La réunion débute à 21 heures 05.
Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet, présidente.
La Commission poursuit l'examen des articles de la proposition de loi relative à la sécurité globale (n° 3452) (M. Jean-Michel Fauvergue et Mme Alice Thourot, rapporteurs).
Nous reprenons nos travaux. Nous en étions aux amendements à l'article 1er. Le ministre de l'Intérieur doit nous rejoindre.
Article 1er : Expérimentation dans le domaine de la police municipale (Suite)
La Commission est saisie de l'amendement CL269 de M. Éric Pauget.
La proposition de loi permet aux polices municipales de procéder à des contrôles en matière de code de la route. Il est prévu notamment la verbalisation en cas de défaut d'assurance. Je propose d'ajouter la possibilité de verbaliser un défaut de contrôle technique. En effet, lorsque les policiers arrêtent un véhicule, ils procèdent automatiquement au contrôle du permis de conduire, de l'assurance, du contrôle technique et de l'état général du véhicule.
C'est l'article R. 323‑1 du code de la route qui vise une infraction et il s'agit seulement d'une contravention. Or, sur la base de l'article L. 511‑1, les agents de police municipale constatent également, par procès-verbaux, les contraventions aux dispositions du code de la route dont la liste est fixée par décret en Conseil d'État. Il s'agit de toutes les contraventions, à l'exception de celles prévues aux articles R. 121‑1 à R. 121‑5, R. 221‑18, R. 222‑2, R. 234‑1, R. 314‑2, R. 411‑32, R. 412‑17, R.412‑51, R. 412‑52 et R. 413‑15.
Cet amendement est donc satisfait.
Après la longue énumération des exceptions prévues et pour ne pas jouer la répétition, je retire l'amendement.
L'amendement est retiré.
La Commission est saisie de l'amendement CL327 de M. Paul Molac.
La proposition de loi vise à étendre à la police municipale la possibilité de délivrer les contraventions pour usage de stupéfiants qui a été mise en place pour la police nationale au 1er septembre 2020. Il nous semble que c'est un peu précipité. Je sais que cette mesure a été instaurée à titre expérimental à Rennes et à Reims. L'expérimentation étant relativement récente, nous considérons qu'il n'est pas nécessaire, pour l'heure, de l'étendre aux polices municipales.
Je ne partage pas votre constat. La lutte contre les stupéfiants est une priorité du Gouvernement et de la majorité qui le soutient. Nous devons au contraire renforcer les moyens de constater cette infraction afin de mieux lutter contre cette plaie et ce fléau qu'est la drogue.
Il ne s'agit pas d'une contravention, mais bien d'une amende forfaitaire délictuelle (AFD). La commission des Lois a déjà eu connaissance d'un premier retour d'évaluation. Je continue de suivre et d'évaluer cette expérimentation, sur laquelle nous ferons régulièrement le point, Mme la présidente étant très attachée à ce travail d'évaluation.
Il ne s'agit pas d'une criminalisation supplémentaire, mais bien d'une forfaitisation par procès-verbaux électroniques, qui est bien accueillie. J'invite M. Molac à prendre connaissance du retour qui en a été fait il y a quelques semaines en commission des Lois. Étendre ce dispositif qui fonctionne bien et qui simplifie la procédure est une bonne chose. C'est un système efficace de lutte contre la consommation de stupéfiants.
Mon collègue Robin Reda était favorable à une dimension contraventionnelle et non délictuelle. Étant en quelque sorte à l'origine de la proposition de cette amende forfaitaire, je suis ravi que l'on ait retenu la dimension délictuelle. Les polices municipales seront à même, j'en suis convaincu, de se saisir de cette forfaitisation au même titre que les autres AFD à l'encontre de la conduite sans permis ou sans assurance. Ce dispositif viendra outiller avantageusement les policiers municipaux dans le cadre de leurs missions de police de la route et de la voie publique.
L'amendement est retiré.
La Commission est saisie de l'amendement CL307 de M. Buon Tan.
. Cet amendement vise à renforcer les compétences dont disposent les policiers municipaux afin de lutter contre la prostitution.
Le développement de la prostitution porte, dans certains cas, une atteinte grave à la tranquillité et à la sécurité de nos concitoyens, y compris des plus jeunes. Certains quartiers voient, en effet, se développer une prostitution à proximité immédiate des établissements scolaires, sans qu'il soit possible d'y mettre fin. C'est le cas dans ma circonscription, où l'on a observé la présence de prostituées le long de l'enceinte d'une école. Aussi me semble-t-il indispensable et urgent d'intensifier la lutte contre de tels comportements.
Cet amendement vise à sanctionner les récidivistes. Dans ma circonscription, après le passage de la police municipale, les prostituées disparaissent deux ou trois jours avant de revenir. Une présence régulière de la police municipale de proximité éviterait leur présence.
La constatation de récidive en matière de prostitution nécessite des actes d'enquête. Or ceux-ci n'entrent pas dans le projet d'expérimentation tel qu'il est présenté.
Il s'agit d'un amendement d'appel. Peut-être est‑ce compliqué sur le plan de la procédure mais nous ne disposons d'aucune autre solution. Je présenterai au cours de nos travaux un amendement qui permettrait d'accéder aux fichiers, dont la consultation pourrait suffire. Si l'on dispose de l'identité de la personne et que le fichier indique qu'elle est multirécidiviste, il serait possible, sur ce seul fait, de la sanctionner. Je suis disposé à retirer l'amendement pour réfléchir à une meilleure rédaction.
L'amendement est retiré.
La Commission est saisie de l'amendement CL15 de M. Éric Diard.
. Cet amendement vise à profiter de la possibilité qui est donnée aux policiers municipaux de constater les délits de squats opérés dans des locaux appartenant à la municipalité pour étendre cette compétence à l'ensemble des délits de squats sur le territoire communal. Quitte à donner la possibilité à un policier municipal de constater un squat dans un local de la commune, habituellement désaffecté, pourquoi ne pas lui donner cette possibilité pour l'ensemble des squats de cette commune ?
Au surplus, cette capacité donnée à la police municipale permettra une meilleure application des dispositifs existants contre les squatteurs, quand on sait qu'un délai de flagrance, de 48 heures, est déterminant pour permettre leur expulsion rapide au profit des habitants ou des propriétaires de l'habitation squattée.
Il semble nécessaire de rappeler la mésaventure de la famille Kaloustian, cet été, qui a découvert que sa maison secondaire à Théoule-sur-Mer était occupée et qui a connu bien de la peine à la récupérer. Un cas similaire a eu lieu à Toulouse en 2018.
Grâce à cet amendement, qui permettrait aux policiers municipaux de constater les délits prévus à l'article 226-4 du code pénal lorsque les squats interviennent sur l'ensemble du territoire municipal, nous pourrions éviter le renouvellement de tels drames personnels.
Vous proposez d'élargir la liste des infractions pouvant être constatées par les agents de la police municipale dans le cadre de l'expérimentation aux squats de toutes les catégories de locaux.
L'expérimentation du constat d'un certain nombre d'infractions par les agents de police municipale repose sur le fait que ce constat ne doit pas nécessiter d'actes d'enquête. Cela ne sera plus le cas si l'on étend largement la possibilité ouverte par l'article 1er de permettre à la police municipale de constater l'introduction par voie de fait puis le maintien dans le domicile d'autrui.
Vous avez cité une affaire qui s'est déroulée cet été. Rendez-nous grâce du fait que, dans le cadre de la loi relative à l'accélération et à la simplification de l'action publique, des dispositions ont été ajoutées afin, précisément, de mieux lutter contre ces squats, en particulier des résidences secondaires.
L'amendement est retiré.
La Commission est saisie de l'amendement CL308 de M. Bon Tuan.
. Cet amendement propose de permettre aux policiers municipaux d'accéder à certains fichiers de la police nationale et de la gendarmerie nationale que sont le fichier national des immatriculations, le fichier des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes (FIJAIS) et le fichier des personnes recherchées (FPR).
Ces fichiers jouent un rôle fondamental dans la lutte contre un certain nombre d'infractions, qu'il s'agisse de délinquances au quotidien ou de faits plus graves – de violences ou d'agressions sexuelles. Ils permettent aux forces de sécurité de développer une connaissance fine des territoires, des acteurs et des réseaux impliqués dans ces actes et de lutter efficacement contre la récidive.
Seuls trois fichiers sont ici mentionnés. De nombreux autres qui dépendent du pouvoir réglementaire mériteraient d'être mis à la disposition de la police municipale, par exemple les fichiers des personnes recherchées et les fichiers des permis de conduire.
Alors que les policiers municipaux verront, dans le cadre de l'expérimentation prévue par l'article 1er, leurs compétences renforcées en matière de lutte contre certains délits, il est indispensable de leur permettre l'accès à ces fichiers. Un tel accès renforcera l'efficacité et la pertinence de leurs actions, tout en permettant d'accroître leur coopération avec les forces de l'ordre nationales. Il leur permettra surtout d'amplifier la lutte contre les infractions du quotidien et la récidive qui minent certains de nos territoires.
La constatation de cette infraction me semble nécessiter, par construction, des actes d'enquête. Or cela entre en contradiction avec le principe des infractions retenues dans le cadre de cette expérimentation.
Par ailleurs, dans le rapport que nous avons remis et à partir duquel nous avons construit la proposition de loi, nous avons indiqué être favorables – le ministre l'est aussi – à la consultation d'un certain nombre de fichiers par les policiers municipaux. Ce point relève cependant largement du domaine réglementaire. C'est la raison pour laquelle il ne figure pas dans cette expérimentation. mais l'extension de leur consultation devrait intervenir rapidement.
L'amendement est retiré.
La Commission est saisie de l'amendement CL40 de M. Pacôme Rupin.
. À la liste des nouveaux délits que les agents de police municipale pourront constater, cet amendement vise à ajouter l'affichage sauvage. Ce fléau pour les villes engendre en effet un coût élevé de nettoyage. Il serait donc logique que la police municipale puisse combattre ce phénomène, qui n'est pas une priorité, ce que l'on peut comprendre, de la police nationale.
Cet amendement me semble satisfait dès lors que l'article L. 581-40 prévoit que, pour l'application des articles que vous visez, sont habilités à procéder à toutes les constatations, outre les officiers de police judiciaire, les agents habilités par les collectivités locales à constater les infractions au code de la route en matière d'arrêt et de stationnement de véhicules automobiles, c'est-à-dire les policiers municipaux.
L'affichage sauvage est une infraction au code de l'environnement. Aussi pourrions-nous réintroduire les gardes champêtres qui, dans certains domaines, notamment dans le champ des infractions au code de l'environnement, ont davantage de compétences que les polices municipales. Mon objectif n'est pas d'en retirer aux polices municipales, mais peut-être serait-ce l'occasion de faire référence aux gardes champêtres et de « raccrocher » un certain nombre de compétences, les gardes champêtres étant, malheureusement, les grands oubliés de cette proposition de loi, ce qui, convenons-en, est fort regrettable.
Madame Ménard, je vous ai remis un tableau indiquant que j'avais déclaré recevable la moitié de vos amendements sur les gardes champêtres. Nous allons donc pouvoir en discuter.
Cet amendement a été rédigé de telle sorte qu'il se rattache à un alinéa de l'article 1er. Il est nécessairement recevable. En revanche, les amendements que j'ai déclarés irrecevables étaient des amendements portant articles additionnels ou qui créaient de nouvelles compétences.
L'amendement est retiré.
La Commission est saisie de l'amendement CL328 M. Paul Molac.
Je propose de supprimer l'alinéa 17 car je le trouve disproportionné, en ce sens que l'on demande aux policiers municipaux de constater par procès-verbaux les contraventions relatives, entre autres, aux débits de boissons.
Le renvoi à un décret en Conseil d'État quant à la liste précisant les contraventions visées n'est pas satisfaisant non plus. Nous devrions l'établir nous-mêmes, d'autant que l'on nous reprochera, éventuellement, à l'avenir, de ne pas avoir été suffisamment prévoyants et précis dans la loi, ainsi que cela s'est déjà produit dans cette commission.
Vous souhaitez supprimer l'alinéa qui autorise, dans le cadre de l'expérimentation, les agents de police municipale à constater sur le territoire communal, sans acte d'enquête, plusieurs contraventions, dont la liste sera fixée par décret en Conseil d'État. Ces constatations sont relatives aux débits de boissons, à la lutte contre l'alcoolisme, à la répression de l'ivresse publique et à la protection des mineurs.
S'agissant des contraventions, il me semble tout à fait logique de recourir à la liste par décret en Conseil d'État, à l'instar de ce qui existe d'ores et déjà à l'article L. 511‑1 s'agissant des contraventions au code de la route que les agents de la police nationale sont autorisés à constater. Donc demande de retrait ou avis défavorable.
Je viens à l'appui du rapporteur. La demande émane en effet de la police nationale, car les procès-verbaux prennent beaucoup de temps.
La Commission rejette l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CL167 de Mme Emmanuelle Ménard.
Nous avons déjà débattu de ce sujet ce matin. M. le rapporteur m'avait expliqué que mon amendement était satisfait. Je suis donc prête à revoir la rédaction de celui-ci car si le cas du policier municipal recruté par un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) n'est pas des plus fréquents, il n'en reste pas moins que des polices municipales intercommunales existent. Le policier municipal recruté par un EPCI peut exercer ses fonctions sur l'ensemble des communes de ce groupement, il n'officie plus sur le seul territoire communal. Entendez-vous mon argument et accepteriez-vous, éventuellement, de modifier l'alinéa 17 ?
En l'état, mon avis est défavorable, mais il va de soi que vous pouvez revoir votre amendement en vue de la séance.
Ce sujet est très important. Les intercommunalités et les rassemblements de communes vont en effet se développer. Votre texte prévoit une expérimentation reposant sur vingt agents de police. Je connais des communes qui en comptent moins mais qui, ayant passé une convention intercommunale, se retrouvent avec une équipe qui dépasse vingt fonctionnaires de police. Il conviendrait de travailler sur le périmètre des intercommunalités afin d'améliorer à l'avenir les pouvoirs des policiers municipaux à l'échelle intercommunale lorsqu'une convention de coopération est signée.
Je viens en soutien de Mme Ménard. Dans les Vosges, dans la vallée de la Moselle plus précisément, il existe une police intercommunale. C'est ainsi que deux policiers intercommunaux interviennent sur sept villages. Dans ce cas précis, comment cela se passe-t-il ? Le texte présenté comporte‑t‑il un trou dans la raquette, auquel cas, il conviendrait d'ajouter la notion d'intercommunalité, ou cette notion est-elle déjà prise en compte ?
L'amendement est retiré.
La Commission est saisie de l'amendement CL44 de M. Pacôme Rupin.
. Dans la même logique, le présent amendement vise à ajouter aux possibilités d'action des policiers municipaux le constat des délits relatifs au port et transport d'armes de catégorie D.
Les contraventions en matière de port et transport d'armes sont assez limitées, car l'essentiel des infractions dans ce domaine est du ressort du délit et nécessite des actes d'enquête. Il peut néanmoins être intéressant d'y réfléchir d'ici à la séance, peut-être sous une forme rédactionnelle différente. Si vous acceptiez de le retirer, nous pourrions y travailler ensemble, éventuellement en lien avec le ministre.
L'amendement est retiré.
La Commission est saisie de l'amendement CL144 de M. Christophe Naegelen.
Il s'agit d'ajouter le dépôt sauvage d'ordures à la liste des délits que pourront verbaliser les policiers municipaux.
Cet amendement est satisfait par l'article R. 15-33-29-3 du code de procédure pénale. Les agents de police municipale peuvent dresser de nombreuses contraventions prévues par le code pénal ne nécessitant pas d'actes d'enquête et ne réprimant pas des atteintes à l'intégrité des personnes. Cela concerne notamment la divagation et l'excitation d'animaux dangereux, les bruits ou tapages injurieux ou nocturnes, les menaces de destruction, lorsqu'elles concernent des biens appartenant à la commune, l'abandon d'ordures, déchets, matériaux et autres objets, les atteintes volontaires ou involontaires et mauvais traitements à animal.
L'amendement est retiré.
L'amendement est retiré.
La Commission examine les amendements CL270 et CL271 de M. Éric Pauget.
. Ces amendements proposent d'autoriser les directeurs ou les chefs de service de police municipale à procéder à des dépistages de l'imprégnation alcoolique – amendement CL270 – ou de l'usage de stupéfiants par un conducteur – amendement CL271.
S'agissant de l'amendement CL270, l'article 29 de la proposition de loi simplifie les modalités des contrôles d'alcoolémie. Il propose un cadre intéressant, à la fois opérationnel et respectueux des droits des personnes. J'ajoute que l'article L.234-3 du code de la route autorise déjà les agents de police judiciaire adjoints à soumettre à des épreuves de dépistage à l'imprégnation alcoolique sous contrôle des officiers de police judiciaire (OPJ). Même argumentaire pour l'amendement CL271. Demande de retrait ou avis défavorable.
La Commission rejette successivement les amendements.
Elle est saisie de l'amendement CL309 de M. Bon Tuan.
Je suis désolé, j'ai commis une inversion entre l'amendement CL308 et l'amendement CL309, auquel vous avez d'ores et déjà répondu. J'en viens donc à l'amendement CL308.
Cet amendement propose d'ajouter à la liste de ces délits les vols et vols avec circonstances aggravantes, par exemple, les vols avec violences, de plus en plus nombreux aujourd'hui et de plus en plus de violents.
L'amendement est-il satisfait ou une raison justifie-t-elle cet avis défavorable ?
La constatation de cette infraction nécessitant des actes d'enquête, nous nous situons aux limites de l'expérimentation.
Si l'on devait confier la verbalisation des vols avec violences aux policiers municipaux, on devrait débattre de la transmission directe des procès-verbaux aux procureurs.
L'amendement est retiré.
La Commission est saisie de l'amendement CL272 de M. Éric Pauget.
Cet amendement autorise les directeurs de police municipale ou les chefs de service à procéder à des contrôles d'identité et non pas uniquement à des relevés comme vous le prévoyez dans le texte. La nuance n'est pas négligeable. Les polices municipales souhaitent pouvoir effectuer des contrôles d'identité.
La différence entre un contrôle et un relevé d'identité est essentielle. Actuellement, les OPJ et les APJ, sous l'autorité des premiers, ont le droit de procéder à des contrôles d'identité. Les APJA que sont les policiers municipaux et d'autres, tels que les agents de sécurité, ne peuvent, pour l'heure, de procéder à ces contrôles.
Vous dites que les policiers municipaux demandent à réaliser des contrôles d'identité. De l'enquête, d'une durée de six mois, que nous avons réalisée pour élaborer notre rapport, il ressort que les agents de police municipale et leurs syndicats, dans leur grande majorité, ne réclament pas de nouvelles qualifications judiciaires, pour la simple et bonne raison qu'ils souhaitent continuer à intervenir sur le terrain et non à faire de la procédure toute la journée, derrière les bureaux.
Au surplus, la jurisprudence constitutionnelle est constante : les policiers municipaux ne peuvent procéder à des contrôles d'identité en l'état. Demande de retrait ou avis défavorable.
Ces amendements proposent l'extension de la verbalisation s'agissant en fait d'infractions souvent complexes et nécessitant des enquêtes très fouillées. Il suffit d'assister à des audiences portant sur des vols avec violences au tribunal correctionnel pour le mesurer. Elles ne peuvent absolument pas relever de la police municipale.
S'agissant des contrôles d'identité, j'ajoute que même les officiers de police judiciaire ne peuvent pas procéder à des contrôles d'identité de leur propre initiative ; ce n'est possible que sur réquisition du procureur de la République.
La Commission rejette l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CL381 du Gouvernement.
Ce premier amendement du Gouvernement vise à accroître les pouvoirs de la police municipale afin que celles-ci puissent constater le défaut d'assurance du véhicule. Pour ce faire, les polices municipales doivent avoir accès au fichier des véhicules assurés.
Nous sommes particulièrement favorables à cet amendement, qui reprend une disposition que nous avions proposée dans notre rapport.
La Commission adopte l'amendement.
Elle adopte ensuite successivement les amendements rédactionnels CL352, CL353 et CL354 du rapporteur.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette successivement les amendements CL58 et CL59 de M. Christophe Blanchet.
La Commission examine l'amendement CL195 de Mme Marietta Karamanli.
Ce matin, nous avons longuement évoqué la question des compétences, de la formation et du statut des agents de la police municipale. Nous souhaitons – et cela a été exprimé par plusieurs groupes – renvoyer à un décret en Conseil d'État la nature et le contenu des certifications et formations complémentaires dont doivent bénéficier les agents de police municipale pour exercer les compétences prévues dans le cadre de l'expérimentation.
En effet, si l'article 1er est relativement précis quant aux obligations d'habilitation et de réussite à un examen technique pour les directeurs et chefs de service de police municipale, de nombreuses imprécisions subsistent s'agissant des agents.
Je comprends le sens de votre amendement. Toutefois, seuls les chefs de police municipale ou les responsables des services de sécurité des mairies disposeront des nouveaux pouvoirs. Les policiers municipaux conserveront leurs pouvoirs d'APJA, aux termes de l'article 21 du code de procédure pénale. Les directeurs de police municipale ou chefs de police municipale seront personnellement habilités, en vertu d'une décision du procureur général près la cour d'appel, après avoir suivi une formation et satisfait à un examen technique. Votre amendement est satisfait. Donc demande de retrait ou avis défavorable.
Je partage vos propos portant sur les directeurs de police municipale ou les chefs de police municipale. Mais, à plusieurs reprises, dans nos travaux de ce matin, nous avons relevé la nécessité de préciser les compétences, voire les certifications des agents. Il convient de le prévoir dans le texte.
Les agents de la police municipale passent un concours et suivent ensuite une formation dans le cadre de leurs qualifications d'APJ adjoint. Ils ont donc acquis ces qualifications que le texte ne remet pas en cause.
La Commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'article 1er modifié.
Après l'article 1er
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette successivement les amendements CL158 et CL159 de M. Sylvain Maillard.
Article 2 (art. L. 511-1 du code de la sécurité intérieure) : Suppression d'un seuil restreignant les capacités des policiers municipaux à procéder à des inspections visuelles de bagages et à des palpations de sécurité.
La Commission examine l'amendement CL310 de M. Buon Tan.
L'article 2 a pour objet d'autoriser les agents de police municipale à assurer la sécurité de toutes les manifestations sportives ou culturelles, et à saisir les objets potentiellement dangereux qui pourraient servir à commettre des infractions. Il permet aux policiers municipaux de procéder à des inspections visuelles des bagages et sacs, et, si la personne donne son accord, d'effectuer une fouille ainsi qu'une palpation de sécurité, mais les policiers municipaux ne disposent pas du pouvoir de procéder eux-mêmes à des saisies. Le fait est regrettable, car la sécurisation des événements serait d'autant mieux assurée s'ils en avaient la possibilité. Cet amendement propose donc de leur permettre de procéder à de telles saisies en établissant un procès-verbal.
La logique de cette proposition de loi est d'octroyer, à titre expérimental, un certain nombre de compétences aux polices municipales. C'est l'objet de l'article 1er que nous venons de voter. Le titre Ier comprend, par ailleurs, différentes mesures de clarification ou de simplification.
En l'état, la rédaction de votre amendement est trop imprécise et laisse une trop large part à la subjectivité. Elle n'établit pas de lien avec la possibilité d'une confiscation judiciaire prévue par la loi. En outre, l'amendement vise à généraliser sans expérimenter, ce qui est contraire à notre logique de base. Je vous invite donc à retirer votre amendement pour le retravailler d'ici à la séance.
L'amendement est retiré.
La Commission en vient à l'amendement CL45 de M. Pacôme Rupin.
Nous vous présentons une rédaction alternative à l'amendement CL44 à l'article 1er. Il s'agit d'étendre les contraventions en matière de port d'arme de catégorie D.
Pourquoi pas, même si le champ contraventionnel en la matière est relativement limité. Le port d'une arme, y compris une arme blanche, relève en effet largement d'une procédure délictuelle. Je vous invite à retirer votre amendement pour le retravailler d'ici à la séance.
L'amendement est retiré.
La Commission adopte l'article 2 sans modification.
Après l'article 2
La Commission est saisie de l'amendement CL71 de Mme Emmanuelle Ménard.
L'amendement donne la possibilité aux agents de police municipale, dans certaines circonstances et sous certaines conditions bien établies, d'exercer leur mission en tenue civile et armés lorsque cela s'avère nécessaire. C'est d'ores et déjà possible pour les gardes champêtres.
Cela peut s'avérer utile notamment face à la recrudescence d'agressions physiques, ou heureusement le plus souvent verbales, à l'encontre des élus locaux et des maires. Opérer en civil leur permettrait de passer plus facilement inaperçus lors d'une mission de protection. L'amendement ne porte pas sur une fonction de garde du corps, mais sur la protection des élus au cours de leurs déplacements sur le territoire de la commune. Bien sûr, la mesure doit être très encadrée mais la possibilité devrait leur être accordée.
J'ignore les raisons qui ont conduit à autoriser les gardes champêtres à travailler en civil. Mais ainsi qu'en attestent les résultats de notre enquête sur six mois, le principe, pour la police municipale, est de travailler en tenue, d'être visible des populations et à leur contact, afin d'assurer des missions de proximité.
En l'état du droit, le second alinéa de l'article L. 511-4 du code de la sécurité intérieure dispose expressément que le port de la carte professionnelle et celui de la tenue sont obligatoires pour les polices municipales pendant le service.
Vous proposez de faire évoluer cette situation. Cela ne me paraît pas opportun au regard des attributions et du rôle des policiers municipaux qui doivent, encore une fois, être visibles, au service de la population. Demande de retrait ou avis défavorable.
J'entends votre argument. Peut-être la rédaction de mon amendement gagnerait-elle à être améliorée en réservant cette possibilité aux directeurs des polices municipales mais je puis vous assurer que, parfois, c'est un vrai besoin. C'est une demande forte de ces policiers amenés à effectuer des missions de protection car la discrétion renforcerait leur efficacité. La municipalité peut se retrouver contrainte de faire appel à des sociétés de sécurité privée pour assurer le maintien de l'ordre dans les manifestations à risque.
Je vais vous donner un exemple, pour dissiper tous les fantasmes. Dans le sud de la France, il y a des corridas. Or les associations anti-corridas peuvent être parfois très virulentes. Je peux vous assurer pour en avoir fait l'expérience qu'on peut se retrouver à deux ou trois face à 200 ou 300 personnes dont les responsables sont, certes, dans le dialogue mais ne sont pas toujours en mesure de contrôler leurs militants, bien moins sympathiques. Or, dans pareil cas, la présence de la police municipale en tenue peut exacerber leur agressivité, contrairement à celle de deux ou trois personnes en civil susceptibles d'intervenir si nécessaire. Cette demande ne me semble ni folle ni disproportionnée.
Je vous entends, mais la limite entre l'action de la police municipale et les polices régaliennes se situe précisément là. La police d'État et les gendarmes sont susceptibles de travailler en civil dans le cadre d'enquêtes ou de missions de protection, mais ce ne sont nullement les missions des polices municipales, même si vous réclamez cette mesure, je l'ai bien compris, à titre dérogatoire.
Vous dites, madame Ménard, que vous ne voulez pas que nous considérions votre demande comme un fantasme et citez l'exemple de la police à Béziers ou dans le sud de la France. Depuis très longtemps, nous disposons, à Lyon, d'une grande police expérimentée, formée et armée. Pour avoir été maire d'arrondissement, je connais très bien cette police municipale. Or, jamais, ô grand jamais, je n'ai entendu les polices municipales de la ville de Lyon exprimer une telle demande alors qu'elles sont parfois confrontées à des situations d'une grande complexité. Les exemples que vous citez sont étonnants. De qui souhaitez-vous la protection ? S'il s'agit du maire, il pourra bénéficier, s'il est inquiété, d'une protection assurée par le ministère de l'intérieur qui le décidera en fonction des risques encourus, et sa police municipale, en tenue, assurera cette protection lors de ses déplacements.
Comme l'a indiqué le rapporteur, depuis le début de nos travaux, nous voulons un texte équilibré. Nous procédons à des avancées importantes qui, parfois, peuvent interpeller certains de nos collègues. Mais nous n'avons nullement pour objectif de faire de la police municipale une seconde police nationale ou l'équivalent des forces de l'ordre nationales. À cet égard, votre proposition est excessive.
La Commission rejette l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CL35 de Mme Brigitte Kuster.
Brigitte Kuster se bat depuis de longues années en faveur de la création d'une police municipale à Paris. Dans cette perspective, elle demande d'adapter le code de la sécurité intérieure à la possibilité d'armer la police municipale dans la mesure où l'autorité administrative de tutelle de la future police municipale de Paris ne sera pas le préfet de département mais le préfet de police de Paris. C'est, en quelque sorte, un amendement rédactionnel dans la perspective de la création de la police municipale de Paris.
L'article 4 prévoit un cadre juridique adapté à Paris. À cet égard, l'alinéa 9 précise que les attributions dévolues par le titre Ier du livre V au représentant de l'État dans le département sont exercées à Paris par le préfet de police. Je vous invite donc à retirer votre amendement.
Il s'agit d'un amendement de Mme Kuster qui est très attachée à cette question de la police municipale parisienne. Dans l'attente de l'article 4, nous le maintenons.
La Commission rejette l'amendement.
La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL104 de Mme Emmanuelle Ménard, CL113 de M. Éric Ciotti, CL325 et CL274 de M. Éric Pauget.
L'amendement CL104, s'il est adopté, permettra, aux policiers municipaux d'accéder à un certain nombre de renseignements essentiels pour assurer la sécurité de nos concitoyens – comme leur propre sécurité, d'ailleurs – lors des missions qu'ils sont amenés à effectuer.
Il faut ainsi, après l'accès au fichier des permis de conduire et cartes grises, leur permettre d'accéder directement au fichier des objets et des véhicules signalés (FOVES) et au fichier des personnes recherchées (FPR). Que les policiers municipaux soient actuellement obligés de passer par les services territorialement compétents de la police nationale ou de la gendarmerie pour y avoir accès, présente un double inconvénient. En premier lieu, il s'agit évidemment d'un frein au bon déroulement d'une mission pour la police municipale ; cela contraint, en outre, la police nationale et la gendarmerie à mettre des effectifs à disposition pour traiter leurs demandes. En second lieu, cet accès indirect peut s'avérer risqué pour les agents qui peuvent se retrouver parfois face à une personne dangereuse. Or n'en étant pas informés immédiatement, ils ne sont pas en mesure d'adapter leur intervention à la dangerosité de l'individu qu'ils ont en face d'eux.
L'amendement CL113 vise également à doter les polices municipales, qui accomplissent des missions essentielle – l'intervention des policiers municipaux de Nice qui ont agi avec courage et efficacité l'a démontré –, de moyens d'action supplémentaires. Il s'agit de leur permettre d'accéder à deux fichiers extrêmement importants, le FPR et le FOVES, qui comprend les véhicules volés. Ces outils sont indispensables à l'action du quotidien. Les policiers municipaux sont confrontés dans leurs interventions à la nécessité de savoir à qui ils ont affaire. Or, actuellement, ils doivent, préalablement, passer par la police municipale.
Des extensions ont été opérées : par le décret du 14 août 2013 pour le FPR avec un accès très limité, réservé aux cas exceptionnels, notamment celui des personnes disparues ou au titre d'un danger exceptionnel, assorti d'une autorisation à l'initiative des forces de police ; par un arrêté du 7 juillet 2017 pour le FOVES, lourd à utiliser, et limitant le recours et l'accès à ces fichiers aux besoins d'en connaître. Dans le cadre de cette proposition de loi, dont l'ambition vise à accroître l'efficacité et les moyens des polices municipales, nous ferions par conséquent œuvre utile en leur permettant d'accéder à ces outils indispensables à leur action.
Mes amendements visent à donner aux polices municipales un accès direct à plusieurs fichiers : au titre de l'amendement CL325, le fichier des personnes recherchées ainsi que le fichier des véhicules signalés ; au titre de l'amendement CL274, le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions terroristes (FIJAIT), que je propose à titre expérimental, car j'ai bien conscience qu'il revêt un caractère particulier.
Dans la mesure où le texte vise à renforcer les pouvoirs de la police municipale, il faut tendre vers plus d'efficience. Au titre du maillage des territoires, notamment des quartiers, il convient que les polices municipales disposent des outils permettant de renforcer l'action de la police nationale ou de la gendarmerie dans le cadre du continuum de sécurité. C'est l'idée qui sous-tend l'accès des polices municipales à ces différents fichiers.
L'accès aux fichiers par les polices municipales ne nous a pas laissés indifférents, Mme Thourot et moi-même. Nous avons souligné à plusieurs reprises dans notre rapport, pour les raisons que vous avez évoquées, l'importance pour les policiers municipaux d'accéder directement aux fichiers sans passer par la police nationale ou la gendarmerie nationale. Cela engendre en effet une perte de temps et des dangers sur le terrain, la police municipale ignorant à qui elle a affaire. Surtout, ces demandes encombrent les policiers nationaux et les gendarmes qui, pendant qu'ils effectuent ces recherches, ne font pas autre chose.
Nous n'avons cependant pas prévu cette disposition dans la proposition de loi car elle relève du domaine réglementaire. Je vous invite donc à retirer ces amendements.
Je m'engage, avant l'adoption définitive de la proposition de loi, à ouvrir l'accès de ces fichiers aux policiers municipaux, notamment dans l'esprit évoqué par M. le député Ciotti, s'agissant des deux fichiers cités dans son amendement. Mais cette mesure, relevant du pouvoir réglementaire, n'a pas sa place dans la loi. Je formule donc un avis défavorable sur le principe, mais un avis favorable sur le fond.
Nos policiers municipaux m'ont fait part de deux problématiques. Premièrement, s'ils peuvent avoir accès au fichier national des immatriculations, ils sont obligés de l'acheter, ce qui n'est pas le cas de la police nationale ou de la gendarmerie. Pourquoi une telle obligation ?
La seconde problématique, plus gênante, est d'ordre pratique : après avoir acheté ces fichiers, ils ne peuvent les consulter que depuis un poste fixe ; ils n'y ont pas accès, au même titre que la police nationale ou la gendarmerie, par le biais d'une tablette ou d'un téléphone. Aussi sont-ils obligés, en cas de contrôle, de se rendre au poste de police municipale avec toutes les difficultés pratiques que cela implique. Dans un souci d'efficacité, il serait bon qu'ils aient accès aux fichiers dans les mêmes conditions que leurs collègues de la police nationale ou de la gendarmerie sur le terrain.
Sur le premier point, vous avez raison. J'ai d'ailleurs engagé des démarches pour que les mairies n'aient plus à acheter ces fichiers, dont l'accès avait été ouvert sur autorisation de mon prédécesseur, Christophe Castaner. Nous allons supprimer la licence qu'il fallait payer jusqu'à présent.
Sur le second point, je suis un peu étonné. Si la police municipale de Béziers agit sur le modèle des Monty Python en procédant à des allers-retours pour contrôler quelqu'un qui reste sur place c'est qu'elle est mal organisée. Que je sache, le téléphone existe depuis un certain temps déjà ! Il suffit que le policier municipal appelle son collègue qui, en général, reste devant les caméras de vidéosurveillance. Il peut même appeler un agent assermenté qui n'est pas toujours un policier municipal. Essayez le téléphone à Béziers, vous allez voir, cela marche bien !
C'est un problème de portabilité. Si la portabilité des fichiers sur des tablettes ou des téléphones peut être étudiée, se pose également la question de savoir qui accède à ces fichiers. Vous le savez, ces fichiers ne pouvant être consultés qu'à des fins professionnelles, le mode de consultation doit être étudié pour répondre aux dispositions que nous impose la CNIL, ce qui est bien naturel s'agissant d'informations personnelles mises à disposition. Indépendamment de cela, madame Ménard, ce serait mentir que de dire que les policiers municipaux sont obligés de retourner au poste de police pour consulter le poste fixe. Votre démonstration n'était objectivement pas très honnête. En général, le policier municipal appelle son collègue resté au poste, qui visionne les caméras de vidéoprotection au centre de supervision urbaine (CSU), ou encore un agent assermenté, qui n'est pas toujours un policier municipal. C'est ainsi que cela se passe.
Si vous voulez me faire dire qu'il faudrait pourvoir à la portabilité des fichiers sur des tablettes sécurisées, je vous répondrai que cela dépend de la portabilité des appareils. Il faut que nous en parlions avec le préfet, mais ne faites pas croire que les policiers municipaux de Béziers font des allers-retours entre le lieu de l'arrestation et le poste central. Ce n'est pas ainsi que votre police s'organise.
J'ai entendu le propos de M. le rapporteur. L'objectif est que ces dispositions entrent dans la loi, ou dans le règlement puisque vous en soulignez le caractère réglementaire. En contrepartie de l'engagement ferme et définitif de M. le ministre, qui, je l'espère, aura un peu plus de valeur que ses chiffres sur les étrangers figurant sur le fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste, FSPRT, je retire l'amendement CL113.
L'amendement CL274 propose l'accès au FIJAIT à titre expérimental. Je voudrais savoir si le décret que prendra le ministre l'intégrera.
Le FIJAIT relève du domaine législatif. Il ne me semble pas nécessaire que les polices municipales y aient accès, dans la mesure où il s'agit de données sensibles.
Mon amendement ne demande pas qu'elles aient accès aux données, mais de pouvoir accéder au fichier. Si un voyant s'allume…
Certes, mais si je consulte le fichier pour obtenir des informations sur vous et si je vois le voyant rouge s'allumer, j'obtiendrai une première information.
Dans ce cas, le directeur de police municipale le signale aux forces de la police nationale. C'est un élément de proximité qui apporte une information.
Cela veut bien dire ce que cela veut dire : les polices municipales auraient accès à des données sensibles, notamment sur des éléments terroristes, qui figureraient dans ce fichier. Or tel n'est pas l'esprit de la démarche engagée par le Gouvernement et les rapporteurs. Je ne suis pas favorable à l'accès au FIJAIT, quand bien même serait-il aménagé. Mais il appartient, bien sûr, à la commission, d'en décider.
Les amendements CL104, CL113, CL325 sont retirés.
La Commission rejette l'amendement CL274.
Article 3 (art. L. 3441-1 du code de la santé publique) : Transport de personnes en état d'ivresse manifeste
La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL355 du rapporteur et CL273 de M. Éric Pauget.
L'amendement a pour objet de préciser que les personnes en état d'ivresse publique et manifeste doivent être menées, après examen médical, dans une cellule de dégrisement de la police nationale ou de la gendarmerie.
La Commission adopte l'amendement CL355.
En conséquence, les amendements CL273, CL329 de M. Paul Molac et CL311 de M. Buon Tan tombent, et l'article 3 est ainsi rédigé.
Chapitre II
Dispositions relatives à l'organisation et au fonctionnement des polices municipales
Avant l'article 4
La Commission est saisie de l'amendement CL8 de M. Éric Diard.
L'amendement vise à conférer aux directeurs de police municipale la qualité d'agent de police judiciaire (APJ).
L'article 92 de la loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI) du 8 février 2011 prévoyait initialement de conférer la qualité d'APJ – définie par l'article 20 du code de procédure pénale – aux membres du cadre d'emplois des directeurs de police municipale, afin qu'ils puissent seconder les OPJ dans l'exercice de leurs fonctions. Le Conseil constitutionnel a jugé cette disposition contraire à l'article 66 de la Constitution, car la « police judiciaire doit être placée sous la direction et le contrôle de l'autorité judiciaire ». En effet, selon le juge constitutionnel, si l'on conférait la qualité d'APJ aux directeurs de police municipale sans les mettre à la disposition des officiers de police judiciaire, le contrôle qu'exerce le procureur de la République sur la police judiciaire serait par trop distendu.
Contrairement à une idée régulièrement avancée, la plupart des maires et des policiers municipaux ne souhaitent pas – comme Alice Thourot et moi-même l'avons constaté dans le cadre de notre mission – que leur qualification judiciaire, et donc leurs prérogatives en la matière, soient revues à la hausse. Concrètement, ils se satisfont du statut d'agent de police judiciaire adjoint et ne souhaitent pas le voir évoluer. En effet, la force principale des policiers municipaux est de pouvoir se projeter sur le terrain. Je vous demande de retirer votre amendement ; à défaut, l'avis serait défavorable.
Je soutiens cet amendement, pour l'avoir défendu en 2011, en tant que rapporteur de la LOPPSI. Avec Brice Hortefeux, alors ministre de l'intérieur, nous avions souhaité doter nos polices municipales de prérogatives très étendues. Nos initiatives avaient été, globalement, censurées par le Conseil constitutionnel. Le problème vient donc de loin, madame la présidente… Sur ce sujet aussi, il faudra réfléchir à une meilleure intégration des problématiques de sécurité dans notre Constitution. Ce débat devra un jour venir devant le peuple français.
L'amendement est retiré.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, elle rejette l'amendement CL155 de M. Sylvain Maillard.
Article 4 (art. L. 511-2, L. 531-1 à L. 535-5 [nouveaux] du code de la sécurité intérieure) : Création d'une police municipale à Paris
La Commission adopte l'amendement rédactionnel CL356 du rapporteur.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, elle rejette l'amendement CL153 de M. Sylvain Maillard.
La Commission adopte l'amendement rédactionnel CL357 du rapporteur.
Elle en vient à l'amendement CL198 de Mme George Pau-Langevin.
L'amendement déposé par George Pau-Langevin au nom du groupe Socialistes et apparentés propose que la police municipale de Paris soit créée selon les dispositions du droit commun, et non dans le cadre d'un statut particulier, qui nécessiterait, entre autres, un décret en Conseil d'État. Lorsque Mme Karamanli a proposé tout à l'heure que les agents des polices municipales fassent l'objet d'un décret particulier, il lui a été répondu que ce domaine relevait du droit commun. Nous ne comprenons pas pourquoi, contrairement au corps des employés municipaux de la ville de Paris, la police municipale parisienne devrait bénéficier d'un statut particulier, avec toutes les conséquences que cela entraîne sur sa gestion.
Le présent article crée le cadre légal permettant de doter la ville de Paris d'une police municipale. L'absence de police municipale à Paris était liée à la spécificité du régime juridique du statut de la capitale, mais celui-ci s'est progressivement rapproché du droit commun. Cela étant, il me paraît pertinent de garder le décret en Conseil d'Etat plutôt que de s'en remettre à une délibération du Conseil de Paris.
Votre amendement vise à encadrer la création de ces corps. Je rappelle qu'il existe à Paris un corps spécifique : celui des agents de surveillance de Paris (ASP) – distinct des agents de surveillance de la voie publique (ASVP) – qui sont APJA au sens de l'article 21 du code de procédure pénale. Cela n'existe nulle part ailleurs. Votre proposition ne garantit pas la prise en compte des différences entre les corps parisiens et les corps homologues de la fonction publique territoriale, s'agissant notamment des conditions de recrutement, de formation et d'intégration des personnels à la création des corps.
Par cohérence, il apparaît souhaitable de créer ces corps par décret en Conseil d'État, afin d'aligner l'ensemble des règles statutaires de la police municipale parisienne – concernant le recrutement, la formation, le déroulement de la carrière, l'échelonnement indiciaire – sur celles de la police municipale de droit commun. L'objectif est de parvenir à un statut identique de nature à favoriser la mobilité, notamment en petite couronne. Cela permettrait d'encadrer, en particulier, les conditions de formation et d'intégration des fonctionnaires de la ville de Paris en charge de la sécurité, afin d'éviter d'éventuels écueils. Cette stricte homologie serait également garante de la mobilité des fonctionnaires au sein des cadres d'emplois de la fonction publique territoriale, et inversement. Demande de retrait, ou avis défavorable.
Je comprends qu'on soulève la question du rattachement de la police municipale de Paris au droit commun. Toutefois, je voudrais rappeler deux spécificités du territoire parisien. Premièrement, la préfecture de police y joue un rôle historique et institutionnel particulier, puisqu'il s'agit de la capitale. Il faudra donc veiller à la bonne articulation entre la préfecture de police et les agents de la police municipale de Paris, dans un cadre distinct de celui du droit commun applicable sur le reste du territoire. Deuxièmement, il existe à Paris une fonction publique territoriale spécifique, exorbitante du droit commun. Dès lors que les agents de la police municipale y feront leur entrée, il sera essentiel d'encadrer leur formation. C'est pourquoi j'approuve la rédaction de l'article, qui permettra de répondre à ces spécificités du territoire parisien.
En un sens, Pacôme Rupin a employé des arguments qui se rapprochent de ceux que nous invoquons pour contester la création de la police municipale. Son périmètre d'intervention se superposera à celui des agents actuels. La sécurité publique relève, à notre sens, des fonctions de la police nationale et doit le rester. Paris compte un nombre élevé de policiers et de policières, du même niveau que des capitales comparables, voire plus peuplées – je pense à Londres ou à Berlin, où on compte six à sept agents et agentes pour 1 000 habitants et habitantes.
Par ailleurs, nous considérons qu'il s'agit d'une forme de désengagement de l'État, qui privatise et rend les collectivités territoriales responsables de missions qu'il devrait continuer à assumer. Certaines tâches dévolues aux agents, qu'ils appartiennent à la police nationale ou aux polices municipales, devraient être confiées à d'autres agents de l'État ou personnels des collectivités, qu'il s'agisse, par exemple, des gardiens et gardiennes d'immeuble, pour assurer le vivre ensemble dans les quartiers, ou des éducateurs de prévention spécialisée.
Il n'y a, de notre point de vue, aucune raison de développer encore davantage des fonctions de police, et ce d'autant moins que certains problèmes, liés aux violences policières, ne sont pas résolus. Je rappelle que, le 28 octobre dernier, l'État a de nouveau été condamné pour faute lourde en raison de violences survenues à Paris dans un commissariat du douzième arrondissement.
Pour toutes ces raisons, il ne faut pas créer une police municipale à Paris.
Je n'ai pas été très convaincu par les arguments du rapporteur et de Pacôme Rupin sur la nécessité d'avoir un dispositif spécifique, qui justifierait un décret en Conseil d'État. La spécificité de Paris est d'abord liée à son statut, qui est en tous points semblables – c'est la loi – à celui de Lyon et de Marseille. Il n'y a aucune raison que, comme Lyon et Marseille, Paris ne puisse pas, par une décision souveraine de son conseil municipal, décider d'avoir sa propre police. Surtout, la rédaction de l'article nous fera perdre du temps. Nous avons déjà débattu de la création de la police municipale à Paris, en 2019, six mois avant les élections municipales, lors de l'examen du projet de loi relatif à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique, dit « Engagement et proximité ». La majorité nous avait expliqué que les conditions de la création de cette police n'étaient pas réunies, car les élections municipales étaient trop proches – M. Griveaux était alors candidat – et que cela donnerait un avantage à la maire sortante. Il y a toujours un argument pour retarder la création de la police municipale parisienne. En l'occurrence, la rédaction que vous proposez rendra le processus beaucoup plus long, sans que cela soit véritablement étayé.
Il ne faut pas minimiser la portée de la mesure introduite par la proposition de loi de M. Fauvergue et de Mme Thourot : tous ceux qui voteront ce texte contribueront à une avancée historique. Depuis très longtemps, tous pouvoirs confondus, on a refusé à Paris d'avoir une police placée sous les ordres des élus municipaux. C'est bien ce gouvernement qui donnera un avis favorable à ce qui constituera une vraie révolution.
Le sujet n'est pas de savoir si on oblige Paris à avoir une police municipale. Le Conseil de Paris prendra une délibération sur le sujet et, le cas échéant, créera cette police selon les conditions qu'il fixera – elle pourrait, ainsi, ne pas être armée.
Monsieur Peu, vous affirmez que Paris a le même statut que Lyon et Marseille. C'est inexact, s'agissant de la fonction publique parisienne. Des administrateurs issus de l'École nationale d'administration (ENA) peuvent choisir, de longue date, d'exercer leurs fonctions au sein de l'administration de la ville de Paris. Par ailleurs, des corps sui generis de fonctionnaires – notamment celui des administrateurs – ont été créés par décret en Conseil d'État. Il n'y a donc aucun régime d'exception : nous ne faisons que tenir compte des spécificités de la fonction publique parisienne.
La question est de savoir comment on institue cette police municipale. L'État doit ici jouer son rôle. Le régime du décret en Conseil d'État est extrêmement protecteur des libertés publiques – je m'étonne que l'aile gauche de la Commission exprime des réserves à ce sujet. Le pouvoir de police, rappelons-le, entraîne une restriction des libertés. Il faut donc se pencher sur les modalités de création de la police municipale parisienne. Tout incite à l'adoption de l'article présenté par les rapporteurs.
Je nourris un désaccord de fond, sur ce sujet, avec Mme Obono et n'entrerais pas dans le débat qu'elle a lancé – notamment sur le fait de savoir s'il y a assez de policiers à Paris.
M. Peu et Mme Pau-Langevin estiment que nous freinons le lancement de la police municipale parisienne. À cela, je réponds que nous la créons, et qu'elle sera instituée dans des conditions propres à la fonction publique parisienne.
La loi « Engagement et proximité » avait pour objet de renforcer les pouvoirs du maire en tant qu'OPJ sans créer de nouveau statut pour la police municipale. La proposition de loi institue une police municipale à Paris et crée, en conséquence, un nouveau statut. Sur ce texte, j'assume un esprit totalement jacobin. L'État délègue une compétence purement régalienne à la Ville de Paris qui dispose, en tant que collectivité locale, d'un statut particulier, puisqu'elle est à la fois une commune et un département. Cela justifie, au regard de ces spécificités, la création d'un statut de la fonction publique différencié par rapport aux autres collectivités locales.
Le débat montre que le sujet suscite de l'intérêt et des questionnements. Il est vrai que l'administration de la ville de Paris comporte des corps spécifiques, mais est-il pour autant nécessaire que la future police municipale – si le Conseil de Paris en décide ainsi – soit aussi un corps particulier ? Qu'est-ce qui justifierait cette particularité ? Où réside la singularité de la préfecture de police ? Elle gère des policiers sur un territoire, comme cela se rencontre à Marseille, où on trouve les mêmes policiers, avec le même statut. Il n'y a pas de corps de police spécifiques à Paris et à Marseille, des mutations pouvant intervenir entre l'une et l'autre villes. Nous proposons de faire les choses simplement, de faire confiance aux élus de Paris. N'insiste-t-on pas, aujourd'hui, sur la nécessité de faire confiance aux élus locaux ? Nous travaillons tous dans l'intérêt commun.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CL197 de Mme George Pau-Langevin..
La création d'un corps de police municipale parisien dans le cadre de cette procédure particulière peut nuire à la libre administration de la ville de Paris, car le Conseil d'État fixera les conditions statutaires. Nous préférons que Paris gère son corps de policiers municipaux comme Lyon, Marseille, Quimper et toutes les autres villes.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement.
Elle est saisie des amendements CL313 et CL314 de M. Buon Tan.
Je fais partie de ceux qui sont convaincus, depuis de très nombreuses années, qu'il faut une police municipale à Paris, et je me réjouis que la proposition de loi prévoie sa création. L'amendement CL313 vise à ce que la publication du décret en Conseil d'État intervienne « au plus tard un mois après l'avis du Conseil de Paris ».
L'amendement CL314 vise à renforcer la qualité de la formation des futurs agents de la police municipale parisienne, en permettant à la ville de Paris de conclure des conventions avec les centres de formation de la police nationale et de la gendarmerie nationale. L'article 4 de la proposition de loi prévoit que la formation des policiers municipaux parisiens sera assurée directement par la ville de Paris, et non par le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT), comme c'est le cas pour les policiers municipaux des autres villes de France. Le CNFPT a cependant la faculté de passer des conventions avec la police et la gendarmerie. Il semble donc légitime et judicieux de conférer également cette possibilité à la ville de Paris, afin d'assurer une formation initiale et continue de la meilleure qualité possible aux policiers municipaux parisiens.
Il ne me semble pas opportun d'inscrire dans la loi le délai proposé par l'amendement CL313. En revanche, nous pouvons profiter de la présence du ministre en Commission pour lui demander de nous garantir que le décret sera pris rapidement. Par ailleurs, je suis favorable à l'amendement CL314.
Le délai d'un mois me paraît court, s'agissant d'un décret en Conseil d'État, mais nous nous engageons à faire vite. Je donne un avis défavorable sur l'amendement CL313, bien que je comprenne sa philosophie. Voilà quasiment un siècle qu'on attend la création d'une police municipale à Paris, on peut sans doute patienter encore quelques semaines… Je suis favorable à l'amendement CL314, qui offre une faculté à la ville de Paris.
L'amendement CL313 est retiré.
La Commission adopte l'amendement CL314.
Elle en vient à l'amendement CL217 de M. Dimitri Houbron.
Je voudrais souligner qu'il s'agit d'une avancée historique pour Paris. La création de la police municipale parisienne a été défendue depuis de nombreuses années, notamment – dès 2013 – par Pierre-Yves Bournazel. Si la question ne porte pas principalement sur son armement, puisque c'est à la ville qu'il reviendra de trancher ce point, le groupe Agir ensemble y voit toutefois un intérêt certain. Les événements récents, en particulier à Nice, nous montrent que l'armement de la police municipale est indispensable pour protéger nos concitoyens et nos agents. L'amendement vise à ce que la formation à l'armement des policiers municipaux de la ville de Paris soit dispensée, compte tenu de sa spécificité et de son exigence, par le CNFPT, comme c'est le cas pour l'ensemble des policiers municipaux sur le territoire national.
Il s'agit de dispositions classiques s'agissant de la ville de Paris. Comme le prévoit la proposition de loi, la formation des futurs policiers municipaux parisiens sera assurée par un centre de formation adapté. La proposition de loi apporte des garanties puisque l'alinéa 8 dispose que le contenu et la durée des formations dispensées aux agents de la police municipale parisienne seront équivalents à ceux des autres polices municipales.
Alice Thourot et moi-même avons auditionné des représentants de la ville de Paris, qui nous ont dit que des formateurs, venant du CNFPT et respectant les standards de cette institution, instruisaient des personnes appelées à devenir formatrices. Des spécialistes viennent aussi de la police nationale et de la gendarmerie nationale, ce qui offre des garanties supplémentaires.
J'ajoute que, dans les polices municipales, à l'issue d'une formation générale de six mois, est assurée une formation à l'armement de deux semaines pour une arme létale, à laquelle s'ajoute une session de dix jours pour l'emploi d'un pistolet à impulsion électrique et d'une semaine pour l'usage de bâtons télescopiques. La formation de la future police municipale de Paris sera alignée sur ces standards. Demande de retrait, ou avis défavorable.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CL47 de M. Pacôme Rupin.
Le texte prévoit que les agents de la police municipale sont des fonctionnaires de la ville de Paris, formés par elle. Il faut se réjouir du consensus politique existant entre la ville et le Gouvernement. Pour la première fois, un gouvernement accepte la création d'une police municipale parisienne, alors que le pouvoir de police relevait, jusqu'à présent, de la prérogative exclusive du préfet de police. On peut tous saluer cette avancée. Monsieur Peu, vous avez évoqué la tentative de création de cette police municipale, par voie d'amendement, lors de l'examen du projet de loi « Engagement et citoyenneté ». Cette initiative, à mon sens, ne répondait pas aux exigences que nous posons dans ce texte. Le fait d'avoir attendu l'issue des élections municipales et l'expression démocratique des Parisiens n'est pas insultant. Dans le respect des choix qui ont été exprimés, la majorité parlementaire souhaite, en accord avec la maire de Paris, la création d'une police municipale. Cela se fait de manière tout à fait logique.
L'amendement vise à ce que les formations dispensées par la ville de Paris soient contrôlées périodiquement par le CNFPT, qui forme l'ensemble des polices municipales de France.
J'indique, pour compléter ce que j'ai déjà à ce sujet, que la police municipale parisienne sera la plus importante de France. Son effectif sera de l'ordre de 4 000 à 5 000 agents, qui seront formés par un centre de formation adéquat, dépendant de la Ville de Paris. Les formations seront harmonisées. Un contrôle périodique de ce centre de formation par le CNFPT semble difficile à mettre en place, dépourvu de cohérence avec son organisation et contraire au principe de libre administration des collectivités territoriales. En outre, compte tenu des effectifs concernés, il en résulterait une charge de travail accrue pour le CNFPT. Celui-ci compte douze interdélégations en France. Si leurs formations font l'objet d'une harmonisation générale, elles ne se contrôlent pas entre elles. Je suggère le retrait de l'amendement. À défaut, ce sera un avis défavorable.
Je vous remercie pour ces précisions. Cet amendement d'appel visait à nous assurer que la formation dispensée par la Ville de Paris aux agents de la police municipalesera d'une qualité identique à celle des formations dispensées dans les autres territoires. Je retire l'amendement.
L'amendement est retiré.
La Commission adopte l'article 4 modifié.
Article 5 (art. L. 512-1 du code de la sécurité intérieure) : Suppression d'un seuil freinant la possibilité de mise en commun de policiers municipaux
La Commission adopte l'article 5 sans modification.
Article 6 (art. L. 412-57 [nouveau] code des communes) : Recrutement des policiers municipaux et souscription d'un engagement de servir
La Commission adopte l'amendement rédactionnel CL358 du rapporteur.
Puis elle examine l'amendement CL219 de Mme Laurence Vichnievsky.
Il s'agit de supprimer l'alinéa 6 de l'article 6. Si un agent de police municipale rompt son engagement, il doit rembourser le montant des traitements perçus en tant que stagiaire, ce qui est parfaitement normal. Le texte prévoit également – c'est ce point qui nous pose problème – que le maire ou le président de l'EPCI concerné peut décider de le dispenser, pour des motifs impérieux, de tout ou partie de ce remboursement. Je rappelle que la fonction publique est soumise à la règle imposant le remboursement de la formation en cas de rupture de l'engagement. Je ne vois pas de raison de prévoir une disposition particulière pour la police municipale, d'autant que, dans ce cas, il existe une proximité assez forte entre le maire et le policier municipal, dont il est l'employeur.
Le droit de la fonction publique territoriale applicable en la matière, défini à l'article 51 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, n'est pas satisfaisant. Il prévoit, en cas de mutation d'un agent dans les trois années qui suivent sa titularisation, que la commune ou l'EPCI d'accueil verse à la commune ou à l'EPCI d'origine une indemnité correspondant au coût de sa formation. Il ne prévoit aucune responsabilisation de l'agent en tant que tel.
Au cours des six mois d'enquête ayant précédé la rédaction de notre rapport, Mme Thourot et moi-même avons entendu plusieurs maires et plusieurs présidents d'EPCI dire qu'ils en ont vraiment assez de financer la formation d'agents de police municipale qui, sitôt formés, sont débauchés par des maires voisins leur offrant de meilleures conditions de travail, ce qui les laisse une formation financée sans résultat. Voilà ce qui a inspiré notre proposition.
Monsieur le rapporteur, cher Jean-Michel, nous ne nous comprenons pas. J'estime comme vous que prévoir le remboursement de la formation des agents de police municipale en cas de rupture de l'engagement est une très bonne chose. Ce que je conteste, et mon groupe avec moi, c'est la possibilité d'une dispense de remboursement, qui n'existe pas dans la fonction publique. Je ne vois pas en quoi elle est justifiée, fût-ce au nom de motifs impérieux. Le maire est l'employeur du policier municipal. Nous évoquions ce matin les difficultés susceptibles de survenir en matière d'éthique : nous devons être attentifs à cette disposition. Les collectivités territoriales vivent d'argent public. Je ne comprends pas que cet amendement fasse l'objet d'un avis défavorable. Ce que nous contestons, ce n'est pas le principe du remboursement, mais la possibilité d'en être dispensé.
Cette possibilité, comme l'indique le texte, est à la main du maire. Si un policier municipal qui vient d'être recruté veut partir dans une autre commune, il doit rembourser sa formation, sauf si la commune d'accueil paie pour lui. La décision appartient au maire.
Comprenons-nous bien. Dans le cas que vous venez de décrire, monsieur le rapporteur, un agent est formé aux frais d'une municipalité donnée, puis part travailler dans une commune voisine. Si le maire qui l'embauche souhaite rembourser sa formation au maire de la commune où il a été formé, aucun problème, mais l'agent lui-même ne peut être dispensé de ce remboursement. Imaginez qu'un agent décide de changer complètement de métier, il n'y a pas de raison que le maire ou le président de l'EPCI le dispense de rembourser les frais engagés pour sa formation. À défaut, on ouvre la voie au copinage, je regrette de devoir le dire. L'alinéa 6 permet éventuellement le copinage.
Il faut regarder ce qui se passe dans les territoires. Former un policier municipal demande du temps et de l'argent. Or, dans certaines parties du territoire national, il existe une forte concurrence entre les polices municipales. C'est vrai en Île-de-France et dans les conurbations importantes mais tel n'est pas toujours le cas ailleurs. J'appelle l'attention de Mme Vichnievsky sur le fait qu'une telle concurrence n'existe pour aucun autre corps de fonctionnaires municipaux. Le corps, très spécialisé, des policiers municipaux a besoin de dispositions spécifiques, comme en témoigne ce texte.
Par ailleurs, cet agent peut faire valoir des motifs impérieux n'ayant rien à voir avec le copinage. Imaginons qu'il soit père d'un enfant devenu handicapé et qu'il doive déménager pour les besoins de cet enfant. Il ne change pas de territoire pour se vendre dans une autre collectivité, mais pour continuer à faire son travail tout en cherchant, par exemple, à se rapprocher d'un établissement spécialisé. Imaginons que cette personne soit confrontée à de graves difficultés familiales. Quiconque a été employeur municipal connaît cela, un fonctionnaire qui vient vous voir et vous dit : « J'aime bien votre collectivité, monsieur le maire, mais je dois me rapprocher de ma famille ; si vous connaissez quelqu'un dans le Sud, cela m'arrangerait, car ma mère est sur le point de mourir », ou je ne sais quoi d'autre. Et lorsque vous faites cette démarche, c'est non par copinage, mais pour essayer de l'aider, même si vous devez vous séparer d'un bon élément. Du fait de ces motifs impérieux, on ne va pas lui demander de rembourser sa formation, de même qu'on ne le demandera pas à la collectivité locale qui accepte de l'embaucher.
Il faut sans doute préciser la nature des motifs impérieux – nous pourrons le faire en séance publique. Mais il me semble normal de laisser sa liberté à l'employeur municipal. Vous dites volontiers qu'il faut faire confiance aux élus. Moi, je ne considère pas spontanément qu'un maire pratique le copinage. Au demeurant, le contrôle de légalité sert à le constater, et les syndicats sont là pour dire ce qu'il en est. Le maire tient compte en même temps de la situation personnelle de l'agent et de la concurrence à laquelle il est éventuellement soumis – il est facile de recruter des policiers municipaux dans certains endroits et pas dans d'autres.
Autre problème : on ne peut pas verser aux policiers municipaux des primes comme aux autres membres de la fonction publique territoriale. Pour compenser, de très nombreux élus, voire presque tous, trichent en leur rémunérant des heures supplémentaires qu'ils n'effectuent pas. Comment faites-vous pour inciter un policier municipal à travailler dans une commune plutôt qu'une autre ? Vous lui offrez un grade supplémentaire, des équipements supplémentaires, une commune un peu plus tranquille que celle où il a été formé, et, en plus de tout cela, vous lui offrez un surplus d'heures supplémentaires, qui relève d'une autre forme de gestion que celle qui est normalement compatible avec la fonction publique territoriale.
Le maire doit donc lutter pour l'attractivité de sa commune et contre la concurrence. À ce titre, la disposition proposée me semble frappée au coin du bon sens. Elle laisse sa liberté à l'employeur. Seuls ces fonctionnaires, formés spécifiquement et appartenant à un corps spécifique, font l'objet d'une telle concurrence, dont on peut estimer à titre personnel qu'elle est injuste. Il peut exister par ailleurs des motifs impérieux d'ordre personnel n'ayant rien à voir avec cette concurrence, ce qui justifie – même si tel peut être le cas d'agents appartenant à d'autres corps – qu'une disposition spécifique soit appliquée aux policiers municipaux. Plus généralement, il faudra réfléchir, d'ici à la fin de la législature, à la possibilité de traiter les policiers municipaux comme les autres fonctionnaires, notamment en modifiant leur statut afin qu'il autorise le versement de primes, ce qui éviterait de recourir à des heures supplémentaires qui ne sont pas effectuées.
En cas de départ d'un agent, la commune, qui a financé sa formation et lui a laissé le temps de se former, est grandement pénalisée. L'objectif est de la protéger. Mais le maire peut choisir de renoncer à la clause que nous lui offrons. C'est à lui de décider. En outre, un agent peut souhaiter changer de commune pour de nombreuses raisons, qui doivent être respectées.
Il est de bon aloi de réfléchir à une telle disposition au moment où nous nous apprêtons à créer un appel d'air dans les polices municipales, puisqu'il y aura à Paris 4 000 à 5 000 agents. Même si un concours spécifique sera organisé, on imagine qu'il existera des passerelles permettant de recruter des gens déjà formés.
Pour en venir à la discussion qui nous occupe, personne ne conteste la nécessité de prévoir un mécanisme de rachat, par l'agent qui rompt son engagement ou par la collectivité qui l'accueille. Mais est-ce au maire d'en décider ?
Telle est la question, moins anodine qu'il n'y paraît, que pose Mme Vichnievsky. Il faut faire confiance aux élus, monsieur le ministre de l'intérieur, ce n'est pas moi qui dirai le contraire. Toutefois, en prévoyant une telle disposition, il ne faut pas perdre de vue la construction des rapports de force localement. Ce n'est pas au gestionnaire du moment de juger de l'engagement d'un fonctionnaire à servir une collectivité territoriale, l'État ou la fonction publique hospitalière, mais bien à la loi. Peut-être faut-il revoir la rédaction de l'alinéa 6 ? La formulation me semble maladroite ; elle ouvre trop largement la possibilité de déroger au remboursement de la formation.
Mon amendement me semblait assez simple, mais je constate qu'il a donné lieu à une interprétation qui n'est pas la bonne. Nous sommes favorables au principe du remboursement de la formation, qui s'applique à la fonction publique de façon générale et défavorables à la possibilité d'en être dispensé. Monsieur le ministre, les motifs impérieux que vous évoquez – un enfant handicapé ou la nécessité de se rapprocher de sa famille – peuvent être avancés par tout fonctionnaire.
Le remboursement de la formation est une obligation si on ne travaille pas pour l'État le nombre d'années convenu.
Elles sont peut-être rachetées par ailleurs. Quoi qu'il en soit, le principe est le suivant : on doit donner à l'État un nombre fixe d'années, et rembourser sa formation à défaut. La possibilité d'appréciation et de dispense de remboursement laissée au maire, qui est l'employeur de l'agent, nous pose problème. Je constate que l'amendement suscite de nombreux commentaires et remercie Raphaël Schellenberger d'être venu au secours de la position que j'ai défendue, qui me semble simple.
La règle qui doit primer est d'empêcher un changement de situation dépourvu d'obligation de remboursement. Mme Vichnievsky connaît mieux que moi la fonction publique ; toutefois, les arguments de M. le ministre démontrent que la situation n'est pas si simple qu'il n'y paraît. Certains motifs très spécifiques doivent ouvrir la possibilité de ne pas rembourser la formation. Leur prise en compte relève d'une certaine humanité, s'agissant notamment de problèmes de santé consignés dans un dossier médical. Au demeurant, l'article 6 fait primer l'obligation, pour l'agent, de rembourser la collectivité où il a été formé.
Lorsque j'ai commencé ma carrière de fonctionnaire d'État, j'ai reçu une formation professionnelle en échange d'un engagement signé à travailler cinq ans dans la fonction publique. Si j'avais rompu cet engagement, j'aurais été obligé de rembourser ma formation. Si certains fonctionnaires ne l'ont pas fait, j'imagine que leur ministère leur a accordé une dérogation à titre gracieux, après demande dûment motivée. Prévoir cette possibilité de façon systématique me semble curieux.
Il faut distinguer fonction publique d'État et fonction publique territoriale. Les fonctionnaires issus des grandes écoles, telles que l'école nationale d'administration (ENA), l'école nationale de la magistrature (ENM) ou Polytechnique, doivent travailler au moins dix ans pour l'État ou rembourser leur formation, sauf motif impérieux.
Dans la fonction publique territoriale, personne n'est obligé de rembourser sa formation. À l'article 6, nous introduisons une disposition nouvelle, justifiée par le fait que le métier de policier municipal est très spécifique et fait parfois l'objet d'une forte concurrence. Parce qu'il s'agit d'un corps particulier, nous proposons, fait exceptionnel, de l'aligner sur une possibilité ouverte, pour motifs impérieux, aux agents de la fonction publique d'État issus des grandes écoles.
Nous faisons confiance à l'employeur, l'État en général et le maire en l'espèce, pour juger de l'exception. Monsieur Latombe, je n'accepte pas le mot « copinage ». Quand on est à la tête d'une mairie, on ne fait pas de copinage ; si on en fait, il est normal qu'on soit rattrapé par la patrouille que sont les électeurs, d'une part, et la justice, de l'autre. Cessez de penser que les maires de France sont des gens qui disent à leurs fonctionnaires, en cachette, « Tu as raison, je te dispense de rembourser ta formation » ! Ce sont des gens responsables, qui gèrent les deniers publics et les fonctionnaires dont ils ont la charge de façon courageuse, dans le respect le plus total du statut de la fonction publique. Ne faites pas croire aux gens que le maire est par nature difficile à surveiller et qu'il pourrait se mettre d'accord avec un policier municipal pour s'asseoir sur le remboursement de sa formation !
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle examine l'amendement CL220 de Mme Laurence Vichnievsky.
Il s'agit d'un amendement de repli. Dès lors qu'il s'agit d'argent public, nous considérons qu'il faut au moins obtenir l'avis conforme du directeur départemental des finances publiques.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 6 modifié.
Après l'article 6
La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL13 de M. Éric Diard et CL106 de Mme Emmanuelle Ménard.
L'amendement CL13 vise à habiliter les agents de police municipale, qui sont des agents de police judiciaire adjoints, à procéder à des contrôles d'identité.
L'amendement CL106 est très similaire à celui que vient de présenter notre collègue Diard. Il semble vraiment intéressant d'attribuer aux agents de police municipale, au même titre qu'aux agents de police judiciaire adjoints et aux gendarmes adjoints volontaires, certaines compétences judiciaires exercées sur ordre et sous la responsabilité d'un officier de police judiciaire. Ils pourraient ainsi procéder à des contrôles d'identité et à des fouilles de véhicules, dans le cadre d'une procédure judiciaire ou d'une réquisition écrite du procureur de la République.
Les contrôles d'identité peuvent être réalisés par les officiers de police judiciaire (OPJ), définis à l'article 16 du code de procédure pénale, et par les agents de police judiciaire, définis à l'article 20 du même code, sous l'autorité d'un OPJ. Comme vous l'avez indiqué, les policiers municipaux sont des APJA. Les faire monter en grade n'est pas à l'ordre du jour du présent texte. Ils peuvent relever les identités, mais pas les contrôler, ce qui au demeurant modifierait le paradigme de notre proposition de loi et celui de leur travail. Si nous donnons aux agents de police municipale la qualité d'APJ ou d'OPJ, alors ils dépendront directement du procureur de la République et beaucoup moins du maire, et seront chargés de mener des enquêtes et d'accomplir un travail judiciaire. Pour l'heure, cela n'est pas souhaitable. Avis défavorable.
Je ne conteste pas l'argument selon lequel la disposition proposée aura pour effet de faire dépendre davantage les policiers municipaux du procureur de la République. Toutefois, sur le terrain, tel est d'ores et déjà le cas. Le procureur de la République demande régulièrement aux policiers municipaux de lui rendre compte. Dans la plupart des cas, il existe une véritable collaboration, dépourvue de blocages. Les policiers municipaux ne s'interdisent pas de lui rendre compte et de transmettre leurs informations à la police nationale au motif qu'ils dépendent du maire. Tout cela fonctionne un peu en circuit fermé. L'information circule, et c'est heureux, car tous exercent leur métier avec le même objectif.
J'aimerais connaître l'avis du ministre de l'intérieur sur la possibilité de donner aux policiers municipaux – pas nécessairement dans le cadre de la présente proposition de loi – la possibilité de réaliser des contrôles d'identité.
Le principe étant que les policiers municipaux ne peuvent pas être chargés d'une enquête, ils peuvent relever des identités, mais pas les contrôler. Nous souhaitons donner des pouvoirs supplémentaires à la police municipale, mais pas créer une police fédérale, à l'américaine ou à la belge, secondée par une police locale disposant de moyens d'enquête, et peut-être demain de retenue de liberté. Nous allons déjà très loin en proposant des expérimentations telles que celles prévues à l'article 1er. Lorsqu'un policier municipal demande son identité à un individu, il l'obtient dans la plupart des cas. Si tel n'est pas le cas, il peut faire appel à ses collègues de la police nationale, qui la contrôleront. Je ne vois pas où est le problème. Les amendements ne me semblent pas conformes à la philosophie du présent texte.
La Commission rejette successivement les amendements.
Puis elle examine l'amendement CL266 de la présidente Yaël Braun-Pivet.
Cet amendement vise à donner un cadre législatif aux brigades canines. Il en existe près de 200, qui ont prouvé leur efficacité. Elles aident les policiers municipaux à assurer leurs missions, notamment à dissuader les troubles à l'ordre public et les agressions contre les agents. Dans ma circonscription, notamment à Sartrouville, on m'a indiqué qu'elles sont particulièrement utiles. Or le cadre juridique de l'utilisation de ces chiens est très fragile, comme l'ont relevé plusieurs observateurs, notamment la Cour des comptes le mois dernier. Il m'a semblé que la présente proposition de loi pouvait constituer le cadre adéquat pour dissiper ce flou, et donner à la formation de brigades canines au sein des polices municipales un cadre d'emploi ainsi qu'une sécurité juridique.
Avant de donner mon avis sur l'amendement, j'aimerais fournir quelques précisions sur les chiens utilisés par les forces de l'ordre. Les polices municipales comptent entre 250 et 300 chiens, outre-mer compris, la police nationale 550 et la gendarmerie nationale 480. Il n'existe aucun référentiel d'emploi de ceux des polices municipales, qui en pratique s'alignent sur celui de la police nationale. En matière d'utilisation de chiens, il existe une différence de taille entre la police et la gendarmerie : les premiers pratiquent la frappe muselée, les seconds travaillent au mordant.
S'agissant des chiens utilisés par les polices municipales, 98 % d'entre eux sont des chiens de patrouille et d'intervention. Les autres sont des chiens dressés à la recherche de stupéfiants. La police municipale de Courchevel dispose d'un chien de recherche de personnes en zone montagneuse. 90 % de ces chiens sont des bergers allemands ou des malinois ; les autres sont des bergers hollandais et des Beaucerons. La formation des chiens policiers municipaux est assurée à Oyonnax par un spécialiste. Toutefois, il n'existe aucun référentiel d'emploi officiel. L'amendement vise à sécuriser la création de brigades canines au sein des polices municipales, en les dotant d'un cadre juridique clair. Nous y sommes favorables.
Jean-Michel Fauvergue n'est pas seul autorisé à parler des chiens ! (Sourires.) Je peux ainsi ajouter que les polices municipales utilisent deux catégories de chiens, des chiens administratifs, qui appartiennent à la commune, et des chiens appartenant aux agents. Le Gouvernement est favorable à l'amendement de Mme la présidente de la Commission.
Par ailleurs, j'appelle l'attention, la protection des animaux étant un important sujet de préoccupation, sur la façon dont on réforme les chiens administratifs à l'issue de leur service. Les mairies s'efforcent de les placer. Il est évident qu'il faut les accompagner. Il faudra un jour réfléchir à ce sujet. Ces chiens, comme ceux de la police et de la gendarmerie, prennent souvent des risques dans le cadre de leurs interventions, et sont parfois blessés.
Outre la réforme des chiens policiers à la fin de leur service, nous devrons également nous pencher sur leur recrutement par l'administration, qui est effectué le plus souvent en externe, en faisant appel à des initiatives privées ou aux clubs canins qui les forment. Je profite de notre débat, ô combien intéressant, pour appeler l'attention de notre commission, s'agissant du mordant sportif, sur les propositions formulées par certains lobbies, qui mettent abusivement en avant la protection du bien-être animal. Elles pourraient déstructurer la filière de recrutement des chiens policiers. Il faudra y être attentif.
La Commission adopte l'amendement. L'article 6 bis est ainsi rédigé.
Puis elle examine l'amendement CL382 du Gouvernement.
Cet amendement vise à dispenser l'État de recueillir l'avis de la commission consultative des polices municipales (CCPM) avant de contrôler les polices municipales.
L'amendement reprend une proposition formulée dans notre rapport. Nous y sommes favorables.
La durée de formation des gendarmes et des policiers nationaux qui se reconvertissent dans la police municipale a-t-elle été modifiée ? Les maires indiquent régulièrement qu'envoyer ces personnels en formation longue, alors même qu'ils disposent de compétences, les empêche d'en disposer rapidement. En outre, ces agents s'y ennuient un peu. Il s'agit souvent de gendarmes qui souhaitent intégrer une police municipale pour éviter une mutation et qui sont d'ores et déjà formés.
Lorsque nous avons soulevé ce problème, dans le cadre de l'élaboration de notre rapport, la formation des policiers et des gendarmes en reconversion était d'une durée de six mois, soit celle de la formation des autres policiers municipaux, et se déroulait dans le cadre du CNFPT. Les maires s'en plaignaient, car il en résultait des coûts, et ils ne disposaient pas immédiatement de ces agents. Un arrêté réduisant à trois mois la durée de leur formation a été publié. Elle sera concentrée sur les pouvoirs du maire et la fonction publique territoriale.
La CCPM n'est pas encore constituée, monsieur Pauget. Elle le sera à l'issue des votes internes aux conseils municipaux issus des dernières élections municipales, visant à renouveler diverses instances. M. Christian Estrosi la présidait jusqu'à présent, j'imagine qu'il continuera à la présider.
La Commission adopte l'amendement. L'article 6 ter est ainsi rédigé.
TITRE II DISPOSITIONs RELATives au secteur de la sécuritÉ privée
Chapitre Ier
Dispositions relatives à l'encadrement du secteur de la sécurité privée
Avant l'article 7
La Commission examine l'amendement CL5 de M. Éric Diard.
L'article L. 114-1 du code de la sécurité intérieure dispose que des enquêtes administratives « peuvent » être conduites afin de vérifier que le comportement des personnes physiques ou morales n'est pas incompatible avec l'exercice des fonctions ou des missions envisagées. L'amendement vise à rendre ces enquêtes obligatoires pour éviter de passer à côté d'un risque potentiel.
Comme vous le soulignez, il est déjà possible de mener des enquêtes administratives ; les automatiser pour les centaines de milliers de personnes visées par votre amendement nous paraît disproportionné. Je demande le retrait de l'amendement ; à défaut, avis défavorable.
J'entends que le fait de systématiser les enquêtes puisse être lourd, mais la question mérite d'être posée dans la mesure où vous entendez élargir le champ potentiel des interventions des forces de sécurité privée. Un certain nombre de gages doivent être donnés. Dès lors que les employés des sociétés de sécurité privée peuvent être amenés à effectuer des missions publiques, il faut s'assurer qu'ils répondent aux standards que l'on attend des collaborateurs occasionnels du service public ou encore des prestataires de service public. C'est vraiment la moindre des choses.
Je vous confirme que le Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) procède à toutes ces enquêtes.
Compte tenu de la situation, il me paraît important de rendre automatique le criblage de ces agents.
La Commission rejette l'amendement.
Article 7 (art. L. 612-5-1 et L. 617-2-1 [nouveaux] du code de la sécurité intérieure) : Encadrement de la sous-traitance
La Commission examine les amendements de suppression CL4 de M. Éric Diard et CL264 de Mme Marietta Karamanli.
Nous abordons le sujet du recours à la sous-traitance dans le secteur de la sécurité privée. Beaucoup de questions se posent quant à la réglementation et à la responsabilité des entreprises exécutant des marchés qui leur ont été sous-traités. L'amendement CL4 est un amendement d'appel, madame la rapporteure : nous devons légiférer au mieux s'agissant du marché de la sous-traitance, tout en le responsabilisant.
Nous demandons nous aussi la suppression de l'article 7, mais pas forcément pour les mêmes raisons. Il rend possible la sous-traitance en cascade d'une partie de l'exécution des contrats de sécurité privée. Certes, l'accord de l'entreprise donneuse d'ordre est nécessaire, mais sa responsabilité n'est pas assez établie. En outre, la nature opaque de certains contrats de sous-traitance nous inquiète fortement. Nous ne souhaitons pas que les activités de sécurité privée soient exercées de cette manière. Plus généralement, nous croyons beaucoup, pour notre part, à la police nationale et à la sécurité régalienne. Transférer un certain nombre de compétences à la police municipale, et même à une forme de police privée, est vraiment dangereux. En proposant de supprimer l'article, nous souhaitons appeler l'attention sur ce point.
L'article 7 n'évoque en aucun cas des transferts de compétences, madame Karamanli : il vise à limiter la sous-traitance. En effet, la sous-traitance en cascade gangrène le secteur de la sécurité privée. Les professionnels eux-mêmes nous demandent de mieux l'encadrer. L'article 7 est donc fondamental.
Monsieur Diard, vous avez parlé d'un amendement d'appel et demandé que nous légiférions mieux sur le phénomène. Or votre amendement vise à supprimer cet article à travers lequel nous proposons de limiter la sous-traitance. C'est un peu contradictoire !
Je demande donc le retrait de ces amendements ; à défaut, avis défavorable.
Moi non plus je ne pense pas qu'il faille supprimer cet article, mais je réponds volontiers à l'appel de M. Diard en participant au débat.
Il est absolument nécessaire de s'attaquer au problème de la sous-traitance, mais les dispositions proposées sont très insuffisantes. La sous-traitance est une jungle : il y a des sous-traitants de sous-traitants de sous-traitants. Le secteur est l'un des principaux employeurs de personnes en situation irrégulière, avec des conditions de travail épouvantables. Or je ne vois pas en quoi cet article permettra d'éviter les abus : le fait d'informer le donneur d'ordre ne changera rien à la situation, pas plus que l'autre condition invoquée. Il est nécessaire de clarifier et de responsabiliser.
D'ailleurs, et pour dire les choses clairement, je ne vois pas ce qui peut justifier le recours à la sous-traitance dans le domaine de la sécurité privée. Autant on peut comprendre qu'une société répondant à un marché public ait besoin de faire appel à un sous-traitant dans un domaine pour lequel elle ne dispose pas de capacités techniques particulières, autant rien ne l'explique dans celui-ci. On voit très bien, en revanche, que cet enchevêtrement et cet empilement de sociétés permettent de faire travailler beaucoup de gens dans des conditions déplorables, principalement au noir.
Quant à nous, nous sommes pour la suppression pure et simple de la sous-traitance ; l'intervention de Stéphane Peu devrait vous avoir convaincus de la nécessité de le faire.
Votre objectif est de développer la sécurité privée, de lui donner des prérogatives qui devraient rester celles de la police nationale, dans le cadre du service public. La tentative d'encadrement qui est proposée ici est inutile car le nivellement par le bas est consubstantiel à la sous-traitance, et ce dans tous les secteurs : du fait de la concurrence, on propose des prix et des services au rabais pour obtenir des marchés, ce qui a des conséquences sur les conditions de travail des salariés. Ce qui est extrêmement problématique dans bien des secteurs l'est encore plus dans celui de la sécurité, surtout quand on donne à ces entreprises des fonctions et des responsabilités qui devraient rester celles de l'État. De notre point de vue, il ne faut pas simplement tenter de réglementer la jungle : ces pratiques doivent cesser. Il faut redonner à la police nationale les moyens nécessaires pour l'exercice de missions qui n'ont pas à être sous-traitées à quelque entreprise privée que ce soit.
Je ne peux pas laisser dire que les sociétés de sécurité sont en quelque sorte des polices privées : c'est un abus de langage. Elles répondent à des besoins polymorphes. Parfois, plusieurs événements sont organisés simultanément dans le même territoire, et une entreprise ne peut répondre seule à la demande : la sous-traitance est alors le moyen idéal de faire en sorte que le donneur d'ordre ait affaire à un seul opérateur, tout en satisfaisant ses besoins de sécurité. La sous-traitance est donc un mal nécessaire dans la sécurité.
L'article 7 présente l'intérêt de limiter la sous-traitance en cascade, dont les conséquences sont effectivement terribles : les prix et les compétences sont tirés vers le bas, et le secteur est gangrené par le travail dissimulé. Interdire totalement la sous-traitance, en revanche, priverait les acteurs de la sécurité de leur capacité d'adaptation et obligerait le donneur d'ordre à avoir affaire à plusieurs interlocuteurs, à passer plusieurs marchés, ce qui alourdirait énormément les procédures. Certaines sociétés font bien leur travail, embauchent des gens compétents en respectant le cadre légal : elles doivent être protégées.
Je remercie ceux de nos collègues qui nous soutiennent sur le fond et partagent notre objectif – sur ce point, il y a d'ailleurs une forme de consensus, me semble-t-il. Je tiens par ailleurs à défendre le secteur de la sécurité privée, qui a été critiqué par certains. S'il est vrai que quelques pratiques peu vertueuses existent, beaucoup d'entreprises travaillent dans de bonnes conditions.
Avec cet article, nous avons essayé de trouver un équilibre entre le respect de la liberté d'entreprendre et la nécessité de tenir compte du fait que le secteur d'activité en question n'est pas tout à fait comme les autres : ces entreprises participent à la sécurité de notre pays, et ce sera encore plus le cas à l'avenir, en tout cas nous l'espérons. Par ailleurs, la constitutionnalité du dispositif sera contrôlée. Nous n'en sommes pas moins prêts à accepter des propositions d'amélioration.
Mme Obono profite de cette discussion sur la sous-traitance, plus précisément sur la difficulté pour l'État d'exercer un contrôle à un niveau plus éloigné – comment contrôler le prestataire du prestataire ? –, pour aborder plus largement la question du recours aux sociétés de sécurité privée.
Autant nous avons des doutes quant à l'opportunité de certaines formes de sous-traitance, autant nous considérons que le recours à des sociétés de sécurité privée pour un certain nombre d'actions est tout à fait utile, voire nécessaire, surtout dans un moment où nous avons besoin de remobiliser les fonctionnaires de police et les militaires de gendarmerie sur des fonctions essentielles comme les enquêtes et les poursuites. Des fonctions de surveillance statique, par exemple, peuvent tout à fait être confiées à des sociétés.
Je voudrais réagir aux propos de Mme Obono, si elle me le permet, de manière à ce que nous ayons un débat constructif. La question de la sécurité privée est importante dans cette proposition de loi et elle est centrale dans l'action que mène l'État – quel que soit d'ailleurs le gouvernement –, comme le démontrera le livre blanc qui sera bientôt publié. Par ailleurs, il vaut mieux réglementer – ce que fait la proposition de loi – que de laisser faire n'importe quoi comme c'est le cas parfois.
Le groupe Socialistes et apparentés et le groupe La France insoumise veulent ouvrir un débat sur le principe même du recours à la sécurité privée.
Madame Obono, vous dites qu'on ne doit pas donner de moyens supplémentaires aux polices municipales et vous refusez même la création d'une police municipale à Paris – comme ailleurs, au demeurant, car vous ne concevez pas qu'elles puissent exister, les comparant même pour ainsi dire à des milices. Dans le cadre des débats autour du projet de loi de finances (PLF), vous disiez qu'il ne fallait pas augmenter le nombre de policiers nationaux ni accroître leurs moyens comme nous le proposions. Or, dans le même temps, vous dites que les policiers nationaux doivent être plus présents et faire le travail des agents de sécurité privée. Tout cela est légèrement contradictoire. La représentante du groupe Socialistes et apparentés a elle aussi expliqué sa méfiance envers l'accroissement des moyens des polices municipales.
Est-ce à dire que vous souhaitez que les personnes gardant les grands magasins soient des policiers nationaux en armes ? C'est un manque de respect flagrant envers les dizaines de milliers de personnes qui font ce travail, souvent au péril de leur intégrité physique : elles protègent ceux qui participent à des événements ou qui font leurs achats dans les grandes surfaces, et elles sont souvent les premières à intervenir en cas d'incident.
Il ne faut donc pas caricaturer les entreprises de sécurité privée, et surtout il importe de ne pas en parler comme de polices privées : M. Poulliat a raison, c'était un abus de langage. L'objet de la proposition de loi n'est pas du tout d'en faire des polices privées, ou alors nous nous sommes tous trompés de texte.
En ce qui concerne la sous-traitance, M. Poulliat a bien défini les limites de la sécurité privée : le recours à des sous-traitants peut se justifier. Toutefois, il doit être encadré. Les situations décrites par M. Peu ne sont pas acceptables : parfois, il y a tellement d'intermédiaires, emboîtés comme des poupées gigognes, qu'on ne sait même plus avec qui on a contracté. C'est exactement ce qui s'est passé en 2016, madame Karamanli, lorsque le gouvernement socialiste – que vous souteniez – a sous-traité la sécurité de l'Euro de football à des agences de sécurité privée. Il y a eu tellement de sous-traitance qu'à la fin on ne savait plus qui devait assurer la sécurité des matchs ; pour certains d'entre eux, personne ne s'est présenté, ce qui a obligé à trouver des solutions au dernier moment, en dehors du marché public qui avait été passé.
L'objet de l'article 7 est ainsi de limiter la sous-traitance. De même, l'amendement CL400 du Gouvernement, que je défends par avance, madame la présidente, prévoit de renforcer les obligations de vigilance du donneur d'ordre – y compris quand il s'agit de l'État – à l'égard de la société privée avec laquelle il a contracté. L'entrepreneur principal devra désormais vérifier que son sous-traitant remplit les conditions fixées. C'est une manière de promouvoir la sécurité privée sans pour autant faire n'importe quoi, ce qui est encore le cas dans certains contrats.
Mon objectif était de provoquer le débat : de ce point de vue, je puis être satisfait… Je retire donc l'amendement CL4.
Cela dit, la sous-traitance en cascade existe encore – j'y reviendrai avec mon amendement suivant. Oui à la sécurité privée, oui à un meilleur contrôle des sociétés de sécurité privée, mais non à la cascade !
L'amendement CL4 est retiré.
Il est parfois utile de provoquer : cela permet d'ouvrir le débat.
Au fond, monsieur le ministre, nous reconnaissons tous que la sécurité privée existe et qu'elle remplit un certain rôle. Ce qui pose problème en revanche, et que certains contestent vigoureusement – notamment nous, députés du groupe Socialistes et apparentés –, c'est la cascade de contrats de sous-traitance. Nous estimons que l'article 7, même s'il répond à une réalité, devrait être amélioré ou complété, peut-être d'ici à la séance.
Nous en discutions entre nous et constations tous, même si nous étions de bords différents, que, sur le terrain, les agents de sécurité privée n'ont pas tous la même formation et ne font pas tous preuve du même discernement, ce qui peut créer des problèmes. Leurs interventions emportent aussi des conséquences en termes de responsabilité civile ou pénale. Cet aspect n'est pas abordé de manière suffisamment claire dans le texte. C'est aussi pour cette raison que mon groupe voulait lancer le débat sur cet article.
Monsieur le ministre, peut-être n'avez-vous pas été assez attentif, lors du débat budgétaire, aux arguments toujours très détaillés de mon collègue Ugo Bernalicis. Je vais donc reprendre point par point votre propos qui caricaturait nos positions.
Nous sommes en faveur de la police nationale, et voulons qu'elle soit mieux utilisée : les agents ne doivent plus être occupés à 80 % de leur temps à faire autre chose que lutter contre la délinquance. Nous voulons construire des écoles de police pour que les agents soient mieux formés. Nous voulons, effectivement, que la sécurité reste une prérogative régalienne, et que l'État ne se désengage pas de sa responsabilité sur les collectivités ou sur le secteur privé.
L'article 7 concerne la sous-traitance. J'ai commencé par dire que nous étions contre la sous-traitance de manière générale, parce que c'est un système qui favorise le nivellement par le bas. Je parlais bien de la sous-traitance et non de la sécurité privée dans son ensemble.
Par ailleurs, ce que nous contestons, c'est votre volonté de développer le secteur de la sécurité privée et de lui confier des missions qui étaient jusqu'à présent assurées par la police nationale, et qui, selon nous, doivent continuer à l'être. Mme la rapporteure a confirmé cette intention. Du reste, c'est ce qui explique que la question de la sous-traitance, et plus largement celle du secteur privé, soient abordées dans cette proposition de loi. Nous sommes donc effectivement en désaccord avec votre stratégie politique, qui, selon nous, va à l'encontre de l'intérêt général.
La Commission rejette l'amendement CL264.
Suivant l'avis favorable de la rapporteure, elle adopte l'amendement rédactionnel CL437 du Gouvernement.
La Commission examine les amendements CL221 et CL231 de Mme Laurence Vichnievsky.
Beaucoup de choses ont été dites sur l'intérêt qu'il peut y avoir à recourir aux entreprises de sécurité privée, mais aussi sur la vigilance dont nous devons faire preuve. Comme aujourd'hui je m'exprime mal, ou en tout cas on ne me comprend pas bien, je me contenterai de renvoyer aux propos de Stéphane Peu, que je partage tout à fait. Je remercie également les rapporteurs d'avoir cherché à encadrer les contrats de sous-traitance, mais aussi le Gouvernement, qui dépose des amendements pour accroître encore la vigilance.
Pour ce qui nous concerne, et de façon certainement très maladroite, une fois de plus, nous avons pensé qu'en faisant en sorte que la ou les parties sous-traitées ne puissent représenter 50 % ou plus du montant du marché, nous parviendrions à contrôler très fortement les cocontractants. Cela garantirait que l'entreprise principale exécute au moins la moitié du marché, renforçant ainsi sa responsabilité – comme le souhaite le Gouvernement à travers l'amendement CL400.
L'amendement CL231 vise à apporter une autre garantie : il prévoit l'obligation, au lieu de la possibilité, de communiquer au maître de l'ouvrage l'ensemble des contrats de sous-traitance.
Madame Vichnievsky, je vous rassure : c'était très clair.
Je prends bonne note de vos propositions d'amélioration de l'article 7. Nous poursuivons tous un objectif commun, ce qui est plutôt positif. Toutefois, je ne suis pas favorable à l'amendement CL221. Vous proposez d'interdire de sous-traiter plus de 50 % du marché, mais ce n'est pas en fixant un chiffre que l'on va avancer. Je suis d'accord avec l'objectif de cet amendement, et si certains collègues ont d'autres propositions à nous faire d'ici à la séance pour améliorer encore l'article 7, nous les étudierons avec attention, mais je n'approuve pas la méthode qui est proposée ici. Je demande donc le retrait de l'amendement ; à défaut, avis défavorable.
Je vous demande également de retirer l'amendement CL231, mais pas pour les mêmes raisons. Dans ce cas, votre demande est déjà satisfaite. L'article 3 de la loi du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance dispose notamment que « l'entrepreneur principal est tenu de communiquer le ou les contrats de sous-traitance au maître de l'ouvrage lorsque celui-ci en fait la demande ».
Pour compléter mon propos, et parce que nous avons évoqué de manière globale le secteur de la sécurité privée, je voudrais vous rappeler un ordre de grandeur : les forces de l'ordre – policiers et gendarmes – représentent à peu près 250 000 personnes, quand le secteur de la sécurité privée en emploie 165 000. On compte 21 500 policiers municipaux.
Loin de moi l'idée de dénigrer les professions de la sécurité privée. D'une part, le secteur est l'un des très gros employeurs de ma circonscription… (Sourires.) Par la force des choses, je le connais donc bien. D'autre part, et beaucoup plus sérieusement, je sais ce que l'on doit aux agents de sécurité privée, pour avoir été témoin de l'attentat du Stade de France, le 13 novembre 2015. Si le premier des terroristes équipés de ceintures d'explosifs n'a pas réussi à se faire exploser à l'intérieur du stade, c'est grâce à la vigilance des agents de sécurité privée qui l'ont empêché d'entrer. Il y a eu un mort et cinquante blessés, mais le bilan aurait pu être beaucoup plus dramatique.
Par ailleurs, pour avoir été, dans d'autres fonctions, un gros recruteur de sociétés de sécurité privée, je sais qu'il s'agit d'un secteur où il faut de la main-d'œuvre et du volume. Quand vous avez besoin de cinquante agents en moyenne et que la société qui répond au marché public n'en a que six, vous pouvez être sûr que le seul moyen à sa disposition pour honorer ses obligations tout en restant dans les prix est de multiplier les sous-traitants, lesquels emploient une main-d'œuvre payée au lance-pierre, composée de personnes précaires voire en situation irrégulière. Force est de constater, tout en respectant la profession, que cette pratique y est pour ainsi dire industrialisée. Si l'on ne met pas des seuils, on n'endiguera pas ce fléau. Or la profession mérite beaucoup mieux.
L'objectif de l'amendement CL221 est de poser une borne. Vous nous dites, madame la rapporteure, que vous comprenez notre proposition mais que vous ne voulez pas d'une limite. Que proposez-vous donc ?
Quant à l'amendement CL231, vous avez répondu qu'il était satisfait car le maître d'ouvrage peut se faire communiquer les contrats de sous-traitance, alors que nous demandons que l'entreprise soit tenue de les communiquer.
Je suis un peu étonné : je m'aperçois qu'on emploie des clandestins. Je croyais que c'était totalement défendu…
Selon vous, madame la rapporteure, le fait de mettre la limite à 50 % n'est pas une bonne solution. En quoi cela pose-t-il problème ? Je ne suis pas un spécialiste, mais je me dis qu'il faut bien commencer par quelque chose si l'on veut essayer de structurer ce secteur.
Même si je suis d'accord avec Stéphane Peu, je voudrais modérer ses propos, car il ne faudrait pas jeter l'opprobre sur toute la profession de la sécurité privée en laissant entendre que, dès que l'on sous-traite, cela veut dire que l'on emploie des gens au noir. On peut être sous-traitant et respecter la loi, et même faire très bien son travail.
Ce qui me dérange dans votre amendement CL221, madame Vichnievsky, c'est que vous prenez comme critère une part du montant du marché. Or, la sécurité privée n'est pas seulement un métier de main-d'œuvre : c'est aussi un métier de technologie. Par exemple, dans l'événementiel, il faut louer des PC de sécurité, des caméras, ou encore un type de barrières particulier permettant d'arrêter les voitures ou les camions. Tout cela coûte très cher et peut représenter une bonne part du montant du marché, sans pour autant que l'entreprise sous-traite beaucoup. Je comprends donc votre intention, mais l'outil n'est pas le bon. En plus, il y a l'effet de seuil : pourquoi 50 % et non 60 % ou 40 % ? Il y a toujours une dimension subjective dans ce genre de dispositions.
Quant à l'amendement CL231, le besoin d'information est réel, et le donneur d'ordre doit sans doute être plus rigoureux, mais la demande est satisfaite.
Au travers de ces amendements est posé un débat essentiel. Mais d'abord, je voudrais rappeler un postulat de base qui correspond à l'esprit de cette proposition de loi : la sécurité privée est utile. Ses 165 000 agents peuvent seconder les polices nationale et municipales – ils le feront encore mieux à l'avenir – et leur éviter d'accomplir des tâches indues. À cet égard, je défendrai, un peu plus loin dans le texte, un amendement relatif à la surveillance des détenus hospitalisés. Les agents pourraient aussi rendre service pour certains transferts.
Le débat autour de ces questions avait déjà eu lieu en 2010, lorsque le Parlement avait examiné le projet de loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI 2). C'est dans ce cadre, d'ailleurs, qu'avait été créé le CNAPS, qui a défini des règles permettant de mieux encadrer la profession et de l'assainir. Des progrès considérables ont donc été faits, mais la sous-traitance demeure un obstacle à la transparence. Certains faits évoqués ne sont pas à la hauteur des exigences que l'on peut avoir à l'égard de la sécurité privée, dont il convient par ailleurs de souligner l'importance et à laquelle, à titre personnel, je souhaite donner encore plus de prérogatives. La sous-traitance en cascade doit être limitée. Il est extraordinairement choquant, en particulier pour des métiers en rapport avec la sécurité, d'entendre parler comme d'une vérité avérée du fait que ces sociétés recourent à une main-d'œuvre clandestine. Si tel est le cas, la situation doit être assainie.
La Commission rejette successivement les amendements.
Elle en arrive à l'amendement CL14 de M. Éric Diard.
Il s'agit ici de supprimer les alinéas 4 à 6. En effet, ils permettent de déléguer jusqu'au quatrième niveau de sous-traitance, sans aucun contrôle du donneur d'ordre. Compte tenu de l'importance des activités mentionnées à l'article L. 611-1 du code de la sécurité intérieure, visé par l'alinéa 4, il ne me paraît pas admissible qu'une entreprise qui s'est vu confier une sous-traitance par une entreprise à laquelle le donneur d'ordre initial a déjà sous-traité puisse, sans droit de regard ni autorisation expresse éventuelle, procéder à une nouvelle opération de sous-traitance. Cela relève clairement du phénomène de cascade.
J'ai l'impression que nous partageons le même objectif – limiter la sous-traitance en cascade – mais divergeons sur la rédaction. Votre amendement, en supprimant les alinéas relatifs à l'encadrement de la sous-traitance dès le deuxième rang, aurait pour résultat concret le statu quo, c'est-à-dire l'absence de régulation. Je vous demande donc de le retirer ; à défaut, avis défavorable.
Je n'arrive pas à comprendre comment, pour des fonctions principalement de main-d'œuvre, on peut en arriver à un troisième, voire un quatrième niveau de sous-traitant. Cela ne saurait se justifier que pour des emplois d'une grande technicité.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CL276 de M. Éric Pauget.
Cet amendement vise à éviter que les entreprises contractantes soient des coquilles vides – ce qui rejoint ce dont nous venons de parler. Je propose donc de supprimer les termes « ou d'une insuffisance ponctuelle d'effectifs » : en les conservant, on reconnaît que certaines structures ont pour seul objectif de recourir ensuite à la sous-traitance.
La mesure que vous proposez nous paraît de nature à avoir des conséquences disproportionnées pour les entreprises. Avis défavorable.
La Commission rejette l'amendement.
Suivant l'avis favorable de la rapporteure, elle adopte l'amendement CL400 du Gouvernement.
Elle est saisie de l'amendement CL330 de M. Paul Molac.
Cet amendement vise à faire en sorte que les différents niveaux de sous-traitants soient bien identifiés.
Vous souhaitez publier systématiquement les noms des entreprises sous-traitantes. Or l'article 3 de la loi du 31 décembre 1975 sur la sous-traitance permet déjà au donneur d'ordre d'obtenir cette information quand il la demande. D'une certaine manière, votre amendement est donc satisfait. Par ailleurs, le dispositif proposé manque de précision : vous n'indiquez pas l'endroit où les noms seraient publiés. Je demande donc le retrait de l'amendement ; à défaut, avis défavorable.
Pouvoir faire quelque chose n'est pas pareil que devoir le faire. Je maintiens donc mon amendement et le redéposerai en séance.
La Commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'article 7 modifié.
La réunion s'achève à 0 heures 10.
Membres présents ou excusés
En raison de la crise sanitaire, les relevés de présence sont suspendus.