La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
Cet après-midi, l'Assemblée a commencé la discussion des articles non rattachés à des missions. Elle a entendu la présentation des amendements en discussion commune, nos 518, 1396, 1527 et 1821, à l'article 42.
Sur ces amendements, je vais commencer par demander la confirmation des avis de la commission et du Gouvernement.
La parole est à M. Joël Giraud, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
La parole est à M. le ministre de l'économie et des finances, pour donner l'avis du Gouvernement.
J'ai bien compris le sort que vous comptez réserver à ces amendements, qui sont en discussion commune alors qu'ils n'ont pas le même objet. Mais je n'y peux rien.
Vous avez prévu d'abaisser le taux du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi – CICE – de 7 % à 6 % en 2018, et de le supprimer à compter du 1er janvier 2019, en le transformant en un allégement de charges qui portera la réduction des cotisations patronales au niveau du SMIC à 9,9 %. Quel sort réservez-vous aux secteurs économiques de l'outre-mer, puisque je comprends que le taux du CICE passera de 9 % à 6 % ? Aujourd'hui, le CICE se cumule avec un régime d'allégement de charges résultant des dispositions de la loi pour le développement économique des outre-mer, la LODEOM, votée en 2009. En sera-t-il de même du nouvel allégement, de sorte que le cumul des deux puisse atteindre entre 12 et 13 % ?
Une première remarque de forme, d'abord. M. le ministre Le Maire nous a indiqué qu'il ne croyait pas les conclusions du rapport de France Stratégie, selon lesquelles le CICE n'a pas permis de créer des emplois. Ce faisant, il remettait en cause l'analyse d'un organisme qui dépend pourtant des services du Premier ministre et qui, si mes sources sont bonnes, était dirigé par Jean Pisani-Ferry, qui a rejoint depuis l'équipe de M. Macron. On ne peut pas dire que ce soit un insoumis ! Faut-il en conclure que ce n'est pas tant la réalisation de rapports qui pose problème que les personnes qui les demandent et, surtout, leurs conclusions : quand elles ne vous conviennent pas, vous les balayez d'un revers de main. C'est assez révélateur.
Sur le fond, ensuite, les arguments ne manquent pas pour montrer que le CICE est une mauvaise mesure. Vous persistez pourtant à le maintenir, voire à le pérenniser. Vous ne pourrez pas, ensuite, réfuter la critique d'un budget fait pour les riches, entreprises comme contribuables. En l'occurrence, vous faites un choix cohérent avec les mesures que vous avez prises, et que vous semblez assumer à demi-mot.
Monsieur le rapporteur général, vous laissez penser que ceux qui n'ont pas de travail vont être affectés par notre proposition d'allégement de charges financé par une hausse du taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée – nous ne touchons pas le taux intermédiaire. Ceux qui n'ont pas de travail doivent aujourd'hui faire face, pour l'essentiel, à deux types de dépenses : le logement et la nourriture. La TVA ne s'applique pas au logement, et les dépenses de nourriture sont soumises au taux intermédiaire ; elles ne seraient donc pas concernées par notre proposition. Je pense donc que l'argument qui a motivé votre avis défavorable n'était pas juste.
Je tiens à répondre à la remarque de notre collègue de La France insoumise sur le CICE. J'ai déjà eu l'occasion de rappeler que l'un des avantages du CICE avait été de restaurer les marges des entreprises.
Il se trouve que, au sein de l'Union européenne, les entreprises françaises affichent le taux de marge rapporté à la valeur ajoutée parmi les plus faibles. Toutes les études montrent que le CICE a permis de restaurer les marges des entreprises, mais vous ne vous y référez jamais.
Vous permettez que je finisse mon intervention ? La restauration des marges a permis aux entreprises de se désendetter, d'investir, de maintenir des emplois, donc de créer de l'activité économique.
Le CICE a eu au moins cet avantage. Je ne cesserai de le répéter quand vous affirmerez des contre-vérités économiques.
On s'appuie sur des rapports ; c'est vous qui dites des contre-vérités ! On devrait interdire le mensonge !
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 164 .
La parole est à M. Éric Woerth, président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour soutenir l'amendement no 1734 .
À la faveur de la transformation du CICE en baisse de charges, à laquelle nous sommes favorables, vous diminuez le taux. Cet allégement n'est donc pas équivalent au bénéfice du CICE, ce qui signifie que vous augmentez les charges. Comme la croissance s'améliore – 1,8 %, c'est, en effet, mieux que 1 % ou rien du tout – , les carnets de commandes se remplissent et les entreprises vont mieux, et vous pensez que c'est probablement le bon moment pour prendre plus de 3 milliards aux entreprises. Vous pensez également que le double bénéfice, pour les entreprises, du CICE et de sa transformation en allégements de charges en 2019 cachera la hausse de la fiscalité.
Je ne suis pas sûr qu'il soit pertinent de faire payer aux entreprises le coût de cette transformation. Vous auriez dû établir la baisse des cotisations sur la base du taux actuel du CICE et, évidemment, suivre nos propositions sur l'impôt sur les sociétés. Vous ne l'avez pas fait, ce qui n'est pas bon pour la compétitivité des entreprises, même si les effets négatifs seront probablement masqués en 2019 par cette double année.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
Je répondrai d'abord à la question précise posée tout à l'heure par M. Letchimy. Les outre-mer ne sont pas concernés par la baisse du taux de CICE de 7 % à 6 %. Ils conserveront le taux de 9 %. Pour le reste, c'est plutôt au ministre de répondre.
S'agissant des amendements visant à supprimer la baisse d'un point du taux de CICE, je rappelle simplement que les entreprises bénéficieront en 2018 du taux de CICE à 7 %. C'est en 2019 qu'elles percevront le CICE à un taux réduit, mais elles bénéficieront également de la totalité des allégements de charges, de plus de 24 milliards d'euros, prévus par le projet de loi de financement de la Sécurité sociale – PLFSS. Je ne crois donc pas que les entreprises soient perdantes. Je suis défavorable à tous ces amendements.
Je suis défavorable à ces amendements. Pour bien éclairer la représentation nationale, je reprendrai certains éléments. Je ne compléterai pas ce qui a été excellemment dit tout à l'heure sur la restauration de la profitabilité des entreprises. J'invite simplement La France insoumise à sortir de sa logique opposant les riches, les pauvres, les grandes entreprises, le CAC 40…
La réalité, c'est que si vous supprimez l'allégement de charges sur les bas salaires, les salariés les plus modestes se retrouveront au chômage. Si c'est ce que veut La France insoumise, tant mieux pour elle, …
… mais regardons les réalités économiques, les réalités de terrain, les réalités des entreprises, les réalités de la concurrence, au lieu de faire de l'idéologie sur le dos des Français, en particulier les plus modestes et les moins qualifiés.
Ensuite, s'agissant du coût et du bénéfice, à terme, du CICE, je voudrais que chacun ait bien conscience des chiffres et qu'on en finisse, là aussi, avec les approximations sur le sujet. Nous voulons que nos entreprises se portent mieux pour qu'elles puissent embaucher. C'est un choix politique du Président de la République, du Premier ministre et de l'ensemble de la majorité. En 2018, le taux du CICE sera maintenu à 7 %. En 2019, son taux baissera de 7 % à 6 %, mais, comme l'a rappelé le président de la commission des finances, les entreprises bénéficieront à la fois du CICE, certes à taux réduit, et de l'allégement de charges, qui représentera près de 24 milliards d'euros.
Je veux bien tout entendre – et j'ai discuté avec beaucoup de chefs d'entreprise – , mais il est difficile de prétendre que nous n'aiderions pas suffisamment les entrepreneurs et les entreprises, alors qu'elles vont bénéficier, en 2019, à la fois de la baisse des charges et du maintien du CICE. Même si ce n'est que pour une année, cela représente un soutien massif de l'ensemble de la nation aux entrepreneurs. Je voudrais que chacun en prenne bien conscience.
En outre, après l'adoption définitive du dispositif, c'est d'un allégement de charges définitif que nos entreprises bénéficieront, au lieu d'un crédit d'impôt qui peut être remis en cause d'une année sur l'autre, car il doit être voté par la représentation nationale.
C'est tout de même, en termes de stabilité, un avantage considérable. J'ai toujours affirmé que la fiscalité doit être à la fois sûre et stable. Nous donnons à tous nos entrepreneurs la stabilité et la visibilité dont ils ont besoin pour investir et, je l'espère, embaucher dans de bonnes conditions.
Regardons maintenant les chiffres à l'horizon de 2023, une fois que le dispositif sera totalement stabilisé. L'allégement de cotisations sociales représentera pour l'ensemble des entreprises françaises 13,4 milliards d'euros de gain. Pour être tout à fait précis, j'ajoute que cet allégement de cotisations sociales est net de l'effet de retour en IS, l'impôt sur les sociétés. Je souhaite aller au bout de mon raisonnement parce que le dispositif est suffisamment important pour que nous nous y arrêtions. Pourquoi ai-je ajouté « net de l'effet de retour en IS » ? Parce que le CICE, vous le savez, est déductible de l'assiette, contrairement à l'allégement de charges, qui élargit l'assiette de l'impôt sur les sociétés. C'est pourquoi, si on veut être honnête s'agissant de l'allégement de cotisations sociales – ce qui est généralement mon cas comme celui du Gouvernement – , il faut préciser « net de l'effet de retour en IS ». Ce sont donc, non pas 20 milliards d'euros mais, avec l'élargissement de l'assiette de l'impôt sur les sociétés, qui en augmentera effectivement la charge pour les entreprises, 13,4 milliards d'euros que toucheront les entrepreneurs. J'ai eu des discussions avec toutes les organisations patronales et syndicales : je tiens également à en avoir avec vous, afin de vous donner des chiffres éclairants.
Les entreprises bénéficieront, ensuite, de la baisse du taux d'impôt sur les sociétés, qui passera de 33,3 % à 25 % : près de 11 milliards d'euros, exactement 10,8 milliards, leur seront ainsi redistribués. Elles bénéficieront également, ne l'oublions pas, de la suppression de la contribution de 3 % sur les dividendes distribués. Cette contribution était illégale, nous l'avons supprimée. Je tiens à rappeler que la taxe sur les OPCVM – organismes de placement collectif en valeurs mobilières – , elle, avait été, non pas supprimée, mais remplacée par cette taxe de 3 % sur les dividendes que nous aurions pu, nous aussi, remplacer. Dieu sait s'il y a eu de bonnes âmes pour nous le conseiller afin de garantir des recettes à l'État ! Nous avons décidé de la supprimer définitivement : 2,1 milliards sont ainsi mis à la disposition des entreprises.
Si je résume, nous avons : 13, 4 milliards d'allégements de cotisations sociales nets de l'effet de retour en IS, 10,8 milliards de baisses du taux d'impôt sur les sociétés de 33,3 % à 25 %, et 2,1 milliards en raison de la suppression de la contribution de 3 % sur les dividendes distribués. Quant à la baisse d'un point de CICE, elle représente 1,8 milliard d'euros en année pleine. Au total, nos entreprises seront très largement bénéficiaires de la transformation du CICE en allégement définitif de charges. Regardons le panorama complet et reconnaissons que ce gouvernement et cette majorité font le choix clair, qu'on peut contester mais qu'ils revendiquent, de soutenir nos entrepreneurs, la création de richesses et la création d'emplois.
Applaudissements sur les bancs du groupe REM.
Après le panorama général, regardons l'ensemble de la séquence 2010-2020. En 2010, il y a eu zéro allégement de charges ; il y en a eu également zéro en 2011 et en 2012. Une fois décidé, le CICE n'a produit ses effets, malheureusement, que deux ans après : donc, c'est encore zéro allégement de charges en 2013. De 2014 à 2017, la baisse des charges due au CICE est de 6 points, avant d'être de 7 points en 2018, en raison du décalage d'un an dans le versement du CICE – je regarde la trésorerie des entreprises en temps réel. La baisse de 7 points n'aura donc eu lieu qu'une seule année. Quant à l'année 2019, du fait du double dividende – baisse des charges et maintien du CICE – , la baisse atteindra 10 points : 6 points pour le CICE, plus 4 points environ si j'intègre les chiffres que vous avez donnés, monsieur le ministre. En 2020, la baisse sera inférieure à 10 points : elle tournera certainement autour de 8 ou 9 points.
La progression est donc constante, et il est en tout cas certain qu'en 2020 et 2021, la baisse dépassera les 7 points, si on prend l'ensemble du panorama que vous avez dessiné, monsieur le ministre. La réduction d'un point de CICE est donc un non-événement. Il ne faut pas focaliser son regard sur une seule année : il faut le porter sur l'ensemble de la séquence, qui sera très favorable aux entreprises. Cette politique, ce n'est pas un gouvernement antérieur à 2012 qui l'a conduite. C'est sous le quinquennat précédent qu'elle a été entamée et c'est le gouvernement actuel qui la poursuit.
Applaudissements sur les bancs du groupe REM.
Monsieur le ministre, je trouve dommage que vous vous sentiez obligé de caricaturer les propositions que nous défendons pour évacuer nos arguments et plus largement le débat. Nos amendements reposent sur une vision générale, philosophique et politique, cohérente. Nous pensons que l'économie et la finance doivent être au service de l'intérêt général, notamment en matière de transition écologique, plutôt que des marchés financiers ou de la règle d'or. Telle est notre cohérence, que nous respectons et qui est différente de la vôtre, que nous vous demandons au moins d'assumer.
Nous aussi, nous connaissons des patrons de TPE et de PME, et nous discutons avec eux. Certains sont même insoumis et insoumises. Vous n'avez pas le monopole de la connaissance du terrain. Nous faisons des propositions pour aider ces entreprises, notamment par le biais d'un amendement que vous avez rejeté, qui visait à créer un fonds de soutien interentreprises qui permettrait de les aider.
Sur le CICE, vous vous contentez d'une caricature, puisque vous ne répondez toujours pas, non pas à La France insoumise, mais au rapport de France Stratégie qui tient compte de tous les paramètres, y compris de ceux qui ont été relevés par notre collègue. Reconnaissez d'ailleurs que l'objectif initial du CICE était de créer 1 million d'emplois et non d'améliorer les marges des entreprises. Tel est du moins l'objectif qui a été vendu et que les gouvernements ont acheté. Or, en tenant compte de vos propres données, de celles de France Stratégie, et même de celles d'un rapport précédent du comité de suivi du CICE, la conclusion est que le CICE, loin d'atteindre son objectif, a seulement permis de maintenir des emplois et d'en créer quelques-uns, dont le nombre est sans rapport avec celui qui avait été avancé. Ce n'est pas La France insoumise qui le dit, ce sont des experts qui ne sont absolument pas gauchistes. Telle est la réalité que nous vous opposons et sur laquelle s'appuient les propositions de nos amendements.
Votre présentation, monsieur le ministre, est biaisée : je comprends bien que le CICE soit une chose importante, et nous sommes évidemment favorables à la baisse des charges, notamment sur les bas salaires. Madame Obono, si cette baisse était supprimée, le taux de chômage augmenterait.
Lorsque, globalement, le prix du travail, charges comprises, est plus élevé que sa productivité, les employeurs finissent par ne plus embaucher. Il faut donc à la fois améliorer la formation et baisser le coût du travail. Or, monsieur le ministre, vous ne le baissez pas. Vous faites même, en la matière, moins bien que François Hollande, …
… puisque l'avantage du CICE transformé en allégement de charges est inférieur à celui que les entreprises en retiraient précédemment. Ce n'est même plus un avantage, c'est une augmentation du coût du travail. Rendre le travail plus cher que sous François Hollande, ce n'est pas vraiment une performance ! Si nous suivons votre raisonnement, vous nous direz qu'en 2018 jamais l'impôt sur les sociétés des grandes entreprises n'aura autant baissé. À partir du moment où, en effet, vous l'aurez augmenté à un niveau incroyable à la fin du mois de décembre, en 2018, c'est sûr, il baissera beaucoup ! Peut-être devrons-nous, en sus, admirer vos efforts !
Comparons ce qui est comparable : avec votre réforme, le coût du travail sera plus cher qu'avec le CICE. Nous le regrettons, mais c'est la vérité. Vous misez sur le fait que les entreprises ne s'en apercevront pas parce qu'elles bénéficieront de deux années en une. Vous misez également sur la phase de croissance qui permettra de masquer la réalité des choses. Il n'en reste pas moins que vous augmentez le coût du travail.
Après l'excellente démonstration du président de la commission des finances, je veux seulement à réagir aux propos de notre collègue marcheur : je ne vois pas comment vous arrivez à parler d'une hausse des allégements, alors que le projet de budget prévoit de réduire le CICE de 7 à 6 points ! Certes, je n'ai pas poussé bien loin mes études de mathématiques, mais je sais que réduire le CICE de 7 à 6 points revient à le baisser et donc à augmenter le coût du travail pour les entreprises, ce qui pose la question de la cohérence de votre projet pour 2018 – la projection est certes différente pour 219. En 2018, on assistera bien à une augmentation du coût du travail. On ne peut, en même temps, dire une chose et faire son contraire dans le budget.
Vous poursuivez en pire la politique qui a été menée jusqu'à présent.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
J'ai le sentiment qu'on raisonne surtout de manière statique, alors que l'économie relève de la dynamique. La compétitivité prix ne prend pas en compte uniquement les charges salariales augmentées des charges sociales : elle repose fondamentalement sur le coût salarial unitaire, c'est-à-dire les charges divisées par la productivité du travail.
Or, non seulement, une reprise de la croissance économique est annoncée, non seulement nous faisons tout pour faire repartir les investissements des entreprises, mais nous misons également sur l'innovation. Tous ces éléments sont susceptibles d'améliorer la productivité du travail. Je le répète, la compétitivité prix s'évalue bien, de manière dynamique, non pas à travers le coût du travail, mais à travers le coût du travail pondéré par sa productivité.
Je ne vous interromps pas.
La compétitivité prix repose à la fois sur le coût salarial unitaire et sur la technologie. On parle alors de compétitivité hors prix, de compétitivité technologique. Or tout ce que nous faisons pour améliorer l'investissement et l'innovation concourra à améliorer la compétitivité hors prix. Je vous invite donc à raisonner de manière dynamique et non statique.
Cet amendement vise à poursuivre le travail entamé dans le cadre du CICE, dont nous pensons qu'il faut l'étendre de 2,5 SMIC à 3,5 SMIC. C'est une proposition du rapport Gallois, et M. Gallois a raison. Si le Gouvernement fait bien de réduire au maximum les charges pesant sur le SMIC, il faut aller jusqu'à 3,5 SMIC parce que c'est le niveau des salaires de la plupart des emplois qui sont exposés à la concurrence internationale.
Monsieur Labaronne, la productivité du travail, vous le savez, augmente aujourd'hui bien moins que par le passé. Nous devons même nous interroger sur ce phénomène. S'il faut, c'est vrai, tenir compte de la nature des produits vendus, le coût du travail n'en demeure pas moins pour nous un handicap important dans la concurrence internationale, même si nous avons un peu rattrapé notre retard en la matière depuis quelques années.
L'élargissement de l'assiette du CICE jusqu'à 3,5 SMIC couvre une grande partie des salaires de l'industrie. Nous voulons une France industrielle – comme beaucoup sans doute – , parce que les emplois de l'industrie tirent l'ensemble de l'économie française. Or, pour réaliser cette France industrielle, il faut réduire le coût du travail jusqu'à 3,5 SMIC.
Défavorable. Ce petit amendement, en élargissant l'assiette du CICE, coûterait seulement 13 milliards d'euros ! Qui plus est, il s'ajouterait aux 24 milliards d'euros d'allégements de charges déjà prévus, ce qui ferait atteindre des sommes par trop astronomiques.
Je suis heureux que nous ayons ce soir, même si c'est à une heure tardive, un débat approfondi sur ce sujet, parce que c'est un des plus importants pour l'emploi en France, pour notre industrie et pour notre croissance économique.
Je comprends l'argument du président de la commission des finances relatif au coût du travail.
Je rappelle toutefois à la représentation nationale et aux Français qui nous écoutent qu'il faut porter un regard global sur l'action que nous menons en faveur des entreprises, pour comprendre à quel point la somme des décisions que nous prenons sera favorable aux entrepreneurs et donc à l'emploi.
Je voudrais donc que, par honnêteté intellectuelle, on n'oublie pas d'ajouter, à la baisse de taux, de 7 % à 6 %, liée à la suppression du CICE, les autres mesures que nous avons prises en faveur de d'emploi : l'allégement définitif des charges sur les bas salaires, le renforcement de l'allégement général de 3,9 points, l'exonération de toutes les charges au niveau du SMIC – vous l'avez dit vous-même, monsieur le président de la commission des finances – , la baisse nette de l'effet de retour en impôt sur les sociétés, sans oublier la suppression de la contribution additionnelle de 3 % sur les revenus distribués, qui constitue, là encore, un choix politique majeur en faveur de nos entrepreneurs. J'affirme que la somme de ces décisions bénéficiera à nos entrepreneurs, qu'elle favorisera donc la création d'emplois et qu'elle marque une vraie rupture dans la politique menée depuis de nombreuses années : au lieu de redistribuer des richesses avant de les créer, nous préférons créer des richesses avant de les redistribuer.
Monsieur le président de la commission des finances, votre proposition porte sur un sujet majeur. Nous devons nous poser sereinement la question : faut-il concentrer les allégements de charges sur les seuls bas salaires – c'est ce que nous faisons depuis plusieurs années, quelle que soit la majorité au pouvoir – ou faut-il, à un moment donné, instaurer un allégement de charges au-dessus de 2,5 SMIC ? Je le répète, je suis prêt à ouvrir la réflexion sur un allégement de charges au-dessus de 2,5 SMIC.
Cela a été dit, la pertinence, c'est de s'interroger de manière dynamique sur les perspectives de l'économie française. Pour notre industrie et pour l'ensemble de l'économie française, nous souhaitons plus de formation, plus d'innovation, plus de digitalisation et une meilleure qualification de tous les salariés, ce qui implique nécessairement des salaires plus élevés.
Pour la compétitivité de notre économie, il sera bon, à un moment donné, de se poser la question de l'allégement de charges sur les salaires supérieurs à 2,5 SMIC. Louis Gallois a recommandé cette mesure dans l'un de ces rapports, et je pense défendre cette position avec beaucoup de constance depuis de nombreuses années. Si nous voulons une industrie forte, nous devons nous poser la question de l'allégement de charges au-dessus de 2,5 SMIC.
Le seul bémol, c'est que cette mesure coûte, au bas mot, 4,6 milliards d'euros en année pleine. Avant de mettre en oeuvre une mesure d'un tel montant, il est bon de réaliser toutes les études nécessaires, de dresser un bilan coûtsavantages et de déterminer combien coûtera chaque emploi pour nos finances publiques. Je suis prêt à engager la réalisation de cette étude. C'est seulement sur cette base que nous prendrons des décisions : j'invite donc le président de la commission des finances, qui a évoqué un point important pour notre économie, à retirer son amendement et à participer aux travaux que je viens d'annoncer. À défaut, je donnerai à son amendement un avis défavorable.
Je souhaite réagir à quelques points évoqués dans le cadre de ce débat que M. le ministre a qualifié de « très important ». Effectivement, je pense que les questions touchant à l'assiette et au taux de l'impôt sur les sociétés, ainsi que tout ce qui découle de la suppression du CICE, sont très importantes.
Monsieur Alauzet, vous avez déclaré que rien n'avait été fait avant 2010. Permettez-moi simplement de vous rappeler que des dispositifs très variés ont été mis en place avant cette date. Je pense notamment à une mesure qui a perduré très longtemps et qui perdure encore, à savoir l'allégement Fillon, qui visait à réduire le coût du travail. Ce dispositif est certes probablement perfectible, mais il a produit ses effets au cours des dernières années. Je pense aussi à la défiscalisation des heures supplémentaires.
Un certain nombre de dispositifs ont donc été créés : on ne peut pas dire qu'il n'y en a pas eu.
Monsieur Labaronne, vous avez souligné la nécessité d'intervenir au niveau économique en prenant en compte un certain nombre d'autres paramètres pour évaluer la compétitivité des entreprises. Vous avez raison : il faut notamment tenir compte de leur croissance, de la dynamique qui a été insufflée… Cependant, nous discutons ici de fiscalité. Si les comparaisons effectuées sont pertinentes, il n'en demeure pas moins que d'autres éléments doivent être pris en compte. Je pense que nous pouvons tous approuver votre remarque, mais ce n'est pas forcément l'objet de notre débat.
Monsieur le ministre, vous avez cité des chiffres. Néanmoins, le fait, dans un premier temps, de ramener le taux du CICE de 7 % à 6 % et de transformer, dans un second temps, ce crédit d'impôt en un allégement de charges sociales aura un impact que l'on évalue à environ 8 milliards d'euros.
Enfin, vous avez évoqué un certain nombre d'allégements de charges sociales, mais je veux aussi rappeler que l'augmentation de la CSG affectera l'ensemble des actifs et des inactifs.
Ce point doit également être pris en considération dans le schéma d'ensemble.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.
La France bénéficie d'une croissance qui n'est pas exceptionnelle – c'est une croissance de rattrapage – mais qui permet de faire beaucoup de choses.
Les carnets de commandes sont remplis. Il faut donc vraiment utiliser cette croissance en restaurant la compétitivité des entreprises. Restaurer la compétitivité de nos entreprises, en dehors du cycle conjoncturel, c'est aussi faire en sorte de rééquilibrer notre commerce extérieur, qui est une très grosse épine dans le pied de l'économie française. Pour ce faire, nous devons évidemment améliorer la qualification et la formation de nos salariés, réformer le code du travail, travailler sur la nature des produits, mais aussi réfléchir au coût du travail, en particulier dans les secteurs exposés à l'international où beaucoup de salaires sont supérieurs à 2,5 SMIC.
Ce n'est donc pas une petite affaire !
Sur les chiffres, monsieur le ministre, je constate que vous n'êtes pas tout à fait d'accord avec notre excellent rapporteur général, qui évalue le coût de mon amendement à 13 milliards d'euros, alors que vous l'estimez à 4 ou 5 milliards d'euros. Il y a tout de même un écart de 7 ou 8 milliards ! Finalement, en faisant un peu d'efforts, je pense que cette mesure coûtera…
… nettement moins cher lorsque vous vous serez calé sur le bon chiffre.
Là où nous ne sommes pas d'accord, c'est que nous voulons aller au-delà du CICE, c'est-à-dire transformer ce crédit d'impôt en baisse de charges. Nous assumons le fait qu'il faudrait ajouter une dizaine de milliards d'euros supplémentaires, soit en diminuant les impôts sur la production, soit en baissant le coût du travail lui-même. Vous décidez de ne pas aller au-delà du CICE, vous décidez même de rester en deçà. C'est un sujet qui nous oppose. Nous n'avons pas non plus la même manière de financer ces mesures. On peut le regretter.
Vous prétendez que les entreprises iront mieux – certainement ! – et que vous faites beaucoup pour elles. Pour ma part, je pense que vous faites moins que François Hollande ! Vous dites aussi qu'elles auront une bonne surprise quand elles constateront qu'elles ne sont plus soumises à la contribution additionnelle de 3 % sur les dividendes. Ce n'est certainement pas grâce au Gouvernement mais plutôt, d'une certaine façon, grâce au Conseil constitutionnel, si j'ai bien compris les débats que nous avons eus pendant trois jours sur ce sujet.
Le rapport Gallois publié à l'automne 2012 était explicite : il démontrait ce que les uns et les autres viennent d'expliquer parfaitement, à savoir que ce sont les salaires les plus élevés qui portent la création, l'inventivité et qui permettent d'offrir des produits plus performants et plus compétitifs sur le marché européen et le marché mondial. Or il se trouve que les gouvernements qui se sont succédé – celui-ci, le précédent, celui d'encore avant – …
… ont été aux prises avec l'impérieuse nécessité d'apporter du travail le plus rapidement possible au maximum de personnes. Chers collègues du groupe Les Républicains, vous-mêmes et vos amis avez connu la même situation avant 2012. Mme Louwagie a rappelé les allégements Fillon. Loin de moi l'idée de les passer sous silence tout à l'heure : ma démonstration portait uniquement sur le CICE et son évolution depuis 2012.
Avant 2012, vous étiez vous-mêmes confrontés à cette impérieuse nécessité et vous avez donc concentré l'effort sur les salaires inférieurs à 1,6 SMIC. Le gouvernement de François Hollande a fait la même chose alors qu'il savait pertinemment que c'était au-dessus de 2,5 SMIC qu'il fallait faire l'effort. Aujourd'hui, nous sommes toujours aux prises avec la même réalité. Si nous arrivons à avancer, tant mieux !
Je veux faire un petit rappel, car j'en ai ras-le-bol d'entendre parler de coût du travail. Cela devient véritablement insupportable !
Je rappelle que le travail est un prix, et non un coût. En effet, le travail rapporte : sans travail, pas de plus-value ! Or il n'y a pas de travail sans travailleurs.
Il vous faudra souffrir de dire que le travail est un prix : il se paie. Racontez ce que vous voulez sur le travail mais, s'il vous plaît, ne dites pas que c'est un coût !
Monsieur le président de la commission des finances, je suis un peu embêtée par votre amendement, d'abord parce qu'il coûte 13 milliards d'euros, …
… mais également parce que vous souhaitez un effort structurel de 0,6 point alors que tous les amendements que vous soutenez depuis une journée contribuent à augmenter le déficit nominal et donc le déficit structurel.
Vous pouvez dire non, mais il suffit de faire des additions et des soustractions, ce dont nous sommes tous capables.
Vous ne proposez jamais d'économies mais vous ajoutez sans arrêt de nouvelles dépenses !
Est-ce vous qui avez fait la réforme des retraites ? À l'époque, vous y étiez opposée !
Je me suis permis d'intervenir parce que je ne trouve pas très sérieux de soutenir un amendement à 13 milliards d'euros sans préciser comment on le finance.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes REM et MODEM.
Je veux juste faire une remarque qui paraîtra peut-être un peu décalée sur le coût ou le prix du travail – on peut utiliser les termes que l'on souhaite.
Aujourd'hui, en France, avec le CICE, il existe plusieurs prix du travail ou plusieurs coûts du travail. Un salarié ne coûte pas le même prix selon qu'il travaille pour un particulier employeur, dans une association, dans une coopérative ou dans une entreprise privée.
Une baisse de charges ou de contributions a l'avantage de redonner un prix unique au travail, comme le disent nos amis insoumis.
Pour les Français, il est intéressant et important de se dire que le travail a le même prix, ou le même coût, quel que soit l'endroit où il est effectué. C'est une forme d'égalité qui rendra les choses plus efficaces et plus simples.
Nous devons retourner le problème et parler de ceux qui travaillent, qui ont un prix, qui touchent un salaire.
Applaudissements sur les bancs du groupe REM.
L'amendement no 1606 n'est pas adopté.
Je défendrai tous les amendements de mon collègue David Lorion, qui m'a confié cette mission puisqu'il est reparti dans son département d'outre-mer.
Dans un souci d'efficacité et en tenant comptes des contraintes budgétaires, l'amendement no 810 vise à flécher le CICE afin que ses effets sur la compétitivité et l'investissement productif bénéficient en priorité aux entreprises évoluant dans des secteurs d'avenir ou à forte valeur ajoutée. Ainsi, nous proposons d'instaurer un CICE pour les activités des secteurs de la transition énergétique, du numérique et de la recherche et de l'innovation, chers à la majorité actuelle.
Si cela ne vous ennuie pas, monsieur le président, je vous demande l'autorisation de rester assis.
Sourires.
Je suis désolé, mon cher collègue : j'ai mal au dos, je suis coincé.
Votre amendement pose un gros problème : la détermination des secteurs éligibles est totalement imprécise. Par exemple, lorsque vous parlez de la transition énergétique, incluez-vous le secteur du bâtiment ? Que recouvre le secteur du numérique ? Cette imprécision exposerait la mesure à une censure du Conseil constitutionnel pour incompétence négative. Je ne parle pas du coût de votre amendement, qui est probablement important mais qui n'est pas chiffré. J'y suis donc défavorable.
L'amendement no 810 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Vous avez raison, monsieur le ministre : le débat est intéressant. S'agissant du CICE, chacun a son propre vécu, sa propre expérience. Chacun a rencontré des petites et moyennes entreprises en difficulté, auxquelles le crédit d'impôt permet de sortir la tête de l'eau. Cependant, le gros problème, c'est qu'il existe des entreprises faisant des bénéfices et ayant un chiffre d'affaires extraordinaire qui perçoivent le CICE.
La question qui se pose est donc de savoir si elles en ont vraiment besoin. Si l'on veut prendre des exemples vécus, de nombreuses entreprises ont bénéficié de ce dispositif, qui remonte à 2013. Pour certaines, cela a bien marché ; pour d'autres, non. Nokia, par exemple, qui a bénéficié de 63 millions de CICE, a procédé à 600 licenciements. C'est tout de même un problème, car cela signifie que, s'il n'y a pas de contrôle de l'utilisation de l'argent public dans l'intérêt de l'entreprise et des salariés, il vient tout de même un moment où il faut mettre des garde-fous et légiférer pour dire qu'on ne va pas continuer à abonder des crédits si l'entreprise ne remplit pas son contrat.
Nous proposons de supprimer le CICE dès 2018, où il devait statutairement continuer à s'appliquer avant de recevoir un nouveau statut en 2019, et de reprendre cet argent pour l'affecter à différentes actions dans tous les secteurs économiques auxquels on peut penser, comme l'économie, la santé ou les services publics. Voilà ce que nous proposons. Il s'agit, en effet, d'une question fondamentale, dont on parle sans jamais faire de bilan. Or, lorsque le bilan est fait, on ne trouve pas forcément de bons résultats.
Entendre parler de CICE m'a fait penser à des syndicalistes d'une entreprise dénommée Engie, que j'ai récemment rencontrés.
Heureusement qu'on n'entend pas ce que vous racontez hors micro : ça évitera de polluer ma prise de parole !
Engie, comme de nombreuses grandes entreprises, a bénéficié du CICE et est en train de procéder, par ses filiales, à des délocalisations de certains de ses centres d'appel : plus de 1 200 postes sont sur la sellette et c'est en ce moment que ça se passe. Engie a bénéficié et continuera de bénéficier du CICE et d'allégements de charges. Or, qui en est l'actionnaire majoritaire ?
Disons plutôt l'État : ainsi, même là où il est aux manettes, il n'est même pas fichu de faire en sorte que le CICE serve, comme prévu, à créer de l'emploi ! Si ce n'est pas la meilleure démonstration que ce système ne sert à rien et ne produit pas les effets escomptés, je ne sais pas quel autre exemple il vous faut.
Notre collègue a raison de dire que les effets du CICE en termes de création d'emplois n'ont pas été éblouissants. C'est la raison pour laquelle la réforme proposée prévoit de renforcer les allégements de charges sur le bas de la pyramide des salaires, les plus proches du SMIC, car on sait que c'est là que se font les créations d'emplois lorsque les charges baissent.
En outre, cette baisse de charges concernera, comme le rappelait à l'instant Mme de Montchalin, de très nombreux employeurs qui n'étaient pas concernés par le CICE et dont, comme nous l'avons vu lors d'une discussion tenue voici quelques semaines dans cette enceinte, les embauches sont très sensibles au coût du travail, en particulier pour les associations et les entreprises de l'économie sociale et solidaire.
Pour ces deux raisons, il semble que l'évolution proposée soit non seulement nécessaire, mais également très prometteuse en matière de créations d'emplois.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe REM.
L'amendement no 1368 n'est pas adopté.
Nous proposons, avec cet amendement, de dynamiser les économies spécifiques de l'outre-mer en instaurant un taux différencié de CICE favorisant les entreprises évoluant, comme nous l'avions proposé avec un précédent amendement, dans des secteurs d'avenir, à forte valeur ajoutée ou créateurs d'emplois. Le taux serait taux fixé à 12 % et fléché par souci d'efficacité, ce qui ne fait que répondre à une promesse qui avait été faite à l'outre-mer par un ancien Président de la République, nommé François Hollande. Le maintien du taux à 9 % pour les autres secteurs est conforme au choix du Gouvernement.
Il entraîne donc le même risque d'incompétence négative du fait qu'il comporte des taux différenciés et des secteurs non précisés.
L'amendement no 809 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements, nos 1440 et 1443 rectifié , qui peuvent faire l'objet d'une présentation groupée.
La parole est à M. Vincent Ledoux, pour les soutenir.
Vous avez dit tout à l'heure, monsieur le ministre, que ces mesures étaient de nature à favoriser nos entreprises et à créer de la richesse et de l'emploi. Lorsqu'il y a création de richesse, on ne peut que s'en réjouir, mais lorsqu'il y a destruction d'emplois, comme le disait tout à l'heure M. Bernalicis, on ne peut que s'en étonner.
Mme Brenier, auteure de cet amendement, cite notamment le groupe Galderma, filiale de Nestlé, qui a bénéficié de 23 millions d'euros au titre du CICE et qui n'en a pas moins décidé de fermer son site de Sophia-Antipolis, qui compte 550 salariés et qui est un fleuron pharmaceutique mondial. On peut donc se poser des questions.
Avec son amendement no 1440 – qui pourrait se heurter à un problème de rétroactivité, mais le rapporteur général et le ministre nous le diront – , Mme Brenier propose de conditionner le maintien du CICE, sous peine de remboursement du montant perçu s'il n'y a pas de maintien de sites d'activité et de l'emploi en France.
Le deuxième point consiste à conditionner le CICE au maintien de l'activité des sites en France, sous peine, non de devoir rembourser mais, après avoir vérifié s'il y avait dégradation de l'emploi, de suspension du CICE jusqu'à extinction du dispositif.
Je comprends très bien l'esprit qui sous-tend cet amendement, mais sa rédaction n'est pas satisfaisante. Selon cette rédaction, l'État « peut exiger », ce qui revient à prévoir une faculté sans en préciser les modalités ni les conditions. Il n'est pas non plus précisé quand doit être pris l'engagement de ne pas fermer le site. Votre amendement souffre réellement d'un problème de précision et ouvre la porte à un risque important d'inconstitutionnalité. Avis défavorable.
S'il y a un risque d'inconstitutionnalité à dire qu'il faut créer de l'emploi, il faudra se poser la question de savoir si la Constitution ne devrait pas garantir un droit au travail – mais je mets cette question de côté.
Si une entreprise qui bénéficie du CICE ne crée pas d'emplois, il doit bien se passer quelque chose. Une entreprise rentable qui en bénéficie peut même détruire des emplois. Dans ce cas, je souscris à l'argumentaire développé tout à l'heure par notre collègue du groupe La République en marche : ce qui change, c'est la marge – elle s'améliore, et c'est la seule vérité. Or la marge sert à ce que veut bien en faire le chef d'entreprise : tantôt à verser des dividendes, tantôt à détruire des emplois, tantôt même à en créer – dans 200 000 cas au maximum, selon le rapport de France Stratégie, soit très loin du million promis.
Je vous invite à examiner le rendement des emplois aidés, qui coûtent vraiment moins cher et qui permettent, au bout du compte, qu'il y ait quelqu'un qui bosse et ait un salaire, une paie.
Permettez-moi, pour finir, une précision sémantique : parlez de « charges » lorsque vous faites votre bilan comptable. Ici, parlez plutôt de « cotisations », s'il vous plaît : ce sera mieux pour tout le monde.
Nous voterons cet amendement, car l'argumentation des Constructifs est tout à fait intéressante. En effet, alors que le CICE est censé préserver l'emploi ou en créer, conformément à la philosophie défendue initialement par les initiateurs du projet, on nous dit que cet amendement est mal foutu, mal rédigé, et on ne répond pas sur le fond. De qui se moque-t-on ?
Alors oui, on fait de la marge.
Et pourquoi fait-on de la marge ? Pour redistribuer aux actionnaires. Dites-le, nom de Dieu !
Merci donc de cet amendement, qui est une démonstration flagrante qu'on marche sur la tête.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI. – Exclamations sur plusieurs bancs des groupes REM et LR.
Je souhaiterais apporter deux précisions. Tout d'abord, contrairement à ce que vous dites, le CICE n'est pas vraiment de l'argent public, mais un moindre impôt.
Exclamations sur les bancs des groupes FI et LR.
Si c'était de l'argent public, cela signifierait que l'on considère que toute la profitabilité d'une entreprise est potentiellement de l'argent public, qu'on lui redonne.
Mêmes mouvements.
En deuxième lieu, vous ne pouvez pas partir du principe que, quand une entreprise reconstitue sa marge, toute cette marge va reconstituer de l'emploi ou permettre d'embaucher, car vous pouvez aussi innover, faire de la recherche et développement, investir dans votre outil de production ou vous développer à l'international : …
… il y a mille manières d'utiliser l'augmentation de votre profitabilité.
Applaudissements sur les bancs du groupe REM.
Puisque nous faisons de la linguistique et recherchons la précision à propos des marges, si on parle de « cotisations » plutôt que de « charges », il faut alors parler de « cotisations obligatoires ». Je rappelle en effet que ces dépenses sont désignées comme des « charges » dans la comptabilité.
Exclamations sur les bancs du groupe FI.
Deuxièmement, je rappelle à mes collègues qui siègent sur les bancs de l'extrême gauche de l'hémicycle, avec l'histoire centenaire de leur mouvement…
Protestations sur les bancs du groupe FI.
Je ne suis pas un tenant du libéralisme. Laissez-moi parler.
Je rappelle qu'un emploi aidé, c'est vingt heures par semaine pour 700 euros nets. Si c'est ça, pour vous, avoir un emploi ou aider les gens, ce n'est pas le cas pour moi.
Exclamations sur les bancs du groupe FI.
Troisièmement, si on veut être précis, la marge n'a jamais rémunéré un actionnaire. Comme cela a été rappelé cet après-midi, la marge est gérée par le gérant et elle aide à réinvestir, à compléter, à se désendetter ou à mener des actions de recherche, tandis que ce qui rémunère l'actionnaire, c'est le dividende. Si vous voulez que nous soyons précis dans les termes, soyons-le.
Applaudissements sur les bancs du groupe REM.
Puisque tout le monde cite des exemples, je vais le faire aussi. Nous étions plusieurs, durant la dernière législature, à demander une conditionnalité du CICE. La dernière usine de fabrication de tabac en France appartenait à Imperial Tobacco, qui la ferme, non pas parce qu'elle ne serait plus rentable, mais pour faire un peu plus de profits en Allemagne et en Pologne. Cette entreprise a touché un peu plus de 600 000 euros de CICE, et non seulement on ne peut pas récupérer cette somme, mais, alors qu'il existait un projet de société coopérative et participative – SCOP – , c'est-à-dire une entreprise montée par les salariés, elle refuse même de céder les machines-outils pour l'euro symbolique. Je voterai donc évidemment ces amendements.
Les amendements nos 1440 et 1443 rectifié , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.
La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne, pour soutenir l'amendement no 1367 .
Je tiens tout d'abord à assurer notre collègue Giraud de toute notre amitié dans l'épreuve qu'il traverse.
Dire que c'est le dividende qui rémunère l'actionnaire signifie qu'il y a eu de belles rémunérations de 2012 à 2016, puisqu'on a versé 300 milliards de dividendes.
Le CICE, que nous avons toujours combattu compte tenu de la gabegie budgétaire qu'il représente, prévoyait néanmoins un mécanisme intéressant permettant aux représentants du personnel, notamment au comité d'entreprise, d'être informés sur le sujet, comme le précise d'ailleurs très bien le rapport du rapporteur général.
En l'état actuel du droit, les partenaires sociaux disposent d'un droit de regard sur l'usage du CICE. Le comité d'entreprise doit être informé et consulté sur cette utilisation et peut, s'il estime que le CICE n'a pas été employé d'une manière conforme à ses objectifs, établir un rapport qui sera transmis au comité de suivi régional du CICE.
Ces dispositions avaient le mérite d'exister et d'associer a minima les représentants du personnel à l'utilisation du CICE.
En réalité, les prérogatives reconnues à ces représentants sont autant de sabres de bois qui ne permettent pas un véritable contrôle ; les rapports successifs rendus par France Stratégie l'ont exprimé très clairement.
Le processus d'information et de consultation du comité d'entreprise est loin d'avoir été pleinement utilisé ; il s'agissait en réalité davantage d'une information que d'une consultation, ce qui a généré beaucoup de frustrations du côté des représentants syndicaux – autant d'éléments montrant qu'il y avait lieu de renforcer les compétences des salariés sur les choix économiques des entreprises.
Or, avec cet article, vous tirez la conclusion inverse et prenez l'exact sens opposé : en 2019, le CICE sera supprimé et remplacé par la suppression pérenne de cotisations sociales patronales. Mais, dans ce nouveau dispositif, vous ne reconnaissez aucune nouvelle prérogative aux représentants du personnel : c'est un symbole fort de votre conception du dialogue social.
C'est très simple : les articles supprimés sont relatifs exclusivement au CICE. Il s'agit simplement d'une coordination. Laisser subsister dans le code des articles relatifs à des instances de suivi et de contrôle de l'utilisation du CICE quand le CICE n'existe plus, c'est l'encombrer de scories vraiment pas utiles. Je comprends très bien le souci qui vous anime mais il n'y a plus de CICE ; donc, les instances dédiées au CICE ne peuvent pas subsister. Avis défavorable.
Monsieur le rapporteur général, même si vous avez techniquement raison, notre collègue a soulevé une question de fond. Quels sont les lieux de contrôle, de discussion, de concertation sur les conséquences réelles pour l'emploi des mesures que vous préconisez ? Voilà le débat de fond !
Lors de la création du CICE, avec tous ses défauts, le Gouvernement avait été obligé, sous la pression des parlementaires, d'introduire les instances de contrôle rappelées par notre collègue. Vous, vous ne le faites même pas ! Or ce qui rend nos débats passionnés, c'est que le CICE a été marqué dès le départ, et tout au long de son existence, par des mensonges : le mensonge de la création d'un million d'emplois, porté par le président du MEDEF, qui en avait fait un badge, puis toute une série de promesses faites mais jamais tenues. Vous comprenez la difficulté ! Il est donc assez singulier que vous balayiez les arguments avancés par notre collègue de cette façon.
Les mêmes causes produisent les mêmes effets. L'argent public contribue, au travers de l'impôt et des outils de redistribution, à l'enrichissement du pays et fait partie des outils concrets de la République. Mais vous le reversez aux entreprises qui, quel que soit le dispositif – nous venons encore de le constater avec le CICE – , en profitent essentiellement pour augmenter les dividendes des actionnaires, les emplois n'étant pas à la clef. Cela ajoute un problème démocratique à ce CICE déjà fort bancal.
L'amendement no 1367 n'est pas adopté.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 1836 .
Cet amendement tire les conclusions de la modification d'éléments du code du travail résultant de l'ordonnance du 22 septembre 2017. Or, si j'ai bien compris le processus des ordonnances, celles-ci n'ont pas encore définitivement force de loi. Êtes-vous dans l'anticipation ? Cet amendement est-il cohérent avec l'agenda ?
L'amendement no 1836 est adopté.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement no 1835 rectifié .
L'amendement no 1835 rectifié , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 42, amendé, est adopté.
La parole est à Mme Émilie Cariou, première oratrice inscrite sur l'article.
L'article 88 de la loi de finances pour 2017 a instauré un crédit d'impôt de taxe sur les salaires, dit CITS. Il bénéficie aux organismes sans but lucratif mentionnés à l'article 1679 A du code général des impôts et redevables de la taxe sur les salaires.
Le CITS est un dispositif bénéfique, souhaité par le secteur de l'économie sociale et solidaire, ou ESS, en compensation du CICE développé antérieurement pour le seul secteur lucratif. Ce dispositif a donc fonctionné. Ce mécanisme de crédit d'impôt, certes moins pratique que la baisse de charges que nous proposons, s'avère plus avantageux pour les grosses structures aptes à le gérer que pour les petites, qui ont plus de difficultés à gérer leur trésorerie.
La suppression du CITS au 1er janvier 2019 traduit l'engagement de l'État en faveur du secteur associatif. Le CITS a un taux de 4 %, contre 7 % pour le CICE, depuis le 1er janvier 2017. Les organismes non lucratifs bénéficieront en contrepartie de la baisse de cotisations, qui simplifiera la vie des associations dans nos territoires, notamment ruraux, où le maillage du petit ESS est tout à fait vital.
L'année 2019 verra les derniers versements du CITS en même temps que la baisse des cotisations, programmée dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Il s'agit bien de redimensionner et de simplifier la politique en matière de prélèvements obligatoires en faveur de tous les Français, pour tous nos acteurs et dans tous les territoires.
Le crédit d'impôt de taxe sur les salaires a été conçu comme le pendant du CICE pour le secteur non lucratif. Il avait pour objectif de favoriser l'emploi dans ces structures grâce à l'allègement de charges qui en résultait. Cependant, ce dispositif est complexe et ses effets sont visibles avec une année de décalage. Notre programme, qui a pour objet de baisser les cotisations sociales pour les entreprises, couplé avec l'article 23, vise donc à transformer le CITS en baisse de charges afin de mettre fin à ce décalage de trésorerie.
La suppression du CITS va de pair avec celle du CICE au 1er janvier 2019, date à laquelle les cotisations patronales seront baissées de 6 points sur les salaires inférieurs à 2,5 fois le SMIC, cette baisse étant complétée par un allègement de 3,9 points au niveau du SMIC, dégressif jusqu'à 1,6 SMIC. Ces allègements feront suite également aux allègements de cotisations salariales prévus en 2018. Dans ce cadre, l'incitation à l'emploi sera conservée et l'organisation sera simplifiée. C'est donc une bonne mesure, qu'il nous faut adopter.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe REM.
Le passage du CICE à la baisse des charges me convient tout à fait : c'est une garantie de pérennité et de stabilité ; c'est plus simple, plus clair et cela nous évitera les circonvolutions imaginées pour compenser l'inexistence du CICE pour un certain nombre de structures qui ne réalisaient pas de bénéfices, en particulier pour l'économie sociale et solidaire.
Cela contribuera, du moins je l'espère, à résoudre un problème latent depuis longtemps : celui des coopératives agricoles, qui ont été les grandes oubliées du CICE.
Elles ont énormément perdu dans la comparaison avec les autres entreprises.
Une autre catégorie a été oubliée des baisses de charges successives : les emplois à domicile. Ceux-ci ne bénéficient pas du dispositif Fillon, ni du CICE – on peut le comprendre. Bénéficieront-ils de la baisse des charges ?
Vous me rétorquerez qu'ils bénéficient par ailleurs d'un crédit d'impôt correspondant à 50 % de la charge, mais je vous rappelle, monsieur le ministre, que pour ces emplois à domicile, le crédit d'impôt a été imaginé à une époque où n'existait pas cette baisse de charges. Je souhaiterais donc que vous nous disiez, très concrètement, si l'employeur familial bénéficiera lui aussi, pour les emplois à domicile, de la baisse des charges que nous souhaitons très majoritairement.
Cette disposition a été présentée par le Gouvernement comme étant favorable aux associations. Dans mon territoire, celles-ci ont été un certain nombre à réagir, s'inquiétant de plusieurs dispositions : la suppression des emplois aidés, la diminution des subventions des collectivités territoriales, qui elles-mêmes subissent des diminutions de dotations, et la perspective de la suppression du CITS.
Pour tenter de les rassurer, j'ai lu l'étude d'impact et l'évaluation préalable. J'avoue que je ne comprends pas un point dans ce document, monsieur le ministre, mais je pense que vous allez pouvoir m'éclairer. Il y est indiqué que le secteur non lucratif bénéficierait, compte tenu de la suppression du CITS et de la baisse de cotisations sociales, d'un gain de l'ordre de 1 milliard d'euros. C'est ce qui est pris en compte dans l'impact de la disposition envisagée.
Par ailleurs, dans un tableau des incidences budgétaires pour l'ensemble des administrations publiques, on découvre qu'aucune somme n'est indiquée pour 2018 et 2019 et que le gain pour l'État s'élève à 600 millions d'euros à partir de 2020, la somme étant équivalente en 2021 et 2022.
J'avoue que je reste perplexe : comment, d'un côté, le secteur non lucratif peut-il gagner 1 milliard d'euros et, d'un autre côté, l'État peut-il gagner 600 millions d'euros en 2020, 2021 et 2022, étant entendu que cela concerne l'ensemble des administrations publiques, y compris la Sécurité sociale ? À mon avis, il y a un petit problème : il faudra que vous nous donniez des explications sur ces éléments.
Je suis saisi de trois amendements, nos 585 deuxième rectification, 1676 rectifié et 746 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 585 deuxième rectification et 1676 rectifié sont identiques.
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement no 585 deuxième rectification.
Sans remettre en cause la transformation du CITS en dispositif de baisse de cotisations patronales, appelé de ses voeux par le secteur et que nous soutenons, l'article additionnel objet du présent amendement déposé par mon collègue Gilles Lurton, vise à rehausser le taux du CITS de 4 % à 6 %, le rapprochant ainsi du niveau du différentiel de charges sociales et fiscales avec le secteur public hospitalier, social et médico-social, d'une part, et du niveau du CICE, d'autre part. Cela permettrait son inscription aux comptes des associations dès 2018.
Cette hausse aura ainsi un double effet : assurer le respect du principe constitutionnel d'égalité devant les charges publiques pour le secteur privé non lucratif, et compenser la baisse des politiques d'insertion en faveur des personnes éloignées de l'emploi, à condition qu'elle ne soit pas reprise dans les tarifications publiques sanitaires, sociales et médico-sociales de l'État, de l'assurance maladie et des conseils départementaux.
Cette hausse du taux sera valable jusqu'à la suppression du CITS et représente un coût modéré pour l'État. L'augmentation est ainsi estimée à 250 millions d'euros, sachant que la baisse du taux de prise en charge par l'État des nouvelles entrées en CUI-CAE – contrat unique d'insertion-contrat d'accompagnement dans l'emploi – sur 2018 équivaut à elle seule à près de 150 millions d'euros. C'est donc une question d'équité pour ce secteur.
La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l'amendement no 1676 rectifié .
Il s'agit d'un amendement identique déposé par notre collègue Ericka Bareigts. Il a pour objet de faire passer le CITS de 4 % à 6 %, sachant que le CITS est le pendant du CICE, et ce, pour une seule année puisqu'il n'est pas question de remettre en cause le remplacement de ce crédit d'impôt par un allègement de cotisations sociales.
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement no 746 rectifié .
Par cet amendement, qui n'est pas exactement identique, il s'agit d'achever la restauration de la compétitivité du secteur non lucratif à l'égard du secteur lucratif. Nous proposons des mesures de prévention et de protection des investissements du secteur hospitalier non lucratif afin de protéger les emplois faiblement qualifiés, notamment en milieu rural, parce que c'est de cela qu'il s'agit à travers la question qui nous est posée.
Cet amendement cherche à améliorer les finances de toutes ces structures qui participent à la consolidation du maillage de soins en France. De plus, il s'agit aussi de parvenir à un rééquilibrage général au profit des efforts continus des établissements privés non lucratifs, comme l'a rappelé ma collègue à l'instant.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
J'ai, moi aussi, reçu ces amendements sur ma messagerie électronique, envoyés par une fédération assez connue. Très honnêtement, le secteur non lucratif sera le grand gagnant de cette transformation du CITS en allègement de charges. Je vous rappelle que le gain net sera de 1,4 milliard d'euros par an. Le taux du CITS a été fixé à la suite d'une étude commandée par le secteur lui-même, et ce secteur a considéré que 4 % étaient suffisants. Même s'il y a eu du lobbying sur ce sujet, je pense que le secteur non lucratif est particulièrement gagnant avec ce dispositif de transformation. Avis défavorable sur l'ensemble de ces amendements.
La parole est à M. le ministre de l'action et des comptes publics, pour donner l'avis du Gouvernement.
Je voudrais ajouter un élément de réponse à l'argument très fort du rapporteur général sur l'aide de 1,4 milliard prévue par le dispositif.
Vous dites que ça ne coûte que 250 millions d'euros aux finances publiques – nos estimations sont plutôt de 300, mais admettons ce chiffre. Je suis plutôt étonné de ce discours. Pour que les débats soient aussi intéressants qu'au Sénat, où je viens de terminer deux jours de discussion sur les premiers articles du PLFSS et où la majorité sénatoriale a creusé le déficit de plus de 6,2 milliards en deux jours, on va compter le nombre de fois où on va alourdir la facture. Je ne parle même pas du gage, le tabac – mais je comprends que les règles du débat parlementaire font qu'on ne peut pas proposer un gage plus sérieux. Soyez cohérent avec la position du président de la commission des finances, et de Gilles Carrez parfois, qui nous reprochent avec justesse de faire trop de dépenses fiscales. Donc la réponse est non à ces 300 millions ; 1,4 milliard représente déjà un effort extrêmement important.
Par ailleurs, la comparaison avec les CUI et les contrats aidés me paraît d'autant plus étonnante que vous oubliez que plus de 1,5 milliard de crédits sont prévus pour la formation professionnelle.
Applaudissements sur les bancs du groupe REM.
Objectivement votre argument n'est pas recevable.
Vous nous avez fait la même réponse en commission, monsieur le rapporteur général. Il convient de citer les bons chiffres devant la représentation nationale. On fait état de chiffres très différents de ceux de l'étude d'impact. Selon Nexem et la FEHAP, la Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne, le montant des exonérations de charges sociales est de 620 millions d'euros et non pas 1,4 milliard. Il est quand même important pour le sérieux du débat que nous puissions être éclairés.
Par ailleurs, le projet du Gouvernement en septembre n'était pas de maintenir ce taux de 4 % mais de le réduire de moitié. Nous parlons de structures qui assurent le même service public que des structures qui bénéficient d'avantages par ailleurs. Cette question d'équité entre des structures qui gèrent le même service public hospitalier est vraiment essentielle.
Vous me parlez des amendements qui ont été votés par le Sénat, monsieur le ministre, mais vous auriez pu aussi évoquer le coût de ceux qui sont votés par votre majorité depuis quelques jours : ce sont des milliards qui ont été votés en cinq minutes, à une heure du matin. À ce jeu-là vous serez perdant.
Eu égard aux chiffres qui figurent dans l'étude d'impact, nous ne pouvons pas voter l'article en l'état, mes chers collègues. Selon l'étude d'impact pour le secteur non lucratif le gain est de l'ordre de 1 milliard d'euros, alors que le rapporteur général vient de dire qu'il est de 1,4 milliard. Je me fierai, pour ma part, à l'étude d'impact.
Selon la même étude, l'État est bénéficiaire de 600 millions d'euros. Qui paye donc ce 1,6 milliard, sachant que c'est l'ensemble des administrations publiques qui est impacté, y compris la Sécurité sociale ? On ne peut pas voter ce dispositif en l'état alors qu'on nous présente des évaluations aussi divergentes et incohérentes : c'est trop important pour les associations.
Non, monsieur le député, il ne faut pas revoir la copie.
Pour faire très vite, aux 2 milliards de baisses de charges prévues par le PLFSS on doit soustraire un coût de 600 millions de compensation pour l'État : cela fait bien 1,4 milliard.
Applaudissements sur les bancs du groupe REM.
Les amendements identiques nos 585 deuxième rectification et 1676 rectifié ainsi que l'amendement no 746 rectifié , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.
L'article 43 est adopté.
Nous en venons aux amendements portant articles additionnels après l'article 43.
La parole est à Mme Amélie de Montchalin, pour soutenir l'amendement no 1727 rectifié .
Aujourd'hui, les établissements publics de coopération culturelle, les EPCC – par exemple l'abbaye de Noirlac dans le Cher, le Louvres-Lens, le Centre Pompidou à Metz, l'Opéra de Lille, le 104 à Paris, parmi plus d'une centaine d'établissements – se trouvent dans une situation un peu étrange. Ces EPCC sont soumis à la taxe sur les salaires, alors que les collectivités publiques qui en sont membres en sont exonérées. Donc quand on se regroupe on paye une taxe dont on n'est pas redevable quand on est seul.
Cet amendement, que je présente au nom de mon groupe, vise à exonérer les EPCC de taxe sur les salaires pour que l'incitation au regroupement soit pleine et entière.
La bizarrerie signalée par Mme de Montchalin est effectivement réparée par cet amendement. Je note que Mme de Montchalin a pris la précaution d'exclure l'exonération au cas où celle-ci entraînerait une distorsion de concurrence. Cette précision importante est bienvenue dans la mesure où les EPCC peuvent être soit des établissements publics industriels et commerciaux, soit des établissements publics administratifs.
Avis favorable, y compris pour l'abbaye de Noirlac et l'excellent restaurant qui lui fait face.
Un EPCC étant un regroupement, il devrait normalement permettre une mutualisation des coûts. L'argument selon lequel une taxation plus désavantageuse dissuade les responsables des collectivités d'opérer un tel regroupement est un argument de poids.
Le ministre des comptes publics que je suis doit quand même souligner que cela coûte 3 millions. Mais sachant que ce sera là l'un des seuls amendements que proposera le groupe majoritaire parce qu'il est conscient des difficultés des finances publiques, l'avis du Gouvernement sera favorable.
L'amendement no 1727 rectifié est adopté.
L'objet du présent amendement, déposé par mon collègue Gilles Lurton, est d'introduire dans le code général des impôts un article instituant un crédit d'impôt recherche imputable sur la taxe sur les salaires pour les organismes privés non lucratifs. Il s'agit d'une rédaction en miroir de l'article 244 quater B du code général des impôts créant le crédit impôt recherche, CIR, déjà ouvert aux structures privées de statut commercial de l'économie sociale et solidaire et de l'économie en général.
Le Président de la République a indiqué sa volonté à la fois de proroger le dispositif du crédit d'impôt recherche, mais aussi de porter l'effort global de recherche-développement de notre pays à 3 % du PIB.
le coût de cette mesure d'équité est estimé à 400 millions d'euros, si tous les organismes mobilisaient le dispositif en totalité et dès le 1er janvier 2018, ce qui est improbable. Sachant, par ailleurs, que les emplois qui en seraient la conséquence généreraient des recettes sociales et fiscales supplémentaires, c'est du « gagnant-gagnant ».
Cet amendement aussi, je l'ai déjà vu quelque part, proposé par un lobby.
Très honnêtement créer un équivalent du CIR pour ce secteur ne me paraît pas nécessaire compte tenu des gains dont il bénéficiera et dont j'ai déjà parlé. On peut douter, en outre, que ces organismes engagent des dépenses de recherche. Sans entrer plus avant dans les détails, ce dispositif me semble un peu abusif. Défavorable.
Même en admettant le coût de 400 millions d'euros que vous avancez – selon nous, il serait plus proche de 500 millions – si ne serait-ce que la moitié de ces organismes réclamaient le bénéfice de cette mesure, le coût serait trop important pour les finances publiques.
Je me range à l'avis dubitatif du rapporteur général. Avis défavorable.
On parle d'un secteur qui compte 1,3 million d'associations, 13 millions de bénévoles et 1,8 million de salariés, et qui intervient dans les territoires. On sait qu'on aura besoin de favoriser l'innovation de tous les acteurs, qu'ils soient publics ou privés, à but lucratif ou à but non lucratif. Nous devons pouvoir accompagner dans ce virage numérique toutes les bonnes intentions de ces acteurs au lieu de les exclure au prétexte que leur fédération les défend.
L'amendement no 581 n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 583 rectifié et 791 rectifié .
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement no 583 rectifié .
Je prévois déjà la réponse du rapporteur, mais je crois qu'on doit insister quand on défend une noble cause.
Les responsables privés non lucratifs du champ sanitaire, social et médico-social ont été encouragés à développer des formules de coopération spécifiques : groupement de coopération sanitaire, groupement de coopération sociale et médico-sociale – les fameux GCS et GCSMS – qui fonctionnent grâce à une mise à disposition non lucrative de moyens humains et matériels par leurs membres, lesquels bénéficient pour leur part du CITS en qualité d'employeur. De ce fait, ces groupements de mutualisation de moyens classiques bénéficient indirectement du CITS par le truchement de leurs membres.
Toutefois, quelques GCS et GCSMS inscrits dans une démarche de coopération et de mutualisation plus intégrée assument des responsabilités d'employeur. Ils sont anormalement exclus du CITS par la formulation actuelle de l'article 1679 A du code général des impôts auquel se réfère l'article 239 du même code, quand celle-ci est suivie par les services fiscaux dans sa lettre et non dans son esprit, conforme à l'intention du législateur : les associations de droit local d'Alsace et de Moselle ou les congrégations ne sont-elles pas bénéficiaires du CITS et des autres dispositions de l'article 1679 A, alors qu'elles ne sont pas explicitement citées par cet article ?
La difficulté est donc que la rédaction actuelle de l'article ne mentionne pas explicitement les GCS et GCSMS employeurs. Nous vous proposons, par cet amendement, de remédier à cette difficulté et de nous assurer, par cette nouvelle rédaction, de l'absence d'élargissement indu du périmètre des bénéficiaires du CITS au regard de l'intention explicite du législateur.
La parole est à M. Vincent Ledoux, pour soutenir l'amendement no 791 rectifié .
Je voudrais illustrer ce que vient de dire notre collègue en défense de l'amendement de M. Lurton.
En 2012, les hôpitaux catholiques de Lille et de Cambrai, que vous connaissez bien, monsieur le ministre, se sont réunis en groupement de coopération sociale dans une démarche de mutualisation et d'intégration et ils assurent des responsabilités d'employeur, des missions de service public et ce sans dépassement d'honoraires. Aujourd'hui, ils se trouveraient anormalement exclus du CITS par la formulation actuelle du code général des impôts.
En effet, la formulation actuelle de l'article 1679 A issu de l'article 88 de la loi de finances pour 2017 ne mentionne pas explicitement les GCS et les GCSMS employeurs. Or, sans le CITS, le groupement des hôpitaux de l'Institut catholique de Lille seraient injustement pénalisés par rapport aux établissements privés non lucratifs de la même catégorie, et l'effet du CITS représente plus de 2 % de sa masse salariale.
Je rappelle que l'ensemble hospitalier universitaire catholique de Lille emploie 2 750 salariés. C'est la raison pour laquelle, à la suite de Gilles Lurton, je propose une nouvelle rédaction de l'article.
Au risque de surprendre M. Bazin, j'estime que ces formes de regroupements ne doivent pas pénaliser les établissements hospitaliers. Je ne méconnais pas non plus la situation particulière des hôpitaux de Lille, dont j'espère qu'ils ne prennent pas en charge une seule confession !
En tout état de cause, je donne un avis de sagesse, quasiment favorable, à cet amendement.
Ce sera un avis favorable, d'abord parce que je trouve l'argumentation de M. Bazin et de M. Ledoux assez juste : un tel regroupement ne doit pas être pénalisé.
Ensuite, ayant, comme vous l'avez rappelé, rencontré les responsables de la faculté de Lille, je sais qu'il y a un sujet qui justifie tout à fait que j'accepte votre amendement. Enfin, il ne coûte que 3 millions.
Vous pouvez constater l'égalité de traitement du groupe majoritaire et de l'opposition : 3 millions chacun et on s'arrête là, n'est-ce pas ?
Sourires. – Applaudissements sur les bancs du groupe REM.
Les amendements identiques nos 583 rectifié et 791 rectifié sont adoptés.
La réorientation de notre pays vers la création d'emplois et l'attractivité, c'est ce que nous espérons et défendons tous dans ce budget pour 2018, à La République en marche, quels que soient les territoires que nous représentons.
Par cette proposition du Gouvernement, je comprends que la réorientation systémique de nos territoires passe aussi par le renforcement de l'attractivité de la place financière de Paris post-Brexit, afin de reconstituer l'écosystème français qui irriguera jusqu'à nos PME et TPE.
Aujourd'hui, monsieur le ministre, cela passe par une diminution de la taxe sur les salaires qui concernera les emplois les mieux rémunérés dans les services financiers existants ou à venir. Selon l'évaluation préalable que vous avez reçue, qui est publique et en ligne, ce sont mécaniquement 60 puis 30 millions d'impôts sur les sociétés qui reviendront dans les caisses de l'État, correspondant à la fraction de la taxe sur les salaires disparue et revenant donc dans l'assiette de l'impôt sur les bénéfices – je renvoie aux réinvestissements que nous avons évoqués tout à l'heure suite aux baisses de charges et de cotisations.
Monsieur le ministre, je ne peux que vous imaginer attaché à ce qui peut être financé par cette taxe sur les salaires – pour l'instant, cette tranche haute bénéficie à la branche famille de la Sécurité sociale. Je m'interroge donc : à partir des recettes générées par notre approche systémique et grâce à cette suppression de la tranche haute de la taxe sur les salaires, combien d'emplois dans la finance et l'assurance sont-ils précisément espérés, notamment en Île-de-France, pendant le quinquennat ? Quelle base de prélèvements fiscaux et sociaux espérons-nous récupérer ainsi ?
Avec les explications que vous allez nous donner, monsieur le ministre, j'en conclus que nous pourrons, grâce à cet article 44, donner le cap et voter cette suppression de la tranche haute sur les salaires en espérant que l'attractivité dont vous allez nous démontrer la teneur sera bien effective.
Avec la suppression de la quatrième tranche de la taxe sur les salaires, c'est un nouveau cadeau fiscal qui vient s'ajouter à une liste aussi longue qu'inédite, qui comprend notamment la suppression de l'impôt sur la fortune, pour 3,2 milliards, la mise en place du prélèvement forfaitaire unique sur les revenus du capital – a minima, 1,5 milliard – , l'attaque contre la taxe sur les transactions financières à hauteur de 2 milliards, la suppression unilatérale de la taxe de 3 % sur les dividendes, le doublet CICE et suppression des cotisations sociales patronales, pour 40 milliards, la baisse de l'impôt sur les sociétés et les 5 milliards donnés aux grands groupes par les contribuables dans le cadre du contentieux de la taxe sur les dividendes, et la baisse de la fiscalité des actions gratuites pour 100 millions. Quant à la suppression de la quatrième tranche de la taxe sur les salaires que vous proposez ici, elle est chiffrée à plus de 100 millions environ.
Pour mémoire, je rappelle que cette taxe est payée par les employeurs au taux de 20 % sur les rémunérations supérieures à 152 279 euros par an, soit l'équivalent de plus de huit fois le SMIC annuel. Le Gouvernement nous propose de supprimer cette tranche, donc, d'alléger la fiscalité sur de tels niveaux de rémunérations. Or dans quel secteur les atteint-on, si ce n'est, bien entendu, dans la finance ? Aujourd'hui, vous faites la danse du ventre devant les traders, c'est un fait.
Plus globalement, cette mesure s'inscrit dans un plan de séduction général que vous essayez de mettre en place pour attirer hypothétiquement les acteurs financiers tentés de quitter Londres. Nous considérons, quant à nous, que ce taux doit être maintenu et même renforcé, comme nous le proposerons par un autre amendement.
La parole est à M. Alexis Corbière, pour soutenir l'amendement no 1397 .
Mon collègue vient de dire l'essentiel. Nous proposons, nous aussi, un amendement de suppression pour les raisons qui viennent d'être invoquées.
Monsieur le ministre, comment justifier une telle mesure ? Vous peinerez à nous en démontrer la pertinence à l'heure où vous n'avez pas vraiment jugé utile de dégeler le point d'indice des fonctionnaires…
Cela n'a rien à voir !
… ou d'augmenter les salaires.
Je ne répéterai pas les arguments de mes collègues.
Je profite de cette occasion, monsieur le ministre, pour vous dire que si vous avez accordé tout à l'heure 3 millions aux collègues de l'opposition – pour vous, votre ancien parti politique – , vous aurez sans doute à coeur de nous en accorder autant. Ne vous inquiétez pas, à Montreuil et en Seine-Saint-Denis, nous en aurons besoin. J'ai trouvé que votre argumentation de tout à l'heure était un peu facile, monsieur le ministre : vous savez, les mesures d'austérité nous touchent tous.
Voilà mon amendement de suppression, en vous priant de m'excuser pour cette digression.
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l'amendement no 1772 .
Je rappelle que la taxe sur les salaires rapporte 13 milliards et que la quatrième tranche, que vous supprimez, porte sur les salaires supérieurs à 152 000 euros par an. Cette mesure s'inscrit après bien d'autres – peut-être pas votées par vous, mais par nous – visant à doubler le régime des impatriés : lorsqu'une entreprise s'installe à Paris, par exemple, avec des salariés étrangers, par exemple londoniens, ces derniers bénéficient pendant cinq ans d'un certain nombre d'exonérations sur l'impôt sur le revenu.
Ces exonérations ont déjà été divisées par deux l'an dernier – par nous, pas par vous – à quoi s'ajoutent des exonérations sur les cotisations sociales. Tout mis bout à bout, le montant du chèque est assez élevé. Pourriez-vous nous dire à combien il s'élèvera pour 2018, monsieur le ministre, si d'aventure les 140 millions correspondant à la suppression de la quatrième tranche de la taxe sur les salaires est votée ?
Si l'on additionne le régime des impatriés, la suppression de la quatrième tranche sur les salaires, les exonérations qui ont déjà été votées, on arrive à combien pour ces tranches de salaire-là ?
Nous proposons donc de supprimer cet article dont la visée s'ajoute à toutes les autres.
M. Cazeneuve a expliqué tout à l'heure que les crédits d'impôts n'étaient pas des dépenses pour l'État. Or l'Insee et Eurostat nous ont demandé de les comptabiliser en dépenses, tout simplement parce que la France est championne d'Europe des crédits d'impôts. Eurostat nous ayant demandé de les comptabiliser dans les dépenses, il faut choisir entre des exonérations…
Le propos liminaire de notre collègue Émilie Cariou a constitué par anticipation un contre-argumentaire suffisamment clair aux propos qui viennent d'être tenus à l'instant. J'ajoute simplement, à destination de ceux qui s'inquiètent du produit de la taxe, qu'en 2018, même avec la suppression du taux majoré, il sera supérieur au produit de 2017.
Le régime particulier des impatriés, quant à lui, a été voté pendant la précédente législature – avec l'avis défavorable, je dois le dire, de la rapporteure générale d'alors, qui est tout à fait cohérente avec elle-même. C'est donc une superposition de mesures qui a été prise sous différentes législatures.
Je vais répondre aux divers intervenants, à la question de Mme Rabault ainsi qu'à vos collègues communistes et de la France insoumise.
Je rappelle à M. le député de la France insoumise, s'il le permet, que les 3 millions sont « toute opposition comprise ».
Sourires.
Comme c'est un défenseur de la générosité du partage, jusque dans la destination de ses applaudissements, je suis sûr qu'il trouvera un terrain d'entente.
Sourires.
Notre problème principal, c'est celui de la compétition internationale, notamment avec l'Allemagne : en France, les cotisations ne sont pas plafonnées alors qu'elles le sont dans ce pays. On a assez répété qu'une convergence était nécessaire et qu'il fallait donner à la France, notamment à la place de Paris – donc à l'Île-de-France et au département de Seine-Saint-Denis qui, comme d'autres, monsieur le député, en profitera – les moyens de lutter.
Il faut savoir ce que l'on souhaite placer en premier dans la décision politique : l'idéologie ou l'efficacité. Il y a toujours une part de symbole…
Mais c'est pas mal, l'idéologie, ne vous énervez pas !
« C'est un joli nom, camarade » et « tout est politique », c'est je crois ce que l'on dit dans votre parti…
Il faut donc savoir ce que l'on met en avant et c'est une question politique difficile : est-ce le symbole et l'idéologie – en soi, ce n'est pas négatif – ou est-ce l'efficacité, à tout le moins la supposée efficacité des mesures que nous prenons ?
Vous faites semblant de ne pas voir que nous sommes dans un monde ouvert et qu'il n'y a pas quelques dizaines de milliers d'emplois de l'autre côté de la Manche à relocaliser chez nous !
Votre question me paraît très légitime, madame Rabault : si l'on se situe au niveau actuel de la taxe, les 3 000 emplois coûtent 100 à 110 millions, cela a été dit. Imaginons que la France, dans la perspective de ce que nous faisons, de ce que fait la région Île-de-France, de ce que font les investisseurs, récupère la moitié des 50 000 emplois d'outre-Manche, la moitié des emplois délocalisables de Londres et de l'Angleterre ! Si cet article est voté, nous pourrions obtenir 750 millions de recettes. La question est donc de savoir si l'on fait de l'idéologie pour 110 millions ou si l'on fait en sorte d'avoir la moitié ou même un quart des emplois et d'être efficaces avec 300 millions.
Dans un monde idéal, on peut imaginer taxer énormément les gens qui ont beaucoup d'argent sans qu'ils quittent le territoire, mais il s'agit d'un modèle économique fermé qui n'existe manifestement plus beaucoup, sauf dans quelques pays qui ne donnent pas très envie d'y vivre.
Dans un monde ouvert comme le nôtre, il faut essayer d'adapter notre territoire afin de forger sa compétitivité. Au final, les recettes sont plus importantes parce que l'impôt est plus bas mais mieux réparti. Je préfère l'efficacité à l'idéologie.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe REM.
Je comprends parfaitement, monsieur le ministre, que l'on s'efforce d'accueillir un certain nombre d'emplois depuis Londres. Pourquoi pas ? Le problème est de savoir qui paie cet effort. Il le sera en l'occurrence par la branche famille à une hauteur considérable : 140 millions dès 2018 et pendant le quinquennat.
Par quelles recettes remplacerez-vous cette perte de 140 millions pour la branche famille qui, je ne développerai pas, connaît déjà des difficultés avec la remise en cause de politiques familiales, comme on l'a vu lors de l'examen du PLFSS ? Comment ces 140 millions seront-ils remplacés de façon à ce que la branche famille ne subisse pas un préjudice excessif ?
Faisons un peu d'idéologie puisque tout est idéologique : c'est en partant d'une idée que l'on décline des amendements qui auront peut-être des effets, ou pas. Idéologie et efficacité ne s'opposent pas, monsieur le ministre, comme vous le savez sans doute. Il est plus rigolo d'opposer une idéologie fumeuse et éthérée au pragmatisme du terrain consistant à aller chercher des cadres de l'autre côté de la Manche !
Nous savons que le monde est ouvert, au point que les Paradise papers, la semaine dernière, ont montré que de nombreux milliards nous échappaient ! Ce n'est pas pour autant qu'il faut rester les bras croisés. Ce n'est pas parce que le monde est ouvert qu'il faut renoncer à taxer ceci ou cela, et se résigner à faire comme tout le monde, à laisser les capitaux se balader tranquillement et échapper à l'intérêt général, à la levée de l'impôt qui permet pourtant de financer nos services publics. Cela, c'est une idéologie et elle s'oppose à la vôtre, monsieur le ministre.
Je reviens aux 3 millions. Mon collègue Corbière a parlé de Montreuil, où se trouve Tracfin. Avec 3 millions supplémentaires, on lui éviterait d'être noyé sous les flots d'informations – aujourd'hui, le problème n'est pas tant d'avoir des informations que de les traiter – et de se montrer peut-être plus efficace, dans ce monde ouvert, pour aller chercher les capitaux où ils sont.
Je le disais l'autre jour, il y a décidément des gens qui comptent plus que d'autres dans votre politique.
Cette stratégie adoptée suite au Brexit soulève bien des questions et montre l'état d'esprit qui anime l'exécutif. Cela témoigne d'ailleurs du malaise et du peu de confiance qui règnent en Europe sur les sujets fiscaux. Quand on nous parle harmonisation, il y a encore du chemin à faire !
Un État membre décide de quitter l'Union européenne et la fiscalité est immédiatement adaptée pour créer de la concurrence et attirer d'hypothétiques investisseurs. Ce n'est pas tout à fait l'esprit du discours que j'entendais sur l'harmonisation, hier.
Bel exemple de coopération et de relations partenariales entre États européens ! En réalité, dans l'affaire, une nouvelle fois, ce sont les acteurs de la finance qui ont la main, bienheureux de voir que d'autres places financières – Francfort et Paris notamment – se battent pour savoir qui allégera le plus la fiscalité afin d'attirer des activités à l'utilité sociale bien discutable.
C'est ainsi que la taxe sur les transactions financières a été sacrifiée, et c'est ainsi qu'il est ici proposé de réserver le même sort à la tranche supérieure du barème de la taxe sur les salaires. Nous ne partageons pas cette philosophie qui veut que notre pays s'aplatisse devant les exigences du secteur financier. Nous n'acceptons pas ce nouveau modèle de soumission aux acteurs de la finance, qui nourrit chez nos concitoyens l'impression malheureusement fondée que ce budget est bel et bien le budget des riches. Nous parlons de la tranche supérieure à 150 000 euros : ce n'est pas une paille, comme on dit chez moi !
La parole est à M. Alexis Corbière, pour soutenir l'amendement identique no 1399 .
L'idéologie, dont il a été question à l'instant, n'est pas un gros mot : tous ici, nous défendons une idéologie, et je plains ceux qui ne sont pas mus par des idées, car que suivent-ils ? Leurs intuitions, leurs impulsions ?
Parmi ces idées, celle selon laquelle il faudrait réduire la fiscalité pour créer de l'attractivité est une idée ancienne qui a montré son inefficacité. C'est l'idée du nivellement par le bas, dont l'expérience nous a montré combien elle cause de dégâts.
À nos yeux, une entreprise qui peut octroyer une rémunération de plus de 8,5 fois le SMIC annuel peut bien subvenir à une taxe d'au moins 25 %. Nous sommes donc favorables à une augmentation du taux actuel. Elle fera rentrer dans les caisses publiques un argent dont celles-ci ont bien besoin.
Tel est le sens de cet amendement.
Défavorable.
Monsieur le ministre, je répète ma question, qui ne me semble pas illégitime et mérite en tout cas une réponse. Nous prenons des dispositions dans le but d'encourager un transfert d'emplois en provenance de la place de Londres. Pourquoi pas ? Je n'y suis pas hostile. Mais je veux savoir qui paie. Or il ressort on ne peut plus clairement de vos documents que le payeur, c'est la branche famille, pour 140 millions d'euros par an pendant toute la durée du mandat. Par quelle recette envisagez-vous donc de remplacer cette perte conséquente pour la branche famille ? Si aucune n'est prévue, cela signifie que la prestation d'accueil du jeune enfant disparaîtra et que les mesures défavorables à la famille que nous avons vu apparaître dans le PLFSS se perpétueront.
Que va-t-il donc se passer pour la branche famille, qui va supporter pour l'essentiel le coût de cette course effrénée pour attirer des collaborateurs de la place de Londres ?
Loin de moi l'intention de vexer Marc Le Fur ; je pensais que sa question était rhétorique. Mais persévérer est diabolique…
Ce n'est que du latin, monsieur le député. Je ne me permettrais pas de suggérer que les Bretons sont diaboliques… et surtout pas Marc Le Fur.
Sourires.
Monsieur Le Fur, l'État compensera. Qui paie ? demandiez-vous. C'est l'intégralité de nos recettes et de nos dépenses. Ainsi que j'ai essayé de le justifier tout à l'heure en répondant à Mme Cariou et à Mme Rabault, nous comptons bien que, en touchant à une taxe qui a fait la preuve de son inefficacité pour l'économie comme du point de vue des recettes, nous obtiendrons plus de recettes en réduisant les cotisations et l'impôt. C'est ce qui nous distingue des groupes GDR et FI.
Rassurez-vous donc : l'État compensera, à hauteur du montant que nous avons évoqué tout à l'heure ; je le répète, lorsqu'un effort de ce type est consenti, c'est l'intégralité du budget de l'État qui vient compenser l'écart pour celui de la Sécurité sociale.
Non, pour 110 millions !
L'article 44 est adopté.
J'ai été informé que l'amendement no 1810 , dont l'auteur, Mme Marie-Ange Magne, n'est pas présente, a été accepté et repris par la commission des finances.
La parole est donc à M. le rapporteur général, pour le soutenir.
Cet amendement a pour objet de proroger pour trois ans la provision déductible spéciale applicable aux entreprises de presse et d'aligner sur celle-ci le dispositif dont bénéficient les services de presse en ligne professionnels, scientifiques ou culturels.
Favorable. Le coût de cet amendement est inférieur à 1 million d'euros.
L'amendement no 1810 est adopté.
Cet amendement tend à réactiver les dispositifs de la provision pour investissement et de la provision pour dépense de mise en conformité, sur le modèle du dispositif applicable à la presse dans l'amendement qui vient d'être adopté.
Il s'agit d'en faire bénéficier les petites entreprises au sens du règlement européen no 6512014, c'est-à-dire employant moins de cinquante personnes et dont le chiffre d'affaires annuel ou le total du bilan annuel n'excède pas 10 millions d'euros – bref, les PME.
Le dispositif visé est un outil destiné à permettre aux entreprises de financer leurs investissements, ce qu'elles peuvent avoir des difficultés à faire. Ces investissements généreront de l'activité, qui générera à son tour des recettes complémentaires de TVA, d'impôt, et des emplois.
Je réponds par avance à ceux qui m'opposeront le coût de cette mesure que celui-ci, réel sur une année, est annulé sur cinq ans par les effets induits de la comptabilisation de provisions pour investissement. Je propose par ailleurs que l'impact de la mesure soit évalué au bout de cinq ans.
La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l'amendement identique no 1278 .
Défavorable.
En réalité, ces amendements ne sont pas du tout comparables à l'amendement précédent, relatif à la presse : ils visent à réactiver un dispositif disparu depuis sept ans, une période pendant laquelle l'investissement a fait l'objet de nombreuses mesures de soutien, à telle enseigne qu'il a augmenté de 3,7 % en 2017, et même de 4,2 % en construction, après une hausse de 3,9 % en 2016. La provision proposée ne se justifie donc absolument pas.
Le suramortissement, une excellente disposition de la loi dite Macron qui incitait les entreprises à se tourner vers l'avenir et à investir, a pris fin peu avant les élections. Monsieur le ministre, envisagez-vous de réintroduire ce mécanisme, qui servait directement à la numérisation des PME et à l'acquisition de machines-outils, indispensable pour nous mettre au niveau de nos concurrents, en particuliers germaniques ? Il serait logique qu'une majorité se réclamant de M. Macron reprenne ce dispositif qui faisait l'unanimité.
Je l'ai dit en commission, cet amendement ne vise pas du tout le dispositif qui vient d'être décrit, mais le suramortissement des poids lourds utilisant certains types de carburants. Cette erreur de rédaction m'avait conduit à en demander le retrait. Je réitère cette demande ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Défavorable.
L'amendement no 1355 est retiré.
La parole est à M. François Pupponi, pour soutenir l'amendement no 1564 .
L'amendement no 1564 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 58 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je suis saisi de l'amendement no 1500 .
La parole est à M. le rapporteur général.
Je laisse Mme Verdier-Jouclas, qui est à l'origine de cet amendement, le défendre.
La parole est donc à Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas, pour soutenir cet amendement.
Le territoire de vignobles dont je suis issue connaît de plus en plus d'aléas climatiques ; or le viticulteur, contrairement à d'autres agriculteurs, est imposé sur sa récolte, qu'il la vende ou qu'il la stocke. La fiscalité actuelle n'encourage donc pas la gestion pluriannuelle des stocks, pourtant de plus en plus nécessaire.
Aux termes de l'amendement, les viticulteurs pourraient stocker une partie de leur vin en bénéficiant de ce fait d'une défiscalisation dans la limite de 20 % de la moyenne du chiffre d'affaires. Ce serait un signal fort pour cette profession, qui subit actuellement un nouvel aléa lié à une maladie de la vigne.
Je défends cet amendement au nom de tous les députés de la région Occitanie.
Madame la députée, je comprends votre intention et celle de vos collègues cosignataires. J'ai parlé tout à l'heure de cet amendement avec le ministre de l'économie et des finances : il vous suggère d'attendre la tenue du groupe de travail sur la fiscalité des produits agricoles, qu'il mènera lui-même dans le cadre des états généraux de l'agriculture et qui concernera notamment la viticulture. Cette solution est préférable car, si intéressant soit-il, votre amendement, vous le savez, contredit des dispositifs existants.
M. le ministre s'est engagé à vous réunir rapidement pour que vous puissiez travailler ensemble à résoudre l'important problème que vous soulevez. Une fiscalité spécifique sera prévue dans le plan qu'il prépare avec Stéphane Travert.
Je vous demande donc de retirer votre amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable, en attendant ce grand soir de la fiscalité viticole et agricole. Mais je ne doute pas que vous comprendrez le sens de l'engagement du ministre de l'économie et des finances.
Voulez-vous retirer votre amendement ou le maintenir, madame Verdier-Jouclas ?
L'amendement no 1500 est retiré.
Nous en venons à l'amendement no 1501 . La parole est à M. le rapporteur général.
Comme précédemment, je laisse Mme Verdier-Jouclas défendre cet amendement dont elle est l'auteur.
J'espère que cet amendement aura plus de succès que le précédent.
Le dispositif de la moyenne triennale permet de retenir, pour constituer l'assiette de l'impôt progressif, un bénéfice égal à la moyenne des bénéfices de l'année d'imposition et des deux années précédentes. Ainsi, le revenu est lissé et l'imposition réduite. Mais cette option, lorsqu'elle est prise, l'est pour cinq ans.
Afin d'adapter cette durée à la réalité, nous proposons de la ramener à trois ans.
C'est une disposition que nous avions préconisée avec mon collègue François André, après avoir travaillé sur ces questions. Cela nous permettrait d'être plus agiles et réactifs.
Tout à fait !
Le vrai problème de l'agriculture aujourd'hui, c'est le caractère très erratique du chiffre d'affaires et de la recette, ainsi que l'incertitude pesant sur les charges. Il faut pouvoir réagir, et la fiscalité est l'un des moyens de cette réaction. L'intérêt de cet outil, c'est qu'il ne dépend pas de décisions européennes, mais de décisions nationales. Cela ne dépend que de nous ! Il y aura certainement d'autres décisions à prendre, mais prendre celle-ci permettra déjà d'évoluer quant à la moyenne triennale ou au choix de l'année : c'est une bonne chose.
L'amendement no 1501 est adopté.
Qui est-ce qui préside ?
Cet amendement, adopté par la commission des finances, provient de plusieurs groupes politiques, comme vous pouvez le constater à la lecture des cosignataires qui siègent aussi bien sur les bancs des Républicains, des Constructifs ou de la Nouvelle Gauche. Plutôt que de donner la parole à l'un de ses coauteurs, je dirai simplement que l'amendement concerne la possibilité de déduction du revenu imposable des cotisations de retraite et de prévoyance complémentaires versées par les chefs d'exploitation. Il semblerait que les dispositions du code général des impôts prévoyant la fourniture d'un justificatif attestant de la régularité de la situation de l'assuré à l'égard des régimes d'assurance vieillesse obligatoires soient redondantes avec celles de l'article L. 144-1 du code des assurances. En fait, il est demandé deux fois le même justificatif. L'amendement apporte donc une simplification très utile à cette profession.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement no 1192 .
La parole est à M. Philippe Dunoyer, pour soutenir l'amendement no 1850 .
L'avis est d'autant plus favorable que cet amendement n'a aucune incidence budgétaire.
La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour soutenir l'amendement no 1528 .
Cet amendement me permet de revenir à la charge concernant une proposition que nous avons déjà faite. La disposition s'appliquerait cette fois au 1er janvier 2019 et non plus 2018. Il s'agit de supprimer l'abattement de 40 % sur les dividendes. Après la question des marges et des excédents bruts d'exploitation que nous avons évoqués tout à l'heure, nous voici aux dividendes qui doivent, selon nous, être taxés normalement sans bénéficier d'un abattement. Il est inutile de vous rappeler que les dividendes ont énormément augmenté ces vingt dernières années et s'élèvent à plusieurs milliards d'euros. Ils seraient sans doute plus utiles s'ils étaient mutualisés au sein du budget de l'État pour nos services publics et pour l'intérêt général.
Vous proposez cet amendement pour fêter le centenaire de la Révolution d'octobre !
L'amendement no 1528 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement no 1750 rectifié .
Il s'agit de mettre fin à deux dépenses fiscales inefficientes. Nous proposons ainsi de mettre un terme au crédit d'impôt pour dépenses de prospection commerciale – le CIPC – et au dispositif d'exonération des suppléments de rétrocession d'honoraires perçus par les professions libérales à l'occasion d'activités de prospection commerciale réalisées à l'étranger ; ainsi qu'au crédit d'impôt pour adhésion à un groupement de prévention agréé prévu à l'article 244 quater D du code général des impôts.
J'abonde dans le sens du ministre. De fait, les aides au financement pour les PME sont multiples, mal adaptées et peu lisibles. Pour les chefs d'entreprise, les formalités sont encore nombreuses et trop lourdes. Je consulte actuellement les chefs d'entreprise exportateurs de mon département au sujet de cet enjeu fondamental de la conquête des marchés internationaux. Je salue la volonté du Gouvernement de s'attacher à un chantier crucial pour notre commerce extérieur. Des travaux sont en cours et aboutiront à des annonces fortes dans les prochains mois. Dans le cadre de ce chantier de refondation, je prends acte de la volonté de supprimer le crédit d'impôt prospection dont le plafond était de 40 000 euros par entreprise sur vingt-quatre mois et qui ne pouvait être obtenu qu'une seule fois.
Peu d'entreprises ont utilisé cette aide durant les dernières années. Nous ne pouvons plus nous permettre de saupoudrer des aides inefficaces. Je voterai donc en faveur de cet amendement et j'invite les députés, notamment ceux qui travaillent sur le commerce extérieur, à aller dans ce sens. En revanche, il faut être vigilant quant à la refondation globale des aides au financement export, pour définir une politique ambitieuse en faveur des PME, lesquelles doivent savoir que nous les soutenons fortement dans leur démarche vers l'export.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe REM.
Les groupements de prévention agréés sont, si j'ai bien compris, les victimes de votre amendement. Qu'avez-vous à l'esprit ? Qu'est-ce que cela représente ? Pourriez-vous éclairer la représentation nationale, monsieur le ministre ?
J'aurais bien avoué à M. Le Fur que je ne suis pas un très grand spécialiste de la question qu'il me pose. Toutefois, j'ai cru comprendre que, pour les premiers dispositifs, il s'agissait de procédures de compagnies françaises d'assurances pour le commerce extérieur avec des interventions de Business France et des prêts export de la Banque publique d'investissement. Par exemple, le CIPC est partiellement redondant avec l'assurance prospection des dépenses de VIE – volontariat international en entreprise.
Par ailleurs, d'autres dispositifs publics concourent à des objectifs convergents avec celui du crédit d'impôt pour adhésion à un groupement de prévention agréé. Ce dispositif a bénéficié à 220 entreprises seulement en 2016. Il est redondant avec l'offre d'information et de conseil des chambres de commerce et d'industrie, des fonds d'investissement de proximité, de l'Agence France Entrepreneur et des réseaux d'appui aux entreprises.
L'amendement no 1750 rectifié est adopté.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement no 469 .
Cet amendement vise à adapter les règles de comptabilisation des immobilisations et des stocks dans le domaine agricole. Pour un certain nombre de raisons, de plus en plus d'exploitations agricoles et d'entreprises optent pour le régime de l'impôt sur les sociétés. Or les méthodes de comptabilisation propres à ce régime n'offrent pas autant de facultés que celles de l'impôt sur le revenu. Il vous donc est proposé d'adapter la comptabilisation au traitement de ce qu'on appelle les biens vivants – qui peuvent être des stocks ou des immobilisations, comme les vaches laitières – , dont les règles de droit commun rendent l'évaluation difficile.
L'amendement tend à rendre plus aisée la comptabilisation des immobilisations et des stocks lorsque l'exploitation agricole a fait le choix de l'impôt sur les sociétés.
Les entreprises visées ont le choix entre l'impôt sur les sociétés et l'impôt sur le revenu pour leur régime d'imposition. Dans un tel système, ce sont les règles de l'impôt choisi qui s'appliquent. On ne peut pas avoir le fromage et le dessert.
Avis défavorable.
Je souhaite revenir sur l'amendement no 1750 rectifié du Gouvernement. Monsieur le ministre, si je comprends bien, vous faites disparaître un dispositif encourageant les entreprises à recruter des VIE, un des outils dont disposent nos entreprises pour faciliter leur présence à l'étranger et exporter. Cela exige une réflexion. N'allons-nous pas un peu vite ? J'ai été très surpris de l'argumentation proposée.
L'amendement no 469 n'est pas adopté.
La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour soutenir l'amendement no 1529 .
Cet amendement vise à supprimer un dispositif d'exonération fiscale, la « niche Copé », particulièrement injuste, puisqu'il exempte d'impôt sur les sociétés les plus-values réalisées lors de la vente d'une filiale ou de titres de participation détenus depuis plus de deux ans. Il est en outre assez coûteux : 3 milliards d'euros. Avec une telle somme, nous pourrions en distribuer, des paquets de 3 millions ! Nous proposons donc l'abrogation de cette disposition à partir de 2019. Un autre de nos amendements suggérait de la supprimer dès 2018 ; vous avez eu, depuis, le temps de réfléchir et de comprendre qu'une telle mesure serait de bon sens. Si l'on pouvait réserver à ce dispositif le même sort que celui subi par son inventeur à l'issue des primaires, nous en sortirions tous gagnants.
Le débat sur la « niche Copé » a déjà eu lieu plusieurs fois, si bien que le législateur a fait vraiment beaucoup de chemin pour en tempérer les effets. Cette niche a une utilité pour l'attractivité de la France, d'autant qu'elle ne s'adresse pas qu'à un petit noyau de très grandes entreprises : 6 000 entreprises sont concernées, y compris des PME et des ETI. Avis défavorable.
L'amendement no 1529 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Émilie Cariou, pour soutenir l'amendement no 1857 rectifié .
Cet amendement vise à recalibrer le régime mère-fille par lequel une entreprise qui perçoit des dividendes de ses filiales peut déduire leur produit de son résultat fiscal. Il s'agit d'un mécanisme d'évitement de la double imposition, empêchant que l'impôt sur les sociétés soit payé deux fois sur le même revenu.
Le problème est que les dividendes peuvent provenir de pays à fiscalité très faible. Par exemple, dans certains pays d'Asie, l'impôt sur les sociétés est à 15 % et les revenus de la propriété intellectuelle ne font l'objet d'aucune taxation. Une filiale établie dans un tel pays subira donc un taux moyen d'imposition ne dépassant pas 8 ou 10 %, tandis que la société mère française à laquelle elle verse ses dividendes et qui peut les déduire de son résultat fiscal est, elle, taxée à 33,3 %. Dans ces conditions, le différentiel de taux constitue quasiment une subvention à la délocalisation de nos activités.
Il est temps de recalibrer le régime mère-fille. L'idéal serait de le faire au niveau européen, sans quoi d'autres mécanismes d'évitement demeureraient accessibles via des sous-holdings établies en Allemagne ou en Italie. Mais on ne peut rester dans une situation qui donne aux groupes les moyens d'une vaste entreprise d'optimisation fiscale, des milliards d'euros étant ainsi remboursés en compensation d'un impôt non payé. Je propose donc de remplacer ce dispositif par un mécanisme de crédit d'impôt, à l'instar de celui qui, au début des années 2000, s'appliquait aux dividendes provenant de pays extra-européens, et conduisait à ne jamais rembourser plus d'impôt que ce qui avait été payé dans le pays d'origine.
Madame la députée, je comprends et partage l'objectif de votre amendement. Vous l'avez évoqué, des projets sont en cours au niveau européen, ce dont je me réjouis. Il faut se montrer prudent lorsqu'il s'agit de modifier l'économie du régime mère-fille compte tenu de son encadrement européen et des effets qu'une telle modification pourrait entraîner. Je vous suggère donc de retirer votre amendement ; sinon j'aurai un avis défavorable.
Madame Cariou, je comprends votre intention, mais il faut faire attention car c'est le régime mère-fille qui a conduit le Conseil constitutionnel à censurer la taxe à 3 % sur les dividendes. Il y a donc quelques difficultés, mais votre réflexion est la bonne : notre pays doit travailler, dans un cadre européen, à la redéfinition de l'assiette commune consolidée pour l'impôt sur les sociétés, ACCIS. C'est bien ce que fait le ministre de l'économie et des finances. La lutte contre l'évasion fiscale doit se faire au niveau européen plutôt que national. Nous partageons votre opinion, mais je vous propose de retirer votre amendement pour encourager les actions du ministre de l'économie et des finances – même si vous le faites déjà. Votre assemblée pourrait par exemple une initiative au sujet de l'ACCIS sans se limiter au point abordé dans votre amendement, qui risque de poser problème au regard du droit constitutionnel et du droit européen. Sur la forme, je suggère donc le retrait, mais sur le fond je suis totalement d'accord avec votre proposition.
Merci, monsieur le ministre. Je voudrais juste préciser qu'il n'y a pas de problème de compatibilité avec le droit de l'Union puisqu'il ne s'agit de frapper que les dividendes provenant de filiales extra-européennes, alors que la directive mère-fille n'encadre que les relations au sein de l'Europe. On peut donc partager le constat d'absence de problème juridique. En revanche, comme il s'agit de questions que j'ai déjà eu l'occasion d'aborder au cabinet de M. Juncker, je sais que la Commission est consciente du fait que le régime mère-fille pose problème s'agissant de dividendes provenant de l'extérieur de l'Europe. Si vous me dites que cette question fera partie d'un paquet de négociation et qu'on en discutera dans le cadre de l'ACCIS, j'accepte de retirer l'amendement.
L'amendement no 1857 rectifié est retiré.
La parole est à Mme Brigitte Kuster, pour soutenir l'amendement no 1227 .
Monsieur le ministre, cet amendement vise à favoriser la création cinématographique française. Au moment où le budget du ministère de la culture a été amputé de plusieurs dizaines de millions d'euros sur la partie audiovisuel, il vous donne une formidable occasion de vous rattraper. Cette baisse de crédits a suscité un émoi profond chez les professionnels qui craignent un impact sur la création. Cet amendement vous permettra donc d'envoyer un signal fort en direction des jeunes talents du cinéma français.
Le rayonnement du cinéma français tient pour une bonne partie à la qualité de la production des premiers et deuxièmes films, ainsi que des films à petit budget – moins de 1,25 million d'euros – , une offre cinématographique qui participe non seulement au renouvellement et à la diversité de la création, mais également à l'émergence de jeunes talents, qu'ils soient réalisateurs, acteurs ou techniciens. Mais sans le soutien des investisseurs – au premier rang desquels figurent les chaînes de télévision – , ces réalisateurs émergents sont souvent soutenus par des mécanismes très sélectifs de financement public, comme l'avance sur recettes ou les aides régionales, et ne peuvent bénéficier du crédit d'impôt pour les dépenses de production déléguée. En effet, la part des financements publics dans les films à petit budget est proportionnellement plus importante, ce qui les contraint à renoncer au crédit d'impôt pour respecter le plafond de 60 % du budget de production. Le présent amendement, monsieur le ministre, cher Gérald,
Exclamations sur plusieurs bancs
vise à porter ce seuil à 70 % afin de leur assurer un accès effectif au crédit d'impôt et de garantir une égalité des films face à ce dispositif.
Chère madame Kuster, votre amendement propose de monter à 70 % la part des financements publics dont peut bénéficier une oeuvre à petit budget. Cette proposition risque d'être orthogonale par rapport aux principes du droit européen puisque la limite, pour ce secteur, est fixée à 50 % du budget de la production. À défaut, il faut une notification européenne pour ce genre de dispositif, et je ne crois pas que votre amendement le prévoie. Avis défavorable.
Chère Brigitte…
Rires et exclamations sur plusieurs bancs.
« Je voudrais tant que tu te souviennes des jours heureux où nous étions amis », c'est cela ? Madame la députée, j'ai du mal à accepter votre introduction : lorsque vous évoquez les économies que nous avons demandées à l'audiovisuel public, il ne faut pas les confondre avec les crédits du ministère de la culture, qui n'ont pas diminué. Je voudrais vous rappeler qu'en France, le budget de l'audiovisuel public s'élève à 3,9 milliards d'euros, et celui de la culture, à 3,6 milliards. La représentation nationale doit savoir que le budget de l'audiovisuel public est supérieur à celui du ministère de la culture ; je ne sais pas si c'est bien ou mal, mais le parallèle que vous avez fait est contraire à la vérité. Les économies que nous avons demandées sont infimes par rapport à aux montants que la contribution de la redevance audiovisuelle, mais aussi la taxation d'un certain nombre de produits modernes, apportent à l'audiovisuel public.
De manière générale, il faudrait sans doute mener une série de réformes de transformation ; ce point figurait dans le projet du Président de la République, comme – me semble-t-il – dans celui de tous les candidats à l'élection présidentielle. Il est important que chacun fasse un effort de rationalisation. Ce n'est pas qu'une question de création ; la structure ou le nombre de chaînes jouent aussi leur rôle. Il y a aujourd'hui des débats importants, qui méritent que la représentation nationale les évalue pour être au rendez-vous de la création. À côté des arguments du rapporteur général, il faut rappeler les grandes facilités dont dispose déjà aujourd'hui le secteur que vous évoquez. Tout d'abord, le crédit d'impôt cinéma a été largement renforcé les années précédentes ; pour les oeuvres cinématographiques, son plafond a été porté de 4 à 30 millions d'euros au titre d'une même oeuvre. Pour les oeuvres audiovisuelles, le plafond du crédit d'impôt a été relevé de 1 300 à 3 000 euros par minute pour les oeuvres d'animation ; il peut atteindre 10 000 euros par minute pour des oeuvres de fiction. Le taux de crédit a été relevé à 30 % pour les oeuvres cinématographiques et d'animation et oeuvres cinématographiques réalisés principalement ou intégralement en langue française. S'agissant des oeuvres audiovisuelles, le taux a été porté à 25 % au lieu de 20 % pour les films de fiction.
La précédente législature a consenti d'importants efforts dans le domaine culturel en augmentant les crédits d'impôt applicable au cinéma, aux créations phonographiques, aux jeux vidéo et au spectacle vivant. À mon avis, il est préférable de procéder à une évaluation de tous ces crédits qui représentent autant de dépenses fiscales ou de recettes manquantes avant de passer à ce que vous proposez. De plus, comme l'a rappelé le rapporteur général, la disposition proposée risque de s'avérer incompatible avec le droit européen. Il n'est donc pas très raisonnable, chère Brigitte, d'adopter votre amendement.
Monsieur le ministre, vous êtes dans votre rôle, et je le comprends. Néanmoins, la baisse des crédits de la partie audiovisuel du ministère de la culture, que nous avons votée – il s'agit de plusieurs dizaines de millions d'euros – , fait naître des inquiétudes quant à la création. L'amendement que je vous ai présenté touche les films à petit budget, donc de petites sociétés de production qui risquent éventuellement de mettre la clé sous la porte. J'appelle votre attention sur ce problème. J'ai entendu l'argument du rapporteur général ; néanmoins le crédit d'impôt cinéma que vous avez évoqué représente une grande réussite. Vous qui êtes un élu du Nord devriez le savoir puisqu'un film comme Dunkerque a eu des répercussions économiques extraordinaires. Or si le crédit d'impôt n'existait pas, beaucoup de films ne pourraient pas être réalisés en France.
Madame la députée, je défendrais ma position même si je n'étais pas ministre des comptes publics. L'exemple budgétaire que vous prenez n'est pas le bon : les crédits du ministère de la culture ne doivent pas être confondus avec ceux de l'audiovisuel. Il y a en France un budget dédié à l'audiovisuel public, distinct de celui du ministère de la culture. Ce ministère – Mme Nyssen en est tout à fait consciente, et votre commission devrait se pencher là-dessus – affecte ses crédits essentiellement à la région Île-de-France, et particulièrement à Paris, et non sur tout le territoire, ce qui pose la question de l'accès à la culture. Par ailleurs, l'audiovisuel représente un véritable enjeu. Quand on a quasiment 3,9 milliards d'euros de budget, on n'est pas obligé de faire porter les économies de quelques dizaines de millions sur la création ! Il y a des réformes de structure à faire, il y a peut-être un nombre trop important de chaînes publiques, une organisation différente à mettre en place. On n'est pas obligé de faire supporter l'effort sur la partie création. Les grands dirigeants des groupes audiovisuels doivent apprendre à travailler de manière différente. Il n'est pas non plus sain, même dans les groupes publics, que la quasi-intégralité de l'argent soit versée directement par l'État. Il faut diversifier les financements.
Enfin, je connais bien le film Dunkerque que vous prenez en exemple – on aurait pu citer Bienvenue chez les Ch'tis, ou bien d'autres productions réalisées dans la région des Hauts-de-France. Il se trouve que j'ai été administrateur de Pictanovo, l'ancien centre régional des ressources audiovisuelles du Nord-Pas-de-Calais situé dans ma commune de Tourcoing. Pictanovo a fait quelque chose d'extraordinaire : il s'est diversifié, et son travail de production concerne désormais non seulement les courts-métrages de petites sociétés de production, mais également les jeux vidéo et l'animation. Il faut savoir se diversifier et s'adapter à son public. Indépendamment du problème de la création, la grande difficulté de ce secteur est d'avoir trop tendance à vivre uniquement de subventions. Il devrait se diversifier et écouter le changement. Je vous encourage, madame la députée, chère Brigitte, à venir passer un moment à Tourcoing. Vous serez très bien reçue ; on prendra, si vous le souhaitez, une boisson que ma collègue Mme Buzyn ne souhaiterait pas que je cite officiellement car si elle n'est pas consommée avec modération, elle peut nuire à la santé.
Je vous ferai visiter Pictanovo, et je suis sûr que vous verrez alors l'audiovisuel de la même façon que moi.
L'amendement no 1227 n'est pas adopté.
La parole est à M. Philippe Dunoyer, pour soutenir l'amendement no 1004 .
Dans la continuité de la conversation que nous venons d'avoir sur cette proposition malheureusement rejetée, l'amendement de mon collègue Bournazel tentait de rétablir une égalité entre les différents secteurs culturels. Comme vient de le souligner M. le ministre, la totalité des activités culturelles bénéficient d'un dispositif de soutien fiscal sous forme d'un crédit d'impôt : c'est vrai pour le cinéma, les jeux vidéos, l'audiovisuel et les oeuvres phonographiques ; mais non pour le théâtre. À l'instar de Mme de Montchalin qui, tout à l'heure, pointait du doigt une anomalie, je regrette que cette activité que tout le monde, je crois, soutient dans son principe, ne bénéficie pas d'un crédit d'impôt. La proposition de cet amendement consiste simplement à ajouter à un des crédits d'impôt existants – celui qui touche au spectacle vivant musical ou de variétés – les activités de théâtre. Le crédit d'impôt, qui donne aux exploitants de ce type de spectacles la possibilité de se voir rembourser jusqu'à 15 % des dépenses, permettra de structurer et de professionnaliser la filière.
Les crédits d'impôt sont nombreux dans ce domaine. Certes, l'amendement proposé implique un coût relativement modeste, mais on maîtrise mal tous ces crédits d'impôt que l'on accumule sur le secteur de la culture depuis quelques années. À l'origine, ces dispositifs étaient censés prévenir la délocalisation d'activités culturelles ; s'agissant du théâtre privé, la délocalisation n'est franchement pas le sujet. Il y a d'autres façons, bien plus efficaces, de soutenir ce secteur. Avis défavorable.
Je me range aux arguments du rapporteur général quant à l'intérêt du crédit d'impôt pour empêcher la délocalisation. Cependant, monsieur le député, je suis également sensible à l'idée que le théâtre est un des seuls domaines du secteur pour lesquels on n'a pas prévu de crédit d'impôt. Dans le souci de maîtriser la dépense fiscale et d'avoir des finances publiques bien tenues, il faudrait que le Parlement évalue tout d'abord ces crédits et leur efficacité. Dans ce cadre, je ne serais pas défavorable – et j'imagine que Mme la ministre de la culture non plus – à l'existence d'un crédit d'impôt pour le théâtre, à condition que sa création ne grève pas les finances publiques et que l'effort soit réparti sur l'ensemble des autres crédits d'impôt dont certains mériteraient sans doute d'être revus. L'égalité des crédits d'impôt dans le secteur de la culture pourrait résoudre le problème, à coût zéro pour la collectivité publique. Je vous suggère donc de retirer votre amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable. Je propose que votre commission et la commission des affaires culturelles, si elles le souhaitent, évaluent tous les crédits qu'on vient d'évoquer ; ils sont assez coûteux et certains d'entre eux ne montrent pas de réelle efficacité. La question pourrait ensuite revenir soit dans le cadre d'une loi relative à la culture, soit dans le cadre du projet de loi de finances de l'année prochaine.
La perspective ouverte par M. le ministre me semble intéressante. Je retire donc cet amendement, dans l'attente de savoir le coût que pourrait représenter l'extension de ce crédit d'impôt. Nous ne sommes pas pour l'empilement des crédits d'impôts, mais pour une meilleure utilisation, plus efficace, des fonds publics. Compte tenu de l'engagement à travailler sur ce sujet qu'a pris M. le ministre devant la représentation nationale, je retire l'amendement.
L'amendement no 1004 est retiré.
La parole est à M. Hubert Wulfranc, pour soutenir l'amendement no 1630 .
Rires et exclamations sur divers bancs
… nul doute que cet amendement suscitera votre intérêt, et que vous accepterez l'esprit dont il procède, l'intention qui le motive, et les objectifs qu'il vise. Nous vous tendons une perche pour lutter contre le recours aux paradis fiscaux. Vous savez que nous plaidons avec constance pour que la France agisse avec détermination en la matière.
Cette action devrait d'abord avoir lieu à l'échelle européenne, où il est déjà difficile de s'accorder sur une liste de paradis fiscaux qui comprendrait les trois ou quatre pays européens relevant de cette catégorie, dont l'Irlande, le Luxembourg et les Pays-Bas. Il faudrait dans le même temps oeuvrer au niveau national. En effet la liste française des paradis fiscaux ne comprend à l'heure actuelle que sept pays : Nauru, Niue, le Botswana, Brunei, les îles Marshall, le Guatemala et le Panama – dont le nom a été opportunément ajouté à la liste.
Plus sérieusement, nous vous proposons de renforcer la fiscalité des banques françaises dès lors qu'elles ont recours aux paradis fiscaux, au moyen d'une surtaxe d'impôt sur les sociétés. Cela permettrait d'adapter notre système fiscal à cette réalité douloureuse que nous avons tous à coeur de combattre.
Les dispositions proposées par M. Wulfranc au moyen de cet amendement pourraient s'appliquer à des établissements bancaires exerçant leurs activités dans d'autres pays de l'Union européenne ; par ce seul fait elles sont contraires au droit européen. Avis défavorable.
Monsieur le député, cher compagnon – c'est ainsi que l'on dit dans ma famille politique.
Exclamations sur certains bancs des groupes GDR et FI.
Tout le monde a été, est ou sera gaulliste, vous le savez bien – y compris les communistes !
Inversement, les gaullistes étaient presque communistes à une certaine époque !
Tout d'abord, comme l'a dit M. le rapporteur général, ce que vous proposez serait contraire au droit européen.
Je peux comprendre l'esprit dont procède cet amendement. Il vise à instituer une surtaxe semblable à celle qu'a proposée le ministre de l'économie et des finances, à ceci près que celle-ci n'aura qu'une durée d'un an, tandis que celle-là serait pérenne. Cette surtaxe ne s'appliquerait qu'aux entreprises ayant recours aux paradis fiscaux.
C'est intéressant, mais au-delà même des difficultés juridiques, européennes et constitutionnelles, qu'évoquait M. le rapporteur général, vous abordez le problème par le petit bout de la lorgnette. Il vaut mieux lutter contre les paradis fiscaux au niveau européen, comme vous nous y incitez par ailleurs avec raison, plutôt que de taxer ceux qui accèdent à des paradis fiscaux.
La surtaxe serait en quelque sorte le prix à payer pour avoir le droit de recourir aux paradis fiscaux ; l'État percevrait une recette sur des pratiques qu'il condamne moralement par ailleurs.
Vous comprenez bien, dans ces conditions, que votre proposition n'est pas acceptable pour le Gouvernement. Avis défavorable.
J'ai bien compris la dialectique de M. le ministre : la bataille doit être menée au niveau européen. C'est au demeurant ce que montre le livre d'Alain et Éric Bocquet sur l'évasion fiscale. C'est une question qui nous intéresse au plus haut point.
Par cet amendement, nous proposons d'assujettir les banques françaises à une surtaxe à l'impôt sur les sociétés, conçue sur le modèle de la surtaxe présentée dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2017 adopté il y a peu. Les banques qui possèdent des filiales dans des paradis fiscaux seraient ainsi soumises à une contribution supplémentaire, qui permettrait de récupérer une partie des sommes soustraites aux impôts par le moyen de l'évasion fiscale.
Les cinq plus grandes banques françaises pratiquent l'évasion fiscale à grande échelle, pour plus 5,5 milliards d'euros cette année. Nous aurions préféré vous proposer un amendement tendant à l'interdiction pure et simple du recours aux paradis fiscaux par les banques françaises, sous peine de retrait de licence bancaire ; cette proposition a malheureusement été déclarée irrecevable.
Nous vous proposons par cet amendement une solution concrète en matière de justice fiscale et sociale, qui enverrait un signal très fort, conformément aux attentes de nos concitoyens, au sujet de l'évasion fiscale. Nous en parlons beaucoup, mais les Français ne comprennent pas comment l'on peut envoyer de l'argent dans les paradis fiscaux en toute impunité. Voilà pourquoi nous vous proposions cette mesure applicable aux banques françaises, pour commencer.
Il est vrai que nous avons encore beaucoup à faire pour lutter contre l'optimisation fiscale agressive. Mais votre amendement vise spécialement les banques : elles ne sont pas les seules – loin s'en faut – à pratiquer l'optimisation fiscale. L'ensemble des multinationales, notamment les sociétés du numérique, y recourent certainement plus que les banques.
Pourquoi ciblez-vous les banques ? Certainement parce que ce sont les seules entreprises soumises à une obligation de transparence concernant leurs résultats financiers. C'est ainsi que l'on repère plus facilement leurs dérives que celles des autres multinationales. Je connais bien les dispositions en cause de la loi bancaire du 26 juillet 2013, puisqu'elles sont issues d'un amendement sur le reporting bancaire dont j'étais l'auteur.
Or les informations dont nous disposons concernant les banques ne sont malheureusement pas publiques s'agissant des autres sociétés, ce qui fait que les premières sont plus exposées que les secondes. Cela me gêne donc un peu que votre amendement cible les banques alors qu'en réalité le problème est universel.
L'amendement no 1630 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Danièle Obono, pour soutenir l'amendement no 1400 .
Monsieur le ministre, vous avez indiqué il y a quelques instants à nos collègues siégeant sur les bancs de la droite que vous étiez ouvert à la révision d'un certain nombre de crédits d'impôts. Pour notre part, au moyen de cet amendement, nous proposons de supprimer le crédit d'impôt recherche.
Ce dispositif est dit « d'attractivité fiscale » ; il est vanté comme tel à l'extérieur de nos frontières. Plafonné au niveau des filiales mais pas au niveau du groupe, il est souvent utilisé dans les montages d'évasion fiscale. Les groupes l'utilisent puis cèdent leurs brevets à une de leurs filiales établie dans un paradis fiscal, et déduisent les redevances de leurs bénéfices imposables en France.
Ce dispositif est donc à la fois inefficace et utilisé de manière abusive, comme l'a montré en 2013 la Cour des comptes : c'est la double peine pour les finances publiques. Nous ne sommes pas seuls à considérer que le crédit d'impôt recherche pose problème : l'auteure d'un rapport sénatorial de 2015 parlait à ce sujet d'une forme d'omertà, tant il y a d'opacité en la matière. Elle écrivait que le CIR est perçu de plus en plus comme un simple outil d'optimisation fiscale et de réduction de l'impôt sur les sociétés pour les grands groupes du CAC 40 qui, en volume, en sont les premiers bénéficiaires. »
Il y a des entreprises qui n'acquittent pas un centime d'euro au titre de l'impôt sur les sociétés, mais qui touchent quand même le CIR ; certaines ne paient pas d'impôts grâce au CIR. Il s'agit non seulement des banques, mais aussi des enseignes de la grande distribution dont la contribution à la recherche est quelque peu sujette à caution.
Les critiques contre ce crédit d'impôt proviennent aussi des acteurs et actrices de la recherche qui y voient non seulement un mécanisme d'optimisation fiscale agressive comme le disait M. Alauzet, mais aussi un mécanisme pesant sur la recherche à travers un certain nombre de déductions.
Par ailleurs nous avons formulé des propositions afin de rediriger les sommes ainsi économisées – on parle de près de 5 milliards d'euros – …
… vers la recherche publique. Je ne doute pas que cet argument vous convaincra, puisque vous voulez lutter….
Le crédit d'impôt recherche n'est sans doute pas parfait ; cela étant, je rappelle que notre pays est – selon une étude de l'Association nationale de la recherche et de la technologie fondée sur les données de l'OCDE – un des premiers pôles de recherche industrielle au monde. Le CIR n'a donc pas que des effets négatifs, loin s'en faut. Sa suppression risque donc d'avoir des conséquences négatives en matière de recherche et développement. Cela nuirait vraiment à l'innovation française. L'avis de la commission est donc défavorable.
Vous nous dites que le crédit d'impôt recherche a peut-être des effets positifs. Mais ce qui est sûr, c'est que si l'on employait les 5 à 6 milliards d'euros qu'il coûte chaque année pour financer directement la recherche, alors il y aurait bien plus d'effets positifs tangibles. Pour l'instant, les effets positifs du CIR sont hypothétiques, mais que ce soit un outil d'optimisation fiscale, c'est une certitude !
On pourrait envisager de maintenir un crédit d'impôt, mais pour un montant bien moindre, ce qui permettrait de consacrer 4 milliards d'euros supplémentaires à la recherche publique. Avec une telle somme, on pourrait faire de belles choses ! Il y a beaucoup de domaines dans lesquels les instituts de recherche devraient avoir les moyens d'attirer des chercheurs de renommée internationale – je prends cet exemple à dessein car vous employez souvent ce genre d'argument.
Quand on remet en question la pertinence du crédit d'impôt recherche, votre réaction, c'est « Touche pas au grisbi ! ». Pourtant cet argent pourrait servir vraiment l'innovation, la recherche et développement, et ainsi favoriser l'éclosion des inventions du futur.
L'amendement no 1400 n'est pas adopté.
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement no 580 rectifié .
Les dispositions relatives au crédit d'impôt recherche donnent au ministre de la recherche le pouvoir d'agréer les organismes privés non lucratifs auxquels les entreprises pourront confier des travaux de recherche tout en pouvant imputer la dépense correspondante au titre de leur crédit d'impôt recherche.
Cette liste est restrictive : elle ne peut mentionner que des fondations reconnues d'utilité publique du secteur de la recherche. Une telle limite écarte de façon anormale les ressources scientifiques et les compétences des associations reconnues d'utilité publique, des fonds de dotation, des fondations hospitalières ou des fondations partenariales. Cet amendement a précisément pour objet d'ouvrir la liste à ces organismes.
Le ministre de la recherche conserverait sa compétence en matière d'agrément, ce qui évitera tout mauvais usage, et permettra de tenir compte des différences de statuts entre les fondations et les fonds de dotation.
Lors de nos débats en commission, cet amendement a été présenté puis retiré après que j'ai fait remarquer que sa rédaction ne prévoit d'agrément que pour les fondations hospitalières ou partenariales, et supprime cet agrément pour toutes les autres structures. Je vous invite donc à retirer à nouveau cet amendement, sans quoi – en dépit de vos bonnes intentions – vous provoqueriez un hiatus dans le droit.
Au demeurant les associations peuvent être sous-traitantes ; des dispositions existent déjà à ce propos ; de sorte que cet amendement provoquerait un effet de bord négatif.
Défavorable.
Ne pourrait-on le sous-amender pour corriger l'erreur décelée par M. le rapporteur général ?
Il vaut mieux le retirer, pour en présenter une version correcte lors de l'examen du prochain projet de loi de finances rectificative.
L'amendement no 580 rectifié est retiré.
J'ai présenté vendredi dernier un rapport sur les crédits de la recherche. Ces deux amendements prolongent le travail que j'ai réalisé à cette occasion.
L'amendement no 1771 vise à renforcer les obligations d'information des entreprises lorsqu'elles bénéficient du crédit d'impôt recherche, en y ajoutant des dispositions relatives à l'emploi des titulaires d'un doctorat.
Le crédit impôt recherche prévoit déjà des dispositions pour favoriser le recrutement des titulaires de doctorat en entreprise, mais nous savons que leur insertion reste malheureusement largement insuffisante en France, les seuls emplois ouverts par les organismes de recherche ne permettant pas le recrutement de toutes les personnes diplômées chaque année.
L'amendement no 1771 propose que les entreprises qui engagent plus de 100 millions d'euros de dépenses de recherche au sens de l'article 244 quater B du code général des impôts doivent, outre la nature de leurs travaux, l'état d'avancement de leurs programmes, les moyens matériels et humains, directs et indirects, qui y sont consacrés, compléter leur déclaration de crédit impôt recherche en indiquant « la part de docteurs financés par ces dépenses, le nombre d'équivalents temps plein correspondants et leur rémunération moyenne, et la localisation de ces moyens ». Le but n'est pas de faire de la paperasse en plus, mais d'inciter les entreprises à engager une vraie réflexion sur leur politique de recrutement de docteurs dans le cadre des projets de recherche qu'elles mettent en oeuvre.
Ces informations nourrissant la réflexion, le ministre chargé de la recherche publiera chaque année un rapport synthétique sur l'utilisation du crédit impôt recherche par ses bénéficiaires. Nous pourrons ainsi évaluer et contrôler dans quelle mesure est rempli l'objectif de renforcement de l'insertion professionnelle des titulaires d'un doctorat par le biais du dispositif du crédit impôt recherche. Je le répète, il ne s'agit pas d'augmenter la paperasse, mais simplement de compléter une disposition existante afin de connaître la politique des entreprises en matière de recrutement de docteurs.
L'amendement no 1769 propose, lui, d'appliquer la disposition susmentionnée aux entreprises qui engagent plus d'un million d'euros de dépenses de recherche et développement. Un seuil très fortement abaissé permettrait en effet de cibler suffisamment d'entreprises pour en tirer des informations encore plus pertinentes, y compris s'agissant des plus petites entreprises, TPE et start-ups, qui souvent, et c'est intéressant, embauchent en proportion plus de docteurs que les grandes entreprises. Elles ont en effet besoin de compétences plus fines, et ce sont souvent des docteurs qui leur permettent de satisfaire leurs besoins en la matière. Là aussi, cela permettrait de mieux comprendre qui embauche des docteurs et de connaître l'avenir que nous offrons à ceux que forme l'État dans l'excellence, au sein de nos universités et nos centres de recherche, à la pointe mondiale dans de nombreux domaines.
Je souligne d'emblée qu'aucun n'aurait d'incidence budgétaire. Même avis que la commission sur l'amendement no 1771 . La déclaration du nombre de docteurs compléterait à bon droit les informations exigibles au titre de ce crédit d'impôt. Sur le second, je pense que si l'intention est louable, j'ai aussi remarqué que vous avez utilisé deux fois le mot « paperasse » dans votre intervention, madame la députée, ce qui dénote un inconscient assez chargé… Je préférerais que vous le retiriez parce que le Gouvernement veut aussi simplifier la vie des entreprises. Un retrait de votre part, plutôt qu'une demande de rejet de la mienne, nous permettrait de garder de bonnes relations.
Sourires.
Comme je souhaite garder de très bonnes relations avec le ministre, je le retire, non sans rappeler que si nous votons l'amendement no 1771 , nous aurons ainsi l'avantage de mieux comprendre au fil des années qui embauche les docteurs et, du coup, de pouvoir demander à un nombre croissant d'entreprises d'expliquer leur politique de recrutement. Nous y veillerons au cours de cette législature.
L'amendement no 1769 est retiré.
L'amendement no 1771 est adopté.
Je suis saisi de plusieurs amendements identiques, nos 574 , 807 rectifié et 1763 .
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement no 574 .
Monsieur le ministre, mes collègues Gilles Lurton, Émilie Bonnivard, Ian Boucard et moi-même souhaitons vous proposer d'étendre l'assiette du crédit d'impôt famille, dit « CIFAM », afin de permettre aux indépendants d'en bénéficier pour la garde de leurs enfants même quand ils n'ont pas de salariés. En effet, ce dispositif concerne actuellement uniquement les entreprises qui ont des salariés. Les professions libérales et les gérants non-salariés n'en bénéficient qu'à la condition que leur entreprise emploie des salariés en bénéficiant également.
Il s'agit donc de mettre fin à une discrimination en intégrant toutes les formes d'entreprises dans le champ d'application du crédit d'impôt famille : professions libérales, gérants non-salariés, entreprises individuelles, artisans, auto-entrepreneurs. La mesure d'extension du CIFAM, en soutenant la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale des indépendants, rétablirait ainsi une égalité de traitement entre salariés et indépendants. Elle compléterait le programme gouvernemental pour les travailleurs indépendants présenté par le Premier ministre Édouard Philippe à Dijon le 5 septembre 2017 puisqu'elle permettrait de dégager du pouvoir d'achat pour les indépendants et de soutenir la création d'entreprises en permettant aux jeunes parents de concilier vie professionnelle et familiale.
Approbations sur les bancs du groupe LR.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement no 807 rectifié .
Pour compléter les arguments de mon collègue, je tiens à mettre l'accent sur le fait que nous sommes devant une vraie inégalité parce que, suivant que les gérants non-salariés et les professions libérales ont ou non des salariés, ils n'ont pas les mêmes droits au regard du crédit d'impôt famille.
Second point : dans une période de diminution du soutien aux familles du fait des dispositions prises sur la PAJE – prestation d'accueil du jeune enfant – dans le PLFSS, ce qui va conduire à en priver des familles et à la réduire pour d'autres, il serait important de donner un signal positif aux jeunes parents qui ont des difficultés à concilier vie professionnelle et vie familiale. Il faut leur apporter un soutien très fort.
La parole est à Mme Sarah El Haïry, pour soutenir l'amendement no 1763 .
Dans la continuité des explications de nos collègues, nous sommes, au sein du groupe MODEM et apparentés, également favorables à une extension du crédit d'impôt famille. Il s'agit évidemment de mettre fin à une discrimination parce qu'en fonction de la typologie de son entreprise, selon qu'elle a ou non des salariés qui en bénéficient, on n'a pas accès aux mêmes droits.
L'élargissement de l'assiette se justifie d'autant plus qu'il permettra une égalité de traitement entre salariés et indépendants, ce qui, j'en suis sûr, fera extrêmement plaisir au Premier ministre, dont le souci est justement de réduire les inégalités entre ces deux catégories. Je vais même plus loin : le gain de pouvoir d'achat qu'une telle mesure procurerait aux indépendants est conforme à la philosophie de la majorité présidentielle. Un autre effet positif serait de favoriser la création d'entreprises en donnant aux jeunes parents la possibilité de s'organiser et de mieux concilier leur vie familiale et leur vie professionnelle.
Les membres de notre groupe attendent un signal positif fort dans le cadre de la politique familiale, d'autant plus qu'un risque pèse sur l'universalité des allocations familiales à laquelle nous sommes extrêmement attachés.
Voilà les raisons pour lesquelles nous espérons que l'avis sera favorable.
Vifs applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Ces amendements, examinés au titre de l'article 86, ont été rejetés par la commission. Leurs défenseurs, que j'ai bien écoutés, entendent faire bénéficier les familles d'un crédit d'impôt qui s'adresse en fait aux entreprises. Il existe par ailleurs un crédit d'impôt pour frais de garde d'enfant qui, lui, s'adresse aux familles. Hormis peut-être le cas particulier des entreprises sans salarié, le crédit d'impôt famille permet déjà, grâce à la souplesse de ses dispositions, d'embrasser un champ assez large. C'est pourquoi je confirme l'avis défavorable.
J'ai moi-même rencontré les entreprises qui font cette proposition : ils ont recours à la même argumentation que les défenseurs des amendements, mais j'avais été surpris d'entendre qu'une telle mesure ne coûterait rien. Elle coûterait tout de même quelque 20 millions d'euros, il faut le savoir. Ce ne serait donc pas à coût constant.
Deuxièmement, j'ai du mal à entendre l'argument d'une discrimination entre les familles, selon qu'il s'agit de salariés ou d'indépendants. Le principe de ce crédit d'impôt est d'inciter les entreprises à financer des places en crèche pour les enfants de ses salariés. Il ne peut s'appliquer aux indépendants qui, par définition, ne sont pas salariés. Les deux statuts ont d'ailleurs leurs avantages et leurs inconvénients. Le mot « discrimination » me paraît donc beaucoup trop dur et ne rend pas compte de la réalité.
Troisièmement, M. le rapporteur a évoqué à juste raison un autre crédit d'impôt destiné aux familles, notamment pour les indépendants : celui prévu au titre des frais de garde. Peut-être n'est-il pas assez avantageux ; on peut se poser la question et celle des conséquences d'une éventuelle augmentation sur le budget de l'État. Quoi qu'il en soit, il relève d'une tout autre logique que le crédit d'impôt famille.
Enfin, selon le principe de l'évaluation des politiques publiques que nous défendons tous, je pense que vous avez reçu, mesdames, messieurs les députés, le rapport conjoint réalisé par l'inspection générale des finances et l'inspection générale des affaires sociales à l'issue d'une revue des dépenses relatives à la petite enfance. En consultant ce rapport, qui s'intéresse particulièrement aux crédits d'impôt, j'ai vu une proposition qui pourrait vous satisfaire : plafonner le crédit d'impôt « frais de garde » afin de trouver, à coût constant, une répartition plus juste des aides. Mais j'ai cru comprendre, au vu des échanges entre mon cabinet et plusieurs entreprises concernées, que cela n'est pas accepté.
J'émets donc un avis défavorable aux amendements, mais il me semble que vous pourriez continuer à travailler sur le sujet, notamment à partir de l'évaluation menée par les deux corps d'inspection, de façon à améliorer la politique familiale, à laquelle chacun ici est attaché, tout en prenant en considération la différence entre indépendants et salariés. Pourquoi ne pas envisager d'y revenir dans la prochaine loi de finances ou dans le cadre d'un texte sur la petite enfance ? Je pense aux travaux législatifs évoqués par Mme Buzyn, qui seront l'occasion de redéfinir la politique familiale. Le plafonnement que j'ai évoqué aurait l'énorme avantage de donner satisfaction à vos demandes, notamment s'agissant des indépendants, sans coûter d'argent à la puissance publique. Je vous recommande de lire le rapport de l'IGF et de l'IGAS et, pourquoi pas, d'inviter ses auteurs à s'exprimer devant votre commission, comme vous l'avez fait à propos du crédit d'impôt transition énergétique lors d'une audition qui, je le crois, a été éclairante. Je pense que nous prendrions ainsi tous de bonnes mesures pour la famille, bénéfiques aux salariés comme aux indépendants.
Si mes arguments ne vous ont pas convaincu de retirer les amendements, l'avis demeure défavorable.
Monsieur le rapporteur général, vous avez dit que le champ du crédit d'impôt famille était déjà large. Je veux bien l'entendre, mais ne pas permettre aux entreprises dépourvues de salariés d'en bénéficier est tout de même une restriction notable.
Par ailleurs, monsieur le ministre, vous avez indiqué qu'une telle mesure coûterait 20 millions d'euros. C'est probablement vrai, mais je note qu'un amendement gouvernemental, adopté il y a quelques minutes, a mis fin au crédit d'impôt pour dépenses de prospection commerciale – je constate au passage qu'on n'a pas beaucoup parlé des volontaires internationaux à l'export – et au crédit d'impôt pour adhésion à un groupement de prévention agréé, deux dispositions qui avaient aussi un coût et dont la suppression permet de réaliser des économies.
Enfin, si j'entends ce que vous dites, il demeure que les professions libérales et gérants non salariés ne peuvent bénéficier du crédit d'impôt famille. Et si le mot « discrimination » est peut-être trop fort, il y a en tout cas une vraie inégalité et de vrais besoins sur le territoire. Je maintiens donc mon amendement.
Les amendements identiques nos 574 , 807 rectifié et 1763 ne sont pas adoptés.
Cet amendement vise à encourager les entreprises qui mettent en place des dispositifs d'aide et de soutien à leurs salariés ayant le statut d'aidant. La France compte en effet 8,5 millions d'aidants familiaux, dont 4 millions exercent une activité professionnelle.
Dans une société vieillissante, ces nombres ne peuvent que croître dans les années à venir : les pouvoirs publics doivent donc, dès à présent, se saisir de ce sujet sociétal majeur en vue d'inciter entités publiques et privées à soutenir leurs salariés aidants.
La mesure proposée aurait en outre le mérite de consolider un secteur d'activité florissant, celui des entreprises d'accompagnement des salariés concernés par la perte d'autonomie d'un proche âgé, handicapé ou malade chronique. L'amendement s'inscrit ainsi dans un cadre social et philosophique correspondant aux attentes de nos concitoyens, soucieux de voir notre pays maintenir un haut niveau de solidarité entre les générations et de prendre en considération la difficulté, pour les aidants, de concilier vie professionnelle et vie familiale.
Le coût du dispositif, qui n'est pas évalué, doit néanmoins être assez important dans la mesure où l'amendement concerne potentiellement des millions de personnes. Or des dispositifs de soutien aux aidants ont d'ores et déjà été mis en place, tel le congé de proche aidant – institué en 2017, il prévoit le maintien des droits sociaux et des congés payés annuels – ou l'allocation journalière d'accompagnement d'une personne en fin de vie. Peut-être ne sont-ils pas suffisants si l'on considère l'enveloppe financière à laquelle ils correspondent. Pour avoir été dans cette situation à titre personnel, je sais en effet ce que c'est que d'être aidant.
Quoi qu'il en soit, il serait préférable d'évaluer d'abord la pertinence des dispositifs existants, de façon à les améliorer si nécessaire, plutôt que d'accepter une proposition dont nous ne maîtrisons pas le coût. Avis défavorable.
Il est également défavorable.
La parole est à Mme Émilie Bonnivard, pour soutenir l'amendement no 517 .
Il est important que l'État joue son rôle d'intégrateur et favorise l'accessibilité et la participation des personnes handicapées à la vie en société, notamment en facilitant leur autonomie.
Or la véritable autonomie pour les personnes en situation de handicap consiste à pouvoir continuer à vivre chez elles et à y évoluer librement, en toute sécurité et sans trop de difficultés. Pour cela, il est bien souvent nécessaire d'effectuer dans son domicile des aménagements adaptés comme il en existe la plupart du temps dans les établissements spécialisés.
De tels travaux représentent toutefois une lourde charge financière à laquelle il faut ajouter les frais – achat d'un fauteuil roulant ou d'un véhicule adapté – liés au handicap moteur.
En outre, lorsque c'est un enfant qui est touché par le handicap, les parents doivent souvent aménager leur emploi du temps pour pouvoir l'aider dans sa vie quotidienne, ce qui les conduit à diminuer leur temps de travail et entraîne donc une baisse de revenus.
La prestation de compensation pour l'aménagement du logement, qui permet de financer une partie de ces travaux, représente un montant maximal de 10 000 euros sur dix ans : si cette aide est significative, elle reste toutefois insuffisante.
L'amendement propose donc, pour favoriser le financement de travaux destinés à rendre un logement accessible à une personne handicapée ou à une personne âgée en perte d'autonomie, un crédit d'impôt correspondant à 25 % des dépenses, plafonné à 5 000 euros pour une personne seule et à 10 000 euros pour un couple.
Il propose également aux personnes handicapées moteur ou aux personnes accueillant à leur domicile une personne handicapée moteur de bénéficier d'un prêt à taux zéro – PTZ – pour le financement de travaux d'aménagement dans leur résidence principale.
Chère collègue, des dispositifs existent d'ores et déjà en la matière : je pense à celui qui a été voté en première partie du projet de loi de finances pour 2018, à l'article 6 bis, et qui prévoit de baisser de 20 % à 5,5 % le taux de TVA applicable à la location d'équipements et d'ascenseurs pour les personnes en situation de handicap.
Je vous renvoie également aux amendements no 1125 de notre collègue Adrien Taquet et no 1800 que j'ai déposé : ils prévoient notamment de proroger le crédit d'impôt au titre des dépenses d'équipements pour personnes âgées ou handicapées.
Franchement, le dispositif proposé est d'une complexité excessive : ajouter au PTZ et à l'éco-PTZ un PTZ propre aux aménagements destinés aux personnes handicapées entraînerait plus de complications qu'il n'apporterait d'efficacité. Par conséquent, l'avis de la commission est défavorable.
Madame la députée, votre argumentation me paraît assez juste s'agissant des aménagements nécessaires pour permettre le maintien à domicile des personnes handicapées. Elle est surtout pertinente lorsque ces personnes, atteintes de handicaps temporaires ou définitifs, y compris liés au vieillissement, sont de petits propriétaires. Dans ce cas, en effet, ils doivent supporter la totalité du coût des aménagements nécessaires, ce qui peut affecter gravement leur compte en banque et transformer leur vie en enfer.
Cependant, madame la députée, permettez-moi de vous dire que vous vous y prenez mal. D'abord, comme l'a rappelé le rapporteur général, vous faites fi des dispositifs existants comme de l'avancée réalisée par le Gouvernement à la suite du travail effectué par Adrien Taquet.
Ensuite, imaginer un dispositif national pour ce genre de situations n'est à mon sens pas une bonne chose. Comme je l'ai fait dans ma commune, il appartient en effet aux collectivités locales de financer ce type de travaux : d'expérience, il me serait loisible de vous démontrer que beaucoup de banques sont prêtes à accorder des PTZ si c'est en lien avec les collectivités locales.
Une collectivité locale peut en effet négocier des prêts, ce qui est d'autant plus facile que les taux sont aujourd'hui très faibles, et les prendre en charge via son centre communal d'action sociale. Les conseils régionaux peuvent d'ailleurs, sur d'autres sujets, adopter la même démarche.
En effet, le CCAS peut prendre en charge le coût financier d'un PTZ. Évitons la centralisation : les collectivités sont les mieux placées pour agir sur l'aménagement de l'habitat des personnes handicapées.
En effet, passer par l'ANAH – l'Agence nationale de l'habitat – pour construire un dispositif national me paraît de nature à entraîner des frais de gestion importants pour des PTZ qui, outre qu'ils coûteront cher au budget de l'État, seront inefficaces sur le terrain.
Compte tenu du fait que l'État prend largement sa part dans ce paysage, il me paraît préférable, madame la députée, de convaincre les collectivités locales d'agir dans le sens que vous souhaitez.
Je l'ai fait dans ma commune : la quarantaine de PTZ qui ont été accordés ont coûté moins de 10 000 euros. Il s'agit à mon sens d'une très belle politique publique locale qui permet, à moindre frais, de répondre à votre préoccupation. L'avis du Gouvernement est par conséquent défavorable.
Monsieur le ministre, j'ai bien écouté vos propos. Nous avons cependant aujourd'hui l'avantage de discuter de propositions concrètes, portées par notre collègue Damien Abad, qui connaît vraiment bien le sujet.
Monsieur le rapporteur général, vous avez répondu en évoquant les dépenses d'équipement : or, en l'occurrence, nous parlons de travaux d'aménagement.
Si j'ai bien entendu la réponse de M. le ministre concernant le PTZ, l'amendement no 517 comporte une autre proposition : un crédit d'impôt de 25 % pour l'autonomie, plafonné, selon la situation, à 5 000 ou 10 000 euros.
Il s'agit d'une proposition concrète, sachant que dans certaines communes, les CCAS ne sont pas en mesure d'offrir ce type de services. Peut-être qu'à Tourcoing cela s'est avéré possible, et tant mieux, mais les petites communes – la mienne compte moins de 3 000 habitants – ne peuvent pas toujours faire de tels efforts, surtout quand le budget du CCAS est inférieur au montant du prêt envisagé.
Offrir un choix entre PTZ et crédit d'impôt revient à proposer aux personnes qui en ont vraiment besoin le maximum de solutions : cela va donc va dans le bon sens.
Je ne suis en outre pas certain que le dispositif concerné grève le budget de l'État.
L'amendement no 517 n'est pas adopté.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue le vendredi 17 novembre 2017 à zéro heure quarante, est reprise à zéro heure quarante-cinq.
Alors que se tiennent les États généraux de l'alimentation lancés par le Président de la République – c'est une très belle initiative, que nous saluons – , le Gouvernement a annoncé la limitation de certaines aides à l'agriculture biologique, en l'occurrence les aides au maintien. Je le regrette : c'est un sale coup porté à l'agriculture biologique, au moment même où la dynamique était au rendez-vous. Tous les jours en France, au moins une ferme se convertit à l'agriculture biologique. Les ventes de produits biologiques ont augmenté de 20 % en 2016 et les surfaces cultivées en bio se sont accrues de 16 %. Malheureusement, le bio est victime de son succès, puisque les enveloppes et les budgets n'ont pas suivi le boom de l'agriculture biologique. Je crois qu'il manquerait énormément d'argent pour satisfaire les aides qui devraient être dues si celles au maintien de l'agriculture biologique étaient prolongées.
En outre, le crédit d'impôt en faveur de l'agriculture biologique s'arrêtera lui aussi au 31 décembre 2017. Si nous ne faisons rien, ce sera une double peine pour les agriculteurs biologiques. C'est pourquoi j'avais soutenu en commission l'amendement de notre collègue Éric Alauzet, que nous avions adopté.
L'amendement no 1801 tend à prolonger le crédit d'impôt jusqu'en 2020, tout en l'augmentant de 2 500 à 4 000 euros. Il modifie aussi le plafond de cumul des aides et du crédit d'impôt.
L'amendement no 1679 propose le même dispositif que le précédent, tout en durcissant le critère d'éligibilité au crédit d'impôt, en augmentant de 40 % à 60 % la part des recettes issues de l'agriculture biologique.
Quant à l'amendement no 1678 , il vise à prolonger le crédit d'impôt, tout en durcissant les conditions d'éligibilité.
J'anticiperai moi aussi sur la défense de mes deux sous-amendements à l'amendement de la commission des finances.
L'enjeu, c'est la crédibilité que l'on veut donner à notre volonté de trouver des alternatives aux glyphosates, perturbateurs endocriniens, néonicotinoïdes et produits phytosanitaires, en lien avec l'ambition affirmée par le Gouvernement de faire passer de 6 à 8 ou 9 % la part du bio dans la production générale – je pense pour ma part que, vu l'engouement que le bio suscite, nous pourrions être plus ambitieux.
Où en sommes-nous ? Pour 2018, le Gouvernement affiche sa priorité pour la conversion. Parallèlement, l'aide au maintien s'arrête, de même que le crédit d'impôt. Cette situation m'a conduit à ouvrir le débat en commission et à proposer un amendement en faveur de l'aide au maintien. Cet amendement a été adopté. Il s'agissait d'un amendement d'appel, en résonance avec les discussions que le ministre Stéphane Travert mène avec les associations. Le ministre avait lui-même évoqué une solution à l'arrêt du crédit d'impôt à la fin de cette année.
L'amendement de la commission, qui sera appelé un peu plus tard, était mieux que rien, mais n'était pas complètement satisfaisant. D'où l'idée d'écrire un nouvel amendement. Je vois que le Gouvernement a lui aussi pris une initiative, de même que le rapporteur : je pense que nous allons pouvoir converger.
Mon amendement propose de prolonger le crédit d'impôt jusqu'en 2020 et de l'augmenter de 2 500 à 4 000 euros.
J'estime que les arguments de Mme Pires Beaune et de M. Alauzet sont bons. Il se trouve qu'avec Stéphane Travert, nous avons déposé au nom du Gouvernement un amendement qui ressemble de façon fort étonnante à celui de M. le rapporteur général ; on peut même dire qu'ils sont siamois !
Sourires.
La moindre des politesses serait que je retire l'amendement du Gouvernement au profit de celui du rapporteur général, que je vous propose d'adopter. Si les amendements de Mme Pires Beaune et de M. Alauzet n'étaient pas retirés, le Gouvernement émettrait un avis défavorable sur eux.
Le dispositif que nous proposons est conforme, me semble-t-il, aux projets du Gouvernement en matière de production biologique et de produits biologiques. Il permettra de proroger les dispositifs qui arrivent à leur terme en décembre, et de réfléchir à une solution pérenne, en liaison avec le ministre de l'agriculture.
Par conséquent, si M. le rapporteur général défendait son amendement, je retirerais le mien et donnerais sur le sien un avis favorable.
La parole est à M. Joël Giraud, pour soutenir l'amendement no 1913 , identique au précédent.
Puisque M. le ministre m'y invite, je vais donc défendre cet amendement qui ressemble à s'y méprendre à celui du Gouvernement.
Son esprit général a été parfaitement explicité par Christine Pires Beaune. Cela étant, l'amendement qui vous est proposé ce soir est plus généreux que celui qui avait été adopté par la commission la semaine dernière, puisqu'il vise à proroger le dispositif du crédit d'impôt pour trois ans, au lieu de deux, et à en augmenter le montant.
Je voudrais préciser une chose. Si j'ai donné en commission un avis défavorable à l'amendement de M. Alauzet, ce n'est pas parce que j'y étais opposé sur le fond, c'est tout simplement parce que la rédaction proposée soulevait des difficultés. Elle risquait d'entraîner une confusion entre le crédit d'impôt et les aides versées dans le cadre de la politique agricole commune, ce qui aurait conduit à un problème opérationnel. L'administration fiscale a contacté mes services sur ce point ; elle s'inquiétait de la rédaction de l'amendement.
Le présent amendement fonctionne parfaitement. Il permet de reprendre intégralement l'esprit du dispositif tout en l'améliorant, en ce qui concerne tant le montant que la durée.
L'amendement no 1906 est retiré.
Oui, monsieur le président. Je me rallie à l'amendement du rapporteur général – bien que ce ne soit pas tout à fait la même chose – , et je retire mes trois amendements.
De même. Je suis très satisfait du travail de coproduction qui a été mené entre le Parlement et le Gouvernement.
Il ne reste donc plus que l'amendement no 1913 de M. Giraud. Je le mets aux voix.
L'amendement no 1913 est adopté.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l'amendement no 1645 .
Cet amendement propose de restaurer le titre de maître restaurateur, qui prendra fin au 31 décembre 2017. C'est un statut qui récompense les restaurateurs qui élèvent la qualité de leurs établissements et font la promotion du tourisme et de leur établissement. Tous ces métiers qui ont trait à la restauration mériteraient d'être soutenus, car ce sont des activités difficiles, qui ont procédé à un grand nombre de mises aux normes. Elles sont sujettes à beaucoup de réglementations. Un effort en matière de qualité leur est par ailleurs demandé.
Ce dispositif de maître restaurateur, qui donnait lieu à un crédit d'impôt, était très apprécié et donnait de bons résultats. Je n'en connais pas le coût, mais je ne pense pas qu'il soit très élevé. Il me paraît important de soutenir ce dispositif et, à travers lui, cette filière, la restauration, ainsi que tous les emplois qui sont derrière.
L'amendement vise à proroger pour cinq ans le crédit d'impôt dont bénéficient les maîtres restaurateurs. Sur le fond, je n'y suis pas opposé, mais la prorogation proposée me semble excessive et sort des clous de la loi de programmation.
Votre amendement conduirait à créer un nouveau dispositif, alors qu'il existe déjà un article du code général des impôts pour le soutien à ces filières. L'amendement no 1010 était plus raisonnable et aurait pu faire l'objet d'un réemploi. Avis défavorable sur celui-ci.
Je ne pense pas, madame la députée, que ce soit le meilleur moyen de défendre la profession – même si je peux comprendre la philosophie de l'amendement. En effet, l'évaluation des dépenses que l'inspection générale des finances a faite dès 2011 montre que ce dispositif est assez peu efficace pour son coût – qui est d'à peu près 5 millions. L'idée du Gouvernement, qui reprend la vôtre, celle du rapporteur général et celle de M. Véran, c'est d'accorder plus de moyens aux restaurateurs et d'aider ceux qui font de la qualité via un amendement gouvernemental augmentant de 1,5 million d'euros les crédits pour la cuisine française dans le budget de l'agence Atout France. Je pense que ce sera plus efficace que ce que vous proposez, car ce crédit d'impôt est à la fois très cher et a un faible effet incitatif. Je vous suggère donc, madame la députée, de retirer votre amendement ; à défaut j'y émettrais un avis défavorable.
Monsieur le ministre, ce n'est pas un coût important, 5 millions d'euros. Dans mon département de l'Orne, j'ai été saisi par des restaurateurs qui utilisaient ce dispositif, qui les a bien aidés à accroître la qualité de leur établissement.
Si j'ai bien compris, vous allez déposer un amendement du Gouvernement afin de proposer un autre dispositif. Pouvez-vous nous dire à quel moment ?
L'amendement a déjà été voté dans le cadre de l'examen de ce projet de loi de finances.
Vous évoquez l'efficience du dispositif. Or, sur 92 000 restaurateurs installés en France, hormis les restaurations rapides, seuls 3 000 restaurateurs utilisent le label. Le taux de renouvellement est d'à peine deux tiers. Cela veut dire que ce n'est pas toujours d'une grande efficacité, pour une dépense fiscale tout de même assez importante. Il y a sans doute quelque chose à faire pour soutenir la filière, notamment dans un département touristique réputé pour la qualité de sa cuisine comme le vôtre, mais il faudrait le faire différemment. Je vous recommande la lecture du rapport de l'inspection générale des finances de 2011, qui évoquait déjà la relative inefficacité du dispositif par rapport aux montants évoqués. Quand aux crédits d'Atout France, ils ont déjà été votés.
L'amendement no 1645 n'est pas adopté.
Cet amendement vise à permettre aux entreprises imposées d'après leurs bénéfices réels de bénéficier d'un crédit d'impôt égal à 50 % des dépenses ayant pour objet de soutenir les salariés aidants.
Pour rappel, la loi du 28 décembre 2015 relative à l'adaptation de la société au vieillissement a posé les bases juridiques d'une définition des aidants, et le code du travail prévoit des droits à des congés spécifiques et une organisation de travail adaptée pour les salariés aidants. Certaines entreprises vont plus loin et financent, pour leurs salariés aidants, des dispositifs d'accompagnement spécifiques, par exemple pour leurs démarches administratives, et des plates-formes d'assistance, d'écoute et de conseil.
En soutenant ces entreprises indépendamment de leur taille, via une déduction fiscale, la représentation nationale appuierait concrètement tous ceux qui promeuvent la solidarité entre proches.
Mon excellent collègue Alain Ramadier a très bien expliqué notre proposition. J'ai entendu les arguments du rapporteur général, mais il s'agit d'amendements d'appel visant à ce que l'on réfléchisse tous ensemble à cette question des aidants familiaux, qui est de plus en plus importante.
En effet, nous souhaitons tous accompagner le mieux possible nos aînés lorsqu'ils vieillissent. En outre, il est important de poursuivre la politique de maintien à domicile, non seulement au bénéfice de l'état psychique et physique des personnes concernées, mais également pour des raisons financières. M. le ministre parle beaucoup des contraintes budgétaires, et l'on sait que le maintien à domicile coûte souvent beaucoup moins cher qu'une entrée dans un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes – EHPAD – , par exemple. On peut donc se poser la question, même si, pour le coup, j'entends vos arguments.
Par homothétie avec ce que je disais tout à l'heure, je demande le retrait de ces amendements. À défaut, l'avis est défavorable.
Avis défavorable.
La parole est à M. Philippe Dunoyer, pour soutenir l'amendement no 660 .
Je défends cet amendement pour le compte de mon collègue Bertrand Pancher. Nous ne proposons pas de créer une imposition supplémentaire ou d'augmenter un taux, mais de préciser simplement la ventilation du produit d'une taxe inscrite dans le code général des impôts, qui fait partie de l'imposition forfaitaire pesant sur les entreprises de réseau et s'applique aux installations de production d'électricité, que leur source soit nucléaire, thermique, photovoltaïque ou éolienne.
Sur le modèle de l'article 1519 C du CGI, qui prévoit l'affectation du produit de la taxe sur les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent en mer, nous proposons de compléter l'article 1519 D du même code afin de préciser l'affectation du produit de cette taxe, qui irait, pour moitié, au budget des communes dans lesquelles ces installations sont implantées, pour quasiment un tiers à l'Agence française pour la biodiversité et, pour le reste, aux organismes mentionnés à l'article L. 742-9 du code de la sécurité intérieure.
Cet amendement pose un grand problème de ressources pour les départements. Avis défavorable.
Défavorable.
L'amendement no 660 n'est pas adopté.
La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à la prochaine séance.
Prochaine séance, ce matin, à neuf heures trente :
Suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2018 : suite de l'examen des articles non rattachés.
La séance est levée.
La séance est levée à une heure cinq.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Catherine Joly