La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
Hier soir, l'Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s'arrêtant à l'amendement no 878 à l'article 19.
Sur les amendements no 264 et identiques, je suis saisie par le groupe Les Républicains d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 878 , 264 , 902 , 1122 , 1337 , 1719 , 1752 , 2372 , 2595 , 3619 , 4716 , 5267 , 5297 , 5481 , 5956 , 6350 et 7137 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 264 et suivants sont identiques.
L'amendement no 878 de Mme Emmanuelle Ménard est défendu, de même que les amendements nos 264 de M. Julien Dive et 902 de M. Gérard Cherpion.
La parole est à M. Patrice Perrot, pour soutenir l'amendement no 1122 .
L'article 19 conduit à remettre en cause les fondements du droit de l'eau, basés sur la gestion équilibrée et durable de la ressource en eau entre les différents usages. Cet équilibre suppose de concilier les intérêts liés à la protection de l'eau en tant que milieu naturel avec les intérêts liés à sa valeur économique et, conformément à la directive-cadre sur l'eau, de prendre en compte toutes les composantes du milieu aquatique sans en privilégier une plutôt qu'une autre, ainsi que toutes les activités humaines qui s'exercent sur ces milieux, sans hiérarchiser les usages. En modifiant l'article L. 210-1 du code de l'environnement pour que priment les enjeux de la préservation et de la restauration des fonctionnalités de certains écosystèmes, qu'ils soient aquatiques, marins ou de zones humides, on rompra l'équilibre actuel entre les usages. En outre, la réglementation risque de s'en trouver complexifiée. C'est pourquoi je souhaite que l'article 19 soit réécrit.
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement no 1337 .
Nous voici arrivés à l'article 19 qui suscite de fortes attentes parmi les acteurs locaux : ils ne veulent pas remettre en cause les fondements du droit de l'eau, basés sur la gestion équilibrée de la ressource en eau entre les différents usages.
Nous sommes nombreux à soutenir ces amendements identiques, afin que le texte établisse une définition précise des écosystèmes aquatiques qui implique non seulement la préservation mais aussi la restauration des fonctionnalités naturelles, et qui instaure un nouveau concept de patrimoine naturel et paysager de la nation, en plus de celui de patrimoine commun de la nation.
Gardons-nous d'ajouter à l'insécurité juridique des projets locaux sans pour autant parvenir à ce que leurs effets sur l'environnement et le climat soient systématiquement bénéfiques. En réalité, il faudrait conjuguer davantage tous les usages. Or l'article 19 présente des risques ; l'amendement vise – à défaut de le supprimer, puisque toute suppression d'article, dites-vous, reviendrait à amoindrir l'ambition du texte – à en donner une rédaction différente et intéressante : « [… ] le respect des équilibres naturels implique la préservation des fonctionnalités naturelles des écosystèmes aquatiques et de leurs interactions, ces fonctionnalités étant essentielles à la reconquête de la biodiversité, à l'adaptation au changement climatique ainsi qu'à l'atténuation de ses effets et participent à la lutte contre les pollutions ; ».
Les amendements identiques nos 1719 de M. Pierre Cordier, 1752 de Mme Marianne Dubois, 2372 de Mme Valérie Bazin-Malgras, 2595 de M. Thibault Bazin, 3619 de M. Gérard Menuel, 4716 de M. Pierre Venteau, 5267 de M. Yves Hemedinger, 5297 de M. David Habib, 5481 de M. Jean-Claude Bouchet et 5956 de M. Rémy Rebeyrotte sont défendus.
La parole est à M. Jean-Baptiste Moreau, pour soutenir l'amendement no 6350 .
Les agriculteurs peuvent contribuer à préserver la qualité de l'eau ; évitons de les considérer systématiquement comme des pollueurs qui modifient cette ressource. L'entretien des zones humides est essentiel, a fortiori dans le contexte du changement climatique, pour préserver la qualité et la quantité de l'eau, sur la maîtrise de laquelle un enfrichement a bien souvent des effets catastrophiques.
L'amendement no 7137 de M. Julien Aubert est défendu.
La parole est à Mme Cendra Motin, rapporteure de la commission spéciale pour le titre II, pour donner l'avis de la commission sur l'ensemble des amendements en discussion commune.
Face à la multitude des amendements visant à modifier l'alinéa 2 de l'article 19 et à l'insérer à l'article L. 211-1 plutôt qu'au L. 210-1 du code de l'environnement, je me suis posé beaucoup de questions. J'ai donc beaucoup consulté et je me suis interrogée de manière pragmatique car comme l'a dit M. Moreau, ce sont les agriculteurs qui s'inquiètent le plus de ces amendements, et nous voulons tous qu'ils continuent à cultiver leurs terres. J'ai entendu leur inquiétude que nous inscrivions la protection des écosystèmes aquatiques parmi les grands principes généraux de l'eau, ceux qu'énonce l'article 1er de la loi sur l'eau. Or le Gouvernement a choisi de placer la protection et la préservation des écosystèmes aquatiques à l'article L. 210-1 du code de l'environnement parce qu'elles doivent précisément être des principes fondamentaux de la gestion de l'eau. Mais en aucun cas ces principes ne doivent entrer en contradiction avec les dispositions très opérationnelles de l'article L. 211-1 en matière de gestion équilibrée des usages de l'eau.
Rappelons l'avis du Conseil d'État sur l'article 19 : il admet la modification de l'article L. 210-1 « dans la mesure où, bien que peu normative, elle éclaire la notion de "respect des équilibres naturels" figurant déjà » audit article. Il est donc pertinent de conserver l'article 19 dans sa rédaction actuelle. Nous pouvons faire confiance au Conseil d'État qui, à aucun moment, n'a jugé que cet article entraînerait un quelconque déséquilibre entre les usages de l'eau.
J'ai également consulté des avocats et des praticiens qui utilisent au quotidien le code de l'environnement. Tous ont été unanimes : en plaçant l'alinéa 2 de l'article 19 à l'article L. 210-1, on rappelle un principe général et, ce faisant, on leur donne un éclairage plus précis sur la notion de respect des équilibres naturels, sans pour autant déséquilibrer les bons usages et la gestion de l'eau. En revanche, en déplaçant cette notion à l'article L. 211-1, on ouvrirait la voie à des contentieux en pagaille et on exposerait les agriculteurs à beaucoup plus de difficultés. En toute bonne foi, parce que vous voulez mettre en exergue l'importance des bons usages de l'eau et de la gestion équilibrée, vous risquez, par ces amendements, de faire finalement plus de mal que de bien, notamment à ceux que vous essayez de protéger. C'est pourquoi je vous propose de les retirer ; à défaut, avis défavorable.
La parole est à Mme la ministre de la transition écologique, pour donner l'avis du Gouvernement.
Comme en commission spéciale, cet article suscite des questions et, comme vient de le faire très justement Mme la rapporteure, il faut que nous en expliquions à nouveau le sens. L'article 19 vise à ajouter aux grands principes du droit la reconnaissance du grand cycle de l'eau et du lien direct entre la ressource en eau et la préservation des écosystèmes et de leur fonctionnement. J'entends les inquiétudes de plusieurs acteurs concernant les risques que cette disposition pourrait faire peser sur certains usages de l'eau et sur leur hiérarchie. Je vous invite à relire l'article 19 avec attention : la hiérarchie des usages n'y est pas modifiée puisqu'elle est abordée à l'article suivant du code de l'environnement.
Au-delà de cet argument légistique qui devrait suffire à rassurer tout le monde, je dirais même que l'article 19 tel que nous le proposons produit l'effet contraire à ce qui lui est reproché. Quand les acteurs locaux élaborent les fameux PTGE (projets de territoire pour la gestion de l'eau), ils ont pleinement conscience que la ressource dont ils discutent est la même pour tous et qu'elle circule entre différents compartiments – naturels ou construits par l'homme – du cycle de l'eau. Dans l'article 19, nous rappelons qu'il n'y a pas d'usage de l'eau sans écosystèmes préservés et fonctionnels. Rien ne modifie la manière dont la répartition de la ressource doit se faire.
Certains amendements visent à déplacer le contenu de l'article 19 dans l'article suivant du code de l'environnement, le fameux L. 211-1, qui est précisément celui qui hiérarchise les usages de l'eau. Ce faisant, on modifierait l'équilibre trouvé dans la loi depuis de nombreuses années sans avoir jamais été remis en cause.
Nous pouvons nous retrouver autour de ces principes qui font consensus, comme la reconnaissance de l'importance du grand cycle de l'eau. Employons plutôt nos forces rechercher un usage raisonné et durable de l'eau, qui permettrait d'y avoir accès et de s'en servir dans de bonnes conditions. Il me semble que là est la priorité, plutôt que de modifier des hiérarchies qui font leurs preuves depuis des années. C'est pourquoi j'émets un avis défavorable.
Placer le contenu de l'article 19 à l'article L. 210-1 du code de l'environnement permet de donner un cadre général au partage de l'eau, car cet article est précisément d'ordre général et ne concerne pas la différenciation entre les usages. C'est une fois ce cadre posé que peut se poser la question du partage, qui suppose que l'eau soit abondante dans les écosystèmes – ce qui n'est pas le cas, et il faut y remédier.
Inscrire cet alinéa dans le cadre général de l'article L. 210-1 permet de sanctuariser l'eau et sa protection dans les écosystèmes. Encore une fois, il ne s'agit aucunement à ce stade des usages, lesquels peuvent être concurrentiels. L'usage agricole n'est pas seul, et le titre Ier du code de l'environnement ne le concerne pas plus qu'un autre. Il s'agit simplement de renforcer l'objectif d'abondance de la ressource en eau.
Votre explication, madame la ministre, n'est ni rassurante ni convaincante. Comme Mme Tuffnell vient de le souligner, il est évidemment nécessaire de préserver le grand cycle de l'eau et d'en garantir la quantité nécessaire afin de répondre aux besoins des différents usagers. Je ne vois donc pas l'intérêt de renforcer ce cadre général ; selon l'interprétation qui en sera faite, une telle modification législative risque au contraire de verrouiller les dispositions encadrant tel ou tel usage.
La gouvernance, ensuite : chacun est suffisamment averti de l'importance de la ressource en eau pour laisser la responsabilité d'organiser les usages, dans le grand comme le petit cycle de l'eau, aux acteurs locaux qui sont d'abord des experts capables de mesurer les défis, les contraintes, les difficultés ; ils ont déjà accompli un travail considérable pour préserver et pour hiérarchiser les usages possibles de cette ressource, au cas par cas, car la situation n'est pas uniforme. Modifier les codes sur ce sujet serait donc plus dangereux qu'autre chose.
Mon amendement no 5129 a été considéré comme non soutenu, alors que j'étais là pour le défendre.
Il est vrai que vous étiez là, mais personne n'a réagi quand je l'ai appelé.
Ce n'est pas grave.
L'argumentaire de la rapporteure et de la ministre est surprenant : à les croire, non seulement l'alinéa dont l'article 19 vise l'insertion dans l'article L. 210-1 du code de l'environnement ne sert à rien, mais son insertion dans l'article L. 211-1 pourrait même le rendre dangereux !
Dans son avis, le Conseil d'État lui-même a estimé que cet alinéa ne sert à rien parce qu'il n'a pas de caractère normatif. Cependant, hier soir, vous avez refusé de supprimer l'article 19. Acceptez au moins d'insérer ce passage dans l'article suivant du code de l'environnement, afin de rassurer les utilisateurs. En effet, la nature n'est pas un bien en soi : il faut trouver un équilibre, et c'est aux représentants du peuple qu'il revient de définir les règles. Comme vous l'avez souligné, les usages de l'eau ne sont pas ici évoqués, or l'eau n'est pas « en et pour soi », selon le concept d'un philosophe célèbre. Quelque chose ne tourne pas rond dans votre argumentaire.
La parole est à M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général de la commission spéciale.
Il ne faut pas faire dire à cet article ce qu'il ne dit pas. Il ne s'agit pas de modifier les éléments fondamentaux du code de l'environnement : l'eau est un patrimoine commun ; sa valorisation comme ressource économique est reconnue – cela rassurera les agriculteurs – ; la politique active de stockage de l'eau sera poursuivie. L'article 19 n'est en rien contradictoire avec ces éléments, il tend seulement à éclairer et à préciser la notion de respect des équilibres naturels. Les activités liées à l'eau ne courent pas de risque. Évitons de susciter des peurs qui ne reposent sur rien dans le texte.
Il s'agit de restaurer les écosystèmes aquatiques en affirmant que la protection de la ressource est prédominante. Il ne sert à rien d'asseoir une obligation de restauration si elle n'apparaît pas dans l'article général, car l'eau sera alors considérée comme une simple ressource à se partager. L'article 19 vise à affirmer avec force l'intérêt de protéger des écosystèmes aquatiques. De là découleront la protection de l'eau et son partage, envisagés dans la suite du code.
L'amendement no 878 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 137
Nombre de suffrages exprimés 116
Majorité absolue 59
Pour l'adoption 30
Contre 86
La parole est à Mme Barbara Bessot Ballot, pour soutenir l'amendement no 6051 .
Il vise à reconnaître qu'il est légitime de préserver les écosystèmes aquatiques créés par l'activité humaine lorsqu'ils ont une incidence biologique positive. Dans le cadre de la protection du grand cycle de l'eau, ce projet de loi nous permet opportunément de prendre en compte les avantages certains que des aménagements humains équilibrés présentent pour la biodiversité. Non seulement ils respectent les écosystèmes, mais ils les préservent et les protègent. Citons les retenues faibles des barrages de petite hydroélectricité : insuffisantes pour aggraver les effets d'une sécheresse, elles peuvent même créer les conditions nécessaires au stockage d'un volume d'eau appréciable pour l'écosystème.
L'amendement ne fait pas obstacle à la continuité écologique des cours d'eau, puisqu'il concerne uniquement les écosystèmes dont on peut démontrer l'impact positif sur la biodiversité. Je précise qu'il fait écho aux observations de la Coordination nationale Eaux et rivières humaines.
En mettant un accent particulier sur l'hydroélectricité dans l'énoncé d'un principe fondamental, comme celui que l'article 19 tend à modifier, votre amendement semble faire prévaloir cet usage de l'eau. Vous comprendrez que nous ne pouvons déséquilibrer les autres usages à son profit. Nous y reviendrons sans doute à l'occasion d'une longue série d'amendements sur les moulins et la petite hydroélectricité.
Exclamations sur quelques bancs du groupe LR.
À ce stade, même si ce mode de production énergétique est éminemment vert et important pour le pays, je vous demande de retirer votre amendement, à défaut l'avis sera défavorable.
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la biodiversité, pour donner l'avis du Gouvernement.
Je confirme qu'une telle énumération, non exhaustive, dans deux articles successifs du code, risquerait de brouiller le message relatif aux usages anthropiques de l'eau. Parmi eux, l'hydroélectricité est déjà mentionnée. Demande de retrait ou avis défavorable.
Je le retire. La petite hydroélectricité ne constitue peut-être pas un sujet de réflexion important au niveau national, en raison de sa faible ampleur, mais il n'en va pas de même dans les territoires ruraux.
L'amendement no 6051 est retiré.
La parole est à M. Christophe Jerretie, pour soutenir l'amendement no 5751 .
Il est lié à l'amendement no 5774 portant article additionnel après l'article 19, que je défends par anticipation.
L'article L. 210-1 du code de l'environnement expose le droit d'utilisation de l'eau, son usage et son coût. En insérant un alinéa sur les écosystèmes, vous mettez à mal la logique du principe du droit de l'eau. Selon moi, c'est dangereux.
Le premier des deux amendements vise à remplacer l'alinéa que vous proposez par un autre, qui concerne le principe général de l'eau, beaucoup plus important à mon sens : « L'équilibre quantitatif et qualitatif entre les prélèvements dans les ressources en eau et leur recharge naturelle doit être assuré ». Voilà le fondement qui manque dans l'article 19 : la compensation de l'eau consommée par l'eau naturelle, qui doit revenir. Nous sommes tous capables d'en mesurer l'importance en matière de droit et de comprendre l'intérêt de la distinction entre quantitatif et qualitatif concernant les impacts : il est indispensable d'apporter cette précision dans l'article L. 210-1.
L'amendement no 5774 ne vise pas à redéfinir les écosystèmes mais à créer un article L. 210-2 de principe, spécifique au milieu naturel. Le droit de l'eau ne serait pas mis à mal et on intégrerait la difficulté de protéger les écosystèmes des milieux marin et aquatique.
Il me semble essentiel de ne pas mélanger ces deux sujets. En effet, on malmène l'article L. 210-1, au fondement du droit de l'eau et des jurisprudences associées, et que nous appliquons dans nos territoires. Attention à cet élément.
Il s'agit certes de deux amendements un peu complexes, qui n'ont pas été présentés en commission – je les dépose parce que j'ai beaucoup travaillé dans le domaine de l'eau. Il faudra se pencher sur ce sujet pendant la navette. Je n'ai pas beaucoup détaillé les exposés sommaires, mais il existe des éléments très concrets qui me poussent à vouloir absolument distinguer l'alinéa de l'article 19 du droit de l'eau tel qu'il est défini par l'article L. 210-1. Je propose donc de créer un nouvel article, afin de ne pas soulever de doutes, ni faire peser les difficultés sur l'usager de l'eau.
Je vous répondrai sur l'amendement no 5751 et je vous répondrai sur le no 5774 lorsqu'il sera appelé. Vous proposez d'ajouter à l'article L. 210-1 une mention visant à assurer l'équilibre quantitatif et qualitatif de l'eau. Elle n'a pas vraiment sa place dans un article de principe qui ne définit pas les usages de l'eau, mais l'objectif de la préserver.
Il y est question de l'eau comme d'un patrimoine national – et non paysager, puisque nous avons enlevé le terme lors de l'examen en commission ; j'en profite pour rectifier le propos de M. Bazin.
En revanche, dans un article du code de l'environnement consacré aux conditions nécessaires à la préservation des équilibres, vous retrouverez les notions que vous défendez et qui sont essentielles. Je sais qu'en Corrèze, votre département, la sécheresse a provoqué d'importantes difficultés ces dernières années, notamment en matière d'eau potable. L'amendement de Martial Saddier que nous avons adopté en commission, créant l'article 19 bis, répond parfaitement à votre préoccupation. Je vous propose donc de retirer votre amendement, sinon l'avis sera défavorable.
À ce stade de la discussion, et au moment où la réglementation européenne et la directive-cadre sur l'eau nous imposent d'observer le bon état écologique des cours d'eau sur le fondement d'indicateurs biologiques et de qualité, liés à leur fonctionnalité, il serait regrettable de restreindre le respect des équilibres naturels aux seuls équilibres quantitatif et qualitatif. Vous le savez, certains prélèvements portent atteinte à la fonctionnalité des cours d'eau. Nous devons garantir une vision beaucoup plus globale de la gestion de la ressource. L'avis est donc défavorable.
L'amendement no 5751 n'est pas adopté.
Il vise à préciser que la gestion des écosystèmes aquatiques tient compte des objectifs nationaux et européens en matière de climat, d'énergie, de biodiversité et de bon état des masses d'eau. Il permet ainsi une gestion cohérente des écosystèmes aquatiques, dans la lignée des grandes orientations fixées au niveau national et au niveau européen. Il réaffirme donc l'importance d'atteindre un bon équilibre des usages dans la gestion des écosystèmes.
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement no 2593 .
Selon vous, madame la rapporteure, l'article 19 répond à une attente de la Convention citoyenne pour le climat. Or les interventions de mes collègues montrent qu'une inquiétude subsiste eu égard à la modification du code de l'environnement, dont les dispositions actuelles permettent une gestion équilibrée de la ressource en eau.
Les enjeux liés à l'eau ne concernent pas uniquement la Corrèze puisque mon département, par exemple, a aussi connu des problèmes dus à la sécheresse, qui concernent non seulement les citoyens, mais aussi beaucoup d'autres d'acteurs. Alors que l'article 19 prévoit d'insérer un nouvel alinéa dans le code de l'environnement, il nous semble essentiel d'ajouter les mots « sans préjudice de la gestion équilibrée et durable de la ressource en eau définie à l'article L. 211-1 ».
Pourquoi y attachons-nous une telle importance ? Parce que l'article 19 permet de concilier la préservation des équilibres naturels avec les usages anthropiques de l'eau – irrigation, hydroélectricité, loisirs. La logique est celle du développement durable, et non pas seulement d'une une vision statique de la ressource en eau. Aussi est-il important de pouvoir concilier la politique de préservation des écosystèmes aquatiques avec les différents usages de l'eau : une telle précision permettrait de rassurer tout le monde.
La parole est à M. Jean-Marie Sermier, pour soutenir l'amendement no 4564 .
L'usage de l'eau est si essentiel qu'il est à l'origine de guerres dans certains pays qui en manquent. Les problèmes liés à l'eau génèrent aussi beaucoup de conflits locaux. Chacun d'entre nous a ainsi déjà entendu les remarques faites lorsqu'un agriculteur irrigue en plein été, ignorant en partie le travail accompli en amont pour économiser l'eau d'irrigation et pour faire en sorte de ne donner à la plante que ce qui lui est strictement nécessaire.
Tout le monde a aussi en tête les problèmes entre les pêcheurs et les kayakistes sur les rivières. Tout le monde a en tête les problèmes d'eau potable dans certaines collectivités, qu'il faut raccorder très rapidement lorsque l'eau manque. En somme, l'eau est essentielle à la vie de nos concitoyens, à leurs métiers, aux collectivités.
Vous venez de préciser un point important, madame la ministre, en indiquant que l'article 19 ne modifie pas l'article L. 211-1 du code de l'environnement. Nous vous avons entendue : le présent amendement, identique à ceux défendus par M. de Courson et par M. Bazin, propose d'inscrire vos propos dans la loi.
Accepter ces amendements reviendrait à admettre que l'article 19 modifie l'équilibre actuel, ce qui n'est pas le cas.
La modification de l'article L. 210-1 du code de l'environnement proposée par le présent texte n'est pas inutile, puisque, monsieur de Courson, comme vous le savez, un amendement de principe permet de fixer un cap et d'indiquer les fondements qui sous-tendent les décisions, comme le fait l'article L. 210-1, qui indique que l'eau fait partie de notre patrimoine commun. L'article L. 211-1 est plus opérationnel et entre dans le détail. L'article 19 ne modifie en rien l'équilibre actuel et il n'est pas utile de le préciser.
Les écosystèmes aquatiques sont au coeur du dispositif, parce qu'ils nous permettent de nous protéger et de régénérer nos ressources en eau. Vous avez raison, monsieur Bazin, la Corrèze n'est pas le seul endroit à connaître des problèmes de sécheresse.
Si, au contraire !
Tous les territoires connaissent des épisodes de sécheresse. La préservation des ressources, dont les écosystèmes aquatiques font partie, est un enjeu essentiel, pour les usages agricoles et industriels comme pour les particuliers.
Le texte ne modifie pas les grands équilibres des usages de l'eau, parce que tel n'est pas l'objet de l'article 19, qui réaffirme que la préservation des écosystèmes aquatiques est au nombre de nos principes et de nos valeurs fondamentales. Je vous invite donc à retirer vos amendements, à défaut ce sera un avis défavorable.
Il serait effectivement curieux qu'un texte législatif comporte des articles qui se contredisent. La rédaction actuelle est cohérente. Ces amendements ne sont donc ni nécessaires, ni utiles : j'y suis défavorable.
Ces trois amendements identiques constituent, madame la rapporteure, un filet de sécurité. Si l'on en croit votre thèse, il ne coûte rien de les adopter puisqu'ils renvoient au code de l'environnement et visent simplement à inscrire dans la loi ce que vous dites ici, afin de dissiper les inquiétudes liées à cet article déclaratif. Je rappelle à cet égard l'avis du Conseil d'État, indiquant l'absence de portée juridique.
Il vise à consacrer le potentiel énergétique de l'eau dans la loi. Je reviens à la charge au sujet de la petite hydroélectricité mais il s'agit de valoriser le patrimoine et de le rendre exploitable pour en faire de l'énergie verte, conformément aux objectifs définis par la Convention citoyenne pour le climat.
La parole est à Mme Danielle Brulebois, pour soutenir l'amendement no 1657 .
Il vise à mentionner dans l'article 19 les écosystèmes créés par l'activité humaine, qui sont le fruit de travaux que les hommes ont accomplis au cours des siècles : les biefs des étangs, les canaux ou encore les étangs de la Bresse, qui sont des zones humides au sens où les entend la convention de Ramsar. Ces zones jouent un rôle important dans les écosystèmes aquatiques et contribuent aux services rendus par l'eau en préservant l'étiage, en régulant les crues, en exerçant une fonction d'épuration, en rendant service à la faune et aux plantes hydrophiles.
Les biefs des étangs sont des lieux calmes où les animaux viennent se reproduire, notamment les carnassiers. Ceux-ci sont en voie disparition en raison de la disparition des frayères à brochets et à saumons. J'appelle votre attention sur le rôle joué par les écosystèmes d'origine humaine, très mal protégés et même souvent contestés par les dispositions juridiques. Or, détruire des ouvrages hydrauliques sous le couvert de la continuité écologique revient à détruire des zones humides au sens de la convention de Ramsar.
Je répondrai à chacune d'entre vous car, bien que faisant partie d'une discussion commune, vos amendements sont relativement différents.
Votre amendement, madame Bessot Ballot, est en partie satisfait car les écosystèmes visés ne se limitent pas aux seuls écosystèmes naturels, ce qui conduirait en effet à omettre beaucoup des lieux que vient d'énumérer Mme Brulebois, tels que les lacs, les étangs, les canaux devenus des rivières au fil des siècles.
Par ailleurs, votre amendement est trop réducteur car il ne préserve que les fonctionnalités biologiques, en oubliant les fonctionnalités hydrologiques et écologiques, rendant difficile la prévision d'un impact biologique bienfaisant. Je vous invite donc à le retirer.
Vous dites très justement, madame Brulebois, qu'il ne faut pas prendre uniquement en considération les écosystèmes naturels, mais aussi les services rendus par les écosystèmes que l'activité humaine a créés. Néanmoins, il n'y a selon moi aucune raison de les distinguer. Lorsque des arbitrages sont à faire, l'ensemble des avantages et des inconvénients de chaque situation doit être pris en compte : il n'est pas nécessaire de valoriser l'un des avantages plus que les autres. Pour ces raisons, je vous invite à retirer vos amendements, sinon j'émettrai un avis défavorable.
L'amendement de Mme Bessot Ballot différencie les écosystèmes aquatiques selon qu'ils sont naturels ou non, réduisant ainsi les fonctionnalités naturelles aux seules fonctionnalités biologiques alors que les milieux aquatiques ont aussi des fonctionnalités géochimiques ou hydrauliques. Ainsi, les fonctions de transport sédimentaire de l'eau permettent de limiter le creusement du lit des rivières et celui des berges, aspects qu'il faut continuer de prendre en compte. Cet amendement restreint donc le champ de l'article 19, ce qui n'est pas souhaitable.
Quant à l'amendement de Mme Brulebois, qui met en avant l'obligation d'évaluer et de préserver les services rendus, il risque de nous éloigner de notre objectif de protection de l'ensemble des rivières, conformément à la directive-cadre sur l'eau, car nous n'arrivons malheureusement pas à toutes les restaurer.
Je vous invite par conséquent à retirer vos amendements, sinon j'émettrai un avis défavorable.
Vous êtes originaire de la Haute-Marne, madame la secrétaire d'État, où se trouve le lac du Der, à la limite des départements de la Marne et de la Haute-Marne : il s'étend sur 5 000 hectares mis en eau en 1977, devenus un superbe réservoir de biodiversité et même un centre majeur de migration des oiseaux. Or, l'article 19 ne protège pas ce lac. Faudra-t-il supprimer les digues et rendre ces 5 000 hectares à leur état naturel ? Faudra-t-il reconstituer les étangs d'origine ?
D'autres secteurs abritent une superbe biodiversité alors qu'ils ont été créés par l'homme et n'ont rien de naturel. Notre collègue Brulebois en a cité plusieurs exemples. Prenons celui des étangs de la Dombes : va-t-on supprimer toutes les digues ?
La rédaction actuelle, qui dispose que « le respect des équilibres naturels implique la préservation, et, le cas échéant, la restauration des fonctionnalités naturelles », est erronée, car de tels équilibres ne sont pas naturels mais artificiels, comme le montrent les réglementations qui régissent les étangs et les lacs. L'amendement de Mme Brulebois est donc plein de bon sens. Faudra-t-il abattre toutes les constructions et rendre ces zones à leur état naturel, quitte à détruire la biodiversité qui s'y est installée ? Dans ce cas, l'article 19 doit l'annoncer clairement ; or ce n'est pas le cas.
Nous en venons pratiquement à définir ce qu'est une zone humide ! J'entends les arguments de M. de Courson et de Mme Brulebois, et je ne nie pas que certains marais ont été créés par l'homme. Reste que cet article vise non à redéfinir des zones humides – même au titre de la convention de Ramsar, que je connais bien – , mais à préserver les équilibres naturels au vu de leur ressource en eau. Nous devons fixer un cap général. Que voulons-nous demain dans nos écosystèmes ? Une eau de qualité et en quantité suffisante. Après quoi, nous pourrons partager ces écosystèmes. L'article est clair : il s'agit de la préservation et, le cas échéant, de la restauration des fonctionnalités naturelles des écosystèmes aquatiques.
Encore une fois, nous sommes dans un cadre général. Il ne s'agit pas d'élaborer une définition précise, ce qui nous amènerait – chose impossible dans une loi – à définir toutes les formes que peut prendre un écosystème. L'adjectif « biologique » restreindrait l'application du dispositif à certaines terres ou certaines particularités de ces zones, ce qui n'est pas souhaitable, puisqu'il faut prendre en compte, dans tous ces équilibres naturels, les paysages, voire certains éléments non biologiques.
Les amendements me semblent au contraire frappés au coin du bon sens. L'important est de maintenir l'existant, même s'il a été créé par l'homme.
Pourquoi vouloir détruire systématiquement ce qui a été construit par l'homme ?
M. de Courson a rappelé l'exemple de la Dombes. On peut également citer celui de la Bresse jurassienne, où des étangs créés par l'homme sont exploités – trop peu, hélas – , ce qui permet à des pêcheurs professionnels de nous approvisionner en poissons d'espèces bien connues, nous évitant de recourir à l'importation. Nous devons privilégier ce circuit court si nous voulons tenir nos engagements en matière de climat.
Je ne fais pas de procès d'intention au Gouvernement, mais je le mets en garde : si la manière dont le texte devait être appliqué nous amenait demain à revoir certaines installations créées il y a des siècles, nous aurions du souci à nous faire.
Le Gouvernement doit à tout le moins s'engager en précisant ce qui, dans les aménagements réalisés par l'homme, doit être conservé, voire sanctuarisé.
Je pense qu'il y a une méprise, peut-être due au fait que la rédaction de l'article est un peu compliquée. Dans la première phrase, l'adjectif « naturel » porte sur les fonctionnalités des écosystèmes et non sur les écosystèmes eux-mêmes.
Même s'il a été créé par l'homme, un étang a une fonctionnalité naturelle. Il permet par exemple à des carnassiers de se nourrir, comme l'a rappelé Mme Brulebois. J'ajoute – M. Sermier a eu raison de le rappeler – que certains étangs ont été créés il y a très longtemps, de sorte qu'un équilibre naturel s'est établi autour de ces écosystèmes.
Que les écosystèmes aquatiques soient naturels ou non, il importe de préserver leurs fonctionnalités naturelles, ainsi que l'équilibre naturel qui s'est installé autour d'eux, parce qu'il concourt au respect de la biodiversité.
C'est pourquoi je vous demande de retirer ces amendements.
Si notre préoccupation est prise en compte et que l'amendement est satisfait, j'accepte de retirer l'amendement, mais je le répète : les moulins sont un patrimoine en soi et ils apportent de l'énergie verte. Osons l'affirmer et permettre son exploitation.
L'amendement no 6052 est retiré.
Non, madame la présidente, compte tenu de l'engagement de Mme la rapporteure. Celle-ci a rappelé que les biefs des moulins, les étangs et les canaux sont des écosystèmes naturels, qu'il faut préserver en raison de leurs fonctionnalités. Je rappelle en outre qu'ils sont reconnus par la convention de Ramsar, que nous devons respecter.
L'amendement no 1657 est retiré.
Pour lever une inquiétude peut-être suscitée par des amendements que j'ai défendus en commission, je vous propose de rappeler explicitement que les zones humides et les écosystèmes marins sont des parties du grand ensemble des écosystèmes aquatiques.
La parole est à Mme la secrétaire d'État, pour soutenir le sous-amendement no 7349 .
L'objectif de Mme la rapporteure est aussi le mien. Pour rester en cohérence avec le code de l'environnement, il est important et opportun de constater le statut spécifique des écosystèmes marins, au sein des écosystèmes aquatiques. Puisque le code distingue bien les réglementations qui leur sont applicables, il convient de maintenir cette distinction à l'article L. 210-1.
Nous comprenons que vous émettez un avis favorable à l'amendement, sous réserve de l'adoption de votre sous-amendement.
La parole est à M. Loïc Prud'homme.
Puisque nous réfléchissons sur les écosystèmes aquatiques et sur l'opportunité d'apporter quelques précisions au texte, j'appelle l'attention du Gouvernement sur une difficulté. La notion de cours d'eau est définie par des termes assez larges – un lit d'origine naturelle, une alimentation par une source et un débit suffisant pendant la majeure partie de l'année – qui ne rendent pas compte de la diversité des cours d'eau sur l'ensemble du territoire.
On a parfois profité de ce flou pour sortir du cadre de la défense des masses d'eau, issu de la loi de 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, et du droit de l'eau, une grande partie du chevelu. De ce fait, dans certains départements, plus du tiers des ruisseaux ne sont plus considérés comme tels et se retrouvent donc livrés à des pollutions industrielles ou agricoles.
Dès lors que nous précisons le texte et que nous redéfinissons certains termes, j'invite le Gouvernement à se saisir de l'occasion pour affiner la définition du cours d'eau et y réintégrer les 30 % du chevelu ne figurant plus sur nos cartes en tant que cours d'eau et qui, bien que situés en amont de tout notre réseau hydrographique, se retrouvent pollués. Nous renouerions alors avec la situation antérieure à 2018, ce qui protégerait non seulement ces cours d'eau mais l'ensemble de l'écosystème aquatique.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Le sous-amendement no 7349 , accepté par la commission, est adopté.
L'amendement no 5686 , sous-amendé, est adopté.
La parole est à Mme Anne-Laure Cattelot, pour soutenir l'amendement no 5923 .
L'amendement no 5923 est retiré.
La parole est à M. Pierre Venteau, pour soutenir l'amendement no 4715 .
La préservation et la restauration des fonctionnalités naturelles des écosystèmes sont des objectifs généraux qui méritent d'être poursuivis. Pour autant, l'application de ces principes généraux peut conduire à une déstabilisation, voire à la remise en cause d'activités humaines existantes, qui ont pu prendre en compte ces fonctionnalités. C'est ainsi qu'une retenue d'eau, mise en conformité et servant à l'irrigation, tout en marquant potentiellement une évolution des écosystèmes initiaux, permet aux irrigants qui l'exploitent de lutter efficacement contre le changement climatique. Sa destruction fragiliserait l'agriculture. Nous proposons donc de rappeler que la réalité des activités humaines doit bien être prise en compte en sous-pesant les bénéfices et les risques.
Sur article 19, je suis saisie par le groupe Libertés et territoires d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement no 4715 ?
Il vise à relativiser le principe que nous proposons d'énoncer à l'article L. 210-1 du code de l'environnement. Bien que nous souhaitions rappeler l'importance des besoins de la nature, fondement de l'article 19, nous ne voudrions pas laisser penser que nous minimisons, voire oublions les besoins humains. C'est parce que ceux-ci sont essentiels que nous n'avons pas touché à l'article L. 211-1, qui les décrit.
Acceptez-vous de me croire si je vous dis que la rédaction de l'article 19 ne met pas en danger l'intérêt des activités humaines, et de retirer votre amendement ? Cela m'évitera d'émettre un avis défavorable.
Votre proposition d'ajouter le respect des équilibres naturels à celui des activités existantes me semble satisfaite par l'article L. 210-1, qui rappelle le respect des droits antérieurement établis – précision qui devrait suffire à vous rassurer. Il y est précisé en outre que « l'eau fait partie du patrimoine commun de la nation. Sa protection, sa mise en valeur et le développement de la ressource utilisable, dans le respect des équilibres naturels, sont d'intérêt général. »
Compte tenu de la conviction de Mme la rapporteure, je retire l'amendement.
L'amendement no 4715 est retiré.
Je propose d'insérer, après la première phrase de l'alinéa 2, la phrase suivante : « La préservation et la restauration de ces fonctionnalités s'appliquent à tous les territoires et doivent être garanties sur les territoires urbanisés et fortement artificialisés. »
L'article 19 souligne le rôle essentiel des milieux aquatiques dans la protection des écosystèmes et de la biodiversité, mais il omet de mentionner les milieux aquatiques urbains. Or, ceux-ci ne doivent pas être les laissés pour compte de la préservation de l'écosystème aquatique, compte tenu de leur développement et de leur impact significatif sur la biodiversité. Il semble essentiel de mentionner les trames bleues dans l'article afin d'inciter à mettre en place ces continuités écologiques aquatiques urbaines, garantes de la préservation de la biodiversité et des écosystèmes.
De fait, au-delà même de la simple conservation de l'écosystème aquatique, les trames bleues comportent de nombreux avantages écologiques. Les zones humides en ville ont un rôle épuratif : la Seine permet par exemple d'économiser près de 50 % du coût d'épuration de l'eau. Par ailleurs, ces espaces humides et aquatiques agissent comme des zones tampons qui aident à limiter les risques d'inondation. Enfin, ils contribuent à atteindre ou à conserver le bon état écologique ou le bon potentiel des eaux de surface et des écosystèmes aquatiques.
Nous avons déjà eu cette discussion en commission. Vous avez raison de souligner les bienfaits des écosystèmes aquatiques créés par l'homme, qui, s'ils ne sont pas naturels, apportent de réels bienfaits dans les zones très urbanisées – ce pourquoi nous les encourageons.
J'aimerais cependant vous rassurer : comme nous l'avons indiqué tout à l'heure, tous les écosystèmes aquatiques, qu'ils soient naturels ou non, et situés en milieu rural ou urbain, sont concernés par l'article L. 210-1 et ils seront préservés par les dispositions que nous allons voter. De plus, même si les bienfaits que vous décrivez sont réels, je ne crois pas opportun d'introduire ce rappel dans un texte de loi. Je vous suggère donc de retirer l'amendement. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Je partage l'opinion de M. Bricout : les écosystèmes aquatiques en milieu urbain sont essentiels pour lutter contre les îlots de chaleur, pour assurer une meilleure résilience des villes. Toutefois, cet article concerne les écosystèmes aquatiques et leurs fonctionnalités, qu'ils soient urbains, forestiers, ruraux ou littoraux. Or d'une part, votre amendement introduit une spécificité, au risque de ne pas être exhaustif et d'oublier tel écosystème ou telle fonctionnalité ; d'autre part, il prévoit une obligation de résultat, ce qui nous expose à un risque important de contentieux. Je vous invite donc à retirer votre amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
L'amendement no 283 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Émilie Bonnivard, pour soutenir l'amendement no 2485 .
Il vise à compléter l'article 19 par l'alinéa suivant : « Le respect et la protection de la biodiversité impliquent de garantir dans les espaces naturels l'équilibre entre les espèces animales sauvages, apprivoisées et d'élevage. Les activités humaines ayant des impacts bénéfiques sur la biodiversité sont prises en compte et valorisées au titre de la préservation des territoires ».
Il vise à appeler votre attention sur l'importance de préserver le pastoralisme dans les zones de montagne, notamment l'élevage extensif ovin qui, depuis quelques années, est mis en difficulté en raison de la réintroduction des loups et de la protection stricte de cette espèce, et de celle des ours, notamment dans les Pyrénées.
Il est indispensable que nous garantissions un équilibre entre les activités humaines durables qui valorisent notre territoire et notre patrimoine – l'agriculture durable, je le répète, favorise la biodiversité dans ces territoires – et la réintroduction d'espèces sauvages strictement protégées. Aujourd'hui, cette cohabitation n'est pas optimale : 12 000 animaux sont tués chaque année par les loups, et les ours posent également des difficultés. Nous devons également protéger les activités pastorales ancestrales, au nom de la biodiversité et de la préservation des territoires.
Nous partageons, bien entendu, la même préoccupation, à savoir trouver le bon équilibre entre les activités humaines et la biodiversité. Or, je le sais car nous vivons dans la même région, la réintroduction du loup et de certains animaux peut poser des problèmes. Nous sommes toujours à la recherche d'un équilibre difficile à trouver, qui implique un long dialogue entre les acteurs et le changement ou l'autorisation de certaines pratiques. Vous avez raison, notre rôle est de trouver cet équilibre et de le garantir pour tous.
Si votre amendement n'a pas vraiment sa place dans cet article, j'entends l'appel que vous avez lancé : nous partageons tous cette préoccupation et nous pouvons nous rejoindre pour trouver le nécessaire équilibre. Je vous propose de retirer votre amendement que je considère comme un amendement d'appel.
Je vous rejoins, madame Bonnivard, quant au défi que nous devons relever. L'objet de la stratégie Aires protégées, que j'ai présentée en début d'année, est précisément de retrouver ces équilibres, d'offrir une protection à la française, redonnant aux activités humaines leur place dans leur espace naturel. Néanmoins, l'amendement, qui vise la gestion des espaces naturels et des espèces sauvages, ne relève pas de la loi sur l'eau ni de l'article L. 210-1 du code de l'environnement. Par conséquent, j'émets un avis défavorable.
L'amendement de ma collègue Émilie Bonnivard est très important. Tout d'abord, permettez-moi une remarque sur la méthode : à chaque fois que le groupe Les Républicains propose un amendement, vous nous répondez toujours la même chose, …
… que vous partagez notre opinion, que vous êtes d'accord avec notre proposition qui va dans le bon sens mais soit ce n'est pas le bon moment, soit ce n'est pas le bon article ou le bon alinéa. On est un peu comme Georges Brassens, « on s'est trompé d'idée ». Il y a l'amour et les preuves d'amour ; pour ma part, je souhaiterais que vous donniez des preuves de partage en nous rejoignant sur cet amendement.
En effet, cet article mentionne les équilibres naturels et, s'il y a bien une discussion que nous devons avoir dans le cadre de l'examen d'un texte sur l'écologie, c'est celle relative à la place de l'homme dans les équilibres naturels. Il y a deux sortes d'écologistes : ceux qui considèrent que l'homme est un problème pour l'équilibre naturel…
Ils feraient mieux de s'occuper de l'explosion démographique en Afrique !
… et que, pour faire court, s'il y avait moins d'humains, finalement, on irait mieux ; ceux qui pensent que l'homme est essentiel à l'équilibre naturel et qu'on protège l'environnement pour protéger l'homme. Or s'agissant du pastoralisme, et ainsi que l'a expliqué Émilie Bonnivard, la politique écologique a consisté à libérer des espèces sauvages – je parle bien entendu du loup, mais il y en a d'autres – , à les laisser proliférer. Aujourd'hui, certains éleveurs sont dans l'incapacité de continuer leur activité, on assiste à une déprise agricole, à un déclin de l'agriculture dans certaines zones. Si on y répond en leur versant des indemnisations, le pretium doloris causé par la tristesse de voir un troupeau décimé ne s'oublie pas.
Ainsi, l'adoption de cet amendement démontrerait que, premièrement, l'homme fait partie de la transition écologique ; deuxièmement, le pastoralisme doit être autant respecté que l'introduction ou la protection d'espèces sauvages ; troisièmement et fort accessoirement, la vie des brebis et des moutons qui se font dévorer par les loups est tout aussi importante que celle des loups qu'on cherche à protéger. Pour toutes ces raisons, je vous invite à voter cet amendement qui permet de réintroduire l'homme dans la transition écologique.
Je voudrais remercier notre collègue Émilie Bonnivard d'avoir abordé ici ce sujet. J'entends bien les arguments concernant sa place dans cet article. Mais alors où est-elle ? À chaque fois qu'on expose le sujet, ce n'est jamais ni le bon texte ni la bonne place.
Or nous n'avons pas de multiples occasions de sensibiliser sur cette question très importante, notamment dans les territoires de montagne, qui doit être abordée à un moment ou à un autre. Nous devons lui trouver une place ; si elle n'est pas ici, où est-elle ?
Si je trouve ce sujet très intéressant, l'article est relatif aux écosystèmes aquatiques…
Tout à fait !
… et non aux questions d'élevage d'ovins dans les montagnes ou aux zones humides en général auxquelles je suis tout à fait favorable et qui sont un objectif clair. Ainsi, recentrons-nous sur les systèmes aquatiques et les milieux humides qui sont l'objet de l'article 19. Je pense que cette question est hors sujet et je suis la première à dénoncer le nombre d'amendements qui le sont.
Je rappelle que la stratégie aires protégées est inscrite à l'article 56 du projet de loi ; nous y reviendrons largement. Les mystères relatifs au placement de cet amendement sur cet article m'échappent.
Je souhaite le maintenir car nous sommes confrontés à un choc de temporalité. Certains jeunes ne souhaitent et ne peuvent plus s'installer et il arrive que des éleveurs partant à la retraite ne soient pas remplacés. Je ne peux pas l'accepter. Les effets de bord de cette impossible cohabitation, en tout cas pour le moment, conduisent les élevages à développer des pratiques contraires à celles qui sont durables et que nous souhaitons tous voir perdurer. En effet, les animaux reviennent plus tôt dans les étables et sont nourris avec des aliments transportés par camion, alors que, normalement, ils vivent dans la nature et restent le plus tard possible dans les estives.
Nous en arrivons donc à des effets contraires à ce que nous souhaitons pour le pastoralisme, alors qu'il engendre des conséquences positives pour la biodiversité comme peu de pratiques agricoles en produisent. En raison de ce problème de temporalité et d'urgence, je maintiens mon amendement pour qu'il puisse être voté. J'ignore pourquoi il a été placé ici, mais peu importe.
L'amendement no 2485 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Florence Lasserre, pour soutenir l'amendement no 4992 .
L'article 19 consacre les écosystèmes aquatiques comme des « éléments essentiels du patrimoine naturel », notion qui reste floue et peu opposable dans le cadre de contentieux devant les tribunaux. Ainsi, cette inscription dans la loi pénalisera les projets de production d'hydroélectricité, qui ne sont pas encore reconnus d'intérêt majeur par les textes et qui seront, demain plus qu'aujourd'hui, jugés non compatibles avec la préservation des milieux aquatiques.
Afin d'éviter que la production d'hydroélectricité soit la grande perdante de la consécration des écosystèmes aquatiques, le présent amendement vise à préciser que l'attention particulière portée à ce patrimoine naturel ne doit pas faire oublier la poursuite des autres politiques publiques, telles que la lutte contre le réchauffement climatique, la transition énergétique et la production d'énergies renouvelables.
Je le répète : si nous modifions l'article L. 210-1 du code de l'environnement conformément à votre amendement, la priorité que nous souhaitons reconnaître au bon fonctionnement des milieux aquatiques sera relativisée au regard de la question énergétique.
Nous sommes tous ici convaincus que les usages énergétiques de l'eau sont importants et présentent un réel potentiel, c'est vrai pour la petite comme pour la grande hydroélectricité – ce n'est pas Mme Battistel qui me dira le contraire. Or l'article 19 autorise ces usages dans la mesure où l'on protège les écosystèmes aquatiques qui les entourent. Je prends l'exemple de ma région, traversée par le Rhône : la Compagnie nationale du Rhône oeuvre depuis cinquante ans à la préservation de ces écosystèmes tout en étant un acteur majeur de l'hydroélectricité.
Ainsi, l'objectif de cet article n'est pas de favoriser un usage plutôt qu'un autre mais de faire en sorte qu'ils cohabitent correctement et harmonieusement sans pour autant relativiser l'importance que nous souhaitons accorder aux écosystèmes aquatiques. Par conséquent, je vous propose de retirer votre amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Je suis d'accord avec vous : nous devons trouver une nécessaire cohérence entre nos objectifs énergétiques climatiques et la préservation de la biodiversité et du bon état des masses d'eau dans le cadre de la gestion des écosystèmes. Or tant l'article 19, l'article L. 210-1 du code de l'environnement que nos politiques générales en matière de gestion de l'eau assurent cette cohérence. Ainsi, je vous invite à retirer votre amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
L'amendement no 4992 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Mathilde Panot, pour soutenir l'amendement no 6730 .
Il vise à imposer un moratoire sur l'extraction de sable en baie de Lannion, un grand projet inutile qui provoque de terribles ravages environnementaux. En effet, l'exploitation industrielle des sables marins bouleverse les fonctionnalités des écosystèmes océaniques où ils sont prélevés et a une forte incidence négative sur la faune qui y réside ainsi que sur le littoral, menacé par le recul du trait de côte.
J'insiste également sur le fait que l'extraction de sable est rejetée par tout le monde dans la région, qu'il s'agisse des pêcheurs, des commerçants, des acteurs du secteur touristique, des associations – à l'instar du collectif Le Peuple des dunes de Batz à Bréhat – , des naturalistes évidemment, ainsi que des élus qui ont saisi la justice à plusieurs reprises contre ce projet.
De plus, le présent amendement tend à faire cesser le climatocynisme du Gouvernement et l'amnésie du Président du République en matière d'écologie. En effet, Emmanuel Macron, alors candidat à l'élection présidentielle, avait nié avoir autorisé l'extraction de sable en baie de Lannion, indiquant que seuls des permis de recherche avaient été délivrés. Pourtant, en avril 2015, c'est bien lui qui, en tant que ministre de l'économie, avait signé le décret attribuant une autorisation d'exploitation de quinze ans à la Compagnie armoricaine de navigation. Pire, s'il a annoncé l'arrêt du projet le 20 juin 2018, cette fois en sa qualité de Président de la République, il a depuis oublié d'abroger le décret en question.
Je le répète, nous demandons l'arrêt de ce grand projet inutile. Je rappelle qu'un site Natura 2000 se trouve à deux kilomètres du lieu d'extraction. On ne peut à la fois déclarer des zones protégées et accorder la possibilité de les détruire !
Enfin, je profite de cette intervention pour apporter mon plein soutien aux journalistes victimes de pressions, d'intimidations et de menaces par les grands groupes alimentaires auxquels nous faisons ici référence et qui, au nom de leurs intérêts privés, prélèvent ce sable au détriment de toute une région. Ce soutien s'adresse particulièrement à Morgan Large et Inès Léraud,
Mme Caroline Fiat applaudit
qui se sont toutes deux battues contre la prolifération des algues vertes et la collusion des intérêts industriels et des élus sur les questions agroalimentaires. Cela ne vous aura pas échappé, Morgan Large a récemment fait l'objet d'une tentative d'homicide – il est impossible de dire les choses autrement : on a été jusqu'à lui retirer les boulons des roues arrières de sa voiture, qu'elle a ensuite utilisée avec ses enfants.
Il faut que ces intimidations cessent et que l'État se montre ferme en mettant un terme à ce grand projet inutile et dangereux !
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Je ne répondrai ni à vos invectives ni à vos commentaires assez déplaisants à l'endroit du Président de la République. Je vous dirai simplement que votre amendement est satisfait et je pense que, mieux que moi, mon collègue Éric Bothorel vous expliquera pourquoi. En tant que député de Lannion, il pourra nous éclairer sur cette question. Avis défavorable.
L'exploitation des sables coquilliers, qui relève du domaine réglementaire et non du domaine législatif, a été strictement encadrée. Elle a été autorisée pour quinze ans, mais interdite de mai à août inclus, et un document stratégique de façade a été élaboré en concertation avec les acteurs locaux. Nous y avons rappelé l'enjeu écosystémique que revêtent les sables coquilliers, qui structurent le fonctionnement des écosystèmes et constituent des zones d'alimentation pour les prédateurs.
L'extraction est limitée aux dunes hydrauliques et doit être évitée sur les dunes du haut talus. Une cible a été fixée s'agissant des surfaces de dunes mobiles pouvant être soumises à extraction. Et il a été décidé en 2019 de n'accorder aucune nouvelle autorisation d'extraction sur cette façade littorale.
Ainsi, au-delà des engagements de l'État, l'activité d'extraction de sables coquilliers en baie de Lannion est strictement encadrée et une trajectoire claire a été établie dans la concertation pour les années à venir – même s'il nous faudra bien sûr rester vigilants. Je demande donc le retrait de l'amendement. À défaut, avis défavorable.
Merci, madame Panot, pour cet amendement qui nous permet de redire à quel point l'ensemble de la population trégorroise est opposée à ce projet et combien elle l'a affirmé haut et fort. Vous avez cité l'implication du Peuple des dunes, nous pourrions aussi mentionner celle d'Alain Vidal, de ma collègue Sandrine Le Feur, ainsi que le combat mené par ma prédécesseure Corinne Erhel. Elle n'aura pas eu la possibilité d'entendre, en 2018, le Président de la République décréter ce que vous demandez, c'est-à-dire la suspension du projet d'extraction. En effet, je crois que vous confondez les termes « suspension » et « abrogation ». En l'occurrence, votre amendement vise bien à imposer une suspension et c'est justement ce qu'a décidé le Président de la République.
Lors du décès de Corinne Erhel puis de ses obsèques, il avait affirmé qu'il n'oublierait jamais l'engagement de l'ensemble des Trégorrois, des acteurs économiques, de Joël Le Jeune, des acteurs du secteur touristiques. Ce n'étaient pas des Gaulois réfractaires qui s'opposaient à l'extraction, mais l'ensemble de la population de la région. Ils ont dit leur opposition de manière très claire et elle a été parfaitement entendue. Depuis trois ans, il n'y a plus d'extraction de sable en baie de Lannion et il n'y en aura plus à l'avenir.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM, ainsi que sur plusieurs bancs des groupes Dem, Agir ens et UDI-I.
Je suis heureuse d'entendre ce qui vient d'être dit. Cependant, Joël Le Jeune, le président de la communauté d'agglomération Lannion-Trégor-Communauté dont vous avez cité le nom, a bien annoncé qu'il allait se pourvoir en cassation pour obtenir l'annulation du décret par lequel l'extraction de sable a été autorisée. Quoi qu'il en soit, si, comme vous le dites, il n'y a plus d'extraction de sable en baie de Lannion, nous pouvons tout à fait l'inscrire dans le projet de loi.
Mme Caroline Fiat applaudit.
L'amendement no 6730 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 163
Nombre de suffrages exprimés 139
Majorité absolue 70
Pour l'adoption 115
Contre 24
L'article 19, amendé, est adopté.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures trente-cinq.
La parole est à Mme Valérie Petit, pour soutenir l'amendement no 4894 .
Cet amendement vise à faire de la préservation de la biodiversité un critère d'évaluation de la performance environnementale des bâtiments. En d'autres termes, il s'agit de faire en sorte que les constructions neuves ou anciennes fassent toute leur place à la faune et à la flore, grâce à l'aménagement de nichoirs, par exemple, ou à la préservation des végétaux qui rendent certains services, en termes d'isolation notamment.
J'espère vous rassurer en indiquant que vos préoccupations au sujet de la performance énergétique et environnementale des bâtiments trouvent des réponses dans ce texte, notamment grâce à la végétalisation des toits, que nous aborderons à l'article 24.
Cela étant, les normes de performance environnementale sont déjà nombreuses et exigeantes. Nous les faisons d'ailleurs évoluer, ne serait-ce qu'avec le diagnostic de performance énergétique et la réglementation environnementale des bâtiments neufs – RE2020 – qui sera bientôt en place.
Il me paraît donc plus prudent à ce stade de s'assurer de la bonne application des règles existantes plutôt que d'en rajouter. C'est pourquoi je demande le retrait de votre amendement ; à défaut, ce sera un avis défavorable.
Si je partage votre souci de préserver la biodiversité, je suis moins convaincue par l'ajout que vous proposez à l'article L. 171-1 du code de la construction et de l'habitation, qui concerne la performance environnementale des bâtiments.
En effet, il reste difficile de corréler les émissions de gaz à effet de serre et la perte d'abondance de la biodiversité. Nous manquons encore de recul et de données chiffrées, et nous avons entrepris un important travail de définition des indicateurs, qui prend progressivement forme. C'est donc une demande de retrait ou, à défaut, un avis défavorable.
Je ne suis pas convaincue mais j'ai confiance en Mme la ministre, et je compte sur elle pour que nous rattrapions notre retard en matière d'indicateurs de la biodiversité ; c'est indispensable dans le domaine du bâtiment mais également pour ce qui concerne l'empreinte des entreprises sur la biodiversité. Je retire mon amendement.
L'amendement no 4894 est retiré.
Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 124 rectifié , 268 rectifié , 1115 , 1185 rectifié , 2106 rectifié , 3131 , 3495 , 4560 , 4835 , 2407 , 2688 , 3817 et 4335 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 124 rectifié , 268 rectifié , 1115 , 1185 rectifié , 2106 rectifié , 3131 , 3495 , 4560 et 4835 ainsi que les amendements nos 2407 , 2688 , 3817 et 4335 sont identiques.
Les amendements identiques nos 124 rectifié de M. Éric Girardin, 268 rectifié de M. Dino Cinieri, 1115 de M. Pierre Vatin, 1185 rectifié de M. Dominique Potier, 2106 rectifié de Mme Delphine Batho, 3131 de Mme Lise Magnier et 3495 de M. Stéphane Viry sont défendus.
La parole est à M. Philippe Meyer, pour soutenir l'amendement no 4560 .
Le présent amendement a pour objectif d'assurer l'équilibre du bilan carbone des politiques de mobilisation de la biomasse forestière. Il vise en particulier à éviter que ces politiques ne portent atteinte à ce remarquable puits de carbone qu'est la forêt dans notre pays, ce qui implique notamment d'éviter les formes d'exploitation qui conduisent à la mise en lumière des sols, avec des risques de libération du carbone.
Il intègre le principe du respect de la hiérarchie des usages, afin d'éviter que des bois d'oeuvre ou des bois pouvant avoir une autre vocation soient utilisés pour de la simple valorisation énergétique.
En outre, il propose que l'approvisionnement en bois soit assuré dans un rayon limité, afin d'éviter l'importation de matières qui, d'une part, alourdiraient le bilan carbone et, d'autre part, augmenteraient les nuisances connexes – dégradation des routes, pollution, nuisances sonores, entre autres.
Enfin, il entend mettre en cohérence la politique nationale énergétique avec les objectifs de la politique forestière de notre pays.
Pardon, monsieur Bouyx, mais vous êtes un certain nombre à changer de place, et il n'est pas toujours facile de s'y retrouver.
J'avais en effet remarqué que cela se faisait beaucoup sous cette législature…
Sourires.
Monsieur Bouyx, vous avez donc la parole pour soutenir l'amendement no 4835 .
Cet amendement vise à assurer l'équilibre du bilan carbone des politiques de mobilisation de la biomasse forestière, afin que ces politiques ne portent pas atteinte au puits de carbone forestier. Il intègre le principe du respect de la hiérarchie des usages et fait en sorte que l'approvisionnement en bois soit assuré dans un rayon limité ; enfin, il met en cohérence la politique nationale énergétique avec les objectifs de la politique forestière.
Les amendements identiques nos 2407 de M. Michel Vialay, 2688 de M. François-Michel Lambert, 3817 de M. Dominique Potier et 4335 de Mme Delphine Batho sont défendus.
Quel est l'avis de la commission ?
Ces amendements ont plusieurs objectifs. Le premier est de rappeler que la politique énergétique en général et les stratégies de valorisation de la biomasse forestière en particulier doivent rester cohérentes avec les enjeux et les objectifs des autres politiques publiques. Si cette exigence est indispensable, il ne me semble pas nécessaire pour autant de l'inscrire dans le marbre de la loi. En outre, nous avons voté, à l'article 14, une disposition qui me semble répondre à votre objectif, puisqu'elle établit que des stratégies telles que la stratégie nationale de recherche, la stratégie nationale bas carbone et la stratégie nationale pour la biodiversité doivent avoir des trajectoires parallèles et tenir compte les unes des autres.
Il y en a, des stratégies ! C'est une armée mexicaine de stratèges, que vous avez !
En ce qui concerne la valorisation du coût de la biomasse à des fins de production de matériaux et d'énergie, il est évident que nous partageons la même ambition et le même objectif. En revanche, vouloir limiter le rayon d'approvisionnement en bois afin de réduire les impacts liés au transport pourrait être contre-productif, même si je comprends votre intention. En effet, le marché du bois n'est pas un marché régional, ni même un marché national, mais un marché international.
Il est vrai qu'aujourd'hui, pour le bois, notre balance commerciale est affreusement mauvaise, puisque nous exportons énormément de grumes pour réimporter du bois transformé, ce qui n'est absolument pas souhaitable. C'est d'ailleurs pour cela que la politique de gestion des forêts est si importante. Cela étant, cette politique de gestion doit pouvoir s'adapter en fonction des nécessités, en l'occurrence le réchauffement climatique, qui nous oblige à modifier les pratiques forestières.
Il est préférable que ces recommandations aient une portée réglementaire plutôt que législative, c'est pourquoi j'émettrai un avis défavorable à l'ensemble des amendements.
C'est en effet une évidence qu'il faut, dans la hiérarchie des usages, réserver le produit du long travail des forestiers et de la nature au bois d'? uvre ; c'est une évidence économique et une évidence environnementale.
Cela répond aussi à un souci de cohérence, mais il n'est sans doute pas nécessaire de rappeler dans la loi l'articulation entre les différentes politiques publiques qui doivent maintenir cette cohérence.
Enfin, en ce qui concerne la limitation du rayon d'approvisionnement, un cadre de la durabilité des bioénergies issu du droit européen doit être précisé courant 2021 ; il nous apportera des éléments de réponse et des outils de contrôle. C'est donc une demande de retrait ou un avis défavorable.
Les amendements identiques nos124 rectifié , 268 rectifié , 1115 , 1185 rectifié , 2106 rectifié , 3131 , 3495 , 4560 et 4835 ne sont pas adoptés.
La parole est à Mme Frédérique Tuffnell, pour soutenir l'amendement no 4991 .
Nous proposons que soit mentionnée, au premier alinéa de l'article L. 110-1 du code de l'environnement, la qualité de l'eau. Il s'agit d'être exhaustif et de l'y faire figurer au même titre que la qualité de l'air, même si elle figure à l'article L. 210-1.
Comme vous venez de le dire très justement, l'article L. 110-1 répond déjà à votre demande. L'eau y est, en quantité comme en qualité, déjà comprise dans la notion de « ressources et milieux naturels terrestre et marin » qu'on y trouve. Par ailleurs, il serait risqué de préciser davantage la portée des fondamentaux du droit de l'environnement.
On pourrait se demander, en lisant l'article : « Je vois inscrite la qualité de l'air. Pourquoi ne pas ajouter la qualité de l'eau ? » Néanmoins, j'ai effectué quelques recherches qui m'ont permis de retrouver, à plusieurs endroits du code de l'environnement, la notion de qualité de l'air, et j'ai l'impression que, l'air n'étant pas quelque chose de physique que l'on peut décrire,
M. Charles de Courson proteste
ce n'est que par sa qualité que l'on arrive à en parler, tandis que l'eau est vue et décrite de manière très claire, qu'il s'agisse des eaux maritimes ou des eaux terrestres, souterraines ou de surface. De ce point de vue, votre amendement ne serait pas une bonne chose. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Cet amendement qui vise à inscrire la qualité de l'eau à l'article L. 110-1 du code de l'environnement m'interpelle : en effet, pourquoi ne pas citer explicitement la qualité de l'eau dans cet article général qui liste les compartiments de l'environnement faisant partie du patrimoine commun de la nation ? Ce sera pour moi un avis de sagesse.
« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe Dem.
L'amendement no 4991 est adopté.
L'amendement no 5774 de M. Christophe Jerretie est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Je m'étais engagée à répondre à notre collègue sur cet amendement ; je m'exécute donc pour dire à nouveau que le caractère d'intérêt général de l'équilibre des fonctionnalités des milieux aquatiques et marins est satisfait par l'article L. 210-1 du code de l'environnement : « L'eau fait partie du patrimoine commun de la nation. Sa protection [… ], dans le respect des équilibres naturels, [est] d'intérêt général. » Il n'est pas nécessaire de préciser cette notion plus qu'elle ne l'est déjà. Avis défavorable.
Je partage cette analyse. Le premier alinéa de l'article L. 210-1 du code de l'environnement répond déjà à cette volonté en élevant l'équilibre des écosystèmes aquatiques au rang de bien commun d'intérêt général. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
L'amendement no 5774 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Josiane Corneloup, pour soutenir l'amendement no 2671 .
La gestion équilibrée de la ressource en eau vise à concilier les intérêts liés à sa protection en tant que milieu naturel et les intérêts liés à sa valeur économique. Cette gestion implique que soient prises en compte toutes les composantes du milieu aquatique et toutes les activités humaines qui s'exercent sur ces milieux. Il n'y a pas de hiérarchie entre les usages. L'ajout visé à l'article L. 210-1 du code de l'environnement conduit à remettre en cause les fondements du droit de l'eau en donnant la prépondérance aux enjeux de la préservation et de la restauration des fonctionnalités des écosystèmes aquatiques. L'équilibre actuel entre les usages est ainsi rompu. L'amendement vise à déplacer une partie des écrits dans l'article L. 211-1 du code de l'environnement pour conserver le principe de la gestion équilibrée de la ressource en eau.
L'amendement est une redite du débat précédent sur la migration de dispositions de l'article L. 210-1 vers l'article L. 211-1. J'émets encore une fois un avis défavorable, surtout à cet endroit du texte.
Le respect des équilibres naturels forme le cadre d'une gestion de l'eau qui soit d'intérêt général. Il me semble logique d'apporter des précisions sur cette notion au même article, sans bousculer pour autant le cadre fondamental de l'équilibre actuel que la loi fixe depuis 1992. Avis défavorable.
L'amendement no 2671 n'est pas adopté.
L'amendement no 5190 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il vise à clarifier la protection des zones humides. Un arrêt du Conseil d'État a considéré que deux critères – sol hydromorphe et végétation hygrophile – devaient être remplis pour définir une zone humide. En plus d'ouvrir une période d'incertitude autour du statut à accorder aux zones humides et de faire disparaître virtuellement celles ne relevant que de l'un des deux critères, cette décision a deux conséquences majeures : la destruction d'espaces occupés par une végétation hygrophile au profit d'espaces artificialisés, car il suffit de détruire la végétation pour empêcher de considérer le terrain comme une zone humide, et la condamnation des milieux humides dégradés qui ne peuvent bénéficier de programmes de restauration, par exemple dans le cadre de la compensation écologique.
Cette décision est illogique eu égard aux objectifs ambitieux que le Gouvernement s'est fixés dans le cadre de la préservation de la biodiversité. Il primordial, dans un projet de loi sur le climat aussi important que celui-ci, de ne pas occulter les milieux qui sont essentiels à sa préservation, comme les milieux humides. C'est pourquoi l'amendement propose de clarifier l'article L. 211-1 du code de l'environnement. Une telle modification est nécessaire pour préserver ces espaces magnifiques.
La parole est à Mme Sandrine Le Feur, pour soutenir l'amendement no 6423 .
Il vise à clarifier le code de l'environnement afin d'assurer la pleine protection des zones humides en spécifiant que ces zones concernent également les sols hydromorphes sans végétation hygrophile. Par un arrêt de 2017, le Conseil d'État a considéré que les deux critères – sol hydromorphe et végétation hygrophile – devaient être constatés pour définir une zone humide. Cela ouvre une possibilité de destruction d'espaces ne satisfaisant qu'un seul de ces critères, au profit d'espaces artificialisés. Il s'agit de clarifier ce point afin que la jurisprudence ne joue pas en la défaveur de la préservation des zones humides.
Cette précision est redondante avec la définition des zones humides donnée à l'article L. 211-1 du code de l'environnement. Depuis la loi du 24 juillet 2019 portant création de l'Office français de la biodiversité (OFB), il me semble que cette définition suffit pour couvrir tous les types de zones humides que vous souhaitez protéger. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
La loi du 24 juillet 2019 portant création de l'Office français de la biodiversité a bien introduit une définition selon des critères non cumulatifs, sol hydromorphe ou végétation hygrophile. Les précisions proposées dans l'amendement de M. Maquet existaient en partie dans le projet du Gouvernement soumis au Conseil d'État, et celui-ci a considéré que les exemples et illustrations relevaient du niveau réglementaire. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
L'amendement no 6423 est retiré.
L'amendement no 605 n'est pas adopté.
Il vise à insérer, après le 7° créé à l'article 19, un 8° ainsi rédigé : « La création ou l'élargissement d'aires protégées préservant les écosystèmes aquatiques d'eau douce afin de permettre une plus grande résilience de la biodiversité. »
Le chapitre III du projet de loi montre l'importance de la restauration et de la préservation des écosystèmes aquatiques en France. En effet, ces espaces sont bien souvent négligés alors qu'ils accueillent une biodiversité vaste et variée et participent largement à la lutte contre le changement climatique. Il convient donc de mieux protéger les écosystèmes aquatiques dans la stratégie de restauration de la biodiversité grâce à une meilleure maîtrise des aires protégées. Bien que le Gouvernement français semble attaché à la conservation de la nature, les aires protégées ne représentent que 23,5 % du territoire métropolitain et d'outre-mer. C'est pourquoi le Gouvernement a l'ambition d'étendre ces zones à 30 % du territoire dès 2022. Pourtant, il est surprenant de constater que, ni dans la stratégie nationale pour les aires protégées 2030, ni dans le plan d'action 2021-2023 de la stratégie nationale pour les aires protégées 2030 ne figurent de chapitre et d'objectifs clairs concernant l'eau douce et les écosystèmes aquatiques.
Si je partage la préoccupation que vous exprimez concernant la protection des écosystèmes d'eau douce et des aires protégées – sujet sur lequel Mme la secrétaire d'État vous répondra sans doute bien mieux que moi – , l'amendement n'a pas sa place dans l'article L. 211-1 du code de l'environnement. Par ailleurs, nous avons répondu à votre souci en adoptant en commission spéciale l'amendement de notre collègue Martial Saddier, devenu l'article 19 bis, lequel nous aidera à protéger ces masses d'eau douce si précieuses. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Nous en débattrons à l'article 56 du projet de loi. Je vous remercie de l'attention que vous portez aux écosystèmes aquatiques, mais il me semble que la stratégie nationale pour les aires protégées prend bien en compte ce paramètre en protégeant les cours d'eau et les zones humides. Nous avons également le projet de créer un parc national dédié, dont nous reparlerons à l'article 56.
L'amendement no 278 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Frédérique Tuffnell, pour soutenir l'amendement no 4993 .
Dans le même ordre d'idées, il vise à inscrire la restauration des zones humides à l'article à L. 211-1 du code de l'environnement, notamment celle des tourbières, des mangroves, des ripisylves, etc. Près de deux tiers des zones humides ont disparu en France depuis le XXe siècle ; une étude de 2010-2012 indiquait que, sur 206 zones humides identifiées, 48 % continuaient de se dégrader et 11 % seulement étaient en amélioration, ce qui est très peu. Le constat est franchement alarmant, et inscrire une disposition en ce sens à l'article L. 211-1, comme on nous l'a pratiquement conseillé, serait un élément très fort.
Nous avons besoin de restaurer les zones humides et surtout d'éviter de les dégrader. Cette dégradation est surtout à éviter dans le cas des tourbières, qui représentent 3 % des terres émergées dans le monde mais captent 30 % du carbone ; il ne faut surtout pas les retourner, ce qui dégagerait ce carbone. Les tourbières jouent un rôle très précieux, et inscrire cette disposition à cet endroit du code de l'environnement est pour moi une évidence.
Merci, madame Tuffnell, d'avoir pris en compte les demandes que nous avions formulées en commission spéciale. Néanmoins, je reste mal à l'aise avec cet amendement qui imposerait une restauration des zones humides. Nous avons pris la précaution d'indiquer, à l'article L. 210-1 du code de l'environnement, que la restauration se ferait « le cas échéant ». Ici, vous l'imposez de fait, de surcroît à l'article L. 211-1, dont nous avons déjà vu qu'il était plus facilement opposable et pouvait donc susciter plus de contentieux. D'autre part, l'avis du Conseil d'État nous a indiqué qu'il fallait éviter de dresser trop de listes de milieux aquatiques, or l'amendement revient en arrière en réintroduisant la liste de milieux aquatiques que le Gouvernement avait supprimée à l'article 19. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Je suis très sensible à cet amendement qui porte sur la restauration des tourbières, mangroves et autres ripisylves et herbiers marins au service écosystémique ô combien significatif. Les zones humides sont des milieux fortement dégradés et représentent une partie importante des solutions fondées sur la nature, dont nous souhaitons voir le développement et la massification.
Le premier alinéa de l'article L. 211-1 du code de l'environnement, consacré aux zones humides, permet déjà de protéger les tourbières et les mangroves. Il m'aurait semblé plus opportun que la rédaction de votre amendement place cette notion au premier alinéa de l'article plutôt que d'alourdir celui-ci en créant un huitième alinéa.
J'émets un avis de sagesse.
L'amendement no 4993 est adopté.
La parole est à Mme Sylvie Bouchet Bellecourt, pour soutenir l'amendement no 7053 .
Il forme un bloc avec les amendements nos 7054 et 7055 qui seront examinés plus tard. L'idée générale est simple : il faut revoir les modalités de classement des cours d'eau pour protéger les moulins qui appartiennent à notre patrimoine.
Il existe actuellement deux listes possibles de classement des cours d'eau : la première répertorie les cours d'eau en très bon état écologique sur lesquels aucune autorisation ou concession ne peut être accordée pour la construction de nouveaux ouvrages s'ils constituent un obstacle à la continuité écologique ; la seconde recense les cours d'eau sur lesquels il est nécessaire d'intervenir, selon des règles définies par l'autorité administrative en concertation avec le propriétaire ou l'exploitant, afin d'assurer le transport suffisant des sédiments et la circulation des poissons migrateurs.
La loi du 30 décembre 2006 sur l'eau et les milieux aquatiques a imposé des obligations disproportionnées aux propriétaires ainsi qu'aux exploitants des moulins de notre pays. En effet, elle contraint les propriétaires de moulin à détruire les seuils de prise d'eau ou à les aménager selon des travaux complexes aux coûts exorbitants.
Or la pratique diffère fortement de l'intention de la loi. Faute de moyens et de temps, l'autorité administrative classe abusivement les cours d'eau dans la première liste sans effectuer de diagnostic préalable. La majorité des cours d'eau classés dans la première liste, qui regroupe ceux en très bon état écologique, présentent en réalité un état chimique déplorable. Pour quelle finalité ? Nous détruisons notre patrimoine local au nom de la continuité biologique sans pour autant améliorer celle-ci car, de toute évidence, nul poisson n'y circule ou ne s'y reproduit.
C'est pourquoi je vous propose de mieux définir la notion de « réservoir biologique » en précisant qu'il s'agit de zones de reproduction ou d'habitat des espèces et que la circulation est libre entre ces zones. L'amendement vise également à réviser la première liste afin d'éviter de détruire notre précieux patrimoine rural.
Voici les conditions précises, énoncées par la loi, de classement d'un cours d'eau ou d'une partie d'un cours d'eau dans la première liste : celle-ci regroupe des « cours d'eau, parties de cours d'eau ou canaux parmi ceux qui sont en très bon état écologique ou identifiés par les schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux comme jouant le rôle de réservoir biologique nécessaire au maintien ou à l'atteinte du bon état écologique des cours d'eau d'un bassin-versant ou dans lesquels une protection complète des poissons migrateurs vivant alternativement en eau douce et en eau salée est nécessaire, sur lesquels aucune autorisation ou concession ne peut être accordée pour la construction de nouveaux ouvrages s'ils constituent un obstacle à la continuité écologique. »
Contrairement à ce que vous venez de dire, cette liste ne se limite pas aux cours d'eau qui sont déjà en très bon état écologique, puisque la loi comprend les mots « ou à l'atteinte du bon état écologique » qui sous-entendent que celui-ci peut, hélas, être absent.
Votre amendement introduit une condition de libre circulation des espèces entre les différentes zones pour le classement d'un cours d'eau dans la première liste ; or le classement ne vise pas uniquement à préserver mais, le cas échéant, à restaurer cette circulation. L'adoption de votre amendement conduirait à supprimer le deuxième objectif.
Enfin, vous souhaitez que soit effectué un diagnostic de la réalité des besoins en moins d'un an, ce qui ne me semble pas totalement réalisable. Si les deux listes ne concernent qu'à peine 11 % des cours d'eau de notre territoire, elles comportent tout de même plusieurs milliers de voies, ce qui représenterait un travail énorme, qui ne me semble pas réalisable. Je donne un avis défavorable à votre amendement.
Nous entrons dans un long tunnel d'amendements. Un travail important de recensement a été effectué sur ces listes. Les interpellations sur les classements et les hiérarchisations sont fréquentes dans les territoires.
La consultation publique sur les SDAGE – schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux – obéit à un calendrier. Les annexes des SDAGE contiennent la liste qui permet de connaître les ouvrages reconnus comme prioritaires. Les concertations et le travail avec les DREAL – directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement – et les comités de bassin sont précieux : il faut poursuivre le plan d'action, dessiné entre 2017 et 2019, qui vise à déployer une politique apaisée de restauration de la continuité biologique. Pour autant, la consultation publique sur les SDAGE stimule la réflexion et le questionnement, notamment sur les priorités inscrites sur les listes.
Je propose de nous retrouver après la consultation publique, soit après le 1er septembre prochain, pour examiner, avec les parlementaires, les présidents de comité de bassin et les DREAL, les projets d'ouvrage soulevant des interrogations. Nous pourrons alors poser un regard plus fin sur les listes annexées aux SDAGE. La concertation est le meilleur outil pour formuler des réponses apaisées et adaptées aux ouvrages et aux territoires, avec l'objectif, que nous partageons tous, de restaurer les continuités écologiques et de protéger un patrimoine auquel nous sommes tous très attachés.
La loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte dispose que chaque révision de SDAGE entraîne celle du classement des cours d'eau. Cette mesure n'est pas appliquée : commençons par la mettre en oeuvre !
L'amendement no 7053 n'est pas adopté.
Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 3558 , 171 , 209 , 334 , 341 , 743 , 946 , 1043 , 1073 , 1658 , 1674 , 1831 , 1846 , 1916 , 1961 , 2123 , 2149 , 2597 , 2625 , 2706 , 2920 , 3891 , 4787 , 5448 , 5670 , 5950 , 6399 , 6424 , 6924 , 6981 , 426 , 436 , 769 , 1038 , 1040 , 1045 , 1048 , 1183 , 1845 , 2150 , 2466 , 2600 , 2628 , 4788 , 5449 , 5948 , 6335 , 6982 , 5056 , 2089 et 4779 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 171 , 209 , 334 , 341 , 743 , 946 , 1043 , 1073 , 1658 , 1674 , 1831 , 1846 , 1916 , 1961 , 2123 , 2149 , 2597 , 2625 , 2706 , 2920 , 3891 , 4787 , 5448 , 5670 , 5950 , 6399 , 6424 , 6924 et 6981 , les amendements nos 426 et 436 , ainsi que les amendements nos 769 , 1038 , 1040 , 1045 , 1048 , 1183 , 1845 , 2150 , 2466 , 2600 , 2628 , 4788 , 5449 , 5948 , 6335 et 6982 sont identiques.
La parole est à M. Hubert Wulfranc, pour soutenir l'amendement no 3558 .
Il m'échoit de défendre l'amendement de mon ami Sébastien Jumel sur les petits moulins à eau.
Nous demandons la reconnaissance et la valorisation énergétique et écologique de ces structures. Il convient d'éviter certaines destructions décidées par les agences de l'eau.
Mon collègue Jumel, qui sillonne abondamment à l'heure actuelle les routes de Normandie, m'a parlé de l'exemple frappant de ces trois fleuves côtiers que sont l'Orne, la Touques et la Vire, où la population des poissons n'a pas repris sa croissance et continue même de baisser malgré de nombreuses destructions d'ouvrages.
En hommage à mon camarade Sébastien Jumel, qui se trouve encore à cette heure sur les routes de Normandie,
Sourires
je vous demande une attention particulière à cet amendement et à ceux qui suivront.
« Merci, Hubert ! » sur les bancs du groupe LR.
Je vais défendre cet amendement au nom de ses cosignataires et des membres de l'espace Colbert. Il vise tout d'abord à consacrer le rôle des moulins à eau, comme vient de le dire Hubert Wulfranc. Au-delà de leur rôle dans la production d'énergie et de leur dimension écologique, ces moulins font partie du patrimoine de notre pays.
Ensuite, l'amendement rappelle strictement la loi et confie aux propriétaires l'entretien, la gestion et l'équipement des moulins. Il ne convient en aucun cas de détruire tout ou partie des équipements de ces moulins. En effet, il y a un conflit d'usage avec les propriétaires de moulins à eau qui peuvent les utiliser pour produire des farines : aux Marches de Bretagne, près de Fougères, sur le Couesnon qui se jette près du Mont-Saint-Michel, il subsiste quelques moulins dont il importe de préserver le rôle et pour lesquels il convient d'éviter le conflit d'usage dans lequel les agences de l'eau tirent argument de la défense de la libre circulation des poissons remontant les cours pour frayer pour demander aux propriétaires de détruire certains équipements des moulins.
Nous voulons travailler à la préservation des dimensions énergétique, écologique et patrimoniale des moulins.
Je constate avec satisfaction que ce sujet nous rassemble sur plusieurs bancs. Je suis ravi, madame la secrétaire d'État, que vous rappeliez votre attachement à l'un des éléments du patrimoine de notre pays.
Lors des deux derniers étés, plus de soixante-dix départements ont fait l'objet d'arrêtés de restrictions sévères de l'usage de l'eau, pénalisant l'agriculture et nos concitoyens, ce qui ne nous laisse pas insensibles.
Des milliers d'ouvrages de retenue d'eau des moulins stockent des centaines de millions de mètres cubes d'eau douce dans l'ensemble du territoire et participent activement à la recharge des nappes tout au long de l'année. Ils offrent un potentiel de développement d'énergie renouvelable non négligeable, qui équivaut à la consommation électrique annuelle, hors chauffage, d'un million de foyers, d'après les données de RESTOR Hydro, un projet européen très intéressant.
Les obligations de franchissement des poissons migrateurs et de transport suffisant des sédiments, posées par le code de l'environnement, confient la gestion, l'entretien et l'équipement des ouvrages de retenue aux propriétaires des moulins.
Pourtant, dans leurs programmes d'aide, les agences de l'eau ont ajouté aux trois seules modalités prévues par la loi une quatrième consistant à détruire les ouvrages. Celle-ci donne lieu à une prime importante, les taux d'aides étant proches de 100 %, soit le double des aides prévues pour l'équipement desdits ouvrages.
Une telle prime à la casse explique à elle seule les milliers de destructions de retenues de moulins et la perte de dizaines de millions de mètres cubes d'eau douce alors que notre territoire connaît des pénuries importantes chaque année.
L'amendement tend à exclure définitivement le financement de la destruction des retenues de moulins au titre des obligations précitées et à orienter les financements publics non plus vers une continuité écologique destructrice, mais vers une continuité écologique de conservation et de valorisation des ouvrages, conforme à la loi.
Il serait ainsi mis un terme à une politique de destruction qui a pour effet d'aggraver la sécheresse sur notre territoire et d'obérer le développement de la petite hydroélectricité.
Les amendements en ce sens peuvent nous rassembler.
Notre pays a la chance de posséder, avec les moulins qui jalonnent nos rivières, un patrimoine gigantesque. Il s'agit d'un patrimoine ancien – datant du XIVe, XVe, XVIe ou XVIIe siècle – , entretenu par des familles propriétaires qui sont souvent des passionnées. Ce patrimoine, aussi curieux que cela puisse paraître, certains veulent le détruire au nom de la prétendue continuité écologique.
Pourtant, il représente une chance à double titre : il constitue à la fois une réserve d'eau et une source d'électricité décarbonée – l'équivalent de la consommation d'un million de personnes. Cela compte, qu'on le veuille ou non !
Or, il est menacé tant par une administration qui, dans le sillage des DREAL, est devenue très militante en s'attaquant aux moulins, que par des financements publics qui pourraient légitimement être affectés à d'autres usages.
Sachons conserver un tel patrimoine. Il constitue une chance pour nous ; il est écologique au sens premier du terme, puisqu'il permet la production d'énergie décarbonée. Pourquoi le remettre en cause ?
Je reçois dans ma permanence – et je ne dois pas être le seul ici – des propriétaires de moulins découragés…
… et scandalisés. Ce n'est pas seulement leur projet de vie qui se trouve remis en question ; ce sont plusieurs siècles de patrimoine préservé par nos grands anciens.
L'adoption de l'amendement permettra de faire cesser les tracasseries à l'égard de ceux qui ont le mérite d'entretenir notre patrimoine.
À mon tour, je souhaite me faire l'avocat d'une continuité écologique apaisée. Je l'ai déclinée au travers de plusieurs amendements que je défendrai de manière groupée ici.
Oui, il faut protéger nos rivières. Oui, il faut protéger la biodiversité. Oui, nous devons continuer à améliorer la qualité écologique des milieux aquatiques – c'est un Ardéchois qui vous le dit, le contrat de rivière pour le bassin de l'Ardèche fut le premier signé en 1984. Mais, non, nos digues ancestrales et nos moulins ne sont pas la source de tous les maux !
Lorsqu'un ouvrage est présent depuis longtemps – des siècles, Marc Le Fur vient de le rappeler – , sa destruction affecte l'hydromorphologie de l'eau.
La destruction des seuils et des digues, outre la perte pour le patrimoine, le tourisme et l'agriculture qu'elle représente, emporte aussi des conséquences écologiques pour un milieu dans lequel un équilibre entre la faune et la flore s'est installé au fil du temps.
La destruction des seuils et des digues a pour effet de diminuer considérablement les masses d'eau alors que le stockage de celle-ci devient stratégique dans la lutte contre le dérèglement climatique ; d'accélérer les vitesses d'écoulement, ce qui représente un danger pour les nappes phréatiques, les zones humides connexes, ou lors de crues – vous connaissez tous ici les fameux épisodes cévenols. Enfin, n'oublions pas le potentiel inexploité de production d'énergie verte et renouvelable.
Tel est l'esprit des amendements que je défends : du bon sens au service d'une continuité écologique apaisée, associant tous les acteurs de la biodiversité, mais aussi la fin d'un dogme – tout ce que la main de l'homme a construit doit non pas être systématiquement détruit, mais être protégé, valorisé et partagé.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.
Je souhaite également appeler l'attention sur la continuité écologique destructrice, en particulier sur le sort réservé aux seuils, qui ont été créés par la volonté de l'homme sur les rivières ou les moulins. Nos ancêtres, qui étaient sur ce point des gens sensés, avaient considéré que certains seuils permettent de réguler le débit de l'eau mais aussi de créer des réserves d'eau capables de demeurer en période d'étiage – celles-ci sont parfois le seul endroit où les poissons peuvent trouver refuge pendant les périodes de sécheresse. Dans les rivières asséchées aujourd'hui, les fédérations de pêche viennent sauver les poissons et les seuls qui résistent sont ceux qui ont trouvé un refuge dans de telles réserves d'eau.
Les passes à poissons coûtent très cher – des milliers d'euros. Dans le Jura, j'invite souvent les agents de l'agence de l'eau à venir voir les truites franchir des cascades de six ou sept mètres de haut, sans avoir besoin de passes à poissons.
L'argent public qui finance la destruction des ouvrages pourrait être mieux utilisé pour assurer la continuité écologique en recréant des méandres dans les cours d'eau – un aménagement trop rare car très coûteux.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement no 1674 .
Tous ces amendements de sensibilités politiques diverses posent une question de fond : faut-il supprimer les retenues d'eau que constituent les moulins à eau ?
Heureusement que Charles de Courson est là pour apporter de la substance !
Pour les partisans de la suppression des moulins à eau, celle-ci se justifierait par le fait que ces ouvrages portent atteinte à la continuité écologique en empêchant les poissons de remonter les rivières. Est-ce vrai ? Une expérimentation a été menée en Basse-Normandie, sur l'Orne et deux plus petits fleuves côtiers, d'où il ressort que cette suppression entraîne un effondrement de la vie aquatique. Pourquoi les espèces disparaissent-elles ? Comme notre collègue l'a expliqué, en période de forte chaleur, lorsque le débit baisse fortement, l'oxygène se raréfie et les poissons meurent – mais s'il existe une retenue d'eau, ils peuvent s'y réfugier. La retenue permet ainsi de maintenir la vie aquacole.
Madame la secrétaire d'État, il faut arrêter la politique consistant à détruire les retenues d'eau.
C'est un désastre pour nos cours d'eau et pour la biodiversité.
Les amendements ont tous le même objet : le respect de la loi. La destruction des retenues d'eau est-elle prévue par la loi ? Pas du tout – les dispositions du code de l'environnement ont été rappelées. C'est l'administration qui a ajouté cette exigence et cherche à persuader les élus que celle-ci vise à maintenir la biodiversité. Je suis fils de pisciculteur, je connais un peu le poisson et je peux vous assurer, madame la secrétaire d'État – vous pouvez venir voir en Basse-Normandie ou chez moi, en Champagne…
La parole est à Mme Jacqueline Dubois, pour soutenir l'amendement no 1831 .
L'ajout des dispositions prévues dans l'amendement permettra d'orienter les financements publics non plus vers une continuité écologique destructrice, mais vers une continuité écologique de conservation et de valorisation. Ainsi cessera la destruction des moulins que nous devons protéger tant pour leur valeur patrimoniale que pour leur potentiel d'exploitation de l'énergie hydraulique. Les moulins font partie de notre histoire et l'énergie hydroélectrique de notre avenir.
L'amendement vise à préserver d'une destruction programmée les moulins à eau. Une telle destruction est un non-sens environnemental. Les moulins sont présents sur notre territoire depuis plusieurs siècles. Pourtant, ils sont encore accusés de la disparition de la faune alors que celle-ci a commencé il y a seulement quelques décennies. Nous le savons tous, la disparition des poissons, faute de reproduction, est principalement due à la dégradation de la qualité de l'eau. Les résidus de produits phytopharmaceutiques provenant des rejets des stations d'épuration dans les cours d'eau sont responsables de la présence d'oestrogènes qui provoquent une déstabilisation des écosystèmes – le genre des poissons est modifié et les mâles disparaissent ; hors rempoissonnement, les rivières comptent aujourd'hui 80 % de femelles. Le réchauffement climatique, et par conséquent celui des cours d'eau, est aussi en cause : les poissons ne sont pas capables de réguler leur température ; cela perturbe leurs déplacements.
Je m'associe aux propos d'Hubert Wulfranc concernant le rôle des agences de l'eau, lesquelles, bien souvent, s'autorisent des destructions de moulins qui pourraient être évitées.
Je sollicite un avis favorable sur les amendements qui visent à préserver les moulins, patrimoine foncier et culturel, mais aussi source potentielle d'énergie verte à laquelle nos concitoyens sont très attachés.
À mon tour, je souhaite insister sur l'amendement soutenu sur de nombreux bancs de l'Assemblée.
Les moulins à eau font partie du patrimoine historique – ils sont présents depuis des siècles – et géographique – que seraient nos territoires sans eux ? Les moulins sont un élément important de leur identité. Mais ils présentent aussi un intérêt écologique compte tenu de leur potentiel, insuffisamment exploité, de production d'énergie et de leur rôle dans la régulation des cours d'eau.
La manière dont les services de l'État considèrent les moulins aujourd'hui suscite une grande inquiétude et une crispation chez les propriétaires qui se sentent montrés du doigt.
L'amendement vise à reconnaître le rôle des propriétaires dans la préservation et la mise en valeur des moulins, mais aussi à faire cesser la destruction des retenues de moulins ainsi qu'à supprimer les financements qui y sont consacrés. Il s'agit de redonner aux moulins leur place dans notre patrimoine ainsi que dans l'économie et dans notre démarche écologique.
Madame la secrétaire d'État, entendez-vous les cris des territoires qui résonnent pour défendre nos moulins ?
Sourires sur divers bancs.
Ben oui, franchement !
Les propriétaires des moulins, lesquels sont parfois en très mauvais état, effectuent un parcours du combattant pour pouvoir restaurer ces ouvrages et imaginer demain une petite production d'hydroélectricité. En effet, les moulins recèlent, grâce à l'énergie verte et décarbonée qu'ils pourraient fournir, un potentiel d'énergie renouvelable non négligeable.
Bien sûr, il s'agit de restaurer ce patrimoine national, de sauver ces moulins qui font partie de nos beaux paysages français, mais leur utilisation donne lieu à un parcours du combattant au cours duquel il faut parfois obtenir l'accord du ministère sur un modèle de contrat avec le fournisseur d'énergie pour le décompte, ou sur les réseaux employés.
Madame la ministre, quelle est votre stratégie à propos de nos moulins de France ? Ont-ils un avenir dans notre pays ? Ils ont des vertus, qu'ont rappelées nos collègues : la retenue d'eau douce, le stockage, qui participent d'ailleurs à la recharge des nappes. Allez-vous favoriser leur préservation et leur restauration ?
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.
En quelques mots, je veux me faire l'avocat des propriétaires de moulins, qui plaident, comme l'ont rappelé nos collègues, pour une continuité écologique apaisée. Pour toutes les raisons patrimoniales, écologiques ou économiques avancées par tous les orateurs et qui me semblent parfaitement valables, cet amendement vise à favoriser une continuité écologique de conservation et de valorisation, et non pas destructrice.
La parole est à Mme Stéphanie Kerbarh, pour soutenir l'amendement no 5448 .
Ces deux derniers étés, notre pays a connu des états de sécheresse particulièrement préoccupants. En 2019 et 2020, près de quatre-vingt-dix départements, soit la quasi-totalité de notre territoire, ont fait l'objet d'arrêtés sécheresse et de restrictions, parfois sévères, de l'usage de l'eau, pénalisant nos agriculteurs et nos concitoyens. Le rapport du 11 décembre 2019 sur la politique de l'eau remis par nos collègues Jean-Claude Leclabart et Didier Quentin conclut à cet égard que « près d'un tiers du territoire de l'Union européenne est d'ores et déjà exposé à un "stress hydrique" », et les dangers liés au manque d'eau – sécheresses – ou à son excès – inondations – risquent de s'accroître, dans les décennies à venir. »
Pourtant, alors que notre territoire est soumis à un manque d'eau de plus en plus prégnant, des centaines de retenues d'eau sont détruites chaque année sur fonds publics dans le cadre de politiques dites de « continuité écologique ». À ce jour, ce seraient déjà entre 3 000 et 5 000 retenues d'eau, en particulier des retenues de moulins, qui auraient été détruites dans le cadre des programmes d'aide des agences de l'eau. La loi a pourtant exclusivement prévu la gestion, l'entretien et l'équipement de ces ouvrages dans le cadre de l'accomplissement des obligations de continuité écologique, et non leur destruction, comme le montre l'article L. 214-17 du code de l'environnement.
Comment pourrons-nous expliquer à nos concitoyens, dans un pareil contexte de stress hydrique récurrent, que l'État encourage et finance la destruction des retenues d'eau ? Les 3 000 à 5 000 destructions déjà opérées représentent une perte de plusieurs dizaines de millions de mètres cubes d'eau douce soustraits à notre territoire…
… et qui ne participent dorénavant plus à l'alimentation de nos nappes, comme ils le faisaient pourtant depuis des siècles.
Mme Marianne Dubois applaudit
Par ailleurs, la doctrine de continuité écologique destructive obère le développement de la petite hydroélectricité. Je rejoins ici mes collègues normands car, en Normandie, plusieurs moulins producteurs d'hydroélectricité ont été rachetés avec des subventions à 100 % de l'agence de l'eau Seine-Normandie afin d'être détruits. Est-il normal, alors que nous avons voté la loi énergie climat à la fin de l'année 2019, que les agences de l'eau financent, sur fonds publics, la destruction de ces productions pourtant encouragées par la loi ? La France possède le plus important potentiel européen de petite hydroélectricité, évalué à l'équivalent de la consommation électrique annuelle d'un million de foyers hors chauffage, d'après l'étude européenne RESTOR Hydro. Il convient de le valoriser, et non de concourir, avec les finances publiques, à sa destruction.
Mme Marianne Dubois applaudit.
Il est grand temps de mettre un terme à cette politique de destruction qui a dévoyé la lettre et l'esprit de nos lois
Vifs applaudissements sur les bancs du groupe LR. – MM. Jean-Louis Bricout et Jean-Luc Mélenchon applaudissent également
au profit d'une doctrine radicale ne faisant l'objet d'aucun consensus scientifique et participant à la destruction d'un patrimoine ancien dont les données historiques prouvent qu'il n'est en rien responsable des désordres écologiques que connaissent nos cours d'eau. Les milliers de moulins à eau qui jalonnent nos territoires depuis des siècles, comme cela a été dit par mes collègues, représentent un précieux héritage, qu'il convient de mettre en valeur au service de la transition énergétique et de la lutte contre les effets du dérèglement climatique, ce qui est l'objet même du projet de loi que nous discutons aujourd'hui, afin de préserver en particulier une ressource vitale dont nous commençons tous à manquer cruellement : l'eau.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM. – Vifs applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Madame la ministre, que vous ont-ils fait ? Qu'ont fait les propriétaires de moulins à eau à votre ministère ?
Mais que vous ont-ils fait à vous ?
Les seuils des moulins sont devenus l'ennemi public numéro un de la direction de l'eau et de la biodiversité ! Or, les chiffres donnés par votre administration sont erronés.
Pour ce qui concerne les seuils, par exemple, des centaines d'études scientifiques montrent qu'on n'observe pas de baisse de biodiversité en leur présence – c'est au contraire après la suppression des seuils que les poissons migrateurs ont tendance à disparaître.
Les seuils ne bloquent pas le transport de sédiments, car 90 % des chutes sont inférieures à 2 mètres et, en cas de petite inondation, ils sont couverts, de telle sorte que les sédiments peuvent être entretenus. Les retenues améliorent la qualité de l'eau par la dénitrification.
Les barrages des moulins participent à la politique d'équilibre de l'eau, en retenant des millions de mètres cubes d'eau.
Madame la ministre, entendez ce cri qui monte de tous les bancs de notre assemblée pour vous dire que les moulins à eau sont dans notre patrimoine et méritent d'y rester.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Les amendements identiques nos 426 de Mme Valérie Bazin-Malgras et 436 de Mme Emmanuelle Anthoine sont défendus.
Les amendements identiques nos 769 de M. Philippe Meyer, 1038 de M. Fabrice Brun, 1040 de M. Marc Le Fur, 1045 de M. Pierre Vatin, 1048 de M. Michel Vialay, 1183 de Mme Émilie Bonnivard, 1845 de M. Xavier Batut, 2150 de Mme Lise Magnier, 2466 de M. Philippe Latombe, 2600 de M. Thibault Bazin et 2628 de Mme Marie-Christine Dalloz sont défendus.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l'amendement no 4788 .
« Bravo ! », applaudissements et quelques sourires sur les bancs du groupe LR
et me contenterai de dire que les moulins représentent des enjeux patrimoniaux, qu'ils soulèvent des problèmes de droits d'eau, et que la question doit être traitée au cas par cas. Il n'est pas possible que les agences de l'eau orientent plutôt vers la destruction que vers la restauration ou l'entretien des moulins : cette décision devrait revenir à la concertation locale, ce qui est le cas dans certains départements et devrait être généralisé. Une telle concertation nous éviterait de voir nos collègues siégeant sur tous les bancs monter au créneau et il est inadmissible que, dans de nombreux départements, elle n'ait pas lieu.
M. David Habib applaudit.
Mme Kerbarh a très bien expliqué l'enjeu des moulins. J'ajoute que, dans le Lot, notre revendication est la même. Depuis trois ans, en effet, nous sommes interpellés à propos des moulins et je souhaiterais que nous parvenions aujourd'hui à réconcilier les agences de l'eau et les propriétaires des moulins, car il s'agit là d'une question d'écologie et de patrimoine, mais aussi de cohésion de nos territoires.
Les amendements identiques nos 2089 de M. Xavier Batut et 4779 de Mme Cécile Untermaier sont défendus.
Madame Tuffnell, puisque vous vous impatientez, permettez-moi de vous rappeler la règle : maintenant que j'ai appelé tous les amendements en discussion commune, Mme la rapporteure, puis Mme la ministre, donneront successivement l'avis de la commission et du Gouvernement, après quoi j'ouvrirai la discussion. C'est la procédure.
Je vous assure que j'ai pris en compte votre demande de parole.
Quel est l'avis de la commission, madame la rapporteure ?
Mme la rapporteure qui a entendu le peuple s'exprimer par la voix de ses représentants !
Monsieur Lecoq, j'ai entendu des députés s'exprimer avec ferveur et passion sur un sujet qui, comme on le sait, les déchaîne depuis un certain temps déjà. Nous devons parvenir à poser deux ou trois éléments de discussion.
Protestations sur les bancs du groupe LR.
Je vous en prie, chers collègues ! L'expression « déchaîner les passions » n'a rien de péjoratif. Cela n'a rien de grave, et tout va bien.
Mêmes mouvements.
Chers collègues, en dépit de la passion justifiée que suscite la défense des moulins, je vous demande d'écouter courtoisement l'avis de la rapporteure.
Sans qu'il s'agisse d'interpeller quiconque, je rappelle que 11 % seulement de nos cours d'eau font actuellement l'objet d'un classement en liste 2 au titre du principe de la continuité écologique, comme je le disais tout à l'heure à Mme Bouchet Bellecourt.
Seuls ces 11 % des cours d'eau sont donc soumis à des obligations relatives à la fois au transport des sédiments et à la circulation des espèces. Cette continuité est un élément fondamental pour le bon fonctionnement des écosystèmes aquatiques, dont nous parlons depuis tout à l'heure, et l'État a pris des engagements auprès de nos partenaires européens pour assurer ce bon état de l'eau. Il se trouve qu'à ce jour, nous sommes très loin des objectifs que nous nous sommes fixés et il importe de le rappeler, car c'est tout de même l'un de nos objectifs à tous que de faire en sorte que l'eau, ressource précieuse, puisse être à la fois une ressource pour nous et un espace de biodiversité pour les espèces aquatiques.
Aujourd'hui, …
… sur les dizaines de milliers de moulins que compte notre pays, 5 000 doivent encore être rendus « transparents », mais cela n'affecterait au maximum que 1 600 seuils, qui ne sont pas tous utilisés, loin de là, et qui font, depuis plusieurs semaines déjà, l'objet d'une consultation de la population, afin que celle-ci puisse s'exprimer sur ces sujets.
Puisqu'il a beaucoup été question d'hydroélectricité, je rappellerai enfin un élément important : …
… la loi du 24 février 2017 a exempté de ces obligations les moulins utilisés à l'époque pour produire de l'électricité, même si cette production n'en était qu'au stade du projet. À moins de supposer que des dizaines d'autres moulins français se soient mis à l'hydroélectricité depuis 2017, ceux qui en produisent actuellement sont donc protégés par cette loi.
Outre le fait qu'ils relativisent fortement le principe de continuité écologique en affirmant qu'aucun autre usage du cours d'eau, notamment énergétique, et même potentiel, ne pourrait être remis en cause, vos amendements visant à interdire la destruction des seuils de retenue des moulins nuisent à nos objectifs communs en matière de biodiversité et d'écosystèmes aquatiques.
Avant de laisser la parole à Mme la ministre, je voulais préciser que les moulins patrimoniaux, chers à vos coeurs, notamment à celui de M. Le Fur, …
… se trouvent déjà protégés – y compris leurs abords – précisément au titre de cet intérêt patrimonial. Enfin, je tiens à prendre la défense des agences de l'eau.
Prétendre que le sujet est anecdotique, c'est méconnaître leur action quotidienne pour la préservation de nos bassins, de la continuité hydraulique, de la biodiversité dans les cours d'eau et dans les espaces aquatiques.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
J'ai discuté avec cinq de leurs six directeurs : s'agissant de ces moulins, tous recourent à la concertation. On ne peut obliger un propriétaire privé à supprimer un seuil ; on lui propose toujours des solutions.
Le financement est garanti et versé en partie par les agences de l'eau, mais aussi par des départements, des régions, notamment pour les passes à poissons. Encore une fois, il faut considérer le sujet dans sa globalité. Une passe à poissons, c'est très bien, mais 10 % des poissons succombent à chaque étape : autant dire qu'au bout du dixième obstacle, il n'en reste plus. Nous devons prendre garde à ce point. Un proverbe dont je ne me souviens plus exactement, madame Brulebois, dit en substance qu'il existe des poissons volants, mais que tous les poissons ne volent pas : ces aménagements permettent de faire passer certaines espèces, pas toutes.
En revanche, ce qui ne passe vraiment pas, ce sont les sédiments. Il y a là un réel problème, auquel je suis particulièrement sensible. Ma circonscription fait office de zone tampon afin de protéger Lyon des crues du Rhône : je peux vous assurer que nous tenons à nos berges, que nous y sommes attentifs. Or la sédimentation est essentielle à leur solidité.
Pour être certains que nos habitations ne seront pas toutes inondées, nous aurions besoin que les sédiments passent beaucoup plus.
Étant donné toutes ces raisons, mon avis sera défavorable à l'ensemble des amendements en discussion commune.
Moi qui suis une amoureuse des moulins et qui défends avec ferveur la biodiversité, je tiens à vous le dire : ce genre de débat m'agace,
Exclamations sur les bancs du groupe LR
tout simplement parce que certains essaient de créer des oppositions entre les uns et les autres. On peut tout à fait préserver notre patrimoine, qui fait la richesse de nos paysages et la fierté des territoires, sans sacrifier la biodiversité. Aussitôt qu'il est question d'écologie, certains tentent de l'opposer à quelque chose d'autre !
La législation actuelle est bien faite : elle permet à la fois de préserver les moulins et de protéger la biodiversité. Il a fallu très longtemps pour atteindre cet équilibre ! Même si cela paraît évident, je voudrais rappeler que rétablir la continuité écologique aux abords d'un moulin suppose d'agir sur le seuil, non sur le bâti : on ne touche donc pas à nos moulins. J'entends aussi que la restauration de la continuité écologique pourrait empêcher notre pays d'atteindre ses objectifs en matière d'énergies renouvelables. Vous conviendrez que ce n'est pas le sujet ! La petite hydroélectricité peut être intéressante pour certains territoires, mais elle représente moins de 1 % de notre production d'électricité : …
… elle n'influe pas sur son équilibre. Ce n'est pas là un enjeu vital pour le mix énergétique.
« Oh ! » sur les bancs du groupe LR.
Vous préférez les centrales à charbon, comme en Allemagne ? C'est plus écologique pour vous ?
C'est amusant : quand on est interrompue sans arrêt, s'exprimer devient difficile. Enfin, ce n'est pas grave !
On peut s'écouter, échanger : même si nous parlons des moulins et non de la faim dans le monde, le sujet mérite que vous y prêtiez tous attention.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Est-ce que je peux continuer ? Premièrement, donc, on ne touche pas au bâti. Deuxièmement, je le répète, la petite hydroélectricité, qui reçoit un soutien financier, peut certes présenter un intérêt pour certains territoires, mais ce n'est pas en touchant aux seuils de 1 600 moulins – dont la plupart ne produisent pas d'hydroélectricité – que nous remettrons en cause notre mix énergétique.
D'ailleurs, cela ne veut pas dire qu'il faut supprimer les seuils partout : il convient évidemment d'agir au cas par cas, comme toujours en matière d'écologie.
D'après la situation d'ensemble, on pose des principes : protéger la biodiversité, la continuité écologique. Ensuite, on regarde de plus près : la configuration n'est pas la même dans l'Orne, dans la Somme, dans les zones de montagne.
Il faut toujours parler des zones de montagne, n'est-ce pas, monsieur Saddier ? Je me permets de le citer, car il connaît bien les politiques de l'eau… L'État n'a pas sur le sujet de position dogmatique, …
… de méthode privilégiée par principe. Les agences de l'eau – heureusement que nous les avons, quoi qu'en pensent ceux qui les attaquent – financent les seuils, les effacements, les passes à poissons, …
Exclamations sur les bancs du groupe LR
… mais en appliquant les prescriptions du préfet.
Comme vous, je reçois très régulièrement de nombreuses sollicitations à ce sujet : je constate qu'elles ont été efficaces. Je connais la passion des défenseurs des moulins. Ils ont parfaitement le droit d'écrire à tous les députés, de leur envoyer des argumentaires, mais on peut aussi y répondre. Monsieur de Courson, vous évoquiez le cas de l'Orne. J'ai reçu comme vous les argumentaires que les défenseurs des moulins ont diffusés très largement à ce propos : les chiffres qu'ils retiennent concernent l'évolution des populations de poissons migrateurs depuis 2010, alors que des réponses biologiques existaient depuis longtemps, puisque les aménagements sur l'Orne sont bien antérieurs.
Lorsqu'on s'intéresse à l'évolution de la situation depuis l'époque où une politique de continuité biologique a été appliquée à l'Orne – les données sont publiques, vous les trouverez sur le site de Normandie grands migrateurs – , on voit que les mesures prises afin de restaurer la continuité biologique des cours d'eau ont fait la preuve de leur efficacité. Il faut donc prendre garde aux chiffres, qui ne donnent pas toujours une vision juste et équilibrée des choses. Laisser croire qu'il existerait une solution unique en matière de gestion des cours d'eau est erroné. Vos amendements nous priveraient par principe d'une possibilité, celle de l'effacement : c'est dangereux.
On peut se retrouver en difficulté lors de la restauration des cours d'eau. Le faire partout serait idiot, nous sommes bien d'accord sur ce point ; ne le faire nulle part poserait des problèmes. J'aimerais donc que nous fassions ce qu'il convient de faire : laisser subsister des possibilités de revoir les listes de cours d'eau, qu'il puisse y avoir des concertations dans les territoires. Personne n'a envie de tuer les moulins. Il faudrait avoir enfin une démarche apaisée : le sujet suscite une passion quelque peu excessive, disproportionnée. Dans ce domaine, les problèmes se posent de manière très ponctuelle et peuvent être réglés autour d'une table. Voilà pourquoi j'émettrai un avis défavorable à ces amendements.
Pour finir, j'ajouterai que les retenues d'eau se limitent à quelques milliers de mètres cubes. Il faut choisir entre retenue d'eau et production hydroélectrique, puisque l'on ne peut combiner les deux : pour les ouvrages déjà équipés et gérés, c'est-à-dire ceux qui ont déjà fait l'objet de travaux, la retenue a pu être conservée dans les deux tiers des cas.
Encore une fois, nous parlons de problèmes dont je ne nie pas l'existence, mais qui surviennent très rarement, surtout si l'on considère l'enjeu. Modifier le texte, nous empêcher de prendre des mesures adaptées aux situations locales, serait fortement contre-productif. J'insiste sur ce point : la continuité écologique des cours d'eau est une politique complexe, sérieuse, nécessitant l'avis de spécialistes, et très bien conduite aujourd'hui, à quelques exceptions près. Vous pouvez nous alerter, nous pouvons avancer ensemble, sans devoir modifier ce projet de loi, ce qui aurait des conséquences beaucoup plus lourdes.
Pour compléter ce que vient de dire Mme la ministre, je voudrais revenir sur la question de la politique de restauration des cours d'eau. Elle ne vise pas à détruire des moulins : …
… la plupart des ouvrages qui se trouvent dans les lits mineurs ne sont pas des moulins. Il s'agit là d'une généralisation visant à nous laisser croire que l'on fait n'importe quoi, ce qui est absolument faux. Demandez aux agences de l'eau : elles ne font pas n'importe quoi ! Il existe des ouvrages qui ne sont pas entretenus, qui ne disposent pas de passes à poissons, des situations qui ne peuvent durer. De plus, la quantité d'eau retenue dans un lit mineur est très faible. Pensez-vous qu'une petite retenue en stockera indéfiniment ? Souvent, même, les sédiments font obstacle à son infiltration. Je vais vous citer un exemple : les tourbières du Jura. Pour les restaurer, les remettre en eau, il a fallu supprimer les seuils transversaux créés par l'homme afin de rectifier le système, l'organisation du cours d'eau. Je vous en supplie, admettez la complexité de la situation. Il ne s'agit pas de supprimer les moulins ; beaucoup d'autres ouvrages sont concernés, et l'objectif du texte consiste à stocker l'eau en quantité suffisante. Je vous invite donc à suivre l'avis de la ministre.
Premièrement, je précise que la vallée de l'Arve, dernière grande rivière glaciaire de France, compte 3 000 moulins. Je suis président de la commission locale de l'eau du bassin de l'Arve : on ne pourra m'accuser de n'être pas assez confronté à ce débat. Chez moi aussi, mes chers collègues, c'est un sujet gratiné : je suis dans ces discussions jusqu'au cou.
Deuxièmement, je m'autorise à vous rappeler que cette politique s'applique depuis 2007. Elle est issue de la loi du 30 décembre 2006 sur l'eau et les milieux aquatiques, adoptée dans cet hémicycle : les quelques députés qui, comme moi, y siégeaient déjà à l'époque s'en souviendront. Trois majorités de couleurs différentes se sont depuis succédé sans la remettre véritablement en cause, même si des discussions ont eu lieu à ce sujet – et si tant de parlementaires sont intervenus, c'est bien qu'il y a place pour la discussion. Toujours est-il que cette politique, cet état de fait, ne tombent pas du ciel, mais déclinent la directive-cadre sur l'eau – DCE – de l'Union européenne, transposée par la loi de 2006.
Les défenseurs de ces amendements ont souvent mis en cause les agences de l'eau. Seul président de comité de bassin présent dans l'hémicycle, j'ai vécu un grand moment de solitude pendant près d'une heure, à l'écoute des différents exposés. Mes chers collègues, j'aimerais rectifier deux éléments. Premièrement, ni les agences de l'eau ni les comités de bassin ne sont à l'origine du classement des cours d'eau.
Celui-ci fait l'objet d'un arrêté préfectoral signé par le préfet coordonnateur de chaque bassin à l'issue d'une très large concertation. Il est vrai, comme l'a rappelé Marie-Noëlle Battistel, que dans les bassins où il existe une gouvernance locale, celle-ci peut s'exprimer et peser dans le classement des cours d'eau en liste 1 ou en liste 2, ainsi que dans l'identification de certains ouvrages, mais à aucun moment les agences de l'eau ou les comités de bassin n'arrêtent de listes de cours d'eau ou de listes d'ouvrages à conserver ou à effacer.
Deuxièmement, il a systématiquement été reproché aux agences d'enjoindre l'effacement ou l'adaptation des seuils. C'est totalement faux, mes chers collègues : un directeur d'agence de l'eau n'a pas les moyens juridiques d'une telle injonction.
Mme Frédérique Tuffnell applaudit.
Une agence de l'eau n'est pas un service instructeur de l'État. Le service instructeur de l'État qui donne l'injonction est le service porteur de la police de l'eau, en lien avec la direction départementale des territoires – DDT – ou bien avec la DREAL de bassin, en fonction de la taille et des enjeux – notamment hydroélectriques – du seuil. Une agence de l'eau n'est jamais décisionnaire dans ce domaine.
Je trouve regrettable cette attaque en règle contre les agences de l'eau, même si je respecte le point de vue qui s'est ainsi exprimé. En effet, les agences de l'eau sont le seul service de l'État qui finance les effacements ou les adaptations de seuil. Je vous demande expressément, chers collègues, de faire la différence entre le service instructeur et le seul service de l'État qui soit actuellement financeur, à savoir l'agence de l'eau. Cela a été dit, les agences de l'eau assument souvent ce financement au côté des collectivités territoriales – la structure intercommunale ayant la compétence gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations – GEMAPI – , le département, la région. Lorsqu'un accord est trouvé – je sais que ce n'est pas toujours le cas – , on peut ainsi parvenir à un financement à hauteur de 80 %.
Enfin, les chiffres sont là : 10 000 ouvrages issus des listes 2 sont à effacer en France, et seulement 11 % des cours d'eau. Cela signifie qu'on ne touche pas à 89 % d'entre eux.
Sur les 11 % de cours d'eau identifiés, les arrêtés de comité de bassin des préfets coordonnateurs ont ainsi recensé 10 000 ouvrages, dont 5 000 peuvent être considérés comme ayant été traités. Il en reste donc 5 000. Un chiffre est assez représentatif de ce qui s'est passé sur les bassins. Il est public et incontestable : vous pourrez le vérifier, dussions-nous y passer la nuit. Parmi les 1 200 équipements d'ouvrages réalisés par l'agence Rhône-Méditerranée-Corse, celle qui en a réalisé le plus grand nombre, 70 % ont été équipés de passes à poissons et 30 % seulement effacés. Il est donc faux de dire que l'on démolit tout et que l'on veut tout effacer ! À l'échelle de la France, une majorité de seuils ont été équipés et une minorité d'entre eux ont été effacés.
Je vous confirme ce qui a été dit au sujet du financement : les agences – à commencer par la mienne – versent une prime à l'effacement plutôt qu'à l'équipement. Dans ma région, le comité de bassin octroie ainsi un financement de 50 % pour un équipement et de 70 % pour un effacement. L'une de nos collègues a évoqué un financement de 100 %. Je ne peux pas laisser dire n'importe quoi : il est interdit, en France, de financer à 100 %.
Cela n'est possible que dans un seul cas, celui où le seuil est orphelin, c'est-à-dire qu'il n'a plus de propriétaire. Dans ce cas, en l'absence d'autre solution et après accord préalable du comité de bassin, l'agence peut, par dérogation, financer l'effacement total à hauteur de 100 %. Il arrive en effet, dans des propriétés privées ou des forêts, que l'on ne retrouve pas de propriétaire.
Oui, nous avons besoin d'une gouvernance locale, oui, nous avons aussi besoin de discuter davantage. Mais s'il vous plaît, chers collègues, ne chargez pas les agences de l'eau : dans cette affaire, elles sont celles qui financent, mais pas celles qui donnent l'ordre. En outre, la majorité des seuils sont aujourd'hui équipés plutôt qu'effacés.
Je le dis très amicalement : je ne voterai pas ces amendements qui auraient pour conséquence de mettre fin au financement par les agences de l'eau de tous les équipements de seuils. Vous y gagneriez peut-être à court terme, chers collègues, en termes de suppressions de seuils, mais les comités de bassin et les agences de l'eau se retireraient. Or, avec les propriétaires, nous avons besoin de leurs financements pour amorcer la pompe et obtenir le concours des collectivités territoriales, des départements et des régions. Ces amendements étaient nécessaires pour appeler l'attention du Gouvernement sur le problème que nous constatons…
… et ils ont fait leur travail. Il nous faut améliorer la situation, mais leur adoption conduirait à couper le financement de la restauration des seuils par les agences de l'eau.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes LR et LaREM. – Mme Frédérique Tuffnell applaudit aussi
Excellent, monsieur Saddier !
Il m'est difficile de m'exprimer après l'excellente présentation de notre collègue Martial Saddier. Sans me prétendre spécialiste des moulins – ma circonscription n'en compte d'ailleurs aucun – , j'aimerais revenir à des éléments concrets. Il est question de 1 600 seuils qui pourraient être effacés, sur un total de 60 000 moulins, et d'ouvrages qui ne produisent plus d'hydroélectricité. Par ailleurs, j'ai écouté les arguments passionnés des uns et des autres, notamment de nos collègues du groupe Les Républicains.
Je suis étonnée de vos arguments, chers collègues qui défendez habituellement le rôle et l'action des collectivités locales.
En partenariat avec les propriétaires de moulins, les agences de l'eau travaillent à la continuité écologique et à la préservation des seuils lorsque celle-ci est possible. Vous l'avez dit vous-mêmes lors de la défense de vos amendements : quatre possibilités sont offertes aux propriétaires de moulins, qui bénéficient également d'un accompagnement financier et technique. Je considère pour ma part qu'il ne faut pas modifier le texte actuel, et vous invite à suivre la proposition de la rapporteure et de la ministre.
Les arguments de la ministre et de notre collègue Saddier m'ont convaincue : je retire mon amendement.
Applaudissements sur divers bancs.
L'amendement no 6424 est retiré.
Je siégeais déjà sur ces bancs en 2006, avec mon cher collègue et ami Martial Saddier, et je me souviens des avancées que nous avions alors pu réaliser dans le domaine de la politique de l'eau. Martial Saddier est sans doute celui d'entre nous qui connaît le mieux l'eau et la politique de l'eau. La preuve : alors qu'il est membre du groupe Les Républicains, l'amendement portant article additionnel après l'article 19 qu'il a proposé en commission est le seul à avoir été adopté à cet endroit du texte. C'est dire la qualité de son travail. Sans cet amendement, nous n'aurions quasiment pas abordé le sujet de l'eau dans ce projet de loi.
Il n'est pas question pour nous de remettre en cause le travail des agences de l'eau, que nous connaissons bien en tant qu'élus locaux. Nous avons conscience du travail qu'elles accomplissent avec le secteur agricole et les collectivités et connaissons l'importance de leurs financements, sans lesquels nous ne pourrions pas implanter les stations d'épuration que nous installons actuellement sur l'ensemble du territoire. Nous les apprécions à tel point que nous avons voté contre la ponction financière que vous leur avez imposée au début de la législature : vous êtes venus chercher plusieurs centaines de millions d'euros dans chacune d'entre elles, ce qui a particulièrement contraint leur travail. Les vrais amis des agences de l'eau se trouvent donc plutôt de ce côté-ci de l'hémicycle !
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.
Le débat s'est révélé très intéressant et M. Saddier a eu raison de souligner qu'il était nécessaire : il a en effet permis de préciser les modalités d'application du texte. Les agents de votre ministère, madame la ministre, effrayent les propriétaires de moulins. Sur le terrain, ils exercent systématiquement une pression pour inciter ces derniers à réduire, voire à supprimer les seuils. Après ce débat, nous pourrons leur garantir que la loi ne les oblige pas à détruire le seuil …
… et que si un agent administratif leur explique le contraire sur le terrain, il faut le dire à la ministre. En effet, ça n'est pas le sens du projet de loi. Il est important de le souligner aujourd'hui dans un but d'apaisement.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.
S'il n'y a que 1 600 seuils sans propriétaire ou mal entretenus qui sont concernés, on peut dire à l'inverse aux propriétaires de tous les autres qu'ils ne risquent rien. Ce débat aura au moins eu ce mérite.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.
Je voudrais sincèrement remercier Martial Saddier. En arrivant dans l'hémicycle, j'étais très partagé sur ce sujet. En effet, je ne connais pas aussi bien la situation que lui, qui en est un grand spécialiste. Comme l'a souligné par ailleurs Jean-Marie Sermier, nous avons désormais une réponse à apporter dans nos circonscriptions aux propriétaires de moulins qui s'inquiètent au sujet de leurs seuils – c'est très important. Faites-nous confiance pour qu'aucun agent administratif de terrain ne fasse plus jamais pression sur les propriétaires de moulins – ce qui est déjà arrivé.
Mme Frédérique Tuffnell applaudit.
Si, c'est vrai, monsieur Benoit. Je connais des propriétaires, dans ma circonscription, qui ont subi de telles pressions visant à leur faire supprimer les seuils. Nous vous ferons remonter les cas, madame la ministre.
En vertu de ce qui a été excellemment expliqué par Martial Saddier, je suivrai l'avis de la ministre et voterai contre ces amendements à titre personnel. J'invite mes collègues du groupe Mouvement démocrate (MODEM) et démocrates apparentés à faire de même.
Je suis ami intime d'un moulin du XIIe siècle situé à Laguépie, dans le département du Tarn-et-Garonne.
Sourires.
De la sorte, j'ai appris à connaître ce que sont les moulins, leur histoire, et ce qu'ils pourraient être pour le futur – ce qui va motiver, pour l'essentiel, ce que je tiens à dire.
Pour ce qui concerne le passé, et pour envoyer un amical salut aux 635 habitants de Laguépie, cela m'amuse de savoir que ce moulin, qui devint un repaire communiste pendant la Résistance, avait été construit par des moines, et que l'on avait vu passer là Jean Jaurès. Nos collègues qui font état d'un patrimoine ont donc mille fois raison. Les moulins sont sans doute parmi les éléments patrimoniaux les plus anciens de notre pays, car l'eau, qui fut le moyen de transport initial avant même la roue, fut ensuite la première énergie à être transformée en force mécanique. Elle demeure aujourd'hui la seule forme d'énergie qui n'épuise pas sa ressource ; au contraire, elle l'entretient et l'aère. J'ajouterai un argument supplémentaire à la défense des biefs, bisses et seuils : l'eau qui se déverse à la cascade est porteuse d'ions négatifs qui sont excellents pour la santé et constituent une ressource médicamenteuse gratuite répandue le long des rivières.
Ce préambule ayant été fait, j'en viens à la suite. Nous croyons pour notre part qu'il faudra revenir sur la politique centenaire – ce n'est pas l'actuel gouvernement qui est en cause dans cette affaire – qui a conduit à détruire toutes sortes de constructions anciennes au profit de nouvelles constructions qui ne procédaient pas du tout des mêmes logiques et de la même philosophie. Le moulin du XIIe siècle dont je vous parle améliorait le site naturel. Les moulins construits au XIXe siècle, eux, ne s'en souciaient pas : ce n'était pas la question du moment et la préoccupation écologique était seconde. On pensait, de façon un peu fanatique et aveuglée, qu'il s'agissait de se rendre « maîtres et possesseurs de la nature », comme avait dit Descartes – et du diable si l'on allait s'occuper de tel poisson ou de telle bestiole vivant dans l'eau : ce n'était pas le sujet !
Il y a moulin et moulin, je crois que nous en convenons tous. C'est pourquoi, pour ma part, je ne ferai pas l'apologie des propriétaires de moulins en tant que meilleurs conservateurs de la nature et des ouvrages installés le long des cours d'eau. C'est à une autre raison que je me réfèrerai. Dans le futur, ceux qui veulent passer à 100 % d'énergies renouvelables s'apercevront très vite, après avoir fait le tour de toutes celles qui sont disponibles, qu'il n'en est aucune, des éoliennes au thermique, qui ne comporte des inconvénients.
Cependant, la ressource en eau est celle qui est la plus abondante. Aux siècles précédents, le pays était couvert de moulins : il y en avait des dizaines de milliers partout.
Ils ont été remplacés dès lors qu'il a été possible de produire de l'électricité dont on savait quelle exploitation faire et avec quels moyens – des centrales qui n'avaient plus besoin de l'énergie hydraulique, fonctionnant au fioul ou avec d'autres énergies. Toutefois, si l'on veut se débarrasser des énergies carbonées et si par-dessus le marché, ce qui est notre cas, on veut aussi tourner la page du nucléaire qui a eu son sens mais qui ne l'a plus, alors il faut bien trouver une ressource de masse ; et cette ressource de masse, c'est le régime hydraulique du pays, c'est la carte de ses fleuves, de ses rivières, de ses moindres cours d'eau. C'est pourquoi nous protestons tant contre ces initiatives qui consistent à déclasser certains cours d'eau pour les rayer de la carte, ce qui a pour conséquence de les priver de la protection de la loi.
Notre projet repose sur des milliers et des milliers de moulins, qu'on appelle aujourd'hui de manière un peu pédante des « hydroliennes ». Quand on dit « hydroliennes », tout le monde pense à celles qui ont été implantées au raz Blanchard, très belles machines auxquelles on se demande pourquoi on a renoncé, mais ce mot désigne toutes les installations qui fonctionnent avec de l'eau pour produire de l'énergie – et elles abondent dans notre pays.
À nos yeux, peut-être même faudrait-il en tirer les conséquences pour établir la carte des régions qu'on s'est tant de fois abandonné à tripoter, avec les conséquences que l'on sait en termes de découpages électoraux. Il y en a aujourd'hui treize, treize qui ne correspondent à rien, ni à l'histoire du pays, ni à quelque entité naturelle que ce soit.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI, sur plusieurs bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe UDI-I.– M. David Habib et Mme Valérie Rabault applaudissent également
Elles ne sont que l'aboutissement de l'exigence aveugle de bureaucrates oeuvrant dans d'autres administrations, celles de l'Europe en l'occurrence.
Tout cela se tient, chers collègues, vous allez voir qu'il s'agit bien ici de moulins. Les régions de France étaient ancrées soit dans une histoire plongée dans le féodalisme, soit dans une conviction tirée des assemblées de la Révolution. Nous avons besoin maintenant de structures administratives dont l'enracinement permette d'aboutir au résultat dont il est précisément question ici : la protection des cours d'eau, préoccupation que nous partageons tous.
Il importe de faire face à la crise que ceux-ci traversent. Notre pays est dorénavant moucheté de poches de sécheresse, ce dont l'opinion publique n'a pas encore conscience. Elle ne comprend pas que le stress hydrique est un phénomène qui ne concerne pas seulement des contrées exotiques, mais qui est d'ores et déjà présent en France, où il est appelé à se développer. Après avoir vu l'Irlande rationner l'eau pendant une partie de l'année, on comprend que le changement climatique a déjà provoqué sous nos latitudes des effets face auxquels il faut réagir. Bref, un jour ou l'autre, j'aimerais que la carte des régions corresponde à la carte des agences de l'eau et qu'à partir du trajet de l'eau, on construise tout le reste : l'emploi, l'agriculture, les circulations.
Mme Mathilde Panot applaudit.
Ainsi cette carte aurait-elle un véritable enracinement.
Ce sont des milliers et des milliers de moulins que nous devrons construire pour passer à 100 % d'énergies renouvelables. Nous devons régler le problème écologique qui est posé. Aucun d'entre nous n'a l'intention, comme il y a trente ou quarante ans, d'opposer moulins et poissons, usines et oiseaux. Tout cela est absurde. On a bien compris qu'il fallait faire les choses en même temps.
« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Faisons un effort d'intelligence : dorénavant, chaque fois que l'on construira un moulin, ménageons des passes à poissons. Et que l'on ne vienne pas enquiquiner la représentation nationale pour qu'elle décide quelle espèce sera concernée : nous exigeons que l'on trouve une solution pour faire passer tous les poissons tout en préservant les moulins. Il ne peut être question d'en détruire.
Je le dis comme je le sens : nous avons les ingénieurs, femmes et hommes, capables de trouver des solutions à tous les défis techniques ! Qui ici, de ma génération ou de celle d'avant, …
Sourires.
… aurait imaginé, il y a seulement quarante ans, que se poserait la question de savoir comment faire remonter des poissons ? La plupart auraient dit : « de quoi parle-t-on, je vous prie ? ». Maintenant, tout le monde sait qu'une telle chose est possible. Mais ce n'est pas tout. Non seulement il va falloir faire en sorte que les poissons puissent passer, mais nous devrons apprendre à faire quelque chose d'essentiel pour la gestion de l'eau : être capables de faire remonter l'eau dans l'autre sens lorsque nous construisons des barrages pour que la prise d'eau soit constante sans que l'on soit obligé d'augmenter son niveau. Voilà les défis.
Nous ne voulons pas que l'on détruise les moulins.
Nous avons écouté ce que nous a dit avec beaucoup d'intelligence et de sens technique notre collègue Martial Saddier, aux propos duquel nous sommes toujours attentifs. Trouvez une autre solution, telle est l'injonction que nous vous adressons à vous, professionnels dont c'est le métier, parce que nous pensons que l'intérêt du pays, c'est que vous le fassiez !
Voilà comment nous abordons cette question, et j'espère que vous entendrez la nuance : il ne s'agit pas de mettre en cause les agences de l'eau. Au demeurant, ce n'est pas nous qui les avons plumées.
Chacun se rappelle dans cet hémicycle les interventions de mes collègues, en particulier celle de Loïc Prud'homme, contre ces fameux – comment les aviez-vous appelés, déjà ? – « plafonds rongeants », si j'en crois ce que j'ai noté sur mon papier …
Ah oui, « mordants » – je vous faisais la grâce de penser que s'ils mordaient, c'était pour ronger, alors qu'en réalité, c'est juste pour dévorer !
Ces échos, vous les avez encore présents à l'esprit. Notre propos, disais-je, n'est pas de mettre en cause les agences de bassin : il est de souligner ce dont nous avons besoin pour faire face à la nouvelle situation engendrée par le stress hydrique lié au changement climatique. Pour cette raison, aujourd'hui et demain plus encore, il faut des moulins partout.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI. – M. Marc Le Fur applaudit aussi.
Le président Mélenchon a évoqué le magnifique moulin du XIIe siècle de Laguépie, qui se situe dans ma circonscription. J'en évoquerai un autre construit sous la Révolution, dont vous voulez détruire le seuil par le jeu de règlements accumulés et de décisions administratives dont on ne sait jamais qui les signe. N'ayant pas obtenu de réponse auprès de votre ministère, j'ai même été obligée de m'adresser au Président de la République pour sauver ce seuil.
Ce sujet, s'il n'est pas au coeur de la discussion, n'en est pas moins important. Il montre, madame la ministre, comme le président Mélenchon l'a très bien dit, que votre ministère raisonne en silo. Vous affirmez que les seuils perturbent les cours d'eau ; or ils existent depuis le XIIe siècle, depuis la Révolution française, et ils ne les ont jamais altérés. Voilà la réalité !
Vous devriez plutôt comparer les énergies entre elles : un moulin pollue beaucoup moins qu'une centrale à charbon ou d'autres moyens de production d'électricité.
Et il produit beaucoup moins aussi !
C'est cet arbitrage-là qu'il importe de faire plutôt que de retenir à chaque fois les solutions les plus radicales. Sur les 100 000 moulins existant en France aujourd'hui, 25 000 produisent de l'énergie et de l'électricité.
Certains semblent en douter. Je pense que vous ne les avez pas tous comptés. Monsieur le rapporteur général, vous qui êtes député du Gers, venez donc au moulin de Laguépie : vous verrez un exemple de ces moulins produisant de l'électricité que vous voulez détruire. Vous comptez faire payer la facture à leurs propriétaires en leur disant qu'ils recevront peut-être un peu d'argent de l'agence de l'eau. N'oublions pas que l'argent des agences de l'eau, c'est toujours de l'argent public et qu'il serait beaucoup mieux utilisé s'il servait à autre chose que financer la destruction de seuils qui fonctionnnent très bien.
Madame la ministre, j'aimerais que votre ministère nous réponde. Quand vous appliquez des règlements contraires à ce qui a été voté à l'Assemblée nationale et au Sénat, je trouve cela non seulement très injuste, mais aussi regrettable. Lors des débats sur le projet de loi de 2016 ou 2017 – je ne sais plus l'année exacte – , nous avions décidé que lorsqu'un moulin existait déjà et qu'il était équipé d'une turbine ou bien en capacité d'en accueillir une, alors il devait être maintenu.
Ce qui était visé, ce n'était pas la capacité d'en accueillir une, mais les projets.
J'ai relu juste avant de venir dans l'hémicycle les comptes rendus des débats du Sénat et de notre assemblée : c'est bien ce qui avait été dit.
Ce principe a été posé de manière extrêmement précise, or votre ministère l'interprète différemment : il engage des destructions de moulins pouvant accueillir une turbine. C'est très grave, parce que ce faisant, il ne respecte pas la volonté du législateur, qui est la volonté par laquelle s'exprime le peuple.
Je souhaitais vraiment vous interpeller sur ce point pour que ces moulins puissent être préservés, madame la ministre, mais ce ne sera pas le dernier sujet sur lequel j'insisterai.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.
Mes chers collègues, nous avons ce débat depuis plus d'une heure et plus nous avançons, plus de nouveaux orateurs veulent s'exprimer. Je sais bien que nous sommes en temps législatif programmé : je ne peux pas vous empêcher de vous inscrire ni vous refuser la parole. Je vous invite toutefois à être brefs, sinon nous risquons d'y être encore à minuit.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Je vais faire court, madame la présidente. Monsieur Saddier, ce que vous avez dit est faux ! Cet amendement ne va nullement affecter le budget des agences de l'eau, il est malhonnête d'affirmer de telles choses. Monsieur Sermier, si personne ne demande la destruction des seuils des moulins, comme vous l'affirmez, alors vous conviendrez qu'il n'est pas catastrophique d'inscrire dans la loi qu'ils doivent être préservés.
Je serai tout aussi bref. Je rends à Martial Saddier ce qui revient à Martial Saddier : sa compétence, acquise par l'expérience. Je ne remets donc nullement en cause ce qu'il a dit. Je soulignerai cependant que le sujet n'est pas les agences de l'eau, dont il a décidé de faire l'apologie. Les discussions entre les propriétaires de moulins à eau, notamment ceux qui produisent de l'énergie, avec les services de la DREAL et avec les agences de l'eau sont difficiles, nous le savons, …
… et si j'ai cosigné l'amendement no 171 d'Éric Girardin, c'est parce qu'il permet au législateur d'apporter les précisions suivantes.
Premièrement, nous disons que les moulins à eau qui produisent de l'énergie et ceux qui seraient susceptibles d'en produire doivent continuer d'en produire, d'où notre ajout : « sans que puisse être remis en cause son usage actuel ou potentiel, en particulier aux fins de production d'énergie ».
Mme Valérie Rabault et M. Marc Le Fur applaudissent.
Deuxièmement, nous spécifions qu'il revient aux propriétaires de moulins l'entretien, la gestion et l'équipement des ouvrages, en vue notamment de la conciliation des usages et de la circulation des poissons, mais qu'en aucun cas ne doit leur être imposée l'obligation de les détruire.
Pour ces raisons, je vais maintenir cet amendement – et naturellement le voter.
Je ne pensais pas prendre part à un tel débat, ma circonscription ne comptant pas d'équipements de cette nature. Je ne veux pas trahir l'esprit de l'amendement de mon ami Sébastien Jumel, que j'ai été amené à défendre alors qu'il se trouve sur les routes de Normandie.
J'ai cru en outre comprendre que le département de l'Orne était également concerné par ces problématiques. Pourriez-vous faire en sorte, madame la présidente, que lui soient communiqués dans les plus brefs délais les éléments lui permettant d'apprécier la situation le plus précisément possible et d'éclairer nos concitoyens normands ?
Nous avons consacré beaucoup de temps à cette discussion. J'y ai appris que nous pourrions sortir du nucléaire grâce aux moulins : ce n'est pas mal !
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Cela fait tout de même un siècle que la technologie existe : si nous avions pu remplacer le nucléaire par les moulins, cela se saurait !
Je vous invite à ne pas voter cette série d'amendements. Comme M. Benoit l'a rappelé, ils concernent le potentiel énergétique d'un barrage et, en définitive, reviendraient à supprimer l'article en question puisque tout barrage peut potentiellement produire de l'électricité, même s'il ne fait que 50 centimètres ou 1 mètre.
Or pourquoi tous les moulins ne produisent-ils pas d'électricité ? En raison de problèmes de rentabilité ou de faisabilité technique pour la grande majorité d'entre eux. Ils sont actuellement moins de 2 000 à en produire. La loi – et il faut la respecter, vous avez raison, madame Rabault – dispose déjà qu'on ne peut détruire le seuil d'un moulin dans ce cas. Je confirme donc que nous ne touchons en aucune façon à leur potentiel énergétique.
En outre, un amendement de Mme la rapporteure, qui sera examiné ultérieurement, prévoit un recensement des sites disposant du potentiel économique et technique pour accueillir une centrale hydroélectrique.
Protestations sur les bancs du groupe LR. – Mme Valérie Rabault proteste également.
Cet article n'a donc aucun impact sur le potentiel hydroélectrique du pays.
Certains d'entre vous ont fait appel à l'histoire et au patrimoine, employant tout de suite les grands mots.
Je le répète : nous ne touchons pas aux 60 000 moulins ! Il convient d'apprécier l'article et ses conséquences à sa juste valeur. Cela a été souligné par beaucoup d'entre vous, et je voudrais en particulier remercier M. Saddier à ce sujet.
Je veux aussi vous rassurer : seuls 11 % des cours d'eau et moins de 3 % des seuils de moulins sont concernés. Dans deux tiers des cas, la solution ne consistera d'ailleurs pas à détruire le seuil, mais à prévoir des passes à poissons.
Enfin, pour terminer, je comprends les angoisses des propriétaires de moulins, mais je rappelle que rien ne peut se faire sans eux et qu'il y a toujours une concertation préalable. Je vous invite donc à ne pas voter ces amendements.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
L'amendement no 3558 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 173
Nombre de suffrages exprimés 149
Majorité absolue 75
Pour l'adoption 79
Contre 70
Les amendements identiques nos 171 , 209 , 334 , 341 , 743 , 946 , 1043 , 1073 , 1658 , 1674 , 1831 , 1846 , 1916 , 1961 , 2123 , 2149 , 2597 , 2625 , 2706 , 2920 , 3891 , 4787 , 5448 , 5670 , 5950 , 6399 , 6924 et 6981 sont adoptés ; en conséquence, les amendements identiques nos 426 et 436 tombent, de même que les amendements identiques nos 769 à 6982 et les amendements nos 5056 , 2089 et 4779 .
Vifs applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe LT.
Rappel au règlement
Il concerne le déroulement du vote. Je n'avais pas demandé de scrutin public sur l'amendement no 3558 de mon collègue Sébastien Jumel. Le résultat laisse à penser que le décompte des voix ne s'est pas opéré dans des conditions satisfaisantes : l'amendement était le premier à être mis aux voix et il y a eu une certaine confusion dans le lancement des mises aux voix successives. Puis-je vous demander un nouveau décompte, madame la présidente ?
Vous formulez votre requête courtoisement, je vais y répondre de la même manière. Par principe et dans le respect du règlement de notre Assemblée, la décision de la présidence ne peut pas être remise en cause.
Par ailleurs, soyez certain que dès que j'ai le moindre doute sur le résultat d'un vote, je procède au comptage – chacun peut en témoigner ici. Si j'ai déclaré que l'amendement de M. Jumel était rejeté, c'est qu'il l'était clairement. Faites-moi confiance : j'ai une vue panoramique sur l'hémicycle, ce qui n'est le cas d'aucun d'entre vous, et je peux vous garantir qu'il n'y a pas eu maldonne sur le décompte des voix.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix-huit heures trente-cinq, est reprise à dix-huit heures quarante-cinq.
La séance est reprise.
L'amendement no 7054 de Mme Sylvie Bouchet Bellecourt est défendu.
L'amendement no 7054 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 7055 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Bien que nous débattions des moulins depuis près de deux heures, des problèmes persistent. Je vous ai notamment interrogée, madame la ministre, sur les propriétaires de moulins qui veulent développer l'hydroélectricité. Nous avons beaucoup parlé de ceux qui l'avaient déjà fait, mais d'autres le souhaitent et rencontrent de nombreux problèmes dans leurs relations avec les services de l'État : ils attendent parfois un retour du ministère sur des projets de contrats avec des fournisseurs d'énergie, au regard du débit autorisé. Le Parlement a besoin d'un retour concernant la politique de restauration de la continuité écologique des cours d'eau : un bilan triennal de la déclinaison du plan d'actions engagé au niveau national doit nous être présenté. Tel est l'objet du présent amendement, qui demande un bilan qualitatif et quantitatif des actions réalisées et des priorités restant à traiter, ainsi que des incidences en termes de perte de production d'énergie hydroélectrique.
Je connais un propriétaire qui souhaitait restaurer son moulin, et pour lequel tout se jouait entre le seuil et le bâti. Les propos qui viennent d'être tenus visent à déconnecter l'un et l'autre : c'est nier que parfois, le seuil et le bâti sont profondément connectés. On ne saurait restaurer un moulin sans s'intéresser à sa destination et à son usage, car des risques d'affaissement et de déstructuration des berges peuvent se présenter et menacer l'ouvrage lui-même. Par ailleurs, la valorisation de l'ouvrage et le financement de la restauration du moulin sont liés, puisque la production d'hydroélectricité peut représenter une solution pour sauver ce patrimoine. Enfin, le coût et les subventions sont parfois plus importants lorsqu'on élimine un seuil, même si le reste à charge est moindre pour le propriétaire ; au contraire, la solution d'adaptation, avec des passes à poissons, est moins coûteuse, mais le reste à charge est beaucoup plus élevé. De fait, les propriétaires de moulins ou les candidats à la restauration de tels ouvrages sont confrontés à un dilemme ; nous devons trouver des solutions pour le résoudre.
Vous demandez un bilan triennal. Or le Comité national de l'eau établit déjà, tous les ans, un bilan de la situation hydrologique et hydroélectrique en France. Votre demande, qui est pertinente – puisqu'elle est déjà appliquée par le Comité national de l'eau – , est donc satisfaite.
Vous évoquez par ailleurs la possibilité de se mobiliser autour de moulins qui produisent de l'hydroélectricité. Je soumettrai une proposition en ce sens après l'article 22, dans le chapitre consacré aux énergies renouvelables. Cette proposition s'appuiera sur les communautés d'énergie dont nous avons voté la création en commission et qui figurent dans l'article 23. Nous aurons donc l'occasion de débattre de la façon dont peuvent être mobilisés des élus, des citoyens, mais aussi des entreprises, autour de projets de petite hydroélectricité. Votre amendement étant satisfait, j'en demande le retrait ; à défaut, mon avis sera défavorable.
Le bilan que vous sollicitez est dressé tous les ans par le Comité national de l'eau et comporte notamment un point d'avancement du plan d'actions. En outre, un groupe de travail dédié réunit absolument toutes les parties prenantes, dont la Fédération des moulins de France et les hydroélectriciens. Je demande donc le retrait de l'amendement ; à défaut, mon avis sera défavorable.
Vous affirmez que ce bilan est réalisé, mais est-il bien transmis au Parlement ? Nos débats permettent d'en douter. Je vous ai également posé plusieurs questions sur les futurs projets d'hydroélectricité, qui imposent de suivre un vrai parcours du combattant : le Gouvernement aidera-t-il les porteurs de projets de production de cette énergie décarbonée qu'est l'hydroélectricité ?
L'amendement no 2599 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l'amendement no 4808 .
Il fait écho au débat que nous avons eu tout à l'heure et aux arguments exposés par M. Mélenchon : il vise tout simplement à appliquer la loi. Des dérogations aux obligations de continuité écologique des cours d'eau sont prévues pour les moulins à eau équipés pour produire de l'électricité ou en voie d'équipement, en application de l'article L. 214-18-1 du code de l'environnement – l'objectif étant que ces moulins ne soient pas détruits. Cette disposition vise à concilier l'objectif de restauration de la continuité écologique des cours d'eau et la préservation du patrimoine que représentent les moulins, tout en permettant le développement de la micro-électricité.
Il semble toutefois que le ministère de la transition écologique ait une interprétation différente et beaucoup plus restrictive de cet article du code de l'environnement, introduit par la loi du 24 février 2017. Dans sa réponse à une question écrite publiée au Journal officiel le 9 août 2018, le ministère considère ainsi qu'un moulin pouvant bénéficier de cette dérogation est un moulin « d'ores et déjà équipé pour la production hydroélectrique ou en train d'être équipé à la date de publication de la loi ». Cette interprétation exclut tous les moulins qui existaient avant le 24 février 2017, mais dont la demande d'équipement hydroélectrique interviendrait postérieurement à cette date. Une telle lecture est contraire à la volonté du législateur. Il suffit, pour s'en convaincre, de relire les débats qui ont eu lieu sur le projet de loi en 2017. L'intention du législateur y était clairement exprimée : le rapporteur du Sénat avait ainsi indiqué que « les moulins existant à la date de la publication de la loi déjà équipés aujourd'hui ou qui pourraient l'être demain » peuvent bénéficier de la dérogation prévue par la loi.
Cet amendement vise donc à faire en sorte que le ministère de la transition écologique applique la loi, telle qu'elle a été pensée et écrite par le législateur.
Comme je l'ai rappelé tout à l'heure, la loi du 24 février 2017 exempte bien du respect du principe de continuité écologique les moulins déjà équipés pour produire de l'électricité. On peut toujours exprimer des souhaits ou relater des débats passés – il sera d'ailleurs intéressant de reprendre mes propos dans dix ans, pour éclairer la volonté du législateur ! – mais les écrits font loi. Or, à l'article L. 214-18-1 du code de l'environnement, il est bien écrit : « Les moulins à eau équipés par leurs propriétaires, par des tiers délégués ou par des collectivités territoriales pour produire de l'électricité, régulièrement installés sur les cours d'eau, parties de cours d'eau ou canaux mentionnés au 2° du I de l'article L. 214-17, ne sont pas soumis aux règles définies par l'autorité administrative mentionnées au même 2°. Le présent article ne s'applique qu'aux moulins existant à la date de publication de la loi no 2017-227 du 24 février 2017 [… ]. » En tant que législateurs, il nous importe que les textes que nous écrivons, en pesant précisément chaque mot et chaque virgule, soient appliqués par nos successeurs. Aussi mon avis est-il défavorable.
Aménager un seuil existant pour restaurer la circulation des poissons n'empêche en rien de l'équiper pour produire de l'électricité. Nous devons respecter les objectifs environnementaux liés à la directive cadre sur l'eau et au règlement instituant des mesures de reconstitution du stock d'anguilles européennes, aussi la dérogation au principe de continuité écologique des cours d'eau ne peut-elle que rester très exceptionnelle. Je demande donc le retrait de l'amendement ; à défaut, mon avis sera défavorable.
Je n'ai jamais parlé des anguilles, madame la secrétaire d'État – je peux le faire si vous le souhaitez, bien que ce soit un autre débat ! J'ai simplement repris les propos du rapporteur du projet de loi au Sénat, tels qu'ils sont inscrits noir sur blanc dans le compte rendu : …
… la dérogation vise « les moulins existant à la date de la publication de la loi déjà équipés aujourd'hui ou qui pourraient l'être demain ». Dans ce dernier cas, les pierres du moulin existent, et il suffit d'y brancher une turbine – mais c'est cela que vous souhaitez détruire !
Je souhaite que les dispositions qui ont été débattues en février 2017 soient appliquées.
M. Gérard Leseul applaudit.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 144
Nombre de suffrages exprimés 137
Majorité absolue 69
Pour l'adoption 56
Contre 81
L'amendement no 4808 n'est pas adopté.
Sur les amendements nos 265 et identiques, je suis saisie par le groupe La France insoumise d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Sur les sous-amendements nos 7363 , 7359 , 7362 , 7364 , 7361 , 7358 à l'amendement no 265 , je suis saisie par le groupe La France insoumise d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 99 et 7009 .
L'amendement no 99 de Mme Delphine Batho est défendu.
La parole est à Mme Sophie Mette, pour soutenir l'amendement no 7009 .
Il vise à intégrer, dans la stratégie nationale bas-carbone, un budget carbone pour le secteur numérique.
Nous avons évoqué ce sujet en commission. La stratégie nationale bas-carbone prévoit certes de grands budgets couvrant de larges thématiques, mais il ne me semble pas nécessaire d'y cibler spécifiquement le numérique. Je demande donc le retrait de l'amendement ; à défaut, mon avis sera défavorable.
La parole est à M. Yves Hemedinger, pour soutenir l'amendement no 1066 .
Les forêts, bois et arbres constituent, en plus d'un patrimoine naturel exceptionnel pour la nation, des puits de carbone à même d'absorber une part des gaz à effet de serre présents dans l'atmosphère et donc d'améliorer la qualité de notre air. En cela, nos forêts sont un atout précieux dans notre lutte contre le réchauffement climatique.
Le présent amendement propose de reconnaître pleinement ce rôle de captation du carbone en l'inscrivant à l'article L. 112-1 du code forestier, qui prévoit déjà que les forêts, bois et arbres sont placés sous la sauvegarde de la nation.
Défavorable, car l'article L. 112-1 du code forestier prévoit déjà ce que vous souhaitez, et de façon plus précise.
Ce que vous proposez existe déjà dans le code forestier. La réflexion va se poursuivre dans les minutes qui viennent. Avis défavorable.
L'amendement no 1066 n'est pas adopté.
Je suis saisie de seize amendements, nos 265 , 559 , 795 , 1356 , 2399 , 2657 , 3484 , 3785 , 4498 , 4572 , 4829 , 5899 , 6425 , 6739 , 759 et 1094 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 265 , 559 , 795 , 1356 , 2399 , 2657 , 3484 , 3785 , 4498 , 4572 , 4829 , 5899 , 6425 et 6739 sont identiques et font l'objet de plusieurs sous-amendements de la rapporteure et du Gouvernement ; les amendements nos 759 et 1094 sont identiques.
Les amendements nos 265 de M. Dino Cinieri, 559 de M. Loïc Dombreval et 795 de M. Pierre Cordier sont défendus.
La parole est à M. Yves Hemedinger, pour soutenir l'amendement no 1356 .
Il vise à mieux intégrer les objectifs de lutte contre le dérèglement climatique et de renforcement de la résilience de la forêt face à ses effets de préservation de la biodiversité en rééquilibrant les articles de principe du code forestier et de la politique forestière nationale. À cette fin, les modifications proposées prévoient d'orienter la politique forestière vers une sylviculture plus proche des cycles naturels, maintenant un couvert forestier continu et une diversité d'essences afin d'améliorer le stockage du carbone par les sols et la capacité de résilience des forêts aux impacts des changements climatiques.
Pour rendre opérants les objectifs fixés, l'article met en place des principes de conformité. Ainsi, la rédaction du programme national de la forêt et du bois et les investissements et financements doivent être rédigés et orientés de manière conforme à l'ensemble des objectifs formulés, et non favoriser certains au détriment des autres.
Les amendements nos 2399 de M. Michel Vialay, 2657 de M. François-Michel Lambert, 3484 de M. Stéphane Viry, 3785 de M. Dominique Potier, 4498 de M. Philippe Meyer, 4572 de M. Matthieu Orphelin et 4829 de M. Bertrand Bouyx sont défendus.
La parole est à Mme Anne-Laure Cattelot, pour soutenir l'amendement no 5899 .
Nos forêts sont, avec les océans, de puissants leviers pour capter les émissions de CO2 et stocker le carbone. Les forêts font partie de notre paysage – elles représentent un tiers du territoire – , protègent nos ressources en eau – c'est l'article 19 – , atténuent les excès du climat, sont un refuge de biodiversité, régulent les cours d'eau et limitent l'érosion – autant de bienfaits qui trouvent leur assise dans les objectifs du présent projet de loi, sans même évoquer les opportunités induites par la production du matériau durable et renouvelable qu'est le bois.
Cet amendement vise à rééquilibrer le caractère multifonctionnel de la forêt, en intégrant dans les articles de principe du code forestier définissant la politique nationale forestière les notions suivantes, qui sont fondamentales : la diversification des essences, la valorisation des feuillus, la régénération naturelle, complémentaire, bien sûr, à la plantation, le tout dans l'objectif d'atteindre la neutralité carbone en 2050. On modifie donc ici le principe et l'article L. 112-1 du code forestier, qui débute ainsi : « Les forêts, bois et arbres sont placés sous la sauvegarde de la nation [… ] »
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et FI – M. Thierry Benoit applaudit également.
Pour une fois qu'on peut parler forêt, je vais prendre un peu de temps pour présenter cet amendement.
Madame la ministre Barbara Pompili, beaucoup d'associations de citoyens et citoyennes vous avaient interpellée sur l'absence de mesures sur la forêt dans un projet de loi qui s'appelle pourtant « climat et résilience ». Nous avons réussi à sauver quelques amendements des fourches caudines de l'irrecevabilité. Je suis donc assez désappointée, déçue, de voir les sous-amendements qui ont été déposés à la fois par Mme la rapporteure et par le Gouvernement sur un amendement qui ne vise pourtant qu'à rééquilibrer les articles du code forestier en vue de mieux intégrer les objectifs de lutte contre le dérèglement climatique, de résilience de la forêt face à ses effets et de préservation de la biodiversité. Voilà ce que je voulais dire ici pour que cela figure dans le compte rendu.
Sept amendements ont été déclarés irrecevables, à différents titres, sur la question de la forêt. Nous ne parlerons donc pas de la libre évolution des forêts, de l'encadrement strict des coupes rases, de l'inscription de la diversité des missions de l'Office national des forêts – ONF – , de la saignée de ses effectifs, ni du statut de contractuel de droit privé qui s'applique désormais à ses agents, alors qu'on privilégiait jusque-là le statut de fonctionnaire, qui les protégeait notamment des conflits d'intérêts et des pressions exercées sur eux par les marchands de bois.
Je me rappelle très bien vous avoir interpellée en commission sur la question des forêts. Vous m'aviez répondu ceci : la Convention citoyenne pour le climat n'a fait aucune proposition d'ordre législatif. C'est faux, et vous le savez très bien. En effet, l'encadrement des coupes rases, sur lequel la France est très en retard, dépend de la loi, tout comme l'ONF, dont nous discutons lors de l'examen du projet de loi de finances. Vous vous souvenez peut-être que nous avions décidé de geler les effectifs de l'ONF alors qu'ils avaient déjà fondu de 40 % sur les vingt ou trente dernières années, avant que le Gouvernement ne revienne sur ce vote en deuxième lecture.
Je vais faire une intervention générale sur la question de la forêt, mais j'interviendrai aussi sur chacun des sous-amendements, sur lesquels j'ai demandé un scrutin public parce qu'ils vident complètement notre amendement de son contenu.
La gestion forestière, telle qu'elle est pratiquée de nos jours, nous conduit vers une industrialisation des forêts françaises. L'industrialisation consiste à raser une parcelle, puis à replanter en monoculture, tout cela pour le plaisir de l'industrie du bois. Cette gestion a des effets désastreux : on abîme les sols, on dégrade leur fertilité, et par là, on compromet même la capacité de la station forestière à se régénérer. Avec les coupes rases, ont détruit les habitats naturels, on retire le bois mort pourtant indispensable à la préservation de la biodiversité. Ces plantations d'arbres qui ne sont pas des forêts sont pourtant plus vulnérables aux tempêtes, car moins bien enracinées dans le sol, plus vulnérables aux attaques d'insectes et aux maladies. Les études scientifiques s'accordent sur un fait : les forêts diversifiées avec des essences et des âges différents sont plus résilientes au changement climatique. Alors pourquoi ne pas intégrer dans le code forestier les avancées scientifiques en matière de gestion forestière ? Je ne le répéterai jamais assez : les forêts ne peuvent être qu'un simple gisement de bois, elles sont multifonctionnelles. Le botaniste Francis Hallé, que vous devez connaître, formule la chose ainsi : « À notre époque, n'est-il pas devenu anormal, voire insupportable, que l'industrie du bois tue et détruise le vivant sans tenir aucun compte des services qu'il nous rend ? »
Collègues, les forêts sont un patrimoine qui absorbe le CO2, fixe le carbone atmosphérique, régule le débit et la filtration des eaux, améliore la fertilité des sols, nous fournit de l'oxygène et maintient une biodiversité vitale pour l'espèce humaine. Beaucoup ont aussi une influence bénéfique sur la santé mentale.
Mais aujourd'hui, les forêts sont à une croisée des chemins et nous devons apprendre de ce qui s'est passé dans l'agriculture industrielle. L'industrie du bois accélère toujours plus les sites de production, tente de plier nos forêts à la cadence effrénée du capitalisme en coupant des arbres à quarante ans alors qu'ils peuvent vivre une centaine d'années. Les troncs sont ensuite envoyés en Chine, ou autre part, et nous reviennent sous forme de produit fini. Quand allons-nous arrêter cette absurdité ? De plus, cette gestion maltraite les hommes et les femmes qui travaillent en forêt. Je pourrais vous parler de ces travailleurs détachés qui restent dix heures par jour dans leur abatteuse, ou de ces agents de l'Office national des forêts à qui on a retiré tous les moyens humains et financiers et qui sont priés de couper toujours plus de bois pour absorber la dette de l'établissement. Comme dans l'agriculture industrielle, où les machines et les pesticides ont progressivement remplacé le savoir-faire des paysans, nous allons vers une forêt sans forestiers. Certains refusent de se plier à l'injonction du marché à tout va : ils se désignent eux-mêmes comme des forestiers résistants, ils pratiquent une sylviculture proche des cycles naturels et veulent redonner du sens à leur métier, ils sélectionnent les arbres, coupent celui qui permet de donner à l'autre davantage de lumière, laissent grandir et vieillir les arbres. Pour eux, les forêts sont un écosystème et ils oeuvrent au temps long.
L'urgence écologique et climatique exige de nous de mettre fin à cette industrialisation des forêts. Il n'y a pas les forêts de production d'un côté et les forêts de promenade de l'autre : toutes nos forêts doivent être gérées en préservant ces différentes fonctions. Je vous adjure, collègues, de ne pas écouter juste ce que disent les lobbies du bois, mais de bien écouter les associations, les citoyens qui sont au coeur de ces mobilisations,
Applaudissements sur quelques bancs du groupe FI
et de revenir au sujet d'intérêt général qui nous occupe : nous devons lutter contre la prédation sur les forêts et enfin les gérer comme des communs.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI. – M. Hubert Wulfranc et Mme Valérie Petit applaudissent aussi.
Le sous-amendement no 7363 vise non à dévitaliser ou à retirer toute leur sève aux amendements nos 265 et identiques présentés par de nombreux collègues, mais à les rendre plus cohérents avec l'ensemble des stratégies de gestion de la forêt que notre pays défend depuis plusieurs années. Je veux ici saluer le travail du ministère de la transition écologique, mais aussi du ministère de l'agriculture et de l'alimentation, qui est en pointe sur ces sujets. Ce sous-amendement vise à faire en sorte de ne pas limiter la mise en valeur des forêts à la conservation des puits de carbone. Nous sommes conscients que les forêts ont un rôle important en tant que puits de carbone, mais certains en jouent, en font presque un argument marketing ; c'est ce que nous allons combattre grâce à l'amendement d'Aurore Bergé sur le greenwashing que nous avons adopté, qui prévoit qu'on ne nous vendra plus demain la plantation d'arbres comme la solution ultime pour l'environnement. Je le répète, le rôle de puits de carbone des forêts est important, mais il est plus intéressant de l'introduire au 5o de l'article L. 112-1 qu'au 1o comme le proposent les amendements identiques.
Le sous-amendement no 7364 est relatif à la régénération naturelle. Certes, la régénération naturelle peut être une solution, mais c'est de moins en moins le cas, parce que le changement climatique va très vite – plus vite qu'on ne le souhaiterait. Il y a hélas des forêts qui meurent et qui, de ce fait, ne se régénèrent pas. Il est donc nécessaire de les aider, en ayant recours par exemple à la migration assistée des essences. Il ne faut donc pas placer la régénération naturelle au-dessus des autres techniques, mais offrir tout un éventail de techniques possibles aux gestionnaires.
Le sous-amendement no 7361 correspond à une précision légistique. Je vous propose de remplacer le terme de « bois massifs » par celui de « bois d'oeuvre », qui est plus communément utilisé dans la réglementation environnementale 2020, la RE2020, qui lui fait une très grande place.
Nous sommes bien conscients que l'enrésinement peut poser localement des problèmes. Dans le Morvan, l'association Canopée, avec laquelle vous avez tous beaucoup travaillé, se bat contre des enrésinements massifs dans certaines régions, mais ce n'est pas le cas partout. Imposer de ne pas planter systématiquement des résineux pourrait poser des problèmes, par exemple dans la forêt de pins des Landes, où l'enrésinement est pour ainsi dire naturel et où tout se passe très bien.
Là encore, il faut faire montre d'un peu de réserve quant à ces obligations qu'on veut créer, et surtout faire confiance aux gestionnaires qui sont sur le terrain et dont Mme Panot vient de parler. Il y a en effet à l'ONF des gens qui sont passionnés, qui connaissent parfaitement les forêts et les environnements qu'ils gèrent. Ils sont tout à fait à même de prendre les bonnes décisions.
Je vous proposerai enfin, par le sous-amendement no 7358 , de supprimer l'alinéa 17. En effet, les aides publiques pour les forêts sont déjà conditionnées par l'application de documents de gestion et il ne me semble ni souhaitable ni utile de subordonner leur octroi à des résultats.
Le sens de tous ces amendements rejoint nos engagements et nos impératifs, sous réserve de quelques points que Mme la rapporteure et moi-même avons souhaité introduire, notamment au travers du sous-amendement no 7359 . La notion de gestion durable incluant déjà l'idée d'un bon état de conservation, la rédaction proposée par l'amendement pourrait poser question s'agissant des coupes qui sont parfois nécessaires à la fourniture de bois.
S'agissant du sous-amendement no 7362 , je me félicite du travail conduit de longue date à la fois avec les membres du groupe d'études « forêt, bois, nouveaux usages et industrie du bois » lorsque j'étais parlementaire, et aujourd'hui avec tous ses membres et les députés particulièrement investis sur ce sujet, notamment Mme Cattelot, Mme Le Feur et M. Thiébaut, qui ont défendu la prise en compte du mélange d'essences nécessaire à la résilience de nos forêts. La diversification des essences est en effet un enjeu majeur de cette résilience. Son application stricte à l'échelle de la parcelle peut cependant poser des problèmes pour certaines stations forestières, comme en montagne, où il est parfois souhaitable de préserver la possibilité d'apprécier cette diversité des essences à l'échelle d'une parcelle de taille réduite, selon le concept de la « forêt mosaïque ».
De ce point de vue, les conditions de l'éligibilité aux aides du plan de relance ont été clairement notifiées et le signal est largement envoyé, mais je rejoins les parlementaires de cet hémicycle qui ont souhaité inscrire cette disposition dans le dur de la loi. La mise en oeuvre de cette diversification doit être adaptée à l'échelon local avec une analyse territoriale des enjeux locaux, parce que c'est par cette diversification des pratiques sylvicoles que nous assurerons cette résilience. C'est pourquoi je soutiens l'amendement no 7364 de Mme la rapporteure.
Par ailleurs, il n'est pas souhaitable d'opposer les résineux et les feuillus. Les uns et les autres font partie intégrante de la nature et nous avons besoin de cette diversité des ressources végétales pour nous adapter au climat futur et garantir la pérennité de nos écosystèmes, mais aussi de nos paysages forestiers, dans une approche patrimoniale que nous partageons également. Les documents d'encadrement en cours de révision pour les forêts privées seront à cet égard des outils précieux.
J'appelle également votre attention sur le rôle de la recherche et de la diffusion des connaissances que certains ont relevé. Elles doivent nous permettre d'anticiper les risques et les crises à venir. Un usage du bois d'? uvre feuillu pour notre industrie et des avancées technologiques dans cette ressource me paraissent essentiels, même si le terme de bois massif semble un peu trop restrictif.
Enfin, vous avez souhaité une articulation de la stratégie nationale bas-carbone et de l'objectif de neutralité carbone en 2050. C'est exactement ce que prévoit le sous-amendement no 7363 de Mme la rapporteure, et je l'en remercie.
Je serai donc favorable à ces amendements, sous réserve de l'adoption des sous-amendements nos 7358 et 7363 de Mme la rapporteure, ainsi que de ceux du Gouvernement.
Les amendements identiques nos 759 de M. François-Michel Lambert et 1094 de M. Pierre Vatin sont défendus.
La parole est à Mme Mathilde Panot.
Effectivement, madame la rapporteure, nous avons toutes et tous préparé ces amendements avec l'association Canopée, qui est extrêmement engagée sur ces sujets. Or vos sous-amendements vident nos amendements de leur substance, alors que nous n'avons même pas évoqué l'encadrement des coupes rases, qui est pourtant un sujet majeur, ni les services publics forestiers, que vous êtes en train de saigner. Nous voulons simplement équilibrer les différentes missions assignées aux forêts par le code forestier, notamment les fonctions de puits de carbone et de refuge de la biodiversité, sans parler de la question de l'eau ou de celle de l'air, dont nous parlions à l'instant.
Il faut quand même que tout le monde comprenne ce qui est en train de se passer. Vous nous proposez d'abord de supprimer la notion de bon état de conservation des forêts, madame la secrétaire d'État, alors que seules 18 % des forêts d'intérêt communautaire sont dans un bon état de conservation, sachant que toute la stratégie de protection de la biodiversité a été fondée sur le volontariat. Nous avons donc besoin de renforcer la loi sur ces questions, et au contraire, vous nous proposez de nouveau une stratégie fondée sur le volontariat. Mais le volontariat, ça ne marche pas, mesdames les ministres ! C'est cela qu'il faut tirer comme leçon ! C'est une aberration, quand seulement 18 % de nos forêts sont en bon état écologique de conservation, de supprimer cet élément de nos amendements !
Deuxièmement, vous proposez de supprimer l'obligation de diversifier les essences à l'échelle de la parcelle. Cela veut dire qu'une parcelle de 300 hectares comportant 280 hectares de Douglas et des petits spots de diversification par-ci par-là, situés généralement au bord des routes pour faire joli dans le paysage, sera considérée comme suffisamment diversifiée. Nous ne sommes pas d'accord avec cela non plus, et c'est pourquoi nous avons demandé des scrutins publics sur tous ces sous-amendements qui vident nos amendements de tout contenu.
Et puis vous voulez qu'on supprime ce qui concerne le puits de carbone. Certes, les forêts ne sont pas qu'un puits de carbone, mais il est extrêmement important qu'elles le soient ! Vous êtes en train de nous proposer de supprimer ce qui figure dans l'accord de Paris ! Je vous renvoie entre autres au rapport du Haut Conseil pour le climat, qui montre que sur la période 2015- 2018, le puits net de carbone a diminué de 2,1 % par an, alors que la stratégie nationale bas-carbone fixe un objectif d'augmentation de 11 %. Là encore, nous avons la preuve que cette stratégie a échoué, et pourtant vous voulez continuer comme ça, alors qu'en plus, les effets de substitution sont extrêmement critiquables et ne peuvent justifier d'augmenter encore de manière complètement irresponsable la récolte de bois.
Dernier point, madame la rapporteure, vous voulez placer la migration assistée des essences au même niveau que la régénération naturelle. Là aussi, nous ne sommes absolument pas d'accord. Si la régénération naturelle est insuffisante en qualité, il faut s'appuyer sur la résilience et l'observation. Vider ces amendements de leur contenu, c'est priver les forestiers de secteurs suffisamment étendus pour qu'ils puissent les observer.
Voilà ce que vous êtes en train de faire, notamment au travers du plan de relance, en croyant que vous avez là une solution miracle, alors que de nombreux exemples montrent que c'est un échec et que c'est au contraire lorsqu'une forêt est diversifiée, avec des essences diverses de différents âges, qu'elle est beaucoup plus résiliente.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe FI.
C'est un avis favorable sur les amendements nos 265 et identiques, sous réserve bien sûr de l'adoption des sous-amendements du Gouvernement et des miens.
Je ne peux pas, madame Panot, sous-amender des amendements irrecevables ni des amendements au projet de loi de finances sur un texte qui n'est pas le projet de loi de finances. On peut toujours parler de ce qu'il n'y a pas dans le texte, mais pour ma part je préfère parler de ce qui s'y trouve.
Vous dites que nous méconnaîtrions les accords de Paris sur la question du puits de carbone. Je veux quand même vous signaler que l'un de mes sous-amendements fait mention de l'objectif de neutralité carbone que nous nous sommes assigné pour 2050. C'est un engagement important, clairement inscrit dans le code de l'énergie : ce n'est pas un engagement en l'air. Nous nous engageons de manière forte sur cet objectif de neutralité carbone, et les forêts font partie de l'arsenal qui est à notre disposition pour atteindre cet objectif.
En ce qui concerne l'obligation de diversité des essences, son application systématique à l'échelle d'une parcelle rompra l'équilibre forestier de certains territoires. Que la monoculture de sapin Nordmann dans le Morvan ait été faite de manière complètement irresponsable, nous sommes tous d'accord sur ce point, mais est-ce qu'au nom de ce combat et d'autres que vous menez ailleurs aux côtés de l'association Canopée, on devrait imposer une diversification qui ne correspond pas à l'ensemble du territoire ? Je préfère pour ma part faire confiance aux acteurs de terrain, dont vous avez évoqué le rôle. c'est d'ailleurs sur eux que repose finalement la réussite du plan de relance, notamment pour les forêts. Ce plan doit aussi aider à prendre conscience des bonnes pratiques et à les diffuser partout où c'est nécessaire.
La régénération naturelle peut marcher à certains endroits, mais il y a des forêts où on voit de plus en plus d'arbres morts. Je ne crois pas qu'on puisse compter sur la régénération des forêts face à ce phénomène. Si on veut que la forêt soit un puits de carbone, il faut pouvoir disposer de tout l'éventail des possibles, en particulier des migrations d'espèces. C'est un outil utile à ceux qui observent et qui continueront à observer les forêts.
Pour toutes ces raisons, je ne suis évidemment pas d'accord avec vous. Notre désaccord premier, fondamental, politique, c'est que vous préférez l'obligation et moi la liberté. Je serai évidemment favorable à ce que ce texte nous permette d'avancer sur le sujet de la forêt. C'était une volonté forte de beaucoup sur ces bancs…
… et je suis contente que nous puissions aboutir.
En ce qui concerne les amendements no 759 et identique, l'avis est défavorable.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les sous-amendements de Mme la rapporteure ?
Vous rendez-vous compte, madame la rapporteure, que je vais être obligée de voter contre mon propre amendement, préparé avec l'association Canopée, tant vos sous-amendements l'ont vidé de sa substance ? Je viens d'ailleurs d'en discuter avec les membres de l'association. Vous dites que nous allons rompre l'équilibre, mais c'est vous qui le rompez en refusant de légiférer ! Nous sommes en train de rompre un équilibre, c'est très grave. Personne ne comprend ce qui s'est passé avec l'agriculture productiviste industrielle ? Personne ne comprend pourquoi un paysan se suicide chaque jour ? Nous sommes en train de reproduire exactement la même chose avec la forêt, en laissant les multinationales décider de l'adapter aux besoins des industries plutôt que de faire le contraire.
Nous voulons des forêts avec des forestiers, des forêts résilientes, des forêts multifonctionnelles et multi-essences…
Venez en Savoie, vous verrez que les forêts ne sont pas ce que vous dites !
… des forêts qu'on laisse vieillir, contrairement à ce que fait l'industrie. En vidant mon amendement de sa substance et en refusant de légiférer, vous lui laissez la voie grande ouverte.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe FI.
Dans ce pays, il en est des forêts comme des mers et des océans : ce sont des opportunités à côté desquelles le pays passe, avec plus ou moins bonne conscience. J'ai le souvenir du programme commun, qui prévoyait une filière bois ; elle n'a jamais été faite et n'a jamais fonctionné. Nous continuons à être un pays qui exporte du bois et importe des meubles, comme si nous étions une nation sous-développée. Cela devrait peut-être interpeller les pouvoirs publics et nous tous ; nous pourrions dire comment changer de méthode, à tout le moins comment ne pas aggraver la situation sur le plan qui nous intéresse aujourd'hui et dont nous avons conscience : le changement climatique.
Je vous invite à lire un magnifique livre de MM. Fabien Locher et Jean-Baptiste Fressoz, qui s'intitule Les Révoltes du ciel. Une histoire du changement climatique XVe-XXe siècle. Il montre comment les forêts ont toujours été pensées comme un instrument de gestion du climat – du microclimat le plus souvent, cela tombe sous le sens.
De grâce, évitons deux ou trois choses, comme dire que l'on imposerait une diversification. Tout d'abord, imposer n'est pas une honte ; la politique d'État, la planification, sont des choses qui existent. Qui a imposé quelque chose ? Ceux qui ont imaginé qu'il fallait planter des sapins de Douglas partout – j'en ai vu dans le Jura ! Qu'il y ait des sapins dans le Haut-Jura, cela tombe sous le sens, mais qu'on aille en coller dans la plaine et à Dole, cela n'a aucun sens !
Cela a pourtant été fait, sans raisonnement. Vous avez vu la tête qu'ils avaient, ces derniers mois, les sapins de Douglas ? Il n'y avait pas d'eau, ils crevaient partout. Ils tombent tout seuls, comme vous dites – justement parce qu'il y a un problème. Il s'agit de le régler par la diversité, notamment en n'acceptant pas la bascule vers l'exploitation telle qu'elle est pratiquée.
Il faut que vous le sachiez : progressivement, tout s'aligne sur un seul type de bois. Par exemple, dans les lycées professionnels, il y a des machines qui coupent des troncs de quarante centimètres de diamètre, et rien d'autre ! Pourquoi quarante centimètres ? Parce qu'on ne sait pas couper les troncs tordus ni les troncs sur lesquels trop de choses dépassent : il faut que ça soit droit comme un poteau ! Pouf ! Quarante centimètres, quarante ans de plantation, au revoir et merci ! Or le sol met soixante ans à se reconstituer.
Si vous coupez tous les quarante ans, le résultat est connu d'avance : s'ils sont toujours là, les sapins auront acidifié le sol et pourri la nappe phréatique en dessous ; ce n'est pas une bonne idée. Ce n'est pas une honte de le dire ! Passons à autre chose ! Les marchands de bois s'adapteront au bois et au règlement ; il ne faut pas supposer d'avance leur incapacité à le faire.
M. Ugo Bernalicis applaudit.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Il faut maintenant en donner les moyens aux gens. Je vais terminer sur cette remarque, quoique bien d'autres me viennent à l'esprit : si nous continuons de cette manière, la forêt française restera le grand rendez-vous manqué de notre génération politique – je ne parle pas d'âge, mais bien de génération politique. Il faut s'y mettre maintenant, parce qu'elle est une ressource considérable d'inventivité et de bien-être pour tout le monde. Si l'on veut une réindustrialisation locale, si l'on veut qu'un maximum de territoires bénéficient d'activités de cette nature, avec un salariat possible, le traitement du bois dans de bonnes conditions est un instrument privilégié.
Dans plusieurs zones du pays, vous ne pourrez rien mettre d'autre ; c'est le moment de s'y atteler et ce projet de loi devrait le permettre, notamment en adoptant l'amendement de Mme Panot.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Je voudrais intervenir très rapidement, parce que j'ai entendu des choses qui me font un peu mal aux oreilles. Premièrement, à écouter certains propos, on pourrait penser que la forêt française est fortement industrialisée. Je rappelle qu'elle progresse de 90 000 hectares par an ; elle a crû de 2,7 millions d'hectares en trente ans. Deuxièmement, la filière bois se structure ; je voudrais remercier et saluer les parlementaires issus de tous les bancs qui participent au groupe d'études « forêt, bois, nouveaux usages et industrie du bois ». Troisièmement, je remercie le Gouvernement et la rapporteure pour leurs sous-amendements, car l'amendement initial présentait un risque. Monsieur le président Mélenchon, vous dites que la forêt peut être une ressource économique ; justement, l'amendement tel qu'il était rédigé visait à la mettre sous cloche.
Les sous-amendements permettront d'utiliser le bois comme une ressource locale de proximité. On peut tenir tous les discours que l'on veut sur le bois et s'asseoir ensuite sur des meubles Ikea en bois scandinave ; moi, ça me dérange un peu. Il est complètement fou de se dire qu'on utilise du bois qui a parcouru des milliers de kilomètres. Utilisons du bois français, produit en France…
Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et LR.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 164
Nombre de suffrages exprimés 145
Majorité absolue 73
Pour l'adoption 107
Contre 38
Le sous-amendement no 7363 est adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 157
Nombre de suffrages exprimés 141
Majorité absolue 71
Pour l'adoption 108
Contre 33
Le sous-amendement no 7359 est adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 157
Nombre de suffrages exprimés 141
Majorité absolue 71
Pour l'adoption 106
Contre 35
Le sous-amendement no 7362 est adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 159
Nombre de suffrages exprimés 139
Majorité absolue 70
Pour l'adoption 104
Contre 35
Le sous-amendement no 7364 est adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 151
Nombre de suffrages exprimés 135
Majorité absolue 68
Pour l'adoption 102
Contre 33
Le sous-amendement no 7361 est adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 156
Nombre de suffrages exprimés 140
Majorité absolue 71
Pour l'adoption 103
Contre 37
Le sous-amendement no 7358 est adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 155
Nombre de suffrages exprimés 150
Majorité absolue 76
Pour l'adoption 140
Contre 10
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures quinze :
Suite de la discussion du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.
La séance est levée.
La séance est levée à dix-neuf heures quarante.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra