifique et technologique afin d'éclairer ses décisions. À cette fin, il recueille des informations.
Vous en conviendrez, cet organe qui regroupe dix-huit députés et dix-huit sénateurs départage l'ambition de tous les groupes, dans notre assemblée comme au Sénat.
À l'alinéa 20, nous proposons donc de remplacer « désignés par les présidents de leurs assemblées respectives » par « siégeant à l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques. »
Je comprends parfaitement l'intention et la logique de votre amendement, mais cette nomination revient aux présidents des deux chambres. Cela étant dit, Cédric Villani figure parmi les signataires de votre amendement : je suis sûre qu'il saura convaincre M. Richard Ferrand de faire en sorte qu'un membre de l'office représente l'Assemblée au sein de ce comité. Avis défavorable.
Sagesse, pour les mêmes raisons.
C'est une bonne suggestion qui mérite une vraie réflexion car l'OPECST est le seul office parlementaire commun aux deux chambres, …
Elle n'a pas le même statut : ce n'est pas un office.
Mais je sens bien que l'idée ne va pas prospérer ce soir. Sans l'inscrire dans la loi, il serait peut-être bon de l'intégrer dans les faits lors des nominations, d'autant que le fait qu'il y ait un seul office commun aux deux chambres est un réel atout.
L'amendement no 626 est adopté.
La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l'amendement no 486 .
Qu'il y ait des parlementaires et des gens de la société civile dans le comité de contrôle, c'est très bien. Mais il faut qu'il y ait aussi des experts, comme le propose cet amendement.
L'amendement no 486 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il n'est pas nécessaire d'imposer dans la loi le principe d'un décret en Conseil d'État, au risque sinon de ralentir l'installation du comité de liaison sociétale. Il est donc proposé de le créer par un décret simple.
L'amendement no 600 , accepté par la commission, est adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 457 .
À l'alinéa 24, il est prévu que le Gouvernement adresse au Parlement un rapport détaillé de l'application des mesures prises dans le cadre de l'article 6. Compte tenu des spécificités et des dangers de ce fichier, la fréquence de trois mois nous semble insuffisante et nous demandons un rapport mensuel complété par un avis public de la CNIL. Dans son propos introductif, le ministre a d'ailleurs indiqué qu'il était tout à fait d'accord pour que le rapport soit trimestriel, mensuel ou même hebdomadaire s'il le fallait.
L'amendement no 457 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 346 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme Mireille Clapot, pour soutenir l'amendement no 624 .
Le code de santé publique définit des dispositions en matière d'hébergement de données. Nous demandons de rappeler expressément que ces dispositions protectrices s'appliquent à ces données.
L'amendement no 624 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Mireille Clapot, pour soutenir l'amendement no 122 rectifié .
C'est un amendement de souveraineté numérique. Ces données, dont nous avons beaucoup parlé au cours des dernières heures, sont collectées et stockées non pas sur un carnet à spirale mais dans des bases de données qui sont ensuite traitées, rapprochées, consultées, extraites, etc.
On a déjà abondamment débattu de la question du stockage…
Nous devons être extrêmement vigilants à l'égard des sociétés qui traitent ces données de santé, pour des raisons de souveraineté et parce qu'il existe des lois américaines extraterritoriales, en particulier le Cloud Act, acronyme de Clarifying Lawful Overseas Use of Data Act, du 23 mars 2018. Celui-ci autorise les États-Unis à accéder aux données et, malheureusement, l'Europe n'a pas encore trouvé la parade – le règlement général sur la protection des données – RGPD – ne suffit pas.
En résumé, ces données de santé extrêmement sensibles et souveraines doivent être confiées de bout en bout à des sociétés européennes qui garantissent cette souveraineté numérique.
L'amendement no 122 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Depuis la modification du règlement, il n'y a plus d'explications de vote sur les articles.
L'article 6, amendé, est adopté.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Les amendements nos 488 et 489 concernent les entreprises qui sont en grande difficulté en raison de cette crise sanitaire. Nous profitons de ce texte pour proposer des mesures sur les redressements judiciaires dont on nous dit qu'elles n'ont pas leur place dans les projets de loi de finances rectificative – PLFR.
Nous proposons de porter à quinze ou vingt ans la durée des plans de redressement judiciaire, actuellement limitée à dix ans, pour que les entreprises mises à mal par cette crise sans précédent aient le temps de s'en sortir.
Quant à l'amendement no 490 , il vise à assouplir les conditions de recours à la procédure de conciliation.
Dans tous les cas, il s'agit de trouver des solutions juridiques pour sauver des entreprises en difficulté.
Je comprends votre préoccupation, mais ce n'est pas l'objet du présent projet de loi. Avis défavorable.
Il y aura beaucoup à dire sur l'impact économique, social et culturel de cette crise virale. Des mesures seront nécessaires mais vous imaginez bien que nous n'allons pas les prendre à la suite d'un article sur le dépistage et le suivi épidémiologique de la maladie. Les mesures économiques sont d'une d'importance majeure mais elles n'ont strictement rien à voir avec le texte. Même si j'en comprends l'intérêt et le sens, je suis défavorable à ces amendements.
Quand nous présentons ces mesures dans le cadre du PLFR, on nous explique que ce n'est pas le moment car l'urgence prime. Quand nous les proposons dans le cadre de la prorogation de l'état d'urgence sanitaire, on nous fait la même réponse. Je le comprends, mais quand allons-nous pouvoir voter des textes qui permettent de sauver nos entreprises ?
Il ne s'agit pas de mesures d'urgence mais de dispositions de long terme qui impliquent des modifications dans différents codes, notamment celui de l'urbanisme. Par ces amendements d'appel, nous proposons aussi des moratoires. En fait, nous voulons savoir quand nous aurons enfin la possibilité d'adopter des textes dérogatoires au droit actuel pour sauver nos entreprises.
La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l'amendement no 520 .
Proposé par notre collègue Philippe Vigier, cet amendement vise à inscrire dans la loi du 23 mars 2020, la possibilité pour les parlementaires d'effectuer un contrôle sur pièces et sur place auprès des ministères et autorités compétentes pour l'application des mesures prises en vertu de l'état d'urgence sanitaire.
L'amendement no 520 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 529 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 329 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Ils portent tous sur les masques.
Par le biais de l'amendement no 502 , nous demandons que le remboursement par l'État des masques acquis par les collectivités locales ne puisse concerner que des masques ayant fait l'objet d'une certification par la direction générale des entreprises. Il s'agit de ne pas rembourser n'importe quel masque, y compris ceux qui n'ont pas de caractéristiques sanitaires.
L'amendement no 502 précise que les collectivités ne peuvent acheter que des masques certifiés par la direction générale des entreprises. Même si tous les masques peuvent avoir une utilité, il vaut mieux prendre ceux qui protègent vraiment la population.
Les amendements nos 518 et 519 tendent à répondre à la situation où une autorité rend le port du masque obligatoire dans l'espace public où elle est compétente : les transports, les lycées ou autres. Nous considérons que l'on ne peut pas obliger quelqu'un à porter un masque, en particulier s'il s'agit d'une personne défavorisée, sans lui en fournir un gratuitement ou, à tout le moins, lui dire comment elle peut s'en procurer un.
Nous en avons déjà débattu ce matin. Mon avis reste défavorable pour les mêmes raisons.
Monsieur Pupponi, je vous propose de retirer l'amendement no 502 qui est clairement satisfait : il est déjà prévu que l'État rembourse aux collectivités locales 50 % des masques achetés qui doivent être aux normes.
Celles de l'Association française de normalisation – AFNOR – pour les masques destinés au grand public.
Qu'est ce que vous ne comprenez pas ?
S'il vous plaît, monsieur le ministre, donnez votre avis sur ces quatre amendements. Monsieur Pupponi, vous pourrez reprendre la parole ensuite.
Votre amendement demande que le remboursement par l'État des masques acquis par les collectivités locales ne concerne que les masques ayant fait l'objet d'une certification par la DGE, mais les masques grand public qui portent la norme AFNOR sont également recommandés par la puissance publique. Ils sont produits soit par des entreprises, soit par des couturières ou des couturiers.
L'amendement no 503 est aussi satisfait, pour les mêmes raisons.
Il y a une ambiguïté sur la norme. À l'origine, la norme AFNOR certifiait uniquement le tissu. On a demandé ensuite aux industriels de tester leurs masques afin de vérifier qu'ils filtraient au moins 70 % des particules et que leur imperméabilité se maintenait après vingt, trente, voire cinquante, lavages. Aujourd'hui, la DGE appose un logo sur les masques qui restent imperméables après cinquante lavages, ce qui n'a rien à voir avec la norme AFNOR, qui atteste de la qualité du tissu sans se prononcer sur les propriétés du masque au plan sanitaire. La DGE a même publié une liste des entreprises qui respectent ce nouveau critère.
Je propose donc que seuls les masques certifiés par la DGE, qui restent imperméables après un certain nombre de lavages, soient acquis par la puissance publique et remboursés. Si l'on rembourse des masques qui ne sont pas efficaces et dont l'imperméabilité n'est que de 20 %, on met tout simplement les gens en danger.
J'aimerais appeler votre attention sur un détail qui n'en sera pas un pour les collectivités territoriales : le Gouvernement a annoncé qu'il rembourserait à hauteur de 50 % les masques commandés après le 13 avril. Cela signifie que les collectivités territoriales qui ont anticipé l'achat de masques pour leurs administrés avant cette date ne pourront pas être remboursées dans les mêmes conditions par l'État. On va punir et pénaliser les bons élèves.
J'ai moi-même été interpellé par plusieurs maires de ma circonscription, y compris celui de la commune où j'ai été maire pendant vingt-deux ans, sur la question du remboursement des masques. Ils expriment un sentiment d'injustice car, en effet, les bons élèves, c'est-à-dire les communes qui ont été diligentes et qui ont fait preuve d'anticipation, sont pénalisés. Ces communes verront leur budget grevé alors que les autres bénéficieront d'une prise en charge.
Je ne souhaite nullement ouvrir une polémique, mais l'État ne pourrait-il pas ajuster le tir et revenir sur la date couperet du 13 avril ? Il serait dommage que celles et ceux parmi les élus qui ont pris leurs responsabilités voient le budget communal pénalisé. Au-delà des amendements dont nous discutons, un signe du Gouvernement serait le bienvenu, monsieur le ministre.
La problématique que vous soulevez renvoie précisément aux inquiétudes de François Pupponi : …
… les masques certifiés par la puissance publique sont des masques dont la qualité de filtration est reconnue ; or seules les collectivités qui ont acquis des masques répondant aux différentes normes de sécurité sont aidées par l'État. Certaines communes ont, avec de bonnes intentions, fait l'achat de masques en tissu qui ne garantissent pas une bonne protection. Nous les avions pourtant alertées de ce risque. Elles ne peuvent bénéficier de la participation de l'État pour les raisons que vient à l'instant de souligner François Pupponi.
Sachez d'ailleurs, monsieur Pupponi, que les masques qui portent la norme AFNOR ne sont pas toujours testés en laboratoire. Cette norme fait l'objet de consignes claires quant au modèle, au tissu et au mode de fabrication des masques. Nous en avons parlé lorsque nous avons discuté de la TVA à 5,5 % : lorsqu'une couturière fabrique des masques en appliquant ces consignes, on ne peut pas lui demander de les envoyer ensuite au laboratoire pour les faire expertiser. La fabrication de ces masques, artisanale, conformément au choix retenu, est soumise à un auto-contrôle.
Non, monsieur Pupponi : nous avons déjà entendu la réponse à la réponse.
C'est de la santé des Français dont il s'agit. Aucune importance manifestement…
L'amendement no 502 n'est pas adopté.
L'amendement no 503 n'est pas adopté.
L'amendement no 518 n'est pas adopté.
L'amendement no 519 n'est pas adopté.
Cet article a été introduit par le Sénat afin d'inscrire dans le projet de loi les critères qui permettent d'établir la carte de classification des départements selon leur état sanitaire épidémique. Malheureusement, il conduit à figer ces critères sans tenir compte de l'évolution future de l'épidémie. C'est pourquoi je soutiendrai l'amendement no 599 du Gouvernement qui vise à supprimer l'article. Nous devons conserver de la souplesse dans l'établissement de cette carte.
L'article prévoit, par ailleurs, que la carte soit établie sur la base d'un dialogue à l'échelon départemental entre l'État, ses services sur le terrain, les professionnels et les élus locaux. Ce dialogue existe déjà ; nous n'avons pas attendu l'établissement de la carte des départements pour l'organiser. Chacun le voit bien, les préfets sont mobilisés, tout comme les maires, qui sont partie prenante des décisions prises dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire. De même, les élus locaux, qu'il s'agisse des présidents de département ou de région, sont étroitement associés au processus.
Je m'en féliciter dans mon département, le Bas-Rhin : au vu de la situation sanitaire, les élus sont invités à limiter l'ouverture des écoles aux classes de CM2 à partir du 14 mai, puis aux autres classes de primaire à partir du 18 mai. Preuve que la différenciation territoriale s'applique, sur la base de deux critères : la situation des services hospitaliers et l'avancée de l'épidémie.
Voilà pourquoi cet article est dangereux. Il nous priverait d'une flexibilité dont nous avons absolument besoin. Les concertations qui ont lieu actuellement au niveau local doivent par ailleurs se poursuivre.
L'article introduit par le Sénat est de bon sens. Chaque jour, la France entière est suspendue aux annonces du directeur général de la santé et à la publication d'une carte qui coupe la France en deux, selon deux couleurs distinctes, avec parfois une couleur intermédiaire, dont nous n'avons pas encore bien cerné l'intérêt. Chacun découvre à dix-neuf heures, à la télévision, la couleur de son territoire, y compris les préfets, d'où les errements constatés au début, qui n'ont favorisé ni l'acceptabilité ni l'acceptation des choix de l'exécutif… Quand, du jour au lendemain, pratiquement sans explication, trois départements passent du rouge au vert, on peut s'interroger sur le sérieux de la carte qui est présentée. Une telle erreur n'aurait pas été commise si un échange avait eu lieu avec les autorités territoriales, éventuellement à l'initiative des services déconcentrés de l'État – ce choix relève de l'exécutif – , et surtout avec les élus locaux, dont l'ancrage dans les territoires leur permet d'interpeller utilement le Gouvernement.
Je pense à notre collègue Mansour Kamardine, à Mayotte, dont le département est classé en rouge alors qu'il affiche un nombre de cas bien inférieur à celui d'autres départements français. Parce qu'elle est mesurée en proportion du nombre d'habitants du département et non en valeur absolue, la circulation du virus y est considérée comme particulièrement élevée.
Ces différentes raisons plaident pour que l'on associe les élus locaux et les acteurs des territoires aux choix qui les concernent.
Le Gouvernement a déposé un amendement qui tend à supprimer l'article 6 bis. Je pense, au contraire, qu'il doit être maintenu.
Depuis plusieurs jours, M. Véran commente des cartes en conférence de presse – il le fait d'ailleurs très bien – et nous explique que trois critères sont pris en considération dans l'attribution d'une couleur à un département : le taux de circulation du virus, la capacité hospitalière en réanimation et la capacité locale de tests de détection des porteurs.
En réalité, l'article 6 bis vise à attribuer au législateur la responsabilité de fixer les critères utilisés dans la cartographie des territoires en vue d'identifier leur situation au regard de la crise sanitaire. Le Gouvernement justifie la suppression de cet article en indiquant, dans l'exposé sommaire de l'amendement no 599 : « Ce dispositif n'a pas vocation à être fixé au niveau législatif, compte tenu des adaptations dont il devra peut-être faire l'objet en fonction de l'évolution de l'épidémie. » Je ne partage pas cette opinion.
On va certainement nous dire que le projet de loi prorogeant l'état d'urgence sanitaire est un d'une nature particulière. Le ministre nous a bien demandé de voter pour l'article 6 parce qu'il avait besoin du fichier d'information lundi pour déconfiner !
Sauf à sous-estimer le rôle de l'Assemblée nationale, j'estime qu'il revient au législateur de décider des critères qui permettent d'établir la carte de classification des départements selon leur état sanitaire épidémique. Il s'agit, en effet, d'un sujet majeur pour la vie quotidienne des Français.
Je tenais à défendre cette position avant l'adoption, qui fait peu de doute, de l'amendement du Gouvernement par la majorité.
Je demande, en effet, la suppression de l'article 6 bis introduit par le Sénat, qui tend à figer dans le marbre de la loi la nature, l'orientation et l'organisation des cartes et des indicateurs.
Je serais bien en difficulté, monsieur Coquerel, de me prononcer sur ces sujets, mais peut-être avez-vous des talents d'épidémiologiste et de virologue.
Nous consultons beaucoup les épidémiologistes et les virologues. Les différentes agences sanitaires, la direction générale de la santé, Santé publique France et les modélisateurs de l'Institut Pasteur travaillent à partir d'indicateurs très fins de prévisibilité et d'anticipation du phénomène épidémique. Ce n'est pas le ministre de la santé qui réalise la carte ou qui construit les indicateurs. J'étais encore député il y a peu : je n'aurais pas non plus été capable de déterminer quels doivent être ces indicateurs. Introduire de la rigidité dans le texte en indiquant qu'il revient à la représentation nationale de fixer les indicateurs ne me semble donc pas réaliste.
Comme je l'ai expliqué à plusieurs reprises, le choix des indicateurs est évolutif. Hier, lors de la conférence de presse avec le Premier ministre, j'ai ainsi indiqué qu'un indicateur important était en train d'apparaître : le taux de positivité des tests par territoire.
Vous êtes encore jeune, monsieur Schellenberger. C'est dommage d'être si réac !
Quant aux couleurs proposées, elles sont seulement au nombre de deux : le vert et le rouge. Nous assumons ce choix depuis le début. La couleur orange a été utilisée pour caractériser la période transitoire avant l'identification de la dynamique épidémique de chaque territoire. Car, vous le savez, nous suivons les indicateurs principaux, c'est-à-dire la circulation active du virus et la surcharge hospitalière, sur sept jours glissants. Il n'était évidemment pas possible de stabiliser les couleurs avant un certain laps de temps.
Les scientifiques et les médecins nous ont par ailleurs indiqué que le critère le plus important à privilégier – nous ne le savions pas avant de finaliser la carte – , au vu de la situation épidémique du pays, était le critère de saturation des services de réanimation, qui doit être vu à l'échelle régionale.
Rassurez-vous, nous avons appelé les élus des territoires passés en rouge pour les informer de la situation et nous concerter avec eux sur les mesures à prendre, comme nous l'avons fait avec les préfets et les directeurs généraux des ARS. Cela ne se fait pas au doigt mouillé. Nous prenons en quelque sorte le pouls du territoire en discutant avec les acteurs locaux. C'est en nous forgeant une conviction – presque une intime conviction – que nous avons consolidé les indicateurs. Les inscrire dans le droit, comme le propose l'article, viderait toute cartographie de son utilité. Je vous propose donc de supprimer l'article 6 bis du projet de loi.
Monsieur le ministre, il n'est pas vrai que vous suiviez toujours l'avis des scientifiques. Je ne vous le reproche pas : en politique, il faut parfois savoir choisir entre des avis contradictoires. Toujours est-il que le choix de la date du 11 mai, par exemple, ne se fonde pas sur le point de vue de modélisateurs, dont certains, cités par un article paru dans Le Monde il y a deux jours, préconisaient plutôt début juin, au moins en zone rouge.
Vous ne voulez pas figer les critères de classification des départements dans la loi, dites-vous ; mais un texte prorogeant l'état d'urgence n'est pas n'importe quelle loi. Vous avez décidé que la prorogation irait jusqu'en juillet ; j'aurais préféré début juin, soit à peu près à la date de la clause de revoyure que vous instituez vous-même à la fin de la première période de déconfinement. Pourquoi, s'agissant d'un texte de cette importance, nous, législateur, ne pourrions-nous fixer nous-mêmes des critères qui devraient peu varier d'ici à cette date ? Cela me rappelle ce qu'on nous a objecté à propos du littoral : il n'appartiendrait pas à l'Assemblée de décider, mais aux préfets et aux maires – dans les faits, cela a été dit, ce sont plutôt les seuls préfets qui décident.
L'amendement no 599 est adopté ; en conséquence, l'article 6 bis est supprimé.
L'article vise à empêcher durant la période d'état d'urgence sanitaire le prélèvement de frais bancaires pour les personnes financièrement fragiles. Si nous ne pouvons qu'approuver l'objectif d'assister les plus précaires en période de crise, les modalités pratiques proposées demeurent problématiques.
Pour des raisons d'opportunité, d'abord. Certes, l'enjeu est considérable : 3,3 millions de Français sont en situation de fragilité financière. Mais l'enfer est pavé de bonnes intentions, et l'effet du dispositif pourrait être contraire au but recherché. Ainsi, l'interdiction de prélèvement pourrait exclure du service bancaire des clients jugés trop fragiles par les établissements.
Le Gouvernement a demandé dès décembre 2018 aux établissements bancaires de prendre leurs responsabilités en plafonnant les frais d'incident bancaire pour les personnes financièrement fragiles. Cette approche fondée sur la souplesse plutôt que sur la contrainte était inédite. À la lumière de l'examen de ses résultats – et du contrôle des obligations des banques – par l'Autorité de contrôle prudentiel et de régulation, elle semble porter ses fruits. En conférence de presse, le 21 février dernier, le ministre de l'économie et des finances a fait état de progrès notables : les frais d'incident ont été réduits pour plus d'1 million de personnes.
Pour des raisons juridiques, ensuite. Dépourvu de lien direct avec l'objet de la loi, qui est de préciser les conditions de prorogation de l'état d'urgence sanitaire, l'article constitue un cavalier législatif. Or le Président de la République a annoncé son intention de saisir le Conseil constitutionnel du texte. De plus, l'article porte une atteinte manifeste à des contrats préexistants, ce qui l'expose d'autant plus au risque d'inconstitutionnalité.
Il ne faut pas supprimer l'article 6 ter. Le problème des frais bancaires concerne environ 7 millions de personnes, dont 3 millions en grande difficulté. Le dispositif existant est uniquement incitatif : vous n'avez pas légiféré sur ce point. De plus, il pose des problèmes, car les personnes considérées dans ce cadre comme clients fragiles sont fichées et ne peuvent plus disposer d'une carte bancaire classique. Les profits réalisés par les banques grâce aux frais bancaires atteignent au bas mot 4 milliards d'euros, voire au moins 7 milliards selon l'UFC-Que choisir. Le dispositif de décembre 2018 n'a absolument pas résolu le problème, qui touchait à la fois les particuliers et les chefs de petites entreprises dès avant la crise du Covid-19.
C'est pour éviter un effet d'aubaine que le Gouvernement veut supprimer l'article. En voici un, d'effet d'aubaine, mais qui ne gêne personne : les frais d'utilisation du paiement sans contact sont passés de 40 à 60 centimes depuis le début de la crise !
Uniquement parce que les clients craignent d'attraper le Covid-19, les commerçants gagnent 20 centimes de moins, les banques 20 centimes de plus ! Et ce n'est qu'un exemple !
Non seulement le problème n'est pas résolu, mais la situation s'est aggravée. Les banques facturent en moyenne 12,50 euros une simple lettre informant le client qu'il a été à découvert pendant quelques jours, dont l'envoi, par informatique, ne leur coûte que quelques centimes. C'est un scandale ! Voilà un impôt privé qui coûte cher à l'ensemble des Français. Nous avons d'ailleurs déposé une proposition de loi à ce sujet.
Ce qu'a fait le Sénat est de la bonne besogne. Il y a bien un risque d'effet d'aubaine, mais de la part des banques : dans une période où les gens sont en difficulté, elles vont chercher à leur facturer des frais supplémentaires. Il serait quand même incroyable que vous décidiez de revenir sur cette disposition !
Je comprends votre engagement, monsieur Corbière, je le respecte et je peux même le partager. Le problème n'est pas de fond, mais de forme, comme l'a très bien dit Catherine Osson : l'article est un pur cavalier législatif. Dans un autre texte, il pourrait trouver sa place, mais, dans un projet de loi relatif à l'état d'urgence sanitaire, il serait invalidé par le Conseil constitutionnel. Je l'ai dit aux sénateurs, qui le savaient d'ailleurs déjà.
Cela dit, l'idée est intéressante. De fait, des mesures ont été prises pour plafonner les frais bancaires des 3 millions de personnes fragiles, notamment à la suite du mouvement des gilets jaunes. Le bilan en a été tiré en février dernier en présence des parties prenantes. Les frais d'incident bancaire sont plafonnés à 25 euros par mois pour les personnes fragiles et à 20 euros par mois pour les détenteurs de l'offre spécifique. Le dispositif a déjà permis de réduire ces frais pour près d'un million de clients et continue de protéger les publics fragiles.
S'y ajoutent les mesures significatives destinées à limiter la perte de revenus des ménages et à prévenir les incidents de paiement : activité partielle, aide exceptionnelle de solidarité qui sera versée le 15 mai à 4 millions de familles, développement de l'aide alimentaire, aide financière d'urgence servie par les caisses d'allocations familiales, prime pour tous les étudiants et les jeunes actifs. Ces aides sont automatiques pour éviter le non-recours.
Toutefois, je suis d'accord avec vous pour dire que l'on peut et doit faire mieux. Il nous faudra donc aller plus loin. Le ministère de l'économie et des finances est prêt à enrichir le dispositif actuel, sur le fondement des propositions qui lui seront faites et auxquelles plusieurs parlementaires travaillent activement, afin de pouvoir rapidement tenir compte des éléments soulignés dans l'article. Les textes réglementaires pourront être modifiés si besoin afin d'assurer la publicité des critères de fragilité financière appliqués par chaque banque, de mieux informer du nombre de clients fragiles et de bénéficiaires du plafonnement, d'améliorer les critères permettant d'avoir droit au dispositif et d'en sortir – notamment en raccourcissant la durée de la période de référence au cours de laquelle sont constatés les incidents de paiement donnant lieu à la catégorisation comme client fragile – et de poursuivre la promotion de l'offre spécifique.
En la matière, je compte beaucoup sur le travail des parlementaires, comme Bruno Le Maire, avec qui je m'en suis entretenu. Je serai toujours à leurs côtés dans cette démarche qui concerne une question importante. Mais il faut agir dans de bonnes conditions au lieu de créer de faux espoirs par des dispositions qui seront censurées avant même que la loi ne soit promulguée.
Il serait très regrettable de supprimer un article qui introduit dans le texte une tonalité sociale essentielle en cette période de crise et aiderait les nombreuses familles modestes dont la situation financière est considérablement compliquée par le chômage partiel, voire un futur licenciement, ou par l'inactivité. Si je peux comprendre l'argument du cavalier législatif, il n'en va pas de même de celui selon lequel la mesure créerait d'importants effets d'aubaine : même si je ne le dis pas sur le même ton que mon collègue Corbière, je trouve très choquant que l'on redoute ces effets à propos de personnes fragiles, en grande difficulté financière, alors qu'on les laisse passer quand ils bénéficient à d'autres.
L'article est peut-être un cavalier législatif qui risque en tant que tel la censure. Mais, dans le cadre de la loi d'urgence, nous avons voté les pleins pouvoirs au Gouvernement. Dès lors, qu'est-ce qui l'empêche de prendre cette mesure par voie d'ordonnance ? Dans la période que nous vivons, les banques ne sont pas exemplaires – même si ce sont parfois les compagnies d'assurance qui ne jouent pas le jeu. Combien d'entrepreneurs qui pourraient bénéficier du fameux prêt garanti par l'État ne l'obtiennent pas parce que les banques refusent de les aider au motif qu'ils ont quelques difficultés ?
N'étant pas constitutionnaliste et n'ayant pas l'ambition de l'être, je ne sais pas si l'article 6 ter est un cavalier législatif, …
C'en est un, sans le moindre doute.
… et ce n'est pas plus mal. Nous avons la certitude que le Conseil constitutionnel va étudier le texte, puisque le Président de la République a annoncé vouloir l'en saisir : laissons-le donc faire son travail et cessons de nous autocensurer. Je n'en peux plus de ce genre d'arguments ! Si vous croyez au dispositif de l'article 6, votez contre l'amendement du Gouvernement ; c'est ce que je ferai, non par plaisir personnel –
« Oh! » sur plusieurs bancs des groupes LR et LaREM
quoique ! – , mais pour les raisons que voici.
Je n'ai pas besoin d'être spécialiste de la Constitution pour savoir ceci : durant la crise, des familles ont vu leurs dépenses augmenter parce que les enfants ne pouvaient plus manger à la cantine et parce que les parents n'avaient pas d'autre choix que de se déplacer en voiture, faute de transports en commun, pour aller prendre leur poste à l'usine, au commissariat ou à l'hôpital. Certains ont aussi perdu une partie de leurs revenus, parce qu'ils étaient placés en chômage partiel ou pour d'autres raisons. Il ne s'agit peut-être que d'un symbole, mais les quelques dizaines de milliers de familles concernées valent la peine que nous ne nous autocensurions pas. Élu dans une circonscription qui compte beaucoup de familles modestes, je peux vous dire que le dispositif est très attendu et qu'il sera utile.
Je remercie chacun de s'être exprimé, y compris M. le ministre, car si mon ton était vif, c'était surtout en réaction à l'exposé sommaire de cet amendement : lire les mots « effets d'aubaine » alors qu'on a tous dit avoir des témoignages qui prouvent le contraire, bon sang ! On ne peut pas parler d'effets d'aubaine pour ces gens qui ont dû momentanément engager des frais avec des sommes qui n'étaient pas toujours sur leur compte.
Deuxièmement, considérer cet amendement comme un cavalier mérite discussion. Ce projet proroge l'état d'urgence sanitaire et il y a en effet un état d'urgence sanitaire et social pour beaucoup de gens, sanitaire parce que social et inversement, les deux sont liés. En Seine-Saint-Denis, le préfet explique le fort taux de mortalité, et je pense qu'il a raison, parce que les gens vont bien souvent trop tard aux urgences, en raison d'un rapport aux soins qui n'est pas le même qu'ailleurs du fait de difficultés financières elles-mêms spécifiques. Tout est lié, il ne faut pas hésiter à le reconnaître. Je rappelle au passage que le Gouvernement a pris des ordonnances permettant de travailler 60 heures par semaine dans certains secteurs et notamment aux établissements bancaires d'imposer à leurs salariés un congé forcé pendant dix jours, une mesure qu'ils ont beaucoup utilisée. Après tout ce qui a été fait dans le même genre, maintenir au contraire cet article serait de toute façon envoyer un signal et tirer les conséquences du fait que les banques n'ont pas vraiment joué le jeu. Or si vous rejetez cet article, mes chers collègues, ce sera un terrible contre-signal et qui aura une interprétation politique. Que craignez-vous ? Que quelques pauvres bougres aient abusé de la situation alors que des millions de gens ont souffert des mauvaises manières des établissements bancaires ?
Deux remarques. Tout d'abord, je considère que si cet amendement de suppression n'était pas adopté et donc l'article censuré par le Conseil constitutionnel, vous seriez, là aussi, capable d'en faire une interprétation politique, je n'ai aucun doute sur ce point. Par contre, vous avez raison, il est bien écrit dans l'exposé sommaire que « cette disposition pourrait en outre créer des effets d'aubaine importants [… ] ». Je ne l'aurais pas écrit ainsi et je regrette ces mots qui n'ont pas à figurer dans un exposé sommaire quand il s'agit de frais bancaires pour des personnes précaires. Voyez, je suis capable de le reconnaître.
Pas seulement des précaires, aussi des chefs d'entreprise, des commerçants !
Bref, continuons à avancer sur le fond. Je répète que l'article adopté par le Sénat ne tient pas la route, et je n'ai pas envie que les gens croient qu'une telle disposition va être appliquée alors qu'elle sera censurée. Le sérieux du travail parlementaire, c'est aussi être capable de reconnaître qu'il faut travailler autrement quand on sait que le texte que l'on soutient aura 100 % de chances d'être censuré. C'est en responsabilité que je vous demande de voter cet amendement de suppression.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
L'amendement no 598 est adopté et l'article 6 ter est supprimé.
Cet article est l'occasion de rappeler toute l'attention que nous devons porter dans cette crise à nos outre-mer parce qu'il y a la crainte, que je souhaite exprimer ici, que nous ne consacrions pas assez de moyens à ces territoires et que nous profitions des nouveaux vecteurs juridiques facilitant un réflexe de protection de la part de la métropole en y empêchant la circulation des ultramarins plutôt que de se donner les moyens de protéger leurs frontières et d'y restreindre l'arrivée du virus. Cette crainte a été alimentée par les doutes qui subsistent au fur et à mesure de l'examen des mesures prises dans ce projet de loi en matière de circulation et de mise en quarantaine. Je souligne que le groupe Les Républicains tient absolument à ce que nos compatriotes ultramarins, bien que résidant à des milliers de kilomètres de Paris, bénéficient des mêmes libertés de circulation que partout sur le territoire national, y compris métropolitain. C'est l'honneur et la chance de la France que de compter parmi ses territoires ces richesses situées sur l'ensemble du globe. Nous devons consacrer les moyens nécessaires pour qu'ils disposent des mêmes droits que leurs compatriotes métropolitains.
Mon intervention vaudra soutien à l'amendement nos 597 du Gouvernement. Je ne comprends vraiment pas le ton utilisé par certains quand on parle des outre-mer par rapport à l'état d'urgence sanitaire. Il y a quelque chose de très dérangeant dans ce discours qui se veut culpabilisant pour les autorités, dans un contexte de jugement moral, mais il faut quitter ce langage pour adopter un langage de responsabilité car ce n'est pas la réalité. Il ne doit pas s'agir pour notre assemblée de s'interroger sur le fait que telle ou telle disposition serait moins bien pour l'outre-mer que pour les autres territoires, il ne s'agit pas de punition ou de sanction, mais de faire face à une situation d'urgence sanitaire et de prendre des dispositions qui permettent de les protéger d'une épidémie qui pour le moment les a plutôt épargnées, Mayotte exceptée, mais qui pourrait provenir en effet des liens avec l'extérieur. Remarquons qu'elles l'ont été grâce aussi au comportement exemplaire des Ultramarins. Il faut donc rendre les dispositions nécessaires. L'amendement du Gouvernement que j'ai évoqué les confortera en laissant au représentant de l'État l'autonomie de décision nécessaire pour pouvoir adapter le dispositif au territoire.
Je me dois de réagir à ce que vient de dire mon collègue Vuilletet car si j'entends bien qu'il faut protéger particulièrement ces territoires, prendre la décision d'une mise en quarantaine systématique pour dissuader les gens de venir sur place aura bien entendu des conséquences terribles pour les économies locales et il faut donc tout de suite en tirer les conséquences. On ne peut pas dire aux habitants : « On va vous sauver du virus, et si vous n'avez plus de quoi vivre, ce n'est pas grave. » Comment se fait-il que le Gouvernement ne lance simultanément un plan à destination des acteurs locaux qui vont être impactés fortement par cette quarantaine ? Il est tout de même compréhensible qu'il faille immédiatement annoncer comment on va économiquement sauver ces territoires.
Je suis contente de l'arrivée de Mme la ministre des outre-mer parce qu'on essaye depuis ce matin de savoir comment cela va se passer dans les outre-mer cet été. On a eu l'occasion de le rappeler à M. le ministre de la santé et des solidarités, deux à trois avions atterrissent chaque jour dans le seul département de la Guadeloupe, nombre de leurs passagers étant des Ultramarins qui attendent les vacances pour revoir leur famille, avec comme conséquences des fêtes – ils peuvent aussi venir pour des deuils – , et on ne parvient pas très bien à comprendre comment cela va se passer. Toutes les personnes arrivant dans les outre-mer seront mises en quarantaine – ou plutôt en quatorzaine – , et il est vrai que les préfets ont pris des mesures à cet effet, je pense aux chambres réquisitionnées dans un hôtel en Guadeloupe où sont placées les quelques personnes concernées. Mais que se passera-t-il si c'est 500 personnes par jour ? Pourront-elles demeurer durant cette période chez elles, dans leur famille, ou seront-elles installées à l'hôtel ? Je pose la question depuis ce matin et je n'ai toujours pas très bien compris.
Ma collègue Vainqueur-Christophe avait demandé que ne soient mis en quatorzaine que les gens testés positifs, mais on nous a répondu que le test ne veut pas vraiment dire grand-chose.
Et puis il y a les fonctionnaires qui ont obtenu de leur administration, souvent avec beaucoup de difficultés, la possibilité de partir en congé bonifié : s'ils ne partent pas cette année, ils risque de perdre leurs droits, et s'ils sont placés sur place dans une sorte de centre de rétention, je ne vois pas bien l'intérêt de ce congé pour eux.
On reste tout de même dans le flou, et c'est tout à fait inquiétant. Il est vraiment bien que Mme la ministre des outre-mer nous précise comment tout cela va se passer.
À travers cet amendement, je porte la voix de Jean-Hugues Ratenon, député de La Réunion. Il l'a largement inspiré. Cette demande de suppression de l'article vise à rappeler le sentiment et la réalité de l'abandon par ce gouvernement des territoires d'outre-mer devant la crise. Comme vient de le rappeler M. Pupponi, on ne peut pas se contenter de n'avoir dans une loi sur l'état d'urgence sanitaire que des règles qui concernent la question sanitaire stricto sensu parce que la crise entraînée sinon par le coronavirus, en tout cas par les mesures de protection, est telle qu'elle nécessite des mesures d'urgence. En Martinique, d'importantes coupures d'eau pendant plusieurs jours en raison de la sécheresse ont provoqué une situation évidemment terrible quand il faut de l'eau pour se laver les mains dans le cadre des gestes barrières ; en Guyane et à Mayotte, c'est le problème de la faim ; à La Réunion, c'est un stock de 120 000 masques FFP2 pourris qui leur est destiné ; à Mayotte toujours, c'est l'absurdité d'avoir imaginé que les enseignants puissent recevoir les mêmes consignes qu'en métropole pour le télé-enseignement, dont celle d'utiliser des plate-formes numériques, alors que 80 % des élèves n'ont ni ordinateur ni connexion ! Et c'est l'incapacité de l'État de répondre aux besoins vitaux des populations qui a nécessité de faire appel à la Croix-Rouge, qui a installé des bornes-fontaines monétiques et des points d'accès à l'eau accessibles grâce à des cartes numériques. Il faudrait pour le moins créer un comité ad hoc de lutte contre les épidémies dans les outre-mer afin de répondre aux problèmes spécifiques auxquelles elles sont confrontées.
Avis défavorable car cet article permet de procéder à des mesures relevant de l'état d'urgence sanitaire en cas de propagation du virus dans les territoires d'outre-mer. C'est donc en votant la suppression dudit article qu'on les abandonnerait.
La parole est à Mme la ministre des outre-mer, pour donner l'avis du Gouvernement.
Vous avez débuté l'examen de cet article en évoquant la situation dans les territoires ultramarins face au Covid-19. Mais je tiens à rappeler à chacun qu'à aucun moment ces territoires n'ont été abandonnés. Nous avons d'ailleurs pris des mesures sur place en même temps que dans l'Hexagone alors que, dans la plupart des territoires, il n'y avait toujours pas de cas d'infection, et le confinement a été très rapide. De même, on a augmenté comme en métropole le nombre de lits de réanimation et l'on continue à le faire dans l'ensemble des territoires. Il fallait aussi que l'ensemble du matériel médical soit au niveau des besoins et même si, je le reconnais, nous avons eu quelques difficultés de logistique, les objectifs à atteindre et les normes des matériels ont toujours été conformes aux références dans l'Hexagone.
Il y avait bien sûr dans les territoires ultramarins, nous le savons tous ici, des difficultés sanitaires, économiques et sociales avant cette crise. Je connais beaucoup de députés qui se sont impliqués dans les questions ultramarines et ils ont toujours su montrer les situations de détresse sanitaire et médicale. J'ai entendu évoquer l'habitat insalubre et le manque d'eau… Et il fallait relever tous ces défis en plus de celui du Covid ! Et nous les avons relevés avec les élus des territoires et l'ensemble des collectivités, les régions, les départements, les mairies, et le monde économique. Nous les avons relevés aussi avec les Ultramarins eux-mêmes, qui souvent ont accepté le confinement dans des situations compliquées : je pense à Mayotte, le seul territoire où l'épidémie n'a pas encore été contenue et où nous renforçons encore bien sûr les moyens nécessaires – j'irai dans quelques jours, avec la ministre des armées, annoncer les différents renforts qui vont arriver.
Tout cela pour dire que l'article 7 ne doit pas être supprimé, car il est important. Il permettra de répondre à l'exigence de protection des territoires d'outre-mer. Cette volonté nous a conduits à réglementer les arrivées dans les territoires ultramarins en en limitant l'accès, à la demande des élus, aux personnes pouvant se prévaloir d'un motif impérieux d'ordre sanitaire, personnel ou professionnel. Le nombre de vols commerciaux a été limité à deux ou trois par semaine. Nous avons en revanche monté un pont aérien entre certains territoires, comme entre Paris et la Polynésie, ou encore entre la Réunion et Mayotte, car il était normal – et même indispensable – d'assurer un minimum de continuité territoriale.
Je veux aussi saluer, comme nous le faisons tous, ceux qui se sont impliqués dans la lutte sanitaire contre le Covid-19, et rappeler que plusieurs territoires ultramarins sont touchés en même temps par deux épidémies : la dengue et le Covid-19. À Mayotte, la dengue tue d'ailleurs plus encore que le Covid-19. Nous devons relever ce grand défi auquel font face les territoires ultramarins.
Je veux également féliciter les enseignants qui exercent dans ces territoires où, c'est vrai, tout le monde n'a pas accès à des cours en ligne – je songe à Mayotte, à la Guyane ou encore à la Polynésie française et à ses archipels. Les enseignants se sont organisés différemment, en se rendant au domicile des élèves pour y dispenser des cours. Ils se sont impliqués. C'est aussi cela, les territoires ultramarins : la résilience et la solidarité. La solidarité est à la fois locale, régionale – la Réunion se tient aux côtés de Mayotte, comme en témoignent les évacuations sanitaires organisées pour alléger l'hôpital de Mayotte – et nationale. C'est bien normal.
L'article 7 est important. Nous évoquerons sous peu, à l'occasion de l'examen de l'amendement no 597 du Gouvernement, les quarantaines de quatorze jours qui, en plus de la limitation des entrées sur le territoire, permettront de contrôler les déplacements depuis l'Hexagone vers les territoires ultramarins. Il est hors de question – et le texte ne le prévoit d'ailleurs pas – que ce contrôle s'applique dans l'autre sens, c'est-à-dire aux déplacements effectués de l'outremer vers la métropole.
J'émets un avis défavorable à l'amendement.
Vous aurez compris que c'est avant tout un amendement d'appel, d'autant que nous en avions déposé un autre, qui a été déclaré irrecevable. Également rédigé par mon collègue Jean-Hugues Ratenon, il visait à instituer, dans chaque territoire d'outremer, un comité local de lutte contre les épidémies, composé d'élus locaux et nationaux ainsi que de personnalités qualifiées, qui auraient été placés auprès du préfet. Ces comités auraient eu pour rôle d'évaluer l'action des communes ou des agences régionales de santé et de proposer des mesures de prévention ou d'urgence aux préfets.
Ce que nous reprochons au texte qui nous est présenté – on en revient au débat que nous avons eu tout à l'heure à propos de plusieurs mesures sociales que nous avions proposées et qui ont été jugées irrecevables – , c'est que l'on ne saurait répondre à une situation d'état d'urgence en prenant uniquement des mesures sanitaires, surtout s'agissant de territoires confrontés aux difficultés que connaissent les outremers. Le projet de loi prorogeant l'état d'urgence, au-delà même des problèmes qu'il pose en matière de libertés individuelles, ignore complètement cet aspect. C'est évidemment problématique.
L'amendement no 316 n'est pas adopté.
L'amendement no 373 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Il vise à maintenir les quarantaines de quatorze jours qui sont actuellement en vigueur dans les territoires ultramarins. Comme je l'indiquais tout à l'heure, dans tous les territoires d'outre-mer, les préfets ont réuni des groupes de travail incluant des élus. Dans ce cadre, ils ont décidé d'instaurer, en plus des mesures de limitation des vols commerciaux et d'interdiction de rejoindre les outre-mers sans raison impérieuse, des périodes de quarantaine. Toute personne arrivant dans un territoire ultramarin est invitée à respecter une quarantaine de quatorze jours, à domicile ou dans une structure collective. Ce choix relève du préfet du territoire concerné, parce que nous devons répondre à des situations particulières et que tous les habitants ne peuvent pas nécessairement être hébergés dans un lieu leur permettant de s'isoler de leur famille ou d'un collectif plus large. Les fortes densités de population ou les difficultés d'accès à l'eau dans certains quartiers justifient de laisser aux préfets le soin d'apprécier les possibilités de quarantaine. Il me semble important de leur garantir cette capacité d'adaptation. Voilà ce que nous faisons, depuis le début, dans les territoires d'outre-mer : nous reconnaissons l'intérêt de la différenciation et adaptons les mesures nationales en conséquence.
Après avoir présenté cet amendement au Sénat, qui ne l'a pas adopté, nous vous demandons aujourd'hui de le soutenir et de le voter. Je remarque d'ailleurs que des parlementaires appartenant à plusieurs groupes ont défendu tout à l'heure des amendements reprenant des amendements qui avaient été présentés par le Gouvernement au Sénat. Cela prouve bien que les décisions qui sont prises le sont en concertation avec les élus des territoires ultramarins.
Nous devons maintenir les quarantaines, car la lutte contre le Covid-19 en outremer n'est pas terminée. Sans doute pourrons-nous, dans un deuxième temps, songer à rouvrir les territoires ultramarins, que nous ne pouvons pas laisser indéfiniment fermés. Le maintien des mises en quarantaine au-delà de la date qui nous sera conseillée aura effectivement des conséquences économiques et sociales. Je pense, en toute honnêteté, que les quarantaines se prolongeront jusqu'en juin, car nous avons pour l'heure besoin de la protection maximale qu'elles assurent. Avec plusieurs parlementaires – Olivier Serva, Max Mathiasin, Justine Benin, Stéphane Claireaux, ou encore Ramlati Ali – , nous avons commencé à travailler à la définition de la doctrine qui remplacera celle des mises en quarantaine. Ces changements n'interviendront toutefois qu'après le mois de juin.
Je vous demande de voter en faveur de l'amendement du Gouvernement, ainsi que de l'amendement suivant, qui relaie le même message.
Hier, la commission a rejeté un amendement identique. Je conçois toutefois, à la lumière des explications apportées par Mme la ministre, que certains des territoires d'outre-mer sont confrontés à des difficultés liées à l'insalubrité des logements. Il me semble en effet que 12 % du parc ultramarin est insalubre, contre 4 % du parc national. Je comprends donc ce qui justifie la mesure proposée. Si l'avis de la commission est défavorable, j'émets à titre personnel un avis favorable.
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Je profite d'avoir la parole pour répondre à la question relative aux congés bonifiés, qui a été posée à plusieurs reprises. Il faut être très clair : à l'heure actuelle, la prise de congés bonifiés ne constitue pas une raison impérieuse de se rendre dans les territoires d'outre-mer. Ces congés sont souvent posés en juillet et en août. J'ai indiqué qu'il me semblait nécessaire de maintenir des quarantaines strictes jusqu'à la fin du mois de juin. Le Premier ministre a par ailleurs invité tous les Français à réfléchir aux voyages qu'ils effectueraient cet été en fonction des informations qui seraient disponibles début juin. Nous disposerons, à cette date, d'un avis scientifique qui pourra différer de celui rendu le 8 avril par le Conseil scientifique. Je vous invite en tout cas à maintenir les quarantaines jusqu'en juin.
J'entends vos arguments. La quarantaine de quatorze jours permet probablement de réguler les arrivées, mais elle représente une contrainte extrêmement forte. Plusieurs élus, dans différents départements ou territoires d'outre-mer, nous font part de cette préoccupation. Je serai porteur d'amendements rédigés par Mansour Kamardine concernant Mayotte. On sait combien ce département est touché par l'épidémie – et ceux qui le connaissent savent combien il est fragile de manière générale – , mais la politique de quarantaine constitue vraiment une barrière très lourde. Je souhaite savoir si des solutions alternatives ont réellement été étudiées, comme la possibilité de réaliser suffisamment de tests pour attester de façon certaine, par le biais d'actes biologiques, que les personnes entrantes ne portent pas le virus, voire qu'elles sont immunisées. De tels éléments pourraient, si ce n'est remplacer les quarantaines, au moins offrir une alternative. La question mérite d'être posée. Elle le sera tout à l'heure, à travers plusieurs amendements.
S'agissant des congés bonifiés, la difficulté tient au fait que la crise sanitaire actuelle et l'accès réduit aux territoires ultramarins conduisent les compagnies aériennes à stopper leur activité – d'autant que l'aéroport d'Orly ne fonctionne plus. Les familles qui devraient partir début juillet, c'est-à-dire dans un mois et demi, ne peuvent ainsi pas réserver de places, parce que les compagnies aériennes ne peuvent pas leur dire si elles affréteront des vols et ne leur proposent pas de places. Peut-être les personnes concernées décideront-elles de ne pas partir, ne serait-ce que parce que les tarifs vont flamber.
Ne serait-il pas possible, par le biais des ordonnances, de permettre à ceux qui, pour toutes ces raisons, ne pourront pas partir cette année, de prendre leurs congés bonifiés l'année prochaine ? La règle veut qu'ils soient posés une année sur deux, mais les personnes qui ne pourront pas partir cette année devraient être assurées de pouvoir le faire l'année prochaine. Le fait que tout le monde parte la même année causerait des problèmes aux administrations concernées, j'en conviens, mais nous devons trouver des solutions, sans quoi les personnes concernées ne pourront pas voir leurs proches avant plusieurs années.
Je comprends la position d'Erika Bareigts qui, considérant que la Réunion est déjà confrontée à d'autres problèmes – au premier rang desquels la dengue, plutôt que le Covid – , estime qu'il faut limiter les entrées dans l'île. Elle précise toutefois que l'ouverture du territoire serait envisageable à condition de tester les personnes. Or, le ministre des solidarités et de la santé estime que le test ne constitue pas une garantie suffisante. En outre, les personnes ayant programmé des vacances, notamment celles qui bénéficient de congés bonifiés, n'ont même pas, la plupart du temps, acheté elles-mêmes leurs billets. Si leur administration leur a fourni leur billet, il n'est pas certain qu'elle accepte de repousser le voyage. Plusieurs personnes m'ont ainsi interpellée en m'expliquant que leur administration avait refusé de reporter leur déplacement. Alors que les dates de départ approchent, il importe que les personnes concernées soient fixées sur la façon dont les congés seront organisés.
Par ailleurs, la proposition du Gouvernement me semble choquante, dans la mesure où, alors que, dans les autres départements, la quarantaine s'effectue soit au domicile soit dans un endroit désigné par le préfet, cette décision est laissée au seul préfet dans les départements d'outre-mer. Pourquoi ne demande-t-on pas aux personnes souhaitant rejoindre un territoire ultramarin si elles bénéficient de conditions d'hébergement correctes ? Si tel est le cas, pourquoi diable ne pourraient-elles pas effectuer leur quarantaine à domicile, sans attendre que le préfet décide ?
Je sais que ce n'est pas facile, mais il me semble nécessaire d'apporter rapidement aux personnes concernées les précisions qui leur permettront de faire des choix pour les mois à venir.
Le Premier ministre a dit qu'il était trop tôt pour parler maintenant de la période des vacances et que nous aurions un rendez-vous début juin pour tous les Français, et également pour les ultramarins. N'étant pas ministre de la santé ni médecin, je me fie aux travaux en cours pour nous proposer une autre doctrine que celle des quatorzaines. Aujourd'hui, je suis persuadée que, comme l'on dit le Président de la République et le Premier ministre, la quatorzaine doit être maintenue tant que nous n'avons pas d'autre solution pour protéger le territoire. Quatre-vingt-dix pour cent des maires d'outre-mer sont du même avis, et je n'aurais pas porté cet amendement sans leur accord ni sans avoir travaillé avec eux.
Pourquoi comparer la quatorzaine des territoires d'outre-mer aux centres où l'on isolera les personnes atteintes en métropole ? Ce n'est pas du tout la même chose, car il s'agit là d'arriver sur des territoires qui, à part Mayotte, n'ont été que peu touchés par le Covid-19 – et c'est tant mieux. Cela signifie que, d'une certaine manière, le confinement rapide des ultramarins les a protégés. Les quatorzaines se sont mises en place très rapidement et d'une manière très stricte, à domicile ou dans des structures collectives, toujours sur décision des préfets, en concertation avec les familles, avec une vérification sur place pour voir quels types de logements étaient proposés à nos compatriotes arrivant dans les territoires ultramarins.
Ce mécanisme fonctionne et il faut le faire perdurer jusqu'à ce que nous disposions d'une nouvelle doctrine pour rouvrir les territoires, pour permettre aux gens d'y retourner et pour retrouver un niveau économique suffisant dans ces territoires qui vivent le plus souvent du tourisme. Tel est bien notre objectif, mais nous avançons marche après marche, avec les élus et les préfets des territoires.
L'article 7, amendé, est adopté.
La parole est à M. Alexis Corbière, pour soutenir l'amendement no 318 , portant article additionnel après l'article 7.
Cet amendement vise à ce que, dans les territoires régis par les articles 73 et 74 de la Constitution, le représentant de l'État territorialement compétent soit habilité à prendre, dans l'intérêt de la santé publique, des mesures proportionnées afin de prévenir et de limiter les conséquences de menaces sur la population, y compris des mesures individuelles, pour quarante-huit heures au maximum. Le Gouvernement devrait alors se prononcer avant la fin de ces quarante-huit heures sur les mesures prises et pourrait les prolonger aussi longtemps que nécessaire.
La situation outre-mer nécessite en effet une adaptation pour pouvoir répondre aux spécificités locales – nous avons échangé à ce propos. Il convient de pouvoir laisser aux territoires d'outre-mer une plus large capacité de réaction dans l'urgence au vu de la situation géographique, climatique et sanitaire.
Le préfet de La Réunion s'est trouvé récemment en difficulté en raison de l'arrivée d'un bateau de croisière refusé par l'île Maurice et sur lequel on pouvait craindre que ne se soient déclarés des cas de Covid-19. Voilà les dispositifs particuliers de cet amendement dont mon collègue Jean-Hugues Ratenon a sans doute été l'un des inspirateurs.
Nous évoquions tout à l'heure la capacité des préfets à faire preuve de souplesse, de différenciation et d'adaptation dans l'application des mesures nationales, en tenant compte des réalités de chaque territoire, mais votre amendement va beaucoup plus loin. Il tend à faire des représentants de l'État des super-préfets.
Je ne suis pas très favorable à ce que nous allions jusque-là, d'autant que les mesures prises jusqu'à présent n'ont pas fragilisé les préfets. Au contraire, le Conseil d'État a validé la légalité des quatorzaines que nous évoquions tout à l'heure dans une décision rendue récemment après un recours formulé par des personnes qui avaient subi une quatorzaine en structure collective. Le préfet de Guadeloupe a, bien sûr, eu raison de prendre de telles mesures. Aujourd'hui, dans les territoires, les préfets peuvent adapter et jouer la différenciation. Il est donc inutile d'aller trop loin. Avis défavorable.
L'amendement no 318 n'est pas adopté.
Madame la ministre, j'évoquais précédemment la difficulté de la quatorzaine dans les outre-mer, en particulier à Mayotte. Je suis porteur, au nom de notre collègue Mansour Kamardine, député de Mayotte, d'une demande de reconsidération de cette quatorzaine qui provoque bien des difficultés – les faits sont têtus.
Il ne s'agit pas de créer des polémiques, puisque nous parlons d'éléments factuels ; il faut trouver une alternative moins pénalisante et plus facile à mettre en oeuvre, en se fondant sur les résultats de tests.
J'éprouve cependant une légère inquiétude après avoir entendu le ministre déclarer tout à l'heure que les tests n'étaient pas très fiables. Pourquoi donc des tests qui ne sont pas valables pour les outre-mer le seraient-ils plus en métropole ? Le raisonnement en la matière pourrait être un peu compliqué, ce qui mettrait à mal le système de tests, non seulement outre-mer, mais d'une manière plus générale. Sans doute faudra-t-il clarifier ce point.
Toujours est-il que l'amendement no 241 pose le cadre général de la démarche, tandis que l'amendement no 240 est plutôt un amendement de repli visant à l'appliquer spécifiquement à Mayotte, compte tenu de la particularité de ce territoire.
Monsieur le député, comme vous le savez, la situation de Mayotte nous inquiète fortement. C'est la raison pour laquelle, avec plusieurs ministres, nous travaillons aujourd'hui à renforcer les capacités sanitaires, notamment en lits de réanimation, mais aussi en moyens complémentaires et, surtout en bras. En effet, quatre-vingts personnes se rendront très prochainement à Mayotte pour lutter contre le virus, qui prend de l'ampleur sur ce territoire.
Je serais tentée de dire que, compte tenu, malheureusement, du développement de l'épidémie à Mayotte, la quatorzaine ne se justifie plus et pourrait être abrogée. Soyons très clairs : il n'y a plus aujourd'hui à Mayotte de capacité de quatorzaine. L'une des réponses que nous allons apporter à ce problème sera, du reste, d'en établir une à Paris pour ramener les étudiants. L'impossibilité d'établir une quatorzaine à Mayotte tient simplement au fait que le nombre de soignants et de militaires que nous y avons envoyés occupe la totalité des espaces qui étaient disponibles. Aujourd'hui, pour les étudiants ultramarins qui devront rentrer chez eux, nous organiserons des quatorzaines à Paris, afin de pouvoir tenir les engagements que nous avons pris. Il est normal que nous puissions agir au plan national pour renforcer ce territoire.
Vous avez raison de dire, monsieur le député, qu'il faut travailler sur la suite. Cette proposition arrive un peu trop tôt, mais c'est le travail des parlementaires que de faire des propositions au bon moment. Vous avez donc raison d'anticiper. C'est ce que nous allons également faire, mais la réponse prendra un peu plus de temps. Étant donné, en outre, qu'il s'agit d'une question de santé, cette réponse est plutôt scientifique et ce n'est donc pas moi qui la présenterai aujourd'hui. De même que j'ai veillé à avoir un premier avis du conseil scientifique, le 8 avril, pour mettre en place des politiques particulières dans les territoires d'outre-mer, j'attends, comme nous tous, pour cette nouvelle étape de l'action dans les territoires ultramarins – qui interviendra, je l'espère, le plus rapidement possible – , des confirmations scientifiques et une décision politique qui reviendra au ministre de la santé.
Deux choses sur ce sujet très important. D'abord, Mayotte est l'exemple type de notre capacité à gérer les frontières extérieures. En effet, les dispositions dont nous parlons concernent les flux de nationaux entre la métropole et les territoires ultramarins, mais il y a à Mayotte d'autres flux, qui viennent de l'extérieur et que nous avons peut-être plus de mal à gérer que ceux qui lient la métropole et ce territoire, alors qu'ils ne sont pas moins dangereux en termes de circulation du virus et de contamination de la population locale. C'est là un problème à propos duquel nous vous alertons depuis bien longtemps, et il est dommage qu'il faille attendre une épidémie virale venant de la métropole pour nous dire que nous avons un problème dans les Comores.
Ensuite, si nous ne pouvons évidemment pas transposer dans les outre-mer les solutions que nous imaginons pour la métropole, il faut cependant chercher un parallélisme. En métropole, on peut circuler librement d'une zone rouge à une zone verte. Entre la métropole et l'outre-mer, on ne peut donc pas se contenter d'imposer une quatorzaine sans échappatoire, car il ne sera évidemment jamais possible de respecter la règle des 100 kilomètres. Pour transposer en quelque sorte cette règle à l'outre-mer, l'usage du test me semble constituer une bonne solution.
L'amendement no 48 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il vise à maintenir les mesures de quatorzaine en vigueur dans les territoires ultramarins entre la publication de la loi et celle des décrets.
L'amendement no 596 , accepté par la commission, est adopté.
La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l'amendement no 223 .
Il vise à éviter d'allonger certains délais liés à l'état d'urgence, qui ont des conséquences sur la construction et sur l'accessibilité. Je défends en même temps l'amendement no 224 , lui aussi de mon collègue Vincent Rolland.
Les amendements identiques nos 464 de Mme Delphine Bagarry et 549 de M. Matthieu Orphelin sont défendus.
La parole est à Mme George Pau-Langevin, pour soutenir l'amendement no 18 .
Il a pour objet d'appeler l'attention de notre assemblée sur la situation des demandeurs d'asile en demandant un rapport sur cette question. Je sais que, souvent, une telle demande n'est pas bien vue, mais nous voulons savoir ce qu'il en est dans cette période de crise sanitaire.
Nous allons maintenant être saisis d'une trentaine d'amendements demandant des rapports sur des sujets qui sont tous très pertinents. L'avis de la commission sera cependant défavorable, non pas sur les sujets auxquels seraient consacrés ces rapports, mais sur la production des rapports eux-mêmes. Avis défavorable.
La frustration que l'on éprouve lorsqu'on ne peut pas aborder tous les sujets que l'on voudrait dans le cadre d'un projet de loi me rappelle quelque chose. Elle pousse à formuler de nombreuses demandes de rapport.
S'il y a bien un projet de loi qui se prête hélas très peu à des remises de rapport, c'est le projet de loi sur l'état d'urgence sanitaire, et ce pour plusieurs raisons. Tout d'abord parce que les sujets abordés sont circonscrits au strict nécessaire, comme on l'a vu au cours de ces deux jours d'examen, ensuite parce que vous recevez chaque semaine de nombreux rapports, très détaillés, à propos de toutes les questions relatives à l'état d'urgence sanitaire.
En consultant la liasse des amendements, je note que les demandes de rapport sont nombreuses. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement no 18 et son avis sera identique s'agissant des amendements qui suivent, non pas que les rapports qu'ils demandent ne soient pas dignes d'intérêt – il ne me revient pas d'en juger – , mais parce que ce texte se prête encore moins que les autres à des demandes de rapport.
L'amendement no 18 n'est pas adopté.
La parole est à M. Pierre-Henri Dumont, pour soutenir l'amendement no 263 .
Il s'agit d'une demande de rapport, formulée par mon collègue Éric Ciotti, à propos de la gestion par le Gouvernement des centres de rétention administrative durant la crise sanitaire. Nous avons pu lire et entendre des témoignages d'agents qui y travaillent et dialoguer avec certains d'entre eux. Ils nous ont expliqué que ces centres accueillaient de moins en moins d'étrangers en situation irrégulière. Pourtant, comme nous le savons, ces structures constituent le meilleur moyen pour procéder au raccompagnement de ces étrangers dans leur pays alors qu'ils se trouvent en France de façon irrégulière.
L'amendement no 263 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 75 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il s'agit de deux demandes de rapport. Comme l'indique l'amendement no 99 , nous souhaitons disposer de chiffres précis concernant l'ensemble des personnels soignants et, de façon plus générale, tous les personnels civils et militaires contaminés dans le cadre de la lutte contre le Covid-19.
Ces données permettraient, comme le précise l'amendement no 100 , d'évaluer les mesures possibles de reconnaissance et de protection que nous pourrions accorder à leurs ayants droit, à leurs familles. Plusieurs d'entre nous ont par exemple travaillé sur la possibilité d'attribuer le statut de pupille de la nation. Il existe bien sûr d'autres formes de reconnaissance, mais c'est une façon d'introduire cette question dans le débat afin qu'elle ne soit pas oubliée. Il y a évidemment un temps pour le travail et l'efficacité, mais il y a aussi un temps pour la reconnaissance et pour la protection des familles de ceux qui sont décédés en luttant contre le Covid-19.
L'amendement no 262 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 206 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 326 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 85 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 260 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Isabelle Florennes, pour soutenir l'amendement no 96 .
Il s'agit d'un amendement de M. Vincent Ledoux, soutenu par plusieurs collègues, comme M. Bruno Fuchs, qui porte sur l'homologation des masques, notamment ceux produits par la filière textile française qui s'est lancée dans ce projet assez rapidement.
Comme vous le savez, monsieur le ministre, cette procédure nécessite deux séries successives de tests avant homologation : des tests de respirabilité réalisés à Lyon ainsi que des tests réalisés par la direction générale de l'armement. Or il semble que les tests ne sont pas en nombre suffisant, car il faudrait pouvoir tester 250 à 300 échantillons tous les jours. En nous fondant sur le rapport qu'ils demandent, mes collègues souhaitent que nous puissions lever les blocages et homologuer beaucoup plus de tests sur notre territoire afin d'encourager la production de masques – je pense en particulier à la mobilisation de la région de Mulhouse et au Pôle textile Alsace.
Je sais que vous n'êtes pas favorable aux rapports mais l'amendement vise surtout à vous sensibiliser à cette question.
Le sujet est sans aucun doute important mais, pour les mêmes raisons que précédemment, nous sommes défavorables aux rapports. Je vous demande donc de retirer cet amendement.
L'amendement no 96 , ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement, est retiré.
La parole est à M. Alexis Corbière, pour soutenir l'amendement no 303 .
J'ai compris le point de vue du ministre concernant les demandes de rapport, mais celle-là porte sur la gratuité des masques que nous défendons depuis ce matin avec mes collègues, parmi lesquels Éric Coquerel et Jean-Luc Mélenchon.
La situation actuelle nous semble tout simplement scandaleuse. Comme vous l'avez noté, sept ordres de professionnels de santé ont publié le 30 avril un communiqué commun pour dénoncer l'apparition soudaine d'un grand nombre de masques dans la grande distribution alors que ces protections leur avaient tellement manqué. Vous avez décidé que des amendes assez significatives seraient infligées à nos concitoyens qui ne portent pas de masques dans certaines circonstances, tout en leur demandant d'acheter des masques.
La ville de Montreuil qui se trouve dans ma circonscription s'est fait dérober à la frontière des milliers de masques dans un camion. C'est très symptomatique de la spéculation, du petit banditisme qui se développe autour du business des masques. S'ils étaient gratuits et qu'ils ne faisaient pas l'objet d'une spéculation, la situation serait assez différente.
L'amendement no 303 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 533 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 261 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 327 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 304 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 543 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 289 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
« Défendu ! » sur plusieurs bancs.
Eh non, nous ne renonçons jamais ! Surtout lorsqu'il s'agit, grâce à une demande de rapport d'insister sur une question grave : la demande de gratuité des frais d'obsèques. Nous n'avions pas réussi à faire adopter nos amendements sur ce sujet lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative ; nous nous sommes demandé pourquoi, étant donné que la mesure représentait « seulement » un coût de 7 millions d'euros.
Dans une France qui recense près de 25 000 morts, et alors que les obsèques se déroulent dans des conditions qui rendent le recueillement difficile, conditions qui viennent encore augmenter la douleur des familles, il nous semblait normal que nos concitoyens n'aient pas à se préoccuper de la question des frais. Le problème est d'autant plus sensible que, comme vous le savez, cette situation a été exploitée par ceux que nous appelons des profiteurs de la crise : cela n'aurait pas été possible si les obsèques avaient été gratuites. Faute d'avoir pu faire adopter un amendement au moment où cela aurait été nécessaire, nous demandons qu'un rapport soit remis au Parlement sur le sujet.
L'amendement no 296 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Par cet amendement, nous demandons que les transports soient gratuits pendant la crise épidémique, au moins pour les personnes contraintes de prendre les transports en commun pour aller travailler.
Cela me permet de lancer de nouveau une alerte à propos du 11 mai. Je répète que nous assistons depuis deux semaines, dans les transports en commun franciliens, à une situation d'impréparation qui n'a pas été rectifiée par les opérateurs s'agissant de la fréquence des rames et des trains par rapport au nombre d'usagers déjà présents. Je crains fort, d'après les informations dont nous disposons, que nous observions le même degré d'impréparation problématique le 11 mai.
Il me semble qu'il faudrait qu'un rapport sur la gratuité l'étudie, d'une part, sous l'angle de la nécessité d'une bifurcation écologique pour l'avenir, qui doit conduire à toujours privilégier les transports en commun aux dépens de la voiture individuelle, et d'autre part, sous l'angle de la nécessité sociale pour tous ceux qui se trouvent aujourd'hui dans l'obligation de se déplacer pour travailler alors qu'il s'agit souvent des plus défavorisés qui sont dans les situations financières difficiles que l'on connaît.
L'amendement no 322 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Ils portent sur une revendication que nous avons souvent défendue au cours de ce débat : la nationalisation de sociétés telles que Luxfer Gas Cylinders, Famar Lyon ou Péters Surgical, afin de faire face à l'épidémie de Covid-19. Ces entreprises auraient pu par exemple produire du matériel sanitaire en quantité suffisante, je pense notamment au matériel de réanimation qui a fait défaut, ce qui a donné lieu à des situations très tendues – nous avons même lu récemment que des respirateurs artificiels fabriqués pour lutter contre l'épidémie avaient finalement été jugés assez peu utilisables, en raison d'une absence de planification. L'utilité d'un rapport sur le sujet est d'examiner s'il est opportun de nationaliser ces sociétés afin de réarmer notre État face à de potentielles autres épidémies.
L'amendement no 492 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l'amendement no 370 .
Cet amendement est totalement pertinent par rapport au projet de loi puisqu'il vise à permettre d'évaluer l'opportunité d'une étude épidémiologique de séroprévalence menée par l'agence régionale de santé de Corse.
L'amendement no 370 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 299 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Alexis Corbière, pour soutenir l'amendement no 292 .
Il s'agit cette fois d'une demande de rapport concernant la nécessité d'encadrer les prix agricoles et alimentaires. Je souhaitais conclure ce débat en évoquant ce sujet. Sans reprendre la discussion que nous avons eue tout à l'heure sur les effets d'aubaine que nous avons pu observer pendant cette crise, je rappelle que de nombreuses associations ont constaté une augmentation des prix des produits de première nécessité de 2,5 % environ, comme l'a noté le magazine Que choisir : 5 % pour les pâtes, 4 % pour le lait, 2 % pour le riz et les oeufs.
Nous sommes tous très attachés à nos circonscriptions. Je ne suis sans doute pas le seul élu d'une circonscription populaire mais, en Seine-Saint-Denis, nous constatons que beaucoup de gens sont en très grande difficulté pour s'alimenter. Cela s'explique par de nombreux facteurs, parmi lesquels la perte d'emploi, mais aussi l'augmentation du prix des produits de première nécessité. Un rapport sur la nécessité d'encadrer les prix agricoles et alimentaires serait particulièrement opportun.
L'amendement no 292 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Proposé par notre collègue Aude Amadou, il vise à demander au Gouvernement la remise d'un rapport sur l'application de la loi Fauchon en s'attachant notamment aux cas où des élus locaux ont été mis en cause dans des affaires touchant à la santé publique. Il s'agira de déterminer comment le juge judiciaire a pu examiner ces affaires et évaluer le niveau de responsabilité des élus locaux dans la prise de décision visant à protéger les populations ainsi que, le cas échéant, l'articulation entre la mise en oeuvre d'initiatives au niveau local et le cadre national contraignant.
L'amendement no 279 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Nous avons achevé la discussion des articles du projet de loi de prorogation de l'état d'urgence sanitaire.
Nous en venons aux explications de vote. Je rappelle que le temps de parole de l'orateur de chacun des groupes est limité à deux minutes.
La parole est à M. Florent Boudié.
La position du groupe La République en marche sur ce projet de loi ne donne bien sûr lieu à aucun suspense. Nous le voterons.
J'avais dit – et je n'étais pas le seul – que ce projet de loi ne devait pas être celui de la mise en oeuvre du confinement. Or nous avons passé beaucoup de temps à parler de cette question, ce qui est légitime même si ce n'est pas le sujet du texte.
À quelques jours du déconfinement, il est éminemment légitime que la représentation nationale en débatte, car le sujet concerne tous nos concitoyens. Le débat fut parfois long, mais il fut sincère, républicain et presque toujours de très bonne tenue.
Monsieur le ministre, je vous remercie d'avoir répondu à toutes les questions difficiles que nous nous posions et que tous les Français se posent.
Le projet de loi, quant à lui, posait des questions simples, même si les réponses à apporter l'étaient moins et exigeaient que nous trouvions des compromis. Fallait-il prolonger l'état d'urgence sanitaire ? Nous pensons tous que oui. Certains voulaient le faire pour un mois, d'autres pour deux. Nous avons choisi de nous aligner sur la proposition du Sénat, car il nous apparaissait utile que les deux chambres s'accordent sur ce point.
Le système d'information a également suscité de nombreuses questions, mais vous avez apaisé de nombreuses inquiétudes, monsieur le ministre. En outre, nous avons apporté de nouvelles garanties à la protection des libertés fondamentales.
À une crise de cette ampleur, il faut toujours répondre par l'État de droit : c'est ce que nous faisons !
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.
Quoiqu'en dise M. Boudié, le projet de loi n'a pas pour seul but de proroger l'état d'urgence sanitaire ; il contient aussi des dispositions liées au déconfinement. D'ailleurs, il est contredit par le Gouvernement lui-même, puisque M. le ministre a avoué avoir besoin que le texte soit adopté avant lundi. C'est ce qui nous a obligés à travailler dans des délais aussi courts, alors même que l'état d'urgence ne doit prendre fin que le 23 mai. Le Parlement ne devrait pourtant plus être contraint de travailler dans de telles conditions !
Le groupe Les Républicains votera contre le texte pour trois raisons.
La première a trait à l'organisation de l'irresponsabilité du Gouvernement et de certaines administrations centrales, sujet qui nous a longuement occupés. À cet égard, la rédaction actuelle ne nous convient pas tant elle semble exonérer de leur responsabilité les personnes ayant dû gérer la crise.
La deuxième concerne la durée de prolongation de l'état d'urgence sanitaire, sujet qui est au coeur du projet de loi. La date du 10 juillet ne nous satisfait pas. J'ai entendu les parallèles dressés avec l'état d'urgence en matière terroriste, mais l'état d'urgence sanitaire s'applique à tous les Français et impose des restrictions colossales aux libertés. Il nécessite donc un contrôle accru du Parlement.
Enfin, les débats de ce soir sur le fichier ont montré que les questions soulevées étaient plus nombreuses que les réponses apportées.
Parce que nous souhaitons un déconfinement fondé sur la confiance faite aux Français et parce que nous croyons à la responsabilité de chacun de nos compatriotes, nous voterons contre le texte.
Je tiens à remercier la rapporteure, le ministre et mes collègues pour le travail mené ensemble pendant plus de deux jours. Je regrette toutefois que l'examen d'un texte aussi important se déroule dans de telles conditions. Des députés confinés n'ont ainsi pas pu prendre part aux votes.
Le groupe Socialistes et apparentés a déposé des amendements sur chacun des points de tension du texte. Ceux-ci n'ont pas disparu. Ainsi, il nous semble dangereux qu'un texte d'urgence modifie le code pénal. De même, il nous paraissait fondé qu'une personne placée en quarantaine contre son gré puisse puisse voir le juge de la détention et des libertés se prononcer sur sa requête en moins de quarante-huit heures. Enfin, malgré les efforts fournis pour en encadrer l'usage, la création, à l'article 6, d'un fichier exorbitant du droit commun en matière de santé nous pose problème, parce qu'il contiendra des données sur des personnes non malades et n'ayant pas donné leur consentement, et parce que des professionnels extérieurs à la sphère médicale et à l'assurance maladie pourront le consulter.
Mon groupe votera donc contre le projet de loi. Nous voulons donner la priorité à la défense des libertés individuelles, et nous vous mettons en garde contre le développement de fichiers dont le contenu s'étendrait à l'environnement relationnel des individus concernés – d'autant qu'une fois créés, il est illusoire d'espérer leur suppression.
Je précise toutefois que cette position n'a rien de polémique et qu'elle ne traduit aucune méfiance à l'égard du ministre des solidarités et de la santé, dont je tiens – et sans doute est-ce le cas d'autres membres du groupe – à saluer le travail et l'engagement pour sortir notre pays de cette pandémie ravageuse.
Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes LaREM et MODEM.
Nos débats furent riches. Ils étaient indispensables pour éclairer l'assemblée sur la portée des mesures du projet de loi.
La première question qui se posait à tous les députés, y compris ceux de mon groupe, est la suivante : faut-il prolonger l'état d'urgence sanitaire, qui permet de prendre des mesures d'exception pour faire face à la situation ? La réponse est oui.
J'avais indiqué lors de la discussion générale qu'il convenait d'assurer une proportionnalité entre les restrictions de liberté et l'objectif visé : lutter efficacement contre la propagation du virus, afin de l'éradiquer le plus rapidement possible, et réaliser le confinement dans de bonnes conditions. Notre groupe estime que l'équilibre obtenu est satisfaisant.
Nous étions également très attentifs à la question de la responsabilité pénale des élus. Nous refusions de donner le sentiment que nous cherchions à organiser l'impunité, notamment en faveur des plus hauts dirigeants du pays. De ce point de vue, la rédaction adoptée par le Sénat n'était pas satisfaisante, en raison de sa portée générale et parce qu'elle concernait les décisions prises pendant une période trop étendue. Elle pouvait être interprétée comme une forme de déresponsabilisation et devait donc être revue. L'amendement adopté par la commission des lois ne me satisfait pas non plus, mais il évacue toute impression d'impunité.
La très grande majorité du groupe UDI, Agir et Indépendants votera pour l'adoption du projet de loi ; quelques collègues, dont je fais partie, s'abstiendront à cause de l'article 6.
Nous vivons un moment particulier et historique pour notre pays. Adopter le texte instaurant l'état d'urgence sanitaire, puis le présent projet de loi qui prévoit sa prorogation, indispensable compte tenu de la diffusion de la pandémie dans notre pays, n'est pas simple, car nous ne légiférons pas dans des conditions normales – le nombre de députés est limité et les votes se déroulent selon des modalités particulières.
Le groupe Libertés et territoires souhaitait porter certaines revendications. Nous souhaitions que l'article 2 apporte des réponses à la Corse et aux territoires ultramarins, où des mesures spécifiques de restriction des déplacements vont être prises. Si la crise sanitaire est là, la crise économique l'est également ; elle précipitera des entreprises et des individus au-delà du point de non-retour.
Un dispositif de suivi des malades et des cas contacts est certes indispensable, mais nos nombreuses craintes et interrogations – dénuées de toute suspicion à l'égard de votre volonté de trouver les meilleures solutions – , n'ont pas été levées, car le texte contient des restrictions de liberté importantes.
N'ayant pas obtenu les réponses escomptées, la grande majorité du groupe ne votera pas ce texte : dix députés s'abstiendront, un seul votera le projet de loi et les autres voteront contre son adoption.
Le texte proroge l'état d'urgence sanitaire, régime qu'il ne faut jamais banaliser. Alors que la date de la fin de l'état d'urgence n'était pas imminente et que certains, comme nous, souhaitaient ne le proroger que d'un mois, vous avez retenu la date du 10 juillet.
De la même manière, vous avez prolongé l'application des ordonnances, alors que celles-ci devraient être systématiquement réexaminées par l'Assemblée nationale. Nous contestons particulièrement celles qui procèdent à la casse du code du travail, notamment les dispositions qui restreignent les délais laissés aux représentants du personnel et aux experts pour analyser les questions relatives à la sécurité.
L'article 6 est celui qui nous pose le plus de problèmes. Vous ne nous avez absolument pas convaincus sur ce point : non seulement le fichier contiendra des données relatives à des malades et à des individus qui ne le sont pas, mais il sera accessible à des personnes qui ne travaillent pas dans le domaine médical, et dont nous ne connaissons toujours pas ni l'identité, ni le nombre. Votre objectif est d'effectuer un « traçage » – je reprends le terme que vous employez – , ce qui n'est pas de nature à nous rassurer : tout cela semble ouvrir la voie à une application, StopCovid, qui permettra de savoir qui sont les malades, où ils habitent et qui ils ont rencontré. Vous avez refusé l'effacement automatique des données au bout d'un mois, en arguant qu'il faudrait les conserver aussi longtemps que la présence du virus et la recherche épidémiologique l'exigeront. Cela présage, au vu de la situation sanitaire, d'une longue conservation des données.
Enfin, vous avez refusé toutes nos propositions de nature sociale, pourtant nécessaires pour répondre à l'urgence. Nous défendons la gratuité des masques, la distribution de ceux-ci aux personnes n'en portant pas dans les transports en commun plutôt que la verbalisation, l'interdiction des licenciements, la fermeture des centres de rétention administrative, l'instauration d'une taxe contre les profiteurs, sur le modèle de celle proposée récemment par l'acteur Vincent Lindon, la suspension des loyers des CROUS, etc.
Pour toutes ces raisons, nous voterons contre le projet de loi prorogeant l'état d'urgence sanitaire.
Il faut faire preuve d'humilité dans ces débats : tel était notre état d'esprit, car nous savons la difficulté de la tâche.
Mais si l'art est difficile, la critique est nécessaire. Lors de l'examen du projet de loi instaurant l'état d'urgence sanitaire, le pays se trouvait dans un état de sidération. Il fallait alors agir vite et prendre des mesures exceptionnelles. Mais, deux mois plus tard, la France est le pays européen où le peuple a le moins confiance dans son gouvernement pour lutter contre le Covid-19. Ne pensez-vous pas qu'il y ait un lien entre les mesures d'exception, le confinement de la démocratie et le régime d'état d'urgence d'une part, et la perte de confiance de l'autre ? Nous ne pensons pas que la démocratie soit l'ennemie de l'efficacité, et l'état d'urgence nous semble contre-productif.
Le professeur Delfraissy et la communauté scientifique insistent sur l'importance de la confiance et de l'adhésion de la population dans la lutte contre le Covid-19. Elles sont le prix de la démocratie. Le régime de l'état d'urgence est un obstacle à la démocratie, donc à l'adhésion massive de la population aux mesures nécessaires pour lutter contre la pandémie.
Voilà pourquoi nous voterons contre le texte.
Je ne m'attarderai pas sur nos conditions de travail assez dégradées, et remercierai Mme la rapporteure ainsi que Mme la présidente de la commission des lois de l'excellent travail que nous avons mené, compte tenu des délais qui nous étaient impartis. L'état d'esprit régnant en commission était bon.
Notre groupe a permis, grâce notamment à la contribution de notre collègue Laurence Vichnievsky et à l'attention dont elle a bénéficié, d'améliorer les articles 1er, 5 et 6, qui l'avaient déjà été par le travail effectué au Sénat. Tout cela a été fructueux. Nous sommes parvenus à des rédactions tout à fait intéressantes.
À présent, espérons que la matinée qui suit permettra d'obtenir un résultat qui nous honorerait. Tel avait été le cas, dans des conditions non moins extrêmes, le 22 mars dernier. J'espère que la nuit portera conseil à chacun, et que nous pourrons aboutir demain.
Applaudissements sur les bancs des groupes MODEM et LaREM.
Le projet de loi est adopté.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.
Prochaine séance, aujourd'hui, à quinze heures :
Discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire ou en nouvelle lecture, du projet de loi prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions.
La séance est levée.
La séance est levée, le samedi 9 mai 2020, à deux heures quinze.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Serge Ezdra